A53 Souley Wade JAS09
A53 Souley Wade JAS09
Résumé Les inondations urbaines constituent une préoccu- Journée internationale pour la réduction des catastrophes,
pation majeure au Sénégal. Elles affectent d une manière ré- Salvano Briceno, directeur du Secrétariat de la Stratégie in-
currente la ville de Saint Louis, au Nord du Sénégal, en liaison ternationale pour la réduction des catastrophes (UN/ISDR),
avec les crues du fleuve, mais aussi avec les eaux de pluie sta- a indiqué que près de 230 000 personnes sont mortes au
gnantes. Dans la région de Dakar, les inondations ont ponctué cours du premier semestre de 2008, suite aux conséquences
les saisons de pluies de ces dernières années. En particulier, les
des catastrophes naturelles. Au total 130 millions de per-
événements pluvieux de 2005 ont provoqué des inondations
catastrophiques qui ont affecté 16 communes sur les 26 que sonnes ont été touchées par les catastrophes naturelles qui
comptent la banlieue de Dakar, entraînant la destruction de ont fait en même temps des dégâts matériels estimés à 35
nombreuses maisons, le déclenchement d une épidémie de cho- milliards de dollars américains, a ajouté M.Briceno.
léra et le quasi-isolement de la capitale du reste du pays. Le L'UN/ISDR indique que plusieurs événements majeurs ont
traitement numérique et l analyse de photographies aériennes été la cause principale de cette situation tragique, parmi les-
et d images satellitaires SPOT a permis d établir une carto- quels le cyclone Nargis au Myanmar, qui a frappé le 10 mai
graphie de l occupation du sol de la région sur une période le Sud du pays, faisant plus de 22 000 morts et 41 000 dis-
couvrant une quarantaine d années (1966-2006). Cette appro- parus ; le tremblement de terre dans la région du Sichuan,
che a également permis cartographier les zones inondées et de
en Chine, d'une magnitude de 8,0 sur l'échelle ouverte de
découvrir qu elles correspondent à des zones de forte crois-
sance urbaine autour des mares et des marécages. La Richter, qui a fait au total près de 90 000 morts et disparus ;
vulnérabilité a l inondation est donc bien en relation avec les violents ouragans dans les Caraïbes, ainsi que les fortes
l installation des populations sur des sites réputées non aedifi- inondations en Inde.
candi. Des catastrophes naturelles, de plus en plus nombreuses et
Mots clefs occupation du sol, inondation urbaine, Dakar, de plus en plus fréquentes, affectent la plupart des pays
images SPOT d Afrique Parmi elles, les sécheresses et les inondations ont
des conséquences graves sur la sécurité alimentaire et hy-
I. INTRODUCTION drique qui ont énormément coûté humainement et économi-
quement. Le continent africain a été notamment frappé en
La notion de catastrophe est étroitement liée à celle de ris- 2007 par des inondations qui ont fait en Janvier 2 millions
que majeur qui est définie comme un événement dangereux de victimes au Centre et à l Est et, en Juillet et Août de la
appelé « aléa », d origine naturelle (séismes et éruptions même année, 2,6 millions de victimes dans une vaste région
volcaniques, tsunamis, inondations, glissements de terrain, allant d Ouest en Est [1]. Le Sénégal subit, au rythme du
sécheresses, péril acridien, foudre, feux de forêt ou de changement climatique et du développement économique
brousse, érosion côtière, etc.) ou technologique (accidents difficile à contrôler, une panoplie de risques majeurs, sour-
industriels, de transport aérien, maritime, ferroviaire, de ces de vulnérabilité pour les populations, les enjeux envi-
transports de matières dangereuses, etc.), et dont les effets ronnementaux et économiques (PAPNGRC/DPC, 2008).
