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La Dimension Radiologique Des Essais Nucleaires Francais en Polynesie PDF

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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE

DES ESSAIS NUCLÉAIRES


FRANÇAIS EN POLYNÉSIE

À l’épreuve des faits


01 Pre?face 01.12.06:Texte 7/12/06 14:24 Page 1

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE

DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS

EN POLYNÉSIE

À l’épreuve des faits


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01 Pre?face-04.01.07.QXD:Texte 10/01/07 9:51 Page 1

Préface

De 1966 à 1996, les installations du centre d‘expérimentation du Pacifique ont permis à la


France de devenir une puissance nucléaire majeure en réalisant, sur les atolls de Mururoa et
Fangataufa, 193 essais nucléaires qui contribuèrent à doter les forces stratégiques aériennes
puis océaniques. Durant trente ans, les équipes du commissariat à l’énergie atomique, les militaires
de toutes les armées et les Polynésiens ont réalisé ensemble un travail remarquable dont tous les
vétérans peuvent être légitimement fiers. Ces essais nucléaires font désormais partie de l’histoire de
la Polynésie française. La France renouvelle sa gratitude à celles et à ceux qui ont ainsi contribué
à garantir son autonomie stratégique et sa sécurité dans un monde toujours incertain.

Après une ultime campagne en 1995 et 1996, la France a démantelé de manière irréversible
ses sites d’expérimentations du Pacifique et a choisi la voie de la simulation pour garantir la fiabilité
et la sûreté de ses armes. En 1998, elle a signé et ratifié le Traité d’interdiction complète des
essais nucléaires et sollicité l’agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) pour établir un
bilan radiologique et géomécanique des atolls de Mururoa et Fangataufa. L’AIEA a estimé qu’il n’était
pas nécessaire de poursuivre la surveillance de la radioactivité dans l’environnement. Cependant,
la France a décidé de mettre en place les moyens pérennes permettant d’assurer la continuité de
cette surveillance. De la même façon, un système complet de capteurs permet de suivre en
permanence le comportement du sous-sol des anciens atolls d’expérimentations.

Dans le cadre d’une démarche volontaire de transparence de l’Etat, la France publie cet
ouvrage consacré aux aspects radiologiques des essais nucléaires. Il s’agit d’un ouvrage scientifique
totalement inédit, fruit du travail des experts et vétérans du commissariat à l’énergie atomique et
du ministère de la défense, que la France est, à ce jour, le seul pays doté d’armes nucléaires à
rendre public. Il vient compléter les informations déjà publiées sur les atolls de Mururoa et
Fangataufa. Il répond ainsi au souhait, souvent exprimé, de nos compatriotes de Polynésie de
mieux connaître cette période pour en écrire son histoire.
01 Pre?face 01.12.06:Texte 7/12/06 14:24 Page 4
02 Remerciements ver 06:Texte 8/12/06 11:35 Page 5

Remerciements

Cet ouvrage, consacré aux aspects radiologiques des essais nucléaires réalisés en
Polynésie française sur les atolls de Mururoa et Fangataufa, rassemble des informations couvrant
de multiples domaines scientifiques et techniques. Il représente un travail considérable qui a été
mené avec une grande rigueur afin d’offrir à son lecteur une vision la plus juste possible de la
situation radiologique en Polynésie telle qu’elle a été observée depuis le premier essai. Son
élaboration a nécessité la collaboration de nombreux spécialistes des diverses disciplines
concernées. Une grande partie de leur travail a consisté à faire l’analyse des documents existant
pour en extraire les informations les plus représentatives sur le sujet de 1966 à nos jours.
Une autre partie du travail a requis des travaux particuliers. Ce document est donc le fruit d’un
immense travail collectif dont il convient de remercier les nombreux contributeurs, notamment
ceux qui ont également participé directement aux essais.

La majorité des données présentées est issue des études et mesures réalisées par le
Service mixte de sécurité radiologique et le Service mixte de contrôle biologique, puis par le
Service mixte de sécurité radiologique et biologique de l’homme et de l’environnement, ainsi que
par le Service de santé des Armées et le Commissariat à l’énergie atomique. Cette synthèse
s’appuie sur le travail de toutes les personnes qui, directement ou indirectement, ont été
impliquées dans ces travaux, sur le terrain et en laboratoire : agents de radioprotection,
physiciens de la mesure, radiochimistes, géologues, biologistes, infirmiers, médecins… Qu’elles
en soient encore une fois remerciées ici.

Il convient également de souligner que les analyses, études et expertises émanant d’autres
organismes français, comme l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, ou internationaux,
comme l’Agence internationale de l’énergie atomique, ont été très précieuses lors de la rédaction
de ce document.

Nous adressons nos plus vifs remerciements à M. W. Delahaye, qui a réalisé la mise en page
et l’illustration de l’ensemble de cet ouvrage.

Crédit photos : ECPA, CEA/Cadam, W. Delahaye, L. Villiers, R. Brand.


02 Remerciements ver 06:Texte 8/12/06 11:35 Page 6
03 Tab.Mat.Ge?n.19.12.06:Table Matières 12/01/07 14:08 Page 7

Table des matières

Chapitre I
Environnement des atolls de Mururoa et Fangataufa

I.1 - Géographie des atolls polynésiens 17


I.2 - Morphologie des atolls 19
I.2.1 - Atoll de Mururoa 21
I.2.2 - Atoll de Fangataufa 22
I.3 - Milieu physique 23
I.3.1 - Géologie 23
I.3.1.1 - Formations volcaniques 24
I.3.1.2 - Formations de transition 24
I.3.1.3 - Formations carbonatées 25
I.3.1.4 - Sols 25
I.3.2 - Conditions hydrogéologiques 26
I.3.3 - Conditions météorologiques 27
I.3.3.1 - Circulation atmosphérique dans le Pacifique Sud 27
I.3.3.2 - Conditions météorologiques en Polynésie française 28
I.3.3.3 - Perturbations atmosphériques en Polynésie 29
I.3.3.4 - Conditions météorologiques à Mururoa et Fangataufa 30
I.3.4 - Océanographie 32
I.3.4.1 - Courantologie du Pacifique Sud 32
I.3.4.2 - Courantologie des lagons 32
I.3.4.3 - Courantologie à proximité des atolls 34
I.3.4.4 - Propriétés des masses d’eau océaniques 35
I.4 - Milieu vivant 36
I.4.1 - Milieu terrestre 36
I.4.1.1 - Flore 37
I.4.1.2 - Faune 38
03 Tab.Mat.Ge?n.19.12.06:Table Matières 12/01/07 14:08 Page 8

8 TABLE DES MATIÈRES

I.4.2 - Milieu marin 38


1.4.2.1 - Écosystème pélagique océanique 38
1.4.2.2 - Écosystème récifal 38
I.4.3 - Réseau trophique 43
I.5 - Pressions anthropiques 45
I.5.1 - Aménagements d’installations humaines 45
I.5.2 - Effets des essais 47
I.6 - Conclusion 47
I.7 - Bibliographie 48

Chapitre II
Essais nucléaires et environnement

II.1 - Réactions nucléaires et radionucléides 53


II.1.1 - Radionucléides libérés lors des essais nucléaires 53
II.1.1.1 - Matières nucléaires non consommées 54
II.1.1.2 - Traceurs de réaction 54
II.1.1.3 - Produits de fission 54
II.1.1.4 - Produits d’activation 55
II.2 - Types d’essais et transferts dans l’environnement 56
II.2.1 - Essais atmosphériques 56
II.2.1.1 - Phénomènes physiques 58
II.2.1.2 - Formation du nuage radioactif 59
II.2.1.3 - Distribution initiale de la radioactivité au sein du nuage 61
II.2.1.4 - Décroissance de la radioactivité au sein du nuage 61
II.2.1.5 - Fractionnement des radionucléides au sein du nuage 64
II.2.1.6 - Évolution des produits d’activation 66
II.2.2 - Essais souterrains 66
II.2.2.1 - Phénomènes physiques 68
II.2.2.2 - Évolution hydrogéologique 69
II.2.2.3 - Mise en pression des gaz de la cavité 70
II.2.2.4 - Distribution initiale de la radioactivité dans la cavité 70
II.2.2.5 - Évolution de la radioactivité au sein de la cavité 72
II.2.2.6 - Émissions gazeuses lors des post-forages 73
II.2.2.7 - Transfert potentiel à la biosphère 75
03 Tab.Mat.Ge?n.19.12.06:Table Matières 12/01/07 14:08 Page 9

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 9

II.3 - Mécanismes de transfert des radionucléides 75


II.3.1 - Dispersion atmosphérique des radionucléides 76
II.3.1.1 - Trajectoires 76
II.3.1.2 - Retombées radioactives 77
II.3.1.3 - Vitesse de dépôt 78
II.3.1.4 - Prévisions des retombées proches 79
II.3.2 - Évolution des dépôts 80
II.3.3 - Transfert aux organismes vivants 81
II.3.3.1 - Végétaux terrestres 83
II.3.3.2 - Animaux d’élevage 85
II.3.3.3 - Organismes marins 85
II.4 - Conclusion 87
II.5 - Bibliographie 88

Chapitre III
Matériels et méthode de la surveillance radiologique

III.1 - Laboratoires de surveillance de l’environnement 90


III.2 - Choix des composantes à surveiller 90
III.3 - Stratégie de prélèvement d’échantillons 92
III.3.1 - Sites d’expérimentations 92
III.3.1.1 - Repérage géographique des stations de surveillance 92
III.3.1.2 - Procédures de surveillance 93
III.3.2 - Polynésie française 96
III.3.3 - Réseau mondial français de surveillance radiologique 101
III.4 - Prélèvements d’échantillons environnementaux 101
III.4.1 - Prélèvements atmosphériques 101
III.4.1.1 - Aérosols 101
III.4.1.2 - Eaux de pluie 102
III.4.2 - Prélèvements en domaine terrestre 103
III.4.2.1 - Eau de source/ruisseau 103
III.4.2.2 - Eau de boisson 103
III.4.2.3 - Sols 103
III.4.2.4 - Végétaux 105
III.4.2.5 - Productions agricoles polynésiennes 107
03 Tab.Mat.Ge?n.19.12.06:Table Matières 12/01/07 14:08 Page 10

10 TABLE DES MATIÈRES

III.4.3 - Prélèvements en domaine marin 109


III.4.3.1 - Eau de mer 109
III.4.3.2 - Sédiments 111
III.4.3.3 - Plancton 111
III.4.3.4 - Algues benthiques 112
III.4.3.5 - Coraux 113
III.4.3.6 - Holothuries 114
III.4.3.7 - Mollusques 114
III.4.3.8 - Crustacés 116
III.4.3.9 - Poissons 117
III.5 - Mesures de la radioactivité 119
III.5.1 - Aérosols atmosphériques 119
III.5.2 - Eaux de mer 121
III.5.3 - Échantillons biologiques 121
III.5.3.1 - Conditionnement des échantillons 121
III.5.3.2 - Préparation des échantillons 123
III.5.3.3 - Mesures des échantillons 123
III.6 - Exercices d’intercomparaison 124
III.6.1 - Exercice d’intercomparaison AIEA-plancton 125
III.6.2 - Exercice d’intercomparaison AIEA-aliments 125
III.7 - Conclusion 128
III.8 - Bibliographie 130

Chapitre IV
Évolution de la radioactivité des sites d’expérimentations

IV.1 - Atmosphère 132


IV.1.1 - Indice bêta global 132
IV.1.2 - Radionucléides émetteurs bêta-gamma 134
IV.1.3 - Isotopes du plutonium 135
IV.2 - Sols 135
IV.2.1 - Radionucléides émetteurs bêta-gamma 136
IV.2.1.1 - Mururoa 136
IV.2.1.2 - Fangataufa 139
IV.2.2 - Isotopes du plutonium 140
IV.2.2.1 - Mururoa 140
IV.2.2.2 - Fangataufa 144
IV.2.3 - Débit de dose 145
03 Tab.Mat.Ge?n.19.12.06:Table Matières 12/01/07 14:08 Page 11

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 11

IV.3 - Plantes terrestres 147


IV.3.1 - Radionucléides émetteurs bêta-gamma 148
IV.3.1.1 - Radionucléides de période inférieure ou égale à l’année 148
IV.3.1.2 - Radionucléides de période supérieure à 5 ans 148
IV.3.2 - Isotopes du plutonium 152
IV.3.3 - Facteurs de transfert in situ sol-plante 154
IV.4 - Eaux de mer 155
IV.4.1 - Indice bêta global 155
IV.4.1.1 - Essais sur barge 155
IV.4.1.2 - Essais sous ballon 156
IV.4.2 - Radionucléides émetteurs bêta-gamma 158
IV.4.2.1 - Radionucléides de période inférieure ou égale à l’année 158
IV.4.2.2 - Radionucléides de période supérieure à 5 ans 160
IV.4.3 Isotopes du plutonium 164
IV.4.3.1 - Essais atmosphériques 164
IV.4.3.2 - Essais souterrains 165
IV.5 - Sédiments marins 169
IV.5.1 - Radionucléides émetteurs bêta-gamma 170
IV.5.2 - Isotopes du plutonium 172
IV.5.3 - Bilan 176
IV.6 - Flore et faune marines 177
IV.6.1 - Radionucléides de période inférieure ou égale à l’année 177
IV.6.1.1 - Plancton 177
IV.6.1.2 - Coraux 179
IV.6.1.3 - Mollusques 180
IV.6.1.4 - Poissons 182
IV.6.1.5 - Holothuries 185
IV.6.2 - Radionucléides de période supérieure à 5 ans 186
IV.6.2.1 - Algues benthiques 187
IV.6.2.2 - Plancton 188
IV.6.2.3 - Coraux 189
IV.6.2.4 - Mollusques 191
IV.6.2.5 - Poissons herbivores 194
IV.6.2.6 - Poissons carnivores 196
IV.6.2.7 - Holothuries 198
IV.6.3 Isotopes du plutonium 200
IV.6.3.1 - Algues benthiques 200
IV.6.3.2 - Coraux 201
IV.6.3.3 - Mollusques 202
03 Tab.Mat.Ge?n.19.12.06:Table Matières 12/01/07 14:08 Page 12

12 TABLE DES MATIÈRES

IV.6.3.4 - Poissons herbivores 204


IV.6.3.5 - Poissons carnivores 205
IV.6.3.6 - Holothuries 205
IV.7 - Conclusion 207
IV.8 - Bibliographie 208

Chapitre V
Évolution de la radioactivité en Polynésie française

V.1 - Atmosphère 211


V.1.1 - Indice bêta global 212
V.1.2 - Radionucléides de période supérieure à 5 ans 215
V.1.3 - Isotopes du plutonium 215
V.2 - Sols 216
V.2.1 - Radioactivité des sols de Tahiti 217
V.2.1.1 - Indice bêta global 217
V.2.1.2 - Radionucléides de période supérieure à 5 ans 218
V.2.2 - Radioactivité des sols de Mangareva 219
V.2.3 - Débit de dose environnemental 221
V.3 - Plantes terrestres 222
V.3.1 - Indice bêta global 222
V.3.2 - Radionucléides de période supérieure à 5 ans 223
V.4 - Production agricole : le lait 224
V.4.1 - Radionucléides de période inférieure à 1 an 225
V.4.2 - Radionucléides de période supérieure à 5 ans 226
V.5 - Eaux océaniques 227
V.5.1 - Tritium 227
V.5.2 - Radionucléides de période supérieure à 5 ans 229
V.5.3 - Isotopes du plutonium 230
V.5.4 - Radioactivité des eaux de mer mondiales 231
V.6 - Flore et faune marines 232
V.6.1 - Plancton 232
V.6.1.1 - Radionucléides de période supérieure à 5 ans 233
V.6.1.2 - Isotopes du plutonium 234
03 Tab.Mat.Ge?n.19.12.06:Table Matières 12/01/07 14:08 Page 13

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 13

V.6.2 - Poissons pélagiques 235


V.6.2.1 - Radionucléides de période inférieure ou égale à l’année 235
V.6.2.2 - Radionucléides de période supérieure à 5 ans 237
V.6.2.3 - Isotopes du plutonium 239
V.7 - Conclusion 240
V.8 - Bibliographie 242

Chapitre VI
Protection des travailleurs et des populations

VI.1 - Définition des unités de doses 245


VI.2 - Réglementation relative à la radioprotection 246
VI.2.1 - Concentrations maximales admissibles 247
VI.2.2 - Cas particulier de la thyroïde 248
VI.3 - Organisation de la radioprotection 248
VI.4 - Organisation de la médecine du travail sur site 249
VI.4.1 - Personnel du CEA 249
VI.4.2 - Personnel du ministère de la Défense 250
VI.4.3 - Personnel des entreprises sous-traitantes 250
VI.4.4 - Accidents du travail 251
VI.5 - Surveillance du personnel 251
VI.5.1 - Exposition externe 251
VI.5.1.1 - Essais atmosphériques 253
VI.5.1.2 - Essais souterrains 254
VI.5.2 - Exposition interne 255
VI.5.2.1 - Examens anthropogammamétriques 255
VI.5.2.2 - Analyses radiotoxicologiques 256
VI.5.2.3 - Activités ayant entraîné des expositions internes 256
VI.6 - Radioprotection hors sites d’expérimentations 257
VI.6.1 - Prévisions météorologiques 257
VI.6.2 - Prévisions des retombées et des débits de dose 258
VI.6.3 - Définition des zones d’exclusion 259
VI.6.4 - Processus de décision de déclenchement d’un essai 260
VI.6.4.1 - Gestion d’une situation imprévue 260
VI.6.4.2 - Exemple de l’essai Centaure 261
03 Tab.Mat.Ge?n.19.12.06:Table Matières 12/01/07 14:08 Page 14

14 TABLE DES MATIÈRES

VI.6.5 - Surveillance radiologique des populations 263


VI.6.5.1 - Méthodologie des calculs de dose 263
VI.6.5.2 - Rations alimentaires 268
VI.6.6 - Évaluations radiologiques 271
VI.6.6.1 - Retombées sur l’atoll de Tureia 271
VI.6.6.2 - Retombées sur les îles Gambier 278
VI.6.6.3 - Retombées sur l’île de Tahiti 285
VI.6.6.4 - Bilan global des doses 292
VI.6.6.5 - Suivi radiologique des populations 293
VI.6.6.6 - Évaluation radiologique des essais souterrains 294
VI.7 - Conclusion 295
VI.8 - Bibliographie 296

Chapitre VII
Assainissements, surveillance actuelle
et évolution radiologique future

VII.1 - Démantèlements et assainissements 298


VII.1.1 - Assainissements en cours d'exploitation des sites 298
VII.1.1.1 - Zone PEE Empereur 298
VII.1.1.2 - Zone Faucon 299
VII.1.1.3 - Zone des expériences Arpège 299
VII.1.1.4 - Zone Colette 299
VII.1.1.5 - Installation Meknès 303
VII.1.2 - Assainissements en fin d'exploitation des sites 304
VII.2 - Gestion des déchets radioactifs 306
VII.2.1 - Origine des déchets 306
VII.2.2 - Règles de classement 306
VII.2.3 - Conditionnement 307
VII.2.4 - Contrôle de l’activité 309
VII.2.5 - Options de stockage 310
VII.2.5.1 - Immersion des déchets radioactifs 310
VII.2.5.2 - Enfouissement des déchets radioactifs 315
VII.3 - Risques associés aux essais souterrains 318
VII.3.1 - Rebouchage des puits d’essai 318
VII.3.1.1 - Puits à terre 318
VII.3.1.2 - Puits sous-marins 319
03 Tab.Mat.Ge?n.19.12.06:Table Matières 12/01/07 14:08 Page 15

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 15

VII.3.2 - Évaluation des conséquences radiologiques futures 320


VII.3.2.1 - Évaluation de l’activité résiduelle confinée dans le sous-sol 322
VII.3.2.2 - Évaluation des taux de relâchement des radionucléides 323
VII.3.2.3 - Validation du terme source 324
VII.3.2.4 - Dispersion des radionucléides dans les eaux du Pacifique Sud 326
VII.3.2.5 - Évaluation des doses 328
VII.3.2.6 - Scenarii «disruptifs» 329
VII.4 - Surveillance actuelle des atolls 334
VII.4.1 - Surveillance géomécanique de Mururoa 334
VII.4.1.1 - Objectifs de la surveillance géomécanique 336
VII.4.1.2 - Suivi continu de l’évolution de Mururoa 336
VII.4.1.3 - Suivi périodique de l’évolution géomécanique globale des atolls 338
VII.4.2 - Surveillance radiologique des atolls 338
VII.4.2.1 - Modalités de surveillance 339
VII.4.2.2 - Mesure de la radioactivité 341
VII.5 - Conclusion 342
VII.6 - Bibliographie 344

Annexe 1
Radionucléides et rayonnements

A1.1 - Notion d’atome 347


A1.2 - Rayonnements et décroissance radioactive 348
A1.2.1 - Période radioactive 348
A1.2.2 - Période biologique et période effective 348
A1.2.3 - Vallée de la stabilité 349
A1.3 - Types de rayonnements 349
A1.3.1 - Rayonnements bêta 349
A1.3.2 - Rayonnements gamma 350
A1.3.3 - Rayonnements alpha 351
A1.3.4 - Autres types de rayonnements 351
A1.4 - Rayonnements et pouvoir de pénétration 351
A1.5 - Réactions en chaîne 352
03 Tab.Mat.Ge?n.19.12.06:Table Matières 12/01/07 14:08 Page 16

16 TABLE DES MATIÈRES

Annexe 2
Liste des essais atmosphériques et souterrains
réalisés au CEP
353

Annexe 3
Essais atmosphériques
359

Annexe 4
Organisation associée à la réalisation
des essais nucléaires
451

A4.1 - Organisation du CEP 452


A4.1.1 - Groupement opérationnel des essais nucléaires 452
A4.1.2 - Commandement territorial 452
A4.1.3 - Direction des centres d’expérimentations nucléaires 454
A4.2 - Principales structures CEA 456
A4.2.1 - Direction des essais 456
A4.2.2 - Direction des applications militaires au Pacifique 457
A4.3 - Chronologie de l’organisation institutionnelle 457
A4.4 - Déroulement d’un essai 460
A4.4.1 - Période des essais atmosphériques 460
A4.4.1.1 - Évacuation temporaire des sites 460
A4.4.1.2 - Retour sur site 461
A4.4.1.3 - Suivi dosimétrique 462
A4.4.2 - Période des essais souterrains 462
A4.4.2.1 - Dispositions particulières 462
A4.4.2.2 - Prévention du risque hydraulique 463

Glossaire 465

Sigles et acronymes 471


Chap. 1VF-05.12.06:Chap. 1 12/01/07 10:51 Page 17

CHAPITRE I

Environnement des atolls de


Mururoa et Fangataufa

Les atolls inhabités de Mururoa et de Fangataufa ont été choisis pour leur isolement
géographique qui constituait un facteur favorable à la réalisation d’essais nucléaires atmosphériques
tout en permettant d’assurer au mieux la sécurité des personnes et de l’environnement. Les
milieux géologique, atmosphérique, océanique et biologique des deux atolls ont fait l’objet de
nombreuses études ; ce chapitre en rappelle les principales caractéristiques.
Initialement, les conditions météorologiques et océanographiques ont été prédominantes
dans les procédures adoptées et dans le dimensionnement des infrastructures nécessaires aux
essais atmosphériques. Par la suite, les conditions géologiques imposeront, à leur tour, les techniques
de forages et de réalisation des essais souterrains. La description de ces conditions naturelles
s’avère donc nécessaire à la compréhension des relations entre les essais nucléaires et les
mesures prises pour la protection des populations et de l'environnement.
Les informations rappelées dans ce chapitre permettront au lecteur de resituer les données
relatives à la radioactivité présentées dans les chapitres traitant du transfert des radionucléides
dans l'environnement local des atolls d'expérimentations et plus généralement de la Polynésie
française, ainsi que de l’évaluation des impacts radiologiques potentiels sur le personnel travaillant
sur les sites et sur les populations polynésiennes.

I.1 - GÉOGRAPHIE DES ATOLLS POLYNÉSIENS


Au cœur de l'océan Pacifique, la Polynésie française constitue un vaste domaine composé
de 118 îles, situées entre les latitudes 8° et 28° S, et entre les longitudes 134° et 155° W. De
dimensions comparables à celles de l'Europe (2 700 km d'est en ouest et de 2 300 km du nord
au sud), la Polynésie représente une surface maritime de près de 5,5 millions de km 2 pour une
superficie totale des terres émergées de 3 430 km 2 , soit 1/1 000 e de la surface de l'océan
Pacifique. Elle est composée de 5 grands archipels : Société (dont fait partie Tahiti) et Marquises
au nord, Tuamotu au centre, Australes au sud et Gambier au sud-est.
Les atolls de Mururoa et Fangataufa, distants d'une quarantaine de kilomètres l'un de
l'autre, se trouvent à l'extrémité sud-est de l'archipel des Tuamotu, auquel ils sont rattachés
administrativement. Ils font partie de l'alignement géologique «Pitcairn-Gambier». Situés au nord
du tropique du Capricorne, à proximité du 139 e méridien Ouest, ils sont distants de 5 000 km de
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18 ENVIRONNEMENT DES ATOLLS DE MURUROA ET FANGATAUFA

la Nouvelle-Zélande et de plus de 6 000 km


ÉTATS UNIS des côtes australiennes et américaines
(Fig. 1).
Los Angeles
CHINE
JAPON En 1960, la population polynésienne
MEXIQUE
s’élevait à environ 80 000 habitants et
PHILIPPINES
atteignait 220 000 habitants en 1996,
6 560 km
l’essentiel de la population résidant sur
INDONÉSIE l’île de Tahiti (70%). Les atolls de Mururoa
PÉROU et Fangataufa étaient inhabités lors de leur
Lima
6 600 km cession à l’État français, en 1964. Ils sont
MURUROA
situés dans une zone très faiblement peuplée
6 900 km FANGATAUFA
AUSTRALIE comptant moins de 2 500 habitants dans un
Sydney 4 750 km
6 720 km rayon de 500 km et moins de 5 000 dans
Auckland
CHILI
NOUVELLE
un rayon de 1 000 km (Fig. 2). Tureia, l'île
ZÉLANDE Santiago habitée la plus proche, se trouve à 110 km
des deux atolls d’expérimentations.

F IG . 1. - Situation de la Polynésie française dans l'océan


Pacifique.

Archipel des
TU A
MO
TU

TAHITI 1 00
0 km
50
0k
m
MURUROA

FANGATAUFA Iles DENO


Iles
25

GAMBIER (GB)
Iles
00

TUBUAI
ab PITCAIRN
h

ita
nts
50
00
h

RAPA
ab

an
it

ts

Mururoa

F IG . 2. - Situation des atolls de Mururoa et


Fangataufa en Polynésie française et
population en fonction de la distance
autour de ces sites.
Fangataufa
Chap. 1VF-05.12.06:Chap. 1 12/01/07 10:51 Page 19

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 19

Le climat polynésien est tropical et humide, sans écarts prononcés. Les températures
moyennes annuelles sont modérées, de 21 à 23°C, et les contrastes thermiques saisonniers
faibles. Les précipitations moyennes sont de 1 800 à 2 000 mm par an. L’ensoleillement est
important, 250 heures par mois à Tahiti (côte Ouest). Les eaux des lagons sont chaudes, de 23
à 26°C, toute l’année. Ces conditions favorisent un mode de vie essentiellement à l’extérieur des
habitations.
Concernant l’habitat, il faut distinguer d’une part Papeete et ses faubourgs, où se trouvent des
immeubles modernes, des maisons de béton et parpaings, mais aussi des quartiers de constructions
légères faites de bois et de tôle ondulée ; d’autre part, les zones éloignées des centres urbains
de Tahiti, les autres îles et atolls, où se trouve un habitat très léger. Notons que, dans ces zones,
les fare traditionnels faits de planchers en bois, de cloisons de lattes de bambou et de toits de
feuilles de cocotiers sont de plus en plus souvent remplacés par des maisons reposant sur une
dalle de béton, aux parois parfois soutenues par des parpaings et aux toits de tôle ondulée. Les
ouvertures vers l’extérieur restent toujours larges, favorisant une bonne ventilation.
Le régime alimentaire des populations présente les caractéristiques générales suivantes : à
Tahiti, il est varié et les productions en provenance de toute la Polynésie peuvent être trouvées en
abondance. Papeete et ses faubourgs possèdent deux marchés approvisionnant à eux seuls
environ 35 000 personnes en produits locaux (poissons, mollusques, crustacés, légumes, fruits,
viande de porc) et de nombreux magasins d’alimentation, bien achalandés en denrées locales et
importées. Les autres îles hautes disposent d’un large éventail de denrées locales, fruits,
légumes, produits de la pêche et de denrées de première nécessité comme l’huile, le riz, la farine
et le sucre arrivant par liaisons maritimes régulières. Le régime alimentaire des populations des
îles basses, ou atolls, est essentiellement constitué de produits de la pêche locale, de noix de
coco et de quelques élevages aviaires et porcins familiaux. Les denrées importées sont moins
nombreuses et arrivent plus irrégulièrement.
À Mururoa, avant la création du Centre d’expérimentation du Pacifique (CEP), une société
privée exploitait la cocoteraie et organisait des campagnes de récolte ponctuelles. Cette concession
fut reprise par le CEP après indemnisation de cette société. Quant à Fangataufa, les autorités
religieuses des îles Gambier en détenaient la concession. Aucune cocoteraie n’y était plantée.

I.2 - MORPHOLOGIE DES ATOLLS


La génèse et les structures géologiques des îles de Polynésie française et en particulier de
celles des atolls de Mururoa et de Fangataufa ont fait l’objet de nombreuses études.
Comme l‘ensemble des îles de Polynésie française, les atolls de Mururoa et Fangataufa
sont d'anciens volcans recouverts de quelques centaines de mètres de roches carbonatées. Il
s’agit d’îles basses constituées d’une couronne corallienne enserrant un lagon.
Ces îles sont toutes d'origine volcanique. Elles prennent naissance à l'aplomb de zones situées
dans le manteau de l'écorce terrestre appelées points chauds. Le magma émis par un point chaud
forme d'abord un volcan sous-marin, qui finit par émerger si l'activité volcanique produit un volu-
me de lave suffisant. La plaque océanique sur laquelle reposent les îles de Polynésie française
se déplace vers le nord-ouest à la vitesse de 11 cm par an. En revanche, les points chauds sont
des zones fixes dans le manteau. Au cours du temps, les volcans issus d'un point chaud s’éloignent
progressivement de la source magmatique qui les alimente. L'activité volcanique cesse et l'île
évolue alors sous les effets de l'érosion aérienne, de l'érosion marine, et de différents phénomènes
intéressant l'édifice volcanique, comme l'enfoncement par subsidence.
Chap. 1VF-05.12.06:Chap. 1 12/01/07 10:51 Page 20

20 ENVIRONNEMENT DES ATOLLS DE MURUROA ET FANGATAUFA

À l'inverse, des phénomènes


Volcan aérien
biologiques de construction conduisent
à l'édification de récifs coralliens sur
Océan
les bords de l'île volcanique (Fig. 3).
Plaque Croûte océanique Mouvement de la plaque
lithosphérique Manteau supérieur
Asthénosphère Point chaud

Nouveau
Ile à récif barrière volcan
Coraux Coraux
Quelques millions
d'années plus tard

Point chaud F IG. 3. - Du volcan à l’atoll : généré par le


fonctionnement d’un point chaud, le volcan,
Nouveau entraîné par le déplacement du plancher
Atoll volcan
océanique dont il est solidaire, quitte son
lieu d’origine. Il passe ensuite par plusieurs
stades ; présentant un récif-frangeant, puis
un récif-barrière, pour arriver au stade
Point chaud
d’atoll.

Le stade ultime de l'évolution des îles volcaniques est l'atoll. Seule la couronne corallienne
émerge autour d'un lagon central et 5 types de structures se succèdent alors de l'océan vers
l'intérieur de l’atoll (Fig. 4) :

• la pente externe commençant à la limite des basses mers de vives eaux pour descendre vers
les fonds océaniques, dont le niveau supérieur constitue la partie la plus vivante de l'atoll ;
• la crête algale (ou front récifal) sur laquelle se brisent les vagues et la houle du large ;
• le platier externe, en arrière de la crête algale, qui se termine par une levée détritique constituée
par une accumulation de débris coralliens déposés par les vagues ;
• le secteur intermédiaire, entre l'océan et le lagon, est constitué d'une alternance de parties
émergées (motu) et immergées (hoa et passes). Le motu est la seule partie émergée d'un
atoll sur laquelle la faune et la flore terrestres peuvent prospérer. Les hoa, dépressions de faible
profondeur (environ 1 m), proviennent de l'érosion de la couronne corallienne due aux courants
entrants des eaux océaniques dans le lagon. Ils se distinguent de la passe, pouvant atteindre
une profondeur supérieure à 10 m et une largeur supérieure au kilomètre ;
• les fonds du lagon, généralement sableux, souvent parsemés d'édifices coralliens dont certains
atteignent la surface, forment alors un pinacle. Les bords du lagon sont, le plus souvent, frangés
par un platier interne lagonaire.

En fonction de l'hydrodynamisme, le milieu marin de l'atoll se subdivise en trois zones :

• une zone océanique subissant l'influence de la houle du large, composée de : la pente externe,
la crête algale et du platier externe ;
• une zone intermédiaire constituée par les hoa et, éventuellement, une ou plusieurs passes,
par lesquels se font les échanges d'eau entre l'océan et le lagon ;
• un secteur interne, formé par le lagon proprement dit, dans lequel les courants se révèlent
généralement faibles, sauf localement, au voisinage de la passe.

Aujourd'hui, cette morphologie correspond à celle des atolls de Mururoa et de Fangataufa


où seule la couronne corallienne émerge autour d'un lagon central.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 21

PASSE
OCÉAN

Hoa LAGON

Motu

Crête algale Platier interne

Platier Terre émergée Pâtés coralliens


Pente externe externe (motu) et fonds meubles

F IG . 4. - Coupe schématique océan-lagon explicitant les structures morphologiques d’un atoll.

I.2.1 - ATOLL DE MURUROA

Avec un périmètre d’environ 65 km, la couronne récifale de Mururoa forme le plus grand
anneau corallien de la partie méridionale de l’archipel des Tuamotu. Elle émerge de trois mètres
au maximum sur une largeur variant de 400 m au nord et 1 100 m à l’extrémité Ouest de l’atoll. Elle
est constituée de matériaux biodétritiques grossiers et de sable corallien qui reposent sur une
dalle corallienne indurée. Cette couronne, relativement continue au Nord et à l’Est, est découpée
au Sud par les hoa. Les motu s’échelonnent sur environ 10 km du pourtour de l’atoll.
Le lagon de Mururoa s'étend sur 28 km de long par 10 km dans sa plus grande largeur. Sa
superficie est de 140 km 2 pour un volume d’eau d’environ 4,7 milliards de mètres cubes. Sa
profondeur moyenne est de 33,6 m. D’un point de vue morphologique, deux bassins se distinguent :
le bassin oriental où les profondeurs atteignent 50 à 55 m et le bassin occidental qui est un
appendice étroit du premier bassin où la profondeur moyenne est de 12 m (Fig. 5).
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22 ENVIRONNEMENT DES ATOLLS DE MURUROA ET FANGATAUFA

N
Les échanges d’eau
entre le lagon et l'océan s’ef-
fectuent essentiellement par
Ri
la passe et les hoa de la côte
Passe
Sud-Ouest. Située au nord-

de
50 m ouest, la passe naturelle
45 m
mesure 4,5 km de large pour
40 m 45 m une profondeur moyenne de
8 m. Les échanges d’eau s'y
30 m 30 m font principalement sous l'effet
20 m
de la marée quotidienne : le
0 5km
lagon se remplit lors du flot
et se vide lors du jusant. En
F IG . 5. - Bathymétrie simplifiée du lagon de Mururoa.
général, les vitesses de cou-
rant sont faibles, inférieures à
0,3 m.s -1 et du même ordre de grandeur que celles des courants océaniques environnants. Les
quantités d'eau transitant par la passe au rythme de la marée dépendent de son amplitude et des
conditions océano-météorologiques. En moyenne, le flot apporte quotidiennement de l'ordre de
100 millions de m 3 d'eau et, à marée descendante, environ 150 millions de m 3 sont exportés.
L'écart entre flux entrant et flux sortant provient de l’entrée d’eau océanique par les hoa de la partie
Sud et les platiers inondés de la partie Ouest. Dans les hoa, le courant entrant est discontinu et
irrégulier, modulé par la marée et les houles. Néanmoins, durant l’hiver austral, par forte houle du
sud, l'apport par les hoa devient important et continu.

I.2.2 - ATOLL DE FANGATAUFA

De forme quasi hexagonale, la couronne corallienne de Fangataufa possède une superficie


de 9 km 2 ; ses axes varient de 9,5 à 5 km. La largeur de la couronne atteint 300 m, en moyenne,
pour une altitude maximale de 3 m. À l’origine, Fangataufa
était un atoll fermé. En 1965, une passe artificielle de Passe N
100 m de largeur pour une profondeur moyenne de 8 m a
été creusée sur la côte Nord-Ouest. Les côtes Est et
Nord-Est, soumises aux vents dominants, sont continues,
rectilignes et opposent une véritable barrière à la péné-
tration des eaux océaniques. La côte Ouest présente de
nombreux hoa et des platiers submergés. La côte Sud
ne comporte que deux ou trois hoa irrigués de façon 40 m
occasionnelle. Ces discontinuités représentent un taux
30 m
d’ouverture de l’ordre de 10 %.
La superficie du lagon de Fangataufa est de 39 20 m

km 2 pour un volume d’environ 560 millions de mètres 5m


cubes. Sa profondeur moyenne est de 14 m. D’un
point de vue morphologique, le lagon se présente
comme une cuvette dont la profondeur croît régulièrement 0 1 2 km
des bords vers le centre (Fig. 6).
F IG . 6. - Bathymétrie simplifiée du lagon de
Fangataufa.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 23

Comme à Mururoa, les courants dans la passe évoluent en fonction de l'état de la marée
et le flux sortant l'emporte sur le flux entrant. En revanche, il existe un déphasage entre l'onde de
marée et l'établissement des courants dans la passe et dans le lagon. Des courants sortants
moyens, de 0,60 m.s -1 (jusqu'à 2 m.s -1 à certaines périodes), sont observés pour des courants
entrants deux fois plus faibles. L’estimation du flux sortant s’élève à 42 millions de m 3 .j -1 pour un
flux entrant d'environ 33 millions de m 3.j -1 ; l'apport d'eau moyen par les hoa étant estimé à 9 millions
de m 3 .j -1 .
Les échanges avec l'océan par les hoa contribuent, pour environ 30 %, au renouvellement de
l’eau du lagon. Ce renouvellement est plus important lors de grandes houles de secteur ouest.
Ce taux de participation des hoa au renouvellement de l’eau constitue un trait caractéristique de
ce lagon.

I.3 - MILIEU PHYSIQUE


I.3.1 - GÉOLOGIE

L'ensemble des données acquises au moyen des forages et des campagnes de géophysique
a permis de caractériser la nature et la répartition des formations géologiques (Fig. 7). En prenant
en considération l'ordre chronologique de mise en place, de la base vers le sommet, trois
ensembles sont distingués : les formations volcaniques, les formations de transition et les formations
carbonatées.
Le pendage des formations est faible sous le lagon, de 2 à 3° dans les formations de
transition et inférieur à 10° dans les formations volcaniques. En revanche, il augmente fortement
au voisinage des flancs de l'atoll où il atteint, au niveau du toit du volcanisme, une valeur comprise
entre 15 et 25°.

SW A B NE
0

200

400

600

800

1000

N Formations carbonatées : Formations volcaniques :


Profondeur (m) B
Calcaires Volcanisme aérien
Dolomies Volcanisme sub-aérien
Volcanisme sous-marin
Formation de transition
A
Echelle horizontale : 1km

F IG . 7. - Coupe géologique suivant un axe orienté sud-ouest/nord-est à travers l’atoll de Mururoa.


Chap. 1VF-05.12.06:Chap. 1 12/01/07 10:51 Page 24

24 ENVIRONNEMENT DES ATOLLS DE MURUROA ET FANGATAUFA

I.3.1.1 - FORMATIONS VOLCANIQUES

Quatre formations volcaniques ont été identifiées et décrites en détail : sous-marine,


aérienne, de transition et intrusive. La carte du toit du soubassement volcanique (Fig. 8) montre que
sa position sous la couronne corallienne de Mururoa est plus profonde au nord (entre 400 et 450 m)
qu'au sud (entre 300 et 350 m). Le sommet de l'édifice volcanique se trouve vers 170 m de pro-
fondeur, dans la partie centrale de l'atoll. II constitue une ligne de crêtes, de 4 km de long sur
1 km de large, orientée sensiblement suivant la direction de la dérive de la plaque Pacifique. Au
sud-ouest de cet axe haut, le toit du volcanisme, situé entre 250 et 275 m, présente une morpho-
logie tabulaire avec un léger pendage (< 10°) vers le sud-ouest.

Passe

0 5 km

< 200m 200 - 225m 225 - 275m 275 - 325m 325 - 375m 375 - 425m 425 - 475m > 475m

F IG . 8. - Profondeur du toit du soubassement volcanique de Mururoa.

À Mururoa, l’homogénéité isotopique indique une composition chimique constante du


manteau source, durant une période supérieure à 1,2 million d’années.

I.3.1.2 - FORMATIONS DE TRANSITION

Les reliefs volcaniques insulaires de Polynésie française induisent des précipitations


abondantes. Ils subissent ainsi, sous l'action de l'érosion, un véritable démantèlement par ravinement
dont les effets peuvent être observés à Tahiti, Maupiti ou Moorea. Facteur érosif essentiel, le
ruissellement entraîne la formation de vallées encaissées. Les produits provenant de l'érosion
sont transportés, puis s'accumulent à la périphérie ainsi que dans les principales vallées drainantes
des îles volcaniques (Fig. 9).
L'accumulation de ces différents produits d'érosion se trouve à l'origine des formations de
transition constituées d’un conglomérat comprenant des éléments volcaniques et carbonatés.
Étroitement dépendante de la morphologie et de l'état d'altération du relief volcanique, leur épaisseur
varie en fonction de sa situation sur l'édifice volcanique. Quasiment inexistantes à la verticale du
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 25

lagon de l’atoll de Mururoa, les formations de transition atteignent une épaisseur de 100 m à la
périphérie de l'atoll, à l'aplomb des anciens chenaux et vallées.

Océan Récif Plaine littorale Relief volcanique

Zone de mélange

F IG . 9. - Création d’une zone de mélange à l’origine des formations de transition.

I.3.1.3 - FORMATIONS CARBONATÉES

D’origine récifale, la couverture carbonatée s'est constituée progressivement, par construction


des divers organismes biologiques et par cimentation de leurs débris. Les organismes constructeurs
les plus robustes, algues rouges et coraux massifs, se développent au niveau des zones fortement
battues par l'océan, s'établissant principalement sur les reliefs, tandis que leurs débris se déposent à
leur périphérie. À l'inverse, les organismes les plus fragiles (coraux frêles, par exemple) et les
sédiments les plus fins, comme les sables, s'accumulent dans les zones abritées des vents
dominants et de la houle ou à une profondeur plus importante.
L'épaisseur de la couverture carbonatée varie entre 130 m, au sommet du volcan, et 450 m,
sous la couronne Nord. Les calcaires représentent la formation la plus superficielle. Ils ont une
épaisseur d'environ 140 m, tant sous le lagon que sous la couronne. Les dolomies sous-jacentes
constituent une masse de forme lenticulaire dont l'épaisseur maximale (300 m) est atteinte sous
la couronne Nord-Est. Elles sont absentes au centre du lagon, là où le toit du volcanisme se trouve
à une profondeur inférieure à 210 m.
Sous le lagon, la plus grande partie des dépôts calcaires s’avère peu consolidée, princi-
palement en raison d'une absence de cimentation plutôt que d'une dissolution des matériaux
originels. Seule la série inférieure contient des niveaux indurés (dalles) souvent karstifiés. À l'inverse,
à la périphérie de l'atoll et plus particulièrement sur les flancs, jusqu'à une profondeur de 400
à 500 m, une intense cimentation consolide la partie calcaire.

I.3.1.4 - SOLS

Les îles hautes ont un sol latéritique formé par érosion sous l'action des eaux de ruissellement
et par transformation du basalte primitif, beaucoup plus riche que les sols de la couronne récifale
d'un atoll. Ces derniers sols, bien qu'assez diversifiés, sont peu évolués, c'est-à-dire qu’ils
comptent peu d'humus et présentent de fortes carences en oligoéléments. Le substrat de base des
Chap. 1VF-05.12.06:Chap. 1 12/01/07 10:51 Page 26

26 ENVIRONNEMENT DES ATOLLS DE MURUROA ET FANGATAUFA

atolls est constitué d'une roche mère, de nature calcitique ou aragonitique, sous forme pierreuse ou
sableuse, donc particulièrement bien drainée. Cette roche provient des squelettes des animaux et
végétaux marins qui ont été rejetés par la mer puis entassés, ou du récif construit avant la dernière
régression marine (3 000 ans).
Sur ce substrat de base, les débris des végétaux terrestres constituent ensuite la partie
humifère organique qui va se décomposer pour former un sol. Cette matière organique, entre 0,1
et 2,5 % des sols, se trouve responsable, pour une bonne part, de la capacité de rétention de
l'eau, de l'abaissement des pH basiques (de 8 à 8,4 dans le calcaire) et de l'adsorption cationique
des oligoéléments. Les carences en fer et en magnésium sont à l'origine des chloroses végétales
affectant la plupart des plantes et sont responsables du caractère à la fois pauvre et sélectif de
la flore terrestre des atolls. Enfin, le sel, très présent dans ce milieu sous influence océanique,
constitue un véritable poison physiologique limitant la flore aux espèces halophiles, seules
capables de vivre sur des sols salés.

I.3.2 - CONDITIONS HYDROGÉOLOGIQUES

Le système des circulations naturelles dans le sous-sol des atolls de Mururoa et de


Fangataufa a été décrit dans de nombreuses publications scientifiques. Schématiquement, il est
induit par une «machine thermique» dont la source froide provient des eaux océaniques profondes
(< 300 - 500 m) et la source chaude du flux géothermique terrestre qui réchauffe légèrement la
roche et l'eau interstitielle à l'intérieur du massif. Cette eau, moins dense, se déplace vers le
haut pour être remplacée par de l'eau froide océanique pénétrant par les flancs de l'atoll (Fig. 10).

Forage lagon Forage couronne


0 2 000 4 000 Distance (m)
0
Lagon
Océan
Calcaire
22°

16° V max
1 cm.j-1
500 24° 10°

30° V max
1 cm.an-1

1 000 34°
(m) Volcanisme

F l u x g é o t h e r m i q u e

F IG . 10. - Schéma de principe des circulations naturelles dans l’atoll de Mururoa. Des mesures de température
(°Celsius) et de perméabilité ont été réalisées dans de nombreux forages. Les vitesses de circulation des eaux
souterraines dans le massif, déduites de ces mesures par modélisation numérique, présentent un fort contraste
entre les formations carbonatées (jaunes et beiges), perméables, et les formations volcaniques (sombres),
dont la perméabilité est faible.
Chap. 1VF-05.12.06:Chap. 1 12/01/07 10:51 Page 27

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 27

La vitesse naturelle de circulation de l'eau est directement liée à la perméabilité des formations
géologiques. Ainsi, la perméabilité relativement élevée des formations carbonatées, qui couronnent
les atolls de Mururoa et de Fangataufa, autorise une vitesse de circulation suffisante pour induire un
refroidissement significatif à la base de ces formations ; la perméabilité beaucoup plus faible
des terrains volcaniques y limite les vitesses de circulation naturelle à des valeurs beaucoup plus
faibles.
La modélisation des échanges thermiques, entre le massif et l'océan, a permis de calculer
la température et les écoulements en régime permanent, en tout point de l'atoll (Fig. 10). Les
températures calculées à l'intérieur de l'atoll sont en accord avec les températures mesurées
dans les forages.
La perméabilité des roches communément rencontrées sur la planète varie de 10 -3 m.s -1
pour un sable à 10 -13 m.s -1 pour des argiles franches. La limite entre roches perméables et
imperméables est classiquement fixée à 10 -9 m.s -1 . Les formations volcaniques de Mururoa et de
Fangataufa se situent dans la gamme des perméabilités faibles à très faibles (valeurs inférieures
à 10 -5 m.s -1 ), avec une valeur moyenne de l'ordre de 10 -7 m.s -1 à l'échelle du massif. À l'échelle
locale, les formations carbonatées présentent des perméabilités très contrastées. À l'échelle du
massif, un réseau d'horizons et de discontinuités à forte perméabilité (karsts) confère aux formations
carbonatées une perméabilité moyenne à forte (valeurs supérieures à 10 -5 m.s -1).

I.3.3 - CONDITIONS MÉTÉOROLOGIQUES


Avant la mise en activité du CEP, des missions de prospection avaient précisé les conditions
météorologiques régnant dans le Pacifique Sud, en particulier autour de Mururoa.

I.3.3.1 - CIRCULATION ATMOSPHÉRIQUE DANS LE PACIFIQUE SUD

Dans le Pacifique Sud, la circulation dans les basses couches de l'atmosphère est dominée
par la ceinture des hautes pressions tropicales australes, axée sur 30° de latitude Sud. Le climat
de la Polynésie française se trouve sous le contrôle des deux cellules de l'anticyclone permanent
de l'île de Pâques (centré en 28° S et 110° W) et de l'anticyclone mobile des îles Kermadec (30° S
et entre 150 et 180° W).
La circulation générale dans les zones à basses pressions qui règnent de part et d'autre
de cette ceinture, se distingue par :

• au nord, les alizés soufflant de l'est vers l'ouest. Des perturbations tropicales comme celles
qui prennent naissance au voisinage de la Zone de convergence intertropicale (ZCIT) peuvent
apparaître entre les alizés de l'hémisphère Nord et ceux de l'hémisphère Sud et évoluer en
cyclones tropicaux ;
• au sud, la frange septentrionale de la grande circulation planétaire polaire australe dirigée
d'ouest en est, transporte les perturbations extra-tropicales de l'hémisphère Sud. Elle peut
recevoir et transformer des perturbations tropicales qui ont pu passer entre les deux cellules
de hautes pressions.

En Polynésie française, la fréquence des alizés est supérieure à 70 %. Les vents d'ouest sont
peu fréquents, sauf dans les îles Australes, plus au sud, donc plus proches de la circulation d'ouest,
où leur fréquence atteint jusqu'à 40 % sur l’île de Rapa, située dans l'extrême sud de cet archipel.
Chap. 1VF-05.12.06:Chap. 1 12/01/07 10:51 Page 28

28 ENVIRONNEMENT DES ATOLLS DE MURUROA ET FANGATAUFA

I.3.3.2 - CONDITIONS MÉTÉOROLOGIQUES EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

La Polynésie française bénéficie dans l'ensemble d'un climat chaud et humide, de type
tropical océanique, avec pour les Tuamotu une saison des pluies, chaude, de décembre à mars,
et une saison sèche, fraîche, de juin à octobre. Les atolls de Mururoa et Fangataufa jouissent
d'un ensoleillement important de près de 2 700 heures par an. Les températures mensuelles varient
entre 22 et 27 °C. La pluviométrie s’évalue à environ 1,3 m par an et l'hygrométrie moyenne se situe
aux alentours de 80 %, ce qui est particulièrement contraignant pour les équipements de haute
technologie. Dans les couches basses de l'atmosphère, les vents d'est, ou alizés, dominent la
plupart du temps, au nord de la Polynésie ; alors qu'à la frange Sud, aux îles Australes par
exemple, ce sont plutôt les vents du sud-ouest, plus frais.

INFRASTRUCTURES MÉTÉOROLOGIQUES

Dès 1964, des moyens importants d'observation météorologique ont été mis en place
afin d'améliorer les prévisions météorologiques nécessaires à la réalisation des essais atmo-
sphériques.
À partir de 1966, à terre, les moyens de prévision météorologique s'appuyaient sur
les stations du réseau de l’aéronautique civile (Papeete à Tahiti, Atuona à Hiva Oa, Bora Bora,
Mopelia, Takaroa, Tubuai, Hereheretue), de la station automatique de Rangiroa, des stations
auxiliaires de Makatea, Taiohae à Nuku Hiva, Uturoa à Raiatea, Rurutu, Rimatara et du réseau
des stations du Centre d’expérimentation du Pacifique installées à Tureia, Hao, Rapa, îles
Gambier, Puka Puka, Reao, Hikueru, ainsi que les stations automatiques de Matureivavao et
Marutea Sud.
En mer, lors de la phase de préparation d'un essai, trois aviso-escorteurs étaient uti-
lisés comme «piquets météo», positionnés à une centaine de nautiques des sites entre les
21° et 28° de latitude Sud et entre les 130° et 155° de longitude Ouest. La mise en place
de ces bâtiments, 2 à 6 jours avant l’essai, était nécessaire pour établir des prévisions à plus
de 24 heures. Tous les moyens maritimes non spécialisés mettaient également à profit leurs mis-
sions pour fournir des données météorologiques complémentaires.
Des moyens aériens dédiés, deux avions, un C135 F et un DC6 météo doté d’un
radar doppler, participaient aux observations météorologiques. Les moyens aériens associés à
d’autres missions donnaient régulièrement des observations météorologiques au cours de
leurs déplacements (vent estimé, renseignements concernant la couverture nuageuse). Le
dispositif d'observation aérien était complété par l'exploitation des 8 à 10 images satellitaires
réceptionnées par la station météorologique de Papeete-Faaa les jours précédant la réalisation
de l’essai.
L’exploitation de l'ensemble des observations recueillies était assurée par :
• le centre d’analyse installé à bord du croiseur De Grasse ;
• le centre d’analyse du service météorologique de l’aviation civile de Faaa (prévisions
générales sur la Polynésie française et protection des lignes aériennes) ;
• le centre secondaire de Hao (protection aérienne des aéronefs au départ de Hao).

Ces données permettaient l’élaboration de cartes de prévision météorologique en


Polynésie française, notamment pour la région des essais (échelles 1/9 000 000 et
1/12 500 000) et servaient au calcul des prévisions, en date et lieu, des principales
retombées radioactives, en fonction de la puissance attendue de l'explosion de l'engin
expérimenté (cf. Chapitre VI).
Les services de la météorologie de la Direction des centres d’expérimentations
nucléaires (Dircen) en Polynésie comprenaient environ 270 personnes.
Chap. 1VF-05.12.06:Chap. 1 12/01/07 10:51 Page 29

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 29

I.3.3.3 - PERTURBATIONS ATMOSPHÉRIQUES EN POLYNÉSIE

Dans les basses couches de l'atmosphère, les invasions de masses d’air polaires, plus ou
moins affaiblies, viennent du sud-ouest. Au nord, leur limite se trouve marquée par un front, plus
ou moins actif, orienté nord-ouest/sud-est, dont la position exacte dépend de la saison. Passant
entre les deux cellules de hautes pressions de l'île de Pâques et des îles Kermadec, cette limite,
appelée Zone de convergence du Pacifique Sud (ZCPS), s’oriente approximativement suivant une
ligne Samoa-Cook-Tuamotu-Gambier pendant la saison froide (juillet-août).
À leur arrivée en Polynésie, derrière la ZCPS, les masses d'air froid se partagent en deux
branches. L'une, à l'est du méridien 140° W, converge dans la circulation d'ouest en est de l'hémi-
sphère Sud, sur la face Sud de l'anticyclone de l'île de Pâques. L'autre, à l'Ouest du méridien
140° W, tourne autour de la cellule des îles Kermadec et se dirige progressivement vers le nord-
ouest où elle converge avec l'alizé (Fig. 11a). En saison chaude, les perturbations polaires dépassent
rarement les Australes. En revanche, des perturbations tropicales venant du nord peuvent passer
entre les deux cellules de hautes pressions et affecter l’archipel des Tuamotu (Fig. 11b). Durant l’hiver
austral, la ZCPS se trouve au voisinage des atolls de Mururoa et Fangataufa, sous la forme d’un
axe perturbé de forte nébulosité. Les conditions météorologiques, température et hygrométrie
élevées, y sont plus changeantes qu'aux latitudes subéquatoriales.

Équateur Équateur
Situation en hiver Situation en été
(25 Juillet 1987) a (12 Janvier 1987) b

Iles Marquises Iles Marquises


12 (Atuona) 12 08
10°S 10°S Iles Samoa (Atuona)
Iles Samoa
(Pago-Pago) (Pago-Pago)
16 12
16 Z.C
Tahiti .P. Tahiti
S. 20
20°S 16
20°S Mururoa Mururoa
08
16 Anticyclone 20
Gambier 12 Gambier
de Pâques D Rapa
Iles Kermadec Anticyclone Iles Kermadec
Rapa 24
30°S 30°S 16
16 Anticyclone
08
12 24
20
D 20 08 Anticyclone 24
40°S D 40°S 20
20
16 04 16
12 20
12 08 04 00 00
16 12
50°S 50°S
170°W 160°W 150°W 140°W 130°W 120°W 170°W 160°W 150°W 140°W 130°W 120°W

F IG . 11. - Exemples de situations météorologiques hivernale et estivale.


a : en hiver austral (25 juillet 1987, à 14 heures ), on observe une perturbation d’origine polaire dont le front se trouve au
voisinage de Mururoa ;
b : en été austral (12 janvier 1987 à 14 heures ), on note la formation d’une dépression tropicale (D).
La pression est indiquée par les dizaines, en millibars (exemple 12 correspond à 1012 millibars).

Les atolls de Mururoa et Fangataufa ne sont pas à l'abri des cyclones et des dépressions
tropicales. Les statistiques d'observation de cyclones, sur près d'un siècle, montrent que la Polynésie
française est restée presque 50 ans sans avoir été touchée par un seul cyclone. Mais, entre 1980
et 1991, la fréquence passe à cinq cyclones sur deux ans, dont aucun n'a touché directement les
atolls d’expérimentations.
Chap. 1VF-05.12.06:Chap. 1 12/01/07 10:51 Page 30

30 ENVIRONNEMENT DES ATOLLS DE MURUROA ET FANGATAUFA

150°W 140°W 130°W


AR
L'apparition des cyclones CH
IPE
LD
découle d’un phénomène épisodique 10°S ES
MA
RQ
appelé El Niño, dû aux échanges de UIS
ES
chaleur entre les masses océaniques
AR
et l'atmosphère. Durant les années CH
IPE
LD
ES
1980, des anomalies saisonnières TU
AM
OT
de température ont été mesurées, 80 U

9
/29.10.1
en particulier au niveau du Sud-
NAN

22
Ouest Pacifique. Elles sont à l’origine OL
A O 22
/2 6 .0 1
DI .1 9 8
de perturbations dans le cycle des 3

20°S
moussons de l'Inde et de l'Asie du CY

VE
AR CL

EN
ON
Sud-Est ainsi que du passage de CH Ed

A
IP eF

R
EL

EV
6/
év
cyclones en Polynésie française DE rie

13

A
WASA 9/12.12.1991 r1

6/
S 90

.04
AU 6

14
(Fig. 12). ST

.19

.0
3.
RA

83

19
LE

83
S

F IG . 12. - Trajectoires des cyclones ayant traversé la Polynésie


française depuis 1900.

I.3.3.4 - CONDITIONS MÉTÉOROLOGIQUES À MURUROA ET FANGATAUFA

À Mururoa et Fangataufa, les alizés de secteur est prédominent au sol, en toutes saisons,
avec des vitesses dépassant rarement 40 km.h -1 (Fig.13). La rencontre des vents d'est et de sud-
ouest s'effectue dans la ZCPS. La position de cette zone de convergence évolue au gré des saisons
et, durant l'hiver austral, englobe les atolls de Mururoa et Fangataufa.
En revanche, à quelques kilomètres d'altitude, les vents sont plutôt de secteur ouest,
comme sur l'ensemble de la Polynésie, avec des vitesses pouvant atteindre 200 km.h -1 .

Les types de temps observés localement résultent naturellement de la circulation et de la


nature de masses d’air dont les caractéristiques (température, humidité) dépendent principalement de
leur origine et des échanges thermiques. Dans le cas présent, où la surface est essentiellement
océanique, les transferts de chaleur par évaporation-condensation jouent un rôle de premier plan.
Quatre régimes de temps sont distingués sur les atolls de Mururoa et Fangataufa.

Régime d’alizés

Le régime d’alizés prédomine toute l’année au nord du 20 e parallèle, et s’étend souvent,


en saison chaude, à toute la Polynésie. En raison de la faiblesse isobarique locale, l’alizé austral,
ordinairement de sud-est, y prend une composante dominante de nord-est sur la face Nord-
Ouest de l’anticyclone de Pâques. Le temps qui en résulte est chaud et ensoleillé, avec vent
modéré et possibilité d’averses le plus souvent faibles et isolées, mais quelquefois plus importantes.
Ces averses sont surveillées en même temps que l’activité locale de la ZCIT, car elles peuvent
donner exceptionnellement naissance à une perturbation tropicale pouvant évoluer en cyclone.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 31

F IG . 13. - Rose des vents de l’atoll de


360°
Mururoa à partir de mesures au sol. 340° 20°
40°
Les vents très faibles (< 1 m.s -1 ), peu fré-
320°
quents (< 5 %), ne sont pas pris en comp- 60°
te. Les directions sont graduées tous les
300°
20° et l’intervalle entre deux cercles
concentriques correspond à une fréquen- 80° ± 10°
80°
ce annuelle de 1 % (306 jours en temps 280°
cumulé). Par exemple, les vents soufflant
du secteur 80 ± 10° E ont une fréquence
de 16 %, c’est-à-dire qu’ils soufflent pen-
dant environ 58 jours par an, en heures 260°
100°
cumulées. La vitesse V des vents est telle
5%
que : V ≥ 10 m.s -1 pendant 3,5 jours par 240°
15 %
an (fréquence 1 %) ; 10 m.s-1 > V ≥ 6 m.s-1
10 %
pendant 33 jours par an (9 % du temps) ; 6 120°
220°
m.s -1 > V ≥ 1 m.s -1 pendant 22 jours par > 10 m.s-1
140° 6 m.s-1 < < 10 m.s-1
an (6% du temps) (Données Météorologie 200° 160°
180° 1 m.s-1 < < 6 m.s-1
nationale, France).

Régime dépressionnaire de nord-ouest

Le régime dépressionnaire de nord-ouest correspond à la face Nord d’une dépression


évoluant dans la ZCPS, le plus souvent en saison chaude entre 15 et 30° S. Le temps y est lourd,
chaud et très humide, avec une nébulosité souvent forte à tous niveaux : pluies, averses, grains
et rafales de vent d’ouest à nord-ouest pouvant atteindre 50 à 70 km.h -1 .

Régime dépressionnaire de sud-est

Le régime dépressionnaire de sud-est, associé et succédant au précédent, correspond à


la face Sud d’une dépression évoluant dans la ZCPS. Le temps associé est moins lourd, moins
chaud et moins humide que dans le cas précédent, surtout en hiver austral avec une nébulosité
variable due à des nuages convectifs, avec encore quelques averses et des vents assez forts
d’est à sud-est et sud.

Régime de sud-est (Maraamu)

Dénommé quelquefois à tort régime d’alizé de sud-est, le régime de sud-est, dit du


maraamu, accompagne le renforcement épisodique dans les basses couches de l’anticyclone de
Kermadec par une expulsion d’air polaire, à l’arrière et au-delà de la ZCPS décalée vers le nord.
Assez fréquent en saison fraîche au sud du 20 e parallèle, ce régime peut s’étendre vers le nord
jusqu’au 15 e parallèle. Lui correspond un temps frais et sec, avec une nébulosité plutôt faible
et des précipitations insignifiantes. Les vents de sud-est peuvent souffler pendant plusieurs
jours consécutifs à des vitesses de 40 à 50 km.h -1 .
Chap. 1VF-05.12.06:Chap. 1 12/01/07 10:51 Page 32

32 ENVIRONNEMENT DES ATOLLS DE MURUROA ET FANGATAUFA

I.3.4 - OCÉANOGRAPHIE

I.3.4.1 - COURANTOLOGIE DU PACIFIQUE SUD

Les courants marins des


180° 160° W 140° W 120° W
160° E 100° W
masses d'eaux de surface en 140° E 80° W
20° N 20° N
Polynésie française sont organisés 28° C
à peu près comme les vents des
basses couches de l’atmosphère,
principalement autour d'une cellule 0° 28° C 0°
ZEE
anticyclonique quasi-permanente
centrée sur l'île de Pâques et 20° C

tournant dans le sens inverse des


aiguilles d'une montre (Fig. 14). 20° S 20° S

40° S 40° S
F IG . 14. - Circulation simplifiée des eaux
de surface dans l'océan Pacifique Sud.
La Zone économique exclusive (ZEE) de 60° S 60° S
Polynésie française est délimitée.

La cellule de l'île de Pâques est bordée, au nord, par le Courant équatorial sud (CES), dirigé
vers l'ouest : les eaux ainsi déplacées s'accumulent dans la zone mélanésienne. Leur reflux
alimente, en partie, un courant situé au nord de l'équateur qui intéresse peu l'environnement
polynésien, et le Contre-courant équatorial sud (CCES). Au sud de la Polynésie, à la convergence
de ce CCES, du CES venant de Polynésie et du Courant tasmanien, les eaux s'organisent en un
courant chaud, dirigé vers le sud-est, qui renforce vers l'est la branche sud de la cellule anticy-
clonique. Au-delà de 35° S, au niveau de la convergence subtropicale, ce courant chaud rejoint
le grand courant froid circum-antarctique orienté vers l'est. Les eaux s'écoulent alors vers
l'Amérique du Sud, en un courant froid, où elles remontent le long des côtes en se réchauffant
progressivement.

I.3.4.2 - COURANTOLOGIE DES LAGONS

La circulation des eaux dans le lagon d'un atoll est influencée par trois principaux facteurs :
le vent, la marée et la houle.
Par le frottement qu’il exerce sur la surface de l'eau, le vent peut être considéré comme
le principal facteur responsable de la circulation des eaux superficielles du lagon. Il tend à provoquer
l’accumulation des eaux vers la côte «au vent», créant une élévation du niveau. Sur la rive opposée
dite «sous le vent», au contraire, l'eau se retire entraînant une baisse du niveau. Bien que ces
élévations soient très faibles pour des alizés moyens, de l'ordre de quelques centimètres, elles
s’avèrent suffisantes pour générer, en sub-surface, un courant de compensation, ou de retour, de
direction opposée à celle du déplacement des eaux de surface.
Chap. 1VF-05.12.06:Chap. 1 12/01/07 10:51 Page 33

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 33

D'une manière générale, les résultats des mesures de salinité, de température et de vitesse et
direction des courants des deux lagons montrent une structure verticale des eaux à plusieurs
niveaux :
NORD Vents : alizés d'est
• une couche superficielle d'épaisseur Atmosphère établis 10 m.s-1
variable (jusqu’à vingt mètres), où la OUEST EST
force d'entraînement du vent génère SUD Surface
un courant de dérive de même sens
(cette couche est dite d'Ekman) ;
• une deuxième couche de retour, où
Couche de surface Lagon
le courant est de direction opposée Les courants portent
à celle du courant de la couche vers l'ouest 10 m

superficielle ;
• éventuellement, une troisième
couche, visible le long de la côte
sous le vent, avec des eaux plon- 20 m
Couche de retour
geant, soit le long de la côte, soit le Les courants portent
vers l'est
long des isobathes (Fig. 15).

30 m

Couche de fond
Les vitesses sont inférieures
F IG . 15. - Mesures de courants du lagon induits au seuil de mesure
par des vents d’est établis, dans le lagon de l’atoll des courantomètres
40 m
de Fangataufa, mettant en évidence la stratification
Échelle des courants : 2 cm.s-1
selon la profondeur.

La force de Coriolis dévie la masse d'eau de la couche superficielle vers la gauche d'un angle
théorique de 30° à la latitude de 22° S. À Mururoa, du fait de la couronne corallienne circulaire,
les courants s'organisent en un ou plusieurs grands tourbillons, variables selon les conditions de
vent ou la phase de la marée. La vitesse du courant à la surface du lagon est de l'ordre de 2 %
de celle du vent. Pour un vent moyen de 6 m.s -1 , on observe des vitesses du courant en surfa-
ce d'environ 12 cm.s -1 . La vitesse du courant dans la partie supérieure de la deuxième couche
est du même ordre de grandeur, puis diminue notablement avec la profondeur. La vitesse de la
couche de fond est trop faible (< 2 cm.s -1) pour être mesurable par les courantomètres classiques.

La marée agit dans le lagon, principalement par les passes, grâce aux entrées et sorties
d'eau, mais y crée peu de cisaillement de courant. À marée montante, l'eau océanique pénètre à
l'intérieur du lagon, plonge et se répartit dans l'ensemble de la masse d'eau profonde, créant des
courants descendants le long de la pente de la passe (Fig. 16). À marée descendante, le courant
est sortant et intéresse l'ensemble de la couche superficielle.

La houle, s’ajoutant à l’action de la marée, agit aussi sur les débits des hoa. À marée haute,
les quantités d'eaux océaniques entrantes sont importantes et minimales à marée basse. Les
caractéristiques physiques des eaux océaniques entrantes (température et salinité), légèrement
différentes de celles des eaux du lagon, peuvent créer des courants de densité qui entraînent les
eaux vers le fond et contribuent à alimenter et à moduler le courant de retour au fond.
Chap. 1VF-05.12.06:Chap. 1 12/01/07 10:51 Page 34

34 ENVIRONNEMENT DES ATOLLS DE MURUROA ET FANGATAUFA

Les mesures directes de courant et d’hydrologie (température, salinité) ont permis de


comprendre les mécanismes généraux de la circulation des eaux dans les lagons et ont été utilisées
comme données d’entrée d’un modèle hydrodynamique qui permet une représentation dans l’espace
des champs de courant, des variations de température et de distribution des radionucléides dans les
eaux (Fig. 16).
La circulation des eaux du lagon est caractérisée par :

• le temps de résidence, soit le temps mis par un volume d’eau en un point donné du lagon
pour sortir par la passe (Fig. 17) ;
• le temps de renouvellement, soit la moyenne des temps de résidence pour l’ensemble du
lagon.

La vitesse de renouvellement de l’eau du lagon a été évaluée à l’aide de simulations. Pour


l’atoll de Mururoa, une série de simulations numériques basées sur différents paramètres (marées,
tension du vent, apports provenant des hoa) montre que le temps de renouvellement s’échelonne
de 44 jours dans les conditions estivales avec vent de sud-est de 8 m.s -1 , à 164 jours dans les
conditions hivernales avec vent d’est soufflant à 5 m.s -1. Le temps de renouvellement, en valeur
moyenne toutes saisons confondues, a été estimé à environ 100 jours. Ces résultats ne s’appliquent
pas aux périodes de «stress climatique» (dépressions tropicales, cyclones).

ÉCHELLE DES VITESSES (m.s-1) N


F IG . 16. - Vitesse moyenne horizontale
> 0,08
des courants sur la colonne d’eau pour un
0,06 à 0,08 vent d’est de 6 m.s -1 à marée montante.
(La direction des courants est donnée par
0,04 à 0,06
l’orientation des flèches, leur vitesse par
0,02 à 0,04 l’échelle des couleurs) .

< 0,02

JOURS N

> 100
80
60
40
20

F IG . 17. - Distribution du temps de 0

résidence intégré sur la colonne d’eau


et calculé par le modèle de circulation
en tenant compte de la marée et d’un
0 1 2 3 4 5
vent d’est de 8 m.s -1 . km

I.3.4.3 - COURANTOLOGIE À PROXIMITÉ DES ATOLLS

La modélisation de la circulation des masses d’eaux océaniques en bordure des atolls


était nécessaire à la précision et au suivi de la dispersion des radionucléides initialement présents
dans les eaux sortant du lagon et celles de la pente externe.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 35

Les données de température enregistrées le long des pentes externes de l’atoll de Mururoa,
jusqu'à des profondeurs de 600 m ont mis en évidence une déformation du champ thermique
vertical (ondes internes) due à deux causes : la force de Coriolis et la marée. Ces ondes piégées
le long du récif-barrière ont des amplitudes maximales pouvant atteindre 60 m de hauteur et sont
localisées au niveau de la thermocline entre 150 et 450 m de profondeur. Elles tournent dans le sens
des aiguilles d’une montre autour des atolls et génèrent des courants en profondeur parallèles à la
côte, alternativement d'est, puis d'ouest, en phase avec la marée.
Les études océanographiques ont montré l’absence de remontées d’eaux profondes le
long du tombant du récif (upwelling), en l’absence de conditions dynamiques suffisantes pour
rompre la stratification thermique permanente du Pacifique tropical Sud.

I.3.4.4 - PROPRIÉTÉS DES MASSES D’EAU OCÉANIQUES

Au niveau de la convergence subtropicale, les eaux superficielles ont des caractéristiques


très particulières. En effet, les eaux qui y pénètrent sont piégées, car la force de Coriolis génère
une composante centripète qui tend à les accumuler vers le centre de la convergence. Ces eaux
ont donc un temps de résidence important et une température élevée (22° à 29° C). Les pertes
par évaporation l'emportent alors sur les apports par précipitations, en particulier dans la zone de
hautes pressions, comme c'est le cas à Mururoa où la perte en eau atteint 800 mm par an. À l'est
de l’archipel des Tuamotu, se trouve l'eau la plus salée et donc la plus dense du Pacifique (Fig. 18).
La salinité de la couche de surface est supérieure à 36 g.kg -1. Du fait de leur forte densité, les eaux
de cette cellule tendent à plonger, empêchant toute remontée d'eaux profondes chargées en
nutriments. Dans ces eaux peu renouvelées, la production phytoplanctonique tend à réduire
encore la concentration des minéraux dissous. Au contraire, au nord du 8° S et au sud du 25° S
de latitude, la salinité devient inférieure à 35,5 g.kg -1 car, dans ces zones, les apports par pré-
cipitations l’emportent sur les pertes par évaporation.

160° E 180° 160° W 140° W

34,75
35,00
0° 35,25
35,25 35,50
35,00
35,50
34,75 35,75 Iles MARQUISES

10°S N lle 34,50


GUINÉE 36,00
VANUATU SAMOA 36,25
TAHITI
34,75 TU
AM
35,00 35,50 OT
U-
N lle GA
20°S CALÉDONIE
MURUROA M BI
35,25 ER
35,50
AUSTRALIE

F IG . 18. - Salinité moyenne, exprimée en g. kg -1 , des eaux de surface dans l’océan Pacifique Sud, entre
1956 et 1974.
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36 ENVIRONNEMENT DES ATOLLS DE MURUROA ET FANGATAUFA

Le pH de l'eau de mer reflète l'état d'équilibre du système carbonate-gaz carbonique dissout.


Il dépend de la température et de facteurs biologiques. Une eau peu productive, contenant peu
de plancton et de matière organique, sera basique, avec un pH supérieur à 8,3. Entre 140 et
150° de longitude ouest, le pH augmente de 8,20 à 8,35 depuis l'équateur jusqu'au tropique du
Capricorne.
La concentration en sels minéraux, nitrates, phosphates et silicates, constitue un excellent
indicateur de la fertilité potentielle d'une masse d'eau, car il s’agit d’éléments indispensables à
la croissance des algues et du phytoplancton. Aux mêmes longitudes, la concentration en nitrates
décroît de 4 à moins de 0,2 mmoles.m - 3 de l'équateur au tropique. Cette distribution est contrôlée
par des remontées d'eaux profondes chargées en sels minéraux dans les zones équatoriales.
La concentration d'une eau en chlorophylle fournit une bonne image de son potentiel de
productivité primaire (phytoplancton). Elle décroît de 0,2 mg.m - 3 à l'équateur à moins de 0,05
mg.m - 3 dans l’archipel des Tuamotu. Cette faible concentration en pigments chlorophylliens
explique la transparence exceptionnelle des eaux océaniques polynésiennes.

I.4 - MILIEU VIVANT


Les atolls de Mururoa et Fangataufa ont fait l'objet d'un point zéro environnemental pour
acquérir, avant tout essai nucléaire, les données de référence sur les peuplements des différents
substrats lagonaires. De multiples études sur l'environnement biologique, tant marin que terrestre,
des deux atolls ont été conduites par la suite qui ne feront ici l'objet que de brèves présentations
nécessaires à la compréhension des transferts des radionucléides dans l'environnement. Le
lecteur désirant plus de précisions sur les espèces polynésiennes et leur répartition au sein des
différents biotopes des atolls de Mururoa et Fangataufa est invité à se reporter aux différentes
publications scientifiques présentées dans la bibliographie de ce chapitre.

I.4.1 - MILIEU TERRESTRE

La colonisation d'une île nouvelle issue d’un point chaud résulte du transport par l'air
(vents et oiseaux) et par l'eau (courants marins) de pollen, de graines ou de fruits flottés, mais
aussi de petits arthropodes comme les araignées. L’isolement insulaire au sein du Pacifique
explique la pauvreté de la biodiversité du milieu terrestre des îles polynésiennes. Pour les îles
basses, le motu est la seule partie émergée sur laquelle la faune et la flore terrestres peuvent
prospérer (Fig. 19).
Comme les autres atolls des Tuamotu du Sud, Mururoa et Fangataufa présentent une flore
terrestre limitée à une centaine d'espèces, alors que le nombre d’espèces végétales présentes
en Polynésie française est estimé à environ un millier.
La faune terrestre de Polynésie n'est pas plus riche que la flore, certains groupes tels que
les reptiles et les mammifères y sont très peu représentés. Le nombre d'espèces d'oiseaux est
faible : 112 dans les îles de la Société, 25 à Rapa et 16 à Fangataufa, à comparer aux 600
espèces dénombrées en Australie.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 37

I.4.1.1 - FLORE

L'inventaire général de la végétation de Mururoa a été réalisé en 1966. La flore peu diversifiée
des atolls de Mururoa et Fangataufa est tout à fait semblable à celle rencontrée dans les atolls
voisins. Il y a une centaine d'années, les cocotiers ont été introduits sur les côtes Sud, Ouest et
Est de Mururoa, où se trouvaient les motu de plus grande surface. Sur l'atoll de Fangataufa, la
végétation est très comparable à celle de Mururoa, mais sans cocoteraie, en raison, probablement,
d'un accès difficile dû à l'absence de passe naturelle.
Les végétaux se répartissent en trois strates suivant la taille des espèces (Fig. 19) : la strate
arborescente qui dépasse une dizaine de mètres, la strate arbustive moyenne qui atteint une hauteur
comprise entre 1 et 3 m et la strate herbacée qui ne dépasse pas un mètre.

20 m
17

17

15 m

18 17

10 m
15
14
16 16 14

5m 11 13 12 Levée
12 10
9 1 océanique
Plage
10 3 5
1 2 7 5
3 4 6 7 8
Océan
Lagon

Strate Strate Strate


Herbacée Arbustive Arborescente
1 Hedyotis romanzoffiensis 6 Heliotropium anomalum 10 Scaevola sericea 14 Argusia argentea
2 Cassytha filiformis 7 Lepidium bidentatum 11 Suriana maritima 15 Pandanus tectorius
3 Lepturus repens 8 Boerhavia tetrandra 12 Pemphis acidula 16 Guettarda speciosa
4 Portulaca sp. 9 Psilotum nudum 13 Morinda citrifolia 17 Cocos nucifera
5 Triumfetta procumbens 18 Casuarina equisetifolia

F IG . 19. - Distribution de la végétation sur une coupe schématique d’un motu de l’atoll de Mururoa (dessin
inspiré de J. Florence, 1993).

Sur les atolls, les groupements floristiques se répartissent en fonction du substrat, fin ou
grossier, composé de débris coralliens, de l’exposition aux embruns et de la proximité d’une
nappe d’eau douce. Du lagon à l’océan, un groupement de Suriana-Heliotropium se distingue,
auquel succède, dans la partie abritée du motu, la cocoteraie sur sol profond et à nappe phréatique
proche de la surface. Côté océan, sur le substrat plus grossier, alternent la forêt de Guettarda-
Pandanus et le groupement bas de Scaevola-Argusia. Enfin, sur le conglomérat de la plage prend
place Pemphis acidula et à proximité de l’océan Hedyotis romanzoffiensis. Casuarina equisetifolia
(arbre de fer ou aito), introduit en 1976 pour des raisons ornementales, a proliféré sur les îlots, essen-
tiellement côté lagon.
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38 ENVIRONNEMENT DES ATOLLS DE MURUROA ET FANGATAUFA

I.4.1.2 - FAUNE

À l'image de la flore, la faune terrestre des deux atolls s’avère assez pauvre. Elle se compose
d'insectes, d'oiseaux, de quelques espèces de reptiles et de petits mammifères, rats et souris.
La faune aviaire de Mururoa était peu importante à l'origine, probablement en raison du
remplacement d'une grande partie de la flore polynésienne traditionnelle par des cocoteraies. À
l’occasion de cinq missions réalisées entre 1965 et 1969, le Museum national d'histoire naturelle
(MNHN) a dressé un inventaire permettant l’identification de 16 espèces d'oiseaux.
La richesse spécifique des peuplements d'oiseaux marins de l'atoll de Fangataufa est
comparable à celle des atolls de l'archipel des Tuamotu et s’avère similaire à celle des atolls
proches, Vairaatea et Tureia (Groupe Actéon, Tuamotu Sud). Les oiseaux terrestres se limitent à
deux espèces : la fauvette des Tuamotu et l'aigrette sacrée. La fauvette des Tuamotu n'est
connue que sur 11 îles ou atolls du sud des Tuamotu, dont Fangataufa et Mururoa.

I.4.2 - MILIEU MARIN


I.4.2.1 - ÉCOSYSTÈME PÉLAGIQUE OCÉANIQUE

Les eaux du domaine océanique polynésien sont pauvres en sels nutritifs. En effet, les eaux
de surface, chaudes et salées, ne reçoivent aucun apport d’eau froide profonde. Pauvres en
nutriments, elles ne sont donc pas propices au développement du phytoplancton, premier maillon
de la chaîne alimentaire et donc, des autres organismes des niveaux trophiques supérieurs : zoo-
plancton, céphalopodes et poissons. Ces derniers, entrant pour une part non négligeable dans la
ration alimentaire des personnes vivant en Polynésie, ont fait l’objet d’un suivi radiologique attentif,
en particulier ceux de la famille des Scombridae. Les espèces de surface côtières, sont le thazard
(Acanthocybium solandri) et le gymnosarde (Gymnosarda unicolor). Les espèces hauturières
comprennent de jeunes albacores (Thunnus albacares) et des bonites (Katsuwonus pelamis). Les
thonidés vivant à plus grandes profondeurs se composent d’albacores adultes, patudo (Thunnus
obesus) et germon (Thunnus alalunga) effectuant de grandes migrations transocéaniques (Fig. 20).

I.4.2.2 - ÉCOSYSTÈME RÉCIFAL

Dans ce «désert océanique», le milieu récifal des îles hautes et des atolls, où la productivité
biologique est élevée, apparaît comme une véritable oasis de vie. Un récif corallien se présente
comme une construction calcaire édifiée par des organismes vivants, principalement par des
coraux et des algues calcaires.
La faune marine récifale de Polynésie française n’est pas très riche, ni en espèces de
madréporaires, ni en espèces de poissons et de mollusques ; certains groupes taxonomiques
s’avèrent même totalement absents, comme la classe des comatules.
De l’océan vers le lagon, la zone externe océanique distingue classiquement trois structures,
caractérisées par des peuplements d’organismes constructeurs différents (Fig. 4) :

• la pente externe où les colonies de madréporaires des genres Pocillopora et Acropora à


branches plus développées sont dominantes en surface ;
• la crête algale dont l'essentiel de la construction est assuré par les algues calcaires
encroûtantes ;
• le platier externe où se retrouve sensiblement la même série des espèces caractéristiques de
la pente externe jusqu’à 25 m de profondeur.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 39

THUNNUS ALBACARES (Linné), albacore, thon jaune. THUNNUS ALALUNGA (Bonnaterre), germon. Habitat :
Habitat : ensemble de la Polynésie, surtout Marquises, jeunes, 35-40˚ S (convergence subtropicale), adultes
Tuamotu. Biotope : surface pour les jeunes, profondeur Polynésie, surtout Marquises et Tuamotu. Biotope :
pour les adultes. Taille maximum : 150 cm, poids max. surface pour les jeunes, profondeur pour les adultes.
100 kg. Reproduction : peu importante, Marquises. Taille maximum : 120 cm, poids max. 30 kg.
Reproduction : Tuamotu.

THUNNUS OBESUS (Lowe), patudo. Habitat : jeunes KATSUWONUS PELAMIS (Linné), bonite, listao.
Marquises, adultes ensemble de la Polynésie et surtout Habitat : ensemble de la Polynésie, surtout Marquises,
Marquises. Biotope : surface pour les jeunes, profondeur Tuamotu-Nord. Biotope : surface, pélagique côtier et
pour les adultes. Taille maximum : 180 cm, poids max. hauturier. Taille maximum : 100 cm, 20 kg.
120 kg. Reproduction : peu importante, Marquises. Reproduction : importante aux Marquises, maximum
en saison chaude.

ACANTHOCYBIUM SOLANDRI (Cuvier), thazard. GYMNOSARDA UNICOLOR (Rüppell), gymnosarde,


Habitat : ensemble de la Polynésie, surtout aux thon à dents de chien. Habitat : ensemble de la
Tuamotu-Gambier. Biotope : surface, pélagique côtier. Polynésie, surtout aux Tuamotu-Gambier. Biotope :
Taille maximum : 200 cm, 60 kg. Reproduction : surface, pélagique côtier, pénètre parfois dans les
Tuamotu-Gambier. l a g o n s . Taille maximum : 1 6 0 c m , 6 5 kg.
Reproduction : Tuamotu-Gambier.

F IG . 20. - Principales espèces de grands poissons pélagiques pêchés à la traîne et à la longue-ligne, en


Polynésie.
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40 ENVIRONNEMENT DES ATOLLS DE MURUROA ET FANGATAUFA

Cette répartition schématique varie en fonction de l'orientation du récif par rapport à la


houle dominante. La morphologie de la côte sous le vent, où l'hydrodynamisme se trouve le
plus faible, paraît quelquefois simplifiée par l'absence de véritable crête algale.
Dans les lagons, l'énergie des courants étant faible, comparée à celle du versant océanique,
la flore et la faune de ces deux milieux sont différentes avec néanmoins quelques espèces
communes. L'écosystème lagonaire comprend des espèces pélagiques (poissons et plancton) et
des espèces benthiques dépendant fortement des deux types de substrats, durs (pinacles coralliens
et platiers internes) et meubles (sédiments du fond de lagon).
Les données sur le plancton, contemporaines de l'ouverture du site de Mururoa montrent
une distribution homogène dans les eaux océaniques proches de l'atoll, la tranche d'eau de 0 à
50 m présentant les plus fortes densités avec un zooplancton très diversifié où tous les groupes
zoologiques sont représentés. La biomasse de ces eaux, nettement plus importante qu'au large
(24 mg.m - 3 ), se trouve donc inférieure à celle du lagon de Mururoa qui atteint 400 mg.m - 3 .
Les substrats durs se trouvent à la périphérie du lagon, sur les bordures internes et au
milieu du lagon, sous forme de pinacles coralliens. À Mururoa, la végétation algale comprend essen-
tiellement des cyanophycées et, localement, au bas de la pente, des populations importantes de
l'algue brune Padina. Sur la bordure interne sous le vent, au sud, les colonies de madréporaires sont
assez nombreuses et représentées par les genres Acropora et Pocillopora.

Platier interne sous le vent du


secteur Sud-Est du lagon de
Mururoa, avec de nombreuses
colonies d’acropores branchus.

Les espèces de gastéropodes, Littorina coccinea et Nerita plicata, sont les mêmes que celles
peuplant le platier externe ; s’y s'ajoutent Drupa morum et Tectarius. Les bénitiers sont assez
abondants. Le tombant de la bordure interne Nord de Mururoa offre un milieu typique pour les
balistes (Rhinecanthus sp.) auxquels s'ajoutent de nombreuses espèces de poissons sédentaires :
mérous (Epinephelus sp.), labres (Pseudojuloides sp.), poissons écureuils (Holocentridae), poissons
papillons (Chaetodon sp.), demoiselles (Pomacentrus sp.), chirurgiens (Acanthurus sp.) et perroquets
(Scarus sp.).
La faune ichtyologique de ces bordures sous le vent s’avère beaucoup plus pauvre que
dans les autres parties du lagon. Autour de quelques rochers, vivent des poissons papillons, des
blennies et des poissons chirurgiens. Dans les trous de rochers, on trouve des poissons carnivores
nocturnes : poissons écureuils, mérous, tétrodons et lutjans.
Sur les fonds de sable, la sole tropicale (Bothus mancus) très fréquente cotoie des bancs de
surmulets et de mulets. Les coraux branchus abritent des poissons demoiselles (Chromis sp.) et
bagnards (Dascyllus aruanus), ainsi que des poissons anges (Centropyge flavissimus).
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 41

Poissons bagnards (Dascyllus aruanus) et demoiselles


Banc de surmulets (Mulloïdichthys flavolineatus). (Chromis caeruleus) inféodés à une colonie d’acropores.

La faune malacologique de Mururoa est assez riche sur les pinacles de la bordure nord au
vent. Les vermets (Dendropoma maximum) et les bivalves Chama iostoma, Arca ventricosa et
Arca plicata s’y avèrent relativement nombreux, surtout en endobiontes dans les blocs coralliens
morts. Dans les deux atolls, l'holothurie noire (Holothuria atra) se trouve bien représentée à la
base des pinacles. Les poissons se rassemblent en grand nombre autour des ces derniers, au
milieu du lagon, habitat de tout un réseau trophique.

Bivalves arches (Arca). Holothuries noires (Holothuria atra).

Les anfractuosités sont successivement occupées pendant la journée par des poissons
carnivores nocturnes et la nuit par des espèces diurnes (Fig. 21). La densité des peuplements est
plus élevée en surface qu'en profondeur, la richesse spécifique étant plus importante à Mururoa
qu'à Fangataufa. En effet, les atolls fermés se caractérisent par la réduction de la diversité spécifique
des madréporaires et des mollusques, mais les espèces étant parvenues à s’adapter y sont
représentées par des populations importantes. Fangataufa, qui était un atoll fermé à l’origine,
n'échappe pas à cette règle, puisque deux espèces de coraux prédominent et trois espèces de
mollusques représentent, en termes d'abondance, environ 90 % des peuplements de mollusques
de substrats durs.
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42 ENVIRONNEMENT DES ATOLLS DE MURUROA ET FANGATAUFA

1
Carnivores 2
Planctonophages
5 14
Omnivores 6 Piscivores
Omnivores

3
4 Planctonophages
11 Carnivores
Planctonophages
16
Herbivores 17
Carnivores
9
Carnivores

8
Herbivores
10 12
Carnivores 7
Carnivores
15
Carnivores
13
Carnivores
JOUR

1 : Pseudojuloides cerasinus (labre) 10 : Epinephelus tauvina (loche mouchetée)


2 : Abudefduf sexfasciatus (poisson bagnard) 11 : Pempheris oualensis (poisson harpe)
3 : Pomacentrus pavo (demoiselle bleue) 12 : Neoniphon sammara (poisson soldat)
4 : Amphiprion chrysopterus (poisson clown) 13 : Pterois antennata (rascasse)
5 : Chaetodon auriga (poisson papillon) 14 : Carangoides ferdau (carangue tachetée)
6 : Chaetodon lunula (poisson papillon) 15 : Gymnothorax javanicus (murène javanaise)
7 : Blennidae (blennie) 16 : Scarus globiceps (perroquet masqué)
8 : Acanthurus guttatus (chirurgien) 17 : Novaculichthys taeniourus (labre)
9 : Rhinecanthus aculeatus (baliste)

11
Planctonophages 13
Carnivores
14
10 Piscivores
5 Carnivores
Omnivores
2 4
Planctonophages 12 Carnivores 3
Carnivores Planctonophages

17 15
Carnivores Carnivores
1
Carnivores 6
9 Omnivores
Carnivores 8
Herbivores
16
Herbivores

NUIT 7
Carnivores

F IG . 21. - Alternance jour-nuit de la répartition des espèces de la faune ichtyologique corallienne.


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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 43

Les sédiments du lagon sont organogènes, constitués de thanatocénoses coralliennes,


c'est-à-dire de débris d'algues calcaires, de coraux, de foraminifères, de mollusques et d'échi-
nodermes. Les sédiments meubles sont colonisés par une faune endogée (enfouie) et épigée (en
surface). Les madréporaires demeurent peu nombreux à la surface des substrats meubles,
probablement en raison d'un renouvellement insuffisant de l'eau en profondeur.
Dans le secteur Ouest du lagon de Mururoa, peu profond (< 30 m) et encombré de
pinacles, le sédiment comporte de nombreux débris coralliens tout en étant parsemé de dômes
à balanoglosses. Ces grands vers endogés rejettent du sédiment et des fèces hors de leur terrier,
construisant ainsi un dôme d'une vingtaine de centimètres de hauteur. Parmi les autres animaux
constituant l'endofaune, se trouvent des mollusques tels que Terebra maculata , Terebra subulata,
Cardium fragum et des crustacés endogés. Dans les secteurs central et Est, les plus profonds,
les substrats meubles abritent des oursins endogés (Laganum depressum) et des gastéropodes
(Cerithium clava, Conus pulicarius). Assez clairsemées, les algueraies révèlent une algue dominante,
Caulerpa urvilliana, qui atteint des couvertures de 500 g.m -2 , en poids frais.
À Fangataufa, la prolifération de Caulerpa urvilliana est due à la nature sablo-vaseuse du
milieu. Les cyanophycées s’avèrent prépondérantes sur les fonds sédimentaires, autour des pinacles.

Sédiments à la base d’un pinacle corallien.

Gastéropode de l’espèce Terebra maculata


vivant dans les sédiments
I.4.3 - RÉSEAU TROPHIQUE

Quelle que soit la biocénose considérée, cinq niveaux trophiques sont identifiés : les
producteurs (végétaux), les herbivores, les carnivores, les détritivores et les décomposeurs
(bactéries et autres micro-organismes) qui restituent au biotope les éléments résiduels après
minéralisation (composés minéraux simples aussi appelés nutriments : phosphates, nitrates, nitrites
et sels amoniacaux). À l’intérieur d’un même écosystème, les représentants de ces différents
niveaux trophiques interagissent entre eux au sein de réseaux trophiques.
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44 ENVIRONNEMENT DES ATOLLS DE MURUROA ET FANGATAUFA

Il convient de garder à l’esprit le caractère simplificateur des notions de niveau et de réseau


trophiques (Fig. 22). En effet, une même espèce peut appartenir à plusieurs niveaux trophiques
différents : c’est le cas par exemple des espèces omnivores.

B1
D

E
B2
a

B1
C1
a

C1b

B2c

c
F C1

A1a
2
C
b
B2

e
B2
d
B2

A1c
b
A1

F IG . 22. - Quelques exemples de types de consommateurs et de réseaux trophiques dans une communauté
récifale corallienne hypothétique (dessin inspiré de Glynn, 1988).
Le phytoplancton est consommé par le zooplancton (A1a) et par certains bivalves, par exemple (A1b, A1c). Le
zooplancton est la proie, à son tour, de nombreux résidents du récif, incluant les poissons planctonivores (B2a), poissons
benthiques (B2b), coraux (B2c), et animaux suspensivores présents dans les cavités du récif ou sur les surfaces exposées
(B2e, B2d : consommateurs de particules flottant dans le milieu aquatique). Beaucoup d’animaux planctonivores sont
la proie de piscivores (B1) et de corallivores (C1a-1c). Quelques autres chaînes trophiques sont indiquées : les herbivores (D),
ingérant par prédation accidentelle la petite faune associée aux algues (E) et des animaux symbiotiques libres associés
aux coraux (F).
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 45

Pour les lagons des atolls de Mururoa et de Fangataufa, les 5 grandes entités fondamentales
sont présentes, à savoir :

• le niveau trophique I, ou producteurs, constitué par les végétaux marins fixés (algues supérieures
du phytobenthos) ou libres (phytoplancton) ;
• le niveau trophique II composé par les animaux herbivores se nourrissant d’algues benthiques ou
planctoniques du niveau précédent. Il a de nombreux représentants parmi les mollusques
bivalves (bénitier, nacre perlière, chame etc.), les gastéropodes (troca, strombe etc.) et les
poissons (poissons chirurgiens et perroquets) ;
• le niveau trophique III formé par les carnivores. S’y trouvent les prédateurs de la petite faune
(coraux, poissons surmulets etc.) et les gros prédateurs (mérous, murènes, requins etc.) ;
• le niveau trophique IV constitué des détritivores (vers, crustacés, holothuries etc.) ;
• le niveau trophique V comprend des bactéries ainsi que des micro-organismes en suspension
dans l’eau ou associés aux particules sédimentaires ; celles-ci dissolvent la matière organique
tout en réalisant la minéralisation des cadavres et des déchets, permettant le recyclage des
sels minéraux.

À travers les échanges alimentaires au sein du réseau trophique, les radionucléides peuvent
être transmis entre les différentes espèces d’une même biocénose ou entre les biocénoses.

I.5 - PRESSIONS ANTHROPIQUES


Avant 1965, la présence humaine à Mururoa et Fangataufa était très limitée et sporadique.
Les modifications anthropiques ont donc été très faibles et principalement limitées au milieu
terrestre : introduction de cocotiers et de rongeurs, capture d'oiseaux. L'installation du CEP a
conduit à une augmentation de la pression anthropique, due à une forte présence humaine et à la
réalisation des essais nucléaires atmosphériques.
À la même époque, la plupart des îles polynésiennes ont eu, elles aussi, un développement
accéléré des activités humaines et industrielles. Les recherches sur le milieu corallien et sur les
conséquences écologiques de ces activités ont alors connu un essor considérable.

I.5.1 - AMÉNAGEMENTS D’INSTALLATIONS HUMAINES


Sur les sites, les activités capables de perturber l'écosystème marin ou terrestre (Fig. 23)
peuvent être classées en deux catégories principales :

• des activités à caractère physique résultant d'une action mécanique sur le biotope ou de
constructions diverses modifiant l'écosystème. Effectuées dans le milieu marin, elles induisent
une dégradation locale des substrats, une augmentation de la turbidité et des taux de
sédimentation, enfin, parfois, une modification locale de l'hydrodynamisme. Dans le milieu
terrestre, elles peuvent induire un bouleversement de la flore. Par exemple, la construction
de la piste d'aviation a conduit à la disparition locale de la flore naturelle ;
• des activités induisant des rejets d'effluents gazeux et liquides variés, plus ou moins bien
tolérés par l'écosystème. Ces activités ont entraîné une modification de la qualité des eaux
lagonaires qui, le plus souvent, limite le développement des madréporaires. Ceux-ci préfèrent
plutôt les eaux claires et oligotrophes, aux eaux trop chargées en matières en suspension et
en nutriments.
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46 ENVIRONNEMENT DES ATOLLS DE MURUROA ET FANGATAUFA

Le secteur Est de Mururoa.


Un double mur du côté océan et un mur simple de moindre hauteur du côté lagon ont été construits dans
cette partie de l’atoll pour la protéger des plus fortes vagues. Les installations techniques liées à la mise en
oeuvre des essais se situaient en bas à gauche de la photo. Les habitations, restaurants et structures de loisirs
étaient répartis dans la zone boisée, à droite de la photo.

NUISANCES ANTHROPIQUES NUISANCES ANTHROPIQUES


TERRESTRES MARINES

Directes Indirectes Indirectes Directes

Diminution du nombre
des oiseaux

Importation
de Casuarina

OCÉAN LAGON

Mur Constructions Quais et routes


Rammassage Mares et Extraction Rejets
de coquillages aires bétonnées d'agrégats de bateaux
Importation
de trocas Pétardements
Corps morts Rejets
de boues
de forage
MILIEU TERRESTRE MILIEU LAGONAIRE

F IG . 23. Impacts sur le milieu naturel des travaux dus aux aménagements associés à la présence humaine.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 47

I.5.2 - EFFETS DES ESSAIS

Les ondes de pression induites par les essais atmosphériques et souterrains dans le lagon
ont entraîné une dégradation des substrats durs. De ce point de vue, les expériences souterraines
eurent un impact plus grand du fait de leur dispersion dans le lagon et des pressions plus importantes
qu'elles généraient autour des points zéro.
Le flash thermique des essais atmosphériques mégatonniques a détruit un pourcentage
élevé des peuplements superficiels de coraux et de mollusques, en particulier ceux des platiers
externes et de la crête algale proches des points zéro de ces essais. Le blanchissement de cer-
taines des colonies coraliennes survivantes, par perte de leurs zooxanthelles, a été régulièrement
observé jusqu'à l'arrêt des essais atmosphériques et plus sporadiquement par la suite. Ce phéno-
mène traduisait un déséquilibre de l'écosystème comparable aux effets observés après le passage
d'un cyclone tropical ou une période estivale anormalement chaude.
Quinze ans après l'arrêt des essais atmosphériques, les peuplements de poissons, de
coraux des platiers externes s'étaient reconstitués, avec une diversité et un taux de recouvrement
comparables à ceux existant avant les essais. La rapidité de cette restauration s'explique proba-
blement par les faibles dégradations subies par les substrats. En 1994, les peuplements de mol-
lusques de ces secteurs se rétablissaient à des niveaux comparables à ceux de 1966.

I.6 - CONCLUSION
En conclusion, il faut retenir des conditions naturelles des sites d’expérimentations et des
atolls polynésiens que les îles de Polynésie française, de formation volcanique, sont de deux types :
• les îles hautes pouvant culminer jusqu’à plus de 2 000 m, comme celle de Tahiti, avec des
vallées étroites et encaissées ; l’habitat y est situé pour l’essentiel au niveau de la ceinture
littorale et les cultures maraîchères et fruitières de même que l’élevage y sont pratiquées ;
• les îles basses ou atolls, simples anneaux de corail, à fleur d’eau, avec essentiellement des
plantations de cocotiers.

Les conditions météorologiques d’hiver, dans l’hémisphère Sud, sont dominées par la
circulation générale des masses d’air d’ouest en est, à l’exception de la zone équatoriale où la
direction dominante est d’est en ouest. En été, elle s’oriente d’est en ouest et est plus faible en
général qu’en hiver, elle devient un peu plus rapide vers les basses latitudes jusqu’à l’équateur.
Les atolls de l’archipel des Tuamotu sont situés dans la partie centrale d’un grand tourbillon anti-
cyclonique où la subsidence de l’air entretient une évaporation prépondérante sur les précipitations.
Les conditions météorologiques, en particulier les directions et intensités des vents
étaient fournies par un important dispositif de recueil et d'exploitation de données météorologiques
qui s'appuyaient sur les experts et les réseaux de la météorologie nationale, complétés par des
moyens militaires. L’ensemble de ces données météorologiques collectées sur zone permettait
l’élaboration de cartes de prévision météorologique en Polynésie française et plus particulièrement
dans la région des essais aux échelles 1/9 000 000 et 1/12 500 000. Elles servaient également
de données de base pour réaliser les prévisions des retombées des essais atmosphériques.

Trois unités géologiques sont présentes à Mururoa et Fangataufa : les formations


superficielles carbonatées et les plus profondes d’origine volcanique sont séparées, à la périphérie de
la formation volcanique, par une zone de transition constituée d’un mélange de matériaux carbonatés
et volcaniques.
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48 ENVIRONNEMENT DES ATOLLS DE MURUROA ET FANGATAUFA

Le volcanisme initial des atolls de Mururoa et Fangataufa a conduit à une vitesse moyenne
d’empilement des laves d’environ 3 mm.an -1 . À Mururoa, l’homogénéité isotopique indique une
composition chimique constante du manteau source durant une période supérieure à 1,2 million
d’années. Le passage des basaltes aux laves évoluées s’explique par un processus de cristallisation
fractionnée en système fermé. À Fangataufa, deux types basaltiques se succèdent représentant
une évolution, au cours du temps, des taux de fusion partielle.
Les formations carbonatées sont composées essentiellement de matériaux détritiques, les
colonies coralliennes préservées sous forme de charpentes en place sont minoritaires. La rigidité
de cette partie de l’édifice est associée par la cimentation calcaire marine qui, par précipitation
intense de carbonates de calcium, conduit à la formation d’une carapace rigide qui pénètre en
indentation dans la masse de l’édifice.

Les conditions hydrogéologiques sont caractérisées par une vitesse de circulation de


l'eau dans les formations volcaniques très faible, ne dépassant pas 1 cm.an -1. Dans la couverture
carbonatée, cette vitesse atteint une valeur maximale de 1 cm.jour -1 à l'aplomb de la couronne
émergée. Globalement, la vitesse maximale en circulation de l’eau dans le massif, à l’état naturel,
est de l’ordre du mètre par an.

Les caractéristiques hydrologiques des eaux océaniques sont celles d’un système à
deux couches : une masse d’eau superficielle de mélange, chaude et salée, au-dessus d’une masse
d’eau profonde de salinité minimale. La couche de mélange est quasiment dépourvue de nutriments.
Cette forte oligotrophie de la couche euphotique se maintient à proximité immédiate des atolls.

La circulation des eaux océaniques baignant l’archipel des Tuamotu se trouve sous la
dépendance du régime bi-modal d’alizés créé par le double système de hautes pressions sub-
tropicales (îles de Pâques et Kermadec) qui entraîne, en zone tropicale, une dérive générale des
eaux vers l’ouest. Ces eaux, très pauvres en sels nutritifs, sont l'archétype d'un milieu oligotrophe,
pauvre en plancton et en poissons. Par contraste, bien que comprenant peu d’espèces, l'éco-
système récifal apparaît comme une oasis au sein de ce désert marin.

La flore et la faune terrestres de l’ensemble des atolls de Polynésie sont très pauvres
en espèces. L'écosystème récifal marin, malgré sa relative pauvreté comparée à l'exubérance de
certains récifs de l'Indo-Pacifique, crée un pôle de vie indispensable aux populations humaines
locales à travers la consommation des produits de la mer.
Aujourd'hui, la flore terrestre de Mururoa et Fangataufa, qui avait été détruite par les effets
des essais atmosphériques, diffère peu de la flore originelle, tant en diversité qu’en taille. Une
espèce introduite par l’Homme, le Casuarina equisetifolia, semble cependant aujourd’hui en pleine
expansion et colonise déjà de grandes surfaces de l’atoll de Mururoa.

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Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 53

CHAPITRE II

Essais nucléaires et environnement

Les essais nucléaires consistaient à tester des engins conçus pour contribuer au diagnostic
de bon fonctionnement des armes en cours de développement. Ils ont mis en jeu des matières
nucléaires et conduit à la libération de radionucléides dans l’environnement.
Entre 1966 et 1974, la France a procédé à 41 essais d’explosion d’engin nucléaire dans
l’atmosphère, dont 37 à Mururoa et 4 à Fangataufa (cf. Annexes 2 et 3). Ces essais peuvent être
classés suivant trois catégories, les essais sur barge, sous ballon captif et par largage à partir
d'avion. À ces essais, il convient d’ajouter 5 essais de sécurité, sans explosion nucléaire.
Par la suite, la maîtrise technique et scientifique acquise alliée au souci de réduire encore
tout risque d’impact potentiel sur les populations et sur l’environnement, hors géosphère, conduisirent
les expérimentateurs à procéder à des essais souterrains d’explosion nucléaire. De 1975 à 1996,
137 essais souterrains, également appelés «essais en puits» ont été réalisés, dont 127 à Mururoa
et 10 à Fangataufa. Dix essais de sécurité souterrains, sans explosion nucléaire, ont également
été réalisés à Mururoa.
Ce chapitre traite spécifiquement des radionucléides générés par les essais et de leurs modes
de dispersion dans l’environnement. Les informations présentées se limitent à celles permettant
de suivre la démarche des expérimentateurs dans leur recherche permanente de limitation des
conséquences des explosions aux périmètres des sites d’expérimentations. Les notions de base
sur la radioactivité et les réactions nucléaires mises en jeu lors du fonctionnement d'engins
nucléaires sont présentées brièvement dans l’annexe 1 de ce document.

II.1 - RÉACTIONS NUCLÉAIRES ET RADIONUCLÉIDES


II.1.1 - RADIONUCLÉIDES LIBÉRÉS LORS DES ESSAIS NUCLÉAIRES

Les explosions nucléaires ont libéré dans l'environnement plus de 1 000 radionucléides
différents, issus de cinq sources principales :
• les matières nucléaires non consommées ;
• les traceurs de réaction ;
• les produits des réactions de fission ;
• les produits des réactions d’activation des composants technologiques (engins, structures) ;
• les produits d’activation des composantes naturelles de l’environnement : eau, sol et air.
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54 ESSAIS NUCLÉAIRES ET ENVIRONNEMENT

II.1.1.1 - MATIÈRES NUCLÉAIRES NON CONSOMMÉES

Lors d’une explosion nucléaire, les réactions de fission consomment de l’ordre de 10 %


de la totalité de la matière fissile de l’engin testé. Aussi, les constituants nucléaires du dispositif,
isotopes du plutonium ( 239 Pu, 240 Pu, 241 Pu), américium ( 241 Am), isotopes de l'uranium ( 235 U,
238 U, 234 U) et tritium ( 3 H) sont-ils libérés dans l’environnement.

II.1.1.2 - TRACEURS DE RÉACTION

Certains éléments étaient parfois introduits dans l’engin, en très faibles quantités, comme
traceurs des réactions neutroniques. Leur contribution à l’activité totale étant négligeable, leur
transfert dans l’environnement n'est pas traité dans ce document.

II.1.1.3 - PRODUITS DE FISSION


De nombreux radionucléides sont créés lors des réactions de fission de l'uranium ou du
plutonium avec une probabilité de formation variable, fonction de leur nombre de masse (Fig. 24).

Rendement fission (%)


101 T ABLEAU 1.
Principaux produits de fission,
de période supérieure à l’heure,
mesurés après une expérimentation.
10 Rendement
Radio de fission en % Période
éléments 235U 239Pu radioactive

85Kr 1,4 0,6 10,756 ans


10-1 87Rb 2,5 1,0 4,75.1010 ans
89Sr 4,4 1,7 50,53 jours
90Sr 5,5 2,0 28,78 ans
91Y 5,7 2,5 58,51 jours
93Zr
10-2 6,3 3,8 1,53.106 ans
95Zr 6,4 4,7 64,02 jours
99Mo 5,9 6,0 65,94 heures
103Ru 3,2 6,8 39,26 jours
106Ru
10-3 0,5 4,4 373,59 jours
129mTe
0,8 1,5 33,6 jours
129I
239Pu 0,8 1,5 1,57.106 ans
131I
235U 3,2 3,9 8,02 jours
133I
6,7 7,0 20,8 heures
10-4 133Xe
6,7 7,0 5,24 jours
135Xe
6,6 7,6 9,14 heures
137Cs
6,2 6,6 30,07 ans
140Ba
6,0 5,3 12,75 jours
10-5 141Ce
5,9 5,1 32,50 jours
60 80 100 120 140 160 180 144Ce
5,3 3,7 284,89 jours
Nombre de masse 147Nd 2,1 2,0 10,98 jours
F IG. 24. - Rendement de fission (%) du 235 U et du 239Pu pour 147Sm 2,1 2,0 1,06.1011 ans
les éléments dont le nombre de masse est compris entre 70 151Sm 0,4 0,8 90 ans
et 170.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 55

Ces produits de fission sont radioactifs. Ils vont se transformer à la suite de désintégrations
radioactives en de nouveaux éléments (cf. Annexe 1). Ces désintégrations successives donnent
naissance, par filiation isobarique, à une cascade de radionucléides dont les proportions relatives
sont caractéristiques de l'essai réalisé (Tableau 1).
Ce mélange initial de produits de fission, non fractionné, est caractérisé par une activité
bêta globale estimée à 1,7.10 19 Bq.kt -1 une heure après l’explosion (H+1). Sachant que la libération
d'une énergie équivalente à l’explosion de 1 kt de TNT est réalisée par la fission complète d’environ
57g de 239 Pu, cela représente 1,4.10 23 fissions.kt -1.
Ces réactions de fission aboutissaient à la formation d’un mélange de radionucléides,
dans des proportions déterminées par le type d’essai, qui était libéré dans la biosphère lors des
explosions atmosphériques ou confiné dans la géosphère lors des essais souterrains.

II.1.1.4 - PRODUITS D’ACTIVATION

La plupart des neutrons de fission associés au rayonnement initial étaient des neutrons
rapides. Ils étaient essentiellement capturés par les noyaux des atomes de la matière nucléaire
de l’engin testé, des matériaux du dispositif nécessaire à l’essai et des composantes naturelles
de l’environnement proche. Ces réactions induisaient la formation d’un cortège caractéristique de
produits d’activation.

Activation des constituants de l’engin et des structures

Des radionucléides étaient formés par activation, d’une part, des impuretés et des traceurs
associés à la matière fissile et, d’autre part, des pièces métalliques telles que celles des gainages,
du conteneur et des installations, situées à proximité immédiate de l’engin (Tableau 2). Dans les
premiers jours suivant un essai, les produits de fission et d’activation étaient intimement mélangés,
mais la fraction relative de l’activité
due aux produits d’activation était T ABLEAU 2.
négligeable. En revanche, les pro- Principaux radionucléides de périodes radioactives supérieures à
duits d’activation induits dans les l’heure induits par activation neutronique des parties métalliques
installations et les structures proches du point zéro de l’explosion.
associées à l’essai comme les Radioéléments Période
barges, les nacelles et les câbles Mode de production
induits radioactive
dans le cas des essais atmosphé- 55Fe 56Fe (n, 2n) 54Fe (n, γ )
2,6 ans
riques, sont restés des sources 59Fe 58Fe (n, γ )
45,5 jours
d’irradiation persistantes au cours
58Ni (n, p) 58Ni (n, pn)
du temps, en fonction de leurs
57Co 270 jours ou filiation 57Ni
58Co 58
périodes radioactives respectives. 71,3 jours Ni (n, p)
60Co 60Ni (n, p) 63Cu (n, α ) 59Co (n, γ )
Ainsi, compte tenu des sections 5,26 ans
65 64Zn (n, γ )
efficaces des noyaux cibles, des Zn 245 jours
radionucléides comme le 60 Co 54Mn
290 jours 54Fe (n, p)

présentaient encore un niveau 56Mn


2,58 heures 55 Mn (n, γ )
d’activité décelable 20 ans après 57Ni
36 heures 58Ni (n, 2n)

les derniers essais atmosphériques. 63Ni


93 ans 62Ni (n, γ )

51Cr 50Cr (n, γ )


27,8 jours
108mAg 107Ag (n, γ )
127 ans
110mAg 109Ag (n, γ )
250 jours
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56 ESSAIS NUCLÉAIRES ET ENVIRONNEMENT

Activation des composantes naturelles de l’environnement

La radioactivité induite par le flux neutronique associé au rayonnement initial concernait


aussi la matière du milieu naturel proche du point d’explosion. Il s’agissait essentiellement de
celle du milieu marin et du sol de l’atoll, lors des essais atmosphériques, et du sous-sol corallien ou
basaltique, lors des essais souterrains. Les radionucléides produits et leurs niveaux induits dans
l’environnement sont caractéristiques de chaque essai, dépendant, en particulier, du mode et des
conditions de l’essai. Différentes réactions étaient observées lors d’un essai dans l’atmosphère.

• L’activité induite dans l’air par la fission est peu significative. Les réactions 16 O (n,p) 16 N avec
l’oxygène conduisent à la formation de l’isotope 16 de l’azote qui disparaît rapidement, sa
période étant de 7 secondes. En revanche, la réaction 14N (n,p) 14C avec les noyaux d’azote,
crée naturellement et en permanence dans l’atmosphère du 14 C de 5 760 ans de période. Les
essais thermonucléaires à haut flux de neutrons ont généré une production de 14 C qui s’est
intégrée au stock naturel.
• L’activation des éléments constituant l’eau de mer par des réactions (n,γ) ou (n,p) conduit à
la formation de 82 Br, 38 Cl, 35 S, 32 P et 24 Na, de périodes respectives 1,47 j, 37,24 min,
87,51 j, 24,28 j et 14,6 h.
• L’activation du sol corallien, mais aussi du béton, conduit essentiellement à la formation
immédiate de 24 Na due à leur imbibition d’eau de mer, associée à la production de 45 Ca
de 160 jours de période.

Lors des essais souterrains, les prélèvements d’échantillons dans la cavité créée par
l’explosion étaient effectués quelques jours à quelques semaines après l’essai. L’activité des
produits d’activation induits était alors négligeable, par rapport à celle des produits de fission.
Les seules traces parfois observées étaient celles des produits d’activation présents dans l’eau de
la cavité.

II.2 - TYPES D’ESSAIS ET TRANSFERTS DANS L’ENVIRONNEMENT


Les explosions nucléaires dans l'atmosphère ont libéré dans l’environnement des radio-
nucléides qui se sont dispersés dans l’ensemble des composantes environnementales des
sites. Les essais souterrains ont été conduits pour confiner la majorité des radionucléides dans
le sous-sol géologique, réduisant à une fraction infinitésimale de la quantité initiale les rejets de
radionucléides dans la biosphère, essentiellement sous forme de gaz radioactifs.

II.2.1 - ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

En 1966 et 1967, quatre essais ont été effectués sur des barges ancrées dans les lagons,
trois à Mururoa et un à Fangataufa. La barge supportant l’engin à tester était positionnée par des
fonds d’une trentaine de mètres, entre 700 à 1 700 mètres au large d’un Poste d’enregistrement
avancé (PEA). Ces essais entraînaient une forte interaction entre la boule de feu et les composantes
naturelles du lagon. Ils induisaient de nombreux produits d’activation qui, associés aux produits de
fission, étaient transférés aux eaux de mer, sédiments et coraux du site. Après un essai, il fallait
attendre environ un mois pour que la décroissance des produits radioactifs permette le retour à une
activité normale dans la zone de l’essai.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 57

De 1966 à 1974, trente et un essais sous ballon captif ont été effectués à Mururoa et trois
à Fangataufa. L’aérostat sous lequel était fixé l’engin à tester était positionné à quelques centaines
de mètres d’altitude. Ce ballon était maintenu par des câbles arrimés à trois barges ancrées face
à un PEA (Fig. 25). L’intérêt de ce mode d’essai était de réduire les conséquences radiologiques
pour l’environnement et donc pour les populations en diminuant les retombées locales et régionales
des particules les plus lourdes. En effet, en se réfléchissant sur la surface du lagon, l’onde de choc
générée par l’explosion projetait les éléments radioactifs dans la haute atmosphère, où l’activité
des masses d’air diminuait rapidement avec le temps par l’action de la décroissance radioactive
des radionucléides produits lors de l’explosion et de leur dilution lors de leur dispersion par les vents.
Le personnel pouvait donc, en général, revenir sur le site quelques heures après l’essai.

N PEA Denise

MURUROA

2 000 m

PCT
PEA Dindon

Tour
PEE Viviane
Faucon

N BPV FANGATAUFA

PEA
Frégate

1 000 m

F IG . 25. - Dispositif de mise en place et d’ancrage du ballon et emplacements des zones des essais atmo-
sphériques représentées en jaune sur les cartes de Mururoa et Fangataufa. Les postes d’enregistrement
avancés (PEA), sont également localisés sur les cartes.
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58 ESSAIS NUCLÉAIRES ET ENVIRONNEMENT

Les essais réalisés par largage à partir d'avions, en reproduisant l’utilisation des armes
nucléaires, ont permis de valider le fonctionnement de systèmes d’armes dans des conditions
opérationnelles. Trois de ces essais d’engins proches des versions militaires ont été pratiqués en
1966, 1973 et 1974, à proximité des sites d'expérimentations. L’explosion des engins a eu lieu à
des altitudes similaires à celles des essais réalisés sous ballon.

II.2.1.1 - PHÉNOMÈNES PHYSIQUES

L'objectif de ce paragraphe est de fournir les données nécessaires à la compréhension des


conséquences environnementales en champs proche et régional des essais atmosphériques
menés au CEP. La formation du nuage radioactif sera donc resituée dans la chronologie d'un essai
et son évolution au cours du temps sera présentée. En revanche, les principales conséquences
mécaniques et thermiques sur l’environnement ne seront pas abordées car elles ont été décrites
dans l’ouvrage sur les atolls de Mururoa et Fangataufa consacré aux expérimentations nucléaires.
À partir du dégagement initial d'énergie, une explosion nucléaire atmosphérique connaît
cinq phases qui correspondent à différents modes de transfert de l'énergie. Les échelles spatiales
et temporelles des phénomènes associés à ces phases varient considérablement.
L'évolution chronologique des principaux phénomènes, radiatifs, thermiques ou mécaniques,
consécutifs à une explosion nucléaire à basse altitude montre que c'est au cours des premiers
instants que les conséquences sur l'environnement du CEP étaient les plus importantes (Fig. 26).
Cette période englobe la phase de dépôt radiatif proprement dite, qui dure quelques
microsecondes au cours desquelles l'énergie émise directement par la source nucléaire interagit
avec les matériaux environnants pour donner naissance à une sphère de plasma : la boule de feu.
À cette phase initiale succède la phase A durant laquelle le principal mécanisme de transfert de
l'énergie est la diffusion thermique. La boule de feu connaît alors une expansion rapide et son rayon
atteint quelques dizaines de mètres. Cette phase dure quelques centaines de microsecondes jus-
qu'à ce qu'un autre mode de transfert d'énergie, mécanique, apparaisse et prenne de plus en
plus d'importance.
La phase B de l'explosion débute par un choc violent accompagné d’un flash lumineux qui
se détache progressivement de la boule de feu en expansion. Au bout de quelques centaines de
millisecondes, la boule de feu, dont le rayon dépasse plusieurs centaines de mètres, devient
visible. À ce stade débute la phase C qui, outre la propagation de l’onde de choc dans l'air
(connue sous le nom de souffle), se caractérise par l'émission d'un rayonnement thermique et
lumineux très important : le flash thermique. L'essentiel des dégâts observés sur la faune et la flore
terrestre ou marine dans un rayon de quelques kilomètres est provoqué pendant les quelques
secondes que dure la phase C.
Rapidement, les effets du choc ou du flash thermique sur le milieu s'atténuent. Au-delà
d'une dizaine de secondes apparaissent d'autres phénomènes, tardifs à l'échelle de l'explosion,
et de plus longue durée. Il s'agit en particulier des ondes hydrauliques induites dans le lagon et
surtout de la formation progressive du nuage radioactif qui caractérise la phase D de l'explosion.
Au cours des jours suivant l'explosion, la propagation lointaine du nuage radioactif dans
les différentes couches de l'atmosphère fait partie des phénomènes détectables à grande distance.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 59

Phase de dépot Phase A Phase B Phase C Phase D


radiatif Elévation de la Sphère
Lueurs instantanées Diffusion Radiative Phase lumineuse de la Onde de Choc de Gaz Chauds
et Halos opaques dûs propagation de l’Onde de Choc transparente Formation du
aux γ, neutrons et x durs Nuage Nucléaire
100 km
Hauteur du sommet
du nuage

Hauteur de la base
du nuage
Distance

Extension latérale
moyenne du nuage
1 km
Phase B1 Choc
Phase B2
Rayon Maximum de
la Boule de Feu
Break-Away

Boule de Feu

Séparation du choc
et de la boule de feu
10 m
Phénomène visible

Phénomène invisible

Watts
Puissance thermique rayonnée

1015
1er Maximum de lueur

2ème Maximum de lueur

1014
Miniimum de lueur

1013

1012
1 µs 1 ms 1s 60 s 1 000 s
Temps

F IG. 26. - Chronologie des principaux phénomènes radiatifs, thermiques ou mécaniques, dans le cas d’une
explosion nucléaire à basse altitude d’un engin d’une puissance d’une mégatonne. Le tracé du haut illustre
l’évolution spatio-temporelle de la boule de feu, du choc aérien et du nuage dans la première demi-heure suivant
l’essai. La figure du bas représente la puissance thermique rayonnée au cours du temps. La forme de cette
courbe, deux pics séparés par un minimum, est caractéristique des explosions nucléaires. Le deuxième maximum
correspond au flash thermique classiquement décrit.

II.2.1.2 - FORMATION DU NUAGE RADIOACTIF

Les phénomènes dits tardifs sont définis comme l'ensemble des événements qui se
développent entre le début de l'élévation de la sphère de gaz chauds dans l'air et la stabilisation du
nuage radioactif dans les hautes couches de l'atmosphère, c'est-à-dire au-delà de quelques
secondes après l'instant zéro (Fig. 27).
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 60

60 ESSAIS NUCLÉAIRES ET ENVIRONNEMENT

Pendant que l’onde de choc se propage,


1,8 s Radiation thermique et nucléaire
la sphère de gaz chauds, qui a une faible densité Boule de feu
par rapport à l'atmosphère ambiante, s'élève Onde de choc incidente

comme une montgolfière avec une vitesse


pouvant atteindre une centaine de mètres par 4,6 s
seconde au début de l'ascension. II en résulte
Onde de choc réfléchie
de violents courants d'air ascendants. Lors des
Début de la réflexion de Mach
explosions à faible altitude, la terre, l'eau et surpression de 1,12 kg.cm-2

des débris divers sont aspirés et forment une


colonne verticale entre le sol et la sphère de 11 s

gaz chauds qui prend l'aspect d'un nuage.


Les échanges thermiques entre ce
nuage encore chaud et l'air ambiant produisent Front de Mach
des mouvements tourbillonnaires de forme toroï- Vitesse du vent 80 m.s-1 surpression de 0,42 kg.cm-2

dale, les gaz s'élevant dans la partie centrale du


nuage et redescendant par l'extérieur. Ce phé- 37 s
Vitesse ascensionnelle 111 m.s-1
nomène, associé à la colonne de débris,
donne à l'ensemble sa forme caractéristique Radiation Nucléaire
Gaz chauds et résidus de l’engin
de champignon (Fig. 28). Dans certains cas,
Front de Mach
les débris aspirés dans la colonne retombent surpression de 0,07 kg.cm-2
vers le sol sous la forme d'un cône qui entoure Vitesse du vent 17 m.s-1

la partie haute de la colonne en s'évasant vers


le bas. 0 5 10 15
Distance (km)
La forme visible de ce nuage, qui ne cor-
respond pas exactement au «nuage radioactif», F IG . 27. - Evolution spatiale et interaction avec la
surface du sol ou de l’océan d’une explosion atmo-
est due à la condensation de la vapeur d'eau
sphérique de 1 Mt à 2 000 m d’altitude.
aspirée dans la partie centrale, reprise par les

Hs
mouvements tourbillonnaires toroïdaux
de la partie supérieure et entraînée par
les courants descendants extérieurs vers
Hs : hauteur du sommet
les basses couches où l'eau s'évapore.
2 Rt (35 km) du nuage La vitesse ascensionnelle du nuage
Hb : hauteur de la base varie avec l'énergie de l'explosion et les
de la tête du nuage
conditions atmosphériques. Elle ralentit
Hj : hauteur de la base
de la jupe
au fur et à mesure du refroidissement
Hb
20 km
des gaz. Pour l'explosion de 1 Mt, la
Rt : rayon de la tête
du nuage vitesse d'élévation moyenne du sommet
2 Rj (18 km)
Rj : rayon de la jupe
du nuage est de 400 km.h -1 pendant la
première minute.
Hj Rp : rayon du pied

15 km Rj = 0,5 Rt
2 Rp (7 km)
Rp = 0,2 Rt

7 km
Fig. 28 - Ordre de grandeur des dimensions
du nuage initial stabilisé pour une explosion
de 1 Mt en atmosphère tropicale.
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 61

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 61

Le nuage atteint sa hauteur maximale au bout d'une dizaine de minutes, lorsque, après avoir
traversé la tropopause, il arrive dans la stratosphère où il se stabilise.
Le nuage est considéré comme stabilisé lorsqu'il est en équilibre thermodynamique avec
l'atmosphère. Pour une énergie d'une mégatonne, le sommet du nuage stabilisé se situe vers
23 km d’altitude et sa base vers 16 km. Son diamètre moyen peut atteindre 40 km au bout de 10
minutes.

II.2.1.3 - DISTRIBUTION INITIALE DE LA RADIOACTIVITÉ AU SEIN DU NUAGE

La répartition de la radioactivité dans le nuage Z


stabilisé a fait l'objet d'études théoriques validées par Zs
des mesures réalisées sur des échantillons prélevés 1
in situ au cours de missions de pénétrations pilotées.
0,9
La radioactivité contenue dans le nuage est propor-
tionnelle à l’énergie développée par l’engin testé, de 0,8
l’ordre de 2.10 19 Bq.kt -1, une heure après l’explosion.
Les dimensions du nuage, donc son volume, croissent 0,7

en fonction de cette même énergie. Ainsi, les activités 0,6


volumiques de la radioactivité au sein du nuage
stabilisé dépendent peu de l’énergie de l'essai. 0,5

Le profil de l'activité volumique pouvait donc


0,4
être calculé suivant une loi de distribution de la radio-
activité en fonction de l’altitude réduite Z/Zs (Fig. 29). 0,3
Zs étant le sommet de la tête du nuage lorsqu’il était
0,2
stabilisé. L'activité volumique dans le nuage initial
stabilisé, était généralement comprise, selon l’altitude 0,1
Z, entre 3,7.10 6 et 3,7.10 9 Bq.m -3 , et dépassait 10 kt 100 kt 1000 kt
rarement 3,7.10 9 Bq.m -3 .
10-4 10-3 10-2 10-1
Les plus fortes activités volumiques se 37 GBq.m-3
situaient dans la partie supérieure, aux trois quarts de
l'altitude atteinte par le sommet du nuage. Dans la F IG. 29. - Profils verticaux de l’activité volumique
(37 GBq.m -3 ) 1h après l’essai en fonction de
partie inférieure, les activités volumiques étaient
l’altitude Z rapportée à celle du sommet Zs dans
nettement plus faibles et décroissaient avec la le nuage stabilisé initial, pour trois domaines
diminution de l’altitude, de 3,7.10 8 (Z/Zs) à 3,7.10 6 d’énergie libérée par des explosions nucléaires.
Bq.m -3.

II.2.1.4 - DÉCROISSANCE DE LA RADIOACTIVITÉ AU SEIN DU NUAGE

La matière nucléaire non consommée lors de l'explosion et les produits de fission présents
dans le mélange initial étaient, pour la plupart, loin de leur ligne de stabilité (cf. Annexe 1). La
désintégration radioactive de ces radionucléides, essentiellement par décroissance radioactive bêta,
est souvent accompagnée de rayonnements gamma (Tableau 3). Généralement, les radionucléides
du début de chaîne ont des périodes radioactives plus courtes que ceux situés en fin de filiation.
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 62

62 ESSAIS NUCLÉAIRES ET ENVIRONNEMENT

T ABLEAU 3.
Exemple de quelques chaînes de fission pouvant être observées après un essai.

85mKr (4,5 h)
78,6 (3 min) : période radioactive
%
85Br (3 min) 21,4 % 85Rb (stable)

85Kr (10,8 a)

86Kr + n (stable)
7%
~ 2,5
87Br (56 s) 87Kr (76 min) 87Rb (4,8 x 1010 a)
~ 97,43 %

88Br (16 s) 88Kr (2,8 h) 88Rb (18 min) 88Sr (stable)


%
~ 13
89Br (4,4 s) 89Kr (3,2 min) 89Rb (15 min) 89Sr (50,5 j) 89Y (stable)
~ 87 %
90Kr (32 s) 90Rb (2,6 min) 90Sr (28,78 a) 90Y (64 h) 90Zr (stable)

99mTc (6 h)
82 %
99Zr (2,1 s) 99mNb (2,6 min) 99Mo (66 h) 99Ru (stable)
18 %
99Tc (2,1 x 105 a)

103Ru (39 j) 103mRh (56 min) 103Rh (stable)

106Ru (1 a) 106Rh (30 s) 106Pd (stable)

125mSn (9,5 min) % 125mTe (57,4 j)


13,6
125Sb (2,8 a)
86,4
%
125Sn (9,6 j) 125Te (stable)

36 %
129Sb (4,4 h) 129mTe (34 j) 129I (1,6 x 107 a) 129Xe (stable)

64 %
129Te (70 min)
131mTe (30 h) 77,8 131mXe (12 j)
% %
1,4 % 0,5
131Sn (56 s) 131Sb (23 min) 22,2 % 131I (8 j) 99,5
98,6
% %
131Te (25 min) 131Xe (stable)
133mTe (55 min)
72 %
133Sb (2,5 min) 17,5 % 133mXe (2,2 j)
28 % %
2,9
133Te (12 min) 133I (21 h)
97,1
%
136Cs (13 j) 136Ba (stable) 133Xe (5,24 j) 133Cs (stable)

136I (83 s) 136Xe (stable)


137mBa (2,6 min)
~ 7% %
94,4
137I (24,5 s) 137Xe (3,8 min) 137Cs (30 a)
5,6
~ 93 % %
137Ba (stable)
144Ce (285 j) 144Pr (17 min) 144Nd (stable)

147Nd (10,98 j) 147Pm (2,6 a) 147Sm (1,06 x 1011 a)

151Nd (24 min) 151Pm (28,4 h) 151Sm (90 a) 151Eu (stable)

155Sm (22,3 min) 155Eu (4,76 a) 155Gd (stable)


Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 63

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 63

10
Activité β (unité relative) L'évolution en fonction du temps de l'indice bêta
global du mélange (Fig. 30) décroît sensiblement selon
t-1,2
1 une loi empirique en t -1,2 jusqu'à 180 jours après l’essai ;
1 jour au-delà, la décroissance s'accélère et la loi s’exprime
10-1 en t -2,35 , soit l’équation suivante:
1 semaine
10-2 A β = A 1 .t -x
1 mois

10-3 (x = 1,2 pour 1 h ≤ t ≤ 180 jours


6 mois et x = 2,35 pour 180 jours ≤ t)
1 année
10-4 avec :
• A β , l'activité bêta globale à l'instant t en heures
10-5
5 années
après l’explosion,
• A 1 l'activité bêta globale à l’instant t+1 en heures ;
10-6 • t, le temps exprimés en heure à partir de l’instant
25 années zéro de l’explosion.
10-7 1 siècle

10-8
t-2,35
10-1 1 10 102 103 104 105 106 F IG . 30. - Décroissance au cours du temps de l’indice bêta
Temps (h)
global d’un mélange non fractionné de produits de fission.

Les produits de fission initiaux et leurs descendants évoluent dans le temps en fonction de
leurs périodes radioactives respectives. L'évolution de la contribution relative de chaque radio-
nucléide émetteur bêta à l’activité bêta globale du mélange théorique non fractionné de produits de
fission peut être calculée en fonction du temps après l’instant zéro de l’explosion (Fig. 31). Les
radionucléides de période égale ou supérieure à un an comme 95 Zr, 106 Rh, 144Ce, 125Sb, 90Sr,
137 Cs jouent un rôle prépondérant dans l'activité globale du nuage radioactif.

Indice bêta global en %


100

60
40
137 Cs
95Nb(2) 137Ba(1)
m
133Te(1) 4 Ce et 1 44 147 P
20 14 Pr 90 Sr et 90 Y
132Te et 132I 140La 95
134Te 99Te(1) Zr
10
3
10 o Ru
97 99 M e
138Cs 139 92Y Nb(2) 1C 91 Y(2)
Ba 10 14
6 5 m
92 Sr 93 Y Rh 89 Sr 151 S
10

(2
2)

129
1 Tc

)
(

Te(2)
Rh

4
6
10

149 Pm b
5S
et

12
88 R

Ru
12

87 Kr 85
6
7

2 12
10

Kr(2
b

Sb

88Kr 10 7
r 9 Te )
91 S Pd 134Cs
(2 (2)
)
1
1 2 4 6 10 20 1 2 4 6 10 20 40 60 100 200 1 2 4 6 10 20 40 60 100
Heures Jours Années

F IG . 31. - Évolution au cours du temps de la contribution relative (%) à l’indice bêta global associé aux radio-
nucléides émetteurs bêta-gamma présents dans le mélange initial non fractionné de produits de fission générés
lors d'un essai thermonucléaire.
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 64

64 ESSAIS NUCLÉAIRES ET ENVIRONNEMENT

L’évolution théorique de l'indice bêta global du mélange suit la baisse des activités volu-
miques des différents radionucléides présents en fonction de leur période radioactive respective. Le
calcul, en fonction du temps, de la contribution relative des radionucléides émetteurs bêta au
débit de dose global du mélange non fractionné de produits de fission générés par la fission de
235 U ou de 239 Pu lors d'un essai montre que deux semaines après l'explosion, la quasi-totalité
du débit de dose résulte d'une dizaine de radionucléides (Fig. 32).

Débit de dose en %
100
134Te 97Nb(1) s
97Nb(2) 140La 7C
60 95Nb(2) 106Rh(2) 13
133Te(1) a-
129Sb 105Ru 137 B
40 138Cs 132I
128Sb 95
Zr
5I
13
20 13
4I 143Pr 135Xe(2)

10
91Y(1) b
125 S

3
Ru
131Te(1)
10 142La
3I 131I
14

13
3C

6 88 Kr 14
e

14
132Te Ba

4 Pr
4 r
92S
127Sb 141Ce
91 Sr

6P
r
2 14
92 Y

99 Te

99 M

144 Ce
88 R

o
(1)
b

1
1 2 4 6 10 20 1 2 4 6 10 20 40 60 100 200 1 2 4 6 10 20 40 60 100
Heures Jours Années
Temps après fission

F IG. 32. - Évolution au cours du temps de la contribution relative (%) au débit de dose global des radionu-
cléides présents dans le mélange non fractionné de produits de fission générés lors d'un essai thermonucléaire.

II.2.1.5 - FRACTIONNEMENT DES RADIONUCLÉIDES AU SEIN DU NUAGE

Différents facteurs sont susceptibles de modifier la répartition et l’évolution relative de la


radioactivité du mélange théorique. Ainsi, le fractionnement des radionucléides en fonction des tailles
de particules associées au nuage est un facteur prépondérant. En effet, les explosions nucléaires
produisaient un large spectre de tailles de particules, généralement compris entre 10 -4 et 1 000 µm,
dont la forme de la courbe de distribution était fonction des conditions de l'essai. Le fractionnement
des radionucléides associés à ces particules commençait dès la phase de refroidissement et de
condensation au sein du nuage, immédiatement après l'explosion.
Lors des explosions sur barge au niveau de la mer, la distribution des tailles des aérosols
créés était dissymétrique, avec une majorité de particules de taille comprise entre 25 à 1 000 µm.
La distribution associée aux essais sous ballon s'étendait de 0,05 à 100 µm, par réduction du
nombre des particules ayant les tailles les plus importantes, tels les cristaux de sels générés par
l’évaporation de l'eau de mer sous l’effet de la boule de feu.
Lors des explosions en altitude, la majorité des aérosols produits avaient un diamètre très
inférieur à 50 µm. Ils pouvaient alors rester plusieurs années en suspension dans la troposphère ou
dans la stratosphère. Une fraction de ces particules s’agrégeait avec des aérosols naturels pour
former des particules de plus grande taille qui sédimentaient progressivement dans les couches
basses de l’atmosphère, avant de se déposer à la surface du sol et des océans (Fig. 33).
Aujourd'hui, la concentration des particules générées lors des essais est devenue négligeable,
par dilution dans le réservoir atmosphérique à l’échelle de la planète, et leur activité massique a
très fortement diminué car la grande majorité des radionucléides associés a complètement
disparu par décroissance radioactive.
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 65

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 65

Conversion des gaz


Vapeur en vapeur peu volatile

Condensation Vapeur peu volatile

Particules primaires Nucléation


homogène
Poussières
Grossissement
+
Coagulation Émissions
par condensation
+
Mers
+
Agrégats Volcans
Gouttelettes
+
Pollens
Coagulation
Coagulation

Coagulation
Lavage
par les pluies Sédimentation

0,001 0,01 0,1 1 10 100


Diamètre des particules (micromètre)

F IG . 33. - Distribution granulométrique des aérosols atmosphériques. Modes de formation et d’élimination.

