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Modélisation de La Dispersion Chromatique Et de L'atténuation Dans Les Fibres Microstructurées À Coeur Suspendu

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Modélisation de la dispersion chromatique et de

l’atténuation dans les fibres microstructurées à coeur


suspendu

Mémoire

Pierre-Louis Gagnon

Maîtrise en mathématiques
Maître ès sciences (M.Sc.)

Québec, Canada

© Pierre-Louis Gagnon, 2016


Résumé

D’abord, nous présentons les principes physiques nous permettant de modéliser et com-
prendre le phénomène de propagation linéaire des impulsions lumineuses dans un milieu
homogène, dans les guides d’ondes planaires et enfin dans les fibres optiques microstructu-
rées.

Ensuite, nous faisons une analyse mathématique rigoureuse des équations linéaires de pro-
pagation et posons le problème comme celui de la recherche de valeurs propres d’opérateurs
auto-adjoints dans un espace de Hilbert. On verra que ces résultats théoriques s’appliquent
aux équations simulées dans le logiciel Comsol Multiphysics.

Enfin, nous recensons et proposons différentes façons de prédire les valeurs de dispersion
chromatique et d’atténuation dans les fibres microstructurées à coeur suspendu en utilisant
les notions et équations discutés dans les deux premiers chapitres. Le choix de la géométrie,
du matériau et de la longueur d’onde de la lumière transmise sont parmi les variables étu-
diées numériquement. Nous ferons également un exemple détaillé d’utilisation du logiciel
Comsol Multiphysics pour construire un modèle de fibre optique microstructurée.

iii
Table des matières

Résumé iii

Table des matières v

Liste des figures vii

Nomenclature ix

Remerciements xiii

1 Introduction 1
1.1 Nature de la lumière . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1
1.2 Électromagnétisme et équations de Maxwell . . . . . . . . . . . . . . . . . 2
1.2.1 Relations constitutives et polarisation électrique . . . . . . . . . . . 3
1.3 Matériaux pour l’optique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
1.3.1 Condition d’interface pour le champ électrique . . . . . . . . . . . . 5
1.3.2 Modèle de Lorentz et formule de Sellmeier . . . . . . . . . . . . . . 6
1.3.3 Relations de Kramers-Kronig . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9
1.4 Milieu homogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 10
1.4.1 Superposition d’ondes planes monochromatiques . . . . . . . . . . 13
1.5 Milieu non-homogène . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
1.5.1 Guide d’ondes optiques planaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
1.5.2 Dispersion et vitesse de propagation . . . . . . . . . . . . . . . . . . 18
1.5.3 Fibres optiques microstructurées . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20

2 Analyse spectrale du problème de modes dans les fibres optiques 23


2.1 Formulation du problème . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23
2.1.1 Espaces fonctionnels et opérateurs de base pour fibres optiques . . 23
2.1.2 Définition des modes guidés, de radiation et de fuite . . . . . . . . 27
2.1.3 Reformulation du problème de mode guidé . . . . . . . . . . . . . 29
2.1.4 Formulation de β(ω ) versus ω ( β) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 29
2.2 Analyse spectrale avec le champ magnétique . . . . . . . . . . . . . . . . . 30
2.2.1 Bornes sur les valeurs propres . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 32
2.2.2 Spectre essentiel des fibres optiques . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
2.2.3 Application du principe du min-max . . . . . . . . . . . . . . . . . 34
2.2.4 Théorème d’existence de valeurs propres . . . . . . . . . . . . . . . 35
2.3 Généralisation au cas tensoriel . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 36

v
3 Simulation par éléments finis de fibres à coeur suspendu 41
3.1 Modélisation numérique de la dispersion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 41
3.1.1 Simplification du cas vectoriel au cas scalaire . . . . . . . . . . . . . 41
3.1.2 Utilisation d’une couche absorbante parfaitement adaptée (PML) . 42
3.1.3 D’une fibre à coeur suspendu vers une fibre à saut d’indices . . . . 43
3.1.4 Discussion des résultats numériques sur la dispersion . . . . . . . . 43
3.2 Modèles numériques des pertes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
3.2.1 Modéliser chaque source de pertes séparément . . . . . . . . . . . . 48
3.2.2 Simulation bidimensionnelle versus tridimensionnelle . . . . . . . 49
3.3 Influence des impuretés sur le champ électrique . . . . . . . . . . . . . . . 50
3.4 Influence des paramètres géométriques . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53
3.5 Utilisation du logiciel Comsol Multiphysics 4.3b . . . . . . . . . . . . . . . 54
3.5.1 Création du modèle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 54
3.5.2 Configuration du modèle vectoriel dans le cas bidimensionnel . . . 57
3.5.3 Résolution du modèle . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
3.5.4 Visualisation des résultats . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63

Conclusion 65

A Rappels d’analyse fonctionnelle 67


A.1 Théorie des opérateurs non-bornés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
A.1.1 Opérateurs fermés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 68
A.1.2 Opérateurs symétriques et auto-adjoints . . . . . . . . . . . . . . . 68
A.2 Théorie spectrale dans des espaces de Hilbert . . . . . . . . . . . . . . . . . 69
A.2.1 Mesure et intégrale spectrales . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
A.2.2 Calcul fonctionnel pour opérateurs auto-adjoints . . . . . . . . . . 73
A.2.3 Formes hermitiennes, coercives et fermées . . . . . . . . . . . . . . 74
A.2.4 Principe du min-max . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75
A.2.5 Applications à l’opérateur du laplacien . . . . . . . . . . . . . . . . 75
A.2.6 L’importance de bien poser le problème . . . . . . . . . . . . . . . . 76
A.3 Dérivation au sens des distributions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 77
A.4 Espaces fonctionnels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 78

Bibliographie 79

vi
Liste des figures

1.1 Exemple de dipôle électrique avec ses lignes de champ (en pointillés) et ses
lignes d’équipotentiel (source : [10]). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 4
1.2 Condition limite de conducteur parfait sur un domaine Ω : n × E = 0. . . . . 5
1.3 Justification de la condition d’interface tangentielle n × (E1 − E2 ) = 0 pour le
champ électrique. Ici, la surface orangée est notée A. . . . . . . . . . . . . . . . 6
1.4 Modèle d’oscillateur harmonique d’un atome neutre (ou plus généralement
d’une molécule) soumis à un champ électrique. Dans cette figure, la position
d’équilibre du ressort est vue comme étant centrée sur le noyau. . . . . . . . . 7
1.5 Résultat du modèle de Lorentz avec les paramètres ω p = ω0 = 2 · 1014 Hz. . . 9
1.6 Exemple d’onde électromagnétique plane sans atténuation (Source : [24]) . . . 13
1.7 Exemple d’une impulsion lumineuse reçue  de forme  gaussienne qui s’exprime
( t − t )2
en notation complexe E(z, t) = E0 exp − σ20 exp(iω0 t) à une position
fixée z, où ω0 , σ > 0. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13
1.8 Amplitude de la transformée de Fourier de l’impulsion illustrée en 1.7 en sup-
posant t0 = 0, la phase étant nulle dans ce cas. L’expression
 générale de cette

2
transformée est donnée par F [ E(0, t)] (ω ) = √σ exp − σ4 (ω − ω0 )2 + (ω − ω0 )t0 i 16
2
1.9 Géométrie d’un guide d’ondes planaire avec son profil d’indice de réfraction
de forme hypergaussienne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 16
1.10 Illustration des vitesses de groupe et de phase à gauche. Courbes de disper-
sion à droite (tiréesrde [23]) d’un guide d’ondes planaires à saut d’indices, où
n2coeur −n2gaine n2i −n2gaine
on a v := k0 ncoeur d n2gaine
, b := ncoeur −n2gaine
2 . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19

2.1 Visualisation de la me valeur de coupure (figure tirée de [2]) . . . . . . . . . . 36

3.1 Le PML est l’anneau mauve recouvrant la fibre optique. La région grise cor-
respond aux trous d’air et la section rouge correspond au verre. Notons que le
coeur et les ponts (qui sont faits de verre) ne sont pas distinguables sur cette
figure en raison du maillage. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 43
3.2 Distribution de l’indice de réfraction d’une fibre à coeur suspendu faite de
As2 S3 à une longueur d’onde de 2.1 µm. L’indice associé à la partie en blanc
est donné par la formule de Sellmeier (n ≈ 2.4). Les trois trous en noirs sont
remplis d’air (n ≈ 1). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 44
3.3 Photo d’une fibre à coeur suspendu (Source : [1]). . . . . . . . . . . . . . . . . 44
3.4 Maillages 1 et 2 utilisés pour le calcul de la dispersion chromatique. On pré-
sente le coeur car la finesse du maillage loin du coeur a très peu d’impact sur
les indices effectifs et la dispersion. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 45

vii
3.5 Comparaison des indices effectifs obtenus avec les modèles vectoriel et sca-
laire d’une fibre optique à coeur suspendu . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
3.6 Comparaison de la dispersion chromatique obtenue avec les modèles vectoriel
et scalaire d’une fibre optique à coeur suspendu . . . . . . . . . . . . . . . . . 46
3.7 Spectre d’atténuation d’une fibre optique à saut d’indice faite de silice (image
tirée de [1]). µm . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 47
3.8 Mode guidé tridimensionnel décrivant l’oscillation de la composante en x du
champ électrique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 49
3.9 Mode guidé tridimensionnel décrivant la norme du champ électrique. Cette
figure illustre la nécessité d’avoir un maillage tridimensionnel très fin pour
obtenir une solution physique. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 50
3.10 Fibre à saut d’indice de silice (n ≈ 1.45) avec six impuretés de forme circulaire
et d’indice de réfraction n = 1 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
3.11 Fibre à saut d’indice de silice (n ≈ 1.45) avec six impuretés de forme circulaire
et d’indice de réfraction n = 1.59 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 51
3.12 Modèle 3D avec impureté sphérique au centre du coeur. . . . . . . . . . . . . 52
3.13 Courbes des indices effectifs selon le rayon du coeur (de 1 micron à 10 microns). 52
3.14 Courbes de dispersion chromatique selon le rayon du coeur (de 1 micron à 10
microns) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 53
3.15 Choix de la dimension (nombre de coordonnées) de la géométrie dans Comsol. 55
3.16 Choix de la physique. Trois choix pertinents se présentent pour modéliser des
fibres optiques (tels que sélectionnés en bleu). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 55
3.17 Choix de l’étude dans Comsol. Trois choix pertinents se présentent : "Boun-
dary Mode Analysis", "Mode Analysis" et "Eigenvalue". . . . . . . . . . . . . . 56
3.18 Arbre présentant les différentes composantes à configurer du modèle. . . . . 56
3.19 Exemple de liste de paramètres pertinents pour un modèle de fibre optique
avec trois trous. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 57
3.20 Géométrie d’une fibre à coeur suspendu à trois trous construite avec des cercles,
des droites, des courbes de Bézier, etc. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 58
3.21 Création d’un maillage. Les deux paramètres les plus utiles sont "Maximum
element size" et "Minimum element size". On note l’utilisation des paramètres
tels que définis dans la figure 3.19 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 59
3.22 Configuration du PML. L’important ici est de spécifier la région correspondant
à la géométrie du PML (cylindrique ici) dans la boite de dialogue "Type" pour
assurer de ne pas avoir d’erreurs à l’exécution. . . . . . . . . . . . . . . . . . . 60
3.23 Choix de l’indice de réfraction. Il est approprié d’utiliser les paramètres définis
dans la liste plus tôt. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 61
3.24 Configuration des équations à résoudre. Notons d’abord que le domaine 5
n’est pas géré par les équations soulignées en pointillés, mais plutôt par le
PML. De plus, il est important de lier l’indice de réfraction aux équations en
choisissant dans le bas du panneau le bon modèle décrivant les matériaux. . . 62
3.25 Choix des paramètres d’étude. Les paramètres les plus importants sont : le
nombre de modes, l’indice effectif initial et la fréquence de la lumière . . . . . 63
3.26 Résultats obtenus lors de la résolution du modèle. On obtient quelques infor-
mations pertinentes sur les algorithmes de résolution. . . . . . . . . . . . . . . 64

viii
Nomenclature

Nom du symbole Notation Définition Unités (SI)


Champ électrique (3D) E V/m
Champ électrique induit D e0 n 2 E
Champ magnétique (3D) H
1
Champ magnétique induit B µH
Charge électrique q C
Coefficient d’extinction κ Im(nc )
Conductivité électrique σ Ω-1 m-1
Constante d’atténuation α Im( β) 1/m
Constante de phase γ Re( β) 1/m
Constante de propagation β 1/m
Fréquence f ω/(2π ) 1/s
Fréquence angulaire ω 1/s
Indice de réfraction n Re(nc )
Indice de réfraction à l’infini n∞ n( x )|k xk≥ R
Indice de réfraction (borne inférieure) n− infx∈R2 n( x )
Indice de réfraction (borne supérieure) n+ supx∈R2 n( x )
Indice de réfraction complexe nc
Indice effectif ne f f βc/ω
Longueur d’onde dans le vide λ 2πc/ω m
Nombre d’onde dans le vide k0 ω/c 1/m
Perméabilité du vide µ0 ≈ 1.3 · 10−6 A-1 s m-1 V
Permittivité e e0 n2c m-3 kg-1 s4 A2
Permittivité du vide e0 ≈ 8.9 · 1012 m-3 kg-1 s4 A2
Permittivité relative er n2c
Polarisation électrique P 2
e0 ( n c − 1 ) E C/m2
Susceptibilité électrique χ n2c − 1
Vitesse de la lumière dans le vide c ≈ 3.0 · 106 m/s2
∂ω
Vitesse de groupe vg ∂γ m/s
Vitesse de phase vp ω/Re( β) m/s

ix
“Imagination is more important
than knowledge.”

Albert Einstein

xi
Remerciements

Ce mémoire n’aurait pu aboutir s’il n’avait pas été du support et de la patience de plusieurs
personnes. J’aimerais d’abord remercier mon directeur Hassan Manouzi pour son assistance,
ses conseils, sa grande patience et sa flexibilité envers mes initiatives personnelles. J’aime-
rais tout autant remercier mon codirecteur Younès Messaddeq pour m’avoir introduit dans
son groupe de recherche, m’avoir appris à évoluer dans un milieu multidisciplinaire, sans
oublier sa grande flexibilité à mon égard.

Ensuite, je tiens à souligner la contribution de Bora Ung, qui m’aura mentoré durant mes 2
années au sein du groupe de recherche. Son expertise en physique computationnelle m’aura
permis de mieux comprendre plusieurs aspects importants des simulations. Je souhaite éga-
lement remercier Patrick Soucy, pour nos nombreuses discussions entourant les mathéma-
tiques et la physique appliquées aux fibres optiques.

Du côté de mon entourage, je tiens à remercier chaleureusement mes parents, mes frères
ainsi que ma tante pour leur support moral, particulièrement durant la rédaction, qui se sera
avérée laborieuse par moments.

xiii
Chapitre 1

Introduction

Nous présentons ici les notions nécessaires à la bonne compréhension physique du modèle
qui sera analysé puis simulé dans les chapitres subséquents. Quelques notions sont en ef-
fet fondamentales à une bonne interprétation du problème de guidage de la lumière ainsi
que du calcul de la dispersion chromatique et de l’atténuation associées à un guide d’ondes.
Avant de commencer par une discussion sur la nature de la lumière, mentionnons que la
rigueur mathématique fera parfois défaut dans ce chapitre, car le but est d’introduire le mo-
dèle physique, qui sera par la suite étudié d’un point de vue plus mathématique et numé-
rique.

1.1 Nature de la lumière


En physique, on retrouve souvent plusieurs niveaux de modélisation et donc d’approxima-
tion d’un même phénomène, et l’optique n’y échappe pas. En effet, l’optique géométrique
permet d’étudier, d’une part, les phénomènes de propagation de la lumière d’un point de
vue macroscopique, c’est-à-dire lorsque les dimensions du composant optique à l’étude sont
au moins de l’ordre de 10 fois la longueur d’onde de la lumière, qui est typiquement de
quelques microns (notés µm). Par exemple, la réflexion par un miroir ou la réfraction par
une lentille peuvent être modélisées très justement en faisant appel au principe de Fermat
(voir [16]). Si l’optique géométrique permet de justifier le fait qu’une fibre guide la lumière,
plusieurs aspects de sa propagation ne peuvent être expliqués en travaillant dans ce para-
digme.

D’autre part, en ayant recours aux principes et lois de la physique quantique, l’optique quan-
tique permet l’étude corpusculaire de la lumière au niveau microscopique, i.e. à la même
échelle que les particules qui constituent l’atome, qui est de l’ordre du nanomètre. L’absorp-
tion lumineuse, qui est étroitement liée au sujet de l’atténuation dans les fibres optiques, est
par exemple modélisée avec succès dans ce paradigme. Cependant, le guidage des ondes via
la différence d’indice de réfraction dans les fibres traditionnelles ou encore la bande inter-

1
dite dans les fibres à crystaux photonique est en pratique impossible à modéliser au niveau
moléculaire (voir [12]).

Notre contexte de modélisation s’inscrit plutôt à l’intersection de l’électromagnétique et des


phénomènes ondulatoire, un paradigme introduit au 18e siècle par des physiciens tels que
James Clerk Maxwell et Michael Faraday. La lumière dans ce cadre est vue comme une onde
se propageant en temps et espace et où ce sont les champs électrique et magnétique qui
oscillent. On notera ces champs vectorielles E et B respectivement, les quantités vectorielles
étant toujours notées en gras.

1.2 Électromagnétisme et équations de Maxwell


L’électrostatique et la magnétostatique ont suscité l’intérêt de bien des expérimentalistes via
l’utilisation de courants électriques et d’aimants, et ce, depuis le temps des grecques. Il aura
cependant fallu attendre la deuxième moitié du 19e siècle et James Clerk Maxwell pour une
théorie électromagnétique de la lumière. C’est plus précisément le système des équations
aux dérivées partielles (EDP) de Maxwell qui a mené à la découverte des ondes électroma-
gnétiques. Il est donc beaucoup plus facile de créer des champs électriques et magnétiques
(pas nécessairement statiques) à l’aide de courants électriques et d’aimants (et d’en tirer les
principes fondamentaux) que de détecter l’oscillation ultra-rapide du champ électromagné-
tique que constitue la lumière.

Voici donc les équations de Maxwell dans leur version macroscopique (voir [13] pour un
traitement détaillé), qui forment le point de départ de notre analyse :

div(D) = ρl (1.1)
div(B) = 0 (1.2)
∂B
rot(E) = − (1.3)
∂t
∂D
rot(H) = Jl + (1.4)
∂t
Il s’agit des équations dites macroscopiques, car la densité de charges ρl et la densité de
courant Jl représentent des charges libres (i.e. des protons ou des électrons non liées à une
molécule), des variables utiles lorsqu’on étudie des ondes électomagnétiques intéragissant
avec une substance possédant les propriétés macroscopiques de diélectrique ou de semi-
conducteur. Nous reviendrons à la section 1.2.1 sur les relations entre E et D ainsi qu’entre
B et H.

Ce n’est pas en mesurant directement le champ électrique mais plutôt en formulant les EDP
1.1 à 1.4 que Maxwell découvrira que E et B satisfont l’équation classique des ondes dans un
milieu uniforme par rapport à la perméabilité relative µr et la permitivité relative er (nous
reviendrons sur ces variables plus loin). Le lien entre la lumière et l’électromagnétisme, i.e.

2
l’oscillation du champ électrique, était quasi-impossible à mesurer à l’époque, étant donné
les très grandes fréquences optiques (environ 1015 oscillations par secondes dans le spectre
visible). Comme nous le verrons plus tard avec le régime harmonique, cette oscillation est
supposée sinusoïdale, ce qui nous mènera à la version électromagnétique de l’équation de
Helmholtz.

Nous reviendrons au chapitre 2 sur la régularité du champ électromagnétique nécessaire


pour résoudre la propagation de la lumière dans une fibre optique. Comme c’est souvent le
cas en physique, on prend pour acquis la régularité nécessaire pour que les équations aient
du sens 1 . Ajoutons aussi que toutes les variables présentées ci-dessus peuvent en général
avoir une dépendance en temps et en espace.

Pour la suite, afin de découpler les variables des équations de Maxwell, il nous faut d’abord
définir une relation entre H et B ainsi qu’une autre entre E et D. On a donc besoin d’intro-
duire les relations constitutives et, pour y arriver, il nous faut d’abord discuter de polarisa-
tion électrique.

