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Droit Pénal Spécial UNIKIN-1-1

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Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

I. OBJECTIFS DU COURS

1. Objectif général
D’une manière générale, le cours de Droit pénal spécial participe, avec les autres
branches du Droit pénal, à la formation des étudiants à cette principale branche du Droit, en
insistant sur l’analyse de chaque infraction ainsi que de la peine dont elle est sanctionnée.
Cela revêt une importance théorique dans la mesure où former les étudiants à la
connaissance des infractions relève de la formation de base d’un juriste, le Droit étant assimilé
par le commun des mortels au Droit pénal spécial : les infractions et leurs peines.
Cela revêt également une importance pratique dans la mesure où le droit pénal couvre
100% d’activités de la police judiciaire, 90% d’activités du parquet, 50% d’activités des cours
et tribunaux ainsi que du barreau et 100% d’activités des juridictions militaires.
C’est pourquoi il est regrettable que le programme national ait déchu cet enseignement,
en le faisant passer du statut d’un cours à part entière à celui de simple contenu d’un cours de
105 heures intitulé « Droit pénal et procédure pénale », ne lui réservant, par-là, que 35
heures, soit 30 heures d’enseignement théorique et cinq heures de travaux dirigés. Dans le
nouveau programme national, il n’est plus utile de réussir en Droit pénal spécial pour passer
de classe parce que l’étudiant n’est plus spécifiquement évalué à sa connaissance. Dans les
questions posées dans l’évaluation des connaissances du cours de « Droit pénal et procédure
pénale », il peut réussir aux questions de droit pénal général et de Procédure pénale, échouer
aux questions de Droit pénal spécial, et passer quand même de classe.

2. Objectifs spécifiques

De façon spécifique, l’enseignement de Droit pénal spécial vise à amener les étudiants
à connaître :
- La nomenclature, la définition et la classification des infractions définies par le
code pénal congolais, le code de la famille, la loi portant protection de l’enfant
ainsi que d’autres textes complémentaires et le traité de Rome portant statut de la
cour pénale internationale ;
- La technique d’analyse d’une infraction ;
- L’étude analytique des infractions types dans la plupart d’axiologies.
Cela est utile d’autant plus que le droit pénal spécial fait l’O.P.J. et constitue l’une des
bases de la formation d’un juriste. Il est l’instrument indispensable dans la main de l’officier
du ministère public pour restaurer l’ordre public, l’outil nécessaire pour le travail de l’avocat
et l’élément incontournable du juge.
2
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

II. ORGANISATION DE L’ENSEIGNEMENT

Alors que, dans l’ancien programme, la charge horaire du cours de Droit pénal spécial, à
la Faculté de droit, comportait 60 heures réparties en 45 heures d’enseignement théorique et
15 heures de travaux dirigés, le programme actuellement appliqué à l’Université de Kinshasa
ne lui réserve plus que 45 heures réparties en 30 heures d’enseignement théorique et 15 heures
de travaux dirigés.
Il en découle que l’on réserve, à ce cours de tronc commun, le même volume horaire
que celui des cours à option. Cela ne valorise pas cet enseignement dans la mesure où les
cours à option sont généralement des cours de complément de connaissance qu’on apprend
mieux après avoir été solidement formé. Parmi lesdits cours à option d’ailleurs figurent des
démembrements du cours de Droit pénal spécial comme le droit pénal des affaires, le droit
pénal et la procédure pénale militaires.
Le manque de valorisation de cet enseignement est tellement criant tant il est vrai que,
d’une part, le nombre d’infractions de droit commun ne fait qu’augmenter (lois relatives aux
violences sexuelles, à la protection de l’enfant, à la criminalisation de la torture etc.) et,
d’autre part, les bibliothèques qu’on pouvait suggérer aux étudiants pour compléter leur
formation n’ouvrent, en général, qu’aux heures où les mêmes étudiants sont occupés dans
l’auditoire.

III. METHODE PEDAGOGIQUE


1. Cours théorique
Le cours théorique consistera en des exposés magistraux sur les différents aspects du
contenu de l’enseignement. La compréhension de cette partie de l’enseignement sera facilitée,
d’une part, par la lecture obligatoire du code pénal, du syllabus et des principaux ouvrages de
droit pénal spécial congolais qui renferment des détails sur les infractions et, d’autre part, par
des discussions et questions qui accompagnent les exposés susvisées.

2. Les travaux dirigés

Les travaux dirigés visent à confronter la théorie aux cas pratiques et, par-là,
approfondir la connaissance de certaines infractions. Ils portent soit sur la résolution des cas
d’usage « casus », soit sur des recherches dont il faut rendre compte.

3. Lectures obligatoires
Elles portent sur le code pénal congolais, la loi portant protection de l’enfant et les
ouvrages de droit pénal spécial congolais. Ces lectures permettront à l’étudiant d’assimiler et
d’approfondir seul le cours.
Les principaux ouvrages recommandés sont :
 Georges MINEUR, Commentaire du code pénal congolais.
 Jean LESUEUR, Précis de droit pénal spécial zaïrois.
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Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

 LIKULIA BOLONGO, Droit pénal spécial zaïrois.


 Bony CHIZUNGU, Les infractions de A à Z.
 MANASI N’KUSU-KALEBA, Le code pénal congolais de l’O.P.J.

Les textes conventionnels et législatifs qu’il faut obligatoirement lire sont :

- La constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006 ;


- Le traité de Rome du 17 juillet 1998 portant statut de la cour pénale
internationale ;
- Le code pénal congolais ;
- La loi portant protection de l’enfant ;
- Le code de la famille ;
- Décret du 6 août 1922 relatif aux sanctions à appliquer aux infractions à l’égard
desquelles la loi ne détermine pas de peines particulières ;
- Ordonnance-loi n° 25-557 du 6 novembre 1959 relative aux peines à appliquer en
cas d’infraction à des mesures d’ordre général ;
- Ordonnance-loi n° 66-269 du 2 mai 1966 relative aux sanctions pénales des
règlements de police et des règlements d’exécution des lois pris par le Président de
la République.

4. Lectures facultatives
Tous les ouvrages, cours, syllabus, dictionnaires et autres publications sur Internet des droits
étrangers et congolais consacrés au droit pénal spécial sont susceptibles de compléter les
connaissances de l’étudiant et l’aider à effectuer des recherches plus personnelles. Nous citerons
particulièrement :

- Jean-Paul DOUCET, Dictionnaire de droit criminel, disponible sur


http://ledroitcriminel.free.fr.

IV. EVALUATION ET CONTROLE DES CONNAISSANCES

Evaluation et le contrôle des connaissances qui portent sur toute la matière dispensée
s’opèrent en deux étapes. D’abord, au cours de l’année académique sous forme
d’interrogations avisées et des travaux dirigés.
Ensuite, à la fin de l’année académique dans le cadre des épreuves finales.
L’interrogation comptera pour 25 % de la totalité des points. Il en sera de même des
travaux dirigés. Quant à l’examen de la première session, il sera en principe organisé pendant
la période de la session sanctionnant la fin de l’année académique et portera sur toute la
matière enseignée. Il comptera sur 50 % du total des points. L’examen et l’interrogation
seront en forme de choix multiple. L’examen à choix multiple est diffèrent de l’examen à
choix unique qu’on pose généralement aux examens d’Etat. En choix multiple, les assertions
renferment plusieurs bonnes réponses, il faut les trouver toutes. Au cas où dans les assertions
choisies il y a une mauvaise et une bonne : la mauvaise réponse annule la bonne. C’est
4
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

difficile à composer mais facile à corriger et ce système permet une appréciation égale de tous
les étudiants sans s’exposer aux erreurs dues à la fatigue.

V. CONTENU DU COURS
Nous examinerons les matieres reprises dans les lignes qui suivent.

Première partie. LES INFRACTIONS PREVUES ET PUNIES PAR LE CODE PENAL


CONGOLAIS ............................................................................................................................. 8
TITRE Ier. DES INFRACTIONS CONTRE LES PERSONNES........................................... 8
Chapitre Ier. ETENDUE DE L’INTERET PROTEGE OU CHAMP AXIOLOGIQUE
DES INFRACTIONS CONTRE LES PERSONNES......................................................... 8
Chapitre II. ETUDE ANALYTIQUE DES INFRACTIONS COURANTES CONTRE
LES PERSONNES............................................................................................................ 19
Chapitre III. APERCU DES AUTRES INFRACTIONS CONTRE LES PERSONNES 66
TITRE II. INFRACTIONS CONTRE LES PROPRIETES OU LES BIENS ...................... 79
Chapitre Ier. ETENDUE DE L’INTERET PROTEGE OU CHAMP AXIOLOGIQUE
DES INFRACTIONS CONTRE LES PROPRIETES ...................................................... 79
Chapitre II. ANALYSE DES INFRACTIONS TYPES CONTRE LES PROPRIETES OU
LES BIENS ....................................................................................................................... 82
Chapitre III. APERCU DES AUTRES INFRACTIONS CONTRE LES PROPRIETES
OU LES BIENS ................................................................................................................ 97
TITRE III. LES INFRACTIONS CONTRE LA FOI PUBLIQUE .................................... 105
Chapitre Ier. ETENDUE DE L’INTERET PROTEGE OU CHAMP AXIOLOGIQUE
DES INFRACTIONS CONTRE LA FOI PUBLIQUE .................................................. 105
Chapitre II. ANALYSE DE QUELQUES INFRACTIONS TYPES CONTRE LA FOI
PUBLIQUE ..................................................................................................................... 106
Chapitre III. APERCU DES AUTRES INFRACTIONS CONTRE LA FOI PUBLIQUE
......................................................................................................................................... 113
TITRE IV : DES INFRACTIONS CONTRE L’ORDRE PUBLIC ................................... 120
CHAPITRE Ier. ETENDUE DE LA VALEUR PROTEGEE OU CHAMPS
AXIOLOGIQUE DES INFRACTIONS CONTRE L’ORDRE PUBLIC ..................... 120
CHAPITRE II. ANALYSE DES INFRACTIONS DE CORRUPTION ........................ 122
Chapitre III. APERCU DES AUTRES INFRACTIONS CONTRE L’ORDRE PUBLIC . 133
TITRE V. INFRACTIONS CONTRE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ................................ 152
CHAPITRE Ier. ETENDUE DE LA VALEUR PROTEGEE OU CHAMPS
AXIOLOGIQUE DES INFRACTIONS CONTRE LA SECURITE PUBLIQUE .... 152
Chapitre II. APERCU DES INFRACTIONS CONTRE LA SECURITE PUBLIQUE . 153
5
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

TITRE VI. INFRACTIONS CONTRE L’ORDRE DES FAMILLES ............................... 158


Chapitre Ier. ETENDUE DE L’INTERET PROTEGE OU CHAMP AXIOLOGIQUE
DES INFRACTIONS CONTRE L’ORDRE DES FAMILLES ..................................... 158
Chapitre II. : ANALYSE DE L’INFRACTION DE VIOL ............................................ 160
Chapitre III. APERCU DES AUTRES INFRACTIONS CONTRE L’ORDRE DES
FAMILLES ..................................................................................................................... 168
TITRE VII. DES ATTEINTES AUX DROITS GARANTIS AUX PARTICULIERS ..... 181
Chapitre unique. NOMENCLATURE ET DEFINITION .............................................. 181
TITRE VIII. DES ATTEINTES À LA SÛRETÉ DE L’ÉTAT ......................................... 183
Chapitre unique. NOMENCLATURE ET DEFINITION .............................................. 184

Deuxième partie. NOMENCLATURE, CLASSIFICATION ET DEFINITION DES


INFRACTIONS PREVUES PAR LES LOIS DE DROIT PENAL PARTICULIER ........... 193
Titre Ier . LES CRIMES CONTRE LA PAIX ET LA SECURITE DE L’HUMANITE .... 193
Titre II. LES INFRACTIONS DEFINIES PAR LA CONSTITUTION DE LA
REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE DU CONGO ............................................................ 201
Titre III. LES INFRACTIONS COURANTES PREVUES PAR LE CODE DE LA
FAMILLE ........................................................................................................................... 207
Titre IV. LES INFRACTIONS PREVUES PAR LA LOI N° 09/001 DU 10 janvier 2009
PORTANT PROTECTION DE L'ENFANT ...................................................................... 209

INTRODUCTION
Section 1. DÉFINITION, SOURCES ET OBJET DU DROIT PÉNAL SPÉCIAL

§ 1. Définition
Il convient de commencer par définir le droit pénal, ensuite le droit pénal spécial, enfin
préciser le champ du droit pénal spécial avant de fixer les esprits sur le contenu de ce cours.
Le droit pénal « est la branche du droit public qui traite des infractions et des peines, et dont
l'objet essentiel est de déterminer les faits punissables et de fixer les sanctions qui doivent
leur être appliquées, compte tenu de la situation personnelle du délinquant et de la gravité
objective de l’acte, en vue de faire régner dans les relations sociales, à l’instar des autres
disciplines juridiques, mais avec plus de puissance et de contrainte, l’autorité et la liberté1 ».
Il fait partie des sciences criminelles et comprend traditionnellement le droit pénal spécial, le
droit pénal général, la procédure pénale et la pénologie.

1Voir J. GICQUEL, Droit constitutionnel et institutions, Montchrestien, Paris, 2003, p. 15, Cité par NYABIRUNGU mwene
SONGA, Traité de droit pénal général congolais, 2e éd., E.U.A, 2OO7, p.22.
6
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Le droit pénal spécial est « une discipline des sciences criminelles consacrée à l’étude
concrète et particulière de chaque incrimination précisant ses éléments constitutifs spéciaux,
les modalités de sa répression, ainsi que son régime juridique propre »2.

Il comporte la nomenclature des infractions, l'étude des éléments constitutifs et du régime


juridique de chaque infraction3.
Concrètement il décrit toutes les incriminations, fixe les modalités de leur répression et
détermine le régime juridique propre à chacune de ces incriminations.

Il en étudie les conditions préalables et les éléments constitutifs, les sanctions et les
particularités procédurales éventuelles…4
Historiquement, le droit pénal spécial précède le droit pénal général, le législateur
s'empressant à prendre position d'abord sur les infractions, à dresser la liste des actes
qui portent atteinte à l'ordre public5.

§ 2. Les sources
En vertu du principe de la légalité criminelle, les infractions et leurs peines ont pour source la
loi pénale.

C’est ainsi qu’en droit congolais les infractions et, éventuellement, leurs peines sont prévues
par :

1. La constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006 ;


2. Les conventions internationales, en l’occurrence le traité de Rome portant statut de la
cour pénale internationale et
3. Les lois internes, parmi lesquelles le code pénal congolais ; la loi portant protection de
l’enfant ; le code de la famille etc.
Une mention spéciale doit être faite au sujet des textes suivants :

4. Décret du 6 août 1922 relatif aux sanctions à appliquer aux infractions à l’égard
desquelles la loi ne détermine pas de peines particulières6 ;
5. Ordonnance-loi n° 25-557 du 6 novembre 1959 relative aux peines à appliquer en cas
d’infraction à des mesures d’ordre général7 ;

2 LIKULIA BOLONGO, Droit pénal spécial zaïrois, T.1, 2ème éd., L.G.D.J, 1985, p.11.
3 NYABIRUNGU mwene SONGA, op. cit., p. 36.
4 Michèle-Laure RASSAT, Droit pénal spécial : infractions du code pénal, 6e éd., Dalloz, Paris, 2011, p. 1.
5 NYABIRUNGU mwene SONGA, op.cit., p. 36.
6
Article 1er. Les contraventions aux décrets, ordonnances, arrêtés, règlements d’administration intérieure et de police, à
l’égard desquelles la loi ne détermine pas de peines particulières seront punies d’une servitude pénale de deux mois au
maximum et d’une amende n’excédant pas deux mille francs, ou d’une de ces peines seulement.
Article 2. Le décret du 11 août 1886 est abrogé.
7 Art. 1er. — Est puni au maximum de sept jours de servitude pénale et d’une amende de deux cents francs ou d’une de ces

peines seulement:
1o celui qui commet ou tient en public tout acte, geste ou propos de nature:
a) à marquer ou à provoquer du mépris ou de l’insoumission à l’égard des pouvoirs établis ou des actes qui constituent
l’exercice de leurs attributions à moins que le fait, le geste ou le propos constitue une infraction passible de peines plus
fortes;
7
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

6. Ordonnance-loi n° 66-269 du 2 mai 1966 relative aux sanctions pénales des


règlements de police et des règlements d’exécution des lois pris par le Président de la
République8.
Les autres sources du droit, telles que la coutume, la jurisprudence, l'équité, voire les
principes généraux du droit, si utiles dans l'interprétation des textes et la mise en œuvre du
droit favorable, n'ont aucun rôle créateur dans la détermination des infractions et des
sanctions9.

§ 3. Objet du cours
Le droit pénal spécial étudie toutes les infractions en vigueur dans la législation d’un pays
donné, rendant ainsi la tache fastidieuse à quiconque décide d’épuiser la matière10.

Le droit pénal spécial est l’étude de toutes les infractions existant dans un ordre juridique
donné. C’est un droit, par principe, hétérogène. Une telle étude d’ensemble est possible
dans les sociétés où le rôle de la collectivité publique est peu développé et où la plupart
des infractions prévues sont de droit naturel. Un interventionnisme public qu’on peut juger
à certain égard pathologique, dans la mesure où il s’exerce dans le domaine du droit
pénal, qui ne devait être que l’ultima ratio sociale, a, depuis hypertrophié la matière. Or
cette évolution ne s’est pas contentée d’augmenter le volume de la matière pénale, elle en
a aussi … affecté l’esprit en spécifiant certains groupes d’infractions11.

D’où un droit pénal commun en face de plusieurs droits pénaux particuliers.

Etre juriste, ce n’est pas connaître tous les textes. La connaissance du droit ne se réduit pas à
une bonne mémoire pour laquelle l’homme ne saurait rivaliser avec l’ordinateur. Elle suppose

b) à marquer ou à provoquer du mépris à l’égard des emblèmes ou insignes adoptés par les agents de l’autorité pour révéler
l’existence d’un mandat public ou à l’égard de documents ou objets remis en exécution des dispositions légales ou
réglementaires;
2o celui qui met en circulation ou répand un bruit sciemment mensonger susceptible d’alarmer les populations, de les
inquiéter ou de les exciter contre les agents de l’autorité publique ou contre les actes qui constituent l’exercice de leurs
attributions, à moins que ce fait ne constitue une infraction passible de peines plus fortes;
3o celui qui refuse de fournir les renseignements demandés par les agents de l’administration, les magistrats ou agents
judiciaires, les officiers de police judiciaire ou les agents de la force publique agissant pour l’exécution de leurs fonctions, ou
qui, sciemment, donne une réponse mensongère à une demande de cette nature, à moins que le refus ou le mensonge ne
forme une infraction passible de peines plus fortes;
4o celui qui, sauf cas de force majeure, ne répond pas à une convocation de service écrite et nominative émanant d’un
fonctionnaire ou d’un agent chargé d’un commandement territorial;
5o celui qui recèle ou aide à se soustraire aux recherches des personnes que l’on sait être poursuivies ou condamnées du
chef d’une infraction d’atteinte à l’ordre public, à la police de l’immigration ou aux dispositions légales ou réglementaires
concernant le droit de résidence.
Art. 2. — L’ordonnance-loi 25-250 du 20 mai 1959 est abrogée.
Art. 3. — La présente ordonnance législative entrera en vigueur le 15 décembre 1959.
8 Article 1er. Le président de la République peut sanctionner ses règlements de police de peines ne dépassant pas deux mois

de servitude pénale et deux mille francs d’amende.


Il peut sanctionner des mêmes peines les règlements qu’il prend pour assurer l’exécution des lois, à moins que la loi n’ait
elle-même déterminé les peines dont seront passibles les infractions aux règlements pris pour son exécution.
Article 2. Le décret du 6 août 1922 relatif aux règlements obligatoires de police et d’administration générale du gouverneur
général est abrogé.
Article 3. La présente ordonnance-loi est immédiatement exécutoire.
9 NYABIRUNGU mwene SONGA, Syllabus de droit pénal général, éd. D.E.S, 2005, p. 24.
10 Monsieur Bony CHIZUNGU, auteur des « infractions de A à Z » peut être cité à titre d’exemple.
11 Michèle-Laure RASSAT, op. cit., p. 53.
8
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

des méthodes appropriées fondées sur une logique, des raisonnements divers, des instruments
techniques, des classifications, des qualifications, une terminologie riche et précise, des
techniques d’expression adéquates12.

C’est pourquoi l’étude des infractions, dans le cadre de ce cours ne consistera pas en l’analyse
de toutes celles qui sont en vigueur en République Démocratique du Congo, mais plutôt
s’articulera sur la technique de traitement d’une infraction à travers certains échantillons.

Cependant, face au trou de mémoire qu’une telle démarche risquera d’imprimer dans le chef
des étudiants, une nomenclature des infractions prévues par le statut de Rome, par la
constitution, par la loi portant protection de l’enfant et par le code pénal congolais ainsi que
leur définition se présentent comme un préalable. Certaines infractions courantes prévues par
certaines lois de droit pénal particulier seront également examinées.

Les infractions restantes seront étudiées dans le cadre de sous-branches du droit pénal spécial
entre autres :
- droit pénal des affaires ;
- droit pénal du travail ;
- infractions en droit pénal international.

Première partie. LES INFRACTIONS PREVUES ET


PUNIES PAR LE CODE PENAL CONGOLAIS

TITRE Ier. DES INFRACTIONS CONTRE LES PERSONNES


Chapitre Ier. ETENDUE DE L’INTERET PROTEGE OU CHAMP
AXIOLOGIQUE DES INFRACTIONS CONTRE LES PERSONNES

Section 1. DÉFINITION DE LA PERSONNE

La lecture des infractions contre les personnes prévues et punies par le code pénal congolais
révèle que, dans ce titre, le législateur entend protéger la personne humaine (appelée
personne physique lorsque l’on veut la mettre en parallèle avec la personne morale) dans sa
vie, son intégrité physique et mentale ainsi que dans ses droits.
Pour Jean-Paul DOUCET, est personne humaine, en science criminelle, tout être conçu par
une femme ; qu’il soit ou non déclaré médicalement viable, qu’il soit ou non civilement
reconnu comme sujet de droit. Le législateur n'a pas autorité pour limiter la notion de
personne humaine (p.ex. en instituant l'esclavage) ; en toute hypothèse il doit protéger son
existence, son inviolabilité, sa liberté, sa dignité propre. Le droit français actuel se prononce,
en principe, pour la protection de la personne humaine ; il refuse toutefois sans raison valable
cette protection à l’enfant en gestation13.

12 BERGEL, J.L., Méthodologie juridique, PUF, Paris, 2001, pp. 19-20.


13 DOUCET, JP, Dictionnaire de droit criminel, v° personne humaine.
9
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Comme le législateur français, la conception du législateur congolais de la personne humaine


ne coïncide pas avec la définition générale de Doucet. Elle l’est plutôt avec celle de
VERGELY selon laquelle la personne désigne le sujet humain en tant qu’il joue un rôle et
qu’il a une fonction légitimement reconnue. La notion de personne en vigueur dans le droit
désigne le sujet humain en tant qu’il est sujet du droit et sujet de droit14.
Ainsi définie, la personne est la raison d'être du droit ; l'humanisme l'a mise à sa place : au
centre de la vie, de la société et du droit15. C’est ce qu’explique le monisme foncier du droit :
le droit est un ; il tourne autour de l’homme. La loi pénale a pour but de défendre la personne
humaine, les droits et libertés de celle-ci, la propriété, l’ordre constitutionnel...16
Aux termes de la Constitution de la R.D.C. du 18 février 2006, la personne humaine est
sacrée. L’Etat a l’obligation de la respecter et de la protéger17. Aussi lui garantit-elle liberté
individuelle ; liberté des réunions pacifiques et sans armes ; la liberté de la presse, la liberté
d’information et d’émission par la radio et la télévision, la presse écrite ou tout autre moyen
de communication ; la liberté de manifestation et lui reconnaît-elle beaucoup de droits, dont :
le droit à la vie ; à l’intégrité physique ; au libre développement de sa personnalité ; à la
liberté de pensée, de conscience et de religion ; à la liberté d’expression ; à l’information ; le
droit circuler librement sur le territoire congolais, d’y fixer sa résidence, de le quitter et d’y
revenir, au respect de sa vie privée, au secret de la correspondance, de la télécommunication
ou de toute autre forme de communication ; à un environnement sain et propice à son
épanouissement intégral.
Tous ces droits et toutes ces libertés sont protégés sous la la contrainte de la sanction pénale,
mais ils ne le sont pas tous dans le premier titre du code pénal congolais. Seuls ceux qui
suivent y sont protégés.

Section 2. INTÉRÊTS PROTÉGÉS

§1. La vie humaine


La vie est l'ensemble des fonctions qui résistent à la mort18. L'ensemble des religions et des
philosophies spiritualistes, fortement attachées à la dignité de la personne humaine,
considèrent que la vie humaine est sacrée. Aussi posent-elles en principe l'interdiction de lui
porter atteinte.19.

Des textes, aussi bien conventionnels que constitutionnels, affirment cette valeur en des
termes diversifiés :
7. Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne20.
8. La personne humaine est inviolable. Tout être humain a droit au respect de sa vie et à
l'intégrité physique et morale de sa personne: Nul ne peut être privé arbitrairement de ce
droit21.

14 VERGELY, Dictionnaire de philosophie, cité par Doucet, op. cit., v° personne humaine.
15 Malaurie, Droit civil - Les personnes, Avant-propos, cité par Doucet, op. cit., v° personne humaine.
16 Code pénal de Moldavie. Art. 2.
17 Constitution de la République Démocratique du Congo, in J.O.RDC, n° spécial, 47e année, Kinshasa, 18 février 2006.

Article 16.
18 Larousse médical.
19 DOUCET, JP, op. cit., v° Vie.
20 Article 3 de la Déclaration universelle des droits de l’homme proclamée par l’Assemblée générale des Nations Unies dans

sa résolution217A (III), le 10 décembre 1948.


10
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

9. Toute personne a droit à la vie, à l’intégrité physique ainsi qu’au libre développement
de sa personnalité dans le respect de la loi, de l’ordre public, du droit d’autrui et des
bonnes mœurs22. En aucun cas, et même lorsque l’état de siège ou l’état d’urgence aura
été proclamé conformément aux articles 87et 88 de la présente Constitution, il ne peut
être dérogé au droit à la vie23.

Les articles 16 et 61 rendent la vie sacrée en interdisant de manière péremptoire l’atteinte à


la vie. Cependant la sacralité de la vie humaine n’est plus reconnue par tous les pays du
monde. Sa protection s'affaiblit peu à peu. C’est ainsi que, dans les pays qui reconnaissent la
licéité de l'interruption volontaire de la grossesse ou de l’avortement, la vie humaine ne part
plus du jour de la conception, mais du jour de la naissance. Dans les pays qui consacrent la
peine de mort ou qui légalisent l’euthanasie, il est envisageable d'abréger la durée de la vie.

Toujours est-il que la loi qui défend de tuer ne protège pas tel ou tel individu déterminé, mais
l’humanité tout entière24. Le monde moderne affirme l'intangibilité de la vie humaine. La
protection de la vie est le but suprême ou, du moins, l'un des objectifs majeurs du droit25.

§2. L’intégrité physique et mentale


Toute personne a droit … à l’intégrité physique dans le respect de la loi, de l’ordre public, du
droit d’autrui et des bonnes mœurs. Aussi nul ne peut être soumis à un traitement cruel,
inhumain ou dégradant26.
En aucun cas, et même lorsque l’état de siège ou l’état d’urgence aura été proclamé
conformément aux articles 87et 88 de la présente Constitution, il ne peut être dérogé au
principe fondamental de l’interdiction de la torture et des peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants27.

L’article 4 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples précédemment citée
est éloquent à ce sujet.

Doucet enseigne que dans un but de protection des victimes, le droit criminel envisage
l’intégrité physique de la manière la plus large. Pour lui cette notion recouvre, non seulement
tous les éléments du corps matériel (allant jusqu’aux cheveux), mais encore son équilibre
psychique ; de sorte que le seul fait de causer un choc émotif à une personne suffit à
constituer le délit de coups et blessures. Le seul fait d’impressionner vivement la victime, au
point qu’elle en a ressenti un trouble physiologique, est une atteinte à son intégrité
corporelle28.

Il s’ensuit que, même lorsqu’il ne précise pas « intégrité physique et mentale » et qu’il s’arrête
au concept « intégrité physique » tout court, le législateur vise l’intégrité mentale. La raison à
cela est très simple, les troubles mentaux se révèlent à travers des comportements

21 Article 4 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples du 27 juin 1981, entré en vigueur 21 octobre 1986, in
OAU Doc. CAB/LEG/67/3 rev. 5, 21 I.L.M. 58, 1982.
22 Constitution de la RDC, Article 16.
23 Id., Article 61.
24 Nypels et Servais (Le Code pénal belge interprété) : cité par Doucet, op. cit., v° Vie.
25 A.Vitu (Traité de droit pénal spécial) :
26 Constitution de la RDC. Article 16, al. 2 et 4.
27 Id., article 61 ;
28 LEVASSEUR, Cours de droit pénal spécial, cité par Doucet, op. cit., v° Vie.
11
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

physiquement observables : l’irritation, la nervosité, l’agressivité, l’inadaptation, la maladie,


la faiblesse …

§3. La vie privée


La vie privée est la part de son existence qu’une personne souhaite isoler de sa vie sociale et
professionnelle ; elle est contenue dans la sphère d’intimité qui protège chacun de nous, et nos
proches, contre les agressions du monde extérieur et la curiosité malsaine d’autrui 29. Elle tend
à assurer le développement de la personnalité de chaque individu dans les relations avec les
semblables30. Elle ne se conçoit que par opposition à la vie publique, cette dernière impliquant
l’accès au regard par des tiers31.

Aux termes de l’article 12 de la Déclaration universelle de droit de l’homme : «Nul ne sera


l'objet d'immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa
correspondance, ni d'atteintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit à la
protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes»32.

De même, l’article 31 de la Constitution R.D.C dit : « Toute personne a droit au respect de sa


vie privée et au secret de la correspondance, de la télécommunication ou de toute autre forme
de communication. Il ne peut être porté atteinte à ce droit que dans les cas prévus par la
loi »33.

La vie privée s'entend de l'intimité de l'être humain en ses divers éléments afférents
notamment à sa vie familiale, à sa vie sentimentale, à son image ou à son état de santé, qui
doivent être respectés en ce qu'ils ont trait à l'aspect le plus secret et sacré de sa personne34.

Elle englobe : l’identité de la personne (l’inviolabilité du domicile ou même de sa situation,


du nom patronymique) ; les souvenirs personnels qui appartiennent au patrimoine moral
d’une personne ; la santé se traduisant par le droit pour un malade d’être en paix ; l’intimité
du foyer ; la vie conjugale et même les fiançailles ; les aventures amoureuses ; les loisirs ; le
droit à l’oubli ; la vie professionnelle ; le secret des affaires ; l’image35. Elle s’étend jusqu’à
la situation financière et aux convictions religieuses et philosophiques36.

Dans d’autres pays de l’Europe occidentale et de l’Amérique ce droit de la personnalité est


efficacement protégé, car il assure le libre développement de la personnalité humaine 37. Chez
nous ce droit n’est qu’imparfaitement protégé. La protection de la vie privée dans notre pays

29 DOUCET, J-P., op.cit. V° vie privée.


30 Cour européenne de droits de l’homme, cité par DOUCET, J-P., op.cit. V° vie privée.
31 Trib.pol. Marmande 10 janvier 1995 (Gaz.Pal. Rec. 1995 somm. 488), cité par DOUCET, J-P., op.cit. V° vie privée.
32 V° également la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, article 7 : C’est dans ce sens que la Charte des

droits fondamentaux de l’Union européenne déclare que toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de
son domicile et de ses communications.
33 Constitution de la RDC, op. cit., article 31.
34 Paris (1e ch.) 5 décembre 1997 (Gaz.Pal. 1998 I somm. 234).
35 Raymond LINDON, les droits de la personnalité, cité par LIKULIA BOLONGO, Droit pénal spécial congolais, T.1, 2ème éd.,

L.G.D.J., 1985, p.201.


36 MWEZE CHIRULWIRE NKINGI D., Internet et les enjeux éthiques, in EKAMBO J.C. et PUNGI J.L.(dir), L’Internet et la

République Démocratique du Congo : Technologies-Appropriations-Société, Actes du séminaire sur les usages de l’Internet,
organisé le 17 juillet 2009, XVe année de la Faculté de Communication Sociale de l’Université Catholique au Congo, pp. 103-
112.
37 Raymond LINDON, op. cit., loc. cit.
12
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

mérite seulement d’être assurée mais aussi renforcée. En effet, on enregistre quotidiennement
des nombreuses violations de la vie privée dans notre société38.

Sur le plan technique une observation s’impose. Tantôt elle se matérialise dans des éléments
concrets (domicile, lettres missives), et peut alors être sauvegardée par des Délits de résultat.
Tantôt elle est menacée par des procédés d’espionnage (jumelles, microphones), et donne
alors lieu à des Délits formels39.

§4. Dignité de la personne humaine


La dignité signifie le respect de soi-même.
La dignité de la personne humaine découle de ses facultés spirituelles, qui se manifestent
notamment dans sa conscience du bien et du mal. Il en résulte des devoirs : devoir de faire le
bien et de lutter contre le mal, de ne pas nuire à autrui et de rendre à chacun ce qui lui revient,
de ne pas s'avilir soi-même et de faire progresser l’humanité dans la voie de la moralité40.
La dignité correspond à l'essence de l'homme ; c'est ce qui permet de distinguer l'homme de
l'animal et des choses en général. Reconnaître dans l'autre son frère et agir en conséquence
avec respect à son égard, voilà de quoi il s'agit. La dignité suppose d'admettre un rapport
d'égalité, de voir en autrui également une personne, de ne jamais dénier en lui toute part
d'humanité41.
La Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 reprend dans son préambule qu’elle
vise la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine. Elle la vise dans ses
articles 1 ; 22 et 23 qui déclarent :
« Article premier. Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits.
Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans
un esprit de fraternité.
Article 22. Toute personne, en tant que membre de la société, a droit à la sécurité
sociale; elle est fondée à obtenir la satisfaction des droits économiques, sociaux et
culturels indispensables à sa dignité et au libre développement de sa personnalité,
grâce à l'effort national et à la coopération internationale, compte tenu de
l'organisation et des ressources de chaque pays.
Article 23. 3. Quiconque travaille a droit à une rémunération équitable et satisfaisante
lui assurant ainsi qu'à sa famille une existence conforme à la dignité humaine et
complétée, s'il y a lieu, par tous autres moyens de protection sociale.42 »
Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Toutefois, la jouissance
des droits politiques est reconnue aux seuls Congolais, sauf exceptions établies par la loi43.

En raison de son imprécision, la dignité humaine ne peut cependant susciter que des
incriminations éparses (interdiction de l’esclavage, exigence d’un hébergement décent ...)44.

§5. Considération, réputation et honneur


38 LIKULIA BOLONGO, op. cit., pp.201-202.
39 DOUCET, J-P., op.cit. V° vie privée.
40 DOUCET, J-P., op.cit. V° dignité humaine.
41 DREYER, La dignité opposée à la personne, D. 2008 n° 39, cité par Doucet, op. cit., v° dignité humaine.
42 Déclaration universelle des droits de l'homme proclamée par l’Assemblée générale des Nations Unies dans sa résolution

217A (III), le 10 décembre 1948.


43 Constitution de la R.D.C, op. cit., article 11.
44 DOUCET, J.P., op. cit., V° Dignité.
13
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Aux termes de l’article 12 de la déclaration universelle des droits de l’homme, nul ne sera
l'objet … d'atteintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit à la protection de
la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes.

1° La considération
Un fait porte atteinte à la considération quand il détruit ou diminue l’estime que chacun peut
avoir acquise par ses qualités morales dans l’état qu’il exerce45.
La considération revêt une portée plus sociale, puisqu’elle consiste dans l’estime que les tiers
accordent à celui dont ils jugent la vie privée, professionnelle ou publique46.
Le droit criminel prend le mot considération parmi l’un de ses nombreux sens ; à savoir
l’estime, le respect, la déférence, les égards dont jouit une personne physique ou morale parmi
ceux qui la connaissent.
En science criminelle, la protection de la considération s'effectue dans le cadre des textes
assurant la protection de l'intégrité morale des personnes. Elle se situe sur le terrain des
incriminations de droit pénal privé, aussi ne peut-elle en principe être mise en œuvre qu'à la
demande de l'intéressé47.

2° La réputation
La notion de réputation est plus neutre ; elle concerne ce qui se dit d’une personne, que ce
soit en bien ou en mal.

3° L’honneur
Un fait porte atteinte à l’honneur quand il est contraire, soit à la probité soit à la loyauté qui
sont les bases de l’honneur pris dans un sens général…48
L’honneur est un bien moral qui résulte pour chaque homme du sentiment personnel d’agir
conformément aux exigences de la morale et de son devoir d’état49.

La notion d’honneur ne se situe pas sur le même plan que la considération et la réputation.
Alors que la considération publique se manifeste sur le plan social, et s’appuie sur des
considérations extérieures ; l’honneur est construit et apprécié par le sujet lui-même, qui
s’efforce d’accomplir l’ensemble de ce que son sens du devoir lui prescrit. De la sorte, si les
personnes morales peuvent revendiquer une certaine considération, seules les personnes
physiques peuvent de prévaloir de l’honneur et de la considération50.

Il s’ensuit que « Les codes contemporains éprouvent manifestement quelques difficultés à


définir l'intérêt protégé dans le chapitre visant les outrages, injures et diffamations. Ils parlent
tantôt d'honneur, tantôt de considération, tantôt de réputation, tantôt d'intégrité morale, tantôt

45 GUILLOT, H., Encyclopédie Dalloz, v° Diffamation.


46 VITU, A., Traité de droit pénal spécial, cité par DOUCET, J.P., op. cit., V° Considération.
47 DOUCET, J.P., op. cit., V° Considération.
48 Guillot, H., Encyclopédie Dalloz, v° Diffamation.
49 VITU, A. ; op.cit., cité par DOUCET, J.P., op. cit., V° Considération.
50 DOUCET, J.P., op. cit., V° Considération. Cass.crim. du Luxembourg Cour 5 février 1979 (sous l’art. 276 C.pén.) : Il n’est

pas nécessaire que les paroles soient caractérisées par un mot grossier, un terme de mépris ou une invective, dès lors qu’en
réalité les expressions utilisées comportent en raison des circonstances un sens injurieux, sont susceptibles de diminuer la
considération des citoyens pour les personnes qui représentent l’autorité, ou indiquent à leur égard un manque de respect.
14
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

de dignité. De toute manière la notion d'honneur n'y apparaît que dans sa conception moderne,
édulcorée »51.

Enfin, l’honneur ne doit pas être confondu avec les honneurs, c.-à-d. la déférence avec
laquelle une personne occupant un certain rang dans la société doit être traitée sous peine
d’offense ou d’outrage.

§6. Liberté
La liberté est l’état de l’être qui agit avec pleine conscience et après réflexion52.

Si on écarte le problème philosophique du Libre arbitre, on peut dire que la liberté est la
faculté de n’agir qu’après s’être exactement informé, qu'après avoir pu assimiler les différents
aspects de la situation, et qu'après avoir pu effectuer sans entrave un choix souverain entre les
différentes possibilités ouvertes53.
Du point de vue de ses caractères, la liberté individuelle est moins un droit qu’un attribut de la
personnalité, un élément de la dignité de la personne humaine. Elle se situe sur le même plan
que la vie et l’honneur. C’est pourquoi elle est indisponible, inaliénable, imprescriptible. La
contrepartie de la liberté est la responsabilité54.
Aux termes de l’article 3 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, tout individu a
droit à … la liberté …55

La Constitution de la République Démocratique du Congo consacre son titre II aux : « droits


humains, aux libertés fondamentales et aux devoirs du citoyen et de L’Etat ». Elle fait aux
pouvoirs publics le devoir de promouvoir et d’assurer, par l’enseignement, l’éducation et la
diffusion, le respect des libertés fondamentales etc.56 et le leurs impose57 le respect. Elles sont
du domaine de la loi58 et c’est le pouvoir judiciaire qui en est le garant59. La mise en œuvre
des mécanismes de leur promotion et de leur sauvegarde relève de la compétence concurrente
du pouvoir central et des provinces60. Est formellement interdite toute révision
constitutionnelle ayant pour objet ou pour effet de réduire les droits et libertés de la personne,
ou de réduire les prérogatives des provinces et des entités territoriales décentralisées61.

51 Id., V° Honneur.
52 Cuvillier, Vocabulaire philosophique, v° Liberté.
53 DOUCET, J.P., op. cit., v° Liberté.
54 Id.
55 Déclaration universelle des droits de l’homme proclamée par l’Assemblée générale des Nations Unies dans sa

résolution217A (III), le 10 décembre 1948.


56 Constitution de la R.D.C, op. cit., article 45, al, 4.
57 Id., article 60. Le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales consacrés dans la Constitution s’impose

aux pouvoirs publics et à toute personne.


58 Ibid., article 122. Sans préjudice des autres dispositions de la présente Constitution, la loi fixe les règles concernant : a)

les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques ;…
59 Ibid., article 150, al.1. Le Pouvoir judiciaire est le garant des libertés individuelles et des droits fondamentaux des citoyens.
60 Ibid., article 203. Sans préjudice des autres dispositions de la présente Constitution, les matières suivantes sont de la

compétence concurrente du pouvoir central et des provinces : 1. la mise en œuvre des mécanismes de promotion et de
sauvegarde des droits humains et des libertés fondamentales consacrés dans la présente Constitution; …
61 Ibid., article 220, al.2.
15
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

La constitution de la R.D.C reconnaît deux catégories des libertés publiques (c.-à-d. les droits
de l’homme reconnus, définis et protégés juridiquement62.) :

- Les droits civils et politiques dont relèvent : la liberté individuelle (article 17) ; la
liberté de pensée, de conscience et de religion (article 22) ; la liberté d’expression
(article 23) ; la liberté de la presse, la liberté d’information et d’émission par la
radio et la télévision (article 24) ; la liberté des réunions pacifiques et sans armes
(article 25) ; la liberté de manifestation (article 26) et la liberté de circuler, de
résider, de quitter et de revenir (article 30) ;
- Les droits économiques, sociaux et culturels dont relèvent : la liberté d’association
(article 37) ; la liberté syndicale (article 38) ; la liberté de création intellectuelle et
artistique, et celle de la recherche scientifique et technologique (article 46).

Aux termes de l’article 17, al. 1er de la constitution précitée : « La liberté individuelle est
garantie. Elle est la règle, la détention l’exception ».

Jean-Paul DOUCET considère que la liberté individuelle a plusieurs aspects : libertés


physiques comme libertés intellectuelles ; et parmi ces dernières : libertés temporelles et libertés
spirituelles63.

1. Les libertés physiques


Les libertés physiques comportent la faculté de mouvoir son corps, de se déplacer et de fixer
sa résidence à son gré.
Aux termes de l’article 30 de la constitution de la R.D.C : « Toute personne qui se trouve sur
le territoire national a le droit d’y circuler librement, d’y fixer sa résidence, de le quitter et
d’y revenir, dans les conditions fixées par la loi.

Aucun Congolais ne peut être ni expulsé du territoire de la République, ni être contraint à


l’exil, ni être forcé à habiter hors de sa résidence habituelle ».

2. Les libertés intellectuelles


Les libertés intellectuelles se répartissent en libertés temporelles et en libertés spirituelles.
Elles s’imposent (en principe), non seulement d’un point de vue individuel, en raison de la
dignité de la personne humaine, mais encore d’un point de vue social, car c’est la
confrontation des idées qui permet le progrès.

2.1. Les libertés temporelles


Les libertés temporelles comprennent :

- La liberté d’expression : La liberté d’expression consiste en la faculté de prononcer des


discours publics ou de rendre des écrits publics.

62 Lexique des termes juridiques 2014-2015, Dalloz, 22é éd., Paris, 22014, v° libertés publiques.
63 DOUCET, J.P., op. cit., v° Liberté.
16
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Aux termes de l’article 23 de la Constitution de la R.D.C : « Toute personne a droit à la


liberté d’expression.

Ce droit implique la liberté d’exprimer ses opinions ou ses convictions, notamment par la
parole, l’écrit et l’image, sous réserve du respect de la loi, de l’ordre public et des bonnes
mœurs ».
- La liberté de presse : L’article 24, alinéas 1à 3 de la Constitution de la R.D.C dispose :
« Toute personne a droit à l’information. La liberté de la presse, la liberté d’information et
d’émission par la radio et la télévision, la presse écrite ou tout autre moyen de communication
sont garanties sous réserve du respect de l’ordre public, des bonnes mœurs et des droits
d’autrui. La loi fixe les modalités d’exercice de ces libertés ».
- La liberté d’association: L’article 37, alinéa 1er de la constitution de la R.D.C dispose :
« L’Etat garantit la liberté d’association ».

De même, l’article 38 du même texte dit : « La liberté syndicale est reconnue et garantie.
Tous les Congolais ont le droit de fonder des syndicats ou de s’y affilier librement dans les
conditions fixées par la loi ».

- La liberté de réunion et de manifestation : La liberté des réunions pacifiques et sans


armes est garantie sous réserve du respect de la loi, de l’ordre public et des bonnes mœurs64.
La liberté de manifestation est garantie65.

- La liberté politique : Le pluralisme politique est reconnu en République Démocratique


du Congo. Tout congolais jouissant de ses droits civils et politiques a le droit de créer un
parti politique ou de s’affilier à un parti de son choix66.

2.2. Les libertés spirituelles

Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Toute personne a


le droit de manifester sa religion ou ses convictions, seule ou en groupe tant en public qu’en
privé, par le culte, l’enseignement, les pratiques, l’accomplissement des rites et l’état de vie
religieuse, sous réserve du respect de la loi, de l’ordre public, des bonnes mœurs et des droits
d’autrui67.

En aucun cas, et même lorsque l’état de siège ou l’état d’urgence aura été proclamé
conformément aux articles 87 et 88de la présente Constitution, il ne peut être dérogé aux
droits et principes fondamentaux énumérés ci-après : la liberté de pensée, de conscience et de
religion68.
Les libertés spirituelles comportent :

- Liberté de pensée : La liberté de création intellectuelle et artistique, et celle de la


recherche scientifique et technologique : La liberté de pensée s’exerce dans le cadre de la
science. Elle est ouverte à tout le monde et repose sur la vérité scientifiquement établie. Elle
repose sur les idées, leur confrontation et ne fait aucune place aux dogmes ni aux croyances
ni aux superstitions.

64 Id., article 25.


65 Ibid., article 26.
66 Ibid., article 6, al. 1-2.
67 Ibid., article 22, al. 1.
68 Ibid., article 61, septième trait.
17
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Le droit à la culture, la liberté de création intellectuelle et artistique, et celle de la


recherche scientifique et technologique sont garantis sous réserve du respect de la loi, de
l’ordre public et des bonnes mœurs. Les droits d’auteur et de propriété intellectuelle sont
garantis et protégés par la loi. L’Etat tient compte, dans l’accomplissement de ses tâches, de
la diversité culturelle du pays. Il protège le patrimoine culturel national et en assure la
promotion69.

- La liberté de religion ou de culte : Science sans conscience étant ruine de l’âme, l’Etat
garantit aussi la liberté de conscience et de religion ou culte.

Par culte, il faut entendre l’hommage qu’on rend à une divinité (à Dieu par une réunion de
fidèles, suivant le rite prescrit par leur religion70), à une personne ou à une chose71 ».

La religion est l’ensemble de croyances, de dogmes et de pratique établissant le rapport de


l’homme avec le divin, le sacré72. Ainsi en est-il des cultes catholique, kimbanguiste et autres
cultes chrétiens, musulman, judaïque, …

La liberté de religion ou de culte est la liberté d’organiser et d’assister à des cérémonies


religieuses ne heurtant ni l’ordre public ni la dignité de la personne humaine. La liberté
d’expression a longtemps été refusée sur le plan religieux en vertu de l’adage ejus regio, ejus
religio, qui s’appuie sur l’idée qu’une communauté de pensée renforce les liens sociaux73.

Les libertés de conscience de culte ou de religion ont souvent été mises en échec par les
religions d’Etat, les obligations religieuses ; des infractions religieuses…

- La liberté de conscience : La conscience est la perception, la connaissance plus ou moins


claire de notre existence, du monde extérieur74.

La liberté de conscience est la liberté d’adhérer à une philosophie autorisée par la loi. A tort
ou à raison l’opinion considère certaines associations comme des mouvements philosophiques
et non des religions. C’est le cas de l’athéisme, de l’A.M.O.R.C (ancien et mystique ordre de
la rose croix) ; la franc-maçonnerie …

Un hommage rendu à un autre être que Dieu, relève de la liberté de conscience.

De tout ce qu’on vient de dire sur la liberté, il y a lieu d’ajouter que Tout individu, tout agent
de l’Etat est délié du devoir d’obéissance, lorsque l’ordre reçu constitue une atteinte
manifeste au respect des droits de l’homme et des libertés publiques et des bonnes mœurs75.

Le principe de réciprocité est aussi à la base du déni des certaines libertés en faveur des
étrangers.

En effet, aux termes de l’article 50, al. 2 de la Constitution de la R.D.C : « Sous réserve de la
réciprocité, tout étranger qui se trouve légalement sur le territoire national bénéficie des
mêmes droits et libertés que le Congolais, excepté les droits politiques. Il bénéficie de la

69 Ibid., article 46.


70 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Culte.
71 Larousse de poche 2013, v° Culte.
72 Id., v° Religion.
73 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Culte.
74 Larousse de poche 2013, v° conscience.
75 Constitution de la R.D.C, op. cit., article 28, al.1.
18
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

protection accordée aux personnes et à leurs biens dans les conditions déterminées par les
traités et les lois».

§7. La minorité d’âge


L’enfant mineur est toute personne, sans distinction de sexe, qui n’a pas encore atteint 18 ans
révolus76. C’est dans ce sens que le législateur congolais entend ce concept dans le code de la
famille. Mais contre toute attente, en 2009, dans la loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant
protection de l'enfant77 , il a refusé d’utiliser ce concept non-équivoque employé par le
constituant congolais en 2006, lui préférant le terme équivoque « d’enfant ».
Ainsi aux termes de l’article 2 de ladite loi : « Au sens de la présente loi, il faut entendre par:
1. enfant: toute personne âgée de moins de dix-huit ans, ».

Certes des conventions internationales utilisent le concept enfant, mais cela n’est pas
suffisant pour justifier l’utilisation de ce concept par le législateur congolais pour deux
raisons :

1° il avait déjà attribué à ce terme un autre sens dans le code de la famille. En effet, aux
termes de l’article 699 de ce code :

« Aux termes de la présente loi, on entend par père ou mère la personne liée par un lien de
paternité ou de maternité à l’individu désigné par les termes fils, fille ou enfant.
On entend par fils, fille ou enfant la personne liée par un lien de filiation au père ou à la
mère.
Considérés dans leur rapport entre eux, ces fils, fille ou enfant sont appelés frère et sœur. 78» ;

2° cette définition n’est pas conforme à la constitution.

Les pouvoirs publics ont l’obligation de protéger la jeunesse contre toute atteinte à sa santé,
à son éducation et à son développement intégral79. Ce vœu est accompli par plusieurs lois
dont principalement le code pénal congolais et la loi portant protection de l’enfant.

Aux termes de l’article 95 de la L.P.P.E : « L'enfant âgé de moins de 14 ans bénéficie, en


matière pénale, d'une présomption irréfragable d'irresponsabilité ». Ce texte affirme une
contre-vérité dans la mesure où la présomption irréfragable d’irresponsabilité pénale est
reconnue à tout enfant mineur. Imiter le législateur français de cette façon, c’est commettre
une erreur parce que le législateur français sanctionne des peines certains enfants, tandis que
le législateur congolais applique des mesures de protection à toutes les catégories d’enfants,
des mesures sociales ou judiciaires. La distinction des enfants en conflit avec la loi avec les
autres enfants en utilisant ce concept n’est pas approprié.

Les pouvoirs publics ont l’obligation d’assurer une protection aux enfants en situation
difficile et de déférer devant la justice les auteurs et les complices des actes de violence à
l’égard des enfants80.

§8. La sureté individuelle

76 Id., article 41, al. 1.


77 Loi N° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l'enfant, in J.O.R.D.C, n° spécial, 50e année, 25/5/2009.
78 Code de la famille.
79 Ibid., article 42.
80 Constitution de la R.D.C, op. cit., article 41, al.6.
19
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles
de l’homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression81.

Si les deux notions de sécurité et de sûreté sont très proches l’une de l’autre, elles diffèrent
néanmoins quelque peu. On parle d’un sentiment de sécurité pour dire qu’une personne se
sent à l’abri du danger. On parle d’une situation de sûreté pour dire que tout a été fait pour
prévenir les divers dangers envisageables82.

En vue de prévenir ces divers dangers, les législateurs modernes incriminent les risques que
quelqu’un peut faire courir à la vie, à l’intégrité, à la santé ; à la qualité de la vie voire à
d’autres valeurs. D’où les infractions de mise en danger, de mise en péril ou encore les délits
(infractions) obstacles.

La « mise en danger d’autrui » résulte d'un acte par lequel, en violation d’une règle de
prudence et de sécurité, une personne met délibérément en péril la vie de son prochain, sans
pour autant lui porter effectivement atteinte. Commet ce délit celui qui, par jeu, roule à
contre-sens sur une autoroute83.

La mise en danger est punie à titre autonome, en l’absence de résultat ; pour ce délit, le
résultat est seulement une éventualité : seule sa probabilité importe. C’est la répression d’un
état dangereux, équivalant à une sorte de tentative d’homicide par imprudence84.

Chapitre II. ETUDE ANALYTIQUE DES INFRACTIONS COURANTES


CONTRE LES PERSONNES

INTRODUCTION
Analyser une infraction n’est pas une tâche facile. On croirait que les infractions déjà
analysées l’ont été naturellement. Ce n’est pas le cas. Ceux qui l’ont fait ont eu recours à des
techniques diverses comme celle que je propose.

A. TECHNIQUE D’ANALYSE D’UNE INFRACTION

L’étude analytique d’une infraction consiste à dégager et à exposer les composantes de celle-
ci relatives à l’incrimination, à la sanction, au délinquant, à la victime et éventuellement à
l’enquête.
Au sujet des éléments constitutifs de l’infraction, il y a lieu d’opérer certaines différences.
En premier lieu, il faut distinguer les éléments permanents des éléments occasionnels de
l’infraction. En effet, « les éléments permanents sont les "actions nuisibles à la société" que
les incriminations pénales édictent dans le but de les réprimer, de sorte qu’un acte qui ne
trouble pas la paix sociale ne saurait relever que des juges civils ; tel est le cas par exemple
lorsqu'un acte est accompli en état de Nécessité85 ».

81 Déclaration des droits de l’homme de 1789 (France), article 2.


82 DOUCET, v° Sûreté.
83 Id., v° Mise en danger
84 Larguier, J., Droit pénal spécial ?
85 Lire utilement DOUCET J-P, op. cit., V° Eléments constitutifs de l’infraction.
20
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Quant aux éléments occasionnels, DOUCET relève que


si les principales infractions se suffisent d’un élément matériel et d’un élément moral,
d’autres comportent un ou plusieurs éléments :
- Parfois l’acte délictueux ne se conçoit qu’à partir d’une situation particulière, appelée
condition préalable, (p.ex. l’Omission de porter secours suppose qu’une personne se
trouve en danger) ;
- Parfois l’acte délictueux revêt une moindre gravité qu’à l’ordinaire, en raison d’une
excuse atténuante intégrée à l’incrimination ;
- Parfois cet acte présente plus de gravité qu’à l’ordinaire, en raison d’une
circonstance aggravante intégrée à l’incrimination86.

En deuxième lieu, il faut distinguer les éléments matériels des éléments intellectuels.
L’élément matériel c’est le corpus delicti ou actus reus et l’élément moral c’est la faute, la
mens rea : la tournure d’esprit socialement répréhensible qui a animé l’agent lors du passage à
l’acte.
« Une infraction pénale est constituée par un acte humain envisagé sous deux aspects.
Un aspect matériel : le trouble causé concrètement à l’ordre social (ce qui légitime
l’intervention du législateur, et permet d’asseoir concrètement des poursuites
judiciaires). Un aspect spirituel, psychologique ou moral : une faute qui met en jeu la
responsabilité subjective de l’agent »87.
« Les infractions sont généralement des actes qui produisent un effet dommageable
dans l’ordre social… La seconde caractéristique des infractions est qu’il s’agit d’actes
qui sont moralement mauvais »88.
En principe, tous ces éléments se dégagent de l’élément légal de l’infraction : la loi violée. En
vue de bien les dégager, il faut utiliser le schéma ci-dessus. Le tableau dit « magique » permet
d’y arriver aisément.
Signalons également, dans la suite de jean Paul DOUCET, que, par rapport à la valeur
protégée, l’acte définit comme infraction peut être tantot un acte principal qui porte atteinte à
ladite valeur, tantôt un acte accessoire consistant soit en un acte antérieur, concomitant ou
postérieur à l’acte principal.
B. CANEVAS DE L’ETUDE D’UNE INFRACTION

1. Elément légal ;
2. Dénomination ;
3. Définition ;
4. Elément axiologique ;
5. Eléments matériels ;
6. Eléments intellectuels ;
7. Sanctions ou régime répressif :
a) Peines principales ;
b) Peines complémentaires obligatoires ou facultatives ;
c) Circonstances aggravantes ;

86 Id.
87 Ibid.
88 Smith & Hogan (Criminal law):
21
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

d) Excuses légales ;
8. Délinquant ;
9. Victime ;
10. Quelques points d’attention.

C. TABLEAU DE TRAITEMENT DE L’INFRACTION (dit Tableau magique)

Elément légal Article 79. Quiconque a soustrait frauduleusement une chose


qui ne lui appartient pas est coupable de vol.
Article 80. Les vols commis sans violences ni menaces sont
punis d’une servitude pénale de cinq ans au maximum et d’une
amende de vingt-cinq à mille francs, ou d’une de ces peines
Eléments constitutifs seulement.
Dénomination est coupable de vol. Les vols commis sans violences ni
menaces : VOL SIMPLE
Définition Le vol est la soustraction frauduleuse d’un bien meuble
appartenant à autrui.
Elément axiologique ou La propriété
valeur protégée
Eléments matériels 1. a soustrait : acte matériel de soustraction
2. une chose : objet du vol
Eléments intellectuels ou 1. frauduleusement : intention frauduleuse
élément moral 2. qui ne lui appartient pas : propriété d’autrui sur la chose
(connaissance de cette propriété)
Sanction et circonstances Peines principales SP : 5ans A : 25 à 1000fc
aggravantes Peines complémentaires RAS (rien à signaler)
Circonstances aggravantes RAS
Excuses légales RAS
Délinquant Quiconque, n’importe quelle personne physique

Victime Non précisée, donc n’importe quelle personne physique ou


morale
Quelques points de RAS
curiosité

Section Ière. LES ATTEINTES A LA VIE


Outre les homicides qualifiés d’infractions politiques et d’atteintes à l’humanité, les atteintes à
la vie peuvent être regroupées en homicides volontaires ; homicides préterintentionnels et
homicides involontaires.

Sous-section Ière. LES HOMICIDES VOLONTAIRES


INTRODUCTION
Aux termes de l’article 43 précité : « Sont qualifiés volontaires, l’homicide commis et les
lésions causées avec le dessein d’attenter à la personne d’un individu déterminé ou de celui
qui sera trouvé ou rencontré, quand même ce dessein serait dépendant de quelque
22
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

circonstance ou de quelque condition et lors même que l’auteur se serait trompé dans la
personne de celui qui a été victime de l’attentat »89.

1. Définition
Par homicide, il faut entendre le fait de donner la mort à autrui90. Dans le vocabulaire
juridique, l’homicide revêt plusieurs variétés eu égard à la victime ou à l’auteur. DOUCET91
reprend les vocables suivants :
- Parricide, lorsque l’homicide est commis sur un père naturel ou un père adoptif, voire
sur un aïeul, par son enfant ou son petit-enfant ;
- Matricide : lorsque l’homicide est commis Meurtre de sa propre mère ;
- Fratricide, lorsque l’homicide est commis sur un frère par son propre frère, ou sur un
frère par sa propre sœur. Le fratricide est une variété aggravée de l’Homicide ;
- Sororicide, lorsque l’homicide est commis sur une sœur par son propre frère ou par sa
propre sœur. Le sororicide est aussi une variété aggravée de l’homicide ;
- Infanticide : Au sens large, c’est le fait de tuer un enfant, plus précisément un mineur
n'ayant pas atteint un certain âge (fixé par le législateur en fonction des circonstances
locales).

Au sens étroit, et plus précis, l’infanticide est l'homicide d'un tout nouveau-né commis
par sa mère, dans un temps où elle se trouve encore sous le choc psychologique causé
par l’accouchement et la séparation qu'il entraîne.
L'infanticide, au sens strict, ne constitue pas un crime autonome. Ce terme vise la
situation particulière de la mère venant d'accoucher : le législateur (français) considère
qu'elle se trouve dans un état d'affaiblissement qui interdit de la tenir pour pleinement
responsable de son acte ; en conséquence il la fait bénéficier de plein droit d'une
excuse atténuante personnelle. Tel était le cas dans le Code pénal de 1810 ;
- Régicide, lorsque l’homicide est commis sur le Prince de l’État (Roi, Président…). Ce
crime revêt une gravité exceptionnelle, du fait qu’il peut déclencher une guerre civile
avec son cortège de calamités ; c’est pourquoi il est ordinairement considéré comme
un délit formel, un attentat punissable dès le commencement d’exécution
indépendamment de son résultat. Dans notre Ancien droit (français) on parlait de
crime de lèse -Majesté humaine au premier degré. Le régicide est la variété de
l’homicide, et même du parricide.
- Déicide, lorsque l’homicide est commis est le meurtre d'une personne tenue pour un
Dieu. Le même terme désigne celui qui se rend coupable d'un tel acte.
- Uxoricide, consiste dans le meurtre du conjoint, c.-à-d., le meurtre de sa femme par le
mari, ou de son mari par la femme. Le jour même où Agamemnon revient à Mycènes,
victorieux de la ville de Troie, il fut assassiné par sa femme Clytemnestre assistée de
son amant Égisthe.

2. La personnalité humaine de la victime : élément commun et préalable à


l’homicide (et aux lésions corporelles)  Garçon enseigne que les éléments constitutifs du

89Code pénal congolais, art. 43.


90Lexique des termes juridiques, Dalloz, 19ème édition, 2012, V° Homicide.
91DOUCET, J-P., Dictionnaire de droit criminel, disp oni bl e sur http :// le dro itcr im ine l. free .f r/di ct ion na ire. htm ,

con su lté le 11 /01 /2 011 , V° chaque mot.


23
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

meurtre sont au nombre de trois : un acte matériel de nature à donner la mort, la personnalité
humaine de la victime, l’intention chez l’auteur de cet acte matériel de donner la mort92.
En réalité la personnalité humaine de la victime est une condition préalable à toute atteinte
à la vie et à l’intégrité physique. C’est ce que révèle le concept « avec le dessein d’attenter à
la personne d’un individu déterminé», comme pour préciser que tuer un animal ou une autre
créature n’est pas un homicide autant que les frapper ou les blesser ne constituent pas des
coups et blessures volontaires.
Toutes les variétés d’homicide ci-haut définies sont réprimées sur pied des infractions
d’homicides volontaires ou involontaires, sinon alors des infractions politiques qui protègent
certaines autorités telles que les atteintes à la vie et à l’intégrité physique du chef de l’Etat.
Trois types d’homicide volontaire sont considérés comme infractions de droit commun. Il
s’agit du meurtre, de l’assassinat et de l’empoisonnement. Cela ne veut pas dire qu’en dehors
de ces infractions il n’y a pas d’autres qui répriment l’homicide.

§1. LE MEURTRE
A. NOTIONS

La loi définit le meurtre comme l’homicide commis avec l’intention de donner la mort93. La
doctrine clarifie cette définition.

Ainsi, le meurtre se définit comme un acte humain, voulu comme un acte de violence envers
autrui, qui a été perpétré avec l’intention de causer sa mort et qui a produit ce résultat94.

Le meurtre consiste dans le fait de donner la mort à un être humain, accompli d’autorité
privée, par quelqu’un qui volontairement recherche cette mort, comme fin ou comme moyen,
en dehors du cas de légitime défense contre une violence physique actuelle95.
B. ELEMENT LEGAL ET ELEMENT AXIOLOGIQUE

1. Elément légal
L’élément légal d’une infraction c’est la loi violée c.-à-d. les dispositions légales enfreintes
par l’agent. Celui du meurtre est sans doute constitué des articles 43, 44 et 45 du C.P.
Aux termes de l’article 43 précité : « Sont qualifiés volontaires, l’homicide commis et les
lésions causées avec le dessein d’attenter à la personne d’un individu déterminé ou de celui
qui sera trouvé ou rencontré, quand même ce dessein serait dépendant de quelque
circonstance ou de quelque condition et lors même que l’auteur se serait trompé dans la
personne de celui qui a été victime de l’attentat »96.
Cette disposition est commune aux homicides et aux lésions corporelles volontaires et
comprend des éléments qui interviennent soit dans la compréhension de la définition de
l’infraction, soit dans l’établissement de la responsabilité telle que l’error personnae ou
l’aberratio ictus.

92 Garçon, Code pénal annoté, cité par Doucet J.P., op. cit., v° Meurtre) :
93 Code pénal congolais, JORDC, 47e année, n° spécial, 05/10/2006, articles 44-45, al. 1.
94 DOUCET, op. cit , v° Meurtre.
95 Vittrant (Théologie morale) : cité par DOUCET, v° Meurtre.
96 Code pénal congolais, art. 43.
24
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Les articles 44-45 du C.P disposent: L’homicide commis avec l’intention de donner la mort
est qualifié meurtre.
Le meurtre commis avec préméditation est qualifié d’assassinat.
Ils sont punis de mort».

Le concours de plusieurs articles pour constituer l’élément légal d’une seule infraction appelle
un éclairage sur la technique légistique et la technique de qualification des faits.

En effet, toutes les dispositions portées par les articles d’un texte ou de plusieurs textes
différents, mais qui concourent à l’établissement des éléments de l’infraction, de sa définition
et de sa sanction doivent être retenues au titre d’élément légal de celle-ci, à partir du moment
où, sans le recours à l’une de ces dispositions, l’infraction ne peut être cristallisée, comprise
ou sanctionnée. C’est ainsi que le meurtre a pour élément légal les articles 43 et 44-45 du
code pénal congolais –C.P.- dont les uns prévoient l’incrimination tandis que l’autre la
sanction.

D’aucuns ont pris l’habitude de reprendre « articles 43 et 44-45 du C.P.LII » en vue de


préciser que lesdits articles se trouvent dans le deuxième livre du code pénal. Cette façon de
citer les articles empruntée au code civil congolais n’est pas nécessaire. En fait, le code civil
congolais comprenait trois livres : le « Livre Ier » sur les personnes qui est actuellement
abrogé par le code de la famille97 (sauf bien sûr le « Titre II » sur les étrangers, soit de l’article
7 à 15 du C.C.C/LI98 ) ; le « Livre II » sur les biens, remplacé par la loi n° 73-021 du 20 juillet
1973 dite foncière99 et le « Livre III » sur les obligations, qui demeure en vigueur. Ces livres
comprenaient chacun sa propre numérotation dans un ordre croissant, soit de l’article 1er à
l’article x, de sorte que chacun d’eux avait ses articles 1 ; 2 ; 10 ; 25 etc. En conséquence,
citer l’article 30 du code civil congolais nécessitait de préciser le livre, parce que ce code avait
en réalité trois articles 30. D’où article 30 du C.C.C/LI, article 30 du C.C.C/LII et article 30
du C.C.C/LIII.
Cette précision n’est pas utile pour le code pénal congolais parce que ses deux livres
comportent la même numérotation dans un ordre croissant : le Livre Ier renferme les articles
compris entre l’article 1er et l’article 42ter, tandis que le Livre II renferme les articles
compris entre l’article 43 et l’article 220. Par conséquent, même si on ne précise pas qu’on
cite l’article 21 du C.P.L.Ier, c’est connu que cet article du code pénal ne se trouve que dans le
premier livre. Il en est de même des articles contenus dans le livre II.
Si nous utilisons l’expression selon laquelle « le Livre Ier renferme les articles compris entre
l’article 1er et l’article 42ter », c’est parce que ce livre compte plus de 42 articles avec les
articles bis, ter, quater … ; a, b, c …
En fait, cette numérotation répond aux exigences légistiques. Les modifications d’un texte ne
doivent pas avoir pour effet de détruire la structure numérique originelle de celui-ci. Ainsi,
qu’on ajoute ou qu’on abroge les articles, le texte doit conserver sa structure numérique
d’antan. Les législateurs recourent alors aux techniques suivantes :

97 LOI 87-010 du 1er août 1987 portant Code de la famille, in J.O.Z., no spécial, 1er août 1987.
98 DÉCRET du 4 mai 1895 portant Code civil – Des personnes, in B.O., 1895.
99 LOI 73-021 du 20 juillet 1973 portant régime général des biens, régime foncier et immobilier et régime des sûretés, in

J.O.Z., no 3, 1er février 1974.


25
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

- Lorsqu’on n’a ajouté que cinq articles dans la suite de l’article 10, par exemple, on
écrira : article 10bis ; article 10ter ; article 10quater ; article 10quinquies ; article
10sexies ;
- Lorsqu’on a ajouté plus on écrira : article 10a ; article 10b ; article 10d ; article 10e ;
article 10f ; article 10g ; article 10h ; article 10i ; article 10j ; article 10k ; …
- Lorsqu’on a ajouté plus que le nombre des lettres de l’alphabet on écrira : article 10 I ;
article 10 II ; article 10 III ; article 10 IV ; article 10 V … ;
- Lorsqu’on a abrogé un article on écrira : article 10- abrogé par la loi x ;
- Lorsqu’on a fusionné les articles 10 et 11 on écrira : articles 10-11.

La fusion des articles 44-45 du C.P a été faite par l’O.-L n° 68-193 du 3 mai 1968 (art. 1er) qui
a introduit la peine de mort comme instrument de répression du meurtre. Avant cette O-L le
meurtre était prévu et puni de servitude pénale à perpétuité par l’article 44. On l’appelait
alors : « meurtre simple ». L’assassinat était prévu et puni de mort par l’article 45. On
l’appelait alors : « meurtre aggravé ». C’est dans ce sens qu’il faut comprendre ce qui est écrit
dans les ouvrages publiés avant 1968.

2. Elément axiologique
Sur le plan axiologique, le meurtre protège la personne dans sa vie, la vie d’un particulier et
non d’une institution ou d’une autorité comme (le Président de la république) ou d’un autre
être vivant. L’homicide d’un Président de la république porte le nom d’attentat contre le chef
de l’Etat et est prévu et puni pas l’article 193, al.1 du C.P100.il s’agit donc d’une infraction
politique, tandis que les autres infractions homicides prévues par le code pénal sont des
infractions de droit commun.
C. ELEMENTS MATERIELS

Deux éléments matériels sont requis : un acte de nature à donner la mort et qui l’a
effectivement causé et la personnalité humaine de la victime.

1. Un acte de nature à donner la mort et qui l’a effectivement causée

Le meurtre comporte un seul acte matériel : Un acte de nature à donner la mort et qui
l’a effectivement causée. Il s’agit « d’un acte quelconque de nature à causer la mort, et l'ayant
effectivement et matériellement entraînée101 ».

Cet acte doit remplir deux conditions : Il doit être positif et matériel.

a) Acte positif. L’élément matériel du meurtre doit être un acte de commission ; un


acte de violence physique ayant entraîné la mort 102. Il exclut donc les abstentions.
En effet, on estime que le meurtre ne peut pas se consommer, en principe par
abstention, omission ou inaction. Ainsi, un mari qui cause du chagrin à sa femme
n’est pas coupable de meurtre103.

100 Article 193. L'attentat contre la vie ou contre la personne du Chef de l'Etat sera puni de mort.
101 LESUEUR, J., Précis de droit pénal spécial, Kinshasa, 1967.
102 JACOPIN, Sylvain, Droit pénal spécial, Hachette supérieur, 2010, p. 21.
103 LIKULIA BOLONGO, op. cit., p. 49.
26
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

b) Acte matériel. L’acte positif susvisé ne doit pas être virtuel ou immatériel, il doit
être matériel c.-à-d. visible et palpable. Cet acte peut revêtir une forme
quelconque, les moyens le plus souvent employés étant les coups de pistolet ou de
fusil, coups de couteau ou de poignard, coups de hache, coups de marteau,
strangulation, noyade, etc104.

Font néanmoins exceptions les homicides commis par le poison ou par le feu qui sont
des infractions distinctes.

L’acte est unique en principe, mais il peut être constitué d’une série de gestes
échelonnés dans le temps105.

c) Problématique de la consommation du meurtre par une omission, une


inaction ou une abstention

Un point de droit est particulièrement discuté : lorsque le législateur a défini une


infraction sur la base d'un acte volontaire de commission, un tribunal peut-il condamner
l'auteur d'une abstention volontaire ayant abouti au même résultat ? Il semble que la réponse
varie selon le cas d'espèce et soit abandonnée à la prudence des juges106.

