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Ceillier, Rondet. Histoire Générale Des Auteurs Sacrés Et Ecclésiastiques. 1729. Volume 20.

Histoire générale des auteurs sacrés et ecclésiastiques : qui contient leur vie, le catalogue, la critique, le jugement, la chronologie, l'analyse & le dénombrement des différentes éditions de leurs ouvrages : ce qu'ils renferment de plus intéressant sur le dogme, sur la morale & sur la discipline de l'Église : l'histoire des conciles tant généraux que particuliers, & les actes choisess des martyrs (1729) Author: Ceillier, Rémi, 1688-1761; Rondet, Laurent Étienne, 1717-1785 Volumes: 23 Subject: Fathers of the church; Christian literature, Early; Catholic literature Publisher: Paris : Chez P.A. Le Mercier père Language: French Call number: AJY-6301 Digitizing sponsor: University of Ottawa Book contributor: John M Kelly Library Rare Books - University of Toronto Collection: johnmkellyrare; kellylibrary; toronto
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Ceillier, Rondet. Histoire Générale Des Auteurs Sacrés Et Ecclésiastiques. 1729. Volume 20.

Histoire générale des auteurs sacrés et ecclésiastiques : qui contient leur vie, le catalogue, la critique, le jugement, la chronologie, l'analyse & le dénombrement des différentes éditions de leurs ouvrages : ce qu'ils renferment de plus intéressant sur le dogme, sur la morale & sur la discipline de l'Église : l'histoire des conciles tant généraux que particuliers, & les actes choisess des martyrs (1729) Author: Ceillier, Rémi, 1688-1761; Rondet, Laurent Étienne, 1717-1785 Volumes: 23 Subject: Fathers of the church; Christian literature, Early; Catholic literature Publisher: Paris : Chez P.A. Le Mercier père Language: French Call number: AJY-6301 Digitizing sponsor: University of Ottawa Book contributor: John M Kelly Library Rare Books - University of Toronto Collection: johnmkellyrare; kellylibrary; toronto
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Digitized by the Internet Archive
in 2010 with funding from
University of Ottawa

Iittp://www.arcliive.org/details/liistoiregnra20ceil
^
1

HISTOIRE GENERALE
DES
AUTEURS SACRES
ET
ECCLÉSIASTIQUES,
QUI CONTIENT LEUR VIE, LE CATALOGUE;
la Critique le Jugement la Chronologie
, l'Analyfe & le Dénom-
, ,

brement des diflférentes Editions de leurs Ouvrages ; ce qu'ils ren-


ferment de plus intérefîant fur le Dogme , fur la Morale fur la &
Difcipline de l'Eglife ; l'Hiftoire des Conciles tant généraux que
particuliers , <5c les Adles choifis des Martyrs.

Par le R. P. Dom Remy Ceillier, Prieur Titulaire de Flavîgny ;

^ Préfident de la Congrégation de Saint Vannes 6* de Saint Hydulphe.

TOME VINGTIEME.

A PARIS,
Chez la Veuve Lottin &Butard, Imprimeur-Libraires , rue S. Jacques ;
à la Vérité.

M. DCC. LVIL
^FEC APPROBATION ET PRIVILEGE DU ROI.
^^^-
, ,

^& ^« #& M. #. ^- iS"^ #. *^«. 4» X # ï4 #« €^ #" #" #" ^^^ *^^ #> ^^-

TABLE
DES CHAPITRES.
CHAPITRE I. Liturgies à l'ufage de l'Eglife
Latine, Page r
Chap. Saint Abhon, Ahhé de Fleuri,
11. & Gérard Moi-
ne dn même Monajlerè , 32
Chap. III. Hériger , Ahhé de Lohes;'Notger , Evêque de
Liège; & Aimoin de Fleuri ^4
Chap. IV. Ethelwerd Patrice & Conful , Hippolyte le
Théhain , Eutychius d'Alexandrie , Chrijîodule, Ni-
cou , Moyfe Barcepha s 6" quelques autres Ecrivains ,
66
Chap. WAdalard , Ahhé deBlandigni i Bridferth, Moi-
.

ne de Ramfey ; & OJberne, Moine de Cantorheri.c^^


Chap. VI. Ditmar, Eveque de Merjhourg , lor
Chap. VII. Brunon , Evêque de Langres ; Ahvalon ;
Valcande ; Conjîantin , Ahhé de S. Symphorien ; Al-
bert, Moine du même Monaflere; Arnoul, Moine de
S aint André d' Avignon s Addhod, Evêque 4'Utrecht
116
Chap. VIII. Saint Fulhert , Evêque de Chartres i GauT^-
lin. Archevêque de Bourges , 128
Chap. IX. Bouchart , Evêque de Vormes ; Arnold} 6*
quelques autres Ecrivains. 1^2.
Chap. X. Thierry, Moine de Fleuri; Thîerri, Moine de
S. Matthias ; Ademar , Moine de S. Çihard , 166
Chap. XI. Rohert , Roi de France; Othelhald , Ahhé de
faim Bavon à Gand; Chronique de Mou\on; Le-^-
cdin, Pierre de Chartres, Enguerr an & Oderanne,
j8i
, , , ,

iV TABLÉ
Chap. XII. Le Bienheureux Cickard, Ahhéiefamt Van^
nés. Saint Orient , Evêque d'Aufck i Poppon , Arche-
, Evêque d'Aufone i Drogon ,
vêque de Trêves ; Oliba
Evêque de Beauvais , ip^
Chap. XIIL Bernon , Ahhé deRichenow ; ArihonyAr-
chevêque de Mayence ; Gui JMre:^:^o 206
Chap. XIV. Du Menologe , 6" autres Livres Ecdéjïa-^

Jliques des Grecs 22T


Chap. XV. Erchinfroid, Ahhé de Molchi Va^on, Evê-
que de Liège ; Glaher i Helgaud i Syrus & Aldehal-
de , 230
Chap. XVI. Saint Odilon, Abhé de Cluni ; & Jodfauà
j'on Difciple , 25r
Chap. XVII. Cativalon , Ahhé de Redon ; JFarin , Abhé
de Saint Arnoul; Gualdon, Moine de Corhie; Jean,
Ahhé de Fécami Gérard , Evêque de Cambrai, 26'è
Chap. XVIII. Hugues , Evêque de Langres i Hijîoire
de l'héréfie de Bérenger , 280
Chap. XIX. Vippon , Hijiorien ; Hatinard , Archevêque
de Lyon , Chronique de Dijon i Jourdain de Limo-
ges , & quelques autres Ecrivains , 503
Chap. XX. Hermann Contraâl , & divers Auteurs de
Chroniques, 314
Chap. XXI. Suite des Tapes depuis Jean XVÎl,jufqu'à
Léon IX ; Wihert , Archidiacre de Touli Ç^ Anfelme
Moine de S. Rémi de Reims 324
Chap. XXII. Michel Cerularius , Patriarche de Con-
Jîantinople ; Léon , Evêque d'Acride ; Nicétas Pe-
(iorat ; Pierre , Patriarche d'Antioche i Humbert ,"

Cardinal ; Dominique , Patriarche de Grade; & Si-


méon le Jeune y 3(^4
Chap. XXIII. Jean Mauropus , Métropolitain dEu-
chanie i Jean de Garlande ; Alexandre &* Anfelme de
,,, , , ,

DES CHAPITRES. >v

,
Liège ; Jean Géometr e '394
Chap. XXIV. Gonion Ahhé de Florenne; Odon, MoU
,

ne des Fojfési Go^echin , Ecoldtre de Liège; cr quet-


ques autres Ecrivains 401
Chap. XXV. Vi^or II; Etienne IX i Nicolas II, Pa-
pes , ^11
Chap. XXVI. Humhert , Cardinal , Evêque de Blan-
che-Selye, ^ij
Chap. XXVII. Adelmanne , Ecolâtre de Liège , & de-
puis Evêque de Breffe ; Afcelin, Moine du Bec, 438
Chap. XXVIII. Hijioire des Evêques de Verdun ; Bouon;
Allé de Saint Bertin i Vitmond , Moine de Saint
Evroul; Arnalti, Moine de S. Via or ; Louis, Moi-
ne de S. Laurent à Liège 447
Chap. XXIX. G erv ais , Archevêque de Reims ; Mau-
r die y Archevêque de Rouen» 45*4
Chap. XXX. De quelques Ecrivains qui ont vécu vers
le milieu de l'onr^iemejiecle, 468
Chap. XXXI. Othlon, Prêtre & Moine de Saint Em-
.meramne de Ratijhonne 480.
Chap. XXXII. Alexandre II , Pape , 4py
Chap. XXXIII. Saint Pierre Damien , Cardinal, Evê-
que d'Ojlie, yi^
Chap.XXXIV. Hepidann, Moine de Saint Gai; Gual-
don , Moine de Corbie ; Jean d'Aquilée ; Gunchier de
Bamhergî Rainaud; Scholajlique d'Angers; & quel-
ques autres Ecrivains ^68
Chap. XXXV. Michel Pfillus , Précepteur de l'Empe-
pereur Ducas ; Conjlantin Lichudès , Çf Jean Xz-
phijîa Patriarches de Conjlantinople
,
^8^
Chap. XXXVI. Saint Gehouin , Archevêque de Lyon ;
Oderic , Ahhé de Vendôme ; &• quelques autres Ecri-
vains y ^p2
ZuKyxzM
vj TABLE DES CHAPITRES.
Chap. XXXVII. Grégoire Fil, Pape , 6it
Çhap. XXXVIII. Samt Anfelme , Evêque de Luques ;
KJCdehardy Evêcjué de Sab^bourg ; Lambert de Schaf-
nabourg ; Benhold de Confiance ; Marianus ScO'
tus } Brunon ; Waltram ; Sigefroi de Mayence , 6jo
Çhap. XXXIX. Saint Anaftafe^ Ermite ; Guillaume^
Moine de Jumiége ; Dudon de Saint Quentin ; Guil-
laume de Poitiers ; Guillaume , Roi d'Angleterre ;
Thierri , Evêque de Verdun , 6^6
Çhap. XL. Didier, Abbé de Mont-Caffîn, & Pape fous
le nom de Viâîor III , 710
Chap. XLI. Urbain II , Pape , 717
Çhap. XLII. Des Conciles de Vorms , de Tolède de Ne- ,

Jîrejîeldy de Rome de Nid, d'Aine, d'Angleterre , de


,

Conjlantinople , de Rome , 755


Chap. XLIII. Des Conciles de Verherie , de Carifiac , de
Conjlantinople , de Verneuil, de Mef:^, de Compiegne ,
de Gentilli , de Rome , 78 }
Chap. XLIV. Du fécond Concile de Nicée ,
pour les
Images ;jeptiéme général , 79'^»

L'Approbation ^
le Privîlepre fe trouvent au
dix -neuvième Volume.

-^w

HISTOIRE
HISTOIRE GÉNÉRALE
DES AUTEURS
SACRÉS ET ECCLÉSIASTIQUES.

CHAPITRE PREMIER.
Liturgies a l^ufage del'Eglife Latine.

UOIQU'IL n'y ait (a) parmi les fidcles Liturgie Ro-


maint'.
•, 1 r -^ r > '
qu un corps , qu un cipnc , qu une elperance
à laquelle ils font tous appelles ;
qu'un Sei-
gneur , qu'une Foi , qu'un Baptême ; & que les
Sacremens inftitués par Jefus-Chrift , l'oient
les mêmes dans toutes les Eglifcs ; elles ont cru
pouvoir varier dans les Rits , ians préjudicier à l'unité de leur
foi ;& cette variété n'a jamais formé un prétexte légitime de
Ichifme & de divifion entre les Eglifes. Nous favons , difoit le
Pape faint Léon IX à Michel Ccrularius Patriarche de Con-
ftantinople (/;) , qui reprochoit aux Latins de célébrer avec du
pain azimc , que la différence des coutumes félon les lieux 8c

(a) Ad Ephef, 4. 4. j-, 1 (i; Lf o , Epi]}, f, tom, 9- Concil.p. 543^


j nnm. Z9,
Tome XX, A
2 LITUPvGIES
les tcms , ne nuit point au ialut ,
pourvu que l'on fott uni par
la foi & la charité. Rome coni'erva fes iifagcs fans y aflreindre ,

Tcglife de Milan ces deux : Eglifesnc firent même aucune dif-


ficulté d'apporter quelques changemens à leurs Liturgies. Le
PapeGclalecompoia de nouvelles Oraifons,& des Préfaces (f).
S. Grégoire en retrancha quelques-unes , en ajouta d'autres (d).
Il joignit au Canon l'Orailon Dominicale {e) , qui en d'autres
Liturgies ne le difoit qu'après la fraclion de l'houie. Il y ajouta
aufiTi ces paroles Difpofez de nos jours dam votre pnix. On ne
:

voit pas que depuis il ie foitfaitde changement dans ce Canon,


qui ell: à prclcnt le même dans les Egliles d'Italie , de France ,
d'Allemagne, cS^ d'Elpagne. On peut en voir le précis dans le
dix-fepticme volume , dans l'article de faint Grégoire.
Lîturg'e H. '^'^alafridc Strabon (/) dit que faint Am'oroife Evcque de
Ambrofienne. Milan rcgla la difpolîtion tant de la Mcffc que des autres Of-

fices pour fon Eglile Sa pour toute la Liturgie. C'eil auffi la tra-
dition de l'églifc de Milan, & on ne doit point s'en écarter
lans de bonnes raifons. Il ne faut pas s'imaginer pour cela qu'il
n'y avoit point de Liturgie dans cette Eglife avant qu'il en fut
Evcque. Il en fuppofe une déjà établie , en di-'crs endroits de
fes écrits, furtout dans fes Lettres à fa fœur Marcclline ; dans
fes Livres delà foi à Gratien, Se dans le Traité des Myfleres ,
ou dcsïnitics. Mais en conlcrvant les ufagcs qu'il avoit trou-
vés établis , il leur donna une nouvelle forme , Se y ajouta ce
qui lui paroilfoit utile pour ranimer Se entretenir la piété des
fidèles; de nouvelles Hymnes , pour être chantées même ci la
McOc (g); le chant alternatif des Pfeaumes {h) ; de nouvelles
Préfaces qui contenoient en peu de mots les fujcts des Myfte-
res & les adions des Saints (?) Se de nouvelles Oraifons. Quel-
;

que loin que faint Ambroife le fut donné pour perfcclicnner la


Liturgie de fon Eglife , elle ne lailfa pas de fouffrir dans la
fuite quelques changemens. Il y a des Méfies dans le Midel Am-
brcHen , qui font tirées du Grégorien en particnlier, les trois ;

du jour de Nocl on n'a pas même retranché à la féconde, les


;

Oraifons de lainte Anaftafie , quoiqu'elles eufient rapport à la


llation qui fe failoit à Rome dans l'Egiife de cette Sainte. On

(c) Tmi. it. />. jjji. rlrfiéiflich , f.?f. ?. î.

(/; W MAïRlV Siral/o ,l:l>.De r<liiis Ec- 1 («') Vk'alAH'vID. lib. Je rth. Ecdtf. c. xx«
DE L'ÉGLISE LATINE. Ch. I.
3
a encore ajouté dans le Canon,' ces paroles que laine Grégoire
a\ oit miles dans le Romain : Difpojez de nos jours dans votre
paix.
III. Le plus ancien Recueil que Ton connoifle des Rits de la Ritsdeia Le-
''^™"
Liturgie Ambrolicnneefl de Berold Bibliothécaire du Dôme ou ''"'Ji"'

e iJbjTlilc Metropolitame de Milan, qui ccnvoit vers 1 an


1123 Voici l'ordre de la Melfe Ambrofienne. Le Célé-
(k).
brant de plufieurs Prêtres , de plulieurs Diacres
affilié Sou- &
diacres, étant aux pieds de l'Autel fait fur foi le ligne de la
croix ; &
après avoir récité à l'alternatif avec les Miniftres le
Pfeaume Judua me j &: le verlet Confitemini Domino , dit le Confi-
teor, fuivant l'ulage Romain, en ajoutant iculemcnz bcaia Am-
brofto Confejjori , les Miniftres le répètent. Après quoi l'OUî-
ciant ayant dit ^djuiorium noftruin ,& Sitnomen Domim benedic-
xum , il récite lécrctement, l'Oraifonde faint Ambroife c]ui com-
mence ainli: liogo te y altijfnne. Puis montant à l'Autel, il dit aufli
à voix baffe : Oramuste, Domine, comme dans le Miifel Romain.
Enfuite il lit à la corne de l'Autel , l'Introït de la Meiïe , appelle
Ingrejfa. C'efl une Antienne fans Pfeaume ni Gloria Patri. On
ne la répète point, (1 ce n'elT: aux Mefles des Morts , où le lie-
quiun eft répété après le verfet. Te decet. Le Célébrant falue le
peuple en difant, Dominus vobifciim , mais fans le tourner. Suit
le Gloria in excclfis , fi on 'c doit dire ; trois fois Kyrie eleifon ;
une ieconde fois Domimis vobifcum, puis une ou deux, ou pla-
fieurs Oraiions fur le peuple; une troifieme fois Dominas vobif-
cum. La lecture de l'Epitre, V Alléluia avec un verlet, ou le
verlet ians V Alléluia , félon les tems. Aux jours de Dimanche
& des Fêtes folemnelles , on lit avant l'Epître , une Lei^on de
l'Ancien Tellament, avec un Graduel: l'Epître finie, l'Officiant
dit la f)riere , Alunda cor meum , enfuite Dominus vohifcum ; &c
failanjle ligne de la Croix fur Ion front, la bouche & fa poi-
trine, il dit LeSJioS. Evnngeliiy&cc. & tandis que l'on répond
:

Gloria rihi. Domine, ï\ le tourne vers la Croix & demande labé-


nédittion, qui cfl la même que dans le Romain. Il lit l'Evangile ;
puis s'avançant au milieu de l'Autel il dit , Dominus vabi/cum',
cnluitc trois fois Kyrie eleifon ; une féconde fois Dominus vobif-
£um; puis l'Antienne d'après l'Evangile, & une troifieme fois
Dominus vobifcum. Après quoi il ajoute; Pacem habeiCy c'eft-à-'

(JC Puricelli Dijprtétiion. Nstariamt. cap, $7, p. 460,


Aij
y

4 LITURGIES
dire ,Tenez-vous en paix. Le Chœur rcpondj Ad te , Domine. Le
Piètre dit pour la quatrième fois Dominus vobifcum ; enfuite la
Colleftc , Hiper Sindonem , c'cfl-à-dire fur le Corporal
Suite èe la jy , Auiïitôt aprcs il prend la Patenne avec l'Hoftic l'offre : & '

^'
puis ayant mis du vin &
de l'eau dans le Calice , il l'offre auiïî.
Il récite fur les Oblata plufieurs Oraiions , après lefquelles il lie
l'Offertoire, &
dit , Dominus vobifcum. Suit le Credo , fi on le
doit dire en ce jour; lequel étant achevé, il prononce à haute
voix une ou plufieurs Oraiions femblablcs à nos Secrètes. En-
fuite il chante la Préface propre à la MefiTe du jour , récite le
Canon ,
jufqu'à ces paroles : ^«i pridie quàm patereîtir. Alors
paffant à la corne de l'Autel où on lit l'Epître , il lave l'extré-
mité de fes doigts &
les eflTuye , fans rien dire ; puis reprend la.
fuite du Canon; lequel étant fini, il rompt l'Hofiiie, le Chœur
chante une Antienne , appelLée ConfraEloriwn , qui efl différente
félon les Meffes. Enfuite il dit. Oremus : Praceptis falutaribns
tnoniti, avec l'Oraifon Dominicale. Apres que le Chœur a ré-
pondu Sed libéra nos à malo , le Prêtre pourfuit en chantant à
:

haute voix Libéra nos qu^fimms , ajoutant au nom de S. André


:

celui de S. Ambroife. L'Oraifon finie , le Célébrant dit Fax :

& commimicatio Domini nojlri Jefu Chrifli fa femper vobifcum. Le,


Chœur répond Et cumfpiritu tuo. Le Prêtre ajoute Offerte vobis
: :

pacem. On répond : Deo gratias. Suivent les Oraiions pour la


&
Communion ; après avoir dit : Domine , nonfum dignus , il fc
communie du Corps &
du Sang du Seigneur ; ayant purifié &
le Calice , il dit à la corne de l'ÈpJtre r()raiion appellée Tranfi-
torium , qui répond à notre Pofl-communion ; puis , Dominus vo~
hifcum , &
une ou plufieurs Oraifons. Il dit une leconde fois Do'
minus vobifcum , &
trois fois Kyrie , eleifon. Se mettant enfuite au
milieu de l'Autel , il fait fur lui-même le figne de la Croix , di-
fant Benedicat
: &
exaudiat nos Deus. Le Chœur ayant répon-
du, Amen^\Q Prêtre ajoute: Procedamiisinpace. On répond In :

nomine Chrifli: alors il chante , Eenedicamus Domino; après &


que l'on a répondu, Deo gratias , il dit l'Oraifon : P/aceat tibi
bcnit peuple
le &
lit le commencement de l'Evangile félon faine

Jean. Après quoi il fe retire en difant le Cantique Benedicite ,


félon le Rit Romain. Aux jours folcmncls , le Prêtre encenfe
l'Autel & les Oblata. Saint Ambroife parle de cette cérémonie
dans ion Commentaire Luc (/).
fur faint

(/] Comment, it> Luc. ci>f, i,


,

DE L'ÉGLISE LATINE. Ch. I.


5
V. Suivant Rit Ambrofien on ne dit jamais Àgnus Dei à la Ufagcspar-
le
Meffe , il ce n'cll lorlqu'on Toffre pour les Morts (m). Le texte ""ibTeMU
de TEcriture qu'on lit à la Mcfle , n'ed pas toujours confor- kn.
me à la Vulgatc ; mais à Tancicnne Verfion Italique , ce qui fc re-
marque furtout dans les Pfcaumes. Aux Dimanches de Carême
on recite auflitôt après rintroïc, des Oraiions pour l'Eglife,
pour TEvcque &
tout Ion Clergé , pour l'Empereur le Roi &
pour tous les Etats &
pour les ncceffités publiques. chaque A
Oraifon le Chœur répond Domine, mifercre^ ou Kyrie, eleifon. Le
:

jour de Pâquc & pendant l'Oflave on chante deux Méfies dans


les Egliles Collégiales , Tune pour les baptifés ; l'autre pour la
fête du jour. Il n'y a point de Meflc pour les Vendredis de Ca-
rême ; l'on n'en célèbre point ce jour-là à caufe de la triftefi'e
qu'imprime la Pafllon de notre Seigneur. Saint Charles en a
fait une défenfe exprefTe dans fon troiilcme Synode , ordon- &
né dans le neuvième , qu'au lieu de la Méfie , on s'afiembleroic
pour adorer la Croix , & que l'on feroit un iérmon fur la Pal-
iion. Saint Ambroifc dit en plufieurs endroits de fes Ecrits, qu'il
offroit tous les jours le faint Sacrifice mais cela doit s'enten-
:

dre relativement aux ufages de fon Eglife. L'Eglife Métropoli-


taine conferve un rcfte de l'ancien ufage de l'oblation du peu-
ple. Le Célébrant ayant chanté VOraiionfuper Sindoaem , fur le
Corporal , defcend à l'entrée du Prcfisitere , accompagné d'un
Diacre & d'un Soudiacre , précédés de deux Acolythes portant
deux vafes d'argent. Là il reçoit les oblations du pain & du
vin , que deux vieillards de l'Ecole ou Congrégation qu'on ap-
^eWedefriim Amhroife, revêtus de blanc avec un Capuce noir,
préfentent. Le premier offre trois hofiies ; & le fécond , une bu-
rette pleine de vin blanc. Enfuite le Célébrant pafie à l'entrée
du Chœur , où il reçoit les oblations des femmes , qui lui font
préfcntées par deux d'entr'elles, d'un âge avancé.
VI. L'Eglife des Gaules avoit fa Liturgie particulière , com- Lim-gle Je
me il paroît par la Préface de l'Abbé Hilduin fur les Aréopa- l'Eg'i'e'^Gai-
gitiqucs , oi:i parlant des anciens Mificls Gallicans , & prcfquc antlquiJ'dif-
confumés de vétufié , il dit qu'ils contenoient l'ordre de la Meflc trente de la
^'"''^^''' '^^'
fuivant l'ufage des Egliles des Gaules , qui y avoit été reçu avec
la foi , &obfervé jufqu'à cequ'on y eut introduit le Rit Romain.
Ce changement n'étoit point encore arrivé en "^^^6 , lorfquc

^«>) CindiiLil, Boa A, Kertim Litiirgiç,lib, i, c, io./'/»f. 5j,


6 LITURGIES
iainc Aygudin Apôtre d'Angleterre pafla en France. Il fut fur-
pris d'y voir que la manière de célébrer
Meifc (//),n'ctoit point
la
la même ^u'a Rome , quoiqu'il n'y eût aucune différence dans
la Foi entre ces deux Egîiles. Cela lui donna occaflon de de-
mander au Pape iainr Grégoire , pourquoi la Foi étant une , les
Coutumes des Egliles étoient li différentes. Le Pape dans fa rc-
ponfe n'accula point les Egliles des Gaules d'avoir innove mais :

il conleilla à Augullin de choifir de toutes les Egîiles, les prati-

ques les plus pieufes , les plus laintes & les plus folides , & d'en
coaipofer un recueil à l'ulage des Anglois. Ce ne fut que fous
le règne de Pépin & le Pontificat d'Etiruie III, que l'on com-
mença en France à le conformer aux rlits de la Liturgie Ro-^
maine. Ce Pape vers l'an 787 donna des Chantres à Charlema-
gne (0) ; Paul I envoya l'Antiphonaire & le Fvefponforiel (p) ; &
le Pape Adrien le Sacramenraire de faint Grégoire (i^). Enfin on
fit une loi rapportée dans les Capitulaires de France (r)
, que
tous les Prêtres célébreroient la Méfie fuivant l'Ordre Romain.
Livrpsdeia VU. \\ nous refic divcrs monumens de l'ancienne Liturgie
iic'aneT'^
'^'Gallicane imprimés à Rome en 1680 par les foins du PereTho-
mafi , depuis Cardinal ; Se à Paris en 1685 par Dom Mabillon,
Son édition qui cft plusample que celle du PereThomafi ,a été
remife fous prcffe en la même Ville chez Montalant en 1725),
C'cil celle que nous iuivons. Elle cft divilée en trois Livres. Le
premier traite des diverfes Liturgies de l'Eglife Latine, en par»
liculier delà Gallicane, dont on fait un paralelle avec la Mo-
iarabique (j). On indique les Auteurs de cette Liturgie fça- ;

voir, iaint Hilaire de Poitiers (r) , Mullcus Prêtre de Marlêille,


& faint Sidoine évêque de Clennont en Auvergne on en ex-^ :

plique toutes les parties par divers paffagcs de Iaint Grégoire de


Tours & par d'autres anciens monumens («) : on fait voir la
différence des Meffes lolemnellcs d'avec les privées de (^) ;

celles du matin d'avec celles du foir appellées auffi quadragéfi-


maies. Par le Solemnelles on entend celles que l'on célébroic
publiquement en prélcncc de tous les fidèles, aux ]ours de Fê-
tes & à l'heure de Tierce. Les Meffes privées font celles où il
Cil libre au peuple d'affilier ou de ne point alîifler. Par les Mcf-»

(h) G^foOR.. Epij), 64- ''i. io. (1) l.ib. 5.1, 1/1.7 1. iit. .p. poj.
(0) Cakoi.in. m. i. fd;. 6. p. iji. (j) Liirir^ij Gj//ii:.(«<l,MAJiiUJJI'l./l. 1 j,
(/)) Paih. i^pifl. ail
'
iJn. (l) l/'i/i- p. 18. Z9.

(y) AdriAiii Vit* i« Moiiacbe [^ Eu^olifm. (h) ItiJ. p. j6,


(,v)iW.;'<i^.;4.
,

DE L'ÉGLISE LATTNF.Cn. I.
7
les marutinales, il faut qu'on dilbit avant Thcure
entendre celles
de Tierce ;& par lesicrotinalcs,]cs Méfies qu'on célébroit vers le
loir. On les appclloit a:udi quadragcHmalcs, parce qu'en Carê-
me on n'offroit le facrifice que vers les trois ou quatre heures
dufoir. Le relie du premier Livre eft employé à examiner quels
étoient les orncmcns des Prêtres &
les ufagcs defàncs au iaint
Minillcrc (y) ; la dilpodtion des Eglifes (z) ; les lieux defàncs à
laconlervarion des Reliques (a). On les mettoit quelquefois fous
l'Autel, ou dans l'cpailfeur des murs, ou dans le Baptiftere;
mais toujours enfermées dans des chafTes ornées proprement;
& jamais fur l'Autel , fi ce n'efl: quand on dcvoit les porter en
proceflion. A
l'égard de l'Euchariflie, ilétoit d'ufage tant chez
les Grecs que chez les Latins, de la rcfcrver pour les malades (ù)
à qui on la donnoit en forme de Viatique ; ou pour le Jacrificc
du lendemain.
I-^^'f^nnaire
Vin. Le fécond Livre contient un Ancien Lccllonnaire de
l'Eglife Gallicane avec les oolervations & les notes de Dom Ma-
billon (c). L'Original efl: encore dans la Bibliothèque de l'Ab-
baye de Luxeu. Il eft écrit en caratleres Mérovingiens: ce qui
prouve qu'il a au-delà de mille ans. On y trouve de luite les Pro-
phéties , les Epitres &
les Evangiles qu'on liioit à la Melfe pen-
dant toute l'année, &
dans les Offices des grandes folemnitcs.
Quoiqu'il foit fans titre , parce que les premiers feuillets man-
quent, on ne doute point que ce ne loit le Lcdionnaire Galli-
can , tant parce qu'il a été écrit avant que l'on ait reçu en Eran-
ce l'Ordre Grégorien , qu'à caufe que les Leçons y font difpo-
fées fuivant le rit ancien de l'Eglife Gallicane. Il y en a deux ,
prelque pour toutes les Méfies, outre l'Evangile: quoique ce &
Livre ne contienne l'Ofhce que de très-peu de Saints , il en mer
un pour lainte Geneviève plus célèbre en France, que dans les
Provinces étrangères. Ce Légionnaire n'étant pas enti^^r » il
n'efl pasaifé de décider, où il commcnçoit ni où il finifibit il :

ne commence dans les imprimés qu'à la veille de Noël; & l'Of-


.fice y efl: défigné par le numéro VIII. ce qui montre qu'il en
manque fepr. On juge de-là que les feuilles qui ont été arra-
chées du manufcrit contenoient les Offices de l'Avent , que
Ton commcnçoit dans l'Eglife Gallicane , à la fête de S. Mar-

(r) 7/.rV./.,rf. 6\.


(0 lUd.f.,^. M

(«j Ibid.fag. 81,


8 LITURGIES
rin. Le Le£lionnaire par l'Office de la Décollation de faint
finit
jcan-Baptifte, pour après quoi il rapporte les Offi-
les Saints:
ces pour la Melfe , pour la Bénédidion des nouveaux fruits ; le
&
Commun des Martyrs des Confefleurs, divers autres Of- &
fices; à dévotion, qui n'ont point de jours affignés. Il y en a un

pour le jour auquel l'Evêque doit faire un Diicours aux peuples


lur l'obligation de payer la dixme (d). Le Difcours 277,dans l'ap-
pendice de ceux de faint Auguflin , traite de cette matière. Il
elt attribué à faint Cefaire , &
fut prononcé avant la fête de la
Nativité de faim Jean-Baptifte.
MiffelsGal- IX. On trouve dans le troifiéme Livre, trois Miflels (e). Le
licans.
Cardinal Bona en avoit indiqué deux. Le Père Thomafi en ayant
découvert un troifiéme, les fit réimprimer à Rome en 1680. La
rareté des exemplaires engagea Dom Mabillon, à remettre ces
IVIifi"cls fous prefle avec des notes marginales fur les endroits du

texte qui en avoient befoin , &


des obfervations préliminaires.
Le premier a pour titre dans le manufcrit de la Bibliothèque de
la Reine de Suéde , auparavant d'Alexandre Pctau Confoiller
au Parlement de Paris , Mijfel Gothique , ou Gallican , comme
l'a intitulé le Cardinal Thomafi Dom Mabillon l'appelle Go-
:

thique (jallican , parce qu'il avoit été en ulage chez les Gaulois
fournis à l'empire desGoths, dans la Gaule Narbonnoife, dont
ces barbares s'étoient rendu maîtres. Le Iccond a pour titre
dans l'édition de Rome , Miffel des Francs ; & le troifiéme , Vy^n-
cien Gallican. L'Ordre Gallican efl: dans le premier fans aucun
mélange dans les deux autres , il efl; mêlé avec le Romain. L'in-
:

icription de chacun cft fondée fur des preuves locales. On lie


dans le premier ou Gallican, les noms des Saints principaux des
Gaules ; de faint Saturnin de Touloufe , de faint Ferrcol faine &
Ferrution de Befançon , de faint Symphorien d'Autun , de
faint Léger évêque de la même Ville mort en (^78 , de faint &
JVÏartin de Tours. Il y efl fait auffi mémoire des Rogations qui
entêté établies dans les Gaules long-tems avant qu'on les reçût
en Efpagne ou ailleurs. Le fécond efl appelle MifJ'cldes Francs,
non-feulement parce qu'il n'y a point d'autre Mcifc que pour les
Saints du Royaume , fçavoir , celle de Inint Hilaire de Poitiers j
mais encore parce qu'on n'y prie point pour d'autres Rois , que
pour ceux de France. Cependant Dom Mabillon ne le croit point
pur Gallican (/) , &
il en donne pour railons
,
que les Prières

(^//) limrgU G.illic.vj/1 , MABii.i,pa^, iéj?. (<•) P.i^, 174. (/) J^'V. p«j. 1 77.
•de L'ÉGLISE LATINE. Ch- T. p
& les Rits des Ordinations y l'ont Icsmcmcs que dansl'OrdreRo-
main ; que le Canon de la MefTc n'en efl point différent , Se
qu'on y lit ces paroles ajoutées au Canon Romain par S. Gré-
goire Dijpofez de nos jours dans votre pai^. D'où il conclut que
:

le manufcritlur lequel eft faite l'édition de Rome en 1680, n'eft


pas du (îxiéme liccle , comme l'a cru le Cardinal Thomali , mais
du feptiéme, &
pas plus tard ; foit parce que dans la Bénédi-
ction des Rois, on en nomme toujours plufieurs; ce qui montre
que le Copille écrivoiten un tems , où les François étoient gou-
vernés par plufieurs Princes ; loit à caufe que dans le Canon de
la Mefle on ne met après les Martyrs que deux Confeflcurs,
laint Hilaire & faint Martin; au lieu qu'il s'en trouve un plus
grand nombre dans les Miffels du neuvième ficelé. Le troilié-
mc MilTel eft également un mélange du Gallican &: du Romain.
D'un coté, il eu dans le même ordre que le Gothique Gallican ;
de l'autre , on y prie le jour du Vendredi-Saint pour l'Empire
Romain [g) ; & les Orailons de ce jour font abfolument les mê-
mes que du Milfel Grégorien.
X. Le Gothique tel qu'il a été publié par Dom Mabillon, ne CequeconJ
comprend que les Orailons de la Mefle , la Préface , la Béné- jj^™.' "'
di£lion du peuple, la Poft-communion pour les Fêtes de l'an-
née, à commencera la veille de Nocl. Les Epîtres & les Evan-
giles n'y font point rapportés, ni l'ordre de la Mefl!e. Il en ell
de même du Miflel des Francs, & de l'ancien Miflel Gallican.
On avoit un autre Livre pour les Prophéties , les Epîtres & les
Evangiles. C'étoit le Ledionnaire , dont nous avons parlé plus
haut. A l'égard des Rits de la MelTe, on les trouvoit dans le
Sacramentaire, ou dans l'Ordre Gallican. Entre plufieurs ob-
fervations que l'on pouvoit faire fur ces trois Miflels Gallicans,
nous ne nous arrêterons qu'à ce qui regarde la doftrine de l'E-
glife des Gaules fur la préfencc réelle dans l'Euchariltie Se la
tranfubftantiation du pain & du vin au corps & au fang de
Jelùs-Chrift. Dans la Mefle pour le jour de l'Epiphanie, le Prê-
tre dit Demandons , mes Frères , que celui qui a changé l'eau en
:

vin ^change maintenant en jon fang les vins de nos ojfrandes (/),
Les prières de la Meflfe pour les Fêtes delà Circoncifion (k) ,
de la Chaire de faint Pierre , & de faint Léger; la McflTe de

(g)IHJ.pj^. 551. qui tuncaquas in vina mutavu , nunc in


Pag. 188.
(/-') (ànguinem fuum oblationumnoflrarum vi«
(»)Epiphani3diem,Fratrescariffimi,ve- na convertat. MifT. in Epifh. p. xai.lib. j.
nereïnur, piâ obfecratione pofcemes, uti (/t) Fiat nobis Ëuchartilia légitima in tuo

Tome XX. B
10 LITURGIES
rOrdiriation des Prêtres dans le Miflel des Francs ; celle du &
Jeudi Saint dans le Miffel Gallican fe fervent même du terme
de transjormation pour marquer ce changement (/).
Sacran^cn- XI. Outrc Mifîcls dont nous vcnons de parler , Dom
Ics t^ '^13
ta"recie!'Fgli
jy^abillon imprimer un quatrième dans le premier tomc
cn a fait
e a icine.
j^ ^^^^^ Muf^wn Italicujn,k7âns en 1687 fur un manufcrit du
Moiiaftere de Bobio, en Lombardie, dans le Duché de Milan (m),
La grandeur «& la forme des lettres de ce manufcrit prouvenc
fon antiquité , & on le croit ancien déplus de mille ans. Quoi-
que trouvé dans la Bibliothèque de Bobio , il ne paroît point
que ce Pvliffel ait été à Tufage de ce Monaftere:mais peut-être
y fut-il porté par faint Colomban lorfqu'il s'y retira fur la fin
de fes jours. En ce cas on pourroit dire que c'étoit le Mif-
fel du Diocefe de Befânçon dans lequel eft fitué l'Abbaye de
Luxeu , d'où ce Saint partit pour aller à Bobio. Ce qui favorife
cette conjetlure , c'eft qu'on y trouve une Meffe en l'honneur
de faint Sigifmond Roi de Bourgogne; qu'il n'y eft rien dit des
Saints de Bobio ni de faint Colomban , ni d'aucun de fes dif-
ciples ; &
qu'il n'y a rien non plus qui appartienne aux Rits mo-
nafliques , point de Bénédictions d'Abbés , ou de Moines , ni
d'Officines de Monafteres, comme il s'en trouve ordinairement
dans les Rituels monaftiques. Ilef^vrai que dans le Canon on
fait mémoire de faint Benoît mais il. étoit d'ufagc d'en faire
:

même dans les Eglifes Cathédrales cela fe voit en particulier •,

par le Canon de
MefTc de l'Eglifc de Milan écrit il y plus
la

de fix cens ans. Au refte, quoique ce Miflel ait plulleurs mar-


ques Ipécifiques du Rit Gallican , telles que les Oraifons après le
Snnflus , la Bénédidion & la Prière («) , le Canon eft entière-
ment Romain-Grégorien. Maison fçaitque dans les Epjlifes des
Gaules, l'on a adopté ce Canon, avant de s'approprier le Rit
Romain 5 les Litanies ou Rogations font marquées dans ce Mif-
fel avant la Fête de TAfcenfion on ne doit donc pas dire qu'on :

y fuive le Rit Ambrofien , qui met les Rogations après l'Alcen-

Filiiquenomine ScSpiritûsTandi, in trans- diom jejunii CiTn.r DominicK,'" <]i'-î Do-


formationcm (^orfori$& Sanguinis Domi- minu<; nofier Jefu"; Chrirtu? i-n rovo Tefta-
ni Dci roftri Jffu Clirifti, unigeniti fui. menlo facrificandi ritum inftitnit, duiii pa»
IM. MiJJ. in Circrimd/iottf,p. lo:. l'iiie W nem acvinumin Sarrjnientum fui Corpo-
MifaitiprnCalheiira S. Pétri C5
MijJ'.Hs ris & Sanguini; transformavit. Mijf, in Ca-
Ae htm in Miffati Francoriim
S. Leoilei(.irio. n.ï Domini , p. ^49.
llll. ,U 0>di>;at.PrrJlnlirorum. (m) Tout. I. Miifei Italici p,i![.ty^.
Il) Hanc oblationcm tibi 01/crimus ob («)P,i_j. 181. i8î. 183. iSj.iSr;-
,

DE L'ÉGLISE LATINE. Ch. I. ii


fion (o). Dom Mabillonau lieu de rincituler,M?^/,lui a fait por-
ter le titre de Sacramentaire Gallican j
parce que dans rénumc-
ration des Livres iacrés,qui le lit à la tin, il eft intitule Livre

des Sacremens. Les anciens donnoient ce nom au Recueil des


Préfaces &
des Oraiibns pour la Meffe {p). Les Leçons de
l'Ecriture y font rapportées iuivant la Vulgate , comme dans le
Légionnaire de Luxeu mais celui qui les a compoiécs , ne s'efl
:

point aflujetti à donner les paroles de l'Ecriture de fuite; fou-


vent il n'en prend que le iens.
XII. On lit à la tête de ce Sacramentaire une Méfie quoti- Cequecon-
"ent ce Sacra-
dienne : la première Leçon eft de l'ancien Tcflamcnt (q) la fc- :

conde, du nouveau: la troiliemc de 1 Evangile. Suit la Meile


Romaine , avec le Canon tout entier iuivant l'ulagc de cette
Eglilc , fi ce n'efl: qu'après les noms de faint Coime de faint &
Damien , on ajoute dans le Cotninumcantes , ceux de S. Hilaire
S.Martin, S. Ambroife, S. Augu(lin,S. Grégoire, faint Jé-
rôme & Benoît. Ce Canon n'efl point répété dans les Mef-
i'aint

fes fuivantes ce qui prouve que ceux qui fc icrvoicnt de ce Sa-


:

cramentaire , ne liioient point d'autre Canon que le R-omain.


Viennent enfuitc les M elles pour l'A vent , pour la veille & le
jour de Noël ;
pour les Fêtes de faint Etienne , de faint Jean ,
des faints Innocens, de la Circoncifion , de l'Epiphanie, de la
Chaire de faint Pierre, & del'Adomption delà Sainte Vierge,
avec une MeiTe pour la veille. Il n'y en a point pour les Di-
manches d'aprcs l'Epiphanie, ni pour la Septuagéfime , Sexagé-
fime & Quinquagclime. Le Carême ne commençoit point au
Mercredi des C'endrcs, mais au Dimanche Iuivant, pour lequel
il y a une Meffe. Celles qu'on difoit lorfqu'on ouvroit les oreil-

les aux Catéchumènes & qu'on leur donnoit le Symbole , font


marquées après le troifiémc Dimanche de Carême. Il n'efl pas
dit dans le Symbole que le Saint-Eiprit procède du Fils. C'étoit
le Dimanche des Rameaux que l'on donnoit le Symbole aux Ca-
téchumènes. Il n'y a point d'autre Méfie pour ce jour. Mais l'E-
vangile Se le refie de la Liturgie a rapport à la cérémonie des
Palmes. Suivent les M elfes pour le Jeudi-Saint, le Vendredi &
le Samedi. L'Office du Samedi-Saint étoit accompagné de la
Bénéditlion du Cierge avec VE^ruhet jant nngelica du Baptême j

Iblemncl , & du lavement des pieds qui fc faifoit ailleurs le Jeu-

(o) rag. 3 H. { (,j) r»g. 277. Tom, i.MuJxi h.tlUi.

Bij
:iT LITURGIES
di-Sainr. Il y a trois MefTes pour la fête de Pâques. On Ik ea-
luite celles de l'Invention de la iainre Croix , des Rogations ,.
de rAlccnfion, & delà Pentecôte; puis des Meffes particuliè-
res pour les Fêtes de divers Saints ; des MefTes votives ; des
Méfies Dominicales , apparemment pour les Dimanches qui
n'en avoient point de propres ; des Méfies pour les vivans &
pour les morts ; des Formules de Bénédictions , de l'eau , d'une,
maifon, d'une Religieufe, des vaics facrés,. des fruits, de l'A--
gneau Pafchal.
Pénkenâel XIII. On ne peut gueres dourcr que le Pénitentiel (r) , qui
Gallican, (j^ns le manufcrit de Bobio fe trouvoit à la fuite du Sacramentai-
re, n'ait été en uiagc dans quelque Eglife de France ,foit celle de.
Befançon, foit quclqu'autre. Il efl compofé de quarante-fept arti-
cles ou Décrets & de deux Oraifons que l'Evêquc ou le Prêtre di- •

foit fur le Pénitent. Le douzième prcfcrit la continence à tout


Clerc,fùt-il marié. Par le vingt-unième l'ufure eft défendue géné-
ralement fans diftinction de Clercs ou de Laïcs. Le vinst-fixiéme
met en pénitence pour trois ans au pain & a 1 eau ceux qui auront
eu recours auxlorts des Saints contre raifon , ou à quclqu'autre
iort. On défend lous peine d'une aufii longue pénitence le jeu du'
petit Cerf & de laGénific, quilc faiioit en quelques endroits le
premier jour de Janvier. Le quarante-quatrième impoie une pé-
nitence de fix mois au pain & à l'eau, à celui qui par fa négligence-
aura laific confumer le facrifice", c'eft-à-diie l'Euchariftie , par
les vers; d'où ilparoît qu'il y a plus de mille ans que l'on con-
fervoit l'Eucharifiie pour la donner en Viatique aux malades.
Suivent dans le même manufcrit un petit écrit (s) , où l'on rend
raifon de l'infiitution des Heures Canoniales; Matines, Primes,
Tierce , Scxte , &c ; le Symbole des Apôtres , avec la dciigna-
tion de l'article que chaque Apôtre a ditlé; & le Canon des Li-
vres de l'Ecriture, qui efl: le même qu'aujourd'hui (r).
MefleGai- XIV. Dc toutes Ics anciennes Liturgies Gallicanes, aucune
llcane par S,
^q ^ct dans un fi grand détail l'ordre de la Méfie , que celle.
Germuin Eve-
quederans.
ri j r •
i--' c ?•
i^
^'^^ '^^^'^ avons lous le nom de laintCjcrmain , qui fut fait Eve-
"

3ue de Paris en 55'>. Elle fe trouve dans le cinquième Tome"


es Anecdotes de Dom Martcnc (u). Nous ne répcicrons poinc
ce que nous en avons dit dans leiciziéme tome (x) dc cette Hi--

(r) P<,g. 5>2. (u) p:,g.


I

(0 ^''S- î^^' J?7J


DE L'ÉGLISE LATINE. Ch.ï. 15
Nous remarquerons feulement que cette Liturgie ne fait
floire.
aucune mention du Symbole; ce qui ell encore une preuve de
fon antiquité, de mcmcquc lafratHonde l'Hortic avant l'Orai-
fon Dominicale. L'ancien Sacramentairc Gallican publié par
Dom Mabillon fur le manufcrit de l'Abbaye de Bobio, ne parle
pas non plus du Symbole {y) ; &
en Afrique on- ne le récitoit
point à la MefTc du temps de S. Augullin. On ne commença à
le dire à la Mefle en Efpagne que vers l'an 585). Pour ce qui
cil de la fra£lion de l'Hoftie , le Rit Ambrolicn , la met avant
rOraifon Dominicale (s) elle eft marquée au même endroit
:

dans Liturgie d'Efpagne ou Mozarabe («) , &; clic le faifoic


la
de même dans toutes les Egliies d'Occident avant iaint Gré-
goire. Dom Marrcnc avoit donné en preuve de l'antiquité de
cette Liturgie {h) , les Prières que l'on y trouve pour les Caté-

chumènes avant de les faire fortir de l'Eglife. On contefte la-


validité de cette preuve, tant fur l'autorité d'Amalaire, Ecri-
vain du neuvième llecle(c) , qui témoigne que de ion tems l'on
rcnvoyoit encore les Catéchumènes avant le Canon de la Molle ;
que parce que long-îcms depuis faint Germain de Paris , il y a
eu dans les Gaules beaucoup de payens((i?). On peut répondre
premièrement que l'ufage de renvoyer les Catéchumènes avant
le Canon a ceffé dans l'Eglife Latine vers l'an 700 (e) En effet
il n'en eft plus parlé dans les anciens Midels Rituels écrits &
depuis ce tem<v, ni dansStrabonjni dans le Micrologue,ni danj'
Rhaban, ni dans Alcuin, ni même dans Amalaire. Il n'en eft
rien dit non plus dans les Conciles, ni dans les ouvrages des
Ecrivains Ecck'liaftiques du huitième ficcle , quoiqu'ils aient
parlé quelquefois de la Mcffe des Catéchumènes. Secondement
le témoignage d'Amalaire n'a point de rapport au renvoi des
Catéchumenesmarqué dans cette Liturgie. Cet Ecrivain ne parle
que de l'ufage où l'on étoit encore de fon temps , dans les &
deux fiecles fuivans de renvoyer les Catéchumènes avant
(/) ,

l'Evangile depuis la mi-Carême julqu'au Samedi-Saint. Ils at-


tendoient cà la porte de l'Eglife que la Meffe fût linie [g) ; alors

()')MabiliOn. p. 182. in notiî, Id) Singularités hijl, ^ lirciaiits j loin. 3.


(t) RoN,\,/ii. ici». 15,/). 660.O MaBIL. pag. 1 1 4.
liitiirgia Ci.ilt::. p. 8. (?) RoNA , lii. j.c.lCp. 171.
(a) Maeul. iùid. 4J0. (^f) Confuetudo noftra eft ut Caiechumi;-
(b) Wyeztom. \6.p- ïîî. nosrepellamusanteEvangeltum.AMAi.AR.
(<.-) AmalArius, liL >.. x6.
j. Js Ojfic. Ecclef. l-J'

cap, }6.
{g) Beleih, lib. deDiiifi,0ffic.c.;4.
,,

14 LITURGIES
un Diacre rEvangilc. Ce Rit , comme on voit
alloit leur lire
étoir tout différent du renvoi iolemncl qui le failoic chaque jour
dans les fix premiers iiecles de rEglife(A),&quiadonnélenom
à h Mcile des Catéchumènes. A l'égard des Payens & des Juifs
qu'on dit avoir été dans les Gaules long -tem.s depuis l'Epifco-
pat de iaint Germain, c'eft un fait que l'on nccontefte pas mais :

ceux qui en font une objection contre l'antiquité de la Litur-


gie (?) , attribuée à ce faint Evêque , fournillcnt eux-mêmes la
réponfe en avouant que ces Payens n'étoient point des naturels
du Pays, mais des barbares qui y étoient venus s'établir, foit
d'Allemagne , foit d'ailleurs. Falloit-il pour ces nouveaux venus
rétablir dans la Liturgie , l'uiage interrompu pendant des cen-
taines d'années, de renvoyer les Catécumenes ? Ils obje(5tent
encore qu'on lit dans cette Liturgie une ancienne hifloire rap-
portée par Phctius (k) , d'après un Anonyme ; & que l'ouvrage
de Phorius n'ayant été traduit que dans le dixième (iécle par Pe-
lage Dincre de Rome, faint Germain qui vivoit dans le fixiéme
n'a pu avoir connoiilance de cette hiftoire. L'Auteur de cette
obiedion ne fe ioutient pas. Il dit quelque lignes après (/) , qu'il
louera ceux nui fouticnrlroiitque celte Liturgie lia été faite qm dans
le huitième Jic'clc fous Charles-Martel ou même fous Pepitj. Com-

ment l'auroit-on faire dans le huitième fiécle , ii les monumens


dont elle eft compofée , n'ont été connus au plutôt que dans
le dixième , depuis la traduttiondu Diacre Pelage ? Mais toute
cette difficulté s'évancuit en attribuant la tradutlion de l'ouvra-
ge anonyme t-ité par Photius (?«) , au Diacre Pelage qui accom-
pagna le Pape Vigiie à Conftantinople en 5 5 5 , Se qui fut lui-
même Pape depuis Ion retour à Rome. Il lui fut aifè pendant fon
iéjour à Conilantinople de copier de traduire cet Opufculcy &
qui contient les vies de quelque i'aints Moines c^ Anachorètes.
•Sigcbert en parlant de cette tradudion , en fait Auteur Pelage
Diacre de l'Eglife Romaine fans s'expliquer davantage («).
Roiweide a luivi Sigebcrt(o) mais Vofîlus, Fabricius & Bu- :

dée (p) opin^iv: que ce Pelage efl: le même que le Pape , pre-
mier de ce no!ii , dont nous avons parlé aill.nirs (q) ; qu'il n'a

(h) BoNA ,/y''. I. f. ]6,par, 171. tyj. I (o) RcsVElD.iii vit:! P.itymn. lib. y.
(i)Sin{r.l.ir;téi hifl. d H'Ulom. ^.p, ii^. ! (p)Vcssivs <le , Hif.crrcrs L.ititns, lib. i'.-

(X) Id.ihirl. Voyettom. I6.p.çjf. j


c. ;o. I'auricii's , ton, ç), Bibliot. Grxct
(l) Ton. zi6.
3. Sifftit.tr, bift.p. \ p. ij. iS tom. <;.

(m) PiiOTMis , CoJ. 19!?. I Bii/iot. Lntiu.f, t<,4. '^ BuDOEUS in tel^hm
(») Szai9r di iictipti>r.iî.c(hf.-4tp, I ij-. I
[q) Tom, 16 p. ^Z6,
DE L'É G LIs E L ATIN E. C h. 15
traduit que lesfeizc premiers chapitres de ouvrage anonyme,
i

qui font le cinquicrce Livre des vies des Pères dans Rolweide;
& que les quatre cb.apitres fuivans font de la verdon de Jeop
Soûdiacre derEgliic Romaine connu fous le nom de Jean III
Pape. Ces quatre chapitres lont contenus dans le lï.\icn-:e Livre
des Vies des Percs du même Rofweide , imprimées à Anvers
chez Plantin eni6i5&i'^28,&à Lyon en 1615,). Sigcbert a
mis ce Jean Soûdiacre de TEglife Romaine au rang des Ecrivains
Eccléiiaftiques pour avoir traduit ces quatre chapitres de Grec
en Latin (r). Ce qu'il appelle un Livre de la vie ù" doSlrine des
Pères.
XV. La Liturgie autrefois en ufage dans rEfpagnc, efl ap- Làurgîe _

pelice tantôtGothwue , tantôt Mozarabe dans les Ecrivains qui f^"?»?"^ °"
en ont parle ; (jroîh:que , parce qu elle tut tormee dans le tcms
que ce Royaume , de même que la Gaule Narbonnoife écoient
fous la domination des Rois Goths ; Mozarabe , parce que les
Arabes ayant chaiTé les Goths d'Efpagne, les Chrétiens de cet
Etat le trouvèrent mêlés avec les Arabes car Mozarabe ou Mi-
:

O^rabe veut dire , qui eft mêlé avec les Arabes. Les Ev lifcs d'Ef-
pagne furent long-tems lans avoir une Liturgie fixe & uniforme ;
& quoique le Pape Vigile dans fa réponfe à Prq/Î<r:.'rwi (5) , da-
tée du 25? Juillet 556 eut ordonné à cet Evêque de le conformer
à celle de Rome, cela ne fut point exécuté du vivant de Profit
jurus , mais feulement en 5(^3. En cette année les Evcques d'Ef»
pagne aflcmblés à Brague dont Profiiturus avoitété Evêque, or^
donnèrent que l'on obfcrveroit par-tout le même ordre de la
Pfalmodic dans les Offices de la nuit & du jour (r) & que la ;

MefTe fcroit célébrée dans le même ordre , que rEYê(]uc de cette


Métropole (z<) , c'efl-à-dire F/-J^/f//r//x , l'avoir reçu par écrit du
Siège Apollolique. Ce Décret ne fut point obfervé à la rigueur
dans toutes les Provinces d'Eipagne. Martin premier Evêque de
Dûmes en 5^0, & enfuire Archevêque de Brague vers l'an 572 ;
Jean Evêque de Gironc faint Leandre Archevêque de Sévillc
.

introduifirent dans la L. "gie plulieurs Rits qu'ils avoient vu


pratiquer à Conftantinop.^ , eu ailleurs. Le FvOi Rccarede af-
îembla en 585? un Concile a Tolède , où il fut ordonné qu'à l'e-

(r) SiGEB. cap. 126. orenturab omnibus, quemProfuturuî qu?n-


tom. \6.p. 552.
{s) Voyii. dam hujus Metropolitan.!» Ecclefia: Euifco-
(0 Ibid.pag. 780. pus, abipsà Apoftoliv'xSedisautoritate (iif-
(«) Placuituf eodem orJinsMillx cele- cepit Icriptum, Coricii, Bracar, Cart, 4'.
,

i6 LITURGIES
xemple des Eglifes d'Orient onchanceroic à la Meiïe le Symbole
de Conftancinople immédiatement avant TOraifon Dominica-r
le (at) Il -fe fit beaucoup d'autres changemens dans cette Litur-
.

gie, foit par faint Leandre, foit par iaint Ifidorc. Sur quoioa
peut conlukcr le Traité hiftorique chronologique de l'ancienne &
Liturgie d'Elpagne du Cardinal Thomali , imprimé à Rome en
J741. En ^33 le RoiSifenand convoqua a Tolède un Concile
de toute la nation d'Efpagnc &
de la Gaule Narbonnoife. Saint
Ifidore y préfida , &
il eut beaucoup de part aux rcglcmcns que l'on

y fit pour l'uniformité des ufages dans la célébration. des .Offices


& de la Liturgie. On y conferva plufieurs Rits anciens, l'O- &
raifon de l'Office de iaint Martin {y) , faite peu de tems après la
mort de ce Saint , c'cft-à-dire , au commencement du cinquième
ilécle. Saint Ildefonle &
faint Julien fuccefleurs de faint Ilidore
dans le liège de Tolède, ajoutèrent cà la Liturgie d'Efpagne quel-
ques nouvelles Méfies (s) , &
en retouchèrent d'autres , viciées
par le laps des temps. Voici quel eft l'ordre de la Liturgie Mo-^
Zcirabc.
Oriîrette'a XVI. Le Prêtre s'étant revêtu des habits facrcs, dit ceRc-
I.ui>rg»«; d'Ei-

P''g"^-
pons (/î) : Pater, ^tccavt in cœliim & coram te, &c. puis il ajoute
Paier no[îer , Sec. Kyrie , eieifon , le vcriet Ab occidiis ?ncis , avec

i'Oraifon Deus qui de indignis dignos facis , (k.c. Il va à l'Autel ;


& après avoir récite la Salutation Angélique , il dit ïn nomine
:

Domini Amen. Adfn nohis Spiritûs San^i gra^


noftri Jcfii Chrifli:
lia. Introiho ad ahare Dei: & {tVitZ-umeJudicame, Sec. puis le

vcrfet Dignare, Domine , die iflo Confitemini quoniam bonus. Or a_,•

pro nohis, (hn^ia Dei Genitrix , & eniuite le Confiteor avec les vcr-
icts & rOrailon Aufir ànobis, Auffitôt après il monte à TAutel,
fait deffus une croix en difant : In nomine Patris & Filii & Spi-
rttûs Saiîcii , b.ùfc l'Autel , récite l'Antienne de la Croix : Salve,
Cruxfpecicfi/yâvcc quatre Collèges, puis la têtebaifTée, il ajoute :
Per^IoriatiiJicminis tui fChri^le,^' per întercefjionem S. Maria
Virginis &
benti ]acobi, &c. mifcrere indignis Jervis luis. Paflanc
delà à la corne droite de l'Autel , il lit l'Introït avec un vcrfet
d'un Picûlume Se le Gloria Patri , &c. Il dit Per omnia facidafar

(i) Voyentom. \6. p. 810. C^ThOmaSI, fcrretcmporibuî.


Liiurg. amiq.UifpMi. $. ]. (. z. (5 (• 3. §• l. (t) liibliot. Velus }hffianictl , p. 290.
Z.i.\5fq. _
(3)H0NA./»i, J.f. 1 1.^, 98.CJTHOMASI,"
(y) Huncvirum quem ,
«taris noftrx tem- tom, l.p<tg. S 3.
for.. protulccuni , jubcis aiuiilium noftris
culonnn ,
D E L'ÉG LISE L ATINE. Ch. T. v;
aiîorum , le Gloria in excdfts ; une Icconde fois , Pc r omniaf^^cula
faculonim. Le Chœur repond , Amen, Ayant récité l'Orailon , le
Prêtre revient au milieu de l'Autel dilant Permifericordiam ttiam, :

Deus fiofltr y qui es beiiedil^his vivis omnia régis in fcculufa^& &


culorum. On repond, Amen. Il dit au même endroit, Domitius vo^
b/fcwn; &
après qu'on a répondu. Et cum fpiritu tm, illit une
Prophétie, à la lin de laquelle on répond, Deograiias. Le Prêtre
dit une féconde fois, Domimisvubijcum puis le Chœur chante :

un Répons femblable à notre Graduel lequel étant achevé , le :

Prêtre ordonne de faire filcnce, lit l'Epître en difjnt, Sequen- &


tia Epijlol^f 8cc. on répond, Deogratias; lorfque la leclurc en &
efl: finie , on répond , Amen. Eniuite le Prêtre demande la bc-

nédiâion ; &
ayant dit, Dominus vobtfcum , il a.]outc, Le^iofi-.n^îi •

Evnngelîi, 8cc. à la fin le Chœur répond , Amen. Le Prêtre dit


encore, Dommis vobifiim , puis on chante un Verfct avec Alléluia
au commencement &à la fin.
XVn. Enfuitc
Prêtre offre l'Hoftie
le le Calice avec les & Suite de cet-

Oraifons propres , &


encenfc l'autel , Ci c'efl: une Fête folcm- '^ Luurgie.

nelle. Suit l'Orailon l/i Jplritu humiUtatis , comme dans le


Romain ; Se ayant dit : Adjtivate me ,fratres, in oratiombus veflrisy
& orale pro me ad Deum , les Miniilres répondent
Adjnvet te :

Pater , & Filius , & Spiritus [an^us.


chante le Sacrifice ,On
c'eft-ci-dire, une Antienne femblable à notre Offertoire. Le Prê-
tre lave fes raains difant Lavabo , &c. il bénit les ObLta^ 3c
:

dit en une Oraiion qui commence par ces paroles ;


filence
Accedam ad te in humilitate y&cc. On lit enfuite dans le Miffcl
Mozarabe Ici commence la Mcffe ; apparemment après le renvoi
:

des Catéchumènes. Le Prêtre dit , Dominus vohifcum , & enfuite


une Oraiion , à laquelle on répond , Amen. Il ajoute Per miferi- :

cordiam tuam, Dcm nojler , qiit es benedi^lus & vivis & otnràa ré-
gis infivcula faciilorum ; & le Chœur ayant répondu , Amen , il
levé les mains en dilant: Aglos^ agios, agios ^Domine Deus sterne,
tihi laudes ^ gratias, Ecclefam fanEiam Catholicam in ti^ente ha-
heamus eam Dominus fîde , Ù" pe
in oratior.ibus , ut chciriîate &
propitius awpliare dignetur. Omnes lapfos ^ captivos , infirmas , at-
que peregrinos in mente hcheamus , ut eos Dominus propitius refpi"
cere , redimere ^fjinare Ù" confortare dign tur. Le Chœur ou le
Miniftre répond Prafla , sterne omnipoiens Deus. Suit un petit
:

Difcoars que le Prêtre fait au Peuple pour l'exhorter â célébrer


avec attention les Mylleies de la Fête du jour: ce Difcours efl:
iuivi d'une Oraifoa où le Prêtre prie pour le Pape
, pour tout le
Tome XX. C
î8 ^ LITURGIES
Clergé & pour le peuple. On répond : Offerunt profeé" pro uni'
vtr.âffaternitate. Puis il fait mémoire des faints Apôtres, delà
fainte Vierge, des laints Zacharie & Jean , des enfans ; des
Saints Pierre , Paul, Jean, Jacques, André, Philippe, Tho-

mas , Barthelemi , Matthieu , Jacques , Simon & Judas, Mat-


thias , Marc (^ Luc : Et le Chœur rcpoiid De tous les Martyrs, :

Le Prêtre ajoure Et pour les elprits de ceux qui repoicnt , Hi-


:

laire, Athanafc, Martin, Ambroifc , Augullin ; & récite les


noms d'environ quarante-lix Evèqucs , dont la plupart l'a voient
été de Tolède le Chœur répond Et de tous ceux quirepofent.
: :

Il récite rOrailon intitulée Pofl nominn ; & le Chœur ayant ré-


:

pondu , wr« , le Prêtre continue ^ina tu es vira vivorum ^Ja-


. : :

nitai infirmorum ne requies omnium fidelium defonBorum in aterna


facula facuiorum.
Suit» de la XVIIÎ. Le Prêtre dit enfuiterOraifony^Jpi7CfOT, puis élevant
Liturgie Mo- les mains il ajoute: Gi'atia Deio?nnipoîentis,pax ac clikciio Do^
tnini nofiri Je/u Chrifa & communicaùo
Spiritûs Snr:5li fit Jcmfer
ciim omnibus vohis : & le Chœnr
ayant répondu Et cum hom:-' :

nJiiis hona voluniaxis , le Prêtre ajoute: ihtomodo nflatis pacim

facite , paroles qui font voir qu'on fe donnoit la paix dans la


place où l'on fe trouvoit. Il la donne au Diacre , & le Diacre
au Peuple. Alors le Prêtre dit les mains jointes: Lntroiboad al'
Tare Det. On répond Ad Deum qui L^tijicat juventutem mearn.
:

Il continue Aures ad Dcrr.inum. Le Minillre répond : HaU-


:

nms ad lJomnurn.'L<t Prêtre: Surfumcorda. Le Miniftre, Leva-


tnus ad Dominion. Le Prêtre Jjco ac Domit:onOjiro Jefii Chriflo
:

Fîlio Dti qui ejl in cœlis dtgnas laudes dîgnafque patins rcferatnu »
Le Miniflrc Digmim cr- jv.Jlum efl. Après quoi le Prêtre dit
:

riliation ou Préface , à la lin de laquelle on chante , SonSlus ,


Sr.nclus , Sanffus; Agios , Agios ,Ag!Os ; Kyrie , Iheos. Puis le
Prêtre commence le Canon de la MclTc à voix baflc. L'Oraifon
»
qui fuit la Conlécration étant achevée , il prend de dcfius la
Patène le Corps dcJcfus-Chrifl:,& le mettant lur le Calice dé-
couvert , il dit Dom:nus fjt feniper vobsjcnm ; (fc après que l'on a
:

répendu Ft cum fpiritu tao^W ajoute Fidcm quaf- corde credimuSf


: :

'ore auum dicamus. Puis il élcvc le Corps de Jclus-Chriftjahn qu'il


foit vu de tout le j:-cuple & alors le Chœur chante le Symbole ;
:

Crediwusin unumDcum P,7Trem omnipotentem , Szc. pendant ce


tcms-là le Prêtre romptrhofticcndeux.il en mcrunc moirié fur
la Patène: & de l'autre moitié il en fait cinq parcel]es,qu'il met en
droite ligne fur la Patène. De l'autre moitié il n'en fait que quatre
DE L'ÉGLISE LATRIE. Ch. l. ip
parcelles qu'il place auili lur la Patène. Les places de ces neuf par-
<: elles loyr dcfignées par des noms parriculicrs : içavoir , Corpa-
ratio , Naîivttûs , Circmncifio , Appnritio , Fafj'to , Mors , Rejur-
re0io Gloria, Regnum- Le Prctrc puriHc les doigvs,
, cou- &
vrant Calice, il récite rOrailon Dominicale. A chaque de-
le
mande on répond, ^î?îe« , excepte à l'nnem noflrum q-Aoridianum
à laquelle on répond , quia Deiis es. Suit TOrailon Libernù à
malo ; &
l'ayant achevée , le Prêtre prend de la Patcnela parti-
cule nommée Regnum , il la met dans le Calice , dilanc à voix
b2il'ïc,Saf!flaSanf}iSf(& conjunEîio Corpons Doi);ini noflrijefu
Chrijii fit Jumentihus &
potanîibus nobis ad veniam , dcfnnlFlisfi^ & •

delibus pr^Jhiur ad requiem. Il donne cnfuite la hénédidion au


'

peuple: puis on chante un Répons intii:ulé:^^//7f("f^fA'r(?j, dans


lequel on avertit ceux qui doivent communier de faire une fé-
rieu le attention à ce qu'ils vont recevoir. Le Prêtre prend de
laPatène une autre particule appellce Gloria ; 8c la tenant lur le
Calice , il dit en lecrct Fatiem cœlaflum de mensâ Domini acci-
:

piam^ &
nomen Domim invocabo. Il fait mémoire des Morts; 8c
ayant récité une Oraifon il fait le ligne de la Croix avec cette
particule, & la porte à fa bouche; ilconfume de fuite toutes les
autres particules , purifie avec fcs doigts la Patène lur le Calice ;
prend le Calice ; & ayantaufli purifié fes doigts, il dit: Refc^i
Chrifîi Corpore <fj' Sanguine te laudamus. Domine y cdleluia^ cHeluia,
alléluia. Suit la Poil-communion , le Dominus vobifcum. La M effc
finitpar ces paroles du Prêtre ou du Diacre, Solemnia compléta
fum , in nomine Domini nojhi Jefu Cfirijli votiim nojirum fit ac~
ceptum cumpace. On répond , Deo gratias.
XIX. Dom Mabillon a fait imprimer à la fuite de la Lirur^- MefT's Ja
gic Gallicane deux Méfies tirées du Miiïel Mozarabe ; l'une ^''^^^ '^'°"-
"
pour le premier Dimanche d'Avent; l'autre pour la Fête de Noël.
Les Kits en font les mêmes, que delà Liturgie que nous ve-
nons de l'apporter. Comme ils ontaufji beaucoup de conformité
avec lesanciens Rits Gallicans , c'eil pour en faire le paralelle ,
•qu'on a joint ces deux Méfies à celles qui font rapportées dans
îes anciens Mifl'els de France.. Cette conformité a fait conjcdu-
Tcr au Père !e Brun de l'Oratoire {b) que te Trecamim marque
dans la Liturgie de laint Germain , étoit la même choie que le
répons Gnftate &
vidcte qui fc dit après la bénédidion & a/ant
îa Communion , dans Iç MiiTcl Mozarabe. Il fe fonde fur ce

{k) Le Brun , dts Liturgies, tant, i.fag, 530,


Cij
,

20 LITURGIES
que ce Répons efl: compofé de trois verfets ; Gufinie videte } &
Kedimet Domtnus animas fervorum , &c. Benedicam I^ominum &
in ojnni tempore ; qu'après chacun on dit trois fois Allcluia , &
qu'Us font luivis de la Doxologie , dans laauclle les trois per-
fonnes divines iont nommément exprimées. Dom Martene , qui
a le premier donné au public la Liturgie de faint Germain,
penfe que pa.rTrecanum [c) , il faut entendre le Symbole. Ces
deux opinions fuppolent également que le mot dcTrecaaum a.
rapport à la profeliion que l'on faifoit pendant la Liturgie, de
la foi en la faintc Trinité.

^
LnLlturgie XX. En 1 5 57 Matthias Flaccus Illyricus fit imprimer à Straf-
diiiyncus.
bourg unc autre Liturgie, fous le titre de Meje latine en ujage
avant la Romaine, vers l'an joo de ] efus-C hriji Il avance dans .

l'Epitre préliminaire à Octhon Henri Prince Palatin du Rhin,


qu'on s'en Icrvoit en Occident, furtout en France & en Alle-
magne , avant que le Rit de la Mcflé Romaine y eût été reçu ,
ce qui n'arriva , dit-il , que vers l'an 800 fous le règne de Char-
lemagnc. L'iiditeur , qui avoit eu une grande part aux Centu-
ries de Magdebourg, avoit intérêt de faire cette obicrvation ,
en faveur de fa icéte. La Liturgie qu'il donneit au jour, étant
plus ancienne que la Romaine , & difiérente , il s'eniuivoit que
î'Eglifc de Rome avoit innové & changé les anciens Rits de la
Meiîe ; ce qui formoit un argument pour le parti proteftant
& devoit cmbarraffer les Catholiques. En effet Philippe II Roi
d'Efpagne {d) de l'avis du Duc d'Albe défendit la leclure de la
Liturgie d'iUyricus ; &
elle fut mife à l'Index des Livres défen-
dus par Sixte V
; mais le triomphe des Luthériens ne fut pas de

longue durée. Les Catholiques ayant examiné cette MelTe, y


trouvèrent tous les Dogmes ael'Eglile bien établis ; l'invocation
des Saints &
de la très-faintc Vierge ; la préfence réelle de
Jefus-Chriftdans l'Euchariftie; la confefllon auriculaire; la priè-
re pour les vivans &
pour les morts , plulieurs autres dogmes&
que les Luthériens rcjcttoient. Ceux-ci ouvrant les yeux fur
tous ces points , témoignèrent leur mécontentement contre Il-
lyricus; &
ne voulant pas fouffrir qu'un homme de leur com-
munion eût fourni des armes pour les combattre , ilsfupprime-
rcnt les exemplaires qu'ils purent trouver de cette Liturgie (f);
cnfortc qu'ils devinrent fort rares. Le Cardinal Bona la chcr-

ijl) CoLOMlZS fBililiolheijut <S>oifie, p, li, [BiirHiiihtijHe chai/ie yp, ix.


DE L'ÉGLISE LATINE. Ch. I. 21
cha en vain à Rome &
en beaucoup d'autres endroits : mais
,

enHn M. Lambecius lui en envoya un exemplaire tiré de la


Bibliothèque Impériale. Dom Hugues Ménard en découvrit un
autre (/) , & Guillaume Peyrat un troifiémc (g) Antoine Vion
en avoit aufTi un; & ce fut lur cet exemplaire que le Père le
Cointe Ht imprimer la Liturgie dUllyricusdans fcs Annales Ec-
léliaftiqucs de France (k). (3n en a fait depuis pluiicurs éditions.
Elle fe trouve dans les Traités liturgiques du Cardinal Bona (?) ,
de Dom Martcne {k) ,& ailleurs (/j. Peyrat & le Pcre le Cointe
ne doutent point que ce foie l'ancienne Liturgie Gallicane.
Mais le Cardinal Bona n'efl: point de ce fentimcnt au contraire :

il fait voir qu'il efl; infoutenable ,1°. parce que dans la Liturgie

Gallicane on récitoit les palfions des Martyrs (w).2".Les Rits en


étoicnt conformes à la Liturgie de Tolède , ou Mozarabe. 3°,
On y lifoit trois Leçons , la première tirée des Prophètes ; la
féconde , des Epitrcs des Apôtres la troilicme , de l'Evangile, ;

4°. Le Diacre y ordonnoit de faire lilence. Fvicn de tout cela


ne fe rencontrant dans la MefTe d'îllyricus, elle ne peut paffer
pour l'ancienne Gallicane. Dom Mabillon dans fon premier Li-
vre de cette Liturgie rapporte divers paflagcs de faint Grégoire
de Tours («) , & de faint Céfaire qui appuycnt les raifons du
Cardinal Bona. On objede que n'y ayant dans la Liturgie d'îl-
lyricus (0) , ainfi que l'avoue ce Cardinal, ni Introït, ni Col-
lège, ni Graduel, ni Evangile, ni Offertoire , ni Préface, on
ne peut fçavoir s'il y étoit fait mention des Martyrs , ni com-
bien l'on difoit de Leçons : mais quoiqu'on ne les y trouve
pas , il y a du moins des Rubriques qui marquent le nombre des
Leçons; le lieu & le tems du Graduel & delà Préface. Or ces
Rubriques n'annoncent que deux Leçons y compris celles de
l'Evangile (p) ; &
ce n'étoit pas , comme le dit l'Auteur de
l'objedion (r) , dans la Préface que l'on faifoit mémoire de la
PafTion des Martyrs ; mais avant les trois autres Leçons ((j) ;
& l'on ne faifoit cette mémoire qu'au jour de leurs fcres.

(y ) MENARD,»or»s atl lib.Siicratnent.pag. {m) rorf^MAEILl. rlelittirgi.i Gatliican,


380. lib. i.c. s-p. 37. S8. 55.
(if) Peyrat. TraS. dtjuribm. Rcgis Gall. („) Uid.
lit. i.c. 13. p. 56 t. {o)\lotiOR.Û de fainte Marie , tom. 3. c,
(*) Tom. t. p. 488. 217.218.
((') In aiipetiiîice Reri<m Liturgie. (/);Mae.tene,«oi«. t. Rit. Ecclef. Hô. I.
(f
) Tom. 1, de Ritil/tis , lib. i. c. 4. art. p"^ 49".
cap. 4, nrt, Iz-
II. p. 4'^o. (17) Honoré
de f.nnf Marie , i id,

(J) Honoré .Ufainte hi.irit,tam.i.p, 1/7. (j) Mabillon. ubifupri,^. 39.


1

22 . LITURGIES
Cette Lîtur- XXI. L'Auteur de l'objeclion n'eft pas mieux fondé à fourc-
gie n'ertpai nivqucla Lituroie d'illyricus a ctécomcoléc vers la fin du qua-
trieme Iiccie (5) , ou au commencement du cinquième, & qu elle
efl; la lource Se Toiigine de toutes les Uturgies des Eglifcs d'Oc-

cident. Une de les plus fortes raifons , cil: la Communion que


l'Evèque donnoit aux Prêtres (r) Se aux Diacres dans leurs
mains avant de la donner au peuple. Mais cet ufagc fuhliftoic
encore dans le feptiéme fiécle , comme on le voit par le dix-
fcptiéme Canon du quatrième Concile de Tolède («) , tenu en
63 5 où il efl dit Les Prêtres
7,
: &
les Lévites communieront de-
vant TAutel le Clergé dans le Chœur , & le pc.iple hors du
;

Chœur. Le fixiéme Ordre P.omain rapporte par^Dom Mabil-


lon (^) , marque que les Prêtres & les Diacres en baifant l'Evè-
que recevront de lui le Corps de Jefus-Chritl que les Soûdia- ;

cres le recevront en baifant la main de TEvcque ; avec cette dif»


fcrence que les Prêtres & les Diacres recevoicnt rEucharifliç
dans leurs mains , & s'en communioient , au côte gauche de l' Au-»
tel ; & que l'Evêque le mettoit dans la bouche aux Soûdiacres,
Dans le iecond Ordre Romain rapporte auffi par Dom Mabil-
lon , qui le croit très-ancien , il efl dit qu'à la MelTe célébrée par
le Pape, les Evêo;ues communient les premiers de la main du
Pape , cnfuite les Prêtres & les Diicrcs & que defcendant dans ;

ie Chœur , il communie le Clergé, puis le peuple ; & qu'il efl


aidé dans cette fonction parles Evê.]ues, les Prêtres & les Dia-
cres. La Communion des Prêtres dans la Mefle folemncllc n'eft
donc point un Rit particulier à la MefTe d'illyricus ; & on ne
peut en rien conclure pour fon antiquité. Ce n'eft , comme l'ont
remarqué les plus habiles, que la Méfie Latine ou Romaine à
laquelle on a ajouté divcrfes Oraifcns (y) , que le Prêtre devoit
récirer pendant que le Chœur étoit occupé du chant des Antien-
nes ou des Répons que l'on chantoit pendant la Méfie.
Pr»uvfs de XXII. Il y a même dans celle d'illyricus des preuves certai-"
ja noure u c nes dc nouvcauîé, 8c des traits qui ne s'accordent avec aucu«»
^i cette Mef-
j^g ^^^ anciennes Liturgies. La Rubrique fur le commencement

du Canon poiie Le Célébrant commencera avec une grande


:

(j) Honoré Je fii/ite-M.irie. Hi-, pag. ()») W I CFL 1 u s in


, liffci/iont L itur^ia Ec-
ÎJI. 'iS 14?- clejtaflica. Apud Le Coi\te ,/»»< J4. Tom i,
Mabiil. Conimentar. in Oniin. Rom. Tmn,
(u) Ton», f Mufti hitlici , f, 7^,
l. Mnf.ti U.ihci , p. CLXVl. EONA, lii.it
(j:) IbiJ.f-i^. JO. T'^cr. Liturg. c. 1 1. 1 lo, 1 1 1<
f,
DE L'ÉGLISE LATINE. Ch. T. 23
révérence , Te kitur ; & alors les Miniftres étant debout fur leurs
dégrés chanteront des Preaumes juiqu'à ce que le Célébrant ait
achevé Te igitur. Or toutes les anciennes Liturgies prefcrivenc
un profond iilcnce pendant la récitation du Canon (z) & ordon-
nent que les Miniftrcs durant tout ce tems demeureront inclines
fans rien dire ; & que les Diacres en ufcront de même que les
Soûdiacres, juiqu'à NoLh quoque peccaioribus. Il cfl: dit encore
dans la Meife d'illvricus que le Célébrant la commencera , en
difant : Introiho ad altare Dei , &
le Pfeaume Jud'ca ; ce qui
n'étoit point en ufagc dans les JMeffcs anciennes. Il y cfl fait
mention de Séquences ou de Proies qu'on ne connoidoit pas
avant Notker le Bègue mort en 5)12. On y récite le Symboie
'

avec la particule Ftiwque, qui n'a voit pas lieu à Rome ni dans
les Gaules avant le règne de Charlemagne. Elle eft chargée de
quantité de Rubriques: &
il y en avoir peu dans les anciens Sa-

cramentaires. L'ancien Ordre Romain ne fait aucune mention


des prières que faifoit le Célébrant en lavant fes mains , & en
fc revêtant des ornemcns deflinés à la célébration des Myfle-
res. Il n'en eft rien dit dans les anciens Miiîcls Gallicans , ni
dans les Gothiques ni Mozarabes Le Miffcl d'illyricus , en .

rapporte pour le lavement des mains , pour l'amict , pour l'au-


be , pour la ceinture , pour l'ctole , pour la dalmatique , pour
la chaiublc , pour l'anneau , &c. Il donne non-feulement l'Orai-
fon ordinaire delà Meffe , mais plufieurs autres qui n'étoientque
de dévotion & que le Prêtre pouvoir dire en ferret , ou omettre.
XXIII. Dom Mabillon conjeaure que la Meffe d'illyricus j'illy^kus^
avoir été à l'iifage de l'Abbaye d'Hornbach dans le Diocefe de rou avoir éié
Metz. Il fonde ia conjeaure fur une des Oraifons pour i'obla- tp^y^'^/^
tionoù le Prêtre dit, qu'il offre, Pro Senior e noliro cunHa Saïf bourg. &
Con^rcgntione fnriBi Pétri & dans un autre , Pro ncpra Coi.gre-
;

gationis fnlme &


pro omnihui in Chrijlo frnxribm (ÙT fororihui nO"
jiriu En Monaftere d'Hornbach cft appelle Congréga-
effet le
tion de faint Pierre dans la 113e Lettre entre celles qui font
de faint Boniface Archevêque de Mayence. Mais Dom Mar-
tene {a) penfe que cette Liturgie appartient plutôt à i'Fglife de
Salzbourg, qui dans fes commencemens , étoit celle d'un Mo-
nalfere de Bénédictins ; &c auprès duquel faint Rupert avoit fon-

(i) M/vBlll.Commf«». inOrdin.Kcntan. 1 tcm. i. de Rili^Mi Ec.Uf.lib. 1, c^.art, lî,


f.CLTV . z:i.\vjj. h). 4;o.
(jj Ma RT£N. M onit. in Liturgiam llljric. \
24 LITURGIES
ûjun Monafterede filles. Il trouve la preuve de fon fentiment

dans un Pontiiicalmanufcrit de Salzbourg, d'environ 600 ans,


qui contient en abrégé la Liturgie d'Illyricus ; que Ton avoit
apparemment trouvée trop longue dans la même Eglife , où
elle avoit d'abord été en ufage. Dom Martene a eu loin de
faire imprimer la MelTe rapportée dans ce Pontifical (b) , avec
quantité d'autres qui font d'une grande utilité pour connoitre
les anciens Rits des Eglilss. La plupart de ces Liturgies font
répétées dans le Code Liturgique de l'Eglife Univerfelle d'Af-
iernani imprime à Rome en 1745).
Gezon AL- XXIV. Il faut joindre aux Liturgies , le Traité de Gezon in-
béJeiortho-
"^^
titulé: Du Corps &
du Sang de Jefus-Chriji , tant parce qu'il y
rélbut plufieurs queflions qui ont rapport aux Rits de la Mefle;
que parce qu'il y établit clairement le Myftere qui fait l'objet de
la Liturgie. Gezon fut d'abord Moine & enlliite Abbé du Mo-
naftcre de faint Pierre & de faint Martien à Torthone dans la.
Liguric (c) , fondé vers le milieu du dixième iiécle fous le rè-
gne d'Othon le Grand, par Gifeprand Evêque de cette Ville.
Ce Prélat vivoit encore en 5152 , puilqu'il afllîta en cette année-
là au Concile tenu à Au/bourg [d) ; & qu'il cfl nommé entre les
témoins qui figncrcnr le Diplôme accordé par ce Prince à l'E-
glife d'Ali:. Ughelli croit même qu'il vécut julques vers l'an
5^8 1 en quoi il s'autorile de la Chronique de Vulturno,
(t?) ,

Gezon nous apprend lui-même qu'il étoit contemporain de Gi-


feprand ; & cju'ayant voulu fe retirer dans la lolitude pour y
pleurer fcs péchés (/ ) , cet Evêque l'en avoit empêché , difanc
contre les règles de quitter une Eglife dans laquelle
qu'il étoit
on avoit été nourri & ordonné, pour aller demeurer ailleurs.
11 parcit par-là que Gezon étcit du Clergé de Torthone. Gife-
prand , pour le fixer en cette Ville, félon fon inclination qui
étoit de vivre dans la retraite , lui offrit de le recevoir dans le
Monaflerc qu'il fe propofoit de bâtir; &- pour l'engager à en
prendre la conduite, après l'en avoir prefTé en diverles maniè-
res , il ajouta que s'il s'obftinoit dans fon refus , il mettroit dans
ce Monaftere des Chanoines , au lieu des Moines qu'il y ayoit;
aiïemblés.

(i)MARTFNF. Monit. in LiiHr^.Jllyric. (c) Ibiit. ^ UGHELU)s,/om.4. Jtal.f.icra


tom. I. de Rit, Ecclef. /. i.f.4. tirt.i z.p. ^74 p. 8s f.
((•) M A B L i ON . Tom, 1
I . Miifsi U,il. p. 8 9 (/) Gf7-0n. Pr«/Iif./« tr.iil.it, de Corpore
{/)MvR.(ijOR}, tom, 3. Aiitcdot.p, 140. ^ iîari^iline Dutniiiiy il/id, p. X4i-
XXXV.
,

DE L'ÉGLISE LATINE. T. 25 Ch.


XXV. C'efl: ce que Gezon raconte dans
Prologue de fon Son Tnhi le

Traité fur l'Euchariflic , dédie aux Religieux de faCol"nInunau-'^'/^'^^''"^•"


té ; ce qui donne lieu de croire que Giieprand ne vivoit plus
alors. Dom Mabillon n'avoit rendu public que ce Prologue avec
l'Index des Chapitres dont l'ouvrage efl: compolé, dans la per-
fuafion qu'il ne contenoit rien de nouveau (^) & que Gezon ;

n'avoit tait que tranfcrire le Livre de Pafchale Radbcrt. M.


Muratori ayant découvert un manufcrit plus ample que celui de
Dom Mabillon dans la Bibliothèque Ambrofiennc à Milan , a
donné l'ouvrage avec le Prologue , en retranchant non-feule-
ment ce que Gezon avoit emprunté de Pafchafe , mais aufïï les
pafTages de faint Cyprien , de faint Ambroife , de faint Augu-,
ftin , de faint Grégoire, & des autres Pères fur l'Euchariftie. Ge-
zon ne diiïimule pas l'ufage qu'il avoit fait du Livre de Rad-
bert: mais il ne le copia pas lervilement. En plufieurs endroits
il n'en prit que le fens en d'autres il retrancha ce qui lui pa-
:

rut inutile. M. Muratori a joint au Prologue douze vers hexa-


mètres de laint Odon Abbé de Cluni fur le Sacrement du Corps
& du Sang du Seigneur & un plus grand nombre de Pafchafe
;

Radbcrt à Placide fon difciple. Les quinze premiers avoienc


déjà été imprimés dans le XIV^ Tome de la Bibliothèque des
Pères (h). Les douze vers fuivans expriment en termes très-
clairs le changement qui fe fait du pain & du vin au Corps &
au Sang de Jefus-Chrill dans l'Euchariftie (?) , par l'ordre du
Tout-puiffant qui a établi cette loi dans la nature que les chofes
fe changcroient en tout ce qu'il ordonneroit. Ce changement
miraculeux fe fait fubitemcnt ; & la nature changeant fa forme
ordinaire , le pain devient chair ; & le vin , fang c'efl Dieu , :

qui s'incorporant tous les Prêtres , opère par eux ces myfte-
xes de manière que le pain & le vin confervent leur odeur , leur
;

couleur , leur faveur , afin de donner lieu au mérite de la foi,


dont la vertu eft très-grande.

(^) MABllhOti. ribifiip. p. S9' Quod jubet omnipotens, res in miracula


(h) P,y. 7iO. vertens.
(i) Difponit caufatn noftris Deusufibu; Protinus ergo vicem mutât natura fuetam,
aptani) Mox caro lit panis , vinum mox denique
Ut panis corpus, vinum fanguifque (uejus: fanguis
5ed queat u£ furamilît odor , color ac ûpor Datque Sacerdotes , fibi quos incorporât
iCdem omnes,
Fit fidei m;rccs, cujus cft maxima virtus. Hxc ut agant per eum myfleria & ipfê pet
Lex ea naturx eft vcrti in quod julTerit au- illos. Ml'raior.1 , tom. j. Anetd,
tor.
ïmperium fcquitiir de fe ,mox tranfit in illud

Tome XX. D
26 LITURGIES
Anaiyfece XXVI. Ce Myftere étant au-dcfllis des lumières de la rai-
" ^°"
humaine, elle ne doit point l'approfondir (k) ; mais l'Ecri-
"c!^'"!' '" ""
3.4.';. turc nous apprend que le Fils de Dieu né de toute éternité de
la iubftance du Père, s'cft fait homme dans le tems , ayant pris
un corps dans le lein de la Vierge par Topération du Saint-
^. ^, Efprit. Jefus-Chrift dès fa naiiTancea été adoré comme Dieu.
Les langes dont il étoit enveloppé , n'ont point rebuté les Ma-
ges. Une Vierge a enfanté; mais fon fruit efl de Dieu: en fe
revêtant de l'humilité de notre chair, il n'a point perdu la di-
gnité de la puiiTance. Sa chair étoit une preuve de fon huma-
nité & fcs actions ont fait voir qu'il étoit Dieu. Par fon In-
;

carnation il a demeuré naturellement avec nous & en rece- :

vant fon corps & fon fang dans l'Euchariflie nous demeurons
joari.6.56. en lui. C'efl: lui-même qui nous en affure: Ma chair , dit-il , e(i

vraiment viande, Ù" mon fang ejl véritablement breuvage: Celui


qui mange )va chair &
boit mon fang demeure en moi , moi en &
lui. Peut-on douter après cela de la vérité de fa Chair & de ion
Cttf. 8. Sang ? Il le dit lui-même, & la foi nous l'enfeigne.
Cap. 9. 10. XXVII. Gezon propofcla foi de l'Eglife fur la Divinité de
n. li. 13.
jefus-Chrifl , Se montre que comme il eu Fils de Dieu par na-
ture , il efl aulTI Fils de l'homme par nature , cnforte que c'cft le
même qui eft Fils de Dieu & Fils de l'Homme, le Verbe & le
Chrifl. Ce qu'il confirme par divers partages des Pères. Il tranf-»
crit une bonne partie du Livre de Paichafe à Placide. Puis il
Crt;. 14. }.<. fait voir les avantages d'une bonne Communion , & les dan-

gers d'une mauvaife. Une jeune fille à la mammclle, qui avoir


mangé du pain trempé dans du vin immolé aux idoles , ayant
cnfuite reçu des mains du Diacre le Sacrement du Calice , l'Eu—
chariflie ne put demeurer dans ce corps &
cette bouche infedée :
le cœur lui iouleva &
elle vomit aulfitôt. Saint Cyprien étoit
préfent (/). C'eft lui qui raconte ce fait. Gezon rapporte fcs
c«;. 57,38. paroles ; 6z ajoute , que l'Eglife défend la communion à tous
3^' ceux qui font en péché mortel ; qu'elle ne permet ni aux hé-
rétiques, ni aux payens, niaux Juifs d'aflifter à la célébration
des Myfleres. Un Juif s'y étant préfenté, quz la témérité de re-
cevoir l'Euchariftie avec les Fidèles. Mais clic s'arrêta à fa gor-
ge , & il ne pût l'avaler. Sa langue fe roidit; il perdit la parole;
& fut fur le champ attaqué défi vives douleurs, qu'il ne put les

(y rii'RATORi, tom. i. Ane i dot, II. ijj. (l) Voyettom. ).f. iji.
DE UÉGLISE LATINE. Ch. T. 27
cachera rAflcmblcc. L'Evcquc averti du fait s'approcha du cou-
pable, retira l'Euchariftic de la bouche, en lui dilanr Vous voilà :

délivré, ne faites plus rien de ibmblable. Le Juif prollerné à fes


pieds, promit de croire en Jelus-Chrifl: , demanda le Baptême ,
le reçut; & fon exemple fut iuivi de ceux de la nation.
XXVIIL II faut donc avant de s approcher de la Commu-
nion, fe confelTerde fes péchés, ou attendre que l'on foie puri-
rifié de fes fautes. L'Autel de Jefus-Chrifl: efl: un Tribunal, où
l'on ell jugé. Ce n'efl: pas un homme , qui foit les oblations, le
Corps 8c le Sang de Jelus-Chrift (m) ; c'efl; celui qui a été cruci-
fié pour nous , Jefus-Chrifl lui-même. Le Prêtre prononce les
paroles , & elles font confacrées par la vertu & la grâce de Dieu.
Ceci ejî , dit-il , mon Corps. C'efl: par ce mot que les oblations
font conlacrées ; & comme la voix cjui dit Croiffez wuhipliez, : &
(ÙT remplï^tz la terre , a été dite une fois , & qu'en tout tems elle
a fon effet pour la génération ; de même cette voix , Ceci eji
mon Corps , a été dite une fois , & opère fur tous les Autels cie
i'Eglife juiqu'aujourd'hui , & donnera jufqu'à l'avènement de
Jefus-Chrifl, la fermeté au facriiice. Gezon inrifl;e fur la nécef-
fité de purilier la confciencc avant de recevoir l'Euchariflie
,
en particulier fur la réconciliation avec fes ennemis. Il combat cap. 41;
l'erreur de ceux qui ne croyoient point qu'elle fût le vrii Corps
& le vrai Sang de Jefus-Chrifl, mais feulement une figure, mon-
trant qu'en cela ils renvcrlent le iens des paroles du Sauveur. Il
a dit Ma chair efl vraiment viande ,
: &
mon jang efl véritable- joj». ;. jé.
tnem un breuvage ; &
lorfque dans la dernière Cène il changea le
pain en fon Corps («) ; il ne dit point , C'efl la figure de mon
Corps ; mais, Ceci efl mon Corps. Et de même en leur donnant
le Calice : C\ft le Calice de mon Sanz> L'Auteur rapporte plu- ^
licurs apparitions miraculeuies , ou Ion avoit vu le Corps de 44.45
Jefus-Chrifl fous la forme humaine dans l'Euchariflie ; ou Ion
Sang en découler. Il traite enfuite de la fréquente Communion ^i, 47. &
qu'il approuve, pourvu qu'on s'en approche avec piété, avec/f?-

(m) Noncnim homo efl, qui propofîta efFedtim ad generationem opérante na-
,

corpus Clirifti & fan^iiinem , fed ille


facit turà : vox illa fomcl quidam didta eft ,
ica &:
qui cruciRxus pro nobis Chriiliis. Ore
«.ft fe.! per ornnes m^nfas
Ecclti-lT.c , ufque ad
Saccrdofis verba prciferuntur , & Dei cirtute hodiernum diem & ufqje ad ejus advcntum
«onlêcrnntur & gratia. Hoc ef},?i\t jCorpns pr.vftat facrificiofirmitatcm. di,". 40 p. 278.
mium. Hocverbo propofita confecrantur; (n) In Corpus fuum panem transfigurans
& fîrut iila vox
qux ilixit Crelciie \i mul-
, : non ait : Hac efl figura Corpcrt! niei (ed
-,

tiplh.imini JJ ccmplete terrain , f?mel qui- Ihç ejl Corpus meiim. Gezon, c. ^i.p, z3o.
4em dicta eft , fed omnium tempore fentit

Dij
28 LITURGIES
crainte avec un cœur
, &
un eîprit pur ; de rutilité du facrîfice
pour les Morts; de la modeftic que l'on doit apporter à la célé-
bration des Myfteres ; de la décence &
de la propreté des égli-
fes, des vaies de l'autel &
des ornemens deflinés au facré My—
Ci;. 5S. flere. Il dit qu'on ne doit rien mettre fur l'Autel , que les obla-
tions, pas même les reliques des Saints ; qu'il ne faut point of-
19' frir pour les homicides , ni pour les voleurs ; que ceux qui fonc
l'aumône , &
ne quittent point le péché ne fauvent pas leur ame ;
^0.61. qu'il eneft de même des pèlerinages ils deviennent inutiles à
:

ceux qui ne veulent point fe corriger ; qu''il faut craindre l'ex-


communication portée par un Prêtre , parût-elle injufte ; que
'<2.6j.64. c'eft un grand péché de violer la fainteté des Eglifes les &
tombeaux,
c-v- 70. XXIX Ce Traité finit par une courte
. remarque fur TEucha-
riftie. Quoiqu'elle foit offerte par plufieurs en divers lieux, &
en différcns tems , ce n'efl: qu'un corps de Jefus-Chrift , le même
qu'il a pris dans le fein de la Vierge ; & qu'un facrifice ; parce
que la Divinité du Verbe , qui eft une, remplit tout l'Univers,
& qu'elle efl toute par-tour. Nous devons croire , ce font les
paroles de Gezon , qu'à l'heure de l'immolation les Cicux s'ou-
vrent à la prière du Prêtre , & que le Corps ell porté par le mi-
niftere des Anges fur l'Autel lublime qui efl jcfus-Chrifl , le
Pontife &
l'Hoftie tout enlemble , &
que ce Corps eft fait un par
fon attouchement. Cet endroit fe trouve mot pour mot dans le
Livre de Gerbert ou Sylvellre II , intitulé Du Corps du Sang : &
du Seigneur (0).
Lettres tou- XXX. Dom Mabillon joint à. ce qu'il a rapporté de l'Ou-
chant lesRits yraQ-e de Gezon , cinq Lettres qui peuvent répandre deslumie-
res lur le Kit Ambroiien {p). On voit par la quatrième qu eues
furent écrites dans le tems , où Conrad le Salique & le Duc
Conon fe difputoient mutuellement le gouvernement depuis la
mort de l'Empereur Henri I du nom ; c'eft-à-dirc , en 1024. Les
quatre premiers font de Paul& deGcbehard Chanoines de Ra-
tifbonnc. Ils a voient été l'un & l'autre à Milan. Témoins ocu-
laires de l'air dcmajcfté c]ui rcgnoit dans la célébration des Of-
fices divins félon le Rit Ambrolien , ils conçurent le deffcin d'in»-
troduirece Rit dans leur Egliie. C'eft pourquoi ils s'adrelferenc
à Martin , Garde du tréfor de faint Ambroife , & lui dcman-

(0) A, ml Ptz. tçm, I, Arucdot, fart, l. j (;; Tom. i. Mufti Italiei , p. 9;. f.irf. 1,
,

DE L'ÉGLISE LATINE. C h. 2p
dercnt le Sacramentairel'Antiphonier , le commencement
, &
la fin des Leçons de l'Evangile , des Epîtres Apoiloliques &
des Prophéties, avec le Catalogue des Évêques de Milan; car
ils avoicnc déjà à Ratifbone les Hymnes &
les Adcs des Saints
àTulcige de TEglife de Milan. Sous le nom de Sacramentaire,
ils entcndoicnt le Livre desOraifons delà Mefle Sz des Préfa-

ces; &parrAntiphonaire, le cahier qui contcnoit les Antien-


nes que l'on chantoit dans les Offices du jour. Ils remarquent
qu'étant à Vérone ils avoient envoyé à Martin , un Traité de
iaint Ambroile que l'on ne trouvoit pas à Milan, fçavoir l'ex-
plication du Pfeaume LXI^ , dans laquelle il eft parlé de la mort
de l'Empereur Gratien. Ils demandèrent depuis l'Antiphonaixe
pour l'Office de la nuit , l'un & l'autre avec des notes s'il y en
avoit. La cinquième Lettre e(l de Martin. Il y exprime le prix
des livres qu'il y avoit envoyés. Il en avoit écrite une , en rc-
ponfe , aux deux premières de Paul &
de Gebehard. Elle n'eft
pas venue jufqu'à nous. Dom Mabillon trouva avec ces cinq
Lettres , dans la Bibliothèque Ambrofiennc, l'ancien Antipho-
naire & le Catalogue de Evêques de Milan. Il s'eft contenté
de mettre ce Catalogue au jour, &
n'a rien donné de l'Anti-
phonaire {q). Le Catalogue contient les noms des Evêques de
cette Ville jufqu'à Jean de Vice-Comti qui mourut en 1355.
XXXI. C'efl auffi à Dom Mabillon que nous devons la Let- Lettre fup-
tre de iaint Augullin à. Bibien Evêque de Saintes (r) , qui l'avoit P°i?5 ^ ^- {'-'!:
prie de lui envoyer 1 ordre des Offices de toute 1 année dans cil parlé des
l'EgUfe d'Hippone. L'Editeur a tiré cette Lettre d'un manuf- Offices Di-
^'"^"
crit de faint Pierre de Chartres. Il convient qu'elle eft iuppo-
fée , mais très-ancienne , puifque ce manufcrit ell de plus de
huit cens ans. Ce qui l'a engagé à la rendre publique, c'cft que
l'Auteur de la Lettre y dit quelque chofe des Offices de l' Avcnt
dont il n'efi: point parlé dans les Ecrivains des llx premiers fié-
cles. Ils ont bien exhorté les peuples à fe préparer pour célé-
brer dignement la Nativité du Sauveur: mais on ne trouve rien
dans leurs écrits , qui prouve qu'il y ait eu des lors un Office
particulier pour le tcms de l'Avent. Il n'étoit pas même bien
fixé du vivant de l'Auteur de cette Lettre. Dans fon Eglife on
en commençoit l'Office le huitième des Calendes d'Oèlcbre ,
ou a l'équinoxe de l'automne, c'eft-à-dire, au 24 de Septembre,

(j) liiii.p.ig. \o(). j


(r) MabulO», Liti:rg. Gallican, p. too.
30 LITURGIES
qu'il croit être le Jour Conception de S. Jean-Baptifle & de
de la

fon martyre. En d'autres on ne


le commençoit qu'à la Fête de

faint Martin. Coutume qu'il défapprouve par des raifons peu


folides.
Difcours XXXII. Cette Lettre eft fuivie dans Dom Mabillon d'un Dif-
km"r:v'ejel ^oui S anonyme lur le martyre des Saints Innocens (s). Il fe
S:i. inn'jcen;. trouve dans un ancien Leilîtionnaire après les ades de la paflîon
de faint Julien & de fainte Bafilifle fa femme martyrs. On les
de l'Epiphanie , & le même jour, le fécond Cha-
lifoit la veille

pitre de faint Matthieu où il eft parlé de l'adoration des Mages.


Teftament XXXIII. Lc Tcftamcnt d'une noble Matrone normnce Er-
d'Ermentrude mentrude n'a d'autre rapport aux Rits Liturgiques (f)
, que

parce qu'il y eft dit que cette Dame fit une donation à l'Eglife
de faint Symphorien dans IcDioceli; de Meaux, du pain & du
vin ncccffaires pour les oblations ; & qu'elle mit en liberté un
efclave,à condition qu'il porteroit le bois pour cuire les oblaia.
Saint Rémi Archevêque de Reims affigna auiïl par fon tefla-
ment deux vignes pour fournir le vin à l'Autel les Fêtes & Di-
manches de l'annce.
Aae^esSS. XXXIV. Dom Mabillon donne cnfuite les attcs du martyre
r-iaviyis Can-
dcs faints Cantius , Cantianus&: CantiancUus («). Ils font at-
"""**
tribués à faint Ambroife dans Mombritius , qui luppofe que ce
faint Evêque les avoir adrefles à tous les Fidèles dltalie. Mais
ils ne font point de fon ftyle ; & il eft hors d'apparence qu'un
Prélat auflTi éclaire , eût dit en parlant de l'Empereur Carin ;
Diva; msmoria Carini bnperatoris. La difcipline de l'Eglife ne
permettoit pas de qualifier ainfi un Prince payen. Ce qui a pu
donner occafion de les attribuer à iaint Ambroife , eft le Ser-
mon àlouange de ces Martyrs , imprime parmi les Œuvres de
la

ce faint Dotleur. On auroit pu par la même raiion les donner à


faint Auguilin. Mais on convient que ce Difcours eft de faint
Maxime de Turin (x). Leursades font plus amples dans Dom
Mabillon que dans Mombritius (y): mais ils nVn ont pas une
plus grande autorité. C'eft un compolé de difi'crens morceaux.
Le commencement n'a aucune liaiion avec le nombre 2 , & la
fin n'en a point non plus avec ce qui précède. UavtkjcBe.jr.Jfimi
eft tiré prefqu'entierement du Sermon de faint Maxime. Les

(f) Maiiill. Litiirj.GJliairi.p. iij. Cî («) IhiJ. !<»<(. 4^7.


