Régiments Suisses À La Bataille de Baylen
Régiments Suisses À La Bataille de Baylen
et la bataille de Baylen
19 juillet 1808
Louiselle de RIEDMATTEN
Introduction
Aprs la terrible bataille d'Eylau et la victoire franaise de Friedland, le
trait de Tilsit scella, le 7 juillet 1807, la paix avec la Russie. Le Tsar Alexandre Ier
acceptait de collaborer au Blocus Continental contre l'Angleterre et abandonnait
ses vues sur l'Europe occidentale; Napolon, en change, lui promettait son aide
contre la Turquie. L'Europe gravitait autour de ces deux ples et plus rien ne semblait s'opposer une paix durable. L'Empereur tait au fate de sa puissance.
Il reste difficile encore maintenant de percer les vritables motifs de l'invasion de l'Espagne par les armes napoloniennes. Toujours est-il que cette dernire s'opra dans ce climat de paix toute relative et de la manire la plus brutale
et la plus sournoise qui ft.
Le 27 octobre 1807, un trait prvoyant le dmembrement du Portugal fut
sign Fontainebleau entre la France et l'Espagne; il s'agissait d'en finir une fois
pour toutes avec l'insolente maison de Bragance qui, malgr les menaces, continuait de commercer avec l'Angleterre. Mais ce pacte permettait surtout de couvrir
la Pninsule de lgions impriales sous prtexte de soutenir l'expdition du
Portugal et, peu peu, les plans de l'Empereur se rvlrent bien plus redoutables
qu'il n'y avait d'abord paru; en effet, les forces franaises, au lieu de se diriger sur
Lisbonne, comme prvu, reurent l'ordre de marcher sur Madrid. Napolon esprait ainsi se dbarrasser de ces Bourbons d'Espagne qu'il mprisait tant - Charles IV
et son fils Ferdinand VII - et s'emparer du pays par la ruse en vitant soigneusement tout coup de force.
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100 Km
1 : 5 0 0 0 000
Outre les annexes qui reproduisent les lettres indites dont nous allons longuement parler, nous avons insr dans cette tude des outils d'ordre plus gnral,
tels qu'une chronologie (Annexe I) qui replace la bataille dans un contexte plus
vaste, un tableau rcapitulatif, qui donne un aperu schmatique des rgiments
suisses prsents Baylen, et quelques cartes, pour mieux situer l'action et clarifier
une situation par moment complexe et confuse.
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qui regardait la solde, elle n'tait pas prcise dans la capitulation elle-mme
puisqu'elle correspondait celle de l'infanterie franaise. Il est difficile de dire ce
qu'elle reprsentait rellement; les salaires des militaires n'taient sans doute pas
trs importants, bien que certaines jeunes recrues suisses se trouvassent plutt
satisfaites de leur solde. Il ne faut pas oublier non plus que les soldats de l'Empire
avaient droit des parts de butin en complment.
L'art. 11 ritrait le principe de l'anciennet, si cher aux soldats car il ne marquait aucune prfrence cantonale et respectait le droit helvtique en la matire. De
plus le libre exercice de la religion et de la justice tait assur par l'art. 19. Quant
au choix de l'uniforme, la France restait fidle au traditionnel rouge garance
qu'avaient toujours port les Suisses son service, et seuls les revers, collets et
parements devaient permettre de distinguer les diffrents rgiments. D'ailleurs, le
tableau suivant illustre l'uniforme des deux rgiments suisses au service de France,
qui participrent la bataille de Baylen:
Habit
Distinctives
Liser
Boutons
noires
bleu cleste
blanc
noir
jaunes
jaunes
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AF: Fonds 2200 Paris 1/11, Correspondance du Landammann Ruttimann avec C. de Maillardoz, 1808.
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Rg. n 3
Rg. n 4
EFFECTIFS/GARNISONS
HISTORIQUE
UNIFORMES
habit rouge
garance.
distinctives:
noires
bleu cleste
EFFECTIFS/GARNISONS
HISTORIQUE
UNIFORMES
habit bleu
indigo
distinctives et
collet rouges
n du rg. sur
les boutons
collet bleu
revers jaunes
n du rg. sur
les boutons
N. B. On appelle aussi Reding n 2: Jeune-Reding et Reding n 3: VieuxReding. Notons que ces rgiments ont leurs deux bataillons au combat. Il y aura
cependant une petite exception, une partie du second bataillon de Reding n 3
ayant dsert lors du pillage de Cordoue.
Les effectifs des deux rgiments suisses sont ceux du mois de janvier 1808,
alors que ceux du rgiment de Preux n 6 sont pris au 1er mars 1801. Nous n'avons
pas trouv de chiffres plus rcents pour ce rgiment. Entre parenthses figure la
proportion de recrues de nationalit suisse.
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AEV: SE 29/1/24, Messages, dcrets, rapports relatifs au service d'Espagne: lefConseil
d'Etat la Dite de la Rpublique, Sion, le 10 mai 1805.
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CARTE N 2: L'ANDALOUSIE
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San Roqu<L^/L-- =
Alqesiras
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C'est en 1763 que Gribeauval unifie le matriel d'artillerie autour des calibres 4, 8 et
12. La pice de 12 livres peut porter jusqu' 900 mtres, celle de 8 jusqu' 800 m et celle de 4 jusqu' 700 m.
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De plus, la premire division d'infanterie de l'arme espagnole tait commande par le gnral Thodore de Reding, gouverneur de Malaga. Il avait sous
ses ordres 9000 hommes dont le rgiment Reding n 3 command par le colonel
Nazare de Reding, son propre frre. Il nous semble d'ailleurs ncessaire de tracer
en quelques lignes l'illustre vie de Thodore, ainsi que celle de ses frres qui
menrent de brillantes carrires militaires, l'tranger comme en Suisse:
Thodore Reding von Biberegg, naquit Schwytz en 1755. Gnral au service d'Espagne et propritaire du rgiment Vieux-Reding, ou Reding n 3, il se distingua dans les campagnes de 1793 et 1794 contre les Franais.
Gnral de division lors de la campagne du Portugal (1800-1801), gouverneur de Malaga en 1803, il fut nomm, aux cts du gnral Castanos, commandant en chef du l'arme d'Andalousie en 1808.
Aprs la victoire de Baylen laquelle il contribua grandement, il fut envoy
en Catalogne comme Capitaine-gnral en 1809. Le 25 fvrier, il affronta
les troupes du gnral Gouvion-Saint-Cyr Valls. Il mourut des suites de ses
blessures le 23 avril 1809 Tarragone; il avait 54 ans et avait servi l'Espagne
durant 40 ans.
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Nazare quant lui est n en 1759. Gnral au service d'Espagne, propritaire du rgiment Vieux-Reding (Reding n 3) aprs son frre, il est nomm gouverneur de Majorque o il tente de protger les Suisses captifs de la fureur espagnole.
De retour au pays, il est charg des affaires d'Espagne en Suisse et meurt en 1825.
Cette famille possdait encore deux illustres fils: Rodolphe (1761- 1792),
Capitaine aux gardes suisses en France, qui fut massacr l'Abbaye de Paris et
Aloys (1765-1818), qui fit la plus grande partie de sa carrire en Suisse. En 1798
il prit la tte des petits cantons soulevs contre les Franais. Mais aprs quelques
victoires, il se vit oblig de capituler et d'accepter la Rpublique Helvtique. Il fut
nomm ensuite Landammann de Suisse, puis de son canton.
Ces frres furent avec tant de constance un obstacle srieux pour Napolon,
que ce dernier se serait cri en apprenant le dsastre de Baylen: Partout o je vais
en Europe, je trouve un Reding en face de moi. On ne peut rver plus bel hommage!
Cependant, au moment de l'affrontement de Baylen, Castanos ne possdait
plus que 1100 Suisses qui provenaient tous du rgiment Reding n 3, seul rgiment
helvtique tre prsent aux cts des Andalous: ceci s'explique tout simplement
par le fait que le rgiment de Nazare avait dj subi quelques pertes lors des premires escarmouches Alcolea, Cordoue et Jaen, et que les rgiments Reding n 2
et de Preux n 6, tous deux cantonns Madrid en plein tat-major franais,
allaient jouer un rle trs particulier dans la bataille de Baylen.
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Quelques tmoignages
Aussi tonnant que cela puisse paratre, les hommes des rgiments Reding
nos 2 et 3 n'ont pas laiss de tmoignages et seuls les Valaisans du rgiment de
Preux n 6 ont laiss quelques rcits sur les motifs de leur enrlement et la vie de
garnison; mais il est vrai que le rgiment servait depuis peu en Espagne et que ses
soldats taient sans doute moins bien intgrs que ceux des rgiments suisses.
Pour Louis Robatel, s'engager au service d'Espagne ne prsentait aucune difficult puisque son pre, Jacques Robatel, n'tait autre que le chirurgien attitr du
rgiment. Ainsi ds 1803, Louis sollicita un emploi de cadet au rgiment valaisan,
bloui par l'attrait qu'avait toujours eu pour moi l'uniforme militaire, et surtout
avec l'espoir d'y joindre l'paulette d'officier...14.
La trajectoire de Pierre d'Odet se rvla bien diffrente. En 1803, il venait de
terminer son collge Sion et n'avait aucune ide prcise quant son avenir; il
avait bien pens devenir prtre mais hsitait. Il finit par lasser la patience des
siens qui le pressaient de faire un choix et, sur un coup de tte, dcida de s'engager
au service d'Espagne: Les premires dmarches peine entreprises, Pierre, de
plus en plus angoiss l'ide de quitter le Valais, regrette son choix et se redcouvre une vocation religieuse. Trop tard.15 Pierre d'Odet ira jusqu'au bout de son
choix trop htif, mais souffrira terriblement du Heimweh.
