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Penalisation Des Droits Des Affaires - Jean Pradel

Ce document traite de la pénalisation du droit des affaires. Il examine les arguments pour et contre la pénalisation, et explique le particularisme du droit pénal des affaires, notamment en ce qui concerne la théorie de l'infraction et de la responsabilité.

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Penalisation Des Droits Des Affaires - Jean Pradel

Ce document traite de la pénalisation du droit des affaires. Il examine les arguments pour et contre la pénalisation, et explique le particularisme du droit pénal des affaires, notamment en ce qui concerne la théorie de l'infraction et de la responsabilité.

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Fondation pour le droit continental

Colloque Le Caire, octobre 2009

La pénalisation du droit des affaires


Par
Jean Pradel
Professeur émérite de l’Université de Poitiers (France)

Les questions les plus simples peuvent s’avérer les plus difficiles à celui qui cherche
une réponse. C’est bien le cas du droit pénal des affaires. Alexandre Dumas fils répondait :
« Les affaires ? C’est bien simple, c’est l’argent des autres ». La boutade est savoureuse. Mais
elle ne saurait satisfaire les juristes, qu’ils raisonnent en droit pur ou en introduisant des
considérations économiques.
Rappelons d’abord qu’il n’y a pas de définition légale du droit pénal des affaires et que
les auteurs ne mettent pas toujours les mêmes infractions dans l’enveloppe de ce droit.
- Un premier critère vient à l’esprit, qui est matériel. Le droit pénal des affaires se
définit par son contenu et il apparaît comme étant un sous-ensemble au sein du droit pénal
spécial. On y trouvera par exemple l’abus de biens sociaux, la banqueroute, le délit d’initié.
Mais au-delà, on hésite. Faut-il par exemple mettre le droit pénal du travail et les délits de
droit commun applicables aux affaires, comme l’escroquerie et le recel ?
- D’où la tentation d’utiliser un autre critère, formel celui-là. Les délits sont alors
classés en fonction de leur localisation dans les Codes : ce qui est dans le Code pénal est du
droit pénal spécial et ce qui est hors du Code pénal peut être du droit pénal des affaires. Ce
second critère n’est pas meilleur que le premier : d’abord car il y a dans le Code pénal des
délits comme l’abus de confiance ou l’escroquerie qui peuvent être réalisés par des hommes
d’affaires ; ensuite car, en dehors du Code pénal, on trouve des délits qui manifestement ne
sont pas des délits d’affaires comme la conduite sous l’emprise de l’alcool.
- Au vrai, il convient de dépasser ces deux critères et de faire appel aux notions
d’économie et d’entreprise, concept certes peu juridiques même si, depuis les travaux de
l’Ecole de Chicago, des auteurs s’efforcent de bâtir une théorie de l’économie du droit.
Le droit pénal des affaires est bien dès lors la branche du droit pénal spécial qui traite
des infractions commises dans le cadre d’une entreprise et qui sont sou tendues par des
considérations économiques, donc de profit. Il en résulte que le délinquant d’affaires est un
professionnel. On intègre donc dans le droit pénal des affaires le droit pénal commercial, le

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droit pénale de la concurrence, de la consommation et de la bourse, et bien évidemment l’abus
de biens sociaux. Inversement, on exclura le droit pénal du travail, le droit pénal
de l’environnement et le droit pénal immobilier : les infractions commises dans ces cadres ne
sont pas en principe commises par des professionnels.
Cela dit, le droit pénal des affaires existe bel et bien. Le droit des affaires est
traditionnellement pénalisé. Il l’est cependant plus ou moins selon les époques et selon les
régimes politico-économiques : un régime libéral fera moins appel à la pénalisation qu’un
régime autoritaire et d’un autre côté les périodes de crises économique connaissent une plus
forte pénalisation que les époques d’expansion économique. De tout cela, il résulte d’abord
que le droit pénal des affaires pose un problème de légitimité. En outre, la présence des idées
d’entreprise et du profit entraînent un certain particularisme de ce droit face aux autres
branches du droit pénal spécial. Et enfin ce droit pénal des affaires comporte des limites, des
alternatives.