1.2.1 Relations constitutives et polarisation électrique


Supposons qu’une onde électromagnétique ou plus généralement un champ électromagné-
tique se propage dans un matériau et considérons un atome ou molécule électriquement
neutre en faisant partie. Les électrons, dont la charge électrique cumulative sera notée q,
sont liés au noyau de charge opposée −q et s’aligneront quasi-instantanément dans le sens
contraire au champ électrique (et le noyau en sens opposé aux électrons), un peu comme l’ai-
guille d’une boussole dans un champ magnétique. Cette force exercée sur les électrons est
appelée force de Lorentz (voir [10]). Elle sépare donc légèrement les charges négatives des
charges positives (on note d le vecteur de déplacemenent entre les charges positives et né-
gatives). Cette force induit alors un nombre astronomique de dipôles électriques (voir figure
1.1) tous alignés, qui créent en retour un champ électrique s’opposant au champ incident.
On s’intéresse en particulier au moment dipolaire de cette particule, défini par le vecteur qd.
D’un point de vue macroscopique, on appelle polarisation électrique (notée P) le champ vec-
toriel représentant localement la quantité de moment dipolaire par unité de volume. Nous
reviendrons un peu plus loin sur cette notion de polarisation lorsqu’on justifiera une for-
mule importante de l’indice de réfraction, celle de Sellmeier. Il existe un concept analogue à
la polarisation électrique pour le champ magnétique, appelé magnétisation et notée M, mais
non-nécessaire dans notre modèle. On supposera donc qu’on a M = 0 dans les matériaux
1. Tel que décrit dans [33] sous l’appelation d’homogénéisation mésoscopique, il est tout à fait justifié physique-
ment de considérer dans nos équations le champ électromagnétique comme étant infiniement dérivable. Cette
homogénéisation consiste à prendre le produit de convolution du champ électrique avec un "mollifier", i.e. une
fonction positive d’intégrale égale à un et dont le support compact a un volume de l’ordre du micron (voir
[7] pour un traitement détaillé de ces fonctions). Ceci revient intuitivement à prendre prendre la moyenne du
champ électrique dans un rayon d’au plus quelques microns. Suite à cette transformation, on peut donc supposer
le champ électrique aussi lisse qu’il nous plaît.

3
F IGURE 1.1 – Exemple de dipôle électrique avec ses lignes de champ (en pointillés) et ses
lignes d’équipotentiel (source : [10]).

utilisés. On peut en fait voir les relations suivantes (appelées relations constitutives), comme
une définition des définitions des champs vectoriels D et H :

D = e0 E + P (1.5)
H = µ10 B − M = 1
µ0 B (1.6)

Afin de simplifier davantage les équations, il nous faudra définir quelques hypothèses phy-
siques supplémentaires.

1.3 Matériaux pour l’optique


Afin de transmettre les impulsions lumineuses avec le moins d’atténuation et de dispersion
possibles (nous reviendrons sur ce point crucial plus loin), on choisit généralement un verre.
Il s’agit entre autres d’un matériau où aucun courant électrique ne peut circuler (Jl = 0 dans
l’équation 1.4) et où tous les électrons sont liés à un noyau (ρl = 0 dans l’équation 1.1). En
fait, un milieu où un courant électrique circulerait librement forcerait le champ électrique

4
F IGURE 1.2 – Condition limite de conducteur parfait sur un domaine Ω : n × E = 0.

à être nul dans son intérieur et réfléchirait les ondes, ce qui est le cas avec les conducteurs
dits linéaires (i.e. Jl = σE où σ  0 est la conductivité électrique). On peut supposer en
effet que le champ électrique est nul à l’intérieur d’un conducteur, car les charges électriques
s’y déplacent quasi-instantanément afin de créer un champ en sens opposé et d’intensité
similaire au champ incident (voir [10]).

1.3.1 Condition d’interface pour le champ électrique


Pour des raisons mathématiques, on supposera parfois que le verre dont est fait la fibre
est recouvert d’un conducteur parfait (σ = ∞). Pour bien comprendre l’origine physique
de cette condition aux limites, il faut savoir que la composante tangentielle du champ élec-
trique à l’interface de deux matériaux est supposée continue, ce qui s’écrit n × (E1 − E2 ) = 0
en général (voir figure 1.3) et n × E = 0 dans le cas d’un conducteur parfait (voir figure 1.2).
Cette affirmation se justifie en supposant que E est continu de part et d’autre de la frontière
(une surface supposée régulière), en intégrant les deux côtés de l’équation 1.3 selon un do-
maine A ⊂ R3 bien choisi (voir la surface à la figure 1.3) et en utilisant ensuite le théorème
de Stokes. Cette surface A est choisie de façon que son aire et que la longueur l de son plus
petit côté soient négligeables par rapport à la longueur L du plus long côté. Mais la longueur
L doit quant à elle être suffisament petite pour que le champ électrique soit approximative-
ment constant sur chacun des deux plus longs côtés du rectangle (on utilise ici la continuité
de E de part et d’autres). On a donc
Z Z Z Z
∂ ∂B
0 ≈− BdA = − dA = (∇ × E) dA = E · ds
∂t A A ∂t A ∂A
≈ L (E1 − E2 ) · s + l (E1 − E2 ) · n
≈ L (E1 − E2 ) · s + 0 · (E1 − E2 ) · n = L (E1 − E2 ) · s

où la première intégrale est approximativement nulle (ainsi que sa dérivée) car A est négli-
geable et où s est un vecteur unitaire contenu dans ∂A et parallèle à la surface de sépara-
tion σ. Comme ce calcul est valide peu importe l’orientation de A orthogonale à la surface,
on conclut, en divisant par L, que la composante tangentielle de E1 − E2 est nulle, i.e. que
(E1 − E2 ) × n = 0

5
F IGURE 1.3 – Justification de la condition d’interface tangentielle n × (E1 − E2 ) = 0 pour le
champ électrique. Ici, la surface orangée est notée A.

1.3.2 Modèle de Lorentz et formule de Sellmeier

Tel que mentionné au début de ce chapitre, il y a souvent en physique plusieurs niveaux


d’approximation d’un même phénomène. Par exemple, dans la modélisation de phéno-
mènes oscillatoires, telle une masse accrochée à un ressort, on peut considérer la force de
retour (celle qui force le retour à la position d’équilibre) comme linéaire. De notre côté, consi-
dérons le phénomène analogue lorsque la lumière se propage dans un matériau et que les
atomes, soumis au champ électrique oscillant, oscillent à leur tour. Comme le noyau a une
masse de loin supérieure au nuage d’électrons, on peut considérer ce nuage comme oscillant
au tour d’un noyau de position fixe.

Il s’agit d’un exemple de polarisation électrique de la matière et constitue la base du modèle


de Lorentz, qui, on le verra plus loin, permettra d’enrichir notre modèle de fibre optique en
justifiant une formule importante de l’indice de réfraction, celle de Sellmeier (tel que men-
tionné dans [24]). Pour l’instant, remarquons que, bien que sa charge nette soit nulle, un
atome polarisé crée un dipole dont le champ électrique émis s’oppose au champ électrique
incident. On appelle optique non-linéaire (voir [5]) la discipline qui étudie les impulsions lumi-
neuses de très grande intensité (une quantité scalaire proportionnelle à |E|2 ), qui entrainent
une force de retour non-linéaire exercée par le noyau. Notre travail se situera au niveau des
forces de retour linéaires avec l’équation de Helmholtz.

Pour l’instant, donnons une justification classique du terme à la base de la formule de Sell-
meier. On dit bien classique ici car le tout peut se faire dans le paradigme quantique en
considérant (à titre indicatif) les niveau d’énergie des électrons. Cependant, comme on arrive
à une expression mathématiquement équivalente, on se limitera à cette dérivation classique
et sans doute plus intuitive de la formule de Sellmeier.

On considère le modèle d’oscillateur harmonique amorti (tel qu’illustré à la figure 1.4) sou-
mis à une force extérieure. Ce modèle mathématique est tiré simplement d’une application

6
F IGURE 1.4 – Modèle d’oscillateur harmonique d’un atome neutre (ou plus généralement
d’une molécule) soumis à un champ électrique. Dans cette figure, la position d’équilibre du
ressort est vue comme étant centrée sur le noyau.

de la deuxième loi de Newton dans le plan complexe (toutes les opérations effectuées ici sont
linéaires). :
my00 (t) = − My0 (t) − ky(t) + |E|qeiωt (1.7)

où tous les termes sont des constantes réelles positives dépendant de la nature physico-
chimique du matériau, sauf |E|, ω et t, qui sont respectivement l’amplitude du champ élec-
trique extérieur (l’onde traversant le matériau), la fréquence angulaire de cette onde et le
temps.

Selon [6], on a que la solution générale de toute équation différentielle linéaire du deuxième
ordre est nécessairement formée de la somme d’une de ses solutions particulières et de sa
solution homogène (i.e. la solution générale de l’équation 1.7 de laquelle on retranche l’ex-
ponentielle). Étant donné que cette solution se comportera comme un oscillateur amorti (voir
[14]), la norme de toute solution homogène déclinera exponentiellement jusqu’à s’annuler.
Notre tâche est donc de trouver une solution particulière de 1.7. Il n’est pas difficile de voir
que t 7→ zeiωt devrait faire l’affaire, où z est une constante complexe bien choisie. Après
substitution dans l’équation et élimination des exponentielles e−iωt , on obtient

−mzω 2 = −izMω + kz + q|E|

où on isole z, pour obtenir


q|E|
z= .
k + iMω − mω 2
Il n’est de plus q
pas difficile de voir à partir de 1.7 que la fréquence angulaire de résonnance
k
du système est m . En effet, il s’agit de la fréquence angulaire de la solution d’un oscillateur
q
k
libre et non-amorti (représenté par 1.7 avec |E| = M = 0). En notant ω0 := m cette
M
fréquence de résonnance (en rad/s) et γ = m le coefficient d’amortissement, la solution de
1.7 devient
q|E| q|E|/m
y(t) = eiωt = 2 eiωt . (1.8)
k + iMω − mω 2 ω0 − ω 2 + iγω

7
Si on reprend la définition de la polarisation (P = qN d, où d = y ici) et si on suppose que les
oscillateurs moléculaires n’intéragissent pas entre eux, on obtient la polarisation suivante

q2 |E|N 1
P(t, ω ) = qN y(t) = 2
eiωt
m ω0 − ω 2 + iγω

où N est le nombre de dipôles par unité de volume (qu’on suppose constant) dans le diélec-
trique. Rappelons qu’en régime linéaire et harmonique, on a que P(t, ω ) = e0 χ(ω )E(t, ω ),
où on note la linéarité et le fait que la polarisation est alignée dans la même direction que le
champ électrique. On en déduit donc que

q2 N 1 ω 2p
χ(ω ) = =
e0 m ω02 − ω 2 + iγω ω02 − ω 2 + iγω
q
q2 N
où on a noté ω p = e0 m , qu’on appelle aussi (à titre indicatif) fréquence de plasma. L’indice
de réfraction complexe nc et la permittivité électrique sont définis en général en fonction de
la susceptibilité électrique. On calcule

ω 2p ω02 − ω 2 + iγω
n2c (ω ) = 1 + χ(ω ) = 1 + = 1 + ω 2p
ω02 − ω 2 + iγω (ω02 − ω 2 )2 + γ2 ω 2
et on note q
nc (ω ) = n(ω ) − iκ (ω ) = er0 (ω ) − ier00 (ω ) (1.9)

D’un point de vue mathématique, on remarque que l’indice de réfraction n’est à priori pas
bien défini, étant donné qu’en général un nombre complexe possède deux racines carrées.
Pour résoudre l’ambiguïté, on choisira en général l’unique racine située dans le premier ca-
dran (l’unicité et l’existence viennent du fait que la partie imaginaire de n2c (ω ) est strictement
positive).

D’un point de vue physique, on remarque aussi que ce modèle prédit parfois que n(ω ) < 1
pour des frequences ω plus grandes que la fréquence de résonance ω0 (voir par exemple le
graphique de n dans 1.5). Il s’agit en apparence d’une contradiction directe avec la théorie
de la relativité restreinte, qui prévoit qu’une onde électromagnétique ne peut voyager à une
vitesse de groupe plus grande que la vitesse de la lumière (c = 2.998 · 108 m/s). Nous revien-
drons plus loin sur la notion de vitesse de groupe, mais comme on considère ici des ondes
monochromatiques, la vitesse de groupe sera égale à la vitesse de translation de la sinusoïde,
aussi appelée vitesse de phase.

En fait, les structures moléculaires possèdent plusieurs fréquences de résonnance, ce qui


correspond à une somme de termes de la même forme. En fait, lorsqu’on fait les calculs dans
le paradigme quantique, on se retrouve également avec une somme de ces termes :

N ω 2p,i
n2c (ω ) = 1 + ∑ (1.10)
i =1 ωi2 − ω 2 + iγi ω

8
7 3
γ : 5e+12 Hz γ : 5e+12 Hz
6 γ : 2e+13 Hz γ : 2e+13 Hz
γ : 5e+13 Hz γ : 5e+13 Hz
2.5
5 γ : 1e+14 Hz γ : 1e+14 Hz
γ : 2e+14 Hz γ : 2e+14 Hz
4 γ : 5e+14 Hz γ : 5e+14 Hz
2
3

2
εr’(ω)

n(ω)
1.5
1

0
1

−1

−2
0.5

−3

−4 0
0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5
Fréquence angulaire (ω) (en Hz) x 10
14
Fréquence angulaire (ω) (en Hz) x 10
14

5 3
γ : 5e+12 Hz γ : 5e+12 Hz
4.5 γ : 2e+13 Hz γ : 2e+13 Hz
γ : 5e+13 Hz γ : 5e+13 Hz
2.5
γ : 1e+14 Hz γ : 1e+14 Hz
4
γ : 2e+14 Hz γ : 2e+14 Hz
γ : 5e+14 Hz γ : 5e+14 Hz
3.5
2

3
εr’’(ω)

κ(ω)
2.5 1.5

1
1.5

1
0.5

0.5

0 0
0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5 0.5 1 1.5 2 2.5 3 3.5
Fréquence angulaire (ω) (en Hz) x 10
14
Fréquence angulaire (ω) (en Hz) x 10
14

F IGURE 1.5 – Résultat du modèle de Lorentz avec les paramètres ω p = ω0 = 2 · 1014 Hz.

Pour obtenir la formule de Sellmeier, on suppose en plus que l’onde est suffisament loin
des fréquences de résonance ωi , ce qui produit une formule de dispersion sans absorption
(γi ≈ 0) de l’indice de réfraction. En reformulant le tout en fonction de la longueur d’ondes
2πc
dans le vide λ = ω , on obtient, en renommant les constantes, l’utile formule de Sellmeier

N ωi2 N
A i λ2
n2c (ω ) = 1 + ∑ 2 2
= 1 + ∑ 2 2 (1.11)
i =1 ω i − ω i =1 λ − λ i

Plus loin dans ce mémoire, nous allons incorporer cette formule d’indice de réfraction dans
notre modèle de fibre optique microstructurée afin d’obtenir la dispersion chromatique. Mais
pour l’instant, considérons la validité physique de ce modèle en discutant brièvement des
relations de Kramers-Kronig.

1.3.3 Relations de Kramers-Kronig

On remarquera ici qu’en supposant la fréquence angulaire de lumière suffisament éloignée


des fréquences de résonance, nous avons introduit N singularités dans notre modèle d’in-
dice de réfraction, soit une en chaque λi . Physiquement, ceci implique que nous avons ob-
tenu un modèle d’indice de réfraction à valeurs réelles, sans absorption intrinsèque. Or, en

9
pratique, toute onde électromagnétique traversant un matériau dispersif entraine de l’ab-
sorption. Théoriquement, ceci se justifie par les relations de Kramers-Kronig, qui décrivent
à l’aide de la transformée de Hilbert (voir [22]) la relation en les parties réelles réelle et ima-
ginaire de la susceptibilité électrique χ. On a plus précisément selon [28] que

2 ∞ s Im(χ(s))
Z
Re(χ(ω )) = Re(n2 (ω ) − 1) = (1.12)
π 0 s2 − ω 2
Z ∞
2 ω Re(χ(s))
Im(χ(ω )) = Im(n2 (ω ) − 1) = (1.13)
π 0 ω 2 − s2

Ces relations sont valides lorsque χ(ω ) est analytique et tend vers 0 aussi rapidement ou
plus vite que 1
|ω |
lorsque |ω | → ∞. Ici, ω est vue comme une variable complexe et nous
référons le lecteur à [15] pour plus de détails.

De quelle utilité les relations 1.12-1.13 seront-elles dans notre modèle de fibre optique mi-
crostructurée ? En pratique, elles sont utilisées afin de prédire la dispersion associée à un
matériau à partir des pertes mesurées. Or, nous souhaitons avoir un modèle qui prédit à
la fois l’atténuation et la dispersion chromatique dans une fibre, en supposant les valeurs
d’indice de réfraction connues.

Notons, d’une part, qu’on peut montrer que le modèle de Lorentz à valeurs complexes (avec
γi 6= 0) vérifie les relations de Kramers-Kronig (voir [22]). Cependant, si on souhaite utiliser
la formule de Sellmeier (avec γi = 0), alors les conditions d’analyticité ne seront pas respec-
tées et Kramers-Kronig ne sera pas valide. C’est pour cette raison que nous n’utiliserons pas
ces relations dans notre modèle de fibre optique.

1.4 Milieu homogène

Afin de bien comprendre l’importance des difficultés reliées à la dépendance fréquentielle


de l’indice de réfraction complexe (et plus tard de son analogue dans les guides d’ondes :
l’indice effectif), commençons par dériver la plus simple des solutions non-constantes des
équations de Maxwell : l’onde monochromatique polarisée linéairement. On se place ici dans
un milieu où er et µr = µ0 sont uniformes en espace (dans R3 ). Les équations de Maxwell
deviennent

div(E) = 0 (1.14)
div(B) = 0 (1.15)
∂B
rot(E) = − (1.16)
∂t
∂E
rot(B) = µ0 e0 er (1.17)
∂t

10
En prenant le rotationel de part et d’autres de 1.16 et 1.17, on calcule

∂2 E
   
∂B ∂ ∂ ∂E
rot(rot(E)) = −rot = − (rot(B)) = − µ 0 e0 e r = − µ 0 e0 e r 2
∂t ∂t ∂t ∂t ∂t
∂2 B
   
∂E ∂ ∂ ∂B
rot(rot(B)) = rot µ0 e0 er = µ0 e0 er (rot(E)) = µ0 e0 er − = − µ 0 e0 e r 2
∂t ∂t ∂t ∂t ∂t

Comme rot ◦ rot = grad ◦ div − div ◦ grad, on conclut en utilisant 1.14 et 1.15

∂2 E
∆E = µ0 e0 er (1.18)
∂t2
∂2 B
∆B = µ0 e0 er 2 (1.19)
∂t
Notons que ces équations non-couplées représentent des conditions nécessaires et non suffi-
santes, à tout de moins sans condition limite appropriées.
∂ ∂
On supposera que la solution est invariante dans le plan ( x, y), i.e. que
= ∂y = 0. Bien que
∂x
cette condition ne soit pas physiquement réaliste, elle permet quand même de représenter
localement une onde électromagnétique dans un matériau homogène. On se retrouve donc
avec six équations des ondes (en considérant les composantes) à deux variables. Pour le
champ électrique, on aura
∂2 E  n 2 ∂2 E
c
= (1.20)
∂z2 c dt2
où n2c = er ∈ C et c = √1 .
e0 µ 0 On sait de [25] que toute solution de l’équation des ondes
sera nécessairement de la forme de d’Alembert ( x, t) 7→ f 1 ( ncc t − x ) + f 2 ( ncc t + x ), les termes
de la somme correspondant respectivement à des ondes voyageant en directions positive et
négative de l’axe des z.