4C'0. (.r) Strm. 4? i» Affta4. S. Amlrofii
,

(/) Jiy</./>.ig. i8i.45î. (i 46J. /./.JJ.4J8.


DEL'ÉGLISE LATINE. Ch.I. 31
Aûes en dilant que les trois Martyrs delccndoicnt de la race
des Anices , ajoutent (s) c'ejl-à-dire de l'Empereur Carin de di"
vine mémoire. Les Anices étoient illuftres à Rome long-tcms
avant Carin. Les mêmes Ades femblent mettre le commence-
ment de la perlécution de Dioclétien & de Maximien {a) , auf-
litôt après la mort de Carin. Elle ne commença néanmoins que
dix-huit ans après. Carin fut tué en 285. Le prenier Edit de
Dioclétien contre les Chrétiens efl: de l'an 303. On y lit encore
que Dioclétien regnoit à Rome, Maximien dans rillyric , &
que Carin favorifoit les Chrétiens dans les Gaules. Dioclétien
ne fut point maître de Rome du vivant de Carin j ni Maximien
maître de l'illyrie. Mais après la mort de Carin, Dioclétien (e
trouva maître de tout rEmpire,& alors il prit pour Collègue Ma-
ximien. Ces Ades portent que les trois frères Cantius , Can-
tianus & Cantianellus , après avoir vendu ce qu'ils avoicnt à
&
Rome , mis en liberté leurs efclaves qui s'éroient faits Chré-
tiens, allèrent à Aquilée, où ils poflcdoient de grands biens ;
que Dulcidius qui en étoit Gouverneur , les fit iommer de ve-
nir facritier ; qu'ils le refuferent , difant qu'ils adoroient Jcfus-
Chrift ; qu'ayant appris l'ordre de Dioclétien , de les condamner
à mort , ils fc retirèrent fuivant le précepte de l'Evangile , & ne
purent aller que jufqu'au lieu appelle alors les eaux de Grado ,
.aujourd'hui faint Cancien à une lieue d'Aquilée. Ils y furent ar-
rêtés par le Comte Silînnius, qui fur leur refus de facrificr, leur fit
trancher la tête & à Prote leur précepteur. Le Prêtre Zoïle prie
foin de leur lépulture. Bollandus a rapporté ces Ades avec quel-
ques additions, au trente-unième jour de Mai (&),

{y)l!ttirgia GxHic,%na,f.^6y. I {») Thii.


(l) lùiJ.pug. 468. I
ÇiyAd diem 31 hlaii pctg, 418.
52 SAINT ABBON,

\
CHAPITRE II.

Si:iint Altéon Abbê de Fleuri , dr Gérard Moine


du même Monaflere»

Abbon. ï* Ç? AI NT Abbon que fon fçavoir & fa vertu rendirent


s.
Sa naiiimce.
Ses études.
^ ,

un dcs plus grands pcrfonnagcs de Ion ficclc , naquit


^^^^ j^, territoire d'Orléans de parens de condition libre , &
craignans Dieu {a). Son père fe nommoit Lœtus, fa mère Er-
mcngarde. Ils le mirent dès fon enfance dans le Monaftere de
Fleuri , pour y apprendre les Lettres dans l'école des Clercs qui
fervoient à TÉglife de faint Pierre , & rourircnt à Dieu fuivant
la règle de faint Benoît. G'étoit vers l'an c>58. Wulfade , de-
puis évêque de Chartres , gouvcrnoit alors ce Monaftere ; &
Abbon y avoir deux parens d'un grand mérite , Gunbold &
Chreflien , revêtus l'un' & l'autre au Sacerdoce. Lorfqu'il fut
fufTifimment inftruit, l'Abbé Wulfad le fit venir en préfencc
de toute la Communauté, & lui demanda quel nom il vouloit
porter: Abbon, répondit-il. Enfuite on lui donna l'habit mo-
naftique avec les cérémonies prefcrites parla règle pour la ré-
ception de ceux qui font offerts par leurs père & mère. Il fit
de grands progrès dans l'étude des beaux arts. Sa mémoire croit
ii hcurcufe , qu'il n'oublioit rien des leçons de fes maîtres; &
pour s'avancer de plus en plus , il étudioit en particulier , fans
aux exercices de la vie régulière qu'il avoir
toutefois fc foufirairc
embrafice. Quelque agrément qu'il trouvât dans la compagnie
des Religieux de fon âge , il fréquentoit autant qu'il le pouvoit
les anciens, dansles tems où il lui étoit libre de les voir avec
bicnféanco.
Il cnfcigr^ H- Son cours d'étude achevé , on jctta les yeux fur lui pour
Je.-. bcUes-let- enfcigner aux autres ce qu'il avoit appris (A) la Grammaire, :

'^^'''
l'Arithmétique , la Dialectique, la Muliquc. Puis pour féconder
fes défirs on lui permit d'aller dans les Ecoles de Paris Se de
Reims, &
s'inftruire des autres arts libéraux , la Philoiophic &
r Agronomie. Il ne fit point dans cette fcience tous les progrès

(.1} Aimo:n. Vitit Abinn. cnp.i, z.»o»». 8. j


Antittl ntwi. %.pitg.
. ^^^%.

4il. S. BetiiiMii î5 MABIH.0.N. libf 4fi.l C^) Mauulom. l*»rf. ^6 vit» Albon.c. ?;
qu'il
MOINEDEFLEURT.Ch.it. 33
qu'il auroit fouhaicc.Mais de retour à Orléans , il le pcrfedion-
na dans la Mufique ; & ians autre fecours que celui des livres ,
il apprit la Rhétorique , la Géométrie , & de l'Aflroromic ce
qu'il n'en avoit pu apprendre dans les Ecoles étrangères
III. En Angleterre les études étoient tellement tombées , qu'à n enfeîgne
«"Angletene.
peine y trouvoit-on quelques Prêtres qui entendiflcnt le latin (c) .

Saint OlVald Archevêque d'Yorch, qui avoit autrefois étudie à


Fleuri,y envoya en 08 5 demander quelques Moines habiles pour
înftruire ceux de l'Abbaye de Ramfey, qu'il venoit de fonder.
Abbon fut député. Il n'étoit encore que Diacre. L'Archevêque
l'ordonna Prêtre ; &
le retint à Ramfey pendant deux ans.

Abbon revint à Fleuri iur la fin de l'an ^87, rappelle par Ion
Abbé nomme Oylbold.
IV. Cet Abbé étant mort quelque tems après , la Commu- iieftfeitAb-
nauté choifit Abbon pour lui luccéder. Son élection fut confir- t>é de Fleuri,

mée par le Roi Hugues (d). Abbon profitant des momcns que
ie gouvernement de fon Monaflere lui laifToit libres , les em-
ploya à l'étude de l'Ecriture-Sainte &
à la ledure des Percs ,
dont il fit divers extraits. Il fut fouvent interrompu dans ce
fenre d'ocupations , foit par l'obligation de défendre les droits
e fon Abbaye , ioit parce qu'on l'invita à plufieurs aflcmblées
d'Evêques. En ppi il affifta au Concile de faint BaOe ; en 5?5)5
à celui de Mouzon j & la même année à celui de faint Denys.
II fit même plus d'un voyage à Rome : le premier , dans le def-
fein de faire confirmer les privilèges de fon Monaflerc ; mais
le Pape Jean XV
qui occupoit alors le fainr Siège , ne lui fut pas
favorable. Il trouva dans le fécond plus d'iccès auprès de Gré-
goire V. Comme il y étoit allé en qualité d'ambaffadcur du
Roi Robert pour des affaires d'importance , ce Pape lui accor-
da fes demandes , &
le chargea de remettre le Pallium a Ar-
noul qu'il avoit ordonné de rétablir fur le Siège archiépifcopal
de Reims.
V. On eut recours à Abbon pour appaifer les troubles cle- Sa mort e«
'^"'^*
vés dans les Abbayes de Marmoutier, deMici&de faint Pcre
de Chartres (e). Les Moines de l'Abbaye de la Reole foumife
à Ion obéiffancc , s'étant relâchés de leur obfervance (/), il y fit
deux voyages dans le dclTein d'y rétablir la difciplinc ; mais

(0 ?.Ubillon. lib. 46. hnii4l. mim, 6^. )


(->)Abp,on, Ipijl.
6^/S l-b ;-. .•;«•«. j.^ 'jitA Abborns, c.j. j
(j"} AlMOIN. cap. 17. iO.
(«0 Mabili. h"- f;jp, Abbon. fiw, c 7. )

Tome XX, 1
^4 SAINTABBON,
Je fécond lui fut fatal. Son arrivée excita un tumulte pendant
lequel un Gafcon lui porta un coup de lance, dont il mourut
le 13^ de Novembre après avoir été feize ans
l'an 1004 ,

Abbé de Fleuri. On l'honora


j comme martyr
on voit &
par les actes du Concile de Limoges en 103 1 , que dcs-lors on
lui rendoit un culte public enplulieurs Egliies (g,). Il n'y a rien
à ajoutera l'éloge que les Pères de ce Concile ont fait de lui en
ces termes : « Abbon Philofophe très-célebre (h) , s'acquit dans
» toute la France une très-grande réputation, en l'inftruifant
» de toutes les fciences divines & humaines ».

Ses Ecrits. VI. Aimoin Auteur de la vie d'Abbon y a joint un Catalo-


Coiiediondes gue de fes Ouvrages; mais il ne l'a point aflez détaillé , fe con-
tentant d'en nommer fept ou huit , & ne parlant des autres
Lanoiu,

qu'en général , de crainte , dit-il , d'ennuyer le Lecteur. Il ne


cite ni le livre de la vie de faint Eadmond Roi d'Angleterre,
ni le recueil des Canons , adreffé aux Rois Hugues & Robert
fon fils, quoique ces deux écrits foient indubitablement d'Ab-
bon. Il n'en eu rien dit non plus dans Sigebert , quoiqu'il ait
parlé de quelques autres ouvrages de cet Abbé dans fon Traité
des Ecrivains Eccléfiaftiques. On conferve dans la Biblioteque
du Roi deux anciens manulcrits de la Collection des Canons:
dans tous les deux elle porte le nom d'Abbon Abbé de Fleuri.
Puiiqu'clle efl: dédiée aux Rois Hugues & Robert fon fils , il
faut dire qu'il la compofa avant l'an 5^97 , qui fut le dernier du
règne de Hugues. Ce monument ell très-confidérablc, non-
feulement parce qu'on en peut tirer de quoi remplir les lacunes
de pluficurs anciens Canons des Conciles , ou en corriger le
texte, mais aufli parce qu'on y apprend en quel état la France
fe trou voit alors , & de quels moyens l'on croyoit dc-
voir fe fervir pour remédier à fes maux & la rétablir dans fon
ancien état. C'eft: le but de l'ouvrage d'Abbon , divifc en 52

Chi pitres.
Amil-fp c'c Vn. Il fait rcffouvenir L'î Roi Hugues des fâcheufes révo-
«pite Collfc- lutions qui lui arrivèrent dans !es commencemens de ion règne,
*'°"'
non de la , mais des premiers de fon royau-
part des Etrangei-s
me (î). En mêmetems il lui reprctenteque Dieu qui l'avoit af-
fligé par un fecrer jugement , i'.tvoir par fa bonté uclivré de fes

{g) Aptcd Laeb. fo»i. 2. Edlioh «<ry*,| (r) MaRjllon, in An.ilcîl-, tait. Parif,
pair 6X. .iiin.
172J.
I

(/>; :nj. I
MOINE DE FLEURI. Ch. II. 55
nnemîs; d'où il prend occa.'ion de lui dire & à ion fils Robert:
» Soi' venez-vous des bons Rois vos prcdécefTeurs: lou venez-vous
» des Jugemcns jutles: ayez toujours dans l'elpricde pardonner
M à des rujersloumis, & de ne combattre que les fupcrbes. » Ab-
bon vient enfuite aux devoirs des Princes Se des iujets, 'V rap-
porte là-dciTi'S ce qu'il en avoit lu , & ce qu'il en penl'oit lui-
même; mais il ne cite jamais les fauifes décret aies , quoiqu'alors
leur autorité ne lut point conteftée. Il commence par l'honneur Cap, i.

qui eii dû aux Eglilés & aux Monaderes , & é.ablit le droit
cl'azilc , qu'il étend conformément aux loix de Théodofe & de
Valcntinien , non-feulcmcnt aux Eglilcs , mais aux maiions , 8c
places contigucs. Il veut que ceux qui s'y feront réfugiés , quit-
tent les armes qu'ils ont iur eux; & qu'en cas qu'ils le refufc-
roient , on les en tire par la force des armes mais que l'on pu-
;

niffe de mort celui qui entreprendra de fc failir d'un coupable


3 ni fc fera retiré dans les lieux faints. Il fe plaint de la vexation Cv« »•

e ces Seigneurs qu'on appeltoit ave ués , à qui les Abbés avoicnt
donné des terres en fief, à la charge de prendre la défcnfe de
leurs Monaftcres contre ceux qui les attaqueroient, mais ilctoit
arrive depuis la décadence de l'Empire François, queccs Avoués
au lieu de défendre l'Eglife, la pilloient, laiiïant les biens des
Monafleres en proie aux ennemis , &fe faifilTant eux-mêmes
de ce que les ennemis n'avoient point emporté. Ces Avoués
agiflbient donc non en proteéleurs, mais en maîtres; s'em- &
parant de la plus grande partie des revenus des Monafleres,
des aumônes 8c des oblations, ils en occafionnoicnc la ruine.
Abbon rapporte l'origine des Avoués aux Conciles d'Afrique
qui firent demander aux Empereurs des Scolafliques ou Avocats
pour foutenir les intérêts de l'Eglife devant les Tribunaux fc-
culiers.Onlesnommoit Défenfeurs.
VIII. La juPdce du Roi confifie à n'opprimer qui que cefoit ;
Cap. 3.

à juger lans acception de perfonne ; à prendre la défcnfe de


l'étranger , du pupille & de la veuve ; à foulagcr le pauvre , à

empêcher le crime, ou à le punir. Chargé de toutes les affafres Cap. 4.

de les Etats , il ne peut les terminer , ni même les connoïtre fans


lefecours des Evêques & des Grands. Comme ils doivent au
Roi l'honneur & le reipeél, ils ne peuvent lui rcfufcr leurs avis
& leur minift;re. On diftingue dans un Etat trois fortes d'éle-
£lions , du Roi Se de l'Empereur , des Evêques , des Abbés. La
première le fait du confentement de tout le Royaume la féconde ;

par l'unanimité des Citoyens & du Clergé; la troifiéme par les


Eij
^6 SAINTABBON,
luffrages delà plus faine partie de la Communauté. La faveur ,
l'amitié, l'argent ne doivent point être le mobile des élections,
mais la fageiïe & le mérite du fujet. Le Roi aufTitôt après fon
éledion a droit d'exiger de fes fujets le ferment de fidélité , pour
le maintien de la concorde dans l'Etat.
O/. j. IX. L'autorité du Siège apoftolique de Rome s'étend fur route
l'Eglife , par une fuite de celle que Jefus-Chrift a accordée à
S. Pierre, dont les Papes tiennent la place. On ne doit rien
changer à la difpofition des Evêchés ni des Monafteres d'hom-
mes & de filles, fondés parles Empereurs Chrétiens, s'il n'y a
Cap. 6. néceiïité. Rcfuier d'obéir aux ordres des Souverains , c'cfl mar*-
quer ciu'on les méprife , au lieu de les craindre & de les aimer.
Cap. 8. Il efl aes cas où l'on peut difpenfer des loix ; & c'efl: ce qui fert
à expliquer les Canons de divers Conciles qui paroiflcnt fe con-
tredire. Les Conciles de Nicée & de Calcédoine défendirent
lestranflations d'Evcques elles furent permifes dans celui d'An-
:

tioche, pourvu qu'il y eût nécefTité ou utilité. Abbon rapporte


plufieurs exemples de ces tranflations faites dans les fiéclcs po-
Cap.(f. llérieurs. Au défaut de loi , la coutume oblige dans un Etat ;
mais elle doit céder aux Edits du Prince , & ne vaut même que
quand elle s'accorde avec l'utilité publique»
Ci;. 13. 14. X. Il rapporte les loix & les décrets qui défendent la fimo-
15. 15. -8-fjje (j^-jps les Ordinations
;
qui prclcrivent la forme de l'éleClion
d'un Abbé ; qui mettent des bornes aux cntrcpriles des Evêques
fur les Monafteres ; qui règlent la manière de procéder contre
un Abbé accufé de quelque prévarication ; qui veulent qu'on
n'en choilîffc point qui ne foicnt Prêtres ; qui permettent aux
Evêques de réformer les abus des Monafteres d'hommes , ou de
filles de leurs Diocefcs ; qui regardent les Moines fugitifs , &
les Clercs qui quittent leur Clergé pour fe ftabilier dans un Mo-
naftere ; qui défendent aux Moines & aux Religieulcs de com-
paroître en Jufticc , autrement que par un Défcnicur ou Avocat.
Il en rapporte aufli touchant la validité de la prcfcription tren-

Cap. 19. tenaire pour le bien des Egliles ; les droits que les Evêques peu-
,
5 ,
vent exiger dans la vilite de leurs Diocefcs ; le droit de Patrona-
3i. ge dans les Egliles ou Oratoires fondés par des laïcs ;le foirt
qu'ils peuvent en prendre, afin qu'ils ne tombent pas en ruine

^. par la négligence des Evêques ; & l'obligation où l'on efl de


fubvenir aux beloins de ceux qui ont conibmmé leurs biens en
3î. fondations ou dotations d'Eglilcs. Ce qu'il dit contre l'avarice
36. des Clercs j contre les excommunications injuflcsj fur le pou-
,

MOINE DE FLEURI. Ch. II. 37


voir qu'a l'Evêque de difpofcr de la troifiémc partie des reve-
nus de l'Eglilc , ioit en faveur des Monaftcrcs , ou dcquclqu'au-
tre Egiifc; de la continence des Prêtres des Diacres; des & 58.??.

enfans des Prêtres &


autres Miniftres de l'Eglife ; de la manière 40.41.
de dilpenler les biens de l'Eglife ; de la dcfcnfe faite à un Eve- 41.
3ue de choifir ion fucceiïcur , n'eft qu'un extrait des Canons
es Conciles ou des Décrétales des Papes cnforte qu'il ne dit :

rien de lui-même. 11 fe fert encore des propres paroles de faint 43.4s.


Grégoire , de celles de faint Eucher & de faint Auguftin
pour ,
prclcrire des règles touchant la fréquente célébration de la
Meffe , la fréquente Communion &
les diipofitions ncceflaires
à ce Sacrement. Le fentimcnt de faint Eucher étoit qu'on-ne
devoir pas différer la communion aux Moines qui font profef-
fion d'une vie pénitente , comme aux Laïcs qui font encore
fous le joug du (lécle.
XI. Les derniers Chapitres regardent les peines que l'on doit Cap.44,4^.
'^^*
impofcr aux Clercs qui ont rendu de faux témoignages ; les de- '^'^' 7^'
• j •
1 r M j • '
,
JO'5'' sa-
vons de ceux qui portent les armes , ou qui iont enrôles dans la
milice fpirituclle, c'eft-à-dire , desEcclédaftiqucs. S'ils ne font
as contens , dit Abbon , de ce qu'ils tirent de l'autel , fuivant
Fordre du Seigneur ; s'ils font quelque commerce ; s'ils vendent
leurs prières ; s'ils reçoivent volontiers despréfens des veuves,
ils font plutôt desnégocians, que des Clercs.

XII. Il s'éleva furla fin du dixième fiécle une querelle pref- ,


Apologla

que générale entre les Evcques & les Abbés au fujct du ferment °""

de fidélité que les Evêques vouloient exiger des Abbés lors de


la cérémonie de leurbénéditlion (fe) , comme on a coutume d'en
exiger des Vaffaux. Arnoul Evêquc d'Orléans, pouffa les pré-
tentions à cet égard avec plus d'ardeur qu'aucun autre , & em-
ploya toutes fortes de moyens pour obliger Abbon à lui prêter
ce ferment. L'Abbé qui prévoyoit le tort que cette démarche
pourroit cauler à fon Monaftcre , refufa de prêter ce ferment
foutenant que l'Abbaye de Fleuri , pour le temporel , ne dépen-
doit que du Roi. Arnoul voyant qu'il ne le pouvoir gagner ni
par raifon , ni par les partages de l'Ecriture qu'il lui ailéguoit
pour le convaincre , fe déclara fon ennemi (/). Les gens de
l'Evêque entrant dans la paffion de leur maître, attaquèrent un
jour Abbon comme il alloit à Tours pour la fête de faint Mar-

(^1 Mabulgn , Prafat. in tom, VIII, AS. I (/) Aia^oin. TiV.» AHon, 7inm. S,
num, i-i, \
,

38 SAINTABBON,
tin, lui firent infultc , & mort quelques perfonnes
blcflerenc à
de la iuite. Arnoul d'en faire fatisladion à Abbon,
s'offrit &
lui amena quelques-uns des coupables pour ccre battus de ver-
ges en la préience. Mais l' Abbé s'en défendit , rcicrvant à Dieu
la vengeance de l'injure. Cn tint quelque tems après , un Con-
cileà laint Denys proche Paris. Les Evèques au lieu de s'y oc-
cuper à rétablir la foi dans la pureté &
à réformer les abus qui
s'étoient glilTés dans la dilcipUne de l'Eglife , aviierent aux
moyens d'ôtcr aux Laïcs &
aux Moines les dixmes qu'ils pof-
fédoient, & de les prendre peureux. Abbon qui éccit préfent
leur réfifla fortement. En mêmetems il fe fit une émeute contre les
Evêques , qui faifis de crainte fe retirèrent fans avoir rien fait.
Tout le monde jetta fur Abbon la caufe de cette violence ; ce
qui l'obligea à s'en juililicr par un écrit qu'il adfcffa aux deux
Rois Hugues & Robert , fous le titre d'^'pologie.
Analvfede XIIL Elle 3 été imprimée à Paris en 1^87, parles foins de
cetteApolo- ]NÎ. Pithou à la fuite de Ion Recueil des anciens Canons (m).
8'^'
Aimoin cn rapporte deux fragmens confidérables dans la vie de
faint Abbon(«) , dont le premier cfl l'cxcrde de l'Apologie. Il
le plaint que chargé centre Ion inclination qui le portoii à la
retraite & à l'étude de la Philoiophie, du régime pafiorsl , fa
vie n'étoit qu'une chaîne d'angoifcs & de tribulations ; que les
envieux i.^ les ennemis le déchiroient fans ccffe , quoiqu'ils ne
puiTent lui reprocher autre chofe , que d'avoir pris la défenfe
des intérêts de fon Monafcere & ceux de ion Ordre , & de n'avoir
pas tû la vérité dans le Concile ; que leur fureur alkit jufqu'à en
vouloir à fa vie, fans être détournés de ce deffein par la crainte
de la puilTimce royale. Il prie Dieu de le délivrer de tels enne-
mis , & déclare qu'il fe foumet au jugement des Eyéqucs fui*
vant les Canons , & qu'il fouhaice cn premier lieu de leur rendre
compte de fa foi. Il diflingue dans l'Eglif.* trois états différens
dans les femmes comme dans les hommes: dans celles-là , les
femmes mariées , les veuves , les vierges dans ceux-ci les Laïcs, :

les Clercs , les Moines. Mais il ne compte pour Clercs que les
Evcqi'cs les Prêtres, les Diacres, diiant que les autres Mini-
ères inférieurs, ayant la liberté de fe marier (0) , ne portent
ciu'abulivemcnt le nom de Clercs. L'état des Moines lui paroîc

(m)PîT, Coi/. C»n.p. iç^.ed.Piir. 1687. 1 hoc eft Dincononim


fpccialiter diftin^iiitur,
(«) Aimoin. ^((.î /JZ-icw. ;;«;«. 8. t5 9- I Preibit rrruni &
EpifcoporDin: ir^m oni-
(c) Clcricorum ordo in tribu* gtadibus ncs qui funi inférions jgradôsper abjifioncm
MOINE DE FLEURI. Cu. II. ^p
préférable à celui des Clercs , en ce que les premiers ne font
occupes comme Marie qu'à Tunique néceffaire. Il combat en
paffant les prétentions des Evoques, en difant que TEglife étant
à Dieu fcul , aucun d'eux ne peut dire qu'une Eglife lui appar-

tient. EncJTct le Seigneur dit à Pierre Prince des Apôtres :Tz/


es Pierre , & fur mon Eglife La mienne &
cette pierre je bâtirai :

non pas la tienne. Si donc l'Egliie n'efl; pas à Pierre , à quife-


ra-t-ellc ? Les fucceflcurs de Pierre oferont-ils s'attribuer une
puiflancc qu'il n'avoit pas ? Enfuite il inveélive contre la (imonie
;

êc s'arrcrant à l'cxcufe de ceux qui répondoient qu'ils n'ache-


toicnt pas la grâce de l'Ordination , mais les biens temporels de
l'Egliie, c'eft, replique-t-il , comme fi l'on vouloit avoir le Teu
fans la matière qui lui lert d'aliment.
XIV. On accufoit Abbon d'avoir des fentimens contraires
aux Canons (p) d'être l'auteur de la fédition arrivée à Hiint De-
;

nys contre les Evêques vers l'an 5jc;>5 , au Concile dont nous
venons déparier; d'avoir fait perdre les bonnes grâces des deux
Rois à Arnoul d'Orléans fon propre Evêque, & d'avoir com-
munique avec des excommuniés. Il répond qu'il ne fçait à oucl

Concile , aucun d'eux ne lui en ayant donné occafion ; & Sep-uin


Archevêque de Sens qui avoit été le plus maltraité , étant' fon
ami & fon bienfaiteur. À l'égard d' Arnoul , il dit que fi cet Evê-
que avoit perdu les bonnes grâces des deux Rois , ce ne pouvoir
être que pour les avoir offcnies, en ufurpant les biens de l'Ab-
baye de Fleuri, dont les Prince-: étoient les protedeurs & les
maîtres. Il ajoute que s'il a communiqué avec des excommu-
niés , Arnoul lui en a donné l'exemple , en recevant ceux qui
l'avoient attaqué dans fon voyac;c à Tours , quoiqu'ils euffent
été cxcomn-iunics par Seguin Ion Archevêque , & par Eudes
Evêques de Chartres ; qu'au furplus on faifoit un fi grand abus
des Cenfures {q) , qu'il n'y avoit prefque perfonne dans le Royau-
me qui ne fût excommunié , foit pour avoir mangé avec des ex-
communiés , foit pour leur avoir donné le baifcr de paix. C'efl
pourquoi il fupplie le Roi Hugues de remédier à cet abus.

Clerici vocantur , dum eis (îcut &Laïcisex j


(/)) Paçc 400.
inoulgentià pcrmittitur fociari conjugibus. 1
{q) P.v^e J^oi,
Abb. iuJ-'clo^.p^ig. 397. l
40 S A I N T A B B O N,
XV. encore ce Prince
Il prie &
le Roi Robert fon fils, de

faire rétablir dans le Symbole fous le nom de faint Athanaie ces


termes ni engendré , que quelques-uns en avoient otés (r) , fe
contentant de dire qu'ûnejlnifaitm crée; d'arrêter le faux bruit
qui le rcpandoit prefque par-tout , que quand l'Annonciation fç
rencontreroit avec le Vendredi-Saint , le monde iiniioit; ce qui
fe trouvoit détruit par le concours de ces deux fêtes en 5»^ 2, en-
viron trois ans auparavant; enfin d'empêcher que Ton commen-
çât r Avent avant le vingt-quatrième de Novembre , puifque
î'Avent ne devoit avoir au plus que quatre femaines & un jour.
Il cite fous le nom de faint Ambroife un pafîagc tiré du Traité
de l'Information des Evêques que Dom Mabillona attribué à Ger-
bcrt fur l'autorité d'un manufcrit de faint Martial de Limo-
ges (s). On ne peut mettre l'Apologétique d'Abbon plus tard
que le mois d'Odobre de l'an p^6y auquel mourut le Roi Hu-
gues Capef , à qui il l'adrefTa.
XVI. Nous devons encore à M. Fithou un Recueil de Let-
tres d'Abbon. Elles font au nombre de quatorze , y compris
celle que le Pape Grégoire V lui écrivit , & une d'Albert Abbé
de Mici, cjui eft la treizième (f). La première a rapport au
voyage qu'Abbon fit à Rome en ^^8 , de la part du Roi Robert
pour faire confirmer fon mariage avec Bcrthe que le Pape avoit
déclaré nul comme contraire aux loix & aux ulages de l'Eglife,
parce que Berthe étoit parente du Roi , & que ce Prince avoir
tenu un des cnfans du premier lit de Bcrthe fur les Fonts de Bap-
tême ce qui lui avoit fait contradcr avec elle une affinité fpiri-
:

tuclle. Cetoicnt deux empêchemcns de mariage, dont il falloic


obtenir difpenfe. Le Roi Robert pour y parvenir plus aifément
avoit promis au Légat Léon le rétabliffcmicnt d'Arnoul dans le
Siège de Reims , que le Pape avoit fort à cœur. L'Abbé de Fleuri
ne put rien obtenir pour le Roi ; & à fon retour il apporta de la
part du Pape le Paliium à Arnoul qui paffa de fa prilbn d'Or-
léans à fon Siège archiépifcopal de Reims. Abbon rendit compte
à Grégoire V de ce qui s'étoit paflé à cet égard , &; de la dif-
polition où étoit le Roi de quitter la Reine Berthe (h) ; qu'il ne
renvoya toutefois que quelques années après vers l'an jooi ou
1004: il prioit le Pape dans la même Lettre d'exhorter Ar-
noul à réunir fon Clergé &
à faire rentrer les biens t]ue fon Egli<

(*•) P.>?f 4or. j


(i)Fpift.z- p«ge4oi.
(i) Vagc jpy. 1 («) T-^ifi. i-f-'f' 401,
,,

MOINE DE FLEURI. Ch. IL 41


fe.avoit perdus pendant fon différend avec Gerbert. II y faifoic
auffi mention de la chafuble que Grégoire V lui avoir donnée
& dit qu'il s'en fcrvoic dans la célébration des Myfteres.
XVII. Dans une autre Lettre il prie le Pape de confirmer la
fondation de deux Monafteres , l'un d'hommes , l'autre de fil-
les (x) , qu'une Dame nommée Hildcgonde," fa parente, avoit
faite depuis peu par le conleil de gens de bien , pour effacer
fes péchés par cette lorte d'aumône on ne fçait point le nom
:

de ces deux Monaffercs. Hildcgonde vouloir qu'ils dépendif-


fent de l'Eglile Romaine , & qu'ils lui payaffent un tribut. Dans
une troifiémc Lettre il recommande à Grégoire 'V^ , un cer-
tain Humbolde , peut-être le porteur de cette Lettre, & de
l'Hiffoire de la Tranflation du corps de faint Benoît en Fran-
ce (^) , que ce Pape lui avoit demandée. Abbon lui envoyoic
en même tcms deux vales ornés de reliefs d'un ouvrage admi-
ble. On voyoit fur l'un des deux la figure de la charité qui te-
coit entre fes mains l'ancien 8c le nouveau Teffament ouverts;
fur l'autre, une figure repréfentant la Morale , qui portoit fur fes
ailes, l'HiffoireÂ: l'Allégorie. L'envoi étoit accompagné d'une
cpigramme en douze vers élégiaques quiavoient rapport à l'Hi-
ftoire de la Tranllation. Abbon fait mention dans la même Let-
tre, du voyage qu'il avoit fait avec le Pape dans la Province
de Spolete, & de l'entretien qu'ils avoient eu enfembic fur les
partions de l'ame. La réponfe que lui fit Grégoire efl: un té-
moignage de l'amitié qu'il avoit pour ce faint Abbé (s). Il lui
rend grâces des marques de fa bienveillance, & le prie de lui
envoyer un de fes Religieux avec des nouvelles de fa fanté, de h
promelTe que le Roi Robert avoit fiite de quitter la Reine Ber-
the , & un Miffcl en beaux caradleres à l'ufage de Cluni afin ;

.^joute-t-il, qu'en le voyant pendant la célébration des myfte-


res, je me fouvienne de mon ami particulier. Je ne ferai jamais
ingrat d'un tel bienfait.

XVII I. Vers Je même temps Archembald Archevêque de


Tours , attaqua les privilèges des Chanoines de faint Martin
dont Hervé étoit Tréforicr (a). Abbon le connoiffoit particu-
lièrement , parce qu'il l'avait élevé à Fleuri. Les Chanoines s'a-
drefferentà cet Abbé pour fe défendre contre leur Archevêque.
X^'infcription de fa réponfe eft générale pour tous les Chanoines

(x) Ipij}. i-face 401. I (1' Epifi. i. page 403.


(y) Fp'P- 4. f.i'y 404, 1 i,i) Epifl. j.fare 404.
Tome XX. ^ F
42 s A I N T A B B O N,
de faint Martin; mais ilnomme Hervé en particulier, peut»
y
être parce qu'il avoit écrit la Lettre au nom de tous fcs confrè-
res. Il leur témoigne qu'il avoit appris par la rumeur publique
qu'Archembald vouloir attenter aux privilèges de faint Martin ;
qu'il ne concevoit pas comment un Prélat d'une Ci grande auto-
rité , Se de tant de douceur , entreprît de s'oppofer aux décrets
des Pontifes Romains , & aux Inftituts des faints Canons , qui
font des preuves de l'excellence de l'Egliie Romaine ; qu'il eft
naturel de confcrver à chaque Eglife fes privilèges. Il rapporte
deux palTages de faint Grégoire le Grand touchant les privilè-
ges des Monafteres & conclut à ce que l'on avertiffe l'Arche-
:

vêque de Tours de ne point vexer le Monaflere de faint Mar-


tin & de le laiffer jouir paifiblement des prérogatives dont il
jouiffoit depuis (i long-tcms ; enfin de lui remontrer qu'en fa
cjualité d'Archevêque , il n'a pas plus de pouvoir fur ce Mona-
ftere qu'en ont eu fes prédécefleurs.
XIX. La Lettre d'Abbon au Roi Robert , eft pour fe juflifier
d'un menfonge dont il avoit été accufé par un Secrétaire de la
Cour {b). Il fait voir dans fa Lettre à faint Odilon Abbé de
ClunijCommcnt on doit faire ufage des Canons ou Tables , pour
trouver aifément le rapport ou la différence qu'il y a entre les
Evangéliftcs (c). Nous avons parlé de cette façon de concor-
dance dans l'article de faint Jérôme , de qui Abbon emprunte
prefque tout ce qu'il dit ici fur ce fujet [d).
XX. Vers Tan ^()j il arriva une divifion fàcheufe dans le
Monaflere de Marmouticr, à l'occafion de l'Abbé Bcrnier établi
par faint Maïeul pour gouverner la Communauté qu'il venoit d^y
mettre à la place des anciens qu'il avoit fait fortir (e) . Ceux-ci
voulant fc venger, accufcrcnt Bernier de pluHeurs crimes. Le
principal moteur de l'accufation étoit un nommé Frédéric , char-
gé du foin des Ecoles. Abbon craignant le icandale , tâcha de
le prévenir , en chargeant Gaufbert Abbé de faint Julien dans
levoiiinage de Tours, de fe tranfporter fur les lieux, & d'in-
former du vrai. Il l'avertit de ne point ajouter aifément foi à de
certains qui s'étant procuré un afile dans les Mona-
Moines ,

fteres en fe couvrant de la peau de brebis , quoiqu'ils fuffent en


effet des loups , féduifent les fimplcs par de faux difcours , dé-
truifent la réputation de ceux qui valent mieux qu'eux , met-

(b) Tfifï. 6- page 40j-. I (</) IVct tam. lo.f agi i;?o.
[c) Tfijl. 7.f0^, 4vj. \ CO Epij}. 8. pagi 405».
MOINE DE FLEURI. Ch. II. 45
tant fur leur compte des crimes dont ils ne font point coupa-
bles. Cela étoit déjà arrivé dans le Monafterc de Marmoutier :
Abbon en fait des reproches à Gauftcrt non qu'il eût concouru
,

au mal avec les mcchans , mais parce qu'il n'a voit pas ufé de fon
autorité peur réprimer le crime des acculareurs ; dil'ant que
pour juger l'acculé on auroit dû appcller des Juges intègres de
divers endroits. Il rapporte un Décret de faine Grégoire le
Grand qui écrivant à Loup Abbé d'Autun , défend à l'Evcque
du lieu de juger feul la caufe d'un Abbé &: ajoute qu'il avoit
;

fait infcrire ce Décret dans le privilège qu'il avoit obtenu depuis


peu du Pape Grégoire V- Il fait voir finiécence du procédé
des Moiner de Marmoutier, non - feulement dans les accufa-
tions formées contre leur Abbé , qu'on ne devoit pas laiflfer im-
punies, mais encore parce qu'ils vouloient l'obligera lejuflifier
par l'épreuve du fer chaud. On ne voit point quelle fut la réponfe
de Gaufbert à cette Lettre ; mais il y a lieu de croire qu*elle ne
fut point favorable , (i l'on en juge par celle qu' Abbon écrivit
cnfuite à l'Abbé Bernier (/) , à qui il dit qu'en vain il attendoic
le jugement des gens de bien , pendant que les remords de fa
propre conicicnce l'accufoient ; que le bruit de fes fautes le cou-
vroit d'infamie; & qu'on favoit dans le public, qu'il avoit per-
du plulieurs de les Moines par la contagion de la lèpre. C'efl
pourquoi il l'exhortoit , en cas qu'il ne put fe juftifier , à faire
fatisfadion à fes frères , & à remettre fon bâton pafloral encre
les mains de l'Evêque , afin que fa place fût donnée à un plus
digne. Il paroît qu'on lui fubuitua Gaufbert, qui en 1004 étoit
Abbé de Marmoutier.
XXI. L'infcription de la dixième Lettre: Epifcopo Amato-
rum Chripi Ama'.or Ahbo, donne d'abord lieu de juger qu'elle
cfl: écrite à un Evcque
(g) mais la fuite fait voir qu' Abbon y
;

parle à un de fes amis , qu'il inrtruit fur la nature & les qualités
du ferment ; qu'ainfi le mot Epifcopus doit le prendre pour le
nom propre de cet ami & non pour un nom appellatif. Au refte
l'Abbé de Fleuri prend les mêmes qualités en écrivant aux Cha-
noines de laint Martin de Tours & à faint Odilon Abbé de Clu-
ni. Il paroît que c?îui à qui Abbon adrelfa cette Lettre , avoit
été contraint oc faire un ferment, & qu'il doutoit s'il étoit dans
Tohligation de le tenir. L'Abbé de Fleuri fait voir que quand
si s'agit de fa propre défenfe, ou de fe laver d'un crime impua'

Fij
^^4 S A I NT A B B O N,
fauflement , le ferment eft permis ; mais que lorfque le ferment efl
accorr pagné de menfonge , c'eft un crime qui doit être expié par
la pénitence ; que le péché de celui qui eft contraint de jurer efl:
plus grand que le péché de celui qui ne jure que par la crainte
de la mort ; que dans le cas où l'on jure par violence qu'on ne ré-
pétera pas d'un voleur ce qu'il a pris , ce ferment n'oblige pas. Il
veut qu'à l'égard de l'obligation du ferment on falfe attention
aux circonftances des lieux , des tems &
des perfonnes la pro- :

meffc que fait ou un enfant , ou une femme fans l'agrément de


fon mari , n'oblige point. Il condamne tous menfonges , &
remarque dans le parjure deux péchés , le menfonge , le nom &
de Dieu pris en vain. Cette Lettre fe fent un peu de la dialectique.
Lettre aux XXI. Saint Abbon informé qu'il s'étoit élevé des troubles
Moines de
^^^^ l'Abbaye de Mici , au fujet de l'Abbé Robert que le Moi-
ne Lerald , homme d'ailleurs rcfpe£lable par fon fçavoir,vouloit
ôter de fa place pour s'en emparer , écrivit aux Moines de Mi*
ci , s'adreffant en particulier cà leur Doyen nommé Conflantius,
qui paroiffoit être le principal moteur de cette révolte (h), pour
fc plaindre de ce qu'ils avoicnt tenté d'entretenir dans leur parti
les Moines de Fleuri. Il déclare qu'ils étoient trcs-éloignés de
donner dans de pareils écarts ; & en donne pour preuve l'ex-
puKîon de Frédéric, le même qui avoir excité quelque tems au-
paravant la divifion dans le Monaflere de Marmoutier. Il ajoute
que l'Abbé deCluni , c'étoit faint Odiion , avoit chalTé de fon
Abbaye plufieurs autres femblables brouillons , après les avoir
puni lévéremcnt. Il invcftive vivement centre ces Moines acé-
phales qui pcrfécutent leurs Abbés afin de vivre fans Supérieurs;
qui contre les droits de la nature déchirent leurs "propres frères
par leurs calomnies plus féroces en cela que les animaux , donc
;

aucun ne févit contre fon fenblable. Venant au fait qui avoit


occafionné la divifion à Mici, & l'expuHîon de TAbbe, il fait
voir qu'il mcritoit au contraire leur approbation, pour avoir pris
le parti d'un innocent que l'on vouloit accabler parla calomnie.
Il exhorte donc les toupablcs à rendre à cet Abbé Tobéiflance

qu'ils lui avoicnt vouée , & s'adreffant en particulier cà Lerald


qu'il traite de fon ancien ami , il le prefle de rendre à Robert
la place qu'il lui avoit enlevée, & de faire rentrer fcs confrères
dans le devoir. La Lettre d'Abbon eut fon effet. Robert fut ré-

(i) Fpifl. II. p-ige^ii.


MOINF, DE FLEURI. Cr:. ï I.
15
tabli, &mourut Abbc de Mici en odeur de faintetc.
XXII. Paflant fur la ^in d'Odobre de Tan J004 par la Ville
de Poitiers, il s'arrêta quelques jours au Monaftere de faintCy-
prien dont Giflebert fon parent ctoit Abbc (?). Il apprit de lui
& de quelques autres pcrlonnes qu'on cherchoic à ternir ia ré-
putation par diverfes calomnies. Il s'informa du vrai ; & ayant
découvert les calomniateurs , il écrivit à faint Odilon Abbé de
Cluni d'où dépendoit le Monaftere de faint Cypricn , de les
contenir dans le devoir , 6c de faire enforte que l'innocent fc
•réjouifle de fe voir déchargé delà calomnie , & que l'accufateur
téméraire fe Il cite ce qui ell prcfcrit par
rcconnoiffe coupable.
la règle de Benoît fur la manière dont les fieres doivent
faint
faire connoître à l'Abbé leurs propres fautes , & celles des au-
tres ; & ce que dit faint Grégoire le Grand, que lorfqu'il s'agit
de crimes , autres doivent être les accufateurs ; autres , les té-
moins ; autres les Juges. Dom Mabillon a tranfcrit cette Lettre
dans fes Annales (fe).
XXÏII. La treizième, dans la Colledion de M. Pithou, n'cft
point d'Abbon , mais d'Albert Abbé de Mici , qui j'adrelfa au
Pape Jean XVIII ou XVII , pour lui demander la confirma-
tion d'une donation faite à fon Monaflere (/). Dom Mabillon
l'a auflî rapportée dans fes Analetles (w). La quatorzième, qui

ell d'Abbon s'adrefle à un Moine ou à un Abbé , qu'il ne déli-


gne que par la première lettre de fon nom, c'efl-à-dire , par
un G. On croit que c'efl: Gerauld , ou bien Gaufclin («) qui lui
fuccéda dans le gouvernement de T Abbaye de Fleuri. Il y traite
des dixmes que quelques Evêques vouloient enlever aux Moi-»
nés, dans un certain Diocèfe qu'il ne nomme pas. Il montre
par l'autorité des Canons & des Pères que les dots des Eglifes
& les dixmes font entre les mains des Evêques , comme le royau-
me entre les mains du Roi , afin que par leur autorité & leur
jugement , chacun demeure dans la pofîeiïion de fes biens , fui-
vant les règles de l'équité. Quoique ce ne foit qu'en ce fens que
les dixmes font entre les mains des Evêques , les Canons leur
en accorde toutefois la troifiéme, ou plutôt la quatrième partie
dont ils peuvent difpoier à leur gré , comme il convient à des

{m) MaetlI-Of. ùj Afi.iliilir.p.xg! 430.


(^)MABII.LOM.L:i. 5i.i4nïM/. «««,48. (hJ ]dcm lib. ^zAnnul, nHm,;i. p.ige

ll)lf'P. 13.^ 14 pige 416.


4^ S A I NT A B B O N,
(jirpenfatcurs Ecclcfiafliqucs fans pouvoir néanmoins les alié-
,

ner. La qucftion des dixmcs avoic été agitée à roccalion d'une


certaine Eglife bâtie fur le fond du Monallere de Fleuri , par
un des d'Abbon. Le fondateur l'a oit en mème-
préaéceflfeurs
tems dotée , nuis d'une partie des biens du Monaftcre. Le Cu-
ré du lieu voulut avoir la dixme de ces biens. Abbcn foutinc
qu'on ne lui en dévoie point , parce que l'Abbé qui avoir bâti
& doté cette Eglife , avec les fonds du Monaftere , n'avoit
pu les aliéner , & que le Monaftere en étoit demeuré en poiïef-
fion; d'où il conclut que les Moines de/oicnt continuer dans
la pofîeflion des Egliies &
les defTervir , s'ils font Clercs ; linon
qu'ils peuvent & doivent vivre des revenus ou des offrandes des
mêmes Eglifes. Sur quoi il rapporte divers pafiages de faint
Grégoire, de Ambroifc & de faint Jérôme.
faint

Lettr?sd'Ab- XXIV. Nous avons deux autres Lettres d'Abbon dans l'Hi-
ton jLeuiard. ftoircde la vie par Aimoin, l'une & l'autre adrefltes à Bernard
Abbé de Bcaulicu en Limoudn. Guillaume Comte de Touloufe
& l'Archvcque de Bourges lui avoient offert l'évêché de Ca-
hors fous la rétribution d'une groife fommc d'argent. Bernard
confulra là-dcff"us l'Abbé Abbon qui avoit autrefois étéfon maî*-
tre. Il en reçut une Lettre pleine de tendrcfle & d'amitié , mais
aufli rempli de zèle pour le maintien du bon ordre & de la dif-
cipline (o). Abbon l'exhorte à ne pas dégénérer de la piété 8c
de la vertu dont il donnoit des preuves dans le gouvernement
de Ion Abbaye; à le fou venir des engagemensde fa profeffion,
& de fon obligation à tendre à un ciegré de pcrfedion qui le
mette à l'abri des offenlcs de Dieu. Il lui fait obferver que quand
les vendeurs & les acheteurs de bénéfices ou dignités Ecclélia-»
fliques couvrent leurs commerces du vain prétexte qu'ils ne ven-
dent pas ou n'achcttcnt pas la bénédidion , mais les revenus de
l'Eglife, c'ell comme s'ils fe couvroient de toiles d'araignée*
qu'il eif aifé de rompre. Car à qui ed: l'Eglife , finon à Dieu ?
Qui en cft !c Seigneur , fi ce n'eft Dieu ? Si l'Eglife préfente a
befoin de deux Avocats, l'un pour les affaire; temporelles, l'au-
tre pour les fpirituelles , elle ne les regarde ni l'un ni l'autre com-
me fcs maîtres , & en droit de la vendre , élit qui a été rachetée
du fang de Jefus-Chrifl. Il confeillc don^- à Bernard de ne point
accepter l'Evêché de Cahors , en fe Ibuillant du crime de fimo-
nie qui le mcttroit au rang des hérétiques.

(d) Tom. S.Àii.r.ji-ige ^.o. ntim. lo»


MOINE DE FLEURI. Ch. IL 47
XXV. Cependant Bernard s'ennuyant de vivre , parce qu'il Autre Lettre

voyoit la charité de pluficurs fe refroidir, & Tiniquitc le mul- ^ ^"'^'^'^^^

tiplier ,penfoit à tout quitter pour aller à Jérufalem , à rimita-


tion de ion perc qui avoir fait ce voyage par un motif de pé-
nitence. Abbon à qui il s'en ouvrit , lui confeilla le pèlerinage
de Rome & du mont Gargan. Il partit accompagné du Prêtre
Conftantin qu Abbon lui avoit donné pour le icrvir en che-
min Mais à quelque diftancc il renvoya le Prêtre avec une
(p).
Lettre pourlefaint Abbé, à qui il dcmandoit lequel dos deux lui

étoitle plus avantageux , ou de tout quitter, ou de fcrvir en


quelque manière le liecle dans la vue d'être utile aux {:.cns. Ce
fut à Abbon le fujct d'une féconde Lettre , dans laquelle il lui
dit de s'examiner lui-même, & de décider s'il fera mieux de re-
noncer à fon Abbaye que de continuer à la gouverner. Il lui
repréfente cependant que c'cft un bien de remplir les fondions
d'Abbé & de chercher à gagner les amcs à Dieu ; mais aullî
qu'il vaut mieux chercher Ion propre ialut que de commander
à des indociles. Bernard fut depuis Evêque deCahors; mais il
parvint à cette dignité par les voies canoniques.
XVI. Abbon s'étoit trouvé à Reims dans le tcms que Léon Lettre àLeon
Légat en France, &
Abbé de faintBoniface, yétoitpour ter- B^,^^|-.^e.''"'"
miner le différend entre Arnoul &
Gcrbert qui prétcndoient l'un
& l'autre à cet Archevêché. Ils eurent enicmble divers entre-
tiens, &
lièrent une amitié qui fut fuivie de lervices mutuels. Le
Légat Léon demandai Abbon des reliques de iaint Benoit, ne
doutant point qu'elles n'euflent été véritablement transférées de
Mont Caiïin à Fleuri ; & en même tems il s'offrit de faire confir-
mer par le Iaint Siège les privilèges de cette dernière Abbaye.
Abbon ne pûtrefufer à Léon les reliques qu'il dcmandoit ; mais
il le pria de lui en envoyer lui-même de celles de iaint Bôniface-

Quant aux offres de faire confirmer les privilèges de Fleuri par


le iaint Siège , Abbon répondit qu'il avoit fait un voyage à Ro-
me dans le delTein d'obtenir cette faveur du Pape j mais qu'à
fon arrivée , il avoit trouvé le faint Siège vacant par la mort du
Pape Jean XV. Il ajoute qu'il avoit appris depuis peuavec une
grande joie l'éleflicn de Grégoire V. Ainfi fa Lettre à Léon
fut écrite vers le mois de Juin de l'an ç)c^6. Aimoin ne fait men-
tion que de deux voyages du faint Abbé à Rome , l'un fous

(;) iiii,j)-»5«4t.
,

43 S A r N T A B B O N
Jean XV , l'autre fous Grégoire V. On voit ici qu'il en fit un
troiiiéme, quelques jours après la mort de Jean XV. M. Baluze
qui a le premier donné cette Lettre au public , dit qn'elle étoit
un Abbé de Fulde (q) ; opinion que Dom Mabillon
adreflce à
a fuivie d'abord (r),mais dont il s'efl: départi depuis,après avoir
reconnu qu'elle étoit à Léon Abbé de faint Boniface & de faint
Alexis à Rome {s) , dont le nom dans le manufcrit n'étoit mar-
qué que par un L. M. Baluze s'eft corrigé lui-même dans une
troiiiéme édition de Tes DilTertations fur la Concorde de l'Em-
pire & du Sacerdoce., & a publié de nouveau cette Lettre avec
Tinfcription (f) A Léon Abbé de faint Boniface.
:

Letneàtous XXVIL Pendant qu' Abbon étoit à Ramfey, il fut confulté


ir-c Moitiés fur quelques qucftions grammaticales. Il y répondit avec plai-
Ai'^.oi5.
jij,^ ^ s'offrit lui. Sa Lettre
à tous ceux qui auroicnt recours à
s'adreffe à tous .les Anglois (h) , en quelque lieu qu'ils fc trouvaf-
fent , mais principalement à ceux qui demeuroient à Fleuri. Il
n'étoit que Diacre lorfqu'il l'écrivit. Quelques-uns lifoient dans
la Palinodie, ou l'Hymne Te Deum laudamus , qu'il attribue à
faint Hilaire de Poitiers Tu ad liber andum fufcepifti fiomnem.
:

Il veut qu'on corrige cette erreur , qu'on Ihcfiijc punis komi-' &
nem, comme nous lifons en effet.
I ettre ^lU XXVlIt. Nous joindrons aux Lettres d'Abbon celle que les
îTiorc d'Ab- Moines de Fleuri écrivirent à tous les Abbés au iujet de la mort.
^'^"'
Quoiqu'ils le regardent comme un véritable martyr , ils ne laif-
fcnt pas de le recommander à leurs prières. Ils en demandent
pour eux-mêmes, afin que Dieu daigne lesconfoler delà perte
qu'ils venoicnt de faire de leur chef & de leur père commun. On
trouve cette Lettre dans les mélanges de M. Baluze, & dans
les Annales de l'Ordre (a-).

AuîresEcrits XXIX. On a d'Abbcn un Abrégé chronologique de la vie


«i'Abbon. .Sa dcs Papes depuis faint Pierre jufqu'à Grégoire II , facccflcur de

£i^"t°^ie Confbintin en 714. Ce n'eil qu'un


extrait d'Anaftafc le Biblio-
deS.Ëdmond.téquaire. imprimé avec. celui deLuitprand à Mayence en
Il fut

1602 par du Père Jean Bufée. Abbon compoia, à la


les foins
prière des Moines de Ramfeyia vie de S. Edmond (y) Roi d' An-

(7)Eai.iiz. tom. 1 . Mifcell.iii. pag. ^09, (ti) Mabillon. lib. 4. Annal, tium. 69.
(r) Mabillon. Tom. 8. Ador. pag. 19. p, IîV. Ç/ in Append. tom. 4. p. 6$J.
(s)Iii. lii, <ji. Arin.il, tiuni. 14./». 100. {x)Tom. I. Mifcell. BalOZ. />. 411 G?
ii in Append. tom. ^. p. 69^ lib. ^z. Annal. »«m. 49.
(c) Ball'Z. i'r.f/jf. iii Tom. 1. Mifcellan. 1 (y) ^pudSiiriitm ndditm 10. Noî'. /'.4* J*

\^p. 40;. 1

glctcrrç
MOINE DE FLEURI. Ch. II. 49
flcterrc , qui cfl; honore comme martyr. Avant de la publier
l'envoya à faint Dunftan pour le prier d'y corriger ce qu'il
trouvcroit de dcfeftucux. Abbon en parle comme du premier
de les ouvrages, &
dit qu'il n'étoit alors que Diacre. Il l'écri-
voic donc vers ^85 environ 39 ans après le martyre de
l'an
faint Edmond que l'on met en ç^^6, Surius a rapporté cette
,

Vie au vingtième de Novembre ,M. d'Andilly l'a traduite en


.François , & publiée dans fon Recueil des vies des Saints.
XXX. Unmanufcrit du Vatican attribue à Abbon de Fleuri JoUdcsâ'Ab-
ime Lettre Ù" des Vers à l'Empereur Otton (s). Peut-être ne ^"*

doit-on entendre par-là que la Lettre de cet Abbé à Otton III,


.écrite en trente-cinq vers héroïques , dont les premières & der-
nières lettres forment de chaque côté le vers luivant par un dou-
.ble acroflichc Otto valens Cafar , nojiro tu cède Coturno. Outre
:

•l'éloge de ce Prince, Abbon y t'ait celui d'Otton II fon père.


Aimoin a trouvé cette petite .pièce de pocfie fi belle, qu'il s'efl
appliqué à en donner la clef, & l'a rapportée toute entière dans
la vie du Saint (/7). Polycarpe Leyferusl'a auffi inférée dans fon
Hifloire des Poètes Latins du moyen âge (b). On cite un au-
tre manuicrit de la même Bibliothèque , d'un Traité d' Ab-
bon fur la tranllation des Reliques de faint Benoît, adreffé en-
.coreà Otton IlL Ce Traité n'a point encore été rendu public.
Abbon étant à Ramfcy fit en quatorze vers élégiaques la def-
cription de ce Monailerc. Dom Mabillon l'a fait imprimer dans
l'Appendice du qu.itrieme tome des Annales (c). On ne peut
gueres lui rcfufer fclogc de faint Dunflan en 60 vers. Il étoit
Gonfidéré de cet Evêque ; il en avoit été comblé d'honneurs &
(de prcfens pendant fon féjouren Angleterre ;& le manufcrit (i^)
où fe trouvent ces vers , porte le nom d' Abbon. Il efl: vrai qu'il
y cil qualifié Italien de nation. Mais il efl vilible que c'efl; une
iautc de Copifte. On donne encore à Abbon d'autres pièces
(de poëfie & uniquement fur de fimples conje£lurcs.
;

XXXI. L'Auteur de fa vie, après avoir fait mention de quel- Çy<^l"-<l'-'^l>-

ques-uns de fes ouvrages, &


dit qu'il en pafic d'autres fous fi-
lence, pour ne point ennuyer le Le£leur (e) , ajoute qu'il ne
doit pas omettre qu' Abbon corrigea fur le texte même des

(l) MONTFAI'CON Biiliol. p.


^l. ^yi. (il) Tom. I. M^afifcript. Bibliot. Artgl.
(rtj Vitii Abhoii. ttum. I ). part- tinm. 56.
f . 44. I.
(t) P^ge joi. (fj Aimoin. F/m Abb. niim, ij.f. 43".
(c) Page 6?.%.

Tome XX, G
, ,

50 S A I N T A B B O N
Evangiles Cycles des années de l'Incarnation du Verbe ,
les &
3u'il les conduilic depuis le jour de raccompliflement de ce My-
ere jufqu a fon tems ; que dans la fuite il augmenta ces Cycles
de façon qu'ils contenoient un efpace de tems d'environ quinze
cens quatre-vingt quinze ans ; qu'il mit à la tête de ces Cycles
une petite Préface adreffée aux Moines de Fleuri , fes frères 8c
fes enfans , dans laquelle il parloit de l'année de la mort de
faint Benoît. Dom Mabillon ne doute point que les Cycles d'Ab-
bon ne foient ceux que l'on a imprimés parmi les ouvrages du
vénérable Bcde (/). Car quoique la Préface y foit fans nom
jd'Auteur , elle ne peut être de Bede , qui y eft cité plus d'une
fois elle elldonc d' Abbon, puifqu'il y eft parlé deux ou trois fois
;

de l'année de la mort de faint Benoît : circonftance remarquée


par Aimoin dans la Préface qu'il avoir vue à la tête des Cycles
d'Abbon. Cet Abbé fe propofe dans cet ouvrage de corriger le
Cycle Pafcal de Denys le Petit ; après l'avoir rapporté , il &
donne deux modèles de iuppurations félon lefquels il auroit dû
procéder. Enfuite il rapporte le Cycle de faint Cyrille d'Ale-
xandrie ; puis il met un Cycle de dix-neuf ans, qu'il avoit fait
lui-même. Il y ajoute diverfes fupputations pour trouver cha-
que année le jour de la Lune , qui doit régler celui de la Fête
de Pàque pendant dix-neuf ans. La Chronique d'Anjou 8c Al-
béric de Trois-Fontaines font mention du Cycle d'Abbon (g).
Suivent dans l'édition des Ouvrages de Bede cinquante-quatre
planches ou tables dontchacune contient un Cycle Pafcal de dix-
neuf ans: ce qui fait le nombre de 155^5 ans commencés ; en-
forte que par le moyen de ce Cycle on trouvoit le jour de la Pâ-
quc depuis la première année de l'Incarnation jufqu 'en 15^").
La Préface qui fe lit au commencement , explique ce que c'cft
qu'un Cycle Pafcal. Elle eft fui vie de huit vers hexamètres qui
renferment l'explication des huit colonnes dont chaque Cycle
eft compofé. L'Editeur l'a intitulée du nom de Bede ; mais dans
quelques manufcrits elle porte celui d'Abbon (?) ; & c'cft cà quoi
il faut s'en tenir , puifqu'au rapport de fon Hiftorien il avoir

compofé un Cycle de 1595 ans (k).


Commen- XXXII. Il fit audi uH Commentaire fur le Cycle Pafcal de
taire fur IcCy-

.
(f)Tom. i./» Iî6. ti? AIabillon. tcm. I piirt. z. p. 14.
S. Adar p il. (I.) Tom.i.pnjeiOf.
(gl C.hrôiiic. Atidegav.apud LABB.'om, l. I
(/) MontfaccOn. BlU. Slillot, p. IJ.
riob. Billot, p, 28d. Albiric. jpC'A»o«ù'. • (y AI.MOl^. /« î'/»4 yî/i/». «.-/m, i 3./'. 45'.
MOINE DE FLEURI. C h. II. 51
Viclorius , aux inilances de fcs Religieux (/) : car il ccoit Abbé de de VîSo-
lorl'qu'il travailla à cet Ouvrage , & à celui dont nous venons ""**

de parler. Son objet dans ce Commentaire eft de rendre intel-


ligible à les Moines, le Cycle de Viâorius, qu'ils n'entendoient
pas bien , à caufe de la difficulté de combiner les nombres dont
ils'étoit iervi. On
en trouve divers exemplaires dans les Biblio-
thèques (w). & Dom Uriîn Durand en ont fait
DomMartene
imprimer la Préface («) , avec les deux premières lignes du
Commentaire. On n'a pas encore imprimé le Traité du Com-
put (0) , ni ceux du mouvement du Soleil, de la Lune & des
Planètes , dont il eft parlé dans l'Hiftoire de fa vie mais on :

les trouve pour la plupart dans les Bibliothèques du Vatican &


d'Angleterre , avec divers autres Traités fur l'Aftronomie , fur
les poids & les mefures , fur la Grammaire & la Dialeûique.
Aimoin met ce dernier à la tête des ouvrages d'Abbon (p). Dom
Mabillon avoit tiré copie de celui qui étoit intitulé q) Des (
:

Poids &des Mefures ; & PofTevin cite d'Abbon des dcmonltra-


tions aftronomiques (r). On ne fçait ce qu'eft devenue la ré-
ponfe qu'il fit par ordre de Richard fon Abbé à des Lettres ve-
nues de Lorraine , où le bruit s'étoit répandu que le monde fi-
niroit infailliblement la même année que le Vendredi-Saintcon-
courroit avec la Fête de l'Annonciation. Voici ce qu'il dit à
cette occafion dans fon Apologie aux Rois Hugues & Robert.
» En ma jeuneffe j'ai ouï prêcher devant le peuple dans l'Eglife
>' de Paris gu'aufïitôt que les mille ans feront accomplis (j) ,
,

« l'Antechrilt viendra; & peu de tems après le Jugement uni-


»> verfel ». Je me fuis oppofé de toute ma force à cette opinion

par les Evangiles , l' Apocalypfe & le Livre de Daniel ; & l'Ab-
bé Richard d'heureufe mémoire , ayant reçu des Lettres de Lor.-
raine fur ce fuj et , m'ordonna d'y répondre. On a perdu auffi
l'écrit d'Abbon où il traitoit de FApoftolat de faint Martial en
France. Il fut cité dans unfermon prêché dans l'Eglife de laint
Pierre de Limoges le jour de la Dédicace de cette Eglife , en
préfence de plulieurs Evêques affemblés pour cette cérémonie.
M. Baluze n'eft pas.éloigné d'attribuer ce dilcours à Ademar
de Chabanois. De qui il foit , l'Auteur parle d'Abbon comme

(/) SloEBERT. de Scriptor Ecclef. cap. 139, ff) I« vilà Abbon. mim. ?. p. jî.
Trithfm. i-,ip. 30;. 1'/) ÎVIa.biIiI-ON. At'iial'l'b, 51. num. ja.
(m) MONTKAUCON. Bibliot. p. 13. 87. (r) PossEViN. in Apparattt , tom. i.p, 35»
(^tt)Tom. i.Atiecdat. p,ifr. ni, .
;
(î) AbeO in Apotog, p. 40Z. I

(0) Aimoin. in viul Abbon, num. 3. 7. |


52 SAINTABBON,
-owiv y du plus fçavant homme de fon fiécle (r) , le plus accrédité , &
dont le iuffrage paffoit pour une dccifion. Il le croyoit fi éloquent,
qu'il le compare à Ciceron. Il ajoute, qu'il faifoit l'honneur
des Conciles ;
appuyoit tellement fes raiions de l'autorité
qu'il
de l'Ecriture ,
que avoient quelque chofe de divin.
fes dilcours

Autres Ecrits XXXIII. On met encore parmi les Ecrits d' Abbon , une Vie
fous le nom (Je ^ainj- Martin; des Homélies fur les Evangiles ; un Sermon
""
fur la Ccne ; un Traité des" Catégories fpirituelles ; une Profe
ou Séquence pour la fête de fainr Etienne, un Traité qui" &
avoit pour titre Canons des ornemens de l'Eglife Romaine. Il faut
:

attendre que l'on ait rendu publics tous ces ouvrages,pour en ju-
ger fainement. Car c'cft deviner que de dire que par ces Canons
il faut entendre fon Recueil des Canons, dédié aux Rois Hu-

gues Se Robert, dont le Copifle aura mal entendu le titre. Abbon:


avoit fait plufieurs voyages à Rome. Ne pouvoit-il pas avoir
imaginé quelque écrit iur les divers ornemens en uiage dans cett©
Egliie, fur leur forme , fur le tems &
la manière de s'en fervir?
L'Auteur de fa Vie n'a point oublié de lui faire honneur de fon
attention à décorer l'Eglife -de Fleuri («). Oylbold fon prédé-
ceffeur avoit commencé à couvrir de lammes d'or la table anté-
rieure de l'Autel de la fainte Vierge mère de Dieu. Abbon l'a-
cheva; & couvrit de. lammes d'argent les deux cotés. Il fit fiX'
autres autels , qu'il orna-auHi de lammes d'argent , un fous l'in-
vocation de faint Benoit ; un fous le nom de la lainte Trinité ;
le troifiéme de faint Etienne ; le quatrième de laint Anien;
le cinquième de faint Jean l'Evangéiifle; le (Ixicmc de l'Apô-
tre faint Jacques fon frère. Il environna le lieu où repoioit les
Reliques de faint Benoît , d'uneboiferie , où l'on voyoit briller le
&
même métal, fit graver fur des plaques d'argent l'Hiftoire de
divers miracles opérés par l'intercefTion de ce faint Légiflateur.

ju ementde
XXXIV. Ce ne font pas là les feuls monumens de fa piété ;
fes Ecrits. il en a laifTé des vertiges dans fes écrits. On y voit qu'il aimoit

fincerement la vérité , &


le bon ordre ; qu'il avoit en horreur le

vice &: le menfonge ; Se qu'au milieu des lionneurs qu'on lui ren-
doit de toutes parcs, il confervoit l'cfprit de ion état, qui cfl:
un efprit d'humilité. On l'apperçoit jufqucs dans fon ftyle. S'il
donne„dcs avis , c'eft avec douceur , & fans faftc ; parlant à fes
difciples avec autant de modération &
de retenue , qu'à fes égaux.

{t) ^^Rli.ixm. Olftr~j»t,inviti Mhan. 1 (u) A.i nota, i» vit, AHcti.num. i^.p^^ 6,
toni. S./. i8. num. 3. { . , .„.w.«.i«Uka.^ ...
,

MOINE DE FLEURI. C h. IL 53
r,e Lcdcur lira avec plailir fes Lettres à Bernard. Elles méritent
de l'attention , & par les principes de piété qu'elles renferment,
& par la façon pleine de douceur & de nobleflc dont elles font
écrites. Il y a moinsd'élégance dans les autres écrits d'Abbon.
Mais il paroît par-tout plein d'érudition, d'un génie vaftc & pé-
nétrant.
XXXV. Il eut entre fes difciplcs un Moine de Fleuri nom- GemrdMoi-
mé Gérard ou Gerauld , & un autre nommé Vital , à qui il adref- "'^ '^^ t'ieun.

fa deux Lettres qui ne font point encore imprimées (x) donc ;

l'une traite des Cycles pour trouver le jour de la fête de Pâque ;


& des défauts du Cycle de Denys le Petit; l'autre fixe l'année
de la mort du Sauveur. Gérard compofa un Pocmc de plus de
cinq cents vers fur la Tranflation des Rdiques de faint Benoît
en France. Il prit pour matière ce qu'Adalbert auflTi Moine de
Fleuri avoit écrit en Proie furie même fujet, environ cent cin-
quante ans auparavant ; enfortc qu'il n'y a rien de Gérard dans
ce Poème que la mefure des vers qui ne font d'ailleurs ni polis
ni coulans. Bollandus l'avoir tiré d'un manufcrit du Vatican (y) ,
avec un autre Poëme du même Auteur en 180 vers élégiaques,
en l'honneur de fainr Benoît , dans le deflein de les joindre l'un
& l'autre à la vie de ce Patriarche au 2 j de Mars ; mais réfle-
xion faite fur la longueur de la pièce, il n'en a fait imprimer que
les quatre premiers vers. Il cite encore de Gérard un Poème à
la louange de la fainte Vierge (z) ; un autre oij il relevé les gran-
des attions de Vautier Roi d' Aquitaine(a) Ce dernier efl dédié .

à Erchambald Archevêque deTours.

(«) Mabillon, Lib. 51. Aiiii.ill. II. 52. \frœmio , p.ige 300. vum. 6.
fâgeyjr,. {t.)U.ibid,
j

(y)BoLLAND.aJdiemiï. Mardi in Cont,


j
[a] Le Long, Bibl.Trstnc.f. yj-j, •
H E R I G E R,

CHAPITRE III.

Heriger, Abbé de Lobes y Notger, "Evêt^ue de Liège ;

dr Aimoin de Fleuri.

béde'&be^s^'
^'
A P ^ E S la mort de Folcuin Abbé de Lobes arrivée en
XjL 99^ Hcriger Religieux {a) de la même Abbaye fut
j
,

choiii unanimement pour lui luccéder {b) & béni le 2 de Dé- , 1

cembre de la même année (c). Avant de parvenir à cette digni-


té , il avoit été chargé du foin de l'Ecole de Lobes , dont la
réputation continuoità fefoutenir. Notger Evcque de Liège qui
connoiiïoit lestalens d'Heriger (<i) , s'en fcrvit utilement dans
le gouvernement de fon Diocèfe , où il ne pouvoit tout faire par
lui-même , à caufe qu'il étoit en même-tems chargé des affaires
de l'Etat pendant la minorité de l'Empereur Otton H. Cet Evê-
que, obligé de faire le voyage de Rome en 5)85) , y mena Heri^
gcr :& ce ne fut qu'à fon retour qu'on le choiiit pour Abbé de
Lobes. Cette Abbaye dépendoit pour le fpirituel , de l'Evê-
ché de Liège , mais pour le temporel de celui de Cambrai ce :

qui obligea les Moines de Lobes de faire confirmer leur élcdtion


par Rothard Evêque de Cambrai, & par Notger de Liège. La
Lettre qu'ils écrivirent à ces deux Prélats cfl fort belle , & toute
à la louange de l'élu {e). Herigcr gouverna ion Monaftere envi-
ron dix-fept ans, étant mort le 31 d'Odobre de l'^n 1007,
félon la Chronique de Lobes (/). Ils'étoit fiit de fon vivant
une grande réputation par fa fageffe {g) , fon fçavoir & fon
éloquence.
Ses Fcrits. ^^' Sigcbcrt &
le Continuateur de l'Hiftoire des Abbés de
Hiftoirc des Lobcs font Hcriger Auteur des Geftcs des Evêques de Ton-
Hvcquw de
J-'^ge.
.

{a)C.AUiLV.Acms.C,brcrt.fage iSi. (y) Tom,6. SpiciUg.p. 69t.


(b)Ui,l.pagt \i\. (g) Mabilion. loi». i.AUdT. p- ^if. in
(c) Tom. 6. SpUileg.p. ;ço, vit. Olbetti, Sl&£pERT. de Seripter. Eccltf,
(d) Ibid. cap. 137.
(«)/.''/(/. p.'Tg. 181. 183.
,

ABBÉ DE LOBES. Ch. III. 55


grès (h) , de Maftrich & de
Liège , que Ton regarde comme
n'ayant fait fuccellivement qu'une même Eglile. Néanmoins
Notger Evêque de Liège dit dans la Préface de la Vie de faine
Remacle, qu'il a recueilli avec foin, non-feulemenrles A des de
ce Saint , mais encore de tous fes prcdéceffeurs jufqu à Ion rems
c'efl-à-dire , jufqu'au fiecle même d'Heriger car Notger & :

Heriger ctoient , comme on Ta déjà dit , contemporains. Il y


a plus , c'eft que cette Préface fait le premier Chapitre des Ge-
ftes des Evêques de Liège; & la vie de faint Remacle , la der-
nière partie. Voilà donc Notger & Heriger Auteurs d'un mê-
me Ouvrage. Tout ce qu'on peut dire pour lever cette difficulté,
c'efl; que Notger ayant recueilli les Gcftes des Evêques fes pré-

déceffeur s , chargea Heriger de les mettre en ordre & en fon


ftyle(/);& qu'Herigcr ht lui-même pluheurs recherches pour
completter l'ouvrage. Il commence à faint Materne & finit à
faint Remacle que l'on compte pour le vingt-fepticme Evêque
de Tongres ou de Madrich , mort , comme l'on croit , vers l'an
6^4. On ne içait pourquoi il ne donna point les Ades des dix-
huit Evêques , depuis faint Remacle jufqu'à Notger : car il eft
certain que celui-ci les avoit recueillis (k). Quoi qu'il en foit,
nous avons aujourd'hui la continuation de l'Hiftoire des Evê-
ques de Liège depuis faint Remacle ; & il y a apparence que les
Auteurs de cette Hiftoire ont fait ufage des Mémoires de Not-
ger. L'ouvrage d'Heriger fe trouve à la tête des Hiftoriens de
l'Eglife de Liège dans le recueil de Chapeauville , à Liège en
1^1 2 & non en 1(^13 , comme difent quelques-uns. On en mar-
que une féconde édition au même lieu en 1618 /«-4° , comme la
première. Mais il paroît que ces deux éditions n'en font qu'une ,
& que l'on n'a fait qu'ajouter à la féconde un nouveau Frontif-
picc , pour lui donner plus de cours.
III. Heriger mit en vers la vie de faint Urfmar un des Pa- Vie <!e faint

trons de l'Abbaye de Lobes (/). Elle avoit déjà été donnée en ^^f'"-''-

profe par Anfon, & retouchée par Rarherius de Vérone. Fol-


cuin avoit auffi parlé du Saint dans l'Hiftoire des Abbés de ce
Monaftere , & rapporté plufieurs miracles faits à fon tombeau.
Les BoUandiftes ont donne quelques vers de cette Vie au dix-
huitiémc jour d'Avril; & Dom Mabillon jufqu'à cent cinquanre-

(h) SloEBERT. c.-'p. 1 37. îj SficiUg. tom. j


Ik.) ^I''<f-

Ô-pav-fOi. j
(l)Toni. 6. Spiciteg. p. ^'ji.^d SlciBtf.r,
(t) BoLLAND. ad iiim 3. Tebrujrii.p.^yo, l ''•»/'. }• p^'S- '37'
5^ H E R I G E R,
quatre, dans le quatrième Tome des Adtes de l'Ordre. Le toiit.fe
monte à mille & au-delà. Ils ont
imprimés avec quelques au-été
tres monumens concernant de l'Abbaye de Lobes.,
l'Hifloire
à Mons en 1628 in-^° , par Gilles NVauld Moine de ce Mona-
Ibre. Les vers d'Hériger font des hexamètres Léonins, & 4i-
vil'cs en fix Livres dans le manulcrit de l'Abbaye de Gem-

blours (;») ils ne le font qu'en deux dans celui de.faint Van-
:

ne («).

IptrrȈHu
^^" ^^ ^ ^'-'^ long-tems fans fçavoir ce qu'écoit devenue. la
'
grci. Lettre d'Hériger à Hugues, mentionnée dans les Gefles des
Abbés de Lobes (0). Dom Martene l'ayant retrouvée. en feuil-
letant, les manufcrits de cette Abbaye , l'a fait imprimer. dans le
premier Tome de fcs Anecdotes (p). Hugues ne pouvant con-
cilier les opinions du vénérable Beoe fur l'époque de l'Incarna-
tion avec ce qu'en a ditDcnys le Petit, confulca Heriger , qui
dans fa rcponie s'explique non-feulement fur cette difficulté (q),
mais auffi fur l'année de la Paflion du Sauveur , fur le tems &
de la Pâque. Il fait voir, fur le rems de la PafTion que Denys
Cil contraire au texte de l'Evangile , qu'on doit s'en rappor- &
ter là-deflfus au témoignage de faint Jean , qui compte quatre
l'èrcs de Pâques , depuis le commencement de la prédication
çc Jefus-ChriO:; enforte qu'ayant commencé à prêcher à l'âee
de trente ans , on doit mettre fa paflion au commencement ac
fa trente-quatrième année. Il fait divers raifonnemcns fur les
jours de la Naiffance &
de la Mort de Jefus-Chrift , d'où il pré-
tend qu'il réfulte qu'il efl: mort le même jour qu'il avoit été con-
çu dans le fcin de la Vierge. Puis combinant le Cycle de De-
nys avec celui des Grecs , il montre que ce qui fiit , félon eux ,
la première année de l'Incarnation, efl , félon Denys, la neu-
vième ce qui occafionne cntr'eux une différence de huit années.
:

Il remarque que les Orientaux failoient quelquefois la Pâque

avant les Juifs ; &


il en, donne pour raifon que ne connoifTant

d'autres Cycles que le Solaire, ils fixoient toujours l'équinoxc


au 25 de Mars, &
le jour de la Pâque au vingt- fept , au lieu

çjue les Juifs qui fuivoient le Cycle Lunaire , ne célébroient


cette Fcte que le quatorzième delà Lune d'après l'équinoxc,
en quelque jour de la fcmaine que ce quatorzième arrivât: ce

(w)FoiLAND. Ton. l. Aprilii ,p. {f8. (f'V- 'j!7' ^


(«) iVIiJBIlLpN. TcTO. 4. A7nr. /). yoj.
I
(/)) r.l^f 112.
(0) fcm. 6. .'>/'V»/f^.f. jji.t? SicEBiaT. I
{q)Tem.l.Aiieedot,^\t.v.Jft^t-, f. lïî.

qui
,

ABBÉ DELOBES. Ch. HT. 57


qui retardoit quelquefois la Fcce jufqu'au mois d'Avril. II re-
marque auffi que plulicurs d'entre les Latins comme d'entre les
Grecs croyoient que le Sauveur étoit mort le même jour qu'il
avoit été conçu, c'eft-à-dire , le 25 de Mars il cite , entr'au-
:

tres , iaintChryloftome, laint Auguflin , faint Fulgence. Mais


il penle lur le jour de la célébration de la Pâque qu'il faut s'en te-

nir à la décifion du Concile de Nicée , fans avoir égard aux di-


verfes fupputations des anciens. Il parle d'une héréde qui s'étoic
élevée depuis peu fur ce fujet , &
que Gerbert la combattit
dit
par l'autoritédu Concile de Tolède. Heriger étoit malade lorf-
<]u'il di£ta cette Lettre, & fa vue commençoit à s'affoiblir , ap-

paremment à caufe de fon grand âge c'efl: pourquoi il veut qu'on


;

i'excufe , fi on la trouvoic moins polie & moins travaillée. Ce


défaut feroit bien excufable , s'il y avoit apporté plus de clarté
Se plus de précifion.
V. Je ne fçai où il avoit lu que le Paralytique de trente-huit Suite de cc<-
'^^""^•
ans , guéri miraculeufement par Jefus-Chrift , étoit le même qui
donna un ^* '*'
lui foufflet Icjour defapafTion. Le paHagc qu'il allègue '

là-defTus, ne le prouve point. En


récompcnfe de la peine qu'il
s'étoit donnée que Hugues lui avoit pro-
d'éclaircir la difficulté
pofée , il lui demanda l'éclairciffement de quelques autres ,
dont la première regardoit le fens de ces paroles de Bede dans
fon Homélie iur le jour des Palmes Il a été ordonné d'immo-
:

ler l'Agneau Pafcal cinq jours avant Pâques , c'eft-à-dire , le


14 de la Lune lur le foir. La féconde. Comment faint Clément
a pu parler du martyre de faint Pierre dans fa Lettre à l'Apô-
tre laint Jacques , puifque ce dernier étoit mort avant faine
Pierre. Heriger ne fçavoit pas que ces Lettres étoient fuppo-
fées. Latroiliéme,Sur quel fondement on a avancé que faint
Eucher , faint Valere & laint Paterne ont été envoyés dans les
Gaules par faint Pierre , martyrifé la 1 5e année de Ncrcn. La
quatrième , Comment il peut être vrai que l'Empereur Dece qui
n'a régné qu'un peu plus d'un an , & fait mourir le Pape Cor-
neille, ait fiit mourir auffi le Pape faint Sixte & faint Laurent
fon Diacre, puifque les Papes fiint Etienne & faint Luce pré-
dcceffeurs de Sixte ont été martyrifés par Gallus & Volufien
ou par Valcrien & Gallien fuccefîeurs de Dece. La cinquième ,
Si Conftantin a été baptifé par Eufebe de Nicomédie Arien ,
ou bien par le Pape faint Sylveftre à Rome. La fixiéme efl à
l'égard du tems de l'invention de la Sainte Croix , que quel-
<jues-uns mettent fous le Pontificat du Pape Sylvcftre, quoique
Tome XX, H
58 HÉ R I G ER,
le Pape Melchiades en parle dans une de fes Décrétales , (c'eft-
à-dire , dans celles qui lui font fuppofées. La fcptiéme , Si l'on
peut dire qu'Arius foit mort fous le règne de Conftantius fils
de Conflantin , vu qu'il efl mort fous Alexandre fon Evêque ,
qui mourut huit ans avant Conftantin. On ne voit point ce que
Hugues répondit à ces queftions , &
nous n'avons que les pre-
mières lignes de la Lettre qu'il écrivit à Heriger fur l'oppofition
de fcntimens entre Denys le Petit &: Bede (r) , au fujet du Cy-
cle Pafcal &
de l'Incarnation.
Diverfîtéde VL On vû dans l'article d'Abbon que l'on ne s'accordoic
a
fentimem au
^^^ jg ^^^ j.g,^5 f^]. j^ nombre des jours ou des femaines dont
veut.
yeat, 1 Avent devoit être compofé. Hcrigcr compofa fur cela un Traité

en forme de Dialogue entre lui & Adelbolde alors Clerc de l'E-


glifc de Liège , & qui en fut depuis Evêque , où il faifoit voir
que fuivant l'Inditut des Pères , il ne doit pas y avoir plus de
quatre Dimanches dans l'Avent (s). Ce Traité n'a pas encore
été mis fous la preflc. Aubert le Mire le cite parmi les manuf-
crits de l'Abbaye de Gemblours (r).
Traité du VIL Mais on ne trouve nulle part le Traité qu'Heriger avoit
Corps & du compofé fous le titre
(«) Du Corps du Sang du Seigneur. En
: &
" "' '^'^"^ °" ^ prétendu que c'étoit l'Anonyme publié par le Père
fineur.
Cellot. II eft démontré que ce Traité anonyme eft l'ouvrage de
Gerbert connu fous le nom de Sylveflre II.
AutresEcrits VIII. Lcs autres écrits d'Heriger font , la Viedefainte Ber-
dHeriger. lende Vierge de Merbck en Brabant , publiée par les Bollandi-
ftes (a-) , & depuis par Dom Mabillon dans le troiliéme Tome
des Ààes ; l'Hiftoire de faint Landclin premier Fondateur de
Lobes. Cette Hiftoire fo lit fans nom d'Auteur à la fuite de
celle qu'Heriger a faite de faint Urfmar en vers hexamètres :
& c'elt une raiion à Dom Mabillon de les croire l'une & l'au-
tre du même Poète ( v) fur-tout à cauie de la reffcmblance de la
,

verfification , & de l'étymologie qu'on y donne dans toutes les


deux du mot de Crifpin , l'un des Monafteres fondés par faint
Landclin dans le Hainaut , ainfi nommé à caufc de la limpi-
dité de fes eaux. La Vie de faint Landoald Prêtre 8c un des
compagnons de S. Amand Evêque de Maftricht,avecrHiftoi-

(r) Martfnf, Tôt». 1. Aiifcilot. p. 118. (f) MiR. aJ 137. Sigeberli.


citp.

(s) Ptz, Tom. 4. Ariecdot. in VrxfiU, f. 7. (h) Tom. 6. Spicitegii


, p. f 91.

niim. 7. Martene , amj'liJJ'. Collcil.tom. (x) BoLiAND.*^ </«>»! J. Feha.ir.p. 377,


J.fag. }87. (r) Mabii-lom. Tom. 4. p. 50^,
. .

ABBÉ DE LOBES. Ch. III. 59


re de la Tninflation de fes Reliques de Windohaim à Gand , fut
acrite par Heriger fur les Mémoires , & par l'ordre de Notgcr
Evêque de Liège. Ce fait eft atteflc par un Auteur contempo-
rain Moine de ll^int Bavon à Gand (z). Après qu'Heriger eut
écrit cette Hiftoire , Notger l'approuva , & y mit fon fccau.
Heriger eut la même part à la Vie de faint Remacle. Notger en
fournit les Mémoires: Heriger les mit à fon flyle. On la trou-
ve dansSurius & dans l'Hifloire des Evêqucs de Liège (rt). Son
Commentaire fur VAhacus ou Tables de Gcrbert , n'a pas encore
été imprimé mais on en trouve plufieurs copies manufcritcs
:

dans Bibliothèques {b). Quelques-uns ont attribué à Heriger


les
un Traité des Oiîîces divins. Il n'en efl rien dit dans Sigebcrt
ni dans les Geftes des Abbés de Lobes. On y lit feulement qu'il
compofa deux Antiennes en l'honneur de faint Thomas (f) ;
dont l'une commençoit par ces mots: Thoma Didyme'^ l'au-
tre par ceux-ci Thoma A^oflole une Hymne de la faintc 'Vier-
: ;

ge , Ave per quam , & quelques autres pièces de cette nature ,


dont 1g Continuateur de ces G efles n'a pas rendu compte. He-
riger écrivoit paflablcment en profe ; c'en étoit allez alors pour

avoir la mais la Poëfie n'efl: pas bonne.


réputation d'éloquence :

Il avoit de l'érudition , & quelque teinture de la Critique , mais


pas affez pour rcjcttcr les pièces fuppofées ; il en fentoit feule-
ment la fauffeté ; & dans l'impolTibilité de s'en convaincre , il
fc laiflbit entraîner par les opinions vulgaires. On en voit un
exemple dans l'embarras où il fe trouvoir d'accorder ce qu'on
lifoit du Baptême de Conflantin par faint Sylvcflre dans la do-
nation de Conftantin , avec ce qu'on lit ailleurs que ce Prince
futbaptifé par Eufebe de Nicomédie chef des Ariens.
IX. Notger, appelle Notker dans les anciens Diplômes (f/) , Kotçer Evê-
^^ ^"^S^"
né en Souabe , d'une famille illuflre , fit, étant encore jeune , ^"'^

profeflion de la Règle de faint Benoît dans l'Abbaye de faint


Gai (e). Il en fut dans la luitc Prévôt ou Prieur (/) mais au- :

paravant il enfeigna à Stavelo (<() , invité par l'Abbé Odilon.


11 fut tiré de l'Abbaye de faint Gai pour être placé fur le Sié-
,

(x.) BoLLANT). ad liiem 13 Martii > i». Jf (./) MaBILl. Tom. y. Ailor.p, 12. h. ao.
num. ^. (f) Id. ibid. ^ Chronic, Magdeburgttife ad
{à) StiRius itd diem 5 Scpttmb. p. 17. ttn, 1008.
Iliflor. Epifcop. Leod. Tom. i . p. 8 1 Ibid.
(/)
(*) Pez, Auecdot. Tom, i. bijfer-tat.p. j8. (^) Martenne, amplijj'. Colleîl, p. 8f i,'
««m. fij. \%6l.innotis,
(':) Tom, 6. Spidligf. j-p I ,

Hij
<?o notger;
ge épifcopal de Liège en 517 1 après la mort d'Everade , & fa-
cré au mois de Juin de Tannée fuivante par faint Gereon Ar-
chevêque de Cologne. Il rendit fon Epifcopat mcmorablepar
le foin qu'il eut de rinfl:ru£lion de fes peuples , & d'orner fa
Ville Epifcopale. On n'y voyoit rien de grand en fait d'édifi-
ce {h) , qu'il n'eût ou achevé ou commencé. Il s'appliqua prin-
cipalement à l'éducation de la jeunefTe ; 8c lorlqu'il alloit ea
voyage, il fe faifoit accompagner de quelques Ecoliers (z) , qu'il
inrtruiloit en chemin , portant avec lui les Livres néceiîaires. Il
fortit de l'Ecole qu'il avoit établie un grand nombre de perfon-
nes recommandablcs par leur piété , leur fçavoir & leurs digni-
tés, entr'autres , Gonthier Evcque de Salzbourg(fe), Rothard
& Erluin Evêques de Cambrai ; Heimon de Verdun ; Hezelon
de Toul , & Adelbold d'Utrecht. Notger s'employa pour re-
concilier Ratherius de Vérone avec Folcuin Abbé de Lobes (/).
& il y réulTit. Il accorda une retraite honorable à Léon Evcque

Grec {ni) , chaflTé de fon Siège comme s'il eût livré aux Grecs
la Calabre , au préjudice d'Otton IL Se fentant près de la fin , il
fe retira dans une maifon contiguc au Cloître de TEglife de S-
Jean qu'il avoit fait bâtir , où il s'adonna tout entier à la prière,
à la letlure & aux autres exercices de piété. Il y mourut le di-
xième d'Avril 1008 , après un epifcopat de trente-fix ans &
quelques mois. Il avoitaffifté en ^5)5 au Concile de Mouzon^
& en 1007 à celui de Francfort. Il fut un des principaux Mi-
niftres de l'Empereur Otton III («) , & les Papes le chargèrent
plufieurs fois de CommifTions honorables (0). Folcuin dit de
lui {-p) , que Dieu lui avoit accordé le don de la vérité & de la
foi. Quoique cet éloge fût accompli, il témoigne qu'il en auroit
dit davantage, fi Notger n'eût été encore en vie. Un Pocte
contemporain a donné plus d'étendue à ion éloge {q) , en di-
fant que cet Evéque înfiruifit fon peuple en langue vulgaire ;
fon Clergé en latin , & l'un & l'autre par des difcours pleins
de douceur qu'il donna du lait pour nourriture aux jeunes gens ;
;

& quelque choie de plus folide à ceux qui étoicnt plus forts;

(i) Mabillon , m. ^l. Annal. ««»>. yj. (n) Hipor. Lpifcof. Leoditnf.p. 106,
(0; Martenne, Tim. 4. anipl. ColleS,
f. loi,
(0 Uid. pag. 866.
(<;) Ihid. \p FoicuiN. de Abbatih. Lobieiif. tom, 6,
(l) Mabillon. Ut. 47, Annal, num. (f- Spicilegiiy cap. 28. p. y77.
page C08. (?) i^'fiof' Efifcop,Liodienf.f*g, iio.
(w) Id.Tcm. 7. Ador.f. 858.
EVESQUE DE LIÈGE. Ch. TII. 6i
qu'il abbatit les hcrclles , &
confondit rhypocrifie la fraude , &
qu il fît trembler les mcchans.
X. 11 recueillit , comme on l'a déjà dit, les Geftes des Eve- SesEcrits.

ques fes prcdéceflcurs , depuis faint Materne , jufqu'à fon cpif-


copat , & les donna à Heriger pour en faire une fuite d'hiftoire.
II paroit toutefois que Notgcr eut plus de part à la Vie de iaint
Remacle qu'aux autres ; du moins ne peut-on nier que la Pré-
face ou Epître Dédicatoirc ne loit de lui. Elle efl: adrcffée à
"Werinfride Abbé de Stavclo qui l'avoit prié de raconter les
vertus de ce Saint avec plus d'étendue que n'avoit fait l'Auteur
de l'ancienne Vie , & de les décrire d'un llyle plus poli. Not-
eer fe nomme dans cette Epitre (r') , & s'appelle le fervitcur
de faint Lambert , ajoutant qu'on lui donnoit aufïl la qualité
d'Evcque. Il ufe de la même modeflie dans l'Epitre Dédica-
toire à Womar Abbé de Gand & à fes Moines (5) , aufquels
il adreflTa la Vie de iaint Landoald avec l'ffiftoire de la Tranf-

lation de fes Reliques. Cette Epître eft donc encore de Not-


ger ; & le refte de l'ouvrage, de la compofition d'Heriger, à
qui cet Evcque avoit fourni des Mémoires. Cette Lettre étoit
luivie dans un manufcrit de faint Bavon de Gand d'une Lettre
anonyme fur l'enfance de faint Lambert fuccclTeur de faint Re-
macle. Gilles de Liège Moine d'Orval qui l'avoit lue (f) , la
croyoit de Notger , & il en jugeoit ainfi par le ilyle. Il ajoute
que cet Evêque avoit aufTi laifle des Mémoires fur la Vie de
fainte Landrade Vierge dans la Belgique («). Les Bollandi-
ftes (x) font encore Notger Auteur de la Vie de faint Hade-
lin Fondateur de l'ancien Monaftere de Celles près de Dinant :
Leurs raifons font plaufibles. C'eft un Evcque de Liège qui a
écrit cette Vie, & il fe fert des mêmes façons de parler em-
ployées dans les Epîtres ou Préfaces des Vies de faint Remacle
& de faint Landoald, qu'on avoue être de Notger. A l'égard
des autres Ecrits qu'on attribue à Notger , comme des Traités
de Rhétorique , du Comput , d'Aftronomie , de Mufique; ils
peuvent également être attribués à Notker de faint Gai , avec
lequel on l'a confondu, de même que la tradudion d'un Livre
d'Ariftote intitulé : De l'Interprétation.

(r)Bijlor.'Epifcop. LeoJienf. nm. i.p. z.t («) Iliii.

3. îJBoLLAND. «</</»>»; 5 Ffir«ar»i, p. 36^. (ï) BoLtAND. ad diftn 3, Ttbrnariiy


I
(s^HoiLAtiD. liid. |/"'.Ç»37°»
Çtj Hiftor, Efifcof. Letdienf.p, iîi., I
,

s% A I O I N M
AimoJT Moi- XT. Ville-Franche, fituée dans le Perigord , entre les riviè-
res de rifle & de Dcrdone , fut le lieu de la naiflance d'Aimoin.
ae de Fleuri.

Elevé à Fleuri des fes premières années , il y fit profciïion de


la vie monaftique fous l'Abbé Amalbert vers l'an 5175) (jy). Il
eut pour maître dans fes études , Abbon depuis Abbé" de ce
Monaftere. Ses progrès dans les fciences furent grands ; & il
n'y en eut point au rapport de Tritheme (2s) , dans lefquelles il
ne fe rendit très-habile. Il n'avança pas moins dans la vertu :
on s'en apperçoit enlifant fes Ecrits. Ils refpirent une piété aufïï
tendre que folide. Il fit au mois d'0£tobredc l'an 10041e voya-
ge de la Reole avec Abbon, qu'il vit maffacrer fous fes yeux.
Voyant fon fang couler avec abondance, il devint pâle & trem-
blant {d) ; mais Abbon confervant au contraire la fércnité fur
fon vifage , lui dit Que fcriez-vous donc vous étiez blciïé vous-
: *^\

même? Aimoin revint à Fleuri où il s'occupa de plufîeurs ou-


vrages très-utiles pour la poftérité. On met fa mort vers l'an
ICO S {h),
t Ses Ecrits. XII. L'Abbé Abbon voulant exercer les talens d'Aimoin ,
Hiiloire lies
lui ordonna de réduire en un corps d'Hiftoire tout ce qu'on
Franijois.
trouve dans divers Ecrivains touchant la Nation des Francs &
les Rois qui les ont gouvernés ; & de mettre le tout en une la-
tinité plus pure & en un ftyle plus châtié, que dans ces divers
Hiftoricns. Aimoin obéit; & profitant de ce que Jules Céfar,
Pline & Orofe avoicnt écrit fur cette matière, il entreprit l'Hiftoi-
re des Francs depuis leur origine jufqu'au règne de Pépin le Bref
père de Charlcmagne. Il divila l'ouvrage en quatre livres traita ;

dans le premier, de cinq Rois de la Nation; de fix dans le fé-


cond ; de fept dans le troifiéme ; de huit & plus dans le qua-
trième. Pour éviter la confufion que la reffemblancc des noms
avoit jettée dans rHifloire,il mit la généalogie des Rois dans
un plus grand jour. Enfin il fit précéder fon Hilloire d'une No-
tice de la Germanie & des Gaules , où s'étoicnt pafles les évé-
ncmens dont il devoit rendre compte. Tel cft le plan de cet
Ouvrage d'Aimoin. Quoiqu'il ne difericn dans fa Préface, de
faint Grégoire de Tours , ni de Frédegairc , ni des autres Con-
tinuateurs de l'Hiftoire des François , il fut obligé de les coi>

(j) Aimoin. dt Miracrilis S. BentHiili (a] ArMOiN. AHon, vita, n. 10. p, f«,
lib. i.'cap. 18. tom. 8. Ailor.
(i.)'Yi\\THiu.CLronic,liirfaug, tom, i. {b} Maeilion./»*. 53. Annal, wm, 11.
(u^. lU. fag. 104.
MOINE DE FLEURI. C h. III.' 6i
fulter , &
d'en tirer ce qu'il avoit à dire pour remplir fon àei-
fein. C'ctoient les feules fources où il pouvoir puilcr ; il y a &
puifé en effet. Soit qu'il en ait copie les fautes , foit qu'il en ait
fait de nouvelles , il lui eft arrive ce qu'il avoit prévu (c) , que
fon ouvrage trouveroit des Ccnfeurs &
des Critiques , qui le
rendroient même rcfponfable des fautes des Copiftes. Palquier
dans fes recherches de la France (d) , le Père le Cointe dans
fes Annales; Pierre Pithou dans fes Mémoires des Comtes de
Champagne & de Brie; & M. l'Abbé Lcbeuf dans fesDiffer-
tations ne l'ont point épargné.
XXIII. Dans le manufcrit de Fleuri , Aimoin finit le quatric- Editionç Je ,

me Livre de fon Hiftoirc au quarante-unième Chapitre indu- ""^ Hiiloire.


fivement ; ce qui ne l'a conduit que jufqu'à l'an <^54 , au lieu que
fuivant le deffein d' Aimoin , elle dcvoit aller jufqu'au règne
de Pépin le Bref, qui ne mourut qu'en y6S , après avoir été fa- --

cré Roi en 7 5 2 Ce quatrième Livre eft beaucoup plus ample dans


.

le manufcrit de faint Germain , & contient 117 Chapitres, qui


renferment THiftoire de Charlemagne , qu' Aimoin ne s'étoit
point propoice. Il cfl donc villblc que cette partie d'Hiftoire
eft d'une autre main , de même que le cinquième Livre ,.qui don-
ne la fuite des événemens jufqu'en 11^5. C'cft fur ce Manuf-
crit que fut faite la première édition de fHiftoire d'Aimoin,
à Paris en 1514, chez Badius,fol. Les fautes dont cette édi-
tion étoit remplie , jufqu'au nom d'Aimoin qui y efl: appelle j4n-
nonius , engagèrent Jean Nicot à en donner une plus correde.
Quoique le Privilège ioit de l'an 15 57, elle ne parut qu'en i')6'j^
à Paris , chez André Wcchel , w8" Wechel la dédia à Nicot
:

lui-même , dont le nom ne paroît qu'à la tête de cette Epître.


Dom Jacques du Breul Moine de faint Germain en fit une nou-
velle édition qui fut mife fous preffe , à Paris, chez Ambroife
& Jérôme. Drouart, avec quelques Ecrits d'Aimoin Moine de
faint Germain, la Dcfcription du Siège de Paris par Abbon
,
& la Chronique deCafTin. L'impreflîon deTHiftoire des Francs
porte dans le Frontifpice l'an 1^03 ; celle de la Defcription du
Siège de Paris, i<^02, & celle delà Chronique de Caffin 1(^03,
ce qui donne lieu de croire qu'il y a faute dans la première da-
te, & qu'il faut lire 1602 dans cette édition comme dans celle
de Nicot. L'Hifloirc d'Aimoin efl: compofée de cinq Livres :

(c)AlMOïri.in Fpifl.nroicupatoria. i ai ann.6^if. n. i^. 27. Lebeuf , Dj//^£>-r.


(rf^PASQU.lïV. 5, f. 17.18, Le Cointe, 1 tom. i.f. 16. 17.^4. 340.341.348. 3J0.
,

^4 A I MO I N
iJ n'y en a que quatre dans rédition de Freherus à Hanaw en
1613 , &dans celle d'André du Chcine, à Paris en 1641 , à
la tête du troifiéme volume de fon recueil mais le quatrième
:

Livre efl: augmenté d'un Chapitre qui ne fe lit point dans le


manufcrit de Fleuri. Ce Chapitre qui fait le quarante-deuxiè-
me, traite delà fondation du Monaflere de Fleuri, & du tranf-
port qui y fut fait des Reliques de faint Benoît fous l'Abbé
Mummolus. Il eflfuivi de l'Hifloire des cette Tranflationmife
envers héroïques par Aimoin. C'cfl: fur cette édition que l'on
a réimprimé l'Hifloire des Francs dans le nouveau Recueil des
Hifloriens de France , à Paris en 1742. Dom Martin Bouquet
qui en efl l'Editeur , a pris foin de marquer en marge les en-
droits d'où Aimoin a tiré ce qu'il dit des Rois & de la Nation
des F'rancs.
Hiftoite de XIV. On trouve dans la même édition le Poème d'Aimoin
Scîiquî" ^^^ laTranllation des Reliques de faint Benoît. Dom Mabillon
de o.int Be-l'a fait aulTi imprimer dans le fécond Tome des A£tes (e): mais
noie.
ce Poème , comme il le remarque , ne contient que ce que le
JVloine Adelbert avoit dit en proie lur le même fujet. Aimoin a
fait encore un Diicours en l'honneur de faint Benoît où il rap-
porte ce qu'en ont dit plufieurs Ecrivains , afin que ceux qui
n'avoient pas leurs écrits fçuflcnt du moins ce que l'on y trou-
voit à la louange de ce Patriarche. Ce Difcours a été imprimé
dans la Bibliothèque de Fleuri , à Lyon en 1^05 , par le Père
du Bois d'où il efl paffé dans la Vie de faint Benoît imprimée
;

en grec & en latin, à Venifeen 1723 , 4". On le trouve aufli


dans le Recueil des Poètes Chrétiens , à la fuite des Poéfies de
JMarc de Mont CafTin, à Leipfic en 16S6.
XV. Adalbert ou Adrevald & Adelere l'un & l'autre Moi-
nes de Fleuri , avoient donné la fuite des miracles opérés en
ce Monaflere depuis que les Reliques de iaint Benoît y avoient
été tranfportées. Aimoin en continua h relation , aux inftan-
ces de fon Abbé & de fa Communauté. Cet Abbé étoit Gau-
zelin , & c'eft à lui qu'Aimoin dédia l'ouvrage , qui eft divifé
en deux Livres. L'inicription porte qu'il les écrivit en 1005.
On y trouve quelques traits intéreffans pour l'Hifloire de Fran-
ce. Les miracles qu'il raconte furent opérés depuis le règne du
Roi Eudes , jufqu'au règne de Robert le pieux. Mais il ne fc

borne
MOINE DE FLEURI. Ch. HT. ^5
^ome pas aux miracles arrives à Fleuri. Il en rapporte d'ail-
leurs ; ce qu'il fait avec choix , reconnoiflant qu'il en avoit vo-'
loncairement pafles plufieurs fous filencc. Ces deux Livres fu-
ient d'abord imprimes dans la Bibliothèque de Fleuri , à Lyon
en KÎ05 (/) , puis dans le Recueil des Bollandilles au 21 de
Mars (g) ; enfuite dans le fixicme Tome des Actes de l'Ordre
de faint Benoit (h).
X VL Quelque tcms après la mort de faint Abbon Abbé de Vie de faizit

Fleuri, Hervé Trcforier de faint Martin de Tours, pria Aimoin ^ "'

d'en écrire la Vie. Ils avoient été l'un &


l'autre diiciples de ce
faint Abbé; mais Aimoin ayant témoin oculaire de ce qui
été
s'étoit pailé dans fon dernier voyage à la Réole ,& du genre -de
famort,étoit plus en état que pcrfonne de la raconter. Il Ht
donc ce qu'Hervé demandoit, & lui dédia l'ouvrage par une Let-
ri'e qu'il a mife à. la tcte. Suit une Préface dans laquelle il prou-

ve que fa mort a été un véritable martyre; puifqu'il l'a foufferte


pour la vérité , qui cfl: Jefus-Chrifl même. Il eu vrai qu'il n'a
pas répandu fon lang en détournant les peuples du culte des ido-
les; mais c'a été en travaillant à les délivrer du joug de la &
fervitude des vices: ce qui efl: plus confidérable , puifque ceux
qui fontafiujettis à cet eiclavagc , font convaincus defervirnon
Dieu , mais les Démons. Que fi Ton objeéte qu'il n'a pas été
tourmenté long-tcms, cela nepcutponcr préjudice à fa gloire,
y ayant plufieurs Martyrs qui ont mérité le royaume du Ciel
par la feule fentcnce de mort prononcée contre eux , quoiqu'ils
n'euflentété baptifés que dans leur propre fang. Peut-être di-
ra-t-on encore qu'Abbon n'avoir fiit aucun miracle durant fa
vie. Qu'on life les Vies des exccllcns Dotteurs faint Jérôme &
faint Auguftin on n'y trouvera point de fignes miraculeux , que
:

font quelquefois même les méchans ; mais une grande pureté


de vie , & l'éloquence d'une dodrine falutaire. La vie de faine
Abbon par Aimoin fe dans la Bibliothèque de Fleuri (i) , &
dans le huitième Tome des Aftcs de l'Ordre de faint Benoît (k).
Du Chefne en a inféré une bonne partie dans le quatrième To-
me de fon Recueil (/) , à. caufc de la liail'on de certains événc-
rncns avec l'Hiftoire de France.
XVII. Aimoin cite dans cette Vie un Livre où il avoit fait Y'^''^^^
bcs de leun. r
1 I 11 L
I
I I

(f) P-'i' -9- (0 P«îf 193.


