Filieres Dechets Recyclage PDF
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N° 12936-01 N° 2019/N°17/CGE/SG
Rapport à
établi par
- JANVIER 2020 -
2 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Statut de communication
Non communicable
Communicable
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 3
SOMMAIRE
Synthèse ...................................................................................................................................... 6
TABLE DES RECOMMANDATIONS .................................................................................................. 8
1 Introduction .......................................................................................................................... 10
2 Les filières matériaux ............................................................................................................. 11
2.1 Les métaux................................................................................................................................ 11
2.1.1 Flux physiques ........................................................................................................................... 11
2.1.2 Données économiques ............................................................................................................. 12
2.1.3 Cadre juridique ......................................................................................................................... 13
2.1.4 Intérêt écologique du recyclage ............................................................................................... 14
2.1.5 Evolutions possibles dans les années à venir ............................................................................ 15
2.1.6 Recommandations de la mission .............................................................................................. 16
2.2 Les granulats ............................................................................................................................. 16
2.2.1 Flux physiques ........................................................................................................................... 17
2.2.2 Données économiques ............................................................................................................. 17
2.2.3 Cadre juridique ......................................................................................................................... 18
2.2.4 Intérêt écologique du recyclage ............................................................................................... 19
2.2.5 Evolutions possibles dans les années à venir ............................................................................ 20
2.2.6 Recommandations de la mission .............................................................................................. 21
2.3 Les papiers-cartons................................................................................................................... 21
2.3.1 Flux physiques ........................................................................................................................... 21
2.3.2 Contexte économique ............................................................................................................... 22
2.3.3 Cadre juridique ......................................................................................................................... 23
2.3.4 Intérêt écologique du recyclage ............................................................................................... 24
2.3.5 Evolutions possibles dans les années à venir ............................................................................ 24
2.3.6 Recommandations de la mission .............................................................................................. 24
2.4 Le plastique............................................................................................................................... 25
2.4.1 Flux physiques ........................................................................................................................... 25
2.4.2 Données économiques ............................................................................................................. 26
2.4.3 Cadre juridique ......................................................................................................................... 26
2.4.4 Intérêt écologique du recyclage ............................................................................................... 27
2.4.5 Evolutions possibles dans les années à venir et recommandations de la mission ................... 27
2.5 Le bois 28
2.5.1 Les flux physiques ..................................................................................................................... 28
4 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
SYNTHESE
Celle des métaux ferreux, pour laquelle une voie de progrès identifiée est une meilleure maîtrise
des exportations illégales de déchets, notamment sous forme de véhicules hors d’usage ;
Celle des métaux non ferreux, pour laquelle les affineurs d’aluminium sont aujourd’hui dans une
situation délicate, notamment en raison de la qualité insuffisante des déchets triés et des capacités
de recyclage du cuivre limitées en France ;
Celle du papier carton, aujourd’hui en crise du fait de l’effondrement du prix des déchets
correspondants suite à la fermeture des marchés asiatiques qui impose un réajustement des prix
de transaction entre acteurs, et dont une voie de progrès serait une plus grande incorporation de
déchets dans la fabrication de cartons ;
Celle, insuffisamment décrite, des granulats, pour laquelle la mise en place de la responsabilité
élargie des producteurs (REP) dans le secteur du bâtiment est une opportunité de compléter le
maillage du territoire avec des plateformes spécialisées facilitant leur recyclage.
Les quatre autres filières sont dans des situations très contrastées :
La filière plastique apparaît stratégique. Elle recycle aujourd’hui une faible proportion des déchets
plastiques, alors que le recyclage des résines est une des conditions de l’acceptation sociale de ce
matériau ;
La filière verre, mature, a identifié les pistes de progrès à mettre en œuvre ;
La filière bois met en avant une amélioration possible de la classification des déchets de bois et de
la réglementation pour améliorer la valorisation énergétique de ce matériau ;
La filière textile doit progresser dans la collecte et le tri, et mettre au point grâce à des efforts de
recherche et développement les procédés de recyclage des fibres textiles.
Pour augmenter le recyclage, des pistes communes aux différentes filières ressortent, pour lesquelles
la mission formule des recommandations :
Recommandation n° 8. Afin d’améliorer la qualité du tri, (1) mieux informer les particuliers sur
les consignes de tri, (2) établir un bilan de l’application du décret 5 flux,
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 9
1 INTRODUCTION
Les matériaux à prendre en compte ont fait l’objet d’un choix avec la direction générale de la
prévention des risques (DGPR) dès le début de l’exercice. Ont été ainsi retenus, par ordre décroissant
de chiffres d’affaires du recyclage, les métaux (l’acier, l’aluminium et le cuivre), les granulats, le papier-
carton, les plastiques, le bois, le verre et les textiles.
L’accent mis sur la dimension économique a révélé le manque d’information consolidée sur ce sujet.
Des bilans physiques du recyclage sont périodiquement établis par l’agence de l’environnement et de
la maîtrise de l’énergie (Ademe). Les rapporteurs ont pu bénéficier du dernier bilan publié1 et avoir
accès aux documents préparatoires pour celui qui devrait paraître en 2020, au moins en ce qui
concerne certaines filières. De même, plusieurs travaux estiment les bénéfices environnementaux
apportés par le recyclage, dont une étude réalisée par l’Ademe et la fédération des entreprises de
recyclages (Federec)2. En revanche, les données économiques sont souvent considérées par les
interlocuteurs rencontrés comme des données confidentielles qu’ils ne communiquent que
parcimonieusement et ne publient pas.
Cette réflexion intervient dans un contexte marqué par l’adoption de la loi contre le gaspillage et pour
l’économie circulaire, préparée par la feuille de route pour l’économie circulaire (FREC), l’adoption des
quatre directives européennes du paquet économie circulaire et une hausse programmée de la taxe
générale sur les activités polluantes (TGAP) visant à rendre le recyclage plus attractif que l’incinération
ou l’enfouissement.
La mission a travaillé essentiellement à partir des documents qu’elle a pu rassembler et des personnes
qu’elle a pu interroger. La liste des personnes rencontrées, que les rapporteurs remercient pour le
temps qu’ils leur ont consacré, et les principaux rapports consultés figurent en annexes.
Ce rapport se présente sous forme d’une première partie qui examine succinctement la situation
actuelle et les perspectives d’évolution pour les sept filières matériaux retenues. Des annexes par
matériau développent ces constats. A partir de leur analyse, les rapporteurs proposent dans une
seconde partie dix orientations transversales communes à l’ensemble des filières. Le rapport se conclut
par quelques réflexions générales et une proposition de thèmes d’approfondissement.
1 Voir https://www.ademe.fr/bilan-national-recyclage-2005-2014
2 Voir https://www.ordif.com/article/un-outil-pour-mesurer-les-bienfaits-du-recyclage
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 11
de l’UE : aucun plafond de paiement en espèces (Allemagne, Autriche, Slovénie, Lituanie, Lettonie, Islande, Chypre et
Malte), plafond à 2 500 euros pour les résidents et 15 000 euros pour les non-résidents (Espagne), virement bancaire au-
delà de 1 000 euros (Portugal), plafond à 2 999,99 euros depuis le 1er janvier 2016 (Italie), montant maximum limité à
3 000 euros depuis janvier 2014 (Belgique).
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 13
à 533,12 €/t (pour une TA comprise entre 45 et 75%) avec un prix d’aluminium primaire (DIN 226) qui
s’élevait à 1850 €/t.9 La qualité du tri a donc une incidence directe et significative sur le prix de
facturation aval de la matière première recyclée.
Actuellement, le prix du cuivre s’élève à 5 239 euros la tonne10 avec un coût de reprise compris entre
3 500 et 4 000 € la tonne.11
Aucun chiffre sur le coût du recyclage, distinguant ses différentes étapes n’a été communiqué à la
mission. En 2017, l’activité de recyclage (collecte et préparation de déchets) de métaux ferreux
représentait un CA annuel 2,2 Mds €, 11 730 salariés sur 848 sites. Cette activité représentait 3 Mds €
pour les métaux non ferreux, dont 473 M€ pour les déchets d’aluminium, et 9 392 salariés sur 679
sites.
2.1.3 Cadre juridique
Depuis 2018, l’Union européenne fixe dans quatre directives composant le paquet « économie
circulaire », des taux et des échéances de recyclage pour les métaux ferreux (70 % d’ici 2025 à 80 %
d’ici 2030) et l’aluminium (50 % d’ici 2025 à 60% d’ici 2030). Ce paquet révise les directives « déchets »,
« déchets d’emballages », « mise en décharge » et refond les trois directives relatives aux VHU, DEEE
et déchets de piles et d’accumulateurs. La nouvelle réglementation définira des méthodes de calcul
harmonisées des taux de recyclage et des mesures pour encadrer la sortie du statut de déchet et la
promotion du réemploi.
La feuille de route pour l’économie circulaire (FREC) du 23 avril 2018 se fixe comme objectifs de
généraliser l’écoconception et d’incorporer davantage de matière recyclée. Dans ce but, elle propose
de mettre en place des « bonus-malus » sur l’éco contribution, pouvant excéder 10% (chiffre porté à
20% dans le projet de loi sur l’économie circulaire) du prix de vente hors taxes des produits. L’absence
d’écoconception entraîne des surcoûts dans le traitement des déchets, d’où l’idée de développer les
échanges entre recycleurs et gestionnaires des REP. La filière sidérurgique bénéficierait par exemple
de consultations plus systématiques organisées par les REP dont les produits utilisent de l’acier.
La réglementation française est parfois plus contraignante que les réglementations des autres pays
européens. C’est notamment le cas pour la transposition de la directive européenne
2013/59/EURATOM à travers les décrets n°2018-434, n°2018-437 et n°2018-438. Cette situation peut
créer une concurrence déloyale sur les alliages recyclés en France.12
Les fédérations professionnelles regrettent également que les recycleurs implantés dans les zones
transfrontalières soient victimes de l’absence d’harmonisation européenne en matière d’achat de
déchets. Le CA dissimulé s’élève à 1,2 Mds € selon Aluminium France et Federec et correspond à 30 %
des volumes de métaux collectés qui ne sont pas recyclés en France. Pourtant, l’article 55 de la loi
9 http://www.affimet.fr/fr/nos-achats/aluminium-issu-du-tri-selectif.html
10 Statistiques de la Banque Mondiale, pour un fil ou cathode de cuivre de grade A (99,9935 % de pureté)
11 http://www.phenix-recyclage.com/fr-tarifs_de_rachat.html
12 Et a fortiori par rapport aux pays non européens qui recyclent des déchets de très faible activité et n’appliquent pas cette
directive.
14 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
LOPSI II permet au ministère de l’économie et des finances, de contrôler les collecteurs de métaux13.
Pour faire face à ce fléau, les autres pays européens ont mis en place des mesures protectionnistes.
Les professionnels du recyclage ont signé un contrat de filière 2019-2022 « transformation et
valorisation des déchets » en lien avec les consommateurs dans le cadre du contrat spécifique de filière
« mines et métallurgie ». Une feuille de route opérationnelle a été établie par les industriels, en lien
avec l’Etat et les organisations syndicales proposant, notamment de développer une filière intégrée
de recyclage des batteries lithium et les véhicules hors d’usage de demain.
Un projet de consigne généralisée des canettes métalliques a été discuté et finalement non retenu
dans le cadre du projet de loi sur l’économie circulaire. Il aurait permis d’améliorer la collecte des
canettes métalliques, mais aurait entraîné des diminutions des recettes de collectivités locales qui
gèrent aujourd’hui ces déchets.
Au niveau européen, il existe une demande non formalisée de certains acteurs pour obtenir un
certificat de matière recyclée. En France, la réglementation n’impose pas de certification matière et
d’affichage du taux de matière première recyclée dans le produit. Les filières de recyclage des métaux
soutiennent l’idée d’une expérimentation de la certification sur l’incorporation de matière.
2.1.4 Intérêt écologique du recyclage
Selon une étude Ademe14, une tonne d’acier recyclé économise plus de deux fois sa masse en matière
première. Elle permet d’éviter un rejet de 3,190 t équivalent CO2 en première fonte, et 1,100 t CO2
pour une tonne d’acier entièrement issu du recyclage. Une tonne d’acier recyclé permet d’éviter par
rapport à la production d’une tonne d’acier primaire, l’équivalent de 57% des émissions de CO2 et de
40% de la consommation énergétique primaire.
La production d’une tonne d’aluminium primaire produit de 1,7 à 23 tonnes de CO2 selon le procédé
et la zone de production15. L’aluminium secondaire issu du recyclage a une empreinte carbone
beaucoup plus faible, ne nécessitant que 5% environ de l’énergie nécessaire à la production de
l’aluminium primaire. Selon Federec en 2017, la valeur retenue est de 7 803 kg équivalent CO2 pour la
matière primaire et de 562 kg équivalent CO2 pour la matière de recyclage avec une incertitude de 30%
sur le facteur d’émission.
La valeur retenue pour le cuivre était de 2,930 kg CO2/kg de métal produit avec une incertitude de 50%
(3,3 à 6,2 kg CO2/kg de métal avec un taux de recyclage de 40% sur la base d’une électricité
entièrement produite au charbon). Il conviendrait toutefois d’ajouter l’empreinte carbone du
transport de déchets français vers des pays tiers pour leur recyclage.
La France dispose d’un mix électrique faiblement carboné et des prix de l’électricité en moyenne plus
bas que dans d’autres États membres (Italie, Royaume-Uni, Espagne, Belgique). Par exemple, les
industriels peuvent se fournir à un prix régulé à 42 euros du MWh.
Dans son récent rapport n°649, le Sénat (soutenu par Eurofer) invite la Commission européenne à
inscrire la mise en place d’une « taxe carbone » également appelée « mécanisme d’inclusion carbone »
13 En application des articles 321-7 du code pénal, L. 80 F à J et 96 H du Livre des procédures fiscales ainsi que l’article 89 A
du code général des impôts. Les amendes encourues en application de l’art. L. 541-46 du code de l’environnement varient
de 75 k€ à 150 k€, accompagnées de 2 à 7 ans d’emprisonnement ferme.
14 Base carbone, Ademe (2014).
15 Aluminium smelting greehouse footprint and sustainability, Jeffery Keniry, Light métals, 2008.
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 15
(MIC) aux frontières de l’Union Européenne au sein de ses priorités politiques pour la nouvelle
mandature.
2.1.5 Evolutions possibles dans les années à venir
Le taux de ferraille recyclée en France a diminué de 5% depuis 15 ans. La consommation de ferrailles
s’est dégradée en raison du recul de la filière électrique en France qui est passée de 40% (2008-2012)
à 31% en 2017. De plus, les fluctuations sur le prix de l’électricité et la hausse du coût du graphite ont
entraîné un surcoût de production pour les aciéristes utilisant la filière électrique et a défavorisé
l’utilisation de ferrailles.
Dans certains cas, la R&D peut améliorer la productivité de la filière faisant appel au recyclage. L’anode
graphite (émettrice de C02) est ainsi remplacée pour la production d’aluminium secondaire par une
anode inerte non émettrice. Par ailleurs, le procédé de pyrolyse qui élimine les impuretés organiques
des emballages d’aluminium multicouches (excédent énergétique utilisé pour le chauffage ou la
production d’électricité) avant leur recyclage, est à développer en France (deux usines de pyrolyse
d’une capacité totale de 90 000 tonnes existent en Allemagne). Ce procédé peut également être utilisé
pour tout déchet industriel, du bâtiment ou de l’automobile dont la teneur en matière organique est
supérieure à 5%.
Dans les années à venir, le remplacement progressif du parc automobile de véhicules à motorisation
thermiques par des véhicules à motorisation électrique réduira la consommation d’acier de 15 à 20%
par volume par véhicule, et jusqu’à 50% des besoins en tubes d’acier. La consommation de pièces
fondues en aluminium secondaire sera aussi réduite. En revanche, le bobinage des moteurs électriques
et le câblage des véhicules électriques nécessitera plus de cuivre.
Le développement de la filière éolienne (dont la fondation « jacket », le mât, le transformateur ou la
génératrice sont composés pour 50 à 90 % d’acier) génère d’importants besoins
Le tri alliage par alliage permet de proposer des matières premières recyclées (MPR) de meilleure
qualité. Des technologies de tri au laser, utilisées en Allemagne, peuvent contribuer à améliorer la
qualité des déchets. En ce qui concerne les emballages aluminium multicouches (25 % des produits
mis sur le marché), le développement des procédés de pyrolyse contribue au recyclage. Actuellement,
il n’y a que 25 centres en France qui en sont équipés. L’Allemagne et l’Autriche ont développé en 2015
des procédés de tri mécanique qui permettent de récupérer les métaux des VHU, préparent un
combustible solide de récupération (CSR). Dans le cas du cuivre, les fabricants européens de câbles
utilisent du cuivre secondaire sans que la présence de matières indésirables n’impacte la conductivité
des câbles. Globalement, l’amélioration des critères de tri des opérateurs français permettrait de
réduire les flux d’imports/exports de déchets métalliques et augmenterait les taux d’incorporation de
matière secondaire dans la production française.
L’absence d’écoconception des produits (robinetteries en laiton, en fonte ou à taux faible de plomb
par exemple) entraîne des coûts élevés de traitement des gaz en fonderie, des poussières impures de
déchets et des sables (issus des moules) qui n’ont plus d’exutoire suite à la fermeture des cimenteries.
Actuellement, les déchets qui contiennent des impuretés organiques (dérivés phénoliques) sont
stockés ou enfouis en l’absence de filière de traitement.
La R&D des producteurs (écoconception) n’inclut que partiellement la gestion de fin de vie des produits
mis sur le marché à cause du clivage réglementaire entre REP et industriels du recyclage. Cette
situation nuit à la performance environnementale française et devrait s’accompagner de la création
d’un centre d’expertise du recyclage associant l’ensemble des acteurs de la chaîne de valeur
16 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
16 Voir
17 http://materrio.construction/ localise les plates-formes en France.
18 Le ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales affiche un taux situé entre 48
et 68 % selon les différentes sources.
18 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
19 L’UNICEM estime que 500 plateformes supplémentaires augmenteraient la collecte et le recyclage de 80 Mt.
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 19
nature et la valorisation des déchets utilisés (ils ne reçoivent plus de contrepartie financière pour
accepter d’utiliser des déchets dans leurs aménagements ou constructions).
Le décret d’application de l’article 93 de la LTECV a fixé les modalités de création d’un réseau de
déchetteries du BTP. La loi n°2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la
République, également connue en tant que Loi NOTRe, a confié aux régions la responsabilité d’établir
un plan régional de prévention et de gestion des déchets (PRPGD) à travers un schéma régional de
développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET). En 2018, parmi les cinquante mesures
de la FREC, trois mesures phares étaient destinées au secteur du BTP : instauration d’une filière REP
appliquée aux déchets du bâtiment pour lutter contre la mise en décharge et développer le recyclage ;
révision du diagnostic pour le réemploi et la valorisation des déchets de chantiers ; développement de
guides techniques sur les performances techniques, sanitaires et environnementales, afin de favoriser
le réemploi dans la construction. Le décret n°2011-610 du 31 mai 2011 et l’arrêté du 10 décembre
2011 relatif au diagnostic portant sur la gestion des déchets issus de la démolition de catégories de
bâtiments complètent ces mesures.
Le centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement
(Cerema) a publié plusieurs guides de valorisation des matériaux alternatifs en technique routière
(laitiers, mâchefers, déchets de déconstruction issus du BTP) pour maîtriser l’impact environnemental
du remblaiement de carrières et des projets d’aménagement (sous-couche routière, merlon phonique,
etc.). Dans le cadre du tri à la source, les maîtres d’ouvrages ont pour obligation depuis le 1er mars
2012 de réaliser un diagnostic portant sur les déchets issus des travaux de démolition, pour les
bâtiments ayant une surface de plancher supérieure à 1000 m² ou ayant hébergé une ou plusieurs
substances dangereuses. Malgré ces mesures, la France est peu performante au niveau européen en
matière de recyclage des déchets du BTP (une dizaine de pays affichent un taux de recyclage supérieur
à 95 %). Cet écart peut s’expliquer par le faible taux de réemploi des briques, tuiles et céramiques
davantage exploités en Europe du Nord (toitures végétalisées, constructions en briques, revêtement
de terrains de sport, etc.)20.
La lutte contre les sites et filières illégaux de gestion des déchets (décharges sauvages) relève de la
police du maire. La loi économie circulaire en cours de discussion prévoit de lui donner de nouveaux
outils d’intervention.
2.2.4 Intérêt écologique du recyclage
Selon le bilan environnemental 2018 des routes de France21, 42 millions de tonnes de granulats et
15 millions de tonnes d’agrégats d’enrobés ont été recyclés. L’utilisation d’enrobé recyclé a permis une
diminution de 27% des GES entre 2009 et 2018. En 2019, le Groupe Eiffage a expérimenté, en
collaboration avec l’institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et
des réseaux (IFSTTAR)22 et les équipes de l’écoquartier LaVallée à Chatenay-Malabry, une technique
de recyclage de bétons qui a la capacité de piéger du carbone. Cette technique consiste à introduire
du CO2 sous pression dans les granulats issus de la déconstruction, à capter ainsi 75 à 150 kg de CO2
par tonne de béton recyclé et à économiser dans le même temps l’extraction de 650 kg de granulats
de carrière.
20 Service contract on management of construction and demolition waste – SR1, European Commission (2010).
21 https://www.routesdefrance.com/wp-content/uploads/BILAN-ENVIRONNEMENTAL-2018-juin-2019.pdf
22 Institut français de sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux.
20 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
La commande publique doit favoriser l’éco-conception et la R&D des façades éco-conçues, même
modulaires.
Enfin, la mission a identifié le projet VALAME (Université de Toulouse et Société NEO-ECO) qui apporte
une solution innovante de traitement des déchets amiantés, permettant leur inertage et recyclage en
composés valorisables, et qui a reçu le prix de l’innovation au salon de l’amiante 2019.
2.2.6 Recommandations de la mission
Le développement de 500 plateformes de tri au-delà des 1 500 existantes est souhaitable. Les
chantiers territoriaux devront être identifiés à travers la base centralisée de déclaration de projet de
travaux par le maître d’ouvrage (DT) et la déclaration d’intention de commencement de travaux par
l’exécutant des travaux (DICT)afin de connaître les gisements potentiels et d’aider à la bonne
implantation des 500 nouvelles plateformes. Il convient de mettre en place en concertation avec
Qualibat une politique de formation au tri des matériaux des personnels de chantier et de les qualifier
pour cette tâche (voir aussi recommandation n°8).
Par ailleurs, la commande publique doit appliquer sans délai les mesures 33, 34, 35 et 44 de la FREC et
inclure une exigence sur la teneur minimale des granulats recyclés, adaptée à la composition des
bétons et des territoires dans un contexte de filière courte (voir recommandation n°1).
Après utilisation, les papiers et cartons usagés sont collectés (1) avec les déchets ménagers gérés par
les collectivités locales, (2) avec les déchets de la grande distribution, de l’industrie et des commerces
de taille moyenne, (3) avec les chutes de production.
Après une phase de tri et de traitement, les papiers-cartons à recycler (PCR) sont envoyés à des
fabricants de papiers-cartons. Les refus de tri (par exemple des éléments plastiques) peuvent être
valorisés énergétiquement ou enfouis. La fibre de cellulose se dégrade à chaque cycle de fabrication
de la pâte à papier : il est donc nécessaire d’introduire de la fibre de bois vierge dans les PCR pour
maintenir la qualité des papiers et cartons fabriqués.
Le gisement de papiers et cartons usagés est estimé en 2017 à 8,2 Mt par le bilan national du recyclage
2008-2017. La collecte de papiers et cartons usagés étant de 7,3 Mt en 2017, le taux de collecte est
estimé à 88 % en 2017, au-dessus de la moyenne européenne (72 %).
La France est devenue exportatrice nette de PCR depuis 2001 selon la direction générale des douanes
et droits indirects, entre 150 et 180 M€ depuis 2007. Ces échanges se font essentiellement avec des
pays de l’Union Européenne et sont stables depuis 2009. La France a exporté 2,896 Mt de PCR et
importé 0,986 Mt (chiffres 2017).
Les quantités de PCR incorporés dans la fabrication de papiers-cartons sont stables en France depuis
2014 (5,383 Mt en 2017), à des niveaux (environ 67 %) supérieurs à la moyenne européenne (52 %).
Ainsi, en comparaison avec les moyennes européennes, la France a de bons taux de collecte, et
d’incorporation des PCR. Comme la plupart des pays membres de la Confederation of European Paper
Industries (CEPI), la France a une production excédentaire de PCR, ce qui est une des causes des
turbulences actuelles sur les prix.
2.3.2 Contexte économique
Le cours de la pâte à papier marchande, qui est mondial, a atteint des sommets en 2018, entre 800 €
et 1 000 € par tonne, selon la taille des fibres, avant de se retourner depuis le début du 4ème trimestre
2018. Les prix de référence des papiers et cartons à recycler (PCR) ont suivi une évolution comparable
quelle que soit la nature de la matière26.
En effet, les exportations européennes de PCR vers l’Asie, nécessitées par un excédent européen en
papier-carton de recyclage d’environ 8 Mt/an sur 56 Mt collectés, ont baissé de 25 à 30 % dans le
courant 2018, suite à la décision de la Chine, de la Malaisie et du Vietnam d’accroître leurs exigences
en termes de qualité de produits à recycler.
Cette crise a conduit Revipac27 à activer fin 2019 la clause de sauvegarde qui la lie à l’éco-organisme
Citeo (voir §3 pour les rôles de Revipac et Citeo) et de mettre fin aux prix planchers minimum de reprise
à compter du 1/1/2020 (entre 60 € et 75€/tonne pour PCNC28) : les prix de reprise seront désormais
alignés sur les prix de marché. Si les prix de marché devenaient négatifs, REVIPAC reprendrait les PCR
pour 0 €.
26 Par exemple, le prix de vente moyen départ récupérateur des « Papiers et cartons mêlés non triés » est passé de 25€/t au
4ème trimestre 2018 à 18€/t au 2ème trimestre 2019, et les « Papiers graphiques triés pour désencrage » de 139€/t à 90€/t
sur la même période selon la cotation REPECAR (Espagne).
27 REVIvre PACkaging, association créée par des acteurs de l’emballage papier-carton.
28 Papier-carton non complexé issu de la collecte séparée et/ou de la déchèterie.
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 23
Selon la confédération française de l’industrie des papiers, cartons et celluloses (Copacel) et Federec
(chiffres 2017), la fabrication de papiers et cartons est assurée en France par 75 entreprises, situées
sur 85 sites, dont 46 usines utilisent des PCR. Le chiffre d’affaires de la fabrication de pâte, de papiers
et cartons est de 5,476 Md€, et 12 334 ETP (dont 4 200 liés à l’incorporation de PCR). La collecte et la
préparation des PCR s’effectue sur 594 sites, pour un chiffre d’affaires de 0,918 Md€, et 8 214 salariés.
2.3.3 Cadre juridique
La directive européenne 94/62/CE sur les emballages et déchets d’emballages, modifiée notamment
par la directive 2004/12/CE, fixe des objectifs en matière de valorisation (recyclage matière, recyclage
organique et valorisation énergétique) sans imposer la mise en place de dispositif REP29. La directive
2004/12/CE a fixé de nouveaux objectifs plus ambitieux de recyclage et de valorisation pour 2008 pour
12 pays, avec des délais plus longs pour les autres pays. Ces directives ont été transposées en droit
français par des décrets (92-377, 94-609, 96-108, 98-638).
Deux directives européennes du « Paquet économie circulaire » (mai 2018) concernent la filière des
papiers cartons. Les mesures suivantes sont notamment prévues : la totalité (ou le cas échéant 80 %
ou 50 % selon la filière30) des coûts de collecte, de tri et de traitement doit être couverte par les
metteurs sur le marché via une éco-contribution ; l’éco-modulation est préconisée ; un objectif de
recyclage en 2025 est fixé à 75 % et à 85 % en 2030.
La loi française n°2009-967 fixe un objectif national de recyclage matière et organique de 75 % dès
2012 pour les emballages ménagers, l’extension du financement par les contributeurs aux emballages
ménagers, et la couverture des coûts de collecte, de tri et de traitement à hauteur de 80 % des coûts
nets de référence d’un service de collecte et de tri optimisé. La loi n°2010-788 prévoit notamment la
modulation des contributeurs en fonction de la prise en compte, lors de la conception du produit, de
son impact sur l’environnement en fin de vie. Le décret n°2016-288 du 10 mars 2016 oblige les
producteurs et détenteurs de déchets (entreprises, commerces, administrations, etc.) à trier 5 flux de
déchets (dont un flux pour les papiers et cartons) afin de favoriser la valorisation de ces matières.
Dans le cas où le détenteur final de l’emballage est un ménage, le conditionneur qui a mis l’emballage
sur le marché est tenu de contribuer ou de pourvoir à son élimination, dans le cadre de la filière REP31
obligatoire sur les emballages ménagers. Selon l’article R. 543‑56 du code de l’environnement, il doit
adhérer à un organisme collectif agréé par les pouvoirs publics. Deux eco-organismes32 sont ainsi
agréés, Adelphe® et Eco-Emballages®, dont les agréments ont été renouvelés pour la période 2018-
2022 (arrêté du 6 mai 2018). Eco-Emballages (emballages ménagers) a absorbé Ecofolio (imprimés
papiers et des papiers graphiques) le 8 septembre 2017, et l’ensemble s’appelle depuis cette date Citeo
; Adelphe est une filiale de Citeo.
Dans le cas où le détenteur final de l’emballage n’est pas un ménage, il existe une obligation de
valorisation, et chaque entreprise détentrice de déchets d’emballages doit répondre individuellement
à ses obligations (art. R. 543-66 à R. 543-74 du code de l’environnement) de recyclage. Pour aider les
entreprises, les acteurs de la chaîne de valeur des emballages papier-carton (les fabricants de
matériaux d’emballages, les fabricants d’emballages et les papetiers-recycleurs) ont créé Revipac33.
2.3.4 Intérêt écologique du recyclage
Une fibre de cellulose est utilisée en moyenne 7,6 fois. Le recyclage des papiers-cartons permet de
limiter la consommation d’énergie cumulée, l’acidification de l’air, l’eutrophisation34 des eaux douces
et de la mer, la consommation d’eau. Etrangement, ce recyclage a un effet négatif sur l’effet de serre,
en émettant, en net, près d’un million de tonnes équivalent CO2 (chiffre 2014)35. Cette émission nette
de gaz à effet de serre s’explique par deux faits : les usines qui produisent de la pâte à papier vierge
utilisent de la biomasse comme source d’énergie (non comptabilisée), alors que les acteurs du
recyclage de PCR utilisent des sources d’énergie non renouvelables (dans le modèle Ademe).
2.3.5 Evolutions possibles dans les années à venir
La Copacel s’attend à une hausse du commerce électronique, favorable au papier-carton d’emballage,
et à un engouement pour les produits de substitution, notamment en carton, suite à la directive UE
n°2019/904 du 5 juin 2019 relative à la réduction de l’incidence de certains produits en plastique sur
l’environnement de l’Union Européenne règlementant dès janvier 2020 les plastiques à usage unique
; les exigences croissantes en matière d’hygiène36 et le développement des impressions à domicile
devraient stabiliser la demande de papier, malgré la baisse de consommation de papiers journaux et
magazines. Cependant les spécialistes ne voient pas de perspective d’amélioration sur le marché des
cartons avant mi 2020, début 2021. Si le taux européen moyen d’incorporation passait de 52 à 66 %
(ce qui semble possible compte tenu des prix très bas des PCR, et des nouvelles obligations
européennes), l’excédent européen serait résorbé. Les très fortes difficultés économiques actuelles
semblent donc conjoncturelles.