La consommation du meurtre par une omission, une inaction ou une abstention résulte
de la théorie de l’infraction de commission par omission admise en droits allemand107,
anglais108, grec109, italien110, japonais111, espagnol112 et polonais113 comme le remarque Jean
PRADEL114. Il remarque également que : « Le concept de commission par omission se

104 LESUEUR, J., op. cit.,


105 JACOPIN, S., Droit pénal spécial, Hachette supérieur, p. 21.
106 DOUCET ????????????????????????????? v° Abstention.
107 Article 223-b du Code pénal allemand de 1975 : « celui qui tourmente ou maltraite cruellement des personnes de moins

de dix-huit ans... confiées à ses soins... ou celui qui, en négligeant par malveillance son devoir de veiller sur elles porte
préjudice à leur santé... ». Article 13, alinéa 1 du même code : « celui qui s'abstient d'éviter un résultat constituant un élément
de l'infraction n'est punissable en vertu de la présente loi que s'il est légalement tenu d'éviter la réalisation de ce résultat, et si
l'omission équivaut à la réalisation active d'un élément constitutif légal de cet acte ».
108 La jurisprudence anglaise assimile l'omission à la commission. Dans un arrêt classique, la cour d'appel a considéré que le

père qui ferme les yeux devant les mauvais traitements infligés par son épouse à leur enfant commun commet un murder3.
109 Le Code pénal grec de 1951 dispose que « si la loi exige un certain résultat pour que l'infraction existe, le fait d'avoir omis

d'éviter ce résultat [...] sera considéré comme sa cause active, à condition que l'agent soit tenu d'une obligation légale
spéciale d'éviter la survenance dudit résultat » (art. 15).
110 On peut encore citer l'article 40 alinéa 2 CP italien : « ne pas empêcher un événement que l'on a l'obligation juridique

d'empêcher, équivaut à l'occasionner »\ Une formule proche se retrouve à l'article 11 du 'code pénal japonais de 1948.
111 Article 11 du 'code pénal japonais de 1948.
112 On évoquera encore l'article 11 du Code pénal espagnol de 1995 ainsi rédigé : « Les délits ou les contraventions dont

l'existence dépend de l'obtention d'un certain résultat ne pourront être considérés comme commis par une omission que si,
d'après le sens du texte de la loi, le fait de n'avoir pu éviter ce résultat, alors que l'agent violait ainsi un devoir juridique précis qui
s'imposait à lui, équivaut à l'avoir causé. À cet effet, l'omission équivaudra à l'action :
a) S'il existe en vertu de la loi ou d'un contrat une obligation d'agir spécifiée ;
b) Si la personne qui s'abstient a créé par une action ou une omission antérieure un risque compromettant le bien
juridiquement protégé »2.
113 Article 2 du Code pénal polonais de 1997 indique que « la responsabilité pénale d'une infraction matérielle commise par

omission n'est encourue que par celui qui a un devoir spécial imposé par la loi d'en prévenir l'effet ».
114 Jean PRADEL, Droit pénal comparé, 3é éd., Dalloz, Paris, 2008, nos 48 et 49.
27
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

retrouve également en Suisse où, dans le silence de la loi, doctrine et jurisprudence lui sont
favorables »115.

La théorie de l’infraction de commission par omission (omission impropre en droit


allemand) divise la doctrine dans d’autres pays de droit romaniste. Le droit pénal français la
rejette116. La question semble controversée en droit pénal congolais.

La partie de la doctrine qui est favorable à la consommation du meurtre par une


omission (commission par omission) développe plusieurs arguments117.

VIDAL et MAGNOL vont dans le sens contraire118.

La doctrine opposée à la théorie de l’infraction de commission par omission enseigne


autres choses119.

115 Id.
116 Le droit français rejette par principe les délits de commission par omission au double motif que la causalité entre omission et
résultat n'est pas toujours certaine et surtout que la loi ne les a pas prévus. La jurisprudence est formelle (Poitiers, 20 novembre
1901, affaire de La Séquestrée de Poitiers, D. 1902-11-81, note Le Poittevin, S. 1902-11-305, note J. Hémard; Crim. 29 janvier
1956, DH 1936, 134, RSC 1936, 226, obs. Magnol. Cependant, la jurisprudence récente évolue, la chambre criminelle
assimilant certaines omissions à des comportements actifs punissables, Crim. 27 octobre 1971. Gaz. Pal 1972, Somm. 2
(douanier tolérant des actes de contrebande de la part de tiers et pouvant être réprimé de complicité par abstention d'infraction à la
législation douanière) ; Crim. 26 novembre 1980, BuH. crim. n° 322 (chef d'entreprise qui, en omettant
de fournir des renseignements à l'inspecteur du travail, se rend coupable d'obstacle à l'exercice des fonctions de ce dernier, add. Ch.
Lazerges, obs. RSC 1988, p. 546).) et sur le plan législatif, la consécration de cette notion est tout à fait exceptionnelle (Ainsi,
l'article 221-6 du Code pénal en incriminant l'homicide involontaire met sur le même plan la maladresse (fait positif) et la
négligence (abstention).
117 Arguments en faveur du meurtre par omission.

1. L'acte de nature à donner la mort est le plus souvent un acte positif (meurtre par commission), mais ce peut aussi être
un acte négatif (meurtre par omission) : priver volontairement un incapable physique ou mental de nourriture jusqu'à sa
mort ; priver volontairement un malade de la drogue qui le maintient en vie (insuline pour le diabétique par exemple)
(LESUEUR, J., op. cit.,).
2. Le délit de commission par omission est pénalement punissable si la personne coupable a omis de faire ce qui
constitue pour elle une obligation légale, réglementaire ou contractuelle, mais elle n'est pas punissable si elle a omis
simplement de satisfaire à une obligation morale (Voir E. LAMY, Cours, op. cit., p. 206 ; LIKULIA BOLONGO, Droit
pénal spécial zaïrois, L.G.D.J., pp. 28-29.).
3. Se rendrait coupable d'homicide volontaire un gardien de prison qui priverait volontairement de nourriture un détenu et
le laisserait ainsi périr d'inanition. De manière plus générale, se rendrait coupable de meurtre celui qui priverait
d'aliments une personne enfermée (G. MINEUR, op. cit., p.124; LIKULIA, loc. cit.).
4. Il y a de cas où un acte négatif peut être considéré comme un cas de meurtre. C’est notamment lorsque son auteur
avait l’obligation légale d’agir. Par exemple un père qui laisse mourir son enfant d’inanition, c'est-à-dire qui ne lui
assure pas la nourriture alors qu’il a l’obligation alimentaire vis-à-vis de cet enfant (Pierre AKELE ADAU, Angélique
SITA MUILA AKELE, THEODORE NGOY ILUNGA wa NSENGA, Droit pénal spécial, cours polycopié, F.D., Université
protestante au Congo., 2003-2004, p. 171.).
5. C’est parce qu’ici, dans les rapports entre les parents et l’enfant, ce sont des rapports légalement protégés, qui
s’expriment en termes de droits et des devoirs. Cette abstention sera donc assimilée à un acte positif, assimilé à un
acte de meurtre. Cette assimilation à l’acte positif vaudra pour tous les rapports légalement protégés, entre les époux,
entre gardien de prison et prisonniers, entre médecin et patients. Donc, tous les autres cas en dehors des rapports
légalement protégés c’est l’infraction de non-assistance à personne en danger qui sera retenue » (Id., loc. cit.).
118 Pour eux, il faut éviter de confondre le délit de commission par omission avec le délit d'omission. Le délit d'omission

n'existe que lorsqu'il y a inexécution d'un ordre positif de la loi. Le délit de commission par omission, au contraire,
n'implique pas un ordre d'agir méconnu par l'omission ... il se réalise par une négligence intentionnelle à empêcher des
causes étrangères de produire leur effet nuisible. Exemple : un garde-barrière aperçoit sur la voie ferrée un objet faisant
obstacle à la circulation, il néglige intentionnellement de l'enlever au moment du passage d'un train, lequel déraille (Vidal et
Magnol, Cours de droit criminel, cité par Doucet, J.P., op. cit., v° Omission.).
28
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Nous pensons qu’en l’absence d’une règle légale qui consacre le meurtre par omission
ou, à tout le moins, l’infraction de commission par omission comme en droits allemand, grec,
italien, japonais etc., il n’est pas possible d’admettre le meurtre par omission ou l’infraction
de commission par omission en droit pénal congolais.

2. La personnalité humaine de la victime est requise (V° Victime du meurtre).

D. ELEMENT INTELLECTUEL

L’élément moral du meurtre est l’intention de tuer, c.-à-d. l’intention de donner la mort,
l’animus necandi. C’est donc une intention criminelle.

1. L’intention criminelle

L’intention peut être définie comme un état d’esprit consistant à désirer que certaines
conséquences découlent de l’acte ou de l’omission120.

119 - Le Professeur Nyabirungu enseigne que le problème d'infraction de commission par omission se pose surtout en
matière de meurtre. Prenons un exemple: Un homme qui, excédé par le mariage, passe près de la piscine où sa femme se
noie et ne lui apporte pas secours, peut-il répondre de l'homicide volontaire ?
Dans l'ancien droit pénal européen, le juge, fort du large pouvoir d'appréciation dont il jouissait, n'hésitait pas à considérer ce
cas comme un homicide, en application de la formule de LOYSEL: «Qui peut et n'empêche, pèche».
Dans le droit moderne, cette solution n'a jamais été retenue pour deux raisons:
1. Il est pratiquement impossible d'établir un lien de causalité entre l'abstention de l'agent et la mort survenue.
2. Retenir l'homicide volontaire porte atteinte au principe de l'interprétation stricte en droit pénal.
Il renchérit que l'abstention la plus coupable sur le plan moral restera cependant en dehors de l'intervention pénale, à moins
que la loi ne l'ait expressément prévue.
Il conclut qu’en droit congolais la controverse autour de cette théorie présente beaucoup moins d'intérêt depuis
l’ordonnance-loi n° 78-015 du 4 juillet 1978 qui incrimine la non-assistance des personnes en danger. (NYABIRUNGU
mwene SONGA, op. cit., pp. 202-203.).
- Georges LEVASSEUR considère que les textes nouveaux (qui incriminent l’omission de porter secours) ne sont
pas la consécration de la théorie des délits de commission par omission, ils en sont même la condamnation implicite,
puisque c’est seulement dans certaines hypothèses précises que l’abstention constituera une infraction (Georges
LEVASSEUR, Droit pénal spécial).
120 Glanville, Criminal law, cité par DOUCET, op. cit., v° Intention.

L’intention est couramment définie comme le but ultime vers lequel tend un acte humain. Plus précis, les philosophes
distinguent entre l’intention, qui est le but donné à l’action, et le mobile, qui est le motif poussant une personne à accomplir
cette action. Les juristes distinguent de surcroît entre la volonté d’accomplir tel acte, et la volonté d’atteindre tel résultat ;
c’est cette dernière seule qui mérite le nom d’intention.
L'intention est considérée par les philosophes comme l’élément qui confère à un acte son sens moral. Un acte est bon ou
mauvais, selon que l'intention qui le sous-tend, vise au bien ou au mal (DOUCET, v° Intention.).
Comme toute action volontaire, l'action morale implique une intention. Voire deux intentions, distinctes quoique liées.
Premièrement, "l'intention de faire ceci ou cela" ; par exemple tuer un homme, comme se le propose pareillement le brigand,
le bourreau ou le soldat ; ils ont tous en effet la même intention de tuer, quoique pour des motifs différents. C'est là
"l'intention matérielle" de l'acte considéré dans sa réalité physique. Deuxièmement, l'intention de faire ceci ou cela pour tel
motif défini : le brigand tue pour s'enrichir, le bourreau pour faire son métier, le soldat pour défendre sa patrie. Il y a autant
"d'intention formelles" différentes, qui correspondent à autant de fins différentes de l'action. L'intention morale ressortit
exclusivement au groupe des intentions formelles (Baudin, Cours de philosophie morale.).
Un même acte peut être moral ou immoral, suivant l'intention dans laquelle elle est faite : donner de l'argent à quelqu'un pour
le soulager est un bien, lui en donner pour le corrompre est un mal (Janet, La morale.).
Pour la doctrine pénale subjective également, c’est l’intention qui fait le crime. Mais les pénalistes considèrent qu’il serait
dangereux d’inviter le juge à scruter le for interne de l'agent. C’est pourquoi ils s’arrêtent au but premier et externe de
l’acte : à savoir l’intention de porter atteinte à tel intérêt protégé par la loi. Ce qui fait le vol, c’est l’intention technique de
29
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

2. L’intention de donner la mort

L'élément intellectuel du meurtre consiste dans la volonté de donner la mort (animus


necandi) et cet élément est fondamental, car lui seul permet de distinguer le meurtre des coups
mortels où l'agent, en voulant les coups, n'a pas voulu la mort, et de l'homicide involontaire,
où l'agent n'a même pas voulu les coups121.

L’intention homicide doit être recherchée dans la manière dont l’acte dommageable est
accompli. Elle peut résulter :

- Soit de l’arme employée lorsque celle-ci a une puissance mortelle en elle –même
telle qu’une arme à feu comme un revolver, une machette, un couteau tranchant, une
flèche, etc. Ex : lancer une flèche sur quelqu’un, un gros caillou. Ici le juge peut
déceler l’intention par le matériel utilisé.
- Soit de l’endroit où le coup a été porté, lorsque celui-ci est une partie vitale du corps,
par exemple l’abdomen, la tête, la poitrine, le poumon, le cœur.
- Soit du degré de la violence ou de sa gravité. Ex : un sportif qui administre des coups
forts et rapides à un enfant faible, telle une fillette.
- Soit enfin de l’état physique de la victime (une personne maladive)122.

N.B : Le mobile, le consentement de la victime, l’erreur sur la personne et l’aberratio


ictus:

Le mobile, le consentement de la victime, l’erreur sur la personne ou l’aberratio ictus sont


inopérants. C’est-à-dire qu’on ne peut justifier l’infraction par le mobile qui a poussé
l’individu à la commettre, et par les autres causes susvisées.

S’agissant du mobile, il y a lieu de retenir qu’on peut tuer par vengeance, par jalousie, par
pitié, pour faire justice (un justicier)... Ce mobile peut être noble. Le mobile qui a déterminé
l’acte du meurtrier est en principe indifférent, inopérant quand bien même il serait louable ou
charitable. Mais le juge peut en tenir compte pour retenir des circonstances atténuantes123.

E. PROTAGONISTES DU MEURTRE

déposséder autrui ; non le Mobile qui aiguillonne l’agent : à savoir le désir de s’approprier le bien en cause, de le transmettre
à un tiers, de le détruire sur la place publique… (DOUCET, v° Intention.).
L’intention criminelle est la forme ordinaire de l’élément moral dans un système subjectif ; elle consiste dans le dessein,
définitivement arrêté, de porter atteinte à tel intérêt protégé précis (DOUCET, v° Intention.).
Elle ne saurait être la même pour toutes les infractions. Si elle n’est pas propre à chaque infraction, à la rigueur, elle peut
l’être pour les infractions de même catégorie.
Ainsi le meurtre suppose « l’intention de porter atteinte à la vie d’autrui », tandis que le vol suppose l’intention frauduleuse,
les coups et blessures volontaire : l’intention de nuire, tandis que l’injure : l’intention d’insulter.
Dans tous les cas, l’intention criminelle ne doit pas être confondue avec le Mobile, qui est la cause profonde de l’acte. Il peut
prendre diverses formes (Envie, Cupidité, Haine, Amour, Pitié, Faim…), mais qui demeure inaccessible au juge puisqu’il
relève du for interne et qui partant lui rendent inopérant dans la plupart des cas.
121 Pradel et Danti-Juan (Droit pénal spécial) :
122 LIKULIA BOLONGO, op. cit., pp. 52-53.
123 Id., p. 54.
30
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

1. Le délinquant : l’auteur du meurtre porte le nom de meurtrier. Il peut s’agir de n’importe


qui.
2. La victime : la personnalité humaine de la victime est requise. L’acte homicide doit être
commis sur une personne vivante. Il n’y a pas meurtre sur un mort, sur un animal ni sur
un autre être vivant. Cependant il n'est pas nécessaire, pour qu'il y ait meurtre, que la
victime soit identifiée. Ainsi, on retiendra le meurtre même en cas de découverte des os
dans une chaudière sans possibilité d'identification de la victime124.

F. REGIME REPRESSIF

Le meurtre est puni de mort.

§2. L’ASSASSINAT
A. NOTIONS
Il ne faut pas voir dans l'assassinat un crime spécial, sui generis, l'assassinat n'est que le
meurtre aggravé par des circonstances qui en augmentent la criminalité125. En science
criminelle, dit DOUCET, l'assassinat résulte d’un acte qui, non seulement est perpétré avec
l’intention d’ôter la vie d’autrui, mais encore se trouve marqué par une circonstance
aggravante telle que le guet-apens, la préméditation, la cruauté, la lâcheté... Ce crime majeur
appelle la sanction la plus élevée que le législateur entend retenir dans l'arsenal des peines
touchant les atteintes à la personne humaine126.

Le code pénal congolais définit l’assassinat comme le meurtre commis avec préméditation127.

C’est la même définition que lui réserve le Code pénal du Luxembourg en son article 394.
Mais il n’en est pas ainsi pour toutes les législations. En effet, aux termes de l’article 181 du
Code pénal de l Principauté d’Andorre: « Commet un assassinat celui qui tue une personne
lorsque intervient l’une des circonstances suivantes : a)- Préméditation, b)- Guet-apens, c)-
Cruauté non nécessaire, d)- Empoisonnement, e)- Récompense128 ».

Selon GARRAUD, l’assassinat se compose de deux éléments : le meurtre d’abord, puis la


préméditation ou guet-apens129.

Le meurtre ayant déjà été étudié, on s’y référera. Il ne nous reste plus qu’à savoir ce qu’il faut
entendre par préméditation.

B. LA PREMEDITATION

L’assassinat exige pour son établissement la réalisation de tous les éléments constitutifs du
meurtre et la préméditation de l’acte accompli.

124 LESUEUR , op. cit .,


125 Blanche (Études pratiques sur le Code pénal) :
126 DOUCET, v° Assassinat.
127 Code pénal congolais, op. cit., articles 44-45, al. 2.
128 Code pénal d’Andorre, Art. 181.
129 Garraud (Traité de droit pénal)
31
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Le terme préméditation dérive du verbe latin praemeditor qui, selon Gaffiot, signifiait :
méditer d'avance, se préparer par la réflexion, se concerter d'avance. L’ancien droit pénal
français n’utilisait pas le verbe préméditer, mais le verbe pourpenser qui signifiait : élaborer
un projet, méditer longuement une action, voir comploter. Il distinguait notamment le guet-
apens simple du guet-apens pourpensé130.
La préméditation est le dessein formé avant l’action de commettre un crime ou un délit131.
Il y a préméditation lorsque l’acte délictueux reproché au prévenu a été accompli, non de
manière spontanée, mais en application d’un dessein longuement réfléchi et adopté avant
l’action132.
La préméditation consiste ordinairement dans le dessein mûrement réfléchi et persistant
d’attenter à la vie d’autrui, par des moyens soigneusement choisis dans l’intention de réussir
l’entreprise coupable133.
Le dol réfléchi ou préméditation existe lorsque l'agent réfléchit à son action à l'avance. Suffit-
il qu'un certain temps s'écoule entre la résolution criminelle et la commission de l'infraction ?
A notre avis, non. La préméditation étant un dol aggravé, pour qu'elle existe, il ne suffit pas
que l'intention de commettre le crime ait précédé l'action, il faut encore que le temps qui s'est
écoulé entre la résolution criminelle et l'exécution de l'acte134 «ait été employé à la
réflexion.»135
La Cour Suprême de Justice a jugé que la préméditation requise pour l'existence de
l'infraction d'assassinat est établie par une succession d'actes préparés au moins 24 heures à
l'avance, à savoir le fait d'avoir déjà attiré la victime sur les lieux du crime, porteur d'un
revolver chargé136.
Il est entendu que cette appréciation ne lie aucune juridiction, et les Cours et tribunaux restent
libres de décider, dans chaque cas d'espèce, si le temps écoulé constitue ou non la
préméditation137.
La preuve de la préméditation est à rechercher parmi les faits qui ont accompagné l’acte. Par
exemple, en cas d’achat d’armes et de munitions et de menace de mort proférés quelques
heures avant le rendez-vous fixé avec la victime138.
La préméditation suppose donc :
- La résolution de donner la mort ;
- Une certaine durée du temps plus ou moins longue, en tout cas variable dans
chaque cas, entre la conception de l’infraction et son accomplissement et
- La réflexion.

Le guet-apens consiste à attendre dans un lieu un individu pour lui donner la mort ou exercer
sur lui des actes de violence. Il suppose donc la préméditation139.

130 DOUCET, v° Préméditation.


131 Article 132-72 N.C.P.F.
132 DOUCET, v° Préméditation.
133 A.Vitu (Traité de droit pénal spécial) :
134 NYABIRUNGU mwene SONGA, op. cit., p. 313.
135 STEFANI et LEVASSEUR, op. cit., n° 200.
136 C.S.J., 10 juil. 1972, Bull., 1973, 88; R.J.Z. 1972, 135.
137 NYABIRUNGU mwene SONGA, op. cit., p. 314.
138 LIKULIA BOLONGO, op. cit., p. 64.
32
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

C. PROTAGONISTES DU DRAME PENAL

1. Le délinquant : l’auteur d’assassinat porte le nom d’assassin. Il peut s’agir de n’importe


qui.
2. La victime : comme dans le meurtre la personnalité humaine de la victime est requise.
Mais il peut s’agir de n’importe qui.
D. REGIME REPRESSIF

L’assassinat est puni de mort.

§3. L’EMPOISONNEMENT
A. NOTIONS

L’empoisonnement est le meurtre commis par le moyen de substances qui peuvent donner la
mort plus ou moins promptement, de quelque manière que ces substances aient été employées
ou administrées140.

Il est différent de l’empoisonnement prévu est puni par l’article 170 du code pénal militaire
aux termes duquel : « Tout empoisonnement de seaux ou des denrées consommables, tout
dépôt, aspersion ou utilisation de substances nocives destinées à donner la mort, en temps de
guerre ou sur une région sur laquelle l’état de siège ou d’urgence aura été proclamé ou à
l’occasion d’une opération de police tendant au maintien ou au rétablissement de l’ordre
public ».

Sur le plan moral, si toutes les autorités civiles et religieuses condamnent le meurtre, elles
abominent plus encore l'empoisonnement qui traduit chez son auteur lâcheté, hypocrisie et
dissimulation.
B. ELEMENT LEGAL ET ELEMENT AXIOLOGIQUE

1. Elément légal

L’élément légal de l’empoisonnement est l’article 49 du C.P qui dit : « Est qualifié
empoisonnement, le meurtre commis par le moyen de substances qui peuvent donner la mort
plus ou moins promptement, de quelque manière que ces substances aient été employées ou
administrées. Il sera puni de mort ».

Etant une variété du meurtre, son élément légal inclut celui du meurtre.

2. Elément axiologique
L’infraction d’empoisonnement, comme toute infraction de meurtre, protège la personne dans
sa vie.

139 Id., p. 65.


140 Code pénal congolais, article 49.
33
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

C. ELEMENTS MATERIELS

L’empoisonnement nécessite trois éléments matériels à savoir : l’acte matériel


d’administration ou d’emploi des substances capables de provoquer la mort, les substances
mortelles et le résultat.
1. Acte matériel d’administration ou d’emploi des substances capables de provoquer la
mort141.
Par « emploi ou administration », il faut entendre notamment le fait de faire absorber, faire
manger, injecter, faire consommer, faire boire des substances mortelles142, asphyxier la
victime, lui faire inhaler le produit ...
2. (Emploi des) substances mortelles
Au sujet des substances mortelles, LIKULIA enseigne que

« Pour que l’infraction soit retenue, les substances employées ou administrées avec la
volonté de donner la mort doivent être mortelles ou susceptibles de la provoquer plus
au moins promptement. Le législateur n’a pas défini ni donné la liste de ces substances.
En tout cas, il doit s’agir du poison et il faudra recourir à l’expert (toxicologue) pour
les déterminer. Généralement, on considère comme poison les substances toxiques ou
vénéneuses, des bacilles ou des virus.

Il s’agit donc de toutes les substances capables de détruire ou d’altérer les fonctions
vitales. Certaines substances végétales (comme les champignons) sont aussi retenues
comme poison.

Dans tous les cas, l’élément intentionnel est important.

Le juge n’est pas lié par le rapport de l’expert.

La doctrine et la jurisprudence écartent l’administration du verre pilé et l’absorption


de l’alcool même en grande quantité puisque ces substances ne sont pas de poison.
Dans ce cas, on pourrait retenir soit le meurtre, soit l’assassinat143 ».

3. Résultat : le décès de la victime


Etant un meurtre, l’empoisonnement est une infraction matérielle dans laquelle le législateur
incrimine le résultat : le décès de la victime. Si elle n’est pas survenue, il y a tentative
d’empoisonnement. Il en est de même si la victime n’a pas consommé ledit poison.
La personnalité humaine de la victime est requise. En effet, la victime doit être une personne
humaine née et vivante, pas un animal ni un cadavre.
D. ELEMENTS INTELLECTUELS

L’empoisonnement exige pour sa réalisation un des deux éléments intellectuels qui suivent :
l’intention de provoquer la mort de la victime, animus necandi, ou tout au moins agir avec la
conscience que la substance administrée peut la provoquer plus au moins promptement.

141 LIKULIA Bolongo, op. cit., pp. 79-82.


142 C.Appel Kis 20/7/1974, in R.J.Z, 1977, p. 74.
143 LIKULIA BOLONGO, op. cit., p. 81.
34
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

« En d’autres termes, l’empoisonnement suppose chez l’agent la connaissance, ou au


moins la conscience, du caractère mortifère des substances qu’il administre
volontairement. C’est dire qu’il n’y a pas empoisonnement en cas d’ignorance de ce
caractère ou en cas de négligence ou d’erreur. Le mauvais dosage des médicaments qui
entraîne la mort du patient n’est pas constitutif d’empoisonnement mais d’homicide
involontaire. Chaque fois qu’il y a erreur, ignorance ou mauvais dosage, il y a défaut
d’élément intentionnel. 144»

E. PROTAGONISTES DE L’EMPOISONNEMENT

1. Délinquant : l’auteur de l’empoisonnement s’appelle « empoisonneur ». Il peut s’agir de


n’importe qui.
2. Victime : la victime doit être une personne vivante, mais il peut s’agir de n’importe qui.

F. REGIME REPRESSIF

L’empoisonnement est puni de mort.

Sous-section II. L’HOMICIDE INVOLONTAIRE

A. NOTIONS
Aux termes de l’article 52 du C.P : « Est coupable d’homicide ou de lésions involontaires
celui qui a causé le mal par défaut de prévoyance ou de précaution, mais sans intention
d’attenter à la personne d’autrui ».
Cet article est commun à l’homicide involontaire et aux lésions corporelles involontaires. Il
est l’équivalent de l’article 43 du même code pour ce qui concerne les homicides et lésions
corporelles volontaires. Nous en ferons, s’il le faut, même un commentaire commun.
Il résulte dudit article que l’homicide involontaire consiste dans le fait de causer la mort d’une
personne par défaut de prévoyance ou de précaution, mais sans intention d’attenter à la
personne d’autrui.

Il ne s’agit donc pas uniquement de la mort provoquée par des violences involontaires. Certes,
la mort non recherchée qui survient à la suite des violences non voulues fait partie de
l’homicide involontaire, mais cette incrimination couvre également toute mort survenue,
même sans violence, mais à la suite d’une omission due à la maladresse, à l’imprudence, à la
négligence, à l’inattention, à l’indifférence ou à l’impéritie (ne pas mettre des garde-fous
autour d’une piscine dans laquelle les enfants se noient ; ne pas couvrir la fausse sceptique
dans laquelle un enfant tombe et meurt ; laisser les médicaments à la porté des enfants qui en
meurent … ).

DOUCET est plus méticuleux sur la question :


«On appelle homicide par imprudence (ou involontaire) le fait de causer la mort
d’autrui par une action ou une omission relevant de la maladresse, de l’imprudence, de
la négligence, de l’inattention, de l’indifférence ou de l’impéritie, ce qui comprend

144 Id., p. 80.


35
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

l’inobservation des règlements. Un homicide « non simplement involontaire » est dit


« volontaire » depuis le droit révolutionnaire »145.

Pour Jean LESUEUR, pour qu'il y ait infraction, au sens de l'article 52 du Code Pénal, il faut
qu'il y ait atteinte à l'intégrité corporelle de la victime, il peut s'agir de lésions externes (piéton
blessé par un automobile, accident de chasse....) ou de lésions internes, de maladie,
d'empoisonnement (état de folie survenu à la suite d'un accident de la route empoisonnement à
la suite de consommation de gâteaux avariés, ...).
Peu importe le degré de gravité des blessures ou de la maladie : dès que l'intégrité physique de
la victime est atteinte, si légèrement que ce soit, il y a lésion corporelle. Il faut cependant
qu'il s'agisse d'une véritable atteinte à l'intégrité physique : une simple indigestion, provoquée
par l'absorption de denrées légèrement avariées ne peut être considérée comme lésion
corporelle.
Peu importe, pour la constitution de l'infraction, la nature du fait matériel ayant causé la mort
ou les lésions : coup de feu, embardée d'un chauffeur imprudent, l’erreur d'un pharmacien
dans la confection d'une ordonnance, noyade, etc. (l'emploi de substances mortelles ou
nuisibles à la santé est ici assimilé aux autres moyens de provoquer la mort ou des lésions
corporelles)146.
B. ELEMENT LEGAL ET ELEMENT AXIOLOGIQUE

L’homicide involontaire est prévu et puni par les articles 52 à 53 du C.P qui dispose :
« Article 52. Est coupable d’homicide ou de lésions involontaires celui qui a causé le
mal par défaut de prévoyance ou de précaution, mais sans intention d’attenter à la
personne d’autrui.
Article 53. Quiconque aura involontairement causé la mort d’une personne sera puni
d’une servitude pénale de trois mois à deux ans et d’une amende de cinquante à mille
francs».
L’homicide involontaire protège la personne dans sa vie.
C. LE DOMMAGE (ELEMENT MATERIEL)

Comme tout délit d’imprudence, l’homicide involontaire requiert un dommage, une faute
pénale et un lien de cause à effet entre ladite faute et ledit dommage.

Ici le dommage c’est le fait matériel homicide : Pour que le fait matériel soit établi, la loi
exige qu’une personne soit morte. On tient donc compte du résultat : la mort147.
D. LA FAUTE PENALE ET LE LIEN CAUSAL (ELEMENTS INTELLECTUELS)

1. La faute pénale de l’agent


La faute pénale peut être définie comme une erreur de conduite qui permet d’imputer à un
agent une conséquence dommageable d’un fit qu’il n’a pas voulu provoquer148.

145 DOUCET, J.P, ., op. cit.,v° Homicide par imprudence.


146 LESSUER, J., op. cit., p. 23.
147 LIKULIA BOLONGO, op. cit., p. 109.
148 LIKULIA BOLONGO, op. cit., p. 109.
36
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Pour que l’infraction soit retenue, l’agent doit avoir commis une faute. Cette faute peut même
être légère. Si aucune faute n’est établie, il n’y a pas d’infraction. Le hasard n’est pas une
faute de même que le cas fortuit.
L’article 52 du code pénal donne une énumération limitative des fautes pénales en prévoyant
le défaut de prévoyance et de précaution sans énumérer les faits constitutifs de la faute pénale.
Mais la jurisprudence estime que par défaut de prévoyance ou de précaution, il faut entendre
toute faute non intentionnelle commise par un agent qui a omis d’accomplir un acte qui lui
incombait ou plus généralement celle qui consiste à un manque de soins pour éviter un mal149.
La faute peut revêtir plusieurs formes. Jean LESUEUR les présente de la manière suivante150 :
« 1° La maladresse, c'est-à-dire l'ignorance ou l'incapacité de son auteur. La
maladresse peut être manuelle ou intellectuelle.

Exemples :
- un chasseur blesse un passant en visant le gibier (maladresse manuelle) ;
- un maçon laisse tomber une pierre sur un passant (maladresse manuelle) ;
- un médecin prescrit un médicament mal dosé (maladresse intellectuelle) ;
- un architecte construit un ouvrage selon un plan défectueux ; l'ouvrage s'écroule
(maladresse intellectuelle) ;
- un chirurgien tue son patient, d'un, coup de bistouri au cours d'une opération très
simple (maladresse physique ou manuelle) ;
- un chirurgien cause la mort de son patient, non cette fois par maladresse
physique mais par ignorance de ce qu'il fallait faire (maladresse intellectuelle).

2° ) L'imprudence, qui est la faute qu'un homme prévoyant, raisonnable, ne


commet pas.
Exemples :
- automobiliste causant un aocide.it parce qu'il roule trop vite ;
- personne posant un pot de fleurs non attaché sur le bord de sa fenêtre: un jour de
grand vent, le pot tombe et blesse un passant ;
- propriétaire d'un animal méchant qui ne l'attache pas ;
- chirurgien qui tue son patient au cours d'une opération, pour l'avoir entreprise en
état d’ivresse ;
- industriel ayant laissé en service dans son usine une chaudière défectueuse dont
l'éclatement provoque la mort d'un ouvrier.

3°) L'inattention, qui est la faute de l'homme absorbé par autre chose que par ce
qu'il fait.
Exemples :
- automobiliste qui s'absorbe dans le spectacle de la rue et qui provoque un
accident
- pharmacien pensant à autre chose et qui délivre par mégarde un produit toxique
- chirurgien ayant oublié une pince dans le corps de son patient.

149 Id., p. 110.


150 LESSUER, J., op. cit., p. 24.
37
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

4°) La négligence est l'omission d'une précaution commandée par la prudence (on
voit d'après cette définition, que -les fautes par négligence pourraient être
classées dans la catégorie des fautes par imprudence) ;
Exemples :
- automobiliste qui omet de faire vérifier ses freins et cause un accident ;
- automobiliste abandonnant serrer les freins ;
- chasseur rangeant sur fusil sans le décharger ;
- ménagère laissant en son absence son fer électrique branché, provoquant un
incendie au cours duquel un voisin est brûlé ;
- industriel ayant négligé de disposer des appareils protecteurs autour de certains
organes dangereux de ses machines.

5°) L'inobservation des règlements. Les règlements dont il s'agit ici sont tous les
textes légaux et administratifs: lois, ordonnances, décrets, arrêtés des diverses
autorités administratives.
Exemples :
- automobiliste circulant en sens interdit et provoquant un accident ;
- patron de cinéma responsable d'accidents survenus au cours de l'incendie de sa
salle, pour n'avoir pas respecté les règlements concernant l'installation de la
cabine ou le mode d'ouverture des portes ;
- non éclairage de matériaux ou d'excavation ».
2. Lien causal entre la faute et le fait matériel (mort, coup ou blessure)
Il doit y avoir une relation de cause à effet entre la faute commise et le dommage subi par la
victime. Il importe peu qu’il y ait ou non des fautes multiples imputables à plusieurs
personnes pour qu’il y ait faute. Ici, la responsabilité pénale de chacune des personnes doit
être engagée. L’imprudence ou la négligence de l’une ne doit pas exclure la négligence ou
l’imprudence de l’autre. Exemple : un homme qui sait que sa femme ne sait pas conduire un
véhicule et qu’elle n’a pas de permis de conduire, lui confie néanmoins sa voiture avec
laquelle cette dernière va cogner un véhicule en mauvais stationnement qui va heurter
mortellement un piéton. Il y a ici plusieurs fautes imputables à plusieurs personnes à savoir le
propriétaire du véhicule en mauvais stationnement, la femme et son mari. La faute de l’un
n’excuse pas celle de l’autre, car il y a ici le cas de causalité directe et de causalité indirecte.
Personne ne peut donc écarter sa responsabilité car tous ont commis une faute. Dans tous ces
cas, l’agent sera poursuivi soit seul si c’est sa faute qui est à la base du dommage soit
conjointement avec l’auteur direct et matériel si sa faute s’ajoute à celle de celui-ci151.
A défaut de ce lien de causalité, le prévenu doit être exonéré de sa responsabilité. C’est le cas
notamment lorsque le décès de la victime est dû à sa propre faute. Et cette faute doit être la
cause unique et exclusive du préjudice. Exemple : un passager à bord d’un véhicule sentant un
danger, saute et meurt. La faute n’est pas du chauffeur. On ne peut pas non plus retenir la
responsabilité pénale en cas de force majeure résultant d’un événement irrésistible et
imprévisible152.
D’après Jean LESUEUR,

151 LIKULIA BOLONGO, op. cit., p. 113.


152 Id. loc. cit.
38
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

« La faute de l’auteur doit être la cause directe du dommage subi par la victime, mais il
n’est pas nécessaire, comme dans le cas de violences volontaires, que l’auteur ait agi
lui-même153. Il n’est pas nécessaire que l’auteur soit présent au moment où les
blessures sont infligées à la victime, il peut même s’écouler un temps assez long
entre la commission de la faute et le moment où le préjudice est subi154. Cas du
cumul de la faute de la victime avec celle de l’auteur : il arrive souvent, dans les cas
d’accidents, que la victime ait également commis une faute. Il en résulte un partage
de la responsabilité civile, mais la responsabilité pénale de l’auteur reste entière155».
E. PROTAGONISTES DE L’HOMICIDE INVOLONTAIRE

1. Délinquant : n’importe qui.


2. Victime : la personnalité humaine de la personne est requise. Mais il peut s’agir de
n’importe qui.

F. REGIME REPRESSIF

L’homicide involontaire est puni d’une servitude pénale de trois mois à deux ans et d’une
amende de cinquante à mille francs congolais ; soit le prix d’un paquet de cigarettes, donc une
somme qui ne peut procurer une bouteille de bière. La modicité du taux maximum de cet
amende appelle des observations.

Sous –section III. LES HOMICIDES PRETERINTENTIONNELS

Il y a homicide préterintentionnel toutes les fois que le décès de la victime, consécutif aux
actions ou omissions volontaires de l’agent, est survenu alors que ce résultat n’était pas
recherché par ce dernier.

§1. L’ADJECTIF PRAETER-INTENTIONNEL OU PRETERINTENTIONNEL


Selon le commentateur du code pénal de la Principauté d’Andorre, l’adjectif praeter-
intentionnel qualifie l'action ou l’omission dont le résultat dépasse l'intention de son auteur156.
Le droit pénal congolais incrimine souvent des faits positifs au titre d’infractions
préterintentionnelles.

153 Exemples : instituteur laissant des enfants jouer avec une arme chargée et qui blessent en passant ; personne laissant
imprudemment un pot de fleur sur le bord de la fenêtre ; cycliste commettant une imprudence et provoquant l’écart
d’automobiliste qui blesse un passant.
154 Exemples : un patron remet un outil défectueux à un ouvrier qui en l’utilisant plus tard, se blesse ou blesse un

compagnon; un architecte fait effectuer une construction défectueuse qui, parfois plusieurs années plus tard, s’effondre et
provoque des blessures ou des décès. Plusieurs exemples célèbres ont été fournis ces dernières années avec des ruptures
de barrages provoquant des centaines de victimes.
155 Exemple : un automobiliste, roulant en excès de vitesse dans une agglomération, renverse et tue un cycliste qui a

brusquement tourné à gauche sans prévenir. La responsabilité civile de l’automobiliste pourra être atténuée : si le juge
estime que la responsabilité du cycliste était engagée à 40%, l’automobiliste (ou son assurance) n’aura que 60% de
dommages-intérêts à payer. Mais la responsabilité pénale reste entière. Certes le juge, tenant compte de la faute du cycliste,
pourra infliger une peine moindre, mais légalement, l’automobiliste peut être condamné au maximum prévu par le Code
pénal
156Code pénal d'Andorre, note sur l'art. 24 : Praeter-intentionnel.
39
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Une infraction préterintentionnelle est une infraction comportant plusieurs conséquences


dommageables dont les unes ont été voulues, et dont les autres ont dépassé l'intention de
l'auteur157.

Plusieurs auteurs abondent dans le même sens.

HAUS enseigne justement que dans ce type d'infraction (coup mortel), il y a concours de dol
et de faute, le dol portant sur les coups et blessures, et la faute sur la mort (culpa dolo
determinata)158.

DOUCET enseigne qu’une « infraction est dite intentionnelle lorsque l'agent accomplit un
acte de violence envers autrui dans le but d'atteindre un certain résultat ; elle devient praeter-
intentionnelle (préterintentionnel) quand le résultat dépasse le but recherché. Il en est ainsi
quand un individu a fait absorber une drogue à une personne dans le seul but de l'endormir ;
mais que cette personne vient à décéder. C’est aussi le cas lorsqu’un individu use de la force
pour violer une femme, et que cette violence cause la mort de la victime : le décès devient
dans certains droits une circonstance aggravante du viol»159.

Abordant la notion de résultat excessif, JEANDIDIER explique que « le délit praeter-


intentionnel (encore appelé dol praeter-intentionnel, mais il est préférable de parler de dol
dépassé) est celui dans lequel le résultat de l'acte volontaire excède les prévisions de l'agent,
le but recherché160 ».

Dans la même optique DESPORTES et LE GUNEHEC disent que « lorsque le résultat


obtenu va au-delà de l'intention du délinquant, il y a dol dépassé ou encore dol
praeterintentionnel. En principe les tribunaux ne peuvent tenir compte de l'existence d'un dol
dépassé161 ».

MERLE et VITU enseignent que « l’hypothèse du délit praeter intentionnel se réalise lorsque
l’infraction développe des conséquences plus graves que celles qui étaient prévues ou
prévisibles pour l’agent. L’exemple classique est celui de l’individu qui, donnant
volontairement des coups à une femme enceinte dont il ignore la grossesse, provoque
l’avortement162.

§2. LES INFRACTIONS PRETERINTENTIONNELLES EN VIGUEUR


EN DROIT PENAL CONGOLAIS
A la lumière des explications qui précédent, on réalise que les infractions préterintentionnelles
peuvent porter atteinte tantôt à la vie, tantôt à l’intégrité physique.

1) Infractions préterintentionnelles portant atteinte à la vie


- coups mortels (article 48 du C.P ; article 150 de la L.P.P.E) ;
157 NYABIRUNGU mwene SONGA, op.cit.,
158 Op. cit., I, n° 329.
159 DOUCET, JP, op. cit., v° Préterintentionnel. En droit positif français les praticiens parlent improprement d'infraction

praeter-intentionnelle lorsque, pour apprécier la culpabilité de l'agent, ils examinent ses "mobiles" et confondent alors le
motif, cause de l'action, et le but poursuivi
160 JEANDIDIER, Droit pénal général, n° 331, cité par DOUCET, JP., op. cit., v° Préterintentionnel.
161 DESPORTES et LE GUNEHEC, Le nouveau droit pénal, cité par DOUCET, JP., op. cit., v° Préterintentionnel.
162 MERLE et VITU, Traité de droit criminel.
40
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

- torture mortelle (article 48ter, al.2 du C.P ; article 152 de la L.P.P.E) ;


- épreuve superstitieuse ayant causé la mort (article 57, al. 3 du C.P) ;
- l’attentat à la pudeur ayant causé la mort (article 171 du C.P) ;
- le viol ayant causé la mort (article 171 du C.P) ;
- la mutilation sexuelle ayant causé la mort (Article 174 g, al. 2 du C.P; article 153, al. 2
de la L.P.P.E) ;
- expérimentation médicale mortelle sur un enfant (article 154, al. 4 de la L.P.P.E) ;
- délaissement d’un enfant ayant entrainé la mort (article 190, al. 3 de la L.P.P.E).

2) Infractions préterintentionnelles portant atteinte à l’intégrité physique


- coups et blessures volontaires aggravés (article 47 du C.P ; article 148 de la L.P.P.E
article ; 144 de la L.P.P.E) ;
- coups et blessures volontaires ayant provoqué l’avortement (article 145 de la
L.P.P.E) ;
- la torture aggravée (article 48ter, al.1 du C.P ; article 152 de la L.P.P.E) ;
- l’épreuve superstitieuse aggravée (article 57, al. 2 du C.P ; article 157, al. 2 de la
L.P.P.E) ;
- incendie ayant causé une blessure (article 108, al.2 du C.P) ;
- le viol aggravé (article 171bis, 8 du C.P ; article 170, al. 3, 3 de la L.P.P.E) : …une
altération grave de la santé et/ou laissé de séquelles physiques et/ou psychologiques
graves ;
- Violence aggravée envers les représentants de l’autorité (Art. 138bis du C.P) ont été la
cause de maladie ;
- expérimentation médicale aggravée sur un enfant (article 154, al. 2-3 de la L.P.P.E) ;
- administration volontaire à un enfant des substances nuisibles aggravée (article 156 de
la L.P.P.E) ;
- délaissement d’un enfant ayant entrainé mutilation ou infirmité permanente (article
190, al. 2 de la L.P.P.E).

§3. ANALYSE DE L’INFRACTION PRETERINTENTIONNELLE


TYPE : LES COUPS MORTELS
Par coups mortels, généralement appelés homicide préterintentionnel (mais nous savons à
présent que ce n’est pas le seul homicide préterintentionnel) on entend les coups et/ou les
blessures volontaires ayant entrainé la mort sans intention de la donner.
A. ELEMENT LEGAL ET ELEMENT AXIOLOGIQUE

Les coups mortels sont prévus et punis par l’article 48 du C.P et par l’article 150 de la
L.P.P.E.
L’article 48 du C.P dispose : « Lorsque les coups portés ou les blessures faites volontairement
mais sans intention de donner la mort l’ont pourtant causée, le coupable sera puni d’une
servitude pénale de cinq ans à vingt ans et d’une amende qui ne pourra excéder deux mille
francs ».

L’article 150 de la L.P.P.E dit : « Les coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort
d'un enfant sans intention de la donner sont punis de cinq à vingt ans de servitude pénale
principale et d'une amende de cinq cents mille à un million de francs congolais ».
41
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

La lecture juxtaposée de ces deux dispositions en révèle l’identité, en dépit de la spécificité


relative au taux élevé d’amende de cinq cents mille à un million de francs congolais dans la
L.P.P.E ainsi que de la spécificité relative à la victime, qui peut être n’importe qui dans le
code pénal congolais, mais uniquement un enfant mineur dans la L.P.P.E. Ce qui pousse à se
demander si cette dernière intervention du législateur était opportune ?
Avant d’y répondre, il échait non seulement de rappeler que cette infraction protège la
personne dans sa vie, mais de préciser que la réalisation de l’infraction de coups mortels
requiert les éléments des coups et blessures volontaires et le résultat non recherché : le décès
de la victime.
B. ELEMENTS MATERIELS

Pour que les coups mortels soient établis, l’infraction doit se révéler par le décès de la
victime, consécutif aux coups et blessures. D’où deux éléments matériels suivants : l’élément
matériel de l’infraction de coups et blessures volontaires et le résultat non voulu, non-
recherché : le décès de la victime.

1. L’élément matériel de l’infraction de coups et blessures volontaires : nous nous y


appesantirons lors de l’étude de l’infraction de coups et blessures volontaires. Peu importe
qu’il s’agisse des coups et blessures volontaires simples ou aggravés.
2. Le résultat non voulu, non-recherché : le décès de la victime. Il faut que le coup porté ou
les blessures faites volontairement provoquent la mort de la victime. Peu importe le temps
écoulé entre la perpétration ou l’accomplissement de l’acte incriminé et la mort de la
victime. Il suffit qu’il y ait un lien de causalité entre l’acte matériel et la mort de la
victime. Ex : l’agent qui donne de coups à une personne qui se blesse et meurt à la suite
du tétanos.
A. ELEMENTS INTELLECTUELS

Les coups mortels sont affectés d’un dol préterintentionnel, c.-à-d.,

1. L’intention, la volonté de faire du mal à la victime : L’élément intentionnel porte ici sur
l’acte, c'est-à-dire sur le coup et non sur la mort qui en est la conséquence. Il importe
donc peu que l’auteur ait prévu ou non cette conséquence, qu’il ait voulu ou non ou
même qu’il n’ait pas pu la prévoir. L’essentiel est qu’il ne doit pas avoir cherché ou visé
la mort de la victime163.
2. Absence d’intention de tuer ;
3. Lien de causalité entre l’acte posé (intentionnellement) et la mort de la victime :
L’infraction suppose une relation de cause à effet entre les coups portés et les blessures
faites volontairement et la mort de la victime. Il faut que la mort soit la conséquence des
coups sinon on tombe sur les articles 46 et 47 du code pénal.
La jurisprudence décide que cette causalité existe même si des soins appropriés auraient
dû empêcher la mort de la victime du moment qu’il n’est pas établi que cette mort est due
à une cause étrangère ou à la suite d’une infection provenant des soins. Exemple : lorsque
la mort de la victime résulte d’une rupture utérine sur une cicatrice de césarienne causée

163 LIKULIA BOLONGO, op. cit., p


42
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

par la gifle donnée par la prévenue laquelle gifle provoqua l’accouchement par suite du
choc émotif quelle occasionna.
Ce lien de causalité peut être indirect mais il doit être établi pour que le juge se prononce.
D. PROTAGONISTES ET REGIME REPRESSIF

1. Délinquant : n’importe qui peut être auteur de cette infraction.


2. Victime : la personnalité humaine de la victime est requise. Il s’agit de n’importe qui dans
le code pénal congolais et uniquement d’un enfant mineur dans la L.P.P.E.

Les coups mortels sont punis de servitude pénale et d’amende. La servitude pénale est la
même dans le code pénal congolais que dans la L.P.P.E : 5 à 20 ans.

La précision reprise par l’article 150 de la L.P.P.E, à savoir « servitude pénale principale » est
pléonastique. En effet, toutes les fois que la servitude pénale est l’instrument direct de la
répression, elle est principale ; elle ne devient subsidiaire que lorsqu’elle remplace l’amende.
Aussi l’expression servitude pénale principale est plus appropriée au juge qui l’utilise pour le
distinguer avec la servitude pénale subsidiaire, deux concepts qu’il utilise, mais pas au
législateur qui n’utilise pas le second. Ainsi, croyant qu’il corrigeait ses erreurs du passé, le
législateur a plutôt sombré dans le fourvoiement.

L’amende ne peut excéder deux mille francs, aux termes de l’article 48 du C.P.

L’article 150 de la L.P.P.E prévoit l’amende de cinq cents mille à un million de francs
congolais, lorsque l’enfant mineur est victime des coups mortels.

IV. APERCU DES AUTRES HOMICIDES PRETERINTENTIONNELS

Le relevé des infractions d’homicide préterintentionnel que nous avons effectué démontre que
les infractions préterintentionnelles sont incriminées plus comme circonstances aggravantes
d’autres infractions que comme infractions autonomes. Même les coups mortels que nous
qualifions d’infraction préterintentionnelle type n’est en réalité qu’une des circonstances
aggravantes de l’infraction des coups et blessures volontaires. C’est pourquoi nous
examinerons les autres homicides préterintentionnels au cours de l’examen des infractions
qu’ils aggravent.

SECTION II. LES ATTEINTES A L’INTEGRITE PHYSIQUE OU


MENTALE DE LA PERSONNE
Sous-section Ière. LES ATTEINTES VOLONTAIRES A L’INTEGRITE PHYSIQUE OU
MENTALE DE LA PERSONNE

§1. LES COUPS ET BLESSURES VOLONTAIRES


A. ELEMENT LEGAL ET ELEMENT AXIOLOGIQUE

Les coups et blessures volontaires sont prévus et punis par les articles 43, 46 et 47 du C.P
congolais ; les articles 143 à 145 et 147 à 149 de la L.P.P.E et par l’article 1er du Décret du 3
43
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

décembre 1956 portant répression des violences commises à l’occasion d’accidents de


roulage164 dont ci-dessous les libellés.

*Code pénal congolais


Article 43 du C.P. Sont qualifiés volontaires, l’homicide commis et les lésions causées
avec le dessein d’attenter à la personne d’un individu déterminé ou de celui qui sera
trouvé ou rencontré, quand même ce dessein serait dépendant de quelque circonstance
ou de quelque condition et lors même que l’auteur se serait trompé dans la personne de
celui qui a été victime de l’attentat.
Article 46 du C.P. Quiconque a volontairement fait des blessures ou porté des coups est
puni d’une servitude pénale de huit jours à six mois et d’une amende de vingt-cinq à
deux cents francs, ou d’une de ces peines seulement.
En cas de préméditation, le coupable sera condamné à une servitude pénale d’un mois
à deux ans et à une amende de cinquante à cinq cents francs.
Article 47 du C.P. Si les coups et les blessures ont causé une maladie ou une incapacité
de travail personnel, ou s’il en est résulté la perte de l’usage absolu d’un organe ou une
mutilation grave, les peines seront une servitude pénale de deux ans à cinq ans et une
amende qui ne pourra excéder mille francs.
*loi portant protection de l’enfant
Article 143 de la L.P.P.E. Quiconque porte volontairement des coups ou fait des
blessures à une femme enceinte est passible de six mois à un an de servitude pénale
principale et d'une amende de cent mille à deux cent cinquante mille francs congolais.
Article 144 de la L.P.P.E. Si les coups portés et les blessures faites volontairement, sans
détruire l'embryon ou le fœtus, entraînent pourtant une altération grave de la santé de
la femme, de l'embryon, du fœtus ou la perte d'un organe, l'auteur est passible de deux à
cinq ans de servitude pénale principale et d'une amende de deux cents mille à trois cent
cinquante mille francs congolais.
Article 145 de la L.P.P.E. Si les coups portés et les blessures faites volontairement,
mais sans intention de provoquer l'avortement, l'ont pourtant causé, l'auteur est
passible de deux à cinq ans de servitude pénale principale et d'une amende de trois cent
cinquante mille à cinq cent mille francs congolais.

164Décret du 3 décembre 1956 — Répression des violences commises à l’occasion d’accidents de roulage. – Approbation de
l’ordonnance-loi 05-320 du 10 octobre 1955. (B.O., 1956, p. 1986) in Les codes Larcier de la RDC, TII. Droit pénal,
Art. 1er. Sans préjudice de l’application de peines plus sévères qui seraient portées par le Code pénal, sera puni d’une
servitude pénale de 6 mois à 3 ans, celui qui, à l’occasion d’un accident de roulage, se sera livré à des violences à l’égard
du conducteur ou des passagers d’un véhicule.
Sera puni des mêmes peines celui qui aura commis des violences à l’égard des personnes qui portent ou cherchent à porter
assistance aux conducteurs et aux passagers des véhicules visés au premier alinéa du présent article ou aux victimes de
l’accident.
Art. 2. Sera puni d’une servitude pénale de 8 jours à 6 mois et d’une amende ne dépassant pas 200 francs ou d’une de ces
peines seulement, celui qui aura pris part à un attroupement au cours duquel des infractions visées par l’article 1 er auront été
commises.
Art. 3. N’est pas punissable, dans les circonstances reprises aux articles précédents, le fait de repousser une attaque,
défendre autrui ou séparer les combattants.
44
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Article 147 de la L.P.P.E. Les coups et blessures volontaires portés sur l'enfant sont
punis de trois à six mois de servitude pénale principale et d'une amende de cent mille à
deux cent cinquante mille francs congolais,
En cas de préméditation, l'auteur est passible de six à douze mois de servitude pénale
principale et d'une amende de cent cinquante mille à trois cent mille francs congolais.
Article 148 de la L.P.P.E. Les coups et blessures volontaires porté sur l'enfant ayant
entraîné une maladie ou une incapacité de plus de huit jours sont punis de six à douze
mois de servitude pénale principale et d'une amende de deux cents mille à trois cent
cinquante mille francs congolais
Article 149 de la L.P.P.E. Les coups et blessures volontaires ayant entraîné une
mutilation ou un handicap permanent de l'enfant sont punis de deux à cinq ans de
servitude pénale principale et d'une amende de trois cent cinquante à cinq cents mille
francs congolais.
Article 1er du Décret du 3 décembre 1956. Sans préjudice de l’application de peines
plus sévères qui seraient portées par le Code pénal, sera puni d’une servitude pénale de
6 mois à 3 ans, celui qui, à l’occasion d’un accident de roulage, se sera livré à des
violences à l’égard du conducteur ou des passagers d’un véhicule.
Sera puni des mêmes peines celui qui aura commis des violences à l’égard des
personnes qui portent ou cherchent à porter assistance aux conducteurs et aux
passagers des véhicules visés au premier alinéa du présent article ou aux victimes de
l’accident.
La lecture des articles susvisés nous convainc que le législateur incrimine différemment les
coups et blessures volontaires :
1. Selon qu’il tient compte de la gravité du préjudice causé, dans ce cas il faut
distinguer :
- Les coups et blessures volontaires simples ;
- Les coups et blessures volontaires aggravés.
2. Selon le degré de l’élément moral, dans quel cas on doit isoler des autres les coups et
blessures volontaires avec préméditation et
3. Selon la qualité de la victime, auquel cas il faut distinguer :
- les coups et blessures volontaires sur autrui ;
- les coups et blessures volontaires sur un enfant mineur et
- les coups et blessures volontaires sur une femme enceinte.

Du point de vue axiologique, les infractions susvisées protègent dans son intégrité physique et
mentale la personne physique qui peut être un homme ou une femme de n’importe quel âge et
de n’importe quelle condition physique ou mentale (ainsi celui frappe un fou ne sera pas
moins puni). Un accent est néanmoins mis sur la protection de l’enfant mineur et sur celle
d’une femme enceinte.
La réalisation de l’infraction de coups et blessures volontaires requiert un élément matériel et
un élément intellectuel. La personnalité humaine de la victime est requise comme pour toutes
les infractions portant atteinte à la personne. Toujours est-il que dans certains cas, la victime
doit être soit une femme enceinte, soit un enfant mineur.
45
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

B. ELEMENT MATERIEL DES COUPS ET BLESSURES VOLONTAIRES

1. Un fait matériel de coup ou de blessure ;

2. La personnalité humaine de la victime (voir victime)

Qu’il s’agisse des coups et blessures volontaires simples, des coups et blessures volontaires
avec préméditation, des coups et blessures volontaires aggravés, des coups et blessures
volontaires sur toute personne, des coups et blessures volontaires sur un enfant mineur ou des
coups et blessures volontaires sur une femme enceinte, toute infraction de coups et blessures
volontaires requiert d’abord un fait matériel consistant soit en un coup, c.-à-d. une atteinte
physique à la personne, soit en une blessure, c.-à-d. une lésion interne ou externe, ensuite la
personnalité humaine de la victime.

Tel est le principal élément matériel de l’infraction de coups et blessures volontaires auquel
s’ajoutent des particularités diverses pour constituer telle ou telle autres variantes susvisées de
cette infraction. C’est pourquoi LIKULIA, qui est très détaillé sur la question et dont nous
résumons les propos dans les lignes qui suivent, le classe dans les « éléments communs » à
toutes les infractions de coups et blessures volontaires165. S’il est trouvé seul, l’infraction est
qualifiée de « coups et blessures volontaires simples ».

Quoiqu’il en soit, il faut que l’acte perpétré par l’agent soit un acte positif et matériel à la
fois.
Par acte positif on veut dire un acte de commission et non une omission.
Par acte matériel on veut dire un coup ou une blessure. Toujours est-il qu’un des deux suffit
pour caractériser l’infraction.

1. LE COUP

LIKULIA enseigne que le coup est toute atteinte matérielle ou physique résultant du
rapprochement violent de deux corps. Peu importe la gravité ou le degré de la violence, même
si le coup n’a pas laissé de traces apparentes. Mais pour qu’il y ait un coup, il faut que celui-ci
soit de nature à impressionner physiquement la personne, à agresser. Avec le coup, le contact
entre les deux corps doit être assez sérieux pour faire la différence avec l’infraction de
violences et voies de fait. C’est ainsi que tirer l’oreille de quelqu’un n’est pas un coup. Un
coup crée une panique, un sursaut. Celui qui saisit violement ou non une personne et lui
frappe la tête sur le sol comme l’infraction de coups et blessures volontaire. Un coup peut être
administré soit directement soit indirectement.

- Directement : lorsque l’agent frappe immédiatement la victime : coup de tête, de pied.


C’est un choc direct. Le heurt est direct.
- Indirectement : lorsqu’on se sert d’un objet, d’une arme, d’un couteau, exciter
l’animal, lancer des pierres, ... Ici le contact se fait au moyen d’un instrument166.

Sont compris dans le mot «armes», toutes machines, tous instruments, ustensiles ou
autres objets tranchants, perçants ou contondants dont on se sera saisi pour tuer,
blesser ou frapper, même si on n’en a pas fait usage167.

165 LIKULIA BOLONGO N., op. cit., pp. 89-91.


166 LIKULIA BOLONGO, op. cit., pp.89-91.
46
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Selon Jean LESUEUR, « l’expression atteinte physique ne doit pas provoquer de confusion,
elle englobe les atteintes matérielles et les atteintes mentales à la santé de la victime»168.
Et d’ajouter que même les voies de fait entrainant une atteinte à la santé de la victime
doivent être réprimées comme coups et blessures volontaires.
« Les voies de fait sont des violences qui ne comportent ni coup ni blessure. Par
exemple : prendre une personne par le bras et l’expulser d’une pièce, d’un bar, etc. Les
voies de fait peuvent même ne comporter aucun contact direct avec la victime.
Par exemple : coucher une personne en joue avec un fusil, brandir contre elle une
hache, un rasoir, ou même frapper chaque nuit à sa fenêtre pour l’empêcher de trouver
le sommeil.
L’article 46 du Code Pénal ne parle pas des voies de faits qui ne sont citées que par
l’article 51 qui réprime les violences légères qui ne blessent ni ne frappent personne, en
prévoyant une peine légère de sept jours au maximum de servitude pénale. Que devra
faire le juge si les voies de fait nuisent, parfois gravement, à la santé de la victime.
Par exemple : - la victime couchée en joue avec le fusil, était cardiaque ; elle tombe
gravement malade ou meurt sur le coup.
- la personne qu’on empêche de dormir tombe malade, etc.
Il ne fait aucun doute que le juge doit, dans ces différents cas, appliquer les articles 46,
47 et 48 du code pénal et condamner l’auteur pour coups et blessures volontaires,
même s’il n’y a eu à proprement parler ni coup et blessure ».
N.B : Les violences exercées sur soi-même ne sont pas punissables (suicide manqué), sauf
textes spéciaux (avortement, mutilations volontaires pour se soustraire aux obligations
militaires).
2. LA BLESSURE

La blessure est toute lésion externe ou interne produite dans l’organisme humain soit par un
coup, soit par un choc ou rapprochement soit par une arme ou un instrument tranchant,
perçant, contondant, piquant soit par tout autre objet susceptible de laisser une trace apparente
ou durable, par exemple les dents169 (la morsure des dents comme objet perçant constitue les
coups et blessures). Donc par blessure, il faut entendre la déchirure de la peau ou de la chair
notamment la plaie, l’égratignure, l’ecchymose, les éraflures, toute brûlure, contusion ou
meurtrissure. Peu importe la gravité de la blessure, c'est-à-dire grande ou petite, la blessure est
une infraction. Une légère blessure peut être retenue. Envoyer son chien mordre quelqu’un est
une infraction de coups et blessures. Peu importe les moyens ou les instruments (liquide),
l’état physique de la victime (frapper un malade parce qu’il souffre il y a longtemps)170.

C. ELEMENT INTELLECTUEL

167 Art. 214 du C.P congolais.


168 LESSUER, J., op. cit., p.
169 C.S.J. 8septembre
170 LIKULIA BOLONGO, op. cit., pp.89-91.
47
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

L’élément intellectuel des coups et blessures volontaires est « l’intention, la volonté de faire
du mal à la victime, une intention indéterminée d’attenter à la personne de la victime :
l’animus nocendi ».

Le mobile, le consentement de la victime, l’erreur sur la personne sont inopérants.

B. PROTAGONISTES DES COUPS ET BLESURES VOLONTAIRES

1. Délinquant : il peut s’agir de n’importe qui.

2. Victime : la personnalité humaine de la victime est indispensable. La victime peut


cependant être n’importe qui. Il s’agit de n’importe qui dans le code pénal congolais et de
l’enfant mineur ou de la femme enceinte dans la L.P.P.E.

E. REGIME REPRESSIF

Les sanctions des coups et blessures volontaires varient selon qu’ils sont simples ou affectés
des circonstances aggravantes. Toujours est-il que depuis l’entrée en vigueur de la L.P.P.E
leurs régimes ne sont plus les mêmes.

1. Coups et blessures volontaires simples


La lecture du code pénal congolais et de la L.P.P.E révèle l’existence de trois catégories des
coups et blessures volontaires simples : les coups et blessures volontaires simples sue autrui ;
les coups et blessures volontaires simples sur une femme enceinte et les coups et blessures
volontaires simples sur un enfant. Un regard juxtaposé des articles y relatifs nous donne le
résultat que voici :

CODE PENAL L.P.P.E.


Article 46, al.1 Article 143 Article 147, al.1
C.B.V.S. sur autrui C.B.V.S. sur une femme C.B.V.S. sur un enfant
enceinte
Quiconque a volontairement Quiconque porte Les coups et blessures
fait des blessures ou porté volontairement des coups ou volontaires portés sur
des coups est puni d’une fait des blessures à une femme l'enfant sont punis de trois
servitude pénale de huit enceinte est passible de six à six mois de servitude
jours à six mois et d’une mois à un an de servitude pénale principale et d'une
amende de vingt-cinq à deux pénale principale et d'une amende de cent mille à
cents francs, ou d’une de ces amende de cent mille à deux deux cent cinquante
peines seulement. cent cinquante mille francs mille francs congolais.
congolais.

La différence au niveau du taux de la peine aurait commandé que l’on considéra les
incriminations de la L.P.P.E comme des circonstances aggravantes de l’infraction prévue par
le code pénal, mais le fait qu’elles soient calquées sur celle-ci, déjà à ce niveau, mais aussi au
niveau des circonstances aggravantes qui s’ajoutent aux incriminations de base nous amène à
considérer trois séries de coups et blessures volontaires simples qui ne différent pas en grand-
48
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

chose. En effet, elle ne différent en rien dans la définition de l’incrimination. Les seuls
différences qu’elles ont sont au niveau des victimes qu’elles protègent et des peines. Autant
reconnaître que cela relève d’une mauvaise légistique, parce qu’elle participe à l’inflation
pénale et à l’éparpillement des sources documentaires des infractions, deux maux qui
pouvaient être évités si l’on s’était limité à modifier et à compléter le code pénal à ce sujet.
a) Les coups et blessures volontaires simples sur autrui : ils sont punis de huit jours à
six mois de servitude pénale et de vingt-cinq à deux cents francs d’amende ou d’une
de ces peines seulement, en vertu de l’article 46, al.1 du C.P.

b) Les coups et blessures volontaires simples sur une femme enceinte : ils sont punis
de six mois à un an de servitude pénale principale et d'une amende de cent mille à
deux cent cinquante mille francs congolais, en vertu de l’article 143 de la L.P.P.E.

c) Les coups et blessures volontaires simples sur un enfant : ils sont punis de trois à
six mois de servitude pénale principale et d'une amende de cent mille à deux cent
cinquante mille francs congolais, en vertu de l’article 147, al.1 de la L.P.P.E.

2. Coups et blessures volontaires accompagnés des circonstances aggravantes


2.1.Coups et blessures volontaires avec préméditation

CODE PENAL L.P.P.E.

Article 46, al.2 Article 147, al.2


C.B.V. avec préméditation sur autrui C.B.V. avec préméditation sur un enfant
En cas de préméditation, le coupable sera En cas de préméditation, l'auteur est passible
condamné à une servitude pénale d’un mois de six à douze mois de servitude pénale
à deux ans et à une amende de cinquante à principale et d'une amende de cent cinquante
cinq cents francs. mille à trois cent mille francs congolais.

Ici également, seuls la victime et les taux des peines distinguent les deux infractions dont les
incriminations sont les mêmes.
a) Coups et blessures volontaires avec préméditation sur autrui : ils sont punis d’une
servitude pénale d’un mois à deux ans et d’une amende de cinquante à cinq cents
francs, en vertu de l’article 46, al.2 du C.P.

b) Coups et blessures volontaires avec préméditation sur un enfant : ils sont punis
d’une servitude pénale d’un mois à deux ans et d’une amende de cinquante à cinq
cents francs, en vertu de l’article 147, al.2 de la L.P.P.E.

2.2.Coups et blessures volontaires aggravés

CODE PENAL L.P.P.E.


Article 47 Article 144 Articles 148 et 149
C.B.V.A. sur autrui C.B.V.A. sur une femme C.B.V.A. sur un enfant
enceinte
Si les coups et les Si les coups portés et les Les coups et blessures volontaires
49
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

blessures ont causé blessures faites porté sur l'enfant ayant entraîné une
une maladie ou une volontairement, sans maladie ou une incapacité de plus de
incapacité de travail détruire l'embryon ou le huit jours sont punis de six à douze
personnel, ou s’il en fœtus, entraînent pourtant mois de servitude pénale principale et
est résulté la perte de une altération grave de la d'une amende de deux cents mille à
l’usage absolu d’un santé de la femme, de trois cent cinquante mille francs
organe ou une l'embryon, du fœtus ou la congolais
mutilation grave, les perte d'un organe, l'auteur
peines seront une est passible de deux à Les coups et blessures volontaires
servitude pénale de cinq ans de servitude ayant entraîné une mutilation ou un
deux ans à cinq ans pénale principale et d'une handicap permanent de l'enfant sont
et une amende qui ne amende de deux cents punis de deux à cinq ans de servitude
pourra excéder mille mille à trois cent pénale principale et d'une amende de
francs. cinquante mille francs trois cent cinquante à cinq cents
congolais. mille francs congolais.

a) Coups et blessures volontaires aggravés sur autrui : Ils sont punis de


deux ans à cinq ans de servitude pénale et d’une amende qui ne pourra
excéder mille francs, en vertu de l’article 47 du C.P. Ici LIKULIA 171 parle
des circonstances aggravantes tenant au préjudice causé. L’élément qui
forme la circonstance aggravante est la conséquence incriminée172.
b) Coups et blessures volontaires aggravés sur une femme enceinte : Ils
sont punis de deux à cinq ans de servitude pénale principale et d'une
amende de deux cents mille à trois cent cinquante mille francs congolais,
en vertu de l’article 144 de la L.P.P.E.
c) Coups et blessures volontaires aggravés sur un enfant : Ils sont punis :
- de six à douze mois de servitude pénale principale et d'une amende de
deux cents mille à trois cent cinquante mille francs congolais, en vertu
de l’article 148 de la L.P.P.E, s’ils ont entraîné une maladie ou une
incapacité de plus de huit jours.

- de deux à cinq ans de servitude pénale principale et d'une amende de


trois cent cinquante à cinq cents mille francs congolais, en vertu de
l’article 149 de la L.P.P.E, s’ils ont entraîné une mutilation ou un
handicap permanent de l'enfant.
Dans ce cas aussi, les éléments qui forment les circonstances aggravantes
sont les conséquences incriminées

Il en découle que les lois incriminent les conséquences suivantes :

- une maladie : l’altération de la santé et non une simple douleur, car le coup fait
normalement mal ou provoque la douleur certainement. La simple douleur ne suffit pas à
caractériser la maladie. Il faut donc une maladie sérieuse ou grave et non simple maladie.
- une incapacité de l’enfant de plus de huit jours.
- une incapacité de travail personnel : C’est toute immobilisation de la victime de se livrer
à ses occupations habituelles ou à exercer un travail corporel quelconque. Et cette

171
172 NYABIRUNGU mwene SONGA,
50
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

incapacité doit être sérieuse soit par sa durée, soit par ses modalités. Exemple : donner
des coups à quelqu’un qui ne peut pas exercer son travail pendant deux mois. Cette
incapacité peut être totale ou partielle : I.T.P.T= incapacité de travail
personnel temporaire et I.T.P.P= incapacité de travail personnel permanente. Mais la
condition est qu’elle soit sérieuse. L’incapacité doit être le résultat des coups qu’il a
administrés.
- la perte de l’usage absolu d’un organe : Il s’agit d’une infirmité permanente résultant de
la perte d’un des organes du corps humain (Perte de la vue). La paralysie d’un membre du
corps humain entre dans cette catégorie. Exemple : couper l’avant-bras de quelqu’un avec
une machette, c’est un coup grave parce qu’on ne peut plus le reconstituer. Ce coup
provoque une infirmité permanente pour la victime.
- une mutilation grave : Il n’y a pas perte absolue d’un organe mais seulement perte de
l’usage. Ex : couper une des oreilles est une mutilation grave qui ne détruit pas l’ouïe.
Constitue la mutilation grave : la perte d’un œil, d’une oreille, du nez, d’un bras, d’une
jambe… qui n’empêche pas l’autre à fonctionner. Ne constitue pas une mutilation grave :
la perte d’un doigt. Ces questions sont des faits laissés toujours à l’appréciation
souveraine du juge. La perte du doigt n’est pas plus grave que celle du bras.
- Un handicap permanent de l’enfant.
- une altération grave de la santé de la femme, de l'embryon, du fœtus ou la perte d'un
organe.

2.3.Coups et blessures volontaires ayant provoqué l’avortement sans intention de


la causer : Ils sont punis de deux à cinq ans de servitude pénale principale et d'une
amende de trois cent cinquante mille à cinq cent mille francs congolais, en vertu de
l’article 145 de la L.P.P.E qui dispose : « Si les coups portés et les blessures faites
volontairement, mais sans intention de provoquer l'avortement, l'ont pourtant causé,
l'auteur est passible de...».

2.4.Coups et blessures volontaires au cours d’un accident de circulation routière.


Ils sont punis de 6 mois à 3 ans de servitude pénale en vertu de l’article 1er du
Décret du 3 décembre 1956 précité qui dispose : « Sans préjudice de l’application
de peines plus sévères qui seraient portées par le Code pénal, sera puni d’une
servitude pénale de 6 mois à 3 ans, celui qui, à l’occasion d’un accident de roulage,
se sera livré à des violences à l’égard du conducteur ou des passagers d’un
véhicule.
Sera puni des mêmes peines celui qui aura commis des violences à l’égard des
personnes qui portent ou cherchent à porter assistance aux conducteurs et aux
passagers des véhicules visés au premier alinéa du présent article ou aux victimes
de l’accident. »

§2. TORTURE

INTRODUCTION

En date du 15 juillet 2011, le journal officiel de la République Démocratique du Congo, en


sigle R.D.C, a publié dans son quatorzième numéro de la cinquante-deuxième année la Loi
n°11/008 du 09 juillet 2011 dite « portant criminalisation de la torture » en R.D.C. Toujours
est-il que l’interdiction de la torture dans le monde ne date de ce siècle.
51
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Plusieurs instruments juridiques nationaux et internationaux interdisent la torture, nous


pouvons citer :
- La déclaration universelle des droits de l’homme de l’ONU du 10 Décembre 1948 en
son article 5 ;
- La convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou
traitements cruels, inhumains ou dégradants adoptée le 10 décembre1984 et entrée en
vigueur le 26 juin 1987, mais ratifiée par la R.D.C, le 18/3/1996 ;
- Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou
traitements cruels, inhumains ou dégradants. Ce protocole est conclu à New York, le
18 décembre 2002. Ce protocole est approuvé par l'Assemblée générale le 20 mars
2009. L’instrument de ratification congolais est déposé le 2 3 septembre 2010. Le
protocole est entré en vigueur pour la R.D CONGO le 23 octobre 2010 ;
- Le pacte international relatif aux droits civils et politiques. Ce pacte est adopté et
ouvert à la signature, à la ratification et à l'adhésion par l'Assemblée générale dans sa
résolution 2200 A (XXI) du 16 décembre 1966. Il est entré en vigueur: le 23 mars
1976, conformément aux dispositions de l'article 49. Il interdit la torture en son article 7.
- Le traité de Rome du 17 juillet 1998 portant statut de la Cour pénale internationale. La
RDC a ratifié ce par le Décret- Loi n° 00/3/2000 du 30 mars 2002. Il n’a pas fait
l’objet d’une publication au journal officiel. Il interdit la torture dans plusieurs de ses
articles : 7 ; 8 et 55 ;
- La charte africaine des droits de l'homme et des peuples du 27 juin 1981, entré en
vigueur le 21 octobre 1986 : article 5 ;
- La constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006 : article 61 ;
- Le code pénal congolais : articles 48bis ; 48ter ; 48quater et 67 ;
- Le code pénal militaire : articles 166 ; 167 ; 169 ; 173 ; 191 ; 192 et 194 ;
- La loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l'enfant : articles 151 et 152 ;
- La loi organique n°11/013 du 11 août 2011 portant organisation et fonctionnement de
la police nationale congolaise -P.N.C- : article 7 ;
- Loi n° 08/011 du 14 juillet 2008 portant protection des droits des personnes vivant
avec le VIH/SIDA et des personnes affectées : articles 34 ; 42 ; 44.