I
jt?)
Pa<^ 501. ((•) Pfliff
j JJ.

Tom e XX, I
^6 ETHELWERD,
Cw ouvri^ge ccUc dcs Abbés de Fleuri prcdéceffeurs de faint Abbon. Cer
eft perdu. ouvragc cft pcrdu. Il en faut dire autant du Recueil des Mira-
cles opérés en Neullrie par l'interceflïon de faint Benoît ; fi tou-
tefois Aimoin exécuta le projet qu'il avoit formé de ce R.e-
cueil {in), Ccft tout ce que nous fçavons des Ouvrages d' Ai-
moin de Fleuri , que l'on a fouvent confondu pour l'attribution
de certains ouvrages , avec Aimoin Moine de faint Germain
des Prez à Paris. Ils font écrits avec plus de pureté & de po-
liteflc , qu'on n'avoit coutume dans le dixième liécle; mais orr
lui reproche de n'avoir pas apporté affez de gravité dans le ré-

cit des circonftanccs de la mort de faint Abbon ( o ) , & de


n'avoir pas aflez d'horreur des féditieux qui l'avoientoccaiionné.

CHAPITRE IV.
Eîheîwerd Patrice ejr Conju' y Hippolyte le Thebaîn , Eutyf
chius d'Alexandrie y Chifloduie , Nicon ; Moyje Barcephay
d^ quelques autres Ecrivains.

Eiheiwerd. I. T ES tîtres de Patrice & de Conful ,c'cfl-à-dire, deCom-


Jl> te
,
que prend Ethelvï crd dans les Ecrits (a), marquent
bien la noblcffe de fon extraction , quand il ne nous l'appren-
droit pas d'ailleurs. Car il dit (JA qu'il avoit pour quadris-aycut
EthcredeRoi dcCanten 8Y7 , aont le Fcre nomme Athiilf (c)
dcfcendoit par plufieurs Rois , de Cerdic , l'un des chefs des Sa-
xons qui envahirent la Grande-Bretagne dans le cinquième fié-
cle, & qui fe mit le premier en polfenicn de la partie occiden-
tale de cette Iflc. Mathildecoulined'Ethclwerd defcendoit éga-
lement d'Athulf par Aelfred fon quadris-ayeul, frère & fucceffeur
du Roi Ethercde {d). Il étoit beloin d'entrer dans ce détail gé-
néalogique , pour faire connoître le dcffein d'Ethelwerd dans
fa Chronique. Il ne l'entreprit que pour avoir lieu de mettre fa
généalogie dans fon jour. Sacoulîne Mathilde l'en avoit prié.

(m) AlMOTN. f'J î/iVi jlit. ».


i*,f. 47. I
i"')'!'! Prolf^o, lik. t.Cbronit.f.Siti
(«) Aimoin. de Mirai. S. Btnid. iib. i. j (t) lib, 4. Chronic.p. 84?»
M/». 11./'. 400. {c)Lil>. i.po£.i^ï.(^lit.l.f»l.»ii*
I
(o)MABULt)N./rt.jfi.iJ»«i«/,)». 4.^,2», I {J)Lil>, 4. f. 844.
.

PATRICE ET CONSUL. Ch. IV. ^7


&c'eftà elle qu'il en fait Icloge en la qua-
dédia Touvrage. Il

lifiant trcs-cloqucnte , & vraie i'ervante de Jeilis-Chrift (e).


II. Cette Chronique fo trouve dans le Recueil des Hiftoriens ,,pS''7""^"!f
'^^^" •
Anglois, de l'édition d'Henri Savilius(/), à Londres en 155)5,
& à Francfort en 1601. Quoique très-abrégée, elle eft diviléc
en quatre Livres , dont chacun a fon Prologue. Dans le premier
il commence à la création du monde, & dit que le premier jour

Dieu forma la lumière, 8& créa en même tems les Anges (g).
Il parcourt avec une grande rapidité les années du peuple de

Dieu julqu'à la naillance de Jelus-Chrift, qu'il met en l'année


du monde 5495 : & l'année de la mort à la trentc-troiîiéme de
fon âge. Il rapporte à la même année le martyre de faint Etienne
& la converfion deiaint Paul. Deux ans après faint Pierre éta-
blit fon Siège à Antiochc ; d'où il paffa à Rome la treizième an-
née de la PaiTion du Sauveur , c'efl-à-dire , neuf ans après avoir
fondé l'Eglife d'Antioche. Il fouffritle martyre avec faint Paul
en la foixante-neuviéme de l'Ere vulgaire. Dans le cours de
cette année faint Jean écrivit fon Apocalypfe dans l'Ille de Pat-
mos , &
1 5 ans après il mourut en paix , fon corps fut inhu- &
mé à 16 flades de la ville d'Ephefe. Ethelwerd ne faifoit pas
attention que faint Jean avoit été relégué fur la fin du règne
de Domitien en cf6 , non pas en 6c).&
III. Le Pape Elcuthere étant monté fur la Chaire de faine
Pierre en 15^ (h), envoya des Lettres à Lucius Roi de la
Grande-Bretagne pour Texhorter à s'inftruire de la Religion
Chrétienne, &
à recevoir le Baptême. Le vénérable Bede («)
dit au contraire que ce fut Lucius qui écrivit au Pape Eleuthere
pour lui demander des Miflionnaires. Lucius fucceda Scvere, A
qui la 23e année de fon règne fut élevé à l'Empire Romain. Il
fit conftruire une muraille dans l'Ifle , d'une mer à l'autre avec

un foffé , des tours &


autres défcnfes pour mettre les Bretons
à couvert d'infulrede la part des Barbares. Le fécond Livre de
la Chronique traite de l'établilfement de l'Evangile en Angle-
terre par le miniftere du Pape faint Grégoire de faint Augu- &
ftin [k). Ethehverd dit que de fon tems il fe faifoit encore des
miracles au tombeau de cet Apôtre des Anglois. Il parle de la

(0 Prolog lit. l.pag.^ix.

{f ) EJii.Framof an. 1 6.0 1 . pttg. 8 ; i («) BebA. HifloT. lih. I . eaf, 4. V. tom, 8.
(g) Primo die Deus in lucis apparitlone
condidit Angeles. Lit. i , Chron, />. 8 3 4.
£8 EtH ï: L >57 ER I>,
propagatîon delà Foi dans la partie occidentale de la Grande-
Bretagne , par l'Evêquc Birinus (/) ; des Ecrits du bienheureux
Evêque Adclme , & d'un prodige arrivé en 77 3. La Lune parut
couverte de gouttes de fang. On vit en l'air , après le coucher
du Soleil , le ligne de la Croix du Seigneur , & ily eut dans le
même tems des ferpens monftrueux dans la partie méridionale
de l'Angleterre (w).
IV. Êthelwerd fait dans le troificme Livre la dcfcription de
l'état heureux où fe trouvoient les Anglois fous le Roi Berhtric
defccndant deCerdic («). Mais cette félicité fur troublée par
l'arrivée des Danois , c'efl-à-dire , des Nortmans ,324 ans après
la première delccnte des Saxons en Angleterre. Il parle de la
cruauté des Pvomains envers le Pape Léon à qui ils crevèrent
les yeux, &
coupèrent la langue, & de fa guérifon miraculeu-
fe ; du grand Concile de Clowesho , en 854 ; & du facre d'Ael-
fred à Rome par Léon IV. Il remarque que le Pape en vertu
de l'ondion royale qu'il lui avoit conférée , le nomma fon fils ;
de la même manière , dit-il , qu'en recevant les enfans au Bap-
tême de deflbus la main de TÉvêque , nous avons coutume de
leur donner leur nom. Aihulf père d'Aclfred , fit lui-même le
voyage de Rome avec un magnifique cortège , & y demeura
douze mois.
V. Le quatrième Livre commence par le partage que l'on fir
des Etats de ce Prince après fa mort (0). Aclfred réunit enfuite
en fa perfonne toute k puiffancc de la Grande-Bretagne. Sous
fon règne les Barbares détrônèrent le Roi Burehede,&: Ic-chaf—
ferent hors de l'Océan ; mais ce Prince mettant la confiance erï
Jcfus-Chrifl,alla en pèlerinage à Rome ^ où il mourut. Son corps
y repofc dans l'églife de la iainte Vierge, où les Anglois ont
une école fous la protection de cette iainte Mère de Dieu (p) Le
Pape Marin déchargea les Anglois du tribut qu'ils dévoient
payer à cette Ecole. Ethelwerd foit un grand éloge du Roi
Aelfred, de fa juftice , de fon éloquence, de fon Içavoir. Il
étoit (i bien inflruit des divines Ecritures, qu'il en traduilit en fa
langue plufieurs Livres , d'un ftyle fi beau , qu'il ne cédoit en
rien aux Livres deBoéce pour le patétique. En ^08 , L'Arche-
vêque Plegmond porta à Rome les aumônes du Roi Edouard.

(/) Pag) 837, f (•) P-i'f S41.

(fj) Piigt 840. L


PATRICE ET CONSUL.Ch. IV. 69
& du peuple. Elfgyme femme du Roi Cadmund mourut en
548 en odeur de laintecc. On l'a mife depuis au nombre des
Saints, & il le faifoic beaucoup de miracles à fon tombeau. La
Chronique d^Ethclwcrd finit à la quatrième annc^; d'Eadgard
fils d'Eadmund & petit-fils d'Aelfred dont Mathildc tiroit l'on

origine ; ce qui revient à l'an ^61 ou p^^.


VI. On ne peut donc mettre la mort d'Ethelwerd en 920 , Jugement

comme a fait Balœus, ni en 105)0,. avec Pitfeus. Il vaut mieux qued'Ethel-'


la rapporter à la fin du dixième fiécle , ou au commencement werd.
de l'onzième. Il nous a laiflé dans la Chronique des marques
de fa pieté , & fur-tout de ion refpcl envers le faint Siège. II
n'eft point ailé de le fuivre dans fcs époques , parce qu'il ne les
fixe que rarement ; & qu'il met fouvent fous la mcmc , des évé-
nemens de différens tems. Son ftyle efl dur,inégal & embarralTé.
On voit toutefois qu'il avoir envie de le rendre harmonieux & ;

que pour lui donner plus de graces,ilempruntoit quelquefois les


exprclTions des anciens Auteurs.
VII. Quelques-uns rapportent à la fin du dixième fiécle , ou leThéb^n'.^
au commencement de l'onzième, la Chronique d'Hyppolyte de
Thebes ou le Thébain ; d'autres la mettent plus tard ; & il n'y
a rien dans cet ouvrage qui puiiTe en fixer absolument l'époque.
Entre les Ecrivains qui y font cités (^) , Mètaphrafle eft le
plus récent. Or Métaphrafte écrivoit vers le milieu du dixième
îiécle. On trouve un fragment de cette Chronique dans un ma-
nufcrit grec qu'on dit être du règne d'Alexis Comnene qui gou-
vernoit l'Empire en loSi. Ainli on ne peut le mettre plus tard.
Elle a été publiée dans les anciennes Leçons de Canifius avec
divers fragmens (r) , déjà donnés au public par M. Lambé-
eius , par M. Schelftrate , & par M. Cotelier. Mais on remar-
que des différences affez confidérables , entre le texte de la Chro-
nique imprimée par les foins de Canifius , & ces fragmens. Il cft
dit dans Canifius que Jefus-Chrifl , après avoir inftruit les dif-
eiples , leur donna la tonfure dans la maifon de faint Jean , &
les admit à fon Clergé. M. Schelftrate nelifoit rien defembla-
ble dans k manufcrit du Vatican fur lequel il a fait imprimer
ce qu'il avoit trouvé de cette Chronique. Ce qu'on lit dans Ca-
nifius de la généalogie de faint Jean , du mariage de faint Jo-
feph & de les enfans , ne fe rencontre pas avec ce qui en efl

(y) HiPpoLYT. in Chranic.f. jcf.tom. j. 1 (r) EJityan, i/îj,.


lidion, Çauijti, ^
70 EUTYCHIUS,
dit dans le manufcric de la Bibliothèque du Roi dont s'efl fervî
M. Cotelier. Toutes ces différences iont marquées dans 1 edi-
dition de M. Bafnage le jugement qu'il porte de l'ouvrage
:

n'eft point avantageux ; mais il y avoit peu de bien à en dire.


L'Auteur n'eil point exatt dans fes lupputations il avance
:

quantité de faits , faux ou incertains. Nous en avons déjà re-


levé quelques-uns (s). Nous ajouterons ici qu'il n'efc pas fondé
à mettre deux ans d'intervalle entre la naiifance de Jefus-Chrift
& l'adoration des Mages ; à donner à la iainte Vierge cinquante-
neuf ans de vie fur la terre , dont elle en avoit pafle 14 dans
le temple , & quatre mois dans la maifon de Joleph, où elle fut
faluée de l'Ange, & conçut. Il dit qu'elle enfanta à l'âge de 15
ans, le 25 de Décembre ; qu'elle vécut avec Jelus-Chriil fon
fils
5 3
ans ; que depuis fon Aicenfion dans le Ciel , elle demeura
onze ans dans la maifon de laint Jean à Ephefc. Hippolyte ne
dit point qu'elle y foit mcrtc ; mais il parle de fon Aflbmption
dans le ciel (r ) Il avoit commencé fa Chronique à la naiflance de
.

Jelus-Chrifl: , & continuée jufqu'au fiécle où il vivoit lui-même.


Nous ne l'avons pas entière. On le fait encore Auteur d'un
Traité intitulé , Des douze Apôtres , imprimé dans le fécond
Tome du Supplément du Père CombeHs ta la Bibliothèque des
Pères, à Paris en 1648. Cet Ecrivain entre dans le détail des
Provinces ou chaque Apôtre a prêché l'Evangile , & le lieu de
leur martyre & de leur mort. Il met l'exil de laint Jean fous
Domitien , & fa mort fous Trajan , à Ephefe. A quoi il ajoute
que quoique l'on eut cherché fes reliques , on n'avoit pu les dé-
couvrir. Il dit que faint Paul prêcha l'Evangile pendant trente-
cinq ans , tant en Judée qu'en Illyrie , en Italie & en Efpagne.
Le Traité des douze Apôtres ne fe trouve gueres cité que par
des Ecrivains pofléricurs au dixième (lécle : ce qui prouve qu'il
n'eft point de faint Hippolyte de Porto , qui ccrivoit dans le
troitlcme.
Eutychius V. Quoiqu'on ne trouve point Eutychius dans le Catalogue
Patriarche dcs Evêqucs d'Alexandrie que M. Renaudot a mis à la tête de
d- Alexandrie,
j'^jf^oire ^cs Patriarchcs de cette Ville ; cet Ecrivain ne laifle
pas de lui en donner le titre dans le corps de cette Hiftoire («),
Eutychius eft auffi appelle Patriarche des Orthodoxes d'Ale-
xandrie dans l'édition de fes Œuvres par Selden, à Londres en

(f) \'oytt.fm. i> pag. )5i, 1 (u) Hiftor, Patriiirch. AUxand.fag, S.


(0 /«^.8ji. 1
,

PATRIARCHE D'ALEXANDRIE. Ch.IV. 71


1642. Cet Editeur nous apprend dans fa Préface quEutychius
étoit né en Egypte vers Tan Sj6 ; que fon père le nommoit Pa-
trice , & lui Saïd en Egyptien , ou Eutychius en Grec , c'eft-à-
dire , heureux ; qu'il étoit habile dans la Médecine fpéculative
& pratique ; qu'après la mort de Chriflodule Patriarche d'A-
lexandrie, il fut choiii pour lui lucccdcr;& qu'il tint ce Siège
jufques vers l'an 5)40. Mais cette Chronologie ne peut s'accor-
der avec l'Hiftoire des Patriarches d'Alexandrie. Chriflodule
ne mourut que l'an 471 de l'Hcgirc (") , qui revient à l'an
1078 de Jefus-Chrift & il eut pour fuccelïeur , non Eutychius
:

mais Cyrille , qui eft compté pour le foixante-fepticmc Patriar-


che. Peut-être même qu'Eutychius Icroit tombé dans l'oubli,
fi Seldcn n'avoit été intércflc à l'en tirer , pour autorifer par
le témoignage de cet Auteur, la SededesPrcfbytcriens d'An-
gleterre. Aulfi s'cft-il borné à un (impie fragment des Annales
d'Eutychius, où il eft dit , félon la traduflion que Sclden en a
faite, que faint Marcl'Evangclifte, après avoir ordonné Hana-
nie Evcque d'Alexandrie , établit douze Prêtres pour demeurer
avec ce Patriarche ; qu'il leur donna le pouvoir d'en élire un
d'entre eux , lorf^ue le Siège feroit vacant ^ de lui impofcr les
mains 8c de le faire Patriarche.
VI. Ce fragment des Annales d'Eutychius , fut imprimé à FcrifsciTu-

Londrcs en 1642 en Arabe & en Latin avec de longs Com- '>''^'' '• ^"
mentaircs de Sclden. Mais en 1(^5^ Pocokius publia ces An-
nales entières en Araoe & en Latin , a Oxford en deux volu-
mes ?«-4". Cet Editeur convient c|u'elles font pleines de fautes,
êc même de fables; & il eft aile d'en donner des preuves. Il dit
qu'avant Démctrius onzième Patriarche d'Alexandrie , il n'y
avoir point d'Evcques en Egypte; que ce fut lui qui en ordon-
na le premier, & qu'il en ordonna trois. On s'accorde à mettre
la mort de Démétrius en 2 3 1 Les uns lui donnent 3 2 ans d'Epif-
.

cop^t; les autres 43. En prenant ce dernier fcntiment, il auroit


été fait Patriarche en 188. Or on voit par une Lettre de l'Km-
pereur Hadrien qui régna depuis l'an 117 julqu'en 138 (^v)
qu'il y avoir dès-lors en Egypte plutieurs Chrétiens qui portoienc
le nom d'Evêques. 11 y en avoit donc long-tcms a 'anr Démé-
trius. Eutychius n'eft pas plus exail quand il fliit Origcne Evc-
<^uc de Mangabe ; & le met fous le règne de l'Empereur Jufti-

ij) Veçiscis in viù SatuTttini T/ranni, \


72 E U T Y C H S, I U
nien. Orîgene ne fut jamais Evcque. mourut vers l'an 253 f, II

6c Juftinien ne régna qu'en 527. Êutychius cite une Lettre de


Démétrius à Gabius Evcque de Jerufalem. Cette Eglile n'a pas
eu d'Evêque de ce nom ; il vouloit dire apparemment Gajanus.
Mais Gajanus n'étoit point contemporain de Démétrius. Euty-
chius raconte (z) que fous le règne de l'Empereur Maurice un
Moine nommé Maron infeclé de l'erreur des Monothélites , la
comm.uniqua aux habitans de la Ville d'Apamée , qui par ref-
pe«St pour lui, bâtirent un Monallere fous fon nom. Mais il eft
certain que Maron auquel les Apaméens bâtirent un Monade»
re , ctoit un faint homme (a) , & qu'il vivoit près de deux fic-
elés avant le règne de Maurice. Ce qu'il dit de Jaques diici-
ple de Sévère (b) , & chef des Jaccbites , n'cfl: pas même vrai-
icmblable. Quel fond peut-on donc faire fur le témoignage d'un
écrivain de ce caradere , fur-tout quand il s'agit de conftater
un fait , qu'il dit arrivé du tems de faint Marc fEvangélifle ?
Sontcmoi- VII. Il y a plus; c'cft qu'Eutychius ne dit pas qu'il étoit au
gnage fur Té-
pouvoir dcs douzc Prctrcs de l'Eglife d'Alexandrie , d'impo-
trinrche d'A- Icr Ics mains ou d'ordonner le
Patriarche de cette Ville. Le
lexaadrie.. terme de conflituere , à qui Selden donne deux fens différens
dans la même phrafc,en le rapportant à l'élcdion & à l'ordina-
tion , n'en a qu'un , qui fc rapporte à l'élctlion enforte que ;

tout ce qu'il veut dire , cfl; que faint Marc établit un Collège
de douze Prêtres dans lefquels , & par lefquels le nouveau Pa-
triarche devoir être élu. Quant à ce qu'ajoute Eutychius , que
ce Décret de l'aint Marc fut en vigueur jufqu'auPatriarchat d'A-
lexandre l'un des Evêqucs du Concile de JNicée. Si Alexandre
eût ôté à CCS douze Prêtres le pouvoir de choilir leur Patriar-
che , n'en auroicnt-ils pas témoigné leur mécontentement dans
ce tems de trouble & n'auroient-ils pas pris la plupart le parti
;

d'Arius contre leur Evêquc f Saint Athanafe fut tire d'entre les
Diacres pour fuccéder à Alexandre. Voit-on que les Ariens à
qui les calomnies ne coûtoient rien , quand il s'agiflbit d'accu-
ler Athanafe, & qui ne dévoient pas faire beaucoup de cas du
Décret d'Alexandre , lui aient reproché d'avoir été élu au pré-
judice des douze Prêtres d'Alexandrie, & contre la règle éta-
blie par laint Marc ? Quoique M. l'Abbé Fleuri convienne que
l'Abrégé de l'Hiftoire univerfellc d'Eutychius ne foit pas exa-

(l) F.L-Tyi-mi'S , /iw. i. Annal. pai^, 191. 1 paj- 4pî?.


(/»] AsstMAM yBibtiot. Oiient. lera. l.i Q:>)ÏLvT\cH.Tom. l. A.'inat. pa«. i4f,

61e,
,

PATRIARCHE D'ALËXANDRÎE. Ch.TV. 75


ôe , il nepas de la regarder comme précicufc , à caufc de
laiflc
la fuite des Patriarches Mclquites d'Alexandrie.
Autr^çEcriw
VIII. On attribue quelques autres ouvrages à Eutychius (c);
içavoir un Traite compoie de trois Dilcours , ou il expliquoit d'Eutychius
ce que que le jeûne des Chrétiens; leur Pâque, & leurs Fc-
c'efl d'Alexandrie.

tes , &donnoit une notice des Califes &


des Patriarches ; un
Livre concernant la Sicile depuis que les Sarrafins s'en ctoicnc
emparés; une difpute entre les Hérétiques &
les Catholiques,
où il établiflbit une doctrine contraire à Terreur des Jacobites
& quelques Opufcules de Médecine. Tous ces Traités n'ont
pas encore été mis fous la preffe.
IX. On n'a pas imprimé non plus les Statuts que Chriftçdulc Chrlftoduie;

Patriarche d'Alexandrie , prédéccffeur immédiat d'Eutychius , d^Akxandrie.


félon Selden, fit aufTitôt après fon ordination ; mais M. Renau- Ses Statuts.

dot en a donné des extraits dans fon Hifloirc des Patriarches


d'Alexandrie (d). Ce ne font que des réglemens de difcipline.
Il y efl: dit que perfonne n'entrera dans l'églife , que déchaufle
& la tête découverte ; que ceux qui recevront l'Euchariftic , ne
mangeront point de pain ordinaire, auffitôt après, mais feule-
ment après la dernière Oraifon de la McfTe ; qu'ils preridront
garde de ne point laifler tomber de l'eau qu'on leur donne à
boire après la Communion , parce qu'elle efl en quelque ma-
nière fandifîéc par l'attouchement de l'Euchariflie; que les Fi-
dèles jeûneront le Carême & pafferont ce tems-là dans la conti-
nence , & dans des fcntimens d'humilité; qu'on ne célébrera point
de mariage en Carême ; que le jour du Jeudi-Saint on ne don-
nera point la paix à la MefTcjni le jour du Samedi - faint ;
qu'on jeûnera tous les Mercredis & Vendredis de l'année , fi ce
n'eft que le jour de Noël tombe en l'un ou l'autre de ces deux
jours ; que le Baptême ne fera adminiflré aux enfans qu'à
jeun hors le cas de nécefTité ; que le Prêtre qui ne fe fera pas
trouvé au commencement de la Liturgie , ne pourra monter à
l'autel , ni rompre, pas même toucher de fa main le faint Corps
de Jefus-Chrili:.
X. Nicon furnommé Métanoëne ^ c'efl-à-dire , faites pèni- Suint Ni'co»

tence naquit dans la Province du Pont a.^Y'QWécPolèmomaqiie.


,
^^l^^^^^^'^'^^
Après avoir paffé douze ans dans le Monaflere de Pierre-d'Or

(f)HoTTiNr,FR , Eibliot. Oriental, c. t. (</)RenaudOT , H»/?. Patriarcb. AlixariJ,


j

fag. 71.^4. i5 i^-fi. EciUf.fxcul, io./>. J7, [oag. 4Z1.


Tome XX. K
, ,

^4 SAINTNICON,
llir les du Pont & de la Paphiagonic , dans les exercices
confins
rigoureux de la pénitence , il alla, du conlcntement de Ion Abbé,
la prêcher aux autres ; premièrement en Arménie , cnfuite dans
rille de Candie , puis dans la Grèce. Dieu bénit les travaux
par la converfion d'un grand nombre de perfonnes. On mec
fa mort fur la fin du dixième fiéclej il efl: honoré comme Saint &
chez les Grecs &
les Latins , le ^6 de Novembre. Sa vie fut
écrite en grec en 1150 par un Abbé du Monaflere qui porte
l'on nom dans le Péloponefe. Le Père Sirmond la traduifit en
latin , mais on ne Ta point imprimée dans le Recueil de fes ou-
vrages \ & on n'en fçait que ce que Baronius en a mis dans le
dixième tome de fes Annales. C'eft de-là que Surius a tiré la
vie de Nicon pour la donner au 2^ de Novembre.
Ses Ecrits. XL
II refte de ce Saint quelques écrits dont le plus connu efl
Traitédes er-
^^ Traité des erreurs des Arméniens , autrement , de la Reli-
reurs des Ar- , / .
g-\ , r j ^

gion impic des Arméniens [e). Un le trouve a la iuite des ou-


. . . . -^ •
. i \

ménians.
vrages deBalfamon;dans les notes de Bevercgius fur le 5^^ Ca-
non du Concile de Trullo ; dans les Bibliothèques des Pères ,
mais feulement en latin de la traduction de Gentien Hervet. 11
efl: en grec & en latin dans les notes de M. Cotelier fur le 24^

Chapitre du fécond Livre des Conflitutions Apofloliques. Quoi-


que les Arméniens crufll?ntlcs trois perfonnes divines paffibles,
ils n'ofoient foutenir hautement cette erreur: mais ils la décla-

foicnt affez en joignant trois croix , qu'ils attachoicnt à un bois


comme à un joug, & nommant le tout Sainte Trinité. Ils ajou-
toient au Trilagion , ^tii êtes crucifié four nous ; enfci—
gnoicnt que le Saint-Efprit eft moindre que le Père Se le Fils ;
& que les deux natures font confondues en Jefus-Chrift. Ils fe
fervoicnt de pain azime dans la confécration des Myftcres , &
ne mcttoient point d'eau dans le Calice. Nicon ajoute qu'ils ne
fc conformoient point aux ulages del'Eglifc dans la célébration
des Fêtes de Noël , de l'Epiphanie , de l'Annonciation & de
la Circoncifion; que contrairement aux Décrets de faint Gré-
goire le Grand , l'Evcque d'Arménie fe fait ordonner par un
autre que par l'Archevêque de Céiarée en Cappadoce; qu'ils
r.«f,ii.44. ont retranché de l'Evangile de faint Luc , ces paroles Il fui :'

vint une fueur , comme des gouttes de [ang qui découloient jiifquà
}m,i. 8. I. terre ; Se de celui de faint Jean , l'Hifloiredelafemmefuipriie

(fj COTEilR, Pmrci Apifiotici', tom, l, fag. x\j


s O L I T A I R E. C H. I V. 75
en adukcrc. Qu'ils mangent de œufs , du fromage & du beurre
les Samedis & Dimanches de Carême ; & de la chair pendant
la femainc des laitages ; qu'au contraire ils préviennent le Ca-
rcme d'une femainc pendant laquelle ils ne vivent que de pain
& d'eau ; qu'ils célèbrent les Myflercs, la tête couverte ; qu'ils
ne rendent aucun culte aux images ni à la Croix , à moins qu'ils
ne l'ayent percée d'un clou & baptiiéc j qu'ils obferventles cé-
rémonies légales, quoiqu'abolies ; enfin qu'ils font dans les er-
reurs des Monothélites.
XII. Ce Traité ell précédé dans Balfamon 6c dansIaBiblio- LettredeN;-
théque des Pères (/") , d'une Lettre de Niconà un Moine cn-^°''„,^un,(fal"
fermé , intitulée: De fE.xcommunication injufh. Voici comrne elle tion.
commence: « Sachez , mon père, que les divines Ecritures &
les divins Canons définilTent que les punitions injuftes que l'en
nous impoie , ne nous lient point devant Dieu , quoique ce
foit un Pontife qui les impoie à plus forte raifon ne nous lient-^
:

elles point quand c'cft un Minillre inférieur, comme le dit faint


Denys. S'il arnvc donc que le Pafteur par une Sentence incon-
fidérée, & par un mouvement de paffion , féparc quelqu'un du
nombre des F idélcs , non-feulement cette excommunication ne
l'atteint pas , mais elle retombe fur le Miniflre qui l'a portée,
ainfi querles faints Conciles le déclarent. Il n'y a que les peines
impofées fuivant les divins Canons &
les Loix , qui lient ; & non
celles qui n'ont pour motif que la volonté propre du Miniflre.
Les Evêques ont la puiffance de punir , puifqu'ils ont reçu de
Dieu le droit de. lier & de délier mais lî un Evêque en ufe con-
:

tre l'intention de Dieu , la peine qu'il inflige devient injufte ,


& conléciuemment invalide &
fans effet ; car Dieu ne fuit &
n'autoriic point la pafTion de ion Minifti'e. Prenez donc garde,
o Evêque , à ce que vous faites , penfez que vous rendrez &
compte en haut de ce que vous liez ici-bas. Vous ne ferez pas
le maître de ne pas rendre raifon de votre conduite , s'il vous
arrive de lier quelqu'un injuftement. Ce fera à vous de faire
voir en préfence des Anges, que ce n'efl: pas par paillon ou par
haine, ou par négligence que vous avez lié votre frère. Dieu
prendra la défenie de celui qui aura été lié injudemcnt, le &
vengera. » Nicon allègue l'autorité de faint Nicolas Patriarche
de .Confia ntinople ; apparemment de Nicolas le Myftique, qui

(/) Tom. zj[. Btl/liiji. Fat. p.ig, 3 17.


Kij
7^ NICON, SOLITAIRE. Ch. IV.
mourut Tan ^25. M. Lambécius (g) cite une Lettre de Nicon
dans laquelle il cfl: ïak mention d'un autre Nicolas qui fut Pa-
triarche de la même Ville depuis l'an 1084 jurqu'en 1 1 1 1 , mais
elle peut être d'un Nicon plus récent , Moine de Raïthe en Pa-
leftine, qui ccrivoit lur la fin de l'onzième iiécle , dor.tles &
ouvrages n'ont pas encore été rendus publics {h^.
d^Nicon!"'''
^^1^- ^" "^^^ ^e ce nombre un Recueil de pailages de l'Ecri-
ture , des Pères , des Conciles &
des Loix Civiles fur l'obfer-
vation des Commandcmens de Dieu, divifé en ^3 Chapitres.
Mais M. Cotelier attribue un ouvrage à peu-près lemblable à
Nicon d'Arménie (i). A l'égard du Traité fur le jeûne de la
glorieufe Vierge Mère de Dieu , dont quek^ues-uns font Auteur
un Anaftafe Syrien qui vivoit en 10^4 , il pcnfe qu'il efl plutôt
de Nicon de Raïthe (k). Il remarque que dans le même manuf-
crit où l'on trouve le Traité de Nicon contre la Religion des
Arméniens , il y en a un fécond , qui contient la Formule de
leur réconciliation avec l'Eglifc , &
les erreurs aufquelles ils
doivent renoncer pour parvenir à cette réunion. M. Cotelier
l'a aufiTi donné en grec & en latin (/) , & il y a toute apparence

que c'efi: l'ouvrage du même Nicon , qui après avoir combattu


de vive voix les erreurs des Arméniens , leur aura prefcrit la
manière de rentrer dans le fein de l'Egliie Catholique. Après
une condamnation générale de l'héréfie des Arméniens , de
leurs mœurs, de leurs fêtes, de leurs jeûnes , de leurs affem-
blées , celui qui renonce à leur feélc , fait profelTion de croire
tous les articles du Symbole , en particulier deux natures en Je-
fus-Chrift , la divine qui eft impaîfible , l'humaine dans laquelle
feule il a fouffert ; de recevoir les fcpt premiers Conciles gêné-,
raux , & la do£lrine c^u'ils ont établie contre les hérétiques ; &
de fe conformer à l'ufage de l'Eglife Catholique dans la célébra-
tion des Myftcres , des Fêtes, du culte des Images, des ali- &
mens du Carême. Après cette profellion l'Archevêque pronon-
ce une oraifon fur celui qui fe convertit; cnfuire il lui fait l'on-
ftion du faint Chrême comme à ceux que l'on vient de baptifer.
Il récite fur lui une féconde prière , & l'admet à la Communion ,

en lui ordonnant de pafl'er les fept jours luivans fans manger


de viande & fans fe laver le vifage.

(^)Lambfcius, lib, 6. /).Tf. 51. li:! 441.


(h) Fabmcius , tom. 10. Bil/liot. Grxctt , J
Uid. pa^.
{k.) 4^12.
fag.iS^. I
(/) CoTFLtRius, 'ow. i.FatTum Afof^
(») Cor£i£R, Tpw. 3. monument, f, 43^. p'ig- 317. i""^»', a», iji'l'
MOYSE BAR-CEPHA. Ch. IV. >]j
XIV. Moyfc Bar-Ccpha , c'eft-à-dire de Pierre , cmbral- jvToyfe , fils
Bar-
fa de bonne heure la vie rcligieufe dans le Monaftcrc de Ser- Cet-lw.
giusfLir le Tigre. Il fut tiré du Cloître pour ctre fait Evêque;.
prit le nom de Scvcre , & fit les fondions épifcopalcs en
divcrfcs Eglifcs d'où vient qu'il eft appelle tantôt Evêque de
Bethraman, tantôt de Beth-Ccno. On met fa mort cncji^. Il
compofa en Syriaque un Commentaire fur le Paradis (?«) , que
Malius a traduit en latin & fait imprimer en cette Langue à An-
vers chez Plantin en 1 56c) ?«-8^ il eft paflc cniuite dans la Bi-
:

bliothèque des Pères, de Paris ,& dans celle de Lyon. L'Ou-


vrage cfl divifé en trois Livres ou en trois parties , & dédié
àignace que M
oy le appelle fon frcre, apparemment parce qu'il
étoit Evêque comme lui. Il paroît par le commencement de
donné en cinq Difcours une
l'Epitre Dcdicatoire qu'il avoit
explication de l'Ouvrage des Six Jours , avant de compofer
fon Commentaire fur le Paradis, Ces Difcours ne font pas ve-
nus julqu'à nous.
XV. Il examine dans la première partie du Commentaire («), Traité du

s'ily avoit deux Paradis, un terreflre &un fpirituel. Il adopte ^^"'^'**

le fcntiment qui n'admet qu'un Paradis ; mais il croit qu'on


peut , outre le iens littéral , expliquer le Paradis en un fens my-
ftiquc. Il commence par le littéral ; &
quoique l'Ecriture ne
marque pas le jour de la création,pen le qu'il fut créé letroi-
il

fiéme jour ,
parce qu'en ce jour Dieu dit Qtie la terre prodiùje :

des herbes & des arbres , portant des femences du fruit. Le &
Paradis fut donc créé avant l'homme , pour qui Dieu l'avoic
créé. Bar-Cepha
dit d'après faint Bafilc de des anciens Interprè-
tes, que Paradis terreftrc fiât créé dans une région firuée h. l'O-
le
rient , &
que c'cfl pour cela qu'en pri^t nous nous tournons
vers l'Orient pour contempler notre ancienne Patrie la re- &
chercher. D'autres plaçoicnt le Paradis terreflre au-delà de l'O-
céan. Apres qu'Adam en eut été chaffé , il fut lon-g-tems fans
fixer fa demeure ; enfin il vint fur la montagne de Jebus , ou
Jerufalem , y mourut & y fut enterré. Cet Auteur juge de l'éten-
due du Paradis terrefire par celle du fleuve qui l'arrofoit , 8t
qui étoit fi vaile, qu'au fortir de-là il fe divifoit en quatre grands
fleuves. Il pcnie qu'il a lubfilé jufqu'à l'avéneracnt de Jcfus-
Chrifl , que c'cft là qu'Enc ch & Elie ont été transférés , de mê-
me que les âmes des Jufles morts avant le Sauveur,

(w) Labb^us , fow, 1. Bihliot.pag, $f, (») Tom, iT.Eibliot, Pat. {ag. 458.
78 MOYSE, BAP.-CEPHA. Ch. I V.
XVI. Les Interprètes ne s'accordoienr pas fur la nature de
l'arbre de la fcicnce du bien &
du mal (o). Les uns difoient que
c'étoit le froment; les autres, la vigne ;
quelques-uns le figuier.

Ce dernier fentiment lui paroît le plus probable , étant à prcfu-


mer que nos premiers parens couvrirent leur nudité des fueilles
mêmes de l'arbre qu'ils avoicnt fous la main. Or l'Ecriture dit
qu'ils fe fcrvirent à cet effet des feuilles de figuier. Il cite un
Diicours de Philoxcne de Mabuge, fur l'arbre de vie; fou- &
tient contre cet Ecrivain , que la déiobcinancc d'Adam lui cau-
fa la mort &
à tous fes delcendans. Il croit qu'Adam ne fça-.
voit pas que Dieu devoit accorder un Royaume céleile à ceux
qui obferveroient fes Commandemens ; que ce fut un véritable
fcrpent qui tenta Eve ; &
que Satan avoit auparavant demandé
à Dieu pcrmifTion de la tenter par le miniftere de cet animal ;
qu'il n'cfl; pas fait mention des Anges dans le Livre de la Gé-
nefe jufqu'à leur apparition à Agar , de peur que les Juifs ne
les adoraflent comme des Dieux ; que la Divinité n'abandonna
ni le corps de Jefus - Chrift ni ion ame dans le tems de la
Paffion , ni dans le tombeau , ni dans les enfers ; que l'ame du
bon Larron fut transférée , avec celles de tous les Jufles qu'il
avoit tirées des Enfers dans le Paradis d'où Adam avoit été
,

chaffé ; & qu'elles doivent y relier jufqu'à la Réfurrection géné-


rale.
XVII. Il donne dans la féconde partie des fignifications my-
fliques à tout ce que l'Ecriture dit du Paradis Terreflre (p) ; &
dans la troifiéme il répond aux objettions des hérétiques , donc
les uns , comme Simon le Magicien , accufoient le Créateur
d'impuifi^ance , en ce qu'il n'avoit pu conierver Adam enl'étac
qu'il l'avoit créé (q) ; les autres foutenoient avec Théodore &
Neflorius que péché d'Adam n'étoit pas la caufe de la more
le

de l'homme. Bar-Ceplia enicigne donc que fi Adam eft tombé


de l'état dans lequel il a été créé, c'a été par un effet de fon
libre-arbitre , &
non de la faute du Créateur ; que l'arbre de
vie n'efl: tourné au préjudice d'Adam que par l'abus qu'il en a
fait, en mangeant du fruit contre la delcnfe qui lui en avoit été
faite; qu'encore que le premier homme ait été mortel de la na-
ture, c'cH-à-dirc , compote d'un corps qui étoit fujet à ladif-
folution de fes parties , Dieu néanmoins l'auroit rendu immor-
tel par grâce , s'il n'eût point péché ; que s'il avoit été créé im-

(o) P.iff 464. (p) l'.i^e 4J)i. (y) Prt^f 494-


MOYSE, BAR-CEPHA. Cm. I V. 7^
mortel , comme le difoit Julien d'Halycarnaire , il auroit con-
fervc fon immortalité , même après le péché , ainfi que les mau-
vais Anges ; cjue l'Auteur dit nettement qu'Adam cil devenu
mortel pnr Ion péché , & que c'cll par ce péché que la mort
efl entrée dans le monde. Il produit- divers exemples tirés des
livres laints , pour montrer que Dieu a ibuvent puni les péchés
des pères dans leurs enfans.
XVIII. Moyle montre beaucoup d'érudition dans cet Ouvra- Auteurs d-
ge , & une grande ledure des Pères Grecs & Syriens. Il cite 'j^ par Moyfe
'^^"*
3'entre les (jrecs , iaint Athanafe , laint Bafile, faint Grégoi- ^"^

re de Nazianze, laint Grégoire de Nyfle, laint Chryfollome,


Nemefius , Jules Africain Evêquc d'Emmaiis dont les^ Com-
mentaires fur le Nouveau Teflament font rappelles par Hebcd
"Jefu , dans le catalogue des livres Chaldéens , & Sévère Pa-
triarche d'Antioche chef des Acéphales. Les Ecrivains Syriens
qu'il allègue font , faint Ephrem à qui il attribue un double
Commentaire fur la Geneie , l'un littéral l'autre myftique ; ,

Philoxcne Evcque de Mabugc Auteur d'un Difcours fur l'ar-


bre de vie , & de quelques écrits contre Diodore de Tarfc ;
Jacques de Sarug , qu'il appelle quelquefois Evcque de Batnar ;
Jean Moine d'Apamce, & Jacques d'Edeifc. Bar-Cepha remar^
que que l'on avoit de fon temps deux verfions Syriennes de
l'écriture ; l'une fur l'Hébreu l'autre fur le Grec. Celle-ci à pour
;

Auteur Mar-Abas , qui vivoit dans le fixiéme fiécle.


XIX. On cite fous le nom de Moyfe Bar-Cepha un com- Autres F-^
mentaire fur l'Ancien & le Nouveau Teftament (r). Il fait lui- critsùeMo>:e
môme mention de l'amplitication qu'il avoit faite de l'Evan- '^^'^-^«P'^^-
gile de faint Matthieu (/). Il com.pofa encore une Liturgie ,
imprimée dans le fécond Tome des Liturgies orientales par
M. Rcnaudot { t ) ; & un Commentaire fur la Liturgie
Syrienne (u). Son Traité de l'Ame, efl: cité dans la première
Partie du Traité du Paradis ; & fon Traité des Seâes dans la
troifiéme Partie. On a de lui dans les manufcrits du Vatican (x) ,
une explication des Cérémonies ufitees dans la tonfure des
Moines ; & pludeurs Homélies, fur les principales fêtes de
l'année , entre autres , fur la Dédicace de l'Eglife , fur l'An-

(r) ASSEMAM , ton. 1. Eibliot. Orient. (k) ïlid pag. I^ I.

(.ï) AssEMANI , tom, z, BiilUt, O'itntf


(j ) Jhiii.O" p.irt. 5. ile VariJifo.
(t) l'ilg. 391. i5 AssEMAM,«/'r/K^r(ï»
.

8o MOYSE,BAR-CEPHA. Ch. IV.


nonciation du Prêtre Zacharie , lur l'Annonciation de la fainte
Vierge , fur la tentation de Jcfus-Chrifl , fur la gucrifon &
miraculeufe du Lépreux.

^-'/'"'"m^*
XX. Nous ne fommes entres dans le détail des Ouvrages
°'
nophyfkes. <^^ Moyfe Bar-Cepha , que parce qu'il en eft dit quelque chofe
dans les Bibliothèques Eccléiiafliques , & que l'on a donné place
à fon Traité du Paradis, dans les Bibliothèques des Pères, où
il paroit qu'il n'en devoit point avoir , puifqu'il étoit de la

fe£le des Monophy fîtes. On nommoit ainfi les Eutychiens , les


Diofcoriens , les Severiens , les Jacobites , 6c tous les autres
Hérétiques qui ne reconnoiffoient en Jefus-Chrift qu'une feule
nature , & qui en conféquence rejettoient le Concile Général
de Calcédoine , où cette erreur fut condamnée , avec anathê-
me contre tous ceux qui la foutenoient elle s'étendit depuis dans
:

l'Egypte , dans la Syrie , dans la Mefopotamie dans l'Ar- &


ménie. Bariumas Prêtre &
Archimandrite , qui en prit la dé-
fenfe au nom des Moines de Syrie dans le faux Concile d'E-
phele , la voyant condamnée à Calcédoine , s'efforça de la ré-
pandre de plus en plus dans fon pays , elle fut embraflce &
non-fculcment des Peuples de Syrie , mais auffi des Patriar-
ches & des Evêques des Eglifes d'Orient , depuis l'an 450
jufqu'en 1484. C'efl cà cette année que M. Affcmani termine
le Catalogue des Evêques Monophyfites , ou Jacobites, dans
le fécond Tome de fa Bibliothèque Orientale. Il a donné dans
le premier la Vie des Evêques orthodoxes d'Orient , avec la
lifte de leurs Ouvrages. Nous avons rapporté en fon temps ce

qui nous y a paru de remarquable.


Thcodcre XXI. Théodore Daphnopates Patrice de Conflantinople j fe
paphnopatcs. rendit recommandable par fes écrits après le milieu du dixié-
fiécle. Un des plus intèreifans , étoit la fuite de l'Hifloire
Ses Ecrits.' j^(>

Byiantine , juiqu'à fon tems. George Cedrenc, qui écrivit de-


puis fur la même matière, fait mention dans la Préface de ceux
qui avoient avant lui écrit l'Hifloirc de Conftantinople ( v ) ;
& il mec de ce nombre Théodore Daphnopates. Ce qu'il fit

fur ce fujct , ne fe mais il nous relie quelques au-


trouve plus :

tres de fes écrits ; fçavoir , un Difcours qu'il prononça en 5^57,


le jour anniverfairc de la fête de la Tranllation d'une main de
faint Jcan-Baptiftc, d'Antioche à Conftantinopleî, rapporté fans
nom d'Auteur dans Lipoman & dans Surius , au 25» d'Août (z) ;
w .
-^— •———— ——^-^^^—^^ ——
,
^^.^— ^-^

(x)Ceur.enus, Pm/i». in com£ci;dii(m l {t)Tom, 6.pa^.ii},viJe^ AlljiiMm,^f.


,

s E, Ch. IV.M OY 8i
& un Ouvrages de laine Chryfoflome ,
recueil d'extraits des
imprimes parmi les (Euvres de ce Père fous le nom d'Eclogues.
Ce recueil dans l'édition de Morel par le Père Fronton le
Duc , ne contient que 31 Homélies ; & 33 dans le Manulcric
de Nicephore Botoniate mais il en comprend 45 dans l'édi-
;

tion de Savilius. Comme il ne les avoir données qu'en grec ,


Dom Montfaucon les à publiées en latin («), & a pris foin de
marquer à la marge de chaque Homélie , les endroits des écrits
de faint Chryfoftome , d'où ces extraits font tirés. Il s'efl fer-
vi de la Tradutlion d'Etzclius , jufqu'à la trente - unième inclu-
livement : mais il en a corrigé les titres & rempli les lacunes
fur l'édition de Savilius , & a traduit en latin , les dix-fept
dernières.
XXII. Allatius , outre le Difcours fur la tranflation de la main Ses dircoura
de Jean-Baptifte (b) , en cite un fur la Nativité du même
faint (c) il eft imprimé lous le nom de Théodoret dans le fup-
:

plément du Perc Garnier aux Œuvres de cet Evcque ; mais il


porte le nom de Théodore Daphnopates dans un Manufcrit du
Vatican (d). Son Difcours en l'honneur de l'Apôtre faint Paul
fait la trentième Homélie des Eclogues (e). Il en fît un à la
louange de faint Grégoire de Nazianzc (/) on ne l'a pas en- :

core rendu public^: il en eft parlé dans Lambecius. Le cata-


logue de la Bibliothèque de Leyde, cite une Vie de faint Théo-
dore Studite , par Théodore Daphnopates (g) , parmi les Ma-
nufcrits d'Ifaac VofTius , que Ton conferve dans cette Biblio-
thèque. On en trouve dans celle de Vienne & d'Italie,des Corti-
mentaires fur les douze petits Prophètes , fous le nom de
Théodore. M. Lambecius (h) , &Dom Montfaucon les croient
de Théodore d'Antioche Evêque de Mopfuefte en Cilicie (i) ,
ou de Théodore d'Heraclée ; d'autres penfcnt qu'ils font de
Théodore Daphnopate. Rien de certain là-dcflus.
XXIII. On trouve dans les Œuvres mêlées de Léon Al- Epiphanej
latius, imprimées à Amflerdam en 1653. une Defcription Géo- Pf"^ de Je-,
graphique de la Syrie , de la Ville Sainte, c'cft-à-dire , de Jéru- '"'^^^"•

(a) Montfaucon, Prafat, inEclog.\Theo- (./) Chrvsost. 0/>. «. it.p.6^6.


dori. t. I 2. p. 430. (/) Lambecius , lib, 6, Biitiath. part, i,
(i) All AT. Je Symeco. Sctip, p, 9 fi, pag. j6.
Jiid.pag. 84. !^ III.
]c)
(g) Page ^ç9,EJit. an. 171 fi,
{</)Fabricius , tom, 9. Bibliot. Grec*, (b) Lambecius , Lii. 4. p. ifia.
fsg. 100. (/) In Diari* italien, p. 39 ^ 44.
Tome XX*
82 EPIPHANE DE JERUSALEM, Ch. IV.
falem , &
des laints Lieux , fous le nom d'Epiphane , Moine
Se Prêtre de Jérutalem. L'Auteur aflure (/) qu'il avoir vu de
fcs yeux tout ce qu'il rapporte , mais il ne dit point en quel
temps il l'écrivoit. Dom Anfelme Banduri
(k) , croit que ce fut
lui qui fuccéda fous le nom de
Polyeu6le dans le fiége Patriar-
chal de Conftantinople à Théophilatte , mort le 27 de Février
p5^. &
qu'il occupa ce fiége jufqu'en ()6p. Cette conjeélure re-
çoit quelque vraifemblance de l'Anonyme qui a écrit l'Hiftoirc
du règne de Conftantin Porphyrogcnetc (/) , qui donne en effet
pour fucceileur à Théophila£lc , un Moine de Palcftine , célè-
bre par fon içavoir &
par la faintetéde fa vie mais il le nom- :

me Polyeuâe , &
non pas Epiphane , fans dire qu'il eût chan-
gé de nom en acceptant l'Epifcopat. Ce qui fait une difficul-
téque Dom Banduri ne levé pas. Allatius attribue au même
Epiphane une vie de la fainte Vierge Mère de Dieu (m) , êc
une de faint André Apôtre («). Epiphane , dit dans le Prolo-
gue de ces deux Vies , que plufieurs avoient déjà traité les
mêmes matières. Il défapprouve ce que Jean de Theffalonique
avoir dit du trépas de la fainte Vierge , & dit qu'André Ar-
chevêque de Crète au lieu d'en écrire la vie , s'étoit contenté
d'un éloge vague qui n'apprenoit rien de fes aftions. Le Dif-
,

cours de Jean de Theffalonique n'efl point imprimé le Pefe :

Combefîs (0) , après l'avoir bien examiné ne crut pas qu'il va-
lût la peine d'être mis au jour , n'étant qu'un extrait de l'écrit
du fameux Meliton , & d'autres Ouvrages apocriphes 8c fabu-
leux. Il porte un femblable jugement d'un Difcours d'un autre
Jean , qui fe donnoit la qualité de Théologien , cité aufTi &:
rebuté par Epiphane dans le prologue fur la vie de la fainte
Vierge. Fabricius (p) cite fous le nom de Jean de ThcfTalo-
nique , une concordance des Evangélifles mais il convient (q) :

ailleurs , que ce n'eft autre chofe que fon Difcours fur les Fem-
mes embaumer le corps de Jelus-
qui portèrent des parfums pour
Chrift où Jean de Theffalonique fait voir qu'il n'y a point de
,

contrariété dans l'Hifloire de la Réfurrctlion (qq) rapportée par

(0) Combefîs, Tom. i. Aiiàuarii. p^g^


(l0HAtiDVKX in confpetht Chronologtco ad 8m.
Imiperiiim Orimtate. Parif. lyir. (p) Fatricus, Tom. 6. Bil/liot. GrtKtu.
(/) Scripior pofl. Iheopb.tn.p. 208.
(m) Allatius, de Symcoti, firiftis , /•» (</) Idem. Tomf p./». 94-
ao6. {qq) l'ojei.tom, 17. p.JlK
THEODOSE DE CONSTANT. Ch. IV. 83
les quatre Evangcliftes. Il compofa une Hymme
en l'honneur
du Martyr Demctrius (r) , avec Ja relation des Miracles opé-
rés par ion intercefTion.
XXIV. L'adion la plus éclatante du règne de Romain II. ou p;^|.'^°''jf''
le Jeune , fils de l'Empereur Porphyrogenete , ed: la conque- conftatino-
tc de rifle de Crète. Nous en avons une Hiftoire abrégée dans pie-.

l'Anonyme (/) qui a continué celle de Théophane: mais Theo-


dofe Diacre de rEglife de Conftantinople , l'a donnée plus au
long. LePerc Maltrcte Jefuite s'étoit engagé delà fliire mettre
fous prcfle , dès l'an 1660 , comme on le voit (f) par fa Pré-
face iur les Ouvrages Hiftoriques de Procope de Célarée ,
& de donner en même - temps les deux livres de Georges
Pifide, à la louange d'Heraclius , les trois livres de la Guerre de
Perle par le même Prince , & quelques autres qu'Holftenius lui
avoir communiqués. Il ne paroît pas qu'il ait tenu parole : il
avoir eu de Léon Allatius , l'Hiftoirc de la prife de Crète :
Théodofe ne l'écrivit que fur ce qu'il en avoir ouï dire , n'ayant
point été témoin des faits qu'il rapportoit : elle étoit diviféc
en cinq parties. Le continuateur Anonyme de Théophanes,
parle («) de l'expédition de l'Empereur Romain le jeune contre
rifle de Crète , comme faite par un motif de religion.
XXV. Parmi les anciens pénitenticls que le Pcre Morin a jç^n Moine,
fait imprimer à la fin de fon Commentaire Hiftorique , fur la
Pénitence , il y en a un qui porte le nom de Jean Moine ,
Diacre , &
Dilciple de faint Bafile ; ce qui donncroit lieu de
croire qu'il vivoit dans le quatrième ou cinquième liécle , s'il
ne citoir l'Echelle de faint Jean Climaque ,
qui n'écrivoit que
dans le ieptiéme. D'ailleurs les règles qu'il prcfcrit fur la Péni-
tence , font fort différentes de celles de faint Bafile : ainfi il

faut dire que Jean ne prend le titre de fon dilciple que parce ,

<\u"û avoir adopté en quelque chofe la Do£lrine de ce Père ;


ou par reftime qu'il faiioit de la perfonne & des Ecrits de ce
.faint Do6teur. Quoique ce Moine fuive la même méthode dans
radminiflration de la Pénitence , que Jean le jeûneur , Patriar-
che de Confl:antinople , il efl: néanmoins plus févere ; ce qui
doit empêcher de les confondre. L'écrit du Moine Jean a été

{r) CoMBEFis , Scriplor fofi Theoph^ii. ni.iiio piniare,


^ag. 1^7. Allativs, de Symeonibiii, pag. (t) Pr^J.u. ad Le3o/ein in Procopio,
iof'. (k) 'icriptsr pofi. Thcofhait. f. iij. tinm,
(s) Scripur pofl TbeopliafJt p. 114^ »» Ro, 8. in Romurio.

Lij
84 JEAN MOINE Ch. TV.
publié fur un Manufcrit du Vatican. Son flilc efl dur,embar-
rafle chargé d'epithetes inutiles il auroit mieux léuflTi , s'il
, :

n'eût pasafïedé d'être cloquent. Tous ces défauts fe remarquent


fur-tout dans le prologue : il y fait l'éloge de faint Bafile , &
de fes règles canoniques ; &
fe plaint qu'on y ait dérogé dans
la fuite , en diminuant le temps qu'il avoit prefcrit pour la pé-
nitence.
Son Péniten- XXVI. Il entre après cela dans le détail de tous les péchés,
tiel.
& de leurs , commençant par celui de mol-
différentes efpéccs
lefle {x). Il recommande aux Confcfleurs d'agir avec beaucoup
de prudence , de proportionner les peines fatisfatloires à la gra-
vité des fautes, en faifant attention à l'âge &
à la condition des
pécheurs , &
de régler le temps de la communion fur celui de
leur converfion. Il donne la manière dont ils doivent interro-
ger les pénirens , &
veut qu'ils leur mettent par écrit la péni-
tence à laquelle ils les auront aftreints. La Confefllon fe faifoit
dans l'Eglife , ou dans un lieu fecret. L'ancien Pénitentiel que
le Père Morin joint à celui du Moine Jean (y) , dit que le Con-
fefleur après avoir ouï les péchés du pénitent , lui montrera dans
le Pénitentiel même , la pénitence qu'il doit faire pour effacer
fon péché. Quoique Jean ne foit qualifié que Diacre dans l'iaf-
cription de fon Pénitentiel , il ne laiffe pas de dire clairement
qu'il avoit oui les Confeflions de quelques-uns ( z ) , même des
Moines &
des Abbés. On peut voir ce que nous avons dit du
pouvoir des Diacres dans l'adminiftration du Sacrement de pé-
nitence , fur faint Cyprien («).
Witikindus XXVII. WitiKindus ou WiduKÏndus, Moine de Corbie en
MoinedeCor- Saxe , fleuriflbit fous le Règne d'Otton II. qui gouverna l'Em-
bie €n Saxe.
pire depuis l'an f)6j , jufqu'en 5)83. Il fut très-confidéré de ce
Prince & de la Reine Malthilde,fille de l'Empereur Otton L C'efl
le témoignage que lui rendit quelque temps après fa mort Hofed
ou Hufar élu Abbé de Corbie, en 1002. dans l'infcription du
maufolée (b) qu'il fit élever fur fon toml'veau , où il lui donne
auffi le titre de pieux Se do£te maître de l'Ecole de cette Ab-
baye. "WitiKindus écrivit trois Livres de l'Hiftoire des Saxons,

(«) MoRiNiis , de Pœnit, edil, Vtnet/t, an. iiid. p. (17.


l-joz.p. 6\i. (/i) Tom. 3. pageZx,

(7) '".?' <'4^- '(*)MABiLi.oi<. W*.fï. ÂMnal, ». jo»|k.


(tj Indignus egoconfeiïîonesexcepi non-
puliorum etiam Moiuchoium & Abbatum.
s. ALFRIC. ARCHEV. DECANTOR. Ch. IV. 85
où il de Henri
s'applique particulièrement à rapporter les allions
I. dit rOileleur , ou le Saxon , Roi de Germanie, & d'Otton I,
fon fils & fon fuccefleur. L'Ouvrage finit à la mort de ce der-
nier , c'ell: -à-dire , à Tan 5^73. Il fut imprime à Balle en 1522
chez Jean Hervage , à Francfort en 1 577 , & en la même Ville
en 1621, parmi les Hiftoriens d'Allemagne recueillis par Henri
Meibomius Père ou l'Ancien. Reinerius Reineccius l'inféra
auffi dans fa collc£^ion des Hiftoriens de la même Nation à
Francfort en ^6'j'j. Enfin on le trouve dans une nouvelle col-
le6lion faite par les Meibomius père & lils , en la même Ville
en 1588. Il y a dans toutes ces éditions, excepte dans la
première , quelques vers fous le nom de WitiKindus ,,car il fe
mefloit de pocfie & Sigebert (c) , dit qu'il avoit mis en vers
;

la Paffion ou les a£les du Martyr de Sainte Thecle , & la Vie


de faint Paul Ermite ; il ne font point venus jufqu'à nous on ne :

fçait pas l'année de fa mort. M. Leibnits dans le premier Tome


des Ecrivains de Brunfwic pag. 108, 221. rapporte diverfes
corretlions à faire dans le texte de WitiKindus fuivant l'édition
de Bafle en 1531.
XXVIII. Nous ne fommes pas mieux informés du temps & S. Aifric Ar-

du lieu de la naifTance de faint Alfrie , ou Alfric , ni de fa fa- c^^torbeii,^


mille ; on fçait feulement qu'elle étoit diflinguée («/) par fa no-
blefîe ; & qu'Alfric embraffa la vie monaftique dans le Monafle-
re d'Abbcndon. L'opinion commune eft qu'il en fur Abbé ;,

d'autres croient que ce fut du Monaftere de faine Alban. Ni


l'une ni l'autre de ces opinions ne s'accordent avec le décret de
fon éle£tion pour l'Evêché de Wilton,qui ne le qualifie que Moine
de la jointe Eglife d'y^bbendon (e). Il fuccéda dans ce fiége Epif-
copal à Sirice qui en p8^ ou 5*91 fut fait Evêquè de Cantor-
beri. En ^ç}6 il paffa lui-même à ce premier Siège de l'Eglife
d'Angleterre & l'occupa dix ans. lî fit le voyage de Rome à
'pied , pour demander au Pape le Pallium. Prefque toutes les
années de fon Epifcopat font dattées de fes bienfaits & de ceux
du Roi Athelred , en faveur des Eglifes & des Monaftercs.
Ce Prince témoigne dans un de ces Diplômes (f) , qu'Alfric
par fa figeffe &
fa vigilance paftorale, lui'avoit appris à s'o€-
'cuper de lobfervation des Commandcmens de Dieu. Il'itiourur

(c) SiGBBEBj. dé Scriitor Ecclt^fi, cap. 1 (d) MaSïi. Tow.S; ÂSaf.p. f r. M U«'i.
U ^ .
SAINT ALFRIC,
le 2$ d'Août 1006. Son corps fut d'abord inhumé dans le Mo-
naftere d'Abbendon , où il avoit fait profefTion de la vie re-
ligieufe , puis rapporté à Cantorberi , où il efl honoré comme
Saint.
S« Ecrit». XXIX. Il fe rendit célèbre non-feulement par fes vertus,

mais aulTi par fon fçavoir , qu'un Auteur du tems (g) dit avoir
paffé les bornes ordinaires mais il n'efl: point aifé de diftinguer
:

les Ouvrages de ceux qu'on attribue à un autre Alfric , qui


d'Abbé de Malmeiburi devint Archevêque d'Yorch , mourut &
en 105 1. âgé de près de cent ans on le furnommoit le Gram-
:

mairien. Voici la lifte des Ouvrages de l'Archevêque de Can-


torberi félon Pitfcus. Un livre de la Grammaire. Deux livres
de Sermons en langue Saxone;,au nombre de cent quatre - vingt.
Une Lettre de la Vie des Moines. Une Tradudion des Canons
de Nicée en 'iangue Saxone. Une Chronique Saxone concer-
nant principalement l'Eglifc de Cantorberi. Un Didionnaire
Latin. La Tradudion de la Genefe. Quatre livres fur les Dia-
logues de faint Grégoire. Un livre de Traductions des Œuvres
de Donat , & des Extraits du même Auteur &
de quelques-au-
tres, comme de Prifcien. On croit que la Verfion des Canons
de Nicée dont parle Pitfcus , eft celle que Spclman rapporte ( /z )
dans le premier Tome des Conciles d'Angleterre. Alfric écri-
.vit aufli la Vie de faint Ettehvolde , environ vingt ans après

fa mort. Dom Mabillon (i) dit l'avoir vue dans un Manulcrit


de l'Abbaye de Fcfcam. On attribue encore à cet Evêque
des Traités fur l'Ancien &le Nouveau Teftament ; une Ho-
mélie Pafchale , intitulée Du Corps
: &
du Sang deJeJus-ChriJi^
.8c imprimée à Londres en 15^6. par les foins de Jean Daius.
.Deux Lettres , l'une à Wulfin Evêque de Schireburne ; l'autre
à Wuiftan Archevêque d'Yorch. Guillaume de l'Ille les fit im-
primer en Anglûis &
en Saxon à Londres i(Î2 ^ &
en 1 63 8 w-S".
La Lettre à Wulfin fur l'obfcrvation des Canons , fe trouve dans
le neuvième Tome des Conciles (k).
l.ettrcàVul- XXX. Il paroît que Alfric n'étoit que fimple Moine lorf-
''"•
qu'il l'écrivit. en langue
Il l'a fit en Anglois , c'eft-à-dire ,

Saxone , & en forme de Difcours , où il fait parler l'Evêque



yf/ ulfin à fon Clergé (/), Les mœurs en étoient très-corrompues ,

(g)MMi\u.oti,Toin. s. Alhr.pag. ^S. f {k) Page icoj.


<A)Si'EiMAN, «cm. I.;». f8i, (i)Tom.p.Con(,p. looi.
I
ARCHE VESQUE DE CANTORBERI. Ch. I V. 87
& l'Evcquc n'avoic pas aflez de courage pour y apporter re-
mède. Alfric y iupplca en lui formant ce Dilcours de la ma-
nière que Wulfin l'avoit i'ouhairc. Comme il ne s'agilîbit que
de réprimer les excès des Prêtres , des Diacres autres Mi- &
niftres inférieurs , Alfric fupprime ce qui eft dit du devoir des
Evêques dans les Canons de Nicée &
des autres Conciles , fup-
pofant que "Wulfin n'ignoroit pas qu'il devoit fervir par fes bon-
nes mœurs , de modèle à fon Clergé. Cette lettre efl: divifée
en 25 articles , qui ne contiennent rien que l'on ne trouve dans
les anciens Canons. Quoiqu'Alfric reconnoifle qu'il s'cft tenu
dans l'Eglife un grand nombre de Conciles , où l'on a établi la foi
contre les Hérétiques , il ne parle que des quatre premiers , pour
lefquels il témoigne autant de vénération , que pour les quatre
Evangiles.
XXXI. On trouve dans les Bibliothèques d'Angleterre quan- Homéiiw ^

^^'"^'^'
tiré de recueils d'Homélies fous le nom d'Alfric , la plus part
en langue Saxonc ; parmi lefquclles on en avoit choifi 24 pour
être lues publiquement au peuple , quand l'Evêque ou le prêtre
le jugeoit à propos. Les 2 premières traitent divers points
1

d'hiftoirc ou de morale les autres font fur les principales Fê-


:

tes de l'année. Celle qui efl: pour le jour de Pâques, efl tirée pour
la plus grande partie du Traité de Ratramne,intitulée:Dz/ Corps
& du San^ du Seigneur. Il efl: donc h préfumer qu'Alfric pen-
foit de même que Ratramne fur la préfence réelle. Voici fes
paroles : Pourquoi (m) la facrée Euchariftie efL elle apppellée le
Corps de Jcfus-Chrifl: , ou fon Sang , fi elle ne l'eft pas véri-
tablement ? Il efl vrai que le pain & le vin qui font confacrés
pendant la MefTe par les Prêtres , montrent aux fens au &
dehors une autre chofe , &
une autre intérieurement aux yeux
de l'ame des Fidèles. Au-dehors ils paroifTent du pain du &
vin , tant en clpece que par la faveur cependant après la
: &
confécration ils font véritablement le Corps de Jefus-Chrifl, 8c
fon Sang , par un Myflere ou Sacrement fpirituel. Il dit la mê-
me choie dans un autre Difcours que l'on attribue quelquefoi:s>

(»h) Quare ergo vocatur facra illa Eu- & vinum, cùm in fpecie , tùm in fapore f
«liariftia Corpus CliriHi , aut Sanguis ejuj, funttamen verè pofl confecrationem Cor-
Ç\ non fît verc \A quod vocatur ? Panis qui- pus Chrifti & Sanguis ejus per fpirituale Sa--
dem & vinuni qua? per Miiïam Sacerdotum cramentum. Aikric. de Sacrificio in JiePaf-
eonfecrantur rem aliain humanis fenfibus chx , in mtis Weloci ai hifl,- Bedtt, liù,
f, ^'•
,

ibris oftendunt , remque allam fidelibus a-


imiuntus declatant. Foris videntur panis i
,

88 SAINT AL FRIC,
à W^ulfin Evêque de Sarifberi : Le Seigneur («)
qui avant fa
Partlon confacra l'Eucharifte que le pain écoit ion
, 8c dit
Corps , & le vin véritablement ion fang , conlacre encore lui-
même tous les jours par les mains du Prêtre , le pain en ion
corps , & le vin en fon lang , par un myftere fpirituel , comme
nous le liions dans les livres. Mais ce pain vivifiant n'efl aucu-
nement le même corps dans lequel Jefus-Chrift à foufFert ; ni
le vin facré , le même Sang du Sauveur , qui a été répandu
quant à la chofe corporelle il l'efl toutefois quant à la fpirituel-
:

Ic. Ces deux paflTages que les ennemis de la tranfubftantiation


objedent avec confiance , ne leur font point favorables. Si Al-
fric ne l'avoit reconnue , auroit-il dit qu'après la confécration
le pain & le vin font véritablement le Corps & le Sang de Je-
fus-Chrifl? Eft-ce ainfi que s'cxprimeroit un homme qui feroit
pcrfuadé que le Corps & le Sang du Seigneur ne font qu'en
vertu dans TEuchariftie ? Cet Evêque en ajoutant que le Corps &
le Sang y font par un Sacrement fpirituel , ne veut dire autre cho-
fe , finon, qu'ils imitent dansce Sacrement, une manière d'exifter
fpirituelle & ineffable , imperceptible aux lens humains. Quant à
ce qu'il dit que ce n'efl pas le même corps qui a loutfert , ni
le même Sang qui a été répandu pour nous , cela ne doit s'en-
tendre que de la même manière d'cxifter de ce corps. Il n'eft
ni vifiblc ni palpable dans l'Euchariftie , fes membres ne font
pas les mêmes fondions , qu'étant fur la terre , ou fur la croix ;
il eft dans l'Euchariftie d'une manière fpirituelle & invifible :

mais c'eft fubftantiellement le même corps ; comme c'efl le mê-


me qui étoit fur la terre , & qui eft dans le Ciel \ quoiqu'il y
foit d'une toute autre façon qu'il étoit en ce monde.

OM'tnges XXXII. En 1 571, on imprima à Londres le Nouveau Tefla-


<!*Aifric fur mcnt cn langue Anglo-Saxone , qu'on diloit être de la Tra-
rEcnture-
<judion d'Alfric. On lui fait encore honneur de laTradudion
ûinte.
des Pfcaumes , que Spclman fit imprimer cn \6^o ; de celles
de l'Hcptateuque , du Livre de Job , de l'flifloire de Judith ,
& de l'Evangile de Nicodemc , mifes fous prcfle à Oxfort en

C « ) Dominut qui confecravit Eudiari-


ille vividus non eft utcunque idem cor-
ftism ante pafllonem fuam , dixitque pnnem pus quo Chriftus paiïus eft ; neque vinum
corpus fuum fuillè,& vinum reveràfangui- illu<1 facrum Servatoris erat fanguis qui pro

nem ruum,ipfequotidic confêcratpermanus nobis fuit effiifus in re corporali , fed in ra-

Sacerdotis panem in corpus fuum , vinuni- tionc fpirituali. AlFric. iti notis Weloci ai
que in fanguinera fuum in myfterio fpiri- cap. 14. Iil>. 4, Hij}. Ati^lo-Saxonici* , veni-

tuali , ûcui in libtis legimus Panis rabilii htd4»


ARCHEVESQUE DE CANTORBERI. Ch. IV. 8>
par les foins d'Edouard Thwaïtes & d'une Chronique
.'i^5?8. ;

Saxone qui commence à Jules Céfar & finit à l'an 1070 de


, ,

Jclus-Chrilt. Mais on dit (0) qu'elle efl de plufieurs mains ,


& qu'Alfric termina la fienne à Tan 5>75 , n'étant alors âgé que de
23 ans. Tout cela paroît fort incertain , & l'on ne fçaura jamais
à quoi s'en tenir au fujet des Ecrits que l'on attribue à Alfric
Archevêque de Cantorberi , que l'on n'ait trouvé le moyen de
les diftinguer de ceux d' Alfric Archevêque d'Yorch ^ ce qui
ne fe peut , qu'avec le fecours des Manufcrits d'Angletere.
XXXIII. Lantfrid & Wolftan , étoient l'un & l'autre de ce Lamfrid te

Royaume , & Moines de l'Abbaye de Winchefter. Ils travail- V°^^"*


lerent tous deux à l'Hiftoire de faint Swithun , Evêque 4e cette
ville , mort vers l'an 865 mais n'ayant trouvé aucuns mémoi-
;

res dont ils puflent compofer fa vie , ils fe bornèrent au


récit de fes miracles , & de rapporter ce qui s'étoit paffé dans
la cérémonie de la Tranflation de fes Reliques , faite en pji,
Lantfrid en avoit été témoin ; on pourroit donc s'aflurer fur ce
qu'il en difoic ; cependant Dom Mabillon (p) n'a pas jugé à
propos de rendre publique fa relation , ne la trouvant point
aflez intéreffante. Elle elf écrite en profe , avec une lettre aux
Moines du Monaftere de S. Pierre à "Winchefter,c'étoit l'ancien
Monaftere: "Wolftan étoit Moine du nouveau. Ilcompofa deux
livres en Vers fur le même fujet , qu'il dédia à Elfcgus alors
Evêque de Winchefter. On trouve dans l'Epître dédicatoire
plufieurs particularités touchant le rétabliffement de l'ancien Mo-
naftere de "Winchefter , Se l'embelliffement du nouveau : elle eft
dans le feptiéme Volume (q) des Acles de l'Ordre de faint Benoît,
avec la lettre que le même Auteur écrivit en général à tous fes
Confrères mais on n'y a pas inféré l'Ouvrage même , &: on
:

s'efl: contenté d'en tirer quelques faits propres à faire connoî-

tre la difcipline du rems où ces deux Ecrivains vivoient.


XXXIV. Le premier («77) regarde la pénitence impofée â ^ajtsremar-
.^1 * .

-un homme qui avoir tue ion



r -n ' -i r J
Fere u tut condamne a porter
' ^ quabUs dan*
; leurs Ecriu.
•des cercles de fer autour de fon ventre & de fes bras pendant
neuf ans, & à faire en cet état divers pèlerinages , en parti-
.<ulier celui de iaint Pierre à Rome. Le fécond repréfentc l'é-

(o ) HrNRiciis Warton , DiJJirtgt. de {q) Vdge «14. tfio.


|
Juobus Africit. p. i-^o.
j (y^) row, tf. ilSor, f . 74.
(f) Mabillon. ton», 6, ASor. «. 73, j
Tome XX. |S
(fO LANFRID ET VOLSTAN. Ch. IV.
preuve dont on fe fervoicpour découvrir lecrime d'un domeflî-
que de Flodoald riche Marchand de Wincheiler» On lui or-
donna de porter dans fa main nue un charbon ardent & un
fer chaud il fut ordonné que s'il n'en étoit pbmt endommagé ,
:

on le dcclarero't innocent ; & que s'il ne pouvoit le tenir lans


en être brûlé , il palTeroit pour coupable, & qu'en conféquence
ilferoit décapité. Le troiiiéme fert à établir l'heure du jeûne
folemncl. Il cfl; dit qu'un Aveugle étant venu au tombeau de
faint S\i; ithun , fe fit un devoir de ne point rompre ion jeûne

avant l'heure de None , c'ell-à-dire , avant trois heures après


midi , & qu'il recouvra la vue par l'intercefTion du Saint. Le
quatrième efl un témoignage de la coutume des Fidèles de
faire fur leur bouche le ilgne la croix , lorfqu'il leur arrivoit de
bâiller ; une femme des Gaules ayant négligé de le faire , elle
fut fubitement attaquée d'une infirmité à la mâchoire. Enfin
il eft parlé d'une Loi du Roi Eadgar contre les voleurs
, por-
tant qu'on leur créveroit les yeux ; & qu'après leur avoir coupé
les mains , arraché les oreilles , percé les narines , ôté la peau
de la tête , on les jetteroit au milieu des campagnes pour être
de'voré par les chiens & les bêtes fauvages.
Ecms de Vol-
XXXV. Wolftan écrivit encore la Vie de faint Ethelvold
fian.
Evêque de Winchefler dont il avoit été diiciple elle a été don- :

née par Dom (y) Mabillon , par Surius & par les Bollandiftes ,,
au premier jour d'Août ; elle efl: partie en profe , partie en vers t
mais les vers ne regardent proprement que la cérémonie de la
Dédicace du Monaltere de "Winchefter , rétabli en 5)80. Willau-
me de Malmcfburi (s) , lui attribue un Ouvrage qu'il appelle très-
Utile , intitulé : De l" harmonie des Tons, il ajoute qu'il étok une
preuve du ff avoir de Wolflan , qui d'ailleurs étoit dune fainte vie
<ÙX d\me jainxe éloquence châtiée. La vie de faint Ethelvold ne
juftifie point ce jugement; car elle eft écrite d'un ftyle très-mé-

diocre \ & les vers que nous avons de "Wolflan , n'ont rien que
de commun (t). Nous remarquerons dans la Vie de faint Ethel-
vold, que le Carême commençoiten Angleterre, au premier Di-
manche que quand les Evêqucs alloicnt en voyage , ils fai-
{il) ;

un vafc rempli de laint Chrême , pour donner la


fbient porter
Confirmation \ ik qu'avant d'adminiflrer aux moribonds (x) le-

(r) Trm. 7. /llor. p. y<J4.


(j) VuiLLLL'. Malmejbur, lili', i. «/<Ry. (h) l'.t^c 6.Qy. w. 12.
(*}.?*_,» 4 10. «.4.1.
,

s. UDALRÎC D'AUSBOURG. C H. IV. pi


Corps &
Sang du Seigneur , on les oignoit de l'huile fainre.
le

XXXVI. Nous avons trois vies de iaint Udalric Evcque G?rard Pràto
«i'Auft'ourg.
d'Aufbourg , mort en 5^73 , imprimées en cette Ville par 1^5
foins de Marc Veli'erus en 15^5 la première eft anonyme : :

la féconde porte le nom de Gebehard la troifiémc de Bernon :

Abbé de Richenou les deux dernières ne contiennent pref-


:

que rien de remarquable , qui ne le life dans la première. C'efl


ce qui a engage Dom Mabillon(^ ) à ne donner que celle-ci
avec les prologues des deux autres ; elle efl: écrite d'un ftylc
iimple «& naturel ; & ce qui doit la faire eftimcr davan-
tage que l'Auteur avoit été témoin de la plupart des faits
, c'eft

qu'il Il étoit du Clergé d'Aufbourg , & avoit reçu la


raconte.
Prêtrife de faint Udalric. Son nom après avoir été long-tems
inconnu a été découvert par le moyen d'un Manufcrit de faint
Emmeramn de Ratifbone , où il c(i dit (z) à la tête de cette
vie , qu'elle a été écrite p^r Gebehard ordonné Prêtre par faint
Udalric.
XXXVII. L'Ouvrage cil: divifé en deux livres , dont l'un ^''«''^."';^-

contient la vie du Saint , l'autre fes miracles. Dom Mabillon j'AÙiborrg!^


y a ajouté diverfes circonftances qui nous apprennent ce que
le Saint avoit fait avant d'être promu à l'Epifcopat. Elles font
tirées de l'Hiftoire de faint Gai parEKKehardlc jeune (/z) outre :

l'Office Canonial , faint Udalric avoit coutume de réciter cha-


que jour l'Office de la fainte Vierge (t) , dont on rapporte
l'inftitution au dixième fiécle ; celui de la làinte Croix ; un
troiiléme en l'honneur de tous les Saints , & tout le Pfcautier.
Il célébroit {c) auffi la Meffe chaque jour , quelquefois deux ,
& même trois en un même jour le Dimanche des Rameaux :

il chantoit {d) une Meffe de la lainte Trinité , béniffoit les Pal-

mes & faifoit une Proceffion avec fes Clercs Se une multitude
de Peuples tenant chacun une palme en main. On portoit à
cette Proceffion le Livre des Evangiles , des Croix & des Ba-
nieres fur Icfquelles étoit l'image du Sauveur , qui étoit repré-
senté affis fur un âne. Chaque année il tenoit deux Synodes ;
l'un , la quatrième femaine d'après Pâque ; l'autre, au mois de

0») Mabillon. Tow, 7, Ailor. pr.g. 415. cap. ç.


414. (Il) Udalric. Fjm,^, 425. ^ Mabiii.
(1) Uhl. i« l'rjef.u. t. 7. «. 117.
(.») Ekkehar. Ae Cafihns S. Galli. apiid (0 IhU.
Coliiafl. tom, i, reritm Alaman, pcig. ji, (tl)ll;id.pag. <^ij

Mîj
_

p2 S. UDALRIC, EV. D'AUCSBOURÔ. Ch.IV,


Septembre. Le Vendredi faint (e) le peuple communioit âo.
jncme que le Samedi Saint & le jour de Pâques : mais il n efl
pas dit qu'ils reçuflent la communion fous les deux efpeces :
il n'efl: parlé que du Corps de Jefus-Chrift , & non de fon
Sang. Depuis le Vendredi Saint jufqu'au Dimanche de Pâques
on confervoit l'Euchariftie en un autre endroit que de coutume;
le Jeudy Saint , faint Udalric donnoit des habits neufs à douze
Pauvres ; & après leur avoir fait fervir à manger , il leur la-
voir les pieds ; le famedi il béniflbit le Cierge &
donnoit le
Baptême folemnel ; le Dimanche il faifoit la bcnédidtion d'ua
Agneau &: de plufieurs morceaux dé Lird , dont il diftribuoic
de petites parties aux Afliftans. L'Auteur de fa vie rapporte
quelques exhortations que le faint Evoque avoit faites dans le
cours de fes vifices. Il remarque (/) que le Cierge commençoic
à s'abflenir de viande le Lundi de la Quinquagclîme ; que dans.
le dixième fiécle , les livres étoient (i chers , qu'un des Pil-
lards de la Ville d'Auibourg (g) , ne donna qu'un Volume ,
qu'il avoit pris , pour le prix d'un beau Cheval ; qu'il étoit d'u-
fage (h) , lorfque quelqu'un avoir été guéri miraculeufemenr
au tombeau du Saint , de le conduire tenant une croix à lai
main , de l'Eglife de fainte Afre à l'Eglifc Cathédrale , fuivi
de tout le peuple , pour y faire à Dieu des a£lions de grâces ,,
& de le reconduire en la même Eglife où ce faint Evêque étoir
en terré
OfwaidMoi- XXXVTTI. Le principal Ouvrage de Ofwald ou Ofvfold
^ °'' Moine de Worcheller,eft la vie de faint Ofwald Evêque deWin--
theûî
chcftcr , & enfuite Archevêque d'Yorch (i ). On lui attribue
encore un livre de prières , partie en profe, partie envers; 8c
une méthode d'écrire des Lettres. Saint OiVald efl mis auflic
parmi les Ecrivains Eccléliaftiques d'Angleterre , par Pitfeus
& Balxus, qui citent fous fon nom (k) des Lettres à Abbonr
de Fleuri , à Adon fon oncle, Archevêque de Cantorberi , &
des Statuts Synodaux. Il efl fait mention de la mort de faintr
Abbon de Fleuri , dans la vie de faint Ofwald. Elle ne fut
donc écrite qu'après l'an 1004 , auquel ccr Abbé mourut. Uf-*
Jferius la croit de l'an 1005 , comme on le voit par une note:

(e)lJDALK. vita^pag, 416». I («) Lelandus, fa/i. 158. Çj.PiTSEOS/*f(.


(/) iA»V./i.«^. 454. Ii8t.
{g) IbU. pj?f 43j^ I, (y PiTSIUSj {ag, 180. BaI^OI , XJ^
SAINT OS^ALD ",
MOTNE. Ch. IV. 93
marginale écrite de [a main fur le manufcrit où cette vie fe
trouve dans la Bibliothèque Cottonienne. Capgravius, BoUa»!*
dus & dom Mabillon après eux, ont publié une vie anonyme
du mdme Saint ; & aucun d'eux ne panche à l'attribuer au Moi-
ne OlVald ; & quoicju'ils parlent de deux ou trois autres Hi-
floriens de ce faint Evoque , ils ne difent rien de celui dont
nous venons de parler mais il en eft fait mention dans le Car
:

talogue des Ecrivains , que M. Ducange a misa la tête de fon


Glolfaire delà latinité du moyen âge.
XXXIX. Saint Ofwald neveu de faint Odon Archavê- VleâeCûat
^^^^^'
que de Canrorberi , après avoir été Chanoine , puis Doyen de
Winchcflcr , pafTa en France chargé de Lettres de pr-éfens &
de fon oncle , & prit l'habit monaftique dans l'Abbaye de
Fleuri (/). Rappelle au bout de quelque tems en Angleterre , le
Roi Edgar à qui faint Dunflan l'avoit fait connoître , lui don-
na l'Evcché de Worchcfter. Saint Ofwald ctablitdeux Mona-
fteres , l'un à Veftburi ; l'autre à Ramfey ; Se pour fc confor-
mer au décret du Concile auquel faint Dunflan avoir prcfidé,
il mit dans fept Monafteres de fon Diocèfe , des Moines à \x

place des Chanoines , dont les mœurs étoient répréhcnfibles^


A la mort d'Ofquerul Archevêque d'Yorch , arrivée en pji , le
Roi Edgar obligea faint Ofwald de fe charger du foin de cet-
te Eglife, & de garder en même -tems fon Evcché de Wor—
chcfler , afin qu'il engageât les Moines qu'il avoir mis dans f*
Cathédrale , à perfévérer dans leur profeflîon. Se fentant prèî
de fa fin , il alfembla les frères , & leur demanda la fainte On-
ôion avec le mourut le lendemain en préfencc de$.
Viatique. Il

pauvres qu'il avoir eu foin de nourrir & de vêtir , & à qui iî


avoir lavé les pieds chaque jour même le jour de fa mort, qui
,,

arriva le 24 de Février ^88.

(<).M.iBiLLoK. Ttm. 7. Aâ.p. 708,.


P4 ADALARD, ABBE'. Ch. V.

C HA PITRE V.

AdaîardjAbbé de Blandigni; Bridferth Moine de Ramfey y


&
OJhêrnef Moine de Cantorberi.

Acîalard Abbé I. ^'^ trois Ecrivains ont compofc chacun , une vie de
Es
de Biandign--.
^^^ Dunflan Archevcque de Cantorberi (a); le premier
<^^

dédia ion Ouvrage à Elphcgus lucceffeur d'Alfric dans le mê-


me Siège ; le fécond , à Alfrie , qui avoit luccédé à faint Dun-
flan le troifiéme , à tous les enfans de l'Eglife Catholique.
;

Henri Warthon a inféré l'Epître dcdicatoire d'Adalard (è) ,


dans le fécond Tome de l'Angleterre facrée. C'ctoit par ordre
d'Elphegus qu'il avoir compofé la vie de faint Dunftan , & di-
vifée en douze Leçons , pour être récitée à l'Office de Mati-
nes. Ce n'étoit donc qu'un abrégé de celle de Bridferth. Auiïi
ne l'a-t-on pas encore rendue publique. Il avoit mis après
chaque Leçon , un Répons qui convenoit à l'hiftoire du
Saint.
Bridferth , IL Lcs Bollandiftcs ont donné au 19 de Mai (c) , la vie que
Bridferht compofa. Elle pouvoit paffer pour originale , puif-
Rw-pv*^^
Ramfey.
que c'étoit la première ; &
que l'Auteur afllire qu il avoit été
témoin de la plupart des faits qu'il rapporte. Elle efl; écrite d'un
flyle barbare &
empoullé. Bridferht étoit Moine deRamfey,
& la difcipline d'Abbon de
avoit vécu dans ce Monaflere fous
Fleuri que faint Ofwald en fit Abbé pendant fon féjour en
,

Angleterre {d). Il y a parmi des manufcrits de la Bibliothèque


de Bodlei , un comput des Latins , des Grecs , des Hébreux ,
des Egyptiens & des Anglois , fous le nom de Bridferth de
Ramfey. Il compofa aufll des Commentaires fur le Traité de
Bede , qui a pour titre De la nature des chofes ^7* des tems.
:

Ils font imprimés dans le fécond Tome des Œuvres de ce Père,

(a) Mabillon ,/;i. jo. Annal, ttum. i. \p'ige f '.

f,f. j
(</) l'ita Ofvaldi. Tom, 7. Ailor,(,yiii
(*) Page r48. j iinm, jo.
\c) MabulON. lib, Jo. AtiriAl, num. I.
'
,

BRIDFERTH ET OSBERNE MOINES- , Ch. V. 95


On peut confultcr la Préface de "Warthon fur les Ecrivains de
la vie de faint Dunflan (e).
Olberne profita de leurs Mémoires ; & ne s'arrctant 0(terne,Moi-
III.
^"'°'^'
qu'aux faits qu'ils a voient racontés , il mit en un ftyle plus pur H^^^
& plus châtié , la vie de ce faint Evcque. Il y joignit le 'récit
des miracles opérés par fon interccffion , pendant fa vie & a-
près fa mort. Oiberne fait remarquer aux Lecteurs (/) , ceux
qu'il ne favoit que par ouï dire , & ceux dont il avoit été té-
témoin , ou qui s'étoient faits de fon tems, & en partie fous
l'Epiicopat de Lanfranc , de qui il reçut la commillion d'en
annoncer quelques-uns au peuple (g). Il écrivoit donc le Livre
des miracles de faint Dunftan , au pl-iitôt en 1 070 , qui fut ia
première année de l'Epifcopat de Lanfranc.
IV. Saint Dunftan étoit né en 924 , dans le Comté de Som- ^'^ de faint
rherfet , près du Monaftere de Glaftembury (h). Il y fut éle-^"" ^°*r
vé dès l'enfance , & y fit les études fous quelques Hibernois
3ui inftruifoient la jcunclTe : car il n'y avoit plus de Moines
ans le Monaftere , dont le Roi s'étoit approprié les domai-
nes. Dunftan pafla de - là. à Cantorberi , auprès d'Ethelme
fon oncle, qui en étoit Archevêque, puis à la Cour du Roi
Edelftan , & enfuite chez Elfegus fon parent, Evcque de Win-
chefter. Il reçut de lui l'habit monaftique & tous les Ordres
facrés. C'étoit l'uiage de n'ordonner perionne fans titre, pas
même des Moines. Elfegus en ordonnant Prêtre Dunftan
lui donna pour titre l'Eglife de Notre-Dame de Glaftemburi.
Cette coutume étoit conforme aux décrets du Concile de Cal^
cédoine Q) , & ce n'eft ciue depuis l'établi flement des Ordres
Mendians , que l'on ordonne indiftindement les Religieux,
fous le titre de pauvreté. Le Roi Edelftan ayant rendu à Dun-
ftan le domaine de Glaftembury , il rétablit le Monaftere &
y
mit une Communauté nombreufe dont il fut le premier Abbé.
Il en fonda cinq autres des biens qu'il avoit hérités de les pè-

re & mère , dont il étoit le feul héritier. Car en Angleterre ,


comme en beaucoup d'autres endroits (ft), les Moines n'ç-
toient point exclus des fucceflions. Il refufa l'Evêché de Vin-

(*) Â/tglia/acra. tom. 2. in Prafat. num, |


(h) Tcw. 7. AU. p. 64^^,
'
!• />• 9. '
(') I^^'^Bii-i-- »<"" "> hune lac, thiJ.
' .

i fngr
(f) De iiiiracalis Du/iJ), nm. 7, ABot, f.'\ éjo.
.
.#7<f.>'-»0.' • .V.. - '1 . ï {JO.MAKIï.LDii.ihid. p.iCipwnotis, ^
•jrt? ADALARD, ABBE'. Ch. V.
mort d'Elfegus. Son zélé à s'oppofer aux
chefler vacant par la
dcfordres du Roi Edui , lui valut l'exil. Il fe retira en Flan-
dre au Monaftere de Blandigni , autrement de Saint Pierre
de Gand. Edgar déclaré Roi à la place d'Edui en ^57 , rap-
:pella Dunftan , & l'obligea d'accepter l'Evêché de Worchef-
ter. II fut iacréparOdon Archevêque de Cantorberi (/): quel-
que rems après on le chargea malgré fa réfiflance , du foin de
l'Eglife de Londres , & enluite de celle de Cantorberi, où il
fut transféré après la more d'Odon en ^61. Cette nouvelle di-
:gnité lui occalionna le voyage de Rome où le Pape Jean lui ,

accorda le Pallium , en le lui faifant prendre iur l'autel de faint


Pierre mais il lui donna de fa main la Lettre ordinaire , con-
:

tenant les devoirs d'un Evêque. Elle fe trouve au commence-


ment de fa vie dans l'édition de Dom Mabillon(/«).
SeiEcrIts. V- Les études étoient fi négligées en Angleterre depuis le
arégne du Roi Elfrid (n) , qu'aucun Prêtre Anglois ne favoit

écrire une Lettre en latin , ni l'expliquer en fa langue. Saint
-Dunftan rétablit les études avec faint Ethclwold , particulière-
ment dans les Monafteres. Il étoit lui-même très-aiïidu à la le-
vure des Livres faints, & il en corrigeoit les exemplaires (0).
Pitfeus lui attribue des formules de bénédidions archiépifco-
;pales (p) , un petit Traité fur la Régie de faint Benoît ; un
'Livre de la Difcipline monaftique; un contre les mauvais Prê-
,tres; & quelques Ecrits fur l'Euchariftie , fur les dixmes, fur
la Philofophie occulte , fur l'ordre du Clergé , & plufieurs Let-
tres , dont quelques - unes étoient à Ed win. De tous ces
Ecrits, on n'a rendu public que le décret pour l'uniformité
de vie dans tous les Monafteres d'Angleterre. Quoiqu'il porte
•le nom du Roi Eadgar , on ne doute point que ce ne foit l'ou-

^vrage de funt Dunftan. Il eft divifé en 12 chapitres. Clément


•Reincrus (7) l'a mis dans l'appendice de la Diflcrtation hifto-
rique de l'antiquité de l'Ordre de Saint Benoît en Angleterre,
imprimée à Douai en 1626, in-fol. Selden n'en a donné que
le prologue (r). Dom Mabillon ayant depuis découvert dans
les manufcrits de M Faure , Dodeur de Sorbonnc , une Lettre
.

de faint Dunftan à Ulfin , ordonné depuis peu Evêque de Schi-

fp) PiTSFtis , p. 179.

(m) /'i'î- (î4?. (î) P"^ 77.


(n) SpumAn. Tom. i. Concf, <i8. (r) Iti netis ad EaJmer, f.
lO;. fS Itm. U
[o) yita Duriflan. 60 j. Ofir.
rcburn |
, ,

BPJDFERT ET OSBERiNE , MOINES. Ch. V. 97


rcburn, l'a inlércc dans l'éloge qu'il a faic de cet Evoque (f)
au icpticme tome des A£les de l'Ordre de Saint Benoît. C'eft
une exhortation très-vive & très-pathétique , à remplir tous les
devoirs de l'Epilcopat. Il lui recommande la fréquente leiturc
du Paftoral de laint Grégoire. Saint Dunftan mourut le 19 de
Mai l'an c>88. Deux jours auparavant où l'on céléhroit la fcte
de Tx^lccndon , il prêcha & célébra la Meiïe. Olhcrne fait un
précis de fon diicours , & remarque que le faint Eveque s'ap-
pliqua à relever le prix du iang de Jefus-Chrifl pour la rémif-
liondcnos péchés. Puis il ajoute, qu'étant remonté à l'autel (r),
il célébra la McHe , en changeant par les paroles toute-puil-

fantes du Seigneur , l'efpece du pain & du vin en la véritable


fubftance de la chair & du fang de Jefus-Chrifl.
VI. Ofberne écrivit la vie de faint Odon , Archevêque de viedefaînt
Cantorberi, prédéceffeur de faint Dunftan («). Odon fut d'à- Oi^^^.Arcne-
bord Eveque de Schireburn , puis de Cantorberi. Il fe défen- torberi.
die d'accepter cet Archevêché , dilant que des Canons con-
damnoicnt les tranflations mais le Roi Edmond lui ayant
;

repréfenté que faint Pierre avoit été transféré d'Antioche à


Rome ^ faint Mellit de Londres à Cantorberi , & fîint Jufl:
de Rochefter au même Siège de Cantorberi , il fe rendit à ces
exemples. Il forma toutefois une autre difiîcuké , qui étoit que
depuis la convcrfion des Anglois , tous les Evêqucs de Can-
torberi avoient été Moines. Le Roi loua fon humilité (x) Se ;

pour lever cet obffcacle , il envoya prier l'Abbé de Fleuri fur


Loire d'apporter à Odon l'habit monaftique. Il le reçut
, fut &
enkiite mis en pcffenion de l'Eglife de Cantorberi. C'étoit
vers l'an 5)42. Sous fon PontiHcat , quelques Clercs infedtés
d'une erreur maligne (y) , s'efforçoient de prouver que le pain

(i| Tom. 7. Auor. p. 139. Chrifii Corpu=& Sanguinem. Quorum e-


(») Inter h.v; Pontifex ad aram reduci- normem perfidiam beatus OJo deftrucre
«ur, transferens omnipotentifllmis Domi- ci.ipins , dum quadam die in confpeftu
ni verbis fpeciem panis & vini in vernm t otius popu'i facro-fandis Mi.Tarum f dem-
(iibftantiam cari.is & fanguinis C^r"fti. Of- niis devenus intenderet , eipreffis la-ry-
BtRti. lu -vil. Drtnflin, to"». y. Acl p. 60^. r.i'ç. D'-i omnipotv-nticclcmeniiam in fuo

{ri) Tcm. 7. Ad. p. 187. n-iinillerio attort? poftulavit, qu« ad depel-


(x) Pa{. ipo. 2.91. lendos hominum errores (ubftantivain. di-
'
(/) Hoc f mpore quidam Clerici mal: vinorum myftcriorum declararet proprie-
gno errore kdudi alfeverire conabanair lateni. Cu'^que ad confradionem vivifie»
pa^cm S: vinum qus in altari ponunlur panis ventum efCrt , confeflim in manus
p_ft confecrationem in priori fubftaniia Pontificis , fragmenta Corporis Clirilli te-
jjctnianere, & figi,ram tantummodo efls neniis Sanauis guttaiimdcfluerecœpit. Vit,
Corporis &Sapguinis Chti&i , non \ecum\OJoit. iiid. p. z^u

Tome XX, N
,

p8 ADALARD, ABBÉ. Ch. V.


& vin que l'on met fur l'autel , demeurent après la confc--
le
cration , dans leur première fubflance , &
que ce n'étoit que
la figure du Corps & du Sang de Jeius-Chrill , & non pas ion-
vrai Corps & fon vrai Sang. Le faint Evcque fouhaicant avec
ardeur de détruire cette énorme perfidie , pendant qu'il célé-
broit un jour avec beaucoup de dévotion les laints myfteres
de la Mefle , il pria Dieu avec effufion de larmes , de faire
connnoîtrc , afin de corriger les erreurs des hommes, la pro-
priété fubftantive ou fubftantielle des divins Myfteres. Quand
on fur venu à la confra£tion du pain vivifiant , & que le Pon-
tife en tenoit les morceaux en la main , on vit couler le fang
goutte à goutte. Alors il fit approcher ceux qui avoient témoi-
gné du doute dans la foi dece Myflere. Dans l'étonncment que
leur caufoit ce miracle, ils en demandèrent un fécond, priant
l'Evêque de demander à Dieu , que le fang reprît fa première'
forme. Saint Odon pria Dieu , & le fang qu'il avoit laiflé fur
l'autel , parut de nouveau fous l'efpece du vin.
'
Ecrits de S. VU. Ofbeme finit la vie de faint Odon , par un petit Poëme-
*^''°°*
à fa louange. Il n'ell: qu'en quatorze vers élégiaques. Celui
qu'il a mis à la fin de la vie de faint Dunflan , eli en feize vers
de même mefure. Saint Odon mourut le 4 de Juillet ()6i. On-
dit que ce fut par fes foins que l'on mit en vers la vie de faint
"Wilfrid , Archevêque d'Yorch. Nous l'avons de la façon da
Moine Fridegod (z) , dans le fécond tome de l'Angleterre
facrée, & dans le cinquième des Aftes de l'Ordre de faint Be-
noît (a). Il la dédia à faint Odon. Cette vie dans l'Angle-
terre facrée , eft précédée d'une Lettre fous le nom de faine
Odon , mais qui paroît avoir été écrite par Fridegod. Elle
roule fur la nécefTité de transférer les reliques de faint Wilfrid
en un lieu plus décent. Dom Mabillon n'a pas jugé à pro-
pos de joindre cette Lettre au Poëme de Frideger mais il cri
:

a porte fon jugement dans une note au bas de ce Pocmc.


Nous avons parlé ailleurs des Conflitutions que faint Odon fît
vers l'an 942 , pour la confolation du Roi Edmond & l'in-
ilruftion de fes peuples. Elles font comprifes en dix articles
& rapportées dans le premier tome des Conciles d'Angleter-
re {b) , & dans le neuvième de la Collcdion du P. Labbc (c).

(t)P«^. fo. I {t)Ton>.u p.4is.


(a) l'a^, epg^ » (0 Tçm, g, f. 606%
,

BRTDFERT ET OSBERNE, MOINES. Ch. V. 99


Le premier article inliftc fur l'immunité des Eglilcs, qu'il dé-
fend de charger d'aucun tribut , difant que les enfans de TE-
glilc, c'cft-à-dire, les enfans de Dieu , en lont exempts dans
tous les Royaumes. Sur quoi il cite ces paroles de S. Ambroile :

L'Eglilc Catholique eft exempte de tous cens de la part du


Prince. Les autres articles regardent les devoirs des Rois , des
Evcques , des Prêtres & autres Clercs , des Moines & des Re-
ligieules , des Seigneurs 8c du peuple. On lit au môme en-
droit {d), une Lettre Synodale d'Odon à fes Suffragans , qui
paroît écrite fous le régne du même Prince. Le faint Evêque
les exhorte à fc conduire avec zélé dans le gouvernement des
âmes. On ne connoît point les autres Ecrits que Pitfeus lui at-
tribue; fçavoir,un Livre aux Moines de Fleuri, pour fon ne-
veu Ofwald ; un de la préfcnce réelle dans l'Euchariftic ; un
Livre de Lettres, & quelques Poéfies.
Vin. On doit encore à Ofberne , l'Hiftoirc de la vie de Viedefair.t

faine Elfegus, &delà tranflation de fes reliques (e). D'Abbé ^'^'^S"^*

de Bath, il avoit été fait Evêque de Vincheiler , & facré par


faint Dunftan en p88. Il gouverna cette Eglife pendant vingt-
deux ans , c'eft-à-dire, jufqu'en 100^, qu'Alfric Archevêque
de Cantorberi , étant mort , Elfegus fut transféré fur ce Siège
à l'âge de cinquante-deux ans. Il fit le voyage de Rome pour
y recevoir le Pallium de la main du Pape Jean XVIII. fon A
jetour il engagea le Roi Ethelrede à tenir un Concile pour la
Téformation des mœurs & de la difcipline. Mais pendant qu'il
•s'occupoit à en fliire exécuter les décrets , les Danois attaquc-
Tent l'Angleterre. Ils prirent de force la Ville de Cantorberi ;
firent tout pafler par le fer & par le feu ; prirent l'Evêquc , le
tourmentèrent , & le mirent en prifon , pour l'obliger à leur
payer trois mille marcs d'or. Saint Elfegus n'étoit point en
•état de leur délivrer cette fommc. Il avoit tout dépenfé à ra-
cheter les captifs & à nourrir le peuple réduit à la famine. Ils
le firent donc fortir de prifon , mais pour le tourmenter de
nouveau. Enfin l'un d'eux lui donna iur la tête un coup de
-hache , dont il mourut le 15) d'Avril de l'an 10 12. Les mar-
.ques de piété & de zélé qu'il donna en cette occafion & pen^
dant fon Epifcopat , l'ont fait honorer dans l'Eglife comme
Martyr. Les habitans de Londres rachetèrent fon corps des

^i) UH.fage 6iu 0) Tom, 8. Atlar. Ordin. *>. Bined. f.ioi.


loo ADALARD, ABBÉ. Ch. V.
Danois : mais dix ans après il fut transféré à Cantorberi. Lan-
franc qui en fut fait Archevêque en 1070, chargea Giberne
d'écrire la vie de iaint Elfegus , & l'hiftoire de la tranflation
de fcs reliques. Ceft ce que dit nettement Eadmer , dans le
premier Livre de la vie de faint Anfelme ; Ofberne le dit aufil
dans la Préface de fon Ouvrage, qui eft adreffée à tous ceux
qui demeurent fermes dans la foi de Jefus-Chrift. Il paroit par
la même Préface , qu'O/berne avoir par ordre du même Lan-
franc , mis en vers la vie de faint Elfegus , pour être chantée
dans FEgliie au jour de la Fête. Eadmer le dit encore. La vie
de ce Saint Martyr a été donnée au 19 d'Avril par Surius ,
par les Bollandifles , par Dom Mabillon , dans le huitième
tome des A£tes de l'Ordre de faint Benoît, & dans le fécond
tome de l'Angleterre facrée. "Warthon y a aufli donné place à
la vie de Iaint Odon , &: au premier Livre de la vie de faint
Dunftan.
/utresEcrits jx. Celle de faint Elfegus mife en vers par Ofberne , n'a
attribues
Olbcrne. pas encore été mile fous la prclfc. On la conferve dans la Bi-
bliothèque du Collège de Iaint Benoît à Cambrige. Bala:us &
Pitfaeus mettent dans le Catalogue des Œuvres d'Ofberne (/),
plufieurs Epîtres familières , & un Livre intitulé De la conjo- :

nance des voix , le même apparemment que le Livre de la Mu-


fique; car on dit qu'il excelloit dans cet art {g). A l'égard de
la Pannormic ou Vocabulaire , on croit qu'il eft d'Oibcrne ,
Moine de Glocefter, qui écrivoit vers fan 1140. "Warthon
avoit attribué à celui de Cantorberi {h) , la vie de faint Brc-
genin , Archevêque de cette Ville , vers l'an 75p , mais il a
reconnu depuis , que ce n'étoit qu'un abrégé de ce qu'en a dit
Eadmer, Ecrivain du douzième fîécie.
^gemfnt Je. X. Les Ecrits d'Ofberne font rccommandablcs par la clar-
té , l'élégance & la noblcflc du flyle , autant que par l'atten-
Fcrits d'Of-

tion qu'il a eue de n'y rien avancer que fur des témoignages
autentiques ; c'eft-à-dire , pour me fervir de les termes (?) , fur
le rapport de ceux qui avoient vu les chofes , ou de ceux qui
les avoient apprifes des témoins oculaires. Il fait paroître par-
tout beaucoup de piété & de modcftie ; & ce ne fut qu'avec

{V) Trm. r. Allait X f.ur:t, p. 7f 77.