La fraction des aérosols de diamètre supérieur


Temps de chute (h)
à 50 µm se déposait rapidement, en fonction des 104
conditions météorologiques. C'est pourquoi, dans un 2 µm
délai assez court, les essais ont été menés en altitude,
au-dessus de l'eau, afin d'améliorer la sécurité en 103
diminuant le nombre des particules de taille supérieure à 5 µm DIFFUSION

50 µm, limitant ainsi les retombées les plus proches TURBULENTE


10 µm
(Fig. 34). DOMINANTE
102
La prévision de la dispersion des radionucléides
20 µm
contenus dans le nuage stabilisé est possible à partir
30 µm
de la connaissance ou de l'évaluation de paramètres
10
comme l'énergie de l'essai, la géométrie du nuage
stabilisé, la répartition des concentrations et de la taille 100 µm
des aérosols, les vitesses de chute et de dépôt des
1
particules, les coefficients de diffusion des particules et 400 µm
600 µm
des gaz. La connaissance de certaines données météo- 800 µm
1 mm
rologiques, telles que la pression atmosphérique, la
température, la vitesse et la direction du vent, est 10-1

également nécessaire pour prédire la dispersion des


radionucléides dans l’atmosphère.
10-2

F IG . 34. - Temps de chute (h) jusqu’au sol des aérosols, 10-3


0 1 10 100
en fonction de leur rayon (µm) et de l’altitude (km). Altitude initiale (km)
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66 ESSAIS NUCLÉAIRES ET ENVIRONNEMENT

II.2.1.6 - ÉVOLUTION DES PRODUITS D’ACTIVATION

Les produits d’activation, faiblement représentés dans le nuage radioactif, ne suivaient


pas une loi de décroissance en t -1,2, identique à celle des produits de fission. Leur évolution relative,
dans les différentes composantes de l’environnement, était calculée en fonction des produits
d’activation du mélange initial et de la matrice considérée : eau de mer, sédiments, etc. (Tableau 4).

T ABLEAU 4.
Évolution de la contribution relative (%) des différents produits d'activation à l'activité bêta globale induite
dans les eaux du lagon de Mururoa, mesurée lors des deux expérimentations atmosphériques
sous ballon Altaïr et Bételgeuse (ND : non détecté) .

Radioéléments
38Cl 24Na 35S 32P 82Br 80mBr

Période 37,24 mn 14,6 h 87,51 j 14,28 j 1,47 j 4,42 h


Temps
Essai Altaïr
H+3 14,1 83,5 1,1 ND 0,2 1,1
H+6 0,08 96,4 1,5 ND 0,3 0,9
H + 10 ND 97,3 1,8 ND 0,3 0,6
J+1 ND 95,5 3,5 0,24 0,5 0,14
J+2 ND 88,7 9,7 0,75 0,85 ND
J+4 ND 47,5 47,5 3,5 1,5 ND
J+6 ND 9,2 84,0 5,7 1,0 ND

Essai
Bételgeuse
H+3 24,0 74 0,32 ND 0,2 ND
H+6 1,5 98 0,25 ND 0,25 ND
J+1 ND 99 0,6 ND 0,4 ND
J+2 ND 97 1,8 0,2 1,0 ND
J+4 ND 82 1,5 1,3 2,8 ND
J+6 ND 34 56 4,6 4,2 ND

II.2.2 - ESSAIS SOUTERRAINS

En 1972, il a été décidé de réaliser les essais au fond de puits souterrains. En 1974,
après une phase exploratoire, il s'est avéré que la structure géologique des atolls de Mururoa et
Fangataufa, en particulier les formations basaltiques, permettait de réaliser ce type d'essais, dans
des conditions de sécurité optimales, tout en assurant le confinement dans le futur des produits radio-
actifs créés lors de l’explosion.
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 67

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 67

De 1975 à 1986, les essais ont été réalisés dans des puits verticaux forés depuis la
partie émergée de la couronne des atolls, pénétrant profondément dans le socle basaltique. À
partir de 1981, certains ont également été effectués dans des puits forés sous le lagon, en
recourant à des moyens de forage off shore. À partir de 1987, tous les essais ont été menés dans
des puits sous les lagons, à l’exception d’un essai de sécurité pratiqué en 1989.
Lors des essais souterrains, l’engin était placé dans un conteneur, qui était ensuite descendu
entre 400 et 1 200 mètres de profondeur, dans des puits creusés jusqu’au sein des formations
basaltiques. Ce conteneur comprenait l’ensemble de l’instrumentation permettant de mesurer les
rayonnements émis. Avant la réalisation de l’essai, le puits était comblé, en partie basse, avec du
sable de basalte favorisant la vitrification des produits radioactifs issus de l’essai et, en partie
haute, par un bouchon de ciment assurant le confinement des éléments radioactifs.

N
Zone 6 12 km2 Zone 1 6 km2
19 essais 28 essais
(81/86 : 8) (87/91 : 9) (76/80 : 22) (81/86 : 6)
(95 : 2)

Zone 7 9 km2 Zone 5 30 km2


14 essais 21 essais
(81/86 : 5) (87/91 : 8) (81/86 : 7) (87/91 : 13)
(95 : 1) (95 : 1)

Zone 3 3 km2 Zone 2 7 km2


Zone 4 8 km2
21 essais 7 essais 27 essais
0 5km (76/80 : 13) (81/86 : 14)
(76/80 : 9) (81/86 : 12) (76/80 : 3) (81/86 : 4)

Zone 2
8 essais
(88/96 : 8)

Zone 1
2 essais
(88/96 : 2)

F IG. 35. - Descente d’un conteneur dans un puits foré à terre et emplacement des zones d’essais souterrains,
sous la couronne et le lagon, à Mururoa et Fangataufa.
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 68

68 ESSAIS NUCLÉAIRES ET ENVIRONNEMENT

II.2.2.1 - PHÉNOMÈNES PHYSIQUES

Les événements se succédant à proximité du point zéro souterrain, à partir de la mise à


feu de l'engin nucléaire, suivent plusieurs phases, différentiables par le mode de transfert de l'énergie
et la réponse du milieu géologique (Fig. 36). Quatre phases sont classiquement distinguées :

La phase nucléaire correspond à l'expansion du plasma à haute température résultant


de la réaction nucléaire au sein de la chambre d'explosion. Elle ne diffère pas de celle qui accom-
pagne une explosion atmosphérique
tant qu'il ne se produit pas d'interaction
significative avec le milieu extérieur à l'en- Paroi de
Gaz de roche Gaz à haute la cavité en
veloppe de l'engin, c'est-à-dire jusqu'à
vaporisée température expansion
quelques dizaines de nanosecondes.
Passé cet instant, les matériaux du
conteneur et le basalte environnant
absorbent les rayonnements et, de
façon analogue à ce qui se passe dans
l'air au cours des essais atmosphé-
riques, une boule de feu est créée, d'où
se détache l'onde de choc. Onde de choc Roche
Zone vaporisée fondue
La phase hydrodynamique par l'onde de choc
débute à l'instant où les transferts
deviennent essentiellement mécaniques.
FIG. 36a. - Après quelques FIG. 36b. - Après quelques
Elle concerne une zone limitée à dizaines de microsecondes. centaines de microsecondes.
quelques dizaines de mètres autour de Les réactions nucléaires sont L’onde de choc transforme la
l'explosion, où la roche encaissante est achevées. L’énergie des rayonne- roche environnante, la chaleur
vaporisée, fondue et fracturée. Alors que ments vaporise la roche en engen- générée vaporise et fait fondre
drant des pressions élevées et une de nouveaux matériaux.
l’onde de choc se propage, les gaz de la
onde de choc intense.
roche, à hautes pression et température,
repoussent les terrains environnants,
provoquant la formation d'une cavité dont Lave tapissant
Gaz à haute les parois de
l'expansion est contrariée par la résistance température la cavité
du milieu et les contraintes préexistantes
dans le massif géologique. Cheminée
(éboulis) Cavité
La phase élasto-plastique initiale
constitue la transition vers le régime de
propagation sismique. C'est au cours de
cette phase que se développe un
réseau de fractures de moins en moins
dense avec l’éloignement du point d'ex- Lave
plosion et dont l'extension est limitée par Front de
la résistance du milieu et les contraintes l'onde de choc Roche Roche fondue
fracturée resolidifiée
dues à la gravité.
La phase finale regroupe les FIG. 36c. - Après quelques FIG. 36d. - Plusieurs minutes à
événements se produisant à des temps dizaines de millisecondes. plusieurs heures après l’essai.
La cavité se stabilise et la lave La roche fondue commence à
plus ou moins longs, après le passage se solidifier et le toit de la cavité
fondue s’accumule au fond en
de l'onde de choc. La cavité, qui atteint piégeant la majeure partie des s’effondre, créant une cavité-
son rayon maximal lorsque la poussée radionucléides réfractaires. cheminée.
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 69

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 69

des gaz n'est plus suffisante pour compacter les terrains, commence à se refroidir. La majeure partie
des matériaux fondus ou vaporisés se condense au fond de la cavité en formant un ménisque de
lave. Le refroidissement se poursuivant, la pression baisse dans les terrains encaissants et dans la
cavité, dont la voûte s'effondre. Cet effondrement forme une cheminée. Il ne s'achève parfois
qu'après plusieurs heures, voire plusieurs jours, provoquant la formation d'un cône d'éboulis, dont la
hauteur est rapidement limitée par un processus de stabilisation naturel.

II.2.2.2 - ÉVOLUTION HYDROGÉOLOGIQUE

À la périphérie de cet ensemble cavité-cheminée, l'eau initialement présente dans les


couches géologiques saturées du massif a été repoussée avec les terrains. Le refroidissement
progressif des matériaux et la condensation d'une partie des gaz met l'ensemble cavité-cheminée
en dépression, par rapport aux terrains environnants qui se décompriment. Ce déséquilibre favorise le
drainage de l'eau présente, depuis ces terrains vers la cavité. Ce drainage centripète peut se
poursuivre pendant des semaines, voire des mois, en fonction de l’énergie de l’explosion, de la
perméabilité et de la teneur en eau des formations environnantes, dont il modifie le système
hydrogéologique (Fig. 37).
Dans un deuxième temps, après la remise en eau de l’ensemble cavité-cheminée, cette
eau va se réchauffer au contact des matériaux ayant stocké le dépôt thermique de l’explosion.
L’eau plus chaude, donc plus légère, présente dans la cavité va tendre à migrer vers le haut, à
travers les terrains volcaniques de la couverture surmontant la cheminée, avec une vitesse dépendant
de la perméabilité et de l’épaisseur de cette couverture. Cette eau est remplacée par une eau plus
froide provenant des terrains environnants, contribuant au refroidissement de l’eau de la cheminée
qui, simultanément, se refroidit aussi, par conduction au niveau de la paroi. Ce réchauffement
induit une perturbation locale du système hydrogéologique naturel au sein du volcanisme, per-
turbation qui disparaîtra avec la dissipation progressive de ce dépôt thermique.
Dans la zone située à la périphérie de la cavité,
les circulations naturelles des eaux interstitielles
sont modifiées pendant quelques dizaines à Eaux du lagon
quelques centaines d'années, sous l'effet de l'énergie
Carbonates
déposée dans la cavité, sous forme calorifique.
Les études de confinement à long terme des
produits radioactifs résultant d’un essai souterrain
ont pris en compte l'ensemble de ces processus
ainsi que ceux décrits brièvement dans les para- Basalte Couverture
graphes suivants. En effet, il s’agissait d’évaluer les
risques d’exposition des populations vivant dans le
Pacifique Sud à partir d’éventuels relâchements de
radionucléides depuis les cavités-cheminées et de
leur diffusion à travers les formations géologiques
jusqu’aux eaux océaniques (cf. Chapitre VII). Cheminée T° C
Réalimentation
par les terrains
environnants
100 m

F IG. 37. - Circulation des eaux au sein d’une cavité-cheminée


et dans les terrains encaissants. 100 m Cavité
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 70

70 ESSAIS NUCLÉAIRES ET ENVIRONNEMENT

II.2.2.3 - MISE EN PRESSION DES GAZ DE LA CAVITÉ

Lorsque la lave s’est solidifiée, le gaz contenu dans la cavité est essentiellement constitué de
vapeur d'eau. Au début de l'effondrement de la voûte, l'apport de matériau froid condense cette
vapeur d'eau ; il ne reste alors que les gaz incondensables. La quantité de gaz formé, exprimée à
température et pression normales, varie en fonction de l'énergie de l'explosion : entre 5 000
m 3.kt -1, pour une énergie de quelques kilotonnes, et 2 000 ou 3 000 m 3.kt -1, pour une énergie de
quelques dizaines de kilotonnes. À ce stade, la cheminée se trouve en dépression par rapport
aux terrains qui l'entourent. À mesure que l'eau drainée des formations environnantes remplit la
cheminée, les gaz sont comprimés au-dessus de la surface de l'eau, jusqu'à ce que leur pression
soit en équilibre avec la pression hydrostatique qui règne au sommet de la cheminée. En fin de
remplissage, les gaz se dissolvent progressivement dans l'eau et peuvent migrer lentement, par
diffusion, dans l'eau interstitielle.

II.2.2.4 - DISTRIBUTION INITIALE DE LA RADIOACTIVITÉ DANS LA CAVITÉ

Les radionucléides produits par l’explosion nucléaire étaient présents au sein de plusieurs
phases de la cavité-cheminée. La répartition des radionucléides entre ces phases, qui dépend de
leur forme chimique et de leur volatilité, est très importante car elle influe sur leur aptitude à
s’échapper de la cavité-cheminée, puis à se déplacer dans la géosphère avant de rejoindre
éventuellement la biosphère. Ces trois phases sont : une phase solide de lave et d’éboulis, une
phase gazeuse et les solutions aqueuses.

• La lave, qui se forme surtout au fond de la cavité-cheminée, contient la majeure partie des
éléments réfractaires (ou non volatils), comprenant les actinides et lanthanides. Le relâchement
des radionucléides de la lave est un processus qui s'effectue lentement.
• Les éboulis ou matériaux broyés contiennent des radionucléides essentiellement retenus
par des phénomènes d'adsorption réversibles.
• Les gaz et les solutions sont les phases qui contiennent les éléments gazeux, volatils et
solubles dans l'eau comme les gaz rares et le tritium.

La répartition des radionucléides, entre la lave et les éboulis, dépend de la volatilité de la


forme chimique de chaque élément, à l’intérieur de la cavité-cheminée, pendant le refroidissement
(Tableau 5). Il existe une somme considérable de données publiées concernant la répartition des
radionucléides, sur la base de mesures effectuées sur différents sites d'expérimentations
nucléaires. Certains radionucléides ayant des périodes importantes, de l’ordre de 30 ans,
comme le 137 Cs et le 90 Sr, ont des précurseurs gazeux (gaz rares) et/ou volatils, dont les
périodes sont comparables aux durées des processus de condensation et de solidification : 137 I
(période 24 secondes) et 137 Xe (période 3,8 minutes) pour le 137 Cs, et 90 Kr (période 32
secondes) et 90 Rb (période 2,6 minutes) pour le 90 Sr. La répartition de ces radionucléides, entre
la lave et les éboulis, dépendra de la fraction des précurseurs qui se sera désintégrée avant que la
lave ne se solidifie. De nombreux facteurs interviennent sur la vitesse de refroidissement, tels que
l’énergie de l’essai et le moment de l’effondrement de la cavité-cheminée qui tend à refroidir la
lave en fusion. Compte tenu de ces facteurs, la répartition du 90 Sr est estimée à 40 % dans la lave
et à 60 % dans les éboulis. Dans le cas du 137 Cs, la situation est plus complexe, l’estimation du
pourcentage de césium dans la lave varie entre 25 et 40 %, en fonction de l’énergie de l’essai. Les
pourcentages les plus élevés correspondent aux essais de grande énergie, supérieure à 40kt.
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 71

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 71

En ce qui concerne les actinides et les lanthanides, 98 % de l’activité de ces éléments est
associée à la lave. Le pourcentage du plutonium présent dans les éboulis est donc important
mais, comme le montrent les activités volumiques du plutonium mesurées dans l’eau des cavités-
cheminées, il se solubilise progressivement.

T ABLEAU 5.
Répartition relative (%) des radionucléides à l’intérieur de la cavité d’essai.

Radionucléide Lave Éboulis Gaz Eau Observations

3H
0 0 2 98 Majoritairement eau tritiée
14C
0 10 80 10 Gaz ou solution
36Cl
50 40 0 10 Volatilité intermédiaire
41Ca
70 30 0 0 Relativement volatil
55Fe
95 5 0 0 Non volatil
59Ni, 63Ni
95 5 0 0 Non volatil
60Co 90 10 0 0 Relativement non volatil
79Se 70 30 0 0 Volatil
85Kr 0 10 80 10 Gaz : tous les précurseurs sont volatils
90Sr 40 60 0 0 Relativement non volatil, mais précurseurs volatils
93Zr 95 5 0 0 Réfractaire mais précurseurs de volatilité intermédiaire
99H 80 20 0 0 Volatil avec précurseurs volatils ou intermédiaires
106Ru 70 30 0 0 Volatil avec précurseurs volatils
107Pd 70 30 0 0 Relativement volatil
113mCd 70 30 0 0 Relativement volatil
121mSn 60 40 0 0 Relativement volatil
126Sn 70 30 0 0 Relativement volatil
125Sb 70 30 0 0 Relativement volatil
129I 50 40 0 10 Volatil et soluble
134Cs 20 80 0 0 Volatil intermédiaire sans précurseurs
135Cs 20 80 0 0 Volatilité intermédiaire avec précurseurs volatils
137Cs 25/40a 75/60a 0 0 Volatilité intermédiaire avec précurseurs volatils
147Pm 95 5 0 0 Réfractaire sans précurseur volatil
151Sm 95 5 0 0 Réfractaire sans précurseur volatil
152Eu, 154Eu 95 5 0 0 Réfractaire
155Eu 95 5 0 0 Réfractaire sans précurseur volatil
236U 90 10 0 0 Légèrement volatil selon l’état d’oxydation
237Np 95 5 0 0 Réfractaire si produit à partir de 241Am,
légèrement volatil si issu du 237U
238Pu, 240Pu 98 2 0 0 Réfractaire
239Pu 98 2 0 0 Réfractaire : un précurseur est légèrement volatil
241Pu, 242Pu 98 2 0 0 Réfractaire
241Am 98 2 0 0 Réfractaire

a : Selon l’énergie de l’essai. Le pourcentage de 137 Cs dans la lave a été estimé à 25 % à Mururoa (où les essais ont été
généralement de faible énergie) et à 40 % à Fangataufa où les essais ont été généralement de plus grande énergie.
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 72

72 ESSAIS NUCLÉAIRES ET ENVIRONNEMENT

II.2.2.5 - ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ AU SEIN DE LA CAVITÉ


Radioactivité dans le milieu
Les matières nucléaires non consommées (unités arbitraires)
1
et les produits de fission et d'activation présents
dans le mélange initial ont été, dans leur quasi- Essais souterrains
1/10 Décroissance des produits de fission (t-1,2)
totalité, confinés dans les différentes phases au dans la cavité de l'essai
sein de la cavité-cheminée. L'évolution, en fonction 1/100
du temps, de l'activité bêta globale de l'ensemble
du mélange décroît sensiblement, selon une loi 1/1.000
empirique en t -1,2 (Fig. 38).
La radioactivité globale de la phase gazeuse, 1/10.000

essentiellement due aux isotopes radioactifs du Essais atmosphériques


xénon ( 131mXe, 135Xe, 133Xe, 133mXe) et du krypton 1/100.000 Décroissance de la radioactivité

( 85m Kr, 87 Kr, 88 Kr), décroît rapidement dans la


1/1.000.000
cavité-cheminée, d'un facteur 100 entre quatre et
huit jours après l'essai, en fonction de la puissance Décroissance radioactive
1/10.000.000 et dilution
dégagée par l’explosion. La décroissance radioactive des produits déposés

rapide de ces gaz limitait l'activité susceptible d'être 1/100.000.000


à la surface du sol

libérée dans l'atmosphère lors des opérations de


post-forage. De plus, ces gaz rares n'interagissant 1/1.000.000.000
pas avec les composantes de l'environnement Décroissance radioactive (t-1,2)
+ dilution dans l'atmosphère
étaient très rapidement dispersés dans l'atmosphère, 1/10.000.000.000
limitant les risques et niveaux d'exposition pour les 8 mn 1h 7h 2j 14 j 3 mois

travailleurs réalisant les opérations de post-forage. F IG . 38. - Décroissance du mélange radioactif


L’importance du volume de lave engendré créé par les essais nucléaires atmosphériques
par l’ensemble des explosions nucléaires réalisé et souterrains (voir explications dans le texte).
sur les deux sites d’expérimentations, soit environ
2,5 millions de tonnes, fait que l’activité massique associée aux matériaux solides est faible.
L'évolution de l'activité massique
-1 des principaux radionucléides de
Bq.g
103 période supérieure à 5 ans, initia-
TBq 55 TO
104 F
14 7 e 2 41
TA
L lement présents dans l'ensemble
Pm Pu
102 60 137
Cs S r
90
TOTAL
des cavités, a fait l'objet d'un calcul
Co
103 151
Sm
Pu 239
théorique (Fig. 39). Ainsi, celle
10 24
0
des radionucléides émetteurs
2 38 Pu
102
Pu
alpha dans la lave est comparable
15
5
Eu25 Sb 106 u

241 A
1

154
1
Eu à celle d’un gisement d’uranium
63 Ni

m
152 Eu

10 ayant une teneur de 0,7 %.


R

10-1
113
Cd
Ni 59
99
Cependant, bien que ces activités
Tc
1
41
36
Ca soient relativement faibles, une
Cl TO
10 -2 121m
93
Sn
Zr 237
Np
TA
L évaluation des conditions radiolo-
107
10-1 13
4
Cs 135
126
Sn
Pd
236
U
giques futures résultant du relâ-
Cs
chement des radionucléides des
1 10 102 103 104 105 106 107 Années cavités suivant différents scénarii
er Date
1 juillet 1998 2010 2100 3000 10000
a donc été réalisée pour ces
F IG . 39. - Activité totale due à l’ensemble des essais souterrains populations (cf. Chapitre VII).
réalisés au CEP et activité spécifique des radionucléides dans la
lave resolidifiée en fonction du temps, la lixiviation étant négligée.
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 73

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 73

II.2.2.6 - ÉMISSIONS GAZEUSES LORS DES POST-FORAGES

Lors des essais souterrains, les câbles transmettant les mesures, entre le conteneur et les
cabines d'enregistrement situées en surface, présentaient des lignes de fuite de faible débit et
constituaient la principale cause de rejets gazeux. Des cloches de récupération des gaz ont été
mises en place au niveau de la tête de puits (essais sous lagon) ou de la plaque de raccordement
des câbles du puits (essais sous couronne), afin de canaliser les gaz.
Destinés à réaliser des prélèvements d’échantillons de lave dans la cavité après un essai,
les post-forages créaient un pont entre la surface et la cavité, qui pouvait également entraîner des
rejets, gazeux ou liquides, lors du forage de la zone proche de la cavité-cheminée.
Dans tous les cas, des dispositifs de mesure de l’activité des gaz étaient mis en place
(cf. Chapitre III) afin d’établir les bilans des rejets gazeux et liquides de ces essais (Tableau 6).

T ABLEAU 6.
Essais souterrains ayant conduit à des rejets de gaz rares radioactifs.

Essais souterrains Date Rejets de gaz rares


HECTOR 26 novembre 1975 18,5 TBq le 9 décembre et 5,5 TBq le 10 décembre.
ULYSSE A 30 octobre 1976 0,4 TBq au moment de l'essai, 18,5 TBq le 12 novembre
et 5,5 TBq le 13 novembre.
XANTHOS 1er juillet 1978 1 850 TBq, 18 minutes après l'essai (durée 12 minutes).
ARÈS 19 juillet 1978 66 TBq entre les 2 et 5 août.
IDOMÉNÉE 26 juillet 1978 Fuite non quantifiée estimée à quelques milliers de TBq,
commençant 22 minutes après l’essai.
EUMÉE 19 décembre 1978 5 TBq au moment de l'essai, et
120 TBq, 8 heures après l'essai (durée 4 heures).
CHRYSOTHÉMIS 19 novembre 1979 1 110 TBq, une heure après l'essai (durée 3 heures).
ATRÉE 22 novembre 1979 74 000 TBq, 42 minutes après l'essai (durée 5 heures).
PELOPS 4 avril 1980 111 TBq, le 24 avril (durée 4 heures).
BURISIS 18 juin 1983 252 TBq, le 29 juin.
CERCYON 30 avril 1985 26 TBq, le 25 mai (durée 120 heures).
DANAÉ 29 novembre 1987 300 TBq entre les 15 décembre 1987 et 22 janvier 1988
DÉJANIRE 23 juin 1988 51 TBq à partir du 7 juillet (durée 60 jours).
ACRISIOS 25 octobre 1988 74 TBq à partir du 4 novembre (durée 6 jours).
CYCNOS 30 novembre 1988 18 TBq (durée 3 heures).
TECMESSA 20 mai 1989 20 TBq à partir du 27 mai (durée 42 jours).
CYZICOS 10 juin 1989 74 TBq, du 21 au 26 juin.
TÉLÈPHE 2 juin 1990 22 TBq, du 6 au 17 juin.
CYPSELOS 26 juin 1990 16 TBq.
HYRTACOS 14 novembre 1990 1,1 TBq.
MELANIPPE 7 mai 1991 130 TBq, du 13 mai au 15 juin.
CORONIS 5 juillet 1991 13 TBq, de 25 heures après l’essai au 23 juillet.
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 74

74 ESSAIS NUCLÉAIRES ET ENVIRONNEMENT

Les sorties gazeuses ou liquides pouvaient survenir de façon précoce, au moment de l'essai,
ou plus tardivement, après la remise en eau de la cavité-cheminée. En effet, lors des essais
souterrains, l'augmentation de la pression au moment de la formation de la cavité propulsait une
faible quantité de gaz dans les câbles sectionnés lors de l’explosion. Ces gaz diffusaient ensuite dans
les interstices remplis d'air des câbles de liaison entre le conteneur et la surface (rejets précoces).
La remise en eau de la cavité y comprimait ensuite lentement les gaz et, du fait de leur faible
solubilité, les poussait vers la surface. Ces fuites étaient qualifiées de différées et se produisaient
souvent lors des opérations de post-forage. Le niveau d’activité des gaz était alors limité car ces
opérations étaient réalisées tardivement, tandis que la cavité et la cheminée étaient remplies
d'eau, réduisant notablement le risque de fuite lors du percement de la cavité. Lorsque le post-
forage entrait dans la zone proche du point zéro, le fluide de forage se chargeait en éléments
radioactifs.
Le principal radionucléide rejeté était 131 I dont les activités ont été quantifiées par les
dispositifs de prélèvement de gaz et de mesure associés au système de contrôle radiologique mis
en place lors de l’essai (Tableau 7 et cf. Chapitre III).

T ABLEAU 7.
Bilan des principaux rejets d’iode enregistrés
lors de la période des essais souterrains.

Essais souterrains Date Activité d'131I rejetée (TBq)

HECTOR 26 novembre 1975 0,1


MÉNÉLAS 11 juillet 1976 1,5
OEDIPE 2 avril 1977 0,35
ORESTE 12 novembre 1977 0,16
POLYPHÈME 27 février 1978 10
LAERTE 25 novembre 1980 6
IPHICLÈS 28 mars 1981 0,06
ÉRYX 11 juillet 1981 0,5
DÉIPHOBE 24 février 1982 0,22
LAODICE 27 juin 1982 0,06
MIDAS 12 mai 1984 0,12
NAUPILOS 12 novembre 1986 0,16
JOCASTE 5 mai 1987 1,4
DIRCÉ 6 juin 1987 0,15
PASIPHAÉ 5 novembre 1987 0,06
PELÉE 19 novembre 1987 0,06
DANAÉ 29 novembre 1987 0,09
ACRISIOS 25 octobre 1988 0,2
MÉGAPENTHÈS 7 juin 1990 0,1
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 75

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 75

II.2.2.7 - TRANSFERT POTENTIEL À LA BIOSPHÈRE

Afin d’estimer l’exposition potentielle des populations polynésiennes aux rayonnements


des radionucléides susceptibles d’être libérés à la suite des essais souterrains, les taux de relâ-
chement des radionucléides, à partir des cavités-cheminées, ont fait l’objet d’études et d’évaluations
détaillées (cf. Chapitre VII). Les expositions ont été calculées par les experts du CEA et de l’AIEA en
fonction de différents scénarios, y compris les plus extrêmes qui correspondent à la perte de
confinement de cavités, suivi de la libération des radionucléides dans les eaux océaniques et de leurs
transferts dans les différentes compo santes de l'environnement polynésien, selon des modalités
décrites dans les paragraphes suivants.

II.3 - MÉCANISMES DE TRANSFERT DES RADIONUCLÉIDES


La connaissance des mécanismes de transfert des radionucléides dans l’environnement,
en particulier les cinétiques d’échanges entre le terme source (essai nucléaire), les vecteurs physiques
du biotope (air et eau) et les constituants de la biosphère (organismes vivants), était nécessaire
afin d’apprécier l’impact sur l’environnement des essais nucléaires et d’en réduire les conséquences
pour les populations, tant régionales que mondiales. Les processus de transfert des radionucléides
mettent en jeu de nombreux mécanismes tels que la dispersion par advection-diffusion dans l’atmosphère
et l’océan, l’adsorption-désorption avec les sols, les sédiments et les matières en suspension,
l’accumulation-élimination dans les organismes vivants, etc., devant être précisés en fonction des
caractéristiques des biotopes et des biocénoses des régions susceptibles d’être affectées par
les essais. Les radionucléides sont ainsi transférés dans et entre les différents compartiments de
l’environnement, atmosphère, eaux, sédiments, sols et organismes vivants qui peuvent constituer
autant de termes sources secondaires que de sites de concentration et qui font l’objet d’une
surveillance radiologique (Fig. 40).

Nuage radioactif
d'un essai atmosphérique
Chaîne
alimentaire

Irradiation
externe
Retombées pluies
Inhalation
(Irradiation
interne)

Ingestion
(Irradiation
interne)

Lait

Mururoa
Sol
Eau

Coprah Prairie Irradiation


Tourteau de coprah externe

F IG . 40. - Voies de transfert simplifiées des radionucléides dans l’environnement, depuis leur libération lors
d’une explosion nucléaire jusqu’aux produits des chaînes alimentaires conduisant à l’Homme.
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 76

76 ESSAIS NUCLÉAIRES ET ENVIRONNEMENT

Les principaux transferts au sein des biotopes et biocénoses sont sommairement rappelés
dans ce chapitre afin de faciliter la compréhension du choix des indicateurs surveillés dans l’environ-
nement (cf. Chapitre III) et d’apprécier les risques pour les travailleurs des sites d’expérimentations
et pour les populations vivant en Polynésie (cf. Chapitres VI et VII).

II.3.1 - DISPERSION ATMOSPHÉRIQUE DES RADIONUCLÉIDES

Lors des essais atmosphériques, dès la formation du nuage radioactif stabilisé, les radio-
nucléides subissaient un processus de dispersion qui, suivant leur trajectoire et leur période
radioactive, pouvait les amener à intégrer les différentes composantes de l’environnement. Deux
classes de trajectoires du nuage étaient alors envisagées, celles provoquant la dispersion des
radionucléides dans la troposphère et celles contribuant à leur dissémination dans la stratosphère.

II.3.1.1 - TRAJECTOIRES

Lors des essais atmosphériques réalisés dans la troposphère tropicale de l’hémisphère


Sud, les masses d’air susceptibles d’être en contact avec le nuage radioactif étaient soumises à
la circulation générale dominante d’ouest en est, en limite Sud de la série zonale de noyaux anti-
cycloniques (cf. Chapitre I). Ainsi, le transport des radionucléides suivant des trajectoires tropo-
sphériques pouvait être schématisé comme suit :

• Un nuage principal suivait, à basse altitude sous l’effet des alizés, une trajectoire initiale vers
l’ouest, s’inversant vers l’est du fait de la circulation d’ouest en est aux plus hautes altitudes.
• Des nuages secondaires se détachaient rapidement du nuage principal et se dispersaient vers le nord,
entre les différents noyaux anticycloniques. Leurs trajectoires conduisaient à des retours de masses d’air
contaminées vers l’ouest, ou favorisaient le passage des radionucléides de l’hémisphère Sud vers
l’hémisphère Nord, dans le cas où des conditions météorologiques favorables à ces transferts existaient
au nord de l’équateur (dépressions, moussons).

Dans le cas des essais souterrains, les éventuels rejets atmosphériques à la surface du
platier, ou des eaux du lagon, lors des opérations de post-forage concernaient les couches les
plus basses de la troposphère et leur dispersion dépendait essentiellement des conditions
météorologiques locales au sol, en particulier de l'influence des alizés.

Lors des essais atmosphériques de puissance mégatonnique, la majorité des produits de


fission étaient injectés dans la stratosphère, où la circulation générale des masses d’air diffère de
celle rencontrée dans la troposphère. En effet, la tropopause est le lieu d’une discontinuité du gradient
thermique vertical, entraînant une discontinuité dans la diffusion des particules radioactives. La
stabilité thermique verticale stratosphérique conduit à une circulation des masses d’air quasi
horizontale, mise en évidence par la configuration des surfaces isentropiques (surfaces de
température potentielle constante) qui contraste avec les turbulences troposphériques. Les radio-
nucléides suivaient alors des trajectoires stratosphériques et restaient confinés dans le compartiment
stratosphérique (Fig. 41). Ce dernier était considéré comme un réservoir dans lequel l’activité des
radionucléides allait diminuer, lentement par décroissance radioactive, par dispersion jusque
dans l’hémisphère Nord et enfin par sédimentation lente des particules, en fonction de l’intensité
des échanges avec la troposphère.
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 77

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 77

Altitude en km
40
Les essais en altitude ont conduit à
30
réduire drastiquement la fraction des parti- 26
24 9 9
cules les plus lourdes lors de l’explosion et 22 18 18
à limiter l’injection dans la stratosphère aux 20 27 37
particules extrêmement fines. Le passage
18 37
aux essais sous ballon a donc eu pour consé- 55
27
quence de limiter les retombées tant locales Tropop
ause
37 37
16
que régionales en Polynésie comme cela est
décrit dans les paragraphes suivants. En 27
fonction de l’altitude de leur injection dans 14
l’atmosphère, le temps de résidence des

e
paus
55
produits radioactifs changeait d’échelle ; de

o
18

Trop
quelques jours à un ou deux mois dans la
12 9
troposphère, le temps de résidence variait
pour les essais sous ballon de plusieurs
mois à un ou deux ans dans la stratosphère. 9

Tro
p
op
au
se
10

F IG . 41. - Évolution de l’activité volumique


(mBq.m -3 ) en 137 Cs mesurée, le 25 mai 1971,
dans la stratosphère des deux hémisphères. Les
activités volumiques maximales sont mesurées
aux plus hautes latitudes de l’hémisphère Nord. 8
90 60 50 40 30 20 10 0 10 20 30 40 50 60 90
Nord Latitude Sud

II.3.1.2 - RETOMBÉES RADIOACTIVES

D’une manière générale, les débris radioactifs résultant d’essais nucléaires atmosphériques
se répartissaient entre la surface du sol et/ou de l'eau des sites d’expérimentations et les
compar timents troposphérique et stratosphérique, en fonction du type, de l’altitude et de l’em-
placement des essais, ainsi que de l’énergie dégagée lors des explosions. Les débris sédimentant
sous forme de particules vers la surface de la Terre sont appelés retombées atmosphériques.
• Les retombées locales pouvaient représenter jusqu'à 50 % des retombées produites dans
le cas des essais pratiqués à faible altitude et au sol (cette proportion a été moindre dans le
cas des essais français). Elles se composaient des matières radioactives particulaires qui
se déposaient dans un rayon d'environ 100 km autour du site d'essai.
• Les retombées troposphériques se composaient d’aérosols de plus petit diamètre se
déposant après un temps de séjour moyen de 30 jours. Au cours de cette période, les débris
se dispersaient dans une bande de latitude centrée sur celle où ils avaient été injectés, en
suivant des trajectoires régies par le régime des vents. Du point de vue de l'exposition, les
retombées troposphériques dominantes étaient celles impliquant les radionucléides ayant une
période de quelques jours à deux mois comme 131 I, 140 Ba et 85 Sr.
• Les retombées stratosphériques, qui formaient une grande partie des retombées totales,
donnaient lieu, ultérieurement, aux retombées mondiales. Les retombées stratosphériques
étaient à l'origine de la majeure partie des résidus mondiaux en 238 Pu, 239 Pu et 240 Pu ainsi
que des produits de fission de longue période, comme le 137 Cs et le 90 Sr.
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 78

78 ESSAIS NUCLÉAIRES ET ENVIRONNEMENT

Dans le cas des sites de N


Mururoa et Fangataufa, les trajectoires ARC
des nuages décrites précédemment, HIP
Hao
EL
expliquent le tracé de l'axe principal DE
S Reao
des retombées proches qui, après
avoir suivi une direction ouest, s’in-
versait rapidement vers l’est. En
effet, la partie inférieure du pied du
20° S
nuage radioactif était poussée vers Axe
l'ouest par les alizés venant de l'est. Tureia
En revanche, les vents s’orientant
vers l'est en altitude durant l'hiver aus- Axe
Tematangi Mururoa Marutea
tral, la tête du nuage était entraînée Groupe
Sud
Actéon
dans la direction opposée. Suivant
la direction des vents dans les
Fangataufa
couches intermédiaires, le déplace- Iles Gambier
ment de la tête des nuages suivait
un axe principal orienté soit vers le Direction optimale Direction optimale
des vents des basses des vents en altitude
nord, soit vers le sud du point zéro de couches (alizés)
0 200 km
l’explosion (Fig. 42).
Les différentes retombées
ont conduit à des dépôts de radio- 140° W 135° W

nucléides à la surface de l’eau et


F IG . 42. - Exemples de retombées proches au niveau de la mer
des sols ; localement, sur les sites lors des conditions météorologiques optimales pour réaliser un
d’expérimentations, avec des retom- essai atmosphérique sur les sites du CEP.
bées immédiatement après l’essai
et, sur l’ensemble du globe essen-
tiellement aux mêmes latitudes, avec des retombées troposphériques, à plus long terme.
Les retombées stratosphériques, quant à elles, ont concerné l'ensemble de la planète.
Produites par les essais atmosphériques effectués principalement par les États-Unis et l’URSS
durant la décennie précédant la réalisation des essais au CEP, elles expliquent les niveaux
d'activité mesurés en 1962 dans l’environnement polynésien (cf. Chapitre V). En effet, un quart
environ des retombées associées aux essais nucléaires atmosphériques s’est déposé dans l'hémi-
sphère opposé à celui où l'essai avait eu lieu. Les niveaux des retombées les plus élevés ont été
observés aux latitudes moyennes de chaque hémisphère.

II.3.1.3 - VITESSE DE DÉPÔT

Les dépôts de radionucléides à la surface du globe se produisaient sous forme de dépôt


sec par captation des radionucléides au contact de l’air contaminé, et sous forme de dépôt humide
par lessivage de la masse d’air par les pluies. L’intensité du dépôt sec dépendait des turbulences
au niveau du sol et celle du dépôt humide était proportionnelle à l’importance des
précipitations. La vitesse du dépôt humide pouvait dépasser 0,1 m.s -1 alors que celle plus faible
du dépôt sec variait entre 1.10 -4 et 2.10 -3 m.s -1 . Les radionucléides déposés sur les sols et les
sédiments peuvent être caractérisés par leur activité surfacique (Bq.m -2 ) ou massique (Bq.kg -1 de
sols ou de sédiments secs).
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 79

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 79

Les dépôts en milieu terrestre conduisaient à la contamination surfacique, entre autres,


des sols et des végétaux. Les sols polynésiens, en général, ne dépassent pas quelques dizaines
de centimètres d’épaisseur (cf. Chapitres I et III). Différents processus naturels (accumulation,
érosion, lixiviation) interviennent pour contrôler l’évolution au cours du temps de l’activité des
radionucléides initialement présents dans les sols. Les radionucléides qui se déposaient à la surface
des masses d’eaux superficielles subissaient quant à eux un nouveau processus de dispersion
par advection-diffusion par les courants marins de l’océan Pacifique (cf. Chapitre I) et migraient
progressivement dans toute la colonne d’eau conduisant progressivement à leur dilution. Les
radionucléides interagissant avec les matières en suspension (MES) sédimentaient plus rapidement et
s’accumulaient dans les sédiments, soit localement dans les lagons des sites d’expérimentations,
soit dans les grands fonds de cette partie de l’océan Pacifique.
Les remises en suspension des dépôts, sur le sol ou les sédiments, pouvaient conduire à des
augmentations locales de l’activité volumique de l’atmosphère ou des eaux des lagons. L’intensité de
la remise en suspension dépendait de la turbulence locale due aux vents ou aux courants et de la taille
des particules. Le rapport entre l'activité volumique de l’air à un mètre au-dessus du sol, ou de l’eau
au-dessus des sédiments, et l'activité surfacique détermine le facteur de remise en suspension.

II.3.1.4 - PRÉVISIONS DES RETOMBÉES PROCHES

Les prévisions des retombées des essais atmosphériques susceptibles de conduire à des
dépôts étaient établies à l'aide d'un modèle mathématique décrivant le nuage initial stabilisé sous
la forme de trois cylindres coaxiaux représentant la tête, la jupe et le pied d'un nuage nucléaire
(Fig. 28). Les rayons et hauteurs des cylindres dépendaient de l’énergie de l’essai et de l’état de
l’atmosphère. L'activité des cylindres était calculée en adoptant la loi de distribution de la radio-
activité en fonction de l’altitude réduite Z/Zs décrite précédemment pour le nuage stabilisé (Fig. 29).
La distribution de l'activité de l’ensemble des particules contenues dans les cylindres était ensuite
modélisée, suivant le type d'engin expérimenté, et l’évolution de l’activité au cours du temps pouvait
être calculée. Pour ce faire, les cylindres décrivant le nuage initial étaient décomposés en un
empilement de tranches horizontales (10 à 30 selon l’énergie), de quelques centaines à un millier
de mètres d’épaisseur chacune. Chaque tranche était ensuite dupliquée pour décrire le comporte-
ment de chacune des classes de particules associées au nuage. Chaque classe de particules
était caractérisée par une vitesse de chute spécifique. La distribution de particules radioactives
comportait jusqu’à 50 classes, réparties dans 20 tranches différentes, de sorte que le nombre de
tranches de particules à traiter était de l’ordre du millier (Fig. 43).
Le transport des particules était ensuite simulé par le déplacement des tranches de particules
jusqu’à leur point de chute, sous les effets combinés des vents (direction et vitesse) et de la
gravité (vitesse de chute). Les calculs étaient réalisés pour un réseau de cellules d'une centaine
de kilomètres de côté et d’une hauteur de quelques centaines à un millier de mètres. Les effets
de la diffusion turbulente étaient modélisés en appliquant une loi de dilatation horizontale à la
tranche de particules, à son arrivée à la surface du sol ou de l'eau. L’expansion de chaque
tranche de particules était exprimée par le calcul de son rayon à l'instant de son arrivée à la surface
(R t ), au moyen de la formule suivante :

R t = R 0 + 2,4.t
avec :
R 0 le rayon initial et t la durée du déplacement de chaque tranche de l’explosion jusqu’au contact avec
la surface du sol ou de l'eau.
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 80

80 ESSAIS NUCLÉAIRES ET ENVIRONNEMENT

Nuage stabilisé Tranche


horizontale

R0

Advection + chute + diffusion

Rt

Surface
n tranches correspondant aux classes
granulométriques des particules

F IG. 43. - Principe du code de calcul opérationnel utilisé pour réaliser les prévisions des retombées en Polynésie.

Les cartes prévisionnelles des activités volumiques et surfaciques, des débits de dose en
fonction du temps étaient réalisées en additionnant, en un grand nombre de points, les contributions
de l'ensemble des tranches de particules. Des courbes étaient tracées pour estimer les niveaux
des retombées, en fonction du temps et de l’espace :

• les courbes d'iso-débit de dose, donnant la prévision du débit de dose maximal, en différents
points suivant le déplacement du nuage ;
• les isochrones, donnant l'heure d'arrivée des retombées au sol.

Afin de comparer les prévisions au cours du temps, les contours des retombées étaient
exprimés par les activités et les débits de dose des produits de fission du mélange, ramenés, par
convention, 1 heure après l’essai (H+1). La valeur réelle du débit de dose, au moment des retombées,
pouvait être calculée en chaque point, en corrigeant la valeur de la courbe par la décroissance
radioactive en t -1,2 , entre H+1 et l'heure d'arrivée de la retombée qui était donnée par l'isochrone.

II.3.2 - ÉVOLUTION DES DÉPÔTS


Les relations entre les radionucléides déposés par les retombées sur les sols et les sédiments
sont évaluées au moyen de coefficients de distribution (Kd, exprimé en l.kg -1 ). Le Kd est défini
par le rapport des activités massiques de la phase particulaire sur la phase dissoute du sol (ou
des sédiments), à l’équilibre, suivant la formule :
Kd = A p / A d
avec :
A p : activité massique de la phase solide du sol en Bq.kg -1 sec ;
A d : activité volumique de la phase aqueuse extraite du sol en Bq.l -1 .
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 81

En règle générale, la valeur du T ABLEAU 8.


Kd associée à un radionucléide, pour Variation des valeurs de Kd observée
un même type de sol, croît avec l'aug- sur différents types de sol standards.
mentation de la proportion d'argile et
Type de sol Sable Limon Argile Organique
la diminution de la taille des particules
le constituant. Ce paramètre permet de Cs Valeur la 270 4400 1800 270
comparer le comportement des radio- plus probable
nucléides dans les sols : ceux caracté- Intervalle 18-40000 330-60000 74-2000 0,2-360000
risés par une valeur de Kd élevée sont observé
considérés comme peu mobiles, alors
que ceux ayant une valeur de Kd faible, I Valeur la 1 4,5 180 27
plus probable
comme le Sr, migrent plus rapidement
Intervalle 0,013-85 0,082-240 0,082-33 0,5-1500
vers les horizons inférieurs des sols et observé
sont plus facilement transférés aux
végétaux. Cependant, pour un même Sr Valeur la 13 20 110 150
type de sol, les valeurs proposées plus probable
dans la littérature scientifique pour un Intervalle 55-330 0,67-600 2-6000 4,5-5400
radionucléide donné apparaissent observé
fortement dispersées (Tableau 8).
La vitesse de migration des
radionucléides est fonction de leurs propriétés chimiques, de la perméabilité et de la capacité de
rétention des sols. Les vitesses de migration sont en général faibles, même pour des éléments
considérés comme mobiles, tel le strontium dont la vitesse de migration est inférieure à 1 cm.an -1 .
En mer, les matières en suspension (MES) et les sédiments sont, respectivement, des
vecteurs de transfert et des lieux de stockage très importants. Comme pour les sols, les valeurs
de Kd pour un même radionucléides sont très variables et leur détermination repose sur une
approche statique. Celle-ci montre que des radionucléides comme le plutonium ou le cobalt ont une
forte affinité pour les sédiments avec respectivement des Kd de l’ordre de 100 000 et de 40 000.
Les sédiments ont accumulé les radionucléides au moment où l’activité de l’eau de mer était la
plus élevée. Les sédiments abyssaux qui ne sont généralement pas soumis à des remobilisations
constituent un terme «puits» pour les radionucléides qui sont mis hors de portée des organismes
vivants par enfouissement progressif. En revanche, les sédiments des régions côtières, peu
profondes, sont susceptibles d'être remis en suspension et sont considérés comme des sources
secondaires différées de radionucléides pour les eaux de mer.

II.3.3 - TRANSFERT AUX ORGANISMES VIVANTS

L’accumulation des radionucléides par les organismes vivants peut se faire par l’intermédiaire
de différents vecteurs : l’air et les aérosols, l’eau et les MES, les sols et sédiments, ainsi que par
leur nourriture. Deux phénomènes sont impliqués dans l’accumulation des radionucléides par les
organismes vivants : l’adsorption et l’absorption (Fig. 44). L’adsorption conduit à un marquage
externe de l’organisme (surface des feuilles, des coquilles, etc.). Au contraire, l’absorption correspond
au passage des radionucléides à travers les membranes biologiques. Leurs voies de pénétration
dans les organismes sont pulmonaires, branchiales, tégumentaires (absorption directe à partir de
l’eau) et digestives (absorption suite à l’ingestion de nourriture contenant des radionucléides). Les
radionucléides sont ensuite véhiculés, par la sève chez les végétaux et par le sang chez les animaux,
entre les différents organes par des mécanismes de translocation. Ils peuvent alors se concentrer
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 82

82 ESSAIS NUCLÉAIRES ET ENVIRONNEMENT

dans des organes ou tissus cibles (fruit, graine, muscle, glande digestive, squelette, etc.) de
façon variable suivant leur forme physico-chimique et en fonction du métabolisme de l’organisme.

Désorption

Adsorption

Ingestion
Accumulation

Absorption Élimination
branchiale
Excrétion Excrétion
branchiale
Absorption

Fig. 44. - Principaux mécanismes conduisant à la contamination des organismes marins par des radionucléides
d’origines naturelle et artificielle.

L’accumulation des radionucléides résulte d’un bilan positif entre les mécanismes d’incor-
poration (contamination) et de désorption (décontamination), en tenant compte de la décroissance
de l’activité, fonction de la période radioactive des radionucléides considérés. Pour chaque
organisme vivant, la cinétique de la décroissance de l’activité d’un radio nucléide particulier peut
être appréciée à l’aide de la période effective (T e), calculée par la formule suivante :

T e = (T b . T p) / (T b + T p)
avec :
T p : la période radioactive du radionucléide considéré ;
T b : la période biologique qui est le temps nécessaire pour qu’un organisme ou un organe perde la
moitié de son activité pour le radionucléide considéré.

Cette valeur T e sera précisée pour les différents radionucléides, dans les chapitres IV et
V présentant les résultats de la surveillance environnementale des organismes vivants, afin d'être
comparée à la valeur de leur période radioactive (T p).
Le transfert des radionucléides aux organismes vivants affecte en premier lieu les pro-
ducteurs primaires (plantes), puis les organismes herbivores. Ainsi, intégrés aux premiers maillons
des réseaux trophiques, les radionucléides pourront éventuellement être transférés aux niveaux
trophiques supérieurs. L’activité de la plupart des radionucléides décroît au fur et à mesure que
l’on s’élève dans les niveaux trophiques, des producteurs photosynthétiques aux herbivores, puis
aux carnivores. Les mécanismes en jeu dans ces transferts sont nombreux. Des modèles ont été
mis au point à partir des résultats de travaux expérimentaux menés en laboratoire et d'observations
sur le terrain représentatives du fonctionnement des écosystèmes terrestres et marins, afin d’évaluer
la répartition spatio-temporelle des radionucléides dans les différents compartiments physiques et
biologiques.
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 83

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 83

II.3.3.1 - VÉGÉTAUX TERRESTRES

Les radionucléides peuvent intégrer les végétaux directement, par voie foliaire, et indirec -
tement, après dépôt sur le sol, par voie racinaire. Les radionucléides absorbés à travers l’épiderme
foliaire ou racinaire font ensuite l’objet de mécanismes de translocation, au sein du végétal, qui les
redistribuent dans des organes initialement exempts de toute activité. La translocation peut conduire
à l'accumulation de certains radionucléides dans des organes particuliers. Par exemple, il a été
observé dans les îles du Pacifique que le 137 Cs est systématiquement à des niveaux d'activité
massique plus élevés dans le coprah que dans le lait issu des mêmes noix de coco (cf. Chapitre IV).
Comme pour les sols, à la suite des essais atmosphériques, l’activité surfacique des
plantes résultait de dépôts secs ou humides lors des pluies. La biomasse et les caractéristiques
du feuillage des végétaux, au moment du dépôt, définissent la valeur du facteur d’interception (µ en
m 2 .kg -1 sec) des radionucléides. Pour l’herbe, la fraction initiale (f) interceptée au moment du
dépôt était calculée généralement de la manière suivante :

f = 1 - e -µ.B
avec: B le rendement de la biomasse des parties aériennes des plantes en kg.m-2 (exprimé en poids sec).

La valeur du facteur d’interception est de 100 % pour une prairie et de l'ordre de 60 à 80 %


pour les autres plantes au stade de la maturité.
Les radionucléides initialement déposés pouvaient ensuite être soumis à divers processus
qui favorisaient leur élimination, tels le lessivage du dépôt par les pluies ou l’arrosage, l’élimination de
particules radioactives par le vent, la chute des feuilles. L’ensemble de ces pertes et la décroissance
physique des radionucléides a conduit à définir des périodes effectives spécifiques des différents
radionucléides et des végétaux. En revanche, les phénomènes de remise en suspension des
dépôts au sol pouvaient contribuer à l’activité des parties foliaires, par redéposition et adsorption
des particules radioactives sur les parties aériennes des végétaux (Fig. 45).
L’estimation du transfert foliaire des radionucléides nécessite le calcul d'un facteur qui est
le rapport de l’activité massique du végétal (Bq.kg -1) au moment de la récolte sur l’activité surfacique
totale déposée (Bq.m -2 ). Ainsi, l'activité massique des radionucléides (A c en Bq.kg -1 frais), dans
la partie consommable du végétal à la récolte au temps tr, peut être calculée à partir de la vitesse de
dépôt, sec ou humide, des radionucléides (D en Bq.m -2.s -1), des facteurs d’interception (F i ), de trans-
location (F tr ), du rendement de culture (R t ) et de la période effective T e (s -1 ) en utilisant la formule
suivante :
tr D.F .F
Ac = ∫ i tr

Rt
(eTet) dt
a

Le facteur de translocation est égal à 1 lorsque la partie consommable est constituée par
la masse foliaire des légumes-feuilles, comme la salade. Il se situe entre 0,1 et 0,15 pour les
autres légumes-racines.
Les radionucléides initialement déposés sur le sol par les retombées peuvent également
être transférés aux végétaux par voie racinaire. L’intensité de ces transferts racinaires dépendait
du radionucléide, de l'espèce végétale et du type de sol (granulométrie, structure, composition
organique, teneurs en éléments stables, pH, concentrations en acides humiques et fulviques et
des amendements agricoles pratiqués). Le principal facteur régissant la biodisponibilité des radio-
nucléides est leur solubilité dans la phase liquide des sols.
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 84

84 ESSAIS NUCLÉAIRES ET ENVIRONNEMENT

Ainsi, les végétaux n’absorbent par voie racinaire qu’une très faible fraction des actinides
présents dans les sols. Les facteurs de transfert racinaire se situent entre 10-3 et 10 -6, du neptunium
à l’américium, au curium et au plutonium.
L’intensité des transferts racinaires est appréciée à travers les valeurs du facteur de transfert
racinaire (F r ), définit comme le rapport entre l’activité massique du végétal (A v en Bq.kg -1 ) et celle
du sol (A s en Bq.kg -1 sol sec), considérée comme homogène et constante pendant la durée de
croissance du végétal. À partir du dépôt, la fraction de l’activité d’un végétal due aux transferts
racinaires est calculée en utilisant la formule suivante :

Av = Fr x As

À la suite des retombées atmosphériques, l’absorption foliaire était la voie de transfert


la plus importante, à court terme chez les végétaux terrestres. Le sol constituait un réservoir de
radionucléides qui, suivant leur période radioactive et leur mobilité, s’incorporaient, à plus ou moins
long terme, par transfert racinaire dans les plantes.

Interception foliaire

Dépôt foliaire
(Sec - humide)

Absorption foliaire
Accumulation
Translocation

Exportation
(Produit agricole)

Lavage
Remise en suspension
Défoliation
Translocation
Dépôt au sol
(Sec et humide)

Érosion
Léssivage

Décomposition
Accumulation Migration
Infitration
Absorption
racinaire
Exportation
(Produit agricole)
Exorption

Fig 45. - Schéma des principaux mécanismes en jeu lors de la contamination des sols et des végétaux
terrestres par des retombées atmosphériques.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 85

II.3.3.2 - ANIMAUX D’ÉLEVAGE

Les radionucléides présents dans les végétaux peuvent être transférés aux espèces
herbivores par ingestion. Après absorption, les radionucléides véhiculés par le sang sont distribués
dans tout l’organisme, d’où ils peuvent être éliminés rapidement, ou se fixer et s’accumuler dans
certains organes cibles. Ainsi, les iso-
topes de l’iode se fixent dans la
T ABLEAU 9.
thyroïde, ceux du césium dans les
Valeurs de facteurs de transfert (jour.kg -1 frais) aux principales
muscles et ceux du plutonium dans le productions animales de différents radionucléides.
foie. Ils se concentrent également
dans les productions animales, par Production Américium
Iode Césium Strontium
exemple, l’iode dans le lait, le chlore animale Plutonium
dans les oeufs, etc. Lait bovin 1.10 -2 5.10 -2 2.10 -3
1.10-5
Le facteur de transfert aux pro- -1 -1 -2
Lait ovin 3.10 1.10 5.10 1.10-4
ductions animales est le rapport entre
Viande bovine 3.10-3 5.10-2 8.10-3 2.10-4
la concentration du radionucléide dans
-3 -1 -2
un produit animal (Bq.kg-1) et sa concen- Viande ovine 6.10 3.10 4.10 1.10-3
tration dans la ration de l’animal Viande porc 4.10-3 2.10-1 4.10-2 1.10-3
-1
(Bq.jour ). Ce facteur est en général -1 -2
Viande volaille 2.10 5 4.10 1.10-1
inférieur à 1, ce qui signifie qu’il y a Oeufs volaille 3 5.10-1 3.10-1 9.10-3
toujours dilution de l’activité à chaque
niveau du réseau trophique ou de la
chaîne alimentaire conduisant à
l’Homme (Tableau 9).

II.3.3.3 - ORGANISMES MARINS

Après dépôt à la surface des océans, les radionucléides s'homogénéisent progressivement


dans les masses d'eau et entrent en contact avec les organismes marins. Les sédiments sont
également des sources secondaires de transfert de radionucléides aux organismes vivant à leur
contact. Dans tous les cas, les transferts de radionucléides aux organismes marins peuvent avoir lieu
directement à partir de l'eau, par absorption des radionucléides à travers les téguments et l'épithélium
branchial, et indirectement, par l'ingestion de nourriture contenant des radionucléides (Fig. 46).
La contribution relative de chacune des deux voies de transfert à l’activité totale d’un organisme
ou d’un organe varie suivant les radionucléides et est modulée en fonction des cycles saisonniers
d’alimentation des espèces. Ainsi, par exemple, chez les poissons, le transfert en 137Cs ou 110mAg
par la nourriture est plus important que le transfert direct à partir de l’eau. En revanche, pour le
60 Co, l’absorption à partir de l’eau est le mécanisme de transfert principal.
À l’état d’équilibre, c'est-à-dire lorsque les eaux de mer sont à un niveau d’activité volu-
mique constant, l'ensemble des transferts aux organismes marins peut être évalué à l’aide d’un
facteur de concentration (Fc), entre les deux compartiments eaux et organisme. Le Fc (l.kg -1) est le
rapport de l’activité massique d’un organisme (A p en Bq.kg -1 frais) sur l'activité volumique des
eaux marines (A em en Bq.kg -1 ). Le Fc caractéristique de chaque couple radionucléide-organisme
est calculé à l'aide de la formule suivante :

Fc = A p / A em
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86 ESSAIS NUCLÉAIRES ET ENVIRONNEMENT

Dépôts
(sec et humide)

Absorption

Dispersion Advection

Absorption
Adsorption Plancton

Matières en suspension

Sédimentation
Herbivore

Absorption Ver Carnivore


polychète
Excrétion Excrétion
Dépôt

Migration
Bioturbation
Accumulation
Mollusque
bivalve
Terme «puits»

Fig 46 - Schéma des principaux mécanismes de transfert des radionucléides en domaine marin.

En général, les facteurs de concentration à l’équilibre sont d’autant plus faibles que le
niveau d’organisation cellulaire de l’organisme considéré est élevé. Les Fc les plus élevés sont
observés chez les espèces appartenant aux producteurs primaires, phytoplancton, algues benthiques
brunes en particulier, avec des Fc supérieurs à 1 000 pour la plupart des radionucléides. Ces
valeurs soulignent l’importance des algues dans le transfert des radionucléides aux niveaux
supérieurs des réseaux trophiques. Ainsi, les mollusques filtreurs se nourrissant essentiellement de
plancton et de MES, comme le bénitier ou la nacre, incorporent rapidement les radionucléides
présents dans les masses d'eau. Il en va de même pour le turbo ou le troca, qui sont des mollusques
brouteurs du tapis algal se développant sur les substrats coralliens.
C'est pourquoi, depuis la mise en place d’une surveillance radiologique de l’environnement
marin en Polynésie, devant la difficulté à collecter des masses suffisantes d'algues pour la mesure,
ces espèces de mollusques sont utilisées comme des bioindicateurs, sentinelles de la variation
éventuelle des niveaux d'activité des eaux de mer. En outre, ils accumulent un grand nombre de
radionucléides au niveau de leur hépatopancréas, par translocation, et par adsorption directe sur
leur coquille, à partir de l’eau de mer. Les valeurs de Fc associées sont élevées. Ainsi, l'AIEA
recommande l’utilisation d’un facteur 500 000 pour le fer, 20 000 pour le cobalt et 3 000 pour
le plutonium, afin d’estimer leur transfert à partir de l’eau de mer.
Chap. 2VF-06.12.06:Chap. 2 12/01/07 11:27 Page 87

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 87

En règle générale, les Fc associés aux différents radionucléides sont d’autant plus élevés que
l’élément est essentiel du point de vue biologique, comme le zinc et le manganèse qui sont des
activateurs de nombreux enzymes et des constituants des métalloprotéines (Tableau 10).

T ABLEAU 10.
Valeur recommandée pour les valeurs de Fc utilisées pour estimer les niveaux de contamination
de différentes familles d’organismes marins à partir de l’activité volumique des eaux de mer
(AIEA - Tec Report n°422).

Éléments Phytoplancton Mollusques Crustacés Poissons

Co 2 000 20 000 7 000 700


Ni 3 000 2 000 1 000 1 000
Zn 10 000 80 000 30 000 1 000
Cs 20 60 50 100
Sr 1 10 5 3
I 800 10 3 9
U 20 30 10 1
Pu 200 000 3 000 200 100
Am 200 000 1 000 400 100

II.4 - CONCLUSION
Une explosion nucléaire libère, en un temps très court, un grand nombre de radionucléides
aux caractéristiques physico-chimiques différentes. Dans le cadre des essais nucléaires, l’ensemble
de ces radionucléides formaient un mélange initial caractéristique, dont l’activité bêta globale
diminuait suivant la période radioactive de chaque isotope radioactif. Les radionucléides générés par
ces explosions étaient majoritairement caractérisés par des périodes radioactives courtes qui les
amenaient à disparaître très rapidement.
Lors des essais atmosphériques, les radionucléides caractérisés par les périodes radio-
actives les plus longues ont été dispersés au cours du temps, au sein des différentes composantes
de l'environnement, où différents facteurs naturels ont modifié leur répartition théorique initiale.
Ainsi, lors des quatre essais atmosphériques sur barge, les radionucléides ont principalement été
émis dans la troposphère, les eaux de mer et les sédiments du lagon. Par la suite, les essais atmo-
sphériques sous ballon générant des particules plus fines, de taille inférieure à 50 µm, les radio-
nucléides associés à ces particules ont été injectés dans la stratosphère, limitant ainsi les retombées
locales à la surface des eaux de mer et des sols polynésiens.
Les essais souterrains ont conduit au confinement initial de la plus grande partie des
radionucléides au sein des cavités-cheminées formées par les explosions. Les transferts à la
biosphère via l'atmosphère ont donc été très limités et localisés à l’environnement des sites
expérimentaux. Cependant, les radionucléides ayant les périodes radioactives les plus longues piégés
dans les laves, restent une source potentielle d'émission vers la biosphère, en particulier en cas de
rupture du confinement.
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88 ESSAIS NUCLÉAIRES ET ENVIRONNEMENT

La connaissance des composantes physique et biologique et la compréhension du


fonctionnement des écosystèmes des atolls polynésiens ont permis d’adapter les améliorations
technologiques aux caractéristiques des sites pour progressivement réduire les émissions de
radionucléides dans l’environnement polynésien lors des explosions nucléaires. Des modèles de
recherche explicatifs ont été élaborés pour décrire au mieux les processus naturels intervenant dans
les transferts de radionucléides entre l'atmosphère, les sols et les eaux marines, les plantes et
les animaux tant terrestres que marins. Des codes opérationnels ont été mis au point pour apporter
des réponses pratiques, permettant d’estimer a priori les impacts radioécologiques et dosimétriques
des essais réalisés en situation nominale. Ces codes de calcul reposent aujourd’hui sur d’importantes
bases de données relatives aux facteurs de transfert, de concentration, etc. issus de travaux
expérimentaux. Ils ont été validés par les résultats de mesure des niveaux de radioactivité observés
dans le cadre de la surveillance radiologique des écosystèmes polynésiens.

II.5 - BIBLIOGRAPHIE
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Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:44 Page 89

CHAPITRE III

Matériels et méthode
de la surveillance radiologique

L’approche adoptée dès 1966 par les expérimentateurs du CEP pour la protection de
l’Homme et de l’environnement a consisté à modifier les modalités des essais afin de réduire les
retombées sur les atolls polynésiens (cf. Chapitre II). Elle a été confortée dans les années 1970,
par les recommandations édictées par la Commission internationale de protection radiologique
(CIPR). À cette date, la CIPR avait conclu que comme la protection de l'Homme contre les rayon-
nements avait pour objectif de maintenir le risque d'exposition pour les personnes à un niveau
très faible, cela devait maintenir les niveaux de rayonnements dans l’environnement suffisamment
bas pour que les autres espèces tant végétales qu’animales soient toujours protégées. Cette
conclusion était formulée au paragraphe 14 de la Publication 26 (CIPR, 1977) : «Bien que le principal
objectif de la protection contre les rayonnements soit la mise en œuvre et le maintien de conditions
de sécurité appropriées pour les activités impliquant une exposition de l'Homme, il est probable que
le niveau de sécurité nécessaire pour assurer la protection de tous les individus du genre humain
convient également pour protéger les autres espèces, sinon nécessairement tous les individus
de ces espèces. La Commission pense donc que si l'Homme est protégé de manière adéquate,
d'autres êtres vivants sont aussi susceptibles d'être suffisamment protégés».
Au fil des ans, la CIPR a produit un grand nombre de recommandations au sujet de divers
aspects de la protection radiologique de l'être humain qui ont été transposées en droit européen et
français et donc appliquées au CEP, en particulier celles qui traitent de la surveillance et du contrôle
radiologiques. Aujourd’hui, les principes de base des recommandations de la CIPR ne traitent
toujours pas spécifiquement de la protection de l'environnement. La position actuelle, comme celle
du passé, est exposée au paragraphe 16 de la Publication 60 (CIPR, 1991) : «La Commission
pense que le niveau de maîtrise de l'environnement nécessaire pour protéger l'Homme à un degré
estimé aujourd'hui comme valable permettra aux autres espèces de ne pas être en danger [...]
Pour le moment, la Commission ne s'intéresse à l'environnement qu'en tant que vecteur des
radionucléides vers l'Homme, puisque ceci affecte directement la protection radiologique des
êtres humains».
La protection de l’Homme étant l’objectif primordial, ce chapitre décrit l’organisation pratique
de la surveillance radiologique des atolls d'expérimentations pour assurer la protection des travailleurs
et celle des populations vivant sur le territoire polynésien. Les indicateurs associés à la localisation
des îles et atolls surveillés, ainsi que les méthodes de prélèvement des échantillons et les protocoles
de mesures des radionucléides utilisés sont également présentés.
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:44 Page 90

90 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

III.1 - LABORATOIRES DE SURVEILLANCE DE L’ENVIRONNEMENT


À la suite d’une première mission d'exploration en 1962, une station de prélèvement a
été installée à Faaa, à proximité de Papeete, sur l’île de Tahiti, afin de surveiller les niveaux d’activité
des radionucléides d’origines naturelle et artificielle en Polynésie française, et d'en analyser les
variations après les essais des autres puissances nucléaires. En effet, entre 1946 et 1968, les
États-Unis avaient réalisé 213 essais, dont 22 supérieures à une mégatonne, dans plusieurs atolls
de Micronésie, comme Bikini, dans le Pacifique Nord. Pour sa part, le Royaume-Uni avait effectué
12 essais atmosphériques dans le Pacifique Sud, en Australie, entre 1952 et 1957.
Dès le milieu des années 1960, avec la création d’un laboratoire et de deux services de
surveillance et de contrôle regroupant du personnel du CEA et du ministère de la Défense, un
dispositif complet de surveillance radiologique de la Polynésie française était en place (cf. Annexe 4).
Basé initialement à Faaa, le Laboratoire de surveillance radiologique (LSR) exécutait toutes
les analyses nécessaires à la surveillance radiologique de la Polynésie. Il était également responsable
de l'édition d'un rapport sur la radioactivité du territoire polynésien comprenant de très nombreux
résultats de mesures réalisées sur les différentes composantes de l’environnement de Polynésie.
Chaque année depuis 1966, ce rapport est adressé au comité scientifique sur les effets des
radiations atomiques des Nations Unies (Unscear). Par la suite, basé à Mahina, le LSR est deve-
nu le Laboratoire d'étude et de surveillance de l'environnement (Lése). Aujourd’hui encore, ce
laboratoire relevant de l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) est la structure de
référence en matière de surveillance radiologique de la Polynésie française.
Le Service mixte de surveillance radiologique (SMSR) était chargé de la surveillance du milieu
physique (air, eau, sol) en Polynésie française ainsi que du suivi dosimétrique de l’ensemble du
personnel employé sur les sites du CEP (cf. Chapitre VI). De son côté, le Service mixte de contrôle
biologique (SMCB), responsable de la surveillance biologique de l’ensemble de la Polynésie
française, effectuait les prélèvements d'échantillons des produits entrant dans la ration alimentaire des
populations vivant dans les différents archipels. Ces deux services disposaient de laboratoires de
mesure adaptés à leur mission. Le SMSR et le SMCB ont fusionné en 1994, pour former le
Service mixte de sécurité radiologique et biologique de l’Homme et de l’environnement (SMSRB).
Depuis la fermeture du CEP, en 1996, l'ensemble des échantillons prélevés sur les sites
d'expérimentations lors des campagnes annuelles de surveillance est envoyé au Service de radio-
analyse, chimie de l’environnement (SRCE) de la Direction des applications militaires du CEA, où
ils font l’objet d’une préparation et d’un traitement chimique avant la mesure de tous les radio-
nucléides d’origines naturelle et artificielle, émetteurs alpha, bêta et bêta-gamma.
Les différents laboratoires de mesure ont participé régulièrement aux intercomparaisons
nationales et internationales qui ont permis de valider leurs résultats au cours du temps. Depuis
1996, toutes les analyses environnementales du SRCE sont couvertes par l’accréditation Cofrac
(Comité français d’accréditation) et depuis 2004, ce service est agréé par la Direction générale de
la sûreté nucléaire et de la radioprotection (DGSNR) pour les analyses environnementales.

III.2 - CHOIX DES COMPOSANTES À SURVEILLER


La qualité et la cohérence d’une surveillance radiologique résident dans la rigueur des
opérations de prélèvement, de préparation et de conditionnement des échantillons. Mais, avant
tout prélèvement, il est nécessaire de procéder à une sélection des indicateurs environnementaux
les plus judicieux en fonction de deux objectifs majeurs :
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 91

• connaître, à tout moment, les niveaux représentatifs de la radioactivité d’origine artificielle des
différentes composantes de l’environnement ;
• estimer la composante dosimétrique associée aux niveaux d’activité des radionucléides
d’origine artificielle mesurés. Depuis l’arrêt des essais atmosphériques, cette composante est
essentiellement associée à l’exposition interne, par ingestion d’aliments contenant des
radionucléides issus des dépôts historiques.

Pour satisfaire ces objectifs, des échantillons représentatifs des différentes composantes
physiques (biotope) et biologiques (biocénose) de l'environnement doivent être prélevés, en
association avec ceux de la ration alimentaire de la population vivant en Polynésie.
La surveillance radiologique des biotopes concerne l’atmosphère, l’hydrosphère et la géo-
sphère. L’atmosphère est caractérisée par des prélèvements d’aérosols et d’eau de pluie ; le
domaine terrestre par des prélèvements d'échantillons de sols et d'eaux de source et de rivière ;
le domaine marin par des échantillons d'eaux de mer, des lagons et de l’océan, de matières en
suspension (MES) et de sédiments.
L’ensemble des espèces présentes dans les différentes biocénoses ne pouvant toutes
être échantillonnées dans le cadre d'une surveillance radiologique, un choix doit être fait. Cette
sélection des espèces, tant végétales qu’animales, nécessite une bonne connaissance de l’écologie
des sites surveillés. Sur les atolls polynésiens, et en particulier ceux de Mururoa et de
Fangataufa, les prélèvements d’indicateurs biologiques ont été réalisés dans le milieu terrestre
(îlot ou motu) et dans le milieu marin (lagon et océan). Les indicateurs biologiques sélectionnés
devaient répondre à un ou plusieurs des critères suivants :

• permanence et disponibilité en quantité suffisante de l’espèce, au cours du temps, dans une


aire géographique donnée, associée à une facilité de récolte ;
• vitesse d’incorporation des radionucléides par l’espèce considérée, qui détermine la rapidité
avec laquelle est obtenu l’équilibre entre l'activité des radionucléides dans l’espèce et l'activité
de ces mêmes radionucléides dans le milieu ambiant. Lorsque cette vitesse est élevée, ces bio-
indicateurs dits sentinelles jouent le rôle de balises biologiques. Ils sont en permanence
révélateurs de l’évolution spatio-temporelle des niveaux d’activité de l’eau et de l’atmosphère ;
• aptitude de l’espèce, ou d’un organe de l’espèce, à concentrer un ou plusieurs radionucléides.
Plus le facteur de concentration Fc sera élevé (cf. Chapitre II), plus il sera aisé de mettre en
évidence les traces de radioactivité ajoutée dans l'environnement ;
• appartenance de l’espèce à la ration alimentaire des populations vivant en Polynésie.

Les modalités de la surveillance radiologique justifiées par les activités menées au CEP ont
évolué au cours du temps, en fonction des conditions des essais. Deux périodes doivent être
considérées.
La première de 1966 à 1974, est celle des essais atmosphériques. Deux types de
contribution de radionucléides dans l'environnement peuvent alors être distingués, les apports
correspondant aux essais sur barge et ceux liés aux essais sous ballon. Durant cette période, la pré-
occupation majeure sur les sites, était de garantir la sécurité des expérimentateurs qui circulaient sur
le lagon, effectuaient des travaux sous-marins, utilisaient et consommaient l'eau en provenance des
bouilleurs des bateaux présents dans le lagon. Concernant les populations polynésiennes, la pré-
occupation était de vérifier que l’exposition due aux retombées des essais restait bien inférieure aux
limites annuelles définies dans la réglementation. Dans les deux cas, il s'agissait de poursuivre un
objectif de radioprotection en vérifiant qu’il n’y avait pas d’accumulation des radionucléides au
cours du temps au-delà des concentrations maximales admissibles.
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92 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

La deuxième période, de 1975 à 1996, est celle des essais souterrains. Elle est caractérisée
par des apports d'activité quasi inexistants dans la biosphère et limités à l'environnement des lagons
des atolls d'expérimentations. L’objectif principal de la surveillance radiologique, outre les aspects de
radioprotection, était également de vérifier le bon confinement des radionucléides au sein du massif
géologique. La radioactivité artificielle du lagon ayant décru rapidement après l'arrêt des essais
atmosphériques, il s'agissait de suivre l'évolution à la baisse de l’activité des radionucléides à
l’état de traces. Les techniques de prélèvement et de mesure ont été adaptées à cet objectif. Un
suivi radiologique de type environnemental à des niveaux d’activité très faibles a été mis en place
afin de détecter un relâchement éventuel de radionucléides à partir des cavités souterraines.

III.3 - STRATÉGIE DE PRÉLÈVEMENT D’ÉCHANTILLONS


Le système de surveillance de l’environnement et des produits entrant dans la chaîne
alimentaire conduisant à l’Homme peut être décrit comme un système à emboîtements à trois
niveaux en partant du terme source : les sites d’expérimentations, le territoire polynésien au-delà
de 12 milles nautiques des sites d'expérimentations et enfin de l'ensemble de l’hémisphère Sud. La
stratégie de prélèvements a été adaptée pour tenir compte de l’évolution des procédures d’essai
entre 1966 et 1996, puis de l’arrêt des essais jusqu’à nos jours.

III.3.1 - SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

III.3.1.1 - REPÉRAGE GÉOGRAPHIQUE DES STATIONS DE SURVEILLANCE

Dès 1962, des missions hydrographiques ont dressé une carte précise des atolls. Sur la
bande corallienne, les points précis ayant servi aux relevés topographiques, ont emprunté leurs
noms à ceux de fleurs, oiseaux, prénoms féminins, ainsi qu’à des éléments de l'alphabet phonétique
international. Ces noms ont ensuite servi à désigner les zones entourant ces points.
Pour les besoins des essais souterrains sous les lagons, un système complémentaire de
repérage de la partie sous-marine a été défini sous la forme d'un quadrillage de mailles de 500
mètres par 500 mètres, dont la position est précisée par des noms d'animaux marins en abscisse
et des chiffres en ordonnée (Fig. 47).
Dans certains cas, les appellations d’installations techniques caractéristiques ont été
substituées au nom du lieu sur lequel elles étaient implantées. C’est le cas, à Mururoa, pour :

• le Poste de commande de tir (PCT), en zone Anémone ;


• les zones d’activités utilisées par les personnels militaires (zone Martine) et par les personnels
civils (zone Anémone). Cette zone est le point kilométrique de départ (PK zéro) des bornes kilo-
métriques de la route allant soit vers le nord (PK Nord) soit vers le sud de l’atoll (PK Sud). Ce
repérage était utilisé plus particulièrement pour localiser les essais souterrains sous la
couronne corallienne (par exemple PK 3 Nord, PK 6 Sud) ;
• les zones industrielles (zones Nicole et Odette) où se trouvaient la centrale électrique, la centrale
d’ensilage du ciment, l’incinérateur et la centrale de concassage des agrégats coralliens ;
• la zone aéroportuaire où étaient mouillés ou embossés la plupart des bâtiments dont le BSL
Rance, bâtiment de sécurité radiologique et médicale, le BSL Garonne et les bateaux bases
avant l’installation à terre des personnels, en 1973.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 93

L'ensemble de ces repères a été utilisé pour positionner les points zéro des essais, les
zones faisant l’objet d’un suivi et les stations de surveillance de l'environnement.

55 56
PEA
55 56
39 40 PEE Empereur N 39 40
53 54
51 52 N Colette Denise a 53 54
51 52 37 38
Passe b 37 38
ra Pingouin BPV
49 50 Do 49 50
35 36 Kilo 35 36
47 48 Brigitte ith 47 48
Ed e 33 34 Manchot
45 46 ois 45 46 33 34

43 44 Canon Fra 43 44
31 32 31 32
41 42
élia
41 42
m Pavillon
39 40
Ca e e 39 40
29 30 PEA 29 30
Aline lèn e nn
Hé Irèn Jea
37 38 37 38 Alpha
35 36 35 36 27 28 Frégate 27 28
33 34
Kathie 33 34
25 26 25 26
31 32 Passe Lea 31 32
Motu aux
29 30 Martine 29 30 23 24 23 24
oiseaux
27 28 27 28
21 22 21 22
25 26 25 26
23 24
Giroflée Anémone PCT 23 24 19 20 19 20
21 22 Nic 21 22
17 18 Fox 17 18
PEA Grue ole
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19 20 19 20
Ode
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17 18 tte 17 18 15 16 Hélène 15 16
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13 14 nd Bleu lette 13 14 13 14
ine Viviane Que et 11 12
11 12 Ch en 11 12 11 12
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9 10 ta l Simeine 9 10
9 10 Echo 9 10
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1 2 1 2
-1 -2 Terme Sud -1 -2
MURENE
AIGUILLETTE

DRAGON

GORGONE
HIPPOCAMPE
ISURUS
JANIE
KRILL
LABRE

NERITE
ORQUE

REQUIN

UMBRE
VERMET

XENIA
YELLOWFIN

ZEBRASOMA
ZOOPLANCTON
APRION
ABALONE

CRABE

EXOCET
FLET

PIEUVRE

SCALAIRE
TAZARD

WHALE

ZANCLUS
ASTERIE
BARRACUDA

PORCELAINE
BIGORNEAU

ZIERLIANA
CERITHE

TROQUE
FUSEAU

VOLUTE
LIMNÉE

NATICE
MITRE
ARCA
F IG. 47. - Repères géographiques utilisés lors des essais aériens et souterrains, et dans le cadre de la sur-
veillance environnementale des sites de Mururoa (a) et Fangataufa (b).

III.3.1.2 - PROCÉDURES DE SURVEILLANCE

Durant la période des essais atmosphériques, les appareils de prélèvement d'aérosols, dont la
finalité est de participer à la radioprotection du personnel, sont placés dans les zones où celui-ci était
temporairement présent, dans les Postes de contrôle radiologique (PCR) terrestres ou embarqués sur
les bateaux. Pendant l’essai, le personnel était évacué des sites d’expérimentations (cf. Annexe 4).
Dans les lagons, les niveaux d’activité volumiques atteints par les eaux contaminées par
l’essai permettaient leur localisation géographique rapide. Ainsi, le jour de l’essai, et dans certains
cas les jours suivants, une cartographie de la radioactivité du lagon était dressée à partir de
mesures directes du débit de dose, au-dessus de la surface de l'eau, avec une chambre d'ionisation.
Parallèlement, une première mission héliportée, dite RAD 1, prélevait un échantillon d’eau de mer à
l'aplomb du point zéro. La décroissance de cet échantillon était suivie par des mesures répétitives
en laboratoire, identifiant la contribution des différents produits de fission et d'activation. Les jours
suivants, des cartographies du lagon étaient réalisées à partir de missions de reconnaissance utilisant
un détecteur d'iodure de sodium tracté au bout d'un câble. Lorsque l’activité était proche de la
limite de détection de l’équipement, la cartographie était réalisée à partir d’échantillons prélevés
dans les différents secteurs du lagon et mesurés en laboratoire. Ces cartes, qui étaient utilisées
pour décider du retour du personnel sur site, sont présentées dans l’annexe 3 pour chaque essai.
Durant la période des essais souterrains, bien que les rejets attendus de radionucléides
dans l’environnement devaient être très faibles, un dispositif permanent de surveillance de la radio-
activité a été maintenu pour garantir la protection du personnel qui restait sur l’atoll (cf. Chapitre II). Les
premières années, il était composé de :

• stations de télémesures transmettant le débit de dose et de stations de prélèvement d'aéro-


sols atmosphériques (par pompage 100 m 3 .h -1 ) en zones Denise et Martine-Anémone ;
• dosimètres photographiques et de dosimètres thermoluminescents mesurant la dose intégrée
mensuelle. Ceux-ci étaient uniformément répartis sur l'ensemble des deux atolls.
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:44 Page 94

94 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

Ce dispositif de surveillance a été complété par un Poste de contrôle biologique (PCB)


implanté dans les zones d’activité de Mururoa.
En période opérationnelle, ce réseau était renforcé par la mise en place de dispositifs de
recueil des retombées éventuelles et par une augmentation du nombre de stations de télémesures.
Ainsi, le suivi radiologique spécifique de la partie terrestre de la zone proche du point zéro était
assuré, au moment d'un essai, par la mise en place (Fig. 48) :
• d'un suivi par télémesures du débit de dose aux quatre points cardinaux de la zone d’essai,
à proximité des cabines d'enregistrement et du réseau de prélèvement des gaz, quand il était
mis en œuvre, soit une dizaine de détecteurs ;
• d'appareils de prélèvements d’aérosols atmosphériques, sur filtre fixe ;
• d'appareils de mesure en continu de la radioactivité atmosphérique ;
• de nombreux dosimètres photographiques et thermoluminescents ;
• de bacs et coupelles pour évaluer les éventuels dépôts au sol ;
• d’un «dispositif polytubes» de prélèvement d’échantillons de l’eau libre des puits pour le contrôle
de la radioactivité en laboratoire.

N
a 1 CI
1 anémomètre - girouette
0 5 km 1 APA 100
1 bac - 6 coupelles 1 CI
1 Film - 2 FLi Denise 1 anémomètre - girouette
1 bac - 6 coupelles
Françoise 1 Film - 2 FLi

Camélia
1 CI
Passe 1 anémomètre - girouette Kathie
1 bac - 6 coupelles
1 CI 1 Film - 2 FLi
1 anémomètre - girouette 1 CI
1 APA 100 P.C. GOEN
1 CI Anémone
1 anémomètre - girouette
Giroflée 1 APA 100 PCT
1 bac - 6 coupelles
Dindon 1 Film - 2 FLi
1 CI
1 bac - 6 coupelles
1 Film - 2 FLi
Viviane Dahlia
Faucon Fuchsia
ZONE D’ESSAI
Zoé 4 CI aux quatre points cardinaux
1 APA 100 3 CI réseau gaz
1 bac - 6 coupelles 2 CI PEM
1 CI
1 Film - 2 FLi 1 APA 100
1 anémomètre - girouette
16 bacs - 96 coupelles
16 Films - 32 FLi

1 bac - 6 coupelles N
CI : chambre d'ionisation (mesure du débit de dose par télémesures) b Empereur
1 Film - 2 FLi

Anémomètre-girouette : vent au sol transmis par télémesures Passe


APA 100 : appareil de prélèvement d'air 100 m 3 .h -1
Kilo
FLi : dosimètre thermoluminescent
Film : dosimètre photographique Pavillon

Vers PCT - PC GOEN


Frégate
1 CI
1 anémomètre - girouette
1 bac - 6 coupelles
1 Film - 2 FLi
Hôtel Fox

F IG. 48. - À titre d’exemple, présentation de l’ensemble 1 bac - 6 coupelles


1 Film - 2 FLi
du dispositif de surveillance mis en place sur les sites
de Mururoa (a) et de Fangataufa (b) lors de l'essai Echo

souterrain Polyphème réalisé le 27 février 1978. 1 bac - 6 coupelles


1 Film - 2 FLi
0 2 km

Terme Sud
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:44 Page 95

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 95

Lors des essais souterrains sous le lagon, le dispositif de surveillance était basé sur la
mesure de la radioactivité près du point zéro et sur celle du débit de dose sur la barge d’enre-
gistrement mesures (BEM) où étaient mis en place :

• des systèmes de télémesures assurant la surveillance en continu du débit de dose au niveau


de la plaque de raccordement des câbles et des cabines d'enregistrement des paramètres
de l'essai ;
• des dosimètres thermoluminescents positionnés au niveau de chaque capteur radiologique
et sur les portes des cabines, permettant d'évaluer l’exposition des personnels chargés de
récupérer les enregistrements.

De même, lors des opérations de post-forage réalisées après chaque essai pour recueillir
des échantillons dans la cavité-cheminée, la surveillance spécifique du point zéro sur la couronne
était assurée par des chambres d'ionisation positionnées au point de forage, sur la zone de rejet des
boues de forage. Un shelter, situé à proximité du chantier de forage, abritait les équipements
centralisant les informations radiologiques et celles concernant la toxicité et l'explosibilité des gaz.
Une cabine vestiaires-douches était implantée à l'entrée de la zone contrôlée du chantier de forage.
En off shore, la barge de forage et de manutention (BFM) et la plate-forme de forages pour
tir sous lagon (Tila) disposaient d'un équipement équivalent pour suivre les niveaux de radioactivité et
détecter la présence de gaz explosifs. Les signaux des différents capteurs étaient regroupés
dans une Cabine de mesures radiologiques (CMR) équipée d'un tableau de contrôle des radiations
(TCR). Toutes les informations des capteurs radiologiques et des détecteurs de toxicité chimique
des gaz et de leur explosibilité, qui étaient implantés sur la barge de forage, aboutissaient au
TCR. Les informations des deux capteurs fixés sur la tulipe de la tête de puits du Forage grand
diamètre (FGD) et sur le toit de la CMR, étaient retransmises au TCR et au Poste de commande
de tir (PCT). En cas de fuite de gaz au niveau du puits de l'essai, celui-ci pouvait être coiffé d'une
cloche, rigide ou souple, qui permettait de confiner temporairement les gaz, d’en quantifier les
volumes et la radioactivité.
Au niveau de la plate-forme de forage, comme pour le dispositif terrestre, les capteurs
radiologiques et ceux des gaz explosifs ou toxiques (H 2 , CO, CO 2 , CH 4 ) étaient implantés sur le
plancher de forage, sur le dispositif de retour des boues du forage, sur la tête du puits du post-
forage, sur l'aire de dépotage, etc. Un circuit de prélèvements atmosphériques permettait de
surveiller l’ensemble des installations de la barge de forage.
En dehors du réseau installé lors de la réalisation d’un essai, les modalités de fonctionnement
du réseau permanent de suivi de l'environnement, en particulier pour la surveillance des eaux
marines, ont évolué au cours du temps, tout en restant très proches de celles définies en 1985,
à savoir :

• des prélèvements annuels à l’intérieur des lagons de Mururoa et de Fangataufa. La fréquence,


la localisation et la profondeur des prélèvements ont évolué au cours du temps, vers une
optimisation du dispositif de surveillance ;
• des prélèvements réalisés aux abords immédiats des atolls de Mururoa (8 stations) et de
Fangataufa (6 stations). Selon les emplacements, les prélèvements sont effectués, le plus
près possible du récif, en surface, à 200, 400 et 600 mètres (surface, 150 et 300 mètres
pour les passes) ;
• des prélèvements en milieu océanique, effectués en 7 emplacements situés à 12 milles
nautiques des deux sites d’expérimentations. Ils sont principalement réalisés en surface,
mais également en profondeur (300, 600 et 900 mètres), à partir de 1994.
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:44 Page 96

96 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

De plus, deux profils océaniques du tritium (eau tritiée, HTO), en fonction de la profondeur,
ont été réalisés, en 1988, à l’est et à l’ouest de Mururoa ; ainsi qu’un profil vertical océanique, en
1993, analogue à celui effectué au large de Tahiti.
Pour les sols, un bilan de la radioactivité résiduelle a été réalisé à Mururoa, en 1992, à
partir de prélèvements de surface sur les deux premiers centimètres du sol, effectués selon un
maillage de 100 m de côtés, les carottages allant jusqu'à 42 cm de profondeur (Fig. 49).

SECTEUR NORD
5 prélèvements en surface
N

Denise ZONE AÉROPORTUAIRE


Françoise 26 prélèvements en surface

Camélia
Kathie
Martine
Anémone
Nicole

Bleuet
SECTEUR EST
Simone 80 prélèvements
Viviane
Ursula Thérèse en surface
Dahlia
6 carottages
F IG . 49. - Localisation des
SECTEUR SUD
zones de prélèvement et du
SECTEUR OUEST - zone Faucon 9 carottages nombre d'échantillons de sol
0 5 km
14 prélèvements en surface prélevés par secteur, en
15 carottages
1992, sur l’atoll de Mururoa.

III.3.2 - POLYNÉSIE FRANÇAISE

La surveillance de la radioactivité du territoire polynésien au-delà de la limite des eaux


territoriales des sites d’expérimentations est effective depuis le début des années 1960. À l’origine,
cette surveillance s’inscrivait dans le cadre plus large du Réseau mondial français de surveillance
radiologique (RMFSR) décrit dans le paragraphe suivant. Depuis 1966, et encore aujourd'hui, un
rapport annuel regroupant les résultats obtenus dans le cadre de cette surveillance, hors Mururoa
et Fangataufa, est transmis à l’Unscear, via le ministère des Affaires Étrangères.
Compte tenu de l'importance de la superficie des territoires concernés, de la faible densité des
populations susceptibles d'être exposées aux retombées des essais atmosphériques et de la
diversité de leurs modes de vie, différentes îles ont été retenues pour la surveillance radiologique,
en fonction de quatre critères :

• couvrir géographiquement l’ensemble du territoire de la Polynésie française, presque 2 000 km


d’est en ouest et du nord au sud, soit près de 4 000 000 de km 2 ;
• tenir compte de la typologie des deux catégories d’îles ; îles hautes et atolls, et ceci avec le
souci de respecter les diversités environnementales et écologiques ;
• respecter la démographie, très hétérogène, de la Polynésie française ;
• tenir compte de la position des deux atolls de Mururoa et Fangataufa et des vents dominants,
facteur important quant aux trajets potentiels des retombées des essais.

Ces critères ont conduit à sélectionner différentes îles représentatives des 5 archipels et
à les intégrer au réseau de surveillance radiologique du territoire polynésien. Ainsi, pendant toute
la période des essais atmosphériques, des mesures étaient réalisées en continu par différents
dispositifs complétés par des mesures en laboratoire d’échantillons environnementaux et de la
chaîne alimentaire.
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:44 Page 97

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 97

Le réseau de surveillance comprenait :


• les Postes de contrôle radiologique (PCR) ; • les Postes de surveillance radiologique (PSR) ;
• les Télémesures sites et atolls (TLM) ; • le réseau des bouées Antoinette ;
• les moyens de détection des navires et aéronefs ;
• les Postes de contrôle biologique (PCB) ou Postes de prélèvements biologiques (PPB).

Ce réseau couvrait l’ensemble du territoire de la Polynésie française avec des PCR, à terre
ou embarqués à bord des navires. Les moyens de contrôle les plus complets (PCR et PCB)
étaient implantés dans les îles ou atolls habités les plus proches des sites d’expérimentations
(Tureia, Reao, Gambier) et ceux plus éloignés comme Tahiti (Société) en raison de l’importance
de sa population ainsi que ceux des Marquises et des Australes, comme références (Fig. 50).

155˚ W 150˚ W 145˚ W 140˚ W 135˚ W

ARCH
Nuku Hiva
Poste de Contrôle Radiologique (PCR permanent)
Hiva Oa
Poste de Contrôle Radiologique (PCR campagne)

IP
Poste de Contrôle Biologique (PCB) L

E
10˚ S 10˚ S
DE
Poste de Surveillance Radiologique (PSR A) S
MAR
Poste de Surveillance Radiologique (PSR B) QUISES

Poste de télémesures

ARC
HIP
EL Puka Puka
Rangiroa DE
ARCHIP
EL Takaroa S
15˚ S DE 15˚ S
TU
LA Makemo AM
Bora Bora Huahine
S O
Raroia TU
O

Mahina
Raiatea
C

Hao

Papeete

Reao
Taravao Anaa
Moorea TAHITI Hikueru Vairaatea
Hereheretue Ahunui

20˚ S 20˚ S
Vanavana Tureia

Tematangi Matureivavao
Anuanurunga
Maria Marutea
Sud
ARCHIPEL MURUROA
DE FANGATAUFA
S
Rimatara Morane
AU Tropique du Capricorne
S Îles
T Mangareva Gambier
R
A
Raivavae L
E
S

25˚ 25˚ S

Rapa
0 200 km

155˚ W 150˚ W 145˚ W 140˚ W

F IG . 50. - Localisation des postes de contrôle et de surveillance radiologique et biologique, en Polynésie


française, lors de la période des essais atmosphériques.
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:44 Page 98

98 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

Lors des premières années des essais atmosphériques, dans les lieux inhabités et sur
mer, des télémesures (réseau TLM et des lignes de bouées de type Antoinette) rendaient compte
du passage éventuel du nuage radioactif et du niveau de l’activité déposée à la surface du sol ou
des eaux. Le réseau complet de bouées était constitué de 5 lignes :

• la ligne Zoulou était larguée sur un arc


18° S 139° W 137° W 135° W 18° S
de cercle, à 70 nautiques du point HAO Pukarua
zéro, Reao
• les lignes Yankee (au nord) et X-ray
(au sud) étaient positionnées sur un 19° S 19° S
Vairaatea 1
arc de cercle, à 120 nautiques, 2
3
WH
• les lignes Whisky (au nord) et Victor IS
K
4
Y
(au sud) étaient positionnées sur un 20° S 20° S

arc de cercle, à 190 nautiques.


1
Tureia YA 2
En fonction des caractéristiques 21° S
3
4
N
21° S

K
de l'essai, certaines lignes de bouées

E
1 Z 1 Matureivavao

E
OU
2

X -
pouvaient être supprimées. À titre 1 2 Marutea Sud

LOU
MURUROA 3

U
2 3
Tematangi

LO
d’exemple, pour l'essai mégatonnique 4

R AY
22° S 3 4 22° S

PRIME
U
Maria
Canopus du 24 août 1968, la ligne la plus 4
FANGATAUFA
proche du point zéro, Zoulou, avait été
Iles GAMBIER
mise en place avant l’essai et les autres 23° S 23° S
Morane
après l'essai, en tenant compte des 140° W 138° W 136° W 134° W

caractéristiques du nuage et des dernières


F IG . 51. - Position des différentes lignes de bouées mises
observations météorologiques (Fig. 51). en place lors de l'essai mégatonnique Canopus du 24 août
1968.
Dans le cas de situations météorolo-
giques complexes, des lignes de bouées
complémentaires (appelés Juliette, Kilo, Lima etc.) pouvaient éventuellement être mises en place
en fonction de l’évolution des conditions météorologiques après l’essai, au vent d’atolls habités,
dans un objectif d’alerte. Les installations de ce dispositif fournissaient un ensemble très complet
de mesures, réalisées avec des matériels spécialement conçus pour résister aux conditions
tropicales. Des équipements «tropicalisés», dérivés de cette génération de matériels, sont
encore utilisés pour réaliser des mesures dans des environnements agressifs.
Pendant la période des essais souterrains, le dispositif de surveillance des niveaux de la radio-
activité atmosphérique a été allégé au cours du temps, puisque le risque d'une contamination de
l'atmosphère était inexistant, en dehors de la zone du lagon où était effectué l'essai. Cependant, à
titre de précaution, le dispositif en place lors de la période des essais atmosphériques a été pour
l'essentiel reconduit lors des premiers essais souterrains, en 1975 (Fig. 52).
Il reposait alors sur les moyens de mesure et d’intervention suivants :

• des PCR à terre à Tureia, Reao, Totegegie (îles Gambier), Hao et Tahiti (station permanente
de Mahina) ;
• des PCR embarqués sur les navires E.V. Henry, Rivière, Protet, Paimpolaise, Lorientaise et
BCB Marara ;
• des PSR à Taravao (Tahiti), Bora Bora, Rangiroa, Makemo, Hiva Oa, Hereheretue, Raivavae,
Tubuai ;
• un réseau de balises de télémesures implantées sur les atolls de Tematangi, Matureivavao,
Morane, Pukarua, Vahitahi, Vairaatea, piloté par la station centrale de Tureia ;
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:44 Page 99

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 99

• un PCB à Tahiti (station permanente de Mahina), Hao, Reao, Tureia et Mangareva (îles Gambier) ;
• un aéronef équipé de moyens de détection de la radioactivité d'un nuage issu d'une éventuelle
fuite, pouvant réalisé un largage de bouées radiologiques ;
• le BCB Marara pour la détection d’une éventuelle émission sous-marine au moment de l'essai
et pour le suivi de routine du milieu correspondant à la zone océanique des 200 milles nautiques
prévue par les conventions internationales ;
• le BDC Trieux était en alerte pour une éventuelle intervention sur un atoll habité.

155˚ W 150˚ W 145˚ W 140˚ W 135˚ W

ARCH
Poste de télémesures
Hiva Oa
Poste de surveillance radiologique (PSR)

IP
10˚ S Poste de contrôle radiologique (PCR) 10˚ S
L

E
Poste de contrôle biologique (PCB) DE
S
MAR
QUISES

ARC
HIP
EL
DE
Rangiroa S
ARCHIP
15˚ S EL TU 15˚ S
DE AM
LA Makemo O
Bora Bora TU
Mahina S
Hao
O
C

Pukarua

Taravao Vahitahi
Tahiti

Hereheretue Reao

20˚ S Vairaatea 20˚ S


Tureia
ARCHIPEL
DE Matureivavao
S Tematangi
AU MURUROA
S
T FANGATAUFA
Tubuai R
A
L Morane Îles Gambier
E

Tropique du Capricorne
S

0 500 km
Mangareva
Raivavae
155˚ W 150˚ W 145˚ W 140˚ W
25˚ S

F IG . 52. - Localisation des postes de contrôle et de surveillance radiologique et biologique en Polynésie


française lors des essais souterrains effectués en 1975.

Après l'obtention des garanties scientifiques d'une absence totale de risque radiologique
pour les atolls les plus proches des sites d’expérimentations lors des essais souterrains, le
réseau de surveillance a été remanié. De 1976 à 1978, les PCR et PCB ont progressivement été
remplacés par des dispositifs de mesure allégés. Le PCB et le PCR de Tahiti, positionnés à Mahina,
ont toutefois été maintenus, à titre de référence pour la mesure de la radioactivité de l'hémisphère
Sud.
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:44 Page 100

100 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

Le réseau de télémesures, qui fournissait des valeurs du débit de dose en temps réel, ne
se justifiait plus dans le contexte des essais souterrains. Il a donc été supprimé en 1983, pour
être remplacé par une surveillance de la dose intégrée au cours du temps à l’aide de dosimètres
passifs (films et dosimètres CaSO 4 de grande sensibilité) sur les îles habitées proches des sites
d’expérimentations : Tematangi, Tureia, Marutea Sud, Nukutavake, Reao, Taku (îles Gambier) et
Pukarua.
Pendant toute la durée des essais souterrains, ces dosimètres ont donné des résultats
correspondant à des niveaux d’exposition dus au rayonnement cosmique naturel, confirmant l'absence
d'exposition d'origine artificielle. Les collecteurs de retombées des aérosols et des pluies du réseau
de PSR ont été maintenus pendant quelques années à Tahiti (Arue), Hiva Oa, Tubuai, Hao et Mururoa
et intégrés à la surveillance des retombées de la radioactivité atmosphérique résiduelle de
l'hémisphère Sud, en complément des appareils de prélèvement d'aérosols en place à Mururoa.
Les équipes scientifiques du BCB Marara ont poursuivi les prélèvements d’échantillons
dans toutes les zones maritimes et terrestres de la Polynésie française. Il faut noter que des
prélèvements d'eaux de mer de surface ont régulièrement été effectués dans le domaine océanique
au voisinage des 4 îles polynésiennes, Tahiti, Hiva Oa, Tubuai et Mangareva (Gambier), pour servir de
référence de la radioactivité des eaux du Pacifique Sud. En complément, deux profils verticaux
océaniques ont été réalisés, en 1988 et 1993, au large de Tahiti. Le premier était destiné à la
mesure du tritium (forme HTO), de la surface à 1 200 mètres de profondeur. Le second a permis de
déterminer la répartition verticale des concentrations en 90Sr, 137Cs et 239+240Pu, jusqu’à 2 300
mètres de profondeur.
À l’heure actuelle, le réseau de surveillance radiologique du territoire polynésien est maintenu
sur 7 îles représentatives des 5 archipels :

• Archipel de la Société. Deux îles ont été sélectionnées : Tahiti et Maupiti. Tahiti, d'une surface
émergée de 1 042 km 2 est la plus grande île de l’archipel. Elle accueille 70 % de la population
du Territoire avec 170 000 habitants en 2002. Maupiti a une superficie de 12 km 2 sur lesquelles
vivent environ 1 000 habitants. Elle se situe à l’extrême ouest de l’archipel de la Société.
• Archipel des Tuamotu. Deux îles ont été retenues : Rangiroa et Hao. Rangiroa se trouve
à l’extrême nord-ouest de l’archipel. C’est le plus grand et le plus peuplé des atolls des
Tuamotu, avec 79 km 2 de terres émergées et environ 2 350 habitants. Au sud-est de l’archipel,
il est situé à 450 km, au nord-ouest de Mururoa. Hao est un atoll d’une superficie totale de 720
km 2 , dont 30 km 2 de terres émergées. Avec 1 300 habitants, Hao est, après Rangiroa, l’atoll
le plus peuplé de l’archipel des Tuamotu.
• Archipel des Gambier. Mangareva qui a été retenue pour la surveillance est la plus grande
île de l’archipel. C’est une île haute de 15 km 2 , comptant un peu plus d’un millier d’habitants.
Il s’agit de la seule île retenue pour la surveillance radiologique qui soit située à l’est des
atolls de Mururoa et Fangataufa, dont elle est distante de 450 km.
• Archipel des Marquises. Hiva Oa fait partie du groupe sud des îles de cet archipel. C’est une
île haute de 315 km 2 , habitée par environ 2 000 personnes en 2002. Elle est considérée
comme la plus fertile. Hiva Oa présente la particularité de se situer au nord du territoire
polynésien, à 1 800 km des atolls de Mururoa et Fangataufa. C’est l’île la plus éloignée des
atolls d’expérimentations à faire l’objet d’une surveillance radiologique.
• Archipel des Australes. L’île retenue est Tubuai. Avec 45 km 2 , c’est la plus grande des cinq
îles habitées. 2 200 habitants y ont été recensés en 2002. Elle est localisée à environ 1 100 km
des atolls de Mururoa et Fangataufa.

Ce sont les résultats de la surveillance radiologique, essentiellement des produits alimentaires,


de ces 7 îles et atolls qui sont aujourd’hui transmis à l’Unscear.
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:44 Page 101

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 101

III.3.3 - RÉSEAU MONDIAL FRANÇAIS DE SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE


En 1960, la surveillance radiologique des atolls polynésiens s'inscrivait dans le cadre du
Réseau mondial français de surveillance radiologique (RMFSR). Le SMSR était également chargé
de recueillir les informations issues d’un réseau mondial de postes de contrôle de la radioactivité pour
suivre les retombées radioactives troposphériques et stratosphériques des essais français, mais
aussi de la radioactivité résiduelle provenant des campagnes d’essais, importantes de par leur
nombre et la puissance des explosions, menées par les États-Unis, l'URSS et le Royaume-Uni durant
la décennie précédente. Les stations de prélèvements d’aérosols atmosphériques et de produits
alimentaires, étaient réparties
sur l'ensemble de la planète
au niveau des territoires
français : métropole et terri-
toires d'outre-mer, de pays
étrangers où la France dis- Stockholm

posait d'une implantation Vancouver


Montlhéry Rome
Varsovie

(bases militaires) et plus par- Washington Téhéran Tokyo


Mers-el-kébir
ticulièrement des pays Océan Atlantique
Hommaguir
Beyrouth New Delhi

Mexico Océan Pacifique


d'Amérique du Sud avec les- Bogota
Dakar Manille
Océan Pacifique Cayenne
quels une coopération bila- Quito
Douala

térale avait été établie : Chili, Papeete Lima Luanda Diego Suarez
Jakarta
Rio de Janeiro Nouméa
Colombie, Équateur et Pérou La Paz
Pretoria Océan Indien
(Fig. 53). Santiago
Buenos Aires

À l’arrêt des essais Réseau mondial de surveillance des retombées :


atmosphériques, en 1975, le Postes du réseau de coopération : Wellington

réseau s’est allégé des sta- FIG. 53. - Localisation des stations de prélèvement d'échantillons d'aéro-
tions situées en dehors du sols atmosphériques et de produits alimentaires appartenant au réseau
territoire polynésien, en parti- mondial français de surveillance radiologique.
culier celles situées en
Amérique du Sud.

III.4 - PRÉLÈVEMENTS D’ÉCHANTILLONS ENVIRONNEMENTAUX


Les équipements de prélèvement et les protocoles de mesure ont évolué au cours du
temps afin de pouvoir quantifier la baisse des niveaux d'activité de l'environnement lors du passage
des essais atmosphériques aux essais souterrains, en tenant compte des progrès technologiques.

III.4.1 - PRÉLÈVEMENTS ATMOSPHÉRIQUES

Deux types d’échantillons, les aérosols et les eaux de pluies, sont prélevés pour caractériser
les niveaux d’activité de l’atmosphère des sites.

III.4.1.1 - AÉROSOLS

Les aérosols et poussières atmosphériques sont collectés en continu sur des filtres au
moyen de pompes à grand débit. Les filtres sont mesurés ultérieurement en laboratoire.
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102 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

Pendant la période des essais atmosphériques, les appa-


reils de prélèvements d'air étaient multiples. Ils couvraient les
gammes 1, 10, 100 et exceptionnellement 1 000 m 3 .h -1 , l'appareil
le plus utilisé à l'extérieur était l'APA 100, Appareil de Prélèvement
Atmosphérique d'un débit de 100 m 3 .h -1 . Le spectre granulomé-
trique des retombées proches étant constitué d'une fraction impor-
tante de particules lourdes, ces appareils étaient dotés d’une tête
de prélèvement omnidirectionnelle permettant d’améliorer la collecte
de cette fraction. Les résultats fournis par ces appareils, complétés
par ceux des études granulométriques mettant en œuvre des
impacteurs, des bacs collecteurs de retombées et des autoradio-
graphies, permirent d'affiner la connaissance des spectres granulo -
métriques des retombées afin d'améliorer les modèles de prévision
de l'impact radiologique des essais atmosphériques.
Les modifications de l’APA 100 dans les années 1980
conduisirent à la qualification du CASA 110, Collecteur d'Aérosols
de Surveillance Atmosphérique d'un débit de 110 m 3 .h -1 . La tête
d’aspiration, placée à 1,20 mètre du sol, est protégée des intem-
péries par un chapeau conique. Le média filtrant utilisé est carac-
térisé par un rendement de piégeage de 99 % pour les particules
inhalables. En revanche, les protocoles de prélèvement ont peu
évolué au cours du temps : le prélèvement est d'environ 2 000 m 3
filtrés sur 24 heures. Changement du filtre sur un Casa.
Dans le cadre de la surveillance de l'atmosphère réalisée à
Papeete à Tahiti par le Lése (IRSN), les aérosols sont prélevés à l'aide d'un appareil à haut débit de
400 m3.h-1. Le média filtrant est en polypropylène, de 27 par 48 cm de côté, ayant une capacité de
rétention proche de 100% pour les particules de 1 à 10 µm. Le prélèvement est effectué en continu,
les filtres étaient changés tous les cinq jours et groupés par deux pour la mesure de l'indice bêta
global, du 90 Sr et des radionucléides émetteurs gamma.
Dans tous les cas, les équipements sont utilisés dans un environnement très contraignant
(atmosphère tropicale avec une humidité relative pouvant atteindre 100 % en présence d’embruns
salés, etc.). Un caisson d’isolation sonore mis en place dans les années 1980 permet leur utilisation
en continu à proximité des habitations.

III.4.1.2 - EAUX DE PLUIE

La collecte des eaux de pluie est réalisée à


l’aide d’un pluviomètre en inox, de forme conique
et de 1 m 2 de surface de section efficace. Le pré-
lèvement est généralement mensuel. Cependant,
durant la période des essais atmosphériques, dans
le cas de retombées significatives, la fréquence de
prélèvement a été adaptée pour permettre de
quantifier l’évolution de l’activité des dépôts
humides au cours du temps. Les volumes d'eau de
pluie collectés mensuellement sont variables puis-
qu’ils dépendent de l'intensité des pluies suivant
les saisons. Pluviomètres à Mururoa.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 103

III.4.2 - PRÉLÈVEMENTS EN DOMAINE TERRESTRE

Le suivi radiologique des composantes physiques du domaine terrestre est réalisé à l’aide
d’échantillons d’eau de source et de boisson ainsi que d’échantillons de sol. La composante
biologique est suivie à l’aide d’échantillons de végétaux, ou de produits agricoles, entrant dans la
ration alimentaire polynésienne.

III.4.2.1 - EAU DE SOURCE/RUISSEAU

Les volumes d’eau prélevés directement dans le milieu atteignent aujourd’hui 400 litres par
échantillon. À l’heure actuelle, en Polynésie, les prélèvements sont limités au site de Papenoo, à
Tahiti avec une périodicité annuelle.

III.4.2.2 - EAU DE BOISSON

L’eau potable distribuée sur les bateaux bases stationnés dans le lagon des atolls d’ex-
périmentations faisait l’objet d’un contrôle radiologique afin de garantir un niveau respectant la
concentration maximale admissible dans les eaux de boisson. À bord de certains bateaux base,
l’eau potable était obtenue par désalinisation de l’eau de mer à l’aide de bouilleurs. Le facteur de
désalinisation, donc de l’activité, était de l’ordre d’un facteur 1 000. L’eau en sortie des bouilleurs
était stockée dans une cuve tampon isolée du circuit de distribution des bateaux. Elle faisait l’objet de
prélèvements d’échantillons qui étaient mesurés par le laboratoire SMSR du BSL Rance. Après
avoir vérifié que l’activité volumique était inférieure à la concentration maximale admissible pour l’eau
de boisson, la cuve était connectée au circuit de distribution. L’approvisionnement en eau potable était
également assuré par les ravitailleurs d’eau douce, Hanap et Giboulée, venant de Hao.
Sur les îles, les échantillons d’eau de boisson sont prélevés directement au robinet ou,
dans le passé, étaient échantillonnés dans les réservoirs d’eau de pluie. Leur volume est de
l’ordre de 40 litres. Afin d’atteindre des limites de détection plus basses par concentration des
radionucléides, le Lése réalise aujourd’hui la collecte d’échantillons de 700 litres à Tahiti.

III.4.2.3 - SOLS

Les sols des atolls polynésiens, et en particulier ceux des deux atolls d’expérimentations,
sont très pauvres en humus. Les débris de végétaux terrestres qui formeront, après décomposition
et remaniement par la faune terrestre, le sol proprement dit, s'accumulent sur le substrat de
base, constitué de sable ou de blocs de carbonate de calcium (calcite ou aragonite). Ce sol se
présentera donc, soit sous forme d'éléments organiques en surface, soit sous forme de particules
organiques associées à des quantités variables de sable de carbonate de calcium. Par endroit, la
couche meuble est totalement inexistante, laissant apparaître la roche calcaire de base (dalle
corallienne).
Pour les îles hautes, comme Tahiti, des cartographies complètes des sols ont été réalisées
sur des radiales partant de la route littorale et remontant jusqu’au plateau. Sur chacune d’elles,
des échantillons ont été systématiquement prélevés, sur le plateau, à mi-pente, dans la vallée et
à proximité de la route littorale. Ces sols affichaient des caractéristiques différentes, pouvant
influencer l'évolution au cours du temps des activités massiques des radionucléides d’origine
artificielle susceptibles d’être présents dans les dépôts suite aux retombées radioactives.
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104 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

Différents types de sols ont été identifiés :

• les sols de plateau sont des sols ferralitiques désaturés. Ils s’avèrent désilicifiés sur une
profondeur pouvant dépasser le mètre, avec un taux de matière organique d'environ 10 % en
surface, qui chute à quelques pour cent, à une vingtaine de centimètres de profondeur ;
• les sols de la zone intermédiaire, entre le plateau et la plaine côtière, sont de trois types : peu
évolués d'apport colluvial, bruns eutrophes tropicaux humifères et ferralitiques moyennement
ou faiblement désaturés. Leur désilification est plus faible que les sols de plateau et leur taux
de matière organique présente une grande variabilité, entre 5 et 20 % ;
• les sols de fond de vallée proviennent de la dégradation des apports colluviaux des flancs de
la vallée et des alluvions déposées lors des fortes crues. Ils sont hétérogènes et moyenne-
ment riches en matières organiques, de l'ordre de 5 % ;
• les sols de bord de route sont d'apport colluvio-alluvial, à caractères vertiques fréquents.
Leur teneur en matière organique est variable, de 4 à 14 %.

Les prélèvements de sols de surface sont exécutés, soit par raclage de la couche super-
ficielle sur 1 cm d'épaisseur d’une surface de 100 cm 2 (cas de Fangataufa), soit à l'aide d'un
gabarit de 20 cm sur 25 cm, permettant le recueil des deux premiers centimètres de sol.
Les prélèvements de sols en profondeur sont réalisés jusqu'à 42 cm, au moyen d'un carottier
permettant l'échantillonnage de cinq tranches superposées de sol, d'une masse approximative d'un
kilogramme (Fig. 54).

10

3
niveau sol niveau sol
2 30 2 1
10
10 2
30
10

50 10 10 3

10 50
10 4

30 10 5
3

F IG . 54. – Schéma de principe des prélèvements d’échantillons de sol en fonction de la profondeur


(les cotes sont données en cm).
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 105

À partir des activités massiques de chaque radionucléide mesuré dans les différentes
couches du sol, l'activité surfacique peut être calculée selon la formule suivante :

A s = A d .h.ρ
avec :
A s = activité surfacique, en Bq.m -2 ;
A d = activité moyenne pondérée en profondeur, en Bq.kg -1 ;
h = épaisseur de l’ensemble des prélèvements prise en compte, en m;
ρ = masse volumique du sol prélevé (1 600 kg.m -3 ).

Dans le cas où l'activité massique des couches les plus profondes est inférieure à la limite
de détection, l’activité surfacique est calculée par défaut et par excès, et l’activité surfacique
retenue est la moyenne des résultats obtenus.

III.4.2.4 - VÉGÉTAUX

Sur les atolls d’expérimentations, quatre espèces de végétaux ont fait l’objet d’une sur-
veillance radiologique particulière.

• Le Scaevola sericea, est une


plante au port arbustif prostré, très largement
répandue sur les atolls. Elle forme des fourrés
denses sur les sables littoraux, dépassant
rarement un mètre de hauteur.

Massif de Scaevola sericea.

• L’arbre de fer (Casuarina equisetifolia),


appelé aito en polynésien et filao dans l’Océan Indien,
est un arbre rameux, ressemblant à un conifère. Les
feuilles, à forme d’aiguilles, piègent efficacement les
particules atmosphériques. Cet arbre, importé de
Tahiti pour servir de plante ornementale et de coupe-
vent, a proliféré sur les atolls, pour devenir très abon-
dant à Mururoa et Fangataufa. Des échantillons
d'aiguilles font l’objet de mesures systématiques
Aito (Casuarina equisetifolia). depuis 1982.
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106 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

• Le cocotier (Cocos nucifera) est un arbre de grande taille appartenant à la famille des
palmiers. Il est très répandu dans les îles de Polynésie. À Mururoa, le cocotier a été introduit il y
a plus de cent ans. La cocoteraie y est bien développée sur les plus grands îlots de la couronne
récifale de l’atoll. Il était totalement absent à Fangataufa en 1966. En 1980, quelques dizaines
d’arbres ont été plantés dans la zone Kilo. Compte tenu du temps nécessaire pour qu’un jeune
plant donne des fruits en quantité suffisante, de 6 à 7 ans, les prélèvements de noix de coco,
limités en nombre, n’ont débuté qu’en 1988.
• Le papayer (Carica papaya) a été introduit tardivement dans le secteur Est de l’atoll de
Mururoa, lors de l’installation de la zone d’habitation. Ses fruits ont donc fait l’objet d’une surveillance
régulière, de 1979 à 1995.

Papayer (Carica papaya).

Cocotier (Cocos nucifera).

Les échantillons de feuilles de Scaevola et du Casuarina étaient prélevés à la main, puis


mesurés sans être lavés. Des échantillons complémentaires de bois, écorce, tige, etc. de ces
végétaux ont également été prélevés pour des études particulières.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 107

III.4.2.5 - PRODUCTIONS AGRICOLES POLYNÉSIENNES

Sur les atolls d’expérimentations, il n’y avait aucune production agricole et une interdiction,
toujours en vigueur, de consommer les fruits des arbres poussant sur place.
L’ensemble des archipels a fait l’objet d’un suivi radiologique des productions agricoles
locales tant végétales qu’animales.

Échantillons de la ration alimentaire

Depuis 1966, divers échantillons de végétaux issus de la production agricole et entrant


dans le régime alimentaire des Polynésiens sont régulièrement prélevés sur différentes îles des cinq
archipels, dans le cadre de la surveillance radiologique.
Ils appartiennent à 5 grandes catégories :

• les légumes - feuilles : chou, fafa (sorte


d’épinard), poireau et salades diverses ;
• les légumes - fruits : aubergine, avocat,
concombre, haricot vert, potiron, tomate et uru ou
fruit de l’arbre à pain ;
• les légumes - racines : carotte, manioc,
gingembre, navet, patate douce, pomme de terre,
tarua et taro ;
• les fruits : ananas, banane, citron, coco
coprah, melon, pamplemousse, papaye, mangue
et pastèque ;
• les viandes : bœuf local, chèvre, oeuf,
porc et poulet.

Des produits alimentaires importés, de


France, d’Australie, de Nouvelle-Zélande et des
États-Unis, sont également achetés dans les
magasins de Papeete (Tahiti). Les résultats de
mesure obtenus sur les produits importés achetés à
Tahiti étant considérés comme représentatifs de
ceux des cinq archipels, ils ne sont pas prélevés
dans les autres îles. Ces échantillons concernent la Échantillons divers d’origine terrestre
viande d’agneau, de bœuf et de poulet, le pain, les sur le marché de Papeete.
pâtes alimentaires, les pommes de terre, le riz, les
yaourts et la bière.
La bière, le jus d’ananas local, le Coca-Cola et d’autres boissons sucrées, importées,
sont analysés aujourd’hui, à raison de 10 litres une fois dans l’année.
Les données étant nombreuses, seuls les résultats des noix de coco (eau et coprah) pour
les végétaux et du lait de vache pour les productions animales seront détaillés dans le chapitre V.

Noix de coco

L’eau de coco est largement consommée dans l’ensemble de la Polynésie. La ration


journalière des populations vivant sur les atolls est estimée à un litre par personne. Elle renferme
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108 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

des sucres et des sels minéraux, notamment du potassium, en proportions variables suivant la
maturité de la noix (20 g d’extrait sec par litre pour les noix mûres). Le coprah entre pour une
moindre part dans l’alimentation humaine. Cependant, il participe largement à l’alimentation du bétail
de certains atolls sous la forme de tourteaux, obtenus après extraction de l’huile. Depuis 1962, la noix
de coco fait l’objet d’une surveillance radiologique, tant pour son eau que pour son coprah (albumen).
Pour l’analyse de l’eau de coco, les noix sont collectées jeunes, avec l’écorce encore
verte (via via en polynésien). La mesure est réalisée sur 50 g de cendres. Le taux de cendres de
l’eau de coco étant de l’ordre de 0,5%, il faut traiter 10 litres d’eau, ce qui correspond au contenu
de 30 à 40 noix.
Pour l’analyse du coprah, les noix sont prélevées à maturité (opaa en polynésien). Le taux
de cendres du coprah étant de l’ordre de 1%, il faut traiter au moins 4 kg de coprah pour constituer
un échantillon de 50 g, ce qui correspond à environ 20 noix.

Prélèvement d’eau de coco Prélèvement de coprah d’une noix


d’une noix jeune. de coco arrivée à maturité.

Lait de vache

Le lait, consommé sous des formes très diverses, est un élément essentiel de l’alimentation
humaine. Cet aliment est un constituant important de la ration alimentaire des nourrissons et des
jeunes enfants.
Les radionucléides mesurés dans le lait sont le césium, l’iode, le couple baryum-lanthane
et les isotopes 89 et 90 du strontium. Ces radionucléides ont été émis lors des essais atmo-
sphériques et sont caractérisés par des facteurs de transfert au lait de vache via l’alimentation du
bétail élevé. C'est un indicateur pertinent des niveaux d’activité des produits alimentaires.
Lors de la période des essais, le lait pouvait être acheté directement aux producteurs et
aux laiteries locales ainsi que sur le marché de Papeete.
Aujourd’hui, le lait local est acheté à une laiterie qui collecte le lait en provenance du plateau
de Taravao à Tahiti (3 prélèvements de 10 litres par an). Le lait UHT, en provenance de métropole,
est mesuré une fois dans l’année (10 litres).
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 109

III.4.3 - PRÉLÈVEMENTS EN DOMAINE MARIN

La surveillance radiologique des composantes physiques du domaine marin est réalisée à


l’aide d’échantillons d’eau de mer, de matière en suspension (MES) et de sédiments. La composante
biologique est suivie à l’aide d’échantillons d’algues planctoniques et benthiques, ainsi que
d’espèces de coraux, de mollusques, de crustacés et de poissons, dont certaines entrent dans
la ration alimentaire de la population polynésienne.

III.4.3.1 - EAU DE MER

Les prélèvements d’eau de lagon sont effectués à l’aide de bouteilles hydrographiques de


35 litres. Les prélèvements océaniques, en surface ou en profondeur, sont réalisés au moyen de
bouteilles de 100 litres General Oceanics, modèle 1080, et de bouteilles de 300 litres Néréides-
Mécabolier (photos ci-dessous). Pour les prélèvements des eaux de surface, des pompes à refou -
lement Grindex, à grand débit, ont également été utilisées, comme ce fut le cas lors de l’exercice
d’intercomparaison AIEA-Lawrence Livermore National Laboratory (LLNL)-SMSR, en 1991.
Les bouteilles de prélèvement sont réservées à une utilisation spécifique, soit pour le lagon,
soit pour l’océan, afin d’éviter toute possibilité de pollution croisée des échantillons par le matériel
de prélèvement. Leur fonctionnement est du type Niskin, sans retournement. Elles sont descendues
en position ouverte, jusqu’à la profondeur voulue repérée par sonar ou poulie compteuse. La
fermeture des bouteilles se fait par l’envoi d’un messager (masse en laiton) depuis la surface.

a b c

Mise à l'eau d'une bouteille de prélèvement d'eau de mer de type Niskin de 35 litres de volume (a)
et d’une bouteille de 300 litres Néréides-Mécabolier (b).
Bouteille de prélèvement d'eau de mer de la marque General Oceanics de 100 litres de volume (c).
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110 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

Les prélèvements d’eau de surface sont réalisés à 5 m de profondeur, ou à 2 m lorsque


la zone de prélèvement est peu profonde. Les volumes d’eau échantillonnés sont de 100 à 600
litres, pour les prélèvements océaniques, et de 30 à 200 litres, pour ceux des lagons.

Lors des essais atmosphériques, la localisation des points de prélèvements situés à l’intérieur
des lagons s’effectuait à l’aide du système Trident (croisement de deux réseaux d’hyperboles).

À partir de la période des essais souterrains, les stations de prélèvements ont été localisées à
l'aide d'un système de GPS différentiel (référence à des bornes topographiques), procurant une
précision de l’ordre du mètre. La localisation précise des zones de prélèvements océaniques est
réalisée au moyen du système de navigation du bateau Satnav ou GPS.

L’eau de mer contenue dans les puits d’essai est collectée régulièrement à l’aide d’un
dispositif dit «polytubes». Celui-ci est constitué de 12 tubes de 4 mm de diamètre assemblés dans
une gaine périphérique. Ce «polytubes» était installé dans le FGD, lors de la descente du conteneur
d’essai. Les tubes élémentaires débouchaient dans le forage à des profondeurs distinctes et
prédéfinies, permettant de prélever de l’eau à différents niveaux, entre le sommet de la zone de
bourrage et la surface. Une armoire contenait les pompes et les flacons de collecte des échantillons
d’eau reliés, en surface, à l'extrémité des différents tubes de l’assemblage (Fig. 55).

Armoire de prélèvement

Calcaires

Dolomies

Zone de transition

Détail polytube
Sommet
du bourrage

Volcanisme

FIG. 55. - Schéma du dispositif dit «polytubes» et son armoire.


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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 111

III.4.3.2 - SÉDIMENTS

Les sédiments superficiels, soit les 5 premiers centimètres, sont collectés en utilisant une
benne Shipeck (Fig. 56a). Les échantillons nécessaires aux mesures de profils sédimentaires sont
prélevés au moyen d'un carottier à gravité de type Kullenberg (Fig. 56b), permettant de réaliser des
carottes pouvant atteindre un mètre de longueur. Les prélèvements sont effectués dans des
zones sédimentaires localisées grâce à une caméra fixée sur le câble de manutention, au-dessus
de la benne ou du carottier.
Au niveau des points zéro des essais réalisés sur barge au droit de la zone Dindon, un
carottier enfoncé par battage à partir d’une embarcation a permis d’obtenir des échantillons d’environ
5 mètres de longueur.

2
1 2 3 4
1 3

1: Descente de l'ensemble et libération du carottier


2: Chute du carottier
3: Fin de phase de carottage
4: Remontée de l'ensemble

a b
FIG. 56. - (a) : benne de prélèvement superficiel de sédiment, type Shipeck avec son principe de fonctionnement
et son godet basculant rempli de sédiments.
(b) : carottier Kullenberg pour prélèvement de sédiments en profondeur avec son principe de fonctionnement.

III.4.3.3 - PLANCTON

Le plancton des eaux océaniques polynésiennes est caractérisé par une faible biomasse et
une richesse spécifique plus élevée que celle du plancton des lagons, caractérisé par une plus
forte biomasse (cf. Chapitre I). Les difficultés pour collecter des masses suffisantes de plancton
pour la mesure d’activité a conduit à définir deux protocoles d'échantillonnage, spécifiques des
lagons et du domaine océanique.
Dans les lagons, la récolte du plancton s’effectue à l’aide de filets de forme cylindro-
conique de 1 m de diamètre d’ouverture, confectionnés en toile nylon à mailles dégressives.
L’extrémité d’un filet est munie d’un collecteur en plastique percé de quatre rangées de trous (4 cm
de diamètre) obstruées par du tissu nylon filtrant. Le trait planctonique est réalisé avec une
embarcation légère de type hors-bord. Deux ou trois filets sont tractés simultanément en surface
à une vitesse réduite, entre 1 et 2 nœuds, durant deux à trois heures.
En domaine océanique, la méthode de pêche systématiquement utilisée depuis 1990 afin
de recueillir la biomasse planctonique nécessaire à l'ensemble des mesures, soit 500 g frais
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112 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

minimum, est la suivante : cinq filets (surface d’ouverture 2 m 2 , longueur 7 m, mailles dégressives
270, 140 et 75 µm) gréés sur le même câble tracteur sont mouillés à la tombée de la nuit, puis
traînés horizontalement entre 10 et 50 m de profondeur, durant 6 heures, à allure réduite (1 à 1,5
nœud). Des appareils enregistreurs fixés à l'entrée des filets, permettent de contrôler a posteriori
les volumes d'eau effectivement filtrés et les profondeurs d'immersion des filets (Fig. 57).
Au laboratoire, le contenu planctonique de chaque collecteur est passé sur deux tamis
superposés, de mailles 4 000 et 75 µm. La fraction supérieure à 4 000 µm comprenant princi-
palement des organismes gélatineux (méduses, salpes) est rejetée. La fraction 75 - 4 000 µm est
recueillie pour être égouttée sur du papier absorbant durant 5 heures, puis pesée et ensuite
desséchée en étuve à 80°C durant 72 heures.

MARARA
PY.10 1 4
MARARA
PAPEETE

filets mailles dégressives


collecteur
- 10 m à plancton

cable
tracteur

- 50 m

lest enregistreur
profondeur - distance

F IG. 57. - Gréement des filets à plancton lors des collectes en domaine océanique par le bâtiment de contrôle
biologique Marara.

III.4.3.4 - ALGUES BENTHIQUES

Les algues sont peu nombreuses sur les fonds sableux des lagons polynésiens. Ceux de
Mururoa et de Fangataufa n’échappent pas à cette règle. La végétation algale se présente prin-
cipalement sous la forme de couvertures cotonneuses ou muqueuses, violacées ou rosées, dont
la récolte en quantité suffisante pour l’analyse radiologique est difficile.
Entre 1970 et 1981, à Mururoa, les échantillons étaient uniquement constitués d’algues se
développant sur leur substrat naturel. À partir de 1982, des substrats artificiels (collecteurs
concentrateurs d’algues) ont été mis en place dans le lagon. Il s’agissait de panneaux en toile
plastique de 5 m 2 de surface, immergés verticalement à différentes profondeurs (Fig. 58a). Le temps
d’immersion d’environ 60 jours était suffisant pour permettre la croissance d’une quantité satisfai sante
d’algues, sans pour autant permettre l’installation de trop nombreux animaux. Après relevage des
panneaux, les échantillons d’algues étaient prélevés par raclage des deux faces du support.
Ce procédé original a permis de réaliser 1 350 échantillons d’algues répartis sur l’ensemble
du lagon de Mururoa en fonction des zones à surveiller plus particulièrement (Fig. 58b).
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 113

a
Bouée de repérage
en surface

Orin en nylon Colette Denise N


b
5m

Bouée de subsurface 5 5 1
6 7
10
5 4 26 70
108
Tube PVC 75 13
Passe Kathie
67
11 91
3
Sommet de la toile 37 5
18 14 118 4
46
10 17
Toile plastique épaisse 66
5m

(5 m x 1 m) Dindon 6 1
65
1 1 72
Cordage de nylon 116 18
29
28 10 1 69
35
1 2 36 47 Viviane
1
Tube PVC
Faucon 0 5 km

Cordage nylon

Gueuse en béton
de 70 kg

F IG . 58. – Schéma général du montage d’un collecteur concentrateur d’algues (a) et localisation des lieux de
prélèvements et nombres d’échantillons d’algues récoltés par station, entre 1970 et 1997, dans le lagon de
Mururoa (b).

III.4.3.5 - CORAUX

Plusieurs espèces de madréporaires


ont fait l’objet d’analyses radiologiques dans
les lagons de Mururoa et de Fangataufa :
Lobophyllia costata, Pocillopora verrucosa,
Acropora pulchra, Porites solida, Fungia
paumotensis et Fungia fungites.

En raison de leur abondance dans le


lagon de Mururoa, ces deux dernières espèces
font l’objet d’un suivi régulier. Le corail
champignon (Fungia fungites), fixé lorsqu’il est
jeune, est, à l’état adulte, libre de toute attache
avec le substrat. Le corail champignon, comme
les autres espèces de coraux, est carnivore et
se nourrit de zooplancton.
La collecte des échantillons était Fungia fungites
effectuée par des plongeurs, en apnée ou en
scaphandre autonome, selon la profondeur.
En moyenne, trois individus de 10 cm de diamètre sont nécessaires pour constituer un échantillon
de 700 grammes. Cette espèce a fait l'objet de prélèvements réguliers, entre 1972 et 1997, dans
les lagons de Mururoa et de Fangataufa. Les mesures étaient effectuées sur l’animal entier :
squelette calcaire et partie vivante réunis.
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:44 Page 114

114 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

III.4.3.6 - HOLOTHURIES

Seule l’holothurie noire, de l’espèce


Holothuria atra, est prélevée. Elle vit sur
le sable au fond du lagon et se nourrit en
ingérant et filtrant le sédiment. Elle est
parfois consommée localement.
Pour chaque échantillon, les
animaux sont fendus longitudinalement
pour être débarrassés de leurs viscères.
Seuls les téguments sont conservés
pour l’analyse radiologique, jusqu’à
obtention d’une masse de 1,5 kg.
L’holothurie a fait l’objet d’une surveillance
radiologique régulière, dans les lagons
de Mururoa et de Fangataufa, de 1967 à Holothurie noire (Holothuria atra) dans son habitat.
1997.

III.4.3.7 - MOLLUSQUES

Les prélèvements réguliers d'échantillons de mollusques des atolls de la Polynésie, y compris


sur les atolls d'expérimentations, concernent les quatre espèces suivantes :

• le bénitier (Tridacna maxima), mollusque bivalve lamellibranche, est une espèce commune
des lagons des atolls fermés. Une algue photosynthétique (zooxanthelle) vit en symbiose dans les
tissus de son manteau. Le bénitier filtre de grandes quantités d'eau de mer pour se nourrir des débris
organiques en suspension dans l’eau, du zooplancton et du phytoplancton dont le facteur de
concentration des radionucléides est très élevé. Il constitue donc l’indicateur de choix pour suivre
l’évolution de l’activité des eaux des lagons, même à des niveaux très faibles ;
Pour chaque prélèvement, une vingtaine de bénitiers adultes, de taille supérieure à 12 cm,
sont extraits de leur gangue corallienne. Les deux valves de l'animal sont écartées afin d’en séparer
les parties molles. La membrane qui recouvre les viscères est incisée pour permettre l’ablation de
l’hépatopancréas. Les deux fractions ainsi obtenues, hépatopancréas (200 g en moyenne) et
parties comestibles (1 200 g en moyenne), sont analysées séparément. Entre 1975 et 1995,
environ 500 prélèvements ont été réalisés dans les lagons de Mururoa et de Fangataufa.

• la nacre ou pintadine à lèvre noire (Pinctada margaritifera), mollusque bivalve filtreur,


est une espèce rencontrée dans tout l’Indo-Pacifique intertropical. Cette nacre, en particulier aux
Tuamotu, est utilisée pour la perliculture depuis 1968 (atoll de Manihi). Elle vit jusqu’à une profondeur
d’une soixantaine de mètres, fixée par son byssus sur les substrats coralliens qui constituent son
biotope dans le lagon des atolls ;
Dans le lagon de Fangataufa, la nacre est suffisamment abondante pour permettre une
surveillance radiologique régulière, alors qu’elle est beaucoup plus clairsemée dans le lagon de
Mururoa. Chaque échantillon est constitué d’environ 350 g de chair.
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:44 Page 115

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 115

Bénitier (Tridacna maxima). Nacres (Pinctada margaritifera).

• le troca (Trochus niloticus) est un gastéropode herbivore brouteur des gazons d’algues
se développant sur des supports naturels (platier récifal, pâtés de coraux du lagon) ou artificiels
(coques de navires…) ;
Chaque prélèvement se compose d’environ 50 individus. La masse viscérale (hépato-
pancréas, tube digestif, branchies, gonades etc.) est séparée de la chair (muscle du pied). Les
deux fractions ainsi obtenues, viscères d’un côté (750 g en moyenne) et chair de l’autre (1 350 g en
moyenne) sont soumises séparément à l’analyse. Depuis 1983, date à laquelle la population de
trocas importée dans le lagon de Mururoa est devenue suffisamment importante pour envisager une
surveillance de la radioactivité de cette espèce, environ 170 prélèvements ont été effectués. Dans
le lagon de Fangataufa, ce n’est qu’en 1991 que la population de trocas est devenue suffisante
pour permettre des prélèvements sans l’appauvrir.

• le turbo soyeux (Turbo setosus) est un gastéropode herbivore (gazons d’algues) très
répandu. Il vit sur la crête algale du récif extérieur en milieu très battu par les vagues. Le Turbo
setosus ou maua en tahitien était autrefois une espèce dont le pied musculeux était consommé en
Polynésie française. Elle l'est encore sur la plupart des atolls des Tuamotu et cause parfois des intoxi-
cations alimentaires rappelant la ciguatera.

Troca (Trochus niloticus). Turbo soyeux (Turbo setosus).

À chaque prélèvement, une centaine de turbos est ramassée à la main, de jour, quand la
marée est basse. La masse viscérale (hépatopancréas, tube digestif, branchies, gonades etc.) et
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:44 Page 116

116 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

la chair (muscle du pied) sont extraites


de la coquille. Les deux fractions ainsi
138˚ 50' W N
obtenues, viscères (650 g en moyen- Atoll de Mururoa 50
12
ne) et chair (1 500 g en moyenne) sont Denise 2
analysées séparément. Entre 1968 et 50
Françoise
1993, au titre de la surveillance radiolo- 22
gique, des stations ont été choisies Passe Kathie

dans des zones représentatives du 21˚ 50' S Anémone

récif externe des atolls de Mururoa 42 Queen


103
(15) et de Fangataufa (14) où plus de Viviane
68

huit cents prélèvements de turbos ont Dindon Dahlia


Ara
77
été effectués (Fig. 59). Faucon Zoé
25 87 0 5 km
La collecte des échantillons 4 7 23 5

des différentes espèces de mol- N


138˚ 45' W
lusques est effectuée par des plon- Atoll de Fangataufa Passe 5 5
geurs en apnée ou en scaphandre 26
Kilo 28
autonome, selon la profondeur. 1 Pingouin
7 Pavillon 22
Frégate
4
Fox 3
Hotel
F IG . 59. – Localisation des stations de prélè- 22˚ 15' S
Echo
vements et nombre d'échantillons de turbos 35
28
prélevés sur le pourtour des récifs externes 21
1
0 5 km
des atolls d'expérimentations de Mururoa et 28 Nombre de prélèvements
réalisés 28 Terme Sud
Fangataufa.