I. ELEMENT LEGAL
L’interdiction de la torture en droit congolais résulte des plusieurs textes d’origines interne et
internationale qui y sont en vigueur. Aussi la base légale de cette infraction est diversifiée.
Cette diversification entraîne ipso facto une diversité de régimes juridiques de la torture en
RDC. Nous limiterons à la torture telle qu’incriminée dans le code pénal congolais et la loi n°
09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant.

A. LE CODE PENAL CONGOLAIS

La torture est prévue et punie par le code pénal congolais sur pied des articles 48bis, 48ter
48quater et 67 dont les libellés suivent.

« Article 48 bis. Tout fonctionnaire ou officier public, toute personne chargée d’un service
public ou toute personne agissant sur son ordre ou son instigation, ou avec son consentement exprès
ou tacite, qui aura intentionnellement infligé à une personne une douleur ou des souffrances aiguës,
physiques ou mentales, aux fins d’obtenir d’elle ou d’une tierce personne des renseignements ou des
aveux, de la punir d’un acte qu’elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d’avoir
commis, de l’intimider ou de faire pression sur elle ou d’intimider ou de faire pression sur une tierce
personne ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu’elle soit, sera puni
52
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

de cinq à dix ans de servitude pénale principale et d’une amende de cinquante mille francs congolais
à cent mille francs congolais.
Article 48ter. Le coupable sera puni de dix à vingt ans de servitude pénale principale et d’une
amende de cent mille francs congolais à deux cent mille francs congolais lorsque les faits prévus à
l’article 48bis ci-dessus auront causé à la victime un traumatisme grave , une maladie , une incapacité
permanente du travail, une déficience physique ou psychologique, ou lorsque la victime est une femme
enceinte, un mineur d’âge ou une personne de troisième âge ou vivant avec handicap.
Il sera puni de servitude pénale à perpétuité lorsque les mêmes faits auront causé la mort de la
victime.
Article 48quater. Sans préjudices des dispositions de l’article 24 du Code pénal, l’action
publique résultant de faits prévus par les articles 48bis et 48ter ci-dessus est imprescriptible.
Article 67. Est puni d’une servitude pénale d’un à cinq ans celui qui, par violences, ruses ou
menaces, a enlevé ou fait enlever, arrêté ou fait arrêter arbitrairement, détenu ou fait détenir une
personne quelconque.
Lorsque la personne enlevée, arrêtée ou détenue aura été soumise à des tortures corporelles, le
coupable est puni d’une servitude pénale de cinq à vingt ans. Si les tortures ont causé la mort, le
coupable est condamné à la servitude pénale à perpétuité ou à mort. »

Les articles 48bis, 48ter 48quater ont été introduites dans le code pénal par la loi n°11/008 du
09 juillet 2011 portant criminalisation de la torture173, qui ne fait aucun obstacle à la loi n° 09/001 du
10 janvier 2009 portant protection de l'enfant.

B. LOI N° 09/001 DU 10 JANVIER 2009 PORTANT PROTECTION DE L'ENFANT174

La loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l'enfant incrimine la torture à travers les
articles 151 et 152 aux termes desquels :

« Article 151. Le fait de soumettre un enfant à la torture est puni de un à cinq ans de servitude pénale
principale et d'une amende de cinq cents mille à un million de francs congolais.

Il faut entendre par torture, tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou
mentales, sont intentionnellement infligées à une personne aux fins notamment de :
1. obtenir d'elle ou d'une tierce personne des renseignements ou des aveux ;
2. la punir d'un acte qu'elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée d'avoir
commis ;
3. l'intimider ou faire pression sur elle, intimider, faire pression sur une tierce personne, ou
pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination quelle qu'elle soit, lorsqu'une telle
douleur ou de telles souffrances sont infligées par un agent de la fonction publique ou toute
autre personne agissant à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès
ou tacite.

Article 152. La peine encourue est la servitude pénale à perpétuité lorsque les tortures ou les actes de
brutalité, de cruauté, d'odieuses souffrances, de privation ou de séquestration susceptibles de porter
atteinte à sa santé physique ou mentale ainsi qu'à son équilibre affectif et psychologique ont entraîné
la mort. »

173 Loi n°11/008 du 09 juillet 2011 portant criminalisation de la torture, in JORDC, n°14, 52ème année, Kinshasa, 15 juillet
2011, col. 21.
174 loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l'enfant, in JORDC, n°14, 52ème année, Kinshasa, 15 juillet 2011,

col. 21.
53
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Ces textes diffèrent de ceux qui sont portés par la Loi n° 08/011 du 14 juillet 2008 portant
protection des droits des personnes vivant avec le VIH/SIDA et des personnes affectées.

II.DENOMINATIONS
A la lecture minutieuse des incriminations de la torture, il s’avère que celles-ci ne définissent
pas une seule infraction, mais plusieurs, et qui, du reste, relèvent de différentes catégories.
Nous distinguons ainsi :

1. Les tortures simples. Celles-ci sont au nombre de trois:


- la torture simple d’autrui : article 48bis du C.P ;
- la torture simple d’un enfant mineur : article 151 de la L.P.P.E et
- la torture simple d’une personne vivant avec le VIH/SIDA ou d’une personne
affectée : articles 44 et 42 de la loi sur les P.V.V ;
2. La torture aggravée : article 48ter, al. 1er du C.P ;
3. Les tortures mortelles. Elles sont au nombre de deux:
- la torture mortelle d’autrui : article 48ter, al. 2 du C.P et
- la torture mortelle d’un enfant : article 152 de la L.P.P.E ;
4. Les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ayant entrainé la mort d’un
enfant : article 152 de la L.P.P.E ;

III. DEFINITIONS
Il ressort de la lecture de certains textes incriminateurs, en l’occurrence le code pénal
congolais, la L.P.P.E et le traité de Rome portant statut de la C.P.I, que ces derniers
définissent ce qu’ils entendent par la torture. Il en résulte deux définitions différentes et qui ne
correspondent pas à la définition que la morale ou le français courant réservent à ce concept.

a) Définition de la torture au sens usuel


D’après le dictionnaire d’éthique et de philosophie morale,
« Torturer, c’est d’abord infliger délibérément une violence à autrui, en créant ainsi
une douleur extraordinaire, physique ou mentale. Le supplice doit se prolonger dans le
temps : frapper une personne occasionnellement n’est pas considéré comme de la
torture… Dans les États répressifs la torture peut être utilisée pour arracher des
confessions (vraies ou fausses). Par opposition, autrefois, la torture était un moyen
d’établir la vérité, d’obtenir des preuves.175 »

b) Définition de la torture au sens de la loi portant la criminalisation de la torture


En Droit, le Code pénal congolais et la L.P.P.E définissent la torture conformément à l’article
1er de la Convention des Nations unies contre la torture et les peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants176 que nous pouvons synthétiser de la manière suivante :
« On entend par torture, tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës,
physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne, par un agent

175MORRIS, Dictionnaire d’éthique et de philosophie morale, cité par DOUCET, J.P, op. cit., V° torture.
176Convention des Nations unies contre la torture et les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants adoptée le
10 décembre1984 ; entrée en vigueur le 26 juin 1987 et ratifiée par la RDC le 18/3/1996.
54
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

public agissant es qualité ou avec son accord, dans la poursuite de l’un des buts
déterminés par la loi ».
Ainsi sont exclus du champ de la torture deux catégories d’actes :
1° Les actes de même nature que ceux qui sont visés par la loi mais qui, soit sont
commis par l’agent public en dehors de l’exercice de ses fonctions, soit sont commis par
le commun des mortels et
2° Les actes de même nature que ceux qui sont visés par la loi commis par l’agent
public dans l’exercice de ses fonctions, mais dans un but autre que ceux qui sont visés
par la loi.
Les actes ainsi exclus ne peuvent être poursuivis que sur pied des qualifications suivantes:

- Les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Cela sera possible dans
un pays où cette infraction est consacrée. Elle ne l’est pas en R.D.C, sauf dans la
L.P.P.E ;
- d’autres infractions portant atteinte à la personne telles que les coups et blessures
volontaires …

Quoiqu’il en soit, toutes ces définitions associent l’infraction de torture à l’idée de douleur ou
de souffrance. Cependant, la Convention interaméricaine pour la prévention et la répression
de la torture de 1985 en dispose autrement.

Pour elle :
« La torture est l’application à toute personne de méthodes visant à annuler la
personnalité de la victime ou à diminuer sa capacité physique ou mentale même si ces
méthodes et procédés ne causent aucune douleur physique ou angoisse psychique. 177»

IV. ELEMENT AXIOLOGIQUE OU VALEUR PROTEGEE


L’incrimination de torture protège, d’une part, la personne dans son intégrité physique et
mentale ainsi que dans sa vie et sa dignité et, d’autre part, la paix et la sécurité de
l’humanité178.

V. ANALYSE DE LA TORTURE DE DROIT COMMUN


A. ELEMENT MATERIELS
a) Un fait matériel de torture appelé aussi acte matériel de torture (de
commission ou d’omission)

Le fait matériel qui consomme l’infraction de torture est communément appelé « acte matériel
de torture ». L’article 269-1 (2) du code criminel du Canada le dit clairement : « la torture est
l’acte, commis par action ou omission … ». La confusion qui peut résulter de la similitude
qu’il y a entre les concepts « acte » et « action », par opposition à « omission », justifie la

177 Convention interaméricaine pour la prévention et la répression de la torture, Signée en 1985 et entrée en vigueur en
1987.
178 NYABIRUNGU mwene SONGA, Droit international pénal : crimes contre la paix et la sécurité de l’humanité, éd. D.E.S,

Kinshasa, 2013, p. 201.


55
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

préférence que nous avons sur le concept « fait », lequel terme peut bien traduire aussi bien
« l’action » que « l’omission ».

Le fait matériel de torture n’est pas n’importe lequel, c’est pourquoi sa précision importe
qu’on s’y attarde avec plus de détails en indiquant que :

1.1. Le fait matériel de torture consiste soit en une action, soit en une
omission.

En effet, le fait matériel de la torture peut consister en un acte positif et matériel ou en une
abstention. L’acception d’un acte positif et matériel a été développée lors de l’examen de
l’infraction de coups et blessures volontaires, on s’y référera.

Le fait matériel de torture se traduit par une abstention dans le fait, par exemple, de laisser la
victime souffrir d’inanition ou un fait analogue. L’article 66 du code pénal militaire révèle
bien qu’une inaction peut constituer un acte de torture lorsqu’il précise que

« Article 166. Constituent des crimes contre l’humanité et réprimées conformément aux
dispositions du présent Code, les infractions graves énumérées ci-après portant atteinte, par
action ou par omission, aux personnes et aux biens protégés par les conventions de Genève du
12 août 1949 et les protocoles additionnels du 8 juin 1977, … ».

1.2.Le fait matériel de torture doit produire une douleur ou des


souffrances aiguës physiques ou mentales donc un fait cruel

L’acte matériel de torture physique doit être un acte cruel d’une gravité exceptionnelle
produisant une douleur ou des souffrances aiguës. La jurisprudence française a précisé que
l’élément matériel de cette infraction consiste dans la commission d’un ou plusieurs actes
d’une gravité exceptionnelle qui dépassent de simples violences et occasionnent à la victime
une douleur ou une souffrance aigüe 179.

Par douleur, il faut entendre une souffrance physique ou morale et par souffrance, il faut
entendre un malaise, une douleur ou une peine.

Le caractère aigu exigé par le législateur signifie que la douleur ou la souffrance ne doit pas
être normale, mais plutôt violente ; intense ; pénétrante ; piquante ou excessive.

Il s’agit donc d’une action ou d’une omission cruelle d’une gravité exceptionnelle produisant
une douleur ou des souffrances aiguës, physiques (acte matériel de torture physique) ou
mentales (acte matériel de torture mentale).

La Cour européenne des droits de l’homme abonde dans le même sens : « Constituent des
actes de torture des violences physiques et mentales qui ont provoqué des douleurs et des
souffrances aiguës et qui revêtent un caractère particulièrement grave et cruel180 ».

Souvent il s’agit d’un acte volontaire, programmé, répété, qui procède d’une décision (à la
différence d’une bavure ou d’un acte de colère).

179 Lyon, ch. Acc., 19 janvier 1996.


180 Cour EDH 28 juillet 1999 (D. 2000 SC 179, obs. Renucci), cité par DOUCET, J.P., op. cit., v° Torture.
56
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

1.3. Même si la loi a omis de le dire, les douleurs ou souffrances résultant


uniquement de sanctions légales, inhérentes à elles ou occasionnées par
elles sont exclues du champ de la torture.

Telle est l’intelligence de l’article 7, 2.e du Statut de la C.P.I et de l’article 1er.1, in fine, de la
Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants qui disent :

1.4. Exemples d’actes matériels de torture

- L’acte matériel de torture physique

Il y a d’innombrables façons de faire mal et il n’est pas possible (ni souhaitable) de les
répertorier toutes. Néanmoins, les techniques suivantes sont les plus utilisées :

1. Les coups portés sur tout le corps, de préférence sur les parties les plus sensibles :
gifles, coups de poing, coups de pied ; coups assénés à l’aide de bâtons, de barres de
fer, de fouets, de câbles électriques, de matraques ;
2. L’immobilisation dans des positions douloureuses : ligotage ou menottage serré ;
maintien prolongé sans bouger debout, accroupi, sur un pied, sur la pointe des pieds ;
181
3. Les suspensions des heures durant par les poignets, par les pieds, par les genoux.

- L’acte matériel de torture mentale

1. La privation de sommeil : quelques jours sans pouvoir dormir conduit les victimes à la
limite de la folie ;
2. Les privations sensorielles : le port prolongé d’un bandeau sur les yeux ou d’une
cagoule, de casques assourdissants ; le maintien dans l’obscurité complète et/ou dans le
silence absolu. Privé de tout repère temporel et spatial, de toute stimulation extérieure,
de toute activité relationnelle, un homme devient très vite la proie d’hallucinations et de
terreurs incontrôlées. Les troubles émotionnels, intellectuels, oculaires ou auditifs, et
psychosomatiques peuvent être irréversibles si la situation se prolonge ;
3. L’hyperstimulation sensorielle : confrontation à des bruits intenses (musique, cris,
sifflements…), à des lumières aveuglantes et/ou stroboscopiques (qui a trait à la
stroboscopie : procédé permettant d’observer un phénomène périodique au ralenti), à
des lumières constantes de jour comme de nuit. 182

b) But poursuivi par le tortionnaire183

Il convient de relever dès le départ que la qualité de l’auteur est préalable et déterminante à
tout établissement de l’infraction de torture simple d’autrui prévu et puni par l’article 48bis du
code pénal congolais. Une étude qui la présenterait comme élément matériel de cette
infraction ne ferait pas une œuvre médiocre. Fidèle à notre canevas, nous en parlerons dans le

181 Les méthodes de torture, publication de l’Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture, disponible sur
www.acatfrance.fr.
182 Id. loc. cit.
183 Une intention d’obtenir de la victime des aveux, des renseignements, ou de la punir d’un acte commis par elle ou par un

autre, ou de l’intimider, de la terroriser (elle ou le groupe auquel elle appartient) ou de lui faire payer le fait d’appartenir à une
minorité. la poursuite d’un but spécifique qui distingue la torture d’autres traitements cruels.
57
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

point relatif aux protagonistes du drame pénal. C’est ainsi qu’ici, nous n’examinerons que le
but poursuivi.

Le tortionnaire poursuit généralement cinq buts :

- Obtenir des renseignements ;


- Obtenir des aveux ;
- Punir la victime ;
- Détruire la personnalité de la victime
- Terroriser l’individu et le groupe social auquel il appartient.

L’article 48bis du code pénal congolais exige que le tortionnaire poursuive un des buts
suivants :
1. obtenir de la victime des renseignements ;
2. obtenir d’une tierce personne des renseignements ;
3. obtenir de la victime des aveux ;
4. obtenir d’une tierce personne des aveux ;
5. punir la victime d’un acte qu’elle a commis ou est soupçonnée d’avoir commis ;
6. punir la victime d’un acte qu’une tierce personne a commis ou est soupçonnée d’avoir
commis ;
7. intimider la victime ;
8. faire pression sur la victime ;
9. intimider une tierce personne ;
10. faire pression sur une tierce personne et
11. discriminer la victime de quelque manière que ce soit.

c) La qualité de l’auteur : voir délinquant.


d) La qualité de la victime : pour la torture simple d’enfant mineur

L’article 151 de la L.P.P.E exige, outre le fait matériel, la qualité de l’auteur et le but
poursuivi, la qualité de la victime en ce que celle-ci doit être un enfant mineur.

VI. ELEMENT INTELLECTUEL : L’intention méchante

Il résulte de l’article 48bis du C.P sur la torture simple que celle –ci doit être commise
intentionnellement et avec un mobile précis: « Tout fonctionnaire ou officier public, toute
personne chargée d’un service public ou toute personne agissant sur son ordre ou son instigation, ou
avec son consentement exprès ou tacite, qui aura intentionnellement infligé … aux fins d’obtenir …».

C’est donc l’intention méchante, mais triplement caractérisée par :


1. la volonté d’accomplir des actes d’une gravité exceptionnelle ;
2. la volonté de faire souffrir la victime et
3. le mobile : briser la personnalité de la victime et obtenir d’elle un comportement
qu’elle n’aurait pas volontairement.

VII. PROTAGONISTES DE LA TORTURE DE DROIT COMMUN


A. Délinquants

L’auteur de la torture est généralement appelé tortionnaire ou bourreau.


58
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

1. L’agent public
Les dispositions du code pénal congolais et de la L.P.P.E sur la torture convainquent que seuls
peuvent se rendre coupables de torture en qualité d’auteur principal l’agent public et le
particulier qui agit sur son ordre ou sous son instigation.
Par agent public, l’article 147, 1 du code pénal184 entend « Tout fonctionnaire ou tout employé
de l’Etat ou de ses institutions, y compris ceux qui ont été sélectionnés, nommés ou élus pour
entreprendre des activités ou exercer des fonctions au nom ou au service de l’Etat, à tout
niveau de sa hiérarchie ».
Cette définition comprend toutes les qualités des autorités visées par les dispositions relatives
à la torture qui sont :
1° Le fonctionnaire ou l’officier public agissant dans le cadre de ses fonctions et
2° La personne chargée d’un service public agissant dans le cadre de ses fonctions.
Il peut s’agir donc des magistrats, officiers de police judiciaire, policiers, militaires, gardiens
de prison, fonctionnaires de la territoriale, groupes paramilitaires…

En vertu de la théorie de fonctionnaire de fait, il faut assimiler à l’agent public les personnes
se comportant comme tel dans les milieux non pourvus des autorités dûment établies telles
que les carrières de mines, de même que les milieux occupés par les insurgés, rebelles ou
autres groupes révolutionnaires dont le but est la prise de pouvoir.

2. Le particulier qui agit sur son ordre ou sous son instigation


La « personne agissant sur l’ordre ou sous l’instigation d’une des personnes
susmentionnées » peut aussi se rendre coupable de torture au titre d’auteur principal. Telle est
la volonté de la loi qui doit être respectée par tous et qui confirme que certains cas de
participation criminelle peuvent, en vertu de dispositions particulières, échapper aux
conditions générales. En fait, ces cas sont plus proches de la corréité par provocation privée.
Qu’à cela ne tienne, la participation criminelle aux titres de coauteur ou de complice reste
réglée par les articles 21 à 23 du code pénal congolais de sorte que les coauteurs ou les
complices des précités peuvent être des simple particuliers.

B. Victimes

Dans le code pénal, n’importe qui peut être victime de la torture.


Dans la L.P.P.E seul un enfant mineur, c.-à-d. une personne âgée de moins de 18 ans peut
l’être.

VIII. SANCTIONS OU REGIME REPRESSIF


Les sanctions des autres tortures simples peuvent être résumées dans le tableau qui suit.

184 Article 147 du C.P. tel que modifié par l’article 1er de la Loi n° 05 mars 2005 modifiant et complétant le Décret du 30
janvier 1940 portant Code Pénal Congolais.
59
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Servitude pénale Amende


Torture simple d’autrui : Code pénal 5ans à 10 ans 50.000 F.C à 100.000 F.C
Torture simple d’enfant/ L.P.P.E. 1an à 5ans 500.000F.C à 1.000.000 F.C

Il en résulte une incohérence déconcertante.

IX. LES TORTURES ACCOMPAGNEES DES CIRCONSTANCES


AGGRAVANTES

1. Torture aggravée d’autrui (article 48ter, al. 1) : dix à vingt ans de servitude pénale
principale et d’une amende de cent mille francs congolais à deux cent mille francs
congolais. C’est en cas des circonstances aggravantes suivants :
- traumatisme grave ;
- maladie ;
- incapacité permanente du travail ;
- une déficience physique ou psychologique,
- qualité de la victime : femme enceinte, mineur d’âge ou personne de troisième âge ou
vivant avec handicap.

2. Tortures mortelles
Les tortures mortelles sont punies de servitude pénale à perpétuité en vertu de:
- article 48ter, al. 2 du C.P relatif à la torture mortelle d’autrui et
- article 152 de la L.P.P.E relatif à la torture mortelle d’un enfant qui dispose

« La peine encourue est la servitude pénale à perpétuité lorsque les tortures ou les actes
de brutalité, de cruauté, d'odieuses souffrances, de privation ou de séquestration
susceptibles de porter atteinte à sa santé physique ou mentale ainsi qu'à son équilibre
affectif et psychologique ont entraîné la mort. »

Il en résulte que cette disposition vise même « traitements cruels, inhumains ou dégradants »
dont le législateur n’a pas parlé dans l’article 151 que celui-ci aggrave.

X. UN POINT DE CURIOSITE : imprescriptibilité de la torture


Article 48quater du C.P. Sans préjudices des dispositions de l’article 24 du Code pénal,
l’action publique résultant de faits prévus par les articles 48bis et 48ter ci-dessus est
imprescriptible.

§3. L’ADMINISTRATION VOLONTAIRE DES SUBSTANCES NOCIVES

I. ELEMENT LEGAL ET ELEMENT AXIOLOGIQUE

Article 50. Sera puni d’une servitude pénale de un an à vingt ans et d’une amende de cent à
deux mille francs quiconque aura administré volontairement des substances qui peuvent
60
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

donner la mort ou des substances qui, sans être de nature à donner la mort, peuvent cependant
gravement altérer la santé.

L’infraction d’empoisonnement protège la personne dans son intégrité physique.


II. ELEMENTS MATERIELS

1. Acte matériel d’administration de substances mortelles ou nuisibles.

Pour ce qui est de l’administration, on se référera à ce qui est dit pour l’infraction
d’empoisonnement.

2. Substances nuisibles à la santé à savoir substances qui peuvent donner la mort ou qui, sans
être de nature à la donner peuvent cependant altérer gravement la santé.

A ce sujet, Jean LESUER enseigne ce qui suit :

« - substances qui peuvent donner la mort : à première vue, il semble qu’il y ait
contradiction entre les termes des articles 49 et 50, puisque d’après le premier
celui qui administre volontairement des substances pouvant donner la mort est
passible de la peine capitale, alors que d’après le second, il n’est passible que de
vingt ans de servitude pénale au maximum. En réalité le législateur a voulu
prévoir les cas de l’auteur qui, volontairement certes et dans le but de nuire, mais
sans l’intention homicide, aurait administré une substance dont il ignorait le
caractère mortel et qu’il croyait simplement nuisible à la santé.

- Substance qui, sans être de nature à donner la mort, peuvent cependant altérer
gravement la santé : peu importe la nature de la substance en question, produit
chimique, gaz, médicament dangereux, mais le mot « gravement » exige, pour que
l’infraction soit constituée, que ce produit soit susceptible de provoquer une
altération sérieuse de la santé. 185»

III. ELEMENTS INTELLECTUELS

La volonté de nuire, d’infliger une gêne ou une souffrance à la victime, mais sans intention
homicide186. Cette infraction est différente de l’empoisonnement proprement dit. Ici l’auteur
ne vise pas la mort comme dans l’empoisonnement mais vise à nuire à la santé de la victime.
Ici l’intention homicide n’existe pas comme dans l’empoisonnement. Mais la simple volonté
de nuire ou « l’animus nocendi »187.

IV. PROTAGONISTES DE L’ADMINISTRATION DES SUBSTANCES


NOCIVES

1. Délinquant : il peut s’agir de n’importe qui.

2. Victime : la personnalité humaine de la victime est requise. Il peut s’agir de n’importe


qui.

185 LESUEUR, J., op. cit., p.


186 Id., loc. cit.
187 LIKULIA BOLONGO, op. cit., p. 83.
61
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

V. REGIME REPRESSIF

L’administration volontaire des substances nuisibles est punie d’un an à vingt ans de servitude
pénale et d’une amende de cent à deux mille francs.

SECTION III. LES ATTEINTES A L’HONNEUR ET A LA


CONSIDERATION
§1. LES IMPUTATIONS DOMMAGEABLES ET DES INJURES
D’une façon générale, l'injure est le fait d'exprimer sur quelqu'un, par écrit, par parole ou
par geste, une opinion susceptible de porter atteinte à son honneur ou de l'exposer au mépris
public.
Selon les conditions de précision, de publicité, etc. dans lesquelles cette opinion injurieuse
est exprimée, elle est susceptible de donner lieu aux infractions suivantes : imputation
dommageable, injure, dénonciation calomnieuse, imputation calomnieuse.
Ces infractions prennent le nom d'outrage lorsque la victime est un fonctionnaire d'autorité
ou un magistrat188.

I. IMPUTATION DOMMAGEABLE OU DIFFAMATION


A. ELEMENT LEGAL ET ELEMENT AXIOLOGIQUE

Art. 74. — Celui qui a méchamment et publiquement imputé à une personne un fait précis qui
est de nature à porter atteinte à l’honneur ou à la considération de cette personne, ou à
l’exposer au mépris public, sera puni d’une servitude pénale de huit jours à un an et d’une
amende de vingt-cinq à mille francs ou d’une de ces peines seulement.
Cette infraction protège la personne dans son honneur et sa réputation. Il s’agit d’une atteinte
diffamatoire.
B. ELEMENTS MATERIELS

1. Un acte matériel d’imputation : le fait de mettre au compte, à la charge d'une personne


déterminée, désignée de façon suffisamment claire pour qu'on puisse la reconnaître,
même si elle n'est pas désignée nommément. Il n’y pas diffamation à l'encontre d'un
groupe de personnes (assemblée, corps de métier, etc.). dans pareil cas on parle
d’outrage au corps constitué. ;
2. Un fait précis : un fait déterminé, dont la véracité ou la fausseté peut faire l'objet d'une
preuve directe et non des déclarations d'ordre général. Peu importe qu’ils soient
possible ou impossible (dire de quelqu’un qu’il a tué à Goma alors qu’il ne s’y est
jamais rendu).
3. Le préjudice : la loi dit que le fait doit être de nature:
- à porter atteinte à l’honneur de la personne ;
- à porter atteinte à la considération de la personne :
- à l’exposer au mépris public.

188 LESUER
62
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Il s’agit donc des faits contraire à la probité, la loyauté, la valeur morale, des faits qui
diminuent l’estime, qui portent atteinte à la considération professionnelle ... le juge qui
apprécie souverainement si cet élément existe en se basant le milieu ou la situation de la
personne.

N.B : l’imputation d’un même fait peut être considérée comme dommageable pour une
personne, et non pour une autre.

4. La publicité : le juge l’apprécie souverainement. Toujours est-il qu’on distingue les


milieux publics par nature : voie publique et les milieux publics par destination.

XI. ELEMENT INTELLECTUEL

L’élément moral de cette infraction est la méchanceté, c.-à-d. l’intention de nuire ou


d’offenser (animus injuriandi).

N.B : si l’imputation a été faite dans l’intention de nuire, il y a infraction même si les faits
allégués sont exacts.
D. PROTAGONISTES DE DIFFAMATION

1. Délinquant : n’importe qui.


2. Victime : La personne protégée est le particulier et non un corps constitué ni une
autorité visée comme telle, auquel cas il y a outrage.

E. REGIME REPRESSIF

Servitude pénale de huit jours à un an et amende de vingt-cinq à mille francs ou une de ces
peines seulement.

II. LES INJURES PUBLIQUES


A. ELEMENT LEGAL ET ELEMENT AXIOLOGIQUE

Art. 75. — Quiconque aura publiquement injurié une personne sera puni d’une servitude
pénale de huit jours à deux mois et d’une amende n’excédant pas cinq cents francs ou d’une
de ces peines seulement.
Cette infraction protège la personne dans son honneur et sa réputation. Il s’agit d’une atteinte
méprisante.
B. ELEMENTS MATERIELS

1. Agression outrageante ou offensante : expression ou geste (au juge d’apprécier), mais


le fait ne doit pas être précis.
2. La publicité : voir diffamation.
C. ELEMENT INTELLECTUEL
63
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Intention d’offenser (animus injuriandi). Elle résulte de la volonté d’offenser ou de blesser


avec laquelle l’agent a agi.
D. PROTAGONISTES D’INJURES PUBLIQUES

1. Délinquant : il s’agit de n’importe qui.


2. Victime : La personne protégée est le particulier et non un corps constitué ni une
autorité visée comme telle, auquel cas il y a outrage.
E. REGIME REPRESSIF

Servitude pénale de huit jours à deux mois et amende n’excédant pas cinq cents francs ou une
de ces peines seulement.

III. LES INJURES SIMPLES

Les injures simples diffèrent des injures publiques aux niveaux de l’élément légal des
éléments matériels et de la sanction.
A. ELEMENT LEGAL

Art. 77. [Décr. du 11 juin 1917. — Sera puni d’une servitude pénale de huit jours et d’une
amende de deux cents francs au maximum ou d’une de ces peines seulement celui qui aura
dirigé contre une personne des injures autres que celles prévues dans les dispositions
précédentes de la présente section.]
B. ELEMENTS MATERIELS

1. Agression outrageante ou offensante : expression ou geste (au juge d’apprécier) ;


2. Absence de publicité ;
3. La catégorie des personnes protégées : les particuliers.
C. REGIME REPRESSIF

Servitude pénale de huit jours et amende de deux cents francs au maximum ou une de ces
peines seulement.

§2. LA DENONCIATION CALOMNIEUSE


A. ELEMENT LEGAL ET ELEMENT AXIOLOGIQUE

Art. 76. Sera puni d’une servitude pénale de cinq ans au maximum et d’une amende de vingt-
cinq à mille francs ou d’une de ces peines seulement:

1° Celui qui aura fait par écrit ou verbalement à une autorité judiciaire ou à un fonctionnaire
public, qui a le devoir d’en saisir ladite autorité, une dénonciation calomnieuse;
Cette infraction protège la personne dans son honneur et sa réputation. Il s’agit d’une atteinte
diffamatoire.
64
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

B. ELEMENT MATERIEL

Le fait de dénonciation (écrite ou verbale) qui doit remplir les conditions suivantes189 :
- Spontanéité (sans invitation) : Si elle est provoquée par un interrogatoire, ou par une
audition de témoin, elle ne constitue pas une infraction ;
- Fausseté : Le fait dénoncé doit être faux, ou s'il est réel, il doit être faussement imputé à
une personne qui n'en est pas l'auteur. Le juge saisi de l'action est seul compétent pour
trancher le point de savoir si le fait dénoncé est vrai ou faux 190 ;
- Le fait dénoncé doit être de nature à provoquer des sanctions. Un fait prévu et puni par la
loi pénale ;
- La dénonciation doit être portée sur une personne déterminée ;
- Elle doit être verbale ou écrite ;
- Elle doit être faite aux autorités judiciaires ou à un fonctionnaire public ayant le devoir de
saisir l’autorité judiciaire.
C. ELEMENT INTELLECTUEL
La connaissance par le dénonciateur de la fausseté totale ou partielle des faits allégués. La
dénaturation volontaire, ou l'exagération-volontaire d'un fait exact entrent dans le cadre de la
dénonciation calomnieuse. Peu importe que l'auteur ait agi par volonté de nuire ou par simple
désir de se rendre intéressant, la connaissance par lui de la fausseté des fait allégués suffit à
constituer l’infraction191.
D. PROTAGONISTES DU DRAME PENAL
1. Délinquant : n’importe qui.
2. Victime : n’importe qui.

E. REGIME REPRESSIF
Servitude pénale de cinq ans au maximum et amende de vingt-cinq à mille francs ou une de
ces peines seulement.

§3. IMPUTATIONS CALOMNIEUSES192


A. ELEMENT LEGAL ET ELEMENT AXIOLOGIQUE

Art. 76. Sera puni d’une servitude pénale de cinq ans au maximum et d’une amende de vingt-
cinq à mille francs ou d’une de ces peines seulement:
2° Celui qui aura fait par écrit ou verbalement à une personne des imputations
calomnieuses contre son subordonné.]

189 LIKULIA BOLONGO, op.cit, pp.248-250. La dénonciation est le fait de porter à la connaissance d’une autorité un fait
répréhensible. Elle est appelée plainte lorsqu’elle émane de la victime (p.247).
190 LESUEUR
191 LESUEUR
192 La différence avec la dénonciation calomnieuse réside en ceci que 1. La dénonciation est faite devant un supérieur

hiérarchique ; 2. Il n’est pas nécessaire que le fait entraîne des sanctions pénales ; 3. L’action disciplinaire n’est pas une
question préjudicielle ; 4. Les relations de subordination entre l’autorité auprès de laquelle on dénonce et la victime. Id.,
p.251.
65
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Cette infraction protège la personne dans son honneur et sa réputation. Il s’agit d’une atteinte
diffamatoire.

B. ELEMENT MATERIEL193

Le fait de dénonciation qui doit remplir les conditions suivantes :

 Spontanéité (sans invitation) : Si le supérieur hiérarchique avait demandé des


renseignements sur son subordonné celui qui donne les renseignements ne commet pas
d’infraction ;
 Fausseté : un fait inexact. Il n'est pas nécessaire, comme pour la dénonciation
calomnieuse, que ce fait constitue une infraction. Il peut s'agir de fautes
professionnelles ne tombant pas sous le coup de la loi pénale, il peut également s'agir
de faits concernant le comportement personnel de l'intéressé et de nature à faire cesser
la confiance qu'avait en lui son supérieur (dire qu'il s'enivre fréquemment, qu’il est
criblé de' dettes, etc.).
Pour qu'il y ait infraction, le fait imputé doit être faux cela résulte des termes mêmes
employés par le Code Pénal: « imputations calomnieuses ». Cependant un jugement
du Tribunal d'Elisabethville, en 1939, a décidé qu'il n'était pas nécessaire que les faits
imputés soient faux, pourvu que l'imputation en ait été faite avec l'intention de nuire.
Ce jugement est en contradiction formelle avec le Code Pénal, le sens du mot «
calomnieuses » étant très net.

 La dénonciation doit être portée sur une personne qui est hiérarchiquement
subordonnée à la personne devant laquelle les faits sont portés, contrairement à la
dénonciation calomnieuse ;
 Elle doit être verbale ou écrite ;
 Elle doit être faite à un supérieur hiérarchique de la personne visée, qu'il s'agisse d'une
administration publique, d'une entreprise privée ou d'un simple particulier.
C. ELEMENT INTELLECTUEL

L’auteur doit avoir la connaissance de la fausseté des faits imputés. Peu importe alors qu'il ait
agi par désir de nuire, pour se rendre intéressant, pour se faire bien voir de la personne à qui il
effectue la dénonciation, ou pour toute autre raison.
D. PROTAGONISTES D’IMPUTATIONS CALOMNIEUSES

1. Délinquant : n’importe qui.


2. Victime : Une personne physique subordonnée à la personne devant laquelle les
imputations ont été portées.

E. REGIME REPRESSIF

Servitude pénale de cinq ans au maximum et amende de vingt-cinq à mille francs ou une de
ces peines seulement.

193 LESUEUR
66
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Chapitre III. APERCU DES AUTRES INFRACTIONS CONTRE


LES PERSONNES
Le nombre d’infraction étant très élevé, il est difficile de les analyser toutes dans le temps
imparti à l’étude du droit pénal spécial. Ainsi, en vue de rendre facile l’apprentissage de
celles qui ne le sont pas par des lectures personnelles des étudiants, nous nous employons à en
donner la dénomination, le texte incriminateur et la définition.
Dans cet élan, nous laisserons guidé par le schéma du code pénal afin d’être plus pratique.

CODE PENAL CONGOLAIS


Décret du 30 janvier 1940 (B.O., 1940, p. 193)

LIVRE DEUXIÈME : DES INFRACTIONS ET DE LEUR RÉPRESSION EN


PARTICULIER

TITRE 1. DES INFRACTIONS CONTRE LES PERSONNES

SECTION I. DE L’HOMICIDE ET DES LESIONS CORPORELLES Analysée


VOLONTAIRES

SECTION II. DE L’HOMICIDE ET DES LESIONS CORPORELLES


INVOLONTAIRE

1. Voies de fait ou violences légères (article 51 du C.P)  Définition : Les voies de


fait ou violences légères consistent dans des offenses physiques exclusives de coups et
blessures, des violences légères exercées sans blesser ni frapper la victime.

Elles peuvent être volontaires (article 51 du CP) ou involontaires (article 56 du CP). Dans
ce dernier cas, il s’agit du fait, sans intention d’injurier la victime, de lancer sur elle un objet
quelconque de nature à l’incommoder ou à la souiller est constitutif de cette infraction.

a) Elément légal Art. 56. [Arr. du gouv. gén. du 29 juillet 1899, art. 3. — Sont
punissables au maximum d’une servitude pénale de deux jours ou d’une amende de vingt-
cinq francs ceux qui, imprudemment, auront jeté sur une personne une chose quelconque
pouvant l’incommoder ou la souiller.]
b) Eléments matériels
1. Acte matériel et positif de jeter ;
2. Personne humaine vivante ;
3. Chose de nature à l’incommoder ou à la souiller.

c) Eléments intellectuels
1. Faute pénale de l’agent : imprudence … ;
2. Lien causal.

SECTION III. DES EPREUVES SUPERSTITIEUSES ET DES PRATIQUES


BARBARES

I. Epreuves superstitieuses Définition : La superstition est la croyance à l’efficacité


magique de certaines pratiques, à la signification surnaturelle de certains signes. Tandis que
67
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

l’épreuve est une expérience pour s’assurer de la valeur d’une chose, d’une personne.
L’épreuve superstitieuse consiste à soumettre, de gré ou de force, une personne à un mal
physique réel ou supposé, en vue de déduire des effets produits l’imputabilité d’un acte ou
d’un événement ou toute autre conclusion194.
On distingue :
1. Epreuves superstitieuses simples (article 57, al. 1) ;
2. Epreuves superstitieuses aggravées (article 57, al. 2) et
3. Epreuves superstitieuses ayant entrainé la mort (article 57, al. 3).

a) Elément légal Art. 57. — Seront punis d’une servitude pénale d’un mois à deux
ans et d’une amende de vingt-cinq à deux cents francs ou d’une de ces peines seulement, les
auteurs de toute épreuve superstitieuse consistant à soumettre, de gré ou de force, une
personne à un mal physique réel ou supposé, en vue de déduire des effets produits
l’imputabilité d’un acte ou d’un événement ou toute autre conclusion.
Si l’épreuve a causé une maladie ou une incapacité de travail personnel, ou s’il en est résulté
la perte de l’usage absolu d’un organe ou une mutilation grave, les auteurs seront punis d’une
servitude pénale de deux mois à vingt ans et d’une amende de cent à deux mille francs, ou
d’une de ces peines seulement.
Ils seront punis de mort si l’épreuve a causé la mort.
Art. 58. — Sont auteurs ou complices de l’épreuve superstitieuse visée à l’article 57 ceux
qui y ont participé selon les modes prévus aux articles 21 et 22 du livre 1er du Code pénal.
Sont considérés également comme auteurs ou complices de l’épreuve superstitieuse visée à
l’article 57 ceux qui, de quelque façon que ce soit, ont à dessein fait naître la résolution de la
réclamer, de l’ordonner ou de la pratiquer.
N’est considérée ni comme auteur ni comme complice la personne qui a consenti à subir le
mal physique constitutif de l’épreuve.
Art. 59. — Quand une épreuve superstitieuse, qu’elle soit ou non constitutive d’infraction,
est la cause directe d’une infraction, ceux qui ont participé à l’épreuve seront punis comme
complices de l’infraction consécutive, à moins qu’ils n’aient pas pu prévoir qu’elle serait
commise.
Il n’y a pas lieu à poursuite lorsque l’infraction consécutive à l’épreuve est un vol ou une
détention non accompagnés de sévices sur les personnes ou une autre infraction moins grave.
Art. 60. — Sont considérés comme ayant participé à l’épreuve superstitieuse non
constitutive d’infraction visée à l’article 59 ceux qui y ont prêté leur concours selon les
modes prévus aux articles 21 et 22 du livre 1er du Code pénal et ceux qui, de quelque façon
que ce soit, ont à dessein fait naître la résolution de réclamer, d’ordonner ou de pratiquer
l’épreuve.

b) Eléments matériels
1. Un acte matériel d’épreuve ;
2. La personnalité humaine de la victime ;
3. Un résultat dommageable : mal physique réel ou supposé

c) Eléments intellectuels But poursuivi par le superstitieux : déduire des effets


produits par des épreuves l’imputabilité d’un acte, d’un événement ou tout autre conclusion.
Connaître la cachette du produit d’un vol, le sort d’un disparu, prouver la culpabilité ou
l’innocence de quelqu’un, etc.
d) Circonstances aggravantes : 

194
Article 57 du C.P.
68
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

1. Maladie ; incapacité de travail personnel, perte de l’usage absolu d’un organe ; mutilation
grave.
2. Mort.

II. Mutilation de cadavre (Art. 61du C.P)  Définition : La mutilation de cadavre est
l’action d’attenter, avec de mauvaises intentions, à l’intégrité du corps d’un être humain déjà
mort195. Par l'emploi du terme «mutiler», le législateur a voulu atteindre tout outrage aux
cadavres, par une atteinte matérielle contraire au respect dû aux morts196. La mutilation de
cadavre comprend le fait de frapper, meurtrir, mutiler, souiller, blesser, brûler, incinérer ….
C’est une pratique barbare. Les actes licites, tels que ceux qui sont justifiés par les coutumes
funéraires ne sont pas concernés.
a) Elément légal Art. 61. Sera puni d’une servitude pénale de deux mois à deux ans
et d’une amende de vingt-cinq à cinq cents francs, ou d’une de ces peines seulement,
quiconque aura méchamment mutilé un cadavre humain.
b) Eléments matériels :
1. Acte de mutilation : toute meurtrissure ;
2. Cadavre humain.
c) Eléments intellectuels :
1. Intention coupable : agir avec connaissance de cause et non accidentellement.
2. Méchanceté : agir sans respect dû aux morts.

III. Anthropophagie197 (Art. 62 du C.P)  Définition : L’anthropophagie ou


cannibalisme consiste dans le fait de manger de la chair humaine. C’est donc une pratique
barbare. Plus précisément elle consiste à manger, à consommer, à se restaurer, à se nourrir
de la chair humaine. Il en est de même du fait d’absorber du sang et de la cervelle198.

Sous cette dénomination, le législateur réprime celui qui :


- aura provoqué des actes d’anthropophagie ;
- aura préparé des actes d’anthropophagie ;
- y aura participé ;
- aura été trouvé en possession de chair destinée à des actes d’anthropophagie.

Faire délibérément manger à autrui de la chair humaine a toujours été considérée comme une
circonstance aggravante.

a) Elément légal Art. 62. — Sans préjudice à l’application des peines frappant
l’assassinat ou le meurtre, sera puni d’une servitude pénale de six mois à trois ans et d’une
amende de cent à mille francs, ou d’une de ces peines seulement, quiconque aura provoqué
ou préparé des actes d’anthropophagie, y aura participé, ou aura été trouvé en possession de
chair destinée à des actes d’anthropophagie.
b) Eléments matériels :

195
LESSUER, J., op.cit., p. 28.
196
Elis, 16 mars 1943, 98. «Sur l'infraction de mutilation de cadavre», voir l'étude de V. SERVAIS, J.T.O., 1956, 20.
197
Nigeria (Code pénal de l'état du Zamfara - Shari'ah). Art. 408. Cannibalisme - Quiconque, en connaissance de
cause, mange d'un corps humain, ou en reçoit une quelconque partie dans le but d'en manger, sera puni de
mort.
Code pénal de Mauritanie. Art. 278 : Sera puni de mort quiconque se sera rendu coupable d'un meurtre commis
dans un but d’anthropophagie. Tout acte d’anthropophagie, tout trafic ou cession de chair humaine à titre
onéreux ou gratuit seront punis des travaux forcés à temps. V° Doucet, J.P., op.cit., v°Anthropophagie.
198
Distr. Kivu, 17 janv. 1938, R.J.C.B., p. 155, cité par LIKULIA BOLONGO, op. cit., p.130.
69
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

1. Un acte matériel consistant soit en :


- Consommation de la chair humaine (par exemple se restaurer de la viande, boire du sang et
de la cervelle) ;
- Préparation ou provocation d’acte d’anthropophagie ;
- Détention de la chair humaine destinée à être mangée ;
- Participation aux actes d’anthropophagie
2. La chair humaine (parties molles du corps de l’homme et des animaux, la peau, les
muscles. Tout ce qui a trait au corps humain, en opposition à l’esprit.)
c) Eléments intellectuels :
Agir en connaissance de cause. Une action consciente

SECTION IV. DU DUEL

 Définition : Le duel est le fait pour deux hommes de se battre, selon des conditions fixées
à l’avance, pour régler un différend199. C’est donc un combat singulier entre deux hommes
armés et en présence de témoins.
Sous cet intitulé sont réprimées les infractions suivantes : la provocation en duel (articles 63
et 64 du C.P) ; le duel simple (article 65 du C.P) et le duel mortel (article 66 du C.P).
1. La provocation en duel
a) Elément légal Art. 63. — La provocation en duel sera punie d’une amende de
cinquante à trois cents francs.
Art. 64. — Celui qui, par une injure quelconque, aura donné lieu à la provocation sera puni
d’une amende de cent à cinq cents francs.
b) Eléments matériels :
1. Existence d’un différend ;
2. Acte matériel constituant le défi lancé à l’adversaire.
c) Eléments intellectuels Intention coupable

2. Le duel simple
a) Elément légal Art. 65. — Celui qui se sera battu en duel sera puni d’une servitude
pénale d’un mois à trois ans et d’une amende de cinquante à mille francs, ou d’une de ces
peines seulement.
b) Eléments matériels :
1. Existence d’un différend ;
2. Actes matériels et positifs constitutifs d’un combat ;
c) Eléments intellectuels 
1. Intention de se livrer au combat ;
2. But poursuivi : résoudre le différend.

3. Le duel mortel
Elément légal Art. 66. — Celui qui, dans un duel, aura donné la mort à son adversaire
sera puni d’une servitude pénale de trois mois à cinq ans et d’une amende de mille à deux
mille francs, ou d’une de ces peines seulement.

SECTION IV BIS. DE LA NON- ASSISTANCE A PERSONNE EN DANGER

La non – assistance à personne en danger n’est pas une infraction mais une catégorie
d’infractions introduite dans le code pénal par l’O.-L. 78-015 du 4 juillet 1978. On y

199
LESUER, J., op. cit., p. 30.
70
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

distingue :

1. L’abstention d’assistance contre une infraction (Art. 66bis.)  Définition : Lorsque


celui qui, pouvant empêcher par son action immédiate, sans risque pour lui ni pour les
tiers, une infraction contre l’intégrité corporelle de la personne, s’abstient
volontairement de le faire. (abstention de porter secours à une personne menacée
dans son intégrité physique par une infraction ou Omission d’assister une personne
menacée dans son intégrité corporelle par une infraction).

a) Elément légal Art. 66bis. [O.-L. 78-015 du 4 juillet 1978, art. 1er. — Sera puni
d’une servitude pénale de trois mois à un an et d’une amende de cinq à cinquante
zaïres, ou de l’une de ces peines seulement, quiconque, pouvant empêcher par son
action immédiate, sans risque pour lui ni pour les tiers, une infraction contre
l’intégrité corporelle de la personne, s’abstient volontairement de le faire.]
b) - Conditions préalables 15
1. Existence d’une infraction et d’un danger provenant de celle-ci ;
2. Absence de risque pour le prévenu
c) - Eléments matériels :
1. Omission d’intervention.

d) Eléments intellectuels :
1. Volonté de s’abstenir

2. Abstention de porter secours à une personne en péril (Art. 66ter du C .P) 


Définition : Lorsque l’auteur s’abstient volontairement de porter à une personne en péril
l’assistance que, sans risque pour lui ni pour les tiers, il pouvait lui prêter, soit par son
action personnelle, soit en provoquant un secours.
N.B : Si les infractions prévues aux articles précédents sont commises par une
personne chargée par état ou profession d’assister les autres en danger, la peine
aggravée (Art. 66quater).
a) Elément légal Art. 66ter. [O.-L. 78-015 du 4 juillet 1978, art. 1er. — Sera puni
d’une servitude pénale de trois mois à deux ans et d’une amende de cinq à cinquante zaïres,
ou de l’une de ces peines seulement, quiconque s’abstient volontairement de porter à une
personne en péril l’assistance que, sans risque pour lui ni pour les tiers, il pouvait lui prêter,
soit par son action personnelle, soit en provoquant un secours.]
b) Conditions préalables
1. Existence d’une personne en péril (la personnalité humaine de la victime et l’existence
d’un péril) ;
2. Absence de risque pour le prévenu
c) Eléments matériels :
1. Omission de porter secours.
d) Eléments intellectuels :
1. Volonté de s’abstenir.
e) Circonstance aggravante :
La qualité de la personne : chargée par état ou profession d’assister les autres en danger.
(débiteur d’obligation d’entretien ou alimentaire ; responsables de prisons, d’écoles, internat ;
commandants d’unités ; personnes chargées de veiller à la sécurité des personnes et de leurs
biens ; les praticiens de l’art de guérir.

3. Omission de porter témoignage en faveur d’un innocent (Art. 66quinquies) 


71
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Définition : lorsque celui qui, connaissant la preuve de l’innocence d’une personne


incarcérée provisoirement ou jugée pour infraction punissable d’au moins un an, s’abstient
volontairement d’en apporter aussitôt le témoignage aux autorités de justice ou de la
police judiciaire.
N.B : Toutefois, aucune peine ne sera prononcée contre celui qui apportera son
témoignage tardivement, mais spontanément.
a) Elément légal Art. 66quinquies. [O.-L. 78-015 du 4 juillet 1978, art. 1er. — Sera puni
des peines prévues à l’article 66bis celui qui, connaissant la preuve de l’innocence d’une
personne incarcérée provisoirement ou jugée pour infraction punissable d’au moins un an,
s’abstient volontairement d’en apporter aussitôt le témoignage aux autorités de justice ou
de la police judiciaire. Toutefois, aucune peine ne sera prononcée contre celui qui
apportera son témoignage tardivement, mais spontanément.]
b) Conditions préalables
1. L’obligation de témoigner n’existe qu’en faveur d’un innocent ;
2. L’exigence d’une infraction punissable au moins d’un an d’emprisonnement.
c) Eléments matériels :
1. Omission de témoigner.
d) Eléments intellectuels :
1. Volonté de s’abstenir.

SECTION V. DES ATTENTATS A LA LIBERTE INDIVIDUELLE ET A


L’INVIOLABILITE DU DOMICILE

1. Arrestation arbitraire et détention illégale (Art. 67)  Définition : Sous la


dénomination d’arrestation arbitraire et détention illégale le législateur punit celui qui, par
violences, ruses ou menaces, a enlevé ou fait enlever, a arrêté ou fait arrêter arbitrairement, a
détenu ou fait détenir illégalement une personne quelconque.

a) Elément légal Art. 67. — Est puni d’une servitude pénale d’un à cinq ans celui qui, par
violences, ruses ou menaces, a enlevé ou fait enlever, arrêté ou fait arrêter arbitrairement,
détenu ou fait détenir une personne quelconque.
Lorsque la personne enlevée, arrêtée ou détenue aura été soumise à des tortures corporelles,
le coupable est puni d’une servitude pénale de cinq à vingt ans. Si les tortures ont causé la
mort, le coupable est condamné à la servitude pénale à perpétuité ou à mort.

b) Eléments matériels :
1. Le fait matériel de l’enlèvement ou de l’arrestation arbitraire, ou de la détention
2. L’emploi de violences, ruses ou menaces
c) Eléments intellectuels :
1. Illégalité de l’acte ;
2. Connaissance par l’auteur de cette l’illégalité
d) Circonstances aggravantes :
- Tortures corporelles ;
- Tortures ayant causé la mort.

2. Esclavage (Art. 68)  Définition : L’esclavage est l’état d’un être humain auquel on
dénie la qualité de sujet de droit, et qui se trouve dès lors réduit au rang d’objet de propriété
en tant que bien meuble200.

200
DOUCET, J.P., op.cit., v° Esclavage.
72
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

L’esclavage proprement dit est l’établissement d’un droit qui rend un homme tellement
propre à un autre homme, qu’il est le maître absolu de sa vie et de ses biens. Il n’est pas bon
par sa nature201.
L’infraction dénommée « esclavage » dans le code pénal congolais est établie dans le chef
de :
- Celui qui a enlevé ou fait enlever, arrêté ou fait arrêter, détenu ou fait détenir des
personnes quelconques pour les vendre comme esclaves ;
- Celui qui a disposé de personnes placées sous son autorité dans le même but.

a) Elément légal Art. 68. — Est puni des peines prévues par et selon les distinctions de
l’article précédent celui qui a enlevé ou fait enlever, arrêté ou fait arrêter, détenu ou fait
détenir des personnes quelconques pour les vendre comme esclaves ou qui a disposé de
personnes placées sous son autorité dans le même but.

b) Eléments matériels : un des actes suivants :


1. Le fait d’enlever, d’arrêter ou de détenir une personne en vue de la vendre comme esclave
(violences, ruses ou menaces ne sont pas nécessaires de même que le caractère arbitraire et
illégal) ;
2. Le fait de vendre comme esclaves des personnes placées sous son autorité.
c) Eléments intellectuels :
1 Intention coupable.

3. Violation de domicile (Art. 69 et 70 du C.P)  Définition : Dans le cadre de cette


infraction et au nom de son autonomie, le droit pénal ne fait aucune différence entre le
domicile et la résidence, comme c’est le cas en droit civil.

Le domicile, dit DOUCET, est un lieu dont une personne a fait le siège de sa vie privée ; peu
importe qu'elle en soit propriétaire, locataire ou simple habitante202.
L'infraction consiste donc dans le fait de s'introduire dans un lieu d'habitation, par force
ou par ruse, sans l'agrément de celui qui y en a fait son domicile203.
En droit pénal congolais, on punit sous la qualification de violation de domicile, celui qui,
sans ordre de l’autorité et hors les cas où la loi permet d’entrer dans le domicile des
particuliers contre leur volonté, se sera introduit dans une maison, une chambre ou un
logement habité par autrui ou leurs dépendances, soit à l’aide de menaces ou de violences
contre les personnes, soit au moyen d’effraction, d’escalade ou de fausses clefs. (La
violation de domicile aggravée)

La violation de domicile est simple lorsque l’individu pénètre contre la volonté de


l’occupant dans une maison, un appartement, une chambre, une case, une cabane, un
logement ou leurs dépendances clôturées (article 70 du C.P).

a) Elément légal Art. 69. — Sera puni d’une servitude pénale de huit jours à deux ans et
d’une amende de trois cents francs au maximum ou d’une de ces peines seulement celui
qui, sans ordre de l’autorité et hors les cas où la loi permet d’entrer dans le domicile des
particuliers contre leur volonté, se sera introduit dans une maison, une chambre ou un

201
MONTESQUIEU, De l’esprit des lois, cité par DOUCET, J.P., loc.cit.
202
DOUCET, J.P., op.cit., v° Domicile.
203
DOUCET, J.P., op.cit., v° violation de domicile.
73
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

logement habité par autrui ou leurs dépendances, soit à l’aide de menaces ou de violences
contre les personnes, soit au moyen d’effraction, d’escalade ou de fausses clefs.
Art. 70. [Ord. du 4 juillet 1910. — Tout individu qui, hors les cas prévus à l’article 69,
pénètre contre la volonté de l’occupant dans une maison, un appartement, une chambre,
une case, une cabane, un logement ou leurs dépendances clôturées, est puni d’une
servitude pénale de sept jours au maximum et d’une amende de deux cents francs au plus,
ou d’une de ces peines seulement.]
b) Conditions préalables
1. Existence d’un domicile ;
2. Atteintes aux droits d’autrui.
c) Eléments matériels :
1. Acte matériel de violation : pénétrer, s’introduire, entrer dans les lieux (domicile d’autrui ;
une maison habitée ou ses dépendances) ;
d) Eléments intellectuels :
1. Agir contre le gré ou à l’insu de l’occupant
e) Circonstances aggravantes :
1. Les menaces ;
3. Les violences ;
2. Effractions ;
3. Escalade ;
4. Fausses clés.

SECTION VI. DES ATTENTATS A L’INVIOLABILITE DU SECRET DES


LETTRES

1. Ouverture ou suppression des lettres (Art. 71 du C.P)  Définition : On entend


par lettre missive, toute correspondance adressée par une personne à une autre, rédigée sur un
support matériel, et transmise par l’intermédiaire d’un porteur. En tant qu’élément de la vie
privée, une lettre missive est naturellement protégée par la loi pénale204.

L’infraction d’ouverture ou suppression des lettres consiste dans le fait pour toute personne
non autorisée par la loi :
- d’ouvrir ou de supprimer des lettres, des cartes postales ou autres objets confiés à la
poste, ou
- d’ordonner ou de faciliter l’ouverture ou la suppression de ces lettres, cartes et objets.
a) Elément légal Art. 71. — Toute personne qui, hors les cas prévus par la loi, aura
ouvert ou supprimé des lettres, des cartes postales ou autres objets confiés à la poste,
ou ordonné ou facilité l’ouverture ou la suppression de ces lettres, cartes et objets sera
punie d’une amende qui ne dépassera pas deux mille francs pour chaque cas.
L’amende pourra être portée à cinq mille francs si la lettre ou l’envoi était
recommandé ou assuré ou s’il renfermait des valeurs réalisables.
Indépendamment de l’amende, le délinquant pourra être puni d’une servitude pénale
de trois mois au plus s’il est agent des postes ou officiellement commissionné comme
tel.
d) Eléments matériels :
1. L’Ouverture ;

204
Id., v° Lettre.
74
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

2. Suppression ;
3. Le fait d’avoir ordonné ou facilité l’ouverture ou la suppression de l’objet protégé.
e) Objet protégé : lettres, cartes postales ou autres objets confiés à la poste (message
télégraphique, colis postaux…).
f) Eléments intellectuels :
1. Agir avec connaissance, avec la volonté d’ouvrir ou de supprimer la lettre ;
2. Agir sans droit.
g) Circonstances aggravantes :
1. Lettre ou envoi recommandée ou assurée ;
2. L’envoi contient des valeurs réalisables (cheque, mandat …) ;
3. Sac ou paquet postal ;
4. Qualité d’agent de poste ou d’officiellement commissionné ;
5. Porteur du courrier postal qui l’abandonne.

2. Révélation de l’existence ou du contenu des lettres (Art. 72)  Définition :


L’infraction de « Révélation de l’existence ou du contenu des lettres » consiste dans
le fait, pour un agent des postes ou toute personne officiellement commissionnée
pour assurer le service postal, non obligé par la loi de le faire, de révéler l’existence
ou le contenu d’une lettre, d’une carte postale ou de tout autre envoi confié à la poste.
a) Elément légal Art. 72. — Tout agent des postes ou toute personne officiellement
commissionnée pour assurer le service postal qui, hors le cas où la loi l’y obligerait,
aura révélé l’existence ou le contenu d’une lettre, d’une carte postale ou de tout autre
envoi confié à la poste sera puni d’une servitude pénale d’un mois au plus et d’une
amende qui ne dépassera pas deux mille francs ou d’une de ces peines seulement.
b) Eléments matériels :
1. Acte matériel de révélation.
c) Objet protégé : lettres, cartes postales ou autres objets confiés à la poste (message
télégraphique, colis postaux…).
d) Eléments intellectuels :
1. Agir volontairement et sciemment ;
2. Agir sans droit.

SECTION VII. DE LA REVELATION DU SECRET PROFESSIONNEL

1. Révélation du secret professionnel (Art. 73)  Définition : Il y a infraction de


révélation de secret professionnel dans le chef des personnes dépositaires par état ou par
profession des secrets qu’on leur confie et qui, hors le cas où elles sont appelées à rendre
témoignage en justice et celui où la loi les oblige à faire connaître ces secrets, les auront
révélés205.
Le secret professionnel s’étend non seulement à ce qui a été confié sous le sceau du secret au
confident nécessaire, non seulement encore aux faits confidentiels par leur nature propre et

205
Article 73 du C.P. ; Code pénal du Brésil. Art. 154 : Révéler à quelqu'un, sans juste cause, un secret dont on a
eu connaissance en raison de sa fonction, de son ministère, de son métier ou de sa profession, et dont la
révélation est de nature à causer un dommage à autrui : Peine - détention de trois mois à un an, ou amende. ;
Article 226-13 du N.C.P.F : « La révélation d'une information à caractère secret par une personne qui en est
dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d'une fonction ou d'une mission temporaire, est punie
d'un an d'emprisonnement et de 15000 euros d'amende ».
75
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

qui n’ont pas été confiés, mais aussi à tous ceux appris, déduits, devinés ou surpris dans
l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de la profession206.
Sont notamment dépositaires du secret professionnel : le médecin ; l’infirmier ; les
ecclésiastiques, les avocats, les défenseurs judiciaires ; les notaires ; les dentistes ; les
pharmaciens ; les sages-femmes ; leurs auxiliaires ; les étudiants207 ; les secrétaires ; les
conseils fiscaux etc.
a) Elément légal Art. 73. [Décr. du 25 mai 1938. — Les personnes dépositaires par état
ou par profession des secrets qu’on leur confie qui, hors le cas où elles sont appelées à
rendre témoignage en justice et celui où la loi les oblige à faire connaître ces secrets, les
auront révélés, seront punies d’une servitude pénale de un à six mois et d’une amende de
mille à cinq mille francs, ou d’une de ces peines seulement.]
b) Eléments matériels :
1. Acte matériel de révélation ;
2. Un secret ;
3. Dépositaire par état ou par profession de secret professionnel18
c) Eléments intellectuels :
La révélation doit être volontaire.

2. Abus des croyances superstitieuses ou Imputations de nature à inciter autrui à


commettre une infraction  Définition : est le fait pour une personne d’abuser des
croyances superstitieuses des indigènes, qui aura, sans fondement réel, imputé à une
personne un acte ou un événement vrai ou imaginaire, sachant que cette imputation
inciterait autrui à commettre une infraction.
a) Elément légal Art. 78. [Décr. du 24 décembre 1923. — Quiconque abusant des
croyances superstitieuses des indigènes, aura, sans fondement réel, imputé à une personne
un acte ou un événement vrai ou imaginaire, sachant que cette imputation inciterait autrui
à commettre une infraction, sera considéré comme complice de l’infraction ainsi
provoquée.]
b) Eléments matériels :
1. Un acte matériel d’imputation ;
2. Un fait précis ;
c) Eléments intellectuels :
1. Connaissance que ces allégations pourraient provoquer l’infraction.

SECTION VIII. DES IMPUTATIONS DOMMAGEABLES ET DES INJURES (Art. 74


et 75 du C.P)
La diffamation consiste à s’efforcer de noircir la réputation d’une personne en lui imputant
des agissements ou des propos infamants. La calomnie se distingue de la diffamation en ce
qu’elle s’appuie sur des faits dont il est établi qu’ils ont été énoncés mensongèrement.
L’Injure diffère de la diffamation et de la calomnie en ce qu’elle ne repose pas sur
l’imputation de faits précis susceptibles de preuve208.

206
GARRAUD, Traité de droit pénal, cité par DOUCET, J.P. , loc. cit.
207
Code pénal suisse. Art. 321, cité par DOUCET, J.P. , op. cit. V° Secret professionnel. Les étudiants qui auront
révélé un secret dont ils avaient eu connaissance à l’occasion de leurs études.
208
DOUCET, J.P. , op. cit. V° Diffamation.
76
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

1. Imputation dommageable ou diffamation (Art. 74 du C.P)  Définition : En


droit congolais, la diffamation consiste dans le fait pour l’auteur d’imputer méchamment et
publiquement à une personne un fait précis (apparemment susceptible de preuve) qui est de
nature à porter atteinte à son honneur ou à sa considération ou à l’exposer au mépris public.

Ainsi, dire de quelqu’un publiquement qu’il a volé le téléphone de Alpha est une imputation
dommageable : le fait est precis.
Le droit pénal congolais ne consacre pas un texte spécifique sur la diffamation envers la
mémoire d’un mort connue en droit français209.

a) Elément légal Art. 74. — Celui qui a méchamment et publiquement imputé à une
personne un fait précis qui est de nature à porter atteinte à l’honneur ou à la
considération de cette personne, ou à l’exposer au mépris public, sera puni d’une
servitude pénale de huit jours à un an et d’une amende de vingt-cinq à mille francs ou
d’une de ces peines seulement.
b) Eléments matériels :
1. Un acte matériel d’imputation
2. Un fait précis
3. Le préjudice
c) Eléments intellectuels :
1. L’intention de nuire ou d’offenser (animus injuriandi).

2. Injures publiques (Art. 75)  Définition : L’injure résulte d’un acte, d’une parole,
d’un écrit, de toute expression de mépris qui blesse l’honneur et la considération d’une
personne, sans pour autant se référer à un fait susceptible de preuve (ce qui la distingue de la
diffamation)210.

D’une façon générale, l'injure est le fait d'exprimer sur quelqu'un, par écrit, par parole ou par
geste, une opinion susceptible de porter atteinte à son honneur ou de l'exposer au mépris
public211.

Comme le souligne le Code pénal espagnol : « Constitue une injure l’action ou l’expression
qui blesse la dignité d’autrui, en affaiblissant sa réputation ou en portant atteinte à sa
propre estime212 ».
Dire de quelqu’un publiquement qu’il est voleur des téléphones n’est pas une imputation
dommageable, mais une injure publique parce que le fait n’est pas précis.

a) Elément légal Art. 75. — Quiconque aura publiquement injurié une personne sera
puni d’une servitude pénale de huit jours à deux mois et d’une amende n’excédant
pas cinq cents francs ou d’une de ces peines seulement.
b) Eléments matériels :
1 Agression outrageante ou offensante

209
La diffamation envers la Mémoire d’un mort n’est punie par l’art. 34 de la loi du 29 juillet 1881 que si leur
auteur a eu l’intention de porter indirectement atteinte à l’honneur ou à la considération des héritiers, époux
ou légataires universels vivants.
210
DOUCET, J.P. , op. cit. V° injure.
211
LESUEUR, J., op. cit., p. 41.
212
Art. 208 du Code pénal espagnol.
77
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

2. La publicité
c) Eléments intellectuels :
1 Intention d’offenser (animus injuriandi).
3. Dénonciation calomnieuse (Art. 76, 1°)  Définition : La calomnie consiste à
imputer mensongèrement à autrui un fait infamant précis, susceptible de preuve, mais qui ne
saurait en réalité lui être reproché213.
En droit congolais, l’infraction de dénonciation calomnieuse existe lorsque l’imputation
mensongère sur autrui est faite par écrit ou verbalement auprès d’une autorité judiciaire
(A.P.J ; O.P.J ; O.M.P ou Juge) ou à un fonctionnaire public, qui a le devoir d’en saisir
ladite autorité judiciaire.

Ainsi, dire à un O.P.J que Mike a volé le téléphone d’Alpha, alors que c’est faux n’est ni une
imputation dommageable, ni une injure mais une dénonciation calomnieuse.

a) Elément légal Art. 76. Sera puni d’une servitude pénale de cinq ans au maximum
et d’une amende de vingt-cinq à mille francs ou d’une de ces peines seulement:

1° Celui qui aura fait par écrit ou verbalement à une autorité judiciaire ou à un fonctionnaire
public, qui a le devoir d’en saisir ladite autorité, une dénonciation calomnieuse;
b) Eléments matériels :

Le fait de dénonciation (écrite ou verbale) qui doit remplir les conditions suivantes214 :
- Spontanéité (sans invitation) : Si elle est provoquée par un interrogatoire, ou par une
audition de témoin, elle ne constitue pas une infraction ;
- Fausseté : Le fait dénoncé doit être faux, ou s'il est réel, il doit être faussement imputé à
une personne qui n'en est pas l'auteur. Le juge saisi de l'action est seul compétent pour
trancher le point de savoir si le fait dénoncé est vrai ou faux 215 ;
- Le fait dénoncé doit être de nature à provoquer des sanctions. Un fait prévu et puni par la
loi pénale ;
- La dénonciation doit être portée sur une personne déterminée ;
- Elle doit être verbale ou écrite ;
- Elle doit être faite aux autorités judiciaires ou à un fonctionnaire public ayant le devoir
de saisir l’autorité judiciaire.
c) Eléments intellectuels :
La connaissance par le dénonciateur de la fausseté totale ou partielle des faits allégués.

4. Imputations calomnieuses (Art. 76, 2°)  Définition : L’infraction d’imputations


calomnieuses existe dans le chef de celui qui calomnie une personne auprès de celui dont elle
est subordonnée. Elles sont faites soit par écrit soit verbalement.

a) Elément légal Art. 76. Sera puni d’une servitude pénale de cinq ans au maximum
et d’une amende de vingt-cinq à mille francs ou d’une de ces peines seulement:
2° Celui qui aura fait par écrit ou verbalement à une personne des imputations
calomnieuses contre son subordonné.]
b) Eléments matériels :

213
DOUCET, J.P. , op. cit. V° Calomnie.
214 LIKULIA BOLONGO, op.cit, pp.248-250. La dénonciation est le fait de porter à la connaissance d’une autorité un fait
répréhensible. Elle est appelée plainte lorsqu’elle émane de la victime (p.247).
215 LESUEUR
78
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

 Le fait de dénonciation qui doit remplir les conditions suivantes :


 Spontanéité (sans invitation) ;
 Fausseté : un fait inexact.
 La dénonciation doit être portée sur une personne qui est hiérarchiquement
subordonnée à la personne devant laquelle les faits sont portés, contrairement à la
dénonciation calomnieuse ;
 Elle doit être verbale ou écrite ;
 Elle doit être faite à un supérieur hiérarchique de la personne visée, qu'il s'agisse
d'une administration publique, d'une entreprise privée ou d'un simple particulier.
c) Elément intellectuel :
L’auteur doit avoir la connaissance de la fausseté des faits imputés.

5. Injures simples (Art. 77)  Définition : ce sont des injures qui ne sont pas publiques
constituent l’infraction d’injures simples. C’est le cas des injures par téléphone, par s.m.s,
par lettre, dans un lieu où l’on est qu’à deux…
a) Elément légal Art. 77. [Décr. du 11 juin 1917. — Sera puni d’une servitude pénale
de huit jours et d’une amende de deux cents francs au maximum ou d’une de ces
peines seulement celui qui aura dirigé contre une personne des injures autres que
celles prévues dans les dispositions précédentes de la présente section.]
b) Eléments matériels :
1. Agression outrageante ou offensante : expression ou geste (au juge d’apprécier) ;
2. Absence de publicité ;
3. La catégorie des personnes protégées : les particuliers.
c) Elément intellectuel : Intention d’offenser (animus injuriandi).

6. Abus de croyance superstitieuse ou imputation de nature à inciter autrui à


commettre une infraction  Définition : V° loi.
a) Eléments légal Art. 78. [Décr. du 24 décembre 1923. — Quiconque abusant des
croyances superstitieuses des indigènes, aura, sans fondement réel, imputé à une
personne un acte ou un événement vrai ou imaginaire, sachant que cette imputation
inciterait autrui à commettre une infraction, sera considéré comme complice de
l’infraction ainsi provoquée.]
b) Eléments matériels :
1. Un acte matériel d’imputation ;
2. Un fait précis ;
c) Eléments intellectuels :
1. Connaissance que ces allégations pourraient provoquer l’infraction.
79
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

TITRE II. INFRACTIONS CONTRE LES PROPRIETES OU


LES BIENS

Les propriétés constituent la deuxième valeur protégée par le code pénal sous la menace d’une
sanction. Le terme propriété est inapproprié, la doctrine et des législations étrangères
préfèrent parler des infractions contre les biens216. LIKULIA finit carrément par parler des
infractions contre les propriétés ou les biens217 au sujet de ce deuxième titre du code pénal
congolais, intitulé que nous adoptons dans ce cours.

Chapitre Ier. ETENDUE DE L’INTERET PROTEGE OU CHAMP


AXIOLOGIQUE DES INFRACTIONS CONTRE LES PROPRIETES

Comme le dit si bien DOUCET, le droit de propriété place une chose sous le contrôle intégral
et exclusif d’une personne. … le droit criminel protège le droit de propriété non directement
en lui-même, mais à travers le fait tangible de la possession218.
Dès lors il importe de préciser l’étendue de l’intérêt protégé (section Ière) avant d’effectuer la
nomenclature et les définitions des infractions concernées (section II).

