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La France Coloniale de 1830 À 1870, Annie Rey-Goldzeiguer

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La France coloniale de 1830 à 1870, Annie Rey-Goldzeiguer

-> Après la prise d’Alger en 1830, il ne fallut que 40 ans pour que la France devienne
la seconde puissance coloniale ; le phénomène de colonisation est-il, dès son origine
un succès, une entreprise prometteuse, ou plutôt un « boulet attaché au pied de la
France » ? (Napoléon III)

Chapitre 12 : Une France frileuse et nostalgie en 1830


La France sous haute surveillance
Désastre de 1815 : met un temps d’arrêt aux ambitions politiques françaises :
amputation de son territoire, suppression des restes de son Empire colonial,
domination anglaise des mers et océans, disparition de la « Grande Armée » … La
France doit accepter une restauration sans gloire et reconnaitre la suprématie anglaise
qui domine les mers, le grand commerce, et assure un remarquable démarrage
industriel.
Traités de Paris 1814-1815 : mutilation de l’Empire colonial
Angleterre restitue : une partie des Antilles, St Pierre et Miquelon, l’Ile Bourbon, 5
comptoirs indiens et 8 loges commerciales du Bengale. La France récupère le Sénégal.

Les grands négociants français sont supplantés dans l’Atlantique et l’océan Indien par
le concurrent anglais (lion colonial). D’autant plus difficile que la France a perdu de
nombreuses routes commerciales à la fin du XVIII avec le désintéressement
napoléonien pour le grand commerce : les villes et ports français qui avaient bâti leur
fortunes avec les « Isles » se voient ruinés.
Ex : Grenoble, liée à St-Domingue pour son grand commerce voit s’effondrer ses
exportations de produits dauphinois, drap, toiles, mercerie…
La France est alors la cinquième puissance coloniale.
Sur le continent, elle se retrouve amputée : diplomatiquement elle est à la portion
congrue, militairement ses effectifs sont limités, sa marine n’est plus qu’un souvenir.

Un pays dont le dynamisme persiste mais qui se considère comme traumatisé et replié
sur lui-même
Conscience de la défaite de 1814-1815 marque la Nation qui se juge stoppée dans son
dynamisme.
• La courbe triomphante de la démographie des XVII et XVIII siècles est alors plus
faible : pacification et modification des conditions d’hygiène font abaisser la
mortalité de 28% (Empire) à 26 % (Restauration). L’accroissement de 13% en
Angleterre tombe à 4% en France.
• Problème social en 1830 : insatisfaction paysanne (exploités dans les campagnes)
insatisfaction prolétarienne des faubourgs surpeuplés des villes (Lille, Reims…).

Société de la Restauration ressemble à celle de l’Ancien régime quant à son ordre


social :
• L’Aristocratie foncière domine économiquement par la vente et l’achat de biens,
mais aussi politiquement en profitant du suffrage censitaire et de la loi du double
vote.
• La grande bourgeoisie en a profité pour affermir ses postions économiques. Mais,
Charles X ayant modifié le cens électoral au profit des propriétaires fonciers, elle
se retrouve dans le camp politique des classes moyenne en 1830. Les bourgeois se
réunissent en sociétés secrètes pour préparer l’avènement d’un nouveau régime.
• Le monde rural et les travailleurs citadins sont eux dominés par l’Aristocratie /
Bourgeoisie. Le monde rural est écrasé par l’Eglise. Celui des villes n’a pas de
droits politiques mais présente au moins l’avantage d’être bien organisé.
Economie semble bloquée et frileuse ; toutefois, il y a un accroissement considérable
de la production industrielle, qui permet le retour d’une collaboration Anglo-
européenne.
Le mercantilisme pas encore beaucoup, même sur des villes industrielles comme
Mulhouse et d’autres à l’abri du protectionnisme (Lyon, Lille…).
Cette économie « asphyxiée » dont parle Annie Rey-Goldzeiguer entraine la chute du
salaire réel des ouvriers et la misère (cf. Déclaration d’Argout, ministre du commerce
p. 323)

La force militaire étant largement affaiblie, elle sert surtout à garantir l’ordre politique
et social. L’armée veut effacer la honte des défaites, et prouver sa vertu militaire à
retrouver la victoire.

Les ultimes tentatives de Charles X pour mener à bien son « grand projet » ne
permettront pas de sauver son régime. Humiliations continues exacerbent le
nationalisme et le désir de revanche, surtout chez une jeune génération critique et
dynamique qui veut partir à la conquête d’un monde nouveau.

Une France de la sensibilité et de la rupture


Les besoins des Français s’exacerbent : besoin d’évasion, aspiration à la conquête
(Palestine, Orient…) et voyages sont autant de rêves qui permettent d’échapper de
l’atmosphère atone de la Restauration.
Les artistes et intellectuels rêvent de cette évasion, et de la création d’une société plus
efficiente / juste. Cf. Socialisme de Saint-Simon, économie politique de J. B Say…
L’Eglise se réforme, affirmant un catholicisme libéral prônant les œuvres humanitaires
charitables et la croisade missionnaire à une époque où la société se déchristianise.
C’est donc dans une Restauration « engluée dans ses difficultés » que la nostalgie de
l’épopée napoléonienne et les rêves de croisade humaniste aiguillonnent les jeunes
générations.

Chapitre 13 : Le redoutable engrenage de la politique de la canonnière 1830-1837


L’Affaire d’Alger
Restauration mena une politique d’envergure pour récupérer et conserver les
concessions de l’ancienne Compagnie royale d’Afrique. 1817 : restitution des
concessions permet au commerce français de s’installer à nouveau à la Calle et à Bône
pour le commerce des grains notamment.
A Alger, la maison marseillaise Paret obtient alors le monopole de la vente des laines.
France ne participe à aucune action collective contre le dey d’Alger.

Le coup d’éventail
Septembre 1814 : Dey Hussein est chargé de régler les dettes de blé contractées par
Jacob Bacri (créances Bacri-Busnach de 7 millions de francs or).
Avril 1827 : Le consul Deval est envoyé à Alger qui donne satisfaction aux Bacri, en
oubliant la dette contractée envers le Dey : n’acceptant pas d’être berné, le Dey accuse
de collusion Deval, les Bacri, et le gouvernement français. Alors, le neveu de Deval
tente un coup de force contre les postes de la Calle et de Bône pour les fortifier, les
considérant comme français. Le Dey cherche à chasser les occupants et insulte le
consul avec son « coup d’éventail » ; le roi de France décide de rompre les relations
diplomatiques avec le dey.
16 juin 1827 : rupture est consommée = blocus d’Alger, Hussein fait détruire les
comptoirs de la Calle et de Bône.
-> Histoire de dettes impayées aboutit donc à une rupture diplomatique de portée
symbolique plus que réelle.

En août 1829, on cherche à camoufler l’impopularité du ministère Polignac : il


imagine un Empire arabe avec l’armée égyptienne de Mehmet Ali pour créer une
suprématie française sur la Méditerranée. Mais Ali exige une expédition strictement
musulmane…Ridiculisé par ce problème mineur, Polignac souhaite une victoire
extérieure permettant de garantir le prestige du régime.
Pour venger son honneur offensé, le 2 mars 1830, le roi annonce sa nouvelle
expédition. L’expédition d’Alger divise l’opinion et interroge les motifs de son
entreprise : preuve de la suprématie française sur Alger ? Anglophobie ? Moyen de
corruption et de violences ?
Un seul accord : l’expédition permettra de mettre fin à la piraterie et de redonner du
prestige aux armées françaises humiliées.

Une expédition impopulaire


Haussez, ministre de la Marine, réussit l’exploit de rassembler 675 bâtiments, dont 103
de la marine royale, et de relever des marins.
Le corps expéditionnaire, fort de 37 000 hommes est placé sous le commandement de
Bourmont (Louis Auguste Victor de Ghaisne de Bourmont), commandant très
contesté.
On joint une quarantaine d’interprètes, de peintres et d’écrivains destinés à populariser
les grands faits d’armes de la France et à relater l’entreprise coloniale.
Mai 1830 : Marseille grouille de soldats en attente du départ ; les officiers sont
insultés, certains soldats brisent leurs fusils, cherchent à se faire condamner à la
détention pour éviter le départ en Afrique.
Gouvernement fait silence sur les opérations militaires. Pour l’opinion, l’expédition est
une source de troubles : la mobilisation de l’armée exige des dépenses accrues,
ajoutant des incidents imprévisibles à la crise intérieure ; Malgré les articles
dithyrambiques de la propagande gouvernementale, les Français ne ressentent pas
l’enthousiasme guerrier et patriotique à l’œuvre.
Le pillage du trésor de Casbah (Juillet 1830) où est impliqué l’entourage de Bourmont
« officiers avec de beaux noms » suscite l’opposition de la classe dirigeante. La prise
s’empare dès lors du scandale ; les dessinateurs populaires réinventent la prise
d’Alger, se moquent d’un pouvoir haï…
La classe politique est toutefois unanime quant à la conservation d’Alger ; il s’agit de
prouver que ces efforts n’ont pas été vains, que la France va vers une victoire, et
qu’une indépendance est possible face à la suprématie britannique.

Un consensus pour conserver la conquête


Dès 1828, Marseille se montre favorable à la colonisation pour de nombreuses
raisons : elle tente de retrouver de sa suprématie méditerranéenne après les effets
Révolution / Empire, elle veut se venger du « coup d’éventail », lutter contre la
barbarie grâce à la « Croix contre le Croissant » (dimension humanitaire et religieuse),
combattre la piraterie algéroise, participer à l’enrichissement du pays, et se vante de
son attachement aux Bourbons et à la cour.
Marseille = « le fer de lance de l’idée coloniale en France », en développant sa
stratégie grâce à la chambre des commerces, l’appui des notables, l’accord du petit
peuple du port… La ville fait tout pour participer à l’entreprise coloniale en ayant
conscience que sa prospérité dépend de la domination africaine.

Un héritage encombrant
Louis-Philippe semble prêt à dévier l’évacuation du corps expéditionnaire car :
libéraux (l’ont porté au pouvoir) s’opposent à la tentative coloniale, Angleterre
s’oppose à une installation française au sud de la Méditerranée, insécurité aux
frontières de la France en raison des militaires envoyés pour l’expédition.
Mais le gouvernement français ne va pas évacuer Alger : on ne peut céder aux
injonctions anglaises (orgueil national).
12 Août 1830 : Général Clauzel remplace Bourmont ; le rapatriement d’une grande
partie des effectifs est prioritaire

Les différents « acteurs »


Les Maures :
• Des citadins d’Alger qui s’inquiètent de voir les Français s’incruster dans le pays et
prétendre tout régenter et administrer.
• Le Comité des Maures envoie des correspondants à Marseille et Paris pour plaider
la cause d’un Etat dont ils assumeraient le pouvoir avec l’assentiment des Français.
Se concentrent dans les salons bourgeois, soutenus par les libéraux partisans du
désengagement militaire mais désireux de maintenir une suzeraineté polit / éco en
Afrique.
Ex : Si Hamdou ben Othman Khodja, ou Ahmed Bouderba, qui s’installe à Paris en
décembre 1830 pour porter au gouvernement français les vœux d’Alger
(interlocuteurs).