III.4.3.8 - CRUSTACÉS

Cinq espèces de langoustes sont connues en Polynésie française. Elles constituent un


complément alimentaire apprécié des populations vivant en Polynésie. L’espèce Panulirus
penicillatus est la plus commune des atolls de
Mururoa et Fangataufa et de l’archipel des
Tuamotu Est. Les langoustes habitent surtout la
pente océanique externe, jusqu'à plusieurs
dizaines de mètres de profondeur. Elles se
nourrissent de petits invertébrés, vers, mol-
lusques ou échinodermes et occasionnellement
de cadavres ou de détritus organiques. Elles
sont ramassées à la main, à marée montante,
lors de leurs incursions nocturnes sur le
platier récifal. Pour chaque échantillon, 10 à
12 individus sont collectés pour obtenir la
quantité de chair nécessaire à la mesure (3 kg).
Langouste (Panulirus penicillatus).
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:44 Page 117

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 117

III.4.3.9 - POISSONS

Les poissons prélevés dans le cadre de la surveillance radiologique appartiennent soit aux
espèces vivant dans le lagon ou sur le platier externe, soit aux espèces pélagiques océaniques.
Quatre d’entre elles sont pêchées dans le cadre de la surveillance radiologique :

• le poisson chirurgien (Ctenochaetus striatus) est le plus commun des poissons du


lagon. Il constitue une espèce de choix pour la surveillance radiologique car, herbivore, il se nourrit
d’algues filamenteuses. Il est sédentaire et très abondant dans toutes les zones ;
• le poisson perroquet (Scarus sp.) est également sédentaire, présent dans tous les massifs
coralliens. C’est un poisson herbivore (algues) ;

Chirurgien (Ctenochaetus striatus). Perroquet (Scarus gibbus).

• le surmulet (Mulloidichthys flavolineatus) est un carnivore se nourrissant des petits


invertébrés benthiques vivant dans le sable. Il vit en bancs, parfois importants, mêlé à d’autres
espèces de poissons, entre les pâtés coralliens et sur les platiers ;
• les mérous (Cephalopholis argus, Plectropomus leopardus, Epinephelus microdon,
Epinephelus merra) sont des poissons carnivores. Ils se nourrissent de langoustes, de crabes, de
crevettes et de poissons pouvant atteindre de grandes tailles.

Banc de surmulets (Mulloidichthys flavolineatus). Mérou céleste (Cephalopholis argus).


Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:44 Page 118

118 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

La pêche est effectuée au moyen de fusils sous-marins, par des plongeurs en apnée ou en
scaphandre autonome, selon la profondeur. Les poissons sont écaillés, puis leur cavité abdominale
est ouverte afin de la vider de ses viscères (tube digestif, foie, gonades etc.). Elle est ensuite rincée
à l’eau douce pour enlever toutes les salissures dues au contenu digestif. En moyenne, 2 à 3 kg
de poissons (de l’ordre de 5 à 7 individus) éviscérés (ou de chair) sont nécessaires pour la mesure.
Les poissons de haute mer, pélagiques océaniques, pêchés dans le cadre de la surveillance
radiologique appartiennent principalement aux genres bonite, thon, thazard et espadon (cf.
Chapitre I, Fig. 20). Ils sont pêchés, soit en surface par des lignes de traîne, soit en profondeur,
à l’aide de longues lignes ou palangres dérivantes. Une ou deux fois par an dans chaque île, la
quasi-totalité des poissons était pêchée par les navires océanographiques BRO La Coquille, jus-
qu'en 1972, puis par le BCB Marara, selon deux techniques, la pêche à la traîne et la pêche à la
longue ligne (ou palangre dérivante japonaise).
Pour la pêche à la traîne, le gréement consiste en deux tangons de 10 m, portant chacun
trois lignes de 70, 60 et 50 m de long. Une à trois lignes supplémentaires peuvent être fixées sur le
tableau arrière du navire. Chaque ligne est armée d'un hameçon double, appâté d'un leurre artificiel.
Les lignes sont remorquées en surface, derrière le navire, à une vitesse de 7 à 8 nœuds, à
quelques centaines de mètres des côtes ou sur les hauts fonds.
La pêche à la longue ligne est une technique de pêche utilisée principalement pour la
capture des thons hauturiers (Fig. 60). Une ligne principale est constituée, vers le bas, des avançons,
supports des hameçons et, vers le haut, des orins reliés aux flotteurs et aux pavillons. La ligne
principale est divisée en plusieurs unités, toutes identiques, appelées baskets sur lesquelles
sont gréés six avançons. La longue ligne de 20 à 40 baskets, de 7 à 14 km, est mouillée au large,
généralement au cours de la nuit, et dérive librement entre deux eaux. Les hameçons sont appâtés
au Cololabis saira, sardine importée du Japon sous forme congelée. La longue ligne est relevée
dix heures plus tard, à l'aide d'un treuil spécifique.

MARARA
P Y.1014
MARARA
PAPEETE

Ligne mère

25m Avançon

Emérillon -100 m
25m Sekiyama -200 m

-300 m

5m -400 m
Bas de ligne

Hameçon

F IG. 60. – Schéma de longue ligne utilisée


Le Bâtiment de contrôle biologique (BCB) Marara
à bord du BCB Marara, avec le détail
en cours de pêche à la traîne (tangons déployés).
d’un avançon.

Entre 1967 et 1993, ce sont essentiellement des thazards, des thons albacore et patudo
qui ont été pêchés (Fig. 61). Des échantillons de chair de ces poissons, d’environ 3 kilos, étaient
préparés de la même façon que celle des poissons de lagon, pour réaliser les mesures de radio-
activité.
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:44 Page 119

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 119

TRAÎNE DE SURFACE LONGUE-LIGNE

Albacore Espadon
Bonite (18%) (8%)
(2%) Albacore
ALBACORE
Thazard (35%)
35%
Patudo
PATUDO
(50%)
Gymnosarde (28%)
28%
(16%) Germon
Divers Divers GERMON
DIVERS (16%)
(14%) (13%) 16%
13%

F IG . 61. – Composition relative (%) des captures de poissons pélagiques océaniques, selon les deux tech-
niques de pêche utilisées par le BCB Marara, entre 1967 et 1993.

III.5 - MESURES DE LA RADIOACTIVITÉ


Les mesures de l'activité des différents radionucléides présents dans les échantillons sont
brièvement présentées dans ce paragraphe, en fonction des matrices environnementales faisant
l'objet de la surveillance radiologique.

III.5.1 - AÉROSOLS ATMOSPHÉRIQUES


Dans le cadre de la surveillance de la radioactivité atmosphérique, les mesures sont de
deux types :
• Chaque filtre fait l’objet d’une mesure des indices alpha global et bêta global immédiatement
après son retrait du filtre puis, successivement, trois jours et cinq jours après la fin du
prélèvement. Ce délai d’attente permet de s’affranchir de l’activité des radionucléides naturels de
période courte et, donc de pouvoir déceler toute activité d'origine artificielle significativement
supérieure au bruit de fond des radionucléides émetteurs naturels à vie longue.
• Pendant la période des essais souterrains, la recherche systématique des radionucléides
d’origine artificielle ( 137Cs, 238Pu, 239+240Pu) à des niveaux d'activité très faibles a conduit à
regrouper les filtres utilisés pendant un mois, voire un trimestre. Les mesures par spectrométrie
gamma étaient réalisées dans un environnement à très bas bruit de fond, dans les installations
du SMSR, au laboratoire souterrain de Modane. Les isotopes du plutonium étaient mesurés
par spectrométrie alpha, après traitement radiochimique de l’ensemble des filtres, utilisés
durant un mois ou un semestre.

Pendant la période des essais atmosphériques, les résultats des mesures réalisées en
routine étaient utilisés pour vérifier le respect des règles de radioprotection, sur la base des
recommandations du rapport n°26 de la CIPR définissant les valeurs des concentrations maximales
admissibles (CMA) dans l'air (cf. Chapitre VI). Les résultats des mesures alpha obtenus sur les
filtres étaient ainsi comparés aux CMA du 239Pu et les résultats des mesures des radionucléides
émetteurs bêta du mélange non fractionné des produits de fission, ces derniers évoluant en fonction
de l’âge du mélange, étaient comparés aux CMA 40-168 h (cf. Chapitre VI).
Dès les années 80, l'activité volumique des radionucléides d'origine artificielle initialement
présents dans l'atmosphère, aux niveaux local et mondial, avait fortement décru. Néanmoins, les
préoccupations environnementales ont amené à modifier les techniques de mesure pour s'assurer
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:44 Page 120

120 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

du confinement des radionucléides dans le massif géologique. De nouveaux protocoles de pré-


lèvement (grands volumes) et de mesure ont été définis afin d'améliorer très sensiblement les
limites de détection et de réduire les incertitudes de mesure (Tableau 11).

T ABLEAU 11.
Caractéristiques des méthodes de mesure utilisées en 1995,
pour quantifier les différents radionucléides au sein des différentes
matrices environnementales prélevées en Polynésie.
Nature de Élément Type et durée Type et durée Limite de Type de
l'échantillon recherché de la préparation du comptage détection l'appareillage
analysé (Prise d'essai) LD de mesure
Émetteurs γ 40K = 1 Bq.kg-1
Sols Étuvage, broyage, Spectrométrie γ Semi-conducteur
(500 ml) (2 h à plusieurs jours) 137Cs = 0,1 Bq.kg-1 Germanium
4 000 min
Sable Pu - Am Mise en solution Spectrométrie
Semi-conducteur
Émetteurs X Séparation sur résine α, X 0,02 Bq.kg-1
Silicium
(10 g) (15 jours) 4 000 min
Sédiments
90Sr Mise en solution Comptage β Compteur
et extraction Décroissance 90Y 2 Bq.kg-1 proportionnel
Faune (10 g) (4 jours) bas bruit de fond
100 min
α global Étuvage, broyage, Comptage α 140 Bq.kg -1 Scintillation
Flore
(250 mg) et dépôt (40 min) 100 min SZn

Tous Solides β totaux Étuvage, broyage, Comptage β 350 Bq.kg-1 Compteur


(250 mg) et dépôt (40 min) 100 min proportionnel

137Cs Concentration, Semi-conducteur


passage sur résine Spectrométrie γ 10-2 Bq.m-3 Germanium
(300 litres)
(2 jours)
Précipitation Fe(OH)3 Chambre à grille
Pu - Am Spectrométrie α
(300 litres)
purification, 2.10-4 Bq.m-3 ou détecteur
4 000 min
électrodéposition silicium
90Sr Extraction Comptage β Compteur
(200 litres) (1 jour) Décroissance 90Y 10-1 Bq.m-3 proportionnel
Eau de mer 100 min bas bruit de fond

Distillation et
Eau douce Eau tritiée enrichissement Comptage β Scintillation
120 Bq.m-3
(250 ml) électrolytique 300 min liquide
(4 jours)
Eau tritiée Distillation Comptage β Scintillation
103 Bq.m-3
(10 ml) (1 heure) 100 min liquide
Eau de mer • Compteur α
α, β global Évaporation α = 3 Bq.m-3 à scintillation
eau de mer (20 ml) sur coupelle Comptage α, β β = 3 Bq.m-3 (SZn)
Eau douce (200 ml) (1 heure) 100 min Eau douce
α = 0,15 Bq.m-3 • Compteur
β = 0,40 Bq.m-3 proportionnel

Pu Mise en solution, Spectrométrie α


(80 000 m3 traçage, séparation 10-8 Bq.m-3 Chambre à grille
4 000 min
par mois) électrodéposition
Cs Mise en solution, Spectrométrie γ Spectrométrie
Aérosols (4,4.105 m3 traçage, séparation 2.10-8 Bq.m-3 γ (GeHP)
10 000 min
par semestre) électrodéposition
atmosphériques
• Compteur α
α, β global α = 1.10-5 Bq.m-3 à scintillation
Mesure directe Comptage α, β (SZn)
(2 400 m3
sur filtres 100 min β = 4.10-5 Bq.m-3
journalier) • Compteur
proportionnel
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:44 Page 121

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 121

III.5.2 - EAUX DE MER

La surveillance de la radioactivité des eaux de mer a évolué au fil des ans, en fonction des
techniques de mesure, en privilégiant la quantification de l'activité volumique des radionucléides
ayant les périodes les plus longues tels le 239+240Pu, le 137Cs et le 90Sr. Ces derniers représentent
aujourd'hui la quasi-totalité de l’activité résiduelle des essais atmosphériques. Ces échantillons après
une filtration à 0,45 µm de porosité font l’objet de mesures des radionucléides associés à la
fraction particulaire insoluble et de ceux associés à la fraction non particulaire soluble.
Dès les premiers essais sur barge, les isotopes du plutonium ont été mesurés dans les eaux
des lagons, après filtration et séparation radiochimique. À partir de 1983, l’ajout systématique
d’un traceur, le 236 Pu, à chaque échantillon a permis de déterminer le rendement des séparations
chimiques de chaque analyse, afin de réduire l'incertitude des résultats. Avant cette date, un
rendement moyen de 56 %, déterminé à partir d'un grand nombre de mesures sur des échantillons
d'eau de mer marqués au 239 Pu, était appliqué uniformément à l’ensemble des analyses.
Le 137 Cs a été systématiquement recherché à partir du début des années 1980, par
l’utilisation de cartouches de ferrocyanure de cobalt et de potassium ou de ferrocyanure de cuivre
qui ont permis de traiter de grands volumes d’eau afin d'abaisser les limites de détection. Le 90 Sr
a été analysé de façon régulière à partir de la fin des années 1980, en adoptant le protocole
opératoire du laboratoire hydrographique allemand de Hambourg. À la même époque, le tritium
(sous forme HTO), considéré comme un précurseur d’un éventuel relâchement des radio
nucléides d’une cavité-cheminée, a été suivi de manière systématique.
Les eaux océaniques, au plus près des flancs des atolls de Mururoa et de Fangataufa, ont
été étudiées, conformément aux recommandations de la mission menée par Haroun Tazieff, en
1982.

III.5.3 - ÉCHANTILLONS BIOLOGIQUES

III.5.3.1 - CONDITIONNEMENT DES ÉCHANTILLONS

La plupart des échantillons marins sont disséqués afin d’obtenir les fractions nécessaires
aux analyses radiologiques (Tableau 12). Ainsi, un même échantillon peut fournir plusieurs sous-
échantillons ou fractions : chair, viscères, tégument, etc. Dès sa réalisation, l’échantillon (ou la
fraction) est pesé, puis identifié par un numéro individuel. Depuis 1992, l’échantillon est reconnu
par code-barres. Les informations qui lui sont associées : nature, lieu ou zone, coordonnées
géographiques, conditions particulières de prélèvement etc., font l’objet d’une saisie dans une
base de données informatique. Une trace écrite de ces informations est systématiquement conservée
sous forme de fiches de prélèvement. Le conditionnement des échantillons pour leur transport et
leur entreposage avant mesure est réalisé en sacs thermo-soudés, étanches et conservés à -30 °C.
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:45 Page 122

122 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

T ABLEAU 12.
Fraction des espèces végétales et animales prélevées sur les atolls d'expérimentations
de Mururoa et de Fangataufa faisant l’objet de mesures.

Niveau Nom Nom Fraction


trophique commun scientifique prélevée

Producteurs Algues Entière

Herbivores Plancton Entier


Mollusques gastropodes
Trocas Trochus niloticus Chair
Viscères
Turbos Turbo setosus Chair
Viscères
Mollusques bivalves
Bénitiers Tridacna maxima Parties commestibles
Chames Chama iostoma Hépatopancréas
Arches Arca ventricosa Parties molles
Petites huîtres Pinctada maculata Parties molles
Grandes huîtres Pinctada margaritifera Parties molles
Poissons
Chirurgiens Ctenochaetus striatus Éviscéré
Perroquets Scarus gibbus Éviscéré

Carnivores Coraux
Acropora Acropora pulchra Entier
Carnivores Pocillopora Pocillopora verrucosa Entier
de la Fungia Fungia fungites Entier
petite faune pélagique Lobophyllia Lobophyllia costata Entier

Carnivores Poissons
de la Surmulets Mulloidichthys flavolineatus Éviscéré
petite faune benthique

Mollusques octopodes
Carnivores
de la Pieuvres Octopus sp.
grosse faune Poissons mérous Cephalopholis argus Entier
et Epinephelus merra Éviscéré

Détritivores Echinodermes
Holothuries noires Holothuria atra Tégument
Contenu digestif

Profondeur Nature
Nom Nom
de de la fraction
courant scientifique
pêche analysée

Surface Bonite ou listao Katsuwonus pelamis Chair


Thon à dents de chien Gymnosarda unicolor Chair
Thazard Acanthocybium solandri Chair
Jeune thon albacore Thunnus albacares Chair
Jeune thon patudo Thunnus obesus Chair

100 à 200 m Thon albacore Thunnus albacares Chair


300 à 400 m Thon germon Thunnus alalunga Chair
300 à 400 m Thon patudo Thunnus obesus Chair
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:45 Page 123

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 123

Moyen Nature
Niveau Profondeur Nom
de de la fraction
trophique courant
capture analysée

Herbivores 10 à 50 m Trait à plancton Plancton Entier

Carnivores 200 à 350 m Palangre profonde Mérou Chair


" Palangre profonde Loche Chair
" Palangre profonde Lutjan Chair
" Palangre profonde Bec de cane Chair
" Palangre profonde Vivaneau Chair
400 à 500 m Filière de casiers Murène Éviscérée
" Filière de casiers Congre Éviscéré

Carnivores 150 à 200 m Dragage Ophiure Entière


détritivores " Dragage Gorgone Entière
300 à 1200 m Filière de casiers Anémone* Entière
Filière de casiers Pagure Entier
Filière de casiers Crevette Entière
Filière de casiers Crabe Entier
Filière de casiers Autres crustacés Entier
* : Anémone symbiotique du pagure.

III.5.3.2 - PRÉPARATION DES ÉCHANTILLONS

L’analyse des radionucléides d’origine artificielle s’effectue, dans la majorité des cas, sur
des cendres, après calcination des échantillons. La recherche des éléments volatils comme les
iodes fait l'objet d'une mesure sur l’échantillon à l’état frais.
Les espèces prélevées, représentent des matrices très différentes les unes des autres,
caractérisées par un taux de dessiccation ou de calcination très variable. Pour chaque espèce,
la quantité de matière à prélever est déterminée de façon à disposer, pour la mesure radiologique,
d’une masse finale d’environ 50 g de cendres. La masse de matière initiale varie entre une centaine
de grammes (coraux, par exemple) et plusieurs kilogrammes (feuilles, coprah, mollusques, crustacés,
chair de poissons etc.).

III.5.3.3 - MESURES DES ÉCHANTILLONS

Une fois broyées et homogénéisées, les cendres blanches obtenues par minéralisation
font l’objet d’une première mesure des radionucléides émetteurs gamma, directement par spectro-
métrie gamma. Tous les radionucléides émetteurs gamma émettant entre 0 et 2 MeV, comme le 40 K
(radionucléide d’origine naturelle), le 137 Cs ou le 60 Co (radionucléide d’origine artificielle), sont
quantifiés sur les cendres conditionnées dans une boîte cylindrique ayant une géométrie
normalisée. Au cours du temps, l’amélioration des équipements en métrologie nucléaire a permis
l’utilisation de détecteurs de plus en plus sensibles :

• détecteurs à cristal d’iodure de sodium activé au thallium (NaI Tl) ;


• détecteurs à jonction de germanium-lithium GeLi (milieu des années 1970) ;
• détecteurs à jonction de germanium haute pureté GeHp (début des années 1980).
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:45 Page 124

124 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

L’analyse radiochimique des radionucléides émetteurs alpha et bêta pur est ensuite réalisée
sur des parties aliquotes de cendres, variant entre 1 et 10 grammes. Les radionucléides émetteurs
bêta pur ( 90 Sr) et alpha ( 239+240 Pu) ne sont pas systématiquement recherchés dans tous les
échantillons. Généralement, deux échantillons sur trois font l’objet d’une analyse complète.
Le 90Sr est isolé à partir des cendres d’échantillon après leur mise en solution acide et une
précipitation des oxalates. Le précipité est mesuré à l’aide de compteurs proportionnels à circulation
de gaz.
Les isotopes du plutonium sont isolés par une séparation chimique sélective, après
incorporation de traceurs ( 236 Pu et 242 Pu) dans l'échantillon, suivie d’une chromatographie sur
résines échangeuses d’ions, puis d’une électrodéposition sur disque en acier inoxydable. La
quantification des isotopes émetteurs alpha du plutonium est effectuée à l’aide de chambres
d’ionisation à circulation de gaz (chambres à grille), de détecteurs semi-conducteurs au silicium
ou de détecteurs à barrière de surface.
Quels que soient les échantillons, les résultats sont toujours exprimés en becquerels par
kilogramme (ou par litre) de produit frais, ramenés à la date du prélèvement de l’échantillon.

III.6 - EXERCICES D’INTERCOMPARAISON


La participation des laboratoires de mesure à des exercices d’intercomparaison (égale-
ment appelés essais d'aptitude interlaboratoires) est indispensable pour valider les résultats de
mesure obtenus sur les échantillons provenant du programme de surveillance de la radioactivité
de l’environnement. Ces exercices permettent de vérifier la validité du programme et la qualité
des laboratoires, en particulier lorsqu’il s’agit de mesurer des traces de radioactivité dans des
matrices environnementales ayant des compositions élémentaires variées. Ces exercices consistent
à partager l'échantillon issu d’un même prélèvement en plusieurs fractions équivalentes, aliquotes,
qui sont ensuite mesurées par des laboratoires mondialement reconnus pour la qualité de leurs
résultats afin de comparer les résultats obtenus.
Depuis 1981, tous les laboratoires de mesure du CEA impliqués dans la surveillance radio-
logique ont régulièrement participé aux exercices d’intercomparaisons nationaux organisés par le
Service central de protection contre les rayonnements ionisants (SCPRI), puis par l’Office de
protection contre les rayonnements ionisants (Opri) et l’Institut de radioprotection et de sûreté
nucléaire (IRSN), laboratoire de mesure de référence de l’Organisation mondiale de la santé.
En 1983, une première délégation de scientifiques étrangers a prélevé des échantillons
sur l'atoll de Mururoa. La mission était constituée de scientifiques de pays du Pacifique Sud :
Australie, Nouvelle-Zélande et Papouasie-Nouvelle Guinée. Le Professeur Atkinson, directeur du
National radiation laboratory de Christchurch, en Nouvelle-Zélande, dirigeait cette mission durant
laquelle des échantillons de mollusques, d’algues, de coraux, de poissons, de plancton, de végétaux,
de sols, d’eaux du lagon et d’eaux océaniques ont été prélevés pour mesure de leur radioactivité
par les différents laboratoires.
Pendant la campagne d’essais de 1987, la Fondation Cousteau, assistée de laboratoires
de l’École normale supérieure, a réalisé de nombreux prélèvements d’échantillons de l’atoll de
Mururoa pour mesure de leur radioactivité.
En 1991, un exercice d’intercomparaison a été organisé à la demande de la Direction des
centres d’expérimentations nucléaires (Dircen), auquel ont participé des scientifiques de l’AIEA et
des États-Unis. Portant sur trois échantillons d’eau de mer et deux échantillons de plancton, cette
intercomparaison avait pour but de déterminer les niveaux de radioactivité naturelle et artificielle dans
l’océan, à proximité des deux sites d’expérimentations.
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:45 Page 125

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 125

En 1996-1997, lors de la fermeture du CEP, à la demande de la France, l’AIEA a réalisé


une expertise complète de l’état radiologique des atolls de Mururoa et de Fangataufa, à partir des
résultats de mesures de l’activité des différentes composantes de l’environnement ayant fait l’objet
d’une campagne de prélèvements spécifiques. Ces résultats ont été comparés à ceux obtenus
dans le cadre de la surveillance de routine du site et ont fait l’objet d’une publication détaillée,
éditée en 1998 (cf. Chapitre VII).

III.6.1 - EXERCICE D’INTERCOMPARAISON AIEA-PLANCTON

L’exercice d'intercomparaison organisé par l'AIEA en 1991 a porté sur la mesure de l'activité
massique d'échantillons de plancton océanique, récoltés au large des atolls de Mururoa et de
Fangataufa. Compte tenu de la difficulté à prélever les masses d'échantillons (300 g frais) nécessaires
aux mesures des traces de radionucléides, seuls trois laboratoires de mesure ont participé à cet
exercice : le laboratoire du SMSR, l'International laboratory of marine radioactivity de l'Agence
internationale de l'énergie atomique (AIEA/Monaco) et le Lawrence Livermore national laboratory
(LLNL/Californie). Les échantillons étaient issus de six traits planctoniques, effectués à la périphérie
des eaux territoriales, au moyen de six filets traînés pendant 6 heures. Les trois premiers (plancton
n° 1) ont été réalisés à 24 milles nautiques à l'Est des côtes de Mururoa et de Fangataufa, les
trois autres (plancton n° 2) à 12 milles nautiques à l'Ouest.
Les trois laboratoires ont obtenu des résultats cohérents (Tableau 13). Les seuls radio-
nucléides artificiels détectés sont caractérisés par des périodes longues : 137 Cs, 238 Pu et
239+240 Pu, alors que le 60 Co, de période plus courte, n'était plus quantifiable. Les activités
massiques de ces radionucléides dans le plancton prélevé en 1991 relevaient de la mesure de
traces de radioactivité, confirmant la qualité des mesures réalisées par le SMSR et les valeurs
obtenues lors des campagnes de surveillance.

T ABLEAU 13.
Résultats de l'exercice d'intercomparaison sur la mesure des activités massiques (Bq.kg -1 frais)
des radionucléides d'origine artificielle présents dans deux séries d'échantillons
de plancton océanique prélevées, en 1991, au large des atolls de Mururoa et Fangataufa.

Plancton 1 Plancton 2
Lieu
Est de Mururoa et de Fangataufa Ouest de Mururoa et de Fangataufa

Laboratoires AIEA LIVERMORE SMSR AIEA LIVERMORE SMSR

137Cs ≤ 0,06 0,030 ± 0,009 ≤ 0,06 ≤ 0,06 0,035 ± 0,009 ≤ 0,06


238Pu (1,3 ± 0,4) . 10-3 ≤ 3 . 10-3 ≤ 2,5 . 10-3 (1,1 ± 0,2) . 10-3 (1,3 ± 0,4) . 10-3 ≤ 3 . 10-3
239+240Pu (9,1 ± 1,0) . 10-3 (7,4 ± 1,4) . 10-3 (9,5 ± 1,2) . 10-3 (6,4 ± 1,3) . 10-3 (7,9 ± 1,1) . 10-3 (6,2 ± 1,1) . 10-3
60Co ≤ 0,06 ≤ 0,16 ≤ 0,06 ≤ 0,06 ≤ 0,16 ≤ 0,06

III.6.2 - EXERCICE D’INTERCOMPARAISON AIEA-ALIMENTS

En 1994, à la demande de la Dircen, un exercice d’intercomparaison a porté sur des


échantillons de cinq espèces comestibles et représentatives des milieux terrestres et marins, eau de
coco, mérou céleste, bénitier, turbo et langouste, prélevés en octobre 1994, sur l’atoll de Mururoa.
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:45 Page 126

126 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

Huit laboratoires de renommée internationale ont participé à l’exercice supervisé par le


laboratoire de l’environnement marin de l’AIEA, à Monaco :

• Marine environment laboratory (AIEA), Monaco ;


• Lawrence Livermore national laboratory, Université de Californie, Livermore, États-Unis ;
• Radiation physics department, Université de Lund, Suède ;
• Federal fisheries center, Hambourg, Allemagne ;
• Australian radiation laboratory, Victoria, Australie ;
• National radiation laboratory, Christchurch, Nouvelle-Zélande ;
• Fisheries laboratory, Lowestoft, Grande-Bretagne ;
• Service mixte de surveillance radiologique et biologique de l’Homme et de l’environnement,
du CEA et de la Dircen.

L’AIEA a été chargée d’organiser, sur le terrain, l’exercice d’intercomparaison. Ses


experts ont défini les lieux et modes de prélèvement des échantillons. Toutes les phases de
prélèvement des échantillons et celles de traitement associées (dissection, étuvage, calcination,
broyage, homogénéisation et conditionnement) ont été effectuées sous le contrôle d’un responsable
de l’AIEA, assisté de deux représentants des laboratoires étrangers. Les lieux de prélèvements
étaient uniformément répartis sur l’ensemble de l’atoll de Mururoa, dont le lagon était découpé en
quatre secteurs : Est, Nord, Ouest et Sud (Fig. 62).

139˚ 02' W 139˚ W 138˚ 58' W 138˚ 56' W 138˚ 54' W 138˚ 52' W 138˚ 50' W 138˚ 48' W 138˚ 46' W

21˚ 46' S 8 Langoustes


Eau de coco 1,33 kg
Prélèvements 10 litres
166 Mérous (39,96 kg) Turbos
1,11 kg
188 Bénitiers (14,35 kg) 4 Langoustes
72 Langoustes (10,0 kg) 0,22 kg
Turbos (6,23 kg)
21˚ 48' S Turbos Eau de coco
Eau de coco (40 litres) 1,17 kg
Secteur NORD 10 litres
52 Mérous (16,1 kg)
39 Bénitiers (2,76 kg)
1 Langouste
0,07 kg
Secteur EST
21˚ 50' S 25 Mérous (4,7 kg)
55 Bénitiers (5,02 kg)
Turbos 52 Langoustes
1,52 kg 7,1 kg Secteur SUD Turbos
Eau de coco 39 Mérous (8,1 kg) 0,28 kg
10 litres 42 Bénitiers (3,25 kg)

21˚ 52' S Turbos


Secteur OUEST 0,93 kg
50 Mérous (11,1 kg)
52 Bénitiers (3,32 kg)
Turbos
1,21 kg 7 Langoustes
1,24 kg Eau de coco
10 litres 0 1 2 3 4 km
21˚ 54' S

F IG . 62. – Lieux de prélèvements, natures et masses des échantillons prélevés à Mururoa, dans le cadre de
l’intercomparaison avec l’AIEA, en 1994.

Les résultats obtenus par les laboratoires étaient le reflet de la radioactivité d'origine
artificielle présente en 1994 dans les échantillons biologiques de l’atoll de Mururoa (Tableau 14).
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:45 Page 127

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 127

Cette intercomparaison a mis en évidence la faible dispersion des résultats de mesure


obtenus par les laboratoires participants, quels que soient les radionucléides d’origine artificielle
quantifiés, à des niveaux d’activité très faibles, souvent proches de la limite de détection. Cet
exercice a confirmé la maîtrise par le laboratoire de mesure du SMSRB des protocoles de mesure
de très faibles niveaux d’activité au sein d’échantillons environnementaux et à mis en évidence
les ordres de grandeur des incertitudes attachées à la mesure de la radioactivité des échantillons
biologiques contenant des traces de radionucléides.

T ABLEAU 14.
Résultats de mesures (Bq.kg -1 ) de l'exercice d'intercomparison de l’AIEA.
Les valeurs des résultats en 40 K, 60 Co, 90 Sr, 137 Cs, 238 Pu et 239+240 Pu obtenues
par le laboratoire du SMSRB sont comparées à celles retenues par l'AIEA.
Un echantillon de référence, hors sites, a été prélevé sur l’atoll de Rangiroa.

40K 60Co

Valeur médiane Valeur médiane


Échantillon Résultat Résultat
et amplitude et amplitude
retenues par SMSRB retenues par SMSRB
l'AIEA l'AIEA

Mérou Rangiroa 115 (108 - 153) 110 ± 8 < 0,03 < 0,017
Mérou secteur Nord 116 (105 - 149) 115 ± 8 0,04 (0,02 - 0,05) 0,038 ± 0,014
Mérou secteur Sud 117 (86 - 154) 117 ± 8 0,02 (0,01 - 0,05) < 0,027
Mérou secteur Est 116 (104 - 153) 116 ± 8 0,03 (0,01 - 0,05) 0,031 ± 0,014
Mérou secteur Ouest 112 (109 - 136) 112 ± 8 0,05 (0,04 - 0,07) 0,037 ± 0,014
Bénitier 68 (64,8 - 90) 69,0 ± 4,9 3,1 (2,6 - 3,9) 2,99 ± 0,15
Turbo 82 (76,9 - 104) 82,0 ± 5,8 0,03 (0,02 - 0,04) 0,028 ± 0,008
Langouste 127,5 (114 - 162) 114 ± 8 0,03 (0,01 - 0,04) 0,027 ± 0,010
Eau de coco 57 (51,7 - 68,3) 57,9 ± 4,1 < 0,03 < 0,0071

90Sr 137Cs

Valeur médiane Valeur médiane


Échantillon et amplitude Résultat et amplitude Résultat
retenues par SMSRB retenues par SMSRB
l'AIEA l'AIEA

Mérou Rangiroa <0,03 <0,032 0,23 (0,20 - 0,29) 0,23 ± 0,02


Mérou secteur Nord <0,01 <0,014 0,30 (0,29 - 0,33) 0,29 ± 0,03
Mérou secteur Sud <0,01 <0,021 0,30 (0,27 - 0,32) 0,28 ± 0,03
Mérou secteur Est <0,02 <0,035 0,26 (0,23 - 0,32) 0,23 ± 0,03
Mérou secteur Ouest <0,02 <0,020 0,35 (0,31 - 0,38) 0,32 ± 0,03
Bénitier 0,02 (0,01- 0,03) <0,024 0,028 (0,01 - 0,05) 0,027 ± 0,009
Turbo <0,02 <0,029 0,041 (0,01 - 0,07) 0,021 ± 0,007
Langouste <0,02 <0,022 0,10 (0,086 - 0,13) 0,086 ± 0,010
Eau de coco 0,006 (0,003 - 0,009) 0,006 ± 0,001 0,17 (0,16 - 0,28) 0,17 ± 0,02
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:45 Page 128

128 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

238Pu 239+240Pu

Valeur médiane Valeur médiane


Échantillon et amplitude Résultat et amplitude Résultat
retenues par SMSRB retenues par SMSRB
l'AIEA l'AIEA
Mérou Rangiroa < 0,00014 < 0,00018 0,00013 < 0,00018
(0,00007 - 0,00019)
Mérou secteur Nord 0,000037 < 0,000063 0,00028 0,000268 ± 0,000054
(0,000022 - 0,000052) (0,00015 - 0,00041)
Mérou secteur Sud < 0,00016 < 0,00012 0,00017 0,00017 ± 0,00006
(0,00002 - 0,00035)
Mérou secteur Est < 0,0002 < 0,00017 0,00013 < 0,00017
(0,00001 - 0,00036)
Mérou secteur Ouest 0,00016 0,00016 ± 0,00006 0,00042 0,00038 ± 0,00007
(0,00011 - 0,00021) (0,00008 - 0,00076)
Bénitier 0,147 0,149 ± 0,009 0,62 0,622 ± 0,037
(0,131 - 0,157) (0,54 - 0,71)
Turbo 0,0145 0,0167 ± 0,0021 0,110 0,113 ± 0,011
(0,0119 - 0,0171) (0,092 - 0,128)
Langouste 0,00030 0,00051 ± 0,00015 0,0020 0,0024 ± 0,0004
(0,00015 - 0,00045) (0,0015 - 0,0025)
Eau de coco <0,00004 < 0,000055 0,000046 0,000052 ± 0,000024
(0,000033 - 0,000059)

III.7 - CONCLUSION
Dès le milieu des années 1960, un dispositif complet de surveillance radiologique de
l’ensemble des atolls de la Polynésie française était en place. Il s’appuyait sur trois entités de
surveillance et de contrôle distinctes : l’une implantée à Papeete (Lése) et deux présentes sur les
sites d’expérimentations (SMSR et SMCB). Les médecins et biologistes en charge de ces laboratoires
étaient responsables de l’interprétation des résultats obtenus dans le cadre de la surveillance
systématique des retombées des essais menés dans le Pacifique.
La qualité et la cohérence de la surveillance radiologique résident dans la sélection judicieuse
des indicateurs environnementaux des niveaux d’activité des radionucléides de l’environnement.
Elles reposent également sur la rigueur des opérations d’échantillonnage, de préparation et de
conditionnement des échantillons prélevés. Les analyses radiologiques ont permis de connaître,
à tout moment, les niveaux représentatifs de la radioactivité d’origine artificielle dans les différentes
composantes de l’environnement, et d’estimer l'impact dosimétrique pour le personnel travaillant sur
les sites et pour les populations vivant en Polynésie. Ainsi, la surveillance radiologique des biotopes
polynésiens concerne l’atmosphère, l’hydrosphère et la géosphère. L’atmosphère est caractérisée par
des prélèvements d’aérosols et d’eaux de pluie ; le domaine terrestre par des prélèvements
d'échantillons de sols et d'eaux de source et de rivière ; le domaine marin par des échantillons
d'eaux de mer, des lagons et de l’océan, de matières en suspension (MES) et de sédiments. La
surveillance radiologique est complétée par des mesures de l’activité des radionucléides carac-
téristiques des essais au sein des différents indicateurs biologiques, espèces végétales et animales,
représentatifs des biocénoses polynésiennes.
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:45 Page 129

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 129

La surveillance radiologique mise en place pour suivre l’impact environnemental et sanitaire


des essais nucléaires français peut être décrite suivant deux périodes. La première, celle des
essais atmosphériques, va de 1966 à 1974. L’objectif était alors principalement d’assurer la
radioprotection des travailleurs et de la population en faisant en sorte qu’ils ne soient pas soumis
à des retombées conduisant à des expositions supérieures aux limites réglementaires. La deuxième,
de 1975 à 1996, période des essais souterrains, était caractérisée par des apports de radioactivité
très faibles et limités aux lagons. Outre les objectifs de radioprotection, il s’agissait alors de surveiller
le confinement des essais souterrains dans le massif géologique.
Le système de surveillance de l’environnement et des aliments, mis en place dès le début
des essais atmosphériques et toujours en vigueur 10 ans après l'arrêt des essais, est un système
à emboîtement à trois niveaux à partir du terme source potentiel : les atolls d’expérimentations, le
territoire polynésien au-delà de la limite des eaux territoriales des sites d'expérimentations et
l’ensemble de l'hémisphère Sud. Cependant, la fréquence de l’échantillonnage, les types
d’équipements de prélèvement et les protocoles de mesure ont évolué au cours du temps, pour
tenir compte de l'évolution à la baisse des niveaux d'activité à la suite du passage des essais
atmosphériques aux essais souterrains.
Les laboratoires chargés des mesures de radionucléides dans les matrices environne-
mentales polynésiennes ont participé régulièrement à des exercices d’intercomparaisons inter -
laboratoires nationaux et internationaux. Les résultats obtenus lors de ces exercices ont permis
de vérifier la qualité des mesures obtenues par les laboratoires chargés de la surveillance des
sites, en particulier pour la mesure des traces de radioactivité. Les résultats des intercompa -
raisons ont confirmé leur maîtrise de la mesure d’échantillons environnementaux caractéristiques
de la Polynésie. La qualité des résultats de mesure permet donc d’assurer la robustesse des
évaluations des impacts radiologiques nécessaire à la radioprotection opérationnelle du
personnel sur les sites et des populations en Polynésie.
Au total, de 1966 à 1996, la surveillance des espèces végétales et animales, à elle seule, a
conduit au prélèvement sur l’ensemble du territoire polynésien d’environ 30 000 échantillons bio-
logiques dont la plus grande partie a fait l’objet de plusieurs types de mesures conduisant à plu-
sieurs centaines de milliers de résultats (Fig. 63).

Nombre d’échantillons
annuels

2000 Arrêt des essais


atmosphériques Mururoa

1500 Fangataufa

1000

500

0
1966 1970 1974 1978 1982 1986 1990 1994
Années

F IG . 63. – Évolution au cours du temps du nombre d'échantillons biologiques réalisés annuellement sur les
sites d'expérimentations de Mururoa et Fangataufa.
Chap. 3VF-06.12.06:Chapitre 3 12/01/07 11:45 Page 130

130 MATÉRIELS ET MÉTHODE DE LA SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE

Depuis la création du CEP, ce sont donc plusieurs millions de mesures qui ont donc d’ores
et déjà été réalisées pour assurer les contrôles et la surveillance radiologiques des expérimentateurs,
de la population résidant sur les îles et atolls ainsi que de l’environnement polynésien. Une synthèse
de l’ensemble des résultats de mesure de la radioactivité, tant du milieu physique que biologique, et
de l’évaluation des conséquences radiologiques pour la population vivant en Polynésie est transmise
annuellement à l'Unscear depuis 1966.

III.8 - BIBLIOGRAPHIE
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Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 131

CHAPITRE IV

Évolution de la radioactivité
des sites d’expérimentations
À partir de la fin des années cinquante, la radioactivité d’origine artificielle détectée sur
l’ensemble des composantes environnementales de la planète : atmosphère, eau, sol et organismes
vivants, résultait des retombées de radionucléides associées aux essais atmosphériques menés
par l'ensemble des puissances nucléaires. Dans chaque hémisphère, les niveaux des dépôts au
sol des radionucléides fluctuaient en fonction de la latitude et de l’altitude des lieux de mesure.
Ceux de l'hémisphère Nord, où ont eu lieu l'essentiel des essais nucléaires atmosphériques,
étaient sensiblement plus élevés que ceux de l'hémisphère Sud (Fig. 64). Les retombées dues
aux essais réalisés à Mururoa et Fangataufa, qu’elles soient locales, régionales ou mondiales, se
sont donc superposées aux dépôts résultant des essais nucléaires des autres puissances.
Ce chapitre présente l’essentiel des résultats de mesure de l’activité des radionucléides les
plus caractéristiques des essais issus de la surveillance radiologique des différentes compo-
santes naturelles de l’environnement des sites d’expérimentations de 1966 à nos jours.

4,5 kBq.m-2
20° - 30°
4,0 40° - 50°
60° - 70°
3,5

3,0

2,5

2,0 Hémisphère Nord

1,5

1,0
Hémisphère Sud
0,5

0
1945 1950 1955 1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000

F IG . 64. - Évolution des dépôts surfaciques (kBq.m -2 )


dus aux retombées radioactives au cours du temps aux
latitudes 20° - 30°, 40° - 50° et 60° - 70° des hémisphères Nord et Sud (modifié d’après Unscear, 2000).
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 132

132 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

IV.1 - ATMOSPHÈRE
La surveillance de l'atmosphère des sites était assurée par la collecte en continu des
aérosols sur des filtres faisant l'objet d'une mesure des indices alpha et bêta globaux et des
principaux radionucléides émetteurs alpha et bêta-gamma. Pendant la période des essais nucléaires,
les résultats de l'indice alpha global sont restés très proche de la limite de détection des
mesures. En revanche, le suivi de l’indice bêta global était plus pertinent car, il traduisait fidèlement
la contribution majoritaire des radionucléides émetteurs bêta-gamma d’origine artificielle présents
dans les retombées. Cet indice fluctuait proportionnellement à l’importance des retombées
associées aux essais atmosphériques.

IV.1.1 - INDICE BÊTA GLOBAL

La mesure de l'indice bêta global de l’air sur la totalité de la période des essais permet de
suivre l’évolution au cours du temps des contributions relatives des radionucléides d’origine naturelle
et artificielle. L’évolution de la moyenne annuelle de cet indice à la station Kathie, qui fonctionnait
même en l'absence de tout personnel à Mururoa lors de la réalisation d’un essai, permet de
distinguer trois phases (Fig. 65). Une première phase, de 1966 à 1975, recouvre celle des
essais atmosphériques. Caractérisées par des fluctuations importantes, les valeurs maximales
proches de 0,03 Bq.m -3 ont été atteintes lors de la première campagne d’essais en 1966. La
deuxième phase débute l’année suivant l’arrêt des essais atmosphériques, avec la décroissance
de l’indice bêta global suivant deux périodes successives : une baisse marquée par des
fluctuations importantes jusqu’en 1975, puis plus rapide et sans fluctuation jusqu’en 1980, année
où est atteint le bruit de fond naturel de l’ordre de 2.10 -4 Bq.m -3 . La troisième phase, allant de 1980
à nos jours, montre des niveaux stables caractéristiques du bruit de fond naturel.

Bq.m-3
10-1

10-2

10-3

10-4
1966 68 1970 72 74 76 78 1980 82 84 86 88 1990 92 94 1996

F IG . 65. - Évolution de la moyenne annuelle de l'indice bêta global (Bq.m -3 ) des aérosols prélevés sur l’atoll
de Mururoa, à la station Kathie, entre 1966 et 1996.
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 133

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 133

Lors des essais atmosphériques,


des fluctuations journalières importantes Bq.m-3
se superposaient à la tendance moyenne

Rigel
annuelle décrite précédemment. L’indice
bêta global de l'atmosphère à la station 10

Kathie montrait des variations journa-


lières significatives de plus de trois
ordres de grandeur, reflétant les fluctua- 1
tions des retombées locales les jours

Bételgeuse
qui suivaient l'essai (Fig. 66). Les

Tamouré
niveaux de l'indice bêta global dépen- 10-1
daient étroitement du mode et du lieu
de l'essai, ainsi que des conditions

Aldébaran
météorologiques locales pendant les 10-2
jours suivant l'essai.

10-3
F IG . 66. - Évolution journalière de l'indice
bêta global (Bq.m -3 ) des aérosols prélevés 4.10-4
1 5 10 15 20 25 30 1 5 10 15 20 25 30 1 5 10 15 20 25 30
à la station Kathie durant la campagne
Juillet Août Septembre Jours
d'essais de 1966.

Bq.m-3
L'évolution journalière de l’indice
Phoebé

bêta global intégrait donc les contribu-


tions des retombées locales immédia-
tement après l'essai, mais aussi les
retombées différées au cours du temps
des essais les jours et semaines
10
précédents. Comme cela était prévu
par la décroissance caractéristique du
mélange de radionucléides généré par
les essais (cf. Chapitre II), une vingtaine
Rhéa

de jours après la fin de chaque


1
campagne, l’indice bêta global de
l'atmosphère revenait progressivement
au niveau de celui caractérisant la tropo-
sphère de l'hémisphère Sud (Fig. 67).

10-1

F IG . 67. - Évolution journalière de l'indice


bêta global (Bq.m -3 ) des aérosols prélevés
à la station Kathie à la suite des retombées
Panne
Panne

des essais Phoebé et Rhéa, des 8 et 14 août


10-2
1971. Les retombées immédiates ont été
suivies, fin août, de retombées différées
puis, en septembre, d'un retour au niveau de 4.10-3
l'activité volumique d'avant la série d’essais. Août Septembre Octobre
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 134

134 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

D'autres sources de fluctuations locales de la radioactivité ont été mises en évidence.


Ainsi, les radionucléides
initialement déposés au sol pou- Bq.m-3
vaient être remis en suspension
zone Kathie
par les vents et conduire très
B.S.L. Rance
localement à des augmentations

Éridan
de l'activité volumique atmosphé-

Licorne
rique allant jusqu’à un facteur 1
100 entre les stations (Fig. 68),
l’activité volumique maximale
restant cependant inférieure à
la CMA air 168h .

F IG . 68. - Évolution de l'indice bêta 10-1


global (Bq.m -3 ) de juin à juillet 1970
à la station Kathie, à terre, et sur le Remise en suspension
en zone Kathie
BSL Rance embossé en mer. Les dif-
férences significatives observées
entre les deux stations pendant les
11 jours suivant l'essai Éridan ont été
-2
attribuées à la remise en suspension 10
des radionucléides à la station
Kathie, processus qui n'était pas 4.10-3
susceptible de se produire à la 19 21 23 25 27 29 01 03 05 07 09 11 13 15 17 19 21 23
station en mer. Juin Juillet Jours

Dès 1980, la valeur de l’indice bêta global atmosphérique n’a plus montré de fluctuation
aussi importante, restant dans l’amplitude des variations naturelles du bruit de fond des atolls.

IV.1.2 - RADIONUCLÉIDES ÉMETTEURS BÊTA-GAMMA

Dans les années 80, la radioactivité artificielle des différentes composantes de l’environ-
nement ayant décru rapidement après l'arrêt des essais atmosphériques, l’objectif principal de la
surveillance radiologique était de vérifier le confinement, au sein du massif géologique, des radio-
nucléides produits par les essais souterrains. Il s'agissait de mesurer l'évolution de traces de
radioactivité. L'amélioration des analyses radiochimiques, associée à l'utilisation d'appareillages
de comptage bas bruit de fond, permit de quantifier les radionucléides au niveau des traces. Dès
lors, les radionucléides émetteurs bêta et bêta-gamma contribuant à l’activité de l'indice bêta global
ont fait l'objet d'un suivi différencié.
Les radionucléides émetteurs bêta-gamma ayant les activités volumiques les plus élevées
dans les aérosols sont d'origine naturelle : 7Be, 22Na, 40K et 210Pb. Les 7Be et 22Na sont considérés
comme les traceurs d’apports des hautes couches de l'atmosphère tandis que 40 K et 210 Pb sont
les traceurs des émissions telluriques.
L’activité volumique des radionucléides émetteurs bêta-gamma d’origine artificielle, en
particulier celle du 137 Cs, étant plus faible que celle des radionucléides d’origine naturelle, les
mesures s’effectuaient sur les filtres regroupés mensuellement. Entre 1985 et 1990, les résultats
en 137 Cs n'étaient pas significativement supérieurs aux limites de détection standards, de l'ordre
de 5.10 -7 Bq.m -3 .
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 135

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 135

À partir de 1991, les mesures ont été réalisées Bq.m-3


1.10-6
dans les installations du Laboratoire souterrain de Modane
afin de quantifier les radionucléides à l'état de traces sur
les filtres regroupés par semestre. Depuis cette date,
l’activité volumique moyenne en 137 Cs est mesurée à des
niveaux très faibles, entre 5.10 -8 et 3.10 -7 Bq.m -3 (Fig. 69).
1.10-7

F IG . 69. - Évolution semestrielle de l'activité volumique (Bq.m -3 )


en 137 Cs des aérosols prélevés, de 1991 à 1996, à la station
Martine située dans le secteur Est de l’atoll de Mururoa.
1.10-8
1991 1992 1993 1994 1995 1996

IV.1.3 - ISOTOPES DU PLUTONIUM

De 1986 à 1996, durant la période finale des essais souterrains, l’évolution de la radioactivité
atmosphérique en 239+240 Pu atteignit ponctuellement une valeur maximale de 7.10 -7 Bq.m -3 en
1987 à la suite des travaux d’assainissement entrepris en secteur Nord de l’atoll de Mururoa
utilisé pour les essais de sécurité (Fig. 70). En 1996, l’activité volumique revenait à un niveau
identique à celui de 1986, soit environ 10 -8 Bq.m -3 .

Bq.m-3
1.10-6

1.10-7

1.10-8

1.10-9
1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996

F IG . 70. - Évolution mensuelle de l'activité volumique en 239+240 Pu (Bq.m -3 ) des aérosols prélevés, de 1986
à 1996, à la station Martine, sur l’atoll de Mururoa.

IV.2 - SOLS
Les principaux radionucléides d’origine naturelle présents dans les sols de Mururoa et
Fangataufa apparaissent à des niveaux d'activité massique homogènes et comparables à ceux des
autres atolls polynésiens (Tableau 15). Le rapport 226Ra/ 232Th est en général proche de 1 à Mururoa.
Des variations de ce rapport sont observées entre les secteurs de l’atoll traduisant des proportions
variables de corail dans les échantillons de sols analysés.
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 136

136 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Durant la période des essais atmo- T ABLEAU 15.


sphériques, compte tenu des délais d'ac- Moyenne des résultats de mesure de l'activité massique
cès sur site pour les prélèvements d'échan- (Bq.kg -1 sec) des sols prélevés dans différents secteurs
tillons de sol et du temps nécessaire à leur de l'atoll de Mururoa.
préparation et mesure, les radionucléides Chaînes naturelles en Bq.kg-1 sec Nombre
Secteur de
caractérisés par les périodes de décrois- 226Ra 232Th 40K prélev.
sance les plus courtes, inférieures à
quelques heures, n'étaient plus détectés. Nord 2,73 ± 0,16 1,69 ± 0,16 12,1 ± 1,7 5
En revanche, le cortège de radionucléides Aéroportuaire 1,81 ± 0,14 1,27 ± 0,14 11,5 ± 1,7 22
de période radioactive supérieure à 4 ans,
Est 2,18 ± 0,16 1,41 ± 0,15 12,7 ± 1,9 75
essentiellement 155Eu, 60Co, 90Sr et 137Cs,
a été mesuré en association avec les radio-
nucléides à vie longue comme l'241Am et les
isotopes du plutonium, 238Pu et 239+240Pu.

IV.2.1 - RADIONUCLÉIDES ÉMETTEURS BÊTA-GAMMA


Les paragraphes suivants traitent des distributions horizontale et verticale dans les sols de
155 Eu, 60 Co, 90 Sr
et 137 Cs, ainsi que de 241 Am, radionucléide émetteur gamma de faible énergie
mesuré par spectrométrie gamma. Les résul-
tats présentés sont issus des bilans établis au 0,12
0,23
N
0,79
cours du temps après l’arrêt des essais 0,98 0,40 0,19
0,16
0,52
atmosphériques. 1,07
0,18
0,28 0,29 1-2
0,5 - 1
IV.2.1.1 - MURUROA 0,16
< 0,5
PK 2N 0,10 0,18 0,16

Afin de préciser les variations géo- 0,40


1,59
graphiques de l'activité massique de ces 0,29
0,24
Léa
radionucléides, une cartographie détaillée 0,77

suivant cinq secteurs : le secteur Nord, le 0,16


0,24
secteur aéroportuaire, le secteur d’activité à 0,76
0,10
l'extrême Est de l'atoll, le secteur Sud, et le PK 1N 0,21
point Faucon, à l'extrême ouest de l'atoll, a été 0,23
0,34 0,28

réalisée en 1992. Martine 0,26


0,32
0,21
0,16
0,15 0,68
Secteur Est 0,10 0,75 0,21
0,32
0,47
En zone Martine-Anémone, le 137Cs 0,56 0,63 1,08
0,95

0,22
était le seul radionucléide émetteur bêta- 0,62
0,83 1,15 0,46
0,17
0,78 0,12
gamma régulièrement détecté. En 1992, son PK O
0,50
0,70 0,11
0,50
activité massique, sensiblement constante sur 0,39
0,48
0,16 0,13
Anémone 0,88
tout ce secteur, ne dépassait pas 2 Bq.kg -1 0,17
0,30 0,15 0,15
0,24
sec (Fig. 71). 0,67 0,30
0,18 0,74
PK 1S 0,10
0,74
0,12 0,17
0,10
1,72 0,26
F IG . 71. - Cartographie de l’activité massique en 0,14 0,21
137 Cs (Bq.kg -1 sec) dans la couche la plus super- Nicole
0,50
ficielle des sols prélevés, en 1992, dans le
secteur Est de Mururoa.
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 137

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 137

Le 137Cs se trouvait essentiellement dans la couche la plus superficielle des sols avec, en
1992, une moyenne de 0,7 Bq.kg -1 sec (Fig. 72). Au-dessous d’une profondeur de 12 cm, les acti-
vités massiques, proches de 0,4 Bq.kg -1 sec, étaient du même ordre de grandeur que celles obser-
vées dans les mêmes couches du secteur Sud. Les autres radionucléides, 60Co, 241Am et 155Eu
étaient présents à des niveaux d'activité moyens proches des limites de détection des techniques
de mesure utilisées, respectivement 0,2, 0,7 et 6,1 Bq.kg -1 sec.

Bq par unité Bq par unité


102 102
Mururoa F IG. 72. - Profils des activités Mururoa
Zone Martine massiques (Bq.kg -1 sec) Secteur Sud
moyennes des principaux radio-
nucléides émetteurs
bêta-gamma naturels et de
10 l'activité surfacique (kBq.m -2 ) 10
des dépôts en 137 Cs mesurés
en zone Martine et dans le
secteur Sud, à Mururoa.

1 1
40K
226Ra
232Th
137Cs
0,1
0,1
0 10 20 30 40 0 10 20 30 40
Profondeur en cm Profondeur en cm

Secteur Nord

Dans ce secteur, les mêmes radionucléides ont été détectés à des activités massiques
plus élevées qu'en secteur Est, mais toujours inférieures à 10 Bq.kg -1 sec (Tableau 16).

Secteur Aéroportuaire T ABLEAU 16.


Activités massiques (Bq.kg -1 sec) des principaux radionucléides
En 1992, la zone située le émetteurs bêta-gamma présents en secteur Nord de Mururoa,
long de la piste d'aviation, montrait entre les zones Denise et Françoise.
une quasi-absence de produits de
fission et d'activation, avec des Activité minimale Activité maximale
Radionucléides (Bq.kg-1 sec) (Bq.kg-1 sec)
activités massiques inférieures à 1
Bq.kg -1 sec en 137 Cs et 60 Co et 60Co 0,1 3,4
des niveaux inférieurs à la limite de
137Cs 0,3 6,0
détection en 155 Eu.
155Eu 1,3 2,1
241Am 0,7 2,2
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 138

138 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

N
Bq.kg-1 sec
Secteur Ouest
2 - 12 0 5 10 15
0
0,5 - 2
En zone Faucon, 137 Cs et < 0,5
0,19

241 Am étaient également présents en 5


0,28
1992, mais à des activités mas- 10
0,12 0,25 0,92
siques plus faibles que dans le sec-
0,17 15
teur Nord, tandis que les niveaux en
60 Co et 155 Eu restaient inférieurs 0,17
0,2 1,6 0,76 20
aux limites de détection. Les 0,54
0,2
0,32
niveaux d'activité des radionu- 3
0,48 25
10,6
cléides décroissaient régulièrement 5,2
30
b
10,6 0,85 1,3
avec la profondeur du sol (Fig. 73). 1,3 0,3
0,24
La profondeur de pénétration du 0,2
0,14 0,35
35
137 Cs était d’ores et déjà plus 0,45
40
importante que celle du 239+240 Pu. 0,18
0,13

Cela traduit une solubilité plus impor- a 45


Profondeur (cm)
tante du césium qui a été entraîné
137
plus rapidement par les eaux de pluie F IG. 73. - Cs dans les sols prélevés en 1992, à Mururoa, en
vers les horizons inférieurs du sol, sur zone Faucon :
a : Cartographie de l’activité massique (Bq.kg -1 sec) de la
30 à 40 cm de profondeur.
couche la plus superficielle.
b : Profils verticaux de l'activité massique (Bq.kg -1 sec).

Des cartographies
gamma de l’ensemble des
sols des deux atolls d’expéri-
mentations, réalisées par voie
aérienne en 1987 et 1999, ont
permis de confirmer l’homogé-
néité de l’activité surfacique en
137Cs et ce, à des niveaux
d’activité très faibles (Fig. 74).

F IG. 74. - Cartographie des dépôts surfaciques (Bq.m -2) du 137Cs réalisée par
spectrométrie gamma, par voie aérienne, sur l’atoll de Mururoa, en 1999.
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 139

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 139

IV.2.1.2 - FANGATAUFA T ABLEAU 17.


Activités massiques maximales (Bq.kg -1 sec) des principaux
Les radionucléides émetteurs radionucléides mesurés dans les échantillons de la couche
bêta-gamma d’origine artificielle et superficielle des sols de la zone Kilo à Fangataufa.
de période radioactive supérieure à Activité maximale Activité maximale
1 an résultant des retombées de Radionucléides
(1987) (2000)
l’essai sur barge Rigel (24.09.1966) 60Co 1 200 210
ont été également identifiés dans
90Sr 1 500 1 100
les sols de la zone Kilo, à Fangataufa
125Sb
(Tableau 17). En 1992, le rapport de 300 10
l'activité de chacun de ces radionu- 137Cs 250 190
cléides avec celle du plutonium était 155Eu 1 500 240
relativement constant, tant en surfa- 241Am 250 250
ce qu'en profondeur, démontrant qu’il
n'y avait pas eu de fractionnement
Bq.kg-1 sec
notable jusqu’à cette date. Ces résultats mettent en évidence 0 1 2 3
0
une faible mobilité de ces radionucléides dans ce type de sol.
Le 137 Cs a été détecté sur l’ensemble de l’atoll. Son
activité massique en surface variait de 0,47 Bq.kg -1 sec en 10
-1
zone Fox, à 11,2 Bq.kg sec en zone Terme Sud et décroissait
20
rapidement avec la profondeur (Fig. 75). Ces activités massiques
étaient de deux ordres de grandeur inférieures à celles relevées
dans la zone Kilo. 30

Des cartographies gamma de cette zone, réalisées par Limite de détection


voie aérienne en 1999, confirmaient les activités surfaciques 40

en 137 Cs et 60 Co estimées respectivement à 5 et 15 kBq.m -2


(Fig. 76). En 1987, le 60 Co a été détecté en zone Pavillon à 50
Profondeur (cm)
-1
hauteur de 14,8 Bq.kg sec.
F IG. 75. - Profils verticaux de l'activité
massique du 137 Cs (Bq.kg -1 sec)
dans le sol de la zone Marvi, à
Fangataufa, prélevé en 1995.

Les niveaux maximums


observés en zone Kilo résultent des
retombées immédiates de l’essai
sur barge Rigel en 1966.

F IG. 76. - Cartographie des dépôts


surfaciques (Bq.m -2) du 137Cs réalisée par
spectrométrie gamma, par voie aérienne,
de la zone Kilo de Fangataufa en 1999.
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 140

140 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

IV.2.2 - ISOTOPES DU PLUTONIUM

IV.2.2.1 - MURUROA

En 1992, l'activité massique résiduelle du plutonium a fait l’objet d’une cartographie


détaillée à partir des résultats en 239+240 Pu obtenus sur des échantillons prélevés sur les cinq
mêmes secteurs que ceux définis précédemment (Fig. 77). L'activité massique résiduelle était
généralement inférieure à 20 Bq.kg -1 sec. Cependant, deux secteurs de l’atoll montraient des niveaux
plus élevés, à l’ouest de la zone Faucon et au nord, le long de la piste d’aviation.

28,4
44,8
N
53,5 15,3 292
9,3 (10,4 - 708)

689 84,3
Denise 9,8 (440 - 960)
Edith (1,4 - 325)
(2,0 - 24,7)
Françoise
4,0
(0,31 - 19,9)
Camélia
6,2
(0,44 - 19,1)
Martine
3,0
Anémone (0,16 - 13,2)

62,9 Bleuet 4,2


(0,6 - 359) (0,15 - 14,2)
Viviane Simone
Ursula 1,24
Dahlia Thérèse
2,01
5,01 3,55
1,99
5,43 2,11 0,40
Faucon 0 5 km
1,99

F IG . 77. - Cartographie de l’activité massique (Bq.kg -1 sec) en 239+240 Pu de la couche superficielle des sols
prélevés en 1992 à Mururoa. Les minimales et les maximales sont données entre parenthèses.

Secteur Nord

Entre les zones Denise et Françoise, les activités massiques des isotopes du plutonium
s’avéraient plus élevées qu'en secteur Est. L'amplitude des activités massiques en 238 Pu et
239+240 Pu étaient de 1,2-4,7 et 9,0-53,5 Bq.kg -1 sec. Le rapport d'activité 238 Pu/ 239+240 Pu y
variait, de 3% à 23%.
Toujours en secteur Nord de l’atoll, à l'ouest de la zone Denise, les trois motu Colette, Ariel
et Vesta utilisés pour des essais de sécurité étaient initialement constitués d’une dalle corallienne
recouverte par endroits d'une fine couche de sable. Cette dalle, alors exempte de toute végétation,
demeure aujourd’hui encore peu favorable au développement de végétaux.
Les cinq expériences de sécurité, sans réaction de fission, Ganymède, Ariel, Vesta, Bélier,
Persée, effectuées entre 1966 et 1974 ont conduit à la dispersion de 239 Pu sur une surface de
190 000 m 2 . Après chaque expérience, les débris les plus importants étaient ramassés et les
dépôts résiduels de plutonium fixés sur la dalle par épandage d'une émulsion de bitume
(cf. Chapitre VII).
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 141

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 141

En 1981, des dépressions tropicales entraînèrent l’arrachage des parties goudronnées de


cette zone (cf. les modalités de l’assainissement de la zone Colette, Chapitre VII). Après ces
tempêtes, une partie du 239 Pu était toujours fixé dans les premiers centimètres de la dalle
corallienne de ces trois motu. En 1986, après les campagnes d'assainissement menées entre
1981 et 1985, un bilan de la radioactivité résiduelle de ces zones a été dressé à partir de 145 000
mesures radiologiques. À cette date, de l'ordre de 3,5.10 10 Bq (soit de l’ordre de 15 g) de plutonium
restaient fixés dans le bitume et dans la dalle corallienne.
Après le dernier assainissement, en 1987, la situation radiologique de ces trois motu a été
établie lors d’une campagne de mesures (Fig. 78). L’activité totale en 239 Pu a été estimée à
1,5.10 10 Bq, 80 % de l’activité se trouvant sur le motu Colette et l’activité surfacique des points les
plus actifs était de l'ordre de 10 6 Bq.m -2. Cette radioactivité résiduelle était intimement liée au support
corallien induré. Les contrôles réalisés sur les chaussures et les vêtements du personnel après
des séjours prolongés sur ces zones ont confirmé que cette activité était fixée et peu labile. Les
prélèvements d’aérosols par filtration de grands volumes d’air ont confirmé l'absence de remise
en suspension de particules marquées en plutonium.
N N
Motu Colette 20 m Motu Ariel
24
20 m 23
13 22
21
12 20
19
11 18
17
10
16
09 15
14
08 te 13
Pis
29,9

47,2 14,1
12
07 55,4 19,9
11
10
Dalle Piste 40 29,1

06 Dalle
50,6 60,4
09
68,5 26,7
08
05 86,7 15,5
07
06
04 05
04
03 03
02
02 01
00
01
Q P O N M L K J I H G F E D C B A WV U T S RQ P O NM L K J I HG F EDCBA α β
Lagon Lagon

20 m N
Motu Vesta
24
23
22
21
20
< à 0,01
19
18
17
0,01 à 0,1
16
15
14
0,1 à 1
13
12
Pis 11 1 à 15
te
10
09
08
07
Dalle 06
05
04 F IG . 78. - Cartographie de l’activité surfacique (MBq.m -2 ) en
03 239 Pu de la dalle de corail induré des motu des zones Colette,
02
01 Ariel et Vesta, dans le secteur Nord de l’atoll de Mururoa, au
ON M L K J I H G F E D C B A 1er janvier 1988.
Lagon
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 142

142 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Secteur aéroportuaire

À l’exception de la bordure de la piste d’aviation, le secteur aéroportuaire compris entre


les zones Camélia et Kathie présentait, en 1992, des activités massiques intermédiaires entre
celles du secteur Nord et celles du secteur Est (Fig. 79). L’activité massique moyenne en
239+240 Pu y était d'environ 9 Bq.kg -1 sec.
Le secteur situé le long de la piste d'aviation a été utilisé en 1987 pour stocker des agrégats
très faiblement radioactifs provenant de déchets issus de travaux d’assainissement menés en
secteur Nord. Les activités massiques les plus élevées en 239+240 Pu de ce secteur étaient
comprises entre 300 et 1 000 Bq.kg -1 sec, le rapport 238 Pu/ 239+240 Pu y était homogène et faible
d’environ 0,5 %.

N
Camélia
2,00
Irène
8,55
8,19 Jeanne
8,92 136
10,4 54,5 175 Kathie
581 440 440
2,98 24,7 1,43
9,18
8,4
14,4 1,58
960
24,7 8,89
708 915
325
2,88

100 - 1000 16,2

10 - 100
1 - 10

F IG . 79. - Cartographie de l’activité massique (Bq.kg -1 sec) en 239+240 Pu de la couche superficielle des sols
du secteur aéroportuaire, entre les points Camélia et Kathie, de l’atoll de Mururoa.

Secteur Est

La plus grande partie des infrastructures (installations techniques, logements, ...) d’une
superficie d'environ 0,75 km 2 , était regroupée dans le secteur Est de l’atoll, entre les zones
Kathie et Nicole. Depuis 1966, les sols de ces zones avaient subi de multiples remaniements.
Leur activité massique en 239+240 Pu était faible ; la valeur moyenne s’élevant à environ 4 Bq.kg -1 ,
pour un maximum de 20 Bq.kg -1 (Fig. 80). Les profils verticaux montraient que l'activité était
généralement présente uniquement dans les premiers centimètres en surface (Fig. 81).
L’activité totale en 239+240 Pu de ce secteur a été estimée à environ 3.10 8 Bq, à partir de
mesures de l’activité massique d’échantillons de la couche de surface et suivant des profils et en
considérant une densité moyenne des sols égale à 1. Lorsque le 238 Pu était décelable, le rapport
d'activité 238 Pu/ 239+240 Pu présentait des fluctuations importantes, de 1 % à 22 %, traduisant les
différentes origines de ce radionucléide.
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 143

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 143

4,69 1,03
3,67 N Bq.kg-1 sec
1,73 2,19 0,31 3,23 0 2 4 6 8 10 12
4,10 19,9 0
0,41 10 - 20
3,68 1,80
1 - 10 5
3,19
<1
3,74
PK 2N 4,76 1,49 10
8,71
8,59
4,41
19,1
15
12,1
Léa 20
13,1
1,26
11,8 25 Limite de détection
0,70
PK 1N 2,99 30
3,06
4,17 1,59
0,61
8,7 3,11
35
0,31
5,56 5,4 40
1,28
Martine 2,52
1,49 0,74 a
45 Profondeur (cm)
0,73
0,43 1,56
0,79 13,2
0,97 0,18
0,87 2,68 0 2 4 6 8 10 12
0,46 1,99
1,77 2,26 1,63 0
PK O 0,57
0,91 1,19 2,24 Bq.kg-1 sec
0,55 0,15
Anémone 1,95 10,8 5
2,34 1,94 1,56
0,47 1,72 14,2 10
4,30
PK 1S 9,6 9,9 5,78 6,28
11,9 15
2,52 5,14
2,74 1,03
6,44 1,02 20
Nicole
3,89
25

F IG . 80. - Cartographie de l’activité massique (Bq.kg -1 sec) 30


en 239+240 Pu de la couche superficielle des sols du secteur
35 Limite de détection
Est de Mururoa.
40
Bq.kg-1 sec
0 1 2 3 4 b
0 45 Profondeur (cm)

5 F IG. 81. - Profil de l’activité massique (Bq. kg -1


sec) en 239+240 Pu des sols des zones Léa (a)
10 et Martine (b) du secteur Est de Mururoa.
15
Secteur Sud
20

25 La radioactivité des sols y est sensiblement


identique à celle déterminée en secteur Est, tant pour
30
Limite de détection les radionucléides identifiés, que pour les niveaux
35 d'activité massique observés (Fig. 77 et 82).
40
F IG. 82. - Profil de l’activité massique (Bq.kg -1 sec) en 239+240Pu
45 Profondeur (cm) des sols de la zone Thérèse dans le secteur Sud de Mururoa.
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 144

144 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Secteur Ouest-Zone Faucon Bq.kg-1 sec N


100 - 360 5 - 50
0 50 100 150 200 250
50 - 100 <5
0
L’essai Parthénope, de 66
très faible énergie, réalisé sous 5
ballon, le 24 août 1973, a 124

10
engendré des retombées 2,8 263 359

locales sur la zone Faucon. 15 18

Les activités massiques en 4,1


12
20 167 11
239+240 Pu étaient, en 1992, 146
6,8 18
toujours plus élevées au sein 25
50
11
des deux premiers centimètres 80
221
60
30 6 29
du sol du motu (Fig. 83). 16 43
38
Cependant, l’activité massique 35
13
55 0,6
Limite de détection 1,2
de ces isotopes dans la
40 2
couche de surface des sols 1,7

était très hétérogène avec les 45 Profondeur (cm)


valeurs les plus faibles dans la F IG . 84. - Cartographie de l’activité
FIG. 83. - Profils verticaux de l'activité
partie Sud-Est du motu et les massique du 239+240 Pu (Bq.kg -1 massique (Bq.kg-1 sec) en 239+240 Pu
plus élevées (359 Bq.kg -1 sec) sec) du sol du motu Faucon du sec- de la couche superficielle des sols
dans la partie Nord-Est (Fig. teur Ouest de l’atoll de Mururoa. de la zone Faucon, de l’atoll de
84). Mururoa.
Le 238 Pu était également présent, mais
à des niveaux moins élevés, conduisant à un EMPEREUR N

rapport d'activité 238 Pu/ 239+240 Pu faible,


compris entre 0,5 et 4,5 %. Océan
Axes des retombées

Empereur
Pi Kilo
st
e
d'
IV.2.2.2 - FANGATAUFA av
ia
tio
n

En 1966, les retombées locales de


l'essai atmosphérique Rigel ont entraîné un
dépôt de produits de fission sur les sols du
secteur Nord-Est de l'atoll. Les retombées se
< 100
sont déposées suivant deux axes, l'un passant
100 - 500
par la zone Empereur, l'autre par la zone Kilo 500 - 1 000
KILO
(Fig. 85). La zone Empereur a fait l’objet 1 000 - 5 000
d’une première opération de remédiation dès
1967, par décapage du sol sur une profondeur Lagon
de 50 cm.
Ro

Un bilan radiologique des sols de


ut
e

l'atoll de Fangataufa a été réalisé en 1986 et


1987. L'activité massique en 239+240 Pu de la
couche de surface de ces deux zones variait FREGATE
0 500 m
entre la limite de détection des mesures (0,5 Nord
à 1 Bq.kg -1 sec) et la valeur maximale de
5 000 Bq.kg -1 sec. F IG . 85. - Cartographie de l’activité massique (Bq.kg -1
sec) en 239+240 Pu de la couche superficielle des sols ,
entre les points Empereur et Frégate à Fangataufa.
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 145

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 145

Les maxima d'activité ont été observés entre l'extrémité Sud de la piste d’aviation et le point
Frégate-Nord (Fig. 85).
L'activité massique en 239+240 Pu
décroissait avec la profondeur (Fig. 86). Les
Bq.kg-1 sec
variations de l’activité de ces profils résul-
0 1000 2000 3000 4000 5000 6000
0 taient des différences de nature des
10
couches de sol échantillonnées, horizons
de sédiments meubles ou de corail compact.
20
De 45 à 60 % de l'activité en plutonium se
30 situait dans les 5 premiers centimètres.
40 L'activité totale en 239+240 Pu dans les sols
50 de cette zone a été estimée à 3,6.10 10 Bq
60
en prenant en compte une densité moyenne
de 1,2 pour les sols.
70
80
90 F IG . 86. - Profil de l'activité massique (Bq.kg -1 sec)
100 en 239+240Pu des sols de la zone Kilo du secteur
Profondeur (cm) Nord de l’atoll de Fangataufa.

Le rapport d'activité 238 Pu/ 239+240 Pu, sensiblement constant, tant en surface qu'en pro-
fondeur, était, en moyenne, égal à 40 %. Cette zone présentait une activité totale en 238 Pu
estimée à 1,4.10 10 Bq.

IV.2.3 - DÉBIT DE DOSE

Les débits de dose environnementaux, mesurés en différents points des atolls expérimentaux,
ont présenté de très fortes variations pendant toute la période des essais atmosphériques. Les
niveaux étaient proportionnels à l'intensité des retombées immédiates après l’essai. Le réseau de
télémesures transmettait en temps réel les valeurs de débit de dose mesurées par les compteurs
et les chambres d'ionisation, en particulier celles des zones où avaient lieu les essais. Ces
informations, complétées par les mesures réalisées lors des missions de reconnaissance radio-
logique après l’essai, permettaient de délimiter les zones à accès contrôlé et de décider de
l'entrée des membres du personnel sur ces zones, dès lors que la décroissance des niveaux de
rayonnement le permettait. Les personnes intervenant sur ces zones étaient munies d'un dosimètre
individuel permettant d'évaluer leur exposition externe éventuelle (cf. Chapitre VI).
Pendant la période des essais souterrains, les niveaux des débits de dose mesurés à la
majorité des points des atolls étaient stables et correspondaient à l'exposition naturelle (260 à
320 µGy.an -1 ), essentiellement due au rayonnement cosmique. Cependant, les points de mesure
du débit de dose des zones Nicole et Dindon à Mururoa et de la zone Kilo à Fangataufa montraient
localement des valeurs maximales proches de 500 µGy.an -1 .
Au point Nicole, l'augmentation était due à la proximité du laboratoire de mesures des
échantillons provenant des cavités d’essais souterrains. Pendant la période du moratoire entre 1992
et 1994, l’irradiation ambiante de ce point, en l’absence d’échantillons à analyser, était du même
niveau qu'aux autres points de mesure (Fig. 87a).
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 146

146 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Au point Dindon, l'augmentation du débit de dose était due au Poste d'enregistrement avancé
(PEA), ouvrage en béton dont les radionucléides des chaînes naturelles de l’uranium et du thorium
sont à des niveaux d'activité plus élevés que ceux des sols environnants (Fig. 87b). Ce point de
mesure a été déplacé de façon à s’affranchir de l’irradiation occasionnée par le béton.
Au point Kilo, l'augmentation provenait des dépôts résultant de l'essai sur barge Rigel de
1966, avec en particulier l'influence du 60 Co (Fig. 87c). En tenant compte d'un débit de dose de
280 µGy.an -1 pour la composante naturelle de l'irradiation, la composante due au 60 Co estimée
à 140 µGy.an -1 en 1988, a décru au cours du temps, suivant la période radioactive de ce radio-
nucléide (5,27 ans).

µGy.an-1 µGy.an-1
700 700
+ Incertitude + Incertitude
Dose 1 Dose
600 - Incertitude 600 - Incertitude
1 2
500 500
2 3 3
400 400

300 300

200 200

a b
100 100
1987 1989 1991 1993 1995 1997 1986 1988 1990 1992 1994 1996

µGy.an-1
700
+ Incertitude
Dose
- Incertitude
600
Courbe d'évolution
calculée F IG . 87. - Débits de dose annuelle (µGy.an -1 ) aux
points Nicole en secteur Est (a), Dindon en secteur
500
Ouest (b) sur l’atoll de Mururoa et au point Kilo (c)
sur l’atoll de Fangataufa.
Au point Nicole, les périodes 1, 2 et 3 correspondent
400 respectivement aux phases d'expérimentation, au moratoire
et à la dernière campagne d'essais.
Au point Dindon, les périodes 1, 2 et 3 correspondent
300 respectivement aux mesures sur le toit du PEA jusqu’en
1987, à 1,2 m au-dessus du sol contre le PEA de 1988 à
1991 et à 100 m du PEA à partir de 1992.
200

c
100
1988 1990 1992 1994 1996
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 147

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 147

De 1985 à 1996, en dehors des zones particulières qui viennent d’être décrites, les doses
annuelles mesurées étaient comprises entre 260 et 320 µGy.an -1 pour la quasi-totalité des points de
surveillance des deux atolls d'expérimentations (Fig. 88). Ces valeurs sont tout à fait représentatives
de l’irradiation ambiante susceptible d’être mesurée sur des atolls coralliens polynésiens. La
moyenne annuelle, calculée à l’aide de l’ensemble des mesures, s’établissait à 290 µGy.an -1 pour
Mururoa et 280 µGy.an -1 pour Fangataufa. La valeur légèrement plus élevée de l’irradiation externe
observée à Mururoa s’explique par le grand nombre de constructions et de voies bétonnées dont
les activités, associées aux radionucléides des chaînes radioactives naturelles, sont plus importantes.

µGy.an-1
600
a
500

Maximum
400
Moyenne
Minimum 300
Moyenne générale
200

100

Points d'exposition
0
µGy.an-1 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
600
b
500

400
F IG . 88. - Débits de dose annuelle (µGy.an -1 )
300 mesurés de 1988 à 1996 aux différents
points de surveillance de l’atoll de Mururoa
200 (a), et de l’atoll de Fangataufa (b).

100

Points d'exposition
0
1 2 3 4 5

IV.3 - PLANTES TERRESTRES


La surveillance radiologique du milieu terrestre, réalisée à partir de 1967, s'appuyait sur la
collecte régulière d'une quinzaine d'espèces végétales qui ont fait l'objet de plus de 1 500 échan-
tillons prélevés sur les deux atolls pendant la période d’activité des sites expérimentaux. Les
résultats associés aux trois espèces les plus représentatives des sites : Scaevola sericea,
Casuarina equisetifolia et Cocos nucifera sont présentés en fonction de la période radioactive des
radionucléides mesurés : périodes courtes, moyennes et longues.
Durant la période des essais atmosphériques, comme pour les prélèvements de sol, les
radionucléides caractérisés par les périodes de décroissance les plus courtes, inférieures à
quelques heures, n'étaient plus détectés dans les échantillons. A contrario, le cortège de radio-
nucléides émetteurs alpha et bêta-gamma, ayant des périodes radioactives supérieures au mois,
mesuré dans l'atmosphère, a également été mis en évidence dans les différentes espèces prélevées
sur les atolls de Mururoa et Fangataufa.
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 148

148 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Ainsi, les radionucléides de période comprise entre 2 mois et un an, 95 Zr, 58 Co, 65 Zn,
57 Co, 54 Mn, 144 Ce et 106 Ru ont été détectés. Ils étaient associés à des radionucléides de période
supérieure à 5 ans, essentiellement
60 Co, 90 Sr et 137 Cs. Un troisième
Radionucléide et Activité Zone de
groupe, celui des radionucléides à vie Période physique maximale
Date
prélèvement
longue, comme les isotopes du pluto-
nium, 238Pu et 239+240Pu, était mesuré. 58Co (70,8 jours) 170 21.11.68 Empereur
Ces radionucléides ont été 65Zn (244 jours) 140 21.11.68 Empereur
quantifiés dans les échantillons biolo- 65Zn (244 jours) 140 10.03.69 Kilo
giques pendant la phase initiale des 57Co (272 jours) 110 28.10.67 Kilo
essais atmosphériques, comme le
54Mn (312 jours) 70 10.03.69 Kilo
montrent les dates de prélèvements des
60Co (5,27 ans)
échantillons de Scaevola sericea pré- 51 27.08.69 Kilo
sentant les activités massiques maxi-
137Cs (30,2 ans) 2 500 27.08.69 Kilo
males de ces produits d’activation et de
137Cs (30,2 ans) 1 500 21.11.68 Empereur
fission (Tableau 18).
144Ce (284 jours) 1 500 21.11.68 Empereur
144Ce (284 jours) 1 100 28.10.67 Empereur
106Ru (373 jours) 1 000 21.11.68 Empereur
95Zr (64 jours) 740 17.09.70 Terme Sud
95Zr (64 jours) 740 18.09.70 Pavillon
T ABLEAU 18.
141Ce (32,5 jours)
Activités maximales (Bq.kg -1 poids frais) 480 17.09.70 Terme Sud
des principaux radionucléides mesurés dans 90Sr (28 ans) 170 27.08.69 Kilo
les échantillons de feuilles de Scaevola 140Ba (12,8 jours) 140 18.09.70 Pavillon
sericea prélevés dans différentes zones de
l’atoll de Fangataufa. 239+240Pu 0,36 10.07.88 Kilo
Les radionucléides sont classés en trois (24 300 et 6 600 ans)
catégories : produits d'activation, produits 238Pu (86 ans) 0,13 10.07.88 Kilo
de fission et matières fissiles.

IV.3.1 - RADIONUCLÉIDES ÉMETTEURS BÊTA-GAMMA


IV.3.1.1 - RADIONUCLÉIDES DE PÉRIODE INFÉRIEURE OU ÉGALE À L'ANNÉE

Les valeurs maximales des principaux radionucléides de période courte ont été mesurées
sur les feuilles de Scaevola sericea prélevées dans le secteur de Fangataufa s'étendant des
zones Kilo à Empereur. Durant la période 1967-1968, les niveaux ont atteint 1 500 Bq.kg -1 frais
en 144 Ce, 1 000 Bq.kg -1 frais en 106 Rh et 740 Bq.kg -1 frais en 95 Zr en zone Empereur (Tableau 18).
140 Ba, 141 Ce, 103 Ru, etc. ont également été détectés occasionnellement dans les échantillons de
coprah et de lait de noix de coco, mais uniquement durant la période des essais atmosphériques
et avec des niveaux toujours plus élevés dans les échantillons de coprah (Tableau 19).

IV.3.1.2 - RADIONUCLÉIDES DE PÉRIODE SUPÉRIEURE À 5 ANS

De 1982 à 1995, l’activité massique en 137 Cs était supérieure aux limites de détection
pour 151 des 211 échantillons de feuilles de Casuarina equisetifolia, prélevés dans la partie Est
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 149

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 149

Eau de coco Coprah


Radionucléide (70 échantillons) (69 échantillons)
et
Période physique Activité Activité Date
Date
maximale maximale
54Mn (312 jours) - - 0,19 (1) 21.06.71
57Co (272 jours) 0,33 (1) 04.10.72 21 (5) 04.05.70
T ABLEAU 19.
60Co (5,27 ans) 3,0 (9) 06.11.74 24 (4) 04.05.70 Activités maximales (Bq.kg -1 poids
frais) des principaux radionucléides à
65Zn (244 jours) 1,1 (2) 12.02.69 8,8 (2) 04.05.70 vie courte mesurés dans les échan-
95Zr tillons d'eau de coco et de coprah,
(64 jours) 1,8 (12) 21.06.71 5,5 (15) 06.06.74
issus de noix de coco prélevées de
103Ru (39,3 jours) 1,4 (4) 21.06.71 8,1 (5) 06.06.74 1969 à 1974, sur l’atoll de Mururoa.
140Ba (12,8 jours) 8,5 (1) 21.06.71 210 (2) 06.06.74 Le nombre de résultats de mesures
significativement supérieurs à la limite de
141Ce (32,5 jours) 1,8 (3) 21.06.71 7,4 (5) 06.06.74 détection est donné entre parenthèses.
144Ce (284 jours) - - 36 (1) 26.01.70

de l’atoll de Mururoa. Quel que soit le site de prélèvement, l’activité des principaux radionucléides
détectés dans les feuilles de Casuarina equisetifolia était très inférieure à l’activité naturelle en
40 K, de 42 à 62 Bq.kg -1 frais.
Entre 1982 et 1995, l’activité massique annuelle en 137Cs était comprise entre 0,09 et 1,3 Bq.kg-1
frais, avec un maximum de 6,6 Bq.kg-1 frais atteint en 1986. L’évolution annuelle de l’activité massique du
137Cs, pour un même lieu de prélèvement, a décru suivant une période effective de l’ordre de 6 ans. La dis-
persion statistique autour de cette tendance a été attribuée à un taux de remise en suspension différent entre
les points de collecte et à un taux de captation
des poussières variable suivant la hauteur des
Bq.kg-1 frais
10 feuilles des arbres échantillonnées (Fig. 89).

1
(17)
(12)
(18) (7) (11)
(1) (21)
(18) (9)
(17)
0,1 (15)
(2)
(2) (1)

0,01

0,001
82 83 84 85 86 87 88 89 90 91 92 93 94 95

F IG . 89. - Évolution annuelle de l'activité massique


(Bq.kg -1 poids frais) du 137 Cs dans les feuilles de
Casuarina equisetifolia, prélevées dans le secteur Est de
l’atoll de Mururoa, entre 1982 et 1995.
L'amplitude des résultats (minimum et maximum) est donnée Détail du feuillage du Casuarina equisetifolia.
autour de la valeur moyenne ainsi que le nombre de mesures
entre parenthèses.
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 150

150 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

De 1968 à 1995, les activités massiques en 60 Co, 137 Cs et 90 Sr des feuilles de Scaevola
sericea de la zone Kilo-Empereur de l’atoll de Fangataufa ont décru suivant une période effective
de l'ordre de 3 à 4 ans (Fig. 90). La dispersion statistique des résultats de cette zone a été attribuée
à l’hétérogénéité spatiale des dépôts des radionucléides dans le sol.

Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais


100 10000
60 137Cs
Co
1000
10
100

1 10

1
0,1
0,1

0,01 0,01
67 69 71 73 75 77 79 81 83 85 87 89 91 93 67 69 71 73 75 77 79 81 83 85 87 89 91 93

Bq.kg-1 frais
1000
90
Sr
F IG . 90. - Évolution de l'activité massique
100
(Bq.kg -1 poids frais) en 60 Co, 137 Cs et 90 Sr
dans des échantillons de feuilles de Scaevola
10
prélevés dans les zones Kilo et Empereur, à
Fangataufa, de 1967 à 1993.
1 La période de décroissance effective (T e ) est
déterminée à partir de la droite de régression figurée
0,1 par un trait pointillé. Les carrés blancs indiquent des
mesures inférieures aux limites de détection.
0,01
67 69 71 73 75 77 79 81 83 85 87 89 91 93

T ABLEAU 20.
Activités massiques maximales (Bq.kg -1 poids frais) en Dans les autres secteurs de
60 Co, 137 Cs et 90 Sr dans des échantillons de feuilles Fangataufa, les activités massiques en
de Scaevola prélevés hors des zones Kilo-Empereur, 60 Co, 137 Cs et 90 Sr des feuilles de
à Fangataufa, de 1968 à 1992. Scaevola s’avéraient plus faibles (Tableau
20). Le 137Cs était également le principal
Activité maximale Secteur
Radionucléide
(Bq.kg-1 frais) Date géographique radionucléide détecté dans l’eau de coco
et le coprah des noix collectées dans la
2,5 21.11.68 Frégate - Echo principale cocoteraie, située dans la zone
60Co 7,7 24.11.68 Terme Sud Martine-Anémone de Mururoa. Pour le
16 19.08.74 Pavillon coprah, l’activité massique est passée de
10 Bq.kg -1 frais en 1967, à quelques
170 03.12.69 Frégate - Echo
dixièmes de Bq.kg -1 frais en 1996 (Fig. 91).
137Cs 30 17.09.70 Terme Sud Pour ces deux types d’échantillons, la
70 07.10.86 Pavillon période de décroissance effective du
137 Cs était alors de 6 ans, c’est-à-dire 5
90Sr 8,1 11.06.80 Pavillon
fois plus courte que la période radioactive
3 18.09.92 Frégate - Echo
de ce radionucléide.
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 151

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 151

La seconde cocoteraie, en zone Faucon, a subi à la fois les effets thermiques des explosions
nucléaires et l’essentiel des retombées des essais effectués sur la zone Dindon, toute proche. Les
activités massiques associées à cette cocoteraie, replantée après les essais atmosphériques, étaient
plus élevées que celles présentes sur d’autres zones de l’atoll. Des valeurs maximales de 10 Bq.kg -1
frais dans le coprah et de 6,3 Bq.l -1 dans l’eau de coco ont été relevées en 1988.
Les résultats de mesure des intercomparaisons de l’AIEA de 1994 et 1996 étaient
conformes à ceux obtenus dans le cadre de la surveillance radiologique des sites (Fig. 91). Ainsi,
les activités massiques en 137 Cs d’échantillons d’eau de coco étaient de 0,095 et 0,11 Bq.kg -1
frais en 1996 dans les zones Anémone et Denise respectivement. Les échantillons des autres
zones étaient caractérisés par des niveaux d’activité inférieurs aux limites de détection.

Bq.l-1 Bq.kg-1 frais


100
100
Eau de coco
Coprah
10
10
1

1
0,1

0,01 0,1
67 69 71 73 75 77 79 81 83 85 87 89 91 93 95 97 99 67 69 71 73 75 77 79 81 83 85 87 89 91 93 95 97 99

F IG . 91. - Évolution de l'activité massique (Bq.kg -1 poids frais) en 137 Cs dans des échantillons d'eau de coco
et de coprah prélevés dans la partie Est de Mururoa, de 1967 à 1999.
La période de décroissance effective (T e ) est déterminée à partir de la droite de régression figurée par un trait pointillé.

Initialement, l'atoll de Fangataufa ne possédait pas de cocoteraie. Néanmoins, les activités


massiques des sols y étant les plus élevées, il a été décidé de préciser les facteurs de transfert
sol-plante en y réalisant des études in situ (cf. Chapitre II).
À cette fin, quelques dizaines d’arbres ont été plantés en
1981 sur l’axe des dépôts maximums de la zone Kilo et T ABLEAU 21.
en zone Frégate, en bordure de la partie touchée par les Activités massiques maximales en 137 Cs
retombées locales de l'essai Rigel. d'échantillons d'eau de coco et de
Un jeune plant donne des fruits en quantité suffi- coprah issus des fruits des cocotiers
plantés en 1980, en zones Kilo
sante pour la mesure des radionucléides à partir de 6 à 7
et Frégate, à Fangataufa.
ans. Ce n'est donc qu'à partir de 1988 que les échantillons,
limités en nombre, ont été disponibles. Les activités mas- Date Activité maximale
siques en 137 Cs du coprah et de l’eau de coco, en zone Échantillons de
prélèvement Kilo Frégate
Kilo, étaient les plus élevées des deux atolls. Celles de la
Eau 10.07.88 37 0,03
zone Frégate étaient proches de celles de la principale de coco
cocoteraie de Mururoa (Tableau 21). (Bq.l-1) 04.10.90 22
Le 137 Cs était régulièrement détecté dans le fruit du AIEA 96 18
papayer. De 1979 à 1995, l'activité massique de la pulpe de
papaye, à Mururoa, a décru de quelques Bq.kg -1 frais à Coprah 04.10.90 110 0,2
quelques dixièmes de Bq.kg -1 frais, avec une période de (Bq.kg-1 frais)
AIEA 96 189
décroissance effective d’environ 3 ans (Fig. 92).
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 152

152 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Bq.kg-1 frais
10

0,1

0,01
1979 1981 1983 1985 1987 1989 1991 1993 1995

F IG . 92. - Évolution de l'activité massique (Bq.kg -1 poids


frais) en 137 Cs dans des échantillons de pulpe de papaye
prélevés, à Mururoa de 1979 à 1995.
Fruits du papayer en place sur l’arbre. La période de décroissance effective Te a été déterminée à partir de
la droite de régression figurée par le trait en pointillés. Les carrés
blancs indiquent les résultats de mesures en limite de détection.

L'activité massique du 90 Sr des noix de coco de Mururoa a été mesurée à partir de 1970.
La moyenne pour l’eau de coco et le coprah s’établissait respectivement à 0,1 Bq.l -1 et 0,2
Bq.kg -1 frais jusqu'en 1991, date à laquelle l'activité massique est devenue inférieure aux limites
de détection des appareils de mesure. Le 90Sr, parfois décelé dans la pulpe de papaye, présentait
des niveaux d’activité plus faibles que ceux de la noix de coco, de l’ordre de quelques centièmes ou
millièmes de Bq.kg -1 frais. La valeur maximale de 0,07 Bq.kg -1 frais a été observée en 1979.
À Fangataufa, à la même époque, les échantillons issus de la zone Kilo présentaient des
activités massiques en 90 Sr de l'ordre de 0,22 Bq.kg -1 frais. Le 60 Co a également été détecté
régulièrement dans les échantillons de coprah, à des niveaux d'activité plus faibles dans l’eau de
coco.

IV.3.2 - ISOTOPES DU PLUTONIUM

À Mururoa, les activités massiques les plus élevées en 239+240Pu ont été mesurées dans des
échantillons de feuilles de Casuarina equisetifolia prélevés dans le secteur Nord de l’atoll, notamment
en zone Colette. Les maxima ont été observés lors des travaux d’assainissement de cette zone.
Sur dix prélèvements réalisés en 1990, les valeurs en 239+240 Pu étaient comprises entre 3,7 et
32 Bq.kg -1 frais, avec une moyenne de 13 Bq.kg -1 frais. Les essais de sécurité réalisés dans cette
zone ont conduit à des dépôts permettant d’expliquer les niveaux d’activité les plus élevés observés
dans les Casuarina equisetifolia qui ont poussé par la suite dans cette zone.
Dans les secteurs Est et Ouest de l’atoll de Mururoa, les activités massiques maximales
en 239+240Pu n'ont pas dépassé 1,5 Bq.kg -1 frais. L’activité massique du plutonium, dans les échan-
tillons d’eau de coco et de coprah, était trop faible pour être détectée par les techniques de mesure
utilisées pour la surveillance de routine.
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 153

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 153

Aussi, une campagne de prélèvements de grands volumes d’eau de coco (40 litres) a été
menée, en 1994, dans les 4 secteurs cardinaux de l’atoll de Mururoa, afin d'atteindre des niveaux
d'activité mesurables par concentration du plutonium de l'échantillon. L’activité volumique en
239+240 Pu variait de 3,3.10 -5 à 5,9.10 -5 Bq.l -1 .
L’expertise menée par l'AIEA en 1996 a reporté des activités massiques en 239+240 Pu
comprises entre 0,0177 et 0,030 Bq.kg -1 frais, pour les échantillons de végétaux prélevés dans le
secteur Ouest, de 0,182 à 0,319 Bq.kg -1 frais, pour ceux de la zone Kathie à l’Est et de 0,69
Bq.kg -1 frais, pour ceux issus de la zone Denise au Nord de l’atoll.
Les activités massiques en 238 Pu et 239+240 Pu de la pulpe des échantillons de papaye
prélevés à Mururoa étaient mesurées à des niveaux d’activité très faibles. En 1995, les valeurs
maximales atteignaient 0,0061 Bq.kg -1 frais en 238 Pu et 0,032 Bq.kg -1 frais en 239+240 Pu.

À Fangataufa, la moitié des 31 échantillons de feuilles de Scaevola sericea prélevés entre


1980 et 1995 montrait une activité massique en 239+240 Pu supérieure aux limites de détection.
Les activités maximales atteignaient 0,36 Bq.kg -1 frais dans la zone Kilo-Empereur. Des traces de
238 Pu étaient également mesurées à hauteur de quelques centièmes de Bq.kg -1 frais.
Les activités massiques en 239+240 Pu mesurées sur les feuilles de Casuarina equisetifolia
étaient inférieures à celles observées sur Scaevola sericea, avec des niveaux compris entre 0,01
et 0,41 Bq.kg -1 frais (Fig. 93). Les valeurs fournies en 1996, par l’intercomparaison de l’AIEA,
pour la zone Kilo étaient de 0,025 Bq.kg -1 frais en 239+240 Pu.

Bq.kg-1 frais

137Cs

239+240Pu
10

0,1

0,01
1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993

(Bq.kg -1
F IG . 93. - Évolution de l'activité massique poids frais) en 137 Cset 239+240 Pudans des échantillons
de feuilles de Casuarina equisetifolia prélevés dans la zone Kilo sur l’atoll de Fangataufa de 1985 à 1993.

Les échantillons de coprah et d'eau de coco issus de la zone Kilo présentaient des niveaux
d’activité en plutonium cohérents avec ceux des échantillons collectés en 1996, par l’AIEA, sur
cette zone. Pour le coprah, les activités massiques en 238 Pu, 239+240 Pu et 241 Am étaient res-
pectivement de 0,016, 0,0487 et 0,0029 Bq.kg -1 frais (Tableau 22).
Chap. 4aVF-06.12.06:Chapitre 4 10/01/07 15:15 Page 154

154 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Date de T ABLEAU 22.


Échantillons
prélèvement
Secteur Activité massique Activités massiques (Bq.kg -1 poids frais
ou Bq.l -1 ) et limites de détection (≤) en
Eau de coco 10.07.88 Kilo 0,0014 ± 0,0013 Bq.l-1 239+240 Pu pour des échantillons d'eau

Eau de coco 04.10.90 Kilo 0,0017 ± 0,0019 Bq.l-1 de coco et de coprah issus des fruits
des cocotiers plantés, en 1980, sur les
Eau de coco 10.02.98 Frégate < 0,00025 Bq.l-1 zones Kilo et Frégate du secteur Nord de
Eau de coco 03.05.99 Frégate < 0,00038 Bq.l-1 l’atoll de Fangataufa.

Coprah 04.10.90 Kilo < 0,0037 Bq.kg-1 frais

Coprah AIEA 96 Kilo 0,0487 Bq.kg-1 frais


Coprah 10.02.98 Frégate < 0,0017 Bq.kg-1 frais

Coprah 03.05.99 Frégate < 0,0011 Bq.kg-1 frais

IV.3.3 - FACTEURS DE TRANSFERT IN SITU SOL-PLANTE

Le rapport entre la valeur de l'activité massique d'un radionucléide présent dans une espèce
végétale et son activité massique dans le sol où pousse la plante, permet de quantifier les transferts
de ce radionucléide du sol vers la plante (cf. Chapitre II). Les valeurs des facteurs de transfert
racinaire s’établissent généralement à partir d'études menées en laboratoire. Lorsqu'elles sont
estimées à partir de données de terrain, les valeurs de F t sont généralement surestimées car elles
intègrent les apports dus aux dépôts directs des radionucléides sur la plante et leur absorption
foliaire dont l'intensité varie suivant le stade végétatif du végétal. L’estimation de ces facteurs, à
partir de données in situ, s’avère également délicate en raison des niveaux d’activité massique
parfois trop faibles, comme c'est le cas pour le césium dans le sol ou pour le plutonium dans les
plantes. Néanmoins, des ordres de grandeur peuvent être avancés à partir des études de terrain
menées sur les atolls de Mururoa et Fangataufa.
Les valeurs des facteurs de transfert spécifiques des plantes tropicales Cocos nucifera,
Pandanus tectorius et Argusia argentea et des sols de Mururoa, obtenues à partir d'étude réalisées
in situ, sont cohérentes avec celles publiées pour l’atoll de Bikini où les États-Unis ont réalisé de
nombreux essais nucléaires atmosphériques (Tableau 23).

T ABLEAU 23. Facteur de transfert Facteur de transfert


Facteur de transfert sol-plante (F t ) en 137Cs en 239+240Pu
pour le 137 Cs et le 239+240 Pu Échantillons
Atoll de Atoll de Atoll de Atoll de
calculé à partir des résultats Mururoa Bikini Mururoa Bikini
d'études expérimentales menées
sur les atolls de Mururoa et Eau de coco 2,6 (3) 3 (147) ≤ 4,2.10-5 0,12.10-4 (11)
de Bikini à partir de données Coprah 13 (4) 10 (98) 4,2.10-4 0,97.10-4 (22)
américaines.
Feuille de cocotier 7,1 (4) - ≤ 2,3.10-4 -
Les chiffres entre parenthèses Fruit du Pandanus 4,6 (2) 7,8 (11) ≤ 4,5.10-4 0,43.10-4 (3)
indiquent le nombre d'échantillons
utilisés pour calculer les F t . Feuille du Pandanus 2,9 (2) - ≤ 3,5.10-4 -

Feuille d'Argusia 11 (2) - ≤ 1,6.10-3 -


Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 155

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 155

IV.4 - EAUX DE MER


Durant la période des essais atmosphériques, en particulier immédiatement après la réalisation
d’un essai, les niveaux de l’activité volumique des eaux du lagon permettaient de dresser la
cartographie de la radioactivité du lagon à partir de mesures directes du débit de dose. Ces
mesures étaient complétées par d’autres analyses, en laboratoire, pour suivre la décroissance de
l’activité des eaux. Durant la période des essais souterrains, les niveaux d’activité étant très
faibles, les mesures en laboratoire sur les échantillons d’eau prélevés à proximité du point zéro
relevaient de la quantification des traces d’activité.

Les résultats obtenus entre 1966 et 1996 permettent de distinguer trois périodes :
• De 1966 à 1974, les activités volumiques des eaux du lagon variaient très rapidement au
cours du temps et dans l’espace, en fonction des essais.
• De 1975 à 1984, période de transition entre essais atmosphériques et souterrains, les activités
volumiques des radionucléides d’origine artificielle des eaux du lagon ont décru très rapidement
au niveau des traces. Ils ont rarement été mesurés dans les eaux océaniques à proximité
immédiate des atolls d’expérimentations.
• De 1985 à 1996, la radioactivité artificielle des eaux de mer résultait principalement des
radionucléides suivants : tritium sous forme eau tritiée (HTO), 90 Sr, 137 Cs, 238 Pu et 239+240 Pu.
D’autres radionucléides, 60 Co, 241 Am et 241 Pu, étaient présents dans les eaux des lagons, à
de très faibles niveaux d’activités volumiques.

Les niveaux atteints par les radionucléides durant ces périodes font l’objet de descriptions
détaillées dans les paragraphes suivants ainsi que dans l’annexe 3 pour chacun des essais atmo-
sphériques. Lorsque l’activité était au niveau des traces directement accessibles par des mesures,
les niveaux moyens pouvaient être appréciés à l’aide du suivi d’indicateurs biologiques : algues,
mollusques, crustacés et poissons, dont les résultats sont fournis dans les paragraphes suivants.

IV.4.1 - INDICE BÊTA GLOBAL


IV.4.1.1 - ESSAIS SUR BARGE

Les trois essais sur barge réalisés à Mururoa, Aldébaran et Sirius, en zone Dindon (1966),
et Arcturus, en zone Denise (1967) ainsi que l’essai Rigel (1966) mené à Fangataufa, ont conduit
aux valeurs maximales de l’indice bêta global. Lors de ces essais, la boule de feu est entrée en
contact avec l’eau et les sédiments du lagon se trouvant à l’aplomb du point zéro, y déposant une
quantité significative de produits de fission et d’activation. L'activité volumique des eaux du lagon
a décru ensuite linéairement, au cours du temps, suivant une loi du même type que celle décrite
pour les produits de fission du nuage radioactif stabilisé, mais avec une constante de décroissance
plus rapide (Fig. 94).
L’activité volumique initiale de la masse d'eau au lieu de l'explosion dépendait directement
de la quantité de produits de fission injectée dans les eaux du lagon, soit de l’ordre de quelques
dizaines de pourcent de l’activité totale de l’ensemble des produits de fission formés lors des
essais réalisés sur barge. Ainsi, Sirius, le plus puissant des quatre essais réalisés sur barge, a
conduit le 4 octobre 1966 à H+1 au débit de dose maximal de 0,23 Gy.h -1, à un mètre au-dessus de
la surface du lagon, pour ensuite décroître à 0,02 Gy.h -1 à J+1, puis à 0,01 Gy.h -1 à J+2
(cf. Annexe 3). La masse d’eau contaminée initialement confinée en zone Dindon, s’est ensuite
étendue vers l’est du lagon. L’activité volumique des eaux du lagon devenait pratiquement homogène
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 156

156 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

à J+37, et atteignait 1,85 à 4,44 MBq.m -3 . Le retour en zone de mouillage des bâtiments sur
lesquels résidait la totalité du personnel pouvait être autorisé lorsque l'activité volumique de l'eau
de mer de la zone portuaire Kathie était redevenue inférieure à 3,7 MBq.m -3 .

Activité totale dans le lagon (unité arbitraire)

Aldébaran
106 Rigel
10 6 Sirius
105 106
Arcturus
t-2
105 106
4
10 105
t-1,8
4
10 105
103 104
t-1,8

t-2,6 103 104


102 t-2,8 103
102 103
10 102
t-2,5
10 t-2,75
102
1 10
1 10 100
1
1 10 100 10
1
1 10 100
1
1 10 100 1000

Jour après J
F IG . 94. - Ajustement de lois de décroissance théorique (A β = A 1 .t -x ) de l’activité de l’indice bêta global (A β )
à partir des résultats de mesure au cours du temps des masses d’eau des lagons de Mururoa et Fangataufa
contaminées par les essais sur barge de 1966 et 1967.

Cette valeur garantissait le respect de l’activité maximale admissible pour l’eau de boisson
(CMA eau ) obtenue par désalinisation d’eau du lagon, par les bouilleurs des bateaux (cf. Chapitre
III et VI). Ainsi, par exemple, suite à l'essai Sirius, l’autorisation de retour des bateaux dans le
lagon de Mururoa n’a été donnée que 47 jours après l’essai. À partir de 1967, un dispositif de
pompage dans l’océan a été mis en place pour alimenter en eau les bateaux mouillés en zone
Kathie.

IV.4.1.2 - ESSAIS SOUS BALLON

Lors des essais sous ballon, de faible ou moyenne puissance, l'engin devait monter à une
altitude suffisante pour que la boule de feu n’atteigne pas la surface du lagon. Néanmoins, lors de
certains essais de forte puissance, les capacités d’emport de charge et de transfert de signaux
de mesures ne permettaient pas de monter l'engin jusqu'à cette altitude optimale. Il s’agissait
alors de positionner l’engin à la hauteur suffisante pour que la réflexion de l’onde de choc sur la
surface de l'eau repousse la boule de feu vers le haut dans la phase finale de son expansion, lui
donnant une forme aplatie dans sa partie inférieure. L’interaction entre la boule de feu et le lagon
était évitée et la radioactivité induite dans le lagon limitée à celle associée aux produits d'activation
créés par le rayonnement neutronique à la surface de l’eau, à la verticale du point zéro.
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 157

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 157

Les résultats du suivi de l'activité volumique de l'eau de mer du lagon de Mururoa, lors
d'essais de la campagne 1971, ont mis en évidence la rapidité de la décroissance de la radioactivité
induite par ces essais (Fig. 95a). Les résultats, corrigés de la décroissance radioactive, ont permis
d'isoler la part de la composante due à la dilution des radionucléides dans la décroissance de
l'activité volumique des eaux au droit des zones Denise et Dindon (Fig. 95b). Les tracés de la
décroissance de l’activité par dilution mettent en évidence une dilution plus lente dans la zone
Dindon, qui est un bassin enclavé, que dans la zone Denise soumise à l’influence des entrées
d’eaux océaniques par la passe et à l’action des vents dominants qui y favorisent le renouvellement
des eaux.

Échelle arbitraire Échelle arbitraire


10-1 1
a b
DINDON

RHÉA
DINDON
RHÉA
10-2 10-1
T(D
T (D

)~ 50
h0
+R

0
)
T (D+

~
11

T
T (D
R)

(D) ~4
h

DENISE
~7

4h
30
+R

00
)
~
h3

11
0

ENCELADE
00

10-3 10-2 T (D
)
DENISE ~
15
JAPET
T (D)

h
00
~

ENCELADE
10
h

DIONÉ
00
T (D+R

JAPET
)

DIONÉ
~ 6

(lagon très agité)


10-4 10-3
h00

Heures après H Heures après H


10-5 10-4
0 50 100 0 50 100

F IG . 95. - Encart a : Ajustement des lois de décroissance globale de la radioactivité par dilution et
décroissance radioactive (T D+R ).
Encart b : Décroissance par dilution (T D ) des masses d’eaux contaminées.
Les ajustements ont été réalisés sur les données de l’évolution au cours du temps de l’indice bêta global des eaux de
mer au droit des zones Dindon et Denise, à la suite des essais Dioné (05.06.1971), Encelade (12.06.1971), Japet
(04.07.1971) et Rhéa (14.08.1971).

La décroissance radioactive des radionucléides à vie courte, la dilution de l’activité initiale


des masses d'eaux du point zéro et le transfert des radionucléides vers les sédiments de fond du
lagon conduisaient à une décroissance rapide de l'indice bêta global, à des niveaux homogènes,
sur l'ensemble de la colonne d'eau, une vingtaine d'heures après l'essai (Fig. 96).
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 158

158 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Profondeur (mètres)
À partir de 1968, tous les
0 essais ont été réalisés sous ballon et
H + 69h30 l'activité volumique des eaux du lagon
était à un niveau très bas lorsqu’elles
5 atteignaient la zone Kathie. À partir de
H + 3h30
cette date, il n’existait plus de
10 contrainte radiologique effective pour
utiliser l'eau issue des bouilleurs des
bateaux qui venaient s’y positionner.
15 À la fin de la campagne de 1970, il
H + 45h00
H + 19h30 a donc été décidé d'arrêter le pom-
page hors du lagon pour l'alimenta-
20
tion en eau des bâtiments bases.

25
F IG . 96. - Évolution au cours du temps de
l'activité volumique (GBq.m-3) à différentes
30
profondeurs de la colonne d'eau, entre la
surface et le fond, aux stations de détection
4.10-4 10-3 10-2 10-1 1
du lagon où l'activité volumique était maxi-
GBq.m-3
male lors de l'essai Japet (04.07.1971).

Systématiquement après chaque essai, des mesures du débit de dose à la surface des
eaux du lagon permettaient d’estimer les niveaux de leur activité volumique et d’en suivre la
décroissance au cours du temps. Ces données sont présentées sous forme de cartes dans
l’annexe 3 de ce document pour chaun des essais atmosphériques.

IV.4.2 - RADIONUCLÉIDES ÉMETTEURS BÊTA-GAMMA

L’activité volumique des radionucléides émetteurs bêta-gamma présents dans les eaux,
tant dans les différents secteurs de lagon qu’au cours du temps, variait de plusieurs ordres de
grandeur comme l’indice bêta global entre les périodes d’avant campagne et celles suivant la
réalisation d’un essai atmosphérique. Aussi, à partir des valeurs de l’indice bêta global
(cf. Annexe 3), les activités volumiques des différents radionucléides, susceptibles d’être
présents dans les eaux, pouvaient être rapidement estimées en tenant compte de leur
contribution relative à cet indice comme cela va être décrit dans les paragraphes suivants.

IV.4.2.1 - RADIONUCLÉIDES DE PÉRIODE INFÉRIEURE OU ÉGALE À L'ANNÉE

Essais atmosphériques sur barge

Lors des essais sur barge l’analyse radiochimique d’échantillons d’eau de mer a permis de
distinguer les différents radionucléides présents et de comparer leur contribution relative (%) à
l’activité volumique totale (Tableau 24).
L’évolution au cours du temps de l'activité volumique des différents radionucléides présents
dans un échantillon d'eau du lagon a été suivie en laboratoire par des mesures successives de leur
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 159

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 159

Activité T ABLEAU 24.


Radionucléide % Activité Commentaires Activité volumique (kBq.m-3) des radionucléides
volumique
140Ba
présents dans un échantillon d'eau de mer prélevé
1 260 36 à J+37, près du point zéro Sirius (04.10.1966).
103Ru 590 17 L'activité totale était de l’ordre de 3 700 kBq.m -3 , avec un
rapport activité alpha/activité bêta de 6,6.10 -6, et un rapport
131I 520 15 activité insoluble/activité totale de 8 %. L‘échantillon d’eaux
de mer a fait l’objet d’une filtration sur membrane de 0,22 µm
95Zr 410 12 de porosité avant mesure.
89Sr 120 3,5 90Sr minoritaire

136Cs 9 0,3 137Cs masqué

GBq.m-3

1
activité (Fig. 97). Ces mesures ont
permis de vérifier l'enrichissement
M
ol
relatif en produits solubles, 140 Ba, 10-1 yb
d
èn
Baryu
m 14
0+ Lanth
131 I, 103 Ru, et l'appauvrissement en e ane 1
99 40
+
Te
ch
produits insolubles, 95 Zr et 141Ce, n
ét
iu
Zirconium 95 + N
iobium 95
m
sédimentant plus rapidement. Ces 10-2 99 Ruthénium 103
- Rhodium 103
Strontium 90 + 89
derniers se retrouvaient ainsi dans les Te
llu
Cerium 141

re
sédiments du lagon, où s'accumu- 13
2
Iod
e 131
+
laient également les produits d’activa- 10-3
Io
de
13
2
tion des éléments des matériaux 4.10-4
constituant la barge : 58 Co, 60 Co, J+5 J+10 J+20 J+30 J+40 J+50 J+60 J+70
65 Zn, 54 Mn et 59 Fe. F IG . 97. - Évolution in vitro de l'activité volumique (GBq.m -3 ) des
principaux radionucléides présents dans un échantillon d'eau
du lagon de Fangataufa, prélevé à J+5, après l'essai Rigel
(24.09.1966).

Essais atmosphériques sous ballon

Lors des essais sous ballon, la radioacti- Réaction Activité


vité induite dans le lagon provenait essentielle- Radionucléide Période de volumique
ment des produits d'activation créés par le formation (Bq.m-3)
rayonnement neutronique à la surface de l’eau, à
l'aplomb du point zéro (Tableau 25). Ces radio- 24Na 15 heures 23Na (n, γ) 7,0.109
nucléides sont caractérisés par des périodes 32P 32S
14,3 jours (n, p) 1,5.106
relativement courtes, d'une fraction d'heure à
quelques dizaines de jours. Le 38 Cl était prépon- 35S 88 jours 34S (n, γ) 5,6.107
dérant pendant la première heure, puis le 24 Na 38Cl 37,3 minutes 37Cl (n, γ) 1,9.1010
l’était jusqu’à 4 jours après l’essai et enfin le 35 S.
42K 12,4 heures 41K (n, γ) 1,9.107
T ABLEAU 25. 45Ca 162 jours 44Ca (n, γ) 8,1.105
Activité volumique (Bq.m -3 ) des produits
d’activation mesurés dans un échantillon d’eau
80mBr 4,38 heures 79Br (n, γ) 1,4.108
de mer prélevé au point zéro à H+2h15 82Br 35,3 heures 81Br (n, γ) 3,0.107
après l’essai Andromède (15.05.1970).
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 160

160 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Le suivi de l'évolution de l'activité volumique des produits d'activation, en particulier du 24Na et du


35S considérés comme des traceurs des masses d’eau, a permis d'évaluer la vitesse de dilution des
radionucléides au sein des eaux du lagon. Ainsi, suite à l'essai Canopus effectué au-dessus du lagon
de Fangataufa, le 24 août 1968, l’activité volumique du 35 S dans les échantillons d’eau du lagon,
ramenée une heure après l’essai, a mis en évidence deux phases :

• jusqu’à 4 jours après l’essai, une homogénéisation des niveaux d’activité volumique du lagon ;
• après 4 jours, une décroissance homogène des niveaux des eaux du lagon, due à leur dilu-
tion par les échanges lagon-océan.

GBq.m-3 Lors de la période des essais


atmosphériques, les activités volumiques
10 des eaux du lagon décroissaient donc
rapidement au cours du temps, en fonc-
tion de la puissance de l’essai, de ses
1
conditions de réalisation et du lieu de
l’explosion, dont les caractéristiques
Activit
10-1
éβ globale hydrologiques conditionnaient par la suite
Soufre 35
Sod
la vitesse de dilution des masses d’eaux
ium
24 contaminées. (Fig. 98).
10-2

Brome
10-3 82
Phosphore 32 F IG. 98. - Evolution in vitro de l'activité volu-
mique (GBq.m -3) des principaux radionucléides
Chlore 38

Br

Po
om

tas
siu présents dans un échantillon d'eau du lagon
e

10-4 m4
80

2
de Mururoa prélevé au point zéro 1h30 après
m

Heures après H
4.10-5
0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 110 120 130 140 l'essai Pollux (03.08.1968).

Essais souterrains

Très rapidement après le dernier essai atmosphérique, les radionucléides de période infé-
rieure à l’année n’ont plus été détectés dans les eaux des lagons. Les apports consécutifs aux
essais souterrains étant très faibles, les niveaux dans les eaux et leur évolution spatio-temporelle
peut être appréciée par leurs mesures sur les bioindicateurs marins, en particulier le plancton,
prélevés dans le cadre de la surveillance radiologique des sites (cf. IV.6.1).

IV.4.2.2 - RADIONUCLÉIDES DE PÉRIODE SUPÉRIEURE À 5 ANS

Essais atmosphériques

Comme décrit précédemment, l’importance des fluctuations de l’activité volumique avant et


après essai a conduit à apprécier les niveaux d’activité moyens des eaux de mer à partir des résultats
de la surveillance radiologique d’indicateurs biologiques, algues, mollusques, crustacés, poissons
qui accumulent les radionucléides dans certains organes, comme l’hépatopancréas, le foie et les
muscles (cf. IV.6).
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 161

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 161

Essais souterrains

Après l’arrêt des essais atmosphériques, les radionucléides à vie courte n’ont plus été
détectés. Pendant la période des essais souterrains,la radioactivité d’origine artificielle des eaux
des lagons résultait de la solubilisation lente des radionucléides de période plus longue associés
initialement aux sédiments, en particulier à ceux des quatre zones d'essais sur barge et du banc
de sable près de la zone Colette.
Au début des années 80, l’activité volumique des eaux du lagon était redescendue à un niveau
très bas. Lors des essais souterrains, le confinement des radionucléides dans les formations basal-
tiques a été vérifié par des techniques de prélèvements et de mesures de plus en plus performantes.
Ainsi, de 1985 à 1996, la radioactivité artificielle des eaux de mer était principalement due
aux 3 H (sous forme d’eau tritiée, HTO), 90 Sr, 137 Cs, 238 Pu et 239+240 Pu. D’autres radionucléides,
présents en très faibles quantités
T ABLEAU 26.
-3 comme 60 Co, 241 Am et 241 Pu, ont été
Évolution de l'activité volumique (Bq.m ) moyenne en tritium
des eaux de surfaces prélevées entre 1987 et 1995. détectés dans les eaux des lagons et
Les chiffres entre parenthèses correspondent au nombre dans l’océan, à proximité immédiate des
d'échantillons mesurés. atolls (Tableau 26).
3H (Bq.m-3)
Comparée à celle des eaux
océaniques avoisinantes, l'activité volu-
Année Lagon de Lagon de Abords de Mururoa mique en tritium des eaux du lagon était
Mururoa Fangataufa et Fangataufa
plus élevée d’un facteur 5, à Mururoa,
1987 570 ± 200 (10) 440 ± 200 (13) 200 (9) et d'un facteur 2, à Fangataufa. Les
niveaux observés restaient néanmoins au
1988 960 ± 410 (10) - 200 (14)
niveau de traces, de l’ordre du Bq.l -1. Les
1989 1050 ± 310 (10) - - variations observées résultaient des
1990 1460 ± 580 (10) - - émissions associées aux opérations de
1991 850 ± 450 (6) 560 ± 140 (6) - post-forages et à la diffusion du tritium à
1993 860 ± 350 (8) 610 ± 520 (5) partir de certaines cavités-cheminées
1994 - - 176 ± 60 (7) dont la partie supérieure atteignait le toit
des formations volcaniques.
1995 1000 ± 410 (9) 470 ± 150 (5) -
1996 - - 215 ± 200 (9) Césium 137
137Cs (Bq.m-3)
Pendant les dix dernières
Année Lagon Lagon Abords de Mururoa années de la période des essais souter-
de Mururoa de Fangataufa et Fangataufa rains, l'activité volumique en 137 Cs des
eaux des lagons de Mururoa et
1987 3,92 ± 1,12 (10) 2,95 ± 0,27 (18) 3,23 ± 0,28 (10)
Fangataufa était légèrement supérieure
1988 3,40 ± 0,55 (34) - 2,58 ± 0,14 (14) à celle des eaux océaniques environ-
1989 2,66 ± 0,26 (9) 3,15 ± 0,67 (6) 2,81 ± 0,55 (14) nantes (Tableau 27).
1990 2,67 ± 0,16 (10) 2,73 ± 0,35 (6) 2,59 ± 0,18 (14)
1991 2,65 ± 0,36 (20) - 2,21 ± 0,17 (14)
T ABLEAU 27.
1992 - - 2,20 ± 0,15 (14) Évolution de l'activité volumique moyenne
1993 2,56 ± 0,15 (8) 2,63 ± 0,30 (5) - (Bq.m -3 ) en 137Cs des eaux de surface pré-
1994 - - 2,05 ± 0,05 (9) levées entre 1987 et 1995, dans les lagons
1995 (9) 2,29 ± 0,05 (15) - de Mururoa et Fangataufa.
2,18 ± 0,09
Les chiffres entre parenthèses correspondent au
1996 - - 1,99 ± 0,12 (9) nombre d'échantillons mesurés.
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 162

162 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Bq.m-3 Cette différence d'activité pro-


10
9 vient de la solubilisation progressive du
8 137 Cs, contenu dans le réservoir sédi-
7
6
mentaire. Cependant, l'activité volu-
5 mique en 137 Cs des eaux de lagon
baisse au cours du temps. De 1982 à
4
(43) 1988, la période de décroissance effec-
(50)
3 (98) tive du 137 Cs était de l’ordre de 6 ans.
(49) (49)
(10) (34) À partir du début des années 1990,
(10)
(9) (8)
2 (20)
(9)
elle va se rapprocher de celle obser-
vée pour les eaux océaniques, de
l’ordre de 15 ans (Fig. 99).
Ce changement de pente est
1
1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996
vraisemblablement dû à l’appauvrisse-
ment en 137 Cs des sédiments et à l’ho-
F IG . 99. - Évolution de l'activité volumique moyenne (Bq.m -3 ) mogénéisation des eaux du lagon avec
du 137 Cs des eaux du lagon de Mururoa, prélevées entre
celles de l’océan. Il s’avère plus rapide
1982 et 1995. L’amplitude des données est reportée à ± 1σ,
autour de la valeur moyenne annuelle. Les chiffres entre paren- à Mururoa suite à l’augmentation des
thèses correspondent au nombre d'échantillons mesurés. échanges lagon-océan résultant du tas-
sement d’une partie du platier, en sec-
teur Sud notamment.
Une diminution progressive, sur plusieurs années, de l'activité volumique du 137 Cs des eaux
océaniques de surface est également constatée (Fig. 100). La différence entre la période effecti-
ve, de l’ordre de 15 ans, et la période radioactive de 30 ans s’explique par la dilution progressive
des masses d’eau marquées par le 137Cs, par mélange avec des masses d’eaux caractérisées par
des niveaux d’activité volumique plus faibles.
Les profils de l’activité volu-
mique en 137 Cs de la colonne d'eau,
Bq.m-3 de la surface à 2 500 m de profon-
10
9 deur, réalisés en 1993 au large de
8
Mururoa ont mis en évidence une
7
6 activité volumique homogène dans
5 la couche d’eau de surface, entre 0
4
et 150 mètres environ, puis une
(6) activité volumique décroissante au
3 niveau de la thermocline, jusqu’à
(8) (10) (10) environ 800 mètres de profondeur
(5) (14)
(14)
2 (14) (Fig. 101). L'activité volumique en
(14) (9) 137 Cs des couches d’eau les plus
(9)
(6)
profondes présentait des niveaux
très faibles, inférieurs à 0,1 Bq.m -3 .
1 Les mesures effectuées, de
1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996
1987 à 1996, sur les eaux pro-
F IG. 100. - Évolution de l'activité volumique moyenne (Bq.m -3 ) du fondes, aux abords immédiats des
137 Cs des eaux océaniques prélevées aux abords de l'atoll de
sites d’expérimentations, montrent
Mururoa, entre 1982 et 1996. L’amplitude des données est reportée
à ± 1σ autour de la valeur moyenne annuelle.
une activité volumique stable à partir
Les chiffres entre parenthèses correspondent au nombre d'échantillons de 1988 et une décroissance lente
mesurés. pour les eaux de surface (Tableau 28).
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 163

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 163

Profondeur (m) Profondeur (m)


0 0

500 500

1 000 1 000

1 500 1 500

F IG. 101. - Profils verticaux de


l'activité volumique moyenne
2 000 2 000 (Bq.m -3 ) en 137 Cs et 90 Sr des
137 90
Cs Sr eaux océaniques prélevées à
proximité des atolls de Mururoa
2 500 2 500
et Fangataufa, en 1993.
0 0,5 1,0 1,5 2,0 2,5 3,0 0 0,5 1,0 1,5 2,0 L'incertitude associée à la mesure
Bq.m-3 Bq.m-3 est donnée à ± 2σ.

T ABLEAU 28.
Évolution de l'activité volumique moyenne (Bq.m -3 ) en 137 Cs des eaux océaniques prélevées,
à différentes profondeurs, aux abords immédiats des atolls de Mururoa et Fangataufa, entre 1987 et 1996.
L’amplitude des données est reportée à ± 1σ autour de la valeur moyenne annuelle.
Les chiffres entre parenthèses correspondent au nombre d'échantillons mesurés.

137Cs (Bq.m-3)
Année
- 10 mètres - 200 mètres - 300 mètres - 400 mètres - 600 mètres

1987 3,23 ± 0,28 (10) 2,63 ± 0,55 (3) - 2,11 ± 0,55 (7) 0,85 ± 0,13 (4)

1988 2,58 ± 0,14 (14) 2,41 ± 0,16 (8) - 1,51 ± 0,16 (11) 0,50 ± 0,20 (11)

1989 2,81 ± 0,55 (14) 2,68 ± 0,63 (8) - 1,68 ± 0,63 (10) 0,66 ± 0,23 (10)

1990 2,59 ± 0,18 (14) 2,41 ± 0,12 (8) - 1,46 ± 0,12 (11) 0,52 ± 0,23 (11)

1991 2,21 ± 0,17 (14) 2,24 (1) - 1,54 ± 0,12 (11) 0,59 ± 0,08 (11)

1992 2,20 ± 0,15 (14) 2,06 ± 0,18 (8) - 1,36 ± 0,18 (11) 0,50 ± 0,14 (11)

1994 2,05 ± 0,05 (9) - 1,72 ± 0,10 (9) - 0,51 ± 0,08 (9)

1996 1,99 ± 0,12 (9) - 1,76 ± 0,08 (9) - 0,56 ± 0,06 (9)

Strontium 90

À partir de 1989, l’activité volumique en 90 Sr des eaux des lagons de Mururoa et de


Fangataufa était proche de 1,5 Bq.m -3, du même ordre de grandeur que celle des eaux océaniques
de surface (Tableau 29). Aucune variation importante n’a été distinguée, au cours du temps ou
géographiquement, entre les stations de prélèvements.
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 164

164 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

90Sr T ABLEAU 29.


(Bq.m-3)
Évolution de l'activité volumique moyenne
Année
Lagon Lagon Abords de Mururoa (Bq.m -3 ) en 90 Sr des eaux de surface
de Mururoa de Fangataufa et Fangataufa prélevées, entre 1989 et 1996.
L’amplitude des données est reportée à
1989 1,66 ± 0,08 (9) - 1,61 ± 0,11 (3)
± 1σ autour de la valeur moyenne
1990 1,87 ± 0,20 (10) - 1,61 ± 0,15 (2) annuelle. Les chiffres entre parenthèses
1991 1,48 ± 0,25 (10) 1,50 ± 0,06 (6) 1,28 ± 0,16 (5) correspondent au nombre d'échantillons
mesurés.
1992 - - 1,48 ± 0,12 (14)
1993 1,56 ± 0,16 (8) 1,74 ± 0,35 (5) -
1994 - - 1,24 ± 0,11 (9)
1995 1,50 ± 0,15 (9) 1,51 ± 0,09 (5) -
1996 - - 1,12 ± 0,06 (9)

En 1993, au large de Mururoa, les profils verticaux de l’activité volumique en 90Sr ont mis en
évidence la présence d’une couche de mélange homogène en surface atteignant 150 mètres de
profondeur. L’activité volumique diminuait ensuite rapidement avec la profondeur pour atteindre
une activité inférieure à 0,3 Bq.m -3 à partir de 600 mètres (Fig. 101).
L'évolution au cours du temps, de 1991 à 1994, de l’activité volumique des eaux profondes
mesurées aux abords immédiats des deux atolls d’expérimentations était proche de celle des
échantillons prélevés à la limite des eaux territoriales en 1993 (Tableau 30). Pendant la même
période, le rapport 137Cs/ 90Sr des eaux océaniques, quelle que soit la profondeur, est resté
constant au cours du temps, fluctuant entre 1,7 et 1,9.
T ABLEAU 30.
Évolution de l'activité volumique moyenne (Bq.m -3 ) en 90 Sr des eaux océaniques prélevées
à différentes profondeurs aux abords immédiats de Mururoa et Fangataufa, entre 1991 et 1994.
L’amplitude des données est reportée à ± 1σ autour de la valeur moyenne annuelle.
Les chiffres entre parenthèses correspondent au nombre d'échantillons mesurés.

90Sr (Bq.m-3)
Année
- 10 mètres - 200 mètres - 300 mètres - 400 mètres - 600 mètres

1991 1,28 ± 0,16 (5) 1,14 (1) - 0,80 (1) 0,39 (1)

1992 1,48 ± 0,12 (14) 1,41 ± 0,12 (8) - 0,98 ± 0,18 (10) 0,48 ± 0,18 (10)

1993 1,24 ± 0,11 (9) - 1,07 ± 0,10 (9) - 0,31 ± 0,06 (9)

1994 1,12 ± 0,06 (9) - 1,00 ± 0,08 (9) - 0,31 ± 0,06 (9)

IV.4.3 - ISOTOPES DU PLUTONIUM

IV.4.3.1 - ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

Les niveaux d'activité les plus élevés en plutonium dans les eaux des lagons ont été
observés au cours des premières années qui suivirent les essais sur barge. Par la suite, la fraction
du plutonium associée aux particules en suspension s’est déposée sur l’ensemble du fond des
lagons, diminuant fortement son activité dans les eaux.
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 165

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 165

Sur l’ensemble de la période


Bq.m-3
100 des essais atmosphériques, l’acti-
vité volumique moyenne en pluto-
nium du lagon a décru après le
10
dernier essai sur barge, passant de
70 Bq.m-3 en 1967, à environ 2
Bq.m-3 en 1974, après le dernier
essai sous ballon (Fig. 102).
1

F IG . 102. - Évolution de l'activité


volumique moyenne (Bq.m -3 ) en
239+240 Pu des eaux filtrées du lagon
0,1
de Mururoa prélevées en surface,
entre 1967 et 1995. L’amplitude des
données est reportée à ± 1σ autour
0,01 de la valeur moyenne annuelle à
1967 69 71 73 1975 77 79 81 83 1985 87 89 91 93 1995 partir de 1985.

IV.4.3.2 - ESSAIS SOUTERRAINS


Les fluctuations de l’activité volumique en 239+240Pu des eaux du lagon observées pendant la
période des essais souterrains provenaient de la remise en suspension des sédiments marqués en
plutonium par les ondes de choc générées par les explosions. Elles résultaient également, mais
dans une moindre mesure, de l’action des dépressions météorologiques les plus fortes et des
tempêtes cycloniques. Depuis une vingtaine d’années, l’activité volumique en 239+240 Pu des eaux
du lagon de Mururoa diminue régulièrement, avec une période de décroissance effective estimée
à environ 7 ans. À Mururoa, l'activité volumique en 239+240 Pu des eaux du lagon augmentait de
l’ouest vers le nord-est de l’atoll (Fig. 103).

N a 1,60 0,90 Prélèvement de surface


1,00 0,80 0,86
Prélèvement de surface et de fond
0,88
0,56
0,75
0,53
0,50 0,69 0,77 0,77
0,40 0,63 0,78 0,60
0,5

0,74 0,60 0,55


0

0,39 0,7
0,60
0,33 0
0,6
0,51 0
0,60
0,52 0,54
0,47 0,51
0,30 0,38 0,53
0,63 b
0,

0,
20
30

0,22 0,49
0,18 0,31
0,17
0,26 0,50
0,40
0,40
0,35
0,42
F IG . 103. - Cartographie de l'acti- 0,42

vité volumique moyenne (Bq.m -3) 0,33


0,41
en 239+240 Pu des eaux filtrées du
lagon de Mururoa prélevées en 0,28
0,28
surface et au fond, en 1985-
1986 (a) et en surface, de 1987 à 0 5km
1995 (b).
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 166

166 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

L’activité maximale, de l’ordre de 1,6 Bq.m-3 N

a été mesurée en 1985 - 1986, au niveau du banc


0,62
Colette, où l’activité massique en 239+240Pu des 0,25
sédiments était également la plus élevée du lagon 0,53 0,98
(106 Bq.kg-1 sec). Les activités les plus faibles ont

0
0,30

0,5
0,81
paradoxalement été observées dans le secteur

0
0 ,8
0,85
Ouest de l’atoll où ont eu lieu deux essais sur barge
0,61
ayant affecté les fonds du lagon. Ce gradient s’ex- 1,00
0,98
plique par l’entrée d’eaux océaniques par les hoa du 0,98
platier du secteur Sud et entre les motu des zones 0,86
Dindon et Faucon. Ces eaux caractérisées par des 1,00
0,91
activités faibles diluaient de manière significative 1,49

l’activité initiale des eaux du secteur Ouest du lagon. 1,65

À Fangataufa, le niveau de l’activité volu- 0,82


mique en 239+240 Pu des eaux du lagon augmentait
du nord-ouest vers le sud-est de l’atoll (Fig. 104). 0 2 km
Prélèvement de surface
Prélèvement de surface et de fond
Les activités les plus faibles, observées en secteur
Nord-Ouest, étaient dues à la dilution résultant des F IG . 104. - Cartographie de l'activité volumique
entrées d’eaux océaniques par les nombreux hoa moyenne (Bq.m -3) en 239+240 Pu des eaux filtrées du
des zones Pavillon et Hôtel et par la passe. Par lagon de Fangataufa prélevées en surface et au
ailleurs, les valeurs d’activité volumique légèrement fond, en 1987.
plus élevées qu’à Mururoa s’expliquent par la solu-
bilisation des radionucléides à partir de sédiments 0
Profondeur (m)
d’activités massiques plus élevées et par un taux
de renouvellement des eaux plus faible.
L’évolution spatiale de l’activité volumique 5
du 238 Pu des eaux des lagons de Mururoa et de
Fangataufa était très proche de celle du
239+240 Pu. Le rapport 238 Pu/ 239+240 Pu était 10

relativement stable, environ 0,2 à Mururoa et 0,4 à


Fangataufa, identiques à celui mesuré sur les 15
sédiments des deux atolls. Ce rapport pouvait être
localement plus élevé, supérieur à 0,5, comme en
20
secteur Ouest de Mururoa, suite à l’un des deux
essais sur barge, ou plus faible, proche de 0,01,
comme en secteur Nord de Mururoa, suite aux 25
essais de sécurité.
Le rapport des activités 238 Pu/ 239+240 Pu Eau
associé aux matières en suspension était sensi- 30
blement le même que celui observé dans la frac- Sédiment

tion dissoute et n’évoluait pas d’une année à


l’autre. En effet, le plutonium accumulé dans les 0 0,5 1 1,5 2 2,5 3,0
sédiments des lagons pouvait ensuite être Bq.m-3
remobilisé sous l’effet des échanges sédiments- F IG . 105. - Profil vertical de l'activité volumique
eau. Ce processus a conduit à une augmentation moyenne (Bq.m -3) en 239+240 Pu des eaux filtrées du
de l’activité volumique de la couche d’eau en lagon de Mururoa prélevées, en 1984, à diffé-
contact avec le fond par rapport à celle des eaux rentes profondeurs de la colonne d’eau au niveau
de surface (Fig. 105). du point zéro de l’essai Sirius.
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 167

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 167

Dans les eaux de lagon, le plutonium se présentait sous deux formes : l’une soluble, non
retenue lors de la filtration des eaux de mer sur une membrane de 0,45 µm de porosité, l’autre
particulaire, associée à la matière en suspension retenue sur la membrane filtrante. L’activité en
239+240 Pu de la fraction particulaire variait fortement suivant le lieu et la date de prélèvement. Ces
variations étaient liées à celles du taux de remise en suspension des sédiments, elles-mêmes fonc-
tion de l’état d’agitation des eaux du lagon lors des campagnes de prélèvement.
Ainsi, en 1995 par exemple, l’activité de la fraction particulaire à Mururoa était de l’ordre de 2
à 6 % de l’activité de la fraction soluble ; alors que pour les années précédentes elle était de l’ordre
de 10 à 30 %, voire exceptionnellement de 50 % (Fig. 106). Les activités volumiques les plus élevées
étaient toujours observées en secteur Nord, à proximité des sites des essais de sécurité.

Bq.m-3
10
Fraction soluble Fraction particulaire

239+240
Pu
1
239+240 238
Pu Pu 239+240
Pu

238
Pu
0,1 238
Pu
239+240
Pu

0,01
238
Pu

0,001
MURUROA FANGATAUFA MURUROA FANGATAUFA

F IG . 106. - Activité volumique minimale, moyenne et maximale (Bq.m -3) en 238 Pu et 239+240 Pu de la fraction
soluble et de la fraction particulaire des eaux prélevées, en 1995, dans les lagons de Mururoa et de
Fangataufa.