Il semble d'ailleurs que le mal du pays soit le lot de plusieurs officiers valaisans, en tmoigne la lettre d'Emmanuel de Riedmatten son pre. Apprenant que
son frre Adrien brle de le rejoindre, il brosse un tableau bien noir de la vie militaire en Espagne et tout spcialement de la garnison de Madrid qu'il a en horreur:
... ici Madrid ... il y a un amas de femmes perdues, parmi lesquelles il y en a de
trs agaantes et remplies d'agrments, capables de sduire l'homme le plus retenu,
et si malheureusement on tombe dans leurs filets empoisonns, on risque bien
d'tre trouss dans vingt-quatre heures, comme on en a vu de frquents
exemples.16 Il voque encore la chert de la vie, le manque de nourriture, les difficults d'avancement et surtout les fivres dues au climat malsain du pays;
d'ailleurs Emmanuel devait mourir de ces fivres en fvrier 1808. Son frre
Adrien, que ce tableau apocalyptique n'avait pas dcourag, allait rejoindre le
rgiment valaisan en 1806 et combattre Baylen comme sous-lieutenant.
A la lumire de ces quelques exemples, nous constatons que les officiers et
soldats du rgiment valaisan restaient trs attachs la patrie. Pourtant ils n'ont pas
tous t insensibles au charme des belles Espagnoles puisque Franois-Xavier de
Riedmatten - sous-lieutenant grenadier - pousa en 1808 la marquise de Campo
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17
Franois-Xavier de Riedmatten, devenu marquis de Campo Franco par son mariage, n'aura
pas de descendance et le titre sera donn par testament Adolphe de Roten, sans doute fils naturel de
la marquise de Campo Franco et d'Antoine de Roten.
'8 Correpondance de Napolon I, Paris, T. XVIII, lettre 13 813, Napolon Murt, Bayonne
le 5 mai 1808.
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MAAG (A.), Geschichte der Schweizer Truppen im Kriege Napoleons I. in Spanien und
Portugal (1807-1814), Biel, 1893, T II, appendice, pp. 412-416.
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AEV: SE 6/16/10, Tolde, le 16 mai 1808, Charles de Preux au baillif de Spibus et au
Conseil d'Etat de la Rpublique du Valais. Nous avons respect l'orthographe et le style.
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ordres du gnral Thodore de Reding22 ce qui voudrait dire qu'il a quitt Tolde
avec un certain nombre d'hommes pour traverser toute l'Andalousie et le rejoindre
Grenade. Il n'a sans doute pas t le seul officier prendre une telle initiative.
Malgr ces dparts qui durent dcourager bon nombre de soldats et aviver
leur terrible crise de conscience, la brigade de Talavera se joignit au corps de
Dupont, o dsormais se ctoyaient Suisses espagnols et Suisses franais, pour
aller combattre le peuple espagnol, ami d'hier, et les rgiments suisses qui le soutenaient.
4. La Bataille
Beaucoup de soldats suisses ont laiss de prcieux tmoignages sur les terribles journes de juillet 1808, tels les officiers Landolt, Schumacher et de Murait.
Sans en nier l'importance, nous avons cependant choisi dans ces pages d'clairer
la bataille de Baylen uniquement au travers des deux documents indits trouvs
dans les archives de la famille Reding et que nous reproduisons intgralement dans
les annexes II et III.
Il va sans dire que la lettre de Nazare de Reding - frre de Thodore de
Reding et colonel du rgiment Reding n 3, soit un Suisse au service d'Espagne est de loin le document le plus important (Annexe II). Dans un langage fleuri et
malicieux il retrace en dtail les journes qui ont prcd le combat, et le combat
lui-mme, un ami que nous n'avons pu identifier mais qui visiblement est un
intime puisque, comme Nazare l'crit, ils surveillent leurs femmes d'un commun
accord!
Quant au second document, il s'agit d'une lettre date du 17 juillet, du gnral en chef Castanos son subordonn le gnral Thodore de Reding, commandant de la premire division de l'arme espagnole (Annexe III). De porte moins
gnrale, cette lettre aura cependant son importance du point de vue stratgique
lorsque nous nous pencherons sur les vnements qui ont prcd le 19 juillet.
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ralit s'amenuisait de moiti tant les dparts taient nombreux. Au total 12 000
hommes et 18 canons. C'est peu, mais Dupont esprait trouver du renfort sur
place, notamment la fameuse brigade de Grenade compose des autres rgiments
suisses espagnols et qui ne vit jamais le jour.
Quant aux deux autres divisions du Corps de la Gironde, elles taient disperses dans diffrentes villes d'Espagne. La seconde division, commande par le
gnral Vedel - o se trouvait le bataillon de May du 3e suisse - restait Tolde,
alors que la troisime division aux ordres du gnral Frre tait cantonne
l'Escorial: l'arme franaise se voyait donc divise et chelonne sur un parcours
long d'environ 240 km et sem d'embches; elle ne devait, d'ailleurs, plus jamais
arriver se runir pour opposer un front compact l'ennemi.
Tout au long de cette marche vers le sud, les soldats se trouvrent confronts
l'hostilit grandissante des Espagnols qui quittaient les villages, brlaient les
rcoltes, massacraient les malades, torturaient et mutilaient les hommes isols ou
perdus. Mme la nature semblait s'allier contre les Franais puisque la route de
Madrid Cadix traversait la Sierra Morena et les terrifiantes gorges du Despena
Perros, si propices aux embuscades en tout genre. D'ailleurs le lieutenant Landolt
- du 4e rgiment suisse - ne peut s'empcher de comparer ce dfil aux gorges des
Schoellenen, dans le canton d'Uri, que traverse le vertigineux pont du Diable.
les hommes de Dupont entrrent dans Cordoue hostile au son du tambour. Ils
n'allrent pas trs loin car les habitants se dfendirent en leur jetant de l'eau
bouillante, du plomb fondu, des pierres et des tuiles, et les tireurs embusqus firent
beaucoup de victimes. Alors la fureur s'empara des Franais qui, puiss par
toute une nuit de marche et un rude combat, assoiffs et affams, se livrrent
au pillage; le dsordre allait durer trois jours et les excs les plus terribles furent
commis.
Il va sans dire que les Suisses aussi participrent au sac de la ville et le sergent Heidegger n'hsita pas conter avec minutie ses nombreuses rapines. Quant
au rgiment valaisan il reut 5000 francs d'Espagne aprs la prise de Cordoue,
comme part de butin23. Mais il est vrai que tous les rgiments qui prirent part ce
combat reurent pareille gratification, il nous est donc difficile de savoir si les
Suisses de Reding n 2 et de Preux n 6 ont pris rellement part au pillage avec les
hommes de Dupont. En revanche, beaucoup de soldats de ces deux rgiments profitrent du dsordre ambiant pour rejoindre les rangs espagnols, tel le lieutenant
Jos de Courten qui rallia le rgiment Wimpffen Tarragone, avec 150 grenadiers
du rgiment de Preux24.
Cependant certains dparts se firent aussi dans le sens inverse, comme en
tmoigne la lettre de Nazare. En effet, aprs la dfaite au pont d'Alcolea, les 800
hommes du second bataillon de Reding n 3 se rfugirent dans Cordoue avec les
restes de l'arme espagnole en fuite. C'est l semble-t-il que 300 d'entre eux se
rendirent aux Franais afin de se mler au pillage et de voler en toute impunit la
caisse de leur rgiment, dont ils connaissaient la cachette ! Et le colonel cache mal
son indignation, lorsqu'il ajoute: ...Aprs tout cela l'on obligea a ces beaux
Messieurs de prendre les Armes contre l'Espagne, entre lesquels il n'y avait ni oficiers ni sargent par unique bonheur... (cf. Annexe II). Ces hommes finirent par
rintgrer leur rgiment, comme le prcise Nazare un peu plus loin et ce geste leur
valut un chtiment moins svre. Toujours est-il qu'aprs cette fcheuse dfection,
le second bataillon de Reding n 3 se vit trs affaibli; heureusement, les Suisses du
premier bataillon allaient laver ce dshonneur Jaen.
Dupont resta dix jours Cordoue dans une inaction totale; coup de Madrid,
sans renforts, il ne pouvait marcher sur Sville et voyait avec angoisse l'insurrection grossir de jour en jour. De leur ct, les rgiments suisses espagnols se montraient trs inquiets, tel point que les sempiternelles menaces ne faisaient plus
d'effet. C'est le cas du moins du sous-lieutenant Pierre d'Odet, du rgiment valaisan, qui persistait demander sa dmission au gnral Rouyer, commandant en
chef de la brigade de Talavera; ce dernier surpris de trouver autant de fermet
dans un jeune officier, lui dit les choses les plus dures, 25
entre autres qu'il lui ferait
donner une voiture dans laquelle il serait bien cahot . Pierre d'Odet qui, l'on
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25
AEV: SHVR 12/23/3, Lettre du gnral Legendre au colonel de Preux, Andujar, 24 juin 1808.
SCHALBETTER, op. cit., p. 345.
AEV: Fonds d'Odet, II, p. 368 n 2: Relation faite par Joseph-Ignace Escher, camarade de
Pierre d'Odet, 12 avril 1837.
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s'en souvient, s'tait engag un peu la lgre, n'obtint pas gain de cause. Mais,
de toute vidence, la tension montait et Dupont, persuad que Castanos prparait
une offensive prochaine alors qu'il n'en tait rien, dcida de quitter Cordoue et de
se rapprocher de Madrid sans pour autant abandonner l'Andalousie. Les Franais
levrent le camp le 16 juin dans la nuit et arrivrent le 18 Andujar o ils dcouvrirent avec horreur que les malades laisss l quelques semaines auparavant
avaient t sauvagement massacrs par des brigands venus des alentours: la fureur
laissa place l'abattement le plus complet. Malgr tout, c'est l que Dupont dcida d'tablir son camp et d'attendre les renforts.
Le village d'Andujar, qui se rvle sur le plan stratgique tout fait indfendable puisque dans ses alentours le Guadalquivir est guable partout, ne pouvait en
aucune manire subvenir aux besoins des 10 000 hommes de Dupont. Aprs
l'abondance de Cordoue, de terribles privations attendaient les soldats. De plus, la
division du gnral Vedel avait enfin pass le Despena Perros et arrivait Baylen
le 29 juin, dans un tat pitoyable; la question des vivres n'en devenait que plus cruciale, car il fallait aussi nourrir ces 5000 hommes. L'on dcida donc d'aller piller
Jaen.