Section Ière. DÉFINITIONS DES CONCEPTS « PROPRIÉTÉ » ET


« BIEN »
§1. Le bien

Le concept « bien » est un terme juridique appartenant au droit civil. Il y a un contenu très
significatif au point que cette branche de droit lui consacre tout un cours : « Droit civil/Les
biens ». En même temps le législateur lui a consacré une loi spécifique, la loi n° 73-021 du 20
juillet 1973 portant régime général des biens, régime foncier et immobilier et régime des
sûretés qui comporte une des médiocres parties de la législation congolaise –le régime foncier
et immobilier- par cela qu’il est à l’origine de plusieurs conflits.

Son premier article opère la nette différence entre le bien et la propriété lorsqu’il dispose :

« Les biens ou droits patrimoniaux sont de trois sortes: les droits de créance ou
d’obligation, les droits réels et les droits intellectuels.
Les seuls droits réels sont: la propriété, la concession perpétuelle, les droits
d’emphytéose, de superficie, d’usufruit, d’usage et d’habitation, les servitudes foncières,
le gage, le privilège et l’hypothèque219.
Tous les biens sont mobiliers ou immobiliers220 ».

216 LIKULIA BOLONGO, op. cit., pp. 69-70 ; N.C.P.F. livre III.
217 Id., loc. cit.
218 DOUCET, op.cit., v° Propriété.
219 Art. 1er de la loi 20 juillet 1973 foncière. Tome I Édition 2003 – © Larcier(J.O.Z., no 3, 1er février

1974, p. 69). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .p. 95.


80
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Ses articles 3 et 4 définissent tout en les distinguant les biens meubles et immeubles. Ainsi :
« Sont immobiliers tous les droits réels qui ont pour objet des immeubles, ainsi que les
droits de créance tendant à acquérir ou à recouvrer un droit réel sur un immeuble221.
Sont mobiliers tous les autres droits patrimoniaux et notamment les actions et intérêts
dans les sociétés, associations et communautés qui jouissent de la personnalité civile
encore que des immeubles appartiennent à l’être moral222 ».
La constitution de la République Démocratique du Congo du 18 février 2006 protège les biens
ainsi définis, parfois même en recourant en des termes creux, comme dans son article 34 où il
dispose notamment que : « La propriété privée est sacrée » tout en reconnaissant les droits
d’expropriation pour cause d’utilité publique et de saisie. Ces deux droits sont en
contradiction avec le caractère sacré, qui signifie ce qui « doit inspirer un respect absolu », ce
qui est « inviolable »223.
Qu’à cela ne tienne, les articles 50, 67, 182 et 187 de la constitution précitée protègent tantôt
les biens tantôt la propriété224. Les prescrits des articles 67 et 182 méritent d’être présentés.
En effet, aux termes de l’article 67:
« Tout congolais a le devoir de protéger la propriété, les biens et intérêts publics et de
respecter la propriété d’autrui ».
L’article 182 dispose :
« La Police nationale est chargée de la sécurité publique, de la sécurité des personnes et
de leurs biens, du maintien et du rétablissement de l’ordre public ainsi que de la
protection rapprochée des hautes autorités ».

§2. La propriété
Ainsi qu’il ressort de l’analyse précédente, la propriété n’est donc qu’un bien, c.-à-d. un droit
patrimonial. C’est le droit de disposer d’une chose d’une manière absolue et exclusive, sauf
les restrictions qui résultent de la loi et des droits réels appartenant à autrui225.
La propriété d’une chose, soit mobilière, soit immobilière, donne droit sur tout ce qui s’y unit
et s’y incorpore, soit naturellement, soit artificiellement, sauf ce qui sera dit de la propriété
immobilière distincte de celle du sol, ou de la concession foncière226.

220 Art. 2.
221 Art. 3.
222 Art. 4.
223 Larousse, 2013, v° sacré.
224 Article 50. L’Etat protège les droits et les intérêts légitimes des Congolais qui se trouvent tant à l’intérieur qu’à l’extérieur

du pays. Sous réserve de la réciprocité, tout étranger qui se trouve légalement sur le territoire national bénéficie des mêmes
droits et libertés que le Congolais, excepté les droits politiques.
Il bénéficie de la protection accordée aux personnes et à leurs biens dans les conditions déterminées par les traités et les
lois.Il est tenu de se conformer aux lois et règlements de la République.
Article 187. Les Forces armées comprennent la force terrestre, la force aérienne, la force navale et leurs services d’appui.
Elles ont pour mission de défendre l’intégrité du territoire national et les frontières. Dans les conditions fixées par la loi, elles
participent, en temps de paix, au développement économique, social et culturel ainsi qu’à la protection des personnes et de
leurs biens.
225 Art. 14. —
226 Art. 21. —
81
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Aux termes de l’article 34 de la constitution de la R.D.C :


« La propriété privée est sacrée.
L’Etat garantit le droit à la propriété individuelle ou collective acquis conformément à
la loi ou à la coutume.
Il encourage et veille à la sécurité des investissements privés, nationaux et étrangers.
Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d’utilité publique et moyennant
une juste et préalable indemnité octroyée dans les conditions fixées par la loi.
Nul ne peut être saisi en ses biens qu’en vertu d’une décision prise par une autorité
judiciaire compétente ».
La propriété est soit publique soit privée ; soit mobilière soit immobilière soit intellectuelle.
Aux termes de l’article 67 de la constitution précitée :
« Tout Congolais a le devoir de protéger la propriété, les biens et intérêts publics et de
respecter la propriété d’autrui ».
Les articles 46, 122 et 202 visent également les propriétés227.

Sous l’intitulé « les infractions contre les propriétés » le législateur protège deux principales
valeurs : les biens et les droits qui s’y attachent. En d’autres termes: l’intégrité physique du
bien ainsi que les droits que le bien génère au profit des personnes. Cette dernière valeur
renferme deux volets différents: les droits résultant du rapport entre la personne et le bien et
les droits résultant des rapports entre deux personnes mais qui ont pour objets des biens. Dans
ce dernier volet, c’est la foi contractuelle qui peut être mis en jeu et qui est donc protégée.

§1. Les biens dans leur intégrité physique

Afin qu’il soit utile aux personnes et à la société, le bien droit être protégé dans son intégrité
physique. C’est ainsi qu’on punit la destruction méchante et l’incendie d’un bien par exemple.

§2. Les biens dans leurs rapports avec ceux qui les possèdent ou les droits
que la personne a sur un bien

Deux catégories de droits méritent d’être distinguées : les droits que la personne a sur un bien
et les droits résultants d’un contrat ayant pour objet un bien
Ici le législateur sanctionne l’atteinte à la valeur patrimoniale que le bien confère à une
personne. Il s’agit en principe des droits réels :
- la propriété qui comporte des démembrements : le droit d’usage, le droit d’usufruit et
le droit disposition ;

227Article 46, al. 2. Les droits d’auteur et de propriété intellectuelle sont garantis et protégés par la loi.
Article 122. Sans préjudice des autres dispositions de la présente Constitution, la loi fixe les règles concernant: … h) le
commerce, le régime de la propriété des droits et des obligations civiles et commerciales ;
Article 202. Sans préjudice des autres dispositions de la présente Constitution, les matières suivantes sont de la
compétence exclusive du pouvoir central :…19. la propriété littéraire, artistique et industrielle et les brevets.
82
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

- la possession : La possession est la détention ou la jouissance d’une chose ou d’un


droit que nous tenons ou que nous exerçons par nous-mêmes, ou par un autre qui la
tient ou qui l’exerce en notre nom228. Elle peut être de bonne ou de mauvaise foi.
- la détention précaire : la maitrise temporaire sur un bien en vertu d’un titre
attribuant à autrui la propriété du bien ; d’origine légale, judiciaire ou conventionnelle,
cette situation de fait se caractérise par la conscience du détenteur que la chose
appartient à autrui et qu’il devra la restituer229.
Le vol met sans doute en cause le droit de propriété. Cela peut être de manière directe, lorsque
la victime est le propriétaire lui-même, mais également de manière indirecte lorsque l’objet du
vol a été soustrait entre les mains d’un simple détenteur précaire, d’un possesseur de bonne ou
de mauvaise foi, d’un usager, d’un usufruitier et même d’un nu propriétaire. Toutes ces
personnes peuvent donc être victimes de vol, et dans le cas extrême, même de la part du
propriétaire.

§3. Les biens comme objet des rapports entre deux personnes ou les droits
résultant d’un rapport entre deux personnes ayant pour objet un bien
Certains rapports juridiques portent sur les biens. La sécurité et de loyauté qui commandent le bon
déroulement des opérations commerciales et qui appellent ainsi à la sincérité se trouvent parfois
mises en péril, par la fraude, aussi la foi contractuelle et les autres rapports doivent être protégés.

Chapitre II. ANALYSE DES INFRACTIONS TYPES CONTRE LES


PROPRIETES OU LES BIENS

Section Ière. LES VOLS ET LES EXTORSIONS


§1. LES VOLS
I. ELEMENT LEGAL ET ELEMENT AXIOLOGIQUE

Les vols sont prévus et punis par le code pénal congolais que par la loi portant protection de
l’enfant. Ils protègent non seulement le droit de propriété sur la chose mais aussi les droits
d’usage et d’usufruit, la possession et la détention précaire de la chose.

A. Les vols dans le code pénal congolais

Art. 79. Quiconque a soustrait frauduleusement une chose qui ne lui appartient pas est
coupable de vol.
Art. 80. Les vols commis sans violences ni menaces sont punis d’une servitude pénale de cinq
ans au maximum et d’une amende de vingt-cinq à mille francs, ou d’une de ces peines
seulement.
Art. 81. La peine pourra être portée à dix années de servitude pénale:
1o si le vol a été commis à l’aide d’effraction, d’escalade ou de fausses clefs;

228 Article 622 du code civil congolais, Livre III.


229 Lexique des termes juridiques 2014-2015, éd. Dalloz, 22e éd., 2014, v° Détention.
83
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

2o s’il a été commis la nuit dans une maison habitée ou ses dépendances;
3o si le vol a été commis par un fonctionnaire public à l’aide de ses fonctions;
4o si les coupables ou l’un d’eux ont pris le titre ou les insignes d’un fonctionnaire public
ou ont allégué un faux ordre de l’autorité publique;
5o [Abrogé par l’O.-L. 68-193 du 3 mai 1968, art. 7.]

Art. 81bis. Le vol à main armée est puni de mort.


Art. 82. Quiconque a commis un vol à l’aide de violences ou de menaces est puni d’une
servitude pénale de cinq à vingt ans et d’une amende qui peut être portée à deux mille francs,
ou de la première de ces peines seulement.
Art. 85. Le meurtre commis, soit pour faciliter le vol ou l’extorsion, soit pour en assurer
l’impunité, est punie de mort.

B. Les vols dans la loi portant protection de l’enfant

Article 163. Quiconque soustrait frauduleusement un bien qu'il sait appartenir à un enfant est puni
conformément à la loi.

Article 164. Si le vol a été commis à l'aide de violences ou de menaces, l'auteur est puni de dix à vingt
ans de servitude pénale principale et d'une amende de cinq cents mille à un million de francs
congolais.

II. ELEMENTS MATERIELS

Sur le plan matériel, la réalisation du vol exige la réunion de deux éléments : un acte
matériel de soustraction et une chose susceptible de vol ; objet du vol.
1. Acte matériel de soustraction :
« On entend par soustraction le fait de déplacer matériellement la chose, c’est-à-dire de la
prendre ou de l’enlever, de la déplacer à l’insu ou contre le gré de son légitime propriétaire
ou possesseur, c’est aussi la ravir contre volonté de son propriétaire ou de son possesseur.
230
».
Le vol implique une idée d'appréhension et de déplacement de l'objet volé, même si le
déplacement est minime. Pour voler, il faut prendre. C’est l’acte matériel de soustraction qui
caractérise le vol, et le différencie de l’abus de confiance (où la chose est confiée) et de
l’escroquerie (où la chose est volontairement remise)231 et de l’extorsion (où la chose est
remise suite à la menace ou à la violence).

N.B : - il n’y pas vol en cas de :


1. Détention frauduleuse ;
2. Remise involontaire déterminée par la contrainte ou
3. de remise volontaire ;

230 Likulia, p. 376.


231 Lesuer
84
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

- il y a vol :
1. en cas de remise faite inconsciemment par un enfant, un dément, bref par un
propriétaire, détenteur ou possesseur qui n’est qu’un instrument passif ;
2. en cas de remise volontaire, lorsque celle-ci en réalité n’était qu’une remise
temporaire, provisoire et précaire, tels que le débiteur qui s’est fait remettre sous
prétexte de le vérifier avant de payer, le titre en vertu duquel le paiement lui est réclamé,
telle la facture acquittée, puis refuse ensuite de payer en prétendant qu’il a en mains la
preuve de sa libération232.c’est aussi le cas de qui emporte sans payer la marchandise
qui lui était remise dans le cadre d’une vente au comptant dans un magasin ou le facteur
qui s’approprie un objet confié à la poste 233 ;
3. en cas de remise nécessaire mais conditionnelle : cas du vol au rendez-moi (appelé
aussi au rendez-vous) s’il y a eu subtilisation, sinon il y a escroquerie.

2. Chose susceptible de vol.


Le principe est que ce sont les choses mobilières peuvent être volées étant donné que la
soustraction implique l'idée de déplacement. Mais en vérité, tout ce qui est susceptible d’être
déplacé sans que sa matérialité soit altérée est susceptible de vol, quelle que soit la
qualification du droit civil/les biens. Il est de même des biens incorporels (leurs supports
seulement : disque, livre) et certaines forces immatérielles. Dès lors, que de distinguer les
biens meubles des biens immeubles, le droit pénal distingue les biens mobiles des biens
réellement immobiles.
Ainsi sont susceptibles de vol :
a) les choses détachables d'un immeuble tels que :
- les accessoires des bâtiments : portes, fenêtres, tôles, briques, ampoules, câbles… ;
- récoltes, fruits, etc. ;
- les éléments mobilisables du sol et du sous-sol : pierres précieuses, sable, graviers,
minerais, argile, etc. ;
- les immeubles par destination ;
b) l'électricité et l’eau du robinet,234 le gaz, la chaleur, la vapeur, le froid artificiel, le
carburant (il y a eu perte de la valeur économique qu’ils représentent) les données d'un
ordinateur sont susceptibles de vol, puisqu'elles peuvent être reproduites, ont une
valeur économique et font dès lors partie du patrimoine du propriétaire235. (cette
interprétation est néanmoins analogique et ne doit pas être suivie. Il appartient au
législateur d’intervenir rapidement dans ce domaine en incriminant le vol des données
d’un ordinateur) ;
c) l’usage d’usage236

232 1ere inst. App.Coq. 21/8/ 1958, R.J.C.B. 1959, p. 209.


233 lessuer.
234 La jurisprudence a assimilé aux choses mobilières certaines choses incorporelles telles que l’électricité, l’eau.

Elis, 27/2/1940, Rev. Jur. 1943 , p. 103. ; Crim., 3 avril 1912, S., 1913, I, 337, note ROUX ; 12 déc. 1984, Bull., n°403;
R.S.C., 1985, 579, chron. P. BOUZAT ; D. 1985, I.R. 186. Voir aussi S. BRAHY, Les vols d'eau et d'énergie, le vol d'usage,
J.T. 1975, 597; G. HUBRECHTS, Les vols d'eau, de gaz et d'électricité, in R.D.P.C., 1935, 236 ; Cass. b., 23 sept. 1982,
Pas. 1982, I, 120.
235 Cour d'appel d'Anvers, 13 déc. 1984, in Rechtskundig weekblad, 1985-1986, 244-246, obs. VERSTRATEN, 215-230,

Recensé in R.D.P.C., 1988,429 ; Corr. Brux., 24 juin 1993, J.L.M.B. , 1994, 444 ; R.D.P.C., 1994, 1336. Voir aussi M.
BRIAT, La fraude informatique ; une approche du droit comparé, in R.D.P.C., 1985 ; 287, J.P. SPREUTELS, Les infractions
en matière d'informatique dans le projet de réforme du code pénal français, in R.D.P.C., 1991, 1027 et s ; La criminalité
informatique, Editions du Conseil de l'Europe, Affaires juridiques, Strasbourg, 1990, 125.
236 Elis., 30/11/1954, R.J.C.B. 1955, p. 315.
85
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

III. ELEMENTS INTELLECTUELS

Deux éléments intellectuels sont requis pour que le vol soit établi. Il s’agit de la propriété
d’autrui sur la chose volée et de l’intention frauduleuse.

1. Propriété d’autrui sur la chose volée


Il importe peu que le propriétaire soit ou non connu.
On ne peut voler :
- sa propre chose, (même se trouvant entre les mains d’une autre personne), sauf en cas
de bien en copropriété ou lorsque la chose a reçu une affectation spéciale : saisie
conservatoire237 ;
- la chose non encore appropriée ou Res nullius (capture les animaux sauvages (les
gibiers) dans leur état de liberté naturelle, les poissons de la mer ou des eaux courantes
comme les fleuves, les ruisseaux, la rivière, trouver de l’or, du diamant.) ;
- la chose abandonnée ou res derelictae (des ordures, des épaves, des vieux vêtements
jetés.) ;

2. L’intention frauduleuse
Elle résulte de l’article 79 du C.P lui-même : « Quiconque a soustrait frauduleusement… ».
Le législateur entend par là que l'auteur des faits reprochés doit avoir agi par des voies
détournées, afin de contourner tant les précautions prises par la victime que les dispositions de
la loi238.
Le Code pénal de Porto Rico le précise bien : un acte accompli frauduleusement est un acte
accompli par ruse, simulation, manœuvre, stratagème, ou par tout autre procédé de
tromperie239.
En droit pénal congolais, l’intention frauduleuse est triplement caractérisée :
- Par la connaissance de la propriété d’autrui sur la chose qui implique la
connaissance qu’a l’agent qu’il s’empare de la chose qui ne lui appartient pas et la
connaissance que la chose appartient à autrui ;
- Par la connaissance du défaut de consentement du propriétaire (la soustraction
doit avoir été opérée à l’insu ou contre le gré du propriétaire. Il n’y a pas de vol
lorsque la soustraction est acceptée par le propriétaire de l’objet c’est-à-dire s’il y
consentement de la part du propriétaire) et
- Par l’intention de se comporter ou d’user de la chose comme propriétaire.
Le mobile, tout comme le repentir actif sont inopérants.

237 Détournement d’objet saisi : article 83 du CP.


238 DOUCET………………………..v° Frauduleusement.
239 Code pénal de Porto Rico, Art. 7 (15).
86
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

IV. PROTAGONISTES DU VOL

3. Délinquant : il porte généralement le nom de voleur. D’autres vocables servent à le


designer dans le langage courant : cambrioleur, pickpocket, détrousseur, maraudeur. Il
peut s’agir de n’importe qui.

4. Victime : n’importe qui peut être victime de vol.

V. REGIME REPRESSIF

1. Vol simple : servitude pénale de cinq ans au maximum et amende de vingt-cinq à


mille francs, ou une de ces peines seulement.

2. Circonstances aggravantes :

a) Circonstances aggravantes tenant aux moyens utilisés

- Effraction : rupture, le bris, la démolition, l’enlèvement, la dégradation d’une clôture ou


de toute autre disposition ou tout autre dispositif servant à fermer un passage ou à protéger
les objets susceptibles de vol. la protection pour accéder à l’objet volé doit être sérieuse
(pas fermer la porte avec un fil) ;
- Escalade : le fait de pénétrer dans le lieu du vol par une entrée autre que celle destinée à
cet usage, et en tout cas en dehors de la voie d’accès normale. Il en est de même du fait de
ramper, passer par le trou laissé par un vitre cassé (Lorsque le voleur entre par la porte et
sort par escalade après infraction, il n’y a pas escalade. Il n’y a pas escalade si le voleur
est déjà à l’intérieur et veut passer d’une pièce à une autre. Si dans une parcelle où il y a
plusieurs locataires ou maisons, il s’introduit normalement mais lorsqu’il veut voler dans
une des maisons à l’intérieur, il y a escalade)240 ;
- fausses clés : clefs imitées, altérées, perdues, égarées, volées, non destinées par le
propriétaire aux fins auxquelles le coupable les a employées, passe-partout, crochets ou
tout instrument non destiné par le titulaire des lieux ;

b) Circonstances aggravantes tenant au lieu et au temps


- la nuit dans une maison habitée ou ses dépendances : la nuit : période de temps comprise
entre le lever et le coucher du soleil. Une maison habitée : tout lieu servant d’habitation ou
lieu d’habitation chambre d’hôtel, maison, hôpital, cabine du bateau…. Les dépendances :
garage, véranda, etc. peu importe que le voleur habite dans la même maison ;

c) Circonstances aggravantes tenant à la qualité de l’agent

- fonctionnaire à l’aide de ses fonctions : toute personne chargée par l’autorité d’un service
public et qui commet de vol à l’aide de ses fonctions ;
- faux fonctionnaire public : prendre le titre ou les insignes d’un fonctionnaire public ou
alléguer un faux ordre de l’autorité publique.

Dans tous ces cas on parle de vol qualifié punissable jusqu’à dix années de servitude pénale.

240 LIKULIA BOLONGO, op. cit., p. 389.


87
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

d) Circonstances aggravantes tenant aux modes d’exécution

- Vol à main armée : tout instrument qui sert à attaquer ou à se défendre. L’arme comprend
toute machine, tout instrument, ustensiles ou tous autres objets tranchants, perçants ou
contondants (hache, fusil, revolver, pistolet, épée, ciseau, poignard, lance, flèche,
machette, pierre, bâton, pierre…)
Quand est-ce que le port d’une arme devient une circonstance aggravante ? La doctrine et la
jurisprudence sont divisées sur la question. Certains disent que le seul fait de porter l’arme
suffit à caractériser cette circonstance aggravante et d’autres estiment qu’il faut faire la
distinction entre le port d’arme et l’usage d’arme.
Une 3e thèse de compromis estime qu’il faut scruter l’intention du coupable. Si l’agent s’était
muni d’une arme spécialement pour réaliser son forfait, c’est-à-dire dans l’intention de
faciliter l’exécution du vol, peu importe l’usage, cette circonstance aggravante doit être
maintenue241.
Le vol à main armée est puni de mort (Art. 81bis du CP).

- Vol à l’aide des violences ou des menaces

 Violence : tout acte de contrainte physique exercée sur une personne. Il peut s’agir de
violences légères ou des violences ayant laissé des traces, des blessures ou de
contusions.

 Menace : toute contrainte morale neutralisant par la crainte d’un mal imminent la
volonté que la victime se propose d’opposer à l’attaque.
Il faut qu’il y ait un lien de causalité entre la violence ou la menace et la soustraction
frauduleuse.
Le vol avec menace et violence est puni d’une servitude pénale de cinq à vingt ans et d’une
amende qui peut être portée à deux mille francs, ou de la première de ces peines seulement
(Art. 82 du CP).

e) Circonstances tenant aux effets


Meurtre commis pour faciliter le vol ou en assurer l’impunité : qu’il y ait préméditation ou
non. Que le meurtre soit consommé ou tenté. Qu’il ait été réalisé avant ou après la
consommation du vol. ici il peut y avoir à la fois le vol à main armée et meurtre.
Le meurtre commis, soit pour faciliter le vol ou l’extorsion, soit pour en assurer l’impunité,
est punie de mort (Art. 85 du CP).

§2. L’EXTORSION
Ainsi que le déclare Jean LESUEUR,
« Il faut bien distinguer l'extorsion de deux autres infractions constituant comme elle,
des moyens de s'approprier le bien d'autrui, le vol et l'escroquerie :

241 V° LIKULIA BOLONGO, op. cit., pp. 39 3- 396.


88
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

- dans le vol il y a appréhension du produit du vol par l'auteur, dans l'extorsion et


dans l'escroquerie, il y a remise à l'auteur faite par la victime ;
- dans l'extorsion, cette remise est obtenue par l’emploi de menaces ou de
violences, dans l’escroquerie elle est obtenue par des manœuvres frauduleuses,
par la ruse.242 »

Dans le vol, l’auteur s’empare de la chose frauduleusement mais en servant de la violence ou


de la menace. Dans l’extorsion, l’auteur se fait remettre la chose.
I. ELEMENT LEGAL ET ELEMENT AXIOLOGIQUE

L’extorsion protège la même valeur que les vols. Elle est prévue par le code pénal congolais.

Art. 84. Est puni d’une servitude pénale de cinq à vingt ans et d’une amende qui peut être
portée à deux mille francs celui qui a extorqué, à l’aide de violences ou de menaces, soit des
fonds, valeurs, objets mobiliers, obligations, billets, promesses, quittances, soit la signature ou
la remise d’un document quelconque contenant ou opérant obligation, disposition ou
décharge.

II. ELEMENTS MATERIELS

Trois éléments matériels sont exigés par le législateur pour que cette infraction soit
établie.
1. Un acte d’extorsion : remise forcée
Selon LIKULIA, extorquer c’est arracher, confisquer, dépouiller, prendre quelque chose par
la force c’est-à-dire par la violence ou la menace. Obtenir quelque chose en dehors du
consentement libre de son propriétaire ou de son possesseur243.
2. Moyens utilisés par l’agent : Violences ou menaces.
- Violence : V° Vol.
- Menace : V° Vol.
Il importe peu que ce soit ou non la personne menacée ou accusée, ou celle contre qui la
violence est exercée, qui doit accomplir ou faire accomplir quelque chose244.
- Chantage : Il consiste dans une menace d’imputation ou de révélation d’un scandale ;
menace dont le but est de révéler un fait diffamatoire.
Peu importe que le chantage porte sur un fait vrai ou faux, il n’est pas requis que
l’objet du chantage soit précisé. Peu importe enfin que le fait soit déjà connu.
3. Une chose, objet de la remise forcée
L'extorsion suppose donc nécessairement un objet matériel qui peut être délivré ou transmis.
Il peut s’agir : des fonds ; valeurs ; objets mobiliers ; obligations ; billets ; promesses ;
quittance ; soit la signature ou la remise d’un document quelconque contenant ou opérant
obligation, disposition ou décharge.

242 LESUEUR, J., op. cit., p.


243 LIKULIA BOLONGO, op. cit., p.
244 Article 346 du Code criminel canadien.
89
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

III. ELEMENT INTELLECTUEL : Intention frauduleuse

Elle consiste dans la volonté de s’approprier injustement la chose d’autrui. C’est-à-dire que
l’agent doit poursuivre un gain illégitime pour lui-même ou pour autrui. Donc, lorsque le
prévenu a employé la violence pour se faire remettre un bien ou des biens auxquels il croyait
avoir droit, ces violences ou menaces-là ne sont pas illégitimes. Donc pas d’extorsion parce
que l’agent n’a pas voulu s’enrichir injustement245.

IV. PROTAGONISTES D’EXTORSION : sans particularité.


V. REGIME REPRESSIF

Servitude pénale de cinq à vingt ans et une amende qui peut être portée à deux mille francs.

SECTION II. LES FRAUDES

La fraude est un acte qui relève de la notion de ruse, par opposition à la notion de violence.
Elle va contre l'honnêteté, la loyauté et la vérité et est condamnée dans son principe, tant par
les moralistes que par les juristes246.
La fraude désigne une action qui porte atteinte à la justice commutative. L’usage du mot s’est
maintenant élargi : il caractérise toute forme de falsification qui blesse les intérêts d’autrui247.
Le code pénal congolais incrimine huit catégories des fraudes : la banqueroute ; les cas qui lui
sont assimilés ; les abus de confiance ; le détournement de main-d’œuvre ; l’escroquerie et la
tromperie ; le recèlement des objets obtenus à l’aide d’une infraction ; le cel frauduleux et la
grivèlerie.
Nous n’analyserons que l’abus de confiance proprement dit (section I) et l’escroquerie
(section II).

§1. L’ABUS DE CONFIANCE

Les abus de confiances sont au nombre de trois : l’abus de confiance proprement dit, le
stellionat et l’usure.

A. ELEMENT LEGAL ET ELEMENT AXIOLOGIQUE

A la différence du vol qui porte atteinte à la paisible possession des biens, l’abus de
confiance blesse la foi contractuelle.

Art. 95. — Quiconque a frauduleusement, soit détourné, soit dissipé au préjudice d’autrui des
effets, deniers, marchandises, billets, quittances, écrits de toute nature contenant ou opérant
obligation ou décharge et qui lui avaient été remis à la condition de les rendre ou d’en faire un
usage ou un emploi déterminé, est puni d’une servitude pénale de trois mois à cinq ans et
d’une amende dont le montant ne dépasse pas mille francs ou d’une de ces peines seulement.

245 LIKULIA BOLONGO, op. cit., p.


246 DOUCET, J.P, op.cit., V° Fraude.
247 BRUGUES, Dictionnaire de morale catholique, cité par DOUCET, J.P, op.cit., V° Fraude.
90
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

B. CONDITIONS PREALABLES

I. Contrat en vertu duquel la chose n’a été remise qu’à titre précaire

Il s’agit, en principe, des contrats ci-après :


1. Le gage et le nantissement c’est-à-dire le gage du fonds de commerce ;
2. Le mandat ;
3. Le prêt à usage ou commodat et non le prêt de consommation ;
4. Le transport (des biens) ;
5. Louage de la chose ;
6. le dépôt ;
7. Contrat de travail : il y a abus de confiance dans le détournement de la chose remise en
vue d’un certain travail. Ex. : Un bijoutier qui revend la montre en or à lui remise pour
réparation.
8. Certaines ventes (Ex. : L’acheteur qui aliène (vend) l’objet vendu avant paiement
complet du prix se rend coupable d’abus de confiance.
Dans les ventes à tempérament, on n’est pas encore propriétaire. Si on vend la chose, on
commet l’abus de confiance.)
N.B : - La preuve du contrat: Le juge qualifie librement le contrat qui lui est soumis sans
être soumis ou lié par la qualification que les parties lui ont donnée mais à condition de ne pas
dénaturer leur volonté et le juge saisi de l’action répressive examine souverainement les
conditions du contrat. La preuve ici en matière pénale est libre248.
- La nullité du contrat : Un contrat peut être nul sur le plan du droit civil pourra néanmoins
entraîner la culpabilité de l’agent sur le plan répressif en vertu de l’autonomie du droit pénal
par rapport au droit civil. S’il n’y avait pas une autonomie du droit pénal beaucoup
échapperait à la répression de crimes. Au sens administratif un ministre est différent d’un
fonctionnaire. Mais le Droit Pénal le considère comme fonctionnaire et peut le punir s’il y a
détournement dans son chef249.

1. Remise de la chose
Elle doit être volontaire et faite à titre précaire (et non à titre définitif parce qu’il n’y aura plus
de chose à rendre et donc susceptible de dissipation ou de détournement).
Un mari qui utilise mal un bien appartenant au couple ne s’expose pas à l’abus de confiance.
Il importe peu que la chose ait été remise à l’auteur de l’infraction ou à une autre personne
agissant en son nom et pour son compte. La victime peut mandater quelqu’un d’autre pour
vous remettre la chose ou vous la remettre directement250.

2. Chose, objet de la remise


Pour qu’il y ait abus de confiance la loi énumère limitativement les objets suivants : effets,
deniers, marchandises, billets, quittance, écrit de toute nature opérant des obligation ou
décharges.

248 LIKULIA BOLONGO, op. cit., p.


249 Id.
250 Ibid.
91
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

C. ELEMENTS MATERIELS
I. Acte matériel de dissipation ou de détournement
Il est caractérisé par le détournement ou la dissipation de la chose reçue.
a) Actes de dissipation

La dissipation est le fait d'anéantir la chose par l’usage que l’on en fait. La preuve du
détournement ou de la dissipation se fera normalement par l’impossibilité dans laquelle se
trouve l’auteur de rendre l’objet251.
C’est le cas de l’agent qui a consommé l’argent qu’il a reçu ; de celui qui a incendié une
voiture louée, abîmée un meuble reçu en gage ou encore abandonné sur la voie publique une
voiture louée. Ces actes impliquent la consommation, la détérioration, la destruction252.

b) Acte de détournement
Le détournement est l'appropriation de la chose par l'auteur. Ce détournement peut résulter de
la vente ou du don de la chose à un tiers ; de sa mise en gage ; du refus de la restituer253, bref
de tout acte par lequel il se comporte en propriétaire.
La différence qui existe entre le détournement et la dissipation réside dans le fait que le
détournement suppose l’appropriation ou la rétention injuste de la chose reçue, tandis que la
dissipation suppose que l’agent se trouve dans l’impossibilité de remettre la chose reçue254.

II. Préjudice
Il est requis un préjudice réel effectif ou éventuel (possible, qui pourrait exister).

D. ELEMENT INTELLECTUEL : Intention frauduleuse (de s’enrichir injustement).


Elle résulte de la connaissance qu’a l’agent de violer le contrat par lequel il détenait la chose
d’une manière précaire et de la conscience qu’il cause un préjudice au propriétaire (nuire à
autrui). L’impossibilité de restituer la chose ou d’en faire l’usage ou l’emploi déterminé,
quoique présumant l’intention frauduleuse, n’est cependant pas suffisante pour l’établir. Elle
doit être établie. Elle ne doit pas être supposée parce que l’impossibilité peut résulter de la
contrainte irrésistible (force majeure), de l’erreur invincible …, des infractions dont l’gent a
été victime. Dans ce cas il doit prouver l’existence d’une action judiciaire relative à ladite
infraction.
E. PROTAGONISTES DE L’ABUS DE CONFIANCE

Le délinquant peut être n’importe qui pourvu qu’il soit débiteur de la victime à la suite d’un
des contrats susmentionnés. Il en est de même de la victime qui doit par contre être
créancière.

251 LESUEUR, J., op. cit., p.


252 LIKULIA, BOLONGO, op. cit., p.
253 LESUEUR, J., op. cit., p.
254 LIKULIA, BOLONGO, op. cit., p.
92
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

F. REGIME REPRESSIF

Servitude pénale de trois mois à cinq ans et amende dont le montant ne dépasse pas mille
francs ou une de ces peines seulement.

§2. L’ESCROQUERIE

Introduction

Aux termes de la loi, l’escroquerie est le fait de se faire remettre ou délivrer des fonds,
meubles, obligations, quittances, décharges, soit en faisant usage de faux noms ou de fausses
qualités, soit en employant des manœuvres frauduleuses pour persuader l’existence de fausses
entreprises, d’un pouvoir ou d’un crédit imaginaire, pour faire naître l’espérance ou la crainte
d’un succès, d’un accident ou de tout autre événement chimérique, pour abuser autrement de
la confiance ou de la crédulité et ce, dans le but de s’approprier une chose appartenant à
autrui. L’escroquerie porte divers qualificatifs dans le langage courant255.

255 Entre l'ensemble de ceux qui portent atteinte à la propriété d’autrui, il se distingue par le fait qu’il n’emploie pas la
violence, mais dupe sa victime par le recours à la ruse.
Jean-Paul DOUCET relève certaines variétés de l’escroquerie. En effet, dit-il,
« la pratique a donné un nom particulier à certains modes opératoires.
- L’escroquerie à la charité. L’exploitation de la charité publique relève de l’escroquerie lorsqu’un individu fait appel aux
bons sentiments de la population pour une bonne œuvre, mais qu’en réalité il ne cherche qu’à s’enrichir personnellement.
Un tel délit doit être sanctionné de la manière la plus rigoureuse ; car, une fois dévoilé, il tarit les sources de revenus des
associations caritatives honnêtes et sérieuses.
- Escroquerie à l’assurance. Il existe de nombreuses variétés d’escroqueries à l’assurance, mais toutes se ramènent à
l’idée qu’un assuré cherche à utiliser la police qu’il a souscrite pour obtenir le paiement de sommes indues : qu’il déclare un
sinistre imaginaire, qu’il le cause volontairement mais secrètement, qu’il majore l’importance des dommages... Pour que
l’affaire puisse venir au pénal, il ne suffit pas d’une déclaration mensongère, il faut en outre qu’elle soit étayée par des
indications de fait précises. La tentative est constituée du moment où la déclaration de sinistre, accompagnée des pièces
justificatives, est transmise à l’assureur.
- Escroquerie au jugement. L’expression « escroquerie au jugement » vise une jurisprudence, quelque peu osée, qui fait
application de l’incrimination de l’art.313-1 C.pén. dans le cas où un individu parvient, en trompant un tribunal par la
production d’une pièce fausse, à obtenir une décision qui portera atteinte au patrimoine d’autrui.
- Escroquerie dite « à la succession imaginaire ». Il s’agirait d’un cas banal d’escroquerie par manœuvres reposant sur
une succession imaginaire, si elle n’avait donné lieu à une infraction qui eut un retentissement national : l’affaire Humbert.
L’argent de la succession était sensé se trouver dans un coffre-fort qui ne pourrait être ouvert qu’une fois achevée la
procédure en cours ; or le coffre était vide.
- Escroquerie dite « au trésor espagnol ». Grand classique de la délinquance, l’escroquerie dite « au trésor espagnol »
consiste pour un étranger (ou pseudo-étranger) à faire croire à une personne (généralement attirée par la cupidité) qu’il a dû
fuir son pays en y abandonnant une fortune considérable et que, si elle l’aide à le récupérer, elle en recevra une bonne part.
- Escroquerie dite « vol à l’américaine ». La principale forme de cette infraction consiste dans le fait pour un malfaiteur de
se faire remettre une somme d’argent, soit pour prix d’indications présentées comme confidentielles, mais en réalité fausses,
soit en contrepartie d’une chose sans valeur réelle. Il y a escroquerie, et non pas vol, puisque les deux parties sont entrées
en relations d’affaires (affaires généralement louches, c’est pourquoi les victimes hésitent à porter plainte).
- Escroquerie dite « vol au rendez-moi ». On englobe sous la formule « vol au rendez-moi » des agissements qui tournent
autour de l’exemple suivant : une personne entre dans un magasin, prétend faire un achat, paie avec un billet et empoche la
monnaie, puis renonce à cet achat, demande la restitution du billet mais profite de la confusion pour conserver la monnaie.
De telles manœuvres relèvent de l’escroquerie, dès lors qu’elles sont accomplies dans le cadre de relations contractuelles.
- Escroquerie informatique. De nos jours, l'escroquerie peut résulter d'une manœuvre frauduleuse perpétrée par l'entrée
frauduleuse dans un système informatique. »
1. L’ingénierie sociale255 . Le terme d’ « ingénierie sociale » désigne l’art de manipuler des personnes afin de
contourner des dispositifs de sécurité. Il s’agit ainsi d’une technique consistant à obtenir des informations de la part des
utilisateurs par téléphone, courrier électronique appelé « fake mail », courrier traditionnel ou contact direct. Elle est basée
sur la naïveté des utilisateurs en se faisant passer pour une personne de la maison, un technicien, un administrateur, etc.
93
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

L’auteur de l’escroquerie porte le nom d’escroc. Il dupe sa victime en recourant à la ruse.

L’escroquerie via l’informatique est désignée par le concept arnaque. Les principales
arnaques connues sont au nombre de quatre : l’ingénierie sociale, le scam ; le phishing et les
loteries256.
A. ELEMENT LEGAL ET ELEMENT AXIOLOGIQUE

Tout comme l’abus de confiance, l’escroquerie porte atteinte à la foi contractuelle. La


jurisprudence semble avoir bien vu que l’Intérêt protégé par l’incrimination d’escroquerie est
la foi contractuelle, qui comporte notamment la fourniture des éléments de fait permettant au
cocontractant de consentir en toute connaissance de cause257.
Il a été jugé en France que « Le délit d’escroquerie existe dès lors que les versements n’ont
pas été librement consentis, mais extorqués par des moyens frauduleux258 ».

Dans le code pénal congolais, l’escroquerie est prévue et punie par l’article 98 qui dispose :
« Quiconque, dans le but de s’approprier une chose appartenant à autrui, s’est fait remettre
ou délivrer des fonds, meubles, obligations, quittances, décharges, soit en faisant usage de
faux noms ou de fausses qualités, soit en employant des manœuvres frauduleuses pour
persuader l’existence de fausses entreprises, d’un pouvoir ou d’un crédit imaginaire, pour
faire naître l’espérance ou la crainte d’un succès, d’un accident ou de tout autre événement
chimérique, pour abuser autrement de la confiance ou de la crédulité, est puni d’une
servitude pénale de trois mois à cinq ans et d’une amende dont le montant ne dépasse pas
deux mille francs, ou d’une de ces peines seulement ».

B. CONDITION PREALABLE259

L’escroquerie suppose une condition préalable: un contrat, quel qu’il soit. Il faut que les
actes reprochés se soient déroulés dans le cadre de la conclusion d’un contrat. C’est ce que le
législateur entend lorsqu’il exige que la manœuvre ait tendu, soit à la remise de fonds, de
valeurs, de biens ou de services, soit à souscrire un acte opérant obligation ou décharge. La

2. Le scam ou la ruse255. Œuvre de Scameurs, le scam est une pratique frauduleuse d’origine africaine, consistant à
extorquer des fonds à des internautes en leur faisant miroiter une somme d’argent dont ils pourraient toucher un
pourcentage. L’arnaque du scam est issue du Nigeria, ce qui lui vaut également l’appellation « 419 » en référence à l’article
du code pénal Nigérian réprimant ce type de pratique.
3. Le phishing, hameçonnage ou courriel hameçon255. Le concept « phishing » est la variation cyberpunk de fishing,
aller à la pêche. Œuvre de Phishers, le Courriel hameçon est un courrier électronique qui persuade l'utilisateur final de
révéler des données confidentielles à l'aide d'une imitation de site censée représenter de véritables sociétés 255
C’est une technique frauduleuse utilisée par les pirates informatiques pour récupérer des informations (généralement
bancaires) auprès d’internautes.
4. La loterie internationale255. Vous recevez un courrier électronique indiquant que vous êtes l’heureux gagnant du
premier prix d’une grande loterie d’une valeur de plusieurs centaines de milliers d’euros. Pour empocher le pactole il suffit de
répondre à ce courrier.
En définitive, les techniques de perpétration des délits liés aux T.I.C sont légion. En dehors des crimes qui nécessitent une
technicité particulière pour sa commission, plusieurs crimes facilités par les T.I.C se perpètrent normalement, sans technicité
particulière. C’est le cas d’injures, de la diffamation, des menaces… et autres crimes liés aux T.I.C dont il convient de faire
l’échantillon.
256 Attaques et arnaques, disponible sur <http://www.commentcamarche.net/contents/système>, dernière modification le

mardi 14 octobre 2008, consulté le 22 septembre 2009. art.cit.


257 DOUCET, J.P., op. cit., V° Escroquerie.
258 Cass.crim. 7 mai 1974, Bull.crim. n° 160 p.410.
259 DOUCET, J.P., op. cit., V° Escroquerie.
94
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

remise ou la délivrance de la chose objet d’escroquerie ne peut se faire que dans le cadre d’un
contrat.

C. ELEMENTS MATERIELS
I. Emploi des moyens ou procédés frauduleux
Il s’agit de l’un des trois moyens suivants : l’usage de faux nom ; de fausse qualité ou encore
les manœuvres frauduleuses.
a) Usage de faux nom : L'usage (oral ou par écrit) d'un nom autre que le sien (à tout les
moins le nom que l’agent utilise : nom patronymique, post nom, prénom ou même d’un
sobriquet), qu'il soit le nom d'un tiers ou un nom inventé (réel ou imaginaire), est un élément
constitutif de l'escroquerie, à condition que cet usage ait été déterminant dans la remise de
l'objet ou des fonds260. Peu importe le consentement de la personne dont le nom à été
usurpé261.

N.B. L’usage du faux nom pour une aventure amoureuse n’est pas de l’escroquerie car il ne
vise pas à prendre un bien d’autrui. Il veut seulement jouir d’un plaisir262.
b) Usage de fausse qualité (réelle ou imaginaire, que l’usage soit verbal ou écrit) : c.-à-d.
d'un mensonge portant sur les fonctions ; sur l’état-civil, la situation familiale, la nationalité
etc. ; sur la profession ou sur l'emploi d'un faux titre263 (une fausse profession ou fonction, un
faux état-civil, un faux diplôme, une fausse nationalité, un faux titre). Cet usage doit avoir
déterminé la victime à remettre la chose.

N.B. - Celui qui utilise une fausse qualité pour se faire un honneur simplement n’est pas un
escroc. Exemple : Se faire passer pour un licencié dans le quartier. Il en est de même de celui
qui utilise une fausse qualité pour jouir d’un prestige. Exemple : se faire passer pour Koffi
Olomide dans un coin reculé.
- Se prétendre être riche n’est pas de l’escroquerie.
- L’usage d’une qualité perdue établit coupablement l’usage de fausse qualité. Exemple : un
ancien commerçant qui se fait remettre de fonds en usant de ses anciennes qualités264.
c) Les manœuvres frauduleuses : c.-à-d. mensonge accompagné d'actes extérieurs et matériels
destinés à le rendre vraisemblable265. Le fait matériel et extérieur destiné à appuyer le
mensonge générateur d’escroquerie266.
1. Caractères des manœuvres frauduleuses

Elles doivent :
1° être antérieures à la remise et cause déterminante de celle-ci ;
2° avoir eu pour but :

260 LESUEUR, J., op. cit., p.


261 LIKULIA BOLONGO, op. cit., p.
262 Id.
263 LESUEUR, J., op. cit., p.
264 LIKULIA BOLONGO, op. cit., p.
265 LESUEUR, J., op. cit., p.
266 LIKULIA BOLONGO, op. cit., p.
95
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

De persuader l’existence de fausses entreprises, d’un pouvoir ou d’un crédit


-
imaginaire, c.-à-d. de faire croire à quelque chose qui n'existe pas ;
Ex. de fausse entreprise : La création d’une société fictive. Récolter l’argent pour une
association qui n’existe pas.
Ex. d’un pouvoir ou d’un crédit imaginaire : prétendre avoir le médicament ou le pouvoir de
guérir le cancer.
- De faire naître l’espérance ou la crainte d’un succès, d’un accident ou de tout autre
événement chimérique, c.-à-d. de faire croire à quelque chose qui ne se produira pas
ou
Ex. prétendre qu’on a le pouvoir de faire obtenir des visas pour la France.
- d’abuser autrement de la confiance ou de la crédulité, c.-à-d. lorsque les manœuvres
employées ne sont pas inspirées par les ou l’un des buts ci-dessus.
3° consister à un acte positif et non à une abstention ou à une omission. Pas une attitude
passive ;

4° consister en une mise en scène c’est-à-dire en des scénarii : une série des faits qui
s’appuient les uns les autres pour arriver à se faire une impression d’ensemble. L’escroc doit
chercher à convaincre, toucher son vif, son cerveau, son cœur.

2. Nature des manœuvres frauduleuses267

Ces manœuvres frauduleuses se présentent sous diverses formes :


1ère forme : Manœuvre frauduleuse par machination simulations, truquage d'instruments,
ou mise en scène
Ex. : Le fait pour une personne ayant souscrit une assurance pour sa voiture de simuler le vol
de celle-ci afin de se faire payer par la SONAS. Il fait croire à l’assureur que sa
voiture est volée. Il a donc monté un scénario comme dans un théâtre.
2e forme : Manœuvre frauduleuse par production des pièces ou document
Ex. : Quelqu’un qui appuie le mensonge avec une mauvaise facture ou lorsqu’un écrit vient
appuyer le mensonge. Quelqu’un qui veut obtenir un crédit à la banque et présente un
faux certificat d’enregistrement. Chaque fois qu’un document vient appuyer le
mensonge c’est de l’escroquerie.
3e forme : Manœuvre frauduleuse par la publicité
En principe, la publicité de produits ou marchandises ne peut constituer l’escroquerie. Il s’agit
ici du « bonus dolus ou le bon mensonge » toléré dans le commerce. La publicité mensongère
devient escroquerie lorsque les annonces à la TV ou à la Radio ont trait à une fausse
entreprise. Quelqu’un fait la publicité à la Radio de la société qu’il veut créer et les gens
paient les 100Fc pour acheter l’acte d’engagement. Or cette société n’existe pas.
4e forme : Manœuvre frauduleuse par l’abus d’une qualité vraie
L’abus d’une qualité vraie est également constitutif d’une manœuvre frauduleuse donc de
l’escroquerie dans la mesure où il appuie le mensonge ou lui imprime une apparence de
sincérité de nature à commander la confiance de la victime ou mieux à égarer sa volonté.
Ex. : Le responsable de service des impôts qui se fait remettre de l’argent pour exempter un
citoyen de ses obligations fiscales. Il exagère un peu sa qualité, va en dehors de ce que la loi

267 Id.
96
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

lui attribue de faire. Un procureur de la République qui remet la peine à un prévenu


moyennant l’argent alors que c’est une des prérogatives du Président de la République.
(Pouvoir de grâce).
5e forme : Manœuvre frauduleuse par l’intervention d’un tiers

Ici l’escroc fait intervenir un coauteur ou un complice pour appuyer ses allégations
mensongères. Il suffit que ce tiers confirme et rende vraisemblables les allégations
mensongères. Ex. : Les italiens vendant des chaînettes opèrent toujours en complicité pour
appuyer leur mensonge. Quelqu’un dans un procès brandit un document et s’appuie sur un
témoin qui intervient dans le mensonge pour condamner la partie adverse à payer les
dommages et intérêts.

II. Remise ou délivrance de la chose


La loi vise en premier lieu le fait de se faire remettre, c.-à-d. obtenir directement la chose
convoitée de la part de la victime.
Elle vise également le fait d’obtenir indirectement par la poste, par le transporteur ou par
l’intermédiaire d’une tierce personne.
Il peut utiliser, envoyer quelqu’un d’autre prendre la chose. Si ce dernier a été mis au courant,
il est complice268.
III. Chose, objet de la remise

- des fonds : des sommes d’argent.


- des meubles : tout objet mobile. Les services ne sont pas concernés en droit congolais
(ex : le fait de ne pas payer la course d’un taxi. Le fait d’entrer frauduleusement dans
un stade.). Les immeubles ne font pas l’objet de l’escroquerie.
- des obligations : titre de créance.
- des quittances : écrit par lequel on constate le paiement d’une dette.
- des décharges : document par lequel on libère un individu d’une obligation ou d’une
chose dont il avait la charge.
D. ELEMENTS INTELLECTUELS

L’intention coupable caractérisée par la volonté, la conscience de s’approprier une chose


appartenant à autrui par l’un des procédés incriminés.
E. PROTAGONISTES D’ESCROQUERIE

L’auteur de l’escroquerie porte le nom d’escroc. Il dupe sa victime en recourant à la ruse.


C’est pourquoi on est bien fondé d’appeler la victime la « dupe ». Toujours est-il qu’il est
préférable de ne pas l’utiliser étant donné son caractère péjoratif.

F. REGIME REPRESSIF

Servitude pénale de trois mois à cinq ans et amende dont le montant ne dépasse pas deux
mille francs, ou une de ces peines seulement.

268 Ibid.
97
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Chapitre III. APERCU DES AUTRES INFRACTIONS CONTRE LES


PROPRIETES OU LES BIENS

Le tableau ci-dessous reprend d’une manière synthétique les autres infractions contre les biens.

CODE PENAL CONGOLAIS


Décret du 30 janvier 1940 (B.O., 1940, p. 193)

LIVRE DEUXIÈME : DES INFRACTIONS ET DE LEUR RÉPRESSION EN


PARTICULIER

TITRE II. DES INFRACTIONS CONTRE LES PROPRIETES

SECTION I. DES VOLS ET DES EXTORSIONS : Infractions non analysées

1. Détournement d’objets saisis (Art. 83)269  Définition : Il consiste dans


l’enlèvement, le déplacement, le transport dans un autre lieu, ou même la résistance non
motivée et persistante à représenter l’objet confié270.
a) Elément légal Art. 83. — Le saisi ou les tiers qui auront détourné des objets saisis
seront passibles des peines de vol.
b) conditions préalables :
1. la saisie ;
2. la chose, objet du détournement.
c) Eléments matériels :
1. Acte matériel de détournement ;
2. Auteur du détournement.
d) Elément intellectuel :
Intention coupable : connaissance de la saisie.

SECTION II. DES FRAUDES

§ 1. De la banqueroute (Intitulé ainsi modifié par le Décr. du 20 avril 1935.)


2. La banqueroute (articles 86, 87 et 88)  Définition : consiste dans le fait pour un
commerçant déclaré en faillite de se rendre coupable d’agissements contraires aux règles de
sécurité et de loyauté qui commandent le bon déroulement des opérations commerciales. Il
s’agit notamment des agissements tels que détourner ou dissimuler une partie de son actif ; se
reconnaître débiteur de sommes qu’il ne doit pas ; soustraire ses livres ou les enlever, effacer
ou altérer le contenu (banqueroute frauduleuse) ; favoriser un créancier au détriment de la
masse ; faire des dépenses excessives etc. (banqueroute simple).
a) Elément légal Art. 86. — Sera puni d’une servitude pénale de trois mois à cinq
ans et d’une amende de cent à mille francs le commerçant déclaré en faillite qui,
frauduleusement:
1o aura détourné ou dissimulé une partie de son actif ou se sera reconnu débiteur de
sommes qu’il ne devait pas;

269
Le saisi ou les tiers qui auront détourné des objets saisis seront passibles des peines de vol.
270
Goyet, Droit pénal spécial, cité par DOUCET, loc.cit.
98
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

2o aura soustrait ses livres ou en aura enlevé, effacé ou altéré le contenu.


Art. 87. — Sera puni d’une servitude pénale de huit jours à un an et d’une amende de
cinquante à cinq cents francs ou d’une de ces peines seulement le commerçant déclaré en
faillite qui:
1o après cessation de ses paiements aura favorisé un créancier au détriment de la masse;
2o aura pour ses besoins personnels ou ceux de sa maison fait des dépenses excessives;
3o aura consommé de fortes sommes au jeu, à des opérations de pur hasard, ou à des
opérations fictives;
4o aura, dans l’intention de retarder sa faillite, fait des achats pour revendre au-dessous du
cours, ou, dans la même situation, se sera livré à des emprunts, circulations d’effets et autres
moyens ruineux de se procurer des fonds;
5o aura supposé des dépenses ou des pertes, ou ne justifiera pas de l’existence ou de
l’emploi de l’actif de son dernier inventaire et des deniers, valeurs, meubles et effets, de
quelque nature qu’ils soient, qui lui seraient avenus postérieurement.
Art. 88. — Pourra être puni des peines prévues à l’article 87 le commerçant déclaré en
faillite:
1o qui n’aura pas tenu les livres ou fait les inventaires prescrits par les articles 1er et 2 du
décret du 31 juillet 1912;
2o dont les livres ou les inventaires seront incomplets, irréguliers ou rédigés dans une
langue autre que celle dont l’emploi, en cette matière, est prescrit par la loi;
3o dont les livres ou les inventaires n’offrent pas sa véritable situation active et passive,
sans néanmoins qu’il y ait fraude;
4o qui aura contracté, sans recevoir des valeurs en échange, des engagements jugés trop
considérables, eu égard à sa situation lorsqu’il les a contractés;
5o qui, sans qu’il soit malheureux et de bonne foi, a déjà été antérieurement déclaré en
faillite;
6o qui, à la suite d’une faillite précédente, n’a pas rempli toutes les obligations d’un
concordat en cours ou contre lequel la résolution du concordat a été prononcée;
7o qui n’aura pas fait l’aveu de la cessation de ses paiements dans les conditions et les
délais prévus par la législation sur la faillite;
8o qui, sans cause légitime, se sera absenté sans l’autorisation du juge ou ne se sera pas rendu
en personne aux convocations qui lui auront été faites par le juge ou le curateur.
b) Eléments matériels :

1. L’agent doit avoir la qualité de commerçant ;


2. Il doit être en faillite.
3. Un des actes matériels ci-après :
 Détournement ou dissimulation d’une partie de l’actif ;
 Reconnaissance frauduleuse du passif ;
 Soustraction ou altération de la comptabilité.

c) Eléments intellectuels :
Intention frauduleuse

§ 2. Des cas assimilés à la banqueroute (– Intitulé ainsi modifié par le Décret du 20 avril
1935.)

3. Des cas assimilés à la banqueroute (articles 89)  Définition : ce sont des délits
99
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

commis par les dirigeants des personnes morales.


a) Elément légal Art. 89. — Seront punis des peines prévues à l’article 86 les
administrateurs, directeurs ou gérants des sociétés à responsabilité limitée, déclarées
en faillite, qui, frauduleusement:
o
1 auront détourné ou dissimulé une partie de l’actif de la société ou reconnu la société
débitrice de sommes qu’elle ne devait pas;
2o auront soustrait les livres de la société ou en auront enlevé, effacé ou altéré le contenu;
3o auront omis de publier l’acte de société ou les actes modificatifs de celui-ci dans les
formes et délais prévus par la loi;

b) Eléments matériels :
1. Qualité de dirigeant ;
2. Personne morale en faillite ;
3. Soit un acte de banqueroute frauduleuse prévu par l’article 89 du CP ;
4. Soit un acte de banqueroute simple prévu par les articles 90-92.

c) Elément intellectuel :
Intention frauduleuse.
§ 3 .Des abus de confiance
4. Stellionat (Art. 96)  Définition : En droit congolais, le stellionat consiste dans le
fait de vendre ou d’hypothéquer un immeuble qui ne vous appartient pas.

a) Elément légal Art. 96. — Sera puni des peines portées à l’article précédent quiconque
aura vendu ou donné en gage un immeuble qui ne lui appartient pas.
b) Eléments matériels :
1. Un acte matériel de vente ou de mise en gage ;
2. Un immeuble appartenant à autrui
c) Eléments intellectuels :
Intention frauduleuse.
5. Usure (Art. 96bis)  Définition : L’usure consiste dans le fait de se faire promettre
pour soi-même ou pour autrui un intérêt ou d’autres avantages excédant manifestement
l’intérêt normal au cours d’une opération de crédit, d’un contrat de prêt ou de tout autre
contrat indiquant une remise de valeur mobilière et ce, en abusant des faiblesses, des passions,
des besoins ou de l’ignorance du débiteur.

a) Elément légal —.Art. 96bis. [Décr. du 26 août 1959. — Est puni d’une servitude pénale
d’un mois à un an et d’une amende de mille à dix mille francs ou d’une de ces peines
seulement, celui qui, abusant des faiblesses, des passions, des besoins ou de l’ignorance
du débiteur, se fait, en raison d’une opération de crédit, d’un contrat de prêt ou de tout
autre contrat indiquant une remise de valeur mobilière, quelle que soit la forme apparente
du contrat, promettre pour lui-même ou pour autrui un intérêt ou d’autres avantages
excédant manifestement l’intérêt normal.
b) Eléments matériels :
1. Une convention ;
2. Un taux d’intérêt excédant l’intérêt normal.
c) Eléments intellectuels : Intention frauduleuse
100
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

§ 4. Du détournement de main-d’œuvre

6. Détournement de main-d’œuvre (Art. 97)  Définition : Le détournement de


main-d’œuvre consiste dans le fait d’utiliser frauduleusement à son profit ou au profit
d’un tiers les services d’engagés mis sous ses ordres par le maître, en vue d’un travail
à exécuter pour celui-ci ou pour autrui.
a) Elément légal —.Art. 97. [Décr. du 27 juin 1960, art. 3. — Sera puni des peines portées
à l’article 95 quiconque aura frauduleusement utilisé à son profit ou au profit d’un tiers
les services d’engagés mis sous ses ordres par le maître, en vue d’un travail à exécuter
pour celui-ci ou pour autrui.]
b) Eléments matériels :
1. Existence d’engagés sous l’autorité du délinquant ;
2. Un fait matériel d’utilisation de main d’œuvre ;
3. Nature des travaux.
c) Eléments intellectuels : Intention frauduleuse.

§ 5. De l’escroquerie et de la tromperie
7. La tromperie  Définition : En droit pénal, la tromperie est l’exécution de la ruse
dans un contrat de transfert de propriété des choses lorsque l’auteur a trompé
l’acheteur:
o
1 sur l’identité de la chose vendue, en livrant frauduleusement une chose autre que l’objet
déterminé sur lequel a porté la transaction;
2o sur la nature ou l’origine de la chose vendue, en vendant ou en livrant frauduleusement une
chose qui, semblable en apparence à celle qu’il a achetée ou qu’il a cru acheter, déçoit
l’acheteur dans ce qu’il a principalement recherché et choses.

a) Elément légal Art. 99. [Décr. du 4 septembre 1928. — Est puni d’un an au plus de
servitude pénale et d’une amende dont le montant ne dépasse pas mille francs, ou d’une de ces
peines seulement, celui qui a trompé l’acheteur:
1o sur l’identité de la chose vendue, en livrant frauduleusement une chose autre que l’objet
déterminé sur lequel a porté la transaction;
2o sur la nature ou l’origine de la chose vendue, en vendant ou en livrant frauduleusement
une chose qui, semblable en apparence à celle qu’il a achetée ou qu’il a cru acheter, déçoit
l’acheteur dans ce qu’il a principalement recherché.]

Art. 100. — Est puni des peines prévues à l’article précédent celui qui, par des
manœuvres frauduleuses, a trompé:

1o l’acheteur ou le vendeur sur la quantité des choses vendues;


2o les parties engagées dans un contrat de louage d’ouvrage, ou l’une d’elles, sur les éléments
qui doivent servir à calculer le salaire

b) Eléments matériels :
1. Un fait de tromperie caractérisé par l’emploi des manœuvres frauduleuses ;
2. Un but poursuivi par l’agent (tromper sur la quantité de la chose vendue, soit sur les
éléments devant servir au calcul du salaire).
c) Eléments intellectuels : Intention frauduleuse de se procurer un bénéfice illicite.
101
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

§ 6. Du recèlement des objets obtenus à l’aide d’une infraction


8. Recel d’objets (Art. 101)  Définition : Le recel d’objet consiste à cacher ou
conserver, en connaissance de cause, en tout ou en partie les choses enlevées, détournées ou
obtenues à l’aide d’une infraction.
a) Elément légal Art. 101. — Celui qui a recelé en tout ou en partie les choses enlevées,
détournées ou obtenues à l’aide d’une infraction est puni d’une servitude pénale de cinq ans
au maximum et d’une amende qui ne dépasse pas mille francs ou d’une de ces peines
seulement.
b) Eléments matériels :
1. Provenance délictueuse de la chose ;
2. Chose, objet de recel ;
3. Un acte matériel de recel.
c) Eléments intellectuels :
Intention frauduleuse : Connaissance de l’origine frauduleuse de la chose.

§ 7. Du cel frauduleux
9. Cel frauduleux (Art. 102)  Définition : En droit pénal congolais, le cel frauduleux
revêt deux modalités.
Premièrement, le cel frauduleux est le fait de cacher une chose mobilière appartenant à
autrui :
- Soit qu’on a trouvé ;
- Soit dont on a eu la possession par hasard.
Deuxièmement, il y a cel frauduleux lorsque ladite chose est plutôt livrée à des tiers par celui
qui l’a trouvé ou en a eu la possession.
a) Elément légal Art. 102. [Décr. du 24 décembre 1929. — Seront punis d’une servitude
pénale de huit jours à deux ans et d’une amende de vingt-cinq à mille francs, ou d’une
de ces peines seulement, ceux qui, ayant trouvé une chose mobilière appartenant à
autrui, ou en ayant obtenu par hasard la possession, l’auront frauduleusement celée ou
livrée à des tiers.]
b) Eléments matériels :
1. Une chose, objet du cel ;
2. Acte matériel du cel ;
3. Propriété d’autrui sur la chose ;
c) Eléments intellectuels :
Intention frauduleuse.

§ 8. De la grivèlerie
10. Grivèlerie ou filouterie (Art. 102bis.)  Définition : c’est le fait pour une
personne sachant qu’il est dans l’impossibilité de payer se fait servir, dans un établissement à
ce destiné des boissons ou des aliments qu’il y aura consommés en tout ou en partie, se fait
donner un logement dans un hôtel où il s’est présenté comme voyageur ou qui aura pris en
location une voiture de louage.
a) Elément légal Art. 102bis. [Décr. du 4 août 1953. — Sera puni d’une servitude pénale
de huit jours à six mois et d’une amende de deux cents à trois mille francs, ou d’une de
ces peines seulement, celui qui sachant qu’il est dans l’impossibilité de payer, se sera fait
servir, dans un établissement à ce destiné, des boissons ou des aliments qu’il y aura
consommés en tout ou en partie, se sera fait donner un logement dans un hôtel où il s’est
présenté comme voyageur, ou aura pris en location une voiture de louage.
b) Eléments matériels :
102
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

 Grivèlerie d’aliments ou de boissons


1. le fait de s’être fait servir des boissons ou aliments ;
2. établissement concerné.
 Grivèlerie de logement
1. Occupation effective d’un logement ;
2. Dans un établissement spécialisé ;
3. L’agent doit se présenter comme voyageur.
 Grivèlerie de voiture de louage ou de transport
1. Prise en location de voiture (commander) ;
2. S’être fait véhiculer.
c) Eléments intellectuels :
Connaissance de l’impossibilité absolue de payer dans laquelle on se trouve.

SECTION III. DESTRUCTIONS, DEGRADATIONS, DOMMAGES

§ 1. De l’incendie
11. L’incendie  Définition : L’infraction d’incendie consiste dans le fait de mettre le
feu à la chose, peu importe que celle-ci soit embrasé ou non.
Le code pénal congolais réprime :
1. L’incendie volontaire de la chose appartenant à autrui (Art. 103-105) ;
2. L’incendie de sa propre chose (Art. 106), (dans une intention méchante ou
frauduleuse) ;
3. L’incendie par communication (107) et
4. L’incendie involontaire de la propriété d’autrui (Art. 109).
a) Elément légal : Art. 103. — Seront punis d’une servitude pénale de quinze à vingt
ans ceux qui auront mis le feu soit à des édifices, navires, magasins ou tous autres
lieux quelconques servant à l’habitation et contenant une ou plusieurs personnes au
moment de l’incendie, soit à tous lieux, même inhabités, si, d’après les circonstances,
l’auteur a dû présumer qu’il s’y trouvait une ou plusieurs personnes au moment de
l’infraction.
Art. 104. — Seront punis d’une servitude pénale de cinq à quinze ans ceux qui auront
mis le feu à des édifices ou tous bâtiments quelconques, appartenant à autrui et
construits en matériaux durables, mais inhabités au moment de l’incendie.
Si les édifices ne sont pas construits en matériaux durables, les coupables seront punis
d’une servitude pénale de trois mois à cinq ans et d’une amende de cent à deux mille
francs ou d’une de ces peines seulement.
Art. 105. — Seront punis des peines portées au deuxième alinéa de l’article précédent
ceux qui, en dehors des cas visés par la réglementation sur l’incendie des herbes et
végétaux sur pied, auront mis le feu à des forêts, bois, récoltes sur pied, bois abattus ou
récoltes coupées.
Art. 106. — Seront punis des mêmes peines les propriétaires exclusifs des choses
désignées aux articles 104 et 105, qui y auront mis le feu dans une intention méchante
ou frauduleuse.
Art. 107. — Celui qui, dans l’intention de commettre l’un des faits prévus aux articles
103, 104, 105 et 106, aura mis le feu à des objets quelconques placés de manière à le
communiquer à la chose qu’il voulait détruire sera puni comme s’il avait directement
mis le feu à cette dernière chose.
Art. 108. — Lorsque l’incendie a causé la mort d’une ou de plusieurs personnes, qui à
la connaissance de l’auteur se trouvaient dans les lieux incendiés au moment de
103
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

l’infraction et si la mort devait être considérée comme une conséquence nécessaire ou


probable de celle-ci, le coupable sera puni de la peine de mort ou de la servitude
pénale à perpétuité.
Si l’incendie a causé une blessure, la peine de la servitude pénale sera toujours
prononcée.
Art. 109. — Sera puni d’une servitude pénale de sept jours à trois mois et d’une
amende de vingt-cinq à cinq cents francs ou d’une de ces peines seulement, l’incendie
de propriétés mobilières ou immobilières d’autrui qui aura été causé par défaut de
prévoyance ou de précaution.
b) Eléments matériels :
1. Acte matériel d’incendie (mettre le feu, brûler, consumer …) ;
2. La chose, objet de l’incendie (spécifiée par la loi) ;
3. La propriété d’autrui sur la chose.

c) Eléments intellectuels :
1. Intention criminelle.

§ 2. De la destruction des constructions, machines, tombeaux et monuments

12. Destruction des constructions, machines, tombeaux et monuments 


Définition : c’est lorsqu’un acte de violence est dirigé contre une chose appartenant à
autrui on qualifie l’infraction de destruction.
a) Elément légal Art. 110. — Quiconque aura détruit, renversé ou dégradé, par quelque
moyen que ce soit, en tout ou en partie, des bâtiments, ponts, digues, chaussées, chemins de
fer, machines, appareils télégraphiques ou téléphoniques ou autres constructions appartenant à
autrui, sera puni d’une servitude pénale de cinq ans au maximum et d’une amende de vingt-
cinq à mille francs ou d’une de ces peines seulement.
Art. 111. — Sera puni d’une servitude pénale d’un mois à un an et d’une amende de
vingt-cinq à cinq cents francs quiconque aura détruit, abattu, mutilé ou dégradé: des
tombeaux, signes commémoratifs ou pierres sépulcrales; des monuments, statues ou autres
objets destinés à l’utilité ou à la décoration publique .

§ 3 .De la destruction et de la dégradation d’arbres, récoltes ou autres propriétés

Art. 112. — Seront punis des peines portées à l’article précédent ceux qui, dans des endroits
clôturés ou non clôturés, auront méchamment détruit ou dégradé des arbres, des récoltes, des
instruments d’agriculture ou d’autres biens meubles ou immeubles appartenant à autrui.

Art. 113. [Ord. du 28 février 1913. — Quiconque aura, même sans intention méchante,
détruit ou dégradé, sans titre ni droit, des arbres, des récoltes, des instruments d’agriculture ou
d’autres biens, meubles ou immeubles, sera puni d’une servitude pénale de sept jours au
maximum et d’une amende qui n’excédera pas deux cents francs, ou d’une de ces peines
seulement.]

§ 4. De la destruction d’animaux

Art. 114. — Sera puni d’une servitude pénale d’un mois à deux ans et d’une amende de
vingt-cinq à trois cents francs ou d’une de ces peines seulement quiconque aura méchamment
et sans nécessité, tué ou gravement blessé des bestiaux ou animaux domestiques appartenant à
104
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

autrui.

b) Eléments matériels :
1. Objets ou animaux protégés (spécifié par la loi) ;
2. Acte matériel de destruction ou de dégradation (détruire, dégrader, renverser …) c.à.d. acte
causant dommage aux objets protégés ;
c) Eléments intellectuels :
Intention méchante, celle de nuire au propriétaire.

§ 5. De l’enlèvement ou du déplacement de bornes


13. Enlèvement ou déplacement de bornes (Art. 115)  Définition : Aux termes de la
loi, l’infraction d’enlèvement ou du déplacement de bornes est établie dans le chef de ceux
qui, sans y être valablement autorisés :
- auront enlevé ou déplacé et ceux qui auront méchamment dégradé des bornes
délimitant des terres légalement occupées par eux ou par autrui ;
- auront enlevé ou déplacé, détruit ou dégradé des signaux ou repères géodésiques ou
topographiques, ou en auront modifié l’aspect, les indications ou les inscriptions.

a) Elément légal Art. 115. — Seront punis d’une servitude pénale de cinq ans au
maximum et d’une amende de vingt-cinq à mille francs ou d’une de ces peines
seulement ceux qui, sans y être valablement autorisés, auront enlevé ou déplacé et
ceux qui auront méchamment dégradé des bornes délimitant des terres légalement
occupées par eux ou par autrui.

b) Eléments matériels :
1. Chose, objet de l’infraction ;
2. Acte matériel ;
3. Absence d’autorisation ;

c) Eléments intellectuels :
Intention coupable. La connaissance qu’on agit sans autorisation valable et que la borne
enlevée délimitait légalement les terres occupées.
105
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

TITRE III. LES INFRACTIONS CONTRE LA FOI PUBLIQUE


Chapitre Ier. ETENDUE DE L’INTERET PROTEGE OU CHAMP
AXIOLOGIQUE DES INFRACTIONS CONTRE LA FOI PUBLIQUE

Section Ière. DÉFINITIONS DES CONCEPTS « FOI PUBLIQUE »


§1. Définition

RIGAUX et TROUSSE définissent la foi publique de la manière suivante:


« On entend par foi publique, la confiance que le public accorde à certains signes,
marques et formes extérieures auxquels le pouvoir et les particuliers ont recours pour
garantir la loyauté et la probité dans les rapports sociaux ... La foi publique constitue
un bien juridique collectif qu'il est nécessaire de protéger de la manière la plus
énergique, notamment par la loi pénale271. »
En effet, observe André VITU :
« La vie en société impose l’existence, entre les hommes, d’un réseau extrêmement
dense de relations de tous ordres. Dans tous les domaines … les individus tissent des
liens entre eux, la confiance y est un élément essentiel, dont l’absence rendrait
impossible toute vie en commun et serait un germe d’incessants conflits individuels ou
collectifs. Cette confiance ne s’attachent pas seulement aux paroles que les hommes
prononcent, mais aussi aux signes par lesquels ils communiquent entre eux ou par
lesquels ils manifestent leur volonté, leurs engagements, leur allégeance ou leur
domination ; elle s’incorpore aussi aux marques par lesquels l’État ou une autorité
publique traduit sa souveraineté, ses propres engagements, son emprise sur les
individus ou les choses. A ces signes, à ces marques, à ces instruments de preuve, la
confiance est due par une sorte d’exigence de la raison, postulée par la qualité de
l’homme, être social272. »

§2. Intérêts protégés


DOUCET273 cristallise bien les intérêts qui sont protégés par les infractions contre la foi
publique. Nous paraphrasons son idée en disant qu’en droit pénal public, on parle de foi
publique pour désigner la nécessaire
1. sincérité et probité que doivent manifester ceux qui prennent un engagement solennel
portant sur un point d’intérêt général ;
2. créance et confiance qu’il convient pour le public de porter aux documents et actes
pris dans ce même intérêt général.