À Mururoa, entre 1985 et 1996, à l’exception des eaux à l’interface avec les sédiments
dans les zones d’essais sur barge, l’activité en 239+240Pu liée à la fraction particulaire représentait, en
moyenne, de l’ordre de 17% de l’activité totale donc une proportion plus élevée que celle observée
dans les eaux océaniques qui était inférieure à 1%.
Contrairement à celles du 90 Sr et du 137 Cs, l'activité volumique du plutonium des eaux
océaniques de surface était comprise entre 1 et 2 mBq.m -3, soit 200 à 500 fois plus faible que
celle des eaux des lagons. Les échanges lagon-océan s’effectuant principalement au niveau des
passes influençaient significativement les niveaux d’activité volumique du plutonium au voisinage des
atolls, jusqu’à la limite des eaux territoriales où les activités volumiques du plutonium pouvaient
être supérieures à celles des eaux océaniques polynésiennes. Les résultats en 239+240Pu observés
entre 1989 et 1996 montrent qu’en raison des échanges d’eaux continus, entre l’océan et les
lagons des atolls d’expérimentations, l’activité en 239+240Pu des eaux en surface au niveau des
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 168

168 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

passes est 10 à 20 fois supérieure à celle des eaux se trouvant à proximité des deux atolls (Fig. 107).
L’amplitude des variations était certainement due aux différences de mélange des eaux des
lagons de Mururoa et Fangataufa avec les eaux du large en fonction de l’intensité des courants
au moment des prélèvements.

Bq.m-3
1

Fangataufa

Mururoa

Mururoa Fangataufa Mururoa Fangataufa


0,1

Ouest
Terme Pavillon
Axe
Sud Nord Passe
Anémone Kilo Denise
Ara Ouest Est
Françoise
Faucon Frégate
0,01 Echo
Est
Simone Anémone

Sud
Terme Sud
0,001
Passes Abords immédiats des atolls Limites des eaux territoriales

F IG . 107. - Activité volumique minimale, moyenne et maximale (mBq.m -3 ) en 239+240 Pu des eaux de surface
prélevées, entre 1989 et 1996, dans les passes, aux abords immédiats et à la limite des eaux territoriales
des atolls d’expérimentations de Mururoa et Fangataufa.

Profondeur (m)
0
Des profils verticaux en 239+240 Pu en
fonction de la profondeur ont été réalisés, en
1993, au large de Mururoa (Fig. 108). L’activité
volumique était constante dans la couche de 500
surface, augmentait pour atteindre un maximum
aux environs de 600 mètres de profondeur et
diminuait ensuite assez rapidement jusqu’à 1 000
1 000
mètres puis, plus lentement, au-delà. Ce type de
profils, présentant un maximum d’activité entre
500 et 1 000 mètres de profondeur, a été observé
dans les océans du monde entier. 1 500
Les activités volumiques en 238Pu sont
rarement détectables, excepté au voisinage des
passes, où le rapport d’activité 238Pu/ 239+240Pu
était identique à celui des eaux des lagons. 2 000

F IG. 108. - Profils de l'activité volumique (mBq.m -3 ) en


239+240 Pu des eaux prélevées en 1993, entre la surface 2 500
0 2 4 6 8 10 12 14 16
et 2 500 m de profondeur, à proximité des atolls de
mBq.m-3
Mururoa et Fangataufa.
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 169

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 169

IV.5 - SÉDIMENTS MARINS


Sur les sites d’expérimentations, la radioactivité mesurée dans les sédiments des lagons
provenait essentiellement des retombées de quatre essais sur barge : Aldébaran et Sirius au droit
du point Dindon, Arcturus au droit du point Denise à Mururoa et Rigel au droit du point Frégate à
Fangataufa. À Mururoa les différents essais de sécurité réalisées sur les motu du secteur Nord ont
également conduit à des dépôts significatifs de plutonium. Les dépressions tropicales de 1981
entraînèrent l’arrachage du bitume qui avait été utilisé sur la dalle de la zone Colette pour y fixer
les particules de plutonium dont l’essentiel se situe aujourd’hui encore dans le banc de sable
immergé au droit de la zone Colette (Fig. 109).

N
Motu Colette
Denise a
Banc Colette
Passe
b
A
B Zone
e Secteur FRÉGATE Frégate
Zon TE Zone NORD
LET
CO DENISE

0 1 km
Passe

Zone
DINDON 0 2 km

0 5 km

A B
Motu
0
Banc de sable F IG . 109. - Situation des zones Colette, Denise
et Dindon à Mururoa (a) et Frégate à
10 m Tombant
Eboulis Fangataufa (b).
La position précise et la bathymétrie du banc
20 m
Colette et de la zone Denise sont précisées.
30 m
20 m 40 m 60 m 80 m

Lors des essais sur barge, les dépôts de radionucléides au point zéro se sont produits
essentiellement par sédimentation des produits insolubles. L’enrichissement des sédiments a
concerné le 141 Ce et 95 Zr et les produits d'activation 57 Co, 58 Co, 60 Co, 65 Zn, 54 Mn et 59 Fe.

À Mururoa, au droit du point Dindon par exemple, l'activité associée à l'ensemble des
radionucléides émetteurs bêta-gamma, à la verticale du point zéro de l’essai Sirius, a atteint
3,7.10 7 à 3,7.10 8 Bq.g -1 en 1966, entre 30 et 100 jours après l’essai. À cette date, des débits de
dose voisins de 0,1 gray.h -1 ont été mesurés au contact des sédiments.
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 170

170 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Un inventaire exhaustif de l’activité des radionucléides présents dans les


sédiments des lagons des deux atolls a été réalisé à partir des résultats de cam-
pagnes de prélèvements effectuées entre 1984 et 1990 :

• en secteur Ouest (Dindon), 240 prélèvements de sédiments de surface ont été réalisés,
sur une surface de 3 km 2. Ils ont été complétés par une douzaine de carottages, cer-
tains atteignant 5 mètres de profondeur, afin de décrire le profil vertical de l’activité
massique de ces sédiments ;
• sur le secteur Nord (zone Denise et banc Colette), 450 prélèvements de sédiments
superficiels ont été réalisés sur une surface de 4 km 2, dont 200 sur le banc Colette
(6 000 m 2 ). Ils ont été complétés par des carottages de sédiments de 0,5 à 1 m de
profondeur, en 9 emplacements et par quelques carottages peu profonds d’environ
50 cm au droit du point Denise ;
• dans le reste du lagon, 440 prélèvements de sédiments de surface répartis selon un
quadrillage de maille de 500 m de côté ont été réalisés. Ils ont été complétés par une
trentaine de carottages permettant d’étudier la distribution verticale de la radioactivité
contenue dans ces sédiments.

Un bilan radiologique complet de la radioactivité des sédiments de l'atoll de


Fangataufa a été effectué en 1987, en s’appuyant sur :

• 133 prélèvements de sédiments de surface, dont 85 dans la zone de l'expérimen-


tation sur barge Rigel,
• 14 carottages jusqu'à 55 centimètres de profondeur, dont 6 dans la zone Frégate.

IV.5.1 - RADIONUCLÉIDES ÉMETTEURS BÊTA-GAMMA

Classés par activités massiques décroissantes, les radionucléides émetteurs gamma


associés aux sédiments, sont : 155 Eu, 241 Am, 60 Co, 137 Cs et 125 Sb.
Les activités massiques maximales en 241 Am ont été relevées au niveau des points zéro
des essais sur barge des deux atolls et du banc Colette, à Mururoa (Fig. 110).

N
a b
<5
1 5

5 - 50 10

> 50 20
100
50
500
<1 200
1-5
5 - 10
5 10 - 20
20 - 50
50
50 - 100
100 - 200
0 5 km
200 - 500 0 2 km
500 - 1 000

F IG . 110. - Activité massique (Bq.kg -1 sec ) en 241 Am des sédiments de surface des lagons de Mururoa (a)
et de Fangataufa (b).
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 171

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 171

À Mururoa, les activités massiques atteignaient 68 000, 1 600 et 90 Bq.kg -1 sec respec-
tivement sur le banc Colette et au droit des points Dindon et Denise (Fig. 111). Dans les autres
zones du lagon, l'activité en 241 Am restait inférieure à 5 Bq.kg -1 sec (Fig. 110a).

Océan
a N b
DINDON
N
< 50 Océan

50 50 - 100

100 - 500
100 COLETTE
500 500 - 1 000
DENISE
700 1 000 - 70 000
300
1000
500

< 50
Lagon
50 - 100
100
100 - 300 Lagon
50
300 - 500
500 - 700
0 500 m
700 - 1 000
1 000 - 1 600

0 500 m
Océan

F IG . 111. - Cartographie de l'activité massique (Bq.kg -1 sec ) en 241 Am des sédiments de surface prélevés
au droit du point Dindon (a) et sur le banc Colette (b), dans le lagon de Mururoa.

Le 155Eu était le radionucléide émetteur gamma le plus abondant dans les sédiments avec des
valeurs d'activité massique maximales de l'ordre de 7 000 Bq.kg -1 sec, au droit des points Dindon et
Denise, à Mururoa et de 5 000 Bq.kg -1 sec au droit du point Frégate, à Fangataufa, en 1987 (Fig.
112). Les autres parties des lagons présentaient des activités massiques inférieures à 50 Bq.kg -1 sec.

a <5 N
b
5 - 10

10 - 50 10 5
20 50

50 - 500 100
5 500

500 - 7 000 2000


3000
1000

<5
5 - 20
20 - 50
50 - 100
500 50 100 - 500
500 - 1 000

0 5 km 1 000 - 2 000
0 2 km
2 000 - 3 000
3 000 - 4 000

F IG . 112. - Cartographie de l'activité massique (Bq.kg -1 sec ) en 155 Eu des sédiments de surface des lagons
de Mururoa (a), prélevés en 1988, et de Fangataufa (b) échantillonnés en 1987.
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 172

172 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

L’activité massique en 60Co était inférieure à 5 Bq.kg -1 sec. 125Sb et 137Cs étaient diffici lement
décelables à l’exception des sédiments des zones au droit des points Dindon et Denise où le 137Cs
atteignait des activités supérieures à 20 Bq.kg -1 sec (Tableau 31 et Fig. 113). L'évolution théorique
au cours du temps des niveaux d'activité massique des radionucléides a été estimée, à partir de
ces valeurs maximales d'activité massique, en tenant compte de la décroissance due à leur période
radioactive. Ainsi, au droit du point Dindon, les activités massiques estimées pour l’année 2006
ne pouvaient dépasser 0,8, 80, 600 et 1 600 Bq.kg -1 sec en 125Sb, 60Co, 155Eu et 137Sb , res-
pectivement.
Le 137Cs et 125Sb n’étaient mesurables qu'à proxi-
mité du point zéro des essais sur barge. Leur répartition Océan N
géographique dans les sédiments était similaire à celle de
l'américium et de l'europium. Ces radionucléides étaient DINDON
absents du banc Colette car les essais de sécurité n’ont
pas conduit à la formation de produits de fission.

T ABLEAU 31. 20
Activité massique maximale (Bq.kg -1 sec ) des 200
100
50

principaux émetteurs gamma des


échantillons de sédiments de surface prélevés
dans les zones Dindon le 01.04.1984,
Denise le 01.10.1986, à Mururoa,
< 20
et Frégate le 01.09.1987, à Fangataufa. Lagon
20 - 50

Activité maximale en Bq.kg-1 sec 50 - 100


100 - 200
Radionucléide Zone Zone Zone 200 - 1 000
1 000 - 3 600
Dindon Denise Frégate
60Co 1 350 100 2 400
Océan 0 500 m
125Sb 220 20 160
137Cs 2 600 18 680 F IG . 113. - Activité massique (Bq.kg -1
155Eu 12 500 1 950 5 200 sec) en 137 Cs des sédiments de surface
241Am 1 600 90 1 300 de la zone Dindon de l'atoll de Mururoa,
au 01.04.1984.

Le 90 Sr n'a pas été mesuré systématiquement sur tous les échantillons, son activité
massique dans les sédiments de surface était du même ordre de grandeur que celle du 137 Cs.

IV.5.2 - ISOTOPES DU PLUTONIUM

L'activité massique en 239+240Pu des sédiments de surface de Mururoa a atteint des


valeurs de 20 000 Bq.kg -1 sec, au droit du point Dindon et de 6 500 Bq.kg -1 sec au droit du point
Denise, avec un maximum de 2,5.10 6 Bq.kg -1 sec au niveau du banc Colette (Fig. 114a).
L’activité massique restait supérieure à 1 000 Bq.kg -1 sec à plus d’un kilomètre à la périphérie
des points ayant les niveaux les plus élevés (Fig. 114b).
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 173

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 173

Océan
a < 1 000 b
DINDON 1 000 - 5 000

5 000 - 10 000 COLETTE


10 000 - 100 000 DENISE
100 000 - 2 500 000

500 100 000


1000 10000
2000 5000 10 000
3000
5000
N

< 500
1000
Lagon 500 - 1 000
1 000 - 2 000
2 000 - 3 000 0 500 m
3 000 - 5000
5 000 - 10 000
10 000 - 20 000

1000
Eider

Océan 0 500 m
< 20
200
20 à 50
50 à 100

20 100 à 200
100
200 à 1 000
> 1 000
50

F IG . 114. - Cartographie du rapport


200
des activités (%) 238 Pu/ 239+240 Pu
1000
des sédiments de surface du lagon
0 5 km
de Mururoa et de leur distribution
détaillée au droit de la zone Dindon
(a) et dans le secteur Nord (b).

À la verticale des points zéro des essais sur barge, l’activité dans les sédiments se répartissait
sur les premiers mètres de profondeur. En zone Dindon, touchée par les retombées de l'essai
Sirius, l’activité était maximale entre 0,5 et 2,5 m sous la surface sédimentaire, et devenait inférieure
à 1 000 Bq.kg -1 sec à partir de 3,5 m de profondeur (Fig. 115a). Dans la même zone, au voisinage
du point zéro de l’essai Aldébaran, l’activité massique passait par deux maxima, le plus important
atteignait 38 000 Bq.kg -1 sec à 0,75 m sous la surface des sédiments et était dû aux retombées
de l'essai Aldébaran, l'autre à 29 000 Bq.kg -1 sec à 0,3 m sous la surface, correspondait à celles
de l'essai Sirius. Au-delà d’une profondeur de 1,5 m, l’activité massique était inférieure à 500
Bq.kg -1 sec, puis inférieure à 50 Bq.kg -1 sec à une profondeur supérieure à 2,7 m sous la surface
sédimentaire. À partir d’une distance de 100 mètres de ces points zéro, l’activité était concentrée
dans les 40 premiers centimètres de sédiments.
Au niveau du banc Colette, l’activité était répartie, de façon homogène, dans toute l’épaisseur
des sédiments entre 0,50 m et 1 m. Certaines particules du banc Colette pouvaient avoir une
masse de l'ordre du milligramme et atteindre individuellement des activités supérieures à 100 000
Bq. Au-delà du tombant, l’activité associée aux radionucléides d’origine artificielle n'était décelable
que dans la couche de surface (Fig. 115b).
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 174

174 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Bq.kg-1 sec Bq.kg-1 sec


0 10000 20000 30000 40000 0 5000 10000 15000
0 0

5
1
10

2
15

3 20

a b
25
4

30
Point zéro Aldébaran
5 Point zéro Sirius
à 100 m du Pt zéro Aldébaran
35

6 Profondeur en mètre 40 Profondeur en centimètre


F IG . 115. - Évolution de l'activité massique (Bq.kg -1
sec) en 239+240 Pu
au sein de la colonne sédimentaire, au
droit du point Dindon, dans la partie Ouest (a) et du banc Colette dans le secteur Nord (b) de l’atoll de Mururoa.

En dehors des trois zones précédemment citées, l’activité en 239+240Pu des sédiments du
lagon de Mururoa était inférieure à 1 000 Bq.kg -1 sec (Fig. 114). Environ 70 % de la surface
sédimentaire du lagon était caractérisée par une activité massique en 239+240Pu inférieure à 100
Bq.kg -1 sec. Les sédiments bordant la côte Sud et ceux de la passe avaient des activités massiques
inférieures à 20 Bq.kg -1 sec. Dans ces zones, à la différence du banc Colette, l’activité du plutonium
était préférentiellement associée aux particules fines, inférieures à 40 micromètres.
En 1993, l’activité massique du plutonium de huit échantillons de sédiments du lagon a
été déduite de résultats obtenus par ICP-MS (Spectrométrie d’émission atomique de plasma avec
couplage inductif), afin de distinguer les isotopes 239 et 240 du plutonium. Le rapport d'activité
240 Pu/ 239 Pu variait, selon les zones de prélèvement, entre 12 % et 18 %. La distribution géographique
des activités massiques en 238 Pu était proche de celle du 239+240 Pu. Les activités massiques
maximales atteignaient 7 800 et 2 100 Bq.kg -1 sec au droit des points Dindon et Denise et 550
Bq.kg -1 sec, au niveau du banc Colette.
Au droit du point Dindon, le rapport des activités 238 Pu/ 239+240 Pu variait de moins 20 %,
sous l’influence prépondérante de l’essai Aldébaran, à près de 60 % sous l’influence prépondérante
de l’essai Sirius (Fig. 116a). Au droit du point Denise, le rapport d'activité 238Pu/ 239+240Pu était
d'environ 30 % et sur le banc Colette était inférieur à 1 % (Fig. 116b). Dans le reste du lagon, ce
rapport était le plus souvent compris entre 20 et 30 % (Fig. 116).
À Fangataufa, l'activité massique des radionucléides artificiels détectés dans les sédiments,
principalement due aux 239+240Pu, décroissait en fonction de l'éloignement du point zéro de l'essai
Rigel (Fig. 117a). L’activité de ces radionucléides variait de 20 000 Bq.kg -1 sec dans les sédiments
de surface au droit du point zéro, à quelques Bq.kg -1 sec, dans ceux de la côte Ouest de l'atoll.
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 175

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 175

Océan a Océan
<1% b
1à3%
DINDON 3à5%
COLETTE
N 5 à 20 % DENISE
20 à 30 %
30 à 32 %
50 1
40
3
30 5
20
20

30

< 20 %
20 à 30 %
Lagon
30 à 40 % Lagon
40 à 50 %
0 500 m 0 500 m
50 à 60 %

10
20
30 < 10 %
10 à 20 %
20 à 30 %
30 à 40 %
40 à 50 %
> 50 %

0 5 km
50

F IG . 116. - Cartographie du rapport des activités (%) 238 Pu/ 239+240 Pu des sédiments de surface du lagon de
Mururoa (01.04.1984). La distribution détaillée du rapport 238 Pu/ 239+240 Pu dans les sédiments de surface
au droit du point Dindon (a) et en partie Nord de l’atoll (b) est précisée.

En 1993, les mesures par ICP-MS des isotopes du plutonium de cinq échantillons de
sédiments du lagon ont révélé des rapports d'activité 240Pu/ 239Pu constants de 18 %.
La localisation géographique de l’activité massique maximale en 238Pu dans les sédiments
de surface était très proche de celle du 239+240Pu. Le rapport d'activité 238Pu/ 239+240Pu, plus
stable qu'à Mururoa, y était compris entre 30 et 47 % (Fig. 117b).
Chap. 4bVF-06.12.06:Chapitre 4 12/01/07 11:04 Page 176

176 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

N
a
b

150

100 200 35
50

300
500
1000 40
45
5000
< 50 10000
50 - 100
100 - 150
150 - 200
30 - 35 %
200 - 300
35 - 40 %
300 - 500
500 - 1 000 40 - 45 %
35
1 000 - 5 000 45 - 50 %
5 000 - 10 000
0 2 km
10 000 - 20 000

F IG . 117. - Cartographie de l’activité massique (Bq.kg -1 sec) en 239+240 Pu (a) et du rapport des activités (%)
238 Pu/ 239+240 Pu présentes dans les sédiments de surface du lagon de Fangataufa (01.09.1987).

IV.5.3 - BILAN

L’extrapolation des activités au 1 er janvier 2006 des principaux radionucléides artificiels


dans les sédiments des lagons a été réalisée en considérant la distribution spatiale, tant horizontale
que verticale, de leurs activités respectives mesurées entre 1984 et 1990 et en appliquant une
densité moyenne de 1,4 pour l’ensemble des sédiments.

L'activité totale en 239+240 Pu résultant des essais


atmosphériques et de sécurité a été estimée à 1,8.10 13 T ABLEAU 32.
Estimation des activités totales (Bq)
et 7,4.10 12 Bq, à Mururoa et à Fangataufa respective-
ment. Ces activités représentent des masses résiduelles de au 1 er janvier 2006 des principaux
239 Pu dans les sédiments de l’ordre de 6,7 kg et 2,7 kg res- radionucléides mesurés dans
les sédiments des lagons
pectivement à Mururoa et Fangataufa. de Mururoa et Fangataufa.

L’activité totale des radionucléides les plus


solubles, comme le 137Cs et le 60 Co a été estimée, à Radionucléide Mururoa Fangataufa
6,4.10 11 et 1,2.10 11 Bq, dans les sédiments de Mururoa, 60Co 1,2.1011 1,0.1010
et à 1,6.10 11 et 1,0.10 10 Bq, dans ceux de Fangataufa
(Tableau 32). Pour ces radionucléides, le bilan est surestimé
125Sb 1,7.109 0,4.109
car il n’a pas été tenu compte des pertes par solubilisation 137Cs 6,4.1011 1,6.1011
depuis la date des prélèvements. 155Eu 1,9.1011 1,2.1011
238Pu 3,1.1012 2,8.1012
239+240Pu 1,8.1013 7,4.1012
241Am 8,4.1011 3,9.1011
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 177

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 177

IV.6 - FLORE ET FAUNE MARINES


Entre 1967 et 1999, près de 12 000 échantillons appartenant à différentes espèces de la flore
et de la faune marines ont été prélevés dans les lagons de Mururoa et Fangataufa. La répartition
relative du nombre d’échantillons en fonction des espèces prélevées montre que ce sont les
poissons qui ont fait l’objet du plus grand nombre de prélèvements dans le cadre de la
surveillance radiologique (Fig. 118). La plupart de ces échantillons ont fait l’objet de différents types
de mesures d’activité massique : indice bêta global, radionucléides émetteurs gamma, 3 H, 90 Sr,
238 Pu et 239+240 Pu. Les résultats de la surveillance radiologique du milieu vivant des deux lagons
sont présentés selon les principaux groupes taxonomiques décrits dans les chapitres I et III, en
fonction de la période des radionucléides : courte, moyenne ou longue.

Mérous Divers
(poissons) (1 %)
5%
Surmulets Algues
(poissons) 12 %
2% Plancton
Holothuries 23 %
(échinodermes)
13 %

Coraux
(16 %)
Trocas
(gastéropodes)
1%
Bénitiers
Perroquets (bivalves)
(poissons) Chirurgiens 4%
(poissons)
4%
19 %

FIG. 118. - Répartition relative (en pourcentage) des échantillons ; en fonction des espèces de la flore et de la faune
prélevées, entre 1967 et 1999, dans le cadre de la surveillance radiologique des lagons de Mururoa et Fangataufa.

IV.6.1 - RADIONUCLÉIDES DE PÉRIODE INFÉRIEURE OU ÉGALE À L’ANNÉE


Les radionucléides de période radioactive inférieure à l’année ont été détectés dans les
différentes espèces végétales et animales prélevées dans le cadre de la surveillance radiologique.
Il s’agissait essentiellement des 57 Co, 58 Co, 54 Mn, 65 Zn, 95 Zr, 106 Ru, 103 Ru, 144 Ce et 141 Ce
auxquels il faut ajouter les 131I et 140Ba, lorsque les niveaux d’activité permettaient leur quantification
malgré les délais entre les dates de prélèvement et de mesure.

IV.6.1.1 - PLANCTON

Le plancton absorbe et concentre très rapidement les radionucléides artificiels présents


dans l’eau de mer. Pour cette raison, dans le cadre de la surveillance radiologique, il a été utilisé
comme bioindicateur afin de quantifier l'importance des retombées immédiates lors des essais
atmosphériques, ou celle des fuites provoquées par les post-forages dans les cavités-cheminées
créées par les essais souterrains. Entre 1970 et 1999, un millier de prélèvements de plancton ont
été effectués dans le lagon de Mururoa et plus d’une centaine dans le lagon de Fangataufa. La
biomasse planctonique utilisée pour les analyses radiologiques était essentiellement animale
(zooplancton).
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 178

178 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Les radionucléides de courte période régulièrement détectés dans le plancton collecté


pendant la période des essais atmosphériques étaient essentiellement les 57 Co, 58 Co, 54 Mn,
65 Zn, 95 Zr, 106 Ru, 103 Ru, 144 Ce et 141 Ce. Le suivi radiologique du plancton permettait donc de
décrire l’évolution des activités de ces radionucléides dans les eaux de mer après chaque essai
atmosphérique, les niveaux résiduels des radionucléides à vie courte du plancton redevenant très
rapidement inférieurs aux limites de détection.
Pendant la période des essais souterrains, l'apparition temporaire de radionucléides à vie
courte résultait de la libération d’une partie des gaz radioactifs sous pression dans la cavité-
cheminée qui remontaient vers la surface par le puits de post-forage, ainsi que le rejet dans le
lagon d’eaux de rinçage ou d’effluents provenant des tubes de carottages ayant pénétré la cavité. Les
prélèvements pouvant être réalisés immédiatement après les essais, la capacité d'accumulation
rapide du plancton a ainsi été confirmée. Ainsi, les radionucléides à vie courte comme 131 I et
140 Ba, de périodes respectives 8 et 12,8 jours, ont pu être mesurés dans le plancton (Fig. 119).
Par exemple, le 26 mai 1987, dès la pénétration du forage dans la cavité créée par l’essai
Jocaste, l’activité massique en 131I atteignait 700 Bq.kg -1 frais dans le plancton prélevé, le jour
même, dans la zone de la tête de puits, et une valeur maximale de 5 600 Bq.kg -1 frais, le 2 juin
au matin. Quinze jours plus tard, les niveaux des radionucléides à vie courte dans le plancton du
lagon de Mururoa n’étaient plus quantifiables en raison de la décroissance radioactive et de la
dilution de l’activité des masses d’eau du lagon par les eaux océaniques entrant par la passe et
les hoa.
En revanche, l’activité massique du 60Co dans le plancton n’était pas influencée par les opé-
rations de post-forage décroissant suivant une période apparente de 3 ans.

Bq.kg-1 frais
10000
131I
140Ba
1000 60Co

100

Te ~ 3 ans
10

Jocaste Thrasimèdès Anticlée Mélanippe


0,1 Danaé Tecmessa Thoas

0,01
1987 1988 1989 1990 1991
F IG. 119. - Évolution de l’activité massique (Bq.kg -1 frais) en 131 I, 140 Ba et 60 Co du plancton collecté dans le
lagon de Mururoa entre 1987 et 1991.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 179

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 179

IV.6.1.2 - CORAUX

Les activités massiques maximales des coraux du lagon de Fangataufa ont été atteintes
en 1967, au début de la période des essais atmosphériques. Elles étaient alors de l’ordre de plusieurs
dizaines de milliers de Bq.kg -1 frais en 95 Zr, 144 Ce, 106 Ru et en 58 Co. Associés à ce dernier,
d’autres produits d’activation, 65Zn, 54Mn, 110mAg et 57Co, ont également été détectés. L’activité
massique de ces produits d'activation a décru très rapidement et n'était plus quantifiable après
1972. L’activité massique des produits de fission, de l’ordre de 10 Bq.kg -1 frais de 144Ce et de 106Ru
en 1975 et 1977 et de 2 Bq.kg -1 frais de 95 Zr en 1976, a décru rapidement, jusqu’à n’être plus
quantifiable à la fin de l’année 1977 (Fig. 120).
La période de décroissance effective (T e ) de ces radionucléides était du même ordre de
grandeur que leur période radioactive. À l’exception du 95Zr, de période radioactive plus courte que
les autres radionucléides, la décroissance de la majorité d’entre eux pouvait être représentée par une
droite de régression, pour l’ensemble de la période des retombées des essais atmosphériques.

Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais


104 104 103
65Zn 54Mn 57Co

103 103
102

102 102
101
101 101

100
100 100

10-1 10-1 10-1


67 68 69 70 71 72 67 68 69 70 71 72 67 68 69 70 71 72

Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais


105 105 105
106Ru 144Ce 95Zr

104 104 104

103 103 103

102 102 102

101 101 101

100 100 100


DRAGON

10-1 10-1 10-1


67 69 71 73 75 77 67 69 71 73 75 67 69 71 73 75

F IG. 120. - Évolution, au cours du temps, des activités massiques frais) en (Bq.kg -1 65 Zn, 57 Co, 54 Mn, 106 Ru,
144 Ce et 95 Zr des coraux du lagon de Fangataufa prélevés lors de la période des essais atmosphériques.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 180

180 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

À partir de 1970, les résultats


Lagon de Mururoa
de mesure de l’activité massique des Radionucléide
coraux prélevés à Mururoa mettaient et Activité Nombre
en évidence des niveaux inférieurs à maximale de mesures Date
période physique
ceux des coraux issus du lagon de (Bq.kg-1 frais) significatives
Fangataufa (Tableau 33). 58Co (70,8 jours) 8,1 1 12/06/70
65Zn (244 jours) 170 46 14/04/70
57Co (272 jours) 310 26 14/04/70
T ABLEAU 33. 54Mn (312 jours) 100 42 13/10/71
Activité massique (Bq.kg -1 frais) des
principaux radionucléides émetteurs 110mAg (250 jours) 15 7 07/01/71
gamma à vie courte, mesurés dans des
95Zr (64 jours) 66 30 26/07/71
échantillons de coraux prélevés, en
1970-1971, dans le lagon de Mururoa. 144Ce (284 jours) 2 800 28 22/01/70
106Ru (373 jours) 850 60 22/01/70
IV.6.1.3 - MOLLUSQUES

L'évolution temporelle de l’activité massique des mollusques a été appréciée par le suivi
radiologique des turbos et des bénitiers prélevés à Mururoa et Fangataufa, respectivement sur le
platier externe et dans les lagons. Durant la période des essais atmosphériques, les activités
massiques des radionucléides présents dans les échantillons de ces deux espèces de mollusques
étaient généralement à des niveaux plus élevés dans les
viscères et l’hépatopancréas que dans la chair. Le
rapport moyen entre l’activité des viscères et celle de la T ABLEAU 34.
chair, des principaux radionucléides détectés dans le Rapport entre les activités massiques
turbo, était compris entre 1,9 et 7 (Tableau 34). Le des principaux radionucléides mesurés
dans les viscères et la chair des mêmes
même constat a été fait pour l’hépatopancréas du
turbos, prélevés pendant la période des
bénitier, qui est un organe d’accumulation, présentant essais atmosphériques.
des niveaux d’activité 50, 35, 12 et 6 fois supérieurs
Rapport d'activité entre les
aux autres organes de l’animal, respectivement en
60 Co, 57 Co, 54 Mn et 106 Ru. fractions viscère et chair
Radionucléide
Les 95 Zr et 144 Ce ont été détectés dans les Moyenne
Nombre
turbos et les bénitiers de Mururoa et de Fangataufa, de mesures
jusqu'en 1976. Les activités massiques les plus élevées 95Zr 2,5 288
ont été observées après les campagnes d’essais 106Ru 6,8 109
atmosphériques de 1969, 1970 et 1971. L’activité
137Cs 2,6 32
massique maximale apparaissait entre 2 et 3 mois
141Ce 4,3 26
après la fin de chaque campagne d’essais, pour
décroître ensuite rapidement, jusqu’à la campagne 144Ce 3,2 225
suivante (Fig. 121). Ces données ont été utilisées pour 57Co 4,2 42
calculer les périodes de décroissance effective du 95 Zr
144 60Co 4,5 321
et du Ce pour ces deux mollusques. Les périodes
65Zn 2,1 83
de décroissance effective de ces radionucléides sont
égales à leurs périodes radioactives. 110m Ag 7,0 84
239+240Pu 1,9 61
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 181

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 181

Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais


10000 100
Radioactivité des turbos
a b
consécutive aux retombées locales

1000
Radioactivité des turbos consécutive
aux retombées des essais nucléaires chinois 10
(17/11/76 - 16/10/80)
100

10
1

0,1 0,1
1969 1971 1973 1975 1977 1979 1981 69 71 73 75 77

F IG. 121. - Évolution, au cours du temps, de l’activité massique frais) du (Bq.kg -1 95 Zr des viscères des turbos
(a) et de la chair des bénitiers (b), prélevés dans le lagon de Mururoa.

Les périodes de décroissance effectives des 57Co, 54Mn et 106Ru calculées pour les bénitiers
prélevés à Mururoa, étaient du même ordre de grandeur que leurs périodes radioactives respectives.
(Fig. 122).

Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais


105 105 104
57Co 106Ru 54Mn

104 104
Hépatopancréas Hépatopancréas
103

103 103 Hépatopancréas

102

102 102

101
101 101

100
100 10
Chair
Chair Chair

10-1 10-1 10-1


69 71 73 75 77 79 69 71 73 75 77 79 69 71 73 75 77 79

F IG. 122. - Évolution, au cours du temps, des activités massiques (Bq.kg -1 frais) en 57 Co, 106 Ru et 54 Mn
mesurées dans la chair (points violets) et l’hépatopancréas (points rouges) des bénitiers prélevés dans le
lagon de Mururoa principalement lors de la période des essais atmosphériques.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 182

182 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Bien que ces deux espèces développent des modes de vie et d'alimentation différents, le
turbo est un mollusque mobile brouteur tandis que le bénitier est un bivalve filtreur fixé sur les
substrats, leurs niveaux d'activités demeurent proches, tant pour ceux prélevés dans le lagon de
Mururoa que pour ceux issus du lagon de Fangataufa, durant la période des essais atmosphériques.

À la fin de l’année 1977 et au milieu d’année 1981, une augmentation ponctuelle du 95 Zr a


été mesurée dans les échantillons de turbo prélevés à Mururoa et Fangataufa, mais aussi, simul-
tanément, sur tous ceux prélevés en Polynésie française. Les activités massiques détectées
étaient identiques sur l’ensemble des échantillons. Simultanément, les stations de contrôle de la
radioactivité atmosphérique au niveau mondial mettaient en évidence une augmentation de l’activité
volumique en 95Zr, qui a été attribuée dans les deux cas aux retombées mondiales des essais
nucléaires mégatonniques du 17 novembre 1976 et du 16 octobre 1980, réalisés dans l’atmo-
sphère par la République populaire de Chine.

IV.6.1.4 - POISSONS

Parmi les poissons herbivores, les poissons perroquets présentaient des niveaux d’activité
massique en radionucléides à vie courte supérieurs à ceux des poissons chirurgiens. Les niveaux les
plus élevés ont été observés dans les premières années de la période des essais atmosphériques.
La décroissance rapide des radionucléides initialement présents dans les eaux immédiatement
après les essais, associée aux déplacements fré-
quents de ces poissons le long de la côte récifale
externe, explique probablement l’homogénéité spa-
tiale observée. Les graphiques de ce paragraphe pré- Bq.kg-1 frais
sentent l'évolution, au cours du temps, des activités
massiques des poissons, tous secteurs confondus. 1000
L’activité massique des poissons collectés sur le
platier externe des deux atolls, a décru rapidement
jusqu'en 1978 (Fig. 123). 100

Au niveau des lagons, les activités massiques


des poissons chirurgiens et perroquets de Fangataufa 10
étaient généralement supérieures à celles mesurées
à Mururoa ; mais aucune hétérogénéité spatiale
n’apparaissait au sein de chaque atoll.
1
Pendant la période des essais atmosphé-
riques, l'activité des 57 Co, 54 Mn et 65 Zn a décru 1968
1970
régulièrement pour atteindre, en 1974, les limites 1972
de détection des appareils de mesure de cette 1974
57 54 65 95 10
0,1
1976 Co Mn Zn Zr
6
Ru
époque (Fig. 124). L’année de l’arrêt des essais Années 1978
atmosphériques, les niveaux d’activité étaient de
F IG. 123. - Évolution au cours du temps des
l’ordre du Bq.kg frais, ou inférieurs. Pour chaque activités massiques (Bq.kg -1 frais) en 54 Mn,
radionucléide, la période effective était sensiblement 57 Co, 65 Zn, 95 Zr et 106 Ru de la chair des pois-
inférieure à la période radioactive. sons perroquets prélevés sur le récif externe du
lagon de Mururoa et de Fangataufa, au cours de la
période des essais atmosphériques.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 183

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 183

a 65Zn 57Co 54Mn


Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais
104 103 104

103 103
102

102 102
101
101 101

100
100 100

10-1 10-1 10-1


69 71 73 75 77 69 71 73 75 77 69 71 73 75 77

65Zn 57Co 54Mn


b
Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais
105 104 104

104
103 103

103
102 102
102
101 101
101

100 100
100

10-1 10-1 10-1


68 70 72 74 76 68 70 72 74 76 68 70 72 74 76

F IG. 124. - Évolution au cours du temps des activités massiques (Bq.kg -1 frais) en 54 Mn, 57 Co, 65 Zn de la
chair des poissons perroquets et chirurgiens prélevés dans les lagons de Mururoa (a) et de Fangataufa (b),
lors de la période des essais atmosphériques. .

En ce qui concerne les poissons carnivores, comme les surmulets, l’évolution au cours du
temps de l’activité massique de ces radionucléides était identique à celle des poissons herbivores
(Fig. 125).
Pour les poissons surmulets, les activités massiques les plus élevées ont été observées
au début de la période des essais atmosphériques avec le 54 Mn et le 57 Co atteignant respec-
tivement 2 000 et 500 Bq.kg -1 frais, à Mururoa, en 1969. À Fangataufa, les activités massiques
étaient plus élevées en 65 Zn, 23 000 et 6 200 Bq.kg -1 frais respectivement, en 1968 et 1969.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 184

184 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

65Zn 57Co 54Mn


a
-1
Bq.kg-1 frais Bq.kg frais Bq.kg-1 frais
104 103 103

103
102 102

102
101 101
101

100 100
100

10-1 10-1 10-1


69 71 73 75 77 69 71 73 75 77 69 71 73 75 77

65Zn 57Co 54Mn


b
Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais -1
Bq.kg frais
105 105 103

104 104
102
103 103

102 102 101

101 101
100
100 100

10-1 10-1 10-1


68 70 72 74 76 68 70 72 74 76 68 70 72 74 76

F IG. 125. - Évolution au cours du temps des activités massiques (Bq.kg -1 frais) en 54 Mn, 57 Co, 65 Zn des
poissons surmulets éviscérés prélevés dans les lagons de Mururoa (a) et de Fangataufa (b), lors de la période
des essais atmosphériques.

En revanche, les activités en 54 Mn et 57 Co y étaient moins élevées, respectivement 330


et 150 Bq.kg -1 frais en 1968. Les activités n’ont cessé ensuite de décroître, jusqu’aux limites de
détection de ces radionucléides en 1974, les valeurs étant inférieures à quelques becquerels ou
dixièmes de Bq.kg -1 frais. Comme cela a été observé sur la plupart des autres espèces du lagon
et en particulier sur les poissons chirurgiens et perroquets, la période effective de chaque radio-
nucléide était sensiblement inférieure à sa période radioactive.
Les mêmes radionucléides ont été mesurés chez les autres espèces de poissons carnivores,
comme les mérous, avec des activités massiques évoluant de façon identique au cours du temps,
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 185

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 185

mais à des niveaux toujours supérieurs à Fangataufa (Fig. 126). Ils n’ont plus été détectés après
1977 et leur période effective était du même ordre de grandeur que leur période de radioactive.

a 65Zn 57Co 54Mn

Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais


104 103 103

103
102 102

102
101 101
101

100 100
100

10-1 10-1 10-1


68 70 72 74 76 78 68 70 72 74 76 78 68 70 72 74 76 78
65Zn 57Co 54Mn
b
Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais
105 104 104

103 103
104

102
103 102

101
102 101
100

101 100
10-1

100 10-2 10-1


68 70 72 74 76 68 70 72 74 76 68 70 72 74 76
F IG. 126. - Évolution au cours du temps des activités massiques frais) en (Bq.kg -1
et du 65 Zn 54 Mn, 57 Co
dans la chair des mérous, prélevés dans les lagons de Mururoa (a) et de Fangataufa (b), lors de la période
des essais atmosphériques.

IV.6.1.5 - HOLOTHURIES

Les principaux radionucléides à vie courte ont également été détectés dans le tégument
des holothuries prélevées à Mururoa et à Fangataufa, durant la période des essais atmosphé-
riques. Le niveau de l’activité massique de ces radionucléides a diminué très rapidement au cours
du temps (Fig. 127). Ceci s’explique par de faibles retombées lors des essais sous ballon, donc une
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 186

186 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

plus faible contamination des sédiments dont se nourrissent les holothuries. L’ensemble de ces
radionucléides ne seront plus décelés après 1975. Leur période de décroissance effective est
inférieure à leur période de décroissance radioactive pour l’ensemble des radionucléides.

Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais


105 104
105 65Zn 57Co 54Mn

104
103
104
103
103 102
102
102
101
101
101

100
100 100

10-1 10-1 10-1


67 69 71 73 75 67 69 71 73 75 67 69 71 73 75

Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais


105
106 144 95Zr
105 Ru 105 Ce
4
10
104 104

103
103 103

102
102 102

101
101 101

100 100 100

10-1 10-1 10-1


67 69 71 73 75 67 69 71 73 75 67 69 71 73 75

F IG. 127. - Évolution au cours du temps des activités massiques (Bq.kg -1 frais) en 54 Mn, 57 Co, 65 Zn, 106 Ru,
144 Ce et 95 Zr dans le tégument des holothuries noires prélevées dans le lagon de Fangataufa, lors de la
période des essais atmosphériques

IV.6.2 - RADIONUCLÉIDES DE PÉRIODE SUPÉRIEURE À 5 ANS


Les principaux radionucléides de période supérieure à 5 ans, régulièrement mesurés dans
les bioindicateurs collectés pendant la période des essais atmosphériques, étaient le 60 Co, le
238 Pu, et le 239+240 Pu associé dans une moindre mesure au 137 Cs et 90 Sr.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 187

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 187

IV.6.2.1 - ALGUES BENTHIQUES T ABLEAU 35.


Évolution annuelle des activités massiques (Bq.kg -1
Pendant la période des essais atmosphé- frais) moyennes en 60 Co, 137 Cs et 241 Am des
riques, le 60 Co était le principal radionucléide de algues benthiques prélevées dans le lagon de
Mururoa entre 1970 et 1997.
période supérieure à 5 ans mesuré régulièrement, Le tiret signale l’absence de résultat.
avec parfois quelques traces de 137Cs. Les activités
massiques les plus élevées en 60 Co dans les Radionucléides
algues benthiques ont été observées au début Année 137Cs 60Co 241Am

de la période des essais atmosphériques pour Act. (Nb.) Act. (Nb.) Act. (Nb.)
décroître par la suite. 1970 - - 103 (3) - -
Ainsi, les niveaux annuels moyens étaient 1971 - - 103 (3) - -
de l’ordre de 100 Bq. kg -1 frais dans les algues 1972 - - 16 (5) - -
prélevées à Mururoa en 1970, de 10 Bq.kg -1 frais 1973 1,3 (1) 15 (5) - -
à l’arrêt des essais atmosphériques en 1974 et 1974 3,5 (1) 8,9 (4) - -
de 0,40 Bq.kg -1 frais à l'arrêt des essais souter- 1975 - - 13 (1) - -
rains, en 1996 (Tableau 35). 1976 0,37 (1) 14 (1) - -
1977 - - - - - -
Les quantités d'algues benthiques natu-
1978 - - 10 (2) - -
rellement présentes étant insuffisantes pour la
1979 - - - - - -
mesure, des panneaux immergés favorisant leur 1980 - - - - - -
croissance ont été mis en place à partir de 1982. 1981 - - 15 (3) - -
À partir de cette date, le nombre d’échantillons 1982 0,13 (2) 6,3 (13) 0,93 (1)
a donc significativement augmenté, permettant de 1983 0,76 (2) 3,4 (13) - -
suivre régulièrement la décroissance de l’activité 1984 2,3 (7) 8,8 (75) ≤ 0,17 (1)
massique des algues ; celle-ci passant de 6,3 1985 1,8 (11) 5,8 (91) 37 (1)
Bq.kg -1 frais, en moyenne, en 1982, à 0,47 1986 0,62 (17) 4,6 (73) 4,3 (3)
Bq.kg -1 frais, en moyenne, en 1997. La période de 1987 0,71 (7) 3,0 (115) 0,08 (5)
décroissance effective du 60 Co dans les algues 1988 1,2 (9) 2,1 (134) 0,04 (1)
1989 ≤ 0,63 (124) 1,2 (157) - -
benthiques, calculée entre 1982 et 1997, était de
1990 ≤ 0,46 (140) 0,81 (140) ≤ 0,23 (57)
l’ordre de 3 ans, c’est-à-dire inférieure à sa période
1991 ≤ 0,30 (75) 0,95 (75) 0,35 (31)
radioactive et identique à celle calculée pour le 1992 ≤ 0,20 (90) 0,83 (90) 2,1 (67)
plancton (Fig. 128). 1993 ≤ 0,14 (92) 0,67 (92) 3,3 (57)
1994 ≤ 0,12 (48) 0,52 (48) 0,41 (45)
Bq.kg-1 frais 1995 ≤ 0,10 (46) 0,46 (45) ≤ 0,85 (40)
100
1996 ≤ 0,12 (61) 0,40 (58) ≤ 0,28 (13)
1997 ≤ 0,10 (47) 0,47 (44) ≤ 0,24 (34)

10

0,1
F IG. 128. - Évolution au cours du temps des
activités massiques (Bq.kg -1 frais) en 60 Co
des algues récoltées sur les panneaux
Les points en bleu clair correspondent à des valeurs en limite de détection
0,01
immergés entre 1982 et 1997 dans le lagon
1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 de Mururoa.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 188

188 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Ce résultat confirme l'absence d'apport en 60Co supplémentaire dans les eaux du lagon de
Mururoa pendant les essais souterrains. Le 137Cs et le 241Am étaient présents, mais à des activités
plus faibles. Ces résultats doivent cependant être considérés avec précaution, car le dispositif
de panneaux immergés favorisait également le dépôt des particules sédimentaires en suspension.
L'activité massique des radionucléides mesurés intégrait celle des algues, mais aussi celle des
matières en suspension ce qui peut expliquer l’importance de la variabilité des activités mesurées pour
une même année.

IV.6.2.2 - PLANCTON

Le 60 Co, le 238 Pu et le 239+240 Pu ont régulièrement été mesurés dans les échantillons de
plancton. L’évolution annuelle de l’activité massique moyenne du 60Co du plancton collecté dans les
eaux du lagon des deux atolls d’expérimentations est donnée à titre d’exemple (Tableau 36).
T ABLEAU 36.
Évolution annuelle des activités massiques (Bq.kg -1 frais) moyennes en 60Co du plancton collecté dans
les lagons de Mururoa et Fangataufa entre 1970 et 1999. Le tiret signale l’absence de résultat .
LAGON DE MURUROA LAGON DE FANGATAUFA
Année
Nombre de Activité Activité Nombre de Activité Activité
prélèvements moyenne maximale prélèvements moyenne maximale
1970 58 205 960 - - -
1971 19 296 620 - - -
1972 18 222 740 - - -
1973 9 112 180 - - -
1974 7 152 400 - - -
1975 15 53 100 19 291 1 100
1976 92 53 210 14 351 590
1977 238 19 77 8 248 590
1978 323 31 140 6 177 440
1979 144 21 51 3 180 220
1980 - - - 4 293 480
1981 - - - - - -
1982 1 4,4 - 1 270 -
1983 7 4,6 9,2 - - -
1984 - - - - - -
1985 - - - - - -
1986 - - - 2 27 32
1987 4 1,3 1,7 - - -
1988 24 1,9 4,8 3 13 21
1989 27 2,2 17 8 11 28
1990 27 1,1 2,2 7 7,8 17
1991 26 1,3 7,6 6 9,5 18
1992 12 0,78 1,1 2 6,0 11
1993 11 0,75 2,6 2 1,8 2,2
1994 12 0,71 2,3 1 5,2 -
1995 12 0,42 1,2 1 2,1 -
1996 1 0,27 - 43 2,8 5,1
1997 1 0,54 - - - -
1998 1 0,51 - 1 1,8 -
1999 1 0,58 - 1 3,4 -
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 189

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 189

La période de décroissance Bq.kg-1 frais


effective (T e ) pour le 60 Co a été déter- 10000 Les points en bleu clair correspondent à des valeurs en limite de détection
minée par des ajustements linéaires
sur chaque série de données et a 1000
Fangataufa
conduit à des périodes de décroissance
similaires, de l’ordre de 3 ans (Fig. 129). 100
Lors de la période des essais
souterrains, les activités massiques en 10
60 Co fluctuaient à des niveaux très
faibles, de 1 à 4 Bq.kg -1 frais de 1
plancton. Ces fluctuations s’expli- Mururoa
quent par la modification saisonnière de
0,1
la composition en espèces du plancton 70 72 74 76 78 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00
prélevé et, par conséquent, de celle
des facteurs de concentration à partir F IG. 129 - Évolution au cours du temps des activités massiques
(Bq.kg -1 frais) en 60 Co du plancton récolté entre 1969 et 1999
de l’eau de mer. Elles peuvent également
dans les lagons de Mururoa et de Fangataufa.
trouver leur origine dans le fait que les
échantillons de plancton contiennent
inévitablement des particules de sédi-
ments en suspension. Ces éléments, étrangers au prélèvement biologique, peuvent contribuer de
façon non négligeable à une surestimation de l’activité des échantillons de plancton.
Les échanges lagon-océan au niveau des passes, conduisaient à la libération d’une fraction
du 60 Co des eaux du lagon dans les eaux océaniques aux abords des atolls. Entre les passes et
une limite située à 12 milles nautiques des atolls, les activités massiques en 60 Co du plancton
étaient donc quatre fois supérieures à celles des eaux océaniques du large. Les activités massiques
ont suivi une décroissance régulière au cours du temps pour atteindre à l’heure actuelle des niveaux
de quelques dixièmes de becquerels par kilogramme frais (Fig. 130).

Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais


100 100
a b

10 10

1 1

0,1 0,1

0,01 0,01
1976 1978 1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994

F IG. 130 - Évolution au cours du temps de l’activité massique (Bq.kg -1 frais) en 60 Co du plancton collecté
dans les eaux océaniques aux abords des passes des atolls de Mururoa (a) et de Fangataufa (b).

IV.6.2.3 - CORAUX

Trois radionucléides, 60 Co, 90 Sr et 137 Cs ont été mesurés dans les coraux prélevés dans
les lagons des sites d’expérimentations.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 190

190 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Cobalt 60
Les activités massiques en 60 Co les plus élevées ont été mesurées au début de la période
des essais atmosphériques. Ainsi, l'activité massique moyenne en 60 Co des coraux prélevés, en
1970, à Mururoa, était de l’ordre de quelques dizaines de Bq.kg -1 frais. Les niveaux sont restés
stables de la moitié des années 1970 jusqu’à la fin des années 1980. Ils ont ensuite régulièrement
diminué pour atteindre une activité d’environ 1 Bq.kg -1 frais, puis être inférieurs aux limites de
détection pour une majorité d’échantillons (Fig. 131).

Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais


1000
100 a b

100
10
11 37
2
8
29 16
2 10 4 33 25 63
79 80 37
10 6 62 24
1 23 30
1 9
48
4
46
37 1 3 2
10 12

0,1 4

0,1
75 77 79 81 83 85 87 89 91 93 95 97 70 72 74 76 78 80 82 84 86 88
F IG. 131. - Évolution des activités massiques frais) du (Bq.kg -1
du corail du genre Fungia (a) et des autres 60 Co
espèces de coraux (b), récoltés entre 1970 et 1997, dans le lagon de Mururoa. Le nombre de résultats de
mesure, utilisés pour le calcul de la moyenne, est donné sous chacun des points de la courbe.

La distribution géographique de l’activité massique en 60Co des coraux du genre Fungia


montre l’hétérogénéité spatiale des niveaux observés dans le lagon de Mururoa. Les activités
massiques les plus élevées, de l'ordre de 50 Bq.kg -1 frais en 1975, ont été localisées dans le
secteur Ouest du lagon, en particulier au droit du point Dindon où ont eu lieu les deux essais sur barge
de 1966. En 1978, les moyennes calculées par secteur à partir de 80 échantillons de Fungia,
récoltés sur l’ensemble du lagon de Mururoa, ont confirmé cette hétérogénéité spatiale (Fig. 132).
L’activité massique en 60 Co des coraux du
lagon de Fangataufa était généralement supérieure
Bq.kg-1 frais
à celle observée à Mururoa. De l’ordre de plusieurs
7 Colette Denise centaines de Bq.kg -1 frais en 1967, elle a diminué
Secteur régulièrement jusqu’en 1996, pour atteindre quelques
Nord
6 Passe Secteur
Est
dixièmes de Bq.kg-1 frais. La période de décroissance
Secteur
Dindon
Sud effective était d’environ 3 ans (Fig. 133).
17 Secteur Ouest
5 Viviane
Faucon

F IG. 132. - Cartographie des activités massiques minimales,


3 moyennes et maximales (Bq.kg -1 frais) du 60 Co des coraux
20
25
du genre Fungia, récoltés en 1978, dans les différents
18 secteurs du lagon de Mururoa. Le nombre de résultats de
2
mesure utilisés pour le calcul de la moyenne et pour représenter
Secteur Ouest Secteur Nord Secteur Sud Secteur Est l’amplitude est donné sous chaque secteur.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 191

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 191

Bq.kg-1 frais
10000
Les points en bleu clair correspondent à des valeurs en limite de détection

1000

100

10
Dernier essai
1 atmosphérique
à Fangataufa F IG . 133. - Évolution des activités massiques
0,1 moyennes (Bq.kg -1 frais) en 60 Co des coraux,
récoltés entre 1967 et 1997, dans le lagon de
0,01 Fangataufa. .
67 69 71 73 75 77 79 81 83 85 87 89 91 93 95 97

Césium 137 et strontium 90


Le 137Cs a rarement été détecté dans les échantillons de coraux prélevés dans les lagons
de Mururoa et de Fangataufa. Les activités massiques en 137Cs supérieures à la limite de détection
se situaient entre 0,93 et 9,2 Bq.kg -1 frais à Mururoa (9 résultats significatifs) et entre 3,2 et 92
Bq.kg -1 frais à Fangataufa (5 résultats significatifs).
Durant la période des essais souterrains, plus précisément de 1976 à 1990, l’activité
massique moyenne annuelle en 90Sr des coraux Fungia prélevés à Mururoa a décru d’un facteur
10, passant de 18 à 2,2 Bq.kg -1 frais, pour ne plus être quantifiable à partir de 1991. L'évolution
au cours du temps a été similaire pour les Fungia du lagon de Fangataufa. L'activité massique
moyenne annuelle du 90Sr y était de 180 Bq.kg -1 frais en 1968 et de 0,78 Bq.kg -1 frais en 1996.

IV.6.2.4 - MOLLUSQUES

Trois radionucléides, 60Co, 90Sr et 137Cs ont été mesurés dans les différentes espèces de
mollusques, Turbo setosus récoltés sur les platiers externes, Tridacna maxima et Trochus niloticus
prélevés dans les lagons.

Cobalt 60
Au niveau du platier externe, le mollusque Turbo setosus a fait l'objet d'une surveillance
régulière, à partir de 1968, pour Fangataufa et de 1969 pour Mururoa. Les activités massiques
étaient plus élevées dans la phase initiale des essais atmosphériques, puis ont décru au cours du
temps. Ainsi, à Fangataufa, les activités massiques en 60 Co des viscères ont diminué, passant
de 400 Bq.kg -1 frais, en 1968, à quelques becquerels par kilogramme frais actuellement.
De même, à Mururoa, l'activité massique de Turbo setosus a décru de quelques dizaines de
Bq.kg -1 frais en 1969, à quelques dixièmes de Bq.kg -1 frais en 1993 (Fig. 134). La période de
décroissance effective variait entre 3 et 4 ans en fonction des secteurs.
La cartographie des activités massiques en 60Co a montré une hétérogénéité géographique sur
les deux atolls. À Fangataufa, les niveaux les plus élevés ont été mis en évidence dans le secteur Nord
de l’atoll, à proximité du récif immergé et de la passe, entre les zones Manchot et Empereur. Les
niveaux les plus faibles se situaient à l’est, entre les zones Kilo et Écho, à l’abri des échanges océan-
lagon. Les mêmes variations géographiques ont été constatées à Mururoa. L’activité massique en
60 Co des Turbo setosus au voisinage de la passe était 5 à 10 fois supérieure à celle mesurée sur les
individus collectés dans les autres secteurs du récif.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 192

192 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais


100 1000
a b
Secteur de la passe
100
10

10

1
1 Secteur Nord
Secteur Ouest
Secteur Sud
Secteurs hors passes Secteur Est
0,1 0,1
1968 1970 1972 1974 1976 1978 1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1968 1970 1972 1974 1976 1978 1980 1982 1984 1986 1988

F IG. 134. - Évolution, au cours du temps, des activités massiques moyennes (Bq.kg -1 frais) en 60Co des Turbo
setosus récoltés entre 1967 et 1993 dans les différents secteurs des lagons de Mururoa (a) et Fangataufa (b).

138˚ 45' W
Empereur N
Golf La courantologie locale a permis d'ex-
Pingouin pliquer les variations géographiques de l’activité
Passe
Kilo
massique en 60 Co de Turbo setosus. Ainsi,
Manchot
une étude menée à Fangataufa, en 1987, a
montré que l’activité massique en 60 Co de ce
Pavillon Alpha
Frégate mollusque diminuait en fonction de l’éloignement
Motu aux
oiseaux du point de prélèvement par rapport à la passe,
tant en direction de l’ouest que de l’est (Fig. 135).
Hotel
Fox Pour les autres espèces, l’activité
massique en 60 Co de la chair et de l’hépato-
Hélène 22˚ 15' S
pancréas des bénitiers (Tridacna maxima)
Activité
en Bq.kg-1 frais
vivant dans le lagon de Mururoa a diminué
0-2 d’un facteur 300 à 400, entre 1969 et 1995,
2-5 Terme Nord Echo
avec une période de décroissance effective
5 - 10 Canard
pour les deux organes de l’ordre de 3 ans (Fig. 136).
10 - 15 Marvi
L’évolution au cours du temps de l'ac-
0 5 km
15 - 20
Terme Sud
tivité massique en 60Co des bénitiers collectés
à Fangataufa était similaire à celle observée à
F IG . 135. - Cartographie des activités massiques Mururoa et, comme pour les autres espèces
(Bq.kg -1 frais) en 60Co des viscères de Turbo setosus faisant l'objet d’une surveillance radiologique,
collectés sur le récif extérieur de l'atoll de Fangataufa. les niveaux mesurés y étaient supérieurs à
Les courants entrants et sortants sont indiqués par des flèches.
ceux des bénitiers prélevés à Mururoa.
Le 60 Co était le radionucléide détecté
aux niveaux les plus élevés chez les trocas (Trochus niloticus), avec une activité massique moyenne
5 fois plus élevée dans leurs viscères que dans leur chair. Les activités maximales ont été observées
à Mururoa en 1984, soit respectivement 12 et 28 Bq.kg -1 frais dans la chair et les viscères.
L'activité massique du 60Co de la chair et des viscères de ces gastéropodes, prélevés dans le sec-
teur Ouest du lagon de Mururoa, a diminué suivant une période de décroissance effective de l’ordre
de 5 ans (Fig. 137). Les sédiments marins de cette même zone présentant les niveaux d'activité mas-
sique les plus élevés en 60Co, par re-solubilisation, pouvaient enrichir l'eau de cette partie du lagon,
en contact avec les mollusques. Ce phénomène d'enrichissement était probablement favorisé par
le fait que les échanges entre les eaux océaniques et ce secteur de l’atoll étaient très limités.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 193

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 193

F IG. 136. - Évolution, au cours du temps, des Bq.kg-1 frais


105
activités massiques moyennes (Bq.kg -1 frais)
en 60 Co de l'hépatopancréas et de la chair
104
des bénitiers, récoltés entre 1969 et 1995, Hépatopancréas
dans le lagon de Mururoa. 3
10

102

101

Chair
100

10-1
69 71 73 75 77 79 81 83 85 87 89 91 93 95

Bq.kg-1 frais
100

Viscères

10

F IG. 137. - Évolution au cours du temps des


activités massiques moyennes (Bq.kg -1 frais)
1 en 60 Co de l'hépatopancréas et de la chair
des trocas récoltés entre 1983 et 1998 dans
Chair le lagon de Mururoa.

0,1
83 85 87 89 91 93 95 97

Une étude menée sur une cinquantaine de prélèvements effectués sur l’ensemble du
lagon de Mururoa, en 1996, a confirmé l'homogénéité de l'activité massique des trocas, dont la
valeur moyenne était proche de 1 Bq.kg -1 frais, à l’exception de ceux de la zone Dindon. À
Fangataufa, entre 1991 et 1999, l’activité en 60 Co de la chair de ce mollusque est passée de 9
à 2 Bq.kg -1 frais et celle des viscères de 37 à 24 Bq.kg -1 frais.

Césium 137 et strontium 90


Le 137Cs est principalement associé aux tissus mous des mollusques, où il s’accumule avec
un facteur de concentration (Fc) compris entre 3 et 150, c’est-à-dire 10 fois plus faible que celui
du 60Co. L’activité massique du 137Cs dans les viscères d’échantillons de Turbo setosus collectés à
Mururoa a décru selon une période effective de 5,4 ans, passant de quelques Bq.kg -1 frais en
1972, à quelques dixièmes de Bq.kg -1 frais en 1988 (Fig. 138). À partir de cette date, ce radio-
nucléide n’était plus quantifiable car les activités étaient inférieures aux limites de détection des
appareils de mesure utilisés pour la surveillance à cette époque.
Les activités massiques du 137 Cs et du 90 Sr étaient inférieures de plus d'un ordre de
grandeur, à celles du 60Co. En 1968, à Fangataufa, les valeurs maximales en 137Cs étaient de
150 Bq.kg -1 frais de chair et en 1977 de 4 Bq.kg -1 frais en 90Sr, dans l’hépatopancréas.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 194

194 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Les activités massiques de ces


10
Bq.kg-1 frais deux radionucléides ont ensuite diminué
au cours du temps, suivant la même
tendance que celle observée sur les
mollusques prélevés à Mururoa.
1

0,1

F IG. 138. - Évolution, au cours du temps de


l’activité massique (Bq.kg -1 frais) en 137 Cs
des viscères des turbos collectés entre
0,01
1972 1974 1976 1978 1980 1982 1984 1986 1988 1972 et 1989 dans le lagon de Mururoa.

IV.6.2.5 - POISSONS HERBIVORES


60 Co, 90 Co et 137 Cs ont été mesurés dans les différentes espèces de poissons prélevés
dans les lagons et sur les pentes externes des atolls d’expérimentations.

Cobalt 60
En 1968, les activités massiques en 60 Co des poissons chirurgiens et perroquets éviscérés
vivant sur la partie externe du récif ont atteint quelques dizaines de Bq.kg -1 frais. Par la suite,
l'activité massique a décru au cours du temps et aucun apport d’activité n’a été mis en évidence
pendant la période des essais souterrains (Fig. 139).
La moyenne annuelle de l’activité massique de ces mêmes poissons herbivores, mais
vivant dans le lagon de Fangataufa, a décru, pour passer de 1 500 Bq.kg -1 frais en 1968 (maxi-
mum de 3 700 Bq.kg -1 frais, minimum de 740
Bq.kg -1 frais), à quelques dixièmes de Bq.kg -1
frais en 1999 (0,79 Bq.kg -1 frais). L’évolution au
Bq.kg-1 frais cours du temps des activités massiques
moyennes annuelles a suivi une période de
décroissance effective de l’ordre de 3 ans (Fig.
100
140b).
À Mururoa, les niveaux d’activité massique
des mêmes espèces de poissons étaient plus
faibles. L’activité massique moyenne annuelle
10 en 60 Co atteignait un niveau de 100 Bq.kg -1
frais en 1969 (maximum de 550 Bq.kg -1 frais en
1970) pour décroître à moins de 1 Bq.kg -1 frais
à partir de 1988 (Fig. 140a). Sur la période
1
1968
1972 F IG. 139. - Évolution au cours du temps des activités
1976 massiques moyennes (Bq.kg -1 frais) en 60 Co, 137 Cs,
1980 90 Sr de la chair des poissons perroquets pêchés sur le
Années 1984 0,1 récif externe de Mururoa et Fangataufa entre 1968 et
90 137 6
1988 Sr Cs 0Co 1988.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 195

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 195

1968-1999, l’activité massique en 60 Co des poissons a diminué suivant une période de


décroissance effective de l’ordre de 3 ans, similaire à celle calculée pour les poissons du lagon
de Fangataufa.

Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais


1000 10000
Les points en bleu clair correspondent à des valeurs en limite de détection

a 1000 b
100

100
10
10
1
Dernier essai 1 Dernier essai
atmosphérique atmosphérique
0,1 à Mururoa à Fangataufa
0,1

0,01 0,01
69 71 73 75 77 79 81 83 85 87 89 91 93 95 97 99 68 70 72 74 76 78 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98 00

F IG. 140. - Évolution au cours du temps des activités massiques moyennes (Bq.kg -1 frais) en 60 Co de la chair
des poissons perroquets et chirurgiens pêchés sur les récifs externes de Mururoa (a) et Fangataufa (b), entre
1968 et 1999. L’amplitude entre le minimum et le maximum est indiquée autour de la moyenne pour la série de données
de Fangataufa.

La surveillance de la radioactivité des


poissons du lagon de Mururoa a mis en évidence Bq.kg-1 frais
une hétérogénéité géographique, avec des 4,4
niveaux d'activité massique plus élevés dans le Colette Denise

secteur Ouest du lagon. Cette hétérogénéité est 3,9 Secteur


particulièrement marquée en 1983, année pour 18 Passe
Nord
Secteur
laquelle le nombre de résultats de mesure pour 3,4 Dindon
Secteur Est
Sud
l’ensemble du lagon est plus important (Fig. 141). Secteur Ouest
Viviane
Faucon
2,9

2,4
F IG . 141. - Cartographie des activités massiques
moyennes (Bq.kg -1 frais) en 60 Co des poissons chirur-
giens et perroquets pêchés en 1983 dans les diffé- 1,9 56
rents secteurs du lagon de Mururoa. 46
47
Le nombre de résultats de mesure utilisés pour le calcul de 1,4
la moyenne et pour représenter la dispersion des données est
indiqué sous chacun de ces secteurs. Secteur Ouest Secteur Nord Secteur Sud Secteur Est

Césium 137
Depuis le début de la surveillance radiologique, les activités massiques des poissons
herbivores, chirurgiens et perroquets, vivant sur la partie externe du récif, n’ont jamais dépassé
quelques dixièmes de Bq.kg -1 frais en 90Sr et 137Cs.
De 1969 à 1999, sur 1 700 échantillons des mêmes espèces de poissons herbivores,
prélevés cette fois dans le lagon de Mururoa, 1 500 présentaient des activités massiques en
137 Cs supérieures à la limite de détection des équipements. L’analyse des données montre que
93 % des activités massiques s’avéraient inférieures ou égales à 1 Bq.kg -1 frais, 6 % étaient
comprises entre 1 et 5 Bq.kg -1 frais et 1 % étaient supérieures à 5 Bq.kg -1 frais.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 196

196 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Les activités les plus élevées ont été observées entre 1969 et 1970 et atteignaient
quelques dizaines de Bq.kg -1 frais, avec un maximum de 33 Bq.kg -1 frais atteint en 1970 (Fig. 142a).
De 1966 à 1973, l’évolution dans le temps des activités massiques en 137 Cs a suivi une
décroissance rapide des niveaux d’activité, passant de 30 Bq.kg -1 à moins de 1 Bq.kg -1 frais.
Dès 1974, à l’arrêt des essais atmosphériques, l’activité en 137 Cs ne représentait plus, en
moyenne, que quelques dixièmes de Bq.kg -1 frais. Elle a ensuite décru lentement avec une période
de décroissance effective de 13 ans, pour atteindre le niveau représentatif des retombées mondiales
en 1999.
L'activité massique en 137 Cs des poissons prélevés dans le lagon de Fangataufa, entre
1968 et 1999, a suivi une évolution similaire à celle observée à Mururoa (Fig. 142b). En 1968,
elle était de l’ordre de 20 Bq.kg -1 frais, puis elle a diminué assez rapidement jusqu’en 1974 où
elle a atteint un niveau moyen de l’ordre de 2 Bq.kg-1 frais. En 1999, l'activité moyenne des poissons
chirurgiens collectés sur l’ensemble du lagon de Fangataufa était de 0,28 Bq.kg -1 frais. La période de
décroissance effective du 137 Cs, de 1975 à nos jours, est d’environ 12 ans, à rapprocher de
celle de 13 ans observée sur les poissons du lagon de Mururoa.

Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais


100 100
a b
10 10

1 1

Dernier essai
0,1 0,1 atmosphérique
Dernier essai à Fangataufa
atmosphérique
à Mururoa

0,01 0,01
69 71 73 75 77 79 81 83 85 87 89 91 93 95 97 99 68 70 72 74 76 78 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98
Les points en bleu clair correspondent à des valeurs en limite de détection

F IG. 142. - Évolution au cours du temps de l’activité massique (Bq.kg -1 frais) en 137Cs des poissons chirurgiens
et perroquets éviscérés pêchés entre 1968 et 1999 dans les lagons de Mururoa (a) et de Fangataufa (b).

IV.6.2.6 - POISSONS CARNIVORES

Cobalt 60
Le 60Co était couramment détecté dans les échantillons de surmulets, poissons carnivores,
prélevés à Fangataufa (Fig. 143). L’activité massique moyenne annuelle a diminué progressivement de
1 000 Bq.kg -1 frais en 1968 (maximum : 2 000 Bq.kg -1 frais) à 0,4 Bq.kg -1 frais en 1996.
À Mururoa où les niveaux d’activité étaient plus faibles, l’activité massique moyenne
annuelle a évolué de 150 Bq.kg -1 frais en 1969 à moins de 1 Bq.kg -1 frais après 1985, en passant
par un maximum de 340 Bq.kg -1 frais en 1970. Actuellement, l’activité massique dans la chair de
ces poissons est de quelques centièmes de Bq.kg -1 frais.
La diminution de l’activité massique en 60 Co des surmulets prélevés dans les deux lagons
a été régulière au cours du temps, avec des périodes de décroissance effective identiques de
l’ordre de 3 ans.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 197

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 197

Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais


1000 10000
a b
100 1000

100
10
10
1
Dernier essai 1 Dernier essai
atmosphérique atmosphérique
0,1 à Mururoa à Fangataufa
0,1

0,01 0,01
69 71 73 75 77 79 81 83 85 87 89 91 93 95 97 68 70 72 74 76 78 80 82 84 86 88 90 92 94 96
Les points en bleu clair correspondent à des valeurs en limite de détection

F IG. 143. - Évolution, au cours du temps, des activités massiques moyennes (Bq.kg -1 frais) en 60 Co de la
chair des surmulets pêchés, entre 1968 et 1997, dans les lagons de Mururoa (a) et Fangataufa (b).

Pour les autres espèces de poissons carnivores faisant l’objet d’une surveillance radiologique,
comme les mérous, les activités spécifiques en 60 Co étaient plus faibles à Mururoa qu’à
Fangataufa. L’activité moyenne annuelle du 60 Co a décru de 30 Bq.kg -1 frais, en 1968 (activité
maximale proche de 100 Bq.kg -1 frais) à quelques dixièmes de Bq.kg -1 frais en 1988 (0,26
Bq.kg -1 frais). De 1989 à nos jours, l’activité massique en 60 Co s’est presque toujours située en
dessous de la limite de détection des appareils de mesure (Fig. 144). Les trois valeurs significatives
obtenues en 1994, 1997 et 1998 en utilisant des protocoles spécifiques à la mesure de très
faibles niveaux d’activité s’élevaient respectivement, à 0,079, 0,021 et 0,038 Bq.kg -1 frais.
Dans le lagon de Fangataufa, les activités massiques moyennes annuelles en 60 Co dans
les mérous éviscérés ont décru régulièrement, passant de 1 000 Bq.kg -1 frais en 1968 (activité
maximale de 8 800 Bq.kg -1 frais) à 0,056 Bq.kg -1 frais en 1999. Dans les deux lagons, la période
de décroissance effective du 60 Co dans la chair des mérous était de l’ordre de 3 ans, comme
pour les autres poissons.

Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais


1000 10000
Les points en bleu clair correspondent à des valeurs en limite de détection

100 a 1000 b

100
10
10
1
1 Dernier essai
Dernier essai atmosphérique
atmosphérique à Fangataufa
0,1 à Mururoa 0,1

0,01 0,01
69 71 73 75 77 79 81 83 85 87 89 91 93 95 97 99 68 70 72 74 76 78 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98

F IG. 144. - Évolution, au cours du temps, des activités massiques moyennes (Bq.kg -1 frais) en 60 Co de la
chair des mérous pêchés, entre 1968 et 1999, dans les lagons de Mururoa (a) et Fangataufa (b).

Césium 137
Sur les 215 échantillons de poissons carnivores du genre Mulloidichthys (surmulet) prélevés
entre 1969 et 1997 dans le lagon de Mururoa, 103 avaient une activité massique en 137 Cs supé-
rieure à la limite de détection. L’évolution au cours du temps de l’activité massique du 137Cs a suivi
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 198

198 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

Bq.kg-1 frais
une décroissance rapide jusqu’en 1974, la
10 période effective étant alors de 1,7 an,
Les points en bleu clair correspondent à des valeurs en limite de détection
avant de décroître plus lentement jusqu’à
nos jours avec une période effective de
1
l’ordre de 13 ans (Fig. 145). De 1974 à
nos jours, l’activité massique en 137Cs de
la chair des surmulets a fluctué entre 0,1 et
1 Bq.kg -1 frais, à un niveau très proche de la
0,1
Dernier essai
limite de détection des appareils de mesure
atmosphérique
à Mururoa
de l’époque. Aujourd’hui, elle est inférieure à
0,1 Bq.kg -1 frais.
0,01 Dans le lagon de Fangataufa, les 20
69 71 73 75 77 79 81 83 85 87 89 91 93 95 97 échantillons prélevés entre 1972 et 1997
F IG. 145. - Évolution au cours du temps de l’activité massique 137
présentaient des activités massiques en
-1
(Bq.kg frais) en 137 Cs des surmulets éviscérés pêchés Cs comprises entre 1 et 0,1 Bq.kg -1
dans le lagon de Mururoa, entre 1969 et 1997. frais, à l’exception de la valeur maximale
de 21 Bq.kg -1 frais, mesurée en 1975.
Le 137 Cs a été régulièrement
détecté dans la chair des autres espèces
carnivores prélevées sur les deux atolls. En 1968, les activités massiques moyennes annuelles
des mérous à Mururoa et à Fangataufa étaient respectivement de l’ordre de 20 et de 100 Bq.kg -1 frais
(Fig. 146).
Elles ont ensuite diminué rapidement pour atteindre environ 1 Bq.kg -1 frais peu après l’arrêt
des essais atmosphériques, puis beaucoup plus lentement, jusqu'à quelques dixièmes de Bq.kg -1
frais, soit le niveau représentatif du bruit de fond dû aux retombées mondiales, très proche de la
limite de détection des appareils de mesure.

Bq.kg-1 frais Bq.kg-1 frais


100 1000
Les points en bleu clair correspondent à des valeurs en limite de détection

100 b
10 14 a
43 33
22 19 10
21
1 14 17
12 22 2
6 4 3 1
2
3 6 6 2 4 2 Dernier essai
Dernier essai 2 2 2 2 2 1 2 atmosphérique
0,1 atmosphérique
1 0,1 à Fangataufa
à Mururoa

0,01 0,01
69 74 79 84 89 94 99 68 70 72 74 76 78 80 82 84 86 88 90 92 94 96 98

F IG. 146. - Évolution, au cours du temps, de l’activité massique (Bq.kg -1 frais) en 137Cs des mérous pêchés,
entre 1967 et 1999, dans les lagons de Mururoa (a) et de Fangataufa (b). Le nombre de résultats de mesures
utilisés pour le calcul de la moyenne et pour représenter l’amplitude des données est précisé pour Mururoa.

IV.6.2.7 - HOLOTHURIES
Parmi les radionucléides de période supérieure à cinq ans, le 60 Co était celui présentant
les activités massiques les plus élevées dans les téguments des holothuries prélevées à Mururoa et
à Fangataufa.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 199

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 199

À Mururoa, l’activité mas- Bq.kg-1 frais


sique moyenne annuelle en 60 Co, 100
Les points en bleu clair correspondent à des valeurs en limite de détection
de l’ordre d’une dizaine de
Bq.kg -1 frais en 1976, a réguliè-
rement décru pour atteindre 10

quelques centièmes de Bq.kg -1


frais en 1997 (Fig. 147). La période
de décroissance effective en 60 Co, 1

d’environ 3 ans, est analogue à


celle relevée pour la plupart des
espèces. À partir de 1990, le 0,1

nombre de valeurs en limite de


détection est de plus en plus Arrêt des essais nucléaires
important. 0,01
76 78 80 82 84 86 88 90 92 94 96

F IG . 147. – Évolution au cours du temps de l’activité en du 60 Co


tégument de l’holothurie noire (Holothuria atra) dans le lagon de
Mururoa.

Dans le lagon de Fangataufa, pour lequel des mesures plus anciennes sont disponibles,
mais en moins grand nombre, les niveaux d’activité du 60 Co sont plus élevés qu’à Mururoa
(Tableau 37). Entre 1967 et 1997, l’activité massique moyenne annuelle en 60 Co passe de
quelques milliers de Bq.kg -1 frais à des valeurs très proches de la limite de détection des appareils
de mesure (0,015 Bq.kg -1 frais en 1997). Par rapport au sédiment au contact duquel l’holothurie
vit et se nourrit, le facteur de concentration du cobalt dans les téguments est voisin de 6.

T ABLEAU 37.
Activités massiques (Bq.kg -1 frais) moyennes, annuelles et maximales en 60 Co des échantillons
de téguments d’holothuries noires prélevés dans le lagon de Fangataufa entre 1967 et 1997.

Année Nombre de Activité Activité Année Nombre de Activité Activité


mesures moyenne maximale mesures moyenne maximale
1967 11 3 982 2 500 1983 1 18 18
1969 6 848 1 300 1985 2 1,1 2,1
1971 2 495 550 1987 1 0,41 0,41
1973 2 270 320 1989 2 1,3 1,7
1975 2 96 160 1991 1 2,7 2,7
1977 1 100 100 1993 2 1,2 1,42
1979 1 18 18 1995 1 0,32 0,32
1980 2 55 66 1997 1 0,015 0,015

L’activité massique des autres radionucléides de période supérieure à cinq ans, 137 Cs,
90 Sr et 155 Eu chez les holothuries était très faible, tant à Mururoa qu’à Fangataufa (Tableau 38).
Ainsi, sur plusieurs centaines d’échantillons collectés dans le lagon de Mururoa, la proportion de
mesures inférieures aux limites de détection est de 74 % et 87 %, respectivement pour le 137 Cs
et le 155 Eu.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 200

200 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

T ABLEAU 38.
Lagon de Mururoa Lagon de Fangataufa
Activités massiques maximales (Bq.kg -1 frais)
Radionucléide
Date
Activité
Date
Activité en 137 Cs, 90 Sr et 155 Eu d’échantillons
maximale maximale de téguments d’holothuries noires prélevés
137Cs 08.08.89 8,5 04.03.69 21 dans les lagons de Mururoa et Fangataufa.
90Sr 04.02.82 0,67 01.06.74 3,2
155Eu 08.04.86 0,85 18.02.91 0,64

IV.6.3 - ISOTOPES DU PLUTONIUM


Le facteur de concentration Fc du plutonium dans les organismes marins décroît des échelons
primaires vers les échelons supérieurs des chaînes trophiques (cf. Chapitre II). Ainsi, les facteurs de
concentration du plutonium relevés dans la littérature scientifique sont de l’ordre de 20 000 pour
les algues, de 1 000 pour les mollusques et de 10 à 100 pour les poissons.

IV.6.3.1 - ALGUES BENTHIQUES

Les quantités d'algues benthiques naturellement présentes étant insuffisantes pour la


mesure des isotopes du plutonium, des panneaux immergés favorisant la croissance des algues
ont été mis en place à partir de 1982. Dès lors, la masse des échantillons collectés a permis la
mesure en routine des 238 Pu et 239+240 Pu (Tableau 39).
Pour la période 1982-1997, les activités massiques 238 Pu et 239+240 Pu ont suivi une
tendance globale à la baisse, ponctuées de fortes variations. Cependant, comme cela a déjà été
souligné, ces valeurs sont à considérer avec précaution, compte tenu des biais d’échantillonnage
possibles. En effet, le dispositif de panneaux immergés favorisait le dépôt des particules
sédimentaires en suspension. Par conséquent, l'activité massique des radionucléides mesurés
intégrait celle des algues, mais aussi celle des matières en suspension ce qui peut expliquer la
variabilité annuelle des activités mesurées.
T ABLEAU 39.
Activités masiques (Bq.kg -1 frais) moyennes annuelles des isotopes 238 Pu et 239+240 Pu des algues
benthiques prélevées sur les dispositifs de panneaux immergés installés entre 1982 et 1997,
dans le lagon de Mururoa. Le chiffre entre parenthèses correspond au nombre d’échantillons
et le tiret signale l’absence de résultat.

Radionucléides Radionucléides
Année 238Pu 239+240Pu Année 238Pu 239+240Pu

Act. (Nb.) Act. (Nb.) Act. (Nb.) Act. (Nb.)


1982 2,0 (9) 32 (10) 1990 0,76 (140) 5,9 (140)
1983 - - 1,3 (2) 1991 1,0 (74) 6,4 (74)
1984 15 (47) 73 (47) 1992 0,85 (89) 9,3 (89)
1985 13 (24) 73 (24) 1993 1,4 (91) 14 (91)
1986 7,8 (48) 217 (48) 1994 1,3 (43) 9,2 (43)
1987 3,3 (119) 72 (120) 1995 1,3 (46) 11 (46)
1988 2,3 (140) 26 (142) 1996 1,4 (53) 27 (53)
1989 3,2 (93) 11 (93) 1997 1,2 (45) 7,5 (46)
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 201

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 201

IV.6.3.2 - CORAUX

La mesure des isotopes 238 Pu et 239+240 Pu sur les coraux du genre Fungia a débuté sur
une base régulière en 1977, à partir d’échantillons prélevés à Mururoa, pour être étendue en 1987
aux genres Lobophyllia, Pocillopora, Acropora et Porites présents dans les lagons des deux atolls
d’expérimentations.
L’activité massique en 239+240Pu des échantillons de Fungia collectés à Mururoa, entre 1977
et 1997, était comprise entre 0,021 à 960 Bq.kg -1 frais. Durant cette période, l’activité massique
moyenne, tous secteurs confondus, était de 8,9 Bq.kg -1 frais. Les activités en 238Pu se situaient entre
0,04 et 40 Bq.kg -1 frais, avec une moyenne de 1,3 Bq.kg -1 frais. Cependant, 61 % des 371
mesures de 238 Pu étaient inférieures à la limite de détection.
La variabilité des activités massiques en 239+240 Pu des échantillons de Fungia, prélevés à
Mururoa au cours d’une même année, traduisait une hétérogénéité géographique. Celle-ci a été
cartographiée en utilisant les valeurs des activités maximales observées aux différentes stations
de prélèvement (Fig. 148). Les niveaux d’activité les plus élevés, entre 400 et 960 Bq.kg -1 frais,
correspondaient aux échantillons prélevés dans le secteur Nord, au droit de la zone Colette, où ont
été réalisés les essais de sécurité.
En 1986 et 1987, les activités massiques les plus élevées des autres genres de coraux
étaient également observées dans le secteur Nord : 7 400 Bq.kg -1 frais pour Acropora, 2 500
et 1 100 Bq.kg -1 frais pour Pocillopora et 740 Bq.kg -1 frais pour Lobophyllia.

Activité en Bq.kg-1 frais N

inférieure à 1 Banc Colette Denise 400 Bq.kg-1 frais

de 1 à 5 440 Bq.kg-1 frais


de 5 à 10
Françoise
de 10 à 50
960 Bq.kg-1 frais Kathie
environ 400

environ 1000 Passe

Dindon

Queen

Viviane Dahlia
Ara 0 5 km
Faucon

F IG . 148. - Activités massiques (Bq.kg -1 frais) en 239+240 Pu des Fungia prélevés dans le lagon de Mururoa.

De 1987 à 1997, les activités massiques du 239+240Pu sur les 29 échantillons des différents
genres de coraux prélevés à Fangataufa variaient de 0,5 à 12 Bq.kg -1 frais (moyenne : 4,1 Bq.kg -1
frais). Les 28 valeurs significatives des activités massiques en 238 Pu étaient comprises entre 0,18
et 4,5 Bq.kg -1 frais, avec une moyenne de 1,4 Bq.kg -1 frais.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 202

202 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

IV.6.3.3 - MOLLUSQUES

La surveillance radiologique des mollusques filtreurs concernait les isotopes 238 Pu et


239+240 Pu, systématiquement mesurés, entre 1976 et 1995, dans la chair, l’hépatopancréas ou les
viscères des bénitiers et des nacres des lagons de Mururoa et de Fangataufa. Les activités
massiques avaient une hétérogénéité spatiale marquée, mais une relative stabilité au cours du
temps pour chaque secteur de prélèvement.
Les activités massiques en 239+240Pu des bénitiers collectés à Mururoa variaient entre 0,6 et
29 Bq.kg -1 frais, pour la chair et entre 0,5 et 370 Bq.kg -1 frais dans l’hépatopancréas. Les activités
massiques du 238Pu dans les deux fractions se situaient entre 0,1 et 10 Bq.kg -1 frais (Tableau 40).

T ABLEAU 40.
Activité massique moyenne (Bq.kg -1 frais) des échantillons de chair et d’hépatopancréas des bénitiers
prélevés entre 1976 et 1995 dans les différents secteurs de l’atoll de Mururoa.
238Pu 239+240Pu
Chair Hépatopancréas Chair Hépatopancréas
Zones
Nombre Nombre
Nombre de Activité Nombre de Activité Activité Activité
de mesures de mesures
détections moyenne détections moyenne moyenne moyenne
significatives significatives

Nord 3 4,4 3 3,4 3 15 3 3,4


Est 14 0,10 10 0,17 15 0,57 11 0,17
Ouest 10 0,48 2 1,3 11 4,6 2 1,3

À Fangataufa, entre 1979 et 1988, l’activité massique en 239+240Pu des bénitiers variait entre
0,13 et 2,7 Bq.kg -1 frais pour la chair et entre 0,18 et 2,3 Bq.kg -1 frais pour l’hépatopancréas.

L’activité massique en 239+240 Pu des mol-


Bq.kg-1 frais lusques brouteurs comme le turbo était à des
10
maximum niveaux faibles, avec des activités massiques
moyenne
maximales de 2 Bq.kg -1 frais. Elle dépendait de l’inten-
minimum
sité des retombées locales durant les essais atmo-
sphériques et des apports par les passes d’eau du
1
lagon sur le platier externe. Ainsi, à Mururoa, les
échantillons les plus marqués étaient issus des
récifs des secteurs Nord (Denise) et Nord-Ouest
(Dindon) situés à proximité des anciens points zéro
des essais atmosphériques et de la passe (Fig. 149).
0,1

0,01 F IG . 149. - Activité massique (Bq.kg -1 frais) en 239+240 Pu


Mururoa Fangataufa
Zone Zone Secteur Secteur proximité autres mesurée sur des échantillons de turbos prélevés de 1977 à
Dindon Denise Sud Est Passe secteurs 1993 dans les lagons de Mururoa et Fangataufa.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 203

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 203

De même, à Fangataufa, les plus fortes 138˚ 45' W


N
Empereur
activités des turbos ont été mesurées dans les Golf

secteurs Nord et Nord-Est de l’atoll, entre les Pingouin


Kilo
zones Manchot et Kilo, de part et d’autre de la Manchot
Passe

passe (Fig. 150).


Les activités massiques en 239+240Pu étaient Pavillon Alpha
supérieures à celles du 238Pu dans les viscères de Motu aux
Frégate

oiseaux
turbo prélevés sur les 2 atolls et le rapport
238 Pu/ 239+240 Pu variait en moyenne de 0,2 à
Fox
Hotel
0,02, en fonction de l’origine des retombées.
Hélène 22˚ 15' S

Activité
en Bq.kg-1 frais
< 0,15 Terme Nord Echo
F IG . 150. - Activité massique (Bq.kg -1 frais) en 239+240 Pu 0,15 - 0,25
Canard
0,25 - 0,50
mesurée sur des échantillons de Turbo setosus préle- Marvi
vés sur le platier externe de Fangataufa (Bilan 1987). 0,50 - 1,00
0 5 km
Les flèches indiquent les courants océaniques entrants et 1,00 - 1,50 Terme Sud
lagonaires sortants.

Les isotopes du plutonium ont été détectés régulièrement dans la chair et dans les viscères
du troca, autre mollusque brouteur. L’activité massique des échantillons de troca issus des deux
lagons étaient, en moyenne, à des niveaux 2,5 fois plus élevés dans les échantillons de viscères que
dans ceux de la chair des mêmes animaux. En 1996, le bilan radiologique effectué sur 25 stations de
prélèvement du lagon de Mururoa a confirmé que les activités massiques en 239+240 Pu étaient
sensiblement plus élevées dans les échantillons collectés dans le secteur Nord (Fig. 151). Les
activités massiques en 238 Pu de la chair et des viscères variaient respectivement entre 0,09 et
1,4 Bq.kg -1 frais et entre 0,22 et 4,1 Bq.kg -1 frais.

Bq.kg-1 frais Colette Denise


Bq.kg-1 frais
Secteur
2,9 Passe
Nord 8,5
Secteur
Chair Secteur Est
Viscères
Dindon
2,6 Sud 7,5
Secteur Ouest
13 Viviane
2,3 Faucon 6,5
13
2,0 5,5

1,7 4,5 12

1,4 12
8 3,5 8
15 16
1,1 2,5
Secteur Secteur Secteur Secteur Secteur Secteur Secteur Secteur
Ouest Nord Sud Est Ouest Nord Sud Est

F IG . 151. - Activité massique moyenne (Bq.kg -1 frais) en 239+240 Pu des échantillons de trocas prélevés en
1996 dans les différents secteurs du lagon de Mururoa. L’amplitude des résultats de mesures est donnée autour
de la moyenne avec le chiffre correspondant au nombre de mesures significatives.
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 204

204 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

À Fangataufa, les activités massiques de troca étaient plus élevées qu’à Mururoa. Entre
1991 et 1999, l'activité massique en 239+240Pu des chairs et des viscères variait respectivement
entre 2,1 et 5,8 Bq.kg -1 frais et entre 8,7 et 25 Bq.kg -1 frais. Les activités en 238Pu variaient entre
0,83 et 2,3 Bq.kg -1 frais pour les échantillons de chair et entre 3,5 et 10 Bq.kg -1 frais pour ceux
de viscères.

IV.6.3.4 - POISSONS HERBIVORES

Les activités massiques en 239+240Pu des poissons herbivores, chirurgiens et perroquets


prélevés régulièrement dans les lagons étaient disponibles à partir de 1977 et à partir de 1986
pour le 238Pu. De 1977 à 1999, 300 analyses de 239+240 Pu ont été réalisées sur des poissons
prélevés dans le lagon de Mururoa. 88 % des résultats étaient inférieurs ou égaux à 1 Bq.kg -1 frais,
9 % étaient compris entre 1 et 5 Bq.kg -1 frais et 3 % étaient supérieurs à 5 Bq.kg -1 frais. Dans ce
lagon, la répartition géographique des niveaux d’activité en 239+240Pu apparaît hétérogène (Fig. 152).

Bq.kg-1 frais Bq.kg


-1
frais
1000 10
Secteur Nord N Secteur Est
100
1
10

1
0,1
0,1
Colette Denise
0,01 0,01
77 79 81 83 85 87 89 91 93 95 97 99 42 4 1 82 84 86 88 90 92 94 96 98
4
2 16
4 Françoise
1 4 7
49
1 16 Kathie
1

2 Secteur Nord
Passe 6 3 Secteur Est
1 1 61 Anémone
1 1

1 Secteur Sud 5
Dindon 1
1 2 2 7
5 1 1 1 Queen
Secteur Ouest 3
1 11 5 2
19
Faucon 1 1 4 18 9 Viviane
1 Dahlia
Ara
-1
Bq.kg frais
Bq.kg-1 frais 1
1 Secteur Sud
Secteur Ouest

0,1
0,1

0 5 km 0,01
0,01 87 89 91 93 95 97 99
82 84 86 88 90 92 94 96 98

F IG . 152. - Activité massique moyenne (Bq.kg -1 frais) en 239+240 Pu des poissons chirurgiens et perroquets
prélevés entre 1977 et 1999 dans les différents secteurs du lagon de Mururoa. L’amplitude des résultats de
mesure est donnée autour de la moyenne avec le chiffre correspondant au nombre de mesures significatives.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 205

Pendant cette période, les activités massiques moyennes annuelles étaient plus élevées
dans le secteur Nord (4,9 Bq.kg -1 frais) que dans les secteurs Est (0,17 Bq.kg -1 frais), Sud (0,07
Bq.kg -1 frais) et Ouest (0,14 Bq.kg -1 frais) avec des activités maximales observées sporadiquement,
en 1986 et 1987, respectivement à 340, 55, 27 et 17 Bq.kg -1 frais avec les valeurs les plus élevées
aux abords du banc Colette et au droit de la zone Denise,
En 1986, dans le secteur Est du lagon, l’activité massique en 239+240 Pu des poissons
chirurgiens et perroquets a atteint un maximum de 3,7 Bq.kg -1 frais, avec une moyenne de 0,9
Bq.kg -1 frais. Le 238Pu a été plus rarement décelé. Ainsi, sur les 270 échantillons soumis à analyse,
48 % des mesures obtenues ont été supérieures aux limites de détection, avec des valeurs réparties
entre 0,0014 et 6,3 Bq.kg -1 frais.
À Fangataufa, sur les vingt-cinq mesures significatives réalisées sur les poissons herbivores
prélevés entre 1986 et 1999, l’activité en 239+240Pu se situait entre 0,005 et 2,11 Bq.kg -1 frais,
avec une moyenne de 0,24 Bq.kg -1 frais. Les activités massiques en 238Pu variaient entre 0,015 et
1,4 Bq.kg -1 frais, pour une moyenne de 0,13 Bq.kg -1 frais, obtenue avec 22 mesures significatives.

IV.6.3.5 - POISSONS CARNIVORES

Sur les 18 mesures de 239+240Pu réalisées sur les poissons carnivores du genre
Mulloidichthys pêchés, entre 1982 et 1997 dans les lagons de Mururoa et de Fangataufa, 13
échantillons de surmulets étaient inférieurs aux limites de détection. Les activités massiques se
répartissaient entre 0,002 et 4 Bq.kg -1 frais, valeur maximale relevée sur des poissons prélevés dans
le lagon de Mururoa en 1986. Les activités massiques moyennes sur cette période s’établissaient
à 0,52 et 0,04 Bq.kg -1 frais respectivement à Mururoa et Fangataufa.
Sur 30 mesures de 238 Pu effectuées sur des poissons prélevés dans les deux lagons,
5 seulement étaient supérieures aux limites de détection, avec des activités massiques entre
0,004 et 0,74 Bq.kg -1 frais.
Les isotopes du plutonium ont rarement été détectés dans les échantillons de chair des
différents genres de mérous prélevés. Entre 1974 et 1999, sur une trentaine de mesures de
239+240 Pu effectuées sur des échantillons issus de Mururoa, les activités massiques étaient
comprises entre 0,01 et 1,1 Bq.kg -1 frais ; cependant 30 % étaient inférieures aux limites de
détection. La moyenne calculée à partir des mesures significatives était de 0,16 Bq.kg -1 frais. À
Fangataufa, 10 mesures significatives sur les 14 réalisées présentaient des activités massiques en
239+240 Pu comprises entre 0,003 et 0,14 Bq.kg -1 frais et une moyenne de 0,04 Bq.kg -1 frais.
Le 238Pu a été recherché sur 23 échantillons de mérous pêchés à Mururoa. Six mesures
significatives ont présenté des activités comprises entre 0,02 et 0,26 Bq.kg -1 frais, avec une
moyenne de 0,07 Bq.kg -1 frais. Seules deux valeurs sont disponibles pour les mérous issus de
Fangataufa : 0,008 et 0,01Bq.kg -1 frais.

IV.6.3.6 - HOLOTHURIES

Depuis 1977, les isotopes 238Pu et 239+240Pu ont fait l’objet d’une mesure systématique dans
le tégument de l’holothurie noire (Holothuria atra). Ainsi, entre 1977 et 1997, les activités massiques
en 239+240Pu des holothuries collectées à Mururoa présentaient une amplitude de valeurs importante,
de 0,012 à 310 Bq.kg -1 frais. Durant cette période, l’activité massique moyenne en 239+240Pu,
toutes zones confondues, était de 2 Bq.kg -1 frais, mais les niveaux s’avéraient significativement plus
élevés dans le secteur Nord (moyenne : 5,2 Bq.kg-1 frais) que dans les autres secteurs (Tableau 41).
Chap. 4cVF-06.12.06:Chapitre 4 11/01/07 10:29 Page 206

206 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

T ABLEAU 41. Secteur Nombre Activité Activité


Activités moyennes et maximales (Bq.kg -1 ) Géographique de mesures moyenne maximale
en 239+240 Pu dans les échantillons de téguments
Nord 127 5,2 310
d’holothuries noires collectées entre 1977 et 1997,
dans les différents secteurs du lagon de Mururoa. Est 84 0,30 4,4
Sud 106 0,48 22
Ouest 70 0,30 5,5

Les plus fortes activités massiques, allant de 100 à 310 Bq.kg -1 frais, ont été relevées au
voisinage du banc Colette, à proximité des motu où ont été réalisés des essais de sécurité (Fig. 153).
Les activités moyennes des autres secteurs étaient comparables entre elles, ne dépassant pas
quelques dixièmes de Bq.kg -1 frais.
Les activités en 238 Pu se situent entre 0,03 et 6,3 Bq.kg -1 frais (moyenne : 0,25 Bq.kg -1
frais). Dès 1985, 60 % des valeurs étaient inférieures à la limite de détection.

maximum : 310 Bq.kg-1 frais N


Denise
Activité en Bq.kg-1 frais Banc Colette
inférieure à 1 Atoll de Mururoa
de 1 à 5
Françoise
de 5 à 10
Kathie
de 10 à 50
Passe
supérieure à 50

Dindon

Queen

Viviane
Ara Dahlia

Faucon 0 5 km

F IG . 153. - Représentation géographique de l’activité massique (Bq.kg -1 frais) moyenne en 239+240 Pu des
téguments des holothuries noires prélevées entre 1977 et 1997 dans le lagon de Mururoa.

À Fangataufa, sur 22 mesures de 239+240Pu, trois étaient en limite de détection. L’activité


massique se situait entre 0,027 et 1,1 Bq.kg -1 frais avec une valeur moyenne de 0,31 Bq.kg -1 frais.
Sur les 16 mesures de 238 Pu réalisées, 6 étaient en limite de détection, et les activités
massiques significatives variaient de 0,014 à 0,33 Bq.kg -1 frais, avec une moyenne de 0,13 Bq.kg -1
frais.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 207

IV.7 - CONCLUSION
L’activité d’origine artificielle, mesurée au cours du temps au sein des différentes composantes
de l’environnement des atolls de Mururoa et de Fangataufa, provient essentiellement des quatre
essais sur barge effectués au début des essais atmosphériques, en 1966 (Aldébaran, Rigel et
Sirius) et 1967 (Arcturus). Les essais atmosphériques réalisés jusqu’en 1974, en altitude sous ballon
captif, n’ont contribué par la suite que très faiblement à la radioactivité de l’environnement des deux
atolls. Les essais souterrains, pour leur part, ont eu un effet très limité dans le temps et localisé
dans l’espace aux têtes de puits, pour un spectre de radionucléides assez réduit.

De 1966 à 1974, les activités volumiques des radionucléides présents dans l’atmosphère
variaient très rapidement, au cours du temps, en fonction des essais. La surveillance radiologique
des aérosols a mis en évidence une baisse très rapide de l’activité atmosphérique après chaque
essai pratiqué dans l’atmosphère. Localement, pendant cette période, de brefs phénomènes de
rémanence ont été observés, en liaison avec la remise en suspension de particules initialement
déposées sur les sols des atolls. À la fin des essais atmosphériques, en domaine terrestre, deux
zones de l’atoll de Mururoa affichent des activités résiduelles, l’une au nord de l’atoll, par dépôt de
239 Pu résultant des essais de sécurité, l’autre à l'ouest de l’atoll, à la suite de l’essai sous ballon
Parthénope, de très faible énergie, qui a conduit à des dépôts en 239+240 Pu, sur la zone Faucon,
en 1973. Les sols de Fangataufa, quant à eux, gardaient la trace des retombées locales de
l'essai sur barge Rigel, dont les produits de fission se sont déposés dans le secteur Nord-Est de
l'atoll.

Lorsque cela était nécessaire, des campagnes d'assainissement ont réduit la radioactivité
des zones concernées (cf. Chapitre VII). Les activités résiduelles des sols ont été étudiées en
fonction de la profondeur des sols, et leur évolution surveillée par l’intermédiaire de mesures sur
les végétaux terrestres s’y développant. Plus généralement, ces végétaux, en particulier les
espèces Scaevola sericea, Casuarina equisetifolia et Cocos nucifera, ont fait l’objet de mesures
régulières des radionucléides les plus représentatifs des groupes de période courte ( 57 Co, 58 Co,
54 Mn, 65 Zn, 95 Zr, 106 Ru, 103 Ru, 144 Ce et 141 Ce), moyenne ( 60 Co, 90 Sr et 137 Cs) et longue ( 238 Pu
et 239+240 Pu). Les radionucléides à vie courte disparaissaient très rapidement après chaque série
d’essais atmosphériques. L’activité massique de la majorité des radionucléides à vie moyenne a
suivi une décroissance régulière à partir des valeurs maximales observées en 1966-1967 pour
atteindre actuellement des niveaux difficilement quantifiables. Les valeurs des facteurs de transfert
racinaire spécifiques des plantes tropicales obtenues à Mururoa à partir d'études réalisées in situ sont
cohérentes avec celles publiées dans la littérature.

En domaine marin, l’activité volumique des eaux du lagon a évolué suivant trois périodes
successives. De 1966 à 1974, les activités volumiques des radionucléides variaient très rapide-
ment au cours du temps, en fonction des essais. De 1975 à 1984, période de transition entre les
essais atmosphériques et souterrains, les activités volumiques étaient au niveau de traces pour
une majorité de radionucléides. Par conséquent, dès 1974, l’évolution des niveaux moyens des
eaux de mer ne pouvait être appréciée qu’à l’aide de celle des indicateurs biologiques : algues,
mollusques, crustacés et poissons. De 1985 à 1996, les radionucléides d’origine artificielle
décelables dans les eaux de mer se limitaient au tritium sous forme d’eau tritiée (HTO) ainsi
qu’aux 90 Sr, 137 Cs, 238 Pu et 239+240 Pu.
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208 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ DES SITES D’EXPÉRIMENTATIONS

L es sédiments marins ont essentiellement gardé la mémoire des essais sur barge :
Aldébaran et Sirius au droit du point Dindon, Arcturus au droit du point Denise, à Mururoa, et Rigel
au droit du point Frégate, à Fangataufa. Il en va de même pour l’activité en 239 Pu du banc de
sable immergé au droit de la zone Colette, conséquence de l’action des tempêtes tropicales de
1981 qui ont entraîné le plutonium initialement fixé sur les motu du secteur Nord de l’atoll de
Mururoa à la suite des essais de sécurité. L'activité totale en 239+240 Pu résultant des essais atmo-
sphériques et de sécurité a été estimée à 1,8.10 13 et 7,4.10 12 Bq, à Mururoa et à Fangataufa
respectivement, soit des masses résiduelle de 239 Pu dans les sédiments de l’ordre de 6,7 kg et
2,8 kg respectivement à Mururoa et Fangataufa.

Comme pour l’eau de mer, durant la période des essais atmosphériques, les radionucléides
caractérisés par une période radioactive inférieure à l’année, à savoir 57 Co, 58 Co, 54 Mn, 65 Zn,
95 Zr, 106 Ru, 103 Ru, 144 Ce et 141 Ce, ont été quantifiés dans les différents bioindicateurs aux
niveaux les plus élevés. Par la suite, leurs activités massiques ont diminué très rapidement, avec
des périodes de décroissance effective du même ordre de grandeur que leur période radioactive,
voire même inférieures. Ces radionucléides n’étaient quasiment plus décelés à la fin des essais
atmosphériques en 1974. Au cours de la période des essais souterrains de 1975 à 1996,
certains radionucléides à vie courte, comme le 131 I et le 140Ba pouvaient également être décelés
immédiatement à la suite d’opérations de post-forage, en particulier dans le plancton du lagon.

Les activités massiques des radionucléides de période moyenne ( 60 Co, 90 Sr et 137 Cs) les
plus élevées, mesurées sur les bioindicateurs, sont apparues lors des essais atmosphériques sur
barge. Cependant, à la fin des années 90, les activités de ces radionucléides avaient rejoint les
niveaux du bruit de fond, représentatifs des retombées mondiales. Ainsi, l’activité massique du
60 Co de la quasi-totalité des bioindicateurs marins a décru régulièrement, jusqu’à nos jours, pour
atteindre aujourd’hui des niveaux très faibles difficilement quantifiables. L’activité massique du
137 Cs dans les bioindicateurs a baissé également très rapidement durant la période des essais
atmosphériques. Par la suite, elle a diminué plus lentement puisqu’elle intégrait les retombées
mondiales issu du réservoir stratosphérique alimenté par les essais réalisés dans l’atmosphère par
l’ensemble des puissances nucléaires.

Les radionucléides à vie longue ( 238 Pu et 239+240 Pu), issus des essais sur barge et de
sécurité, ont une activité massique peu élevée dans les échantillons biologiques qui a décru
lentement au cours du temps.

IV.8 - BIBLIOGRAPHIE
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Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 211

CHAPITRE V

Évolution de la radioactivité
en Polynésie française
Les données présentées dans ce chapitre proviennent de la surveillance radiologique des
différents archipels de la Polynésie française mise en place dès la création du CEP. Une grande
partie de ces données ont été communiquées au Comité scientifique des Nations Unies pour
l’étude des effets des rayonnements ionisants (Unscear), sous la forme de rapports annuels
transmis de 1966 à nos jours. Elles ont été complétées par des données inédites ou extraites de
publications disponibles dans des revues scientifiques. Une présentation exhaustive de l’ensemble
des milliers de résultats de mesures disponibles étant impossible, une sélection en a été faite,
sur la base des résultats des indicateurs les plus représentatifs de l'environnement polynésien,
en tenant compte des voies d'exposition potentielles des populations vivant en Polynésie.
L'objectif de ce chapitre est de décrire les situations chroniques les plus caractéristiques
de l'évolution, tant spatiale que temporelle, des niveaux d'activité des composantes de l'envi-
ronnement des îles polynésiennes et de préciser les situations ayant fait l'objet d'une attention
particulière en termes d'exposition des populations, pendant la période des essais. Les données
environnementales ont été complétées par celles relevant des transferts de radionucléides dans la
chaîne alimentaire conduisant à l’Homme. Aussi, un exemple de production agricole sera présenté,
celui du lait commercialisé à Tahiti.
L'évolution de l’activité des radionucléides issus des essais atmosphériques est décrite
dans les différentes composantes de l'environnement des îles polynésiennes, suivant la même
présentation que celle retenue pour les sites d’expérimentations (cf. Chapitre IV). En revanche,
les émissions de radionucléides lors des essais souterrains ayant été limitées à l’environnement
immédiat des atolls d'expérimentations, elles n'ont donc pas été détectées dans celui des autres
atolls.

V.1 - ATMOSPHÈRE
L'indice bêta global a été mesuré sur les aérosols atmosphériques prélevés dans différents
atolls polynésiens pendant toute la période des essais, de 1966 à 1996. L'interprétation de ces
résultats doit tenir compte des retombées régionales et mondiales des essais réalisés au CEP,
ainsi que de la part des retombées mondiales de ceux réalisés à la même époque par la
République populaire de Chine. L’intensité de ces retombées était également modulée par les
fluctuations saisonnières des retombées mondiales résultant des essais précédemment réalisés
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212 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

par les autres puissances nucléaires, fluctuations dues à l'accélération des échanges entre la tro-
posphère et la stratosphère durant l'hiver austral.

V.1.1 - INDICE BÊTA GLOBAL

Dès 1962, les atolls polynésiens ont fait l'objet de mesures des radionucléides, tant d’origine
naturelle qu’artificielle, permettant d'établir la situation radiologique de référence avant la réalisation du
premier essai atmosphérique au CEP. Dans les années 1962-1963, les niveaux de l’activité atmo-
sphérique dans les îles polynésiennes, de l'ordre de 0,01 Bq.m -3 , résultaient, comme pour
l’ensemble des îles du Pacifique Sud, de la contribution des retombées régionales et mondiales
des essais nucléaires réalisés par les pays étrangers, en particulier dans l’hémisphère Sud. Les
résultats obtenus dans le cadre de la surveillance continue des aérosols, réalisée à partir de 1962
à Tahiti, permettent aujourd’hui de décrire l'évolution pluriannuelle de la radioactivité de l'atmo-
sphère en Polynésie à partir du suivi de l'indice bêta global (Fig. 154).

Bq.m-3
100

10

0,1

0,01

0,001

0,0001

0,00001
62 63 64 65 66 67 68 69 70 71 72 73 74 75 76 77 78 79 80
/ 19 /19 /19 /19 /19 /19 /19 /19 /19 /19 /19 /19 /19 /19 /19 /19 /19 /19 /19
/ 01 / 01 / 01 / 01 / 01 / 01 / 01 / 01 / 01 / 01 / 01 / 01 / 01 / 01 / 01 / 01 / 01 / 01 / 01
31 31 31 31 31 31 31 31 31 31 31 31 31 31 31 31 31 31 31

F IG. 154. - Évolution de la moyenne décadaire de l'indice bêta global (Bq.m -3 ) des aérosols prélevés, entre
1962 et 1980, à Papeete (Tahiti).

De 1966 à 1975, l'évolution de l'indice bêta global montre l'influence des retombées
régionales et mondiales des essais atmosphériques réalisés au CEP, avec une fluctuation annuelle
très marquée résultant des campagnes d'essais réalisées pendant l'hiver austral et de l'épuration
rapide du milieu atmosphérique. Les retombées les plus importantes mesurées à Papeete
(Mahina) ont atteint 52 Bq.m -3 lors de la décade du 10 au 20 juillet 1974, avec un maximum
journalier de 520 Bq.m -3 , à la suite de l'essai Centaure du 17 juillet 1974. Comme ce fut alors le
cas, la détection de retombées significatives sur un atoll déclenchait des contrôles radiologiques
complémentaires des principaux constituants de la chaîne alimentaire de l'atoll affectés par les
retombées, avec des fréquences de prélèvement plus importantes (cf. Chapitre VI). Dès la fin de
l'année 1975, l'activité volumique associée à l'indice global était revenue aux niveaux représentatifs
de cette période dans le Pacifique Sud, soit une activité volumique inférieure à 0,1 mBq.m -3 ,
c'est-à-dire 100 fois plus faible que celle caractérisant l’atmosphère au début des années soixante.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 213

Les résultats de l'évolution temporelle de la radioactivité des aérosols des différents atolls
étaient utilisés pour dresser des cartes annuelles de retombées pour l'ensemble du territoire
polynésien. Ces informations étaient transmises chaque année à l'Unscear. Ainsi, à titre
d’exemple, en 1966, l’activité volumique décadaire a fluctué entre la limite de détection et
20 mBq.m -3 , atteignant une valeur maximale de 66 Bq.m -3 pour la décade du 2 au 12 juillet 1966,
à Mangareva (archipel des Gambier), à la suite des retombées de l'essai Aldébaran, réalisé le
2 juillet 1966 à 15h34 TU (Fig. 155).

Bq.m-3 Bq.m-3
100,0 100,0
Hiva Oa
10,0 10,0
Papeete
1,0
1,0
Bq.m-3
100,0 0,1
0,1
Bora Bora
10,0 0,01
10/12 0,01
1,0 0,001 10/6 10/7 10/8 10/9 10/10 10/11 10/12
10/6 10/7 10/9 10/10 10/11 10/12 10/01
0,1
10/8 Bq.m-3
100,0
0,01 Puka Puka
10/6 10/7 10/8 10/9 10/10 10/11 10,0
0 500 km AR
1,0
CH

Bq.m-3
IP

100,0 Hiva Oa
EL

10,0
Raiatea DE
0,1
S M
1,0
ARQU I S E S
0,01
10/6 10/7 10/8 10/9 10/10 10/11
0,1

0,01
Bq.m-3
10/6 10/7 10/8 10/9 10/10 10/11 100,0
Rangiroa Anaa
A RCHIPE Puka Puka 10,0
L
DE
Bq.m-3 S 1,0
100,0
Hereheretue Bora Bora TU
AM 0,1
10,0
Raiatea Tahiti O
TU
0,01
1,0 Anaa
Hao 10/6 10/7 10/8 10/9 10/10 10/11
ARCHIPEL
0,1
DE LA SOCIÉTÉ Hereheretue Bq.m-3
0,01 100,0
10/6 10/7 10/8 10/9 10/10 10/11 Tureia Tureia
10,0
Bq.m-3 Mururoa
100,0 ARCH
10,0
Raivavae IPEL Fangataufa Îles Gambier 1,0
Tubuai DE
S
1,0
A Tropique du Capricorne 0,1
0,1
U
Raivavae
S
TR

0,01 0,01
A

10/6 10/7 10/8 10/9 10/10 10/11


LE

10/6 10/7 10/8 10/9 10/10 10/11


Bq.m-3
S

100,0
Bq.m-3 Rapa Totegegie
100,0 10,0
10,0
Rapa
1,0
1,0
0,1
0,1

0,01 0,01
10/6 10/7 10/8 10/9 10/10 10/11 10/6 10/7 10/8 10/9 10/10 10/11

F IG. 155. - Évolution décadaire et journalière (Tureia et Totegegie) de l'indice bêta global (Bq.m -3 ) dans les
aérosols prélevés, de juin à décembre 1966, sur les principaux atolls polynésiens faisant l’objet d’une sur-
veillance radiologique (Rapport RF pour l’Unscear).

De 1966 à 1974, cette surveillance atmosphérique a permis de détecter les retombées de


l'essai Aldébaran sur Mangareva et celles de l'essai Centaure sur Tahiti ainsi que cinq autres
augmentations significatives de l’activité volumique à Tureia et dans l'archipel des Gambier
(Tableau 42). Les conséquences radiologiques pour les populations des îles concernées par ces
retombées particulières ont alors fait l'objet d'évaluations spécifiques ; leurs résultats sont expli-
cités dans le chapitre consacré aux conséquences radiologiques des essais (cf. Chapitre VI).
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 214

214 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

T ABLEAU 42.
Liste des essais ayant conduit à une augmentation de l’activité volumique de l’atmosphère supérieure aux
niveaux caractéristiques des retombées régionales ou mondiales attendues pour les atolls polynésiens.

Essai Date essai Iles Date des retombées Durée des retombées
Aldébaran 2 juillet 1966 Gambier 2 juillet 1966 1h20
Rigel 24 septembre 1966 Tureia 24 septembre 1966 3h30
Rigel 24 septembre 1966 Gambier 24 septembre 1966 3h00
Arcturus 2 juillet 1967 Tureia 4 juillet 1967 3h00
Encelade 12 juin 1971 Tureia 12 juin 1971 2h30
Phoebé 8 août 1971 Gambier 8 août 1971 0h30
Centaure 17 juillet 1974 Tahiti 17 juillet 1974 12h30

Les niveaux de l'indice bêta global des aérosols prélevés en Polynésie sont actuellement
inférieurs à 0,1 mBq.m -3, c’est-à-dire inférieurs d’au moins un ordre de grandeur à ceux mesurés en
métropole. Cette différence s'explique par les écarts de l'activité volumique des radionucléides
d’origine naturelle, essentiellement les descendants de l'uranium se présentant sous forme parti-
culaire. Ces radionucléides sont émis ou mis en suspension à partir des sols, à des niveaux
d’activité volumique plus faibles dans les sols coralliens que dans ceux de la métropole où s’ajoute
le 137 Cs provenant des retombées des nombreux essais réalisés dans l'hémisphère Nord et de
l'accident de Tchernobyl (Fig. 156).

3
Bq.m-3
1.10
Naturel Artificiel
1 220+222
1.10 Rn
7
Be 137
Cs
210
Pb 239+240
40
Pu
-1 K
1.10 22
Na

-3
1.10

-5
1.10

-7
1.10

-9
1.10
Montlhéry Tahiti Montlhéry Tahiti

F IG. 156. - Activité volumique (Bq.m -3 ) des principaux radionucléides d’origine naturelle, 220+222 Rn, 7 Be,
210 Pb, 40 K et 22 Na mesurés sur des aérosols prélevés en 1996 à Tahiti et en 1995 à Montlhéry (région
parisienne) et des radionucléides d’origine artificielle encore mesurés de nos jours, 137 Cs et 239+240 Pu.
L’activité volumique du 220 Rn et du 222 Rn peut varier naturellement d’un ordre de grandeur dans la même
journée, en fonction des conditions météorologiques.
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 215

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 215

V.1.2 - RADIONUCLÉIDES DE PÉRIODE SUPÉRIEURE À 5 ANS

Parmi les radionucléides émetteurs bêta-gamma, les 137Cs et 90Sr résultant des retombées
mondiales et régionales ont été régulièrement recherchés dans les aérosols prélevés en Polynésie.
L'évolution décadaire de l'activité volumique en 137 Cs à Tahiti est similaire à celle de l'indice bêta
global, mais à des niveaux d'activité 100 000 fois plus faibles. De 1970 à 1975, les niveaux
étaient stables, entre 20 et 50 µBq.m -3, avec des maxima pouvant temporairement dépasser 100
µBq.m -3 (Fig. 157). Dès 1975, l’évolution de l’activité volumique s’inscrivait dans une tendance à la
baisse à laquelle se superposait une composante périodique annuelle traduisant la variation
saisonnière de l’intensité des échanges entre la stratosphère et la troposphère.

µBq.m-3
1 000

100

10

0,1
1970 1972 1974 1976 1978 1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996
F IG. 157. - Évolution décadaire de l'activité volumique (µBq.m -3 )
en 137 Cs
des aérosols prélevés, entre 1970
et 1996, à Papeete dans le cadre de la surveillance de la radioactivité de l’atmosphère. Les données sans
barre d’erreur sont les valeurs de limite de détection (d’après IRSN).

V.1.3 - ISOTOPES DU PLUTONIUM

L’activité volumique atmosphérique en 239+ 240 Pu a suivi une baisse régulière de 1960 à
nos jours, de sorte que l'activité volumique à Papeete ne pouvait être mesurée qu'en regroupant
mensuellement les filtres journaliers. Elle était de l'ordre de 2.10 -5 Bq.m -3 en 1965, de 2.10 -8
Bq.m -3 en 1983, pour atteindre 5.10 -9 Bq.m -3 en 2000.
La comparaison des activités volumiques en 239+ 240Pu observées sur les aérosols collectés
en différents points du globe, entre 1960 et 1990, montre que l’ensemble des activités volumiques
décroissent au cours du temps suivant des périodes effectives similaires atteignant aujourd’hui
des niveaux inférieurs à 10 -9 Bq.m -3 (Fig. 158).
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 216

216 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

Bq.m-3
1.10-3

New York (USA)


Rocky Flats 1 (USA)

1.10 -4 Santiago (Chili)


Lima (Pérou)
Chilton (UK)
Eskmeals (UK)
1.10-5
Tahiti (Polynésie fr.)
Tsukuba (Japon)

1.10-6

1.10-7

1.10-8

1.10-9
1960 1965 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005

F IG . 158. - Évolution, au cours du temps, de l’activité volumique (Bq.m -3 ) du 239+240 Pu des aérosols prélevés,
de 1960 à 2000, en différentes régions du globe.

V.2 - SOLS
L'indice bêta global a été mesuré sur des échantillons de sols prélevés dans les différents
archipels polynésiens durant toute la période des essais nucléaires. Les sols coralliens montrent
des valeurs de l'indice bêta global plus faibles que celles des sols caractéristiques des îles
hautes, traduisant des compositions différentes en radionucléides d’origine naturelle. Les dépôts
surfaciques ont intégré, au cours du temps, les retombées régionales et mondiales des produits
de fission générés par les essais atmosphériques américains, britanniques et russes réalisés
durant la décennie 1950-1960. Les retombées régionales des essais français, pour la période
1966-1974, et chinoises, jusqu'en 1981, ont également été intégrées à ces dépôts. Néanmoins,
par l'action conjointe du lessivage par les eaux de pluie des radionucléides déposés sur les sols
et de leur migration vers des horizons plus profonds, l'activité massique des sols a décru plus
rapidement au cours du temps que par le simple fait de la décroissance radioactive des radio-
nucléides.

Type de sol 226Ra 238U 232Th 40K


T ABLEAU 43.
Niveaux d'activité massique (Bq.kg -1 sec)
Volcanique 48 48 48 814
des principaux radionucléides d’origine
Corallien 16 15 5 81
naturelle présents dans les sols polynésiens.
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 217

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 217

Aussi, tenant compte des principales retombées observées à Mangareva, dans l'archipel
des Gambier, à la suite des essais Aldébaran, Rigel et Phoebé et, à Tahiti, après l'essai Centaure,
la distribution des radionucléides dans les différents types de sols de ces deux îles est décrite
précisément ci-après (cf. Chapitre III). Ces deux îles hautes sont à des stades comparables de
leur évolution. Elles sont caractérisées par des récifs-barrières discontinus répartis autour de reliefs
volcaniques érodés offrant des sols similaires. De plus, elles sont représentatives des îles ayant
une vocation agricole, Tahiti avec une production toujours significative et Mangareva pour ses
productions qui alimentaient le CEP.

V.2.1 - RADIOACTIVITÉ DES SOLS DE TAHITI

Outre la surveillance régulière de points représentatifs, des cartographies complètes des


sols de l'île de Tahiti ont été réalisées au cours de campagnes en 1974, 1987 et 1989 le long de
la route littorale et suivant des radiales allant de la côte jusqu’au plateau. Sur chaque radiale, des
échantillons étaient systématiquement prélevés sur le plateau, à mi-pente, dans la vallée et à
proximité de la route longeant le littoral. Ces sols avaient des caractéristiques différentes pouvant
influencer l'évolution des dépôts initiaux (cf. Chapitre III).

V.2.1.1 - INDICE BÊTA GLOBAL

Les dépôts les plus élevés le long du littoral à proximité de Teahupoo au sud de l'isthme
de Taravao, et à Hitiaa sur la côte Est de l'île (Fig. 159). Ils résultaient des retombées de l'essai
Centaure du 17 juillet 1974 et les
valeurs maximales de l’activité surfa-
cique de ces dépôts, de l’ordre de 1 Valeur de référence
2.10 7 Bq.m -2 , traduisent l'arrivée du 0,5
2 1,2
nuage par la côte Sud-Est et son les- Mahina 1,6
Papenoo
sivage par des pluies localisées. Les Pirae
Arue

0,85
niveaux étaient 10 fois plus faibles Papeete

dans le secteur Ouest, d'Arue à 1,3


Faaa
Papara. Ces retombées se sont addi-
3,1
tionnées aux résidus des dépôts anté- Hitiaa
2,6
rieurs dus aux retombées mondiales, Punaauia
2,2
les augmentant d'un ordre de gran- 0,1 1,3
à Faaone 1
deur dans la partie Est de l’île. 0,2
0,65
Paea 1,4
0,32 0,75 1 2,8
Afaahiti Pueu
1,6
0,18
Taravao

Papeari
Papara
0,8 Vairao

F IG. 159. - Valeurs relatives des dépôts dus 0,25

aux retombées de l’essai Centaure, par


rapport à la valeur de référence de 2,5.10 6 0,5 Teahupoo
Bq.m -2 mesurée à la station de Mahina, 0 5 10 km
1,3
sur les sols de bord de route, le 19 juillet 4
6
1974. 2,4
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 218

218 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

V.2.1.2 - RADIONUCLÉIDES DE PÉRIODE SUPÉRIEURE À 5 ANS

Parmi les radionucléides émetteurs bêta-gamma contribuant à l'indice bêta global, le


137 Cs a été détecté dans les sols de Tahiti (Fig. 160). Ainsi en 1987-1989, l'amplitude des activités
surfaciques mesurées couvrait deux ordres de grandeur, fluctuant de 0,1 à 7,2 kBq.m -2 , respec-
tivement entre les activités surfaciques minimales, à l’ouest de l’île, et celles maximales sur les
radiales de Mahaena et Hitiaa, sur la côte Est.

Mahina
Papenoo
Arue 7,16 : Point de prélèvement et
Pirae 0,17 activité surfacique en 137
Cs
Papeete 0,78 0,86
- Tiarei
Faaa 0,34 0,95
0,28
0,36 1,75
0,55 Mahaena
0,21 0,75 7,16
0,55
0,35 2,40
0,66 0,73 Hitiaa
0,51 1,57
TAHITI NUI
Punaauia
0,20 0,51 0,59 1,39 0,53 0,16 0,46
0,093

0,75
0,83
0,49
Paea
0,53 0,31 Presqu'île
1,02 -
2,17 de
0,76
0,57
0,42 Taiarapu
0,99 1,10 Taravao Pahua Nutae
0,35 0,13 0,57
1,27 0,36 Tautira
-
0,11
Patere 1,18 0,33 0,71
0,58 -
1,27 Atimaono 0,13 0,18
0,91 0,31 0,20 2,85
Papara Pte Riri 0,82
Mataiea 0,34 -

TAHITI ITI 0,97

1,55
N 1,61
0 10 Km 2,37
Teahupoo 2,36

F IG. 160. - Activité surfacique (kBq.m -2 ) des dépôts de 137 Cs mesurés en 1987-1989 dans les sols de l’île
de Tahiti.

Les activités surfaciques de dépôts en 137 Cs dues aux retombées mondiales cumulées
jusqu'à la date des prélèvements ont été évaluées en considérant les niveaux d'activité des sols
de la côte Ouest où la contribution des retombées de l’essai Centaure était la plus faible, de l'ordre
de 0,2 à 1,3 kBq.m -2 . À la même époque, les dépôts de 137 Cs en métropole se situaient en
moyenne entre 1 et 10 kBq.m -2 et pouvaient atteindre ponctuellement quelques dizaines de kBq.m -2 .
L'évolution de l’activité massique des sols entre 1974 et 1989, a été influencée par leur
teneur en matière organique et surtout par l'importance du lessivage, du ruissellement ainsi que
de l'érosion des flancs de montagne et des plaines côtières par les eaux de pluie. Quelle que soit
la nature des sols, l'activité en 137Cs diminuait avec la profondeur (Fig. 161). Ainsi, l'activité massique
moyenne du 137 Cs, tous prélèvements confondus, décroissait d'un facteur 5 entre la surface et
42 cm de profondeur. En revanche, les radionucléides des chaînes naturelles, 238 U, 235 U, 232 Th
et 40 K, présentaient des activités massiques homogènes sur toute la profondeur des sols
échantillonnés.
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 219

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 219

Bq.kg-1 sec Bq.kg-1 sec F IG. 161. - Profils de l’activité


6 10 massique (Bq.kg-1 sec) moyenne
du 137 Cs des sols de Tahiti (a)
63
5
Sols de plateau et des différents sols prélevés,
5
suivant la radiale de Punaauia,
sur la côte Ouest de l’île (b)
4 62 précisée sur la figure 160.
Les incertitudes de mesures
Sols intermédiaires
3 1 sont données à 1 σ et les
chiffres associés à la courbe
2
56 0,5 (a) représente le nombre de
46
prélèvements mesurés.
Sols de bord de route
35
1
b
a Activité inférieure
0,1 à la limite de détection
0
02 12 22 32 42 0 2 12 22 32 42
Tranches de sol en cm Tranches de sol en cm
Bq.kg-1 sec

10

Dans les sols ferralitiques, l'activité massique en


137 Cs augmentait linéairement avec la quantité de matière
organique présente dans les différents échantillons prélevés
à Tahiti (Fig. 162). Néanmoins, les valeurs maximales d’activité
observées étant à 10 Bq.kg -1, cette relation ne pouvait pas
1
être vérifiée pour des teneurs en matières organiques supé-
rieures à 10%.

0,1
F IG. 162. - Relation entre l’activité massique (Bq.kg -1 sec) en 137 Cs 0 2,5 5 7,5 10 12,5 15
et la teneur en matière organique des sols ferralitiques. Matière organique en %

V.2.2 - RADIOACTIVITÉ DES SOLS DE MANGAREVA

Un bilan de la radioactivité des sols de l'île de Mangareva a été réalisé, en 1993, à partir
d’échantillons prélevés en vingt emplacements représentatifs des différents types de sol de l'île.
En 1993, l'activité surfacique en 137 Cs, en fonction des types de sol, variait entre la limite
de détection de 0,06 kBq.m -2 et une valeur maximale de 1,67 kBq.m -2 (Fig. 163). La moyenne
était de 0,80 kBq.m -2 , du même ordre de grandeur que celle observée sur Tahiti.
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 220

220 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

135° Ouest
Archipel
des N
Gambier Île
de
Mangareva

1,03 ± 0,09
Île de Mangareva < 0,06
Taku 0,66 ± 0,07
23° 10' Sud 0,60 ± 0,06
1,31 ± 0,11
0,54 ± 0,07
1,08 ± 0,09

0,78 ± 0,08
0 10 km
Station 15
1,08 ± 0,09
Station 5
0,40 ± 0,06
0,08 ± 0,03

0,95 ± 0,09 0,57 ± 0,09

0,79 ± 0,08 Répartition des sols analysés

Sols hydromorphes
0,46 ± 0,05

Village de Rikitea Sols colluviaux-alluviaux


Station 18
Sols vertiques
Station 20 1,04 ± 0,10

1,38 ± 0,11 Sols ferrallitiques peu désaturés


1,67 ± 0,12
0,08 Sols ferrallitiques désaturés

Mt Duff Sols carbonatés


441 m 1,40 ± 0,11

0 4 km

F IG . 163. - Activité surfacique (kBq.m -2 ) en 137 Cs des sols prélevés en 1993 dans l’île de Mangareva de
l’archipel des Gambier.

Les activités massiques moyennes en 137Cs décroissaient avec la profondeur pour tous les
types de sol échantillonnés (Fig. 164). Ainsi, l'activité massique moyenne de l'horizon 0-2 cm était de
5,74 ± 0,84 Bq.kg -1 sec, pour une amplitude comprise entre 0,68 et 12,9 Bq.kg -1 sec, et variait
entre 1,86 et 4,5 Bq.kg -1 sec dans l'horizon 32-42 cm. Comme pour Tahiti, les retombées régionales
qui ont parfois affecté les îles de cet archipel se sont additionnées aux dépôts des retombées
mondiales, homogènes à l’échelle de la Polynésie. Les dépôts de ces dernières ont été estimés à
partir des résultats de mesures réalisées sur les sols prélevés dans l'archipel le plus éloigné du
CEP, celui des Marquises, sur l'île de Nuku Hiva où à la même époque, les activités massiques étaient
comprises entre 0,32 ± 0,14 et 2,12 ± 0,84 Bq.kg -1 sec.
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 221

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 221

Bq.kg-1 sec

Station 5 Station 15 Station 18 Station 20


(sols vertiques) (sols ferrallitiques) (sols colluviaux-alluviaux) (sols carbonatés)

10

0,1

2 12 22 32 42 2 12 22 32 42 2 12 22 32 42 2 12 22 32 42 cm

F IG. 164. - Exemple de profils d’activité massique sec) en (Bq.kg -1 137 Cs


des différents types de sol de l’île de
Mangareva prélevés en 1963. La position géographique des stations de prélèvement est indiquée sur la
figure 163.

V.2.3 - DÉBIT DE DOSE ENVIRONNEMENTAL

Différentes mesures du débit de dose environnemental représentatif de l’irradiation


ambiante ont été réalisées, entre 1985 et 1996, au moyen des dosimètres thermoluminescents
au CaSO 4 positionnés en plusieurs sites de mesure de différentes îles polynésiennes. La valeur
moyenne annuelle pour chaque
archipel a été calculée à partir Île Dose annuelle Dose annuelle
des résultats obtenus sur ces ou archipel moyenne par île surveillée
sites de mesure (Tableau 44). Tuamotu-Gambier 280 Tematangi 280
Ainsi, pour Tahiti, la valeur (atolls coralliens Tureia 290
sauf les îles Gambier) Marutea Sud 250
moyenne annuelle a été établie
Hao 280
à partir des résultats obtenus Reao 260
sur 21 sites de mesure. Gambier (Mangareva) 300

Tahiti 480 Minimum 390


(île haute entourée (en bordure littorale)
d'un récif corallien) Maximum 570
(à l'intérieur de l'île)

Îles Marquises 700 Nuku Hiva 730


(îles hautes Hiva Oa 660
sans récif corallien)
T ABLEAU 44.
Évaluation de la dose externe Îles Australes 380 Rapa 420
(îles hautes entourées Rurutu 340
annuelle (µGy.an -1 ) des îles des
d'un récif corallien)
différents archipels polynésiens.
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 222

222 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

L’irradiation ambiante annuelle des archipels des Tuamotu et des Gambier est faible, de
l'ordre de 300 µGy.an -1, la contribution du rayonnement d’origine tellurique étant peu élevée pour
des sols coralliens. En effet, l’activité massique en 40K de ces sols est inférieure à 5 Bq.kg -1 sec,
celle des éléments des séries radioactives naturelles du 232Th inférieure à 3 Bq.kg -1 sec et celle
de 238U de l’ordre de 20 Bq.kg -1 sec. La rupture de l’équilibre radioactif constatée sur la série de
238 U à partir du 226 Ra (inférieur à 1 Bq.kg -1 sec) conduit donc à réduire la contribution relative
des émissions de ces radionucléides à l’irradiation tellurique des sols coralliens.
Les îles hautes des autres archipels présentent des niveaux d'exposition annuels pouvant
atteindre 700 µGy.an -1 . Ces niveaux s'expliquent par la contribution importante du rayonnement
tellurique en raison de la présence dans
les sols d'éléments d’origine volcanique, en
µGy.an-1
particulier des radionucléides des séries
2 000
naturelles de l'uranium et du thorium.
En France métropolitaine, les débits Bretagne
de dose, en général plus élevés, pro- 1 500
viennent précisément d’une contribution
plus importante du rayonnement d’origine
tellurique (Fig. 165). Cette contribution est 1 000 Région Îles
plus forte dans les massifs montagneux parisienne Marquises

anciens, comme le Massif armoricain et le Tahiti Îles Tuamotu


Australes
Massif central, que dans les bassins sédi- 500 (dont Mururoa
mentaires, comme la région parisienne, en et Fangataufa)

raison des activités plus élevées des


radionucléides d’origine naturelle. Les 100
activités massiques des radionucléides
de la série de l'uranium des granites des F IG. 165. - Evaluation des doses externes annuelles
(µGy.an -1 ) des différents archipels polynésiens, de la
régions métropolitaines sont plus élevées
région parisienne et de la Bretagne.
que celles des basaltes polynésiens.

V.3 - PLANTES TERRESTRES


La surveillance radiologique des plantes terrestres polynésiennes concernait principalement
les productions agricoles végétales entrant dans les chaînes alimentaires des populations vivant
en Polynésie.

V.3.1 - INDICE BÊTA GLOBAL

Le 40 K est parmi les radionucléides émetteur bêta-gamma présent naturellement dans les
organismes vivants celui dont l'activité massique est la plus élevée. La prépondérance de cet élément
dans les échantillons biologiques fait que les résultats de l'indice bêta global doivent être interprétés
avec précaution. Lors de la période des retombées mondiales les plus importantes, de la fin des
années 50 au début des années 60, le pourcentage de la contribution du 40K à l'indice bêta global
était systématiquement estimé afin de déduire par différence celui des radionucléides d’origine
artificielle. En 1962, le pourcentage moyen de 40 K des végétaux-feuilles, comme les salades et
les choux, et celui des fruits étaient respectivement de 64 % et 79 % ; des valeurs à comparer
aux 41 % mesurés sur les végétaux prélevés en métropole la même année.
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 223

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 223

En 1962, les radionucléides d’origine artificielle contribuant le plus fortement à l’indice


bêta global étaient principalement les 95 Zr, 103 Ru, 106 Ru, 141 Ce, 144 Ce et 137 Cs. Ils étaient
mesurés dans les échantillons d'herbe et dans les végétaux-feuilles prélevés dans les différents
archipels polynésiens à des niveaux d'activité massique proches de ceux des mêmes types
d'échantillons prélevés en métropole.

V.3.2 - RADIONUCLÉIDES DE PÉRIODE SUPÉRIEURE À 5 ANS

La distribution géographique et l'évolution, au cours du temps, de l'activité du 137Cs dans les


végétaux peuvent être considérées comme représentatives de l'influence des retombées en
Polynésie. Depuis 1966, dans le cadre de la surveillance radiologique des essais nucléaires, des
mesures de la radioactivité des noix de coco sont réalisées sur l’ensemble du territoire de la
Polynésie française. Entre 1966 et 1996, 1 250 échantillons de coprah et d’eau de coco ont été
prélevés sur les 44 îles hautes ou atolls faisant l’objet de la surveillance radiologique.
Le 137 Cs est le principal radionucléide détecté dans les végétaux, en particulier dans le
coprah des noix de coco où il s'accumule à des niveaux plus élevés que dans l'eau de coco. Les
activités massiques du 137 Cs dans le coprah des noix de coco des différents atolls sont repré-
sentatives et proportionnelles à la répartition spatiale des retombées régionales et mondiales sur
l’ensemble du territoire polynésien. Les variations géographiques de l'activité moyenne en 137Cs du
coprah, durant cette période, montrent que les îles caractérisées par les valeurs les plus élevées
se situaient à l’est et au nord-est des atolls de Mururoa et de Fangataufa (Tableau 45).
L’activité massique moyenne la plus élevée, 130 Bq.kg -1 exprimée en poids frais, et l'activité
massique maximale, 280 Bq.kg -1 frais, mesurée en 1971, ont été observées sur l’atoll inhabité de
Maria. Cette île est située sur l'axe principal, orienté vers l’Est, de la dispersion des nuages générés
par les essais nucléaires atmosphériques réalisés à Mururoa et Fangataufa.