Le gnral Cassagne la tte de 4000 hommes mena cette expdition; le
1erjuillet les Franais taient devant la ville et trs vite remportaient un franc succs. Mais ds le 3 la chance tourna, car les forces armes de Grenade, soit 10 000
hommes conduits par Thodore de Reding qui allait rejoindre Castanos, s'arrtrent au passage pour prter main forte aux habitants de Jaen. C'est l que le premier bataillon de Reding n 3 se couvrit d'honneur et que les Espagnols reprirent
le chteau de Santa Catalina et mme toute la ville, mais pour peu de temps, prcise Nazare, cause des volontaires trop peu expriments qui composaient cette
arme et d'un certain Moreno. Il semble de plus que les pertes espagnoles aient t
assez importantes.
Du ct franais la victoire paraissait aussi incertaine et le 4, Cassagne
dcida de se retirer faute de munitions. Aprs le combat de Jaen, Dupont fut plus
que jamais sur la dfensive et l'espoir de marcher rapidement sur Sville et Cadix,
afin de mater l'insurrection, s'amenuisait mesure que le temps passait
ne contenait aucun rgiment helvtique dans ses rangs et s'tait vue dans l'obligation de laisser de nombreux dtachements dans les dfils. Sa mission tait
d'ailleurs d'en surveiller l'entre, c'est--dire les villages de Guarroman et de
Linars.
Deux choses nous paraissent essentielles signaler d'emble. Tout d'abord,
Andujar semblait tre pour Dupont le point stratgique qu'il fallait tout prix tenir,
alors qu'en ralit le vritable nud des communications entre la Castille et
l'Andalousie tait Baylen; c'est par Baylen que passe la route de Madrid Cadix,
seule voie de retraite en cas de dsastre, mais aussi celle qui relie Jaen et Grenade
et, plus l'est, celle qui permet d'accder Guarroman et d'atteindre les dfils.
Pourtant ce point stratgique, aussi important soit-il, fut bien souvent abandonn
par les Franais. De plus, les forces franaises taient trop parpilles et Dupont
ne disposait que de 15 000 hommes pour tenir le front d'Andujar Baylen - soit
40 km - ce qui est peu en pays ennemi et face l'arme espagnole qui, elle, en
comptait 29 000.
Castanos de son ct suivait de prs tous les mouvements ennemis et, enhardi par la retraite de Dupont Andujar et par le combat de Jaen, il se dcida rassembler et organiser ses forces. C'est le 10 juillet, Porcuna, que s'opra la jonction avec les troupes de Grenade conduites par Thodore de Reding. Comme
l'crit Nazare, l'arme espagnole se composait alors de trois divisions principales,
dont la premire tait confie Thodore et dans laquelle servait le rgiment
Reding n 3. Le Marquis de Coupigny, originaire d'Arras en France, conduisait la
seconde et c'est Flix Jones, de nationalit irlandaise, que fut confie la troisime; quant la quatrime mene par Manuel de La Pena, c'tait la division de
rserve. L'arme d'Andalousie possdait aussi deux corps indpendants, constitus uniquement de volontaires, l'un command par Cruz Mourgeon et l'autre par
le comte de Valdecanas; ces troupes avaient une connaissance parfaite du pays et
une grande mobilit, ce qui leur permettait de s'approcher aisment de l'arme
ennemie pour la harceler, l'induire en erreur et lui couper ses communications.
C'est Porcuna aussi que Castanos et ses gnraux laborrent leur plan
d'attaque. Il s'agissait d'attirer l'ennemi hors de ses positions et pour ce faire, il
fallait s'tablir entre Andujar et Baylen afin de lui couper sa ligne de retraite et
l'obliger ainsi combattre en position dsavantage. En consquence, la premire
division commande par Thodore de Reding partit en tte et alla franchir le
Guadalquivir en amont de Mengibar; elle fut suivie de la seconde qui traversa le
fleuve aux alentours d'Espeluy. Quant Jones et La Pena, ils restrent devant
Andujar. Il s'agissait donc d'une manuvre d'encerclement qui divisait l'arme
espagnole en deux portions gales: la premire devant Andujar, avec le gnral en
chef sa tte, comptait environ 12 000 hommes, alors que la seconde, qui allait
tenter de passer les gus, en comprenait 17 000. Sans oublier les troupes de
Valdecanas et de Cruz Mourgeon, charges d'envelopper les flancs ennemis. Ce
plan audacieux dbuta le 14 juillet et ne rencontra le succs escompt que grce
aux nombreuses erreurs des Franais.
Nazare, dans sa lettre, affirme qu'il y eut un violent combat le 16; de fait, face
aux manuvres espagnoles, l'ennemi allait rpliquer.
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La journe du 17 s'coula au rythme des fausses marches de Vedel, des hsitations de Dupont et de l'extrme prudence des Espagnols. A 8 heures du matin,
les troupes de Vedel arrivrent extnues Baylen, mais ce fut pour trouver le village totalement dsert. Il en dduisit donc tout fait arbitrairement que l'attaque
ennemie tait imminente dans les dfils et qu'il fallait aller seconder Dufour.
Vedel partit pour Guarroman et laissa nouveau Baylen trs peu protg. La
deuxime division du Corps de la Gironde ne cessait, depuis le 15 juillet, de parcourir de jour comme de nuit les chemins poussireux d'Andalousie, par des tempratures excessives, et s'loignait irrmdiablement de Dupont et de l'ennemi!
Aussi tonnant que cela puisse paratre, Castanos ne profita pas des nombreuses erreurs de son adversaire. Rest devant Andujar tout au long de ces jours,
il tait malgr tout mal inform, puisque - selon le second document indit trouv
Schwytz - il tait persuad que, le 17 7 heures du soir, Vedel se trouvait toujours auprs de Dupont, alors qu'il tait dj Guarroman (Annexe III). Croyant
donc que le plus gros des forces franaises se trouvait devant lui, il ne vit aucune
raison pour changer le plan tabli et demanda Thodore de Reding de venir
appuyer sa droite pour attaquer en force Andujar. Ainsi, comme pour les Franais,
Baylen - carrefour des chemins d'Andalousie et de Castille - n'tait pas le centre
des manuvres espagnoles, et Castanos regardait comme peu de chose l'occupation de ce village. Immobile et inquiet devant Andujar, attendant avec impatience
ses deux divisions pour passer l'action, ses craintes rappellent trangement celles
de Dupont; ces deux gnraux en chef, cramponns Andujar, se proccupaient
peu des dangers qu'encouraient le reste de leurs forces. Et de fait, Reding se trouvait dans une position quelque peu dlicate, puisqu'il ne savait exactement o se
trouvait Vedel ni ce qui l'attendait Baylen.
Aprs cette longue journe d'attente et d'inaction, Reding et Coupigny oprrent enfin leur jonction et, l'aube du 18, ce corps de 17 000 hommes occupa
Baylen sans avoir tirer un seul coup de feu! Pourtant Reding, qui de par son
anciennet en grade commandait les deux premires divisions espagnoles, n'tait
pas tranquille; il dtacha l'est de Baylen sur l'Ahorcado et le San Cristobal
(carte n 3) plusieurs troupes, au total 3600 hommes, afin de surveiller la route
emprunte par Vedel et d'o il pouvait revenir d'un moment l'autre. L'on ne peut
d'ailleurs s'empcher de constater la symtrie frappante qui existait entre Dupont,
encercl par Castanos et Reding, et Reding lui-mme, pris entre les feux de Dupont
et de Vedel. Malgr cette position dlicate les ordres du gnral en chef furent suivis la lettre: il n'tait pas question de s'attarder Baylen et le dpart pour
Andujar fut fix au lendemain 3 heures du matin.
Pour les Franais, le 18 juillet allait tre le jour du dsarroi et de la consternation. Vedel et Dufour s'aperurent enfin qu'ils avaient t leurrs par les troupes
de montagne de Valdecanas qu'ils croyaient tre l'avant-garde de Castanos. Ils
poursuivaient donc depuis quelque temps un ennemi invisible et insaisissable.
Quant Dupont, apprenant que l'ennemi tait fortement install Baylen, il se
dcida enfin quitter Andujar. Ainsi esprait-il encore pouvoir prendre les troupes
de Reding en tenaille avec l'aide de Vedel.
191
Petit Zumacar
Grand Zumacar
Cerro Valentin
Cerrajn
Haza Wallona
385 m
420 m
400 m
560 m
385 m
192
L'attaque de Dupont
Le Rumblar, qui coule six kilomtres de Baylen, tait le point d'eau le plus
important pour les Franais, bien qu'en plein t andalou son dbit soit trs faible.
Aprs le ruisseau, la route s'lve en pente douce, traverse le col de la Cruz Bianca
340 m d'altitude et atteint Baylen. Le village tabli dans une cuvette est surplomb de tous cts par des hauteurs d'environ 400 m (carte n 3): l'ouest il y a
le Grand et le Petit Zumacar ainsi que le Cerro Valentin qui vient mourir l'entre
de Baylen, et au sud de la Cruz Bianca se trouvent le Cerrajon et le Haza Wallona
dont les pentes recouvertes d'oliviers allaient rendre la tche de la cavalerie trs
difficile. Puis au nord du village, la route qui conduit Guarroman se faufile entre
les collines du San Cristobal et de l'Ahorcado; seul le sud de Baylen, o le ruisseau
des Alamices longe la route de Mengibar, apparat dgag. Enfin, devant le village s'tend une grande plaine fertile o les forces espagnoles devaient se dployer.
Pour Dupont l'unique moyen de rejoindre Vedel tait de passer par Baylen et
donc de franchir le col de la Cruz Bianca; mais trs vite le thtre des oprations
s'avra dfavorable aux Franais, car les hommes de Reding et de Coupigny les
attendaient devant Baylen tandis que Castanos, Andujar, menaait leurs arrires.