Une administration franco-algérienne composée de l’aristocratie des officiers


« africains », et d’instituteurs / journalistes / publicistes provinciaux : ils regardent de
haut la plèbe d’origine française, ces « volontaires parisiens » que le gouvernement a
éloigné de la capitale.
Parmi les colons, un sentiment domine : celui de supériorité face au barbare
méprisable. Ce monde des colons revendique le droit à la reconnaisse nationale, si bien
que leurs clameurs étouffent les revendications des Maures. Un double langage naît
dans la politique française : l’un à l’usage interne (sous-entendus) l’autre à usage
externe (paré d’intentions humanitaires pour convaincre l’opinion)

1830 - 1833 : l’opinion française est intéressée par l’affaire d’Alger. Le débat repose
sur des rumeurs, des bribes de correspondances particulière ou des options
idéologiques… 3 positions politiques :
1. Anticolonialistes, soutenus par la voix du comte de Sade, souhaitant un retrait
du corps d’occupation et une souveraineté algérienne.
2. Colonialistes, soutenant Dupin et son occupation « définitive et perpétuelle »
3. Une majorité indécise

Mars 1932 : débat parlementaire crucial. Clauzel défit l’enrichissement permis par la
colonisation et est largement soutenu ; les décisions provisoires s’instituent comme
politiques. Les anticolonialistes évoluent vers la doctrine de l’occupation restreinte.
Printemps 1933 : duel oratoire Clauzel-Berthezène deux anciens commandants du
corps expéditionnaire ; un porte-parole du lobby algérien contre un anticolonialiste =
l’impact est tel que le roi s’émeut, le gouvernement est perplexe…

Le temps des commissions


Gouvernement demande à des commissions de trouver la solution à la question
coloniale ; du 2 septembre au 19 novembre 1933 enquêteurs interrogent sur place
témoins populations, militaires, l’administration militaire…
= des rapports permettant de tenir compte de la population indigène sans se laisser
séduire par « les illusions de l’assimilation ». Ce travail conclut à la conservation
définitive des « possessions de la côte septentrionale d’Afrique ».

L’acte de naissance d’une colonie sans nom


Ordonnance du 22 juillet 1834 : acte de naissance de l’Algérie coloniale, régit
l’administration / gestion des « possessions françaises dans le nord de l’Afrique ». Un
régime de décrets faisant du chef de l’Etat le législateur de la nouvelle possession ; les
institutions indignes s’effacent étant des « entraves à la domination française et
l’exécutif français se réserve de légiférer dans la colonie algérienne. »
Pour apaiser les inquiétudes des libéraux, Drouet d’Erlon est nommé gouverneur
général ; politique personnelle ≠ musclée
Avril 1835 : discussion parlementaire donne l’aval aux anticolonialistes pour préserver
l’économie budgétaire, les capacités guerrières et les investissements industriels de la
France. Doctrine de l’occupation restreinte devient la politique du gouvernement
français.

La monarchie de Juillet à la recherche d’une politique


Alors que l’Angleterre consent à l’occupation d’Alger contre la renonciation d’Anvers,
le principal obstacle diplomatique à l’aventure algérienne est levé.
La bourgeoise mercantile française cherche à élargir son espace économique et fait
pressions pour entrainer une politique de l’état traditionnel de la Régence d’Alger.
(Applaudit le départ du dey…)
Louis-Philippe tente de créer des Etats vassaux ; remplacer les deys turcs par des
princes maghrébins sur qui la France exercerait une véritable suzeraineté politique. Les
Maures supportent mal une occupation prédatrice qui s’empare des maisons / zaouias /
cimetières / mosquées et s’insurgent contre le viol des propriétés. Les tribus reposent
de même par une guérilla.
Aux portes de la Régence d’Alger, les princes maghrébins se montrent peu opposés à
l’occupation française que leurs peuples ; heureux de voir réduite la puissance du
puissant et dangereux voisin. Le comte de Mornay envoyé en mars 1832 auprès du
sultan du Maroc, obtient la garantie que celui-ci étendra son khalifat jusqu’à Mascara
en laissant les mains libres à la France à l’ouest.
Mathieu de Lesseps, diplomate en poste à Tunis, tient en respect les tribus algériennes
sous une suzeraineté française.

Un nouveau système de protectorat tunisien se négocie :


Souveraineté des princes tunisiens sur Constantine ; en contrepartie la France
s’accorde les droits de douane et de révocation en cas de mauvaise gestion. Le pouvoir
tunisien protège les négociants français et verse des sommes importantes au Trésor et
au général Clauzel. Ce projet est un échec, notamment en raison des exigences
financières de Clauzel.

Les Français cherchent des personnalités algériennes dévouées, prêtes à souscrire à


tous les engagements pour leur donner autorité et moyens militaires :
4. Prise de Bône, 28 mai 1832 par le capitaine Armandy et le jeune indigène
Yussuf. Domination de la ville par pillage / torture…
5. Ahmed Bey cherchera lui aussi à soumettre l’Est du territoire à la domination
française
Mais, un jeune marabout de 24 ans opposé aux pillages des Français, Abd el-Kader,
étend son autorité ; 26 février 1834, une convention est signée avec le général
Desmichels. Elle reconnait Abd el-Kader comme commandeur des Croyants, met fins
aux hostilités en libérant les Français, respecte la liberté de commerce. <Desmichels
promet de respecter les mœurs musulmanes.

Dès 1830, la commission d’enquête affirme qu’on a « besoin de la quantité » sur place
en Algérie. Les petits colons, sans moyens matériels, succombent aux maladies, se
regroupent près des « biscuitvilles » et des marchés (notamment pour les distributions
d’absinthe) : futur centre de colonisation.
Grande colonisation apparait après la révolution de Juillet ; les nobles, ces « colons en
gants jaunes », viennent largement créer de grands domaines avec des maisons
fortifiées de type féodal. Ex : le baron de Vialar, Max de Tonnac… Des porte-parole
de la colonisation, ils savent utiliser leurs relations politiques pour peser sur les
décisions gouvernementales.
Depuis le traité Desmichels, Abd el-Kader gagne du terrain ; armée cherche à arrêter
ces progrès et subit un échec humiliant dans le marais de la Macta, juin 1835, suivie du
désastre de la première expédition de Constantine (1836 - 1837) = foucades de Thiers,
exactions de Yussuf, impréparation et inadaptation miliaire de Clauzel au pays…
Afin de pacifier l’Ouest, le général Bugeaud, partisan de l’occupation restreinte achète
la paix à Abd el-Kader par de larges concessions ; le 20 mai 1937, le traité de Tafna
assure à la France l’occupation restreinte - outre les villes occupées du Sahel et de la
Mitidja, en laissant dans le vague la délimitation de l’Est (paix établie conte l’avis de
la Chambre et de l’opinion, par ce général décidé à ne suivre aucune directive).
Cette pacification de l’Ouest permet alors de préparer la revanche de Constantine ; une
division spéciale, au ministère de la Guerre, est créée le 28 décrier 1837. Il s’agit pour
le gouvernement d’effacer honte / échec.

En 7 ans seulement : le débat colonial est devenu composante de la politique, un


nouveau champ de réflexion de débats et d’investigation. Débouché pour les vins, le
savon et l’industrie, l’Afrique est une opportunité pour les commerçants marseillais là
où elle irrite les Bordelais. Pour le peuple parisien, et les paysans des campagnes elle
demeure un exécutoire à la misère et aux répressions policières.

Chapitre 14 : Le temps de la colonisation mercantiliste : 1837-1847

La place de la colonisation dans la France de Louis-Philippe


Si la voie méditerranéenne pourrait ouvrir sur Afrique / Orient, les aspirations
expansionnistes apparaissent peu : la France doit combler son retard économique vis-
à-vis de l’Angleterre et ne peut se permettre une « distraction coloniale » onéreuse.
Seule modification entrainée par la colonisation en politique est de donner au
Parlement le droit de voter les lois coloniales pour les vieilles colonies, et de poser (1
fois / an), le problème algérien à chaque discussion du budget.

Louis-Philippe veut affirmer les possessions françaises en Algérie : Henry John


Temple Palmerston (Secrétaire d’Etat des affaires étrangères UK) se rend compte que
l’opinion française n’acceptera jamais l’évacuation algérienne et accepte à « cette
seule condition que les territoires de Tunisie et du Maroc restent intacts. »

E. Bouet-Willaumez, commandant de la canonnière La Malouine, a pour mission


d’étendre les comptoirs du commerce de troc le long de la côte d’Afrique, au sud du
Sénégal, en 1838. Allant jusqu’à l’Equateur, il débarque le 9 février 1839 sur la rive
gauche de l’estuaire du Gabon et conclut un traité de commerce avec l’oga
Rapotchombo ; s’amorce la création d’un comptoir dominé par le fort Aumale dès
1842.

Outre l’Afrique, la France veut s’étendre sur le reste du monde pour protéger ses
négociants, son commerce, et n’hésite plus à irriter son allié britannique (cf.
expéditions à Mayotte, vers l’Extrême-Orient, l’Antarctique…) -> Doctrine
mercantiliste pacifique de François Guizot (ministre Affaires étrangères) appelée
« points d’appui » dans son discours de mars 1842, visant à assurer stations milliaires /
commerciales de part et d’autre sur le globe.

L’affaire Pritchard (royaume tahitien entre France / Royaume-Uni…) suscite une forte
tension franco-britannique ; elle révèle combien la suprématie anglaise est mal
acceptée, tout comme la mauvaise humeur populaire vis-à-vis du gouvernement.

Le système des prébendes


France = certain retard sur la possession du globe = ne fait pas de la colonisation une
priorité
Gouvernement laisse champ libre au ministère de la guerre pour diriger l’Algérie
pendant la monarchie de Juillet : maréchal Jean-de-Dieu Soult, à la tête de ce
ministère, devient le maitre absolu de la politique algérienne et crée une Direction de
l’Algérie prétendant ainsi régir toutes les questions militaires / civiles administratives
depuis Paris. Il accapare le pouvoir, se bat contre la centralisation des affaires à Alger
qui augmentait les pouvoirs du gouverneur (avec son ordonnance du 15 avril 1845, qui
sera critiquée par Tocqueville en 1847). Il intervient avec violence contre l’occupation
de Beni-Mered au moment où le ministère ordonne le transfert à l’autorité civile
(1842).
L’ordonnance du 22 juillet 1834, « l’acte de naissance de l’Algérie » a été conçue par
le maréchal Etienne-Maurice (ministre secrétaire d’Etat de la guerre) et par Soult.

Thomas Robert Bugeaud (sera gouverneur général de l’Algérie en 1840), lui, bénéficie
du soutien du parlement ; il sait aussi se servir de la presse qu’il sait flatter (publiera
dans Débats).
Il réussit à organiser un réseau de brillants officiers en Algérie : Trochu, Rivet,
Fourichon, Thiers en France… Guizot l’appréciera pour être le seul à avoir un
programme algérien.

Les ports français cherchent une nouvelle ouverture pour redonner vie et profit ; les
armateurs prétendent recréer de nouveaux établissements coloniaux. Balguerie impose
au ministère de la Marine et des Colonies une politique ambitieuse mais elle échoue à
Madagascar / Sénégal.

Direction des colonies / ministère de la Guerre, malgré des initiatives hardies, se


heurtent souvent au veto gouvernemental jusqu’en 1842.
Le roi, lui, « gouverne mais n’administre pas » (Tocqueville) et se présente plutôt
comme arbitre suprême de ces deux pôles ; n’ayant pu caser ses fils sur un trône
européen, il nourrit pour eux des ambitions algériennes.

L’Algérie, apanage de l’armée


Août 1839 : violation du traité de Tafna (organisation d’un régime théocratique et
centralisé) par le franchissement des « Portes de fer », par l’expédition du duc
d’Orléans ; déclenche une réaction violente d’Abd el-Kader qui proclame le Jihad et se
jette sur la Mitidja en ravageant les propriétés coloniales.
1839 : « Le pays occupé par les Français dans le nord de l’Afrique sera à l’avenir
désigné sous le nom d’Algérie. »
Mars 1840 : Arrivée du monstre marseillais Thiers au pouvoir ; se prononce pour une
victoire totale sur Abd el-Kader
L’opinion française défend une riposte guerrière efficace : ministre de la Guerre
expédie des renforts importants pour permette l’offensive du printemps 1840 qui
nettoie la plaine et reprend Médéa puis Miliana.
-> Dès lors, 1/3 de l’armée française occupe l’Algérie : 83 000 h en 1842
108 000 en 1846

1841-1847 : conquête totale de Bugeaud, avec 90 000 hommes ; dévastation et ruine


des régions, contrôle du blé des nomades permettant de tenir à merci les tribus du Sud
en les affamant.
Abd el-Kader se réfugie au Maroc, espérant riposter ; la flotte française commandée
par Joinville bombarde Tanger (6 août 1844) puis Mogador.
14 août 1844 : Bugeaud, contrevenant aux instructions gouvernementales, franchit la
frontière, bouscule l’armée marocaine et écrase l’armée chérifienne à Isly.
10 septembre 1844 : traité de Tanger élimine le danger Marocain en mettant
officiellement Abd el-Kader hors la loi dans l’étendue du Maroc / Algérie.
1845 : L’armée française doit supporter la violence de l’insurrection qui met le pays à
feu et à sang.