Des technologies de fabrication de papiers multi-couches, par exemple pour le papier à imprimer, sont
en cours d’élaboration.
2.3.6 Recommandations de la mission
Entretemps, toutes les mesures incitatives pour accroître la demande de PCR doivent être mises en
œuvre, notamment :
Renforcer les exigences de qualité de tri (voir recommandation n°8) et de traçabilité des papiers-
cartons recyclés (voir recommandation n°10), afin de satisfaire les exigences croissantes des pays
asiatiques, et européens (notamment norme EN 643). La qualité française des PCR semble
aléatoire pour nos voisins européens qui lient qualité variable, collecte des fibreux en mélange et
33 REVIvre PACkaging.
34 Processus par lequel des nutriments s’accumulent dans un milieu ou un habitat (terrestre ou aquatique).
35 Bilan National du Recyclage 2005-2014 de l’Ademe.
36 JC Caudron (Ademe) anticipe une croissance des couches pour bébés et adultes (même s’il s’agit d’une faible fraction des
papiers-cartons consommés)
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 25
manque de cohérence de la qualité d’un centre de tri à un autre37. Les PCR issus des entreprises
(type Carrefour) seraient de meilleure qualité que ceux produits par les collectivités.
Porter au niveau européen un taux de matière recyclée de 85% (taux européen en 2030) d’ici 3
ans dans la fabrication de papier-carton (ce qui ne devrait pas poser de problème, compte-tenu
du prix très bas du PCR), afin de soutenir les débouchés des PCR (au détriment du bois vierge, à
réorienter vers la valorisation matière ou énergétique) (voir aussi recommandation n°3).
Prévenir la mise en œuvre de restrictions du commerce, telles qu'elles existent actuellement en
Indonésie et rétablir un accès libre et équitable aux marchés internationaux nécessaires pour
équilibrer l'offre et la demande (proposition Euric38)
Dans les appels d’offres publics, privilégier le papier recyclé, introduire des critères de proximité
(réduire les émissions de CO2), avec un taux de pondération significatif et/ou faire référence à
l’éco-label européen (voir recommandation n°1).
2.4 Le plastique
Les plastiques, qui représentent 4 à 6% de la consommation de pétrole, ont des usages très divers et
sont notamment utilisés pour les emballages (40% des plastiques), le BTP (20%), les automobiles (10%),
les appareils électriques et électroniques (6%).
La filière plastique est caractérisée par une importante variété de résines ou polymères, dont les
5 principales sont : le polyéthylène (PE, qui peut se diviser en PE haute ou basse densité, PEHD ou
PELD/PEBD), le polypropylène (PP), le polystyrène (PS), le polychlorure de vinyle (PVC) et le
polytétraphtalate d’éthylène (PET). Chacune de ces résines nécessite une filière de recyclage
spécifique.
A cette complexité s’ajoute celle des différents additifs utilisés pour modifier les propriétés des résines,
dont certains limitent leur recyclage (retardateurs de flamme bromés aujourd’hui interdits pour des
raisons sanitaires).
2.4.1 Flux physiques
Après une forte baisse entre 2005 et 2009, la consommation française de résines vierges est repartie
à la hausse pour atteindre 4 921 kt en 2017 (4 784 kt en 2016).
Le gisement de déchets plastiques est quant à lui estimé à 3 400 kt en 2016. Seulement un quart de ce
gisement (886 kt), auquel s’ajoutent les chutes de production (80 kt) est collecté en vue du recyclage.
La France se positionne comme l’un des pays européens qui recycle le moins les plastiques. Les pays
d’Europe du nord, qui ont interdit la mise en décharge des déchets plastiques, présentent des taux de
recyclage supérieurs.
La France est exportatrice nette de déchets plastiques. L’excédent commercial de 360 kt s’explique par
des coûts de traitement plus compétitifs à l’étranger, notamment en Asie et une faible demande aval
d’incorporations de matières plastiques recyclées, PET excepté. La décision de la Chine d’interdire les
importations de plastiques à compter de début 2018 modifie cependant ces équilibres.
37 Source : Etude sur l’incorporation des sortes papetières dans le secteur du tissue (Hygiène). Réunion COPIL n°2, octobre
2019, Ademe, Viasourcing, Alterinnov, Sereho. Voir aussi : « étude sur l’incorporation des sortes papetières dans le
secteur de l’hygiène », rapport intermédiaire, Ademe, décembre 2019
38 European Recycling Industries Confederation.
26 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
L’incorporation de plastiques recyclés est tirée par quelques utilisations de niches. Au total, 437 kt sont
régénérées, essentiellement du PET et du PE. Le recyclage du PET (170 kt soit 40% du gisement recyclé
en 2012) est porté par le recyclage des bouteilles plastiques. Le recyclage du PE (160 kt de PEHD et
PEBD soit 14% du gisement) porte notamment sur les films. Le recyclage du PP est également
relativement important et semble en nette croissance depuis 2012, si l’on se fie aux données fournies
par les adhérents du SRP (Syndicat national des Régénérateurs de matières Plastiques).
In fine, entre 250 et 300 kt sont finalement de nouveau incorporées dans le cycle de production en
France, ce qui représente seulement 6% de la production de plastiques. Les secteurs les plus vertueux
sont l’emballage avec le PET (principalement les bouteilles plastiques), l’automobile ou l’industrie
électrique et électronique avec le PP et le bâtiment avec le PEHD.
Ces mauvaises performances peuvent s’expliquer par des obstacles technologiques (20% des
plastiques non recyclables par nature), des contraintes sanitaires poussant à l'incorporation de matière
première vierge, des obstacles économiques liés à un coût prohibitif de production de la matière
recyclée comparé à celui de la matière vierge, des obstacles commerciaux liés à un effet d’image.
S’y ajoutent une complexification des résines mises sur le marché pour des raisons marketing
(bouteilles d’eau de couleur) et une collecte encore insuffisante compte tenu de règles de tri peu
lisibles et non homogènes sur l’ensemble du territoire.
2.4.2 Données économiques
La filière plastique est tout d’abord caractérisée par des producteurs très éclatés. La plasturgie est en
effet un marché atomisé composé de 4 000 entreprises (dont 56% de 1 à 9 salariés), pour un total de
130 000 salariés et 30 milliards d’euros de chiffre d’affaires.
Le solde commercial sur les produits de plasturgie est négatif (-4 milliards d’euros pour 8 milliards
d’euros d’exports). Une partie significative des plastiques entrant sur le marché n’est donc pas
produite ou transformée en France.
On observe par ailleurs un très faible recouvrement entre les recycleurs et les producteurs de résines
vierges ou d’objets en plastique, contrairement à ce qui peut se passer dans d’autres filières (verre,
papiers ou métaux par exemple).
Les recycleurs de plastiques en France constituent une filière fragile : ce sont essentiellement des PME
et TPE, avec de faibles capacités industrielles et des capacités d’investissement également limitées.
Elles sont pour beaucoup situées sur des activités de niche, avec une spécialisation par types de
déchets et, surtout, par résine. Elles n’ont pas de lien avec leur marché aval.
Cette relative faiblesse de la filière de recyclage résiderait dans la stratégie d’investissement des grands
industriels professionnels de la gestion des déchets, davantage tournée vers les activités de
valorisation énergétique et d’enfouissement, dont les rentabilités seraient plus élevées et
présenteraient moins d’incertitudes.
Les régénérateurs sont pris en étau entre en amont, les chaînes de collecte et de tri, dont les structures
de coût sont fixes et dont les volumes de production sont limités, et en aval, les utilisateurs de
plastiques qui comparent le prix du recyclé au cours fluctuant des matières vierges. La rentabilité du
recyclage des plastiques est dans ces conditions éminemment variable et fragile.
2.4.3 Cadre juridique
Le cadre juridique a beaucoup évolué compte tenu de la sensibilité politique du sujet et se caractérise
notamment par :
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 27
pour les professionnels, la mise en place du tri 5 flux39 qui les oblige à trier sélectivement les
plastiques ;
pour les particuliers, l’extension des consignes de tri pour collecter tous les déchets plastiques.
Cette extension devrait permettre de collecter 200 kt supplémentaires par an.
la création dans la loi du 10 février 32020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie
circulaire de filières REP supplémentaires qui devraient faciliter la collecte de plastiques (bâtiment,
emballages professionnels, etc.) ;
l’interdiction progressive des plastiques à usage unique par le biais de divers textes (LTECV ou
directive européenne SUP (single-use-plastic) UE n° 2019/904 du 5 juin 2019) ;
l’obligation pour certains produits d’intégrer des matières recyclées notamment via la directive
SUP (par exemple 25 % de contenu recyclé dans les bouteilles en PET d’ici à 2025 et 30 % dans
toutes les bouteilles plastique en 2030).
La feuille de route sur l’économie circulaire (FREC) a abouti à l’engagement de l’industrie d’atteindre
de nouveaux objectifs :
dans le secteur des emballages, l’objectif est de passer à 400 kt de plastiques régénérés
réincorporés en 2025 contre 200 kt aujourd’hui ;
dans le bâtiment, l’objectif est fixé à 100 kt en 2025.
Par ailleurs, en dépit d’un taux de recyclage du plastique pour l’instant très faible, il ne faudrait pas
conclure que son abandon et sa substitution par d’autres matériaux est une panacée. Selon des études
réalisées par Plastics Europe40, la consommation d’énergie et les émissions de gaz à effet de serre (GES)
occasionnées par des emballages plastiques est inférieure à celle des autres matériaux même en
tenant compte du recyclage de ces autres matériaux.
2.4.5 Evolutions possibles dans les années à venir et recommandations de la mission
Des objectifs ambitieux peuvent être fixés dans les années à venir pour augmenter le taux
d’incorporation de matières plastiques.
La priorité est de faciliter l’incorporation de matières premières recyclées. Toute augmentation de la
collecte ou du tri de matières recyclées ne saurait être pleinement utile que si l’accent est également
39
Le décret n° 2016-288 du 10 mars 2016, pris en application de la LTECV, fait obligation aux producteurs et détenteurs de
déchets (entreprises, commerces, administrations...) de trier à la source 5 flux de déchets : les papier/carton, le métal, le
plastique, le verre et le bois.
mis sur le développement de la réincorporation des matières recyclées sur le territoire français.
Différents outils peuvent ainsi être utilisés pour développer l’aval du processus de recyclage :
passer en revue toutes les barrières réglementaires limitant inutilement la réincorporation de MPR
(voir recommandation n°4) ;
adopter, préférentiellement à l’échelon européen dans le cadre de la directive européenne SUP,
des obligations d’incorporation (voir recommandation n°3) ;
moduler les eco-contributions dans les filières REP en fonction du taux de MPR ;
soutenir les projets de réincorporation à l’image de ce qui a été fait dans le programme ORPLAST
qui a permis avec 30 M€ d’aides publiques de favoriser l’incorporation annuelle de 250 kt de MPR
(voir recommandation n°2).
Une des faiblesses structurelles de la filière de recyclage des plastiques réside dans son relatif
isolement. Des liens sont à développer (voir recommandation n°7) :
avec les principaux producteurs et metteurs sur le marché de matières plastiques vierges, de plus
en plus conscients que l’utilisation de matière plastique vierge est conditionnée politiquement par
son recyclage ;
avec les producteurs d’objets utilisant des matières plastiques, afin de développer des solutions
d’écoconception facilitant le recyclage et prévoyant l’emploi de MPR. Des études d’impact de
recyclage préalables à la mise sur le marché de nouvelles résines devraient être généralisées.
Une autre difficulté structurelle concerne sa rentabilité économique, lorsqu’une demande forte ne
soutient pas les prix de la MPR. Les hausses de TGAP programmées visent à ne pas rendre plus
attractive une gestion des déchets plastiques fondée sur l’enfouissement ou l’incinération. Au-delà de
cette mesure :
un renforcement de l’interdiction de l’enfouissement pourrait être étudié ;
un soutien financier du recyclage par les éco-organismes producteurs de déchets plastiques en cas
de baisse du prix des résines vierges serait à envisager (voir recommandation n°6).
Deux réformes principales, la mise en place du tri 5 flux et l’extension des consignes de tri, ont pour
objectif de simplifier la collecte et d’en augmenter l’efficacité. La priorité est la mise en œuvre effective
de ces mesures. Il pourrait être envisagé complémentairement de donner aux éco-organismes des
objectifs de collecte ambitieux assortis de sanctions financières si ces objectifs ne sont pas atteints
(voir recommandation n°7). Toutefois, un objectif de 100% de valorisation en 2030 parait plus
approprié qu’un objectif de 100% de recyclage en 2030.
2.5 Le bois
La filière française de bois séquestre du carbone, déduction faite de l’exploitation commerciale. Le
bois, de récupération ou non, peut être soit brûlé pour produire de l’énergie, en émettant du CO2 en
substitution aux énergies fossiles, soit valorisé sous forme de bois d’œuvre, ou de bois de trituration
(panneaux de particules).
2.5.1 Les flux physiques
La récolte annuelle de bois commercialisée en France varie entre 35 et 40 millions de m3 (38,9 Mm3 en
2018). Elle est destinée à du bois d’œuvre (50 % environ), du bois de trituration (25 % environ), du bois
énergie (25 %, en croissance depuis 2008).
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 29
Les déchets de bois viennent des chutes de production, et des produits en bois en fin de vie ; ils sont
collectés auprès des ménages, des collectivités, de la REP « ameublement » (33 %), des déchèteries
(30 %), des entreprises (21 %), et de la filière emballage (16 %). Les quantités collectées augmentent
d’environ 6 % par an depuis trois ans, selon Federec (6,86 Mt en 2018, hors bois de palettes, dont
1,66 Mt ont été collectés en 2017). Les déchets de bois (hors palettes qui sont reconditionnées, sauf
exceptions) ont quatre usages principaux après broyage :
Le bois matière en France (22%) : les déchets de bois peuvent être incorporés dans des panneaux
de particules, avec du bois vierge, sans en dégrader les qualités mécaniques, lorsque l’outil
industriel a été adapté (par exemple Egger; à l’inverse beaucoup de petites et moyennes
entreprises n’ont pas investi pour pouvoir utiliser des déchets de bois). Selon l’Ademe41, 0,97 Mt
de bois recyclé a été incorporé dans des panneaux de particules en 2017, en croissance depuis
2014, malgré une érosion de la fabrication de tels panneaux en France : sous ce double effet, le
taux d’incorporation a cru en 2014 (33 %) et 2017 (41 %). Ce taux reste bien inférieur aux taux
belges et italiens (de 70 à 90 %) : il semble cependant qu’au-delà de 50 à 60 % une dégradation de
la qualité mécanique des panneaux soit à craindre. D’autres valorisations matières sont plus
marginales : fabrication de pâte à papier, carbonisation, paillage, compostage, nettoyage des sols,
dégraissage de pièces métalliques, litières animales, etc.
Le bois énergie (35%) : la quantité de déchets de bois valorisée sous forme d’énergie augmente
(1,62 Mt en 2014 selon l’Ademe, 2,5 Mt en 2017 selon Federec), essentiellement dans des
chaudières industrielles et des centrales thermiques (65 %), sinon dans des chaufferies de
collectivités (30%), et à l’export (5 %, en Allemagne, Finlande, Suède, Grande-Bretagne, pays moins
exigeants sur la qualité du bois dans les intrants de chaudières).
L’exportation (22%) : la France exporte des déchets de bois et de matière première de recyclage
(1,15 Mt en 2017, contre 0,63 Mt en 2015 selon l’Ademe), essentiellement à destination de
panneautiers (Belgique, Italie, Espagne), et n’en importe pas.
L’élimination (20%) : les déchets de bois sont enfouis, ou incinérés sans récupération d’énergie
(1,4 Mt en 2014, selon l’Ademe).
Le cours du bois vierge de trituration reste stable depuis 2015, et celui du bois-énergie sylvicole est à
un niveau comparable à celui de 2011, après une baisse en 2018-2019. Les prix des chutes de bois de
scierie et les déchets de bois de classe A suivent une évolution comparable : les premiers (assimilables
à de la matière vierge) entre 30 et 70 €/tonne42 selon l’origine (scieries de feuillus ou de résineux,
chutes de sciures broyées ou non, chutes de seconde transformation broyées ou non…), et les seconds
entre 10 et 13 €/tonne. Enfin, les déchets de bois de classe B seraient « vendus » aux fabricants de
panneaux de particules à des prix négatifs de l’ordre de 30 à 40 €/tonne.
D’après l’institut technologique forêt cellulose bois (FCBA), les coûts moyens de gestion des déchets
varient selon qu’ils sont issus des bâtiments (89 €/t), ou de la filière d’ameublement (150 €/t).
Ainsi, le prix de la matière vierge, tel que reflété par les chutes de bois de scierie employées aussi dans
les panneaux de particules (entre 30 et 60 €/t selon les variétés) est très inférieur au coût du recyclage
dans les panneaux de particules (entre 90 et 150 €/t) diminué du coût de l’élimination (30 €/t).
L’économie n’est pas naturellement incitée au recyclage43. L’éco-contribution sur les ameublements,
via les deux éco-organismes Valdélia pour les professionnels et les collectivités, et Eco-mobilier pour
les particuliers, permet un transfert des sommes prélevées à l’achat de meubles neufs vers le secteur
du recyclage.
L’activité du secteur du recyclage du bois représente un chiffre d’affaires de 186 M € en 2018, selon
Federec, et emploie environ 6100 personnes selon l’Ademe (chiffre 2017).
Comme indiqué au paragraphe 2.5.1, environ 42% des déchets-bois sont exportés ou éliminés. Il est
donc nécessaire de trouver de nouveaux débouchés pour ces déchets y compris sous forme d’énergie.
2.5.3 Cadre juridique
Les agréments des éco-organismes ÉcoMobilier et Valdélia ont été renouvelés en 2017. Chaque éco-
organisme doit répondre aux objectifs de la filière44 :
un taux de collecte en 2023 des déchets d’ameublement de 40 % ;
un recyclage en 2022 de 50 % des déchets d’ameublement ;
une valorisation (réutilisation, recyclage et valorisation énergétique) en 2022 de 90 % des déchets
d’ameublement.
Les déchets dangereux ne peuvent être incinérés que dans des installations 2770.
Ainsi, paradoxalement ce sont surtout les bois de classe A qui sont valorisés sous forme d’énergie, et
les bois de classe B qui sont valorisés en matière. Pour favoriser la valorisation énergétique des déchets
43 L’économie circulaire, ou la compétition pour les ressources : étude annuelle 2014 du Conseil Général de l’Economie, sous
la coordination de François Valérian, page 33.
44 Décret n° 2017-1607 du 27 novembre 2017 et l’arrêté du 27 novembre 2017.
45 Arrêté du 3 août 2018
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 31
de bois, la profession cherche à définir deux sous-catégories (2 et 3) des déchets bois B, dont l’une
pourrait être admise dans des installations ICPE 2910 B.
2.5.4 Les impacts environnementaux
D’après l’Ademe46, le recyclage de déchets de bois collectés en France en 2014 a permis d’éviter
l’émission de 230 000 tonnes équivalent CO2 soit environ 0,05 % des émissions françaises de gaz à effet
de serre. L’impact est positif aussi en ce qui concerne la consommation d’énergie, l’acidification de
l’air, l’eutrophisation des eaux douces, l’eutrophisation marine, la consommation d’eau.
Le plan déchet du comité stratégique de filière (CSF) Bois prévoit que 400 kt de déchets bois
supplémentaires soient incorporés dans les panneaux de particules d’ici 202547, ce qui porterait le taux
d’incorporation à environ 60 % et permettrait d’éviter l’émission d’environ 100 kt équivalents CO2.
2.5.5 Evolutions possibles dans les années à venir
L’objectif du plan déchets du CSF bois48 est d’accroître la valorisation matière et énergie, en France. Il
s’agit :
en amont, de mobiliser 1,3 Mt de déchets de bois supplémentaires en 2025, par soustraction à
l’élimination de 0,8 Mt, par relocalisation de 0,2 Mt (réduction de l’exportation), et par une collecte
supplémentaire auprès des entreprises (0,3 Mt) ;
en aval, d’augmenter de 0,4 Mt la quantité de bois recyclé dans les panneaux de particules, et de
0,9 Mt en valorisation énergétique dans des installations de combustion (ICPE 2910 B) de co-
incinération (ICPE 2771 – 2971).
Sur le plan R&D, les principales voies explorées au Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB)
concernent le recyclage ou le réemploi du bois dans le bâtiment (isolants thermiques, produits de
carrelets lamellés-collés), et la transformation en charbon de bois pour des applications de fonderie.
2.5.6 Recommandations de la mission
La France n’utilise pas assez ses déchets de bois et les exporte, en raison d’une industrie aval
insuffisamment développée (meubles, pâtes, papiers-cartons), et de fortes exigences en termes de
contaminants comme intrants dans les installations de combustion. Ainsi, trois types de
recommandations sont proposés : valorisation énergie, recyclage matière, gestion des données.
Valorisation énergétique
Introduire des sous catégories (2 et 3) de déchets bois B, promouvoir le tri selon ces nouvelles sous
catégories, et l’améliorer. FCBA49 doit faire une proposition détaillée de sous-catégories. En
parallèle, Valdélia fait actuellement une étude de caractérisation de divers déchets bois, du
process de séparation mécanique, et d’essais de combustion (voir aussi recommandation n°8) ;
Faire évoluer la réglementation des installations ICPE 2910B pour admettre les déchets B sous-
catégorie 2 ;
Examiner la possibilité d’imposer aux chaufferies de plus de 20 MW d’être capables d’intégrer du
bois recyclé de classe B.
Recyclage matière
Soutenir financièrement les évolutions des outils industriels des entreprises « aval » pour
incorporer du bois recyclé. Examiner en complément la pertinence de certificats d’incorporation
de matière recyclée dans les produits à base de bois (voir recommandation n°2) ;
Introduire un taux minimum de bois recyclé dans le cahier des charges de la commande publique
pour le bois construction, lorsque c’est pertinent (exemple carrelets lamellés-collés, voir
recommandation n°1) ;
Encourager la R&D et l’innovation pour susciter d’autres voies de valorisation matière des déchets
de bois dans le bâtiment et l’ameublement (voir recommandation n°2) ;
Promouvoir une reconnaissance de statut de sous-produit pour certaines chutes de production
comme le prévoit la directive 2008/98/CE (article 5 de la directive du 19 novembre 2008 relative
aux déchets).
Gestion des données
Mieux quantifier les flux de déchets de bois, notamment en instaurant un code des douanes
spécifique aux déchets de bois (voir aussi recommandation n°9).
2.6 Le verre
La nature et les applications des produits verriers sont variées. Le verre creux trouve ses applications
dans les bouteilles, bocaux et flacons utilisés comme emballages par les industries agro-alimentaires,
la parfumerie et la cosmétique ainsi que la pharmacie. Il recouvre aussi les produits des arts de la table.
Quant au verre plat, il est principalement utilisé pour le vitrage bâtiment, l’automobile et les transports
(parebrises, vitres, etc.) ainsi que pour les panneaux solaires. Une fois formé, le verre plat, produit sous
forme de feuille, est envoyé chez un transformateur pour subir différentes opérations propres à son
application. Au contraire, le verre creux qui se trouve sous sa forme finie, est directement utilisable.
2.6.1 Flux physiques
En 2017, la production française de verre atteint 3,44 Mt pour le verre creux et 0,95 Mt pour le verre
plat. Elle est stable pour le verre creux et augmente de 39 % pour le verre plat suite à la mise en place
de deux floats (fours de verre plat).
La quantité de déchets (gisement) de verre creux est estimée par l’Ademe et les professionnels à
2,79 Mt pour le verre creux et 0,27 Mt pour le verre plat. Les différences de tonnage entre production
et gisement s’expliquent d’une part par les exportations (par exemple les vins et spiritueux partent à
l’étranger dans des bouteilles fabriquées en France) et d’autre part par la durée de vie des verres plats
utilisés dans l’automobile ou le bâtiment (où l’on utilise aujourd’hui souvent du double vitrage, alors
que l’on récupère beaucoup de simple vitrage dans la déconstruction). À ces quantités s’ajoutent les
chutes de fabrication du verre plat, estimées à 0,33 Mt.
La collecte de déchets de verre creux, essentiellement du verre d’emballage ménager, atteignait
2,11 Mt en 2017 soit un taux de collecte de 76 %. Cette collecte se fait majoritairement de manière
sélective par les services publics de gestion des déchets. Elle peut encore être améliorée. Vingt-quatre
acteurs de la filière ont signé fin 2019 une charte d’engagement pour atteindre 90 % d’emballages
collectés d’ici 2025.
La collecte des déchets de verre plat n’atteignait que 47 000 t en 2017, soit un taux de collecte estimé
de 17 %. Les chutes de fabrication étaient également collectées. Les professionnels ont signé une
charte et un engagement pour la croissance verte (ECV) pour améliorer la collecte du verre plat du
bâtiment. Un objectif de 80 000 t collectées en 2025 figure dans l’ECV. Cette amélioration est liée à
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 33
une meilleure gestion des déchets de second œuvre du bâtiment, pour lesquels un dispositif de
responsabilité élargie du producteur a été décidé. Dans une moindre mesure, un meilleur
fonctionnement de la filière de gestion des VHU, qui prévoit une collecte séparée des vitres par les
centres, pourraient y contribuer.
Après collecte, les déchets de verre sont traités dans des installations industrielles fortement
automatisées qui ont pour objectif d’éliminer l’ensemble des indésirables et des pollutions (infusibles,
métaux, plastiques, papiers, autres matériaux, etc.). Les déchets de verre sont alors transformés en
calcin (verre recyclé), qui est envoyé chez les verriers pour être fondu à 1 500 °C, en général en mélange
avec de la matière primaire. Si le calcin issu de verre plat usagé peut être utilisé dans la fabrication de
verre creux, la réciproque n’est pas valable. Les fours de verre plat privilégient le recyclage des chutes
de production.
Les exportations et importations de calcin sont à peu près équilibrées et représentent de faibles
tonnages par rapport à l’incorporation de calcin dans la fabrication du verre en France (0,17 Mt sur
2,44 Mt). Le taux d’incorporation du calcin en France dans la production de verre ressort dans ces
conditions à 56 %.
2.6.2 Données économiques
Il n’y a pas de difficulté en France pour recycler le calcin produit. Les verriers ne communiquent pas de
chiffres sur le coût de chaque étape de recyclage, permettant de démontrer la rentabilité de l’emploi
du calcin, mais on constate que la totalité du calcin collecté est préparé puis recyclé en production de
verre sans qu’il y ait besoin d’une contrainte réglementaire pour parvenir à ce résultat. Le verre est
réputé par ailleurs pouvoir se recycler à l’infini sans dégradation des performances des produits
fabriqués avec de la matière recyclée.
Une présentation un peu ancienne du cercle national du recyclage indique que le prix de la tonne de
calcin en entrée de four est proche de celui de la tonne préparée pour le lit de fusion, mais que
l’utilisation d’une tonne de calcin permet des économies substantielles d’énergie (40 kg de fioul
valorisés à 15 € en 2006).
La collecte sélective du verre creux est également économiquement intéressante pour les services
publics de gestion des déchets. Le coût unitaire de la collecte sélective des déchets de verre creux,
diminué du soutien apporté par l’éco organisme en charge des emballages et du prix de reprise des
verriers, est inférieur au coût de mise en décharge de ces déchets. On peut toutefois s’interroger sur
la logique qui conduit les professionnels de l’emballage en verre (éco-organisme et verriers) à ne
couvrir que 80 % du prix de référence du coût de la collecte sélective des emballages en verre.
L’économie des déchets de la reprise du verre plat ne peut pas être décrite de la même façon. Les
expériences de collecte organisée ne sont pas assez nombreuses pour que l’on puisse avoir des chiffres
fiables.
L’activité du secteur « recyclage du verre » représente un chiffre d’affaires annuel d’un peu plus de
100 M€ et emploie un peu moins de 2 000 personnes. Les centres de traitement pour préparation
ultime du calcin sont au nombre de 14, chacune correspondant à un investissement d’environ 15 M€.
Selon les interlocuteurs rencontrés, il n’y aurait pas de difficulté à augmenter leur capacité si le besoin
s’en faisait sentir, mais elles possèdent aujourd’hui des réserves de capacité.
34 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Une fois le verre collecté, les logiques économiques font qu’il est naturellement recyclé. Les verriers
maîtrisent les technologies correspondantes et sont intéressés par l’incorporation de calcin dans leurs
fours. La France a la chance de produire plus de verre qu’elle n’en consomme, ce qui fait que le calcin
collecté n’a pas de difficulté à être employé.
2.6.6 Recommandations de la mission
L’enjeu est d’améliorer la collecte pour augmenter le recyclage au sein d’une filière qui fonctionne
bien. Dans ces conditions, la mission suggère :
de couvrir 100 % des coûts de référence de la collecte des emballages de verre creux par les
services publics de gestion des déchets (voir recommandation n°5) ;
de fixer des objectifs de taux de recyclage aux éco organismes et de leur appliquer des pénalités
dissuasives en cas de non atteinte des objectifs (voir recommandation n°7).
ou des textiles non tissés (après nappage et consolidation). L’automobile, le bâtiment, les géotextiles
sont des marchés potentiels de ces produits recyclés.
2.7.2 Données économiques
Federec estime le chiffre d’affaires de la filière à 100 millions d’euros. La filière emploie
2 500 personnes, dont 1 500 pour l’activité tri. La moitié des personnes employées dans le tri sont des
personnes en difficulté vis-à-vis de l’emploi.
Le coût de la collecte est d’environ 400 €/t et celui du tri d’un peu plus de 100 €/t. Le coût de revente
varie fortement selon les usages : de 500 à 4 500 €/t pour la réutilisation selon la qualité des déchets,
300 €/t pour les chiffons, 150 €/t pour l’effilochage. Le coût de l’effilochage varie entre 190 et 250 €/t.
L’éco-contribution perçue varie aujourd’hui de 0,12 à 4,84 centimes d’euro par pièce, et le total de ces
éco-contributions était censé atteindre 21,8 M€ en 2019.
2.7.3 Cadre juridique
Une filière REP relative aux textiles, linge de maison et chaussures destinés aux ménages, a été créée
par la loi de finances pour 2007 (art. 69). Elle s’est structurée conformément aux orientations données
par l’Union européenne dans la directive-cadre sur les déchets (directive 98/2008). Les modalités
d’application de l’article L. 541-10-3 du code de l’environnement sont définies aux articles R. 543-214
à R. 543-224 du même code. Elles précisent les dispositions relatives à l’agrément des organismes et à
l’approbation des systèmes individuels de la filière REP des TLC.
La société Eco TLC a été agréée, par arrêté interministériel, pour la première fois le 17 mars 2009 afin
d’assurer les obligations des metteurs sur le marché en matière de traitement des déchets issus de
textiles, linge de maison et chaussures (TLC), jusqu’à fin 2013. Elle a été à nouveau agréée pour la
période 2014-2019. Elle est aujourd’hui critiquée pour ses recherches d’économies dans la gestion de
la filière qui ne permettent pas d’atteindre les objectifs visés.
Le cahier des charges d’Eco TLC fixe l’objectif d’augmenter significativement les tonnages collectés,
afin d’atteindre en 2019 50 % du gisement mis en marché, soit 300 000 tonnes (ce qui équivaut à 4,6 kg
par an et par habitant). L’objectif qualitatif pour les déchets issus des TLC triés est d’atteindre d’ici la
fin de l’agrément, au moins 95 % de valorisation matière (réutilisation et recyclage) et un maximum de
2 % de déchets éliminés (déchets ne faisant l’objet d’aucune valorisation).