A l'aube du 19 juillet, Reding disposa ses troupes en arc de cercle depuis le
Cerro Valentin jusqu'au Haza Wallona, soit un front de 2 km de long et d'un km et
demi de profondeur; les 800 Suisses du rgiment de Nazare taient posts sur le
Haza Wallona, l'extrme gauche espagnole.
Ds 3 heures du matin, l'avant-garde franaise se heurta aux premires
troupes espagnoles. Trs vite s'engagea un violent combat car les deux adversaires
voulaient en finir au plus vite, avant que la chaleur ne devnt insupportable. S'il est
vrai que les Franais la faveur de l'obscurit parvinrent devant Baylen et prirent
mme position sur le Haza Wallona, cette victoire fut de courte dure et bien vite
les troupes de Reding se ressaisirent et firent reculer l'ennemi: Nous nous postmes avec beaucoup d'ordre et clrit pour lui faire front... (cf. Annexe II).
C'est seulement vers 9 heures du matin que le bataillon Freuler et les rgiments de Preux n 6 et Reding n 2 arrivrent sur le champ de bataille, aprs une
marche nocturne puisante. Ces troupes furent immdiatement diriges sur la
gauche espagnole pour seconder le gnral Priv et ses cavaliers qui y entreprenaient une charge d'envergure et, en effet, l'aile gauche ennemie fut srieusement
193
branle et semblait mme plier sous l'assaut des Franais. Mais bientt, Priv
s'aperut avec consternation que l'infanterie qui devait l'appuyer ne l'avait pas
suivi: isol, il n'avait pas d'autre choix que de se retirer. Que s'tait-il donc pass
pour que l'offensive de la cavalerie ft rduite nant de la sorte?
En vrit l'on assista au sommet du Haza Wallona une scne peu commune: les Suisses de Nazare, installs sur la colline, se prparaient repousser
l'attaque franaise lorsqu'ils aperurent dans une plaine entre des oliviers (.) une
fourmilire de Suisses, compose des deux Regts d'Espagne et des Rouges au service de France (cf. Annexe II). Cette colonne qui s'avanait n'tait autre que
l'infanterie charge de seconder Priv et qui pensait s'emparer facilement du Haza
Wallona aprs le passage des cavaliers; le face face des Suisses tait invitable26.
Bon nombre de tmoins suisses mentionnrent aussi cet pisode dans leurs
mmoires. Ainsi, le capitaine Jean Landolt du bataillon Freuler s'tend longuement sur la surprise et la joie que provoqua cette rencontre, o les Suisses, oubliant
l'ardeur du feu, s'embrassrent, fraternisrent et plantrent leurs drapeaux cte
cte, refusant catgoriquement de se battre contre leurs frres27! Cette attitude
n'avait rien d'une trahison, au contraire, elle tait conforme en tous points aux
capitulations militaires qui interdisaient formellement aux Suisses de se battre
entre eux.
Cependant un incident vint troubler la trve qui s'tait tablie sur le Haza
Wallona. Ici les rcits se font trs confus; il semblerait qu'un officier du rgiment
Reding n 2, vtu de l'uniforme bleu des Suisses au service d'Espagne, mais servant la France, voyant le combat tourner l'avantage des Franais, ait demand
aux Suisses de Nazare, portant le mme uniforme mais servant l'adversaire, de se
rendre sans autre forme de procs. Ces derniers piqus au vif refusrent et appelrent aux armes, mais peu nombreux, ils furent vite dbords et une cinquantaine de
leurs grenadiers furent faits prisonniers.
Quant au tmoignage de Nazare, il diffre des autres en plusieurs points et
jette un regard diffrent sur cet vnement. Il est remarquer avant tout que
Nazare ne mentionne pas la rencontre des Suisses dans le rcit linaire et chronologique qu'il fait de la bataille, mais il lui consacre un paragraphe part, un peu
plus loin dans sa lettre; pour plus de clart, nous l'avons mis en italique. Ce qui
frappe de prime abord, c'est qu'il ne mentionne ni l'tonnement ni l'allgresse qui
se sont empars de ses hommes la vue d'autres Suisses. Au contraire, il affirme
qu'immdiatement l'on commena se tirailler d'importance et que, dans la
confusion, ses hommes voyant avancer avec rsolution les Suisses au service de
France, s'crirent: Still, schiesst nicht, er kommt alles zu uns hinber, c'est-dire: Stop, ne tirez pas, il vient tout entier de notre ct (cf. Annexe II). Cette
26
Une telle rencontre avait dj eu lieu cent ans auparavant, en 1709, Malplaquet. Durant
cette bataille de la guerre de Succession d'Espagne, qui opposait les Franais aux troupes du prince
Eugne et du duc de Marlborough, deux rgiments de May s'taient trouvs face face.
27
LANDOLT (J.), Erinnerungen, 1807-1815, in: Zrcher Taschenbuch, Zurich, 1893,
pp. 133-211.
194
phrase quelque peu ambigu prte penser que les Suisses de Nazare ne s'arrtrent de tirer que pour incorporer dans leurs rangs les Suisses du camp adverse.
Et c'est avec consternation qu'ils s'aperurent que ni les Suisses du bataillon
Freuler, ni ceux de Reding n 2 et de Preux n 6 n'avaient l'intention de dserter;
au contraire, ces derniers de battirent avec une rage peu commune, soutenus
d'aprs Nazare par les cuirassiers et quelques troupes de la Garde de Paris, dans
la mchante intention de nous asomer et aussi de persuader nos gens de passer
aux Franais. Ainsi les Suisses au service de France sont accuss ni plus ni moins
de perfide et lche trahison. La colre de Nazare s'explique sans doute par le fait
que cette aventure lui valut de nombreuses pertes, parmi lesquelles un lieutenantcolonel tu, deux capitaines blesss, deux autres faits prisonniers et deux premiers
sergents tus; c'est beaucoup pour un rgiment dont 300 hommes du second
bataillon avaient dj dsert Cordoue. Malgr tout, il eut la satisfaction de capturer quelques cuirassiers ainsi que deux officiers du rgiment Reding n 2 qui,
prcise-t-il, vinrent se rendre de leur plein gr, lasss sans doute d'tre contraints
servir la France. Il est difficile de savoir avec prcision s'il y eut d'autres dparts
de ce genre durant le combat lui-mme; il semblerait cependant que les Suisses
aient attendu le cessez-le-feu pour changer de camp, comme nous le verrons plus
loin.
Malgr les capitulations, l'on s'est donc farouchement battu entre
Confdrs au sommet du Haza Wallona. Et Nazare de s'exclamer avec indignation: se fut l'action la plus escandaleuse que les Suisses ayent pu commettre!
Sur le plan tactique, la rencontre des Suisses eut d'normes consquences.
Certains auteurs vont mme jusqu' affirmer que si l'offensive contre la gauche
espagnole avait t mene bien, le sort des armes aurait t trs diffrent; peuttre Dupont aurait-il t le vainqueur de Baylen et les deux rgiments suisses
pris par Napolon Charles IV - avec sa couronne - auraient eu la triste gloire de
faire pencher la balance de la fortune du ct de l'usurpateur28. Il est vrai que la
rencontre des Suisses brisa irrmdiablement l'lan de l'assaut des Franais. Mais
bien vite ces rgiments furent dplacs et le combat se poursuivit avec son cortge
d'attaques et de contre-attaques, le tout sous une chaleur mortelle.
A midi et demi Dupont, bless et malade, se vit oblig de demander une suspension d'armes et le libre passage par Baylen; il ne lui restait que quelques
hommes encore debout, puiss et assoiffs, qui refusaient de reprendre les armes
et quittaient le champ de bataille pour aller se dsaltrer au Rumblar.
Reding accepta la suspension d'armes et ordonna le cessez-le-feu. Quant au
passage par Baylen, il affirma ne pas avoir les comptences et envoya les parlementaires de Dupont au-devant de Castanos, qui n'avait toujours pas quitt
Andujar.
28
REPOND (J.), La Bataille de Baylen, in: Schweizerische Vierteljahrsschrift r Kriegswissenschaft, Bern, 1923, pp. 328-329.
195
L'attaque de Vedel
Mais que fait Vedel ? Cette question tait sur toutes les lvres et dans toutes
les ttes; l'absence de la seconde division faisait le dsespoir de Dupont et l'tonnement des Espagnols. Et Nazare d'crire: Wedel qui tait Guarroman ne
s'asoma pas pendant toutte la matine pour auxilier Dupont, dont nous ignorons
le motif (cf. Annexe II).
Vedel avait pass toute la journe du 18 la Caroline, la poursuite de l'ennemi pour apprendre finalement que ce dernier occupait Baylen. S'il avait encore
des doutes ce sujet, ceux-ci furent vite dissips par le bruit du canon qui se faisait
entendre le 19 l'aube et rsonnait dans les dfils. Pourtant il ne quitta la Caroline
qu' 5 heures du matin, ce qui tait dj trop tard pour viter la grosse chaleur, avec
les 5000 hommes de la seconde division - o servaient les Suisses du colonel
Louis de May - et les 3000 de la troisime division dont le gnral Dufour avait
pris la tte aprs la mort tragique du gnral Gobert, le 16, Mengibar.
Vedel arriva Guarroman 11 heures du matin; la canonnade qui se faisait
de plus en plus violente se tut brusquement aux alentours de midi et Vedel en
dduisit, tout fait gratuitement, que Dupont avait cras l'ennemi. Il permit donc
ses hommes affams de capturer quelques chvres et de les faire cuire. Ce n'est
qu' 2 heures de l'aprs-midi qu'il reprit la route, non sans avoir laiss 3000
hommes Guarroman, pour arriver devant Baylen 5 heures avec 5000 hommes
et 450 dragons. L, il s'aperut avec stupeur que les Espagnols tenaient le San
Cristobal et l'Ahorcado et que la lenteur de sa marche avait mis Dupont dans une
fcheuse posture; il dcida donc de rparer sa mprise au plus tt et se prpara
l'attaque.
Pendant ce temps, Castanos avait profit du cessez-le-feu pour envoyer 6000
de ses hommes afin de surveiller les Franais vaincus sur le champ de bataille de
Baylen. Reding tait alors libre de ses mouvements et put se prparer la venue de
Vedel en renforant ses arrires: il plaa 1400 hommes sur l'Ahorcado et 4500 sur
le San Cristobal (carte n 3), parmi lesquels l'incontournable rgiment de Nazare.