Le duc d’Aumale, successeur plus diplomatique de Bugeaud, obtient l’appui du sultan


du Maroc ; en décembre 1847, Abd el-Kader se rend, symbole de la résistance
algérienne (sera enfermé au château de Pau).
La conquête est presque achevée en 1847 ; il ne reste que quelques résistances dans les
massifs kabyles et dans le Sahara et le Sud algérien.

Armée d’Afrique = modèle de l’armée coloniale française.


Dès mars 1831, des éléments étrangers viennent s’agréger aux troupes française afin
d’enrichir les effectifs sans dégarnir les frontières métropolitaines : chasseurs
d’Afrique (1831), zouaves (1830), spahis et bataillons d’Afrique (1832).
Technique de l’armée du « père Bugeaud » est d’affamer les populations locales par la
technique de la terre brûlée et les razzias.
Bugeaud veut transformer ses soldats en colons ; ils préparent la création de route, les
défrichements et assèchements pour faire prospérer la colonisation. Se met en place un
« régime du sabre » où l’officier est roi grâce à l’autorité de sa discipline militaire ; les
civils sont maltraités / humiliés, font entendre leur voix en Algérie, en France aussi
grâce au journalisme.

« La passion endurée par l’armée d’Afrique a été trop dissimulée sous le manteau de la
gloire. » C.A Julien

Outre les archéologues ; anthropologues, et intellectuels qui traversent la


Méditerranée, l’Algérie représente aussi un tremplin pour accéder aux plus hautes
charges (‘ascenseur social…’) :
• Saint-Arnaud, engagé en 1836 à la légion étrangère, alors ruiné. En 1847 il devient
chef de brigade, et accompagne Bugeaud pour maintenir l’ordre à Paris en 1848. Il
tramera le complot de Louis Napoléon Bonaparte et deviendra ministre de la
Guerre (réussite du coup d’Etat du 2 décembre) avant de recevoir le bâton de
maréchal l’année suivante.

1846 : 100 000 hommes dans l’armée d’Afrique


1848 : armée d’Afrique devient aussi l’organe de la répression ouvrière

Le burnous et le pouvoir
Les Bureaux arabes : corps spécialisé pour l’administration des indigènes organisé par
l’armée, créé en 1844.
Bugeaud organise un corps spécialisé d’officiers (corps d’élite…) en Algérie : Une
Direction des affaires arabes à Alger, près du gouverneur, centralise tous les
renseignements et envoie ses directives à chaque division qui transmet aux Bureaux
arabes. L’officier des Bureaux arabes sert d’intermédiaire entre l’autorité militaire et la
population indigène (centralise les renseignements nécessaires à l’assiette des impôts
indigènes, aux alliances politiques, dangers de rébellion…)
-> Une organisation qui prétend mener les indigènes à la civilisation : Eugène Daumas
est l’initiateur de ce corps d’officiers, notamment grâce à son Exposé sur l’état actuel
de la société arabe (1844), un bréviaire à tous les officiers, rédigé par le Consul d’Abd
el-Kader de 1837 à 1838.
-> Créent une rivalité civils / militaires et deviendront bientôt le symbole d’un régime
dictatorial pour l’opposition républicaine

Pouvoir, exercé sur le peuple français, grâce à la propagande colonialiste : tableaux


officiels d’Horace Vernet font courir Paris pour reconnaitre les protagonistes des
grandes scènes militaires, images d’Epinal dépeignent la figure de l’officier qui sauve
les colons, Balzac et La Rabouilleuse…
-> Impressionnent la conscience collective française (héritage Occident chrétien, droit
de la civilisation, ordre face à l’anarchie)

Les comptoirs et les vieillies colonies, domaine de la Marine, des marins et des
armateurs
Objectif de la Marine vise à recréer l’outil de la domination des mers, redonner
autorité et richesse à la France sans froisser la « perfide Albion ».
1840 : crise et risques de guerre révèlent la fragilité de la défense maritime ; la
Chambre débloque 125 000 000 pour l’armement des navires. (D’où le discours de
Guizot en 1842 sur les points d’appui)

Outre les expansions et affrontements à Tahiti / en Indochine, les navigateurs français


jalonnent l’Afrique, du golfe de Guinée jusqu’à l’équateur. Déçus par des tentatives de
colonisation agricole de produits tropicaux au Sénégal, les navigateurs font des
reconnaissances à Saint-Louis, dans l’espoir de créer des comptoirs.
1833-1835 : conflit entre les Français, défenseurs du commerce saint-louisien et les
Trarzas encouragés par les Anglais (concurrence commerciale). Les marins français
bloquent le port et entreprennent une reddition momentanée des Trarzas en 1835.

Le sultan du Maroc soutient Abd el-Kader et lui donne asile.


Août 1844 : le prince de Joinville bombarde Tanger puis la ville de Mogador.
Sans rien exiger du Maroc, le roi fait négocier par les diplomates une paix douce avec
le Maroc (10 septembre 1844) ; cela rassure l’Angleterre mais ne répond ni aux vœux
de l’opinion française ni à ceux de la marine et de l’armée.

Le déclin et le renouveau des ports français


Si le circuit atlantique permet de préserver le grand commerce du XVIII jusqu’en
1840, la France et ses ports doivent trouver une ouverture nouvelle pour regagner en
dynamisme.
• Bordeaux : Premier port colonial français sous la Restauration, la ville est vite
touchée par la crise durant la Monarchie de Juillet ; les colonies subissent un fort
déclin, sucre de canne est dépassé par le sucre de betterave (1840), les épices ne se
vendent plus aussi bien… Dès 1831, Saint-Louis redevient un simple comptoir…
Vers 1834, les négociants bordelais sollicitent l’attribution d’une huilerie et, en
1847, le gouverneur affirme que « les arachides sauveront le pays » : l’arachide
(« pistache de terre ») utilisée par les paysans du pays comme appoint au mil, a
révélé aux colons sa riche teneur en huile.
• Marseille, « le grand port colonial » : si l’opulence de la ville cesse sous la
Révolution et l’Empire, la prise d’Alger provoque une explosion de joie (côtes
Africaines attirent Marseille depuis l’Antiquité) et les commerçants marseillais sont
les premiers à acquérir terres (plantations de coton, d’indigo, de canne à sucre…) et
immeubles pour installer elles succursales commerciales. C’est aussi la perte des
comptoirs de la Calle et de Bône en 1827 qui contribuent à pousser la ville à
l’action.
-> Armateurs marseillais mettent à disposition de la marine 357 navires de commerce
et 5 000 matelots.
-> Hommes politiques se chargent de convaincre la Chambre des députés de conquérir
et maintenir le territoire algérien
1846 : la ville cherche à sortir du carcan mercantiliste pour développer sa nouvelle
vocation avec sa campagne libre-échangiste qui trouve un écho avec la création d’une
« Association marseillaise du libre-échange »
1841 : Algérie est le 4ème pays où Marseille dirige ses exportations ; de l’Algérie, elle
importe bétail, laine, blé (pour pâtes et semoules)
Grâce au négociant Joubert, Marseille fait importer de l’huile d’arachide de Gorée,
Sénégal. En 1840, 500 kilos de la nouvelle graine arrivent à Marseille.
Le commerce colonial marseillais = 20 / 25 % du commerce colonial Fr
Elle devient une ville industrielle par les nécessités de son commerce et les richesses
accumulées ; dès 1830, elle développe son industrie métallurgique, ses productions de
savon, d’oléagineux, et ses raffineries de sucre (avec sucre des Antilles).
La ville s’enrichit : corps électoral censitaire 1 355 en 1833 à 3 000 en 1847 (200
francs de contribution…) et le monde ouvrier augmente, de 1 550 en 1830 à 4 200 en
1848 (en plus de la main d’œuvre étrangère alors recrutée). La ville s’étend hors de la
vieille ville, de la porte d’Aix à la place Castellane.
-> Est en passe de devenir 1er port du Royaume, et se classe 5ème au rang mondial.
• Le Havre : le « grand port des mers occidentales » (Martinique, Guadeloupe…)
Journal du Havre et le Courrier du Havre défendent les créoles et les colonisés plus
généralement. La presse havraise attaque avec vigueur les lois Mackau en 1845 pour
améliorer les conditions des esclaves / développer leur instruction religieuse. Elle
propose une tactique en suggérant de remplacer les lois Mackau par une compensation
financière de 200 000 000 francs en faveur des propriétaires lésés par l’émancipation ;
officiers financiers / budgétaires renvoient sine die les mesures. Selon certains, le
Havre est encore la vraie Bourse des produits coloniaux en France, même au XIX
siècle.

La marine s’adapte à une évolution de la traite


Disparition de la traite en raison de la crise éco des plantations des îles à sucre ; mais
forte relation de domination française subsiste. Au Gabon, les Mpongwe, habituels
fournisseurs de la traite, se mettent sous l’autorité de la marine française et le « roi »
Denys, dès 1832, signe un accord de protection avec la France. L’Angola est
désormais au premier rang des fournisseurs de « bois d’ébène ».
Mécanisation (due à l’industrialisation…) réclame des lubrifiants : aux huiles
méditerranéens sont substituées les oléagineux tropicaux. Sous pression des huiliers de
Bordeaux / Marseille, la Marine installe des points d’appui sur les côtes de Guinée, de
Côte d’Ivoire…
3 septembre 1843 : France édifie un comptoir en Guinée ; sur des terres cédées par
l’oga Dowé, la Marine construit un port qui enserre un blockhaus et prend le nom de
Fort-d ’Aumale. (Permet aux marins de surveiller la traite et de ravitailler la croisière
de la Guinée aux négociants en plus de créer un entrepôt général des produits français
pour les colonies)
On s’efforce de vanter les exploits des amiraux / explorateurs : mort de Jules Dumont
d’Urville, en 1842, décédé dans un accident de chemin de fer à Bellevue est célébrée
en France comme un deuil national.

Le renouveau missionnaire et l’expansion coloniale


Depuis 1815, la ferveur religieuse enflamme les esprits ; les évangélisateurs veulent
porter la vérité aux peuples jugés avilis par des rites barbares et des croyances
païennes en Afrique. Missionnaire français se juge investi d’un apostolat divin.
Anne-Marie Javouhey, fondatrice de la congrégation Saint Joseph de Cluny
(dynamisme des Frères des Ecoles chrétiennes de 1816) envoie ses religieuses vers
Bourbon / Sénégal / Antilles / Guyane
1843 : Mgr Forbin-Janson, évêque de Nancy, crée l’œuvre de la Sainte Enfance pour le
rachat des enfants esclaves.
-> Effort d’évangélisation, d’éducation, et d’assimilation linguistique pour garantir
l’ordre social.
28 septembre 1844 : l’Abbé Bessieux débarque au Fort du Gabon et commence son
apostolat en emmenant évangélisation / ouverture d’école / premiers essais agricoles
Gouvernement français a imposé au Saint-Siège une solution gallicane : l’Eglise
d’Algérie est un simple appendice de l’Eglise de France.
1839 : se crée la « Compagnie chrétienne pour la civilisation d’Afrique » soutenue par
l’apport financier des capitalistes marseillais (but missionnaire de faire triompher la
Croix sur le Croissant )
-> Missions coloniales qui dilatent le pouvoir spirituel et matériel de la « civilisation
française » en imposant un Christ blanc et l’imagerie sulpicienne

La naissance des idéologies de l’expansion : une croisade humanitaire vers l’abolition


de l’esclavage
Génération de la révolution de 1830 demande au régime de mener le combat anti-
esclavagiste que l’Angleterre mène depuis fin du XVIII.
La question de l’abolition est d’autant plus sensible que l’Angleterre, en 1834,
supprime l’esclavage dans ses colonies. En France / colonies françaises : mutilation et
marque pour les escales récalcitrants (30 avril 1833), recensement obligatoire des
esclaves (4 août 1833) …
L’opinion libérale en France est unanime à réclamer l’abolition de l’esclavage.
Par suite de la réunion abolitionniste anglaise (1840), la pression publique oblige le
nouveau gouvernement de Thiers à déclarer vouloir « rendre effective l’abolition de
l’esclavage. »
1841 : roi réunit une commission extraparlementaire (parlementaires + hauts
fonctionnaires) ; le gouvernement décide une abolition lente et progressive plutôt
qu’une abolition totale et simultanée.
18 juin 1845 : loi libérale reconnait à l’esclave son premier droit — celui de posséder.
(Nb : il faudra attendre le décret de Victor Schœlcher qui décide l'abolition de
l'esclavage en France et dans ses colonies, le 27 avril 1848.)
Graves problèmes liés à l’abolition : main-d’œuvre sur les plantations risque de
disparaître, de même que certaines propriétés colo… Négociants qui s’enrichissent du
trafic d’esclaves qui peut rapporter de 100% à 300% depuis l’interdiction de la traite,
ne peuvent admettre la suppression du marché.
Opinion publique française très sensible à la question coloniale ; réagit
sentimentalement et pleure à la lecture de la dénonciation de l’esclavage qui pervertit
l’homme européen dans le Bug Jargal, premier roman de Victor Hugo. (1826 )
Journal du Havre a d’autant plus d’audience que, organe orléaniste, il appuie
l’opposition libéral qui soutient que le roi règne et ne gouverne pas : critique de
l’extension de l’idée coloniale sans remettre en cause le principe même de la
colonisation.
1847 : Victor Schoelcher crée dans chaque département des comités abolitionnistes et
rédige le 30 août de cette même année une pétition contre l’esclavage.