2.7.4 Intérêt écologique du recyclage
Selon une étude de Federec et de l’Ademe, le recyclage d’une tonne de déchets textile sous forme de
chiffons permet d’éviter 98 % des émissions de GES et 99 % des consommations d’énergie
occasionnées ou nécessitées par la production d’une tonne de textiles en fibres vierges. Ce bilan,
calculé en prenant l’exemple des chiffons mettait en évidence un gain de GES de 5,61 tCO2-eq et
26 000 kWh par tonne de déchets transformés en chiffon. Ces bilans font également apparaître des
gains substantiels d’eau ou de produits chimiques nécessaires pour faire pousser, produire et
transformer les fibres vierges.
2.7.5 Evolutions possibles dans les années à venir
L’un des enjeux de la filière est l’amélioration de la collecte à l’heure où dans le même temps les
débouchés se restreignent suite aux difficultés rencontrées (fermeture de certains marchés par
exemple africains) pour exporter la « fripe », mode de gestion des déchets qui peut par ailleurs être
perçu comme un transfert de déchets dissimulé sous une réutilisation vertueuse.
Il existe donc un fort enjeu pour trouver de nouveaux débouchés aux déchets textiles.
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 37
Le centre européen des textiles innovants (CETI) travaille sur des procédés permettant de refaire des
fils à partir des textiles usagés très bien triés et arrive à produire un fil sur pilote industriel à des coûts
comparables à celui de la matière vierge (3,2 €/kg). Le potentiel d’une telle production est estimé à
plus de 100 000 tonnes.
Le recyclage chimique est une autre voie explorée, aujourd’hui non compétitive.
L’automobile et le bâtiment sont deux marchés porteurs pour l’utilisation de matières et textiles
produits à partir de textiles recyclés. L’automobile pourrait utiliser 15 000 t/an achetés 30 €/t.
L’isolation des bâtiments constitue un autre marché potentiel de 10 000 t si la part de marché des
isolants fabriqués à partir de textiles recyclés, qui ont par ailleurs d’intéressantes propriétés
acoustiques, atteignait 2 %. Le domaine du sport (vêtements, chaussures) est également un marché
potentiel pour le recyclage des textiles innovants50.
50 Les débouchés du recyclage des déchets de textiles, linge de maison et chaussures sont décrits dans un autre rapport des
deux Conseils généraux « Avenir de la filière REP de gestion des déchets de textiles, linge de maison et chaussures (TLC) »
Rapport CGEDD n°011990-01, CGE n°2017/25 établi en juillet 2018 par Y. Aujollet et H. Legrand (CGEDD), M. de Jouvenel
et P. Louviau (CGE)
38 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
3 RECOMMANDATIONS TRANSVERSES
Ce chapitre ne développe pas la commande publique exercée par les services publics de gestion des
déchets pour des dispositifs de collecte (y compris déchetteries) ou de tri, qui ont des impacts majeurs
sur le recyclage mais sont évoquées dans d’autres chapitres de ce rapport.
51 Voir Annexe 12
52 « Commande publique responsable : un levier insuffisamment exploité », Conseil économique, social et environnemental,
Patricia Lexcellent, mars 2018.
53 Voir Annexe 13
54 Technology readiness level
55 Groupe de travail « économie circulaire » du CNI : Plan d’actions pour la transition vers une économie circulaire (23
septembre 2019).
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 39
l’éco-conception des produits et au recyclage permettent de décliner les quatre axes du plan d’actions
précité.
A contrario, les certificats d’incorporation ont paru difficiles à mettre en place à la mission, qui ne
recommande pas un tel dispositif.
3.3.2 L’actualisation des réglementations limitant le recyclage
Des réglementations françaises restreignent la valorisation de certains déchets ; par exemple les règles
françaises de valorisation énergétique de déchets bois apparaissent plus contraignantes que dans
certains pays européens. D’autres restrictions semblent exister (notamment sur certaines résines
recyclées) pour des raisons sanitaires, faute de connaissances suffisantes.
56 Voir Annexe 14
57 Voir Annexe 15
40 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
La mission estime très discutable de ne pas rembourser à 100 % les coûts de collecte sur la base d’un
prix de référence : les collectivités sont davantage incitées à atteindre des taux de collecte élevés si
ces coûts sont remboursés de 100 %.
58 Voir Annexe 16
59 Voir Annexe 17
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 41
égaux, Renault a affiché sa préférence pour l’utilisation de plastique recyclé auprès de ses sous-
traitants. Voir recommandation n°7.
3.7 La gouvernance60
La mission a constaté, notamment pour la filière « plastiques », les insuffisantes interactions entre les
metteurs sur le marché et les industriels du recyclage, qui n’ont pas les mêmes intérêts. Il faudrait, par
exemple, inciter les industriels à définir des feuilles de route communes, comme l’ont fait les acteurs
de la filière « bois ». L’éco-conception, l’étude d’impact en termes de recyclage de toute nouvelle
matière, ou tout nouveau produit, doit faire partie de ce dialogue, qui peut se tenir soit au sein des
comités stratégiques de filière, soit au sein des éco-organismes.
Des directives européennes, et des textes réglementaires français fixent des taux de recyclage
« ciblés » à des échéances bien définies, et des objectifs quantitatifs sont fixés aux éco-organismes
dans le cadre de leurs cahiers des charges. Comme l’observe Jacques Vernier61, ceux-ci ne sont pas
sanctionnés en cas de non atteinte de leurs objectifs.
60 Voir Annexe 18
61 Filières REP – responsabilité élargie des producteurs en matière de prévention et de gestion des déchets générés par leurs
produits – mai 2018 – Jacques Vernier.
42 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
62 Voir Annexe 19
63 Voir Annexe 20
64 Voir https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/10-indicateurs-cles-pour-le-suivi-de-leconomie-
circulaire-edition-2017?rubrique=&dossier=237
65 Voir https://ec.europa.eu/eurostat/fr/web/circular-economy/indicators
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 43
Il est difficile à partir de ces données d’appréhender globalement le secteur. Les bénéfices
environnementaux des efforts de gestion et de recyclage des déchets sont peu accessibles. Les
données économiques font dans l’ensemble défaut. Personne n’a ainsi une vision globale des efforts
d’investissements réalisés dans le secteur du recyclage. Quant aux prix des matières recyclées, ils sont
proposés par des sites payants spécialisés.
Par ailleurs, les rapporteurs ont mesuré la forte dépendance des institutions publiques vis-à-vis des
prestataires privés auprès de qui ils sous-traitent leurs études ou vis-à-vis des éco-organismes. Faute
de spécifications dans les clauses contractuelles ou les contrats d’agrément, l’administration ne
dispose pas toujours des données recueillies lors de ces travaux ou dans le cadre de l’activité des éco-
organismes.
Les rapporteurs préconisent une réflexion sur le système d’information nécessaire au pilotage d’une
politique de recyclage s’inscrivant dans le cadre de l’économie circulaire.
3.9.2 Les comparaisons européennes
La consolidation des données au niveau européen est très utile à la fois pour fonder une politique
européenne et pour permettre un parangonnage entre pays.
Les rapporteurs ont été sensibilisés au fait que ces comparaisons sont aujourd’hui délicates parce que
les manières de calculer les données remontées au niveau européen sont aujourd’hui insuffisamment
précises. La fédération nationale des activités de la dépollution et de l’environnement (FNADE)
souligne ainsi que les Pays comptabilisent différemment leurs flux de déchets exportés et importés, ce
qui fausse les comparaisons.
Nonobstant ces imprécisions, la France n’apparaît pas mal placée en ce qui concerne le recyclage.
66 Voir https://Federec.com/FEDEREC/documents/MARCHERECYCLAGE20181920.pdf
67 Voir https://www.ademe.fr/bilan-national-recyclage-2005-2014. Un prochain bilan est en préparation.
68 Voir https://www.ademe.fr/expertises/dechets/elements-contexte/filieres-a-responsabilite-elargie-producteurs-rep
44 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
3.10 La traçabilité69
Développer l’utilisation de matières recyclées conduit à mettre en place des outils pour vérifier la
réalité des informations correspondantes, surtout dans un contexte où des exigences réglementaires
ont été adoptées pour augmenter le taux de recyclage. La traçabilité des produits est également un
enjeu important pour les filières VHU (lutte contre les paiements en numéraire) ou bois, plastiques et
textiles (prise en compte de la présence d’additifs). Les rapporteurs privilégient pour ce faire des
mécanismes de certification. Parallèlement, la question de la lisibilité des informations attachées au
produit se pose pour à la fois motiver et orienter le consommateur dans son geste de tri et le guider
dans son comportement d’achat.
3.10.1 La certification
La certification est une démarche volontaire du producteur. Elle se base sur un référentiel. Elle suppose
le regard d’un acteur externe à l’entreprise certifiée qui s’engage sur la performance de l’entreprise
auditée.
La certification du taux d’incorporation de matière recyclée serait à construire par filières et produits.
Elle devrait permettre de garantir sous une forme ou sous une autre que la matière recyclée peut être
tracée, et que la matière incorporée a été effectivement produite en respectant les exigences
environnementales. Elle devrait d’autre part donner des assurances raisonnables quant au fait que le
taux réel de matière recyclée est effectivement égal au taux annoncé.
Des démarches pouvant être intégrées dans une telle certification existent d’ores et déjà. Ainsi, de
nombreux labels papetiers s’intéressent au pourcentage de fibres recyclées. Les recycleurs proposent
par ailleurs des certificats de recyclage qu’ils proposent de généraliser.
Une certification de nature un peu différente pourrait faciliter le recyclage en qualifiant mieux les
productions issues des centres de tri. Par exemple, dans le cas des emballages papiers-cartons, la
perception de la qualité française semble aléatoire pour nos voisins européens70. Les papiers cartons
issus des entreprises seraient de meilleure qualité que ceux produits par les collectivités. La
certification du respect d’une norme, telle que EN 643, permet de garantir la qualité du produit à
recycler.
3.10.2 L’information du consommateur
La FREC comporte plusieurs mesures relatives à l’information du consommateur, qu’elle propose de
renforcer. Elle retient notamment d’améliorer le pictogramme Triman en apportant au niveau du
produit une information sur la nature du geste de tri. Aujourd’hui, des obstacles organisationnels
69 Voir Annexe 21
70 Source : Etude sur l’incorporation des sortes papetières dans le secteur du tissu (Hygiène). Réunion COPIL n°2, octobre 2019, Ademe,
Viasourcing, Alterinnov, Sereho. Voir aussi : « étude sur l’incorporation des sortes papetières dans le secteur de l’hygiène », rapport
intermédiaire, Ademe, décembre 2019
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 45
freinent la collecte des matériaux compte tenu de règles de tri peu lisibles et non homogènes sur
l’ensemble du territoire.
La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire reprend ces orientations. Ainsi,
un marquage ou étiquetage (article 1er) permettra de renseigner le consommateur sur les qualités et
les impacts environnementaux des produits qu’il achète, en particulier sur leur incorporation de
matière recyclée, leur emploi de ressources renouvelables, leur réparabilité, leur possibilité de
réemploi, leur recyclabilité, la présence de substances dangereuses en leur sein et la modulation de
leur éco-contribution. Les catégories de produits soumises à cette obligation seront précisées par
décret. Des expérimentations d’affichage environnemental sont prévues.
Cette information peut protéger les producteurs d’une concurrence déloyale. Au niveau européen, le
droit ne prévoit cependant qu’une information des consommateurs sur les risques associés à la
détention du produit, son utilisation ou sa destruction, mais ne prévoit pas d’information sur les
qualités et impacts environnementaux des produits. La France, au vu des résultats de ses
expérimentations, pourrait proposer une évolution du droit européen sur ce plan.
4 CONCLUSION
La filière « transformation et valorisation des déchets » représente un chiffre d’affaires d’un peu moins
de 20 milliards d’euros qui ne progresse pas depuis 2012, et elle emploie 112 000 personnes71. La
collecte, le tri et le recyclage des sept matériaux objet de ce rapport ne représentent qu’une partie de
ce total, que l’on peut estimer à une dizaine de milliards. Les marges des entreprises qui œuvrent dans
le recyclage sont en général faibles, ce qui explique qu’elles aient peu attiré les grandes entreprises de
services qui préfèrent se positionner sur l’incinération et l’enfouissement et que 70% des entreprises
œuvrant dans le négoce et le recyclage des déchets aient moins de vingt salariés. Le financement public
à ces opérations est assuré pour partie par les services publics de gestion des déchets, qui ne sont pas
totalement remboursés de leurs dépenses de collecte et de tri, et par l’Etat72, notamment via l’Ademe,
pour le soutien à la R&D, aux démonstrateurs industriels et via le fonds économie circulaire. Les éco-
contributions, qui financent la collecte et le traitement des produits usagés, parfois à travers des
remboursements aux collectivités locales (cas des emballages), se sont élevées à environ 1,2 Mds€ en
201673.
L’année 2019 apparaît particulièrement difficile pour plusieurs raisons :
manque de débouchés industriels pour la matière première de recyclage (MPR) ;
fermeture des marchés asiatiques à certains déchets (plastiques, papiers-cartons, textiles),
notamment en raison d’exigences qualité accrues ;
effondrement ou baisse des prix de la MPR (papiers-cartons, ferrailles, par exemple) ;
investissements rendus nécessaires par des nouvelles réglementations environnementales
(émissions de poussières par exemple).
Il faut ajouter à cela que certaines petites entreprises, qui ne couvrent que quelques départements,
apparaissent fragiles compte-tenu de leur dépendance aux appels d’offres de quelques éco-
organismes.
Cette situation va probablement évoluer assez vite compte tenu de l’enjeu que constitue de plus en
plus le recyclage pour des producteurs de matériaux et de produits du fait des changements de
comportements des consommateurs. Ainsi, début 2020, Nestlé annonce sa volonté de fortement
progresser dans les plastiques recyclés.
L’analyse des filières matériaux74 par la mission fait apparaître des différences significatives dans les
performances des différentes filières et leur économie et des problématiques communes quant à la
manière d’améliorer leurs performances.
Le tableau ci-après résume les caractéristiques des différentes filières matériaux et facilite les
comparaisons. Les progrès potentiels identifiés peuvent générer une activité industrielle
supplémentaire de plus d’un milliard d’euros par an. La collecte d’environ 1,5 Mt supplémentaires de
déchets ménagers pourrait coûter aux collectivités locales environ 80 M€ de plus par an.
75 D’après Federec – Activité 2018 de collecte, tri, recyclage de ses membres (donc hors collecte et tri des collectivités)
76 Sources CSF et Ademe 2017
77 D’après le bilan national du recyclage de l’Ademe – Solde exportations-Importations/Déchets collectés
78 En termes de quantités collectées
79 On considère que l’énergie nécessitée par le recyclage des cartons émet du CO2 à la différence de la production primaire
80 Le taux de recyclage comprend le remblaiement des carrières.
48 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
parallèlement le fait que la France privilégie moins la fabrication de l’acier dans des fours
électriques que d’autres pays ;
Celle, mature et économiquement rentable, des métaux non ferreux. L’absence d’affineur français
de cuivre est une question qui dépasse le périmètre de la mission. La situation difficile des affineurs
d’aluminium est en partie liée à une qualité insuffisante des déchets triés, qui est un problème
général ;
Celle, mature, du papier carton. Le secteur est en crise du fait de l’effondrement du prix du déchet
de papier carton qui remet en cause les équilibres économiques antérieurs. La France est
handicapée par une production papetière qui diminue et s’accompagne de la fermeture d’usines.
L’une des pistes à explorer est une plus grande incorporation de matière recyclée dans la
production de cartons ;
Celle, mal connue, des granulats. L’absence d’information distinguant dans la destination des
granulats collectés enfouissement, remblaiement de carrières et recyclage dans la production de
béton ou d’enrobés bitumineux rend plus difficile l’analyse. La création d’une REP bâtiment va
permettre un meilleur suivi des déchets du bâtiment et des granulats de récupération qui en seront
issus. Un travail a été confié à l’Ademe pour la mise en place de cette filière, dont il convient
d’attendre les résultats. Les rapporteurs sont convaincus que les plateformes recueillant les
déchets du BTP qui ont commencé à être déployées sur le territoire sont des outils à privilégier.
La filière verre, mature et économiquement rentable, a identifié les pistes de progrès à mettre en
œuvre, qui seront confortées pour la collecte du verre plat permise par la mise en place de la REP
bâtiment ;
La filière bois, au-delà d’un plus fort taux d’incorporations dans les panneaux, doit progresser sur
la valorisation énergétique des déchets de bois, sachant que là encore, des pistes de progrès ont
été identifiées par la profession. Un approfondissement des aspects réglementaires est
souhaitable ;
La filière textile doit progresser dans la collecte et le tri, revoir la destination des déchets triés en
développant des utilisations faisant appel au recyclage, soutenues par un effort de recherche et
développement.
L’activité industrielle de recyclage en France au-delà de la collecte et du tri est souvent pénalisée par
une faible demande aval (exemples : déchets de papier, de bois, de textiles), et par un outil industriel
mal adapté (exemples : métaux, papier-carton, bois) : ainsi à l’exception du verre, et des granulats, 15
à 50% des déchets triés en France sont exportés. Bien que cela ne se soit pas encore traduit dans des
orientations politiques ou législatives, il est probable que des exigences de plus en plus fortes se
fassent jour pour un recyclage et une gestion des déchets près du lieu de consommation, pour limiter
les transports et ne pas reporter la responsabilité de la gestion dans des pays où les traitements
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 49
échapperaient à tout contrôle. Pour rapatrier de plus une partie de la valeur ajoutée du recyclage en
France, les rapporteurs ont identifié des pistes communes :
L’utilisation des outils de la puissance publique pour faciliter l’utilisation de matière recyclée,
notamment la commande publique, la réglementation et les soutiens financiers aux
expérimentations et développements ;
Le développement de l’écoconception, qui nécessite un dialogue renforcé entre metteurs sur le
marché et recycleurs ;
La contribution financière des éco-organismes tout au long de la chaîne de recyclage, soutien à la
R&D, meilleure couverture des coûts de collecte et incitation financière à la développer, soutien
financier à l’utilisation de MPR quand les coûts de marché ne reflètent pas les bénéfices
économiques de cette option ;
L’amélioration de la qualité du tri, notamment en modernisant les centres de tri et en augmentant
le nombre de catégories de tri ;
L’amélioration de l’information sur le recyclage, que ce soit au niveau des données collectées par
les outils statistiques, de la traçabilité ou de l’information des consommateurs.
ANNEXES
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 51
Cabinet de Mme Brune POIRSON, Secrétaire d’Etat auprès de Mme la Ministre de la Transition
écologique et solidaire
Pierre-Yves BURLOT, conseiller en charge de l’économie circulaire, finance verte et territoire
DGPR
Cédric BOURILLET, directeur général
Philippe BODENEZ, chef de service (risques sanitaires liés à l’environnement, déchets, pollutions
diffuses)
Vincent COISSARD, sous-directeur déchets et économie circulaire
Anne-Luce ZAHM, cheffe de bureau planification et gestion des déchets
Léonard BRUDIEU, chef de bureau prévention et filières REP
Jacques VERNIER, président du Conseil Supérieur de la Prévention des Risques Technologiques
DGE
Olivier STEMLER, chef de projets « Economie circulaire - Plastiques »
Thomas PILLOT, sous-directeur de la chimie, des matériaux et des éco-industries
Ademe
Jean-Charles CAUDRON, chef du Service Produits et Efficacité Matière
Marc CHEVERRY, directeur économie circulaire
CGDD/SGS
Christelle SCRIBE, chef de projet
Céline MAGNIER, chef de bureau pressions sur l’environnement
Bpifrance
Benoit CALATAYUD, responsable sectoriel transition énergétique
Julie SIMON, direction du pilotage des programmes et du support juridique
INSEE
François-Xavier DUSSUD, Chef de la division Enquêtes Thématiques et Études Transversales
Maxime BOULAY
Mines ParisTech
Mathieu GLACHANT, directeur du CERNA
Franck AGGERI, professeur de management
Organisations professionnelles
CITEO
Jean HORNAIN, directeur général
Nicolas FURET, directeur des affaires publiques
Eco-systèmes (D3E)
Christian BRABANT, directeur général
Ecomobilier
Dominique MIGNON, présidente directrice générale
Fabien CAMBON, directeur technique
Xavier REBARDY, directeur juridique
Valdélia
Arnaud HUMBERT-DROZ, président directeur général
CME
Dominique MAGUIN, président
Roland MARION, délégué général
Aluminium France
Cyrille MOUNIER, délégué général
Plastics Europe
Hervé MILLET, responsable technique/traitement des déchets en Europe
Eric QUENET, responsable région Ouest/Europe
Valorplast
Catherine KLEIN, directrice générale
Robert BONNEFOY, chargé de mission
FCBA
Gérard DEROUBAIX, directeur du Pôle Environnement, Economie et Bio-ressources
Industrie du verre
Xavier CAPILLA, responsable environnement
RECORD
Bénédicte COUFFIGNAL, directrice
Zero Waste
Laura CHATEL, responsable du plaidoyer
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 59
Entreprises
Véolia
Marc-Antoine BELTHE, directeur du développement, recyclage et valorisation des déchets
Françoise WEBER, directrice Schémas de Responsabilité Elargie des Producteurs
Jean-Christophe DELALANDE, responsable Affaires Publiques Recyclage et Valorisation des Déchets
Galloo recycling
Olivier FRANÇOIS, Market development officer and environmental affairs
Constellium
Edouard MARCHAND, head of Metal Management Constellium
Affinerie d’Anjou
Michel VALERY, président-directeur-général
Eiffage
Valérie DAVID, directrice développement durable Eiffage
Clotilde PETRIAT, responsable responsabilité sociétale des entreprises
VINCI
Christophe JOZON, directeur matériaux et industries
CEMEX
Benjamin LECENDRIER, directeur production granulats
Alain PLANTIER, directeur général
PLASTIPAK
Raphaël JEAUMOTTE, responsable du développement du recyclage
CCEP
Benoit BERTON, directeur stratégie emballage économie circulaire
CTI-IPC
Etienne BECHET de BALAN, président
EGGER
Bernard RETUREAU, délégué général
60 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Le taux de recyclage des métaux ferreux se situe autour de 100% alors qu’il est de 62% pour les métaux
non ferreux. En 2019 selon la FNADE, 97% des métaux traités (12,9 Mt) sont recyclés (12,6 Mt), 2%
stockés (240 000t) et 1% incinérés (120 000 t avec valorisation énergétique et 30 000 t sans
valorisation énergétique).81
Quelques chiffres clés en 201782 :
Chiffres clés CA (Mds€) Collecte (t) Ventes (t)
Filière métal 2,229 12,8 12,3
Filière métaux non ferreux 3 1,97 1,87
Flux physiques
L’acier est produit à partir d’oxyde de fer et de coke, auxquels on ajoute des déchets de métaux ferreux
(ferraille). La fonderie (acier et fonte) et la sidérurgie sont deux industries qui utilisent les métaux
ferreux. La fonderie met en forme des produits métalliques par coulage dans un moule et utilise 85 à
100% de ferraille selon les sites. La sidérurgie fabrique des produits bruts de première transformation,
longs ou plats par laminage (étirement et écrasement du métal). Cette dernière se décompose en
filières fonte83 (69% de la production nationale d’acier sidérurgique à partir de 10 à 15% de ferraille)
et électrique84 (31% de la production nationale d’acier sidérurgique à partir uniquement de ferraille).
Les ferrailles proviennent de la collecte et du tri (bâtiment, véhicules, industrie), des chutes neuves85
(sidérurgies, usines de transformation, fonderies, récupérateurs de ferraille). Le gisement est ensuite
préparé par broyage, cisaillage, chalumage, presse, mis en paquet ou en balle, par des opérateurs de
la récupération et du tri (848 sites) avant d’être recyclé par les usines sidérurgiques (41 sites). Les
ferrailles (essentiellement des emballages en acier) récupérées par les collectivités sont directement
vendues aux sidérurgistes et fondeurs équipés de broyeurs. En 2017, 11 730 salariés contribuaient à la
collecte et préparation des ferrailles.
Le tableau montre que depuis 3 ans les tonnages de ferrailles achetés par la sidérurgie française sont
presqu’aussi élevés que les volumes d’export vers l’étranger et que les stocks représentent 25% des
importations de ferrailles. Par ailleurs, le taux d’incorporation de matière première recyclée (ferraille)
en sidérurgie et fonderie (situé entre 49% et 35% sans les chutes neuves/internes) était largement
inférieur en 2017 au taux européen (56%). La baisse de la matière première (produite principalement
en Chine) a défavorisé le recyclage des ferrailles, impactant la filière électrique, moins présente en
France que dans d’autres pays européens.
Le sujet sur la qualité de ferraille est important pour l’acier utilisé dans la filière électrique qui a besoin
de matière non polluée. Le tri de l’acier est facilité par l’utilisation de magnétisme pour sa séparation
d’un stock de déchets dans des installations moins importantes que les hauts fourneaux. Le gisement
est très complexe à évaluer au regard de la variété des produits concernés et des filières REP qui
encadrent la collecte (DEEE87, VHU, emballages et meubles/Valdelia). Certains experts (A3M)
estimaient que 90% du gisement de ferrailles était exploité en 2017. Les ferrailles collectées sont issues
des déchetteries et de la collecte88 (69%) et des chutes neuves de l’industrie de transformation (18%)
et enfin de la filière de démolition des bâtiments (11%).86
Malgré l’augmentation de ferrailles issues de la filière VHU (635 000 tonnes en 2017)89 par rapport aux
années précédentes, une partie du gisement VHU reste à capter. (60% métaux ferreux). Selon
l’Ademe90, 60% du gisement VHU était broyé en France il y a 9 ans alors que :
720 000 VHU sortaient des filières agréées pour être exportés illégalement sous couvert de
véhicules de seconde main.
182 000 VHU étaient exportés vers des broyeurs agréés principalement en Espagne
(enfouissement des résidus de broyage automobile) et Belgique (déficit de matière).
Face à ce constat, l’Ademe propose la mise en place de dispositifs spécifiques : traçabilité, partage des
données et informations au niveau européen, et une politique de contrôle et de sanction
volontariste.
Concernant la filière DEEE, l’éco-organisme à but non lucratif « ecosystem » est né de la fusion en 2018
d’Eco-systèmes et Recyclum. Quatre activités (90 sites en métropole et DOM créés depuis 2007) sont
agréées avec un taux global de réutilisation/réemploi qui atteint 18% : DEEE ménagers (296 M€/75
millions d’appareils), lampes (23 M€/49 millions de lampes), petits extincteurs (1,2 M€/71000
extincteurs) et DEEE professionnels (11,4 M€, panneaux photovoltaïques). La filière emploie 7200
personnes (logistique, réemploi et traitement), avec un budget de 406 M€ (75% de contributions des
producteurs et 25% de recettes matières). Les coûts des collectivités territoriales (57% de la collecte)
sont pris en charge à 100% à l’aide d’un soutien de 30 M€ et d’un coût opérationnel évité de 187 M€
(transport, dépollution et traitement). Les coûts 2018 de la filière se répartissent ainsi : 78% de coûts
opérationnels ; 14% de soutien à la collecte ; 4,1% pour la communication ; 3,1% pour les frais de
fonctionnement et 0,8% de recherche et développement. En 2018, les métaux ferreux représentaient
50,8% des produits DEEE traités et les non-ferreux : 7,5%.91
En 2017, les filières DEEE et emballages ont permis de collecter respectivement 366 000 tonnes et
314 000 tonnes de ferrailles en vue du recyclage. La contribution des filières REP à la collecte de
ferrailles (10% au total) se répartissait ainsi : VHU (5%), DEEE (3%) et emballages ménagers (2%). La
collecte en vue du recyclage des emballages ménagers de la REP s’élevait à 68%.86
L’aluminium primaire est fabriqué par électrolyse à partir d’alumine métallurgique (issue du minerai
Bauxite)92 et l’aluminium de seconde fusion (avec des propriétés physiques identiques), à partir de
déchets. La production d’aluminium recyclé résulte de :
déchets d’aluminium de composition hétérogène par affinage,
chutes de fabrication (première et seconde transformation) ou déchets de composition
identiques (canettes) par recyclage direct.
C’est un métal léger, malléable, conducteur et recyclable à l’infini, sans perte de propriétés
intrinsèque. Il provient des VHU, emballages, mâchefers d’incinération, forges, etc. Le tri s’effectue à
l’aide de la machine à courant de Foucault (séparation des métaux non ferreux des autres composants)
ou par flottaison (densimétrie).
Les lots sont analysés par spectrophotométrie dès leur arrivée sur le site d’affinage afin de déterminer
leur composition métallique et sont fondus dans des fours pour constituer des alliages spécifiques.
92 Minerai découvert en 1821 dans les Baux-de-Provence et procédé chimique de synthèse d’aluminium découvert par H ;
Saint-Clair Deville en 1854.
66 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Les chutes de fabrication ou de déchets post-consommation de type canettes (bien souvent importés
d’Europe du Nord) sont envoyées en recyclage direct et récupérées sous forme de billettes ou lingots.
Des usines de transformation possèdent des fours et recyclent sur place leurs chutes de fabrication et
déchets d’alliages.
La production d’aluminium recyclé au niveau national (53%) est très inférieure à la moyenne
européenne (69%) de la production totale. Ce taux moyen d’incorporation couvre l’affinage et le
recyclage direct avec une part non connue de chutes internes.
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 67
En 2018, 11 usines d’affinage93 et 7 usines de recyclage direct sont situées en France. La collecte et la
préparation des déchets de métaux non ferreux s’effectue sur 679 sites et emploie 9 392 salariés.
L’aluminium massif issu du secteur des transports (chutes de fabrication) est collecté à plus de 90%,
alors que l’aluminium diffus (déchets d’emballage) est collecté à 55% sous la forme de canettes,
barquettes et boîtes de conserve. Les volumes récupérés sur des déchets d’emballages en aluminium
sont faibles en comparaison des volumes mis sur le marché.
Estimation des volumes récupérés de déchets d’emballage en aluminium (Aluminium France, 2019)
Estimation des volumes
Type d’emballage en aluminium
Mis sur le marché Récupérés
Canettes 30 000 t 18 000 t
Aérosols 10 000 t 5 000 t
Barquettes 7 000 t 3 500 t
Boîtes alimentaires/conserves 7 000 t 5 000 t
Emballages en aluminium flexible 20 000 t 2 000 t
La Finlande a un taux de collecte des canettes mises sur le marché plus élevé que la France : 98% contre
60%. La Société Constellium95 (CA 1,5 Mds €) doit augmenter sa capacité de recyclage pour
approvisionner le marché automobile allemand et français. Trois milliards de canettes usagées (dont
50% importés d’Allemagne, Norvège, Russie, etc.) sont ainsi recyclées annuellement sur le site de
Neuf-Brisach (Haut-Rhin) qui monopolise le marché français. Par conséquent, l’objectif de taux de
recyclage de 80% fixé par l’Europe d’ici 2020, est très soutenu par cette multinationale.
Actuellement, la collecte est encadrée par deux filières REP : VHU (absence de caractérisation des
métaux non ferreux) et emballages ménagers (32 000 tonnes, soit 5% des volumes totaux collectés). A
ces filières, peuvent s’ajouter à travers le projet « Métal »96, la collecte des petits gisements
d’aluminium (capsules, opercules, dosettes et couvercles).
95 Le site d’Issoire est l’un des principaux producteurs mondiaux de tôles aéronautiques.
96 Projet initié en 2014 par le Club de l’emballage léger en aluminium et en acier (CELAA) en collaboration avec Citeo, l’AMF,
Nespresso et quelques collectivités.