Cependant, pour bien faire l’analogie avec ce qui suivra dans les deux prochains chapitres,
on modifiera légèrement 1.20 avant de la résoudre. En fait, comme toute fonction de carré
intégrable peut être représentée comme une superposition d’exponentielles complexes grâce
à la transformée de Fourier, on ne perd pas en généralité en travaillant en régime harmonique
selon t, i.e. en supposant que la solution est de la forme (z, t) 7→ E(z)eiωt (on fait ici un abus
de notation en réutilisant la lettre E pour la composante spatiale). On a alors que 1.20 devient
une équation différentielle ordinaire en x :

d2 E
2
= − ( k 0 n c )2 E ( z ) (1.21)
dz
ω
où k0 = c. On appelle la fonction β(ω ) = k0 nc (ω ) la relation de dispersion de l’onde, une
relation qui jouera un rôle fondamentale plus tard dans les guides d’ondes linéaires. L’équa-
tion 1.21 est la version unidimensionnelle de l’équation classique de Helmholtz. Sa solution
générale peut être exprimée par une exponentielle complexe de la forme z 7→ Ae−ik0 nc z avec
le vecteur complexe A ∈ C3 . On supposera que les trois composantes complexes de A sont

11
en phase, i.e. que l’onde plane est polarisée linéairement (il s’agit là d’une hypothèse phy-
sique). Aussi, on rappelle que l’indice de réfraction complexe nc = n(ω ) − iκ (ω ) aura une
dépendance en ω, ce qui donne

E(z, t) = E0 ei(ωt−k0 n(ω )z) e−k0 κ (ω )z v (1.22)

où E0 ∈ C et v ∈ R3 (qu’on suppose de norme unitaire) sont quelconques. De plus, pour


retrouver la solution physique du champ électrique, notons qu’il est nécessaire de considérer
seulement la partie réelle de 1.22 :

E(z, t) = E0 cos (ωt − k0 n(ω )z + φ) e−k0 κ (ω )z (1.23)

où φ est la phase associée à E0 et E0 = | E0 |v. En raison de l’exponentielle décroisant, on re-


marque que cette solution réelle ne vérifie pas la formule de d’Alembert, bien que la version
complexe la vérifie. Cette apparente contradiction est dû au fait que dans 1.23, on pourrait
croire que les parties réelles et imaginaires de chaque composante sont découplées et donc
que chacune des parties vérifie la formule de d’Alembert. Or, comme l’indice de réfraction
est à valeur complexe, sa partie réelle interagit avec sa partie imaginaire dans 1.21, ce qui
implique que chacune des ces parties réelle et imaginaire ne vérifie pas nécessairement la
formule de d’Alembert.

Ceci étant dit, il nous reste à vérifier la loi de Gauss 1.1, i.e. que la divergence spatial ∇ · n2c E


est nulle. On rappelle que l’indice de réfraction est uniforme en espace et que E n’a pas de
∂Ez
dépendance en x et y, ce qui implique que cette loi se résume à vérifier que ∂z = 0. Après
avoir calculé la dérivée, on a que cette condition revient à vérifier l’équation

κ (ω ) E0,z cos (ωt − k0 n(ω )z + φ) = n(ω ) E0,z sin (ωt − k0 n(ω )z + φ)

pour tout t et z, où E0,z est la composante de l’amplitude dans la direction de propagation


(l’axe des z). On peut facilement se convaincre que le seul cas physiquement et mathémati-
quement possible permettant de vérifier cette équation est celui où E0,z = 0. Cela veut donc
dire que le champ électrique d’une onde harmonique plane est nécessairement transversal à
la direction de propagation, une condition qui sera fausse en général dans les guides d’ondes
optiques.

En complément, mentionnons qu’on peut, en régime harmonique selon t, déterminer la dis-


tribution de B à partir de la loi de Faraday 1.3. À titre indicatif, cela donne en notation
complexe

1  
B(z, t) = ∇ × E0 ei(ωt−k0 nc (ω )z+φ)
−iω
−ik0 nc (ω )   nc (ω )
= k × E0 ei(ωt−k0 n(ω )z+φ) = (k × E0 ) ei(ωt−k0 nc (ω )z+φ)
−iω c

12
F IGURE 1.6 – Exemple d’onde électromagnétique plane sans atténuation (Source : [24])
x 10

1.5

0.5

−0.5

−1

−1.5

−2

F IGURE 1.7 – Exemple d’une impulsion lumineuse reçue de forme gaussienne qui s’exprime
( t − t )2
 
en notation complexe E(z, t) = E0 exp − σ20 exp(iω0 t) à une position fixée z, où
ω0 , σ > 0.

où k est le vecteur unitaire aligné positivement sur l’axe des z. On voit encore une fois que
l’indice de réfraction complexe complique les choses en introduisant une phase supplémen-
taire dépendant de la fréquence angulaire. On peut toutefois conclure que le champ magné-
tique est orthogonal au champ électrique et à la direction de propagation, tel qu’illustré à la
figure 1.6 dans le cas où κ = 0.

Maintenant que nous avons un premier ensemble de solutions aux équations de Maxwell
(paramétrisées par ω, | E0 | et φ dans le cas réel et ω, E0 et v dans le cas complexe), nous
allons montrer comment on peut les combiner pour mieux comprendre les phénomènes de
dispersion et d’atténuation.

1.4.1 Superposition d’ondes planes monochromatiques


Dans cette section, on ignorera volontairement la nature vectorielle du champ électrique et
on travaillera exclusivement en notation complexe. Plus précisément, en reprenant 1.22, on
considèrera la version scalaire de l’onde plane monochromatique linéairement polarisée

E(z, t) := E(z, t) · v = E0 ei(ωt−k0 nc (ω )z) . (1.24)

13
On souhaite généraliser à d’autres sortes d’ondes en considérant différentes superpositions
de ces ondes, qui respecteront elles aussi les équations de Maxwell étant donné l’hypothèse
de linéarité de la force de retour des molécules face au champ électrique. Rappelons qu’un
des objectifs de ce mémoire est de modéliser la propagation des impulsion lumineuses (telles
qu’illustrées par exemple en 1.7) dans les guides d’ondes optiques. Ce sont ces impulsions
qui, par exemple, transmettent l’information dans un réseau de fibres optiques. Nous ver-
rons plus loin que d’un point de vue mathématique, la seule différence avec la solution dans
les guides d’ondes sera que l’amplitude E0 de l’onde (ou la paire ( E0 , v) en notation com-
plexe) aura une dépendance en ( x, y) et que l’indice de réfraction (qui est égal à l’indice
effectif dans ce contexte) dépendra également de la géométrie du guide d’onde, celle-ci étant
généralement invariante selon l’axe de propagation (i.e. l’axe des z).

Dans le cas linéaire, l’idée principale pour atteindre cet objectif est de voir mathématique-
ment une impulsion lumineuse comme une superposition d’ondes monochromatiques de
fréquence angulaire, de phase et d’amplitude variables (i.e. des sinusoïdes d’amplitude ex-
ponentiellement décroissante ou encore d’exponentielles complexes avec constante de pro-
pagation β = k0 nc complexe à dépendance fréquentielle).

Mentionnons ici qu’il faut voir physiquement la fréquence angulaire comme une variable
indépendante associée à la lumière produite, car elle ne change pas à l’interface de deux
matériaux (voir [14]), contrairement à la longueur d’onde. D’ailleurs, lorsqu’on parle de la
longueur d’onde comme variable indépendante, on fera référence à longueur d’onde dans
2πc
le vide λ = = 2π
ω k0 et non à la "vraie" longueur d’onde

β , qui varie en fonction du guide
d’ondes, du matériau, etc.

Rappelons certaines techniques d’analyse de Fourier qui nous permettront de décomposer


une impulsion lumineuse en une superposition d’ondes monochromatiques. D’une part, on
a la technique bien connue des séries de Fourier, qui s’applique dans notre cas d’impulsion
lumineuse en exprimant le champ électrique E(z, t) : R → C en notation complexe :


1 2π
E(z, t) = √

∑ T
Cm ei(ωm t− β m z) (1.25)
m=−∞

2πm ωm n c ( ωm )
où ωm := T et β m := c . On note l’apparition de fréquence négatives ωm ≤ 0, qui
sont difficilement justifiables d’un point de vue physique. Cette difficulté est résolue par le
fait qu’en utilisant la notation complexe, toute impulsion lumineuse raisonnable (comme
celle de la figure 1.7) sera telle que le calcul de ses coefficients donnera Cm ≈ 0 pour tout
m≤0

En fait, le principal inconvénient ici est que toute impulsion représentée de cette façon sera
périodique en temps. On peut en effet vérifier facilement que la fonction t 7→ E(z, t) sera
de période T, peu importe le z fixé. En prenant le produit scalaire (celui de L2 (− T2 , T2 )) avec

14
e−iωm t , il n’est pas difficile de voir les coefficients dans l’égalité 1.25 seront donnés par

Z T/2
1
Cm = √ E(0, t)e−iωm t dt (1.26)
2π − T/2

où E(0, t) est donné. Soulevons le fait qu’on peut très bien (en considérant une somme finie)
approximer toute fonction de L2 (− T/2, T/2) à e > 0 près selon le produit scalaire associé
à cet espace. Les meilleurs coefficients pour une telle approximation sont donnés également
par 1.26. Cette dernière affirmation se justifie par le fait que les coefficients déterminent une
projection sur un sous-espace de dimension finie de L2 (− T2 , T2 ), et que les coefficients 1.26
déterminent en fait la projection de E(0, t) dans cet espace. Cette façon de faire nous permet-
tra de simuler une impulsion en considérant un grand nombre d’ondes planes à partir de la
version discrète de 1.18.

D’une part, il est intéressant de constater que plus T est grand, plus le peigne de fréquences
T : m ∈ Z} devient dense dans R et l’expression 1.25 tend vers l’intégrale impropre de
{ 2πm
Riemann de E(0, t)ei(ωt− β(ω )z) en ω dont les bornes sont −∞ et ∞. D’autre part, si l’amplitude
de l’impulsion tend rapidement vers 0 lorsque |t| → ∞, on constate que l’intégrale dans 1.26
tendra vers l’intégrale de la transformée de Fourier de E(0, t) évaluée en ωn , et aussi notée
F [ E(0, t)] (ωn ). On rappelle qu’on peut définir la fonction F [ E(0, t)] : R → C pour toute
impulsion initiale E(0, t) de carré intégrable au sens de Lebesgue. L’intégrale 1.26 converge
donc vers l’intégrale impropre
Z ∞
1
F [ E(0, t)] (ω ) = √ E(0, t)e−iωt dt (1.27)
2π −∞

tandis que la relation 1.25 converge vers la relation


Z ∞
1
E(z, t) = √ F [ E(0, t)] (ω ) ei(ωt− β(ω )z) dω (1.28)
2π −∞

Physiquement, cette dernière équation peut être vue comme une superposition d’une infi-
nité indénombrable d’ondes monochromatiques. Mathématiquement, on considère E(0, t)
comme étant donnée et E(z, t) comme décrivant l’évolution de l’impulsion en espace et en
temps. Mentionnons au passage que les équations 1.27 et 1.28 avec z = 0 forment un théo-
rème et restent valide dans le contexte où on considère l’intégrale au sens de Lebesgue (voir
[26] pour les démonstrations). Cet outil mathématique est fondamental en optique car il per-
met d’analyser le "contenu spectral" d’un paquet d’ondes dans toute sorte de contexte. À
titre d’exemple, on a illustré à la figure 1.8 la transformée de Fourier de l’impulsion illustrée
en 1.7.

Comme nous allons le voir, les séries de Fourier seront davantage utiles, étant donné notre
désir de simuler numériquement ces impulsions dans les fibres optiques microstructurées.

15
x 10

6
|F [E(0, t)] (ω)|
σ
5

2

0
−5 0
0
5
ω0 14
x 10
10
ω

F IGURE 1.8 – Amplitude de la transformée de Fourier de l’impulsion illustrée en 1.7 en


supposant t0 = 0, la phase étant nulle dans ce cas. L’expression
 générale de cette 
2
transformée est donnée par F [ E(0, t)] (ω ) = √σ exp − σ4 (ω − ω0 )2 + (ω − ω0 )t0 i
2

F IGURE 1.9 – Géométrie d’un guide d’ondes planaire avec son profil d’indice de réfraction
de forme hypergaussienne

1.5 Milieu non-homogène

La résolution précédente des équations de Maxwell reposait sur l’homogénéité de la permit-


tivité relative. Nous allons dans ce qui suit généraliser cette situation de deux façons, que
nous analyserons au prochain chapitre avec des outils d’analyse fonctionnelle. En premier
lieu, on considérera les guides d’ondes planaires et en second lieu, les fibres optiques.

1.5.1 Guide d’ondes optiques planaire

Complexifions légèrement la situation en ajoutant une perturbation selon y de l’indice de ré-


fraction, ce qui donnera un guide d’ondes optiques planaire (dans R3 ). Il est nommé ainsi car
il guide les ondes aux fréquences optiques et que les propriétés du matériau sont homogènes
dans les plans parallèles à O xz. La pertinence d’un tel modèle dans ce mémoire réside dans
sa simplicité mathématique tout en permettant d’illustrer les concepts physiques importants
comme la dispersion et l’atténuation. L’hypothèse qui simplifie les équations de ce modèle

16
est l’invariance selon l’axe des x :
∂Ex ∂Ey ∂Ez ∂Bx ∂By ∂Bz
= = =0= = =
∂x ∂x ∂x ∂x ∂x ∂x
On suppose aussi qu’il existe R > 0 tel que n(y) est constant pour tout y ≥ R. Les solutions
recherchées seront alors de la forme

E( x, y, z, t) = E0 (y)ei(ωt− βz) = E0 (y)ei(ωt−k0 ni z) (1.29)


B( x, y, z, t) = B0 (y)ei(ωt− βz) = B0 (y)ei(ωt−k0 ni z) (1.30)

où on rappelle que ω ∈ R est la fréquence angulaire et k0 = λ ∈ R est le nombre d’onde


k0 ∈ C et appelée indice effec-


β
dans le vide. On a introduit une nouvelle variable notée ni :=
tif. L’indice effectif est égal à l’indice de réfraction lorsque le milieu est uniforme (comparer
1.29 à 1.22) et sa valeur peut être bornée en fonction de l’indice de réfraction (voir prochain
chapitre). En utilisant la définition du rotationnel, l’équation 1.3 (i.e. rot(E) = − ∂B
∂t ) devient
dans ce contexte
dEz
+ iβEy + iωBx = 0 (1.31)
dy
βEx − ωBy = 0 (1.32)
dEx
− iωBz = 0 (1.33)
dy
n2 ∂E
et l’équation 1.4 (i.e. rot(B) = c2 ∂t
en réarrageant les constantes) devient

dBz  n 2
+ iβBy − iωEx = 0 (1.34)
dy c
 n 2
βBx + ωEy = 0 (1.35)
c
dBx  n 2
+ (iω ) Ez = 0 (1.36)
dy c
T
où on a noté E0 = Ex , Ey , Ez en omettant la dépendance en y. Or, il est possible de réor-
ganiser ces équations en deux systèmes indépendants formés d’une part de 1.31, 1.35, 1.36
et d’autre part de 1.34, 1.32, 1.33. Dans ce contexte, la solution complète du champ électro-
magnétique (E0 , B0 )ei(ωt− βz) peut donc toujours être vue comme une superposition de deux
modes, appelés TM et TE pour "transverse magnetic" et "transverse electric". Dans le cas TM,
on suppose que By = Ex = Bz = 0 et on n’a qu’à résoudre
   2 
d 1 dBx β 2
= − k 0 Bx (1.37)
dy n2 dy n2
pour ensuite déduire Ey et Ez à l’aide de 1.35 et 1.36. Dans le cas TE, on pose Bx = Ey = Ez =
0 et on n’a qu’à résoudre

d 2 Ex
= β2 − k20 n2 Ex .

2
(1.38)
dy

17
1
On serait alors tenté de sortir le terme n2
de la première dérivée de 1.37, mais on doit se
rappeler que dans le présent contexte, n dépend de y. C’est d’ailleurs lorsque cette dépen-
dance est bien choisie que le milieu pourra guider la lumière, comme dans le guide d’ondes
planaire à gradient d’indices illustré à la figure 1.9.

On verra au prochain chapitre qu’un mode guidé est défini formellement comme étant une
solution non-nulle de carré intégrable (d’énergie finie) d’un probème aux valeurs propres. En
général, pour un guide d’ondes, il est faux de dire que les équations 1.37 et 1.38 ainsi que plus
généralement le système 1.31-1.36 n’admettent que des modes guidées comme solutions.
On retrouve en particulier deux autres sortes de modes, appelés modes de fuite et modes
radiatifs. De surcroît, il n’existe pas nécessairement de modes guidés pour une paire (ω, β)
arbitraire. Nous reviendrons plus tard sur ces points importants lorsqu’on fera l’analyse
spectrale du champ magnétique.

1.5.2 Dispersion et vitesse de propagation


Introduisons maintenant la notion importante de relation de dispersion associée à un mode.
Ces courbes (un guide d’ondes peut en avoir plusieurs) décrivent la relation entre les valeurs
de β et ω pour lesquelles il existe un mode guidé. Sous certaines conditions, ces courbes
possèdent des propriétés mathématiques utiles telles que la monotonicité et la continuité,
ce que nous allons d’ailleurs démontrer rigoureusement au prochain chapitre. Ces relations
permettent de définir plusieurs concepts physiques importants nous permettant de mieux
comprendre le phénomène de dispersion, à commencer par les vitesses de phases v p et de
groupe v g , définies comme
 γ  −1   −1

v p (ω ) = v g (ω ) =
ω dω

où γ = Re( β) et ω > 0. Si l’interprétation de la vitesse de phase est directe, celle de la vitesse


de groupe est quant à elle plus délicate. D’un côté, on voit facilement que la vitesse de phase
correspond à la vitesse de translation d’une onde monochromatique, dépendant donc d’une
seule paire ( β, ω ). De son côté, la vitesse de groupe est définie davantage en considérant β
comme une fonction de ω.

En fait, il est possible de montrer que si le contenu spectral d’une impulsion brève est centré
en une fréquence angulaire ω0 (telle qu’illustrée en 1.7 et 1.8), l’enveloppe de l’impulsion
et son énergie se déplacent à une vitesse égale v g (ω0 ) (tel que justifié dans [21]). Notons
que ceci est justifié dans le cas où le milieu n’entraîne aucune perte, i.e. lorsque l’indice de
réfraction est réel. Nous prendrons pour acquis cette affirmation plus généralement dans le
cas qui nous intéresse, i.e. dans un milieu avec pertes.

Comme on l’a illustré plus tôt, une impulsion brève doit être vue mathématiquement comme
une superposition d’un continuum de mode guidés, chacun se déplaçant à une vitesse de

18
F IGURE 1.10 – Illustration des vitesses de groupe et de phase à gauche. Courbes de
dispersion à droite (tirées de [23]) d’un
r guide d’ondes planaires à saut d’indices, où on a
n2coeur −n2gaine n2i −n2gaine
v := k0 ncoeur d n2gaine
, b := ncoeur −n2gaine
2

phase v p (ω ) Fixons une fréquence ω0 > 0 et exprimons la partie réelle de la courbe de dis-
persion γ = f (ω ) (qu’on supposera deux fois dérivables) sous la forme d’un développement
de Taylor (voir [8]) d’ordre deux autour de ω0 :

f (ω ) = f (ω0 ) + (ω − ω0 ) f 0 (ω0 ) + (ω − ω0 )2 f 00 (ω0 ) + o ((ω − ω0 )2 ) (1.39)


0 1 ∂γ
f ( ω0 ) = = (1.40)
vg ∂ω ω =ω0
est l’inverse de la vitesse de groupe et
∂2 γ

0
f ( ω0 ) = (1.41)
∂ω 2 ω =ω0
est appelée la dispersion de vitesse de groupe. Le point crucial pour nous est que si f res-
semble localement à une droite autour de ω0 , alors l’enveloppe de l’impulsion brève main-
tiendra sa forme.

D’abord, si cette droite intersecte l’origine, alors la vitesse de phase est approximativement
constante autour de ω0 et l’onde se déplace en translation selon l’axe des z. De plus, même si
cette droite ne passe pas par l’origine (et donc que la vitesse de phase dépend localement de
ω), alors l’enveloppe de l’impulsion gardera quand même sa forme. Dans ce cas, les crêtes
de l’impulsion se propageront à une vitesse différente de leur enveloppe. Nous justifierons
numériquement cette affirmation au chapitre 3 en simulant des impulsions brèves à l’aide
de différentes relations de dispersion.

D’une part, nous nous limiterons, dans certaines sections de ce mémoire, au mode fonda-
mental, i.e. au mode guidé associé au γ le plus élevé pour un ω fixé. Cette restriction inclut

19
le cas important des guides d’ondes monomodes, qui sont particulièrement utilisés en pra-
tique comme par exemple dans les réseaux de télécommunication à large échelle (voir [30]).
Il s’agit de guides d’ondes pour lesquels seul le mode fondamental existe, ce qui réduit la
dispersion associés à la superposition de modes.

Enfin, nous nous intéresserons aux fréquences incluses dans le spectre visible ou l’infrarouge
proche, c’est-à-dire pour les valeurs de ω variant entre 2 environ 1014 et 1015 rad/s. Celles-
ci sont souvent utilisées en pratique étant donné le peu de pertes associées aux impulsions
émises dans leur voisinage. Nous reviendrons également sur les modèles de pertes au cha-
pitre 3.