I – La justification d’une pénalisation du droit des affaires


A – A l’encontre de la pénalisation
Des auteurs, soit libéraux politiquement, soit méfiants à l’égard du droit pénal plaident
pour une restriction de la voie pénale. Les premiers entendent laisser jouer la loi du marché et
les seconds (qui peuvent se confondre avec les premiers) considèrent que des sanctions non
pénales ont autant d’effets que les peines avec en moins certains désastres. En outre, ces
esprits invoquent deux autres arguments.
- D’abord les faits sont parfois ignorés de la justice pénale. A quoi bon dès lors prévoir
l’appel cette justice ! Cette ignorance se fonde parfois sur des raisons juridiques comme le
secret de l’entreprise dont la violation peut donner lieu à poursuites. Il est vrai que les
commissaires aux comptes sont tenus de révéler au parquet les faits délictueux qu’ils
découvrent à l’occasion de leurs contrôles de la comptabilité des entreprises. D’autres fois,
l’ignorance des autorités se fonde sur des raisons factuelles : le flagrant délit est rarissime et
les plaintes des victimes ne sont pas très fréquentes. Il y a pourtant des victimes comme les
associés, les concurrents, les consommateurs, les petits épargnants… Mais ces gens là
déposent peu plainte soit qu’ils ignorent les faits, soit qu’ils sont complices, soit encore qu’ils
ne croient pas à l’utilité de leur démarche.
- Ensuite, le juge pénal est mal à l’aise en matière de délinquance des affaires. Il
ignore les subtilités de la vie des affaires. Il a peur de la paralyser, voire n’aime pas le monde
de l’entreprise.

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B – En faveur de la pénalisation
Et pourtant une certaine pénalisation est indispensable tant pour des raisons
matérielles (préjudice causé aux salariés et épargnants) et morales (recherche affirmée du
profit). Balzac dans son roman Lucien Leuwen a écrit : « Les assassinats sur la Grand’route
me semblent des actes de charité comparés à certaines combinaisons financières ».
Cette légitimité du droit pénal des affaires est d’autant plus évidente que ce droit n’est
pas une remise en cause du système d’économie libérale, même si G. Ripert soutenait le
contraire dans son Déclin du droit publié en 1949 (n° 56). A vrai dire, le droit pénal est très
compatible avec un système libéral et même il le fortifie comme l’a montré le professeur
américain Charles Fried dans l’ouvrage collectif Les enjeux de la pénalisation de la vie
économique (Dalloz 1997, p. 102 et s.). Il est vrai que cet auteur entend limiter la sanction
pénale à des faits clairs et graves, des faits de « turpitude morale frappant le citoyen
ordinaire » (p. 106). Ce point de vue est le meilleur.
Cela dit, le droit pénal des affaires n’est pas le droit commun pénal. Le banqueroutier
n’a rien de commun avec le voleur d’un véhicule ou l’auteur d’un délit sexuel. Il existe un
particularisme du droit pénal des affaires.

II – Le particularisme de la pénalisation dans le droit des affaires


A – La théorie de l’infraction
Les sources de l’infraction ne sont pas toujours celles du droit commun pénal. Certes
les délits sont contenus dans les lois comme les autres délits. Mais en droit des affaires il
existe un droit communautaire (de l’Union européenne) et celui-ci prime le droit interne. La
chambre criminelle de la Cour de cassation l’a admis dans un arrêt du 22 octobre 1970 dans la
célèbre affaire des Fils d’Henri Ramel. Plus récemment, la Cour de justice des Communautés
européennes a rendu un arrêt remarqué le 13 octobre 2005 dont le principe est celui-ci : la
législation communautaire (les directives et les règlements communautaires) peut prendre des
mesures « en relation avec le droit pénal des Etats membres pour garantir la pleine efficacité
des normes qu’elle édicte en matière d’environnement ». Ce qui est une invitation, une
obligation même pour les Etats à pénaliser les dispositions communautaires. En l’espèce il
s’agissait d’environnement à la limite des affaires (mais qui peut en faire partie). Cependant
on peut imaginer que par la suite, ce principe sera étendu à d’autres secteurs.
La structure de l’infraction n’est pas non plus toujours la même en affaires et en droit
commun. C’est vrai d’abord pour l’élément matériel : l’omission joue un grand rôle en droit
des affaires, plus important qu’un droit commun. Il y a beaucoup de délits d’omission en droit