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 69
La production européenne de cuivre recyclé représente plus de 85% de la production totale en cuivre
et 41% de la demande est satisfaite par le recyclage. L’Allemagne devance l’Italie et la France.
Le bilan 2005-2017 de l’Ademe majore de 62% les volumes recyclés par rapport aux estimations de
2014 en raison d’un changement de méthodologie. Toutefois, le taux d’incorporation de cuivre recyclé
reste faible (35%) dont 14% sont issus de chutes de fabrication (hors chutes internes) et 19%
proviennent de produits en fin de vie. Ce taux n’intègre pas les exportations de cuivre traitées en
Allemagne ou affinées en Belgique, ni le cuivre recyclé importé. Cette situation affaiblit la collecte des
déchets cuivrés des régions transfrontalières avec l’Italie et l’Espagne où les paiements en espèce sont
autorisés.
En 2017, les câbles en cuivre représentaient 64% de la collecte, et environ 8% des déchets cuivreux
provenaient des filières REP VHU et DEEE, soit 19 000 t. Mais aucune donnée sur le gisement de cuivre
n’a été transmise à la mission.
Données économiques
Quelques chiffres sur les industries mécaniques en 201899 :
La France est au 6ème rang mondial derrière les Etats-Unis, le Japon, l’Allemagne, l’Italie et la
Chine.
615 500 salariés (recrutements en 2019), CA de 132,2 Mds €.
20% de l’emploi industriels des régions.
57% exportations vers l’UE (51,2 Mds €).
Les équipements100 (221 500 emplois, 55,9 Mds €).
La transformation101 (326 828 emplois, 58,3 Mds€).
La précision102 (67 122 emplois, 18 Mds €).
Le fer est le métal le plus utilisé dans le monde et le plus abondant sur terre. Il est majoritairement
fondu dans les hauts fourneaux pour la fabrication de l’acier ou de la fonte. Les principaux pays
fournisseurs de fer sont la Chine, l’Australie et le Brésil. En 2018, la production mondiale d’acier brut
a atteint 1,808 milliards de tonnes (+ 4,5% par rapport à 2017) dont 1,267 milliards de tonnes à partir
de four à oxygène (+1,8% depuis 2017) et 524 millions de tonnes produits par des fours électriques à
forte intensité ferraille (+12% en un an). La consommation de ferraille en Chine (1er producteur mondial
d’acier) a augmenté de manière significative pour atteindre 187 millions de tonnes (20,2% de ferraille
en 2018 contre 10,4% en 2015). La production par les fours électriques est passée en une année de 54
millions de tonnes en 2017 à 120,7 millions de tonnes. L’Europe a consommé 93,812 millions de tonnes
de déchets d’acier avec 56% de ferraille (+ 0,3%) et a diminué sa production d’acier brut (- O,5%). En
2018, la France se situait au 13ème rang mondial des pays importateurs d’acier (14,8 Mt) et 8ème
exportateur mondial (15,1 Mt).
En 20 ans, la France est passée du 9ème au 15ème rang mondial en matière de production d’acier
(3ème place au niveau européen). Il ne reste plus que 8 hauts-fourneaux actifs en France, contre 152
en 1954. La France ne compte plus que pour 1% de la production mondiale, soit 15 millions de tonnes
d’acier brut. ArcelorMittal (Inde) produit les deux tiers de l’acier français sous forme de produits plats
(secteur automobile). La filière sidérurgique emploie plus de 31275 personnes et génère un chiffre
d’affaires (CA) de 14,9 milliards d’euros.105 Les deux groupes français Aubert & Duval et St-Gobain ne
représentent que 9,5% du CA national, monopolisé à 67% par Arcelor et l’Italien Riva. La France
fabrique 11 Mt/an de produits plats, 4,4 Mt/an d’aciers longs (destinés à la construction), 1 Mt d’aciers
spéciaux à haute valeur ajoutée pour les industries de pointe (aéronautique, transport, énergie) et des
aciers plats inox de qualité. 106
L’industrie française est fortement dépendante de l’approvisionnement en acier avec en 2017 : 4,3 Mt
destinés au bâtiment (béton, enveloppe métallique, poutrelles, laminés et profils à froid, tubes et
produits plats) et 6 Mt d’aciers plats et spéciaux utilisés par les équipements et constructeurs
automobiles (2,7 Mt produits en France). La proximité géographique des producteurs sidérurgiques
avec les industries ferroviaires est un facteur de compétitivité et de performance. Toutefois,
l’approvisionnement en certains produits d’aciers spéciaux traçables et certifiés n’est pas assuré de
manière constante en France et nécessite une harmonisation des normes107 entre industriels et
producteurs et des prix. Par exemple, l’industrie automobile utilise les produits longs français, mais
importe des produits plats à cause des différences de prix.
L’inox ou acier inoxydable109 (alliage Fer - Carbone + 10,5% de chrome) est utilisé dans la fabrication
de pièces automobiles, de couteaux, d’électroménager (cuisines professionnelles), la construction,
l’industrie alimentaire et pétrochimique, ou pour des applications médicales.
Les minerais qui entrent dans le cycle de production de l’acier sont nombreux : aluminium, chrome,
cobalt, manganèse, molybdène, nickel, niobum, phosphore, silicium, titane, tungstène, vanadium. La
Chine produit 90% des terres rares bien que ne possédant que 50% des réserves mondiales et la France
a besoin de matières premières non disponibles sur son territoire (fer, charbon, graphite) pour
produire son acier. En effet, elle fait partie des trois pays européens de « mine morte » avec le
Royaume-Uni et l’Allemagne. En l’absence de filière viable de recyclage de cuivre et métaux rares, la
France exporte ses déchets métalliques non ferreux principalement vers l’Allemagne et la Belgique
pour alimenter leur propre stock stratégique « national ». L’approvisionnement de l’Union européenne
et plus particulièrement de la France en matériaux rares, dépend de l’importation. Aussi, comme le
souligne le rapport du sénat en 2019, l’acier doit se situer au début de la chaîne de valeur comme les
terres rares, et constituer un enjeu de souveraineté national.
Belgique Espagne Allemagne Italie Luxembourg Chine Pays-Bas Turquie Inde Etats-Unis
1,07 Md€ 770 M€ 750 M€ 590 M€ 380 M€ 258 M€ 190 M€ 76 M€ 36 M€ 43 M€
59,2% 58,3% 16,3% 30,5% 81% déchets 45% 45% déchets 99% 49% 48% métaux
déchets déchets de déchets déchets d’acier déchets de cuivre et déchets métaux non ferreux
de fonte fonte et d’acier, d’acier, de d’aluminiu d’acier non
et d’acier, d’acier, 42% 24,8% cuivre m, 18,3% ferreux
18,7% 15,8% déchets de déchets déchets de
déchets déchets de cuivre et de papiers-
de cuivre papiers- métaux cuivre. cartons
cartons précieux.
Typologie des matières premières de recyclage exportées par pays en 2014.
Les filières de recyclage110 et les technologies de production, plus économes en matières premières
(poids du fer divisé par trois en 20 ans dans une voiture) essaient de compenser la réactivation des
projets miniers de fer en Asie. Toutefois, elle reste étroitement dépendante de la filière sidérurgique
108 Rapport du sénat n°649, « Sur les enjeux de la filière sidérurgique dans la France du 21ème siècle : opportunités de
croissance et de développement » V. Létard (2019).
109 C’est la formation d’une couche d’oxyde de chrome à la surface de l’acier qui lui confère sa résistance à la corrosion. On
peut parfois l’enrichir avec du nickel ou du molybdène pour augmenter son caractère anticorrosif.
110 La filière de recyclage consomme trois fois moins d’énergie que la filière dite de « conversion ».
74 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
dans son ensemble. Avec un chiffre d’affaires de 2,2 milliards d’euros, 848 établissements (60% de
PME) dont 41 sites en sidérurgie ; la filière emploie 11 730 salariés qui collectent et préparent les
ferrailles. En résumé, 50% de l’acier recyclé en France est vendu dans l’hexagone, 46% est exporté
dans l’Union européenne et 4% dans le reste du monde. C’est un marché inversé puisque les flux
partent d’une multitude de consommateurs vers un nombre réduit de producteurs. Ce contexte relie
directement les cours des matières recyclées à ceux des matières premières de première extraction.
Le modèle économique de l’acier recyclé reste fragile avec pour les usines qui consomment de la
ferraille, un coût de matières premières et un coût de produits finis supérieurs au coût de fabrication
d’acier à partir de minerai de fer.
Le prix de l’acier est un prix composite calculé par MEPS (leader mondial de l’analyse marché de l’acier),
à partir de produits longs et plats sur trois régions (Europe, Asie et Amérique du Nord). Concernant
l’inox, il s’agit d’un prix composite calculé par MEPS à partir d’inox de type 304 sur les trois mêmes
régions. Le prix du fer est tiré des statistiques de la Banque mondiale, pour le minerai de fer importé
de Chine (référence du marché), à teneur minimale de 62%.
Depuis quelques années, l’industrie sidérurgique doit faire face aux surcapacités mondiales de
production d’acier du marché Chinois (exportations supérieures à la consommation nationale
principalement pour la construction). La filière électrique française a été la plus touchée (-14% en 5
ans) avec des coûts de production plus élevés que la filière fonte. Face à cette situation, la Commission
européenne a imposé des mesures anti-dumping (règlement UE 2019/159) et les secteurs de la
construction et de l’automobile (Europe et Inde) ont permis d’augmenter la demande en acier.
Mais l’abondance de l’offre et le ralentissement de la demande ont tiré les prix vers le bas en 2017.
Alors que les prix avaient triplé entre 2006 et 2011, ils étaient redescendus depuis pratiquement à leur
niveau d’avant-crise. En 2018, la Turquie était le premier importateur mondial de ferraille d’acier
(20,66 Mt) devant la Corée et l’Inde. Les tensions politiques entre les Etats-Unis et la Turquie (baisse
des achats Turcs) et les restrictions imposées par la Chine en 2017 sur les importations de déchets
ferrailles, DEEE et plastiques, ont entrainé une pression sur le prix des métaux ferreux (+12% en 2018
par rapport à 2017). L’arrivée de l’acier laminé chinois sur le marché turc, principal importateur de
ferrailles françaises, a aussi fortement réduit la demande.
En ce qui concerne le VHU, la valeur de reprise sur le marché français variait en 2014 entre 100 et
150 €/t (inférieur à la valeur de reprise Belge). La valeur commerciale de l’acier valait entre 200 et
250 €/t au sein du marché européen et méditerranéen (236 €/t en 2017112). La mise en installation de
stockage de déchets dangereux (ISDD) est souvent une solution plus économique que la valorisation ;
elle freine les investissements dans les unités de tri post broyage à travers l’innovation et la R&D
(valorisation des résidus de broyage). L’observation de pays voisins (Belgique, Espagne) montre que
111 https://www.journaldunet.fr/patrimoine/guide-des-finances-personnelles/1146972-prix-des-metaux-les-tarifs-des-
metaux-en-decembre-2019/
112 + 29% par rapport à 2016.
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 75
Carte de France des sites industriels et emplois (Source : Aluminium France, 2019).
Globalement, la production française d’aluminium a peu évoluée depuis 15 ans, malgré une légère
augmentation ces dernières années (+15% de 2013 à 2017) grâce à la production d’aluminium primaire
(+20% en 4 ans)118. En 2017, la filière française représentait 13% de la production européenne, mais sa
demande en aluminium reste supérieure à la production nationale avec une consommation de 1,2Mt
(dont 41% d’aluminium affiné) principalement portée par l’industrie automobile. En 2019, la baisse du
marché automobile en 2019 a impacté le prix de vente d’aluminium secondaire au profit de
l’aluminium primaire pour la transformation des moteurs. Aussi, la filière devra identifier de nouveaux
débouchés industriels, notamment pour le recyclage des anciens moteurs automobiles qui
contiennent de nombreuses impuretés.
118 Redémarrage d’une ligne d’électrolyse par TRIMET en 2013 et amélioration des techniques de production.
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 77
Avec une balance commerciale déficitaire, (260 000 t en 2017), les importations sont une source
significative d’approvisionnement pour l’industrie française (47% de la consommation).
Par ailleurs, l’alumine a longtemps été indexé au London Metal Exchange (LME), mais possède à
présent son propre cours. Les cotations de l’aluminium sont internationales avec une fluctuation des
cours mondiaux. Par exemple, le prix du LME (Londres) varie en fonction de l’offre et la demande. Il
existe également un cours chinois à la bourse de Shanghai SHFE.
En 2015, la baisse importante des prix sur le marché des déchets, malgré une demande soutenue des
industries consommatrices européennes, a diminué les volumes de collecte cette même année. Le
redécollage des cours de l’aluminium en 2016 (+ 10%) avait augmenté les volumes de déchets
collectés. Depuis 1 an, le LME stagne autour de 1800 $ avec des prévisions mauvaises au regard des
surcapacités de production chinoise. En décembre 2019, le prix de l’aluminium tiré des statistiques de
la banque mondiale, et établi à partir des chiffres du London Métal Exchange (LME), pour un lingot
d’aluminium d’une pureté minimale de 99,7%, s’élève à 1571 €/t.111
En revanche, le lingot non indexé au prix du déchet est décalé avec le prix de vente du lingot de
seconde fusion. Les cotations sont internationales avec une fluctuation des cours mondiaux. Par
exemple, la cotation européenne s’appuie sur une cotation allemande (norme DIN 226) à corréler avec
l’indice LME. Il y a 10 ans, des experts prévoyaient que le prix de l’aluminium secondaire devait
atteindre 2300 €/tonne si le marché Chinois se fermait.
En 2019, le décalage entre la DIN 226 et l’indice LME (cotation française) s’élève à 300 €/t avec une
variation de +/- 50 €/t. Ce système avantage les gros acteurs avec des prix négociés variant de 200 à
300 €/t.
Voici quelques exemples de prix de reprise trouvés sur internet119 pour un DIN à 1850 €/t en 2016 (prix
plancher 200 €/t) :
Teneur Al 45% -> repris 227,87 €/t
Teneur Al 60% -> repris 380,50 €/t
Teneur Al 70% -> repris 482,25€/t
Teneur Al 75% -> repris 533,12 €/t.
La filière cuivre existe depuis 10 ans en France, mais n’y a pas de production primaire de cuivre et les
cours sont très volatiles. Les produits cuivrés sont utilisés pour la conduction thermique électrique
avec une demande croissante de RTE sur une période de 5 à 20 ans. C’est un métal concurrent avec
l’acier et l’aluminium dans les secteurs aéronautiques et automobiles. La récupération des câbles est
localisée dans le Nord de la France pour approvisionner Nexans (leader français du recyclage des câbles
et métaux non ferreux, créé en 2008 par Suez). Les déchets cuivrés sont recyclés en tuyaux, câbles
électriques et maroquinerie ; quant aux déchets impurs, ils sont exportés et recyclés en Allemagne et
Belgique.
En 2017, l’industrie française a importé 226 000 tonnes de lingots et cathodes et 111 000 t de déchets
cuivreux ont été recyclés par fusion au niveau national. De plus, 321 000 t de produits en cuivre (fils,
câbles, barres, profilés, laminés) ont été fabriqués en France (7% de la consommation européenne).
Les principaux secteurs consommateurs de cuivre en Europe sont le bâtiment et la construction
(14,7%), le matériel de transport (14,5%) et les infrastructures (10%).120
119 http://www.affimet.fr/fr/nos-achats/aluminium-issu-du-tri-selectif.html
120 Données 2015, European Copper Institute.
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 79
La figure ci-dessus établie par l’Ademe montre un écart notable entre les périodes 2005-2014 et 2015-
2017, car les méthodologies ont changé : données IWCC jusqu’en 2014 et données de l’Institut
Européen du Cuivre à partir de 2015. Par ailleurs, le marché du cuivre a stagné en France ; alors qu’il a
nettement évolué en Europe (+2% entre 2016 et 2017), qui représente 10% de la production mondiale
de cuivre (2,7 Mt en 2017), dont 15% provient de l’extraction minière en Pologne, Bulgarie et
Espagne.121 Cette hausse est due à la reprise mondiale des secteurs de la construction et l’automobile.
Les industriels français ont pérennisé leur approvisionnement avec des actifs étrangers leur
garantissant un marché à l’international, en particulier en Asie.
La nouvelle politique environnementale Chinoise interdit l’exportation des déchets cuivrés (câbles et
moteurs électriques). En 2017, la France importait 55 000 t de déchets cuivre de l’Union européenne
(83% des volumes bruts importés122). La balance commerciale des déchets cuivre est donc restée
positive de 2015 à 2017 en France, malgré la diminution des échanges européens avec la Chine. Les
entreprises européennes doivent donc trouver de nouveaux débouchés et investissent dans des
grenailleuses pour recycler des produits difficiles à exporter. Mais le cours du cuivre est
particulièrement sensible à la conjoncture économique et peut subir de brutales variations. Aussi,
plusieurs facteurs risquent de défavoriser le recyclage du cuivre en Europe :
L’incitation vers le cuivre primaire peut être plus forte lorsque les cours du LME sont bas.
L’approvisionnement en déchets peut être rendu difficile par les prix élevés de l’énergie (ce
n’est pas le cas en France) et les coûts de main d’œuvre.
Actuellement, le prix du cuivre tiré des statistiques de la Banque mondiale, pour un fil ou cathode de
cuivre de grade A à 99,9935% de pureté s’élève à 5239 €/t.111
Cadre juridique
équipements électriques et électroniques) sans être directement identifié125 ; c’était aussi le cas dans
le projet de plan national de gestion des déchets du 18 avril 2019 qui était en consultation publique.
En effet, les producteurs d’acier ne sont pas qualifiés de recycleurs au sens de l’obligation codifiée
dans l’article L. 541-10 du code de l’environnement. Cette situation réglementaire freine l’organisation
du recyclage (traité verticalement en « silo ») qui pourrait être plus efficiente, notamment dans le
cadre de l’écoconception126, si la filière sidérurgique était consultée par les REP dans une perspective
de politique volontariste de transition énergétique. A noter que la feuille de route de l’économie
circulaire permet également aux REP de « soutenir les investissements des filières industrielles du
recyclage et de fabrication de produits issus de matières recyclées en prenant à leur charge les risques
financiers liés à des variations sur le cours des matières premières ».
Les concepts de l’écoconception sont aussi posés au niveau international depuis 2002 (norme ISO/TR
14062). La France a défini en 1998 par l’Ademe, la norme FD X 30-310. Par la suite, la directive
2012/27/UE relative à l’efficacité énergétique a modifié la directive-cadre du 21 octobre 2009/125/CE
déterminant un cadre pour la fixation d’exigences en matière d’écoconception applicables aux
produits liés à l’énergie. Au niveau national, le modèle d’économie circulaire est renforcé par l’article
46 de la loi n°2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de
l’environnement et l’article 70 de la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique
pour la croissance verte. Cependant, plus de 10 ans après le Grenelle de l’environnement, la politique
de l’écoconception reste théorique, notamment pour la filière de l’acier.
La feuille de route pour l’économie circulaire (FREC) du 23 avril 2018 fixe comme objectif d’intégrer
l’écoconception et l’incorporation de matière recyclée. Dans ce but, elle propose de mettre en place
des « bonus-malus » sur l’éco contribution, pouvant excéder 10% du prix de vente hors taxes des
produits. Actuellement, à cause de l’absence de contrôle amont les normes aval deviennent
contraignantes (pollutions des métaux au mercure, hygiène au travail, protection de l’environnement).
Par exemple, les bornes « Velib » contiennent une couche de zinc qui nécessite une température de
fusion plus élevée que la ferraille, le traitement devient incontrôlable. Autre exemple, dans le cas des
déchets de grenaillage pollués par des peintures (transformés en billes métalliques), le retrait de
peinture a également un coût. Dans les fonderies, le sable (silice) pollue les billes métalliques, toutes
les pièces passent par le grenaillage. A cause du coût de traitement et d’incinération (normes
d’émissions dans l’air), les déchets sont souvent enfouis. Si on connaît mieux la composition de
matière en métaux, le traitement sera plus aisé pour les recycleurs et moins coûteux. Les produits
métalliques doivent être mieux encadrés en France. Ainsi, des produits métalliques recyclés vendus
sur le marché national peuvent provenir de pays non soumis à la directive européenne
2013/159/EURATOM.127
Les normes ISO 14040 et 14044 définissent des règles et une méthodologie qui intègrent toutes les
étapes du cycle de vie du produit : production d’aluminium primaire, produits semi-finis, recyclage et
fin de vie. Mais dans le cas des aciers inoxydables, il peut arriver qu’il y ait 30% de tromperie sur la
dénomination des échantillons. Les principales non conformités proviennent de Chine, malgré
125 Par exemple, le taux de recyclage est bon pour les emballages (68%) grâce aux canettes (74% au niveau UE).
126 Par exemple, les meubles 100% métalliques ont une REP contraignante a contrario du secteur automobile qui a une REP
libre à travers son éco-organisme qui ne fixe aucune éco-contribution.
127 « (i) leur recyclage et leur réutilisation, dans le domaine nucléaire ou conventionnel, avec la mise en place de seuils de
libération ou d’objectifs de dose, et (ii) leur stockage, dans un centre dédié ou conventionnel. Les politiques libératoires
mises en oeuvre concernent majoritairement deux types de déchets distincts : les métaux et les déchets inertes (gravats
de béton, sols, etc.). », extrait du rapport de l’IRSN : « Déchets radioactifs de très faible activité : la doctrine doit-elle
évoluer ? » (2016).
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 81
l’obligation de traçabilité de matière première pour les aciers alimentaires. Lorsque les matières
premières sont importées et non tracées, cette situation peut créer une concurrence déloyale sur les
alliages. La certification DGCCRF doit être améliorée et renforcée à travers les normes EN 10 204
(métaux) et EN 10 068 (produits en acier). Il convient de mettre en place des normes de composition
matière sous forme de certification avec une forme définie et une limite acceptable. Dans certains
secteurs sensibles (plans de cuisine, charriots d’hôpitaux, restauration), les matériaux inoxydables sont
en contact avec les aliments et les décrets de certaines REP (ameublement, DEEE) n’imposent pas la
traçabilité des ferrailles aux metteurs sur le marché et opérateurs.
Concernant l’affichage du taux de recyclage des métaux, il existe une demande non formalisée des
clients pour obtenir un certificat de matière recyclée, car les produits peuvent être juridiquement
contestables. Par exemple, la bouteille Heineken scanne avec un code barre sur la canette la traçabilité
du produit. Au niveau européen, les objectifs réglementaires pour le recyclage des déchets
d’emballage ont été fixés :
50% en poids pour l’aluminium d’ici 2025,
60% en poids pour l’aluminium d’ici 2030.
128 Lors de la fermeture des frontières avec la Belgique il y a quelques années, 30% des flux de déchets sont revenus en France
82 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Une tonne d’acier recyclé économise plus de deux fois son poids en matière première, 70% de son
poids en énergie, 1,5 fois son poids en CO2. Selon une étude Ademe129, la valeur de référence est de
3190 kg équivalent CO2 pour une tonne d’acier en première fonte, et 1100 kg CO2 pour une tonne
d’acier entièrement issu du recyclage (c’est-à-dire entièrement faite à partir d’acier recyclé, ou en
d’autres termes de ferrailles). L’incertitude sur le facteur d’émission est prise égale à 10%.
La production d’aluminium est une source de gaz à effet de serre du fait de l’énergie utilisée pour
extraire la bauxite, la transformer en alumine, électrolyser l’alumine fondue et des émanations de
perfluorocarbures (notamment CF4). Pour faire une tonne d’aluminium en lingots, il faut extraire (en
moyenne) 5168 kg de bauxite, qui donnera 1925 kg d’alumine, laquelle consommera 441 kg d’anode
(électrolyse), pour donner une tonne de métal pur. La très importante quantité d’électricité utilisée
pour l’électrode conduit à une dispersion très forte des résultats selon les pays de production : 1,7 à
23 tonnes de CO2 par tonne d’aluminium primaire selon le procédé et la zone de production.130 La
production directe rejette 2 tonnes de CO2/t, alors que la production indirecte rejette 4 tonnes CO2/t.
Il faut supprimer le second facteur. La R&D remplace l’anode graphite (émettrice de CO2) par une
anode inerte (non émettrice de CO2). Le plan B est la captation de CO2.
L’aluminium secondaire est composé d’aluminium récupéré dans le cadre du recyclage des métaux.
L’empreinte carbone est très faible, car elle ne consomme que 5% environ de l’énergie nécessaire à la
production de l’aluminium primaire. En 2014, l’Ademe avait retenu la valeur de 515 kg CO2 par tonne
de production d’aluminium secondaire, à partir de ferraille d’aluminium (1210 kg de CO2 par tonne
pour l’US EPA dans le cadre de la production de canettes en aluminium).
La valeur retenue pour le cuivre était de 2,93 kg/CO2/kg de métal produit avec une incertitude de 50%
(3,3 à 6,2 kg CO2/kg de métal avec un taux de recyclage de 40% sur la base d’une électricité
entièrement produite au charbon).
Par ailleurs, la France dispose d’un mix électrique faiblement carboné avec des prix en moyenne plus
bas que dans d’autres Etats membres (Italie, Angleterre, Espagne, Belgique) à travers la régulation
nucléaire du parc historique de EDF (dispositif prévu jusqu’en 2025). Par exemple, les industriels
peuvent se fournir à un prix régulé à 42 euros du MWh lorsque le prix du marché est supérieur.
Concernant l’indicateur effet de serre, le recyclage des métaux ferreux représente 76% de l’ensemble
des déchets recyclés (25,4% des tonnages de déchets collectés) et le recyclage de l’aluminium
contribue à hauteur de 20% du bilan total. Le recyclage des métaux ferreux représente 28% du bilan
total de consommation d’énergie primaire des déchets recyclés (20% pour l’aluminium) et une tonne
d’acier recyclé permet d’éviter par rapport à la production d’une tonne d’acier primaire, l’équivalent
de 57% des émissions de CO2 et 40% de la consommation énergétique primaire.
La réduction des émissions de CO2 par l’économie du recyclage est donc un enjeu important. Par
exemple, le groupe américain Nucor a développé des mini-aciéries à proximité des sites de production
de ferraille ou des usines des clients. Par conséquent, le maintien d’un site comme Ascoval131 qui
fonctionne à 100% à partir de ferraille recyclée constitue un enjeu pour le développement d’un réseau
dense de sites sidérurgiques fonctionnant avec des fours électriques.
Aussi, dans l’objectif d’augmenter la compétitivité des entreprises sidérurgiques françaises et
européennes, le Sénat (avec le soutien d’Eurofer) invite la Commission européenne à inscrire la mise
en place d’une « taxe carbone » également appelée « mécanisme d’inclusion carbone » (MIC) aux
frontières de l’Union Européenne au sein de ses priorités politiques pour la nouvelle mandature.132
Seuls 30% des nouveaux produits en acier sont fabriqués à partir d’acier recyclé avec un taux de
récupération des ferrailles situé entre 50 et 90%. La marge de progression reste importante. Aussi, le
Sénat propose à travers son rapport, de préserver un réseau dense d’aciéries électriques en France
afin d’optimiser le recyclage de la ferraille et de participer au développement de l’économie circulaire,
riche en emplois non délocalisables. Dans l’objectif de développer l’écorecyclabilité des produits
industriels à base d’acier (écoconception) et en application de la feuille de route pour l’économie
132 Selon Aluminium France, 1 tonne d’aluminium recyclé à partir de 100% de déchets en fin de vie a une empreinte carbone
20 fois plus faible qu’une tonne d’aluminium primaire produit en Chine. L’empreinte carbone de la production primaire
d’aluminium est trois fois plus faible en Europe qu’en Chine. Et pour la France : 4 fois.
133 Bilan 2005-2017 de l’Ademe (2019).
84 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
circulaire (FREC), il est également proposé de créer un centre d’expertise du recyclage associant tous
les acteurs des filières afin d’approfondir les conditions de recyclabilité réelle des produits contenant
de l’acier.
L’industrie automobile représente l’un des principaux gisements d’évolutions technologiques pour
l’acier français : aciers plus légers, plus résistants ou nouveaux revêtements. Néanmoins, le
remplacement progressif du parc automobile par des véhicules à motorisation électrique conduira à
une consommation réduite de l’acier : 15 à 20% du volume par véhicule, et jusqu’à 50% des besoins
en tubes d’acier selon le rapport sénatorial 2019 de V. Létard. Ces véhicules consomment beaucoup
moins de pièces fondues en aluminium secondaire (25 %, contre 56 % dans les moteurs thermiques).
Le taux d’incorporation des pièces de fonderie des véhicules électriques varie entre 30 et 100 %
d’aluminium recyclé. Le prix des carrosseries de voiture augmente avec une réduction de poids de 40
à 50 %. Il y a peu de pièces moulées dans les moteurs électriques (besoin d’aluminium primaire non
recyclé). Si on améliore le déchet (plus affiné), le déchet ultime risque d’être plus concentré en
impuretés (1 tonne recyclée coûtera 4 fois plus cher pour les affineurs).
Le groupe indien Tata Steel a développé en 2001 la plate-forme numérique Mjunction (premier site
mondial de vente en ligne d’acier avec un chiffre d’affaires de 9,5 milliards de dollars en 2016) qui
contribue à alimenter l’industrie du recyclage avec des données sur les flux, l’utilisation des matières
d’acheteurs et vendeurs de ferrailles tout au long de la chaîne de valeur. En France, la feuille de route
de l’économie circulaire d’avril 2018 fixe comme objectif de favoriser le développement de
plateformes numériques cartographiant les services de réparation et de réemploi, malheureusement
sans déclinaison sur un mode opérationnel avec une gouvernance définie.
Production d’aluminium recyclé et incorporation dans la fabrication des produits en aluminium (première transformation en
fonderie) – Source Ademe.
Le marché des déchets d’aluminium fait face à quelques difficultés qui influencent la quantité de
déchets disponibles pour le recyclage en France. En particulier, le positionnement des affineurs
français sur des produits de qualité nécessitant des déchets bien triés, limite les débouchés des autres
déchets d’aluminium en France, qui sont donc essentiellement destinés à l’export. Ces exportations
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 85
concernent 68 % des flux collectés en 2017, soit 472 kt, majoritairement à destination de l’Asie (en
Chine en particulier). A l’échelle européenne, le durcissement de la politique chinoise d’importation
des déchets et la mise en place de solutions locales pour s’adapter à ce changement de physionomie
du marché seront des enjeux forts pour la filière dans les prochaines années. Jusque récemment, les
déchets d’aluminium qui ne trouvaient pas preneur en France et plus généralement en Europe
partaient à plus de 80 % vers la Chine. La fermeture des frontières chinoises entraîne donc une
augmentation des stocks de déchets en Europe. Ceci est à la fois une opportunité pour la filière
française car, c’est l’occasion de relocaliser le traitement de ces déchets en Europe, mais également
une faiblesse puisque cette relocalisation va demander du temps et des investissements importants.
L’Europe risque donc de se retrouver avec des stocks de déchets importants sans débouchés à court
terme.
Les déchets, constitués d’un mélange d’alliages, nécessitent des opérations de tri supplémentaires et
donc un surcoût pour les recycleurs français rendant le recyclage économiquement moins intéressant.