Pourtant Vedel avant de passer l'offensive prvint Reding qui lui dona
pour rponse, que Mr Wedel toit bien hont de lui annoncer une chose toute a fait
hors des rgles, mais qu'a cela il falloit savoir s'il ignoroit ce qu'il avoit t capitul entre Dupont et Lui (cf. Annexe II). Au dbut, le gnral franais ne crut pas
la suspension d'armes et pensa tre victime d'une ruse de guerre. Finalement, il
accepta d'envoyer son aide de camp, le commandant Meunier, accompagn d'un
homme de Reding, comme le prcise Nazare, afin d'aller s'enqurir de la situation
auprs de Dupont; mais si ces deux hommes n'taient pas de retour dans un quart
d'heure, les Franais attaqueraient. Bien entendu, le dlai tait trop court, et ne
voyant revenir personne, Vedel prpara une offensive simultane des deux hauteurs: il dirigea 1200 hommes sur l'Ahorcado et 1100 sur le San Cristobal, dont le
bataillon suisse du colonel de May.
Comme le fait remarquer judicieusement Nazare, Vedel s'apprtait attaquer
des hommes qui l'avaient attendu toute la journe et ne l'espraient plus; et de fait,
196
30
Ibid.
197
trire, les Suisses avaient combattu sur plusieurs fronts, avaient particip la plupart des offensives et avaient t jusqu' se battre entre eux au mpris de leurs capitulations. La grande faute de cette bataille demeura malgr tout l'absence de Vedel
qui, se doutant que l'on se battait Baylen, ne marcha pas au canon: beaucoup de
protagonistes suisses, d'ailleurs, le considrrent comme un tratre qui n'avait agi
de la sorte que pour assouvir une vengeance personnelle: il prtendait tre plus
ancien que Dupont et ne voulait pas, par cette misrable susceptibilit, se rendre
ses ordres31. Toujours est-il qu' force de pourchasser l'ennemi sans jamais le
combattre, la seconde division assista en spectatrice la dfaite de la premire.
5. Les consquences
Dans ce dernier chapitre nous allons voquer les ngociations entre les
deux armes qui vont conduire une paix trs conteste, par les Espagnols comme
par les Franais; nous tenterons aussi d'tablir un bilan prcis de la bataille. Tout
ceci, bien entendu, se fera la lumire de la prcieuse lettre de Nazare, qui ose
dnoncer demi-mot la victoire sans gnie des Espagnols. Enfin, nous nous pencherons brivement sur le long calvaire de la captivit qui attendait les prisonniers
suisses.
Aprs le combat
De retour sur le champ de bataille devant le village de Baylen, en ce 19 juillet
au soir, force est de constater que les hommes de Dupont taient dans un tat
dplorable et les quatre longs jours qui allaient tre ncessaires aux ngociations et
la signature de la convention de paix - appele aussi Convention d'Andujar - ne
devaient qu'aggraver la situation.
En effet, depuis le cessez-le-feu du 19 midi, les Franais taient rests parmi leurs cadavres, souffrant atrocement de la faim et de la soif et ne pouvant aller
puiser de l'eau dans les flaques boueuses du Rumblar sans encourir de graves dangers; c'est au cours d'une telle expdition que le sergent Heidegger fut fait prisonnier. Quant aux officiers du rgiment valaisan, Louis Robatel et Pierre d'Odet, ils
arpentaient le champ de bataille pour retrouver leur ami Frdric Guerratay, de
Monthey, et lui donner une spulture dcente: L'aumnier du rgiment n'tant
pas avec nous, ce fut d'Odet qui dit les prires pendant que les pionniers creusaient
une fosse pour inhumer ce pauvre corps que nous avions retrouv aussi nu qu' son
entre dans le monde!32
En dpit de ce que l'on pourrait croire, la situation pour les habitants de
Baylen tait tout aussi critique: les puits se tarissaient et les cadavres pourrissaient
198
31
32
Ibid., p. 61.
dans les rues. Longtemps encore des uniformes allaient s'agiter aux arbres et des
ossements blanchir sous le soleil andalou.
C'est dans ce cadre apocalyptique et pendant que les soldats souffraient
mille morts, que les ngociations entre les deux armes s'engagrent. Elles se
rvlrent ardues pour les Franais qui espraient toujours obtenir le droit de passage par Baylen et rejoindre ainsi Madrid malgr l'intransigeance de Castanos; il
faut dire que l'attaque de Vedel l'avait rendu encore plus intraitable, et il n'offrait
pas d'autre choix aux armes ennemies que celui de se constituer prisonnires de
guerre.
Aprs un conseil de guerre mouvement, Dupont accepta de capituler, sa
situation devenant vraiment dsespre. En effet, bien que le cessez-le-feu stipult
que les deux armes resteraient leur place durant les tractations, les Espagnols
effecturent plusieurs mouvements pour touffer les troupes franaises; les divisions Jones et La Pena se postrent sur le Zumacar et les hommes de Valdecanas
et de Cruz Mourgeon se htrent d'occuper les dfils pour couper la retraite du
2e Corps de la Gironde. Dans ces conditions, Dupont envoya une dlgation
Castanos pour laborer le trait de paix, avec pour consigne d'obtenir au moins le
retour vers Madrid par voie de terre.
Vedel de son ct, maintenu dans une ignorance totale des vnements
depuis le 19 au soir, rongeait son frein. Le 20, lui parvint un mot du gnral en chef
lui ordonnant de rendre les prisonniers, les drapeaux et les canons pris sur
l'Ahorcado, puis nouveau le silence. Cette inaction lui tait insupportable et se
sentant quelque peu responsable de la situation de Dupont, il chercha par tous les
moyens reprendre l'offensive. Il envoya donc un officier au gnral en chef pour
proposer un nouveau plan d'attaque men conjointement cette fois-ci. Mais la
situation de la premire division devant Baylen tait tout autre que celle de la
seconde l'est du village et Dupont risquait d'tre totalement ananti, s'il entreprenait une nouvelle offensive; cependant il ne s'opposa pas expressment une
retraite discrte de Vedel sur Madrid pour sauver au moins ses hommes des mains
ennemies.
Forte de cette permission tacite, la seconde division leva le camp dans le plus
grand secret le 20 juillet 21 heures et arriva le 22 dans l'aprs-midi SainteHlne. Nazare dans sa lettre se fait le juste cho de l'indignation espagnole;
Castanos considra en effet ce dpart comme un acte de haute trahison et menaa
Dupont, s'il ne rappelait pas immdiatement Vedel, de passer au fil de l'pe les
divisions Barbou et Frsia dj si mal en point devant Baylen. Le gnral en chef
cda au chantage et, ds le 22 juillet, la seconde division revint sur ses pas. Mais le
fougueux capitaine Amde de Murait ne l'entendait pas de cette oreille. Ne pouvant se rsoudre l'ide d'tre livr pieds et poings lis l'ennemi aprs avoir si
peu combattu, il dcida, de mche avec un officier des cuirassiers, de rejoindre
Madrid avec sa compagnie. Le 23 au petit jour, il atteignit la Caroline, mais se vit
trs vite rattrap pas une ordonnance de Vedel qui, lui exposant les consquences
de sa fuite vis--vis de ses compagnons d'armes, parvint le ramener Baylen.
Lorsqu'il arriva au village, Thodore de Reding tait en train de passer les hommes
de Vedel en revue et, soucieux d'adoucir le sort de Suisses, s'arrta devant
Amde de Murait pour lui demander s'il avait un dsir particulier exprimer:
199
Afin de sauver l'honneur, je demande que les officiers puissent conserver leur
pe. Reding l'accorde d'autant plus volontiers que ce point est compris dans la
capitulation33. C'est qu'entre-temps, l'on avait sign la Convention d'Andujar et
Murait, cause de ses alles et venues, n'en avait rien su.
En effet, le trait, qui comprenait 21 articles et 3 articles additionnels, avait
t sign le 22 juillet 1808 par ngociateurs interposs, sans que jamais Dupont
n'ait rencontr Castanos qui ne s'est pas prsent sur le champ de bataille! La
Convention stipulait que les divisions Barbou et Frsia taient prisonnires de
guerre et qu'elles devaient livrer leurs armes, alors que les divisions Vedel et
Gobert mettaient les leurs en dpt pour les rcuprer au moment d'embarquer
pour la France. Quoiqu'il en soit, les officiers pouvaient conserver leurs armes et
une voiture qui, leur avait-on promis, ne devait pas tre fouille. Quant aux simples
soldats, ils pouvaient garder leurs effets personnels, mais dans tous les cas les chevaux, trop encombrants, restaient en Espagne contre une compensation en espces.
Pour ce qui regardait l'vacuation des Franais, Dupont n'obtint pas gain de
cause et leur dpart se fit par mer et non par terre: les hommes furent achemins
aux ports de San Lucar et La Rota (deux ports prs de Cadix) par tapes de 4 lieues
et embarqus pour Rochefort sur des navires espagnols.
Ce trait provoqua les foudres de Napolon et la disgrce de Dupont.
Cependant, avec du recul et toutes passions teintes, l'on peut affirmer que la
Convention d'Andujar n'tait pas aussi dshonorante qu'on a tent de le montrer.
Elle permettait tout de mme aux hommes de retourner en France et remettait
presque tout de suite le 2e Corps de la Gironde la disposition de l'Empereur. Aux
dires de certains tmoins, les Espagnols la trouvrent bien trop avantageuse pour
l'ennemi, tel point qu'on dut en arrter la publication Cadix et Sville tant elle
provoquait l'indignation. Il est peut-tre ncessaire aussi de rappeler que Dupont
ne fut ni le premier ni le dernier gnral d'Empire capituler; l'amiral Rosily
Cadix comme le gnral Junot Cintra furent rduits cette mme extrmit
(Annexe I).