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des sociétés. La jurisprudence admet même la complicité par abstention alors que l’article
121-7 du Code pénal exige une action dans la complicité, et dons un comportement positif.
Un arrêt de la chambre criminelle, en date du 28 mai 1990, a qualifié de complice le membre
d’un directoire de société qui connaissait l’existence d’abus de biens sociaux et qui ne s’y est
pas opposé.
Quant à l’élément moral du délit, la jurisprudence l’entend de façon répressive. On sait
que la Cour de cassation avait, depuis 1845, créé des délits dit matériels pour lesquels
l’élément moral était présumé en sorte que le prévenu ne pouvait se sauver qu’en prouvant sa
folie ou la contrainte. Les rédacteurs du Code pénal de 1992 ont supprimé cette notion.
Cependant, pour des infractions qui sont en général des délits d’affaires, la Cour de cassation
a imaginé une sorte de présomption de connaissance qui en revient pratiquement aux anciens
délits matériels. Elle décide en effet que « la seule constatation de la violation en
connaissance de cause d’une prescription légale ou réglementaire implique de la part de son
auteur l’intention coupable exigée par l’article 121-3 du Code pénal » (par exemple Crim. 14
janvier 2004).
B – La théorie de la responsabilité
Pendant longtemps, seule a été envisagée la responsabilité du chef d’entreprise. Les
premières applications de cette idée remontent au XIXème siècle et la formule imaginée par la
jurisprudence s’est perpétuée. Ainsi un arrêt de la chambre criminelle, en date du 28 février
1956 décide : « dans les industries réglementées sur le plan de la salubrité et de la sécurité
publique, la responsabilité pénale remonte essentiellement au chef d’entreprise ».
Cependant la responsabilité de l’employeur suppose la réunion de certaines conditions.
Il faut d’abord que le préposé ait commis une faute qui soit une infraction pénale. Il faut
ensuite une faute du patron, qui est en réalité un défaut de contrôle ou de surveillance.
Cependant cette faute est présumée en sorte que le patron ne pourra pas se dégager en
prouvant son absence de faute. En somme, l’infraction de l’employé révèle celle du patron et
cela de façon quasiment irréfragable. Certes une loi du 10 juillet 2000 sur les délits non
intentionnels exige une faute qualifiée en cas de causalité indirecte entre le comportement de
l’agent et le préjudice. Mais la jurisprudence n’admet pas cette dépénalisation en faveur du
chef d’entreprise. Elle entend maintenir une grande rigueur pour forcer les employeurs à bien
surveiller leurs préposés.
Toutefois, la jurisprudence reste humaine. Il y a des cas dans lesquels le patron est
dans l’impossibilité matérielle de surveiller correctement ses préposés. C’est pourquoi, depuis
1901, la chambre criminelle admet que le chef d’entreprise peut déléguer une partie de ses