.

(<) OsCi^Kti. itologa iuvitti LlfbigJyfi


(?) MALMfSB. Lik. He Rt^ilus Angl. 104. loi». &,Aîi.
DÏTMAR, EVESQ. MERSB. Ch. VI. loi DE
quelque forte de peine qu'il changea le langage barbare des
mémoires qui lui avoienc été fournis. 11 fallut des ordres de la
parc de ceux qui l'engageoienc à écrire ; pour changer le ftyle
de ces mémoires , &
pour rendre en un latin plus pur , les
faits qu'ils contenoient [k). D'autres avant lui avoient écrit iur
les mêmes matières, &
s'étoient efforcés de le faire avec métho-
de & avec élégance ; mais leurs Ecrits ne fubfilloicnt plus : ils
avoient été confumés par les flammes dans l'incendie de Can-
torbcri par les Danois. Il n'en reftoit plus que le louvenir.

CHAPITRE VI.

Dhmar , Eveque de Merjhourg,

I. TL de Saxe (/) , fils de Sigcfroi & de Cii-


étoit originaire Ditmar. Sa
Son
I negondc , & l'autre
de la première Nobleile du pays,
l'un
naifiance.
cducaticn.
& très -riches. Etant encore jeune, il fut envoyé à Magdc-
bourg dans le Monaftere de Saint Maurice, où il prit l'habic
monartique ; fans toutefois renoncer aux biens de fa famille.
Après la mort de Vigbert , Eveque de Merfbourg , l'Empe-
reur Henri appella à la Cour Ditmar , & lui fit demander s'il
donneroit une partie de fes terres à l'Eglife vacante , pour l'ai-
der dans fes befoins (;«). Ditmar ne voulut s'engager à rien :
feulement il dit à celui qui lui avoit fait cette propofition de
la part du Roi , que fi par la volonté de Dieu & du Roi , il
devenoit Eveque de Merfbourg , il donneroit volontiers de
fes biens à cette Eglife , pour le falut de fon ame. L'Empe-
reur content de cette difpofition , lui donna l'Evcché avec le
Bâton Paftoral. Il fut facré au mois d'Avril , le Dimanche de
l'Oftave de Pâques de l'an 1009 , âgé de trente-trois ans («).
Le Clergé & le peuple fe congratulèrent de l'avoir pour Pa-
fleur (0) , & il en remplit les devoirs , par fon afTiduité aux
bonnes œuvres , & fon application à faire rendre à fon Egli-

(^) Jdem. vitx Dtvijlnm. tcm. 7.ptg.\ («i) Ditmar. I/i. ^.;>. jSj.
644. ,
I {11) Chronic.S.xxon. rd an. 1009.
(/) Vita Dilmitr. tom. i. Script, Bb,vj:>SV. [o) ]'ila- Ditmar, p. /{.].%:,
j
/»+i7. £i»t, lia/;»!/. (»«. 1707. ' 1
102
^
D T T M A R ;
fc les biens qu'on lui avoir ôccs. Entre les vertus , fon Hifloîre
relève Ion humilité , dont Ditmar a lui-même donné urïe preu-
ve en faifant fon portrait. 11 n'y diiïimule ni fes fautes , ni fes

défauts naturels (p) , difant qu'il étoit de petite taille de mau- &
vaife mine, indigne non-feulement ds l'honneur de l'Epifco-
pat(^) , mais même du nom. Il mourut le premier jour de Dé-
cembre de l'an loip.
Chronique de gon nom eil devenu recommandable à la poftérité (r) , par
une Chronique divifée en huit Livres , dont le premier com-
mence au régne de Henri l'Oifeleur & le dernier finit à ce- ;

lui de Henri II ; cnforte que tout l'Ouvrage renferme THif-


roirc de cinq Empereurs , de Henri I , des trois Ottons & de
Henri II. Ditmar y entre dans de grands détails , mais qui ne
font pas également intéreiïans. Il s'applique fur-tout à faire
connoîtrc les plus iaints Evêques avec qui il avoit été en re-
lation j & ne ménage pas les grands Seigneurs , foit de Fran-
ce, foit d'Allemagne , foit d'Italie, qui ne refpe£loient ni les
Eglifes , ni les Evêques , ni rautorit<î de leurs Souverains. Rap-
portons quelques traits de cette Chronique. Ditmar, en par-
iant de deux de fes ancêtres qui avoient été tués dans une ba-
taille avec plufieurs autres , dit qu'aucun Chrétien ne doit dou-
ter de la future réfurreftion des morts: il en donne pour preu-
ve ( j ) , trois ou quatre apparitions de morts , qu'il croyoic
bien avérées. Il prouve auffi la réfurre£tion des morts par l'au-
torité de l'Ecriture , & par la nature de l'ame de l'homme. I!
fait cette digrefTion à caufe des Sclaves qui s'imaginoient que
tout périlfoit avec le corps , 8c qu'après la mort temporelle ,
il n'y avoit plus rien à efpérer ni à craindre pour l'homme.

Les Normans & les Danois avoient coutume tous les neuf ans,
au mois de Janvier , d'immoler à leurs faux Dieux 5)9 hom-
mes 5 autant de chevaux , de chiens & de coqs. Le Roi Henri
les ayant fubjugués leur défendit de fcmblablcs facrifices. Ce
,

Prince ayant pris plus de vin qu'à l'ordinaire un jour de Jeu-


di-Saint , obligea la Reine Mathilde à violer la régie de la
continence prefcrite en Carême (f). Ce qui fut regardé com-
me un crime , & jctta cette Princcfle dans un grand char
grin.

(f)nnMAR. Lib. 4. p. jf;^,


I
(î) fil', i.p, J26. 517,

(r) tdil.LeibiiiH,. att, l-jo-j; %


EVESQUE DE MERSBOURG. Ch. VL io}
III. Sous le régne de l'Empereur Otron I («), HaroldRoi des
Danois , vivoic comme l'es prédéceiïeurs dans le culte des fciux
Dieux. Un Prêtre nommé Topon, l'en reprit , & tâcha d'en
détourner le peuple, ioutcnant que Jei'us-Chrift étoit le ieul
Dieu , avec le Pcre & le Saint -Eiprit. Le Roi lui demanda
s'il vouloit prouver fa créance par l'épreuve du fer chaud.

Popon l'accepta. Le lendemain on tit rougir un fer très-pefant,


Popon après l'avoir béni , le porta en fes mains juiqu'au lieu
marqué par le Roi Harold : puis il montra à tout le monde la
main faine & entière. Ce Prince réjouï de ce miracle , em-
braffa la Religion Chrétienne avec tous fes fujets , & ordonna-
qu'on en fuivroit les loix & les ufages. Popon fut élevé à l'E-
pifcopat en 5)61. Otton I , fit transférer de Ratifbonne à Mag-
debourg, les corps de faint Maurice & de quelques-uns des
compagnons de ion martyre. Il fit auiïi ériger cette Ville en
Métropole {x) , par le Pape Jean XII. Ditm.ar défapprouvc
les procédures contre Benoît V (y) , difant qu'il n'apparte-
noit qu'à Dieu de le juger. Ce Pape conduit à Hambourg ,
fut mis à la garde de l'Archevêque Adaldague , & mourut en
cet exil en()6-^. Sa. mort fut iuivie d'une grande mortalité dans
l'armée de l'Empereur (s). Ce que l'Auteur regarde comme
une punition de l'entreprife de ce Prince contre Benoît V,
Quelques années auparavant, c'eft-à-dirc en 954} on vit pa-
roître fur Ie5 habits des hommes le figne de la croix. Ceux qui
regardèrent ce prodige avec refpetl , n'en reçurent aucun
dommage ; il fut nuilible à ceux ciui s'en mocquerent. Juditte
veuve du Duc Henri , avoir de l'aftcdion pour Abraham Evê-
que de Frifmgue. Ses envieux en prirent occafion de les ac-
cufer d'un mauvais commerce (<7). Cette Princefle étant au lit de
la mort , l'Evêquc chanta la Meffe , & étant venu à la commu-
nion, il prit entre fes mains le corps de Jefus-Chrift , & din
aux affiftans , qu'il vouloir que ce remède du falut lui fervît de
damnation , fi le crime qu'on lui imputoit & à Juditte , étoit
réelle. Il cbnfuma l'hoftie & défabufa le peuple.
IV. L'Empereur Otton II , accorda par un Diplôme , au
Chapitre de la Cathédrale de Magdebourg (b) , le privilège
de fe choifir un Archevêque ; & fit préient à Adclbert qui

(x) P^ge ^34. 1 {a) rag. 340.


i^y.P'Z' HT- * (i-)!!*, 3.p/i^. 341.
,

104 D I T M A R
reçoit alors , d'un Livre dans lequel il avoit fait mettre (on
portrait & de l'Impératrice Thcophanie fon époule , en
celui
or. Geron, Archevêque de Cologne, Ht faire avec beaucoup
d'art j un Crucifix pour être placé au milieu de fon Eglife.
N'étant que de bois , il arriva que la tête du Chrifl fe fendit.
Geron ne voulut point recourir à l'ouvrier mais joignant une ;

partie de l'hoftie conlacréc à un morceau de la vraie Croix (c) ,


il les fit entrer dans la fente puis fe mit en prière , donna fa
;

bénédiction , & aufli-tôt les parties féparées fe réunirent. Mi-


ciflas Duc de Pologne , avoit époufé la fœur de l'ancien Bole-
flas Duc de Bohême Elle fe nommoit Dobrane, c'eft-à-dire,
Bonne , & faifoit profciïion de la Religion Chrétienne mais :

fon mari ctoic encore payen (d). Le premier Carême qui fui-
vit fon mariage , elle voulut, fuivant le précepte de l'Eglife,
s'abflenir de viande. Miciflas la pria de n'en rien faire. Elle
céda à fes prières , dans l'efpérance d'être exaucée de lui en
quelque autre occafion. En effet, elle l'engagea par fes exhor-
tations, à recevoir le Batême : les iujets fuivirent fon exemple.
L'Empereur Otton III , étant à Aix-la-Chapelle (e), vers l'an
looo, voulut s'affurer de l'endroit où l'on avoit mis le corps
de Charlcmagne & l'ayant découvert , il tira de fon tombeau
;

la croix d'or qui pendoit à fon col , une partie de fes vête-
mens , qui fe trouvèrent fans pourriture , remit le refte avec&
beaucoup de vénération. Il fit rapporter de Hambourg à Rome,
!e corps de Benoît V , fuivant la prédidion de ce Pape. Pen-
dant fon exil (f) , il étoit très-appliqué au fervice de J. C.
& le pays étoit en paix ; mais prévoyant ce qui devoit arriver ,
il dit: « Je dois mourir ici: enfuite toute cette contrée iéra

» défolée par les armes des payens , & deviendra l'habitation


>j des bêtes fauvages. Avant la tranflation de mon corps , les

j> gens du pays n'y jouiront point d'une paix folide. Mais
« quand je ferai retourné à ma maifon , j'cfpere que par l'in-
>« tercefTion des faints Apôtres , les payens demeureront en
« repos ». L'événement vérifia la préditlion. Ce fuîRacon ,un
des Chapelains d'Otron lU, qui fut chargé dt cette tranlla-
tion. Ce Prince mourut quelque tcms après: fon corps fut por-
té à Cologne , le Jeudi-baint de l'an looi. On le dépofa dans

Cf)Prtçf 341. 1
(t)Pa-e$S7-

l'Eglife
EVESQUE DE MERSBOURG. Ch. VI. 105
l'Eglilc Cathédrale («). L'Archevêque après avoir don-
de la
né rablolution aux Pénitens félon la coutume, la donna aulîi
à l'ame du défunt Empereur en prcfence de ion corps ; & re-
commanda aux Prêtres d'en faire mémoire.
V. Saint Volfang , Evêque de Ratifbone (Ji) , étant près de
mourir , fit venir Tagmon
fon difciple , qu'il avoir élevé dès
l'enfance , &: lui dit Mettez votre bouche fur la mienne , 8c
:

recevez du Seigneur le fouflfle de mon efprit , pour tempérer


en vous l'ardeur de la jeunefle , par celle de la charité. Si
vous êtes maintenant privé de ma dignité , lâchez que dans
dix ans vous en recevrez une plus grande. Tagmon fut élu
tout d'une voix , Evêque de ilatiibonne ; mais l'Empereur
Henri lui refufa fon confentement. Ce fut. une occafion à Tag-
mon de s'attacher à Henri Duc de Bavière , qui au bout de
dix ans le fit Archevêque de Magdebourg. Ainfi fut accom-
plie la prophétie de faint Volfang. En 1005 (?) , il fe tint une
grande aficmblée à Throtmunn , où le Roi Henri fe trouva
avec la Reine Cunegondc fon époufe , & plufieurs Archevê-
ques & Evêques. On y ordonna que quand quelqu'un d'eux
viendroit à mourir , les autres diroient dans l'efpace de tren-
te jours , chacun une Méfie pour le défunt & les Prêtres de ;

la campagne , trois ; les Diacres & les autres Clercs inférieurs


dix Pfeautiers; que le Roi& la Reine donneroient cinq cens
deniers , &
nourriroient autant de pauvres ; que chaque Evê-
que en nourriroit trois cens, donneroit trente deniers,& &
autant de luminaires. Il fut encore ordonné qu'aux veilles de
faint Jean - Baptifte , de iaint Pierre &; faint Paul , de faint
Laurent &
de tous les Saints , on jeûneroit au pain , à l'eau
& au fel ; que le jeûne de la veille de l'Afl'omption , des Apô-
tres , des Quatre-Tems , feroit de même qu'en Carême , ex-
cepté le Vendredi de la femaine avant Noël , où l'on jeûne-
roit au pain, au fel &
à l'eau. Je ne fais où Ditmar avoit lu
que Tertullien fut fait Prêtre par le Pape faint Etienne , que &
quatre jours après il fouffrit le martyre pour l'amour de Jefus-
Chrift (fe). Il dit que le Pape Sergius IV, s'appelloit aupara-
vant. Bouche de -porc (/).
VI. Le 22 de Février de l'an 10 14 {ni) , le Roi Henri

COP^jT. 5Ç8. ;f9. I


C^) Pa?. 594.
(A )
lih. î. p. 574. (l) P"?. 199.
I
{i\ Lih. 6. p. xEo. 1' "') I^'f>-7- {'''g- 430-
Tome XX. O
, ,, ,

lo^ D I T M AR
étant à Rome dans le deflein de s'y faire couronner Empe»
reur , VEglile de iaint Pierre , accompagné de la Reine
alla à
Cunegonde fon époufe , &
environné de douze Sénateurs
dont fix avoient la barbe raze à la Romaine , fix de longues
mouftaches à la Françoife , & des bâtons à la main. Le Pape
Benoit XII , qui Tattendoit au dehors , lui demanda s'il vou-
loir être le protecteur & le défcnleur de l'Eglii'e, fidèle en &
tout à lui & à fcs lucccfleurs. Le Roi le promit. Alors étant
entré , reçut du Pape l'onclion impériale & la couronne
il

avec la Reine Cunegonde, & fit fufpendre devant l'autel de


faint Pierre, la couronne qu'il portoit auparavant («). Er-
nefte Duc d'Allemagne , étant à la chaffe , fut percé d'une
flèche par un des chafleurs qui l'accompagnoient , le prenant
pour une biche. Le Duc fentant qu'il ne reviendroit pas de
cette blcffure , appella tous ceux de fa fuite , les pria de par-
donner au meurtrier; & n'ayant point de Prêtre à qui il pût
confelTer fes péchés , il obligea un de fes foldats de l'enten-
dre , & confefTa à haute voix en préfence de toute la compa-
gnie , tous les péchés dont il fe fouvint puis il mourut. Dit-
;

mar remarque qu'Eid , Evêque de Meiflen , confacroit fou-


vent des Eglifes fans dire de MeiTe ; qu'il la difoit rarement
faifoit rarement le faint Chrême & ordonnoit peu de Clercs ;
en quoi on ne pouvoir l'accufer de négligence (o) , puifqu'il
étoit continuellement occupé à prêcher , à baptifcr & à confir-
mer , même dans les autres Diocèfes. Il dit que faint Colomban
pleuTa la mort de Charlemagne ce qui fait un anachronifme
:

de près de deux fiécles (p).


Editions de la i/H. La Chronique entière de Ditmar contient l'hiftoire
* de Cent fept ans. Reinerius Reincccius efl: le premier qui l'ait
Ditmar!"^
rendue publique, mais remplie de lacunes. L'édii ion qu'il en
fit , parut à Francfort en i 580 , in-fol. On la réimprima en

1600 , chez Wcchcl , dans le Recueil des Hiftoriens d'Al-


lemagne. Maderus la donna fcparément avec des notes mar-
ginales & des Tables généalogiques, à Helmflad en i66j ,
in-j^". M. Lcibnits ayant eu communication d'un ancien Ma-
nufcrit du Père Papebroch , s'en fervit utilement pour répa-
rer tous les vuides des éditions précédentes. Il en donna une
nouvelle dans le premier tome de fon Recueil des Ecrivains

(a) Pa^t 406. I


EVESQUE DE MERSBOURG. Ch. VI. 107
dcBrunlvic, imprimé à Hanovre en 1707. II n'y a pas fait
entrer la vie de Dicmar par Reineccius, & s'efl contente de
rapporter l'ancienne vie , tirée d'une Chronique manufcritc
des Evêques de Mer/bourg. L'Ouvrage de Ditmar, quoique
d'un flyle dur , peu châtié & quelquefois obfcur , mérite l'e-
ftimc du public qu'il eu prcique le ieul c]ui ait tranf-
,
parce
mis à événcmens conîidérables de ion tems.
la poftcrité les
Il les rapporte de bonne foi Se avec beaucoup de candeur.
On le trouvera peut-être trop crédule , fur quantité de vi-
dons & d'apparitions de morts. Mais cette crédulité ne doit
diminuer en rien le prix d'un Ouvrage , où il ne raconte que
des faits paffés Tous les yeux de tout le nwnde. Il s'étend
beaucoup plus fur l'Hiftoire de Saxe , où il vivoit , que fur
celledes Provinces voifincs c'étoit fon but de décrire les ré-
:

gnes des Empereurs , qui ont gouverné en même-tcms l'Em-


pire Romain & le Germanique ; mais il ne laiffe pas d'entrer
dans le détail de l'Hiftoire des Sclaves , des Polonois , des
Hongrois , que l'on ne connoîtroit pas aujourd'hui il bien ,
fans le iecours de Ditmar il a même répandu des lumières
:

fur divers endroits de l'Hiftoire d'Angleterre. Le Prologue


de la Chronique , efl: en vers hexamètres , de même que
les Prologues des deux , trois , cinq , iix , feptiéme Livres.
L'Auteur y fait l'éloge des Princes dont il va donner l'Hi-
ftoire.
VIII. Un Anonyme contemporain de Ditmar (q) , nous a Chronique
laiflé auffiune Chronique des Saxons , mais d'un dcftcin dif- Q^elirabourg!
feront. Elle a pour titre ; Chronique de ^iielimboiir'^ , & com-
mençoit à la Création du monde , fuivant l'ufage des ancien-
nes Chroniques. M. Leibnits, en lui donnant place dans le
fécond tome des Ecrivains de Brunfvic , imprimé à Hanovre
en 1710, en a retranché tout ce qui précédoit le régne de
Valentinien. C'eft-là que l'anonyme commence à parler des
Francs & des Allemans. Ceux-ci s'étant révoltés contre Va-
lentinien, furent vaincus dans un combat. Ils fe retirèrent fur
les bords du Danube ; d'où les Francs les chafterent par or-
dre de Valentinien. Ils bâtirent fur les confins de la Panno-
nie , une Ville à qui ils donnèrent le nom de Sicambrie. Juf-
qucs-là ils avoient été appelles Troycns. Ce Prince les nom-
ma Francs , qui en langue Attique , lignifie féroces. Sortis de

(.;) Tetn. z. icri^», Brunfvic. pflg. 172,


io8 D I T M A R ,
Sicambrie, ils vinrent fur les bords du Rhein. Leurs premiers
Chcl's furent Prinm , Antcnor, Cunon , Marchomire , Pha-
ramond. Ilconduit fon Hiftoirc jufqu'en 1025 ; mais peut-
être alloit-il plus loin car il manque quelque chofe à la fin de
:
^^
cette Chronique. Il ne fait aucune remarque fur les années qui
s'écoulèrent depuis 5x^1, jufqu'en 5^84: ce n'efl: qu'à cette &
année qu'il commence à rapporter au long les événemens. En
998 , au mois de Juillet, il y eut par toute la Saxe un horri-
ble tremblement de terre &
dans une tempête , il tomba du
:

tonnerre deux pierres de feu ; l'une à Magdebourg , l'autre


au-delà de l'Elbe. En loop , le Dimanche des Rameaux , on
apperçut en divers endroits des gouttes de fang qui décou-
loient des habits des hommes. Ces deux prodiges furent re-
gardes comme des prognoftiques des accidens fâcheux qui fur-
vinrent. L'Auteur s'arrête volontiers à ces événemens fingu-
liers , aux incendies, aux inondations. Comme il écrivoit à
Quelimbourg même, il raconte dans un grand détail , les cé-
rémonies de la Dédicace de l'EgUfe de cette Ville , & les re<
liques des Saints que Ton y confervoit. Il y en avoit des fain-
îes Viergeî de Cologne. La Chronique n'en met pas le nom-
bre. Cette cérémonie fe pafla en 102 1. L'année précédente
le Pape Benoît VII , célébra avec l'Empereur Henri , les fê-
tes de Pâques à Bambcrg puis il s'en retourna à Rome char-
:

gé de préfcns. On voit ailleurs (r) , que ce Prince donna la


Ville & l'Evêché de Bamberg à l'Eglife Romaine , avec une
redevance annuelle d'un cheval blanc enharnaché. En 1012,
ce Prince fit dédier l'Eglife Cathédrale de la même Ville. La
cérémonie en fut faite par trente Evêques. Les deux Abbeffes
Sophie & Adélaïde fœurs de l'Empereur Otton III , y afll-
flercnt avec un nombreux Clergé & une grande multitude de
peuples. Le Roi accorda en cette occafion , le pardon à plu-
fieurs coupables. Mais la même année , il fît chaffer de Maycn-
ce les Juifs. Il tint aufïi à Coblents un grand Concile , pour
la condamnation de Thierri Evêque de Metz, & des autres
rebelles de Lorraine. Ceux qui fe fournirent , obtinrent le
pardon.
wffingus , j^^ L^ Yie de fainteldc femme d'Ecbert Duc des Saxons ,
.Werdem a été écrite par ^i'^ffingus Moine de "Werden en Wcitphalie.

(r) BAaONR'S > ad an. loi 4. {ag. 4p. ^ Canis. Vit» Uenrui , tom. 3. furr. z»

fi' JO-
,, ,

EVESQUE DE MERSBOURG. Ch. VI. lop


II y a joint l'hiftoirc des miracles opérés à fon tombeau , &
celle de la tranOation de Tes reliques , en 5)80, au mois de
Novembre. Cette vie le trouve dans la Collection de Surius,
au quatrième de Septembre &: dans le premier tome des E-
;

crivains de BrunlVic par M. Leibnits. Elle y eil luiviedeTHi-


ftoire de la tranflation de faintc Pulinne à Hervord , par les
foins de l'Abbeflc Hardwide , fille d'Ecbert & de fainte Ide.
"Wffingus écrivit auiïi la vie de laint Lutger Evêque de Mun-
fler (s). On en avoir déjà une par Alfrid , Evcque de la mê-
me Ville. Nous en avons parlé en fon tems. Nous obferve-
rons ici , qu'elle cft plus ample & plus correde dans le pre-
mier tome des Ecrivains de Brunfvic , que dans les éditions de
Bollandus , & de Dom Mabillon. On attribue encore à "Wffin
une vie de laint Luce , Roi d'Angleterre (/).
X. Celle de faint Bcrnouard , Evcque d'Hildesheim («) , Tangmar
a été écrite par un Prêtre de cette Egîifc nommé Tangmar. jg."çfn,. vie
Il étoit d'autant plus en état de l'écrire , qu'il l'avoit connu de faim B.i-
dès fes premières années ; qu'il fiit depuis le compagnon "ouard.
de fes voyages , & Ion confcil en divers affaires. Folemar
Evêque d'Utrecht , oncle de Bcrnouard , confia fon éduca-
tion à Oidag, Evêque d'flildeshcim, qui le mit fous la con-
duite de Tangmar Chef de fon école. Celui-ci n'oublia rien
pour mettre à profit les grandes difpofitions qu'il remarqua
dans fon élève. C'étoit un génie uiiiverfel, également né pour
les fciences & pour toutes fortes d'arts. Ses études achevées
Bcrnouard paffa chez Villegife , Archevêque de Mayence
qui l'éleva à la Prêtrife. Appelle à la Cour du Roi Otton ,
l'Impératrice Theophanie mit fous fa conduite ce jeune Prin-
ce. Bcrnouard trouva le moyen de s'en faire craindre & ai-
mer ; Se l'accoutuma de bonne heure à découvrir les artifices
de la flatterie & de la diflîmulation dans les avis des Courti-
fans. Gerdag , Evêque d'Hildesheim , étant mort en 5^92
,
Bcrnouard fut élu pour lui fuccéder, & facré le 15 de Jan-
vier de l'année fuivante , par Villegife, Archevêque de Mayen-
ce. Son application aux fon£tions de l'Epifcopat , ne lui fit
point changer le goût qu'il avoit naturellement pour les ou-
vrages d'eÇrit & d'indullrie. Il employa bon nombre d'écri-

(i) Suffrid.Petb.1, (/« 5f»<p»(ir. Frj/?*, r (n) ]\1abillon. tom. S. A3or. p. 18».
Jec.iile 7. cap. y. Script, BriipfiU.p, 441.
j
(^ ,cw.
j .

[t) Idfm, ItiJ.


,

no D I T M A R,
vains à tranfcrire les Livres tant eccléfiaftiques que philofo-
phiques , &
chercha cà pcrfe£bionner la peinture , la mofaï-
que , la ferrurerie , l'orfèvrerie. Il lit môme bâtir des fortereffes
pour mettre le pays en fureté du côté des ennemis.
Son voyage
XL Un différend furvenu entre lui & l'Archevêque Ville-
looi. gifc (x) , au fujet d'un Monaftere de Filles nommé Ganden-
lem , l'obligea de faire un voyage à Rome , où il avoit porté
fa plainte. Le Pape Sylveftre II , alTembla un Concile. La fen-
tence fut favorable à Bernouard & le Concile écrivit à l'Ar-
,

chevêque de Mayence , de fe délifter de les prétentions fur ce


Monaftere. Le Prêtre Tangmar fut de ce voyage. L'Arche-
vêque ne voulant point fe défiflcr , on tint un Concile à Franc-
fort , où Tangmar fut député par Bernouard , qu'une indif-
pofition empêchoit de fortir. Mais on n'y décida rien ce qui :

l'engagea à envoyer Tangmar à Rome. Il y fit rapport au


Pape de ce qui s'étoit paflfé à Francfort (y) ; de la façon
dont Villegifc s'y étoit conduit, prenant à témoin du vrai
l'Archevêque de Ravenne , qui y avoit afTifté. Les Evêques
Romains blâmèrent le procédé de Villegifc ; mais ne déci-
dèrent point le différend , voulant en conférer auparavant
avec l'Archevêque de Cologne , que l'on attendoit à Rome.
Tangmar en partit l'onzième de Janvier de l'an 1002. Cinq
ans après , c'eft-àdire en 1007 , l'Empereur Henri réconci-
lia Villegifc avec Bernouard , à l'occafion de la Dédicace de
l'Eglife de Gandcnfcm. Tous les deux aflifterent à cette céré-
monie. Bernouard en fit les invitations & les arrangcmens :
& Villegifc, en qualité de Métropolitain, tint le premier rang
dans les afperfions , & Bernouard avec lui. La cérémonie de
la Dédicace achevée, le Roi Henri déclara publiquement que
cette Eglife avoit toujours appartenu comme elle appartenoic
encore , à l'Evêque d'Hildcshcim ; & l'Archevêque pour mar-
que qu'il renonçoit à la jurilditlion fur cette Eglife , donna
le bâton Paftoral qu'il avoit en main , à Bernouard , avec
proteftation , tant pour lui que pour fcs fuccefleurs , de ne
plus rien entreprendre fur l'Eglife de Gandcnicm puis à l'in- :

vitation de Bernouard , il célébra la Meflé folemncUe.


Bernouard
^ll. ViHegifc mourut au mois de Février ion on lui :

chevéque de' donna pour fuccefTcur Archcmbaud , qui fut facré à


Mayen-
Mayeiue. ce par Bernouard. Son Epifcopat ne fut que de neuf années.

(«) Mabillon. iliil.p. l'jo.». II. (7) Num. 31.;». ip;.


EVESQUE DE MERSBOURG.Ch. VI. iii
étant mort au mois d'Août de Tan 1020. Aribon lui fucccda.
Bernouard en l'ordonnant Prêtre , lui fit promettre en prc-
icnce de l'Empereur Henri & de plufieurs Evcques , de ne
point attenter à fes droits fur TEgliie de Gandenfcm. Ari-
bon le promit ; mais il faufla depuis fon ferment. Néanmoins
fes tentatives furent inutiles tant que Bernouard vécut. C'eft
ici que Tangmar finit la vie de ce Saint. Elle fut continuée
par un Anonyme, jufqu'au tems de fa mort, qui arriva le 20
de Novembre 1022. 11 fe fit plufieurs miracles à fon tom-
beau , qui ont été recueillis par divers Ecrivains anonymes.
Ce Recueil fait le fécond Livre de la vie de faint Bernouard.
On y a joint la Bulle de la canonifation faite en 1 1^4, par le
Pape Céleflin III (z).
XIII. Saint Godehard fon fuccefiTeur (a) , fut aufiî canoni- Viedefaînt
p"
fé dans le même fiécle. Il étoit né dans le Diocèfe de PafTau. ^°^^£^
Des fon enfance , on l'otfrit à Dieu dans le Monaflere d'Al-
tach. L'Empereur Henri n'étant que Duc de Bavière , le fit
Abbé , & lui donna plufieurs autres Monafleres à réformer.
Quoiqu'il fût déjà fort âgé lors de la vacance du Siège d'Hil-
desheîm , ce Prince le choifit pour le remplir. Saint Gode-
hard le refufa d'abord , mais cnfuite il l'accepta , & fut facrc
le 30 de Novembre 1022. Il vécut quinze ans depuis, n'étant
mort que le 30 de Mai 1038. Sa vie a été écrite par Wolfe-
rus , qui avoir vécu avec lui , & l'avoit connu particulière-
ment , foit à Altach, foit à Hildesheim. W'olferus dédia l'Ou-
vrage à Albuin. Arnold le revit quelques années après , &
y ajouta plufieurs miracles. Cette féconde vie efl adrefi"ée à
Menghard. Quoiqu'elle foit abfolument la même que la pr«-
miere pour le fond , Surius & Browerus l'ont publiée fous le
nom d'Arnold , dont le nom fe trouvoit dans leurs Manuf-
crits. Les BoUandifies foutiennent qu'on doit la donner à
Wolfcrus : en quoi ils font fuivis par Dom Mabillon & par
M. Leibnits, qui l'ont fait imprimer dans leurs Recueils. Ar-
nold n'a donc fait autre chofe que de la revoir d'y ajouter &
quelques miracles , comme on vient de le dire. Nous dirons
de "Wolferus & de Tangmar , qu'ils ont donné l'un l'autre &
à leurs Ecrits , un air de gravité & de religion , qui les feront
goûter de ceux qui aiment les Ouvrages où l'onflion régne

(O Tem. S. Jiclor.

(j) Mabillon ,
pa^. jjo. î5 tom, i, Scrtpt, Brunfvi:. />. 4S«.
,,

112 D I T M A R,
avec la vérité. Ceux-ci font encore intéreflans par divers traits
qui ont rapport à THifloire générale de i'Eglile & de FEm-
pire.
Vie de faînt XIV.
Il s'en trouve beaucoup de femblables dans la vie de

^£q "g "g


p
J faint Mcinuerc , Evéque de Padcrborn (i) , imprimée dans
le premier tome des Ecrivains de Brunfvic. Elle avoit déjà
'
derborn.

été publiée par Browerus à Maycnce en 1616 in-^°. He. par


Adolphe Overham , à Ncuhaufl^ en 1^8 r , i«-8^. avec de fa-
vantes notes. Mcinuerc étoit parent de l'Empereur Otton III.
Mais ce Prince laimoit beaucoup plus pour la probité de fes
mœurs. Il le fit ion Chapelain & le fervoit de lui , tant dans
les affaires lecrcttes que politiques (c). L'Evêque de Pader-
born étant mort en 1005», le Roi Henri afTembla fon Confeil
pour délibérer fur le choix d'un fucceffeur (^). Mcinuerc fut
préféré à tous , foit pour fa naiflTanee , foit pour fes grands
biens, foit pour les vertus. Le Roi l'ayant fait appeller , le
reçut en ioûriant, & lui donna un gant, en difant Prenez: :

Que prendrai-jc , répondit-il ? L'Evcché de Paderborri , re-


prit le Roi. J'ai affez de bien , répliqua Mcinuerc , pour en
fonder un meilleur. C'eft cela même que je confidere, ajouta
le Roi , & je defire que vous fubveniez à la pauvreté de cette
Eglifc. Meinuerc l'accepta à cette condition , & fut facré par
Willegile, Archevêque de Mayence, le fécond Dimanche de
Carême. Il commença par rétablir fon Egliié Cathédrale
en augmenta les revenus (e-) , prit foin des pauvres , remit fur
pied les , inflruifit la jeunefTe
études ce qui le fit avec tant
:

de fucccs que fous Imade fon neveu & fon fucceffeur (/)
j
on apprenoit dans l'Ecole de Paderborn , les fept arts libé-
raux ; on y lifoit Horace , Virgile , Crifpe Salufle , Stace ;
on y apprenoit à bien écrire & à peindre. Meinuerc accom-
pagna l'Empereur Henri en Italie {g). Le Pape Benoît lui fit
un accueil gracieux , & lui donna un privilège contenant la
confirmation des donations faites à fon Eglife. Il eft daté de
l'an 1014 ( A). Ce Prince à fon retour en Allemagne , pafTa
par Cluni. Meinuerc obtint de laint Odilon, des Moines pour
le Monaftcre qu'il avoit deiïein de fonder près de Pader-

(A) Tom. I. Scripior. Brunfvittnf^ f»g. (e) Nr/m. 17,


S'il-
(g) Nnm. ip.
(i3NMm. 16. (y Iv'hi», 30.
born.
,
.

EVESQUE DE MERSBOURG. Ch. VT. 113


born. 11 emporta de Cluni, le poids du pain
auflTi , la mcfure
de vin , le Livre de la Règle , celui des hymnes 8c un anti-
phonicr.
XV. Mcînuerc ne fonda d'abord qu'une chapelle en Thon- ilfmJetîcs
neur de faint Benoit ; mais dans rcipacc de quinze ans , le j^^"^'^"^' ^
Monaftcre fut entièrement achevé. Ce fut là qu'il plaça les
Moines qu'il avoit amenés de Cluni en 1015. La Dédicace
de ce nouveau Monallere & de ion Eglife , le fit en 103 i
L'Evcque le dota richement (i) , & après lui , l'Empereur
Conraa. Il efl: connu fous le nom de Saint Michel de Pader-
born. Meinuerc y mit les reliques de faint Félix , Martyr
qu'il avoit obtenues de Wolfang , Patriarchp d'Aquilce , ap-
paremment dans le fécond voyage qu'il fit à Rome avec ce
Prince, en 1026: & avant que de les expofer à la vénération
publique , il en fit conftater fautenticité , en les jettant trois
fois dans le feu , félon l'ufage du tems (k). Il bâtit dans le
Fauxbourg de Paderborn , une Eglife fur le modèle de celle
du faint Sépulcre de Joruialcm , «& y établit une Communauté
de Chanoines , à qui il fournit de Ion patrimoine , les chofes
nécefTaircs à la vie (/). Il en fit la Dédicace au mois de Mai
de l'an 10^6 ^ 8c lui afiîgna des fonds. Meinuerc ne furvéquic
<que peu de jours à cette cérémonie , étant mort le cinquième
de Juin de la même année. L'Anonyme Auteur de fa vie ,
parle de quelques - uns de fcs Sermons ; mais il n'en donne
point d'extraits. Il efl; d'ailleurs d'une très-grande exaditude
& on doit lui fçavoir bon gré d'être entré dans le détail de
ce qu'un grand nombre de Seigneurs , loit eccléfiaftiques , foie
particuliers , donnèrent pour le rétabliffement de l'Eglife Ca-
thédrale de Paderborn , qui avoit été ruinée par les Barbares.
Il nomme tous ces bienfaiteurs les uns après les autres , avec
leurs qualités , & défigne les fonds de terres , les fommes d'or
& d'argent , & autres biens , dont ils fe dépouillèrent en cette
occafion , par un motif de charité & de dévotion. Il rapporte
auffiles attes du Concile qu'Aribon, Archevêque de Mayen-
ce , tint à SeUngflad en 1022 & ce qui fe paffa en divers au-
,

tres Conciles.
XVI. Monlieur Leibnits a mis à la fuite de la vie de Mei-

(i)MABilLON.^n. lit. yfi. rium, 10?. P. 1 (0 Jhiii,

hry. ^ vita Authar, nttm, 109. \ (0 Num, izz,


Jome XX, ^,
114 D I T M A R ,
nuerc^ celle du Prêtre Heimerad ou Heimon (m). Il étoit
Suéve de nation , né efclavc. Ayant obtenu ia liberté , il quit-
ta fa patrie alla à Rome & dc-là en Paleftine , d'où étant
_,

repafîe en Germanie , il s'arrêta à Mimileve , Celle dépen-


dante du Monaflere d'Herfcld. L'Abbé Arnold voulut lui
donner l'habit monailique. Heimerad le refufa quelque tems :

après, étant entré au Chapitre, il demanda proflerné en ter-


re , pcrmifTion de s'en aller , difant qu'il ne pouvoir vivre ea
ce lieu fans rilque de ion falut. L'Abbé prenant cette démar-
che pour une preuve de fon inconftance , le fit fuftiger & le
chaffa contre l'avis de la Communauté. Pendant ce mauvais
traitement , Heimerad ne fe plaignit point : mais il récitoic
le Pfeaume 50. De Mimileve il alla dans le Dioccfe de Pa-
derborn , où il fit fa demeure dans une vieille Eglife. L'£-
vèquc Mcinuerc lui demanda qui il étoit. Heimerad lui fie
entendre par les livres dont il fe fervoit dans la célébration
des Myfteres , qu'il étoit Prêtre. Meinuerc le regardant com-
me un vagabond , le fit frapper de verges. Heimerad fc reti-
ra lur la montagne de Haifungen dans la Hefle, où il palfa
le refle de fes jours dans les exercices de la piété. Sa mort
arriva le 28 de Juin lorp. Aribon , Archevêque de Mayen-
ce («) y bâtit depuis un Monaftere fur la montagne de Haffun-
gen , en l'honneur des Apôtres faint Pierre & faint Paul , 8c
en mémoire du Bienheureux Heimerad. Ecbert Prêtre d'Hers-
feld , qui écrivit fa vie vers l'an ioy6 , lui donne le titre de
faint Confi'ffcur. Il l'entreprit par ordre de l'Abbé Hartwig
fon Supérieur. Elle a été donnée au public par Brovferus &
par Ouerhan Moine de Weerden , avec celle de Mcinuerc.
Quoique Ecbert l'ait compofée dans le ftyle des Panégyri-
ques j il y met les atlions du Saint dans un grand jour. Il con-
firme l'opinion que l'on avoir de les vertus , par un grand
nombre de miracles opérés par fon interceffion. Nous remar-
querons qu'il étoit d'ulage dans ces cantons, lorfqu'il arrivoic
un incendie, d'employer pour l'éteindre, le cierge qui avoic
été béni le Samedi-Saint (0).
AifridF.vcque XVII. On a parlé ailleurs de la vie de faint Lutger (p) ,
ie Munf^er.

(m) Tom. 1, Script. Bruiifvic.p. jtff. | (o) Vim UeiniernJ, nrim, i i p. )(f),
(«) Mabill. Lib.^^, Ann.ii.umu 105 (^J
Tom, iS. fag, J67,
I

«
EVESQUE DE MERSBOURG. Ch. VI. 115
compofce par Alfrid , l'un de les fucccllcurs dans l'Evcchc
de Munfter, depuis Tan 83P , jufqu'en 845?. Alfrid la dédia
aux Moines du Monaftere de Saint Sauveur oui lavoicnt: ,

prié de l'écrire. Elle eft divifce en deux Livres dans les édi-
tions de Bollandus [q) , de Dom Mabillon & de M. Leib-
nits. Le troiliéme Livre eft un Recueil des miracles opérés à
fon tombeau. Il y cfl parlé d'gn jeune homme (r) nommé A-
dam, mis en pénitence publi^jue , pour avoir tué fon frère
Henri, dans une querelle qu'ils avoient eue enfemble. Jonas,
Evéque d'Orléans , rendit contre lui une fentence , portant
qu'il leroit fouetté de verges ; qu'après avoir été un an en pri-
lon , il leroit exilé voyages nuds^ pieds , fans por-
; feroit fes
ter de linge, fon corps de cercles de fer , &
8z les bras ceints
jeûneroit fortement. Un Moine anonyme de W"eerdencom-
pofa une féconde vie de Lutger , après l'an 8(^4 {s). Elle eft
en plufieurs endroits différente de celle d' Alfrid. Browerus
la lit imprimer à Mayence en \6i6 , ^«-4°. avec beaucoup
d'autres vies des Saints de Germanie. Dom Mabillon W
tait entrer dans fon Recueil , à la fuite de celle qu' Alfrid
compofa. Il y en a une troiliéme , qui n'eft qu'un extrait des
deux premières. Elle le trouve dans la première édition de
la Collcttion de Surius. On a fuivi dans la troifiéme ," la vit
publiée par Browerus. Les Moines de Weerdcncompoferent
une quatrième vie de faint Lutger , en forme de Litanies ,
par ordre de Bernard leur Abbé , vers l'an 1 140. Bollandus
en a donné une partie. Il s'en trouve aulTi quelque chofe dans
le premier tome des Ecrivains de Brunfvic.

(.7) BoLiAND. Tcm. 3. M.irf;;, p. 6x6. 1 (r) Lib. 3. vitu Lutrefi^ »Um, to. f»i»
Mabih. Tom. f . Ailor. p. 17.LEIBN. lom. i 51.
l.Scrift. Brunfvic. p. i^. ^.,,.^ |
[s] Lit, 1, cup. z6.

jî'9^^

Pij
I \6 BRUNON, EV. DE L ANCRES. Ch. VIL

CHAPITRE VII.
Brunon , Evêque de Langres ; Alwahn ; Vdcande ; Con^
Jîantin , Abbé de Saint Syfnphorien i Albert ,Moine du
même Monaflere ; Arnoul , Moine de Saint André d Ar.
vignon ; Adelbod , Evêque dUtrecht,

Brenon Eve- !• "O R u N o N fut tiré du Clergé de Reims , par le Roi Lo-
que de Lan- fj en 5^80 , pour remplir k Siège
chaire Ion parent ,
^'"*
Epilcopal de Langres , qu'il occupa trente-cinq ans. Il étoic
fils de Renaud , Comte de Roucy , & d'Albradc fœur de ce

Prince {a). En 991 , il le trouva au Concile de faint Balle ,


où Arnoul , Archevêque de Reims , fut dépoi'é. Il ne relie de
lui que le fragment d'une Lettre adrelTée à Hildric , Abbé de
Saint Germain d'Auxerre , & à la Communauté. Il la com-
mence par cette formule y qui c(l depuis paflee en ulage par—
mi les Evêques , Brunon , par la grâce de Dieu , l zfjue de
Langres. Ce fragment ie lit dans le premier tome des Anec-
dotes de Dom Martenne (ù). On y trouve une autre Lettre,
mais anonyme (c) , aux Clercs de cette Eglile , fous le titre
de La fréquente cotjfejjion des péchés. Il efl; vilible que c'ùft un
Evcque qui y inftruit fon Clergé : d'où il efl naturel d'attri-
buer cette Lettre à un Evêque de Langres ; mais ce n'eft pas^
une preuve qu'elle foit de Brunon. L'Auteur adreffe la paro-
le à ceux de fon Clergé , qui étoient chargés de l'inftrudion
des jeunes Clercs ; & Tes exhorte à pcrluader à leurs élèves ,
non-feulement de confclîer leurs péchés aux Prêtres de Jefus-
Chrifl, mais de les effacer encore par les larmes de la péni-
tence , & de ne les plus commettre \ parce que les dernières
plaies font toujours plus dangereules que les premières. On.
cite deux Lettres du Pape Benoît VIII, à Brunon (^). Ce
qui en fuppoferoit deux de fa part. On voit par celle que ce
Pape écrivit en 1015;, aux Evêques des Gaules (e), que
... n
(a) Tom. I. Spicileg.p. 41p.
| (</) Gallia Chriflian. nov. t.H.p, JJI^
(h} Martinne , Tom, i.AnttJ.p. 107. 1 (') Tçitut). Concf, Si».
(c) liid. pag, 75.
[
ALWALON , VALCANDE. Ch. VIT. 117
Lambert ctoit alors Evêquc de Langres. Brunon mourut au
commencement de la même année, emportant avec lui la ré-

putation d'un grand Prélat (/) , de protedeur de défcn- &


feur des pauvres de Jeius-Chrilh On a de lui plulieurs char-
tes (g). Dans celle qui eft de l'an 1008 , il confirme aux Moi-
nes de Beze , le pouvoir d'entendre les confeffions des fidè-
les (h) , lorlqu'ils vcnoient à l'Eglife de ce Monaftere , ap-
porter leurs offrandes dans les jours des Rogations. Il y en
a une autre c]ue Brunon fit expédier dans un Synode géné-
ral de ton Dioccle , où il autorife la reflitution des dixmes
faite aux Religieux de Beze , par un Seigneur nommé Gy-
rard. Il alFilTia à un autre Concile (z) , auquel préiidoit Hedlor,
Archevêque de Belançon , dans lequel on établit la liberté de
quelques particuliers dépendans du Monafterc de Beze.
II. On trouve dans le même Recueil de dom Martenne ,
Alwaîoîî. Sa
Lettre.
une Lettre d'un nommé Alwalon (fe) , adreflfée à un Evêque
dont le nom n'efl: défigné que par une L. Cet Evêque y eft
appelle foHverain Ponttfe titre qui le donnoit quelquefois à
:

d'autres qu'aux Papes comme on le voit par la vie de faint


-,

Gérard , Evêque de Toul , où Brunon , Archevêque de Co-


logne , eft qualifié fmnmus Ponùfcx. Ahvalon prioit cet Evê-
que anonyme de le faire abloudre de l'excommunication qu'il
avoit encourue. Sa demande lui fut accordée à de certaines
conditions que l'Evêque notifia à l'Abbé Hildric , que l'on
,

croit être l'Abbé de Saint Germain d'Auxerrc , à qui Bru*-


non , Evêque de Langres , écrivit la Lettre dont nous venons
de parler.
III. Il y a tout lieu de croire que Valcande étoit Moine ValcanJeMbî»
de Moyenmoutier puifqu'en parlant de faint Hydulphe , Fon-
;
"^ Je Moyens
"^°"""*
dateur de cette Abbaye , il l'appelle fon Père fon Mai- &
tre (/). On a été long-tems à chercher l'Auteur de la troifié-
me vie de ce Saint mais on ne doute prefque plus qu'il ne
:
,

faille la donner à Valcande ; &


par une fuite néceflaire, de

(/) Cbronic. Divio», Tom, r. Eiblîot. «o». à Monachis illicDeo fervientibus , de fà—
Lalrlr. p. 194. lute atiimaruni fuarum admoniti , faiflaab—
(f) Tom, 4. Giillia Chrifiian.p. t^to. C? folutiore & data benedidione, Istirever^
f« Appettd. p. I 58^. tf tom. i.Spicileg. fag. tanturin pace. ïhid.
534.e5/fy. («) Galita Càriftian. t. 4.
f. f^t.
(A) Veniarit igitur illo tempore flatuto (^) To/w. î. Anetd, Martfii.p. ïoS^
& de peccatis veniam poftulantes ab
fuis
eis , quorum linguse claves tœli U&x ùuA^
ii8 VALCANDE. Ch. VII.
lui faire encore honneur de celle de fainr Dié , parce qu'efi
effet (m) , on remarque dans Tune &
dans Tautre , le même
ftyle, le même génie , la même manière de compter , & fou-
vent les mêmes piirafes 8c les mêmes cxpreffions. Ce qui le
prouve aufii , c'eft qu'ayant occafion dans la vie de faint Dié,
de parler de la mon de faint Hydulphe , il s'en abftient , ou
n'en dit que peu de chofe («) , dans la crainte d'ennuyer les
Lecteurs , qui en avoient pu voir le détail dans l'Hiftoire mê-
me de faint Hydulphc. Ces deux vies ont été imprimées fé-
parément ; celle de faint Hydulphc , dans le troi(îéme tome
des Anecdotes de Dom Martcnne , dans l'Hiftoire de l'Ab-
baye de Moyenmoutier , par Dom Belhomme ; & dans les
Bollandiftes , à l'onzième de Juillet ; celle de faint Dié , fe
trouve dans la même colleâion , au dixième de Juin , & dans
Mofander. Il y en a une édition de Nancy, en i6i^. Elles
ont l'une Se l'autre été miles en françois par Jean Ruyr, Se-
crétaire du Chapitre de Saint Dié , & imprimées à Troies en
I 5tj4 ; puis dans les Antiquités
de Voges, à Epinal en 1626
& 1 63 3
. L'édition de Nancy en 1 ^75» , eft de François Riguet
Prévôt de Saint Dié.
ilécrivoitau jy. Ce Chapitre occupé d'abord par des Moines , fut fé-
^^ZTàeTon. cularifé vers l'an 996 , par une Bulle de Grégoire V , félon
ziémefiécle. la remarque de Valcande (0). Il n'écrivoit donc que depuis

ce changement , Se même après l'an îoi6 , puifqu'il finit fon


Livre des fuccelTeurs de faint Hydulphc , à Hardulphe ou
Nardulphe , dcpofé en cette année par Bertolde , Evêque de
Toul (p) ; & qu'il ne dit rien du récabliflcment de cet Abbc
en 1019. Ce Livre des fucceffeurs de faint Hydulphc, eft
joint à la vie de cet Archevêque , dans le manufcrit de Pa-
derborn. Mais ce n'eft pas la feule preuve que les deux Ecrits
font d'une même main. Cela paroît encore mieux par le vingt-
unième chapitre de la vie de faint Hydulphc (^) , où Val-
cande promet en termes exprès , d'écrire celles de les fuccef-
feurs ; & par les premiers mots de ce Livre , où il rappelle ce
qu'il avoir dit de l'Abbé Lembald , dans la vie de ce Saint (r).
Au refte , on ne doit point la regarder comme originale. Val-

{m] UiJ.pag. 119.^ liO.


I
lp)Uiii.piig.iii.

{^o)Hijlor. mtdian.Monafl.f.l'^l. l^i. \ [r) l'âge


14J.
,

CONSTANTIN , ABBÉ. Ch. VII. iip


cande fe fcrvit de deux autres vies {s) , auxquelles il ajouta ,
& dont il retrancha comme il jugea à propos. Il eft tombé
dans plulicurs fautes de chronologie que Dom Bclhomme a,

çu foin de relever & de corriger dans fon Hifloire de l'Ab-


baye de Moyenmoutier , imprimée à Strafbourg en 1724,
m--{°- Il y fiiit voir clairement (r) , que faint Hydulphe a voit
çté Archevêque de Trêves , & s'étoit retiré dans la même fo-
litude , en un lieu nommé le Val de Galilée , dont il obtint
la propriété de Childeric II (î/), tant pour lui que pour les
]\îoines du Monaftcrc qu'il y fonda. Dans le manufcrit de
Moyenmoutier, la vie de laint Hydulphe par Valcande , e(l
iuivie d'un difcours (x) , dans lequel l'Auteur invedive forte-
ment contre les mœurs dépravées de fon lîécle puis s'a- •,

^reflant aux Moines , apparemment de ce Monaflere, il les


exhorte à imiter les vertus de leur Fondateur & de fes dif-
ciples.
V. Conftantin , troifiéme Abbé de Saint Symphorien de Conflantin
Abbe defamt
Metz, fuccéda dans cette dignité à Siraude, en 1004. Il re-
çut la bénédidion abbatiale d'Adalberon II , Evêque de cette Meti.
Ville , qui l'honora de Ion amitié &
de la confiance. Il gou-
verna l'Abbaye de Saint Symphorien jufqu'en l'an 1024 ,
auquel il mourut le 10 de Septembre. On le fait Auteur de
la vie de cet Evêque , mort plufieurs années avant lui ; cette &
opinion efl: fondée fur un endroit de cette vie , où l'Ecrivain
reconnoît qu'il avoit fuccédc à Siraude (y ) , dans la dignité
abbatiale de Saint Symphorien à Metz, qu'il en étoit le troi-
fiéme Abbé , &
qu'il avoit été béni par l'Evêque Adalberon.
Conflantin ne pouvoit fe défigner plus clairement, fi cen'eli
en mettant ion nom à la tête de cette vie : ce qu'il n'a pas jugé
Si propos. Elle a été imprimée fans nom d'Auteur (z) dans ,

Je premier tome de la nouvelle Bibliothèque du Père Labbe.


L'Epiraphe d'Adalberon fe trouve dans le quatrième tome des
mélanges de M. Balufe (a): mais fans nom d'Auteur. On ne
peut guéres douter qu'elle ne foit de la façon de l'Abbé Con-
ftantin , puifque cet Evêque fut inhumé dans l'Eglife de Saint
.Sjmphorien , ainfi qu'il l'avoit ordonné.

MaeiliON. lii. Ji. AnHitl. niim, 45./»«i'.


1 69' tS Ador.paj. y 6.
'ofi>- 8.
, (ji\ Page 10. (t) Ibid.pag. 670.
'(x)fag. 119.
(f) Labb. Noî/. Biilm. twi. i,p. 6yi.
120 CONSTANTIN , ABBÉ. Ch. VII.
Vie d'Adalbe- VI. Adalberon ctoic d'une naiflance illuflre {b). Il fit fes
études dans l'Abbaye de Gorze , où il fut également élevé
dans la piété. Deodcric , Evêque de Metz , étant mort au
mois d'Odobre de l'an 5)84. Adalberon fut choili pour lui fuc-
céder. Il fit un voyage à Rome , fous le Pontificat de Jean
XV. A fon retour, il rétablit l'Hôpital de Metz. Il avoita-
vant fon départ , fait rebâtir le Monaftere de Saint Sympho-
rien. Son prédéceflfeur en avoit fondé un à Efpinal , Ville de
Lorraine , où il fit tranfporter de Metz , les reliques de Goë-
ric. Adalberon y mit d'abord des Clercs , enfuite des Reli-
gieufes fous la Régie de faint Benoît , & leur donna des fonds
pour fubfifter. C'ei^ aujourd'hui une Collégiale de Chanoi-
neiïes. II ne célébroit jamais les divins My(leres,que revêtu
d'un cilice ; pafi!bit fans manger , les veilles de Noël , de Pâ-
ques , de Pentecôte , & des principaux Martyrs. Il aimoit la
compagnie des fcrvitcurs de Dieu , fur-tout des Moines (c) :
mangeoit fouvent avec eux , les faifoit mettre à fa droite , 8c
s'entretenoit avec eux de chofes faintes. L'Auteur de fa vie fe
félicite d'avoir eu plufieurs fois cet avantage. Adalberon mou-
rut au mois de Décembre 1005.
Alpert, Moine
yjj_ L'Abbé Conftantin avoit dans fa Communauté , un
tiende^Metz! Moine nommé Alpert ou Albert , habile dans l'intelligence
de l'Ecriture & des arts libéraux (ci). Il écrivit l'hiftoire de
ce qui s'étoit pafïé de fon tems. L'Ouvrage efl divifé en deux
Livres , & fe trouve dans le Recueil de M. Eccard (e) , im-
primé à LeipficK en 1723. La plupart des événemcns qu'il
raconte, ont rapport à l'Hiftoire profane. Il y dit toutefois
quelque chofe des Evcques de Metz Se d'Utrecht (/). Un
Clerc avoit quitté fa profelTion pour fe faire Juif (g) , ré- &
pandu à cette occafion plulieurs blafphcmes contre la Reli-
gion Chrétienne. Albert réfute folidement les vains raifonne-
mens dont ce Clerc appuyoit fon apoflafie ; alléguant contre
lui les paffages de l'Ecriture les plus précis pour l'établiflement
du Chriftianiimc , fur la ruine de la Synagogue. Il dédia fon
Hiftoire à Bouchart , Evcque de Wormcs , qui l'en remercia
par une Lettre , que M. Eccard a jointe à l'Epître dcdica-

(i) Tom. I. Bièlht. nov. Labb.f. 6']o. j


M EccAK. Script. Germau. t, l. f. 91,
(c). \ n% 6j\. I (/) Lib. i.cAp. 10. 17. lib. z, cap, 3. 7^
(//) SlGIB- Je Scriptor, Ecclef. (a£. 143' 1 ^4- ij.

toire
ARNOUL, MOINE. Ch. VIT. 121
toîre d'Albcrc;(A). Ceft apparemment le même Moine à qui
i'Anonyme de Mole attribue un excellent Traité du Com-
put (/) , puifqu'il place cet Auteur entre Rémi d' Auxerre &
Vrillcramne , dont le premier écrivoit au commencement du
dixième ficelé, le fécond vers le milieu de l'onzième.
VIII. Il eft parle dans les Annales de Dom Mabillon, d'un ^^"-"'i^'f :
autre Moine du même fiecle , qui le rendit recommandable par à Avit,ncn.

divers Ouvrages de Littérature (k). Il le nommoit Arnoul 8c ,

demeuroit au Monaflcre de Saint André à Avignon. Le pre-


mier de ces Ouvrages efl une Chronologie qui commence par
la Création du monde. Arnoul compte de-là jufqu'à la venue
de Jefus-Chrill;, cinq mille vingt-cinq ans; depuis la Naif-
fance du Sauveur jufqu'à la quatrième année du régne de Char-
les le Chauve fils de Louis le Debonaire, 854 ans ; & de
,

cette année jufqu'à celle où il écrivoit, i72ans. Ce qui revient


à l'an 102^ auquel il met la mort de la Comtefle Adalax fem-
,

me de Guillaume Comte Provence, & mère de Conllantia, fem-


me du Roi Robert. Son fécond Ecrit efl: un Martyrologe ou
Calendrier. Le troificme , un Traité des poids & des mefu-
rcs , où il dit que la livre eft de douze onces , & qu'elle péfe
ou contient vingt fous. Ce qui peut fervir à faire entendre
ce qu'on lit dans les Atles du Concile d'Aix-la-Chapelle , en
817 , que la livre de pain alfignée par la Régie de Saint Be-
noît, à un Moine par chaque jour, devoir pefer trente fous.
A l'égard des nourritures liquides, Arnoul dit fur la mefurc
de l'hémine de vin , dont il efl: parlé dans la même régie,
que félon quelques-uns , elle pefoit une livre & félon d'au- ;

tres , une livre & demie. Iltraitoit dans le quatrième Ouvra-


ge , des Auteurs que l'on devoir recevoir ou rejetter , félon
le décret de la Ville de Rome, c'eft-à-dire , le décret du Pape
Gélafe. Le fixiéme étoit touchant le Solflice ; & le fepticme ,
fur le jour de la Pafllon & de la Mort de Jelus-Chrifl:. Aucun
de ces Ouvrages n'a encore été rendu public. Sigebert attri-
bue à un Moine aufli nommé Arnoul (/), un Recueil en vers,
des plus belles Sentences de Salomon , dont il donnoit le fens
littéral & fpiritucl. On ne fait fi c'eft le même qu'Arnoul Moine
de iaint André à Avignon.

(A) Va^e pi. ((;) T.it. 'i<;.An. num. Çfij.p.^it.


{i) Mellicins. Je Scriftor. Ecclef, caf.t (l) SlOBBERT. Je S(ri£lor. Eccle/Î^lf, ctfi
77. I IfJ,
Tome XX Q
122 ADELBOLDE,
Ade'ioiJe, IX. Adelbolde né dans le pays de L'ége ou en Hollande,
Bveqn; d U-
j^ parens nobles confacré à Dieu dès fa jeunefle , dans
, fut
l'Egiife Collégiale de laint Urfmar à Laubes. Il y fit fes étu-
des fous Herigcr (m) ; de-la il paffa dans les Ecoles de Reims
& de Liège. D'un efprit vif , folide pénétrant , il fit de &
grands progrès dans les fciences. Sigebert (?/), en parlant de
Fulbert de Chartres , d'Heriger , d'Abbon de Fleuri , qui
étoient alors en réputation de fçavoir , fait marcher Adel-
bolde de pair avec eux. Il joignoit aux fciences (o) , beau-
coup de fageife , de prudence & de courage , & le ta-
lent de s'exprimer avec facilité & éloquence. Ce qui engagea
Henri , Roi de Germanie & depuis Empereur , à Tappeller à
fa Cour , &à lui confier les emplois les plus conlidérables (p),
Ansfeld , Evêque d'Utrecht {q) , étant mort le troifiéme de
Mai loio. Ce Prince lui fit donner Adelbolde pour fuccefleur.
Il gouverna l'Egiife d'Utrecht environ dix-huit ans, & mourut

le 27 de Novembre 1027 ('')•

v^"d ^f""'
^* L'Empereur Henri étoit mort quelques années aupara-
'
Henri. vant , c'cll-à-dire , en 1024 (s). Adelbolde témoin oculaire
de fes vertus , entreprit d'en tranfmettre la mémoire à la po-
ftérité, en commençant la vie de ce Prince à l'an 1002 , au-
quel il fut fait Roi de Germanie. Soit qu'il n'eût point leloifir
d'achever l'Ouvrage , foit qu'il foit perdu , ce que nous en
• avons ne va que jufqu'en 1004. Mais ce fragment fera tou-
jjours honneur à Adelbolde , par la beauté & l'élégance du
ftyle , fa netteté , fa précifion , & par l'exatlitude qui fe fait
remarquer dans le récit des faits. Les Bollandiftes l'ont don-
né d'après Gretzer. Il ell précédé d'une Préface , où l'Au-
teur prefcrit les régies que doivent fuivre ceux qui écrivent
l'Hifloire , & le but de leur travail. Il faut en premier lieu ,
qu'ils fc dépouillent de tous préjugés , c'efl-à-dire , que la hai-
ne , l'amitié charnelle , l'envie , l'adulation ne les animent
point parce qu'autrement , ou ils difTîmuleront la vérité , ou
;

ils la tairont , ou ils donneront une apparence de mal à ce

qui eft bon en lui-même i & dès-lors ils tromperont les Lcc-

(to) TailKEM. de Scfipttr. Eeclef. cap. ÇJ Trithem. Script. Ecciff. citp. j 1 1.


^11. (5) Chronic. lUrfang. f. ll6,
tom, I. {p) Rolland. lbid.p.tg.<) 47-
t? AiBEEK. Chronic. part. z. f. 34»
-in (7) Idem, aidiem 14 /'''", f- 1-4-
.f«) Sir.FB. ad an. 9<)4. [r] Ihid.
(o) BOLL&ND, ad 15 Feliruar. p4g. ^46. {s) BoLLAtiD. ad dicm 14^"''' >/>• 744»
EVESQUE. D^UTRECIir. Ch. VIT. 123
teurs qui ne feront point aflez attentifs ni affcz habiles pour
diftingucr le vrai d'avec le faux. Il fait voir qu'il y a de l'injufli-
ceà n'aimer dans leshifloires , que ce quis'efl; paiTc ancienne-
ment, & que Ton doit également eftimer ce que l'on rapporte
des faits arrives depuis peu , pourvu qu'ils foicnt accompa-
gnés de la vérité. En effet , ce qui eft aujourd'hui ancien pour
nous , ne l'étoit pas dans le tems de ion événement. Ce n'eft
point le nombre des années qui donne la certitude ni l'utilité:
c'efl la vérité; & il cft également utile de fçavoir une chofe
vraie , foie qu'elle foit arrivée depuis peu ou depuis long-
tems. Sigebert parle de de l'Empereur Henri par Adel-
la vie
bolde. Son témoignage , où elle;
joint à celui dqs manufcrits
porte fon nom , ne laifle aucun doute qu'elle ne foit de cet
Evcque. Outre les Bollandiftcs, M. Leibnits l'a fait imprimer
parmi les Hiftoriens de Brunivic. On a une autre vie du mê-
me Empereur , mais écrite long-tems après fa mort elle a :

été imprimée dans les Recueils de Canifius , dans les Vies des
Saints de Bamberg par Gretzer , dans Surius & dans Bollan-
dus au 14 de Juillet, à la fuite de celle d'Adelbolde. On n'en
connoit pas l'Auteur.
XI. Guillaume Heda attribue à cet Evêque (r) , la vie de VieJefaiiw

fainte W^alburge ; & c'efl: fous fon nom que les Bollandifl:es
^^'^ '"^^^'

l'ont publiée au 25 de Février («). Ce n'eft qu'un abrégé de


celle que le Prêtre Wofhard a faite de cette Sainte ; c'efl: ap-
paremment la raifon pourquoi le ftyle de cet abrégé efl moins
poli que de la vie de iaint Henri, Adelboldc s'étant aflujettf
en quelque façon à la manière d'écrire de Wofhard. Cet a-
brégé efl fuivi de deux Lettres , écrites fur la fin de l'Epifco-
pat d'Adelbolde. La première lui efl: adreffée , & contient fon
éloge, après quoi l'Auteur qui étoit Tréforier de l'Eglife de
Tiel , raconte quelques miracles qui s'étoient fait fous fes
( v)
yeux au tombeau de fainte Walburge. Comme il en avoir
,

oublié un, il l'ajouta dans une féconde relation qu'il envoya"


avec une Lettre au Diacre de l'Eglife de Wormes , nommé
Immon.
XII. On nous a donné depuis
^
quelques années (y),
' ' ^y ' '
une Le:tred'Adel.
bolde au Papa
SylveftreH.

(() BoiLAND.rjrf iiem 2^ Febritarii,pag. (x) BoiLAND. iiid.p, J46'. 148.

(y) l'EZ. tom, 3. Atieedot. pan. i, pag,


(n) Heda , de Epifcop. XJltrajtStnf. fag. 86. C5 8a.
a82. •
Qij
,

124 ADE LB O L D E
Lettre (f Adelbolde au Pape Sylveftre II , à qui il cnvoyoîr
un petic Traité de la groffeur de h Sphère , pour en avoir
fon fentimenc. Ces deux pièces le trouvent dans le troiliéme
tome des Anecdotes de Dom
Bernard Pez, avec une Lettre
de ce Pape à Adelbolde , fur la Trigonométrie. Il paroîr par
k commencement , qu'il avoit autrefois donné des leçons à
Adelbolde apparemment lorfqu'il cnfeignoit à Reims. Ce
,

n'eft pas le feul Ouvrage qu'Adelbolde ait fait en ce genre»


On en cite un fur FAdronomic (z) , ou l'Abacus , adreflc aU'
même Pape, mais fous le nom de Gerbert le Scholailique ;
un autre fur le cours des aftres «) , & un troiliéme intitulé :
De Minutiis. Tritheme quelque chofe de l'Ecrit d'Al-
dit
delbolde fur le diamètre de Srhere, au Pape Sylveftre (è)..
la

Il ajoute qu'il avoit compofc divers autres Ecrits, tant en profe


qu'en vers,
1^" XIII. Il marque en particulier , un Livre des louanges de
rh^'^'^'
laCro^x&'de '^ Croix ; un autre de celles de la fainte Vierge Marie , &
la Sie Vierge, plufieurs Difcours en l'honneur des Saints. Adelbolde com-

pofa Je chant de l'Office de la nuit pour la fête de faint Mar-


tin (c) ; & de fon triomphe fur les Normans , qui avoient
tenté de fe rendre maîtres de la Ville de Tours. Il fit rati'-
fier en 102 1 [d) dans un Synode où l'Empereur Henri fe
,,

trouva avec plufieurs Evêques , une lifte des vaffaux libres


de l'Eglife & de l'Evêque d'Urrecht. Heda l'a publiée dans
l'Hiftoire des Evoques de cette Ville , imprimée à Francquere
en 1^12.
Traîtéfurl'A- XIV. Cet Editeur attribue encore à Adelbolde , un Traité
wm. en forme de dialogue, fur la variété des uiages dans l'obfer-
vation de l'Avent. Mais on a montré plus haut, qu'il étoit
d'Heriger , Abbé de Lobes. Adelbolde avoit toutefois écrit
quelque chofe fur ce fujet , à la prière de Bernon , Abbé de
Kichenou ; mais il pacoît que ce n'étoit qu'une fimplc Lettre^,
cnréponfeàcelledecet Abbé. Adelbolde étoit alors ci ^ome 5,
Si. en état de rendre compte de la manière donr on y obfer-

voit l'Avent. On ne le commcnçoit jamais avant le 27 de


Novembre y m
plus tard que le troifiéme des Nones de Dc-

(X) MONTFAWCON Biblioti p. Zj, 1 C? de Script: Etilif. cap. ; i î.

(o) I.r BotuF. Toj». 2.^. 83. {d) Heda ,


|
de Epifcop, VlirayS. i»g^.
lj>) MowAUcnti. !tid. pa<^. to8«49I< zSo.
I

(f^ Trithïme. Chron, lUrfaug. />, jj^p».' (,')Iiid. pag, iSî».


EVESQUE D'UTRECHT. 125 Ch. VTî.
cembre , c'eft-à-dire ,
de ce mois ; Se en
que le troificme
quelque jour de ces fcpt ciu'arrivât le Dimanche , on le cclc-
broit comme le premier d'Avcnt. C'eft tout ce que Bernon
nous a confervé de la Lettre d'Adelbolde (/) , en la diflin-
guant clairement du Dialogue d'Heriger , fur la même ma-
tière.
XV. Nous donnerons ici TAnalyfe d'une Lettre que Dom q-^J'"^ f""
^^artenne a rapportée dans le premier tome de fa grande Spire à Hcri-
CoUedion (g) , & qu'il croit être de l'an 1000 , & adrefTée b^n Archevé-
»-
à Heribert , Archevêque de Cologne. Elle porte dans l'inf- ^„l^ «

cription Lettre d'un Citoyen de Spire à H. ^. Ce qui , félon


:

cet Editeur fignific Heribert Archevêque; & ce qui le prou-


,

ve , c'eft qu'elle fe lit dans un Manufcrit à la fuite de la vie


de cet Archevêque , qui le fut en effet de Cologne, depuis
l'an ppp jufqu'en 102 1 . En certaines Eglifcs , les Prêtres a-
prcs avoir prêché aux peuples la parole de Dieu , leur ordon-
noient de lever leurs mains vers le Ciel , &
de confcfler leurs-
péchés. Cela fair, ils leur donnoicnt l'abfolution , leur accor-
dant la avec plus de facilité qu'ils
rémifTion de leurs fautes ,

ne leur auraient donné de leur propre argcntcr


trois oboles
Ce font les termes de ce Bourgeois. Cette nouvelle façon d'ab-
foudre le fcandalifa , &
plufieurs des laïques , qui étoient in-
flruits des vérités de la Religion. Il en porta fes plaintes à
Heribert, Evêque de grande réputation par fa vertu. La pre--
miere chofe dont il fe plaignit , fut que les Prêtres donnoicnt:
des abfolutions fans avoir éprouvé les pécheurs, ni leur avoir'
impofé de pénitences ; la féconde , qu'ils ne fe fervoicnt point-"
d'une formule déprécative. 11 fouricnt que cette formule Je- :

vous remets vos péchés , n'a jamais écc en ufagc dansl'Eglife;'


Se prouve l'ufage de la formule déprécative , par l'exemple de
V Apôtre faint Jean , qui employa les jeûnes les prières pour &
ebtenir i ce jeune voleur qu'il avoir retire de fes défordrcs 3
le pardon de fes fautes ; & par celui de Jefus -Chrift ,-qui ne
drfoit pas Je vous remets vos péchés ; mais: Homme, vos pé-
:

chés vous font remis.- Il ajoure que le Sauveur n'en ufa ain(î'
envers le Paralytique de trente-huit ans, que parce qu'il fa—
voit que pendant ce tems , il avoir expié fes fautes par les>

( f)
Bernon. Tom. i. Coll'tâi amp'rfT. \ pt't- i- f. 4^''
fiLlîLl£NE£, J87. (£P£Z. Tow.4; AaecJoi.l (s)^""' i'C»lUS,Maxti»tK,f.^jfi
,

126 ADELBOLDE,
fouffrances. il conclut qu'il y a de
D'où latémérité de la part
de ces Prêtres d'abfoudre ceux dont
, non-feulement ils ne
connoiffent pas les péchés , mais qu'ils ne lavent pas même
avoir fait pénitence. Il veut donc que l'on éprouve les pé-
cheurs avant de les abloudre , que l'on examine quelle fatif-

faclion ils ont faite pour leurs fautes : fur quoi il cite pluiieurs
paffages de l'Ecriture & un du Pape faint Grégoire. Il paroît
parla fuite de fa Lettre ,
que l'abus dont il fe plaignoit , n'é-
toit arrivé qu'une fois en fa préfence , & le jour auquel, fui-
vant la coutume de l'Eglife , on donnoit la Communion aux
Pénitcns , apparemment le Jeudi -Saint. Mais craignant les
fuites , il en donna avis à Heribert , pour arrêter cette nou-
velle héréfie dans fa naiflance , & avant qu'elle fe répandît.
En Archevêque , il dit Fotre Majeflé ;
parlant à cet il n'eft : &
pas Ecrivain de ce liécle qui en ait ufé ainfi.
le feul
Lettre d'Ai-
XVI. Hcribert avoit chargé un Ermite nommé Albuin , de
"^""
bea.
^
lui faire un Recueil de palTages d'exemples de l'Ecriture &
fur toutes les vertus (//). Albuin s'en acquitta de façon qu'il
n'y avoit rien du fien : mais il fcmble qu'il tira aufli quelques
endroits des Ecrits des faint Percs, peut-être pour rendre
plus fenfibles les exemples de vertus répandus dans l'Ecritu-
re. Il envoya ce Recueil avec une Lettre à ce Prélat , à qui
il recommande d'en pour l'utiHté
foire tirer pluficurs copies
publique. Il s'adrefle même une efpéce de
à fcs Letlcurs par
féconde Lettre, les ailurant qu'ils trouveront dans ce Livre,
les moyens d'aquérir les trélors céleftes , s'ils fe donnent
la peine de le lire fouvent. Il commence par ce qui regarde
la vertu de la charité. Ce Recueil n'a pas encore été im-
primé.
Aganon,cha- XVII. Nous avons dans les Bollandiftes , au dix-feptiéme
noinedeChâ-
^^ j^.^ ^^ ^ ^^ Diicours en l'honneur de faint Vorle , Prê-
tre de Châtillon-fur-Scine , & Patron de l'Eglife Collégiale
de cette Ville. Il y eft fans nom d'Auteur. Mais depuis T'im-
preiïion de ce Difcours , on a découvert le nom d'Aganon,
dans un Manufcrit de la Bibliothèque de M. le Préfidcnc
Bouhicr à Dijon {k) , fous ce titre Homilia Ubellus de mi" : &

(h) Uid.pacr.i6o. (k) Mabi


MAmtLOîi.îter BiiriunJic, tem i
(») BoLLAND. ad ditm 17. Junii ,
Iik)
pag.
\
"^
Opujc.f.9.
382.
EVESQUE D'UTRECHT. Ch. VIT. 127
raculis beati Veroli ah Ai^nnone viro Scholaftijfnno. Quoique ce
litre ne puifTe pafler pour original , il prouve deux choies ;
la première , que le copiée ne doutoit point que cette Ho-
mélie , ou ce Libelle , ne fût d' Aganon la féconde , que l'Au-
:

teur étoit très-difcrt, &


très -habile dans les Lettres. Cela
pouvoir être vrai pour le tcms , c'eft-à-dirc , pour ronziéme
ûécle , oij Ton n'écrivoit point avec autant d'élégance que
dans les où les Belles - Lettres étoient plus cultivées ;
fiécles
&: c'étoit beaucoup alors d'écrire aulTi noblement que le fait
Aganon. Il donne d'abord un précis de la vie de iaint Vor-
le ; enfuite il fait l'Hiftoire de la tranflation de fes reliques ,
& des miracles opérés à fon tombeau. Il en rapporte un fait
en faveur d'un impotent nommé Gozbert , en préfence du
Roi Robert , des Evcques & des Abbés qu'il avoit affem-
blés cl Airy en 1020 , pour y traiter de la paix. On avoit à
cet effet porté en ce lieu les reliques du Saint , fuivant l'ufa-
ge d'en mettre au milieu de rAflemblée avec la Croix & les
Évangiles dans les Conciles. Aganon ne compofa donc fon
Diicours que depuis cette année-là. Il le finit en exhortant fes
auditeurs à l'imitation des vertus du Saint , & à invoquer
fon fecours pour la convcrfion de leurs mœurs , & pour la
ceflation des calamités dont ils étoient affligés. Le Père E-
ticnne le Grand traduilit ce Difcours en françois , & le fit
imprimer cà Autun en 165 1 Aganon étoit Chanoine de Châ-
.

tillon. il le dit aiïcz clairement en deux endroits (/).

(/)BoLLAtiD. «</if>oi i7.7M/»'(,f. j8z. num. i. |^f« 387. ». iz«


ii8 SAINT FULBERT,

CHAPITRE VIIL
Saint Fulbert , Evêque de Chartrei i Gauzlia , Archevêque
de Bourges,

s. Fulbert , I. /"^ E ne fut ni par la noblefle du fang , ni par l'abon-


Evcque
ique Js
de l "
- _ --
\^__j dance des biens temporels , que faint Fulbert s'ouvrit
.

éducation.Ses un chemin à la Chaire Epiicopale. Il ne dût fon élévation


études. qu'à fon mérite perfonnel ; & il ne fait point difficulté de re-
connoître qu'on le tira de la poufllere , pour le faire afleoir
avec les Princes de TEglife (a). On ne connoît ni fes parens
ni le lieu de fa naiffance. Il fit fes études à Reims fous Ger-
bert (b) , d'où il pafla à Chartres pour préfider à l'Ecole de
cette Ville ( f ) j où fon habileté lui attira de tous côtés des
difciples , dont plufieurs furent élevés à l'Epifcopat ou à d'au-
tres dignités Eccléfiafliques. Il polfédoit non - feulement les
Belles-Lettres & les divines , autant qu'on le pouvoit alors ,
mais auffi la Médecine , comme on le voit par plufieurs de
fes Lettres. Il paroît par celle qu'il écrivit à Abbon , Abbé
de Fleuri ( «^ ) , qu'il étoit Chanoine de Chartres des l'an
1003 , en mcme-tcms qu'il profcflbit publiquement les Let-
tres. On ne voit nulle part ,
qu'il ait embraflTé la vie Mo-
nafiique , moins encore qu'il ait été Chancelier du Roi Ro-
bert.
lunfaitEvê- jj. Mais ce Prince ,qui connoifibit fon mérite le fit choî- ,

tte!«fioo7? ^r Evêque de Chartres , à la mort de Rodulphe en 1007 (0*


11 fut facré par Lenthcric, Archevêque de Sens, fon Métro-
politain. Les fondions de l'Epifcopat ne lui firent point dif-
continucr les leçons publiques (/) mais : il ceflTa de fe mêler
de la Médecine {g). On verra par l'analyfc de fes Lettres,

f/j) FcLBERT, Carrf. fi. ^ MaBILI.' (e'j AIaeillon. lit, ^1. Ann.num. \0X
/ii. 50. Annal, n 71. p. yp, page 14?.
(i) MAiiLLOU.ibid, ( f) M ABILIOH. in AnaltS. p. 100»
(c) IbiJ. (j) FutB. Epifi. 10. 47. II}.
(/) FuiB. Efi'P. II .

4u'il
EVESQUE DE CHARTRES Ch. VIIT. î2^
qu'il étoic regarde commeToracle de la France , qu'on &
s'adreffoic à lui de toutes parts pour le confulter fur toutes
fortes de matières. Au mois de Mai de l'an 1008 , qui croie
le fécond de fon Epifcopat , il affifta au Concile que le Roi
Robert avoit aflbmblé à Chelles ; & quoiqu'il fut un des der-
niers fuivant le rang de fon ordination , on le fit foufcrirc
par refpc£l pour fon mérite , immédiatement après les Métro-
politains. Il rebâtit fon Eglife Cathédrale (h), qui en 1020,
avoit été réduite en cendres avec une partie de la Ville de
Chartres. Cet accident l'empêcha de fe trouver avec fes Clercs,
à une Procelfion à laquelle Théodoric , Evoque d'Orléans ,
l'avoit invité. La Lettre d'excufe que Fulbert lui écrivit en
cette occafion , fait voir qu'ils s'étoient voulu réconcilier.
Leur diffenfion venoit de ce que Fulbert n'avoit pas voulu
affilier au facre de Théodoric en 1016 , il prétendoit en &
avoir eu de bonnes raifons ; entre autres (?) , que l'inter-
dit jette fur l'Eglife d'Orléans, n'étoit point levé , qu'il &
n'y avoit point eu de liberté dans l'éleftion de cet Evêque.
IIL Son Epitaphc met fa mort au dixième d'Avril de l'an Ssm^n c»
'°^*'
1028 , après vingt &
un ans & demi d'Epifcopat. Il fut en-
terré dans le Monaftere de Saint Pierre, qu'il avoit aimé de
fon vivant. Etant au lit de la mort (fe) , il appcrçut dans l'af-
femblée , Berenger , Archidiacre d'Angers , qui avoit été au-
trefois fon difciple , mais dont la dottrine fur l'Euchariflic
n'étoit point orthodoxe. Il le fit chaffer de la chambre , di-
fant qu'il voyoit auprès de lui un dragon qui follicitoit plu-
fieurs perfonnes à embraffer les erreurs. Odelmann qui avoit
étudié avec lui fous le faint Evêque , ci Chartres (/) , lui re-
mettoit depuis devant les yeux , pour l'engager à quitter fa
mauvaife dofctrine , celle qu'ils avoient apprife enfemble de
Fulbert , cet homme fi catholique &
fi chrétien. Il l'appelle

leur vénérable Socrate. Il relève la fainteté de fa vie , la gran-


deur de fa charité , qui lui donnoit liru de croire qu'il n'en
auroit pas moins dans le Ciel pour fes difciples , qu'il en a-
voit eu étant avec eux fur terre. Adelmann fut depuis Evê-
que de BrefiTe. Joftald , dans la vie de faint Odilon , écrite

(i) Fulbert T.pifi.d, ^ Mabillon. /. page 3 n •

Jf4.
Annal, u. yS. p. l68. (/) Apud Mjiillon, lit. f j. Annal, titim.

(»-)Fi'UïE/'«7'. 61.
Xk) Mabillon, W. ^6.Annal,nMm,^j>
TomeKK, R
ï^o SAINT FULBERT,
vers l'an , loue la fainteté de Fulbert , fa fageflè ad--
I04P (m)
mirablc ; &
dit qu'à fa mort , l'étude de la Philofo
f hie&: la
gloire del'Epifcopat femblerent être enfevelies avec lui. Néan-
moins on ne lui a encore décerné aucun culte public , pas mê-
me dans l'Eglife de Chartres»
SesEcritî. IV. Ses Ecrits ont été recueillis par Papyre le Maffon (k) ,,
& imprimés à Paris en 1585, chez Dupré in-S'^. Cette édi-
tion étant fort imparfaite , Charles de Villicrs en publia une
autre en la même Ville en 1608, chez Thomas Blaifej/w-S"»
jMais fi elle eft plus ample que la première , elle n'eft pas e-
xempte de fautes, que l'on n'a pas corrigées dans les Biblio-
thèques des Pères de Cologne, de Paris de Lyon , où l'on &
n'a fait que copier l'édition de Charles de Villiers. Le Re-
cueil des Lettres de Fulbert en contient cent trente -huit ^
mais elles ne font pas toutes de lui 5 il y en a d'Ifcmbert, Evc-
que de Poitiers , d'Hildegairc , de Guillaume , Duc d' Aquitai-
ne, &
de quelques autres.
Lettres de V. Dans fa Lettre à Adeodat (0) , il explique trois articles
&&cKà A- jrnportans de la Religion Chrétienne ; le myflere de la Tri-
nité , le Sacrement de Batême ,& les deux Sacremens de la
vie qui contiennent le Corps
,
&
le Sang de Notre Seigneur.

Il prouve par l'autorité de l'Ecriture , qu'il y a trois Perfon-


nes en Dieu en une feule même nature ; & combat en paf- &
fant , Arius, Macédonius & NeRorius , montrant
Sabcllius ,

que Jcfus-Chiift eft Dieu ; que la fainte Vierge eft véritable-


ment merc de Dieu ; qu'en Jefus-Chrift , les deux natures, la
divine & l'humaine , ont été unies en une feule perfonne , mais
non pas confondues. Il dit en général fur les Sacremens ,
qu'il ne faut pas s'arrêter uniquement aux lignes extérieurs ,
mais faire aulTi attention à la puilTance invifiblc des Myfte-
res , & à ce qu'ils opèrent intérieurement. Il propofc l'exem-
ple du Batême, dans lequel nous effaçons les taches de notre
naiflancc , en renailTa'^t de l'eau & du Saint-Efprir, unis dans
ce Sacrement , quoiqu'ils aient des effets diffcrcns. L'eau eft
néccffairc dans le Batême, pour la fépukure; le Saint-Efprit
pour la vie éternelle. Car de même que Jclus-Chrifl fut trois
jours dans le fciJi de la terre , de même l'homme eft plongé &

(m) MabiilOM. tom, a, ASvr, fêg. |


(«) Tom. xV..Bibliot. Pat.Lagd. f.Xi
éOlutr
,1

EVESQUE DE CHARTRES. Ch. vni. 13


comme enfeveli trois fois dans un élément qui a de l'affinité avec
la terre , c'eft-à-dire , dans l'eau ; d'où il fort renUfcité par le
Saint-Efprit. montre que le Batême a fon effet , quoique
Il

conféré par un mauvais Minière , parce que c'cft Jclus-Chrill:


qui batife: d'où vient que le Prêtre dit au batifé , en l'oignant
ûu faint Chrême Dieu qui vous a régénéré p,7r Peau
: far le &
Saint-Efprit , vous oint aufftdu Chrême dufalut.
VI. Fulbert cnfcigne iur le troifiémc article (p) , que Dieu
ayant pitié de notre fragilité , nous a procuré un remède con-i
tre nos fautes journalières, en nous laiflant le gage falutaire
de fon Corps & de fon Sang , qui n'eft pas , dit-il , le fym-
bole d'un vain myftere , mais le vrai Corps de Jcfus-Chrift ,
que fa vertu produit tous les jours d'une manière inviiible fous
la forme vifible de la créature dans nos facrées folemnités.
C'eft de ce Corps qu'il a dit à les Apôtres Ceci ejl mon Corps : :

Ceci e(l mon Sang. Il ajoute qu'il n'cft pas indigne de Dieu (q),
qui eft defccndu dans le fcin d'une Vierge , de fe rendre pré-
sent dans les créatures qui font aufïï vierges, fçavoir le pain
& le vin ; que ces créatures , qui avant que d'être confacrées
ne paroiffent que des fubftances fimples & terreftres , devien-
nent céleftes aufli-tôt que les paroles de la coniécration étant
prononcées, la Majefté véritable s'y répand & s'y communi-
que, de forte que ce qui extérieurement neparoiflbit être que
la iubftance du pain & du vin , efl: fait intérieurement le Corps
& le Sang de Jefus-Chrifl. Pour ôter tout doute fur la poffi-
bilité de ce changement , & le rendre croyable , il le com-
pare à la création de l'univers , & dit , que fi Dieu a pu le
créer de rien (r) , il peut à plus forte raifon changer une de
les créatures en une nature plus excellente c'cfl-à-dire , en la :

lubftance de ion Corps.

(p ) Defedum noftra: fragilitatis mifè- tura; paulo ante proférant iitiaginem , poft-
ratus Corporis & Sanguinis fui pi- modum cœleftis , ubi fanftificatione inC-
gnus falutare nobis non inanis
reliquit , pirati majeflas vera dittunditur , quje &
myrtetii fymSolum , feJ compaginante lubftantia panis &
vini appaicb.it extcriii?,
Spiritu Sando Corpus Chrifli verum , quod jam Corpus Chrifli & Saiiguis lit intenils.
quotjciiana veneratione , fub vifibili crca- u;j.
tun forma invilîbiliter virtus fecreta
, in (r) Si Deum omnia pofle credis , hoc
facris folenmibus operatut. FoiB. Epj{l. z. confeqiiitur ut credas creaturp.s qt-as de ni-
ad AdeoJiitMtu, p^r^e j. hilo potuit creare, lias ipfas multo tnagis
(//) Quid iiidignum Deo judicari potcft valeat in exc-Uentioris naturx dignitaten»
qui uterum virginis fub.it , R virgmibus ;
convertere in fui corporis fubilantijintranf-
«reatis infunditur, c^ix licct liroplicis na- \ fundere. UU^
Rij
ija 'SAI NT FU LB ERT,
Lettre z, à VU. Un Seigneur Einard (5) , & non pas Finardfy
nommé
Finar ou El-
J comme on le nomme dans
imprimés , confuka Fulbert fur
les
l'ufage établi en plufieurs Egliles , de donner à un Prêtre à
fon ordination , une Hoftie confacrée qu'il devoit confumer
pendant quarante jours , en en prenant chaque jour une par-
ticule. Fulbert qui croyoit cet ufage général dans toutes les
Egliies , parce qu'il l'étoit dans la Province où il avoir pris
Baiflance , fut furpris de la quellion d' Einard. Avant d'y ré-
pondre , il remarque qu'encore que les ufages ne foient pas
les mêmes dans toutes les Eglifes d'Occident & d'Orient , ils
n'étoient pas tous différens ; que ces Eglifes fe rencontroient
en plufieurs points ; qu'au refte la variété de la difcipline ne
nuifoit point à l'unité de l'Eglife , quand la foi étoit une. Ve-
nant à la queftion , il raconte qu'un Prêtre ayant reçu à fon
ordination , l'Hoftie de la main ae l'Evêque , l'enveloppa dans
un parchemin delliné à cet ufage , qu'il ouvroit tous les jours-
en célébrant la MefTe , & en prenoit une particule qu'un jour ;

après avoir dit la Mefle , il oublia , en pliant les ornemens &


le corporal , le parchemin où étoit l'hoftie ; & que le lende-
main à l'heure de la Mefle , il ne la trouva plus , quelque re-
cherche qu'il en f;t. Il en fut extrêmement affligé & l'Evê- ;

que informé de l'événement , ordonna à tous les Frères de


faire pénitence pour ce Prêtre , & lui en impofa à lui-même
une iévere pour le punir de fi négligence. Fulbert en pr!t oc-
eafion de demander à cet Evêque , s'il ne feroit pas mdeuK de
conloramer l'hoftie le premier ou le fécond jour , vu le péril
de la garder fi long-tems , & qu'il y a peu de Prêtres capa-
bles d'en prendre un lî grand foin. Il répondit qu'on les obli-
geoit à prendre de cette Hoflie pendant quarante jours, afin
de les faire fouvenir des quarante jours durant lefqucls Jefus-
Chrifl apparut à tes Dilciplcs , pour fortifier leur foi encore
foible. Ne
pourroit-on pas , répliqua Fulbert à l'Evêque , fup-
plécr à ce myftcre par le pain que le Prêtre conlacrc tous les

jours ? Faites attention , mon fils , lui répondit le Prélat,,


qu'encore qu'il y ait plufieurs Egli'.cs répandues par toute la.
terre , néanmoins elles ne font qu'une feule Eglife Catholique,
parce qu'elles n'ont qu'une même foi; de même plufieurs Ho-
fties offertes par plufieurs fidèles , ne font qu'un même pain i
eauic de l'unité du Corps de Jclus-Chrifi. Il ajoute que le
mi < m t—.— III I
i^^—i^W»

(0 ^"li' ^'
,

EVESQUE DE CHARTRES. Ch. Ylll. i ,^


pâîn confacré par l'Evcque, & le pain confacrc par le Prê-
tre , font changes en un & même Corps de Jefus-Chrirt, par
la vertu fecrette de la même puiflance qui opère ; mais que
comme on peut dire en quelque forte , que le Corps de Jcfus-
Chrifl: ne de la Vierge & attache â la Croix ;, eO: différent
du Corps de Jefus-Chriil: reflufcité ; de même le pain confa-
cré le jour de Tordination , & réfervé par les Prêtres , peut
ce femble , avoir une fignitication particulière , différente de
celle du pain confacrc tous les jours le premier pouvant Ci-'
:

gnifier le Corps du Seigneur refTufcité &


placé dans le Ciel
qui conféquemment ne meurt plus ; le fécond , Jcfus-Chrifl
qui meurt &
reffufcite pour nous, fe montre à nous, &
fe donne
en nourriture.
VIII. Les deux Lettres de Fulbert au Roi Robert ( f ) , !-""<? ' *
font pour l'engager à faire démolir deux châteaux bâtis par
*^' ^
bert!
le Vicomte Geofroi , & qui caufoient beaucoup de dommages
à l'Eglife de Chartres. Celle qu'il écrivit à Lentheric , Arche-
vêque de Sens («) , étoit pour le prier de prêter fon fecours à
Avifgaud , Evcque du Mans , à qui le Comte Hébert faifoic
beaucoup de mal , en s'emparant des maifons, des terres &
des revenus de l'Evêché , & même des prébendes canoniques-
de l'Eglife. Azel , Evêque de Paris , s'étoit plaint que Ful-
bert & Lentheric de Sens, avoicnt publié fa confelTion. Ful-
bert ioutint qu'il n'en avoit jamais parlé ( a" ) , mais qu'il ne
dépendoit pas de lui d'empêcher de répandre dans le public y
des choies connues d'ailleurs , foit avant , foit depuis fa con-
feilion. Dans une autre Lettre (y) , il s'excufe auprès de l'E-
vcque de Paris , de n'avoi-r point excommunié une perfonne
qui s'étoit emparée des biens de cette Eglife. Je ne l'ai point,
fait , dit-il , parce que je n'ai trouvé perfonne qui auroi: ofi;
lui (îgnitier la fentence d'excommunication ; qu'elle ne nous
feroit pas d'une grande utilité , fi je la portais à fon infcu ;.
& parce qu'il me paroît qu'elle aura plus de force y fi on la:
rend dans le Concile Provincial. Cet Evêque s'étoir plaint
de fon Archidiacre à Fulbert , qui lui répondit, qu'à cet é-
gard il ne pouvoit rien , n'ayant pas entendu cet Archidia-
cre , ni examiné la caufe. 11 le prie de fufpendre l'anathê-

(t) Pag. 7.
I
r*) Epifl. 8.
,

154 SAINT FULBERT,'


me dont menaçoic Adeold , pour un différend qu'il avoîc
il

avec les Moines de Saint Denis ; Adeold voulant bien s'en


rapporter au jugement de l'Evèque même de Paris , «& de
Fulbert.
Lettre il , à IX. Vers Tan 1003 (z) , faint Abbon , Abbé de Fleuri ,
<;/Fi!."u'ii.
^
ayant appris qu'il s'écoit élevé une conteftation dans le Mo-
nafkere de Saint Pierre de Chartres , au lujet de réIc£lion d'un
Abbé à la place de Gilbert , en écrivit à Fulbert , pour fça-
voir au vrai ce qui s'étoit pafle. Abbon y prenoit intérêt
parce que le Monaflere de Saint Pierre de Chartres , avoic
été autrefois réformé par les moines de Fleuri. Fulbert répon-
dit , que Gifbert , Abbé de Saint Pierre , étant dangereufe-
ment malade , mais encore fain d'clprit , un Moine nommé
Magcnard , forrit la nuit du Monaflere , & alla demander
l'Abbaye au Comte Thiébaud , alors à Blois ; que le Comte le
renvoya le lendemain , avec ordre aux Chanoines & aux Moi-
nes de le recevoir en qualité d'Abbé. Cet ordre furprit d'au-
tant plus , que loriqu'il arriva , l'Abbé Gilbert vivoit encore,
C'étoit une raifon de ne pas recevoir Magenard comme Abbé.
D'ailleurs il n'étoit point Moine de Saint Pierre , ni même
Clerc. On ne voulut donc point le reconnoître. Il s'en re-
tourna mécontent au Comte Thiébaud ; & cinq jours après ,
l'Abbé mourut. On aflembla le Chapitre , où l'on appella des
Chanoines , du nombre defquels étoit Fulbert. Il demanda
aux Moines , s'il y en avoit quelqu'un qui favorisât l'entrc-
prife de Magenard. Tous répondirent que non. Sur quoi on
députa au Comte Thiébaud , pour lui donner avis de la mort
de l'Abbé , & demander permiffion de procéder à une élec-
tion régulière. Les Députés partis , deux Moines qui avoient
des Prévôtés au dehors , allèrent à Blois dire au Comte que
Magenard étoit élu Abbé du contentement des Frères. C'é-
toit un menibngc , le Comte à l'inftant , donna à Magenard
le bâton Paftoral. Les Moines qui étoient rcftés à Chartres ,
informés de la fourberie , firent un a£lc de proteftation qu'ils
lignèrent. Le Comte amena Magenard à Chartres , &
le fit

entrer de force dans le Monaflere. Les Moines fe retirèrent :


l'Evêquc Rodulphe les reçut. Il avoit fuccédé depuis peu ,
dans TEvcché de Chartres, à Odon. Il rcfufa apparemment
de bénir l'intrus , puiique celui - ci reçut la bcnédidion d'un
,

EVESQUE DE CHARTRES. Ce^t. VIII. J35


Evcque de Bretagne , dans un des Fauxbourgs de Chartres,
en rabfence du Clergé, au murmure du peuple , & malgré
l'oppofition du Député de l'Archevêque. Fulbert déplore cet
attentat aux Loix de l'Eglile , & la facheufe fituation de celle
de France , où Ton ne connoiflbit plus les vertus qui avoient
rendu ii illuftres , faint Denis , faint Martin , faint Hilai-
re. Il prie Abbon de s'employer pour les Moines de Saint
Pierre.
X. Le Comte Rodulphe avoît ufurpé des biens de l'Eglife „ ^^"/® ^"
, „,
de Chartres
/
\a)
^
, &
o -1
il
• ' I c °
en avoit tue de les propres mains un
• Pape Jean.

Clerc. Cité cà la la Cour du Roi & au tribunal de l'Eglife , il

ne comparut point. Fulbert l'excommunia. Le Comte prit le


Rome pour fe foire abfoudre. L'Evêque de Char-
parti d'aller à
tre en au Pape Jean XVIII , pour.le prier de ne point
écrivit
recevoir à fa communion , un homme que la Loi divine éloi-
gnoit de l'Eglife comme un paycn.
XL
II y a de fuite douze Lettres à Lentcric, Archevêque Lettre? à Len-
de Sens ih). C'étoit de lui que Fulbert avoit reçu l'ordina- te^'c Arche- ,

non & 1 onthon iamte : ce qui 1 attachoit extrêmement a ce


Prélat. Fulbert en répondant à une de fes Lettres , lui con-
feille de renvoyer un Prêtre fimoniaque , dans le Dioccfe de
l'Evêque qui l'avoit ordonné ; & au cas qu'il s'obflinât à de-
meurer dans celui de Sens , de le fufpendre de toute fon£i:ion
cccléfiaflique. Il lui marque dans une autre Lettre (c) , de dé-
. grader un Prêtre ordonné pour de l'argent ; de le mettre en
pénitence pour deux ans , & de le rétablir enfuite , non en le
réordonnant, mais en le réhabilitant dans fes ordres , par les
înftrumens & les habits propres à chaque Ordre , en difant :
Je vous rends le degré de Portier, au nom du Perc , & du
Fils, & du Sainc-Elprit ; & ainfi de tous les autres Ordres
.jufqu'à la Prêtrife ; ce qui fera fuivi d'une bénédi£lion en ces
'termes : Que la bénédiétion de Dieu le Père , & du Fils du &
Saint-Efprit , defcendc fur vous, afin que vous foyez confir-
mé dans l'Ordre facerdotal , & que vous offriez des hofties
,
pacifiques au Dieu tout-puiffant , pour les péchés & les offcn-
fes du peuple. L'amitié que Fulbert avoit pour Lcnteric , ne
Fempcchoit pas de lui écrire vivemx:nr (<j?) , quand il fe croyoii;-
,

13^ SAINT FULBERT,


lézc dans les droits de fon Eglife.L'Archevêque de Sens a-
voic ordonné quelques Evcques fans fon confeil & fans l'in-
viter à ces ordinations. Fulbert lui fit là-deflus des repro-
ches (e) , &
fur-tout d'y avoir fait venir l'Evêque de Troics ,
qui en ctoit incapable. 11 n'eut point d'égard non plus , à la
prière que Lenteric lui fit d'abfoudre des homicides de Sen-
lis , ne trouvant pas que les conditions qu'ils offroient , fuf-

fent fuffifantes pour l'expiation de leurs fautes. Il lui dit dans


une autre Lettre (/) Ce n'eft point moi qui
: ai choifi l'Evê-
que d'Orléans , comme on vous l'a rapporté : mais fâchant
qu'il avoit été élu par Clergé
le & le peuple , je l'ai ordonné
Prêtre ; & par honneur pour vous , perfuadé de ne
je lui ai
point aller à Rome fe faire facrer Evêque. Il loue Lenteric
d'avoir admis à fon Confeil l'Abbé Odilon &
quelques-uns
de fes Moines (g) , difant que ce lui étoit un moyen de fau-
vcr fon ame , &
de rétabhr fa réputation. Il efl: de fentiment
qu'un homme qui a été parrain de fon fils à la Confirmation (^),
doit fe fc parer de fa femme ; &
il fe fonde fur le feptiéme Ca-

non du Concile de Leptines , fous Charlemagne.


Lettrcà l^E- XII. Lenteric &
Fulbert écrivirent conjointement au Cler-
giife de ParJî.
gé de l'Eglife de Paris (i) , à l'occafion des maux qu'on fai-
ioit fouffrir à leurEvêque. Ces deux Evêques témoignent leur
étonnement de ce que ces Clercs admettoient à leur commu-
nion des hommes impies , qui n'avoient de foumiflîon , ni
pour les Loix divines , ni pour leur Pafteur. Ils fe plaignent
en particulier , de l'Archidiacre Lifiard , qui au lieu d'être ,
Iclon les fondions de fa charge , l'œil de l'Evêque , Tœcono-
me des pauvres , le Catéchifte des ignorans , étoit comme un
clou qui perçoit l'œil de fon Evêque , le déprédateur des biens
des pauvres & le guide de l'erreur , en donnant des malédi-
ftions à fon Evêque , & en le troublant dans fon miniftere ;
en ôtant aux Autels les dixmes & les oblations , qui font le
patrimoine des pauvres ; & en les donnant à des féculiers fans
la participation de l'Evêque. Ils déclarent Lilîard féparé de
leur communion , avec menace de le frapper d'anathême per^-
pétuel dans le Concile plénier , s'il ne fc corrige. Ils ordonnent

(0 Epifi. ip. {h)Epifl. 33.