Les îles des Tuamotu Sud-


Est, de Tureia à Reao et les atolls T ABLEAU 45.
inhabités du groupe Actéon, situés Activité massique (Bq.kg -1 frais) moyenne, minimale et
maximale du 137Cs mesurée sur des échantillons de
au sud et au nord de l'axe de dis-
coprah issus de noix de coco prélevées entre 1966
persion recherché, ont également et 1974 dans les différents archipels de Polynésie.
été occasionnellement soumis à Le nombre d’échantillons est donné entre parenthèses.
des retombées atmosphériques
régionales. Néanmoins, l’activité 137Cs (Bq.kg-1 frais)
massique du coprah des noix de Secteur géographique
Moyenne Minimum Maximum
coco collectées sur ces îles était
faible, comprise entre 15 et 25 Atoll de Maria - Actéon 130 (9) 51 280
Bq.kg -1 frais, reflétant l'amplitude
Tuamotu du Sud-Est - Actéon 18 (176) 1,9 59
limitée des retombées durant cette
période. Le coprah issu des noix Îles Australes - Tubuai 14 (24) 1,4 40
de coco collectées sur la majorité Tuamotu Nord et centre et Mururoa 10 (166) 1,1 51
des îles de l'archipel des Tuamotu
Îles Australes - autres que Tubuai 2,7 (8) 0,41 8,1
et de Tubuai, des îles Australes,
avait des activités moyennes d’envi- Îles Gambier - Mangareva 2,7 (65) 0,11 10
ron 10 Bq.kg -1 frais. Tahiti et îles-Sous-le-Vent 2,4 (132) 0,07 20

Îles Marquises 0,63 (21) 0,04 4,8


Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 224

224 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

Dans tous les autres archipels, les activités massiques moyennes étaient inférieures à 10
Bq.kg -1 frais. Le coprah provenant des îles Marquises avait les niveaux d’activité massique les
plus faibles avec une moyenne de 0,6 Bq.kg -1 frais et de 4,8 Bq.kg -1 frais en valeur maximale.
Bien que l’île haute de Mangareva de l'archipel des Gambier, située au sud de l'axe des
retombées, ait été affectée par des retombées régionales en 1966 et 1971 (Tableau 42), les activités
massiques du coprah en 137Cs y étaient faibles, de l'ordre de 3 Bq.kg -1 frais. L'explication la plus
probable est à rechercher, dans la lixiviation par les pluies du césium présent dans les sols, mais
aussi dans les processus de compétition entre le potassium et le césium au niveau des transferts
sol-plante. Les sols de Mangareva ont des teneurs en potassium supérieures à celles des sols
coralliens. Le potassium, analogue chimique naturel du césium, est donc absorbé préférentiellement
par voie racinaire par la plante, puis s'accumule par translocation dans le coprah. Il en résulterait
un transfert de 137 Cs dans la noix de coco plus faible que celui observé sur les atolls voisins
ayant des sols moins riches en potassium.
L’île de Tureia, dans l’archipel des Tuamotu, peut être considérée comme représentative
des îles se trouvant au nord de la zone des retombées atmosphériques centrée sur l’axe principal
attendu de la dispersion du nuage produit par les essais. L'évolution au cours du temps des
activités massiques en 137 Cs du coprah des noix de coco prélevées dans cette île montre des
fluctuations importantes autour d'une valeur moyenne annuelle de 20 Bq.Kg -1 pendant la période
des essais atmosphériques (Fig. 166). À partir de 1975, l’activité massique décroît progressivement
avec le temps suivant une période de décroissance effective de l’ordre de 10 ans et atteint une
activité de l'ordre de 4 à 5 Bq.kg -1 frais en 1996.

Bq.kg-1 frais
100

10

période des essais aériens


période des essais souterrains
1
1970 1974 1978 1982 1986 1990 1994 1998

F IG. 166. - Évolution de l’activité massique (Bq.kg -1 frais) en 137 Cs des échantillons de coprah prélevés, de
1969 à 1997, sur l’atoll de Tureia.

V.4 - PRODUCTION AGRICOLE : LE LAIT


Dès 1966, les productions laitières ont fait l’objet d’une surveillance radiologique particulière,
avec la quantification entre autres, des radionucléides à vie courte comme l’ 131 I et à vie moyenne,
comme le 137 Cs, de période respective de 8 jours et 30,1 ans.
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 225

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 225

V.4.1 - RADIONUCLÉIDES DE PÉRIODE INFÉRIEURE À 1 AN

L’évolution générale des radionucléides à vie courte montre des augmentations ponctuelles
de l’activité limitées à la période des campagnes d’essais atmosphériques. Ainsi, l’apparition du
131 I dans les laits produits à Tahiti et commercialisés à Papeete a été observée temporairement
pendant chaque campagne d’essais, de 1966 à 1974, mais à des niveaux variables (Fig. 167).
La valeur maximale de 255 Bq.l -1 de l'activité volumique en 131 I de ces laits a été atteinte
le 27 juillet 1974, soit 8 jours après le dépôt des radionucléides associés aux retombées atmosphé-
riques de l'essai Centaure, réalisé le 17 juillet (Fig. 168). Les productions issues de la partie Est de
l’île où les dépôts ont été les plus importants (cf. paragraphe sur la radioactivité des sols de Tahiti)
et où pâturait une partie des vaches laitières ont montré une évolution similaire au cours du temps mais
avec des niveaux plus élevés (Fig. 187).
À la suite de ces retombées, une estimation des doses à la population a été réalisée afin
de vérifier le respect de la limite d’exposition annuelle. Les calculs ont été actualisés en 2006 en
utilisant les données de surveillance de 1974 et les facteurs de dose en vigueur (cf. Chapitre VI).

F IG. 167. - Évolution journalière Bq.l-1


300
de l'activité volumique (Bq.l -1 )
Essai
en 131 I du lait de vache collecté Centaure
de 1966 à 1975 sur le marché 250
de Papeete, à Tahiti, dans le
cadre de la surveillance radiolo-
gique des aliments. 131I n’a plus 200
jamais été détecté dans les laits
à partir de 1975.
150

100

50
Bq.l-1
300

LD
14/12/66 14/12/67 14/12/68 14/12/69 14/12/70 14/12/71 14/12/72 14/12/73 14/12/74 14/12/75
250
Temps

200

150

100

F IG. 168. - Activité volumique


50
(Bq.l -1 ) journalière de 131 I
mesurée dans le lait collecté sur
le marché de Papeete à Tahiti,
LD de juillet à septembre 1974
18 20 22 24 26 28 30 01 03 05 07 09 11 13 15 17 19 21 23 25 27 29 31 2 4 6 8 10 12 14 16 18 20 dans le cadre de la surveillance
Juillet Août Septembre radiologique des aliments.
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 226

226 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

V.4.2 - RADIONUCLÉIDES DE PÉRIODE SUPÉRIEURE À 5 ANS

En 1969, l'activité volumique moyenne du 137 Cs dans le lait collecté à Tahiti était de 3,5
Bq.l -1 . L'évolution pluriannuelle de l'activité volumique de ce radionucléide a ensuite suivi une
décroissance rapide, entre 1969 et 1978, puis une décroissance plus lente, jusqu'en 1992 (Fig.
169). De 1993 à nos jours, l'activité volumique est restée constante, à un niveau très faible,
proche de 1 Bq.l -1 et du même ordre de grandeur que les incertitudes associées à ces mesures
et de la limite de détection. Cette stabilité des activités du lait reflète celle de l'activité massique en
137 Cs de l'horizon superficiel des sols tahitiens où paissent les vaches. En effet, les sols de
prairies sur lesquelles pâturent les animaux ou servant à la production de fourrage sont pauvres
en potassium, donc, comme cela a été expliqué précédemment, favorables aux transferts racinaires
sol-plante du césium. De plus, ces prairies sont constituées de deux graminées fourragères, Serratia
sp. et Batiki sp., caractérisées par des facteurs de transfert du césium plus élevés que ceux des
autres espèces de végétaux.

Bq.l-1
10

1
1967 1970 1975 1980 1985 1990 1995 2000 2005

F IG. 169. - Évolution annuelle de l'activité volumique (Bq.l -1 ) en 137 Cs du lait de vache collecté, de 1967 à
2004, à Tahiti (D’après rapport IRSN, 2005).

De 1967 à 1980, la période effective de décroissance du 137Cs dans le lait était inférieure à
5 ans. Calculée sur la période 1967-1995, elle est proche de 15 ans, c’est-à-dire inférieure de
moitié à sa période radioactive. Ces deux phases traduisent un appauvrissement initial rapide de la
fraction la plus labile du césium déposé sur les sols puis le lent appauvrissement dû au fait
qu’une partie des pertes en 137 Cs par le lessivage des sols a été compensée par l’apport des
retombées mondiales. Autour de cette tendance pluriannuelle, des fluctuations de faible ampleur de
l’activité volumique du 137 Cs étaient observées. Ainsi, en 1974, année des retombées les plus
importantes observées sur Tahiti à la suite de l'essai Centaure, les activités volumiques d’échan-
tillons de lait collectés à Tahiti ont fluctué entre la limite de détection de 1 Bq.l -1 et près de 6 Bq.l -1
le 12 août (Fig. 170). Compte tenu des niveaux résiduels en 137Cs dans les dépôts au sol résultant
de sa période radioactive et de sa persistance dans les retombées mondiales, l’influence des
retombées immédiates n’était pas aussi marquée que pour les radionucléides à vie courte. En
revanche, les fluctuations locales en 137Cs pendant la période des essais atmosphériques pouvaient
être plus importantes entre les zones de production de lait. Ainsi, le lait collecté à Hitiaa a atteint
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 227

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 227

une activité volumique maximale de 14,4 Bq.l -1 , en août 1974, reflet de l’activité des sols et des
herbes de la zone paturée à Taravao où les dépôts, dus aux retombées de l’essai Centaure, ont
été les plus élevés.

Bq.l-1
7

LD
3 4 4 4 4 4 4 4 75
97 97 97 97 97 97 97 97 9
/1 /1 /1 /1 /1 /1 /1 1/1 /1
/1
2
/0
1
/0
3 05 /0
6 08 09 /1 01
02 21 12 0 1/ 20 0 9/ 2 8/ 17 0 6/

F IG. 170. - Activité volumique (Bq.l -1) du 137Cs mesuré dans le lait collecté au marché de Papeete à Tahiti de
décembre 1973 à janvier 1975 dans le cadre de la surveillance radiologique des aliments. (LD = Limite de
détection).

V.5 - EAUX OCÉANIQUES


Le tritium est un radionucléide considéré comme un traceur conservatif des masses d'eau
marines. À ce titre, les retombées mondiales de tritium, à la surface des océans, ont été mesurées
pour être utilisées par les océanographes afin de quantifier la vitesse de mélange des masses
d'eau de surface avec celles plus profondes. Ces études permettent de disposer de nombreuses
références scientifiques sur les activités volumiques du tritium au sein des eaux des différents océans
et de pouvoir les comparer avec celles obtenues en Polynésie. Le 90 Sr, le 137 Cs et le 239+240 Pu
ont également fait l'objet de nombreuses études qui ont permis de comparer les niveaux d’activité
volumique mesurés au sein des eaux polynésiennes, à ceux des autres mers et océans.
Les données présentées dans ce paragraphe viennent complèter celles concernant les
eaux océaniques aux abords des sites d’expérimentations exposées dans le chapitre IV.

V.5.1 - TRITIUM
L'activité volumique du tritium dans les eaux océaniques, n’a été quantifiée qu’à partir de
1993 car les méthodes d’analyse utilisées en routine, avant cette date, à savoir l’enrichissement
électrolytique suivi d’une mesure par scintillation liquide, bien que très performantes, ne permettaient
pas de quantifier les activités volumiques inférieures à 200, voire 300 Bq.m -3 . Cette limite de
détection était insuffisante pour atteindre les niveaux d’activité volumique caractéristiques du bruit
de fond des océans, et en particulier de celui de l’océan Pacifique, d’environ 150 Bq.m -3 . En
revanche, les niveaux d’activité de l’ordre d’une dizaine de Bq.m -3 peuvent être quantifiés par spec-
trométrie de masse, par double mesure de l’hélium-3 qui se forme par désintégration du tritium.
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 228

228 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

Cette technique de mesure n’est pas employée en routine car le délai d’attente entre les
deux mesures dépasse un an. Néanmoins, en 1988, des mesures de tritium ont été réalisées par
cette technique sur trois profils verticaux, l’un au large de Tahiti, les deux autres aux limites Est et
Ouest des eaux territoriales de l’atoll de Mururoa, dans le sens de la circulation des masses d’eaux
océaniques orientée d'est en ouest (Fig. 171).

Profondeur (m)
0

200

400

600
Valeur avec
incertitude de mesure

800 Valeur en
limite de détection

1000
Large de Tahiti Limite Ouest de Mururoa Limite Est de Mururoa

1200
0 50 100 150 200 0 50 100 150 200 0 50 100 150 200
Bq.m-3
F IG. 171. - Profils verticaux de l’activité volumique (Bq.m -3) en tritium (forme HTO) des eaux océaniques prélevées
en 1988 à différentes profondeurs, au large de Tahiti et aux limites Ouest et Est des eaux territoriales de
l’atoll de Mururoa. Les incertitudes de mesure sont données à ± 2 σ.

Les profils des trois stations de prélèvement étaient similaires. Les activités volumiques
maximales, de l'ordre de 150 Bq.m -3 , ont été mesurées dans les masses d’eau superficielles, de
0 à 300 mètres de profondeur. Elles décroissaient ensuite rapidement avec la profondeur au
niveau de la thermocline pour atteindre 50 Bq.m -3 , et être inférieures à la limite de détection
au-delà de 600 mètres. Aucun apport en tritium n’a été observé en limite des eaux territoriales,
comme le montre la similitude entre les profils à l’est et à l’ouest de Mururoa et au large de Tahiti.
Les activités mesurées sont cohérentes avec les données scientifiques contemporaines
disponibles, en particulier celles de la campagne océanographique «Benthic 8» réalisée en 1983.
Bien que l’extension méridionale de cette campagne ait été limitée à 10° S (Tahiti est à 18° S et
Mururoa à 22° S), les activités et les profils publiés sont similaires à ceux obtenus en 1988.
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 229

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 229

V.5.2 - RADIONUCLÉIDES DE PÉRIODE SUPÉRIEURE À 5 ANS

Les 137 Cs et 90 Sr étaient présents dans


les eaux de mer de surface sur l’ensemble de T ABLEAU 46.
la planète, dès le début des années 60, à la Activités volumiques (Bq.m -3 ) moyennes en 137 Cs
suite des retombées mondiales résultant des et 90Sr des eaux océaniques de surface prélevées,
essais atmosphériques réalisés dans les deux de 1987 à 1994, sur l’ensemble de
hémisphères. Ces radionucléides ont fait l'objet la Polynésie française.
d'un suivi annuel dans les eaux de surface de Le nombre de points de prélèvements est donné
entre parenthèses.
l'ensemble de la Polynésie qui a montré, entre
1987 et 1994, une décroissance lente de l’ac- 137Cs (Bq.m-3) 90Sr (Bq.m-3)
Année
tivité volumique de ces eaux (Tableau 46).
Les profils de l’activité volumique du 1987 3,17 ± 0,50 (11)
137 Cs et du 90 Sr en fonction de la profondeur
1988 2,66 ± 0,23 (11)
réalisés en 1993, au large de Tahiti, montraient
des évolutions très proches, avec une différence 1989 2,45 ± 0,08 (11) 1,65 ± 0,09 (5)
marquée des activités volumiques entre les 1990 2,64 ± 0,14 (11) 1,49 ± 0,22 (11)
eaux de surface et de fond. Ainsi, les eaux de la 1991 2,22 ± 0,10 (11) 1,54 ± 0,10 (8)
couche de surface, entre 0 et 150 mètres envi-
ron, présentaient une activité volumique 1992 2,15 ± 0,06 (7) 1,34 ± 0,06 (7)
homogène de 2,1 Bq.m -3 et 1,4 Bq.m -3 , res- 1993 2,15 ± 0,11 (11) 1,35 ± 0,11 (11)
pectivement pour le 137 Cs et le 90 Sr. Les 1994 2,12 (1) 1,17 (1)
niveaux décroissaient rapidement à partir de la
thermocline jusqu’à environ 800 mètres de
profondeur. De cette profondeur et jusqu'aux
couches d’eaux les plus profondes, les activités volumiques du 137 Cs et du 90 Sr étaient
constantes et à des niveaux très faibles, inférieurs à 0,1 Bq.m -3 et 0,2 Bq.m -3 , respectivement
(Fig. 172).

Profondeur (m) Profondeur (m)


0 0

500 500

1000 1000

1500 1500
F IG. 172. - Profils verticaux de
l’activité volumique (Bq.m -3 ) 137Cs 90Sr
en 137 Cs et 90Sr des masses
d’eaux océaniques prélevées 2000 2000
Valeur avec
à différentes profondeurs, en incertitude de mesure
1993, à proximité de l’île de Valeur en
limite de détection
Tahiti. Les incertitudes de 2500 2500
mesure sont données à 2 σ . 0 0,5 1,0 1,5 2,0 2,5 3,0 0 0,5 1,0 1,5 2,0
Bq.m-3 Bq.m-3
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 230

230 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

V.5.3 - ISOTOPES DU PLUTONIUM

L'activité volumique du 239+240 Pu des eaux océaniques polynésiennes prélevées en 1989-


1996 était comprise entre 0,001 et 0,002
Bq.m -3 (Fig. 173). À la limite des eaux ter-
ritoriales, les activités volumiques en mBq.m-3
1 000
plutonium, bien que déjà très faibles, Maximum
étaient supérieures d’un facteur 2 à
Moyenne
celles des eaux océaniques polyné-
Minimum
siennes, avec des variations impor- Mururoa Fangataufa
tantes d’une année de prélèvement à
l’autre ; variations dues aux fluctuations 100

des courants entraînant les eaux en


Ouest
sortie des lagons de Mururoa et Pavillon
Fangataufa vers le large. Axe
Nord Passe
Denise Est
Ouest
Faucon Frégate
10
Est
F IG. 173. - Amplitude de variation de l’activité Anémone
Hiva Oa Tubuai
volumique (mBq.m -3 ) des eaux océaniques
de surface, prélevées à proximité de diffé- Tahiti
Sud
rentes îles polynésiennes et à différentes
Terme Sud Gambier
stations à la limite des eaux territoriales de
1
Mururoa et Fangataufa, référencées au droit LIMITES DES EAUX TERRITORIALES POLYNÉSIE
des zones d'expérimentations des atolls.

Profondeur (m)
0

La distribution verticale du 239+240 Pu, dans les dif-


férentes masses d'eau présentes en Polynésie, a été précisée
sur des échantillons de grands volumes d'eau prélevés en 500

1993, à différentes profondeurs, au large de Tahiti (Fig. 174).


L’activité volumique apparaissait constante dans la couche de
surface, de l'ordre de 2 mBq.m-3, augmentait progressivement 1000

à partir de 200 mètres de profondeur, pour atteindre un


maximum de 10 mBq.m-3 aux environs de 600 mètres, avant
de diminuer rapidement jusqu’à 1 000 mètres, puis de 1500

décroître plus lentement au-delà. Le maximum observé à


600 m de profondeur était le résultat de la lente sédimentation
dans la colonne d’eau du plutonium issu des retombées 2000

mondiales résultant de l'ensemble des essais atmosphériques


mondiaux.
Cette distribution verticale a été observée, sur l’en- 2500
0 2 4 6 8 10 12 14 16
semble des mers du globe et s’explique par la migration pro- mBq.m-3
gressive du plutonium, de la surface des océans vers les
F IG . 174. - Profils de l'activité volu-
grands fonds, à raison de 20 à 30 mètres par an.
mique en 239+240 Pu des eaux préle-
Les activités volumiques en 238 Pu étaient rarement vées, en 1993, entre la surface et 2
détectables dans les eaux océaniques. 500 m de profondeur, à proximité de
Tahiti. Les incertitudes de mesure sont
données à 2 σ .
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 231

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 231

V.5.4 - RADIOACTIVITÉ DES EAUX DE MER MONDIALES

Des échantillons d’eau de mer de surface des différents océans de la planète ont été
prélevés, en 1992-1993, afin de comparer leurs niveaux d'activité volumique en 90 Sr, 137 Cs et
239+240 Pu avec ceux observés en Polynésie. Les résultats de cette campagne ont montré que les
activités volumiques de ces radionucléides dans les eaux de surface polynésiennes étaient
identiques ou inférieures à celles des eaux océaniques de l’hémisphère Nord (Fig. 175).

180˚W 150˚W 120˚W 90˚W 60˚W 30˚W 0˚ 30˚E 60˚E 90˚E 120˚E 150˚E 180˚E

75˚N
90 Sr
60˚N

1,31
45˚N
1,26 1,57 1,69
1,58 1,67 OCÉAN
1,66 1,41 1,42 1,59 1,58 2,11 PACIFIQUE
30˚N
0,92 1,60
OCÉAN 0,99 1,14 OUEST
1,15 1,74 2,06
1,35 0,87 1,74 1,65
1,00
15˚N PACIFIQUE 1,07
1,43 2,04 1,51
1,13 0,93
1,11 1,74
EST 1,02 1,66
0
0,89 1,24 1,37
0,92 OCÉAN
1,17 1,22
15˚S 1,39
TAHITI 1,31 OCÉAN INDIEN
1,02
1,30 0,81 1,47
0,50
30˚S ATLANTIQUE
0,662 1,45
0,405 1,09
45˚S
0,354 ? 0,12
0,454

60˚S 0,410
? 0,12

75˚S

180˚W 150˚W 120˚W 90˚W 60˚W 30˚W 0˚ 30˚E 60˚E 90˚E 120˚E 150˚E 180˚E

137 Cs 75˚N

60˚N

2,42
45˚N
2,47 2,58 2,86
2,84 2,56
OCÉAN
3,97 2,63 2,32 2,50 2,82 2,82
30˚N PACIFIQUE
1,84 2,53
OCÉAN 2,11 2,13 OUEST
3,30 2,91 3,12
2,57 2,08 3,12
1,60
15˚N PACIFIQUE 1,95
2,43 2,87
2,55 1,45
2,08 2,59
EST 1,60 2,77
0
2,56 2,12 2,35
1,82 OCÉAN
2,01 2,16
15˚S 1,93
TAHITI 2,48 OCÉAN INDIEN
1,56
2,30 1,35 2,33
0,77
30˚S ATLANTIQUE
0,79 1,96
0,65 1,63
45˚S
0,56
0,65 0,10

60˚S
0,69
0,072

75˚S

F IG. 175. - Activité volumique en 90 Sr et 137 Cs (Bq.m -3 ) des masses d'eau de surface prélevées en
1992-1993 dans les différents océans de la planète.
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 232

232 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

180˚W 150˚W 120˚W 90˚W 60˚W 30˚W 0˚ 30˚E 60˚E 90˚E 120˚E 150˚E 180˚E

239+240 Pu 75˚N

60˚N

7,50
45˚N
20,70
0,69 11,50 8,70 6,90
OCÉAN
0,60 7,10 7,10 11,90 PACIFIQUE
30˚N 17,80
2,48 6,60
OCÉAN 3,30 3,92 OUEST
1,70 0,85 4,80
0,78 3,22 7,0 4,30
2,44
15˚N PACIFIQUE 4,15
2,44 5,70 2,36
1,37 1,63
2,42 5,20
EST 1,93 7,60
0
2,01 2,78
2,82
2,1 OCÉAN
2,60 1,44
15˚S 3,70
TAHITI 2,50 OCÉAN INDIEN
4,2
1,81 0,87
2,25
30˚S ATLANTIQUE
1,32 1,00
45˚S
1,8 1,77
0,82

60˚S 1,33

75˚S

F IG. 175 (suite). - Activité volumique en 239+240 Pu (mBq.m -3 ) des masses d'eau de surface prélevées en
1992-1993 dans les différents océans de la planète.

V.6 - FLORE ET FAUNE MARINES


Parmi l'ensemble des résultats de mesure disponibles pour les organismes vivant en
Polynésie sujets de la surveillance radiologique, ceux appartenant au niveau trophique primaire, à
savoir le plancton, et ceux du niveau trophique le plus élevé, celui des carnivores marins que sont
les poissons pélagiques océaniques, seront présentés dans ce paragraphe.

V.6.1 - PLANCTON

Le plancton accumule les radionucléides d'origines naturelle et artificielle à des niveaux


d'activité massique importants. Ainsi, pour ceux d'origine naturelle, notamment le 234 Th (330
Bq.kg -1 frais), les facteurs de concentration (Fc) à partir des eaux de mer sont de l'ordre de 400 000
et de 10 000, respectivement dans le phytoplancton et le zooplancton. À la limite des eaux terri-
toriales de Mururoa et de Fangataufa, cette radioactivité naturelle est environ cinq mille fois plus
élevée que la radioactivité d’origine artificielle (Fig. 176).
Concernant les radionucléides d'origine artificielle, ce sont essentiellement les 60 Co,
137 Cs et 239+240 Pu qui ont été quantifiés. En effet, le plancton se caractérise par des capacités
d'accumulation variables suivant les radionucléides, reflétées par les valeurs génériques de Fc
recommandées par l'AIEA (cf. Chapitre II). Ainsi, le césium est faiblement accumulé par le phyto-
plancton et le zooplancton, avec des Fc de 20 et de 40, respectivement. Au contraire, le cobalt
et le plutonium s'accumulent dans le plancton, l'AIEA a publié des valeurs de Fc de 2 000 et de
200 000 pour le phytoplancton et de 7 000 et de 4 000 pour le zooplancton. Pour les poissons,
les Fc associés au césium, cobalt et plutonium sont respectivement, de 100, 700 et 100.
Les principaux radionucléides d’origine artificielle mis en évidence dans le plancton
océanique sont le 60 Co, le 137 Cs, le 238 Pu et le 239+240 Pu (Fig. 177).
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 233

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 233

Le strontium, caractérisé par des Fc Bq.kg-1 frais 234Th

de 1 et de 2 respectivement dans le phyto- 400 40K

plancton et le zooplancton, n'est donc pas 366


234U+235U+238U
7Be
accumulé par les organismes composant le Rad. artificiels
plancton. Aussi, il n'est pas étonnant que le
90 Sr, à de faibles niveaux d'activité volumique 300

dans les eaux de mer de l'ordre de 1,3 Bq.m-3, Bq.kg-1 frais


n'ait pas été décelé dans les échantillons de
plancton. 200 0,076

0,06
60Co
V.6.1.1 - RADIONUCLÉIDES DE PÉRIODE 100
SUPÉRIEURE À 5 ANS 0,04

En raison des échanges lagon-océan 239+240Pu


0
par l'intermédiaire des passes, le 60 Co initia- Natu
0,02

lement présent dans les eaux du lagon a été artif rels et


iciels 137Cs

décelé dans les eaux océaniques proches 0


des atolls d'expérimentations, jusqu'à la limite Artif
238Pu

icie ls

60Co : 0,017 ± 0,008 Nord 60Co


137Cs
: 0,034 ± 0,006 F IG. 176. - Activité massique (Bq.kg - 1 frais) des
137Cs : 0,022 ± 0,010 DENISE : 0,013 ± 0,005
238Pu : < 0,0075 238Pu : < 0,0018 radionucléides d'origine naturelle et artificielle
239+240Pu : 0,0063 ± 0,0017
239+240Pu : 0,0027 ± 0,0017 du plancton océanique collecté dans les eaux
60Co: 0,140 ± 0,015
137Cs : 0,022 ± 0,009
de surface, à la limite des eaux territoriales des
Nord-Ouest
PASSE
238Pu : 0,0165 ± 0,0038 atolls de Mururoa et Fangataufa.
239+240Pu : 0,0980 ± 0,0120

60Co
: 0,062 ± 0,012
137Cs
: < 0,019
PASSE Est
238Pu
: 0,0031 ± 0,0013
ANEMONE
239+240Pu : 0,0155 ± 0,0026
Ouest
FAUCON Atoll de Mururoa des eaux territoriales. De même, l'activité
60Co : 0,022 massique du plancton était plus élevée au
137Cs : 0,018 ± 0,006
238Pu : < 0,0028 voisinage des passes qu’au large (Fig. 177).
239+240Pu : 0,0057 ± 0,0022
À partir de 1993, des niveaux d’activités
60Co: 0,011 ± 0,007
60Co : 0,167 ± 0,018
137Cs
: 0,017 ± 0,006 plus faibles ont été mesurés à l'aide de
238Pu
137Cs : 0,018
238Pu : 0,0246 ± 0,0044
: 0,0031 ± 0,0024
239+240Pu : 0,0130 ± 0,0039
détecteurs bas bruit de fond très perfor-
239+240Pu : 0,0770 ± 0,0100 mants installés dans le laboratoire souter-
Est
PASSE KILO rain de Modane (Savoie, France). Ces
60Co : 0,071 ± 0,010 Ouest
137Cs : 0,015 ± 0,007
PAVILLON mesures faisaient apparaître une diminu-
238Pu : 0,0055 ± 0,0015
239+240Pu : 0,0324 ± 0,0043
tion de l’activité massique du 60 Co, en
Atoll de Fangataufa
moyenne d’un facteur quatre, des passes
aux 12 milles nautiques des côtes de
60Co : 0,033 ± 0,010 Mururoa et de Fangataufa (Fig. 178). En
137Cs Sud
238Pu
: 0,016 ± 0,007
: 0,0066 ± 0,0024
TERME SUD revanche, le 60 Co n’a pas été détecté
239+240Pu : 0,0432 ± 0,0066
dans le plancton prélevé dans les eaux à
F IG. 177. - Activités massiques (Bq.kg -1 frais) en 60 Co, proximité des autres atolls de la Polynésie
137 Cs, 238 Pu et 239+240 Pu mesurées sur des échantillons française.
de plancton prélevés en 1993-1994 à la limite des eaux
territoriales des atolls de Mururoa et Fangataufa.
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 234

234 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

Le 137Cs, faiblement accumulé par le plancton océanique, est également mesuré depuis 1993
dans le laboratoire souterrain de Modane. Le 137Cs apparaît à des niveaux constants compris entre
0,015 ± 0,07 et 0,022 ± 0,010 Bq.m -3 sur l’ensemble des points de prélèvement, traduisant
l’homogénéité de l’activité volumique des eaux polynésiennes, conséquence des retombées
atmosphériques mondiales (Fig. 178).

Bq.kg-1 frais
V.6.1.2 - ISOTOPES DU PLUTONIUM
60Co
0,10
n : Nombre d'échantillons analysés 239+240Pu
Quelle que soit la période de prélèvement, ≤ x : Activité inférieure à la limite de
0,08
les activités volumiques en 238 Pu et en 239+240 Pu, détection 137Cs

60
étaient, comme pour le Co, toujours plus élevées 0,06
238Pu

dans les échantillons de plancton collectés à proxi-


0,04
mité des passes que dans ceux prélevés au large. n=6
< 0,020

Entre ces deux zones, l'activité volumique diminuait 0,02


en moyenne d'un facteur cinq pour le 238 Pu, de n=7 n
< 0,0027
=6 n=6
-1
0,0206 à 0,0046 Bq.kg frais, et pour le 239+240 Pu, 0 n=4
12 milles n=6
de 0,0875 à 0,0170 Bq.kg -1 frais. Mururoa
nautique
et Fang
s de n=6 n=6
ataufa
L'activité massique du 238 Pu du plancton pré- Polynési
e frança
ise

levé dans les eaux territoriales était inférieure aux


limites de détection alors que l'activité en 239+240 Pu F IG. 178. - Activité volumique (Bq.kg - 1 frais)
-1
était comprise entre 0,0016 et 0,0090 Bq.kg frais, moyenne en 60 Co, 137 Cs, 238 Pu et 239+240 Pu
-1
avec une moyenne de 0,0050 Bq.kg frais (Fig. du plancton océanique prélevé, en 1993-
178). Ces valeurs étaient proches de la valeur mini- 1994, à la limite des eaux territoriales de
Mururoa et de Fangataufa et des autres îles de
male de l’amplitude des niveaux attendus suite aux
Polynésie française.
retombées atmosphériques mondiales. En effet, sur
la base des résultats des mesures obtenus en
1972-1973 entre 15° et 30° de latitude Sud, l'AIEA fixait à cette date les activités probables entre
0,003 et 0,034 Bq.kg -1 frais.
Lorsque l'activité massique du 238 Pu a été quantifiée, les rapports 238 Pu/ 239+240 Pu étaient
de 32 % et de 17 %, respectivement dans les passes de Fangataufa et de Mururoa, proches de
ceux des eaux du lagon de Fangataufa (35 %) et de Mururoa (16 %).

Facteurs de concentration du plancton polynésien

Les données obtenues pour les eaux de mer et le plancton, prélevés simultanément lors
des campagnes de 1993 et de 1994, permettent de calculer des facteurs de concentration du
137Cs et du 239+240Pu spécifiques du plancton vivant dans les eaux polynésiennes (Tableau 47).
Le Fc du 137Cs pour le plancton océanique varie de 6 à 14, confirmant le faible pouvoir
d'accumulation du césium par le plancton. Le Fc varie de 4,5 à 7,4 lorsqu'il est calculé avec les
résultats obtenus sur les échantillons issus des archipels de Polynésie française (Marquises,
Tahiti, Tuamotu-Gambier et Australes). Ces valeurs pour le plancton polynésien sont du même
ordre de grandeur, mais inférieures aux valeurs génériques recommandées par l'AIEA.
Le Fc du 239+240Pu pour le plancton polynésien oscille entre 1 900 et 5 000, confirmant
le fort pouvoir d'accumulation de cet élément. Ces valeurs sont inférieures à celles recommandées
par l'AIEA. En revanche, elles sont très proches du Fc de 4 000 obtenu à partir des mesures
réalisées par les différents laboratoires lors de l'intercomparaison organisée par AIEA en 1991.
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 235

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 235

T ABLEAU 47.
Facteurs de concentration (Fc) du 137 Cs et 239+240 Pu pour le plancton polynésien, calculés à partir
des résultats de mesure de l'intercomparaison AIEA de 1991 et des campagnes de prélèvements
de 1993-1994. Le nombre de mesures utilisé pour le calcul est donné entre parenthèses.

Facteur de concentration Facteur de concentration (Fc)


Facteur de concentration
AIEA Campagnes 1993 - 1994
Radionucléide Intercomparaison
Valeurs mini - maxi
1991 minimum moyen maximum
(Valeur recommandée *)
137Cs 10 - 50 : 30 * 14 (2) 4,5 5,6 (5) 7,4
239+240Pu 500 - 5 000 : 1 000 * 4 000 (2) 1 900 3 200 (5) 5 000

V.6.2 - POISSONS PÉLAGIQUES

Depuis 1966, date du début des essais nucléaires sur les atolls de Mururoa et Fangataufa,
la radioactivité des denrées entrant dans la ration alimentaire des populations vivant en Polynésie
est régulièrement contrôlée. Le poisson constitue la base de l’apport en protéines dans leur
alimentation. Des consommations annuelles pouvant atteindre 140 kg par adulte, dont 30 kg de
thon, ont été relevées lors des enquêtes alimentaires réalisées jusqu’en 1985, en particulier dans
l’archipel des Gambier. Ces quantités sont supérieures à celles consommées à la même
époque par les pêcheurs du Nord de la France par exemple (17,3 kg.adulte -1.an -1). Aussi, depuis
1966, une attention particulière a été accordée aux grands poissons pélagiques océaniques
pêchés dans la Zone économique exclusive (ZEE) de Polynésie française. Les résultats obtenus
sont utilisables pour estimer la dose engagée du fait de la consommation de ces espèces
(cf. Chapitre VI).

V.6.2.1 - RADIONUCLÉIDES DE PÉRIODE INFÉRIEURE OU ÉGALE À L’ANNÉE

Pendant la période des essais atmosphériques, entre 1967 et 1974, parmi les radio
nucléides du cortège mis en évidence lors d'un essai (cf. Chapitres II et IV), le 65Zn est celui de
période courte le plus souvent mesuré chez les poissons. Le Fc du 65Zn pour les poissons,
donné dans différentes publications scientifiques, est élevé, de l'ordre de 1 000. Sur un
ensemble de 4 700 échantillons analysés, 65 % ont conduit à une activité massique quantifiable. Les
activités massiques les plus élevées ont été observées, en 1967 et 1968, en particulier pour
Acanthocybium solandri, le thazard, espèce qui ne semble pas effectuer de grandes migrations
(Tableau 48). Un marquage significatif en 65Zn a été mis en évidence, de janvier à août 1968, dans
la zone de pêche proche des sites de Mururoa et de Fangataufa.
À partir de 1969, les activités massiques ont décru régulièrement pour n'être plus quantifiables
à partir de 1975. L’évolution temporelle de l'activité massique en 65 Zn de Gymnosarda unicolor, entre
1967 et 1974, illustre la décroissance de ce radionucléide dans la chair des poissons pélagiques
dès l'arrêt des essais atmosphériques sur barge (Fig. 179). La période de décroissance effective
calculée était de 362 jours, supérieure à la valeur de la période radioactive de 244 jours, révélant
des apports réguliers de 65 Zn durant cette période.
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 236

236 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

T ABLEAU 48.
Évolution, au cours du temps de l’activité massique moyenne (Bq.kg -1 frais) en 65Zn, dans les six principales
espèces de poissons pélagiques océaniques pêchées entre 1967 et 1974.
Les chiffres entre parenthèses indiquent le nombre de mesures supérieures aux limites de détection
qui ont été prises en compte pour le calcul de la moyenne annuelle.
65Zn (Bq.kg-1 frais)
Année
Thazard Albacore Germon Bonite Gymnosarde Patudo

1967 25 (29) 110 (79) 17 (18) 520 (92) 63 (12) -


1968 1 600 (20) 89 (133) 18 (55) 15 (436) 41 (99) 28 (20)
1969 20 (51) 16 (125) 7,2 (156) 5,7 (300) 18 (69) 2,8 (32)
1970 2,3 (21) 2,6 (44) 1,2 (48) 2,7 (244) 14 (55) 1,1 (29)
1971 1,8 (33) 3,0 (50) 1,0 (23) 2,2 (257) 2,7 (26) 1,1 (23)
1972 1,0 (26) 1,6 (86) 0,62 (21) 1,2 (127) 1,8 (29) 0,71 (15)
1973 0,62 (16) 0,51 (28) 0,47 (13) 0,57 (83) 0,66 (9) 0,46 (8)
1974 0,41 (5) 0,50 (2) - 0,68 (10) 0,93 (8) -

Bq.kg-1 frais
1000

100

10

1 F IG. 179. - Évolution de l’activité massique


(Bq.kg -1 frais) moyenne (incertitude à 2σ) en
65 Zn dans la chair des échantillons de

0,1 Gymnosarda unicolor pêchés de 1967 à


1966 1967 1968 1969 1970 1971 1972 1973 1974 1975 1974 en Polynésie française.

La distribution spatiale des résultats d'activité massique du 65Zn dans les poissons pélagiques
montre également une décroissance de l'activité massique, en fonction de la distance, entre les
zones de pêche et les sites d'expérimentations (Tableau 49). Néanmoins, lors des premières années
de la surveillance, des activités massiques atteignant quelques centaines de Bq.kg -1 frais ont été
occasionnellement mesurées sur des poissons appartenant à des espèces migratrices et pêchés
en dehors de la zone la plus proche des sites d'expérimentations.
Le mode de vie des poissons influence également les niveaux d'activité massique de la
chair des poissons pélagiques (Tableau 49). Ainsi, l'activité massique moyenne en 65 Zn s’avérait
nettement plus faible pour les espèces vivant en eaux profondes (germon et patudo) que pour les
espèces vivant dans les eaux de surface (thazard, bonite et gymnosarde). De même, les activités
massiques des thons de l’espèce albacore se trouvaient certainement influencées par les fluctuations
dans la composition de l'échantillon de cette population : mélange de jeunes individus pêchés à la
traîne en surface et d'adultes capturés en profondeur par des longues lignes (cf. Chapitre III).
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 237

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 237

T ABLEAU 49.
Activités massiques (Bq.kg -1 ) en 65 Zn dans la chair des différentes espèces de poissons pélagiques
pêchés entre 1967 et 1974 en fonction de l'éloignement des sites d'expérimentations.
Les distances correspondent aux zones au large de Mururoa et Fangataufa (< 100 km),
Tuamotu Centre - Sud Gambier (100-700 km), Tuamotu Nord - Tahiti - Australes Sud (700-1 300 km),
Marquises - Îles sous le Vent -Australes Nord (> 1 300 km).
Les chiffres entre parenthèses indiquent le nombre de résultats de mesure significatifs.

65Zn (Bq.kg-1 frais)


Distance des
sites (km) Thazard Albacore Germon Bonite Gymnosarde Patudo
Inférieure à 100 1 300 (26) 180 (51) 54 (14) 1 900 (24) 130 (64) 0,50 (2)
100 à 700 5,5 (119) 24 (140) 8,3 (40) 34 (102) 13 (236) 0,97 (23)
700 à 1 300 6,6 (50) 32 (281) 5,4 (224) 5,9 (1 386) 2,4 (7) 6,8 (89)
Supérieure à 1 300 6,4 (6) 11 (75) 3,8 (56) 26 (37) 11 (1) 7,0 (13)

Les autres radionucléides à vie courte, les plus fréquemment mesurés, sont les 57Co,
58 Co et 54Mn. Les valeurs étaient très dispersées avec des maxima apparaissant surtout dans les
années 1967 et 1968 (Tableau 50). Les autres radionucléides tels que les 95Zr, 131I, 140Ba,
141 Ce, 103 Ru, 110m Ag, 144 Ce et 106 Ru ont également été mesurés épisodiquement, principalement
entre 1967 et 1970.

T ABLEAU 50.
Évolution au cours du temps de l’activité massique maximale (Bq.kg -1 frais) en 57 Co, 58 Co, 60 Co et 54 Mn
dans les six principales espèces de poissons pélagiques océaniques pêchées entre 1967 et 1974.

Espèces Thazard Albacore Germon Bonite Gymnosarde Patudo


Lieux Mururoa Fangataufa Tahiti Mururoa Mururoa Marquises
Dates 1968 1967 1968 1967 1968 1968
57
Activités Co 1 800 290 8,4 8 400 1 200 -
58
maximales Co 180 240 - 2 700 440 8,1
60
Co 620 670 150 1 300 200 8,8
(Bq.kg-1 frais) 54
Mn 230 250 - 1 400 400 11

V.6.2.2 - RADIONUCLÉIDES DE PÉRIODE SUPÉRIEURE À 5 ANS

Parmi les radionucléides caractérisés par une période supérieure à 5 ans, le 60 Co et


principalement le 137 Cs ont régulièrement été quantifiés dans les poissons pélagiques. En effet,
le 137 Cs, par exemple, a été détecté dans la chair de 5 200 poissons océaniques péchés entre
1967 et 1993 dans la ZEE de Polynésie française (Tableaux 50 et 51).
L'analyse statistique montre que, pour cette période, 91 % des valeurs d'activité massique
étaient inférieures ou égales à 1 Bq.kg -1 frais, 8 % étaient comprises entre 1 et 5 Bq.kg -1 frais
et seulement 1 % étaient supérieures à 10 Bq.kg -1 frais.
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 238

238 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

T ABLEAU 51.
Évolution au cours du temps de l’activité massique moyenne (Bq.kg -1 frais) en 137 Cs
dans les six principales espèces de poissons pélagiques océaniques pêchées entre 1967 et 1993.
Les chiffres entre parenthèses indiquent le nombre de mesures supérieures
aux limites de détection prises en compte pour le calcul de la valeur annuelle.

137Cs (Bq.kg-1 frais)


Année
Thazard Albacore Germon Bonite Gymnosarde Patudo
1967 2,8 (17) 2,7 (56) 3,4 (9) 12,00 (22) 1,8 (10) - (-)
1968 3,7 (13) 3,2 (52) 1,8 (33) 1,20 (91) 9,2 (93) 1,1 (10)
1969 1,3 (23) 2,3 (29) 1,5 (39) 0,57 (30) 2,0 (58) 1,0 (8)
1970 0,68 (34) 0,61 (76) 0,54 (74) 0,61 (155) 2,4 (60) 0,48 (38)
1971 0,98 (41) 0,94 (61) 0,55 (49) 0,61 (242) 1,1 (48) 0,60 (57)
1972 0,72 (29) 0,69 (110) 0,46 (32) 0,66 (135) 0,81 (30) 0,69 (18)
1973 0,80 (44) 0,56 (102) 0,54 (61) 0,59 (198) 0,95 (27) 0,57 (22)
1974 0,85 (90) 0,54 (147) 0,51 (39) 0,58 (258) 1,1 (100) 0,70 (22)
1975 0,62 (58) 0,57 (49) 0,33 (9) 0,44 (41) 0,71 (39) 0,27 (10)
1976 0,72 (46) 0,49 (93) 0,45 (22) 0,62 (70) 0,79 (40) 0,40 (28)
1977 0,53 (60) 0,42 (112) 0,34 (13) 0,51 (70) 0,59 (23) 0,39 (7)
1978 0,63 (38) 0,42 (68) 0,30 (5) 0,46 (69) 0,73 (17) 0,37 (8)
1979 0,42 (43) 0,41 (62) 0,20 (10) 0,44 (50) 0,57 (31) 0,41 (4)
1980 0,42 (35) 0,24 (36) 0,19 (4) 0,41 (10) 0,52 (34) 0,31 (6)
1981 0,34 (24) 0,28 (23) 0,18 (10) 0,49 (8) 0,56 (6) 0,22 (8)
1982 0,31 (23) 0,24 (22) 0,15 (9) 0,56 (4) 0,37 (7) 0,31 (10)
1983 0,33 (38) 0,19 (27) 0,23 (11) - (-) 0,40 (16) 0,34 (2)
1984 0,40 (62) 0,29 (41) 0,21 (7) - (-) 0,61 (35) - (-)
1985 0,45 (12) 0,36 (10) 0,23 (6) 0,37 (1) 0,50 (20) - (-)
1986 0,33 (30) 0,27 (33) 0,16 (4) - (-) 0,51 (14) 0,33 (3)
1987 0,33 (39) 0,23 (20) 0,19 (8) - (-) 0,54 (25) 0,26 (2)
1988 0,36 (19) 0,30 (16) 0,29 (4) 0,20 (3) 0,48 (10) 0,44 (3)
1989 0,43 (33) 0,23 (15) 0,31 (1) 0,25 (19) 0,41 (14) 0,27 (1)
1990 0,39 (24) 0,26 (18) - (-) 0,33 (20) 0,21 (3) 0,07 (1)
1991 0,31 (24) 0,23 (12) 0,20 (3) 0,32 (9) 0,33 (16) 0,29 (3)
1992 0,36 (13) 0,32 (7) 0,39 (2) 0,37 (7) 0,60 (1) - (-)
1993 - (-) - (-) - (-) 0,50 (1) 0,40 (2) - (-)

Les activités massiques les plus élevées ont été observées entre 1967 et 1969 (Fig. 180).
De l'ordre d'une dizaine de Bq.kg -1 frais pour la gymnosarde et la bonite, elles ne dépassaient
pas 4 Bq.kg -1 frais pour les quatre autres espèces de poissons pélagiques. L’évolution au cours
du temps montre une décroissance rapide de l’activité moyenne annuelle, entre 1967 et 1974,
puis une diminution plus lente jusqu’à nos jours. Dès 1974, année de l’arrêt des essais atmo-
sphériques, l'activité massique en 137 Cs ne représentait plus que quelques dixièmes de Bq.kg -1
frais, valeur légèrement inférieure à celles mesurées dès 1996 dans la chair de thon de
l'Atlantique et de la Méditerranée, de 0,7 à 0,8 Bq.kg -1 frais.
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 239

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 239

Bq.kg-1 frais
10

F IG. 180. - Évolution de l'activité massique


(Bq.kg -1 ) moyenne (écart-type associé) en
137 Cs dans la chair des échantillons de
thons de l’espèce albacore pêchés, de 0,1
1967 à 1992, en Polynésie française. 1966 1970 1974 1978 1982 1986 1990

Comme pour le 65 Zn, les activités massiques moyennes en 137 Cs décroissaient avec
l'éloignement des sites de Mururoa et Fangataufa et étaient inférieures pour les espèces vivant en
profondeur, germon et patudo, par rapport à celles vivant en surface, bonite et gymnosarde
(Tableau 52).

T ABLEAU 52.
Activités massiques (Bq.kg -1 ) en 137 Cs dans la chair des différentes espèces de poissons pélagiques
pêchés entre 1967 et 1974 en fonction de l'éloignement des sites d'expérimentations.
Les distances correspondent aux zones au large de Mururoa et Fangataufa (< 100 km),
Tuamotu Centre - Sud Gambier (100-700 km), Tuamotu Nord - Tahiti - Australes Sud (700-1 300 km),
Marquises - Îles sous le Vent -Australes Nord (> 1 300 km).
Les chiffres entre parenthèses indiquent le nombre de résultats significatifs.

137Cs (Bq.kg-1 frais)


Distance des
sites (km) Thazard Albacore Germon Bonite Gymnosarde Patudo

Inférieure à 100 1,3 (88) 2,4 (100) 1,1 (38) 8,5 (27) 6,9 (155) 0,42 (18)

100 à 700 0,64 (509) 0,57 (346) 0,43 (94) 0,78 (169) 0,81 (500) 0,53 (77)

700 à 1 300 0,59 (129) 0,61 (599) 0,77 (242) 0,61 (1 256) 0,56 (40) 0,60 (98)

Supérieure à 1 300 0,47 (186) 0,56 (252) 0,58 (90) 0,63 (62) 0,47 (84) 0,48 (78)

V.6.2.3 - ISOTOPES DU PLUTONIUM

Les isotopes du plutonium ont très rarement été quantifiés dans la chair des poissons
pélagiques de haute mer. Les niveaux d’activité étaient pour la plupart inférieurs aux limites de
détection des techniques de mesure utilisées. Dans les années 1990, l’amélioration des techniques
d’analyse a permis d’atteindre le niveau des traces d’activité pour ces radionucléides.
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 240

240 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

Grâce à l’amélioration des limites de détection, des résultats significatifs ont été obtenus sur
un faible nombre d'échantillons, tous issus des poissons pêchés au large des atolls de Mururoa
et de Fangataufa (Tableau 53).
Le Fc du plutonium pour les poissons pélagiques polynésiens, calculé à partir des activités
des masses d'eau et des poissons prélevés simultanément, est de l'ordre de 50, proche de la
valeur générique préconisée par l'AIEA (100), démontrant la cohérence des données de surveillance.

T ABLEAU 53.
Activités massiques (Bq.kg -1 frais) minimale et maximale en 239+240 Pu dans la chair
des poissons pêchés, de 1990 à nos jours, à proximité des sites de Mururoa et Fangataufa.

239+240Pu (Bq.kg-1 frais)


Espèce
Nombre de Nombre total
Minimum Maximum
mesures significatives de mesures

Bonite 0,0022 0,0078 (3) (144)

Albacore 0,0020 0,0132 (3) (180)

Gymnosarde 0,0007 0,0133 (7) (80)

V.7 - CONCLUSION
La surveillance radiologique réalisée au début des années soixante sur différentes com-
posantes de l'environnement polynésien montre l'existence d’un bruit de fond significatif pour les
différents radionucléides d’origine artificielle provenant des retombées des essais nucléaires
réalisés dans l'atmosphère par les États-Unis, l'URSS et le Royaume-Uni, dont certains ont eu lieu
dans le Pacifique Sud. Par la suite, l'influence sur le territoire polynésien des retombées régionales
et mondiales des essais réalisés à partir de 1966 sur les atolls de Mururoa et Fangataufa s'est
essentiellement limitée à la période des essais atmosphériques. Ainsi, l'évolution au cours du
temps de la radioactivité des aérosols suit une tendance générale à la baisse de 1966 à 1975,
année où les niveaux redeviendront inférieurs à ceux du début des années soixante. Sur cette
tendance, se sont superposées des fluctuations annuelles marquées, résultant à la fois des
campagnes d'essais réalisées uniquement pendant l'hiver austral pour profiter de conditions
météorologiques favorables à la dispersion du nuage radioactif et de l'épuration rapide du milieu
atmosphérique pendant l’été austral. Les niveaux d'activité volumique des principaux radionucléides
dans l'atmosphère étaient comparables, ou inférieurs, à ceux observés dans l'hémisphère Nord,
en particulier sur le territoire métropolitain.

Cependant, suite aux essais Aldébaran, Rigel, Arcturus, Encelade, Phoebé et Centaure,
des retombées supérieures aux niveaux attendus ont été détectées dans l'atmosphère des îles
de Mangareva, Tureia et Tahiti. Ces détections déclenchèrent des contrôles radiologiques complé-
mentaires, avec des fréquences de prélèvement plus importantes des principaux constituants de la
chaîne alimentaire de l'île affectée par les retombées. De plus, dans chacun de ces cas, des calculs
de doses pour les populations concernées ont été réalisés au moment des retombées et ont fait
l’objet d’une réactualisation en 2005-2006 ; leurs résultats sont présentés dans le chapitre VI.
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 241

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 241

Les dépôts sur les sols des îles polynésiennes ont donc intégré, au cours du temps, les
retombées régionales et mondiales des radionucléides générés par les essais réalisés durant la
décennie 1950-1960, puis les retombées des essais français pour la période 1966-1974, en
particulier celles des 6 essais mentionnés précédemment, et enfin les retombées chinoises jusqu'en
1981. Néanmoins, par l'action conjointe du lessivage par les eaux de pluie des radionucléides
déposés sur les sols et de leur migration vers des horizons plus profonds, l'activité massique
des radionucléides présents dans les sols a décru plus rapidement au cours du temps que par
le simple fait de la décroissance radioactive de ces radionucléides. En conséquence, la contribution
de la composante tellurique des sols, en particulier des sols coralliens, au débit de dose ambiant
des îles est généralement faible et inférieure à celle de la majorité des sols métropolitains et ce,
en raison des niveaux d'activité très bas de certains radionucléides appartenant aux séries
naturelles de l'uranium et du thorium.

L'évolution au cours du temps de l'activité massique des végétaux montre que les niveaux
les plus élevés ont été mesurés pendant la période des essais atmosphériques. Les fluctuations
observées pour cette période correspondaient aux apports par dépôts directs, secs ou humides,
sur les plantes en fonction de l'intensité des retombées. Les 6 essais déjà évoqués ont conduit
à des niveaux d'activité massique plus élevés dans les végétaux des atolls concernés. Pour cette
période, les niveaux en 137 Cs du coprah des noix de coco collectées sur les différents archipels
polynésiens permettent de cartographier la répartition spatiale de l’activité des végétaux. Celle-ci
est globalement en accord avec les prévisions attendues à partir du choix des conditions météo-
rologiques retenues pour réaliser les essais. L'atoll inhabité de Maria, situé sur l'axe de dispersion
attendu du nuage à l'ouest des sites d'expérimentations, présentait les niveaux d'activité les plus
élevés. Les îles de l'archipel des Marquises, situées au Nord du territoire polynésien, affichaient
les niveaux les plus faibles, caractéristiques des retombées mondiales des essais atmosphériques
réalisés par l'ensemble des pays détenteurs d’armes nucléaires. Au nord de cet axe, les îles des
Tuamotu Sud-Est, de Tureia à Reao, ainsi que celles du groupe Actéon montraient les niveaux
sensiblement plus élevés que ceux des autres atolls polynésiens. À partir de 1975, l'évolution
pour l’ensemble des archipels s'est inscrite dans une tendance à la baisse qui était fonction des
périodes radioactives des radionucléides. Ceux à vie courte ont disparu rapidement. Pour les
radionucléides comme le 137Cs, de période de 30 ans, le sol a joué le rôle d'un réservoir à partir
duquel, par transferts racinaires, les végétaux étaient contaminés. Aujourd'hui, les niveaux de ces
radionucléides dans les végétaux sont à l’état de traces pour l'ensemble des îles polynésiennes. Les
différentes productions agricoles, en particulier le lait recueilli à Tahiti, ont fait l'objet d'une sur-
veillance radiologique continue dès 1964. Les radionucléides à vie courte, comme les isotopes de
l'iode, ont été mesurés pendant les campagnes d’essais atmosphériques, en particulier suite à
l'essai Centaure. L'évolution au cours du temps des éléments comme le 137 Cs a suivi une
décroissance de période effective de l'ordre de 13 ans jusqu’au début des années 90. Depuis,
la persistance de ce radionucléide dans le sol des pâturages à des très faibles niveaux dans les
sols et l’existence de Fc plus élevés pour les graminées fourragères dont se nourrissent les
vaches explique une décroissance plus lente d’environ 30 ans proche de celle de la période
radioactive.

En domaine marin, de l'arrêt des essais atmosphériques à nos jours, un gradient décroissant
de l'activité volumique entre les eaux de mer sortant par les passes du lagon jusqu’à une dizaine
de milles des atolls de Mururoa et Fangataufa a été mis en évidence pour les radionucléides
caractérisés par des périodes moyennes et longues, notamment le 239+240Pu. En dehors de cette
zone, la radioactivité ajoutée par les eaux des lagons des deux atolls n’était pas perceptible dans
Chap. 5VF-06.12.06:chapitre 5 12/01/07 14:10 Page 242

242 ÉVOLUTION DE LA RADIOACTIVITÉ EN POLYNÉSIE FRANÇAISE

les eaux océaniques polynésiennes. Dès lors, les activités volumiques des radionucléides d'origine
artificielle présents dans les eaux océaniques de Polynésie ne se distinguaient pas des niveaux
des eaux du Pacifique Sud qui se situaient parmi les plus basses de la planète.

Comme pour le plancton, les activités massiques les plus élevées concernant les grands
poissons pélagiques ont été mesurées dans des poissons pêchés entre 1967 et 1968, à proximité
des sites d'expérimentations. Par la suite, l'activité massique a rapidement diminué pour l'ensemble
des espèces surveillées. Le 65 Zn ainsi que les autres radionucléides à vie courte ont disparu
dès la fin des essais atmosphériques ; le 137 Cs s’est stabilisé à un niveau très bas, équivalent à
celui mesuré dans les poissons pêchés dans les autres océans. Des différences entre les
espèces ont été mises en évidence en rapport avec leur mode de vie : d'une part, une activité
massique moyenne en 239+240Pu plus faible pour les poissons vivant en profondeur que pour ceux
vivant dans les eaux de surface ; d'autre part, une extension spatiale apparente plus importante
des mêmes niveaux d’activités en plutonium chez les espèces migratrices par rapport aux espèces
sédentaires. Les facteurs de concentration associés aux différents radionucléides mesurés sur les
espèces polynésiennes et calculés à partir des résultats issus de la surveillance radiologique
ont conduit à des valeurs inférieures aux valeurs génériques préconisées par l'AIEA pour le calcul
du transfert de ces radionucléides aux organismes marins à partir de l’eau de mer.

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CHAPITRE VI

Protection des travailleurs


et des populations
La protection des travailleurs du CEP ainsi que la protection des populations ont fait l’objet
d’attentions et d’améliorations constantes, tout au long de la période des essais nucléaires. Les
consignes de radioprotection définies par la Commission consultative de sécurité (CCS) avaient
pour objet de faire respecter la réglementation applicable à l’époque des essais.
Avant chaque essai, en particulier pendant la période initiale des essais atmosphériques,
des moyens importants étaient mis en œuvre pour prévoir :

• la situation météorologique, au moment de l’explosion et durant les heures et les jours suivant
l’essai ;
• la localisation et l’intensité des retombées radioactives, afin de s’assurer qu’elles ne puissent ni
exposer les travailleurs des sites d’expérimentations et les populations au-delà des limites
réglementaires, ni provoquer de retombées directes sur les îles habitées.

Les bilans des doses reçues tant par le personnel que par les populations sont présentés
dans ce chapitre, en particulier le bilan des doses délivrées aux populations par six essais dont
les retombées proches ont touché des îles habitées. En effet, malgré toutes les conditions et
contraintes imposées pour la réalisation d’un essai qui entraînaient fréquemment son report, des
évolutions imprévues de la situation météorologique ont entraîné des retombées vers des zones habitées.

VI.1 - DÉFINITION DES UNITÉS DE DOSES


La dose absorbée est une grandeur physique directe qui exprime la quantité d’énergie
cédée à la matière par un rayonnement donné. L’unité employée est le gray (Gy). Elle est notée
D T.R et exprime la dose délivrée à un tissu T par un rayonnement R.
Les différents types de rayonnements n’ont pas, à dose absorbée égale, le même effet sur
la matière vivante : tissu ou organe. Pour en tenir compte, un facteur de pondération (W R ) est
associé à chaque type de rayonnements pour établir la dose équivalente pour un organe ou un
tissu donné. Le facteur W R est égal à 1 pour les rayonnements gamma et X et, à 20 pour le rayon-
nement alpha. La dose équivalente est notée H T et sa valeur est donnée par H T =D T.R .W R . L’unité
employée est le sievert (Sv). Les différents types de tissus et organes ne présentant pas le même
niveau de radiosensibilité, un facteur de pondération tissulaire (W T ) est introduit. Sa valeur est de
0,2 pour les gonades, de 0,12 pour la moelle osseuse et de 0,05 pour la thyroïde. Son utilisation
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246 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

permet de définir la dose efficace qui prend en compte l’ensemble des tissus et organes de l’or-
ganisme. Celle-ci est notée E et sa valeur est donnée par la formule : E = Σ H T .W T . L’unité
employée est également le sievert. La dose efficace, destinée à exprimer un niveau de risque en
termes généraux, est le plus souvent employée et couramment exprimée sous le terme de «dose».
Dans le cas particulier de l’incorporation de radionucléides dans l’organisme, l’exposition
est conditionnée par la décroissance radioactive du radionucléide et par son temps de séjour
dans l’organisme (période biologique cf. Annexe 1). Pour tenir compte de cet aspect temporel, un
calcul «d’engagement» de la dose sur la durée de l’exposition est effectué. Cette période est très
variable selon les radionucléides, de quelques heures à plusieurs dizaines d’années. Par
exemple, l’iode-131 a une période radioactive de 8 jours et une période biologique de 80 jours
alors que le plutonium-239 à une période radioactive de 24 000 ans et une période biologique de
20 ans dans le foie et de 50 ans dans l’os. Par convention, le calcul de l’engagement de dose
(dose engagée) est fait, sauf cas particulier, sur 50 ans pour les adultes et sur 70 ans pour les
enfants. Le calcul de dose engagée peut s’exprimer en termes soit de dose équivalente si l’on
considère un organe «cible», soit de dose efficace si l’on prend en considération l’ensemble de
l’organisme. Les doses sont calculées généralement en fonction de six classes d’âges : cinq
classes pour les enfants et une pour les adultes.
Dans le cas de la thyroïde, dans la mesure où la plus grande part de l’exposition de cet
organe est liée aux iodes radioactifs qui ont pour elle une affinité sélective, il est usuel d’utiliser
le terme de dose équivalente à l’organe. Par ailleurs, la plus grande radiosensibilité de cet organe
chez les enfants nécessite de tenir compte de l’âge des personnes au moment de l’exposition.

VI. 2 - RÉGLEMENTATION RELATIVE À LA RADIOPROTECTION


En juillet 1966, le décret n°66-450 du 20 juin 1966 relatif aux principes généraux de
protection contre les rayonnements ionisants venait d’entrer en vigueur. Par la suite, il a été complété
par le décret 67-228 du 15 mars 1967 portant règlement d’administration publique relatif à la
protection des travailleurs contre les dangers des rayonnements ionisants. Ces décrets avaient été
établis sur la base des directives européennes des 2 février 1959, 5 mars 1962 et 27 octobre 1966.

Ces décrets fixaient les équivalents de dose maximaux admissibles pour les travailleurs
directement affectés à des travaux sous rayonnements suivant la terminologie de l’époque,
comme suit :

• une dose cumulée de 50 (N-18) mSv, à un âge donné N, exprimé en années, pour l’organisme
entier, les organes hématopoïétiques et les gonades ;
• 80 mSv sur une période de trois mois et 300 mSv sur une année, pour la peau, les tissus
osseux (sauf mains, avant-bras, pieds et chevilles) ;
• 40 mSv sur une période de trois mois et 150 mSv sur une année, pour les autres organes
et tissus internes ;
• 600 mSv sur une année pour les mains, avant-bras, pieds et chevilles.

Pour le personnel, des expositions externes exceptionnelles et concertées étaient permises,


délivrées en une ou plusieurs fois sur une même opération, avec une limite de dose à l’organisme
entier de 120 mSv à ne pas dépasser.

Ces décrets indiquaient les équivalents de dose maximaux admissibles sur un an pour les
travailleurs non directement affectés à des travaux sous rayonnements, comme suit :
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 247

• 15 mSv pour l’organisme entier, les organes hématopoïétiques et les gonades ;


• 15 mSv, pour les autres organes et tissus internes ;
• 30 mSv pour la peau et les tissus osseux ;
• 60 mSv pour les mains, avant-bras, pieds et chevilles.

Ils fixaient les équivalents de dose maximaux admissibles sur une année pour les personnes
du public, comme suit :

• 5 mSv pour l’organisme entier, les organes hématopoïétiques et les gonades ;


• 15 mSv pour les autres organes et tissus internes.

À la suite de la directive européenne du 15 juillet 1980, portant modification des directives


fixant les normes de base relatives à la protection sanitaire de la population et des travailleurs
contre les dangers résultant des rayonnements ionisants, le décret 86-1103 du 2 octobre 1986
relatif à la protection des travailleurs contre les dangers des rayonnements ionisants a porté
modification des équivalents de dose maximaux admissibles sur 12 mois consécutifs :

• 50 mSv pour la dose en profondeur (organisme entier) ;


• 500 mSv pour la peau, les mains, les avant-bras et les chevilles ;
• 150 mSv pour le cristallin.

Ces doses maximales admissibles étaient applicables au personnel affecté à des travaux sous
rayonnements ionisants.
Pour les personnes du public et les travailleurs non affectés à des travaux sous rayonnements
ionisants, les doses «en profondeur», c'est-à-dire les doses délivrées à l’organisme entier étaient
limitées à 5 mSv.
C’est à la suite de la transposition en droit français de la directive européenne 96/29 du
13 mai 1996, que les décrets 2002-460 du 4 avril 2002 relatif à la protection générale des personnes
contre les dangers des rayonnements ionisants et 2003-296 du 31 mars 2003 relatif à la protection
des travailleurs contre les dangers des rayonnements ionisants limitent les doses à l’organisme
entier appelées «doses efficaces» à 20 mSv sur 12 mois consécutifs pour les travailleurs et à
1 mSv par an pour le public.

VI.2.1 - CONCENTRATIONS MAXIMALES ADMISSIBLES

Le décret 66-460 du 20 juin 1966 définissait, dans son article 15, les concentrations
maximales admissibles dans l’air et dans l’eau de boisson, notées CMA air et CMA eau . La CMA air
était, pour un radionucléide donné, l’activité volumique pour laquelle une inhalation continue
durant une année entraînait une dose égale à la limite annuelle admise soit pour l’organisme entier
soit pour l’un des organes critiques. La CMA eau était, pour un radionucléide donné, l’activité volu-
mique pour laquelle une ingestion de 1,1 litre d’eau par jour durant une année entraînait une dose
égale à la limite annuelle admise soit pour l’organisme entier soit pour l’un des organes critiques.
La CMA pour les travailleurs d’un mélange inconnu de radionucléides était fixée par précaution
à 7,4 mBq.m -3 pour l’air et 3 700 Bq.m -3 pour l’eau. Lorsque la composition du mélange était
connue, il était possible de calculer une CMA spécifique du mélange en faisant la somme des
CMA de chaque radionucléide pondérée par leur activité volumique respective. Il est à noter que
pour les personnes du public, il est explicitement indiqué que les CMA sont égales au dixième de
celles appliquées pour les travailleurs.
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248 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

La CMA représentait essentiellement une «valeur dérivée opérationnelle» en repère des


résultats de mesure. Le dépassement d’une CMA était autorisé par la réglementation qui précisait
que «l’inhalation ou l’ingestion en une fois de la quantité de radioéléments qui serait inhalée ou
ingérée lors d’une exposition continue durant 3 mois consécutifs est permise, mais doit être évitée
dans la mesure du possible».

VI.2.2 - CAS PARTICULIER DE LA THYROÏDE


De 1966 à 1974, période des essais atmosphériques, les limites de doses précisées dans le
décret 66-450 ont été appliquées. Ce décret, conforté par la directive européenne du 27 octobre
1966, fixait les normes de base en radioprotection en limitant à 15 mSv la dose annuelle à la thyroïde
pour le public et à 150 mSv pour les travailleurs.
Par la suite, la directive européenne en date du 15 juillet 1980, portant modification des
directives fixant les normes de base relatives à la protection sanitaire de la population et des
travailleurs contre les dangers des rayonnements ionisants a établi une limite annuelle de dose à
la thyroïde de 50 mSv, applicable tant en situation normale qu’en situation accidentelle. Ces principes
n’ont pas été repris dans la réglementation française. La notion de limite annuelle de dose à la
thyroïde a ensuite disparu de la réglementation tant française qu’européenne au profit de la limitation
annuelle de la dose efficace.
C’est en 1984 que la CIPR a défini des niveaux d’intervention associés à des situations
accidentelles ou exceptionnelles concernant les doses à la thyroïde. Des niveaux dérivés ont
ensuite été établis dans des documents publiés par l’AIEA et l’OMS. Il s’agit cependant de valeurs
de référence, appelées niveaux d’intervention, qui permettent d’aider les autorités dans la prise
de décision des mesures à prendre pour protéger les populations en cas d’exposition ou de
risque d’exposition. Il est important de souligner que les niveaux d’intervention sont des valeurs
guides destinées aux gestionnaires d’une situation de crise dans la mise en œuvre de mesures
palliatives et non de limites annuelles de dose. Ces niveaux d’intervention variaient de 50 mGy à
5 Gy, selon les contre-mesures appliquées et les risques entraînés par la mise en place de ces
mesures palliatives (CIPR 40).

VI.3 - ORGANISATION DE LA RADIOPROTECTION


Afin de mener à bien les essais, les responsabilités respectives du ministère de la Défense
et celles du CEA étaient clairement définies :

• Le ministère de la Défense avait la responsabilité globale des opérations et, notamment, du


respect des règles de sécurité sur les sites d’expérimentations.
• Le CEA était responsable de l’ensemble des programmes scientifiques, c’est-à-dire de la
conception de l’engin à expérimenter, de la réalisation technique de l’essai, des mesures
associées et de leur exploitation.

Pour réaliser les essais nucléaires, le ministère de la Défense avait mis en place un
organisme chargé de la conduite des essais : le Groupement opérationnel des expérimentations
nucléaires (Goen). Il s’agissait d’une structure temporaire, limitée à la durée des campagnes. Pour
le Centre d’expérimentation du Pacifique, il revenait au général commandant le Goen de décider
de l’heure à laquelle devait avoir lieu l’explosion de l’engin et de décider de sa réalisation, en
fonction des conditions locales. Il lui appartenait également de donner l’ordre d’évacuation des
sites avant chaque essai atmosphérique, d’assurer la gestion des mouvements d’avions et de
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 249

navires autour des atolls, de superviser les contrôles radiologiques après l’essai et d’autoriser
ensuite le retour des équipes sur les atolls (cf. Annexe 4).
Depuis 1958, les activités du CEA liées à la défense nationale relèvent de la Direction des
applications militaires (DAM). En son sein, la Direction des essais (DE) prenait en charge les
installations spécifiques aux expérimentations nucléaires (ouvrages pour les appareillages de
mesures, nacelles de support d’engins, ballons…), ainsi que toutes les dispositions relatives en
matière radioprotection à proximité de la zone d’essai appelée aussi point zéro, et lors de la mise en
œuvre de l’engin. C’est également à la Direction des essais que revenaient la définition, l’acquisition
et le dépouillement des résultats des mesures neutroniques, radiologiques, radiochimiques,
optiques et sismiques.
Le 30 janvier 1964, la Direction des centres d’expérimentations nucléaires (Dircen) a été
créée afin de coordonner les actions du ministère de la Défense et du CEA. C’était un organisme
mixte Armées-CEA, dirigé par un officier général relevant directement du ministre de la Défense.
Elle était chargée de la conception, de l’organisation, de la construction et du fonctionnement du
CEP, ainsi que de la préparation et de l’exécution des essais. Deux services chargés de la sécurité
regroupant des spécialistes du CEA et de la Défense lui étaient rattachés :

• Le SMSR, Service mixte de sécurité radiologique, était chargé de la dosimétrie externe du


personnel, du suivi de la dosimétrie d’ambiance, des investigations de terrain, des mesures
fournies par les postes de mesures radiologiques (PCR) et de la dosimétrie de zone. Ce service
avait également pour mission la mise en oeuvre des moyens, la définition et l'application des
dispositions à prendre pour respecter la réglementation en matière de radioprotection pour
l’ensemble du personnel de la Défense, du CEA et des entreprises sous-traitantes.
• Le SMCB, Service mixte de contrôle biologique, avait pour mission le contrôle radiologique
des différentes composantes de la biosphère : milieux terrestre et marin et des différents produits
entrant dans la ration alimentaire des populations des cinq archipels.

Le SMSR et le SMCB ont fusionné en 1994, pour former le Service mixte de sécurité
radiologique et biologique de l’homme et de l’environnement (SMSRB).

VI.4 - ORGANISATION DE LA MÉDECINE DU TRAVAIL SUR SITE


La diversité des métiers exercés sur les sites d’expérimentations couvrait un large éventail de
compétences et, compte tenu des contraintes spécifiques à chaque organisme de tutelle, la
médecine du travail y était du ressort d’un service médical propre au CEA pour le personnel CEA et
d’un service médical militaire pour le personnel du ministère de la Défense. La réglementation et
la législation du travail concernant la radioprotection étaient strictement appliquées par les deux
organismes. À poste de travail équivalent, la surveillance médicale était la même pour tout le
personnel, qu’il dépende du ministère de la Défense, du CEA, des entreprises sous-traitantes locales
ou métropolitaines.

VI.4.1 - PERSONNEL DU CEA


Le CEA disposait au CEP, comme dans tous ses centres, d'une structure dédiée à la
médecine du travail très orientée, par vocation, vers la surveillance radiologique. Les Services de
médecine du travail (SMT) étaient dirigés par des médecins, spécialistes chargés, à partir des
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250 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

fiches de poste et de nuisance renseignées par l’employeur, de vérifier l’aptitude du personnel au


poste de travail et, en particulier, celle à pouvoir travailler sous rayonnements ionisants. Les médecins
assuraient la surveillance de l’exposition et, surtout, recherchaient une éventuelle exposition interne
qui, si elle était avérée, était évaluée et traitée. Le SMT disposait de l’appui technique des
Laboratoires d’analyses médicales (Lam), dirigés par des pharmaciens biologistes. Ces laboratoires
étaient chargés des analyses sanguines, des analyses radiochimiques et des anthropogammamétries,
dont le but est de déterminer le spectre des radionucléides présents dans un organisme humain
pour détecter et quantifier une éventuelle exposition interne. Une coopération étroite existait avec
le Lam du centre métropolitain CEA/DAM de Bruyères-le-Châtel, qui effectuait toutes les analyses
du personnel, avant le départ vers les sites d'expérimentations et avec le Service de santé des
Armées (SSA) qui effectuait les analyses sur sites. Un renfort de personnel du Lam a été mis en
place à Mahina (Tahiti) pour la durée de chaque campagne d’essais atmosphériques et à Mururoa
pendant les essais souterrains.

VI.4.2 - PERSONNEL DU MINISTÈRE DE LA DÉFENSE


Ce sont des médecins du Service de santé des armées (SSA) qui assuraient la charge de la
médecine du travail. Ils s’appuyaient sur un laboratoire d’analyses médicales (Lam) ainsi que sur un
laboratoire de radiobiologie (LRB) qui effectuait les analyses radiochimiques, ainsi que les anthropo-
gammamétries. Durant la période des essais atmosphériques, outre le LRB implanté auprès de
l’hôpital Jean Prince à Papeete, des structures mobiles étaient positionnées à la demande, soit à
bord de bâtiments de la Marine Nationale, soit sur des atolls. Durant la période des essais souterrains,
ces installations ont été implantées à terre, à l’Infirmerie-hôpital des sites (IHS) de Mururoa. Le
Service de santé des Armées mettait en oeuvre les Postes de décontamination fine (PDF), où
étaient effectués des soins spécifiques (décontamination de la peau ou des blessures), en cas
d’incident ou d’accident à caractère radiologique. Pendant les essais atmosphériques, les PDF
étaient installés sur les bâtiments de la Marine Nationale et à Hao, puis à Mururoa pendant les essais
souterrains.

VI.4.3 - PERSONNEL DES ENTREPRISES SOUS-TRAITANTES


Concernant les entreprises métropolitaines intervenant pour le compte du CEA, un service
spécialisé, dépendant de l’Association des centres médico-sociaux (ACMS), avait été créé pour
couvrir le cadre spécifique des essais nucléaires : le Service de protection des entreprises (SPE).
Dès le début des essais, par accord entre le SPE et le SMT de la Direction des essais, ce dernier
disposait d’installations et d’une permanence médicale, à Tahiti, puis à Mururoa, pour assurer le
suivi du personnel en mission. Après 1989, la réglementation ayant évolué, le suivi du personnel
des entreprises devait être assuré par leurs propres médecins du travail. Le suivi du Personnel de
recrutement local (PRL), dépendant directement de la Défense, du CEA, ou des entreprises sous-
traitantes travaillant pour ces deux organismes, suivait les mêmes règles que celles appliquées
au personnel métropolitain. En fonction de son appartenance, le personnel était suivi soit par le
Centre interarmées de médecine et de prévention (CIMP), soit par le SMT de la Direction des
essais du CEA.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 251

VI.4.4 - ACCIDENTS DU TRAVAIL

La protection des travailleurs et de la population est le principal objet de ce chapitre.


Cependant, si aucun accident n’a entraîné d’exposition aux rayonnements ionisants ayant eu des
effets déterministes, c’est-à-dire létaux ou durablement handicapants, les activités du CEP ont été
accompagnées, comme dans toutes les entreprises industrielles et grands chantiers, par des acci-
dents du travail. Certains d’entre eux ont entraîné le décès de personne du CEA, des Armées et des
sociétés sous-traitantes :

• septembre 1965 : sur la base de Hao dans le cadre d’un chantier de travaux publics, une
explosion a provoqué la mort de 3 employés de la société Dumez-Citra ;
• janvier 1970 : sur la base de Hao, l’explosion d’une citerne de carburant a entraîné le décès
de 7 personnes dont 2 personnels militaires ;
• juin 1972 : le crash d’un Boeing KC135 au décollage de la base de Hao pour une mission
d’observation à la suite de l’essai Titania a entraîné le décès de 6 personnes de la Défense ;
• juillet 1979 : au cours d’une opération d’assainissement de la cuve d’expérimentation Meknès
sur l’atoll de Mururoa, une explosion a provoqué le décès de deux personnes du CEA ;
• en 1980 et 1985 : sur l’atoll de Mururoa, deux personnes du CEA sont décédées à la suite
d’accidents mettant en cause des véhicules de transport et de levage.

VI.5 - SURVEILLANCE DU PERSONNEL

VI.5.1 - EXPOSITION EXTERNE


Le suivi dosimétrique des travailleurs du CEP susceptibles d’être exposés était effectué à
partir de la mesure de la dose individuelle et du contrôle des niveaux d’irradiation des zones où
évoluait le personnel. Durant la période des essais atmosphériques, des dosimètres photographiques
étaient utilisés pour effectuer la dosimétrie individuelle réglementaire du personnel. Compte tenu
des techniques de mesure, les seuils d’enregistrement des doses étaient fixés à 0,2 mSv, les
doses inférieures à ce seuil étant considérées comme nulles. Pendant la dernière décennie des
essais souterrains, le dosimètre photographique a été remplacé par des dosimètres thermo
luminescents pour les personnels de catégorie B susceptibles d’être les moins exposés parmi les
personnels surveillés.
D’autres moyens de mesure à caractère opérationnel, comme le stylo électromètre (stylo-
dosimètre) et le débitmètre intégrateur, ont été utilisés pour permettre un accès plus rapide à la
dose reçue. Ils avaient un rôle d’alerte et de redondance de la mesure. Au moment d’un essai
atmosphérique et pour toutes les missions qui pouvaient entraîner un risque d’exposition, trois
moyens dosimétriques pouvaient être simultanément mis en œuvre : le dosimètre photographique
réglementaire, le dosimètre thermoluminescent et le stylo électromètre.

Un dosimètre photographique est constitué d’un film de type photographique dont la


mesure du noircissement permet d’estimer la dose reçue. Une partie du film protégée par plusieurs
écrans permet de différencier les expositions dues aux différents types de rayonnements (X, bêta
et gamma).
Un dosimètre thermoluminescent permet de déterminer la dose à partir de la mesure
des interactions du rayonnement avec un matériau ayant des propriétés thermoluminescentes,
comme le fluorure de calcium (CaF 2 ), le sulfate de calcium (CaSO 4 ) dopé au dysprosium ou le
Chap. 6aVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 11:59 Page 252

252 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

fluorure de lithium (LiF). L’action d’un rayonnement sur un cristal thermoluminescent se fait
essentiellement par des particules chargées existantes ou créées lors de l’interaction des atomes
du cristal avec un rayonnement gamma, X ou neutron. L’énergie des particules chargées est
transférée à des électrons qui sont libérés et piégés par les impuretés situées dans la bande de
conduction du cristal. Une augmentation de la température du cristal provoque la libération des
électrons et l’émission d’un photon lumineux, mais provoque la perte de la trace de l’interaction
entre le rayonnement et le cristal. Cette émission de lumière est proportionnelle à l’intensité du
rayonnement interagissant avec le cristal.
Les dosimètres électromètres, ou stylos-dosimètres, ont un fonctionnement particulière-
ment simple. Ils sont composés de deux électrodes chargées, se rapprochant lorsqu’elles se déchar-
gent lors de l’ionisation de l’air due au rayonnement ambiant.
Les équipages des avions appelés Vautour assurant les missions de pénétration pilotée
disposaient d’un équipement individuel de protection, avec masque et adduction d’air et d’oxygène
ainsi que d’un film dosimètre et de stylos-dosimètres. Les avions étaient également équipés de
débitmètres portatifs et de débitmètres-dosimètres de type DUK-DUR 304.
Par ailleurs, les mesures environnementales d’irradiation complétaient ce dispositif.

Avion Vautour équipé des sytèmes


de prélèvement d’échantillons
d’aérosols.

Contrôle radiologique de
l’équipage d’un avion Vautour
après une mission de prélèvement
d’échantillons d’aérosols
dans le nuage radioactif.
Chap. 6aVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 11:59 Page 253

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 253

VI.5.1.1 - ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

Entre 1966 et 1974, 52 750 personnes, quels que soient leur appartenance, leur fonction,
leur risque d’exposition, leur durée de séjour et leur lieu d'affectation ont bénéficié d’une surveillance
dosimétrique. L’analyse des résultats de la surveillance de ces travailleurs montre que seuls 3 425
d’entre eux ont été exposés lors d’opérations particulières, listées ci-après en fonction des missions
respectives du personnel du CEA, du ministère de la Défense et des entreprises sous-traitantes.

Personnel du CEA

• la mise en oeuvre des engins expérimentaux, du montage de l’engin à sa mise en place sur
son support (barge puis ballon) ;
• les opérations de reconnaissance radiologique des sites ;
• la récupération des enregistrements dans la zone de l’essai ;
• l’assainissement des zones d’essais ;
• la récupération des prélèvements réalisés par l’envoi de fusées ;
• le traitement à Hao des échantillons radioactifs prélevés dans le nuage.

Personnel du ministère de la Défense

• les missions de pénétration pilotée et de poursuite du nuage ;


• les missions d’écoute des réseaux de bouées radiologiques ;
• les investigations et prélèvements dans la zone des retombées proches ;
• le repérage et le chalutage des têtes de fusées tirées dans le nuage ;
• la réception des missions aéroportées ;
• la décontamination des matériels.

L’histogramme de la répartition des doses annuelles calendaires individuelles mesurées


pendant la période des essais atmosphériques montre que la plus grande partie du personnel a
reçu des doses inférieures au seuil d’enregistrement (0,2 mSv). Des doses annuelles supérieures
à 5 mSv ont été enregistrées dans
291 cas. Le dépassement de la
Nombre de doses
limite réglementaire annuelle de
52 231
dose (50 mSv) est constaté dans 3
cas (Fig. 181).
Le personnel médical sus-
ceptible d’être exposé au rayonne-
ment X à l'occasion d'actes de
radiologie, faisait également l’objet
d’un suivi dosimétrique externe, 2 701 1 303 234 42 12 3
conformément à la réglementation.
Cette statistique ne prend pas en
< 0,2 1à5 5 à 15 15 à 30 30 à 50 50 à 200
compte les doses reçues par cette 0,2 à 1
mSv
catégorie de personnel.
F IG. 181. - Histogramme du nombre de doses annuelles indivi-
duelles par année calendaire pendant la période des essais atmo-
sphériques, hors personnel médical et irradiations médicales
(1966-1974).
Chap. 6aVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 11:59 Page 254

254 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

Deux des trois cas observés dans la T ABLEAU 54.


classe allant de 50 à 200 mSv, correspondent Doses individuelles maximales supérieures
à des doses de 120 et 180 mSv reçues par à 30 mSv reçues par les équipages des avions
l’équipage de l’avion effectuant la pénétration au cours des opérations de pénétration pilotée.
pilotée dans le nuage radioactif suite à l’essai
Aldébaran, en 1966. Le troisième cas, corres- Dose reçue Dose reçue
Année Année en mSv
pondant à une dose de 60 mSv, concerne un en mSv
membre du personnel basé à Tahiti. Les expo- 1966 180 1971 34
sitions les plus fortes ont été délivrées aux 1966 120 1971 33
équipages des avions Vautour chargés des 1966 35 1971 32
pénétrations pilotées destinées à effectuer des 1966 34 1971 31
prélèvements d’aérosols atmosphériques au 1967 32,5 1971 31,5
cours de vols au travers ou à proximité du 1971 34
nuage radioactif. Ces prélèvements étaient
effectués, soit en pénétrant le nuage afin de
recueillir le dépôt des aérosols sur des filtres montés sur l’avion, soit en tirant des fusées, de
type Matra munies de filtres, à travers le nuage. Les doses individuelles supérieures à 30 mSv
reçues par les équipages au cours de ces opérations sont rassemblées dans le tableau 54. Après
1971, toutes les doses reçues par les équipages des pénétrations pilotées ont été inférieures à
30 mSv. En 1972, les deux doses les plus élevées étaient égales à 29 et 23 mSv ; en 1973 elles
étaient égales à 19 et 18,6 mSv et en 1974 égales à 19,8 et 19,2 mSv.

VI.5.1.2 - ESSAIS SOUTERRAINS

Entre 1975 et 1996, plus de 5 200 travailleurs ont fait l’objet d’une surveillance dosimé-
trique, fonction de leur affectation et de leur période de présence sur site. Les risques d’exposi-
tion externe étaient limités et seul le personnel effectuant les opérations spécifiques suivantes était
susceptible d’être exposé :

• montage des engins nucléaires à tester ;


• exécution des post-forages après les essais ;
• traitement des échantillons de lave issus des cavités ;
• décontamination des instruments de forage.

L’histogramme de la répartition des doses annuelles individuelles pendant la période des


essais souterrains (Fig. 182) montre que la plus grande partie du personnel a été exposée à une
dose annuelle inférieure au seuil d’enregistrement (0,2 mSv). Il indique également que 2 124
doses annuelles étaient supérieures
à 0,2 mSv, dont 10 doses com-
Nombre de doses
prises entre 5 et 15 mSv et une
seule dose annuelle individuelle 11 525

comprises entre 15 et 30 mSv.

F IG. 182. - Histogramme du nombre de 1 788


325
doses annuelles individuelles par année
10 1 0 0
calendaire, pendant la période des
essais souterrains, hors personnel médical < 0,2 0,2 à 1 1à5 5 à 15 15 à 30 30 à 50 50 à 200
et hors irradiation médicale (1975-1996). mSv
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 255

Cette statistique ne prend pas en compte les doses reçues par le personnel médical et
celles reçues pour des raisons médicales par les travailleurs. Les doses reçues par le personnel
médical à l’occasion d’actes de radiologie étaient suivies conformément à la réglementation. Les
doses dues à l’irradiation naturelle et aux actes de radiologie diagnostiques ou thérapeutiques
ne sont pas prises en compte dans la limitation annuelle des doses, que ce soit pour les travailleurs
ou pour le public.

VI.5.2 - EXPOSITION INTERNE

Pendant toute la période des essais nucléaires, la recherche d’une éventuelle exposition
interne consécutive à l’inhalation ou à l’ingestion d’éléments radioactifs s’est appuyée sur les résultats
des investigations suivantes :

• les mesures anthropogammamétriques qui permettent de déterminer le spectre et l’activité des


radionucléides émetteurs gamma incorporés dans l’organisme ;
• les mesures de l’activité des radionucléides présents dans les urines, les fèces et les prélè-
vements narinaires.

Les résultats de ces mesures et les connaissances acquises sur le métabolisme des
radionucléides dans l’organisme humain permettent de déterminer les activités incorporées et
d’évaluer les doses.
Près de 250 000 examens anthropogammamétriques et radiotoxicologiques ont été réalisés à
titre systématique ou dans le cadre de la surveillance médicale du personnel affecté à des travaux
sous rayonnements ionisants.

VI.5.2.1 - EXAMENS ANTHROPOGAMMAMÉTRIQUES

Le rayonnement gamma émis par le corps entier


était détecté au moyen d’une ou plusieurs sondes en
iodure de sodium (NaI) de grande sensibilité, placées
dans une enceinte blindée qui protégeait du rayonnement
ambiant.
Le résultat de la mesure était ramené au poids
de la personne examinée (nombre de désintégrations
par minute et par kilogramme) avec pour hypothèse une
répartition homogène de la radioactivité dans le corps
humain. Cette mesure globale des émetteurs gamma
d’une durée d’une dizaine de minutes permettait d’éva-
luer la charge corporelle et donc d’estimer l’exposition
interne, connaissant les produits de fission suscep-
tibles d’être présents.

Installation d’anthropogammamètrie en place sur l’atoll de


Mururoa montrant une sonde NaI dans une enceinte blindée.
Chap. 6aVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 11:59 Page 256

256 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

La mesure du rayonnement émis par la personne contrôlée était comparée avec celle d’une
personne de même poids n’ayant jamais été exposée. Le rapport de ces 2 mesures était appelé
indice de tri. Normalement comprise entre 0,5 et 2, une valeur supérieure de l’indice de tri entraînait
une suspicion de contamination et imposait une analyse fine du spectre à la recherche de radio-
nucléides artificiels émetteurs gamma dans les énergies comprises entre 200 et 2 000 keV. Dans le
cas d’une détection de radionucléides non naturels, des analyses radiotoxicologiques des excrétas
(selles, urines par exemple) pouvaient être demandées permettant de confirmer ou d’infirmer
une contamination interne par un mélange de produits de fission émetteurs gamma.
De 1966 à 1995, près de 150 000 examens anthropogammamétriques ont été effectués :
environ 65 000 pendant la période des essais atmosphériques et 85 000 pendant la période des
essais souterrains.
Les évaluations réalisées à partir des résultats de ces examens complémentaires corres-
pondaient généralement à une évaluation de l’exposition interne nulle. Lors des essais souterrains,
le risque d’exposition interne était essentiellement dû à la présence des radioisotopes de l’iode
dans les boues et sur les tiges des post-forages. L’examen anthropogammamétrique était alors
localisé au niveau de la thyroïde, organe cible de l’accumulation d’iode.

VI.5.2.2 - ANALYSES RADIOTOXICOLOGIQUES


Durant les essais atmosphériques, les dosages des 239 Pu, 144 Ce et 90 Sr étaient effectués
à partir d’analyses radiotoxicologiques car les caractéristiques radioactives de ces radionucléides
ne les rendent pas directement décelables par les examens anthropogammamétriques. Durant les
essais souterrains, les analyses radiotoxicologiques portaient principalement sur les radioisotopes
du plutonium et sur le tritium, compte tenu des risques d’exposition interne essentiellement lors
des opérations d’assainissement réalisées sur les zones d’essais de sécurité, de l’installation
Meknès et durant les opérations de post-forage.
Par ailleurs, des examens radiotoxicologiques des selles ont été réalisés sous la forme de
sondages et à titre systématique y compris pour des personnes non exposées professionnellement
afin de compléter la surveillance de l’environnement.

VI.5.2.3 - ACTIVITÉS AYANT ENTRAÎNÉ DES EXPOSITIONS INTERNES


Diverses opérations menées dans le cadre des essais ont entraîné l’exposition interne de
travailleurs. Elles sont rappelées dans les paragraphes suivants.

Travaux en présence de plutonium


Deux expérimentations atmosphériques ont produit une énergie suffisamment basse (50 t
équivalent TNT) pour que le risque dû aux dépôts de radionucléides émetteurs alpha soit significatif
par rapport au risque dû aux radionucléides émetteurs bêta-gamma. Ce sont les essais Pégase
et Melpomène effectués respectivement les 27 juillet 1970 et 28 juillet 1973. Dans le cas de l’essai
Pégase, les examens anthropogammamétriques et radiotoxicologiques réalisés sur le personnel
ayant exécuté des travaux d’assainissement d’une étroite bande corallienne touchée par une
retombée de plutonium ont révélé des doses comprises entre 20 et 320 µSv, avec une moyenne
de 170 µSv. Les doses dues à l’exposition externe de ces personnels ont été comprises entre 0,5 et
5 mSv, avec une moyenne de 2 mSv.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 257

D’autres opérations d’assainissement ont été réalisées sur la zone où ont eu lieu les essais
de sécurité, entre 1981 et 1988. La dose maximale reçue lors de ces opérations a été estimée à
3,9 mSv. Le détail des travaux d’assainissement est donné dans le chapitre VII.

Travaux en présence d’iode radioactif

Les résultats des anthropogammamétries ont permis d’estimer les doses à la thyroïde du
personnel engagé dans les travaux d’assainissement suite à l’essai Pégase, entre 0,6 et 1,5 mSv.
Lors des essais souterrains, une fraction de l’iode présent dans l’eau de la cavité créée
par l’essai pouvait remonter en surface lors des opérations de post-forage et se déposer sur les
outils utilisés. Un risque d’exposition pour les équipes de forage et de radioprotection présentes sur
la plate-forme des post-forages justifiait une surveillance spécifique.

Chantiers d’assainissement

Les chantiers d’assainissement ouverts après les essais de sécurité et les expériences
réalisées dans l’installation Meknès ainsi que durant les opérations de post-forage ont provoqué
l’exposition de personnel dont les doses reçues n’ont pas dépassé 30 mSv, comme le montre
le récapitulatif statistique suivant :

• 0,01 à 0,1 mSv 8 personnes


• 0,1 à 5 mSv 34 personnes
• 5 à 10 mSv 5 personnes
• 10 à 30 mSv 3 personnes

VI.6 - RADIOPROTECTION HORS SITES D’EXPÉRIMENTATIONS


Le commandant du Goen prenait la décision d’effectuer un essai lorsque les prévisions
météorologiques conduisaient à écarter tout risque de passage de l’axe du nuage radioactif à
proximité d’une île habitée ou tout risque de retombée directe sur une île habitée, en particulier
les plus proches : Tureia, Reao, Pukarua et celles de l’archipel des Gambier. Ces prévisions devaient
montrer que l’essai serait effectué dans des conditions météorologiques favorables, limitant les
retombées sur le territoire polynésien et que les doses reçues par les populations seraient d’un
niveau très en deçà des limites réglementaires en vigueur.

VI.6.1 - PRÉVISIONS MÉTÉOROLOGIQUES


Pendant l’hiver austral, la circulation générale dominante des masses d’air est dirigée
d’ouest en est dans l’hémisphère Sud, à l’exception de la zone équatoriale où la direction dominante
est inversée (cf. Chapitre I). En été, elle est orientée d’est en ouest, de vitesse faible en général, un
peu plus rapide des basses latitudes jusqu’à l’équateur. L’hiver austral a été retenu pour réaliser les
essais pour les vents d’ouest en altitude et pour les alizés qui soufflent de l’est dans les basses
couches de l’atmosphère, éloignant, en particulier, les retombées locales provenant du bas du pied
du nuage du secteur Est de l’atoll de Mururoa (cf. Chapitre II).
Chap. 6aVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 11:59 Page 258

258 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

Les directions et intensités des vents étaient fournies par un important dispositif de recueil
et d'exploitation des données météorologiques qui s'appuyait sur les experts et les réseaux de la
météorologie nationale, complétés par des moyens militaires. Une connaissance des champs de
vents suffisamment fine permettait de prévoir les trajectoires les plus probables du nuage radioactif.
Les données météorologiques collectées permettaient l’élaboration de cartes de prévisions
météorologiques en Polynésie française et, plus particulièrement, de la région de Mururoa et
Fangataufa, aux échelles 1/9 000 000 et 1/12 500 000. Elles fournissaient également les données
nécessaires à la prévision des retombées, pour plusieurs gammes de puissance, afin d’apprécier
les conséquences d’une explosion d’une puissance différente de celle attendue.

VI.6.2 - PRÉVISIONS DES RETOMBÉES ET DES DÉBITS DE DOSE


Avant tout essai, une série de prévisions des conséquences radiologiques régionales était
faite à partir de modélisations permettant d’évaluer les activités atmosphériques, les dépôts et les
débits de dose ambiante. Les vitesses et directions de vent à différentes altitudes, la distribution
des tailles des particules et des vitesses de chute associées devaient être connues pour prévoir
les fronts des retombées et les débits de dose au sol. Les méthodes de prévision des retombées
des essais atmosphériques, à partir du nuage stabilisé, sont décrites en détail dans le chapitre II. Les
prévisions de la trajectoire du nuage étaient calculées, pour chaque essai, 48, 24, 12 et 6 heures
avant la date et l’heure prévues de l’essai, faisant l’objet de représentations cartographiques.
Pour chaque simulation, les points de retombées au sol de même temps de transport
étaient reliés par des lignes d’iso-valeurs appelées isochrones et superposées sur la carte de la
Polynésie française. Chaque isochrone représentait le front des retombées, pour un même temps de
transport, jusqu’à leurs dépôts au sol.
Les activités volumiques et surfaciques, débits de dose et doses en surface étaient également
calculés en un grand nombre de points pour tracer les courbes d'iso-débit de dose sur les
mêmes cartes. Si la situation était considérée comme favorable, c’est-à-dire qu’aucune retombée
n’était prévue sur un lieu habité, il était procédé la veille au soir du jour prévu de l’essai, au dernier
stade de la préparation appelé «passage du Rubicon» (embarquement de l’état-major, évacuation
des personnels, appareillage de l’ensemble des bâtiments).
Si la situation météorologique évoluait de manière défavorable, l’essai était différé, de
quelques heures à une journée au plus. Si la situation défavorable persistait, l’ensemble du dispositif
revenait à l’état antérieur, dans une situation dite «Pénélope» qui consistait, dans le cas des
essais sous ballon, à descendre le ballon pour remettre l’engin en position de sécurité, dans l’attente
d’une situation favorable.
Après la réalisation de l’essai, de nouvelles prévisions de retombées et de débit de dose
étaient faites en prenant en compte la puissance réelle de l’engin, ainsi que la situation météorologique
réelle, observée pendant et après l’essai.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 259

VI.6.3 - DÉFINITION DES ZONES D’EXCLUSION

Lors d’un essai atmosphérique, l’environnement proche du point zéro était soumis à des
effets thermiques, mécaniques et aux effets des rayonnements ionisants. Pour s’en protéger, trois
zones étaient définies selon la terminologie de l’époque (Fig. 183) :

• une zone interdite à la circulation nautique et aérienne, située dans un cercle de 10 milles
nautiques de rayon centré sur le point zéro ;
• une zone dangereuse pour la circulation nautique, située dans un cercle de 120 milles nautiques
de rayon centré sur le point zéro, complété par un secteur circulaire s’étendant jusqu’à 200
milles nautiques (400 milles nautiques en 1966) ;
• une zone dangereuse pour la circulation aérienne, située dans un cylindre de 200 milles
nautiques de rayon, centré sur le point zéro et de hauteur illimitée, complété par un secteur
cylindrique s’étendant de 200 à 500 milles nautiques du point zéro.

°
30
Hao
Reao

°
45
20
Tureia 0n
200 nautiques

autiques

500 nautiques
Mururoa

Fangataufa 100°

Gambier
120 s
nautique

Pitcairn
15

Zone maritime dangereuse

Zone aérienne dangereuse

F IG. 183. - Les zones de restriction à la circulation nautique et aérienne définies pour la réalisation d’un essai
atmosphérique au CEP.

Au moment de l’essai, pour assurer une protection contre les effets mécaniques, thermiques
et les effets de l’exposition aux retombées du nuage radioactif, les bateaux étaient positionnés à
une distance du point zéro dite «distance de sécurité». Cette distance de quelques dizaines de
milles dépendait de l’énergie attendue lors de l’explosion de l’engin testé, du mode d’expérimentation
et des conditions météorologiques. À cette distance et pour parer aux effets du flash lumineux,
le personnel devait tourner le dos à l’explosion et mettre la tête dans les bras ou porter des lunettes
anti-flash. Ce flash pouvait être perçu jusqu’à 100 milles nautiques à partir des bateaux et 200 milles
nautiques à partir des avions.
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260 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

VI.6.4 - PROCESSUS DE DÉCISION DE DÉCLENCHEMENT D’UN ESSAI

Lorsque les prévisions météorologiques préalables prévoyaient des conditions susceptibles


d’entraîner des retours anticycloniques vers l’ouest, ou des entrées d’air stratosphérique vers la
troposphère, l'essai était reporté. Les calculs déterminants étaient ceux réalisés le jour précédant
l’essai, donnant les prévisions de la situation météorologique à l’heure prévue de l’essai et des 24
heures suivantes. Ces prévisions prenaient en compte les possibilités de pluies, susceptibles de
rabattre les radionucléides au sol.
La sécurité des populations étant une préoccupation majeure, la décision d’effectuer un
essai était prise lorsque les prévisions de retombées sur les terres habitées, voisines des sites
d’expérimentations, ne faisaient apparaître aucune retombée pouvant induire des doses aux
populations supérieures aux limites réglementaires et après vérification de l’absence d’intrusion à
l’intérieur de la zone dangereuse.
Pour les deux essais mégatonniques exécutés en 1968, compte tenu du niveau d’activité
possible de retombées, la CCS avait prescrit au Commandant du Goen de n’autoriser l’essai que
si la courbe d’iso-débit de dose de 1 mGy.h -1 (calculée à H+1) des retombées se situait à plus de
100 km de Reao ou des îles de l’archipel des Gambier.

VI.6.4.1 - GESTION D’UNE SITUATION IMPRÉVUE

Malgré toutes les précautions prises, il ne pouvait être exclu qu’une évolution météorologique
après l’essai, entraîna des retombées sur une île habitée. Aussi, par précaution, des mesures
préventives de protection radiologique étaient prises vis-à-vis des populations des îles susceptibles
d’être atteintes par une retombée. Ces mesures de protection avaient trois objectifs :

• protéger les personnes pendant la période des retombées ;


• prévoir les moyens d’évacuation en cas de retombées importantes ;
• réduire l’exposition des personnes à un niveau de dose aussi bas que possible.

Pour protéger la population des conséquences d’éventuelles retombées plus importantes


que celles initialement prévues, des abris de prévoyance avaient été construits à Tureia pour la
campagne de 1966, à Reao, Pukarua ainsi qu’aux Îles Gambier en 1967 en prévision des essais
mégatonniques. La population concernée était systématiquement rassemblée à proximité des
abris avant l’essai et la décision d’y séjourner était prise, soit en prévision de l’arrivée d’une
retombée, soit à la suite de la détection d’une augmentation de la radioactivité.
En cas de retombée sur une île habitée, il était prévu d’évaluer la dose susceptible d’être reçue
par une personne séjournant un an sur cette île. Cette dose devait être calculée en tenant compte
des mesures palliatives pouvant être mises en oeuvre. Elle devait ensuite être comparée aux critères
radiologiques définis par la CCS. Ainsi, il avait été prévu que :

• Dans l’hypothèse d’une dose efficace annuelle inférieure à 50 mSv, la population reviendrait
à une vie normale et pourrait être amenée à mettre en œuvre des mesures simples de
protection.
• Dans l’hypothèse d’une dose efficace annuelle comprise entre 50 et 150 mSv, la population
serait rendue à ses activités, mais devrait respecter les consignes de sécurité des services
de protection afin de limiter l’exposition aux rayonnements pendant le retour progressif à la
vie normale.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 261

• Dans l’hypothèse d’une dose efficace annuelle comprise entre 150 et 250 mSv, les risques
d’une évacuation et d’une exposition aux rayonnements seraient comparés. Cette comparaison
conduirait, soit à l’évacuation des populations, soit à une reprise des activités de la population,
dans le respect des consignes de sécurité rigoureuse concernant en particulier l’alimentation.
• Enfin, au-delà de 250 mSv, l’évacuation des populations, du personnel militaire et des expéri-
mentateurs civils aurait été automatiquement effectuée.

En 1968, année des premiers essais mégatonniques, les populations de Reao et des
îles Gambier ont été systématiquement mises sous abri avant chaque essai.
Le porte-avions Clémenceau était gréé pour assurer, si nécessaire, l’évacuation des atolls
de Reao, Pukarua et de l’archipel des Gambier et le TCD Ouragan celle de l’atoll de Tureia.

VI.6.4.2 - EXEMPLE DE L’ESSAI CENTAURE

Cet essai a été pris comme exemple car il a fait l’objet d’une évaluation radiologique
particulière pour Tahiti parce que les retombées observées n’ont pas été conformes aux prévisions.

Caractéristiques de l’essai
L’essai Centaure prévu initialement le 2 juillet 1974 a eu lieu le 17 juillet, à 8h00, heure
locale. Ce report est lié à l’attente de conditions météorologiques favorables à l’essai. D’une
puissance de 4 kt, il a été réalisé sous ballon, à 270 m d’altitude. Les prévisions de retombées
et des débits de dose ont été établies sous la forme de cartes d’isochrones et d’iso-débits de
dose, 24 heures et 12 heures avant l’heure prévue de l’essai. Celui-ci a été effectué à la limite
Nord d’une cellule anticyclonique en voie d’affaiblissement, de centre situé approximativement à
24° de latitude S et 140° de longitude W. La direction
des vents des basses couches était de 120° à 130° 0 100 km

avec une vitesse de 5 m.s -1 , tendant à faiblir dans la


journée.

Hao Pukarua
Prévisions des isochrones et débits de dose 18˚ S
20 h
Reao
Vingt-quatre heures avant l’heure prévue de 0,01
l’essai, les isochrones et les iso-débits de dose pré- 15 h 0,03
voyaient la trajectoire des retombées vers le nord, 0,1
aucune île habitée n’étant touchée par les retombées
directes (Fig. 184). Ces prévisions indiquaient que 10 h 20˚ S

l’atoll d’Hao aurait été frôlé par l’iso-débit de dose 10


Tureia
µGy.h -1 , valeur non corrigée de la décroissance 5h
7h
0,03
radioactive des radionucléides transportés dans le 3h 0,1
1h 0,3
nuage (cf. Chapitre II). L’arrivée des retombées sur cet 1
Mururoa Maria
atoll ayant été estimée à plus de 20 heures après Tematangi
22˚ S
l’heure de l’essai, le débit de dose maximum enre- Fangataufa
gistré aurait été de l’ordre de 270 nGy.h -1 , soit un 141˚ W 139˚ W 137˚ W

débit de dose très inférieur à la limite de 1 mGy.h -1


F IG . 184. - L’essai Centaure : prévisions des
préconisée par la CCS. Les prévisions répondaient retombées réalisées 24 heures avant l’heure
donc aux conditions requises du déclenchement de prévue de l’essai. Les débits de dose (mGy.h -1) ne
l’essai. sont pas corrigés de la décroissance radioactive.
Chap. 6aVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 11:59 Page 262

262 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

141˚ W 139˚ W 137˚ W


Compte tenu des paramètres
météorologiques, 12 heures avant l’heure
prévue de l’essai, une nouvelle prévision
de l’évolution des retombées et des
Hao
débits de dose sur 24 heures avait permis
50 µGy.an-1 18˚ S

Pukarua
de tracer les nouvelles isochrones et
courbes d’iso-débits de dose (Fig. 185).
20 h Cette nouvelle prévision était
cohérente avec celle effectuée 24 heures
0,01 avant l’heure prévue de l’essai et confirmait
15 h 0,03 l’absence de retombées significatives sur
20˚ S
les îles habitées. Le débit de dose maxi-
0,1
mum attendu sur l’atoll d’Hao était estimé
200 µGy.an-1
10 h à 630 nGy.h -1 et la dose annuelle
Tureia
0,1 intégrée était évaluée à 50 µGy. Ces
7h
5h 0,3 1 prévisions conduisaient à des retombées
3 et des débits de dose suffisamment
Tematangi Mururoa
22˚ S faibles et conformes aux conditions d’auto-
0 100 km 3h risation de l’essai.
Fangataufa

F IG . 185. - L’essai Centaure : prévisions des retombées


réalisées 12 heures avant l’heure prévue de l’essai.
Les débits de dose (mGy.h -1) ne sont pas corrigés de la
décroissance radioactive.

Trajectoires réelles du nuage

Une fois l’essai réalisé, les conditions météorologiques se sont avérées différentes de
celles prévues. Un fléchissement des vents vers l’ouest en altitude a été observé et la modélisation
des nouvelles trajectoires des retombées avec les conditions météorologiques observées a
conduit à recalculer les isochrones et les iso-débits de dose (Fig. 186). Les estimations ont montré
que les retombées devaient toucher l’île de Tematangi près de 10 heures après l’essai, avec un
débit de dose maximum de 630 nGy.h -1 , soit une valeur inférieure à la limite définie par la CCS.
Le changement de direction des vents a eu pour conséquence d’emmener le nuage radioactif
vers l’ouest de la Polynésie.

0,01 0 100km
20˚ S
0,03
0,1

0,3 Tureia

20 h 15 h
1
10 h
7h 3
5h
3h 1h
F IG. 186. - L’essai Centaure : estimation
Tematangi
des retombées réalisées après l’essai.
22° S Mururoa
Les débits de dose (mGy.h -1) ne sont
Fangataufa
pas corrigés de la décroissance radio-
143˚ W 141˚ W 139˚ W
active.
Chap. 6aVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 11:59 Page 263

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 263

VI.6.5 - SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE DES POPULATIONS

Après chaque essai, une estimation de l’exposition des populations des îles les plus
proches des sites d’expérimentations était faite par les spécialistes du SMSR et du SMCB, à partir
de l’ensemble des résultats de mesures effectuées dans les différents compartiments de l’envi-
ronnement et de la chaîne alimentaire (cf. Chapitre III). En 2005 et 2006, de nouvelles estimations
ont été faites par les spécialistes de la DAM du CEA. Avant de présenter le résultat de ces
estimations, les paragraphes suivants rappellent la méthodologie employée pour le calcul des
doses. Si la méthodologie appliquée par les équipes durant la période des essais atmosphé-
riques est proche de celle appliquée en 2005-2006, les modèles ont évolué et les valeurs des
paramètres utilisés par ces modèles sont aujourd’hui mieux connues et confortées par de
nombreuses études, expériences de laboratoire et observations de terrain. C’est le cas des
facteurs de transfert environnementaux (cf. Chapitre II) et des coefficients permettant d’estimer
les doses par exposition externe ou par exposition interne.
Dans la suite de ce chapitre, conformément aux textes réglementaires les plus récents, les
doses sont exprimées sous les termes de doses efficaces et de doses à la thyroïde pour différentes
classes d’âge de la population. Les qualificatifs «équivalente» et «engagée» sont sous-entendus.
Ces doses peuvent être calculées pour différentes classes d’âge de la population. Six
classes d’âge ont été prises en compte dans les calculs de dose : les nourrissons d’âge inférieur
à 1 an, les enfants de 1 à 2 ans, les enfants de 2 à 7 ans, les enfants de 7 à 12 ans, les enfants
de 12 à 17 ans et les adultes.
Seuls sont présentés, ici, les résultats pour les adultes et pour les enfants de 1 à 2 ans
auxquels sont délivrées les doses à la thyroïde les plus élevées.

VI.6.5.1 - MÉTHODOLOGIE DES CALCULS DE DOSE

Les doses reçues par les populations résultent des expositions dues :

• au passage du nuage ;
• aux dépôts des radionucléides associés aux retombées ;
• à l’inhalation de radionucléides pendant le passage du nuage, la faiblesse des remises en
suspension due au climat humide n’augmentant pas les doses après le passage du nuage ;
• à l’ingestion de radionucléides présents dans les eaux de boisson, dans les produits de la
pêche et dans les produits agricoles locaux.

Les doses délivrées aux populations à la suite des essais atmosphériques ont été estimées
à partir de résultats de mesures. Ces mesures effectuées dans les différents milieux de l’environ-
nement et dans la chaîne alimentaire concernaient l’indice bêta global, ou encore l’activité totale, selon
la terminologie de l’époque.
Le spectre des radionucléides à l’origine de cet indice bêta global a été déduit du bilan
des radionucléides produits par l’essai nucléaire étudié, après prise en compte de la décroissance
et de la filiation de chaque radionucléide, en supposant que le transport atmosphérique n’ait
provoqué aucune modification du spectre initial décrit dans le nuage stabilisé.
Sur les 1 300 isotopes inventoriés à la suite d’un essai nucléaire, 1 000 environ sont radio-
actifs et seuls quelques dizaines, qui contribuent majoritairement à l’indice bêta global ont été
sélectionnés pour composer le spectre retenu afin d’exploiter les résultats de mesure d’indice
bêta global.
Chap. 6aVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 11:59 Page 264

264 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

Activité atmosphérique et dépôt au sol

Parmi l’ensemble des résultats des mesures d’activité effectuées après un essai figuraient
ceux des aérosols atmosphériques et des dépôts au sol. Dans certains cas, ces résultats de
dépôt font défaut ou sont insuffisamment documentés, mais ils peuvent éventuellement être
déduits des valeurs d’activité des aérosols atmosphériques. Inversement, lorsque les données
d’activité des aérosols manquent, elles peuvent être déduites des activités déposées au sol.
La plupart du temps, la granulométrie des aérosols, n’est pas connue précisément.
Cependant, les observations faites lors des essais atmosphériques ont montré que la répartition
des tailles de particules dépendait de la durée du transport atmosphérique, de la pluviométrie et de
la puissance de l’essai.
En effet, les particules se déposent d’autant plus facilement qu’elles sont denses. En
conséquence, plus la distance parcourue par le nuage est importante, plus les particules restant
dans le nuage sont légères et plus leur vitesse de dépôt est faible.
Par temps sec, les particules se déposent sur le sol :

• par gravité ;
• par turbulence dans la couche limite entre l’air et le sol ou la surface de l’eau ;
• par interaction avec la surface de dépôt caractérisée par sa «rugosité» qui dépend du relief
et de l’occupation de la surface.

Par temps de pluie, les particules se déposent en beaucoup plus grand nombre, jusqu’à
100 fois plus, par lessivage de l’atmosphère par les précipitations. Les caractéristiques de la pluie
conditionnent l’efficacité du lessivage : hauteur d’eau, durée des précipitations et hauteur de la
colonne de lessivage. Le dépôt peut donc croître très fortement avec la pluie.
Enfin, les observations effectuées à la suite des essais ont montré que la taille des particules,
diminuait avec la puissance de l’essai. Il s’agit cependant d’une relation de second ordre
comparée aux deux précédentes : la distance de transport et la pluviométrie.
C’est sur la base de ces critères que les vitesses de dépôt sont déterminées. Elles sont
généralement comprises dans un intervalle de 5.10 -3 à 3.10 -1 m.s -1 . Dans le cas, où un intervalle
de valeurs est pris en compte, les résultats des calculs de dose sont également exprimés sous
la forme d’un intervalle dont la borne inférieure correspond à la vitesse de dépôt la plus forte et
la borne supérieure à la vitesse de dépôt la plus faible.

Doses dues à l’inhalation d’aérosols radioactifs

La dose due à l’inhalation d’aérosols radioactifs est calculée comme la somme des produits
de l’activité volumique de chaque radionucléide intégrée, sur la durée du passage du nuage
radioactif, par le débit respiratoire et par la dose par unité d’incorporation. La dose par unité d’incor-
poration (DPUI) dépend de la nature, de la forme physique et de la forme chimique du radionucléide,
ainsi que de l’âge de l’individu qui inhale l’aérosol radioactif. Le débit respiratoire dépend également
de l’âge de l’individu.
La dose due à l’inhalation des particules radioactives pour un individu d’une classe d’âge
j est obtenue à partir de la formule suivante :
inh
Dj = Fp • A i • Rj • DPUI ij
i
Chap. 6aVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 11:59 Page 265

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 265

où,
A i est l’activité volumique intégrée du radionucléide i (Bq.m -3 .s) ;
R j est le débit respiratoire d’un individu de classe d’âge j (m 3 .s -1 ) ;
DPUI ij est la dose par unité d’incorporation pour le radionucléide i et un individu de classe
d’âge j (Sv.Bq -1 ) ;
F p est un paramètre compris entre 0 et 1 qui permet de prendre en compte la protection
apportée par un équipement particulier, une habitation, un temps de présence inférieur à celui
du passage du nuage.

Le passage du nuage radioactif se traduit par une activité volumique de l’air exprimée en
Bq.m -3 qui dépend du temps. L’activité volumique intégrée A i est le résultat de l’intégration de
l’activité volumique sur la durée T du passage du nuage.
T
Ai = ∫ ai (t) • dt
0
où,
a i (t) est l’activité volumique du radionucléide i (Bq.m -3 ) ;
T est la durée du passage du nuage (s).

L’aérosol est représenté par un ensemble de particules de densité égale à 1 supposées


sphériques et dont les diamètres sont répartis suivant une loi dite «log-normale» dont la médiane est
le «diamètre aérodynamique médian». Ce diamètre est un paramètre qui conditionne, d’une part,
la valeur de la vitesse de dépôt et, d’autre part, la valeur de la DPUI. En effet, les particules de plus
grand diamètre sont piégées par le système respiratoire supérieur (nez et pharynx), puis dégluties
alors que les particules de plus petite taille pénètrent dans le système respiratoire profond
(bronches et alvéoles pulmonaires) et peuvent alors passer la barrière pulmonaire et diffuser dans
l’ensemble de l’organisme. La DPUI est donc d’autant plus élevée que la taille de la particule est
petite.
La DPUI est déterminée pour chaque radionucléide en appliquant un modèle métabolique
qui représente son comportement dans l’organisme, en prenant en compte la part de l’activité
incorporée dans chacun des organes et le temps d’élimination de ce radionucléide par l’organe.
La dose absorbée à un organe est d’autant plus élevée que le radionucléide y reste longtemps.
Le temps de présence du radionucléide dépend de sa nature, de sa forme chimique ainsi que de
l’âge de l’individu. Les formes chimiques sont réparties en trois classes qui caractérisent le temps
de présence du radionucléide dans l’organisme : lent, moyen et rapide. En absence d’information
sur sa forme chimique, la forme la plus pénalisante en termes de dose est choisie.

Doses dues à l’exposition externe

Doses dues à l’immersion dans le nuage

Ces doses sont calculées connaissant les activités volumiques atmosphériques intégrées
et le temps de présence des individus dans le nuage.
La dose efficace due à l’exposition externe aux émetteurs β et γ du nuage radioactif est
égale à la somme des produits de l’activité volumique intégrée par le coefficient de dose efficace
par immersion pour chaque radionucléide présent dans le nuage.
Chap. 6aVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 11:59 Page 266

266 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

ext, p ext, p
D = Fp • A i • CD i
i
où :
A i est l’activité volumique intégrée du radionucléide i (Bq.m -3 .s) ;
CD iext, p est le coefficient de dose efficace en Sv pour une immersion dans une activité volumique
intégrée unitaire du radionucléide i (Sv.Bq -1 .s -1 .m 3 ) ;
F p est un paramètre compris entre 0 et 1 qui permet de prendre en compte la protection
apportée par un équipement particulier, une habitation, un temps de présence inférieur à celui
du passage du nuage.

Cette dose ne dépend pas de l’âge de l’individu.

Doses dues à l’exposition au dépôt

L’exposition due au dépôt peut être calculée soit à partir des mesures de débits de dose
dus au dépôt, soit estimée à partir de l’activité du dépôt. Dans ce dernier cas, la dose due au dépôt
est évaluée par intégration sur différentes durées compte tenu de la décroissance radioactive et du
spectre des radionucléides présents. Le débit de dose est exprimé en Sv.h -1 et égal à la somme,
pour tous les radionucléides, des produits du dépôt exprimé en Bq.m -2 par le coefficient de dose
efficace pour la voie «exposition externe due au dépôt» exprimé en Sv.h -1 .Bq -1 .m 2 , c'est-à-dire
le débit de dose unitaire pour une activité surfacique de 1 Bq.m -2 en géométrie infinie. Le débit de

dose D i ext, d dû au dépôt du radionucléide i est donc égal à :

ext, d ext, d
Di = Di • CD i
où :
D i est le dépôt du radionucléide i (Bq.m -2 ) ;
CD iext, d est le coefficient de dose efficace (Sv.h -1 .Bq -1 .m 2 ).

La dose est évaluée en prenant en compte la décroissance radioactive et en intégrant le


débit de dose sur la durée de présence T de l’individu, sur le dépôt, à partir de la fin des retombées
(t = 0) :
ext, d ext, d 1-exp(-λi•T)
D = Fp • Di
i λi
où :
λ est la constante de décroissance radioactive du radionucléide i (s -1 ) ;
• i
D iext, d est le débit de dose dû au radionucléide i (Sv.s -1 ) ;
F p est un paramètre compris entre 0 et 1 qui permet de prendre en compte la protection
apportée par un équipement particulier, une habitation, un temps de présence inférieur à celui
du passage du nuage ;
T est la durée d’intégration du débit de dose (s).

Ces doses ne dépendent pas de l’âge de l’individu.

Doses dues à l’ingestion de produits alimentaires

Ce sont les doses dues à la consommation de produits alimentaires locaux touchés par
les retombées radioactives. Ces doses sont exprimées en termes de doses efficaces et de doses
à la thyroïde, pour différentes classes d’âge de la population.
Chap. 6aVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 11:59 Page 267

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 267

Les calculs de dose par ingestion utilisent les activités effectivement mesurées dans les
aliments ou les activités estimées à partir des résultats de mesure du dépôt au sol ou de son
estimation qui peut être faite à partir de l’activité des aérosols atmosphériques et des eaux de pluie.
Le spectre des radionucléides dans les différents aliments à la date considérée de consommation
est supposé identique à celui des dépôts calculés à partir de l’évolution dans le temps du spectre
des produits de fission. La dose (Dking) due à l’ingestion d’aliments pour une classe d’âge donnée (k)
est la somme pour les radionucléides présents (i), des produits de l’activité massique de l’aliment
(j) par la quantité consommée et par la dose par unité d’incorporation DPUI ik , :
ing
Dk = Bij • DPUI ik • Q jk
i j

où:
Q jk est la quantité (en kg) quotidienne d’aliments (j) consommés par un individu de la classe
d’âge (k). L’ensemble des valeurs Q jk représente la ration alimentaire. C’est un paramètre
important qui influe sur la dose calculée. Cette ration alimentaire comprend les consommations
de boissons, poissons, viandes, œufs, mollusques, crustacés, coprah, fruits et légumes.
Différentes rations alimentaires ont été retenues compte tenu des habitudes alimentaires
spécifiques des différents archipels de Polynésie.
DPUI ik est la dose par unité d’incorporation (ingestion) pour le radionucléide i et la classe
d’âge k, exprimée en sievert par becquerel (Sv.Bq -1 ) ingéré. Cette dose dépend uniquement
du radionucléide et de la classe d’âge.
B ij est l’activité du radionucléide i dans l’aliment j (Bq.kg -1 ).

Les doses efficaces sont finalement établies en sommant, pour une même
classe d’âge de la population, les doses efficaces dues à l’inhalation d’aérosols
radioactifs, à l’ingestion d’aliments et à l’exposition externe. Les doses à la thyroïde,
pour une même classe d’âge de la population, sont établies en sommant les doses
à la thyroïde dues à l’inhalation d’aérosols radioactifs et celles dues à l’ingestion
d’aliments.

Coefficients de doses utilisés

Le calcul des doses efficaces dues à l’inhalation et à l’ingestion utilisent les DPUI précisées
par l’arrêté du 1 er septembre 2003, définissant les modalités de calcul des doses efficaces et des
doses équivalentes résultant de l’exposition des personnes aux rayonnements ionisants. Pour les
doses efficaces dues à l’inhalation, les cinétiques retenues en relation avec la forme chimique
des radionucléides sont celles recommandées dans la Directive européenne 96/29 Euratom du
13 mai 1996 fixant les normes de base relatives à la protection sanitaire de la population et des
travailleurs contre les dangers résultant des rayonnements ionisants, ou dans les publications 71 «age
dependent doses to members of the public from intake of radionuclides : Part 4, Inhalation dose
coefficients, Vol 25 n°3-4, 1995» et 72 «age dependent doses to members of the public from
intake of radionuclides : Part 5, compilation of ingestion and inhalation dose coefficients, Vol. 26 n° 1,
1996» de la CIPR.
Chap. 6aVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 11:59 Page 268

268 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

Pour le calcul des doses absorbées à la thyroïde dues à l’inhalation et à l’ingestion, les
DPUI proviennent des publications 71 et 72 de la CIPR. Les classes d’âge et les débits respiratoires
retenus proviennent de la publication 66 de la CIPR.
Pour l’exposition externe par immersion dans le panache et par les dépôts, les coefficients
de dose proviennent du rapport «U.S. Environmental Protection Agency, Federal Guidance report
12, External exposure to radionuclides in air, water and soil. EPA-402-R93-081».

IV.6.5.2 - RATIONS ALIMENTAIRES

Des rations alimentaires ont été établies pour les adultes sur la base d’enquêtes alimentaires
et nutritionnelles représentatives de la consommation des produits locaux par les populations
polynésiennes. Ces enquêtes, effectuées en 1965 et 1985, ont mis en évidence les habitudes
alimentaires des différents archipels (Gambier, Tuamotu, Australes, Marquises et Tahiti) et ne tiennent
pas compte des produits importés, comme le riz ou les conserves.
Les rations alimentaires présentées dans les tableaux 55 à 57 ont été établies pour les
adultes et les enfants de 1 à 2 ans de Tureia, des Îles Gambier, de Tahiti, en dehors de Papeete
(population rurale), et de Papeete (population urbaine), sur la base des enquêtes alimentaires et
nutritionnelles indiquées ci-dessus. Les rations alimentaires des enfants ont été extrapolées des
rations alimentaires établies pour les adultes. Les quantités indiquées sont en grammes et par
jour.

T ABLEAU 55.
Rations alimentaires (g.jour -1 ) établies pour Tureia.

Catégorie Consommation Consommation


Aliments
alimentaire adulte enfant de 1 à 2 ans
Boissons Eau 1 000 500
Eau de coco 2 000 1 000
Poissons Haute mer 30
Lagon 440
Total 470 150
Viandes Poulet 10
Porc 10
Chien 10
Total 30 10
Mollusques Turbo 60
Bénitier 100
Poulpe 30
Total 190 30
Crustacés Langouste 20
Coprah 220
Fruits Banane 50
(arbres) Papaye 60
Arbre à pain 60
Total 170 30
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 269

T ABLEAU 56.
Rations alimentaires (g.jour -1 ) établies pour Tahiti.

Catégorie Population urbaine Population rurale


Aliments
alimentaire Adultes Enfants de 1 à 2 ans Adultes Enfants de 1 à 2 ans

Boissons Eau 2 700 1 000 1 000 500


Eau de coco 2 000
Lait 300 500 300 500
Poissons Thon 13
Bonite 106
Ature 18
Inaa 5
Haute mer 30
Lagon 440
Total 231 100 380 100
Viandes Poulet 1 10
Porc 49 10
Boeuf 28
Chien 10
Total 78 20 30 10
Mollusques Turbo 15 5 60
Bénitier 15 5 100
Autres 30
Total 30 10 190 30
Crustacés Langouste 20
Coprah 6 220
Fruits Banane 40 50
(arbres) Papaye 12 60
Citron 19
Mangue 32
Avocat 6
Pamplemousse 5
Arbre à pain 28 60
Autres 52
Total 194 170
Fruits Ananas 28
(herbacées) Tomate 28
Concombre 17
Aubergine 3
Autres 164
Total 240
Légumes Salade 20
feuilles Chou 18
Poireau 3
Fafa 2
Autres 20
Total 63 30 63 30
Racines et Taro 48
tubercules Patate douce 26
Tarua 13
Navet 12
Carotte 10
Autres 6
Total 115
Chap. 6aVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 11:59 Page 270

270 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

T ABLEAU 57.
Rations alimentaires (g.jour -1 ) établies pour les îles Gambier.

Catégorie Consommation Consommation


Aliments
alimentaire adulte enfant de 1 à 2 ans

Boissons Eau 1 000 1 000


Eau de coco 2 000
Poissons Haute mer 80
Lagon 300
Total 380 100
Viandes Poulet 40
Porc 40
Total 80
Mollusques Turbo 15
Bénitier 30
Autres 15
Total 60 10
Crustacés Langouste 40
Coprah 150
Fruits Banane 100
(arbres) Papaye 50
Arbre à pain 100
Autres 50
Total 300
Fruits Tomate 40
(herbacées) Concombre 40
Autres 20
Total 100
Légumes Salade 30
feuilles Chou 10
Fafa 30
Total 70 15
Racines et Taro 70
tubercules Patate douce 70
Manioc 100
Total 240

Cette méthodologie de calcul des doses est une méthodologie standard


dont la base, même représentée par les modèles et les paramètres utilisés, amène à
calculer des doses surestimées, voire très surestimées, par rapport à la réalité.
C’est un principe toujours mis en pratique lorsqu’il s’agit d’estimer des doses dues
à une exposition à des rayonnements ionisants. Les valeurs de dose obtenues doivent
donc être considérées comme maximales.
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:03 Page 271

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 271

VI.6.6 - ÉVALUATIONS RADIOLOGIQUES

Chaque essai nucléaire atmosphérique de Polynésie française a été mis en œuvre avec un
maximum de précautions, afin que son impact radiologique soit le plus faible possible. Le nombre
réduit et la faible puissance globale des essais ont également contribué à en limiter significa -
tivement les impacts. Néanmoins, tous ont entraîné la dispersion d’aérosols et de gaz radioactifs
dans les hautes couches de l’atmosphère et donc des retombées d’aérosols radioactifs de très
faibles niveaux sur de très larges surfaces, induisant de très faibles doses aux populations. Avant
la création du CEP, la Polynésie française avait été l’objet de retombées radioactives dues aux
essais des autres puissances nucléaires. Les retombées des essais atmosphériques effectués au
CEP, entre 1966 et 1974, lorsque les conditions météorologiques réelles étaient conformes aux
prévisions, avaient un impact radiologique extrêmement faible. Cependant, lorsque les conditions
météorologiques divergeaient des prévisions, les retombées des essais pouvaient entraîner des
retombées plus importantes que prévues sur certaines îles habitées.
Les retombées de dix essais, parmi lesquelles les plus importantes furent celles des
essais Aldébaran, Arcturus, Phoebé, Encelade, Rigel et Centaure ont touché les îles suivantes :

• Tureia, atoll le plus proche des sites d’essais (110 km) et peu peuplé (40 habitants au
recensement de 1967, et 68 lors de celui de 1971), dont les ressources alimentaires, carac-
téristiques d’un atoll, étaient très limitées ;
• îles Gambier (516 habitants en 1967, 545 en 1971) qui se trouvent, par rapport à Mururoa,
dans une direction voisine de celle des vents dominants en altitude. Elle se situe à une distance
intermédiaire des sites d’essais (450 km) et disposait d’une grande variété de productions
agricoles ;
• Tahiti, (61 500 habitants en 1967, 74 400 en 1971) qui regroupait alors les deux tiers de la
population de la Polynésie. À 1 200 km des sites d’expérimentations, elle dispose d’une
grande variété de productions agricoles.

Les résultats représentatifs des mesures effectuées dans les différentes composantes de
l’environnement et de la chaîne alimentaire sont présentés pour chacun de ces six essais. Les
estimations de doses, calculées selon la méthodologie exposée précédemment, sont également
présentées dans les paragraphes suivants, pour chacun des îles ou atolls concernés.

VI.6.6.1 - RETOMBÉES SUR L’ATOLL DE TUREIA

Les retombées sur Tureia


ont été consécutives aux essais
Rigel du 24 septembre 1966,
Arcturus du 2 juillet 1967 et
Encelade du 12 juin 1971.
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:03 Page 272

272 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

L’essai Rigel, d’une puissance de 125 kt, a été réalisé le 24 septembre 1966 à 7h00, heure
locale. il a eu lieu sur une barge ancrée dans le lagon de Fangataufa. Au moment de l’essai,
des vents de sud-est d’une vitesse de 5 m.s -1 entre le sol et 500 mètres d’altitude, des vents
variables et faibles entre 600 et 3 000 mètres d’altitude étaient établis. De 3 000 mètres jusqu’à la
stratosphère, les vents venaient de l’ouest avec une vitesse moyenne de 40 m.s -1 , atteignant une
vitesse de 50 m.s -1 vers 12 000 mètres. Environ 12 heures et 30 minutes après le déclenchement
de l’essai Rigel, l’île de Tureia enregistrait durant trois heures et trente minutes l’arrivée d’un front
de retombées radioactives, dont l’impact était caractérisé par les résultats de mesure et les
estimations suivantes.

Atmosphère
L’arrivée des retombées a été accompagnée d’une
mesure de l’indice bêta global moyen de l’air sur 24
heures de 11 Bq.m -3 , avec un maximum de 355 Bq.m -3 .
L’indice bêta global des pluies de 16 mm tombées le 26
septembre a été mesuré à 25 900 Bq.l -1 .

Dépôts au sol
L’indice bêta global déposé au sol a été estimé à
partir de l’indice bêta global de l’air, associé à une vitesse
de dépôt de 10 -1 m.s -1 et de dépôt humide, calculé à partir
de l’indice bêta global de l’eau de pluie et des hauteurs de
précipitations. Ainsi, le 26 septembre, après les pluies,
l’indice bêta global du dépôt est estimé à 5.10 5 Bq.m -2 , à
Tureia.

Eau de boisson
L’indice bêta global de l’eau de boisson est estimé à
partir de l’indice bêta global de l’eau de pluie. L’expérience
acquise autour des autres essais permet d’établir la valeur
du rapport entre l’activité de l’eau de pluie et l’activité de
l’eau de boisson entre 12 et 20. Ce rapport est dû aux Prélèvement d’eau de coco à Tureia.
phénomènes de décroissance radioactive, de décantation
et de filtration. Le 26 septembre, l’indice bêta global de
l’eau de boisson est estimé à une valeur comprise entre 1,3.10 3 et 2,2.10 3 Bq.l -1 .

ESTIMATION DE L’EXPOSITION DE LA POPULATION DE TUREIA

Les doses estimées à partir des résultats de mesure de la radioactivité sont rassemblées
dans le tableau 58. Elles sont présentées par voie d’atteinte : inhalation, exposition externe,
consommation de produits locaux. Les points particuliers de l’estimation des doses sont en
annotation au tableau.
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 273

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 273

T ABLEAU 58.
Évaluation des doses (mSv) suite aux retombées de l’essai Rigel à Tureia.

Enfants de 1 à 2 ans Adultes


Doses (mSv)
Dose efficace Dose thyroïde Dose efficace Dose thyroïde

Inhalation (1) 0,0026 0,03 0,002 0,015


Exposition externe au panache (1) 1,4.10-4 1,4.10-4
Exposition externe au dépôt (2) 0,051 0,051
Consommation d'eau (3) 0,05 - 0,08 0,52 - 0,88 0,01 - 0,02 0,12 - 0,2
Consommation de produits 0,0046 - 0,095 0,056 - 1,1 0,0018 - 0,074 0,019 - 0,73
marins (4)
Bilan 0,1 - 0,2 0,6 - 2,0 0,06 - 0,1 0,2 - 0,9

(1) Les doses dues à l’inhalation et à l’exposition externe au panache sont calculées avec l’hypothèse
que la population était à l’extérieur des habitations pendant le passage du panache et ne
disposait d’aucune protection particulière. Ces doses sont calculées sur la base d’un indice
bêta global des aérosols atmosphériques déduit de l’indice bêta global de l’eau de pluie
mesuré le 26 septembre. Cette estimation de l’activité atmosphérique conduit à une valeur de
l’ordre de 400 Bq.m -3 , en moyenne, limitée à la durée du passage du nuage.

(2) Les doses dues à l’exposition externe par le dépôt sont calculées pour une durée d’intégration
de six mois, en supposant que les personnes passaient les deux tiers du temps à l’extérieur
des habitations.

(3) L’indice bêta global de l’eau de boisson étant sous la forme d’un intervalle de valeurs, les
doses dues à la consommation d’eau de boisson sont sous la forme d’un intervalle de valeurs
dont la valeur maximale correspond à l’indice bêta global maximum de cette eau.

(4) Les doses dues à la consommation de produits marins sont déduites des rapports établis, à
partir des observations de terrain, entre les mesures de l’indice bêta global des dépôts au sol
et les doses dues à la consommation de produits de la pêche. Ces rapports varient de 2,2.10 -6
à 1,1.10 -7 et correspondent respectivement à la dose maximale et minimale

Remarque : La dose due à la consommation de légumes-fruits et de fruits est négligeable et il


n’y a pas de production de légumes-feuilles à Tureia.

Les calculs de dose effectués avec l’ensemble des résultats de mesures


environnementales et alimentaires réalisées après l’essai ont permis d’estimer :

• la dose efficace aux adultes entre 0,06 et 0,15 mSv et la dose efficace
aux enfants âgés de 1 à 2 ans entre 0,10 et 0,23 mSv.
• la dose à la thyroïde des adultes entre 0,2 et 0,9 mSv et la dose à la
thyroïde des enfants âgés de 1 à 2 ans entre 0,6 et 2,0 mSv.
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 274

274 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

L’essai Arcturus d’une énergie de 22 kt a été effectué à Mururoa, le 2 juillet 1967, à 7h30,
heure locale, sur une barge ancrée dans le lagon. Pendant l’essai, un vent au niveau du sol venait
du nord-nord-est, alors que de 5 000 à 9 000 mètres d’altitude, sa direction était de ouest-sud-
ouest avec une vitesse de 15 m.s -1 . La vitesse maximale du vent mesurée à 31 m.s -1 était
observée à 13 000 mètres. Ces conditions météorologiques ont entraîné le nuage radioactif vers
l’île de Tureia, à 110 km au nord de Mururoa. Le 4 juillet, entre 16h10 et 19h10, Tureia est atteint
par les retombées. Ce même jour, 2,5 mm de pluie sont tombés sur l’atoll. Ces retombées ont été
confirmées par les mesures effectuées dans les différentes composantes de l’environnement et de la
chaîne alimentaire.

Atmosphère
Un indice bêta global maximum de 9,25 Bq.m -3 a été enregistré à Tureia, accompagné
d’un débit de dose 50 µGy.h -1 .

Dépôt au sol
Le 4 juillet, le débit de dose dû aux dépôts a été mesuré entre 3 à 10 µGy.h -1 ce qui
correspondait, à des activités surfaciques calculées comprises entre 1,30 et 4,45.10 6 Bq.m -2 .
Cette dernière valeur correspondait à un dépôt de 1,60.10 7 Bq.m -2 le 2 juillet 1967 à la fin des
retombées. L’indice bêta global mesuré entre 3,3.10 5 et 35.10 5 Bq.m -2 sur des bacs collecteurs
des retombées conforte ces estimations. L’indice bêta global de l’eau de pluie collectée le
4 juillet s’élevait à 4,8.10 4 Bq.l -1 .

Eau de boisson
L’indice bêta global de l’eau de la citerne permettant l’adduction d’eau était de 11 à 74
Bq.l -1 le 4 juillet, avant l’arrivée de la pluie, et de 2 400 Bq.l -1 le 5 juillet.

Végétaux
L’indice bêta global mesuré sur des échantillons de
fruits d’arbre à pain (uru) et de papayer était respectivement
de 4,72.10 3 et 4,42.10 3 Bq.kg -1 frais, le 5 juillet.

Mollusques et crustacés
La valeur maximale de l’indice bêta global de
6,93.10 5 Bq.kg -1 frais a été mesurée le 5 juillet dans la
chair d’un bénitier prélevé le 3 juillet. L’indice bêta global
de la chair d’un turbo prélevée le 11 juillet était de
2,02.10 3 Bq.kg -1 frais.