1.5.3 Fibres optiques microstructurées

Terminons ce chapitre en introduisant le modèle de fibres optiques microstructurées, qui sera


analysé et simulé dans les prochains chapitres. Considérons d’abord une fibre de longueur
infinie selon l’axe des z. On suppose que les propriétés des matériaux varient seulement de
façon transversale selon ( x, y) ∈ Ω, où Ω est soit un domaine compact à frontière régu-
lière (on parlera de guide d’ondes fermé) ou encore est égal à R2 (on parlera alors de guide
d’ondes ouvert).

L’indice de réfraction complexe sera donc invariant en z, la direction de propagation de


l’onde. Ici, les définitions précédantes de constante de propagation, d’indice effectif, de dis-
persion et d’atténuation sont identiques au cas des guides d’ondes planaires. De plus, les
hypothèses physiques demeurent, telles que la polarisation linéaire, la non-conductivité et
l’indice de réfraction complexe variant en fonction de la fréquence. La seule différence sera
au niveau du profil d’indice de réfraction et de la dépendance en ( x, y). On cherche une
solution aux équations 1.1-1.4 de la forme

E( x, y, z, t) = E0 ( x, y)ei(ωt− βz) (1.42)


B( x, y, z, t) = B0 ( x, y)ei(ωt− βz) (1.43)

où on décompose généralement E0 = ( Ex , Ey , Ez ) = (Et , El ) en fonction de sa partie trans-


versale Et : Ω → C2 et sa partie longitudinale El : Ω → C. En faisant de même pour B0 , on
obtient après substitutions dans les équations de Maxwell

divβ (n2 E0 ) = 0 (1.44)


divβ (B0 ) = 0 (1.45)
rotβ (E0 ) = −iωB0 (1.46)
rotβ (B0 ) = in2 ωE0 (1.47)

2. On utilise ici les unités rad/s pour les fréquences angulaires ω et les Hz pour les simples fréquences f 0

20
où on note généralement
 
rotβ (V) := eiβz rot Ve−iβz
 
∂Vz ∂Vz ∂Vx ∂Vy
= −iβVy − , + iβVx , −
∂y ∂x ∂y ∂x
 
divβ (V) := eiβz div Ve−iβz
∂Vx ∂Vy
= + − iβVz
∂x ∂y

pour β ∈ C et pour un champ vectoriel V : R2 → C3 , qu’on supposera suffisament dérivable


au sens classique pour l’instant. Notons que ces nouveaux opérateurs consistent simplement
à remplacer les dérivées ∂
∂z par une multiplication par −iβ. Afin d’isoler le champ magné-
tique B0 ou électrique E0 , on prend le rotationel de part et d’autres de 1.46 et on divise 1.47
par n2 avant de prendre le rotational là aussi. Ce faisant, on obtient

rotβ (rotβ (E0 )) = rotβ (−iωB0 ) = n2 ω 2 E0


 
1
rotβ rotβ (B0 ) = rotβ (iωE0 ) = ω 2 B0
n2

ce qui donne finalement les systèmes découplés

rotβ (rotβ (E0 )) = n2 ω 2 E0 (1.48)


divβ (n2 E0 ) = 0 (1.49)

et
 
1
rotβ rotβ (B0 ) = ω 2 B0 (1.50)
n2
divβ (B0 ) = 0 (1.51)

Ce modèle contient toute les hypothèses physiques nécessaires pour l’étude des modes gui-
dés. Certaines manipulations mathématiques seront nécessaires si on veut bien formuler les
équations permettant le calcul de β en fonction de ω. Nous gardons celles-ci pour le prochain
chapitre, où on fera une analyse plus rigoureuse du modèle.

21
Chapitre 2

Analyse spectrale du problème de


modes dans les fibres optiques

En mathématiques appliquées, il est parfois utile de travailler dans un cadre abstrait afin
de dégager les idées nous permettant de généraliser un concept ou démontrer un théorème.
Dans ce chapitre, nous travaillerons dans le cadre de l’analyse fonctionnelle et de la théorie
spectrale afin de dégager les caractéristiques des fibres à saut d’indices nous permettant
de décrire de façon générale les propriétés des courbes de dispersion de toutes sortes de
fibres optiques. Ceci aura des répercussions pratiques, comme par exemple lorsque nous
justifierons plus loin la recherche des indices effectifs (bornes, valeurs de coupure, etc) en
utilisant le principe du min-max. Mais pour l’instant, concentrons-nous sur la formulation
mathématique du problème.

2.1 Formulation du problème


Cette section a comme objectif de formuler le problème d’analyse modale dans le cadre ma-
thématique des opérateurs non-bornés dans des espaces de Hilbert. Nous ferons une dé-
monstration mathématique de l’équivalence entre la formulation du champ électrique et
les deux formulations du champ magnétique. Mais pour ce faire, on doit introduire les es-
paces sur lequels seront définis les opérateurs et formulations variationnelles pour les guides
d’ondes optiques, et plus particulièrement pour les fibres optiques.

2.1.1 Espaces fonctionnels et opérateurs de base pour fibres optiques


Définissons les espaces fonctionnels et opérateurs diférentiels nécessaires pour formuler
notre problème de modes dans les fibres optiques. Nous noterons le produit scalaire et la
norme sur un espace de Hilbert H par h·, ·iH et k · kH . Nous supposerons que le produit sca-
laire sur L2 (Ω)n est de la forme A.24. Enfin, nous utiliserons dans ce chapitre les variables
(x1 , x2 , x3 ) pour désigner les coordonnées ( x, y, z).

23
Définition 2.1. Soient un ouvert 1 Ω ⊂ R2 et β ∈ C. On appelera rotationel vectoriel l’applica-
tion linéaire rotβ : D 0 (Ω)3 → D 0 (Ω)3 définie par
 
∂Λ3 ∂Λ3 ∂Λ2 ∂Λ1
rotβ (Λ) = iβΛ2 + ,− − iβΛ1 , − (2.1)
∂x2 ∂x1 ∂x1 ∂x2

L’idée ici est que pour une transformée de Fourier, prendre la dérivée revient à multiplier
par iβ.

Proposition 2.2. L’application linéaire rotβ devient un opérateur non-borné et fermé sur L2 (Ω)3
lorsque son ensemble de définition est restreint à {F ∈ L2 (Ω)3 | rotβ F ∈ L2 (Ω)3 }.

Démonstration. La linéarité de rotβ est évidente et cet opérateur est non-borné car D(Ω) est
dense dans L2 (Ω) selon [7] et D(Ω)3 ⊂ D (rotβ ).

Il reste à démontrer que rotβ est fermé. Soit une suite (Fn )∞
n=1 ⊂ D (rot β ) telle que Fn → F
et rotβ (Fn ) → G dans L2 (Ω)3 . Nous allons simplement montrer que G1 est égal à iβF2 + ∂F3
∂x2
au sens des distributions, un argument similaire s’appliquant aux autres composantes de G.
Par hypothèse sur Fn , on a que pour tout φ ∈ D(Ω)
Z Z Z  
∂φ ∂Fn,x3
iβ Fn,x2 φdΩ − Fn,x3 dΩ = iβFn,x2 + φdΩ (2.2)
Ω Ω ∂x2 Ω ∂x2

Étant donné l’inégalité de Cauchy-Schwartz et comme la convergence de chaque compo-


sante se fait dans L2 (Ω), on prend la limite de part et d’autres et on obtient
Z Z Z
∂φ
iβ F2 φdΩ − F3 dΩ = G1 φdΩ (2.3)
Ω Ω ∂x 2 Ω

pour tout φ ∈ D(Ω), ce qui signifie que G1 = iβF2 + ∂F3


∂x2 au sens des distributions.

Définition 2.3. Le domaine de rotβ est noté H (rotβ ; Ω). Le résultat A.3 nous dit que cet
espace fonctionnel devient un espace de Hilbert lorsqu’il est muni du produit scalaire


hF, Gi H (rotβ ;Ω) = hF, Gi L2 (Ω)3 + rotβ (F), rotβ (G) L2 (Ω)3 (2.4)

Lorsque Ω = R2 , cet espace sera noté H (rotβ ).

Définition 2.4. Soit un ouvert Ω ⊂ R2 . On appellera rotationel scalaire l’application linéaire


rot : D 0 (Ω)2 → D 0 (Ω) définie par

∂Λ2 ∂Λ1
rot(Λ) = − (2.5)
∂x1 ∂x2

Proposition 2.5. L’application linéaire rot devient un opérateur non-borné et fermé de L2 (Ω)2 vers
L2 (Ω) lorsque son ensemble de définition est restreint à {F ∈ L2 (Ω)2 | rot(F) ∈ L2 (Ω)}.
1. Sans le mentionner à chaque fois, on supposera toujours que Ω est non-vide.

24
Démonstration. Il suffit d’adapter à rot les arguments de la démonstration de 2.2.

Définition 2.6. Comme en 2.3, on définit l’espace de Hilbert H (rot; Ω) en munissant le do-
maine du rotationel scalaire avec le produit scalaire

hF, Gi H (rot;Ω) = hF, Gi L2 (Ω)2 + hrot(F), rot(G)i L2 (Ω) (2.6)

Ici aussi, lorsque Ω = R2 , cet espace sera noté H (rot).

Proposition 2.7. Pour tout ouvert Ω ⊂ R2 et β ∈ C, on a que les espaces fonctionnels H (rotβ ; Ω)
et H (rot; Ω) × H 1 (Ω) sont égaux et les norme induites des deux espaces sont équivalentes.

Démonstration.
 Commençons par l’égalité. Soit ( F1 , F2 , F3 ) ∈ L2 (Ω)3 . Alors, on a clairement
∂F3
que iβF2 + ∂x 2
∂F3
, − ∂x 1
− iβF1 ∈ L2 (Ω) × L2 (Ω) si et seulement si F3 ∈ H 1 (Ω). De plus, on a
par définition que ∂F2
∂x1 − ∂F1
∂x2 ∈ L2 (Ω) si et seulement si ( F1 , F2 ) ∈ H (rot; Ω).

Terminons avec l’équivalence des normes. Soit F = ( F1 , F2 , F3 ) ∈ H (rotβ ; Ω). Alors on a


√  
kFk H (rotβ ;Ω) ≤ 2 kFk L2 (Ω)3 + krotβ (F)k L2 (Ω)3
!


∂F 3 ∂F3
≤ 6 k F k L2 ( Ω )3 +
iβF2 + ∂x2 2
+ − ∂x − iβF1 2
+ krot( F1 , F2 )k L2 (Ω)
L (Ω) 1 L (Ω)
√  
≤ 6(1 + | β|) k F3 k H1 (Ω) + k( F1 , F2 )k H (rot;Ω)

≤ 6(1 + | β|) kFk H (rot;Ω)× H1 (Ω)

√  
kFk H (rot;Ω)× H1 (Ω) ≤ 2 k( F1 , F2 )k H (rot;Ω) + k F3 k H1 (Ω)
!


∂F3 ∂F3
≤ 3 kFk L2 (Ω) + krot( F1 , F2 )k L2 (Ω) +
∂x2 2 +
∂x 2
L (Ω) 1 L (Ω)
√ √
≤ 3(1 + | β|) kFk L2 (Ω) + 3 rotβ (F) L2 (Ω)3


≤ 6(1 + | β|) kFk H (rotβ ;Ω)

où on a utilisé les inégalités ∑in | ai | ≤ ∑in | ai |2 ≤ n ∑in | ai | et k f k ≤ k f − gk + k gk pour
p

tout ( ai ) ∈ Rn et toute norme k · k.

Ce résultat nous dit que l’ensemble H (rotβ ; Ω) et sa topologie ne dépendent pas de β, mais
que la norme et le produit scalaire en dépendent.

Définition 2.8. Soient un ouvert Ω ⊂ R2 et β ∈ C. Alors, on définit les applications linéaires


gradβ : D 0 (Ω) → D 0 (Ω)3 et divβ : D 0 (Ω)3 → D 0 (Ω) par
 
∂Λ ∂Λ
gradβ (Λ) = , , −iβΛ (2.7)
∂x1 ∂x2
∂Λ1 ∂Λ2
divβ (Λ) = + − iβΛ3 (2.8)
∂x1 ∂x2

25
La proposition suivante est facile à vérifier mais sera utile par la suite.

Proposition 2.9. Soit β ∈ C. Alors pour tout F, G ∈ D(R2 )3 et g ∈ D(R2 ), on a que



D E
rotβ (F), G L2 (R2 )3 = F, rotβ (G) 2 2 3 (2.9)
L (R )

D E
divβ (F), g L2 (R2 ) = F, −gradβ ( g) 2 2 3 (2.10)
L (R )

où L2 (R2 )n est muni du produit scalaire A.24 avec e ∈ R constant.

Démonstration. Comme ∂Ω est vide, il suffit d’appliquer la formule de Green. Le terme de


bord est nul car F et G sont à support compact.

Définition 2.10. Soit β ∈ C. Alors on définit les applications linéaires suivantes

rot∗β = rotβ div∗β = −gradβ grad∗β := −divβ (2.11)

Ces définitions peuvent être considérés comme des opérateurs adjoints si on les restreint au
cadre des opérateurs non-bornés sur l’espace des champs vectoriels de carrés intégrables.
Les identités suivantes justifient cependant leur définition dans le cadre plus général des
distributions.

Proposition 2.11. Pour tout β ∈ C, Λ ∈ D 0 (Ω) et Λ ∈ D 0 (Ω)3 , on a

rotβ (gradβ (Λ)) = 0 (2.12)


divβ (rotβ Λ) = 0 (2.13)

De plus, lorsque β > 0, alors

rot∗β (rotβ (Λ)) + div∗β (divβ Λ) = grad∗β (gradβ (Λ)) (2.14)

où grad∗β (gradβ (Λ)) est défini en appliquant grad∗β ◦ gradβ sur chaque composante de Λ.

Le résultat suivant est une conséquence directe des définitions et résultats précédents.

Corollaire. Pour tout F, G ∈ D(Ω)3 et tout β > 0


Z Z Z
rotβ (F) · rotβ (G)dΩ + divβ (F)divβ (G)dΩ = gradβ F · gradβ GdΩ (2.15)
Ω Ω Ω

Proposition 2.12. L’application linéaire divβ devient un opérateur non-borné et fermé de H (rotβ ; Ω)
vers L2 (Ω) lorsque son ensemble de définition est restreint à {F ∈ H (rotβ ; Ω) | divβ ( F ) ∈ L2 (Ω)}.

Démonstration. Il suffit d’utiliser les mêmes arguments qu’en 2.2 et 2.5.

26
Le résultat suivant est important pour l’analyse mathématique du champ magnétique. No-
tons qu’il n’est valide que pour Ω = R2 . Afin de traiter le cas où Ω ⊂ R2 est un compact
à frontière régulière, il serait sans doute nécessaire de considérer les traces de nos champs
vectoriels. Rappelons à titre d’exemple que D(Ω) n’est pas dense dans H 1 (Ω), mais plutôt
dans le sous-espace H01 (Ω).

Définition 2.13. Étant donné β > 0, on note Vβ l’espace de Hilbert associé à l’opérateur
non-borné et fermé divβ avec Ω = R2 .

Théorème 2.14. Pour tout β ∈ R, on a que Vβ et H 1 (R2 )3 sont des ensembles égaux et des espaces
de Hilbert isomorphes.

Démonstration. Voir [2].

Le théorème précédent nous dit que, pour tout F ∈ L2 (R2 )3 , on a que grad(F) ∈ L2 (R2 )6
si et seulement si rotβ (F) ∈ L2 (R2 )3 et divβ (F) ∈ L2 (R2 ). Or, selon la preuve du théorème
précédant on peut conclure que 2.15 tient pour tout F, G ∈ H1 (R2 )3 . Ces deux remarques
seront importants dans la formulation selon le champ magnétique.

2.1.2 Définition des modes guidés, de radiation et de fuite


Dans la littérature mathématique sur les fibres optiques microstructurées (voir par exemple
[33]), on considère généralement trois types de solutions aux équations de Maxwell de la
forme

β ∈C \ {0}
!
E(x)
(x, x3 , t) 7→ exp(i (ωt − βx3 )) (E, H) 6= (0, 0) (2.16)
H(x) ω>0

où on note x = ( x1 , x2 ). Après substitution de 2.16 et en utilisant les applications linéaires


définis ci-dessus, les équations de Maxwell se résument à

rotβ (E) = −iµωH (2.17)


rotβ (H) = ieωE (2.18)

où µ > 0 est constant, e : R2 → R est mesurable et 0 < inf e ≤ sup e < ∞. Il est très peu
probable qu’on arrive à traiter le cas général où e(x) ∈ C \ R sur un ensemble de mesure
non-nulle dans le cadre de la théorie des opérateurs auto-adjoints.

De plus, la dépendance de e envers ω doit être ignorée afin d’avoir un problème linéaire en
ω. Cela sera justifié numériquement au prochain chapitre, où on montrera que la dispersion
totale peut être approximée par les dispersions causées séparément par le matériau et le
guide d’onde.

27
Le lecteur remarquera qu’on a omis les lois de Gauss dans le dernier système d’équations.
Dans le contexte des modes et grâce à l’identité 2.13, on obtient en divisant par les coefficients
constants et en appliquant divβ de part et d’autres de 2.17 et 2.18
 
1
divβ (H) = divβ rot (E)
=0 (2.19)
−iµω β
 
1 1 
divβ (eE) = divβ rotβ (H) = divβ rotβ (H) = 0 (2.20)
iω iω

Ces conditions devront être plus loin prises en compte afin d’obtenir une formulation coer-
cive. Pour l’instant, introduisons les définitions mathématiques de modes guidés, radiatifs
et de fuite.

Définition 2.15. Un champ vectoriel non-nul de la forme 2.16 respectant les équations 2.17
et 2.18 est un mode guidé lorsque β > 0 et (E, H) ∈ L2 (R2 )6 .

On redéfinira plus loin le problème des modes guidés comme un problème aux valeurs
propres (voir [2] et [4]).

Définition 2.16. Un champ vectoriel non-nul de la forme 2.16 respectant les équations 2.17
/ L2 (R2 )6 mais (ψΓ E, ψΓ H) ∈ L2 (R2 )6
et 2.18 est un mode radiatif lorsque β > 0 et (E, H) ∈
pour tout Γ > 0, où ψΓ (x) = e−Γkxk .

Le problème de modes radiatifs est généralement associé à la détermination du spectre


essentiel des opérateurs de fibres optiques. Intuitivement, on peut voir un mode radiatif
comme une onde sinusoïdale bornée s’étendant à l’infini dans l’espace.

Définition 2.17. Un champ vectoriel non-nul de la forme 2.16 respectant les équations 2.17
et 2.18 est un mode de fuite lorsque β ∈ C+ et (E, H) ∈
/ L2 (R2 )6 mais (ψΓ E, ψΓ H) ∈ L2 (R2 )6
pour au moins un Γ > 0, où ψΓ (x) = e−Γkxk et C+ = {z ∈ C | Im(z) > 0}.

Intuitivement, on peut voir un mode de fuite comme divergeant exponentiellement vers ∞


lorsque kxk → ∞ Finalement, pour obtenir une formulation du champ électrique et mettre
en évidence la symétrie entre les champs magnétique et électrique , on fait parfois (comme
dans [18] et [4]) le changement de variables suivant :

E0 := ( E1 , E2 , iE3 ) (2.21)
H0 := ( E1 , E2 , −iH3 ) (2.22)

On remarque que les normes entre E et E0 ainsi qu’entre H et H0 restent inchangées. Après
substitutions, on obtient le système d’équations équivalent suivant

rotiβ E0 = µωH0 (2.23)

28

rotiβ H0 = eωE0 (2.24)

Ce système a l’avantage d’être davantage symétrique en fonction des champs électrique et


magnétique et de e et µ. Cependant, on sait que dans une fibre optique, e varie et µ est
constant. Cette particularité n’est généralement pas utilisée lorsqu’on désire avoir une for-
mulation selon le champ électrique. On supposera alors plus généralement que µ respecte
les mêmes conditions que e. Cependant, si on souhaite simuler le champ magnétique, alors
cette asymétrie peut s’avérer utile.

2.1.3 Reformulation du problème de mode guidé


Si (E, H) ∈ L2 (R2 )6 composent un mode guidé, alors on obtient de 2.17 et 2.18 (par la même
méthode qu’au chapitre 1) que

rotβ (rotβ (E)) = k2 n2 E (2.25)


 
1
rotβ rotβ (H) = k2 H (2.26)
n2
On n’utilisera pas la formulation en E donnée par 2.25, car, contrairement à 2.26, elle ne
présente aucun avantage sur celles qui suivent, qu’on obtient à partir de 2.23 et 2.24
 
1 ∗ 1
rot rotiβ (E ) = ω 2 E0
0
(2.27)
e iβ µ
 
1 1 ∗
rotiβ rot (H ) = ω 2 H0
0
(2.28)
µ e iβ
ω e
où on rappelle que k et ω ainsi que e et er sont directement proportionnels (k = c et er = e0 ).
On voit à nouveau la symétrie gagnée avec les changements de variables 2.21 et 2.22.