prévisibles peuvent occasionner de nombreuses victimes, Au premier rang des risques, les inondations affectent prati-
d importants dégâts matériels et un impact négatif sur quement toutes les régions du pays. Elles sont d origine na-
l environnement. Un risque naturel est donc la rencontre turelle ou anthropique, liées au réchauffement de la planète
entre un aléa d'origine naturelle et des enjeux humains, éco- (dérèglement et variabilité du climat, élévation du niveau de
nomiques ou environnementaux. la mer), aux fortes précipitations, au débordement des cours
Les catastrophes naturelles augmentent régulièrement en d eau ou des eaux marines, à l urbanisation anarchique, aux
intensité et en fréquence, avec des effets dévastateurs sur le défaillances en matière d aménagement, à la déforestation,
plan humain et sur celui du développement. En attestent, etc. Leurs impacts sont d ordre environnemental (érosion
ces dernières années, les tsunamis et séismes en Asie du hydrique, ravinement salinisation et pertes de sols arables),
Sud-Est, le cyclone Katrina aux Etats-Unis et les inonda- socioéconomiques et sanitaires, socio-culturels (déplace-
tions en Afrique. Les principales causes identifiées sont le ments de populations, destruction de maisons, de sites et
changement climatique, la démographie galopante, vestiges historiques, etc.). Les dégâts dus aux inondations
l urbanisation non planifiée, la dégradation de portent aussi sur les infrastructures, les équipements publics
l Environnement. En moyenne par an, de 2000 à 2005, près et l économie nationale. Tous ces impacts et sources de pré-
de 300 millions de personnes ont été affectées par les catas- carités constituent des obstacles à l atteinte des objectifs du
trophes naturelles et près de 78 000 y ont trouvé la mort millénaire pour le développement (OMD). Pour réduire les
(Scheuren et al., 2007). L'année 2008 a été particulièrement risques de catastrophes et donc réduire la vulnérabilité hu-
marquée par des catastrophes naturelles de plus en plus fré- maine et renforcer ses capacités de résistance, il faut établir
quentes dans le monde. Prenant la parole le 8 octobre, à la et mettre en uvre des stratégies de gestion dont la perti-
Journées d Animation Scientifique (JAS09) de l AUF Alger Novembre 2009
nence et l efficacité dépendent, dans une large mesure, des pulation du Sénégal issues du RGPH 2002/DPS). Elle
connaissances établies. C est dans le cadre de cette quête de concentre aussi 80% des industries et 75% des activités
connaissances que se situe le projet CRDI "Maîtrise des économiques et administratives. La forte pression démogra-
eaux pluviales et des rejets unitaires dans les espaces urba- phique à Dakar pose de multiples problèmes dans les do-
nisées de la région de Dakar, Sénégal" dont quelques résul- maines de l habitat, de la santé, du transport et de
tats du volet Télédétection sont ici présentés. Les princi- l assainissement. Dakar connaît, en effet, depuis quelques
paux objectifs visés sont : (i) l identification et la cartogra- années des problèmes de drainage des eaux pluviales, de
phie des zones inondables ; (ii) la compréhension de collecte et de traitement des déchets : seul 35% de la popu-
l origine et des causes des inondations ; (iii) l élaboration lation est branché au réseau collectif contre 60% en système
d un SIG dédié à la prévention, au suivi et à la gestion des individuel alors que 5% ne disposent d aucun système
impacts environnementaux ; (iv) la contribution à la forma- d assainissement. La moyenne pluviométrique annuelle y
tion et au développement des capacités de recherche et est de 500-600 mm.
d applications en Télédétection et SIG et (v) la sensibilisa- La région de Dakar est localisée dans la zone dite des
tion des décideurs sur l importance de la mise en uvre des Niayes, longue de 180 km, large de 5 à 30 km et constituée
outils Télédétection et SIG dans la gestion des catastrophes. d une succession de grandes dunes de sable longitudinales,
orientées NE-SW, de 15-25 m d altitude. Entre les dunes
II. CONTEXTE ET PROBLEMATIQUE s intercalent des dépressions humides, tracés d anciens ré-
seaux hydrographiques ou bas-fonds inondés par les émer-
II.1. Zone d étude gences de la nappe phréatique en saison des pluies.