L'heure des comptes
S'il reste difficile d'tablir un bilan exact des pertes franaises, l'on peut tout
de mme, en recoupant divers tmoignages, les estimer 2000 morts et 400 blesss; ces pertes concernent essentiellement les divisions Barbou et Frsia. Malgr la
dfaite, les hommes s'taient courageusement battus et n'avaient point dmrit:
l'honneur tait sauf.
Les rgiments suisses aussi avaient vaillamment guerroy aux cts des
Franais. Cependant, ds que l'ordre de retraite parvint aux hommes, bon
nombre de soldats des rgiments Reding n 2 et de Preux n 6 passrent l'ennemi;
33
200
autrement dit, retournrent au service d'Espagne qu'ils n'auraient jamais d quitter. L aussi il n'est pas ais d'valuer avec justesse le nombre de ces dparts. Le
colonel espagnol Don Juan Creagh de Lacy, charg de conduire les prisonniers
franais San Lucar, inscrit dans son rapport que 308 soldats et 73 officiers et
sous-officiers des rgiments suisses espagnols avaient bien voulu partager le triste
sort des hommes de Dupont34. Et de prciser que sur ces 308 soldats, 196 appartenaient au rgiment de Karl de Reding et 112 celui de Charles de Preux. Aux dires
des sources officielles franaises, ces deux rgiments comptaient 2150 hommes
la date du 10 juillet 180835; si l'on dduit de ce total les prisonniers susmentionns,
l'on s'aperoit alors que 1769 soldats suisses taient retourns aux Espagnols.
Mais pour plus d'exactitude, il convient de soustraire de ce chiffre les morts et les
blesss de ces deux rgiments.
Pour ce qui regarde les pertes du rgiment valaisan de Preux, le colonel
Hyacinthe de Riedmatten (1749-1811), pre de l'infortun Emmanuel qui, l'on
s'en souvient, mourut des fivres peu avant Baylen, et d'Adrien, qui fit ses premires armes durant cette bataille, nous fournit d'intressantes prcisions. En
effet, le 16 fvrier 1809, il crit au capitaine Weger avec toute l'inquitude d'un
pre sans nouvelles de son Adrien, qu'il sait ce dernier malgr tout sain et sauf,
puisque prisonnier de guerre Dijon, avec Messieurs les capitaines Stanislas
Werra, Benjamin Denuc et Joseph de Bons36. Et d'ajouter que: Lorsque le
Rgiment Preux et sous la division du gnerai Dupont fut fait prisonier de guerre
par le gnerai Reding commandant les insurg, le rgiment avait dj perdut 600
hommes, Monsieur le capitaine henri Preux de St. Maurice, Monsieur frideric guerati de Monthey et Messieurs pierre odet et tine ganioz tou ci tu par les paysans. Force est de constater que le colonel de Riedmatten est bien renseign, puisqu'il est au courant de la mort de Frdric Guerratty, rapporte de manire
mouvante par Robatel (cf. supra), et de celle de Pierre d'Odet, assassin par des
infirmiers, alors qu'il s'tait port volontaire pour soigner les blesss37. Ainsi, lorsqu'il value le nombre des pertes du rgiment valaisan 600 hommes, tout nous
porte le croire; et pourtant, une lettre du colonel Charles de Preux, crite en 1811,
fait tat de 200 soldats morts ou blesss, ainsi que de trois officiers morts et de trois
officiers blesss38.
Quant au rgiment de Karl de Reding, nous ne savons rien puisque son colonel n'a laiss aucun relev de ses pertes. Il nous est donc bien difficile, voire
impossible, d'estimer avec exactitude le nombre des Suisses bleus qui sont retour34
GOMEZ DE ARTECHE (J.), Guerra de la Independancia. Historia militar de Espana de 1808
a 1814, Madrid, 1875, T II, pp. 541-542.
35
AN: BB 30/101 A, Correspondance saisie chez le gnral Dupont, 1807-1808, document
183: tat du 2e Corps de la Gironde au 10 juillet 1808, certifi par le gnral Legendre chef d'tatmajor. 36
Archives Weger: F. 311 : Lettre du colonel de Riedmatten au capitaine Weger - anciennement au service de France, dont le colonel est charg de faire valoir la rente - Sion, 16 fvrier 1809.
Nous en avons respect le style et l'orthographe.
37
AEV: Fonds d'Odet, II, p.368 no 2: Relation faite par Joseph-Ignace Escher, camarade de
Pierre d'Odet, 12 avril 1837.
38
AEV: SHVR 12/23/10: Le colonel Charles de Preux au Roi d'Espagne, Tolde, 12 janvier
1811.
201
39
SHM: Guerra de la Independancia, Legajo 2 Carpeta II, documento 25, Castanos a la junta
de Sevilla, Andujar, 27 de julio 1808.
40
MEYER-OTT (W.), Kriegsthaten von Zrchern in auslndischem Dienste, in: Neujahrsbltter der Feuerwerker Gesellschaft, Zrich, 1872, p. 6.
202
41
42
204
suisses et franais confondus et 400 officiers dont le colonel Louis de May, l'adjudant-major Charles von der Weid et le capitaine Amde de Murait furent abandonns sur l'lot dsertique de Cabrera, dans les les Balares. Ici, les mots manquent pour voquer le calvaire des prisonniers, vritables cadavres vivants, laisss
dans le dnuement le plus complet, peine ravitaills par les Espagnols et oublis
par les Franais jusqu'en 1814.
Conclusion
La bataille de Baylen eut de nombreux retentissements et ceci dans l'Europe
entire. En Espagne, Castanos et Thodore de Reding furent acclams et lous
comme de vritables hros et cette victoire galvanisa toutes les villes et les provinces qui s'enlisaient dans leur lutte contre l'oppresseur franais.
Du ct franais, elle provoqua l'vacuation affole de Madrid, la terrible
colre de Napolon, la disgrce de Dupont et l'tonnement de l'Europe l'annonce de la dfaite franaise. Il est vrai que Baylen remit srieusement en cause
l'quilibre voulu par le trait de Tilsit; l'Autriche se dcida rorganiser son
arme et les Anglais furent combls dans toutes leurs esprances, puisque, la
capitulation de Dupont, succda celle de Junot Cintra. Menac de toutes parts,
Napolon se tourna alors nouveau vers la Russie, mais la Convention d'Erfurt du
12 octobre 1808, mine par les intrigues de Talleyrand, apparut comme un bien
faible soutien. Finalement, l'Empereur se jeta dans une campagne clair pour rappeler l'ordre l'Espagne; malgr quelques victoires retentissantes, cela ne suffit
pas et la guerre dans la Pninsule s'ternisa, au point d'puiser la Grande Arme.
Quant la Suisse, elle ne sut exactement quelles mesures prendre vis--vis de
ses bataillons prisonniers et de ses rgiments qui soutenaient l'insurrection espagnole. Seul le canton de Lucerne eut l'trange initiative, en septembre 1809,
d'mettre un dcret qui dclarait dchus de leur droit de cit et de patrie ses ressortissants des rgiments suisses au Service de l'Espagne et qui pourraient se trouver encore avec les Insurgs espagnols43. Le gouvernement lucernois esprait
ainsi viter que ces Suisses se battent contre leurs confrres qui servaient sous les
drapeaux franais. Mais Louis d'Affry, l'poque Landammann de la Suisse,
n'approuva pas une telle politique qui risquait d'aggraver le sort des soldats qui,
aprs tout, avaient t pousss dans le camp des insurgs en raison de la complexit des vnements. Le dcret resta donc lettre morte.
Baylen, ce fut aussi la fin du rgiment valaisan qui, malgr sa situation douloureuse, avait vaillamment combattu et dont la dfaite n'avait su ternir la gloire.
J'ose peine me plaindre des maux cruels dont je fus accabl, et je pense que la
43
AF: Fonds 2200 Paris 1/12, Correspondance du Landammann Rudolf von Wattenwyl de
Berne, avec l'Ambassadeur C. de Maillardoz, Anne 1810, Conduite tenir au sujet des Suisses des
Rgiments au Service de l'Espagne, Berne, le 4 fvrier 1810.
205
plus belle Rcompense digne de mes principes et de mon Etat doit tre le souvenir
du corps que je commandais alors pour la vie, et dont la Gloire rejaillissait sur
moi.44
Brigands Cordoue, hros Baylen, martyrs Cadix, dserteurs ou fidles
jusqu'au bout, les Suisses ont vritablement jou tous les rles et connu durant
cette campagne la gloire au mme titre que la misre la plus profonde. Dans la vie
de ces soldats, Baylen ne fut qu'une tape, plus ou moins douloureuse il est vrai,
mais qui ne les empcha nullement de repartir au combat, soit en Russie pour les
Suisses au service de France, soit en Catalogne pour le rgiment de Nazare de
Reding.
Le 19 juillet 1808, Baylen, les Suisses ne dmritrent pas et le bel hommage grav sur le Lion bless de Lucerne s'adresse eux aussi:
Helvetiorum Fidei ac Virtuti
Au courage et la fidlit des Suisses.
44
1811.
206
AEV: SHVR 12/23/10, le Colonel Charles de Preux au Roi d'Espagne, Tolde, le 12 janvier
Annexe I
Chronologie des vnements depuis Pinvasion de l'Espagne
jusqu'aux pontons de Cadix
1807
27 oct. Trait de Fontainebleau entre la France et l'Espagne qui prvoit le
dmembrement du Portugal.
19 dc. Dupont entre en Espagne la tte des 24 428 hommes du 2e Corps
d'Observation de la Gironde et tablit son quartier gnral Valladolid.
1808
20 fv.
Murt, grand-duc de Berg et beau-frre de Napolon, est nomm
gnral en chef des armes franaises en Espagne. Dupont quitte Valladolid et se
dirige vers Madrid et non plus vers Lisbonne.
18 mars Emeutes d'Aranjuez. La demeure du premier ministre et favori de
la reine, Manuel Godoy, prince de la paix, est saccage et il chappe de peu la
mort. Face cette fureur populaire, le roi Charles IV accepte d'abdiquer en faveur
de son fils Ferdinand VII. Le 23 Murt entre Madrid; il refuse de reconnatre
Ferdinand VII comme roi et monte le pre contre le fils en demandant Charles IV
de revenir sur son abdication. Le lendemain Dupont arrive dans la capitale.