Les idéologues et la colonisation


• Les Saint-simoniens : défendent un système qui unirait l’Orient /l’Occident, le
passé / futur, tradition / modernité… Ils s’établissent à demeure en Algérie et
spécialisent leurs activités (= recherches minières ; docteur Vital = médical…) De
petits propriétaires européens mettent en valeur les terres. Ils diffusent les théories
coloniales avec la création de leur journal l’Algérie (1843) par Enfantin, visant à
civiliser les indigènes et à faire entrer ce pays neuf dans le circuit éco en créant
routes / libre-échange / chemin de fer / facilité de crédit… Les lieutenants généraux
de Lamoricière et Bedeau (tête) présentent leur projet de « colonisation pour les
provinces d’Oran et de Constantine ».
• Les autres socialistes « utopiques » : des fouriéristes qui, plus que les St-simoniens,
veulent moderniser les colonies par l’association capital / travail et la mise en
commun des moyens de production et des bénéfices pour assurer aux travailleurs
retraite, soins médicaux, instruction et éducation des enfants… Ils tenteront à leur
tour une expérience coloniale en créant, en 1845, « l’Entreprise phalanstérie<nne
de Saint-Denis-du-Sig. » (Refusent le schéma mercantiliste) <
<<
La naissance de la « geste » coloniale
• Les thèmes littéraires : dans la dynamique de Paul et Virginie, les romanciers
rêvent d’exotisme, de paysages vierges… Se développe une veine littéraire qui
cherche à échapper à l’étroitesse de la vie bourgeoise et provinciale : entre
supériorité de la civilisation et fascination, entre critique des excès coloniaux et
appelle à l’évangélisation fleurissent nombre d’œuvres. (Cf. La Rabouilleuse, Les
Mystères de Paris d’Eugène Sue, Algérie et Grand désert…)
• Les apports artistiques : le peintre Eugène Fromentin dira de l’art oriental qu’il est
« inconnu et nouveau » en raison de son apparente disharmonie, de ses excès et de
son inexpressivité qui fascine. Outre les toiles d’Horace Vernet à valeur
documentaire, les lithographies de Raffet, les images d’Épinal amènent jusque dans
les chaumières des images colorées de ce continent qui fait rêver ; mais en aucun
cas l’Algérie n’évoque la colonisation et la présence française qui, au contraire,
irrite.

Les problèmes nouveaux posés par la colonisation


Trois grands points d’interrogation liés à la colonisation marquent la pensée politique :
peuplement, rentabilité et la place dans le système Fr
Le peuplement des colonies
Après 1845, si l’esclavage est en phase de disparition, il reste 6000 captifs à Saint-
Louis, au Sénégal (domestiques, artisans, ouvriers, matelots). Ils font cause commune
avec les laptots (soldats noirs) pour assurer la sécurité des comptoirs. Sénégal =
comptoir actif
En Algérie, les résistances / volonté d’indépendance posent le problème du
peuplement : Bodichon présentent des thèses exterminatrices là où certains préfèrent
une union Français / femmes indigènes (nb : faible flux migratoire français - civils -
vers l’Algérie).
1846 : 195 000 arrivées de Français aux ports Algériens pour 118 000 retour cette
même année… (méconnaissance des cultures adaptées au pays, insuffisance de
capitaux, maladie et insécurité…)
1846 : misère grandit en France / disette épuise les ressources alimentaires ; pouvoirs
publics incapables de nourrir les campagnes.
1847 : 47 000 Français en Algérie.

La mise en valeur des possessions coloniales


Premiers colons, venus à la suite de l’armée, s’adressent aux Maures qui offrent pour
des sommes modiques des propriétés qui ne leur appartiennent pas, au besoin en
fabriquant de faux titres. Très vite, la place d’Alger devient « un véritable tripot ouvert
à tous les chevaliers d’industrie » ; même les habous, biens religieux inaliénables sont
livrés à l’encan par le biais des rentes à ana.
Dès 1834, « Blida est vendue à des milliers de colons avant d’avoir été conquise et
occupée par nous » écrit la femme d’un officier supérieur.
Clauzel crée une société, la « Ferme expérimentale d’Afrique », qui exploite mille
hectares aux portes d’Alger moyennant un franc de location par hectare.
1841 : par un arrêté de cette année le gouverneur s’arroge le droit d’exproprier et
d’octroyer des concessions à des particuliers avec interdiction d’aliéner les propriétés
et obligation de mettre en culture.
(Village de pêcheur à Sidi-Ferruch concédé à un armateur de Lorient ; villages naissent
entre 1842 et 1844 en « bordure de l’Atlas » et on fait des tentatives aux abords d’Oran
et Philippeville.)
Les colons s’engagent dans discussions sans fin pour obtenir des apports financiers —
surtout chez les saint-simoniens… (Bedeau, Bugeaud). Bugeaud défend d’ailleurs une
colonisation militaire, marquée par l’autorité, qu’il explique dans sa brochure De
l’Algérie (1842) ; il n’obtiendra pas l’approbation des chambres pour son projet.
1841 - 1846 : importations de produits français ont plus que triplé et ont enrichi
producteurs / négociants français.
1847 : Crise économique et disette ont fait apprécier les blés algériens pour la
semoulerie et les pâtes alimentaires
-> Algérie échappe au régime de « l’Exclusif » comme les vieilles colo
-> Ordonnance du 11 novembre 1835 ; établit monopole commercial France / Algérie
et produits algériens sont au tarif général à leur entrée en France

La colonisation dans le système français : un problème de gouvernement


Très vite, les comptoirs africains sont rattachés au Sénégal.
Ordonnance de 1834 ; Algérie = prolongement de la métropole. Le gouverneur
dépendant du seul ministre de la Guerre est le maître tout-puissant de l’armée
administration, assisté d’un conseil purement consultatif. Administrations sont
organisées par de simples arrêts ministériels, et le rôle omnipotent du gouverneur sera
accentué avec le proconsulat de Bugeaud. (Cf. Critiques de Tocqueville…)
Ordonnance du 15 avril 1845 : laisse au roi le droit de légiférer, en plaçant le
gouverneur sous la coupe du ministre de la Guerre et la surveillance d’un Conseil
supérieur.

Problème théorique des rapports de la métropole et des colonies


• L’assimilation : Assimiler, pour le gouvernement = soumettre le colonisé
Assimiler pour le colon = obtenir des privilèges exclusifs de citoyens fr
Assimiler pour l’opinion métropolitaine = offrir la civilisation avec tous ses avantages
aux indigènes -> Triple Langage / ambiguïté, « triple abîme » selon Victor Hugo
Assimilation est législative, en faisant de l’Algérie une terre française par ses
institutions, en supprimant les anomalies du régime militaire en faveur d’un régime
civil, mais aussi linguistique —langue étant un outil de domination. -> langue
française devient obligatoire dans tous les actes de la vie administrative et courante (+
arrivée de l’école française). Toutefois, en Algérie, l’arabisation est très ancienne : Si
les officiers des Bureaux arabes se plient à l’apprentissage de l’arabe, les colons des
villes le refusent et prônent la transcription de l’arabe en caractères latins.
Victor Hugo soutient une colonisation permettant d’« apporter l’Europe » et son
progrès, L. Veuillot défend la conversion religieuse.

Le grand débat
Colonistes et anticolonistes = deux camps irréductibles
1. Valeur humanitaire et « progrès colonial » : défendus par Cavaignac dans La
Revue indépendante, là où le fils de Ney (Michel Ney) s’indigne à la Chambre
des pairs en affirmant que c’est un « meurtre consommé avec préméditation sur
un ennemi sans défense. » (1847)
2. Intérêt politique : affirmer la puissance française au-delà de l’Hexagone par la
domination des routes terrestres et maritimes.
3. Intérêt économique : cf. Travaux de J-B Say et d’A. Blanqui dans l’Histoire du
commerce soutenant que la colonisation ruine la métropole.
-> En 1843, le système des points d’appui de Guizot se présentera alors comme la
première doctrine coloniale officielle.
4) Rêve d’exotisme dans l’opinion publique cf. Productions artistiques, journaux
susmentionnés…

Chapitre 15 : La France coloniale à la recherche de l’efficience


La II République et le nouvel élan colonial
Malgré sa courte existence, la II République impose au pays étonné une doctrine
coloniale nationale et humanitaire. Avec le gonflement soudain de l’opinion publique
permis par la suffrage universel, les Français croient alors en leur mission civilisatrice
et coloniale (« messe républicaine » …) FF

L’abolition de l’esclavage, conquête de la liberté individuelle


4 mars 1848 : établissement du suffrage universel
27 avril 1848 : décret d’abolition de l’esclavage. C’est Victor Schoelcher (journaliste
au National) qui élabore le décret qui libère tous les esclaves, accorde une amnistie à
ceux qui étaient condamnés pour des peines légères, et donne un délai de trois ans aux
propriétaires d’esclaves pour se conformer au décret.
-> Libère 262 564 esclaves (bien que l’opinion croit au demi-million).
L’abolition entraine des pertes de bénéfices en Martinique, Guyane, Réunion… —
D’où les indemnisations des banques coloniales qui versent les indemnités en bons du
Trésor, à 5 %.
Mais au Sénégal, les traites continuent et «   la condition de captifs domestiques à
Saint-Louis est préférable à celle des journaliers agricoles européens » selon un
rapport du gouverneur. Mais, la riche caste des métis ne cache pas son
mécontentement ; elle est amputée de son patrimoine et contrainte de modérer ses
fastes.
L’assimilation, garantie de libertés politiques
4 novembre 1848 : la II République opte pour une politique d’assimilation garantissant
les libertés outre-mer (et supprimer le « régime du sabre » …).
Les colons reçoivent les droits de citoyens français. 17 avril 1848 ; gouvernement
provisoire rétablit les députés coloniaux : une cohorte coloniale de 13 députés peut
ainsi défendre certaines revendications.
St-Louis et Gorée envoient à Paris le représentant de la collectivité Métis, Valantin,
riche notable bientôt maire de Saint-Louis.
Assimilation législative supprime le régime des ordonnances et les colonies doivent se
soumettre au régime de la loi ou des décrets.
4 août 1851 : assemblée parlementaire vote la naissance de la Banque d’Algérie,
banque de dépôt et d’émission. Contraire au principe d’assimilation, cette création
encourage les colons dans la voie de l’autonomie.
1851 : loi douanière assouplit les relations de la métropole avec sa colonie et permet
d’entrer en franchise les produits d’équipement, mais les produits étrangers restent
grevés de droits élevés ; une assimilation douanière qui permet immédiatement un
essor du commerce algérien.