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pouvoirs à un préposé. Encore faut-il que la délégation ne soit pas générale et que le préposé
soit pourvu de la compétence, de l’autorité et des moyens nécessaires à l’exercice de sa
fonction » (chambre criminelle, 5 arrêts en date du 11 mai 1993). Il faut aussi que l’entreprise
soit d’une certaine dimension. La conséquence de la délégation est que le chef d’entreprise
échappe à sa responsabilité et que seul le préposé délégué est responsable.
Le nouveau Code pénal, de 1992, a créé un nouveau sujet passible de poursuites, la
personne morale (art. 121-2 du Code pénal). Il y a certes un débat sur la possibilité de punir
un être moral. Mais aujourd’hui un nombre croissant de législations nationales en Europe
l’admette et la France l’a admis aussi avec le Code de 1992.
Cette responsabilité peut s’appliquer à toutes les infractions, du moins depuis une loi
du 9 mars 2004 et dans la pratique, plusieurs délits d’affaires servent de base à la poursuite.
Son mécanisme est celui de la responsabilité par ricochet : en effet, selon l’article 121-2 al. 1
la personne morale est responsable pour les « infractions commises pour leur compte, par
leurs organes ou représentants ». En somme, l’être moral ne commet pas directement lui-
même l’infraction, c’est le dirigeant qui la commet et qui la commet pour le compte de l’être
moral. La jurisprudence a d’ailleurs condamné la théorie de la faute distincte de la personne
morale (chambre criminelle, 2 décembre 1997). Il est vrai que par la suite, la personne morale
a pu être condamnée même si l’auteur physique n’a pu être déterminé, qu’il s’agisse d’une
infraction non intentionnelle (chambre criminelle, 20 juin 2006) ou même d’une infraction
intentionnelle (chambre criminelle, 25 juin 2008, « il se déduit que les infractions retenues
s’inscrivent dans le cadre de la politique commerciale des sociétés en cause et ne peuvent, dès
lors, avoir été commises, pour le compte des sociétés, que par leurs organes ou
représentants »).
La responsabilité de la personne morale n’exclut pas celle du dirigeant : un cumul des
deux est possible et d’ailleurs prévu par l’article 121-2 al. 3. Ceci s’explique par le fait que la
responsabilité de la personne morale (qui est une responsabilité personnelle) suppose une
infraction commise par un dirigeant, personne physique.
C – La théorie de la sanction
Considérons d’abord les peines prévues par la loi.
Si l’on met de côté les peines encourues par les personnes morales, (l’amende qui est
en principe le quintuple du maximum prévu pour les personnes physiques ; l’interdiction
d’exercer une activité professionnelle ; le placement sous surveillance judiciaire ; la fermeture
d’un établissement ; la confiscation de la chose ayant servi à la commission de l’infraction ou
de la chose qui en est le produit…), on doit insister davantage sur les peines encourues par les

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personnes physiques. Ce sont celles du droit commun, y compris l’emprisonnement (la
réclusion n’est pas prévue) et, bien évidemment l’amende. Il faut ajouter la confiscation, la
fermeture d’établissement et l’interdiction d’exercer une activité professionnelle ou sociale
ainsi que l’exclusion des marchés publics.
L’interdiction professionnelle d’exercer le commerce (pendant dix ans), créée par la
loi du 30 août 1947 sur l’assainissement des professions commerciales et conçue comme une
peine accessoire doit être considérée aujourd’hui comme abrogée : en effet l’article 131-27 du
Code pénal prévoit une peine plus douce d’interdiction pour cinq ans au plus lorsqu’elle est
temporaire (Cour de cassation, assemblée plénière, 22 novembre 2002).
Quant aux peines prononcées par le juge, il faut signaler la grande importance de
l’amende, ce qui est normal car les délits d’affaires sont des infractions de profit.
L’emprisonnement est rarement prononcé sauf si les faits sont très graves.
Des problèmes se posent à propos des personnes morales, notamment en cas de fusion
de deux personne morales et lorsque la société absorbée avait, avant absorption, commis une
infraction. Cette société ne peut plus, après cette opération être responsable puisqu’elle perd
son existence juridique (chambre criminelle, 20 juin 2000). Mais de son côté la société
absorbant ne peut pas non plus être condamnée pénalement car rien ne peut lui être reproché
alors que l’article 121-1 du Code pénal proclame le principe de la responsabilité pénale,
même si les faits sont graves. S’ils ne le sont pas, peut-on de façon générale maintenir la
répression pénale ou ne faut-il pas organiser des alternatives à la pénalisation ? C’est le
troisième point à examiner.

III – Les alternatives à la pénalisation des affaires


Depuis plusieurs décennies, le législateur a créé des sanctions que l’on peut qualifier
d’administrativo-répressives. En outre la doctrine et des comités de réflexion, allant plus loin,
évoquent une franche dépénalisation quand les faits ne sont pas trop graves.
A – Les sanctions administrativo-répressives
En voici d’abord quelques exemples. Ces sanctions sont prononcées par des Autorités
administratives indépendantes (AAI).
Citons l’Autorité de la concurrence (ex. Conseil de la concurrence). En cas d’atteinte
au libre jeu de la concurrence, cet organisme peut se saisir d’affaires. Il peut aussi être saisi
par le ministre de l’économie ou par une entreprise (art. L. 462-5 du Code de commerce).
Après une enquête contradictoire, l’Autorité peut prononcer une sanction pécuniaire (la loi ne
dit pas amende, ce terme étant de nature pénale), laquelle sanction peut aller jusqu’à 10% du