271 RIGAUX et TROUSSE, Les crimes et les délits du Code pénal belge, cité par DOUCET, op. cit., v° foi publique.
272 A.VITU, Droit pénal spécial, cité par DOUCET, op. cit., v° foi publique.
273 DOUCET, op. cit., v° foi publique.
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Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Chapitre II. ANALYSE DE QUELQUES INFRACTIONS TYPES


CONTRE LA FOI PUBLIQUE

Section Ière. DES FAUX COMMIS EN ÉCRITURES


§1. Faux en écritures

On définit classiquement le faux comme une déformation, une altération ou une négation de la
vérité, de la réalité ou de l’authenticité ; cette corruption ayant pour but d’induire autrui en
erreur. L’auteur d’un faux est un faussaire274.
Toutes les définitions du faux en écriture reprennent comprennent la réalité susvisée.
En droit pénal congolais, le faux en écriture est défini comme l’altération de la vérité, dans un
écrit public ou privé, commise dans une intention frauduleuse et de nature à porter préjudice à
autrui275.
La plupart des définitions ressemblent à celle qui précède.
« Le faux est une altération de la vérité, commise en connaissance de cause et dans le but
de causer préjudice à autrui276 .»
« Le faux en écriture est constitué par l’altération de la vérité dans un écrit de nature à
porter préjudice et accompli avec l’intention frauduleuse et à dessein de nuire277. »
« Constitue un faux pénalement punissable l’altération frauduleuse de la vérité,
préjudiciable à autrui, accomplie dans un document faisant titre278.»
« Le faux est une altération de la vérité, commise dans une intention criminelle, qui a
porté ou a pu porter préjudice à des tiers. 279»

Le faux porte sur un écrit manuscrit, dactylographié, imprimé ou photographié, informatique.


Dans ce dernier cas certaines législations, comme en Belgique, prévoient carrément
l’infraction de « faux informatique ».

Quant à la gravité de l'acte, le code pénal congolais distingue deux infractions :

- le faux commis par un simple particulier (article 124) et


- le faux commis par un fonctionnaire public dans l'exercice de ses fonctions (article
124).
Quant à la prescription, son point de départ, pour l’infraction de faux en écriture est fixé non
au jour où l’infraction est commise, mais au jour où elle peut être constatée.
« En principe, la prescription doit courir du jour du crime ... si ce n'est qu'en matière de
faux, le crime ne doit dater que du moment où le faux est reconnu par l'usage que le

274 DOUCET, J.P. , op. cit. , V° FAUX.


275 LESUEUR, J., op. cit. p. 86.
276 FARINACIUS, cité par DOUCET, J.P. , op. cit. , V° FAUX.
277 Arrêt de la C.A du 11 Août 1914, Jurisprudence coloniale, 1925, page 145.
278 Cass.crim. 8 juin 1994, Gaz.Pal. 1994 II Chr.679.
279 Cujas : cité par DOUCET, J.P. , op. cit. , V° FAUX.
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Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

faussaire veut eu faire : c'est ainsi que les lois de l'Angleterre admettent la
prescription280. »

Le faux est une infraction formelle qui tend à assurer la crédibilité de la preuve littérale ; il est
constitué dès lors que la falsification commise est de nature à causer un préjudice social ou
privé. Le faux est, tantôt matériel, tantôt intellectuel281.
Faux matériel. On parle de faux matériel lorsque l’on est en présence d’un document qui a été
physiquement confectionné ou altéré ; en sorte qu’un examen diligent du document lui-même
permet d’établir la supercherie282.
« Le faux est dit matériel lorsqu’il se consomme par une altération physique d’un écrit et
laisse des traces corporelles283. »
« Le faux matériel résulte d’une falsification ou altération, en tout ou en partie, commise
sur la pièce arguée, et susceptible d’être reconnue, constatée et démontrée physiquement,
par une opération ou par procédé quelconque. La fabrication d’une pièce ou d'une
signature, une addition, une suppression, une altération, une radiation, un grattage, une
surcharge, une lacération, la substitution d’un acte à un autre, un changement même dans
la ponctuation d’un acte, si le sens en est changé, dénaturé, ou modifié, sont autant de
circonstances à l'aide desquelles le faux matériel peut être consommé. 284»

Le faux matériel se réalise par grattage surcharge, suppression d’une partie du texte, de
l’insertion après coup d’une fausse clause, de la fabrication intégrale d’un écrit, de
l’apposition d’une fausse signature.
La fabrication d’un document, forgé pour servir de preuve, constitue un faux matériel
susceptible de porter préjudice à un tiers, même si ce document est conforme à
l’original285.

Faux intellectuel. Le faux intellectuel consiste en une altération des énonciations de l’écrit
sans que la matérialité de celui- ci soit falsifiée. Le faux intellectuel résulte de l’inscription
dans l’acte d’une mention contraire à la vérité ou de la non-insertion d’une mention nécessaire
pour l’acte reflétant la vérité.
On parle de faux intellectuel lorsque l’on est en présence d’un document dont les
mentions comportent une altération de la vérité ; en sorte qu’il faudra faire appel à des
éléments extérieurs pour établir la supercherie286.
287
Le faux est dit intellectuel lorsqu’il porte sur le contenu d’un acte et ne laisse aucune
trace matérielle.
Le faux intellectuel résulte seulement de l’altération dans la substance d’un acte non
falsifié matériellement, c’est-à-dire dans les dispositions constitutives de cet acte ; il ne
peut être reconnu à aucun signe palpable, physique et matériel288.

280 BEXON, Développement de la théorie des lois criminelles, cité par DOUCET, J.P, op. cit. , V° FAUX.
281 DOUCET, J.P., loc. cit.
282 Id.
283 GOYET, loc. cit.
284 PONTAS, Dictionnaire de cas de conscience, V° Faux.
285 Cass.crim. 3 juin 2004, Bull.crim. n° 149 p.557.
286 DOUCET, J.P., loc. cit.
287 GOYET, loc. cit.
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Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Une attestation faisant état de faits matériellement inexacts contient un faux intellectuel
manifeste289.
Le droit pénal congolais ignore plusieurs distinctions, pourtant utiles, opérées par le droit
pénal français quant au régime juridique du faux.
En effet, en France, comme le souligne DOUCET290, en matière de poursuites pour faux
« On distingue depuis notre Ancien droit deux types de poursuites. D’une part le faux
principal, où une action est intentée pour faire établir qu’un acte a été forgé ou altéré ;
d’autre part le faux incident, où c’est une pièce produite dans un procès qui est arguée
de faux. Voir les articles 642 et suivants du Code de procédure pénale291.
DENISART, dans la Collection de jurisprudence, 1768 dit : Le faux principal est la
poursuite qui s’intente directement contre quelqu’un pour faire déclarer fausse une
pièce. Le faux incident est celui qui s’oppose, par forme d’exception, contre une pièce
de la partie adverse qui la produit et prétend en tirer avantage. Le faux est un crime
sanctionné par la peine de mort (Ordonnance de François 1er de 1531).

Parlant de l’inscription de faux, il dit : L’inscription de faux est une procédure spéciale,
par laquelle une partie soutient que telle pièce de la procédure a été forgée. On parle
aussi de faux incident (art. 646 et s. C.pr.pén.).
Comme le dit LE POITTEVIN dans le Dictionnaire des parquets : L’inscription de faux
est une procédure spéciale destinée à détruire la force probante de certains actes,
notamment de procès-verbaux auxquels s’attache une autorité exceptionnelle. Elle est
une voie de droit exceptionnelle, qui ne peut être prise que lorsque toutes les autres
voies sont fermées. »
I. ELEMENT LEGAL ET ELEMENT AXIOLOGIQUE

Article 124 du C.P. Le faux commis en écritures avec une intention frauduleuse ou à
dessein de nuire sera puni d'une servitude pénale de sis mois à cinq ans et d'une
amende de vingt-cinq à deux mille francs, ou d'une de ces peines seulement.
Article. 125 du C.P. Si le faux a été commis par un fonctionnaire ou agent public, dans
l'exercice de ses fonctions, la servitude pénale pourra être portée à dix ans et l'amende
à cinq mille francs.
Comme nous l’avons vu, ces infractions protègent :

288 PONTAS, loc. cit.


289 Cass.crim. 24 mai 2000, Bull.crim. n° 203 p.597.
290 DOUCET, J.P. , loc. cit.
291 Article 646. Si au cours d'une audience d'un tribunal ou d'une cour une pièce de la procédure, ou une pièce produite, est

arguée de faux, la juridiction décide, après avoir recueilli les observations du ministère public et des parties, s'il y a lieu ou
non de surseoir jusqu'à ce qu'il ait été prononcé sur le faux par la juridiction compétente.
Si l'action publique est éteinte ou ne peut être exercée du chef de faux, et s'il n'apparaît pas que celui qui a produit la pièce
ait fait sciemment usage d'un faux, le tribunal ou la cour saisi de l'action principale statue incidemment sur le caractère de la
pièce prétendue entachée de faux.
Article 647. La demande en inscription de faux contre une pièce produite devant la Cour de cassation est adressée au
premier président. Elle est déposée au greffe. Elle est signée par le demandeur ou par un avocat au Conseil d'Etat et à la
Cour de cassation ou par un fondé de pouvoir spécial. Dans ce dernier cas, le pouvoir est annexé à l'acte dressé par le
greffier. Si la personne qui dépose la demande ne peut signer, le greffier en fait mention.
109
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

1. sincérité et probité que doivent manifester ceux qui prennent un engagement solennel
portant sur un point d’intérêt général ;
2. créance et confiance qu’il convient pour le public de porter aux documents et actes
pris dans ce même intérêt général.

II. ELEMENTS MATERIELS (extrait du livre de Jean LESUEUR)


I) Altération de la vérité dans un écrit
D’où la nécessité d'un écrit. Le simple mensonge verbal, la fausse déposition ne
sont pas des faux. Par contre la loi n'exige aucune condition quant à la nature de
l'écrit qui contient l'altération de la "vérité. Elle n'exige pas non plus que l'écriture
émane du prévenu lui-même, il suffit qu'il ait, avec intention frauduleuse, fait de
fausses déclarations qui ont donné lieu au faux. La vérité s'apprécie en se plaçant
au moment de la rédaction de l'écrit. La rectification ultérieure d'une mention
faussement écrite ne fait pas disparaître l'infraction consommée.
L'altération peut revêtir deux formes :
- l'altération matérielle d'un écrit, c'est le faux matériel
- l'altération portant sur le contenu d'un écrit, réalisée lors de la
rédaction de l'écrit, c'est le faux intellectuel.
a) Les faux matériels. Ils peuvent être réalisés de différentes façons :
1. apposition d'une fausse signature ; c'est le fait de signer d'un nom imaginaire ou
d'un nom appartenant à autrui
2. altération d'écritures : tout changement matériel apporté à un- écrit après sa
rédaction : sur- charge, addition ou intercalation d'un chiffre, d'une date, d'un
mot, suppression d'un mot ou d'un chiffre par rature ou par un procédé
quelconque contrefaçon d'écritures : imitation de l'écriture d'une personne pour
faire croire que l'écrit émane de cette personne (ce faux est le plus souvent
accompagné d'une fausse signature)
3. fabrication de pièces faisant, litres): il s'agit ici de la création et de la fabrication
complète d'une fausse pièce. Mais, pour que l'infraction de faux existe, il faut
que l'acte ainsi créé fasse titre ou serve de preuve à une convention, disposition,
décharge : la création de pièces comme de fausses factures ou de faux états de
frais, qui sont soumis à vérification et qui n'ont aucune valeur probatoire par
eux-mêmes, ne constitue pas l'infraction de faux, mais un élément de
l'escroquerie. Constituent par contre l'infraction de faux :

- la fabrication d'un faux diplôme scolaire ou universitaire ;


- la confection par un domestique d'un faux certificat de travail ;
- l'établissement d'un faux livret de travail.

b) Les faux intellectuels


110
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Commettre un faux intellectuel, c'est altérer la vérité dans les énonciations de l'écrit,
sans que dans sa matérialité celui-ci soit falsifié. Cette altération peut se pratiquer par
addition ou soustraction, ou encore par substitution de nom, de chiffre ou de clause.
C'est dans le domaine du faux intellectuel que le coupable peut être, on celui qui écrit,
mais celui qui affirme la fausse mention. Exemple : — celui qui déclare un enfant
comme né d'une femme qui n'est pas la mère.

II) Possibilité d'un préjudice

La loi n'impose aucune condition particulière concernant l'écrit objet du faux, mais
il faut, pour qu'il y ait infraction, que l'itération de la vérité soit susceptible de
porter préjudice à quelqu'un. Un faux ne lésant personne et n'entrainant aucun
préjudice présent ou futur n'est pas punissable. Par exemple :
- altération d'un écrit qui n'est la source d'aucun droit et qui ne peut servir de
preuve
- altération d'un acte non signé et n'ayant par conséquent aucune valeur
- altération d'un copie non authentifiée.

Par contre, quand il y a possibilité de préjudice, l'auteur du faux est poursuivable, que
le préjudice soit déjà réalisé, qu'il soit en train de se réaliser ou qu'il soit susceptible de
se réaliser dans l'avenir.

Le préjudice en cause peut être matériel ou moral, or il peut léser soit les intérêts d'un
particulier, suit les intérêts de l'Etat. Exemples :
ional : préjudice moral lésant les intérêts
de l'Etat

intérêts de l'Etat

matériel lésant les intérêts d'un particulier.

III. ELEMENTS INTELLECTUELS

1) L'auteur doit savoir qu'il altère la vérité.


Celui qui a trompé gérait de bonne foi en déclarant un enfant comme né d'une femme
qui n'est pas la mère, ne commettrait pas l'infraction de faux.
2) Intention frauduleuse
L'auteur doit avoir eu soit l'intention de procurer un bénéfice illicite à lui-même ou à
un tiers, soit l'intention de nuire à autrui.

N.B : PRESCRIPTION. La prescription de l'action publique ne commence à courir à


l'égard du faussaire qu'à la date du dernier fait d’usage du faux qu’il a créé.

IV. CIRCONSTANCE AGGRAVANTE

L’article125 édicte des peines plus sévères lorsque le faux en écritures a été commis
par un fonctionnaire ou agent dans l’exercice de ses fonctions. Sont visées toutes les
111
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

personnes qui, en vertu d’une nomination émanant de l’autorité publique, sont


attachées au cadre d’une administration, à l’exécution des agents temporaires. Elles
sont passibles des peines frappant l’infraction aggravée si elles commettent un faux
dans un acte entrant dans l’exercice de leurs fonctions.

§2. USAGE DE FAUX

André VITU définit l’usage de faux de l manière suivante:


« L’usage de faux consiste en l’emploi, conforme à sa destination, et au préjudice de la
victime, d’un écrit qu’on sait falsifié. L’infraction suppose un objet, réunissant toutes les
caractéristiques du faux punissable, un acte matériel d’usage, le préjudice et l’intention
frauduleuse292. »
L’usage de faux est l’infraction qui consiste à utiliser, dans une intention frauduleuse ou à
dessein de nuire, un acte faux ou une pièce fausse293.
RIGAUX et TROUSSE précisent avec raison que
« La fabrication et l'usage ne se confondent pas ; ils forment deux faits successifs, qui
s'isolent l'un de l'autre, en présentant deux opérations distinctes. De ces deux actes, la
loi a fait deux crimes distincts, indépendants, qui ont des éléments constitutifs
différents294.»
Il est de principe que lorsque le faussaire fait lui-même usage du faux, cet usage ne forme que
le dernier acte et la consommation de l'infraction de faux ; il en suit que l'auteur du faux et de
l'usage de faux ne commet qu'une seule infraction, l'ensemble des faits délictueux étant le
résultat d'une même intention criminelle295.

L'usage de faux est l'infraction qui consiste à utiliser, dans une intention frauduleuse
ou à dessein de nuire, un acte faux ou une p:èce fausse.

I. ELEMENT LEGAL
Art. 126 du C.P. Celui qui, dans une intention frauduleuse ou à dessein de nuire, aura
fait usage de l'acte faux ou de la pièce fausse, sera puni comme s'il était l'auteur du
faux.
II. ELEMENT MATERIEL
C'est le fait d'utiliser, ou de tenter d'utiliser, un acte faux, cet acte ayant été établi,
falsifié ou altéré par un autre. Exemple : — individu postulant un emploi administratif
grâce à un faux diplôme qui lui a été remis par un faussaire.

292 A.VITU, loc. cit.


293 LESUEUR, J., op. cit., p.88.
294 RIGAUX et TROUSSE, loc. cit.
295 Cour supérieure du Luxembourg 16 janvier 1972, Pas.lux. 1972-1974 167.
112
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

REMARQUES.
- l'infraction d'usage de faux nécessite l'utilisation d'un acte faux ; l'usage d’une pièce
d'identité véritable mais appartenant à autrui, ne constitue pas l’infraction d’usage de
faux ;
- si c’est l’auteur de la pièce qui en fait usage, il est admis par la jurisprudence qu’il ne
commet que la seule infraction à l’article.

III. ELEMENTS INTELLECTUELS

1) L'auteur doit savoir que la pièce est fausse ou a été altérée.

2) L'auteur doit agir dans une intention frauduleuse ou à dessein de nuire.

IV. USAGE D'UN FAUX COMMIS PAR UN FONCTIONNAIRE PUBLIC

L'article 126 dispose que celui qui fait usage de faux « sera puni comme s'il était
l'auteur du faux ». Il faut en déduire que le particulier qui fait usage d'un faux commis
par un fonctionnaire public dans l'exercice de ses fonctions n'est passible que des
peines de l'article 124 et non de celles de l'article 125.

§3. FAUX CERTIFICATS DELIVRES PAR UN FONCTIONNAIRE

I. ELEMENT LEGAL

Art. 127. Tout fonctionnaire ou officier publie qui, dans l'exercice de ses fonctions,
aura délivré un faux certificat, falsifié un certificat, fait usage d'un certificat faux ou
falsifié, sera puni d'une servitude pénale de trois mois à cinq ans et d'une amende de
cent à mille francs, ou d'une de ces peines seulement.

On peut se demander pourquoi les rédacteurs du Code Pénal ont jugé utile de faire cet
article 127, alors que l'article 125 réprime déjà les faux commis par un fonctionnaire
dans l'exercice de ses fonctions, et que l'article 126 permet de poursuivre l'usage de
faux effectué par ce fonctionnaire. Si nous remarquons que l'article 127, contrairement
aux précédents, ne parle pas de l'intention frauduleuse, il faut en déduire que l'on a
voulu permettre une répression plus facile, sans qu'il soit besoin d'établir l'existence
d'un élément constitutif moral, de l'infraction que l'on appelle communément « la
délivrance de certifient de complaisance ».

II. ELEMENTS MATERIELS

1. Délivrance d'un faux certificat

Délivrance veut dire remise.


Quant au « Faux » nous avons déjà étudié cette notion, le faux peut se commettre par
confection ou falsification.
Le certificat est toute attestation écrite d'un fait ou d'une appréciation, de nature à
influencer des intérêts publics ou privés.
113
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

2. Par un fonctionnaire ou officier public dans l'exercice de ses fonctions.

Nous savons ce qu'il faut entendre par fonctionnaire public. Un officier public est une
personne chargée d'un emploi public, dont le concours est nécessaire pour des actes
d'un intérêt public ou privé. Par exemple : notaires, officiers de l'état civil, huissiers.
Exemples de faux certificats tombant sous le coup de l’article 127 :
- fabrication d'un faux certificat d'indigence, de bonne conduite, etc. ;
- fabrication d'un faux certificat de maladie, infirmité, établi par un médecin
fonctionnaire ;
- falsification d'un certificat officiel en modifiant le nom, etc. ;

Chapitre III. APERCU DES AUTRES INFRACTIONS CONTRE LA FOI


PUBLIQUE

Le tableau ci-dessous reprend d’une manière synthétique les autres infractions contre la foi publique.

CODE PENAL CONGOLAIS


Décret du 30 janvier 1940 (B.O., 1940, p. 193)

LIVRE DEUXIÈME : DES INFRACTIONS ET DE LEUR RÉPRESSION EN


PARTICULIER

TITRE III. INFRACTIONS CONTRE LA FOI PUBLIQUE

SECTION I. DE LA CONTREFAÇON, DE LA FALSIFICATION ET DE


L’IMITATION DES SIGNES MONETAIRES (– Section introduite par le second décret
du 24 juin 1953.)
La contrefaçon consiste à reproduire par imitation frauduleuse un écrit ou une chose.
La falsification consiste à altérer volontairement les données sur lesquelles l’expert s’est
fondé, et les résultats auxquels la mission qui lui a été confiée lui a permis d’aboutir.
La loi punit les faits qui sont définis dans les lignes qui suivent.

1. Fabrication et mise en circulation de fausse monnaie métallique. (Art. 116) 


Définition : c’est le fait pour une personne de contrefaire ou d’altéré
frauduleusement des monnaies métalliques ayant cours légal en République
démocratique du Congo ou à l’étranger, et ceux qui ont introduit ou émis sur le
territoire de la République démocratique du Congo, des monnaies ainsi contrefaites
ou frauduleusement altérées.
a) Elément légal  Art. 116. [Décr. du 24 juin 1953. — Sont punis d’une servitude
pénale de deux à quinze ans et d’une amende de deux mille à quinze mille francs,
ceux qui ont contrefait ou frauduleusement altéré des monnaies métalliques ayant
cours légal en République démocratique du Congo ou à l’étranger, et ceux qui ont
introduit ou émis sur le territoire de la République démocratique du Congo, des
monnaies ainsi contrefaites ou frauduleusement altérées.]

b) Eléments matériels :
1. Contrefaçon, altération, introduction ou émission
114
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

2. D’une monnaie métallique ayant cours légal au Congo ou à l’étranger

c) Eléments intellectuels :
Il faut que l’auteur ait connaissance de la fausseté de la pièce de monnaie

2 Fabrication et mise en circulation de faux billets de banque (Art. 117) 


Définition : c’est le fait pour une personne ceux qui ont contrefaire frauduleusement
ou falsifié des billets au porteur ayant cours légal en République démocratique du
Congo ou à l’étranger, et ceux qui ont introduit ou émis en République démocratique
du Congo des billets ainsi contrefaits ou falsifiés.]

a) Elément légal Art. 117. [Décr. du 24 juin 1953. — Sont punis d’une servitude
pénale de cinq à vingt ans et d’une amende de cinq mille à vingt mille francs, ceux
qui ont frauduleusement contrefait ou falsifié des billets au porteur ayant cours légal
en République démocratique du Congo ou à l’étranger, et ceux qui ont introduit ou
émis en République démocratique du Congo des billets ainsi contrefaits ou falsifiés.]

b) Eléments matériels :
1. Contrefaçon, altération, introduction ou émission
2. D’une monnaie métallique ayant cours légal au Congo ou à l’étranger

c) Eléments intellectuels :
Il faut que l’auteur ait connaissance de la fausseté de la pièce de monnaie

3 Trafic de fausse monnaie (Art. 118)  Définition : est le fait pour une personne,
sans être coupables de participation, se procure avec connaissance, des monnaies
métalliques ou des billets au porteur ou qui dans le but de les mettre en circulation, a
reçu ou se sont procuré des monnaies métalliques ou des billets au porteur.
a) Elément légal  Art. 118. [Décr. du 24 juin 1953. — Sont punis d’une servitude
pénale d’un mois à trois ans et d’une amende de cent à cinq mille francs, ceux qui,
sans être coupables de participation, se sont procuré avec connaissance, des
monnaies métalliques ou des billets au porteur visés aux articles 116 et 117 et les ont
mis ou ont tenté de les mettre en circulation.
Sont punis d’une servitude pénale de huit jours à un an et d’une amende de cent à
mille francs, ceux qui dans le but de les mettre en circulation, ont reçu ou se sont
procuré des monnaies métalliques ou des billets au porteur visés à l’article 116 et
117.]
b) Eléments matériels :

1. Se procurer de la fausse monnaie


2. Mise en circulation ou tentative de mise en circulation

c) Eléments intellectuels :

Il faut que l’auteur ait su qu’il s’agissait de fausse monnaie métallique ou de faux billets de
Banque

4 Remise en circulation de fausse monnaie reçue comme bonne (Art. 118bis) 


Définition : c’est le fait pour une personne qui ayant reçu pour bons des monnaies
métalliques ou des billets au porteur ayant cours légal en République démocratique du
115
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Congo ou à l’étranger, contrefait ou falsifié, les remet en circulation en connaissance des


vices.
a) Elément légal  Art. 118bis. [Décr. du 24 juin 1953. — Sont punis d’une servitude
pénale de huit jours à un an et d’une amende de cent à mille francs ou d’une de ces
peines seulement, ceux qui ayant reçu pour bons des monnaies métalliques ou des
billets au porteur ayant cours légal en République démocratique du Congo ou à
l’étranger, contrefaits ou falsifiés, les ont remis en circulation en connaissance des
vices.]
b) Eléments matériels :

1. Recevoir une fausse monnaie


2. La remettre ou essayer de la remettre en circulation
c) Eléments intellectuels :
1. Croire que la monnaie était bonne à sa réception
2. Avoir connaissance qu’il s’agissait d’une monnaie fausse lors de la remise de
la tentative de remise en circulation.
5 Fabrication et mise en circulation d’objets ressemblant aux signes monétaires (Art.
119)  Définition : c’est le fait de fabriquer, distribuer ou mettre en circulation, soit des
jetons, médailles ou pièces métalliques, soit des imprimés ou formules, obtenus par un
procédé quelconque et présentant par leur forme extérieure, avec des monnaies ou billets au
porteur ayant cours légal en République démocratique du Congo ou à l’étranger, une
ressemblance ayant pour but d’en faciliter l’acceptation en lieu et place des valeurs imitées.
a) Elément légal  Art. 119. [Décr. du 24 juin 1953. — Sont punis d’une servitude
pénale d’un an au plus et d’une amende ne dépassant pas mille francs ou d’une de ces
peines seulement, ceux qui ont fabriqué, distribué ou mis en circulation, soit des
jetons, médailles ou pièces métalliques, soit des imprimés ou formules, obtenus par
un procédé quelconque et présentant par leur forme extérieure, avec des monnaies ou
billets au porteur ayant cours légal en République démocratique du Congo ou à
l’étranger, une ressemblance ayant pour but d’en faciliter l’acceptation en lieu et
place des valeurs imitées.]
b) Eléments matériels :
1. Un des actes matériels suivants : fabrication, distribution, mise en circulation ;
2. Un objet métallique ou un papier ;
3. Ressemblance entre ces objet et papier avec les monnaies légales congolaises ou
étrangères.

c) Eléments intellectuels :
Intention coupable.

SECTION II. DE LA CONTREFAÇON OU FALSIFICATION DES SCEAUX, TIMBRES,


POINÇONS, MARQUES, ETC

6 Contrefaçon ou falsification des sceaux, timbres, poinçons, marques, etc. (Art.


121)  Définition : c’est le fait de contrefaire ou falsifier les sceaux, timbres, poinçons ou
marques de l’État zaïrois et des administrations publiques, de faire usage de ces objets
contrefaits ou falsifiés et d’exposer sciemment en vente les produits de ces contrefaçons ou
falsifications.

a) Elément légal  Art. 121. [O.-L. 85-007 du 14 février 1985, art. 1er. — Seront
punis d’une servitude pénale d’un à quinze ans et d’une amende de cinq mille à
116
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

vingt-cinq mille zaïres:


1o ceux qui auront contrefait ou falsifié les sceaux, timbres, poinçons ou marques de l’État
zaïrois et des administrations publiques;
2o ceux qui auront fait usage de ces objets contrefaits ou falsifiés;
3o ceux qui auront sciemment exposé en vente les produits de ces contrefaçons ou
falsifications.

b) Eléments matériels :
1. Accomplissement d’un acte visé par la loi :
3. contrefaçon ou falsification
4. usage de l’objet contrefait ou falsifié
5. mise en vente des produits de ces contrefaçons ou falsification
2. Portant sur certains objets de l’Etat et des administrations publiques

c) Elément intellectuel :
Il faut que l’auteur sache qu’il s’agit d’un objet contrefait ou du produit d’une contrefaçon.

7 Contrefaçon ou falsification des timbres-poste. (Art. 122)  Définition : c’est le fait


pour une personne dans un but de fraude, qui fait subir aux timbres-poste ou cartes postales
de la République démocratique du Congo ou des États étrangers une altération ou une
préparation quelconque, ou qui aura, avec ou sans intention frauduleuse, contrefait ces
timbres ou ces cartes.

a) Elément légal  Art. 122. — Ceux qui dans un but de fraude, auront fait subir aux
timbres-poste ou cartes postales de la République démocratique du Congo ou des
États étrangers une altération ou une préparation quelconque, ou qui auront, avec ou
sans intention frauduleuse, contrefait ces timbres ou ces cartes, seront punis d’une
amende qui ne dépassera pas cinq mille francs pour chaque cas.

b) Eléments matériels :
1. Altération ou contrefaçon
2. Portant sur des timbres-postes ou cartes postales émis par la RDC ou les Etats étrangers

c) Eléments intellectuels :
La loi précise que l’intention frauduleuse n’est pas nécessaire pour que l’infraction existe
dans les cas de contrefaçon. Par contre cette intention doit exister dans le cas d’altération

SECTION III. DE L’USURPATION DE FONCTIONS PUBLIQUES

8 L’usurpation de fonctions publiques (Art. 123)  Définition : c’est le fait pour


quiconque de se faire attribuer faussement la qualité de fonctionnaire public ou de porter
publiquement tout insigne ou emblème destiné à faire croire à l’existence d’un mandat
public.
a) Elément légal  Art. 123. [Décr. du 26 janvier 1899. — Quiconque se sera attribué
faussement la qualité de fonctionnaire public ou aura porté publiquement tout insigne
ou emblème destiné à faire croire à l’existence d’un mandat public sera puni d’une
servitude pénale d’un mois à deux ans et d’une amende de cinquante à cinq cents
francs, ou d’une de ces peines seulement.
Si l’insigne ou l’emblème n’est pas destiné, mais est simplement de nature à faire
117
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

croire à l’existence d’un mandat public, celui qui publiquement l’aura porté ou l’aura
laissé ou fait porter par une personne à son service ou sous son autorité sera puni
d’une servitude pénale de sept jours au maximum et d’une amende qui ne dépassera
pas deux cents francs ou d’une de ces peines seulement.]

b) Eléments matériels :
1. Attribution de la qualité ou port d’insigne ou emblème
2. La qualité de fonctionnaire public

c) Eléments intellectuels :
L’intention de faire croire à sa fausse qualité ou à l’existence d’un faux mandat public.

SECTION III BIS. DU PORT ILLEGAL DE DECORATIONS

9 Port illégal de décorations (Art. 123bis)  Définition : c’est le fait pour une personne
de porter publiquement une décoration, un ruban ou autres insignes d’un ordre qui ne lui
appartient pas.
a) Elément légal  Art. 123bis. [Décr. du 20 avril 1950. — Toute personne qui aura
publiquement porté une décoration, un ruban ou autres insignes d’un ordre qui ne lui
appartient pas, sera punie d’une servitude pénale de 7 jours au maximum et d’une
amende de 50 à 500 francs ou d’une de ces peines seulement.]
b) Eléments matériels :
1. Port apparent et public
2. de l’insigne
3. d’un ordre
4. qui ne lui appartient

c) Elément intellectuel :
Agir en connaissance de cause

SECTION IV. DES FAUX COMMIS EN ECRITURES (infractions analysées)

SECTION V. DU FAUX TEMOIGNAGE ET DU FAUX SERMENT

10 Faux témoignage (Art. 128)  Définition : c’est est l’altération de la vérité, dans une
déclaration verbale effectuée sous la foi du serment devant les tribunaux, dans la cause
d’autrui, et de nature à porter préjudice.
a) Elément légal  Art. 128. — Le faux témoignage devant les tribunaux est puni de
servitude pénale. La peine peut s’élever à cinq ans.
Si l’accusé a été condamné soit à la servitude pénale à perpétuité, soit à la peine de
mort, le faux témoin qui a déposé contre lui peut être condamné à la peine de
servitude pénale à perpétuité.
b) Eléments matériels :
1. Altération de la vérité
2. Devant les tribunaux
3. Sous la loi du serment
Dans la cause d’autrui
4. De nature à porter préjudice
118
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

c) Eléments intellectuels :
Il faut que l’auteur sache qu’il altère la vérité
11 Subornation de témoin (Art. 129)  Définition : c’est le fait d’inciter une personne à
exposer mensongèrement devant un tribunal des faits venus à sa connaissance, que ce soit à
titre de témoin, d’interprète ou d’expert.
a) Elément légal  Art. 129. Le coupable de subornation de témoin est passible de la
même peine que le faux témoin, selon la distinction de l’article précédent.
b) Eléments matériels :
1. Pression, conseils, instigation, dons, promesses, menaces, etc.
2. Sur une personne susceptible d’être appelée à témoigner en justice
Pour lui faire effectuer un faux témoignage
c) Eléments intellectuels :
Il faut que le suborneur ait su que ce qu’il demandait au témoin de déclarer était
contraire à la vérité
12 Fausses déclarations en justice (Art. 130)  Définition : c’est le fait pour une
personne appelée à donner des renseignements en justice dit des mensonges des cours et
tribunaux.
a) Elément légal  Art. 130. — Toute personne appelée en justice pour donner de
simples renseignements, qui se sera rendue coupable de fausses déclarations, sera
punie d’une servitude pénale de huit jours à un an et d’une amende de vingt-cinq à
cinq cents francs ou d’une de ces peines seulement.
b) Eléments matériels :
1. Altération de la vérité ;
2. Devant les tribunaux ;
3. Dans la cause d’autrui ;
4. De nature à porter préjudice.

c) Eléments intellectuels :
Il faut que l’auteur sache qu’il altère la vérité

13 Fausses déclarations émanant d’interprètes (Art. 131)  Définition : c’est le fait


pour un interprète de dire des mensonges en interprétant devant les cours et tribunaux.
a) Elément légal  Art. 131. — L’interprète et l’expert coupables de fausses
déclarations en justice seront punis comme faux témoins.
b) Eléments matériels :
1. Avoir la qualité requise par la loi et être requis quant à ce ;
2. Acte matériel consistant en : traduction inexacte ; attestation comme exactes des
constatations fausses ; interprétation inexacte ;
3. Devant les tribunaux ;
4. sous la loi du serment ;
5. Dans la cause d’autrui ;
6. De nature à porter préjudice

c) Eléments intellectuels :
Intention coupable : Il faut que l’auteur sache qu’il altère la vérité

14 Faux serment (Art. 132)  Définition : Est coupable de l’infraction de faux serment
celui à qui le serment aura été déféré ou référé en matière civile et qui aura menti.
Le serment décisoire est une espèce particulière de serment, très rare en pratique, car très
119
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

dangereux pour celui qui serait tenté de l'utiliser. Pour cette raison, seules les personnes
capables de disposer de leurs droits peuvent déférer le serment.
En effet, l'un des plaideurs offre de s'en remettre au serment de son adversaire pour établir le
fait contesté, dont dépend l'issue du débat. On dit qu'il défère serment à son adversaire.
Celui-ci peut adopter 3 attitudes :
- Ou bien il prête le serment qui lui est déféré et gagne son procès.
- Ou bien il refuse de le prêter, ce qui constitue un véritable aveu judiciaire dont l'autre
partie pourra se prévaloir pour gagner le procès. Il lui reste une troisième attitude
possible :
- il peut référer le serment au plaideur qui le lui a déféré. Si ce dernier prête serment, il
gagne le procès ; si, au contraire, il refuse de prêter le serment, il perd le procès.
Est coupable de l’infraction de faux serment celui à qui le serment aura été déféré ou référé
en matière civile et qui aura menti.
En effet, « dès lors que le serment est parfois admis comme mode ce preuve par le droit
civil, il importe d’en assurer la crédibilité. C’est à cette fin que répond l’article qui
incrimine le faux serment prêté devant une juridiction civile 296».
a) Elément légal  Art. 132. — Celui à qui le serment aura été déféré ou référé en
matière civile et qui aura fait un faux serment sera puni d’une servitude pénale de six
mois à trois ans et d’une amende de vingt-cinq à deux mille francs, ou d’une de ces
peines seulement.
b) Eléments matériels :
1. Etre partie dans un procès civil ;
2. Le serment vous est référé ou déféré297 ;
3. Altération de la vérité ;
4. Devant les tribunaux

c) Eléments intellectuels :
Intention coupable : avoir connaissance de faire un faux serment.

296 Id. loc. cit.


297 L’un des plaideurs offre de s'en remettre au serment de son adversaire pour établir le fait contesté, dont dépend l'issue
du débat. On dit qu'il défère serment à son adversaire.
Celui-ci peut adopter 3 attitudes :
- Ou bien il prête le serment qui lui est déféré et gagne son procès.
- Ou bien il refuse de le prêter, ce qui constitue un véritable aveu judiciaire dont l'autre partie pourra se prévaloir pour gagner
le procès. Il lui reste une troisième attitude possible :
- il peut référer le serment au plaideur qui le lui a déféré. Si ce dernier prête serment, il gagne le procès ; si, au contraire, il
refuse de prêter le serment, il perd le procès.
120
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

TITRE IV : DES INFRACTIONS CONTRE L’ORDRE PUBLIC


CHAPITRE Ier. ETENDUE DE LA VALEUR PROTEGEE OU CHAMPS
AXIOLOGIQUE DES INFRACTIONS CONTRE L’ORDRE PUBLIC

Section Ière : DÉFINITION DE L’ORDRE PUBLIC

Selon Duhamel et Mény, l’ordre public est la paix interne qui permet à un groupe humain
d’être vraiment une société, au sens où l’entendait la philosophie des lumières.
Est d’ordre public ce qui est si important qu’est mise en question l’essence même de la
société ou son droit.298.
Constituant un intérêt protégé majeur, l’ordre public doit impérativement être assuré tant par
le pouvoir législatif que par le pouvoir exécutif et par le pouvoir judiciaire. Sa protection
relève au départ de la police administrative299.
La police administrative générale vise à assurer le maintien de l’ordre public en général
(sécurité, salubrité et tranquillité publique) au regard des activités privées en général.300

Section 2. INTÉRÊTS PROTÉGÉS PAR LES INFRACTIONS CONTRE


L’ORDRE PUBLIC

L’ordre public, qui constitue l’un des principaux fondements de la société, comporte la
sécurité, la tranquillité, la salubrité et la santé publique301.

§1. La sécurité publique

André VITU définit la sécurité publique de la manière suivante : « La sécurité publique peut
être définie comme la situation dans laquelle se trouve la société lorsqu’elle est à l’abri de
troubles nés, en particulier, de la commission d’actes délictueux. Une parenté évidente unit la
sécurité et la sûreté, les deux mots ayant à peu près le même sens302 ».
DOUCET renchérit que « Partie de l’ordre public, la sécurité publique constitue un intérêt
juridique que les autorités publiques ont le devoir impératif de protéger. C'est même l'un des
premiers aux yeux de certains législateurs.
L’objet de la sécurité publique est d’établir et de maintenir un environnement paisible et sûr
pour les personnes ou pour les biens.

298 DUHAMEL et MENY, Dictionnaire de droit constitutionnel, V° Ordre public.


299 DOUCET, J.P., op. cit., V° Ordre public .
300 DEMBOUR, Droit administratif belge, cité par DOUCET, J.P., op. cit., V° Ordre public .
301 DOUCET, op. cit., V° ordre public.
302 A.VITU, loc. cit.
121
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Le devoir d'assurer la sécurité publique pèse à l'évidence sur les trois pouvoirs. Mais, au
quotidien, il incombe particulièrement à la police administrative : le préfet ou le maire doit
interdire ou du moins réglementer les activités susceptibles de créer un risque de trouble ou
d’accident303. »
Pour André De LAUBADERE, « L’expression sécurité publique vise la limitation du risque
d’accident304».
La sécurité publique est sûrement la composante la plus naturelle de l’ordre public : elle
recouvre la prévention des risques d’accidents, de dommages aux personnes et aux biens. Elle
implique la sécurité des biens et des personnes à assurer contre les agissements privés qui la
remettent en cause, et qui s’est plus récemment développée aussi sous l’angle de la sécurité
civile; les citoyens doivent être protégés non seulement des délinquants et des criminels, mais
aussi contre les risques naturels et technologiques majeurs. Ainsi l’administration doit par
exemple préserver cette sécurité publique sur les routes en édictant des règles (Code de la
route) et en procédant à des contrôles.
La sécurité des biens et des personnes passent par la protection de la propriété privée, la
garantie de l’intégrité physique, la protection du domicile, la réglementation de la circulation
routière, etc305.
Aux termes de l’article 52 de la constitution de la R.D.C : « Tous les Congolais ont droit à la
paix et à la sécurité tant sur le plan national qu’international.
Aucun individu ou groupe d’individus ne peut utiliser une portion du territoire national
comme base de départ d’activités subversives ou terroristes contre l’Etat congolais ou tout
autre Etat ».
L’article 182 de la même constitution dispose : « La Police nationale est chargée de la
sécurité publique, de la sécurité des personnes et de leurs biens, du maintien et du
rétablissement de l’ordre public ainsi que de la protection rapprochée des hautes autorités ».

§2. La tranquillité publique

La tranquillité publique s’étend essentiellement de la prévention des nuisances telles que le


bruit ou le fait de ne pas pouvoir évoluer tranquillement sur la voie publique. Elle consiste à
préserver le calme des citoyens. Ainsi l’administration doit prendre les mesures permettant
par exemple de lutter contre les tapages nocturnes et diurnes ou bien contre les troubles que
peuvent créer le déroulement de manifestations. La sauvegarde de la tranquillité des citoyens ;
la paix sociale des citoyens exige le respect de la tranquillité de chacun afin d’éviter que le
mauvais comportement des uns ne puisse nuire à la tranquillité des autres.
Ainsi que l’affirme André VITU : « Les sociologues pourraient aisément faire cette
constatation qu’au silence, souvent regardé comme une gêne ou la source d’un malaise, la
plupart de nos contemporains préfèrent le bruit, qu’ils tiennent pour la plénitude de la vie …
Mais nul ne peut ignorer que le bruit est, pour une part non négligeable, la cause d’accidents
du travail ou d’infirmités et qu’il entraîne des affections nerveuses chez un certain nombre de

303 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Sécurité publique.


304 André De LAUBADERE, Droit administratif, cité par DOUCET, J.P., op. cit ., v° Sécurité publique.
305 YUMA BIABA, Manuel de droit administratif, DADIC, Kinshasa, 2012, pp. 11-12.
122
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

personnes. On sait aussi qu’il est à l’origine, entre voisins, d’altercations aux suites violentes,
voire mortelles306 ».
L’article 53 de la constitution de la RDC dit : « Toute personne a droit à un environnement
sain et propice à son épanouissement intégral.
Elle a le devoir de le défendre.
L’Etat veille à la protection de l’environnement et à la santé des populations ».
§3. La salubrité publique
L’objet de la salubrité publique est d’établir et de maintenir un environnement favorable à la
Santé307. L’expression salubrité vise la limitation du risque de maladie308.
§4. La santé publique
Aux termes de l’article 47 de la constitution de la RDC, le droit à la santé et à la sécurité
alimentaire est garanti. La loi fixe les principes fondamentaux et les règles d’organisation de
la santé publique et de la sécurité alimentaire.
L’article 53 renchérit que Toute personne a droit à un environnement sain et propice à son
épanouissement intégral. Elle a le devoir de le défendre. L’Etat veille à la protection de
l’environnement et à la santé des populations.

CHAPITRE II. ANALYSE DES INFRACTIONS DE CORRUPTION

Section Ière. NOTIONS DE CORRUPTION

Au niveau de l’infraction de corruption, le Décret du 30 janvier 1940 portant code pénal


congolais a été modifié par la Loi n° 05/OO6 du 29 mars 2005. Depuis, sa définition a connu
une évolution exponentielle au point que cette infraction en recoupe d’autres.
La corruption est définie par la loi elle-même. En effet, aux termes de l’article 147 CP
congolais, « On entend par corruption les actes ou pratique, y compris les infractions
assimilées, prohibés visés par la présente loi ».
Cette définition est laconique oblige un recours à la doctrine pour plus de lumière.
Traditionnellement la corruption est définie comme « le fait, soit pour un agent public de
solliciter ou d’agréer des dons, présents ou avantages pour accomplir ou s’abstenir
d’accomplir un acte de sa fonction, soit pour un administré de le solliciter dans le même
but »309.

La corruption peut se comprendre dans deux sens : la corruption passive et la corruption


active.

306VITU, A., Traité de droit criminel, cité par Doucet, J.P., op. cit., v° Bruit.
307 Doucet, J.P., op. cit., v° Salubrité publique.
308 De LAUBADERE, Droit administratif, cité par Doucet, J.P., op. cit., v° Salubrité publique.
309 DOUCET, op. cit ., v° Corruption.
123
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

On parle traditionnellement de corruption passive pour la personne qui se fait


corrompre, et qui sera donc le corrompu, et la corruption active pour la personne qui
corrompt le fonctionnaire, et qui est donc le corrupteur310. »
« Les deux termes de corruption active et corruption passive sont consacrés par
l’usage ; ils ont cependant le défaut de laisser croire que l’initiative revient toujours au
corrupteur, alors que celui-ci a souvent cédé aux sollicitations ou même aux exigences
du corrompu.311 »

1. La corruption passive

La faute commise par le fonctionnaire qui se laisse corrompre, c'est la corruption


passive. On l'appelle corruption passive même dans le cas où, à l'origine, c'est le
fonctionnaire qui a sollicité le don ou autre avantage pour lequel il a failli à son
devoir312.

En clair, la corruption passive est le fait du fonctionnaire qui se laisse acheter, soit
pour accomplir un acte de sa fonction, soit pour s'en abstenir313.

2. La corruption active

La faute commise par celui qui corrompt le fonctionnaire, c'est la corruption active.

La corruption active est commise par l'administré ou le justiciable qui rémunère la


complaisance du fonctionnaire314.

N.B : Le délit de corruption est une infraction instantanée, consommée dès la


conclusion du pacte entre le corrupteur et le corrompu315.
Il y a des degrés dans la corruption passive : le fonctionnaire par suite de promesses faites ou
de présents reçus, peut faillir à son devoir en accomplissant un acte de sa fonction, même
juste, mais non soumis à salaire ; il peut accomplir un acte injuste (ou s'abstenir de faire un
acte qu'l! aurait dû faire) ; il peut enfin aller jusqu'à commettre une infraction. Nous allons
voir, en quatre paragraphes :

- Corruption passive en vue d’un acte de la fonction, même juste ;


- Corruption passive simple ;
- Corruption passive portant sur un acte injuste ;
- Corruption passive portant sur une infraction et
- Corruption active316.

310 LARGUIER, J., Droit pénal spécial, cité par DOUCET, loc. cit .
311 A.VITU, loc. cit.
312 LESUEUR, J., op. cit., p. 129.
313 VOUIN, R., Droit pénal spécial, cité par DOUCET, op. cit ., v° Corruption.

314 VOUIN, R., Droit pénal spécial, cité par DOUCET, op. cit ., v° Corruption.
315 Cass.crim. 29 juin 2005, Bull.crim. n° 200 p.698.
316 LESUEUR, J., op. cit., p. 129.
124
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Section II. CORRUPTION PASSIVE EN VUE D’UN ACTE DE LA FONCTION,


MEME JUSTE
§1. ELEMENT LEGAL ET ELEMENT AXIOLOGIQUE

La corruption passive en vue d’un acte de la fonction, même juste protège la sécurité publique.
Elle est prévue est punie par l’article 149 ter du code pénal congolais qui dispose :

« Tout agent public ou toute autre personne qui aura, directement ou par personne interposée,
sollicité des sommes d’argent, tout bien ayant une valeur pécuniaire ou tout autre avantage,
pour faire un acte de sa fonction, de son emploi ou de sa mission même juste, mais non sujet à
salaire, sera puni d’une servitude pénale de six mois à deux ans et d’une amende de vingt mille
à cent mille francs congolais constant ou d’une de ces peines seulement ».

§2. ELEMENTS MATERIELS


1°) Qualité de l'auteur

Peuvent seules être poursuives pour corruption passive les personnes énumérées par l'article149 ter du
C.P.

a) Agent public

L’article 147 du C.P définit l’agent public à son premier point repris ci-dessous.

b) Toute personne

Le même article 147 du C.P définit « toute autre personne » comme étant « tout individu qui n’est pas
agent public ».

2°) Réception des dons ou agréement des promesses

Peu importe, pour que l'infraction soit constituée, que l'auteur ait sollicité ces dons ou ces promesses,
ou qu'au contraire il se soit contenté d'accepter sans rien avoir demandé (évidemment le juge pourra en
tenir compte pour l'attribution de la peine, mais l'infraction existe aussi bien dans un cas que dans
l'autre). La corruption existe dès que des promesses, dons ou présents ont été agréés. Il n'est donc pas
nécessaire que le fonctionnaire ait reçu les dons, mais il est par contre nécessaire que les promesses ou
dons aient précédé l'accomplissement de l'acte ou l'abstention du fonctionnaire.317.

3°) Nature de l'acte à accomplir par le fonctionnaire

Le fonctionnaire a agréé ces promesses ou reçu ce don pour accomplir un acte entrant dans le cadre de
ses fonctions, même si cet acte est juste, mais non sujet à salaire. Si l'acte est sujet à salaire (certaines
vacations de fonctionnaires, honoraires d'officiers publics), il n'y a pas infraction. Mais si aucune autre
rémunération n'est prévue en dehors du traitement normal du fonctionnaire, ce dernier commet
l'infraction de corruption, en acceptant une promesse ou un don pour faire un acte qu'il doit
normalement effectuer dans le cadre de ses fonctions.

Exemples : — commissaire de police .qui accepte de l'argent de la victime d'un vol pour en rechercher
l'auteur — magistrat du parquet qui accepte un don pour signer un mandat d'arrêt contre un individu
qui se trouve dans les conditions requises pour être placé en détention préventive. L'accomplissement
de l'acte n'est pas nécessaire pour que l'infraction soit consommée. La consommation résulte de

317 Id., loc. cit.


125
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

l'agréation des dons ou des promesses, avec, en contre-partie, la promesse de la part du fonctionnaire
d'accomplir l'acte. Même s'il se ravise, il est punissable318.

§3. ELEMENTS MORAL

L’auteur doit agir en connaissance de cause, en sachant qu’il n’avait pas le droit de poser
l’acte de corruption.

§4. PROTAGONISTES DE LA CORRUPTION ET REGIME REPRESSIF

3. Le délinquant : le corrupteur et le corrompu. Il s’agit d’une infraction plurale qui ne peut


être commise que par plusieurs personnes.
4. La victime : la personne lésée par l’acte ou l’omission accomplis par l’auteur.

La corruption passive en vue d’un acte de la fonction, même juste est sanctionnée d’une
servitude pénale de six mois à deux ans et d’une amende de vingt mille à cent mille francs
congolais constant ou d’une de ces peines seulement.

Section III. CORRUPTION PASSIVE SIMPLE


§1. ELEMENT LEGAL ET ELEMENT AXIOLOGIQUE

La corruption passive simple est prévue est punie par les articles 147 à 148, al. 1 du code
pénal congolais. Elle protège la sécurité publique.

Article 147. Au sens de la présente Loi, on entend par :


1. Agent public : Tout fonctionnaire ou tout employé de l’Etat ou de ses institutions, y
compris ceux qui ont été sélectionnés, nommés ou élus pour entreprendre des activités ou
exercer des fonctions au nom ou au service de l’Etat, à tout niveau de sa hiérarchie.
2. Toute autre personne : Tout individu qui n’est pas agent public.
3. Biens :Tous les types d’avoirs, corporels ou incorporels, meubles ou immeubles, tangibles
ou intangibles, ainsi que les actes juridiques ou documents attestant la propriété de ces
avoirs ou les droits y afférents.
4. Corruption : Les actes ou pratiques, y compris les infractions assimilées, prohibés visés par
la présente loi.
5. Confiscation : Toute sanction ou mesure ordonnée par une juridiction à la suite d’une
procédure judiciaire pour une ou plusieurs infractions relevant de la corruption et donnant
lieu à une privation des biens, gains ou produits provenant de la corruption.
6. Enrichissement illicite : L’augmentation substantielle des biens d’un agent publique ou de
toute autre personne que celui-ci ou celle-ci ne peut raisonnablement justifier au regard de
ses revenus légitimes.
7. Produit de la corruption : Tout bien corporel ou incorporel, meuble ou immeuble, tangible
ou intangible et tout document ou acte juridique prouvant qu’on a des titres pour ses biens
ou des intérêts dans ce mêmes biens, acquis à la suite d’un acte de corruption.

Article 147 bis. Sont constitutifs d’actes de corruption, les actes énumérés ci-après :
1. le fait, pour un agent public ou toute autre personne, de solliciter ou d’accepter,
directement ou indirectement, des sommes d’argent, tout bien ayant une valeur pécuniaire
ou toute autre avantage, tel qu’un don, une faveur, une promesse ou un gain pour lui-

318 Ibid., loc.cit.


126
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

même ou pour autrui, personne physique ou morale, en contrepartie de l’accomplissement


ou de l’omission d’un acte dans l’exercice de ses fonctions ;
2. le fait d’offrir ou d’octroyer directement ou indirectement à un agent public ou à toute
autre personne des sommes d’argent, tout biens ayant une valeur pécuniaire ou tout autre
avantage tel qu’un don, une faveur, une promesse ou un gain pour lui-même ou pour
autrui, personne physique ou morale, en vue de l’accomplissement ou de l’omission d’un
acte dans l’exercice de ses fonctions ;
3. le fait d’offrir, de donner ou de promettre, directement ou indirectement un avantage indu à
toute personne qui dirige un organisme du secteur privé ou est employé par ce dernier en
quelque qualité que ce soit, ou le fait, pour cette personne, de solliciter ou d’accepter cet
avantage indu, directement ou indirectement, à titre personnel ou pour autrui, pour qu’elle
agisse en contravention de ses devoirs ou s’abstienne d’agir.
4. le fait, pour un agent public ou toute autre personne, de solliciter ou d’accepter,
directement ou indirectement, un avantage indu, pour lui-même ou pour autrui, afin
d’abuser de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d’une administration
ou d’une autorité publique un avantage indu.
5. l’usage, la dissimulation ou l’aliénation frauduleuse du produit ou de biens tirés de l’un
des actes visés au présent article ;
6. le fait d’utiliser la fraude pour échapper ou faire échapper autrui aux obligations fiscales,
douanières et administratives ;
7. l’enrichissement illicite.

Article 148, al.1. Tout agent public ou toute personne qui aura commis un des actes prévus à
l’article 147 bis sera puni de six à mois à deux ans de servitude pénale et d’une amende de
cinquante mille à deux cent mille francs congolais constants.
§2. ELEMENTS MATERIELS

Pour que la corruption passible simple soit établie, il faut la réalisation de trois éléments
matériels à savoir : Qualité de l’auteur ; un acte matériel de corruption et la nature de l’acte de
sa fonction à accomplir par l’auteur.

1. Qualité de l’auteur
L’article 148 du C.P parle de « tout agent public ou toute personne qui aura commis … ».
Il en découle que deux catégories d’auteurs.

c) Agent public
L’article 147 du C.P définit l’agent public à son premier point repris ci-dessus.

d) Toute personne
Le même article 147 du C.P définit « toute autre personne » comme étant « tout individu qui
n’est pas agent public ».

2. Un acte matériel de corruption


Sept actes de corruption sont définis par l’article 147 bis dont le libellé est repris ci-dessus.
Eu égard au premier acte de corruption, « peu importe, pour que l'infraction soit constituée,
que l'auteur ait sollicité ces dons ou ces promesses, ou qu'au contraire il se soit contenté
127
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

d'accepter sans rien avoir demandé (évidemment le juge pourra en tenir compte pour
l'attribution de la peine, mais l'infraction existe aussi bien dans un cas que dans l'autre). La
corruption existe dès que des promesses, dons ou présents ont été agréés. Il n'est donc pas
nécessaire que l’auteur ait reçu les dons, mais il est par contre nécessaire que les promesses
ou dons aient précédé l'accomplissement de l'acte ou l'abstention du fonctionnaire : recevoir
un cadeau après avoir agi (ou s'être abstenu de la faire), si ce don n'avait pas été sollicité-ou
agréé auparavant, ne constitue pas l'infraction de corruption mais, éventuellement, une
simple faute disciplinaire 319», à condition que celui qui vous l’offre soit prêt à assumer son
acte publiquement, car autrement la corruption sera établie dans votre chef par la modalité
d’enrichissement illicite.

3. Nature de l’acte à accomplir par le fonctionnaire

La nature de l’acte à accomplir est nécessaire dans l’établissement de la corruption à travers


ses actes repris aux points 1 à 4. Les autres points ne sont pas concernés par ce troisième
élément. Dans lesdits actes, selon le cas, l’auteur doit poser l’acte de corruption
respectivement :
1° en contrepartie de l’accomplissement ou de l’omission d’un acte dans l’exercice de ses
fonctions ;
2° en vue de l’accomplissement ou de l’omission d’un acte dans l’exercice de ses fonctions ;
3° pour qu’elle agisse en contravention de ses devoirs ou s’abstienne d’agir et
4° afin d’abuser de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d’une
administration ou d’une autorité publique un avantage indu.

C’est dans ce sens que s’exprimait LESUEUR, en référence au texte abrogé, de la manière
suivante : « accomplir un acte entrant dans le cadre de ses fonctions, même si cet acte est
juste, mais non sujet à salaire. Si l'acte est sujet à salaire (certaines vacations de
fonctionnaires, honoraires d'officiers publics), il n'y a pas infraction. Mais si aucune autre
rémunération n'est prévue en dehors du traitement normal du fonctionnaire, ce dernier
commet l'infraction de corruption, en acceptant une promesse ou un don pour faire un acte
qu'il doit normalement effectuer dans le cadre de ses fonctions.

Exemples : — commissaire de police .qui accepte de l'argent de la victime d'un vol


pour en rechercher l'auteur — magistrat du parquet qui accepte un don pour signer
un mandat d'arrêt contre un individu qui se trouve dans les conditions requises pour
être placé en détention préventive.

L'accomplissement de l'acte n'est pas nécessaire pour que l'infraction soit consommée. La
consommation résulte de l'agréation des dons ou des promesses, avec, en contre-partie, la
promesse de la part du fonctionnaire d'accomplir l'acte. Même s'il se ravise, il est
punissable »320.

§3. ELEMENT MORAL

L’auteur doit agir en connaissance de cause, en sachant qu’il n’avait pas le droit de poser
l’acte de corruption.

319 LESUEUR, J., op. cit., p. 130.


320 Loc. cit.
128
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

§4. PROTAGONISTES DE LA CORRUPTION

5. Le délinquant : le corrupteur et le corrompu. Il s’agit d’une infraction plurale qui ne peut


être commise que par plusieurs personnes.
6. La victime : la personne lésée par l’acte ou l’omission accomplis par l’auteur.

§5. REGIME REPRESSIF

La corruption passive simple est punie de six à mois à deux ans de servitude pénale et d’une
amende de cinquante mille à deux cent mille francs congolais.

Section IV. CORRUPTION PASSIVE EN VUE D’ACTE INJUSTE OU


D’ABSTENTION COUPABLE
§1. ELEMENT LEGAL

Article 148, al. 2 du C.P : « La peine prévue à l’alinéa précédent pourra être portée au double
du maximum, si l’acte susvisé commis par l’agent public ou toute autre personne l’a été en
vue d’accomplir, dans l’exercice de ses fonctions, de son emploi ou de sa mission, un acte
injuste ou s’abstenir d’accomplir un acte qui rentre dans l’ordre de ses devoirs ».

§2. ELEMENTS MATERIELS


Comme pour la corruption passive simple, l’établissement de la corruption passive en vue
d’acte injuste ou d’abstention coupable requiert les trois éléments matériels précités, avec
juste une différence au niveau du contenu du troisième élément :

« La nature de l’acte à accomplir par le fonctionnaire :


1° Accomplir, dans l’exercice de ses fonctions, de son emploi ou de sa mission, un acte
injuste
2° S’abstenir d’accomplir un acte qui rentre dans l’ordre de ses devoirs.
Exemples : — policier qui accepte de l'argent pour ne pas dresser procès-verbal à l’encontre
d'un contrevenant — policier agréant une promesse de la part d'un commerçant pour effectuer
à son commissaire un faux rapport à l’encontre d'un autre commerçant, concurrent du
premier, etc.
N.B : tous les autres éléments restent les mêmes, à part la peine qui pourra être portée au
double du maximum.

Section V. CORRUPTION PASSIVE EN VUE DE COMMETTRE UNE


INFRACTION
§1. ELEMENT LEGAL

La corruption passive en vue de commettre une infraction est prévue et punie par l’article 149,
al. 1 du C.P qui dispose : « La peine sera de quinze ans de servitude pénale et d’une amende
de cinq cent mille à un million de francs congolais constants, si l’acte susvisé commis par
129
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

l’agent public ou toute autre personne dans l’exercice de ses fonctions de son emploi ou de
sa mission constitue une infraction ».

L’article 149bis prévoit des peines complémentaires en ces termes :


« Outre les peines prévues à l’article 149, la juridiction compétente, saisie d’une infraction de
corruption, prononcera au profit de l’Etat la confiscation du produit ou moyen de la
corruption de la personne condamnée ainsi que la rétribution perçue.
Elle pourra ordonner le gel, la saisie, la confiscation et le rapatriement du produit de la
corruption, conformément à la législation sur l’entraide judiciaire et l’extradition ou aux
accords bilatéraux existants en la matière.
En outre, la personne reconnue coupable de corruption active ou passive sera condamnée à :
1. L’interdiction, pour une période de cinq ans au moins et de 10 ans au plus, après
l’exécution de la peine, du droit de vote et du droit d’éligibilité;
2. L’interdiction, pour la même période, du droit d’accès aux fonctions publiques et
paraétatiques quel qu’en soit l’échelon et du droit d’exercer, directement ou
indirectement, certaines activités, notamment la profession de banquier, d’agent de
change, d’agent comptable, d’importateur ou d’exportateur ;
3. L’interdiction de soumissionner dans tous les marchés publics pour une période de
cinq ans ;
4. La privation du droit à la condamnation ou à la libération conditionnelle ;
5. L’expulsion définitive du territoire de la République Démocratique du Congo, après
l’exécution de la peine, si le condamné est étranger ».
§2. ELEMENTS MATERIELS

Tout comme pour la corruption passive simple, l’établissement de la corruption passive en


vue de commettre une infraction requiert les trois éléments matériels précités, avec juste une
différence au niveau du contenu du troisième élément :
« La nature de l’acte à accomplir par le fonctionnaire : une infraction.
Peu importe qu’il s’agisse d’une infraction de droit commun ou d’une infraction aux lois de
droit pénal particulier. Quoiqu’il en soit, le corrupteur et le corrompu encourent, comme co-
auteurs, les peines propres à cette infraction321.
N.B :
- Tous les autres éléments restent les mêmes, à part la peine qui sera de quinze ans de
servitude pénale et d’une amende de cinq cent mille à un million de francs congolais
ainsi que les peines complémentaires prévues par l’article 149bis.
- La corruption est constituée dès que le fonctionnaire et l'auteur des dons ou promesses
se sont mis d'accord, peu importe que le fonctionnaire, ultérieurement, tienne ou ne
tienne pas ses engagements.

321 Id.
130
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

§3. CIRCONSTANCES AGGRAVANTES (article 149, al.2)

1. Corruption Constituent des circonstances aggravantes et seront punis des peines


active ou prévues à l’alinéa précédent :
passive en 1) Les actes de corruption active ou passive ayant pour but
vue d’entraver au bon fonctionnement de la justice, notamment le fait de
d’entraver promettre, d’offrir ou d’accorder un avantage indu pour :
au bon a. obtenir un faux témoignage ou empêcher un témoignage ou
fonctionnem la présentation d’éléments de preuve dans une procédure en rapport
ent de la avec la commission de l’un des actes prévus par l’article 147 bis.
justice b. empêcher un membre de la commission de l‘Ethique et de la
lutte contre la corruption agissant conformément à la loi, un
magistrat, un officier de police Judiciaire ou un agent de services de
détection et de répression, d’exercer les devoirs de leur charge en
rapport avec la commission de l’un des actes prévus par l’article
147bis ;
2. Corruption active ou 2) Les actes de corruption commis en vue de :
passive en vue de gagner a. gagner des marchés publics en violation de
des marchés publics la procédure d’appels d’offres et des seuls fixés par
la législation en matière de passation de marchés
par voie de gré à gré ;
3. Corruption active ou b. obtenir, par voie de gré à gré des droits
passive en vue d’ obtenir miniers ou des carrières en violation de la procédure
des droits miniers ou des d’appels d’offres prévues par le Règlement minier ;
carrières
4. Corruption active ou c. obtenir, par voie de gré à gré, des
passive en vue d’ obtenir concessions forestières en violation de la procédure
des concessions forestières fixée en exécution du Code forestier ;

5. Corruption active ou d. violer les règles de procédure en matière de privation


passive en vue de violer ou de désengagement de l’Etat des entreprises publiques ;
les règles de procédure en
matière de privation ou de
désengagement de l’Etat
des entreprises publiques
6. Corruption active ou e. soustraire les contribuables aux obligations imposées
passive en vue de par la législation fiscale, parafiscale et douanière ;
soustraire les contribuables
à leurs obligations
7. Corruption active ou f. faciliter ou dissimuler le blanchiment du crime ;
passive en vue de faciliter
ou dissimuler le
blanchiment du crime
8. Corruption active ou g. obtenir des avantages fiscaux en violation du code
passive en vue d’ obtenir des investissements ;
des avantages fiscaux
9. Corruption active ou h. financer les activités des partis politiques.
passive en vue de financer
les activités des partis
politiques
10. Corruption active ou 3) Les actes de corruption commis dans le cadre d’une
passive commise dans le organisation criminelle.
cadre d’une organisation
criminelle
131
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Section VI. CORRUPTION ACTIVE


§1. ELEMENT LEGAL

Article 150 du C.P. Ceux qui auront contraint par violence ou menaces ou corrompu par
promesses, dons ou présents l’une quelconque des personnes visées à l’article 147 ci-dessus,
pour obtenir un acte de sa fonction, de son emploi ou de sa mission même juste mais non sujet
à salaire, ou l’abstention d’un acte qui rentre dans l’ordre de ses devoirs, ou la commission
d’une infraction, seront punies des peines prévues à l’article 149 ci-dessus.
Lorsque les dons ou présents ont été offerts, agrées ou reçus après l’accomplissement de l’acte
juste, injuste ou infractionnel prévu par les articles précédents, les coupables seront punis des
peines portées à ces articles selon les distinctions y établies, s’il est prouvé que c’est cet acte
qui en a été la cause ou que telle était l’intention déclarée d’une des parties au moins.

§2. ELEMENTS MATERIELS322

1°) Un acte de corruption. La liste en est plus étendue que pour la corruption passive : aux
promesses, dons et présents, il faut ajouter les violences et les menaces à l’encontre du
fonctionnaire. Il y a infraction de corruption active même si c'est Je fonctionnaire qui a
sollicité les dons ou promesses.

2°) Envers un fonctionnaire, etc. Voir la liste des personnes pouvant être coupables de
corruption Passive.

3°) Dans le but de corrompre. L'auteur de la corruption doit avoir eu pour but d'obtenir du
fonctionnaire l'accomplissement ou l'abstention d'un des actes visés aux articles 147, 148 et
149. Le délit est consommé dès que le prévenu a usé des moyens vus ci-dessus. Peu importe,
en conséquence, qu'ils aient été ou non suivis d'effet. Les actes de corruption doivent avoir été
accomplis avant d'obtenir la faveur sollicitée : offrir une récompense après l'accomplissement
de l'acte ne constitue une infraction que s'il y a eu entente préalable entre l'auteur et le
fonctionnaire.

TENTATIVE. La tentative de corruption active est punissable, lorsque l'entente entre l'auteur
et le fonctionnaire ne se réalise pas pour une cause indépendante de la volonté de l'auteur, par
exemple te refus du fonctionnaire.
§3. ELEMENT INTELLECTUEL

L’agent doit avoir agi en connaissance de cause

§4. PROTAGONISTES DE LA CORRUPTION

1. Le délinquant : corrupteur et corrompu.


2. La victime : la personne lésée. N’importe qui.

§4. REGIME REPRESSIF : Les peines prévues à l’article 149 du C.P.

322 Ibid., p. 132.


132
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Section VII. REPRESAILLES OU INTIMIDATION DES


TEMOINS OU EXPERTS

§1. Élément légal


Article 149quinquies. Sans préjudice d’autres sanctions prévues dans le Code Pénal, Livre II,
quiconque commet des actes de représailles ou d’intimidation des témoins ou experts qui
déposent contre les actes de corruption ou de trafic d’influence et leurs parents, est passible
d’une servitude pénale de trois à cinq ans et d’une amende ne dépassant pas deux cent mille
francs congolais constants.
En outre, aucune poursuite pour dénonciation calomnieuse ne peut être engagé contre un
témoin, un expert ou une victime qui, de bonne foi, a transmis des informations ou déposé
contre les actes de trafic d’influence et de corruption devant l’autorité judiciaire compétente
dans le cadre d’une procédure judiciaire ou devant la commission de l’Ethique et de la Lutte
contre la Corruption.

§2. ELEMENTS MATERIELS


1. Qualité de témoin, d’expert ou de son parent ;
2. Une affaire portant sur un acte de corruption ou de trafic d’influence ;
3. Acte matériel d’intimidation ou de représailles.

§3. ELEMENT INTELLECTUEL :Intention méchante

§4. PROTAGONISTES DE LA CORRUPTION

1. Le délinquant : N’importe qui.


2. La victime : témoin et expert.

§5. Régime répressif : Servitude pénale de trois à cinq ans et une amende ne
dépassant pas deux cent mille francs congolais.

§6. Autre point de curiosité : Excuse légale absolutoire : bonne foi : article
149quinquies, al.2.
133
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Chapitre III. APERCU DES AUTRES INFRACTIONS CONTRE


L’ORDRE PUBLIC

Section Ière. LES INFRACTIONS CONTRE L’ORDRE PUBLIC PRÉVUES ET


PUNIES PAR LE CODE PÉNAL CONGOLAIS

CODE PENAL CONGOLAIS


Décret du 30 janvier 1940 (B.O., 1940, p. 193)

LIVRE DEUXIÈME : DES INFRACTIONS ET DE LEUR RÉPRESSION EN


PARTICULIER

TITRE IV. INFRACTIONS CONTRE L’ORDRE PUBLIC


SECTION I. DE LA REBELLION

Le concept rébellion est polysémique. La doctrine pénale distingue deux niveaux de


rébellion :
- la rébellion contre l’État lui-même, qui relève des atteintes à la sûreté de l’État (on dit aussi
Insurrection) et
- la rébellion contre les agents publics, qui consister à empêcher un représentant de l’autorité
d’accomplir un acte de sa fonction323.

La rébellion, qui consiste à s’opposer activement à l’action d’une administration publique,


est spécialement incriminée, sous cette appellation. Le Code pénal congolais distingue :
- La rébellion commise par une seule personne (Art. 134) et
- La rébellion commise par plusieurs personnes et par suite d’un concert préalable (Art.
135).

1 . Définition  Le code pénal congolais définit la rébellion en son article 133 qui
dispose : « Est qualifié rébellion toute attaque, toute résistance avec violences ou menaces
envers les dépositaires ou agents de l’autorité ou de la force publique, agissant pour
l’exécution des lois des ordres ou ordonnances de l’autorité publique, jugements ou autres
actes exécutoires ».
a) Elément légal  Art. 134 (V° supra)
Art. 134. — La rébellion commise par une seule personne est punie au maximum
d’une servitude pénale d’un an et d’une amende de cent à cinq cents francs ou d’une de ces
peines seulement.
Art. 135. — Si la rébellion a été commise par plusieurs personnes et par suite d’un

323
DOUCET, J.P., op. cit., V° Rébellion.
MONTREUIL, Commentaire du Juris-classeur : L’infraction de rébellion requiert la réunion de quatre éléments
constitutifs. Le premier réside dans la qualité de la victime : il doit s’agir « d’une personne dépositaire de
l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public ». Le deuxième élément est circonstanciel :
l’agent d’autorité devait agir lors des faits incriminés « dans l’exercice de ses fonctions, pour l’exécution des lois,
des ordres de l’autorité publique, des décisions ou mandats de justice. Le troisième élément, l’élément matériel,
est constitué par le fait pour le prévenu « d’opposer une résistance violente » à l’agent de l’autorité. Enfin,
l’infraction comporte un élément intentionnel.
134
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

concert préalable, la servitude pénale peut être portée à cinq ans et l’amende est de deux
cents à mille francs.
b) Eléments matériels :
1. Attaque ou résistance avec violences ou menaces
2. Envers les dépositaires ou agents de l’autorité ou de la force publique
3. Agissant dans l’exercice de leurs fonctions
c) Eléments intellectuels :
Le délinquant doit avoir : - volontairement exercé des violences ou des menaces – connu la
qualité de l’agent.