En outre, en l’absence de caractérisation de ces flux (composition et sources), il est impossible
d’identifier les fractions de déchets concernés pour engager les actions nécessaires. L’enjeu pour la
filière est donc d’améliorer la qualité des déchets en s’orientant vers des systèmes de tri alliage par
alliage ou par typologie de forme. Des technologies de tri au laser, à l’image du Libs (laser induced
beakdown spectroscopy, ou spectroscopie sur plasma induit par laser) déjà utilisé en Allemagne, sont
capables de différencier les alliages et pourraient contribuer à améliorer la qualité des déchets
collectés en France. Le tri alliage par alliage pour proposer des MPR de meilleure qualité est donc à
favoriser pour conserver ce marché, qui peut également être une opportunité pour la filière aluminium
dans la fabrication des carrosseries avec une justification d’un taux d’incorporation dans les pièces du
produit final. En plus d’une absence de tri optimal de certaines fractions de déchets en aluminium,
d’autres facteurs pénalisent le recyclage des déchets en aluminium en France, en particulier les
emballages. Environ 25 % des emballages mis sur le marché sont multicouches (constitués de feuille
d’aluminium collée à une ou plusieurs couches de plastiques ou de papier). Ces emballages sont peu
triés à ce jour en France : ils ne sont dans l’extension des consignes de tri que pour 15 millions
d’habitants et seulement 25 centres de tri sont équipés pour les trier. En outre, il est quasi impossible
de les recycler via les procédés classiques en raison d’une teneur importante en matières organiques.
Le développement des procédés de pyrolyse pourrait contribuer au recyclage de cette fraction.
Il y a donc deux priorités dans le secteur du recyclage de l’aluminium :
recycler les emballages multicouches grâce à la pyrolyse petits alu comme en Allemagne (R&D
à développer face au problème de COV et de dioxine non captés) ;
trouver de nouveaux débouchés aval pour le secteur affinage, car les récupérateurs les
rachètent (il ne reste que 3 ou 4 affineurs indépendants).
La collecte et le recyclage doivent être différenciés avant la mise en four (filière différenciée) en
fonction des métaux. Un dialogue multicritères doit être construit entre les laitons de robinetteries,
les fontes d’eau potable et les robinetteries à taux de plomb plus faible. Leur cahier des charges de tri
diffère notablement en fonction de l’utilisation aval du produit sortant du recyclage. Deux solutions
pour la métallurgie par rapport à la toxicité de certains déchets :
soit on produit des déchets plus purs,
soit on dilue avec du métal primaire (cas du cuivre).
Par ailleurs, la concertation amont avec les recycleurs lors de la mise en marché d’un produit
permettrait de traiter deux sujets majeurs :
la saturation des capacités de stockage des déchets ultimes,
86 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Cette concertation amont conditionne l’objectif de diviser par deux l’enfouissement des déchets, face
à la saturation des incinérateurs, approvisionnés en priorité par les déchets ménagers au détriment
des déchets ultimes134 qui s’accumulent sur les sites de recyclage. Par exemple, la récupération de
tôles peintes ou plastifiées génère un surcoût135 dans le processus de recyclage (traitement et filtration
des contaminants conformément aux normes sanitaires et environnementales de rejets dans l’air).
Dans le cas des VHU, les ferreux et les induits récupérés avant les RBA représentent 75% d’un VHU
dépollué et démonté. En 2015, l’Allemagne et l’Autriche développaient des procédés de tri mécanique
des VHU qui visait à récupérer les métaux et à préparer un CSR (fraction combustible utilisée dans les
hauts-fourneaux) et à stabiliser les boues en vue de leur mise en décharge. En France, 16 unités de tri
post broyage étaient actives (inégalement réparties sur le territoire) dont 13 appartenaient à des
grands groupes pour une capacité de 1Mt (4 sites > 100 000t au Nord de la Loire) alors que le besoin
était estimé à 289 000t. Dans la majorité des cas, le tri post-broyage se fait sur le site du broyeur.
Les fonderies souhaitent augmenter leur part de recyclage des déchets post-consommation. Mais la
collecte de produits pollués risque d’augmenter les émissions de composés chimiques toxiques
impactant directement le prix final du déchet, à cause du coût élevé de traitement. C’est pourquoi,
une grande partie des ferrailles collectées part vers l’étranger (principalement la Turquie) avec une
partie des opérations (collecte, transport et tri) financée par les filières REP à travers le soutien. L’éco-
organisme DEEE regrette que les règles encadrant les flux transfrontaliers et le contrôle ne soient pas
harmonisés au niveau Européen, car les filières illégales exportent des déchets métalliques
(notamment le cuivre) vers des pays qui paient en « cash » (interdit en France).
134 Fraction résiduelle issue du processus de recyclage et qu’il n’est plus possible de recycler dans les conditions techniques
et économiques du moment.
135 Aucune évaluation de ces coûts n’a été transmise à la mission par les acteurs concernés (fédération professionnelles).
136 Filiales de collecte de matières ferreuses françaises : Cornu, Gosselin Duriez, Récupération du Nord, Comet France à
Bonneuil sur Marne).
137 Grands équipements ménagers hors froid.
138 Positionnement et compétitivité des industries du recyclage en France, Ademe (2014).
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 87
Recyclage du cuivre et incorporation dans la fabrication de produits en cuivre en France (Source Ademe).
Le cuivre peut être utilisé sans contrainte de qualité grâce aux technologies développées par les
fabricants de produits. Par exemple, dans l’objectif de favoriser la consommation de cuivre recyclé, les
fabricants européens de câbles utilisent du cuivre secondaire sans que la présence de matières
indésirables n’impacte la conductivité des câbles.
A moyen terme, il est attendu que certaines utilisations du cuivre se développent, et contribuent à
augmenter la demande en cuivre. Il s’agit notamment de la transition vers des énergies renouvelables
et du développement du marché des véhicules électriques, le cuivre étant utilisé dans les systèmes de
production et de transport d’électricité. De plus, le bobinage des moteurs électriques et le câblage de
ces véhicules nécessitent plus de cuivre.
La R&D du tri doit aider à obtenir des déchets riches en cuivre avec moins d’impureté (voir Federec)
pour optimiser le recyclage. Des filières de recyclage doivent également se développer en France sur
les métaux stratégiques. Par exemple, le recyclage du titane est un enjeu fort (Eco titanium dans le
Sud), idem pour le plomb (absence de plomb primaire en France).
En général, la R&D des producteurs (écoconception) n’inclut que partiellement la gestion de fin de vie
des produits mis sur le marché à cause du clivage réglementaire entre REP et industriels du recyclage.
Cette situation nuit à la performance environnementale française et devrait s’accompagner de la
création d’un centre d’expertise du recyclage associant l’ensemble des acteurs de la chaîne de
valeur (collectivités publiques, Ademe, entreprises du recyclage, metteurs sur le marché, pôle de
compétitivité, ONG) afin d’approfondir les conditions de recyclage139 réelles d’un produit.
Malheureusement aucune gouvernance de ce projet n’est définie à ce jour par les Pouvoirs publics.
139 « Caractéristique d’un produit, d’un emballage, ou d’un composant associé qui peut être prélevé sur le flux des déchets
par des processus et des programmes disponibles, et qui peuvent être collectés, traités et remis en usage sous la forme
de matières premières ou de produits. » Définition du terme « recyclable » selon la norme ISO 14021.
88 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Recommandations de la mission
En l’absence de données robustes sur le gisement réel des métaux en France, le contrôle des filières
illégales de VHU doit être porté au niveau européen et passe par une harmonisation de la traçabilité
et du partage des informations entre les acteurs de la filière conformément aux préconisations du bilan
mondial de l’Ademe en 2019 sur les dispositifs incitatifs visant à orienter les VHU dans les filières de
traitement autorisées.
Concernant le tri des déchets, la mission suggère à la DGPR et à la DGE d’augmenter le nombre de
critères de tri des opérateurs à travers un cahier des charges défini par l’ensemble des acteurs du
recyclage en concertation avec les opérateurs et éco-organismes au sein des comités stratégiques de
filières. La création d’un centre d’expertise du recyclage vise à accompagner cette mesure
conformément à la FREC et au rapport 2019 du sénat. Il est bien évident que l’amélioration des critères
de tri des opérateurs français augmentera les taux d’incorporation de matière secondaire dans la
production française.
L’expérimentation de la certification sur l’incorporation de matière recyclée (avec des normes de
composition dans le cas des emballages multicouches) et la mise en place d’une taxe carbone («
mécanisme d’inclusion carbone » ou MIC) aux frontières de l’Union européenne (proposition du Sénat
et d’Eurofer), visent également à renforcer l’éco-conception des produits et à diminuer leur coût de
traitement aval.
Concernant l’acier, les propositions 1, 9, 16, 17, 18, 19 du rapport n°649 de V. Létard pour le Sénat en
2019 permettront, bien évidemment, de renforcer les performances du recyclage en France :
« Améliorer l’échange d’information entre les entreprises de la filière sidérurgique et le comité
stratégique de la filière (CSF) Mines et métallurgie, afin de mieux prendre en compte les
spécificités des PME et des ETI du secteur dans les travaux du CSF. »
« Inviter la Commission européenne à inscrire la mise en place d’une « taxe carbone » aux
frontières de l’Union européenne au sein de ses priorités politiques pour la nouvelle
mandature. »
« Préserver un réseau dense d’aciéries électriques afin d’optimiser le recyclage de la ferraille et
de participer au développement de l’économie circulaire, riche en emplois non délocalisables. »
« Imposer une vision transversale du recyclage de l’acier, qui doit irriguer toutes les filières
industrielles, notamment les filières à responsabilité élargie des producteurs. »
« Créer un centre d’expertise du recyclage associant tous les acteurs du recyclage afin
d’approfondir les conditions de recyclabilité réelle des produits contenant de l’acier. »
« Développer l’écoconception en intégrant l’amont (la filière sidérurgique) pour concevoir des
produits plus facilement recyclables. »
Le développement du recyclage des métaux rares est également un enjeu important, mais sort du
périmètre d’analyse de la mission.
Flux physiques
Selon Federec, le volume des déchets inertes de construction ou de démolition de produits s’élevait à
46 Mt en 2014 (40,4 Mt en 2017) soit 19 % de la production de déchets du BTP dont 73 % de déchets
inertes. Les tonnages collectés proviennent de la démolition (49 %) contre 38 % de la réhabilitation et
13 % de la construction neuve. A noter que 4Mt de déchets non dangereux et dangereux proviennent
des travaux publics et 12 Mt de déchets non inertes140 du second œuvre du bâtiment (principalement
de la réhabilitation/rénovation141 ). Selon l’UNICEM, le taux final de recyclage et valorisation matière
des déchets (tous déchets confondus) et déblais produits par l’activité BTP atteignait 69 % en 2014 (la
mission n’a pas obtenu de données 2019)142. Ce taux varie selon l’activité (60 à 80 % pour la démolition,
10 à 30 % pour la réhabilitation, 40 à 60 % pour la construction neuve) et selon le type de déchets (60 à
70 % sur les déchets inertes, 30 à 50 % pour les déchets non dangereux non inertes). En moyenne
annuelle, selon l’UNICEM, un gisement de 34 Mt de déchets granulats est constitué par 17 Mt de
béton, 10,5 Mt de mélanges (dont 8 Mt de déchets béton non triés), 3,2 Mt de tuiles et briques, 3 Mt
de terres et cailloux et 200 000 t de verre plat ; et les taux de performances du recyclage/mise en
carrière s’élèvent à 95 % (tuiles et briques), 80 % (bétons), 60 % (terres et cailloux) et 50 % (déchets
inertes en mélange). Les déchets de béton triés sont recyclés en granulats, via un réseau de
1500 plates-formes143 détenues et exploitées par les adhérents de l’UNICEM et de la FNTP, réparties
sur l’ensemble du territoire.
En ce qui concerne les entreprises de travaux publics, elles génèrent 185 millions de tonnes de déchets
par an. Le taux de valorisation/recyclage de ces déchets atteint 72 %. Les plates-formes de recyclage
détenues par les entreprises de travaux publics reçoivent et traitent 60 % des déchets issus de la
démolition du bâtiment, essentiellement des déchets inertes (types béton de démolition et terres),
soit 25 millions de tonnes. Ils sont valorisés et recyclés à plus de 80 %. Les entreprises de travaux
publics intègrent dans leur organisation le traitement et l’utilisation de matières secondaires (inclus
dans la nomenclature des identifications professionnelles). Les déchets triés et collectés à l’occasion
d’un chantier parcourent entre 10 et 25 km jusqu’aux installations de traitement. Les déchets sont
transformés et stockés sur les plateformes des entreprises de travaux publics, puis acheminés vers
d’autres chantiers afin d’être intégrés en technique routière. Chaque année, 1,5 fois le volume de la
dune du Pilat est réutilisé, réemployé, recyclé ou valorisé en carrière.
Il n’existe aucune distinction entre les déchets inertes du bâtiment et les déchets inertes des travaux
publics dans l’activité des producteurs de matériaux. En effet, le béton est utilisé pour la construction
de bâtiments, mais également pour la construction d’ouvrages d’art et, dans les cas de travaux publics,
pour des bordures de trottoirs, etc. De même les granulats recyclés, issus donc du recyclage du béton,
ne sont pas utilisés majoritairement dans la construction, mais plutôt en travaux routiers. Autrement
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 91
dit, les plateformes de recyclage acceptent l’ensemble des déchets inertes du bâtiment et des travaux
publics, et vendent indifféremment des granulats recyclés aux acteurs du bâtiment et des travaux
publics. Cette bonne pratique (mutualisation) évite un cloisonnement du recyclage entre les différents
secteurs d’activité qui dépendraient de gisements restreints et donc coûteux (non compétitif avec la
matière première largement disponible en France), puisque l’ensemble des déchets est traité sur la
même ligne de production. Les travaux publics gèrent ainsi 81 % des déchets du BTP soit près de
141 Mt de déchets par an.
Données économiques
Les 1500 plateformes dans lesquelles les entreprises ont investi depuis 25 ans représentent
8000 emplois non-délocalisables (un site emploie 10 personnes au maximum). Le modèle économique
des plateformes de recyclage des entreprises des travaux publics est fondé sur un tarif d’accueil des
déchets en moyenne de 10 € la tonne et sur un prix de vente des granulats recyclés qui oscille entre
4 € et 15 € la tonne selon la qualité des produits.
La collecte et le transport de déchets s’organise différemment selon l’abondance du gisement
(saturation près des métropoles et recherche des chantiers dans les zones rurales) selon l’existence ou
non d’un réseau de déchetteries accessibles aux artisans (transfert de déchets vers une plate-
forme/transports secondaires) et selon la proximité ou non d’une plate-forme de tri ou de
regroupement intermédiaire. Le coût de transport (location d’un camion à 600 € la journée) est évalué
à 5 €/t en zone rurale (5 rotations/jour) et 7,5 €/t à Paris et proche banlieue (3,5 rotations/jour). Le
coût de stockage des déchets en béton et produits peut atteindre 110 €/m² en région Parisienne et
varie entre 1 et à 1,5 €/t sur une surface de 4000 m² pour un flux traité de 400 000t.
Le dé-ferraillage des bétons armés, qui représentent 60 % des déchets de béton, nécessite
l’intervention d’une pelle avec broyeur et un brise-roche hydraulique (location 1000 €/jour) et aura un
coût évalué à 4 €/t en tenant compte de la revente du métal (5 à 50 € la tonne). Le coût moyen de
traitement (criblage/concassage) est de 8€/t et le chargement client s’élève à 2 €/t. Les frais d’analyse
de laboratoire représentent un coût d’environ 1 €/t.
Globalement, le coût de traitement d’un déchet du bâtiment en béton, hors foncier et hors transport,
est donc d’environ 15 €/t. Le chiffre d’affaires provient d’une part, de la facturation à l’entrée pour le
traitement des déchets (2 €/t pour des blocs béton ou retour toupie à 15 €/t pour un béton armé) et
d’autre part, de la vente à la sortie des granulats recyclés. Le remblaiement coûte 3 à 5 €/tonne et la
mise en décharge : 6 à 10 €/tonne.
Le chiffre d’affaires estimé par Federec en 2017 pour la filière de recyclage des déchets de granulats
du BTP, s’élevait à 1,7 Mds € et 1,8 Mds € en 2018. Ce chiffre qui repose sur les prestations de collecte
et de traitement facturées aux détenteurs de déchets, est tiré par l’activité construction neuve
(défiscalisation Pinel, etc.).
Cadre juridique
L’Europe a fixé dans la directive-cadre révisée relative aux déchets du 19 novembre 2008, qui fait suite
au Grenelle de l’environnement, l’objectif de 70% de valorisation des déchets du BTP à l’horizon 2020.
Un programme européen de prévention des déchets sur la période 2014-2020 prévoit 4 actions pour
la filière bâtiment : le protocole de recyclage volontaire, l’étude de l’empreinte environnementale des
produits, un diagnostic, l’élaboration d’indicateurs.
La loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte du 17 août 2015 (LETCV) fixe à l’État
et aux collectivités territoriales un objectif de valorisation d’au moins 70 % des matières et produits
sur les chantiers de construction dont ils sont maîtres d’ouvrage à l’horizon 2020 (rédaction des CCTP,
92 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
144 Service contract on management of construction and demolition waste – SR1, European Commission (2010).
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 93
145 Institut français de sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux.
146 Déclaration de projet de travaux (DT) et déclaration d’intention de commencement de travaux (DICT).
94 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Les professionnels peuvent acquérir auprès de l’AFNOR la norme NF EN 206/CN de décembre 2014
(béton, spécification, performance, production et conformité – Complément national à la norme NF
EN 206). Cette norme s’applique au béton destiné aux structures coulées en place, aux structures
préfabriquées, ainsi qu’au béton destiné aux produits préfabriqués structurels pour bâtiment et
structures de génie civil. Elle spécifie notamment les recommandations quant à l’utilisation dans le
béton des gravillons recyclés.
Au-delà du maillage des plateformes ou centres de regroupement sur le territoire national, il convient
d’observer que leurs horaires d’ouverture 6h-19h correspondent à l’organisation journalière des
chantiers pour l’évacuation de leurs déchets, a contrario des horaires administratifs inadaptés des
déchetteries municipales (ouverture à 9h30 à Paris) qui dissuadent les entreprises à venir. A noter que
la plateforme Noé à Bordeaux est un outil innovant de services mutualisés inter-chantiers gérée par le
groupement d’intérêt économique qui réunit Eiffage Construction, Eiffage Route et Suez. Elle
propose : des espaces de travail, des solutions de recyclage et valorisation de déchets, le réemploi des
terres excavées et la vente de matériaux, un service de logistique et de la location de matériel.
Un nouvel appel à projet « démonstrateurs industriels pour la ville durable » (DIVD) apparaît
également comme un bon relais en vue de porter les priorités et objectifs de la ville durable dans le
cadre de la transition écologique et énergétique pour la croissance verte.
La commande publique doit favoriser l’éco-conception et la R&D des façades éco-conçues, même
modulaires.
Au niveau européen, le Royaume-Uni et la Belgique ont développé le tri amont des déchets de
granulats et des normes de recyclage des bâtiments sont mises en œuvre aux Pays-Bas, en Belgique et
en Allemagne. En revanche, la qualité/pureté des matériaux est supérieure en France qui priorise leur
contenu (retrait d’amiante par exemple).
La mission a aussi identifié le projet VALAME (Université de Toulouse et Société NEO-ECO) qui apporte
une solution innovante de traitement des déchets amiantés, permettant leur inertage et recyclage en
composés valorisables, et qui a reçu le prix de l’innovation au salon de l’amiante 2019.
Recommandations de la mission
Dans l’objectif d’améliorer la collecte, la police de l'environnement assurée par les élus locaux doit être
renforcée pour lutter contre les déchetteries sauvages et appliquer les sanctions pollueur → payeur.
Dans le même sens, une mutualisation des collectes et du tri des autres matériaux est nécessaire avec
les plateformes présentes dans les territoires.
Concernant le tri, il convient de qualifier et mettre en place en concertation avec Qualibat une politique
de formation des personnels de chantier.
Par ailleurs, la commande publique doit appliquer sans délai les mesures 33, 34, 35 et 44 de la FREC et
inclure une exigence sur la teneur minimale des granulats recyclés, adaptée à la composition des
bétons et des territoires dans un contexte de filière courte. Les projets territoriaux seront identifiés à
travers une base centralisée DT-DICT afin de connaître les gisements potentiels et les demandes
incluront des clauses d’éco-conception.
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 95
-La demande de papiers d’hygiène est stable depuis 15 ans : ces produits de première nécessité sont
peu sensibles aux évolutions économiques, ou technologiques.
-La consommation apparente du papier graphique diminue régulièrement depuis 15 ans, et est passée
de 5,5 Mt en 2004, à 3,0 Mt en 2018147, notamment en raison des moindres tirages des journaux, et
de la croissance des usages numériques.
Flux physiques
La fabrication française de papiers-cartons est stabilisée depuis 2012 à environ 8 Mt. L’érosion des
produits graphiques est compensée par une progression de l’emballage et du conditionnement.
Il faut remarquer que sur la période 2000-2017, la fabrication de papiers-cartons a diminué en France
de 20 % alors qu’elle a augmenté de 26 % en Allemagne148. Ainsi, la balance commerciale française de
papiers-cartons est déficitaire (5,1 Mt d’importations et 4,3 Mt d’exportations), mais à un niveau
stable depuis 2013, elle se creusera sans doute si le papetier finlandais UPM ne reçoit pas d’offre
acceptable pour la papeterie Chapelle Darblay (capacité annuelle de 240 kt par an de papier).
Après utilisation, les papiers et cartons usagés sont collectés selon trois voies principales :
147 Source COPACEL (Union Française des Industries des Cartons, Papiers et Celluloses).
148 Source CEPI (Confederation of European Paper Industries).
96 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
- avec les déchets ménagers gérés par les collectivités locales (emballages, journaux et magazines,
papiers de bureaux…),
- avec les déchets de la grande distribution, de l’industrie et des commerces de taille moyenne :
emballages de transports usagés, journaux invendus, etc.,
- avec les chutes de production.
Après une phase de tri, et de traitement, les papiers et cartons recyclés (PCR) sont envoyés à des
fabricants de papiers-cartons. Les refus de tri (par exemple des éléments plastiques) peuvent être
valorisés énergétiquement ou enfouis : par exemple Blue Paper a transformé deux de ses quatre
chaudières à gaz (qui fabriquent de la vapeur pour le processus de production) pour brûler ces refus
de production149. La fibre de cellulose se dégrade à chaque cycle de fabrication de la pâte à papier : il
est donc nécessaire d’introduire de la fibre de bois vierge dans les PCR pour maintenir la qualité des
papiers et cartons fabriqués. L’Ademe a synthétisé le cycle de vie des papiers-cartons selon le schéma
ci-dessous.
En s’appuyant sur les données COPACEL, et Federec, le Bilan national du recyclage 2008-2017150 dresse
l’historique 2015-2017 ci-dessous du bilan du recyclage.
Unit
Chiffres clés du recyclage des papiers et cartons en France 2015 2016 2017
é
Le gisement de papiers et cartons usagés est estimé en 2017 à 8,7 Mt par Deloitte (voir ci-dessus), et
à 8,2 Mt par le Bilan National du recyclage 2008-2017. En retenant ce dernier chiffre, la collecte de
papiers et cartons usagés étant de 7,3 Mt, le taux de collecte est estimé à 88 % en 2017, au-dessus de
la moyenne européenne (72 %).
La France est devenue exportatrice nette de PCR depuis 2001 selon la direction générale des douanes
et droits indirects: le solde exportateur oscille entre 150 et 180 M€ depuis 2007 (la baisse observée en
2018 est due à l’effondrement de la valeur marchande de PCR, et non pas au volume). Ces échanges
se font essentiellement (85 à 95 %) avec des pays de l’Union Européenne.
Montant 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018
(M€)
Exportations 190,5 266,1 271,2 217,9 367,1 449,8 388,8 342,1 329,2 358,8 390,4 428,6 308,3
Importations 90,0 114,9 111,5 68,3 133,2 150,2 106,9 105,0 127,4 150,0 157,2 168,7 128,5
Solde 100,5 151,2 159,7 149,6 233,9 299,6 281,9 237,1 201,8 208,8 233,2 259,9 179,8
Titre : Importations et exportations de PCR
Source : Direction générale des douanes et droits indirects
En termes de volumes, la France a exporté 2,896 Mt de PCR (2017) et importé 0,986 Mt (2017), en
stabilité depuis 2009 (voir ci-dessous).
Les quantités de PCR incorporés dans la fabrication de papiers-cartons sont stables en France depuis
2014, à des niveaux élevés (environ 67 %), au-dessus de la moyenne européenne (52 %).
Ce taux d’incorporation est plus important pour les papiers et cartons d’emballage (91 % en 2017) que
pour les papiers à usages graphiques (41 % en 2017), et pour les papiers spéciaux et d’hygiène (29 %).
Titre : Incorporation de PCR dans la fabrication de papiers et cartons (en kt), 2005-2017
Source : Bilan national du recyclage 2008-2017, Ademe septembre 2019
Ainsi, en comparaison avec les moyennes européennes, la France a de bons taux de collecte, et
d’incorporation des PCR. Comme la plupart des pays membres de la Confederation of European Paper
Industries (CEPI), la France a une production excédentaire de PCR, ce qui est une des causes des
turbulences actuelles sur les prix (voir §2).
Contexte économique
Le cours de la pâte à papier marchande, qui est mondial, a atteint des sommets en 2018, avant de se
retourner depuis le début du 4ème trimestre.
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 99
Titre : cours du NBSK (pâte de fibres longues) et de l’Eucalyptus (pâte des fibres courtes)
Source : réunion COPIL n°2, 4 octobre 2019 « Etude sur l’incorporation des sortes papetières dans le secteur du tissu »
(Ademe, Viasourcing, Alterinnov, Sereho) citant la source FOEX/RISI.
Les prix de référence des papiers et cartons à recycler (PCR) ont suivi une évolution comparable quelle
que soit la nature de la matière, comme le montre le tableau ci-dessous.
En effet, les exportations européennes de PCR vers l’Asie, nécessitées par un excédent européen en
papier-carton de recyclage d’environ 8 Mt/an (sur 56 Mt collectés), ont baissé de 25 à 30 % dans le
courant 2018, suite à la décision de la Chine, de la Malaisie et du Vietnam d’accroître leurs exigences
en termes de qualité de produits à recycler. Le marché européen de PCR est structurellement
excédentaire, car les produits fabriqués en Asie, et importés en Europe, arrivent emballés ; ce
phénomène perdurera tant que l’Europe importera un plus grand nombre de produits qu’elle n’en
exporte.
Le déséquilibre entre l’offre et la demande est particulièrement sensible sur les « basses sortes » :
cartons d’emballages (alias 1.05), et les papiers cartons mêlés (alias 1.01). La situation des papiers
graphiques (journaux, revues et magazines, alias 1.11, et gros de magasin, alias 1.02) n’est pas
meilleure, mais pour une cause différente : la baisse de la consommation de papier journal entraîne
des réductions de production, et donc des problèmes d’écoulement des papiers graphiques recyclés ;
au cours de l’année 2019, le cours de l’alias 1.11 est passé de 90 €/t à 40 €/t.
Les sites de tri-préparation ont les plus grandes difficultés à écouler leur production, ce qui a conduit
certaines entreprises à dépasser les volumes de stocks autorisés, entraînant un risque d’incendie
accru.
100 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Cette crise a conduit REVIPAC153 à activer fin 2019 la clause de sauvegarde qui la lie à l’éco-organisme
Citeo (voir §3 pour les rôles de Revipac et Citeo) et de mettre fin aux prix planchers minimum de reprise
à compter du 1/1/2020 (60 €/t pour PCNC154 alias 5.02A, 75 €/t pour PCNC alias 1.05A) : les prix de
reprise seront désormais alignés sur les prix de marché.
Titre : Prix de référence des Papiers-cartons non complexés issus de la collecte séparée et/ou de la déchèterie (alias 1.05)
Source : Revipac
Si les prix de marché devenaient négatifs, REVIPAC reprendrait les PCR pour 0 €.
Selon COPACEL et Federec (chiffres 2017), la fabrication de papiers et cartons est assurée en France
par 75 entreprises, situées sur 85 sites, dont 46 usines utilisent des PCR. Le chiffre d’affaires de la
fabrication de pâte, de papiers et cartons est de 5,476 Md€, et 12 334 ETP (dont 4 200 liés à
l’incorporation de PCR). La collecte et la préparation des PCR s’effectue sur 594 sites, pour un chiffre
d’affaires de 0,918 Md€, et 8 214 salariés.
La directive européenne 94/62/CE sur les emballages et déchets d’emballages, modifiée notamment
par la directive 2004/12/CE et complétée par la décision 97/129/CE (identification des matériaux) et
la décision 2005/270/CE (base de données), concerne les emballages industriels, commerciaux et
ménagers. Elle fixe des objectifs en matière de valorisation (recyclage matière, recyclage organique et
valorisation énergétique), sans imposer la mise en place de dispositif REP155. La directive 2004/12/CE
a fixé de nouveaux objectifs plus ambitieux de recyclage et de valorisation pour 2008 pour 12 pays,
avec des délais plus longs pour les autres pays. Ces directives ont été transposées en droit français par
des décrets (92-377, 94-609, 96-108, 98-638).
Deux directives européennes du « Paquet économie circulaire » (mai 2018) concernent la filière des
papiers cartons. Les mesures suivantes sont notamment prévues : la totalité (ou le cas échéant 80 %
ou 50 % selon la filière156) des coûts de collecte, de tri et de traitement doit être couverte par les
153 REVIvre PACkaging, association créée par des acteurs de l'emballage papier-carton (voir §3).
154 Papier-carton non complexé issu de la collecte séparée et/ou de la déchèterie.
155 Responsabilité élargie du producteur
156 La couverture des coûts ci-dessus pourra être limitée :
-A 80% s’il s’agit d’une REP européenne
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 101
metteurs sur le marché via une éco-contribution ; l’éco-modulation est préconisée ; un objectif de
recyclage en 2025 est fixé à 75 % et à 85 % en 2030.
La loi française n°2009-967 fixe un objectif national de recyclage matière et organique de 75 % dès
2012 pour les emballages ménagers, l’extension du financement par les contributeurs aux emballages
ménagers, et la couverture des coûts de collecte, de tri et de traitement à hauteur de 80 % des coûts
nets de référence d’un service de collecte et de tri optimisé. La loi n°2010-788 prévoit notamment la
modulation des contributeurs en fonction de la prise en compte, lors de la conception du produit, de
son impact sur l’environnement en fin de vie. Dans le prolongement de la loi relative à la transition
énergétique pour la croissance verte nᵒ 2015-992, le décret n°2016-288 du 10 mars 2016 oblige les
producteurs et détenteurs de déchets (entreprises, commerces, administrations, etc.) à trier 5 flux de
déchets (dont un flux pour les papiers et cartons) afin de favoriser la valorisation de ces matières. Les
détenteurs de papiers de bureau doivent s’acquitter de l’obligation de tri à la source et de collecte
séparée.
Dans le cas où le détenteur final de l’emballage est un ménage, le conditionneur qui a mis l’emballage
sur le marché est tenu de contribuer ou de pourvoir à son élimination, dans le cadre de la filière
REP157 obligatoire sur les emballages ménagers. Selon l’article R. 543‑56 du Code de l’environnement,
il doit adhérer à un organisme collectif agréé par les pouvoirs publics. Deux Eco-organismes158 sont
ainsi agréés, Adelphe® et Eco-Emballages®, dont les agréments ont été renouvelés pour la période
2018-2022 (arrêté du 6 mai 2018). Eco-Emballages (créé en 1992 pour le recyclage des emballages
ménagers) a absorbé Ecofolio (créé en 2007 pour le recyclage des imprimés papiers et des papiers
graphiques) le 8 septembre 2017, et l’ensemble s’appelle depuis cette date CITEO ; Adelphe est une
filiale de CITEO.