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montant du chiffre d’affaires de l’entreprise s’il s’agit d’une personne morale et dans la
négative 10% du montant du chiffre d’affaires de l’exercice précédent celui où se sont révélés
des pratiques anticoncurrentielles (art. L. 464-2 du Code de commerce). La sanction est
proportionnée à la gravité de la faute. Un système de clémence est prévu : il s’agit d’une
exonération de sanction si l’entreprise a contribué à l’identification des auteurs (art. L. 464-2
III du Code de commerce). Ce droit imite donc le droit pénal qui connaît lui-aussi des
exemptions de peines en cas de dénonciation, à certaines conditions.
On peut évoquer aussi l’Autorité des marchés financiers, appelé à sanctionner les
délits d’initié, la diffusion d’informations fausses et la manipulation des cours boursiers.
L’Autorité peut, là encore après enquête, prononcer une interdiction d’exercer ( à titre
temporaire ou définitif) des services fournis. Une sanction pécuniaire peut aussi être
prononcée dont le montant ne peut être supérieur à 1,5 million d’euros, ou au décuple du
montant des profits éventuellement réalisés en cas de pratiques de nature à nuire aux
épargnants ou ayant pour effet de fausser le fonctionnement du marché. Sont en outre prévus
l’avertissement et le blâme (article L. 621-15 du Code monétaire et financier).
On s’est interrogé sur la légitimité de ces sanctions qui sont lourdes et qui ne sont pas
prononcées par le juge pénal. Cependant, cette légitimité, a été formellement affirmée par le
Conseil constitutionnel en 1982 et en 1987 et, déjà auparavant par la Cour de Strasbourg
(affaire Engel c./ Pays-Bas, 8 juin 1976 : ces sanctions font partie de la matière pénale « et
sont donc soumise à l’article 6 § 1 Conv. EDH). Mais cette légitimité est soumise à des
conditions qui apparaissent à l’examen du régime juridique de ces sanctions.
Le régime juridique de ces sanctions est proche de celui des sanctions pénales. Selon
un arrêt du Conseil constitutionnel de 1989, doivent être respectés les droits de la défense, le
caractère non automatique de la sanction, la motivation de la condamnation, la légalité et la
non-rétroactivité de la loi plus sévère, le non-cumul avec les sanctions pénales. On retrouve
ainsi les principes propres au droit pénal et de la procédure pénale. Quant à la Cour de
Strasbourg, elle applique à ces sanctions les principes du procès équitable de l’article 6 précité
(juge impartial et indépendant, garanties procédurales…) mais seulement si elles font partie
de la matière pénale ». Et pour savoir si la sanction en fait partie, les juges européens
s’attachent aux indications du droit national, à la nature du fait et à la sévérité de la sanction.
Mais dans l’ensemble, la plupart des sanctions administratives font partie de la matière
pénale. On aura noté que les principes du procès équitable recouvrent en partie les garanties
du droit pénal et de la procédure pénale, telles que rappelées par le Conseil constitutionnel
(notamment les droits de la défense).

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B – La franche dépénalisation
Envisagée depuis un bon nombre d’années, cette dépénalisation a fait l’objet des
réflexions d’un groupe de travail présidé par J.-M. Coulon, haut magistrat, dont les travaux
ont été publiés (La dépénalisation de la vie des affaires, 2008). Les propositions principales
sont les suivantes :
- suppression d’infractions tombées en désuétude et pas graves, en droit des sociétés,
en droit de la concurrence et de la consommation ;
- mise en place de mécanismes civils (injonctions de faire, nullités, sanctions
contractuelles dans les mêmes matières) ;
- développement de la transaction qui doit à la fois arranger tout le monde et éviter le
recours au juge pénal.
Il faut noter que le législateur a déjà pris ces dernières années des lois de
dépénalisation, en 2001, 2003 et 2004. Il est trop tôt encore pour connaître le sort que
réservera le législateur aux propositions du groupe de travail présidé par J.-M. Coulon.

****
***
En résumé, le droit pénal des affaires doit être sauvegardé. Il faut cependant
l’humaniser grâce à ces instruments que sont les alternatives à la pénalisation. De tout cet
exposé, il résulte que ce droit pénal est mouvant, technique et un peu idéologique.

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