La colonisation algérienne et l’exportation de la crise


L’Algérie permet à la République d’évacuer ses problèmes : le trop-plein de la
population active française y est envoyé, en transformant les prolétaires misérables des
faubourgs de la métropole en propriétaires de concessions de terres, en débarrassant les
bagnes français (supprimés en 1848, par suite de l’afflux de prisonniers en juin).
La crise industrielle met sur le pavé une masse d’ouvriers, la population « croît chaque
cinq ans de plus d’un million ».
-> Alors l’arrêté du 19 septembre 1848 prévoit 5 millions de francs, dès 1848, pour
installer 12 000 colons sur des concessions de terre.
Le gouverneur Charon, polytechnicien, répartit les 42 colonies agricoles sur les
départements d’Oran, d’Alger et à l’Est de l’Algérie.
1848 : se crée la Commission de colonisation. Les centres prospèrent rapidement : les
colons agricoles ont fixé en Algérie 10 000 habitants, défriché 10 000 hectares,
construit plus de 7 000 maisons.
L’insurrection attendue n’a pas lieu et pendant 18 mois la colonisation semble prendre
le pas sur les opérations militaires : juillet 1849, une oasis des Zibans, Zaatcha
(Algérie), se révolte contre un impôt injuste ; un marabout prend la tête de l’agitation.
Coup de main français échoue et la révolte s’étend. Dès octobre, et pendant 2 mois, 4
000 hommes font le siège de l’oasis et l’assaut final, très meurtrier, entraine un terrible
massacre (3 000 morts, équitablement répartis) : l’oasis est rasée, les palmiers coupés.
Saint-Arnaud, général de division, entreprend des expéditions militaires
exceptionnelles : février 1851, dans son expédition de Djijelli il soumet en un mois les
tribus de la région de Mila, débloque Djijelli.
La conquête coloniale, marchepied du pouvoir politique, devient le tremplin d’un coup
d’Etat qui enterre la II République.

L’ère des indécisions : la conjecture nouvelle


Par suite du coup d’Etat de février 1848, le pays révise son échelle des valeurs et
donne une place secondaire au problème colonial (Révolution industrielle est au cœur
des préoccupations).
Louis-Napoléon Bonaparte ne voit dans l’Algérie qu’une utilité : utilité d’un camp
militaire permanent, utilité dynastique pour attacher l’armée / nouveau régime, utilité
familiale pour établir son cousin Jérôme.
Le régime nouveau que la constitution de 1852 met en place donne une autorité quasi
dictatoriale à l’Empereur : il décide d’envoyer les opposants dans les bagnes d’Alger
(1851, 1852, 1858…), le régime des décrets régit la politique coloniale et laisse à
l’Empereur toute la liberté de l’exécutif et du législatif, le Sénat règle par sénatus-
consulte la constitution des colonies d’Algérie, et la représentation des territoires
d’outre-mer est supprimée par le décret organique du 2 février 1852.
Aussi le Second Empire fait-il naître un capitalisme jeune, dépendant du rôle dirigeant
des industriels (modernisation de la sidérurgie, des industries de fer et d’acier, passant
de 588 000 tonnes à 1 014 000 tonnes entre 1856 et 1859).
Inflation : brusque apport d’or de Californie et d’Australie provoque une hausse du
coût de la vie qui n’entraine qu’avec retard les salaires nominaux, alors que les salaires
réels continuent à baisser. Problème du paupérisme demeure non résolu.

Des solutions partielles et des essais inégaux


Algérie, aux données complexes, oblige l’Empereur à des réajustements administratifs,
le Sénégal, œuvre d’un bâtisseur d’empire s’affirme comme une belle réussite ;
l’Extrême-Orient s’ouvre et le projet de grand canal égyptien s’affirme.

L’Algérie, colonie de peuplement et d’exploitation


• L’alliance de l’armée et des colons : Au gouvernement militaire de 1852 à 1856,
Randon expérimente l’alliance armée / colons. Il accroît les effectifs militaires, et
utilise les effectifs indigènes enrôlés dans les smalas. La chasse au chérif
d’Ouargla, défenseur de l’inviolabilité des sanctuaires sahariens, entraine une vaste
opération qui marque la pénétration française dans le désert ; prise meurtrière de
Laghouat, soumission du M’Zab, domination du Souf et de Touggourt, acte
d’allégeance du chef des Ouleds Sidi Cheikh ( 1852 - 1853 ). Randon prend à cœur
de se concilier les colons dont la population croît de 1851 à 1857 de 131 000 à 189
000 personnes ; 200 villages, 200 000 hectares concédés, une population rurale
triplée, tel est le bilan de l’établissement des colons à la fin du « governorat » de
Random ( il dégage les propriétés indigènes en faveur des colons pour y parvenir ).
Il met au point le « cantonnement des tribus », consistant à prendre aux Arabes des
terres qui excèdent leurs forces de production, devenant ainsi des propriétés de
l’Etat.
8 avril 1857 : décret par lequel Randon prépare un plan du réseau de chemins de fer
algérien.
1851 : est votée une loi qui accorde la franchise à presque tous les produits algériens ;
en un an les exportations doublent.
Officiers français sont investis de grands pouvoirs : Doineau, (cf. l’Affaire Doineau)
en 1857, investi de pouvoirs immenses est accusé d’avoir attaqué la diligence de
Tlemcen d’Oran et d’avoir assassiné le Khalifa de Tlemcen, son interprète, et un
négociant français dans la diligence = incarne l’exercice de la violence coloniale, du
« régime du sabre ». La cour d’assise d’Oran condamne à mort l’officier et l’opinion
publique français réagit sentimentalement et condamne ce genre d’acte.
• Une expérience coloniale assimilatrice : un pouvoir civil.
1858 : Création du ministère de l’Algérie et des Colonies permettra d’élaborer une
politique cohérente des territoires sous domination française. Désir d’assimilation,
surtout politique : « En face de Marseille nous avons un vaste royaume à assimiler à la
France », Napoléon III, 19 octobre 1852 lors de son discours de Bordeaux.
Les libéraux et démocrates revendiquent les libertés individuelles consacrées par la
Révolution (constitution de la propriété privée et indépendance des efforts individuels
vis-à-vis de l’Etat.) Ils brandissent pour slogans la liberté politique, la liberté
économique, et l’assimilation.
24 Juin 1858 : ministère de l’Algérie et des colonies attribué à Napoléon-Jérôme. Le
prince Jérôme veut doter les colonies d’un régime civil fortement centralisé à Paris
dans un ministère nouveau qui regroupe sans tarder les services spécialisés du
ministère de la Guerre, de la Marine, et permette d’écarter les personnalités gênantes
telles le général Dumas, trop représentatif du régime militaire = cherche à coordonner
une administration coloniale multiforme.
Préfets et commandants des territoires militaires coexistent, mais l’unité administrative
est réalisée par la création d’un Conseil général commun chargé de l’établissement
d’un budget unique aux deux territoires. Les libéraux ont gagné la partie :
l’administration militaire dépend directement du ministre, elle a perdu sa liberté
d’action.
Prince cherche l’alliance des colons et indigènes : réforme judiciaire se calque sur
l’organisation française et cherche à atténuer le régime judiciaire d’exception auquel se
sont soumis les indigènes (ôte aux officiers les pouvoirs discrétionnaires exorbitants).
Les indigènes sont libres de quitter leur tribu pour aller travailler sur les terres des
colons. Les réformes libérales rencontrent l’hostilité des colons qui menacent de ne
pas s’y soumettre.
24 mars 1859 : décret impérial porte Chasseloup-Laubat au poste de ministre de
l’Algérie et des Colonies dans le but de mettre fin aux tensions internes et de garantir
une assimilation du territoire algérien.
Il appliquera le traité de libre-échange de 1860 enterrant la politique de l’« Exclusif ».
Il introduit les lois françaises en Algérie, calque les administrations naissantes telles
que les postes et la justice, sur le modèle français (ouvre les tribunaux français aux
indigènes, et fait étroitement surveiller la justice musulmane par des magistrats
français).
17 septembre 1860 : Napoléon III débarque en Algérie pour régler les contradictions
éternelles dans le gouvernement du territoire algérien. Il reçoit le bey de Tunis et le
frère du sultan du Maroc, tout en découvrant les violentes tensions entre préfets et
généraux. Il écoute les doléances des uns et des autres (fonctionnaires civils,
populations locales…) et promet la civilisation pour les Arabes, l’assimilation pour les
colons. Il prend conscience de la grandeur des territoires : « Notre possession
d’Afrique n’est pas une colonie ordinaire, mais un royaume arabe. » ; et cherche à
allier tradition / modernité, et à intégrer les colonies à une nouvelle stratégie française.
Le Sénégal, des comptoirs de traite à la colonie
Le « malaise sénégalais » est né pendant la II République : c’est une crise
commerciale. De 14 millions de francs, le commerce s’effondre à 7 millions de 1847 à
1849. Il n’est pas question d’abandon colonial toutefois : une commission d’enquête
parlementaire opte pour le maintien des comptoirs existants avec un renforcement des
moyens matériels pour assurer la sécurité et le rétablissement de la liberté
commerciale.
II République nomme le capitaine de vaisseau Protet comme gouverneur du Sénégal.
En 1852, il s’efforce de débloquer les possessions françaises vers le sud où les tribus
toucouleurs entretiennent une insécurité permanente. Il contient les toucouleurs en
implantant un détachement au fort de Podor et en leur infligeant une défaite difficile à
Dialmath, ville sainte, le 6 mai 1854.
Les commerçants bordelais poussent au développent de l’arachide dans les comptoirs
français et dans toutes les zones d’une future expansion coloniale : ils misent sur le
Sénégal pour y implanter une nouvelle Algérie qui fera la richesse du port de
Bordeaux. Hubert Prom, de la société Maurel et Prom, préside le conseil général de
Saint-Louis ; François Héricé devient maire en 1856 ; le « clan des Bordelais » fait la
loi et multiplie les établissements coloniaux.
• Faidherbe, l’allié des Bordelais : il fait sien le programme des Bordelais avec l’idée
de conquête pour impératif, afin de contrôler le commerce avec une économie de
moyens et d’hommes.
Il débarque à Gorée en 1852 et étant un polytechnicien, fasciné par l’exploration,
négrophile en Guadeloupe, il quadrille les pays. Grâce à lui, bientôt le ministre et le
grand public français disposent de renseignements précis, de rapports, de croquis
d’itinéraires, de cartes imprimées, de collections d’échantillons minéraux et végétaux.
29 septembre 1855 : négocie la vente de Médine, par le roi du Khasso, Sambala, pour
stopper l’avance d’El-Hadj Omar sur le haut Sénégal (apparaît comme une croisade de
la civilisation française contre la violence conquérante de l’Islam).
-> établit un équilibre favorable à l’extension des échanges
• Les guerres pour l’honneur du drapeau :
Faidherbe mène des conflits contre les Maures, pilleurs / prédateurs.
1857 : organise les tirailleurs sénégalais, faisait ainsi naître l’armée d’Afrique ;
promotion de l’indigène, fait croire à l’assimilation, allège les budgets métropolitains
et donne bonne conscience aux Français.
1855 : Création de l’école des otages à Saint-Louis pour préparer l’élite à son rôle de
courroie de transmission entre les ordres coloniaux et la masse en les formant à une
assimilation des « fils de chefs ».
Faidherbe sait entrainer les indigènes contre leurs prédateurs habituels que sont les
Maures et prône les terres brûlées, les exécutions sommaires, le chantage aux otages
pour une « pacification ».
1 janvier 1856 : prise du Walo (ruine des Maures), par la terre brûlée, permet de faire
des habitants du Walo des sujets de l’Empereur.
Le Sénégal français s’accroît d’environ 10 000 km carrés jusqu’en 1856 et sort du
ghetto des îles infertiles pour s’étendre vers la terre ferme.
Avril-juillet 1857 : délivrance de Médine, fort acquis pour la France en 1855 par achat
du roi Khasso, légitime la campagne de Faidherbe qui brise l’élan mystique du cheikh
Tidjane. Le traité de Médine (août 1860 ) signé par El-Hadj Omar apparaît alors
comme une victoire incontestable qui marque le reflux du cheikh, son acceptation de la
domination française sur le Sénégal et affirme la liberté de commerce dans cette région
( domination de la voie royale des Blancs).
• L’or du Bambouk, le rêve d’un Eldorado
Faidherbe fait miroiter l’idée d’un Eldorado à portée de la main. En réalité, l’or du
Bambouk n’amène que des désillusions et, en 1860, l’affaire du Kéniéba — commune
supposée riche en or — est liquidée en catimini, même si les Français restent maîtres
du fleuve.
• Vers le monopole mercantile
Domination du pays arachidien n’est jamais perdue de vue et l’annexion du Walo
prépare l’investissement du Cayor.
Faidherbe s’efforce d’étendre la « tâche d’huile » de la domination française.
-> Fin 1859 : les postes de Joal, Rufisque, Kaolack, et Portendal tiennent solidement
les débouchés maritimes des routes de l’arachide. L’investissement du royaume oualof
du Kayor, le grenier arachidien de la colonie, principal obstacle à l’unification de la
colonie, peut commencer après un encerclement mené en 1856 ; mais nombreux sont
les indigènes qui refusent annexion et protectorat. Une démonstration militaire a raison
des résistances : un Damel, dévoué à la cause française, élimine le chef rétif. Les
négociants bordelais ont gagné la partie et dominent le commerce du Sénégal.
De 1859 à 1860, le commerce a chuté de 30 % (échec de Kéniéba, gouffre financier de
l’affaire du Kayor…) : dès lors les bordelais ne supportent plus la politique de prestige
de Faidherbe qui rêve constamment d’expansion.