SECTION IBIS. DE LA PROVOCATION ET DE L’INCITATION A DES


MANQUEMENTS ENVERS L’AUTORITE PUBLIQUE

2. Provocation à la désobéissance aux lois (Art. 135bis)  Définition : La provocation est


l’incitation à commettre des actes répréhensibles324. Le code pénal réprime :
1. la provocation à la désobéissance aux lois (article 135bis) ; le fait, en vue de porter
atteinte à l’ordre public, de provoquer à la désobéissance, directement par quelque
moyen que ce soit, la population civile ;
2. la provocation des militaires à se détourner de leurs devoirs militaires et de
l’obéissance (article 135ter) ; le fait de provoquer des militaires à se détourner de
leurs devoirs militaires et de l’obéissance qu’ils doivent à leurs chefs dans tout ce
qu’ils leur commandent pour l’exécution des lois et des règlements militaires.

a) Elément légal  Art. 135bis. [O.-L. 299 du 16 décembre 1963, art. 1er. Quiconque
aura provoqué directement à désobéir aux lois sera puni d’une servitude pénale de deux mois
à trois ans et d’une amende de mille à dix mille francs, ou d’une de ces peines seulement.]
b) Eléments matériels :
1. Acte matériel : il peut s’agir d’écrits ou de paroles, qui peuvent s’adresser à une seule
personne, à un groupe de personnes, ou à la collectivité
2. Incitant à désobéir à la loi
c) Eléments intellectuels :
L’auteur doit savoir que ce qu’il incite à faire est contraire aux lois

3. Provocation des militaires à se détourner de leurs devoirs militaires et de


l’obéissance (Art. 135ter)  Définition : Elle consiste dans le fait de provoquer des
militaires à se détourner de leurs devoirs militaires et de l’obéissance qu’ils doivent à leurs
chefs dans tout ce qu’ils leur commandent pour l’exécution des lois et des règlements
militaires.
a) Elément légal  Art. 135ter. [O.-L. 299 du 16 décembre 1963, art. 1er. —
Quiconque aura, d’une manière quelconque, provoqué des militaires à se détourner de leurs
devoirs militaires et de l’obéissance qu’ils doivent à leurs chefs dans tout ce qu’ils leur
commandent pour l’exécution des lois et des règlements militaires, sera puni d’une servitude
pénale de deux mois à trois ans et d’une amende de mille à dix mille francs, ou d’une de ces
peines seulement.]
b) Eléments matériels :
1. Acte matériel de provocation: il peut s’agir d’écrits ou de paroles ;
2. adressé à un militaire ou à un groupe de militaire ;
3. Incitant à se détourner de leurs devoirs militaires et de l’obéissance

324
LAROUSSE, V° Provocation.
135
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

c) Eléments intellectuels :
L’auteur doit savoir que ce qu’il incite à faire est contraire aux lois

SECTION II. DES OUTRAGES ET DES VIOLENCES ENVERS LES MEMBRES DU


BUREAU POLITIQUE, LES MEMBRES DE L’ASSEMBLEE NATIONALE, LES
MEMBRES DU GOUVERNEMENT, LES DEPOSITAIRES DE L’AUTORITE OU DE
LA FORCE PUBLIQUE

Définition  Les outrages et violences envers les autorités consistent dans le fait de
témoigner ouvertement le mépris ou de porter un acte de violence envers un parlementaire,
un membre du gouvernement ou un membre de la Cour constitutionnelle, un magistrat, un
officier militaire ou de la police ou un gouverneur et envers les autres dépositaires de
l’autorité ou de la force publique ou envers les corps constitués.

Doucet qui est plus détaillé sur la question estime qu’en droit criminel, l’outrage est
constitué par un acte, un geste, un écrit ou une parole de caractère méprisant, qui porte, non
seulement atteinte au sentiment de l’honneur d’une personne, mais encore et surtout à la
dignité de la fonction dont elle est investie. Alors que l'injure ou la diffamation apparaissent
comme des infractions de droit commun, l'outrage s'analyse plutôt en une atteinte à l'honneur
d'un supérieur hiérarchique (familial ou social) ; il est ordinairement perpétré en sa présence,
ce qui rend manifeste le mépris affiché envers sa fonction 325.

Outrager quelqu'un c'est lui témoigner ouvertement son mépris, soit en l'injuriant, soit en le
frappant326.

Est un outrage, blessant l’honneur et la délicatesse de la victime, tout ce qui tend à abaisser
le fonctionnaire visé, à diminuer l’autorité morale dont il jouit et, en définitive, à nuire au
respect qui doit entourer la fonction qu’il exerce327.

Par violences, il faut entendre tout acte de contrainte physique exercée sur une personne. Il
peut s’agir aussi bien de violences légères que de violences ayant laissé des traces, des
blessures ou de contusions328.
Sont réprimés :
1. Outrage ou violence envers un parlementaire, un membre du gouvernement ou un
membre de la Cour constitutionnelle (Art. 136)
2. Outrage envers un magistrat, un officier supérieur militaire ou de la police ou un
gouverneur (Art. 136)
3. Outrage envers les autres dépositaires de l’autorité ou de la force publique (Art. 136)

N.B : Excuse légale absolutoire (Art. 136) – La loi 71-001 du 12 juin 1971 dispose en son
article 9 que «les outrages prévus aux articles 136 et 138quater ne donneront lieu à aucune
action s’il est établi qu’ils ont été précédés de provocations de la part des personnes
protégées.»

4. Outrage envers les corps constitués (art. 137) ;


5. Violence simple envers les représentants de l’autorité (Art. 138)

325
DOUCET, op. cit ., v° Outrage.
326
THOMAS, Cours de philosophie morale, DOUCET, J.P., op. cit., V° Outrage.
327
A.VITU, loc. cit.
328
LIKULIA BOLONGO, op. cit., p. 393.
136
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

6. Violence aggravée envers les représentants de l’autorité (Art. 138bis)

N.B : plainte préalable de la victime (Art. 138ter)

7. Outrage ou violence envers les représentants de l’autorité à cause de son témoignage


Art. 138quater.
8. Outrage ou violence envers les représentants de l’autorité en dehors de l’exercice de
son mandat ou de ses fonctions (Art. 138quinquies)

1. Outrage envers un parlementaire, un membre du gouvernement ou un membre de


la Cour constitutionnelle
a) Elément légal 
Art. 136. L. 71-001 du 12 juin 1971, art. 2.
1° Sera puni d’une servitude pénale de 6 à 12 mois et d’une amende de cinquante zaïres au
maximum, ou de l’une de ces peines seulement, celui qui, par paroles, faits, gestes ou
menaces, aura outragé soit un membre du bureau politique, soit un membre de l’Assemblée
nationale, soit un membre du gouvernement, soit un membre de la Cour constitutionnelle,
dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de son mandat ou de ses fonctions.
2° Sera puni d’une servitude pénale de 3 à 9 mois et d’une amende de trente zaïres au plus,
ou de l’une de ces peines seulement, celui qui, par paroles, faits, gestes ou menaces, aura
outragé soit un membre du cadre dirigeant du parti, soit un membre des cours et tribunaux,
soit un officier du ministère public, soit un officier supérieur des forces armées et de la
police, soit un gouverneur dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions.
3° Sera puni d’une servitude pénale de 7 à 15 jours et d’une amende de cinquante K. à cinq
zaïres ou de l’une de ces peines seulement, celui qui, par paroles, faits, gestes ou menaces,
aura outragé les autres dépositaires de l’autorité ou de la force publique dans l’exercice ou à
l’occasion de l’exercice de leurs fonctions.]

b) Eléments matériels :
1. Fait matériel d’outrage : paroles, gestes ou menaces, écrits ou dessins, envoi d’objet
2. Adressé à un représentant de l’autorité
3. Dans l’exercice de ses fonctions
4. Outrage reçu personnellement par l’offensé
c) Eléments intellectuels :
L’auteur doit avoir connu la qualité de celui qu’il outrageait, et avoir eu l’intention de
l’outrager et de le blesser dans sa dignité et dans sa fonction.

2. Outrage envers les corps constitués


a) Elément légal  Art. 137. — Les outrages commis envers les corps constitués
seront punis de la même manière que les outrages commis envers les membres de ces corps.
b) Les autres éléments, voir ci-dessus.

3. Violence envers les représentants de l’autorité (Art. 138, 138bis, 138quater,


138quinquies.)
a) Elément légal  Art. 138. [L. 71-001 du 12 juin 1971, art. 4, 1o. — Sera puni
d’une servitude pénale de six à trente mois et d’une amende de 30 à 200 zaïres, ou de l’une
de ces peines seulement, celui qui, sans qu’il en soit résulté des blessures, aura frappé soit un
membre du bureau politique, soit un membre de l’Assemblée nationale, soit un membre du
gouvernement, soit un membre de la Cour constitutionnelle dans l’exercice ou à l’occasion
de l’exercice de son mandat ou de ses fonctions.]
137
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

[L. 71-001 du 12 juin 1971, art. 4, 2o. — Sera puni d’une servitude pénale de six à
vingt-quatre mois et d’une amende de 20 à 100 zaïres, ou de l’une de ces peines seulement,
celui qui, sans qu’il en soit résulté des blessures, aura frappé les personnes visées à l’article
136, 2è alinéa, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de leurs fonctions.]
[L. 71-001 du 12 juin 1971, art. 4, 3o. — Sera puni d’une servitude pénale de six à huit
mois et d’une amende de 5 à 30 zaïres, ou de l’une de ces peines seulement, celui qui, sans
qu’il en soit résulté des blessures, aura frappé les personnes visées à l’article 136, 3è alinéa.]

Art. 138bis. [L. 71-001 du 12 juin 1971, art. 5. — Si les violences exercées contre les
personnes désignées à l’article 138 ont été la cause d’effusion de sang, de blessures ou de
maladie, le coupable sera puni:
1o d’une servitude pénale de 4 à 10 ans et d’une amende de 400 à 1000 zaïres, ou
de l’une de ces peines seulement pour les victimes visées à l’article 138, 1er alinéa;
2o d’une servitude pénale de 1 à 3 ans et d’une amende de 100 à 300 zaïres, ou de
l’une de ces peines seulement pour les victimes visées à l’article 138, 2è alinéa;
3o d’une servitude pénale de 6 mois à 2 ans et d’une amende de 50 à 200 zaïres, ou
de l’une de ces peines seulement pour les victimes visées à l’article 138, 3è alinéa.]
– La loi 71-001 du 12 juin 1971 dispose en son article 3 que «les outrages commis
envers les corps constitués seront punis de la même manière que les outrages commis envers
les membres de ces corps.»

Art. 138ter. [L. 71-001 du 12 juin 1971, art. 6. — Les outrages adressés aux personnes
visées aux articles 136 et 138, ne peuvent, sauf le cas de flagrant délit être poursuivis que sur
plainte de la personne lésée ou celle du corps dont relève celle-ci.]

Art. 138quater. [L. 71-001 du 12 juin 1971, art. 7. — Les peines prévues par les
articles 136, 138 et 138bis seront applicables dans le cas où l’on aura outragé ou frappé des
témoins en raison de leurs dépositions, selon qu’ils peuvent être rangés dans l’une des trois
catégories de personnes protégées par la présente loi.]

Art. 138quinquies. [L. 71-001 du 12 juin 1971, art. 8. — Sera puni selon le droit
commun mais avec des circonstances aggravantes, celui qui aura outragé ou frappé soit un
membre du bureau politique, soit un membre de l’Assemblée nationale, soit un membre du
gouvernement, soit un membre de la Cour constitutionnelle, soit un membre du cadre
dirigeant du parti, soit un membre des cours et tribunaux, soit un officier du ministère public,
soit un officier supérieur des forces armées et de la police, soit un gouverneur, en dehors de
l’exercice

a) Eléments matériels :
1. Fait matériel de violence: coup ou autre mais sans blessures ;
2. Adressé à un représentant de l’autorité ;
3. Dans l’exercice de ses fonctions

b) Eléments intellectuels :
1. L’auteur doit avoir connu la qualité de celui qu’il violentait ;
2. intention de le violenter ;

4. Outrages envers l’emblème national (Art. 138sexies.)  Définition : ils consistent


dans le fait de témoigner publiquement du mépris envers l’emblème national.

a) Elément légal  Article 138sexies. - Sera puni d’une servitude pénale de huit jours
138
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

à trois mois, celui qui aura publiquement outragé l’emblème national.


b) Eléments matériels :
1. Acte matériel d’outrage : détérioration, parole ou geste de mépris
2. Effectué publiquement
3. Envers le drapeau national

c) Eléments intellectuels :
L’auteur doit avoir eu l’intention d’outrager le drapeau national

SECTION III. DU BRIS DES SCELLES


Définition On entend par « scellés » un sceau apposé à des serrures, à un cabinet etc. par
autorité de justice pour empêcher de les ouvrir329.

Pour assurer l’intégrité et la conservation de certains lieux ou objets, un membre de la police


ou un magistrat peut avoir à les clore d’un lien rendu juridiquement inviolable par
l’apposition d’un sceau. Le législateur voit dans le bris de scellés un délit dirigé contre
l’autorité des pouvoirs publics, donc un délit relevant du droit pénal public330.
La fermeture par scellés est en elle-même très fragile ; elle ne puise sa force que dans la
loi qui en garantit l’inviolabilité par une sanction pénale rigoureuse... L’élément
matériel du bris de scellés consiste dans l’enlèvement ou la destruction des bandes ou
cachets qui forment scellés331.

a) Elément légal  Art. 139. — Lorsque des scellés apposés par l’autorité publique
auront été brisés, les gardiens seront punis, pour simple négligence, d’une servitude pénale
de huit jours et d’une amende de vingt-cinq à cent francs, ou d’une de ces peines seulement.
Art. 140. — Ceux qui auront à dessein brisé des scellés seront punis d’une servitude
pénale de six mois à deux ans et d’une amende de cinquante à mille francs, ou d’une de ces
peines seulement; et si c’est le gardien lui-même ou le fonctionnaire qui a opéré l’apposition,
la servitude pénale pourra être portée à trois ans et l’amende à deux mille francs.
Il s’ensuit que le législateur réprime deux catégories de personnes :
- Le gardien qui n’a pas empêché le bris du scellé pour négligence et
- La personne qui a brisé ledit sceau.

b) Condition Préalable : apposition des scellés

c) Eléments matériels :
Acte matériel consistant à briser ces scellés : l’enlèvement ou la destruction des bandes
ou cachets qui forment scellés.
d) Eléments intellectuels :
Agir avec connaissance que l’objet était scellé.

SECTION IV. DES ENTRAVES APPORTEES A L’EXECUTION DES


TRAVAUX PUBLICS
Définition Le délit d’opposition à l’exécution de travaux publics consiste, pour des
particuliers, à faire délibérément obstacle à l’accomplissement de travaux qui ont été

329
Dictionnaire Littré, v° Scellé.
330
DOUCET, op. cit ., v° Scellé.
331
GARÇON, loc. cit.
139
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

prescrits par l’autorité publique dans l’intérêt général.

Cette infraction de police, caractérisée par tout acte de rébellion, est constituée même si la
résistance n’a pas été couronnée de succès332.
Elle vise notamment les actions menées par les membres d’associations de défense de
l’environnement ou de protection écologique contre des projets de lignes TGV, de barrages,
tunnels ou centrales nucléaires, ou celles menées par des propriétaires qui veulent s’opposer
au passage de lignes électriques, à des opérations de bornage ou de remembrement333.
Le Code pénal congolais réprime :
- Les entraves à l’exécution des travaux publics commises par un individu et
- Les entraves à l’exécution des travaux publics commises en groupe.

a) Elément légal Art. 141. Quiconque, par voies de fait se sera opposé à l’exécution
de travaux, ordonnés ou autorisés par le pouvoir compétent, sera puni d’une servitude pénale
de huit jours à trois mois et d’une amende qui ne dépassera pas cent francs, ou d’une de ces
peines seulement.
Art. 142. Ceux, qui, par attroupement et violence, voies de fait ou menaces, se seront
opposés à l’exécution de ces travaux seront condamnés à une servitude pénale de trois mois à
deux ans et à une amende qui pourra s’élever à cinq cents francs ou à l’une de ces peines
seulement.
b) Eléments matériels :
1. Existences des travaux ordonnés : ceux exécuté par l’autorité elle-même ou des travaux
autorisés : ceux concédés ;
2. Acte matériel d’entrave : voies de fait, attroupement, violences, menaces …
c) Elément intellectuel : Intention de s’opposer à l’exécution de ces travaux.

SECTION V. DES ATTEINTES A LA LIBERTE DU COMMERCE ET DE LA


NAVIGATION

Définition  On entend par liberté du commerce ou de l'industrie le droit pour toute


personne d'exercer telle activité de son choix, dans le respect des lois et des règlements qui
encadrent l'activité considérée dans l'intérêt du bien commun. Cette liberté est protégée par
les textes de droit commun, notamment ceux qui incriminent les violences contre les
personnes ou contre les biens334.
Aux termes de l’article 35 de la Constitution de la RD Congo : « L’Etat garantit le droit à
l’initiative privée tant aux nationaux qu’aux étrangers.
Il encourage l’exercice du petit commerce, de l’art et de l’artisanat par les Congolais et veille
à la protection et à la promotion de l’expertise et des compétences nationales.
La loi fixe les modalités d’exercice de ce droit. ».

De même, son article 122 dispose : « Sans préjudice des autres dispositions de la présente
Constitution, la loi fixe les règles concernant : … 8. le commerce, le régime de la propriété
des droits et des obligations civiles et commerciales ; … »
L’infraction d’atteinte à la liberté de commerce et de la navigation consiste dans le fait pour

332
DOUCET, J.P., op. cit., V° travaux publics.
333
VERON, Droit pénal spécial, cité par DOUCET, op. cit ., v° travaux publics.
334
DOUCET, op. cit ., v° travaux publics.
140
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

une personne d’empêcher toute personne d'exercer telle activité de son choix, dans le
respect des lois et des règlements qui encadrent l'activité considérée dans l'intérêt du bien
commun en matière commerciale ou de navigation.
a) Elément légal Art. 143. — Sera puni d’une servitude pénale de deux ans au
maximum et d’une amende de vingt-cinq à cinq cents francs ou d’une de ces peines
seulement quiconque a employé la violence ou des menaces pour contraindre les indigènes,
sur les voies de communication intérieure ou sur les marchés, à céder leurs marchandises à
des personnes ou à des prix déterminés.
Art. 144. — Seront punis d’une servitude pénale de cinq années au maximum et d’une
amende de cinq cents francs au plus, ou d’une de ces peines seulement, ceux qui, soit par
violences, injures, menaces ou rassemblement, soit en prononçant des amendes, défenses,
interdictions ou toutes prescriptions quelconques, auront porté atteinte à la liberté du
commerce ou de la navigation, dans le but, soit d’arrêter des caravanes de commerce sur les
chemins publics, soit d’entraver la liberté du trafic par terre ou par eau ou le libre
recrutement des caravanes et des porteurs, soit d’interrompre les communications par terre
ou par eau.
b) Eléments matériels :
1. Existences d’une activité commerciale ;
2. Un des actes matériels visés par la loi : voies de fait, attroupement, violences,
menaces, rassemblement, prononcer des amendes, défenses, interdictions ou
prescriptions quelconques, …
c) Eléments intellectuels :
Intention de d’attenter à la liberté de commerce ou de navigation.

SECTION VI. DES DETOURNEMENTS ET DES CONCUSSIONS COMMIS


PAR DES PERSONNES REVETUES DE MANDAT PUBLIC OU CHARGEES
D’UN SERVICE OU D’UNE MISSION DE L’ÉTAT OU D’UNE SOCIETE
ETATIQUE

1. Les détournements (ART 145, al 1 C P)  Définition : l’infraction de


détournement consiste dans le fait pour un individu de déposséder l’Etat des fonds
appartenant ou confiés aux organismes publics, ou des fonds confiés aux organismes publics
mais destinés aux particuliers, tel est le cas des fonds destinés aux salaires des agents de
l’Etat ; le produit d’une vente aux enchères par le greffier en exécution d’un jugement au
profit d’un particulier.
Le détournement est l’acte par lequel un individu dépossède une personne d’un bien
qu’elle lui a confié335.
C’est aussi l’acte matériel par lequel le possesseur précaire manifeste sa volonté
d’intervertir cette possession et de posséder animo domini la chose qui lui a été
confiée336.
Le détournement consiste dans l’enlèvement, le déplacement, le transport dans un
autre lieu, ou même la résistance non motivée et persistante à représenter l’objet
confié337.
L’article 145, alinéa 1er du code pénal congolais réprime les détournements des:

335
Id. loc cit.
336
GARÇON, loc. cit.
337
GOYET, loc. cit.
141
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

- deniers publics : les revenus de l’Etat338. Fonds appartenant ou confiés aux


organismes publics339.
- deniers privés : Fonds confiés aux organismes publics mais destinés aux particuliers,
tel est le cas des fonds destinés aux salaires des agents de l’Etat ; le produit d’une
vente aux enchères par le greffier en exécution d’un jugement au profit d’un
particulier ;
- effets tenant lieu des deniers publics ou privés : chèques, billets à ordre …
- pièces : des écrits, documents divers pouvant servir de preuve ;
- titres : titre de rente, action, obligation ;
- actes : des écrits par lesquels les fonctionnaires compétents ou les parties elles-
mêmes ont constatées l’existence d’un droit estimable ou convertissable en argent ;
- effets mobiliers : tout ce qui selon le droit civil des biens est réputé meuble340.
Cette infraction est reprochée à :
- Tout fonctionnaire ;
- Tout officier public,
- toute personne chargée d’un service public ou parastatal,
- toute personne représentant les intérêts de l’État ou d’une société étatique au sein
d’une société privée, parastatale ou d’économie mixte en qualité d’administrateur, de
gérant, de commissaire aux comptes ou à tout autre titre,
- tout mandataire ;
- le préposé des personnes citées ci-haut.

a) Elément légal : Art. 145. [L. 73-017 du 5 janvier 1973, art. 2. — Tout fonctionnaire
ou officier public, toute personne chargée d’un service public ou parastatal, toute personne
représentant les intérêts de l’État ou d’une société étatique au sein d’une société privée,
parastatale ou d’économie mixte en qualité d’administrateur, de gérant, de commissaire aux
comptes ou à tout autre titre, tout mandataire ou préposé des personnes énumérées ci-dessus,
qui aura détourné des deniers publics ou privés, des effets en tenant lieu, des pièces, titres,
actes, effets mobiliers qui étaient entre ses mains, soit en vertu, soit à raison de sa charge,
sera puni d’un à vingt ans de travaux forcés.
En condamnant à la peine prévue à l’alinéa précédent, le juge prononcera en outre:
1o [Abrogé par la loi 86-030 du 5 avril 1986];
2o l’interdiction pour cinq ans au moins et dix ans au plus, après l’exécution de la peine,
du droit de vote et du droit d’éligibilité;
3o l’interdiction d’accès aux fonctions publiques et paraétatiques quel qu’en soit
l’échelon;
4o la privation du droit à la condamnation ou à la libération conditionnelles et à la
réhabilitation dont le but est de faire bénéficier le coupable des avantages prohibés au
présent article;
5o l’expulsion définitive du territoire de la République après l’exécution de la peine, si le
condamné est un étranger.

Sera puni des peines portées aux alinéas 1 et 2 ci-dessus, celui qui, sciemment, aura, de
quelque manière que ce soit, dissimulé ou caché soit les deniers ou les biens détournés,
soit certains bien du coupable dans le but de les faire échapper à la confiscation.]
338
LAROUSSE, v° Dénier.
339
Lexique des termes juridiques, v° Denier.
340 e
MINEUR, G., Commentaire du code pénal congolais, 2 éd., Larcier, Bruxelles, 1953, p. 321.
142
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

b) Eléments matériels :
1. L’auteur a disposé des objets s’ils lui appartenaient
2. Commis par un fonctionnaire public, un officier public ou toute personne chargée d’un
service public
3. Portant sur des objets définis par la loi : - Deniers publics – effet ou tenant lieu – denier
privés – pièces – titres – actes – effets mobiliers
4. Objet se trouvant entre les mains du fonctionnaire public soit – en vertu de sa charge – à
raison de sa charge

c) Eléments intellectuels : intention frauduleuse (Le détournement doit être


frauduleux).

2. Recel des deniers ou des biens détournés ou de certains biens du coupable (article
145, alinéa 3).
C’est le fait pour une personne, de quelque manière que ce soit, dissimule ou cache
sciemment soit les deniers ou les biens détournés, soit certains biens du coupable dans le but
de les faire échapper à la confiscation.

3. Destruction ou dissimulation des pièces (Art. 145bis)

La destruction ou la dissimulation des pièces consiste dans le fait pour tout agent public ou
son préposé de détruire ou supprimer, de dissimuler ou cacher, dans une intention méchante
ou frauduleuse, des actes, des titres ou tout autre document dont il était dépositaire en sa
qualité ou qui lui avaient été communiqués à raison de sa qualité.

a) Elément légal : Art. 145bis. [L. 73-017 du 5 janvier 1973, art. 2. — Tout
fonctionnaire ou officier public, toute personne chargée d’un service public ou parastatal,
toute personne représentant les intérêts de l’État ou d’une société étatique au sein d’une
société privée, parastatale ou d’économie mixte en qualité d’administrateur, de gérant, de
commissaire aux comptes ou à tout autre titre, tout mandataire ou préposé des personnes
énumérées ci-dessus qui aura méchamment ou frauduleusement détruit ou supprimé,
dissimulé ou caché des actes, des titres ou tout autre document dont il était dépositaire en sa
qualité ou qui lui avaient été communiqués à raison de sa qualité, sera puni d’une servitude
pénale de deux ans à vingt ans.]
b) Eléments matériels :
1. Acte matériel de destruction. L’auteur détruit ou fait disparaitre ;
2. Commis par un fonctionnaire public, etc. ;
3. Portant sur des actes ou des titres ;
4. Dont il était dépositaire en vertu ou à raison de sa charge.
c) Eléments intellectuels :
Intention frauduleuse ou méchante.

4. Infractions en vue de destruction ou de dissimulation des pièces (Art. 145ter)


Définition : Les infractions en vue de destruction ou de dissimulation des pièces consistent
dans des vols, des cas assimilés à la banqueroute, des escroqueries, des tromperies, des recel
d’objets, des cels frauduleux et des faux commis en écritures en vue de ladite destruction ou
de ladite dissimulation.

a) Elément légal : Art. 145ter. [L. 73-017 du 5 janvier 1973, art. 2. — Les infractions
143
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

visées aux articles 79 à 81, 89 à 94, 98 à 100, 101 à 102, 124 à 127, seront punies des peines
doubles de celles que la loi prévoit, lorsqu’elles ont pour but de réaliser ou de dissimuler les
infractions prévues aux articles précédents de la présente section.]
b) Eléments matériels :
1. Commission de l’une des infractions suivantes : vol ; cas assimilé à la banqueroute ;
escroquerie ; tromperie ; recel d’objets ; cels frauduleux ou faux commis en écritures.
c) Eléments intellectuels : Intention de détruire ou de dissimuler.

5. Concussions (Art. 146.)


Définition : L’infraction de concussion est d’ordinaire définie comme le fait, par un
fonctionnaire, de recevoir, exiger ou ordonner de percevoir des sommes non dues, ou
excédant ce qui est dû, à titre de droits, taxes, contributions, ou pour salaires ou
traitements341.

a) Elément légal : Art. 146. [L. 73-017 du 5 janvier 1973, art. 2. — Seront punis d’une
servitude pénale de six mois à cinq ans tous fonctionnaires ou officiers publics, toutes
personnes chargées d’un service public ou parastatal, toutes personnes représentant les
intérêts de l’État ou d’une société étatique au sein d’une société privée, parastatale ou
d’économie mixte en qualité d’administrateurs, de gérants, de commissaires aux comptes ou
à tout autre titre, tous mandataires ou préposés de personnes énumérées ci-dessus qui se sont
rendus coupables de concussion en ordonnant de percevoir, en exigeant ou en recevant ce
qu’ils savaient n’être pas dû ou excéder ce qui était dû pour droits, taxes, contributions,
revenus ou intérêts, pour salaires ou traitements, pour indemnités, primes ou tout autre
avantage.
En condamnant à la peine prévue à l’alinéa précédent, le juge prononcera en outre:
1o la confiscation de la rétribution perçue par le coupable ou du montant de sa valeur
lorsqu’elle n’a pu être saisie si la concussion résulte de la perception illicite, pour le compte
du concussionnaire ou d’un tiers autre que l’État, des avantages inclus cités à l’alinéa
précédent;
2o l’interdiction pour cinq ans au moins et dix ans au plus, après l’exécution de la peine,
du droit de vote et du droit d’éligibilité;
3o l’interdiction d’accès aux fonctions publiques et paraétatiques quel qu’en soit
l’échelon;
4o la privation du droit à la condamnation ou à la libération conditionnelles et à la
réhabilitation dont le but est de faire bénéficier le coupable des avantages prohibés à l’article
145 de la présente section;
5o l’expulsion définitive du territoire de la République après l’exécution de la peine, si le
condamné est un étranger.]
b) Eléments matériels :
1. Perception portant sur : droits, taxes, contribution, revenus ou intérêts, salaires ou
traitement
2. Perception indue ou exagérée
3. Par un fonctionnaire
4. Soit en exigeant, soit en recevant
c) Eléments intellectuels : L’intention frauduleuse. Le fonctionnaire doit savoir que la
somme versée n’est pas due, ou qu’elle est supérieure à ce qui est dû

341
A.VITU, loc. cit.
144
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

SECTION VII : DE LA CORRUPTION, DES REMUNERATIONS ILLICITES, DU


TRAFIC D’INFLUENCE ET DES ABSTENTIONS COUPABLES DES
FONCTIONNAIRES
§ 1. De la corruption (analysée)

§ 2. Des rémunérations illicites accordées aux employées des personnes privées

Définition : Alors que la concussion et la corruption visent plus les agents publics, la
rémunération illicite concerne les employées des personnes privées qui sollicite des offres,
promesses, dons ou présents, comme condition ou récompense, soit pour faire un acte même
juste, soit pour s’abstenir de faire un acte qui rentrait dans l’exercice de son emploi.

La loi réprime trois formes de rémunérations illicites.

1. Les rémunérations illicites sollicitées (article 150a)


a) Elément légal : Art. 150 a. Toute personne au service d’un tiers qui aura sollicité
directement ou par personne interposée, des offres, promesses, dons ou présents, comme
condition ou récompense, soit pour faire un acte même juste, soit pour s’abstenir de faire un
acte qui rentrait dans l’exercice de son emploi, sera punie d’une servitude pénale d’un à trois
mois et d’une amende de un à cinq zaïres ou d’une de ces peines seulement.
b) Eléments matériels :
1. Etre au service d’un tiers ;
2. Solliciter une rémunération non due : des offres, promesses, dons ou présents,
3. Nature de l’acte ou de l’omission à accomplir.
c) Eléments intellectuels : Agir en connaissance de cause.

2. Les rémunérations illicites agréées (article 150b)


a) Elément légal : Art. 150 b. Si une personne au service d’un tiers a, directement ou
par personne interposée, agrée des offres ou des promesses, reçu des dons ou des présents,
soit pour faire un acte même juste de son emploi, soit pour faire dans l’exercice de son
emploi un acte injuste, soit pour s’abstenir de faire un acte qui rentrait dans l’exercice de
son emploi, elle sera punie d’une servitude pénale de deux à six mois et d’une amende
double de la valeur des personnes agrées ou des choses reçus, sans que ladite amende puisse
être inférieure à cinq zaïres, ou d’une de ces peines seulement.
b) Eléments matériels :
1. Etre au service d’un tiers ;
2. Agréer une rémunération non due : des offres, promesses, dons ou présents,
3. Nature de l’acte ou de l’omission à accomplir.
c) Eléments intellectuels : Agir en connaissance de cause.

3. Les rémunérations illicites suivies d’effets (article 150c)


a) Elément légal : Art. 150 c. Si à la suite d’offres ou de promesses agrées, de dons ou
de présents reçus, directement ou par personne interposée, une personne au service d’un tiers
a fait, dans l’exercice de son emploi, un acte injuste ou s’est abstenue de faire un acte qui
rentrait dans l’exercice de son emploi, elle sera punie d’une servitude pénale de quatre mois
à deux ans et d’une amende double de la valeur des promesses agrées ou des choses reçues,
sans que ladite amende puisse être inférieure à dix zaïres ou d’une de ces peines seulement.
(Circonstance aggravante.)
145
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

N.B.
Art. 150 d. Dans le cas prévus aux articles 150 c, la confiscation des choses livrées au
coupable ou du montant de leur valeur sera toujours prononcée. (peine complémentaire).
L’Etat peut réclamer les sommes, biens ou valeurs provenant des infractions visées aux
mêmes articles à tous ceux qui les recueilleraient à cause de mort. La preuve de l’origine et
du montant des gains illicites peut être faites par toutes voies de droit. L’action est prescrite
cinq ans après le décès de l’auteur des ayants-droit à la succession. (créance de l’Etat).

§ 3. Du trafic d’influence

Définition : Le trafic d’influence est défini par la loi. En effet, l’article 150e du CP congolais
distingue deux formes de trafic d’influence : le trafic d’influence passif, émanant de l’agent
public et le trafic d’influence actif, provoqué par un simple particulier.

Le trafic d’influence passif est le fait d’agréer des promesses ou accepter des dons pour
user de son influence réelle ou supposée afin de faire ou de tenter de faire obtenir des
décorations, médailles, distinctions ou récompenses, des places, fonctions ou emploi ou des
valeurs quelconques accordées par l’autorité publique.

Le trafic d’influence actif consiste à faire ou à tenter de faire gagner des marchés,
entreprises ou autres bénéfices résultant de traités ou d’accords conclu soit avec l’Etat, soit
avec une société étatique, parastatale ou d’économie mixte, ou de façon générale de faire ou
de tenter de faire obtenir une décision favorable d’une autorité de l’Etat ou d’une société
étatique, parastatale ou d’économie mixte.
a) Elément légal : Art. 150 e. (modifié et complété par l’article 6 de la loi n° 05/006 du
29 mars 2005 modifiant et complétant le décret du 30 janvier 1940 portant code pénale
congolais).
Sont constitutifs d’acte de trafic d’influence. Les actes énumérés ci-après :
1. Le fait de promettre, d’offrir ou d’accorder à un agent public ou à toute autre
personne, un avantage indu afin qu’il abuse de son influence réelle ou supposée, en vue
d’obtenir ou de faire obtenir d’une administration ou d’une autorité publique, un avantage
indu pour l’instigateur initial de l’acte ou pour toute autre personne ;
2. Le fait pour un agent public ou toute autre personne, de solliciter ou
d’accepter directement ou indirectement, un avantage indu pour lui-même ou pour autrui,
afin qu’il abuse de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d’une
administration ou d’une autorité publique un avantage indu.
L’avantage indu visé par l’alinéa précédent comprend notamment des décorations,
médailles, distinction ou récompense, des places, fonctions ou des valeurs quelconques
accordées par l’administration ou l’autorité publique, l’obtention des marchés, entreprises ou
d’autres bénéfices résultant des traités ou d’accords conclus soit avec l’Etat, soit avec une
entreprise publique, paraétatique ou d’économie mixte ou, d’une façon générale, une
décision favorable d’un agent public.
Quiconque aura commis un des actes visés par le présent article, sera puni d’une
servitude pénale de six mois à trois ans et d’une amende de cent mille à un million de francs
congolais constants ou d’une de ces peines s seulement.
b) Eléments matériels : Un des actes matériels prévus par la loi.
c) Eléments intellectuels : Agir en connaissance de cause.

§ 4. Des abstentions coupables


146
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Définition : Si les deux termes « Omission » et « Abstention » sont ordinairement employés


indifféremment, il existe cependant entre eux une nuance. Alors que l’omission peut résulter
d’une simple négligence fautive, l’abstention traduit généralement une attitude délibérée de
refus d’effectuer un acte que l’on a le devoir d’accomplir342.

Il s’ensuit que la loi réprime deux faits différents.

1. Retardement ou rétention du règlement des fonds destinés au paiement des


rémunérations, traitements, salaires et créances (Article 150 f)
La loi réprime tout agent public ou toute autres personne, sans motif valable, retardera ou
retiendra le règlement des fonts dont il a la gestion et qui sont motif valable, paiement des
rémunérations, traitements, salaires et créances dus par l’Etat ou par une entreprise
publique, paraétatique, d’économie mixte ou privée où l’Etat a des intérêts.
a) Eléments légal : Art. 150 f. (modifié et complété par l’article 6 de la loi n° 05/006
du 29 mars 2005 modifiant et complétant le décret du 30 janvier 1940 portant Code
Pénale Congolais).
Sans préjudice de l’application d’autres dispositions visant des infractions plus sévèrement
punies, tout agent public ou toute autre personne qui, sans motif valable, retardera ou
retiendra le règlement des fonds dont il a la gestion et qui sont destinés au paiement des
rémunérations, traitements, salaires et créances dus par l’Etat ou par une entreprise
publique, paraétatique, d’économie mixte ou privée où l’Etat a des intérêts, sera puni d’une
peine de deux mois de servitude pénale et d’une amende de dix mille à cent mille franc
congolais constant ou d’une de ces peines seulement.
b) Eléments matériels :
1. Qualité de l’agent : Agent public ou toute autre personne ;
2. Existence des fonds destinés au paiement ;
3. Acte matériel de Retardement ou rétention du règlement dudit fonds.
c) Eléments intellectuels : Intention coupable, méchante.

2. Abstention volontaire d’accomplir un acte de sa fonction ou de son emploi


(Article 150 g)

Définition : L’abstention coupable de fonctionnaire est le fait pour tout agent public ou toute
autres personne, sans motif valable, de retarder ou de retenir le règlement des fonts dont il a
la gestion et qui sont motif valable, paiement des rémunérations, traitements, salaires et
créances dus par l’Etat ou par une entreprise publique, paraétatique, d’économie mixte ou
privée où l’Etat a des intérêts.
a) Eléments légal : Art. 150 g. (modifié et complété par l’article 6 de la loi n° 05/006
du 29 mars 2005 modifiant et complétant le décret du 30 janvier 1940 portant Code
Pénale Congolais
Sans préjudice de l’application d’autres dispositions visant des infractions plus
sévèrement punies, tout agent ou toute autre personne qui s’abstiendra volontairement de
faire, dans les délais impartis par la loi, ou par des règlements, un acte de sa fonction ou de
son emploi qui lui a été demandé régulièrement, sera puni d’une peine de six mois de
servitude pénale et d’une amende de dix mille à cent mille francs congolais constants ou
d’une de ces peines seulement.
Il en est de même lorsqu’il s’abstient volontairement de faire un acte de sa fonction ou de
son emploi pour lequel aucun délai n’a été préétabli et qui lui a été demandé régulièrement,
342
DOUCET, op. cit ., v° abstention coupable.
147
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

si ce retard est manifestement exagéré.


b) Eléments matériels :
1. Qualité de l’agent : Agent public ou toute autre personne ;
2. Existence d’acte de sa fonction ou de son emploi à accomplir ;
3. Omission d’accomplir l’acte.
c) Eléments intellectuels : Intention méchante.

SECTION VII BIS. DE LA PUBLICATION ET DE LA DISTRIBUTION DES


ECRITS
Définition : Le pamphlet est un petit ouvrage polémique, rédigé dans un style agressif,
dirigé contre une œuvre, une personne ou une institution. Les régimes autoritaires y sont
nettement hostiles. Les régimes libéraux, en revanche, afin d’assurer la liberté d’expression,
n’acceptent de sanctionner son auteur que s’il a manifestement abusé du droit d’exposer son
opinion343.
a) Eléments légal : Art. 150h. — Toute personne qui aura sciemment contribué à la
publication ou à la distribution de tout écrit dans lequel ne se trouve pas l’indication vraie du
nom et du domicile de l’auteur ou de l’imprimeur sera punie d’une servitude pénale ne
dépassant pas deux mois et d’une amende de 2.000 francs au maximum ou de l’une de ces
peines seulement.
Toutefois la servitude pénale ne pourra être prononcée lorsque l’écrit publié sans les
indications requises fait partie d’une publication dont l’origine est connue par son apparition
antérieure.
Art. 150i. — Seront exemptés de la peine portée par l’article précédent, ceux qui auront fait
connaître l’auteur ou l’imprimeur; les crieurs, afficheurs, vendeurs ou distributeurs qui
auront fait connaître la personne de laquelle ils tiennent l’écrit incriminé.
b) Eléments matériels :
1. Participation à la publication ou à la distribution
2. D’un écrit
3. Rendre public
4. Absence de l’indication obligatoire
c) Eléments intellectuels : L’auteur doit avoir agi sciemment

SECTION VIII. INFRACTIONS EN MATIERE DE TRANSPORT D’OBJETS


POSTAUX

1. Transport illégal d’objets postaux (Art. 151 et 152)

Définition : L’infraction de transport illégal d’objets postaux est le fait de transporter sans
autorisation préalable des objets de correspondances dont le transport est le monopole de la
poste, sauf en cas d’exceptions admises par la loi.
a) Eléments légal : Art. 151. — Celui qui, sauf les exceptions admises par la loi, aura
transporté des objets de correspondance dont le transport est un monopole de l’État, sera
puni d’une amende qui ne dépassera pas cinq cents francs pour chaque cas.
Art. 152. [O.-L. 68-045 du 20 janvier 1968, art. 20. — Tout commandant d’un navire qui ne
(se) sera pas conformé aux prescriptions imposées par la législation postale sera puni d’une
amende qui n’excédera pas 2 zaïres pour chaque infraction.]
b) Eléments matériels :

343
DOUCET, op. cit ., v° Pamphlet.
148
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

1. Un objet postal ;
2. Acte matériel de transport ;
3. Inexistence de l’exonération à l’endroit de l’agent.
c) Eléments intellectuels : Agir en connaissance de cause.

SECTION IX. DES INFRACTIONS TENDANT A EMPECHER LA PREUVE DE


L’ETAT CIVIL. — FAUSSES DECLARATIONS DEVANT LES OFFICIERS DE
L’ETAT CIVIL

1. Défaut de déclaration de naissance ou de décès (Art. 153)

Définition : C’est le fait pour toute personne obligée de faire les déclarations de naissance
ou de décès, ne le feraient pas le délai légal et celle qui, convoquée par l’officier de l’état
civil pour faire une déclaration de décès refuserait de comparaitre ou de témoigner.

Aux termes de l’article 16 de la Loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de


l'enfant : « Tout enfant a le droit d'être enregistré à l'état civil dans les quatre-vingt-dix jours
qui suivent sa naissance, conformément à la loi »

Le délai légal de déclaration décès est d’un mois aux termes de l’article 98, alinéa 1 du code
de la famille qui dit : «Sauf dispositions spéciales prévues par la loi, les actes de l’état civil
doivent être rédigés dans le délai d’un mois du fait ou de l’acte juridique qu’ils
constatent ».
a) Eléments légal : Art. 153. —Seront punies d’une servitude pénale d’un à sept jours
et d’une amende n’excédant pas deux cents francs, ou d’une de ces deux peines seulement,
toutes personnes qui, obligées de faire les déclarations de naissance ou de décès, ne les
feraient pas dans le délai légal et celles qui, convoquées par l’officier de l’état civil pour faire
une déclaration de décès refuseraient de comparaître ou de témoigner.
b) Condition préalable : être une Personnes susceptibles de commettre l’infraction344 .
c) Eléments matériels :
1. Omission ou abstention ;
2. Refus de répondre à la convocation ou de comparaitre devant l’officier de l’état civil.
d) Eléments intellectuels :
1. Négligence ou
2. Oubli.

2. Refus de comparaître ou de témoigner aux fins de déclaration de décès (Art. 153


in fine)
La loi réprime les personne qui, convoquées par l’officier de l’état civil pour faire une
déclaration de décès refuseraient de comparaître ou de témoigner.

3. Fausses déclarations devant les officiers de l’état civil (Art. 154)


La loi réprime :
- les personnes obligées par la loi de faire les déclarations de naissance ou de décès ;
- les personnes qui auraient été convoquées par l’officier de l’état civil, pour faire une

344Les personnes obligées de déclarer la naissance : Les parents ; les personnes présentes à l’accouchement ; les
personnes munies d’une procuration du père ou de la mère. Les personnes obligées de déclarer le décès : les parents ; les
personnes qui ont assistées au décès ; gérant et employé de la maison de commerce où le défunt travaillait ; …, LIKULIA
BOLONGO, op.cit., p. 312.
149
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

déclaration d’état civil,


- les personnes qui, sans être tenues de faire les déclarations auront volontairement
comparu devant l’officier de l’état civil et qui y font devant les officiers de l’état
civil des fausses déclarations quant aux énonciations que doivent contenir les actes.
a) Eléments légal : Art. 154. — Seront punies d’une servitude pénale de huit jours à un
an et d’une amende de vingt-cinq à cinq cents francs, ou d’une de ces peines seulement, les
fausses déclarations faites devant les officiers de l’état civil quant aux énonciations que
doivent contenir les actes, soit par les personnes obligées par la loi de faire les déclarations
de naissance ou de décès, soit par celles qui auraient été convoquées par l’officier de l’état
civil, pour faire une déclaration d’état civil, soit par toutes autres personnes qui, sans être
tenues de faire les déclarations auront volontairement comparu devant l’officier de l’état
civil.
Les mêmes peines seront appliquées à ceux qui auront donné la mission de commettre les
fausses déclarations mentionnées au paragraphe précédent, si cette mission a reçu son
exécution.
b) Condition préalable : être la personne tenue de faire la déclaration.
c) Eléments matériels :
1. Fausse déclaration ;
2. Enonciation que doivent contenir les actes de naissance ou de décès.
d) Eléments intellectuels : Intention coupable.

4. Supposition d’enfant (Art. 155)


Définition : La supposition d’enfant c’est l’introduction d’un enfant dans une famille à
laquelle il n’appartient pas345.
C’est le cas du fait d’attribuer à une femme qui n’en est pas réellement la mère l’enfant de la
femme qui en est vraiment la mère, ce afin de donner à l’enfant un état civil qui n’est pas
conforme à la réalité346.
a) Elément légal : Art. 155. — Seront punies d’une servitude pénale d’un à cinq ans,
les personnes qui se rendront coupables de supposition d’enfant. La même peine sera
appliquée à ceux qui auront donné la mission de commettre l’infraction, si cette mission a
reçu son exécution.
b) Eléments matériels :
1. Acte matériel de supposition347 : substitution ou fausse attribution d’un enfant existant
réellement à une femme imaginaire ou qui n’a pas conçu. ;
c) Victime : enfant né vivant.
d) Eléments intellectuels : Intention coupable, agir avec conscience.

SECTION X. DE QUELQUES AUTRES INFRACTIONS CONTRE L’ORDRE


PUBLIC
– Intitulé ainsi modifié par l’O.-L. 299 du 16 décembre 1963, art. 4.

1. Port de l’uniforme, insigne ou de l’emblème d’une association ou d’un


groupement de fait dissous (Art. 155bis)
Définition : C’est le fait pour une personne de porter l’uniforme, l’insigne ou l’emblème
d’une association ou d’un groupement de fait dissous par l’autorité publique compétente.
345
MINEUR, op. cit., p. 335.
346
DOUCET, op. cit ., V° Supposition d’enfant.
347 Supposition : déclarer un enfant comme né d’une femme déterminée alors qu’il est en réalité né d’une autre femme.

LIKULIA Bolongo, op.cit, p. 315.


150
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

a) Elément légal : Art. 155bis. [O.-L. 299 du 16 décembre 1963, art. 4. — Sera puni
d’une servitude pénale de deux mois à un an et d’une amende de cinq cents à cinq mille
francs, ou d’une de ces peines seulement, celui qui aura publiquement porté l’uniforme,
l’insigne ou l’emblème d’une association ou d’un groupement de fait dissous par l’autorité
publique compétente.]
b) Eléments matériels :
1. Un des biens visés par la loi ;
2. Appartenant à une association dissoute ;
3. Acte matériel consistant à le porter.
c) Eléments intellectuels : intention coupable.

2. Publication reproduisant les circonstances d’un meurtre, d’un assassinat ou


d’un attentat aux mœurs (Art. 155ter)
Définition : C’est le fait pour une personne de contribuer sciemment à la publication, par
tous moyens, de photographies, gravures, dessins, portraits ayant pour objet la reproduction
de tout ou partie des circonstances d’un meurtre, d’un assassinat ou d’un attentat aux mœurs.
a) Elément légal : Art. 155ter. [O.-L. 299 du 16 décembre 1963, art. 4. — Sera puni
d’une servitude pénale de deux mois à un an et d’une amende de cinq cents à cinq mille
francs ou d’une de ces peines seulement, celui qui aura sciemment contribué à la publication,
par tous moyens, de photographies, gravures, dessins, portraits ayant pour objet la
reproduction de tout ou partie des circonstances d’un meurtre, d’un assassinat ou d’un
attentat aux mœurs.]
b) Eléments matériels :
1. Acte matériel publication ;
2. De l’infraction visée par la loi.
c) Eléments intellectuels : Intention coupable

3. Nom à consonances étrangères


Art. 155quater. [O.-L. 72-039 du 30 août 1972, art. 1er. — Sera puni d’une servitude
pénale de six mois à cinq ans, tout officiant qui, lors du baptême d’un adepte Zaïrois, lui
conférera une appellation aux consonances étrangères.]

N.B : L’infraction est tombée en désuétude depuis l’abolition du M.P.R parti-Etat.

Section II. Les infractions contre l’ordre public prévues et punies


par d’autres textes
Offense envers 1ere de l’ordonnance-loi n°300 du C’est le fait de prononcer
le chef de 16 décembre 1963 relative à la publiquement une expression
l’État répression des offenses envers le méprisante ou diffamatoire à l’endroit
congolais chef de l’État. du chef de l’Etat congolais.
ere
Offense envers 1 de l’ordonnance-loi n°301 du 16 C’est le fait de prononcer
les chefs décembre 1963 relative à la répression publiquement une expression
d’État et des des offenses envers les chefs d’État méprisante ou diffamatoire à
gouvernements étrangers et outrages dirigés contre les l’endroit les chefs d’État et des
étrangers agents diplomatiques étrangers. gouvernements étrangers.
151
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Outrages 2 de l’ordonnance-loi n°301 du 16 décembre C’est le fait de témoigner


dirigés contre 1963 relative à la répression des offenses du mépris envers les
les agents envers les chefs d’État étrangers et outrages agents diplomatiques
diplomatiques dirigés contre les agents diplomatiques étrangers.
étrangers étrangers.

Jet de débris le 1ere de L’ordonnance Le fait pour toute personne, le long d’une voie
long des voies du 10 octobre 1910 ferrée, de jeter, de déposer, ou d’abandonner ou de
ferrées faire jeter, déposer ou abandonner des boîtes,
bouteilles vides et autres objets quelconques de
nature à blesser toute personne longeant la voie
ferrée, sans qu’il ne soit autorisé par l’administration
du chemin de fer.
ere
Jet de Art. 1 de Est le fait de jeter ou déposer sur ou à côté des voies
bouteilles et l’ordonnance du 27 de communication, ou en général aux endroits non
fragments de mars 1911. réservés à cet effet, des bouteilles vides et tous
verre sur la autres objets en verre et fragments de verre pouvant
voie publique causer des blessures aux piétons ou aux animaux
domestiques
ere
Tapage Art. 1 de C’est le fait de faire les bruits et les tapages de
nocturne l’ordonnance nature à troubler la tranquillité des habitants pendant
64/Cont. du 16 la nuit.
septembre 1925.
Ivresse Art. 1ere de C’est lorsqu’une personne est trouvée dans un
publique l’ordonnance état apparent d’ivresse dans les rues, places,
57/APAJ du 10 juin chemins, débits de boissons, salles de spectacles et
1939. autres lieux publics ainsi que dans les lieux non
clôturés sur lesquels le public peut avoir directement
vue.
Désordres sur Art. 1ere de C’est le fait pour toute personne d’être trouver
la voie l’ordonnance n°11-2 sur la voie publique causant du désordre par des cris,
publique du 14 février 1959 des chants, des querelles, attroupements ou de
sur les désordres sur quelque autre manière.
la voie publique.
Rétention Art. 1ere de C’est l’obligation faite à toute autorité de
illicite des l’ordonnance n°21- remettre, tout certificat, document ou reçu officiel
pièces ou 84 du 14 février 1959 prouvant qu’une personne a satisfait à une
documents relative à obligation légale ou réglementaire vis-à-vis de
l’interdiction de l’autorité et dont l’absence peut l’exposer
retenir certaines personnellement ou exposer l’agent de l’autorité
pièces ou documents ayant l’obligation de le délivrer à des poursuites,
officiels. doit rester en sa possession; il en est de même de
toute attestation ou autorisation remise par un agent
de l’autorité constatant dans le chef de son titulaire,
l’exercice d’un droit.
ere
Propagandes Art. 1 du décret-loi C’est le fait d’avoir été convaincu d’avoir, par
subversives du 14 janvier 1961 sur des moyens quelconques, fait acte de propagande
la répression des subversive, en préconisant le recours à la violence
propagandes pour transformer l’ordre politique ou l’ordre social
152
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

subversives. établis.
Chanvre à Art. 1ere de C’est le fait pour toute personne de cultiver,
fumer l’ordonnance-loi du 22 de vendre, de transporter et de détenir du
janvier 1903 portant chanvre à fumer. De même que l’usage de ce
mesures contre l’usage de chanvre, soit en le fumant, soit en le consommant
fumer le chanvre. de toute autre manière.

TITRE V. INFRACTIONS CONTRE LA SÉCURITÉ


PUBLIQUE
CHAPITRE Ier. ETENDUE DE LA VALEUR PROTEGEE OU CHAMPS
AXIOLOGIQUE DES INFRACTIONS CONTRE LA SECURITE
PUBLIQUE
153
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

André VITU définit la sécurité publique de la manière suivante : « La sécurité publique peut
être définie comme la situation dans laquelle se trouve la société lorsqu’elle est à l’abri de
troubles nés, en particulier, de la commission d’actes délictueux. Une parenté évidente unit la
sécurité et la sûreté, les deux mots ayant à peu près le même sens348 ».
DOUCET renchérit que « Partie de l’Ordre public, la sécurité publique constitue un Intérêt
juridique que les autorités publiques ont le devoir impératif de protéger. C'est même l'un des
premiers aux yeux de certains législateurs.
L’objet de la sécurité publique est d’établir et de maintenir un environnement paisible et sûr
pour les personnes ou pour les biens.
Le devoir d'assurer la sécurité publique pèse à l'évidence sur les trois Pouvoirs. Mais, au
quotidien, il incombe particulièrement à la Police administrative : le préfet ou le maire doit
interdire ou du moins réglementer les activités susceptibles de créer un risque de trouble ou
d’accident349. »
Pour André De LAUBADERE: « L’expression sécurité publique vise la limitation du risque
d’accident350».

Chapitre II. APERCU DES INFRACTIONS CONTRE LA SECURITE


PUBLIQUE

SECTION I. DE L’ASSOCIATION FORMEE DANS LE BUT


D’ATTENTER AUX PERSONNES ET AUX PROPRIETES
§1. Association de malfaiteurs (Art. 156 à 158)

a) DEFINITION: On parle de malfaiteur à propos d’une personne qui est en train de


commettre une Infraction, ou qui vient de perpétrer un méfait. C’est ce sens étroit qui est
retenu lorsque l’on parle d’Association de malfaiteurs ou de Recel de malfaiteur351.
L’association de malfaiteurs est constituée par un groupe organisé de personnes, qui ont pour
but commun la perpétration de certains crimes ou délits graves. Il s'agit, tantôt de crimes de
droit commun, tantôt de crimes politiques ; les deux étant parfois liés352.
L’incrimination d’association de malfaiteur se situe, dans l’iter criminis, au niveau de la
résolution criminelle. Elle ne saurait toutefois être incriminée par le législateur que lorsqu’elle
se traduit par des actes matériels révélant le but poursuivi par ses membres.
En droit pénal congolais, « Toute association formée dans le but d’attenter aux personnes ou
aux propriétés est une infraction qui existe par le seul fait de l’organisation de la bande.353 »

348 A.VITU, loc. cit.


349 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Sécurité publique.
350 André De LAUBADERE, Droit administratif, cité par DOUCET, J.P., op. cit ., v° Sécurité publique.
351 Id.
352 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Association de malfaiteurs.
353 Art. 157 du C.P. congolais.
154
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

« Les provocateurs de cette association, les chefs de cette bande et ceux qui y auront exercé
un commandement quelconque seront punis de mort. ».
« Tous autres individus faisant partie de l’association et ceux qui auront sciemment et
volontairement fourni à la bande des armes, munitions, instruments d’infraction, seront
également punis de mort.».
c) Elément légal : Art. 156. [O.-L. 68-193 du 3 mai 1968, art. 3. — Toute association formée
dans le but d’attenter aux personnes ou aux propriétés est une infraction qui existe par le seul fait de
l’organisation de la bande.]

Art. 157. [O.-L. 68-193 du 3 mai 1968, art. 3. — Les provocateurs de cette association, les chefs
de cette bande et ceux qui y auront exercé un commandement quelconque seront punis de mort.]

Art. 158. [O.-L. 68-193 du 3 mai 1968, art. 3. — Tous autres individus faisant partie de l’association
et ceux qui auront sciemment et volontairement fourni à la bande des armes, munitions, instruments
d’infraction, seront également punis de mort.]

c) Eléments matériels :

1. Etre membre
2. D’une association formée
3. Dans le but d’attenter aux personnes et aux propriétés
d) Eléments intellectuels : Il faut que l’auteur ait connaissance de cause, qu’il ait su qu’il entrait
dans une bande de malfaiteurs ou qu’il fournissait des instruments destinés à la commission d’une
infraction par une association de malfaiteurs

SECTION II. DES MENACES D’ATTENTAT CONTRE LES


PERSONNES OU CONTRE LES PROPRIETES
1. Définition : La menace est l'acte par lequel un individu s'efforce d’obliger sa victime à
faire ce qu’elle ne veut pas faire, à ne pas faire ce qu’elle voudrait faire, ou à laisser faire ce
qu’elle voudrait empêcher. Elle peut résulter, tantôt d’un acte matériel (montrer un poing
fermé), tantôt d’une parole (crier : "j'aurai ta peau"), tantôt d’un écrit (p.ex. : "partez avant
qu’il ne vous arrive le pire"). Sa sanction varie en fonction de deux éléments : la gravité de la
menace pesant sur la victime et le degré d'intensité de la résolution criminelle chez d'agent 354.
Pour GARRAUD: « La menace s'entend du fait par un individu d'annoncer à une personne
un mal qu'il lui prépare »355.
GARÇON dit : « Les menaces, au moins lorsqu’elles offrent un certain caractère de gravité,
constituent par elles-mêmes un acte de violence morale qui trouble la personne menacée et
porte ainsi atteinte à sa liberté individuelle »356.
Il a été jugé en France qu’une menace doit s’interpréter en fonction de la psychologie de celui
qui en est l’objet357.

354 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Menace.


L'acte de menace s'analyse en une agression dirigée contre la Liberté* d’autrui. C'est donc dans le chapitre consacré à
la protection de la liberté individuelle qu'il doit être réprimé.
355 GARRAUD, loc. cit.
356 GARÇON, loc. cit.
357 Cass.crim. 4 avril 1978, Bull.crim. n° 125 p.321.
155
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Le code pénal congolais punit deux formes de menaces : les menaces d’attentat par écrit et les
menaces d’attentat verbales, par geste ou par emblème.
2. Menaces d’attentat par écrit (Art. 159) : La loi punit celui qui, par écrit anonyme ou
signé, aura menacé, avec ordre ou sous condition, d’un attentat contre les personnes ou les
propriétés punissable d’au moins cinq années de servitude pénale.
a) Elément légal : Art. 159. — Sera condamné à une servitude pénale de trois mois à
deux ans et à une amende de cinquante à cinq cents francs, ou à l’une de ces peines seulement, celui
qui, par écrit anonyme ou signé, aura menacé, avec ordre ou sous condition, d’un attentat contre les
personnes ou les propriétés punissable d’au moins cinq années de servitude pénale.
b) Eléments matériels :
1. Menace (écrite, verbale)
2. Menace d’un attentat contre les personnes ou contre les propriétés punissables d’au moins 5 ans de
servitude pénale
3. Menace avec ordre ou sous condition
c) Eléments intellectuels : Pour que l’infraction soit constituée, l’auteur doit avoir
l’intention d’intimider, mais il n’est pas nécessaire qu’il ait l’intimidation de mettre sa menace à
exécution

3. Menaces d’attentat verbales, par geste ou par emblème (Art. 160)


a) Définition: Il s’agit de la menace verbale faite avec ordre ou sous condition ou la
menace par gestes ou emblèmes d’un attentat contre les personnes ou les propriétés
punissables d’au moins cinq années de servitude pénale.
b) Elément légal : Art. 160. — La menace verbale faite avec ordre ou sous condition ou la
menace par gestes ou emblèmes d’un attentat contre les personnes ou les propriétés punissable d’au
moins cinq années de servitude pénale, sera punie d’une servitude pénale de huit jours à un an et d’une
amende de vingt-cinq à deux cents francs, ou d’une de ces peines seulement.

SECTION III. DE L’EVASION DES DETENUS


1. Évasion simple de détenus (Art. 161)
a) Définition: Une personne s’évade quand elle se soustrait à la garde à laquelle elle était
soumise sur ordre de l’autorité judiciaire. Peu importe que ce soit par ruse ou par violence. ..
Un législateur répressif, au contraire, estime que le simple fait de s’évader porte atteinte à
l’ordre public et appelle une sanction pénale358.

b) Elément légal : Art. 161. — Tout détenu qui se sera évadé ou qui aura tenté de s’évader
sera, pour ce seul fait, puni d’une peine de servitude pénale d’un an au maximum.
Sera puni de la même peine tout détenu qui se sera évadé ou aura tenté de s’évader d’un
établissement hospitalier ou sanitaire où il avait été transféré ou alors qu’il était employé à l’extérieur
d’un établissement pénitentiaire ou qu’il bénéficiait d’une permission d’en sortir.
Les peines de l’évasion sont également applicables à tout détenu mis à la disposition de la
surveillance du conseil exécutif national avec internement en application de l’article 14d) du présent
Code ou du décret du 23mai 1896 tout comme aux personnes qui contreviendraient à l’obligation de
s’éloigner de certains lieux ou d’une certaine région ou d’habiter dans un lieu déterminé, prévue aux
articles 14a) et 14b) du présent Code.

2. Évasion aggravée de détenus (Art. 161bis)

358 DOUCET, J.P., op. cit ., V° EVASION .


156
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

a) Définition: Si l’évasion a eu lieu ou a été tentée avec violence, menaces ou bris de


prison, la peine sera la servitude pénale de deux à cinq ans, sans préjudice des plus fortes
peines encourues pour d’autres infractions commises dans ces circonstances.
b) Art. 161bis. — Si l’évasion a eu lieu ou a été tentée avec violence, menaces ou bris de prison,
la peine sera la servitude pénale de deux à cinq ans, sans préjudice des plus fortes peines encourues
pour d’autres infractions commises dans ces circonstances.

3. Négligence et connivence ayant occasionné l’évasion des détenus (Art. 162)


a) Définition: Les personnes chargées de la garde des détenus ont le devoir positif de les
empêcher de s’enfuir. La loi sanctionne ce devoir en punissant leur simple négligence359.
b) Elément légal : Art. 162. — En cas d’évasion ou de tentative d’évasion de détenus, les
personnes préposées à leur conduite ou à leur garde seront punies ainsi qu’il suit:
1) si l’évadé était poursuivi ou condamné du chef d’une infraction punissable au maximum de
cinq ans de servitude pénale ou s’il avait été mis à la disposition de la surveillance du conseil exécutif
national avec internement, ces préposés seront punis en cas de négligence, d’une servitude pénale de
un à six mois et, en cas de connivence, d’une servitude pénale de six mois à deux ans;

2) si l’évadé était poursuivi ou condamné du chef d’une infraction punissable de plus de cinq ans
de servitude pénale, des travaux forcés ou de la peine de mort, ces préposés seront punis en cas de
négligence, d’une servitude pénale de deux mois à un an, et, en cas de connivence d’une servitude
pénale de deux à cinq ans.

Les peines prévues pour le cas de connivence seront également encourues lorsque l’aide à
l’évasion n’aura consisté qu’en une abstention volontaire.

4. Aide apportée à l’évasion d’un détenu (Art. 162 bis et Art. 163)

a) Définition : La loi punit, au cas de l’article 162, 1o, d’une servitude pénale de deux
mois à un an et, au cas de l’article 162, 2o d’une servitude pénale de six mois à deux ans ceux
qui, n’étant pas chargés de la conduite ou de la garde d’un détenu, auront procuré, facilité ou
tenté de procurer ou de faciliter son évasion ou sa fuite une fois l’évasion réalisée.

b) Elément légal : Art. 162 bis. — Ceux qui, n’étant pas chargés de la conduite ou de la
garde d’un détenu, auront procuré, facilité ou tenté de procurer ou de faciliter son évasion ou
sa fuite une fois l’évasion réalisée, seront punis au cas de l’article 162, 1o, d’une servitude
pénale de deux mois à un an et, au cas de l’article 162, 2o d’une servitude pénale de six mois à
deux ans.
Art. 163. — Si l’évasion a eu lieu ou a été tentée avec violence, menaces ou bris de
prison, la peine contre ceux qui l’auront favorisée, soit par leur coopération, soit en
fournissant des instruments ou armes propres à l’opérer, sera la servitude pénale de deux à
cinq ans.

Si l’infraction a été commise par une personne préposée à la conduite ou à la garde des
détenus, la peine sera la servitude pénale de cinq à dix ans.

359 GARÇON, loc. cit.


157
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Art. 163bis. — Tous ceux qui auront connivé à l’évasion d’un détenu seront solidairement
condamnés, à titre de dommages-intérêts, à tout ce que la partie civile du détenu aurait eu
droit d’obtenir contre lui.

5. Recel de malfaiteurs (Art. 164)


a) Définition: Les définitions de la doctrine ne traduisent pas complètement ce que la loi
réprime.
« On appelle recel de délinquants l’attitude d’une personne qui fournit, à un individu
qu’elle sait coupable d’une infraction, un asile qui la mettra à l’abri des recherches
policières et judiciaires360. »
« Le recel de malfaiteur consiste à cacher sciemment l’auteur d’une ou de plusieurs
infractions, ou même à lui apporter une assistance quelconque, afin de l’aider à
échapper aux recherches de la force publique. Il s’agit là autant d’un délit de
complicité a posteriori, que d’un délit d’opposition à l’exercice du pouvoir
judiciaire. »
Le code pénal congolais réprime :
- ceux qui auront recelé ;
- ceux qui auront fait receler des personnes qu’ils savaient être
- poursuivies ou
- condamnées du chef d’une infraction que la loi punit
- de mort ;
- de travaux forcés ou
- de cinq ans au moins de servitude pénale.
Excuse légale absolutoire en faveur des parents et alliés : Sont exemptés de la présente
disposition, les ascendants ou descendants, époux ou épouse même divorcés, frères ou sœurs
des détenus évadés ou leurs alliés aux mêmes degrés.
b) Elément légal : Art. 164. — Seront punis d’une peine de six mois à deux ans de
servitude pénale, ceux qui auront recelé ou fait receler des personnes qu’ils savaient être
poursuivies ou condamnées du chef d’une infraction que la loi punit de mort, de travaux
forcés ou de cinq ans au moins de servitude pénale.
Sont exemptés de la présente disposition, les ascendants ou descendants, époux ou épouse
même divorcés, frères ou sœurs des détenus évadés ou leurs alliés aux mêmes degrés.]

360 A.VITU, loc. cit.


158
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

TITRE VI.

TITRE VI. INFRACTIONS CONTRE L’ORDRE DES


FAMILLES

Chapitre Ier. ETENDUE DE L’INTERET PROTEGE OU CHAMP


AXIOLOGIQUE DES INFRACTIONS CONTRE L’ORDRE DES
FAMILLES

Section 1. DÉFINITION DE LA FAMILLE


159
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Au sens large, la famille est l’ensemble des personnes descendant d’un ancêtre commun et
rattachées entre elles par un lien horizontal (mariage, mais aussi concubinage), et un lien
vertical (la filiation)361.
Au sens strict, la famille est un groupe formé par les parents et leurs descendants, ou même,
plus restrictivement encore, par les parents et leurs enfants mineurs362.
On appelle famille l’unité sociale fondée par le mariage d’un homme et d’une femme appelés
à procréer et à assurer les conditions économiques de la vie commune363.
La famille doit par suite être considérée comme l’un des intérêts majeurs que le législateur
est tenu de protéger364.

Section 2. INTÉRÊTS PROTÉGÉS

Les infractions contre l’ordre des familles protègent, en principe, plusieurs intérêts. Mais
toutes les infractions qui concourent à cette protection ne sont pas définies par le code pénal
congolais. En effet, la R.D Congo ayant un code de la famille, d’autres infractions sont
portées par celui-ci.

§1. La famille, le foyer conjugal, les devoirs conjugaux et la foi conjugale.

La famille est sans doute un intérêt majeur en droit congolais qui lui a dédié tout un code, à
savoir : le code de la famille, qui renferme essentiellement les règles relatives aux droits de la
personne.

Dans le « Cours de philosophie morale », Baudin en dit que réduite à son essence, la famille
est la société que constituent les parents et leurs enfants... Elle est par essence la première des
sociétés naturelles et morales, par là qu'elle précède la nation sous toutes ses formes
historiques ... Elle a pour fin et fonction primaires la propagation et la perpétuité de la race
humaine ; elle est essentiellement organisée en vue de l'enfant, de sa procréation, de son
entretien, de son éducation, et de son établissement quand est venu pour lui le temps de fonder
un nouveau foyer365.

La famille est la cellule de base de la société. En la protégeant la morale chrétienne entend


conserver la société et la défendre contre son comportement suicidaire… La famille est la
première école des vertus sociales dont aucune société ne peut se passer366.

Les familles sont les fondements des États, et les individus sont les fondements des
familles367.

361 e
Lexique des termes juridiques, Dalloz, 19 éd., 2012, V° Famille.
362
Id.
363
HÖFFE, Dictionnaire d’éthique, cité par DOUCET, J-P., op. cit., V° Famille.
364
DOUCET, J-P., op. cit., V° Famille.
365
Id.
366
BRUGUES, Dictionnaire de morale catholique, cité par DOUCET, J-P., op. cit., V° Famille.
367
CONFUCIUS, Meng Tseu, IV I 5, cité par DOUCET, J-P., op. cit., V° Famille.
160
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

La constitution de la RD Congo reconnaît l’importance de la famille en lui consacrant


quelques articles.
En effet, aux termes de l’article article 40 de la constitution : « Tout individu a le droit de se
marier avec la personne de son choix, de sexe opposé, et de fonder une famille.
La famille, cellule de base de la communauté humaine, est organisée de manière à assurer
son unité, sa stabilité et sa protection. Elle est placée sous la protection des pouvoirs publics.
Les soins et l’éducation à donner aux enfants constituent, pour les parents, un droit naturel et
un devoir qu’ils exercent sous la surveillance et avec l’aide des pouvoirs publics.
Les enfants ont le devoir d’assister leurs parents.
La loi fixe les règles sur le mariage et l’organisation de la famille ».
De même, l’article 15 du même texte déclare : « Les pouvoirs publics veillent à l’élimination
des violences sexuelles.
Sans préjudice des traités et accords internationaux, toute violence sexuelle faite sur toute
personne, dans l’intention de déstabiliser, de disloquer une famille et de faire disparaître tout
un peuple est érigée en crime contre l’humanité puni par la loi ».

§2. L’enfant. Sans revenir sur le développement que nous avons consacré au concept enfant
dans le premier titre, auquel on se refera quant à ce, nous précisons que l’enfant est protégé
par le droit pénal : avant sa naissance ; après sa naissance et pendant sa minorité.

§3. La sexualité. Le concept sexualité est polysémique. Il signifie, entre autres, l’ensemble
des phénomènes relatifs à l’instinct sexuel et à sa satisfaction. La diversité des phénomènes a
amené le législateur à protéger :

- La dignité et la souveraineté de la personne sur son corps368 qui impliquent notamment


l’intimité sexuelle de la victime369 et la liberté dans ses relations sexuelles,
- L’intégrité physique des organes génitaux ;
- La santé sexuelle ;
- Les mœurs ;
- La liberté de procréer.

Chapitre II. : ANALYSE DE L’INFRACTION DE VIOL

INTRODUCTION
Dans sa conception classique, le viol consiste dans le fait pour un homme d’avoir une relation
charnelle avec une femme non consentante, ou dans des circonstances où elle ne peut
manifester sa volonté.

Dès lors qu’il consiste en un acte de violence envers les personnes, et qu’il est en outre de
nature à entraîner la conception d’un enfant illégitime, le viol porte atteinte, non seulement à

368 e
PRADEL, J. et DANTI-JUAN, M., Droit pénal spécial, 6 éd., Paris, éd. CUJAS, 2014, n° 763, p. 477.
369 e
VERON, M., Droit pénal spécial, 15 éd., Paris, éd. Sirey, 2015, n° 111, p. 72.
161
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

la pudeur de la victime, mais encore à la paix des familles. Il relève donc de la catégorie des
délits complexes370.

GARRAUD va dans le même sens :

« On entend par viol le fait de connaître charnellement une femme sans la participation
de sa volonté371 ».

C’est le plus répréhensible de tous les attentats aux mœurs ou à la pudeur, puisqu’à
l’immoralité du but ce crime joint la violence des moyens372.

DOUCET remarque que, conséquence de la dissolution des mœurs, l’incrimination actuelle


est plus extensive. Elle vise tout acte de pénétration sexuelle, en sorte que la victime peut être
soit une femme soit un homme ; dans ce dernier cas il s’agit en réalité d’un crime d’Attentat à
la pudeur aggravé373. En effet, en droit pénal français :

« Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, commis sur la
personne d'autrui par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol374 ».

En droit pénal congolais, la définition du viol par le législateur va au-delà de ce qui est
imaginable. En effet, aux termes de l’article 170, al. 1 du CP congolais commet le viol :

1. tout homme, quel que soit son âge, qui aura introduit son organe sexuel, même
superficiellement dans celui d’une femme ;
2. toute femme, quel que soit son âge, qui aura obligé un homme à introduire même
superficiellement son organe sexuel dans le sien ;
3. tout homme qui aura pénétré, même superficiellement l’anus, la bouche ou tout
autre orifice du corps d’une femme par un organe sexuel, par toute autre partie du
corps ou par un objet quelconque ;
4. tout homme qui aura pénétré, même superficiellement l’anus, la bouche ou tout
autre orifice du corps d’un homme par un organe sexuel, par toute autre partie du
corps ou par un objet quelconque ;
5. toute personne qui aura introduit, même superficiellement, toute autre partie du
corps ou un objet quelconque dans le vagin ;
6. toute personne qui aura obligé un homme à pénétrer, même superficiellement son
anus, sa bouche ou tout orifice de son corps par un organe sexuel, pour toute autre
partie du corps ou par un objet quelconque ;

370 Id., V° Viol.


371 GARRAUD, loc. cit.
372 MORIN, Répertoire du droit criminel, cité par DOUCET, J.P., op. cit ., V° Viol.
373 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Viol.
374 Article 222-23 du N.C.P.F
162
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

7. toute personne qui aura obligé une femme à pénétrer, même superficiellement son
anus, sa bouche ou tout orifice de son corps par un organe sexuel, pour toute autre
partie du corps ou par un objet quelconque.