Poissons
L’indice bêta global le plus élevé, 1,66.10 4 Bq.kg -1
frais, a été mesuré dans la chair d’un poisson chirurgien
prélevé le 11 juillet. L’indice bêta global de la chair
d’un poisson perroquet prélevé le 6 juillet était de
3,08.10 3 Bq.kg -1 frais, à la date du 11 juillet ; celui d’un Prélèvement de végétaux-feuilles
mérou prélevé le 3 juillet était de 1,3.10 3 Bq.kg -1 frais, au à Tureia.
5 juillet.
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 275

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 275

ESTIMATION DE L’EXPOSITION DE LA POPULATION DE TUREIA

Les doses ont été estimées à partir des résultats de mesure de la radioactivité et pour les
différentes voies d’atteinte : inhalation, exposition externe, consommation de produits locaux
(Tableau 59).
T ABLEAU 59.
Évaluation des doses (mSv) suite aux retombées de l’essai Arcturus à Tureia.
Enfants de 1 à 2 ans Adultes
Doses (mSv)
Dose efficace Dose thyroïde Dose efficace Dose thyroïde

Inhalation (1) 0,019 - 0,11 0,23 - 1,38 0,012 - 0,07 0,1 - 0,63
Exposition externe au panache (1) 1,7.10-3 - 9,9.10-3 1,7.10-3 - 9,9.10-3
Exposition externe au dépôt (2) 0,7 0,7
Consommation d'eau (3) 0,11 1,24 0,03 0,29
Consommation de végétaux (4) 0,018 - 0,019 0,2 - 0,22 0,013 - 0,014 0,13 - 0,14
Consommation de produits 0,049 - 3,05 0,56 - 34,6 0,033 - 2,38 0,34 - 23,5
marins (5)
Bilan 0,9 - 4,0 2,2 - 37,4 0,8 - 3,2 0,9 - 24,6

(1) Les doses dues à l’inhalation et à l’exposition externe au panache sont estimées à partir de l’indice
bêta global du dépôt (1,6.10 7 Bq.m -2 ) et de deux vitesses de dépôt, 5.10 -2 et 3.10 -1 ms -1 . Cet
intervalle de valeurs prend en compte les incertitudes sur la granulométrie de l’aérosol atmosphérique
composant le nuage radioactif. Les indices bêta global des aérosols atmosphériques sont estimés,
selon la vitesse de dépôt, entre 3.10 4 et 5.10 3 Bq.m -3 , en moyenne, pendant le passage du nuage.
La dose maximale correspond à la vitesse de 5.10 -2 m.s -1 et la dose minimale à 3.10 -1 m.s -1. Les
doses sont calculées avec l’hypothèse que les populations étaient à l’extérieur des habitations pendant
le passage du panache et ne disposaient d’aucune protection particulière.
(2) Les doses dues à l’exposition externe par le dépôt sont calculées pour une durée d’intégration de six
mois, en supposant que les personnes passaient les deux tiers du temps à l’extérieur des habitations.
(3) Les doses dues à la consommation d’eau de boisson correspondent à la valeur maximale mesurée.
L’activité de l’eau est supposée décroître selon la décroissance radioactive des radionucléides
qu’elle contient et dont le spectre est identique à celui de l’aérosol atmosphérique et du dépôt. Les
doses sont calculées pour une consommation d’eau d’un mois à partir de l’arrivée du front de
retombées. Au-delà, l’activité de l’eau est considérée comme négligeable.
(4) La dose est due à la consommation de légumes-fruits et de fruits produits localement. Il n’y a pas
de production de légumes-feuilles à Tureia.
(5) La borne supérieure de l’intervalle est la dose due à la consommation des produits de la mer dont
les résultats de mesure de l’activité sont plus élevés (poissons chirurgiens et bénitiers) car pêchés
dans le lagon. La borne inférieure de l’intervalle est la dose due à la consommation des produits de
la mer dont les résultats de mesure sont plus faibles (mérous et turbos) car pêchés en haute mer.

Les calculs de dose effectués avec l’ensemble des résultats de mesures environnementales et
alimentaires disponibles ont permis d’estimer :
• la dose efficace aux adultes entre 0,8 et 3,2 mSv et la dose efficace aux enfants âgés de
1 à 2 ans entre 0,9 et 4,0 mSv.
• la dose à la thyroïde des adultes entre 0,9 et 24,6 mSv et la dose à la thyroïde des
enfants âgés de 1 à 2 ans entre 2,2 et 37,4 mSv. La dose de 37,40 mSv délivrée à la
thyroïde des enfants est limitée à une population enfantine ayant consommé des mollusques,
notamment des bénitiers.
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 276

276 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

L’essai Encelade d’une puissance de 440 kt a été effectué le 12 juin 1971 à 10h15, heure
locale, sous ballon sur le site de Mururoa, par 450 mètres d’altitude. Le jour de l’essai, les vents
venaient du sud-sud-est, avec une vitesse de 5 m.s -1 . En altitude, le régime des vents était mal
établi, les vents venaient du sud-ouest, avec une vitesse assez faible, de 10 m.s -1 , à 9 000
mètres. Après l’essai, des conditions météorologiques défavorables entraînèrent le nuage
radioactif vers l’île de Tureia. Les retombées arrivèrent 8 heures et 50 minutes après l’essai. Le
maximum de la retombée a été observé entre 12 heures et 35 minutes et 15 heures et 10 minutes
après l’essai. Ces retombées, accompagnées d’une pluie de 10 mm dont la durée a été de
7 heures, ont été confirmées par les mesures effectuées dans l’air, sur le sol et dans les eaux de
boisson.

Atmosphère
La valeur maximale de l’indice
bêta global, 66 Bq.m -3 , a été enregistrée
à Tureia, dans l’après midi du 13 juin. Le
débit de dose variait entre 30 et 60
µGy.h -1 .

Dépôt au sol
La valeur maximale de l’indice
bêta global du dépôt a atteint 2,2.10 7
Bq.m -2 .

Eau de boisson
Les résultats les plus élevés de
l’indice bêta global de l’eau de boisson
ont été enregistrés pour des échantillons
d’eau prélevés dans deux citernes le
13 juin, avec 7,40.10 4 et 7,03.10 4 Bq.l -1 . Élevage de porcs chez un particulier.

ESTIMATION DE L’EXPOSITION DE LA POPULATION DE TUREIA

Les doses ont été estimées à partir des résultats de mesure de la radioactivité et pour les
différentes voies d’atteinte : inhalation, exposition externe, consommation de produits locaux
(Tableau 60).
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 277

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 277

T ABLEAU 60.
Évaluation des doses (mSv) suite aux retombées de l’essai Encelade à Tureia.

Enfants de 1 à 2 ans Adultes


Doses (mSv)
Dose efficace Dose thyroïde Dose efficace Dose thyroïde

Inhalation (1) 0,01 - 0,062 0,14 - 0,82 0,004 - 0,024 0,04 - 0,25
Exposition externe au panache (1) 1,3.10-3 - 8.10-3 1,3.10-3 - 8.10-3
Exposition externe au dépôt (2) 1,12 1,12
Consommation d'eau (3) 0,25 - 1,8 3,023 - 21,12 0,06 - 0,45 0,66 - 4,7
Consommation de végétaux (4) 0,008 0,04 0,0036 0,016
Consommation de viande 0,0014 - 0,0068 0,007 - 0,056 0,0006 - 0,0028 0,0025 - 0,02
Consommation de produits 0,083 - 0,48 0,67 - 4,5 0,06 - 0,3 0,46 - 2,54
marins (5)
Bilan 1,5 - 3,5 3,9 - 26,5 1,2 - 1,9 1,2 - 7,5

(1) Les doses dues à l’inhalation et à l’exposition externe au panache sont estimées à partir de
l’indice bêta global du dépôt (2,2.10 7 Bq.m -2 ) et de deux vitesses de dépôt, 5.10 -2 et 3.10 -1
m.s -1 . Les indices bêta global des aérosols atmosphériques sont estimés, selon la vitesse de
dépôt, entre 5.10 4 et 8.10 3 Bq.m -3, en moyenne, durant les 2 heures et 30 minutes du passage du
nuage. Cet intervalle de valeurs prend en compte les incertitudes sur la granulométrie de l’aérosol
atmosphérique composant le nuage radioactif. La dose maximale correspond à la vitesse de
5.10 -2 m.s -1 et la dose minimale à 3.10 -1 m.s -1 . Les doses sont calculées avec l’hypothèse que
les populations étaient à l’intérieur des habitations pendant les retombées maximum qui sont
arrivées pendant la nuit.
(2) Les doses dues à l’exposition externe par le dépôt sont calculées pour une durée d’intégration de six
mois, en supposant que les personnes passaient les deux tiers du temps à l’extérieur des habitations.
(3) Les doses dues à la consommation d’eau de boisson sont sous la forme d’un intervalle de valeurs
dont chaque borne correspond à la consommation d’eau de l’une des citernes. L’activité de l’eau
est supposée diminuer selon la décroissance radioactive des radionucléides qu’elle contient et
dont le spectre est identique à celui de l’aérosol atmosphérique et du dépôt. Les doses sont
calculées pour une consommation d’eau d’un mois à partir de l’arrivée du front de retombées. Au-
delà, l’activité de l’eau est considérée comme négligeable.
(4) Il n’y a pas de production de légumes-feuilles à Tureia et aucun résultat de mesure ayant porté
sur des végétaux, fruits ou viandes n’indique d’activité susceptible d’entraîner des doses
supérieures à quelques dizaines de microsieverts.
(5) La borne supérieure de l’intervalle est la dose due à la consommation des produits de la mer dont
les résultats de mesure de l’activité sont plus élevés (poissons perroquets et bénitiers) car pêchés
dans le lagon. La borne inférieure de l’intervalle est la dose due à la consommation des produits
de la mer dont les résultats de mesure sont plus faibles (poissons et bénitiers pêchés sur le récif).

Les calculs de dose effectués avec l’ensemble des résultats de mesures environnementales et
alimentaires disponibles ont permis d’estimer :
• la dose efficace aux adultes entre 1,3 et 1,9 mSv et la dose efficace aux enfants âgés de
1 à 2 ans entre 1,5 et 3,5 mSv.
• la dose à la thyroïde des adultes entre 1 et 8 mSv et la dose à la thyroïde des enfants âgés
de 1 à 2 ans entre 4 et 27 mSv. La dose maximale de 27 mSv délivrée à la thyroïde des
enfants est limitée à une population enfantine ayant bu de l’eau de citerne de collecte des
eaux de pluie.
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 278

278 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

VI.6.6.2 - RETOMBÉES SUR LES ÎLES GAMBIER

Les retombées sur les Îles de l’archipel des Gambier sont consécutives aux essais
Aldébaran du 2 juillet 1966, Rigel du 24 septembre 1966 et Phoebé du 8 août 1971.

L’essai Aldébaran, d’une puissance de 28 kt, a été réalisé le 2 juillet 1966, à 5h30, heure
locale, sur une barge ancrée dans le lagon de Mururoa. Il a été effectué par un vent d’ouest-nord-
ouest dont la vitesse était de l’ordre de 5 m.s -1 au sol et de 20 m.s -1 en altitude. Des conditions
météorologiques défavorables ont provoqué une inclinaison et un cisaillement du panache, avant
sa dispersion dans l’atmosphère. Les vents ont poussé les aérosols et les gaz radioactifs vers l’île
inhabitée de Morane, puis vers les Îles Gambier situées à 450 km de Mururoa. Les retombées
sont arrivées sur l’archipel des Gambier, le jour de l’essai de 16h20 à 17h40. Ces retombées ont
été confirmées par les résultats des mesures effectuées dans les différentes composantes de
l’environnement et de la chaîne alimentaire.

Atmosphère
L’air a fait l’objet d’une mesure d’indice bêta
global, de l’ordre de 60 Bq.m -3 . Le débit de dose
maximum enregistré pendant le passage du panache
a atteint 250 µGy.h -1 .

Dépôt au sol
Le dépôt maximum à Rikitea, sur l’île de
Mangareva, était de 5,9.10 7 Bq.m -2 .

Eau de boisson
Quatre mesures de l’indice bêta global des
eaux de boisson ont été effectuées : le 6 juillet (3
Bq.l -1 ), le 8 juillet (814 Bq.l -1 ), le 9 juillet (592 Bq.l -1 )
et le 21 juillet (2 Bq.l -1 ).

Végétaux
Les valeurs maximales de l’indice bêta global maximum de 8.10 5 Bq.kg -1 frais ont été
mesurées, le 7 juillet, dans des feuilles de radis et 6,7.10 5 Bq.kg -1 frais le 6 juillet dans une salade.

Mollusques et crustacés
Plusieurs mesures d’indice bêta global ont été effectuées sur des mollusques et crustacés
prélevés entre le 4 et le 19 juillet 1966. La valeur la plus élevée a été obtenue lors de la mesure
de la chair d’un bénitier (2,2.10 5 Bq.kg -1 ), les autres résultats étant beaucoup plus faibles : oursin
(1 258 Bq.kg -1 , le 4 juillet), turbo (370 Bq.kg -1 , le 4 juillet), crabe (555 Bq.kg -1 , le 19 juillet).

Poissons
Des mesures de l’indice bêta global sur les poissons ont été effectuées entre les 5 et
13 juillet. Le résultat le plus élevé, 130 Bq.kg -1 frais, a été obtenu sur une bonite pêchée dans le
lagon.
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 279

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 279

ESTIMATION DE L’EXPOSITION DE LA POPULATION DES ÎLES GAMBIER

Les doses ont été estimées à partir des résultats de mesure de la radioactivité et pour les
différentes voies d’atteinte : inhalation, exposition externe, consommation de produits locaux
(Tableau 61).
T ABLEAU 61.
Évaluation des doses (mSv) suite aux retombées de l’essai Aldébaran sur les îles Gambier.

Enfants de 1 à 2 ans Adultes


Doses (mSv)
Dose efficace Dose thyroïde Dose efficace Dose thyroïde

Inhalation (1) 0,2 - 2,2 3 - 30 0,12 - 1,2 1,3 - 13


Exposition externe au panache (1) 0,02 - 0,21 0,02 - 0,21
Exposition externe au dépôt (2) 2,9 2,9
Consommation d'eau 0 - 0,48 0-6 0 - 0,12 0 - 1,3
Consommation de végétaux (3) 0,1 - 1,7 1,3 - 19 0,09 - 1,4 1 - 14
Consommation de produits 1,9.10-3 - 1,88 0,022 - 22,8 9,5.10-4 - 0,8 9,8.10-3 - 8,6
marins (3)
Bilan 3,2 - 9,4 4,3 - 77,8 3,1 - 6,6 2,3 - 36,9

(1) Les doses dues à l’inhalation et à l’exposition externe au panache sont estimées à partir de
l’indice bêta global du dépôt (5,9.10 7 Bq.m -2) et de deux vitesses de dépôt, 10 -2 et 10 -1 m.s -1 .
Les indices bêta global des aérosols atmosphériques sont estimés, selon la vitesse de dépôt,
entre 1,2.10 5 et 1,2.10 4 Bq.m -3 , en moyenne, durant les 80 minutes de passage du nuage.
Cet intervalle de valeurs prend en compte les incertitudes sur la granulométrie de l’aérosol
atmosphérique composant le nuage radioactif. La dose maximale correspond à la vitesse de
dépôt de 10 -2 m.s -1 et la dose minimale à la vitesse de dépôt de 10 -1 m.s -1 . Les doses sont
calculées avec l’hypothèse que les populations étaient à l’extérieur des habitations pendant le
passage du panache et ne disposaient d’aucune protection particulière.
(2) Les doses dues à l’exposition externe par le dépôt sont calculées pour une durée d’intégration
de six mois, en supposant que les personnes passaient les deux tiers du temps à l’extérieur
des habitations.
(3) La borne supérieure de l’intervalle est la dose due à la consommation des végétaux dont les résultats
de mesure de l’activité sont plus élevés. La borne inférieure correspond à la consommation des
végétaux dont les résultats de mesure sont les plus faibles.

Les calculs de dose effectués avec l’ensemble des résultats de mesures environnementales
et alimentaires disponibles ont permis d’estimer :

• la dose efficace aux adultes entre 3,1 et 6,6 mSv et la dose efficace aux enfants âgés
de 1 à 2 ans entre 3,2 et 9,4 mSv.
• la dose à la thyroïde des adultes entre 2 et 40 mSv et la dose à la thyroïde des enfants
âgés de 1 à 2 ans entre 4 et 80 mSv. La dose de 80 mSv délivrée à la thyroïde des
enfants correspond à la dose maximale en supposant que l’enfant aurait consommé la
totalité de sa ration alimentaire en sélectionnant systématiquement les éléments les plus
contaminés.
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 280

280 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

L’essai Rigel, d’une puissance de 125 kt, a eu


lieu le 24 septembre 1966 à 7h00, heure locale, sur
une barge ancrée dans le lagon de Fangataufa. Au
moment de l’essai, les sondages météorologiques indi-
quaient des vents de sud-est, avec une vitesse de 5
m.s -1 entre le sol et 500 mètres d’altitude, des vents
variables et faibles entre 600 et 3 000 mètres d’alti-
tude. De 3 000 mètres jusqu’à la stratosphère, les
vents venaient de l’ouest, avec une vitesse moyenne
de 40 m.s -1 , atteignant une vitesse de 50 m.s -1 vers
12 000 mètres d’altitude.
Le front des retombées est arrivé sur les Îles
Gambier entre 11 et 14 heures après l’essai. Des pré-
cipitations d’une durée de 5 minutes se sont produites
19 heures après l’essai, ainsi que le 26 septembre
durant 1 heure (1,3 mm de hauteur de précipitation).

Atmosphère
Un indice bêta global moyen de l’air, sur 24 Prélèvement de végétaux-feuilles
heures, de 3,7 Bq.m -3 a été mesuré au PCR de sur le Mont Duff aux îles Gambier.
Mangareva. L’eau de pluie mesurée à ce même
poste indiquait un indice bêta global de 1,1.10 5 Bq.l -1 .

Dépôt au sol
Le dépôt a été estimé à partir de l’activité de l’air, associée à une vitesse de dépôt de
10 -1 m.s -1 et du dépôt humide calculé à partir de l’activité de l’eau de pluie et des quantités
tombées. Ainsi, le 26 septembre, après les pluies, l’indice bêta global du dépôt était de l’ordre
de 1,75.10 5 Bq.m -2 , à Mangareva.

Eau de boisson
L’activité de l’eau de boisson a été établie à partir de l’activité de l’eau de pluie.
L’expérience acquise autour d’autres essais a permis d’établir la valeur du rapport entre l’indice
bêta global de l’eau de pluie et l’indice bêta global de l’eau de boisson entre 12 et 20. L’indice
bêta global de l’eau de boisson le 26 septembre peut donc être estimé entre 9,2.10 3 et
5,5.10 3 Bq.l -1 .

ESTIMATION DE L’EXPOSITION DE LA POPULATION DES ÎLES GAMBIER

Les doses ont été estimées à partir des résultats de mesure de la radioactivité et pour les
différentes voies d’atteinte : inhalation, exposition externe, consommation de produits locaux
(Tableau 62).
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 281

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 281

T ABLEAU 62.
Évaluation des doses (mSv) suite aux retombées de l’essai Rigel sur les îles Gambier.
Enfants de 1 à 2 ans Adultes
Doses (mSv)
Dose efficace Dose thyroïde Dose efficace Dose thyroïde

Inhalation (1) 9,4.10-4 0,011 7,1.10-4 0,0052


Exposition externe au panache (1) 4,7.10-5 4,7.10-5
Exposition externe au dépôt (2) 0,019 0,019
Consommation d'eau (3) 0,38 - 0,64 4,4 - 7,3 0,1 - 0,17 1 - 1,7
Consommation de végétaux (4) 0,013 0,13 0,012 0,1
Consommation de produits 0,0016 - 0,033 0,02 - 0,38 0,00064 - 0,026 0,0067 - 0,26
marins (5)
Bilan 0,4 - 0,7 4,6 - 7,8 0,1 - 0,2 1,1 - 2,1

(1) Les doses dues à l’inhalation et à l’exposition externe au panache sont calculées avec l’hypothèse
que les populations étaient à l’extérieur des habitations pendant le passage du panache et ne
disposaient d’aucune protection particulière. Ces doses sont estimées à partir de l’indice bêta
global du dépôt (1,75.10 5 Bq.m -2 ) et d’une vitesse de dépôt de 10 -1 m.s -1 . Les indices bêta
global des aérosols atmosphériques sont estimés à 160 Bq.m -3 , en moyenne, pendant la
durée de passage du nuage sur les Îles Gambier.
(2) Les doses dues à l’exposition externe par le dépôt sont calculées pour une durée d’intégration de
six mois, en supposant que les personnes passaient les deux tiers du temps à l’extérieur des
habitations.
(3) L’activité de l’eau de boisson étant sous la forme d’un intervalle de valeurs, les doses dues à
la consommation d’eau de boisson sont sous la forme d’un intervalle de valeurs dont la valeur
maximum correspond à l’activité maximum de cette eau.
(4) L’indice bêta global des légumes-feuilles est établi à partir du dépôt, sur la base d’un rendement
de 1 kg.m -2 et d’un rapport de captation de 0,1 qui amène l’indice bêta global des légumes-
feuilles à 1,75.10 4 Bq.kg -1 .
(5) Les doses dues à la consommation de produits marins sont déduites des rapports établis, à
partir des observations de terrain, entre les mesures de l’indice bêta global des dépôts au sol
et les doses dues à la consommation de produits de la pêche. Ces rapports varient de 2,2.10 -6 à
1,1.10 -7 et correspondent respectivement aux doses maximale et minimale.

Les calculs ont permis d’estimer :


• la dose efficace aux adultes entre 0,1 et 0,23 mSv et la dose efficace aux
enfants âgés de 1 à 2 ans entre 0,4 et 0,7 mSv.
• la dose à la thyroïde des adultes entre 1,1 et 2,1 mSv et la dose à la thyroïde
des enfants âgés de 1 à 2 ans entre 4,6 et 7,8 mSv.
Les doses maximales (efficaces et à la thyroïde) pour les adultes et les enfants sont
principalement dues à la consommation d’eau de boisson.
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 282

282 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

L’essai Phoebé, d’une puissance de 4 kt,


a été réalisé sous ballon par 230 mètres d’alti-
tude sur la site de Mururoa, le 8 août 1971 à
9h30, heure locale. Au moment de l’essai, la
nébulosité était importante et les vents modérés,
avec une visibilité supérieure à 15 km. Au sol,
les vents venaient du sud-est avec une vitesse
de l’ordre de 5 m.s -1 . Au-delà de 1 500 mètres
d’altitude, les vents venaient de l’ouest et leur
vitesse variait de 20 à 25 m.s -1 . Après l’essai,
des conditions météorologiques défavorables ont
entraîné le nuage radioactif vers les Îles Gambier
situées à 450 km de Mururoa. Les populations
de Rikitea et Taku sont restées dans les abris de
prévoyance pendant 17 heures, de 4h30 à
21h30 après l’essai. Les retombées arrivèrent
sur les Îles Gambier 6h10 après l’essai, accom-
pagnées d’une pluie qui a duré 30 minutes.

Atmosphère
Une retombée a été constatée aux Îles Gambier, entre 6h10 et 6h40 après l’essai. Le
débit de dose maximal a été mesuré à 50 µGy.h -1 pendant une brève période. L’indice bêta
global de l’air a atteint un maximum de 6 Bq.m -3 à Totegegie, 6h30 après l’essai, avec un débit
de dose associé de 14 µGy.h -1 .

Dépôt au sol
Un indice bêta global de 5,18 10 6 Bq.m -2 a été mesuré sur un dépôt prélevé à Totegegie,
6 heures et 30 minutes après l’essai.

Eau de boisson
L’activité de l’eau distribuée par le système d’adduction à Rikitea, principal village des Îles
Gambier, ainsi que celle de l’eau distribuée à partir de la citerne de Taku, petit village de quelques
dizaines d’habitants, ont fait l’objet de contrôles réguliers (Tableaux 63 et 64).

T ABLEAU 63.
Activité volumique en 131 I (Bq.l -1 ) de l’eau de boisson prélevée à Taku.
Points de prélèvements
Date de prélèvement
1 2 3 4 5 6 7 8

10/08/1971 - - - - - - - 2 300
15/08/1971 454 736 1 190 248 7 287 693 1 252
17/08/1971 115 185 405 123 28 279 83 11
24/08/1971 < LD 120 80 4 38 10 260 < LD
31/08/1971 < LD 67 < LD 3 14 86 132 2
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 283

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 283

T ABLEAU 64.
Activité volumique en 131 I (Bq.l -1 ) de l’eau de boisson prélevée à Rikitea.

Points de prélèvements
Date de prélèvement
Source Robinet

10/08/1971 1,37 0,8


17/08/1971 2 90
24/08/1971 12 15

Végétaux
Les légumes-feuilles ont fait l’objet de contrôles réguliers. L’indice bêta global le plus
élevé, 4,5.10 5 Bq.kg -1 , a été mesuré le 12 août dans des prélèvements de salade non lavés.

Mollusques
Un indice bêta global de 950 Bq.kg -1 , dont 183 Bq.kg -1 de 131 I, a été mesuré le 25 août
dans un bénitier prélevé le 11 août. Ceci correspond à un indice bêta global égal à 1,73.10 4
Bq.kg -1 , dont 615 Bq.kg -1 en 131 I à la date du prélèvement. Une activité de 55,8 Bq.kg -1 de 131 I
a été mesurée le 25 août dans un turbo prélevé le 11 août, ce qui correspond à une activité de
188 Bq.kg -1 en 131 I à la date du prélèvement.

ESTIMATION DE L’EXPOSITION DE LA POPULATION DES ÎLES GAMBIER


Les doses ont été estimées à partir des résultats de mesure de la radioactivité et pour les
différentes voies d’atteinte : inhalation, exposition externe, consommation de produits locaux
(Tableau 65).

T ABLEAU 65.
Évaluation des doses (mSv) suite aux retombées de l’essai Phoebé sur les îles Gambier.
Enfants de 1 à 2 ans Adultes
Doses (mSv)
Dose efficace Dose thyroïde Dose efficace Dose thyroïde

Inhalation (1) 0,00076 - 0,0031 0,0096 - 0,039 0,00053 - 0,0021 0,0042 - 0,017
Exposition externe au panache (1) 0,00052 - 0,002 0,00052 - 0,002
Exposition externe au dépôt (2) 0,11 0,11
Consommation d'eau (3) 0,37 - 7 4,3 - 88,2 0,1 - 1,8 1 - 19,4
Consommation de végétaux (4) 0,028 - 0,72 0,34 - 9 0,025 - 0,64 0,27 - 7,1
Consommation de produits 0,015 - 0,048 0,18 - 0,58 0,0058 - 0,019 0,06 - 0,2
marins (5)
Bilan 0,5 - 7,9 4,8 - 97,8 0,2 - 2,6 1,3 - 26,7

(1) Les doses dues à l’inhalation et à l’exposition externe due au panache sont calculées pour une
activité des aérosols atmosphériques estimée à partir des dépôts (5,18.10 6 Bq.m -2 ). Pour tenir
compte des incertitudes sur la granulométrie des aérosols atmosphériques, un intervalle de
vitesse de dépôts compris entre 5.10 -2 m.s -1 et 2.10 -1 m.s -1 a été retenu.
L’indice bêta global des aérosols atmosphériques est estimé, selon la vitesse de dépôt, entre
5,7.10 4 et 1,5.10 4 Bq.m -3 , en moyenne, pendant les trente minutes du passage du nuage sur
les Îles Gambier.
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 284

284 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

Les doses sont calculées dans une fourchette correspondant à l’intervalle des vitesses de
dépôt. Les doses dues à l’inhalation sont calculées avec un facteur de protection égal à 0,1
car les populations étaient à l’intérieur des abris de prévoyance pendant le passage du nuage.
Les doses dues à l’exposition externe résultant du passage du nuage sont calculées avec un
facteur de protection égal à 0,5.
(2) Les doses dues à l’exposition externe par le dépôt sont calculées pour une durée d’intégration
de six mois, en supposant que les personnes passaient les deux tiers du temps à l’extérieur
des habitations. Les populations ayant séjourné durant les 24 premières heures dans les abris
de prévoyance, la dose durant cette période a été considérée comme nulle.
(3) La valeur maximale correspond à la dose reçue par un habitant de Taku et la valeur minimale
à celle reçue par un habitant de Rikitea.
(4) La borne supérieure de l’intervalle est la dose due à la consommation des végétaux dont les
résultats de mesure de l’activité sont plus élevés. La borne inférieure correspond à la con-
sommation des végétaux dont les résultats de mesure sont les plus faibles.
(5) La borne supérieure de l’intervalle est la dose due à la consommation des produits de la mer dont
les résultats de mesure de l’activité sont plus élevés (bénitier) car présentant des facteurs de
reconcentration plus élevés (mollusques filtreurs) la borne inférieure de l’intervalle est la dose due
à la consommation des produits de la mer dont les résultats de mesure de l’activité sont moins
élevés (turbo) car présentant des facteurs de reconcentration plus faibles (mollusques brouteurs).

Les calculs de dose effectués avec l’ensemble des résultats de mesures environnementales et
alimentaires disponibles ont permis d’estimer :

• la dose efficace aux adultes entre 0,2 et 2,6 mSv et la dose efficace aux enfants âgés de
1 à 2 ans entre 0,5 et 7,9 mSv.
• la dose à la thyroïde des adultes entre 1,3 et 26,7 mSv et la dose à la thyroïde des
enfants âgés de 1 à 2 ans entre 4,8 et 98 mSv. La dose de 98 mSv délivrée à la thyroïde
des enfants correspond à une population enfantine ayant consommé des denrées produites
localement parmi les plus contaminées. La principale contribution aux doses efficaces et à
la thyroïde est la consommation d’eau. Les doses maximales sont obtenues à Taku (île de
Mangareva) et correspondent à la consommation des eaux du puits communal.

Autres essais ayant contribué plus faiblement aux retombées sur les Îles Gambier :

Eridan (1970)
Une retombée directe est détectée aux îles Gambier le 25 juin à 01h00. Le débit de dose
maximal de 0,95 µGy.h -1 était atteint le 25 juin à 12h30. L’activité volumique moyenne de l’air le
25 juin était de 5,5 Bq.m -3 .

Toucan (1970)
Des retombées directes ont été détectées aux îles Gambier, le 7 août, à 14h00. Le maximum
a été atteint le 8 août, entre 1h00 et 3h00, avec 0,84 µGy.h -1 . L’activité volumique atmosphérique
moyenne sur 24 heures était de 0,55 Bq.m -3 avec, pendant une heure, un pic à 3,5 Bq.m -3 .
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 285

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 285

VI.6.6.3 - RETOMBÉES SUR L’ÎLE DE TAHITI

Mahina TAHITI N
Papenoo
Pirae Arue
L’essai Centaure, d’une puissance de Tiarei
Papeete
4 kt, a été réalisé sous ballon, par 270 Faaa Mahaena
Océan
mètres d’altitude, sur le site de Mururoa, le Hitiaa
Pacifique Sud
Mont Orohena
17 juillet 1974 à 8h00, heure locale. Il a été Punaauia
(2 241 m)

effectué sur la limite Nord d’une cellule anti-


Tahiti Nui Faaone
cyclonique en voie d’affaiblissement centrée Presqu'île
de
sur l’atoll de Morane ; avec des vents de Paea
Taravao Taiarapu
Pueu
basse couche venant du sud-est, d’une Tautira

vitesse de l’ordre de 5 m.s -1 tendant à faiblir Papara


Mataiea
Papeari

dans la journée du 17 juillet. Dix minutes Vairao Tahiti Iti


après l’essai, la tête du nuage s’est détachée 0 10 20 km
Teahupoo
du pied et a culminé à 5 200 mètres, une alti-
tude plus basse que les estimations prévues.
Le nuage principal a généré plusieurs nuages
secondaires qui ont suivi des trajectoires dis-
tinctes, dirigées vers l’ouest. Ces conditions
météorologiques ont entraîné le nuage radioactif
vers l’île de Tahiti. Les retombées ont abordé Tahiti T ABLEAU 66.
le 19 juillet par la côte Est. Activités volumiques (Bq.m -3 ) des radio-
Des précipitations (1,4 mm) liées aux effets nucléides émetteurs gamma présents
du relief ont bloqué les nuages au-dessus de Tahiti, sur les deux filtres prélevés à Mahina
entraînant des dépôts au sol hétérogènes. D’Arue à le 19 juillet 1974.
Papara, sur la côte Ouest qui est la plus peuplée, le Filtre 1 Filtre 2
niveau de la retombée a été dix fois plus faible que Radionucléides (629 Bq.m-3) (1 180 Bq.m-3)
sur la côte Est et la presqu’île, où il a été sensible- 95Zr 3 8
ment plus élevé. Compte tenu des temps de trans- 95Nb 0,1 0,35
port des aérosols jusqu’à Tahiti, les radionucléides 97Zr 23 54
prépondérants étaient les 239 Np, 105 Rh, 133 I, 97Nb 25 58
132 I et 131 I, représentant respectivement 12,2%,
99Mo 36 130
7,6%, 7%, 5,2% et 2% de l’activité. 99mTe 39 142
103Ru 4 11
131I 12 37
Atmosphère 132Te 21 60
À Tahiti, le 19 juillet, l’indice alpha global de 132I 22 62
l’atmosphère était de 0,044 Bq.m -3 , dont 70% de 133I 15 43
239 Pu, et l’indice bêta global était de 740 Bq.m -3 ,
136Cs 0,4 1,62
dont 1% dû aux iodes radioactifs ; les activités volu- 137Cs - 0,05
miques étant de l’ordre du Bq.m-3 pour les 89Sr et 90Sr. 140Ba 10 37
À Mahina, les indices bêta global moyens sur 140La 7 24
24 heures, mesurés sur deux filtres positionnés le 141Ce - 11
19 juillet, étaient de 629 et 1 180 Bq.m -3 . Les filtres 143Ce 24 91
ont également fait l’objet d’une spectrométrie gamma 239Np 83 278
directe (Tableau 66). 239+240Pu - 0,07
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 286

286 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

Dépôt au sol
Les mesures effectuées ont montré une grande hétérogénéité des dépôts sur les zones
côtières (Fig. 159). Compte tenu de cette hétérogénéité, différentes estimations de dose ont été
effectuées, considérant toutes les populations concernées de Tahiti.
Ces estimations de dose ont été faites pour :

• Hitiaa, où l’activité du dépôt a été trois fois plus élevée (7,5.10 6 Bq.m -2) que celle mesurée à
Mahina (2,5.10 6 Bq.m -2) ;
• Pirae, où l’activité du dépôt était égale à 3,3.10 5 Bq.m -2 ;
• le sud de Teahupoo et le plateau de Taravao, où les activités des dépôts ont été maximales,
2,75.10 7 Bq.m -2, du fait des précipitations plus importantes dans ces deux régions.

Eaux de boisson
L’indice bêta global et l’activité des radionucléides émetteurs gamma présents dans l’eau
de boisson ont été suivis au cours du temps, à Hitiaa, (Tableau 67) ainsi qu’à Pirae et Teahupoo
pour l’indice bêta global (Tableau 68). La valeur la plus élevée de l’indice bêta global, 7 000 Bq.l -1 ,
a été atteinte le 19 juillet, à Hitiaa.

T ABLEAU 68.
T ABLEAU 67. Activités volumiques (Bq.l -1 ) des
Activités volumiques (Bq.l -1 ) des radionucléides mesurés par radionucléides mesurés par spectro-
spectrométrie gamma dans l’eau de boisson prélevée à Hitiaa, métrie gamma dans l’eau de boisson
du 19 juillet au 1 er août 1974. prélevée à Pirae et à Teahupoo,
du 19 juillet au 1 er août 1974.
Activité β 131I 132I 133I 140Ba-La 103Ru 95Zr
Date
global Activité β global Activité β global
Date
Pirae Teahupoo
19/07 7 061 88 600 230 44 34 7
20/07 2 717 48 47 26 17 19/07 733 941
21/07 602 12 27 19 4 20/07 463 144
22/07 403 21/07 302 261
23/07 281 5 21 7 1 22/07 142 275
24/07 1 320 35 109 45 139 23/07 104 140
25/07 512 6 15 6 24/07 221 47
26/07 140 4 3 4 25/07 223 51
27/07 48 4 5 26/07 221 88
28/07 150 27/07 60 93
29/07 30 1 28/07 47 48
30/07 100 1 29/07 34 4
31/07 8 30/07 23 11
01/08 44 31/07 24 47
01/08 40 8

Lait de vache
En 1973, le lait produit à Tahiti représentait 20% de la consommation totale. Il provenait du
plateau de Taravao, pour 800 000 litres, et des régions de Mataiea et Atimaono, pour 300 000 litres.
Ce lait servait à la production de produits dérivés (yaourts, glaces, fromages) et de lait pasteurisé.
Une partie de ce lait n’était donc pas habituellement consommé immédiatement après sa production.
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 287

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 287

Vaches dans les paturages de Tahiti.

D’autres élevages, comportant au total 92 vaches laitières, ont produit un lait dont la
consommation locale a été immédiate. L’activité volumique du lait, en particulier celle de 131 I,
produit par l’un de ces élevages, à Hitiaa, a été suivie journalièrement entre le 19 juillet et le 16
septembre 1974 (Fig. 187). Ces données complètent celles obtenues pour le lait commercialisé
au marché de Papeete (Fig. 168).

Bq.l-1
1 400

1 200

1 000

800

600

400

200

0
19 26 02 09 16 23 30 06 13 16
Juillet Août Septembre

F IG. 187. - Activité volumique (Bq.l -1) de 131 I dans le lait produit à Hitiaa, entre le 19 juillet et le 16 septembre
1974.
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 288

288 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

Légumes
Les mesures réalisées sur les végétaux ont porté sur de nombreuses variétés de la production
locale : salades, choux chinois, fafa (variété d’épinard), poireaux, etc. Les valeurs maximales
de l’indice bêta global ont été mesurées, le 19 juillet 1974, dans le fafa : 410 000 Bq.kg -1 frais,
dont 8 000 Bq.kg -1 frais pour 131 I, 13 000 Bq.kg -1 frais pour 132 I, 11 000 Bq.kg -1 frais pour
133 I et 10 000 Bq.kg -1 frais pour 140 La. À Teahupoo, le 19 juillet, l’activité dans le fafa était de 2
070 Bq.kg -1 frais, pour 140La, et 4 290 Bq.kg -1 frais, pour 131I. L’activité mesurée dans les salades
était beaucoup plus faible, inférieure à 100 Bq.kg -1 frais.

Viandes et produits animaux


Compte tenu des transferts et des courtes périodes radioactives des radionucléides
prépondérants, les niveaux d’activité des viandes étaient faibles. L’indice bêta global des œufs de
poules prélevés à Mahina était de 6 500 Bq.kg -1 frais, le 26 juillet. À Hitiaa, l’indice bêta global
des œufs prélevés était mesuré à 4 660 Bq.kg -1 frais, le 26 juillet.

Produits de la mer
Les niveaux d’activité des produits de mer ont été faibles, compte tenu des transferts et des
courtes périodes radioactives des principaux radionucléides. Par exemple, l’activité due à l’iode-
131 a atteint 13 Bq.kg -1 dans un rouget et 8 Bq.kg -1 dans la chair d’un bénitier. L’activité maximum
due à l’iode-131 a été de 32 Bq.kg -1 dans un ature, le 14 août 1974.

ESTIMATION DE L’EXPOSITION DES POPULATIONS DE TAHITI

L’hétérogénéité des dépôts au sol et le contraste entre les habitudes alimentaires des
populations urbaines et celles des populations rurales de l’île nécessitent de faire des estimations
de dose différentes, tenant compte de ces facteurs. Trois estimations de dose ont été faites :

• La première pour Pirae dont les sols ont été épargnés par les pluies pendant les retombées
et dont les habitants ont des habitudes de vie urbaines.
• La deuxième pour Hitiaa où des pluies ont accru les retombées et dont les habitants ont des
habitudes de vie rurales.
• Enfin, la troisième estimation de dose concerne deux zones de l’île de Tahiti ayant des
caractéristiques communes : le plateau de Taravao et la région de Teahupoo. En effet, toutes
deux ont fait l’objet de dépôts pluvieux et abritent des activités d’élevage, avec une présence
réduite de travailleurs agricoles.

Ces trois zones ont des profils démographiques très différents. La zone de Pirae, comme
celle de Papeete regroupe la plus grande part des habitants de l’île, alors que la zone d’Hitiaa
regroupe quelques milliers d’habitants. Les zones de Taravao et Teahupoo sont fréquentées par
quelques centaines de personnes.

Estimation de l’exposition de la population de Pirae

Les doses ont été estimées à partir des résultats de mesure de la radioactivité et pour les
différentes voies d’atteinte : inhalation, exposition externe, consommation de produits locaux
(Tableau 69).
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 289

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 289

T ABLEAU 69.
Évaluation des doses (mSv) suite aux retombées de l’essai Centaure sur Tahiti à Pirae.
Enfants de 1 à 2 ans Adultes
Doses (mSv)
Dose efficace Dose thyroïde Dose efficace Dose thyroïde

Inhalation (1) 0,05 0,57 0,046 0,27


Exposition externe au panache (1) 0,002 0,002
Exposition externe au dépôt (2) 0,053 0,053
Consommation de lait (3) 0,36 4,5 0,03 0,4
Consommation d'eau (4) 0,05 0,6 0,016 0,2
Consommation d'œuf et de viande 0,095 1,28 0,046 0,57
Consommation de végétaux (5) 0,35 4,3 0,15 1,7
Consommation de produits 0,23 2,86 0,11 1,22
marins (6)
Bilan 1,2 14,1 0,5 4,4

(1) Les doses dues à l’inhalation et à l’exposition externe au panache ont été calculées sur la base
d’une activité des aérosols atmosphériques estimée à partir du dépôt (3,3.10 5 Bq.m -2 ) et pour
une vitesse de dépôt de 5.10 -3 m.s -1 , correspondant à une situation de temps sec. L’indice
bêta global des aérosols atmosphériques est estimé à 1 500 Bq.m -3 , en moyenne, durant le
passage du nuage sur Tahiti, soit douze heures et trente minutes. Cette dose est estimée en
supposant que les populations étaient à l’extérieur des habitations pendant le passage du
panache.
(2) Les doses dues à l’exposition externe au dépôt sont estimées pour une présence de six mois,
en supposant que les populations étaient à l’extérieur des habitations les deux tiers du temps.
L’indice bêta global retenu pour le dépôt est 3,3.10 5 Bq.m -2 .
(3) La consommation de lait a été estimée à un demi-litre par jour, pour les enfants de 1 à 2 ans,
et à 30 cl par jour, pour les adultes, sur la période allant du 19 juillet au 26 août, date à partir de
laquelle l’activité du lait a suffisamment décru pour ne plus être prise en compte.
(4) La consommation quotidienne d’eau a été supposée de 1 litre par jour, pour les enfants de 1
à 2 ans, et de 2,7 litres, pour les adultes, sur la période allant du 19 juillet au 1er août, date
à partir de laquelle l’activité de l’eau a suffisamment décru pour ne plus être prise en compte.
(5) La dose a été calculée pour une consommation quotidienne de 30 grammes de végétaux, pour les
enfants de 1 à 2 ans, et de 100 grammes, pour les adultes, pendant une période de 6 mois.
(6) Les doses ont été calculées pour une consommation quotidienne de 100 grammes de poisson
et 15 grammes de mollusques et crustacés, pour les enfants de 1 à 2 ans et de 370 grammes
de poisson et 50 grammes de mollusques et crustacés, pour les adultes, pendant une période
de 6 mois.

Estimation des doses pour les populations de Hitiaa

Les doses ont été estimées à partir des résultats de mesure de la radioactivité et pour les
différentes voies d’atteinte : inhalation, exposition externe, consommation de produits locaux
(Tableau 70).
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 290

290 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

T ABLEAU 70.
Évaluation des doses (mSv) suite aux retombées de l’essai Centaure sur Tahiti à Hitiaa.
Enfants de 1 à 2 ans Adultes
Doses (mSv)
Dose efficace Dose thyroïde Dose efficace Dose thyroïde

Inhalation (1) 0,57 6,4 0,52 3,1


Exposition externe au panache (1) 0,025 0,025
Exposition externe au dépôt (2) 1,2 1,2
Consommation de lait (3) 2,1 25 0,2 1,7
Consommation d'eau (4) 0,1 1,3 0,03 0,3
Consommation d'œuf et de viande 0,051 0,68 0,0246 0,25
Consommation de végétaux (5) 0,95 11,9 0,41 4,5
Consommations de produits 0,274 3,4 0,177 1,96
marins (6)
Bilan 5,3 48,7 2,6 11,8

(1) Les doses dues à l’inhalation et à l’exposition externe au panache ont été calculées à partir
d’une activité des aérosols atmosphériques estimée à partir du dépôt (7,5.10 6 Bq.m -2 ) et pour
une vitesse de dépôt de 10 -2 m.s -1 , correspondant à une situation de temps pluvieux. L’indice
bêta global des aérosols atmosphériques est estimé à 16 500 Bq.m -3 , en moyenne, durant le
passage du nuage sur Tahiti, soit douze heures et trente minutes. Cette dose est estimée en
supposant que les populations étaient à l’extérieur des habitations pendant le passage du
panache.
(2) Les doses dues à l’exposition externe au dépôt sont estimées pour une présence de six mois,
en supposant que les populations étaient à l’extérieur des habitations les deux tiers du temps.
L’indice bêta global retenu pour le dépôt est 7,5.10 6 Bq.m -2 .
(3) La consommation de lait a été estimée à un demi-litre par jour, pour les enfants de 1 à 2 ans,
et à 30 cl par jour, pour les adultes, sur la période allant du 19 juillet au 26 août, date à partir de
laquelle l’activité du lait a suffisamment décru pour ne plus être prise en compte.
(4) La consommation quotidienne d’eau a été supposée d’un demi-litre par jour, pour les enfants
de 1 à 2 ans, et de 1 litre pour, les adultes, sur la période allant du 19 juillet au 1er août, date
à partir de laquelle l’activité du lait a suffisamment décru pour ne plus être prise en compte.
(5) La dose a été calculée pour une consommation quotidienne de 30 grammes de végétaux, pour les
enfants de 1 à 2 ans, et de 100 grammes, pour les adultes, pendant une période de 6 mois.
(6) Les doses ont été calculées pour une consommation quotidienne de 100 grammes de poisson
et 35 grammes de mollusques et crustacés, pour les enfants de 1 à 2 ans. Les doses ont été
calculées pour une consommation quotidienne de 470 grammes de poisson et 210 grammes
de mollusques et crustacés, pour les adultes, pendant une période de 6 mois.

Estimation de l’exposition des populations de Teahupoo et Taravao

Les doses ont été estimées à partir des résultats de mesure de la radioactivité et pour les
différentes voies d’atteinte : inhalation, exposition externe, consommation de produits locaux
(Tableau 71).
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 291

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 291

T ABLEAU 71.
Évaluation des doses (mSv) suite aux retombées de l’essai Centaure sur Tahiti à Teahupoo et Taravao.
Enfants de 1 à 2 ans Adultes
Doses (mSv)
Dose efficace Dose thyroïde Dose efficace Dose thyroïde

Inhalation (1) 2,1 24,2 1,9 11


Exposition externe au panache (1) 0,09 0,09
Exposition externe au dépôt (2) 1,1 1,1
Consommation de lait (3) 0,36 4,5 0,03 0,4
Consommation d'eau (4) 0,018 0,22 0,0045 0,05
Consommation d'œuf et de viande 0,0461 0,61 0,025 0,23
Consommation de végétaux (5) 0,56 6,9 0,225 2,6
Consommation de produits 0,274 3,4 0,177 1,96
marins (6)
Bilan 4,5 39,8 3,6 16,2

(1) Les doses dues à l’inhalation et à l’exposition externe au panache ont été calculées à partir
d’une activité des aérosols atmosphériques estimée à partir du dépôt (2,7.10 7 Bq.m -2 ) et pour
une vitesse de dépôt de 10 -2 m.s -1 , correspondant à une situation de temps pluvieux. L’indice
bêta global des aérosols atmosphériques est estimé à 60 000 Bq.m -3 , en moyenne, durant le
passage du nuage sur Tahiti, soit douze heures et trente minutes. Cette dose est estimée en
supposant que les populations étaient à l’extérieur des habitations pendant le passage du
panache.
(2) Les doses dues à l’exposition externe au dépôt sont estimées pour une présence de six mois,
en supposant que les personnes ayant des activités dans ces zones y étaient présentes
durant 4 heures par jour. L’indice bêta global retenu pour le dépôt est de 2,75.10 7 Bq.m -2 .
(3) La consommation de lait a été estimée à un demi-litre par jour, pour les enfants de 1 à 2 ans,
et à 30 cl par jour, pour les adultes, sur la période allant du 19 juillet au 26 août, date à partir de
laquelle l’activité du lait a suffisamment décru pour ne plus être prise en compte.
(4) La consommation quotidienne d’eau a été supposée d’un demi litre par jour, pour les enfants
de 1 à 2 ans, et de 1 litre, pour les adultes, sur la période allant du 19 juillet au 1er août, date
à partir de laquelle l’activité du lait a suffisamment décru pour ne plus être prise en compte.
(5) La dose a été calculée pour une consommation quotidienne de 30 grammes de végétaux, pour
les enfants de 1 à 2 ans, et de 100 grammes, pour les adultes, pendant une période de 6 mois.
(6) Les doses ont été calculées pour une consommation quotidienne de 100 grammes de poisson
et 35 grammes de mollusques et crustacés, pour les enfants de 1 à 2 ans, et de 470 grammes
de poisson et 210 grammes de mollusques et crustacés, pour les adultes, pour une période
de six mois.

La dose efficace maximale délivrée à un enfant de 1 à 2 ans, tranche d’âge présentant les
doses les plus élevées, vivant à Hitiaa, a été de l’ordre de 5 mSv, en 1974. La contribution de la
dose due à la consommation de lait représente 60% de la dose efficace par ingestion et 40% de la
dose efficace totale.
La dose efficace maximale pour un enfant de 1 à 2 ans ayant séjourné à Taravao ou à
Teahupoo pendant le passage du nuage, puis durant quatre heures par jour, est de l’ordre de 4,5
mSv en 1974. Dans ce cas, la dose efficace est due pour près de 50% à l’inhalation et pour près
de 25% à l’exposition au dépôt.
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 292

292 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

La dose efficace pour un enfant vivant à Pirae ou à Papeete, dans des conditions de vie
urbaines, est de l’ordre de 1 mSv. Elle est due, pour un tiers, à la consommation de lait et pour
un tiers de végétaux.
La dose efficace maximale pour un adulte ayant séjourné à Taravao ou à Teahupoo, pendant
le passage du nuage, puis durant quatre heures par jour, est de l’ordre de 3,6 mSv. L’inhalation
contribue à plus de 50% à cette dose.
À Pirae, la dose efficace maximale pour un adulte est de 0,5 mSv, due, pour plus de 30%,
à la consommation de végétaux. À Hitiaa, la dose efficace maximale pour un adulte, due, pour
près de 50%, à l’exposition au dépôt, est de 2,6 mSv.
En 1974, une dose à la thyroïde, de l’ordre de 50 mSv, a pu être délivrée aux enfants âgés
de 1 à 2 ans vivant à Hitiaa qui auraient consommé du lait produit localement.
Pour un adulte présent à Taravao ou à Teahupoo pendant le passage du nuage, puis
durant quatre heures par jour, la dose à la thyroïde serait de l’ordre de 16 mSv et pour un enfant,
la dose à la thyroïde serait de l’ordre de 40 mSv, pour plus de 60% à cause de l’inhalation des
isotopes de l’iode.
À Pirae, les doses à la thyroïde sont dues pour 30% à la consommation de lait et de végétaux
pour les enfants de 1 à 2 ans, et pour 40 % à la consommation de végétaux pour les adultes.
À Hitiaa, une dose de l’ordre de 12 mSv a pu être délivrée à la thyroïde des adultes,
essentiellement à cause de la consommation de végétaux (40%) et à l’inhalation d’iode pendant le
passage du panache (25%).

Les calculs de dose effectués avec l’ensemble des résultats de mesures envi-
ronnementales et alimentaires disponibles ont permis d’estimer :

• la dose efficace aux adultes entre 0,5 et 3,6 mSv et la dose efficace aux
enfants âgés de 1 à 2 ans entre 1,2 et 5,3 mSv.
• la dose à la thyroïde des adultes entre 4,4 et 16,2 mSv et la dose à la
thyroïde des enfants âgés de 1 à 2 ans entre 14,1 et 48,7 mSv.

VI.6.6.4 - BILAN GLOBAL DES DOSES

Les expositions maximales de la population vivant en Polynésie française sont celles calculées
pour les personnes résidant sur les îles de Tureia et de Tahiti, ainsi que dans l’archipel des
Gambier (Tableau 72). Pour chaque essai indiqué, la dose efficace à l’adulte calculée après l’essai par
le SMSR est indiquée dans la colonne 4. Les nouvelles estimations de dose effectuées en 2006
par le CEA pour les essais prépondérants, Aldébaran, Rigel, Arcturus, Encelade, Phoebé et
Centaure, figurent en colonnes 5 à 8. Elles recoupent celles réalisées par le SMSR.
Les doses efficaces aux adultes dues aux retombées associées à cinq autres expéri-
mentations : Umbriel, Toucan, Dragon, Rigel et Éridan ont également été estimées après essai.
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 293

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 293

T ABLEAU 72.
Bilan des doses reçues par les populations des îles et atolls les plus exposés
pour les essais dont les retombées ont été les plus importantes.

Estimation SMSR Estimation CEA 2006 (mSv)

Dose Dose Dose Dose Dose


Lieu Essai Année efficace efficace thyroïde efficace thyroïde
adulte enfant de enfant de adulte adulte
(mSv) 1 à 2 ans 1 à 2 ans

Aldébaran 1966 5,5 3 à 10 4 à 78 3à7 2 à 40


Rigel 1966 0,4 à 0,71 4,6 à 7,8 0,1 à 0,23 1,1 à 2,1
Gambier Éridan 1970 0,1
Toucan 1970 0,2
Phoebé 1971 1,2 0,5 à 7,9 4,8 à 98 0,2 à 2,6 1,3 à 26,7

Rigel 1966 0,1 à 0,23 0,6 à 2 0,06 à 0,15 0,15 à 1


Arcturus 1967 1 0,9 à 4 2 à 38 0,79 à 3,2 0,9 à 25
Tureia
Dragon 1970 0,16
Encelade 1971 1,3 1,5 à 3,5 4 à 27 1,3 à 1,9 1à8
Reao Toucan 1970 0,15

Hereheretue Umbriel 1972 0,2


Tahiti :
Pirae Centaure 1974 0,8 1,2 14 0,5 4
Hitiaa Centaure 1974 5,3 49 2,6 12
Teahupoo Centaure 1974 4,5 40 3,6 16

VI.6.6.5 - SUIVI RADIOLOGIQUE DES POPULATIONS

Dans le cadre de la surveillance radiologique de la population résidant en Polynésie, 25


campagnes de mesures anthropogammamétriques sur les populations des îles les plus proches
des sites d’expérimentations ont eu lieu, entre 1966 et 1974 (Tableau 73).
La première campagne de mesures anthropogammamétriques des Îles Gambier, effectuée
entre le 7 et le 16 juillet 1966, a porté sur 5 personnes résidant à Mangareva pendant le passage
du nuage dû à l’essai Aldébaran. Les résultats des anthropogammamétries font apparaître une
exposition interne par les radionucléides à vie courte, sans pour autant entraîner des doses efficaces
supérieures à quelques centaines de microsieverts et des doses à la thyroïde supérieures à
quelques millisievierts. Du 10 au 20 août 1966, une campagne de contrôle de la population a
porté sur 223 personnes résidant dans l’archipel des Gambier. Les résultats de cette campagne
effectuée un peu plus d’un mois après l’essai Aldébaran ont mis en évidence une très faible
exposition interne pour 17 personnes et l’absence d’exposition interne pour les 206 autres. Deux
autres campagnes, menées à Tureia du 4 au 13 juillet puis du 4 au 5 août 1967, à la suite de
l’essai Arcturus ont mis en évidence que 14 et 28 personnes respectivement avaient un indice de
tri supérieur à 5.
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 294

294 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

T ABLEAU 73.
Résultats des campagnes de mesures anthropogammamétriques réalisées, entre 1966 et 1974,
sur les populations les plus proches des sites d’expérimentatations.

Nombre de contrôles en fonction


Année Lieu Date de l’indice de tri
<2 >2à<5 >5

1966 GAMBIER 7 au 16 juillet 5


GAMBIER 10 au 20 août 206 17
HAO 5 au 8 octobre 76 32
TUREIA 12 novembre 60
GAMBIER 6 au 12 décembre 307 3
1967 PUKARUA 19 au 20 avril 93
REAO 21 au 22 avril 124 2
HAO 15 au 30 juin 70
TUREIA 4 au 13 juillet 14
REAO 13 juillet 6
PUKARUA 18 juillet 6
TUREIA 4 au 5 août 25 28
1968 PUKARUA 2 et 3 avril 16 46
TUREIA 5 au 11 avril 15 30 1
REAO 17 avril 22 44
VAIRAATEA avril 5 7
HIKUERU avril 12
ANAA avril 19
GAMBIER 19 au 22 juin 51
1970 TUREIA 21 octobre 47
1971 TUREIA 16 au 19 avril 49
TUREIA 1 au 6 septembre 53
1972 TUREIA 8 et 9 mai 50
1973 TUREIA 18 et 19 avril 59
1974 TUREIA 29 au 31 mai 52

D’autres campagnes de mesures réalisées en 1968, plusieurs mois après la fin de la


campagne 1967, ont mis en évidence un nombre significatif de contaminations associées à des
doses de l’ordre de quelques centaines de microsieverts.

VI.6.6.6 - ÉVALUATION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS SOUTERRAINS

Lors des essais souterrains, des barrières physiques ont été mises en place sur les câbles de
liaison entre le conteneur et la surface associées à des dispositifs destinés à améliorer l’étanchéité
des circuits pendant les phases de post-forage.
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 295

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 295

Lors des essais sous la couronne, des débits de doses significatifs étaient mesurés au
niveau des dispositifs de prélèvement de gaz (cf. Chapitre II). Les doses reçues par les opérateurs,
à une exception près, étaient inférieures à 0,5 mSv. Aucune exposition du personnel, présent à
distance, sous le vent, n'a été mesurée.
Lors des essais réalisés sous lagon, en l’absence de risques d'exposition les dernières
années, les missions de récupération des enregistrements s'effectuaient, sans tenues ni
équipements particuliers ; elles restaient cependant encadrées par du personnel de radioprotection et
disposaient de moyens de surveillance dosimétrique.
Au cours de certaines opérations de post-forage, quelques cas de contamination cutanée
du personnel ont été constatés. Les activités atmosphériques en 131 I sur le chantier n’ont pas
dépassé quelques Bq.m -3 (cf. Chapitre II).

VI.7 - CONCLUSION
Durant toute la période d’exploitation du CEP, les efforts déployés par les expérimentateurs
pour réduire autant que techniquement possible les risques d’exposition du personnel ou des
populations ont été particulièrement importants et soutenus. C’est à la suite des essais atmo-
sphériques que les doses les plus élevées ont été délivrées à quelques membres du personnel,
en particulier lors des opérations de pénétrations pilotées dans le nuage radioactif, ainsi qu’aux
populations des Gambier, de Tureia et de Tahiti, principalement par les retombées proches de six
essais.

Le bilan de la surveillance de l’exposition externe des travailleurs du CEP montre que seule
une infime partie du personnel, qui faisait l’objet d’une surveillance dosimétrique rigoureuse, a été
exposée à des doses mensuelles supérieures au seuil d’enregistrement de 0,2 mSv. Près de 91%
du résultat des mesures des dosimètres présentaient une dose nulle et seulement 3 doses ont
été supérieures à 50 mSv.
Les 250 000 examens anthropogammamétriques et radiotoxicologiques effectués sur le
personnel pendant la période des essais n’ont révélé qu’un nombre limité de cas de contamination
qui n’ont conduit qu’à de faibles ou très faibles doses.

Les doses susceptibles d’être délivrées aux populations de trois îles de Polynésie par les
retombées radioactives proches des six essais : Aldébaran en juillet 1966, Rigel en septembre
1966, Arcturus en juillet 1967, Encelade en juin 1971, Phoebé en août 1971 et Centaure en juil-
let 1974 ont été réévaluées en 2005-2006. Les activités de l’ensemble des radionucléides rejetés
dans l’atmosphère par ces essais ont été estimées en prenant en compte les caractéristiques de
chaque engin testé : puissance, matières nucléaires et matériaux utilisés. Les résultats des
mesures de radioactivité effectuées dans l’environnement et les produits alimentaires des îles
touchées par les retombées ont également été utilisés pour évaluer l’exposition des populations.
Ces expositions ont été estimées sous la forme d’intervalles de doses afin de tenir compte
des incertitudes sur les conditions environnementales au moment des retombées et de la variabilité,
parfois grande, des résultats de mesure en particulier sur les produits de la chaîne alimentaire.
Les bornes inférieure et supérieure de l’intervalle correspondent respectivement aux résultats de
mesure d’activité les plus bas et les plus hauts obtenus sur les échantillons de l’environnement,
en particulier au niveau des dépôts.
Chap. 6bVF-06.12.06:Chapitre 6 12/01/07 12:04 Page 296

296 PROTECTION DES TRAVAILLEURS ET DES POPULATIONS

L’estimation des doses efficaces maximales pour les enfants a conduit à une valeur de 10 mSv,
c’est-à-dire un niveau de dose qualifié de faible, pour lequel aucun effet stochastique n’est attendu.
Celle des doses maximales à la thyroïde des enfants a atteint des valeurs de plusieurs dizaines
de millisieverts : 78 mSv après l’essai Aldébaran aux Gambier en 1966, 98 mSv aux Gambier
après l’essai Phoebé en 1971 et environ 50 mSv à Tahiti après l’essai Centaure en 1974.

Cependant, l’évaluation de ces doses est volontairement surestimée par la méthode de calcul
utilisée et les valeurs des paramètres retenues en 2006. Les maxima doivent donc être consi -
dérés comme des valeurs qui ne pouvaient être qu’exceptionnellement atteintes. D’ailleurs, les
résultats de mesures anthropogammamétriques effectuées à l’époque des essais, réexaminés
aujourd’hui, ne confirment pas des niveaux d’exposition aussi élevés. Enfin, l’état actuel des
connaissances et les données acquises, notamment lors de l’utilisation médicale d’iode radioactif
pour des diagnostics de la thyroïde ou après les études épidémiologiques consécutives aux
retombées radioactives de l’essai Bravo réalisé en 1954 par les États-Unis aux îles Marshall, mon-
trent que ces niveaux de dose ne devraient pas conduire à l’apparition d’un nombre décelable de
cancers de la thyroïde en excès dans les populations vivant en Polynésie.

VI.8 - BIBLIOGRAPHIE
COMMISSION INTERNATIONALE DE PROTECTION RADIOLOGIQUE (1984).- Publications 40, Vol 14 n°2.
COMMISSION INTERNATIONALE DE PROTECTION RADIOLOGIQUE. - Publications 66,
COMMISSION INTERNATIONALE DE PROTECTION RADIOLOGIQUE (1995). - Publication 71 «age dependent doses to members of the
public from intake of radionuclides : Part 4, Inhalation dose coefficients, Vol 25 n°3-4.
COMMISSION INTERNATIONALE DE PROTECTION RADIOLOGIQUE (1996). - Publication 72 «age dependent doses to members of the
public from intake of radionuclides : Part 5, compilation of ingestion and inhalation dose coefficients, Vol. 26 n° 1.
DIRECTIVE EUROPÉENNE 96/29. - Euratom du conseil du 13 mai 1996 «fixant les normes de base relatives à la protection sanitaire de la popu-
lation et des travailleurs contre les dangers résultant des rayonnements ionisants»
GROUZELLE C., DOMINIQUE M., LAFAY F., DUCOUSSO R. (1985). - Résultats d’une enquête alimentaire effectuée à TAHITI de 1980 à
1982. Rapport CEA-R-5304.
KABIS de SAINT-CHAMAS L., BABLET J.P., ARNOULD C., DUCOUSSO (1991). - Evolution de la teneur en césium137 depuis 1967 dans
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LEDERMANN S. (1965). - Niveaux de contamination radioactive du milieu ambiant et de la chaîne alimentaire. Contamination radioactive
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MECHALI, DOUSSET, PARDO et PENOT (1966). - Dose délivrée à la thyroïde produits de fission. Health Physisc, 12 15-27.
UNITED NATIONS (1958). - Report of the United Nations Scientific Committee on the Effects of Atomic Radiation. Official Records of the
General Assembly, Thirteenth Session, Supplement No. 17 (A/3838). New York.
UNITED NATIONS (1972). - Ionizing Radiation: Levels and Effects. Volume I: Levels, Volume II: Effects. United Nations Scientific Committee
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UNITED NATIONS (1977). - Sources and Effects of IonizingRadiation. United Nations Scientific Committee on the Effects of Atomic
Radiation, Report to the General Assembly, with annexes. United Nations, New York.
UNITED NATIONS (1982). - Ionizing Radiation: Sources and Biological Effects. United Nations Scientific Committee on the Effects of Atomic
Radiation, Report to the General Assembly, with annexes. United Nations, New York.
UNITED NATIONS (1988). - Sources, Effects and Risks of Ionizing Radiation. United Nations Scientific Committee on the Effects of Atomic
Radiation, Report to the General Assembly,with annexes. United Nations, New York.
UNITED NATIONS (1993). - Sources and Effects of Ionizing Radiation. United Nations Scientific Committee on the Effects of Atomic
Radiation, Report to the General Assembly, with scientific annexes. United Nations, New York.
UNITED NATIONS (2000). - Sources and Effects of Ionizing Radiation. United Nations Scientific Committee on the Effects of Atomic
Radiation, Report to the General Assembly, with scientific annexes. United Nations, New York.
U.S. Environmental Protection Agency, Federal Guidance report 12, External exposure to radionuclides in air, water and soil. EPA-402-R93-
081.
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:11 Page 297

CHAPITRE VII

Assainissements, surveillance actuelle


et évolution radiologique future
De la création du CEP à sa fermeture, les activités mettant en jeu des substances radioactives
ont été menées en veillant au respect des limites d'exposition définies réglementairement, tant
pour les travailleurs que pour les populations. La surveillance radiologique, constante au cours du
temps sur les atolls d’expérimentations comme sur les autres atolls polynésiens, dont les principaux
résultats ont été exposés dans les chapitres IV à VI de ce document, démontre la volonté de
réduire au minimum l'impact radiologique des essais sur le personnel travaillant sur les atolls et les
populations vivant en Polynésie.

En 1996, lors de l’arrêt définitif des essais nucléaires français, de nombreux projets de
reconversion des sites ont été étudiés, pour préserver l’emploi du personnel de recrutement local et
valoriser les investissements en installations et équipements. Il s'agissait notamment de conserver
sur place le potentiel scientifique et technique, dans le cadre d’activités de recherche non
nucléaires. Aucune solution de substitution techniquement satisfaisante et économiquement viable
n’ayant été retenue, il a été décidé de démanteler l'ensemble des installations du CEP. Les infra-
structures ont donc été démontées et les sites ont fait l'objet d'actions complémentaires d'assai-
nissement, en particulier radiologique, afin d’éliminer les risques d'exposition après leur fermeture.
L'objectif était de remettre l’environnement dans un état aussi proche que possible de celui d’origine,
compte tenu des contraintes techniques. En effet, il n’était pas techniquement envisageable
d’assainir les cavités-cheminées résultant des essais souterrains compte tenu de l’absence de
risque radiologique.

Ce chapitre traite des plus importantes opérations d'assainissement d'installations et de


remédiation de sols, dont l’objectif était de réduire les risques d'exposition radiologique pendant
la période d’exploitation des sites. Il présente également les différentes actions réalisées à la
fermeture du CEP afin de réduire les contraintes radiologiques futures. Ces assainissements
ayant généré des déchets radioactifs, ce chapitre décrit leur gestion au cours du temps, en
particulier, les opérations d'immersion en mer et d'enfouissement en puits à terre sur l’atoll de
Mururoa. Ce chapitre rappelle également les principaux résultats des expertises concernant les
risques géomécaniques et radiologiques après assainissement des sites, liés à la présence des
radionucléides dans les cavités-cheminées et les sédiments des lagons des atolls de Mururoa et
Fangataufa, réalisées à la demande de l’État français auprès de l’AIEA et de la Commission
géomécanique internationale.
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298 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

Enfin, ce chapitre décrit brièvement le dispositif mis en place pour assurer la surveillance
de l’état radiologique et géomécanique des sites depuis la fermeture du CEP jusqu’à nos jours.

VII.1 - DÉMANTÈLEMENTS ET ASSAINISSEMENTS


Les opérations d'assainissement d'installations et de remédiation de sols étaient entreprises
lorsqu'elles s’avéraient justifiées par des risques d'expositions radiologiques. Les plus impor-
tantes ont été conduites pendant la période d’activité des sites. Lors de la fermeture définitive du
CEP, des opérations complémentaires d'assainissement radiologique ont été réalisées, dans le
cadre du démantèlement des installations ayant contenu des substances radioactives, afin de les
libérer de toute contrainte radiologique pour l’avenir.
Les déchets radioactifs générés par l’ensemble des assainissements ont fait l'objet d'une
gestion adaptée, fonction de leur niveau d'activité et de la situation du site, en conformité avec les
pratiques autorisées par la réglementation en vigueur au moment de leur élimination.

VII.1.1 - ASSAINISSEMENTS EN COURS D’EXPLOITATION DES SITES


À Mururoa, les dépôts au sol les plus importants ont été localisés en zone Faucon et dans
le secteur Nord de l’atoll utilisé pour la réalisation des essais de sécurité (cf. Annexe 2). À Fangataufa,
l’essentiel de ces dépôts se trouvait entre les zones Kilo et Empereur (cf. Chapitre IV). Ces zones
ont rapidement fait l'objet d'importantes actions de remédiation afin de réduire les risques d'exposition
du personnel pendant la durée d'exploitation des sites. Au final, pendant la période d’exploitation
des sites d’expérimentations, ce sont six grandes opérations d’assainissement qui ont été
menées, dont cinq sur l’atoll de Mururoa :

• le nettoyage de la zone Faucon, à la suite de la retombée de l'essai Parthénope ;


• le nettoyage de la zone utilisée pour les expériences Arpège ;
• l’assainissement de la zone Colette et de ses abords, lieu des expériences de sécurité,
• la récupération des particules contaminées en plutonium dispersées sur les plages de
Mururoa suite aux dépressions tropicales qui ont touché l’atoll en 1981;
• l’assainissement et le démantèlement de l’installation Meknès ;
• la décontamination du PEE Empereur, sur l’atoll de Fangataufa, à la suite des retombées de
l'essai Rigel.

Toutes ces opérations sont détaillées dans les paragraphes suivants, en commençant par
celle réalisée sur l’atoll de Fangataufa.

VII.1.1.1 - ZONE PEE EMPEREUR

Les plus importantes retombées atmosphériques ayant touché les deux atolls d’expéri-
mentations sont celles de l'essai Rigel réalisé à Fangataufa, le 24 septembre 1966, affectant les
zones Kilo et Empereur. Le débit d’irradiation, à un mètre du sol, atteignait quelques gray.h -1 , une
heure après l’essai. Cependant, des travaux de génie civil devaient être entrepris dans ces zones
en juillet 1967, en vue de la campagne d’essais de 1968. Ces zones ont donc été assainies au cours
du premier semestre 1967, afin que les expérimentateurs puissent travailler dans les zones
techniques, sans aucune contrainte radiologique.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 299

Les opérations d’assainissement et de remédiation ont été réalisées du 7 mars au 25 avril


1967 sur la zone Empereur, ses abords et ceux de la piste aviation. La zone Frégate n’ayant pas
été touchée par les retombées a servi de base arrière, ainsi que le BSL Rance qui disposait des
laboratoires, des installations de décontamination des personnels, des matériels et des infra-
structures opérationnelles nécessaires.
Le terrain de la zone Empereur a été décapé au bulldozer, sur une vingtaine de centimètres
d’épaisseur. Les déblais ont été regroupés sous forme de talus et les pourtours fixés par une
émulsion de goudron, sur une quinzaine de mètres de large. Sur le terrain d’aviation, les sables
et graviers ont été repoussés, par balayage et lavage sous pression, vers l’extérieur de la piste
où ils ont été fixés par épandage d’une émulsion de bitume.
Les parties bétonnées de cette zone ont été soumises à un nettoyage poussé réduisant
d’un facteur 20 le niveau de l’activité résiduelle. Toute trace de radioactivité a été éliminée des
surfaces métalliques par abrasion de la couche la plus superficielle. Les surfaces peintes ont
totalement été assainies par décapage de la peinture.

VII.1.1.2 - ZONE FAUCON

Lors de l’essai Parthénope, du 24 août 1973, des vents au sol soufflant est-nord-est
avaient poussé les débris du ballon et de la nacelle vers le motu Faucon, où ils s’étaient déposés.
Une première campagne de ramassage des débris radioactifs avait été réalisée à proximité des
installations techniques, avant d’en autoriser l’accès. Les parties du motu dépourvues d’installation
étaient restées en l’état.
Au début des années 80, des campagnes complémentaires de nettoyage se sont déroulées
pour contrôler et assainir l’ensemble du motu. Le contrôle méthodique des sols a permis de
récupérer les débris déposés, en particulier les morceaux du ballon. Ces déchets ont été mis en
fûts et immobilisés dans une matrice de béton.

VII.1.1.3 - ZONE DES EXPÉRIENCES ARPÈGE

En 1970, en secteur Nord à l’ouest du PEA Denise, une douzaine d’expériences de physique
ont mis en œuvre de l’explosif chimique et de faibles quantités (de l’ordre de quelques grammes) de
plutonium. Ces expériences ont été effectuées par vent d’est afin d’éviter les retombées sur les ins-
tallations techniques du PEA, où se trouvait l’instrumentation de mesure. Elles ont conduit à des
retombées sur la zone Ouest du PEA, initialement dépourvue d’installations.
Le plutonium déposé à la surface du sol y a été fixé par une émulsion de goudron et, en
certains endroits, recouvert d’agrégats de corail. Par la suite, une partie des surfaces coralliennes
nettoyées a été bétonnée pour être utilisée comme zone industrielle, accueillant la station de
décontamination des matériels, les alvéoles de stockage des explosifs et les puits de déchets.
Les déchets de remédiation sous forme d'agrégats contenant du plutonium, ont été
entreposés temporairement dans une enceinte fermée appelée «boîte Arpège», avant leur tri et
l’enfouissement des agrégats radioactifs dans les puits PS1 et PS3.

VII.1.1.4 - ZONE COLETTE

L’appellation Colette, en secteur Nord, recouvre le motu Colette et les portions de dalles
coralliennes contiguës, à l’est, là où ont eu lieu les expériences de sécurité, aux points Ariel et
Vesta. De 1966 à 1974, cinq essais de sécurité y ont été réalisés à l’air libre, conduisant au
marquage en 239 Pu du sol de cette zone.
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300 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

Après chaque essai, les débris les plus gros, situés autour du point zéro, étaient ramassés
pour être mis en fûts et les particules résiduelles étaient fixées au sol par épandage d’une émulsion
de goudron, afin d’empêcher toute remise en suspension par les vents. Pendant une dizaine
d’années après l’arrêt des essais de sécurité, l’accès à ces zones a été réglementé et des actions
complémentaires de nettoyage y ont été menées.
En 1981, la dépression tropicale Thamar touchait le secteur Nord de l'atoll et entraînait
dans le lagon une dizaine de fûts stockés sur la zone Colette. Le contrôle des laisses de mer sur
les plages mettait en évidence la présence de plutonium sur des débris flottants : bois, goudron,
paraffine, plastique. Afin d'éviter toute exposition du personnel, il a été décidé de :
• traiter la zone Colette afin d’éviter une nouvelle émission de débris contaminés par du plutonium.
En effet, la pellicule de goudron fixant initialement le plutonium s’était décollée de la dalle
corallienne par les effets conjugués de la chaleur et de la houle, devenant une source
d’émission de particules radioactives ;
• ramasser les particules radioactives déposées sur les plages.

Remédiation de la dalle

Préalablement à toute opération de remédiation, le niveau de l’activité surfacique résiduelle


acceptable au plan sanitaire après assainissement, également appelé «seuil d’action», était déterminé
par la Commission de sécurité des sites (C2S). Concernant la remédiation de la dalle, le seuil a
été fixé à 10 6 Bq.m -2 en 239+240Pu, sur la base d’un scénario d’exposition conduisant à une dose
inférieure à la limite de dose annuelle pour le public. Ce scénario concerne d’éventuels pêcheurs
polynésiens qui seraient exposés en traversant le motu Colette, après assainissement, pour se
livrer à leur activité de pêche. Cette valeur du seuil d’action est cohérente avec celles retenues
pour les assainissements d’autres sites ayant subi des retombées radioactives, tels Maralinga
(Australie), Palomares (Espagne) ou Enewetak (Îles Marshall).
Les opérations de remédiation de la zone Colette aux points Ariel et Vesta avaient pour
objectif d’éviter de nouvelles dispersions de particules radioactives. Entre 1981 et 1985, plusieurs
campagnes d’assainissement ont successivement été menées, mettant en œuvre différents
moyens d’arrachage des résidus de bitume contaminés : bulldozer, marteau piqueur, jet d’eau sous
pression et gratteuse à percussion.
À la fin de cette première série d’actions de remédiation, l’activité résiduelle en plutonium
était essentiellement associée à la dalle corallienne. C’est pourquoi, en 1987, l’opération finale de
réhabilitation a consisté à raboter la couche de surface de la dalle corallienne sur quelques centi-
mètres d’épaisseur, au moyen d’une
décapeuse à percussion. Cette action
a été complétée par des opérations
ponctuelles et localisées par mar-
teau-piqueur. Les produits du déca-
page ont été récupérés dans des
bennes étanches, en sortie d’un aspi-
rateur à gros débit. L’ensemble des
opérations de remédiation a généré
quelque 1 500 m 3 de déchets et
déblais, qui ont été stockés dans
les puits PS1 et PS3.

Aspirateur «Vactrailer» permettant de récupérer les produits de décapage.


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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 301

En 1988, l’activité volumique atmosphérique associée


aux particules remises en suspension collectées dans cette
zone était très faible, inférieure à 10 -5 Bq.m -3. L’activité rési-
duelle étant essentiellement incluse dans la dalle, aucune par-
ticule n’était détectable sur les chaussures des personnes
circulant sur cette zone.
La situation radiologique finale a été établie par le
système de détection aéroporté Hélinuc et par des mesures
au sol, montrant que le seuil d’action avait été en moyenne
atteint et que la radioactivité résiduelle totale en 239Pu de cette
zone terrestre s’établissait à 1,5.10 10 Bq (cf. Chapitre IV).
L’expertise de l’AIEA, réalisée en 1996, a déterminé des acti-
vités surfaciques légèrement supérieures mais du même
ordre de grandeur. Les écarts s’expliquent par l’utilisation de Système de détection aéroporté Hélinuc.
méthodes et équipements différents pour les mesures de
terrain. Aujourd'hui, la dalle corallienne indurée de la zone Colette affleure en surface et reste
dépourvue de sol. Elle est impropre à toute culture et à toute activité humaine, y compris des
activités de pêche.

Récupération des particules radioactives sur les plages

Les dépressions tropicales de 1981


entraînèrent l’arrachage de parties goudron-
Nombre de débris
nées de la zone Colette, la dispersion dans 250
le lagon des débris radioactifs et leur 235

échouage sur les plages du lagon de


Mururoa. Le ramassage méthodique de ces
débris sur les laisses de mer a commencé 200
dès 1981. Priorité était donnée à la plage de
la zone Martine, où le contrôle était quoti-
dien, car il s’agissait de la seule plage vérita-
blement fréquentée par le personnel. À chaque 150
période de mauvais temps, ces particules flot-
tantes étaient remobilisées et redistribuées sur 115
les bords du lagon. De dimensions supé- 110

rieures à 100 µm, elles avaient une activité 100


87
alpha moyenne de l’ordre de 0,2 Bq. Le
nombre de particules récoltées lors des
contrôles réguliers des plages de la zone
Martine était considéré comme un indicateur de 50
41
l’évolution du volume de débris susceptibles 27
23
d’être mobilisés. Ces ramassages étaient effec- 17 19
15
tués par une équipe spécialisée, contrôlant 6 7 10
5 0
2 1 3 3 2 3 1 0
systématiquement toute la plage avec un 0
1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993
appareil portatif (Lon 307) capable de détec-
ter les raies X du plutonium et gamma (59 F IG. 188. - Histogramme des débris radioactifs collectés,
à partir de 1981, sur les plages de la zone Martine de
keV) de l’américium-241 qui lui est associé
l’atoll de Mururoa.
(Fig. 188).
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302 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

Dans un premier temps, par précaution, le personnel effectuant ce travail s’équipait de


combinaisons de protection anti-poussières. Le retour d’expérience a montré que la nature des
particules et leurs caractéristiques physico-chimiques n’entraînaient pas de risque d’inhalation,
ou d’ingestion directe, de plutonium. Le port de protections n'étant pas justifié, ces contrôles ont
très rapidement été effectués en tenue de travail normale, une paire de gants étant suffisante
pour se protéger de l’exposition lors du ramassage des débris après leur localisation. La collecte
des particules le long des autres parties du rivage du lagon a été effectuée par campagnes. En
1986, des essais de récupération des débris flottant à la surface des eaux du lagon ont été entrepris,
par temps calme, à l'aide d’un filet à plancton à embouchure semi-immergée. Une surface de 10
hectares a été prospectée sur des zones choisies en fonction des trajectoires les plus probables
des débris, à partir du secteur Nord. Aucun débris radioactif n’a été collecté par le filet, confortant
l’idée qu’il n’existait plus de transfert continu, depuis les motu de la zone Nord vers les plages ;
mais une redistribution des débris, d’une plage à l’autre, lors de conditions météorologiques
défavorables. À partir de 1989, les collectes ont été limitées aux zones du rivage sur lesquelles
les débris se déposaient systématiquement après les périodes de mauvais temps. Les contrôles
ont donc été adaptés à la fréquence de ces évènements météorologiques.

Filet à plancton à embouchure semi-immergée pour la récupération des débris flottant en surface du lagon
(En médaillon, détail du collecteur de débris).

Durant toute cette opération, près de 50 000 débris ont été localisés et ramassés sur
l’ensemble du rivage du lagon. Depuis 1994, aucun débris radioactif n’ayant été découvert sur
les plages, il a été conclu que les travaux d’assainissement du secteur Nord étaient suffisants et
que les débris émis avant l’opération de remédiation avaient été recueillis.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 303

VII.1.1.5 - INSTALLATION MEKNÈS

Construite en 1977, en zone Denise, à proximité du PEA, l’installation Meknès se composait


principalement d’une enceinte renforcée en béton contenant une cuve en acier. Elle a été utilisée en
1978 pour des expériences de physique, sans dégagement d’énergie nucléaire, mettant en jeu
du plutonium associé à de l’explosif chimique. En 1979, lors de la dernière phase des opérations
d’assainissement suivant une expérimentation, la déflagration des vapeurs des solvants utilisés
lors du séchage du revêtement de surface a conduit au décès accidentel de deux personnes,
l’une par anoxie, l’autre par l’onde de choc (cf. Chapitre VI).
Les premières opérations de démantèlement de l'installation ont démarré en 1982, avec le
démantèlement du château de plomb faiblement contaminé, qui protégeait les équipements de
mesure de l’installation. Isolés dans du béton, les éléments du château ont été immergés dans
l’océan au dernier trimestre 1982, dans le respect des dispositions de la convention de Londres,
après un accord ministériel formalisé. Ce fut la dernière immersion de déchets radioactifs réalisée
au CEP.
La seconde opération d’assainissement a concerné le système de ventilation situé sur le
toit de l’édifice. La dépose des gaines contenant des traces de plutonium s’est déroulée au cours
du 1er trimestre 1983. L’habillage en scaphandre à adduction d’air, le contrôle des intervenants
ainsi que l’évacuation des déchets étaient réalisés à partir de cabines permettant de contrôler
l'accès à l’enceinte par une porte en acier de 5 tonnes. Des études ont été menées en 1991 et
1992 afin de terminer l’assainissement
de la cuve en acier et, en particulier,
d’éliminer les éclats perforants fichés
dans la paroi métallique, pour éventuel-
lement démanteler la cuve, voire l’en-
ceinte de béton, dans des conditions
normales de travail. Les modalités d’as-
sainissement de la cuve, en scaphandre
ventilé, ont reçu l’accord de la C2S,
après examen du rapport de sûreté
détaillant les opérations à mener. La
décontamination de la cuve a été réa-
lisée par sablage à sec, par projection
d’eau chaude sur la paroi métallique et
par carottage des fragments perforants
inclus dans la paroi. Ces opérations ont
été suivies d’un contrôle radiologique. Vue des équipements autour de l’enceinte Meknès
L’activité des déchets extraits lors de l’assainissement.
de l’enceinte a été établie à 3,7.10 10
Bq de plutonium. Le volume des déchets générés a été de 110 m 3 , répartis en fûts, viroles de
béton ou vrac, en fonction du niveau de l'activité massique des déchets. Le facteur de déconta-
mination global obtenu, supérieur à 10 000, a permis d’atteindre des niveaux d’activité résiduelle très
largement inférieurs aux seuils fixés par la C2S et, par voie de conséquence, de proposer le
déclassement de l’installation en usage normal, en octobre 1993.
En 1990, à la fin du chantier de décontamination de la cuve, un essai de sciage de l’édifice
bétonné par câble diamanté en vue de sa déconstruction complète s’était avéré concluant.
Toutefois, l’opération n'a pas été réalisée car le coût de la découpe de l’édifice entier n’apparaissait
pas justifié, puisque l’installation ne présentait plus de risque radiologique.
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304 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

Entre 1993 et 1996, les niveaux d’activité résiduelle de l’installation ont continué à être
mesurés périodiquement. L’activité volumique atmosphérique alpha mesurée dans l’enceinte était
de l’ordre de 10 -5 Bq.m -3, soit environ 1/10 000 de la limite dérivée de concentration atmosphérique
(LDCA) du 239 Pu et l’activité surfacique labile était de l’ordre de 10 2 Bq.m -2 , soit environ le quart de
la valeur guide du CEA pour les matériels à usage normal (0,04 Bq.cm -2).
En 1997, les ouvertures de la cuve ont été obturées pour en interdire l’accès afin d'éviter les
chutes dans sa partie basse en cas de pénétration dans l’enceinte. Aujourd'hui, l'ouvrage est en
respiration naturelle avec l’extérieur, par l’intermédiaire d’un filtre mis en place sur le toit, et ne
présente aucune sujétion d’ordre radiologique.

VII.1.2 - ASSAINISSEMENTS EN FIN D’EXPLOITATION DES SITES

L'arrêt de toute activité sur les sites d’expérimentations a conduit au repli des matériels et
des installations utilisables en Polynésie française ou en métropole. Il a également été procédé au
démantèlement des installations devenues inutiles, susceptibles de se dégrader dans un envi-
ronnement humide et salin agressif. Les actions suivantes ont été réalisées :

• le démontage ou la destruction des bâtiments et infrastructures inutiles en effaçant, si possible,


la trace des installations par la plantation de cocotiers sur les emplacements libérés ;
• pour les ouvrages bétonnés, dont la destruction n’était pas financièrement envisageable, à
savoir les PEA, PCT, PEE, BPV et Meknès, leurs accès ont été condamnés afin d’éviter les
risques d’accident en cas de pénétration humaine ultérieure ;
• le rapatriement en métropole, ou la destruction, du stock existant de produits chimiques utilisés
par les laboratoires ou dans le cadre d’activités industrielles ;
• le contrôle radiologique de toutes les barges opérationnelles, des apparaux de mouillage et
des matériels de forage avant cession et, d’une manière générale, celui de tous les matériels
en place dans les installations à caractère nucléaire, comme celles utilisées pour le stockage
des sources radioactives, les laboratoires de radiobiologie, de mesures de radioactivité, etc.
• l’assainissement des installations à caractère nucléaire présentant une radioactivité résiduelle,
à savoir la station de décontamination (Stadec), le bâtiment de traitement des solides (TDS)
et les locaux du laboratoire de mesure, comme le L7 ;
• la fermeture définitive des têtes des puits d’essais de la couronne corallienne et du lagon ;
• le stockage des déchets radioactifs résiduels dans les puits dédiés.

Plantation de cocotiers, après démantèlement des PEA Denise après la condamnation


installations du secteur Est . des portes d’accès.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 305

Ce document ne traitant que des pratiques ou des installations mettant en jeu des matières
nucléaires, le paragraphe suivant se limitera à présenter un exemple de démantèlement d'installation
avec assainissement radiologique, celui de l’installation de traitement des solides (TDS).

Le TDS était un bâtiment dédié au traitement des échantillons de lave radioactive prélevés
dans les cavités-cheminées et à leur conditionnement avant leur expédition en métropole pour des
analyses complémentaires. Il était constitué de deux cellules de très haute activité (THA), entourées
de laboratoires et d’un local de décontamination.
Le démantèlement de cette installation a débuté après le traitement des échantillons issus
du dernier essai réalisé, en janvier 1996, afin de profiter de la présence sur le site du personnel
qualifié et des moyens de soutien associés. À cette date, l'installation était à un niveau radiologique
dit de «fin de campagne», c’est-à-dire que les cellules THA et les différents laboratoires contigus
étaient décontaminés. Il restait à assainir les gaines de ventilation reliant les équipements et locaux
où étaient traités les échantillons : face arrière des cellules, laboratoires ayant renfermé des matières
radioactives, salles de décontamination, vestiaire, etc. Pendant les opérations de démantèlement,
la centrale d’extraction d’air a continué à maintenir l'atmosphère des locaux en dépression par
rapport à l'extérieur, pour assurer le confinement de la radioactivité, tout en filtrant l'air rejeté au
travers de caissons contenant des filtres de très haute efficacité.
La première phase a consisté, après contrôle et décontamination éventuelle, à évacuer les
matériels et à démanteler les installations situées dans les locaux entourant le cœur de l’ouvrage,
les cellules THA1 et THA2, tout en mettant à profit le confinement procuré par le système d’extraction
et le dispositif de surveillance radiologique.
Dans une deuxième phase, il a été procédé au démontage et à l’évacuation des équipements
présents dans les cellules THA, puis au démantèlement de leurs éléments structuraux : hublots
de verre au plomb, revêtements des parois en acier inoxydable, plan de travail, protections en
plomb, télémanipulateurs, portes blindées et divers équipements électriques et hydrauliques.
Dans une troisième phase, il a été procédé au démantèlement du système de ventilation-
extraction, correspondant à une cinquantaine de mètres de gaines contaminées. Des poussières
provenant du tronçonnage des carottes de prélèvement et du concassage des laves radioactives
dans les cellules THA s'étaient déposées dans les gaines du système de ventilation en amont des
filtres, et, principalement, dans leurs parties horizontales basses. L’estimation de ces dépôts de
poussières, en prenant des hypothèses raisonnablement pessimistes, a conduit à une masse en
239 Pu de l’ordre du millionième de gramme et à une activité surfacique maximale de quelques
dizaines de Bq.m -2 de 239 Pu, valeur très inférieure à la limite de 400 Bq.m -2 retenue au CEA pour
le matériel destiné à un usage normal.
L’opération de dépose des gaines d’extraction a été effectuée en maintenant en fonction-
nement le réseau d’extraction-filtration. Chaque tronçon de gaine a été contrôlé, éventuellement
décontaminé, puis découpé. Les éléments dont l’activité surfacique résiduelle restait supérieure
à 4.10 4 Bq m -2 (bêta, gamma) ou à 400 Bq.m -2 (alpha) ont été gérés comme des déchets radio-
actifs, en fonction de leur niveau d’activité. Les matériels divers non contaminés ou décontaminés ont,
après contrôle radioactif, été stockés avant d’être évacués.
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306 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

VII.2 - GESTION DES DÉCHETS RADIOACTIFS


Deux types de déchets radioactifs ont été générés par les activités menées au CEP : les
déchets renfermant les radionucléides présents dans les mélanges de produits radioactifs résultant
des essais nucléaires et ceux issus des expériences de sécurité, contenant de la matière fissile
seule, en l’occurrence le plutonium (cf. Chapitre II). À ces déchets s’ajoutent ceux provenant des
différentes opérations d’assainissement et de démantèlement menées lors du fonctionnement des
sites d’expérimentations, puis à leur clôture.

VII.2.1 - ORIGINE DES DÉCHETS


Les résidus provenant des différentes opérations mettant en œuvre des matériaux radioactifs,
ou résultant d’assainissement, étaient définis comme déchets. Ces déchets étaient constitués :

• des produits résiduels des installations de décontamination : le Centre d’intervention de


décontamination (CID), le Centre de décontamination des aéronefs et des personnels (CDAP)
à Hao, et les installations de décontamination du BSL Rance, pendant la période des essais
atmosphériques ; puis de la Stadec (essentiellement matériel de post-forage), lors des
essais souterrains à Mururoa ;
• des résidus issus des cellules THA de traitement des échantillons prélevés à des fins de
diagnostic radiochimique des essais. Ces installations se situaient sur l’atoll d’Hao, durant la
période des essais atmosphériques, puis à Mururoa pendant celle des essais souterrains ;
• du tartre provenant des circuits d’eaux de mer, en particulier des bouilleurs des bâtiments
ayant séjourné dans les lagons de Mururoa et Fangataufa, peu après les essais sur barge
réalisés en 1966 et 1967 ;
• des résidus des échantillons radioactifs traités dans les laboratoires d’analyses de Tahiti, de
Hao et de Mururoa ;
• des principaux déchets radioactifs de démantèlement et des consommables (cotons, chiffons)
utilisés lors des opérations de décontamination.

Ces déchets contenaient essentiellement des radionucléides émetteurs bêta-gamma issus


du mélange initial des essais dont la décroissance radioactive suivait la loi décrite dans le chapitre II.

VII.2.2 - RÈGLES DE CLASSEMENT

Deux catégories de déchets ont été distinguées au CEP :

• Les déchets à vie courte, de période inférieure à 10 ans, contenant des radionucléides
émetteurs bêta-gamma, dont les 140 Ba, 141 Ce, 144 Ce, 60 Co et ceux de période plus longue,
proche de 30 ans, comme le 137 Cs et 90 Sr. Ces derniers représentaient une faible proportion
du mélange au stade de déchet qui était donc constitué en majorité de radionucléides à vie
courte. L’activité globale du mélange décroissant très vite, il en a été de même de l’activité
des déchets associés, dont l’activité avait très largement décru après une dizaine d’années
(cf. Chapitre II).
• Les déchets contenant des radionucléides émetteurs alpha à vie longue, essentiellement le
239 Pu, 240 Pu et 241 Am, ont été traités dans le cadre d’un stockage de longue durée.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 307

Les conditions de traitement des déchets ont été définies par la C2S (Tableau 74).

T ABLEAU 74.
Règles de classement et traitement des résidus solides.

Déchets
Groupe II A Exutoire Conditionnement
Groupe I
et suivants
(émetteurs α)
(émetteurs β, γ)

Am < 100 Bq.g-1 Am< 100 Bq.g-1 Excavations en zone


ou At < 5 kBq ou At < 50 kBq Aucun
corallienne terrestre

100 Bq.g-1 < Am< 1 300 Bq.g-1 Am > 100 Bq.g-1 Zone sédimentaire Agrégats en vrac
et At > 5 kBq et At > 50 kBq des puits Fûts bétonnés

Am > 1 300 Bq.g-1 ou


1,85.109 Bq.m-3 Zone volcanique Agrégats en vrac
(Environ 80 mg de plutonium des puits PS1 et PS3 Fûts bétonnés
par fût de 100 litres)

Am : Activité massique rapportée à un volume de 100 litres


At : Activité totale d'une source isolée

VII.2.3 - CONDITIONNEMENT

Trois types de conditionnement des déchets


radioactifs ont été mis en œuvre en tenant compte
de leur activité massique.

Le premier conditionnement consistait à


rassembler les déchets dans des sacs rouges en
polychlorure de vinyle, fermés de façon étanche, et
de les mettre dans des fûts de 100 litres remplis de
béton (cf. photo ci-contre).
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308 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

Un deuxième conditionnement consistait à positionner les fûts de 100 litres, centrés par
des entretoises, dans des fûts de 225 litres, l’espace intercalaire était également rempli d’un coulis
de béton (cf. photos et schéma ci-dessous).

Anse métallique de préhension

Couvercle
Barre de maintien

Béton
Fût de
100 litres

Cales de centrage
Fût de
225 litres

Fût de 100 litres Schéma de conditionnement définitif Conditionnement définitif


dans un fût de 225 litres. des résidus solides en fûts métalliques. des résidus solides.

Enfin, des viroles en béton vibré étaient utilisées, principalement pour assurer le confinement
des résidus provenant des cellules THA. L’espace intercalaire était également rempli d’un coulis
de béton (cf. photos et schéma ci-dessous).

Anse métallique de préhension


pour enfouissement
Confinement
par béton Barre de
maintien

Résidus dans
Conteneur
poubelle 15 litres
prébétonné
sortant de THA

Conteneur THA Conteneur préfabriqué rempli de résidus Sortie du conteneur


posé sur sa virole en béton. conditionnés dans du béton. des cellules THA.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 309

Le conditionnement se terminait par le remplissage des fûts et viroles qui, après séchage,
étaient entreposés, avant d’être immergés en mer jusqu’en 1982 ou stockés sur terre, dans des
puits dédiés (PS1 ou PS3).
Durant les quinze dernières années d’exploitation des sites, seuls les deux derniers types
de conditionnements ont été utilisés. Les déchets conditionnés étaient dirigés vers la station de
mesure des fûts de la Stadec, afin de quantifier leur niveau d’activité.
La comptabilité des déchets enfouis dans les puits était établie annuellement dans un
document particulier appelé «rapport d’enfouissement», dans lequel, pour chaque colis référencé par
un numéro d’identification, étaient associés sa masse, son contenu et l’activité mesurée.

VII.2.4 - CONTRÔLE DE L’ACTIVITÉ

Une station de mesure par spectrométrie gamma permettait d’identifier et de quantifier les
radionucléides émetteurs gamma ainsi que les transuraniens présents dans les déchets.
Les conteneurs de déchets (fûts, viroles etc.) étaient entreposés sur une aire de stockage
située dans une zone contrôlée avant d’être transférés, un par un, vers la station de comptage.
Le conteneur était alors déposé à l’aide d’une pince sur un chariot se déplaçant sur un rail et
équipé d’un plateau tournant pouvant recevoir les fûts de 100, 225 l ou les viroles de béton. Le
chariot était transféré mécaniquement, plaçant le conteneur à mesurer en face du détecteur. La
rotation du fût permettait de tenir compte de la position des déchets à l’intérieur du conteneur. Le
conteneur était ensuite pesé.
La calibration était réalisée avec une source de test et différents écrans amovibles sous
forme de disques rotatifs atténuateurs de 4 et 10 mm d’épaisseur. Ces derniers ont aussi été
utilisés exceptionnellement comme écrans pour la mesure de déchets de haute activité. La station
de mesures était initialement équipée de deux sondes NaI, puis de détecteurs Ge-HP. Un collimateur
en plomb permettait de limiter la contribution des rayonnements diffusés.

Détail de la mesure d’un fût de 100 litres. Aire de stockage des fûts de déchets
en attente d’enfouissement, après mesure.
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310 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

Le logiciel de mesure prenait en compte les conteneurs de formes géométriques diverses


(fûts de 100 et 225 litres, viroles de béton, sacs de vinyle de 60, 100 et 200 litres, bidons de
polyéthylène de 30 litres et flacons de 500 cm 3 ) ainsi que les matrices de remplissage (béton,
sac de corail sec, sable de corail humide, sable de corindon, vinyle).
Les résultats de mesure et leurs incertitudes étaient donnés pour chaque colis comme suit :

• activité totale (Bq), activité massique moyenne (Bq.kg -1 ) en 239 Pu et la masse totale en mg
du plutonium contenu dans le colis ;
• activité totale alpha (Bq) ;
• activité totale des produits de fission (Bq) ;
• activité totale bêta-gamma du colis (Bq) ;
• activité résiduelle dans 300 ans (Bq).

La limite de détection du plutonium, dans une matrice de sable corallien, était de 20 MBq
pour un temps de comptage de 5 400 secondes, soit de l’ordre d’une dizaine de milligrammes de
plutonium dans un fût de 100 litres. L’activité alpha était généralement déduite des résultats de
mesure de 241 Am. Pour les produits de fission, à titre d’exemple, la limite de détection du 137 Cs
était d’environ 600 Bq par fût.

VII.2.5 - OPTIONS DE STOCKAGE

Pendant la période des essais atmosphériques, des déchets radioactifs de faible activité
ont été immergés à grande profondeur dans l’océan, dans des zones définies géographiquement,
conformément à la réglementation internationale résultant de l’application de la Convention pour
la prévention de la pollution marine par l’immersion de déchets et autres matières, dite Convention de
Londres, ratifiée par la France en 1977. À partir des années 80, adoptant des dispositions plus
contraignantes que les recommandations de l’AIEA sur lesquelles s’appuient la Convention de
Londres pour la question des immersions de déchets radioactifs, la Direction des centres d’expé-
rimentations nucléaires (Dircen) n’autorisait plus les immersions. Exceptionnellement, fin 1982,
une dernière opération de ce type a reçu une autorisation particulière et formelle du ministre de la
Défense, dans le respect des recommandations internationales concernant les déchets radioactifs.
Il s’agissait de déchets générés par le démantèlement de l’installation Meknès.
La gestion des déchets contenant des radionucléides émetteurs alpha était une pré -
occupation majeure au moment de la réalisation des expériences effectuées dans l’installation
Meknès. Les déchets alpha générés par ces expériences ont été conditionnés dans des coques
en béton ou des fûts bétonnés. Ils ont été stockés dans les deux puits de grand diamètre, forés
profondément dans le basalte, jusqu’à près de 1 200 m, en zone Denise (PS1 et PS3).

VII.2.5.1 - IMMERSION DES DÉCHETS RADIOACTIFS

Dans ce paragraphe, le contexte réglementaire particulier des immersions en mer des


déchets radioactifs est rappelé et les opérations d'immersions réalisées au large des atolls
d’expérimentations sont détaillées, par site. Les États-Unis, l'URSS, la Nouvelle-Zélande et le
Japon ont également immergé des déchets radioactifs dans l’océan Pacifique.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 311

Cadre réglementaire

Les principales réglementations internationales et françaises, ainsi que les dispositions prises
par la Dircen concernant l'immersion des déchets radioactifs solides, sont présentées chronolo-
giquement dans ce paragraphe.

En 1958, la Conférence de l’ONU sur le droit de la mer adoptait une convention dont l’article
25 précise que «tout État est tenu de prendre des mesures pour éviter la pollution des mers, due
à l’immersion des déchets radioactifs». Elle a également adopté une résolution recommandant
que l’AIEA «poursuive toute étude et prenne toute mesure pour aider les États à réglementer la
décharge des matériaux radioactifs dans la mer».

Ainsi, en 1960, l’AIEA publiait des recommandations pouvant servir de base à un accord
international permettant de garantir qu’«aucune évacuation de déchets radioactifs en mer n’im-
pliquera un risque inacceptable pour l’Homme». L'AIEA considérait que «dans des conditions
contrôlées et bien déterminées, les déchets solides de faible et moyenne activités peuvent être
évacués sans risque dans la mer». L'agence recommandait que «seules devront être envisagées les
méthodes de rejet permettant de limiter le rayonnement à un niveau ne comportant pas de risque
inacceptable pour la population». Elle considérait que 1/25 e de la dose générique (0,2 mSv.an -1 )
pouvant affecter l’ensemble de la population devrait être réservé pour les rayonnements provenant de
sources marines qui échappent au contrôle national. L'agence recommandait que «tous les rejets
de déchets radioactifs dans la mer, à l’exception de ceux qui proviennent du fonctionnement de
navires nucléaires, devraient être faits à des emplacements fixés à l’avance, et dans des conditions
prescrites pour l’emplacement considéré».

En 1965, un groupe d’experts de l’Agence pour l’énergie nucléaire (AEN) de l’OCDE a réalisé
une évaluation de la sûreté des opérations d’immersion et fixé les premières limites d’activité
massique des déchets pouvant être immergés, à :

• 37 GBq.t -1 pour les radionucléides émetteurs alpha (dont les isotopes du plutonium) ;
• 3,7.10 3 GBq.t -1 pour les radionucléides émetteurs bêta-gamma de période supérieure à six
mois.

En 1967, la Dircen approuvait les procédures d’immersion des déchets radioactifs solides
en provenance de Hao qui tenaient comptent des recommandations et limites fixées par
l’OECD/AEN et reprises par l’AIEA.

En 1972, la Convention de Londres sur la prévention de la pollution des mers résultant de


l’immersion des déchets était ratifiée par 37 pays, dont la France qui en a appliqué les dispositions à
partir de 1977. La convention a chargé l’AIEA du secrétariat technique pour ce qui concerne la
question particulière de l’immersion des déchets radioactifs. L’AIEA était chargée de redéfinir
les déchets dont l’immersion en mer était interdite, ainsi que les conditions dans lesquelles
l’immersion des autres déchets radioactifs pouvait être autorisée. Il faut noter que la France, lors de
la signature de la Convention de Londres, s’est réservé le droit de ne pas appliquer les dispositions
de cette convention «si celle-ci était interprétée comme faisant obstacle à des activités estimées
nécessaires à la défense nationale».
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312 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

En 1978, l’AIEA présentait à la Convention de Londres la définition des déchets dont


l’immersion en mer était interdite ou soumise à l’obtention d’un permis spécial délivré par une
autorité nationale.

• Étaient interdits à l’immersion, les déchets «fortement radioactifs», c’est-à-dire ceux dont
l’activité massique excédait :
➙ 37 GBq.t -1 pour les radionucléides émetteurs alpha ;
➙ 3,7.10 3 GBq.t -1 pour les radionucléides émetteurs bêta-gamma, de période
supérieure à six mois ;
➙ 3,7.10 7 GBq.t -1 pour les radionucléides émetteurs bêta-gamma, de période
inférieure à six mois et le tritium.

• Étaient autorisés à l’immersion, sous réserve de la délivrance d’un permis spécifique


par une autorité nationale compétente, les déchets dont l’activité massique était infé-
rieure à ces limites, sous réserve que :

➙ les immersions ne soient pas effectuées dans les mers marginales ou intérieures,
mais à des profondeurs excédant 2 000 mètres, dans des zones strictement
limitées de superficie inférieure à 10 4 km 2 ;
➙ les conteneurs des déchets soient prévus pour résister à la pression, pendant
leur descente jusqu’au fond ;
➙ les opérations d’immersion satisfassent aux prescriptions fondamentales de la
radioprotection, basées sur le principe de limitation des doses engagées ;
➙ les activités immergées n’entraînent aucun risque pour la santé des populations
des pays riverains.

En 1981, la Dircen, avec l’approbation du Haut-Commissaire à l’énergie atomique, déci-


dait d’arrêter à terme les immersions de déchets radioactifs solides dans l’océan. En 1982, la derniè-
re opération était réalisée après accord de la Commission consultative de sécurité (CCS) pour l’éli-
mination des déchets radioactifs solides, volumineux, issus des opérations d’assainissement de
la zone Nord.

En 1986, la Convention de Nouméa, relative à la prévention de la pollution de la région du


Pacifique Sud résultant de l’immersion de déchets, édictait, dans ses articles 10 et 11, une
interdiction absolue d’immersion de déchets et autres matières radioactives.

Tenant compte du contexte réglementaire, de la diversité des types de déchets, des zones
d’entreposage et des modalités possibles de réalisation des opérations d’immersion, la Dircen a
délimité deux sites d'immersion à proximité de l’atoll de Mururoa et un autre au large de l’atoll de
Hao (Fig. 189 et 190).
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 313

350°
18° S

0
N
0
3 00

3 00
Zone
Site Hôtel
340°
NOVEMBRE

2 000 Passe
00
20 Kaki
3 000 Site Colette Denise
Françoise
OSCAR Village
0
1 00

d'Otepa
280°

Passe
0
2 00

21°50 S Anémone

Dindon
18°10' S

Faucon

0 5 km
0 5 km

139° W 141° W
FIG. 189. - Emplacement des sites d’immersion au large de Mururoa FIG. 190. - Emplacement du site d’immersion
et caractéristiques des déchets immergés. Hôtel, au large de Hao.

Site d’immersion Novembre

Le site Novembre est situé au nord d'une ligne allant des zones Françoise à Denise, à une
distance de l'atoll de Mururoa de 2 à 4,5 nautiques, entre les isobathes 2 000 et 3 000 m (Fig. 189).
Ce site, d'une surface d’environ 20 km 2 , a été utilisé pour l’immersion de déchets à partir
d’hélicoptères. Il a été choisi au plus près de la zone Denise afin de limiter les distances des
héliportages pour atteindre des fonds supérieurs à 2 000 m.
Entre 1972 et 1975, 76 tonnes de déchets radioactifs non conditionnés, essentiellement
des éléments de tours et de gros débris métalliques provenant des essais de sécurité pratiquées
en zone Denise, ont été immergés, en vrac, au cours de cinq opérations d’immersion héliportées.

• L’activité totale des radionucléides émetteurs alpha (plutonium) contenus dans les déchets a
été estimée à 7.10 9 Bq, avec une activité massique moyenne de 0,09 GBq.t -1 .
• L’activité des radionucléides émetteurs bêta-gamma a été estimée à 4.10 6 Bq. Il convient d'y
ajouter l'activité non mesurée des produits de fission accompagnant la matière fissile. Un ordre
de grandeur de cette activité a été déduit du rapport entre l'activité des radionucléides émet-
teurs bêta et celle des émetteurs alpha estimés 1 heure après l’essai. Connaissant les dates
d'immersion des déchets métalliques (1 à 5 jours après l’essai), le calcul conduit à une
activité totale des produits de fission associés au plutonium dans les déchets immergés
exprimée un jour après l’essai, de l'ordre de 10 9 Bq, avec une activité massique moyenne de
0,013 GBq.t -1 .

Site d’immersion Oscar

Le site Oscar a été utilisé pour des immersions réalisées à partir de bateaux ou de barges
(Fig. 189). En forme de segment de couronne, il est situé de 3 à 5,5 nautiques des bouées de la
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314 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

passe de Mururoa, entre le 280° et le 340°. Ce site, d'une surface de l'ordre de 60 km 2 , a été
choisi au plus près de la passe.

Entre 1974 et 1982, 2 580 tonnes de déchets radioactifs, conditionnés en conteneurs


béton (1 280 tonnes) ou non conditionnés, ont été immergés entre les isobathes 2 000 et 3 200 m
au cours de 14 campagnes d'immersion par bateaux. Ces déchets provenaient des opérations
d’assainissement du secteur Nord de l’atoll et des premiers post-forages.

• L'activité totale des radionucléides émetteurs alpha (Pu), contenus dans les déchets, est estimée
à 6.10 10 Bq, avec une activité massique moyenne de 0,023 GBq.t -1 .
• L'activité totale des radionucléides émetteurs bêta-gamma, essentiellement des produits de
fission, immergée est estimée à 6.10 9 Bq, avec une activité massique moyenne de 0,0023
GBq.t -1 .

Entre 1984 et 1986, quatre campagnes d'immersion de déchets volumineux provenant de


la fin des opérations d'assainissement du secteur Nord ont été menées sur ce site. Elles ont
exclusivement concerné des matériels, engins lourds, cabines, etc., préalablement décontaminés à
des niveaux compatibles avec la limite réglementaire pour le public.

Site d’immersion Hôtel

Le troisième site d’immersion dénommé Hôtel, d’une surface d'environ 1 km 2 , est situé à
4 nautiques, dans le 350° de la passe Kaki, au nord de l'atoll de Hao, dans une fosse océanique
de 2 500 m de profondeur moyenne (Fig. 190).
Entre 1967 et 1975, 532 tonnes de déchets radioactifs ont été immergées, 310 condi-
tionnées en fûts de béton et 222 non conditionnées. Une partie de ces déchets provenait du
traitement des échantillons prélevés dans les nuages générés par les essais atmosphériques. Ils
ont été immergés au cours de 19 campagnes d’immersion par bateaux.

• L'activité totale des radionucléides émetteurs bêta-gamma, due essentiellement aux produits de
fission contenus dans les déchets lors de leur immersion, est estimée à 1,5.10 10 Bq, dont
environ un tiers provenant des fusées et avions utilisés pour les prélèvements d’échantillons
dans les nuages associés aux essais atmosphériques. L’activité résiduelle a été estimée à 10 8
Bq pour l’année 2000, avec une activité massique moyenne de 0,028 GBq.t -1 .
• L’ordre de grandeur de l'activité totale des radionucléides émetteurs alpha peut être estimé à
partir des rapports théoriques entre les radionucléides émetteurs bêta/alpha dans les
nuages, exprimés 1 heure après l’essai. En tenant compte du temps écoulé entre la date de
l’essai et celle de l’immersion des déchets, compris entre neuf et quinze mois, un calcul
conduit à un rapport entre l’activité des radionucléides émetteurs bêta et celle des émet-
teurs alpha, ramené au jour suivant l’essai, compris entre 500 et 5 000 et, en corollaire,
une activité des radionucléides émetteurs alpha, due aux isotopes du plutonium, de l'ordre
de 3.10 7 Bq, avec une activité massique moyenne de 0,000056 GBq.t -1 .

Les valeurs des activités totales en alpha et bêta-gamma, comparées à celles des limites
préconisées par l'AIEA, montrent que les déchets radioactifs étaient des matériels individuellement
peu contaminés. Le niveau du tonnage de déchets immergés est dû à l’importance des masses
des outils et engins lourds, ainsi qu’aux matériaux de conditionnement en béton et en acier, qui
furent immergés dans le strict respect de la réglementation internationale en vigueur au moment
des immersions.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 315

VII.2.5.2 - ENFOUISSEMENT DES DÉCHETS RADIOACTIFS

Deux puits, PS1 et PS3, ont été forés spécifiquement pour l’enfouissement des déchets
contenant des radionucléides émetteurs alpha. En complément, les parties supérieures de 25
puits forés pour réaliser des essais sous la couronne terrestre ont été utilisées pour enfouir des
déchets très faiblement radioactifs.

Puits de stockage PS1 et PS3

Des déchets contenant des radionucléides émetteurs alpha, conditionnés dans des fûts,
des viroles ou en vrac, ont été stockés dans les puits PS1 et PS3 forés dans le secteur Nord de
l’atoll de Mururoa. Ces puits ont des diamètres supérieurs à ceux des puits d’essais afin d’augmenter
leur capacité de stockage ; un diamètre de 82 pouces, soit environ 2 mètres pour PS1, et de 72
pouces, soit environ 1,8 mètre pour PS3 (Fig. 191). Ces deux puits ont été forés jusqu’à une
profondeur d’environ 1 200 mètres et traversent la zone carbonatée, entre la surface et - 450 m,
ainsi que la zone basaltique de - 450 m à - 1 150 m. Le puits PS2 n’a jamais été foré, car sa
position prévue a été finalement considérée comme trop proche de celle de PS1. En effet, la
technique de forage en air-lift utilisée crée une circulation d’eau ascendante dans le puits, pouvant
accélérer la mobilité des radionucléides stockés dans PS1. Par précaution, le second puits foré,
appelé PS3, a été réalisé quelques centaines de mètres plus loin, à l’ouest de PS1.
L’enfouissement des déchets était réalisé par campagne, généralement annuelle. Le périmètre
des puits était classé zone contrôlée pendant la durée des opérations d’enfouissement des déchets
les plus radioactifs. Lors de ces opérations une zone contrôlée était établie autour de la tête de puits.
Le personnel y accédait à partir d’une cabine vestiaires-douches. Pendant toute la durée des
opérations de transport sur zone et d’enfouissement, un contrôle atmosphérique était réalisé sous
le vent de la tête de puits à l’aide d’un appareil de prélèvement d’air d’un débit de 100 m 3.h -1 .
Les colis contenant les déchets étaient descendus à l’aide d’un câble au fond des puits.
La profondeur était connue en permanence grâce à une
poulie compteuse. Lorsque le colis atteignait le fond du
puits, le câble était remis en tension et le fût libéré à
l’aide d’un largueur acoustique.
Les agrégats radioactifs ont été transportés de la
zone d’entreposage aux puits, par bennes fermées,
accompagnées par un véhicule de radioprotection. À la
sortie de la zone contrôlée, l’extérieur de la benne et du
véhicule faisaient l’objet d’un contrôle radiologique. Les
agrégats, dont l’activité totale alpha était supérieure à
1,9.109 Bq.m-3, soit 1 300 Bq.g -1 pour une densité de
1,4, ont été enfouis dans le tronçon basaltique du
puits et, ceux d’activité massique inférieure dans
celui traversant le massif calcaire. Le déversement des
agrégats était effectué en vrac dans le puits, dont la tête
était équipée d’une trémie. Pendant le déversement, un
arrosage en pluie limitait la mise en suspension de
particules. Le personnel participant à l’opération était
équipé de combinaisons et de masques. Déversement des agrégats dans le puits
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:12 Page 316

316 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

Puits de stockage PS1 Puits de stockage PS3

Enfouissement Valeurs Enfouissement Valeurs


Géologie Date et aux dates Géologie aux dates
Date et
cimentation d'enfouissement cimentation d'enfouissement
0m 0m Bouchon de ciment
9,4.10 (α)
5
S S 1997
é é Bouchon de ciment
Bouchon
d 1996
de ciment
d
i 115 m i
m 3,8.10 (α)
6
m 140 m
5.10 (β, γ)
7
e 1996
e
n Bouchon de ciment n
4,6.10 (α)
8
t 1993 t
5.10 (α)
8
a a
2.10 (β, γ)
5
1989
i i
1,8.10 (α)
8
r 1988 r
e 1987 7,3.10 (α)
9 e Agrégats
376 m de
11
(α) remplissage
410 m 1986 1,8.10 Zone de
Zone de transition 7.10
11
(β, γ) transition
451 m 1985 456 m
1984 Bruit de fond
(α)
11
1983 1,3.10

7,4.10 (α)
9
574 m 1982

623 m
(α)
12
2,7.10 (α)
10
1981 6,5.10
2,2.10 (β, γ)
7
1996
8,9.10 (α)
9

B B 1994
(α)
10
1993 2,6.10
a a
2,9.10 (α)
10
s s 1988-91
3.10 (α)
9
a a 1987
6,8.10 (α)
8
l l 1986
t t 1985 8,2.10
10
(α)
e e
(α)
13
1979 1,4.10
(α)
11
1984 2.10

(α)
12
1983 1,9.10

1148 m
1169 m
Ø = 2,1 m Ø = 1,8 m

F IG . 191. - Coupe verticale schématique des puits, avec les indications d’ordre géologique, les activités
enfouies et la position des bouchons de ciment cloisonnant les puits. La quasi-totalité de l’activité est
enfouie dans la partie volcanique.

Des bouchons de ciment de plusieurs mètres d’épaisseur ont été coulés entre les
déchets, constituant des barrières supplémentaires. En fin d’exploitation du CEP, les puits ont été
obturés jusqu’en surface à l’aide de bouchons d’agrégats de corail et de ciment. Les activités
massiques des radionucléides émetteurs alpha présents dans les déchets enfouis dans ces puits
sont de l’ordre de 37 GBq.t -1 .
L’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) prend en compte ce
stockage dans l’inventaire géographique des déchets radioactifs (Fig. 192).
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 317

F IG . 192. - Inventaire géographique des déchets


radioactifs. Fiche de l’observaoire national des
déchets radioactifs des sites de Muruoa et
Fangataufa. Rapport de l’Agence nationale pour la
gestion des déchets radioactifs (Andra), version
2004. (www.andra.fr)
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:12 Page 318

318 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

Puits annexes

La partie supérieure des premiers puits réalisés pour les essais souterrains était initialement
obturée en totalité. Cette obturation jouant un rôle négligeable sur la tenue mécanique du terrain
au moment de l’explosion a très vite été abandonnée puisqu’elle ne contribuait pas à la sécurité
de l’essai. Ainsi, au fil des ans, 25 puits situés sur la couronne terrestre sont restés en eau libre,
sur une hauteur de plusieurs centaines de mètres, de la zone de transition basalte-calcaire, jusqu'à
la surface de l’atoll. À partir de 1981, la partie supérieure de ces têtes de puits, accessibles par
voie terrestre, a été obturée à l’aide des matériaux ayant des niveaux d’activité inférieurs aux
limites imposant leur stockage dans les puits PS1 et PS3.
Les activités résiduelles de ces déchets sont aujourd’hui négligeables, de l’ordre de 3,7
Bq.g -1 en radionucléides émetteurs alpha et en bêta-gamma, soit entre le centième et le millième
des activités massiques stockées en surface dans le centre de stockage de la Manche de
l’Andra.

VII.3 - RISQUES ASSOCIÉS AUX ESSAIS SOUTERRAINS


Afin de remettre l’environnement des sites dans un état aussi proche que techniquement
possible de leur état d’origine, l'ensemble des puits creusés dans la couronne récifale et au fond
du lagon de Mururoa de Fangataufa ont été rebouchés. Après l’assainissement des sites, une
évaluation des conséquences radiologiques a été réalisée. Les résultats de cette évaluation ont
été confortés en 1996 par une expertise de l’AIEA sur les risques radiologiques associés aux résidus
radioactifs piégés dans les cavités-cheminées, conjointement à l’étude menée par la Commission
géomécanique internationale de différents scenarii possibles de l’évolution géomécanique des
atolls.

VII.3.1 - REBOUCHAGE DES PUITS D’ESSAI


L’ensemble des puits, des forages de grand diamètre (FGD), des post-forages et des
forages de mesures physiques, ont été rebouchés jusqu’au niveau du sol ou du fond du lagon.
Cette opération a débuté en 1995, à partir de l'inventaire complet de l’état des 392 forages, tous
types confondus. Pour remplir l’objectif de désengagement des atolls pour la fin de l’année 1996, les
opérations de rebouchage des puits ont été menées en deux phases, tenant compte des moyens
disponibles sur sites. La première phase a concerné le rebouchage des puits à terre, la seconde
celui des puits sous-marins dans le lagon.

VII.3.1.1 - PUITS À TERRE

Les opérations de rebouchage sur la couronne de Mururoa ont concerné 76 puits. Menées
de 1995 à octobre 1996, elles ont consisté à reprendre, à l’aide d’un engin de levage, la mordache
d’appui, le câble porteur et les câbles mesures et à les relever, après coupure, dans la partie
supérieure libre du puits. La partie tubée du puits dépassant la dalle corallienne a été recépée,
par découpe au chalumeau, ou à l’explosif en cas de trop grand dépassement. La partie supérieure
du puits, remplie d'eau, a ensuite été comblée par des agrégats sur lesquels ont été coulés un
bouchon en béton et une dalle ferraillée. Les ouvrages de génie civil existant en périphérie du
puits ont été détruits à l’explosif et les parties cavées bétonnées.
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:12 Page 319

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 319

Dans la zone Sud, une douzaine de puits n’étaient accessibles qu’après réfection de la route,
ou par le lagon. Deux d’entre eux, situés sur une partie semi-submergée du platier ont nécessité
l’intervention de plongeurs pour la réalisation des opérations d’oxycoupage, sous 1,50 m d’eau.
En 1995, les travaux sur les différents types de puits ont été réalisés à Fangataufa. Les
superstructures des FGD ont été détruites, le tubage d’acier découpé à l’explosif, les caves
remblayées avec des débris coralliens et obturées par des bouchons de béton ferraillés de 40 cm
d’épaisseur. Les forages périphériques ont été traités en fonction des ouvrages de génie civil qui
leurs étaient associés, à savoir :
• curage de la cave, démolition à l’explosif de la tête du puits, remblaiement avec du corail et
coulage d’un bouchon de béton armé ; ou
• curage autour du tube, découpe au chalumeau du tubage et coulage d’un bouchon en béton
armé.

VII.3.1.2 - PUITS SOUS-MARINS

Le rebouchage des puits, en particulier ceux du lagon de Mururoa, a été réalisé suivant
une méthode générale. Les câbles porteurs et les câbles mesures étaient sectionnés à l’aide
d’une cisaille hydraulique ou d’un dispositif pyrotechnique, un obturateur gonflable (packer) était
descendu dans le tubage, sous la tulipe de l’entrée du puits et était gonflé. Il servait de support
à un bouchon composé d’agrégats de corail. En fin de remplissage, dans la partie supérieure du puits
jusqu’au fond du lagon ou de la tulipe quand elle subsistait encore, le bouchon était constitué d’un
coulis de béton de quelques mètres d’épaisseur. La partie supérieure des câbles sectionnés
étant rabattues dans la partie libre du puits, elle se retrouvait emprisonnée dans le bouchon de
ciment. La tulipe était relevée, chargée sur un engin flottant afin d’être ramenée à terre pour être
détruite.
Les puits des essais de la dernière campagne (1995-1996) ont fait l’objet d’un remplissage
complet avant essai, amenant le sommet du béton dans le puits à quelques dizaines de mètres
du fond du lagon afin de simplifier la pose du bouchon définitif après l’essai. Dès l’origine, les post-
forages ont été systématiquement obturés après chaque opération. Pour mener à bien ces opéra-
tions, les moyens classiques de forage et de remplissage des puits ont été utilisés : barge de
forage et de manutention, barge de cimentation et de transport d’agrégats, barge Flocons amé-
nagée à cet effet.

Barge de forage et de manutention, BFM Barge de cimentation et de transport d’agrégats, Cimagré


Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:12 Page 320

320 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

À Fangataufa, un traitement correctif a été appliqué pour rétablir le paysage sous-marin


environnant les puits ayant subi des effondrements sédimentaires sous forme de cratères de sub-
sidence. Après affouillement par circulation d’eau à fort débit, ces cratères ont été comblés par
injection d’un coulis de ciment pour rétablir la cohésion du tubage du puits avec le terrain.
L’injection se poursuivait jusqu’au débordement du ciment dans le fond du cratère.
Pour les plus grands cratères, dont le comblement a nécessité plusieurs milliers de mètres
cubes de matériaux, des agrégats de corail ont été récupérées dans le remblai ayant servi à sur-
élever le sol d'un ancien campement provisoire. Pour les plus petits cratères, la ligne de fond du
lagon a été reconstituée par simple raclage des sédiments périphériques. L’opération de rebouchage
de tous les puits était terminée fin juin 1996, peu de temps avant la cession des barges à leurs
nouveaux propriétaires. Pour le traitement de l’ensemble des puits, plusieurs dizaines de milliers
de mètres cubes d’agrégats et environ dix mille tonnes de ciment ont été nécessaires.

VII.3.2 - ÉVALUATION DES CONSÉQUENCES RADIOLOGIQUES FUTURES

À l’issue de la dernière campagne d’essais, la politique de transparence décidée par le


Président de la République s’est traduite par la réalisation, à la demande du gouvernement français,
d’études internationales sur l’évaluation des effets des essais sur l’environnement et les populations.
L’AIEA a conduit une étude sur la situation radiologique actuelle et future des atolls de Mururoa et
Fangataufa après 30 ans d’essais. Dans le même temps, une étude complémentaire sur la stabilité
géologique et sur l’hydrogéologie de Mururoa et Fangataufa a été confiée à un groupe d’experts,
l’International geochemical commission, réuni sous la responsabilité du Professeur Charles Fairhurst
(Université du Minnesota, États-unis). Les deux études ont fait l’objet de rapports publiés en 1998. Le
relâchement dans la biosphère des radionucléides initialement présents dans les cavités souter-
raines, par migration à travers les roches fissurées des formations géologiques des atolls, ou à
travers le ciment d’obturation des puits d’essai, ainsi que la dispersion des radionucléides asso-
ciés aux sédiments des lagons ont donc fait l’objet d’études approfondies par les scientifiques fran-
çais et d’analyses par des experts internationaux.

L’évaluation des conditions radiologiques à long terme avait pour but d’estimer les doses
hypothétiques auxquelles des groupes de personnes vivant dans la région du Pacifique Sud
pourraient être exposés à la suite d’un éventuel relâchement dans l’océan environnant des radionu-
cléides actuellement confinés dans le sous-sol de Mururoa et Fangataufa.

L’évaluation des conditions radiologiques futures du Pacifique Sud a nécessité de :

• déterminer à partir des énergies dégagées par les essais, l’activité résiduelle des radionu-
cléides confinés dans les cavités-cheminées ;
• évaluer au cours du temps le taux maximum envisageable de relâchement des radionu-
cléides directement dans l’océan ou via le lagon ;
• calculer la dispersion des radionucléides relâchés dans les eaux de l’océan Pacifique Sud et esti-
mer l’évolution de leur niveau d’activité dans les eaux de mer au cours du temps ;
• calculer l’activité des radionucléides au sein des différentes composantes de l’environnement à
partir de la dispersion des radionucléides relâchés dans les eaux du Pacifique Sud ;
• estimer les débits de dose au cours du temps auxquels seraient éventuellement exposés des
groupes de population dits critiques potentiellement présents dans les lieux susceptibles
d’être les plus exposés (Fig. 193).
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 321

Données sismiques Données


indépendantes géologiques

Surveillance des Évaluation des


milieux terrestre Estimation de
cheminements
et aquatique l'énergie explosive géologiques potentiels

Modélisation
hydrologique

Bases de données sur Estimation du terme


les activités Quantités totales source en solution
dans le sous-sol
actuelles et passées (Bq.m-3)

Répartition des
quantités totales
entre les phases
Prélèvements
d'échantillons
d'eaux souterraines

Modélisation du transport Comparaison


Lixiviation des radionucléides avec les
des sédiments dans la géosphère prévisions

Activité Activité dans


dans le lagon le lagon à partir de
et les sédiments sources souterraines

Doses à la faune Taux de relâchement


et à la flore et totaux dans le lagon
incidence de et l'océan (Bq.an-1) Relâchements dus à
ces doses
des évènements
disruptifs possibles

Transport marin dans Transport marin dans


le champ régional le champ lointain
(Bq.m-3) (Bq.m-3)

Doses actuelles Doses en fonction du


aux populations Doses futures aux temps en divers points
locales populations locales de la région du Pacifique

Évaluation de la nécessité d'actions correctives


et autres mesures de suivi

Fig. 193 - Diagramme des principales étapes nécessaires à l’évaluation des conditions radiologiques futures
des populations à partir des relâchements de radionucléides des cavités d’essai et des sédiments des lagons.
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:12 Page 322

322 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

Les résultats de l’évaluation obtenus par les scientifiques français ont fait l’objet d’une
comparaison avec les résultats d’une étude menée par un groupe d’experts internationaux sous
l’égide de l’AIEA qui a également vérifié les estimations des impacts radiologiques pour les sites
d’expérimentations américains et russes. Les principales conclusions du rapport d’experts publié
en 1998 par l’AIEA sont reprises dans les paragraphes suivants et le lecteur intéressé par le détail
des calculs est renvoyé à ce document.

VII.3.2.1 - ÉVALUATION DE L’ACTIVITÉ RÉSIDUELLE CONFINÉE DANS LE SOUS-SOL

L’activité résiduelle des radionucléides subsistant après un essai souterrain dépend


essentiellement de l’énergie explosive du dispositif nucléaire testé. Les évaluations d’énergie ont
été utilisées pour estimer la
quantité des principaux
radionucléides associée à Radionucléide Étude AIEA
Total français1
chaque essai (Tableau 75). Mururoa Fangataufa Total
3H
Les estimations françaises 232 000 48 000 280 000 280 000
14C 25 2,6 28 nc2
concordent avec celles réa- 36Cl 1,3 0,4 1,7 nc
lisées par les experts de 41Ca 1,0 0,3 1,3 nc
l’AIEA. Il est intéressant de 55Fe 3 800 3 800 7 600 nc
noter que les quantités 59Ni 2,9 0,9 3,8 nc
60Co
totales des matières asso- 1 600 1 000 2 600 2 500
63Ni 340 110 450
ciées aux essais français nc
79Se 0,008 0,003 0,011 nc
représentent moins de 2% 85Kr 670 380 1 000 700
de la quantité totale de 90Sr 7 300 3 500 10 800 11 000
matières radioactives relâ- 93Zr 0,23 0,09 0,32 0,35
99Tc
chées dans le cadre de 1,9 0,6 2,5 2,8
106Ru 3 900 3 400 7 300
l’ensemble des essais 20 000
107Pd 0,18 0,03 0,21 nc
atmosphériques d’engins 113mCd 2,7 0,6 3,3 nc
nucléaires effectués dans le 121mSn 0,32 0,03 0,35 nc
monde. Ces informations 126Sn 0,14 0,03 0,17 nc
125Sb
ont été transmises à l’Andra 420 310 730 700
129I 0,0047 0,0014 0,0061
qui en pérennise la mémoire 0,005
134Cs 0,68 0,26 0,94 25
et les comptabilise en tant 135Cs
0,20 0,07 0,27 0,24
que déchets radioactifs 137Cs 10 700 4 100 14 800 14 500
(Fig. 192). 147Pm 5 200 5 900 11 100 11 000
151Sm 510
390 120 750
152Eu 330
230 100 140
154Eu 50
33 17 nc
155Eu 470
330 140 1 200
236U 0,14
0,12 0,02 nc
Tableau 75. 237Np 0,22 0,03 0,25 0,25
Estimation des activités (TBq) des 238Pu 200
185 15 200
radionucléides confinés dans le 239Pu 1 100
1 030 70 1 100
240Pu 300
sous-sol des atolls de Mururoa et 280 20 300
241Pu
de Fangataufa au 1 er mai 1996. 6 200 620 6 820 6 800
242Pu 0,0092
Les données des estimations fran- 0,0084 0,00085 nc
241Am 380
çaises sont comparées à celles 350 30 380
publiées par les experts de l’AIEA. 1 : Source Bureau de liaison français, document n° 4.
2 : nc : donnée non communiquée.
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:12 Page 323

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 323

VII.3.2.2 - ÉVALUATION DES TAUX DE RELÂCHEMENT DES RADIONUCLÉIDES

À partir des activités résiduelles, le taux de relâchement des radionucléides initialement


présents dans les cavités-cheminées dans les eaux du lagon et de l’océan a été estimé (terme
source effectif). Connaissant les taux de lixiviation des radionucléides de la lave et les taux
d’adsorption/désorption dans l’eau de la cavité-cheminée, les activités volumiques des radionucléides
dans l’eau de l’ensemble des cavités-cheminées ont été calculées (terme source en solution). Les
estimations de ces activités volumiques ont été validées par l’intermédiaire des résultats de mesure
de la surveillance de la radioactivité des eaux des cavités-cheminées et ceux de l’étude de terrain de
l’AIEA. Les taux de migration des radionucléides dissous dans l’eau des cavités à travers les
roches volcaniques ont ensuite été estimés à partir de la circulation des eaux souterraines dans les
formations géologiques des deux massifs. In fine, c’est le taux de relâchement total dans les
roches carbonatées et, par voie de conséquence, dans les lagons et l’océan, en fonction du temps,
de chacun des radionucléides pertinents pour les 149 essais, considérés comme autant de sources
souterraines de résidus radioactifs, qui a été estimé. Il a été considéré que les radionucléides
présents dans les formations carbonatées pouvaient être relâchés dans la biosphère, soit par
remontée d’eaux souterraines depuis les lagons, soit par écoulement préférentiel dans les formations
karstiques jusque dans l’océan à une profondeur de 300 à 400 m. Un modèle avec mélange,
tenant compte de la présence d’eau dans les carbonates, a été utilisé pour décrire le taux de relâ-
chement maximum envisageable au cours du temps des radionucléides dans les eaux du lagon et
de l’océan (Fig. 194).
D’une manière générale, les résultats de la modélisation présentent une bonne concordance
avec les quantités estimées à partir des mesures, comme cela sera montré dans le paragraphe
suivant à partir des résultats de la surveillance radiologique des eaux souterraines.

Taux de relâchement (TBq.an-1) Taux de relâchement (GBq.an-1)


1 000 100
Dans l'océan en profondeur
3H 90Sr
Dans l'océan en profondeur

100 10

Dans le lagon de Mururoa


Dans le lagon de Mururoa

10 1

Dans le lagon de Fangataufa

Dans le lagon de Fangataufa


1 0,1
1975 2000 2025 2050 2075 2100 1975 2000 2025 2050 2075 2100 2125 2150 2175
Années Années
Taux de relâchement (GBq.an-1) Taux de relâchement (GBq.an-1)
1 000 10
Dans l'océan en profondeur
137Cs 239Pu

Dans l'océan en profondeur


100 1

Dans le lagon de Mururoa

10 0,1
Dans le lagon de Mururoa

Dans le lagon
de Fangataufa
Dans le lagon de Fangataufa
1 0,01
1975 2000 2025 2050 2075 2100 2125 2150 2175 1 10 100 1 000 10 000 100 000
Années Temps (années)

Fig. 194. - Prévisions de l’évolution annuelle des taux de relâchement en 3 H, 90 Sr, 137 Cs et 239+240 Pu dans
les eaux des lagons de Mururoa et Fangataufa et les eaux profondes de l’océan Pacifique proches des
atolls.
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:12 Page 324

324 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

Dans le cas d’une déstabilisation de flanc d’atoll, avec glissement des formations carbonatées,
des quantités différentes de radionucléides seraient éventuellement relâchées. Ces hypothèses
ont fait l’objet de calculs particuliers dont les résultats sont exposés dans la section de ce chapitre
portant sur les scénarios disruptifs.

VII.3.2.3 - VALIDATION DU TERME SOURCE

Le transport des radionucléides dans la géosphère à partir des cavités-cheminées est un


phénomène complexe en raison de l’hétérogénéité des formations géologiques et des nombreux
processus physiques et chimiques qui interviennent entre les phases solubles et solides (cf.
Chapitre I). Les éventuels relâchements de radionucléides ont fait l’objet de modélisations
décrites dans le paragraphe précédent. Ainsi, il a été montré que le temps moyen de transit d’un
traceur passif, de la base des carbonates jusqu’au lagon, est d’environ 800 ans, soit un temps
assez long pour que 3H, 90Sr et 137Cs éventuellement relâchés dans les carbonates aient disparu par
décroissance radioactive.
Les mesures de terrain permettent de vérifier la validité des modèles utilisés. Aussi, une
surveillance radiologique des eaux circulant dans les formations carbonatées a été mise en place
à l’intérieur de différents secteurs d’expérimentations, sous les lagons de Mururoa et de
Fangataufa et sous la couronne de Mururoa. Deux types de puits de surveillance ont été spécia-
lement forés entre 1994 et 1996 à Mururoa, ceux terminant dans les cavités-cheminées et ceux
se terminant dans les formations carbonatées ou volcaniques. Les résultats de mesure montrent
que les activités volumiques en 3 H, 36 Cl et 129 I sont de trois à quatre ordres de grandeur plus
faibles dans l’eau des puits de surveillance que dans les puits de cavité. Il en va en général de
même pour le 90 Sr et 137 Cs, mais parfois l’écart est plus faible, en particulier pour les puits de
surveillance situés dans le secteur Nord de Mururoa. Ces mesures permettent de suivre l’évolution
annuelle des gradients de l’activité volumique des différents radionucléides au sein des carbonates
des deux atolls (Fig. 195 et 196).