L occupation anarchique de l espace en général et
La région de Dakar est située dans la presqu île du Cap l urbanisation de zones non aedificandi en particulier ont eu
Vert, entre 17°10 et 17°32 de longitude Ouest et 14°53 et pour conséquences :la rupture de la continuité hydrographi-
14°35 de Latitude Nord. Elle est limitée à l Est par la région que entre les cuvettes d une part et l inondation récurrente
de Thiés et par l océan Atlantique dans ses parties Nord, de certaines zones d habitat spontané, d autre part.
Ouest et Sud (fig. 1).
II.2. Problématique des inondations urbaines
Le traitement numérique de la série diachronique de don- Les cartes d occupation du sol ont été dressées pour les an-
nées satellitaires a permis d élaborer des cartes nées 1966, 1978, 1986, 1995 et 2008, soit environ tous les
d occupation du sol qui mettent en évidence les change- 10 ans, sur une période de 40 ans. L enseignement majeur
ments survenus, avec un intérêt particulier pour les surfaces tiré de ces cartes est que la croissance urbaine s est faite en
en eau libre et les zones inondables. particulier autour des mares et marécages, colonisant ainsi
d année en année un espace réputé non aedificandi (fig. 3).
III.2. Méthodologie
IV.2. Cartographie des inondations passant de 45 000 à 2 583 000 habitants (fig. 5a). L analyse
des statistiques de précipitations annuelles de 1919 à 2006
Les cartes des zones inondées en 1995 et 2005 (fig. 4a et met en évidence la période de sécheresse 1970-1988, enca-
4b) ont été déduites des cartes d occupation du sol. La su- drée par la période de forte pluviométrie d avant 1970 et
perposition de ces dernières montre les zones inondées une celle de moyenne pluviométrie d après 1988 (fig. 5c). Le
année ou l autre, ainsi que celles inondées les deux années pic de précipitations de l année 2005 est également bien vi-
(fig. 4c). Ces dernières s avèrent être les plus vulnérables. sible. Dans le détail, l année 2005 est caractérisée par une
forte concentration des précipitations sur une très courte pé-
a riode. En effet, sur un total de 590 mm de pluies, 270 mm,
soit 46% sont tombées en 7 jours en mi-août et 360 mm en
14 jours, soit 61% en fin août et début septembre (fig. 5d-f).
b
bb
1000
900
c 1995
1998
2000
800 2005
pluviométrie(m m)
2005
1989
700 2003
600
500
400
300
200
100
0
1919
1923
1927
1931
1935
1939
1943
1947
1951
1955
1959
1963
1967
1971
1975
1979
1983
1987
1991
1995
1999
2003
c années
60
50
40
d
pluviométrie(mm)
30
20
10
0
11
13
15
17
19
21
23
25
27
29
31
1
années
100
90
80
70
e
pluviométrie(mm)
50
30
20
10
V. DISCUSSIONS 0
11
13
15
17
19
21
23
25
27
29
31
1
jours
Précipitations journalières (Septembre 2005)
L évolution de l occupation du sol à Dakar rend compte de
70
20
13
15
17
19
21
23
25
27
29
31
1
conjugué avec le fort taux de natalité, explique la croissance Fig. 5 - Evolution de la population de Dakar de 1904 à 2004 (a),
exponentielle de la population de Dakar, de 1904 à 2004, du bâti de 1966 à 2008 (b), des précipitations annuelles (c) et jour-
nalières en juillet (d), août (e) et septembre 2005 (f).
Journées d Animation Scientifique (JAS09) de l AUF Alger Novembre 2009
VI. CONCLUSION [7] Sandholt I., Bjarne F. (2000) - Flood monitoring in the
Senegal river valley: first results based on SAR PRI data.