(f) Epift. H>.
ii)Ep,fl.iu
àti
,

EVESQUE DE CHARTRES. Ch. VIIT. 137


de lui lire cette Lettre , arin que la vue du danger l'engage à
Téviter.
XIII. Fulbert confulté par Guy , Evêque de Senlis (k) , fur q^'^'" ^^^
la façon dont on devoit punir un Diacre , qui feignant être
Prêtre , avoir célébré la MefTe , répondit ; qu'il faJloit le dé-
pofer de fon grade de Diacre , & le mettre en pénitence par-
mi les laïques. Il n'en fixe point le tems , laiflant à l'Evêque
de l'allonger ou de le diminuer , iuivant la ferveur du péni-
tent. Guy craignoit de prendre part à l'ordination d'Ebal ou
Ebles , Archevêque de Reims ( / ) , parce qu'il avoir été élu
encore laïc. Fulbert le rafTura en lui difant, qu'il ne dévoie
faire aucune difficulté là-deffus , s'il étoit vrai, comme on le
diloit , qu'Ebles avoit été des fon enfance , élevé dans la Re-
ligion Chrétienne ; qu'il étoit fain d''efprit , inflruit des divi-'
nés Ecritures , fobre , chaRe , de bonne réputation , amateur
de la paix , & que fon élection s'étoit faite du confentement
du Clergé 8c du peuple de la 'Ville. Il rapporte les exemples
de faint Ambroiie, de laint Germain d'Auxerre , quiavoienr
été tirés d'entre les laïques ; & le bcfoin où l'Eglife de Reims
étoit de le relever de fa chute. Il trouve mauvais dans fa Let-
tre cl l'Archevêque de Bourges (?«) , qu'il ait excommunié les
Moines de Saint Pierre de Chartres, n'en ayant point le pou-
voir. Enfuite il fe juftifie fur ce que cet Archevêque lui avoic
reproché d'avoir fournis l'Abbé Tetfride au Moine Salo-
mon , qui n'étoit que Prévôt. Il dit là - deflus , que Tetfride
avoit été entendu , & qu'il s'étoit démis de fon Abbaye vo-
lontairement avant que Salomon eût été mis en fa place.
XIV. Le Sous-doyen de l'Eglife de Chartres étant mort, LatreàAJaî-
Robert , Evêque de Senlis , demanda ce Bénéfice pour lui '"^'^°"'
ou pour Guy fon frère. Fulbert lui fit réponfe (n) , qu'il ne
lui convenoit point , puifqu'il étoit Evêque ; ni à fon frère
parce qu'il étoit trop jeune. Il le donna donc à un de fes Prê-
tres nommé Evrarci , homme de fçavoir & de vertu. L'Evê-
que de Senlis & fa mère en furent fi irrités , qu'ils firent de
grandes menaces à Evrard en préfence de témoins. Quelques
jours après , les domelliques de Robert étant venus à Char-
tres , attaquèrent ce Prêtre comme il alloit à Matines , & le
tuèrent à coups de lances & d'épées. Les auteurs du crime fu-

{DF.pijl.^S. [ Q,)EpiJl.^6.f'ig.i6.
Tome XX,
,

138 SAINT FULBERT,


rcnt découverts. Fulbert en écrivit à Adalberon, Evcque de

Laon, comme au plus ancien de la Province de Reims, dont


le Siège étoit apparemment vacant, l'exhortant à excommu-
nier les coupables. Il prononça lui-même une fcntence d'ex-

communication contre eux , & refufa ce qu'ils offroient pour'


fe faire abfoudrc , comme on l'a dit plus haut. L'Evêque de
Senlis lui écrivit pluficurs fois fur cette affaire (0) , mais Ful-
bert ne fe relâcha pas. Ilconfeilla à l'Archcvcquc de Tours,.,
à qui l'on avoir refufé cà Rome le Pallium , de ne pas fe re-
buter , &
de réitérer fa demande (p ) , difant qu'il y avoit
des régies en Cour de Rome, que l'on ne connoilïbit pas bien,
ailleurs.
X V. Il décide qu'une femme qui s'étoit engagée par-
ferment à époufer un certain homme ( 7 ) , ne pouvoit en
cpoufer un autre , finon après la mort de cet homme , ou de
fon confentement. Une femme fe fépara de fon mari , dont
les mœurs lui étoient infupportables. Le mari voulut l'obliger
s retourner avec lui (r) elle répondit qu'elle n'y retourne-
:

roit jamais , & qu'elle préféreroit de renoncer au monde & de


fe faire religieufe. L'Archevêque de Rouen confulta Fulbert,;
qui fut d'avis de ne point obliger cette femme de retourner
avec fon mari ; & de ne point permettre à fon mari d'en é-
poufer une autre ^ jufqu'à ce que celle-ci fût ou religieufe ou-
morte. Il efl: de fentimcnt qu'on ne doit point dire la MelTe
qu'il n'y ait deux ou trois pcrfonhes pré fentes ( ^ ) ; l'Eglife
où l'on offre le facrifice ne le pouvant dire que de plufieurs,
de même que la falutation , Dommus vobijcwn. 11 écrivit à
Ebles , Archevêque de Reims (t) , pour le confoler dans les
chagrins que lui caufoit Eudes , Comte de Champagne , &
pour l'empêcher d'abandonner fon Eglife. Il lui repréfcntc
que ce feroit manquer au devoir de Pafteur. L'Evêque de Li-
fieux avoit interdit les Prêtres de la dépendance de la Cathé-
drale de Chartres , qui avoicnt des Eglifcs dans fon Diocc-
fe , parce qu'ils ne lui avoient point porté le droit de Syno-
de. Fulbert en écrivit à cet Evêque ( '<) s '^ ^"-'^ •' ^^^ ^^^ ^e
droit leur avoit été remis dans le Diocèfc de Chartres , par

(e) F,pij).49. îo. (s) i-p:iy ÎJ.


(p) hpifl.
{j)Epill.u.
48.
I

I
l
(f)

(«;
Ip'p. W
£/>./?.$ 8.
ir)EpiJl.^i
EVESQUE DE CHARTRES. Ch. VIIT. 139
les prédcceffeurs mais que cet a6le de libéralité de leur part,
"
;

ne pouvant préjudicier aux droics établis dans le Diocèle de


Lilîcux ces Prêtres le lui paieront , pourvu qu'il les récabliiTe
,

dans les fondions de leur minillerc. Il ne lailTe pas de prier


l'Evèque de Lilîeux de leur remettre ce droit.
XVI. Le changement de conduite dans celui de Paris (.v), ^.J^^^Jé' de Pal
Jui fut bien plus lenfible. Cet Evèque au commencement de ris.

fon Epiicopat , s'étoit plaint amèrement de ce que fon pré-


dccefleur, par une témérité l'acrilége , avoir donné des autels
en bénéfice à des laïques & depuis , il pria lui-même Ful-
;

bert de leur en donner. L'Evêque de Chartres ne répondit


qu'en peu de mots à fa Lettre , fe rélervant de lui faire de
vive voix de fortes réprimendcs fur l'indécence de fa deman-
de. Fulberr ne put aflifler , par railon de maladie , au facre
de Henri fils du Roi Robert. Il en eut encore d'autres rai-
fons qu'il ne détaille pas (^ ). Elles regardoient la Reine mère
de ce jeune Prince. Guy , l'un des complices du meurtre du
Sous-doyen de Chartres , demandoit que cette affaire fût exa-
minée dans un Synode. Fulbert à qui l'Archevêque Lenteric
en écrivit , répondit qu'un Synode étoit inutile à l'égard de
Guy, puifque fon crime étoit démontré (z). Théoderic ou
Thierry d'Orléans , s'attendoit de voir à fon facre l'EvêquG
de Chartres. Il s'en plaignit à lui-même en fon nom , en ce-
lui de fes amis , & même du Roi Robert. Fulbert répondit ,
1°. qu'il n'y avoit point afTifté {a) ,
parce qu'il n'y avoit point
été invité , ni par Lettres , ni par Députés des Ev.êques de la
Province; 2=. parce qu'il avoit vu un interdit du Paperon-
-tre lui à caufc d'un crime d'homicide dont il étoit acculé ;
,

3°. parce qu'il s'étoit avoué lui-même indigne de l'Epifcopat ;


,4°. parce qu'on fe plaignoit que fon cledion s'étoit faite par
•l'autorité du Prince , contre la volonté du Clergé du peu- &
-ple. Ce font-là , lui dit-il , les raifons qui m'ont empêché de
vous impofer les mains , de peur d'être privé moi-même du
droit de les impofer aux autres. Il reproche encore à Thierry
de s'être fait ordonner par violence, & d'avoir enfuite célé-
bré les faints Myfteres dans une Eglife violée , avant qu'elle
eût été réconciliée ce qui étoit défendu par les Canons. Ful-
:

ix)Epi/}.^9, I (t]Ip!jt.6u
Q)Efift,^G. 1 {a) Epifl, 61.
Si)
140 SAINT FULBERT,
berc reconnut depuis , l'innocence de Thierry (b) , & ils véciî-
rcnt en bonne intelligence.
XVII. 11 approuve dans une de fes Lettres {c) la diflb- ,

lution du mariage pour caufe d'impuiflance , avec permiflTion


d'en contrader un nouveau. Dans une autre {d) , il prie l'Ab-
bé Odilon de recevoir dans fon Monaftere , un Moine qu'il
en avoir chafle pour fes fautes, mais qui en ctoit repentant.
11 dit à l'Abbé & aux Moines de Saine Médard de SoifTons,
d'être à l'avenir plus foumis à leur Evêque (e) , puifqu'ils dé-
pendent tellement de lui , qu'ils ne peuvent même fans fon
confentement , fe bâtir un Oratoire. 11 les reprend d'avoir ce*
lébré dans l'Eglife de Saint Médard ,. depuis qu'elle avoir été
violée par un meurtre commis par leurs domeftiqucs , & avant
qu'elle eût été réconciliée par l'Evêque. Il confeille auffi la
foumiflîon à Gaufelin , Abbé d'Orléans (/) , envers l'Evêque
de cette Ville , qui l'avoit excommunié lui fes Moines , &
parce qu'ils ne vouloient pas reconnoitre fa Jurifdidion. En
quelques Eglifes, il éroit d'uiagc les jours de jeûne, d'ajouter
un nombre de Pfeaumes à ceux qui étoient prefcrits
certain
pour chaque Heure canoniale. Fulbert confulté fur cet ufage,
répond qu'il ne trouve point de régie là - deiTus ; que cette
augmentation lui paroîtfuperfiuc (g) , Il elle n'efl fécondée de
îa dévotion de ceux qui récitent ces Pfeaumes; qu'il faut tou-
tefois que chacun fuive l'ufage de fon Eglile. Il fut aulTi con-
fulté à l'occaiion d'un Prêtre qui avoir célébré la MefTe fans
communier. Sa réponfe porte (//) , que fi ce Prêtre s'eft abftc"
nu de la communion par défaut de foi , ou parce qu'il fe fen-
toit la confcience chargé d'un péché mortel , comme d'yvro-
gncrie ou d'impureté , on doit le priver de fes fondions , jur"
qu'à ce qu'il foit converti & qu'il ait fait pénitence ; que s'il
s'en eft abftenu par dégoût , &
à caufe de la trop grande frc*-
auentation du Sacrifice de la MeiTe , on doit le priver pen*-
ant un an de la Communion ; que H c'cfl: par fcrupulc &
pour une faute légère , on doit le reprendre doucement ; en»-
fin , que fi c'efl par foiblefTc de tête ou d'ellomac , on l'oblige-
ra à s'abftenir de célébrer ,
jufqu'au rétablilTemcnt de fa fanté».

(i) Ijip. Cl, (f)Epill.7y.


I
(0 Epip. «4. I (g) Epifl. 79.
Çd)Epift.yu \ (blEfip.di,
,

EVESQUE DE CHARTRES. Ch. VIIÎ. 141


XVIII Le Roi Robert ayant demandé fon avis fur Té-
lui Leff.-eauRoi;

Ieâ:ion de Francon , à qui il deflinoit rEvcchc de Paris , Fui-


^<^''"f«

bert répondit (i) , que fi Francon croit un homme de lettres


qu'il prêchât facilement , en quoi , dit-iî , les Evêques ne doi^
vent pas être moins experts que dans l'action ; & li réledion
avoir été jugée canonique par l'Archevêque de S^ns& parles
Evêques de la Province , il donnoit fon confentement à l'or-
dination de Francon. Ce Prince écrivit plufieurs autres Let-
tres à Fulbert. Dans une (^) , il lui marquoit qu'il devoir paf-
fer à Orléans la fête de Noël, &
y tenir une Affemblée avec
les Princes de fes Etats , pour traiter de la paix. Fulbert lui
lie là-defï"us des remontrances , difant que la Ville d'Orléans

ayant été brûlée , profanée par divers lacrilégcs , enfuite&


excommuniée , il ne pouvoit y célébrer dignement cette fête ,
fans participer à la communion de l'Euchariftie , &
aiïifter
aux divins Offices ; que tout cela n'étant point faifable , fans
auparavant réconcilier les Eglifes de cette Ville , il devoir
pardonner à l'Evêque , &
le rappeller pour faire cette récon-
ciliation. Le même Prince fut prié par Guillaume , Duc d'A-
quitaine , de confuirer les Sçavans de fon Royaume , fur un
prodige arrivé en Aquitaine , près la côte de la Mer , trois
jours avant la Saint Jean, en l'an 1022 (/). Il tomba du ciel
une pluie de fang , qu'on ne pouvoit laver quand elle tomboit
fur la chair d'un homme , fur de l'étoffe ou fur de la pierre ;
mais on la lavoit bien fi elle tomboit fur du bois. Le Roi Ro-
bert en écrivit à Gauflin , Archevêque de Bourges , le priant
de chercher dans les Hifloires anciennes , & de lui marquer
s'il y auroit trouvé quelque prodige femblable , &
ce qui s'en
étoit fuivi. Il en écrivit auffi à Fulbert. Gauflin rapporta au
Roi , grand nombre d'exemples d'événemens à peu près pa-
reils (m) , & prétendit que cette pluie de fang étoit le préfage
d'une guerre; que celui qui étoit tombé fur ia pierre & ne
pouvoit être lavé , étoit la figure de l'Eglife, qui quoique
fondée fur la pierre , c'efl-à-dire , fur Jefus-Chrifl , efl fu-
jette aux tribulations ; que le fang tombé fur le bois , & que
l'on effaçoit , figniiroit le bois de la Croix , & les œu~sres de
là pénitence qui effaçoit nos péchés. Les explications myflc'-=

0) Wfift: Bi.page i<},. 1 CO Epifl. 9^;


iiO_Efifl,pj, l ÇmlEfili.^6*
.142 - SAINT FULBERT,
rieufes qù*il donne aux
autres circonflances du prodîge , font
dans le même
goût («). Fulbert en donna à peu près de fem-
blables , & fe contenta de rapporter d'après faint Grégoire de
Tours , l'exemple d'une pluie de fang tombée à Paris , qui fut
fuivie la même année d'une pefte.
e:uRoi XIX. Il paroît par les Lettres de Fulbert à Canut, Roi
L.nut,
de Dannemarc &: d'Angleterre (0), que ce Prince l'avoit ai-
dé par fcs libéralités , à rebâtir l'Eglilè de Chartres. Il fut aufli
fecouru dans cette dépenie , par Guillaume , Comte de Poi-
tiers. Fulbert écrivit durement au Comte Foulques , pour a-
Voir protégé des rebelles au Roi , & leur avoir donné retrai-
te (p). Il le menace d'excommunication , s'il ne les abandonne
à la Juflice. Les Lettres fuivantes , ou ne font point de Ful-
bert , ou ne contiennent rien de bien important (q). Il y en a
douze d'Hildegaire , un de les difciples , dans la dernière def-
<juelles il dit avoir appris de fon Maître , que les mauvaifes
penfées né nuifent point à notre ame , fi nous n'y prenons point
de plâifir qu'il faut les chaffer de fon efprit par le figne de la
;'

croix.
Autres tet-
XX. C'eft , ce femble , le même Hildegaire à qui efl: adref-
"
oett. fée une Lettre de Fulbert (r) , fur l'adminiftration des reve-
nus cccléfiaftiques , & fur l'ufage qu'on peut faire en certai-
nes rencontres , des vafes dcflinés au facré miniflere. Elle ell
rapportée dans le fécond tome du Spicilégc. 11 fait voir par
l'autorité de faint Jérôme & de faint Ifidore , que les revenus
de l'Eglife étant le patrimoine des pauvres , ceux qui en ont
l'adminiftration , ne peuvent , après en avoir pris pour leurs
propres befoins , les employer à d'autres ufages , qu'au foula-
gemcnt des pauvres, à. la rédemption des captifs, ou à quel-
ques œuvres de piété. A l'égard des vafes facrés, il dit qu'on
peut bien , dans de preffans befoins de l'Eglife ou des fidè-
les , les mettre en pièces j mais jamais les employer à des ufa-
ges profanes , ni les mettre en gage ; qu'avant de les brifcr , il
faut d'abord prendre dans le trèlor de l'Eglife , l'or & l'ar-
gent monnoyés ; cnfuitc les vafes qui ne font point encore con-
lacrcs , enfin ceux qui le font , fi la circonflance des tcms &
des pcrfonnes le demande. F'ulbert établit ces règles , pour

(«) EpSft. 9-. t (g) Fpift. 154.


(0) Lpip. 97. loî. 104, 1 (j) FuiB. Tom. i.Scrifi.f. 817.
If) ffip, loô.
'.'
,

EVESQUE DE CHARTRES. Ch. Vin. 145


tous ceux qui font prcpofcs à la diftribution des biens de TE-
glife , envers les pauvres de Jefus-Chrift , du nombre defquels
lont , dit - il , les Moines , les Chanoines réguliers , ou tous
les Religieux qui vivent en commun. On doit fournir à leurs
befoins avec difcrécion , & en évitant la prodigalité. Pour
preuve du refpeft dû aux vafes facrés , il rapporte la manière
dont le Roi Balthafar fut puni pour avoir fait fervir du vin à
fcs concubines dans les va les que ion père a voit emportes du
Temple de Jéruialcm ; &
un prodige arrive depuis peu en
Bretagne. Un Banquier avoir pris en gage des vafes de l'E-
glifc, &les gardoit dans un coffre. Il- arriva que de jeunes
enfans montèrent fur le coffre : a'ufTi-tôt ils tombèrent en dé-
mence ; 6c des chiens qui par hafard y étoit auffi montes , fu-
rent dans le moment attaqués de la rage. Le Banquier effrayé,
fe fauva à TEglife , raconta par-tout , ce qui étoit arrivé , &
rendit les vafes facrés avec autant de crainte , qu'en eurent
autrefois les Philiffins de retenir chez eux l'Arche d'alliance
i la vue des calamités dont ils croient menacés , s'ils la gar-
doient plus long-tems. Fulbert fait mention d'une autre Let-
tre qu'il avoit écrite au même Hildegairc , &
dans laquelle il
fe plaignoit de que certains Evcques faifoient de leurs
l'abus
revenus , en les employant à. enrôler des foldats, &: autres abus
femblables.
; XXL Cette féconde Lettre fe trouve dans le premier tome Letfrp;
degaire.
des Anecdotes de Dom Martenne ( s ). On y voit que ces
Evêques enrôloient des foldats , ou pour exciter des fédi-
tions,ou pour venger les injures qu'on leur avoit faites; qu'ils
dirigeoicnt eux-mêmes leurs troupes , &
qu'ils favoient autant
bien que perfonnc le métier de la guerre. Fulbert dit, qu'ils
méritoicnt mieux le nom de Tyrans que d'Evcques fait ; &
fen polîlble pour leur infpirer la douceur de l'Evangile , donc
licite pluficurs paffages. Il en rapporte encore des Pcres de
l'Eglifc , &
un Edit du Roi Charles , portant dcfenfe aux
Evêques & aux Prêtres de
porter les armes, de fe battre, Se
d'aller à la guerre ou contre l'ennem.i. Ce Prince ne permet-
,

toit à la fuite de fes armées , qu'un ou deux Evêques avec


quelques Prêtres , pour la célébration des Myfteres 5 & i'ad-
miniftration du Sacrement de Pénitence,

Ci) ToOT, i.Anecd, M^temit.f, iio.


,

Î44 SAINT FULBERT,


TH cours Je XXII. Il refte quelques Difcours de Fulbert (r). Le
nous
^uibert (ur la
premier r/elt qu'un fragment de rinftruttion que Fulbert fie
* *
à fon peuple fur les premiers principes de la Religion , c'eft-
à-dire , fur k foi en un Dieu en trois Perfonnes. Pour leur
rendre fenfible ce Myftere autant qu'il peut l'être , il apporte
l'exemple du Soleil , dans lequel font trois chofes , la fphere
la clarté , la chaleur ; ce ne font pas trois foleils , mais un feul.
Il dit auflTi quelque chofe de l'Incarnation. Dans le fécond , il
traite en peu de mots du Batême & de la Pénitence. Elle
n'eft utile qu'autant qu'on fe corrige de fes fautes. Il faut a-
,vant tout , que le pécheur mette fin à fes défordres , qu en-
fuite il ks expie par la pénitence , par les aumônes , par les
prières. Le troifiéme Difcours fut prononcé le jour de la Pu-
rification. Fulbert fait voir que Jefus-Chrift &
la fainte Vier-
fa Mère , ne fe préfenterent au Temple que pour obéir à
fre
a Loi. En parlant des cierges allumés que les fidèles portoient
dans l'Eglife , il dit En mémoire de la préfentation de Je-
:

fus-Chrift au Temple , nous célébrons ce jour avec l'oblation


des cierges , dont la lumière fignifie fa divinité , [la cire , fa
chaire virginale.
Difcours fur XXIII. Il y a trois Sermons fur la Naiflance de la fainte
la Nativité de Vierge («). On en faifoit la Fête depuis quelques tems , les
la Ste Vierge.
fj^éJes ayant témoigné là-deffus beaucoup d'empreffemenr.
On ne doutoit pas que cette naiflance n'eût été miraCuleufe ,
& annoncée par un Ange à Joachim & à Anne, que Marie
ne fût née à Nazareth , qu'elle n'ait été confaciée à Dieu à
l'âge de trois ans par fes parens , & qu'à l'âge de quatorze
ans , elle n'ait voué à Dieu fa virginité ce qu'aucune vierge
•,

n'avoit fait avant elle. Fulbert dit qu'elle fut enterrée dans la
vallée de Jofaphat (x) , où l'on bâtit une Eglife en fon hon-
neur. Il rejette les livres apocryphes de la Naiffancc de la
fainte Vierge (y) , & de l'enfance de Jcfus-Chrift, «& une pré-
tendue Généalogie de cette fainte Mcre , qu'on fuppofoic
fauflTement avoir été écrite par faint Matthieu. Le troifiéme
Difcours finit par deux vers hexamètres , où l'Orateur re-
court à l'intercefiion de Marie , pour obtenir le pardon de
fes fautes , les progrès dans la vertu. Henri de Gand , Se
&

(f) Tcni. t8. Bitliot. Pat. fag. 37. f (») P-^S- 39.
(«) i\^ie j«. * (r) Pos- 40. ^ . ,
Tnthemô
,
,,

EVESQUE DE CHARTRES. Cn. VIIT. 145


Trithémc (z) , font menrion du premier Dilcours , & on cn
trouve un fragment dans la Bibliorhcque de Fleuri.
XXIV. Le même Henri de Gand & lYmonyme de Mol k , J^^j^-ff""*
attribuent à Fulbert un Traite contre les Juifs (r.) , où il rc-
pondoit aux vaines fubtilités qu'ils employoient pour montrer
que cette Prophétie de Jacob Le Sceptre ne fera point oté de
:

Juday &c. n'a point été accomplie en Jclus-Chrift. Il eO: vi-


iMc que c'eft ce Traite que l'on a divilc en trois Sermons
dans les éditions des Œuvres de Fulbert; divifion qui n'eft
fondée fur rien , puifqu'on ne voit par aucun endroit , qu'ils
aient été prononcés publiquement. Il paroît au contraire , que
ce n'eft qu'un feul Se même Traité ,
quoique les parties n'en
foicnt pas extrêmement bien liées,
XXV. Tous les Juifs ne raifonnoient pas de même, quand ^'^^^^^^^^
il défendre leur Religion {b). Les unsdiioient Il n'efl
falloit :

pas furprenant que nous foyons réduits en captivité , que &


ne poffédant plus la Ville de Jérufalem , nous n'ayons point
de Roi de notre Nation. IJ en a été de même dans le tems
de la captivité deBabylone; & nous avons efpérance de re-
tourner dans notre patrie lorfqu'il plaira à Dieu. Il fe peut
difoient quelques autres , qu'il y ait dans quelque partie du
monde que nous ne connoiiïbns point , une multitude de Juifs
avec un Roi de la Nation; c'en efl: alTez, pour dire qu'elle
jouît encore du Sceptre de Juda. Ne peut-on pas dire auiïi ,
que ce Sceptre cil entre les mains de ces Juifs fag-es 8c puii-
lans , qui gouvernent leurs maifons 8z leurs familles avec la
verge de la prudence ? Fulbert répond , que fi c'eft-là le fens
de la Prophétie de Jacob , non-feulement le Meflle n'eft pas
venu ; 'mais il ne viendra qu'après la mort de tous les Juifs ,
ou du moins qu'il ne s'en trouve plus aucun qui lâche gouver-
ner fa famille. C'eft renvoyer fa venue à la fin du monde , 8c
fiès-lors la rendre inutile. Il n'y a pas plus de fondement à
faire l'application du Sceptre dont parle Jacob , à tous les po-
rcs de famille qui la gouvernent avec prudence. C'eft d'un
Sceptre rbyal que ce Patriarche parle ; quand m.crae les&
Juifs auroient pluiieurs Rois de leur Nation , ils ne pourroicnt
en conclure que le Mcffie ne foit pas venu ; parce qu'il eft

(î) HfnRIC-GandaV. lieScriptor. Ec- (^n) Henric. Gand. Aiionym. Melli


tlrf. eaf. 1. Trith. cup. 370. Fioriac. op. 9^.
Bibliot. paç^i ? 1 6

Tome XX. T
i4<r s AINT F UL B E R T,
queftion de montrer de leur part , qu'ils ont encore le Sccp-»'
tre de Juda. Trois chofes font efientiellcs pour un Pvoyaume;
la terre ou le pays le peuple qui l'habite ; le Roi qui le gou-
;

verne. La terre du Royaume de Juda, efl la Province de Jé-


rufalem , qui dans l'Ecriture eli appellée , Terre de Juda. Le
peuple de cette Terre fut la Tribu de Juda. Tous fes Rois ,
jufqu'à la venue du Meflîe, ont été de la Tribu de Juda. De-
puis ce tems , la Province de Jérufalem eft tombée en la puif-
îance des Rois étrangers , &
fon peuple qui étoit la Tribu de
Juda , a été difperlé dans les Nations. Après Hircan ce fut
Hérode qui régna en Judée lous Céiar-Augufte , fous lequel
Jefus-Chrift eit né {c). Pour preuve qu'en lui a été accomplie

la Prophétie de Jacob , c'eft que depuis fa venue , les facrifi-


ces de la Loi ancienne ont ceifé , & qu'il s'efl introduit avec
luiun autre Sacerdoce différent de celui d'Aaron ; & une Loi
différente de celle de Moyfe. Fulbert prouve aufîi , que la
Prophétie de Daniel a eu fon accompliffement en Jefus-
Chrift , de même que tout ce qui avoit été prédit de lui &
de fa Paffion dans les autres Prophètes. Il rapporte encore
en preuve , fes miracles , fa Naiflance miraculeufe , fa Réfuf-
reftion.
XXVL Afin de mettre la vérité dans un plus grand jour,
Fulbert donne la fuite de ceux qui ont gouverné le peuple de
Juda {d) , à commencer depuis Moylc juiqu'à Hircan ; dit &
que le premier Roi étranger qu'eut ce peuple , fut Hérode fous
lequel Jefus-Chriil efl: né à Bethléem , fuivant la Prophétie
de Michée. Ce Prince étranger n'ayant aucun égard à la Loi
de Moyfe , ne permit plus que les Prêtres fe fuccédaffcnt dans
une même famille ; il les établilToit de fantailie , pour au- &
tant de tems qu'il vouloit. Il enferma l'habit du Grand-Prê-
tre fous la clef, & ne permit à aucun de s'en fervir. Sa con-
duite fut imitée par Archélaiis fon lucccffcur par les Ro-
, &
mains , jufqu'à ce que Jéruialcm ayant été détruite , la Na- &
tion des Juifs difperfée , ils n'ont plus eu de Cité fainte de _,

Roi ni de Prêtres, fo n'ont plus formé un peuple. En vain ils


objeâent qu'il peut y avoir dans une contrée du monde in-
connue , une multitude de Juifs avec un Roi à leur tête ; non-
feulement cette objcftion n'eft poiiît fondée ; mais quand il
V auroit en effet un Royaume tel que celui-là , ce ne Icroic
,

EVESQUE DE CHARTRES. Ch. VTII. 147


pas le Royaume de Juda, i\zué Terre de Juda , & qui
dans la
doit avoir un Roi de la Tribu même de Juda. Si le Scej^tre
de Juda apparcenoit à celui qui commandoit aux deux Tri-
bus de Juda $c de Benjamin , à Texclufion de celui qui com-
mandoit aux dix autres Tribus , & qui avoir fon Siège à Sa-
maric à plus forte raifon n appartiendra-t-il pas à ce Roi
,

dont le peuple , ni la terre , ni la tribu ne font point connus


ou plutôt ne font qu'en idée. Enfin , Fulbert fait voir que la
Situation de la Nation Juive telle qu'elle efl aujourd'hui , n'a
rien de fcmblablc à ce qu'elle ctoit à Babylone ; qu'alors le
peuple Juif croit réuni , qu'il avoir avec lui l'on Roi &: les Prc-
très , & que le terme de ion retour à Jérufalem étoit fixé ; au
lieu que depuis la mort de Jefus-Chrili: , les Juifs font difper-
fés , n'ont ni Roi , ni Prêtres, ni aucune promclTc de la part de
Dieu, de retourner à Jérufalem.
XX VU. Le dernier Difcours n'efl; qu'un tiffu de partages, BlCcom Cut
pour montrer que Dieu efl: un en trois Pcrfonnes (e) ^ c]ue la |ur^ia'^p|^\î
l'econde s'efi: fait homme pour nous racheter. Suivent deux tence,
liftes des péchés canoniques , l'une pour les hommes , l'autre

pour les femmes , avec le tems de la pénitence pour chaque


péché. Fulbert ne paroît pas faire grand fond , fur la péni-
tence demandée à l'article de la mort. Cependant il ne la refu-
foit point à ceux qui la demandoient dans ce moment-là (/).
Ce qui efl dit enfuite de l'Eucharillie , paroit être un fragment
de quelque Difcours fur cette matière (g) , où l'Auteur alié-
guoit l'autorité du Concile d'Ephéfe & d'Haymon , pour mon-
trer que Jefus-Chrift eft réellement dans l'Euchariftie , que c'efl:
Ibn Corps & fon Sang.
XXVIII. L'Anonyme de Molk (A), après avoir parlé du Dircoursat-
Traité de Fulbert contre les Juifs, dit qu'il en avoit com- f"^"'^'^^'^"'"'
pofé d'autres contre les mauvais Chrétiens. C'étoient donc
des Difcours de morale. On ne leur a pas encore fait voir le
jour. Le 208^. Difcours dans l'Appendice des Œuvres de
faint Auguliin ( z , porte dans quelques manufcrits , le nom
)
de Fulbert mais on a reconnu qu'il étoit d'Ambroife Aut-
;

pert. Le fécond , fur l'Annonciation (k) , qui fait le 1^4 de


cet Appendice , cil attribué , tantôt à faint Auguflin , tantôt

(e)rag.^6. 1 (t) Pag. 9J.


if) f »?' 47- \ (') Appetid. Serm. Aiij. p. 343.

Tij
128 S AINT F UL BER T,
à faint Fulgence ; quelques-uns ont cru qu'il pourroit être de
Fulbert. C'elî plutôt l'Ouvrage d'un compilateur mal habile ,
qui a joint enfcmble plufieurs extraits de divers Difcours en
l'honneur de Vierge.
la fainte
Ouvrages XXIX. Le Recueil des Œuvres de Fulbert-, finit par di-
poétiques de
Fulbert, vers Ecrits de piété , tant en profc qu'en vers. Il y a des pro-
fes fur faint Pantaléon , fur la Nativité de Notre Seigneur ,
fur faint Gilles, fur faint Martin; des hymnes en l'honneus
de faint Piat &
de la fainte Trinité ; un Invitatoire avec des
Répons pour la fcte de faint Gilles. Seroit-ce Li même chofc
que la vie de ce faint Abbé , dont l'Anonyme de MoIk faic
Auteur Fulbert (/) ? Cela n'eft pas trop vraifemblable. Il y a
encore quelques petites pièces en l'honneur de la fainte Vier-
ge, de faint Lambert, &
une prière à Dieu pour la profpé-
rité des armes du Roi Robert. Suivent plufieurs petits Poè-
mes en vers hexamètres la plupart ; d'autres font élégiaques ,
ou de quelque autre mefure ; un fur la Croix ; un qui a pour
titre De la crainte , de l'efpérance
: &
de Vamour ; le iuivant
eft fur le même fujet ; deux, où Fulbert parle de lui-même :
ce qu'il fait avec beaucoup de piété &
de modcflie ; un fur
l'année &
fes divifions en mois , jours , heures, 8c la manière
de trouver la biffexte & les épa£tes ; un à la louange du rodi-
gnol ; un en l'honneur de faint Caraune ; un fur la chafteté
& les moyens de la conferver ; une prière à Dieu , des lita-
nies , trois hymnes Rois Mages une fur le Saincr
; une fur les ;

Efprit ; la de Pàquc. Il ne faut pas omet-


dernière fur la fête

tre une petite hiftoirc en vers , où Fulbert raconte cju'un Moi-


ne peu expérimenté dans la vie hérémitique, rciolut de l'emr
brader , afin , diioit-il , de vivre comme un Ange. Le Frère
avec qui il vivoit , l'avertit de la difficulté de l'entreprife.
Cela ne le rebuta point mais étant allé au défert , la faim
:

l'en chaffî au bout de huit jours. Il revint à fon compagnon ;


& n'ayant pu être un Ange dans le dcfcrt , il devint du moins
un homme de bonnes mœurs avec ce Frère.
K*rt?l'^
XXX. Cafimir Oudin ayant découvert dans l'Abbaye de
de; Ades^dts Long-Pont , Ordre de Citeaux , dans le Diocèfc de Soif-
Apotres , &ions, un Traité de Full:)crt fur ces paroles du douzième cha-
ile'Fulbcrt!^
pitrc des Adcs: En ce tems/à, h Roi Hèrodcs employa fa puif-
pince pour maltraiter quelques-wis de fEgliJe , le fit imprimer

(/) Uid.fup^
,

EVESQUE DE CHARTRES. Ch. VTIT. 149


en i6c)2 , à Lcyde avec quelques opulculcs d'anciens
, in-S'^.
Ecrivains de France &
de la Belgique , chez Pierre Van-
(der-Meerche. On trouve ious le nom de Fulbert (w) , dans
les Manulcrits du Vatican, un Traité des vertus, un Recucif
de icntences des Pères , lur le iouvcrain bien ; des ver^ lut
la paix , & fur la livre & les parties dont elle efl: compofcc.
On ne lait peint li ces Ecrits ont été imprimés. Mais Charles
de Villicrs a inféré dans fes notes fur la 113^- Lettre de Ful-
bert , des vers fur l'once & les parties ; fur le fcrupule 6c &
fes parties. Trithéme attribue à Fulbert («) , divcrfes pièces
en l'honneur de la fainte Vierge , dans lefquelles il faifoit
dit-il , paroitre de l'érudition , & divers chants à la louange
de Dieu. Il efl: parlé des chants de Fulbert en l'honneur de la
fainte Vierge , dans les Gefles des Anglois , par Guillaume
de Malmefburi (0) , à l'occafion de l'argent que le Roi Canut
avoit envoyé à cet Evêquc , pour le rétabliffement de l'Eglife
de Notre-Dame à Chartres. La Chronique de Cambrai fait
le Do£teur Fulbert , Auteur de la vie de faint Aubcrt , Evc-
que d' Arras ; & dit qu'il l'écrivit par ordre de Gérard , Evê-
que de Cambrai , depuis l'an 10 12 jufqu'en 1049. Mais il y
eut dans l'onzième fiécle , plufieurs Ecrivains du nom de Ful-
bert; un , Archidiacre de Rouen; un autre. Moine de Saint
Ouenenla même Ville. Si l'Auteur de la Chronique de Cam^
brai , avoit eu dclTcin de parler de Fulbert de Chartres , ne
Tauroit-il pas nommé Evêque ? Il l'étoit avant Gérard , qu'on
fijppofe lui avoir ordonné d'écrire cette vie. Surius l'a don-
née au 1 3 de Décembre , mais mutilée. On la trouve néan-
moins toute entière dans divers manufcrits (p). Nous n'avons,
pu voirie Traité delà variété des Offices divins que Bcllarmin
dit être imprimé fous le nom de Fulbert (q) , au troifiéme
rome de la Bibliothèque des Percs à Paris , édition féconde.
Il efl: inutile de s'arrêter à quelques autres Ecrits , qu'on ne
peut attribuer à Fulbert de Chartres, que fur des conjeêlures-
très-légères.
XXXI. Ses Lettres font écrites avec beaucoup de grâces
^ " & ^''^"''"•'«lic
fci Ecrits».

(m) Labb. Bibliot. nov. maiiitfcrif^, p } (;>) C^Ulia Chrifîian. S.jjKmanban. ttm^
5'* I•
P'?- I? î- t5 MrR.£OS. in not. ad cap. t,
I
(n) TritH. ChroHic.Birfaug, tom. l. />. I Eenri:. G.tnd.
1»Ï9-
I
(q) BKularm, df Script. Ecclef. p. 17^.
(») Lit, i, de Gtpis AngloTa \
I -o G A U s E L I N ,
ct'efprit ,
^
d'un flyle aifé & y répond folide-^
dclicac. Fulbert
ment à grand nombre de queflions , & il le fait toujours avec
clarté. Car il poffédoit bien la fcicnce ecclcfiaftique ; & ce
n'étoit guéres que fur des queflions de ce genre qu'on le con-
fultoit. Exa£l obfcrvarcur des Canons pour lui-même, il les
faifoit obicrvcr aux autres , fans le lailTer fléchir aux prières
des Grands en faveur des prévaricateurs & au préjudice de la
Loi. Quoiqu'il ne fît pas profeflion particulière de Poéfie , il
en favoit les régies , & ne manquoit pas de talens pour y réuf-
fir. On en verra des preuves dans l'hymne en vers lapphi-

ques, furie Saint-Efprit. Ses hymnes fes profes paflerent &


dans fon fiéclemcme , à l'ufage des Egliics d'Angleterre (r),
où on les chantoit publiquement. L'hymne pour le jour dePâ-
oue j a été réimprimée dans le Recueil des Poètes Chrétiens ,
oe Georges Fabricius (j),& parmi les hymnes eccléfiafliques de
Georges Caffandre.
Gauflin
ûuTg.i,
de XXXîL Nous avons remarque plus haut (f) , que le Roi
Robert ne fe contenta pas de consulter Fulbert fur la plaie
du fang tombée en Aquitaine, & qu'il en écrivit auffi à Gauf-
lin , Archevêque de Bourges , qui ctoit en grande réputa-
tion pour fon fçavoir & pour fa vertu. Il étoit fils naturel de
Hugues Capet (m). Ce fut aux Moines de Fleuri , une raifon
de le rcfufer pour leur Abbé , après la mort de faint Abbon.
Mais le Roi Robert qui l'avoir nommé à cette Abbaye , les
obligea de le recevoir. Il entra dans les difputes que fon pré-
déccffcur avcit eues avec Foulques , Evêque d'Orléans , au
fujet de la juflification mais enfuite , de l'avis de Fulbert (.v),
:

il donna fatisfadion à cet Evêque


,
qui l'avoit excommunié
avec toute fa Communauté ; il prcffoit les autres Evoques
d'en faire autant. En 1013 , le Roi Robert le nomma à l'Ar-
chevêché de Bourges, (y). Le défaut de fa naiffance lui fut
objetté de la part du Clergé 8c du peuple. Gauflin fit à cette
occailon un voyage à Rome (z), d'où il revint avec un refcrit
du Pape Benoît VIII , quiconhrmoit fon élection. Il alTifta en
1020, au Concile d'Airy [a). L'Abbaye de Fleuri qu'il avoir

(r) An^li.ifxcra, Tctn. i. p. 48. {f) Di'CHr.SNE , Tom. 4. p. 96.


(s) r.t?* 799. {\) Ademar.. i» Cbronic. pag 71, Cl,

Mabii 1.0N, Toi», s. AtJor.pags, z<),

(« Aiiffit.\n.iH Clrcnic. jyz, (4) Tom. iS. Cour. p. 84%.


f,
(.<:) FcLEtra ,Epifî. 7J.
ARCHE VESQUE DE BOURGES. Ch. VIII. 151
retenue avec rArchcvcchc de Bourges {b) , ayant été brûlée
en 102^ , il la rebâtit. Trois ans après, il le trouva à la Dé-
dicace de TEglifc de Saint Agnan d'Orléans , où le Roi Ro-
bert aflifta avec touce la Cour. Gauilin ne furvcquit pas long-
tcms à cette cérémonie , étant mort le deuxième de Septem-
bre de l'an 1029 , dans le cours de la vifite de fon Dioccfe.
Son Epitaphe publiée par Dom Mabillon (c) , au lieu du fé-
cond Septembre , Tcmble mettre fa mort au huitième de Mars:
06iavas Marîts jiipernbnt Apollo ftncjlras. Mais on prétend
que par ces termes {d) Ociavas Alarùs , il faut entendre la
:

huitième heure du Mardi, auquel en 1025» , tomboit le fé-


cond de Septembre. Cette explication peut avoir lieu pour
cette Epitaphe ; mais je ne fais comment elle pourroit con-
venir à une autre Epitaphe publiée par M. Balufc (e), où le
huitième des Ides de Mars , efl; marqué pour le jour de la
mort de Gauilin. 05lavas dwn Marchis iditus intrat à carnis
vinctdo lolliîiir eccejuis. Il eft vrai que cette date ne s'accorde
pas avec celle du Nécrologe de Fleuri, qui met la mort de cet
Archevêque au fécond de Septembre ; mais il n'y a aucune nc-
ceffité de concilier ces Epitaphes avec ce Nécrologe fur la mort
de Gauflin.
XXXIII. Il avoir été en commerce "de Lettres avec Fui- Ses Ecrifs.^

bert de Chartres ; & nous en avons encore quatre de ce der-


nier, qui lui font adreffées (/) , & qui en fuppofent vifible-
ment de la part de Gauflin. Elles font perdues , & il ne refi:^
que celle que cet Archevêque écrivit au Roi Robert {g) , aii
iujct de la plaie de fang ; & une à Oliba , Evoque de Vich en
Catalogne. Celle-ci n'eft qu'un compliment de condoléance
fur la mort de Bernard , Comte de Befalu , frère de cet Êvê-
<que (/;). Dans un Concile tenu à Limoges, au mois de No-
vembre J031 , on agita la queftion (?) , Ç\ faint Martial de-
voit être mis au rang des Apôtres, ou feulement des Confef-
feurs. Odolric, Abbé de faint Martial de Limoges, dit qu'il
avoir été prèfcnt à une difpute élevée fur ce fujet entre les
François 8c les Limoufins , à la Cour du Roi Robert ; que

Ci)BALUZ. To»J. 2. Mi/cet l. p. 307. fe) UiJ. Epifi. 96,


(c) Maeill. I»/», jô. Annal, tium, 6o. (Ij) Marca. Hifpnn. in Apfend, ptg'^
(J) Rivet, liifloi. litt. ton, 7. zS t. loij.
^e) Baluz. Tuni. 4. Mifceil. pa^. 5 J J'r {i} Tom.'j^Conc.p.ZS'),
(/; FULB. Ejrifl. JjJ. 40. 4+. 7^.
152 B O U C H A R T, ^
Gauzlin y foutint que Marnai devoit être reconnu pour
faint
Apôtre (k) , puilqu'il étoit né de la race d'Abraham , parent
de faint Pierre & de faint Etienne , qu'il étoit difciple du
Seigneur qu'il avoit été batilé par fon ordre & de k main
;

de iaint Pierre , ordonné Evoque par Jefus-Chrifl: même le


jour de fon Afcenfion , &
envoyé par lui dans les Gaules a-
près avoir reçu le Saint-Efprit avec les Apôtres. Quoique ce
Difcours de Gaufelin fût tiré en partie des faux A£tes de faint
JMariial , il fut approuvé du Roi & des affiftans , imbus des
mêmes préjugés que l'Archevêque. On l'a imprimé dans le
neuvième tome des Conciles. Gauzlin eut apparemment quel-
que autre occafion de figiialer Ion zèle pour la vérité , puif-
qu'un Hiftorien contemporain (/) , le qualifie de défcnfeur de
ia foi orthodoxe. On cite une Hiftoire manufcrite de fa vie ,
où il efl dit qu'il aflifta vers l'an 1022 (m) , à un Concile
d'Orléans affemblé par le Roi Robert , contre certains hé-
rétiques qui rcnouvelloient l'héréfie des Manichéens , & qu'il
les combattit fortcmear.

CHAPITRE IX.

Bouchart, Eveque de VoY)nes ; Arnold \ à' quelques autres


Ecrivains,

^
'^^^'^^ "^ ^^"^ ^^ ^efCe (n) Province d'Allemagne^
Îu2"'*^"^- T ,

de parcns nobles , qui l'envoyèrent d'abord à Coblents


_|_
pour faire fes études ; cnfuitc à l'Abbaye de Lobes & à Liè-
ge. Trirhéme le fait Moine de Lobes (0) ; & le continuateur
de Folcuin, Chanoine de Liège (/>). Villcgifc, Archevêque
de Maycnce, l'éleva dans' les Ordres jufqu'au Diaconat, 8c
fe l'attacha par divers bienfaits. L'Empereur Otton III , é-
tant de retour de Rome en Saxe , Ville^ife alla le voir ac-
compagné de Bouchart , qui étoit connu de ce Prince. Fran-

(li) Uid.p.tg. 875. (0) TaiTHiM. Chronic. Uirf. tom. l.f.


I

(') Mabilion. tow. 8, f. 18.


A[](>r, I ijo.
{ni)V.i\iT, Hijl. littcT.pag. 180. /». 7. 1 (/')GrSTA, AibiU.Lobiciif. tom. 6.Sfi-
(«; l'il.i BiiicharJi VonihU, I ii/fjf. /"''j;. jyi.

con.
,

EVESQUE DE VORMES. Ch. ÏX. 155


con Evcquc de Vormcs , étoit mort depuis quelque cems ,
-y

Bc on lui avoir déjà donné deux lucceflcurs , donc Tun n'a-


YOÎt furvccu à 1.1 nomination que trois jours ; &: l'autre, qua-
torze. Otton offrit rpv/cché à Bouchart , & le prefTa même
de l'accepter mais il réiifta jufqu'à ce qu'il eut pris avis de
:

l'Archevêque. Villegife lui conleilla de fe loumettre , & il Je


iacra lui-même.
IL Cefut , félon Sigebcrt (q) , en 1008 , ou félon d'autres , ï' eft faît Evé-
en 1006. Bouchart était encore jeune , plein d'ardeur pour ^e%n,o°^
l'étude. N'ayant perfonnc auprès de lui qui pût féconder fes ou loo*.
defirs , il pria Baudric , Evcque de Liège , avec qui il avoic
lié amitié à la Cour (r) , de lui envoyer un homme de Let-
tres , pour l'aider dans l'étude des divines Ecritures. Baudric
lui envoya le Moine Olbcrt , qui étoit alors en grande répu-
tation, & qui fut depuis Abbé de Gemblours. Les progrès de
Bouchart furent fi rapides , qu'il devint en peu de rems fous
cet excellent Maître , un des plus favans Evéques de fon fié-
cle. Sa vie étoit édifiante. Il ne vivoit que de pain & d'eau
de légumes^ de fruits paiïbitune partie de la nuit Jvifitcr les
;

pauvres; faifoic de longues prières & de grandes aumônes, &


célébroit tous les jours la Mcfle.
En 1022 , il afTifta au Concile de Selingllad ,
Iir. c'cft HaATifte a« &
lui qui nous a confervé les vingt Canons qui y furent faits. seH"ngtad*e«
71 ne vécut que quatre ans depuis , étant mort au mois d'Août ion,
de l'an 1026. On ne lui trouva d'argent que trois deniers (x);
mais dans un coffret , un cilice y Se une chaîne de fer uféc
d'un côté. Avant de mourir, il donna l'abfolution à tous ceux
Su'il avoir excommuniés ^ & fit à ceux qui étoicnr
venus le voir
ans ce dernier moment , une exhortation pathétique fur la
vanité & l'inconflancc des grandeurs & des richefTcs de ce
monde.
IV. L'on donné fa vie avec fon décret , qui cft le plus
a Ses Ecrj»*

confidérable de fes Ouvrages. Il fut aidé dans ce travail par ^°" ^^"°^

Vauthier , Evcque de Spire , qui l'a voit excité à l'entrepren-


dre , par Brunechon , Prévôt de l'Eglifc de Vormes , à qui
il le dédia; mais fur-tout par Olbert fon Maître , qui, pour
nous fervir des termes de Sigebert (f) , éternifa fa mémoire

(f)SiGEBERT.»» C6ro«jf. <i(/fl«. looS. I {s) Vit.J Bwclari.


(0 Oleirti , Vita TuH. 8. AQoT.fjg 1 (f) Sigebert, de Scfiptor. Etttef, tâfi

Tome XX, V
1^4 B O U C H A R T,
en contribuant à un Ouvrage fi utile au public. Boucharry

Ht encrer tout ce qui lui parut intéreiTcr ion fujet dans les
Canons des Apôtres , dans les Conciles d'outrc-mer , d'O-
rient, d'Allemagne, de France, d'Efpagne , dans les Dé-
crets des Papes , dans les Livres iaints , dans les Ecrits de
faint Bafile , de laint Jérôme , de faint Auguftin , de faine
Ambroife , de l'aint Benoit , de faint lildore ; & dans les Pé-
nitentiels de Rome , de Théodore de Cantorberi , & de Bedc»
Il reconnoît lui-même dans fa Préface , qu'il n'y avoit rien
de lui dans cet Ouvrage ; & ce fut afin de le perfuadcr aux
Lefteurs , qu'il indiqua les fources où il avoit puifé. On re-
marque toutefois , qu'il n'a pas toujours puifé dans les fources
originales , qu'il a fouvent copié la Collection de Rheginon,
& qu'il y a ajouté beaucoup de fautes. A l'égard des fauffes
Décrétales , il en efl: peu dont il n'ait rapporté quelques pal-
fagcs ; mais on fait qu'elles étoient alors en autorité dans tout
l'Occident, Blondel s'eft donné la peine de marquer tous les
endroits que Bouchart en cite dans fon Décret (u).
pefTein du y. L'Anonyme qui a donné fa vie (-r) nous apprend qu'il ,

^atd.'^^^^^'^s compofa en un lieu défert , éloigné de deux railles de Vor-


mcs ; qu'il s'y bâtit d'abord un oratoire , enfuite des cellules
avec les ufuines néccflaires que là dégagé du foin de toutes
;

les afifàires temporelles , il s'occupoit tout entier du fervice


de Dieu. Il ajoute , que le dcffein de Bouchart , dans la com-
position du Décret , fut de rétablir dans fon Diocèfe l'obfer-
vation des Canons , d'en inilruire les Prêtres chargés de la
conduite des âmes , & de faire revivre les pénitences canoni-
ques , ignorées ou négligées alors , pour la plupart ; & qu'il
divifa fon Ouvrage en vingt Livres. Bouchart dit la même
choie dans la Préface du décret , & donne lui-même le fom-
maire des vingt Livres dont il eft compofé.
Somnialre du
Dccrct.
VL Le premier traite de l'aurorité du Pape Se de fa pri-
jnauté , du pouvoir des Patriarches , des Primats , des Mé—
tropolitains, des Conciles; de tout ce qui regarde les Juge—
mens cccléilaftiqucs de l'ordination des Evêques & de leurs
-,

devoirs. Il parle dans le fécond , du reite du Clergé , de leurs


qualités , de leurs fondlions , de leur entretien. Dans le rroi-
fiémc, des Egliics & de leurs biens temporels, en particulier;

(*) RlOKDFV , ProifJC»». «i P/f«</». î/i-


j
(*) KURCHARDI f»M.
EVESQUE DE VORMES. Ch. IX. 155
des dixmcs & des oblations des Livres canoniques & de
, ,

ceux qui font rejettes comme apocryphes. Le


quatrième con-
tient ce qui regarde Tadminirtration des Sacrcmens de Batê-
me & de Confirmation ; le cinquième , ce qui concerne le
Sacrement du Corps & du Sang de Notre Seigneur. On trou-
ve dans le (Ixiéme , le détail des crimes &
de leurs péniten-
ces ; dans le ieptiéme , l'explication des degrés dans Icfquels
le mariage eft défendu ; dans le huitième , les obligations des
hommes 8c des femmes coniacrés à Dieu , 8c les pénitences
qu'on doit impofer à ceux ou à celles qui ont agi contre leurs
vœux. Le neuvième traite des vierges &: des veuves qui n'ont
pas reçu le voile , des raviffburs , des mariages légitimes , du
concubinage , des tranfgrefTions des gens mariés des pé- &
nitences qu'ils doivent faire. Les trois Livres fuivans règlent
celles que méritent les enchanteurs , les voleurs , les parjures
& autres pécheurs fcmblables. Le treizième regarde l'obfer-
vation du jeûne du Carême ; le quatorzième , la pénitence
qu'il faut impoier pour la crapule &
l'yvrogneric. Le quin-
zième traite des Empereurs , des Princes &
des autres laï-
ques en autorité , &
de leur miniftere. Le feizième , de la ma-
nière de juger , &
de la pénitence des faux témoins. Le dix-
feptiéme , de la pénitence des fomicateurs &
inccftueux. Le
dix-huitième , de la vifite , de la pénitence & de la réconci-
liation des infirmes. Bouchart explique dans le dix -neuviè-
me , les moyens de racheter à tour âge , la pénitence qu'on a
méritée. C'eft un corre£tif de fa part, pour empêcher les pé-
cheurs de tomber dans le défefpoir , par rimpofTibilité d'ac-
complir ce qui leur avoir d'abord été commandé. Il dit donc
que celui qui ne peut jeûner ( v ) ? rachettera un jour de jeûne
au pain & à l'eau , par cinquante Pfeaumes , qu'il récitera à
genoux dans l'Eglife , & en nourriflant ce jour-là un pauvre ;
qu'à cette condition il prendra quelle nourriture il voudra , à
l'exception du vin , de la chair & de la graifTe. Il ajoute que
cent génuflexions îupplèeront à cinquante Pfeaumes , & que
les riches pourront fe racheter pour de l'argent (z). Mais ce
rachat de pénitence n'étoit que pour ceux qui ne pouvoient
l'accomplir à la lettre. On ne les en difpenfoit pas abfolumcnt;
mais on la commuoit , en la manière qui leur ètoit poflible ,
afin qu'ils lubiffcnt du moins quelques peines pour l'expiation

iy) Lib. is.cAf. ij. (t) O/. 14. 15 t:? 11.


Vij
155 B O U C H A RT,
de leurs fautes. Le vingricnie Livre efl: appelle , Des Jpecula^
tiens , parce parlé de la Providence y de la prédefti-
qu'il y efl;

narion , de ravénement de l'Antechrift de fcs œuvres , de &


la réfurrcdion , du jour du jugement , des peines de l'enfer &
de la félicité éternelle.
Etîitionîdu VIL On cite une édition du Décret de Bouchart , à Paris
Décret.
gj^ 145^5^ i^)' ^' Y ^'^ ^^^ ^^^ féconde à Cologne en 1548 ou
1549. infol. par Barchold Queftembourg ,avec la Loi de fa-
; & une troiliéme à Paris , en
mille 1 545» ou 1 5 50 , chez Jean

Fouchicr , in-S°. On trouve dans celle-ci les Canons du Con-


cile de Selingftad. Toutes ces éditions font incomplettes.
L'Ouvrage elt beaucoup plus ample dans certains manufcrits.
Dans celui de Denis Talon , le vingtième Livre , qui dans
l'édition de Paris , n'efl; que de ico cliapicres, en contient
158. C'cft la remarque de M. Balufe, dans fa Préface fur An-
toine Auguftin , de la correftion du Décret de Gratien.
AVécé du Vin. Un Anonyme dont on ne connoît ni la qualité ni
» ^^ ^^ abrégé OU plutôt un extrait des Livres du Dé-
"
charu ^^ë>^
cret de Bouchart. Il commence par le fécond Livre ,.& paffe
du cinquième au huitième , de-là au dix-ncuviéme , finit &
par-là fa compilation. On la trouve parmi les anciennes le-
çons de Caniiius (b) , de l'édition d'Anvers en 1725. Par la
Loi de famille imprimée avec le Décret de Bouchart , à Co-
logne , on entend les Loix qu'il donna à la famille de faint
Pierre , c'efl-à-dire , aux habirans des terres de fa Cathé-
drale ,, pour régler leurs affaires , tant civiles que crimit-
nelles.
EettredeBou- JX. Ce Bouchart qu'Alpert , Moine de Saint Synv
fut à
charta pe«.
pj^Qj-j^j^ ^^q Metz
{c) , dédia fon Traité de la variété des
tems, imprimé dans le premier tome des Ecrivains du moyen
âge, par M. Eccard , avec la Lettre de remerciement de cet
Evcquc à Alpert , où il fait l'éloge de l'Ouvrage de l'Auteur.
Bouchart fonda plufieurs Monalteres^&un Collège de vingt
Chanoines, fous le nom de Saint Paul. Il rétablit la vie com-
mune dans les Monafleres de Saint Cyriac de faint An- &
dré. En 1005 , il aflifta à un grand Concile en un Heu ap-
pelle Trotmann , où le Roi, de l'avis des Evêques préfens ,

' (h) Tom. j.LeS.C.^iiif. eJ. Bafti.p.


(a) Fabricius , Biilitt. Latin. nieJ.
| ^y^^
,

EVESQUE D'HALBERSTAD. Ch. IX. 157


fitfupprimer plufieurs chofes qui tournoient au préjudice de
l'Eglifc. C'cft ce qu'on lit dans la Chronique Saxonne , pu-
bliée par M. Eccard (d). Elle met l'Epiicopat de Bouchart en
1006 , au lieu que celle de Sigebert ne le met qu'en ioo8 :
mais d'autres le renvoient même au commencement de l'on-
zième liécle ; &
leur opinion reçoit un degré de probabilité
des deux Conciles où Bouchart affifla avant l'an 1008 , l'un
à Trotmann en 1006 , l'autre à Francfort l'année i'uivante (e)
où à la prière de l'Empereur Henri, on termina l'affaire de
l'creclion de l'Evcché de Bamberg.
X. Cette Ville étoit lituée dans le Dioccfe de Virtzbourff, Arnold,Evc-
1 T, T-> » T,r^
.
TT que d Halber-
quiavoit alors Henri pour bveque. L hmpercur Henri le pria AaJ.SaLettro
• •
1

de la lui céder. L'Evcque y coni'entit à condition d'un échan- à Henri d«


W'"îbourg.
ge ; que par cet étabUlTemcnt il dcviendroit Archevêque ; &
que le nouvel Evêque de Bamberg lui fcroit foumis. ces A
conditions il écrivit conjointement avec le Roi, au Pape Jean
XVIII , pour obtenir la confirmation de cette érection. Le,
Pape l'accorda par une Lettre datée du mois de Jufn de l'an
IOC7. Au mois de Novembre de la même année , le Roi
voulant faire foulcrire cette Lettre par les Evêques de fon
Royaume, les aflcmbla à Francfort (/). L'Evêque de Wirtz-
bourg mécontent de ce qu'on ne lui avoit pas accordé le titre
d'Archevêque , refufa d'y venir. Sur cela Arnold , Evêque
d'Halberftad , dont il étoit ami , lui écrivit une Lettre trcs-
preiïante (g), dans laquelle il lui fit voir qu'il n'avoit aucune
raifon de (fe roidir contre les intentions du Roi Henri ; 8c
que l\ le Diocèie de Wirtzbourg perdoit quelque peu de ter-
rein dans l'éredion de Bamberg en Evêché , fon Eglife avoic
en échange les avantages de la fécondité , par la produdion
d'une nouvelle Eghfe. Cette Lettre a été publiée par M. Ba-
lufe (k). Il paroit qu'Arnold en avoit écrit plufieurs autres à
Henri de Wirtzbourg (i) ; mais elles ne font pas venues jufqu'à
nous.
XI. On connoît un autre Ecrivain du même tems , qui por- Arnold, Pre-
toitauflile nom d'Arnold ou Arnolf. Il renonça aux dignités 1.°' "^« s^int
de fa maifon (k), pour fe confacrer à Dieu dans le Monallere de °"*"^™'

(//^ EcCAR. «OTO. 1.^.402. (^) DiTMAR. L»'^. 6. p. 67.


(e) Gailia Chrifliaii, nov, tam, 4. fxg. (i) Baloz. Tom. 4. Mifcell.f, 45 j,
669.
(jl Tarn. 9. Co/tf. ;>. 784. (It)CAius. Tooj. 3./. 87 e? 103.
158 ARNOLD;
Saine Emmeramm à Ratifbonne. Il en fut depuis Prévôt , &
compofa divers Ecrits en Thonneur de ce Saint , qui fut, dit-
on , Evcque de Poitiers dans les Gaules mais qui abandon- ;

na fon Siège & fon troupeau , pour aller en Pannonie tra-


vailler à la converfion des infidèles , vers l'an ^5*7 Il y a .

deux Livres d'Arnold ; l'un , des miracles de ce laint Evê-


3ue l'autre , qui ell: en forme de Dialogue , traite des vertus
;

es Saints qui ont été enterrés dans Monaftere de Saine


le

Emmeramm. Il font imprimés dans le troiliémcvolume des


Leçons de Canifius , de l'édition d'Anvers (fe). Arnold dit
quelque chofe dans fon premier Livre , des Evêques & Ducs
de Bavière ; de faint Boniface, Archevêque de Mayence,
& promet de parler dans le fécond , de faint Volfgang, E-
vêque de Ratiibonne , & de faint Romuald , Abbé dans la
îTiême Ville. Saint Volfgang l'avoit fait venir de Trêves pour
îe faire Abbé de Saint Emmeramm , où il n'y en avoit point
depuis long-tems. Les Evêques de Ratifljonne étoicnt en
même-tems Abbés de ce Monaftere , non pour en faire les
fonâiionsj mais pour en tirer les revenus» C'eft par ce début
qu'Arnold commence fon fécond Livre ; & il remarque que
ce fut par ces Evêques- Abbés , que le relâchement s'introdui-
fit parmi ces Moines. Il fait l'éloge de faint Volfgang & de

faint Romuald ; donne le Catalogue des Evêques de Ratif-


bonne, & raconte les miracles qui s'opéroient dans l'Eglifc
de Saint Emmeramm , au tombeau de faint Volfgang , avec
la même candeur qu'il avoit rapporté ceux de faint Emme-
ramm dans le premier Livre. Il y en ajoute de faits par l'in-
terceflîon de faint Romuald , dont il avoit été témoin , 8c
même en fa faveur. Il compte cinq Abbés à Saint Emme-
ramm depuis la mort de faint Romuald. Celui fous lequel il
écrivoit , fe nommoit Udalric. Il avoit été Chanoine avant
d'être Moine. Son mérite le fit choillr Abbé. Arnold donne
de grandes louanges à un ferviteur de Dieu nommé Gonthier
qui vivoit encore , & à quelques autres qui s'étoient ren-
dus rccommandables par leurs vertus , tant en Italie qu'en
France.
Lettre (TAr- XII. Canifius a publié avec les deux Opufcules d'Arnold,
^°^^'
une Lettre à l'Abbé Burchard ou Purchard (/) , prcdéccflcUTr

{10 Cahis. Tom. 3. pag. loy. (/) Uid. pag. 8p.


PREVOST DE S. EMMERAMM. Ch. TX. i jp
d'Udalric , à qui il rend compte des premières années de l'a
eonvcriion & de les études. Il lut d'abord les Livres des Pro-
phètes ; mais il les quitta pour lire les Ecrits de laint Hilaire,
de laint Ambroile, de laint Grégoire de Nazianze, de laint
Chryloflome , de laint Jérôme, de faint Auguftin, de laint
Grégoire Pape, & de faint liîdorc de Seville. Il porte un ju-
gement fur leur (lylc , & ajoute que plus il avoit pris de plai-
iir dans la lefturc de leurs Ouvrages , moins il en trouvoit

dans les Ecrits qui lui apprenoient l'hiftoire domeflique , cVil-


à-dire , celle de faint Emmeramm , Martyr que celui qui ;

en étoit Auteur, fe donnoit le nom de Cirinus ; que fon Ou-


vrage avoit fouiïcrt de, grandes altérations par la négligence
des anciens ; qu'ayant entrepris de rétablir cette Hiftoirc avec
la permiflion de fon Abbé , il y avoit trouvé beaucoup d'op-
polition de la part de fes confrères , qui ne pouvoient foutïrir
qu'on touchât aux Ecrits des anciens , toit en ajoutant , foie
en retranchant quelque chofc. Arnold cédant pour un tems
à ces contrariétés . le retira en Saxe par ordre de fon Abbé ,
portant avec lui l'Hiftoire de faint Emmeramm. Etant à Mag-
debourg , il fit connoiflance avec Meginfroid , qui y tenoic
des Ecoles publiques , &; l'engagea cà écrire lui-même l'Hi-
ûoire du faint Martyr. Meginfroid demanda du tems; &pour
gage de fa promcRe , iî donna à Arnold un hymne en vers
lapphiques en Thonncur de ce Saint. L'Ouvrage ne fut ache-
vé qu'au bout de trois ans , quoique Meginfroid n'ait fait au-
tre chofe que de mettre en un nouveau ftyle l'Ecrit de Ciri---
nus, Arnold pendant fon féjour en Pannonic , compofa des-
Antiennes & des Répons pour l'Office de faint Emmeramm»-
II Hnit fa Lettre en marquant ce qu'il y avoit de lui dans le
Livre des miracles de faint Emmeramm , & ce qui étoit de
l'ancien Auteur de fa vie , c'eft-à-dire , de Cirinus. On ne fait
fi cet Arnold eft le même que le Moine Arnolf ,.à qui Sige-

bert attribue un Poëme compolé des plus belles fentences du-


Livre des Proverbes (w), que l'Auteur expliquoit félon le fens
littéral & allégorique.
XIII. Dom Bernard Pez a donné fur un manufcrk de la ,
Homéi;*-
"*®
Bibliothéque de faint Emmeramm («) , une Homélie d'Ar- ^ •

lU7*r » 30. ^ 37.


.

i6o M EG î N F Pv O ID ,
nold fur les huit Bcaticudcs. Elle efl folide & mieux écrite
que les Ouvrages dont nous venons de parler. Il explique la
pauvreté d'efprit , de la pauvreté volontaire ; les pacifiques ,
de ceux qui s'appliquent non -feulement à avoir la paix en
eux-mêmes & avec Dieu , mais qui la procurent encore entre
ceux qui font en diffenfion. Il compte une neuvième Béati-
tude, qu'il dit n'appartenir qu'aux Martyrs , qui eft de fouf-
frir la perlécution de la part des hommes. Il fait à cette oc-
cafion , un précis de la vie de faint Emmcramm , Martyr , qui
ne contient que ce que nous en avons dit plus haut. Suit un
Poème acroftiche d'Arnold , fur la vie de ce Saint , compofée
par Mcginfroid.
Meginfroid, XIV. Il étoit Moinc de Fulde (p) , Ordre de Saint Be-
^^ ^oîc. Apres
M^^d'b y avoir enfeigné pendant vingt-quatre ans , de-
puis l'an (}^6 , jufqu'en loio, il paffa à Magdebourg, où il
fît les mêmes fondlions. Il prend la qualité de Prévôt, dans

la vie de faint Emmeramm. Elle n'eft point originale , ce


n'eft que l'ancienne vie mifc en un meilleur ftyle. Mcginfroid
dédia Ion Ouvrage à Arnolf , qui l'avoir excité à l'entrepren-
dre. Il met comme les autres, la naiiïance du Saint en Aqui-
taine , le fait Evoque de Poitiers & enfuite Apôtre de Pan-
nonie. Il entre dans le détail de fon martyre , & de la faufle
accufation qui y avoit donné lieu. Enfuite il parle de [a tranf-
lation de les reliques à Raufbonne , & de la mort tragique de
fes bourreaux. Cette vie fc trouve dans le troifiéme tome de
Canifius (q). Il n'en eft rien dit dans Trithéme, à qui nous
devons la connoiffance de plufieurs autres Ouvrages de Me-
ginfroid. Il met en premier lieu (r), une Chronique de Ful-
de, où l'on voyoit en abrégé l'Hiftoire de tous les Abbés de
ce Monafterc , 8c de ceux des autres Monafteres qui avoient
tiré leur origine de celui de Fulde. On n'a pas de preuve que
cette Chronique foit la même chofe , ni aufli qu'elle foit dif-
férente de l'Hiftoire Des tems de grâces, diviiéc en 24 Livres,
citée fous le nom de Meginfroid , par Latomius (s). Elle n'a
pas encore été rendue publique. Trithéme lui attribue aufli
la vie de faint Boniface , Martyr & Archevêque de Mayen-

(f) Trithéme. Tom. i. Cbron. Hirfang. page 1 18

f.
iz3. (j) La TOM. Apud Menckfnium , tom, ]i
Script. Girmari. p. 440*
(r) Tkithem, Cbratic, llirfaug. tom. 1.
ce:
,

PREVOST DE MAGDEBOURG. Ch. TX. j6t


ce ; celle de Sturmc , premier Abbé de Fulde celle de
faint ;

Rhaban Maur, qui d'Abbc de Fulde, devint Archevêque de


Maycnce la vie & le martyre de faine Sonderold , Moine de
;

Fulde & enfuitc Archevêque de Mayence enfin celle de faint ;

Hildebert, qui fut au/Ti tire de Fulde pour occuper ce Siège


Archiépifcopal. Les vies de faint Bonifacc & delaint Sturmc,
ctoient en vers , les autres en profc.
XV. L'Auteur de celle de faint Adalbert, Evêque de Pra- ^^*^^^^/'''^''
gue & Martyr, n'efl pas connu. On fait feulement qu'il étoit véque Je Ka-
Moine du Monaftere de faint Boniface & de faint Alexis à gue &Maft/r.
Rome, & qu'il écrivit l'Hiftoire de ce faint Evêque aufTi-têu
après fon martyre , & fous le régne de l'Empereur Otton IH.
C'efl: ce qu'il marque en termes exprès (r). 11 faut donc re-
jetter l'opinion de ceux qui attribuent cette vie à un nommé
Cofme, Doyen de Prague, qui ne vivoit que dans le douziè-
me fiécle , & dont la Chronique finit en 1 125. Cette vie a été
imprimée plulîcurs fois premièrement , parmi les anciennes
:

Leçons de Canilius , enfuite dans le Recueil des Bollandifles


au 2 3 d'Avril puis par Dom Mabillon , dans le feptiéme
;

tome des A£tes de l'Ordre. 11 y a joint une féconde vie du


même Saint , faite encore par un Anonyme, mais contempo-
rain , puiiqu'il écrivoit fous le Roi faint Henri , qui avoit fuc-
cédé à TEmpercur Otton III , en 1002. Le premier nom de
faint Adalbert étoit Voyticch , qui en Sclavon fignifie , con-
folatïon de rnrmée. Ses parens l'envoyèrent à Magdebourg
pour y être élevé fous les yeux de l'Archevêque Adalbert
<:]ui lui donna pour Maître le Moine Otrîc. C'étoit vers l'an

5;>73 , & il fut pendant neuf ans fous la difcipline de ce Maî-


tre. L'Archevêque Adalbert en lui conférant le Sacrement de
Confirmation, lui donna fon nom. Après la mort de ce Pré-
lat , Adalbert revint à Prague lieu de fa naifl^ance. Il entra
dans le Clergé & fut fait Soûdiacre. A la mort de Dithmar
Evêque de Prague , arrivée en 983 , on lui donna Adalbert
pour fuccclTeur. L'Empereur agréa l'éledlion , donna à l'élu
l'anneau & le bâton Paftoral , & le fit facrer par Villcgifc ,
Archevêque de Mayence. Le peuple de Prague le reçut avec
frande joie mais il fut peu docile à fes inflruclions. Le faint
;

ivêque les voyant endurcis dans le crime , quitta fon Siège

(0 AnAiBBRT. Vitu num, lé. T«bi. 7* Ador.S, Bitxd, {>. 8jo. 839.
Tome KK, X
i62 '^>(7:>ï TJTJ EH AR D,
& s'en aJIa à Romeprcndie lavis du Pape Jean XV. Il s'y
retira dans le Mana'lere de f^inc Boniface. Mais rappelle à
Prague par le Duc Boledas , il travailla à la converiion des
Hongrois en leur envoyant des MiHlonnaires. Il batil'a lui-
,

même le fils de leur P«.oi. Cependant le peuple de Prague con-


tinuoit les dclordres. Saint Adalbert croyant Ion miniilere
plus utile aux infidèles pa^a en Pruffe , où il batifa grand
,

nombre de perlbnnes. Il avoit avec lui deux Moines ; l'un ,


nommé Benoît, qui étoit Prêtre l'autre, Gaudence. Etant ;

entrés dans une Ifle pour y prêcher Jcfus-Chrill , ils en furent


chaires à coup de poing & de bâtons. Réfolus d'aller chez les
Lutitiens , ils s'étoicnt déjà rais en chemin , lorfqu'ils furent
attaqués par une troupe de Payens. Siggo , Sacrificateur des •

làoles & Chef de cette troupe , lança contre faint Adalbert,


un dard qui lui perça le cœur d'autres à fon exemple frap-
: ,

pèrent le Saint & enfoncèrent jufqu'à fept dards. Il mou-


lui

rut de fes blelTures les mains étendues vers le Ciel , en priant


pour fes perfécuteurs , le 2 3 d'Avril ^^j.
GoJehard, E- XVI. L'Allemagne eut vers le même tems un autre Evc-^
' célèbre par les vertus , nommé Godchard (?). Il étoit né-
'^"
dcsheim. '^^
dans le Diocèie de Pallau , en un lieu appelle Ritenbach , de
la dépendance du Monafterc d'Altach , occupé alors par des'
Chanoines. Ses parens l'offrirent à Dieu dans ce Monadere :
mais ayant plù par fes bonnes mœurs. , à Chrétien fon Evê-
que diocéfain , il le prit à fon fervicc le fit fon Chancelier. &
Godehard craignant que les affaires dont on Icchargeoit , ne
fificnt naître en lui de l'inclination pour le fiécle, follicita fon
retour dans le Monadere & l'obtint. L'Evêque de PalTau l'a-
Voit ordonné Soûdiacre , &
quelque tems après , il fut promu
au Diaconat. Otton I , avoit tenté de rétablir la profclTion
rhdnaflique à Altach , fans en être venu à bout. Otton III , y
jicùffit la feptiéme année de fon régne , qui étoit l'an 5?90.

Plufieurs Chanoines prirent la réforme. Godehard fut despre-


fniers. Il étoit dans la trente &
unième année de fon âge. SeS
progrès daiis là piété rurenc- tels qu'on le jugea digne d'y for-»
-,

rncï^ès autres. Henri , Duc de fiaviefe , fuccefTeur d'Ôtton


iri ,
.lui donna l'Abbaye d'Altach («) j & fucccdîvemcnc plu-

(f) Mabillon. //4, jo. Annal, nam, 68 1 («) J^Iaculom, Uid.Lib. 5 1, num. 7J-i
EVESQUE FHILDESHErM.^ Ch. IX. "1^5 •

fieurs autres à reformer. Bcrnouard ,• Evoque 'â'Hiideshctm,


étant mort en 1022, l'Empereur Henri lui donna Godchard
pour rucceflTcur (.v). Il étoic doja vieux. Ce lui ftif une railon
de s'oppoibr au delTein de ce Prince (y); & il eri" ajoura une
féconde , dilant qu'il avoir abandonne exprès de grr.ndcs ri-
cheiïcs , pour Icrvir Dieu avec plus de liberté, & attendre h.
fin de la vie avec plus de sûreté dans i'oblcrvation de la pau-
vreté évangcliquc. L'empereur perfifta dans ion fencimcnt'.
Se Godehard obéit. Il occupa le Siège Epilcopal d'Hil.icshcim
Jufqu'au quatrième de Mai 1038, qui lut le jour de la mort.
Ses auftérités l'a voient tellement dcITéché, qu'à peine les nerfe
de Ion corps confervolent-ils leurs liaifons naturelles. Le Pape
Innocent U
, le mit au nombre des Saints (3) , dans le Concile

de Reims. !

XVII. "Wolferus ,
qui l'avoir connu particulièrement , écri- Ses Lettre*,

vit fa vie par ordre d'Athelbert, Abbé d'AItach , & la dédia


à Albuin fon Maître. Quelques-uns l'attribuent à Arnold :
mais il y a apparence que celui-ci ne fit que revoir la vie-dom-
pofée par Wolferus ,eri' ajoutant quelques miracles , ou-
y-'

bliés ou faits depuis. Cette vie le trouve dans le huitième tome


des Aftes de l'Ordre de faint Benoit (a) , avec l'Hiiloire de
•la canonifation de faint Godchard, &
de la trandation defcs
reliques. Il y cit hk mention de piulieurs Conciles auxquels
ce faint Evèque alTifta. Ori en parlera ailleurs. D6m'Mat)4flon ^^ î'|-vvJ
~''^'"
a fait imprimer dans les Analciles (b) , une v-ingraihe dê-Ler*
très tirées des manufcrits de l'Abbaye deTegernïé en Bavie-^
re , parmi Icfquellcs il y en a plulieurs de Godehard ; une aux
Moines de ce Monaflere, dans le tems qu'il en étoit A.bbé ,
mais abfcnt , ayant été envoyé par le Duc Henri, à Cren^-s*
minder, pour y rétablir la dilcipline monaflique. Il marqué
dans cette Lettre (c) , que îcs Moines de cette Abbaye l'ai'
voient reçu avec honneur &
charité, Se qu'ils faifoient avec:
piété les exercices qu'il leur prefcrivoit. Il prie ceux de Te-
gernfé, de lui envoyer le Livre d'Horace &: les Epîtrcs dé
Cicéron. La Lettre fuivantc efl: à Théodule (d) , Evoque dé
Frifingue , c|ui lui avoit fait un crime de s'être cmparré ûê

(*)Mabtli.Cn. ilid.p. iSo. iST. 130.


(j) ïbid, LU/. î5. pa^e ip.j.w*. Z-i:
(X.) Ihid. LU. 57. n. loii-fa^^'^l)'''
(fl) Tom. i. p. 350.
Xij
1^4 G D E K A R D , ^
^
l'Abbaye de Tegernfé. Godchard protcfte qu'il n'a ufurpé nî
les droits de l'Eglife de Frifingue, ni de qui que ce foie ; &
qu'il a reçu le tout du Roi Henri ; qu'à Tégard de la défenfe
d'obéir , qu'il lui avoir dit être marquée pour certains cas , dans
la régie de faint Benoît , il n'y lifoit rien de femblable. Dans
une Lettre à l'Abbé de Maniée {e) , il l'avertit que l'Evêque
de Paflau le menaçoic d'excommunication , ii dans quatorze
nuits il ne paroiflbit ; qu'il ne devoir donc pas tarder de ve-
nir , après en avoir toutefois demandé la permiUion à Gé-
rard , Evêque de Ratifbonne. Godehard ayant reçu chez lui
une Rcligieufe qui étoit fortie de fon Monaftere (f), l'y renvoya
avec une Lettre pour l'Abbeffe , qu'il pria de la recevoir avec
bonté , de lui fournir le néceïïaire , &
de l'affocier aux ouvra-
ges de fes fervantes; enfin , d'empêcher qu'elle fortît du Mo-
naftere , & pour fauvcr du moins l'honneur de la profeflîon &
de fon habit (g). Après qu'il eût mis la réforme à Tegernfé ,
on élut pour Abbé de ce Monaftere , Eberhard ; mais le Roi
Henri n'eut pas foin de le pourvoir des choies néceflairesà la
vie. Eberhard s'en plaignit pluficurs fois à Godehard , qui fie
là-deffus des remontrances à ce Prince , le priant en mcme-
tems de laiffer ces religieux jouir du droit d'éledion , félon la
régie & les privilèges accordés à leur Monaftere par les Em?-
percurs.
Lettres d'E- XVIIL C'étoit en effet, le Rot Henri qui avoir nommé
fcwhard.
l'Abbé Eberhard à la place de Godehard {h). Aufli cet Abbé
lui fit des remontrances fur les perfécutions que le Monafte-
rc dont il lui avoir confié le foin (i) , fouffroic de la part de
fes ennemis , & fur la difette générale où étoient les Moines.
La Letttre de Peringer (/t) , fucccdeur d'Eberhard , au même
Prince , efl encore en plainte contre les féculiers qui vexoient
fon Monaftcre. Cet Abbé avoit fous fa conduite , un Moine
nommé Fromond , que l'on vouloir élever au Sacerdoce. Il
s'en défendoit , difant que plus on étoit élevé , plus les fautes
<]ue l'on faiioit étoient grandes. On lui permit d'aller à Rome
& de s'y faire ordonner Prêtre. Pendant fon voyage (/) , il
écrivit à fon Abbé la difpolîtion où il fe trouvoit à cet égard.

(f)Epif}.i}. I
(k) £p'li. -tT.

(A) lUJ. pas.^ifi I


EVESQUE D'HILDESHEIM. Ch. TX. 1^5
Je ne fuis pas, dit -il , fort éloigné d'accepter la Prêtrife ,
mais auflî je n'en ai pas une grande ardeur. J'efpere qu'en
l'acccptan t , les fautes que je ferai étant Prêtre , me feront
pardonnces plus aiféfncnt , que fi je l'avois recherché avec
témérité. On voit par la Lettre que lui écrivit Ellinger un de
les difciplcs , qui fut enfuite Abbé de Tegernfé (m) , qu'il fe
laiffa ordonner Prêtre. L'Epitaphe de l'Abbé Ellinger , nous
le repréfente comme un homme de fçavoir & de vertu («),
Il y a une féconde Lettre de Fromond à Théodule , Evêque
de Frifmgue (0) , qu'il prie de réprimer les pillards du Mona-
ftere de Tegernfé , afin que les pauvres que l'on y nourrifToic
en leur donnant en aumône la dixième partie des revenus, n'en
foufifriflent point.
&
XIX. Les plaintes des Abbés des Moines de Tegernfé , Lettre» de
rcgardoient fur-tout un Comte nommé Diémont. L'Empereur Gûzpen.
Otton II , lui en écrivit (p) , en le menaçant de fon indigna-
tion , s'il lui arrivoit encore d'inquiéter cette Abbaye dans
fes biens. Nous avons une autre Lettre de ce Prince à Pili-
grin , Evêque de Paffau (^) , à qui il recommande Brunon ,
Apôtre des Pruffiens, le priant de fournir à tous fesbefoins,
pour le voyage qu'il fe propofoit de faire chez les Hongrois.
Suit l'Epitaphe de Hartwic , Abbé & Relïaurateur de Te-
gernfé , dont la vie a été donnée par Dom Mabillon , au fep-
tiéme tome des A£tes (r ). Il eut pour fucceffeur Gozpen^
Moine de Ratiftonne, dont il refle quatre Lettres. La pre-
mière eft adreflée à tJton fon neveu (s). Il le prie de faire
payer la dixme qui étoit due à l'on Monaflere , & qu'on em-
ployoit au fervice des pauvres Se des étrangers. Il fupplie,
dans la féconde (r) , le Comte Adalpert, bienfaiteur du Mo-
naftere, de lui procurer du poiffon pour la Communauté, au
cas que la pêche de fes étangs fût heureufe. Il réitéra fa prière
par une féconde Lettre (m) , 011 il donne pour motif de fes:
inftanccs, que fuivant l'inltirut des Moines, ils s'abftenoicnc
de viande , &
qu'il étoit diflàcile à Tegernfé d'avoir du poiffon..
En une certaine année , la récolte des fruits y fut iï petite ^

(m) Epiff, 19. (r)Tom. 7, pag.^$u


(«) Uid.pagu^ij,.
i<,) Epift. iz. (0 Epift. 6.

(») Efi^. 7.
i^«r THIERRY,^
que Religieux y manquoient prefque du néceflTaire. Tl écri-
les
vit à Arnold fon neveu & à fa nièce ( .r) , de leur prêter fe-
«ours en cette occafion. La Lettre qui porte le nom d'Adal-
beron, Evêque de Metz (y) , efl: circulaire , & c'ed apparem.-
mcnt la raifon pourquoi on l'a trouvée dans les manuicrits de
l'Abbaye de Tegcrnié , comme elle pouvoir fe trouver par-
tout ailleurs. Cet Evcque l'écrivit en faveur d'un homicide
pénitent , qu'il avoir exilé de fa patrie , envoyé vifiter les &
Lieux faints, peur l'expiation de ion crime. Il le recomman-
de aux prières &
aux charités des fidèles. Cet homme enavoit
tué quatre , pour venger la mort de fon frère ; il avoir tué &
auflî le fils de fon frère , mais involontairement par igno- &
rance.
^
DîpiSmo XX. A
la tête de toutes ces Lettres, efl un Diplôme de
i Oiton III.
l'Empereur Otton III (z) , pour l'établiffement du Monaflere
de Seon en Bavière , fondé par le Comte Aribon. Henri Duc
de Bavière , étoit devenu maître du lieu où on l'avoir bâti ;
& ce fut ce Prince qui obtint de l'Empereur , de prendre ce
Monaftere fous fa protedion. Il y mit pour Abbé , Adalbert ;
mais il laifla aux Religieux la liberté de fc choifir dans la
fuite , leur Abbé.

CHAPITRE X.

Thierry , Moine de Fleuri ; Thierri, Moine de Saint Mat--,


thias } Ademar , Aloine de Saint Cibard»

Thierti de
j TL efl parlé dans Trithémc, fur l'an 089 f/?), d'un Moi
Fleuri. H ^ ^., . ,
a j. .
r •
J- • •

ne nomme Ihicrri, trcs-mitruit dans les icicnccs divi--


1

_|_
ncs (k. humaines , &: dont on avoit un Recueil des Statuts de
l'Abbaye de Fleuri , divifé en deux Livres. Ce Thierri étoit
Moine de cette Abbaye , & avoit dédié fon Recueil à Ber-
nouard, Evêtpe de Virzbourg. Il parle fur l'année J185 {b) ,'

(*) Epi'/J. 8. (.1) TiUTHEM.Ciro«;V. il/r/m^. p. 134


I

(/) I>7'- 4. '<""• ••

(O IbU. [ar. 433 E,':p. u I. (i) ii;././.,.j. 117.


MOINE DE FLEURI, r-, A. i6y
d'uri àuti'e Thierri, Moine de Saint Alban, j-rcs de Mayen-
cc , à qui il attribue un Commentaire fur le Cantique des Can-
tiques , Se fur l'Evangile de faint Jean , avec un abrégé de
l'Hidoire des Archevêques de Mayence jufqu'à fon rems. ïri-
thémc connoiflbit un troillcme Ecrivain nommé Thierri (c) ,
Allemand de nation, homme dode cloquent, d'un génie &
fiibtile, qui Abbé de Fulde , deux
avoit adrelTé à Richard ,

Opufculcs ; de faint Benoit; l'autre, la tranflation


l'un , la vie

de fon corps ; un volume de Lettres à diverfes perfonnes , Se


quelques autres Ouvrages tant en profe qu'en vers. Ce Thierri
étoit donc contemporain de Richard , qui fut fait Abbé de
Fulde en 1022. Il fait mention d'un quatrième Sçavant de
môme nom (d) , qui préfida à l'Ecole de l'Abbaye de Saint
Matthias à Trêves, après la mort d'Adalbert , en 980. Ce
Thierri régenta pendant 14 ans avec réputation , eut un grand
nombre de difciples , qui fe rendirent recommandables ; &
lnUîà plufieurs Ecrits , un fur l'invention des reliques de faine
Celfe, un Recueil des miracles du même Saint, 8c plufieurs
Sermons Se Homélies.
: IL Mais il n'efl: point aifé d'accorder ce que Trithéme dit Ses Ecrits.

de tous ces Ecrivains , avec la vérité de l'Hiftoire. Ce Thierri


qu'il fait Allemand de nation , étoit François. Cela paroît
clairement dans la Lettre que l'Abbé Richard lui écrivit en
ces termes : Il eft au pouvoir de Dieu qui vous a donné & à
vos François (e) , les talcns de relever fa gloire par vos E-
crits , de nous les communiquer aufli. Il lui dit plus bas , qu'il
avoit vieilli parmi les François , & demeuré dans le Mona-
(Icrc de Fleuri. Une autre faute de Trithéme, c'efl: qu'il attribue
•à ce même Thierri , l'Hiftoire de la tranflation des reliques de

faint Benoit de Mont^CafTin en France ; quoiqu'elle ait été


^écrite par Adalbert, Moinc]de Fleuri , & qu'il confond la vie
<le faint Benoît , dont il foit Tliierri Auteur , avec l'Hiftoire
de riUation , qui cft en effet de lui , & que l'Abbé Richard
lui avoit demandée. Il vaut mieux , fans s'arrêter aux diftin-
âions de Trithéme , ne reconnoître que deux Thierri , Moi-
nes 8c Ecrivains dans le même tems: celui de Fleuri, qui , a-
prcs avoir demeuré long-tcms en ce Monafterc , fera paflo à

U) Idem, de Scripior. Icclef. ctp. J42. j


(f) Tm, 6, Ââtr. Orditi, S, Benedili. f.
(ti) Idem, tof», I, ChroH, HirfaMg, ;>. l 561,
ïil, .{
t6S T HIER ri;
celui d'Hirsfeld en Turinge , & de-Ià à celui de Saînt Alban
près de Mayence , pour l'utiliré de ce Monaftere. Hirsfeld
n'étant point éloigné de "Wirzbourg il lui aura été facile de ,

fe faire connoître de l'Evêque Bernouard , & de trouver des


raifons de lui adrefler le Recueil des Statuts 8c des Coutumes
de Fleuri. A l'égard de THiftoire de l'Ulation des reliques de
faint Benoît , Richard , Abbé de Fulde , a pu la demander à
Thierri dans le tems qu'il demeuroit à Saint Alban. Il n'im-
porte que Trithéme donne à Richard , la qualité d'Abbé de
Fui de , & qu'il foit qualifié d'Abbé d'Amerbach dans l'Epî- ,

pître dcdicatoire de Thierri. Il fut élu Abbé de Fulde en


I022 i mais ayant bâti depuis , l'Abbaye d'Amerbach dans
!a Franconie fur le Mcin (/) , on lui donna le nom de l'Ab-
baye qu^il vcnoit de fonder. C'eft la remarque de Browerus.
Hiftoirede III. Richard n'âvoit pas demandé à Thierri l'Hifloire de
^'lll^tion ,mais feulement pourquoi en France , on faifoit pen-
rdiques'd8''r
Benoît. * dant l' Avent , une fête en l'honneur de faint Benoît , fous le
nom d'illation (g). Thierri , pour fatisfaire pleinement à cette
demande , qui avoir donné oc»-
crut devoir raconter le fait
,

callon à cette folemnité ; & prenant


chofe dans fa fource , la
il commença fon Livre à la dévaftation des Gaules par les

Normans , fous le régne de Carloman , Roi des François,


Alors les Moines de Fleuri craignant' que ces barbares ne
icur enlevaflent les reliques de faint Benoît , ou qu'ils ne les
profanaffent , les réfugièrent à Orléans, dans l'Eglife de Saint
Agnan. Quelques jours après , les Normans vinrent à Fleu-
ri , tuèrent les Moines ; & après s'être faifis de tout ce qu'il

y a voit de précieux , ils mirent le feu au Monaflere & fe re-


tirèrent. La paix ayant été rendue à l'Etat , on rebâtit l'Ab-
baye & de l'avis des Evcques & des Abbés qui s'y étoient
;

affemblés , peut-être pour la confécration de l'Eglife , il fut


arrêté que l'on rcporteroit les reliques de faint Benoît. La
cérémonie fut indiquée au quatrième de Décembre de l'an
883. Le froid étoit excedif, & la Loire gelée. Dans l'embar-
ras du tranfport , un Moine propofa de mettre les reliques
fur un batteau. Aufii-tôt qu'elles y furent, la glace fondit, &
la Loire étant devenue navigable , elles arrivèrent le même
jour à Fleuri , quoique la diltancc d'Orléans à ce Monaflere

(J ) M*BiLioN. T*w. 6, A3, fag. jtfe. 1


Cj) Tt"»»« 6. AÙer.^ag. ifi,
nuK. îOt I . .
THIERRI, MOINEDES. î^.^^ttH.Ch. X. i^p
fijcdeleizc milles. A
leur arrivée, ks ai bres 'fruitiers paru-
rent charocs de fleurs , comme (i c'eût éié au piintems. On
plaça les reliques dans l'Egliie de Saini Pierre ; d'où l'année
fuivante à pareil jour, elles furent tranfportccs dans celle de
Notre-Dame. La rencontre du rapport de ces reliques d'Or-
léans à Fleuri , & de leur traniport de l'Eglife de Saint Pierre
à celle de la iainte au quatrième de Décembre , cft
Vierge ,

la railon de en ce jour dans toute la France ,


la fête infîituée
fous le nom d'IUation. Il y avoit plus de cent ans que la cho-
fe s'étoit pafTée, lorfque Thierri en donna l'Hittoirc. Le mer-
veilleux qu'il y a répandu, n'efl: point de ion invention. Ro-
dulpheTortaire , Pierre , Abbé de Cluni {h), & leChronogra-
plic de Fleuri , publié par M. Duchcfne, rapportent cet évé-
nement avec les mêmes circonflanccs. Mais ks Bollandiftes
les ont Tupprimécs comme fabuleuies , ou du moins comme très-
fufpeiiles.
IV. Nous n'avons plus le Recueil des Statuts & des Cou- j^!^','"^^"^"

tûmes de Fleuri, que Thierri avoit dédié à Bernouard, Evê-


que de W^itzbourg. Il étoit différent de celui que l'on trouve
dans la Biblcrhéque de ce Monaftcre, imprimée par je Père
Dubois. Les autres Ecrits de cet Auteur , ne font pas non
plus venus jufqu'à nous ; & nous n'avons d'autre connoitTan-
ce de l'Hiftoire des Archevêques de Mayence , que ce que
jious en a appris Trithéme. Il en faut dire autant des Com-
mentaires fur le Cantique des Cantiques , & iur l'Evangile de
laint Jean.
V. On ne fait ras bien en quelle année Thierri de Fleuri ^ J'""^' ^^
mourut mais il eitcertam qu il ccnvoit depuis 1 nicrri , Moi-
:
Trêves.
ne de Saint Euchaire ou Saint Matthias à Trêves , puifque
celui-ci étoit déjà fort avancé en âge en ioc6 (i), qui fut
l'année de fa converfion ; & que l'autre écrivoit encore* après
l'an 1022 , c'eft-à-dire , depuis que l'Abbé Richard eût bâti
le Monaik-re d'Amerbach. L'Abbé de Saint Matthias fe nom-
moitauffi Richard. Ce fut lous fon gouvernement que Thierri
quitta le monde pour fe faire Moine à Trêves. Cet Abbé le
reçut dans fa Communauté avec beaucoup de bonté (k) , en
I oC^ j k' regardant
moins comme étranger , que comme un

(b) MaB'.llon. il/id. piigt ',^6-t:tim. 4. SO.piir. 189.

{1) |\1a.p;:!OV. lii, 51. Aimai, iium,


Tome XX.
,

I/o A DE M A R ,
ami. Lorfqu'il le vit bien inflruit dans la difcipline régulière^
il le chargea de mettre par écrit ce qu'on favoit de l'inven-

tion des reliques de faint Celfe , faite vers Tan c;8o , lorf-
qu'on rétablilloit le Monaftere de Saint Matthias , de rap- &
porter aufTidcs miracles opérés par rinterceflTion du Sainr.-
Thierri divifa l'Ouvrage en deux Livres. C'eft fur la fin du
premier , qu'il marque l'année de fa converiion. Il dit fur la
lin du fécond , que travaillé de la goûte depuis trois ans, il
en avoit été délivré par les mérites de faint Celfe. En recon«
noiffancc il compofa un Difcours que l'on devoir lire le jour
de fa fête. Trithérae lui en donne encore d'autres , plufieurs &
Homélies (/). Les deux Livres de Thierri , ont été imprimés
dans le Recueil des BoUandilies , au 23 de Février, avec le
Difcours du même Auteur , en l'honneur de laint Celfe , Eve-
que de Trêves. Il eft remarqué dans l'Hifloirc de l'invention
de fcs reliques (m) , par l'Archevêque Egbert , que ce Prélat
après avoir fait un Difcoiurs au peuple , monta à l'autel pour
y offrir le faint Sacrifice , & qu'étant prêt de commencer le
Canon de la Melfe , il prit un article d'un doigt du Saint ea
préfence de tous les habitans, l'enveloppa dans un linge très-
fin , & le mit fur des charbons ardens deflinés à brûler l'en-
cens ; que cette relique demeura dans le feu avec le linge ,>
pendant tout le tems que dura la récitation du Canon , lans
que ni l'une ni l'autre en fuflent endommagés. Ce qui fi.it re-
gardé comme un miracle & une preuve de la lainteté de l'E—
vê.]ue Celfe.
AvieinaT,Moi- VI. Adcmar né de l'illuflre Maifon de Cliabanois («)»
ne <+e s. Vienne au Diocèfe de Limoges , fut mis des
Ci- \i\\q j^tuée fur la

fon enfance , dans le Monaftere de Saint Cibard à Angoulê-


me (0). Il en fortit pour aller continuer fes études à Saine
Martial" de Limoges , fous Roger fon oncle paternel , qui y
enfcignoit. Ademar étoit dès-lors Moine d'Angoulcme (p)..
Il raconte que dans le tems qu'il demeuroit dans le Mona-

ftere de Saint Martial , c'eft-cà-dire , vers l'an loio , il y eut


pîuileurs fignes dans les aflres , tantôt des féchcrelfes, tantôt
des pluies exccfÏÏves, des pertes 8c autres calamités; & qu'é-

(/) Tritheme , Tom. l. Chron. Hirfauj. j


(t>) Adfmab. , in CLronu-. f. 174. tom^
pi7 111. II. "ov. Bil/liot. hnhh,
(m) BoLt AND, itd diitn 13 . TtlirHaii , f.. (0) IbH. p^igf 7 ?• 1

4po. * liid. jKtg. 174.


{f)
,

MOINE DE S. Ch. X. CIBARD.