2.1.4 Formulation de β(ω ) versus ω ( β)


Physiquement, la fréquence angulaire ω est généralement fixée et le nombre d’onde β en
dépend. En fait, lorsqu’elle transfère d’un milieu à un autre (qui diffèrent selon leur indice
de réfraction), la lumière garde sa fréquence angulaire mais sa constante de propagation
varie. Cependant, d’un point de vue mathématique et numérique, le choix de la variable
indépendante importe peu dans la description des courbes de dispersion.

Nous démontrerons plus tard que sous certaines conditions la courbe β 7→ ω ( β) (il peut y en
avoir plusieurs dans le cas des fibres multimodes) est strictement croissante et continûment
dérivable. En fait, il est même possible de montrer qu’elle est infiniment dérivable presque
partout, ce qui nous permet de considérer rigoureusement la dérivée seconde et donc la
dispersion chromatique. La fonction ω ( β) est donc inversible et son inverse est infiniment
dérivable presque partout. On peut alors considérer le calcul de la dispersion chromatique en
considérant le problème de ω en fonction de β. Or, l’analyse mathématique de ce problème
est beaucoup plus facile que le problème inverse.

29
Selon notre recherche littéraire, l’analyse spectrale du problème ω 7→ β(ω ) avec guide
d’ondes ouvert a été peu étudié par la communauté mathématique. Cela s’explique d’une
par le fait que ce problème spectral est caractérisé par un opérateur qui n’est ni à résol-
vante compacte dans le cas d’un guide d’onde fermé, ni auto-adjoint dans le cas d’un guide
d’ondes ouvert. Mentionnons les résultats de [31] pour une étude approfondie dans le cas
des guides d’ondes fermés. Pour une approche différente appliquant des techniques d’ana-
lyse complexe au cas des guides d’ondes ouverts, on réfère vers [19].

2.2 Analyse spectrale avec le champ magnétique


Il est recommandé de lire l’annexe avant d’aborder cette section. Notre objectif est d’abord
de trouver dans l’espace de Hilbert H := L2 (R2 )3 une forme a : D ( a) × D ( a) → C qui soit
densément définie, hermitienne, coercive et fermée. On veut également que

a ( H1 , H2 ) = h T ( H1 ) , H2 i H (2.29)

pour tout H1 , H2 ∈ D(R2 )3 , où


 
1
T (H) = rotβ rotβ (H) (2.30)
n2
Par la proposition 2.9, on a que rot∗β = rotβ lorsque β > 0 et donc

1
Z
h T ( H1 ) , H2 i H = rotβ (H1 ) · rotβ (H2 )dx (2.31)
R2 n2
pour tout H1 , H2 ∈ D(R2 )3 Le terme de droite s’avère à première vue une forme densément
définie et hermitienne tout à fait convenable avec H (rotβ ) comme domaine.

Si on considère les champs vectoriels de la forme H = gradβ (φ) avec φ ∈ H 1 (R2 ), alors on
voit par 2.12 que cette forme n’est pa coercive. Une solution est d’ajouter un terme (on verra
que cette forme est compatible avec les équations de Maxwell) à cette forme en considérant
plutôt
1 1
Z Z
a β ( H1 , H2 ) : = rotβ (H1 ) · rotβ (H2 )dx + divβ (H1 ) · divβ (H2 )dx (2.32)
R2 n2 R2 n∞
avec D ( a β ) = H 1 (Ω).

Ici, on suppose qu’il existe n∞ > 0 et R > 0 (le rayon du coeur) tels que n( x, y) = n∞ pour
tout x2 + y2 > R2 . Ensuite, on pose

n+ := sup n( x, y) (2.33)
R2

n− := inf n( x, y) (2.34)
R2

et rappelle que physiquement, on suppose que 0 < n− < n+ < ∞. Avec ces hypothèses on
peut maintenant démontrer le théorème suivant

30
Théorème 2.18. Soit β > 0. L’applications sesquilinéaire définie en 2.32 est une forme densément
définie, hermitienne, fermée, coercive et et qui vérifie

1  Z 
2 2 2
a β (H, H) ≤ 2 |grad(H)| + β |H| dx (2.35)
n − R2
1
Z  
a β (H, H) ≥ 2 |grad(H)|2 + β2 |H|2 dx (2.36)
n + R2

pour tout H ∈ H 1 (R2 )3 .

Démonstration. L’application en 2.32 est évidemment hermitienne. Elle est densément définie
car H 1 (R2 )3 ⊂ D ( a β ) est dense dans L2 (R2 )3 . Les inégalités 2.35 et 2.36 sont obtenues en
utilisant 2.15 après avoir remarqué que 1
n2
≤ 1
n2−
et 1
n2
≥ 1
n2−
: La coercivité dans L2 (R2 ) est
1
alors évidente car β > 0. De plus, si β > 0,alors la norme kHk aβ := a β (H, H) 2 est équivalente
à celle de H 1 (R2 )3 , qui est un espace de Hilbert. La forme a β est donc fermée.

Étant donné ce dernier théorème et A.25, il existe un opérateur auto-adjoint et coercif Saβ tel
que D (Saβ ) ⊂ D ( a β ) et
Z
a ( H1 , H2 ) = Saβ (H1 ) · H2 dx ∀(H1 , H2 ) ∈ D (Saβ ) × D ( a β ) (2.37)
R2

En particulier, en appliquant 2.9, on a pour tout H ∈ D (Saβ ) ∩ D(R2 )3


 
1 1
Saβ (H) = rotβ rot β ( H ) − 2 gradβ (divβ (H)) (2.38)
n2 n∞

La proposition suivante confirme la compatibilité de cette formulation avec les équations


de Maxwell. L’idée est d’utiliser la transformée de Fourier sur l’espace des distributions
Λ ∈ D 0 (R2 ) (plus précisément sur le sous-espace des distributions tempérées (voir [27])).

Proposition 2.19. Soit H ∈ H 1 (R2 )3 . Alors, au sens des distributions, on a que



rot 1 rot (H) = k2 H
β n2 β 0
(2.39)
div (H) = 0
β

si et seulement si  
1 1
rotβ 2
rotβ (H) − 2 gradβ (divβ (H)) = k20 H (2.40)
n n∞

Démonstration. L’implication de 2.39 vers 2.40 est évidente. Montrons l’implication en sens
inverse. Appliquons divβ au sens des distributions de part et d’autres de 2.40. En appliquant
l’identité 2.13 et en posant φ = divβ H ∈ L2 (R2 ), on obtient que

1
− divβ (gradβ (φ)) = k20 φ (2.41)
n2∞

31
Par définition de divβ et gradβ , on déduit que

β2
 
1
− 2 ∆φ = k20 − 2 φ (2.42)
n∞ n∞

où ∆ est le laplacien usuel, au sens des distributions. Comme φ ∈ L2 (R2 ), on peut prendre la
transformée de Fourier au sens des distributions tempérées de part et d’autres et on calcule
que
ξ2 β2
 
φ̂ = k20 − φ̂ (2.43)
n2∞ n2∞
En réarrangeant les constantes, on conclut que

ξ 2 − n2∞ k20 − β2

φ̂ = 0 (2.44)

Or, la solution à cette équation au sens des distirbutions tempérées est une combinaison
linéaire de deltas de dirac de la forme

φ̂ = Aδ(C − ξ ) + Bδ(C + ξ ) (2.45)

/ L2 (R2 ). On conclut donc que


où C := n2∞ k20 − β2 . Si A 6= 0 ou B 6= 0, alors on aurait que φ ∈
φ̂ = 0 et divβ H = φ = 0, ce qui complète la démonstration.

Par ce résultat, on a que toute solution H ∈ H 1 (R2 )3 de


 
1 1
rotβ 2
rotβ (H) − 2 gradβ (divβ (H)) = k20 H (2.46)
n n∞

vérifie les équations de Maxwell (au sens des distributions).

2.2.1 Bornes sur les valeurs propres

Proposition 2.20. Le spectre de Saβ vérifie

β2
 
σ (Sa β ) ⊂ ,∞ (2.47)
n2+

β2
De plus, n2 n’est jamais une valeur propre de Saβ . Lorsqu’on reformule ceci en fonction des indices
+
effectifs neff , ceci revient à
neff < n+ (2.48)

Démonstration. Selon l’inégalité 2.36, on a pour tout H ∈ D (Saβ ) que

D E β2
Sa β (H), H = a β (H, H) ≥ kHk2H (2.49)
H n2∞

32
β2
L’inclusion 2.47 suit par la proposition A.22. De plus, si Saβ (H) = n2+
H, alors en invoquant
2.36 de nouveau, on a

β2 1
Z D E Z  
|H|2 dx = Saβ (H), H = a β (H, H) ≥ 2 |grad(H)|2 + β2 |H|2 dx (2.50)
n2+ R2 H n + R2

β2
|H|2 dx des deux côtés, on obtient
R
En soustrayant par n2+ R2

Z
|grad(H)|2 dx ≤ 0 (2.51)
R2

ce qui implique que H est constant presque partout (donc nul) et que H ne peut pas être un
β2
vecteur propre associé à n2+
dans H 1 (R2 ).

Nous ne montrerons pas le résultat suivant. Il utilise la régularité par morceaux de l’indice
de réfraction.

Proposition 2.21. Supposons que l’indice de réfraction n est régulier par morceaux, i.e. qu’il existe
des ouverts Ω1 , ..., Ωm ⊂ R2 réguliers tels que

j =1 Ω j
R2 = ∪m et n2 | Ω j ∈ C ∞ ( Ω j ) ∀ j ∈ {1, ..., m} (2.52)

Alors les valeurs propres de Saβ sont plus petites ou égales à β2 /n2∞ .

Démonstration. Voir [2].

Le théorème suivant résume les propositions précédantes 2.20 et 2.21.

Théorème 2.22. Si la condition de régularité 2.52 est vérifiée, alors une condition nécessaire pour
l’existence d’une valeur propre dans σ(Saβ ) est que

n+ > n∞ (2.53)

β2 β2
 i
Si 2.53 est vérifié, alors l’ensemble des valeurs propres est contenu dans l’intervalle ,
n2+ n2∞
.

On supposera dans la suite de ce chapitre que les conditions 2.52 et 2.53 sont vérifiées.

2.2.2 Spectre essentiel des fibres optiques


Bien que ce sous-ensemble du spectre corresponde à un continuum de modes de radiation,
la détermination de σess reste néanmoins importante dans la recherche des modes guidés. En
effet, ses valeurs interviennent dans l’application qui suivra du principe du min-max.

Or, le spectre essentiel de Sdβ est donné par le résultat suivant.

33
Théorème 2.23. Pour tout β > 0, on a que

β2
 
σess (Saβ ) = ,∞ (2.54)
n2∞

Démonstration. Voir [2].

Par la suite, on notera


β2
α β := (2.55)
n2∞
Le théorème 2.23 est d’une grande utilité. Jumelé au théorème 2.22, il dit que toutes les
valeurs propres de Saβ (à l’exception de possiblement α β ) , sont isolées, de multiplicité finie
et situées en dessous en α β , qui est la borne inférieure du spectre essentiel.

2.2.3 Application du principe du min-max

On a toutes les conditions nécessaires pour appliquer le principe du min-max afin de carac-
tériser ces valeurs propres. On note celles-ci (en tenant compte de la multiplicité)

λ1 ( β) ≤ λ2 ( β) ≤ λ3 ( β) ≤ ... (2.56)

On reprend ici la construction de la section A.2.4. Rappelons que si le nombre de valeurs


propres est fini (on verra plus loin que c’est le cas), alors on note λn = α β pour tout n à partir
d’un certain N.

Il s’agit de fonctions de β bien définies qui, par le principe du min-max, peuvent être définies
par les formules A.15 et A.16. En reprenant les notations de ce chapitre, on a

λk ( β) = sup inf a β (H, H) k≥1 (2.57)


M ∈Fk−1 H∈ D (tS ),kHk=1
H⊥ M

où Fk est l’ensemble de tous sous-espaces M ⊂ H de dimension k. Énoncons quelques


résultats utiles sur ces fonctions.

Proposition 2.24. Soit deux profils d’indice réfraction n et n0 tels que n( x, y) ≤ n0 ( x, y) presque
partout. Alors les valeurs propres correspondantes vérifient λk ( β) ≥ λ0k ( β).

Démonstration. Comme
Z   Z  
1 2 1 2 1 2 1 2
|rotβ (H)| + |divβ (H)| dx ≤ |rotβ (H)| + |divβ (H)| dx
R2 ( n 0 )2 n∞ R2 n2 n∞

le résultat suit par la caractérisation 2.57.

34
Proposition 2.25. Les fonctions β 7→ λk ( β) sont analytiques par morceaux et continues pour tout
β > 0. De plus, elles sont strictement croissantes si
 − 12
n+ n− 1
< x0 ≈ 1.32472 et > +1 ≈ 0.83620 (2.58)
n∞ n∞ 1 + x0

où x0 est l’unique racine réelle du polynôme x3 − x − 1.

Démonstration. Voir [2].

La proposition 2.25 nous dit que si l’indice de réfraction dans le coeur est suffisament près
de l’indice dans la gaine, alors on est assuré que les courbes de dispersion seront inversibles.
Il s’agit d’une condition suffisante mais pas nécessaire.

Or, les fibres de As2 S3 (celles qui nous intéressent) ne vérifient pas la condition 2.58, en raison
de la grande différence d’indice de réfraction entre ces verres et les trous d’air. Il faut cepen-
dant se rappeler que les verres de chalcogénures constituent un milieu dispersif, i.e. que
l’indice de réfraction varie en fonction de la longueur d’onde. Dans la plage de longueurs
d’ondes qui nous intéresse, l’indice de réfraction diminue significativement lorsque la lon-
gueur d’onde λ augmente 2 Sans entrer dans les détails, nos simulations suggèrent que cette
dispersion du matériau nous assure en pratique de l’inversibilité des courbes de dispersion.

2.2.4 Théorème d’existence de valeurs propres


La condition suivante est suffisante pour s’assurer l’existence de valeurs propres et sera utile
afin de justifier la modification de l’indice de réfraction à l’extérieur du pont et du coeur.
Z  
1 1
− 2 dx ≥ 0 (2.59)
R2 n2∞ n

Théorème 2.26. Si l’inéquation 2.59 est respectée, alors λ1 ( β) ≤ λ2 ( β) < α β pour tout β > 0.
Autrement dit, pour tout β > 0, le spectre discret contient au moins deux valeurs propres (en tenant
compte d’une possible multiplicité double).

Démonstration. Voir [2].

Ce théorème dit donc qu’on peut obtenir à la fois l’unicité de la valeur propre et de la mul-
tiplicité pour un quelconque β > 0. On obtient des résultats intéressants lorsqu’on tient
compte de la condition supplémentaire suivante

n( x, y) ≥ n∞ p.p. dans R2 (2.60)


2. La prudence est de mise ici, car selon la formule de Sellmeier,
pl’indice de 2réfraction est une fonction de la
longueur d’onde λ = 2πk , qui est inversement proportionnel à k = λn ( β) où k = λn ( β).

35
F IGURE 2.1 – Visualisation de la me valeur de coupure (figure tirée de [2])

Le résultat qui suit nous dit que toute fibre devient multi-mode pour une valeur de β > 0
suffisament grande.

Théorème 2.27. Supposons que les conditions 2.58, 2.59 et 2.60 soient respectées. Alors, il existe
une suite ( β m )∞
m=1 qui tend vers l’infini, telle que 0 ≤ β 1 ≤ β 2 ≤ ... et qui vérifie (voir la figure 2.1)

 λ m ( β ) = β2 si β ∈ (0, β m ]
∞2
2 (2.61)
λm ( β) < β
n2∞
si β ∈ ( β m , ∞)

pour chaque m ≥ 1. Les nombres β m sont appelés les valeurs de coupures.

Démonstration. Voir [2].

Corollaire. Si les conditions 2.58, 2.59 et 2.60 sont vérifiées, alors pour toute longueur d’onde , il
existe un nombre fini plus grand ou égal à deux (en tenant compte de la multiplicité) de mode guidées
β2 β2
pour lesquels les indices effectifs sont strictement compris entre n2+
et n2∞
.

Démonstration. Voir [2].

2.3 Généralisation au cas tensoriel


On généralise ici au cas tensoriel, car il s’agit généralement du problème résolu dans le logi-
ciel de simulation numérique Comsol Multiphysics. Notons cependant que la nature tenso-
riel de la formulation ne sera pas exploité dans nos modèles.

36
On suppose que l’indice de réfraction tensoriel a la forme
   
exx exy 0 µ xx µ xy 0
eT =  eyx 0 µ T =  µyx 0  (2.62)
   
eyy µyy
0 0 ezz 0 0 µzz

où chacun de ces coefficients dépend généralement de de la position ( x, y) . On notera éga-


lement
! !
exx exy µ xx µ xy
e⊥ = µ⊥ = (2.63)
eyx eyy µyx µyy
! !

0 −1
P= ∇⊥ = ∂x
∂ (2.64)
1 0 ∂y

Étant donné ω > 0, pe problème revient alors à trouver ( β, E) tels que





 β > 0, E = (Et , El ) 6= 0
    
P∇⊥ µ1zz ∇⊥ · P − β2 Pµ− 1
P − iβPµ −1
P ∇ ⊥ E t e E t (2.65)

  ⊥ ⊥    = ω2  ⊥ 
−1 −1
−iβ∇ · Pµ P ∇ · Pµ P∇ E e E


⊥ ⊥ ⊥ ⊥ ⊥ z zz z

La proposition suivante établit l’équivalence entre le problème 2.65 et celui pour lequel on a
énoncé les résultats d’existence. On obtient donc les mêmes relations de dispersion.

Proposition 2.28. Supposons que le milieu est un diélectrique isotrope, i.e. que eT = eI et µ T = µ0 I,
où I est la matrice identité 3 × 3 et e : R2 → R est une fonction positive. Alors ( β, E) satisfait 2.65
si et seulement si
rot− β (rot− β (E)) = ω 2 µ0 eE (2.66)

Démonstration. Simplifions d’abord la matrice de 2.65. Comme µ T = µ0 I et PP = − I, on a


! !
P∇⊥ µ1zz ∇⊥ · P − β2 Pµ−⊥
1
P − iβPµ −1
⊥ P ∇ ⊥ 1 P ∇ ∇
⊥ ⊥ · P − β 2 PP − iβPP ∇ ⊥
=
−iβ∇⊥ · Pµ− ⊥
1
P ∇ ⊥ · Pµ −1
⊥ P ∇ ⊥ µ 0 − iβ ∇ ⊥ · PP ∇ ⊥ · PP ∇ ⊥
!
2
1 P∇⊥ ∇⊥ · P + β I iβ∇⊥
=
µ0 iβ∇⊥ · I −∇⊥ · ∇⊥

Si on multiplie cette matrice par E, alors on obtient le champ vectoriel


!
1 ( P∇⊥ ∇⊥ · P)Et + β2 Et + iβ∇⊥ Ez
µ0 iβ∇⊥ · Et − ∇⊥ · (∇⊥ Ez )

On développe alors
! ! ! !
∂ ∂
0 −1 0 −1
( P∇⊥ ∇⊥ · P) = ∂x

∂x
∂ ·
1 0 ∂y ∂y 1 0

37
! 2 ∂2
!
− ∂y
∂   − ∂y

2 ∂y∂x
= − ∂x
∂ ∂
∂y = ∂2 ∂2

∂x ∂x∂y − ∂x 2

Ceci nous permet de simplifier davantage pour obtenir que le système 2.65 est équivalent à

∂ 2 Ex ∂2 Ey ∂Ez
− + + β2 Ex + iβ = ω 2 µ0 eEx (2.67)
∂y2 ∂y∂x ∂x
∂ 2 Ex ∂2 Ey ∂Ez
− + β2 Ey + iβ = ω 2 µ0 eEy (2.68)
∂x∂y ∂x2 ∂y
∂Ex ∂Ey ∂2 Ez ∂2 Ez
iβ + iβ − − = ω 2 µ0 eEz (2.69)
∂x ∂y ∂x2 ∂y2

Pour conclure, on n’a qu’à développer le rot− β (rot− β (E)) dans 2.66. En utilisant 2.14, on
obtient

rot− β (rot− β (E)) =grad∗− β (grad− β (Λ)) − div∗− β (div− β Λ)


= − div− β (grad− β (Λ)) + grad− β (div− β Λ)
 
∂Ex ∂Ex
∂x ∂y iβEz  
 ∂E y ∂Ey  ∂Ex ∂Ey
= − div− β  ∂x

∂y iβEz  + grad− β
 + + iβEz
∂x ∂y
∂Ez ∂Ez
∂x ∂y iβEz
∂2 E
 ∂2 E 2   2
+ ∂∂yE2x − β2 Ex

∂ Ex
∂x2
x
∂x2
+ ∂x∂yy + iβ ∂E ∂x
z

 ∂2 Ey ∂2 Ey ∂2 Ey
2 E  +  ∂ 2 Ex
  
=−  ∂x 2 + ∂y 2 − β y   ∂y∂x + ∂y2
+ iβ ∂Ez 
∂y 
∂2 Ez ∂2 Ez 2E ∂Ey
∂x2
+ ∂y2
− β z iβ ∂x + iβ ∂y − β2 Ez
∂Ex
 
∂ 2 Ex ∂ 2 Ex 2 ∂ 2 Ex ∂2 Ey
− ∂x2 − ∂y2 + β Ex + ∂x2 + ∂x∂y + iβ ∂x ∂Ez
 
 ∂2 Ey 2 ∂2 Ey
=  − ∂x2 − ∂∂yE2y + β2 Ey + ∂y∂x ∂ 2 Ex
+ ∂y2 + iβ ∂y  ∂Ez 
 2 2

− ∂∂xE2z − ∂∂yE2z + β2 Ez + iβ ∂E
∂Ey 2E
∂x
x
+ iβ ∂y − β z
 2

2 ∂ E
− ∂ E2x + β2 Ex + ∂x∂yy + iβ ∂E z
∂x 
 ∂y
 ∂2 Ey 2
∂ Ex
=  − 2 + β2 Ey + ∂y∂x + iβ ∂E

z 
 2 ∂x ∂y 
2
− ∂∂xE2z − ∂∂yE2z + iβ ∂E
∂Ey
∂x
x
+ iβ ∂y

On conclut en comparant ce champ vectoriel avec les termes à gauche des équations 2.67,
2.68 et 2.69. Ils sont identiques.