Section Ière. ELEMENT LEGAL


Article 170. Aura commis un viol, soit à l’aide de violences ou menaces graves ou par
contrainte à l’encontre d’une personne, directement ou par l’intermédiaire d’un tiers, soit par
surprise, par pression psychologique, soit à l’occasion d’un environnement coercitif, soit en
abusant d’une personne qui, par le fait d’une maladie, par l’altération de ses facultés ou par
toute autre cause accidentelle aurait perdu l’usage de ses sens ou en aurait été privé par
quelques artifices :
a) tout homme, quel que soit son âge, qui aura introduit son organe sexuel, même
superficiellement dans celui d’une femme ou toute femme, quel que soit son âge, qui
aura obligé un homme à introduire même superficiellement son organe sexuel dans le
sien ;
b) tout homme qui aura pénétré, même superficiellement l’anus, la bouche ou tout autre
orifice du corps d’une femme ou d’un homme par un organe sexuel, par toute autre
partie du corps ou par un objet quelconque ;
c) toute personne qui aura introduit, même superficiellement, toute autre partie du corps
ou un objet quelconque dans le vagin ;
d) toute personne qui aura obligé un homme ou une femme à pénétrer, même
superficiellement son anus, sa bouche ou tout orifice de son corps par un organe
sexuel, pour toute autre partie du corps ou par un objet quelconque.

Quiconque sera reconnu coupable de viol sera puni d’une peine de servitude pénale de cinq à
vingt ans et d’une amende ne pouvant être inférieure à cent mille francs congolais constants.

Est réputé viol à l’aide de violences, le seul fait du rapprochement charnel de sexes commis
sur les personnes désignées à l’article 167, alinéa 2.

Article 171. Si le viol ou l’attentat à la pudeur a causé la mort de la personne sur laquelle il a
été commis, le coupable sera puni de la servitude pénale à perpétuité.

Article 171 bis. Le minimum des peines portées par les articles 167 alinéa 2, 168 et 170
alinéa 2 du présent Code sera doublé :
1. si les coupables sont les ascendants ou descendants de la personne sur laquelle ou à l’aide
de laquelle l’attentat a été commis ;
2. s’ils sont de la catégorie de ceux qui ont autorité sur elle ;
3. s’ils sont ses enseignants ou ses serviteurs à gage ou les serviteurs des personnes ci-
dessus indiquées;
163
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

4. si l’attentat a été commis soit par les agents publics ou par des ministres du culte qui ont
abusé de leur position pour le commettre, soit par le personnel médical, para-médical
ou assistants sociaux, soit par des tradi-praticiens, envers les personnes confiées à leurs
soins ;
5. si le coupable a été aidé dans l’exécution de l’infraction par une ou plusieurs personnes ;
6 . s’il est commis sur des personnes captives par leurs gardiens ;
7. s’il est commis en public ;
8. s’il a causé à la victime une altération grave de sa santé et/ou laissé de séquelles
physiques et/ou psychologiques graves ;
9. s’il est commis sur une personne vivant avec handicap ;
10. si le viol a été commis avec usage ou menace d’une arme.
En cas de viol tel qu’aggravé au sens du point 1 et 2 de l’alinéa 1er, le juge prononcera en
outre la déchéance de l’autorité parentale ou tutélaire si l’infraction a été commise par une
personne exerçant cette autorité conformément a l’article 319 du Code de la famille.
Il en résulte qu’il y a lieu de distinguer :
1. Le viol (Article 170, al. 1 et 2) ;
2. Le viol réputé commis à l’aide de violences (Article 170, al. 3) : le seul fait du
rapprochement charnel de sexes commis sur les personnes âgées de moins de 18
ans ;
3. Le viol ayant causé la mort (Article 171) et
4. Le viol aggravé (Article 171 bis).

Les articles 170 et suivants de la L.P.P.E prévoient le viol de l’enfant.

Section II. ELEMENTS MATERIELS

Deux éléments matériels sont requis : un acte matériel de viol et l’absence de consentement.

§1. Un acte matériel de viol

Les actes matériels de viol sont spécifiés par la loi à l’article 170, alinéa 1er du C.P. Il en
résulte que les actes ainsi spécifiés sont multiples et susceptibles de différentes classifications.
C’est ainsi que nous distinguons les viols impliquant les organes sexuels des viols sans
organes sexuels.

A. VIOL IMPLIQUANT LES ORGANES SEXUELS (un organe sexuel)

Par organes sexuels, nous faisons ceux qui sont visés par le législateur, en l’occurrence
l’organe sexuel de l’homme, communément appelé « pénis » et l’organe sexuel de la femme
appelé par le législateur « vagin ».

A la manière ce dernier, qui ne s’est pas gêné à utiliser les termes bruts, nous nous
exprimerons dans les mêmes termes afin de nous faire comprendre dans notre analyse.
164
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Toujours est-il qu’il y a lieu de distinguer le viol à l’aide du pénis du viol à l’aide d’autres
organes que du viol à l’aide d’objets.

I. Viol à l’aide du pénis


Quatre différentes modalités de viol peuvent être réalisées par le pénis.

1. Viol par le vagin : coït imposé à la femme par l’homme.


L’article 170, alinéa 1er, a, du code pénal vise en premier lieu le coït imposé à la femme par
l’homme en disposant : « tout homme, quel que soit son âge, qui aura introduit son organe
sexuel, même superficiellement dans celui d’une femme ». Peu importe que l’intromission du
pénis dans le vagin soit totale ou superficielle.
2. Viol par l’anus : la sodomie imposée ou obligée
Le viol par l’anus relève de la sodomie également appelée coït anal. Il s’agit d’une perversion
sexuelle consistant dans une pénétration de l’anus par la verge d’un homme.
La loi vise aussi bien la sodomie de la femme par l’homme que celle d’un homme par un
autre homme. La pénétration peut être imposée à la victime (femme ou homme) ou obligée à
celle-ci (homme ou femme).
3. Viol par la bouche : fellation imposée ou obligée
Le viol par la bouche relève la fellation également appelée coït buccal. Il s’agit d’une
perversion sexuelle consistant en l’excitation du sexe masculin par la bouche, aussi bien d’un
homme comme d’une femme.

La loi vise aussi bien la fellation imposée à la victime femme ou homme par un homme que
celle obligée à la victime homme par une femme ou par un autre homme.

4. Viol par autres orifices du corps : (de l’homme sur l’homme ou de la


femme sur l’homme et vice versa)

II. Viol à l’aide du vagin

1. Viol à l’aide du vagin via le pénis : coït obligé à l’homme.


L’article 170, alinéa 1er, a, du code pénal vise en second lieu le coït obligé à l’homme par la
femme, en disposant : « Toute femme, quel que soit son âge, qui aura obligé un homme à
introduire même superficiellement son organe sexuel dans le sien ». Peu importe que
l’intromission du pénis dans le vagin soit totale ou superficielle.

2. Viol à l’aide du vagin par le vagin : une femme qui en viole une autre
peut sans doute recourir à son vagin contre celui de la victime.

III. Viol à l’aide d’autres organes

Le viol à l’aide d’autres organes qui implique le sexe ne peut concerner que le vagin.

a. Viol par le vagin


165
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Le viol par le vagin à l’aide d’autres organes comprend deux modalités :


i. Viol à l’aide de la langue : Cunnilingus et
ii. Viol à l’aide des doigts : Touchée vaginale, qui consiste en réalité en
une caresse.

IV. Viol à l’aide d’objets

a. Viol par le vagin (entre autres) : il comprend :


1. Sadisme notamment : le sadisme est un trouble du comportement, principalement
sexuel, dans lequel l’excitation érotique et le plaisir ne peuvent être obtenus qu’en
infligeant des douleurs physiques ou morales à son partenaire.
2. Masochisme : en sexualité, il s’agit d’une déviation sexuelle qui correspond au
comportement d’une personne qui éprouve un certain plaisir dans la douleur
physique ou morale.
3. Atteintes physiques au vagin par des objets. Violence, meurtrissures, agression
dirigée contre le vagin.

B. VIOL SANS ORGANES SEXUELS

1. Viol à l’aide d’autres organes


1.1. Viol par l’anus
1.2. Viol par la bouche
1.3. Viol par autres orifices
2. Viol à l’aide d’objets
2.1. Viol par l’anus
2.2. Viol par la bouche
2.3. Viol par autres orifices

§2. ABSENCE DE CONSENTEMENT DE LA VICTIME


Pour que le viol soit établi, il faut que la victime n’ait pas consenti à l’acte. L’absence de
consentement doit être réelle, des vagues protestations émises par la femme ne suffisent pas.
L’absence du consentement se déduit des moyens auxquels l’auteur a eu recours pour réaliser
l’acte qui consomme le viol.
Le viol se commet :
1. soit à l’aide de violences ;
2. soit à l’aide de menaces graves ;
3. soit par contrainte à l’encontre d’une personne, directement ou par l’intermédiaire
d’un tiers ;
4. soit par surprise ;
5. soit par pression psychologique ;
6. soit à l’occasion d’un environnement coercitif ;
7. soit en abusant d’une personne qui, par le fait d’une maladie, par l’altération de
ses facultés ou par toute autre cause accidentelle aurait perdu l’usage de ses sens
166
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

ou en aurait été privé par quelques artifices(personne évanouie, ivre, sous l'effet
d'un soporifique etc.).
8. L’absence de consentement est irréfragablement présumée dans le chef d’un enfant
mineur.

Section III. ELEMENT INTELLECTUEL

L’élément moral dans l’infraction de viol est l’intention coupable différemment caractérisée.

1. Dans les viols impliquant les organes sexuels cette intention coupable consiste en la
volonté consciente d'avoir des relations sexuelles avec une personne non consentante.

2. Dans les viols sans organes sexuels cette intention coupable consiste en la volonté
consciente de poser un acte défendu par la loi.

En général l'emploi des moyens qui annihilent le consentement suffit à démontrer cette
intention coupable.

Section IV. PROTAGONISTES DU VIOL ET REGIME REPRESSIF

Jadis seule la femme était victime du viol et seul l’homme en était auteur. Depuis la loi de
2006 relative aux violences sexuelles n’importe quel individu, homme ou femme peut en être
auteur ou victime.

Le viol simple est puni de servitude pénale de cinq à vingt ans et d’une amende ne pouvant
être inférieure à cent mille francs congolais.

Nous constatons que le législateur a laissé le plafond de l’amende ouverte. Cela suppose que
le juge peut aller jusqu’à l’infini. C’est une erreur sur le plan de la légistique qui viole le
principe de la légalité criminelle.

Section V. CIRCONSTANCES AGGRAVANTES


Les circonstances aggravantes prévues par l’article 171bis sont :
1. si les coupables sont les ascendants ou descendants de la personne sur laquelle ou à
l’aide de laquelle l’attentat a été commis ;
2. s’ils sont de la catégorie de ceux qui ont autorité sur elle ;
3. s’ils sont ses enseignants ou ses serviteurs à gage ou les serviteurs des personnes ci-
dessus indiquées;
4. si l’attentat a été commis soit par les agents publics ou par des ministres du culte qui
ont abusé de leur position pour le commettre, soit par le personnel médical,
paramédical ou assistants sociaux, soit par des tradi-praticiens, envers les personnes
confiées à leurs soins ;
167
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

5. si le coupable a été aidé dans l’exécution de l’infraction par une ou plusieurs personnes
;
6. s’il est commis sur des personnes captives par leurs gardiens ;
7. s’il est commis en public ;
8. s’il a causé à la victime une altération grave de sa santé et/ou laissé de séquelles
physiques et/ou psychologiques graves ;
9. s’il est commis sur une personne vivant avec handicap ;
10. si le viol a été commis avec usage ou menace d’une arme.

L’aggravation de la peine ne portera que sur le minimum et non sur le maximum. En effet, dit
la loi :
« Le minimum des peines portées par les articles 167 alinéa 2, 168 et 170 alinéa 2 du
présent Code sera doublé ».
Des peines complémentaires obligatoires suivantes sont prévues :
- la déchéance de l’autorité parentale ou tutélaire si l’infraction a été commise par une
personne exerçant cette autorité conformément a l’article 319 du Code de la famille.

Section VI. PROBLEMATIQUE DU VIOL DANS LE MARIAGE

Par principe, le viol n’est pas impossible dans le mariage, pourvu que le législateur en décide
ainsi tout en en fixant les contours. C’est ce qu’a fait le législateur français.

En droit pénal français l’article 222-24 du N.C.P .F dit :

« Le viol est puni de vingt ans de réclusion criminelle :

11° Lorsqu'il est commis par le conjoint ou le concubin de la victime ou le partenaire lié à
la victime par un pacte civil de solidarité ; … ».

A notre connaissance, le droit pénal congolais n’a pas un texte semblable.

Toutefois, le juge Bony CHIZUNGU pense que le viol est possible dans le mariage.

La professeure SITA estime que ce sont des violences légitimes.

Jean LESUEUR est d’avis qu’il ne peut y avoir viol qu'en cas de relations sexuelles illicites.
Il ne peut donc y avoir viol de la part d'un mari sur son épouse (mais il pourrait y avoir,
éventuellement, coups et blessures volontaires, ou même attentat à la pudeur en cas de
pratiques contre nature).

Le professeur LIKULIA enseigne que cela est d’autant plus vrai qu’étendre l’interprétation de
l’incrimination du viol entre époux est de nature à exposer le mariage à la dislocation, alors
qu’il est plutôt très protégé en droit congolais par la constitution et par le code de la famille.
En effet elle donnerait aux époux des raisons valables de refuser d’exécuter leurs obligations
conjugales.
168
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Nous pensons que le code de la famille375 justifie le viol dans le mariage à travers l’obligation
pour les époux de perpétuer leur espèce. Aussi toute violence dans le mariage, fut-elle
sexuelle, doit être, en l’absence de l’intervention du législateur, qualifiée d’une infraction que
le code de la famille ne justifie pas.

Chapitre III. APERCU DES AUTRES INFRACTIONS CONTRE


L’ORDRE DES FAMILLES

SECTION I. DE L’AVORTEMENT

L’avortement est défini comme l’expulsion prématurée du fœtus, volontairement provoquée


par un procédé artificiel quelconque376. C’est l’utilisation de procédés destinés à provoquer
artificiellement l’expulsion prématurée du produit de la conception377. C’est également la
pratique ou les manœuvres tendant à interrompre artificiellement la grossesse en provoquant

375 Art. 330. — Le mariage est l’acte civil, public et solennel par lequel un homme et une femme qui ne sont engagés ni l’un
ni l’autre dans les liens d’un précédent mariage enregistré, établissent entre eux une union légale et durable dont les
conditions de formation, les effets et la dissolution sont déterminés par la présente loi.
Art. 331. — Dans l’interprétation et l’application de la présente loi, les cours et tribunaux auront en vue la protection du
ménage fondé sur le mariage et la sauvegarde de son unité et de sa stabilité.
Art. 332. — Sauf disposition contraire, les règles de la présente loi sont impératives et d’ordre public.
Aucune convention conclue en considération d’une union distincte du mariage tel que défini à l’article 330 ne peut produire
les effets du mariage.
Art. 349. — Le mariage a pour but essentiel de créer une union entre un homme et une femme qui s’engagent à vivre
ensemble jusqu’au décès de l’un d’entre eux, pour partager leur commune destinée et pour perpétuer leur espèce.
Art. 350. — Est nulle toute stipulation visant à écarter l’une des fins essentielles du mariage.
Art. 453. — Les époux s’obligent mutuellement à la communauté de vie.
Ils sont tenus de vivre ensemble et d’assurer la consommation du mariage.
Art. 463. — Si l’un des époux manque gravement à ses devoirs, le président du tribunal de paix de la dernière résidence
conjugale ordonne, sur requête verbale ou écrite de l’autre époux, les mesures urgentes et provisoires qu’exige l’intérêt de
ce dernier et des enfants.

376 LESUEUR, J., op. cit., p. 121.


377 MINEUR, G., op. cit., p.
169
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

l’expulsion avant terme des fœtus, quel que soit le stade du développement de celui-ci et
indépendamment de sa viabilité378.
Selon Jean – Paul DOUCET :
« L’avortement est l’acte par lequel une personne prive de la vie, intentionnellement
(voire par imprudence), un enfant encore en gestation dans le sein de sa mère. Cet acte
porte atteinte à la personne de l'enfant, à sa famille et à la Nation.
L'avortement ne saurait être considéré comme exceptionnellement légitime, dans tel ou
tel cas d'espèce, que pour des raisons médicales concernant, soit la vie de la mère, soit
l’état de santé de l’enfant.
En droit pénal français, lorsque cet acte se commet sans l’autorisation de la mère, on
parle d’interruption illégale de grossesse (art. 223-10 C.pén.). Lorsqu'il est perpétré
avec l’autorisation de la mère, dans les formes légales, et n’est dès lors plus punissable,
on parle par euphémisme d’interruption volontaire de grossesse, en sigle I.V.G.
On est allé si loin dans la négation du droit à la vie, pour les enfants dans le sein de
leur mère, qu'il est actuellement interdit de discuter le "droit" des femmes à
l'avortement 379 ».
Le code pénal prévoit deux formes d’avortement :
1. Avortement par autrui (Art. 165) : Le fait de celui qui, par aliments, breuvages,
médicaments, violences ou par tout autre moyen, aura fait avorter une femme.
2. Avortement sur soi-même (Art. 166) : Le fait de la femme qui, volontairement, se
sera fait avorter.

Section II : DES INFRACTIONS DE VIOLENCES SEXUELLES

Le législateur congolais ne définit pas le concept violences sexuelles qu’il a visées dans la loi
de 2006.

L’acte de violence, dit DOUCET, est souvent défini comme un dérèglement de la force vitale
que soutient chaque individu ; il prend des noms différents selon le domaine où il est perpétré.
On parle de coups et violences en matière d’intégrité corporelle des personnes, de cruauté
envers les animaux et de destruction en matière de choses. En ce qui concerne les personnes,
il est punissable dès la moindre atteinte à l’intégrité physique ou psychique de la victime380.

Lorsque ledit acte est lié au sexe, on parle alors de violence sexuelle.

L’acte de violence prend des noms différents selon le domaine où il est perpétré 381. Aussi
parle-t-on de violences sexuelles lorsque les actes de violences se rapportent au sexe.

§ 1er. De l’attentat à la pudeur

378 LIKULIA BOLONGO, op. cit., p. 295.


379 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Avortement.
380
DOUCET, J.P., op.cit., V° Violence.
381 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Violence.
170
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

La pudeur
Le mot pudeur vient du mot latin pudor. L’étymologie relie la pudor aux pudenda : les parties
honteuses. C’est ce qui fait que le sens commun relie la pudeur aux parties génitales 382. Mais
HÖFFE vas plus loin que ça lorsqu’il affirme que
« La pudeur ne se laisse pas enfermer dans une problématique purement sexuelle. Si elle
s’atteste le plus souvent par le refus d’exposer son corps aux regards de quiconque, la
pudeur est en profondeur une réserve ou une discrétion à travers laquelle se manifeste la
volonté de sauvegarder une stricte limite entre le domaine privé et le domaine public… La
pudeur s’étend alors du corps aux sentiments, voire à l’ensemble de la vie privée383 ».
DOUCET enseigne que
« La pudeur consiste en un sentiment de retenue qui invite à proscrire des attitudes et
des conduites de nature à choquer autrui, notamment sur le plan sexuel. Commet une
faute celui qui ne respecte pas cette réserve dans les rapports sociaux.
Au sens large, la pudeur consiste dans le sentiment intime que certaines choses ne
sauraient être faites, montrées ou dites, parce qu’une telle manifestation porterait
atteinte à la dignité de la personne humaine.
Au sens étroit, le sentiment de pudeur s’oppose principalement à l’exposition des
organes sexuels principaux et secondaires, ainsi qu’à la représentation des activités qui
s’y rattachent .
Qu’ils soient imposés à une personne contre son gré ou qu’ils soient rendus public, des
actes, des écrits ou des propos offensant la pudeur sont susceptibles de troubler l’ordre
social, et appellent dès lors une répression pénale384».
Pour André VITU:
« Les êtres humains se distinguent des animaux en ce que les manifestations de leur
instinct sexuel sont modérées par un sentiment profond, façonné par l’éducation reçue,
et qu’on appelle la pudeur. Toutes les législations assurent la protection de la pudeur
contre les abus et les déviations de cet instinct385 ».

1. Attentat à la pudeur commis sans violences ou menaces (Article 167) : Le code


pénal congolais définit l’attentat à la pudeur comme étant
« tout acte contraire aux mœurs exercé intentionnellement et directement sur une
personne sans le consentement valable de celle-ci 386».
Plusieurs auteurs vont dans le même sens.
« L’attentat à la pudeur se définit comme un acte contraire aux Bonnes mœurs, qui est
accompli consciemment, qui vise le corps d’une personne précise, et qui est de nature à
porter atteinte à un sentiment raisonnable de Pudeur »387.

382 V° utilement le dictionnaire d’éthique et de philosophie morale. V° Pudeur (Habib).


383 HÖFFE, Dictionnaire d’éthique, V° Pudeur.
384 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Malfaiteur. V° Pudeur.
385 André VITU, loc. cit.
386 Article 167 C.P. congolais.
171
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

« L’attentat à la pudeur peut être défini comme tout acte contraire à la pudeur de la
victime et mettant directement en cause le corps de celle-ci (à l’exception toutefois des
actes de pénétration sexuelle commis avec violence, qui relèvent de la notion de
viol)»388.
Pour DOUCET, cette infraction est essentiellement constituée par la commission consciente
d’un acte de nature à offenser la pudeur d’autrui, sans qu’il y ait lieu de rechercher si la
victime s’est effectivement sentie offensée389.

Sur pied de l’article 167, al. 2 la loi punit d’une servitude pénale de six mois à cinq ans
« Tout attentat à la pudeur commis sans violences, ruse, ou menaces sur la personne ou
à l’aide de la personne d’un enfant âgé de moins de dix-huit ans.
L’âge de l’enfant pourra être déterminé par examen médical, à défaut d’état civil »390.

L’article 169 du C.P congolais précise que


« L’attentat existe dès qu’il y a commencement d’exécution ».
VILLEY abonde dans le même sens:
« La tentative d’attentat à la pudeur constitue par elle-même un attentat391 ».

DOUCET distingue l’attentant à la pudeur avec l’outrage public à la pudeur en ces termes :
« Alors que l’Outrage public à la pudeur vise principalement le maintien de l’ordre
public l’Attentat à la pudeur porte essentiellement atteinte au sentiment de décence de
la victime d’une agression présentant un caractère sexuel392».

2. Attentat à la pudeur commis avec violences ou menaces (Article 168.) : Cette


infraction comprend trois modalités :
- L’attentat à la pudeur commis avec violences, ruse, ou menaces sur des personnes
majeure de l’un ou de l’autre sexe (Article 168, al. 1 : six mois à cinq ans) et
- L’attentat à la pudeur commis avec violences, ruse, ou menaces sur la personne ou à
l’aide de la personne d’un enfant âgé de moins de 18 ans (Article 168, al. 2 : cinq à
quinze ans).
- L’attentat à la pudeur commis avec violences, ruse, ou menaces sur les personnes ou à
l’aide des personnes âgées de moins de dix ans, la peine sera de cinq à vingt ans
(Article 168, al. 2).

3. L’attentat à la pudeur ayant causé la mort (Article 171) : Il est incriminé dans le
même article que le viol ayant causé la mort.

§2 : Du viol

387 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Attentat à la pudeur.


388 A. VITU, loc. cit.
389 DOUCET, J.P., loc. cit .
390 Id.
391 VILLEY, Cours de droit criminel, DOUCET, J.P., op. cit ., V° Attentat à la pudeur.
392 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Pudeur.
172
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Dans la conception classique le viol consiste dans le fait pour un homme d’avoir une relation
charnelle avec une femme non consentante, ou dans des circonstances où elle ne peut
manifester sa volonté.
DOUCET remarque que conséquence de la dissolution des mœurs, l’incrimination actuelle est
plus extensive. Elle vise tout acte de pénétration sexuelle, en sorte que la victime peut être soit
une femme soit un homme ; dans ce dernier cas il s’agit en réalité d’un crime d’Attentat à la
pudeur aggravé393. En effet, en droit pénal français :
« Tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, commis sur la personne
d'autrui par violence, contrainte, menace ou surprise est un viol394 ».
En droit pénal congolais, la définition du viol par le législateur va au-delà de ce qui est
imaginable. Nous l’examinerons dans les détails.

Section III : DES AUTRES INFRACTIONS DE VIOLENCES


SEXUELLES

§ 1er : De l’excitation des mineurs à la débauche

La débauche La débauche est une perversion de la nature humaine qui implique, avec
l’abolition de toute sentimentalité vraie, la recherche débridée de toutes les jouissances dont
au premier rang les jouissances sexuelles souvent les moins raffinées. Un tel dérèglement au
regard de la moralité publique a justifié de la part du législateur une certaine sévérité395.
On entend par débauche tout excès dans le domaine du boire ou du manger, mais plus encore
en matière sexuelle.
La débauche constitue une notion plus large que la prostitution, elle vise tout abandon à
l’impudicité ; elle est indépendante de toute condition de rétribution396.

Il a été jugé en France que :


« Pour déclarer le prévenu coupable du délit d'excitation de mineure à la débauche, l'arrêt
attaqué constate qu'en mars 1989, il s'est masturbé devant la victime, née en 1973, avec la
volonté d'associer cette mineure à son comportement impudique en lui demandant de le
photographier. Les juges ajoutent que pareille mise en scène impliquait la volonté d'éveiller
les pulsions sexuelles de l'adolescente et que cette volonté s'est prolongée puisque, huit jours
plus tard, le prévenu lui a demandé de venir voir les clichés397 ».
Le mineur
Aux termes de l’article 41, al. 1 de la constitution de la RDC : « L’enfant mineur est toute
personne, sans distinction de sexe, qui n’a pas encore atteint 18 ans révolus ».
« De nos jours un être humain est considéré comme un mineur tant qu’il n’a pas atteint l’âge
de la majorité légale (actuellement fixé autour de 18 ans). On parle d'enfant, lorsqu'on

393 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Viol.


394 Article 222-23 du N.C.P.F
395 Agen, 1re Ch., 7 janvier 1981, Gaz.Pal. 1982 I somm. 154.
396 RIGAUX et TROUSSE, loc. cit.
397 Cass.crim. 1er février 1995, Gaz.Pal. 1995 II Chr.crim. 328.
173
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

envisage les liens de celui-ci avec ses parents ; mais plutôt de mineur, lorsqu'on s'attache à ses
rapports avec les tiers et plus généralement avec l'ensemble de la population. Le mineur doit
être protégé par le législateur, tout d'abord en raison de son inexpérience de la vie, ensuite du
fait de son état de faiblesse vis-à-vis de certains individus particulièrement pervers. Cette
protection doit être renforcée à l'égard des très jeunes mineurs»398.
1. Excitation des mineurs à la débauche (Article 172- 174) : L’excitation des mineurs
à la débauche consiste dans le fait d’attenter aux mœurs en excitant, facilitant ou favorisant
pour satisfaire les passions d’autrui, la débauche ou la corruption des personnes de l’un ou
l’autre sexe, âgées de moins de dix-huit ans, sera puni d’une servitude pénale de trois mois à
cinq « ans et d’une amende de cinquante mille à cent mille Francs congolais constants.

§2 : Du souteneur et du proxénétisme

Des précisions sur quelques termes méritent d’être apportées.

1. Le souteneur : Dans le langage courant on nomme souteneur un individu qui prétend


assurer la protection d’une personne se livrant à la prostitution pour justifier qu’il vit à ses
dépens (on dit aussi maquereau ou maquerelle). Ce mot est employé par la loi pénale
belge (la loi canadienne parle d’entremetteur) ; mais il ne l’est pas par le législateur
français, qui lui préfère le terme équivalent de Proxénète399.
« La loi qui définit le souteneur ne fait pas de distinction de sexe. Par conséquent, une
femme peut être condamnée comme souteneur d’une prostituée aux dépens de laquelle
elle vit400 . »
En droit pénal congolais, est souteneur celui qui vit, en tout ou en partie, aux dépens d’une
personne dont il exploite la prostitution401.

2. Le proxénétisme : Au sens large, le terme proxénétisme vise toute activité tirant profit de
la prostitution d’une autre personne.
Dans le sens le plus large du mot, on désigne par proxénétisme le fait de faciliter ou de
favoriser les passions d’autrui ; dans un sens plus restreint, c’est le fait de favoriser, de
manière habituelle et dans un but lucratif, la débauche d’autrui402.
Au regard de la technique juridique, le proxénétisme consiste en l’accomplissement d’actes
accessoires à la prostitution ; il peut dès lors prendre toutes les formes de la complicité.

Principaux actes incriminés :


a) L’instigation à la prostitution.
b) L’entremise à la prostitution.
c) L’aide et assistance à la prostitution :
 L’engagement dans une maison de débauche ou dans un réseau de
prostitution ;
 La fourniture d’un local ;

398 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Mineur.


399 Id. v° Souteneur.
400 CONSTANT, Manuel de droit pénal, DOUCET, J.P., op. cit ., V° Souteneur.
401 Article 175 CP congolais.
402 GARRAUD, loc. cit.
174
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.


La fourniture de matériels, notamment le fait de procurer un véhicule ;

Le financement, par exemple le fait de prêter de l’argent à une prostituée
pour qu’elle achète un appartement où elle pourra recevoir ses « clients ». ;
 La publicité faite au profit d’une prostituée, notamment par la publication de
petites annonces dans un journal ;
d) Le partage des produits de la prostitution.

1. Le proxénète - Un proxénète est une personne qui s’adonne au Proxénétisme. Il peut


s’agir d’un homme ou d’une femme ; d’une personne extérieure à la famille de la personne
livrée à la débauche ou de l’un de ses parents, éventuellement de son conjoint.
En revanche, lorsque deux prostituées collaborent, l’une ne saurait être considérée comme la
proxénète de l’autre.

2. L’entremetteur - De manière générale, un entremetteur est un individu qui use de ses


relations et accointances pour mettre deux personnes en rapport. Plus spécialement, il facilite
des manœuvres délictueuses ou des intrigues galantes. Lorsqu’il intervient dans une affaire
relevant du droit criminel, il apparaît comme un complice par fourniture de renseignement.
3. La prostitution : On parle de prostitution pour désigner l’activité d’un homme ou
d’une femme qui se prête physiquement, de manière habituelle et contre rémunération, à la
satisfaction des plaisirs sexuels d’autrui. Au regard de la technique juridique, cet acte apparaît
comme l’acte principal dans l’ensemble des agissements qui constituent le commerce
vénérien.
4. La maison de tolérance : La maison de tolérance est un établissement accueillant
des prostituées, dans un cadre législatif défavorable à la prostitution, voire hostile, mais non
prohibitif.
5. Le racolage : Le racolage consiste, de la part d’une personne se livrant à la
prostitution, à chercher, en un lieu ou par un moyen public, à attirer des clients.
Dans le paragraphe 2 consacré au souteneur et au proxénétisme, la loi réprime, à l’Article
174 b, les infractions ci-après :
 Entraînement, embauche et le détournement en vue de la débauche ou de la
prostitution ;
 Tenue d’une maison de débauche ou de prostitution ;
 Délit du souteneur ;
 Exploitation habituelle de la débauche ou prostitution d’autrui ;
 Exposition des enfants à la pornographie : diffuser publiquement un document ou
film pornographique aux enfants de moins de 18 ans ;
 Danses ou tenues obscènes à la télévision : faire passer à la télévision des danses ou
tenues obscènes, attentatoires aux bonnes mœurs.
N.B : Lorsque la victime est un enfant âgé de moins de 18 ans, la peine est de cinq à vingt
ans.

§ 3 : De la prostitution forcée (Article 174 c.)


La loi punit quiconque aura amené une ou plusieurs personnes à accomplir un acte ou
plusieurs actes de nature sexuelle, par la force, par la menace de la force ou de la coercition
175
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

ou encore en profitant de l’incapacité desdites personnes à donner librement leur


consentement en vue d’obtenir un avantage pécuniaire ou autre.

§ 4 : Du harcèlement sexuel
Le harcèlement
Harceler une personne c'est la soumettre à des agressions constantes, chacune envisagée en
elle-même étant de peu de gravité, mais leur répétition étant susceptible de causer un trouble
physique ou psychique403.
Tourmenter, inquiéter par de petites mais de fréquentes attaques404.
Le droit français ne connaît pas de délit général de harcèlement, mais deux délits spéciaux :
le harcèlement moral et le harcèlement sexuel. Toutefois des actes de harcèlement peuvent
être réprimés sous la qualification de Voies de fait et violences légères, à défaut de
qualifications plus élevées tenant à la gravité de l'atteinte405.
A l’instar du droit pénal français, le droit pénal congolais ne connaît pas une infraction
générale de harcèlement, mais plutôt le harcèlement sexuel.
1. Le harcèlement sexuel (Article 174 d) : En droit pénal congolais, le harcèlement
sexuel consiste dans le fait d’adopter un comportement persistant envers autrui, se
traduisant par des paroles, des gestes soit en lui donnant des ordres ou en proférant des
menaces, ou en imposant des contraintes, soit en exerçant des pressions graves, soit en
abusant de l’autorité que lui confère ses fonctions en vue d’obtenir de lui des faveurs de
nature sexuelle.
N.B : Les poursuites sont subordonnées à la plainte de la victime.

§5 : De l’esclavage sexuel
L’esclavage est l’état d’un être humain auquel on dénie la qualité de sujet de droit, et qui se
trouve dès lors réduit au rang d’objet de propriété en tant que bien meuble406.
L’esclavage est la condition de l’homme qui appartient à un autre en pleine propriété.
L’esclave n’est plus une personne, il est une chose407.
1. L’esclavage sexuel (Article 174 e) : L’esclavage sexuel consiste dans le fait d’exercer
un ou l’ensemble des pouvoirs associés au droit de propriété sur une personne, notamment en
détenant ou en imposant une privation similaire de liberté ou en achetant, vendant, prêtant,
troquant ladite personne pour des fins sexuelles, et de le contraindre à accomplir un ou
plusieurs actes de nature sexuelle.

§ 6 : Du mariage forcé (Article 174 f)

403 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Harcèlement


404 Dictionnaire Littré, v° Harceler :
405 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Harcèlement.
406 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Esclavage.
407 PIERRE et MARTIN, Cours de morale, DOUCET, J.P., op. cit ., V° Esclavage.
176
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Par mariage forcé on entend le fait pour toute personne qui, exerçant l’autorité parentale ou
tutélaire sur une personne mineure ou majeure, de le donner en mariage, ou en vue de celui-
ci, ou de le contraindre à se marier.

Le minimum de la peine prévu à l’aliéna 1er est doublé lorsqu’il s’agit d’une personne âgée
de moins de 18 ans.

§ 7 : De la mutilation sexuelle (Article 174 g)

La mutilation sexuelle consiste dans le fait de poser un acte qui porte atteinte à l’intégrité
physique ou fonctionnelle des organes génitaux d’une personne.
La loi vise sans doute le fait d’émasculer une personne en lui coupant la verge de même que
l’excision.
La circoncision n’est pas une mutilation sexuelle. Telle est la volonté du législateur congolais
qui l’affirme à l’article 153, alinéa 4 de la loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection
de l'enfant en ces termes :
« La circoncision n'est pas une mutilation sexuelle ni une atteinte à l'intégrité
physique ».
Le législateur a tout à fait raison parce que la circoncision ne porte atteinte ni à l’intégrité
physique ni à l’intégrité fonctionnelle des organes génitaux de l’homme, bien au contraire,
elle facilité le fonctionnement de l’organe et elle est un signe de beauté.

§ 8 : De la zoophilie (Article 174 h)

La zoophilie a pour synonymes la bestialité et la bougrerie.


La bestialité est le commerce charnel d'un homme ou d'une femme avec une bête408.
C’est une déviation sexuelle extrême. C’est le crime de Pasiphaé, dont est issu le
Minotaure, symbole du Mal pour les grecs. La bestialité est considérée comme le plus
grave des péchés de luxure par les moralistes. Ils la désignaient autrefois sous l'appellation
de « crime sans nom » et n'en parlaient qu'en latin, afin de ne même pas en donner
l'idée409 : Bestialitas est concubitus cum bestia. La bestialité est en soi le plus grave des
péchés de luxure410.
Le code pénal congolais réprime deux comportements :
- celui de contraindre une personne à avoir des relations sexuelles avec un animal, par
ruse, violences, menaces ou par toute forme de coercition ou artifice et
- celui d’avoir volontairement des rapports sexuels avec un animal.

408 BOURG SAINT-EDME, Dictionnaire de la pénalité, v° Bestialité.


409 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Bestialité.
410 VITTRANT, Théologie morale, cité par DOUCET, J.P., loc. cit .
177
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

§9 : De la transmission délibérée des infections sexuellement transmissibles


incurables (Article 174 i)

La loi punit celui qui aura délibérément contaminé une personne d’une infection
sexuellement transmissible incurable. C’est le cas du V.I.H.

§10 : Du trafic et de l’exploitation d’enfants à des fins sexuelles (Art. 174 j)


Le trafic : On parle de trafic à propos d’une vaste opération commerciale, qui porte sur un
objet hors commerce, illicite ou obtenu à la suite d’un crime ou d’un délit, et qui est effectuée
dans le but de procurer au trafiquant un profit immoral. Lorsqu’un trafic porte sur des êtres
humains on emploie plutôt le terme Traite411.
La traite d’êtres humains412 : La traite des êtres humains consiste à voir en ceux-ci de
simples marchandises ; à les vendre, à les acheter, en un mot à en faire commerce. Il s’agit là
d’une forme particulière de Trafic413.

Le droit français réprime :


- La traite proxénète : La traite des êtres humains, notamment des femmes, en vue de
les livrer à la prostitution (art. 225-8 C.pén.) et
- La traite d’enfants. La traite des enfants peut prendre deux formes. La première tend
à fournir en main d’œuvre bon marché certains marchés peu scrupuleux ; elle relève
de la législation sur le travail forcé, voire sur l’esclavage. La seconde vise à alimenter
le trafic d’enfants nouveau-nés en vue de leur adoption par des personnes qui
souhaitent fonder une famille.
Le droit pénal congolais réprime tout acte ou toute transaction ayant trait au trafic ou à
l’exploitation d’enfants ou de toute personne à des fins sexuelles moyennant rémunération ou
un quelconque avantage.

§11 : De la grossesse forcée (Article 174 k.)

Par « grossesse forcée », on entend la détention illégale d’une femme mise


enceinte de force, dans l’intention de modifier la composition ethnique
d’une population ou de commettre d’autres violations graves du droit
international. Cette définition ne peut en aucune manière s’interpréter
comme ayant une incidence sur les lois nationales relatives à la grossesse414.
Ainsi, sans aucune clarté, le code pénal punit :« Quiconque aura détenu une ou plusieurs
femmes rendues enceintes de force ou par ruse ».

§ 12 : De la stérilisation forcée (Article 174 l)

411 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Trafic.


412 Convention pour la répression de la traite des êtres humains et de l'exploitation de la prostitution d'autrui.
Convention prohibant l’esclavage du 25-09-1926, amendée le 7-12-1953.
413 DOUCET, J.P., op. cit ., v° trafic.
414 Article 7, 2, f du Traité de Rome du 17 juillet 1998 portant Statut de la Cour pénale internationale, in les codes Larcier de

la RDC, T. 2, Droit pénal, éd. Larcier et Afrique éditions, Bruxelles et Kinshasa, 2003, p. 63.
178
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

La loi punit quiconque aura commis sur une personne un acte à la priver de la capacité
biologique et organique de reproduction sans qu’un tel acte ait préalablement fait l’objet
d’une décision médicale justifiée et d’un libre consentement de la victime.

§13 : De la pornographie mettant en scène des enfants (Article 174 m)

La pornographie : La pornographie est la représentation, par écrits, dessins, peintures ou


photos, de choses obscènes destinées à être communiquées ou vendues au public415.
La pornographie mettant en scène des enfants consiste à faire toute représentation par
quelque moyen que ce soit, d’un enfant s’adonnant à des activités sexuelles explicites,
réelles ou simulées, ou toute représentation des organes sexuels d’un enfant, à des fins
principalement sexuelles.
Elle est différente de la pédophilie et du tourisme sexuel.
La pédophilie se caractérise par une attirance sexuelle ressentie par des adultes envers des
enfants ; elle se concrétise par l’accomplissement d’attentats à la pudeur, voire de viols sur
ceux-ci. Emportant des troubles psychiques graves et durables chez les victimes, de tels actes
doivent être très sévèrement réprimés.
Le "tourisme sexuel", consistant pour de tels individus à se rendre dans un pays étranger pour
y assouvir leurs bas instincts sur des enfants de familles vivant dans une grande pauvreté.

§14 : De la prostitution d’enfants (Article 174 n)


La loi réprime celui qui aura utilisé un enfant de moins de 18 ans aux fins des activités
sexuelles contre rémunération ou toute autre forme d’avantage.
Si l’infraction a été commise par une personne exerçant l’autorité parentale ou tutélaire, le
coupable sera en outre déchu de l’exercice de l’autorité parentale ou tutélaire conformément
à l’article 319 du Code de la famille.

SECTION IV. DES OUTRAGES PUBLICS AUX BONNES MŒURS


Les bonnes mœurs : Les mœurs sont les habitudes de vie d’une personne, ou d’un ensemble
des personnes. Elles sont considérées comme bonnes ou mauvaises selon qu’elles sont
conformes ou contraires aux règles de la morale, et plus particulièrement de la morale
sexuelle416.
Les bonnes mœurs sont utiles à la tranquillité publique417.
DOUCET affirme que la science criminelle n’est pas parvenue à définir cette délicate notion,
qui évolue dans le temps. Elle en abandonne l’appréciation, d’abord au législateur, mais
surtout aux juges du fond (qui doivent se tourner vers le sentiment général, plutôt que vers les
opinions extrêmes). Ainsi, certaines œuvres littéraires ou artistiques peuvent choquer à
certaines périodes de l’histoire et plaire à d’autres : poursuivi pour atteinte aux bonnes mœurs
après la publication de « Madame Borary », Flaubert fut acquitté de justesse le 7 février

415 GRAND ROBERT, v° Pornographie.


416 DOUCET, J.P., op. cit ., v° Bonnes mœurs
417 Alexis de TOCQUEVILLE, La démocratie en Amérique, cité par DOUCET, J.P., op. cit ., V° Bonnes moeurs.
179
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

1857 ; il en fut de même pour D.H. Lawrence, en 1960, avec « L’amant de Lady
Chatterley 418».
La définition de la notion de bonnes mœurs est laissée à l'appréciation des magistrats419.

1. Outrages publics aux bonnes mœurs (Art. 175)


L'expression outrage aux mœurs vise des faits qui sont de nature à scandaliser ceux qui en
sont témoins, à porter atteinte, d'une façon générale à la pudeur publique420.
Selon André VITU, la loi française veut frapper tout ce qui favorise la propagation de
l'immoralité ... Il ne s'agit pas seulement de réprimer les "publications obscènes", c'est-à-dire
les écrits immoraux, mais plus largement toute propagande en faveur de l'immoralité421.
En droit pénal congolais les outrages publics aux bonnes mœurs consistent dans le fait:
- d’exposer, de vendre ou de distribuer des chansons, pamphlets ou autres écrits,
imprimés ou non, des figures, images, emblèmes ou autres objets contraires aux
bonnes mœurs ;
- en vue du commerce ou de la distribution, de détenir, d’importer ou de faire importer,
de transporter ou faire transporter, de remettre à un agent de transport ou de
distribution, d’annoncer par un moyen quelconque de publicité des chansons,
pamphlets, écrits, figures, images, emblèmes ou objets contraires aux bonnes mœurs ;
- de chanter, de lire, de réciter, de faire entendre ou de proférer des obscénités dans des
réunions ou lieux publics devant plusieurs personnes et de manière à être entendu de
ces personnes.
Un acte ou un objet est obscène, soit lorsqu’il blesse la pudeur individuelle, soit lorsqu’il
offense les bonnes mœurs sociales422.

2. Outrage public à la pudeur (Art. 176)


Constitue un outrage public à la pudeur tout acte contraire aux bonnes mœurs qui, quand il est
commis soit dans un lieu public soit dans un lieu ouvert aux regards du public, est de nature à
causer un scandale, par exemple à provoquer un attroupement423..
Paraphrasant DOUCET, nous pouvons dire que l'outrage public à la pudeur diffère
fondamentalement de l’infraction d’attentat à la pudeur. Alors que le second vise à protéger
l'honneur et la liberté d'une personne précise, le premier tend à assurer l'ordre social contre les
agissements de nature sexuelle susceptibles de troubler la paix publique et de pervertir les
mineurs424.
Il peut s’agir :

418 DOUCET, J.P., loc. cit.


419 Cass.crim. 6 mai 1986, Gaz.Pal. 1987 I somm. 100.
420 CONSTANT, loc. cit.
421 A.VITU, loc. cit.
422 DOUCET, J.P., op. cit ., V° obscène.
423 Id., V° Outrage public à la pudeur.
424 Ibid.
180
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

« d’une attitude ou un geste impudique commis en public au but d’offenser la pudeur


d’autrui »425.
L'outrage public à la pudeur est essentiellement constitué par des faits ou gestes de nature
à insulter la pudeur publique ou privée426.
Le délit d’exhibition sexuelle imposée à la vue d’autrui dans un lieu accessible aux
regards du public est caractérisé, une partie des faits se serait-elle déroulée dans des
lieux privés, dès lors que tous les actes reprochés ont été imposés, par surprise, à des
témoins involontaires427.
Le code pénal congolais punit
« Quiconque aura publiquement outragé les mœurs par des actions qui blessent la
pudeur ».
N.B : Ne sont pas punissables les faits prévus par les deux articles précédents si, à raison des
circonstances dans lesquelles ils ont été commis, ils ne peuvent avoir pour effet de
corrompre les mœurs428.

3. Propagande anticonceptionnelle et propagande antinataliste (Art. 178)

Propagande : Au regard du droit pénal, la propagande est une forme de publicité présentant
sous un jour favorable un acte qui, bien que condamné par la morale et nuisible pour la
société, est soutenu par certains idéologues. On parle notamment ainsi, pour la condamner, de
propagande en faveur de l’avortement ou en faveur du suicide ; il en irait de même pour une
littérature politique invitant au crime429.
Propagande antinataliste : La loi punit :
- quiconque aura, soit par l’exposition, la vente ou la distribution d’écrits, imprimés ou
non, soit par tout autre moyen de publicité, préconisé l’emploi de moyens quelconques
de faire avorter une femme, aura fourni les indications sur la manière de se les
procurer ou de s’en servir ou aura fait connaître, dans le but de les recommander, les
personnes qui les appliquent;
- quiconque aura exposé, vendu, distribué, fabriqué ou fait fabriquer, fait importer, fait
transporter, remis à un agent de transport ou de distribution, annoncé par un moyen
quelconque de publicité, les drogues ou engins spécialement destinés à faire avorter
une femme ou annoncés comme tels.
Propagande anticonceptionnelle : La loi réprime :
- quiconque aura exposé ou distribué des objets spécialement destinés à empêcher la
conception et aura fait de la réclame pour en favoriser la vente;
- quiconque aura, dans un but de lucre, favorisé les passions d’autrui en exposant,
vendant ou distribuant des écrits imprimés ou non qui divulguent des moyens
d’empêcher la conception, et en préconisant l’emploi ou en fournissant des indications
sur la manière de se les procurer ou de s’en servir;

425 LIKULIA BOLONGO, op. cit, p. 345.


426 LEGRAND DU SAULLE, Traité de médecine légale, cité par DOUCET, J.P., op. cit ., V° outrage public à la pudeur.
427 Cass.crim. 12 mai 2004, Bull.crim. n° 119 p.462.
428 Art. 177 du CP congolais.
429 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Propagande.
181
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

- quiconque aura, en vue du commerce ou de la distribution, fabriqué, fait fabriquer, fait


importer, fait transporter, remis à un agent de transport ou de distribution ou annoncé
par un moyen quelconque de publicité les écrits visés dans l’alinéa précédent.

TITRE VII. DES ATTEINTES AUX DROITS GARANTIS AUX


PARTICULIERS
Chapitre unique. NOMENCLATURE ET DEFINITION

Le pouvoir : Le pouvoir consiste en une relation d’autorité, de droit ou de fait, qui permet à
une personne d’adresser des injonctions à une ou plusieurs autres personnes.
L’aspiration au pouvoir, et l’exercice du pouvoir, agissent sur certains hommes comme une
drogue. C’est pourquoi, d’aucuns sont prêts à toutes les ignominies, comme à tous les crimes,
pour y parvenir. C’est aussi sans doute pourquoi ceux qui détiennent le pouvoir ont tendance à
surestimer leurs compétences et à s’imaginer affranchis des règles applicables au commun des
mortels430.
Le pouvoir relève toujours de quelque manière d’une relation d’autorité, de dépendance,
de subordination… Seule une compréhension fonctionnelle du pouvoir, susceptible de
contenir une éthique du service, peut s’accorder à la reconnaissance de droits naturels431.
L’abus de pouvoir : Celui qui use du pouvoir dont il dispose, non dans la recherche du bien
commun ou de l’intérêt général, mais dans l’intérêt de lui-même ou de ses mandataires,
commet une faute au regard de la morale. Cette faute constitue au demeurant, tantôt un délit
pénal, tantôt un mode d’imputation de l’infraction432.

SECTION I. DES ATTEINTES A LA LIBERTE DES CULTES


1. Les atteintes à la liberté des cultes ou de conscience (Art. 179) : Le droit comparé et
l’histoire du droit offrent un éventail de texte qui va de l’interdiction de toute religion,
considérée comme une aliénation de l’individu, à une liberté totale, sous réserve d’absence de
troubles à l’ordre public, en passant par le régime de la religion officielle et par celui des
religions reconnues433.
L’article 22 de la constitution de la RD CONGO dispose :
« Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion.
Toute personne a le droit de manifester sa religion ou ses convictions, seule ou en
groupe tant en public qu’en privé, par le culte, l’enseignement, les pratiques,
l’accomplissement des rites et l’état de vie religieuse, sous réserve du respect de la loi,
de l’ordre public, des bonnes mœurs et des droits d’autrui.

430 Id. V° Pouvoir.


431 HÖFFE, Dictionnaire d’éthique, v° Pouvoir.
432 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Abus de pouvoir.
433 Id. v° Culte.
182
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

La loi fixe les modalités d’exercice de ces libertés. 434»


La violation de cette liberté affirmée par la constitution donne lieu à l’infraction d’atteintes à
la liberté des cultes et de conscience.
S’en rendent coupables toutes personnes qui, par des violences, outrages ou menaces, par des
troubles ou des désordres, auront porté atteinte soit à la liberté des cultes ou à leur libre
exercice public, soit à la liberté de conscience435.
Par culte, il faut entendre
« un hommage rendu à Dieu, par une réunion de fidèles, suivant le rite prescrit par leur
religion436 ».
Ainsi en sera-t-il des cultes catholique, kimbanguiste et autres cultes chrétiens, musulman,
judaïque, …
Dans le même contexte, un hommage rendu à un autre être que Dieu, relève de la liberté de
conscience.
La loi punit toutes personnes qui, par des violences, outrages ou menaces, par des troubles ou
des désordres, auront porté atteinte à la liberté des cultes ou à leur libre exercice public, et à la
liberté de conscience.

SECTION II. DES ATTEINTES PORTEES PAR DES


FONCTIONNAIRES PUBLICS AUX DROITS GARANTIS AUX
PARTICULIERS
Au sens strict : « Un fonctionnaire est une personne titulaire d’un emploi public ou occupant
un poste permanent dans un organisme public. Participant peu ou prou à l’exercice de la
puissance publique, il bénéficie de garanties et de privilèges ; en contrepartie il devrait être
soumis à une discipline particulièrement rigoureuse. L'incompétence et l'irresponsabilité des
fonctionnaires entraîne le déclin de l'état »437.
Deux conditions sont nécessaires et suffisantes pour qu’un individu soit tenu pour
fonctionnaire. 1° Il faut qu’il occupe un emploi institué pour assurer la marche d’un
service public proprement dit. 2° Il faut que cet emploi soit permanent ou ait tout au
moins une certaine permanence438.
Un dépositaire ou agent de l’autorité publique est une personne qui, sans avoir la qualité de
fonctionnaire, n’en exerce pas moins une fonction publique dans l’intérêt général. Tel est le
cas d’un conseiller municipal439.
Aujourd’hui le terme fonctionnaire utilisé par la loi doit être compris dans le sens d’agent
public. L’Agent public est tout fonctionnaire ou tout employé de l’Etat ou de ses institutions,

434 Constitution de la RDC, in JORDC, n° spécial, 47e année, Kinshasa, 18/2/2006.


435 Article 179 du CP congolais.
436 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Culte.
437 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Fonctionnaire.
438 ROLLAND, Droit administratif, cité par DOUCET, J.P., loc. cit .
439 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Fonctionnaire.
183
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

y compris ceux qui ont été sélectionnés, nommés ou élus pour entreprendre des activités ou
exercer des fonctions au nom ou au service de l’Etat, à tout niveau de sa hiérarchie440.

6. Les atteintes portées par des fonctionnaires publics aux droits garantis aux
particuliers (Art. 180)
Tout acte arbitraire et attentatoire aux libertés et aux droits garantis aux particuliers par les
lois, décrets, ordonnances et arrêtés, ordonné ou exécuté par un fonctionnaire ou officier
public, par un dépositaire ou agent de l’autorité ou de la force publique, sera puni d’une
servitude pénale de quinze jours à un an et d’une amende de deux cents à mille francs ou
d’une de ces peines seulement.
S’il est constitutif d’une infraction punie de peines plus fortes, son auteur sera condamné à ces
peines.

440 Article 147 du CP congolais.


184
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Titre VIII. DES ATTEINTES À LA SÛRETÉ DE L’ÉTAT


Chapitre unique. NOMENCLATURE ET DEFINITION

La sûreté de l’Etat : Pendant des siècles les États (c’est-à-dire l’ensemble des organes
officiels qui structurent une Nation) ont eu à faire face à deux types de conflits : d’une part
des offensives menées de l’extérieur par des étrangers ; d’autre part des insurrections
perpétrées de l’intérieurs par des nationaux,. C’est pourquoi on a longtemps parlé de Sûreté
extérieure de l’État et de Sûreté intérieure de l’État.
Mais la distinction est trop schématique : des menées subversives sont parfois l’œuvre de
nationaux stipendiés par l’étranger ; elle n’a même plus de sens depuis que le recours à la
guerre subversive a été hissé au rang de principe par Lénine et Trotski. C’est pourquoi notre
nouveau Code pénal l’a abandonnée et parle de protection des intérêts fondamentaux de la
Nation441.
« Jusqu’en 1960 on avait de la protection de la sûreté de l’État une vue limitée presque
uniquement à ses aspects politiques, diplomatiques et militaires ; la mention des intérêts
économiques de la France n’apparaissait que d’une façon tout à fait secondaire
Or l’indépendance, la puissance et la grandeur de l’État peuvent être attaquées sur
d’autres points que politiques, ou militaires. De véritables offensives sont menées sur le
plan économique, commercial, industriel, scientifique ou financier, notamment par la voie
de l’espionnage industriel et économique… En outre, on tente de désorganiser l’économie
d’un pays adverse et de le rendre impuissant à tenir un rythme de concurrence suffisant,
en suscitant chez lui des grèves longues et coûteuses, des troubles politiques répétés, qui
sont de nature à dissuader les États ou les industriels étrangers à lui attribuer la
préférence dans l’attribution de marchés importants… Il est apparu au législateur qu’il ne
pouvait pas ignorer l’importance de ces données nouvelles442. »

SECTION I. DES ATTEINTES A LA SURETE EXTERIEURE DE L’ÉTAT


§ 1er. De la trahison et l’espionnage
1. Trahison : En droit pénal le crime de trahison consiste, pour un national, à prendre le
parti d’une puissance étrangère ; et ce par un acte portant atteinte aux intérêts fondamentaux
de la Nation. Commis par un étranger, de tels agissements relèvent du délit d’Espionnage443.
« Sous le nom de proditio (trahison), notion qui occupe le premier rang parmi les crimes
d’État, on comprend principalement la livraison à l’ennemi d’une place romaine, d’un
territoire romain, d’une troupe romaine, ou même d’un seul citoyen. L’entente avec
l’ennemi est un crime d’État, qu’elle se manifeste par la fourniture de subsides de guerre,
par des renseignements ou par des conseils.444 »
Le code pénal congolais réprime au titre de trahison les actes ci-après :

441 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Sûreté de l’Etat.


442 A.VITU, Commentaire du Juris-classeur,
443 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Trahison.
444 MOMMSEN, Droit pénal romain, cité par DOUCET, J.P., op. cit ., V° Trahison.
185
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

a. Port d’armes contre le Congo (Art. 181) ;


b. Intelligences avec l’ennemi pour déclencher ou faciliter ses hostilités contre le Congo
(Art. 182. 1o ) ;
c. Livraison à une puissance étrangère des troupes, territoires ou matériels congolais
(Art. 182. 2o ) : des ouvrages de défense, postes, ports, magasins, matériels, munitions,
vaisseaux, bâtiments ou appareils de navigation aérienne appartenant au Congo;
d. Destruction ou sabotage des matériels servant à la défense nationale (Art. 182. 3o ) ;
e. Provocation des militaires à passer au service d’une puissance étrangère (Art. 183.
1o) ;
f. Intelligences avec l’ennemi en temps de guerre en vue de favoriser ses entreprises
contre le Congo (Art. 183. 2o) ;
g. Participation à une entreprise de démoralisation de l’armée ou de la nation (Art. 183.
3o) ;
h. Livraison à une puissance étrangère, ou destruction, d’un secret de la défense
nationale (Art. 184).

2. Espionnage (Art. 185)

L’espionnage consiste à rechercher dans un pays, puis à livrer à un État étranger, des
renseignements de nature à porter atteinte aux intérêts fondamentaux de ce pays445.
L’espionnage peut être défini comme l’acte par lequel un individu se procure ou
cherche à se procurer clandestinement et par fraude, des renseignements confidentiels
sur la situation militaire, politique ou économique d’un État afin de les communiquer,
soit gratuitement, soit à prix d’argent, à un État étranger446.

3. Offre, proposition ou acceptation de trahison ou d’espionnage (Art. 186)

§ 2. Des autres atteintes à la sûreté extérieure de l’État (Art. 187 à Art. 192)
1. Appréhension, destruction ou divulgation d’un secret intéressant la défense nationale, sans
intention de trahison ou d’espionnage
2. Divulgation d’information militaire
3. Infiltration dans un établissement affecté à la défense nationale
4. Organisation occulte d’un moyen de correspondance ou de transmission à distance
5. Actes hostiles non approuvés par le gouvernement, exposant le Congo à des hostilités
6. Intelligences nuisible à l’armée ou à la diplomatie du Congo avec les agents d’une puissance
étrangère
7. Collaboration avec les sujets ou les agents d’une puissance ennemie en temps de guerre ;
8. Actes de commerce prohibés avec les sujets ou les agents d’une puissance ennemie en
temps de guerre

445 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Espionnage.


446 HUGUENEY, Traité de droit pénal militaire, cité par DOUCET, J.P., op. cit ., V° espionnage.
186
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

SECTION II. DES ATTEINTES A LA SURETE INTERIEURE DE


L’ÉTAT
§ 1er. Des attentats et complots contre le chef de l’État

Le chef de l’Etat
Par l’effet de la Constitution en vigueur, le chef d’un l’État incarne peu ou prou la Nation à la
tête de laquelle il se trouve. Sans doute les textes pénaux le concernant diffèrent-ils beaucoup
en droit comparé. Mais deux questions se posent toujours : comment doit-il être protégé par la
loi pénale ? Doit-il répondre en justice de toute infraction qu’il peut commettre ? Qu'il soit
Empereur, Roi ou Président de la République, le chef de l'État a pour principal devoir de se
consacrer pleinement au Bien commun. Toute agression contre la personne du Chef de l’État
s’analyse en un délit complexe, puisqu’elle cause tout à la fois un dommage individuel et un
dommage public. Aussi est-elle ordinairement punie de la manière la plus rigoureuse447.

1. L’attentat contre la vie ou contre la personne du chef de l’État (Art. 193)


L’attentat constitue le type même du Délit formel, caractérisé sans qu’il soit besoin de
constater une atteinte, de déplorer un résultat effectif. Dans l’Iter criminis, il se situe au
niveau du Commencement d’exécution ou, mieux, lors de l'accomplissement du dernier acte
dépendant de l’agent. Ainsi, l’attentat à l’explosif est ordinairement tenu pour constitué dès
l’instant où l’engin est mis à feu : peu importe que le mécanisme fonctionne mal, et qu’il n’y
ait ni victime ni dégâts448.
Dans son acception stricte, l’attentat est une tentative érigée en consommation, c’est-à-
dire qu’il incrimine comme consommés des actes de tentative… supposant que le but
poursuivi par l’auteur de l’attentat a été effectivement atteint449.
Au sens large : Le mot «attentat» définit toute entreprise violente et criminelle dirigée
contre les personnes ou les biens450.

2. Le complot contre la vie ou contre la personne du chef de l’État ( Art. 194)


Le complot consiste dans le fait, pour plusieurs personnes, de se concerter dans le but de
commettre un crime particulièrement grave. Il s’agit d’un délit de Résolution criminelle, qui
se situe dans la phase antérieure au commencement d’exécution ; donc d’un délit distinct de
l’Attentat, lequel ne s'ouvre qu'avec le Commencement d’exécution.
Le législateur incrimine le complot pour assurer la protection des intérêts juridiques les plus
sensibles ; là où l'attentat constituerait déjà une atteinte grave et peut-être irréversible à l'ordre
public. Il en est notamment ainsi dans le cas des menaces pesant sur la Constitution ou sur la

447 DOUCET, J.P., op. cit ., Chef de l’Etat .


448 Id., V° Attentat.
Il convient de recourir à la technique de l’attentat dans deux cas. D’une part pour définir un crime ou un délit perpétré par un
moyen dangereux dont les suites échappent au contrôle de l’auteur principal (empoisonnement ou destruction par incendie).
D’autre part lorsque l’atteinte à l’intérêt protégé peut difficilement être constatée, car touchant au for interne de la victime
(attentat à la pudeur ou violation de domicile).
449 PROTHAIS, Tentative et attentat, cité par DOUCET, J.P., op. cit ., V° Attentat.
450 Cass. 1re civ., 27 octobre 1981, Gaz.Pal. 1982 I panor cass 110.
187
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Sûreté extérieure de la Nation. Cette incrimination ne reposant sur aucun acte matériel,
constitue une exception au principe de Matérialité* et à la règle de la saisine in rem 451.
Le complot n'est pas une simple résolution, mais une "résolution d'agir concertée et
arrêtée entre plusieurs personnes", fait externe que le pouvoir social peut et doit punir452.
Le complot est ainsi défini par l’art. 110 C.pén. : « Il y a complot dès que la résolution a
été arrêtée entre plusieurs personnes ». Pour qu’il y ait complot il faut donc quatre
éléments : Une résolution d’agir, arrêtée, entre deux ou plusieurs personnes, dans le but
de commettre l’un des crimes expressément prévus par la loi453.
Le complot contre la sûreté de l'État non suivi d'actes préparatoires n'est encore qu'un fait
incertain et la loi ne peut indiquer les circonstances qui doivent l'accompagner pour que
la résolution criminelle des accusés soit évidente. Mais le législateur doit laisser à la
sagesse d'un jury indépendant et consciencieux l'appréciation de ces circonstances454.
§ 2. Des attentats, complots et autres infractions contre l’autorité de l’État et l’intégrité du
territoire
L'attentat dirigé contre le régime constitutionnel est caractérisé par un acte qui tend à
remettre en cause, en dehors des formes légales, l'organisation des pouvoirs publics de l'état.
On parle ici de crime de lèse-Majesté, de crime de lèse-Révolution, de crime de lèse-Parti
..455.
Il n’y a d’attentat consommé que si un ou plusieurs actes de violence ont été commis ; en
leur absence il ne saurait y avoir, tout au plus, qu’un complot, ou peut-être le
commencement d’exécution d’un attentat456.
La loi réprime :
1. Attentats contre l’autorité de l’État et l’intégrité du territoire (Art. 195) : détruire ou
changer le régime constitutionnel, exciter les citoyens ou habitants à s’armer contre
l’autorité de l’État ou à s’armer les uns contre les autres, porter atteinte à l’intégrité du
territoire national ;

2. Complots contre l’autorité de l’État et l’intégrité du territoire (Art. 196) ;

3. Atteintes à l’intégrité du territoire national (Art. 197) : entreprendre, par quelque moyen
que ce soit, de porter atteinte à l’intégrité du territoire national ;

4. Création illégale de troupes armées (Art. 198) : lever ou faire lever des troupes armées,
engager ou enrôler, faire engager ou enrôler des soldats, ou leur fournir des armes ou
munitions, sans ordre ni autorisation du gouvernement ;

5. Prise illégitime d’un commandement militaire (Art. 199) :

 Prendre un commandement militaire quelconque ;

451 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Complot.


452 GARRAUD, loc. cit.
453 Novelles de droit pénal belge, T.II n°77.
454 NYPELS, Législation criminelle de la Belgique, cité par DOUCET, J.P., op. cit ., V° complot.
455 DOUCET, J.P., op. cit ., V° attentat.
456 A.VITU, Juris-classeur pénal, art. 412-1 et s.
188
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

 retenir un tel commandement contre l’ordre du gouvernement ;


 les commandants qui tiennent leur armée ou troupe rassemblées, après que le
licenciement ou la séparation aient été ordonnés ;

6. Faux bruits (Art. 199bis et 199ter)


Sous l’infraction de faux bruit, le législateur réprime deux comportements :
- le fait de porter ou de chercher à porter le trouble dans l’État en répandant sciemment de
faux bruits de nature à alarmer les populations, à les inquiéter ou les exciter contre les
pouvoirs établis (Art. 199bis ) et
- le fait, sans intention de porter le trouble dans l’État, de répandre sciemment de faux bruits
de nature à alarmer les populations, à les inquiéter ou à les exciter contre les pouvoirs établis
(Art. 199bis et 199ter).
Il en découle que le meilleur concept aurait été : « fausse nouvelle ».
Les deux aspects de cette infraction diffèrent au niveau du mobile poursuivi.
« L’expression d’une opinion, ou la prédiction d’un fait futur ne sauraient entrer dans les
prévisions de la loi457. »
« Telle fausse nouvelle lancée ou répandue de mauvaise foi sert à dépouiller des légions
de vendeurs ou d’acheteurs458. »
« Une fausse nouvelle habilement répandue ... par l'indiscrétion calculée et la connivence
d'une personne haut placée, suffit à faire, en quelques instants, la fortune ou la ruine d'un
grand nombre. Entre les fripons d'un côté, et de l'autre la multitude des dupes, un jeu se
joue où les chances ne sont pas égales, et où les mensonges par simple réticence peuvent
être aussi nuisibles que les mensonges formels en parole ou par écrit459. »
« Dès lors que la diffusion d'une fausse nouvelle est de nature à troubler la paix publique, ou
plus spécialement à fausser le libre jeu des élections, elle est légitimement incriminée par de
nombreux législateurs460. »
Il a été jugé en France que :
« Le délit de fausse nouvelle exige la réunion de quatre éléments : la publicité, le
caractère faux de la nouvelle, la possibilité de trouble de la paix publique et l’intention
coupable ; la nouvelle est l’annonce d’un événement arrivé récemment faite à quelqu’un
qui n’en a pas encore connaissance »461.

457 GOYET, loc. cit.


458 JOLY, loc. cit.
459 BOUILLIER, Questions de morale, cité par DOUCET, J.P., op. cit ., V° Fausses nouvelles.
460 DOUCET, J.P., loc. cit .
461 Trib.corr. Toulouse 27 juin 2002, D. 2002 J 2972.
189
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

§ 3 .Des attentats et complots tendant à porter le massacre, la dévastation


ou le pillage

Le massacre : On parle de massacre à propos d'homicides intentionnels commis, de


manière systématique, sur un nombre important de personnes ne pouvant se défendre
efficacement462.
« Tuer est le terme générique qui indique simplement le fait de frapper à mort ...
Massacrer, c'est tuer en frappant avec acharnement, particulièrement en parlant d'une
masse de gens qui ne se défendent pas.463 »

Le pillage : Le pillage consiste en des actes de violence, de déprédation et de vol commis,


ordinairement dans une ville, en conséquence d’un conflit armé, en marge d'un mouvement
populaire ou à la suite d’une catastrophe naturelle464.
Le pillage consiste à s’approprier le bien d’autrui par la force ouverte, par des offenses
graves et directes à la personne du possesseur465.
Le pillage désigne une dévastation commise pour s’emparer des choses dévastées466.

La loi réprime :
1. Les attentats tendant à porter le massacre, la dévastation ou le pillage (Art. 200) et
2. Les complots tendant à porter le massacre, la dévastation ou le pillage (Art. 201).

§ 4. De la participation à des bandes armées (Art. 202)

Une bande armée est d’abord une bande organisée, c.-à-d., un groupement formé ou un
entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d’une
ou plusieurs infractions. La particularité de la bande armée est que ses participants
bénéficient des armes à feu pour commettre leurs forfaits.

L’infraction de participation à des bandes armées consiste dans l’un des faits suivants :
- Se mettre à la tête de bandes armées ;
- y exercer une fonction quelconque ;
- y exercer un commandement quelconque ;
- en faire partie ;

Ladite bande doit être formée en vue de troubler l’État par l’un des attentats prévus aux
articles 195 et 200, ou par l’envahissement, le pillage ou le partage des propriétés publiques
ou privées, ou encore en faisant attaque ou résistance envers la force publique agissant contre
les auteurs de ces infractions.

462 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Massacre.


463 Larousse des synonymes, v° Massacre.
464 Id., v° Pillage.
465 PRUNER, Théologie morale, cité par DOUCET, J.P., op. cit ., V°pillage.
466 A.VITU, loc. cit.
190
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

§ 5. De la participation à un mouvement insurrectionnel (Art. 206-208)

L’insurrection (insurgé) : L’insurrection consiste en une manifestation de violence


collective, qui émane d’un groupe important d’individus, et qui vise à renverser la forme du
gouvernement467.
Insurrection implique le refus de reconnaître comme légitime l'autorité à laquelle on était
jusqu'alors soumis et contre laquelle on se lève et s'arme468.
Il ne suffit pas qu’il y ait des réunions, des manifestations, voire des attroupements armés,
ou des rébellions contre l’autorité publique : il faut que se produise un véritable
soulèvement plus ou moins généralisé contre l’autorité gouvernementale, une subversion
entraînant une partie importante de la population469.
Le droit d’insurrection n’existe en aucun cas, sous prétexte de violation de la Constitution
de la part du pouvoir législatif470.
Sous la qualification de participation à un mouvement insurrectionnel, la loi réprime les
individus qui, dans un mouvement insurrectionnel:
1o auront fait ou aidé à faire des barricades, des retranchements, ou tous autres travaux ayant
pour objet d’entraver ou d’arrêter l’exercice de la force publique;
2o auront empêché, à l’aide de violences ou de menaces, la convocation ou la réunion de la
force publique, ou qui auront provoqué ou facilité le rassemblement des insurgés, soit par la
distribution d’ordres ou de proclamations, soit par le port de drapeaux ou autres signes de
ralliement, soit par tout autre moyen d’appel;
3o auront, pour faire attaque ou résistance envers la force publique, envahi ou occupé des
édifices, postes et autres établissements publics, des maisons habitées ou non habitées ;
4o Le propriétaire ou le locataire qui, connaissant le but des insurgés, leur aura procuré sans
contrainte l’entrée desdites maisons471 ;
5o se seront emparés d’armes, munitions ou matériels de toutes espèces, soit à l’aide de
violences ou de menaces, soit par le pillage de boutiques ou d’établissements publics, soit par
le désarmement des agents de la force publique;
6° auront porté des armes apparentes ou cachées, ou des munitions;
7° auront fait usage de leurs armes472 et
8° ceux qui auront dirigé ou organisé un mouvement insurrectionnel473.

467 DOUCET, J.P., op. cit ., V° Insurrection.


468 Larousse des synonymes, v° Insurrection.
469 A.VITU, Commentaire du Juris-classeur.
470 Haute cour de justice 10 novembre 1849, S. 1849 II 722.
471 Art. 206.
472 Art. 207.
473 Art. 208.
191
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

§ 6. Des autres atteintes à la sûreté intérieure de l’État


1. Distribution des tracts d’inspiration étrangère de nature à nuire à l’intérêt national (Art.
209)
La loi punit :
- celui qui, dans un but de propagande, aura distribué, mis en circulation ou exposé aux
regards du public, des tracts, bulletins ou papillons d’origine ou d’inspiration étrangère de
nature à nuire à l’intérêt national et
- celui qui aura détenu de tels tracts, bulletins ou papillons en vue de la distribution, de la
circulation ou de l’exposition dans un but de propagande.

2. des subsides d’origine étrangère (Art. 210)


La loi punit quiconque recevra, d’une personne ou d’une organisation étrangère, directement
ou indirectement, sous quelque forme et à quelque titre que ce soit, des dons, présents, prêts
ou autres avantages, destinés ou employés en tout ou partie à mener ou à rémunérer au Congo
une activité ou une propagande de nature à porter atteinte à l’intégrité, à la souveraineté ou à
l’indépendance du Congo, ou à ébranler la fidélité que les citoyens doivent à l’État et aux
institutions du peuple congolais.

3. Diffusion des fausses nouvelles ou de nouvelles de nature à troubler la paix publique


(Art. 211) la loi punit:

– celui qui, en vue de troubler la paix publique, aura sciemment contribué à la


publication, à la diffusion ou à la reproduction, par quelque moyen que ce soit, de
nouvelles fausses ou de pièces fabriquées, falsifiées ou mensongèrement attribuées à
des tiers;
– celui qui aura exposé ou fait exposer, dans les lieux publics ou ouverts au public, des
dessins, affiches, gravures, peintures, photographies, tous objets ou images de nature
à troubler la paix publique.
N.B : § 7. Définitions
 L’attentat existe dès qu’il y a tentative punissable474.
 Il y a complot dès que la résolution d’agir a été arrêtée entre deux ou plusieurs
personnes475.
 Sont compris dans le mot «armes», toutes machines, tous instruments, ustensiles ou
autres objets tranchants, perçants ou contondants dont on se sera saisi pour tuer,
blesser ou frapper, même si on n’en a pas fait usage476.