Dans le cas où le détenteur final de l’emballage n’est pas un ménage, il existe une obligation de
valorisation, et chaque entreprise détentrice de déchets d’emballages doit répondre individuellement
à ses obligations selon l’une des modalités suivantes (art. R. 543-66 a R. 543-74 du Code de
l’environnement) :
*le valoriser dans sa propre installation agréée ;
*le céder par contrat à l’exploitant d’une installation agréée ;
*le céder par contrat à un intermédiaire assurant une activité de transport, négoce ou courtage de
déchets.
Pour aider les entreprises, les acteurs de la chaîne de valeur des emballages papier-carton (les
fabricants de matériaux d’emballages, les fabricants d’emballages et les papetiers-recycleurs) ont ainsi
créé sur une base volontaire à Revipac (REVIvre PACkaging).
Le projet de loi « lutte contre le gaspillage et économie circulaire » voté le 19/12/2019 en seconde
lecture à l’Assemblée nationale prévoit notamment l’intégration obligatoire d’un taux de matière
recyclée par exemple la cellulose issue du bois.
-A 80% s’il s’agit d’une REP nationale « établie » après la révision de la directive
-A 50% s’il s’agit d’une REP nationale « établie » avant la révision de la directive (cas de la REP française emballages)
157 Suite au décret 92-377 du 1er avril 1992 qui impose aux entreprises sur le marché de pourvoir à l’élimination des déchets
d’emballages issus de la consommation de leurs produits.
158 Leko, société également agréée a renoncé à concurrence Eco-emballage et sa filiale Adelphe le 20/10/2017.
102 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Impacts environnementaux
Une fibre de cellulose est utilisée en moyenne 7,6 fois. Selon le Bilan National du Recyclage 2005-2014
de l’Ademe, le recyclage des papiers-cartons permet de limiter la consommation d’énergie cumulée,
l’acidification de l’air, l’eutrophisation159 des eaux douces et de la mer, la consommation d’eau.
Etrangement, ce recyclage a un effet négatif sur l’effet de serre, en émettant, en net, près d’un million
de tonnes équivalent CO2 (chiffre 2014).
Cette émission nette de gaz à effet de serre s’explique par deux faits : les usines qui produisent de la
pâte à papier vierge utilisent de la biomasse comme source d’énergie (non comptabilisée), alors que
les acteurs du recyclage de PCR utilisent des sources d’énergie non renouvelables (dans le modèle
Ademe).
L’Union Française des Industries des cartons, papiers, et cellulose (COPACEL) s’attend à une hausse du
commerce électronique, favorable au papier-carton d’emballage, à un engouement pour les produits
de substitution, notamment en carton, suite à la directive « plastique » de l’Union Européenne
règlementant dès janvier 2020 les plastiques à usage unique; les exigences croissantes en matière
159 Processus par lequel des nutriments s'accumulent dans un milieu ou un habitat (terrestre ou aquatique)
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 103
Cependant les spécialistes ne voient pas de perspective d’amélioration sur le marché des cartons avant
mi 2020, début 2021. Concernant les PCR, il est à noter que si le taux européen moyen d’incorporation
passait de 52 à 66 % (ce qui semble possible compte tenu des prix très bas des PCR, et des directives
européennes), l’excédent européen serait résorbé.
Des technologies de fabrication de papiers multi-couches, par exemple pour le papier à imprimer, sont
en cours d’élaboration.
Recommandations de la mission
Entretemps, toutes les mesures incitatives pour accroître la demande de PCR doivent être mises en
œuvre, notamment :
-Renforcer les exigences de qualité de tri et de traçabilité des papiers-cartons recyclés, afin de satisfaire
les exigences croissantes des pays asiatiques, et européens (notamment norme EN 643). La perception
de la qualité française semble aléatoire pour nos voisins européens qui font des liens avec la collecte
des fibreux en mélange et le manque de cohérence de la qualité d’un centre de tri à un autre161. Les
PCR issus des entreprises (type Carrefour) seraient de meilleure qualité que ceux produits par les
collectivités.
-Porter au niveau européen un taux de matière recyclée de 85% (taux européen en 2030) d’ici 3 ans
dans la fabrication de papier-carton (ce qui ne devrait pas poser de problème, compte-tenu du prix
très bas du PCR), afin de soutenir les débouchés des PCR (au détriment du bois vierge, à réorienter
vers la valorisation matière ou énergétique).
-Prévenir la mise en œuvre de restrictions du commerce, telles qu'elles existent actuellement en
Indonésie et rétablir un accès libre et équitable aux marchés internationaux nécessaires pour équilibrer
l'offre et la demande (proposition Euric162)
-Dans les appels d’offres publics, privilégier le papier recyclé, introduire des critères de proximité
(réduire les émissions de CO2), avec un taux de pondération significatif et/ou faire référence à l’éco-
label européen.
160 JC Caudron (Ademe) anticipe une croissance des couches pour bébés et adultes (même s’il s’agit d’une faible fraction des
papiers-cartons consommés)
161
Source : Etude sur l’incorporation des sortes papetières dans le secteur du tissue (Hygiène). Réunion COPIL n°2, octobre
2019, Ademe, Viasourcing, Alterinnov, Sereho. Voir aussi : « étude sur l’incorporation des sortes papetières dans le
secteur de l’hygiène », rapport intermédiaire, Ademe, décembre 2019
162 European Recycling Industries Confederation
104 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Annexe 8 : Le plastique
La matrice ci-dessous donne une image fidèle de la complexité de la situation. Elle présente la
répartition croisée de l’utilisation des différentes résines pour les principaux types d’usages pour 2019
(données Plastics Europe).
Figure 1: Utilisation des différentes résines pour les principaux types d’usages (données Plastics Europe, 2019)
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 105
A cette complexité s’ajoute celle des différents additifs utilisés pour modifier les propriétés des résines,
tels que les retardateurs de flamme dans les équipements électroniques et électroménagers utilisés
pour réduire les risques d’incendie en cas de surchauffe d’un appareil. Certains de ces additifs sont
désormais interdits compte tenu de leurs effets nocifs sur la santé ou l’environnement (retardateurs
de flamme bromés par exemple), ce qui empêche la recyclabilité des matières concernées.
Enfin, les objets contenant du plastique sont en général constitués de plusieurs pièces composées de
résines différentes (en particulier pour les automobiles ou les appareils électriques et électroniques).
Flux physiques
Le bilan national du recyclage de l’Ademe (cf schéma ci-dessous pour le cycle de vie des plastiques en
France en 2016) donne les principaux ordres de grandeur de la filière, toutes résines confondues.
Après une forte baisse entre 2005 et 2009 (passant de 5 325 kt à 4 450 kt), la consommation française
de résines vierges par les transformateurs est repartie à la hausse pour atteindre 4 921 kt en 2017
(4784 en 2016).
Figure 2: Bilan national du recyclage, Cycle de vie des plastiques en France, 2016
La France se positionne comme l’un des pays européens qui recycle le moins les plastiques. Elle
présente encore une importante marge de progrès, notamment par rapport à des pays qui ont
106 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Figure 3: Utilisation du gisement de déchets plastiques par pays (données de 2018, Plastics Europe)
La France est exportatrice nette de déchets plastiques (l’excédent commercial est de l’ordre de
360 kt), ce qui peut s’expliquer par :
- des coûts de traitement plus compétitifs à l’étranger, notamment en Asie (par exemple en
2016, 50 % des déchets plastiques triés européens sont exportés vers la Chine) ;
- un manque de débouchés des matières plastiques recyclées en aval.
Il faut néanmoins noter que la décision de la Chine d’interdire les importations de plastiques à compter
de début 2018 impactera cet équilibre, en contraignant à trouver de nouveaux débouchés (en France
ou au sein d’autres pays asiatiques avant qu’eux aussi prennent des mesures pour endiguer les
importations de plastiques, comme le Vietnam, l’Indonésie ou la Malaisie).
Figure 4: Flux des matières plastiques par résine (tonnes; données 2012 estimées par Deloitte)
Le recyclage du PP est également relativement important et semble en nette croissance depuis 2012,
si l’on se fie aux données fournies par les adhérents du SRP (Syndicat national des Régénérateurs de
matières Plastiques, cf. graphique ci-dessous), les données n’ayant pu être extrapolées à l’ensemble
de la production française dans le dernier bilan national du recyclage produit par l’Ademe.
Ce même graphique semble indiquer une tendance globalement stable pour le PET, ainsi qu’une
tendance à la baisse pour le PE (moins 28% entre 2012 et 2017 pour les adhérents du SRP), ce qui
s’explique par une conjoncture économique défavorable et des prix de matière première recyclée
relativement bas (cf. section suivante).
Figure 5: Production de MPR par les adhérents du SRP, par résine (en kt), 2011-2017
Enfin, entre 250 et 300 kt sont finalement de nouveau incorporées dans le cycle de production en
France, ce qui représente seulement 6% de la production de plastiques. Comme le montre le
graphique ci-dessous, les fragments de secteurs les plus vertueux sont :
108 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Figure 6: Utilisation de plastiques recyclés et vierges en France (données 2012, estimation Deloitte & Plastics Europe)
- Des obstacles commerciaux : les produits recyclés pâtissent encore d’un déficit d’image (même
si la tendance semble évoluer dans le bon sens), ce qui ne pousse pas les industriels à en
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 109
incorporer davantage. Par ailleurs, certains additifs (notamment de couleur, cf. exemple de la
bouteille de Badoit rouge) sont incorporés pour des raisons marketing, ce qui complique le
recyclage. Les innovations marketing tendent à aller dans le sens d’une complexification des
résines mises sur le marché, alors que l’industrie du recyclage bénéficierait d’une relative
simplification de ces résines.
- Des obstacles organisationnels : la collecte est encore insuffisante compte tenu de règles de
tri peu lisibles et non homogènes sur l’ensemble du territoire.
Données économiques
Les producteurs de plastiques : une filière très éclatée
La filière plastique est tout d’abord caractérisée par des producteurs très éclatés. La plasturgie est en
effet un marché atomisé composé de 4000 entreprises (dont 56% de 1 à 9 salariés), pour un total de
130 000 salariés et 30 milliards d’euros de chiffre d’affaires.
Le solde commercial sur les produits de plasturgie est négatif (-4 milliards d’euros pour 8 milliards
d’euros d’exports). Une partie significative des plastiques entrant sur le marché n’est donc pas
produite ou transformée en France.
On observe par ailleurs un très faible recouvrement entre les recycleurs et les producteurs de résines
vierges ou d’objets en plastique, contrairement à ce qui peut se passer dans d’autres filières (verre,
papiers ou métaux par exemple).
L’effet conjugué de ces deux facteurs exogènes à l’industriel régénérateur de plastiques est très
variable, en fonction notamment des cycles économiques et des matières considérées. Néanmoins, il
est souvent défavorable comme l’illustre le graphique ci-dessous, ce qui détourne des investissements
d’une filière pour le moment peu rentable.
Cadre juridique
Un Ccadre juridique foisonnant et souvent évolutif entoure la filière de recyclage des déchets
plastiques. Parmi les éléments les plus impactants pour les acteurs, on peut citer :
- pour les professionnels, la mise en place du tri 5 flux qui oblige les producteurs et détenteurs
de déchets de trier à la source 5 flux de déchets : papier/carton, métal, plastique, verre et
bois ;
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 111
- pour les particuliers, l’extension des consignes de tri. En effet, les consignes de tri pour les
emballages en plastique étaient limitées aux bouteilles et flacons, actant le choix de
développer prioritairement la filière du PET, au détriment du recyclage des autres matières
comme de la simplicité de l’acte de recyclage. L’objectif est désormais de développer le
recyclage des emballages en plastique qui n'étaient pas recyclés jusqu'alors (films, pots et
barquettes) en systématisant le geste de tri dans les « bacs jaunes » (évitant ainsi les doutes
sur le tri des emballages, exprimés par 4 Français sur 5 selon Citeo).
Actuellement, seuls 25 millions de français sont concernés par cette mesure. L’extension doit ainsi se
mettre en place progressivement pour permettre aux collectivités locales d’adapter leurs
infrastructures de collecte et de tri. En effet, la rationalisation de ces unités industrielles est essentielle
pour garantir la compétitivité des matières recyclées.
L’Ademe estime que l’extension des consignes de tri devrait permettre à 200 kt supplémentaires de
plastiques par an d’être récupérées en vue du recyclage, à comparer aux 1 266 kt actuellement
collectées.
- les filières REP et les éco-organismes associés qui structurent certains écosystèmes
(emballages ménagers, déchets électriques et électroniques, véhicules hors d’usage,…) ;
- l’interdiction progressive des plastiques à usage unique par le biais de divers textes (loi TECV
d’août 2015 ou directive européenne SUP (single-use-plastic) de juin 2019) ;
- l’obligation pour certains produits d’intégrer des matières recyclées notamment via la
directive SUP qui fixe un objectif de 25 % de contenu recyclé dans les bouteilles en PET d’ici à
2025 et de 30 % dans toutes les bouteilles plastique en 2030, qui a constitué un moteur
important pour favoriser le recyclage du PET ;
- La feuille de route sur l’économie circulaire (FREC) en France, présentée en avril 2018 et qui a
abouti à l’engagement de l’industrie d’atteindre de nouveaux objectifs :
o dans le secteur des emballages, l’objectif est de passer à 400 kt de plastiques régénérés
réincorporés en 2025 contre 200 kt aujourd’hui ;
o dans le bâtiment, l’objectif est fixé à 100 kt en 2025.
Par ailleurs, en dépit de taux de recyclage pour l’instant très faible, il ne faudrait pas conclure que
l’abandon du plastique et sa substitution par d’autres matériaux est une panacée. Comme le montre
ce graphique de Plastics Europe, le choix du plastique par rapport à des matériaux de substitution est
souvent bénéfique en termes d’émissions de gaz à effet de serre.
112 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Figure 9: Effet du remplacement de certains emballages plastiques sur les masses, la consommation énergétique et les
émissions de GES, rapport de Plastics Europe (2011)
Figure 10: Appréciation qualitative des points d'attention prioritaires de la filière plastique (Appréciation de la mission à
partir du bilan du recyclage de l’Ademe)
-Passer en revue toutes les barrières réglementaires qui pourraient subsister et freiner inutilement la
réincorporation des matières recyclées (exemple : tuyaux dans le BTP, usages alimentaires…).
-Étudier la pertinence d’élargir les obligations d’incorporation déjà existantes, notamment dans le
cadre de la directive européenne SUP. Pour les filières REP, les eco-contributions peuvent également
être modulées en fonction du taux de réincorporation de matières recyclées.
Une des faiblesses structurelles de la filière de recyclage des plastiques réside dans la non intégration
des acteurs en charge de la régénération avec les principaux producteurs et metteurs sur le marché de
matières plastiques vierges, contrairement à d’autres filières comme les métaux ou le verre. Or, les
projets de recyclage les plus vertueux impliquent directement les producteurs, permettant ainsi la
mise en place de boucles de rétroaction courtes entre le marché et l’utilisation des matières recyclées.
Le partenariat de Renault et Galloo pour le recyclage des véhicules hors d’usage est ainsi exemplaire.
Le marché des matières plastiques recyclées est ainsi loin d’être un marché de commodités qui peut
être contrôlé par une politique de l’offre. Au contraire, il est constitué de nombreuses niches d’usages
extrêmement variées. C’est pourquoi tirer les flux en favorisant la consommation de matières
plastiques recyclées est beaucoup plus efficace que de les pousser en inondant le marché de matières
plastiques recyclées dont la réutilisation ne saurait être garantie.
Il est donc proposé d’orienter massivement les soutiens économiques aux projets de recyclage de
plastiques sur les projets de ce type impliquant des solutions de réincorporation.
Les chiffres du programme ORPLAST donnent un ordre de grandeur de l’effort à consentir, puisque les
30 M€ d’aides financières (pour un coût total des 123 projets de 250 M€) entre 2016 et 2019 devraient
permettre, à horizon 2022, de favoriser l’incorporation de 250 kt de plastiques recyclés par an
supplémentaires, ce qui équivaudrait à un quasi doublement de la situation actuelle.
La répartition de la valeur ajoutée entre la régénération des déchets plastiques, leur valorisation
énergétique et leur enfouissement semble inégale, au profit de ces deux dernières activités. Ce
constat, partagé de manière unanime par les acteurs du recyclage, mériterait d’ailleurs d’être étayé
par des données économiques plus détaillées afin notamment de le nuancer en fonction des
différentes résines.
Ainsi, pour simplifier, la rentabilité d’un investissement pour un industriel sera plus forte s’il se lance
dans des activités de valorisation énergétique ou d’enfouissement. Ce signal économique est donc
contraire à l’objectif affiché de développer le recyclage des plastiques.
114 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Il est donc proposé de mettre en place des mesures visant à augmenter la rentabilité relative du
recyclage, notamment en continuant à augmenter les coûts d’enfouissement des déchets (voire en
interdisant la mise en décharge de déchets plastiques, comme certains pays européens). Il faut
néanmoins veiller à lisser ces mesures disruptives dans le temps pour que les acteurs puissent
s’adapter.
La valorisation énergétique doit quant à elle continuer à faire partie des voies d’exutoires possibles,
d’autant que les plastiques possèdent en général un fort pouvoir calorifique.
Les régénérateurs de plastiques subissent de plein fouet les variations du cours des matières vierges
(largement corrélé à celui du pétrole) alors que leur structure de coût est globalement stable. Ces
effets cycliques ont été très néfastes pour la filière ces dernières années compte tenu des cours
relativement bas du pétrole, limitant ainsi les investissements dans la filière.
Il serait donc utile de développer des mécanismes d’atténuation de ces effets de cycle pour accroître
la rentabilité des investissements et diminuer les risques perçus :
- en confiant aux éco-organismes des missions de soutien des activités de régénération, en
étudiant une modulation de l’éco-contribution reliée au prix du pétrole (si le pétrole est bas,
l’éco-contribution est forte) ;
- en généralisant le programme d’aides financières ORPLAST mis en place par l’Ademe depuis
2016, pour préserver l’écosystème de régénérateurs en place en dépit de la chute des cours
de la matière vierge.
3. La fabrication et la mise sur le marché de produits plastiques : mettre en place des incitations
pour promouvoir l’éco-conception et favoriser le recyclage
Les faibles performances de la filière de recyclage des plastiques sont en grande partie dues à la
complexité des produits mis sur le marché et à la diversité des résines utilisées. Or, les producteurs et
les metteurs sur le marché n’ont pour le moment aucune incitation à commercialiser des produits
facilement recyclables.
Pour les filières dotées d’une REP, une forte modulation de l’éco-contribution (intégrant l’impact
environnemental, l’incorporation de matières recyclées, la durée de vie…) permettrait d’inciter les
acteurs à produire des biens de consommation plus faciles à recycler.
Pour les grandes entreprises, les obligations légales associées à la publication des rapports RSE
pourraient inclure davantage d’aspects liés au recyclage des déchets.
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 115
4. La collecte et le tri : des mesures ambitieuses ont déjà été actées, l’essentiel étant dès lors
de bien veiller à leur exécution dans les délais impartis
Deux réformes principales ont pour objectif de simplifier la collecte et d’en augmenter l’efficacité. Il
s’agit, comme vu ci-dessus, de la mise en place du tri 5 flux163 et de l’extension des consignes de tri.
La priorité est donc à la mise en œuvre effective de mesures déjà prévues, en prêtant une attention
particulière au déploiement dans les temps de ces réformes, notamment grâce à l’action des éco-
organismes. Le MTES doit également s’assurer qu’une communication suffisante soit mise en place
pour que les acteurs, particuliers comme professionnels, s’approprient ces nouvelles habitudes de tri.
Les gains espérés suite à la mise en place de ces mesures sont importants, mais pas suffisants pour
atteindre les objectifs ambitieux de la feuille de route pour une économie circulaire (objectif de 100%
de plastiques recyclés en 2025). Il pourrait ainsi être envisagé de donner aux éco-organismes des
objectifs de collecte ambitieux assortis de sanctions financières si ces objectifs ne sont pas atteints.
Toutefois, certaines filières « produits » ont encore de gros efforts à faire pour collecter leurs déchets
plastiques, c’est le cas notamment du BTP ou des véhicules hors d’usage. Les filières REP doivent
permettre de fixer des objectifs plus ambitieux.
Développer une signalétique pour permettre au consommateur d’apprécier la facilité de recyclage des
produits achetés.
6. Gouvernance
En complément de toutes ces recommandations, plusieurs mesures transverses doivent permettre de
mieux coordonner les acteurs de la filière qui agissent pour l’instant en ordre dispersé, au détriment
de l’efficacité globale.
Les données à la disposition des décideurs sont parfois insuffisantes, comme le montre le tableau ci-
dessous. Il serait donc utile de proposer des mesures simples permettant à l’Ademe de fournir des
statistiques encore plus détaillées sur les flux de matière, par exemple en travaillant avec les filières
REP pour que ces dernières fournissent des statistiques détaillées sur les flux matière mis sur le
marché.
Plutôt que de se contenter de publication de flux ex-post, l’Ademe devrait être en mesure de se lancer
dans des travaux prospectifs pour anticiper les flux de matières à venir et envisager des stratégies
industrielles pertinentes à mener en conséquence.
163 Le décret n° 2016-288 du 10 mars 2016, pris en application de la LTECV, fait obligation aux producteurs et détenteurs de
déchets (entreprises, commerces, administrations...) de trier à la source 5 flux de déchets : les papier/carton, le métal, le
plastique, le verre et le bois.
116 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Figure 11: Disponibilité des données sur les flux de plastiques (source : estimation Deloitte)
Le dialogue au sein de la filière doit être développé, notamment en se reposant sur le comité
stratégique de filière déchets, mais également sur les autres comités stratégiques de filière. Continuer
à inciter les industriels à définir collectivement des feuilles de route ambitieuses en matière de
recyclage des déchets est une condition nécessaire pour atteindre les objectifs. On peut encore aller
plus loin dans cette dynamique :
- en donnant une place aux recycleurs dans la gouvernance des REP ;
- en étudiant des dispositifs d’étude d’impact de recyclage, préalable à toute mise sur le marché
de nouvelle matière. En effet, l’exemple du PET opaque pour les bouteilles de lait montre un
problème de dialogue et de concertation avant l’introduction de nouveaux matériaux sur le
marché ;
- en renforçant globalement l’approche par « filières matériaux » pour favoriser les synergies
entre « filières produits » et inclure plus activement l’ensemble des acteurs de la chaîne de
valeur, en particulier les régénérateurs dont l’implication semble pour l’instant très
hétérogène. La mise en place d’instances de dialogue par matériaux, réunissant recycleurs,
éco-organismes et metteurs sur le marché semble nécessaire, non seulement pour valider de
nouvelles mises sur le marché, mais également pour se doter de visions de long terme sur les
stratégies de recyclage.
Œuvrer pour la mise en place de normes de traçabilité pour l’incorporation des produits recyclés (par
exemple via des certificats d’intégration). Cet enjeu deviendra rapidement déterminant non seulement
pour garantir le respect des objectifs assignés aux producteurs, en toute transparence vis-à-vis des
consommateurs mais également protéger ces mêmes producteurs de la concurrence déloyale venue
de l’étranger.
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 117
Annexe 9 : Le bois
La filière française du bois a ceci de particulier qu’elle séquestre du carbone (environ 114 Mt/an de
CO2 eq), déduction de l’exploitation forestière (environ 60 Mt de CO2 eq), soit un solde de 54 Mt
CO2 eq, environ 12 % des émissions de CO2 eq émises par la France en 2016. Une autre spécificité est
que le bois recyclé peut être soit brûlé pour produire de l’énergie, en émettant du CO2 en substitution
à des énergies fossiles, comme le ferait de la biomasse vierge, soit valorisé sous forme de matière, par
exemple dans des panneaux de particules, auquel cas il se substitue au bois vierge. Or l’exploitation
de la forêt est considérée comme vertueuse en termes de bilan CO2, notamment car les jeunes arbres
séquestrent plus de CO2 que les arbres en fin de vie. Le bilan environnemental global du recyclage du
bois est donc difficile à établir : néanmoins l’Ademe164 estime que les 800 000 tonnes de bois recyclé
en 2014 ont permis d’éviter d’émettre 200 000 tonnes équivalents CO2 (0,05 % des émissions
françaises).
Le bois d’œuvre utilise environ 50% de la récolte de bois commercialisé en 2018, et le bois énergie et
le bois de trituration sont à quasi égalité à un peu moins de 25%, suite à une croissance forte de la part
du bois-énergie depuis 2008.
La filière bois (exploitations forestières et industries du bois) est importatrice nette d’environ 6,8 Mds€
(2018), malgré une des forêts les plus étendues d’Europe. Les produits des industries du bois, des
pâtes, des papiers et des cartons sont lourdement déficitaires (-6,25 Mds€), les produits d’exploitation
La forte augmentation de la collecte des déchets d’éléments d’ameublement (DEA) par la REP en 2017
s’est poursuivie en 2018 (+300 ktonnes). La collecte des palettes en fin de vie (1,665 Mt en 2017) n’est
pas comptabilisée dans le tableau ci-dessus, car environ 95% de ces palettes est reconditionnée et
remise sur le marché (141 millions de palettes vendues en 2015).
Une part croissante de bois recyclé est valorisée sous forme de matière ou d’énergie (69% en 2016,
72% en 2017, et 80% en 2018) : ainsi, la part éliminée décroît. Plus précisément, les chiffres 2018 de la
branche hors palettes sont :
Les déchets de bois (hors palettes) ont quatre destinations principales : bois matière France (22%),
bois-énergie (36%), bois-matière exporté (22%), déchets éliminés (20%).
1.Le bois matière France : La quantité de panneaux de particules fabriqués en France diminue depuis
2013. Mais le taux d’incorporation de bois recyclé dans ces panneaux progresse, ainsi que la quantité
incorporée.
D’autres valorisations matière sont aussi possibles, bien que plus marginales sur le plan quantitatif : la
fabrication de pâte à papier (sous- produits des scieries), la carbonisation, le paillage, le compostage,
le nettoyage des sols, le dégraissage de pièces métalliques ou encore des litières animales…
2.Le bois énergie : La quantité de déchets de bois valorisée sous forme énergétique croit, et serait
même supérieure en 2017 à l’objectif du plan déchets du CSF bois (2 Mt de déchets de bois-énergie en
France en 2025).
120 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Selon Federec172, 65% des ventes de déchets bois énergie sont destinées aux chaudières industrielles
et aux centrales thermiques, 30% aux chaufferies (collectivités), et 5% à l’export (voir ci-dessous).
3.Les déchets de bois exportés :
La France est exportatrice nette de déchets de bois et de matière première de recyclage173 d’environ
1,154 Mt en 2017(voir tableau ci-dessous), soit environ de 20% de la collecte de déchets, ce qui traduit
la saturation du marché français de bois-déchets. L’objectif du Plan déchet du CSF bois est de réduire
cette part nette exportée à 0,8 Mt d’ici 2025.
En 2017, 55 % des déchets de bois valorisés « matières » sont destinés à des panneautiers à l’étranger
(Belgique, Italie, Espagne). Il s’agit principalement de déchets de bois pollué de classe B (85 % volumes
collectés) issus de l’ameublement et de déconstructions, dont les volumes collectés augmentent
progressivement.
Importations/exportations (kt) 2015 2016 2017
Les déchets de bois exportés en Allemagne, Finlande, Suède, Grande-Bretagne ont surtout une
destination énergie (source FCBA).
4.Les déchets de bois éliminés : selon l’Ademe174, 1, 4 Mt ont été éliminés en 2014 contre 1,3 Mt en
2013 : ils ont été enfouis, ou non valorisés, par exemple par incinération sans récupération d’énergie.
L’objectif du Plan déchet du CSF bois est de réduire cette part à 0,4 Mt d’ici 2025, notamment grâce à
une valorisation énergétique.
Le contexte économique
Le cours du bois vierge de trituration reste stable depuis 2015, et celui du bois énergie sylvicole est à
un niveau comparable à celui de 2011, après une baisse en 2018-2019.
Actuellement trois classes de déchets de bois sont valorisées de manières distinctes, avec des
prix différents:
- les bois de classe A sont issus des sous-produits de la transformation du bois brut, les bois secs non
traités et non peints, les palettes…
- les bois de classe B rassemblent les panneaux, les bois d’ameublement, les bois de démolition
exempts de gravats, les résidus d’exploitations forestières (souches, grumes, etc).
- les bois de classe C sont des bois traités, considérés comme dangereux. Ils doivent suivre les filières
de traitement agréées.
Les prix des chutes de bois de scierie (une variété de bois vierge) et les déchets de bois de classe A
suivent une évolution comparable, haussière jusqu’au premier trimestre 2019, avant de connaître une
baisse au 2ème trimestre 2019 (voir tableau ci-dessous). La montée en puissance de la REP
« ameublement » crée une saturation des marchés historiques.
Le bois recyclé de classe B serait revendu aux fabricants de panneaux de particules à des prix négatifs
de 30 à 40 €/tonne.
Ainsi, les prix des déchets de bois de classe A et B sont très inférieurs aux coûts moyens de gestion des
déchets de bois issus des bâtiments (89 €/t selon le FCBA), et de la filière ameublement (150 €/t selon
le FCBA). Plus précisément, ces coûts se décomposeraient approximativement en trois parts
principales : collecte (35 %), préparation matière (37 %), valorisation matière (28 %), selon Valdélia. Le
bois recyclé est en compétition avec la matière vierge, considérée en général de meilleure qualité
122 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
mécanique, et ses différentes formes de traitement sont aussi en compétition les unes avec les autres :
valorisation matière, énergie, incinération, stockage, exportation.
Le prix de la matière vierge, tel que reflété par les chutes de bois de scierie, entre 30 et 60 €/t au
2ème trimestre 2019, est très inférieur au coût du recyclage (entre 90 et 150 €/t), même diminué du
coût de l’élimination (30 €/t environ). L’économie n’est pas naturellement incitée au recyclage175 :
l’éco-contribution sur les ameublements, via les deux éco-organismes, créés en 2011, Eco-mobilier176,
pour les particuliers et Valdelia177, pour les professionnels et les collectivités, permet un transfert des
sommes prélevées à l’achat des meubles neufs vers le secteur du recyclage. Cette situation pourrait
évoluer si le prix de la matière vierge augmentait significativement, par exemple en cas d’insuffisance
de la ressource : cela est peu probable à court-moyen terme, la forêt française étant sous-exploitée,
en comparaison par exemple à la forêt allemande, et étant soumise à des crises successives qui
mettent de grandes quantités de bois sur le marché (tempêtes de 1999, et de 2009, épidémies de
scolytes…). Et la ressource des déchets de bois est elle-même sous-exploitée puisque plus d’un million
de tonne a été exporté (chiffre 2017), et qu’environ 1,3 Mt auraient été éliminés (chiffre 2013).
Le chiffre d’affaires de la filière de recyclage du bois est en croissance régulière, et celle-ci employait
6128 personnes en 2017 (source bilan national du recyclage Ademe 2019).
Le cadre réglementaire
Les agréments des éco-organismes Éco-mobilier et Valdélia ont été renouvelés en 2017. Chaque éco-
organisme doit répondre aux objectifs de la filière178:
•un taux de collecte en 2023 des déchets d’éléments d’ameublement (DEA) collectés séparément des
autres déchets de 40 % des quantités d’éléments d’ameublement mis sur le marché ;
•un recyclage en 2022 de 50 % des DEA collectés séparément des autres déchets ;
•une valorisation (réutilisation, recyclage et valorisation énergétique) en 2022 de 90 % des DEA
collectés séparément des autres déchets.