20 avril Le roi Ferdinand accepte l'invitation de l'Empereur Bayonne.
L, il est pri de se dfaire de sa couronne pour la donner un prince choisi par
Napolon. Ferdinand rsiste malgr les supplications de son pre qui finit par le
dpossder.
2 mai
Soulvement de Madrid contre les Franais, rprim dans le sang
par Murt.
11 mai Ferdinand abandonne ses droits de succession au trne. Il est
exil Valenay, chez Talleyrand. Charles IV et la reine, ainsi que Manuel Godoy,
partent aussi pour la France o ils reoivent une rente et quelques chteaux pour
les remercier de leur coopration.
23 mai Dupont part pour Cadix avec sa premire division renforce par
les rgiments suisses de Preux n 6 et Reding n 2. A Madrid, Murt tombe
malade de dpit en apprenant que la couronne d'Espagne qu'il briguait pour luimme a t attribue Joseph Bonaparte, ancien roi de Naples et frre an de
l'Empereur.
2 juin
Arrive de Dupont Andujar o il apprend le soulvement de
l'Andalousie. Le 7, il crase les hommes du gnral Echavarri au pont d'Alcolea.
Le mme jour les Franais entrent Cordoue. Le pillage va durer trois jours.
14 juin L'amiral Rosily, bloqu Cadix, encercl par la flotte espagnole,
se rend sans condition. Le 16, Savary, duc de Rovigo, arrive Madrid pour seconder Murt.
17 juin Dpart pour l'Andalousie de Vedel la tte de la deuxime division du 2e Corps d'Observation de la Gironde. De son ct, Dupont, aprs dix jours
d'inaction Cordoue, retourne Andujar.
207
20 juin
Voyant que Dupont bat en retraite, Castanos dcide de marcher
sur Cordoue et Bujalance avec ses hommes.
26 juin
Vedel ouvre le passage du Despena Perros et, le 29, s'installe
Baylen. Murt quitte dfinitivement l'Espagne.
ler-4 juillet Expdition Jaen mene par le gnral Cassagne. La ville est
dfendue par l'arme de Grenade aux ordres de Thodore de Reding. Le 3 juillet
Gobert quitte Madrid.
12 juillet Runion Porcuna des forces du gnral Castanos et du gnral
Reding. Organisation finale de l'arme d'Andalousie et laboration d'un plan
d'attaque. Le lendemain Gobert arrive Baylen; la majorit de ses forces est chelonne sur la route de Madrid Baylen.
16 juillet Echec franais Mengibar et mort du gnral Gobert.
18 juillet Dupont vacue Andujar.
19 juillet Victoire espagnole Baylen. Le lendemain, le nouveau roi
d'Espagne, Joseph Bonaparte, fait son entre triomphale Madrid.
22 juillet Signature de la Convention d'Andujar. Le 23 les troupes de
Dupont dfilent devant l'ennemi Baylen. Le lendemain, Vedel et ses hommes
font de mme Guarroman. Commence alors un vritable calvaire pour les soldats
du 2e Corps de la Gironde; faits prisonniers Baylen, ils sont enferms entre
dcembre 1808 et avril 1809, sur les pontons de Cadix. Certains parvinrent s'en
chapper, beaucoup y trouvrent la mort, d'autres enfin furent envoys sur l'le
dserte de Cabrera (le la plus mridionale de l'archipel des Balares).
Dans la Pninsule, la dfaite franaise de Baylen eut pour consquences:
30 juillet Le roi Joseph quitte Madrid en catastrophe et se rfugie derrire
l'Ebre.
Apprenant la victoire andalouse, Saragosse redouble d'ardeur contre l'ennemi
et Junot doit faire face plusieurs soulvements au Portugal. Les Anglais y dbarquent ds le 1er aot.
30 aot
Par la capitulation de Cintra, Junot abandonne le Portugal. Les
Franais n'occupent plus en Espagne que les territoires situs entre l'Ebre et les
Pyrnes.
5 sept.
Dupont s'embarque pour la France avec plusieurs officiers du
Corps de la Gironde. Tous leurs effets ont t pills lors d'une meute Puerto de
Santa Maria.
12 oct.
Signature de la convention d'Erfurt qui reconduit l'alliance franco-russe pour dix ans. Le Tsar promet de secourir la France contre l'Autriche qui,
depuis Baylen, montre des vellits de rarmement. Napolon se dcide partir
pour l'Espagne afin de reconqurir le pays. En novembre, Castanos et Palafox sont
battus Tudela. Il en va de mme pour toutes les troupes de la Pninsule: il n'y a
plus d'arme espagnole en tat de combattre. Madrid tombe, mais le Roi Joseph n'y
entre que deux mois plus tard (12 janvier 1809).
dcembre L'Empereur poursuit les armes anglaises, puis quitte prcipitamment la Pninsule. Soult continue la chasse, mais le 18 janvier 1809 les
Anglais s'embarquent la Corogne et prennent le large.
208
Annexe II
Lettre du Colonel Nazare de Reding un ami
Grenada 20 sept 1808
Mon trs cher Ami!1 Ta lettre datte du 7 du courent m'a fait un plaisir dont
je ne pourais pas te donner une ide au juste, te sachant bien portant, au millieu de
touts les tourbillons que nous venons de passer. Je vois avec beaucoup de surprise
et au mme temps de la peine, ce que tu me mandes concernant le bat. actuelle de
Giordi2 ce que je savois a Madrid, mais j'ignorois entirement qu'il tait contrari
de ses oficiers et encore moins de ce qu'on pouvoit s'aviser de le regarder comme
soupsoneux; l'on m'avoit bien mand qu'il toit a Madrid, en qualit de Prisonier
du General Moncey sans m'insinuer la moindre chose de tout ce que tu me relates.
C'est bien fcheux pour nous touts de voir qu'il n'y aye pas presque un Rle que
nos Suisses n'ayent pas jou pendant cette maudite guerre; il nous manque encore
de voire ce que le Regt de Betschart fera, en entrant en Campagne, comme cela se
sera dj efectu a Taragone, suivant les dernires nouvelles de Catalogne.
Pour ce qui regarde a nous je peux te dire que a exception du 7 juin, fonction
de Echevari au pont d'Alcolea prt de Cordova ou se trouvoit le second Battallon
comand par le Lieutenant Colonel; le Regt s'est comport pour faire honneur a la
Nation, dont je te ferai un petit dtaille. Pour ce qui regarde le second Battaillon
prt de Cordova, il y eut prt de 300 hommes, qui se firent faire Prisoniers de leur
propre volont par les Franois, et aprs cela, ils osrent d'aller dans la maison ou
ils savaient tre dposits les fonds du Regt dans la mme ville de Cordova, et
repartirent en bons camarades sous les auspices des Franois; tout ce qu'ils trouvrent soit en argent, et en butin des oficiers en particulier, l'argent seul paroit de
quarante mil Rs (raux). Aprs tout cela l'on obligea a ces beaux Messieurs de
prendre les Armes contre l'Espagne, entre lesquels il n'y avait ni oficiers ni sargents par unique bonheur, et l'on incorpora au bout de quelques semaines le
second Batallon au premier, pendant que nous tions dans le plus fort de nos
marches, et contremarches, ce qui arriva aprs le jour 3 de juillet dans lequel le
premier Battallon se fit un honneur imortel, d'avoir pris par asault le chteau de
Jaen, et en suite toute la ville, en traant le chemin au reste de la Trouppe, qui toit
compose toute de Paysans, et que par mauvaise disposition du Colonel d'Espagne
de Cavallerie, apell Moreno, nous fmes obligs de rabandonner tout l'aprs
dn, aprs avoir perdu une infinit de Monde t, et blesss, et l'oficier Steger, qui
1
laquelle
ce dernier a rpondu Nazare. Cette inscription dit: A Thodore, qui rpond le
1er octobre.
Il semblerait que ce Thodore n'ait aucun lien de parent avec Nazare. Par contre, d'aprs les
propos tenus dans la lettre, leurs deux femmes pourraient se connatre.
2
II nous a t impossible d'identifier ce bataillon. On peut penser qu'il appartient l'un des
cinq rgiments suisses au service d'Espagne et qu'il soit pass du ct franais.
209
justice qui nous est due; mais je t'exhortes dans le mme temps de vouloir conserver pour tout temps ce Papier, comme une histoire vridique de l'important afaire
de Bailen {et un jour cela poura servir de lecture nos Femmes}3.
C'est bien avec regret que je dois te dire aussi que nos Compatriotes et
Camarades de Reding 2e et Preux faisoient nombre de VArme de Dupont, et qui
se sont battu acharnement contre mon Regt mme, et d'une manire qui est
presque incroyable; Von m 'ordona de prendre une hauteur a la gauche avec mon
Regt, et a peine y fus-je, que je vis dans une Plaine entre des oliviers a la partie
opose une fourmilire de Suisses, composs des deux Regts d'Espagne, et des
Rouges au Service de France Von comena a se tirailler d'importance, et dans un
instant voil qu'il s'arme une Confusion diabolique dans le rang de mon Regt,
avec des cris Still, schiesst nicht, er kommt alles zu uns hinber4, et dans la
minute nous fmes touts ples mles, entre lesquels il y avait aussi des Cuirassiers
a Cheval et de la Garde de Paris et tout cela ft fait dans la mchante intention, de
nous asomer et aussi de persuader a nos gens de passer aux Franois; nos hostilits recomenerent dans la minute, il y eut en assez grand nombre de morts, blesss et prisoniers de part et d'autre; on me fit deux capitaines Frisch-hess et Preux5
prisoniers, on s'tait dj empare d'un de nos Drapeaux, qui fut reconquis par des
braves gens du Regt: deux premiers Sargents y perdirent la vie: Caratti tait dj
asome, et il pt tre encore dlibr, il y eut les Capitaines Gut et Gretener blesss, enfin se ft l'action la plus escandaleuse que les Suisses ayent pu comettre
depuis qu 'ils servent.