On remarque que nous avons utilisé rot− β (rot− β (E)) avec un signe négatif devant β. Cette
équation est physiquement équivalente, car cela revient à supposer que le champ électrique
tridimensionnel est de la forme E( x, y)ei(−ωt+ βz) au lieu de E( x, y)ei(ωt− βz) comme nous
l’avons fait précédemment. La différence est purement mathématique.

38
Afin d’obtenir un problème ayant β comme valeurs propres généralisées , il est convenable
ez := βEz . Le système 2.65 devient
de faire le changement de variable E

1 1e
( P∇⊥ ∇⊥ · P)Et − ( β2 Pµ− 1 t −1 2
⊥ P ) E − (iβPµ⊥ P ∇⊥ ) β Ez = ω e⊥ E
t
µzz
1e 1e
−(iβ∇⊥ · Pµ− 1 t −1 2
⊥ P ) E + (∇⊥ · Pµ⊥ P ∇⊥ ) β Ez = ω ezz β Ez

En multipliant la deuxième équation par β, en simplifiant et en réarrageant les termes, on


obtient le système équivalent

1
( P∇⊥ ∇⊥ · P)Et − ω 2 e⊥ Et − (iPµ− 1 2 −1
⊥ P ∇⊥ ) Ez = β ( Pµ⊥ P ) E
e t
µzz
(∇⊥ · Pµ− 1 2 2 −1
⊥ P ∇⊥ ) Ez − ω ezz Ez = β (i ∇⊥ · Pµ⊥ P ) E
e e t

ce qui peut être réécrit


AE = β2 BE (2.70)

où on note généralement
!
P∇⊥ µ1zz ∇⊥ · P − ω 2 e⊥ −(iPµ− 1
⊥ P∇⊥ )
A := (2.71)
0 ∇⊥ · Pµ− 1 2
⊥ P ∇⊥ − ω ezz
!
Pµ− 1
⊥ P 0
B := (2.72)
i ∇⊥ · Pµ− 1
⊥ P 0

On remarquera que ces matrices ne dépendent pas de β. Le système 2.70 est donc la preuve
qu’une reformulation mathématique du problème de dispersion avec β en fonction ω est
possible.

39
Chapitre 3

Simulation par éléments finis de fibres


à coeur suspendu

Si les prévisions données par les modèles numériques diffèrent des mesures faites en labo-
ratoires, le coût associé à leur exécution sur un ordinateur reste néanmoins une fraction du
coût associé à une fabrication en laboratoire. Le cas des fibres optiques ne fait pas exception à
cet égard. Dans ce chapitre, nous étudierons le modèle linéaire de modes guidés avec indice
de réfraction complexe ainsi que ses nombreuses variantes numériques. Nos principaux ou-
tils de travail seront le logiciel de simulations par éléments finis Comsol Multiphysics pour
créer les modèles et le logiciel de calculs numériques Matlab pour l’analyse des résultats.

D’abord, on comparera les différents modèles numériques construits et on discutera des dif-
férentes hypothèses qui les sous-tendent. Ensuite, on présentera les résultats sous forme de
prédictions sur les valeurs de dispersion et de pertes.

3.1 Modélisation numérique de la dispersion


Lorqu’on désire prédire la dispersion chromatique d’une fibre optique avec Comsol Mul-
tiphysics, plusieurs choix s’offrent au numéricien. Si certaines variantes peuvent simplifier
les simulations, certaines hypothèses doivent cependant être vérifiées afin de garder une er-
reur d’approximation raisonnable sur la dispersion calculée. Avant de discuter des résultats
numériques, introduisons chacune de ces variantes.

3.1.1 Simplification du cas vectoriel au cas scalaire


Rappelons que toute onde électromagnétique se propageant dans un matériau diélectrique
linéaire se comporte selon l’équation des ondes suivante (dite de Maxwell, i.e. avec le double
rotationnel).
n2 ∂2 E
rot(rot(E)) = − (3.1)
c2 ∂t2

41
Or, on vérifie facilement l’identité vectorielle rot(rot(E)) = grad(div(E)) − ∆E, ce qui per-
met de reformuler 3.1
n2 ∂2 E
∆E = + grad((div(E)) (3.2)
c2 ∂t2
Le lecteur se rappelant les équations de Maxwell serait alors tenté d’annuler le dernier terme
en utilisant l’équation de Gauss pour le champ électrique, qui dit que

div(D) = 0

où D est étroitement relié à E par une relation de proportionnalité D = eE où la constante a


p
une dépendance spatiale. Ainsi, lorsque l’indice de réfraction n( x, y, z) = e( x, y, z)/e0 est
presque constant, l’omission du dernier terme dans 3.2 est justifiée. Après substitution de
E( x, y, z, t) = E( x, y)ei(ωt− βz) dans 3.2, on obtient

∆E = β2 E − n2 ω 2 E (3.3)

Selon [33], dans ce contexte, la composante longitudinale (en z) est généralement nulle et les
composantes transversales sont découplées. Ceci nous permet donc de considérer le champ
électrique E comme étant un scalaire. Malheureusement, l’indice de réfraction varie grande-
ment dans une fibre à coeur suspendue et l’approximation ne tient plus, ce qui sera d’ailleurs
vérifié dans nos simulations.

3.1.2 Utilisation d’une couche absorbante parfaitement adaptée (PML)


Au chapitre précédent, nous avons discuté d’un point de vue mathématique de la différence
entre les guides d’ondes ouverts et fermés. D’un point de vue plus numérique, il est bien
sûr impossible de représenter explicitement en mémoire un maillage recouvrant R2 . La so-
lution à ce problème est alors d’utiliser une couche absorbante parfaitement adaptée (qu’on
appelera plus concisément PML, de l’anglais "perfectly matched layer").

Physiquement, il s’agit ici de recouvrir la fibre d’un anneau (voir figure 3.1) qui ne réflète
pas l’onde électromagnétique (i.e. qui l’absorbe sans réflexion). Mathématiquement, sans en
donner explicitement la construction, cela se traduit par un changement de coordonnées vers
le plan complexe (voir [3]). Ce changement de coordonnées vers C a comme conséquence
qu’on obtient alors des indices effectifs à valeurs complexes, malgré le fait que l’indice de
réfraction demeure à valeur réels.

Comme nous le verrons numériquement en modifiant l’indice de réfraction à l’extérieur du


coeur, il est possible d’utiliser une condition limite de conducteur parfait et d’obtenir malgré
tout une excellente approximation des courbes de dispersion. Ceci s’explique selon nous
par la décroissance exponentielle du champ électrique à l’extérieur du coeur. Les conditions
limites auraient donc peu d’impact sur les valeurs des indices effectifs qui nous intéressent.
On réfère vers [17] pour plus de détails à ce sujet.

42
F IGURE 3.1 – Le PML est l’anneau mauve recouvrant la fibre optique. La région grise
correspond aux trous d’air et la section rouge correspond au verre. Notons que le coeur et
les ponts (qui sont faits de verre) ne sont pas distinguables sur cette figure en raison du
maillage.

3.1.3 D’une fibre à coeur suspendu vers une fibre à saut d’indices
L’étude des conditions d’existence des valeurs propres dans le spectre des opérateurs de
fibres optiques nous a amené à reconsidérer la distribution de l’indice de réfraction pour les
fibres à coeur suspendu. D’une part, nous avons déterminé numériquement que l’indice de
réfraction à l’extérieur du coeur et des ponts n’avait que très peu d’impact sur les indices
et la dispersion chromatique. D’autre part, les conditions d’existence mentionnent bien que
l’indice de réfraction devrait être plus grand dans le coeur que dans la gaine d’une fibre (on
rappelle la distribution réelle de l’indice à la figure 3.2). Rien ne nous empêche de simuler
une fibre dont n=1 partout sauf dans les ponts et le coeur (bien qu’une telle fibre ne puisse
bien sûr pas être reproduite en laboratoire). Comme nous verrons dans la prochaine sous-
section, cette modification accélère grandement les calculs tout en donnant une excellente
approximation.

3.1.4 Discussion des résultats numériques sur la dispersion


Nous reviendrons plus loin sur l’impact des paramètres géométriques sur la dispersion. Pour
l’instant, comparons les variantes numériques présentées ci-dessus à l’aide des résultats (les

43
F IGURE 3.2 – Distribution de l’indice de réfraction d’une fibre à coeur suspendu faite de
As2 S3 à une longueur d’onde de 2.1 µm. L’indice associé à la partie en blanc est donné par
la formule de Sellmeier (n ≈ 2.4). Les trois trous en noirs sont remplis d’air (n ≈ 1).

F IGURE 3.3 – Photo d’une fibre à coeur suspendu (Source : [1]).

44
F IGURE 3.4 – Maillages 1 et 2 utilisés pour le calcul de la dispersion chromatique. On
présente le coeur car la finesse du maillage loin du coeur a très peu d’impact sur les indices
effectifs et la dispersion.

figures 3.6 et 3.5) sur la dispersion obtenus dans Comsol Multiphysics avec la géométrie
illustrée en 3.2.

On remarque d’abord que les deux courbes des indices effectifs et de la dispersion chroma-
tique des modèles vectoriels (en vert pâle et vert foncé) ne sont pas distinguables l’une de
l’autre. Le plus grand écart (i.e. le maximum de la valeur absolue pris sur l’ensemble des
longueurs d’onde) est d’à peine 2.70615 · 10−5 µm et 0.193217 ps/(km · nm) pour les indices
effectifs et la dispersion chromatique respectivement.

Rappelons que la dispersion chromatique est obtenue à partir des indices effectifs en utili-
sant une formule de différence finie approximant la dérivée seconde (on a vu au chapitre
β 2πc
λ

précédent que neff (λ) = 2π λ est analytique par morceaux) dans l’expression de la dis-
persion chromatique :
λ d2 neff
− (3.4)
c dλ2
On pourrait s’intéresser aux effets de dispersion du troisième et du quatrième ordre en consi-
dérant les dérivée d’ordre supérieurs, mais leur impact est habituellement négligeable.

Le but premier des simulations bidimensionnelles est de trouver les longueurs d’ondes pour
lesquelles la dispersion chromatique est nulle (on n’a pas nécessairement existence ni uni-
cité). Or, on constate la différence notable entre les zéros de dispersion du cas vectoriel versus

45
F IGURE 3.5 – Comparaison des indices effectifs obtenus avec les modèles vectoriel et
scalaire d’une fibre optique à coeur suspendu

F IGURE 3.6 – Comparaison de la dispersion chromatique obtenue avec les modèles vectoriel
et scalaire d’une fibre optique à coeur suspendu

46
F IGURE 3.7 – Spectre d’atténuation d’une fibre optique à saut d’indice faite de silice (image
tirée de [1]). µm

le cas scalaire. Ceci justifie la complexité supplémentaire apportée par l’utilisation du double
rotationel.

3.2 Modèles numériques des pertes


Le développement de modèles numériques pour une meilleure compréhension et prévision
des pertes (en particulier celles causées par les impuretés OH− ) était un des objectifs de ce
mémoire.

D’un point de vue pratique, le problème de l’attéunation des impulsions lumineuses dans les
fibres optiques a longtemps frêné leur utilisation à large échelle dans les réseaux de télécom-
munications. Des techniques de purificastion ont donc été développés au fil des années afin
de réduire l’atténuation aux valeurs qu’on connait aujourd’hui, soit d’environ 0.2 dB/km
à 1.55 µm (voir [20]) dans les fibres de silice. Cette longueur d’ondes est d’ailleurs géné-
ralement choisie pour transmettre les signaux en raison des faibles pertes engendrées, qui
varient fortement en fonction de la fréquence angulaire ω.

D’un point de vue théorique, il est impossible de traiter mathématiquement le problème de


mode guidé avec un indice de réfraction complexe qui modéliserait l’absorption intrinsèque
du matériau et celle des impuretés. En fait, par définition, un mode guidé doit être vu ma-
thématiquement comme ne décrivant aucune perte car sa constante de propagation β est

47
réelle.

Cependant, d’un point de vue numérique, il est possible de simuler par éléments finis un
guide d’ondes d’ondes avec des pertes, (voir [20] pour une description numérique du mo-
dèle). Sans donner expliciter la formulation du problème aux valeurs propres, cette façon
de faire permet de modéliser les pertes causées par une conductivité non-nulle (n2 (ω ) =
er (ω ) − i ωσ )) en résolvant β ∈ C en fonction de ω ∈ R. Dans Comsol Multiphysics, il nous
est possible de même généraliser en tenant compte d’une dépendance quelconque envers ω
de la partie imaginaire de l’indice de réfraction complexe (voir [11]).

Ces possibilités se sont cependant avérées peu fructueuses d’un point de vue prédictif. Rap-
pelons que pour une onde plane de longueur d’onde λ traversant un matériau décrit par
un indice de réfraction complexe nc = n − iκ, le coefficient d’atténuation α est donné par la
relation

α= κ (3.5)
λ
Or, cette relation donne une très bonne approximation des résultats obtenus dans Comsol
Multiphysics avec une fibre optique microstructurée à ponts suspendus. Nous reviendrons
empiriquement sur cette approximation à la section 3.4.

3.2.1 Modéliser chaque source de pertes séparément

Nous nous sommes intéressés à la modélisation des impuretés dans une perspective de pré-
diction et de compréhension des mécanismes de pertes. Nous nous sommes cependant li-
mités à une modélisation au niveau macroscopique du phénomène d’atténuation, évitant
ainsi toute considération quantique. Or, particulièrement à propos des pertes causées par les
impuretés, la littérature est relativement faible au niveau macroscopique.

Notons les travaux décrits dans [9], où on reprend le modèle de Lorentz afin d’étudier l’ef-
fet des impuretés OH sur les modes polarisés linéairement d’une fibre monomode à saut
d’indice. Plus récemment, on note les travaux de [32], où on modélise dynamiquement l’in-
téraction entre les impuretés et les impulsions lumineuses en utilisant le modèle non-linéaire
de Schrödinger.

Nos travaux ont principalement consisté à recenser les formules mathématiques décrivant
chacune des sources de pertes, qui sont illustrées à la figure 3.7 pour une fibre de silice. Il
s’agit de résultats classiques établis par des démarches d’approximation physique. Parmi ces
formules mentionnons les plus significatives dans le proche infrarouge :

n
Ai
α I (λ) = ∑ σ 2 + ( λ −1 − λ −1 )2 Absorption des impuretés
i =1 i i
A
α R (λ) = Diffusion Rayleigh
λ4

48
F IGURE 3.8 – Mode guidé tridimensionnel décrivant l’oscillation de la composante en x du
champ électrique.

 
B2
αU (λ) = B1 exp "Urbach tail"
λ
 
C2
α M (λ) = C1 exp Absorption multiphonon
λ

où λ > 0 est bien sûr la longueur d’onde dans le vide et toutes les autres constantes dé-
pendent du matériau. Rappelons l’importance des longueurs d’ondes λi de résonance.

3.2.2 Simulation bidimensionnelle versus tridimensionnelle


Bien que la simulation bidimensionnelle d’une fibre optique en régime harmonique nous
donne des informations importantes sur l’évolution d’une impulsion en temps et en es-
pace (i.e. selon l’axe longitudinal à la propagation) via une superposition de modes, il se-
rait néanmoins intéressant de résoudre directement l’équation des ondes en considérant une
dépendance quelconque en ( x, y, z, t) du champ électrique. Cela permettrait entre autres la
simulation de l’intéraction entre les impulsions lumineuses et les impuretés. Ces impuretés
indésirables sont une cause importante de diffusion des impulsions lumineuses, particuliè-
rement aux fréquences de résonnance de ces molécules.

Dans Comsol Multiphysics, nous nous sommes inspirés d’un modèle de guide d’ondes pla-
naire afin de simuler en régime harmonique une fibre optique à saut d’indice. Cependant,

49
F IGURE 3.9 – Mode guidé tridimensionnel décrivant la norme du champ électrique. Cette
figure illustre la nécessité d’avoir un maillage tridimensionnel très fin pour obtenir une
solution physique.

ce modèle nous apparait peu utile dans la modélisation des impuretés, car il reproduit es-
sentiellement les résultats du modèle bidimensionnel. Nous illustrons aux figures 3.8 et 3.9
des exemples de simulations tridimensionnels avec des fibres à saut d’indices. De tels calculs
sont impossibles à réaliser sur un ordinateur personnel, en raison de la mémoire vive néces-
saire (plus de 100 GB). De plus, en raison du temps de calcul, il est en pratique impossible
de mesurer les pertes avec précision à partir d’un tel modèle

3.3 Influence des impuretés sur le champ électrique

Une partie de nos travaux a consisté à explorer les possibilités de modéliser l’effet des im-
puretés en les incluant explicitement dans la géométrie de la fibre. Un des problèmes fut
d’abord de déterminer l’indice de réfraction de telles impuretés. On voit l’importance de ce
point en examinant le champ électrique du modèle bidimensionnel aux figures 3.10 et 3.11.
Le problème ici est que le modèle ne voit que l’indice de réfraction, i.e. que les impuretés
peuvent être vu comme un verre d’indice de réfraction plus ou moins élevé. Cela fait en
sorte que le mode se concentre dans les impuretés, comme à la figure 3.11, ce qui ne nous
apparaissait pas justifiable physiquement.

50
F IGURE 3.10 – Fibre à saut d’indice de silice (n ≈ 1.45) avec six impuretés de forme
circulaire et d’indice de réfraction n = 1

F IGURE 3.11 – Fibre à saut d’indice de silice (n ≈ 1.45) avec six impuretés de forme
circulaire et d’indice de réfraction n = 1.59

51
F IGURE 3.12 – Modèle 3D avec impureté sphérique au centre du coeur.

F IGURE 3.13 – Courbes des indices effectifs selon le rayon du coeur (de 1 micron à 10
microns).

52
F IGURE 3.14 – Courbes de dispersion chromatique selon le rayon du coeur (de 1 micron à 10
microns)
.

3.4 Influence des paramètres géométriques

Nous avons créé une géométrie paramétrisée nous permettant d’étudier l’influence des ca-
ractéristiques géométriques des fibres à coeur suspendu dans le but de prédire avec préci-
sion la dispersion chromatique. L’objectif était de découvrir une géométrie de fibre à coeur
suspendue telle que le zéro de dispersion se situe autour de 1.55 µm.

La figure 3.13 nous permet de visualiser les indices effectifs. Agrandir le coeur a l’effet que
le mode se comporte de plus en plus comme une onde plane, car la courbe se rapproche de
la courbe d’un milieu homogène (voir section 1.4).

La figure 3.14 nous permet de visualiser les zéros de dispersion obtenus. On voit bien que
le zéro de dispersion diminue lorsqu’on considère des coeurs de plus en plus petits. Mal-
heureusement, un coeur de 1 µm n’est pas réalisable en pratique. Notons aussi que la même
observation pour les indices effectifs s’applique à la figure 3.14 sur l’effet de l’agrandisse-
ment du coeur.