Les dépôts de déchets et de sous-produits de bois sont soumis à la réglementation des installations
classées pour la protection de l’environnement sous la rubrique 1532. Les dépôts sont soumis à :
– autorisation lorsque la quantité stockée est supérieure à 20 000 m3,
–déclaration lorsque la quantité stockée est supérieure à 1 000 m3 mais inférieure ou égale à
20 000 m3.
Les stocks de bois-déchets sont à saturation, en raison de l’augmentation des volumes collectés
d’ameublement, et du ralentissement de la croissance de la demande en bois-énergie. Pour soutenir
la valorisation énergétique des bois recyclés de classe B, le plan déchets du Comité stratégique de
filière prévoit de créer deux sous catégories 2 et 3, notamment pour accroître les débouchés dans les
175 L’économie circulaire, ou la compétition pour les ressources : étude annuelle 2014 du Conseil Général de l’Economie, sous
la coordination de François Valérian, page 33
176 Pour la collecte et le recyclage du mobilier usagé
177 Pour la gestion des déchets d'ameublement
178 Décret n° 2017-1607 du 27 novembre 2017 et l’arrêté du 27 novembre 2017
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 123
chaudières ICPE 2910 B. FCBA179 doit faire une proposition détaillée de sous-catégories. En parallèle,
Valdélia fait actuellement une étude détaillée de caractérisation de divers déchets bois, du process de
séparation mécanique, et d’essais de combustion.
Des catégories similaires existent en Finlande, Allemagne et Grande-Bretagne.
Ainsi, paradoxalement ce sont surtout les bois de classe A qui sont valorisés sous forme d’énergie, et
les bois de classe B qui sont valorisés en matière.
179 Centre technique industriel français, chargé des secteurs de la forêt, de la cellulose, du bois-construction et de
l'ameublement
124 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
D’après l’Ademe180, le recyclage de déchets de bois collectés en France en 2014 a permis d’éviter
l’émission de 230 000 tonnes équivalent CO2 soit environ 0,05 % des émissions françaises de gaz à effet
de serre. L’impact est positif aussi en ce qui concerne la consommation d’énergie, l’acidification de
l’air, l’eutrophisation des eaux douces, l’eutrophisation marine, la consommation d’eau.
Source : bilan national du recyclage 2005-2014, page 88-89, Ademe mai 2017
Le plan déchet du CSF Bois prévoit que 400 kt de déchets bois supplémentaires soient incorporés dans
les panneaux de particules d’ici 2025181, ce qui porterait le taux d’incorporation à environ 60 % (ce taux
va jusqu’à 70 à 90 % en Belgique et Italie). Il est possible qu’un taux supérieur dégrade la qualité des
panneaux.
L’objectif du plan déchets du Comité stratégique de la filière bois182 est d’accroître la valorisation
matière et énergie, en France. Il s’agit :
-en amont, de mobiliser 1,3 Mt de déchets de bois supplémentaires en 2025, par soustraction à
l’élimination de 0,8 Mt, par relocalisation de 0,2 Mt (réduction de l’exportation), et par une collecte
supplémentaire auprès des entreprises (0,3 Mt).
-en aval, d’augmenter de 0,4 Mt la quantité de bois recyclé dans les panneaux de particules, et de 0,9
Mt en valorisation énergétique dans des installations de combustion (ICPE 2910 B) de de co-
incinération (ICPE 2771 – 2971).
Il n’y aura sans doute pas de nouvelles usines de panneaux de bois en France, en raison de la
concurrence de l’Italie, de l’Europe de l’Est…
Sur le plan R&D, les principales voies explorées au Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB)
sont :
- l’exploration du réemploi de déchets de bois dans le bâtiment,
- la fabrication de produits de carrelets lamellés-collés à partir de déchets de bois de type palettes,
- la transformation en charbon de bois pour des applications de fonderie,
- la fabrication d’isolants. Ainsi, Buitex, une PME, réalise un isolant thermique composé de fibres de
bois, issus de déchets de scieries locales, et de chanvre.
L’eau supercritique, par ses propriétés oxydantes, pourrait contribuer efficacement au traitement des
déchets de bois pollués, notamment par des matières organiques.
Les recommandations
La France n’utilise pas assez ses déchets de bois et les exporte, en raison d’une industrie aval
insuffisamment développée (meubles, pâtes, papier-cartons), et de fortes exigences en termes de
contaminants comme intrants dans les installations de combustion. Ainsi, trois types de
recommandations sont proposés : valorisation énergie, recyclage matière, gestion des données.
1 Valorisation énergétique
Le plan déchets du CSF bois a formulé des propositions très précises pour favoriser la valorisation
énergie des déchets de bois (voir §2) qui sont déclinées par la mission :
- introduire des sous catégories (2 et 3) de déchets bois B, promouvoir le tri selon ces nouvelles sous
catégories, et d’améliorer la qualité du tri,
- faire évoluer la réglementation des installations ICPE 2910B pour admettre les déchets B sous-
catégorie 2,
- examiner la possibilité d’imposer aux chaufferies de plus de 20 MW d’être capables d’intégrer du bois
recyclé de classe B.
2 Recyclage matière
Comment inciter les industries « aval » (panneautiers notamment) d’incorporer plus de déchets de
bois dans leurs produits ? Le spectre des fabricants de panneaux, par exemple, est très large entre des
grands groupes comme Egger (près de 10 000 collaborateurs dans le monde), et des PME comme Linex
Panneaux. Si Egger a beaucoup investi dans l’incorporation de déchets dans ses panneaux, d’autres ne
l’ont pas fait. Prendre des mesures réglementaires, par exemple fixant un taux minimum
d’incorporation, pourrait fragiliser des petites entreprises soumises à une forte concurrence étrangère.
Une incitation financière à l’investissement paraît mieux adaptée.
Soutenir financièrement les évolutions des outils industriels des entreprises « aval » pour incorporer
du bois recyclé. Examiner en complément la pertinence de certificats d’incorporation de matière
recyclée dans les produits à base de bois.
La commande publique peut avoir un rôle moteur pour développer un secteur. Les Jeux Olympiques
2024 sont par exemple une opportunité pour développer la filière bois, et l’utilisation de bois recyclé.
Le Comité Stratégique de la filière bois fait de la préparation des JO 2024 son projet structurant n°2.
Introduire dans le cahier des charges de la commande publique pour le bois construction un taux
minimum de bois recyclé, lorsque c’est pertinent (exemple carrelets lamellés-collés).
Il existe trop peu de débouchés pour la valorisation matière du bois-matière. Le Centre scientifique et
technique du bâtiment mène des travaux de recherche sur le réemploi, et la valorisation matière dans
le secteur du bâtiment qu’il faut encourager. D’autres débouchés doivent être recherchés dans
l’ameublement.
Encourager la R&D et l’innovation pour susciter d’autres voies de valorisation matière des déchets de
bois dans le bâtiment et l’ameublement.
Certains résidus de production de scieries ont les caractéristiques et les propriétés du bois vierge.
Promouvoir une reconnaissance de statut de sous-produit pour certaines chutes de production comme
le prévoit la directive 2008/98/CE (article 5 de la directive du 19 novembre 2008 relative aux déchets).
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 127
Les données concernant le recyclage des déchets de bois sont approximatives, sans doute en raison
de circuits non quantifiés : utilisation de déchets bois dans les scieries ou les entreprises aval,
éliminations non déclarées…. Les déchets de bois sont à la fois de la matière recyclable, des
combustibles, et de la matière biodégradable.
Mieux quantifier les flux de déchets de bois, notamment en instaurant un code des douanes spécifique
aux déchets de bois.
128 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Annexe 10 : Le verre
Flux physiques
Le cycle de vie du verre en France183
La nature et les applications des produits verriers sont variées. Le verre creux trouve ses applications
dans les bouteilles, bocaux et flacons utilisés comme emballages par les industries agro-alimentaires,
la parfumerie et la cosmétique ainsi que la pharmacie. Il recouvre aussi les produits des arts de la table.
Le verre plat est principalement utilisé pour le vitrage bâtiment, l’automobile et les transports
(parebrises, vitres, etc.) ainsi que pour les panneaux solaires. Une fois formé, le verre plat, produit sous
forme de feuille, est envoyé chez un transformateur pour subir différentes opérations propres à son
application. Au contraire, le verre creux qui se trouve sous sa forme finie, est directement utilisable.
Seuls le verre plat et le verre creux sont étudiés dans ce chapitre, qui exclut les verres techniques, les
fibres de verre, la laine de verre et les verres spéciaux.
Les produits verriers usagés sont collectés par une multitude d’acteurs (collectivités territoriales,
opérateurs spécialisés, déchetteries, etc.). Après collecte, ils sont traités dans des installations
industrielles de traitement fortement automatisées qui auront pour objectif d’éliminer l’ensemble des
indésirables et des pollutions (infusibles, métaux, plastiques, papiers, autres matériaux, etc.) afin
d’être transformé en calcin (verre recyclé). Ce calcin est ensuite envoyé chez les verriers qui le fondent
à 1 500 °C, en général en mélange avec de la matière primaire. Si le calcin issu de verre plat usagé peut
être utilisé dans la fabrication de verre creux, la réciproque n’est pas valable.3
183 Ce bilan des flux physiques reprend essentiellement les éléments du bilan national du recyclage (BNR) 2008-2017 de
l’Ademe en cours de préparation au dernier semestre 2019.
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 129
Figure 3 : Nombre de sites, chiffres d’affaires, emplois liés à l’industrie du verre et son recyclage – Source : BNR Ademe
Production de verre
184 Federec cite le chiffre de 2,4 Mt collectées en 2018 (+ 2,6% par rapport à 2017) dont 7% vendues à l’exportation. La
fédération du verre cite les chiffres de 3,4 Mt pour la production de verre creux et 1 Mt pour la production de verre plat.
185 Le gisement et la collecte de verre creux concernent principalement des déchets de verre d’emballages usagés, les autres
types de verre creux (notamment la gobeleterie) représentant des volumes négligeables et n’étant pas recyclables. Par
ailleurs, les chutes de fabrication pour le verre creux représentent elles aussi un volume négligeable
186 Les chutes de fabrication de verre plat sont estimées entre 140 et 190 kt.
187 Le taux d’incorporation est calculé comme le ratio entre l’incorporation de calcin par les verreries et la production totale
de verre
130 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
En 2017, la production française de verre atteint 4,4 Mt, après être restée stable depuis 2013 autour
de 4,1 Mt. Cette hausse de 9 % s’explique notamment par la remise en service de deux floats (fours de
verre plat). Le secteur bénéficie de la reprise économique mondiale, y compris en France avec une
croissance du pouvoir d’achat des ménages. Cette croissance observée dans l’industrie du verre a
conduit plusieurs acteurs à réaliser des investissements afin d’améliorer la compétitivité de leurs sites
de production en France. Malgré cela, la production française de verre reste inférieure aux niveaux
observés avant la crise économique de 2008-2009 (elle se situait alors autour de 5,3 Mt).
Figure 4 : Production de verre en France (en kt), par type, 2005-2017 – Source BNR Ademe
En outre, on observe des évolutions contrastées selon le type de verre considéré : le verre creux
(bouteilles, flacons, pots, bocaux et gobeleterie) représente le principal segment de marché de
l’industrie du verre en France (environ 80 % de la production totale). La France est le deuxième
producteur européen de verre d’emballage (bouteilles, flacons et pots) derrière l’Allemagne. La
croissance de la demande en verre d’emballage au niveau européen a été en hausse de 2 % en 2017.
En France en 2017, la demande en verre creux a été principalement tirée par le marché de la bière en
forte croissance ainsi que par les besoins du secteur de la beauté-santé (parfumerie, cosmétique).
Quant au verre plat, il est majoritairement utilisé dans le secteur du bâtiment (80 % de la demande au
niveau mondial en 2015), mais également dans l’industrie automobile (parebrises, vitres latérales et
arrières, etc.) et dans une moindre mesure pour la fabrication de panneaux photovoltaïques. La
production de verre plat en France augmente fortement en 2017 (+ 39 % par rapport à 2016) avec la
remise en service de deux fours de production de verre plat, après une longue période d’arrêt
conjoncturel. Ceci marque le retour à un niveau de production quasi historique de verre plat.
Confrontés à une baisse de la demande depuis plusieurs années, les industriels impliqués dans la
production de verre plat ont également profité en 2017 du redressement de l’activité dans la filière du
bâtiment et dans le secteur automobile.
Le commerce extérieur de verre neuf ne peut être estimé de façon fiable à partir des données
douanières. Il convient cependant de noter que l’industrie française du verre est tournée vers
l’international, en particulier pour le verre plat qui réalise une part importante de son chiffre d’affaires
à l’étranger. A l’inverse, les industriels du verre français font face à une concurrence des pays à bas
coûts de production qui cassent les prix pour pénétrer le marché français. Certains industriels tentent
de relever leurs prix en pratiquant une montée en gamme de leur offre et en poursuivant leurs
investissements dans l’innovation et les produits à haut contenu technologique (vitrages automobiles
disposant de caractéristiques optiques améliorées, verre photovoltaïque, etc.).
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 131
Le gisement total de verre usagé n’est pas connu, en raison du manque de données précises sur le
verre plat. Les professionnels du secteur estiment que le gisement de verre plat de déconstruction,
qui représente la majorité du gisement, avoisine 200 kt, auquel s’ajoutent 74 kt issues des véhicules
hors d’usage (VHU).
Le gisement de déchets de verre creux (verre d’emballage usagé post-consommation) est bien connu
et est estimé autour de 2,8 Mt, stable depuis 2010. Une légère hausse est observée en 2017 et tient
notamment à la bonne réussite du marché de la bière (+ 5 %), qui représente des débouchés
significatifs pour le verre d’emballage.
En 2017, la collecte de verre d’emballage usagé atteint plus de 2,1 Mt, dont 2 Mt de verre d’emballage
d’origine ménagère. Initiée en 1974, la collecte de verre d’emballage progresse régulièrement grâce
au déploiement de la filière REP emballages ménagers depuis 1993. La densification du dispositif de
collecte, très majoritairement en apport volontaire (85 % de la collecte), combinée à des actions de
communication efficaces menées par les éco-organismes et les collectivités territoriales sont à l’origine
de cette progression.
A cela s’est ajoutée une amélioration des performances de tri grâce au perfectionnement des
équipements. Ainsi en 2017, le centre de Rozet-Saint-Albin dans l’Aisne s’est doté d’une nouvelle
technique de tri au laser sur la machine de tri de verre blanc existante. Une ligne de tri optique va
également permettre une meilleure extraction des infusibles, pour un investissement de plus de 7
millions d’euros188.
Les professionnels du secteur identifient d’autres leviers pour faire encore progresser la collecte du
verre d’emballage, notamment :
Augmenter le pourcentage de trieurs systématiques par rapport aux trieurs occasionnels, par
exemple en mettant à disposition davantage de conteneurs dans les grandes villes et en
rendant leur design plus attractif ;
Sensibiliser les publics plus jeunes : en France, 67 % des 18-29 ans déclarent savoir que le verre
se recycle à l’infini contre 74 % toutes catégories d’âge confondues.
188 Source : Site internet de Verralia France, Everglass modernise son site de Rozet-Saint-Albin (2017).
132 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Figure 5 : Collecte totale de verre creux en vue du recyclage en France (en kt), 2005-2017_ Source BNR Ademe
Contrairement au verre creux, l’industrie du verre plat ne bénéficie pas encore d’une filière de collecte
et de recyclage totalement organisée en raison notamment à cause de contraintes logistiques,
techniques, et sécuritaires et du fait des coûts supplémentaires induits pour les opérateurs (centres
VHU et entreprises du BTP). La collecte de verre plat usagé n’est pas connue mais peut être estimée
entre 47 kt et 326 kt189 pour l’année 2017. Cette estimation est faite grâce aux flux connus issus des
filières REP (VHU, BTP) pour la fourchette basse et grâce à la différence entre la collecte apparente
totale et la collecte connue de verre creux pour la fourchette haute. Une Charte signée en 2015 par la
Chambre Syndicale du verre plat, Saint-Gobain Glass et AGC Glass vise à promouvoir la collecte et le
recyclage du verre plat issu des déchets du bâtiment, en particulier des menuiseries et des vitrages.
Une nouvelle dynamique a été impulsée en 2017 avec la signature d’un engagement pour la croissance
verte (ECV) par Federec Verre, Federec BTP, la FFPV (Fédération Française des Professionnels du
Verre), le SNED (Syndicat National des Entreprises de Démolition), le SRBTP (Syndicat des Recycleurs
du BTP) et les pouvoirs publics et auquel la CSFVP (Chambre Syndicale de Fabricants de Verre Plat) a
adhéré. Cet ECV précise deux objectifs :
40 kt de déchets de verre plat collectés et triés annuellement à la fin de l’engagement
(2020) ;
80 kt déchets de verre plat collectés et triés annuellement en 2025.
Le recyclage du verre du bâtiment suppose un système de collecte efficace permettant de trier les
déchets en cinq ou six flux. La mise en place d’une REP bâtiment va y contribuer. Un flux suffisamment
massifié de verre plat peut trouver sans difficulté sa place dans la filière de recyclage du verre.
Une cartographie190 des points de collecte disponibles partout en France a été conçue par Federec
pour aider les entreprises souhaitant recycler le verre plat issu d’une déconstruction ou d’une
rénovation.
189 La fourchette haute couvre a priori la collecte de verre plat usagé et de chutes de fabrication de verre plat.
190 Voir http://recyclageverreplat.com
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 133
Le recyclage du verre automobile a commencé chez les entreprises spécialisées dans la pose des pare-
brises191. Mais les tonnages en jeu restent aujourd’hui faibles.
Comme les années précédentes, le commerce extérieur de calcin reste faible par rapport aux volumes
collectés en vue de recyclage : en 2017, les importations françaises représentent 171 kt (moins de 8 %
de la collecte apparente), et les exportations sont de 173 kt. Ces échanges extérieurs ont
majoritairement lieu avec les pays frontaliers comme la Belgique et l’Allemagne.
L’industrie du verre fait partie des industries de premier plan du recyclage en France. Ainsi, le taux de
recyclage192 du verre d’emballage atteint 78 % en 2017, en progression constante depuis 2005 (il
atteignait alors 60 %). Il est à noter que le verre d’emballage collecté en France est très
majoritairement recyclé en France (à 98 %) et ce dans une logique de proximité avec une distance
moyenne de 230 km entre le lieu de collecte et l’usine où le verre est recyclé.
Au niveau européen, la France se classe en 15ème position en matière de taux de recyclage du verre
d’emballage, un taux supérieur à la moyenne européenne. Ces comparaisons sur les taux de recyclage
sont toutefois à prendre avec précaution. En effet, la définition et le mode de calcul du taux de
recyclage varient d’un pays à l’autre. Par exemple, la Belgique (taux de recyclage de 100 % en 2016)
définit ce taux comme le ratio entre la quantité incorporée dans la production et la quantité de verre
produit. Il s’agit donc en réalité d’un taux d’incorporation et non d’un taux de recyclage. En Angleterre,
le taux de recyclage inclut aussi le verre usagé utilisé dans les sous-couches routières.
La capacité de recyclage a été régulièrement augmentée grâce au tri par couleur automatisé mis en
œuvre dans 9 des 14 centres de traitement, qui permet de séparer le verre blanc du verre coloré.
Incorporation de calcin
Le calcin, débris de verre issus de la collecte, constitue la matière première principale des industriels
français du verre. Verre creux et verre plat confondus, le taux d’incorporation de calcin est passé de
39 % en 2005 à 56 % en 2017 en France, mais il peut atteindre jusqu’à 90-95 % dans certains fours de
production de verre creux. La baisse du taux d’incorporation de calcin en 2017 (59 % en 2016 pour 56
% en 2017) est liée à la forte reprise de l’activité de verre plat (686 kt en 2017 pour 952 kt en 2017) et
au taux d’introduction nettement plus faible en verre plat qu’en verre creux. L’effet de mix est donc
important. Le taux d’introduction de calcin moyen en verre creux reste de l’ordre de 65 %.
La production de verre creux représente 87 % de l’incorporation de calcin au niveau national. En
verrerie de verre plat, le taux d’incorporation du calcin a connu une croissance rapide. Toutefois ce
calcin provient encore surtout de chutes de fabrication (estimées entre 140 et 190 kt selon
FEDEVERRE). Les déchets post-consommation de verre plat empruntent en majorité la voie des
déchets inertes. Cela s’explique en particulier par les difficultés à mettre en place jusqu’alors des
systèmes de collecte et de logistique efficaces. C’est l’objectif prioritaire de l’engagement de
croissance verte relatif au verre plat. Des progrès significatifs sont attendus grâce à l’ECV signé par les
professionnels du secteur.
Figure 6 : Incorporation de calcin dans la production de verre (creux et plat) en France (en kt), 2005-2017- Source : BNR
Ademe
Contexte économique
Le prix à la production du verre ne montre pas des variations brutales au cours des dernières années :
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 135
Il n’y a pas vraiment de concurrence entre matière vierge et matière recyclée. Sans que la mission ait
pu avoir de la part des verriers des chiffres précis, elle observe que la totalité du calcin collecté est
préparé puis recyclé en production de verre sans qu’il y ait besoin d’une contrainte réglementaire pour
parvenir à ce résultat. L’intérêt économique des verriers les incite à utiliser du calcin pour la production
de verre creux. Le verre est réputé par ailleurs pouvoir se recycler à l’infini, sans dégradation des
performances des produits fabriqués avec de la matière recyclée.
Une présentation un peu ancienne du cercle national du recyclage193 donne des indications sur la
répartition des coûts des différentes étapes du recyclage et permet une extrapolation sur la base du
prix de reprise actuel de 24 €/t, aboutissant à un prix entrée de four de 68,5€/t :
Prix de reprise à la collectivité : 35% - 24€
Transport collectivité-traitement : 21% - 14,4€
Traitement : 31% - 21,2€
Transport traitement-verrier : 6% - 4,1€
Divers 7% - 4,8€
que l’utilisation d’une tonne de calcin au lieu d’une tonne de lit de fusion permet des
économies substantielles (40 kg de fioul lors de la fusion et 200 kg de CO2, économie chiffrée
à 15 € en 2006 dans la présentation citée).
La collecte sélective du verre est également intéressante du point de vue des collectivités locales
responsables de services publics de gestion des déchets. Une présentation de Citéo au Sénat de 2014
explicitait les avantages pour les collectivités locales de la collecte sélective du verre en s’appuyant sur
les chiffres suivants :
Figure 9 : Intérêt économique de la collecte sélective du verre pour un service public de gestion des déchets – Source : Citéo
Il existe aujourd’hui en France 14 installations industrielles qui éliminent l’ensemble des indésirables
et des pollutions (infusibles, métaux, plastiques, papiers, autres matériaux, etc.) afin que le verre
collecté puisse être transformé en calcin (verre recyclé). Ils sont possédés par des verriers, des
indépendants ou un actionnariat mixte. Chaque centre représente des investissements de l’ordre de
15 M€. Ils permettent en particulier le tri des verres suivant leur couleur.
Il n’y a pas de difficulté pour que les acteurs investissent dans des capacités supplémentaires si le
besoin s’en faisait sentir. Il reste toutefois encore un peu de marge de capacité pour cette phase de
traitement, tout le monde ne travaillant pas en 3x8. Mais il y a des pointes, liées aux déplacements de
population lors des vacances et à la saisonnalité des consommations de boissons.
Il n’y a pas de difficultés en France concernant la réutilisation du calcin résultant de la collecte des
déchets en verre, car d’une part la France, pour ce qui est de la production de verre creux, exporte
plus qu’elle n’importe et, d’autre part, le pourcentage de calcin utilisé pour la production de verre
creux peut être très significative et monter jusqu’à 90%.
Cadre juridique
Le Cadre juridique concernant le verre creux est aujourd’hui peu développé. Il faut néanmoins signaler
les obligations européennes en matière de recyclage des déchets des emballages et les obligations
découlant du conventionnement des éco organismes intervenant dans le secteur des emballages.
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 137
Pour l’application de la législation relative aux VHU, l’Etat conventionne les centres VHU et les
broyeurs. L’agrément des centres VHU prévoit une récupération du verre (Arrêté du 2 mai 2012
relatif aux agréments des exploitants des centres VHU et aux agréments des exploitants des
installations de broyage de véhicules hors d'usage).
Aspects environnementaux
Les avantages environnementaux du recyclage correspondent essentiellement à des économies
d’énergie et à des moindres émissions de gaz à effet de serre.
Selon un calcul d’analyse du cycle de vie mené par la fédération européenne des industries du verre,
chaque tonne de verre recyclée économise entre 0,670 t CO2194. Sur la base de 2 439 t de calcin
incorporées dans la production française, l’économie en termes de tonnes de CO2 ressort à
1,6 Mt CO2. L’avantage économique peut être calculé avec les valeurs de référence de la tonne de CO2
évitée. Les autres sites fournissent des valeurs un peu moins favorables, de l’ordre de 0,5 t CO2 par
tonne recyclée, sans toujours préciser le mode de calcul.
Chaque tonne de verre recyclée se traduit par ailleurs par un gain énergétique de 1,46 MWh, selon le
site verre avenir195. Cela correspond à une économie annuelle de 3,56 TWh (un peu plus de la moitié
de la production annuelle d’un réacteur de 900 MW).
Evolutions technologiques
Aucune évolution technologique ne semble devoir bouleverser le fonctionnement de ce secteur dans
les années à venir.
Eléments prospectifs
La concurrence entre matériaux pour l’emballage va se poursuivre. Le verre a pour atout la perception
qu’en a le public d’un matériau inerte et naturel. Il a comme avantage écologique sa recyclabilité. En
revanche c’est un matériau lourd donc difficile à transporter et qui n’a pas toujours le meilleur bilan
en termes d’analyse du cycle de vie sur les paramètres énergie et émissions de gaz à effet de serre.
L’enjeu pour améliorer les performances de recyclage du verre creux est une amélioration de la
collecte. Les professionnels ont signé un engagement en ce sens qui passe par des efforts d’éducation
et une multiplication de points d’apport volontaires pour notamment collecter les emballages hors
domiciles.
Tout est à faire pour la collecte du verre plat, à commencer par les déchets du bâtiment. La création
de tri au niveau du chantier et dans les points d’apports volontaires, puis une massification des flux
ainsi collectés, semble la seule solution réaliste. Un système de REP permettra de financer les points
d’apport volontaires.
L’amélioration de la collecte dans le secteur des VHU, avec des objectifs en tonnage plus limités,
semble plus facile, pour autant que les détenteurs de véhicules hors d’usage amènent effectivement
leurs véhicules dans ces centres et que ces centres respectent l’obligation qui leur est faite de collecter
séparément le verre.
Une fois le verre collecté, les logiques économiques font qu’il est naturellement recyclé. Les verriers
maîtrisent les technologies correspondantes et sont intéressés par l’incorporation de calcin dans leurs
fours. La France a la chance de produire plus de verre qu’elle n’en consomme, ce qui fait que le calcin
collecté n’a pas de difficulté à être employé.
Flux physiques
Les mises sur le marché, la collecte
Le rapport d’activité de l’éco-organisme en charge des textiles, Eco TLC, fournit le bilan suivant pour
l’année 2018 :
Tonnage mis sur le marché (409 500 tonnes de vêtements et 95 500 tonnes de linge de
maison) : 505 000 tonnes
Tonnage collecté : 224 600 tonnes (40,5%)
Figure 1 : Bilan de l’utilisation des tonnages de déchets textiles – Source Eco TLC
Ces chiffres sont corroborés, à quelques pour cents près, par le bilan 2018 de Federec, qui mentionne
239 000 tonnes collectées (y compris chaussures qui représentent 6% des tonnages), en augmentation
de 7% par rapport à l’année précédente.
Le taux de collecte progresse, mais reste faible. L’objectif de 300 000 tonnes collectées en 2019 assigné
à Eco TLC n’a pas été atteint. La collecte se fait essentiellement (85,1 %) au travers de 45 614 points
d’apport volontaires (PAV), dont le nombre a augmenté d’un peu plus de 10 000 en 4 ans. Les autres
modes de collecte sont le don aux associations (10,6 %), la reprise en magasin (2,5 %), la collecte en
porte-à-porte (1,8 %).
140 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Le tri
Le tonnage de déchets textile triés stagne. Cette stagnation s’explique, selon Federec, par l’attentisme
des opérateurs de tri en raison du manque de visibilité sur les perspectives économiques de la filière,
qui s’est traduit par un manque d’investissements. Soixante-huit opérateurs de tri sont conventionnés
avec Eco TLC, dont 16 centres en Europe hors de France, comme l’illustre la carte jointe.
Il y a une réticence des trieurs français à remettre en cause leurs pratiques et faire évoluer leurs centres
de tri en transformant les métiers vers des métiers plus techniques. S’ils ne le font pas, d’autres acteurs
vont entrer sur le marché. Ce seront les marques (cf. la volonté d’Ikéa ou Decathlon de recycler) ou les
acteurs qui gèrent la revente.
La réutilisation
Le taux de réutilisation des déchets textiles baisse tendanciellement. Il a baissé de 5% entre 2014 et
2018 selon Federec. Cette baisse s’explique par une demande croissante de qualité de la part des
marchés vers lesquels ces produits sont exportés, qui y voient parfois une concurrence dommageable
au développement de leur industrie textile. La réutilisation en France de « la crème » des déchets
textiles porte sur moins de 10% des quantités collectées.
Le bilan 2018 d’Eco TLC fournit des informations complémentaires sur la réutilisation :
142 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Le recyclage et la valorisation
Le chiffon d’essuyage est un débouché traditionnel pour des textiles présentant des propriétés
d’absorption recherchées dans certaines activités industrielles (automobile, imprimerie, mécanique,
chimie, etc.). Les tissus, principalement en coton, sont classés par couleur, découpés et débarrassés
des éléments indésirables tels que boutons ou fermetures, voire lavés avant de pouvoir être utilisés
comme chiffons d’essuyage.
Certains opérateurs de tri assurent la préparation des chiffons, mais cette activité est le plus souvent
confiée à des entreprises spécialisées qui peuvent être amenées à délocaliser les opérations de
découpe dans des pays à bas coût de main-d’œuvre. Le chiffon d’essuyage est vivement concurrencé
depuis de nombreuses années par des produits tels que la ouate de cellulose.
L’effilochage consiste à récupérer mécaniquement les fibres du tissu. Après l’effilochage, les fibres sont
reconditionnées sous forme de :
Fils, après une étape de cardage ;
Flocons, après une étape de pulvérisation ;
Textile non tissé, après nappage et consolidation.
Les débouchés envisagés à terme sont notamment l’automobile, le bâtiment, les géotextiles.
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 143
Contexte économique
Federec estime le chiffre d’affaires de la filière à 100 millions d’euros. C’est l’ordre de grandeur que
l’on obtient en multipliant le nombre de tonnes triées (un peu moins de 200 000) avec le coût d’une
tonne collectée et triée (500 €).
Le rapport du CGE et du CGEDD fournit quelques données sur le coût de la collecte et du tri :
Le coût net moyen du tri était estimé à 101 €/t en 2015
Le coût de la collecte ressort à 400 €/t dans la mesure où le coût de la collecte et du tri est
estimé à 500 €/tonne.
Le barème des contributions est assis sur la taille des pièces de TLC ; il varie de 0,121 centime par pièce
pour les plus petites pièces à 4,84 centimes par pièce pour les plus grandes. Le montant total des
contributions était censé atteindre 2&,8 M€ en 2019. Il était de 18,6 M € en 2017.