N
PIEUVRE 37
GEO 10
Fig 195 : Gradient horizontal de HTO : 1,5.107 GEO 5
HTO : 107
l’activité volumique (Bq.m -3 ) en 137Cs : 1,3.104
90Sr : 1,8.104
137Cs : 2.104 GEO 8 HTO : 105
90Sr : 1,6.104 137Cs : < 10
tritium et résultats de mesure MURÈNE 27 HTO : 6.105
90Sr: 40
HTO : 7.103 137Cs : 400
en 137 Cs et 90 Sr des eaux des 137Cs : < 10 90Sr: 800
90Sr : < 20
puits de surveillance de l’atoll WHALE 30
HTO : < 7.103
de Mururoa pour la période 137Cs : < 20
1994-1996. 90Sr : < 20
KRILL 23
HTO : 5.108
137Cs : < 10
DRAGON 09 90Sr : 160
HTO : 2.104
137Cs : < 10
90Sr : < 30
SCALAIRE 22
HTO : 7.104
137Cs : 50
90Sr : 80

MURÈNE 16
TAZARD 14
107 à 108 HTO : 1,5.107
137Cs : < 10 HTO : 8.106
137Cs: 20
106 à 107 90Sr : 100 ORQUE 13 PIEUVRE 23
90Sr
: 60
105 à 106 FLET 08 ISURUS 10 LABRE 13 HTO : 7.104 HTO : 6.104
< 105 HTO : 2.104 HTO : 106 HTO : 7.103 137Cs : < 10 137Cs : < 10
137Cs 137Cs : < 10 137Cs 90Sr : < 20 90Sr : 20 0 1 2 3 4 km
Observatoires : < 10 : < 10
90Sr: 13 90Sr : 100 90Sr
: < 10
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:12 Page 325

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 325

FUSEAU 30 N
Fig 196 : Gradient horizontal de l’activité volumique
HTO : 4.106 (Bq.m -3 ) en tritium et résultats de mesure en 137 Cs
137Cs
90Sr
: 100 Empereur
et 90 Sr des eaux des puits de surveillance de l’atoll
: 300 Passe MITRE 27
HTO : 8.106
de Fangataufa pour la période 1994-1996.
Pingouin Kilo 137Cs : 110
90Sr : 530

Les activités les plus élevées de


Frégate l’atoll de Mururoa sont observées dans les
Pavillon
PORCELAINE 23
secteurs où :
HTO : 5.104
137Cs : 17
Hotel 90Sr : 10 • des essais ont été réalisés dans les for-
mations basaltiques mais dont les chemi-
NATICE 19
nées ont atteint le toit du volcanisme, essais
HTO : 2.106
dits à CATV (Fig. 197) ;
137Cs : < 10 • des essais souterrains à énergie élevée
90Sr : 60
Echo ont été réalisés : essais Nestor et Enée
sous la couronne et Mégarée sous le
Marvi lagon et où la formation volcanique n’a pas
0 1 2 km
Observatoires suffisamment confiné les radionucléides.
Terme Sud

À Fangataufa, le gradient d’activité dans les carbonates est dû à un essai unique (Lycos),
de forte énergie, insuffisamment confiné dans les formations volcaniques.

OCÉAN LAGON

CARBONATES

3H, 137Cs, 90Sr 4 essais de sécurité


3 essais Pu(OH)4
3H, 137Cs, 90Sr
de sécurité
avec libération 4 essais :
d'énergie nucléaire 12 essais (couverture dégradée)
à CATV, Lycos
énergie Mégarée
totale 55 kt Nestor VOLCANISME
Enée

3 essais 121
de sécurité essais
(couverture normale) (Les échelles ne sont pas respectées)

F IG. 197. - Schéma représentant les différents types d’expérimentations souterraines effectuées sur les atolls de
Mururoa et de Fangataufa, avec leur nombre et leur impact sur la couverture géologique.
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:12 Page 326

326 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

Les résultats de la surveillance de la radioactivité des eaux souterraines ont permis de valider
l’estimation des activités déposées dans les zones particulières des carbonates et les taux de
relâchement utilisés dans la modélisation des transferts potentiels des radionucléides dans les
différentes composantes de la biosphère.

VII.3.2.4 - DISPERSION DES RADIONUCLÉIDES DANS LES EAUX DU PACIFIQUE SUD

La dispersion des radionucléides et l’évolution au cours du temps de leurs activités au


sein des eaux de différentes régions du Pacifique Sud ont été calculées à partir de leurs taux
de relâchement dans les eaux du lagon et de l’océan. Un premier modèle hydrodynamique a
été utilisé pour calculer la dispersion des radionucléides au sein des eaux du lagon et quantifier leur
transfert des eaux lagonaires vers l’océan. En complément, un modèle de transport sédimentaire a
permis d’estimer les quantités annuelles de sédiments exportées par la passe vers l’océan.
L’évolution de l’activité volumique des radionucléides dans les eaux océaniques a ensuite été
calculée à l’aide de deux modèles océanographiques, l’un en champ régional et l’autre en champ
lointain. Le modèle de dispersion en champ proche est un modèle à compartiments. Il compte
600 compartiments, et utilise une grille avec un maillage équidistant de 1° de longitude par 1° de
latitude, soit environ 110 km par 110 km. Il est classiquement utilisé pour évaluer la dispersion en mer,
à l’échelle régionale, des rejets liquides d’installations industrielles.
L’activité volumique du 3 H, 90 Sr, 137 Cs et 239+240 Pu résultant du relâchement au cours du
temps a été calculée. Les calculs ont couvert la période des 100 prochaines années pour 3 H,
137 Cs et 90 Sr et jusqu’à 100 000 ans pour 239 Pu. L’évolution au cours du temps de l’activité
volumique du 3 H dans les eaux de surface près des îles habitées les plus proches des atolls
d’expérimentations montre que la valeur maximale atteindrait 6 Bq.m -3 vers l’année 8000 à Tureia
(Fig. 198a). La valeur maximale en 137 Cs serait de 0,002 Bq.m -3 , une évolution similaire est
observée pour le 90 Sr, avec une valeur maximale de 0,008 Bq.m -3 .

Activité volumique
100 10
3H Tureia 137Cs Tureia
Hao Hao
10 Tahiti Tahiti
Tubuai 1 Tubuai

1
0,1
0,1

0,01
0,01

0,001 0,001
1980 2000 2020 2040 2060 2080 2100 1980 2000 2020 2040 2060 2080 2100
Années Années

Fig. 198a. - Évaluation de l’évolution au cours du temps de l’activité volumique en 3H ( Bq.m -3 ) et 137 Cs

(m Bq.m -3 ) des eaux de surface à proximité des îles habitées de la Polynésie française.

La courbe du 239Pu passe par deux valeurs maximales, 0,8 et 0,3 mBq.m -3 à Tureia, reflétant
respectivement la contribution du plutonium présent dans le sédiment des lagons et celle des
éventuels relâchements futurs des cavités souterraines (Fig. 198b). Toutes les augmentations
d’activité seraient inférieures aux niveaux caractéristiques du bruit de fond de l’océan Pacifique Sud.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 327

100
Activité volumique Fig. 198b. - Évaluation de l’évolution au cours du temps
Tureia de l’activité volumique (mBq.m -3) en 239+240Pu des eaux
Hao
10 Tahiti
de surface, à proximité des îles habitées de la Polynésie
Tubuai française dans le cas d’un relâchement à partir des
1 sédiments des lagons et des massifs géologiques.

0,1

0,01

0,001

0,0001
1980 1990 2080 3000 12000 102000
Années

Le calcul de la dispersion des radionucléides en champ lointain a été réalisé à l’aide d’un
modèle eulérien de circulation de l’océan mondial, couplé à un modèle de dispersion de traceurs
lagrangiens développés à l’Institut Max Planck pour la Météorologie de Hambourg afin d’étudier
les changements climatiques.
Les variations au cours du temps, au sein du Pacifique Sud, de l’activité volumique des
radionucléides ont été calculées pour les eaux de surface, supposées homogènes sur 50 m
(relâchement à partir du lagon) et pour celles circulant à une profondeur de 400 m (relâchement
karstique).

10 ans

30 ans

Fig. 199 - Activité volumique (10 -7 Bq.m -3 ) des eaux de surface de l’océan Pacifique Sud, 10 ans et 30 ans
après le début des relâchements en plutonium. Ces valeurs peuvent être comparées à l’activité volumique
actuelle en plutonium des eaux de surface du Pacifique Sud, de l’ordre de 1 à 4 mBq.m -3 .
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:12 Page 328

328 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

Le plutonium, initialement issu des sédiments des lagons, est la source la plus importante de
radioactivité. La modélisation de sa dispersion dans les eaux de surface a été réalisée après 5,
10, 30 et 50 ans, en considérant que le relâchement a débuté en 1996, avec un terme source
estimé à 10 GBq.an -1 (Fig. 199). Cinq ans plus tard, la plume de dispersion de surface est car-
tographiée à l’est des atolls avec une activité volumique maximale à proximité des atolls de Mururoa
et Fangataufa atteignant 0,2 mBq.m -3 . Après 10 ans, la plume s’est élargie, principalement en
direction de l’Est. Après 30 ans, l’activité volumique maximale est de 0,2 mBq.m -3 à proximité de
l’île de Pâques. Après 50 ans, l’activité volumique maximale des eaux de surface atteint 0,1
mBq.m -3 et apparaît négligeable pour toutes les autres régions du Pacifique Sud. Pour des temps
plus importants, jusqu’à 1 000 ans, les activités volumiques décroissent progressivement suivant
en cela la décroissance du terme source. Ces prévisions permettent de conclure que l’augmentation
éventuelle la plus élevée restera inférieure d’un ordre de grandeur au bruit de fond océanique,
aujourd’hui de 1 à 4 mBq.m -3, résultat des retombées de l’ensemble des essais atmosphériques.
L’activité volumique des autres radionucléides, 3H, 137Cs et 239+240Pu dans les eaux de surface
montre une décroissance rapide, à très courte distance des atolls d’expérimentations.
Pour les relâchements à 400 m de profondeur, la dispersion des radionucléides est orientée
vers l’ouest. Après 10 ans, les activités volumiques à proximité des côtes australiennes, ayant
subit une forte dilution, ne seraient pas décelables dans des niveaux du bruit de fond océanique.

VII.3.2.5 - ÉVALUATION DES DOSES

L’exposition aux rayonnements radioactifs des personnes vivant à proximité de Mururoa et


Fangataufa résulte de deux sources : les sources naturelles et les résidus radioactifs déposés par
les essais nucléaires atmosphériques. Les principales voies d’exposition sont :

• l’irradiation externe, par le rayonnement naturel cosmique ou tellurique ou due aux radio-
nucléides d’origine artificielle présents dans les sols et les sédiments ;
• l’irradiation interne par inhalation de radionucléides lors de la remise en suspension de particules
de sol ou de sédiments ;
• l’irradiation interne par l’ingestion de radionucléides dans la nourriture issue des atolls ou
prélevée dans l’environnement marin.

La très faible contribution de l’exposition externe à la dose totale par les radionucléides
primordiaux, isotopes des séries de l’uranium et du thorium, est due à leur faible niveau d’activité
dans les sols des atolls essentiellement
constitués de corail ou de débris de car- Essais nucléaires
bonate (cf. Chapitres IV et V). Exposition externe + interne
Exposition
La contribution la plus importante < 0,5 % externe
(artificiel)
19 %
provient de l’ingestion de nourriture issue 210 210 (naturel)
Po/ Pb
de cultures et d’élevages originaires des Exposition
interne
atolls ou de produits de la pêche locale. 40
K
68 %
Pour ces derniers, l’évolution de l’activité (naturel) Exposition
interne
des radionucléides au sein des diffé- 13 %
rentes denrées d’origine marine du régi- (naturel)

me alimentaire des habitants de sites


choisis du Pacifique Sud a été calculée à Fig. 200. - Proportion relative des doses résultant de l’expo-
partir des activités volumiques des eaux sition à des sources naturelles et aux résidus des essais
océaniques. nucléaires français.
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:12 Page 329

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 329

Trois voies d’exposition complémentaires ont été également étudiées :

• l’incorporation de plutonium par des coupures et blessures ;


• l’ingestion de sol par les jeunes enfants ;
• l’exposition externe en fonction de la présence sur les plages et lors de la manipulation de
matériel de pêche.

Outre les atolls de Polynésie actuellement habités, il a également été envisagé que les
deux atolls d’expérimentations soient à terme peuplés et fassent l’objet de cultures et d’élevages.
Pour ce scénario, le rapport des experts de l’AIEA montre que l’estimation de l’exposition d’une
hypothétique population vivant sur les sites d’expérimentations conduit à une valeur faible en
absolu puisque la valeur maximale reste de deux ordres de grandeur inférieurs à celle due aux
rayonnements naturels (Tableau 76). De même, le calcul de l’exposition annuelle des habitants des
autres îles du Pacifique résultant des éventuels relâchements de radionucléides de Mururoa et
Fangataufa montre que pour Tureia, la dose annuelle maximale atteindrait 8 nanoSievert dans 5 000
ans. Les doses en d’autres lieux et d’autres temps seraient toutes plus faibles. Aux îles Cook et
plus à l’ouest, les doses annuelles aux gros consommateurs de produits de la mer ne devraient
pas dépasser 1 nanoSievert, que ce soit dans le présent ou à n’importe quel moment à l’avenir.

T ABLEAU 76.
Dose annuelle (microSievert.an -1) associée à la radioactivité résiduelle éventuellement relachée au cours
du temps par les cavités-cheminées des atolls de Mururoa et Fangataufa.

Doses annuelles, années à compter de 1995 (µSv.an-1)


1 20 50 100 200 500 1 000 2 000 5 000 10 000
Habitants de Mururoa
(hypothétiques) 6 3 2 1 1 1 1 1 4 3
Gros consommateurs de
produits de mer :
• Tureia 0,03 0,01 0,004 0,004 0,001 0,001 0,001 0,002 0,008 0,005
• Tahiti 0,003 0,002 0,0005 0,0005 0,0001 0,0001 0,0001 0,0002 0,001 0,001
• Tubuai 0,0004 0,0002 0,00006 0,00005 0,00001 0,00001 0,00001 0,00003 0,00001 0,00007

VII.3.2.6 - SCÉNARII «DISRUPTIFS»

Cinq scénarii qualifiés de «disruptifs», c'est-à-dire susceptibles d’entraîner une accélération


des relâchements de matières radioactives, ont également été examinés par les experts de l’AIEA. Ces
scénarii liés à diverses hypothèses de changements climatiques ou géologiques sont brièvement
présentés dans les paragraphes qui suivent.

Reprise de l’activité volcanique des atolls

La reprise de l’activité des volcans à l’origine des atolls pourrait faire remonter à la surfa-
ce les matières radioactives présentes dans les formations volcaniques des atolls, sous forme de
lave en fusion, de gaz et de vapeurs, pour être relâchées dans l’atmosphère, l’océan, le lagon et
déposées sur le sol. Cependant, le point chaud magmatique à l’origine de la formation des atolls
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330 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

de Mururoa et Fangataufa, il y a onze millions d’années, se déplace à raison de 11 centimètres


par an, soit un kilomètre tous les mille ans (cf. Chapitre I). Ce point chaud est maintenant localisé
à 70 kilomètres au sud-est des Pitcairn, îles britanniques situées à environ 1 000 kilomètres à
l’est-sud-est de Mururoa. Compte tenu de leurs positions et du sens de la dérive de la plaque tecto-
nique du Pacifique, les autres points chauds identifiés dans l’océan Pacifique Sud ne pourront se
trouver dans le voisinage des atolls de Mururoa et Fangataufa avant un million d’années (Fig. 201).
Outre la faible probabilité que ce scénario se réalise, la reprise de l’activité volcanique ne
pourrait donc se réaliser avant un million d’années, alors que l’activité de tous les radionucléides,
y compris le 239 Pu, sera infinitésimale par le jeu de la décroissance radioactive.

D
E A
S R
M CH Point chaud
A I actif
R P
Q E
U L
IS Point chaud
E
S présumé
ES
QUIS
MAR
DES
CT URE
RA
E DE F
AR ZON
CH
IP
EL
DE
LA AR
SO CH
CI IPE
ÉT L D
É E S T
TAHITI
MEHETIA
UA
MO
TU
HAO
ÎLES COOK

S
ALEMURUROA
USTR
RE DES A de Sens
ACTU la d
DE FR AR
ZONE CH FANGATAUFA ÎLES GAMBIER éri
IP ve
EL
AR PI
CH TC
IP AI
EL RN PITCAIRN
-G
DE AM
S BI
AU ER
ST
RA
LE
S

MAC DONALD

F IG . 201. - Points chauds magmatiques identifiés et présumés en Polynésie française.

Réchauffement de la planète

Le réchauffement de la planète, accompagné d’une remontée du niveau de l’océan, est


considéré aujourd’hui comme un scénario probable et envisageable dans un délai de quelques
dizaines d’années. Ce scénario fait l’hypothèse d’une submersion des atolls. Les études menées
ont montré que cette submersion ne modifierait pas les hypothèses de relâchement des radio-
nucléides piégés dans les cavités souterraines retenues pour le scénario de base (cf. section
précédente), mais occasionnerait la dispersion dans l’océan des radionucléides, principalement
le plutonium, présents initialement dans les sédiments du lagon. La cinétique du rejet et la capacité
dispersive des radionucléides de l’océan sont telles qu’aucune augmentation de la dose de
rayonnement aux habitants du Pacifique n’est attendue de ce scénario.
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:12 Page 331

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 331

Apparition d’une période de glaciation

Ce scénario est basé sur l’apparition d’une période de glaciation entraînant une baisse du
niveau des océans et, par conséquent, un assèchement des lagons et une augmentation sensible de
la surface émergée des atolls. Les atolls de Mururoa et Fangataufa ont connu, depuis leur formation,
plusieurs périodes glaciaires ayant entraîné des baisses du niveau des eaux supérieures à 100
mètres. La prochaine grande glaciation ne devrait pas survenir avant au moins 50 000 ans. Les
radionucléides présents dans les sédiments et les cavités auront alors disparu par décroissance
radioactive, à l’exception du 239 Pu, dont l'activité aura été divisée par 4.

Afin d’explorer toutes les conséquences potentielles de l’apparition d’une telle période de
glaciation, une hypothèse complémentaire, certes hautement improbable en raison de la situation
isolée de l’atoll et de son caractère relativement peu propice à l’agriculture, a été considérée : celle
d’un peuplement sédentaire. Les conséquences d’une période glaciaire dans 50 000 ans ont donc
été estimées sur la base d’une baisse de 100 mètres du niveau des océans, ce qui amènerait à une
exondation des sédiments du lagon, à la présence d’une population sédentaire sur l’atoll et à la
mise en culture des zones sédimentaires découvertes. Outre ces hypothèses, il a été supposé
que la baisse de l’activité du plutonium présent dans les sédiments n’était due qu’à la décrois-
sance radioactive, en faisant abstraction des processus possibles de lixiviation et de désorption
pendant la période liminaire.
Le bouleversement de l’environnement des atolls de Mururoa et de Fangataufa aurait diffé-
rentes conséquences en termes d’exposition des populations. Les radionucléides présents dans
les sédiments des lagons pourraient être remis en suspension, en particulier par les travaux
agricoles, et devenir inhalables. La mise en culture des zones sédimentaires asséchées du
lagon entraînerait une production de produits agricoles présentant des traces de radioactivité
d’origine artificielle. De plus, l’utilisation possible des eaux souterraines constituerait une troisième
voie d’exposition interne directe pour les habitants et indirectes par l’aspersion des cultures.

L’inventaire du 239 Pu présent dans les sédiments amène à une masse de 1,3 kg dans
50 000 ans, soit une activité de 3 TBq. Ces sédiments exondés, avec des hypothèses d’empous-
sièrement standard, entraînerait pour les populations une dose efficace annuelle de 0,6 µSv par
inhalation.
L’activité du 239 Pu présent dans les carbonates de Mururoa est estimée à 50 TBq, 30 TBq
provenant des essais souterrains et 20 TBq provenant des essais de sécurité. Compte tenu d’un
volume d’eau douce présent dans les carbonates estimé à 6 milliards de m 3 et, de la proportion du
plutonium mis en solution (0,04%), l’activité du 239 Pu dans l’eau serait de l’ordre de 3.10 -3 Bq.l -1.
La part du plutonium mise en solution est calculée à partir du coefficient de distribution du plutonium
(500 l.kg -1 ), de la masse volumique des carbonates (2 200 kg.m -3 ) et de leur porosité (0,3). La
consommation de cette eau comme eau de boisson, sur la base de 2 l.j -1 , conduirait à une dose
efficace annuelle de 0,5 µSv pour les populations polynésiennes.
Compte tenu des faibles facteurs de transfert entre le sol et les plantes pour le plutonium
et du faible niveau de l’activité massique des sédiments (5 Bq.kg -1 en moyenne), la consommation
de denrées produites sur les atolls induirait des doses inférieures de plusieurs ordres de grandeur
à celles résultant de l’inhalation de poussières ou de la consommation d’eau issue du sous-sol.

En conclusion, une période de grande glaciation se produisant dans un délai de 50 000


ans induirait des doses efficaces annuelles inférieures à 11 µSv.an -1 pour les personnes susceptible
de vivre en autoconsommation sur les atolls.
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332 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

Intrusion humaine

Les scénarii d’intrusion humaine sont basés sur des hypothèses de forages, dans ou à
proximité, d’une cavité résultant d’un essai. Il a été supposé que ces forages pourraient être
effectués dans le cadre de la prospection de ressources naturelles ou d’extraction d’eau. Les
risques encourus par de telles pratiques concerneraient :

• les personnes effectuant ces forages qui pourraient être en contact direct avec les radio
nucléides ;
• l’environnement et la population de l’atoll, dans la mesure où l’étanchéité des cavités serait
rompue, en particulier si les forages restaient ouverts ou étaient mal rebouchés.

Une intrusion humaine qui aurait des conséquences radiologiques clairement domma-
geables pour les intrus est considérée comme hautement improbable compte tenu de l’absence
de ressources naturelles dans le sous-sol des atolls et de la profondeur des eaux susceptibles
d’être contaminées par les radionucléides.

Risques naturels majeurs : glissements de roches carbonatées

Une catastrophe naturelle majeure, comme un cyclone, un tsunami, une tempête ou encore
un séisme, pourrait avoir pour conséquence de déclencher un glissement de roches carbonatées :

• soit directement, en augmentant la fracturation des atolls (séisme) ;


• soit indirectement, à la suite des dommages causés en surface (cyclone, tsunami, tempête).

Un relâchement des matières nucléaires ne pourrait se produire que si le glissement de


roches des formations géologiques de surface mettait à nu des zones où étaient confinés les radio-
nucléides. Comme la plus grande partie des matières radioactives se trouve dans la zone volcanique,
un glissement au niveau de la zone carbonatée n’exposerait qu’une fraction minime des radionucléides
présents dans le sous-sol (Fig. 202).

Un glissement hypothétique de roches coralliennes et carbonatées a été imaginé dans le


secteur Nord de l’atoll de Mururoa, où ont été effectués 7 essais pour lesquels la cheminée a
pénétré la zone carbonatée et plusieurs essais de sécurité souterrains. Dans ce scénario, il est
supposé que la totalité du plutonium provenant d’un essai de sécurité, soit 10 TBq, et les radio
nucléides résultant de l’essai d’un engin de 5 kt (1 000 TBq de 3 H, 10 TBq de 90 Sr et 30 TBq
de 137 Cs) seraient instantanément relâchés dans l’océan, à une profondeur de 400 mètres. Il
s’agit d’un scénario extrêmement pessimiste et pénalisant. L’hypothèse que les radionucléides,
y compris le plutonium, principal contributeur à la dose, entreraient en totalité en solution, ce qui
est improbable, a été également retenue.

Les activités volumiques maximales de l’eau de mer et des produits de la pêche seraient
mesurées à Tureia quelques mois après l’éboulement. Pour des consommateurs de produits de la
pêche, la dose efficace maximale est estimée à environ 7 µSv.an -1 , la première année à Tureia et
de 3 µSv.an -1 l’année suivante (Tableau 77). Il s’agit là de doses très faibles et néanmoins sur -
estimées compte tenu du caractère pessimiste des hypothèses retenues dans ce scénario.
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:12 Page 333

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 333

Couronne récifale

Surface Essai
de glissement de sécurité
Lagon

Calcaire Océan

Dolomies

Débris
Formations
de transition

Essai à CATV
Calcaire
crayeux

Volcanisme

F IG. 202. - Glissement hypothétique de roches carbonatées entraînant un relâchement de matières radioactives
contenues initialement dans une cavité-cheminée.

T ABLEAU 77.
Les doses (µSv.an -1 ) auxquelles seraient exposées
les populations de Tureia, Hao et Tahiti grandes
consommatrices de produits de la mer sont indiquées
entre 1 et 20 ans après le relâchement de matières
radioactives dans l’océan.

Nombre d'années après l'évènement


Îles
1 2 3 5 10 20
Tureia 6,6 2,8 1,2 0,42 0,09 0,004
Hao 0,39 0,93 0,53 0,25 0,08 0,003
Tahiti 0,006 0,21 0,41 0,18 0,04 0,002
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:13 Page 334

334 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

VII.4 - SURVEILLANCE ACTUELLE DES ATOLLS


Le 25 septembre 1995, la Conférence générale de l’AIEA votait une résolution demandant à
tous les états concernés «de s’acquitter de leurs responsabilités en veillant à ce que les sites où
des essais nucléaires ont été effectués fassent l’objet d’une surveillance scrupuleuse et en prenant
des mesures appropriées pour éviter des impacts néfastes sur la santé, la sûreté et l’environnement
imputables à ces essais nucléaires». C’est dans cette perspective qu’à l’arrêt des essais, en 1996,
le programme de surveillance géomécanique et radiologique des anciens sites d’expérimentations
a été adapté à la nouvelle situation opérationnelle des sites. En effet, bien que l’expertise de
l’AIEA de 1998 ait conclu «qu’il n’est pas nécessaire de poursuivre la surveillance de l’environnement
de Mururoa à des fins de protection radiologique», depuis cette date, la caractérisation régulière de
l’état radiologique et géomécanique des atolls de Mururoa et de Fangataufa, a été orientée pour
vérifier les résultats de l’évaluation prévisionnelle de l’impact des essais nucléaires sur l’environ-
nement. Cette surveillance est aujourd’hui sous la responsabilité du Département de suivi des
centres d’expérimentations nucléaires (DSCEN) de la Délégation générale pour l’armement (arrêté du
25 août 2000). Cet organisme est composé de personnels du ministère de la Défense et du CEA.
Les sites d’expérimentations du Pacifique font l’objet de l’article 24 du décret n°2001-592
du 5 juillet 2001 confiant les modalités de la surveillance au ministre de la Défense via l’autorité de
sûreté : le Délégué à la sûreté nucléaire et à la radioprotection pour les activités et installations
intéressant la défense (DSND). Dans ce domaine, ce dernier s’appuie sur les avis émis par la
Commission de sûreté pour la surveillance des anciens sites d’expérimentations (C3S).
Sur le plan juridique, la tutelle des sites de Mururoa et de Fangataufa est exercée par le
ministère de la Défense. Par l’arrêté du 5 juillet 2001 précité, ces sites ont le statut d’Installation
nucléaire intéressant la Défense (INID). Ce sont donc des terrains militaires placés sous la res-
ponsabilité territoriale du Commandant supérieur des forces armées en Polynésie française (Comsup
- PF). Ainsi, la surveillance, la protection et le contrôle des accès sont assurés de façon permanente
à Mururoa, par une section composée de personnel mis en place par le Régiment d'infanterie de
marine du Pacifique (Rima-P). Fangataufa fait l'objet d'une surveillance occasionnelle par des survols
aériens ou des inspections du site par du personnel héliporté.
Les paragraphes suivant détaille le programme de surveillance géomécanique et radiolo-
gique des atolls d’expérimentations toujours en cours en 2006.

VII.4.1 - SURVEILLANCE GÉOMÉCANIQUE DE MURUROA

Les atolls possèdent naturellement des zones de faiblesse mécanique. Les principales
d’entre elles sont localisées :

• soit au niveau des ruptures de pente de la falaise récifale ;


• soit au droit de larges vallées sédimentaires sous-marines, grossièrement perpendiculaires
au flanc des atolls, contenant des accumulations importantes de matériaux détritiques (résidus
de roches érodées), poreux et peu cohérents, et présentant une faible tenue mécanique.

Des arrachements au niveau de la falaise corallienne et des avalanches sous-marines se


sont produits par le passé sous l’effet des explosions souterraines réalisées sur l’atoll de
Mururoa. Ces phénomènes sont liés à une fracturation produite par le passage de l’onde de choc
d’un essai nucléaire souterrain, suivie d’une déstabilisation des blocs sous l’effet de la gravité,
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:13 Page 335

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 335

cette déstabilisation étant éventuellement favorisée par certaines conditions météorologiques


(houles et tempêtes).
L’ensemble des zones dans lesquelles des arrachements de la falaise récifale ou des
effondrements sous-marins sont susceptibles de se reproduire ont été identifiées. Par le passé,
ces phénomènes ont été limités à la côte Sud-Ouest de l’atoll de Mururoa. Cependant, malgré
l’arrêt des essais, des phénomènes de ce type, bien que de moindre amplitude, sont susceptibles de
se produire encore, notamment dans les secteurs Sud-Ouest et Nord-Est de Mururoa (Fig. 203).

N
Zones protégées par un mur

Avalanches de sédiments superficiels


Masses en mouvement Françoise
Camélia
Irène

Dindon

Viviane Simone

0 5 km

F IG. 203. - Carte de l’atoll de Mururoa avec la position des masses carbonatées montrant la fracturation la
plus importante en surface.

L’effondrement soudain de pans de falaises ou l’éboulement de masses sédimentaires sous-


marines pourraient générer des vagues susceptibles de submerger le platier, jusqu’à plusieurs
kilomètres de l’épicentre. La hauteur de ces vagues, au droit de l’épicentre, pourrait être de
plusieurs mètres, si bien qu’elles présenteraient un danger pour les personnes présentes dans le
secteur temporairement submergé. Dans ce cas de figure, les personnes présentes en dehors du
secteur Est de l’atoll de Mururoa (zone Martine) protégé par des murs devraient se réfugier sur les
points hauts (plates-formes, bunker) ou se diriger vers le centre du lagon (en absence de point
haut proche). Le personnel présent dans le secteur abrité par les murs ne courrait aucun risque.
En conséquence, tant que des personnes seront amenées à résider sur l’atoll de Mururoa
(pour des raisons de gardiennage) et tant que la situation géologique ne sera pas stabilisée, il a
été décidé :
• de suivre très strictement les accès aux zones non protégées par les murs, qui devront être
aussi limités dans le temps que possible ;
• de conserver des murs de protection permettant de maintenir à l’abri la zone Martine où
réside le personnel en charge du gardiennage du site et de maintenir des plates-formes de
refuge sur zones, principalement à proximité des stations de mesure ;
• de conserver un système de surveillance et d’alerte capable à la fois d’avertir automatiquement
et en temps réel les personnes, notamment celles présentes sur zone, lorsqu’un risque imminent
de vague (de faible ampleur) est diagnostiqué, et capable de vérifier que l’évolution des
zones en mouvement reste conforme à celle qui a été prévue et, éventuellement, de mettre
en évidence toute accélération anormale qui serait le signe d’une déstabilisation à venir.
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:13 Page 336

336 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

Ces éléments, déjà mis en œuvre à partir du début des années 1980, ont été maintenus,
sous une forme adaptée et suffisante, jusqu’à nos jours.

VII.4.1.1 - OBJECTIFS DE LA SURVEILLANCE GÉOMÉCANIQUE

La surveillance avait initialement été définie de façon à ce que, de concert avec l’obser-
vation de règles très strictes quant aux moyens et aux modalités d’accès sur zones lors des
essais, la sécurité du personnel vis-à-vis des risques hydrauliques soit à tout moment assurée.
À l’arrêt des activités du CEP, la surveillance a été adaptée à cette nouvelle situation et
comprend deux volets : le suivi continu d’indicateurs représentatifs de l’évolution du massif
géologique de l’atoll et la réalisation périodique de campagnes complémentaires d’observation de
la géosphère (topographie), offrant une vue plus globale de l’évolution de Mururoa et un état de
celle de Fangataufa. Le suivi continu concerne uniquement l’atoll de Mururoa où les effets des
essais sur le massif ont été les plus importants. Il se justifie par la nécessité de connaître en
temps quasi réel toute évolution pouvant mettre en jeu la sécurité des personnes se trouvant sur
l’atoll. L’atoll de Fangataufa qui est inhabité et où aucun mouvement majeur n’a été mis en évidence,
ne nécessite pas le maintien d’une telle surveillance.
Les effets géomécaniques des essais, les risques et le dispositif de surveillance exposés
ci-après sont décrits dans les publications associées aux expertises internationales de l’AIEA ou
de la Commission géomécanique Internationale. Ce suivi repose sur le système baptisé Telsite
(Télésurveillance du site). Ce système, entièrement automatique, transmet ses résultats de
mesures et diagnostics en Métropole, par liaisons satellite, et ne nécessite, par conséquent, aucun
personnel spécifique sur place.

VII.4.1.2 - SUIVI CONTINU DE L’ÉVOLUTION DE MURUROA

La télésurveillance repose sur des capteurs connectés à des stations d’acquisition de


données, réparties sur le pourtour de la couronne de l’atoll de Mururoa et reliées par des trans-
missions hertziennes numériques à une station centrale.
L’alerte à 90 secondes repose sur la détection en temps réel d’événements sismiques à
l’aide de différents équipements :

• deux stations sismiques de surface équipées de sismomètres, situées en zones Dindon et


Viviane, susceptibles de détecter et de localiser les éboulements sur les flancs de l’atoll ;
• quatre stations sismiques en puits, (jusqu'à 450 m de profondeur) équipées de géophones
triaxiaux, situées aux points PK5N, PK8N, PK10N et PK8S, détectant et localisant les relâ-
chements de contrainte locaux et les éboulements sur les flancs.

Le suivi continu de l’évolution géologique du secteur Nord de Mururoa repose sur l’obser-
vation spatiale et temporelle de la sismicité enregistrée par le réseau décrit ci-dessus et sur la
mesure régulière des déformations en profondeur, par des capteurs dits séquentiels en place
dans les secteurs les plus sensibles (Fig. 204) :

• un puits (GEO8B) équipé de 5 paires d'inclinomètres scellés dans le terrain entre 350 et 450 m
de profondeur. Ces appareils détectent les variations d’inclinaison des couches avec une
précision supérieure au millidegré.
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:13 Page 337

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 337

• six forages inclinés à 30°, 40° ou 45° latéraux (FIL) de plusieurs centaines de mètres de longueur,
munis de câbles ancrés à leur extrémité et équipés chacun de 2 capteurs d'élongation de
dynamiques différentes. Ils permettent, avec une précision supérieure au millimètre, de
suivre le mouvement des différents compartiments du glissement délimités par les failles
subverticales. Ces types de forage sont situés au PK5 (zone Irène), au PK8 (centre de la
zone Camélia) et au PK10 (zone Edith-Françoise).
• quatre balises GPS de géodésie spatiale toutes situées en secteur Nord de Mururoa : au
PK5N (digue Hôtel), PK7N (digue Charlie, point dénommé GPS1), PK10N (digue Kilo) et sur
un pilier situé en zone Jeanne (référence). Elles fournissent automatiquement le mouvement
relatif des différentes parties instables dans les trois directions, par rapport à la référence stable
située en Jeanne. La précision de ces mesures automatiques est de 10 -6, les balises sont donc
capables de détecter un déplacement de 1 mm sur une base de mesure de 1 km.

7 590 000

KILO
FRANÇOISE
GEO10
Océan

CAMELIA
GEO8
7 587 500
CHARLIE 400
Antenne GPS 300
200
Inclinomètres
GEO7 IRENE 100
HOTEL GEO5
Capteur de submersion

Extensomètres dans FIL Lagon JEANNE


Géophones 3 composantes

Balise GPS Abri FIL et Balise GPS


sur point fixe extensomètres sur digue

Chaîne de mesures Repère de


et transmission en nivellement
base arrière
Pilier de
visée Pilier jalon
LAGON OCEAN

Capteur
de force
Ancrage
Carbonates

Chaîne d'inclinomètres

Ancrage

Volcanisme

Géophone tridirectionnel

F IG. 204. - Localisation précise de l’instrumentation de surveillance géomécanique en secteur Nord. Vue en
coupe des principales composantes de cette instrumentation.
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:13 Page 338

338 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

Cette instrumentation est complétée par trois capteurs de submersion (capteurs de pression)
qui permettraient, en cas d'éboulement suivi de l’arrivée d’une vague sur le platier, de mesurer
l’amplitude des phénomènes hydrauliques et de les comparer aux prévisions effectuées pour
dimensionner les protections.

VII.4.1.3 - SUIVI PÉRIODIQUE DE L’ÉVOLUTION GÉOMÉCANIQUE GLOBALE DES ATOLLS

Un suivi complémentaire global des atolls est réalisé lors de campagnes d’observation
spécifiques. Ces campagnes, organisées à intervalles réguliers, de l’ordre de 5 ans, concernent
essentiellement l’observation de l’évolution de la partie haute des flancs des atolls, assurée
principalement par :
• un suivi des éventuels tassements et mouvement horizontaux locaux, particulièrement en
secteurs Nord-Est et Sud-Est de Mururoa, par l’intermédiaire de campagnes de topographie
par levé GPS ;
• un suivi de la fracturation de surface par des campagnes de photographies aériennes de la
couronne et particulièrement du secteur Nord, avec des prises de vue à basse altitude (1 000
à 1 500 pieds) permettant ensuite de cartographier les fractures sur les photographies.

Si cela s’avérait nécessaire, ces observations peuvent être complétées par :


• un suivi des déformations de surface (fracturation et tassements différentiels) par des
mesures de radar SAR opérées depuis un avion ou un hélicoptère ;
• un suivi de la géomorphologie des flancs et de la fracturation sous-marine, par des mesures
bathymétriques et d’imagerie acoustique, des fonds superficiels, de 10 à 300 m de profondeur,
par des campagnes de sonar latéral et bathymétriques le long de profils respectivement
parallèles et perpendiculaires à la côte, mises en œuvre depuis un bateau.

VII.4.2 - SURVEILLANCE RADIOLOGIQUE DES ATOLLS

L’expertise radiologique réalisée à Mururoa et Fangataufa en 1996 par l’AIEA constitue la


situation de référence des niveaux d’activité dans l’environnement des atolls d’expérimentations.
L’étude publiée en 1998 par l’AIEA sur les sites d’expérimentations a conclu «qu’il n’est pas
nécessaire de poursuivre la surveillance de l’environnement de Mururoa et Fangataufa à des fins
de protection radiologique». Elle indique toutefois «qu’une certaine surveillance des niveaux des
radionucléides dans la biosphère, pourra également être utile pour convaincre le public de la
sûreté radiologique permanente des atolls». Cette démarche a été retenue par la France qui a
décidé de continuer à surveiller la radioactivité dans l’environnement des sites. Les modalités
pratiques de la surveillance radiologique ont été validées par la mission d’étude de l’AIEA.
L’activité résiduelle d’origine artificielle, encore décelable dans les composantes naturelles des
atolls a pour origine, d’une part, en surface dans la biosphère, les retombées des essais atmo-
sphériques et, d’autre part, au sein des massifs géologiques, les résidus des essais souterrains. La
surveillance radiologique de l’environnement des atolls de Mururoa et Fangataufa a donc pour
objectifs de vérifier :
• l’absence d’augmentation anormale de l’activité des radionucléides au sein des différentes
composantes de la biosphère ;
• la conformité des prévisions de l’évolution de l’activité des radionucléides migrant dans la géo-
sphère, à partir des systèmes cavités-cheminées débouchant à la base des formations
carbonatées des atolls.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 339

À cette fin, une surveillance très complète des différents compartiments du milieu naturel des
atolls d’expérimentations est effectuée avec une fréquence de prélèvements ajustée à la très
faible variabilité au cours du temps de l’activité résiduelle des radionucléides encore présents dans
l’environnement.
Les résultats de mesures obtenus durant la dernière décennie indiquent que la fréquence
optimale de prélèvement se situe entre trois et quatre ans pour la réalisation d'un point complet
des différents compartiments de l'environnement. Les modalités du programme annuel actuel
vont bien au-delà de cette fréquence optimale d’échantillonnage.
La surveillance radiologique des différentes composantes naturelles des atolls est complétée
par celle des produits alimentaires consommés en Polynésie française. Cette dernière est aujour-
d’hui réalisée par l’IRSN qui détaille dans un rapport de surveillance annuelle transmis à l’Unscear,
les modalités de prélèvement d’échantillons et les résultats de radioactivité obtenus (cf. Chapitre V).
Le lecteur est invité à consulter ces rapports sur le site internet de cet institut.

VII.4.2.1 - MODALITÉS DE SURVEILLANCE

La surveillance radiologique des atolls de Mururoa et Fangataufa concerne les compartiments


atmosphériques, terrestre et marin. Les eaux souterraines circulant au sein des formations car-
bonatées font également l’objet d’une surveillance radiologique particulière.

La surveillance radiologique est composée de deux volets :

• un suivi en continu des aérosols atmosphériques et de la dose intégrée ;


• des campagnes annuelles de prélèvement d’échantillons des autres composantes de l’en-
vironnement pour mesure en laboratoire.

Les modalités de prélèvement et de mesurage des échantillons sont brièvement rappelées


dans les paragraphes suivants. Le lecteur souhaitant connaître les détails des protocoles utilisés
peut se reporter au chapitre III.

Nature et fréquence des prélèvements

La surveillance radiologique en continu des sites est assurée par :

• la collecte des aérosols atmosphériques par aspiration d’air au travers d’un filtre. Les filtres,
changés quotidiennement, sont adressés mensuellement en métropole pour analyses ;
• la mesure de la dose intégrée (dosimétrie d’ambiance) à l’aide de dosimètres changés
trimestriellement.

En complément, des échantillons des milieux physique et biologique sont prélevés au


cours d’une campagne de prélèvements appelée Turbo organisée entre mars et juin de chaque
année (Tableau 78). Les différents échantillons prélevés sont conditionnés (congelés, séchés, filtrés,
acidifiés) sur place, avant de faire l’objet d’un traitement spécifique en métropole par le laboratoire
en charge de la mesure.
Les prélèvements sont réalisés sur les deux sites de Mururoa et Fangataufa par le personnel
basé en métropole du DSCEN et de la Direction des applications militaires (DAM) du CEA. Le soutien
logistique nécessaire au déroulement de la surveillance est assuré par des unités du Comsup–PF.
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:13 Page 340

340 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

T ABLEAU 78.
Caractéristiques des prélèvements et des échantillons réalisés dans le cadre de la campagne annuelle Turbo.

Nature de l’appareillage Poids - Volume Fréquence Prélèvements Prélèvements


ou unitaire des des à à
des échantillons prélevés échantillons prélèvements Mururoa Fangataufa

MILIEU ATMOSPHÉRIQUE ET TERRESTRE

DOSIMÈTRES CaSO4 tous les 3 mois 6 points

AÉROSOLS (CASA 110) 1 filtre journalière 1 point

SOLS 1 kg tous les 4 ans 8 points 6 points

EAU DE COCO 10 l annuelle 4 zones 1 zone

COPRAH 4 kg annuelle 4 zones 1 zone

LAGON

EAUX DE LAGON 2x30 l + 2x50 ml annuelle 9 points 5 points

SÉDIMENTS 1 kg annuelle 9 points 5 points

PLANCTON 500 g annuelle 1 1

CHIRURGIEN éviscéré 3 kg annuelle 2 zones/4 1 zone

TROCA chair 2 kg annuelle 2 zones/4 1 zone

MÉROU chair 3 kg annuelle 2 zones/4 1 zone

MILIEU OCEANIQUE PROCHE, PLATIER ET PENTE EXTERNE

TURBO chair 2 kg annuelle 2 zones/4 1 zone

EAUX FLANCS D'ATOLL 2 x 50 ml annuelle 1 zone/4 1 zone


(3 Cotes) (6 points) (4 points)

PLANCTON FLANCS D'ATOLL 500 g annuelle 1 zone/4 1

CREVETTES PROFONDES 3 kg annuelle 1 -

POISSONS PÉLAGIQUES 3 kg annuelle 1 1


COTIERS chair

MILIEU OCÉANIQUE DANS LA LIMITE DES 12 MILLES NAUTIQUES

EAUX OCÉANIQUES 2x30 l + 2x50 ml tous les 4 ans 1 point (6 profondeurs)

PLANCTON 500 g tous les 4 ans 1

POISSONS PÉLAGIQUES 3 kg annuelle 1


HAUTURIERS chair

EAUX SOUTERRAINES
EAUX SOUTERRAINES 10 l + 2x50 ml annuelle 13 points lagon 4 points lagon
3 points à terre
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:13 Page 341

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 341

VII.4.2.2 - MESURE DE LA RADIOACTIVITÉ

Depuis la fin des essais atmosphériques en 1974, la radioactivité d’origine artificielle dans
l'environnement n'a cessé de décroître pour atteindre des niveaux d’activité très faibles, uniquement
quantifiables en utilisant les techniques les plus performantes disponibles dans les laboratoires
de mesure. C’est pourquoi les échantillons de la biosphère et de la géosphère sont rapportés en
métropole pour y être analysés et exploités par les laboratoires de la DAM qui ont développé des
compétences spécifiques et disposent d’équipements performants permettant la mesure des
radionucléides présents à l’état de traces dans l’environnement. Ces laboratoires de mesure sont
accrédités par le Comité français d’accréditation (Cofrac) et agréés par les ministères en charge
de l’industrie, de la santé et de l’environnement pour réaliser des mesures de radioactivité sur des
échantillons de l’environnement.
L’ensemble des échantillons font l’objet d’une mesure des radionucléides émetteurs
gamma par spectrométrie gamma directe. L’analyse directe de l’activité du tritium et celles du
90 Sr et des isotopes du plutonium après radiochimie sont réalisées sur une sélection d’échantillons
(Tableau 79).
T ABLEAU 79.
Radionucléides recherchés en fonction de la nature des échantillons
prélevés dans le cadre de la surveillance continue et au cours de la campagne annuelle Turbo.

Eau de Sédiment Eau Eau Eau Prélèvements


Radionucléides Aérosols lagon de lagon Sols souterraine flanc d'atoll océanique biologiques

HTO (eau tritiée)*


7
Be
22
Na
40
K
N
210
A Pb
T 226
U Ra
R 228
E Th
L 228
Ac
S
234
Th
235
U
60
Co
A 90
Sr
R
T 125
Sb
I 137
F Cs
I 155
C Eu
I 238
Pu
E
L 239+240
Pu
S
241
Am
* : origine naturelle et artificielle
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:13 Page 342

342 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

L’ensemble des résultats de mesures font l’objet d’un rapport annuel de surveillance radio-
logique spécifique des anciens atolls d’expérimentations. Ce rapport est présenté chaque année
par le DSCEN devant l’autorité de sûreté (DSND) et analysé par les membres de la C3S.
Depuis la fin des essais souterrains en 1996, aucune augmentation de la radioactivité
d’origine artificielle n'a été détectée dans les échantillons prélevés dans les différentes compo-
santes de l'environnement des deux atolls de Mururoa et Fangataufa.

VII.5 - CONCLUSION
Les opérations d'assainissement d'installation et de remédiation de sol ont été entreprises
lorsqu'elles étaient justifiées par des risques d'expositions radiologiques du personnel en poste
sur les sites d’expérimentations. Les actions les plus importantes ont été menées pendant la période
d’exploitation des sites. Pour l’atoll de Mururoa, elles ont concerné l’assainissement de la zone Faucon
à la suite de la retombée de l'essai Parthénope, le nettoyage des zones du secteur Nord utilisées
pour les expériences Arpège et pour les essais de sécurité, la récupération des particules marquées
par le plutonium dispersées sur les plages de Mururoa, l’assainissement et le démantèlement de
l’installation Meknès. Pour l’atoll de Fangataufa, elles ont concerné la décontamination du PEE
Empereur à la suite des retombées de l'essai Rigel.

Lors de la clôture définitive du CEP, afin de remettre les sites d’expérimentations dans
un état aussi proche que techniquement possible de leur état d’origine, des opérations complé-
mentaires d'assainissement radiologique ont été réalisées lors du démantèlement des installations
ayant contenu des substances radioactives, afin de les libérer des contraintes radiologiques
dans le futur. Ainsi, l’assainissement de la radioactivité résiduelle a porté sur les installations à
caractère nucléaire, à savoir : la station de décontamination, le bâtiment de traitement des solides
et les locaux du laboratoire de mesure de la radioactivité. De même, un contrôle radiologique a été
réalisé sur toutes les barges opérationnelles, les apparaux de mouillage et les matériels de forage
avant cession et, d’une manière générale, sur tous les matériels en place dans les installations à
caractère nucléaire comme celles utilisées pour le stockage des sources radioactives, les laboratoires
de radiobiologie, de mesures de radioactivité, etc.
Les déchets radioactifs générés par ces assainissements ont fait l'objet d'une gestion
adaptée à leurs niveaux d'activité et à la situation du site, en conformité avec les pratiques autorisées
par la réglementation au moment de leur élimination. Ainsi, en fonction de leur niveau d’activité
les déchets ont fait l’objet de conditionnements, d’entreposage et de stockage spécifiques. Les
immersions de déchets radioactifs ont été réalisées en suivant les prescriptions en vigueur à la
date d’immersion édictées par l’AIEA pour le compte de la Convention sur la prévention de la
pollution des mers résultant de l’immersion des déchets. Les valeurs des activités totales en
alpha et bêta-gamma, comparées à celles des limites préconisées par l'AIEA, montrent que les
déchets radioactifs étaient individuellement peu contaminés. Le niveau élevé du tonnage immergé est
dû à l’importance des masses des équipements immergés ainsi qu’aux matériaux de conditionnement.
En effet, la masse du béton utilisé pour les coques des viroles et comme matrice pour immobiliser les
déchets dans les conteneurs a été comptabilisée en tant que déchet. En complément, des
déchets contenant des radionucléides émetteurs alpha, conditionnés dans des fûts et des viroles
ou en vrac, ont été stockés dans deux puits, PS1 et PS3, situés dans le secteur Nord de l’atoll
de Mururoa. De plus, la partie supérieure de 25 puits situés sur la couronne terrestre de l’atoll de
Mururoa ont été obturés, à partir de 1981, à l’aide des matériaux contaminés à des niveaux
d’activités inférieurs aux limites imposant leur stockage dans les puits PS1 et PS3.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 343

À l’issue de la dernière campagne d’essais, la politique de transparence décidée par le


Président de la République s’est traduite par la réalisation, à la demande du gouvernement français,
d’études internationales sur l’évaluation des effets des expérimentations sur l’environnement et
les populations. L’AIEA a conduit une étude sur la situation radiologique actuelle et future des
atolls de Mururoa et Fangataufa après 30 ans d’essais. Dans le même temps, une étude com-
plémentaire sur la stabilité géologique et sur l’hydrogéologie de Mururoa et Fangataufa a été
confiée à un groupe d’experts, l’International geochemical commission, réuni sous la responsabilité
du Professeur Charles Fairhurst (Université du Minnesota, États-Unis). Les deux expertises ont fait
l’objet de rapports publiés en 1998. L’expertise de l’AIEA sur les risques radiologiques associés
aux résidus radioactifs piégés dans les sédiments des lagons et confinés dans les cavités-che-
minées, en fonction de l’évolution géomécanique des atolls a conclu « qu’il n’y aura aucun effet
sur la santé qui puisse être diagnostiqué médicalement chez un individu ou décelé dans un groupe
par des études épidémiologiques et qui serait attribuable aux doses de rayonnements estimées qui
sont reçues actuellement ou qui seraient reçues à l’avenir par des personnes du fait des matières
radioactives résiduelles présentées à Mururoa et Fangataufa». En outre, «l’étude a permis d’évaluer
les débits de doses au milieu biologique résultant des matières radioactives résiduelles présentes à
Mururoa et à Fangataufa et il a été constaté qu’ils étaient analogues ou inférieurs aux débits de
doses dus aux sources naturelles de rayonnements».

Aujourd’hui, la surveillance des sites comporte deux volets : géomécanique et radiologique. La


surveillance géomécanique des atolls d’expérimentations comprend un suivi continu d’indicateurs
représentatifs de l’évolution des mouvements du massif géologique de Mururoa et la réalisation
périodique de campagnes d’observation, offrant une vue plus globale de l’évolution des atolls de
Mururoa et de Fangataufa. Le suivi géomécanique continu de l’atoll de Mururoa permet de
connaître en permanence toute évolution géologique pouvant mettre en jeu la sécurité des personnes
se trouvant sur l’atoll. L’atoll de Fangataufa, inhabité et où aucun mouvement majeur n’a été mis en
évidence, ne nécessite pas le maintien d’une telle surveillance.

L’expertise radiologique réalisée à Mururoa et Fangataufa en 1998 par l’AIEA a également


conclu «qu’il n’était pas nécessaire de poursuivre la surveillance de l’environnement de Mururoa
et Fangataufa à des fins de protection radiologique». Toutefois, il a été décidé de continuer à surveiller
la radioactivité dans l’environnement des sites afin de vérifier qu’il n’y avait pas d’augmentation
anormale de l’activité des radionucléides au sein des différentes composantes de la biosphère.
Cette surveillance permet de vérifier que l’évolution de l’activité des radionucléides migrant dans
la géosphère à partir des systèmes cavité-cheminée débouchant dans la base des formations
carbonatées des atolls est conforme aux prévisions. Depuis l’arrêt des essais souterrains, une
surveillance très complète des différents compartiments naturels des atolls est effectuée avec
une fréquence des prélèvements ajustée à la très faible variabilité au cours du temps de l’activité
résiduelle des radionucléides. Depuis 1996, aucune anomalie dans les niveaux d’activité n'a été
détectée dans les échantillons prélevés dans l'environnement des deux atolls d’expérimentations.
La surveillance radiologique des anciens atolls d’expérimentations est complétée par celle
des produits alimentaires réalisée par l’IRSN. Ce contrôle a mis en évidence une baisse régulière
de la radioactivité d’origine artificielle pour l’ensemble des aliments de la Polynésie qui aujourd’hui
a atteint des niveaux inférieurs aux limites de détection pour la quasi totalité des radionucléides
libérés lors des essais atmosphériques.
Chap. 7VF-06.12.06.QXD:Chapitre 7 12/01/07 12:13 Page 344

344 ASSAINISSEMENTS, SURVEILLANCE ACTUELLE ET ÉVOLUTION RADIOLOGIQUE FUTURE

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Annexe 1VF-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:13 Page 347

ANNEXE 1

Radionucléides et rayonnements

Cette annexe présente les notions de base sur la radioactivité, les rayonnements et les
réactions en chaîne mises en jeu lors de l’essai d’explosion d'un engin nucléaire.

A1.1 - NOTION D’ATOME


Toute matière, minérale ou vivante, est constituée d’atomes. Les atomes sont eux-mêmes
composés d’un noyau et d’électrons. Le noyau est constitué de particules fondamentales, appelées
nucléons : les neutrons et les protons, de masses sensiblement identiques. Le proton porte une
charge électrique positive, tandis que le neutron est sans charge électrique. Le nombre de charge
du noyau est donc la somme des charges portées par les protons. Au niveau de l’atome, la charge
est neutralisée par la présence d’électrons de charge négative, en nombre identique à celui des
protons de masse très faible gravitant autour du noyau.
Le nombre d’électrons, Z, égal à celui des protons, est appelé numéro atomique. Le
nombre de nucléons du noyau donne la masse de l’atome A, appelé nombre de masse. Tous les
éléments chimiques sont ainsi définis par leur numéro atomique Z et leur nombre de masse A.
Chacun d’eux est référencé par un symbole spécifique se représentant ainsi :
A
X
Z N

Un même élément chimique peut avoir un nombre de neutrons (N) différent, donc des
masses atomiques différentes qui correspondent aux différents isotopes de l'élément. Les isotopes
d’un élément ont les mêmes propriétés chimiques puisque celles-ci sont déterminées par le nombre
d'électrons. En revanche, ils n'ont pas les mêmes propriétés physiques car leur masse est différente.

Par exemple, l’élément plutonium, symbole Pu, de numéro atomique Z = 94 a plusieurs


isotopes dont le nombre de neutrons diffère : 150 pour un nombre de masse 244 ( 244 Pu), 145
pour un nombre de masse 239 ( 239 Pu), etc.
Annexe 1VF-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:13 Page 348

348 Annexe 1 : RADIONUCLÉIDES ET RAYONNEMENTS

A1.2 - RAYONNEMENTS ET DÉCROISSANCE RADIOACTIVE


La cohésion du noyau est assurée par différentes forces maintenant ensemble les
nucléons. Les noyaux sont stables lorsque le rapport neutrons/protons se situe entre les valeurs
idéales de 1 à 1,6 qui varient suivant la masse atomique du noyau. Pour les éléments légers, ce
rapport est égal à 1, soit un nombre de neutrons identique à celui des protons, et pour les
éléments les plus lourds il est égal à 1,6, soit un nombre de neutrons de 60 % plus élevé que celui
de protons. Lorsque la valeur de ce rapport diffère des valeurs idéales, traduisant un déséquilibre
important entre le nombre de neutrons et de protons, le noyau est instable. Les isotopes ayant
un noyau instable sont appelés isotopes radioactifs ou radionucléides.
Les noyaux instables subissent spontanément des modifications qui les conduisent pro-
gressivement vers des états plus stables en générant l'émission d'une particule, ou de rayonnements.
Ces transformations, appelées désintégrations radioactives, entraînent une décroissance
progressive du nombre d'atomes de ce radionucléide suivant une vitesse qui lui est spécifique.
Les désintégrations sont aléatoires, il est impossible de prévoir l'instant auquel elles vont se
produire ; spontanées, elles se produisent sans aucune intervention extérieure ; inéluctables, un
noyau radioactif se désintégrera tôt ou tard. Enfin, elles sont indépendantes de la combinaison
chimique, dont le noyau radioactif fait partie, et des paramètres extérieurs tels que la pression ou
la température.
La radioactivité d’une substance radioactive est caractérisée par le nombre de désinté-
grations nucléaires par unité de temps (activité). L'unité d'activité du Système international (SI) est
le becquerel (Bq) qui correspond à une désintégration par seconde.

A1.2.1 - PÉRIODE RADIOACTIVE

L'activité d'un radionucléide présent dans une substance radioactive décroît avec le
temps, suivant une loi exponentielle. La période physique d'un radionucléide est le temps
nécessaire pour que l'activité diminue de moitié du fait de la décroissance radioactive. Elle est
constante pour chaque radionucléide.
La période du 239 Pu est de 24 110 ans, celle du 137 Cs de 30,15 ans, du tritium de 12,35
ans, du 140 Ba de 12,765 jours. Pour les isotopes d'un même élément les périodes peuvent être
très différentes, comme dans le cas de l’iode : 1,57 10 7 ans pour 129 I, 8 jours pour 131 I, 4,18
jours pour 124 I, 20,8 heures pour 133 I, 13,21 heures pour 123 I, 6,55 heures pour 135 I, 2,30 heures
pour 132 I.

A1.2.2 - PÉRIODE BIOLOGIQUE ET PÉRIODE EFFECTIVE

Par analogie avec la période radioactive, la période biologique est le temps nécessaire à
un organisme vivant pour éliminer, par des processus biologiques, la moitié de la quantité d'un
radionucléide contenu dans ses tissus.
La période effective est la combinaison des périodes radioactive et biologique. Elle permet
d'apprécier la vitesse globale à laquelle la quantité de matière radioactive présente dans un
organisme diminue. La notion de période effective est également utilisée pour traduire la
décroissance observée de l'activité des eaux de mer, intégrant la vitesse de décroissance des
radionucléides due aux processus de dispersion et de diffusion ainsi que leur transfert aux
sédiments, ainsi que la décroissance due à leur période radioactive.
Annexe 1VF-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:13 Page 349

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 349

A1.2.3 - VALLÉE DE LA STABILITÉ

Tous les noyaux connus peuvent être classés dans un graphique, appelé diagramme de
Segré, représentant le nombre de neutrons N en fonction du nombre de protons Z (Fig. 205).
Quatre zones sont classiquement distinguées :

• Une zone centrale, rouge, appelée vallée


N de stabilité est constituée des noyaux
160
stables. On note que pour Z < 30 les
150 noyaux stables sont situés près de la
140 noyaux stables première bissectrice, où N = Z.
noyaux émetteurs β-
130 noyaux émetteurs β+ • Une zone jaune, où se situent des
noyaux émetteurs α
130 noyaux donnant lieu à une radioactivité
de type alpha. Ce sont des noyaux
110
lourds (A est grand).
100
• Une zone bleue, où se situent des
90
noyaux donnant lieu à une radioactivité de
80 type bêta-. Il s’agit de noyaux présentant
un excès de neutrons, par rapport aux
70
noyaux stables de même nombre de
60 masse A.
première
50
bissectrice • Une zone verte où se situent des
40 noyaux donnant lieu à une radioactivité
30 bêta + . Il s’agit de noyaux présentant un
excès de protons par rapport aux
20 noyaux stables de même nombre de
10 masse A. Les forces électrostatiques
entre protons sont plus fortes que les
10 20 30 40 50 60 70 80 90 100 Z forces nucléaires entre nucléons.
F IG. 205. - Diagramme de Segré
(voir explications dans le texte ci-dessus).

A1.3 - TYPES DE RAYONNEMENTS


Un noyau instable peut devenir stable suivant plusieurs modes de désintégration, avec
l'émission de différents types de rayonnements.

A1.3.1 - RAYONNEMENTS BÊTA

Suite à la transformation d'un neutron en proton, les noyaux instables ayant des neutrons
en excès peuvent émettre un électron de charge négative, appelé particule bêta. Cette désintégration
modifie le nombre de protons Z, faisant passer le numéro atomique de l'atome à Z+1, caractéristique
de l’élément chimique suivant dans la classification périodique de Mendeleïev.
Annexe 1VF-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:13 Page 350

350 Annexe 1 : RADIONUCLÉIDES ET RAYONNEMENTS

Cette désintégration peut se répéter au cours du temps, en fonction du niveau d'instabilité


de l'atome créé. Dans le cas de noyaux lourds, ces désintégrations successives amenant le
noyau à son état le plus stable sont décrites sous la forme de chaînes de désintégrations. Ainsi,
l'isotope 238 U de l'uranium naturel se transforme successivement en 13 noyaux instables avant de
parvenir à l'état stable sous la forme de l'isotope 206 Pb (Fig. 206).

9
(4,47.10 ans)
238 234 5
(2,45.10 ans)
U U
β−
α α
234
4,2 Mev
β−
Pa 4,8 Mev
(1,17 min)
234 230 (7,53.104 ans)
Th Th
(24,1 jours)
α
4,7 Mev

226 (1 600 ans)


Ra
α
4,8 Mev

222 (3,82 jours)


Rn
α
5,5 Mev -4
(1,65.10 s) (138 jours)
218 (3,05 min) − 214 210
Po β Po Po
(5,01 jours) −
α α β α
214 210
6 Mev β− Bi 7,69 Mev β− Bi 5,3 Mev
(19,9 min)
214 210 206
Pb Pb Pb
(26,8 min) (22,3 ans) (stable)

F IG. 206. - L’uranium 238 et ses descendants.

Lorsqu’un noyau est instable par excès de protons, l’un d’eux peut se transformer en
neutron par émission d'une particule bêta, chargée positivement, appelée positon. Le nombre de
protons du noyau est donc réduit d'une unité. Il devient, par conséquent, le noyau de l'élément
de numéro atomique Z-1. La durée de vie d’un positon est très courte car, lorsqu'il rencontre
un électron, tous deux s'annihilent pour donner de l'énergie sous forme d'un rayonnement
électromagnétique gamma.

A1.3.2 - RAYONNEMENTS GAMMA

Le rayonnement gamma est un rayonnement électromagnétique généralement émis lors de


la réorganisation du noyau après une désintégration bêta. C'est le cas du noyau de 137 Cs, qui
par désintégration bêta, évolue vers un état plus stable, de période courte (2,3 min), celui du
137m Ba libérant ensuite de l'énergie sous forme d'un rayonnement gamma de 662 keV.
Annexe 1VF-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:13 Page 351

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 351

A1.3.3 - RAYONNEMENTS ALPHA


Le rapport neutrons/protons des noyaux instables les plus lourds, à savoir les éléments
dont le numéro atomique est supérieur à 80, peut être modifié par l'émission d'une particule
composée de deux protons et de deux neutrons. Cette particule, identique au noyau d'un atome
d'hélium, 4 He, est appelée particule alpha. C'est le cas du noyau de 239 Pu qui, par désintégration
alpha, évolue vers un état plus stable, celui du noyau de 235 U.

A1.3.4 - AUTRES TYPES DE RAYONNEMENTS


Les autres principaux types de rayonnements sont :
• Le rayonnement X, rayonnement électromagnétique pouvant être émis au cours d'une désinté-
gration. D'énergie plus faible que les rayons gamma, les rayons X sont émis lors des réar-
rangements des électrons de l'atome.
• Le rayonnement neutronique issu des neutrons pouvant être émis en général au cours de
réaction de fission ou de fusion nucléaire.

A1.4 - RAYONNEMENTS ET POUVOIR DE PÉNÉTRATION


Les rayonnements alpha, bêta et gamma sont qualifiés de rayonnements ionisants. En
effet, lors de leurs interactions avec la matière, ils peuvent transférer suffisamment d'énergie aux
atomes qui la constituent pour provoquer l'éjection de leurs électrons orbitaux ainsi que la
formation d'ions possédant une charge positive ; c'est le processus d'ionisation. Le taux d'ionisation
de la matière sur la trajectoire d'une particule chargée la traversant dépend de sa masse, de sa
charge et de sa vitesse. Dans le cas du rayonnement gamma le taux d'ionisation dépend de
l'énergie gamma.
Les particules lourdes, comme les particules alpha, possèdent une forte charge et perdent
rapidement leur énergie sans pénétrer profondément dans la matière. Elles sont arrêtées par une
feuille de papier ou la couche de cellules mortes de l'épiderme (Fig. 207).
Les particules bêta sont arrêtées par une feuille d'aluminium ; mais peuvent pénétrer dans
les tissus d'un organisme vivant, jusqu'à quelques millimètres de profondeur.

Particules α

Particules β- : électrons

Rayonnements X et γ

Neutrons

Papier Aluminium Béton

F IG. 207. - Pouvoir de pénétration des rayonnements ionisants (voir explications dans le texte ci-dessus).
Annexe 1VF-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:13 Page 352

352 Annexe 1 : RADIONUCLÉIDES ET RAYONNEMENTS

Les rayons électromagnétiques, tels que les rayons X et gamma, ont un pouvoir de
pénétration important, fonction de leur énergie. Ils peuvent traverser plusieurs dizaines de centi-
mètres de tissus d'un organisme vivant. Une importante épaisseur de béton ou de plomb permet
de s’en protéger.

A1.5 - RÉACTIONS EN CHAÎNE


Comme les réactions chimiques, les réactions nucléaires produisent de l'énergie. Si elles
se poursuivent, s’amplifient, après avoir été amorcées, les énergies libérées peuvent être consi-
dérables. Il existe deux catégories de réactions nucléaires capables de fournir de telles énergies
en un temps très court : les réactions de fission et de fusion. Les armes nucléaires utilisent ces
deux types de réactions.

La fission s'applique à des noyaux lourds, de nombre atomique élevé, tels que le 235 U et
le 239 Pu.Lorsqu'un neutron libre pénètre dans un noyau d'atome fissile, celui-ci se divise en
noyaux plus légers, en émettant des particules β et des neutrons libres, et en donnant naissance
à un rayonnement électromagnétique γ (constitué de photons) très énergétique. Les particules α
correspondent à la radioactivité spontanée de la matière fissile. Les deux ou trois neutrons
éjectés au cours d’une désintégration sont en mesure de produire la fission de nouveaux noyaux
et de déclencher ainsi une réaction en chaîne. Néanmoins, tous les neutrons produits ne provoquent
pas de nouvelles réactions de fission, soit parce qu'ils traversent la matière sans interagir avec les
noyaux de la matière fissile, soit parce qu'ils interviennent dans d'autres réactions.

Pour que la réaction en chaîne puisse se développer, il faut une masse de matière fissile
supérieure à une valeur minimale appelée masse critique, de telle sorte que le nombre de neutrons
produits ne puissent pas s'échapper de cette masse plus vite que le nombre de neutrons générés
lors des fissions. La fission de tous les noyaux présents dans un kilogramme d'uranium-235
délivre une énergie équivalente à 14,5 kilotonnes de TNT. Les neuf dixièmes de cette énergie sont
émis dans un temps de l'ordre de 10 nanosecondes.

La fusion nucléaire se produit lorsque deux noyaux d'atomes légers s'unissent pour former
un atome plus lourd. Cette réaction provoque l’émission d'énergie et l’éjection d’un neutron. Les
atomes légers qui fusionnent sont en général le deutérium et le tritium, tous deux isotopes de
l'hydrogène. La réaction de fusion n'est initiée que si les noyaux légers possèdent une énergie
importante qui les rapproche. Dans les explosions thermonucléaires, cette énergie est fournie aux
éléments légers par des réactions de fission. La fusion de tous les noyaux présents dans 1 kilo-
gramme de mélange deutérium-tritium dégage une quantité d'énergie correspondant à 81 kilo-
tonnes de TNT.

Une explosion nucléaire libère donc, en un temps très court, une quantité considérable
d’énergie qui trouve son origine dans les réactions de fission de noyaux lourds, de numéro
atomique élevé, 235 U ou 239 Pu, réactions pouvant être stimulées par la fusion de noyaux légers
d’isotopes de l’hydrogène, deutérium et tritium, lors du processus thermonucléaire.
Annexe. 2VF-07.12.06.QXD:Annexe 28/12/06 14:16 Page 353

ANNEXE 2

Liste des essais atmosphériques


et souterrains réalisés au CEP

ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES
Report en jour
Date et heure Énergie météo (M)
Nom de l'essai Lieu Mode Altitude
(TU) totale technique (T)

1966
02/07 - 15 h 34 ALDÉBARAN Mururoa Dindon Sur barge 10 m 28 kT 1 (T)
19/07 - 15 h 05 TAMOURÉ 85 km Est Mururoa Largage avion 1 000 m 50 kT 6 (M)
21/07 - 12 h 00 GANYMÈDE1 Mururoa Colette Sur tour 12 m 0 kT -
11/09 - 17 h 30 BÉTELGEUSE Mururoa Denise Sous ballon 470 m 110 kT 1 (M)
24/09 - 17 h 00 RIGEL Fangataufa Frégate Sur barge 3m 125 kT 10 (M)
04/10 - 21 h 00 SIRIUS Mururoa Dindon Sur barge 10 m 205 kT 2 (M)

1967
05/06 - 19 h 00 ALTAÏR Mururoa Denise Sous ballon 295 m 15 kT 4 (M)
27/06 - 18 h 30 ANTARÈS Mururoa Dindon Sous ballon 340 m 120 kT 19 (T)
02/07 - 17 h 30 ARCTURUS Mururoa Denise Sur barge 3m 22 kT -

1968
07/07 - 22 h 00 CAPELLA Mururoa Denise Sous ballon 463 m 115 kT 2 (M)
15/07 - 19 h 00 CASTOR Mururoa Dindon Sous ballon 650 m 450 kT -
03/08 - 21 h 00 POLLUX Mururoa Denise Sous ballon 490 m 150 kT -
24/08 - 18 h 30 CANOPUS Fangataufa Frégate Sous ballon 520 m 2,6 MT -
08/09 - 19 h 00 PROCYON Mururoa Dindon Sous ballon 700 m 1,28 MT -

1970
15/05 - 18 h 00 ANDROMÈDE Mururoa Denise Sous ballon 220 m 13 kT -
22/05 - 18 h 30 CASSIOPÉE Mururoa Dindon Sous ballon 500 m 224 kT 2 (M)
30/05 - 18 h 00 DRAGON Fangataufa Frégate Sous ballon 500 m 945 kT 3 (M)
24/06 - 18 h 30 ERIDAN Mururoa Denise Sous ballon 220 m 12 kT -
03/07 - 18 h 30 LICORNE Mururoa Dindon Sous ballon 500 m 914 kT -
27/07 - 19 h 00 PÉGASE Mururoa Denise Sous ballon 220 m 0,05 kT 1 (M)
02/08 - 19 h 00 ORION Fangataufa Frégate Sous ballon 400 m 72 kT 2 (M)
06/08 - 19 h 00 TOUCAN Mururoa Dindon Sous ballon 500 m 594 kT -
1 : Essais de sécurité.
Annexe. 2VF-07.12.06.QXD:Annexe 28/12/06 14:16 Page 354

354 Annexe 2 : LISTE DES ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES ET SOUTERRAINS RÉALISÉS AU CEP

ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES
Report en jour
Date et heure Énergie météo (M)
Nom de l'essai Lieu Mode Altitude
(TU) totale technique (T)

1971
05/06 - 19 h 15 DIONÉ Mururoa Denise Sous ballon 275 m 34 kT -
12/06 - 19 h 15 ENCELADE Mururoa Dindon Sous ballon 450 m 440 kT 2 (M)
04/07 - 21 h 30 JAPET Mururoa Denise Sous ballon 230 m 9 kT -
08/08 - 18 h 30 PHOEBÉ Mururoa Denise Sous ballon 230 m 4 kT 3 (M)
14/08 - 19 h 00 RHÉA Mururoa Dindon Sous ballon 480 m 955 kT 1 (M)

1972
25/06 - 19 h 00 UMBRIEL Mururoa Denise Sous ballon 230 m 0,5 kT 3 (M) + 1 (T)
30/06 - 18 h 30 TITANIA Mururoa Dindon Sous ballon 220 m 4 kT 5 (M)
27/07 - 18 h 40 OBÉRON Mururoa Dindon Sous ballon 220 m 6 kT 7 (M)
31/07 - 22 h 30 ARIEL1 Mururoa Colette Sur tour 10 m 0,001 kT 1 (M)

1973
21/07 - 18 h 00 EUTERPE Mururoa Dindon Sous ballon 220 m 11 kT 2 (M)
28/07 - 23 h 06 MELPOMÈNE Mururoa Denise Sous ballon 270 m 0,05 kT 3 (M)
18/08 - 18 h 15 PALLAS Mururoa Denise Sous ballon 270 m 4 kT -2 (avancé)
24/08 - 18 h 00 PARTHÉNOPE Mururoa Dindon Sous ballon 220 m 0,2 kT -1 (avancé)
28/08 - 18 h 30 TAMARA 26 km Ouest Mururoa Largage avion 250 m 6 kT -
13/09 - 15 h 42 VESTA1 Mururoa Colette Sur tour 4,1 m 0 kT -

1974
16/06 - 17 h 30 CAPRICORNE Mururoa Dindon Sous ballon 220 m 4 kT 1 (M)
01/07 - 17 h 30 BÉLIER1 Mururoa Colette Sur tour 5,6 m 0 kT 21 (M)
07/07 - 23 h 15 GÉMEAUX Mururoa Dindon Sous ballon 312 m 150 kT -
17/07 - 17 h 00 CENTAURE Mururoa Denise Sous ballon 270 m 4 kT 15 (M)
25/07 - 17 h 30 MAQUIS 17 km O-S-O Mururoa Largage avion 250 m 8 kT 1 (M)
28/07 - 17 h 30 PERSÉE1 Mururoa Colette Sur tour 5,6 m 0,001 kT -
14/08 - 00 h 30 SCORPION Mururoa Dindon Sous ballon 312 m 96 kT 16 (M)
24/08 - 23 h 45 TAUREAU Mururoa Denise Sous ballon 270 m 14 kT -
14/09 - 23 h 30 VERSEAU Mururoa Dindon Sous ballon 433 m 332 kT 4 (M)

1 : Essais de sécurité, faible libération d'énergie pour Ariel et Persée.


Annexe. 2VF-07.12.06.QXD:Annexe 28/12/06 14:16 Page 355

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 355

ESSAIS SOUTERRAINS
Date et heure Mode Catégorie
Nom de l'essai Lieu
(TU) expérimental d'énergie1
1975
05/06 - 18 h 15 ACHILLE Fangataufa Puits sous couronne récifale A
26/11 - 00 h 48 HECTOR Fangataufa Puits sous couronne récifale B

1976
03/04 - 17 h 07 PATROCLE Mururoa Puits sous couronne récifale A
11/07 - 00 h 30 MÉNÉLAS Mururoa Puits sous couronne récifale B
22/07 - 19 h 00 CALYPSO Mururoa Puits sous couronne récifale S
30/10 - 23 h 00 ULYSSE A Mururoa Puits sous couronne récifale A
05/12 - 23 h 00 ASTYANAX Mururoa Puits sous couronne récifale A

1977
19/02 - 23 h 30 ULYSSE B Mururoa Puits sous couronne récifale B
19/03 - 23 h 01 NESTOR Mururoa Puits sous couronne récifale C
02/04 - 23 h 30 OEDIPE Mururoa Puits sous couronne récifale A
28/06 - 18 h 15 ANDROMAQUE Mururoa Puits sous couronne récifale S
06/07 - 23 h 00 AJAX Mururoa Puits sous couronne récifale B
12/07 - 23 h 00 CLYTEMNESTRE Mururoa Puits sous couronne récifale S
12/11 - 01 h 30 ORESTE Mururoa Puits sous couronne récifale A
24/11 - 17 h 00 ÉNÉE Mururoa Puits sous couronne récifale C
17/12 - 22 h 00 LAOCOON Mururoa Puits sous couronne récifale A

1978
27/02 - 23 h 00 POLYPHÈME Mururoa Puits sous couronne récifale A
22/03 - 17 h 30 PYLADE Mururoa Puits sous couronne récifale A
25/03 - 17 h 30 HÉCUBE Mururoa Puits sous couronne récifale A
01/07 - 17 h 00 XANTHOS Mururoa Puits sous couronne récifale A
19/07 - 18 h 00 ARÈS Mururoa Puits sous couronne récifale B
26/07 - 23 h 00 IDOMÉNÉE Mururoa Puits sous couronne récifale A
02/11 - 18 h 00 SCHÉDIOS Mururoa Puits sous couronne récifale A
14/11 - 18 h 00 APHRODITE Mururoa Puits sous couronne récifale S
30/11 - 17 h 32 PRIAM Mururoa Puits sous couronne récifale C
17/12 - 18 h 04 ÉTÉOCLE Mururoa Puits sous couronne récifale A
19/12 - 16 h 57 EUMÉE Mururoa Puits sous couronne récifale B

1979
01/03 - 17 h 24 PENTHÉSILÉE Mururoa Puits sous couronne récifale B
09/03 - 16 h 37 PHILOCTÈTE Mururoa Puits sous couronne récifale B
24/03 - 16 h 28 AGAPÉNOR Mururoa Puits sous couronne récifale B
04/04 - 18 h 07 POLYDORE Mururoa Puits sous couronne récifale B
18/06 - 23 h 27 PYRRHOS Mururoa Puits sous couronne récifale B
29/06 - 18 h 56 ÉGISTHE Mururoa Puits sous couronne récifale C
25/07 - 17 h 57 TYDÉE Mururoa Puits sous couronne récifale C
28/07 - 19 h 56 PALAMÈDE Mururoa Puits sous couronne récifale A
19/11 - 17 h 53 CHRYSOTÉMIS Mururoa Puits sous couronne récifale A
22/11 - 19 h 14 ATRÉE Mururoa Puits sous couronne récifale A
A : < 5 kT
1 : Les catégories d'énergie pour les essais souterrains sont les suivantes :
B : 5 à 20 kT
S : Essais de sécurité C : 20 à 150 kT
Annexe. 2VF-07.12.06.QXD:Annexe 28/12/06 14:16 Page 356

356 Annexe 2 : LISTE DES ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES ET SOUTERRAINS RÉALISÉS AU CEP

ESSAIS SOUTERRAINS
Date et heure Mode Catégorie
Nom de l'essai Lieu
(TU) expérimental d'énergie1
1980
23/02 - 18 h 03 THYESTE Mururoa Puits sous couronne récifale A
03/03 - 17 h 56 ADRASTE Mururoa Puits sous couronne récifale A
23/03 - 19 h 37 THÉSÉE Mururoa Puits sous couronne récifale C
01/04 - 19 h 31 BOROS Mururoa Puits sous couronne récifale B
04/04 - 18 h 33 PÉLOPS Mururoa Puits sous couronne récifale B
16/06 - 18 h 27 EURYPLE Mururoa Puits sous couronne récifale C
21/06 - 17 h 01 ILUS Mururoa Puits sous couronne récifale B
06/07 - 17 h 27 CHRYSÈS Mururoa Puits sous couronne récifale B
09/07 - 18 h 03 LÉDA Mururoa Puits sous couronne récifale S
19/07 - 23 h 47 ASIOS Mururoa Puits sous couronne récifale C
25/11 - 17 h 53 LAËRTE Mururoa Puits sous couronne récifale A
03/12 - 17 h 33 DIOMÈDE Mururoa Puits sous couronne récifale C

1981
27/02 - 23 h 28 BROTÉAS Mururoa Puits sous couronne récifale A
06/03 - 17 h 27 TYRO Mururoa Puits sous couronne récifale A
28/03 - 17 h 23 IPHICLÈS Mururoa Puits sous couronne récifale B
10/04 - 17 h 57 CLYMÈNE Mururoa Puits sous lagon B
08/07 - 22 h 23 LYNCÉE Mururoa Puits sous couronne récifale B
11/07 - 17 h 17 ERYX Mururoa Puits sous couronne récifale A
18/07 - 17 h 43 THÉRAS Mururoa Puits sous couronne récifale A
03/08 - 18 h 33 AGÉNOR Mururoa Puits sous couronne récifale C
06/11 - 17 h 03 LÉTO Mururoa Puits sous couronne récifale A
11/11 - 17 h 07 PROCLÈS Mururoa Puits sous couronne récifale B
05/12 - 16 h 58 CILIX Mururoa Puits sous couronne récifale B
08/12 - 16 h 47 CADMOS Mururoa Puits sous lagon B

1982
20/02 - 17 h 33 AÉROPE Mururoa Puits sous couronne récifale A
24/02 - 18 h 15 DÉIPHOBE Mururoa Puits sous couronne récifale A
20/03 - 17 h 03 RHÉSOS Mururoa Puits sous lagon B
23/03 - 17 h 07 ÉVÉNOS Mururoa Puits sous couronne récifale A
31/03 - 16 h 30 AÉSON Mururoa Puits sous couronne récifale S
27/06 - 17 h 00 LAODICE Mururoa Puits sous couronne récifale A
01/07 - 17 h 02 ANTILOKOS Mururoa Puits sous couronne récifale C
21/07 - 17 h 13 PITANE Mururoa Puits sous couronne récifale A
25/07 - 18 h 02 LAIOS Mururoa Puits sous lagon C
27/11 - 17 h 02 PROCRIS Mururoa Puits sous couronne récifale A

1983
19/04 - 18 h 53 EURYTOS Mururoa Puits sous lagon C
25/04 - 17 h 33 AUTOMÉDON Mururoa Puits sous couronne récifale A
25/05 - 17 h 31 CINYRAS Mururoa Puits sous lagon C
18/06 - 17 h 31 BURISIS Mururoa Puits sous couronne récifale A
28/06 - 17 h 46 OXYLOS Mururoa Puits sous lagon B
20/07 - 20 h 30 BATTOS Mururoa Puits sous couronne récifale B
04/08 - 17 h 14 CARNABON Mururoa Puits sous lagon C
03/12 - 16 h 58 LINOS Mururoa Puits sous couronne récifale A
07/12 - 17 h 28 GYGÈS Mururoa Puits sous lagon B

A : < 5 kT
1 : Les catégories d'énergie pour les essais souterrains sont les suivantes :
B : 5 à 20 kT
S : Essais de sécurité C : 20 à 150 kT
Annexe. 2VF-07.12.06.QXD:Annexe 28/12/06 14:16 Page 357

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 357

ESSAIS SOUTERRAINS
Date et heure Mode Catégorie
Nom de l'essai Lieu
(TU) expérimental d'énergie1

1984
08/05 - 17 h 26 DÉMOPHON Mururoa Puits sous couronne récifale A
12/05 - 17 h 31 MIDAS Mururoa Puits sous lagon C
12/06 - 17 h 16 ARISTÉE Mururoa Puits sous couronne récifale B
16/06 - 17 h 44 ÉCHÉMOS Mururoa Puits sous lagon C
27/10 - 17 h 16 MACHAON Mururoa Puits sous couronne récifale B
02/11 - 20 h 45 ACASTE Mururoa Puits sous lagon C
01/12 - 16 h 51 MILÉTOS Mururoa Puits sous couronne récifale A
06/12 - 17 h 29 MEMNON Mururoa Puits sous lagon C

1985
30/04 - 17 h 29 CERCYON Mururoa Puits sous couronne récifale B
08/05 - 20 h 28 NISOS Mururoa Puits sous lagon C
03/06 - 17 h 30 TALAOS Mururoa Puits sous couronne récifale B
07/06 - 17 h 40 ERGINOS Mururoa Puits sous lagon B
24/10 - 17 h 50 HÉRO Mururoa Puits sous couronne récifale A
26/10 - 16 h 35 CODROS Mururoa Puits sous lagon C
24/11 - 16 h 01 ZÉTÈS Mururoa Puits sous couronne récifale B
26/11 - 17 h 42 MÉGARÉE Mururoa Puits sous lagon C

1986
26/04 - 17 h 02 HYLLOS Mururoa Puits sous couronne récifale B
06/05 - 16 h 58 CÉTO Mururoa Puits sous couronne récifale A
27/05 - 17 h 15 STHÉNÉLOS Mururoa Puits sous couronne récifale B
30/05 - 17 h 25 GALATÉE Mururoa Puits sous lagon C
10/11 - 16 h 58 HÉSIONE Mururoa Puits sous couronne récifale A
12/11 - 17 h 02 NAUPLIOS Mururoa Puits sous lagon B
06/12 - 17 h 10 PÉNÉLÉOS Mururoa Puits sous couronne récifale A
10/12 - 17 h 15 CIRCÉ Mururoa Puits sous lagon C

1987
05/05 - 16 h 58 JOCASTE Mururoa Puits sous lagon B
20/05 - 17 h 05 LYCOMÈDE Mururoa Puits sous lagon C
06/06 - 18 h 00 DIRCÉ Mururoa Puits sous lagon B
21/06 - 17 h 55 IPHITOS Mururoa Puits sous lagon C
23/10 - 16 h 50 HÉLÉNOS Mururoa Puits sous lagon C
05/11 - 17 h 30 PASIPHAÉ Mururoa Puits sous lagon B
19/11 - 16 h 31 PELÉE Mururoa Puits sous lagon C
29/11 - 17 h 59 DANAÉ Mururoa Puits sous lagon B

1988
11/05 - 17 h 00 NÉLÉE Mururoa Puits sous lagon C
25/05 - 17 h 01 NIOBÉ Mururoa Puits sous lagon C
16/06 - 17 h 15 ANTIGONE Mururoa Puits sous lagon A
23/06 - 17 h 31 DEJANIRE Mururoa Puits sous lagon B
25/10 - 17 h 00 ACRISIOS Mururoa Puits sous lagon A
05/11 - 16 h 30 THRASYMÈDES Mururoa Puits sous lagon C
23/11 - 17 h 01 PHÈRES Mururoa Puits sous lagon C
30/11 - 17 h 55 CYCNOS Fangataufa Puits sous lagon C
A : < 5 kT
1 : Les catégories d'énergie pour les essais souterrains sont les suivantes :
B : 5 à 20 kT
S : Essais de sécurité C : 20 à 150 kT
Annexe. 2VF-07.12.06.QXD:Annexe 28/12/06 14:16 Page 358

358 Annexe 2 : LISTE DES ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES ET SOUTERRAINS RÉALISÉS AU CEP

ESSAIS SOUTERRAINS
Date et heure Mode Catégorie
Nom de l'essai Lieu
(TU) expérimental d'énergie1

1989
11/05 - 16 h 45 ÉPÉIOS Mururoa Puits sous lagon B
20/05 - 17 h 59 TECMESSA Mururoa Puits sous lagon A
03/06 - 17 h 30 NYCTÉE Mururoa Puits sous lagon C
10/06 - 17 h 30 CYZICOS Fangataufa Puits sous lagon C
24/10 - 16 h 30 HYPSIPYLE Mururoa Puits sous lagon C
31/10 - 16 h 57 ÉRIGONE Mururoa Puits sous lagon B
20/11 - 17 h 29 TROS Mururoa Puits sous lagon B
25/11 - 18 h 00 DAUNUS Mururoa Puits sous couronne récifale S
27/11 - 17 h 00 LYCOS Fangataufa Puits sous lagon C

1990
02/06 - 17 h 30 TÉLÈPHE Mururoa Puits sous lagon B
07/06 - 17 h 30 MÉGAPENTHÈS Mururoa Puits sous lagon B
26/06 - 18 h 00 CYPSÉLOS Fangataufa Puits sous lagon C
04/07 - 18 h 00 ANTICLÉE Mururoa Puits sous lagon B
14/11 - 18 h 12 HYRTACOS Fangataufa Puits sous lagon C
21/11 - 17 h 00 THOAS Mururoa Puits sous lagon C

1991
07/05 - 17 h 00 MÉLANIPPE Mururoa Puits sous lagon A
18/05 - 17 h 15 ALCINOOS Mururoa Puits sous lagon C
29/05 - 19 h 00 PÉRICLYMÉNOS Fangataufa Puits sous lagon C
14/06 - 18 h 00 PITTHÉE Mururoa Puits sous lagon C
05/07 - 18 h 00 CORONIS Mururoa Puits sous lagon A
15/07 - 18 h 10 LYCURGUE Mururoa Puits sous lagon C

1995
05/09 - 21 h 30 THÉTYS Mururoa Puits sous lagon B
01/10 - 23 h 30 PLOUTOS Fangataufa Puits sous lagon C
27/10 - 22 h 00 AEPYTOS Mururoa Puits sous lagon C
21/11 - 21 h 30 PHÉGÉE Mururoa Puits sous lagon C
27/12 - 21 h 30 THÉMISTO Mururoa Puits sous lagon C

1996
27/01 - 21 h 30 XOUTHOS Fangataufa Puits sous lagon C

A : < 5 kT
1 : Les catégories d'énergie pour les essais souterrains sont les suivantes :
B : 5 à 20 kT
C : 20 à 150 kT
S : Essais de sécurité.

Nota : Dans la catégorie A, 3 essais de sécurité souterrains sont inclus.


X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 359

ANNEXE 3

Essais atmosphériques

De 1966 à 1996, 193 expérimentations nucléaires ont été effectuées au Centre d’expéri-
mentation du Pacifique, sur les atolls de Mururoa et Fangataufa. 178 essais nucléaires ont
consisté à faire exploser un engin nucléaire, avec libération d’une grande quantité d’énergie. Les
15 autres étaient des essais de sécurité.
Entre juillet 1966 et septembre 1974, 41 essais nucléaires ont été réalisés dans l’atmo-
sphère et, entre juin 1975 et janvier 1996, 137 ont été effectués en grande profondeur, dans le
massif géologique des atolls (cf. Chapitre IV).
L’énergie libérée par une explosion se mesure en kilotonnes (kt) d’équivalent trinitro toluène
(TNT). L’ensemble des essais effectués sur le site du CEP a été d’environ 13 000 kt, 10 000 kt pour
les essais atmosphériques et environ 3 000 kt pour les essais souterrains.
Les essais nucléaires français représentent donc 3,6 % de l’énergie de fission et 2,3 % de
l’énergie totale de tous les essais réalisés par l’ensemble des pays dotés d’armements nucléaires.

T ABLEAU 80.
Récapitulatif de la répartition des types d’essais nucléaires et de sécurité effectués au CEP.

Essais Mururoa Fangataufa Total


Essais nucléaires atmosphériques
Barge 3 1 4
Ballon 31 3 34
Avion 3 - 3
Essais nucléaires souterrains
Sous la couronne corallienne 77 2 79
Sous le lagon 50 8 58
Essais de securité
Dans l'atmosphère 5 - 5
Souterrains 10 - 10
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 360

360 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

La France a également pratiqué, comme les autres puissances ayant développé un armement
nucléaire opérationnel à des essais de sécurité destinés à s’assurer que les armes ne s’amorceraient
pas d’elles-mêmes pendant leur transport ou leur stockage et que, dans tous les cas possibles
d’accidents, il ne puisse y avoir de dégagement spontané d’énergie nucléaire. L’objectif techno-
logique ultime est la sûreté intrinsèque de l’arme, la charge est dite alors «auto-sûre». Ces essais
de sécurité ont conduit à la dispersion très localisée d’une fraction de matières nucléaires présentes
dans l’engin. Entre 1966 et 1974, cinq essais de sécurité ont été effectués à l’air libre, à Mururoa,
en zone Colette qui a été assainie par la suite (cf. Chapitre VII).

Entre 1974 et 1989, dix essais de sécurité ont été réalisés en souterrain, trois dans les
formations volcaniques et sept dans celles carbonatées. Trois de ces expériences ont entraîné
un faible dégagement d’énergie résultant de réactions de fission.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 361

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 361

CAMPAGNE 1966

Dès la fin du mois de décembre 1964, la météorologie nationale fournissait au SMSR, les
valeurs quotidiennes des vitesses et direction des vents à dix niveaux au-dessus du secteur inté-
ressé par les futurs essais atmosphériques. À partir du 1 er août 1965, elle lui transmettait quoti-
diennement deux séries de données correspondant respectivement à un découpage de
l’atmosphère en dix couches de 1 500 m et 10 autres couches de 2 500 m. Il est rapidement
apparu que les conditions météorologiques permettant de réaliser un essai atmosphérique en toute
sécurité étaient établies 15 jours par mois, entre juin et septembre, avec des séquences de 3 à 6
jours consécutifs. En revanche, l’été austral, de janvier à mai, est apparu peu propice à la réali-
sation des essais avec 1 à 4 jours favorables non consécutifs. Afin de réduire le temps d’attente
d’un créneau météo rologique favorable pour chaque essai, il a été décidé d’organiser la première
campagne d’essais atmosphériques au début du mois de juillet 1966.

Le premier semestre 1966 fut une période d’intense préparation pour terminer l’installation
des atolls d’expérimentations. Dans le même temps, la volonté d’atteindre un niveau de sécurité
maximal pour les populations résidant sur les îles et atolls polynésiens, proches et éloignés des
sites d’expérimentations a conduit à l’installation de nombreux postes de mesures radiologiques et
biologiques dans des atolls dont certains d’accès difficile (cf. Chapitre III). Dès le début de l’année,
tous les moyens d’accueil des expérimentateurs étaient en place : bateaux bases, liaisons
aériennes journalières inter-insulaires Papeete-Hao-Mururoa, qui ont permis les nombreuses
recettes techniques et le réglage des appareils.

La campagne 1966 a concerné six essais atmosphériques, trois sur barge, un sous ballon,
un par largage d’avion et un essai de sécurité sur tour. Du 11 au 13 juin, l’exercice API a permis
de tester le fonctionnement de l’ensemble du dispositif opérationnel avant que n’ait commencé la
première campagne d’essais au CEP. Celle-ci s’est déroulée en deux phases. La première a débuté
par l’essai de faible puissance sur barge Aldébaran suivi de l’essai d’une arme larguée d’avion aux
abords de Mururoa (Tamouré). La seconde phase a concerné trois essais de moyenne puis-
sance : l’essai Bételgeuse avec, pour la première fois, une explosion en altitude sous ballon pour
réduire les retombées sur les atolls les plus proches des sites d’expérimentations et deux essais
réalisés sur barge, l’un à Fangataufa (Rigel) l’autre à Mururoa (Sirius).
L’avis de zones dangereuses à la navigation maritime et aérienne a été diffusé dès le 15 mai
aux navigateurs et dans les Publications d'informations aéronautiques (AIP). Ces zones ont été
activées par messages AVURNAV et NOTAM six jours avant le premier essai. La navigation
commerciale a respecté ces avis et les pêcheurs Japonais se sont tenus à l’écart de ces zones.
La volonté de protéger les atolls et îles habités de la Polynésie et en particulier les plus
proches des sites d’expérimentations (Tureia-Gambier-Reao) de retombées significatives conduisit à
attendre les conditions météorologiques les plus favorables à la dispersion du nuage radioactif. Les
essais sur barge ont généralement donné lieu à de longues attentes (nommées Pénélope), avant que
les conditions météorologiques soient réunies pour réaliser ces essais qui ont été accompagnés de
retombées locales importantes au niveau du lagon. Malgré les précautions prises, l’archipel des îles
Gambier, a été touché par les retombées de l’essai Aldébaran (cf. Chapitre VI), conduisant à une
exposition de la population à un niveau de l’ordre de grandeur de la dose annuelle maximale
admissible pour les populations (5 mSv), selon la réglementation française en vigueur jusqu’en 2001.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 362

362 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

ALDÉBARAN Essai n° 1

Date de l’essai : 2 juillet 1966, 5h34 (heure locale)


Type d’essai : sur barge dans le lagon
Site : Mururoa – Zone Dindon
Altitude : 10 m
Énergie : 28 kt

Informations météorologiques
Le 1er juillet, les conditions
météorologiques étaient favorables,
avec des vents du sud-ouest faiblissant
en soirée et remontant lentement vers le
nord. Le 2 juillet, après réalisation de
l’essai, l’orientation des vents évoluait
défavorablement, soufflant d’ouest-
nord-ouest.
Au moment de l’essai, la visibilité
était bonne sur la zone.

Déroulement de l’essai
Le nuage s’est élevé verticalement au niveau du point zéro et l’influence du vent est apparue
très nettement à partir de H+6min. Le nuage s’est alors incliné dans le lit du vent pour présenter,
peu à peu, plusieurs parties distinctes dues aux cisaillements des vents. La partie inférieure du
pied est restée visible à la verticale du point zéro, jusqu’à H+15min.
À H+1h, le nuage principal s’étendait sur 65 km, à une altitude moyenne de 6 500 m. Il
était porté par des vents de 20 m.s -1 venant du 280, conditions moyennes mesurées entre 5 000
et 9 000 m d’altitude. La vitesse moyenne des vents au sol atteignait 5 m.s -1 .

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Le jour de l’essai, entre 16h20 et 17h40, une augmentation de la radioactivité atmosphérique
a été détectée à Morane, l’atoll inhabité le plus proche à l’est de l’atoll de Mururoa, puis à
Mangareva, la principale île de l’archipel des Gambier.

Îles et atolls concernés par les retombées différées


Les 13, 14 et 15 juillet, une faible remontée de l’activité volumique associée à l’indice bêta
global entre 0,37 et 3,7 Bq.m -3 , a été détectée dans l’atmosphère de l’ensemble des îles
appartenant au réseau de surveillance polynésien. Ces détections correspondaient à des retombées
différées dans le temps. La valeur maximale de l’activité volumique associée à l’indice bêta global,
5,5 Bq.m -3 , a été atteinte à Puka Puka.

➙ Les détails de l’évaluation des conséquences radiologiques de l’essai Aldébaran


pour la population et l’environnement des îles Gambier sont présentés dans le
chapitre VI.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 363

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 363

N
Giroflée

2 15

Dindon 80
50 100
50 8

Fuchsia
2 15
8
Faucon Iris 0 5km

F IG . 208. - Débits de dose (µGy.h -1 ) à 1 m au-dessus des eaux de lagon dans le secteur
Ouest de l’atoll de Murruoa à J+2 (vent du sud de 7 m.s -1 ).

Denise
N

7,40
Camélia
Aline 3,70 Tacan Kathie
1,85

Giroflée Anémone
0,74
0,03
Dindon
1,85
3,70
0,74
Viviane Simone
1,85 7,40 Fuchsia Dalhia
Faucon Ara 0 5km
Iris

F IG . 209. - Activité volumique (MBq.m -3 ) des eaux du lagon de Mururoa à J+8 (vent du 120 ;
6 m.s -1 ).
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 364

364 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

TAMOURÉ Essai n° 2

Date de l’essai : 19 juillet 1966, 5h05 (heure locale)


Type d’essai : largage par avion Mirage IV
Site : à 85 km à l’est de Mururoa
Altitude : 1 000 m
Énergie : 50 kt

Informations météorologiques
Le 13 juillet 1966, les vents des basses
couches de la troposphère étaient orientés au nord,
puis au nord-ouest, très à l’avant d’une dépression
qui se dirigeait lentement vers l’est. Les 17 et 18,
une perturbation a atteint l’atoll de Mururoa. Les
conditions météorologiques ont été favorables pendant
quelques heures le 18, en fin de nuit, et le 19, en
matinée. Une couche de stratocumulus était alors
présente vers 1 200 m.

Informations sur l’essai


Le nuage s’est fragmenté rapidement puis, le nuage principal s’est allongé, s’étendant sur
près de 150 milles nautiques 2 heures après l’essai.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Le nuage principal s’est dirigé vers l’est en direction des atolls inhabités du Groupe
Actéon. Au large de Mururoa, une tache correspondant à l’activation de l’eau de mer à l’aplomb
du point zéro a été détectée jusqu’au 21 juillet, elle a ensuite disparu alors par décroissance
radioactive et dilution.

Iles et atolls concernés par les retombées différées


Une augmentation de l’activité volumique associée à l’indice bêta global a été détectée, à
faible niveau, dans l’atmosphère de Papeete le 23 juillet, atteignant une valeur maximale de
0,074 Bq.m -3 . Cette augmentation correspondait aux retombées associées au passage d’un
nuage dérivé.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 365

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 365

Décollage d’un Mirage IV A de la piste de l’atoll d’Hao.

Mirage IV A en vol armé d’un engin nucléaire.

Équipage d’un Mirage IV A


au retour d’un vol d’entraînement.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 366

366 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

BÉTELGEUSE Essai n° 3

Date de l’essai : 11 septembre 1966, 7h30 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Denise
Altitude : 1 200 m
Énergie : 110 kt

Informations météorologiques
Le 9 septembre, l’atoll de Mururoa se trouvait
à l’avant d’une dépression barométrique liée à une
perturbation dont la partie active se trouvait plus au
sud. Une baisse de la pression localisée au niveau de
l’atoll s’est traduite par une perturbation active se
développant rapidement. Celle-ci est restée stationnaire
une partie de la nuit, son diamètre n’a pas excédé
50 milles nautiques. Les vents d’est à nord-est ont souf-
flé en rafales atteignant 40 nœuds jusqu’à la fin de la
nuit. Le 10 septembre, la perturbation s’est atténuée
en se déplaçant très lentement vers le sud-est, la
dépression barométrique a repris son mouvement
vers l’est et, le 11 septembre au matin, l’ensemble de
la zone englobant le site d’expérimentations se trouvait
dans un régime de sud-ouest, à toutes les altitudes. Le
ciel était nuageux au voisinage du point zéro, mais la
visibilité était bonne.

Informations sur l’essai


Le nuage s’est élevé verticalement au-dessus du point zéro sous la forme d’un champignon
à la tête nettement plus grosse que le pied. Il s’est sensiblement incliné dans la direction du vent,
à partir de H+5min. Dès H+7min, le pied s’est désagrégé et à H+8min, seul subsistait, en altitude,
le nuage provenant de la tête du champignon initial. À H+15min, le nuage s’est allongé sur plusieurs
dizaines de kilomètres. Deux heures après l’essai, il s’étendait sur une longueur de 200 km, à une
altitude moyenne de 12 000 m.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Une augmentation de l’activité volumique associée à l’indice bêta global de l’ordre de
185 Bq.m -3 a été détectée, 4h15 après l’essai, dans l’atmosphère de Tureia. Les autres atolls et
îles de Polynésie n’ont pas fait l’objet de retombées directes.

Iles et atolls concernés par les retombées différées


Le 20 septembre, l’activité volumique associée à l’indice bêta global a atteint une valeur
de 0,3 Bq.m -3 dans l’atmosphère de Papeete.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 367

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 367

Denise N

10 H+6
100

Camélia
500 Tacan
Kathie

0,30 1,85
0,74
5,18
Anémone

J+2
Viviane

Simone
0 2,5 km
Dalhia

F IG . 210. - Débits de dose (µGy.h -1 ) à 1 m au-dessus des eaux


du lagon à H+6 et activité volumique des eaux (MBq.m -3 ) à J+2.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 368

368 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

RIGEL Essai n° 4

Date de l’essai : 24 septembre 1966, 7h00 (heure locale)


Type de l’essai : sur barge dans le lagon
Site : Fangataufa – Zone Frégate
Altitude : 3 m
Énergie : 125 kt

Informations météorologiques
Le 21 septembre, les vents étaient
favorables, au-dessus de 8 000 m d’alti-
tude, mais ils soufflaient d’ouest-nord
ouest aux altitudes inférieures, ce qui a
entraîné trois reports successifs de l’essai.
Le 22 septembre, les vents soufflaient
d’ouest-nord-ouest en altitude, mais la
marge de sécurité étant trop faible pour
procéder à l’essai qui a été reporté une 4 e
fois. Le 23 septembre, un régime de
sud-sud-est s’établissait dans les basses couches de l’atmosphère, se renforçait lentement et
gagnait les couches supérieures. Le 24 septembre, ce régime de sud à sud-est, complété par
des vents oscillant autour du secteur ouest au-dessus de 4 000 m, établissait des conditions météo-
rologiques favorables à la réalisation de l’essai. Au moment de l’essai, la nébulosité en stratocu-
mulus et cumulus était encore importante.

Informations sur l’essai


Au moment de l’essai, le régime des vents en fonction de l’altitude était décrit comme suit :

• entre 0 et 500 m d’altitude, le vent soufflait du sud-est (du 140°) à 5 m.s -1 ;


• de 600 à 3 000 m d’altitude, les vents avaient des directions variables et des vitesses faibles ;
• de 3 000 m d’altitude jusqu’à la base de la stratosphère, les vents prédominants d’est ouest
atteignaient une vitesse de 40 m.s -1 , le maximum de 50 m.s -1 était atteint vers 12 000 m
d’altitude.

Dans les 12 heures qui ont suivi l’essai, les masses d’air ont peu évolué, soumises essen-
tiellement à l’effet diurne, favorisant le maintien en suspension des aérosols par turbulence et leur
dépôt pendant la nuit. Il y a été noté l’absence d’un front cohérent.

Îles et atolls habités concernés par les retombées immédiates


L’axe des retombées directes était orienté en direction de l’est, sur les atolls alors inhabités du
Groupe Actéon, Maria, Marutea Sud et Matureivavao. Cependant, le retour de masses d’air
contaminées au niveau des basses couches de l’atmosphère, a conduit à une augmentation de
l’activité volumique associée à l’indice bêta global, entre 11 et 13 heures après l’essai, dans
l’atmosphère de Tureia et des îles Gambier atteignant un maximum de 355 Bq.m -3 avec une
augmentation de l’activité volumique des eaux de pluie.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 369

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 369

20° S
20 h

Tureia

Groupe Matureivavao
10 h 15 h
Actéon Marutea Sud
Mururoa
22° S Maria 5h
1h 3h 3 1
FANGATAUFA 10
300 100
1 000 30

Iles Gambier

24° S 139° W 137° W 135° W 133° W 131° W 129° W 127° W

F IG . 211. - Évaluation des retombées proches après l’essai Rigel :


• Courbes des iso-débits de dose en mGy.h -1 ramenées à H+1 et isochrones en heures
après l’heure de l’essai.
• Tracés réalisés avec les vents réels observés après l’essai.

0,7 PEE
150 1,5 N Axe de la passe Empereur N
2
120
PEE 5,0
Empereur Pingouin
6,5
0,03 540 Kilo
Kilo 3,5 ,5
Pavillon 18
0,2
Pavillon 8 < 18,5 PEA
0,01 Frégate
PEA
Frégate ,0
0,7 37
non détectable
Hôtel au DGET Fox
4
0,06 Hôtel 44,

> 37,0

0,03 a ble Echo


ect Echo
dét
non

0 3km
0 3km
Terme Sud
Terme Sud

F IG . 212. - Débits de dose (mGy.h -1 ) mesurés à 1 m F IG . 213. - Activité volumique (MBq.m -3 ) des eaux de
au-dessus du sol à H+7 par mission héliportée et à lagon à Fangataufa à J+32.
J+15 le 09/10/66 (en italique).

➙ Les détails de l’évaluation des conséquences radiologiques de l’essai Rigel pour


la population et l’environnement de Tureia et des îles Gambier sont présentés
dans le chapitre VI.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 370

370 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

SIRIUS Essai n° 5

Date de l’essai : 4 octobre 1966, 11h00 (heure locale)


Type d’essai : sur barge dans le lagon
Site : Mururoa – Zone Dindon
Altitude : 10 m
Énergie : 205 kt

Informations météorologiques
Le 4 octobre au matin, la rotation des vents
à l’ouest-sud-ouest était effective à tous les
niveaux. Le vent soufflait du 130 à 9 m.s -1 dans les
basses couches et du 280 à 26 m.s -1 , entre 5 000
et 9 000 m. L’essai a donc été réalisé à 11h,
moment où la situation météorologique favorable
était parfaitement établie.

Informations sur l’essai


Une très forte nébulosité couvrait les atolls
d’expérimentations au moment de l’essai, gênant
l’observation du nuage. La partie basse du pied
est restée visible à la verticale du point zéro jus-
qu’à H+20min. Deux heures après l’essai, le nuage
principal s’étendait sur une longueur de 180 km, à
une altitude moyenne de 12 000 m.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Entre le 6 et le 7 octobre, des retombées de faible niveau ont été détectées par la remontée
de l’activité volumique associée à l’indice bêta global de l’atmosphère atteignant une centaine de
Bq.m -3 dans l’air à Vairaatea, Makemo, Reao et Hao et quelques centaines à quelques milliers de
Bq.m -3 à Anaa, Hereheretue et Tahiti (Taravao).

Îles et atolls concernés par les retombées différées


Entre le 9 et le 11 octobre, des retours anticycloniques ont entraîné des retombées plus
tardives, de plus faible amplitude, sur l’ensemble de la Polynésie.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 371

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 371

15,00 30,00 N

12,00 12,00
4,20
Denise Françoise

0,05 Brigitte 6,00


0,60
Aline 1,2 rad/h
Camélia
Hélène Jeanne
0,04 Léa
12,00
Anémone
Giroflée
300,00
Bleuet
0,06
6,00
Viviane
Dindon
Thérèse 0,03
Faucon
0,01
ctée
Aucune radioactivité déte 0,03

0 5km

F IG . 214. - Débits de dose (mGy.h -1 ) à 1 m au-dessus du sol de l’atoll de Mururoa à


H+3h30.

N
Denise

Brigitte 0,070

0,040
Aline
0,004

Giroflée

11,500 Dindon
Hortensia
7
0,00

22,500

15,000 75 Viviane
0

0,0
75

15
3,

7,500
1,
Fuchsia
Faucon Ara
Iris Coucou
0 2,5 km
Eider

F IG . 215. - Débits de dose (mGy.h -1 ) à 1 m au-dessus de la sur-


face des eaux du secteur Ouest du lagon de Mururoa 1 jour
après l’essai.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 372
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 373

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 373

CAMPAGNE 1967
À la fin de l’année 1966, la décision a été prise d’effectuer en 1967 une campagne limitée
à trois essais, conduisant à réduire les moyens opérationnels sur zone. Ainsi, pendant les deux
mois de campagne, l’effectif mensuel du CEP a été ramené de 17 000, dont 5 000 pour la force
Alfa en 1966, à 12 400 personnes dont 3 100 personnels directement affectés.

La campagne 1967 a concerné trois essais atmosphériques, deux sous ballon et un sur barge
(Arcturus). Ces trois essais d’engins de faible puissance ont été prévus sur l’atoll de Mururoa les
1 er , 8 et 25 juin, en utilisant la technique du ballon porteur afin de réduire les retombées proches.
Un exercice de répétition a été réalisé du 18 au 21 mai. Les essais ont été reportés aux 5, 25
juin et 2 juillet en raison de l’attente du “courant jet” à l’altitude de 10 000 mètres qui ne s’est
installé solidement que fin juin début juillet et à la suite de la destruction le 23 juin du ballon prévu
pour porter l’engin à tester qui a contraint à réaliser le dernier essai sur barge. Cet essai est le
dernier réalisé avec cette technique au CEP.

Cette campagne a mis en évidence la vulnérabilité du ballon aux situations météorologiques


défavorables lors de la phase de préparation de l’essai, nécessitant un effort particulier pour
assurer sa protection lors du gonflage et de son transport vers le point zéro.

Le suivi des retombées sur l'ensemble de la Polynésie par le réseau de surveillance a


permis de confirmer l’intérêt de réaliser les essais sous ballon, puisque les résultats de la surveillance
radiologique ont montré que par rapport aux essais sur barge l’utilisation de cette technique
limitait fortement les retombées radioactives, tant régionales que mondiales. Les retombées en
Polynésie les plus importantes ont concerné l’atoll de Tureia, suite à l’essai sur barge Arcturus qui a
conduit à une dose à la population inférieure à la dose annuelle maximale admissible pour les popu-
lations (cf. Chapitre VI).

L’avis de zone dangereuse maritime a été respecté par tous les bâtiments commerciaux.
La goélette US Machias est restée au voisinage de Tematangi pour des travaux océanographiques, la
zone dangereuse aérienne n’a été traversée que par les appareils Boeing C135 des États-Unis.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 374

374 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

ALTAÏR Essai n° 6

Date de l’essai : 5 juin 1967, 9h00 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Denise
Altitude : 295 m
Énergie : 15 kt

Informations météorologiques
Le jour de l’essai, l’anticyclone au sol a été
dévié au nord-nord-est de l’atoll de Mururoa par la
dépression établie au sud du site d’expérimentations.
Cette conjoncture a créé des vents de basses
couches sur l’Est de la Polynésie, tournant du nord-
ouest à l’ouest, en fonction de l’altitude.

Informations sur l’essai


Au moment de l’essai, le vent au sol venait de
l’ouest-sud-ouest (250°), à 6 m.s -1 , le vent moyen
entre 5 000 et 9 000 m passait plein ouest (266°),
à 30 m.s -1 , sa vitesse était maximale à 10 700 m
(260°) à 41 m.s -1 . Le sommet du nuage atteignait
11 000 m, sous la tropopause située à 17 000 m
d’altitude.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Aucun atoll ne se trouvait sur la trajectoire des retombées directes du nuage principal.
Néanmoins, le jour du tir, les postes de contrôle radiologique de Mangareva et de Tureia ont
détecté une montée de l’activité volumique atmosphérique associée à l’indice bêta global de
l’ordre de 1 Bq.m -3 .

Îles et atolls concernés par les retombées différées


Les 13 et 14 juin, soit 8 jours après l’essai, suite à un net retour anticyclonique, l’ensemble
des postes répartis sur les îles et atolls de la Polynésie ont détecté une augmentation de l‘activité
atmosphérique.
Le niveau maximum de l’activité volumique atmosphérique associée à l’indice bêta global
atteignait 3 Bq.m -3, à Rangiroa, et 1,5 Bq.m -3 le 17 juin, aux autres postes de contrôle radiologique.
Cette activité atmosphérique a été détectée jusqu’au 25 juin. Par la suite les retombées dues au
nuage principal qui terminait sa première révolution autour de l’hémisphère Sud ont également été
détectées.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 375

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 375

Aire ballon : 1,70 mGy.h-1 N


Porte AR PEA : 1,30 mGy.h-1 Aire ballon : 60 µGy.h-1 N

Face Ouest : 1,70 mGy.h-1 AR PEA : 35 µGy.h-1


AV PEA : 2,65 mGy.h-1 AV PEA : 70 µGy.h-1
Chenal : 7,00 mGy.h-1 Face Est : 55 µGy.h-1
Face Est : 2,20 mGy.h-1 Face Ouest : 50 µGy.h-1
PEA Beaching : 180 µGy.h-1
1,3 mGy.h-1
Denise PEA
Pt zéro 0,09 mGy.h-1 Denise
H+3 = 7 400
Pt zéro
0,004 mGy.h-1
0,05
3,7
1,85
Camélia
Aline Camélia
Aline

1,48
Giroflée 0,74
Giroflée

0,19

Viviane
Viviane
Fuchsia Dahlia Simone
Fuchsia Dahlia Simone
Ara
0 5km Ara
0 5km

F IG . 216. - Débits de dose (mGy.h -1 ) au PEA Denise F IG . 217. - Débits de dose (µGy.h -1 ) au PEA Denise
et activité volumique (MBq.m -3 ) des eaux du secteur et activité volumique (MBq.m -3 ) des eaux du secteur
Nord du lagon de Mururoa à H+7. Nord du lagon de Mururoa à J+3 (H+74).
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 376

376 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

ANTARÈS Essai n° 7

Date de l’essai : 27 juin 1967, 8h30 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Dindon
Altitude : 340 m
Énergie : 120 kt

Informations météorologiques
Le 27 juin, le noyau anticyclonique au sol était
très proche au Sud de l’atoll de Mururoa, créant de 0
à 2 000 m des vents tournant du sud-est au nord-est,
puis à l’ouest vers 5 000 m.

Informations sur l’essai


Au moment de l’essai, les vents au sol venaient
du nord-nord-est (30°) à 5 m.s-1. Entre 5 000 et 9 000 m,
ils tournaient à l’ouest (260°) à 15m.s -1 . Leur vitesse
était maximale à 13 000 m d’altitude, au niveau de la
tropopause, avec un vent de 31m.s -1 soufflant du
280°.
La base de la tête du nuage est montée à 12 000 m et le sommet à 25 000 m d’altitude.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Compte tenu de la puissance et de l’altitude de l’essai, les retombées du pied ont été
pratiquement inexistantes. Le nuage principal s’est bien orienté vers l’est, pour passer entre les
îles Gambier et Reao.
Dans les premières vingt-quatre heures après l’essai, la situation créée par l’anticyclone
dans les basses couches a entraîné une retombée atmosphérique de faible niveau sur les atolls
de l’est polynésien. L’activité volumique associée à l’indice bêta global était de l’ordre du Bq.m -3
à Mangareva, Tureia et Hao et atteignait 7,4 Bq.m -3 sur l’atoll de Vairaatea.

Îles et atolls concernés par les retombées différées


Trois à cinq jours après l’essai, dans le prolongement des retombées précédentes, un
retour anticyclonique a atteint le Nord-Ouest de la Polynésie. Une augmentation de l’activité volumique
associée à l’indice bêta global de l’atmosphère a été détectée par les postes de contrôle radio-
logique de Mahina, Bora Bora et Rangiroa, à des niveaux de l’ordre de quelques dixièmes de
Bq.m -3 .
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 377

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 377

N N

Aline Aline

Giroflée Giroflée

PEA PEA Pt zéro


1 110,00 Dindon Dindon
2,22
0,37
0,37 0,37
37,00 1,10
370,00 Fuchsia
1,10 Fuchsia

Faucon Ara Faucon Iris Ara


Iris

0 5km
0 5km

F IG . 218. - Activité volumique (MBq.m -3 ) des eaux du F IG . 219. - Activité volumique (KBq.m -3 ) des eaux
lagon du secteur Ouest de l’atoll de Mururoa à H+7. du lagon du secteur Ouest de l’atoll de Mururoa à
J+4 (H+98).
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 378

378 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

ARCTURUS Essai n° 8

Date de l’essai : 2 juillet 1967, 7h30 (heure locale)


Type d’essai : sur barge, dans le lagon
Site : Mururoa – Zone Denise
Altitude : 3 m
Énergie : 22 kt

Informations météorologiques
Le 2 juillet, le vent au sol venait du nord-nord-
est (30°), à 6m.s -1 . Entre 5 000 et 9 000 m, il tournait
à l’ouest-sud-ouest (250°) à 15m.s -1 . Sa vitesse
maximale était située à 13 000 m (260°) à 31 m.s -1 .

Informations sur l’essai


La base du nuage a atteint 7 000 m, son som-
met 15 000 m, sous la tropopause située à 15 200 m
d’altitude.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


La prévision de retombées, effectuée dans la nuit du jour J, établissait que le nuage principal
passerait à une dizaine de kilomètres à l’est de l’atoll de Tureia. L’évolution des vents au moment
de l’essai a dévié les masses d’air contaminées vers le nord-ouest et l’enveloppe du nuage a touché
Tureia le 2 juillet, entre 16h et 19h.
Les habitants ont séjourné dans les abris de prévoyance pendant toute la durée de la
mesure de l’augmentation de l’activité volumique associée à l’indice bêta global qui a été détec-
tée jusqu’à Hao, à 0,74 Bq.m -3 .

➙ Les détails de l’évaluation des conséquences radiologiques l’essai Arcturus pour


la population et l’environnement de Tureia de sont présentés dans le chapitre VI.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 379

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 379

250,00 (H+1)
N
100,00 (H+1)
100,00 (H+1) 10,00 (H+1)
Denise
0,05 (H+1)
Françoise 0,02 (H+1)
15,00 (H+1) Aline
0,005 (H+1)
Camélia
Tacan 0,18 (H+1)
Kathie
12,00 (H+1) Anémone
0,10 (H+6) Giroflée

Viviane Simone
0,02 (H+6) Dindon Fuchsia
Dahlia
d
au
ch Iris Ara
e
ax
Faucon 0,30 (H+6)
0,35 (H+6) 0 5km

200,00 (J+4) 0,03 (H+6)

F IG . 220. - Débits de dose (mGy.h -1 ) à 1 mètre au-dessus du sol de l’atoll de Mururoa de


H+1 à J+4.

N
Denise
8
6
Dora

Aline Camélia
2 4
1
0,5

1 0,1
Giroflée 2 0,01
4

Viviane
Fuchsia
Dahlia
0 5km

F IG . 221. - Débits de dose (mGy.h -1 ) à 1 mètre au-


dessus des eaux du lagon de l’atoll de Mururoa à
H+28.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 380
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:37 Page 381

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 381

CAMPAGNE 1968
La campagne 1968 a concerné cinq essais atmosphériques, tous réalisés sous ballon.
Cette campagne mettant en oeuvre les premiers essais d’engins mégatonniques testés par la
France a nécessité la prise en compte de précautions supplémentaires en termes de sécurité à la
lumière des enseignements tirés des campagnes précédentes qui avaient montré que :

• les conditions météorologiques les plus favorables à la réalisation des essais débutaient en
juillet,
• les essais réalisés en altitude évitaient que la boule de feu ne vienne interagir avec la surface
de l’eau du lagon (cf. Chapitre II),
• les essais étaient à réaliser par série avec un intervalle minimum de 4 jours entre deux essais
afin de bénéficier du même créneau météorologique favorable,
• les essais de plus fortes puissances ne devaient pas être réalisés en zone Denise pour conserver
la disponibilité du terrain d’aviation.

Les conditions météorologiques les plus favorables ont été attendues par les expérimen -
tateurs pour les essais d’engins mégatonniques. Ainsi, le ballon a été monté à une altitude suffisante
pour garantir, a priori, l’absence d’interaction de la boule de feu avec le lagon afin de limiter des
retombées proches significatives. En effet, le rebond de l’onde de choc sur la surface du lagon
empêchait l’interaction de la boule de feu en fin d’expansion avec les eaux du lagon, limitant ainsi
les risques de retombées proches.

Par précaution, en prévision des essais d’engins mégatonniques, un effort particulier a été fait
pour qu’en cas d’aléas météorologiques la protection des populations des îles habitées suscep-
tibles d’être exposées : Tureia, les îles Gambier, Reao et Pukarua, soit assurée. Les moyens mis en
place pour protéger les populations ont été réexaminés et l’organisation ainsi que les conditions
d’une éventuelle évacuation soigneusement étudiées. De nouveaux abris ont été construits à
Reao et Pukarua dans l’archipel des Gambier en remplacement des hangars gonflables appelés
«tortues». Ils reposaient sur des murs en dur en partie basse pour protéger les occupants d’une
éventuelle irradiation par des dépôts au sol au voisinage de l’abris. Un arrosage en pluie du toit
pouvait être déclenché pour éviter l’accumulation des radionucléides et l’air y était renouvelé après
filtration. Ils ont été conçus afin de pouvoir être éventuellement réutilisés par la population comme
salle de cinéma ou hangar à coprah par exemple.

L’atoll de Tureia disposait, depuis la campagne de 1966, d’abris en béton de taille suffisante
pour abriter l’ensemble de la population et des expérimentateurs en poste sur l’atoll. Par précaution,
les habitants de Tureia, 60 personnes, ont séjourné à Tahiti pour le premier essai de forte puissance.
La présence permanente sur l’atoll, d’une trentaine d’expérimentateurs a justifié le maintien des
mesures de sécurité.

Les essais de forte puissance de cette campagne ont finalement engendré des retombées
troposphériques très faibles.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 382

382 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

CAPELLA Essai n° 9

Date de l’essai : 7 juillet 1968,12h00 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Denise
Altitude : 463 m
Énergie : 115 kt

Informations météorologiques
Le 7 juillet, les vents au sol soufflaient de l’est, avec une vitesse de 20 nœuds. Vers 8 000 m,
les vents se dirigeaient vers l’est en se renforçant de 13 à 15 m.s -1 . Au-dessus de 12 000 m,
des vents forts (courant-jet de 36 m.s -1 ) étaient dirigés vers l’est. Une première tropopause était
présente à 12 600 m et une seconde vers 16 300 m.

Informations sur l’essai


La tête du nuage stabilisé atteignait 16 700 m à H+6min, sa base était à 11 400 m d’altitude,
pour un rayon de 6 100 m. Une couche de cirrus située entre 11 000 et 13 000 m masquait la tête
du nuage.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Il n’y a pas eu de retombées directes d’un niveau significatif, mais une augmentation de
l’activité volumique associée à l’indice bêta global de l’atmosphère a été détectée à Tematangi,
sur les atolls du Groupe Actéon, à Reao et à Totegegie dans l’archipel des Gambier. La valeur
journalière maximale de 3 Bq.m -3 a été mesurée à Raivavae pour la journée du 7 juillet.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 383

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 383

Îles et atolls concernés par les retombées différées


Quelques retours anticycloniques ont entraîné une augmentation perceptible à bas niveaux
de l’activité volumique associée à l’indice bêta global de l’atmosphère sur l’ensemble de la
Polynésie.

Denise
N

37,0
Aline
120 à 1000
370,0 100

0 Denise
37,0

Aline Camélia
3,7 b Kathie

Anémone
30 Giroflée
120
30
Viviane
80
Dindon Fuchsia Dahlia
Simone a
120 Ara
Iris 30
Faucon
24 0 0 5km
0

F IG . 222. - a : Débits de dose (µGy.h -1 ) à 1 mètre au-dessus du sol de l’atoll de Mururoa à H+1h30.
b : Activité volumique (MBq.m -3 ) des eaux de surface du secteur Nord du lagon de l’atoll de
Mururoa à J+1.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 384

384 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

CASTOR Essai n° 10

Date de l’essai : 15 juillet 1968, 9h00 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa - Zone Dindon
Altitude : 650 m
Énergie : 450 kt

Informations météorologiques
Le 15 juillet, les vents, du sol jusqu’à
2 500 m, venaient de l’est, avec une vitesse
faible de 3 à 5 m.s -1 . Vers 3 000 m, ils
tournaient au secteur Sud, puis au sud-
ouest en se renforçant jusqu’à atteindre 26 à
36 m.s -1 à 12 000 m. Aux altitudes supé-
rieures, vers 19 000 m, ils passaient à
l’ouest nord-ouest.
Une tropopause polaire était présente
à 12 500 m et une tropopause tropicale
vers 16 000 m.

Informations sur l’essai


La tête du nuage stabilisé atteignait 21 000 m, avec un rayon de 12 200 m à H+10min,
sa base était à 14 800 m d’altitude.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


La trajectoire des retombées était orientée
N
vers le nord, les niveaux étaient faibles. L’activité
volumique journalière associée à l’indice bêta glo-
bal atmosphérique de l’ensemble des postes de Aline
contrôle radiologique de Polynésie est restée de
l’ordre de 0,37 Bq.m -3 , avec des maxima attei-
Canal : 300 µGy.h-1
gnant 3 Bq.m -3 , à Tureia 5 heures après l’essai, et Côté PEA : 100 µGy.h-1
6 Bq.m -3 , à Raivavae à 63 heures après l’essai. Arrière PEA : 50 µGy.h-1 Giroflée

PEA
Dindon
< 0,3
185,0

3,7 0,3
37,0
Fuchsia
Faucon Iris Ara
F IG . 223. - Débits de dose (µGy.h -1 ) au PEA Dindon et
activité volumique (MBq.m -3 ) des eaux de surface du 0 5km

secteur Ouest du lagon de Mururoa à J+1.


X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 385

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 385

POLLUX Essai n° 11

Date de l’essai : 3 août 1968, 11h00 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Denise
Altitude : 490 m
Énergie : 150 kt

Informations météorologiques
Le 3 août les vents au sol étaient faibles
et venaient du nord à nord-ouest. Entre 1 500
et 5 000 m d’altitude, ils passaient à l’ouest-
sud-ouest, leur vitesse étant comprise entre 5
et 10 nœuds. Aux altitudes supérieures, vers
14 000 m, des vents de sud-ouest atteignaient 26 m.s -1 . La tropopause tropicale était située vers
16 000 m d’altitude.

Informations sur l’essai


La tête du nuage stabilisé à H+10min avait un rayon de 9 000 m et atteignait 17 600 m,
tandis que sa base était à 10 400 m d’altitude.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Cet essai n’a pas entraîné de retombées significatives. L’activité volumique atmosphérique de
l’indice bêta global était de l’ordre de 0,37 Bq.m -3 . Des dépôts ont été détectés sur des bacs de
prélèvement, avec des dépôts atteignant un maximum de 260 Bq.m -2 observés à Tureia et à Reao.

Beaching : 1000 µGy.h-1 N


Chenal : 900 µGy.h-1
Face Avant : 900 µGy.h-1
Denise 370,0 Côté Ouest : 500 µGy.h-1
Côté Est : 600 µGy.h-1
Porte Arrière : 800 µGy.h-1
Aire Ballon : 500 µGy.h-1 Camélia
Kathie
37,0 Camélia
Aline 20 50
200
3,7 PEA 150
Denise
50 30 10 0

0,4 Aline 0
0

Giroflée b
Anémone
Giroflée
Dindon

0 5km Viviane Simone


Fuchsia Dahlia
Faucon
Iris Ara
a
F IG. 224. - a : Débits de dose (µGy.h -1) à 1 mètre au-dessus du sol de l’atoll de Mururoa à J (H+1h20 à H+5).
b : Activité volumique (MBq.m -3 ) des eaux de surface du secteur Nord du lagon de l’atoll de
Mururoa à J (H+4 à H+6h30)
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 386

386 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

CANOPUS Essai n° 12

Date de l’essai : 24 août 1968, 8h30 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Fangataufa – Zone Frégate
Altitude : 520 m
Énergie : 2,6 Mt (1 er essai thermonucléaire)

Informations météorologiques
Le 24 août, les vents, du sol jusqu’à 1 500 m d’altitude, venaient du nord-nord-ouest avec
une faible vitesse de 3 à 5 m.s -1. Entre 1 500 et 3 000 m, le vent était faible, d’ouest, tournant
au sud-ouest. De 3 000 m à 19 000 m, les vents du sud-ouest se renforçaient, atteignant 23 m.s -1,
à 15 000 m d’altitude. La tropopause était située à 15 500 m d’altitude.

Informations sur l’essai


À la stabilisation à H+10min, la tête du nuage atteignait 24 000 m d’altitude, sa base
14 800 m et son rayon était de 21 600 m.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


La trajectoire des retombées s’est orientée en direction du nord-est. Les 24 et 25 août
une augmentation de l’activité volumique atmosphérique de l’indice bêta global a été détectée à
Tureia avec 2,6 Bq.m -3, 16 heures après l’essai, puis à Pukarua et Reao avec 10 Bq.m -3, le 25
août à 8H30.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 387

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 387

14 N
Empereur 21
Pingouin
0
Kilo
0
Pavillon
0 40
Frégate
0 100
1 000 4 000
Fox
2 000

3 000
2 000
0
4 000

Echo
0

1 000
Terme
0 2 km
Sud
0
F IG . 225. - Débits de dose (µGy.h -1) à 1 mètre au-
dessus :
N
• du sol de l’atoll de Fangataufa entre H+2 et Empereur
H+3h30 ;
Pingouin 8,14
• de la surface de l’eau du lagon de Fangataufa
11,47
à H+8h30. 7,40 Kilo
12,95 8,88
10,73
Pavillon
4,81 9,25
10,36
Frégate
9,99
7,03 9,62
12,21
11,10
11,10
Fox
10,36 11,10
10,73

11,10 9,99
10,73 11,10

9,99
5,92
8,14
5,92 Echo
1,29

0 2 km
Terme Sud

F IG . 226. - Activité volumique (MBq.m -3 ) des eaux de


surface du lagon de l’atoll de Fangataufa à J+4 (07h30
à 11h00).
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 388

388 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

PROCYON Essai n° 13

Date de l’essai : 8 septembre 1968, 9h00 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Denise
Altitude : 700 m
Énergie : 1,28 Mt

Informations météorologiques
Les vents au sol étaient de secteur
est et de faible vitesse, de 3 à 6 m.s -1.
Ils ont ensuite tourné par le nord pour
s’orienter au sud-ouest. En altitude, de
3 500 m à 13 000 m, les vents de sud-
ouest se sont renforcés pour atteindre
36 m.s -1. De 13 000 m à 20 000 m, les
vents du sud-ouest ont faibli, jusqu’à
atteindre 3 m.s -1 à 20 000 m. La tropo-
pause était située à 15 300 m.

Informations sur l’essai


La tête du nuage stabilisé a atteint
24 000 m d’altitude, sa base 15 500 m et
son rayon était de 20 000 m.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


La trajectoire des retombées a suivi un axe nord-est. Les niveaux de l’activité volumique
associée à l’indice bêta global sont restés du même ordre que ceux mesurés avant l’essai, soit
quelques dixièmes de Bq.m -3.

Iles et atolls concernés par les retombées différées


Des masses d’air contaminées ont été détectées sur l’ensemble de la Polynésie entre 17
et 48 jours après l’essai, avec une activité volumique moyenne associée à l’indice bêta global de
l’ordre de quelques dizaines de mBq.m -3.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 389

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 389

6
N

Giroflée

PEA 160
Dindon
< 0,4
84 0,4
37,0
200 3,7
370,0

Faucon Ara 1
Iris

1 800 0 2,5 km

F IG . 227. - Activité volumique (MBq.m -3 ) des eaux de


surface du secteur Ouest du lagon de l’atoll de
Mururoa à H+4 à H+7 et débit de dose (µGy.h -1) des
parties terrestres à H+1h30.

Giroflée

0,05
0,70
PEA Dindon
3,03
9,25
12,58
7

17,02 2,04 0,04


0,3
3,7

15,17
1,70
11,10
23,68

Faucon Iris Ara

0 2,5 km

F IG . 228. - Activité volumique (MBq.m -3 ) des eaux de


surface du secteur Ouest du lagon de l’atoll de
Mururoa à J+3.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 390
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 391

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 391

CAMPAGNE 1970
Aucun essai n’a été programmé en 1969, ce qui a permis d’analyser le détail des résultats
scientifiques et techniques acquis lors de la campagne thermonucléaire de 1968 et de les mettre à
profit pour l’étude et la réalisation de nombreux engins expérimentaux qui ont entraîné une
campagne 1970 particulièrement dense en nombre d’essais. La campagne 1970 a concerné huit
essais atmosphériques, tous sous ballon. L’importance du nombre d’essais a imposé un début de
campagne dès la mi-mai. La maîtrise acquise pour la mise en œuvre des ballons a permis d’être
prêt lorsque les conditions météorologiques étaient favorables. L’absence de porte-avions a conduit
à constituer deux groupes de Super Frelon, l’un sur l’Orage, l’autre sur l’atoll de Tureia pour
récupérer les fusées de collecte des aérosols.

Des modifications rapides des conditions météorologiques ont entraîné une contamination
localisée sur les atolls d’expérimentations à la suite de cinq des huit essais. Le libre accès à certaines
zones de l’atoll de Mururoa a donc dû être différé de quelques jours à une semaine suivant les
essais. L’absence de contamination significative du lagon a permis d’assurer le retour des
bateaux dans le lagon dès l’après-midi de chaque essai et d’abandonner le dispositif de pompage
extérieur pour l’alimentation des bouilleurs des navires.

En Polynésie, les retombées ont été d’un faible niveau. Les couples altitude-énergie retenus
pour la réalisation des essais de cette campagne ont réduit considérablement les risques pour les
habitants des îles riveraines et la navigation maritime. La courbe d’isodose de «10 Gy/h à H+1» n’a
atteint que très rarement les zones situées à plus de soixante milles nautiques du point zéro.
L’évaluation de la dose externe reçue dans l’année par la population des atolls et îles proches des
sites d’expérimentations montre que le maximum a été de l’ordre de quelques pourcents de la dose
maximale admissible annuellement pour les populations (cf. Chapitre VI). Les retombées les plus
significatives ont été observées, après l’essai Dragon, à Tureia (0,12 mSv) et après l’essai
Toucan, à Reao et aux îles Gambier avec respectivement 0,12 et 0,10 mSv, soit environ 2 % de
la dose maximale admissible.

Les expérimentateurs ont été attentifs au risque de contamination des avions commerciaux
susceptibles de rencontrer des masses d’air radioactives à leur altitude de vol. Compte tenu de la
mise en service de Boeing 707 volant à une altitude de 9 000 à 10 000 m, altitude moins favorable
que celle correspondant aux DC6 utilisés précédemment, le risque de contamination des avions
pouvait subsister pendant plusieurs jours. L’appréciation de ce risque était effectuée par une équipe
spécifique du SMSR positionnée au centre de la météorologie de Faaa. Le dispositif a parfaitement
fonctionné et a conduit aux reports de deux essais ainsi qu’à des modifications de l’itinéraire des vols
de la compagnie aérienne Lan Chile dont la ligne Santiago-Île de Pâques-Papeete passait dans la zone
dangereuse aérienne une fois par semaine, dans chaque sens.

La fermeture du site de Fangataufa à l'issue de la campagne de 1970 a conduit à une


économie de moyens et une simplification des activités opérationnelles. Elle a permis en particulier
de supprimer la mission du bâtiment base Morvan qui arrivait à échéance de grand carénage et dont
la poursuite du service nécessitait une opération de maintenance coûteuse.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 392

392 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

ANDROMÈDE Essai n° 14

Date de l’essai : 15 mai 1970, 10h00 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa - Zone Denise
Altitude : 560 m
Énergie : 13 kt

Informations météorologiques
Le 15 mai, la situation météorologique locale se caractérisait par des vents au sol du sud-
est de faible intensité, de 2 à 4 nœuds. En altitude, les vents passaient successivement du sud-
ouest au nord nord-ouest avec une vitesse de 4 à 12 m.s -1, à 12 m.s -1 du 240 à 6 000 m, à
12 m.s -1 du 270 à 7 000 m, à 9 m.s -1 du 290 à 8 000 m d’altitude. Au moment de l’essai, le ciel
était peu nuageux, la visibilité était bonne. La tropopause était située à 14 700 m d’altitude.

Informations sur l’essai


La base du nuage stabilisé à H+6min se situait à une altitude de 7 500 m, son sommet à
environ 10 000 m d’altitude.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Le 15 mai, à Tureia, l’activité volumique atmosphérique journalière moyenne associée à
l’indice bêta global était de 0,37 Bq.m -3. Le 17 mai, 0,74 Bq.m -3 et 1 Bq.m -3 ont été mesurés
respectivement dans l’atmosphère de Reao et de Pukarua.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 393

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 393

Îles et atolls concernés par les retombées différées


Des retombées différées ont été mesurées à Reao le 18 mai, à Pukarua le 19, à Tureia et
à Puka Puka le 20, aux îles Marquises, à Hao et aux îles Gambier le 23, à Tahiti et aux îles
Australes les 29 et 30. L’activité volumique atmosphérique associée à l’indice bêta global était de
l’ordre de quelques dixièmes de Bq.m -3.