171
*ant un jour occupe la nuic à contempler les aftrcs , il apper-
çut du côté du Midi, une grande croix qui paroilToit atta-
chée au ciel, doùpendoit la figure du Seigneur, qui rcpan-
doit beaucoup de larmes. Tant la croix que la figure du cru-
cifix , étoient de couleur de feu & de lang. Il ne put à ce l'pc-
^aclc s'empêcher de pleurer mais il tint lecret ce qu'il avoir
:

vu, julqu'au jour qu'il le mit par écrit ; 6c il prend Dieu à té-
moin de la vérité du fait. On voit par la Lettre touchant l'A-
poftolat de faint Martial , qu'il étoit Prêtre (^). Il ne paroît
nulle p.irt , qu'il ait été promu à un degré iupérieur. Cette
Lettre eil de l'an J028 (r). Ademar n'avoir alors que quaran-
te ans. Le tems de fa mort n'efl pas connu. On dit qu'étant
dans le delfein de faire le pèlerinage de la Tcrre-iaintc (j) ,
Se d'y finir les jours , il donna à l'Abbaye de Saint Martial
de Limoges , plulieurs volumes qui lui avoicnt beaucoup coû-
té, ou à trankrirc ou à compofcr ; entre autres , une Nomen-
clature univeriellc; des extraits de Marius Vitlorinus,la Chro-
nique, & autres. La note où ce fait eft rapporté , qualifie Ade-
mar, Grammairien d'heurcule mémoire.
Vil. On une Chronique , depuis l'oiiçrine de la
a de lui fîifo"^'î"e

Monarchie fhrançoife , juiquen fan io2y(/j. Avant quelle


eût été donnée en entier par le Pcre Labbe , d Paris en 1^)57.
Caniiius («) , le Père Sirmond (x) , Pierre Pithou (y) , André
Duchcfne (z) , & Jean Belli (a) , en avoient publié divers
fragmens. On avoir encore un abrégé de cette Chronique , de
la façon de Dom Guillebaud , autrement Dom Pierre de Saine
Rornuald , Feuilient ^ imprime à Paris chez I.vOuis Chamdouri,
en 1 6 5 2 , en deux volumes dont l'un contient le texte latin ;
_;

l'autre , la tradudion françoile. L'abbréviateur a continué l'Hi-


iîoire , depuis 1025?, 011 Ademar avoir fini , juiqu'en 1652.
La Chronique d'Adem.ar n'a rien d'intérciTant juiqu'en 82c;»
que l'on ne trouve dans les anciens Hiiioriens de Fraiice.
C'eft-là qu'il a puiié. Aufli le Pcrc Labbe , pour ne pas char-
ger le public , a retranché de cette Chronique beaucoup de
choies , en indiquant les fources d'où elles font tirées , afin

^</) Adimar, Fr»77. :1e ^pnp. Tome 4. j


(k) Tntn. j. ;>. 66.
,4r»«4/. Mabill. i« AflitnÀ.f. 717. \x\ Ton. 4. O/?, p. 6^'T.
it) It.-d.f/i^. 7:0- f-/)P.THœus, ht ColleiJ.
(s) hibiiit. Lu^diin. tnanufiirift. latin. '
(x.) I« ScriHiu-t. p. 19.

f.jS<'. I^.i) iiijior. Comiimr,. liilav.paj. ^51,


[t)LtJiB.T(>m,z. Kez>, Bilrl. pjig. iji, '4 i~. 4 ji. 460.47;. 475.
Yii
172 A D E M A R,
que y recourir. Ademar eïi plus original dans ce
l'on puifle
qu'il raconte depuis Tan 825^, jufquà fon tcms. Il y a même
des exemplaires ( /; ) , où la Chronique ne commence qu'en
cette année-là ; entre autres , celui que M. Adrien Valois a-
voit en main. L'Auteur ne le borne point à THilloire de Fran-
ce , il y fait entrer plufieurs évcnemens qui regardent l'Em-
pire , &
rapporte également tout ce qui lui paroit remarqua-
ble dans l'Etat & dans l'Eglife. Il pouffe même fes remar-
ques jufques fur l'Empire d'Orient ; fur l'Efpagne , fur l'Ita-»
lie, fur l'Angleterre, & plufieurs autres Royaumes étrangers
à France. Mais il s'applique principalement à ce qui s'eft
la
pafTé dans le Royaume d'Aquitaine. Il fait fur la fin , le récit
de la mort de Guillaume , Comte d'Angoulcme, arrivée le fi-
xiéme d'Avril 1028 , quelque rems après fon retour d'un voya-
ge qu'il avoit fait à Jérufalem. Ce Comte avoit demandé la
pénitence aux Evcques & aux Abbés , dans le commencement
du Carême, &s'éroit préparé pendant ce fainttems, à la mort.
La veille des Rameaux, il reçut l'huile fainre des infirmes le &
Viatique ; puis ayant adoré &
baifé le bois de la Croix , il-
mourut entre les mains de TEvêque Rhodon & des Prêtres.
Il ajoute que le lendemain , après qu'on eut achevé les céré-
monies de la fépulture , les Evêques , le Clergé le peuple, &
firent la procefTion folcmnelle , avec la fliation marquée pour
le Dimanche des Palmes. Il parle enfuite d'un Concile tenu
à Charrou , contre les erreurs des Manichéens , que Ton re-
nouvelloit dans le pays ; de la défaite des Sarrafins en Efpa-
gne, par les armes d'Alfonfe, Roi de Galice; &: de la mort
de ce Prince. C'cfl par-là qu'il finit fa Chronique d'où quel- :

ques-uns infèrent , qu'il l'écrivit en l'année même de la mort


d'Alfonfe , c'efl-à-dirc , en 1027. Mais cette conféquencc
n'cfl: pas néceffaire. Ademar n'a pas toujours rapporté lesévé-

ncmens dans leur ordre ; & un peu auparavant , il en rapporte


un de l'an 1028.
Notice des VIII. Nous avons encore d' Ademar , une Notice des Ab-

Ahbis àe S. be's de S. Martial de Limogcs(c) , à compter depuis l'an 848,


^
nîo'gés.
' auquel les Chanoines de Saint Maniai embraficrcnt tous vo-
lontairement la vie monaflique , avec Ainard leur Abbé , juf-
qu'cn 1020. Ces Chanoines ne voulurent point prendre parmi

{t) Laee. tcm, 1, p. ijf). (f) Laei), Tum. 2. imv, Biil.p. 271,
,

MOINE DE SAINT CIBARD. 173 Ch. X.


eux un Abbé ,
parce qu'aucun d'eux n'étoit affez de infti'uit

la vie nouvelle qu''ils alloient profclTer. Ils choifi cnt l'Abbé


régulier de Saint Savin , nommé ]3odon , qui ne gouverna ce
Monaflerc que trois ans. Le dernier Abbé dont parle Ade-
mar , étoit Hugues, qui mourut le 27 de Mai 1020. Roger
oncle d'Adcmar & ion Maître , étoit mort quelque tems au-
paravant. Un Moine nommé Hclie de Rofiac , a continué cet-
te Notice , qu'il commence à Odolric fuccefleur immédiat de
Hugues. Ademar ne s'applique pas tellement à donner la fuite
des Abbés de Saint Martial , qu'il n'y falTe entrer quelques
traits de THilIoirc des Rois & des Evoques , cjuand l'occa-
cafion s'en prélente. Cet Opufcule a été auflTi publié par le
Père Labbe , dans le fécond tome de fa nouvelle Biblio-
thèque.
ç'
IX. On y apprend ce qu'on ne lit nulle part ailleurs, que ^^j^f^f/"'!.'
l'Abbé Hugues affifta à une AfTemblée, où fe trouvoit le Roi Martial/
Robert, avec Gauzlin , Archevêque de Bourges , 8c pluficurs
autres Prélats; & qu'il y fut décidé fur d'anciennes Litanies,
& autres monumens , que faint Martial fcroir reconnu pour
Apôtre, & qu'on lui en donneroit le rang , comme ayant été
indubitablement du nombre des foixante &: douze Difciples
que Jelus-Chrill envoya prêcher l'Evangile. On ne peut met-
tre cette Afiémbléejqu'entre l'an 1014, auquel Hugues fut fait
Abbé de Saint Martial, & l'an 1020, auquel il mourut. Le
Décret que l'on y rendit , fut confirmé^ dans le Concile de
Limoges , en 10^ i. Il s'en étoit tenu un'cn la même Ville , le
quatrième d'Août de l'an 1028. Ademar y a.Tilta (d) , & ap-
puya fon opinion touchant l'Apoflolat de faint Martial. Il fit
la même choie dans un Sermon qu'il prononça au mois de
Novembre de la même année , à la Dédicace de l'Eglife du
Sauveur ou de Saine Martial, a Limoges, & dont on trouve
un long fragment dans le huitième toîne des A£tcs de l'Or-
dre deS. Benoît (f). Mais ayant içu que Benoît de Clufecon-
tcftoit l'Apoftolat de faint Martial, il écrivit là-defius une
grr.nde Lettre adceflée à Jourdain, Evêque de Limoges; à
Odolric , Abbé de Saint Martial; à. Rainald , &: aux autres
Chanoines de la Cathédrale ; à Gerald , Abbé de Saint Au-
guflin de Limoges ; à un autre Gerald , Abbé de Solignac ;

(</) Mabul, Tom. 4- Aiiiiat.in Af(end.\ (j) Vng. 28,


,

Î74 ^
AD E MA R,
à Thierri,Evêque de Metz ; à l'Impératrice Cunegonde ; à
l'Empereur Conrad ; à Guillaume, Duc d'Aquitaine ; au Pape
Jean &
XIX, à quelques autres dénommés dans l'infcripiion.
La plupart avoicnt ailiflé au Concile de Limoges; ôc il étoit
de l'intérêt d'Ademar , de répondre aux difficultés que le
Prieur de Clule avoit oppoiées a ion fentimcnt. Mais pré-
voyant que fa Lettre pouroir parvenir jui'qu'au Pape , à l'Em-
pereur 8c au Duc d'Aquitaine , ce lui fut une raifon de la leur
adrcfTer , pour les engager par cette politefle, à lui être fa-
vorable. Elle fe trouve dans l'Appendice du quatrième tome
des A nnales de Dom Mabillon.
Anaiyfe de X. Il âvoit l'Apoflolat de faint Martial fi à cœur , qu'il étoic
cectî cure. pj.A^
^^^^ prendre la dcfenfe aux dépens de fa vie. Il raconte
comment Benoît , Prieur de Clule en Piémont (/) , s'étanc
trouvé à une fête de la Nativité de Notre - Dame , quelques
jours après la tenue du Concile de Limoges , y avoit combat-
itu l'Apollûlat de (aint Martial , jufqu'à taxer d'ânes d'i- &
gnorans , ceux qui le regardoient comme un Apôtre ^ faire
regarder comme des péchés , les prières 6c les litanies qu'on
lui adreiloit en cette qualité; &
ordonner de brûler les Meflcs
que l'Abbé Odolric avoit compofées en fon honneur. Ademar
rapporte au long tous les difcoursque Benoît de Clufe tint en
cette occafion ; &
n'oublie pas les termes méprifans , dont il
fc fervit en parlant de l'Abbé Odolric 6c d'Ademar lui-mê-
me , qu'il accuioit de n'avoir imaginé l'Apoilolat de faint
Martial , que pour faire plaifir à l'Abbé aux ]\loines du &
Monallere de ce nom à Limoges. Il convient que le Prieur
de Clule parla fi fortement fur ce fujet , que deux Moines de
Saint Cibard, quil'avoient entendu , ayant rapporté ion d'f-
cours à leurs confrères , tous , à l'exception d'Ademar de &
Gauihert, embraiTcrent fon feniimcnt. Benoît, en réfutant
ceux qui ne penloient pas comme lui, s'étoit répandu iur les
propres louanges, fur loniçavoir , furies talcns , iur fcs libé-
ralités envers les maîtres, iur fes prétentions à l'Abbaye de
Clufe, dont Ion oncle étoit Abbé. Ademar n'oublie rien pour
î'humiiier. Il le charge d'injures , l'appelle Ebionitc héré- (f^-

tique. Venant au fait , il prouve TApoltolat de faint Martial


piir l'autorité d'une ancienne vie de ce Saint , où on lui don-

(/) Mauillon. Ts»). 4. A/iiiaLirt yipi>. p.i^. 7i'i


MOINE DE SAINT CIBARD.Ch.X. 175
roit le nom d'Apôtre, & où étoit dit, qu'ayant ctd
il con-
verti par Jcfus-Chrift mcme, il avoit été prclenc à la rélur-
redion de Lazare frcre de Marie & de Marthe ; qu'il avoic
icrvi à table le jour de la Cène légale ; qu'il étoit dans la cham-
bre avec les Apôtres , lorique le Sauveur y entra les portes!
fermées ; qu'il reçut avec eux le pouvoir de lier & de délier ,.
& d'aller prêcher l'Evangile; qu'il aflifta à l'Alcenfion de Je-
fus-Chrift dans le Ciel ; Se que le jour de la Pentecôte, il re-
çut le Saint-Efprit avec le aon des langues. Benoît rejettoir
l'autorité de cette Légende , dilant qu'elle étoit l'Ouvrage^
d'un Moine. Aderruir répond que cela ne fe pouvoit , pre-
mièrement , parce qu'il n'y avoit que 1^0 ans que les Cha--
noines de Saint Martial avoient quitte leur inftitut ; féconde--
ment , que la même vie étoit reçue dans toutes fcs circon-
ftances , par toute la France , l'Efpagne , l'Angleterre &"
l'Italie. Ademar produit en fécond lieu, un ancien Bréviaire ,,.

où faint Martial cfl appelle dans un Répons, Apôtre de la


France 8c une fequcncc à. la fuite du même Bréviaire ,. dans
;

laquelle on donnoit au Saint le même titre.


XL Benoît de Clufe alléguoit une autre vie de faint Mar- Suite Je cecïe.-

tial , en ufage dans les Eglifes de Lombardie (g) , où l'on


difoit qu'il avoit eu une million femblable à celle de faint
Apollinaire , de faint Saturnin , de faint Denis , de faint Au-
{bemoine , &
de quelques autres Saints qui ont les premiers
prêché l'Evangile en certaines Provinces d'Italie ou des Gau-
les. Ademar rejette cette vie comme apocryphe ; &
ajoute ^
que quand même faint Martial n'auroir pas été Difciple de-
Jcfus-Chrift vivant fur la terre, on ne pouroit lui rcfufer la:
qualité d'Apôtre ,
pour avoir le premier converti l'Aquitai-
ne , comm.e on la donne aux difciples des Apôtres , qui ont:
converti quelques Provinces à faint Marc , à faint Luc , à
;

Onélirae, à Epaphrodite; queGcraldouGeraud , Evêquede


Limoges , étant allé à Rome , il y avoit environ quinze ans
y
y avoit lu un volume où il étoit écrit , que faint Martial en
venant en Gaule, avoit pafiTé à Ravenne, & annoncé l'Evan-
gile en cette Ville , long-tems avant que faint Apollinaire
y
vînt. Ademar apporte encore en preuve, les anciennes pcin-
tures de l'Eglife de Saint Sauveur , qui repréfentoicnt faint
JVLartial fcrvant le Seigneur à table ; & d'anciennes Litû:^-
,

i'j6 À D E M A R ;
nies, où on l'invoquoit comme Apôtre , & a\'ant les Mar-
tyrs.Benoît de Clule , ibutenoit qu'il n'ctoit point permis de
donner le nom d'Apôtre à laint Martial ( /? ) , avant qu'un
Concile général de tous les Evéques des Gaules & d'Italie
eût décidé avec le Pape , ce que l'on doit croire fur ce lujet.
Adcmar répond , que fi le Pape iurpris par les avis des en-
vieux , défendojt de nommer faint Martial parmi les Apô-
tres , il faudroit en ce cas obéir plutôt à Dieu qu'au Pape , qui
n'a pas reçu le pouvoir d'abfoudreni d'excommunier les faints
Apôtres, ni d'empêcher l'Egliie de Dieu , de bien faire de &
bien parler (z).
Di -cours d'A- ;j[ll. Outre le Difcours prêché par Ademar , le jour de la
'" *
Dédicace de l'Eglife de Saint Sauveur à Limoges, M. Baluf3
lui en attribue trois autres ( /t ) , qu'il a fait imprimer fous ion
nom , à la fuite de l'Hiiloire de Tulle. Mais s'il ell vrai , com-
me le prétend cet Editeur , que ces Difcours ont été pronon-
cés dans un Concile de Limoges en 5)94, ils ne peuvent être
d'Ademar de Chabanois, qui n'avoit alors que douze ans ,
puifoue ainfi qu'il le dit lui-même (/) dans la Lettre dont nous
venons de parler, il n'en avoit que quarante en 1028. C'efl:
apparemment à ces trois Difcours qu'il faut rapporter le ma-
nufcrit de la Bibliothèque du Roi {m) , qui eft intitulé Adema- :

ri de Conciius Lemovicenfibus , onno 9P4 €^1051.


Autres Ecrits XIU. Rohon , Evêque d'Angoulcme , avoit chargé Ade^-

'
det^'a'.*^
"^
mar de lui faire tranfcrire l'Hiiloire des Papes , attribuée à
Damafe. Adcmar exécuta cette commilllon , & mit à la tête
de cette Hifloire , un double acïoiliche ; dont l'un porte le
nom de l'Evêque; l'autre, celui d'Ademar. Mais les vers lonc
à la louange de Rohon. Cette petite pièce de Poéfie , fait par-
tie des Analedes de Dom Malîiilon («), qui remarque que
rflifloirc des Papes, dans le manufcrit de l'Abbaye de Saint
Evroul , ne va que jufqu'à Léon IV. Il tranfcrivit aulTi les
Livrés des divins Offices, par Amalairc, à qui il donne le
prénom de Sympcfius , dans la note qu'il fit à la hn de ces
Livres. On en ccnfcrvc le manufcrit dans l'Abbaye de Saine .

JVUrtial à Limoges (0). C'cif de-là que Dom. Mabillona tiré le

(h) Uid. />.»;. 726, (/)Adsmab,. Epin.p>g.7i7-


(>) fa:f, 717. „ (m) MoNTFAUCON. B«*/. B«*'''"./'.94(S',
(k.) Lalus. lUflgr, Tutti, in Afptnd. p.
185.
Supplément
MOmE DE SAINT CIBARD. Ch. X. 177
Supplément au quatrième Livre d'Amalairc (/)) ,
qui ne fe lit

point dans les cdiiions ordinaires , pas même dans les Biblio-
thèques des Percs. Adcmar n'cll: donc point Auteur de ce
Supplément, comme quelques-uns l'ont cru, mais feulement
le Copifte. Il eft intitulé du nom d'Amalaire dans ce manuf-
<:rit, qui eft de plus de lîx cens ans. On a voulu faire hon-
neur à Ademar (<?) , de rHilîoirc des Evêques 8c des Com-
tes d'Angoulcme , fur ce que M. Duchefne rapporte un frag-
ment de cette Hiftoire (r) , & l'attribue à Adcmar. Mais il

faut remarquer que cette Hifloire des Evêques d'Angoulcme,


n'eft qu'une compilation de divers Ecrivains, principale- &
ment d'Adcmar, comme remarque dans le titre (s), &:
il efl:

que le paffage rapporté par M. Duchefne, fe trouve dans la


•Chronique d'Ademar. L'Auteur de cette compilation , ctoit
Chanoine d'Angoulcme vers l'an 1 1 59.
XIV. On met la naiflance.dc Guillaume en ç6i , lamé- Guillaume,-
me année qu'Otcon I , fut appelle en Italie , & couronné Em- ^^^^î '^ j^"'
percur. Ce Prince voulant fe rendre maître de la fem.me deD^jon.
Bercnger (f) , Roi des Lombards , mort depuis peu , aiïîége
un Château où elle s'ctoit retirée près de Novare. Il ne peut
le prendre que par compofition. Robert père de Guillaume,
& Perinza la mère , qui y étoient , prièrent l'Empereur de
tenir fur les Fonts de Batcme, l'enlant qui leur étoit né pen-
dant le liège. Il y cohfentit , &: le nomma Guillaume. A peine
avoit-il fept ans , que fes parens le vouèrent à Dieu dans le
JVIonaflere de Saint Janvier de Locedia, près de Verceil. Il
y fut élevé dans la piété & dans les Lettres. Mais pour le per-
fectionner dans les fcicnces , on l'envoya fuccelTivcment aux
Ecoles de Verceil & de Pavie. A fon retour à Locedia (u) ,
on lui confia divers emplois du Monaftere. Sa mère étant
morte pendant ce tems-là , il perfuada à fon père de quitter
le monde , 8c d'entrer dans la même Communauté , où il
mourut iaintement. L'Evêque de Verceil connoiiTant le mé-
rite de Guillaume , voulut l'ordonner Diacre cela ne fe pou- :

voir qu'en prêtant , félon la coutume de ce Monaftere , ferment


de fidélité à l'Evêque. Guillaume regardant ce ferment comme

{ç)LlI.OKG. li:il.Ft;ific.p.X^7. .
\ S. Berr lui. p. zS6,
'•''^''ri
'

(r' DuCHfSNf , l'i)}. Norm.p. 19. 1 (u) Pag. 188.


s) Labb. B:l'l:ot.nov. Tom. 1./.Î45).
Tome XX, Z
1/8 GUI L LAU ME,
un abus 8c une efpcce de iimonic ,ne voulut point recevoir
l'Ordination. Il quitta même lelejour de Locedia ,
pour pafler
à Cluni avec Saint Maycul , qui à ion retour de Kome , étoit
paffé par ce Monaftere (x).

ve« Alwiaflè"
^V. lls s'appliquèrent enfemble à faire fleurir la piété à
les. Cluni. Guillaume y fit tant de progrès , qu'au bout d'un an ,
faint Mayeul penfa à le faire ordonner Prêtre ; car il étoit
déjà Diacre. Guillaume s'en jugea indigne (y). Il fut envoyé
pour réformer le Monaflere de Saint Saurin fur le Rhône ,
puis l'Abbaye de Saint Bénigne de Dijon. Brunon , Evêque
de Langres , l'en établit Abbé & l'ordonna Prêtre. Il ne le
fixa pas tellament à Dijon , qu'il n'étendit fon zélé fur quan-
tité d'autres Monafleres qui avoient befoin de réforme j & on
en compte plus de quarante , tant en France qu'en Lorraine,
où il rétablit la difcipline régulière. Il ordonna qu'il y auroic
en tous des Ecoles , tant pour les Moines que pour les fécu-
liers (z). Ce qui faifoit des Ecoles doubles; l'une, dans l'in-
térieur du Cloître ; l'autre, au dehors. On devoir recevoir
dans celle-ci , tous ceux qui fe prcfcntoient , riches ou pau-
vres , libres ou efclaves. En beaucoup d'endroits , on four-
niiïbit aux pauvres écoliers , la fubfiftance. Guillaume fit un
Voyage à Rome (a) , dans le deflein d'aller viiiter les tom-
beaux des iaints Apôtres. Au retour il fonda , de concert
avec fes frères , l'Abbaye de Frutare , dans une Terre de leur
patrimoine. L'Empereur Henri , Se Robert Roi de France,
l'honorèrent de leur amitié (b). Occupé à faire la vifite des
Monaflercs qu'il avoir réformes, il tomba malade à Fécam,
où il étoit allé de Gorze (<^) , & y mourut le premier de Jan-
vier de l'an 103 i , âgé de foixante 8c dix ans , environ qua-
rante & un ans depuis qu'il étoit venu d'Italie en France. S^
vie fut écrite par Glaber Rodulphe , Moine de Cluni , qui
avoir été fon difciple, & par l'Auteur anonyme de la Chro-
nique de faint Bénigne de Dijon. Ces deux vies fc lifent dans
le huitième tome des A£les de l'Ordre de Saint Benoît. Mais
il eft parlé de l'Abbé Guillaume avec éloge , en beaucoup

d'autres endroits. II fe rendit recommandablc par la pureté de


îes mœurs , par la folidité & la pénétration de fon efprit ,
par

ix)ragf2lif. („)P„î. 25,,.


I

{X)P.^^I$0. J
(f)Pjj{, 1,6.
,

ABBB' DE SAINT BENIGNE. Ch. X. i;^


fa prudoncc 8c par fon Içavoir (d). Aime & en vénération
en France & en Italie , les Rois l'honoroient comme leur perc;
les Evêques , comme leur maître ; les Abbés & les Moines
comme un Archange ; tous, comme l'ami de Dieu & le Doc-
teur de la voie du lalur.
XVI. Il nous relie de lui trois Lettres , dont deux font l'f"f«< î*»
^'"^'
adreflees au Pape Jean XIX. Dans la première, il l'exhorte ^^J'^^
à réprimer avec plus de foin qu'il ne faifoit , la fimonie qui in-
fedoit fur-tout l'Italie. Qu'il iuftlfc aux hommes , lui dit-il
que Jefus-Chrifl- ait été vendu une fois pour lefalut commun
du genre-humain. Il ajoute , que fi ce mal fe fait fi fort icn-
tir à la fourcc de l'Eglifc , c'elt-à-dire , en Italie , il dévoie
à plus forte raifon , le répandre dans les lieux plus éloignés.
Le Pape reçut bien cet avis. Dans la féconde , il avertit le
même , de ne pas fouffrir que l'Eglife de Confiantinople s'at-
tribuât le titre d'univcrfelle , comme on difoit qu'elle le pre-
noit: ce qui doit s'entendre d'Euftache, Patriarche de cetta
Ville , qui , conjointement avec l'Empereur Bafile , envoya à
Rome des Dépurés chargés de grands préfens , pour obtenir
de fe donner le titre d'Evêque univerfel dans l'Orient , com-
me le Pape le prenoit dans toutes les Eglifes du monde.
Mais le bruit de cette tentative ayant excité en Italie & même
en France , un grand tumulte , elle n'eut pas l'effet que le Pa-
triarche & l'Empereur en attendoient. Ces deux Lettres fe
trouvent ; l'une, dans la vie de Guillaume par Glaber ; l'au-
tre , à la fuite de la même vie, de l'édition de Dom Mabil-
lon, dans la Chronique de Verdun , par Hugues de Flavi-
gni , & ailleurs. La troifiéme eft à laint Odilon , Abbé de
Cluni(e),à qui l'Abbé Guillaume fait une trifle peinture de
l'état auquel l'Abbaye de Vczelai étoit réduite par le fait du
Comte Landric , qui en avoir chaffé l'Abbé & les Moines. Jl
lia fait part aufiî de la mauvaifedifpofition de l'Evêque d'Au-
tun , tant contre l'Abbaye de Cluni , & un Prieuré de fa dé-
pendance , que contre celle de Saint Bénigne de Dijon ; ajou-
tant que cet Evêquc en avoit excommunié les Moines , avec
défenle à eux de célébrer publiquement l'Ofike divin , mais
que ceux-ci ne tenant compte de cette fentence , dont ils fe
croyoient à couvert par leurs privilèges , avoient foulé aux

(<{) Pd^gc 284. 28;. 2$é. (^cjl>l^eïLLOH,lit.jl6.4»»4j,tium.ii.page jjj.


Zij
,

i8o G U T L L A U M E,&c.
^
pieds les Lettres de TEvêque d'Autun , ce qui l'avoir mis etr
une étrange colère , &
les avoir rendu odieux même à leurS
anciens amis. Guillaume tâcha de perfuader aux Moines de
Vezelai , d'aller à Cluni prendre les avis de laint Odilon.'
On ne fait quelle fut la fuite de ces troubles. Dom Mabil-
/ Ion a inféré cette Lettre dans le quatrième tome de fes An»
'

nales.
Charte de la
XVIL La Charte de fondation de l'Abbaye de Frutare,.
.frutareT" ^Vulgairement faint Balain, au Diocèfe d'Yvrée dans le Pié-
mont (/) , doit être mife au rang des Ecrits de l'Abbé Guil-
laume, puifqu'elle e(i de fa façon. On la trouve à la fuite de'
fa vie , dans le huitième tome des A6les de l'Ordre de Sainr
Benoît. Cette Abbaye fut , comme on l'a déjà dit , bâtie aux
dépens de la famille de Guillaume , & fur un terrcin qui ap-
partcnoit à fes frères. Il eut foin de faire confirmer cet éta-
bliiTement par les Princes & par les Evêques de qui l'Abbaye
dépendoit ; &
voulant qu'elle fût excmte de la Jurifdidion'
ordinaire , il fe pourvut à Rome , & obtint ce privilège du
Pape Jean XVIII , puis de Benoît VIII , fon fucccffeur , qui
ie ratifia dans un Concile de quarante Evêques , de plufieurs
Abbés & Cardinaux, tenu dans l'Eglife de Latran , le troi-
fiéme de Janvier loi j Guillaume prend dane cette Charte
.

k qualité d'Abbé de Frutare. Leoteric , Archevêque de Sens ,


y foufcrivit avec grand nombre d'Evêqucs (g). Elle cft fans
date. Le Diplôme par lequel l'Empereur Henri confirma
cette fondation eft de l'an 1014 , celui du Pvoi Robcn de l'an
1023.
DTcoii'cjfe XVIII. L'Abbé Guillaume ayant fait rebâtir l'Eglife de
^"* ' ^^-'^^^ Bénigne de Dijon , invita plufieurs Evêques à en faire
ïavi^^
la Dédicace (h). Ils l'obligèrent de prêcher en leur prcfence
dans cette cérémonie. Glaber nous a confcrvé un aflez long
fragment de ce Difcours. Il fut fi touchant , t]u'au rapport de
cctHillorien , il tira des fanglots & des larmes des afllflants.
Glaber nous a encore confcrvé une partie de ce que l'Abbé
Guillaume dit au Roi Robert & à la Reine Confiance, pour
les confoler de la mort du jeune Roi Hugues leur fils (?) , ar-
rivée le 17 de Septembre de l'an 1016 , environ ncufansa-

4g} lui J. pige loi. i\o. I [i\lbid.{.i9l^


KOBERTjROI DE FRANCE. Ch-XL i8i
p'rès Vous ne devez point , leur dit-il , vous efti-
fon Sacre.
mer malheureux , pour avoir perdu un tel lils. Je penle que
de routes les conditions des hommes , il n'y en a point où il y
ai: fi peu de fauves cjuc dans celle des Rois. Voyant le Roi Se
la Reine furpris de ce dilcours , il ajouta N'avez-vous pas :

remarqué, que de trente Rois dont il efl: parlé dans le facré


Canon , à peine trois ont été bons ? Cefl'ez donc de pleurer
ce jeune Prince ; congratulez-le , au contraire , d'être délivré
des maux de cette vie, &
d'être pafTé à un repos éternel.
Glaber parle auiïl de certaines formules de prières compofces
par l'Abbé Guillaume (/s), en faveur des pcrfcnncs non let-
trées , qui quittoicnt le fiécle pour fe retirer dans des Mona--
fteres. Chacune de ces prières avoir rapport à l'un des cinq
fens du corps humain , c'cft-à-dire , aux péchés que l'on com-
met par ces fens ; &
devoir être fuivie de la récitation du
Pfeaume Miferere. Tl y a une autre formule de prières fous le
nom de l'Abbé Guillaume, dans les Analcdes de Dom Ma-
; mais après l'avoir attribuée à Guillaume ,
billon (/) Abbé de
Saint Bénigne de Dijon , il a reconnu qu'elle étoit de Guillau-
me , Abbé de Saint Arnoul.

CHAPITRE X !..

^ohert , Roi de France ; Othelbald , Abbé de Saint Bavcm


a Gand i Chronique de Motizon ; Lezcelin ; Pierre de
Chartres , Engticn'an , (zfr Oderanne*

I. T> O B E R T fils de Hugues Capct , & de la Princefle Ro'^erî, Roî

XV Adelaide, naquit à Orléans vers l'an 5)70. Il fit fcs'^'^"""'


études a Reims, fous Gcrbert , Abbé d'Aurillac (m), qu'il
protégea toujours depuis. Ses progrès dans les fciences lui en
infpircrent de l'amour. Il les cultiva toute fa vic,& favoriia ceux
qui les cultivoient. Hugues ayant été élu Roi à Noyon , & fa-
cré à Reims en 5; 8 7 ^ Ht couronner fon fils Robert le pre— ,.

{\)Ibiit. p.ï^j^. 1 (m) HFLCArD. Frl.rRoi/r/»', <'^;/ri<ip-_


^) F/tg 113., ij^é p. «5^ /(£.,.
Xcefiirt.Mi.
i82 ROBERT,
mier de Janvier de l'année fuivante, pour lui aflurer la fuc -

cciïlon. Il étoit alors dans la dix-huitiéme année de fon âge.


Son père mourut après neuf ans & près de cinq mois de ré-
gne, c'eft-à-dire , le 24 d'Odobre ^^6 > & par cette mort ,
Robert fe trouva en poiTcflTion du Royaume. Il régla telle-
ment fon tems , qu'il en donnoit une partie aux oeuvres de
piété. , une aux affaires de l'Etat , & l'autre à l'étude. Chaque
jour il récitoit le Pfcautier , &
enleignoit aux autres les Le-
vons 8c les Hymnes de l'Office , auquel il étoit très-afTidu. On
comte jufqu'à quatorze Monafteres qu'il fonda , & fept Egli-
fes. Ses aumônes étoient extraordinaires. Il avoir coutume le
Jeudi-Saint, de fcrvir trois cens pauvres , le genou en terre ;
de faire la même chofe à l'égard de cent pauvres Clercs ; de
laver les pieds à cent foixante autres , de les efluyer de fes &
cheveux ;donnant de l'argent à tous ceux dont il avoit lavé
les pieds , ou à qui il avoit (ervi à manger. Ce Prince fit vers
Tan 1020 , le voyage de Rome par dévotion. Les dernières
années de fon régne furent troublées par la révolte de fes deux
fils : mais enfin il les ramena à leur devoir. Comme il conful-
toit un jour l'Abbé Guillaume , fur ce qu'il devoit faire à leur
égard , ce Saint lui répondit («) Vous devez, Seigneur,
:

vous fouvcnir des chagrins que vous avez donnes , en votre


jeuneffc , à votre père & à votre mcrc , & confidérer que
Dieu permet que vos enfans vous traitent de même. Le Roi
fouffrit patiemment cette remontrance , fe rcconnoiflant cou-
pable. Il mourut à Melun , le 20 de Juillet de l'an 103 1 , âgé
de ^o ans.
SesEcritî.Scs II. Tous Ics monumcns de fon fçavoir , en font autant de
^^ P^'^'-^ ' ^
'^^ ^^^ '^^^'^ P^"^^ ^^ ^^^^^ '^^ ^^^" ^ ^'^ ^^^ Saints.
Ief"FTs''°7
l'année. On a de ce Prince des Hymnes , des Séquences & des Ré-
pons pour diverfes Fêtes de l'année ; pour celles de la Réfur-
redlion & l'Afcenfion du Sauveur ; pour la Fête de la Pente-
côte celle de Noël celle de la Nativité de la fainte Vierge;
; ;

Se celle de faint Martin. Il en compofa auifi en l'honneur des


faints Martyrs, nommément de faint Denis & de fes compa-
gnons, & à la louange de S. Agnan d'Orléans(o). Toutes ces
pièces font encore difperfécs en différens Recueils , per- &
ibnnc ne s'eft donné la peine de les réunir. Je n'en trouve

(») Gî-AStR. Lil: j. bift. cap. p. />. J7. (») Hubirt. Antiquit, tHOrkuu , {0g,
j

tjttfJ. tditiin, I 39.


ROI DE FRANCE. Ch. XI. 185
point de citées par Hclgaud fon Hiftoiien. Mais la Chroni-
que de Tours , publiée par Dom Martennc (p) , rapporte les
premiers mots de quclcjues-uncs. Il y en a d'entières dans le
Recueil de Joffe Clichtoue {q), imprime à Paris en 1521 ;
dans Guillaume de Malmelburi , & dans l'Hiftoirc de Na-
varre , par André Faugu (r). Cet Hiftorien remarque que le
Roi Robert {s) , qu'il appelle un des plus excellens Poètes de
fon tems, en vers latins , nommoif la Vierge, l'Etoile de fon
Royaume ; qu'il avoit continuellement en la bouche , deux vers
qu'on difoit être de fa façon , où elle eft appellée l'EcoHe bril-
lante de la mer ; qu'il compofa en l'honneur de cette iainte
Vierge , les Antiennes & Répons que l'Eglife & celles de ce
Diocèle , chantent le jour de la Nativité de Notre-Dame ; que
ce fut fous fon régne qu'on reçut cette Fête en France , qu'il
donna à cet effet un Edit portant obligation de la folemni-
fer , & qull fit pour cette folemnité , trois Antiennes , cha-
cune en trois vers hexamètres. Faugu ajoute , que ce Prince
étant à Rome , préienta le Répons qui fe chante le jour de
la F'ête de fiint Corneille le Centurion, fur la confellion des
Princes des Apôtres ; que ce Répons étoit de fa compofition;
qu'il fut goûté &
applaudi. Cette dernière circonftance eft
rapportée par Trithéme ( r ) , qui ajoute qu'à la prière des
Clercs de l'Eglife Romaine , le Pape Sylveilre II , ordonna
que ce Répons feroit chanté dans l'Eglife , en l'iu^nncur de
laint Pierre. Ce que cet Hiftox-icn ne dit que d'un Répons,
Dupleix , dans fon Hiftoire de France («) , l'étend à toutes
les Hymnes & aux Cantiques compofés par le Roi Robert : fur
quoi il cite Paul Emile , qui dit en effet {x) , qu'ils furent reçus
& approuvés de toute l'Eglift.
III. Il relie encore du Roi Robert, deux Lettres , doiMT SeiLetne«
l'une , qui eft la ^5 , parmi celles de Fulbert , Evêque de Char-
tres , eft adreflee à Gauzlin , Archevêque de Bourges ; .& l'au-
tre , à Leutheric , Archevêque de Sens. Ce Prince écrivit la
première , au fujet d'une pluie de fang tombée fur une des
côtes maritùstes d'Aquitaine ; ia féconde , pour reprendre

if) Tom. ï. /mpliJJ' ColUn. p. 994. (t) Tmthi^. Chronic. JïiTfaiig. tom. i,
Xq) CllCTH. in tluciilat.p. 206. fa^. 141.
(r) Malmesb. Lib. de Regiim Ang. («) DupiEUC , JFfiyî. dt Irjuut , ptg. xS>
tom. 2.
(s) pAueu. Hifioirufk JiiMatrf fli^.y (7) ?/lOj^ Bmil, tu Utierto , f « 64»
t»g. 141.
i«^ -^ O T H E L B O L D,
rArchevèque de Sens (y), d'un abus qii'il autorifoit dan"?
Ion Dioccfe c'ctoit de fe fervir du Corps de Jefus-Chrift:
:

pour éprouver les coupables. Je m'étonne , lui dit le Roi ,


<]u'ayant la réputarion de fçavoir , on ne voie point luire en
"vous, la lumière de la lagelTe , Se que par un motif de haine
envers les ferviteurs de Dieu , vous taîfiez fervir à les éprou-
'^er , le Corps de Jcfus-Chrifl puifque fon corps doit être :

'le falut de l'ame & du corps de celui qui le reçoit, fuivant les
paroles que le Frctre prononce en le donnant comment avez"* ;

vous la Reçois-lc , fi tu en es digne ? per-


témérité de dire :

sonne n'en étant digne. Pourquoi attribuez-vous à la divini-


"i:é les fouffranccs corporelles ? Je jure par la foi que je dois à

Dieu , que Ci vous ne vous corrigez , vous ierez privé de l'hon-


neur du Sacerdoce. Leutheric profita de cette réprimende,
Se cefla d'enfeigner fa mauvaife do£i:rine ,
qui commençoit à
fe répandre dans monde. On ne fçait pas bien quelle étoit
le
'cette erreur mais on voit par la Lettre de ce Prince , qu'au
;

'lieuque nous difons aujourd'hui, en adminiflrant l'Euchari-


flic Que le Corps de notre Seigneur Jefus-Chrift confcrve
:

ton ame pour la vie éternelle , on diibit alors (z) Que le :

Corps de notre Seigneur , foit pour toi le falut de l'ame & du


corps.
OtliclbolJ, jv. Othelbold, vingt -neuvième Abbé de Saint Bavon à
Bz^on^ ^dT'^^^^ («), gouverna ce Monaftcre
depuis l'an loip jufqu'au
GauiU cinquième de Décembre de l'an 1054. On a de lui une Let-
tre d Otgive, femme de Baudouin le Barbu , Comte de Flan»-
dres , dans laquelle il donne le détail des reliques que l'on
confcrvoit à Saint Bavon , & une notice des Saints de qui
ctoient ces reliques. Il y joint une defcription de ion Mona-
ftere , eh le repréfcntant tel qu'il avoit été dans fon commen*
cernent , & tel qu'il étoit lorfqu'il écrivoit ; florifiant dans fon
origine , c'eft- à-dire , dans le feptiéme fiécle ; il n'avoit plus
aucune fpicndcur dans l'onzième. L'Ecritd'OthclboId fe trou-
ve dans le Recueil des Donations Bclgiques (/;) , par Aubère
\c JVlire;& en partie dans fa Notice des Egliies de la BeU
giquc & dans le fécond tome des Actes de l'Ordre de SairM:

{*) Helgaldus. in 'jvita Roberti , pag, (x.)GKllia Chr!f>.iatur,Tom,^.p. \ig.


(,») MiR.Tij, i)rH, If. ISel^k.lib. }. cafti

(;)C(yrpus Dortrin? noftri Jefu GlKÏfti , 19. è fiotin'n Ecciff. Belglc, cap. 8 1. ^ low.
fitxibj i'alus aiiimx & corporis. Ibid,
Benoit.
CHRONIQUE DE MOUSON. Ch. XI. 185
Benoît. Il commence par un précis de rHiftoirc de faine
Bavon ,
qu'il dit avoir été converti par faint Amand ; Se
renvoie ceux qui en voudroient fçavoir davantage , au Li-
vre de la vie. Celle qu'en a donnée Dom Mabillon , efl: ano-
nyme.
-
V. La Chronique de Moufon ctt très - intéreflante pour ci.roniouede
^o<irM.
l'Hiftoirc de l'Eglile de Reims (b) ;'û y a. même une Lettre
du Pape Jean, que l'Auteur a rapportée toute entière. Son
Ouvrage ell; divilé en trois parties. Il donne dans la premiè-
re, un Diicoui'S en l'honneur de faint Arnoul , dont les re-
liques avoicnt été transférées à Moufon. Il le qualifie Martyr,
fuivant l'ufage du-tems, non qu'il eût fauffcrt ou répandu
fon fang pour la foi , mais parce qu'il avoir été maffacré par
les voleurs. Dans la féconde, les divers changcmens arrivés
à l'Abbaye de Moufon. Il y eut d'abord une Communauté
de Filles puis une de Chanoines l'Archevêque Adalbcron
; ;

y mit enfuite des Moines fous la Régie de faint Benoît. Il


,

fit confirmer ce nouvel établiflement par une Bulle du Pape

Jean XIII, datée de Fan 972 & enfuite par un Décret du ;

.Concile aflemblé l'année fuivante , au Mont Sainte Marie.


Les ades en font ici plus entiers que dans les CoUedions gé-
nérales des Conciles , où les dernières paroles & les iouicrip-

tions des Evêqucs manquent. Ils étoient dix en tout ; Adaî-


beron , Archevêque de Reims à la tête parce que le Concile ;

le tenoit dans fa Province. Les Archidiacres , au nombre de


huit , y loufcrivircnt avant les Abbés , qui n'étoient que cinq.
La troifiéme partie contient le Catalogue des Abbés de Mou-
fon , en commençant par Lietald , établi par Adalberon , juf-
qu'à Ebal, qui mourut en 1033. Il y ed faitaufTi mention de
quelques Archevêques de Reims. Cette Chronique ell fuivie
d'une autre , qui commence par la récapitulation de ce que
fit Adalberon pour l'Abbaye de Moufon. De-là il pafle roue

d'un coup à ce qui arriva à ce Monaftcre , fous le Pontificat


de l'Archevêque Gervaife en 106'y & va jufqu'cn 1212 , où ;

une partie du Château de Moufon fut brûlée avec l'Abbaye.


Avant que Dom Luc d' Acheri publiât la Chronique entière de
Moufon , on en avoir imprimé un abrégé à Charlevillc en
j 620 (c) , par les foins de Dom Nicolas Habert , Prieur de ce
Monaflere.

(i) Trm. 7. Spicile^.p. 61 5. (f) Le Long. Biblietheqm Fr.wfoiff , p. 138.


Tome XX Aa
,

iS6 LEZCELIN, ABBÉ. Ch. XL


Lezceii'n , VI. Les BoIIandiftes nous ont fait connoître un autre faine
AbbidsCteL-
Arnoul , qu'ils qualifient Martyr & Archevêque de Tours.
Ils en ont donné deux vies Tune anonyme elle efl: en profe;
•,
:

l'autre en vers-: elle porte le nom de Lczcelin. Cet Ecrivain


n'étant pas connu d'ailleurs , ils croient avec beaucoup de
vraifcmblance , que c'cft le même que Lezcelin , Abbé de
Crefpy en Valois , dont Helgaud fait l'éloge (e) ; & qu'il die
avoir été fi confidéré du Roi Robert , que chaque année Lez-
celin rendoit vifite à ce Prince , s'entretenoit avec lui de cho-
fes fpiricuelles ; puis s'en retournoit à fon Monaflcre, com-
blé d'honneurs & de bienfaits. En effet , les reliques de faint
Arnoul , Martyr (/) , repofent dans l'Abbaye de Crefpy ;
& c'cll: le lieu principal de fon culte. Cette Abbaye, qui n'elî
aujourd'hui qu'un Prieuré de la Congrégation de Cluni , fuc
fondée en looo (g) , par un Seigneur nommé "Wauthier , eut
pour premier Abbé , Gérard ; & pour fécond , Lczcelin (A)
homme de grande probité , & zélé pour la difcipline régu-
lière. Ce fut aux inftances de fes frères , qu'il mit en vers la
vie de faint Arnoul. Ilparoît qu'on l'avoit déjà en profe; &
que c'eft fur celle-là que Lczcelin travailla. Auiïi les Bollandi-
fles qui regardent celle quiefl en profe , comme plus ancien-
ne parce qu'elle ell écrite avec plus de fimpiicité, lui ont
(?) ,

donné la première place dans leur Recueil (u) , feulement &


la féconde, à celle qui efl; en vers (/). Ils en citent une autre,
qu'ils croient faite fur celle-ci ; mais ils ne l'ont pas trouvée
digne d'être rendue publique , à caufc de plufieurs circonflan-
ecs fibulcufes ajoutées par l'Auteur. Toutes ces vies font S.
Arnoul difciple de faint Rémi , Archevêque de Reims. Les
vers de Lczcelin font communément meilleurs que ceux de la
plupart des Poètes de fonfiécle. Il y mêle quelquefois des mots
grecs , moins apparemment pour le faire honneur d'une lan-
gue étrangère , que parce que la mefure des vers l'y contrai-
gnoit. Ainli au lieu de dire corpus meum , il met foma mcum. Il
paroît que Lezcelin vivoit encore dans le tems qu'HcIgaud

(é) BoiLAND. nd liiem 18. Jiilii, ptg.\ {h) Idem, ubi fuf.
4&0. C? Maeil. lil>. î3. Annal, num. p. |
( i) Bolland. ai diem i8 JkIU ; fttg^

p. 1-3- -fo^-

(y; BoiiAND. Uid. tS pag, 40Î. f'tti».


I
(k) ll'i'l-
fS- 4°î'
24» I (l) UiJ.fag.^oj*
(g) Mabillon. Hbifufràt
,

PIERRE DE CHARTRES. Ch. XI. id>7


ccrivoit la vie du Koi Robert (w) , c'eft-à-dire , depuis la more
de ce Prince en 103 1.
VII. Geiner & PolTevin (»),ont mis dans leur Catalogue „ ^"'^ ^^

des Ecrivains Eccléliafliqucs , Pierre , Chancelier de l'Eglife


de Chartres , comme Auteur d'une Paraphrafc fur les Fieau-
mes. Ils ne dii'ent point qu'elle foit imprimée j & Jean Garer
qui en rapporte un paflage fur la prclence réelle de Jellis-
Chrifl dans l'Euchariftie (0) , ne cite pas Tédition d'où il l'a
tiré. On trouve dans quelques Bibliothèques ( p ) > d'autres
Ecrits de Pierre de Chartres j fçavoir , un Manuel des My-
Ilcres de l'Eglife , où il donne une explication du Canon de
la Mefle ; des glofes ou courtes notes fur le Livre de Job,
fur les Lamentations de Jérémie , & fur l'Evangile de faine
Matthieu. Sigcn étoit chancelier de l'Eglife de Chartres j en
1040 {q): il lucccda à Pierre dans cet emploi. Ce Pierre é-
toit donc mort avant cette année-là. Poflcvin dit feulement
2u'il vivoit en 1030 mais on prétend que c'eft une faute
:

'impreffion (r),& qu'il faut lire 1 300 ce qui obligeroit de ren- :

voyer cet Auteur au treizième fiéclc. Mais de Launoi le fait M .

difciple de faint Fulbert , Evêque de Chartres , mort dans


l'onzième {s) ; &
c'eft l'opinion la plus fuivie. Dom Mont-

faucon cite deux manufcrits du Manuel des Myfleres ( r ) ,


que M. de Launoi n'avoir pas vus ; l'un , de la Bibliothèque du
Monaflere ; l'autre, de celle de Saint Pierre de la Couture.
On voit, par le premier, que ce Manuel étoit auffi intitule :
Miroir de l'Eglife.
VIII. Ce fut encore fous Fulbert , qu'Enguerran fe perfe- Enguerran;
^î'^''^ ^^'"'
ftionna dans les fciences. Il étoit né à Ponthieu (u) , de pa-
rens plus refommandables par leur pictc que par 1 éclat de
leur condition , qui n'avoit rien de diflingué dans le monde.
Au fortir de l'enfance , il fe retira à l'Abbaye de Saint Ri-
quier , autrement Ccntule , où il fit profeiTion de la vie mona-
ftique , fous l'Abbé Ingelard. Quoique les études n'y fufTcnt
point tout-à-fait négligées , elles n'y étoient pas au point de

(m) Heigaid. f'"«r« Roicrti,p, 74. 20.^.440.


(n)GESNFR. Biblioth. riniverf. p. 66^' {r] OvDW.Tom, 5. de Scr-ptor. Ecclef,
PossEViN. iii Appar.itH tom. 1. p. 14^.
, p,il^. 699.
(0) Garet , de Eucharijl. p. 64. (5) Launoi. ul'ifttp,

(p) Launoi, Je Scbolis celelrioribus , p. (() Biuliot. Bibliot, p. Jl6o.^ X164.


128. Edit. an. 171 7. C«) Vi:a Angelranni. Tom. 8. ABor.pitg,
^ (f )Mabillon. lib, ;8. Annal, rtiim. 436.
A ai]
,

i88 ANGUERRAN,
lacisfaire les defirs d'Engucrran. 11 obtint donc la permifllori
de Ion Abbé, en d'autres Ecoles. Il erï fré-
d'aller s'inftruire
quenta pluiieurs , & fe fixa enfin à celle de Chartres. Saint
Fulbert lui trouvant de grandes difpofitions , prit plaifir à le
former & après l'avoir rendu habile dans la Grammaire , la
:

MufiOjUe & la Dialectique, le renvoya à Centulc , revêtu du


Sacerdoce. Le Roi Robert informé de fon mérite, le choific
pour l'accompagner dans fon voyage de Rome. Quelque
tems après fon retour , l'Abbé Ingelard mourut. La plus faine
partie de la Communauté jetta les yeux fur Enguerran , &
l'élut pour Abbé ; l'éledion ne trouva d'oppofition que de la
part de quekjues Moines , qui enflés de leur nobleffe , avoicnc
peine de voir au-deiïus d'eux , un de leurs confrères dont la
naiifance n'égaloit pas la leur. Enguerran préférant l'état de
fimple Religieux à celui de la Prélature , fe fauva dans les
bois , réfolu d'y demeurer caché. Mais le Roi Robert qui
fouhaitoit que Télctlion réufsît en la fliveur , vint lui-même
au Monaftere , le fit chercher , & en préfence d'une aflem-
blée nombreufe, le mit en poflcfilon de l'Abbaye , en lui fai-
l^int toucher les cordes des cloches {x). Enguerran fit à fon
Monaftere tout le bien c|u'on pouvoit attendre de fa fagcflc
&; de fon fçavoir. Il y fit refleurir la piété & les fciences en ;

répara bâtimens, retira les biens ulurpés , décora l'Egliie,


les
enrichit la Bibliothèque, & rétablit une Ecole d'où ioitirent
Guy depuis Evêque d'Amiens , Drogon de Terrouane , &
pluficurs autres perfonnes conlidérables. Foulques , un de fes
Moines, le voyant malade &
déjà avancé' en âge j chercha
les moyens de fe faire fon fucceflTeur. Le faint Abbé le pré-
vint en faifant choilir de fon vivant , avec l'agrément du Roi
un des prinncipaux Officiers de ion Monaftere , nommé Gcr-
vin. Enguerran mourut le neuvième de Décembre 1045. Guy,
qui n'étoit alors qu'Archidiacre d'Amiens (y), lui fit une
Epitaphe en quatre vers èlègiaqucs. Sa vie fut écrite aulll-tôc
après fa mort; & c'eft de-là qu'Hariulfe a tiré tout ce qu'il
rapporte de ce faint Abbé , dans fa Chronique. Cette première

(x) Pcrfunes ad /igna pendentes ipi'î to- qiiPî, IVxpi'diiion de Guillaume le Con*
tiu» iOci doniinationem delegat. l'iia.An- qi.trant en Angleterre. Guiilelm. Gem.
gtlran. ntim. y . />. 4^7. mclhrnjh. Lih, 7, iU^, caf, 44. ^ OKOfB.,
{y) Gui , Evêque d'Amiens, aimoit à fai- ViLilis, lit, 3,
re des \ets. On dit ^u'il Hiil en vers liéxo;--
ABBÉ DE
S. RIQUIER. Ch. XI. i8p
vie efl perdue: mais paroit qu'on peut s'en rapporter à ce
il

qu'en dit Hariulfe, non-i'culement , parce qu'il avoit vu cette


vie , mais parce qu'il ccrivoit peu de tcms après la mort d'En-
guerran (z) ; & à Saint Riquier même , où la mémoire de fes
adions étoit récente.
^"'"'
IX. Saint Gerauld , Abbé de la Sauve-Majour , dans l'on- ^*^

ziéme fiécle , parle d'Enguerran comme du plus fçavant hom-*


me de ion tems ( a ). Ce jugement avantageux ne pouvoir
guéres i'e juftitier par les Ouvrages qu'il nous a laifles , moins
encore par leur flyle. Mais il faut remarquer qu'il compoi'a
celui qui efl: le plus conlidérable , c'eft-â-dire, la vie de faine
Kiquier , étant encore jeune , & fous la diicipline de Fulbert
de Chartres. Engucrran dit lui-même (Z») , dans l'Epître dé-
dicatoire adreiïée à cet Evêquc , qu'il n'y avoit que peu de
tems qu'il le mêloit de poéfie , & que l'Ouvrage qu'il lui a-
drefl'oit étoit fon coup d'elTai. Il ell divifé en quatre Livres,-
dont chacun a fon Prologue en vers hexamètres comme tout
rOuvrage. Mais depuis qu'il fut fait Abbé , il mit en tête &
avant l'Epître dédicaroire qui efl: en proTe , une Epigramme
au Ledeur , en douze vers élégiaques. Dans le premier Li-
vre (c) , il ne fciit que mettre en vers la vie de faint Riquier,.
écrite en profe par Alcuin , fans y rien ajouter. Son fécond
& troiliéme Livres font pareillement tirés d'une Hiftoire a-
nonyme des miracles de faint Riquier, écrite vers l'an 8<îo.
Le quatrième Livre eft plus origninal , puifqu'il y fait l'hi-
ûoire de la tranflation du corps de faint Riquier en 5)8 1 , de
l'Abbaye de Saint Bertin , à Centule ; & celle des miracles
opérés depuis cette tranflation , jufqu'à fon tems. Dom Ma-
billon n'a fait imprimer que le premier (r/) & le quatrième
Livres (e) , & s'cft contenté de donner les titres des chapi-
tres contenus dans le iècond & troiliéme Livres. Les Bollan-
diftes n'ont mis dans leur Collcdion
(/) , que ce qui rco-arde
la tranflation du corps de faint Riquier. On en trouve un
fragment dans le quatrième Tome des Hiftoriens de Francc

(l) MaîIIILON. in noiis pritviis ad vi- t.ï nnvo. Tom. 2. AUor. f. 189,
um Angelramni. ^. 43 f. Ç^ Harint. tib.
5
(f) Vita Aiigtli .imni. num. 13. p. 44r,-
Cbrcti. cip. 51. Tim. ^. Mar.
{a) Ingelramnus eo tempore coetéris (d) M.ABIL. Tom. 2. ABor.pag, 1%^
pkilofopliabamraltius.MAEiLtON.Tow. 8. ' (c) Idem, Tow» 7. ASor.f. ç jj
f>4î?- I
If) EoLLAVD. ad dsem 26 A^rills.p.tg.
(i) I* lijs poftularem veninm mihi Poe- 45p.
j
I9D ODERANNE, MOINE. Ch. XI.
par Duchêne (g). Le Moine Hariulfe écrivit depuis , les au-
tres miracles de laint Riquier dont il avoit été témoin , ou
qu il avoit appris de perlonncs dignes de foi (A).
res Ecnts X. Il attribue encore à Enguerran (i) , l'Hifloirc du mar-
nicrnn
tyre de faint Vincent , &
la vie de fainte Auftreberte , l'une

& l'autre en vers; de nouveaux chants & plus mélodieux que


les anciens , pour les hymnes en l'honneur de faint Riquier ,
de faint Wulfran , Archevêque de Sens , de faint Paie- &
rie , Abbé de Leucone; l'Epitaphe d'Odelger , Prieur de Saint
Riquier fous Enguerran (fe) ; celle de Gui , Abbé de Forêt-
'

JM entier (/) , frère d'Enguerran ; Se un Catalogue des Abbés


de Saint Riquier jufqu'à lui - même. Mais Hariulfe remar-
que que ce Catalogue défedueux (m) , qu'Enguerran en
ctoit
avoit omis plufieurs , Nithard , Ribbodon
entre autres («)
; >
Helgaud & Cofchin ; & qu'il ne s'étoit attaché qu'à rapporter
ceux dont il trouvoit les noms dans les Chartres du Monaflere
ou fur quelques papiers détachés.
Odoranno , XI. Seguin , Archevêque de Sens (o) , ayant fait rétablir
le Monaftere de Saiht Pierre-le-vif , vers l'an ppp , y mit
Pe'"*^/* -f
*
pour Abbé , Rainard , qui y fit revivre la difcipline réguliè-
re & les études (p). Ce fut fous cet Abbé , qu'Odoranne fit
profeïïîon de la vie monaUique , & qu'il étudia les Belles-Let-
tres. Il paroît qu'avant de fe faire Moine , il avoit appris l'or-
fèvrerie, & qu'il étoit habile dans cet art ; puifqu'en 1028 , le
Roi Robert & la Reine Confiance , le firent venir au Châ-
teau de Dreux pour le charger de l'exécution d'une ChâfTe à
mettre les reliques de faint Savinien , Martyr , qui jufques-Ià
n'étoient couvertes que de feuilles de plomb. Ils lui mirent
en main l'or, l'argent & les pierreries qu'ils deflinoient à cet
ouvrage (q). Odoranne rapporta le tout à fon Monaflere , en
compofa la Châffe ; & l'ouvrage ayant plû au Roi , ce Prince
lui lit donner la matière nécelfairc pour en faire une fécon-
de , pour y mettre les reliques de faint Potentien auffi Martyr,
C'eft ce qu'Odoranne raconte lui-même dans fa Chronique ,

(g) ^"S- 99' («) Tom. f . A^or. page 105. ». 5 p,


( A ) Tom. 7. Ailor. Jf 7. p. (nj Mabui. Lit. <! I. Annal, num. 45»
(;'^ }i\KlVLt.inVitaIngelriim,nnm, ij, p. 107. y tom. ï. SpiciUg.p. 7 5*.
pag. 441. {p) Idfm. A/ï'. î4. «. 1 i.p. 14Î'.

( k^ ] Ihld. I utn. 14. (ij) Mabxlion, Lib. ^6, Annal, n.^^i


(i) Ibid.nu», li.fng. 444. p. 34('. î5 OdokaN. in Chronico, p, ijj,
[m) Ibid. III. m. 14, *40. 64 !• tom, 1. Opufc, Du Cbejni,
ODORANNF, MOINE. Ch. XT. 191
où l'on voit qu'il vivoit encore en 1045 (r) , & qu'alors il ctoic
âge de foixante ans.
XII. Elle commence à l'an 6y<f , & va jufqu'en 1032. On Sr.Chromtjr-.
la trouve dans le fécond Tome des Hiftoricns François (s)
de la CoUedion de Duchcne. Pierre Pithou en avoit donné
un fragment parmi les douze Ecrivains contemporains ( f ) ;
& Baronius fur l'an 875 («). Cette Chronique efl fort fuc-
cin£l:e : l'Auteur ne s'étend guéres que fur la tranflation des
reliques de faint Savinien ; fur l'exécution de la Châffe où on
devoir les renfermer ; & fur les ornemens qu'il avoit ajoutés
au haut de la Châffe de faint Sanucien & de faintc Béate fa
foeur. Il parle aufll d'un Chrift attaché à la Croix (.r) , com-
me étant de la façon , & d'un puits qu'il avoit fait creufer.
Ce qu'il dit du rétabliffement du Monaftere de Saint Pierre-
Ic-vif , par l'Archevêque Seguin, de la mort de ce Prélat &
de celle de l'Abbé Rainard , a été copié par Clarius , Se par-
Robert dans leurs Chroniques. Ils en ont tiré quelques au-
tres faits , en copiant non-feulement les termes d'Odoranne,-
mais aulTi les fautes: car il n'eft pas toujours exaèl (y ).
^ XIII. Dom Mabillon paroît perfuadé que l'Hiltoire de la B.\{\olreâeh,
tranflation des reliques des faints Savinien & Potentien ,
s" s^g'lSnie-if
martyrifés à Sens après y avoir annoncés l'Evangile , eft l'ou-
vrage d'Odoranne. Ses raifons font , 1°. qu'on lit à la tête
de fa Chronique , qu'il avoit fait d'autres Opufcules , & les
«voit raffemblés en un corps ; 2°. que la moitié de cette Chro-
nique efl employée à faire l'hiftoire de cette tranflation , dans
îes mêmes termes qu'elle efl: conçue dans les éditions parti-
eulicrcs qu'on en a faites ; &
que n'étant pas vraifemblablc
qu'Odorannc ait été plagiaire jufqu'à ce point , on doit con-
clure que la Chronique & l'Hifloire de cette tranflation font
d'un même Auteur ; 3°. qu'Odorannc ayant eu plus de parc
que pcrfonne à cette tranflation , il étoit plus en état qu'un
autre d'en écrire l'Hifloire; 4". qu'en comparant la Chroni-
que d'Odoranne avec cette Hifl;oire, on remarque le même
cénie. Il faut ajouter qu'elle fut écrite dans le tems même de
la tranflation , c'efl:-à-dire , vers l'an 1028 ; puifque l'Hiflô-

(0 f*i?-(î5';. \^ f'T-
(s) Pa^e 6 J 6.
j ( .ï ) Odor AN. iti Chmn. p. <C?p,
\f)Pafe 11^. I
(")) Bai'.on. «i<i;;. 875, Le CoiKTï. rt.<-

(»3 Baromius > ad an, g7j'. «/«?;« j. I •m. '/o-.


1^2 ODORANNE, MOINE. Ch. XL
rien parle de l'Archevêque Lenteric comme vivant : & on
içaic qu'il mourut en 1032. Cette Hifloire eft intcrefTante
pour la fuite des Archevêques de Sens, & des Abbés de Saint
Pierre-Ie-vif. Elle eil aufG un témoignage de la piété du Roi
Robert Sr de la Reine Confiance. Dom Mabillon la fait im-
primer dans le huitième Tome des A3es (z) , fur un manufcric
de la Bibliothèque de faint Marien d'Auxcrre.
d'OJoiann'e.
XIV. Nous devons aulFi cà fes recherches , la connoifTance
d'un autre Ecrit d'Odoranne , où il fe juftifioit de certaines
erreurs dont quelques-uns de fes Confrères l'accufoient. Il
gardoit volontiers la folitude , 8c s'appliquoit dans l'intérieur
<iu Cloître, à l'étude & à laconnoiffance de la vérité. Sa con-
duite à cet égard , étoit une cenfure vivante des autres Moi-
nes du Monaftere, qui aimant les plaifirs plus que l'étude, fe
répandoient fouvent au dehors pour fatisfaire leurs padions.
Pouffes d'un mouvement d'envie , ils l'accuferent d'être dans
l'erreur des Antropomorphites , & d'admettre en Dieu des
îTîembrcs corporels à la manière des hommes. Odoranne fut
donc contraint de faire fon apologie. Il l'adreffa au Maître
de TEglife d'Orléans , c'eft-à-dire , à celui qui en gouvernoit
l'Ecole, à Aycfroi , Abbé de Saint Avite ; à Hugues , Ar- &
chidiacre de l'Eglife de Sens. Nous n'en avons qu'une par-
tie (a) , par le défaut du manufcrit d'où on l'a tirée mais il ;

y en a affcz pour la juflification d'Odoranne. Il y défavoue


l'erreur qu'on lui imputoit , & déclare en empruntant les pa-
roles de faint Auguftin , que la foi catholique ne permet pas
de croire qu'il y ait en Dieu rien de corporel. Cet Ecrit qui
paroît avoir été fait en 1022 , ne le réconcilia point avec les
Confrères. Ses reproches les aigrirent ; & ils le maltraitèrent
de façon , que pour fe tirer de leurs mains , il fut obligé l'an-
née fuivante 1023 (&) , d'aller demeurer à Saint Denis. Au
bout de quelque tems , il retourna à Saint PLerre-le-vif , où
les efprits s'ctant adoucis , il fut reçu avec honneur.

Lamentation ^V. On ne fçait ce qu'eft devenu un autre Ouvrage d'O-


a'Odoranne. doranne , dont il fait mention dans cette Apologie. Il étoit
intitulé Lamentation ou Gémijfctr.cnt , apparemment fur les
;

maux qu'on lui faifoit fouffrir. Il avoit auiïi écrit quelques

(t) Prtff 22$. / (/•) OdOran. i» Chrohic.aii a», 101}


(-i) Mabillon , lil, •;<;. Annal, nuw- 4. p. fjp.
j

fa^.iS^. »

Lettres
ODORANNE, MO:iNE.
Ch, XI. ïp3
Lettres qui Ibnt perdues. On
en cite deux parmi ks manuf-
crits du Vatican (c). Son Ecrit touchant l'origine du Mona-
ftcrc de Saint Pierre-le-vif (<^) , dont il fait honneur à la Rei-
ne Theudechilde fille de Thierri , Roi d'Auftrafie, n'a pas en-
core été rendu public.
XVI. Meginhard , Evêque de Wirtzbourg , étant mort le ^^l^f"^'^^^'
21 de Septembre de Tan 1033 (^) » ^^ ^"^ donna pour fuc- xviribour/.
ccfTeur Brunon , homme d'une l'ainte vie , agréable à Dieu &
aux hommes , fçavant, zélé pour la Religion Chrétienne , &
appliqué à la répandre dans les pays où elle n'étoit point con-
nue. Il étoit Allemand de nation , & oncle paternel de l'Em-
pereur Conrad , doîit il fut toujours chéri. La grande Eglife
de Wirtzbourg menaçant ruine , Brunon la rétablit de fond
en comble , & employa à cet édifice tout le patrimoine qu'il
avoir en Saxe , lieu de fa naifiance. Cette Eglife portoit le
nom de faint Kylien , Martyr. Il y fut inhumé au mois de Mai
1045 , après environ douze ans d'Epifcopat. Nous avons de
lui un Commentaire fur k. Pfeautier, où il fait ufage du texte
hébreu & de la verfion des Septante , marquant par des afté-
rifques & des abéles , leur différence d'avec l'ancienne ver--
fion latine. Il Fa tiré des Ecrits des Pères fur le même Livre,
en particulier de faint Auguftin , de faint Jérôme , de Caffio-
dore , de faint Grégoire & du vénérable Bede. Ses explica-
tions font très-courtes , mais claires & folides. Il donne le fens
littéral , le moral & l'allégorique. Brunon fit aufTi un Com-
mentaire fur les cantiques de l'Ancien & du Nouveau Tefta-
ment ; fur l'Oraifon Dominicale , fur le Symbole des Apôtres
& fur celui qui porte le nom de faint Athanafe, & un fur. le
Pentatcuque. Celui-ci a été imprimé à Douai en 1(^48 , in-^^.
parles foins de Georges Galopin. Les deux autres Commen-
taires parurent à Cologne en 1494 , à Nuremberg en 1497,
& à "Wirtzbourg en i 531 , 1555? i'^-^°' C'efl fur cette der-
nière édition , qui efl de Jean Cochlée , qu'on les a placés
dans le dix-huitiéme tome de la Bibliothèque des Percs à Lyon
en 1677. Brunon fçavoit le grec, l'hébreu, & parloir bien
latin. Il efl: exa6l dans le dogme , 8c met les vérités de la Re-
ligion dans un grand jour. On lira avec édification, les pric^

(0 MoNTFAUCON Bibliot, Bibliot.pag.


y- (e) Trithem. Clironic. llirf.iu^. tcm. I.
(d) Mabit.l. Lit, X, Annal, uum, 29. p, 1 6?, ^ (le Scrht. Etclef. cap. 5 i ;

Tome XX, Bb
,

IP4 ,.
LE B. R I C AR D H
res qu'il place à la tûe de chaque Pfcaume ; elles font ordinai-
rement tirées du Picaume même.

CHAPITRE XIL
Le Bienheureux Richard , Abbé de Saint Vanne ; Saint
Orient, Evêque d'Aufch; Poppon, Archevêque de Trê-
ves ; Oliba y Eve que d'Aufone } Drogon , Eve que de
Beauvais.

mchmlhhhé I. T Es incurfions des Barbares


les guerres inteftines &
Son'ùuca^' -^ravagèrent les Gaules dans le dixième fiécle , a-
^'^^

tiotu voient tellement affoibli la difcipline monaftique , qu'il n'y


auroit eu aucune cfpcrancc de la voir revivre , fi Dieu n'eût
furcité des hommes zélés &
vertueux pour la rétablir. Un des
plus connus dans la Belgique, fut Richard. Non -feulement
il répara les ruines des Monafteres dans cette Province j il

en bâtit encore de nouveaux par fes foins &


fes travaux ,
: &
l'ordre monaflique reprit fon ancienne fplendeur. Il ctoit de
Danton en Argone , au Diocèfe de Reims (/). Ses parcns
de condition noble , le mirent de bonne heure dans l'Ecole
de cette Ville , pour y être élevé dans la piété & dans les
^ ettres. Il de progrès , qu'ayant été promu aux
y fit tant
Ordres facrés devint fucceflivement Grand-Chantre, Ar-
, il

chidiacre & Doyen de


l'Eglife de Reims. Mais le defir d'une
vie plus parfaite , lui fit quitter fa dignité pour cmbrafTer la
vie monaftique dans le Monaftcre de Saint Vanne. Il fut dé-
termine à prendre ce parti par Frédéric , Comte de Ver-
dun , touché comme lui du defir de la retraite : mais ils ne
l'embrafferent qu'après en avoir conféré avec faint Odilon ,
Abbé de Cluni.
iieftfaitAbbé n, Fingen , Abbé de Saint Vanne , les reçut en 1004;
mais étant mort au bout de quelques mois (j) , les Moines fe
partagèrent fur le choix d'un fucceflTeur. Le Comte Frédéric

[f) Vilit Rickgril. Apud, MaBiLI. font. {g) U-iil.jiagc 4; 8. ^S9»


J
8. ;. 4^7.c/lit. Vtntt. |
,

ABBÉ DE SAINT VANNE. Ch. XlL 195


fouhaicoit que Ton jcctât les yeux l'ur Richard , 6c c'étoic aurti
le ientimenc de deux jeunes Religieux de bonnes mœurs ; en-
fin tous s'accordèrent à le choifir pour leur Abbé , & il reçut
la bcncdittion abbatiale d'Hcimon , Evêque de Verdun. Le
bon ordre qu'il établit à Saint Vanne , y attira un grand nom-
bre de iujets. Il fallut pour les contenir , rebâtir le Monaflerc
& lui donner plus d'étendue en quoi il fut aidé par l'Empe-
:

reur Henri luccedeur d'Otton III , & par plulieurs perfonnes


de qualité (k) , qui envoyoient leurs enfans à Saint Vanne
pour être inftruits. C'étoit l'ufage de ce Monafterc, d'y avoir
des Ecoles.
III. Les Princes- & les Evcques eurent recours à Richard , ^' ^^'\''',''-*

pour mettre la réforme dans diverfes Abbayes de leur dé" j^inj vingt-un
pendance (i) On en compte vingt-une dont il devint com-
. Monafterci.

me l'Abbé par le bon ordre qu'il y établit. Cependant l'Evè-


que Heimon voulut l'obliger à enfermer le Monaftere defaint
Vanne dans l'enceinte des murs de la Ville. L'Abbé s'y op-
pofa, difant que le repos des Moines fatigués des veilles de
la nuit , feroit troublé par les tumultes de la Ville 5 l'Em- &
pereur entrant dans fa pcniée , fit prier l'Evéque de ne le
point molcfler iur ce point. Heimon mécontent, commença
à le plaindre de l'Abbé Richard , qui pour le bien de la paix
quitta fon Monaftere &
fe retira dans une folitudc près de Re-
miremont (/:). L'Evêque apprenant qu'il y failoit des miracles,
le rappclkcà Saint Vanne (/).
IV. En 101 I , Richard fit le voyage de Pvome , où il futilyaàRoiv.e,
bien reçu du Pape Benoît VIII. A
fon retour l'Empereur ^^^^P^^^'IJl"'
Henri le députa avec Gérard , Evêque de Cambrai (m) , vers vèchc de \ er-
le Roi Robert , avec qui ils conclurent un traité de paix en- d""-
tre la France &
l'Empire. Il efl fait mention de cette léga-
tion («) , dans la Charte d'union des Eglifes de faint Pierre
de Beauvais &
de faint Vaft d' Arras , à laquelle Richard fouf-
crivit. Quant au Traité de paix , il fe trouve dans le fécond
Livre des preuves de l'Hiftoire de Montmorenci. la mort A
de Rambert , Evêque de Verdun , arrivée en 103p. L'Em-
pereur Henri nomma l'Abbé de Saint Vanne pour lui fuccé-

(/;) Pag. 4fii. (m) Ihi.t. p. 483.


((•) IHd.p. 46t« (») I\lAEiLieK,Oi/<rrî/4t, jrt vit.KiebarJ,
<^)P„^. 463. num, 4. p. 45^,
(/) p«5 464.

Bbij
I
1^6 B. LE RIC H A R D,
i der ; mais fon humilité ne lui permit pas d'accepter l'Epifco-
pat , &
il fit mettre fur ce Siège , Richard fon tilleul , fils du

Comte Hilrade (o).


Sonvoyage à y. p^p dévotion pour les faints Lieux , il fît le voyage de
Jerufalem accompagné d'Ervin, Abbé de Trêves, fon ami,
& d'un grand nombre de perfonnes de piété (/>). Richard
II , Duc de Normandie , avec qui il étoit tellement lié d'a-
mitié , que ce n'étoit qu'une ame en deux corps , fournit aux
frais du voyage. En paffant à Conftantinopîe , l'Empereur
d'Orient &
le Patriarche , comblèrent Richard d'honneurs &
de prélens. Il arrofa de fcs larmes les lieux où Jefus-Chrift
avoir fouffcrt , &
les inflrumens de fa Paflîon , la colomne où
il avoir été attaché , la couronne d'épines , le calvaire où iî
fut crucifié (^). En fe baignant dans le Jourdain , il laifla
tomber une croix qu'il portoit ordinairement au coû. Il ne
s'apperçut de cette perte que quelque tems après. Il retourna
au même lieu &
la retrouva furnâgcant dans le fleuve. Il vit
à Antioche un faint homme nommé Siméon , qui s'attacha à
lui , le regardant comme fon père. Ils revinrent enfemble à
Verdun , où le faintAbbé fut re^u aux acclamations du Clergé
& du peuple de la Ville.

^^' L'Abbé Richardaflfoibli par fes travaux & par fon


Sa mort en'
«0^6. grandâge déchargea du foin des Monafteres qu'il avoir
, fe
réformés & gouvernés jufqucs-Ià par lui-même ; mais il con-
tinua à donner les attentions à celui de Saint Vanne , autant-
que fes forces le lui permettoient. S'appercevant qu'elles dimi-
nuoient notablement & que fa fin étoit proche , il reçut l'on-
ftion lainte des mains de l'Evêquc Richard (r), & le faint
Viatique après avoir fait faconfelfion ; & mourut fur la cendre
& le cilicc, le 14 de Juin 1 046. On compte parmi les dilci-
ples , l'Evéque de Verdun dont nous venons de parler, le
Comte de Lctard , parent de l'Empereur Conrad; Gervin ,
Abbé de Saint Riquier; Hugues, Abbé de Flavigny, & plu-
fieurs autres pcrfonnages confidérables. Hugues a écrit la vie
de fon maître avec beaucoup d'cxaftitude y dans fa Chroni-
que de Verdun {s). Nous avons une autre vie du Saint, corn-
pofée par un Moine anonyme de Saint Vanne (r), qui n'é-

(0^ Pn^e 41) t. (5) Labb. B(^//of. tiov.tom. r. p. 175.


y; Tom. 8. Âtlor.p,!^. 4.73.

((jjMabillon, i'om. 3. ^<2or,p. 456»


Abbé de saint vanne, ch^. xit. r^/
toit point éloigné du tcms où les chofcs qu'il raconte ctoient
arrivées , puiiqu'il dit les avoir apprifes de ceux qui avoienc
vu & connu particulièrement l'Abbé Richard. Cette vie cft
fuivie d'une courte relation des miracles du faint Abbé ^ dont
le nom fe lit dans le Martyrologe Bénédiftin de Dom Hugues
Menard , dans le Menologe de Bucelin , dans l'Appendice &
au Martyrologe de France par du Sauflai.
VII. L'Hiftoricn anonyme de l'Abbé Richard (u) , le fait ^,-^^'^'^J2*
Auteur de la vie de faint Rouyn , Abbé de Beaulieu en Ar- ^ '

gone. Elle a été imprimée d'abord par les foins de Dom Hu-
gues Menard , fans nom d'Auteur (x) cnfuitc Dom. Mabillon
:

Ta publiée fous le nom de l'Abbé Richard , lur le témoignage


de cet Anonyme {y). On met la mort de faint Rouyn vers
l'an é8o. Cette vi-e ne fur pas le premier Ouvrage de l'Abbé
Richard ; il paroît qu'il commença par écrire la vie Si les mi-
racles de faint Vanne , Evcque de Verdun & Patron ritulaira
de fon Monaftere. Cet Evcoue étoit mort dans leiixicme fié-
cle. On ne favoit que peu de chofes de fcs actions. L'Abbé
Richard preffé par les Religieux de leur faire un Difcours en
l'honneur du Saint le jour de fa Fête , fe répandit en de (Im-
pies éloges , faute de faits bien avérés. Il joignit depuis à ce
Dicours, la relation des miracles opérés par i'intercefllon de
iaint Vanne proteftant qu'il ne rapporteroit que ceux qu'il
,.

avoitvus de les yeux, ou appris de témoins non lufpe£ts. Dom


Mabillon n'a publié que le Prologue du Difcours , avec le
Livre des miracles (z). L'abrégé de la vie de faint Vanne dans
le Supplément de Surius, paroît avoir été fait fur l'Ecrit de
l'Abbé Richard.
VIII. On voit encore aujourd'hui dans le jardin de l'Ab- VersHuri-hvés
^"'
baye de Saint Vanne, une efpéce de maufolée compofé d'une ciJjj.^''*^
tombe de dix pieds de longueur fur fcpt de largeur , foutenu
de neuf colonnes , élevé par l'Abbé Richard, à fendroit où
il "avoit trouvé les corps des huit Sénateurs qui avoient gou-
verné de Verdun , c'efl-à-dire , de huit Evcques de
la Ville
cette Ville. En conféquence on le fait Auteur de l'infcription
gravée autour de cette tombe & lur le pavé qu'elle couvre.
Elle eft de dix-neuf vers hexamètres. Il y efl dit que cet Abbé
en creufant les fondemens de l'Efilife du Monaflcre , à la-

(a) Tom.6. -Aihr.p. f-^l. j (y ) Tom. 6. AHor. p. ^4^,


i(?8 LE B. RICPIARD,
quelle voulok donner plus d'étendue que n'en avoit l'an-
il

cienne , trouva CCS huit corps dans autant de tombeaux qui


fe touchoient qu'il eut d'abord la pcnfce de les tranfportcr
:

ailleurs ; mais qu'il changea de lentiment l'ur une vifion , 8c


que pour empêcher qu'ils ne fuiïcnt foulés, par les pieds des
paflans , il les couvrit de cette pierre montée fur des colon-
nes. Ce monument tombant en ruine , fut rétabli au mois de
Juillet de l'an 1463 , comme on le voit par trois autres vers
gravés fur le même maufolée (/z). Dom Mabillon a rapporté
toutes ces infcriptions dans fes Obfervations préliminaires fur
la vie de l'Abbé Richard.
RégiedesSo- IX. Hugues de Flavigni (6), lui attribue une Régie pour
liuues.
jgg Solitaires qui vinrent fe mettre fous fa difcipline , pendant
fon féjour à Rombech près de Remiremont. Ce féjour , félon
!e même Auteur , fut de cinq ans ; &: la Régie de l'Abbé Ri-
chard étoit tirée des faints Pères nous ne l'avons plus. C'eft
:

encore du même Hiftoricn que nous apprenons ( c ) , que cet


Abbé appelle à Rouen par Guillaume le bâtard , Duc de
Normandie , pour inflruire le Clergé de cette Ville , compo-
fa à cet effet un corps de réglcmens , que l'on inléra dans le
Livre commun de cette Egliie , attaché derrière le grand Au-
tel avec une chaîne.
SesDifcourî, X. L'Abbé Richard avoit le don de la parole. Il éroit fi
SesLettres.
pathétique dans fes Difcours, que les Religieux trcmbloient
d'effroi (d) , lorfque dans les exhortations capiculaires , il
leur rcpréfentoit les feux de l'enfer 8c les autres fupplices de-
flinés aux méchans dans l'autre vie mais ils croient raffurés
:

enfuite par les motifs de coniolation qu'il leur donnoit en la


miféricorde de Dieu. Il étoit lui-même tout à la fois févere &
miféricordieux envers fes frères. Attentif à procurer du fou-
lagement aux défunts , il ordonna que l'on diroit pour eux
l'Office que nous appelions les Vigiles , & la Meflc ; que l'on
écriroit les noms de tous les frères & bienfaiteurs , dans un
Calendrier du Nécrologe ; & que chaque année on les réci-
teroit en Chapitre au jour de leur mort ^ en faifant remar-
quer à la Communauté ce que chaque bienfaiteur avoit donné
à l'Eglifc. Il fit en cette occafion un Difcours , que l'on écri-

(^a) Pag. 4<; 4.. I (c) JtiJ. pag. 1S9. num. jo,
(*; Hugo FtAViH. in Cbronic.p. iS;, j (//) Uid, f.
171.». I4«
riHm, zp.
ABBÉ DE S AT NT VANNE. Ch. XII. irjp
vit par ion ordre à la tête du Nécrologe. Ce Difcours n'elt
point imprimé , ni celui qu'il fit fur la PafTion du Sauveur ,
étant à Blois (c) , au retour d'un voyage de dévotion à Tours.
Les Lettres qu'il écrivit de l'a retraite de Rombcch, font per-
dues. Hugues de Flavigni , dit cju'il les avoit vues dans fon
enfance (/). L'Abbé Richard en écrivit plufieurs autres non-
feulement à fes amis (g), mais à des Princes , à des Rois , à
des Evoques, pour les engager à foulager les peuples dans la
famine qui fe fit fentir en 1028. Mais il ne demanda aux au-
tres cju'après avoir facrifié tout ce qu'il poflcdoit , au foula-
gement des malheureux. II vendit jusqu'aux ornemens les plus
précieux de fon Egjife , à celle de Reims , en diftribua le prix
aux pauvres, dont il fe léferva un certain nombre à nourrir
aux dépens du Monaftere de Saint Vanne. Il efl remarqué
dans la vie de faint Poppon , Abbé de Stavelo {h) , que lorf-
qu'il fut mort , fes Religieux lui mirent fur la poitrine , un
calice avec des Lettres que l'Abbé Richard lui avoit écrites
fur la charité ; mais qu'avant que d'enterrer ces Lettres avec
le défunt , ils en tirèrent une copie qu'ils confervcrent à Sta-
velo , en mémoire de l'amitié qu'il y avoit eu entre ces deux
Abbés. Je ne fais (i après ces traits de charité , l'on doit faire
beaucoup d'attention à ce que dit faint Pierre Damien ( i ) ,
qu'ayant été conduit en fonge dans les enfers , il y vit l'Ab-
bé Richard tourmenté en diverfes manières , pour avoir dé-
penféles biens du Monaftere à bâtir des édifices inutiles pen-
dant fa vie.
XI. L'Anonyme qui nous a donné l'Hiftoire de l' Abbé „ .^"""^ /•;
, j
•'
Ail»
>r\j
' Auteur de la 1
R.icliard , y remarque que cet Abbe ayant appris qu Odon ou vie de l'Abbé
Eudes , Comte de Champagne , alTîégeoit le Château de Richard.

Commerci, y alla avec Gervin Apocryfiaire de faint Vanne,


pour le détourner de ce Siège (k) mais que tout étant déjà;

en feu en cette Ville , ils s'empreflerenc


lorfqu'ils arrivèrent
de fauver des flammes un bras de faint Pantaleon , Martyr ;
qu'ils l'achetèrent d'un foldat qui l'emportoit fous fa cafa-
quc, & le rapportèrent à Saint Vanne (/). Il écrivit là-def-

(0 Vita Richard, apnd Mabillom, tcm. 8. (») Damian. I(*. 8. E;»f/?. 2, î^ MaBU»
j».4«9.470' Obftrvai. in vit, Richard, p.ig, 455,
(/) Hi'GO./). i8é. «. 29. (i() Tom.S. Ailor,p,^6i,
(?) Uid. p. iS^. (/) UiJ. p. 47f.
{h) Vita Poppoii, T»m, 8. Ader.p. f zi.
,

aoo S AINT O R I E T, N
fus une Lettre aux Moines de Saint Pantaleon de Cologne ,
qui avoient fouhaité de fçavoir comment la choie s'étoit pai-
lée. On trouve cette Lettre à la fuite de la vie de l'Abbé Ri-
chard. On y a oublie une circonflance qui méritoit d'être re-
levée. La voici. Dans la crainte que l'oubli de ce qui s'étoit
parte de fon tems à Saint Vanne , n'occafionnât à fes fuccef-
i'eurs quelques difficultés ou quelques dommages , il eut foin
de faire un Cartulaire , où il écrivit ou fit écrire toutes les
Chartes & Diplômes qui concernoient fon Monaftere , & ce
qui y étoit arrivé de confidérable. L'original s'en conferve à
Dijon. Dom Mabillonqui l'avoit vu (m) , en a rapporté quel-
ques lignes , qui nous apprennent par quels motifs l'Abbé Ri-
chard avoit travaillé à ce Cartulaire.
g.cvîem.Fvê- XIL En parlant d'Orient dans le feiziéme volume de cette
sued'Aufch. Hiftoire
(«) , nous avons dit, que fuivant l'opinion la plus
commune , on le failoit Eipagnol de naiffance , & Evcque
d'Elvire ; & nous n'avons fait mention que d'une partie de fon
Poème imprimée à. Anvers en 1 600 , avec les notes de Mar-
tin Delrio. Il faut retoucher ces deux articles. Premièrement
il paroît par les a£tes du Saint , que les Bollandiftes ont don-

nés , qu'il étoit Evêque d'Aufch (0) ; qu'il y avoit encore des
payens dans fon Diocèfe , & qu'il en convertit un bon nom-
bre ; qu'Actius & Littorius , Généraux de l'armée Romaine,
étant venus attaquer Théoderic, Roi desGoths,qui régnoic
alors dans la Ville de Touloufe , ce Prince Arien qui ne fe
fentoit pas affcz de forces pour rédfter aux ennemis , envoya
ï'Evcque Orient en Ambalfade vers ces deux Généraux pour
traiter de la paix , qu'Actius le reçut honorablement ; mais
que Littorius n'ayant témoigné pour lui que du mépris , en
fut puni par ceux-là même à qui il avoit refufé la paix , c'efl-
à-dire, par les Touloufains, entre les mains de qui il tomba,
Cette ambafladc que fon met vers l'an 435? , foutiriroit beau-
coup de difficulté , fi l'on ne fçavoit par le témoignage de Sal-
vien (p ) , que les Goths dans leurs guerres avec les Romains,
députèrent fouvent des Evèqucs Catholiques pour leur de-
mander la paix. Les Auteurs de la nouvelle Gaule chré-

(m) .Maeuion. ObferviU, ifi tiit, R/- (0) RoilAND. ad diem l Maii, fitg, 6\.
(larii.p. ^^f. (^ lowj, i.Bililiot. Littb. p. ^<)6.
(fjSALVIAM. Lib, 7, dt Providf»ti,j.
ticnnç
'"
'
EVESQUE D'AUSCrî. Ch. XIT. 201
tienne (17), font cgalement laine Orient Evoque d'Aufch :
mais ils prétendent que ce fut en 323 , qu'il gouverna cette &
Egliie julqu'en ^6^^. Ils fe fondent fur un monument qui ne
paroît être que du douzième fiécle. Les aètcs produits par les
Bollandifles , font plus anciens ; &
quoiqu'ils ne loient pas ori-
ginaux, on peut s'y arrêter préfcrablement au monument de
I Egliie d'Aufch , d'un âge poftéricur.

XIII. L'édition du Poëme d'Orient par Martin Dclrio ,


q^T'"''^^'
n'en comprend que le premier Livre. Outre celle qui parut à
Anvers, chez Joachim Trogncr en i '^c^p ©u 1600 , on en fit
deux à Salamanque , l'une en 1 60^ , in-^°. chez Antoine Ta-
berniel , & une féconde en 1^44. 11 en parut une troiliéme à
Leiplick en 1(^51 , ?«-8". avec les notes d'André Rivinus;
puis ce Poëme fut imprimé dans la Bibliothèque des Pères à
Cologne en 1^18 , & dans celle de Paris & de Lyon. Dom
Martenne ayant recouvré l'Ouvrage entier dans un manuf-
crit d'environ 800 ans , le publia avec quelques autres an-
ciens opulcules , à Rouen en 1700 , ?«-4o. & en 1717 , dans
le cinquième volume de fcs Anecdotes. Le Poëme d'Orient
efl cite par Fortunat de Poitiers (r) , dans le Livre de la vie
de laint Martin ; & par Sigebert de Gemblours fon nom fe :

lit à la tête de l'Ouvrage , dans le manufcrit de l'Eglife de

Tours , d'où on l'a tiré pour le donner au public , & à la fin


du fécond Livre (s); en forte qu'on ne peut fe méprendre
lur l'Auteur. Ce iccond Livre efi une inventive contre la vai-
ne gloire , le rrcnfonge , la gourmandife & l'yvrogncrie dont
il fait une peinture capable de donner de l'horreur de ce vice.

II fait voir l'inconftance des biens temporels pour lefquels on


fe donne tant de peines , & l'avantage qu'il y a à leur préfé-
rer des biens éternels. C'eft à ce fujet qu'il décrit les calami-
tés qui dcioloient les Gaules ; les incurfions des Barbares , les
guerres, les incendies , la famine. Il pafTe dc-là à la defcrip-
ticn des fuppliccs deflinés aux méchans dans l'enfer , à la &
félicitédont les juftes jouiront dans le ciel. L'Ouvrage porte le
titre de Commonitoriv.m ou d'Avertinêmcnt.
XIV. Il efi: luivi de quelques petites pièces de poèfics, qui .
Poéfe d'Oî

(y) Galliit Cl.rljli.-.na nova , tam. i.


f, (s ) Ut p'tcntores vincens Orientius
975. omnes, Sanâoiuai veniam promerear pre-
(f) IVlARTrN. Trolog. in Vacm< Orient cibus.
Tcm. 5. A;:fC.iot. p, i8.

Tome XX. Cc
ao2 POPPON , ARCHEVEQUE
roulent toutes fur des matières de piété ; fur la naiHance dir
Sauveur ; iur les divers noms qu'on lui donne , comme de
vertu , de fageffe^ de verbe , d'époux , de fleur , de pierre ,
d'agneau, &c. fur la Trinité, fur l'Incarnation dans une ^ :

il explique noms propres ou impropres qu'on donne à Je-


les
fus-Chrift. On l'appelle lion , parce qu'il efl le Roi des Rois,
comme des bctcs féroces. Il efl: nommé fagefl^e,
le lion l'efl:

parce de la vie ;
qu'il efl la régie doigt de Dieu , à caufe &
que c'efl par lui que la Loi de Dieu a été écrite. Vient en-
fuite un Poème de louanges , où il entre dans le détail des
créatures qui louent Dieu ; puis des formules de prières au
•'

nombre de vingt -quatre. Le manufcrit de Tours n'a fourni


que la première &
la vingt-quatrième. On ne fait ce que les
autres font devenues. La vie , ou les atles d'Orient , fe trou-
ve dans le fécond tome de la nouvelle Bibliothèque du Père
Labbe , & dans les Bollandifles au premier jour de Mai.
Poppon, Ar- XV. Après lamort de Meingaud , Archevêque de Trêves
Ttsym"^
^ en ioi<^, on lui donna pour fuccefl"cur Poppon , fils du Mar-
quis Léopold , & Prévôt de l'Eglife de Bamberg. Vers l'an-
1027 , forma le defl!ein d'aller à Jèrufalem , & prit pour
il

compagnon de fon voyage , Syméon Moine de Sinaï , qui


s'étoit retiré à Verdun auprès de l'Abbé Richard. Au retour
l'Archevêque lui offrit telle demeure qu'il fouhaiteroit dans
fon Diocèle. Syméon choifit une tour près d'une porte de la
Ville , appellée alors la Porte noire , où il fe fit enfermer en
préfcnce du Clergé & du peuple , le trentième de Novembre
1028. Ily paflfa îerefte de fes jours dans le lilence, les jeû-
nes & la prière, & mourut faintement le premier jour de Juin
1035. Dans le Concile de Limoges en 105 1 , Syméon fut
cité comme témoin de la créance des Orientaux fur l'apofto-
lat de faint Martial. Quoique né à Syracufe en Sicile , de
parens Grecs , outre fa langue maternelle , il fçavoit l'Egyp-
tienne , la Syriaque , l'Arabe & la Latine ce qui engagea :

Richard II , Duc de Normandie , à le choiflr pour envoyer fes


libéralités ordinaires & les aumônes de fes fujets , au faint Sé-
pulcre de Jèrufalem.
Sa Lettre ru XVI. Syméon avoit fait pluficurs miracles pendant fa vie j
Pupo Benoit
^| ^•^.j^ ^^ ^j^ grand nombre à fon tombeau après fa mort (?),,

(() AIabui. titn, 8. AîloT.p. 315. Lavrent, SuRiasCi BoLLA^D. /i</</<<m \:]tiniù
,

DE TREVES. Ch. XII. 205


L'Archevêque Poppon ordonna à Evervin , Abbé d'un Mo-
jiaftere de Trêves , de les mettre par écrit , & d'y joindre les
principales a£lions de fa vie , que cet Abbé pouvoir mieux
connoitre que pcrfonnc , parce qu'il l'avoit connu particuliè-
rement, & qu'il avoit eu part à fa confidence. Ce fut appa-
remment cette vie que Poppon envoya à Rome , à la prière
du Clergé 8c du peuple de Trêves , pour demander au Pape
Benoît IX, que le nom de Syméon fût écrit entre ceux des
Saints. Il chargea le porteur d'une Lettre où il difoit au Pape :
a> Pendant le voyage que j'ai fait à Jérufalem avec la permif-

3> fion de Jean XIX , votre prédécefleur , l'iniquité des mé-

n chans s'efl: accrue dans ce pays , 6c ils ne peuvent encore


» s'abftenir des pillages auxquels ils fe font accoutumés J'ai .

» prié le Roi mon Maître , de me prêter fecours , & j'ai fait


» la même demande au Pape Jean , mais inutilement. C'cft
» pourquoi je vous fupplie de m'envoyer un homme des plus
» confidérables & des plus habiles qui foient auprès de vous
ï> pour m'aider dans mes befoins , de fes avis & de fon fe-

» cours». Venant enfuite à Syméon, « Il eft mort chez nous,


»> dit-il depuis peu un homme d'une vie très-fainte , dont
_,

» les vertus & les miracles nous donnent lieu de croire qu'il
» cfl: avec les Bienheurcox. Nous vous envoyons fa vie 8c la
« relation de fes miracles , aux inftances de notre Clergé &
j) de notre peuple ; afin que fi vous le trouvez bon , vous per-

j> mettiez par un Décret de votre Apoftolat , d'écrire fon

« nom avec ceux des Saints , & de lui rendre les autres mar-
» ques d'honneur que l'on a coutume de leur rendre ». Le
Pape envoya un Légat à Trêves , avec des Lettres pour la
canonifation du Saint , dans lefquelles il ordonne que fon
nom fera mis dans le Martyrologe , & que chaque année l'on
célébrer^ fa Fête le jour de fa mort. Poppon en conléquen-
ce de CCS Lettres, déclara folemncllement le 17 de Novem-
bre 1042 , que faint Syméon feroit à l'avenir honoré entre les
faints Confefieurs ; 8c pour rendre fon culte plus éclatant , il

fonda en fon honneur une Eglife Collégiale , au lieu où il


s'étoit fait enfermer , qui éroit celui de fa fépukure. Cette E-
gUfe fublifie encore , fous le nom de Saint Syméon. 11 avoit
en à fon ufage un Plcautier grec , écrit en caradçrcs anciens ,
menus , mais très-lifibles (k). L'Archevêque en fit préfent à

(«) Mabili. Obfir-iiat. iti vit, Simtcii , tom. 3, Ailor.f, }Z9.


Ccij
204 OLIBA , EVESQUE DE VIC. C. XIT.
Evervin ,
qui en diftribua des feuilles comme autant de reli-
ques. L'Abbé Trithéme en avoic trois feuillets qu'il préfcroic
à l'or &
à l'argent ; dom Mabillon en obtint quatre de Gé-
rard Abbé de Toley, où j'en ai vus encore quelques- uns^
,

Poppon mourut le i6 de Juin de l'an 1047 (jt). Sa lœur nom-


mée Chridine , voulant imiter l'exemple de iaint Syméon ,
fe fit enfermer , &c mourut faintement dans le lieu de fa ré-
„ clufion.

^^tvlT XVir. Oliba troifiéme fils d'Oliban , Comte de Befalu , fe


conlacra à Dieu dans le Monafiere de Ripouil. H en fut élii;
Abbé;& deux ans aprcsjon lui donna encore l'Abbaye deCufan
à gouverner c'ctoit en 10 1 1, félon M. de
: ara (y), ou, félon M
d'autres, en 1 01 8. L'année fuivante 1015? ( z ) , on le choi-'
fit Evcque de Vie ou d'Aufone, fous la Métropole de Nar-
bone. n'abandonna point pour cela le gouvernement de les
Il

deux Abbayes: on dit même qu'il en avoir jufqu'à 38 fous fa


conduite {a). En 1032 , il afiembla plufieurs Êvêques à Ri-
pouil , pour la Dédicace de l'Egliie de ce Monailere qu'il
avoir rebâtie. La cérémonie achevée, ils tinrent un Concile
dans lequel ils confirmèrent tous les privilèges de Ripouil {h),
Oliba fe trouva à divers autres Conciles ; d'Elne en Roufii-
lon en 1047 (c), de Cufan en 1035 , deGirone en 103S, de
Saint Michel dans le Lampourdan en 1045. Il mourutdans
l'Abbaye de Cufanen 1047 > ap^^^^ avoir été environ 38 ans
Abbé & 28 ans Evcque.
5.-£ Lettres.
XVIII. Il refte de lui deux Lettres imprimées , dans l'Ap*-
pendice à l'Hifioire d'Efpagne de M. de Marca(c/); la pre-
mière , cil: une réponfe au compliment de condoléance que
lui avoit fait Gauflin , Archevêque de Bourges , au fujet de
k mort de Bernard fon frère , Comte de Belalu la féconde eft :

adreflée aux Moines de Cufan , à qui il rend compte de cet*'"


raines affaires qui concernoientleur Monaflerc (e). On en cite
une troifiéme à Sanchc-lc-Grand , Roi de Navarre (/). Elle
n'a point encore été rendue publicyue. Oliba eut fans doute ,

Çï) Broveri'S , annal, ircviretif.ad ttn,


1047./'. n 3- (f) Tn?«. 9. CsiTf. p,
9}f.
(;; Marc/i ,.flifp.ifupag. 4x1. 44 f. t^i) 9. Couc.p. liHp. U M/lRCA^
Tom,
(ï ) M A E-u i . tom. y. Aclor.pag.B^i- 458. 440. 1088.
llifpan,
^n,^''.ARCA tilifpan. pag. J^^o. loi?. (f) AIarca. Hifp.iti. p. \oi6, 1027,.
(t) Omt;. RiiipuI,. tom. j, AU, AIaèil,
,,

DROGON , EVESQ. DE BEAUVATS. Ch.


XIT. 105
beaucoup aux attes du Concile d'Elnc en 1047, ^^''
<le part
quel il prcfida & à ceux de la Dédicace de Ripouil en 1032.
;

11 y a dans la Bibliothèque de M. de Colbert, un Cycle paf-


chal fait en 1047, par Oliva , Moine de Notre-Dame de
Kipouil. M. Baluie qui avoit vu ce manufcrit (g) , dit qu O-
liva n'y efi: point qualifié Moine ; mais qu'on y a ajouté de-
puis le nom de Moine ce qui l'empccha de le décider fur
:

l'Auteur de ce Cycle. Papyre le Maflbn (k) a donné un frag-


ment d'une Lettre de Jean, Moine de Fleuri, à 01iba,-où
l'on voit quelles étoicntles erreurs des nouveaux Manichéens
découverts à Orléans , & de quels fupplices ils furent punis
enfuite du Concile tenu en cette Ville l'an 1022. On y difputa
long-tems contre eux , & l'on fit ce que l'on put pour les tirer
de leur erreur. Mais étant demeurés endurcis , ils furent brûlée
par ordre du'Roi Robert.
XIX. Nous n'avons qu'une feuîe Lettre de Drogon, Eve- Drogo-n,Ev^
que de Beau-
J P •
r •

que de r>
1 •
I'
bcauvais , depuis! an 1030, julques vers lan 1047. vais. Sa Lettre
On neconnoît pas bien l'Evcque à qui elle efl; adrcflTée, parce ^"^ l'excom-
que fon nom n'eil: marqué que par la lettre initiale , qui
™ "
"
mumcatioB»
W
peut également défigner Gui , Evêque de Senlis , & Vautier
Evéque de Meaux , qui vivoient l'un & l'autre en même-tems
que Drogon. La réponfe de cet Evêque roule fur l'excom-
munication prononcée par celui qui l'avoir confulté (z) , con-
tre des laïcs , pour avoir frappé un Clerc , & fur les autres
peines qu'on devoir faire lubir au coupable. Drogon dit pre-
mièrement , que ces laïcs étoient excommuniés de droit di-
vin ; qu ain(i TEvêque en les excommuniant , n'a fart ciue les
dénoncer excommuniés. Il dit en fécond lieu, que pour les
punir de leur excès & réparer le fcandale , il feroit exoé-
dient de leur attacher au coû une meule de moulin & de' les
jettcr dans la mer. Sur quoi il rapporte un endroit des Capi-
tulaires (k) , qui ordonne la peine de mort ou l'exil
, pour
de pareils crimes, ou de couper les mains à ceux qui les ont
commis , ou de les contraindre à pafler le relie de leurs jours
en pénitence dans un Monaflcrcr II eft néanmoins d'avis qu'on
les traite plus doucement & que l'on fe contente d'ajouter à l'ex-
communication une amende pécuniaire , telle qu'elle efl por-
tée par les Loix , & fcpt ou au moins cinq ans de pénitence ,.

(_?) UiJ. p. 4^6. (;) Baluz. Tcm. z. C.ipi'iil. p. 1S4^„


J
,

10^ B ER N O N
tant pour leur propre corredion que pour imprimer de la terj
reur aux autres. Il raconte que ious le régne de Louis le
Debonaire , un laïc ayant frappé grièvement un Prêtre , ce
Prince fit attacher le coupable nud au pied d'un arbre , ou
il mange par une multitude de mouches qui
fut furvinrent
dans le moment.

CHAPITRE XII L )

Bemon , 'Abbé de Richenovv ; Aribon , Archevêque dé


Mayence ; Qui dArçzzo.

Ewnon, Abbé I. T^ E R N O N , nommé quelquefois


Bernard ( / ) , Qiioâ &
4eRichenow. -;„/; d'abord Moine de Fleuri fur Loire , S»
£)^^^
JjJ ^ f^j
député en ppp (m) , avec quelques autres Moines de ce Mo-
naflere , au Concile d'Orléans , où l'on devoit agiter une dif-
ficulté furvenue touchant la durée de i'Avent. Il pafla de
Fleuri à l'Abbaye de Prûm , apparemment pour y enfeigner
les Belles-Lettres &
dont il étoit très-in^
les autres tciences ,

firuit. La de fa vertu étant par^-


réputation de fon fçavoir &
venue jufqu'au Roi faint Henri {n) , ce Prince le choifit en
1008 , pour remplacer Imm.on , Abbé de Richenow , dont la
trop grand fcvérité avoit contraint la plupart des Moines de
îbrtir de ce Monaflere. Immon étoit auparavant Abbé de
Gorze , &
le Roi Henri l'en avoir tiré pour le mettre à Ri-?»
chcno\('. Bernon fut reçu avec joie à Richcnow. Il fit revenir
les Moines difpcrfés , rétablit les ufuines du Monaflcre qui
tomboicnt en ruine , reçut la bénédiclion abbatiale de Lantr-
pert , & gouverna fa Communauté avec
Evcque de Confiance ;

édification pendant quarante ans , enfcignant à fes frères la


pratique de la Régie de Saint Benoît , autant par fes exemples
que par fes dlfcours (0).
!ifa;tunvo.ya-
jj. En 10 1 2 j, il âCCompagna le Roi Henri dans fon voyai*
.{rc à Rome. d c o j

Obtient dis _ .

privilèges

(/) Trithk.m. tcm. 1. Chron'ic. Hirf. p. Aiiecd. V et., part, z.png- yi.
l6o iluKMkN ,coHtr. inChronic. ad an. (n) Ma BILL. Lib. f. Âtiiial. num. 6.
f^
^Oo8. M^nriL. in A:iiitcll. p. ^2. Z02. ^ lib. îi. nttm. Sj.p. igS.
(;!«^ liiiLNo I
de «J^cuix f.j^, 4. tom, 4.» (jj) TritH. ubifitffit.
ABBÉ DE RTCHENOW. 720 Ch. XIIT.
ge de Rome , & alFiila à la ccrcmonie de fon
couronnement
qui fe'.fic le 22 de Février l'année fuivantc, par le Pape Be-
noît VIII. Bernon raconte (p) , que ce Prince demanda aux
Prêtres de Rome , pourquoi après l'Evangile , ils ne chan-
toient pas le Symbole comme on faifoit dans les autres Egli-
fes. Ils répondirent que l'Eglife Romaine n'ayant jamais été
iîifedé d'aucune héréfie , n'avoit pas beloin de déclarer fa

foi Symbole. Mais le Pape à la perfuafion du nouvel


par le
Empereur , le fit chanter dans la fuite , aux MefTes folemnel-'
les. Bernon ayant envoyé en 1032 (q) , les privilèges de fon
Monaftere , au Pape Jean XIX , pour en avoir la confirma-
tion , il en obtint un nouveau ; fçavoir , de fe fervir de fan-
dales &
autres ornemens pontificaux en célébrant la Meffe.
"Warmanne , Evêque de Confiance, en [fut fi irrité , qu'il s'en
plaignit à l'Empereur , comme d'une ufurpation. Ce Prince
le joignant à l'Evêque , ils obligèrent l'Abbé de leur rendre
fon privilège , que W'armanne brûla publiquement dans fon
Synode, le jour du Jeudi-Saint loj 3. C'efl: le premier exem-
ple d'un femblable privilège. Bernon mourut le feptiéme de
Juin de l'an 1048 (r) , 8c eut pour fucceffeur Udalric , Doyen
de Richcnow.
III. on ne peut mettre qu'après Tan roi 3 (s) , le Traité de Ses Écrits.

Bernon fur l'Office de la Méfie , puifqu'il y parle du voyage !jj''fj,'^


'^'^ ^^

qu'il fit à Rome en cette année- Là avec l'Empereur Henri.


L'Ouvrage eft divifé en fcpt chapitres. Dans le premier (?) ,,
Bernon remarque que la Liturgie de fon tems n'étoit pas la
même que dans l'Eglife naiflante qu'on a ajouté beaucoup ;

de chofes au Canon de la Méfie que l'on a multiplié les priè-


;

res de rOfiîce qui la précède ; que les Latins ont pris des
Grecs l'ufage de chanter plufieurs fois le Kyrie eleison y que
les Efpagnols eurent peine à chanter le Graduel avec VAl-
luia , entre la Icdute des Epîtrcs de faint Paul & de l'Evangi-

le mais qu'enfuite ils fe conformèrent fur ce pointa l'ufage de


;

l'Eglife Romaine ; que dans les Eglifes d'Efpagne on chan-


te chaque Dimanche &
aux jours de Fêtes des Martyrs, fur
le Pulpitre , l'hymne des trois jeunes Hommes dans la four-
naife ; au lieu qu'on ne la chante que quatre fois l'année dans

(p) Berko de Miffa , cap. i. fr) Idem. ibid. ad an. 1048.