L’Extrême-Orient des missions et des marins


Marine est, depuis 1830, objets de soins et investissements. Elle a su effacer ses échecs
passés et joue désormais un rôle de prestige et d’appui militaire incontestable.
• L’évolution de la Marine française :
Sous le II Empire, la Marine traverse avec succès une phase de mutation décisive : par
suite des études du ministre de la Marine, l’amiral Hamelin, les nouvelles techniques
modifient le transport (hélice remplace l’aube encombrante) et la puissance de feu
(chargement du canon par la culasse).
23 novembre 1857 = Empereur approuve un programme financier exceptionnel avec
225 000 000 de francs débloqués pour la Marine.
Ecoles de mécaniciens naissent à Brest / Toulon… -> Marine se modernise et prétend
rivaliser avec la flotte anglaise.
Il y a d’ailleurs un fort intérêt artistique pour le succès de cette Marine : cf. La Vague
de Courbet (1869-1870), les peintures de Jean-Paul Laurens pour le musée de
Marseille ainsi que les lithographies et les images d’Epinal.
• La stratégie des marins : la Marine française apparaît comme la protectrice des
missions catholiques dans le monde. Les appels au secours des missionnaires
trouvent d’ailleurs une oreille favorable à des forces prêtes à acquérir, avec la
gloire, des intérêts nationaux substantiels. La Marine française présente également
la grande ambition de vouloir affirmer sa présence sur tous les océans et mers et
donc baliser les grandes routes maritimes — d’où la politique de prestige de
Napoléon III et ses investissements.
• Le balisage des routes maritimes : grande ouverture maritime entraine de nombreux
conflits dans les conquêtes (cf. Seconde guerre de l’Opium 1856 - 1860, tensions
entre Empires coloniaux en Inde, en Indochine, et tensions religieuses au Liban).
1859 : la France, pour dix mille talari (50 000 francs ) obtient la cession de la rive
nord de la baie de Tadjourah ( Djibouti ) face à la colonie anglaise d’Aden
La France garde cette ambition napoléonienne de faire de la méditerranée un « lac
français », et cherche à étendre son influence jusqu’en Turquie, ce qui sera un échec en
1856 lorsque le pays biaisera le traité de Paris pour retirer à la France la protection des
catholiques.
Si elle ne s’étend pas sur toutes les mers, la Marine sous le Second-Empire semble
avoir gagné son pari : elle a su pénétrer dans le champ de la conscience nationale et
imposer son image d’explorateur aussi protecteur de la chrétienté et, au besoin,
colonisateur des « points d’appui » chers à Guizot.
• Du rêve saint-simonien à la réalisation de Lesseps : le canal de Suez
S’il relève d’une ambition de relier la Méditerranée à la mer Rouge, Lepère et une
équipe de techniciens doivent se confronter à la réalité : l’inégalité du niveau des deux
mers est un obstacle.
1846 : une équipe saint-simonienne forme une Société d’études pour le canal de Suez,
mais la crise financière élimine leur entreprise.
• Des volontés pour un canal
Ferdinand de Lesseps ( diplomate et entrepreneur de renom ), capable, par ses relations
fiables de traiter au plus haut niveau diplomatique et financier trouve en Napoléon III
un allié pour son projet.
4 janvier 1855 : séduit par les travaux de Lesseps sur le canal de Nicaragua ( 1884-
1885 ), Napoléon III fixe à Ferdinand de Lesseps la démarche à suivre : la Société
d’études doit se transformer en Compagnie universelle afin de conjuguer l’effort des
hommes d’Etat, négociateurs, des capitaines d’entreprises, exécutants, et des financiers
chargés de drainer les capitaux.
1858 : use de son influence pour inciter le vice-roi d’Egypte à acheter les actions du
canal, que les puissances ont dédaignées.
Octobre 1859 : intervention personnelle de Napoléon III lève les interdictions
anglaises, turques et égyptiennes pour commencer les travaux.
Aussi Lesseps sait-il jouer de son atout principal : lors de sa disgrâce à Alexandrie,
Saïd, dernier fils préféré de Méhémet-Ali a lié une réelle amitié avec de Lesseps faite
de confiance réciproque ; Lesseps peut convertir le khédive à son projet de canal qui
permettra de donner à l’Egypte une dimension mondiale. L’affaire doit « conserver
son caractère d’initiative égyptienne en dehors des complications de la diplomatie
européenne » écrit Lesseps en total accord avec le khédive.
Février 1855 : Lesseps établit son projet de compagnie universelle du canal de Suez
avec un conseil d’administration qui inclut l’ancien comité d’études saint-simonien —
il sera signé le 19 mai par Saïd.
• La campagne canaliste
Lesseps assume son projet avec une détermination remarquable : il s’adresse à
l’opinion publique anglaise en voyageant à Londres de 1855 à 1859 ( gouvernement
britannique investira deux cent millions de francs pour le projet ), et s’entoure de
techniciens de haute qualité : polytechniciens, ingénieurs des Ponts et Chaussées,
ingénieurs ou officiers de la Marine impériale. Son journal l’Isthme de Suez propage
les nouvelles et passe sous silence les incidents fâcheux. Il mène sa campagne avec la
presse et affirme en 1871 que « la grandeur de l’oeuvre a séduit le journalisme. » Son
initiative porte les plus hautes autorités spirituelles ; Lesseps prétend étendre
l’influence de l’Eglise par cette nouvelle voie de communication ; «  l’empire du
christianisme ne s’en étendra que mieux » écrit-il à Pie IX en avril 1857.
Toutefois, son projet se heurte au scepticisme d’ingénieurs et de financiers. Le Times
s’opposera largement à ce projet, un « vol manifeste » pour un « canal impossible ».
Travaux commencent en 1863 ( mort de Saïd…) et le canal sera inauguré le 17
novembre 1869.

La colonisation sur la place publique


Conjecture nouvelle et percée du thème colonial
L’affaire Doineau (1857) dissout l’opinion et entraîne une prise de conscience des
tensions coloniales ; l’armée traumatisée par la condamnation à mort d’un officier
ressent la flétrissure qui atteint les Bureaux arabes — corps d’élite de l’armée
d’Afrique — et se juge victime d’une cabale. L’Algérie s’indigne de la collusion de
l’armée avec certains chefs là où en France on reproche aux Bureaux arabes d’avoir
abusé de l’autorité de vainqueur pour écraser le peuple vaincu.
A cette époque, excepté une fraction catholique intransigeante, la majorité de l’opinion
condamne la violence coloniale anglaise qu’elle accepte pourtant en Algérie et au
Sénégal.
Après loi sur la presse de 1860 (24 nov. 1860, les journaux gagnent en liberté, et
obtiennent notamment le droit de reproduire les débats parlementaires) les journalistes
tendent à attaquer la politique coloniale française.

Polémiques et tensions autour du problème algérien


L’Algérie devenant peu à peu une « nouvelle France », la question qui divise est de
savoir ce qu’il faut faire des indigènes dans le pays. Emile de Girardin (patron de La
Presse), en 1860, souligne les contradictions de la politique coloniale française en
dénonçant les « contradictions de la France qui se bat sur une rive de la Méditerranée
pour affranchir la nationalité italienne, et se bat sur l’autre pour retenir sous son joug la
nationalité algérienne » à son confrère Clément Duvernois. Sans doute Girardin a-t-il
eu le dernier mot en écrivant : « Barbarie et conquête se donnent la main, civilisation
et conquête se tournent le dos. »
Forte opposition également, entre les journaux d’Algérie qui défendent l’idée selon
laquelle la tradition doit l’emporter sur la modernité, et les journaux français qui
nuancent une telle affirmation. En témoigne le duel du général Yussuf contre le
journaliste Fonvielle en février 1859 qui défraie la chronique mondaine et provoque la
colère de Napoléon III qui fait un voyage impérial.
-> Quel rôle l’Etat doit-il jouer ? Défendre les indigènes ? Protéger les colons ? : une
bonne administration se présente comme un impératif
En 1858, le conseil d’Etat Blondel propose une « législation où tous les droits sont
garantis (…) cad l’assimilation relative des indigènes à ces intérêts et l’introduction
des Européens au milieu des indigènes. Il ne faut ni une autorité civile ni une autorité
militaire mais une autorité politique et une seule. L’Algérie doit être administrée de
Paris. »
= critique l’extension du pouvoir civil.
1860 : le duc Achille de Broglie fait paraître une brochure intitulée Une réforme
administrative en Afrique qui pose la question du profit de la conquête coloniale « qui
court toujours le risque d’être un mauvais calcul » (problèmes de population,
d’exploitation des terres…). Il critique l’ancienne Administration où a prévalu
« l’esprit des Bureaux arabes (…) véritable cheville ouvrière de la conquête », un
instrument vénal de toutes les vexations et des spoliations. Il faut constituer un
« chef » en Algérie, ni civil ni militaire — sorte d’entité souveraine responsable devant
le gouvernement de la métropole.
Auprès de l’opinion, l’assimilation demeure la doctrine la plus appréciée : bienfaiteur,
le pays offre à l’Algérie sa civilisation, son régime, ses lois, son Code Napoléon. On
prône la « fusion des races » et le "droit commun", slogan proche des formules de
1848 pour faire cesser le régime colonial et faire des provinces algériennes des
départements français. Si La Revue contemporaine (1862) définit le droit commun
sous cette conception populaire, l’expression couvre une autre réalité et s’inscrit dans
une logique de double langage.
Pour les colons, le droit commun revient à exploiter en toute liberté le pays et ses
habitants. 2 vocabulaires / raisonnements : l’incompréhension naît entre une métropole
de la bonne conscience et la colonie qui règle ses comptes au mieux de ses intérêts.
En raison de l’euphorie économique européen des années 1850, les discussions
s’accélèrent pour la mise en valeur du pays.
La pénurie de coton asphyxie l’industrie textile française, et les cantonniers —
Normands et Alsaciens notamment — regardent vers l’Algérie
11 juillet 1860 : création de la Compagnie des chemins de fers algériens
Aussi les investissements financiers sont-ils faibles ; crise monétaire de 1861 empêche
tout investissement extérieur qui comporte des risques ; malgré l’intérêt nouveau pour
la Méditerranée notamment grâce au canal de Suez. Mais les capitaux, prudents,
conseillés par une presse financière aux options libérales ne font pas encore confiance
à l’essor colonial.
-> L’Etat doit intervenir au plus vite pour élaborer une politique coloniale stricte et
tracer les grandes lignes d’une stratégie générale.

Chapitre 16 : La solution impériale : l’association

En 1860, la France a repris une place considérable dans le concert des nations. Il s’agit
alors pour l’empereur de penser à l’expansion de la « race intelligente et laborieuse »
en affirmant une politique de prestige.