Le traitement et l analyse des données SPOT démontrent ERS ENVISAT Symposium Looking down the Earth in
bien le potentiel réel de l imagerie optique très haute résolu- the New Millenium. Gothenbhurg, Sweden 16 20 October
tion (THR) dans le suivi de l évolution des milieux urbains. 2000
Différentes classes d occupation du sol ont pu être distin-
guées : (i) végétation naturelle, (ii) surface en eau libre, (iii) [8] Yésou H. et Chastenet P. (2000) - Contribution des
zones artificielles, (iv) zones de cultures et (v) zones nues. données d'observation de la Terre à la gestion des crues len-
Les espaces inondées ont pu être cartographiées et le degré tes, Rapport Final WP3, Programme Eau et Feu, ESA, 35.
de vulnérabilité à l inondation des différentes communes
évalué. Ceci démontre l intérêt de l application de la tech- [9] Bocoum O., Fog B., Lô M., Nybord L., Rasmussen K.,
nologie spatiale pour la compréhension et la gestion des ca- Sandholt B., 2003. Remote sensing techniques for flood
tastrophes d inondation. Les études en cours s intéressent à monitoring in the Sene gal River Valley. Geographisk Tids-
l apport de l imagerie radar « tout temps » qui pourrait sup- skrift, Danish Journal of Geography, 103, 1, 71-81.
pléer l imagerie optique dont on sait que la qualité et la dis- [9] Yésou H., Meyer C., Clandillon S., De Fraipont P.,
ponibilité restent dépendantes des conditions météorologi- 2001. Apport des données simulées SPOT 5 pour la gestion
ques. Enfin, la phase ultime du projet s attellera à du risque d inondation. Bull. SFPT, 151-161.
l élaboration d un SIG dédié aux inondations, outil d aide à
la décision. [10] Flouzat G. Puech C. Dartus D. (2003) - Les observa-
tions par satellite pour l analyse et le suivi du fonctionne-
Remerciements Les auteurs remercient vivement la coo- ment des hydro-systemes, Bulletin de la SFPT, n°172
pération canadienne CRDI et l Université du Québec à (2003-4), pp. 3-10.
Montréal (UQAM) pour la subvention de recherche accor- [11] Henry J. B. et al., 2003. Vers une intégration des tech-
dée dans le cadre du projet « Gestion locale de l eau à niques spatiales pour la gestion des inondations. In Bull.
l aide de systèmes d information géographiques (SIG) dans SFPT, n°172 Hydrosystèmes et télédétection à haute résolu-
les pays francophones d Afrique de l Ouest et du Nord ». tion, p. 99-106.
[4] Meyer C. Geldreich P. Yésou H. (2001) - Apport des [15] Dia A.M., Wade S., Deroin J.P., Frison P.L., Kouamé
données simulées SPOT 5 pour l évaluation des dégâts de J., Rudant J.P. (2006) - Apport des données SPOT et Land-
tempête dans la forêt de Haguenau (Alsace, France). Confé- sat au suivi des inondations dans l estuaire du fleuve Séné-
rence SPOT 5 « vers de nouvelles applications », Toulouse gal. PHOTO-INTERPRETATION N° 2006/4.
27-28 novembre 2001.
[16] Wade S., Bâ K., Niang I., Trébossen H., Rudant J.P.
[5] Ortolani A et Francesco M. (2000) - Validating soil (2006) - Coastal zone mapping using multitemporal ERS
moisture estimation with ERS PRI data : operational use in SAR and ENVISAT ASAR data. Proceedings ENVISAT
DECIDE, a decision support system for floods. ERS Symposium 2007, Montreux, Switzerland 23-27 April
ENVISAT Symposium Looking down the Earth in the New 2007, ESA SP636.
Millenium. Gothenbhurg, Sweden 16 20 October 2000.
[17] Wade S., Rudant J.P., Bâ K., NDoye B. (2008) Ap-
[6] Schneider T. (2000) - Evaluation of multitemporal radar plications de la Télédétection et des SIG à l étude des inon-
data for the mapping of inundation dynamics in the Save dations urbaines de Saint Louis et du ravinement des sols
flood plain (Croatia). ERS ENVISAT Symposium Look- par érosion hydrique à Nioro-du-Rip (Sénégal). Télédétec-
ing down the Earth in the New Millenium. Gothenbhurg, tion, vol. 8, no 3, 2008.
Sweden 16 20 October 2000.
Journées d Animation Scientifique (JAS09) de l AUF Alger Novembre 2009
This document was created with Win2PDF available at http://www.daneprairie.com.
The unregistered version of Win2PDF is for evaluation or non-commercial use only.