(7) Hfrman. in Cbronic.adattt I031. (s)Tom. 18. Bitlict, Pal. p. jiS,
*dit, B.ffuag. Amturp. (0 Cap, I.
,

ao8 B E R N ON
l'Eglife Romaine, aux Samedis des Quatre-tems; que le Sym-
bole que l'on chante après l'Evangile , n'cfl: pas celui de Ni-
cée , mais de Conftanrinople. A
1 égard de l'Offertoire , de

l'hymne San^us ou Trifapon , ÏAgnui Dei , &


la Poil - com-
munion , il paroît perfuadé que tout cela a été ajouté à I4
Liturgie ; &: que dans les premiers fiécles , on offroic l'on &
communioir en lilence , comme on fait encore aujourd'hui le
Samedi-Saint.
IV. Il combat dans le fécond chapitre («) , ceux qui pré-
tendoient qu'on ne devoit chanter à la Meffe le Gloria in ex*
celfts qu'à Pâques. Sur quoi il cite le témoignage des fauffes
Décrctales , qui ordonnent de le chanter avant le Sacrifice,
tous les Dimanches &
aux Fêtes des Martyrs. Dans le troi-
fiémc ( ;f ) , il fait mention d'une dilpute arrivée pendant qu'il
étoit en France , au fujet de l'Odave de la Pentecôte. C'é-
toit l'ufage de célébrer durant huit jours la Fête de la Naif-
fance du Sauveur , «& de fa Réfurreîtion mais quelques-uns:

foutcnoicnt qu'on ne devoit donner que fept jours à celle de


la Pentecôte , parce que l'on ne compte que fept dons du
Saint-Efprit , qui apparut en ce jour fous la figure de langues
de feu. Bernon allègue contre eux le parallèle que faint Au-
guftin fait dans l'explication du Sermon de Jefus-Chrift fur
la Montagne , des huit Béatitudes avec les dons du Saint-
Efprit ; &
montre par ce parallèle , qu'il y a huit dons du
Saint-Efprit ; qu'ainfi on doit donner à la Pentecôte une Oc-
tave comme aux autres folcmnités , comme cela , dit-il , fe
pratique dans toute l'Eglife Catholique. 11 ne contredit point
ni à ceux qui cornptoient cinq Dimanches dans l'Avent , nî
à ceux qui n'en cornptoient que quatre (y). Il donne des rai-
fons myiliqucs de l'un &
de l'autre uîage. Il en donne audi
de quelques variétés qui fe trouvoicnr dans les dis'erfes dilL'i-
butions des Offices de l'année (s) ;<lcs Tntroïtcs , des Orai-
fons, des Leçons &
des Evangiles. Il pofe pour principe d'a-
près faint Auguflin , que dans les choies où l'Ecriture-laintc
ne s'explique pas nettement, il faut s'en tenir à la coutume
du peuple de Dieu &
aux décrets des anciens d'où il con- :

clut que l'on doit obfervcr les jeûnes des Quatre-tems au- &

{«) C4^ V, I (;) Cap. 4.

très
ABBÉ DE RTCHENO^. Ch. Xlir. 2op
1res établis dans rEglife , la Litanie majeure , apparemment
de Saint Marc , les Rogations avant l'A ibenlion , les
le jour
, l'Avent, la Septuagcfime , la Sexagéiime
veilles des Saints
Se la Quinquagéfimc. Les anciens Sacramentaires prefcrivcnt
douze Leçons pour les Samedis des Quatre-tems , dont lîx
étoient lues en grec & en latin à Rome. Les Grecs à Con-
flantinople iuivcnt encore aujourd'hui cet ufage , & cela pour
deux raiions l'une , à caufe qu'il fe trouve à l'Eglife , des
:

Grecs qui n'entendent pas le latin , & des Latins qui n'en-
tendent pas le grec ; l'autre , pour marquer l'unanimité des
deux peuples. Les Leçons étoient partagées en douze , parce
qu'il y avoit autant de Le6leurs. C'eft la remarque d'Âma-
laire que Bernon copie ici mot à mot. Ce Traité fut imprimé
à Paris en 1518, ^«-4". chez Henri Etienne; à Venife en
1571 , in-S°. à Cologne en 1568 , dans la CoUedion d'Hit-
torpius; à Paris en 1610. On le trouve auflTi dans les Biblio-
thèques des Pères qui ont paru tant en cette Ville qu'à Colo-
gne & à Lyon.
'
V. La conformité du titre & de la matière a fait attribuer Traîtédel'Of-
à Bernon le Livre de l'Office de la MeiTe , connu ordinaire- fi«deiaMefre
ment lous le nom de Micrologue mais l'erreur efl palpa- noiu^ ^''"
:

ble , puiique dans le quatorzième chapitre , on cite une Dé-


crécale du Pape Grégoire VII (^) , qui ne mourut qu'en 1085
,
environ 57 ans après Bernon de Richenow.
VI. Le Traité du jeûne des Quatre-tems , cité entre les Traitédu jeû-
Ouvragcs de cet Abbé, par Sigebert & par Trithème (c) , "ems & du Sa-
eft la même chofe que le dernier chapitre du Traité des Offi-medi.
ces de la Meflc ; avec cette différence que dans ce chapitre

il point en forme Dialogue ;


n'eft &
que l'on en a retranché
le commencement , la fin &
la Préface ou Epître dédicatoi-
re à Aribon , Archevêque de Mayence. Dom Bernard Pez
a donné ce Traité tout entier dans le quatrième tome de fes
Anecdotes (d). Bernon y apporte diverlèsraifons allégoriques
pour fixer les jeûnes des Quatre-tems en certaines femaines
des mois de Mars , de Juin , de Septembre & de Décembre.
Aribon, dans le Concile de Selgenftad en 1022 Ce), fixa
les jeûnes des Quatre-tems conformément aux régies établies

(i) Tow. iS, Bihliot. Pat. cap. 1^. I {J) Part. l. page ^9.
(f)TR.iTHFMF. TotH, X. Cliron.p. 160. 1 («) Tom, y. Cotic.fag. 845'.
Tome XX, Dd
,

2\o B E R N OJN,
par Bernon mais les Clergés de 1 rêves
: de Liège , n'y &
eurent aucun égard (/) , ne les trouvant point folides. Il l'era
parlé de la Lettre du Clergé de Trêves à celui de Liège
dans l'article de Sigebert de Gemblours , qui fut chargé de la
réponfe. On ne fait ce que c'eft que le Livre du jeûne du Sa-
medi j que Trithéme compte entre les Ecrits de Bernon (g).
Il parle louvent du jeûne du Samedi des Quatre-tems , dans
le Traité qui porte ce titre , &
dont nous venons de dire quel-
que chofe ; mais nous ne connoiflbns point d'Ouvrage particu-
lier fur le jeûne du Samedi ; aufli Trithéme n'en rapporte pas
les premiers mots , comme il a coutume de faire à l'égard des
Ecrits qu'il avoit vus.
l'Avent?
""^
Vn. On n'étoit pas plus d'accord dixième fiéclc,
dans le
fur la durée de l'Avcnt (A) ,
que de l'année ,
fur les femaines
où l'on devoir pratiquer le jeûne appelle des Quatre-tems.
Bernon crut devoir s'expliquer là-deffus. Il adreffa fon Ecrit
au même Archevêque de Mayence , le priant de lever les
doutes qu'il avoit fur ce fujet. Il arrivoit quelquefois que la
Fête de Noêltomboit au Lundi, & la veille conféquemment
au Dimanche. Les uns vouloient que ce Dimanche fut comp-
té pour le quatrième de l'A vent , quoiqu'on y fit l'Office de
la veille de Noël les autres foutenoient que l'Avent devant
:

avoir fes quatre femaines pleines , il fallait confacrer fpécia-


lement le cinquième Dimanche à cette faintc veille. Ils n'en
donnoient point d'autres raifons , que l'ordre rcglè pour les
Offices dans les quatre femaines d'Avcnt. Ceux , au contrai-
re , qui ne vouloient en tout que quatre Dimanches , fe fon-
doicnt fur l'autorité du Pape faint Grégoire, c'eft-à-dire , de
Ion Sacramentaire , qui ne rcconnoît que quatre Dimanches
dans l'Avent. Le Ledionnaire appelle le Livre du Comte ,
en met cinq , dont le cinquième eft nommé par Amalaire ,
la préparation de l'avènement du Seigneur. Suivant ces dif-
férentes manières de compter , l'Avent en certaines Egliics,
étoit de quatre femaines pleines , & un jour de plus en d'au- :

tres , il rrèioit que de trois femaines pleines & quclcjues jours


quoiqu'il y eût quatre Dimanches. Bernon prend le parti de
ce dernier ufagc , &
dit après le vénérable Bédé j que l'on

( f) A- AR^ . ! r, TiW, /. Aiitcdùt. p. J04.] Script. Ecclef. cip. } 1 1.

(f;)'i'e.\lHinl,in Chmnic.f. 1^0, \2de\ [hj^f., ihid, p. ^\.


ABBÉ DE RICHENOW. Ch. XTTT. 211
ne doit jamais commencer l'A vent plutôt que le 27 de No-
vembre, ni plus tard que le troificme de Décembre. Il cite
pour lui la coutume de Rome & de toucc la France & le ;

Livre que lAbbc Heriger avoit compoié fur cette matière.


L'Archevêque Aribon donna fon approbation à l'Ecrit de
Bernon qui ayant depuis fait de nouvelles découvertes , trai-
;

ta une féconde fois le même fujet: mais ce qu'il cite du Livre


des Offices de faint Hilaire de Poitiers , ne fait pas beaucoup
pour fon fcntiment , puifque cet Ouvrage n'ert: point de ce
faint Evêque. Il n'en efl parlé dans aucun de ceux qui ont
donné le Catalogue de fes Ecrits ; & on ne trouve dans fon
fiécle aucun veftige de l'Avent. L'autorité du Concile d'Or-
léans auquel Bernon affifta avec plulleurs Evoques, fait mieux
pour fa caufe. Il y réduifit fes adverlaircs au lllencc ; & il

paroit que ce Concile donna un décret pour la célébration


de l'Avent en quatre Dimanches. L'Ecrit de Bernon fur ce
fujet , fe trouve dans le quatrième tome des Anecdotes de
Dom Pez (/) , & dans le premier volume de la grande Col-
lection de Dom Martene ( ; mais il n'eft pas entier dans

cette Collcwlion , & finit à l'approbation de l'Archevêque


Aribon.
VIII. Sigebert en parlant des Ecrits de Bernon, relève Traites de
^^'»''5"e-
avec de grands éloges, ceux qu'il avoit faits fur la Muiique;
un intitulé , Tonarius ou Des tons de la Mufiqiie adrcffé a Pi- .^

ligrin , Archevêque de Cologne Dom Mabillon en a donné


:

le Prologue (/) & Dom Pez , le Prologue & le premier ch*a-


;

pitre du Livre ( ?» ) un autre fous le titre , De la diverfitè


;

confonajite des tons , il eft en forme de Dialogue. Dom Pez


n'en a publié que la Préface {ri) un troiliémc qui avoit pour
;

titre: Desinjlrumensde .^«yJ^^e^o). Bernon l'a voit dédié à Ari-


bon, Archevêque de Mayence il n'eft point imprimé. Tri-
:

théme en ajoute un quatrième (p) , qui traitoit , dit-il , de la


mcfure du monocorde ; mais il n'en cite point les premières
paroles ce qui efi: une preuve qu'il ne l'a voit pas vu. Il en eft
:

{n)Tom.^. AnecJ.p.nt. i.pag. 159,


(0) TritHem, «0»;. I. Chrome. Hirfaii^,
(/) AIabulon. lik. îj. Annal, nom. pog. ii<o. Wossius iï Matbtm, c.ip. 6d.
t6. rtum. y.
(m) Pez. ttm, 4. Ane(Jot.pitri,i.pag, (/>) TritHEM. ii«.V. î3 de Script, Ecclef,

«9. Ctp, MI.


Ddij
,

212 B E R N O N ,
toutefois parlé dans Sig-^bert ((/) , qui remarque que Bernoft
ne s'y afiuictiffoit point aux régies données par Bocce ^.pour la
mefure du monocorde.
Let-res de IX. Il y a dans le cinquième tome des Anecdotes de Dom
Beinon.
Bernard Pez y onze Lettres de Bernon à diverfes perlonnes.
La première eft à un Abbé de grande confidération (r) , qu'il
ne défigne que par les premières lettres de fon nom , Vo
peut-être Volpert de Gladbac. Il paroîr que Bernon n'étoit:
alors que fimple Moine , & qu'il fouhaitoit aller demeurer a-
vec cet Abbé. La féconde eft à Geron , Archevêque de Mag-
debourg , qu'il congratule d'avoir par fes foins , rendu la paix
à l'Empire (s). Il le prie de s'intéreffer à la confervation de
fon Monaftere , & de prévenir le Roi contre les calomnies
que l'on répandoit à la Cour contre les perfonnes confacrées
à Dieu , pour avoir lieu de s'emparer de leurs biens ; & d'u-
fer du crédit qu'il avoit auprès de ce Prince , pour le foula-
gement de la mifere des affligés. Bernon , pour lui donner
des marques de fon zélé & de fon amour , lui dit quelque
chofc des devoirs d'un Evêque , en témoignant qu'il louhai-
toit beaucoup plus pour lui la félicité éternelle , que les hon-
neurs dont il jouiffoit dans le morrde. Dans la troiiiéme (f) ,
après avoir fait l'éloge de l'Empereur Henri, il lui rend grâ-
ces de lui avoir confié le gouvernement de l'Abbaye de Ri-
chenow. Il écrivit la quatricm.e , étant prêt de faire un voya-
ge {u) ; c'eft pourquoi il fe recommande aux prières de l'Ab-
bé & des Religieux de Saint Sauveur & le prie de veiller ;

aux beioins des Moines de Richenow. Pendant fon abfen-


ce , ils lui annoncèrent la mort d'un d'entre - eux, nommé
Henri , chargé de l'adminiftration du temporel de l'Abbaye.
Bernon leur répondit par fa cinquième Lettre (.v) , où il leur
ordonne de célébrer pendant trente jours la MefTe pour le ,

défunt , & les Vigiles autant de jours , avec la récitation du


Pfeautier ; de nourrir le premier jour , cent pauvres le rroi- ;

fiémc , deux cens ; le fcptiéme , trois cens ;.lc trentième, qua-


tre cens ; mille en tout. Il écrivit fur le même fujet (y) , »

(j) SiGEBEKT. de Scriptor.Ecclefiap.cap. l^)Epif,.x.


U6. (u) Epifl. 4.
(r) Pf z , Tom, ^. Anecdot. pag. lol. (.v) Epift. î.
Ipip. I. (j]EpiJl.6.7,
ABBÉ DE RlCVENOy. Ch. XIIT. 213
l'Abbc Burchard. La fepticme à rEvêque Henri , ed une Let-
tre d'amitié.
X. Dans la huitième (z), Bernon prie un Evcquequi dc-
voit avoir part à l'cleâion du fuccefl'cur de l'Empereur Hen-
ri , de ne rien faire en cette occafion qu'après en avoir déli-
bère mûrement & La neuvième eft à l'Evêque
pris confeil.
Henri (a) ,
donner
qu'il prie de
des reliques de faint Urie,
lui

Martyr , dont on difoit qu'il devoit bien - tôt transférer le


corps. Il fit la même prière à Cuonon. Bernon avoir befoin
de reliques pour la confécration d'une nouvelle Eglife (i).
L'onzième fut écrite à cette occafion cet Abbé fe trouvant ;

à Cologne avec un de fes amis nommé Frédéric , qui éroic


homme de Lettres , ils fe propoferent mutuellement diverfes
quellions fur l'Ecriture-lainte. La converfation tomba fur les
Ecrits de Cafllen. Frédéric demanda comment cet Auteur
qui a compofé plufieurs Ouvrages utiles fur l'inftituc des Moi-
nes , s'étoit rendu répréhenfible en d'autres ? Bernon répond
à cette queflion ; premièrement , en rapportant le jugement
cjue Gaffiodore a porté des Ecrits de CafTien la cenfure que ;

faint Profper en a faite , & le corre£tif que Viètor , Evêque


de Martyrire en Afrique , s'efi: cru obligé d'y apporter pour
en rendre la Icdure utile & lans danger. Il fait voir en fécond
lieu , que Caffien a lur-tout erré en ce qui regarde les for-
ces du libre-arbitre , enfeignant que parmi les élus , il y en
a que Dieu fauve par fa grâce , & d'autres que la nature ju-
ftifie par les forces du libre-arbitre. Pour mettre la chofe en

évidence , Bernon tranlcrit les propres paroles de Caffien ,


avec remarques de faint Profper. On auroit pu objeiler ,
les
qu'il ne doit plus y avoir d'erreurs dans les Ouvrages de
CafTien , depuis que Vitlor de Martyrite les en a ôtées. Ber-
non prévient cette objedion , en difant que l'on n'avoir pas
les Livres de cet Auteur corrigés par Vitlor , que CafTiodorc
même ne les avoir pas lus , & qu'il avoir écrit en Afrique pour
les avoir.
Xn. On croit que la Lettre de Bernon au Roi Henri le lettre ^eBer-
Noir , fut écrite vers l'an 1045 ( c) . dans le tems que ce Henri
u" •^"vr'*°'
P.rince
' /
etoit
. X ^ .
T'Aii^^ j T)-
, ?,
a Zurich. L Abbc de Richeno\v le loue d avoir
I 1
ieNoir.
1
.*"

(t) Ep»/?. 8. I (<r) MjBiLtON, LU. 58. Àmial. tium,


(.t)^P'lf-9. Ipt.p. 471.
,

214 B E R N O N,
reçu avec bonté Pierre Roi de Hongrie , qui étoit venu lui
demander grâce , &
non-ieulcmenc de n'avoir tiré de lui au-
cune vengeance; mais de l'avoir même aidé à rentrer dans
Ibn Royaume. Bernon joignit à la Lettre deux Sermons ;
l'un , fur l'Epiphanie \ l'autre , fur la Ccne du Seigneur ;

priant le Roi Henri de les ajouter aux Ecrits qu'il avoit de


Jui , s'il les en trouvoit dignes. Il s'intérefla auifi auprès de
ce Prince , pour le rétabliTlement d'une Abbefle de Zurich ,
nommé Hirmingare, qui avoit pleuré ilncérement une faute
dans laquelle elle étoit tombée. Nous n'avons de cette Lettre
que quelques fragmens rapportés par Dom Mabillon , dans le
quatrième tome de les Annales (f/). On y en trouve une autre
qui icrvoit de Préface au Livre de Bernon , fur les régies des
fymphonies &
des tons , cité par Sigcbert elle eft adreffée :

à Grinouer , Prélat de Cologne , par l'ordre de qui il avoic


compofé cet Ouvrage. Ce Grinouer cxcelloit dans la Muli»
que. On ne fçait de quel Monaftere il étoit Abbé ou Prélat
comme le nomme Bernon; Il c'étoit de Saint Pantaléon ou
de Saint Martin , ou de la Collégiale des faints Apôtres. Dom
Martenne rapporte un fragment d'une autre Lettre de Ber-
non ( e ) , où que l'on fc fervoit de fon tems ^ dans les
il dit
Eglifes de Gaule &
de Germanie , de la Verfion du Pfeautier
par faint Jérônc. Bucelin parle de quelques autres Lettres
de cet Abbé ( /") , dont il y en avoit à l'Empereur faint Hen-
ri. On ne voit pas qu'elles aient été rendues publiques. Tri-

trémc ( ^ ) en cire qui étoicnt adrclTées à Aribon , Archevêque


de Maycncc. Nous avons parlé plus haut de celle qui efl ve-
nue jufqu'à nous. Il lui attribue en général pluficurs Ser-
mons iji) , ou Exhortations faites à fes Religieux dans l'inté'»
rieur du Cloître.
XII. Nous avons trois Vies de faint Udalric (ou Ulric ,
Vi«defaint
Udalric, Evêquc d'Aufbouri^c; la première , par Gérard contempo-
rain de ce faint Eveque ; la féconde, par Gebehard, l'un de
fcs fucccHeurs ; la troiliémc, par Bernon ( ? ) • "^"^^^ ^^^ deux
dernières ne font ditférentes de Xit. première que pour le flyle.

(//;Mabill. Lib.^(;.ijr4m.i6. pa^e 19}. ig) TiUTfiEM. de Script. Ecclef. cap,


(ir)'MARTENNE, de Kiilbiis I.ccUfiajlic. 503.
tom. 4. p. iS. (h) Idem. tom. I. Chron. p. i(<o.

(f) BvcLLiti, Annal, ad an. |0i6. /". (i) Mabill, tom. 8. AQor.pjg. 41 7. ^
19» 4/8.
ABBÉ RICVENOVr. Ch. XIIÎ.
DE 215
Le fond des chofes eft tiic de celle que le Prêirc Gérard a-
voic compolcc. Sa didion ne plut point a TEvcque Gebehard ;
elle lui parut trop (impie. Il cncrcprii de lui dcnnt-r plus d'c-
Icgance Se de rioblcfre: mais il mourut avant que d'a\oir a-
chevc d'Ouvrage. Bernon le reprit , à la prière de Fridebald
Abbc de faintc Afre à Aufbourg , &
y mit la dernière main.
11 s'appliqua à. rendre avec plus de prccilion , ce que Gérard
avoir dit avec trop d'étendue ; à mettre dans un plus grand
jour , ce qu'il avoir trop abrégé ; &
cà donner plus de fuite &
plus d'ordre aux faits qu'il avoir rappoités mais il ne fuivit
:

point le (lyle de Gebehard , qui en voulant corriger celui de


Gérard étoit tombé dans l'excès oppofé , en donnant trop
,

d'élévation au lien ; en forte qu'il n'étoit plus à la portée du


plus grand nombre les le£leurs. Bernon prit un milieu entre
la balfcfle du ftylc de fun , & la fublimité que l'autre avoir
affe£tée. Il acheva fon Ouvrage en 1030 au plus tard, quifcfl:
l'année de la mort de Fridebald. Les trois Vies de faint Udal-
ric onrété imprimées à Aufbourg en 1595, par les foins de
Marc Velfcrus. Surius en avoir déjà donné la première au qua-
trième de Juillet. C'cfl: la feule que les Bollandiftes & Dom
Mabillon aient mile dans leurs Recueils. Le dernier y a feule-
ment ajouté les Prologues de Gebehard & de Bernon , avec les
premières lignes de ces deux Vies.
XIIL On n'a point de preuves certaines que Bernon foir VieJe faint

Auteur de la Vie de faint Mcginrad Ermite & Mari-yr chez '^'^g'"'-"^*

lesSuifles (i). L'Anonyme de MoIck ,qui lui attribue celle de


faint Udalric (/) , ne dit rien de celle-ci. Mais Dom Chrjf-
tophe Hartmarne Moine de l'Abbaye de Notre-Dame des
Eirmites , qui Ta fait imprimer dans les Annales de ce Mo-
naftere , rrifcs fous prede à Fribourg en i<5i2 , ne doute point
qu'elle ne foit de la façon de Bernon Abbé de Richcno\i(' (?«)-,
Dom Mabillon a embrafle ce fentimcnr. Ce qui le rend vrai-
femblab'e , c'eft que le corps de ce faint Ermite , qui avoir çté
enterré dans le Monaflere de Richenow , fut levé de terre
pendant que Bernon en étoit Abbé , & que la cancnifation
de Meginrad fe fit par le Pape Benoît IX fans doute à la ,

follicitation de Bernon , qui ne put y parvenir qu'en envoyant

(») Mabillon. tom (,.p.6y. (m) MABri.zoN, Ciffrrat. iri'jst.Mt'


(/) Anonjin, McUùeiiJ. cap. Zl. ginr.J. tcm.6. Aiior.p. bZ.
,,

ii6 A R I B O N,
à Rome [fe Vie de ce Saint & les ades de fon martyre , ar-'
rivé le 21 Janvier 861 ou 860 , fuivant les différentes ma-
nières de compter. Meginrad étoit de noble condition. Il fut
élevé à Richenow à lage de 25 ans on l'ordonna Diacre, &
:

•Prêtre peu de tems après. Son Abbé lui connoiflant du talent


pour le chargea du loin d'une école.
l'inflru£lion des autres ,

L'amour de prendre le parti de la vie léré-


la retraite lui fit

mitique. Un jour qu'il fortoit de l'Autel , où il avoir céébré


la Mcffe , deux voleurs vinrent l'attaquer. Quoiqu'il connue
leur deflein , il les reçut avec bonté , leur otfrit à boire à &
manger. Ils l'attachèrent avec des cordes , le frappèrent fur
du corps , & enfin le tuèrent , fans qu'il fe
toutes les parties
mît en défenfe. Sa vie le trouve dans Surius , dans Bollan-
dus , au 21 de Janvier , & dans le fixiéme tome des A6les de
l'Ordre de Saint Benoît. Elle fut imprimée en Allemand en
1603 , avec les origines de l'Abbaye de Notre -Pâme des
Ermites,

n^""^^^"'
XI V".
ne paroît pas que Bernan ai eut beaucoup de goût
II

pour la , fi l'on en juge par l'infcription qui fe lit à la


poéfie
tête d'un Sacramentaire , dont il fit préfent à l'Empereur Hen-
ri III. Elle eft compofée de fix grands vers qui ne font recom-
mandables que par les fcntimcns d'humilité que l'Auteur y
fait paroître , & par l'attachement qu'il y fait paroître pour
fon Prince. Dom Mabillon copia cette infcription fur un ma-
nufcrit de M. le Préfident Bouhicr à Dijon (n). Le Poëme
fur la ruine de Troies public par Goldafl: & par Barthius (0)
porte le nom de Bernard de Fleuri. On conjcilure de -là,
qu'elle eft de Bcrnon , qui eft quelquefois appelle Bernard , &z
3ui avoir été Moine de Fleuri. On ne voit point fur quel fon-
ement Goldaft lui attribue une Chronique. Il n'en eft rien
dit dans les Catalogues de fcs Ouvrages , par Sigebcrt
Trithémc & l'Anonyme de A\o1ck. Il y a dans la didion de
Bernon , de la poIitcflTo , de la netteté & delà précifion.
Arîbon.Ar- XV. Aribon Archevêque de Maycnce, à qui il adrefiâ
^^ plufieurs de (es Ecrits
, en laifta lui-même à la poftérité. Il
Mayence
étoit né dans la Noric , d'une famille noble. Sage , prudent
& proprç pour entrçr dans le confeil des Princes , il faifoic

(») Majîii.i. lit', f ?• Aiiiial. nsm. 27. l (»') Fabricius , Bitliot. Latin, lib. i.

filg. z»5. iS lib. ;7. tium. 77, t? tom, 1. I />• 61^. ^ Bartb. advtrf.lik. ji. c,j.
Of»fc. p.
les
^ARCHEVESQ. DE MAYENCE. Ch. XTIT. 217 î

les fonctions de Chapelain du Roi , lorfqu'on le choiik pour


Tcmplir le Siège de Mayencc vacant par la mort d'Archcm-
baud (p). Son cledion le fit au commencement de Novem-
bre 1021 ; & il fut facrc le trentième du même mois , par
Gothard Evêquc d'Hildesheim. Son zélé pour la Difcipline
Eccléliaftique lui fit alfembler plufieurs Synodes , dont nous
avons encore les décrets. Etant à Paderborn avec TEmpe-
rcur Conrad à la Fête de Noël 1050, il demanda à ce Prin-
ce la permifTion d'aller à Rome. Il en fit le voyage au mois
de Février de Tannée fuivante 103 1. Au retour il fut attaqué
d'une maladie dont il mourut, le 13 d'Avril de la même an-
née après dix ans d'Epifcopat.
XVI. Trithéme cite de lui plufieurs Lettres (q) , une en- Ses Eçrù»
tre autres , à Bernom Abbé de Richcnow , & un Commen-
taire fur les quinze Pfeaumes Graduels. Sigebert en fait auffi
mention ( r) ; mais il ne paroît pas qu'aucun des Ecrits d'A-
ribon aient éié rendus publiques.
XVII. On connoît deux autres Ecrivains : l'un appelle nus ^"bonSvM-
A
Aribon ^
-l
Cynnus ;
i' •
A -1
r m
& Ariboa
1 autre , Anbon le Mudcien. Le premier, leMuikien.
I ,- •

d'Abbé de Saint Denis de Schcchdorf , devint Evcque de


Frihngue depuis Tan 760 jufqu'en 783. Il compoia la vie de
faint Corbinicn premier Evêque de cette Ville. Suriusl'a rap-
portée dans fa Collcêlion au huitième de Septembre; & Dom
JMabillon , dans le troiliéme tome des Attcs de l'Ordre de
faint Benoît (s). Le fécond Aribon écrivit un Traité de Mu-
llque qu'il dédia à fon Evêque Diocéfain (r). Il faiioit mé-
moire de \v'ilhclme Abbé d'Hirfaugc, de qui il avoir reçu du
fecours peur la compofition de fon Ouvrage. En reconnoif-
lance il le qualifioit le premier des Muficicns , l'Orphée & le
Pythagore moderne. Ainfi Aribon écrivoit vers l'an io5>i ,
auquel cet Abbé mourut, félon Trithéme (u). Dom Bernard
Pez a donné une partie de la Préface ou Epure dédicatoire
de ce Traité (x). L'Evêque à qui elle efl adrefîée eft nomme
Ellcnhardus.
XVIII. Dans le même ficelé , vivoit un autre Muficien celé- ^"' J'Arei-.

, nommé Gui & furnommé d'Aiezzo


^''^'
bre , du nom de la ville

45
(f) Gallia CbrijUjii. ncja, tom, ^.{ng.
9-
(<j) Trithem. c^ip. }o9
^1
'
1

1
(s) Mabill. tcm.
{() An<jiiym.
p.

(«) TiUTH. Toffi. i.ClroaU.p.


470.
Melticenf. C.ip. 106.
zfii.
V') SiGEE-^RT. c.i^., 140, • (xjPiz.Tom. S' AntcJ.p m.
Tome XX. Ee
2i8 GUI D'ARREZZO, Ch. XIII.
où il avoit pris naiflancc. Il fit profellion de la vie monaflî-
que dans le Monaftcrc de Pompoue près deRavenne. Com-
me il avoit beaucoup de talent pour la Mufique inventa , il

une nouvelle méthode ii facile , qu un enfant pouvoit appren-


dre en peu de mois , ce qu'un homme auroit appris à peine
en plufdeurs années , en fuivant Tancienne. C'eiî ce que nous
appelions la Game ou les fix notes ut re mi fa J'ol la. Cette
invention qui devoit naturellement le faire confidérer de tout
le monde , lui attira des envieux , qui pouffèrent leur paffion
fi loin , qu'il fut obligé de fortir de fon Monaftere. L'Abbé

de Pompofie qui fe nommoit aufîi Gui , entra dans leur fcn-


timent ; mais ce ne fut que pour un tems. Il reconnut qu'on
. l'avoit féduit , en demanda pardon à Gui , & le retint dans
fon Monaftere y revint à fon retour de Rome.
lorfqu'il
Ses Ecrit?. XIX. Il faut l'entendre parler lui-même de fon voyage en
rJchei.^'"^
"
cette Ville (v), & des fucccs de fa nouvelle méthode , dans fa
Lettre à Michel Moine de Pompofie qui l'avoit ^idé dans ce
travail. Il fe compare à cet ouvrier qui ayant trouvé le fecret
de rendre le verre malléable , en fit l'expérience devant l'Em-
pereur Auguffe ; &
qui au lieu d'en recevoir la récompenfc
qu'il avoit droit d'en attendre , fut condamné à mort ; de
peur qu'un fecret de cette nature ne rendît le verre , en lui
ôtant fa fragilité, plus précieux que l'or. Enfuite il fe con-
folc des pcrfécutions de fes envieux ,
par l'efpérance que ceux
qui viendroient dans la fuite, prieront pour la rémiffion de fcs
péchés ;
puifqu'au lieu qu'en dix ans à peine pouvoit- on ac-
quérir une fcience imparfaite du chant , nous faifons, dit-il,
un Chantre en un an , ou tout au plus en deux. Si les hom-
mes, ajoute-t-il, ne nous paient que d'ingratitude, cfl:-cc
qu'un Dieu nous laiffcra fans récompenfc ? Affurcs donc
jufte
de la , appliquons-nous à un travail d'une fi gran-
récribution
de utilité. Il raconte enfuite qu'étant al é à Rome avec Gré-

goire Abbé de Milan & Pierre Prevot des Chanoines de l'E-


gUfe d'Arczzo , le Pape Jean XIX le fit venir, l'entretint
long-tems , feuilleta fouvent fon antiphonicr , qu'il rcgardoic
comme un prodige. Le Pape fit plus , il examina les régies
de cette nouvelle méthode, les médira , &: ne fe leva point
de fon liège, qu'il n'eût appris un veiiec qu'il n'avoic jamais

(v) AIabillOK. hl. j;, AimnI. num, loo. p.y


GUI D'AREZZq. Ch. XIIT. 2ip
ouï chanter, &
n'éprouvât en lui-même ce qu'il avoit peine à
croire des autres. La mauvaife lantc de Gui ne lui permet-
tant pas de faire un long féjour à Rome , il revint à Pom-
pofie. L'Abbé qui auparavant avoit rejette le nouvel Anti-
phonier , l'approuva , & conl:illa à Gui d'cnieigner fa mé-
thode plutôt dans les Monaftcres que dans Ls Vailles Epif-
copalcs. Gui fuivit cet avis d'autant plus volontiers , qu'il
craignoit de communiquer avec les Evoques , qui étoicnt a-
lors prefque tous condamnés pour iîmonic. Il Ht préfent de
Ion Antiphonicr à l'Abbaye de Pompofie. Cette Lettre fc
trouve dans les Annales de B.ironius (jy ) , dnns celles de &
Dom Mabillon(z) i qui remarque qu'au lieu qu'il ell dit dans
Baronius, que Gui alla à. Rome fous le Pontificat de Benoît
VIII , il faut lire Jean XIX. Elle a aulïi été publiée par Dom
Bernard Pez (fl).
XX. Outre l'Antiphonier , Gui compofa un autre Livre je^Gu^d-Ar!
de Mufique qu"il nomma le Micrologue , & qu'il dédia à rezzo.

Théodalde d'Arezzo , fon Evêque Diocéfain. Baronius a in-


féré l'Epître dédicatoire dans les Annales (b) , mais l'infcri-
Ption en étant défectueufe , Dom Mîbillon l'a rétablie fur
autorité d'un ancien manufcrit (c). Gui dit dans cette Epî-
tre , que tandis qu'il s'occupoit du deffein de mener une vie
entièrement folitaire , Théodalde l'avoir appelle auprès de lui
pour lui aider à l'inflrudion de fon Clergé &
de fon peuple ,
quoiqu'il ne manquât pas de perfonnes habiles pour les fonc-
tions de ce minillere ; qu'il l'avoir auffi obligé de rendre pu-
blique fon Traité de la Mufique , & d'en infiruire les Clercs
de l'EglifeCathédrale , comme il avoit fait à l'égard de ceux
de l'Eglife de faint Donat Martyr ce qui avoit eu un tel fuc-
:

cès , que les enfans même de cette Eglife fe trouvoient plus


inflruits que les anciens des autres Eglifes. Il ajoute que ce
qui lui avoit donné occafion de travailler à cette nouvelle mé-
thode , étoit le foin dont on l'avoit chargé d'apprendre le
chant aux jeunes gens , qu'elle lui avoit été li utile qu'en moins
d'un tTîois , ils chantoient à l'ouverture du Livre des veriets &
des chants quils n'a voient point connus auparavant. Le Mi-
crologue étoir compolé de deux Livres ; l'un en profe , l'au-

{y)Aia!t. lozi. i (i) Baron. j4(/ <i«. loii , n«/n. 13.


(1) Mabul. iibifiif,
I
(c)Mabill. L;K 55 , i<n«.»'.»«!«. lor,

E e ij
,

120 GUI D'AREZZO. Ch. XIII.


treen vers (d). Théodaldc à qui il le dédia , fut Evêquc d'A-
rezzo depuis l'c^n 1014 , eu, fclon d'autres , 1023 jufqu'er»
1037. ^^ ^^ dit à la fin (e) , que Gui le compofa dans la
trente- quatrième année de fcn âge , fous le Pontificat de
Jean XX
On en trouve plufieurs exemplaires dans les Biblio-
.

thèques (/) ; mais on ne l'a pas encore mis au jour. Il efl: cité
par Domnio , dans le premier Livre de la vie de la DucheflTe
Mathilde (g).
Delamefure XXI. Gui compofa un troifiéme Traité de la Mufiqne, in-
du Monocor-
de.
titulé De la mefure du Monocorde. Nous en avons un frag-
:

ment dans le cinquième tome des Anecdotes de Dom Pez (Ji),


On remarque ( i ) qu'avant que Gui eût inventé la Game
ut re mi fa fol la, on fe fervoit des fept premières lettres de
l'alphabeth que tel étoit l'ufage du tems de faint Grégoire-
;

le- Grand ; qu'elles fervoient également pour monter à l'oc-


tave, comme pour en defccndre , & que les Egyptiens long-
tems auparavant , prenoient la mefure de leurs chants des
fept voyelles de leur langue. Gui prit fes notes de la lettre
initiale des fix premiers hémifliches de l'hymne en l'honneur
de faint Jean-Baptifte Ut qiieant Iaxis -Refonare fibrii - Mira
:

gefîonim - Fan.uli tuorum - Solve polluti - Labii reatum.


Traité fuppo-
XXII. C'eft par erreur que Trithé me attribue à Gui d'Are2-
zo (Kj,un Livre contre Berenger, lous le titre Du C orps dU' : V
Sang deJeJus-ChriJl. Il paroît l'avoir confondu avec Guitmond,,
Moine de Saint Ouein & enfuite Evêquc d'Averfe , qui écri-
vit en effe: contre Berenger , ainfi que Trithéme le reconnoîc
lui-même ( /). Nul autre que cet Ecrivain n'a mis Gui d'Arez-
20 entre les adverfaires de Berenger,

(1/) Fa BRIC. Eibliot. Ltuina y Lib, 8, (h) P.ije 11 y. vide CJ tom. j , pig' 6iS-
/. 374. roOT. 5. (O Fabric. uiifnp.p. 376.
(•«) Mabill, iibi fup, p. '^if, (k) Trithem. de Scripler. Ecdef. Citf>
(/) OiiDiN. Tom. z.f. 600. 318.
(jf )
ApuJ Leiinit. tom, 1 Script,. BrutiJ- (/) Id. ilid.cap. 327..
7iic,f,.6ni,
DU MENOLOGE DES GRECS. Ch. XIV. 221

CHAPITRE XIV.
Vu Menologe , & autres Livres Ecclêfiajîiques des
Grecs n

I. /^^ E que les Latins appellent Martyrologe ou Calcn- Menologe des


V_^ clrier Grecs le nomment Menologe {a). Ce *^''^"'
, les.

Livre ne contient autre chofe qu'un lommairc de la vie des


Saints , dont on fait l'Office chaque jour de Tannée , ou la
mémoire de ceux dont on n'a point de vies. Il y a prefque
autant de différcns Menologcs chez les Grecs, que de Mar-
tyrologes chez les Latins. Le Menologe traduit en latin par
le Cardinal Sirlct , & imprimé parmi les anciennes Leçons
de CaniHus , n'cft pas le même que celui que l'on trouve en
diverfes Bibliothèques , en particulier dans la Barberine ,
qu'on dit être très-ancien ; 8c ils font tous différens du Me-
rologe traduit en grec vulgaire par Margunne Evêque de
Cythere ou Cerigo , fur les côtes de la orée , dont Antoi- M
ne Pinelli a donné une édition à Venife en 1 525;», in -4»,
,'
Baronius croit que ce fut l'Empereur Balilc le Macédonien
qui prit foin de faire écrire le Menologe , & de l'orner des
images de tous les Saints dont il y étoit fait mention 5 mais
on convient aujourd'hui que c'efl l'Ouvrage de Bafile Por-
phyrogenete (Z>),qui commença à régner en 975, & régna juf-
qu'cn 1025. L'original de ce Menologe fait partie des ma-
nufcrits delà Bibliothèque du Vatican. Il n'eft; pas néanmoins
complet &
ne renferme que fix mois ; fçavoir depuis le com-
jnencement de Septembre qui eft le premier mois de l'année
chez les Grecs , jufqu'à la fin de Février. Arcudius en a fait
une traduction latine qu'Ughelli a inférée dans le fixiéme
tome de l'Italie facrée, imprimée à Rome en 1^44 (<r), Hcnf-
chenius ayant découvert les lix autres mois dans un manuf-

(rt) E.V Allaiii Diffrrtitt. Tôt». $. B«o/»«». iTont. y. Bililiot. Grue. fag. 62. (6
y 6^ }
Crac. Fa BRIC. png. x.^feq.patt. 1. fart. 1.
\

i*} Piioi adg/;, S86. n«Wii 1, Fabric. J


(c) Pa^t lO-fS.
,

222 DU M EN O L O G E
crit du îvïonaftere de la Grotte facrée en Italie , a mis à la
^n du premier volume des mois de Mars , d'Avril & de
Mai , ce qu'il y avoit d'inrcreflant dans ce Menologe ; 6c
fes Continuateurs ont fait la même choie pour les mois de
Juin , Juillet & Août: en forte que nous avons ce Menologç
entier.
Menées des ll\ Les Menées , ainfi appellces du nom de mois , font
'^"*
divilces en douze volumes , pour autant de mois de l'année.
On y trouve pour chaque jour , une ou plufieurs vies des
Saints abrégées , à peu près comme dans nos Bréviaires. On.
en cite une édition grecque commencée en 159*^ & achevée
en 1607 (<^). Il y en a une autre chez les Pinelli à Venife
en 1628 , par les foins de Nicéphore Pafchaleius ; & une
troifiéme en la même Ville , par Théophilade Tzanfurer,
Raderus en tira diverfes hiftoires dont il compofa un recueil
fous le titre de Viridarium San6lorum ex Menais, imprimé à
Aufbourgen 1604, in-4°. Il s'étoit propofé de traduire les
Menées entières en latin. La mort traverfa fon dcflTein. Aux
vies des Saints dont on fait l'Office chaque jour, les Menées
ajoutent des canons ou mémoires de quelques autres Saints
dont il n'y a point d'Offices particuliers & ces canons font;

tantôt en vers , tantôt en profe. Au refte les Menées de mê-


me que les Menologes , font remplis d'hiftoires fabuleufcs
qui marquent peu de choix & e ddifcernement dans ceux qui
ont été charges de ces fortes de compilations.
Du Typique. III. La variété continuelle des Offices eccléfiafliques au-
roit occafionaé de la confufion , fi l'on n'avoit eu foin d'en
régler l'ordre, C'eft ce que les Grecs appellent Type ou 7}v
fique j & ce que nous nommons Ordre ou Dire£loire. On y
voit ce qui concerne tous les Offices de l'année , depuis le
premier jour jufqu'au dernier; ce que l'on doit chanter à la
MelTe,à Vêpres, à Matines , aux Heures du jour ; les Pfeau-
mes & les Leçons des jours de Fêtes , ou de la Ferie ; en
quel jour on doit jeûner ou rompre le jeûne. Ce Type ne pou-
voit être le même par - tout. Les Fglilcs Patriarchales fur-
tout , en avoicnt un particulier. Mais la Difcipline ayant
beaucoup foutfer: par l'incurfion des Barbares , on fe rédui-
lit prcfque par-tout au Type de faint Sabas , comme IcmciU

((/; FaBRIC. Toot. j. Bitliot. Crtie,f, $?• /S. fart. »,


.

DES GRECS. Ch. XIV. 123


leur &le plus aifc à obrcrvcr: d'où vicnc qu'Eutychius lap-
pcllc le Typs de rEglife {e).Il fe trouve dans les éditions dii

Type à Venile chez Antoine Pinclli (/) , en 1(^03 , 1615,


1643 , in fol. Le texte en avoit été corrigé vers Tan 1585 ,
par le Moine Jolaphat. Le Type eft quelquefois appelle Li-
vre Tactique, principalement dans les Monafleres des Grecs ;
ce qui ne ligniHe autre choie que Tordre ou la régie des Offi-
ces divins ainli ces deux termes ont une même lignification.
:

Type fe prend aulTi pour une régie ou manière de vivre pref-


crite par les fondateurs d'un Monaftere. Dom Montfaucon
a donné en grec &
en latin {g) le Type de l'Impératrice Irène
femme d'Alexis Comnene , pour le Monaftere de Filles qu'elle
avoit fondé.
IV. Les Grecs ont un autre Livre qu'ils appellent Liturgi- L'tff'gîei

que , parce qu'il renferme les trois principales Liturgies qui


font en ufage chez eux ; fçavoir, celles qui portent le nom de
faint Chryfoflomc &
de laint Bafile , &
celle des Préfandi-
fiés. Us en ont eu beaucoup d'autres , comme les Liturgies
de faint Jacques, de laint Clément, de laint Pierre , de faiçiç
Marc ,dont on a fait plufieurs éditions ; miais ils fe font re-
flraints aux trois premières 5 fi ce n'efl qu'ils fe fervent une
fois l'année de celle de faint Jacques {h), mais feulement à
Jérufalem. La Liturgie des Préfanâiîîés lé trouve dans le
vingt- feptiéme tome delà Bibliothèque des Percs,de la ver-
fion de Gencbrard. Cette Liturgie cfl: fort ancienne , puif-
qu'il en efl parlé dans le cinquante-deuxième canon du Con-
cile in Trullo. On n'y confacre point le Corps de Jefus-Chrift :
mais on y conlume l'Hoftie confacrée la veille ou quelques
jours auparavant. Cette Liturgie n'efl d'ufage que dans le Ca-
rême & aux veilles des grandes Fêtes. Dans le refte de Tan-
née on fe fert de celle faint Chryibflome ou de laint Ealile. La
Meffc des Préfandifiés diflx^re de celle qu'on appelle lèche ,
en ce que 'Jans celle-ci on n'offre point d'hoftie, & Ton n'en
confume point (?").
V. Le Livre des Evangiles à l'ufage des Grecs dans la ce- Livre HesE*

lébration des Myfleres , prélence de fuite pour chaque jour de ^''"S'^"- .

l'année , les Leçons de TEvangile , en les tirant du même Evan-

(e) EuTYCH. T^m. 1. Annal. p. 147. 1 (g) Tom. 4. morirtm. Cofeitrii ^ p, 12^,
{/) Fabkic. Tom, f, Biblioi, Grxc, f, (h) Allât, nki jup. fage ii,
{
Z,part.z, I
{i) Id. ibid.p. z^.
224 DU MENOLOGE^
gélifie, fi ce fe rencontre quelque Fête folemnelle
n'efl: qu'il

qui ait un Evangile propre au Myftore du jour. On lit donc


chez eux l'Evangile de fuite ; par exemple , celai de faint Mat-
thieu avant d'en commencer un autre ; & ils nomment les Di-
manches du nom de l'Evangile qu'on y lit. Ainli ils difcnt le
premier Dimanche de faint Matthieu , le fécond Dimanche de
l'aint Matthieu , & de même des autres. Le jour de Pâques on

commence la le6lure de l'Evangile de faint Jean elle dure fepc


:

femaines moins trois jours. On prend enfuite l'Evangile félon


faint Matthieu, qu'on lit pendant dix-fept femaines, a com-
mencer au Lundi de la Pentecôte jufqu'au Vendredi d'après
la Fcte de l'Exaltation de la fainte Croix. Suit la ledture de

l'Evangile de faint Luc , depuis le Lundi qui fuit cette Fête,


jufqu'au bout des douze femaines fuivantes. Au commence-
ment de la treizième, on lit l'Evangile de faint Marc , à l'cX"
ception des Samedis & des Dimanches où l'on prend les Le-
çons de l'Evangile de faint Luc. On aché e de lire les Sa-
medis & Dimanches de Carême , les endroits de faint Mat-'
I
thieu & de faint Luc qu'on n'auroit pas lus pendant le cours
de l'année. Ce Livre des Evangiles diftribué en cette forte,
a été imprimé en i ç 95» , par Emmanuel Glyfon , en 162^ ,
& en 1645 (/). Cette dernière édition cfl: due aux foins du
Moine Théophilade. Le nom de l'Imprimeur çii Pierre Pinelli
de Venife.
livre de l'A-
yj^ ^ l'imitation de ce Code des Evangiles, les Grecs en
ont fait un dnns lequel Ws ont divilé en. Leçons pour chaque
jour & ciiaqiie fête de l'année , les Aêtes des Apôtres , les
Epîtres de iaint Paul , les Epîrres Catholiques , & TApoca-
lypfe de faint Jeîn. Ils commencent le jour de Pâques la le-
dure du Livre des Aéles, qu'i's continuent jufqu'au Diman-
che de tous les Sainrs. Aux autres Dimanches de l'année ils
Hfent les Epitres de S. Paul , les Epîtrcs Catholiques & l'Apo-
calypfe. Ce Code elT: quelquefois appelle l'Apôtre "J parce que
les Epîrres de S. Paul en font la partie principale. Il fut impri-
mé à Venife' en KJ55, 1641.
Uaienaire.
yjj^ j j,^^^. Lc^ion^ire n'a p^s encore été mis fous prefTe ;
quoiqu'on en trouve plufieurs exemplaires parmi les manuf-
cf jts des Bibliothèques Vaticanc &: Barberine. Les Leçons

Çkj FaîîRJC. llbi fiip. p, îj,


çn
,

DES GRECS.
Cv. XIV. 225
en fpns de l'ancien Tcflamenc , 8c difpofccs relati-
tirées
vement aux jours de Fèce où on doit les lire. Il faut di-
ftingucr ce Lcttionaire d'un autre qui eft en uGige chez les
Grecs, & qui ne contient que des difcours des Pères de TE-
glife , comme les Commentaires de S. Chryfoftome fur l'an-
cien & le nouveau Teftament ; les Sermons de faint Bafilc, de
S. Grégoire de Nazianze ; les Cacéchefes de Théodore Studi-
rc , les Afcétiques de S. Ephrem , l'hifloirc Laufiaque , le Pré
Spirituel de Jean Mofch.
VIII. Les Plbaumes entrent dans tous les Offices, foit de P^^utier.;
la nuit , foit du jour on en récite même à la Meffe. Les Grecs
:

les difent de fuite comme ils font dilpolcs dans la Bible: mais
il les partagent en plufieurs fcdions les unes en contiennent
:

plus , les autres moins j félon la longueur des Pfeaumes cha- :

que Icdion cfl; iou^-divilce en trois parties , & terminée par


l'hymne Gloria Potri: &
Fi'io : au lieu que dans l'Egîiie La-
tine , en la récite après chaque Pleaume. Le cent dix-hui-
tiéme efl divilc chez les Grecs on trois parties à caufe de fa
longueur ; & ce n'efl qu'à la iin de la dernière partie , qu'ils
difent le Gloria Patri. Balfamon conjecture que l'on n'a in-
venté ces fedions des Pfeaumes (/) , que pour avoir lieu de
fiitisfaire au décret du Concile de Laodicée , qui porte qu'on
entremêlera la récitation des Pfeaumes , de leftures ; de crain-
te qu'en récitant de fuite le Pleauticr , les afTiflans ne s'en en-
nuiaflcnt. Les Cantiques tant de l'ancien que du nouveau Te-
flament , lonr compris fous une feule fedion.
IX. Outre les Pleaumes & les Cantiques tirés de l'Ecriture 1.'^'',^''"^'"*
fainte, les Grecs ont des Cantiques & des Hymnes qu'ils ap-
pellent Cnnom &
Tropaires. Ils les chantent fous divers tons :
car leur mufique en admet huit différens ; & ils ont un Livre
nommé pour cette raifon le OBotone ou des huit Tons , im-
primé à Venife {m) en 152} , 1 543 , 1 584, 1602, 16^10 ,
1 624 , m-8°. Les Tropaires & toutes les autres fortes d'hym-

nes , font tellement difpofées dans ce Livre , que l'on


y
trouve d'abord celles qui doivent être chantées du premier
Ton ; enfuite celles qui font du fécond Ton & enfuite des ;

autres.

(/) Allât. ib-J. (ag. 40. Bibl. Grxc. (m) Faehic. iliid. p. 47.
j
fui. tom. ^ I

Tome XX, Ff
1 ,

226 DU M O N O L O G E,
LeParacléii- X. Le Paraclctiquc eft ainfi nommé («) , parce que tout
^"^' pécheur , à l'ex-
ce quil renferme, elT: propre à confolcr le
horter à fe convertir , à faire pénitence , & à fc rendre Dieu
propice. Il contient des prières à Dieu , aux Anges , aux
Apôtres , aux Martyrs, aux Confcfleurs & à tous les autres
Saints. L'uiage de ce Livre n'cfl; point attaché à certaine fai-
fon de Tannée , comme le Triodion qui n'a lieu que pendant
le Carême , ou le Pentecoftrion qui fe récite depuis Pâques
jufqu'â la Pentecôte. Il eft de tous les jours : &: c'efl-Ià qu'on
a recours , quand il manque quelque chofe à l'Office du jour
foit pour la Meffe , foit pour les autres Offices. Le Paraclé-
tique parut à Venife en 1620, en i<^25 (0), chez Antoine
Pinelli, &
en i<^40.
LeTriod-'on. XI. On imprima en la même Ville le Triodion , en r 620
& ii!)44. Sous le nom de Triodion , on entend une hymne
compofée ieulement de trois odes ou flrophes ; au lieu que
les autres hymnes des Grecs , font ordinairement de neuf.
Le Triodion contient les Offices de l'Eglife Grecque , de-
puis le Dimanche de la Septuagélime , jufqu'au Samedi-
Saint.
LePtnteco- XII. Le lendemain , c'efl-à-dire, le jour de Pâques , on.
fidnon.
commence les Offices rapportés dans le Pentecoftarion & il ;

y en a pour tout le tems qui s'écoule jufqu'au Dimanche de


l'Odave de la Pentecôte , appelle chez les Grecs, le Diman-
che de tous quatre éditions à Veni-
les Saints. Il s'en ell fait
fe ; fçavoir en 15^8,1579, 1618, 1^42. Ailatiusfeplaiiit
,

que les nouveaux Grecs ont beaucoup ajouté à l'ancien Pen-


tecortarionf/)).
Anthologium XIII. L'Anthologium , qui dans fes commencemens n'é-
toit qu'un petit Livre (q) , cil: aujourd'hui trés-enflé par les
fréquentes additions qu'on y a faites. Il contient des Offices
pour les Fêtes de Notre - Seigneur pendant l'année , de la
fainte Vierge & des Saints les plus célèbres , auxquels on a
ajouré un Commun pour les Prophètes , les Apôtres , les Mar-
tyrs , les Evoques, les Confciïcurs & autres Saints ; un Cycle
pafchal de trente-deux ans , & plufieurs ciiofcs tirées des Me-

C'j)
* 1 LAT. :l)--!. p. ïo. hr i::i , }<f,
(0) Fahric. thid. p. 49. {j) AlLAT. Differt. I. ibiil.f, 66,
I

(fj AiiAT. Difen. 2 ,pag, iz<). S.»-


,

DES GRECS. Ch. XIV. 117


nées 8c du Paraclétique. Il fut mis fous preflc à Venifc cnï6ii
ôc i639,in-fol. chez Pierre Pinelli. On connoît un autre
Anthologium à Tufagc des voyageurs &
de ceux qui ne peu-
vent adi'tcr au chœur , fait par Antoine Arcudius imprime &
à Rome en 1598, in-^''.
^'Horloge,
XIV. Le Livre intitulé Horloge, parut en la m.Cmc Ville
en 1677; On imprimé plulicurs fois à Venifc;
l'avoir déjà
fçavoir , en 15^5, 1568 , 1601 , 1623 , 1646 , 1652. Il
cft nommé Horloge , parce qu'il comprend les Offices du
jour , c'eft- à-dire , les Tropaires , les Pfeaumes & les prières
de chaque heure. On y a fait entrer auffi diveries prières & of-
fices de dévotion, un, entre autres, fur la fainte Communion
& deux difcours de S. Cyrille d'Alexandrie l'un, lur la fortie ;

de l'ame ; l'autre , fur le fécond Avènement de Jefus-Chrifl


& quelques autres pièces. y"''^-'*^*
XV. Parle Livre qui a pour titre Synaxaire , on entend
:

un Recueil des Vies des Saints , mais abrégées en quoi il :

eft différent des Menées , où ces Vies font plus au long. Il


en dififere encore ( r ) , en ce que les Menées renferment les
Offices des Saints dont elles donnent la vie ; & que les Syna-
xaircs ne font qu'indiquer les Fêtes des Saints avec un petit
éloge de chacun. On regarde Nicéphore Callifle comme un
des principaux Auteurs de ce Recueil {s).
Panégyriques,
XVI. Les Grecs en ont un autre , intitulé Panégyriques , :

parce qu'il contient les difcours en l'honneur de Jefus-Chrift


& des Saints , que l'on a coutume de lire dans les Solcmnités
en préfence de tout le peuple. Il n'eft pas le même dans tou-
tes les Eglifcs ; chaque Colledeur ayant groffi ce Recueil à. fa
dévotion , & eu égard aux Saints reipedés particulièrement
dans ion Diocèfc; dans plufieurs exemplaires, il cil divifé en
douze volumes , à raifon des douze mois de l'année. Je ne vois
point qu'on l'ait imprimé.
XVII. On a au contraire , grand nombre d'éditions de L'Eucholog<*

l'Euchologe des Grecs faites à Venife {t) , en i ^26 , 1544 ,


1 550, 1553 , 1570 , 1600 , 1602 , 162g y 1^38 , i6^z ,
i<ji6, 1622, in- 40. Pierre Mogilas Métropolitain de Ki-
jovie, le traduidt en langue Rufficnne , & le iit imprimer au
Monaflere de Kijovie en 16^6. L'année fuivante le P. Goar

(r) pABRlc/iaî. 6?, {t)lbid. fMge-ji,


I
{,i)Uid.{.%g.bi. 1
Ffij
,

128 DU MEN O LO G E
le publia à Paris en grec & en latin avec de favantes notes
, «J

in-fol. On l'a
réimprimé àVcnifc en 1 7 30,in-foI. Mais quelque
foin qu'il fe foit donné pour rendre cette édition completre,
Lambecius dit qu'on pourroit y ajouter pluHcurs choies (z<),par
le moyen d'un Euchologe manuicrit de la Bibliothèque Im-
périale. On en cite un autre de la Grotte ferrée (x). L'Eu-
chologe ainfi nommé d'un terme grec qui fignine prières ,
préfente d'abord les fon6lions du Diacre dans les Vêpres fo-
lemnelles , les Matines & la MefTe ; puis les prières du foir ,
l'Office des Laudes, enfuiteles trois Liturgies, de S. Chry-
foftome , de faint Baille & des Préfanftifiés ; les Rits ufités
dans l'adminillration desSacremens , en commençant par ce-
lui de l'Ordre viennent enfuite les cérémonies du Batême ,
:

de l'Extrcme-onftion , & celles qu'on doit obferver lorfqu'on


donne l'habit monaftique à un Novice de l'un & de l'autre
fexe ; dans l'élc^lion d'un Supérieur , dans les obféques des
morts ; dans la conflruétion d'une maifon ou d'une Eglilc ;
dans la plantation d'une croix ; dans la réconciliation d'un-
Temple profané par les hérétiques ou autrement; dans la con-
fécration du faint Chrême le Jeudi-Saint ; dans l'abfolution
des cenfures. On trouve auffi dans l'Euchologe des bénédic-
tions en tout genre ; & des Offices pour divcrfcs Fêtes de
l'année ; pour le lavement des pieds S^c pour implorer le fe-
,

cours de Dieu dans les calamités publiques. Il ell chez les


Grecs , ce que le Rituel efl: chez les Latins. On a mis vers la
fin une table où font marqués les Evangiles & les Epîtresque
l'on doit lire aux Fêtes de douze Leçons pendant toute Pan»
née. Cette Table commence par le mois de Septembre qui efl
le premier de l'année Eccléiiaftique chez' les Grecs , & finit
par le mois d'Août. Outre les Epitres & les Evangiles , on y
lit encore les deux verfets que l'on chantoit immédiatement

après l'Epître ; le fécond efl: précédé du chant de YAllc'uia


tantôt d'un ton , tantôt d'un autre , félon qu'il eft marqué dans
cette Table. Suivent onze Leçons de l'Evangile , où la Réfur-
reftion du vSauveur eft annoncée, & les cérémonies qui fe pra-
tiquent dans le couronnement des Empereurs d'Orient.
L'Hirmo'o^e XVIH. Par Hirmologe , les Grecs entendent des chants
fc autres L:
yrce ou airs de muliquc , qui fervent de régies pour le chant des

(«) Iambeciks, I/i. j". Bil/liat. Vitt- (a) Simon. Tdto. j. BiHiot. criiica.f^
I

dotttt.p. «87.
DESGRECS. Ch. XIV. lap
hymnes outropaircs (y);en forte que toutes Ic^cdcs ou rtrophes
d'une hymnclc chantoicnt conformément à rHirmologc. On
dit que Jofaphat Cucuzcle compofa un Hirmologc pour toute
l'année , c'eil-à-dirc , qu il nota toutes les hymnes de l'Office
Eccléfiaftiquc. Ce qui prouve cette lignification
, c'eft que l'on

a de lui l'Office entier de l'Eglife note en mulique ; que, &


ce Recueil eft appelle Hirmologe , dans un manufcrit de la

Bibliothèque Barberine (z). Les Grecs ont un Livre particu-


lier de mufique (a) , qui contient les diverfes Hymnes des
Fêtes de l'année , les Pleaumes &
tout ce qui fe chante dans
les Offices de jour &
de nuit, 8c pendant la célébration des
MylT:eres. On en connoît chez eux un autre intitulé , Petit
Horloge y & imprimé à Venifc en 1642. Ce n'cll: qu'un di-
minutif de l'Horloge ordinaire, pour la commodité de ceux
qui vont en voyage. C'eft par un femblable motif qu'Antoine
Arcudius fit imprimer à Rome en 15^8, de l'avis du Car-
dinal Sanclorius ProtciSteur de la Nation des Grecs, un abré-
gé de l'Antologc , afin que les Prêtres & les Moines qui ne
pouvoient affilier au chœur, fuffcnt en état de récirer l'OlTîce
fans avoir befoin de plufieurs volumes. Allatius a porté un ju-
gement défavantagcux de l'abrégé d'Arcudius (c) ; Se ilparoît
parce qu'il en dit, que le5 plus fages d'entre les Grecs l'ont
blâmé, pour y avoir fait entrer d^s chofes étrangères à l'An-
thologe , &
qui n'ont rien de commun avec les ufages de l'E-
glife Grecque. On peut confulter fur ces L'vres dont nous ve-
nons déparier, le^ deux Diiïertations d'Allatiu^, imprimées à
Paris chez Cramoifi en 1(^44 , &
réimprimées dans le cinquiè-
me tome de la Bibliothèque Grecque de M. Fabricius à Ham-
bourg enAyai.

(y) Allât. Jt llirmoloo. tom. J. Bihti. {a) Allât, nhi fiip, f.7t.
|

74 , 7/.
Gr/cc. F.thric, p. I (^i ) U. Itiii, pag. 77,
(t) Fabric. ibiil. Î5 Lambec. Lib,
j ,
(c) liid.pagtysi,
j
Bitliot.ViiiJeliiin, pag. 173. I

^
230 ERCHINFROID,

CHAPITRE XV.
Enhînfroid , Abbé de Molck ; Vazon , Eveqtie de Liège f
Claber i Helgaud i Syrus & Aldebalde.
Erdiinfroîa
\^ ^ régnc de TEmpereur faine Henri , un Ecoflbîs
Qus le

Kiftoir^e 'du'' ^ Colmann , vint dans la bafle Autriche , dans le


nomiTié
martyre de S. dciiL'in de pafTcr de-là à Jcruialcm avec quelques autres per--
Colmann.
fonnes qui l'accompagnoienc. Son extérieur lit naître aux
Autrichiens le foupçon , qu'il étoit un efpion envoyé par les
ennemis de TEmpire. Ils fe faifirent de lui & le menèrent en
prifon à StocKcrau, petite Ville appcllée auparavant Aftu-
ris. Mais avant que de l'y enfermer , la populace !e mit tout

enfang , à coups de fouet. Colmann -ioufïrit tous ces mauvais


traitcmcns fans fe plaindre, demandant à Dieu la patience.
Le lendemain on le fit comparoître devant le Juge du lieu ,
qui l'interrogea fur fon pays , fa profefTion & les motifs de
fon voyage. Le pieux Pèlerin répondit à tout avec beaucoup
de modeflie ; & quoiqu'il exposât au vrai le fujet de fon
voyage , le Juge fouhaitant d'arracher de lui d'autres décla-
rations , le mit à la torture. Colmann n'avoua rien de plus
que ce qu'il avoit déclaré d'abord. Sa fermeté dans le témoi-
gnage qu'il dcvoit à ion innocence & à la vérité , lui attira
une Sentence de mort, portant qu'il feroit pendu avec deux
voleurs. Cela fut exécuté le 13 d'Odobre 1012 leurs corps :

furent abandonnés en proie aux bctes de la campagne mais :

celui de Colmann n'en reçut aucune injure il demeura fans


:

corruption L'Empereur le fit enterrer honorablement en un


lieu nommé MezeliKim, où fe forma depuis un célèbre Mo-
naftcre connu aujourd'hui ious le nom de MoLk. Il le fit plur
fleurs miracles à fon tombeau; &; il eft au nombre des Saints

dans le Martyrologe Romain ,au 13 d'Oûobre , où il eft


qualifiéMartyr. Eichinfroid , troifiéme AbLé de M»1ck , a
de fon martyre &
écrit Ihifloire de les miracles C'cft la mê-
Riç Quc M, Lambeciusa iait imprimer dans le fécond tomç
ABBÉ DE MOLCK. Ch.XV. 251
de fa Bibliochcque (d) Se Dom Jérôme Pcz , dans !c pfe-
',

micr tome des Ecrivains d'Autriche. On cite deux Chroni-


ques manulcritcs (e) , qui mettent la mort de Cohnann â Tan
1012. Nous ne connoiffons point d'autres Ouvrages de l'Ab-
bé Erchinfroid il n'a pas même été mis au rang des Ecri-
:

par l'Anonyme de Mole K.


vains Eccléfialliqucs
,

II.Vaton ou Vazon fut prcmiéremement Chapelain de ,ieTiLe?'^^°


Notger Evêque de Liège (/) , qui lui confia enfuice le foin
de l'Ecole Epifcopale de cette Ville. Il le fit depuis Doyen
de fa Cathédrale, & quelque rems après Prévôt. Vazon rem-
plit toutes ces différentes places avec honneur , faifant paroî-
tre autant de figcffe que de prudence dans fa conduite. Il fie
auffi les fondions de Chapelain dans la Cour de l'Empereur
Conrad. Ce Prince connoiiTant fon mérite (g) , voulut lui
donner l'Archevêché de Maycnce, vacant par la mort d'A-
ribon. Vazon le refufaavec modeftie: il rcfufa de mémcrE-
vcché de Liège, à la mort de l'Evèque Reginald mais Ni- :

thard qu'il avoir fait placer fur ce Siège , étant venu à mou-
rir , il fallut fe rendre aux vœux & aux inftances du Clergé
& du peuple de Liège. On met fon élection en 1041 , & fon
fa^rc en l'année fuivante (h). Herimanne Archevêque de
Cologne , en fit la cérémonie. L'Epifcopat de Vazon ne fut
que de fix ans & quelques mois ( ? ) ' étant mort le 8 de Juillet
1048. L'Abbé Olbert le fâchant à l'extrémité, vint le voir.
L'Evèque le pria de lui adminiftrer l'ondion fainte , difanc
qu'il mourroit le lendemain. L'Abbé pénétré de douleur, fe
mit à pleurer , &
dit Que Dieu ne me permette pas de vous
:

furvivre fept jours. Il mourut en cITctle feptiéme jour , c'efl-à-


dire , le 14 de Juillet de la même année.
III. Pendant que Vazon étoit à la Cour de l'Empereur A'^^"''"'-
^''^'^
Conrad , il fut fouvent provoqué à la difpute par un Juif Mé- „n jùiT
decin de profefTion , qui pafioit pour habile dans fon art. Il
pouffa fa témérité fi loin , qu'il confentit qu'on lui coupât ua

(J) LAMBFCirs , Tom. z Bibliot. Vhi-


, (f)*\lARTENE. ToTO. 4,ampliJJ', Colleâ.
Joban. />. 61 1. (Î18. Ç^HlFRON. Pez tom. j /j.if.SSi, S8i.
t. Script. AttPriac. p. 94, 9-7. (h) SlCtBERT , in Chroaic. ad an,
(f) ÀÎABILL. Lih. 5'4. Aftnil. pum.4.t.

fage 2?<. Pagi, .«'/ .»««. 1011, p. 'o^. ^';"} ]dfm .-id an, 1048. tj G'lli.s Chri'
(/") Mabillon. Lib. 57. Annal, iiitm. fiu-n, t.crj.l. tcm. ;./>.858. £S MaEILLOII.
78.;..^f 453. !ib, 59. ÂiiiLtl. uitm, ij. />. 431.
,

2^2 VAZON EVESQ. DE LIEGE. Ch. XV.


doigt de k main droite , s'il ne pouvoit prouver fon fenti-
ment par un paflage de l'Ecriture. On apporta le volume de
l'ancien Teftament mais quand on vint au paflage , Vazon
:

fit voir clairement qu'il ctoit favorable à la Religion Chré-

tienne : &
la victoire lui fut adjugée fur le Juif. Il paroît que
la difpute fe fit publiquement à Padcrborne. Les actes n'en
ont pas encore été imprimés , &
nous n'en fçavons que ce
ce qu'on en lit dans les Geftcs des Evèques de Liège ( / )
où l'on a même négligé de marquer le fujet de la contefta-
tion.
tettreàJean. IV. N'étant cncorc que Doyen de la Cathédrale de Liège,
il écrivit une longue Lettre à Jean qui en étoit Prévôt
fort
&C en cette qualité , chargé de l'adminifiration du temporel
de cette Eglife (/). Non-feulement il s'en acquittoit mal,
difpofant de tout fans la participation de perfonne ; mais il
ne fe croyoit pas même aflujetti aux exercices de la vie ré-
gulière. Vazon , foit pour réprimer fon fade {m) , foit pour
le conformer aux ufages de fon Eglife , ne lui donne point
d'autre qualité dans l'infcription de fa Lettre, que celle de
Frère. Il lui rend la juftice de s'être comporté fagement dans
le tcms que fa fortune étoit médiocre: mais il lui reproche
d'avoir changé de conduite , depuis que fes finances fe rrou-
voient plus abondantes. Venant au fait , il lui dit que puif-
que l'Evêquc même , qui efl: le premier du Clergé y ne peut
adminiftrcr les biens du Clergé fins en communiquer avec
fes Clercs; lui qui ne tenoit que le fécond rang, avoir bien
moins de raifons de les gérer icul &
à ion gré , fans daigner
prendre l'avis de fes Confrères ; quoiqu'il fût d'ufage de ne
laiflcr gérer les pofli'eflîons de l'Eglife qu'en leur nom. Il lui re-
proche encore fa négligence dans les exercices de la vie ré-
gulière , qu'il mépriioit de ïicon à s'abficnir prcfque toujours
du chœur, du réfctloire &
clu dortoir; fe trouvant à peine

une fois la femaine , ou même en un mois , au chœur avec


les Chanoines les frères ; qu'il ne pouvoit s'en cxcufcr lur un
défaut de lanté ou de forces , puifqu'il fe portoit bien qu'il &
étoit vigoureux ; moins encore fur fes travaux , puifqu'on le
voyoit fouvent oifif , ou occupé d'affaires féculicres. Il lui

dit cnfuite que fes airs d'ambition & de vanité , ne pouvoient

(/)MAn.T£^. Tom. 4. amflijf, Col.'ttlA (m) Mabilion. lib.p. Anri.il. num,


m-'^7h 1 78.^'>i" 415.
5'alliçr
VAZON, EVESQ. DE LIEGE. Cv. XV. 233
s'allier avec ne prêche que l'humilité ; que fi
fa profefllon qui
•les Romains idolâtres puniHbient ceux qui fraudoicnr la re-

cette des biens de la République , des tncmcs rupplices que


les lacrilcgcs , on devoir à plus forte raifon , pur.ir ceux qui
adminiflrenc frauduleufcment les biens d'une Communauté
Ecclcfiaftiquc qu'en vain il prétendroit s'autoriicr de Tula-
;•

ge de l'Eplife de Cologne , puifque tout s'y paiFoit dans l'or-


dre ; i^e l'Archevêque fréquentoit fouvent le cloître avec un
air de bonté qu'il vifitoit les Ecoles , y propofoit
;
rélol- &
voit des quefliops ; que le Prévôt & tous les autres Oflkiers
rcmpliitoicnt exactement leurs devoirs. Jean s'enfloic encore
de fa qualit-é d'Archidiacre. Vazon le fait fouveiiir que l'E-
glifc a fupprimé les Corévcques à caufe de leur infolence; &
que les Canons défendent à un Diacre de s'afleoir devant un
Prêtre fans fon ordre. Cette Lettre , quoique très-vive , pa-
roît néanmoins avoir été di£lée par l'amour du bon ordre.
Elle fait partie des Atlcs des Evêques de Liège ( « ) , dont
nous avons deux éditions , l'une de ChapeauviUe en 1612 &
1^18; l'autre de Dcm Martcne, dans le quatrième tome de
fa grande Colledion , où cette Lettre eft plus entière plus &
corre£le.
V. On trouve dans l'une & l'autre de ces éditions , un frao;- ^t5 "".^f J?*"*
e la Lettre que Vazon écrivit en 046 , a Henri I , ^g. 1

Roi de France ( ) , pour le détourner de faire la guerre à


Henri le Noir , qui étoit allé à Rome pour fe faire couron-
ner Empereur. Le prétexte de la guerre étoit de s'emparer
de la Ville d'Aix-la-Chapelle , que le Roi , à la perfuafion
des Seigneurs de fa Cour , regardoit comme un appanage de
fa Couronne; l'occafion de s'en rendre maître étoit favora*-
ble , puifque le Chef de l'Empire étoit abfent , qu'il n'y avoit
point de troupes fur pied , que l'on étoit fans méfiance.&
Vazon écrivit donc à ce Prince des Lettres très - foumifes ,
dans lefquelles il lui repréfcntoit les avantages de l'union &
de la paix entre l'Empire & la France. Le Roi Henri n'eut
aucun égard à cette Lettre. L'Evêque lui en écrivit une fé-
conde , & c'eft de celle-là feule qu'il nous refte quelque cho-
fe. Il y repréfente au Roi l'indécence qu'il y auroit de fa

(o) Pair. iSi. tiim, I. Eficop. Liadienf, fug. 350.


I

( ) Martin. Ibid. p.'.g, 857. ^ Ili(li!r.


j

Toi}:e XX. G c
254 V A Z O N,
part de s'emparer des Etats d'un Prince abfenr ; il ne craint
,

point de nommer vol , cette entreprife , & de la lui faire en-


vifager comme contraire à l'honneur de fa dignité. 11 lui re-
préfente encore les fuites fàcheufes de cette guerre , qui ne
pouvoir être que très-préjudiciable aux peuples 8c aux Provin-
ces par les pillages & les autres défordres qui font les fuites
inévitables de la marche des armées. Le Roi touché des re-
montrances de Vazon , changea de deffein , fit affembler un
Concile , & lire cette Lettre en préfence de tous les Eveques ;
& lorfqu'on en eût achevé la le£lure , il donna à Vazon de
grands éloges.
Lettre àRo- yj^ Ro3;er , Evêquc de Châlons-fur-Marne (p) , qui occu-
^ry?n
per Evcquede o- 'j n •
r y ^ > ^ _

Châions. pa ce Sicge depuis lan 1043 julqucn 1062 , ayant cte in-
formé qu'il y avoir des Manichéens dans cerrains cantons de
fon Dioccfc, &
qu'ils y tenoicnt desconventicules facriléges,
confulta l'Evêque de Liège fur la conduite qu'il falloir tenir
envers eux ; &
s'il ne convenoit pas pour les empêcher de per-

vertir le peuple , de les livrer au bras féculier. La réponfe de


Vazon fut que cette héréfie avoit été réfutée par les faints
Pères , &
que l'on devoit regarder ceux qui en étoient infe-
£lés , comme l'yvraie au milieu du bon grain ; qu'en arra-
chant cette yvraie prématurément &
avant la moilfon , ce fe-
roit aller contre les deffeins de Dieu , qui ne veut par, la mort
du pécheur , mais fa converfion qu'il ne faut donc point ôter
;.

la vie à ces hérétiques par le glaive de la Puiflance iéculiere;


que ce n'efl point un glaive de cette nature , que les Evêque»
reçoivent dans leur Ordination ; &
que s'ils font oints de
l'huile fainte, c'eft pour donner la vie non la morr. Il con- &
feille à Roger d'employer d'autres moyens pour réduire ces
fchifmatiqucs ; fçavoir , de les priver , eux tous ceux qui &
communiqueront avec eux , de la communion de l'Eglife Ca-
tholique , & de les dénoncer publiquement excommuniés , afin
que la crainte de cette cenlure donne de réîoigncmcnt de
cette fecte. Vazon fournit à l'Evêque de Châlons divers rai-
fcnncmcnî propres à réfuter ces Manichéens. Us prétendoient
qu'il n'étoit point permis de tuer cela , dit-il , doit s'enten-
:

dre de l'homme & non des animaux. L'Hiilori^n des Eveques


de Liège, après avoir rapporté cette Lettre, ajoute que quel-.

C/) MiRTEK. ï»gt Si-S. 8551. Cl Ji//îiir. Ji^ijCBi, LeoJ.f. 502.


,

EVESQUE DE LTEGE. Ch. XV. 235


. de rhcréfie des Manichéens , ayant cré pris à
<jues fe£latcurs
Gollar , & convaincus de Ibperftidon , furent d'abord excom-
muniés & cnfuite pendus ; c]ue s'ctant informe exaûemcnt de
la procédure , il avoit appris qu'ils n'avoient été ainli traités
que pour avoir rcfufé de tuer un poulet. Il dcfapprouve ce
jugement comme contraire à la conduite de iaint P-lartin , qui
fauva la vie aux Prifcillianiflcs que l'Empereur vouloir faire
mourir à Li pcrfuadon de quelques Evêques.
VII. Le même Hiftorien rapporte aufli un fragment d'une t^ettre àl'Em-
Lettre que Vazon écrivit à l'Empereur Henri le Noir en
^" "
JO47 , à cette occafion (q). Ce Prince fe trouvant à Rome
aux Fêtes de Noël l'année précédente , avoit fait élire pour
Pape Suidger Evêque de Bambcrg , à la place de Grégoire
VI , que l'on avoit lubftitué à Benoit IX qui vivoit encore.
Suidger prit le nom de Clément II , mourut le neuvième &
d'Odobre 1047 , après neuf mois & demi de Pontificat.
L'Empereur pcnfant à lui donner un fuccefleur , coniulra là-
deflus l'Evcque de Liège , qui lui remontra que la dépolition
de Benoit IX ou de Grégoire VI , car il ne s'explique pas
pouvant avoir été irrégulierc dans fa forme , il étoit contre
les régies d'en élire un autre de fon vivant. En effet, Benoît
IX rentra pour la troifiémc fois dans le Saint Siège , le hui-
tième de Novembre de la même année , l'occupa huit mois &
&
dix jours , c'eft-à-dire, jufqu'au 17 de Juillet 1048 , qu'il
renonça à fa dignité.
VIII. Vazon fut fouvent confultè par les Evêques ( r ) ; ^^g.^"''^' P"'
& il répondoit afllduement à leurs queftions. Mais fes rè-
ponfes ne font pas venues jufqu'à nous ; fi ce n'efl celle
qu'il f\t à l'Evêque de Châlons , dont nous avons, parlé ci-
deflus.
IX. Olbert ami de Vazon (s) , naquit à Lederna dans le OlbertAbbé
°"^
Diocèfe de Liège, d'une famille honnête de piété. Il fut ^^-^ &
élevé des fon enfance dans le Monallere de Laubes , où il
eut pour maître dans les icpt arts libéraux l'Abbé Heriger.
11 -en fortit pour aller étudier à Saint Germain de Paris , puis
à Troies , & enfin à Chartres fous l'Evêque Fulbert. De re-
tour à Laubes il y pratiqua avec foin les exercices de la vie

(<j) IhiJ. p.ij.çoz. H-flor. Epifi'p, leoii. t (s) GtSTA Aibat, Gemllacenf. Ton), i'
/ij;r. 305. ISphile^. p. J19.
(r) Ji/V.^,_
,

23^ O L B E R T
religieufe. fait Evêque de "Wormes fort jeune , fou*
Boucharc
de trouver quelqu'un pour Tinflruire. Il s'adrefla pour
haitoit
ce fujet à Baudri Evêque de Liège , qui lui envoya Olbert.
Bouchart devint trèS'habilc, & compofa avec Olbert le grand
recueil de Canons dont on a parlé plus haut.
Il f défait
AbbédeGem^ X. Erluin Abbé de Gemblous , étant mort le premier de
blo'JSËnioi2. Juin de Tan 10 12. Baudri lui donna pour fucceffeur Olbert ,
& le bénit Abbé le 21 de Septembre de la même année (r).
Les Moines mécontcns de ce qu'on leur donnoit un Abbé
qu'ils n'avoient pas choifi , lui rcfuferent l'obéiflance mais :

changeant enfuite d'avis , ils le reconnurent pour leur Supé-


rieur. Olbert rétablit parmi eux la difcipline réguliere,qui avoit
beaucoup foufferrfous fon prédécefTeur & connoiflant que ce :

relâchement avoit pris fa naiflance dans l'oifiveté , il remit


fur pied l'étude de l'Ecriture-fainte & des Pères , comme un
moyen d'entretenir dans fes Religieux les fentimens de piété
qu'il leur avoit infpirés. L''Auteur de fa vie le comparant à
Ptolomée Philadelphe («) , dit qu'il amaffa plus de cent vo-
lumes d'Auteurs EccléHaftiques , & cinquante d'Ecrivains
profanes. Cela paffoir alors pour une grande Bibliothèque ;
& on ne concevoit pas comment Olbert en étoit venu à bout
dans un Monaftere où les revenus étoient très - médiocres :
mais il trouva du fecours dans fes Religieux mêmes , en les
occupant à tranfcrire des livres (x). C'étoit un moyen de faire
éviter l'oifiveté à ceux qui avoient moins de capacité pour les
fciences.

iieftciiarTé
^^' EnTOi4 (y), l'Evêque Baudri fonda un Monaflercen
du'roindei'Ab- l'iionncur de S. Jacques dans l'Ifle à la porte deXiége, dont il
baye de (aint •
j.^^ fondcmcns en 1016. Mais étant mort en 1017,
|gg
' '
fans
Jacques. Sa J . ^ , ,
. „ ,

avoir achcve les batimens , ce monaltere tomba comme dans


, ,

mon en 1048.
l'oubli jufquesvers l'an 1021 , que Wolbodon fuccefleur de
Baudri y mit la dernière main à la recommcndation de l'Em-
pereur Henri. L'Evêque ne trouva pcrfonne plus capable d'y
établir la difcipline monaflique , que l'Abbé de Gemblous :
en forte qu'il eût tout à la fois deux Monaftcres fous fa con-
duite. Il mit dans celui de faint Jacques , des Religieux bien

[y") SrcBBERT. inChmiiic. ad an. 1014.


(«^ Ibii. fitg. 519. C? Mabulgn , in vit, Olbert, Toin. 8,
A<ler. p. 514.
,

ABBÉ DE GEMBLOUS. Ch. XV. '

237
înftruits des devoirs delà vie monartiquc,
formés dans la &
dillipline établie à S. Vanne de Verdun par l'Abbé Richard,
<jui éroit en grande réputation de régularité. Olbert gouverna
ce nouveau Monaftere pendant environ vingt-neuf ans (z) ; &
celui de Gemblous trente-fcpt. Il mourut le quatorzième de
Juillet de l'an 1048 , fept jours après , Vazon Èvêque de Liè-
ge, fon ami. La famine s'étant fait fentir , tant en France
qu'en Germanie, l'an 1043 , Olbert donna en cette occafion
des preuves éclatantes de fa charité. Prévoyant , comme un
autre Jofeph (a) , cette calamité plulicurs années avant qu'elle
arrivât, il remplit les greniers de fes Monafteres ; & pen-
dant que jles riches avares profitoient de la mifere publique
pour augmenter leurs tréfors , il Ht diftribucr libéralement fes
grains aux pauvres , ne voulant avoir d'autre débiteur que
Dieu même. Il fut enterré non à Gemblous , mais à faint Jac-
ques où il étoit mort. Son Epitaphe qui eft en quatre vers élé-
giaqucs {b) , le repréfente comme le miroir des Abbés & Tor-
ncment des Moines.
XII. Il éternifa fa mémoire en écrivant la vie des faints Ses Ecrits.

Pères (c) : ce ;qu'il fit d'un ftyle clair &


poli (d). Sigebert
n'en fpécifie qu'une {e) ,
qui cft la vie de faint Veron Con-
fefTcur ou plutôt l'Hiftoire de l'invention & de la tranflarion
,

de fon corps , &


des miracles opérés par fon intCBceïïion :
car il n'y eft prefque rien dit des adions de ce Saint. Dom
George Galopin , Moine de Saint Guiflain , l'a fait imprimer
à Mons chez Jean Havart en 16^6 , avec des notes de fa
façon. Henfchenius en a fait de nouvelles fur cette HiHoire,
qu'il a inférée parmi les vies du trentième de Mars. Olberc
la dédia à Raginer Comte de Ham , par une Epître qui fe lie
à la tête de l'Ouvrage. Il compofa auffi plufieurs chants en
l'honneur des Saints ( f) ce qui peut s'entendre des hymnes
:

des répons , des antiennes , qui faifoient partie de leurs Of-


fices ; ou des airs de mufique , ou de l'un de l'autre. Il pa- &
roît du moins qu'il compofa des chants & des hymnes pour
les Offices de faint Veron &
de fainte Vaudru (g). L'Auteur

(t) Olbert. vita^mim, ié.pag. 531. (</) GïSTA Mbat. Gemblactnf.f, y 30.
T*l». 8. Au. M^BILLON. Tof». 6. Spicil.
{a)UiJ.num. xi.pag. çjo. (e)SiGEB. ilid,
^iz.num. 17.
(i) Ihid.f. (/) n,d.
{() SlC£B. de Script, Ecclef, c»f, 142, Q) Geîta Abbat, Geinbl.pag. ^•30,
238 RODULPHE GLABER,
des Geftes des Abbés de Gemblous h die afTez claircmenr.'
Quelques-uns ont attribué à Olberc une Hiftoire de l'ancien
& du nouveau Teftament ( h ). Sigebert ion difciple n'en dit:
rien mais on lit dans les Gedes des Abbés de Gemblous ,
-,

qu'il tranicriviten un feul volume l'Hilloire de l'ancien 8c


du nouveau Teftament (i) & c'efl apparemment ce qui a
:

donné lieu à le faire A.uteur d'une Hiftoire des deux lella-


mens. Quoique Olberr ait eu beaucoup de part au décret ou
recueil des Canons de Bouchart ( /) , c'efl toutefois à ces Eve*
ques que l'on en fait honneur.
RoJuIpIie XIII. Rodulphe furnommé Glaber , parce qu'il étoit chau-
GlïÏJsr Moi-
ve &: fans poil , embraffa la vie monaftique dans le Mona-
«e de Ciuni.
flere de Saint Léger au Diocèfe de Langres , n'ayant pas en-
core douze ans accomplis (??j). Il convient que cet état n'é^
toit pas de fon choix , &
qu'il y avoit été engagé par un on-

cle , qui ne trouvant pas d'autres moyens de le retirer de fes


défordres , le contraignit de fe faire Moine. Mais je ne chan-
geai , dit-il, que d'habit , &
non de mœurs ni d'efprit. Je
rejcttois avec orgueil tous les avis falutaires que mes maîtres
fpirituels & mes confrères me donnoient ; défobéiflant à mes
anciens fâcheux envers mes égaux , à charge à ceux qui
,

éîoient plus jeunes que mol j infupportable à tous , c'étoit


foulager la Communauté que de m'en abfcnter. On peut ju-
ger de la fincérité de cet aveu , par ce qui en fut l'occafion.
Un jour quelques momens avant Matines , un homme dont
il fait une peinture affreufe , lui apparut , l'obligea de fe le-

ver , &
lui dit jufqu'à deux fois : Tu ne demeureras pas ici

plus long-tcms. Effrayé de cette vifion qu'il croyoit réelle ,


il court à PEglife , fe jette jau pied de l'autel de faint Be-

noît , y confefTe à Dieu tous les péchés qu'il avoit commis


depuis fon bas âge , &
en demande pardon. Cet homme qu'il
ne doutoit pas être le démon , lui apparut pluficurs autres
fois dans les divers Monaftcrcs où il demeura. De Saint Lé-
ger il pafTa au Monaftcre de Saint Bénigne de Dijon ; de-là
à celui de Mouticrs au Dioccfc d'Auxerre , cnfuitc à Bezc &
à Cluni.
Il change p!u» XIV. Ces changemcns ne vinrent pas toujours de fon in-
fwms fois de

(4) M'Rxi's", NotisaJ Sit^b. cap. I4Z. (/) Sir.EB. in Chronic. ad an, \oo%
JLe LoNc, ,K'W/of./ifr. f. Zfp. 884. {m) Glaber. . Lib, J. lliflor, c, I.
,

MOINE. DE CLUNL Ch. XV. 2^9


confiance. Ses Confrères ne pouvant le fouffrir à caufc de les
mauvaifes mœurs , le chaflbient du Monaftere , pcrluadés
qu'on le recevroiten d'autres à caufe de fon fçavoir. Il dit
lui-même, que cela arriva ainfi («). Guillaume, Abbc de S.
Bénigne de Dijon , voulant le ramener à fon devoir par des
marques de confiance , le prenoit quelquefois pour compa-
gnon de fes voyî^ges (0). Rien ne put fixer fon inconftancc.
Étant dans un Monaftere delà dépendance de Cluni, qu'on
croit Saint Germain d'Auxerre , il s'y occupa à renouveller
les infcriptions & les épiraphes de TEglife (p) Ses foins dé- .

plurent à quelques-uns de la Communauté. Il en fortit & fe


retira à Bcze , & de-là à Cluni où il mourut on ne fçait en :

quelle année.
XV. Ce fut dans cette Abbaye qu'il acheva l'Hiftoire que Ses Ecrits.
l'Abbé Guillaume lui avoit ordonné decompofer dans le tems ^°" Hiftoire,
de fa demeure à Saint Bénigne de Dijon. Elle efl diviféc en
cinq livres , & dédiée à laint Odilon , Abbé de Cluni. Gla-
ber marque dans l'Epître dédicatoire , les motifs de fon tra-
vail. Ses Confrères fe plaignoient fouvent qu'on ne trouvoic
perfonne qui fe donnât le foin de tranfmettre à la portérité
les événcmens confidérables , foit de l'Eglifc , foit de l'Etat.
Il étoit lui-même fenfiblc à cette indolence , qui étoit telle ,
que depuis le vénérable Bede & Paul "Warnefride , qui ont
écrit chacun l'Hiftoire de leur Nation , aucun Ecrivain ne
s'étoit appliqué à rapporter les principaux événemens de l'Em-
pire Romain , ni des Provinces d'outre - mer ou barbares
quoiqu'il y en eût eu de remarquables ce qui faifoit un vui-
:

de de près de deux cens ans pour THiftoire générale tant


civile qu'eccléiiaflique. Glaber ne fe chargea pas de le rem-
plir. Il ne fe propofa que ce qui étoit arrivé depuis l'an poo,
& de donner la fuite des chofes jufqu'à Tan 10^.6 ; & de com-
prendre dans fon Hiftoire les événemens confidérables non-
îeulement de la France (q) , mais de toutes les Provinces dont
l'Empire Romain étoit compofé.
XVI. Apres avoir allégorifé dans le commencement du ^"^jy^*.''"'
premier Livre fur le nombre de quatre (r) , qu'il trouve dans f^^ Fr°ndl
an. 1596.

(«) Glab. IhiJ. (j) Ihi.i. lib. ï ,cap. I ,f. J.


(0) r/>;W. Li,'j. 4 ,iaf. ^.
(/>) lùij. Lib. î ,c.ip. l.
,

24P RODULPHE GL ABEP.,


celui des fens corporels de rhomme , des Evangiles , des
du Paradis rerreftre , il donne en peu de
fleuves qui lorcoienc
mots ce qui concerne le régne du Roi Rodolphe, fils de Ri-
chard Duc de Bourgogne 5 du Roi Lothaire , & des Empe-
reurs Romains , à commencer par Orton fils de Henri Roi des
Saxons. Puis il parle des ravagesque les Sarrafins fortis d"Ef-

pagne en Italie ; les Normans & les Hongrois en Fran-


firent
ce ; & de ;la converfion de ces deux peuples à la Religion
Chrétienne. Le Roi Henri fut couronné Empereur à Rome
en 1014, le 22 de Février. Glaber dit que Benoît VH! qui
devoit en faire la cérémonie , avoit auparavant fait fabriquer
une pomme d'or ornée de deux cercles de pierreries croifés
avec une croix d''or plantée deifus ; que la pomme d'or re-
préfentoit le monde , la croix figuroit la Religion dont l'Em-
pereur devoit être'le prote£leur ; & les pierreries , les vertus
qui dévoient lui iervir d'ornemens ; que le Pape donna cette
pomme en prélence de tout le monde à l'Empereur Henri
qui la reçut avec plaifir , en difant au Pape Vous voulez ,
:

Saint Père , m'apprendre par-là comment je dois gouver-


ner ; que ce Prince la tenant en fa main, ajouta Ce préfenc
:

ne peut mieux convenir qu'à ceux qui ont foulé aux pieds les
pompes du monde pour fuivre plus librement la croix ; &
qu'il l'envoya au Monaflere de Cluni , regardé alors comme
le plus réguHer de tous , & à qui il avoit déjà fait divers au-
tres préfens. Cet Hiftorien dit au même endroit, qu'il paroît
trcs-raifonnable & très-bien établi pour le maintien de la paix,
qu'aucun Prince ne prenne le titre d'Empereur , finon celui
que le Pape aura choifi pour fon mérite , & à qui il aura donné
la marque de cette dignité.
XVII. Il commence fon fécond Livre à l'éledlion de Hu-
gues Capct (s) , c'eft-à-dire , à l'an 5^87 ; raconte les guerres
entre Conan Duc des Bretons , & Foulques Comte d'An-
jou ; le voyage de celui-ci à Jérufalcm, pour l'expiation de
ïcs péchés ; & les oppofitions qu'il trouva dans la fondation
du Monaflere de Bcaulicu ou de Loches. L'Eglifc étant a-
chevée , le Comte pria Hugues , Archevêque de Tours, d'en
faire la Dédicace. L'Archevêque s'en excula juiqu'à ce que
Foulques eut rendu les biens qu'il avoit enlevés à l'Eglile

(0 Lit. z.

de
,

MOINE DE C LU NI. Ch. XV. 241


de Tours Le Comte indigné de ce refus, alla à Rome ,
(r).
expoia l'affaire au Pape Jean, qui députa le Cardinal Pierre
avec ordre de faire ce que Foulques ordonncroit. La Dédi-
cace fc Ht dans le mois de Mai 1004. Mais le jour même
vers l'heure de Nones , quoique l'air fût ferein , il s'éleva un
orage qui emporta le toit de l'Eglife avec toute la charpente.
Cet accident fut regardé comme une punition du violement
des Canons en cette occalion. Car encore , dit Glaber, que
la dignité du Siège ApofloUque rende le Pape le plus rcipe-
•^able de tous les Evoques du monde j il ne lui cfl: permis en
rien de violer les Canons : & comme chaque Evoque eft: l'é-

poux de fon Eglife, dans laquelle il repréfente le Sauveur,


il ne convient à aucun Evêque fans exception , de rien en-

treprendre dans le Diocèfe d'un autre. Glaber rejette fur les


Ordinations limon!aques& les autres défauts du Clergé , lés
mœurs dépravées des peuples ; &
s'attachant à ce qui lui pa-
•roiffoit de plus mcmorablc, il rapporte divers fléaux dont
Dieu avoit châtié les hommes , les dcvaflemens des Provin-
ces , les incendies, les famines, les pertes. Vers l'an )000,
lin nommé ï^eutard ne au Bourg de Vertus dans le Dioccle
de Chàlons- fur- Marne , s'érigea en Prophète. Il quitta fa
femme ; & étant entré dans une Eglife il brifa la croix avec
l'image du crucifix (u) ^ pcrfuadant à ceux qu'il avoit féduits,
qu'il n'agiffbit en cela que par des révélations divines. Il en-
icignoit qu'on ne devoit croire qu'une partie de ce qu'avoient
dit les Prophètes ; qu'il étoit inutile de donner les dixmes.
L'Eivcque Gcbouin le fit venir , l'interrogea , le convainquit
d'erreur , & défabufa le peuple. Leutard fe voyant abandon-
né le jetta dans un puits où il périt. On vit à Ravenne un au-
tre fanatique nommé Vilgard (x) , Grammairien de profef-
Tton. Croyant avoir vu en fonge Virgile , Horace Ju vénal &
oui le remorcioicnt de fon attachement pour leurs Ouvrages
il commença à débiter pluueurs chofes contre la foi de i'E-

gUfe , foutenant que l'on devoit croire en tout ce que les Poè-
tes avoient enfeigné. Pierre Evêque de Ravenne le convain-
quit d'erreur 8c le condamna. Pluficurs de ceux qu'il avoit in-'
fedés de fa pernicicufc doflrine, furent arrêtés en divers en-
droits de riralie , & mis à mort par le fer ou par le feu. Il

fi) Crp. 4. I (*) c.»;. 1 1.

Tome XX, Hh
,

z^x ^
RODULPHE GLABER,
forcit en même-tems divers hcrctiqucs de l'IIle de Sardaî-
gne , qui corrompirent une partie des Chrcriens d'Elpagne;
mais ces Novateurs furent exterminés par les Catholiques. On
crut , cl ce débordement d'erreur , que la prophétie de faine
;«.; io.y.
. jp^^ ^j.^jj. ^(^complic, 011 il eil dit que fatan fera lâché après
mille ans.
Prologue. XVIII. Mais on eut lieu d'être détrompé , par ks exemples-
de vertus que donnèrent prefque auiTi-tôt, tant dans les Gau-
les qu'en Italie, des hommes des deux ordres , c'eft-à-dire
eccléiiaftiques & laïques. remarque de Roduljhe dans
C'elt la
la Préface du troifléme Livre. En effet , les Hongrois à l'imi-
tation d'Etienne leur Roi , embrafferent la Religion Chré-
tienne (;'); on rétablit les Eglifes tant des Cathédrales que
des Monafleres (z) ; on s'appliqua à faire revivre la pureté
de l'ancienne difcipline ; on découvrit quantité de corps
faints , à qui jufques-là on n'avoit rendu aucun culte ( « ) ;
l'Eglile du Saint Sépulcre , qui avoit été détruite par les arti-
fices des Juifs , fut rebâtie par la mère du Prince de Baby—
lone , qui étoit Chrétienne & fe nommoir Marie {b). Les-
Evêques firent défcnfe à tous les Chrétiens d'avoir aucun corn- ^

merce avec les Juifs , dent plufieurs furent chaiTés des Villes ;.
d'autres misa mort; quelques-uns pour l'éviter , demandè-
rent le Batême ; mais peu cfe tems ils apoftafierent. A Orléans,
deux Clercs en réputation de fçavoir , & eftimés à la Cour du
Roi Robert (c) , fe laiflerent féduire par une femme venue-
d'Italie , qui leur communiqua une héréfie dont le fonds étoic
celle des Manichéens l'un le nommoit Etienne , l'autre Li-
:

foye. Ils rcjettoient tout ce qu'on lit de la Trinité dans les di-
vines Ecritures croyoient le monde éternel nioient que Je-
; ;

fus-Chriil fût né de Marie , qu'il eût fouffcrt , qu'il fût rcfluf-


cité que le Batême lavât ks péchés que le corps & le fang-
; ;

de Jefus-Chrift fe fît par la confécration du Prêtre enfei- ;

gnoicnt qu'il étoit inutile de prier les Saints , de faire de bon-


nes œuvres ; condamnoient le mariage , & défendoient de
manger de la chair. Glaber réfute ces erreurs {d) , 8c remar-
que qu'après que l'on eut fait des efforts peur en retirer ceux
qui en étoient infedés , comme on les vit endurcis , on en fie

(^! C.ip. I. I (l) Cfip.-'..

44) Ci/i. é.
J (^J-^ Yra^m. ulutl. Barcti. ai cr.. 1G17*
,

MOINE DE CLUNT. Ch. XV. 245


brûler quelques-uns par ordre du Roi ; que de treize que l'on
menoit au lupplice , il n'y eut qu'un Clerc &
une Rciigieufe
qui fe convertirent ; que les autres commençant à fentir le
feu le mirent à crier qu'ils a voient été trompés ; qu'on en re-
,

tira quelques-uns , mais inutilement , parce qu'ils étoient prel-


que réduits en cendres. Iln'efl point aile de concilier Glaber
avec lui-même (t- ) , dans ce qu'il dit de Hugues fils du Roi
Robert. Hugues , iclon lui , fut couronné à 1 âge de dix ans j
il mourut à dix-huit ans : &: toutefois il lui donne vingt-huit

ans de vie , dans l'éloge de ce Prince en vers iambiques. Il dé-


crit dans un autre Poëme, le luxe & la dépravation des mœurs
occalionnés par le mariage du Roi Robert avec Confiance fille
du Comte d'Arles.
XIX. Le Prologue qu'on lit à la tête du quatrième Li-
vre (/ contient en abrégé ce qui le pafla dans l'avènement
) ,
de Conrad à l'Kmpire après la mort de l'Empereur Henri
qui ne laifia point de poftérité. Glaber, dans le corps du Li-
vre (g) y rapporte les tentatives qu'Euiîache Patriarche de
Conftantinople , fit conjointement avec l'Empereur Bafile
pour obtenir du Pape Jean XIX , la permiffion de prendre
le titre d'Evcque univerfel dans l'Eglile Orientale , comme
le Pape le prcnoit par toute l'Eglifc la Lettre que Guillaume
;

Abbé de Saint Bénigne de Di;on , écrivit au Pape pour le


détourner de confencir à la demande des Grecs la naiflance ;

d'une nouvelle héréfie en Italie ( A ) , qui tcnoit des fuperfti-


rions du paganifme & du judaiTme , 6c coram.ent étant à Suzc
avec le même Abbé , ils avoicnt découvert l'impofturc d'un
inconnu qui trompoit les peuples par de fauffes reliques (i).
Il dit à cette occafion , que Dieu , pour punir les péchés des
hommes, permet quelquefois aux efprits malins de faire des
prodiges (/). Il met en 1035 , une famine prefque générale
dans tout le monde (w) , fi affrcufe, qu'en France pluficurs
furent brûlés pour avoir mangé de la chair humaine. Pour iub-
venir à la mifcre publique , on vendit les ornemens des Eglî-
les & on vuida leurs tréfors , fuivant les décrets des Pères.
Cette calamité dura trois ans elle fut fuivie d'une grande
:

0) C..9. 9. (i^Cap.^.
(/) L»*. 4. (/) C:,p. 4.
U)Cap.i. (»') i^'V- ï
ih) Caf. l.
Hhij
144. RODULPHE GLABER,
fertilité ce qui donna lieu à de fréquentes affemblées d'Evc-
;

ques &
d'Abbés ; où il fut réfolu d'un confentcment unani-
me , que l'on s'abfticndroit de vin tous les Vendredis de l'an-
née , &
de chair les Samedis , Onon pour caule de griéve ma-
ladie , ou qu'en ces jours il tombât une Fête lolemnelle au :

quel cas on racheteroit cette abftinence par la nourriture de


trois pauvres. Il fe fit vers le même tems un grand concours
de peuples de toutes les parties du monde au Saint Sépulchre
à Jérufalem («). Les Sarrafins perfécuterent les Chrétiens en
Afrique ; mais ceux-ci les vainquirent en divers combats (o).
Les Leuticiens peuples barbares du Nord, ainli nommés des
marais qu'ils habitoient , firent auflTi fouffrirent aux Chrétiens
de cruelles perfécutions (p); mais enfin l'Empereur Conrad
les défit. Glabcr finit fon quatrième Livre par la delcription
d'une éclypfe terrible qui jetta la conflernation par-tout. (17) ;
il ne manque guéres de rapporter ces fortes de phénomènes
,
iuivant l'ufage dcprefque tous les Hiftoriens.
XX. Il commence le cinquième par le récit de diverfes ap-
paritions d'efprit (r) , tant à lui qu'à d'autres pcrfonnes : &
il raconte de façon , qu'on voit bien qu'il ne les révoquoic
les
pas en doute. Il trouve dans la verge miraculeufe de Moyfc,
dans le Serpent d'airain , dans le pafl'age de la Mer rouge ,
les figures des Myfteres de la nouvelle Loi. Il ne doutoit
point de la préfence réelle dans l'Euchariftie , remarque &
qu'il étoit d'uiage de la conferver dans une boétc ; que quel-
quefois on s'en fervoit pour découvrir le crime ou l'innocen-
ce d'un accufé , quand on manquoit d'autres preuves ; que 1
l'huile fainte des infirmes rendoit fouvenc la fanté aux mala-
des , quand ils la recevoient avec foi ; &
que prclentée devant
les maifons en feu , elle l'éreignoit , ou empêchoit les flammes
de fe communiquer à d'autres bàtimens; que quelquefois on
apportoit aufll l'Euchariftie pour faire ceffer les incendies ;
que févéremcnt les négligences commifes dans
l'on punifioit
la célébrationou l'adminiilration des Myftcrcs: en lort'c que
fi un Prêtre avoir laifie tomber ou le corps du Seigneur ou

fon fang précieux , il étoit mis en pénitence ; ou l'on faifoic

(p; Cap. 7. I ( ' J ^'^- S' '*h *•

If)
c«/. «. r
MOINE DE CLUNI. Ch. XV. 245
expier cette faute à d'autres. Il rapporte divers exemples (s) ,

pour montrer que le Sacrifice de la Méfie eft utile aux morts:


& parle d'un Monaftere d'Afrique , où , pour cette raii'on ,
l'on diioit des Meffes depuis l'aurore jufqu' à l'heure de dî-
ner , fans difcontinuation ( f ). C'efl: en cet endroit qu'il dit
Quelque choie d'un Taïfale des Gaules (?/) , peuples qui
dès le tcms de faint Grégoire de Tours , croient établis dans

XXI. Vers l'an 103 1 (;»:), les Evoques, les Abbés les & '^'^''^ '^^

Seigneurs aflTcmblés avec les principaux des peuples , avoient


fait divers réglemens pour le maintien de la paix entre les
&
hommes libres les ferfs. Il y étoit porté entre autres cho-
fes , que tous marcheroicnt fans armes ; que ceux qui pille-
roient ou ufurperoient le bien d'autrui , feroient punis de pei-
nes pécuniaires ou corporelles", que les Eglifcs ferviroient d'a-
fyle à tous ceux qui s'y réfugieroicnt pour quelque crime ,
excepté à ceux qui auroient violé cette paix; que les Clercs ,
les Moines âc les Religicufes feroient en fureté dans leurs
voyages avec ceux de leur compagnie. Mais la plupart des
articles de cette paix ayant rencontré beaucoup de difficul-
tés (y), en fe réduiiit à une trêve pour certains jours, c'cft-
à-dire , que depuis le Mercredi au foir jufqu'au Lundi marin ,
perfonnc ne prendroit rien par force , ne tireroit vengeance
d'aucune injure, n'cxigeroit point de gage d'une caution ; Se
que quiconque y contrevicndroit, paieroit la compolltion des
JLoix, comme ayant mérité la mort , ou fcroit excommunié

& banni du pays. On nomma cette convention , la Trêve de


Dieu ou du Seigneur , parce que l'on crut qu'il l'avoit approu-
vée par un grand nombre de punitions exemplaires fur ceux
qui i'avoicnt violée. Elle fut obfervée aflcz exatlement prei-
que dans toutes les Gaules ; mais les Neuflriens refufant de
s'y loumettre , fuivant les exhortations d'Odilon Abbé de
Cluni, & de Richard Abbé de Saint Vanne, furent attaques

(s) Sed & illiv! magnifie! Myftcrfi ce ! trumropiajrL, continua MilTaixm celebra-
Ifbrauo, quarrùm profit animabus defun- i tio. Mi'/.
âori-ni fidtlium, rutn in mt-lt s (ît prib-- (k) VcjiX. Imjingttlaritis littérjirn. Tant,
tifTîmuTD ,Iibct tJnien è divf r(-s prodiicere i.p- 47.
in mtdium iiniini. Gl.ab. lil'. i. cap. 1, (a) Gi-AB. lib, 4. cap. y.
(1)Mos iilius Ca nobli à prima diei au- (/) Uiii. Lit, S i(-tf. I.
rora ufque in lioram prancii , propttr fra- i
,

24^ RODULPHE GLABER,


d'un feu qui leur dcvoroit les entrailles : c'eil ce qu'on appelloit
la maladie des ardens.
XXII. Apres la mort du Roi Robert ( z) , Henri fon fils

qu'il avoir fait facrer y avoir déjà quelques années, entra en


il

pofieirion du Royaume; mais il eut des guerres à foutenir con-


tre les deux fils du Roi Eudes , Thibaud &
Etienne elles tour- :

nèrent à fon avantage (<2 ). Il y eut aufli des conteflations au


fujet de l'Archevèclié de Lyon vacant par la mort de Bou-
chard. Le Pape Jean XIX jugeant les contendans indignes
d'un il grand Siège , nomma Odilon Abbé de Cluni. Le laine
homme ne la croyant pas compatible avec la profeflion hum-
ble qu'il avoit embraffée , refufa l'Archevêché. Henri Roi
d'Allemagne , étant venu à Befançon , on lui confeilla de
nommer Odalric Archidiacre de Langres , qui accepta & gou-
verna dignement TEglife de Lyon^Z*). Le même Prince s'ap-
pliqua à déraciner la fimonie qui n'infcdoit pas m^oins l'Em-
pire que le Royaume de France elle s'étendoit juiqu'à Ro-
:

me. Benoît IX qui occupoit alors le Saint Siège , avoit été élu
à l'âge de douze ans , mais à force d'argent. Il fut chaffé de
fon liiége, & l'on mit à fa place un homme très-pieux , Ro-
main de naidance, qui prit le nom de Grégoire VI. Sa bon-
ne réputation répara tout le fcandale qu'avoit caufé fon pré-
décefîeur. C'efi: par ce trait que Glaber finit ion Hifloire d'où :

il fuivroit qu'il l'acheva en 1045 , qui fut l'année de l'élection

de Grégoire VI. Mais on voit par le premier chapitre du cin-


quième Livre (c) , qu'il l'écrivoit après le mois de Novembre
de l'an 104^) car il y raconte qu'en certains endroits , on fit
:

cette année deux récoltes de grains dont la féconde arriva au


mois de Novembre.
^''S^meyitde XXIII. Glaber ne s'eft donc point attaché fcrupuleufement
c*t.e oire,
1
^ p^^^^, (^ç.^ tcms. Au chapitre 4 du quatrième Livre , il rap-
porte ce qui s'efl: pafle en 1033 ; &
dans le neuvièm.e, les
événemens de l'an 1000. Il feroit ailé de donner d'autres e-
xemples de tranfpodtion. Il n'efl pas non plus toujours cxad
dans fa Chronologie ; & il ufe quelquefois de certaines ma-
nières de compter, qu'on n'entend que dillicilcme.it (^). Son
Hiftoire feroit plus agréable & plus utile , s'il y avoit plus

(n) C^p.i. (OC.,;. I.