Le défi du libre-échange
1860 : « vrai coup d’Etat » de Napoléon III. Sans approbation parlementaire, il signe le
traité de commerce avec la Grande-Bretagne.
Il impose à la France le libre-échange, supprime les droits de douane sur les
importations de matières premières, abaisse sensiblement les droits de douane sur les
produits manufacturés.
Pour entrainer son « royaume arabe » dans la modernité, il lui donne moyens
financiers / données techniques des polytechniciens français.
-> La seule réussite industrielle de l’Algérie tient à ce projet de Napoléon III : les hauts
fourneaux de l’Alelik dans la plaine de Bône.
Loi du 17 juillet 1867 : règle dans le sens libre-échangiste les relations de l’Algérie
avec la France. Elle est destinée à « assurer à l’industrie métropolitaine la jouissance,
sinon exclusive du moins privilégiée, du marché algérien. » (Exposé des motifs de la
loi du 17 juillet 1867)
Si le trafic Algérien progresse, notamment parce que l’Algérie devient un débouché
intéressant pour les industries françaises, angoissées par la concurrence anglaise ( cf.
Viticulteurs du Midi, écoulent vers la colonie leurs vins les plus médiocres ), l’outil
économique lui manque.

Or, la réticence des capitalistes et des bourgeois ne peut être vaincue que par la seule
autorité de l’Etat. Pour financer son entreprise, l’Etat colonial tentera d’imposer des
impôts coloniaux, notamment l’impôt foncier : ce sera un échec, les colons refuseront
en masse cet impôt. Alors, l’Etat a recours à l’aide « des grandes associations de
capitaux européens » selon le vœu de l’Empereur.
-> L’Etat emprunte cent millions à la Société générale algérienne (1867 - 1868) pour
financer les grands travaux publics : moyens de communication, barrages.
-> Paulin Talabot, en 1865, lance sa société en commandite de Mokta el-Hadid qui
fusionne trois sociétés minières : région de Bône reçoit une impulsion nouvelle
(création d’une ligne de chemin de fer, création d’un port moderne, transformation
d’une ville prospère…)
Dès 1867 apparaissent des critiques et campagnes d’accusation de la presse
métropolitaine qui mettent en lumière les profits exorbitants et les méthodes peu
orthodoxes : cf. Critique dans l’ironie de la part de Crampon dans ses « Causeries à
propos de la Société générale algérienne. »
Avec cet afflux de capitaux frais qui relancent l’économie, la France impériale prétend
construire son économie-monde, selon l’expression braudélienne et faire de Paris le
centre d’une activité mondiale et le centre des expositions internationales.
-> les fastes de la fête impériale du 13 février 1866 en témoignent : présence de
chameaux, princesses déguisées en femmes africaines et asiatiques, figurants…

Une grande politique méditerranéenne


Les objectifs personnels de l’Empereur
En Méditerranée occidentale, chasse gardée de l’Angleterre, la France s’insère tout de
même grâce à une solidarité économique et une influence culturelle certaine.
En Egypte, le canal de Suez a implanté un encadrement français, utilisant une
technique de pointe française remplaçant la main-d’œuvre égyptienne. Port-Saïd
devient une cité peuplée de Français, avec de hauts fonctionnaires… Linant de
Bellefonds y est ministre des Travaux publics. A.R. Goldzeiguer qualifie même
l’Egypte de « bastion français en terre d’islam. »
Expédition au Liban en 1860 (sans résultat…) permet de resserrer les liens éco avec la
montagne libanaise, productrice de soie et pourvoyeur de l’industrie lyonnaise.

L’Algérie, préoccupation majeure


Les informateurs impériaux
Nombreux sont les informateurs qui cherchent à faire de Napoléon III le « sultan des
Arabes » dans une Algérie assez inquiète et qui n’accepte guère un statut de vaincue.
Ismaïl Urbain, initié au saint-simonisme s’installe au Caire comme enseignant puis à
Alger. Les journaux parisiens apprécient la qualité de ses informations (connait très
bien l’administration) : il collabore au Temps et à la Revue de Paris notamment. En
1860, il avait déjà publié sa brochure l’Algérie pour les Algériens où il démontre que
le nœud gordien de l’Algérie est le problème des terres, d’où dépend la sécurité et
l’avenir économique, convaincu que « les Arabes et l’Algérie pouvaient être modifiés
par la civilisation. »
Frédéric Lacroix, homme de lettres écrit lui aussi depuis l’Algérie pour le National.
= des réseaux d’information

La tactique des lettres impériales


Décret du 10 décembre 1860 : supprime le ministère de l’Algérie et des Colonies pour
rétablir le gouverneur général qui devient alors une sorte de vice-empereur à Alger.
Le 1er novembre 1861, Napoléon III adresse une lettre au maréchal Pélissier,
proconsul sénile, dans lequel il parle de créer un « royaume arabe », un état autonome
sous l’autorité exclusive de l’Empereur.
Urbain lance en 1862 un manifeste, l’Algérie française dans lequel il explique que les
terres algériennes doivent être protégées contre toute spéculation. Très vite la
colonisation industrielle et agricole suit l’inquiétude des populations indigènes qui se
révoltent : attaques de Djelfa, apparition de chérifs, raids meurtriers sur Laghouat…
Dans son discours du Trône du 12 janvier 1863, puis dans la « lettre impériale au
maréchal de Malakoff » du 6 février 1863, l’Empereur affirmera mettre un terme aux
inquiétudes excitées par les discussions sur la propriété arabe. Il décide de consacrer
les droits de propriété et de jouissance, mal définis par la loi de 1851.
-> Souhaite répudier le système colonial pour une sorte d’Etat multinational.

Une révolution foncière, le sénatus-consulte de 1863


22 avril 1863 : sénatus-consulte relatif à la constitution de la propriété en Algérie dans
les territoires occupés par les Arabes a pour mission de rassurer les masses
algériennes, d’arrêter les spoliations de terres et le refoulement des tribus.
-> provoque une panique des arabophobes qui voit dans cette mesure une visée
antinationaliste.
Manifestations inattendues irritent alors l’Empereur et déconcertent le gouvernement :
de la fin 1862 jusqu’à l’été 1863, l’Algérie est secouée par une triple rébellion
• Révolte couverte de la bureaucratie coloniale qui fait obstruction aux mesures
• Révolte ouverte de la presse coloniale contre les « sauvageophiles »
• Révolte sur la place des colons citadins qui mobilisent leurs troupes pour mettre au
pilori tous les séides d’un pouvoir honni et élire des représentants pour porter à la
métropole les exigences du peuple français en Algérie.
De 1864 à 1866, les inquiétudes indigènes nées de bouleversements administratifs se
conjuguent aux prémices de la Nahda du monde musulman : révolte éclate en bordure
des marges sahariennes occidentales dans le territoire des Ouled Sidi Cheikh, et à
l’autre bout de l’Algérie dans la Kabylie orientale. = explosions sporadiques décèlent
un malaise latent qui permet à l’insurrection de 1864 de faire tache d’huile.

L’armée au pouvoir pour la défense des indigènes


Si Napoléon III affirme qu’il faut fonder avec fermeté une domination sur les
populations arabes, dans sa lettre impériale du 14 janvier 1864 au gouverneur Pélissier,
il explique que l’insurrection algérienne est telle qu’il doit composer avec l’opposition.
La réforme administrative de juillet 1864 entraine une centralisation des Bureaux
arabes à Alger et organise une administration nouvelle qui subordonne les civils aux
militaires sous autorité du gouverneur.

L’enquête sur place : le voyage impérial de 1865


En 1865, par une décision brusque dont il a le secret, Napoléon III installe
l’Impératrice, récente pendant son absence, et part trente-six jours voir l’Algérie de ses
propres yeux. Avec Ismaïl Urbain comme interprète et le maréchal Mac-Mahon
(opposé au sénatus-consulte de 1863) pour lui faire la démonstration des réalisations
coloniales, l’Empereur constate que la colonisation qu’il désirait cantonner
étroitement, affirme un dynamisme insoupçonné. Ce voyage le convainc que la
« civilisation » doit permettre à la société indigène d’évoluer en toute quiétude par une
lente assimilation. L’empereur glisse vers le concept assimilationniste de « fusion des
races ».

La lettre de l’empereur au maréchal Mac-Mahon


C’est à la suite du voyage que Napoléon III imprimera une lettre destinée à Mac-
Mahon qui fixe le programme impérial à exécuter. Dans celle-ci, Napoléon se présente
comme le chef, le censeur du parti arabophile en affirmant que les éléments français et
arabes « ont besoin de se prêter à un concours réciproque ».
-> Par l’exécution du sénatus-consulte de 1863, l’empereur entend rétrocéder les terres
aux tribus et rendre insaisissables par les créanciers les propriétés individuelles. Le
camp militaire algérien est trop dispendieux : les effectifs métropolitains doivent être
remplacés par des troupes indigènes. Mais le Maréchal Mac-Mahon cherche à tourner
les directives impériales dangereuses pour la colonisation et l’armée. Il évince de tous
les postes de décision des personnalités fortes à tendance arabophile.
S’engage alors une « bataille des brochures » quant à la politique de Napoléon III pour
l’Algérie : si Emile de Girardin propose d’ériger « l’Algérie en vice-royauté
viagère conférée à Abd el-Kader », Jules Duval, dans ses Réflexions sur la politique de
l’Empereur en Algérie, souhaite voir en l’Algérie un « royaume français et non un
royaume arabe ».
Le voyage impérial — soit 36 jours de voyage, 3084 KM — a pour conséquence la
reconstitution d’un groupe de pression coloniste qui a établi des liens étroits avec la
presse le Parlement et les hommes politiques métropolitains et se trouve prêt à mener
une offensive en France.
Le grand capital à l’aide de la colonisation
Pour faire entrer l’Algérie dans la voie du développement moderne, il faut lui procurer
des capitaux.
-> L’Empereur convainc le directeur du Crédit foncier Frémy, et Paulin Talabot de
créer la Société générale algérienne (SGA). La convention de 1866 stipule qu’elle
investira 100 millions pour « des entreprises industrielles et agricoles consistant en
travaux publics, exploitations de mines, de terres, de ponts, exécution de barrages,
canaux d’irrigation… »
Au même moment, les capitaux Talabot s’investissent avec succès dans les mines de
fer de la plaine de Bône et, en 1865, Paulin Talabot crée, par fusion, la société en
commandite de Mokta el-Hadid.
La plupart des capitalistes métropolitains demeurent toutefois rétifs quant à ces
investissements.

La Tunisie, zone d’influence française


En 1830, l’influence du consul de France Matthieu de Lesseps sur le bey Hussein avait
permis d’obtenir sa neutralité bienveillante et même son appui matériel pour le
ravitaillement du corps expéditionnaire.
Sous le Second-Empire, le rôle du consul de France, Léon Roches, est décisif. Après
avoir été secrétaire d’Abd el-Kader (1838-1839), et interprète auprès de Bugeaud,
l’Empereur en fait son ambassadeur. Il cherche à entrainer le bey dans une série de
réformes, et à maintenir les concessions de la famille Lesseps de part et d’autre de la
frontière algéro-tunisienne.
En faisant ainsi pression avec le représentant anglais Wood, Roches convainc le bey
qui prête serment au pacte fondamental ( Ahd el Aman ), crée un conseil municipal et
légalise pour les étrangers de « posséder des propriétés foncières en se conformant aux
lois et en acquittant les mêmes charges que les indigènes. »
Aussi les lettrés et tunisiens en direction de la Mecque qui font des détours européens
sont-ils émerveillés face aux chemins de fer, au télégraphe… Éblouis par une
civilisation nouvelle, ils appuieront les tentatives réformatrices des généraux Husaïn,
Rustam et Khereddine.
• La prépondérance française : mission Campenon a fait de l’école du Bardo un
modèle pour les troupes du bey et former, à l’occidentale, les jeunes officiers.
Aussi, le procès de Ben Ayad, fermier de la Régence naturalisé français de 1857 à
1876 prend une telle ampleur que l’Empereur assume le rôle d’arbitre = une justice
franco/tunisienne Napoléon III cherchera par ailleurs à renverser une personnalité
gênante dans le cadre politique tunisien, Khaznadar, mais ce fut un échec
• La fin de l’indépendance financière tunisienne : il existe une réelle compétition
entre la France, l’Angleterre qui veille à « l’indépendance tunisienne », et l’Est-
Algérien pour la Tunisie.
Révolte tunisienne de 1864 : mesures financières prises en 1856 par le bey pour
réduire le déficit, sont amplifiées en 1861, par le doublement de l’impôt et de la mejba
et pressurent une population aux ressources limitées. C’est une révolte au caractère
anti-colonial et anti-européen, les Tunisiens accusent les Français de la responsabilité
des dettes beylicales : la Tunisie en 1863 a dû emprunter trente-six millions à Paris à
des conditions léonines provoquant, avec l’augmentation des impôts, la révolte. En
1865, à la suite d’un nouvel emprunt, la France obtient la création d’une commission
franco-tunisienne chargée d’assurer le paiement des créances financières. En 1869, la
France doit accepter la création d’une Commission internationale de la terre franco-
anglo-italienne.
-> Protectorat dans les faits car la Tunisie n’a plus sa souveraineté éco