53
3.5 Utilisation du logiciel Comsol Multiphysics 4.3b
Pour conclure, donnons un tutoriel complet montrant comment construire un modèle de
fibre optique microstructurée dans Comsol Multiphysics 4.3b. Si on se restreint aux modèles
décrits dans ce mémoire, il s’agit de suivre les étapes suivantes :
1. Créer le modèle
a) Choisir la dimension de la géométrie :2 ou 3 coordonnées
b) Choisir une physique, i.e. le modèle à résoudre
c) Choisir une étude, i.e. le plan de résolution du modèle
2. Configurer le modèle
a) Créer une liste de paramètres physiques et numériques
b) Créer la géométrie et le maillage
c) Déterminer les conditions limites : PML, conducteur parfait ou Dirichlet
d) Spécifier la distribution de l’indice de réfraction complexe nc = n − iκ
2πc
e) Choisir une ou plusieurs fréquences ω = λ

f) Donner un nombre autour duquel on cherche les indices effectifs neff = ω

3. Lancer la résolution du modèle


4. Visualiser les résultats
Reprenons chacune de ces étapes en détails

3.5.1 Création du modèle


Il s’agit ici d’utiliser le "Model wizard" afin d’obtenir un modèle pré-configuré selon nos be-
soin. On commence par choisir la dimension du modèle (3.15). Pour l’étude de la dispersion
et des modes, on choisira un modèle bidimensionnel, mais un modèle tridimensionnel est
également possible pour modéliser une fibre optique.

Ensuite, on choisit la physique (figure 3.16). Dans notre cas, trois choix pertinents se pré-
sentent à l’utilisateur :
1. "Electromagnetic Waves, Beam Envelopes (ewbe)" : il s’agit de la physique utilisée pour
modéliser efficacement en temps de calcul une fibre optique tridimensionnelle.
2. "Electromagnetic Waves, Frequency Domain (ewfd)" : c’est la physique idéale pour le
calcul des indices effectifs en deux dimensions, i.e. la version vectorielle du modèle de
modes.
3. "Coefficient Form PDE" : cette physique permet la création d’une version scalaire du
modèle de modes dans les fibres optiques avec conditions limites de Dirichlet (aucun
PML implémenté dans ce cas).

54
F IGURE 3.15 – Choix de la dimension (nombre de coordonnées) de la géométrie dans
Comsol.

F IGURE 3.16 – Choix de la physique. Trois choix pertinents se présentent pour modéliser
des fibres optiques (tels que sélectionnés en bleu).

55
F IGURE 3.17 – Choix de l’étude dans Comsol. Trois choix pertinents se présentent :
"Boundary Mode Analysis", "Mode Analysis" et "Eigenvalue".

F IGURE 3.18 – Arbre présentant les différentes composantes à configurer du modèle.

56
F IGURE 3.19 – Exemple de liste de paramètres pertinents pour un modèle de fibre optique
avec trois trous.

Enfin, on choisit l’étude (figure 3.17. Ici encore, selon la physique choisie précédemment,
trois choix pertinents se présentent à l’utilisateur :

1. "Boundary Mode Analysis" : Si l’utilisateur a choisi le modèle tridimensionnel et la


physique "Beam Envelopes (ewbe)". Cette étude consiste à faire une analyse modale
aux deux extrémités de la fibre et ensuite résoudre l’équation vectorielle des ondes à
l’intérieur.

2. "Mode Analysis" : Si l’utilisateur a choisi le modèle bidimensionnel et la physique


"Electromagnetic Waves, Frequency Domain (ewfd)". Il s’agit de résoudre la version
vectorielle du modèle de β en fonction de ω.

3. "Eigenvalue" : Si l’utilisateur a choisi le modèle bidimensionnel et la physique "Coeffi-


cient Form PDE". On résoud ici la version scalaire et l’utilisateur spécifie les équations
et paramètres par lui-même.

Une fois ces choix réalisés, on peut finaliser la création en cliquant sur le drapeau blanc et
noir situés en haut à droite de l’onglet.

3.5.2 Configuration du modèle vectoriel dans le cas bidimensionnel

Abordons maintenant la configuration du modèle, qui est au coeur du travail de modélisa-


tion dans Comsol Multiphysics.

57
F IGURE 3.20 – Géométrie d’une fibre à coeur suspendu à trois trous construite avec des
cercles, des droites, des courbes de Bézier, etc.

D’abord, il est convenable de commencer en créant une liste des paramètres physiques et
numériques pertinents dans la section "Global Definitions" du modèle (voir figure 3.18. Un
exemple de liste pour une fibre avec géométrie paramétrisée est présenté en 3.19. On re-
marque les paramètres géométriques ainsi que les indices de réfraction des matériaux.

Ensuite, on crée la géométrie qui correspond au domaine Ω. Nous n’entrerons pas dans les
détails à ce niveau, mais mentionnons que différentes formes utiles se présentent à l’utilisa-
teur : cercles, droites, courbes de Bézier, etc. Un exemple de géométrie construite à partir de
ces outils est illustrée en 3.20.

Une fois la géométrie construite, on construit un maillage sur celle-ci. Notons que chaque
région de la géométrie est naturellement décomposée en domaines par le logiciel. On spécifie
une finesse appropriée pour chaque domaine, en spécifiant en particulier la taille maximale
et la taille minimale des éléments (voir figure 3.21). Une particularité des simulations de
fibres optiques est qu’on sait dès le départ où le maillage doit être fin. Il s’agit bien entendu
de la région du coeur.

58
F IGURE 3.21 – Création d’un maillage. Les deux paramètres les plus utiles sont "Maximum
element size" et "Minimum element size". On note l’utilisation des paramètres tels que
définis dans la figure 3.19

59
F IGURE 3.22 – Configuration du PML. L’important ici est de spécifier la région
correspondant à la géométrie du PML (cylindrique ici) dans la boite de dialogue "Type"
pour assurer de ne pas avoir d’erreurs à l’exécution.

60
F IGURE 3.23 – Choix de l’indice de réfraction. Il est approprié d’utiliser les paramètres
définis dans la liste plus tôt.

Par la suite, on détermine les conditions limites. Si l’utilisateur décide d’utiliser un PML, il
doit l’ajouter dans la section "Definitions" du modèle (voir figure 3.18). Dans ce cas, la seule
modification à apporter à 3.22 est de modifier le type de géométrie du PML, qui est cartésien
par défaut. Ici, le PML est assigné à un anneau entourant la fibre : le type "Cylindrical"
convient donc. Si l’utilisateur choisit plutôt une condition limite de conducteur parfait, alors
aucune modification n’est nécessaire, car elle est appliquée par défaut.

La prochaine étape consiste à spécifier les matériaux et à les assigner aux bons domaines.
Il s’agit simplement de créer le nombre de matériaux nécessaires et d’ajouter un lien vers
les paramètres d’indices de réfraction définis plus tôt dans la liste de la figure 3.19. Dans
nos fibres optiques, on a typiquement deux matériaux : le verre et l’air. On notera que pour
permettre de trouver facilement les modes guidés, on assignera le matériau d’air partout

61
F IGURE 3.24 – Configuration des équations à résoudre. Notons d’abord que le domaine 5
n’est pas géré par les équations soulignées en pointillés, mais plutôt par le PML. De plus, il
est important de lier l’indice de réfraction aux équations en choisissant dans le bas du
panneau le bon modèle décrivant les matériaux.

dans la fibre sauf dans le coeur et les ponts. Ceci n’aura numériquement pas d’impact sur les
valeurs de dispersion et d’atténuation.

Finalement, afin de terminer la configuration du modèle, il reste à déterminer la fréquence


de la lumière ainsi que l’indice effectif autour duquel on cherche les indices effetifs. Cette
étape est présentée à la figure 3.25.

62
F IGURE 3.25 – Choix des paramètres d’étude. Les paramètres les plus importants sont : le
nombre de modes, l’indice effectif initial et la fréquence de la lumière

3.5.3 Résolution du modèle


Maintenant que le modèle est configuré, il suffit de lancer les calculs en cliquant sur le bouton
"Compute". On obtient les informations pertinentes sur la résolution telles que présentées à
la figure 3.26.

3.5.4 Visualisation des résultats


La visualisation des résultats ne pose généralement pas de problème. Il s’agit simplement de
récupérer les indices effectifs pour qu’il soient analysés dans Matlab ou Excel.

63
F IGURE 3.26 – Résultats obtenus lors de la résolution du modèle. On obtient quelques
informations pertinentes sur les algorithmes de résolution.

64
Conclusion

Dans ce mémoire, nous avons modélisé, analysé puis simulé les modèles de dispersion et
d’atténuation dans les fibres optiques à saut d’indice et les fibres microstructurées à coeur
suspendu. Nous avons exposé les forces et les limites du paradigme linéaire dans la modé-
lisation de la propagation des impulsions lumineuses. D’une part, la dispersion est prédite
avec succès en considérant un modèle bidimensionnel avec invariance selon l’axe de propa-
gation. D’autre part, l’atténuation est davantage un phénomène tridimensionnel et on doit
tenir compte de l’invariance en z afin de par exemple tenir compte des impuretés, qui sont
encore aujourd’hui une source importante de pertes dans les fibres optiques. Au niveau théo-
rique, notons les limites de l’analyse mathématique à tenir compte de la nature complexe de
l’indice de réfraction. Au niveau numérique, en nous limitant au niveau macroscopique,
nous avons montré les limites des modèles de propagation. Il serait sans doute intéressant
d’étudier comment intégrer les effets des impuretés en tenant compte d’une variance en z,
que ce soit en régime linéaire ou non-linéaire. Cependant, il faudra reconsidérer certaines
hypothèses, telles que celle de travailler en régime harmonique.

65
Annexe A

Rappels d’analyse fonctionnelle

Nous supposerons ici que le lecteur maîtrise les notions vues dans un cours gradué d’analyse
fonctionnelle et de mesure et intégration. Parmi celles-ci, mentionnons les formes sesquili-
néaires, la mesure et l’intégrale de Lebesgue, les projections orthogonales et les opérateurs
bornés (et en particulier compacts et/ou auto-adjoints) dans un espace de Hilbert, ainsi que
plus généralement les notions associés aux espaces topologiques, tels que les ensembles ou-
verts, les ensembles denses, l’espace dual associé à une topologie dans un espace vectoriel,
etc. On réfère le lecteur vers [26] pour une introduction aux notions analytiques et topolo-
giques et vers [27] pour un traitement plus général de l’analyse fonctionnelle (et en particu-
lier pour la théorie des distributions).

Mentionnons que dans ce mémoire, le corps associé à un espace vectoriel sera toujours C,
car on travaille en régime harmonique.

A.1 Théorie des opérateurs non-bornés

Commençons par introduire les notions importantes reliées aux opérateurs non-bornés auto-
adjoints dans des espaces de Hilbert. Ce cadre mathématique est nécessaire dans l’étude du
problème de modes dans les fibres optiques. Pour les démonstrations et pour plus de détails
entourant cette théorie, on réfère à [29].

Définition A.1. Étant donné deux espace de Hilbert H1 et H2 , on appelle opérateur de H1 vers
H2 toute application linéaire T : V → H2 , définie sur un sous-espace vectoriel V ⊂ H1 . Si V
est dense dans H1 , alors on dira de T qu’il est non-borné. On appelle V le domaine de T et on
le note généralement D ( T ). Si H1 = H2 , on dira de T que c’est un opérateur sur H1 .

Selon cette définition, un opérateur borné (i.e. une application linéaire, continue et définie
partout) est aussi un opérateur non-borné. Cependant, comme les opérateurs non-bornés T

67
définis dans ce mémoire seront partiellement définis, ils ne seront donc pas bornés, ce qui
justifie la terminologie.

Mentionnons que la composition de deux opérateurs non-bornés T1 , T2 est défini comme un


autre opérateur (pas nécessairement non-borné) T1 T2 dont le domaine est donné par

D ( T1 T2 ) := { x ∈ D( T2 ) : T2 ( x ) ∈ D ( T1 )} (A.1)

qui est non-vide et pour lequel ( T1 T2 ) x := T1 ( T2 ( x )) est bien défini. Il s’agit du plus grand
sous-espace de H tel que T1 T2 est bien défini.

A.1.1 Opérateurs fermés


La définition suivante est importante dans l’analyse spectrale des opérateurs non-bornés,
qui fera plus loin l’objet d’une sous-section.

Définition A.2. Le graphe d’un opérateur T de H1 vers H2 , noté G( T ), est défini comme
l’ensemble des paires ( x, T ( x )) avec x ∈ D ( T ). De plus, T est dit fermé lorsque G( T ) est
fermé dans H1 × H2 .

Les deux caractérisations suivantes s’avèrent utiles pour démontrer qu’un opérateur est
fermé ou pour constuire des espaces de Hilbert.

Proposition A.3. Soit un opérateur non-borné T de H1 vers H2 . Alors les assertions suivantes sont
équivalentes :
1. T est fermé
H H
2. Si ( xn )∞ 1 2
n=1 ⊂ D ( T ), xn −→ x et T ( xn ) −→ y, alors on a que x ∈ D ( T ) et T ( x ) = y

3. ( D ( T ), h·, ·iT ) est un espace de Hilbert, où h x1 , x2 iT := h x1 , x2 iH1 + h T ( x1 ), T ( x2 )iH2 .

Rappelons que selon le théorème du graphe fermé (voir [7]), un opérateur défini partout
dans un espace de Hilbert est continue si et seulement si il est fermé. Or, on démontre facile-
ment que si T est un opérateur non-borné et continu sur son domaine, alors T est fermé si et
seulement si D ( T ) = H1 . Comme tous les opérateurs pour fibres optiques seront fermés et
partiellement définis (i.e. D ( T ) 6= H1 ), on conclut qu’ils ne seront pas continus.

A.1.2 Opérateurs symétriques et auto-adjoints


Les opérateurs non-bornés reliés aux fibres optiques vérifient l’importante propriété d’être
égaux à leur opérateur adjoint. Lorsque T est un opérateur, l’opérateur adjoint n’est pas bien
défini. Il ne s’agira dans ce cas en général que d’une relation, telle que définie ci-dessous.

Définition A.4. Étant donné un opérateur T de H1 vers H2 , son adjoint est une relation dans
H2 × H1 selon laquelle x est relié à y si h T (w), x iH2 = hw, yiH1 pour tout w ∈ D ( T ).

68
La proposition suivante justifie l’inclusion de la condition de densité de D ( T ) dans la défi-
nition d’un opérateur non-borné T.

Théorème A.5. Si T est un opérateur non-borné de H1 vers H2 , alors l’adjoint de T est un opérateur
fermé, i.e. que si on note T ∗ ( x ) = y lorsque x et y sont reliés, alors T ∗ est un opérateur fermé et bien
défini, appelé opérateur adjoint. De plus, si T est fermé, alors T ∗ est non-borné.

Par construction, on a que h T ( x ), yiH2 = h x, T ∗ (y)iH1 pour tout ( x, y) ∈ D ( T ) × D ( T ∗ ) et


que D ( T ∗ ) est le plus grand sous-espace pour lequel cette équation est vérifiée. On peut
maintenant définir ce qu’est un opérateur symétrique et un opérateur auto-adjoint dans le
cas non-borné.

Définition A.6. On dit d’un opérateur non-borné T sur un espace de Hilbert H qu’il est
symétrique lorsque h T ( x ), yiH = h x, T (y)iH pour tout x, y ∈ D ( T ) et qu’il est auto-adjoint
lorsque T = T ∗ .

Cette définition met en évidence le rôle important que joue le domaine dans le contexte des
opérateurs non-bornés. En effet, un opérateur est symétrique si et seulement si T ⊂ T ∗ , c’est-
à-dire D ( T ) ⊂ D ( T ∗ ) et T ( x ) = T ∗ ( x ) pour tout x ∈ D ( T ). En pratique, s’il est souvent aisé
de démontrer qu’un opérateur non-borné est symétrique, il est beaucoup plus difficile de
démontrer qu’il est auto-adjoint.

Par exemple, grâce à l’identité de polarisation

4 h Tx, yi = h T ( x + y), x + yi + h T ( x − y), x − yi


+ i h T ( x + iy), x + iyi − i h T ( x − iy), x − iyi

on déduit facilement que T est symétrique si et seulement si h T ( x ), x i ∈ R pour tout x ∈


D ( T ). Terminons avec une proposition nous permettant de conclure que tout opérateur auto-
adjoint est fermé.

Proposition A.7. Si T et T ∗ sont des opérateurs non-bornés, alors T = T ∗∗ si et seulement si T est


fermé. En particulier, si T est auto-adjoint, alors T est fermé.

A.2 Théorie spectrale dans des espaces de Hilbert


Afin de définir la notion de spectre d’un opérateur fermé, introduisons d’abord son ensemble
résolvant.

Définition A.8. Soit T un opérateur fermé sur H. Un nombre λ ∈ C appartient à l’ensemble


résolvant (qu’on note ρ( T )) lorsque T − λI est un opérateur bijectif et que son inverse est
borné. Si λ ∈ ρ( T ), alors la résolvante de T est l’opérateur borné Rλ ( T ) := ( T − λI )−1 .

69
Comme on suppose T fermé, il est possible de montrer que la condition d’inverse borné peut
être omise sans changer ρ( T ). Rappelons que les opérateurs différentiels au sens faible et à
coefficients constants sont généralement fermés.

Définition A.9. Le spectre σ( T ) d’un opérateur fermé T est défini comme le complément de
ρ( T ) dans C. En particulier, on dit d’un λ ∈ σ( T ) qu’il s’agit d’une valeur propre de T lorsque
le noyau de T − λI contient des éléments non-nuls, appelés vecteur propres.

Pour étudier le spectre des opérateurs pour fibres optiques, il est utile d’utiliser la notion de
mesure spectrale.

A.2.1 Mesure et intégrale spectrales


Cette section se veut une brève introduction aux outils nécessaires à la formulation du calcul
fonctionnel des opérateurs auto-adjoints dans un espace de Hilbert H. Cette théorie permet
d’établir une correspondance directe entre d’une part les opérateurs auto-adjoints et coercifs
et d’autre part les formes sesquilinéaires qui sont fermées, coercives et densément définies.
On reviendra sur ces notions plus loin.

Définition A.10. Soit (Ω, F ) un espace mesurable. Alors une mesure spectrale E est une ap-
plication définie sur F vers l’espace des projections orthogonales dans un espace de Hilbert
H et telle que
1. E(Ω) = I
2. Pour toute suite ( Mn ) ⊂ F d’ensembles disjoints, on a que ∑n E( Mn ) = E(∪n Mn )

Il n’est pas difficile de montrer que si la condition 1 est vérifiée, alors la condition 2 est
équivalente au fait que Ex := h E(·) x, x i soit une mesure à valeur réelles sur (Ω, F ), pour
tout x ∈ H.

L’espace mesurable qui nous intéresse ici est la tribu de Borel sur la droite réelle (qu’on note
B(R)). En effet, sur (R, B(R)), chaque opérateur auto-adjoint T est associé à une et une
seule mesure spectrale. Le lien entre mesure spectrale et opérateur auto-adjoint se fait via
l’intégrale spectrale.

Définition A.11. Fixons une mesure spectrale E sur (R, B(R)). Soit un nombre fini de Mn ∈
B(R) disjoints ainsi qu’une fonction f à valeurs complexes de la forme f ( x ) = ∑n an χ Mn ( x ).
Alors, l’intégrale spectrale de f selon E est l’opérateur auto-adjoint et borné défini par
Z

R
f ( x )dE( x ) = ∑ a i E ( Mn ) . (A.2)
n

Similairement à l’intégrale de Lebesgue, l’opérateur A.2 ne dépend pas de la représentation


de f . Il est possible d’étendre cette construction à toute fonction mesurable et bornée g en

70
prenant une limite d’opérateurs de la forme A.2 dans l’espace de Banach des opérateurs
bornés.

Le théorème spectral dans le cas borné nous dit que si T est un opérateur auto-adjoint et
borné tel que σ( T ) ⊂ [ a, b], alors il existe une et une seule mesure spectrale ET sur B(R)
R R
pour laquelle T = [a,b] xdET ( x ) := xχ[a,b] ( x )dET ( x ).

Nous aurons cependant besoin d’une généralisation de ce résultat aux opérateur auto-adjoints
et non-bornés. Sans en faire une exposition détaillée, on généralise à nouveau la construction
avec g borné et mesurable aux fonctions h appartenant à S(R, B(R), E).

Définition A.12. On dit d’une fonction h : R → C ∪ {∞} qu’elle appartient à l’ensemble


S(R, B(R), E) lorsqu’elle est mesurable et E({ x ∈ R : h( x ) = ∞}) = 0.