Le prix de vente varie fortement selon les usages :
Un rapport RDC de 2009196 pour le compte de l’Ademe fournit les coûts suivants :
Prix d’achat des matières neuves acceptés par les effilocheurs : coton de mélange 70 €/t,
coton denim multicouleurs 150 €/t, acryliques 150 à 200 €/t, couleurs écrues blanches 250 à
400 €/t, matières synthétiques 1000 €/t
Prix d’achat des matières issues des centres de tri : de 0 à 150 €/t
Le coût de l’effilochage varie entre 190 et 250 €/t
Chutes de tissus achetées 100 €/t avant processus d’effilochage et revendues 300 €/t pour
des applications automobiles, sachant que pour les équipementiers automobiles
l’approvisionnement en matière vierge coûte cinq fois plus cher.
Figure 7 : Données sur l’emploi dans le secteur de la gestion des déchets textiles- Source : Eco TLC
Cadre juridique
Une filière Responsabilité élargie du producteur (REP) relative aux textiles, linge de maison et
chaussures destinés aux ménages, a été créée par la loi de finances pour 2007 (art. 69).
Le projet de filière s’est structuré conformément aux orientations données par l’Union européenne
dans la directive-cadre sur les déchets (directive 98/2008), qui affiche sa volonté de mettre en place
une société plus responsable des déchets qu’elle produit tant sur le plan écologique qu’économique.
La France applique notamment cette directive pour organiser plusieurs filières nationales de gestion
des déchets selon le principe de la responsabilité élargie des producteurs (REP), dont la filière des TLC.
La société Eco TLC a été agréée, par arrêté interministériel, pour la première fois le 17 mars 2009 afin
d’assurer les obligations des metteurs sur le marché en matière de traitement des déchets issus de
leurs produits de TLC, jusqu’à fin 2013. Cet éco-organisme a versé les premiers soutiens aux opérateurs
de tri textile en juillet 2009. Il a été réagréé pour la période 2014-2019.
Les modalités d’application de l’article L. 541-10-3 du code de l’environnement sont définies aux
articles R. 543-214 à R. 543-224 du même code. Elles précisent les dispositions relatives à l’agrément
des organismes et à l’approbation des systèmes individuels de la filière REP des TLC.
Le cahier des charges d’Eco TLC fixe l’objectif d’augmenter significativement les tonnages collectés,
afin d’atteindre en 2019 50 % du gisement mis en marché, soit 300 000 tonnes (ce qui équivaut à 4,6 kg
par an et par habitant). L’objectif qualitatif pour les déchets issus des TLC triés est d’atteindre d’ici la
fin de l’agrément, au moins 95 % de valorisation matière (réutilisation et recyclage) et un maximum de
2 % de déchets éliminés (déchets ne faisant l’objet d’aucune valorisation).
Parmi les arguments en faveur de la fibre recyclée, outre son intérêt écologique (le CETI sortira un bilan
premier semestre 2020, mais on gagne sur l’eau, les produits chimiques de teinture etc.), il y a
l’innocuité (respect de Reach, Eucotex).
Contexte environnemental
Selon une étude de Federec et de l’Ademe, le recyclage d’une tonne de déchets textile sous forme de
chiffons permet d’éviter 98% des émissions de gaz à effet de serre et 99% des consommations
d’énergie occasionnées ou nécessité par la production d’une tonne de textiles en fibres vierges. Le
recyclage des textiles en chiffon d’essuyage permet de faire d’importantes économies de gaz à effet
de serre (5 610 kg CO2-eq/t). Ceci est lié à la production de matières premières évitées. Deux cas sont
considérés : les chiffons recyclés permettent d’éviter soit des chiffons textiles issus de matières
premières vierges soit des chiffons en papier. C’est l’évitement de fibres textiles d’origine vierge qui
représente plus de 95% des bénéfices. Le recyclage des textiles en chiffon d’essuyage permet de faire
d’importantes économies d’énergies (- 26 000 kWh/t). Ceci est lié à la production de matières
premières évitées. Dans cette étude, le papier d’essuyage est évité dans 50% des cas et il représente
30% des gains énergétique. L’évitement du mix textile représente 70% des gains énergétiques.
Evolutions technologiques
Le centre européen des textiles innovants (CETI) a travaillé sur des procédés permettant de refaire des
fils à partir des textiles usagés. Aujourd’hui, il arrive à produire un fil à peu près au même coût que
celui de la matière vierge (3,5 $/kg). Les débouchés de ce fil produit à partir de recyclage sont très
importants : son potentiel est estimé à plus de 100 000 tonnes. Le CETI en est cependant encore à une
phase pilote de production.
Pour développer le procédé, il faut des centres de tri qui trient les vêtements par fibre et couleur. C’est
techniquement possible. Les machines de tri en Belgique et aux Pays-Bas (Valvan) savent le faire, en
utilisant des procédés spectophotométriques pour reconnaître les couleurs.
La France a la chance d’avoir le leader français des machines d’effilochage (Laroche), qui se développe
dans le démantèlement (suppression des boutons et autres fermetures).
Ces fibres effilochées peuvent ensuite être recardées et refilées en les mélangeant avec 30% de
matière vierge.
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 147
Des algorithmes permettent d’obtenir les couleurs désirées à partir de la reconnaissance automatique
des couleurs des fibres recyclées, ce qui évite de reteindre les fils et permet des économies.
Il y a aussi possibilité de recycler les fibres polyester (65% du marché vs 30% pour le coton) en les
transformant en granulés.
Eléments prospectifs
La France est pénalisée par la faiblesse de son industrie textile, ce qui limite la réutilisation des textiles
usagés pour en faire d’autres textiles.
La solution consistant à exporter nos textiles usagés vers des pays plus pauvres n’est pas pérenne.
D’une part, ces pays commencent à réagir face à ce qu’ils considèrent comme une possible
concurrence de leur industrie textile. D’autre part, sous couvert de réutilisation, nous exportons nos
déchets textiles vers des pays tiers sans nous soucier de leur devenir à terme, ce qui n’est pas
pleinement satisfaisant.
La question de la réutilisation ou du réemploi des textiles usagés va par ailleurs devenir plus difficile si
le taux de collecte s’accroit, ce qui est un objectif des pouvoirs publics.
L’automobile et le bâtiment sont deux marchés possibles pour le recyclage des textiles .
L’automobile est un marché intéressant de 15 000 t/an. Les constructeurs automobiles et leurs sous-
traitants utilisent aujourd’hui 15 kg de fibre textile/voiture pour l’isolation ou les sièges, qu’ils sont
prêts à acheter 30 €/t. Les intérieurs n’ont pas beaucoup évolué depuis 20 ans, il y a des innovations à
introduire. Le cuir peut aussi être recyclé pour des applications automobiles.
L’isolation des bâtiments constitue un autre marché. Avec des prix d’achat de 30 €/t, c’est un marché
de 10 000 t, ce qui représente 2% du marché d’isolation dans le bâtiment. Ce marché est fortement
concurrencé par la laine de verre pour l’isolation thermique. Le métis n’a pas été un succès. Mais les
isolants à base de textile ont aussi d’intéressantes propriétés d’isolation acoustique. Au vu de
l’importance du marché représenté par l’isolation du bâtiment la question d’une contribution de l’éco
organisme à la réutilisation de textiles usagés pour faire de l’isolation se pose.
Le recyclage actuellement pratiqué fait essentiellement appel à des procédés mécaniques. Il serait
possible de procéder à un recyclage chimique, mais ce dernier, présent essentiellement en Asie
(japon), achoppe sur des questions de coût et de pureté de la matière.
Les règles de la commande publique ont évolué pour permettre une meilleure prise
en compte des critères environnementaux (et sociaux)
En 2014, la commande publique a fait l’objet d’une réforme d’envergure sur le plan européen.
Trois textes européens ont introduit une meilleure prise en compte de l’environnement dans l’achat
public : la directive n° 2014/24 sur la passation des marchés publics (dite directive « secteurs classiques
») et la directive n° 2014/25 relative à la passation des marchés passés par des entités opérant dans
les secteurs de l’eau, de l’énergie, des transports et des services postaux (dite directive « secteurs
spéciaux ») offrent diverses possibilités d’intégrer des considérations environnementales dans les
achats publics, notamment lors de la définition des spécifications techniques, des critères de sélection
des entreprises et des critères d’attribution d’un marché. La directive dite « concessions » 2014/23/UE
portant sur l’attribution des contrats de concession a complété le dispositif.
Leur transposition en droit français, par l’ordonnance 2015-899 du 23 juillet 2015 et le décret 2016-
360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics a été l’occasion et simplifier et de moderniser le droit
français de la commande publique.
Les objectifs environnementaux peuvent être introduits de plusieurs manières dans les marchés
publics français. Ces derniers peuvent d’une part comporter des clauses relatives aux produits ou aux
procédés mis en œuvre. Les considérations environnementales peuvent d’autre part se retrouver dans
les critères de jugement des offres, soit dans le cadre d’analyses multicritères, soit sous forme d’une
prise en compte d’un coût global intégrant des coûts environnementaux.
Les schémas de promotion des achats publics socialement responsables adoptés par les collectivités
territoriales ont parallèlement été étendus par la loi relative à la transition énergétique pour une
croissance verte aux achats publics écologiquement responsables.
L’Ademe a consacré 4 Mds € de crédits sur la période 2010-2020 pour financer des projets innovants
et développer les filières industrielles de demain198, dont 9 % à l’économie circulaire et les déchets,
soit environ 36 M €/an en moyenne. Le PIA3 (Programme d’investissement d’avenir n°3, de 10 Mds€)
a doté l’Ademe d’une enveloppe d’un milliard d’euros qui se décline selon trois axes :
(1) Démonstration et territoires d’innovation de grande ambition pour notamment financer en
fonds propres des infrastructures innovantes de type « premières commerciales », sur trois
thèmes dont l’économie circulaire.
(2) Concours d’innovation, en partenariat avec Bpifrance.
(3) Développement d’écosystèmes de l’innovation performants, dédié aux transports et à la
mobilité.
Solover : création d’une filière de recyclage de verre plat (aide 2,5 M€)
Motion : écoconception de moules de verrerie (aide 1,7 M€)
Hatzen : recyclage de cartes électroniques par procédé mécanique
(aide 1,7 M€)
Sopraloop : recyclage de PET opaque (aide 2,5 M€)
HPI PVB : création d’une filière de recyclage du poly-butyral de vinyle
(aide 1 M€)
Rewind : recyclage des textiles commercialisés par Décathlon (aide :
2,5 M€)
Nextroad : optimisation de la collecte des déchets (aide 3,4 M€)
Source : Bilan thématique 2018-économie circulaire, PIA. Ademe
engagées en 2016-2017-2018 pour un montant total d’aides de 687 M€, soit 229 M€/an200. L’Ademe
apporte ainsi ses aides au conseil, à la réalisation, à la connaissance, au changement de comportement
et dans le cadre d'un contrat d'objectifs.
On peut donc estimer que la filière « transformation et valorisation des déchets » est soutenue de
250 M€/an à 300 M€ en termes de R&D, de soutiens à l’innovation et à l’investissement (hors prêts ou
participations en fonds propres de Bpifrance), d’aides au conseil, à la réalisation, à la connaissance, et
au changement de comportement.
La mission recommande donc de cibler les soutiens publics à l’innovation notamment via un soutien
du PIA4 porté à 40 M€/an (1) au développement de débouchés français pour les déchets (2) à la
modernisation des centres de tri, (3) à l’écoconception des produits (4) et à de nouveaux procédés de
recyclage (Secrétariat général pour les investissements d’avenir, Ademe)
200 Le budget 2019 de l’Ademe prévoit 185 millions pour l'économie circulaire et pour la valorisation des déchets et des sites
pollués afin d’appliquer la feuille de route pour l'économie circulaire (Frec).
152 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Les certificats d’incorporation, inspirés des certificats d’économie d’énergie, ont la préférence des
recycleurs pour rendre obligatoire l’incorporation de matière recyclée. L’idée est d’obliger les
producteurs à présenter un certain volume de certificats d’incorporations, acquis lors de l’achat de
matière recyclée. Un marché d’échange de certificats est créé à cette occasion.
Les rapporteurs n’ont pas été convaincus par un tel système dont la gestion leur est apparue plus
compliquée que la mise en place d’une obligation réglementaire d’incorporation.
des autres résines recyclées. Des restrictions existeraient également en matière d’utilisation de
produits recyclés dans le bâtiment. La mission recommande d’identifier plus précisément ces
contraintes à la valorisation de déchets et à l’utilisation de matières premières recyclées, de
développer en tant que de besoin les connaissances sur les effets sanitaires de valorisation ou de
réutilisation de matières recyclées et d’actualiser les réglementations en conséquence.
Ces études et l’actualisation des réglementations se feraient préférablement dans un cadre européen.
Les rapporteurs se sont par ailleurs interrogés sur la justification du taux différent de 100% de
remboursement d’un coût de référence pratiqué par les éco-organismes lorsque la collecte est
effectuée par d’autres, en l’espèce les services publics de gestion des déchets. L’argument selon lequel
un tel taux démotiverait les collectivités territoriales et ne les inciterait pas à faire des économies ne
les a pas convaincus dans la mesure où le remboursement se fait sur la base d’un prix de référence
reflétant les pratiques les plus efficientes. Ne pas rembourser à 100% les coûts de collecte leur semble
en revanche aller à l’encontre du principe selon lequel le metteur sur le marché est responsable, y
compris financièrement, de la gestion des déchets que son activité induit. Les collectivités sont par
ailleurs davantage incitées à atteindre des taux de collecte élevés si on leur rembourse ces coûts à
100%.
La mission recommande de s’interroger sur le taux optimal de remboursement par les éco-organismes
des coûts de collecte sélective des déchets supportés par les collectivités territoriales (DGPR).
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 155
Certains garde-fous sont à mettre en place pour éviter que le système ne dérive :
• la matière entrant dans le processus de recyclage doit être obtenue à coût négatif ou nul : si
ce n’est pas le cas, cela signifie qu’il y a d’autres moyens pour abaisser le prix de la matière à recycler
à mettre en place prioritairement ;
• l’aide doit être inférieure à la valorisation des bénéfices environnementaux du recyclage par
rapport à une autre solution de traitement des déchets.
Pour les éco-organismes opérateurs, la mise en œuvre de cette aide ne pose pas de difficultés. Elle se
matérialise sous forme de prix négatifs de reprise des déchets triés par les recycleurs s’engageant à les
transformer en matière première recyclée.
Pour les éco-organismes financiers, une obligation de reprise à coût nul de déchets triés si le détenteur
des déchets en fait la demande pourrait initier une telle aide. Les éco-organismes devraient alors
contribuer à leur recyclage en payant des recycleurs pour qu’ils les transforment en matière recyclée
compétitive.
Ces mécanismes d’intervention seraient à décrire dans l’agrément des éco-organismes.
Les éco-organismes pourraient également jouer un rôle pour amortir les impacts sur le recyclage des
fluctuations de cours des matières premières. Si le prix d’une matière première vierge baisse, les
metteurs sur le marché en bénéficient. En revanche, les recycleurs souffrent, puisque le coût
d’élaboration de la matière recyclée, qui comprend une partie importante de coûts fixes (collecte, tri),
ne peut refléter ces variations que si le prix de la matière à l’entrée de la phase de recyclage peut lui-
même être diminué dans les mêmes proportions. Dans ces conditions il ne serait pas illogique que les
éco organismes perçoivent des éco-contributions tenant compte du coût des matières premières
vierges qui financeraient une diminution du prix des matières à recycler (directement pour les éco
organismes opérateurs et sous forme d’aide majorée à la phase collecte/tri/recyclage pour les éco-
organismes financiers).
La mission recommande d’étudier, dans les agréments des éco-organismes, un soutien de ces derniers
à la compétitivité des matières recyclées, notamment en cas de fluctuation des prix de la matière
première vierge, dans la limite des bénéfices environnementaux apportés par le recyclage par rapport
aux autres modalités de gestion des déchets (DGPR).
156 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
L’écoconception des produits ne saurait se limiter à leur recyclage, mais le recyclage des matériaux
utilisés dans un produit doit être intégré dans les réflexions sur l’écoconception.
Plusieurs pratiques favorisant l’écoconception ont été relevées par les rapporteurs, notamment le
dialogue entre concepteurs de produits et recycleurs, les études de recyclage menées dès la
conception du produit, le développement d’une expertise sur le recyclage, enfin la modulation des
écocontributions selon la facilité à recycler le produit.
Le projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et l’économie circulaire prévoit que les
écocontributions peuvent être modulées en fonction de la quantité de matière, l’incorporation de
matière recyclée, les possibilités de réemploi ou réutilisation, la recyclabilité, etc. Les écocontributions
peuvent même devenir négatives (le metteur sur le marché recevant une prime).
158 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
Annexe 18 : La gouvernance
La mission adhère à ces recommandations. Elle a constaté, notamment pour la filière plastique, la
faiblesse des interactions entre les metteurs sur le marché de matières vierges, et les industriels du
recyclage.
201 Filières
REP – responsabilité élargie des producteurs en matière de prévention et de gestion des déchets générés par leurs
produits – mai 2018 – J. Vernier.
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 159
La mission recommande de demander aux industriels (metteurs sur le marché et recycleurs) d’établir
des feuilles de route en vue de développer le recyclage des déchets de leur secteur, et d’évaluer
l’impact sur le recyclage de tout nouveau produit et instituer des pénalités financières pour les éco-
organismes en cas de non atteinte des objectifs de collecte ou de recyclage qui leur sont assignés
(DGPR).
160 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
- concernant les ménages, le tri à la source s’opère de manière distincte selon les communes :
(1) collecte sans distinction de déchets, (2) collecte par apport volontaire dans des conteneurs qui
accueillent par exemple les papiers-cartons, les métaux, les plastiques, le verre, et aussi les piles, les
vêtements…, (3) collecte sélective par maison ou immeuble, par la mise à disposition de deux à quatre
poubelles de couleur, (4) collecte mixte, combinant apport volontaire et collecte sélective,
- concernant les entreprises, le décret n°2016-288 du 10 mars 2016 fait obligation aux entreprises,
commerces, administrations, etc. de trier à la source cinq flux de déchets : papiers cartons, métal,
plastique, verre, bois. Les déchets doivent ensuite (1) soit être valorisés par les détenteurs et
producteurs de déchets eux-mêmes, (2) soit être cédés à l’exploitant d’une unité de valorisation,
(3) soit être cédés à un intermédiaire (collecteur ou repreneur) en vue de leur valorisation.
Selon une étude Ademe202, les gisements des 5 flux sont très significatifs : papiers-cartons (6,8 Mt/an),
plastique (2,3 Mt/an), métaux (13 Mt/an), bois (6 Mt/an), verre (0,96 Mt/an). Sur les 29 Mt/an
collectés, environ 4 Mt ne sont pas encore triés.
Pour améliorer le tri à la source, il est recommandé (1) de mieux informer les particuliers sur les
consignes de tri, et (2) d’établir un bilan de l’application du décret 5 flux, et le faire respecter, par
exemple via des pénalités (DGPR).
Les centres de tri (environ 450 en France, avec une capacité globale d’environ 7 Mt/an) mettent en
œuvre différents procédés : tri manuel, procédés mécaniques (selon la taille, la masse volumique,
etc.), méthodes d’analyse physico-chimique (rayons X, induction, spectrométrie, thermographie,
analyse de la couleur, et de la forme, spectroscopie, ultrasons, laser, pyrolyse), tri optique,
reconnaissance d’images….
Plusieurs procédés sont souvent associés dans un même centre. La qualité du tri est essentielle pour
la valorisation économique. Par exemple, pour les textiles, les déchets réutilisables sont vendus entre
500 et 4500 €/t, les chiffons 300 €/t et les déchets destinés à l’effilochage à 150 €/t ; les métaux mal
triés engendrent des surcoûts pour les industriels, ou sont interdits de certains marchés (filière
électrique) ; les papiers-cartons de recyclage français semblent être considérés comme mal triés par
nos voisins européens, et l’accès au marché asiatique est conditionné à une meilleure qualité des
déchets.
Améliorer la qualité du tri permet une meilleure valorisation des déchets, un accès plus facile à certains
marchés, notamment à l’export, et plus généralement un accroissement de la valeur ajoutée française
dans le recyclage des déchets. Il est donc recommandé d’accroître le nombre de catégories de déchets
triés, en concertation avec les acteurs économiques (métaux, bois, plastiques par exemple),
d’améliorer le contrôle qualité en sortie des centres de tri en généralisant la certification, qualifier la
formation des professionnels au tri (notamment dans le bâtiment. Action : DGE/DGPR/organisations
professionnelles).
202 Tri 5 flux, étude prospective d’évaluation des impacts économiques du développement du tri 5 flux de déchets par les
acteurs économiques, Ademe, juillet 2019, Jean-Christophe Pouet.
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 161
Pour améliorer la qualité du tri, les centres de tri doivent être adaptés : automatisation du geste de tri,
analyses et mesures en continu etc. Il est donc recommandé de soutenir financièrement les
investissements nécessaires à la modernisation des centres de tri visant à améliorer la qualité du tri
(Ademe) (voir la recommandation n°8), et d’encourager la certification « qualité » en sortie des centres
de tri (DGE/DGPR).
La mission recommande, afin d’améliorer la qualité du tri, (1) de mieux informer les particuliers sur les
consignes de tri, (2) d’établir un bilan de l’application du décret 5 flux, et de le faire respecter, (3)
d’accroître le nombre de catégories de déchets triés, en concertation avec les acteurs économiques,
(4) d’améliorer le contrôle qualité en sortie des centres de tri en généralisant la certification (Ademe,
DGPR).
162 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
203
Production et consommation (4 indicateurs), gestion des déchets (2 indicateurs), matières premières secondaires
(2 indicateurs), compétitivité et innovation (2 indicateurs).
204
Rapport CE relatif à la mise en œuvre du plan d’action en faveur d’une économie circulaire (2019).
205
10 indicateurs clés pour le suivi de l’économie circulaire, Service de l’observation et des statistiques (mars 2017).
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 163
Dans l’objectif d’améliorer l’analyse des résultats transmis par les États membres, la Commission
européenne avait proposé en 2015 de réviser la législation sur les déchets en harmonisant les
méthodes de calcul des taux de recyclage dans l’ensemble de l’UE. Un rapport récent du sénat
français206 montre qu’aucune suite n’a été donnée par l’UE à cette proposition depuis 5 ans. En effet,
un plan européen d’action en faveur de l’économie circulaire incite les États membres à collaborer
entre eux et avec l’ensemble des acteurs locaux, industriels et associatifs. Les directives du Paquet
économie circulaire imposent aux États membres des obligations d’information de la Commission sur
les dispositifs mis en place pour atteindre les objectifs fixés et les résultats obtenus. Les seules
modalités de calcul et vérification des données pour évaluer l’atteinte des objectifs ne concernent que
les emballages (article 6 bis directive 94/62/CE modifié par la directive UE/2018/852). A noter toutefois
que des systèmes de contrôle qualité et de traçabilité des déchets sont imposés depuis 2 ans aux États
membres, en particulier pour les déchets municipaux (Cf. Article 11 de la directive cadre).
Titre : Logigramme de gouvernance des données statistiques sur la gestion des déchets et leur recyclage
Source : mission.
Au-delà de ce constat, la mission a pu mesurer les modifications méthodologiques apportées par ces
mêmes Cabinets prestataires de l’Ademe dans les nouveaux bilans nationaux du recyclage (BNR). En
effet, les auteurs de l’étude utilisent des méthodes de calculs très approximatives (aucune incertitude
206
Rapport portant observations sur la transposition du droit européen par le projet de loi relatif à la lutte contre le
gaspillage et à l’économie circulaire, P. Médevieille pour la Commission des affaires européennes (2019)
164 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
associée) qui extrapolent des données européennes théoriques et n’intègrent pas les informations
suivantes : gisements, part de collecte des collectivités, déchets agricoles (plastiques, etc.), recyclage
des chutes de production (correction théorique de 20 % appliquée dans la nouvelle étude), commerce
des produits de fonderie, répartition entre filières électrique/fonte, chiffres d’affaires spécifiques par
type de métal, emballages papier-carton importés d’Asie et données sur les papiers d’hygiène, verres
européens consignés, laines et fils de verre, etc. Face aux écarts observés selon les sources de données
choisies, pour l’année 2017 (Δ ± 2,5 Mt d’acier exporté, Δ ± 610 000 t d’acier importés, Δ ± 219 000t
d’aluminium collecté, Δ ± 122 000 t de plastiques collectés, Δ 47 à 326 000 t de verre plat collecté,
etc.), les Cabinets Rdc et Deloitte ont modifié de nombreuses données du BNR précédent en les
corrélant avec les nouvelles valeurs 2014-2017. Cette manipulation impacte la justification technico-
économique de nombreux outils amont : Eurostat, positionnement français face aux objectifs
européens, coûts des mesures à mettre en place, etc. Par ailleurs, la méthode de calcul de collecte
proposée par les auteurs de l’étude soustrait sans justification les exports ou imports de déchets en
fonction des matériaux. Ce travail a également mis en évidence le contenu technique des incertitudes
liées aux analyses de Federec : majoration du chiffre d’affaires des métaux (qui inclut les filières
illégales), minoration des chiffres de collecte de déchets aluminium (les chutes de transformation ne
sont pas quantifiées), peu de données robustes sur le recyclage du cuivre (à cause des enjeux de
stockage stratégique pratiqués par les pays tiers) ; il y a des risques de double comptage dans certains
secteurs (par exemple, la comptabilisation des emplois ne peut être effectuée en fonction des types
de métaux traités car les opérateurs peuvent recycler plusieurs matériaux différents sur le même site),
les flux et coûts de négoce ne sont pas intégrés dans les BNR (plastique, acier, etc.), les collectes FNADE
ne sont pas incluses dans l’étude, etc.
Ces approximations peuvent se justifier face à la difficulté de quantifier les données sur certaines
matières comme par exemple le bois (pas de code des douanes, peu d’informations sur les
imports/exports). Généralement, les taux d’incorporation sont plus clairs mais il est devenu complexe
d’évaluer le taux de recyclage lorsqu’on ne connaît pas le gisement du produit ou matériau concerné.
Dans le cas des granulats, la distinction entre taux de recyclage des matériaux et remblaiement des
carrières ou mines est difficile à établir, notamment lorsque les secteurs du bâtiment et des travaux
publics mutualisent le traitement de leurs déchets.
Annexe 21 : La traçabilité
L’Ademe a produit en 2018 six fiches synthétiques sur la composition-matière (métaux et plastiques)
de différents produits usuels (voiture, ordinateur, pile, emballage, meuble, vêtement, etc.) et sur leur
valorisation en fin de vie (recyclage, valorisation énergétique, etc.). Ces outils permettent de connaître
la répartition en poids des matériaux de composition (métaux et plastiques) du produit ; les taux de
recyclage et valorisation des matériaux ; et enfin leur seconde vie (emballages en carton, papier-
toilette, mobilier urbain, pièces automobiles, etc.).
Le cadre juridique
Au niveau européen, des objectifs de recyclage sont fixés à échéance 2025 et 2030 pour les produits
et matériaux (les VHU208, les papiers-cartons, les plastiques, le bois et les emballages en verre, métaux
ferreux ou aluminium).209 De manière plus contraignante, les directives du Paquet économie circulaire
imposent aux Etats membres des obligations d’information de la Commission sur les dispositifs qu’ils
mettent en place pour atteindre les objectifs fixés et sur les résultats obtenus. Elles définissent les
modalités de calcul pour évaluer l’atteinte des objectifs (pour les emballages uniquement) et font
obligation aux Etats membres de mettre en place des systèmes de contrôle qualité et de traçabilité
des déchets (emballages). Pour atteindre ces objectifs, il convient de tracer la composition et les taux
d’incorporation des matériaux recyclés dans les produits afin de faciliter leur contrôle. Cette mesure
n’est pas encore effective en France. Pourtant certains pays européens, dans le cadre de la consigne
généralisée, imposent des systèmes de code barre sur les canettes (% de matière recyclée et
composition détaillée d’une bouteille) afin d’assurer la traçabilité complète du produit et de faciliter
le contrôle. Ce type de technologie peut par exemple faciliter l’application du bonus-malus de la FREC
sur l’écoconception et l’incorporation de matière recyclée.
Les mesures d’interdiction de certaines matières ou d’incorporation de matière recyclée, incitent à
afficher la composition détaillée des produits. C’est le cas des plastiques à usage unique et des
bouteilles PET, idem pour les taux d’incorporation dans les emballages et pour le secteur du bâtiment.
La traçabilité des produits est également un enjeu important pour les filières VHU (lutte contre les
paiements en numéraire), bois et plastiques (affichage de l’écoconception des produits, incorporation
de matière vierge dans les emballages alimentaires, interdiction d’additifs, complexification des
résines dans un contexte concurrentiel international, etc.), emballages multicouches (additifs colorés
peu recyclables, incorporés pour des raisons marketing). Dans le cas du verre, la fixation d’objectifs de
recyclage pour les éco-organismes, nécessite aussi un affichage clair de la composition des produits de
seconde vie, afin d’assurer leur contrôle et d’appliquer des pénalités en cas de non-conformité au
cahier des charges de la filière REP.
La réglementation française peut également être plus contraignante dans le domaine du contrôle
sanitaire des matériaux recyclés (métaux et bétons issus du démantèlement des installations
nucléaires), c’est notamment le cas de la transposition nationale210 de la directive 2013/59/EURATOM
qui fixe les normes de base relatives à la protection sanitaire contre les dangers résultant de
l’exposition aux rayonnements ionisants. Dans certains secteurs sensibles où les matériaux
inoxydables sont en contact avec les aliments (plans de cuisine, charriots d’hôpitaux, instruments
médicaux, etc.), il peut arriver qu’il y ait tromperie sur la dénomination des échantillons lorsque les
matières premières sont importées et non tracées par les REP (acier, aluminium, cuivre, etc.). En outre,
l’absence d’affichage de composition détaillée des produits importés complexifie leur contrôle et peut
créer une concurrence déloyale sur les alliages recyclés en France par rapport aux pays non européens
qui sont néanmoins soumis aux seuils internationaux fixés par l’AIEA. La mise en place des normes de
composition (forme définie et limite acceptable) et d’affichage du taux de matière première recyclées
dans le produit irait dans le sens du souhait des industriels européens du recyclage des métaux.
211 Déclaration de projet de travaux (DT) et déclaration d’intention de commencement de travaux (DICT).
212 Source : Etude sur l’incorporation des sortes papetières dans le secteur du tissu (Hygiène). Réunion COPIL n°2, octobre 2019, Ademe,
Viasourcing, Alterinnov, Sereho. Voir aussi : « étude sur l’incorporation des sortes papetières dans le secteur de l’hygiène », rapport
intermédiaire, Ademe, décembre 2019
168 Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine
fait l’objet d’une consigne de tri, dès lors qu’il est soumis à un régime de REP (conformément à la
FREC). Cette obligation est de nature à faciliter la mise en œuvre de la collecte séparée imposée, pour
les déchets papiers, métaux, plastiques et verre, par l’article 11.2 de la directive-cadre ou des directives
sectorielles. 213
La mission recommande donc de mettre en place une certification du taux d’incorporation de matière
première recyclée dans les produits et développer une signalétique pour permettre au consommateur
d’apprécier la facilité de recyclage des produits achetés (DGPR)
Cet enjeu deviendra rapidement déterminant non seulement pour garantir le respect des objectifs
assignés aux producteurs, en toute transparence vis-à-vis des consommateurs mais également
protéger ces mêmes producteurs de la concurrence déloyale hors UE.
213 Rapport portant observations sur la transposition du droit européen par le projet de loi relatif à la lutte contre le gaspillage et à l’économie
circulaire, P. Médevieille pour la Commission des affaires européennes (2019).
Les filières de recyclage de déchets en France métropolitaine 169