Le Lieutenant Colonel Chaque, que je ne vis pas, doit avoir mordu la poussire dans cette occasion l; Mon Regt fit 5 Cuirassiers prisoniers avec leurs cheveaux, et deux oficiers de Reding, qui prtendent de s'tre pass, dont l'un est le
Capitaine des Granadiers Seil - Pendant les jours qui se coulrent pour la sanction
de la Capitulation, il y eut une infinit de monde des deux Regts des Suisses
Espagnols, ainsi que des rouges, dont je n'ai pas admis un seul ni avant ni aprs
l'action du 19; ne sachant pas pour te dire le vrai si j'ai bien ou mal fait, mais il me
parut toujours indlicat, que de complter mon Regt sur les dbris des autres, et
d'ailleurs pour l'efet que cela pouroit causer chez nous; Ceux de mon Regt qui
furent faits prisoniers a Cordova, sont revenus touts a nous, nanmoins d Sacage
de la Caisse; et pour la bonne fois, qu'ils ont eu pour leur ancien Regt, ils ont t
chti avec beaucoup de douceur - Nous n'avons pas eu un seul Dserteur pendant
toute la Campagne {welches eigentlich der Furcht zu verdanken ist vom ersten
bauer der sie angetroffen htten wrde sie zutodtegeschlagen haben - Die Spanier
desertieren dagegen zu scharenweis}6, et les prisoniers ont fait toute leur posible
3
4
5
212
de revenir avant et aprs le jour 19, de faon que mon Regt passe encore de 1500
Places, sans que j'aye engag des autres Regts.
Ce sont les Gardes Wallones, le Regt d'Irlande et touts les Cinques Regts
Granadins de nouvelle leve, qui se sont empars des Oficiers ainsi que des
trouppes suisses passes, dont ils sont infiniment contents, et moi je ne me repents
pas jusqu'apresent, de ne les pas avoir voulu, car ils pasent de mils hommes ceux
que j'aurois pu avoir de touttes cts avec la Musique entire de Reding - Brautz
a t efectivement bless le 19 au premier rencontre que nous emes, d'une baie
qui lui est entr dans la main droite, mais qui n'a jamais eu la mine d'une chose
dangereuse; il est presque entirement rtabli et pour consolider sa cure, il lui faudra encore des Bains minrales. Si je n'avois pas 7 Capitaines pour un Conseil de
Guerre entre premiers et seconds; je continuerois avec ceux qu'il y a, quoique je ne
me soyes jamais trouv dans ce cas.
Mon Frre est all Malaga il y a 8 jours, ou on l'a reu comme il n'est pas
posible t'expliquer, car on l'aime et estime la folie. {Mon Regt reste en attendant
ici, faisant partie de l'arme de Grenade qui doit tre de 16 000 hommes, dont le
comandement sera confi mon Frre si tout marche ensemble}7. Que te dirai-je
de nos pauvres Femmes qui sont encore beaucoup plus a plaindre que nous, ne
sachant des choses d'Espagne que ce que les Papiers Franois leurs annonceront,
la dernire lettre que je reus etoit du 4e mai qui m'est arrive bien arrir, et a ce
que je comprends, mes Lettres ne lui arrivent non plus, je pris la prcaution de les
envoyer a Mr. Brosey, croyant qu'il aurait de posibilit pour les faire passer de
quelque faon, mais celui-ci se retrouve dans l'arme de Palacios, agrg au Regt
de Wimphen, qui me dit qu'il n'est pas posible pour le moment de faire passer de
Lettres, mais qu'il tachera de le faire aussitt qu'il pour - Pour te dire tout, il faut
que tu saches aussi ntre Promotion. Mon Frre Lieutenant-General avec 13 000
Ds (douros) de Pension, tandis que quelque Encomienda puisse la remplacer - A
moi le rang de Brigadier. Mr Steydinger rang de Colonel et sa retraite suivant
Capitol(ation). avec tout l'apointement. Le Major et les 3 Caps Carrati, Gble et
Gut rang de Lieutenant Colonels - Les deux Molos rang de Capitaines. Franois
Reding, Schrmann Gretener et Bonif. Ulrich rang de 1er s Lieutenants, 3 Sargents
avec Rang d'oficier et les autres Sargents avec rang de Premiers et escudo de
Ventaja, Caporaux Item.
Je crois t'avoir compt assez, je finis en t'embrassant et te sanctionant ntre
convenio pour ce qui regarde nos Femmes. Je suis tout toi ton dvou Ami
Nazare.
Lettre trouve dans les archives prives de la famille Reding von Biberegg Schwytz et classe
avec les liasses concernant Thodore de Reding.
Nous en avons respect le style et l'orthographe (mais est-ce bien ncessaire de le prciser?).
Nous remercions chaleureusement M. B. Truffer, directeur des Archives cantonales de Sion,
pour son aide dans la traduction des passages allemands.
213
Annexe 3
Lettre de Castanos Thodore de Reding
He recibido el oficio de V.S. (Vuestra Senora) hoy y aunque los prisioneros
hechos por Coupini digan que ha salido de Andujar la 2a Division, hemos observado todo el dia que ningunas tropas se han movido de su campo y lo mismo han
confirmado los desertores que acaban de venir.
En consecuencia para no variar el plan acordado y propuesto bajo la idea de
ser el punto de Andujar el que ha de experimentar un ataque vigoroso en terminos
que sea decisivo, es preciso que luego V. S. entre en Baylen, venga con la Division
de Coupini a mi derecha a la cuya sobre Andujar y luego que veamos se hallan a
media lgua de Andujar atacaremos con firmeza para verificar la operacion
concertada.
Esperamos que Ud (usted) me d aviso sin perdida de tiempo del resultado de
su ataque a Baylen y del modo con que se proponga marchar sobre Andujar, que
debera su lo mas pronto posible, pues solo en el caso que vieremos muy disminuidas la fuerzas de este campamento enemigo podriamos determinar hoy el ataque
sin esperar esas Divisiones. V. S. sabe el renombre y calidad de las tropas de estas
Divisiones y debe conocer que lo mas conviene es augurar de un modo nada dudoso el feliz exito de esta empresa que entre todos es muy facil: por lo quai nos dar
V. S. repetidos avisos de su movimiento de modo que no nos quede duda alguna
para operar con seguridad.
Dios que a V.S mande.
Arjonilla1 17 de Julio 1808 a las 7 de la tarde.
Castanos
214
BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE
Sources manuscrites
ARCHIVES FEDERALES DE BERNE
- Fonds 2200 Paris 1/11: Correspondance du Landammann Riittimann C de
Maillardoz, ambassadeur de Suisse Paris. 1808.
ARCHIVES DE L'ETAT DU VALAIS
- Fonds du Service Etranger 6/16/1-11: Correspondance de Monsieur le Colonel
Charles de Preux, 1807-1808.
- Fonds du Service Etranger 29/1/1-33: Dite valaisanne. Messages, dcrets, rapports, capitulations, relatifs au service de France. 1803-1830.
- Fonds du Service Etranger 37: Liste des officiers demandant du service en 1810.
- Fonds de la Socit d'Histoire du Valais Romand 12/23: Service d'Espagne
pour les annes 1767 et 1802-1815.
- Fonds Louis de Riedmatten 7/12: Lettres diverses de 1805-1808.
- Fonds d'Odet II/P 368: Relation faite par Joseph-Ignace Escher. 12 avril 1837.
ARCHIVES PRIVEES
DE LA FAMILLE REDING VON BIBEREGG A SCHWYTZ
- Papiers concernant Thodore de Reding.
- Papiers concernant Nazare de Reding.
ARCHIVES PRIVEES DE LA FAMILLE WEGER A MUNSTER
- F. 311 : Lettre du colonel de Riedmatten au capitaine Weguer. Sion le 16 fvrier
1809.
ARCHIVES NATIONALES, PARIS.
- Fonds du Ministre de la justice BB 30/97 BB 30/101B: Affaires des Gnraux
Dupont, Vedel, Marescot, etc. Capitulation de Baylen, 1808-1814.
SERVICIO HISTORICO MILITR, MADRID.
- Fondo de la Guerre de la Independencia. Duque de Bailen, Legajo 2, Carpeta II:
Documentos consultados para la redaccin de la Historia relativos a los principales sucesos desarollados en Andalucia durante la primera Campana.
215
Sources imprimes
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Paris, Imp. Impriale, 1865, t. XVII, avril-octobre 1808.
DIESBACH (M. de), Le Gnral Charles-Emmanuel von der Weid. 17861845, in: Archives de la Socit d'Histoire de Fribourg, t. V, Fribourg, 1893,
pp. 471-546.
HEIDEGGER (G.), (sergent), Lebensgeschichte, Erlebnisse in napoleonischen
und niederlndischen Diensten, 1807-1825, in: Zrcher Taschenbuch, Zurich,
1925, pp. 27-76.
LANDOLT (J.), (colonel), Erinnerungen. 1807-1815, in: Zrcher
Taschenbuch, Zurich, 1893, pp. 133-211.
MURALT (R.-K.-A. de), (lieutenant de la Garde suisse), Militrische
Laufbahn des Oberstlieutenant R. K. Amde von Muralt, in: Berner
Taschenbuch, Berne, 1887, pp. 227-281.
ROBATEL (L.), (capitaine), Mmoires de Louis Robatel (1788-1877), officier
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(Bibliotheca Vallesiana n 3), 1966.
SCHUMACHER (G.), (capitaine), Journal et Souvenirs de Gaspard
Schumacher, Capitaine aux Suisses de la Garde Royale (1798-1830), Paris,
1916.
Ouvrages
BELER (G. de), Baylen, Paris, 1955.
CORTEY (F.), 1760-1835 Peintre Valaisan, catalogue d'exposition, Bagnes,
Centre de Recherches historiques de Bagnes, 1979.
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Historia militar de Espana de 1808 a 1814, Madrid, SHM, 1875, t. II.
MAAG (A.), Geschichte der Schweizertruppen im Kriege Napoleons I. in
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SCHALLER (H. de), Histoire des troupes suisses au service de France sous le
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216