Il est possible de montrer que par construction, l’intégrale spectrale selon E de h ∈ S(R, B(R), E)
est un opérateur non-borné et auto-adjoint et son domaine est (à titre indicatif)
Z   Z 
D h( x )dE( x ) = v ∈ H : |h( x )| d h E( x )v, vi < ∞
2
(A.3)
R R

où l’intégrale de Lebesgue de |h|2 est selon la mesure h E(·)v, vi. On obtient le résultat fonda-
mental suivant. On réfère vers [29] pour la démonstration.

Théorème A.13 (Théorème spectral). Pour chaque opérateur auto-adjoint T sur H, il existe une
unique mesure spectrale ET sur (R, B(R)) telle que T = R xdET ( x ).
R

Un lien fondamental entre les mesures spectrales E et le spectre des opérateurs auto-adjoints
est donné par le résultat suivant.

Théorème A.14. Soit un opérateur auto-adjoint T et sa mesure spectrale ET . Si on définit en général


le support supp( E) d’une mesure spectrale E comme étant le complément de la réunion de tous les
ouverts U ⊂ R tels que E(U ) = 0, alors

σ( T ) = supp( ET ) (A.4)

De façon équivalente, on a que λ ∈ σ( T ) si et seulement si ET ([λ − e, λ + e]) 6= 0 pour tout e > 0.


Enfin, λ ∈ R est une valeur propre de T si et seulement si ET ({λ}) 6= 0.

Dans le même ordre d’idées, les définitions suivantes seront fondamentales dans notre étude
du spectre des opérateurs pour fibres optiques.

Définition A.15. Étant donné un opérateur auto-adjoint T, son spectre essentiel σess ( T ) est
l’ensemble des λ ∈ R tels que pour tout e > 0, l’image de ET ([λ − e, λ + e]) est de dimension
infinie. De plus, le spectre discret σd ( T ) est défini comme le complément de σess ( T ) dans σ( T )

71
En appliquant cette définition, il n’est pas difficile de montrer que le spectre essentiel est un
sous-ensemble fermé dans R. Afin de déterminer le spectre essentiel de nos opérateurs pour
fibres optiques, on utilisera la notion de suite singulière.

Définition A.16. Étant donné un opérateur non borné T et λ ∈ R, on dira que ( xn )∞


n =1 ⊂
D( T ) est une suite singulière de T à λ lorsque les trois conditions suivantes sont vérifiées
1. lim infn→∞ k xn k > 0

2. Pour tout x ∈ H on a limn→∞ h xn , x i = 0

3. limn→∞ ( A − λI ) xn = 0

On donne dans ce qui suit deux caractérisations importantes du spectre essentiel pour notre
étude des fibres optiques (voir [29] pour la démonstration).

Théorème A.17 (Critère de Weyl). Étant donné un opérateur auto-adjoint T et λ ∈ R, les trois
énoncés suivants sont équivalents

1. λ ∈ σess ( T )

2. Il existe une suite singulière de T à λ.

3. λ est un point d’accumulation dans σ( T ) ou est une valeur propre dont l’espace propre est de
dimension infinie

Corollaire. Soit λ ∈ R et un opérateur auto-adjoint T. Alors λ ∈ σd ( T ) si et seulement si λ est


une valeur propre isolé du reste du spectre et de multiplicité finie.

On dira du spectre d’un opérateur T qu’il est purement discret lorsque σ( T ) = σd ( T ) (i.e.
σess ( T ) = ∅). C’est le cas par exemple lorsque H est de dimension finie ou encore lorsque
T l’opérateur d’un guide d’ondes fermé, i.e. lorsque le domaine Ω ⊂ R2 est borné (dans
le cas des fibres optiques, le spectre essentiel est non-vide). On a par ailleurs la caractérisa-
tion suivante d’un opérateur auto-adjoint avec spectre purement discret. Mentionnons qu’un
opérateur fermé T est à résolvante compacte lorsque Rλ ( T ) est compact pour tout λ ∈ ρ( T ).

Théorème A.18. Soit T un opérateur auto-adjoint dans un espace de Hilbert H de dimension infinie.
Alors les assertions suivantes sont équivalentes.

1. T est à résolvante compacte.

2. Le spectre de T est purement discret.

3. Il existe une base orthonormale de vecteurs propres (en )∞


n=1 ⊂ H et une suite de valeurs propres
associées (λn )∞
n=1 ⊂ R telles que limn→∞ | λn | = ∞.

4. Le plongement D ( T ) → H est compact selon la norme induite par T.

72
A.2.2 Calcul fonctionnel pour opérateurs auto-adjoints
Étant donné un espace de Hilbert H, nous avons vu en A.13 qu’il y a bijection entre l’en-
semble des opérateurs auto-adjoints T et celui des mesures spectrales E sur (R, B(R)). Ce
théorème de structure d’analyse fonctionnelle nous permet de généraliser aux opérateurs
auto-adjoints certains résultats portant sur les matrices symétriques. La définition suivante
fournit la base du calcul fonctionnel pour opérateurs auto-adjoints.

Définition A.19. Soit un opérateur auto-adjoint T et h ∈ S(R, B(R), E). Alors on on définit
R
l’opérateur non-borné h( T ) := R h( x )dET ( x ) dont le domaine est donné en A.3 avec E = ET .

Notons quelques propriétés utiles de ces opérateurs nouvellement définis. De la même ma-
nière que pour la mesure de Lebesgue, on dira qu’une propriété tient E-presque partout s’il
existe un M ∈ B(R) de mesure spectrale nulle (E( M ) = 0) et tel que cette propriété tient sur
R \ M.

Théorème A.20. Soit un opérateur auto-adjoint Tet f , g ∈ S(R, B(R), E).


1. Si f est à valeurs réelles ET -presque partout, alors f(T) est auto-adjoint.
2. Si f ( T ) g( T ) est fermé, alors ( f g)( T ) = f ( T ) g( T )
3. Si f est non-négative ET -presque partout, alors h f ( T ) x, x i ≥ 0, pour tout x ∈ D ( f ( T )).

Avant d’aborder une application importante, définissons un autre concept important, celui
d’opérateur semi-borné inférieurement.

Définition A.21. Soit un opérateur auto-adjoint T. On dira que T est semi-borné inférieure-
ment lorsqu’il existe m ∈ R tel que h Tx, x i ≥ mk x k2 pour tout x ∈ D ( T ). On notera dans ce
cas que T ≥ m. Finalement, on dira de T ≥ 0 qu’il est positif et et de T ≥ m qu’il est coercif
lorsque m > 0.

Proposition A.22. Soit T un opérateur semi-borné inférieurement (disons T ≥ m). Alors

σ( T ) ⊂ [m, ∞) (A.5)

Pour nous, une application importante de ce calcul fonctionnel est l’existence de la rarine
carrée pour tout opérateur positif. Rappelons qu’étant donné A.1, on a que D ( T ) ⊂ D ( B) et
pas nécessairement D ( T ) = D ( B) dans ce qui suit.

Théorème A.23. Soit T un opérateur auto-adjoint et positif. Alors il existe un unique opérateur
1
auto-adjoint B ≥ 0 tel que BB = T. On note alors T 2 = B.

Démonstration. Nous nous contenterons de démontrer l’existence (voir [29] pour l’unicité).

Par les propositions A.14 et A.22, on a que supp( ET ) ⊂ [m, ∞). La fonction f ( x ) := x est

73
donc non-négative ET -presque partout. L’opérateur B := f ( T ) est donc bien défini et par le
théorème A.20, on a que B est auto-adjoint et non-négatif. Finalement, comme BB est aussi
auto-adjoint, il est fermé et on conclut que par A.20 que T = BB.

A.2.3 Formes hermitiennes, coercives et fermées

Commençons par de multiples définitions. On dira d’une application sesquilinéaire

t : D (t) × D (t) → C

qu’il s’agit d’une forme densément définie (ou simplement une forme) lorsque D (t) ⊂ H est
un sous-espace dense. On dit d’une forme t qu’elle est hermitienne lorsque t( x, y) = t(y, x )
pour tout x, y ∈ D (t). Une forme t est semi-bornée inférieurement lorsqu’il existe m > 0 tel que
t( x, x ) ≥ mk x k2 pour tout x ∈ D (t). On écrira alors t ≥ m et on dira que t ≥ m est coercive
lorsque m > 0 et positive lorsque t ≥ 0. Enfin, une forme hermitienne t ≥ m est fermée si
D (t) devient un espace de Hilbert lorsqu’on le munit du produit scalaire

h x, yit = t( x, y) + (1 − m) h x, yi (A.6)

Finalement, on utilisera souvent la notation t( x ) pour dénoter t( x, x ), i.e. la forme quadra-


tique associée à t.

Définition A.24. Si t est une forme positive et fermée, alors on définit l’opérateur At par

D ( At ) = { x ∈ D(t) : ∃u x ∈ H tel que hu x , yi , ∀u ∈ D(t)} (A.7)

et At x = u x . Inversement, si A est un opérateur auto-adjoint et positif, alors on définit la


1
forme t A par D (t A ) = D ( A 2 ) et
D 1 1
E
t A ( x, y) := A 2 x, A 2 y = h Ax, yi (A.8)

Théorème A.25. Soit t une forme positive et fermée et A un opérateur auto-adjoint et positif. Alors
t A est bien défini, est une forme positive et fermée et At est un opérateur auto-adjoint et positif. On a

t At = t (A.9)
At A = A (A.10)

On a donc une bijection entre des formes positives et fermées vers les opérateurs auto-adjoints et
positifs. De plus,

t A ( x, y) = h Ax, yi ∀( x, y) ∈ D ( A) × D (t A ) (A.11)
t( x, y) = h At x, yi ∀( x, y) ∈ D ( At ) × D (t) (A.12)

74
A.2.4 Principe du min-max
Lorsque H est de dimension infinie et σess ( T ) est non-vide, on donne dans cette section une
caractérisation des valeurs propres de T plus petites ou égales à α := inf σess ( T ). Notons que
α ∈ σess ( T ) car c’est un ensemble fermé.

En tenant compte de la multiplicité, s’il y a un nombre fini m (possiblement nul) de valeurs


propres plus petites que α, alors on les note

λ1 ( T ) ≤ λ2 ( T ) ≤ .. ≤ λm ( T ) < λm+1 = λm+2 = .. (A.13)

où on pose λn = α pour tout n > m.

S’il y a une infinité de valeurs propres plus petites que α, alors encore une fois en tenant
compte de la multiplicité, on peut les noter

λ1 ( T ) ≤ λ2 ( T ) ≤ λ3 ( T ) ≤ .. (A.14)

Dans les deux cas, on aura recensé par les λi ( T ) tous les éléments du spectre discret en tenant
compte de leur multiplicité. Ceci étant dit, notons qu’il est possible que α soit une valeur
propre, mais elle sera nécessairement un point d’accumulation ou de multiplicité infinie. Ce
sont deux cas indésirables en pratique d’un point de vue numérique.

Théorème A.26 (Principe du min-max). Supposons que H est de dimension infinie. Soit S un
opérateur auto-adjoint et semi-borné inférieurement tel que σess (S) 6= ∅, tS sa forme fermée associée
et ES sa mesure spectrale associée. Pour chaque n ≥ 0, posons Fn l’ensemble des sous-espaces de H
de dimension au plus n.

µn (S) = sup inf hSx, x i (A.15)


M ∈Fn−1 x ∈ D (S),k x k=1
x⊥ M

en (tS ) = sup
µ inf tS ( x, x ) (A.16)
M ∈Fn−1 x ∈ D (tS ),k x k=1
x⊥ M

Alors on conclut que

λn ( T ) = µn ( T ) = µ
en ( T ) = inf λ ∀n ≥ 1 (A.17)
{λ∈R:dim( Im( ES (−∞,λ)))≥n}

A.2.5 Applications à l’opérateur du laplacien


Afin d’illustrer certains points importants, appliquons ces notions à un exemple suffisament
simple pour le lecteur familier avec les formulations faibles des équations aux dérivées par-
tielles. Si l’auteur n’est pas familier avec les espaces fonctionnels usuels, il est suggéré de lire
les sections A.3 et A.4 avant d’aborder cette section.

Considérons l’espace de Hilbert H = L2 (Rn ). Supposons qu’on désire étudier le spectre de


l’opérateur T défini par le domaine D ( T ) = H 2 (Rn ) et

T (u) = −∆u + u (A.18)

75
où ∆ est le laplacien au sens faible, qui est bien défini dans H 2 (Rn ), mais pas dans H 1 (Rn ).
Or, on souhaiterait utiliser une formulation variationnelle (i.e. une forme fermée) qui est en
quelque sorte équivalente à cet opérateur. On définit alors l’application sesquilinéaire t dont
le domaine est D (t) = H 1 (Rn ) ⊂ H et
Z Z
t(u, v) := grad(u)grad(v)dx + uvdx (A.19)
Ω Ω

Il est clair que t est densément définie (selon le produit scalaire de H), hermitienne, coercive
et fermée. En appliquant A.25, on obtient l’existence d’un unique opérateur auto-adjoint et
coercif S tel que D (S) ⊂ H 1 (Rn ) (où D (S) est maximal) et qui vérifie
Z Z
hSu, viH := grad(u)grad(v)dx + uvdx (A.20)
Rn Rn

Or, par la formule de Green, on sait que pour tout u ∈ H 2 (Rn ) et v ∈ H 1 (Rn ), on a
Z Z Z Z
h Tu, viH = (−∆u)vdx + uvdx = grad(u)grad(v)dx + uvdx = hSu, viH
Rn Rn Rn Rn
(A.21)
Comme il y a unicité de S, on peut alors se demander si on a égalité entre S et T. En utili-
sant A.21, on déduit facilement que T est symétrique et coercif. La question revient alors à
déterminer si T est non-seulement symétrique, mais aussi auto-adjoint et si son domaine est
maximal.

Nous semblons alors arrivés face à un mur, car on aurait besoin d’une théorie plus élaborée
des espaces de Sobolev et du laplacien pour établir l’équivalence entre l’opérateur auto-
adjoint T et la forme fermée t. Remarquons cependant qu’il est clair que Su = Tu pour tout
u ∈ D(Rn ) car A.21 tient pour tout u, v ∈ D(Rn ). Nous verrons à la prochaine sous-section
comment on peut facilement résoudre ce problème sans faille au niveau de la rigueur.

A.2.6 L’importance de bien poser le problème


En général, supposons qu’on veuille étudier en toute rigueur le spectre d’un opérateur dif-
férentiel T dont on sait qu’il est symétrique et coercif (comme par exemple celui défini en
A.18). On aimerait appliquer la théorie spectrale des opérateurs auto-adjoints à cet opéra-
teur non-borné. À priori, on ne sait pas cependant si cet opérateur est auto-adjoint. On sait
cependant qu’il existe un opérateur auto-adjoint S tel que Su = Tu pour toute fonctions
infiniment dérivables à support compact.

La solution à ce problème est de poser comme problème de départ la forme fermée associée
à notre opérateur. Le théorème A.25 nous dit alors qu’il existe un opérateur auto-adjoint S
égale à T sur D ( T ) équivalente à cette forme. On peut appliquer ensuite les résultats vus
dans cette annexe à cette forme, en négligeant l’expression précise de S (il pourrait s’avérer
que S = T bien entendu).

76
C’est ce qui est fait dans [2], et ce qui explique pourquoi on peut déclarer rigoureusement
que l’opérateur de notre problème est non seulement symétrique, mais auto-adjoint.

A.3 Dérivation au sens des distributions


Généralisons maintenant le concept de dérivée aux fonctions localement intégrables. Nous
jugeons nécessaires de bien comprendre cette généralisation dans le contexte des fibres op-
tiques car certains opérateurs différentiels et espaces fonctionnels utilisés ne sont généra-
lement pas enseignés dans un cours d’introdution aux espaces de Sobolev. Pour plus de
détails, nous référons le lecteur vers [27].

L’ensemble Ω ⊂ R2 désignera pour l’instant un ouvert non-vide quelconque. Nous noterons


D(Ω) l’espace des fonctions φ : Ω → C qui sont infiniment dérivables et à support compact.
Muni d’une topologie τ judicieusement construite, l’espace topologique (D(Ω), τ ) devient
un espace vectoriel topologique non-métrisable mais avec certaines propriétés remarquables,
telles que la complétude et la convexité locale.

L’objet mathématique d’intérêt pour nous est l’espace dual de (D(Ω), τ ), noté D 0 (Ω) et dont
les éléments sont appelés "distributions" ou "fonctions généralisées". Rappelons que cet es-
pace correspond par définition à l’ensemble des applications linéaires continues (selon τ)
à valeurs complexes définies sur D(Ω). Pour pouvoir parler de convergence dans l’espace
D 0 (Ω), on le munit de la topologie faible étoilée.

Dans un certain sens, l’espace D 0 (Ω) contient l’ensemble des fonctions localement inté-
grables, noté L1c (Ω). En effet, l’application qui à chaque f ∈ L1c (Ω) associe la forme linéaire
Λ f suivante
Z
Λ f : φ 7→ f φdΩ (A.22)

est une injection de L1c (Ω) vers D 0 (Ω). Chaque f ∈ L1c (Ω) est donc associé à une et une seule
distribution. On définit alors la dérivée partielle en x d’une distribution Λ quelconque par
 
∂Λ ∂φ
: φ 7→ Λ − (A.23)
∂x ∂x

et on définit la dérivée en y de façon similaire. Mentionnons qu’étant donné que ∈ D(Ω) ∂φ


∂x
et qu’il y a continuité selon τ, la forme linéaire en A.23 est bien définie et est une distribution.
En prenant un certain recul, on s’appercoit qu’on vient de généraliser ici à toute fonction
f ∈ L1c (Ω) la notion de dérivée partielle en x ou y d’une fonction continuement dérivable au
sens classique. Par exemple, pour la dérivée partielle en x, si on se rappelle l’intégration par
parties, on obtient pour tout f ∈ C1 (Ω) et φ ∈ D(Ω) que
 
∂f
Z Z
∂Λ f ∂φ ∂φ
(φ) = Λ f − =− f dΩ = φdΩ = Λ ∂ f (φ)
∂x ∂x Ω ∂x Ω ∂x ∂x

77
où le terme de bord est nul car φ est à support compact dans l’ouvert Ω. On est donc en
mesure de considérer la dérivée de toute fonction localement intégrable sans pour autant
modifier la définition classique applicable aux fonctions de C1 (Ω).
∂Λ ∂Λ
Comme ∂x et ∂y sont des distributions, on peut définir récursivement (au sens de A.23)
toute combinaison linéaire de dérivés partielles d’ordre quelconque. Ceci nous permettra de
définir les espaces de Hilbert de fonctions pour lesquelles les opérateurs des équations 1.48
à 1.51 sont bien définies, tels que le rotationel et la divergence.

Intéressons nous maintenant aux sous-ensembles de L1c (Ω) nous permettant de bien formu-
ler le problème de détermination des courbes de dispersion de nos fibres optiques micro-
structurées.

A.4 Espaces fonctionnels


Commencons par rappeler l’espace de Hilbert dont tous les modes guidés feront partie. Pour
n ≥ 1, considérons l’ensemble des champs vectoriels F : Ω → Cn où chaque composante Fi
est mesurable et | Fi |2 est d’intégrale finie. Comme on souhaite utiliser les méthodes hilber-
tiennes, on s’intéressera plus précisément à cet ensemble quotienté par la relation d’équiva-
lence ∼ selon laquelle F ∼ G si on a Fi = Gi sauf sur un ensemble de mesure nulle, pour
tout i. Cet ensemble, noté L2 (Ω)n (on omettera le n dans le cas unidimensionnel), contiendra
tous les modes guidés de nos équations de fibres optiques (n = 3 dans ce cas).

Théorème A.27. Soit un entier n ≥ 1 et e : Ω → R une fonction mesurable telle que 0 < inf e(Ω)
et sup e(Ω) < ∞. Alors l’espace fonctionnel L2 (Ω)n devient l’espace de Hilbert L2 (Ω)ne lorsqu’on
le munit du produit scalaire
n Z
hF, Gie := ∑ eFi Ḡi dΩ (A.24)
i =1 Ω

Démonstration. Sans perte de généralité, on peut supposer que n = 1 et e = 1. En effet,

hF, Fi1 inf e(Ω) ≤ hF, Fie ≤ hF, Fi1 sup e(Ω) (A.25)

et donc les normes induites par A.24 sont équivalentes. De plus, on voit facilement que la
complétude découle du cas n = 1. Le théorème devient alors classique et on réfère vers [7]
pour la démonstration.

On remarque que dans le contexte du théorème précédent, le contenu de L2 (Ω)n ne dépend


pas de e et seule la géométrie associée au produit scalaire h·, ·ie varie selon e.

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