SECTION III. DISPOSITIONS COMMUNES AUX DEUX SECTIONS


PRECEDENTES

1. Non - dénonciation des atteintes à la sûreté de l’Etat (Art. 215)


La loi punit celui qui, ayant connaissance de projets ou d’actes de trahison, d’espionnage ou
d’autres activités de nature à nuire à la défense nationale, d’attentats ou de complots contre la

474 Art. 212.


475 Art. 213.
476 Art. 214.
192
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

sûreté intérieure de l’État, n’en fera pas la déclaration aux autorités militaires, administratives
ou judiciaires, dès le moment où il les aura connus.
N.B : Outre les personnes désignées à l’article 22, sera puni comme complice quiconque,
autre que l’auteur ou le complice:
1o fournira sans contrainte et en connaissance de leurs intentions, subsides, moyens
d’existence, logement, lieu de retraite ou de réunion aux auteurs d’infractions contre
la sûreté de l’État;
2o portera sciemment la correspondance des auteurs de telles infractions, ou leur
facilitera sciemment de quelque manière que ce soit, la recherche, le recel, le
transport ou la transmission de l’objet de l’infraction477.

2. Recel : Extension du nombre des cas (Art. 217)


Outre les personnes désignées à l’article 101, sera puni comme receleur quiconque, autre que
l’auteur ou le complice:
1o recèlera sciemment les objets ou instruments ayant servi ou devant servir à commettre
l’infraction ou les objets, matériels ou documents obtenus par l’infraction;
2o détruira, soustraira, recèlera, dissimulera ou altérera sciemment un document, public ou
privé de nature à faciliter la recherche de l’infraction, la découverte des preuves ou le
châtiment de ses auteurs.
Dans les cas prévus au présent article, le tribunal pourra exempter de la peine encourue les
parents ou alliés du coupable jusqu’au quatrième degré inclusivement.

NB :
1. Excuses légales. Sera exempté de la peine encourue celui qui, avant toute exécution ou
tentative d’une infraction contre la sûreté de l’État, en donnera le premier connaissance aux
autorités administratives ou judiciaires.
L’exemption de la peine sera seulement facultative si la dénonciation intervient après la
consommation ou la tentative de l’infraction, mais avant l’ouverture des poursuites.
L’exemption de la peine sera également facultative à l’égard du coupable qui, après
l’ouverture des poursuites, procurera l’arrestation des auteurs et complices de la même
infraction, ou d’autres infractions de même nature ou de même gravité478.
2. La confiscation de l’objet de l’infraction et des objets ayant servi à la commettre sera
toujours prononcée. La rétribution reçue par le coupable, ou le montant de sa valeur lorsque la
rétribution n’a pu être saisie, seront déclarés acquis au Trésor479.
3. l’interdiction du droit de vote et du droit d’éligibilité. Tout coupable de trahison,
d’attentat ou de complot contre la sûreté intérieure de l’État pourra être frappé, pour cinq ans
au moins et dix ans au plus, de l’interdiction du droit de vote et du droit d’éligibilité480.

477 Art. 216


478 Art. 218.
479 Art. 219.
193
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Deuxième partie
NOMENCLATURE, CLASSIFICATION ET DEFINITION DES
INFRACTIONS PREVUES PAR LES LOIS DE DROIT PENAL
PARTICULIER

Titre Ier. LES CRIMES CONTRE LA PAIX ET LA SECURITE


DE L’HUMANITE481

Les crimes les plus graves qui touchent l’ensemble de la communauté internationale sont les
crimes qui heurtent profondément la conscience humaine. Ils sont inscrits dans le noyau dur
de la criminalité et sont considérés par d’aucuns comme des atteintes graves à l’humanité.
Ceux de la compétence de la Cour Pénale Internationale sont ceux que nous examinons dans
les lignes qui suivent.

SECTION I. CRIME DE GENOCIDE482


On entend par crime de génocide l’un quelconque des actes ci-après commis dans l’intention
de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel:
a) Meurtre de membres du groupe;
b) Atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale de membres du groupe;
c) Soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa
destruction physique totale ou partielle;
d) Mesures visant à entraver les naissances au sein du groupe;
e) Transfert forcé d’enfants du groupe à un autre groupe.

SECTION II. CRIMES CONTRE L’HUMANITE483


Il s’agit de Onze crimes définis par le traité de Rome en ces termes :
« 1. On entend par crime contre l’humanité l’un quelconque des actes ci-après lorsqu’il
est commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique lancée contre
toute population civile et en connaissance de cette attaque:
a) Meurtre ;

480 Art. 220.


481
Terme utilisé par le Professeur Nyabirungu mwene Songa, Droit international pénal : crimes contre la paix et
la sécurité de l’humanité, éd. D.E.S, Kinshasa, 2013, p.201.
482 Article 6 du Traité de Rome du 17 juillet 1998 portant statut de la Cour pénale internationale, ratifié par le Décret- Loi n°

00/3/2000 du 30 mars 2002, in Les codes Larcier de la R.D.C., Tome II, Droit pénal, éd. Larcier et Afrique édition, Bruxelles,
2003, p.63.
483 Article 7 du Traité de Rome, op. cit., p.63.
194
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

b) Extermination;
c) Réduction en esclavage;
d) Déportation ou transfert forcé de population ;
e) Emprisonnement ou autre forme de privation grave de liberté physique en violation
des dispositions fondamentales du droit international ;
f) Torture ;
g) Viol, esclavage sexuel, prostitution forcée, grossesse forcée, stérilisation forcée ou
toute autre forme de violence sexuelle de gravité comparable;
h) Persécution de tout groupe ou de toute collectivité identifiable pour des motifs
d’ordre politique, racial, national, ethnique, culturel, religieux ou sexiste au sens du
paragraphe 3, ou en fonction d’autres critères universellement reconnus comme
inadmissibles en droit international, en corrélation avec tout acte visé dans le présent
paragraphe ou tout crime relevant de la compétence de la Cour;
i) Disparitions forcées de personnes;
j) Crime d’apartheid;
k) Autres actes inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de grandes
souffrances ou des atteintes graves à l’intégrité physique ou à la santé physique ou
mentale.
2. Aux fins du paragraphe 1:
a) Par «attaque lancée contre une population civile», on entend le comportement qui
consiste en la commission multiple d’actes visés au paragraphe 1 à l’encontre d’une
population civile quelconque, en application ou dans la poursuite de la politique d’un
État ou d’une organisation ayant pour but une telle attaque;
b) Par «extermination», on entend notamment le fait d’imposer intentionnellement des
conditions de vie, telles que la privation d’accès à la nourriture et aux médicaments,
calculées pour entraîner la destruction d’une partie de la population;
c) Par «réduction en esclavage», on entend le fait d’exercer sur une personne l’un
quelconque ou l’ensemble des pouvoirs liés au droit de propriété, y compris dans le
cadre de la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants;
d) Par «déportation ou transfert forcé de population», on entend le fait de déplacer de
force des personnes, en les expulsant ou par d’autres moyens coercitifs, de la région où
elles se trouvent légalement, sans motifs admis en droit international;
e) Par «torture», on entend le fait d’infliger intentionnellement une douleur ou des
souffrances aiguës, physiques ou mentales, à une personne se trouvant sous sa garde ou
sous son contrôle; l’acception de ce terme ne s’étend pas à la douleur ou aux
souffrances résultant uniquement de sanctions légales, inhérentes à ces sanctions ou
occasionnées par elles ;
195
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

f) Par «grossesse forcée», on entend la détention illégale d’une femme mise enceinte de
force, dans l’intention de modifier la composition ethnique d’une population ou de
commettre d’autres violations graves du droit international. Cette définition ne peut en
aucune manière s’interpréter comme ayant une incidence sur les lois nationales
relatives à la grossesse;
g) Par «persécution», on entend le déni intentionnel et grave de droits fondamentaux en
violation du droit international, pour des motifs liés à l’identité du groupe ou de la
collectivité qui en fait l’objet;
h) Par «crime d’apartheid», on entend des actes inhumains analogues à ceux que vise
le paragraphe 1, commis dans le cadre d’un régime institutionnalisé d’oppression
systématique et de domination d’un groupe racial sur tout autre groupe racial ou tous
autres groupes raciaux et dans l’intention de maintenir ce régime;
i) Par «disparitions forcées de personnes», on entend les cas où des personnes sont
arrêtées, détenues ou enlevées par un État ou une organisation politique ou avec
l’autorisation, l’appui ou l’assentiment de cet État ou de cette organisation, qui refuse
ensuite d’admettre que ces personnes sont privées de liberté ou de révéler le sort qui
leur est réservé ou l’endroit où elles se trouvent, dans l’intention de les soustraire à la
protection de la loi pendant une période prolongée.
3. Aux fins du présent statut, le terme «sexe» s’entend de l’un et l’autre sexe, masculin
et féminin, suivant le contexte de la société. Il n’implique aucun autre sens. »

SECTION III. CRIMES DE GUERRE484

Les crimes de guerres se commettent en cas de conflit armé présentant un caractère


international ou en cas de conflit armé ne présentant pas un caractère international, exclusion
faite des situations de troubles et tensions internes telles que les émeutes, les actes isolés et
sporadiques de violence ou les actes de nature similaire.
En cas de conflit armé présentant un caractère international, sont constitutifs de crimes de
guerre :
- les huit infractions graves aux Conventions de Genève du 12 août 1949 et
- les vingt-six autres violations graves des lois et coutumes applicables aux conflits
armés internationaux dans le cadre établi du droit international.
En cas de conflit armé ne présentant pas un caractère international, les crimes de guerre sont
constitués :
- de quatre violations graves de l’article 3 commun aux quatre Conventions de Genève
du 12 août 1949 et
- de douze autres violations graves des lois et coutumes applicables aux conflits armés
ne présentant pas un caractère international.

En effet, l’article 8 du Traité de Rome dit :


« On entend par «crimes de guerre»:

484 Article 8 du Traité de Rome, op. cit., pp.64-65.


196
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

a) Les infractions graves aux Conventions de Genève du 12 août 1949, à savoir l’un
quelconque des actes ci-après lorsqu’ils visent des personnes ou des biens protégés par
les dispositions des Conventions de Genève:
i) L’homicide intentionnel;
ii) La torture ou les traitements inhumains, y compris les expériences biologiques;
iii) Le fait de causer intentionnellement de grandes souffrances ou de porter gravement
atteinte à l’intégrité physique ou à la santé;
iv) La destruction et l’appropriation de biens, non justifiées par des nécessités militaires et
exécutées sur une grande échelle de façon illicite et arbitraire;
v) Le fait de contraindre un prisonnier de guerre ou une personne protégée à servir dans les
forces d’une puissance ennemie;
vi) Le fait de priver intentionnellement un prisonnier de guerre ou toute autre personne
protégée de son droit d’être jugé régulièrement et impartialement;
vii) La déportation ou le transfert illégal ou la détention illégale;
viii) La prise d’otages;
b) Les autres violations graves des lois et coutumes applicables aux conflits armés
internationaux dans le cadre établi du droit international, à savoir, l’un quelconque des
actes ci-après:
i) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre la population civile en tant que telle
ou contre des civils qui ne participent pas directement aux hostilités ;
ii) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre des biens de caractère civil, c’est-
à-dire des biens qui ne sont pas des objectifs militaires;
iii) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre le personnel, les installations, le
matériel, les unités ou les véhicules employés dans le cadre d’une mission d’aide humanitaire
ou de maintien de la paix conformément à la Charte des Nations unies, pour autant qu’ils aient
droit à la protection que le droit international des conflits armés garantit aux civils et aux
biens de caractère civil ;
iv) Le fait de diriger intentionnellement une attaque en sachant qu’elle causera incidemment
des pertes en vies humaines dans la population civile, des blessures aux personnes civiles, des
dommages aux biens de caractère civil ou des dommages étendus, durables et graves à
l’environnement naturel qui seraient manifestement excessifs par rapport à l’ensemble de
l’avantage militaire concret et direct attendu ;
v) Le fait d’attaquer ou de bombarder, par quelque moyen que ce soit, des villes, villages,
habitations ou bâtiments qui ne sont pas défendus et qui ne sont pas des objectifs militaires;
vi) Le fait de tuer ou de blesser un combattant qui, ayant déposé les armes ou n’ayant plus de
moyens de se défendre, s’est rendu à discrétion;
vii) Le fait d’utiliser indûment le pavillon parlementaire, le drapeau ou les insignes militaires
et l’uniforme de l’ennemi ou de l’Organisation des Nations unies, ainsi que les signes
197
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

distinctifs prévus par les Conventions de Genève, et, ce faisant, de causer la perte de vies
humaines ou des blessures graves ;
viii) Le transfert, direct ou indirect, par une puissance occupante d’une partie de sa population
civile, dans le territoire qu’elle occupe, ou la déportation ou le transfert à l’intérieur ou hors
du territoire occupé de la totalité ou d’une partie de la population de ce territoire;
ix) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre des bâtiments consacrés à la
religion, à l’enseignement, à l’art, à la science ou à l’action caritative, des monuments
historiques, des hôpitaux et des lieux où des malades ou des blessés sont rassemblés, à
condition qu’ils ne soient pas des objectifs militaires;
x) Le fait de soumettre des personnes d’une partie adverse tombées en son pouvoir à des
mutilations ou à des expériences médicales ou scientifiques quelles qu’elles soient qui ne sont
ni motivées par un traitement médical, dentaire ou hospitalier, ni effectuées dans l’intérêt de
ces personnes, et qui entraînent la mort de celles-ci ou mettent sérieusement en danger leur
santé;
xi) Le fait de tuer ou de blesser par traîtrise des individus appartenant à la nation ou à l’armée
ennemie;
xii) Le fait de déclarer qu’il ne sera pas fait de quartier;
xiii) Le fait de détruire ou de saisir les biens de l’ennemi, sauf dans les cas où ces destructions
ou saisies seraient impérieusement commandées par les nécessités de la guerre;
xiv) Le fait de déclarer éteints, suspendus ou non recevables en justice les droits et actions des
nationaux de la partie adverse ;
xv) Le fait pour un belligérant de contraindre les nationaux de la partie adverse à prendre part
aux opérations de guerre dirigées contre leur pays, même s’ils étaient au service de ce
belligérant avant le commencement de la guerre;
xvi) Le pillage d’une ville ou d’une localité, même prise d’assaut ;
xvii) Le fait d’employer du poison ou des armes empoisonnées;
xviii) Le fait d’employer des gaz asphyxiants, toxiques ou similaires, ainsi que tous liquides,
matières ou procédés analogues;
xix) Le fait d’utiliser des balles qui s’épanouissent ou s’aplatissent facilement dans le corps
humain, telles que des balles dont l’enveloppe dure ne recouvre pas entièrement le centre ou
est percée d’entailles;
xx) Le fait d’employer les armes, projectiles, matières et méthodes de guerre de nature à
causer des maux superflus ou des souffrances inutiles ou à frapper sans discrimination en
violation du droit international des conflits armés, à condition que ces armes, projectiles,
matières et méthodes de guerre fassent l’objet d’une interdiction générale et qu’ils soient
inscrits dans une annexe au présent statut, par voie d’amendement adopté selon les
dispositions des articles 121 et 123;
xxi) Les atteintes à la dignité de la personne, notamment les traitements humiliants et
dégradants;
198
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

xxii) Le viol, l’esclavage sexuel, la prostitution forcée, la grossesse forcée, telle que définie à
l’article 7, paragraphe 2, alinéa f), la stérilisation forcée ou toute autre forme de violence
sexuelle constituant une infraction grave aux Conventions de Genève;
xxiii) Le fait d’utiliser la présence d’un civil ou d’une autre personne protégée pour éviter que
certains points, zones ou forces militaires ne soient la cible d’opérations militaires;
xxiv) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre les bâtiments, le matériel, les
unités et les moyens de transport sanitaires, et le personnel utilisant, conformément au droit
international, les signes distinctifs prévus par les Conventions de Genève ;
xxv) Le fait d’affamer délibérément des civils comme méthode de guerre, en les privant de
biens indispensables à leur survie, y compris en empêchant intentionnellement l’envoi des
secours prévus par les Conventions de Genève;
xxvi) Le fait de procéder à la conscription ou à l’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans
dans les forces armées nationales ou de les faire participer activement à des hostilités ;
c) En cas de conflit armé ne présentant pas un caractère international, les violations
graves de l’article 3 commun aux quatre Conventions de Genève du 12 août 1949, à
savoir l’un quelconque des actes ci-après commis à l’encontre de personnes qui ne
participent pas directement aux hostilités, y compris les membres de forces armées qui
ont déposé les armes et les personnes qui ont été mises hors de combat par maladie,
blessure, détention ou par toute autre cause:
i) Les atteintes à la vie et à l’intégrité corporelle, notamment le meurtre sous toutes ses
formes, les mutilations, les traitements cruels et la torture ;
ii) Les atteintes à la dignité de la personne, notamment les traitements humiliants et
dégradants;
iii) Les prises d’otages;
iv) Les condamnations prononcées et les exécutions effectuées sans un jugement préalable,
rendu par un tribunal régulièrement constitué, assorti des garanties judiciaires généralement
reconnues comme indispensables;
d) L’alinéa c) du paragraphe 2 s’applique aux conflits armés ne présentant pas un
caractère international et ne s’applique donc pas aux situations de troubles et tensions
internes telles que les émeutes, les actes isolés et sporadiques de violence ou les actes de
nature similaire;
e) Les autres violations graves des lois et coutumes applicables aux conflits armés ne
présentant pas un caractère international, dans le cadre établi du droit international, à
savoir l’un quelconque des actes ci-après:
i) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre la population civile en tant que telle
ou contre des personnes civiles qui ne participent pas directement aux hostilités;
ii) Le fait de diriger intentionnellement des attaques contre les bâtiments, le matériel, les
unités et les moyens de transport sanitaires, et le personnel utilisant, conformément au droit
international, les signes distinctifs des Conventions de Genève;
199
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

iii) Le fait de lancer des attaques délibérées contre le personnel, les installations, le matériel,
les unités ou les véhicules employés dans le cadre d’une mission d’aide humanitaire ou de
maintien de la paix conformément à la Charte des Nations unies, pour autant qu’ils aient droit
à la protection que le droit international des conflits armés garantit aux civils et aux biens de
caractère civil;
iv) Le fait de lancer des attaques délibérées contre des bâtiments consacrés à la religion, à
l’enseignement, à l’art, à la science ou à l’action caritative, des monuments historiques, des
hôpitaux et des lieux où des malades et des blessés sont rassemblés, pour autant que ces
bâtiments ne soient pas des objectifs militaires;
v) Le pillage d’une ville ou d’une localité, même prise d’assaut;
vi) Le viol, l’esclavage sexuel, la prostitution forcée, la grossesse forcée, telle que définie à
l’article 7, paragraphe 2, alinéa f), la stérilisation forcée, ou toute autre forme de violence
sexuelle constituant une violation grave de l’article 3 commun aux quatre Conventions de
Genève;
vii) Le fait de procéder à la conscription ou à l’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans dans
les forces armées ou dans des groupes armés ou de les faire participer activement à des
hostilités;
viii) Le fait d’ordonner le déplacement de la population civile pour des raisons ayant trait au
conflit, sauf dans les cas où la sécurité des civils ou des impératifs militaires l’exigent;
ix) Le fait de tuer ou de blesser par traîtrise un adversaire combattant;
x) Le fait de déclarer qu’il ne sera pas fait de quartier;
xi) Le fait de soumettre des personnes d’une autre partie au conflit tombées en son pouvoir à
des mutilations ou à des expériences médicales ou scientifiques quelles qu’elles soient qui ne
sont ni motivées par un traitement médical, dentaire ou hospitalier, ni effectuées dans l’intérêt
de ces personnes, et qui entraînent la mort de celles-ci ou mettent sérieusement en danger leur
santé;
xii) Le fait de détruire ou de saisir les biens d’un adversaire, sauf si ces destructions ou saisies
sont impérieusement commandées par les nécessités du conflit ;
f) L’alinéa e) du paragraphe 2 s’applique aux conflits armés ne présentant pas un
caractère international et ne s’applique donc pas aux situations de troubles et tensions
internes telles que les émeutes, les actes isolés et sporadiques de violence ou les actes de
nature similaire.
Il s’applique aux conflits armés qui opposent de manière prolongée sur le territoire d’un État
les autorités du gouvernement de cet État et des groupes armés organisés ou des groupes
armés organisés entre eux.
200
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

SECTION IV. LE CRIME D’AGRESSION


Le crime d’agression est prévu par l’article 8bis485 du traité de Rome portant statut de la Cour
Pénale Internationale qui dispose :
« 1. Aux fins du présent Statut, on entend par «crime d’agression» la planification, la
préparation, le lancement ou l’exécution par une personne effectivement en mesure de
contrôler ou de diriger l’action politique ou militaire d’un État, d’un acte d’agression qui,
par sa nature, sa gravité et son ampleur, constitue une violation manifeste de la Charte des
Nations Unies.

2. Aux fins du paragraphe 1, on entend par «acte d’agression» l’emploi par un État de la
force armée contre la souveraineté, l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique
d’un autre État, ou de toute autre manière incompatible avec la Charte des Nations Unies.
Qu’il y ait ou non déclaration de guerre, les actes suivants sont des actes d’agression au
regard de la résolution 3314 (XXIX) de l’Assemblée générale des Nations Unies en date du
14 décembre 1974 :

a) L’invasion ou l’attaque par les forces armées d’un État du territoire d’un autre État ou
l’occupation militaire, même temporaire, résultant d’une telle invasion ou d’une telle
attaque, ou l’annexion par la force de la totalité ou d’une partie du territoire d’un autre
État ;
b) Le bombardement par les forces armées d’un État du territoire d’un autre État, ou
l’utilisation d’une arme quelconque par un État contre le territoire d’un autre État ;
c) Le blocus des ports ou des côtes d’un État par les forces armées d’un autre État ;
d) L’attaque par les forces armées d’un État des forces terrestres, maritimes ou aériennes, ou
des flottes aériennes et maritimes d’un autre État ;
e) L’emploi des forces armées d’un État qui se trouvent dans le territoire d’un autre État
avec l’agrément de celui-ci en contravention avec les conditions fixées dans l’accord
pertinent, ou la prolongation de la présence de ces forces sur ce territoire après l’échéance de
l’accord pertinent ;
f) Le fait pour un État de permettre que son territoire, qu’il a mis à la disposition d’un autre
État, serve à la commission par cet autre État d’un acte d’agression contre un État tiers ;
g) L’envoi par un État ou au nom d’un État de bandes, groupes, troupes irrégulières ou
mercenaires armés qui exécutent contre un autre État des actes assimilables à ceux de forces
armées d’une gravité égale à celle des actes énumérés ci-dessus, ou qui apportent un concours
substantiel à de tels actes. ».

485 Résolution RC/Res.6 du 11 juin 2010.


201
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Titre II. LES INFRACTIONS DEFINIES PAR LA


CONSTITUTION DE LA REPUBLIQUE DEMOCRATIQUE
DU CONGO

Section I. TABLEAU SYNOPTIQUE DES INFRACTIONS PREVUES


PAR LA CONSTITUTION

N° Dénomination Constitution de la Loi sur la Cour constitutionnelle486


R.D.C.

1 Haute trahison par Article 7. Nul ne peut Article 74. Le Président de la


l’institution d’un instituer, sous quelque République ou le Premier Ministre se
parti unique forme que ce soit, de rend également coupable de
parti unique sur tout ou l’infraction de haute trahison lorsque
partie du territoire l’un ou l’autre :
national. 1. institue ou tente d’instituer un
L’institution d’un parti parti unique sous quelque forme que
unique constitue une ce soit ; …
infraction imprescriptible
de haute trahison punie Article 75. La haute trahison est punie
par la loi. de la servitude pénale à perpétuité.

2 Crime contre Article 15. Les pouvoirs publics veillent à l’élimination des
l’humanité par violences sexuelles.
violence sexuelle Sans préjudice des traités et accords internationaux, toute
violence sexuelle faite sur toute personne, dans l’intention de
déstabiliser, de disloquer une famille et de faire disparaître
tout un peuple est érigée en crime contre l’humanité puni par
la loi.
3 Abandon, Article 41. L’enfant mineur est toute personne, sans
maltraitance et distinction de sexe, qui n’a pas encore atteint 18 ans révolus.
exploitation des Tout enfant mineur a le droit de connaître les noms de son
enfants mineurs père et de sa mère.
Il a également le droit de jouir de la protection de sa famille,
de la société et des pouvoirs publics.
L’abandon et la maltraitance des enfants, notamment la
pédophilie, les abus sexuels ainsi que l’accusation de
sorcellerie sont prohibés et punis par la loi.
Les parents ont le devoir de prendre soin de leurs enfants et
d’assurer leur protection contre tout acte de violence tant à
l’intérieur qu’à l’extérieur du foyer.
Les pouvoirs publics ont l’obligation d’assurer une protection
aux enfants en situation difficile et de déférer, devant la
justice, les auteurs et les complices des actes de violence à

486
Loi organique n° 13/026 du 15 octobre 2013 portant organisation et fonctionnement de la
Cour Constitutionnelle.
202
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

l’égard des enfants.


Toutes les autres formes d’exploitation d’enfants mineurs
sont punies par la loi.
4 Pillage Article 56. Tout acte, tout accord, toute convention, tout
arrangement ou tout autre fait, qui a pour conséquence de
priver la nation, les personnes physiques ou morales de tout
ou partie de leurs propres moyens d’existence tirés de leurs
ressources ou de leurs richesses naturelles, sans préjudice des
dispositions internationales sur les crimes économiques, est
érigé en infraction de pillage punie par la loi.

5 Haute trahison par Article 57. Les actes visés à l’article précédent ainsi que leur
pillage tentative, quelles qu’en soient les modalités, s’ils sont le fait
d’une personne investie d’autorité publique, sont punis
comme infraction de haute trahison.
6 Haute trahison par Article 63. Tout Congolais a le Article 74. Le Président de la
omission de droit et le devoir sacré de République ou le Premier
sauvegarder défendre le pays et son intégrité Ministre se rend également
l’unité de la territoriale face à une menace ou coupable de l’infraction de
République et à une agression extérieure. haute trahison lorsque l’un
l’intégrité de son Un service militaire obligatoire ou l’autre :
territoire peut être instauré dans les 1. (…) ;
conditions fixées par la loi. 2. manque à son devoir de
Toute autorité nationale, sauvegarder l’unité de la
provinciale, locale et coutumière République et l’intégrité de
a le devoir de sauvegarder l’unité son territoire ;
de la République et l’intégrité de
son territoire, sous peine de haute Article 75. La haute trahison
trahison. est punie de la servitude
pénale à perpétuité.

7 Tentative de Article 64. Tout Congolais a le devoir de faire échec à tout


renversement du individu ou groupe d’individus qui prend le pouvoir par la
régime force ou qui l’exerce en violation des dispositions de la
constitutionnel : présente Constitution.
Crime contre la Toute tentative de renversement du régime constitutionnel
nation et l’Etat constitue une infraction prescriptible contre la nation et
l’Etat. Elle est punie conformément à la loi.
8 Haute trahison par : Article 165. Sans préjudice Article 73. Il y a haute
- violation des autres dispositions de la trahison lorsque le Président
intentionnelle de la présente Constitution, il y a de la République a violé
constitution ou haute trahison lorsque le intentionnellement la
- violations graves Président de la République a Constitution ou lorsque lui ou
et caractérisées violé intentionnellement la le Premier Ministre est
des droits de Constitution ou lorsque lui ou reconnu auteur, coauteur ou
l’homme le Premier ministre sont complice des violations
- cession d’une reconnus auteurs, co-auteurs graves et caractérisées des
partie du territoire ou complices de violations droits de l’homme ou de
national graves et caractérisées des cession d’une partie du
203
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Droits de Homme, de cession territoire national.


d’une partie du territoire Article 75. La haute trahison
national. est punie de la servitude
pénale à perpétuité.
9 Atteinte à Il y a atteinte à Article 76. Il y a atteinte à l’honneur lorsque le
l’honneur l’honneur ou à la comportement personnel du Président de la
probité notamment République ou du Premier Ministre est contraire aux
lorsque le bonnes mœurs.
comportement
personnel du L’atteinte à l’honneur est constituée des faits définis
Président de la dans les sections III et IV du titre VI du Code Pénal,
République ou du Livre II, et est punie des peines privatives de liberté
Premier ministre qui y sont prévues, ainsi que d’une amende de dix à
est contraire aux cinquante millions de Francs congolais.
10 Atteinte à bonnes mœurs ou Article 77. Il y a atteinte à la probité lorsque le
la probité qu’ils sont Président de la République ou le Premier Ministre est
reconnus auteurs, reconnu auteur, coauteur ou complice de
co-auteurs ou détournement de deniers publics, de corruption ou
complices de d’enrichissement illicite.
malversations, de
corruption ou L’atteinte à la probité est constituée des faits prévus
d’enrichissement dans la section VII du titre IV du Code Pénal Livre II
illicite. et est punie des mêmes peines.

11 Délit Il y a délit d’initié dans le Article 78. Il y a délit d’initié dans le chef du
d’initié chef du Président de la Président de la République ou du Premier
République ou du Premier Ministre lorsque l’un ou l’autre effectue des
ministre lorsqu’il effectue des opérations sur valeurs immobilières ou sur
opérations sur valeurs marchandises à l’égard desquelles il possède,
immobilières ou sur en raison de ses fonctions, des informations
marchandises à l’égard privilégiées et dont il tire profit avant que
desquelles il possède des celles-ci ne soient connues du public.
informations privilégiées et
dont il tire profit avant que Il englobe l’achat ou la vente d’actions
ces informations soient fondées sur des renseignements qui ne
connues du public. Le délit seraient jamais divulgués aux actionnaires.
d’initié englobe l’achat ou la
vente d’actions fondés sur des Le délit d’initié est puni d’une servitude
renseignements qui ne pénale principale de dix à vingt ans et d’une
seraient jamais divulgués aux amende de dix à cinquante millions de Francs
actionnaires. congolais.

12 Outrage Il y a outrage au Parlement Article 79. Il y a outrage au Parlement,


au lorsque sur des questions lorsque, sur des questions posées par l’une ou
Parlement posées par l’une ou l’autre l’autre Chambre du Parlement sur l’activité
Chambre du Parlement sur gouvernementale, le Premier Ministre ne
l’activité fournit aucune réponse dans un délai de trente
gouvernementale, le jours à dater de la réception de la question.
Premier ministre ne fournit
aucune réponse dans un L’outrage au Parlement est puni de cinq à dix
204
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

délai de trente jours. ans de servitude pénale principale.


13 Haute trahison Article 188. Les Forces armées sont républicaines. Elles sont
par au service de la Nation toute entière.
détournement de Nul ne peut, sous peine de haute trahison, les détourner à ses
l’armée à ses fins fins propres.
propres Elles sont apolitiques et soumises à l’autorité civile.
14 Haute trahison Article 190. Nul Article 74. Le Président de la République ou
par : ne peut, sous le Premier Ministre se rend également
- organisation peine de haute coupable de l’infraction de haute trahison
des formations trahison, lorsque l’un ou l’autre :
militaires organiser des 1. (…) ;
- organisation formations 2. (…) ;
des formations militaires, para- 3. détourne les forces armées de la
para-militaires militaires ou des République à ses fins propres ;
- organisation milices privées, 4. organise des formations militaires,
des formations ni entretenir une paramilitaires ou des milices privées ou
des milices jeunesse armée. entretient une jeunesse armée.
privées,
- entretien Article 75. La haute trahison est punie de la
d’une jeunesse servitude pénale à perpétuité.
armée

Section II. NOMENCLATURE ET DEFINITION DES INFRACTIONS


PREVUES PAR LA CONSTITUTION

Le droit pénal intervient aussi comme sanctionnateur des règles relevant d'autres disciplines
juridiques: le droit commercial, fiscal, social, etc. Le droit pénal apparaît ainsi comme le
«gardien de tous les autres droits »487. Son intervention dans la vie sociale moderne a pris
une importance telle que l'on parle aujourd'hui de « l'inflation pénale.»488, de la
surpénalisation et de la repénalisation489, de la République pénalisée490 , de l’Etat pénal491, etc.
Cette réalité n’a pas épargné la constitution de la République démocratique du Congo du 18
février 2006 qui définit plusieurs infractions à la tète desquelles se trouve la haute Trahison.

§1. LA HAUTE TRAHISON


Aux termes de la constitution, il y a haute trahison dans l’un des cas suivant :
1. L’institution d’un parti politique unique, sous quelque forme que ce soit, sur tout ou
partie du territoire national492.
Cette infraction est imprescriptible.

487 François OST, Le temps du droit, Ed. Odile Jacob, Paris, 1999, p. 295.
488 Voir G. STEFANI et G. LEVASSEUR, Droit pénal général, Précis Dalloz, Paris, 1978, n° 31.
489 François OST, op. cit., pp. 295-296.
490 Titre d’un ouvrage sur la France d’André GARAPON et D. SALAS, aux éditions Hachette, Paris, 1996.
491 L. WACQUANT, De l’Etat charitable à l’Etat pénal, Note sur le traitement politique de la misère en Amérique, in Regards

sociologiques, II, mai 1996, 30 et s.


492 Article 7 de la constitution.
205
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

2. Le pillage fait par une personne investie d’autorité publique en passant tout acte, tout
accord, toute convention, tout arrangement ou tout autre fait, qui a pour conséquence de
priver la nation, les personnes physiques ou morales de tout ou partie de leurs propres
moyens d’existence tirés de leurs ressources ou de leurs richesses naturelles, sans
préjudice des dispositions internationales sur les crimes économiques493.
3. Le fait pour toute autorité nationale, provinciale, locale et coutumière de ne pas
sauvegarder l’unité de la République et l’intégrité de son territoire494.
4. Le fait pour :
- le Président de la République de violer intentionnellement la Constitution ou
- lui ou le Premier ministre d’être reconnus auteurs, co-auteurs ou complices de
violations graves et caractérisées des Droits de l’Homme ou de cession d’une partie du
territoire national495.
5. Le détournement de l’armée à ses fins propres496.
6. L’organisation des formations militaires, paramilitaires ou des milices privées, et
l’entretien d’une jeunesse armée497.

§2. LE CRIME CONTRE L’HUMANITE


Le crime contre l’humanité défini par la constitution est constitué de toute violence sexuelle
faite sur toute personne, dans l’intention de déstabiliser, de disloquer une famille et de faire
disparaître tout un peuple est érigée en crime contre l’humanité puni par la loi498.

§3. L’ABANDON ET LA MALTRAITANCE DES ENFANTS


L’abandon et la maltraitance des enfants notamment la pédophilie, les abus sexuels ainsi que
l’accusation de sorcellerie sont prohibés et punis par la loi499.

§4. L’EXPLOITATION D’ENFANTS MINEURS


Toutes les autres formes d’exploitation d’enfants mineurs sont sévèrement punies par la
loi500.

493 Articles 56 et 57 de la constitution.


494 Article 63 de la constitution.
495 Article 165 de la constitution.
496 Article 188 de la constitution.
497 Article 190 de la constitution.
498 Article 15 de la constitution.
499 Article 41, al.4 de la constitution.
500 Article 41, al. 7 de la constitution. Ces actes sont définis et punis par la Loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant

protection de l'enfant.
206
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

§5. LE PILLAGE (SIMPLE)


Tout acte, tout accord, toute convention, tout arrangement ou tout autre fait, qui a pour
conséquence de priver la nation, les personnes physiques ou morales de tout ou partie de leurs
propres moyens d’existence tirés de leurs ressources ou de leurs richesses naturelles, sans
préjudice des dispositions internationales sur les crimes économiques, est érigé en infraction
de pillage punie par la loi501.

§6. L’INFRACTION CONTRE LA NATION ET L’ETAT


Tentative de renversement du régime constitutionnel.
Toute tentative de renversement du régime constitutionnel constitue une infraction
imprescriptible contre la nation et l’Etat. Elle est punie conformément à la loi502.

§7. OUTRAGE AU PARLEMENT


Il y a outrage au Parlement lorsque sur des questions posées par l’une ou l’autre Chambre du
Parlement sur l’activité gouvernementale, le Premier ministre ne fournit aucune réponse dans
un délai de trente jours503.

§8. ATTEINTE À L’HONNEUR OU À LA PROBITÉ

Il y a atteinte à l’honneur ou à la probité notamment lorsque le comportement personnel du


Président de la République ou du Premier ministre est contraire aux bonnes mœurs ou qu’ils
sont reconnus auteurs, co-auteurs ou complices de malversations, de corruption ou
d’enrichissement illicite504.

§9. DELIT D’INITIE


Il y a délit d’initié dans le chef du Président de la République ou du Premier ministre lorsqu’il
effectue des opérations sur valeurs immobilières ou sur marchandises à l’égard desquelles il
possède des informations privilégiées et dont il tire profit avant que ces informations soient
connues du public. Le délit d’initié englobe l’achat ou la vente d’actions fondée sur des
renseignements qui ne seraient jamais divulgués aux actionnaires505

501 Article 56 de la constitution.


502 Article 64 de la constitution.
503 Article 165, al.4 de la constitution.
504 Article 165, al. 2 de la constitution.
505 Article 165, al. 3 de la constitution.
207
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Titre III. LES INFRACTIONS COURANTES PREVUES PAR


LE CODE DE LA FAMILLE

SECTION I. L’ADULTERE (articles 467 à 472 du Code de la famille)

L’adultère es défini par les articles 467 à 472 du Code de la famille. Il n’est reproché qu’aux
mariés et à leurs complices. Ses éléments matériels varient selon qu’on est mari ou épouse.
Art. 467. — Sera puni, du chef d’adultère, d’une peine de servitude pénale de six mois à
un an et d’une amende de 500 à 2.000 zaïres:
1. quiconque, sauf si sa bonne foi a été surprise, aura eu des rapports sexuels avec une
femme mariée;
2. le mari qui aura eu des rapports sexuels avec une personne autre que son épouse, si
l’adultère a été entouré de circonstances de nature à lui imprimer le caractère
injurieux;
3. la femme qui aura eu des rapports sexuels avec un homme marié dans les
circonstances prévues au 2o du présent article;
4. la femme mariée qui aura eu des rapports sexuels avec une personne autre que son
conjoint.
Art. 468. — La poursuite des infractions prévues à l’article précédent ne pourra avoir
lieu que sur plainte de l’époux qui se prétendra offensé.
Le plaignant pourra, en tout état de cause, demander par le retrait de sa plainte,
l’abandon de la procédure.
À la condition de consentir à reprendre la vie commune, le plaignant pourra aussi
demander l’abandon des effets de la condamnation à la servitude pénale.
Article 469. — Dans les cas prévus à l’article 467, l’action du plaignant sera déclarée
irrecevable si l’infraction a été commise avec son consentement ou avec sa connivence.
Les frais de l’instance seront mis à sa charge.
Article 470. — Sera puni d’une peine de servitude pénale ne dépassant pas six mois et
d’une amende de 500 à 2.000 zaïres, le mari qui aura incité sa femme à commettre
l’adultère ou en aura sciemment favorisé l’exécution.
Article 471. — L’époux offensé peut réclamer une réparation au conjoint coupable et à
toute personne avec qui son conjoint a commis l’adultère, pourvu que l’époux lésé n’ait
pas approuvé ou toléré l’adultère. La personne avec qui le conjoint a commis l’adultère
ne sera pas tenue à la réparation si elle prouve que sa bonne foi a été surprise.
En déterminant la réparation, le tribunal s’inspirera des dispositions de l’article 461,
alinéa 2.
Article 472. — Sera puni des peines prévues en cas d’adultère, sauf si sa bonne foi a été
surprise:
208
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

1. quiconque aura enlevé, même avec son consentement, une femme mariée ou l’aura
détournée de ses devoirs de façon à la soustraire à la garde de son mari ou de la
personne chargée de ce soin pour le compte du mari, afin de faciliter ou permettre à
cette femme des rapports adultères;
1. quiconque aura caché ou gardé cette femme avec la même intention. »

SECTION II. LA BIGAMIE

La bigamie est prévue par l’article 408 du Code de la famille en ces termes :
« Quiconque, étant engagé dans les liens d’un mariage enregistré ou célébré devant
l’officier de l’état civil, en aura fait enregistrer ou célébrer un autre avant la
dissolution ou l’annulation du précédent, sera puni du chef de bigamie d’une peine de
servitude pénale de un à trois mois et d’une amende de 100 à 300 zaïres ou de l’une de
ces peines seulement.
L’action publique et l’action civile peuvent être intentées tout le temps que subsiste
l’état de bigamie. Elles s’éteignent par la dissolution du premier ou du second mariage
ou par la validation du second. ».

SECTION III. L’ABANDON DE FAMILLE


L’abandon de famille consiste dans le fait de ne pas fournir, pendant deux mois, une pension
alimentaire à son conjoint, à ses descendants ou à ses ascendants, à laquelle on a été
condamné par décision judiciaire désormais sans recours en opposition ou appel. Il est prévu
par l’article 926 du Code de la famille qui dispose :
« Sera puni de sept jours à deux mois de servitude pénale et d’une amende de 20 à 100 zaïres
ou de l’une de ces peines seulement, quiconque ayant été condamné, par décision judiciaire
désormais sans recours en opposition ou appel, à fournir une pension alimentaire à son
conjoint, à ses descendants ou à ses ascendants sera volontairement demeuré plus de deux
mois sans en acquitter les termes ».
209
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Titre IV. LES INFRACTIONS PREVUES PAR LA LOI N°


09/001 DU 10 janvier 2009 PORTANT PROTECTION DE
L'ENFANT506

SECTION Ière : DE LA PROTECTION DE L'ENFANT AVANT SA


NAISSANCE
§1. Coups ou blessures volontaire sur une femme enceinte

1. Coups et blessures volontaires simples

Article 143. Quiconque porte volontairement des coups ou fait des blessures à une
femme enceinte est passible de six mois à un an de servitude pénale principale et d'une
amende de cent mille à deux cent cinquante mille francs congolais.

2. Coups et blessures volontaires aggravés

Article 144. Si les coups portés et les blessures faites volontairement, sans détruire
l'embryon ou le fœtus, entraînent pourtant une altération grave de la santé de la
femme, de l'embryon, du fœtus ou la perte d'un organe, l'auteur est passible de
deux à cinq ans de servitude pénale principale et d'une amende de deux cents mille à
trois cent cinquante mille francs congolais.

3. Coups et blessures volontaires ayant provoqué l’avortement sans intention de le


causer

Article 145. Si les coups portés et les blessures faites volontairement, mais sans
intention de provoquer l'avortement, l'ont pourtant causé, l'auteur est passible de
deux à cinq ans de servitude pénale principale et d'une amende de trois cent
cinquante mille à cinq cent mille francs congolais.

4. Non-assistance à une femme en instance d'accouchement

Article 146. Est puni des peines prévues pour non-assistance à personne en danger, le
personnel soignant qui s'abstient de porter assistance à une femme en instance
d'accouchement.

Article 66ter du Code pénal congolais. [O.-L. 78-015 du 4 juillet 1978, art. 1er. —
Sera puni d’une servitude pénale de trois mois à deux ans et d’une amende de cinq à
cinquante zaïres, ou de l’une de ces peines seulement, quiconque s’abstient
volontairement de porter à une personne en péril l’assistance que, sans risque pour lui
ni pour son les tiers, il pouvait lui prêter, soit par son action personnelle, soit en
provoquant un secours.] (Omission de porter secours à une personne en péril)

506Loi N° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l'enfant, Titre IV : De la protection pénale, in J.O.R.D.C, n°
spécial, 50e année, 25/5/2009, pp. 5-47.
210
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Section II. DE LA PROTECTION DE L'ENFANT APRES SA


NAISSANCE
§1. Des atteintes volontaires à la vie et à l'intégrité physique ou mentale de
l'enfant

1. Coups et blessures volontaires simples sur un enfant

Article 147. Les coups et blessures volontaires portés sur l'enfant sont punis de trois à
six mois de servitude pénale principale et d'une amende de cent mille à deux cent
cinquante mille francs congolais,

2. Coups et blessures volontaires avec préméditation sur un enfant

En cas de préméditation, l'auteur est passible de six à douze mois de servitude pénale
principale et d'une amende de cent cinquante mille à trois cent mille francs congolais.

3. Coups et blessures volontaires aggravés sur un enfant

Article 148. Les coups et blessures volontaires porté sur l'enfant ayant entraîné une
maladie ou une incapacité de plus de huit jours sont punis de six à douze mois de
servitude pénale principale et d'une amende de deux cents mille à trois cent cinquante
mille francs congolais.

Article 149. Les coups et blessures volontaires ayant entraîné une mutilation ou un
handicap permanent de l'enfant sont punis de deux à cinq ans de servitude pénale
principale et d'une amende de trois cent cinquante à cinq cents mille francs congolais.

4. Coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort d'un enfant sans intention
de la donner

Article 150. Les coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort d'un enfant sans
intention de la donner sont punis de cinq à vingt ans de servitude pénale principale et
d'une amende de cinq cents mille à un million de francs congolais.

5. Torture d’un enfant

Article 151. Le fait de soumettre un enfant à la torture est puni de un à cinq ans de
servitude pénale principale et d'une amende de cinq cents mille à un million de francs
congolais.

Il faut entendre par torture, tout acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës,
physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne aux fins
notamment de :

1. obtenir d'elle ou d'une tierce personne des renseignements ou des aveux,


2. la punir d'un acte qu'elle ou une tierce personne a commis ou est soupçonnée
d'avoir commis;
3. l'intimider ou faire pression sur elle, intimider, faire pression sur une tierce
personne, ou pour tout autre motif fondé sur une forme de discrimination
quelle qu'elle soit, lorsqu'une telle douleur ou de telles souffrances sont
211
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

infligées par un agent de la fonction publique ou toute autre personne agissant


à titre officiel ou à son instigation ou avec son consentement exprès ou tacite.
Article 152. La peine encourue est la servitude pénale à perpétuité lorsque les tortures
ou les actes de brutalité, de cruauté, d'odieuses souffrances, de privation ou de
séquestration susceptibles de porter atteinte il sa santé physique ou mentale ainsi qu'à
son équilibre affectif et psychologique ont entraîné la mort.

6. Mutilation sexuelle d'un enfant

Article 153. La mutilation sexuelle d'un enfant est punie de deux à cinq ans de peine
de servitude pénale principale et d'une amende de deux cents mille à un million de
francs congolais.

7. Mutilation sexuelle d'un enfant ayant entrainé sa mort sans intention de la


donner

Lorsque la mutilation sexuelle entraîne la mort de l'enfant sans intention de la donner,


l'auteur est passible de dix à vingt ans de servitude pénale principale

(Définition) La mutilation sexuelle est un acte qui porte atteinte à l'intégrité physique
ou fonctionnelle de l'organe génital.

La circoncision n'est pas une mutilation sexuelle ni une atteinte à l'intégrité


physique.

8. Expérimentation médicale simple sur un enfant

Article 154. Le fait de pratiquer ou faire pratiquer une expérimentation médicale sur
un enfant est puni de un à cinq ans de servitude pénale principale et d'une amende de
deux cents mille à un million de francs congolais.

9. Expérimentation médicale aggravée sur un enfant

Si elle entraîne une incapacité ne dépassant pas huit jours, la peine est de deux à cinq
ans de servitude pénale principale et d'une amende de deux cents mille à un million de
francs congolais.

Si elle entraîne une incapacité de plus de huit jours ou provoque une mutilation ou une
infirmité permanente, la peine est de cinq à dix ans de servitude pénale principale.

10. Expérimentation médicale sur un enfant ayant entrainé la mort

Si cette expérimentation entraîne la mort, la peine est portée à la servitude pénale à


perpétuité.

11. Administration volontaire à un enfant des substances nuisibles

Article 155. L'administration volontaire à un enfant des substances nuisibles,


notamment des stupéfiants et des psychotropes, qui peuvent donner la mort ou des
substances qui, sans être de nature à donner la mort, peuvent altérer gravement la santé
d'un enfant de quelque manière que ces substances aient été employées ou
administrées, est punie de trois à vingt ans de servitude pénale principale.
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Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Article 156. Lorsque l'administration volontaire à un enfant des substances nuisibles


cause une infirmité permanente, l'auteur est passible de cinq à vingt ans de servitude
pénale principale.

12. Epreuves superstitieuses commises sur un enfant

Article 157. Est puni de un à deux ans de servitude pénale principale et d'une amende
de deux cents mille à six cent mille francs congolais, l'auteur d'épreuves
superstitieuses commises sur un enfant.

Si les épreuves superstitieuses causent une maladie ou une incapacité, ou s'il en résulte
la perte de l'usage absolu d'un organe ou une mutilation grave, l'auteur est puni de cinq
à vingt ans de servitude pénale principale et d'une amende de deux cents mille à un
million de francs congolais.

Par épreuve superstitieuse, il faut entendre tout acte consistant à soumettre un enfant,
de gré ou de force, à un mal physique réel ou supposé, en vue de déduire des effets
produits, l'imputabilité d'un acte ou d'un événement ou toute autre conclusion.

13. Incitation d'un enfant au suicide

Article 158. L'incitation d'un enfant au suicide est punie de un à cinq ans de servitude
pénale principale et d'une amende de quatre cents mille à un million de francs
congolais.

Si l'incitation aboutit au suicide, la peine est portée à la servitude pénale à perpétuité.

Si l'auteur de l'infraction est une personne exerçant l'autorité parentale sur l'enfant, le
juge peut, en outre, prononcer la déchéance de cette autorité.

Article 159. Le juge peut également prononcer la déchéance de l'autorité parentale


conformément aux disposions pertinentes de la loi lorsque le père, la mère, le parâtre,
la marâtre ou le tuteur sont condamnés pour des atteintes volontaires à la vie, à
l'intégrité physique ou mentale de l'enfant.

§2 : Des atteintes à l'honneur et à la liberté individuelle de l'enfant


1. Imputation dommageable ou diffamation contre un enfant

Article 160. Quiconque impute méchamment et publiquement à un enfant un fait


précis qui est de nature à porter atteinte à son honneur et à sa dignité est puni de deux
à douze mois de servitude pénale principale et d'une amende de deux cents mille à six
cents mille francs congolais.

2. Accusation de sorcellerie

En cas d'accusation de sorcellerie à l'égard d'un enfant, l'auteur est puni de un à trois
ans de servitude pénale principale et d'une amende de deux cents mille à un million de
francs congolais.
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Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

3. Arrestation arbitraire et détention illégale d’un enfant

Article 161. Quiconque enlève ou fait enlever, arrête ou fait arrêter arbitrairement,
détient ou fait détenir un enfant car violence, ruses, ou menaces, est puni de deux à
cinq ans de servitude pénale principale.

Lorsque l'enfant enlevé, arrêté ou détenu a été soumis à des tortures corporelles,
l'auteur est puni de dix à vingt ans de servitude pénale principale.

4. Traite ou vente d’enfants

Article 162. La traite ou la vente d'enfants est punie de dix à vingt ans de servitude
pénale principale, et d'une amende de cinq cents mille à un million de francs
congolais.

Il faut entendre par:

1. traite d'enfants: le recrutement, le transport, le transfert, l'hébergement ou


l'accueil des enfants, par la menace de recours à la force ou à d'autres formes de
contrainte, par l'enlèvement, la fraude, la tromperie, l'abus d'autorité ou d'une
situation de vulnérabilité, ou par l'offre ou l'acceptation de paiements ou
d'avantages pour obtenir le consentement d'une personne ayant autorité sur
l'enfant aux fins d'exploitation;

2. vente d'enfants: tout acte ou toute transaction faisant intervenir le transfert


d'enfants de toute personne ou de tout groupe de personnes à un autre groupe
contre rémunération ou tout autre avantage.

§3: Des atteintes à la propriété ou au patrimoine de l'enfant


1. Vol de bien d’un enfant

Article 163. Quiconque soustrait frauduleusement un bien qu'il sait appartenir à un


enfant est puni conformément à la loi. (Articles 79-81du Code pénal).

2. Vol à l’aide de violences ou de menaces de bien d’un enfant

Article 164. Si le vol a été commis à l'aide de violences ou de menaces, l'auteur est
puni de dix à vingt ans de servitude pénale principale et d'une amende de cinq cents
mille à un million de francs congolais.

3. Destruction méchante des biens d’un enfant

Article 165. Est puni de cinq à dix ans de servitude pénale principale et d'une amende
de deux cent cinquante mille à cinq cents mille francs congolais, quiconque détruit ou
dégrade méchamment des biens meubles ou immeubles qu'il sait appartenir à un
enfant.
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Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

4. Stellionat au préjudice d’un enfant

Article 166. Quiconque vend ou donne en gage un immeuble qu'il sait appartenir à un
enfant est puni de cinq à dix ans de servitude pénale principale et d'une amende de
deux cent cinquante mille à cinq cents mille francs congolais.

5. Escroquerie au préjudice d’un enfant

Article 167. Est puni de deux à cinq ans de servitude pénale principale et d'une
amende de cent mille à deux cent cinquante mille francs congolais, quiconque se rend
coupable d'escroquerie au préjudice d'un enfant.

6. Abus de confiance au préjudice d’un enfant

Article 168. Est puni de deux à cinq ans de servitude pénale principale et d'une
amende de cent mille à deux cent cinquante mille francs congolais quiconque détourne
frauduleusement ou dissipe au préjudice d'un enfant des effets, propriétés, deniers,
marchandises, billets, quittances, écrits de toute nature contenant ou opérant
obligations ou décharges qui lui avaient été remis à la condition de les rendre ou d'en
faire un usage ou un emploi déterminé.

§4 : Des agressions sexuelles


Article 169. Les actes de pédophilie s'entendent de toute attirance sexuelle d'un adulte ou d'un
adolescent envers un enfant, notamment l'attentat à la pudeur, la relation sexuelle, l'érotisme,
la pornographie, l'abus sexuel et le viol.

1. Viol d'enfant

Article 170. Le viol d'enfant est puni de sept à vingt ans de servitude pénale
principale et d'une amende de huit cent mille à un million de francs congolais.

Le minimum de la peine est doublé si le viol est le fait :

1. des ascendants de l'enfant sur lequel ou avec l’aide duquel le viol a été commis;
2. des personnes qui ont autorité sur l'enfant;
3. de ses enseignants ou de ses serviteurs à gage ou les serviteurs des personnes
ci-dessus:
4. des agents publics, des ministres de culte qui ont abusé de leur position pour le
commettre du personnel médical, para médical ou des assistants sociaux, des
tradi-praticiens envers les enfants confiés à leurs soins;
5. des gardiens sur les enfants placés sous leur surveillance;

Le minimum de la peine est également doublé' :

1. s'il est commis avec l'aide d'une ou plusieurs personnes;


2. s'il est commis en public;
3. s'il a causé à la victime une altération grave de sa santé et/ou laissé de séquelles
physiques et/ou psychologiques graves ;
4. s'il est commis sur un enfant vivant avec handicap;
5. s'il a été commis avec usage ou menace d'une arme.
215
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Article 171. Commet un viol d'enfant, soit à l'aide de violences ou menaces graves ou par
contrainte à l'encontre d'un enfant, directement ou par l'intermédiaire d'un tiers, soit par
surprise, pression psychologique, soit à l'occasion d'un environnement coercitif, soit en
abusant d'un enfant qui, par le fait d'une maladie, par l'altération de ses facultés ou par toute
autre cause accidentelle a perdu l'usage de ses sens ou en a été privé par quelques artifices :

a) tout homme qui introduit son organe sexuel, même superficiellement dans celui d'une
enfant ou toute femme qui oblige un enfant à introduire même superficiellement son
organe sexuel dans le sien;

b) tout homme qui pénètre, même superficiellement l'anus, la bouche ou tout autre orifice
du corps d'un enfant par un organe sexuel, par toute autre partie du corps ou par un
objet quelconque ou toute femme qui oblige un enfant à exposer son organe sexuel à
des attouchements par une partie de son corps ou par un objet quelconque ;

c) toute personne qui introduit, même superficiellement, toute autre partie du corps ou un
objet quelconque dans le vagin d'une enfant;

d) toute personne qui oblige un enfant à pénétrer, même superficiellement son anus, sa
bouche ou tout orifice de son corps par un organe sexuel, par toute autre partie du
corps ou par un objet quelconque.

2. Attentat à la pudeur

Article 172. L'attentat à la pudeur sans violence, ruse, ou menace commis sur un
enfant est puni de six mois à cinq ans de servitude pénale principale. L'attentat à la
pudeur avec violence, ruse, ou menace commis sur un enfant est puni de cinq à quinze
ans de servitude pénale principale.

Si l'attentat est commis sur un enfant, à l'aide d'un ou de plusieurs enfants âgés de
moins de dix ans, l’auteur est passible de cinq à vingt ans de servitude pénale
principale.

Les peines encourues sont portées de cinq à quinze ans de servitude pénale principale
et à une amende de quatre cents mille francs congolais Si l'attentat à la pudeur a été
commis par des personnes ou dans les circonstances prévues à l'alinéa 2 de l'article
170.

L'attentat à la pudeur est tout acte contraire aux mœurs exercé intentionnellement sur
un enfant.

3. Incitation des enfants à la débauche

Article 173. Quiconque attente aux mœurs en incitant, facilitant ou favorisant pour
satisfaire les passions d'autrui, la débauche ou la corruption des enfants est puni d'une
servitude pénale principale de trois à cinq ans et d'une amende de cinq cents mille à un
million de francs congolais.

Le fait énoncé à l'alinéa précédent est puni d'une servitude pénale principale de dix à
vingt ans et d'une amende de deux cents mille à quatre cents mille francs congolais, s'il
est commis envers un enfant âgé de moins dix ans accomplis.
216
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Si l'infraction a été commise par le père, la mère, le parâtre, la marâtre, le tuteur ou


toute personne exerçant en droit ou en fait l'autorité sur l'enfant. L'auteur est en outre
déchu de l'autorité parentale ou tutélaire.

Les peines encourues sont portées à une servitude pénale principale de cinq à dix ans
et à une amende de un million à deux millions de francs congolais si l'incitation à la
débauche est le fait du père, de la mère, du parâtre, de la marâtre, du tuteur ou de toute
personne exerçant en droit ou en fait l'autorité sur l'enfant.

L'incitation à la débauche est le fait de faciliter, exciter ou favoriser la débauche d'un


enfant.

4. Incitation de l'enfant à la Zoophilie

Article 174. L'incitation d'un enfant à des relations sexuelles avec un animal est punie
de sept à quinze ans de servitude pénale principale et d'une amende de cinq cents mille
à un million de francs congolais.

5. Détention d’enfant aux fins d’abus sexuels

Article 175. Le fait de détenir un ou plusieurs enfants dans le but d'abuser d'eux
sexuellement est puni de dix à vingt ans de servitude pénale principale.

Si grossesse s'en suit, la servitude pénale principale est de quinze à vingt ans.

6. Stérilisation forcée d’enfant

Article 176. Le fait de priver un enfant de la capacité biologique de reproduction sans


qu'un tel fait ne soit justifié médicalement est puni de cinq à quinze ans de servitude
pénale principale.

Lorsque le fait est médicalement justifié, le consentement des parents ou de ceux qui
exercent l'autorité parentale est requis.

En cas de conflit entre la justification médicale et le consentement des parents, l'intérêt


supérieur de l'enfant prime.

7. Transmission délibérée des infections sexuellement transmissibles incurables à


l’enfant

Article 177. Quiconque contamine délibérément un enfant d'une affection


sexuellement transmissible incurable, notamment le VIH/SIDA, est puni d'une
servitude pénale à perpétuité et d'une amende de cinq cents mille à un million de
francs congolais.

8. Exposition d'un enfant à l'exhibition sexuelle ou Corruption d’enfant

Article 178. L'exposition d'un enfant à l'exhibition sexuelle est punie de cinq à dix
ans de servitude pénale principale et d'une amende de deux cents mille à six cents
mille francs congolais.
217
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Les peines encourues sont portées de cinq à quinze ans de servitude pénale principale
et l'amende de deux cents mille à un million de francs congolais, si l'exhibition
sexuelle est le fait du père, de la mère, du parâtre, de la marâtre, du tuteur ou de toute
personne exerçant en droit ou en fait l'autorité sur l'enfant.

L'exhibition sexuelle désigne le fait de montrer certaines parties intimes du corps et/ou
de faire en oublie, des gestes à caractère sexuel.

9. Pornographique mettant en scène un enfant

Article 179. Le fait de produire, de distribuer, de diffuser, d'importer, d'exporter,


d'offrir, de rendre disponible, de vendre, de se procurer ou procurer à autrui, de
posséder tout matériel pornographique mettant en scène un enfant est puni de cinq à
quinze ans de servitude pénale principale et d'une amende de deux cents mille à un
million de francs congolais.

Le juge prononce en outre la confiscation du matériel pornographique concerné.

On entend par pornographie mettant en scène les enfants toute représentation, par
quelque moyen que ce soit d'un enfant s'adonnant à des activités sexuelles explicites,
réelles ou simulées, ou toute représentation des organes sexuels d'un enfant, à des fins
principalement sexuelles.

10. Exposition de l'enfant à la pornographie

Article 180. L'exposition de l'enfant à la pornographie sous toutes ses formes est punie
de cinq à vingt ans de servitude pénale principale et d'une amende de un million de
francs congolais.

11. Harcèlement sexuel sur l'enfant

Article 181. Le harcèlement sexuel sur l'enfant est puni de trois à douze ans de
servitude pénale principale et d'une amende de deux cents mille à quatre cents mille
francs congolais.

Le harcèlement sexuel sur l'enfant est le fait pour une personne d'abuser de l'autorité
que lui confère sa position sociale ou professionnelle en exerçant sur l'enfant des
pressions afin d'obtenir de lui des faveurs de nature sexuelle.

12. Proxénétisme à l'égard d'un enfant

Article 182. Le proxénétisme à l'égard d'un enfant est puni de cinq à vingt ans de
servitude pénale principale.

La peine encourue est portée de dix à vingt-cinq ans si le proxénétisme à l'égard d'un
enfant est le fait du père, de la mère, du parâtre, de la marâtre, du tuteur ou de toute
personne exerçant l'autorité parentale.

Le proxénétisme à l'égard d'un enfant est le fait d'offrir, d'obtenir, de fournir, de se


procurer ou d'utiliser un enfant à des fins sexuelles contre rémunération ou toute autre
forme d'avantages.
218
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

13. Esclavage sexuel d'un enfant

Article 183. L'esclavage sexuel d'un enfant est puni de dix à vingt ans de servitude
pénale principale et d'une amende de huit cent mille à un million de francs congolais.

L'esclavage sexuel est le fait pour une personne d'exercer un ou l'ensemble des
pouvoirs assimilés au droit de propriété sur un enfant notamment en détenant ou en
imposant une privation de liberté ou en achetant, vendant, prêtant, troquant l'enfant
pour des fins sexuelles, et de le contraindre à accomplir un ou plusieurs actes de nature
sexuelle.

14. Article 184. La condamnation du père, de la mère, du parâtre, de la marâtre ou de


toute personne exerçant l'autorité parentale sur l'enfant, pour une infraction prévue à la
présente section, peut être accompagnée de la déchéance de l'autorité parentale, en
application des dispositions de la loi.

§ 5 : De la mise en danger d'un enfant


1. Acte discriminatoire à l'égard de l'enfant

Article 185. Tout acte discriminatoire à l'égard de l'enfant expose son auteur de trois à
six mois de servitude pénale principale et à une amende de cent mille à deux cents
mille francs congolais.

2. Déplacement ou rétention illicites de l'enfant à l'étranger

Article 186. Est puni de un à trois ans de servitude pénale principale et d'une amende
de deux cents mille à un million de francs congolais, tout déplacement ou rétention
illicites de l'enfant à l'étranger par un parent ou un tiers.

3. Contravention aux pires formes du travail de l’enfant

Article 187. Quiconque contrevient aux dispositions de la présente loi sur les pires
formes du travail de l'enfant, est puni d'une peine de un à trois ans de servitude pénale
principale et d'une amende de cent mille à deux cents mille francs congolais.

4. Enrôlement ou l'utilisation des enfants dans les forces et groupes armés et la


police

Toutefois, l'enrôlement ou l'utilisation des enfants âgés de moins de dix-huit ans dans
les forces et groupes armés et la police sont punis de dix à vingt ans de servitude
pénale principale.

5. Utilisation d’un enfant dans la criminalité

Article 188. Quiconque utilise un enfant dans les différentes formes de criminalité,
est passible de cinq à dix ans de servitude pénale principale et d'une amende de deux
cents mille à un million de francs congolais.
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Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

6. Mariage forcé d’un enfant

Article 189. Toute personne qui exerce l'autorité parentale ou tutélaire sur un enfant,
le donne en mariage ou en vue de celui-ci, ou le contraint à se marier est puni d'une
peine de cinq à douze ans de servitude pénale principale et d'une amende de huit cents
mille à un million de francs congolais.

7. Délaissement d'enfant

Article 190. Le délaissement d'un enfant en un lieu quelconque est puni de un à cinq
ans de servitude pénale principale et d'une amende de cent mille à deux cent cinquante
mille francs congolais.

Lorsqu'il entraîne une mutilation ou une infirmité permanente, il est puni de cinq à dix
ans de servitude pénale principale et d'une amende de deux cents mille à cinq cents
mille francs congolais.

S'il entraîne la mort de l'enfant, il est puni de la servitude pénale à perpétuité et d'une
amende de cinq cents mille à un million de francs congolais.

(Définition) Par délaissement d'enfant, il faut entendre le fait pour le père ou la mère,
le parâtre ou la marâtre, ou le tuteur, d'abandonner et ou de rejeter un enfant sans s'être
assuré qu'il sera en sécurité et protégé dans ses droits.

8. Omission de porter secours à un enfant en péril

Article 191. Quiconque s'abstient de porter secours à un enfant menacé d'atteinte


imminente à sa vie ou à son intégrité physique, sans risque pour lui ni pour des tiers,
est puni de trois mois à un an de servitude pénale principale et d'une amende de cent
mille à deux cent cinquante mille francs congolais.

9. Non-dénonciation des violences commises sur un enfant

Article 192. Toute personne a l'obligation de dénoncer toute forme de violence


physique ou morale infligée à l'enfant ainsi que toute menace à sa santé et à son
développement dont elle a connaissance.

La non dénonciation des violences commises sur un enfant est puni d'une amende de
cent mille à deux cent cinquante mille francs congolais.

10. Abstention coupable de fonctionnaire

Article 193. Tout fonctionnaire ou officier public toute personne chargée d'un service
public qui prend connaissance d'abus ou de mise en danger d'un enfant et qui s'abstient
volontairement d'accomplir un acte de sa fonction ou de son emploi requis pour la
circonstance est puni d'une amende de cent mille à deux cent cinquante mille francs
congolais.

11. Utilisation d’un enfant aux fins de mendicité

Article 194. Quiconque utilise un enfant aux fins de mendicité est puni d'une amende
de cinquante mille à cent mille francs congolais.
220
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

§6: Des atteintes aux droits à la santé et à l'enseignement


1. Abstention de donner les soins préventifs requis à l'enfant

Article 195. Tout responsable d'un établissement sanitaire public ou privé intégré dans
le système des soins de santé primaires qui ne se conforme pas à la politique sanitaire
du pays et s'abstient de donner les soins préventifs requis à l'enfant est de un à six
mois puni de servitude pénale principale et d'une amende de cent cinquante mille
francs congolais ou d'une de ces peines seulement.

2. Refus délibéré d'assurer à son enfant les soins médicaux préventifs dont les
vaccinations

Article 196. Tout parent, tuteur ou responsable légal qui refuse délibérément d'assurer
à son enfant les soins médicaux préventifs et particulièrement les vaccinations, est
puni d'une servitude pénale principale ne dépassant pas cinq jours et d'une amende de
cinquante mille francs congolais ou d'une de ces peines seulement.

3. Frais scolaires non légalement exigés

Article 197. Tout gestionnaire de l'enseignement primaire, secondaire et professionnel


public qui exige des frais autres que ceux prévus par les textes légaux et
réglementaires est puni d'une amende de cent mille francs congolais.

4. Omission délibéré d’envoyer l’enfant à l’école

Article 198. Tout parent, tuteur ou responsable légal qui, délibérément, n'envoie pas
son enfant à l'école est puni d'une amende de cinquante mille francs congolais.
221
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

TABLE DES MATIERES

I.OBJECTIFS DU COURS ........................................................................................................ 1

II.ORGANISATION DE L’ENSEIGNEMENT ........................................................................ 2

III.METHODE PEDAGOGIQUE .............................................................................................. 2

IV.EVALUATION ET CONTROLE DES CONNAISSANCES .............................................. 3

V.CONTENU DU COURS ........................................................................................................ 4

INTRODUCTION ...................................................................................................................... 5

Première partie. LES INFRACTIONS PREVUES ET PUNIES PAR LE CODE PENAL


CONGOLAIS ............................................................................................................................. 8
TITRE Ier. DES INFRACTIONS CONTRE LES PERSONNES ........................................................ 8
Chapitre Ier. ETENDUE DE L’INTERET PROTEGE OU CHAMP AXIOLOGIQUE DES
INFRACTIONS CONTRE LES PERSONNES .............................................................................. 8
Chapitre II. ETUDE ANALYTIQUE DES INFRACTIONS COURANTES CONTRE LES
PERSONNES ................................................................................................................................ 19
Chapitre III. APERCU DES AUTRES INFRACTIONS CONTRE LES PERSONNES ............. 66

CODE PENAL CONGOLAIS ................................................................................................. 66


LIVRE DEUXIÈME : DES INFRACTIONS ET DE LEUR RÉPRESSION EN PARTICULIER .. 66
TITRE 1. DES INFRACTIONS CONTRE LES PERSONNES ....................................................... 66
SECTION I. DE L’HOMICIDE ET DES LESIONS CORPORELLES VOLONTAIRES................ 66
TITRE II. INFRACTIONS CONTRE LES PROPRIETES OU LES BIENS ................................... 79
Chapitre Ier. ETENDUE DE L’INTERET PROTEGE OU CHAMP AXIOLOGIQUE DES
INFRACTIONS CONTRE LES PROPRIETES ........................................................................... 79
Chapitre II. ANALYSE DES INFRACTIONS TYPES CONTRE LES PROPRIETES OU LES
BIENS ........................................................................................................................................... 82
Chapitre III. APERCU DES AUTRES INFRACTIONS CONTRE LES PROPRIETES OU LES
BIENS ........................................................................................................................................... 97

CODE PENAL CONGOLAIS ................................................................................................. 97


LIVRE DEUXIÈME : DES INFRACTIONS ET DE LEUR RÉPRESSION EN PARTICULIER .. 97
TITRE II. DES INFRACTIONS CONTRE LES PROPRIETES...................................................... 97
SECTION III. DESTRUCTIONS, DEGRADATIONS, DOMMAGES .......................................... 102
TITRE III. LES INFRACTIONS CONTRE LA FOI PUBLIQUE ................................................. 105
222
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Chapitre Ier. ETENDUE DE L’INTERET PROTEGE OU CHAMP AXIOLOGIQUE DES


INFRACTIONS CONTRE LA FOI PUBLIQUE ....................................................................... 105
Chapitre II. ANALYSE DE QUELQUES INFRACTIONS TYPES CONTRE LA FOI
PUBLIQUE ................................................................................................................................. 106
Chapitre III. APERCU DES AUTRES INFRACTIONS CONTRE LA FOI PUBLIQUE ......... 113

CODE PENAL CONGOLAIS ............................................................................................... 113


LIVRE DEUXIÈME : DES INFRACTIONS ET DE LEUR RÉPRESSION EN PARTICULIER 113
SECTION III. DE L’USURPATION DE FONCTIONS PUBLIQUES ........................................ 116
SECTION III BIS. DU PORT ILLEGAL DE DECORATIONS ................................................... 117
SECTION IV. DES FAUX COMMIS EN ECRITURES (infractions analysées) .......................... 117
TITRE IV : DES INFRACTIONS CONTRE L’ORDRE PUBLIC ................................................ 120
CHAPITRE Ier. ETENDUE DE LA VALEUR PROTEGEE OU CHAMPS AXIOLOGIQUE
DES INFRACTIONS CONTRE L’ORDRE PUBLIC ................................................................ 120
CHAPITRE II. ANALYSE DES INFRACTIONS DE CORRUPTION..................................... 122
Chapitre III. APERCU DES AUTRES INFRACTIONS CONTRE L’ORDRE PUBLIC .............. 133

CODE PENAL CONGOLAIS ............................................................................................... 133


LIVRE DEUXIÈME : DES INFRACTIONS ET DE LEUR RÉPRESSION EN PARTICULIER 133
TITRE V. INFRACTIONS CONTRE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ............................................. 152
CHAPITRE Ier. ETENDUE DE LA VALEUR PROTEGEE OU CHAMPS AXIOLOGIQUE
DES INFRACTIONS CONTRE LA SECURITE PUBLIQUE .............................................. 152
Chapitre II. APERCU DES INFRACTIONS CONTRE LA SECURITE PUBLIQUE .............. 153
TITRE VI. INFRACTIONS CONTRE L’ORDRE DES FAMILLES ............................................ 158
Chapitre Ier. ETENDUE DE L’INTERET PROTEGE OU CHAMP AXIOLOGIQUE DES
INFRACTIONS CONTRE L’ORDRE DES FAMILLES .......................................................... 158
Chapitre II. : ANALYSE DE L’INFRACTION DE VIOL ......................................................... 160
Chapitre III. APERCU DES AUTRES INFRACTIONS CONTRE L’ORDRE DES FAMILLES
..................................................................................................................................................... 168
TITRE VII. DES ATTEINTES AUX DROITS GARANTIS AUX PARTICULIERS .................. 181
Chapitre unique. NOMENCLATURE ET DEFINITION ........................................................... 181
TITRE VIII. DES ATTEINTES À LA SÛRETÉ DE L’ÉTAT ...................................................... 183
Chapitre unique. NOMENCLATURE ET DEFINITION ........................................................... 184

Deuxième partie. NOMENCLATURE, CLASSIFICATION ET DEFINITION DES


INFRACTIONS PREVUES PAR LES LOIS DE DROIT PENAL PARTICULIER ........... 193
Titre Ier . LES CRIMES CONTRE LA PAIX ET LA SECURITE DE L’HUMANITE ................. 193
Titre II. LES INFRACTIONS DEFINIES PAR LA CONSTITUTION DE LA REPUBLIQUE
DEMOCRATIQUE DU CONGO ................................................................................................... 201
223
Droit pénal spécial, Notes de cours, 2016 par Manasi N’kusu-Kaleba, P.A.

Titre III. LES INFRACTIONS COURANTES PREVUES PAR LE CODE DE LA FAMILLE ... 207
Titre IV. LES INFRACTIONS PREVUES PAR LA LOI N° 09/001 DU 10 janvier 2009
PORTANT PROTECTION DE L'ENFANT................................................................................... 209

TABLE DES MATIERES ..................................................................................................... 221

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