L’achèvement du canal de Suez


Le projet de Lesseps subit les assauts anglais qui cherchent à empêcher la réalisation
des travaux. Ils ne peuvent admette un canal dû aux Français, comme en témoigne la
plainte que le consul Buliver adresse au ministre des Affaires étrangères, lord Russel,
3 janvier 1863.
Le monde politique, économique, et la presse prennent part au débat ; de La Presse de
Girardin, pourtant ami de Lesseps, au Constitutionnel, les attaques se multiplient.
Lesseps demeure soutenu par l’Impératrice et l’Empereur : ce dernier en appelle à
l’opinion publique et, en février 1864, fait réunir mille six cents personnes dans la salle
du Palais de l’industrie aux Champs-Elysées, en un banquet pour appuyer l’action de
Lesseps.
• L’arbitrage de Napoléon III : sollicité par Ismaïl — à la tête de l’Egypte — et
Lesseps, soutenu par l’opinion publique, il doit trancher ce différend international.
Le 6 juillet 1864 il rend sa sentence
Son autorité écarte l’opposition anglaise qui n’hésite pas à parler d’ « usurpation
française en Egypte » dans le Times.
2 conventions signées en 1866 : Ismaïl apparait comme souverain ; le gouvernement
égyptien conserve, sur toute la zone de l’isthme, ses droits de souveraineté.
Un marchand d’esclave que fréquente Henri Lambert alors installé à Aden lui offre la
rive nord de la baie de Tadjourah avec le mouillage d’Obok après avoir été défendu
par Lambert pour une accusation de vol. Le 19 février 1862, le drapeau français est
hissé à Zeïla ; deux émissaires s’étaient rendus à Paris pour négocier la vente d’une
bande de 400 km2 . Dans la même région, sur la rive arabique, en 1868, des négociants
marseillais de la riche famille Rabaud achètent un terrain de 160 km2 au cheikh de
Turba.
-> Une politique d’expansion qui flatte la fierté nationale.

L’expansion coloniale au service d’une stratégie économique


Gouvernement impérial a su reconquérir du prestige extérieur par les armes et
l’influence de sa diplomatie ; les exposition universelles, où paradent les Altesses du
monde entier, symbolisent cette volonté de puissance économique mondiale, d’une
économie-monde (cf. GB) dont le centre serait Paris.

L’affaire mexicaine : un besoin désespéré d’argent


« La grande idée du règne »
(partie hors programme )
En raison des pénuries d’or et d’argent, la France a accepté le fardeau d’une expédition
coloniale. Le compte Raousset-Boulbon organise une concession minière pour l’argent
du Sonora et part au Mexique, dès 1852. Il rencontre vite des résistances, et sera
exécuté sous l’ordre du gouvernement mexicain le 11 août 1854.
Son associé Jecker reprend la concession et en 1862, le gouvernement impérial
s’attribue les concessions sur la majeure partie de la Sonora.
Février 1864 : un contrat place la Sonora sous la « protection directe et souveraine de
la France », comme moyen efficace d’enrichissement au moment où le besoin d’argent
se fait ressentir. Si cette entreprise est assez méconnue du grand public, elle est une
« cascade d’argent » qui permet à la France de régler sa question monétaire.
Des convois d’hommes se rendent au Mexique, mais le nationalisme mexicain pousse
Maximilien à s’opposer de Napoléon III et à lui refuser la cession des mines de la
Sonora. Les USA, soucieux d’appliquer la doctrine Monroe se méfient par ailleurs
d’une présence française prépondérante au Mexique = échec de l’expansion des Etats-
Unis.
-> Un échec colonial, mais un succès financier : a enrichi le Trésor français de 373 019
livres sterling par an d’argent mexicain ( soit 40 fois le montant annuel antérieur ) et
lui a permis d’affronter les crises monétaires causées par l’afflux d’or des années 1850
-> Face à la crise européenne de 1866, les 30 000 hommes des troupes françaises au
Mexique ont manqué sur le Rhin pour freiner l’irrésistible ascension prussienne.

Un programme ambitieux pour la Sénégambie


Suite aux conquêtes de Faidherbe, l’organisation de cette colonie (où le coton semble
se présenter comme culture-miracle à développer), inspirée par la règle du self
government anglais (Sierra Leone, Gambie… ) s’envisage, selon le gouvernement
impérial, dans une pacification générale jusqu’aux rivières du Sud le long du Sénégal.
• Les grands projets de Faidherbe : Après avoir repris son poste de gouverneur en
1863, le 29 avril 1864, dans un rapport au ministre, il résume ainsi son
programme : priorité au développement commercial avec le contrôle des débouchés
; élimination des établissements non rentables et des enclaves étrangères ;
constitution d’une colonie compacte, noyau d’un empire du Sénégal qui permettrait
jonction Algérie / Atlantique par le Sahara et le Niger.
Faidherbe prépare une pénétration plus profonde du continent africain et assigne deux
axes d’extension, à l’est, par le fleuve du Sénégal, la poussée en direction du Niger, au
sud toute la côte jusqu’à la Sierra Leone. Sa délégation obtiendra un traité commercial
négocié avec les Toucouleurs en 1866, mais la route du Sénégal demeurera reconnue
au Niger.
Le gouverneur doit aussi mener d’incessantes interventions militaires : il doit
consolider les positions acquises au Fouta-Toro, au Cayor et au Saloum. La politique
de destitution des damels dans le Cayor rend la situation inextricable et oblige
Faidherbe à l’annexer le 5 mars 1865.
• L’opposition du gouvernement : Lorsque Faidherbe propose d’échanger avec
l’Angleterre la Gambie contre les comptoirs français du golfe de Guinée, il
rencontre l’opposition de son ministre Chasseloup-Laubat qui utilise tous les
moyens dilatoires : disparition des rapports, accumulation d’objections,
interminables discussions. En plus de ne pas être soutenu pour son ambitieuse
politique, le gouverneur doit, en 1865, envoyer des homes pour le Mexique au
moment où Kayor, Sine et Saloum s’agitent.
23 août 1864 : le gouvernement impérial décide d’arrêter l’expansion française vers
l’ouest — l’élan de Faidherbe est brisé.
• La défection des soutiens coloniaux : les appuis solides échappent à Faidherbe :
négociants bordelais, de Saint-Louis et de Gorée craignent l’aventure et proposent
un programme de colonisation réduite et efficiente.
-> Les bordelais notamment, s’offusquent de la politique des « mariages à la mode »
encouragés par Faidherbe pour participer à un métissage accéléré.
S’il a su imposer la souveraineté française directe à de petits états de cinquante mille
kilomètres carrés, il demande à rentrer en France en 1865 ; il connaîtra la gloire
militaire lors de l’hiver terrible et sera comblé d’honneurs par la III République.

« C’est un véritable empire qu’il nous faut créer dans l’Extrême Orient »
Disait Chasseloup-Laubat, ministre des colonies, le 17 février 1863 : cette instruction
reflète la politique française menée dans la péninsule indochinoise.
Après la guerre de Chine qui déçoit nombre de Français, dès l’automne 1860, l’amiral
Charner dégage Saigon assiégée et étend l’occupation à My Tho, Bin Hoa et Vin Loy
en 1861. Chasseloup-Laubat veut ainsi doter la France d’un « empire » en Extreme-
Orient pour remplacer le domaine perdu des Indes.
• Traités difficiles et interventions :
(hors programme )
5 juin 1862 : Traité de Saigon, cosigné par la France et l’Espagne avec l’empereur
Annam : les trois provinces du Sud et l’île de Poulo-Condor sont cédées à la France en
toute souveraineté.
1863 : les ambassadeurs d’Extrême-Orient vont défrayer la chronique à Marseille et
Paris
Au moment où l’entreprise de colonisation du Mexique s’enlise, et où l’Empereur
rejette l’assimilation en Algérie, on se demande s’il convient d’entreprendre une
oeuvre de colonisation en Extrême-Orient.
Chasseloup-Laubat mènera cette politique : le roi du Cambodge accepte définitivement
le protectorat français par le traité du 11 août 1863, ratifié le 17 avril 1864.
• Vers l’annexion : Napoléon III, sous l’influence des amiraux, promet de créer un
« véritable empire » en Asie.
Après Chasseloup-Laubat, c’est l’amiral Charles Rigault de Genouilly ( premier
gouverneur de la basse Cochinchine ) qui va poursuivre sa politique : en 1867, la
colonie de Cochinchine s’étend sur 60 000 km2 ( = 9 départements français… )
L’administration y est confiée à des officiers de marine qui jouissent de pouvoirs
illimités, la justice aux inspecteurs d’affaires indigènes.
Le contact Français / Annamites est facilité par l’institution d’un collège d’interprètes.
• Les explorations et l’extension vers le marché chinois
Chasseloup-Laubat, qui préside la Société de géographie, organise une expédition en
vue de reconnaître la route de Mékong, d’explorer les plateaux du Laos et d’étudier les
rapports avec le Yunnan chinois.
Expédition part en 1866 : se heurte à l’hostilité du Siam et de la Birmanie, du climat
du Mékong…
-> Cours du Mékong a été reconnu sur 2000 KM, le cours du Yang Tsé sur 500 KM.
L’expédition fournie une moisson de renseignements hydrographiques, astronomiques,
ethnographiques… qui serviront à Jules Ferry à jeter les bases de sa politique
tonkinoise.
-> Découverte du débouché fluvial de la Chine du Sud vers le Tonkin : importance
capitale pour l’hydrographie et l’économie. La maîtrise de la voie du fleuve Rouge
ouvre le marché de Yunnan dont toutes les richesses sont drainées vers le Tonkin.

Les aléas de la « politique conventionnelle » à Madagascar


1861 : le prince Rakoto, ami des Français connu sous le nom de Radama II, arrive au
pouvoir à Madagascar et décide de faire de l’île un pays moderne = décidé à étendre
les intérêts commerciaux autant que le prestige français.
Radama II autorise la création de la « Compagnie de Madagascar », chargée de
l’exploitation des richesses du sol et du sous-sol de l’île. Constituée par le décret du 2
mai 1863, cette compagnie doit assurer le dynamisme éconofJulesmique de
Madagascar et préparer sans à-coups les voies du protectorat français.
12 septembre 2 : traité d’amitié et de commerce assure aux Français la liberté de
commerce, de culte, leur donne la possibilité de louer et de cultiver les terres. Lambert,
ministre et ambassadeur loue l’exploitation des richesses de Madagascar et une large
pénétration française.
Les Anglais, furieux d’être distancés, ainsi que les traditionalistes s’inquiètent de cette
affirmation française : mai 1863, le jeune souverain est étranglé par une conjuration
dirigée par un Hova, Rainilarivony, qui s’impose à la tête du gouvernement en
épousant les reines Rasoherina puis Ranavalona. Par négociation, Napoléon III obtient
une indemnité pour dédommager les actionnaires de la compagnie Lambert et la
signature d’une convention, le 8 août 1868. La France se voit reconnaître son
protectorat sur les royaumes Sakalaves, les Français ont le droit de propriété, de
commerce et d’industrie et peuvent utiliser des ouvriers malgaches.
Par nécessité de maitriser le territoire, le géographe Alfred Grandidier explore le pays,
crée des cartes et collecte des documents.

Ainsi, cette « politique conventionnelle » (Napoléon III) a maintenu la présence


française mais n’a pas su redonner à Radama II les moyens du succès. Elle crée une
élite moderniste à Madagascar par l’intermédiaire de ses négociants, aventuriers et
missionnaires.

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