Verticale PEA : 13 N
Denise Radier : 20
Porte : 40

6
4
400
6
4
3 Exter 0
4
0,5
0,01 PEA Mto
Aline Denise 0
b Point 0
Giboulée 0 0 0 0
Aline 20 0,02 Camélia
Kathie
0
0
ire 0
onna PCT
Stati ce 0
Ran Anémone
BSL Giroflée
ge
é Ora 0
Pos h57
11
Dindon
0
0
Viviane
Fuchsia

0 5km
Faucon
Our llage
10h an
40
ag

a
o
déc

F IG . 229. - a : Débits de dose (mGy.h -1) à 1 mètre au-dessus du sol de l’atoll de Mururoa à H+0h40 à
H+1h57 (mission RAD 1).
b : Débits de dose (mGy.h -1) à 1 mètre au-dessus des eaux du lagon du secteur Nord de
l’atoll de Mururoa à H+3h40 à H+7h30 (mission LCPS).
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 394

394 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

CASSIOPÉE Essai n° 15

Date de l’essai : 22 mai 1970 à 10h30 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa - Zone Dindon
Altitude : 500 m
Énergie : 224 kt

Informations météorologiques
Initialement prévu le 20 mai, l’essai
a été différé en raison de mauvaises condi-
tions météorologiques, notamment de fortes
rafales de vent à plus de 40 nœuds dans la
soirée. Le 22 mai, les vents au sol soufflaient
d’est avec des vitesses de 6 à 9 m.s -1. Au-
dessus de 3 000 m d’altitude, ils tournaient
au nord puis, à l’ouest-nord-ouest, et attei-
gnaient 30 m.s -1 entre 9 000 m et 12 000 m,
pour décroître jusqu’à 10 m.s -1 à 16 000 m
d’altitude.
Au moment de l’essai, les conditions
de visibilité étaient médiocres avec de
nombreux grains et un plafond bas. La tropo-
pause était située à une altitude de 14 700 m
d’altitude.

Informations sur l’essai


La tête du nuage stabilisé à H+6min atteignait 17 000 m, tandis que sa base était à
13 500 m d’altitude.

Îles et atolls habités concernés par les retombées immédiates


Aucune retombée directe n’a été mise en évidence.

Îles et atolls habités concernés par les retombées différées


Des retombées différées ont été détectées. Des augmentations de l’activité volumique
associée à l’indice bêta global ont été mesurées le 28 mai avec 0,037 Bq.m -3 à Hiva Oa, les 30
et 31 mai avec 0,07 à 0,1 Bq.m -3 à Tahiti, le 1er juin avec 0,1 Bq.m -3 à Puka Puka et le 2 juin
avec 0,74 et 0,15 Bq.m -3, respectivement à Hao et Tureia.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 395

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 395

Aline

Porte PEA AR Verticale PEA


Mission
150 65 RAD 1

Giroflée 0
Face AV PEA Aires béton
100 autour du PEA
50 0

0 0 0
PEA Dindon 0 Fuchsia
Recherche du
0 0
maxi tache
6 400
0
Faucon Iris Ara
Figaro Eider
0 2,5 km

6 400

F IG . 230. - Débits de dose (µGy.h -1 ) à 1 mètre au- F IG . 231. - Débits de dose (µGy.h -1) à 1 mètre au-
dessus du sol du secteur Ouest de l’atoll de Mururoa dessus de la surface et activité volumique (MBq.m -3 )
entre H+42min et H+1h50. des eaux de surface et sur un profil vertical jusqu’à
-15 m de profondeur dans le secteur Ouest du lagon
de Mururoa entre H+5h30 et H+8.

F IG. 232. - Valeurs des débits de


dose et d’iso-débits de dose à 1 m
au-dessus de la surface du sol et des
eaux (µGy.h -1), de la contamination
surfacique (MBq.m -2 ) et des activités
volumiques (MBq.m -3 ) des eaux du
lagon de l’atoll de Fangataufa rame-
nées à H+1.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 396

396 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

DRAGON Essai n° 16

Date de l’essai : 30 mai 1970, 10h00 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Fangataufa – Zone Frégate
Altitude : 500 m
Énergie : 945 kt

Informations météorologiques
Le 30 mai, un premier anticyclone
côtoyait le site d’expérimentations, au
sud-est, et un second était centré au
nord-est de la Nouvelle-Zélande. Les
vents étaient faibles à toutes les altitudes.
Ils étaient d’est de 5 à 10 m.s -1 , jusqu’à
2 000 m d’altitude ; du sud jusqu’à 7 000 m,
et tournaient au sud-ouest à 9 000 m,
avec une vitesse de 5 m.s -1. Entre 12 000
et 18 000 m, ils s’orientaient successivement
d’ouest sud-ouest à ouest-nord-ouest,
passant par une vitesse maximale de 20 m.s-1
à 15 000 m. À 21 000 m, ils étaient d’est-
nord-est et très faibles, de l’ordre de
quelques m.s -1 .
Au moment de l’essai, le ciel était peu nuageux avec de petits cumulus et la visibilité était
excellente. La tropopause était située à une altitude de 13 200 m.

Informations sur l’essai


La tête du nuage stabilisé à H+6min atteignait 21 000 m d’altitude et sa base 15 000 m.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Le 30 mai vers 19h50, des retombées ont été détectées sur Tureia, pendant environ 3 heures.
L’activité volumique atmosphérique associée à l’indice bêta global atteignait alors 11 Bq.m -3 ,
avec une moyenne journalière de 1,6 Bq.m -3. Le 31 mai vers 13h00, le débit de dose augmentait
suite à des précipitations,
Le 1er juin, à 11h15, le poste de contrôle radiologique d’Hao détectait une retombée qui
a pris fin le 3 juin. Cet épisode coïncide avec la détection du retour des masses d’air contaminées
lors de l’essai d’Andromède. Le niveau maximal d’activité volumique atmosphérique a été atteint le
2 juin avec 0,74 Bq.m -3 .
Le 1 er juin, l’activité volumique atmosphérique journalière était de 0,26 Bq.m -3 sur l’île de
Rapa et de 0,037 Bq.m -3 à Pukarua. Le 3 juin, elle était de 0,18 Bq.m -3 à Tahiti.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 397

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 397

Îles et atolls concernés par les retombées différées


Les 6 et 14 juin, le passage des masses d’air contaminées a été détecté à Puka Puka,
Hiva Oa, Tahiti, Hao, Reao, Tureia et l’archipel des Gambier, les maxima de l’activité volumique
atmosphérique journalière moyenne étaient compris entre 0,0185 et 0.148 Bq.m -3 .

N
Sur quai au
PEE contact : 1 000
Empereur
Pingouin
Derrière canal
Sur aire corail de cables : 260
3 Kilo
au contact : 500 2
330
Verticale
Posé Orage PEA : 100
H+3h06 PEA
Pavillon
13h15 5 Frégate
20 Décoll
age O
7 rage
11h40
3 250 10
3
Fox
Hotel
2 600
2
40
2
1 000 2
Echo
3
10
F IG. 233. - Débits de dose (µGy.h -1) à 1
mètre au-dessus de la surface du sol et des
2
0 2 km eaux du lagon de l’atoll de Fangataufa entre
Terme Sud
H+1h40 et H+3h15 (mission RAD 2).

N 16h30 PEA 16h10


e

36 Denise 14
14h Orag

16h55 16h20
12 16h15 14
e
50
lag

14 17h05
col

Eau de lagon
12

703 kBq.m-3 Kathie


à H+10
Camélia
Posé Orage
17h50 DZ
17h15
12
Giroflée PCT
PEA 15h07 Anémone
Dindon 50

15h40
15h25 18 Viviane
12
0 5km
Faucon

F IG . 234. - Débits de dose (µGy.h -1 ) à 1mètre au-dessus du sol de Mururoa entre H+4h50
et H+7h50 (mission RAD 3).
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 398

398 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

ÉRIDAN Essai n° 17

Date de l’essai : 24 juin 1970,10h30 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – zone Denise
Altitude : 560 m
Énergie : 12 kt

Informations météorologiques
Le 24 juin, un front froid est passé à
Tematangi, Mururoa puis Tureia, respectivement vers
H+2h, H+11h et H+24h. Les vents soufflaient de
nord-ouest dans les basses couches à 5 nœuds au
niveau du sol, tournaient avec l’altitude à l’ouest-
nord-ouest, puis à l’ouest entre 5 000 et 6 000 m. Ils
revenaient au nord-ouest à 8 000 m, puis à l’ouest
vers 11 000 m. Les vitesses ne dépassaient pas 15
à 20 nœuds. La tropopause était située à 15 000 m.

Informations sur l’essai


La tête du nuage stabilisé, à H+6min, se
situait à 2 000 m d’altitude et sa base à 8 500 m.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Le 25 juin à 01h00, une augmentation de l’activité atmosphérique a été détectée aux îles
Gambier avec une activité volumique journalière moyenne associée à l’indice bêta global de
5,5 Bq.m -3 .

Îles et atolls concernés par les retombées différées


Des retours anticycloniques ont été détectés le 6 juillet sur les Tuamotu et les Marquises
et à Tahiti, le 9 juillet. Les valeurs maximales d’activité volumique mesurées étaient de 1,25 Bq.m -3 à
Reao, 0,27 Bq.m -3 à Tureia, 0,17 Bq.m -3 aux Gambier, 0,48 Bq.m -3 à Hao, 0,37 Bq.m -3 à Hiva
Oa, 0,48 Bq.m -3 à Puka Puka et 0,26 Bq.m -3 à Papeete.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 399

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 399

Verticale PEA Porte salle 6 N

40 60 (au contact)
SBTFT
50
Porte AR PEA
20 (au contact)
Exter 0
Aires autour 0,2 300 m piste
Aviation : 0,8
du PEA : 40
Dora Début piste
Aviation : 0,8
1,3 Milieu piste
PEA Françoise Aviation : 0,5
0 Denise 0,1
0 Parking Aviation
Hélène 1,5 (au contact)
0,3 Camélia
0
ga n
Oura
llage Aline
Déco h 0 5 Kathie
1 1
0,7
0,4

Martine

Posé Ouragan PCT


17h50
Anémone
Giroflée
0 2,5 km

F IG. 235. - Débits de dose (mGy.h -1) à 1 mètre au-dessus du sol de l’atoll de Mururoa entre H+0h35
et H+1h48 (mission RAD 1).
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 400

400 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

LICORNE Essai n° 18

Date de l’essai : 3 juillet 1970, 10h30 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Dindon
Altitude : 500 m
Énergie : 914 kt

Informations météorologiques
Le 3 juillet, le vent au sol était d’est
sud-est, et sa vitesse de l’ordre de 2 à
5 m.s -1. En altitude, à partir de 3 000 m, il
tournait brutalement au sud-ouest avec
une vitesse de 10m.s -1 , sa vitesse aug-
mentait avec l’altitude et sa direction
évoluait progressivement vers l’ouest. La
vitesse maximale de 35 m.s -1 pour des
vents du 270 était observée à 12 000 m,
diminuait ensuite très vite pour devenir
inférieure à 5 m.s -1 pour des vents du
nord-ouest au-dessus de 19 000 m d’al-
titude.
Au moment de l’essai, le ciel était
partiellement couvert avec des lignes de
grains. La visibilité était bonne.
Une première tropopause se situait
à 11 800 m et une seconde à 15 800 m
d’altitude.

Informations sur l’essai


La tête du nuage stabilisé à H+6min atteignait 24 000 m d’altitude et sa base 15 000 m.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Le 3 juillet, une augmentation de l’activité a été détectée sur les atolls inhabités du Groupe
Actéon, principalement à Matureivavao, Marutea Sud et Maria. Le même jour, à Tureia, l’activité
atmosphérique journalière associée à l’indice bêta global était de 0,5 Bq.m -3 .

Îles et atolls concernés par les retombées différées


Des augmentations de l’activité volumique atmosphérique de l’ordre 0,18 Bq.m -3 ont été
mesurées aux îles Gambier le 13 juillet et à Tureia le 14 juillet.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 401

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 401

N
N
0,007 * : activité volumique
Surface : 2,405
-2m : 2,664
-4m : 2,590 Aline
-6m : 2,070 Surface : 2,479 Aline
-8m : 1,369 -2m : 4,440
- 10 m : 1,443 -4m : 3,219
- 12 m : 1,036 -6m : 2,294
Giroflée
- 15 m : 1,147 -8m : 3,108
- 12 m : 2,257 Giroflée
0,007
PEA 0,666
Dindon PEA
Dindon
* 0,5
Fuchsia
1 000 10
100 0,900 Fuchsia
2 500 0,370
*
4 000 500 1,480 0,740

Faucon
* * Iris Ara
Figaro Faucon Iris Ara
0 2,5 km Figaro
4,810 2,294 0 2,5 km

F IG . 236. - Débits de dose (µGy.h -1 ) à 1 mètre au- F IG . 237. - Activité volumique (MBq.m -3 ) des eaux de
dessus de la surface des eaux et activité volumique surface jusqu’à -12 m de profondeur dans le secteur
(GBq.m -3 ) des eaux de surface du secteur Ouest du Ouest du lagon de Mururoa à J+5.
lagon de Mururoa entre H+4h30 et H+7h30.

Zone STBFT N

H+5h50
18 Dora
Zone STBFT
H+5h50 H+6h15
18 15
Françoise
H+6h22
15 Camélia Hélène Cabine VD II
PEA H+6h43 H+7h00 H+7h30
Denise 8 3 2

Edith
*
Léa
H+6h19 H+7h35
15 1,5
Aline Camélia
* Martine
Kathie H+7h40
Gisèle
H+6h35
*
Irène *
Caisson SPS * <1
12 H+7h10 H+7h20
3 1,2
PCT
Anémone

* : Mesures fortement influencées par la composante


résiduelle de la contamination surfacique due à l'essai Éridan 0 2,5 km

F IG . 238. - Débits de dose (µGy.h -1) à 1 mètre au-dessus du sol des secteurs Nord et Est de
l’atoll de Mururoa entre H+6h10 et H+8h00 (mission TER 2).
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 402

402 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

PÉGASE Essai n° 19

Date de l’essai : 27 juillet 1970, 11h00 (heure locale)


Type d’essai : Sous ballon
Site : Mururoa – Zone Denise
Altitude : 220 m
Énergie : 0, 05 kt

Informations météorologiques
Le 27 juillet, l’atoll de Mururoa était encadré
par deux anticyclones, l’un à l’est, dont la limite
occidentale atteignait Reao et les îles Gambier ;
l’autre à l’ouest, situé au sud-ouest des îles
Australes. Une dépression était positionnée au sud
de l’atoll et une zone de basses pressions au nord.
Ces perturbations se déplaçaient lentement vers le
nord-est. Au moment de l’essai, l’atoll de Mururoa
était à la limite occidentale d’une zone frontale.
Jusqu’à 1 500 m, les vents étaient de sud-
ouest avec des vitesses de 6 à 10 m.s -1 puis
tournaient à l’ouest et au nord-nord-ouest dans la
tranche comprise entre 2 000 et 6 000 m
d’altitude, leur vitesse ne dépassait pas 12 m.s -1 .
Au-dessus, ils revenaient à l’ouest-nord-ouest,
puis à l’ouest et enfin à l’ouest-sud-ouest à
9 000 m avec des vitesses de 15 à 20 m.s -1 . La
tropopause était située à 16 500 m d’altitude.

Informations sur l’essai


La tête du nuage se situait vers 2 400 m d’altitude.

Îles et atolls habités concernés par les retombées immédiates


Une augmentation de l’activité volumique associée à l’indice bêta global atmosphérique
due à des précipitations a été mesurée sur les atolls de Reao et Puka Puka. À Reao, cette hausse
commence le 27 juillet à 23H00 et atteint un niveau maximal de 1,5 Bq.m -3 , le 28 juillet.

Îles et atolls habités concernés par les retombées différées


Des retombées différées ont été détectées qui se sont traduites par une augmentation de
l’activité volumique associée à l’indice bêta global atmosphérique à Hiva Oa avec 0,037 Bq.m -3
et Totegegie avec 0,1 Bq.m -3 le 5 août ; à Reao avec 0,15 Bq.m -3 , le 6 août ; à Tahiti avec
1,85 Bq.m -3 et à Tureia avec 0,1 Bq.m -3 , le 7 août.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 403

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 403

Aire Ballon : 60 au contact Exter 0


N
Face AV PEA : 200 au contact PEA 200 au contact
Denise
Porte AR PEA : 100 au contact
Porte salle 6 : 300 au contact 0 Côté Caisson SPS
0 0 0
0 au contact
0 0
0
Aline Recherche
0 Camélia
0 0
0 maximum 0
tâche : 150 0 Kathie
0
0 0
0
agan
Décollage Our 0
0
0
11h40 0 0 0
0 PCT
Giroflée ra gan Anémone
Ou 0
PEA osé 2
P 13h
Dindon

Faucon Viviane
0 5km

F IG . 239. - Débits de dose (µGy.h -1) à 1mètre au-dessus du sol et de la surface des eaux
du lagon de l’atoll de Mururoa entre H+0h40 et H+2h20 (mission RAD 1).
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 404

404 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

ORION Essai n° 20

Date de l’essai : 2 août 1970 à 11h00 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Fangataufa – Zone Frégate
Altitude : 400 m
Énergie : 72 kt

Informations météorologiques
L’essai Orion était initialement prévu le 31
juillet, la direction des vents en altitude étant défavo-
rable, il a été reporté au 1er août, puis au 2.
Le 2 août, les vents, du sol jusqu’à 5 000 m
d’altitude, étaient d’est, puis du nord-est, et leur
vitesse était comprise entre 3 et 6 m.s -1 . De cette
altitude jusqu’à 18 000 m, ils étaient d’ouest puis de
l’ouest-nord-ouest avec des vitesses de 10 à 15 m.s-1.
Après le passage d’une faible ligne d’averses
au cours de la nuit du 1er au 2 août, le ciel était
dégagé au moment de l’essai et la visibilité excellente.
La tropopause se situait à 15 400 m d’altitude.

Informations sur l’essai


La tête du nuage stabilisé à H+6min atteignait
16 500 m et sa base 10 500 m d’altitude.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Une augmentation de l’activité volumique associée à l’indice bêta global atmosphérique de
faible niveau a été détectée aux îles Gambier.

Îles et atolls concernés par les retombées différées


Deux séries de retours anticycloniques se sont superposées aux retombées des essais
précédents, conduisant à une augmentation de l’activité volumique associée à l’indice bêta global
atmosphérique. La première série a été détectée du 6 au 10 août à Reao avec 0,15 Bq.m -3, à
Hao avec 0,26 Bq.m -3, à Puka Puka avec 0,3 Bq.m -3, à Tureia avec 0,1 Bq.m -3 et à Tahiti avec
1,85 Bq.m -3. La deuxième série a été détectée les 12 et 13 août à Totegegie avec 0,15 Bq.m -3,
à Reao avec 0,74 Bq.m -3, à Puka Puka avec 0,26 Bq.m -3, à Hiva Oa avec 0,15 Bq.m -3, à Hao
avec 0,63 Bq.m -3, et à Tahiti avec 0,26 Bq.m -3.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 405

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 405

N
Empereur

Pingouin

Kilo

Pavillon
11 100 - 14 800
Frégate
Point
zéro 2 220

Fox
es

< 1,3.10-3
om
et
sr
de

Echo
e
Ax

51,8

0 2 km
Terme Sud

F IG . 240. - Dépôts surfaciques (GBq.m -2 ) sur l’atoll de


Fangataufa exprimés à H+1 après l’essai.
Décollage Ouragan
11h30
N
0 0 0
0 0 Posé Orage
0 0 13h25

Empereur 0 0

Kilo
0 0

0,1 0

Extrémité culée Bâtiment Base : 1 0,4


1
PEA
Toit PEA : 4 au contact
Frégate
0,4
3à1m 2
Portes PEA : 80 au contact
2 5
AR PEA : 5 au contact 1
4à1m 2 4 3
Extrémité canal câbles : 70 3 0,6
1 1
4
2 Fox
3
4 3 1

0 2 km

F IG . 241. - Débits de dose (mGy.h -1) à 1 mètre au-


dessus du sol et de la surface des eaux du secteur
Nord-Est de l’atoll de Fangataufa entre H+0h30 et
H+1h55 (mission RAD 1).
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 406

406 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

TOUCAN Essai n° 21

Date de l’essai : 6 août 1970, 11h00 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Dindon
Altitude : 500 m
Énergie : 594 kt

Informations météorologiques
Le 6 août, dans la basse couche, du sol
jusqu’à 3 000 m d’altitude, un régime d’alizés bien
établi donnait des vents d’est-nord-est ayant une
vitesse de 15 à 20 nœuds. En altitude, au-dessus
de cette couche d’alizés et d’une couche de tran-
sition comportant des vents faibles et non organisés
jusqu’à 5 000 m d’altitude, un flux d’ouest assez
régulier était établi jusqu’à 18 000 m d’altitude avec
des vitesses de 35 à 50 nœuds.
Au moment de l’essai, le ciel était peu
nuageux avec des bancs isolés de strato-cumulus
et quelques petits cumulus. La visibilité était
excellente. La tropopause se situait à 14 900 m
d’altitude.

Informations sur l’essai


La tête du nuage stabilisé à H+6min atteignait
19 000 m d’altitude et sa base 14 000 m.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Une augmentation de l’activité volumique associée à l’indice bêta global atmosphérique a
été détectée aux îles Gambier le 7 août à 14h00, le maximum a été atteint le 8 août entre 1h00
et 3H00. L’activité atmosphérique journalière était de 0,55 Bq.m -3 et a atteint pendant une heure
un maximum de 3,5 Bq.m -3 .

Îles et atolls habités concernés par les retombées différées


Des augmentations de l’activité volumique associée à l’indice bêta global atmosphérique
ont été détectées les 8 et 9 août par l’ensemble des postes de contrôle radiologique, à l’exception
de celui de Rapa. Il s’agissait, dans l’ordre croissant des niveaux d’activité des postes de Reao
avec 0,4 Bq.m -3 , de Pukarua, Hao, Rangiroa, Anaa, Tahiti et Hiva Oa.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 407

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 407

Aline

Giroflée

PEA Dindon

100 Fuchsia
1 500
50
1
3 000
100

Faucon Iris Ara

0 2,5 km

F IG . 242. - Débits de dose (µGy.h -1) à 1 mètre au-des-


sus des eaux de surface du lagon du secteur Ouest
de l’atoll de Mururoa de H+2h30 à H+14h0 (mission
LCPS).

86 8,1 N

35 * 9,2
PEE
Empereur * 6,2
35 Pingouin Kilo
*
68
Pavillon

PEA
Frégate
0,6

Fox
39 Hôtel *

Echo 6,6
36 *
*
37 9,6

0 2 km
Terme Sud 9,6 * : activité surfacique
F IG . 243. - Débits de dose (µGy.h -1) à 1 mètre au-dessus du
sol et activité surfacique (MBq.m -2 ) à la fin de la retombée
(H+3h30) sur l’atoll de Fangataufa.
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 408
X3 Annexe 3aVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:38 Page 409

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 409

CAMPAGNE 1971
La campagne 1971 a concerné cinq essais atmosphériques sous ballon. Le service
central hydrographique de la marine a diffusé les AVURNAV le 22 avril puis les avis d’activation des
zones dangereuses avant chaque série d’essais entre J-8 et J-5 et les avis de désactivation entre
J+1 et J+4 après les essais. Le service d'informations aéronautiques a publié un NOTAM le 29 avril
annonçant la création des zones dangereuses entre le 1 er juin et le 30 septembre, puis le NOTAM
d’activation de celles-ci entre J-5 et J-4 et de désactivation entre J+1 et J+4 après l’essai. Le
risque à prendre en compte pour les occupants des capsules spatiales habitées se trouvant à
vue directe du point zéro de l’explosion, étant celui du flash lumineux, aucun essai n’a eu lieu
lorsqu’un satellite habité passait à portée des effets lumineux des explosions.

En 1971, la situation météorologique a été une suite de conditions complexes et instables,


marquée par des conditions météorologiques peu favorables, caractérisées par des vents forts et
des grains violents, entraînant des retards dans la préparation du ballon. Les jours de retard surve-
nus au cours de cette campagne ont tous eu pour cause des conditions météorologiques défavo-
rables. La statistique établie à partir des conditions météorologiques observées sur 110 jours,
montre que les possibilités d’essai se résumaient à :

• 48 jours où l’essai était interdit,


• 62 jours où un essai était possible avec quelques interdictions concernant le secteur Est de
l’atoll.

Les contraintes météorologiques ont été telles, qu’un essai sur deux n’a été possible au
jour initialement prévu.

Cette campagne a été marquée par une augmentation importante des pénétrations pilotées,
22 missions au lieu de 12 l’année précédente. Le dispositif d’arrosage en pluie pour éliminer
d’éventuels dépôts sur la zone portuaire a été maintenu. L’utilisation en a été étendue à la darse
Kathie et au parking aviation, permettant ainsi l’accès direct de la darse à la zone d’escale de
l’aéroport, afin de faciliter le transfert des personnels entre les bateaux au mouillage et les avions
en partance vers Hao ou Papeete. La surface ainsi protégée a été portée de 2,7 ha en 1970 à
3,3 ha en 1971. Un revêtement plastique arrachable (avec trame) a également été mis en place
sur 3 700 m 2 des aires bétonnées de la zone Kathie.

Des évaluations de l’exposition des populations ont été réalisées suite à la détection sur
l’atoll de Tureia de retombées provoquées par l’essai Encelade et sur les îles Gambier après
l’essai Phoebé. Les estimations ont conduit à des doses inférieures à 4 mSv (cf. Chapitre VI). Ces
doses sont inférieures à la limite annuelle admissible pour les populations de 5 mSv à cette date.
Sur les autres îles, le niveau des retombées a été inférieur à ceux observés en 1970.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:49 Page 410

410 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

DIONÉ Essai n° 22

Date de l’essai : 5 juin 1971, 10h15 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Denise
Altitude : 275 m
Énergie : 34 kt

Informations météorologiques
Le 5 juin, les vents au sol et en altitude étaient d’ouest. Leur vitesse était de l’ordre de
6m.s -1 au sol, elle passait à 10m.s -1 entre 500 à 4 000 m d’altitude pour atteindre 25 m.s -1 entre
6 000 et 14 000 m. Au moment de l’essai le ciel était semi-couvert, les vents modérés, la visibilité
supérieure à 20 km. La tropopause était à 12 900 m d’altitude.

Informations sur l’essai


La tête du nuage stabilisé était à 13 400 m d’altitude, sa base à 11 200m et son rayon
était de 2 900 m.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Une augmentation de l’activité volumique associée à l’indice bêta global atmosphérique de
très faible niveau a été détectée aux îles Gambier 6h45 après l’essai, avec un maximum atteint à
Vairaatea, 9h15 après l’essai.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:49 Page 411

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 411

PEA 0,013
Denise
0,03
0,02
Camélia
H+18min

Kathie 0,028
axe
Débit de dose à 1 mètre (mGy.h ) -1 de
la reto
de H+0h40 à H+2h00 25,90 m bée
Porte salle 6 : 25,0 0,060
Face AV PEA : 6,0 Martine 0,190
Aire ballon : 6,0
Côté PEA : 5,0 29,20 Anémone
Radier AR PEA : 2,5
Porte AR PEA : 20,0
0,480
0 2,5 km
2,1
38,85
2,1 : activité surfacique 0,170

F IG . 244. - Débits de dose (mGy.h -1) à 1 mètre et activité surfacique (MBq.m -2) à H+1 des secteurs
Nord et Est de l’atoll de Mururoa .

N
925,0 * : activité volumique 925,0

PEA Surface : 85,1


37,0 * : activité volumique
2 294,0 1 184,0
Denise -5m : 70,3
- 10 m : 36,6
- 20 m : 23,7 Surface : 136,9
20
*
15 *
-5m : 129,5
* 277,5 : 81,4
* 10 * PEA
- 10 m
- 20 m : 30,3
5
* * Denise - 30 m : 6,3

Camélia
50 * *
10 * 100 *
1
1 110,0 Camélia
-5m : 8 14,0
9 25,0
1 739,0 37,0 *
- 10 m :
- 20 m
- 30 m
:
:
7 77,0
9 99,0
0 2 km 148,0 *
51,8
F IG . 245. - Débits de dose (mGy.h -1) à 1 mètre et 0 2,5km
< 0,2
activité volumique (MBq.m -3) entre H+3 et H+5 du
secteur Nord de l’atoll de Mururoa.
F IG . 246. - Débits de dose (µGy.h -1) à 1 mètre et
activité volumique (MBq.m -3) des eaux de surface du
secteur Nord du lagon de l’atoll de Mururoa entre
H+22 à H+27.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:49 Page 412

412 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

ENCELADE Essai n° 23

Date de l’essai : 12 juin 1971, 10h15 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Dindon
Altitude : 450 m
Énergie : 440 kt

Informations météorologiques
Le 12 juin, la situation météorolo-
gique locale était complexe. Les vents
étaient du sud-est, à 5 m.s -1 . En altitude,
ils étaient de sud-ouest avec une vitesse
assez faible de 10 m.s -1 à 9 m. Pour les
altitudes supérieures, les vents souf-
flaient d’ouest avec une vitesse de l’ordre
de 20m.s -1 .

Informations sur l’essai


La tête du nuage stabilisé à
H+10min atteignait 17 000 m d’altitude,
sa base 13 500 m et son rayon était de
13 000 m.

Îles et atolls habités concernés par les


retombées immédiates
Une augmentation de l’activité volumique N

481 * : activité volumique


associée à l’indice bêta global atmosphérique
due principalement à des précipitations a été Surface : 3 515
-5m : 407
mesurée sur l’atoll de Tureia 8h50 après l’essai. - 10 m : 133 481
Une augmentation de radioactivité a également - 20 m : 48
PEA
été détectée à Vairaatea avec 0,66 Bq.m -3 , à - 23 m : 37
Dindon
Raivavae avec 0,85 Bq.m -3 , à Tahiti (Mahina) Hortensia
avec 0,52 Bq.m -3 , à Hao avec 0,3 Bq.m -3 , à
Reao, Pukarua, Hiva Oa et Rapa. 4 440 6 *
** 3
0,1 0,01
2 * 1
0,1
1
F IG . 247. - Débits de dose(mGy.h -1)à 1 mètre au- Faucon Ara
Iris
dessus de la surface des eaux et activité volumique
(MBq.m -3 ) des eaux de surface et suivant un profil
vertical jusqu’à -23 m de profondeur dans le secteur 0 1 km 1739
Ouest de l’atoll de Mururoa entre H+3h30 et H+6h30.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:49 Page 413

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 413

Valeurs en mGy.h-1 PEA Exter 0 N

PEA Dindon Denise


Hortensia
Edith
10
155 0 14 Françoise
55 80 70
135 100 80 Gisèle
400 220 Hélène
160 135 100
125 Camélia
100 Aline Irène
55
25 100 Kathie
25
10 9 Lea
90
75 5 RMP
66 30
Iris Posé OURAGAN 18 h 00 80
100 Martine
RAD2
30 30
Giroflée
RAD2 Décollage OURAGAN 50
16 h 30 Anémone
40
RAD1 Nicole
PEA
Dindon Bécasse 20
70
<10
30 Reine
<10
Viviane
Fuchsia
Thérèse
Faucon Iris Ara
Figaro
RAD1
Treuillage sur
<10 RANCE 11h57 0 5 km
Décollage OURAGAN
Posé OURAGAN 12 h 07
11 h 05

F IG . 248. - Débits de dose (µGy.h -1) à Mururoa lors des différentes missions réalisées le jour de l’essai.

➙ Les détails de l’évaluation des conséquences radiologiques de l’essai Encelade


pour la population et l’environnement de l’atoll de Tureia sont présentés dans le
chapitre VI.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:49 Page 414

414 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

JAPET Essai n° 24

Date de l’essai : 4 juillet 1971, 12h30 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Denise
Altitude : 230 m
Énergie : 9 kt

Informations météorologiques
Le 4 juillet, les vents au sol et en
altitude étaient de sud-ouest. Au sol, leur
vitesse était faible, de l’ordre de 1 à 2 m.s-1 ,
et elle atteignait progressivement 34 m.s -1
à l’altitude de 7 000 m. La tropopause se
situe à 14 100 m.

Informations sur l’essai


La tête du nuage stabilisé atteint
9 000 m d’altitude, sa base noyée dans
les nuages est aux environs de 5 500 m et
son rayon était de 1 400 m.

7 030,0 * : activité volumique N


Îles et atolls habités concernés PEA Denise
par les retombées immédiates
À l’exception de Tureia, aucune
augmentation significative de l’activité * 6 *
volumique associée à l’indice bêta 3
global atmosphérique n’a été mesurée 2
sur les autres îles habitées de 7 030,0 0,01 Surface : 4 810,0
Polynésie. -5m : 1 776,0
- 10 m : 2,4
- 20 m : 2,5
Aline - 30 m : 0,9
Îles et atolls habités concernés
par les retombées différées
0 1 km 0,001
Une légère augmentation de
l’activité volumique associée à l’indice
bêta global atmosphérique due à un F IG . 249. - Débits de dose (mGy.h -1 ) à 1 mètre et activité
retour anticyclonique a été mesurée volumique (MBq.m -3 ) des eaux de surface et jusqu’à 30 m de
sur les îles suivantes : Bora Bora, profondeur dans le secteur Nord de l’atoll de Mururoa entre
Rapa, Raivavae, Pukarua et Papeete. H+2h30 à H+5h00 .
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:49 Page 415

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 415

Porte salle 6 N
Mission TER1 Côté PEA
60 (au contact)
Côté canal de câbles : 8 20
Aires béton : 4 à 7
STBFT : 3,5 Avant PEA Radier AR PEA
Entre Exter 0 et STBFT : 1 25 15

PEA Denise
Dora Porte AR PEA Aire Ballon
Edith 30 (au contact) 8
PEA Denise
0,70 0,80 Françoise
0,50
0,25 Camélia
0,04

Aline
Camélia
Mission RAD1

0 2,5 km Giroflée

F IG . 250. - Débits de dose (mGy.h -1 ) dans le secteur Nord de l’atoll de Mururoa le jour
de l’essai (missions RAD1 et TER1).

27,4
MURUROA 24,4

59,2 66,6
222,0
Kathie
Giroflée Anémone
210,9 PEA
Dindon
Viviane
32,3
Faucon

35,2
366,3
236,8

125,8
PEE
Empereur

N PEA
Frégate

FANGATAUFA
125,8

F IG. 251. - Activité surfacique (kBq.m -2) à H+14 de la retombée


intervenue entre J (23h30) et J+1 (8h00) sur les atolls de Mururoa
et Fangataufa .
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 416

416 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

PHOEBÉ Essai n° 25

Date de l’essai : 8 août 1971, 9h30 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Denise
Altitude : 230 m
Énergie : 4 kt

Informations météorologiques
Le 8 août, les vents au sol étaient
du sud-est avec une vitesse de l’ordre de
5 m.s -1 . À partir de 1 500 m d’altitude, ils
étaient d’ouest et leur vitesse était de 20 à
25 m.s -1 , entre 2 000 à 5 000 m d’altitude.
Au moment de l’essai, le ciel était couvert,
les vents modérés, la visibilité supérieure à
15 km. La tropopause était située à 13 500 m.

Informations sur l’essai


La tête du nuage stabilisé à H+10min atteignait 4 800 m d’altitude et sa base 1 800 m.
La présence d’une masse nuageuse à l’altitude de la tête gênait son observation et empêchait la
bonne connaissance de ses caractéristiques dimensionnelles.

Îles et atolls habités concernés par les retombées immédiates


Après l’essai, des conditions météorologiques défavorables ont entraîné le nuage radio-
actif vers les îles Gambier. Des dépôts humides y ont été constatés entre 6h10 et 6h40 après
l’essai. La population, dans les abris de prévoyance depuis le début de l’après-midi, y est restée
pour la nuit et a repris une vie normale le matin du 9 août.
Des traces de radioactivité ont été détectées à Tureia le 9 août, Vairaatea et Hao le 10 août.

Iles et atolls habités concernés par les retombées différées


Une augmentation du débit de dose associé aux retombées a été mesurée à Tureia le
9 août, avec 160 nGy.h -1 , puis à Vairaatea avec 80 nGy.h -1 et à Hao le 10 août.

➙ Les détails de l’évaluation des conséquences radiologiques de l’essai Phoebé


pour la population et l’environnement des îles Gambier sont présentés dans le
chapitre VI.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 417

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 417

Axe
cha Retombée N
ud
- Re bas du pied
tom
bée
hau
t du PEA
pie
d Denise Dora
Edith
Françoise

300
Gisèle 150
100
300 Hélène
400 Camélia 38
Aline
Kathie
180
Léa 95
10
16
<10 250 250
90 Martine
5 PCT Anémone
Giroflée
4

0 2,5 km

F IG . 252. - Débits de dose (µGy.h -1 ) à 1 mètre au-dessus du sol à H+1 des secteurs Nord et Est de l’atoll
de Mururoa.

PEA N
Exter 0
Denise
Colette
* 50 * *
10
0,1 Françoise
*
Aline 1 Camélia

81,40

Surface : 133,20 Surface : 13,69


-5m : 140,60 -5m : 12,95
51,80
- 10 m : 136,90 - 10 m : 10,73
- 20 m : 144,30 - 20 m : 4,44
- 25 m : 136,90 - 25 m : 1,48

0 2,5 km
81,40 * : activité volumique
F IG . 253. - Débits de dose (µGy.h -1 ) à 1 mètre et activité volumique
(MBq.m -3 ) des eaux du lagon dans le secteur Nord de l’atoll de
Mururoa entre H+22 et H+26 .
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 418

418 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

RHÉA Essai n° 26

Date de l’essai : 14 août 1971, 10h00 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Dindon
Altitude : 480 m
Énergie : 955 kt

Informations météorologiques
Le 14 août, les vents au sol étaient d’est-nord-est
et de faible vitesse allant de 2 à 3 m.s -1 . En altitude, au-
dessus de 1 500 m, les vents étaient d’ouest avec une
vitesse maximale de 30 m.s -1 entre 9 000 et 12 000 m. Au
moment de l’essai, le ciel était dégagé.

Informations sur l’essai


La base du nuage stabilisé était à 15 500 m d’al-
titude, sa tête atteignait 20 000 m d’altitude et son rayon
était de 1 800 m.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Les îles inhabitées de Matureivavao et Marutea Sud
ont été touchées par de faibles retombées, respectivement
5 heures et 7 heures après l’essai. Aux îles Gambier, une
augmentation de l’activité volumique associée à l’indice
bêta global atmosphérique a été détectée 19h30 après
l’essai, avec un maximum 22h40 après l’essai.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 419

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 419

N
Giroflée
296,0 * : activité volumique
296,0

Surface : 555,0 3,7


-5m : 1 180,0 PEA
Dindon 0,001
- 10 m : 1 702,0
- 20 m : 518,0 Hortensia
- 30 m : 814,0
*
222,0 * 0,002
*
0,005
Faucon * 2
1 0,2 0,1

3
* Iris Ara
Surface : 4 070,0
Figaro 0 2,5km
-8m : 407,0
3,2

F IG . 254. - Débits de dose (mGy.h -1 ) à 1 mètre et activité volumique


(MBq.m -3 ) des eaux du lagon dans le secteur Ouest de l’atoll de
Mururoa entre H+4h00 et H+7h00 .
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 420
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 421

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 421

CAMPAGNE 1972
La campagne 1972 a concerné quatre essais atmosphériques, trois sous ballon et un essai
de sécurité sur tour. Les zones dangereuses ont été activées à partir du 20 juin par AVURNAV et
NOTAM diffusés le 18 juin. Elles sont restées en vigueur pendant la totalité de la campagne et ont
été désactivées le 2 août. Suite aux contraintes liées aux engins testés et aux conditions météo-
rologiques médiocres, peu de jours ont été favorables à l’exécution des essais pendant la période
du 21 juin au 1 er août.

Durant cette campagne il n’y a pas eu de tirs de fusées de prélèvement d’aérosols dans le
nuage et pour la première fois :

• des hélicoptères lourds Super Frelon ont assuré les missions de récupération des enregis -
trements à la place des Alouette III,
• un Boeing C 135 a assuré le contact radiamétrique du nuage,
• deux DC6 ont été chargés de mesures électromagnétiques complémentaires.

Les retombées observées ont été très faibles sur les îles de la Polynésie française à
l’exception de celles observées sur l’atoll de Hereheretue à la suite de l’essai Umbriel. L’évaluation
de l’exposition annuelle a conduit à une dose de 0,2 mSv, soit 4 % de la limite annuelle admissible
pour les populations qui était de 5 mSv à cette date. Le faible niveau des retombées envisa-
geables sur l’atoll de Pukarua ne justifiait plus l’utilisation de l’abri de prévoyance.

Deux accidents ont été déplorés, la perte d’une Alouette II le 16 mai, sans victime, puis celle
d’un Boeing KC135 le 30 juin, à proximité de Hao, entraînant la disparition des 4 membres de
l’équipage et de deux observateurs.

Les avions de la compagnie aérienne Lan Chile et le trafic commercial maritime n’ont à
aucun moment été retardés ou déroutés.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 422

422 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

UMBRIEL Essai n° 27

Date de l’essai : 25 juin 1972,10h00 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Denise
Altitude : 230 m
Énergie : 0,5 kt

Informations météorologiques
Le 25 juin, la situation météorologique était favorable.
Un anticyclone était centré sur les îles australes, bordé à
l’est et au nord-ouest par des zones de faible pression. Les
vents étaient de sud-est, établis dans la basse troposphère,
et de sud-ouest à partir de 3 000 m d’altitude. Au sol, les
vents étaient du 140 (SE) avec une vitesse de 15 à 20
nœuds et au-dessus de 3 000 m, du 240 avec une vitesse
pouvant dépasser 50 nœuds.
La tropopause se situait à 12 300 m d’altitude.

Informations sur l’essai


Une inversion dans le profil de température à 2 000 m d’altitude était à l’origine d’une hauteur
de stabilisation relativement basse du nuage : 2 400 m au lieu des 3 500 m attendus.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


À Hereheretue, une augmentation de l’activité volumique associée à l’indice bêta global
atmosphérique est détectée 19 heures après l’essai, atteignant 17 Bq.m -3. À Tahiti, une augmentation
de l’activité volumique est mesurée 30 heures après l’essai et la moyenne atmosphérique journalière
s’est établie à 2 Bq.m -3, à Mahina, et à 1 Bq.m -3, à Taravao. Dès le lendemain, l’activité volumique
de l’atmosphère était revenue au niveau d’avant l’essai.

Îles et atolls concernés par les retombées différées


Des augmentations de l’activité volumique associée à l’indice bêta global atmosphérique
correspondant à des retombées différées dues à des retours anticycloniques ont été relevées
entre le 1 er et le 4 juillet à Hereheretue, avec un maximum de 0,1 Bq.m -3 , et le 5 juillet à Bora
Bora et Tahiti, avec 5 mBq.m -3 .
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 423

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 423

N Mesures à 1 mètre du sol

Point 5 Point 6
800 1 000

Point 3 Porte AR PEA


300 PEA 600
Denise
30 pieds
400
Edith
Françoise 0
Aline Camélia
Kathie
Décollage OURAGAN 0 0
11h10
Treuillage prélèvements d'eau 0 Anémone
sur La Rance 11h55 Giroflée
0
Posée OURAGAN
12h00 Dindon
Viviane
Faucon 0 5 km

F IG . 255. - Débits de dose (µGy.h -1 ) à 30 pieds entre


H+1h10 et H+2h00 dans les secteurs Nord et Est de l’atoll
de Mururoa (mission RAD 1).

Surface : 10,0 70,3 * : activité volumique N


-5m : 22,9
- 10 m : 18,5
- 15 m : 17,4
- 20 m : 13,3
Surface : 70,3

PEA
Colette Denise
Dora
Edith

Brigitte ***100
10
1

Surface : 40,7
-5m : 44,4
Aline - 10 m : 40,7
0 2 km
- 15 m : 59,2
- 20 m : 59,2

F IG . 256. - Débits de dose (µGy.h -1 ) à 1 mètre et


activité volumique (MBq.m -3 ) des eaux du lagon du
secteur Nord de l’atoll de Mururoa entre H+2h30 et
H+4h30 (mission LCPS).
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 424

424 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

TITANIA Essai n° 28

Date de l’essai : 30 juin 1972, 9h30 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Dindon
Altitude : 220 m
Énergie : 4 kt

Informations météorologiques
Le 30 juin, le profil thermodynamique de
l’atmosphère, dans lequel s’est développé le nuage,
était caractérisé par une humidité particulièrement
faible à partir de 2 000 m et par une température
relativement élevée à tous les niveaux.
Les vents au sol étaient d’est-nord-est
(60°) à 10 m.s -1 et tournaient en altitude vers l’est
(96°) à partir de 5 000 m à 4 m.s -1 , puis au sud-
est entre 6 000 et 8 000 m, toujours avec des
vitesses très faibles (3 à 4,1 m.s -1 ). La tropopause
se trouvait à une altitude de 16 700 m.

Informations sur l’essai


La base du nuage était à 2 600 m d’altitude,
sa tête atteignait 5 800 m, le rayon était de 1 800 m.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Cet essai n’a donné lieu à aucune détection de retombées directes sur les îles ou atolls
de Polynésie.

Îles et atolls concernés par les retombées différées


Des augmentations de l’activité volumique associée à l’indice bêta global atmosphérique
correspondant à des retombées différées de faible niveau ont été relevées sur 6 atolls polynésiens :

• Bora Bora les 10, 12 et 14 juillet, avec un maximum journalier de 0,037 Bq.m -3 ;
• Hao les 11, 13 et 17 juillet, avec un maximum journalier de 0,018 Bq.m -3 ;
• Hiva Oa, du 12 au 17 juillet, avec un maximum journalier de 0,05 Bq.m -3 ;
• Reao les 12, 13 et 15 juillet, avec un maximum journalier de 0,03 Bq.m -3 ;
• Puka Puka les 13, 16 et 17 juillet, avec un maximum journalier de 0,03 Bq.m -3 ;
• Tureia le 13 et du 19 au 22 juillet, avec un maximum journalier de 0,015 Bq.m -3 .
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 425

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 425

N
Surface : 629,0 96,2 * : activité volumique
-5m : 407,0
- 10 m : 251,6
PEA Dindon
- 15 m : 229,4
- 20 m : 155,4

* *
500
100
1 000 1

Faucon

Surface : 96,2
-5m : 136,9
- 10 m : 233,1
0 2 km - 15 m : 70,3
- 20 m : 5,6

F IG. 257. - Débits de dose (µGy.h -1) à 1 mètre au-dessus


de la surface des eaux du lagon et activité volumique
(MBq.m -3 ) entre H+2h00 à H+5h30 dans le secteur
Ouest du lagon de l’atoll de Mururoa (mission LCPS) .
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 426

426 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

OBÉRON Essai n° 29

Date de l’essai : 27 juillet 1972, 9h40 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Dindon
Altitude : 220 m
Énergie : 6 kt

Informations météorologiques
Le 27 juillet, au niveau du site, un col isobarique
a laissé place à partir de 2 000 m à un anticyclone
s’infléchissant vers le nord-est et générant des vents
irréguliers et faibles de 5 m.s -1 , de nord-est au sol,
réguliers et assez forts d’ouest-nord-ouest à partir de
2 000 m atteignant 31 m.s -1 entre 7 000 et 9 000 m
d’altitude. Le ciel était nuageux. La tropopause se trouvait
à une altitude de 16 600 m.

Informations sur l’essai


La base du nuage a atteint 6 500 m et sa tête 8 500 m d’altitude.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Une augmentation de la radioactivité de faible niveau a été détectée aux îles Gambier.

Îles et atolls concernés par les retombées différées


Des augmentations de l’activité volumique associée à l’indice bêta global atmosphérique
ont été détectées sur 6 îles au cours du mois d’août :

• à Puka Puka le 8 août, avec 0,022 Bq.m -3 ;


• à Hiva Oa les 10 et 11, avec 0,011 Bq.m -3 ;
• à Hao le 12, avec 0,022 Bq.m -3 ;
• à Bora Bora les 16, 17 et 20, avec 0,027Bq.m -3 ;
• à Tahiti du 17 au 20, avec 0,0074 Bq.m -3 ;
• à Rangiroa le 17, avec 0,006 Bq.m -3 .
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 427

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 427

N
55,5 * : activité volumique Surface : 2 035,0
-5m : 55,5
- 10 m : 148,0
- 15 m : 0,8
Surface : 1 073,0 1 147,0 - 20 m : 1,4
-5m : 0,7
- 10 m : 0,7 PEA
- 15 m : 0,7 Dindon
- 20 m : 0,7
Hortensia

* *

* 0,20
0,20
0,10
0,001

Faucon
Iris
0 2 km
Figaro

F IG . 258. - Débits de dose (mGy.h -1 ) à 1 mètre et


activité volumique (37 MBq.m -3 ) entre H+3h00 et
H+5h00 dans le secteur Ouest de l’atoll de Mururoa
(mission LCPS) .
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 428
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 429

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 429

CAMPAGNE 1973
La campagne 1973 a concerné cinq essais atmosphériques sous ballon et un essai de
sécurité sur tour. Cette campagne a comporté deux séries d’essais :

• deux essais sous ballon, Euterpe et Melpomène , initialement prévus les 20 et 25 juillet et
réalisés les 21 et 28 juillet.
• deux essais sous ballon, Pallas et Parthénope prévus les 20 et 25 août, réalisés les 18 et
24 août et un essai d’arme en altitude, Tamara, par largage d’un avion Mirage III le 28 août.

Les conditions météorologiques rencontrées ont été relativement complexes. De longues


périodes de vents forts au sol ont contrarié la mise en œuvre des ballons porteurs d’engins. Ainsi,
trois des quatre ballons utilisés ont été soit gonflés, soit transférés, par vents de 20 à 32 nœuds
avec passage de grains. Par contre le comportement en vol de ces quatre ballons a été excellent
et a permis de réaliser le positionnement précis de la nacelle.
Lors de cette campagne et pour la première fois, l’état-major du Goen est resté à terre sur
l’atoll de Mururoa abrité à l’intérieur d’un blockhaus situé en zone Martine où avait été installé le
Poste de Commandement (PC).

En 1973, les retombées radioactives sur les îles et atolls de Polynésie ont été très faibles,
y compris sur les atolls d’expérimentations. Ainsi, les expositions intégrées sur l’année ont été
évaluées pour la population de Hereheretue à 0,3 mSv, de Raivavae à 0,07 mSv, de Tubuai à
0,05 mSv et de Tahiti entre 0, 02 et 0,04 mSv. Sur tous les autres atolls ou îles hautes les doses
intégrées sur l’année ont été encore plus faibles.

La navigation aérienne commerciale dans cette partie de l’océan Pacifique était devenue
un peu plus active après l’ouverture par la compagnie aérienne Air France de la ligne quotidienne
Lima-Papeete-Tokyo pour laquelle la protection radiologique a été assurée comme pour les vols
Santiago-Île de Pâques-Tahiti de la compagnie aérienne Lan Chile.

Différents navires ont continué de croiser dans les parages des sites d’expérimentations
après l’avis d’activation des zones dangereuses. Ils ont été prévenus de l’explosion quinze minutes
avant chaque essai pour des raisons de sécurité afin que les membres des équipages se
protègent éventuellement du flash lumineux.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 430

430 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

EUTERPE Essai n° 30

Date de l’essai : 21 juillet 1973, 9h00 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Dindon
Altitude : 220 m
Énergie : 11 kt

Informations météorologiques
Le 21 juillet, les vents au sol étaient
de nord-est, avec une vitesse de 3 à 7 m.s -1 ,
et du nord-ouest du 280 à 9 000 m d’altitude
avec une vitesse de 28 m.s -1 .
Au moment de l’essai, le ciel était
relativement nuageux.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Une augmentation de la radioactivité de faible niveau a été observée aux îles Gambier
21 heures après l’essai. L’activité volumique journalière associée à l’indice bêta global atmosphé-
rique est passée de 3,7 à 60 mBq.m -3 . Les dépôts au sol occasionnés par les précipitations était
de 96 200 Bq.m -2 .

Îles et atolls concernés par les retombées différées


Des augmentations de l’activité volumique associée à l’indice bêta global atmosphérique
correspondant à des retombées différées ont été mesurées sur dix îles :

• Tureia entre le 8 et le 12 août, avec un maximum de 22 mBq.m -3 le 10 août ;


• Reao le 7 août avec 22 mBq.m -3 ;
• Hao, du 31 juillet au 3 août et du 9 au 12 août, avec un maximum de 0,13 Bq.m-3 le 1er août ;
• Bora Bora, les 3, 6, 7 et 12 août, avec un maximum de 18 mBq.m -3 le 6 août ;
• Hiva Oa, du 2 au 6 août, avec 0,44 Bq.m -3 le 4 août ;
• Raivavae, le 9 août avec 18 mBq.m -3 ;
• Rangiroa, les 2, 5, 6 et 12 août, avec un maximum de 0,296 Bq.m -3 le 6 août ;
• Tubuai, les 9 et 10 août, avec un maximum de 11 mBq.m -3 le 9 août ;
• Mahina (Tahiti), les 12 et 13 août, avec un maximum de 55 mBq.m -3 le 13 août ;
• Totegegie (Gambier), les 9 et 10 août, avec un maximum de 22 mBq.m -3 le 10 août.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 431

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 431

74 : Contamination surfacique
N Aline

Giroflée

PEA Hortensia
Dindon
Bécasse 74
74
Axe de la retombée
74
740 Fuchsia

Faucon Iris Ara


H+8h
H+5h ambiance
Points max. Points max. < 10
à J+1 8 500
~ 10 ambiance
5 à 20 0 2,5km

F IG. 259. - Débits de dose (µGy.h -1 ) et contamination


surfacique (Bq.m -2 ) dans le secteur Ouest de l’atoll
de Mururoa.

N
66,6 * : activité volumique
Aline

Giroflée
1
PEA
Dindon

10 20 40 *
30
1 Fuchsia

Faucon Iris Ara

66,6
0 2,5 km à H+28

F IG . 260. - Débits de dose (µGy.h -1 ) à 1 mètre et


activité volumique (MBq.m -3 ) dans le secteur Ouest
des l’atoll de Mururoa à H+25h30 à H+28h30 (mission
LCPS).
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 432

432 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

MELPOMÈNE Essai n° 31

Date de l’essai : 28 juillet 1973, 14h06 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Denise
Altitude : 270 m
Énergie : 0,05 kt

Informations météorologiques
Le 28 juillet, le vent au sol était du 120, avec
une vitesse comprise entre 5 et 10 m.s -1. Il s’affaiblissait
nettement entre 1 000 et 3 000 m d’altitude et se
renforçait au-delà en s’infléchissant progressivement
vers l’axe sud-ouest. La situation générale était assez
complexe, ce qui a entraîné un retour de masses d’air
contaminées. Au moment de l’essai, le ciel était
presque totalement dégagé.
Une double tropopause se situait aux altitudes
de 10 800 m et 14 700 m.

Informations sur l’essai


La base du nuage était à 1 800 m d’altitude et sa tête atteignait 2 300 m.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Une augmentation de la radioactivité atmosphérique a été détectée à Tematangi, 6 heures
après l’essai. Les dépôts au sol ont été négligeables.

Îles et atolls concernés par les retombées différées


Des augmentations de l’activité volumique associée à l’indice bêta global atmosphérique
correspondant à des retombées tardives ont été mesurées sur quatre îles :

• Tureia, du 30 juillet au 2 août, avec une activité maximale de 3,25 Bq.m -3 ;


• Totegegie, où l’activité a atteint un maximum de 0,26 Bq.m -3 le 31 août ;
• Reao, avec une augmentation atteignant 0,0185 Bq.m -3 le 2 août ;
• Tahiti, avec 0,037 Bq.m -3 à Mahina et 0,1 Bq.m -3 à Taravao le 3 août.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 433

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 433

< 50
50 à 600

Dalle
< 50 Ariel Dalle
Dalle
Vesta
Colette

Colette Denise

< 1 débris par 1 000 m2

1 à 5 débris par 100 m2

FIG. 261. - Débit de dose (µGy.h -1 ) dans le secteur Nord de l’atoll de Mururoa (mission RAD 3-reconnaissances
terrestres).
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 434

434 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

PALLAS Essai n° 32

Date de l’essai : 18 août 1973, 9h15 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Denise
Altitude : 270 m
Énergie : 4 kt

Informations météorologiques
Le 18 août, les vents au sol étaient du
sud est, assez forts jusqu’à 1 000 m, atteignant
14 m.s -1 . Entre 1 000 et 6 000 m d’altitude, ils
étaient très faibles et variables en direction.
Entre 6 000 et 7 000 m d’altitude, le vent était
d’ouest (260) avec une vitesse de 17 m.s -1 .
Au moment de l’essai, le ciel était très
couvert. La tropopause se situait à une altitude
de 15 000m.

Informations sur l’essai


La base du nuage se situait à 1 800 m et
son sommet à 5 500 m d’altitude.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Des augmentations de l’activité volumique associée à l’indice bêta global atmosphérique
correspondant ont été détectées sur quatre îles :

• Hereheretue les 19 et 20 août, avec un maximum de 1,2 Bq.m -3 ;


• Raivavae, du 19 au 21 août, avec un pic à 111 Bq.m -3 ;
• Tubuaï avec un maximum de 111 Bq.m -3 ;
• Tahiti avec des activités maximales de 0,55 Bq.m -3 et de 0,92 Bq.m -3 respectivement à
Mahina et Taravao, le 21 août.

Îles et atolls concernés par les retombées différées


Plusieurs augmentations de l’activité volumique associée à l’indice bêta global atmosphérique
correspondant à des retombées différées ont été détectées à Tureia les 25, 26 et 28 août avec
un niveau maximum de 0,011 Bq.m -3 ; ainsi qu’à Totegegie les 23, 24, 28 et 29 août, avec
0,022 Bq.m -3 .
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 435

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 435

70
100 PEA STBFT
Denise
Exter 0
Colette
Dora
Edith

70 160 80 10 0
20 PEA Denise
25 160 330 26 4

F IG . 262. -Débits de dose (µGy.h -1 ) mesuré à 1 mètre au-dessus du sol dans le secteur Nord de
l’atoll de Mururoa entre H+5h15 et H+8h20 (mission TER).
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 436

436 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

PARTHÉNOPE Essai n° 33

Date de l’essai : 24 août 1973, 9h00 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Dindon
Altitude : 220 m
Énergie : 0,2 kt

Informations météorologiques
Le 24 août, les vents au sol étaient d’est (entre
80 et 95°), avec une vitesse de 6 à 9 m.s -1 et restaient
sensiblement alignés en altitude jusqu’à 3 000 m,
avec une vitesse de 18 m.s -1 . Au moment de l’essai,
le ciel était dégagé et les vents bien établis.
La tropopause se trouvait à 15 300 m d’altitude.

Informations sur l’essai


Le pied du nuage s’élevait à 1 400 m d’altitude
et sa tête à 2 500 m.

Îles et atolls habités concernés par les retombées immédiates


Une augmentation de l’activité volumique associée à l’indice bêta global atmosphérique a
été mesurée le 26 août à Raivavae et, du 24 au 27 août, à Tubuai.

< 1 débris.m-2
PEA N
1 débris.m-2 Dindon
10 débris.m-2

11 8
9
10 mbée
reto
de la
10 Axe
9
14 Faucon0,5
PEA Dindon

6,5 Faucon
Iris
14 Iris
1,3 0,6

F IG . 263. -Débits de dose (mGy.h -1 ) mesuré à 1 mètre au-dessus du sol dans le secteur Ouest de l’atoll de
Mururoa et densité des débris récupérés.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 437

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 437

TAMARA Essai n° 34

Date de l’essai : 28 août 1973, 9h30 (heure locale)


Type d’essai : largage par avion Mirage III E
Site : océan intérieur des eaux territoriales
Altitude : 250 m
Énergie : 6 kt

Informations météorologiques
Le 28 août, les vents au sol étaient de sud-
est, du 130 au 140, entre 0 et 1 000 m d’altitude,
avec une vitesse de 13 m.s-1 ; faiblissant jusqu’à
3 000 m, altitude où leur vitesse était presque
nulle. Entre 10 000 et 15 000 m d’altitude, les
vents passaient au sud-ouest (du 210 au 250),
avec des vitesses de 15 à 26 m.s -1 . Au moment de
l’essai le ciel était couvert.

Informations sur l’essai


L’essai consistait à larguer une arme de faible énergie à partir d’un mirage III E qui avait
décollé de l’atoll de Mururoa. Les distances de sécurité étaient de 9 milles nautiques pour les
navires opérationnels avec hélicoptères, de 16 milles nautiques pour les bâtiments bases et de
8 milles nautiques pour les avions en vol à 6 000 m d’altitude.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Une augmentation de l’activité volumique atmosphérique de faible niveau a été détectée
entre le 28 et le 30 août à Tureia, Hao, Reao, Tahiti (Mahina et Taravao) et Rangiroa.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 438
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 439

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 439

CAMPAGNE 1974
La campagne 1974 a concerné neuf essais atmosphériques dont six sous ballon, un essai
par largage d’avion Jaguar et deux essais de sécurité sur tour. Les essais ont été réalisés entre
le 16 juin et le 14 septembre. Les conditions météorologiques, anormalement stationnaires pour
l’hiver austral, ont entraîné plusieurs jours d’attente jusqu’à ce qu’elles soient favorables à la réalisation
de l’essai. Le décalage des dates d’essais a réduit à l’extrême la période de temps entre les
séries.

L’activation du Goen a été effective entre le 10 mai et le 19 septembre. Les avis concernant
l’activation des zones maritimes et aériennes dangereuses et de sécurité ont été émis à compter
du 11 juin. Elles ont été désactivées le 17 septembre.

L’énergie prévue de certains essais était supérieure à celle de ceux de 1973, mais l’expérience
acquise lors des essais précédents a conduit à ne pas modifier les dimensions des zones
maritimes et aériennes dangereuses et de sécurité. En effet :

• Le risque dû au flash défini suivant le critère le plus contraignant de visibilité directe de la


boule de feu était identique.
• Le risque radiologique pour les avions des lignes commerciales a été évité par des accords
de déroutement passés avec les compagnies aériennes (Air France et Lan Chile).

Aucune retombée significative n’a été détectée sur la Polynésie à l’exception de celles
mesurées sur les îles de l’archipel de la Société à la suite de l’essai Centaure. L’abri de prévoyance
de Rikitea dans l’archipel des Gambier n’a pas été utilisé en 1974. Seuls les blockhaus de Tureia
ont été maintenus en état de fonctionnement.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 440

440 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

CAPRICORNE Essai n° 35

Date de l’essai : 16 juin 1974, 8h30 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Dindon
Altitude : 220 m
Énergie : 4 kt

Informations météorologiques
L’essai a été effectué le 16 juin, sur la face nord-
ouest d’un anticyclone centré entre les îles Pitcairn et de
Pâques. Les vents, jusqu’à une altitude de 3 000 m
étaient du nord-est de vitesse de 5 à 8 m.s -1 et au-dessus
de nord-ouest à ouest de 8 à 13 m.s -1 .
Des nuages cumuliformes, limités à 1 500 m d’al-
titude en raison d’une faible inversion, induisaient de
faibles risques de pluie.

Informations sur l’essai


La tête du nuage a culminé à 6 900 m d’altitude.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Aucune retombée directe
n’a été détectée.
À H+1h15 PEA N

Porte AR PEA : 2,5 mGy.h-1 à 1m Dindon


Porte salle 6 : 5,0 mGy.h-1 à 1 m
Îles et atolls concernés par les extrémité canal de câble : 8,0 mGy.h-1
retombées différées
Une augmentation de l’activité
volumique associée à l’indice bêta 9 250 1 110
global atmosphérique de faible 555
niveau due à des nuages dérivés 3 330
du nuage principal a été détectée à 2 220 111
ée

Papeete à partir du 20 juin, avec


mb

Faucon
une valeur maximale enregistrée le
reto

21 juin. À H+2h40
e la

0,07 mGy.h-1
d
Axe

Iris
0 1,25 km

F IG . 264. - Activités volumiques (MBq.m -3 ) des eaux de surface du


lagon entre H+2 et H+4 et débit de dose (mGy.h -1 ) du secteur
Ouest de l’atoll de Mururoa.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 441

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 441

GÉMEAUX Essai n° 36

Date de l’essai : 7 juillet 1974, 14h15 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Dindon
Altitude : 312 m
Énergie : 150 kt

Informations météorologiques
Le 7 juillet, l’essai Gémeaux a
été effectué sur la face nord-ouest
d’une cellule anticyclonique centrée en
27° S et 125° W. Les vents de basse
couche jusqu’à 4 500 m d’altitude
étaient de secteur nord-est à est-
nord-est.
À partir de 5 000 m, ils
s’orientaient à l’ouest. Les vitesses
étaient de 8 à 10 m.s -1 , jusqu’à
10 000 m ; se renforçant et atteignant
31 à 41 m.s -1, à partir de cette altitude.

Informations sur l’essai


La tête du nuage stabilisé à H+15min culminait à 15 240 m, sa base se situait à 10 668 m.
Le nuage s’est fractionné en s’inclinant vers l’est, le pied s’est détaché du sol et un cumulus
blanc s’est formé à la base de ce dernier.

À H+1
Porte AR PEA : 6,0 mGy.h-1 à 1m N
Îles et atolls concernés par les PEA
Aire Ballon : 4,0 mGy.h-1 à 1 m
retombées immédiates Maximum : 8,0 mGy.h-1
Dindon

La seule retombée directe a


été mesurée sur des atolls inhabités
166,5 222,0
à l’est de l’atoll de Mururoa. 111,0
111,0 166,5
55,5

Îles et atolls concernés par les 55,5


11,1
retombées différées Faucon Iris
Des augmentations de l’activité 11,1
volumique associée à l’indice bêta
global atmosphérique correspondant Radioactivité dispersée par plaques
2
d'une centaine de m
à des retombées différées de faible 0 1,25 km
0,1 à 1,0 mGy.h-1 au contact
niveau ont été détectées entre le 14
et le 16 juillet sur différents atolls, FIG. 265. - Activités volumiques (MBq.m -3 ) des eaux de surface du
ainsi qu’à Tahiti. lagon entre H+42h45 et H+45h30 et débit de dose (mGy.h -1 ) du
secteur Ouest de l’atoll de Mururoa.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 442

442 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

CENTAURE Essai n° 37

Date de l’essai : 17 juillet 1974, 8h00 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Denise
Altitude : 270 m
Énergie : 4 kt

Informations météorologiques
Le 17 juillet, l’essai a été effectué sur la
face nord d’une cellule anticyclonique en voie
d’affaiblissement centrée sur l’atoll de Morane,
avec des vents de basse couche de secteur
sud-est de 5 m.s -1 , tendant à faiblir durant la
journée.

Informations sur l’essai


La tête du nuage stabilisé, à H+10min,
de couleur ocre s’est détachée du pied. Le
sommet du pied a bourgeonné en formant une
petite tête blanche cerclée d’un anneau ocre.
La tête du nuage a culminé à 5 200 m, altitude
nettement plus basse que celle attendue par la
prévision.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


La seule retombée directe est observée sur l’atoll de Tematangi.

Îles et atolls concernés par les retombées différées


Le nuage radioactif s’est dirigé vers Tahiti qui est touchée, le 19 juillet, par la côte Est. Des
précipitations de forte intensité, conjuguées aux effets du relief, conduisirent à des dépôts au sol
hétérogènes en termes d’activités surfaciques à Hitiaa sur le plateau de Taravao et au sud de
Teahupoo.

➙ Les détails de l’évaluation des conséquences radiologiques de l’essai Centaure


pour la population et l’environnement de Tahiti sont présentés dans le chapitre VI.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 443

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 443

À H+1 N
Face AV PEA : 1 600 600 à 1 000
Aire Ballon : 1 300
Face AR PEA : 800 PEA Exter 0 : 30
Denise
Colette 6
Dora
Edith PEA Denise
500 à 600 2 220,
1 110,0
111,0
À H+1
Porte AR PEA : 600 à 1m
11,1
Aire Ballon : 400 à 1 m
Maximum : 800
1,1

0 1 km
Aline
11,1 : débit de dose

F IG . 266. - Activités volumiques (MBq.m -3 ) des eaux de surface du lagon entre H+2h15 à H+4h00 et débit
de dose (µGy.h -1 ) du secteur Ouest de l’atoll de Mururoa entre H+1 et H+1h20 (mission TER 1).
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 444

444 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

MAQUIS Essai n° 38

Date de l’essai : 25 juillet 1974, 8h30 (heure locale)


Type d’essai : largué par avion Jaguar
Site : au dessus océan – 20 km Sud-Ouest de Mururoa
Altitude : 250 m
Énergie : 8 kt

Informations météorologiques
Le 25 juillet, le tir Maquis a été
effectué sur la face nord-ouest d’un
anticyclone centré à 450 milles nau-
tiques, au sud-est de l’île de Pitcairn.
Le matin de l’essai, les vents étaient
de nord-est faibles, de 5 à 7 m.s -1 .
L’influence anticyclonique s’est fait
sentir jusqu’à 4 000 m avec un flux de
composante nord-est à nord-nord-est
faible. Entre 5 000 m et 8 000 m d’al-
titude, les vents étaient à composante
ouest nord-ouest, avec des vitesses
qui atteignaient 12 m.s -1 . Au-dessus
de 8 000 m, ils étaient de secteur
sud-ouest et leurs vitesses étaient très
élevées, avec un maximum de 43 m.s -1
à 12 500 m. Le ciel était peu nuageux.

Informations sur l’essai


La tête du nuage a culminé à 10 700 m d’altitude. À H+9min, elle s’étirait sur 5 km dans
l’axe du vent, un anneau rouge-orange apparaissait à sa base, à l’altitude de 9 000 m. Le pied
formait une colonne bourgeonnante dont le sommet se situait aux environs de 3 000 m. Il s’est
confondu petit à petit avec les cumulus environnants.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Aucune variation du bruit de fond radioactif n’a été détectée et aucune retombée directe
n’a été constatée sur les îles habitées de Polynésie française.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 445

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 445

SCORPION Essai n° 39

Date de l’essai : 14 août 1974, 15h30 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Dindon
Altitude : 312 m
Énergie : 96 kt

Informations météorologiques
Le 14 août, l’essai Scorpion a été effectué sur la
face nord-ouest d’une profonde dépression centrée sur le
40° S et le 130° W, entraînant un flux de sud-ouest sur le
sud des Tuamotu et des îles Gambier. Sur l’atoll de Mururoa,
ce flux de sud-ouest se renforçait en altitude, sa vitesse
passant graduellement de 9 m.s-1 au sol, à 21 m.s-1 à 4 000 m,
31 m.s -1 à 6 000 m et 38 m.s -1 à 11 000 m d’altitude. Le
ciel était peu nuageux et les risques d’averses faibles.

Informations sur l’essai


La tête du nuage stabilisé, à H+5min, était de couleur
blanche avec une tache orange foncé à sa base. Des
nuages lenticulaires se sont formés à son sommet et le pied
s’est détaché pour n’être plus relié à la tête que par une zone ocre transparente. À H+10min, la
tête avait pris la forme d’une enclume blanche avec une base ocre foncé. La tête du nuage
culminait à 17 500 m d’altitude.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Aucune retombée directe sur une île habitée n’a été constatée.

Îles et atolls concernés par les retombées différées


Une augmentation de
l’activité volumique atmo-
sphérique correspondant à N À H+1h45
À H+1h45 2 400 à 8 000 µGy.h-1
des retombées différées de 7 400 µGy.h-1 PEA Dindon

faible niveau a été détectée


à Reao, le 15 août, entre 3 et Maxi = 800
750
6 h du matin. 600
300
500
400
200
100
Faucon
10 10
F IG . 267. - Débit de dose (µGy.h -1 ) à
1 m au-dessus de la surface du sol et Iris
des eaux du secteur Ouest de l’atoll de 0 1,25 km
Mururoa entre H+18h00 et H+20h00.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 446

446 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

TAUREAU Essai n° 40

Date de l’essai : 24 Août 1974, 14h45 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Denise
Altitude : 270 m
Énergie : 14 kt

Informations météorologiques
Le 24 août, l’essai Taureau a été effectué
sur la face sud-est d’un anticyclone faible, à
l’arrière d’une perturbation active, qui a touché
l’atoll de Mururoa dans la nuit du 22 au 23
août. Des vents faibles étaient alors orientés
au sud, puis sud-est.
L’arrivée d’une petite perturbation dans la
nuit du 23 au 24 août a provoqué une orientation
des vents au sud-ouest, puis ouest, avec un
léger renforcement au cours de la journée du
24 août.
Sur l’atoll de Mururoa, au moment de
l’essai, les vents étaient donc sensiblement ali-
gnés, entre le 260 et le 280, du sol jusqu’à
10 000 m avec des vitesses qui augmentaient
régulièrement avec l’altitude, passant de
5 m.s -1 jusqu’à 1 000 m, à 15 m.s -1 à
4 000 m et à 41 m.s -1 au-dessus de 8 000 m.

Informations sur l’essai


La tête du nuage à H+4min atteignait 9 753 m, en s’éloignant dans le 80. Le pied est resté
en arrière et a pris la forme d’un gros cumulus blanc bourgeonnant. À H+10min, le début de
cisaillement de la tête et du pied a été observé. La tête du nuage à la stabilisation atteignait
l’altitude de 10 000 m.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Une retombée de faible niveau a été détectée sur l’archipel des Gambier, avec un niveau
maximal mesuré 18 heures après l’essai.

Îles et atolls concernés par les retombées différées


Une augmentation de l’activité volumique atmosphérique correspondant à des retombées
différées a été observée suite à des précipitations ayant eu lieu 4 jours après l’essai, sur les atolls
de Tureia et Reao.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 447

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 447

PEA Denise N

Dora

10
Françoise
1
Gisèle
PEA Denise 1
10 Camélia
100 Hélène
300 Irène
200

0 2,5km

F IG . 268. - Débit de dose (µGy.h -1 ) mesuré à 1 m au-dessus de la


surface dans le secteur Nord de l’atoll de Mururoa entrer H+2h15 et
H+3h30.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 448

448 Annexe 3 : ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

VERSEAU Essai n° 41

Date de l’essai : 14 septembre 1974, 14h30 (heure locale)


Type d’essai : sous ballon
Site : Mururoa – Zone Dindon
Altitude : 433 m
Énergie : 332 kt

Informations météorologiques
Le 14 septembre, l’essai Verseau a eu lieu sur la face nord-est d’un anticyclone centré au
sud-ouest de Rapa et au nord-ouest d’une dépression qui s’était formée le 12 septembre aux
alentours de l’atoll de Mururoa. L’instabilité modérée et la turbulence étaient limitées à 2 400 m
d’altitude par une forte inversion de température. La rotation des vents entre sud-est et sud sud-
ouest se situait également à 2 400 m.
Il n’y avait pas de précipitations prévues aux abords des sites. Au moment de l’essai, les
vents au sol (jusqu’à 2 000 m) étaient du 145 de 5 à 8 m.s -1 , puis du 240-250 avec des vitesses
de 10 m.s -1 entre 3 000 et 6 000 m, de 15 à 26 m.s -1 de 6 000 à 18 000 m et chute à 6 m.s -1 ,
aux altitudes supérieures.

Informations sur l’essai


La tête du nuage a culminé à 19 000 m d’altitude.

Îles et atolls concernés par les retombées immédiates


Des augmentations de l’activité volumique atmosphérique correspondant à des retombées
directes de très faible niveau ont été observées, à 8 heures après l’essai, à Tureia et Reao.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 449

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 449

1 000,0
PEA Dindon PEA DINDON HORTENSIA
BÉCASSE

Jabiru

740,0
5,0
666,0
0

11,1
55

4,
11 44
,1
333,0
Jasmin 222,0
111,0
FAUCON
ARA

EIDER

0 0,5 1 1,5 2 km

F IG . 269. - Activité volumique (MBq.m -3 ) des eaux de surface du secteur Ouest de l’atoll de
Mururoa mesurée 1 jour après l’essai.
Annexe 3bVF-07.12.06.QXD:Annexe 2 11/01/07 10:50 Page 450
X4 Annexe 4-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:15 Page 451

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 451

ANNEXE 4

Organisation associée
à la réalisation des essais nucléaires

Les essais nucléaires français ont été réalisés dans le cadre d’une étroite collaboration
entre le ministère de la Défense et le Commissariat à l’énergie atomique (CEA), les responsabilités
de chacun étant clairement réparties par différents textes réglementaires.

Chargé de la conception et de la fabrication des armes nucléaires françaises, le CEA était


responsable du volet expérimental des essais nucléaires, c’est-à-dire de la fabrication des engins
à tester, de la préparation et de l’exécution des essais, ainsi que de l’exploitation scientifique de
leurs résultats. Depuis le 12 septembre 1958, les activités du CEA liées à la défense nationale
relèvent de la Direction des applications militaires (DAM).

Le ministère de la Défense assurait la responsabilité globale des opérations et, en


particulier, veillait à ce que les essais nucléaires soient réalisés dans le respect des règles de
sécurité, pour les expérimentateurs comme pour les populations polynésiennes. Les règles de
sécurité radiologique, en particulier, étaient définies par la Commission consultative de sécurité
(CCS) présidée par le Haut-Commissaire à l’énergie atomique. Cette commission a été remplacée
en 1982 par la Commission de sécurité des sites d’expérimentations (C2S). Les règles de
radioprotection étaient établies en conformité avec les recommandations internationales de
radioprotection édictées par la Commission internationale de protection radiologique (CIPR). Elles
étaient soumises à l’approbation du Comité interministériel des sites lointains (CISL) que présidait
le Premier ministre.

Les bases de l’organisation du CEP ont été établies dès 1964 grâce à l’expérience
acquise lors du fonctionnement des sites d’expérimentations sahariens de Reggane et In Ecker.
Elles ont perduré moyennant quelques aménagements, durant toute la durée d’exploitation des
sites du Pacifique. Les principales évolutions dans l’organisation du CEP ont résulté du passage
des essais souterrains aux essais atmosphériques (cf. Organigrammes 1 et 2). Cette annexe,
présente les principales structures de l’organisation mise en place durant toute la durée
d’exploitation du CEP et retrace chronologiquement les grandes lignes de son évolution
institutionnelle et administrative.
X4 Annexe 4-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:15 Page 452

452 Annexe 4 : ORGANISATION ASSOCIÉE À LA RÉALISATION DES ESSAIS NUCLÉAIRES

A4.1 - ORGANISATION DU CEP


En 1966, le CEP était composé :

• d’une base arrière située à Tahiti regroupant le commandement et le soutien militaire, les
laboratoires du CEA du centre technique de Mahina et le Laboratoire de détection
géophysique du CEA implanté à Pamataï ;
• d’une base avancée sur l’atoll de Hao qui assurait le soutien des missions aériennes
opérationnelles, le prétraitement des échantillons recueillis dans le nuage suite aux
expérimentations atmosphériques, l’entreposage des composants des engins nucléaires à
leur arrivée de métropole ;
• des deux atolls d'expérimentations de Mururoa et Fangataufa.

À partir de 1975, avec le passage aux essais souterrains et le transfert des installations
vers Mururoa, le centre de Mahina a progressivement perdu sa vocation technique. Quelques
années plus tard, il en a été de même des installations à caractère opérationnel de Hao.

A4.1.1 - GROUPEMENT OPÉRATIONNEL DES ESSAIS NUCLÉAIRES

Créé en 1960 pour prendre la direction des premiers essais nucléaires au Sahara, le
Groupement opérationnel des essais nucléaires (Goen) était le seul organe de commandement
dont la création était antérieure à celle du CEP.
Le Goen était une structure occasionnelle, activée à chaque campagne d’essais. L’officier
général commandant le Goen donnait l’ordre d’évacuation des sites avant chaque essai, assurait
la gestion des mouvements d’aéronefs et de navires autour des atolls et surtout ordonnait la
réalisation de l’essai compte tenu des conditions météorologiques. Enfin, après avoir supervisé
les contrôles radiologiques sur zone, c’est lui qui autorisait le retour des équipes après chaque
essai (cf. Chapitre VI, § VI.3).
Le commandant du Goen était secondé par le directeur des Essais de la Direction des
applications militaires (DAM) du CEA et était assisté de conseillers scientifiques pour la sécurité
radiobiologique, la prévision météorologique et pour la prévention et la protection sanitaires.

A4.1.2 - COMMANDEMENT TERRITORIAL

L'amiral Commandant supérieur des forces armées dans le Pacifique (Comsup-Alpaci)


était le commandant du CEP durant la période des essais atmosphériques. À ce titre, il était le
correspondant direct du Directeur des centres d’expérimentations nucléaires (Dircen). Il avait
autorité sur les moyens locaux de soutien des expérimentations : bâtiments de la marine
nationale, liaisons aériennes inter-insulaires, réseaux de transmissions locaux, moyens du Génie,
direction du Service de santé des Armées (SSA) en Polynésie (Hôpital Jean Prince de Tahiti),
antennes locales des services spécialisés de la Dircen. Il pouvait, pour certaines campagnes,
être désigné par le Dircen pour assurer le commandement du Goen.
En 1986, un arrêté définissant la nouvelle organisation du CEP venait modifier les
attributions entre le Dircen et le Comsup qui conservait le commandement territorial sur les
installations du CEP dont il devait assurer la protection physique (cf. Organigrammes 1 et 2).
X4 Annexe 4-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:15 Page 453

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 453

SMSR
SMCB
DIRCEN PARIS
Villacoublay
DTS Adjoint Adjoint
Armées CEA

Direction des Essais

COMSUP
Base avancée
d'HAO
COMCEP HAO DIRAM Hao BIA des Sites
DIRAM DIRAM Sites
SSA TAHITI Pacifique
LRB
GOEN MURUROA
Météo
CEA
DIRTEC FANGATAUFA
CEP Organisation des
Postes Périphériques

Organigramme 1 : Organisation du CEP pendant la période des essais atmosphériques.

SMSR
SMSRB
SMCB
DIRCEN PARIS
Villacoublay
DTS Adjoint Adjoint puis
Montlhéry
Armées CEA

Direction des Essais

COMSUP

HAO BIA HAO BIA des Sites


BA 190 DIRAM Direction technique
Pacifique des Sites
TAHITI

MURUROA
GOEN
DIRTEC
Essais
CEP FANGATAUFA

Organigramme 2 : Organisation du CEP pendant la période des essais souterrains.


X4 Annexe 4-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:15 Page 454

454 Annexe 4 : ORGANISATION ASSOCIÉE À LA RÉALISATION DES ESSAIS NUCLÉAIRES

A4.1.3 - DIRECTION DES CENTRES D’EXPÉRIMENTATIONS NUCLÉAIRES

Créée par un décret du 30 janvier 1964, la Direction des centres d’expérimentations


nucléaires (Dircen) était chargée de la conception, de la réalisation et de l’exploitation du CEP. Il
s’agissait d’un organisme mixte, Armées-CEA, et interarmées (cf. Organigramme 3). Dépendant
directement du ministre de la Défense, la Dircen était dirigée par un officier général, assisté d’un
officier général adjoint et du directeur des Essais du CEA/DAM. La conduite des expérimentations
restait assurée par le Goen qui était commandé par le Dircen ou un officier général mis à sa
disposition.

Ministères
DÉFENSE RECHERCHE - INDUSTRIE

CEMA
Météo Chef Etat Major CEA
Nationale des Armées

DPS/IPSN DAM
DIRCEN
COMSUP - ALPACI

COMCEP Direction des Essais


Échelon
Météo Météo CEP Polynésien Médecine du travail
Polynésie SMCB DIRAM/PAC SMT/ESSAIS
Laboratoire d'Analyses
Moyens Navals Médicales (LAM)

Groupe d'Etude et
Moyens Aériens Échelon Laboratoire
Polynésien de Sûreté des Essais
GSR - LSR - LESE Nucléaires (GESEN)
SMCB/PAC
DSSA (essais souterrains)
Hopital J. Prince
Laboratoire SMSR
Radiotoxicologie (LRB) SPS Département Mesures
Infirmerie Hopital d'Hao Diagnostic Nucléaire
de Mururoa et
Radiochimie
du BSL Rance Échelon Optique et Sismique
Polynésien
SMSR/PAC
Moyens terrestres Exploitation-Ingéniérie
Organisation Ballon
Forage
des Postes DTS
Périphériques Manutention du Conteneur
(OPP) Infrastructures spécifiques

Organigramme 3 : Positionnement de la Dircen au sein de l’organisation


mise en place pour la réalisation des essais.
X4 Annexe 4-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:15 Page 455

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 455

A partir de 1986, c’est au Dircen qu’il revient d’assurer la direction des organismes de
soutien des expérimentations dans le Pacifique : base interarmées des sites et de Hao, base
aérienne 190 de Tahiti-Faaa, éléments du CEA implantés à Tahiti, de la météorologie, du SMSR
et du SMCB.
La Dircen disposait initialement de trois services : le Service mixte de sécurité radiologique
(SMSR), le Service mixte de contrôle biologique (SMCB) et la Direction des travaux et services
(DTS). Le SMSR et le SMCB étaient composés de personnel des Armées et du CEA. Il s’agissait
de services de surveillance et de contrôle de la radioactivité, en charge de la radioprotection :

• le SMSR avait la responsabilité de la radioprotection des personnes et du suivi de la


radioactivité dans le milieu physique (air, eau et sol). À ce titre, il mesurait la radioactivité
produite lors des essais et ajustait les modalités de protection. Ce service était également
en charge de la dosimétrie du personnel et, le cas échéant, de la décontamination du
matériel et du personnel, à l’exclusion de la décontamination fine et de la décontamination
des blessés qui dépendaient du SSA.
• le SMCB avait pour mission d’assurer la surveillance radiologique de la biosphère, à
l’exclusion de l’être humain qui est de la responsabilité du SSA et de la médecine du travail,
y compris des denrées alimentaires et des eaux de boisson, sur l’ensemble de la Polynésie
française. Il était chargé de l’évaluation de l’exposition des populations via leur alimentation
et en particulier de l’exposition par ingestion de produits de la mer qui représentent une part
non négligeable de la ration alimentaire des personnes vivant en Polynésie.
• La DTS avait en charge la réalisation et l’entretien des grandes infrastructures de soutien
(aérodromes, installations portuaires, routes, usines de dessalement d’eau de mer,
hébergement, incinérateur de déchets etc.).

Concernant le SMSR, les fonctions de chef de service et de chef de service-adjoint étaient


assurées alternativement par un responsable de la Défense ou du CEA. La direction du service
était basée à Montlhéry, en région parisienne, avec une antenne à Tahiti, le SMSR/Pac.

Lors des essais aériens, la composante centrale du SMSR/Pac était implantée dans le
centre technique du CEA, à Mahina où se trouvaient les unités de soutien électronique et
mécanique et les laboratoires de mesure de la radioactivité et de photo-dosimétrie. Une antenne
était installée à Mururoa, le SMSR/Sites, dont les moyens étaient regroupés sur le BSL Rance
(laboratoires de mesure, locaux de décontamination, etc.) et une autre à Hao qui disposait d’un
Centre d’intervention et de décontamination des matériels (CID) et d’un Centre de
décontamination des aéronefs et des personnels (CDAP).

Lors du passage aux expérimentations souterraines, les moyens polynésiens du SMSR ont
été regroupés à Mururoa où ont été construits une station de décontamination des matériels
(Stadec) et un laboratoire de mesures, le L7 (cf. Organigramme 4).

Le SMCB était composé de médecins, pharmaciens et vétérinaires provenant


principalement du SSA et de quelques membres du Département de protection sanitaire (DPS) du
CEA. Le laboratoire de mesures radioactives du DPS installé à Mahina réalisait des mesures au
profit du SMCB. Ce laboratoire s’est successivement appelé : Groupe de surveillance
radiologique (GSR), puis Laboratoire de surveillance radiologique (LSR) et enfin Laboratoire
d’études et de surveillance de l’environnement (Lése).
X4 Annexe 4-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:15 Page 456

456 Annexe 4 : ORGANISATION ASSOCIÉE À LA RÉALISATION DES ESSAIS NUCLÉAIRES

PÉRIODE DES ESSAIS AÉRIENS PÉRIODE DES ESSAIS SOUTERRAINS


Échelon Direction Échelon Direction
Bureau d'Études Générales, Prévisionnel (BEGP)
Bureau Scientifique (BS)
Section de Radioprotection des Chantiers
Bureau Opérations (OPS)
et Installations (SRCI)
Section Effets Lointains (PEL) Section Intervention Assainissement et
Section Effets Proches (PEP) Décontamination (SIAD)

Section Etudes Radiologiques (ER) Section Etudes et Surveillance de


l'Environnement (SESE)
Section Equipements (EQ)
Section Equipements (SEQ)

Organigramme 4 : Organisation du SMSR pendant la période des essais atmosphériques puis souterrains.

Le chef du SMCB, médecin du SSA, était également le conseiller médical du Dircen. Il


était assisté d’un comité scientifique composé de membres du DPS, du SSA, du service
biologique et vétérinaire et de personnalités extérieures compétentes dans ce domaine d’activité.
D’abord implantée à Villacoublay, la direction du service s’est installée à Montlhéry en août 1974.
Le SMCB disposait d’une implantation polynésienne dans le centre technique de Mahina qui sera
transférée sur l’atoll de Mururoa quelques années avant la fin de la période des essais
souterrains.
Le SMCB disposait en Polynésie d’un bâtiment de recherches océaniques, le BRO La
Coquille, remplacé en 1973 par un bâtiment de contrôle biologique, le BCB Marara.

En 1994, le SMSR et le SMCB ont été regroupés, formant le Service mixte de sécurité
radiologique et biologique de l’homme et de l’environnement (SMSRB).

A4.2 - PRINCIPALES STRUCTURES CEA


A4.2.1 - DIRECTION DES ESSAIS

Au sein de la Direction des applications militaires du CEA, la direction des Essais était
responsable de la mise en œuvre des essais nucléaires. Elle était composée de plusieurs
services spécialisés :

• Le service exploitation, devenu lors des essais souterrains le département Ingénierie, était
chargé de l'étude et de la réalisation des installations spécifiques aux essais : ouvrages
abritant les appareillages de mesure, nacelles supports d'engins, ballons, etc.
• Les services du diagnostic nucléaire (DN), de la radiochimie (RC) des effets extérieurs (EE)
et le Laboratoire de détection géophysique (LDG) étaient responsables de la définition, de
l’acquisition et du dépouillement des résultats de mesure (neutroniques, gamma, radio-
chimiques, optiques et sismiques). Ces services formeront par la suite le département
Mesures.
X4 Annexe 4-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:15 Page 457

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 457

• Le Service de protection des sites (SPS) était chargé de la radioprotection dans


l’environnement proche du point zéro de l’essai et lors de la mise en œuvre de l’engin. Ce
service développait les appareils tropicalisés pour la mesure de la radioactivité adapté au
climat polynésien (climat chaud, humide et salin) afin de permettre la réalisation de mesures
de radioprotection dans des conditions environnementales beaucoup plus sévères que
celles rencontrées habituellement dans les centres métropolitains du CEA. Son personnel
était issu des Services de protection radiologique des centres du CEA. Le SPS a été intégré
au SMSR en 1964
• Le Service médical du travail (SMT/Essais) était chargé de l’ensemble de la médecine du
travail des agents du CEA. Il bénéficiait d’une double implantation, en métropole, sur le
centre du CEA/DAM de Bruyères-le-Châtel et, en Polynésie, sur le centre CEA de Mahina à
Tahiti pendant la période des essais atmosphériques, puis sur l’atoll de Mururoa pour la
période des essais souterrains. La médecine du travail disposait, sous la responsabilité de
pharmaciens, de laboratoires spécialisés, les Laboratoires d’analyses médicales (Lam)
chargés de tous les examens médicaux : analyses de sang, d’urines, radiographies
pulmonaires et anthropogammamétries. Ces laboratoires, placés au plus près du médecin du
travail, avaient une double implantation, métropolitaine et polynésienne.

A4.2.2 - DIRECTION DES APPLICATIONS MILITAIRES AU PACIFIQUE

Dès son implantation en Polynésie, le CEA a créé la Direction des applications militaires
au Pacifique (Diram/Pac), un échelon local de coordination dont l’implantation principale était le
centre technique de Mahina. Cette structure a été amenée à jouer un rôle important dans la mise
en place et l’entretien des moyens opérationnels. Pendant toute la période des essais aériens,
son directeur, le Diram/Pac, était l’adjoint CEA du Comsup. À la fin des essais atmosphériques,
l’activité opérationnelle du centre de Mahina s’est interrompue, pour n’être plus qu’administrative.
Le Diram/Pac a conservé le rôle d’interlocuteur du CEA auprès des autorités locales (Comsup,
Haut Commissaire de la République, autorités politiques du Territoire). De plus, il continuait
d’assurer le suivi du personnel de recrutement local.

A4.3 - CHRONOLOGIE DE L’ORGANISATION INSTITUTIONNELLE


18 octobre 1945 : L’ordonnance n° 45-2563 crée le Commissariat à l’énergie atomique (CEA),
placé sous le contrôle direct du Premier ministre et chargé de «poursuivre les recherches
scientifiques et techniques en vue de l’utilisation de l’énergie atomique dans les divers
domaines de la science, de l’industrie et de la défense nationale». Cette ordonnance a par
la suite été modifiée à plusieurs reprises, par les décrets n° 70-878 du 29 septembre
1970 concernant son organisation et son rattachement au ministre du développement
industriel et scientifique, n° 72-1158 du 14 décembre 1972 et 82-734 du 24 août 1982
concernant les attributions du comité de l’énergie atomique. Elle est aujourd’hui intégrée
dans le Code de la Recherche sous les articles L.332-1 à 7.
2 janvier 1952 : Création du Commandement des armes spéciales (Armée de terre) qui
deviendra interarmées (CIAS) par une décision de juillet 1957.
Décembre1954 : Création au CEA d’un Bureau d’études générales (BEG) chargé d’étudier les
applications militaires de l’énergie atomique, devenant en mai 1956 le Département des
techniques nouvelles.
X4 Annexe 4-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:16 Page 458

458 Annexe 4 : ORGANISATION ASSOCIÉE À LA RÉALISATION DES ESSAIS NUCLÉAIRES

20 mai 1955 : premier protocole CEA-Défense.


13 février 1956 : Création d’un groupe mixte des expérimentations spéciales pour l’étude des
questions liées aux premières expérimentations nucléaires.
18 mars 1957 : Création du groupe mixte Armées-CEA ayant pour mission d’instruire les
questions relatives à l’exécution des programmes d’armement nucléaire.
6 janvier 1958 : Création de la Commission consultative de sécurité (CCS) chargée d’étudier les
conditions de sécurité relatives aux essais nucléaires afin de parvenir à :

• «un degré de sécurité jugé nécessaire et suffisant pour les participants aux essais,
• un degré de sécurité jugé nécessaire et suffisant pour les populations et biens de
toute nature situés dans les régions extérieures au champ de tir et en particulier
voisines de celles-ci».

Cette commission était présidée par le Haut-Commissaire à l’énergie atomique. Sa


composition a été modifiée par les décisions du 20 novembre 1961 et du 25 juin 1979.
1 er Février 1958 : Officialisation de la création du Commandement interarmées des armes
spéciales (Cias), organisme du ministère de la Défense chargé d’organiser les premiers
essais réalisés au Sahara, puis l’implantation du CEP.
Septembre 1958 : Création de la Direction des applications militaires (DAM) du CEA qui succède
au Département des techniques nouvelles.
21 septembre 1962 : La décision de création du Centre d’expérimentation du Pacifique (CEP) et
du Comité interministériel des sites lointains (CISL) est prise en conseil de Défense. Le
CISL dont les attributions font l’objet du décret N° 634 du 30 janvier 1964, est chargé de
suivre le déroulement des programmes d’expérimentations nucléaires, d’approuver les
besoins futurs (nombre et énergie des essais) et d’évaluer d’un point de vue technique et
politique la situation des sites d’expérimentations. Les recommandations de la CCS lui
sont soumises pour approbation. Il est présidé par le Premier ministre.
La création du CEP est décidée suite aux études menées après la décision du Conseil de
Défense du 27 juillet 1962 et formalisée par la décision du 29 août 1962 : «Le Général
commandant interarmées des armes spéciales est chargé de conduire, en liaison avec le
CEA/DAM ces études et ultérieurement de réaliser ce centre d’expérimentations qui
portera le nom de Centre d’expérimentation du Pacifique (CEP)».
7 novembre 1962 : Formalisation d’un protocole entre la Délégation ministérielle pour l’armement
(DMA) et le CEA relatif à la participation de ce dernier à la préparation des
expérimentations dans le Pacifique.
1 er juillet 1963 : le CEP est constitué, sous la subordination du Cias.
30 janvier 1964 : parution du décret portant création de la Dircen, Direction des centres
d’expérimentations nucléaires, qui remplace le Cias.
8 février 1964 : les atolls inhabités de Mururoa et Fangataufa sont cédés par le Territoire à l'État
français par l'arrêté 290 AA/DOM, à la suite des délibérations de la Commission
permanente de l'Assemblée Territoriale du 6 février 1964.
8 août 1964 : Par décision du ministre d’État chargé de la recherche scientifique et des
questions atomiques et spatiales, il est créé une Commission mixte Armées-CEA de
sûreté nucléaire des systèmes d’armes atomiques qui deviendra la Commission mixte de
sécurité (CMS) en 1978 et dont la compétence s’étend aux transports des composants
des engins nucléaires destinés aux essais.
X4 Annexe 4-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:16 Page 459

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 459

17 novembre 1965 : Par décision interministérielle «La mission du Goen/Pacifique qui est
constitué pour une durée qui couvre l’ensemble d’une campagne de tirs, consiste à
assurer, dans les conditions de sécurité requises, l’exécution du programme
d’expérimentations nucléaires décidé par le Gouvernement». Le Commandant du Goen est
assisté de conseillers, pour la sécurité radiologique, le contrôle biologique et la
météorologie.
12 février 1968 : Décision de création du Comité mixte des expérimentations nucléaires dont le
rôle est de préparer la présentation des programmes d’expérimentations nucléaires au
CISL et d’assurer leur cohérence. La présidence est assurée par le Dircen et la vice-
présidence par le Directeur des applications militaires du CEA.
20 janvier 1977 : Établissement d’un protocole Dircen-CEA/DAM concernant l’organisation, les
missions et le fonctionnement respectif du CEP, de la Direction des applications militaires
au Pacifique (Diram/Pac), et des bases du CEP.
2 octobre 1980 : Un décret et un arrêté fixent les attributions et l’organisation de la Direction des
centres d’expérimentations nucléaires. Sont en particulier rappelées, sans changements
notables, les missions du Goen et des services de sécurité, SMSR et SMCB.
27 octobre 1982 : Création de la Commission de sécurité des sites d’expérimentations
nucléaires (C2S). Prenant la suite de la CCS, elle a pour mission d’examiner l’ensemble
des dispositions permanentes prévues en vue d’assurer à tout moment la sécurité
nucléaire dans la zone des expérimentations et à l’extérieur de celle-ci. Elle est présidée
par le Haut-Commissaire à l’énergie atomique et rend compte de ses travaux aux ministres
en charge de la Défense et de l’Industrie. Pour fonder ses avis, elle peut s’appuyer sur les
travaux de commissions de sécurité particulières, notamment la Commission de sûreté
des essais nucléaires (CSEN) du CEA qui, pour chaque engin testé, instruisait le rapport
de sûreté qui précisait notamment le maquettage, la recette, le stockage, le montage, la
manutention de l’engin et du conteneur ainsi que des installations spécifiques.
23 décembre 1983 : En application de la décision ministérielle n°4551 du 27 octobre 1982,
création par le Haut-Commissaire à l’énergie atomique d’un groupe de travail «risque
hydraulique» ayant pour mission de fournir à la C2S ses avis sur le risque hydraulique
encouru sur les sites et les mesures de sécurité nécessaires pour en limiter les
conséquences.
10 mai 1984 : Création du comité scientifique de la Dircen orienté vers l’examen des
programmes de radioécologie et de géophysique. Il est ouvert à des personnalités
scientifiques pluridisciplinaires issues de l’IPSN, du CNRS, d’Universités, de l’Institut
Curie, du Muséum national d’histoire naturelle, etc.
9 décembre 1986 : Un arrêté définit la nouvelle organisation du CEP modifiant les attributions du
Dircen et du Commandant supérieur des forces armées de Polynésie française (Comsup).
1 er août 1998 : dissolution de la Dircen. Le gardiennage du site passe sous la responsabilité du
Comsup.
Septembre 1998 : Création au sein de la DGA, du Département de suivi des centres
d’expérimentations nucléaires (DSCEN). Sa mission est d’assurer, en coopération avec le
CEA/DAM, le suivi radiologique et géologique du CEP après sa fermeture ainsi que la
pérennité des informations concernant le passé radiologique des sites d’expérimentations.
25 août 2000 : un arrêté définit les attributions et l’organisation du DSCEN.
X4 Annexe 4-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:16 Page 460

460 Annexe 4 : ORGANISATION ASSOCIÉE À LA RÉALISATION DES ESSAIS NUCLÉAIRES

A4.4 - DÉROULEMENT D’UN ESSAI

Cette section propose une description du déroulement des essais sous l’angle de
l’organisation permettant d’assurer la sécurité de l’ensemble des personnes résidant sur le site
d’expérimentations de Mururoa.

A4.4.1 - PÉRIODE DES ESSAIS ATMOSPHÉRIQUES

Durant les premières années du fonctionnement du CEP, le personnel travaillant sur les
atolls d’expérimentations était hébergé à bord de cinq bâtiments bases amarrés dans le lagon de
l’atoll de Mururoa. C’est en 1970 que commencèrent les travaux d’aménagement des zones
d’habitation et d’activité dans le secteur Est de l’atoll. Dès 1974, ce secteur devient l’unique lieu
de résidence des personnels présents sur les atolls d’expérimentations de Mururoa et
Fangataufa.
Lors des essais atmosphériques, tous les personnels, civils et militaires, étaient évacués
de l’atoll. Ils étaient embarqués sur les bâtiments bases et autres navires engagés pour la
campagne, ou se repliaient par avion sur la base avancée de Hao.
Seuls quelques expérimentateurs demeuraient présents sur site lors de l’essai, protégés à
l’intérieur du Poste de commande de tir (PCT), situé en zone Anémone sur l’atoll de Mururoa.

A4.4.1.1 - ÉVACUATION TEMPORAIRE DES SITES

Lorsque l’ensemble du dispositif était techniquement prêt et que les conditions


météorologiques étaient favorables au déclenchement de l’essai (cf. Chapitre II) la décision de
réaliser l’essai était prise sur la base des dernières estimations des retombées atmosphériques
sur les îles et atolls de la Polynésie (cf. Chapitre VI). Dans la soirée du jour précédant l’essai
(J-1), il était procédé au dernier stade de la préparation appelé «passage du Rubicon», avec :

• l’embarquement de l’état-major du site sur le BSL Rance et des derniers moyens terrestres
sur le TCD Ouragan ;
• l’évacuation des derniers personnels à terre, par un avion Bréguet vers Hao, à l’exception
des équipes Ballon et Amorçage qui réalisaient au dernier moment la mise en configuration
de l’engin et pouvaient être amenées à intervenir en cas d’incident, et de l’équipe
d’expérimentateurs qui restait dans le PCT durant l’essai ;
• l’appareillage de l’ensemble des bâtiments abritant le personnel du lagon de Mururoa.

Si les conditions météorologiques évoluaient défavorablement, l’essai était différé de


quelques heures, d’une journée, voire plus. Dans ce cas, l’ensemble du dispositif revenait à la
situation antérieure, dite «Pénélope», qui consistait à descendre le ballon pour remettre l’engin en
position de sécurité, dans l’attente de conditions météorologiques favorables permettant de
revenir à la situation «passage du Rubicon».
Lorsque les conditions météorologiques étaient favorables, à H–30min le Goen donnait
l’ordre au PCT de déclencher la séquence de tir et le compte à rebours automatique était
déclenché. Il pouvait être interrompu manuellement ou automatiquement, si les comptes-rendus
de l’instrumentation de mesure n’étaient pas satisfaisants.
X4 Annexe 4-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:16 Page 461

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 461

Au moment de l’essai, par mesure


de protection contre les effets
mécaniques, thermiques et radiologiques
les bateaux étaient positionnés à une
distance du point zéro dite «distance de
sécurité». Celle-ci dépendait de l’énergie
attendue de l’explosion de l’engin, du
mode d’expérimentation et des conditions
météorologiques. Des précautions étaient
prises pour parer aux effets du flash
lumineux pouvant être perçu jusqu’à 100
nautiques au niveau de la mer et 200
nautiques pour les aéronefs, sachant que
le risque de brûlure rétinienne peut
intervenir jusqu’à des distances de l’ordre
d’une vingtaine de milles nautiques. Ainsi Ouvrage de béton armé dont l’épaisseur des murs varie
par précaution, toute personne assistant de 3 à 5 mètres, le PCT pouvait abriter les expérimenta-
teurs présents sur l’atoll pendant l’essai durant plusieurs
aux essais depuis le pont des navires
jours, si nécessaire.
devait se protéger du flash lumineux en
tournant le dos au point zéro et en
plaçant un bras devant les yeux ou en
portant des lunettes anti-flash. En 1966, lors des premiers essais, seul un nombre restreint de
personnes était autorisé à assister aux expérimentations. Par la suite, le retour d’expériences
acquis par la mesure des effets des essais précédents a permis d’alléger les contraintes et les
passagers pouvaient assister à l’essai.
En 1973, cette organisation a été quelque peu modifiée par l’installation du poste de
commandement du Goen dans un blockhaus situé en secteur Est de Mururoa. Cependant, les
personnels continuaient d’être évacués avant l’essai et ne restaient sur l’atoll que les 200
personnes nécessaires à la conduite de l’essai.

A4.4.1.2 - RETOUR SUR SITE

Dans les heures qui suivaient la réalisation d’un essai, les missions de reconnaissance
radiologique menées par le Service mixte de sécurité radiologique (SMSR) déterminaient les
niveaux de radioactivité dans les principaux lieux où les personnels étaient amenés à intervenir à
court terme : lagon, ouvrages bétonnés, chantiers, zone aéroportuaire, etc. Les missions
réalisaient un survol général permettant une reconnaissance radiologique de la totalité des deux
atolls d’expérimentations. Toutefois, dans un premier temps, cette reconnaissance ne pouvant
être exhaustive, les lieux qui n’avaient pas été reconnus finement au plan radiologique étaient, par
précaution, classés zones interdites (ZI). En fonction des besoins, ces zones faisaient ensuite
l’objet de reconnaissances plus poussées et étaient reclassées en zones surveillées (ZS) ou en
zones contrôlées (ZC). Toute intervention dans une ZI se faisait en présence d’un agent de
radioprotection du SMSR. Les cartes dressées à partir de ces relevés sont présentées pour
chaque essai décrit dans l’annexe 3.
X4 Annexe 4-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:16 Page 462

462 Annexe 4 : ORGANISATION ASSOCIÉE À LA RÉALISATION DES ESSAIS NUCLÉAIRES

Le retour sur site n’était autorisé par le Goen qu’après contrôle du site par le SMSR. A
l’exception de la campagne 1966 durant laquelle les retours sur l’atoll de Mururoa ont été différés
jusqu’à plusieurs semaines à la suite des essais sur barge, les activités nautiques étaient
autorisées dans la zone Kathie peu après le retour des bateaux au mouillage et, quelques jours
après, dans la zone de l’essai. Les zones où ont eu lieu les essais sur barge, ainsi que celles
proches du rivage de la zone Colette restaient des zones contrôlées (cf. Chapitre IV).

A4.4.1.3 - SUIVI DOSIMÉTRIQUE

Pendant la période des essais atmosphériques, les modalités de distribution des films
dosimètres aux personnes présentes sur site ont évolué en fonction des procédures de
réalisation des essais afin d’assurer la meilleure efficacité du suivi radiologique. Les trois
premières années de fonctionnement du CEP, par précaution, les films dosimètres mensuels
individuels ont été distribués à la quasi-totalité du personnel. Ainsi par exemple, en 1966, lors de
la première campagne, 110 000 films ont été distribués et moins de 1% d’entre eux ont présenté
une dosimétrie non nulle. En 1968, après les essais mégatonniques, le retour d’expérience du
suivi dosimétrique a permis d’identifier et ou de confirmer précisément les fonctions et postes de
travail présentant un risque radiologique nécessitant une surveillance radiologique. Ainsi, au cours
des années suivantes, cela a conduit à ajuster le nombre de dosimètres individuels attribués
systématiquement aux personnes relevant de ces fonctions et postes et d’augmenter ceux
disponibles à l’entrée des différentes zones contrôlées pour les personnes devant y travailler
occasionnellement.

A4.4.2 - PÉRIODE DES ESSAIS SOUTERRAINS

Le passage aux essais souterrains a conduit à la modification des procédures de


radioprotection et a également eu des répercussions sur le déroulement des essais ainsi que sur
l’organisation mise en œuvre pour assurer la protection du personnel. La modification majeure a
concerné les personnels résidant sur l’atoll de Mururoa qui n’ont plus été amenés à évacuer les
sites d'expérimentations. En revanche, toutes les précautions ont été prises pour parer aux
risques hydrauliques immédiats ou différés dus à la sollicitation mécanique des atolls lors des
explosions souterraines.

A4.4.2.1 - DISPOSITIONS PARTICULIÈRES

Une fois l’essai techniquement prêt (cf. Chapitre II), le personnel chargé des installations
en cours de forage, (FGD ou post-forage), était rapatrié en secteur Est et le lagon était totalement
évacué. Des barrages routiers contrôlaient les accès aux secteurs Sud et Nord de l'atoll à partir
du secteur Est pour vérifier l'absence de personnels en dehors de ce secteur.
Un appel nominatif de toutes les personnes présentes sur le site était réalisé. Des points
de regroupement étaient prévus pour l’ensemble du personnel, à l’exception des agents
opérationnels au PC Goen et au PCT. Au milieu des années 80, le rassemblement se faisait sur
les plates-formes surélevées destinées à assurer la sécurité des personnes face au risque
hydraulique.
X4 Annexe 4-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:16 Page 463

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 463

Une mission de reconnaissance (mission Surmar) des abords des sites était déclenchée
quelques heures avant l'essai pour une ultime vérification de l'absence d'intrus dans les zones
aériennes et maritimes de sécurité. Une mission de reconnaissance des effets mécaniques et
radiologiques héliportées (mission Almée) et une mission de secours (mission Sar) prenaient l'air
à H-40min et se positionnaient à distance de sécurité du point zéro.

A4.4.2.2 - PRÉVENTION DU RISQUE HYDRAULIQUE

Les terres émergées de la couronne des atolls de Mururoa et Fangataufa se situent à


environ un mètre en moyenne au-dessus du niveau de la mer ; ces atolls sont donc très
vulnérables aux phénomènes hydrauliques qu'ils soient naturels (tsunamis, cyclones, tempêtes
tropicales) ou déclenchés par les essais nucléaires. En effet, l’onde de choc de l’explosion
pouvait déclencher l’éboulement d'éléments de la falaise récifale générant une vague océanique
sur le platier externe et une seiche dans le lagon. Ainsi, en juillet 1979, suite à l’essai Tydée un
éboulement d’une fraction du flanc d’atoll du secteur Sud a généré, en retour, une vague qui a
submergé le platier et la route, emportant et blessant gravement deux personnes.

Il a alors été décidé de compléter les moyens de sécurité pour les étendre à l'ensemble des
risques hydrauliques. Pour prévenir ces évènements, un réseau de sismomètres et de géophones
a été mis en place, permettant d'initier une alerte dans un délai court (environ 30 secondes). Afin
d’assurer la sécurité des personnels en cas de vague de hauteur anormalement élevée, plusieurs
moyens de protection ont été mis en place :

• En secteur Est, côté océan, une digue d'une hauteur de quatre mètres a été érigée pour
protéger l'ensemble des zones d’habitation. Elle a été prolongée par un mur longeant les
zones industrielles et aéroportuaires.
• Dans le même secteur, côté lagon, une digue de protection plus modeste a été construite
au niveau des habitations, les protégeant des effets de seiche, dont l’amplitude peut
atteindre un mètre.
• 22 plates-formes de plus de 100 m 2, pouvant accueillir 120 personnes et dont les structures
pouvaient résister à une submersion de 1 mètre, avec une vitesse de 10 km.h -1, assuraient
une protection complémentaire en cas de submersion des digues.
• Dans les zones isolées de l’atoll où le risque était réel, 23 plates-formes pouvant accueillir
10 personnes ont été implantées tous les 700 m le long de la route, côté lagon, ainsi qu'aux
abords de tous les chantiers. Ces installations étaient équipées d'une liaison VHF permettant
de recevoir une alerte générée par un émetteur positionné au PCT, commandé par le réseau
d'écoute sismique. Cette alerte déclenchait des signaux lumineux et sonores sur chaque
plate-forme.
• Des équipements portatifs pouvaient aussi permettre de recevoir ce signal d'alerte, donnant
au personnel un préavis de 90 secondes pour se réfugier sur les plates-formes avant
l’arrivée de la vague océanique.

Les essais souterrains initialement réalisés sous la couronne de l’atoll ont été effectués
dans les années 80 sous le lagon, vers le centre de l’atoll, afin d'atténuer de manière significative
les sollicitations mécaniques des flancs de l'atoll. La réduction des puissances des essais
effectués sous la couronne terrestre, a aussi considérablement abaissé les risques d’éboulement
des pans de falaises récifales ou de glissement de dépôts alluvionnaires.
X4 Annexe 4-07.12.06.QXD:Annexe 12/01/07 14:16 Page 464

464 Annexe 4 : ORGANISATION ASSOCIÉE À LA RÉALISATION DES ESSAIS NUCLÉAIRES

Une des plates-formes prévue pour accueillir le


personnel lors de la réalisation d’un essai
souterrain ou lors d’un événement hydraulique.

De fait, il n'a jamais été nécessaire d'utiliser les moyens de protection pendant toute la
durée d'exploitation des sites d’expérimentations. Cependant, le dispositif de surveillance géo-
mécanique a été conservé jusqu’à nous jours pour assurer la sécurité des militaires chargés du
gardiennage (cf. Chapitre VII).
X6 Glossaire_061120A:Texte 12/01/07 14:50 Page 465

Glossaire
absorption : en radioécologie, phénomène qui correspond au passage des radionucléides au travers
des membranes biologiques.
accrétion : augmentation d'une masse quelconque par addition ou accumulation.
actinides : radioéléments naturels et/ou artificiels dont le numéro atomique (nombre de protons du
noyau) est supérieur à 89.
activation : réaction nucléaire tendant à rendre radioactifs certains éléments chimiques par
bombardement par des neutrons ou d’autres particules.
activité : nombre de désintégrations par unité de temps au sein d’un radionucléide ou d’un mélange
de radionucléides. Elle est exprimée en becquerel (Bq), unité qui correspond à une
désintégration par seconde.
adsorption : en radioécologie, phénomène de surface qui conduit à un marquage externe d’un corps par
les radionucléides.
advection : terme qui se réfère à tout mouvement, vertical ou horizontal, des masses d’eau ou d’air.

aérosols : particules en suspension dans l’atmosphère.


aliquote : partie représentative d’un échantillon.
anthropogammamétrie : mesure directe du rayonnement gamma émis par le corps humain.
anticyclone : centre des hautes pressions atmosphériques.
apparaux : terme générique désignant l'ensemble des objets formant l'équipement d'un navire pour le
chargement, l'amarrage et le mouillage (treuils, palans, guindeaux, aussières, chaînes, ancres).
aragonite : carbonate de calcium métastable à température ordinaire et se transformant en général en
calcite.
bathymétrie : mesure des profondeurs d'eau et traitement des données correspondantes.
becquerel : Unité de mesure de la radioactivité, symbole Bq. Un Bq équivaut à une désintégration par
seconde. L’activité des échantillons de l’environnement est souvent exprimée en sous-multiple
comme le millibecquerel (mBq), le microbecquerel (µBq) voire le nanobecquerel (nBq) alors que
l’activité des sources radioactives s’exprime le plus souvent en multiples du becquerel :
kilobecquerel (kBq), mégabecquerel (MBq), etc.
benthique : vivant sur le fond ou à proximité du fond des mers. Le benthos est l’ensemble des organismes
vivant au fond ou à proximité du fond des mers.
biocénose : ensemble des organismes (animaux et végétaux) qui cohabitent au sein d'un même
environnement physique (biotope), où ils sont soumis à des relations d'interdépendance.
biodétritique : élément, entier ou plus souvent sous forme de fragments, d’origine animale ou végétale,
ayant été transformé ou non.
X6 Glossaire_061120A:Texte 12/01/07 14:50 Page 466

466 GLOSSAIRE

biosphère : ensemble des écosystèmes de la planète, comprenant tous les êtres vivants et les
milieux où ils vivent.
biotope : milieu, de dimension et de composition très variables, qui sert de support à une biocénose.
calcite : carbonate de calcium plus ou moins riche en magnésium, elle est dite magnésienne si
elle comprend 5 à 10 mole % de CO 3 Mg.
chaîne trophique : ensemble des relations s'établissant entre des organismes, en fonction de la façon dont
ceux-ci se nourrissent. En général, une chaîne trophique (réseau trophique) comprend des
producteurs (végétaux), des consommateurs primaires (herbivores), des consommateurs
secondaires (carnivores) et des décomposeurs (détritivores).
chlorose : disparition partielle de la chlorophylle dans un végétal entraînant le jaunissement des
plantes.
conglomérat : roche sédimentaire détritique formée pour 50% au moins de débris de roches de
dimension supérieure à 2 mm et liés par un ciment naturel.
contamination : dépôt de radionucléides sur des objets, des espaces découverts ou des personnes.
corallivore : animal se nourrissant de coraux comme certains poissons du genre Chaetodon et une
étoile de mer urticante de grande taille l’Acanthaster planci.
coriolis, force de : force d'inertie à prendre en compte pour étudier le mouvement d'un corps (liquide ou
gazeux) par rapport à un repère en rotation, par exemple par rapport à la Terre dans les
applications à la géodynamique et la géophysique.
débit de dose : quotient de l’accroissement de dose (énergie absorbée par la matière par unité de
masse) par la durée de l’intervalle de temps durant lequel il se produit. L’unité légale est
le gray par seconde de symbole Gy.s -1 (cf. Chapitre VI).
désintégration : transformation d’un noyau instable en un noyau stable ou instable au cours de laquelle
le nombre et la nature des nucléons (neutron ou protons, particules constitutives du
noyau atomique) sont modifiés (cf. Annexe 1).
détritivore : se dit d’un organisme s'alimentant en ingérant la matière organique morte laissée par les
producteurs primaires (végétaux) ou par les consommateurs.

détritique : qui résulte de la désagrégation d’une roche préexistante.


dolomie : roche sédimentaire carbonatée.
dose absorbée: quotient de l’énergie moyenne communiquée à un élément de matière exposée à un
rayonnement ionisant par la masse de cet élément. Elle s’exprime en gray (Gy). Un
gray correspond à une énergie absorbée de 1 joule par kilogramme de matière
(cf. Chapitre VI).
dose efficace : La dose efficace est la valeur de dose qui est destinée à estimer les risques dus à une
exposition en termes généraux. Elle s’exprime en sievert (Sv). Elle fournit une base pour
l’estimation de la probabilité d’apparition des effets stochastiques, comme les cancers et
les effets génétiques. La dose efficace associée à l’inhalation d’un radionucléide est la
somme des doses absorbées aux organes et tissus, chaque dose absorbée étant
pondérée par un facteur reflétant la sensibilité de l’organe, ou du tissu, aux différents
types de rayonnement (cf. Chapitre VI).
dose engagée : dose résultant de l’incorporation d’un ou de plusieurs radionucléides qui sera reçue au
niveau d’un organe ou d’un tissu au cours de la vie d’une personne (50 ans pour les
travailleurs). Elle s’exprime en sievert (Sv).(cf. Chapitre VI).
X6 Glossaire_061120A:Texte 12/01/07 14:50 Page 467

LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 467

dose équivalente : Les doses efficaces et les doses absorbées à la thyroïde sont des doses équivalentes
exprimées en sievert tenant compte de la nature des rayonnements auxquels l’individu
a été exposé (alpha, bêta, gamma, neutron). Elle s’exprime en sievert (Sv). Ces doses
sont aussi des doses engagées (cf. Chapitre VI).
dosimétrie : mesure de doses de rayonnements ionisants auxquelles un être vivant a été exposé. Elle
peut être interne lorsque les radioéléments ont été incorporés par l’être humain ou
externe si l’irradiation provient d’une source externe comme le sol, l’atmosphère, etc.
(cf. Chapitre VI).
échinodermes : embranchement contenant des animaux exclusivement marins dont la symétrie est rayonnée
(exemples les oursins, les étoiles de mer, les crinoïdes, les ophiures et les holothuries).

écosystème : c'est l'unité fonctionnelle de base en écologie qui inclut à la fois les êtres vivants et le
milieu dans lequel ils vivent avec toutes leurs interactions réciproques entre le milieu et
les organismes (écosystème = biotope + biocénose).
Ekman (couche) : couche de surface de la mer dans laquelle se fait sentir l’influence (la tension) du vent
et où se fait le transport d’Ekman.
endobionte : animal ou végétal vivant à l’intérieur d’un substrat ou d’un être vivant.

endogé : qui vit dans le sol, les sédiments ou un substrat dur.

épibionte : animal ou végétal vivant fixé ou posé sur des supports ou sur d’autres êtres vivants

épithélium : tissu animal constitué d’une ou plusieurs couches de cellules séparant les différentes
parties du corps des cavités.

espèce : unité indivisible de la Classification du monde vivant. Chaque espèce est désignée par
un double nom latin ou latinisé. Le premier nom, avec majuscule initiale désigne le
genre, et le second, en minuscule, désigne l'espèce proprement dite. Ce double nom
latin est toujours en caractères italiques dans le texte.
euphotique : qualifie la couche superficielle des océans, dans laquelle l’intensité de la lumière solaire
permet la photosynthèse.
facteur de
concentration: dans le milieu aquatique, c’est le rapport entre l’activité d’un radionucléide dans l’organisme
(ou organe, ou tissu) et l’activité de ce même radionucléide dans l’eau.
fission : scission d’un noyau lourd en deux morceaux, accompagnée d’émission de neutrons, de
rayonnements et d’un important dégagement de chaleur (cf. Annexe 1).
flot (courant de) : mouvement horizontal de l’eau correspondant, avec un décalage plus ou moins important,
à la marée montante. Les courants de flot portent généralement, selon le cas, vers la
côte ou dans la direction de propagation de l’onde marée.
fractionnement : ce sont les modifications dans la composition du mélange radioactif, qui intervient entre
l’instant de sa formation et celui du recueil d’un prélèvement de ce mélange, ce qui fait
que l’échantillon mesuré n’est pas totalement représentatif des produits formés.
genre : subdivision d'une famille biologique, se répartissant elle-même en une ou plusieurs
espèces (cf. définition d’espèce).
granulométrie : qui est relatif à la mesure des dimensions des grains d’un mélange, de la détermination
de leur forme et de leur répartition statistique.
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468 GLOSSAIRE

gray : unité de dose absorbée dans un élément de matière de masse 1 kilogramme auquel les
rayonnements ionisants communiquent de façon uniforme une énergie de 1 joule.
Symbole : Gy.
gymnosarde : poisson de la famille des scombridae (ex. maquereau) appelé thon à dents de chien.
halophile : se dit des plantes vivant sur les sols salés.
hépatopancréas : volumineuse glande digestive associée à l'estomac, en particulier chez les invertébrés
comme les mollusques.
holothurie : animal marin de la classe des échinodermes de forme allongée vivant au contact du
substrat, généralement les sédiments dont il se nourrit.
HTO (eau tritiée) : Formule chimique associant 1 atome d’hydrogène, 1 atome de tritium et 1 atome
d’oxygène. Naturellement, l’eau de mer contient 100 Bq.m -3 d’HTO.
humus : ensemble de substances présentes dans le sol, résultant de la décomposition partielle
des déchets de végétaux et en faible partie, d’animaux.
hydrologie : étude des eaux, de leur composition et de leurs propriétés. En océanographie, l’hydrologie
s’attache à la mesure de la température et de la salinité des eaux de mer en vue de
déterminer leur densité, qui est une grandeur fondamentale dans la dynamique marine.
ichtyologique : relatif aux poissons (faune des poissons).
indentation : échancrure d’une côte, d’un littoral.
ionisation : phénomène par lequel un ou plusieurs électrons sont émis (ou absorbés) par un atome
ou une molécule, lesquels sont alors transformés en ions (cf. Annexe 1).
irradiation : exposition de l’organisme ou d’une partie de celui-ci, à des rayonnements ionisants (cf.
Chapitre VI).
isotopes : formes différentes d’un même élément chimique de la table de Mendeleiev ayant des
propriétés chimiques identiques mais des propriétés physiques différentes : période,
rayonnements émis, etc. (cf. Annexe 1).
jusant (courant de) : mouvement horizontal de l’eau correspondant, avec un décalage plus ou moins important,
à la marée descendante. Les courants de jusant portent généralement, selon le cas,
vers le large ou dans la direction opposée à celle de la propagation de l’onde marée.
On dit aussi courant de reflux.
karst : région de calcaires et dolomites ayant une topographie souterraine particulière due à la
dissolution de certaines parties du sous-sol. Dans les atolls, les cavités naturelles ainsi
formées favorisent la circulation des eaux souterraines.
labile : se dit d’une contamination peu fixée sur un support.
lixiviation : en géologie, opération qui conduit par dissolution à libérer certaines substances contenues
dans un solide, par exemple par les eaux d’infiltration et de ruissellement (synonyme :
lessivage).
madréporaires : ordre des Cnidaires Anthozoaires (Hexacoralliaires) renfermant la majorité des coraux
actuels. Ces animaux coloniaux dont le squelette est constitué de calcaire sont
susceptibles de réaliser d'importantes constructions appelées à tort récifs de coraux.
matière fissile : nucléide dont le noyau peut subir la fission nucléaire par interaction avec des neutrons
(par exemple 235 U et 239 Pu).
micron : Unité de mesure égale à un millième de millimètre (10 -3 mm), ou un millionième de mètre
(10 -6 m). Symbole µ.
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 469

mille marin : unité de distance en mer égale à une minute de degré d’arc sur le méridien. Un mille
marin ou nautique est égal à 1 852 mètres.
mordache : lors des essais souterrains, c’est une traverse posée en surface, à l’entrée du puits et
qui permet la tenue du câble support du conteneur de l’engin à expérimenter.
nutriants : terme qui désigne l’ensemble des espèces chimiques nécessaires au développement
de l’activité biologique (synonymes : nutriments et sels nutritifs).
oligotrophe : qualifie un milieu, une masse d’eau, où la concentration en éléments nutritifs (nutriments)
est faible. Le développement du système trophique est alors limité par la disponibilité
des éléments nutritifs.
organe critique : organe dont l’atteinte par les rayonnements ionisants est la plus pénalisante pour
l’organisme humain.
pélagique : adjectif qui qualifie tout ce qui se passe en pleine eau sans relation avec le fond
(contraire de benthique).
période : temps nécessaire pour que l’activité d’un radionucléide en un lieu donné soit réduite de
moitié par suite de l’ensemble des processus pertinents, exemples : décroissance
radioactive, dilution, érosion, élimination biologique, etc.).
phytoplancton : ensemble des organismes du plancton appartenant au règne végétal, de taille souvent
microscopique, qui vivent en suspension dans l’eau. Les Diatomées et les Dinoflagellés
constituent la plus grande partie des organismes du phytoplancton.
plancton : ensemble des organismes, animaux et végétaux, vivant en pleine eau et à faible capacité
natatoire ne leur permettant pas de lutter efficacement contre les courants.
platier : pour l'écosystème corallien, il s'agit de l'élément principal de la partie interne ou externe
d'un récif constitué essentiellement de coraux morts et de leurs débris (zone plate).
point zéro : point où se produit l’explosion nucléaire.
produit d’activation : élément radioactif résultant de la capture d’un neutron, par exemple l’uranium
238 devient par activation le plutonium 239.
produit de fission : produit radioactif provenant de la cassure du noyau d’un élément fissile ( 235 U ou 239 Pu
par exemple).
radioactivité résiduelle : radioactivité mesurée après un temps déterminé ou après décontamination.
radiotoxicité : toxicité liée aux rayonnements émis par un élément radioactif présent dans l’organisme. Elle
n’est pas seulement liée aux caractéristiques radioactives de l’élément considéré mais dépend
également du métabolisme de cet élément dans l’organisme et, par suite de son état chimique
et physique.
scintillateur : détecteur de radioactivité constitué d’un matériau susceptible d’émettre un rayonnement
lumineux sous l’action d’un rayonnement ionisant. Par exemple, le cristal d’iodure de
sodium (NaI) est utilisé pour la détection des rayonnements γ et le fluorure de zinc pour
celle du rayonnement α.
sievert : unité de dose équivalente, dans le domaine de la radioprotection. Le sievert est égal au
joule par kilogramme. Symbole Sv.

sol brun : terme de pédologie qualifiant un sol à horizons peu différenciés plus ou moins riche en
humus.
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470 GLOSSAIRE

sol ferrallitique : terme de pédologie qualifiant un sol rouge des régions tropicales humides pauvre en silice
et caractérisé par la présence d’alumine libre et d’oxyde de fer.
sol vertique : terme de pédologie qualifiant un sol aux caractéristiques intermédiaires aux sols bruns
eutrophes quand ils sont situés sur de fortes pentes, et aux sols ferrallitiques quand ils
sont sur des pentes moins accusées. Les sols vertiques constituent l’originalité de la
couverture pédologique des îles Gambier (Mangareva). On les trouve également aux îles
Marquises (Nuku Hiva) ainsi qu’aux îles Australes (Rurutu).

spectrométrie γ : étude du rayonnement gamma à l’aide d’un spectromètre. Celui-ci est conçu de manière
à détecter les rayonnements gamma et de les classer avec précision selon leur énergie.
Cette fonction de classification (ou de tri) distingue le spectromètre des autres
instruments qui mesure l’activité totale émise dans une gamme donnée d’énergie.
stochastique : aléatoire, qui paraît lié au hasard.
stratosphérique : qui se rapporte à la stratosphère, partie de l'atmosphère située entre 12 et 50 km au-
dessus de la surface terrestre et où, dans un air très raréfié, la température se stabilise
entre -50 et - 60 °C.
subsidence : lent mouvement d’affaissement des massifs volcaniques
symbiose : association durable, sinon constante, nécessaire et à bénéfices réciproques entre deux
organismes vivants. Ces phénomènes sont assez répandus dans le milieu marin
(exemples : les algues unicellulaires zooxanthelles avec les coraux ou les bénitiers).
tangon : espar horizontal placé en dehors du navire, perpendiculaire à la coque, servant notamment
à y gréer des lignes de traîne.
taxinomique : caractérise la classification des espèces vivantes, tant végétales qu’animales
tégument : tissu le plus superficiel isolant l’intérieur des organismes de l’environnement extérieur.
tellurique : qualifie ce qui provient de la Terre.
thermocline : zone de transition entre deux masses d’eau de températures différentes et se mélangeant
difficilement.
thermoluminescence : émission d’un rayonnement par chauffage d’un corps préalablement irradié et qui
libère, par suite de son élévation de température, l’énergie emmagasinée pendant
l’irradiation. Des instruments de mesure, sur la base de ce principe, sont utilisés pour la
dosimétrie opérationnelle des personnes comme les stylos dosimètres
thermoluminescents.
tropopause : surface de séparation de la troposphère et de la stratosphère. Elle correspond à un
minimum de température.
troposphérique : qui se rapporte à la troposphère, partie de l'atmosphère située entre la surface terrestre
et une altitude de 8 km depuis les pôles à 15 km au niveau de l'Équateur. Sa partie
basse est le siège des perturbations météorologiques.
zooplancton : ensemble des organismes du plancton appartenant au règne animal. Les crustacés et
plus particulièrement les copépodes y sont très représentés.
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Sigles et acronymes

ACMS : Association des centres médico-sociaux.


AEN : Agence pour l’énergie nucléaire, organisme de coopération créé par l’OCDE, en 1957.
AIEA : Agence internationale de l’énergie atomique, créée en 1957 (abréviation anglo-saxonne : IAEA).
AMR : Atelier de montage et de réglage du conteneur de l’engin nucléaire.
Andra : Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs.
APA 1 : Appareil de prélèvement d’aérosols, d’un débit de 1 m 3 .h -1 (essais atmosphériques).
APA 100 : Appareil de prélèvement d’aérosols, d’un débit de 100 m 3 .h -1 (essais atmosphériques).
BB : Bâtiment base (BB Maine, BB Moselle, BB Maurienne etc.).
BCB : Bâtiment de contrôle biologique (BCB Marara).
BEM : Barge enregistrement mesures.
BFM : Barge de forage et de manutention.
BPV : Blockhaus prise de vues, situé à Fangataufa, en zone Empereur.
BRO : Bâtiment de recherche océanographique (BRO La Coquille).
BSL : Bâtiment de soutien logistique (BSL La Rance, BSL Rhin, BSL Garonne, BSL Tarn etc.).
C2S ou CSS : Commission de sécurité des sites d’expérimentations nucléaires (Défense/CEA).
CASA 110: Collecteur d’aérosols de surveillance atmosphérique, de 110 m 3 .h -1 (essais souterrains).
CATV : Cheminée atteignant le toit du volcanisme.
CCS : Commission consultative de sécurité.
CDAP : Centre de décontamination des aéronefs et des personnels (essais atmosphériques).
CEA : Commissariat à l’énergie atomique.
CEMA : Chef d’état-major des Armées.
CEP : Centre d’expérimentation du Pacifique.
CID : Centre d’intervention de décontamination (essais atmosphériques).
Cimagré : Barge de cimentation et de transport d’agrégats, utilisée pour l’obturation des puits de forage.
CIPR : Commission internationale de protection radiologique (appellation anglo-saxone : ICRP).
CIRC : Centre international de recherche contre le cancer.
CMA eau ou air : Concentration maximale admissible (dans l’eau de boisson ou dans l’air).
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472 SIGLES ET ACRONYMES

CMR : Cabine de mesures radiologiques.


CMS : Commission mixte de sécurité.
CNRS : Centre national de la recherche scientifique.
Cofrac : Comité français d’accréditation (pour les mesures de laboratoire).
Comsup : Commandement supérieur des forces armées dans le Pacifique.
Crapal : Collecteur des retombées des aérosols et des précipitations atmosphériques liquides.
CSEN : Commission de sûreté des engins Nucléaires.
DAM : Direction des applications militaires du CEA.
Dase : Département, analyse, surveillance, environnement (CEA/DAM).
DATR : Personnel directement affecté à des travaux sous rayonnements (PDA, DA ou catégorie A).
DE : Direction des essais du CEA/DAM.
DGA : Délégation générale pour l’armement.
Diram/Pac : Direction des applications militaires dans le Pacifique (CEA).
Dircen : Direction des centres d’expérimentations nucléaires (rattaché au ministre de la Défense).
Dirtec : Direction technique du CEA/DAM/Essais (Dirtec/Essais, Dirtec/Sites).
DMA : Dose maximale admissible (dosimétrie des personnes).
DSCEN : Département de suivi des centres d’expérimentations nucléaires (créé en 1998 à la DGA).
FDO : Forage dirigé oblique.
FGD : Forage grand diamètre.
FIR : Forage incliné rectiligne.
FIRC : Forage incliné radiochimie.
FVRC : Forage vertical radiochimie.
Goen : Groupement opérationnel des expérimentations nucléaires.
GSR : Groupe de surveillance radiologique, devenu LSR, puis Lése.
Hélinuc : Mission héliportée de mesure de rayonnement nucléaire.
Hydropol : Hygrologie en Polynésie (campagne de mesures océaniques).
Inserm : Institut national de la santé et de la recherche médicale.
IPSN : Institut de protection et de sûreté nucléaire (actuellement IRSN).
IRSN : Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (regroupement de l’IPSN et de l’OPRI).
eV : Symbole de l’électronvolt (1 eV = 1,6.10 -19 joule) et ses multiples : keV, MeV et GeV.
LAI : Limite annuelle d’incorporation (ou LIA, Limite d’incorporation annuelle).
LAM : Laboratoire d’analyses médicales du CEA.
LD : Limite de détection.
LDG : Laboratoire de détection géophysique (CEA).
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LA DIMENSION RADIOLOGIQUE DES ESSAIS NUCLÉAIRES FRANÇAIS EN POLYNÉSIE 473

Lése : Laboratoire d’étude et de surveillance de l’environnement (CEA/IPSN, Tahiti Mahina).


LRB : Laboratoire de radiobiologie (Service de santé des Armées).
LSR : Laboratoire de surveillance radiologique (devenu Lése).
Manucea : Barge de manutention du CEA, pour les essais sous lagon à Mururoa.
Manutere : En polynésien manu (oiseau) et tere (qui part au loin) : barge de manutention permettant son
transfert océanique pour les essais sous lagon à Fangataufa.
MES : Matières en suspension.

NE : Personnel non exposé (à des Travaux sous Rayonnements ionisants).


OCDE : Organisation de coopération et de développement économique (créée en 1960).
OMS : Organisation mondiale de la santé (ou WHO, World Health Organization).
OPRI : Office de protection contre les rayonnements ionisants (ex. SCPRI)
PC Goen: Poste de commandement du groupement opérationnel des essais nucléaires.
PCB : Poste de contrôle biologique.
PCR : Poste de contrôle radiologique (essais atmosphériques).
PCT : Poste de commande de tir, situé en zone Anémone.
PDA : Personnel directement affecté (aux travaux sous rayonnements ionisants ou DA, DATR,
catégorie A).
PDF : Poste de décontamination fine, des services de Santé.
PEA : Poste d’enregistrement avancé (essais atmosphériques).
PEE : Poste d’enregistrement éloigné, sur les zones Empereur et Faucon (essais atmosphériques).
PK : Point kilométrique.
PNDA : Personnel non directement affecté (aux travaux sous rayonnements ionisants, ou NDA, ou
catégorie B).
PPB : Poste de prélèvements biologiques.
PRL : Personnel de recrutement local.
PSR : Poste de surveillance radiologique (essais atmosphériques).
QMA : Quantité maximale admissible.
RAD : Mission de reconnaissance radiologique du jour J de la réalisation d’un essai.
SCPRI : Service central de protection contre les rayonnements ionisants.
SMCB : Service mixte de contrôle biologique (Défense-CEA,), créé en 1964.
SMSR : Service mixte de sécurité radiologique (Défense-CEA), créé en 1964.
SMSRB : Service mixte de sécurité radiologique et biologique de l’Homme et de l’environnement
(Défense/CEA), créé en 1994 par la fusion du SMSR et du SMCB.
SMT : Service médical du travail (CEA).
SPE : Service de protection des entreprises.
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474 SIGLES ET ACRONYMES

SPR : Service de protection radiologique des centres du CEA.


SPS : Service de protection sur les sites (CEA), intégré au SMSR en 1964.
SRCE : Service de radioanalyse, chimie et environnement du CEA/DAM/DASE (essais souterrains).
SRCI : Section de radioprotection des chantiers et des installations du SMSR (essais souterrains).
SSA : Service de santé des armées.
Stadec : Station de décontamination du SMSR à Mururoa (à Denise puis en zone industrielle Odette).
TDS : Installation de traitement des solides (échantillons de laves)
Telsite : Système de Télésurveillance du site, de surveillance mécanique automatisé.
THA : Très haute activité.
TILA : Plateforme de forages pour tirs sous lagon.
TLM : Télémesures sites et atolls proches pour les mesures de radioactivité.
TNP : Traité de non prolifération nucléaire.
TNT : Trinitrotoluène (solide cristallisé constituant d’un explosif).
TU : Temps universel (méridien de Greenwich).
Unscear : United nations scientific committee on the effects of atomic radiation.
ZC : Zone contrôlée (au plan radioactif).
ZCIT : Zone de convergence intertropicale.
ZCPS : Zone de convergence du Pacifique Sud.

ZEE : Zone Économique Exclusive.


ZI : Zone interdite.
ZS : Zone surveillée (au plan radioactif).
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59, Av. Émile Didier


05003 Gap Cedex
Tél. 04 92 53 17 00
Dépôt légal : 823
Décembre 2006
Imprimé en France
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