I
(i)C.i". 4, ( </ )lMABrLiON. »»TO.. ^. Âiitiat. fttg.
I
MOINE DE CLUNI. XV.Ch. 247
d'ordre
re ,
plus de fuite & plus de clarrc. Mais on doit lui Tij-a-
voir gré de fon travail , puifqu'il nous apprend quantité de
faits que Ton ne lit point ailleurs. Il fe trouve à la tête des
Hilioricns de France dans l'édition de Francfort en i')C)6,
,

fol. chez Marnius ; & dans le quatrième tome de la Collec-


tion d'André Duchcfne à Paris en 1 «^4 1 Le Père Le Long cite .

une verlion Françoife de l'Hiftoire de Glaber (e) , 8c infé-


rée dans la Chronique de faint Dcnys : mais on n'y trouve
rien qui en approche (/).Sigebcrtfoit mention dcl'Hinoirc des
François écrite par Rodulphe Glaber-, mais il ne dit rien de la
vie de faint Guillaume Abbé de Saint Bénigne de Dijon, que
le même Hiftorien a compoiée.
XXIV. II en parle lui-même dans le quatrième Livre de Vie âe s.
fon Killoire (g) y où il dit qu'il l'avoit écrite long-tems au- Guillaume,
paravant. Dom Mabillon l'a fait imprimer dans le huitième
tome des Acles de l'Ordre de Saint Benoit (k). Elle fe trou-
voit dé a dans la Collection de Bollandus au premier jour de
Janvier: & le P. Rouviere lui a donné place dans fon Hi-
ftoire de Réomé ou Moûtier-Saint-Jean , imprimée à Paris
10-4". en i<j37 («)• Hugues de Flavigny renvoie ceux qui
voudront connoitre les actions de l'Abbé Guillaume (^) , à
ce que Glaber en écrit. Il étoit plus en état qu'un autre , de
les raconter , puifqu'il en avoit été tém.oin ; & qu'il avoit
vécu <i Saint Bénigne avec pluilcurs difciples du Saint , auprès
defqucls il s'ètoit inllruit des autres faits qu'il n'avoit pas vus
lui-même. C'efl: ce qu'il aflure dans le Prologue qu'il a m,is à la
tête de cette vie , qui vaut mieux pour le ftylc fit pour l'arran-
gement , que fon Hiiloirc.
Pc('(Tcs de
XXV. On y lit deux petites pièces de poède (m) , l'une Gkbér "^

en vers iambiques rimes , fur la mort du Roi Hugues ; l'autre


en vers hcxamcttres , iur les délord rcs introduits en France
par les peuples d'Auvergne & d'Aquitaine, enfuite du ma-
riage du Roi Robert avec la fille de Guillaume Comte d'Ar-
les. Il dit que demeurant à Saint Germain d'Auxerre, il rc-
nouvella les infcriptions des autels , qu'il en compofa d'au-

(f) Lr LoKG.Biliîiothtqrie Traiifoife , p. [jr] GlAB. LU- 4. ("iJl. 4.


241 , t!ur,i, 6 09. (h) M A Bill. tom. 8. AdoT.pa^. i^g.
( f) M. L.iCnriit JfSiihitePitltye, Ms-
moire de t'A.adiimie des Inferip. tom. S. p. (l) Tom. 1. Biliot. no-j. La! b. p. 158.
•.549. («*) Lih. J. cap. p.
248 H E L G A U D ,

très pour les faints Martyrs dont on y avoir des reliques ,


ou qui y ctoicnt honores particulièrement ; & qu'il iit des
Epitaphes pour être gravées lur les tombeaux de quelques per-
fonnes de piété enterrées dans l'Eglife de ce Monadere. Glabcr
ctoit homme d'efprit & habile pour ion tems.
Hel.'îaud Moi- XXVI. H eut pour Contemporain , Helgaud Moine de
(«) , fous [PAbbé Gauzlin , fils naturel du Roi Hu-
n-deFkuti. Fleuri

gues Capct. Gauzlin étoit en même -tems Archevêque de


Bourges , & mourut en 102p. Ce fut par fes ordres que Hel-
gaud conftruifit à Fleuri une Chapelle fous l'invocation de
laint Denis & de fes Compagnons, Martyrs. Ne l'ayant faite
que de bois , elle périt dans un incendie. Helgaud en fit une
nouvelle de pierres ; & afin qu'à l'avenir on fçût de qui ctoic
l'ouvrage, il mit aux deux côtés de l'autel une infcripiion,
avec Ion nom. Odolric Evêque d'Orléans , en fit la Dédica-
ce. C'étoit donc avant l'an 10^3 , qui eft l'époque de la mort
de cet Evêque. Helgaud en étoit aimé \ mais il avoit encore
un ami plus puiffant en la perfonne du Roi Robert , qui l'ai-
moit comme fon fils (0). Les Ecrits d'Helgaud ne fourniffent
rien pour fixer le tems de fa mort. Il paroît feulement qu'il
vécut afi'ez long-tems fous le régne du Roi Henri fils du Roi
Robert (p), puil'qu'il dit que les Hiitoriens qui entreprendroient
de rapporter les faits de guerre de ce Prince , trouveroicnt aufli
matière à faire paroître Henri & les autres fils de Robert com-
me de grands Capitaines.
Ecrite d'Hel- XXVII. Il fait voir par ces paroles , que fon deflcin en
p,-n;l. Vie du écrivant la vie du Roi Robert , n'étoit pas d'y faire entrer fes

Koi Robert,
exploits militaires; aulfi s'eft-il borné à raconter les œuvres
de piété: ce c]u'il fait plutôt en Orateur qu'en Hiflorien. C'cft
fans aucune raifon que les Copiées ont mis dans l'infcription
de cette vie, qu'Helgaud l'avoit abrégée fur une plus éten-
due. Il ne prend nulle part la qualité d'abbréviateur, & il die
affcz nettement que l'Ouvrage ell de lui (</ ) , en déclarant
(]u'il n'entreprend point d'y parler des guerres de ce Prince

ni des afiaircs politiques , lailîant ce foin à d'autres. C'eft cr^


ce fens qu'on peut regarder Ion Ecrit comme un abrégé de la
vie du Roi Robert, puifqu'il ne s'arrête qu'à fes vertus mora-

les
,

MOINE DE CLUNI. Ch. XV. 245?


les. 11 précédé dans les éditions de Francfort
cfl: de Paris, &
du Teftamcnt de Léodebode , Fondateur de l'Abbaye de
Fleuri , &
d'une Notice de cette fondation. Ces deux pièces
font conje6lurcr qu'Hclgaud s'étoit propofé de donner l'Hi-
floire des Abbayes de Fleuri & de Saint Agnan d'Orléans
& d'y ajouter celle du Roi Robert , bienfaiteur de ces deux
Monaftercs (r). On appuyé cette conjedurc , fur ce que dans
la Préface de la vie de ce Prince , l'Auteur rappelle ce qu'il
avoit dit de faint Agnan & de fleuri après quoi il déclare :

3u'il va commencer l'Hiiloire du Roi Robert; ce qui forme ,


it-on , une liaifon entre les deux parties de cet Ouvrage ;
dont la première doit en ce cas, être ccnfée perdue. Mais ne
pouroit-on pas dire qu'Helgaud s'efl contenté de rapporter
îe Teftamcnt de Léodebode avec une Notice de la fondation
de Fleuri , & d'y ajouter un abrégé de la vie de Robert (s) ?
En effet , ces paroles Nu/ic huic jcripto addere curavimus Ro-
berti vhamrapportent au Teilament de Léodebode
, fe non &
à une Hificire particulière des Monafîeres de Saint Agnan &
de Fleuri.
XXVIIL Hclgaud remarque que la dévotion du Roi Ro- Traits rrmar

bert pour le Sacrement de l'Euchariflie , étoit telle , Qu'iP""^'^^''l"'


^.
TN- j • ^ r ri-
' Jn vie du Roi
croyoït y voir Dieu dans la gloire, plutôt que fous une lor- Robert,
1
J

me étrangère ; qu'il avoit grand foin de fournir des vafes &


des orncmcns pour la célébration des fainrs Myfléres ( r ) ;
qu'il fe failoit un plailir de couvrir d'or d'argent les ChâlTcs &
où l'en enfermait les reliques des Saints ; qu'il pouflbit fa com-
palTion pour les pauvres , jufqu'à leur laifier prendre en fa
.préfcrce l'argenterie de fa Chapelle ; qu'ayant fait arrêter le
jour du Jeudi-Saint (u) , douze hcm.mes qui avoient conjuré
contre fa vie, il les fit garder , nourrir fplcndidcment, le &
jour de Pâques leur fit donner la Com.munion {x) ; qu'ayant
été tous condamnés à mort le Lundi , ce Prince leur fit grâ-
ces, par refpeâ peur la nourriture cclclle qu'ils avoient' re-
çue ; que pour prévenir les faux fermcns , il fit faire un Reli-
quaire de criftal orné d'or , mais fans reliques , fur lequel il
faifoit jurer les Seigneurs; &: un autre d'argent, contenant

(r) M. de Sahut P.iUyt. Ilift. Je VAuiil \

du Irifcrlct, toîji. I o. ;>.


f f 7.
(»^ Roi;. ï'i',t Pr.tfit, p. 6t,

Tome XX, I i
.

250 SYRUS ET ALDEBALD,


un œuf de grifon (y) ; s'imaginant que la validité du ferment
dépendoit des reliques. Il met la confccration de l'Eglife de
Saint Agnan en la trente-fixicme année du régne du Koi Ro-
bert (z) ce fut en la trente-troifiémc (.?.). La vie de ce Prin-
:

ce par Helgaud , a été imprimée avec celle de faint Louis à


Francfort en 1577, &
avec l'Hiftoire de France par Gaguin.
Elle parut depuis en la même ville à la fuite de Glaber en 1 50^,
& dans le quatrième tome de la Collcftion d'André Duchefne
à Paris en i (34 r

Ouvrages fup- XXIX. Quelqucs-uns ont attribué à ?îelgaud la vie de faint


pofés à Hei-
Abbon Abbé de Fleiui {b) : mais elle efl: inconreftablement
^*"
d'Aimoin Moine de Fleuri & difciple du Saint. Les deux
fragmens imprimés à la fuite de la vie du Roi Robert , font ti-
rés de la Chronique d'Ademar de Chabanois. Il paroît qu'on
ne les a placés en cet endroit , que parce qu'il y eft dit quelque
chofe des Rois Hugues & Robert.
Fj'in&iM- XXX. Syrus Moine de Cluni fous l'Abbé faint Odilon,
dcbiiaMoines
(î^^j-jy^^ \^ ^[q (\q f^int Maïeul , aux inftances réitérées d'un de

les Contreres nomme w


armer, qu il nomme de lainte mé-
moire à caufe de fes vertus. Obligé de partir pour l'Italie, il
kiffa l'Ouvrage imparfait ; 'Warnicr envoyé en Alface, l'em-
porta avec lui , & le laifTa dans l'Abbaye de Mcrbac (c).
Saint Odilon l'y trouva ; & de retour à Cluni , il ordonna à'
Syrus qui étoit aufli revenu de Pavie , de revoir cette vie
de l'achever. Elle eft divifée en trois Livres, avec une Epî-1
tre dédicatoire adreffée à ce faint Abbé. Ce qui preuve que
Syrus publia ion Ouvrage avant le premier jour de Tan 1045?
qui eft l'époque de la mort de faint Odilon. Après celle de
Syrus, Aldebald auiïi Moine de Cluni (d) , mit des Proie-"'
gués à chacun des Livres de la vie de faint Maïeul; & pour
orner cette vie, il la pariema de vers, mais qui ne contien-
nent aucun fait que Syrus n'eût rapporté ; (i ce n'cft qu'au
commencement du premier Livre , il parle des ravages que
les Sarrafins firent dans l'Ifie de Lcrins circonftance ablb- :

ment étrangère à l'Hiftoire de faint Maïeul. Dom Mabillorv

44 . FAP.Ricn'S , Billiat. média Latin, tom,


î.f. r(îf.
(fly MABiLiom m. ^6. Amial. ntim. (c) j4 ui Mabil. Ttm. 8. Ador.p. y(n^
Fp.'ji, ilrJicat.

^
{b) Vossius dt IJijitr, L»ti». Ub. i.caf. [d^ liiJ, in Oifcrvat. />. 735.
,

MOINES DE CLUNI. Ch. XV. 251


l'a détachée de la vie de ce Saint imprimée dans le fcptiéme
Tome des Aîtes de l'Ordre , &
l'a mifc eni'uite comme un

Appendice , à la vie de laint Porcaire Abbé de Lerins ( e )


. fous qui arriva l'incurdon des Sarralins. Saint Maïeul eut plu-
fieurs autres Hiiloricns , entre autres, faint Odiion Nal- &
god mais tous ayant puiié dans Syrus , on s'efl contenté dans
:

le recueil des Aclcs Sénédiclins , d'y inférer Ton Ouvrage.


Celui d'Aldebad Te trouve dans les Bollandiftes à l'onzième
de Mai (/). Syrus écrivoic avec beaucoup d'ordre: Ion fiyle
eft clair &paffablement bon , foit en profe, foit en vers j car
il en a fait entrer quelques-uns dans fon troiiiéme Livre.

CHAPITRE XVI.
Saint Odiion , Ahbê de Cluni , & Jotfaud fon Difdple.
I. "^T^""" ^'^1 Auvergne de la noble famille des Seigneurs de ^- .9."'''>"*

i.^ .'îercœur (g) , il eut pour pcrc Berald l'un des plus sÔrÏÏation.
îlluilres &
des plus riches de la Province ; pour merc Gir- &
bergc , autant recommandable par fa piété que par la nobleflc
de fon extraction , qui après la mort de fon mari , fc fit rcli-
gicufe dans l'Abbaye de faint Jean d'Autun. Il perdit dans
Ion enfance l'ufage de fes mem.bres. Sa nourrice l'ayant porté
un jour à une Eglife dédiée à la faintc Vierge, l'y laifTa ieul:
l'enfant le traîna comme il put juîc]u'à l'autel , s'aida de la
nappe pour fe lever , Se fc trouva guéri aufli - tôt. Quelque
tcms après fcs parens le mirent dans le Clergé de Saint Julien
de Brioude ; d'où il palïii à Cluni dans le dcffein d'y faire
profelîion de la vie monaflique. Saint Maïeul lui en donna
l'habit , & conçut de lui dès ce moment , de grandes cfpé-
rances. Ses progrès dans la perfection furent en effet fi rapi-
des , queleiaint Abbé qui fe fcntoit chargé d'années & d'in-
firmités , le jugea digne d'être fon Coadjuteur & fon fuc-
icelïeur.

(e) Totn, 7. Aihr. p. 7S7. (g) MaBILLOU. Oôferval. in-vit. Odil.

(/) EoLLAND, ad dhin n hliiit. icm. Tcm. 8. Athr.p. 5^4.. ^fetj. î5 Lit. <;o
,
A/iri.il. liuiit. j ?. p. 7 j.

tiij
^

252 ^ SAINT O D I L O N ,
IleftfaitAbbé en préfence de plufieurs perfonnes de la
II. L'éleiSlion fe fit

, Comtes , Abbés , & des Moi-


^"' Evêques
PznlTù première condirion ,

nes de Cluni. Nous en avons encore i'Ade (h) , qui eft fouf-
crit de faint Maïcul , de Rodulphe Roi de Bourgogne , de
Bouchard Archevêque de Lyon , de Hugues Evcque de Ge-
nève , de Henri de Laufanne , de Hugues de Màcon , de
Vauthier de Langres , de plufieurs autres Prélacs ou Sei-
gneurs & de 77 Moines. On met cette éledion en 5)91 , &
on ne peut la mettre plus tard qu'en (?92 , puifque dans p'u-
.,
fleurs chartes de l'Abbaye de Cluni (z), écrite en cette an-
née-là , faint Odilon eft nommé Abbé : cependant Rodul-
phe ne fut fait Roi de Bourgogne qu'en 515)4, félon la Chro-
nique d'Hcrmann. Il faut donc dire que ce Prince ne ioui-
crivit à l'Ade d'cledion que trois ans après qu'elle fut faite (/).
Le nouvel Abbé étoit alors dans la vingt-neuvième année de
de fon âge, étant né en 5^2. Saint Maïeul continua néan-
moins à être regardé comme Abbé de Cluni, mais faint Odi-
lon avoit la principale part au gouvernement. Il e.i fut char-
gé feul des l'onzième de Mai 9^4 , auquel faint Maïcul
mourut.
III. L'Auteur de la vie de faint Odilon , qui avoit été fon
^^^^"'^"°"' difciple , en témoin oculaire ( w ),' nous le repré (ente com-
me partageant le tems qui lui refloit après les exercices ordi-
naires de' la vie religieufe , entre l'étude des Livres faints &
la prière ; & nous
renvoie pour juger de fa capacité de la &
douceur de fon éloquence , à fcs Difcours fes Lettres. Il &
ajoute («) , que par fa doâirine &
la pureté de fcs mœurs, il

s'attira l'eftime de tout ce qu'il y avoit de plus grand dans


l'Europe ; du Roi Robert , de l'Impératrice Adélaïde , de
l'Empereur Henri , de Conrad , d'Etienne Roi de Hongrie ,
de Sanches Roi d'Efpagne , des Papes Sylveflre II , Benoît
VIII IX , Jean XVIII XIX ,
& & &
Clément TT; des Evê-
ques de Panpelune, de Mcâcon &
de Chartres; que dans un
tems de fimine (0), après avoir employé au foulagcmcnt des
malheureux les revenus de Cluni , il en vendit les vafcs 5c les
orncmcns précieux, même la couronne de l'Empereur Henri

(l) Tom. (,. SpiciUf.p. 41?. ï («0 f'''^» Odilt-n. fiiim. 6.

(») Mabill. »oi«. S. ^flor.p. ;j8. 1 {ti) Ihd.m'm.J.


(/) Uent. Lib. ;o. mm. Ji?. J
(o) ll>id. unni, ^
,

ABBÉ DE
CLUNI. Ch. XVr. 2^3
ne croyant point qu'on dût les épargner au préjudice des pau-
vres rachetés du fang de Jclus-Chrilh
IV. Il accompagna ce Prince dans fon voyage à Rome en s.s voyages

1014 (p) , où il fut couronné Empereur. Cétoit fon Ibcond ^i'^°"^«-

voyage en Italie. 11 en fit un troifiéme en 10 7 , &, ce icmblc, 1

un quatrième en 102?.. Par dévotion envers faint Benoît, il


alla au Mont-Caffin (q) , où il demanda par grâces de bai-
icr les pieds de tous les Moines de la Communauté ce qui :

ne lui fur accordé qu'avec peine. Il djnna en cette occafion


beaucoup d'autres marques de fon humilité. L'Abbé Théo-
bald le pria de lui envoyer à fon retour en France , des re-.
liqucs de faint Maur. Ce que l'Abbé de Cluni n'exécuta que
fcpt ans après. La réforme qu'il mit en divers Monafleres,
lui occafionna beaucoup d'autres voyages , fans parler de ce-
lui qu'il fit à Orbe pour rendre vidte à l'Impératrice Adélaï-
de. Cette picufe Princcfie l'ayant apperçu , verfa des larmes ;
& lui prenant la robe, elleîa baifa , l'approcha de fes yeux , fe

&
recommanda à fes prières , lui déclara qu'elle mourroit bien-
tôt. Cétoit en çigp; elle mourut en effet le i Cj de Décembre de
la même année.
V. On a déjà remarqué plus haut, que l'Abbé Odilon avoir H eft char.^i

été chargé de faire recevoir la Trêve de Dieu & qu'elle fut ^-''^^

A--
'^'^
; Jf'''~
n n -M 'tt voir la liLve
n
S et reçue en Aquitauie , en Aultrafie &^ ailleurs. Hu^tucs de Di:-u il ,v-
de Flavigny rapporte cet événement fur l'an 1041 (r) , & (uie l'Ard::-.
'^^'^^'"^'^^'''"^
dit que ce faint Abbé y eut plus de part que perlbnne ; que
cette Trêve fut établie non-feulement par autorité humaine
mais par des prodiges qui tenoient du miracle. la mort de A
Bouchart Archevêque de Lyon , le Pape Jean XIX informe
des défordres que cauioir la vacance de ce Siège, nomma fui-
vant les defirs du Clergé & du peuple, Odilon pour le rem-
plir ; & lui envoya le Pallium & l'anneau , avec ordre d'ac-
cepter cette dignité. Il s'en excufa ce qui obligea le Pape de :

lui écrire en ces termes (s): « Saint Grégoire nous enfeio-nc


» que pluficurs chofes paroiiïent bonnes qui ne le l'ont pas : &
» qu'y a-i-il de meilleur en un Moine que l'obéifiance? Vous
» favez combien faint Benoît la relève. Nous avons appris

(p) Madilion , L:'-. fj. Annal, iium, (r) 1\I/. Bill. Lil>. 58./?'/?». ^C.pa/. ^^T,
:in. (S Lit-. 5p. <;.
;, (\) htcin. lib. JiJ. iiHit. 103, ^.i_7. j'-i^
(y) Mabilioiv, Lit. 55. Armai, num. ^ tom, z, Sgicileg.p, 357.
,

254 .
SAINT O DI LON,
» l'injure que vous avez faite à l'Eglile de Lyon , qui vous
» demandoit pour cpoux &
dont vous rctufez le gouverne-
« ment par attachement à votre repos. Je ne vous dis point
w que vous avez mcprifé l'autorité des Prélats qui vous prioienc
» d'accepter la dignité Epilcopale ; mais nous ne pouvons
» laifTer impunie votre défobéiffance à légard de rEglile Ro-
» maine &
de Nous, fi vous ne la réparez par la foumilfion:
>> autrement vous vous rendrez coupable de la perte de tant

» d'amcs à qui vous pourriez être u.ile par votre exemple Se


» votre doftrine. » Cette Lettre toute preflantc qu'elle étoit,
ne gagna rien fur l'Abbé de Cluni. Il conferva le Fallhim 6c
l'anneau pour celui qui fuccéderoit à Bouchart. Cet Arche-
vêque mourut en 1 025) , &
le Pape Jean en 1032. On ne peut
donc rapporter qu'à l'an 103 1 , le refus que laint Odilon lit de
l'Archevêché de Lyon, parce qu'il le paifa pluiieurs contefta-
tions fur le choix du fucccffeur de Bouchart , avant qu'on en fie
la propofition à faint Odilon.
Il tient une ^I Dans un Diplôme de
Gcrvaifc Evêque du Mans (r) ,
aiTenibiéenô- il d'uHC aflcmblée de plus de cinq cens Prêtres à Clu-
eft parlé

rfL» P^n"ê ^^ ^^"^^ l'Abbé Odilon.


On ne fait ce qui s'y paiïa , ni s'il faut
càfimir s'y K- entendre par-là un Chapitre général de l'Ordre de Cluni, ou
^'^^'
quelque Synode. Dom Mabillon rapporte cet événement à
l'an 1047. Quelques années auparavant («), le Prince Cadmir
iils de Mice/law Roi de Pologne , chafTé étant encore jeune,

de fon Royaume , fe retira à Cluni , où il fit profeffion de U


vie monaftique , &
fur enfuite élevé au Diaconat. Richfa fa
mère avoir été déclarée Régente de l'Etat à la mort de fon
mari mais elle avoir aliéné les efprits des Grands par fes
:

hauteurs &
par la dureté de fon gouverncm.cnt. Ils cherchè-
rent le moyen de fecoucr fon joug dans le rappel de Calimir.
Ils députèrent à Cluni , le réclamèrent pour leur Roi. L'Abbé
refula de le rendre fans en avoir eu auparavant la permifTion
du Saint Siège. Benoît IX l'accorda ; CaHmir retourna en
Pologne , diipenfé de fon vœu de chafleté , fut reconnu Roi
fe maria , eut des enfins, &
régna depuis l'an 1041 jufqu'cn
1058 , qu'il laiffa le Royaume à fon fils Bolcdis II. Les con-r
ditions de la difpenfe du Pape (.r) , furent que les Polonois

(f) MaBILI. Lih. i9. Annal, num. 3./. I (v) ///'/. ^ îlifîoire de relo^rifp.ir M. dt
481. {Soli^nac.nmt l,p, 177,
Çit) Iderrf, lil>, fj. num, iS'f'^S- 3'7.
,

ABBÉ DE CLUNT. Ch. XVT. 255


paicroienr chacun tous les ans à perpétuité v.vc rcrraine fem-
me d'argent pour l'entretien d'une lampe dans l'Eglife de S.
Pierre ; qu'ils porreroient à l'avenir les cheveux en forme de
couronne & tels que les Moines les portoient alors qu'aux ;

grandes Fêtes durant le tems du Sacrifice , tous les Nobles


porrcîoicnt au col une étole de lin pareille à celle des Prêtres
& des Diacres. Ces trois conditions furent obfervées pendant
long-tems. Il n'y a plus que la féconde qui fubnftc encore.
VII. Saint Odilon a r.ndu fa mémoire célèbre dans toute llt-t^/^iît 'a
l'Eglife, par linflitution de la Commémoration générale des t-ionj^^™";.^.'
morts , dent il fixa la lolemnité au fécond jour de Novem-
bre. Sigebert rapporte cette inftitution à l'an 998 (jf) ; re- &
marque qu'elle fut adoptée par un grand nombre d'Egîiibs. Il
y en avoir déjà quelques-unes où ce Rit étoit en ufage ( z ) ,
comme on le voit par quelques anciens Martyrobges Né- &
crologes. A Cluni on taiioit une mémoire p;énérale des dé-
funts , le Lundi d'après la B'ête de la très - lainre Trinité ; à
Auxcrrc j le 10 dos Calendes de Février , c'eft-à-dire , le 23
de Janvier. La Régie de faint IHdore au dernier chapitre
•rdonne d'offrir chaque année le fécond jour a ap: es la Pen-
tecôte , le faint Sacrifice pour lesâmes des Trépafles. Mais
tous ces établiiTemens n'étoient que pour les morts d'une Con-
grégation particulière ou de quelque Société , ou feulement
en faveur des parcns, amis ou bienfaiteurs d'un Monaflere.
Le faint Abbé étendit fa charité plus loin , & voulut que dans
Cluni même , on lit des vœux , des prières , des oblations ,
des aumônes , pour le repos de tous les morts en général. Le
décret qu'il lit à cette occafion (a) , porte que comme dans
toutes les Eglifeson célébroit la Fête de tous les Saints le pre-
mier jour de Novembre,de même on célébrera à Cluni la Com-
mémoration des Fidèles trépaffés depuis le commencement du
monde qu'à cet effet le jour même de la Fête de tous les
:

Saints , après le Chapitre, le Doyen & les Célériers feront l'au-


mône de pain & de vin à tous les pauvres qui fe prcfcntcronr,
en la même manière qu'au Jeudi- Saint ; qu'après les Vêpres
de la Fête on fonnera toutes les cloches , &
on chantera les
Vêpres des morts ; que le lendemain après Matii-es on fcn-

(y)^\r\B. »« Cfn-n.-f. (ii/in. <jç3. Itcin.t'.Anir.p.^?.^.


(t)Mabi llon , Cbj'nvAt. in vit, OJil. I ( .» ) Ibid.p.i^e 5 8 5
2^6 SAINT O D I LO N,
ncra encore toutes les cloches &
on'fcra rOfTice des morts ;
que la MefTe fera folemnelle ; que deux Frères chanteront le
Trait , que tous offriront en particulier , qu'on nourrira &
douze pauvres. Cette Solemnitc pafla bien-tôt à d'autres Egli-
fes. L'Evêque Notger contemporain de faint Odilon (b) , en
ordonna la célébration dans le Dioccle de Liège , enfin elle &
eft devenue commune à toute l'Eglife Catholique.

Il Eivorîfe
VIII. L'Abbé de Cluni fa voit allier la politefle la pureté &
kç études.La dcs mœurs avec les fciences ( c ). Sa vie fes Ecrits en font&
fiouceur de
j^^ preuvcs. Il infpira autant qu'il fut en lui j les mêmes fen-
meX"
'
timens à fes Religieux. Ce fut par fon ordre que Glaber ache-
va l'Hiiloire qu'il avoir commencée fous Guillaume Abbé de
Saint Bénigne de Dijon ; &
que Syrus, l'un de fes difciples ,
écrivit la vie &
les mnracles de faint Maïeul. Abbon Abbé
de Fleuri , compofa à la prière d'un Moine de Cluni , une
introduflion à l'intelligence des Canons fur la Concorde des
quatre Evangiles. Ce fut aufli un Moine de Cluni qui mit par
écrit les actions de faint Odilon. Il fe nommoit Jotfaud , &
avoit été fon difciple. Parlant de fa manière de gouverner ,
il dit qu'un air de gaieté tempéroit la gravité defcS mœurs (d);

qu'il favoit ^ fuivant les circonftances & les tems , corriger L^s
fautes de fes Religieux ; qu'il leur j."^ardonnoit gratuitement ;
mais de façon que le bon ordre n'en fouffroit point. On ne
laiflbit pas de lui reprocher quelquefois fa trop grande dou-
ceur (e). Il répondoit : Si je dois être damné , j'aime
mieux que ce foit pour avoir écé trop miféricordieux que trop
dur.
Jîa mort en jx. Il mourut étant à Souvigni , dans le cours de la vifite
^^^^'
des Monallercs de fa dépendance , la nuit du dernier jour de
Décembre au premier de Janvier l'an i o^p , âgé de Sy ans.
Les Moines de Souvigni témoins oculaires des dernières ac-
tions de fa vie &
des circonftances de fa mort , en écrivirent
à Albert Abbé de Marmoutier.
Il eftdit dans leur Lettre
(/),
que la veille de Noël il fe trouva au Chapitre avec la Com-
munauté , où il fit un difcours merveilleux aux Frères , pour

{b) Mcnafl. S. Laurent. Icodien,


IJifl. 8, /,7 '.
amflij. colleil. M^irien.p, 1044.
t*fn. 4. (<•) AIaBIIlon, «i;V/. ^. ySj. Ohftrvai,
(f) M» BILL. Oifer-jat, in vit, Odil.f, in vit, Odilon.

ft6. "i'ii. 7. -/idor.


(J'S Ooi;.i vitanut», i^.ptg, 6o\.Tfin,

les
ABBÉ DE CLUNI. Ch. XVI. 257
les confolcr de fa perte ; que s'étant fait porter dans l'Eglife
de la faintc Vierge pour affifter aux Matines le jour de la
Fête , il commença les Pfcaumes & les Antiennes , donna les
Béncdi6lions 8c entonna le Te Dewn , quoique moribond : car
ilétoitfi exténué , qu'il ne pouvoir plus prendre de nourriture
corporelle : mais il fe nourriflbit chaque jour de la fainre Eu-

chariflic. Etant proche de la fin , on le mit , comme il l'avoit


ordonné , fur un cilice couvert de cendres , où il mourut dou-
cement , les yeux arrêtés fur la croix qu'on avoir mife devant
lui. Cette dernière circonftance ne fe lit point dans la Lettre
des Moines de Souvigni mais elle efl: rapportée par Jotfaud
:

qui entre dans un plus grand détail. Il remarque , entre au-


tres choies {g) , que la nuit de fa mort , le faint Abbé deman-
da avec cmpreiïement la Communion du corps du fang du &
Seigneur ; qu'on lut devant lui le Symbole avec l'explication
de laint Auguftin; que les Frères l'ayant interrogé fur fon fuc-
ceflfeur , il répondit Je le laifTe à la difpofition de Dieu
: au &
choix des Religieux (Ji) ; craignant peut-être que s'il dédgnoic
Ion fucceffeur comme avoient fait les quatre Abbés fcs prédé-
cefleurs , l'uiage ne s'en établit à Cluni , au préjudice de l'élec-
tion ordonnée par la Régie de faint Benoît.
X. Les Ecrits qu'il nous a laifles , refpircnt par-tout une ^"'^ '^«.?-
humilité profonde. A
l'entendre, il n'écrivit la vie de l'Impé- je 'ste* Ade-
ratrice Adélaïde (ïunjiyle bai &
concis ( ? ) , que pour four- laide.

lîir l'occafion à quelque Savant d'en compofer une d'un ftyle

proportionné aux vertus &


à la condition de cette Sainte. Il
craignit même de donner à fon Ecrit le nom de Vie ; Se à l'i-
mitation de faint Jérôme &
de faint Bafile , il lui donna le
titre d'Epitaphe. Il fait paroître la même modeftic en écri-
vant la vie de faint Maïeul. Jel'aicompofée , dit-il , non fé-
lon la grandeur du fujet , mais fuivant la portée de mon petit
efprit{l). Nous remarque pour montrer que c'eft
faifons cette
le même régne dans ces deux vies ,
eiprit qui par une con- &
îéquence naturelle , qu'elles font d'un même Auteur. Mais il y
en a des preuves plus pofitivcs non-feulement elles lui font
:

attribuées dans les anciens manufcrits; il fe nomme lui-même


dans le Prologue de l'une & de l'autre , comme dans le corps

(.s) V'f^Oiilon.ibid.fag. tfoç. I (»j Vrxftit.iii vit. &, /.delaiiî,


(h) Fleuri , llij}. Ecclef, Itj, ^g, fag. 1 (l) Pr.tfat,iH vit. S, Mttjoli.

f £}. font. II. I

Tome XX. K k
,,

258 SAINT ODI LON,


de la que faint Odilon parle de lui-même en
vie. 11 eft vrai
trcificme pedonne dans la
vie de fainte Adélaïde: mais il le
fait d'une manière qu'on ne peut l'y mcconnoître. Il y avoir
dit-il , en prcfence de cette PrincefTe dans fa dernière mala-
die , un Moine qui quoique indigne d'être appelle Abbé , é-
tcit néanmoins en confidération auprès d'elle. S'ctant regar-
dés mutuellement , ils fe mirent l'un l'autre à pleurer. Adé- &
laïde prit humblement fon habit ,
qui n'étoit pas des plus pro-
pres , & lui dit à voix bafle Souvenez- vous de moi
le baifa :

mon dans vos prières , & fâchez que vous ne me verrez


fils ,

plus des yeux corporels. Quel cfl l'Ecrivain qui eût ofé
taxer ainfi faint Odilon ? Il n appartcnoit qu'à lui feul de fe
dire indigne du nom d'Abbé. Tout le monde le croyoit ca-
pable d'une place fupérieure , & même des premières dignités
de l'Eglife.
S. OJiloneft XI. donc fans raifon qu'un Ecrivain de ce fiécle (w) ,
Cell:
Auteur de h Çq j'^j-j- endroit pour contefter à faint Odilon la vie de
^^^ (.^^
vie de fainte ^ . a n n
i i > r • ^

Adélaïde. ob,f'iinte Adélaïde celt au contraire , une preuve tres-torte


:

jeflions contre qu'il en ell Autcur. Les autres objedions font que le manuf-
ceftmiment.
^^^j. ig^u^} ^ette vie a été publiée par Canifius , ne portoit
^j.-^.

point le nom d'Odiion ; que l'Auteur dit en un endroit, qu'il


a reçu plufieurs préfens de la PrincefTe Adélaïde ; qu'elle l'a
foulage dans fes befoins , &
l'a rendu illuftre par les hon-

neurs qu'elle lui a procurés ; que dans un autre , où il pouvoir


parler avantageufement de l'Abbaye de Cluni , il n'en dit que
peu de chofes ; &
qu'en parlant de faint Maïeul fon prédécef-
feur dans le gouvernement de cette Abbaye , il ne fe dit pas
fon fuccelfeur , ni revêtu de la qualité d'Abbé. De tout cela
cet Ecrivain conclut que la vie de l'Impératrice Adélaïde efi:
l'Ouvrage d'un Courtifan affamé qui fe trouvoit afliduement
à la Cour pour en obtenir de l'argent , des honneurs des &
dignités. Mais fi le manufcrit de Canifius ne portoit pas le
nom d'Odiion (n), cet Editeur reconnoîtfur le témoignage
de Lupold de Bamberg, Ecrivain du treizième fiécle , que
cette vie lui étoit attribuée dans divers autres manufcrits de
Bourgogne &
d'Allemagne. On a remarqué plus haut , que
dans une famine ( o ) , faint Odilon avoit vendu les vafes 6e

(o) BasmaoE, Objervat. in vit. Aitlaid. l (») Canis. ibid. ^ ptg. 70.
Jem.i.Leâ.Cunif. p.yi, | l») Viia.0dil.num.9-p- Col»
,

ABBÉ DE
CLUNI. Ch. XVI. 25^
les orncmens précieux , même la couronne que faine Henri a-
voit donnée à Cluni , pour avoir de quoi foukger les nécefll-
teux quel inconvénient y a-t-il donc à dire que ce Monaftere
:

fe foie trouvé cnfuite réduit à la néccflitc , qu'il ait reçu des &
préfens de fainte Adélaïde ? On verra dans la luice , qu'il eue
même recours au Roi Garfias dans les befoins de Cluni. D'ail-
leurs l'Auteur de fa vie remarque {p )
qu'elle en faifoit à tou-
tes les Eglifes &à tous les Monaileres qu'elle connoifToit ou
qui ctoient dans fon voidnage : & c'eft-là l'endroit où il dit
quelle n'oublia point Monajîere de Cluni {q) , qui lui èîoitfa^
le
milier. Ces deux mots faifoicnt bien l'éloge de Cluni, il au- &
roir Clé indécent à faint Odilon d'en dire davantage. Que fi
en parlant de faint Maïeul , il ne fe dit point fon fucceflcur ,
c'eft qu'il étoit inutile de le dire: il l'appelle yô« Fne (r). C'é-
toic vidblement fe reconnoître pour fon difciple. Ce langage
convient- il à un Courtifan affamé ? La plus forte objection ert
apparence , eft celle qui efl fondée fur ces paroles de l'Auteur
de cette vie : Ce que nous difons de cène Sainte (i) , non-Jeule"
ment nom Pavons ouï ou vu nous-mêmes , mais nous le /avons en-
core par notre expérience. Nous avons ouï de [abouche les paro-
les du falut , nous en avons reçu phifieurs préfens elle nfouvent :

enrichi d'or ceux qui navoiem point d argent , & quelquefois elle
a mis en honneur des perfonnes qui manquaient de revenus quoti-
diens. Mais peut-on en conclure qu'il ait expérimenté lui-mê-
me tout ce qu'il rapporte en cet endroit ? S'il en étoit ainfi
il auroit inutilement ajouté le témoignage d'autrui. Il faut

donc diflinguer ici ce que l'Auteur favoit par fon expérience,


de ce qu'il ne favoit que par ouï dire ou pour l'avoir vu. Il
avoit reçu lui-même des paroles de falut & des préfens de la
part de la Sainte mais il ne favoit que par le témoignage de fes
:

gens & de fes oreilles , qu'elle avoit élevé aux honneurs , ceux-
là même qui n'avoient pas de quoi vivre. On peut même dire
à la rigueur , que fainte Adélaïde avoit enrichi l'Abbé Odilon
par les prcfens qu'elle avoit faites à Cluni dans le tems de la
famine , & qu'elle l'éleva aux honneurs , en approuvant fon
éledionavec tant d'autres grands Seigneurs qui lignèrent à. l'a-
de qui en fut drefic.

Vita ^J.eLxid. f . 78. I (0 Ibid.


( f )

Kkij
,,

2^o ABBÉ DE CLUNI. Ch. XVI.


Ceqii'Uya XII. Cette vic a d'abord été publiée dans le Recueil des
^f^cienncs Leçons de Canifius (r), tant à Ingolftat qu'à An-
tl/àzrs'tml
Vie, vers. Mais elle y ell fans la Préface ou Epître dédicatoire à
André Abbé de Saint Sauveur à Pavie , & à tous les Frères
de ce Monaftere, fondé par fainte Adélaïde. Dom Marrier
& Duchefne ayant trouvé un manufcrit plus enrier que celui
de Canifius , l'ont réimprimé dans la Bibliothèque de Cluni
avec la Préface que le premier Editeur avoir omife. Il y en
eut une troifiéme édition , parmi les Ecrivains de Brunf\t'ick
en 1707 , par les foins de Monfieur Leibnitz. Il eft parlé fur
la fin de cette vie , d'un miracle arrivé fous le régne de l'Em-
pereur Henri III dit le Noir. Ce Prince ne fut couronné Em-
pereur qu'en 1046, le jour de Noël. Ainfi faine Odilon ne
put mettre dernière main à cette Hiftoire qu'en 1047. Elle
la
eft , fuivant l'ufage aflez fréquent alors , intercalée de profe &
de vers 5 mais elle n'en eft ni moins fuivie ni moins agréable.
Nous Adélaïde fonda autant de
y obferverons (m) que fainte
Monaftcrcs de Royaumes avec les Empereurs
qu'elle pofleda
Otton I , fon époux , Otton II fon fils , & Otton III fon pe-
tit-fils ; qu'elle fonda la Ville & le Monaftcre de Salfe dans
le Diocèfe de Strafbourg , & y mit pour Abbé Acemagne
homme de vertu & de favoir , qu'elle avoit continuellement
auprès d'elle , pour apprendre de lui les divines Ecritures ;
qu'elle pourvut fi - bien aux revenus & aux ornemens de ce
Monaftere , qu'il ne manquoit rien à ceux qui y fervoient Dieu
dans la pratique de la Régie de Saint Benoît; qu'elle fit de
grandes libéralités à plufieurs autres Monaftere* d'hommes &
de filles , & à des Chapitres de Chanoines (x) , fans négliger
pour cela les pauvres & les affligés ; qu'au lieu d'employer l'or
& les pierreries à fe parer , fuivant fa condition , elle en or-
noit les étendards de la croix du Seigneur & les Livres des
Evangiles , ou en faifoit des aumônes ; qu'étant à Salfe le jour
annuel de la mort de fon fils Otton (y), elle fit célébrer pour
lui le Sacrifice de la MefTe , & donna de grandes aumônes
aux pauvres-, que fc trouvant quelques jours après (z) , rédui-
te à l'extrémité par la fièvre , elle fe fit adminiftrer les Sacre-

(f) BiHiot. Je Cluni , p. 3 ;4, 1 agcbatur pro filii fui Ottonis Augufti me
{m) Pa^e jj-7. moria. . .àquodam Archiepiicopo, MifTa*
J
(.1) Paj^t J58. j
fcc't celebrari pro 61io. p. j^o,

iy) Iniiabat dics in qua dCTOtiO annua i (x.) P<t/r jâi.


. .

s AINT OD I L O N, 261
mens de rEglifc qu reçut d'abord rExtrcmc-onflion (a),
;
elle
enfuirc le Sacrement du Corps du Seigneur en l'adorant avec
humilité &
avec dévotion , ayant toujours cru toujours ef- &
péré en que munie de ces lecours & repue de cette nour-
lui ;

riture , elle dit aux anciens & au Clergé qui étoient préfens ,
de chanter les Pfeaumes de la Pénitence & réciter les Lita-
nies des Saints fuivant le Rit del'Eglife enfin qu'après avoir -,

fouvent répété ces paroles de l'Apôtre Je fouhaiîe de mourir ^^'l'fpti-t-h :

ib" d'être avec Jeftis-ChrifljcWe mourut le 1 ^ de Décembre 95*5?,


<âgce d'environ 5S ans. A l'Hifloire de fa vie , faint Odi-
lon ajouta celle de quelques miracles opérés par fon inter-
ceflion. Ce qui fait un fécond Livre, à la fin duquel on lit
une hymne avec quelques oraifons pour l'Office & la Mefle de
la fainte Vierge. On ne fait qui en cfl: l'Auteur. Dom Mabillon
paroît les attribuer à faint Odilon (b)
XIIL Ce faint Abbé compofa auffi la vie de faint Maïeul Vie (Je faint
fon prédéceflcur , ou plutôt fon Panégyrique : car il en re- '^^'^"'*
lève les aftions plus en Orateur qu'en Hiflorien. Il n'entre pas
même dans un grand détail ( c ) , renvoyant le Ledcur aux
Ecrivains qui avoient avant lui traité la même maticrc , c'eft-
à-dire , à Syrus Se h Aldebade. Saint Odilon étoit à Romans
Monaflere en Dauphiné, de la dépendance de Cluni, lorf-
que la penfée lui vint d'écrire cette vie. Trille & affligé des
calamités publiques , il fe pcrfuada qu'il pourroit trouver un
lénitifà fa douleur en s'occupant des louanges d'un Ci faint
homme & pour rendre fon mérite plus éclatant , il fit précé-
:

der fon éloge d'un précis de l'Hiftoire monaftique dans les


fiécles précédens ; où l'on voit en peu de mots les progrès de
l'Ordre de Saint Benoît , & fa décadence jufqu'à l'Abbé Ber-
non , qui au commencement du dixième fiécle , rebâtit Cluni
& y rétablit l'obfcrvance. Elle fut foutenue par faint Odon
fon fuccefleur, & établie en plufieurs autres Monaflcrcs. Hey-
mard qui lui fuccéda , ne témoigna pas moins de zcle , tant
pour le fpiritucl que pour le temporel des Monafteres crai- :

gnant dans un âge avancé , quefes infirmités n'occafionnaflcnt


quelque relâchement dans la difcipline , il déclara aïeul M

(«) Tum facri Olei unftione perunfla , (A) Mabillon. Oi/fri'«. in vit. Odih
Sacramenti Dominici corporis humiliter &
devotiflfimè adorando percejiit , in quem (c) Viia Majoti in Bibliat, Clnniac«nfit
ibinper fperavit Se. ciedidit. p. 3 6 1 p. î8j. i86.
2^1 SAINT ODI L ON.
Abbé du confentement de fa Communauté. C'eft fur-tout de
,

la fageffe de fon gouvernement , que faint Odilon fait l'élo-


ge il y joint le récit des miracles que faint Maïeul fit avant
:

& après fa mort ; & quatre hymnes que l'on devoir chanter le
jour de fa Fétc ; deux pour les Vêpres , une pour l'Office de
Matines , & une pour les Laudes. L'Ecrit cft adreffé à Hu-
gues & à Almanne , tous deux Moines de Cluni , que l'Au-
teur croyoit aflez habiles pour en corriger les défauts. Su-
rius l'a donné à l'onzième jour de Mai , de même que Bollan-
dus. Il fait auffi partie de la Bibliothèque de Cluni.

DiTcours de
XIV. Il nous refte plufieurs Difcours de faint Odilon fur
"'
s. Odiioii! divers fujets ce font autant de preuves de fon intelligence
:

dans les faintes Ecritures , de la pureté ds fa foi , de fa doc-


trine , & de fon éloquence. C'efl le jugement qu'en a porté
Jotfald ou Jotfaud fon Hiftorien (i^). Ces Difcours font pré-
cédés dans la Bibliothèque de Cluni , d'une profefTion de foi,
qui , quoique différente du Symbole dans les termes , eft la
même quant à la fubflance : elle efl fuivie d'une prière fur la
croix , dont le Saint relève la vertu. Le premier Sermon eft
fur la NaifTance du Sauveur ; le fécond , fur l'Epiphanie ; le
troifième , fur la Fête de la Purification ; le quatrième , fur
l'Incarnation ; les trois fuivans , fur la Réfurrection ; le hui-
tième , fur r Afcenfion le neuvième , fur la Pentecôte le di-
•, ',

xième , fur faint Jean-Baptiflc ; l'onzième , fur la veille des


Apôtres faint Pierre &
faint Paul ; le douzième, furl'Aflbmp-
tion de la fainte Vierge, avec une hymne pour la même Fête;
le treizième j qui eftfur fa Nativité , eft: imparfait , de même
que celui qui cfl: intitulé : De l'Invention de la Croix. Tous ces
Difcours fe trouvent dans la Bibliothèque de Cluni. Dom
Martenne en a donné deux autres dans le cinquième Tome
de fes Anecdotes ; , fur la Nativité dé la fainte Vierge (f );
l'un
l'autre , Croix; mais le premier n'ef!: qu'un frag-
fur la fainte
ment du fécond Livre de faint Ambrcife (/) , intitulé , Des
Vierges. Le cent foixante 6c onzième Difcours dans l'Appen-
dice des Œuvres de faint Auguftin (g) , c(l attribué à faint
Odilon il cil peu différent du premier fur Lt Pâque. Il y a
:

des preuves aflfez fortes , que le cinquahtc-fixiéme parmi ceux

{(l) Vit,i Odil.num, C, p. 699, • {g) AiJCUST. Strm, in Apfend. ttm.i,


(<) V.\gt 6i\. 6i8. I
fag. 19S.
(/) Ambr.cs, Tora. !./>, i6j.
,,,

ABBÉ DE CLUNI. Ch. XVI. 5^3


de faint Pierre Damkn , n'cfl: pas de lui ; 6c des conjectu-
res qu'il cft de faim Odilon. On les ex.lminera dans la fuite.
Trithéme atrribue à ce faint Abbé un Livra de Sermons (/;) :

il n'en fpécific aucun. Sanderus en avoit vus pour diverfcs


Fèces de l'aint Benoit ( i ).
con-
XV. Mous donnerons ici quelques endroits de ceux qui Ç^ qu'ils

font imprimes dans le dix-fcptiéme Tome de la Bibliothèque remarquable.


des Pcrcs & dans celle de Cluni ( / ). Dieu qui avoit fait Thom-
me à fon image (m) , n"a pas voulu le laifler périr éternelle-
ment dans que fon péché lui avoit caufée mais
la difformité :

il a envoyé fon pour rendre à l'homme la beauté de fa


B'ils

première forme. Lors donc que vous entendez dire que Je-
fus-Chrift vous eft né , réjouilfcz-vous & augmentez votre :

joie quand on vous dit qu'il vous efl donné. Mais gardez-
vous bien de mettre aucune différence félon la nature divine
entre le Pcre & le Fils ; entre celui qui vous a donné celui &
qui vous eft donné. Ils font à ccz égard d'une même fubftan-
ce: aufli grand, auffi puiffantl'un que l'autre. Il n'y a même
entre le Père Se le Fils aucune différence de tems , comme il n'y
en a point d'égalité. Quoique l'Incarnation foit l'ouvrage des
trois Perfonnes de la fainte Trinité («) , & t]u'elles opèrent le
Myftere du Batcme , néanmoins le Fils feul s'cft foit homme.
Les Mages ont adoré Dieu dans l'Enfant nouvellement né.
En lui offrant de l'or , ils l'ont reconnu pour Roi ; pour Dieii
en lui préfentantde l'encens ; & pour homme mortel , par la
myrrhe. Le jour de l'Epiphanie étoit regardé comme confa-
cré fpécialement à la célébration des Myfteres , parce qu'on
y
folemnifoit fa manifeftation au monde , fon Batcme , & le
changement de l'eau en vin aux Noces de Cana. La Circon-
cifion purifioit les enfans de la tache du péché originel ( )
& l'oblation de l'enfant au Temple, purifioit la mère des im-
puretés de fes couches. Jefus-Chrift ni fa fainte Mcre n'a-
voient pas befoin de ces fortes de purifications ; mais il vou-
lut obferver la Loi, & que la Mère l'obfervât , d? peur qu'il
ne parût méprifer une Loi qu'il avoit faite lui - même , étant

(i) TritHEM. Je Scriftor. ^cdef, cap. iBihliot.ClHniacenf.p. ^yo,


JI4. (m) Serm. I. de Nativit,
\

(») Sanderus, Bitliot. Belgicx. part. i. (») Serm, i. de Epiphan,


(^0'^ Serm,
f. 30?. i. de turijiiat.
(l)Tom. 17. Biilitt. Pât.pag. 6^3. ÇJ in
,

254 S A I NT O D I L O N,
l'auteur des deux Teftamens. La maffe du genre humarn a
été corrompue dans le premier homme par Ion péché (p) :

Jefus-Chrift le fécond homme , Ta rétablie par fa grâce en ref-


fufcit.^nt.L'Ange apoftat eft péri fans rcflburce , parce qu'il
s eftvolontairement révolté contre fon Créateur , n'ayant na-
turellem.ent en lui aucune matière de péché. Mais Dieu a eu
compaflTion de l'homme qu'il favoit avoir péché , autant pour
avoir été féduit, que par fon libre arbitre. Quand on dit que
le Saint-Efprit eft envoyé (5') , il ne faut pas croire que ce
foit ou contre fa volonté ou comme inférieur au Père au &
Fils : il leur eft coéternel & confubftantiel & comme égal ;

il eft envoyé de fa propre volonté par Dieu le Père & le Fils;


félon ces paroles de la Vérité : LEfpritfouffe où il veut. Que
ceux-là donc fe taifent , qui ofent dire que le Saint Efprit eft
le moindre dans la divinité , & qui le mettent au rang des
créatures. Il ne peut être moindre ,
puifqu'il coopère à tout
l'ouvrage divin ; ni créature ,
puifqu'il eft le Créateur & le

Kénovateur de toute la machine du monde ; qu'il remet les


péchés dans le Batême ; que c'eft lui qui a enleigné les Pa-
triarches & rempli les Prophètes. Quoique faint Pierre foit le
fondement de l'Eglife (r), faint Paul ne lui eft pas inférieur:
comme un fage Architcfte , il a auiïi jette les fondemens de
la foi des peuples fidèles égaux en mérites , ils ont également
:

foufîert , ils font l'un & l'autre héritiers du Royaume célefte ,


& cohéritiers de Jefus-Chrift. Saint Odilon ne doute pas que
la fainte Vierge n'ait été préfente à l'Afccnfion de Jefus-
Chrift , & qu'elle n'ait reçu avec les Apôtres , la grâce du
Saint-Efprit , quoiqu'elle en fut déjà remplie mais il ne veut :

rien affurer fur ce qu'elle devint depuis ce moment. Il mar-


que que la croyance commune étoit , qu'elle avoit été enle-
vée dans le Ciel , le jour que Ton folemnifoit fon Aflbmp-
tion : il adopte ce fentiment dans l'hymne qu'il a faite pour
ce jour.
Difcoursfur XVL II diftingue deux Fêtes en l'honneur de la Croix de
lacreix. Jefus-Chrift (j) ; l'une , fous le nom de l'Invention ; l'autre ,
fous celui d'Exaltation. La première doit fon origine à l'Im-
pératrice fainte Hélène: il rapporte la féconde à Hérdclius. Il

(f ) Serm. 6. de Rrfurrea. 1 (r) Strm. in vigil.f.tiifl. Peirl ^ Paiili.


Çji Strm, p. de Fi/itecofî. |
(s^ Serm, in AJjitm[ii»n,
cite
ABBÉ
DE CLUNI. Ch. XVI. 245
cite un Difcours de faine Chryfoftome fur la Croix , Se rap-
porte un fragment de celui que Rhaban Maur a fait fur le mê-
me fiijct. C'ert: la coutume de faint Odilon de citer les an-
ciens dans fes Sermons, & d'en emprunter quelquefois les pa-
roles. Les Ouvrages de faint Cyprien , de iaint Grégoire de
iNazianze , de faint Jérôme , de faint Auguftin , de faint Am-
broife & de faintGrégoirele-Grand j lui étoient connus. Dans
les fiensil s'applique plus à inftruire qu'à briller : fes inftru6tions
lont claires &
folides.
XVII. Du grand nombre de Lettres que Jotfaud lui attri- ^ ^".7^* '^^
1 / " \ rr
-, -S. Odilon. 1 •

bue nous n en connonions que quatre la première , qui


[ti) , :

cfl: à Fulbert Evcque de Chartres (f) , fe trouve dans la Bi-

bliothèque de Cluni , & dans le Recueil de celles de cet Evê-


quc. Le fujet en eft aiïcz iingulier. Un Clerc de l'Eglife de
Chartres avoir prié faint Odilon de dire ce qu'il penfoit de la
vie & des qualités de Fulbert , & d'adreffer fa Lettre à Ful-
bert même , qui n'étoit encore que Prêtre. Quoique le faint
Abbé trouvât la proportion au-deflus de fa portée , il fît ce-
pendant ce que ce Clerc fouhaitoit. 11 rendit témoignage à la
fageflc de Fulbert , à fon favoir , à la pureté de fa foi , & à la
probité de fes mœurs. Il ne vous manque , lui dit-il , quune
chofe : &
vous favez ce que cejî. Il faitallufion à ce que Jefus-
Chrift dit à ce jeune homme qui fe fiattoit d'avoir obfervé la
Loi des fa jeunefle. On voit par la foixante-fixiéme Lettre de
Fulbert que pcnfant à quitter l'Epifcopat , faint Odilon lui
,

confeilla de continuer fon miniftere. Les trois autres Lettres


font rapportées dans le fécond Tome du Spicilegc {y ). Il y
en a une de Paterne , d'abord Moine de Cluni & alors Abbé
en Efpagne elle efl au nom de toute la Communauté & de
:

Sanche Évêque de Pampclune , qui s'étoit retiré à Cluni. C'eil


un témoignage des vœux & des prières que l'on y faifoit alïï-
duement pour la paix du Royaume d'Efpagne , & des enfans
du Roi Sanche, mort depuis quelque tems. cet effet on difoit A
chaque jour après Matines , le Pfeaume troifiéme , Domine ,
quid multiplkaîi fimî : 8c aux Heures du jour , le Pfeaume
120, Levavi oculos meos in montes. Il manque quelque choie
à la fin de cette Lettre elle efl: fuivie de celle que le Pape
:

Jean XIX écrivit à faint Odilon (z) , pour lui faire des repro-

(«) Vita Oïlil. niim. (.. par. 6^19. I (y) Pit'ic 5 Ç S.

Tome XX. Ll
266 J OT S A U D,
ches fur le refus qu'jl avoic fait de l'Archevêché de Lyon.
L'Abbaye de Cluni fe reflent.inc, comme le refte du Pvoyau-
me , famine qui le défo'oit depuis deux ans ( « ) , s'a-
de la
dreifa au Roi Gariias dans l'eipérance d'en recevoir du fe-
ccurs peur le foulagcment de fcs Religieux & des habJrans du
voidnage. Il en reçut de la part d'une Dame {b) qu'il ne dé-
,

fîgne que par la première Ie;rre de fon nom A. En reconnoif-


fance, il l'aflccia, comme elle le iouhaitoit, aux prières de fa
Communauté. Il arriva fous fon gouvernement , qu'un hom-
me qui avoit tué un Evêque , fc fit Moine à Cluni pour pleu-
rer ion péché Se en faire pénitence. Ayant appris à bien lire
&
à bien chanter , le fùnt Abbé conçut le deflein de le faire
ordonner Prêtre mais auparavant il confulta le Pape Jean ,
:

dont la réponfe fut , que ce Moine ne pouvoit être promu à


aucun grade du miniitere Eccléfiaflique , Se qu'on ne devoir
pas même lui accorder la communion laïque, linon à la mort
par forme de Viatique. L'extrait de la réponfe du P.ipe & de
la confultation de faint Odilon , ef!: rapporté dans les ades du
Concile de Limoges en 1031 (c).
Poé/ies de S, XVIII. Les Poéfies de ce Saint font plus recommandables
OJiio:;.
par les fentimens de piété , que par la beauté des vers. Outre
les hymnes en l'honneur de la fainte Vierge , de fainte Adé-
laïde & de faint Maïeul , il compola un Poème funèbre fur la
mort de l'Empereur faint Henri. Il y dit quelque chofe d'Ot-
ton I , ce qui a fait croire à Barthius (d), que cette pièce re-
gardoit principalement ce Prince. On l'a imprimée avec les au-
tres dans la Bibliothèque de Cluni (e). C'eftaux foins de faint
Odilon que cette Abbaye cfl: redevable du Recueil des Diplô-
mes & des Chartes qui avoient été accordés depuis fa fonda-
tion.Ce Cartulaire exifle encore (/").
JotfauJ Moi.
ne ce Ciiiiii.
XIX. La vie de ce faint fut écrite par Jotfaud Moine de
Cluni , fon difciple , comme il le dit lui-même dans la Préfa-
ce (^). On croit que c'efl le même qui foufcrivit avec l'Abbc
Odilon (h), le Prieur Robert & quatre Moines de la même
Abbaye , à la charte d'un nommé Girbald en 1031 , & à celle

(a) R.f. 588. (e) Pag. 361.

if) Mazilu Opuff. tom. 1. p. 11.


(c) Biiliot. Clmiiacenf. p, 338. C? Toi (f) Tem. S. Aclor. pag. ^97'
9. Conc, p. 9C7. (*)MaBIJ.J-ON. »« î"'. Oiitl.p. 553,
(d) Barth. AJv. lit. 3. cap. j.
MOINE DE CLUNI. Ch. XVI. 2^7
de Bernard & [d'Ada perc
fcs &
mcre , avec Joferann Ion
frère, fous le régne du Roi Robert. Son nom fe lit dans plu-
fieurs autres A<Stes & Archives de Cluni ce qui donne lieu
:

de juger qu'il en étoit Chancelier &


Secrétaire. Le Catalogue
des anciens Livres de Cluni, en met un de Jotlaud contre
Bcrcngcr , fous Henri Roi des François. Cet Ouvrage ou n'eft
pas venu julqu'à nous , ou eft reflé inconnu. On n'a aucune
preuve que ce Jotfaud foit le même que l'Abbé de ce nom (t),
dont on lit l'Epitaphe fur le mur extérieur de l'ancienne Egli-
fe defaint Pierre à Cluni. 11 paroit que Jotfaud fe nommoit
auiïl Alemannou Allemann (/) ; puifqu'en finiflant la vie de
faint Odilon , il lui dit Souvenez-vous de votre Allemann
: &
favorifezfcs vœux: d'où il fuit que c'eft à Jotfaud comme à
Hugues , que faint Odilon adreffa la vie de faint Maïeul.
XX. Jotfaud dédia celle de fiint Odilon (m) , à Etienne Ses Ecrits.
Evcque du Puy , fon neveu. Elle efl divifée en trois Livres , od?ion! ^^'"'
dont le premier contient le récit de fa vie &
de fa mort; le fé-
cond & le troiliéme , l'hiftoire de fes miracles. On peut la re-
garder comme un des bons Ouvrages en ce genre ; foit pour le
Itylc , foit pour l'ordre des matières. Dom Mabillon l'a publiée
dans le huitième tome des Aâes. On ne l'avoit qu'imparfaite
dans la Bibliodiéque de Cluni &
dans les Bollandifles , au pre-
mier de Janvier. Quoique Jotfaud parût perfuadé de la félicité
de faint Odilon en l'autre vie , il ne laiffe pas de pleurer fa
mort dans un Pocmc de cent cinquante grands vers. Il font
imprimés dans la Bibliothèque de Cluni (h). Dom Mabillon
n'en a rapporté que dix (0) mais il en a donné trente
: un &
fur Téicdion de faint Odilon
(p) , fans s'expliquer fur l'Auteur,
fi ce n'cft qu'il le dit contemporain.

(0 Mabill. »i«V.
(
(n)Prt^. 519.
(/) UiJ. fage j I (o) Obfervsit. in vit, Odil. p. Jy4.
J4.
(m) liij.pag. f<)7. '
(p) Ibid.fage $^9.
,

26S C A T W A L O N ,

CHAPITRE XVII.
Cativahn , Abbé de Redon ; Warin , Abbé de Saint Arnouîi
Gualdon , Moine de Corbie ; Jean , Abbê de Fécam i
Gérard y Evêque de Cambrai.

Ab^^'d"'""'
^' £^^ Atwalon n'étant encore que Moine dans T Abbaye
don."
^^"
\^ de Redon au Dioccle de Vannes {a) , fut choili par
TAbbe Mainard pour une Communauté de Moines à
établir
Bcllc-Ifle ou Guedel , que Geofroi Duc de Bretagne , avoit
donné pour cet effet au Monaftere de Redon. On dit que
Catwalon étoit frère de ce Duc il poflcdoit du moins la vraie
:

noblelTc , qui eft la vertu. A la mort de l'Abbé Mainard arri-


vée en 1025 ? i^ fut élu pour lui fuccéder. Le Monaftere de
Redon tomboit en ruine Catwalon le rétablit & le gouverna
:

fagement jufques vers l'an 1045).


S« Lettres H. H n'avoit pas encore commencé à en réparer les édifi-
ces , lorfqu'il reçut une Lettre & des Députés d'Hildegarde
ComtefTc d'Anjou , femme de Foulques Nerra ou le Noir
pour lui demander de fe fouvenir d'elle dans les prières. C'é-
toit apparemment à caufe que fon mari étoit alors en guerre
avec Alain Duc de Bretagne. Catwalon dans fa réponle {b) ,
lui donne le titre de Reine d'Anjou , & dit Si vous croyez :

que nous puiflTions vous rendre Dieu propice , foyez affurée


que nous faifons tous les jours mémoire de vous auprès du
Seigneur car il y a long-tems que nous favons que vous lui
:

rendez un culte fîncere , & que vous favorifez ceux qui le


fervent au défaut de bruit public , vos œuvres vous ren-
:

droient ce témoignage, tant elles font éclatantes. Il ne vous


relie qu'à avancer de plus en plus dans le bien. Il dit enfuite
qu'il difpofoit tout pour commencer fes bâtimens au mois de
Mars prochain ; & la fupplia de lui obtenir la franchife des

(.» ) MiBiLLON. Lik. jj. Annal, num. I {i) Mabili. ibid.


^i.p/ijf 311. I
ABBÉ DE REDON. Ch. XVIÎ. 2^^
péages dans Etats, pour certaines denrées qui dévoient y
les
paflcr ; Se de prêter fon fccours au Frère qu il avoit envoyé
pour en faire rcmplcttc. Nous avons une lecondc Lettre de
Catwalon à Lctgardc ou Leburgc, Abbcflc de Notre-Dame
de la charité à Angers (c) ,
qui s'étoit auffi recommandée à les
prières. Il s'en excufe d'abord mais cnluitc il lui promet de
,

faire offrir pour elle le SacriRcc iolemncl , tant à Redon qu'à


Eelle-inc.
III. Vers l'an 1047 (d), quelques Moines de l'Abbaye de \»',innAbbé
Fécam en fortircnt fous le prétexte d'une vie p'us retirée ,
"^^
^-
'^'''•^^'

mais fans en avoir demande la permidion cà Jean leur Abbé.


Celui-ci leur écrivit pour tâcher de les ramener à leur devoir.
Il répéta aufTi Warin Abbé de Saint ArnoLil , un autre Moi-

ne nommé Benoît , par une autre Lettre aflez vive. Warin


n'y fît point de réponfe. Jean lui en écrivit une féconde en-
core plus forte , le menaçant de fc féparer de l;x communion,
s'il ne lui renvoyoit Benoît. Warin répondit d'un ftyle mo-

defte mais nerveux , que le Moine Benoît étoit delà Commu-


nauté de Saitit Arnoul &
non de celle de Fécam ; qu'il étoit
étonnant que Jean s'avisât de le répéter alors , puifqu il ne lui
,
en avoit rien dit lorfque allant en pèlerinage à Saint Mi-
chel , il léjourna à Fécam où il fut bien reçu ; que ce defTcin
lui avoit apparemment été fuggéré par Bernard , qui s'étant
fauve du Monaftcre de Saint Arnoul à celui de Fécam , ta-
choit d'y attirer Benoît fon frerc ; que fi chacun étoit- oblige
de retourner à fon premier Monaftere, il eft vrai que Benoît
retourneroit à Fécam , mais aufTi que l'Abbé Jean rentrcroic
dans le Monaftere de Saint Bénigne de Dijon , d'où il avoit
é:c tirO ; &
lui Warin , dans celui de Gorze où il avoit fait
profcdion. Il ajoute, que Benoît peut avec l'aide de Dieu , fe
fauver dans un pauvre Monaflere comme dans un plus riche ;
qu'en vain l'Abbc Jean prétend l'excommunier , puifqu'il n'a
uir lui aucune jurifdidion , n'étant pas Religieux de Fécam , '

mais de Saint Arnoul ; qu'au relie il efl contre l'clpiit de l'E-


vangile & l'ufage de l'Egliie d'employer l'excommunication
pour un fujet de cette nature. Il finit en priant cet Abbé de
s'adoucir &
de lui rendre fes bonnes grâces. Il rcftoit uncdif-

(f )
UiJ, pag. izi,^ i» A[[(nd, pig. 1 (J) MabillOn. hb. 55. Atwal. num.
270 JEAN, ABBÉ DE FECAM. Ch. XVII.
fficukc , favoir permis de retenir un Religieux d'un au-
s'il eft

tre Monaiterc. Warin la réfout par rapport à Benoît , endi-


fant qu'il n'ctoit de la Communauté de Saint Arnoul , que
parce qu'il y ctoit venu par obéiflance &
par l'ordre de l'Abbé
Guillaume , qui avoit été en mcme-tems Abbé de Fécam &
de Saint Arnoul ; que depuis il avoit affifté fans aucune op-
pofition , comme membre de cette Communauté , à l'éledion
I
des deux Abbés fuccelTeurs de Guillaume ; au lieu que l'Abbé
Jean ne pouvoit dire que Benoît eût alFiflé à la Tienne ; d'où
il fuivoit qu'il n'étoit point de la Communauté de Fécam. 11

en efl; tout autrement, ajoute-t-il , d'un Moine fugitif comme


étoit Bernard ; forti de fon Monaftere contre l'obéifTance , on

—"'-'-—
doit l'obliger d'y revenir. L'Abbé Jean étoit donc en faute de
deux côtés. Il retenoit chez lui Bernard qui étoit Moine de
Saint Arnoul ; &
répétoit Benoît fur qui il n'avoir aucune ju- 1

fes Anale6les (e).


^'^
^^^ féconde Lettre de l'Abbé de
précédée de
de.^F^r.'m
Fé(cam.
IV. Elle y
Y eft la
Fécam à l'Abbé Warin (/) ; &
de deux autres, l'une à Guil-
laume Roi d'Angleterre ; l'autre à Vital Abbé de Bernai. Ce
Prince fâchant que Vital avoit fait beaucoup de bien dans
l'Abbaye de Bernai & l'avoit rendu floriiïante , le transféra
à l'Abbaye deWeftmunfter qu'il affedionnoit, foit parce que
c'étoit le lieu de la fépulture de fes ancêtres , foit parce qu'il y
avoit été couronné Roi de toute l'Angleterre mais il ne vou-
:

lut point faire cette tranflation fans le confentemcnt de l'Ab-


bé de Fécam , de qui Bernai dépendoit ; ni fans l'agrément
des Religieux. C'eft le fujet de fa Lettre à cet Abbé , dans la-
quelle il déclare auflî qu'il avoit jette les yeux fur Oltern frè-
re de Vital, pour prendre la place à Bernai. Jean confentit
à toutes les demandes du Roi , & donna fon agrément à Vi-
tal pour paffer à "Weftmunfter mais parce qu'Ofbern n'étcit
:

Moine ni ne Fécam ni de Bernai , il exigea qu'il devînt Moi-


ne de Fécam , avec la pcrmiffion de fon Abbé , avant de
pouvoir gouverner l'Abbaye de Bernai. On voit par ces trois
Lettres , cp'encore que les Rois & les Princes nommaflcnt des
Abbés aux Monafteres qu'ils avoicnt fondés , ils en deman-

Edit.a/i. J723./0/. I
GERARD, EVESQ. DE CAMBRAI. Cri. XVH. 271
doient le Moines à qui Tclcdion appaitc-
conienicn-:ent aux
noit. Jean, de Moine de Saint Bcnignc de Dijon , étoit de-
venu Abbé de Fccacn. Il gouverna ce MonaRcrc depuis l'an
1028 julqu'en 1078.
V. Gérard fils d'Arnoul (2) , Seigneur de Florincs & de ^"?"^ ^'^'^-

Kumigny , & d Ermcntrude , etoit natit de Liège. 11 fur mis b-^i,


de bonne heure dans le Clergé de Reims, ious rArchevcquc
Adalberon , & inllruit dans l'Ecole de cetce Eglilc , conilcc
alors aux i'oins de Gerbert. De Reims Gérard pafla à la Cour
du Roi Henri , qui le prit pour Ion Chapelain , quoiqu'il ne
fût encore que Diacre. Erluin Evêque d'Arras & de Cambrai,
étant mort au mois de Février de l'an 1012, plufieurs le pré-
Icnterent pour lui fuccéder. Le Roi Henri leur préféra Gé-
rard , qui ne fut toutefois facré Evéque qu'un an après , le
lendemain de la Purification. Ce Prince avoir fouhaité que la
cérémonie s'en fit à Bambcrg , à la Dédicace de la Cathédra-
le ; mais Gérard le pria de trouver bon , que fuivant le droit
commun , il reçût l'ordination de TArchevcquc de Reims fon
Métropolitain: c'étoit a'ors Arnoul. Le Roi lui donna avant
fa coniccration , un Livre qui en contenoit les Rits , ne vou-
lant poinL qu'il fût facré à la manière des Evoques de Fran-
ce, qu'il regardoit comme irréguliere. On conjetiure que ce
Livre étoit Temblable à celui que Fulbert de Chcirtres avoir ap-
porté de fon pays {h) , où i! étoit prefcrit que celui qui étoit or-
donné Piécre reccvroit de la main de l'Evcque une hoftie, dont
il prendroit une partie pendant quarante jours.

VI. Dans les premières années de fon Epiicopat , Gérard ir/'.'^"''^'^"


acheva le Monalîerc de Gingulfe à Florines , cjue ion pcre aiTifte à div.rs
avoir commencé , pour des Clercs ; & en fonda un autre pour Conciles.
des Moines en l'honneur de iaint Jean-Baptille. Il îe fournit
à Richard Abbé de Saint Vannes, qui y mit pour le gouver-
ner fous fcs ordres , un Moine nommé Benoit. Gérard fonda
un fécond MonaAere à Càteau - Cambrelis , & prit foin du
rétabliffemcnt de la difcipline monaftique dans les Abbayes
de MaroUes , de Maubeugc , de Saint Guillain & de Haut-
mont. En 1015 , il foufcrivitau Concile de Rcimsavec l'Ar-
chevêque Arnoul ; en 1022, à celui d'Aix-la-Chapelle ; &

Iz) C.illia Chr'-fiiin. mv. tom, 5. f-tg. 18. ^ MaBILl. Lii, 53. Âuinl. Kt:i
a*6. (i) Mabill. iwi.
,

272 GERARD,
en 1025 » ^"^^ Décrets du Concile d'Arra? contre les nouveaux
Manichéens. Quelque tems auparavant , c'eft-à-dire en 1022
il fut député avec l'Abbé Richard par 1 Empereur Henri vers

le Pvoi Robert , pour Tinviter au Coîloqne d'Ivois ; & il y afli-


fta avec ces deux Princes &: quantité de Seigneurs de France
& d'Allemagne. Il s'oppofa en loj ^ , aux reglemens de la
Trêve de Dieu , ne croyant point qu'on dût s'engager par fer-
ment à des obfervances qui n'avoient pas encore été en ufage.
C'étoit déjeuner au pain & à l'eau les Vendredis , & des'ab-
ftenir de viande Samedis. Depuis il changea de léntiment.
les
On trouve fon nom dans la charte de fondation de la Collé-
giale de Sainte Gudule à Bruxelles en 1047. Il mourut le
quatrième de Mars 105 1 ( « ) , &
non en 1048 , comme plu-
fieurs l'ont avancé. Radulphe Hiftorien de faint Licbert luc-
ccHcur immédiat de Gérard (/) , dit en termes exprès , que
ce Saint , après fon éle£lion , alla trouver l'Empereur Henri
fils de Conrade , ci Cologne ; que ce Prince approuva fon

élection le jour de Pâques ; qu'enfuite Liebert fut ordonné Prê-


tre, puis Evcque. Or Hcrmann Contracl Ecrivain contempo-
rain , remarque fur l'an 105 1 , que l'Empereur Henri pafla les
Fêtes de Pâques à Cologne.

^fTA"^'°"'
^^^' Pendant que l'Evêquc Gérard s'occupoit à Arras en
1025, de fcs fondions Epii'copales , on lui donna avis qu'il
y ctoit arrivé depuis peu d'Italie un certain nombre de No-
vateurs qui s'efforçoient de féduirc les peuples , failant pro-
fcfTion d'une certaine juftice , par laquelle feule ils diloient
qu'on étoit purifié , &
ne reconnoiffoient dans l'Eglife aucun
autre Sacrement utile au falut. Il les fit comparoïtre devant
lui , & les interrogea fur leur créance. Ils répondirent qu'ils
croient difciples d'un nommé Gandulphe d'Italie, de qui ils
avoient appris à ne reconnoîtrc point d'autre Ecriture que les
Evangiles & les Ecrits des Apôtres ; à avoir en horreur le
Myllére du Batême ; à rcjetter le Sacrement du corps & du
fang de Jefus-Chrifl ; à icgardcr la pénitence comme inutile
dans ceux qui étoicnt tombés dans le crime depuis leur prc-
fefîion ; à méprifer les Eglifes & les mariages ; à ne point «S.:

reconnoîtrc pour faints les Confcflcurs ; mais iculcment les

(;) BoLLAND. a,l (iiem iS. Juiiii. pi'g. j


(/) liil.pitg. <j9\,nnm. II.

Apôtres
EVESQUE DE CAMBRAT. Ch. XVII. 275
Apôtres & les Martyrs. Convaincus de leurs propres bouches
qu'ils étoient dans l'erreur , il les fit mettre en prifon pour
deux jours , pendant Iciquels il ordonna aux Clercs Sr aux
Moines un jeûne pour la convcrfion de ces hérétiques. Le croi-
fiéme jour qui croit un Dim>inchc , il .tint un Synode dais Î'E-
glif'e de Notre-Dame, avec les Abbés, les Moine*; & les Ar-

chidiacres où ayant fait venir les prifonnicrs , il ni un dil-


;

cours au peuple à leur fujet puis il les interrogea fur leur


:

doctrine. Leur réponfc fut conforme à celle qu'ils avoient dija


donnée.
VIII. L'Evcque voulant réfuter leurs erreurs par ordre, ^na'yfe <Jo
commença par le Batêmc (?») , &: montra qu'on ne pouvoir i"crentent*de
admettre , comme ils faifoient , le Livre des Evangiles, fans iiatême.
rcconnoîtrc auflTi la nécelTité du Batême qui y efl clairement
établie. Ils objeâioient que, le Batême étoit inutile pour trois
raiibns : mauvaifc vie des MiniRres , la rechute dans les
la
péchés ; & parce qu'il, n'eft pas yraifemblable que la foi & la
volonté d'autrui puiflb être utile à un enfatJt pour le falut :
pour eux ils mettoicnt leur juflice à quitter le monde , à ré-
primer les deHrs de la chair , à vivre du travail de leurs mains,
à ne faire tort à perfonne, & à exercer la charité envers tous
ceux qui fiivoriloient leur fc6te. Gérard répondit qu'on ne
pouvoit douter de la bonté du Batême (n) , puifque Jefus-
Chrift même l'a reçu ; 8c que faint Pierre l'adminiftra à Cor-
neille, quoiqu'il eût déjà reçu le Saint-Efprit ; que l'indigni-
té du Minilire ne forme point d'obftacle au Sacrement, parce
que c'eft le Saint-Efprit qui opère ; que les enfans peuvent
être fauves par la foi d'autrui (0) comme le Paralytique fut M,uth.$. 1
:

guéri par la foi de ceux qui le préfcnterent à Jcfus-Chrift ^ ^''"*'8«i5.


la fille de la Cananée par la foi de fa mère ; & le domeflique du
Centenicr par la foi de fon maître.
IX. Il vient enfuite nu Sacrement d'Euchariflie , & dit p5''^/"^!î'''® :

» Quand nous offrons ce Sacrifice (p), le pain & le vin mê "*^ ^" '**

» lé d'eau fandifiés d'une manière ineffable fur l'autel par la

(m) Ton. 1 5 . Spicilrg, p. i. pus ipfius Domioi noftri Jefu Chri/li , &
fangnis verus ac proprius efficitur, quam-
(«)'''/' 7. vis aliud efle videatur. Vidctur namque
(p) Quod qutdem Sacrificiiim dum de > panis matertalis, fed verirtimè efficitur cor»
pane vino ciim aqua m xtoin-'iTabili fim-
& pus Chrifti. Synodus Aireh.uenjis, tom. i j.
difiratione, crace & vcrbis illius in a!tan SpUileg. p. l] l^ 14.
conferratiir . . vttum ac propriura cor-

Mm
.

Tome XX.
,

274 GERARD,
» croix &
[les paroles de Jefus-Chrifl: , deviennent fon vrai

» &
propre corps &: fon vrai &
propre fang , quoiqu'ils paroif-
« fent être autre choie. On voit en effet un pain matériel :
» mais il devient tiès-véritablemcnt le corps de Jcfus-Chrift,
« comme la Vérité l'atteftc clic - même ". Gérard rapporte
ALi/f.îfi. 27. pour le prouver , les paroles de l'inllitution ; enfuite il répond
à l'objeâion que faifoient ces hérétiques , la même à peu près
que les Capharnaïtes , &
montre que l'on ne mange pas le
corps de Jefus-Chrifl: à la manière des alimens ordinaires en
les déchirant par morceaux (^) ; mais qu'il efl la nourriture de
l'ame ; nourriture qui procure aux fidèles , lorfqu'ils la reçoi-
vent dignement , la vie éternelle. Ils demandorcnt comment
ilétoit poffible que le corps de Jcfus-Chrifl; fùtdiftribué dans I
routes les Eglifes , & tous les jours , fans cefTer d'être î L'E-
vêque de Cambrai répond, que Jefus - Chrifl étant Dieu, il
ne lui efl: pas impoiïlblc de conferver fon corps qui efl éter-
nel & incorruptible , dans le ciel ; & de nous communiquer
fur la terre le Sacrement de ce même corps par le miniflere
des Prêtres , en la manière qu'il l'a ordonné , lorfque leur
donnant le pain & le calice , il leur dit : Faites ceci en mémoi-
re de moi. Il rapporte plulieurs hifloires miraculeufes pour
prouver la vérité du changement du pain du vin au corps &
& au fang de Jefus-Chrifl; , qui du moins peuvent fervir de
témoignage à fa créance fur la préfence réelle & la tranfub-
flantiation. Les fidèles n'en purent foutenir le récit fans verfer
des larmes. Les hérétiques mêmes n'ayant rien à répliquer
demandèrent pardon profternés par terre. Gérard le leur fit ef-
pérer de la part de Dieu , s'ils rejcctoicnt de bonne foi leurs er-
reurs.

Sainteté des
^' ^^ Combattit enfuite celle où ils étoient touchant les E-
Egiifes, glifes matérielles (r) , pour lefquclles ils n'avoient que du mé-
pris , les regardant comme des amas de pierres. II fait voir
par l'autorité des divines Ecritures , qu'elles font la mailon de
Dieu , un lieu de prières , de fan£lification , où l'on célèbre
les plus faints Myftcres ; où l'on entend la divine parole; où
l'on chante les louanges du Créateur ; où l'on vient offrir à
Dieu des vœux. Il fit voir auffi que l'ufage des encenfemcns
& des cloches n'a rien que d'utile ; la nécciïîté de tous IcsOr-

(f) P«j» 14. 1 î. (r) Fag. 22. 1 3 . ^ Juiv^


,

EVESQUE DE CAMBRAT. Ch. XVIT. 275


dres Ecclcliaftiqucs pour les fondions du facrc minifterc (s)
;
h décence des cérémonies de la fcpulcurc (t); rutilité de la
pénitence , non-feulement pour les vivans , mais mcine pour
les morts (ii) , lorlqu'on offre pour eux le Sacrifice du Média-
teur, ou qu'on fait pour eux des prières des aumônes. Un &
ami , dit- il (x) , peut fuppléer à la pénitence que fon ami n'a
•pu accomplir , étant prévenu par la mort. TI autorife ce fcnti-
ment témoignage de l'Ecriture
par le de faint Grégoirc- &
le-Grand , & ajoute
Que c'eft donc avec raifon que les faints
:

Dodeurs reconnoilTcnt un feu purifiant appelle Purgatoire ,


parce qu'il purifie certains péchés (y); ceux qui en cette &
vie ont mérité par leurs bonnes oeuvres , que les luffrages des
furvivans leur loient utiles , foit en donnant pour eux des
aumônes , foit en faifant offrir le Sacrifice. Sur quoi il cite
le palfage du fécond Livre des Macchabées rapporté par faint ^^•"^^''^•î.iî.
Paul.
XL Venant au Mariage
que ces hérétiques difoient être
, SurleMarJa-
contraire à l'Evangile (z) montre par plufieurs paflages de
, il S^. * .^"'f"
""
l'ancien & du nouveau Tcflament , que Dieu en efl l'inftitu- arkil
^

teur ; mais que comme on ne doit point le défendre généra-


lement , il ne faut pas le permettre indiftindement à toutes
fortes de perfonnes , nommément à celles qui le font confa-
.crées au fervice de l'Eglife. II fait voir que fi les Confcfleurs
n'ont pas répandu leur fang comme les Martyrs , ils l'ont du
moins fouhaité & ibuffcrt beaucoup par leurs travaux ( a) ;
qu'ainfi ils méritent un culte particulier ; que la pfalmodie ufi-
tée dans l'Eglife tire fon origine du chant des Anges dans
le Ciel , & des exemples qu'on en trouve dans l'ancien Tel-
tament i que le culte qu'on rend à la Croix & aux Images ^

(j) Pa^. aS. ji. pbemiam dixerit , neque in hocfaculo remit'


tetur et , neqitc in fttttiro. In qua fententia
(«) Prtij. 59. 41. beatus ait Gregorius , datur intelligi quaf-
( * ) Verùm n« quis poenîtentiam folis damciilpas in hoc ficulo , quafdaiii verô

vivis & non deiiindis proficere credat ,


in futuro poife relax.iri undc yure à
miiltos qui à fjcculo tranf;enint, fuonini fanLUsDoftoribuspurgatorius ignisefTe di»
pietate viventium à pœnis relevatos Scjrip- f
citur , quod per euni pcccata aliqiia purgan-
uir.i tcfte corape-rimL's , duci pro eis Sa^ tur, prout viventes aut eleemofynis , auû
criticium Mediitoris ofFertun, vel eleemo- facrificiis, autceriù, (îci:tante di.\imus,vi-
(jnx fiunt , vel quis vicariam pccnitemix cariâ pœnitentia; Iblutione obtinetc pof-
ibliuionem dcfiindo amico perfolvit, dum funt. ïbid. p. 41. 4j.
quoJ a?ger pravenrus morte non potuit (y) rat^e4i.
vives hipplet amicus. Nani fp!a Veritas
dicit , (J'.iij /;' i/:cis :;i Soiriiumfitiiflum blaf- (<i) /'<»^. 46. 47. 4p.
Mmij
z'j6 GERARD
eft relatif & fe rapporte aux Prototypes
en glorifiant la Croix :

du Seigneur nous l'invoquons comme y étant attaché


( ^ ) ,

lui-même nous adorons celui que nous invoquons. Proftcr-


:

nés de corps devant la Croix , notre ame s'humilie devant


Dieu. Ce n'efl point le trône de bois que nous adorons (c).
On ne fait point d'images dans l'Eglifc pour les adorer , mais
pour nous exciter à imiter les vertus de ceux qu elles repré-
fentent. Quant à la hiérarchie Eccléiiallique , elle efl: d'infti-

tution apodolique , formée fur la hiérarchie cclelie «& fur les


divers minifteres en ufage dans le culte du Seigneur fous la
Loi de Moyfe {à). Enfin l'Evèque Gérard enfeigne qu'il n'y
a aucune juftice ni aucune aftion méritoire lans la grâce de Je^
fus - Chrift ,
qui prépare lui-même gratuitement la volonté
de l'homme , qui lui donne gratuitement fa grâce , qui l'aide à
faire le bien & qui le confomme.
Concîamna- XII. La féancc dura jufqu'au foir mais auffi elle eut un :

tion de^ er-


j-j^yj-eux fuccès. Lcs Novatcurs s'avouèrent convaincus par les

nichéen/.
" raifons de l'Evêque, & reconnurent que la doclrine du falut
étoit celle-là feule qu'il leur avoit enfeignée. Gérard en con-
féquence leur ordonna de condamner leurs erreurs & ceux
qui lesavoient inventées \ &
prononça la condamnation avec
tous les Abbés , les Archidiacres & le Clergé, en ces termes:
Nous condamnons & anathématifons cette hérëfie , qui con-
trairement à la vraie &
catholique Eglife , dit que le Batême
ne fcrt de rien pour effacer le péché originel les péchés &
a£luels ; que les péchés ne peuvent être remis par la Péniten-
ce ; que la fainte Eglife de Dieu , le faint Autel & le Sacre-
ment du Corps &
du Sang de Jefus-Chrift ne font autre chofe
que ce que l'on voit des yeux du corps , regardant ce Sacre-
ment comme une chofe vile ; & qui rejette les mariages lé-
gitimes. Nous condamnons cette hérél^e tous ceux qui la &
louticnncnt: & nous faifons profcflTion de croire que perfon-
ne ne peut être fauve que par l'eau du Batême ; que les pé-
chés commis depuis , font remis par la pénitence ; que hors
de l'Eglife il n'y a point de falut ; que le Sacrement du Corps

fi) Ligno nihil divinum damus ut illiiJ


nimur corporc anteCrucem, mente Deuin,
adoranJum jii Ucfmus .. glorificantesi^i-
.
lliid.p.itie j I. î3,
turCrucim Domiiiioam, Chriftu-n quafi
prndentem in e.i, mente inv" camus, Qiiem ('0 P''X-i i-^' . .

yerô invocaaius, ipluiuiuloiamus :


pioAei-
. ,

EVESQUE DE CAMBRAT. Ch. XVTT. 277


& du Sang du Seigneur , cH: la même chair qui eil nce de U
Vierge ( ) , qui a ibuffcrt fur la croix , qui étant Ibrti du le-
(?

pulcrc a été élevée au-delTus des Cieux & eft aflls à la droi-
,

te du Pcre ; & que ce Myfterc ne peut être landiHé que Un-


ie iaint Autel. Ce Décret fut prononcé en latin ; mais à caule
que ceux qui avoient profeflc i'héréiie , n'entcndoicnt pas bien
cette langue , on le leur expliqua en langue vulgaire après ;

quoi ils le Ibul'crivirent comme ils purent en failant une croix.


L'Evêque Gérard envoya les Ades de ce Synode à un Evê-
que voilin, qu'on croit être Renaud de Liège , pour le précau-
tionner contre ces hérétiques , dont quelques-uns avoient fçu
fi bien fe déguiier dans Ion Diocèfe, qu'il les avoit laifle aller

impunis, ne les croyant pas coupables. Ces A6tes ont été im-
primés dans le treizième Tome du Spicilége , avec la Lettre de
Gérard à Renaud , qui iert de Préface. Tl cite en deux endroits
les Actes du martyre de faint André; ceux defainte Cécile &
les Ouvrages de iaint Dcnysl'Aréopagite.
XI IL La Chronitjue de Cambrai nous a confervc huit Let- Retires «!e

^^''"^
très de TEvêque Gérard (/) , dont la première eft adrelTée
aux Archidiacres de Liège , à qui il fait des reproches de ce
qu'ils accordoient la iépuîture ecclèilaftiqucà des perfonnesou
excommuniées , ou qui ayant vécu dans le dérèglement , n'a-
voient donné en mourant aucun figne de repentir. Il fait voir
qu'en cela ils agiffoient contre les régies de l'Eglilc. Cette
Lettre femble fuppoier que le Siège Epilcopal étoit vacant. La
féconde eftà Adalberon Evêque de Laon (g). Dans un âge
très-avancé , il penla à. fe donner un fucceffeur avant fa mort
& choifit à cet effet Widon ou Gui neveu de Berold ou Ber-
told Evêque de Soiiïbns. Gérard en ayant eu avis , lui écrivit
pour l'en détourner , comme d'une nouveauté exécrable ; n'é-
tant pas permis à uneEglife d'avoir deux Evêques. Il en écri-
vit aufli à Ebles Archevêque de Reims ( h) , comme Métropo-
litain; & à Bertold de SoilTons. Par fon zèle pour la difci-
pline , il fit échouer le defl!ein d'Adalberon , qui eut pour fuc-
ceffeur Gebuin &
non pas Gui. Gérard n'eut pas le même fuc-

) Sacramentum Domînici Corporis


(e gloria. Uiii, pag, 61
& Sanguinis .... irJ'iblcar.t'T profitc/nnr (f) Cirmic. Camerac, Lii, 5. <•. lî
eamdem eflc cai ne.T t irex V'irginenata, (r) IhiJ. taf. 19.
incfuce padà , c'e (Vl- Ichrole^ata. fuper (i) IbiJ. lap, 50. 31,
Cœlo* exakata, fïJcc in Paterna: maieihtù
278 GERARD,
ces dans fon oppofidon à l'élection d'EbIcs après la mort d'Ar-
noul. Il prétendit qu Ebles étant Néophyte peu inftruit (i), &
ne pouvoit être élu mais on pafla outre , de l'avis de Ful-
:

bert de Chartres. Ces trois Lettres à Adalberon, à Ebles & à


Bertold ont été réimprimées dans l'Hiftoire de l'Eglife de
Reims par Marlot (/).
LêîtreàLe- XIV. La cinquième eft à Leduin , Abbé de Saint Wall
'
S.'vaft,
d'Arras {m), L'Eglife Cathédrale ayant été brûlée par le feu
^

ciel, le trentième de Juillet de l'an 1050 , cet Abbé en


du
témoigna fa douleur à l'Evêque Gérard , qui .l'en remercia eri
lui demandant &
à fa Communauté , des prières des jeûnes &
pour fléchir le Seigneur, que les défordres du fiécle nepouvoienc
manquer d'irriter. Il répond dans la même Lettre aux inful-
res des libertins qui attribuoient à la vie licentieufe des Ec"
cléfiafliques ces fortes de malheurs. Gérard rebâtit l'Eglife
d'Arras &
la fit plus belle qu'elle n'étoit auparavant. On ne
fait point le nom de l'Abbé à qui la fixiéme eft adreflee : il
commcnçoit par un G. Voici quel en eft le fujet. Un nommé
Hezelin s'étoit féparé de fa femme ( « ) , nièce de l'Evêque :
l'affaire portée devant les Archidiacres de Liège , ils donnè-
rent gain de caufe à Hezelin. Gérard s'en plaignit (0) , di-
fant que cet homme , après huit ans de mariage , ne pouvoir
refufcr d'habiter avec fa femme. Dans la feptième Lettre , il
prie Foulques Evêque d'Amiens , de s'intèreffer auprès du Roi
Robert en faveur de Drogon Evêque de Terrouane , chafle
injuflemcnt de fon Siège par Baudouin Comte de Flandres ;
&
d'engager l'Archevêque de Reims fes Suffragans à de- &
mander le iecours du Roi pour ce Prélat {p). La huitième Let-
tre eft à l'Empereur Henri III dit le Noir {q) elle a pour but :

dtxcitcr ce Prince à protéger l'Eglife.


«îcntirnent de XV. On a dit plushaut,que Gérard s'étoit oppofcà l'èfa-
Gcrard fur la bUlTemcnt de la Trêve de Dieu (r) , dont les Evêques de Bour-
""^^
"• gogne avoient été les principaux auteurs. Il donnoit pour rai-

Ion de fon oppofition , qu'il appartient aux Rois de réprimer


les féditions par la force, de terminer les guerres & faire la
paix ; mais c]ue le devoir des Evêques ètoit d'avertir les Roi?
• I
,
I I w

(/) C
ronU. Camernc. ad an, 102
J, ^f (o) Chronic.Camer.u, lil/, j.f, jj.
^Iarlot I ib. 1, cap. 10. ip') I/>U. cap. 54.
j
( /) /</. Toin, 2. p. Ép, I
(,/) Ihiii. cap. 60,
(m) Chrcnic. Camer.it. cap. jl. lili. j. . (r) Lib. 3, caB. l'If
(jt") Ton), 9, SpiciUg page 67p. 1

EVESQUE DE CAMBRAI. Ch. XVII. 175?


de combattre vaillamment peur le fa'uc delà pa rie, &: :1c prier
Dieu de leur donner la vidloirc. Il croyoit aulTi qu'on devoir
porter armes , & faire rendre ce qui avoit été pris par force ;
les
qu'il n'étoit pasexpédient d'impofer à tout le monde le jeûne
du Vendredi & du Samedi , parce que tous n'ont pas la même
force; ni de les obliger par fermenta ces pratiques, difant que
c'ctoit les expofer au parjure. Enfin il trouvoit dur d'excom-
munier ceux qui refufoient de s'y foumettre ; de rcfufer la vi-
fite aux malades , & la fépulture aux morts ; toutefois prefTc

par les Abbés Leduin & Rotric , il confentit , quoiqu'à regret,


à cette paix comme les autres. Mais l'événement fitvoirlafoli-
dité de fon oppolition : la plupart de ceux qui ayoient juré la
Trêve de Dieu fe parjurèrent.
XVI. En l'an io-^6, on aflembla par l'ordre de l'Empereur ,
^"T'^i^"'"^

Conrad , un Concile à Tribur ou Teuver près de Mayence (j) , Tems."^"^'


cù il queRion du jeûne du premier mois, c'cfl-à-dire, des
fut
Quatrc-tems, qui arrivent ordinairement en Mars. Plufieurs
Evcqucs étoient d'avis de célébrer ce jeûne avec celui du Mer-
credi des Cendres, quand ils fe rencontroicnt enfemble. Mais
Gérard &
quelques-uns avec lui s'y oppoferent , demandè- &
rent que fuivant l'ancienne coutume, ce jeûne fût renvoyé à
la Semaine-Sainte , où les trois jours des Quatre-tems ont un
Office particulier & c'efl ce qui s'obferve aujourd'hui généra-
:

lement dans l'Eglife. Ce dernier trait de la vie de l'Evêque


Gérard achève de nous convaincre qu'en toute occafion il fe
déclaroit avec fermetépour le maintien de la difcipline, com-
me il n'en échapoit aucune de défendre la pureté de la foi : mais
fon zélé n'avoit rien d'amer ; &
il régne dans fes Ecrits un air

de politefTe qui fied fi bien à la véritable piété,


*—1^ ——^—
(t) Cbronic.Camerac, ad an, lojo, C^ SictZi^T,Cbrottic, ad eumdtman,

-
4^
aSO HUGUES,

CHAPITRE XVIII.

Hugues , Eve que de Langres ; Hifloire de l'hêrêfie de


Berenger,

Hino'
•''^'*I. A Vantd'entrer dans la difcuffion des Ouvrages que
gel Ses" [u- J^\. Do£leurs Catholiques compoferent contre l'héré-
J^s
, il efl: bon de faire connoître au Le6leur en
deî. Ses digni- fie de iiérenger
'''*'
quoi elle coniirtoit ; quels en furent les commencemens les &
fuites , les Ecrits que ce Novateur publia pour la foutenir ; qui
il étoit , &quelle fut la fin de fa vie. Né à Tours dans les
premières années de l'onzième fiécle (a) , d'une famille hon-
nête, il y fit fes études dans l'Ecole de Saint Martin. Vau-
thier fon oncle étoit Chantre de cette Eglifc (b). De Tours
il alla à Chartres où il étudia fous Fulbert , avec Adelmanne

depuis Evêque de Breffe. Fulbert les cxhortoit à fuivre exa-


tlemcnt les traces des Pères fans s'en écarter (c). Berenge»
de retour en fa patrie (d) , fut reçu dans le Chapitre de Saint
Martin du vivant du Roi Robert ainfi avant l'an 103 1 , on :

le chargea du foin de FEcole , & il remplit fucceflivrmentles


ofiTices de Tréforier &
de Chambrier ( ^). Il fut enfuitc fait
Archidiacre d'Angers par Hubert de Vendôme Evcque de
cette Ville (/). Il loufcrivit en cette qualité à l'ade delacon-
fécration pu Dédicace de cette Eglife (g) , par Thierry Evt"-
que de Chartres en 1040. Quoique Archidiacre d'Angers , il
continuoit les leçons à Tours , où il fe faifoit une grande ré-
putation de favoir ; paflant pour très-éloquent (h) , pour ha-
bile Grammairien & excellent Philolophe néanmoins tout :

(1) /noriyin. Mellic. cap. 86. Cf) Chronic. Trironeiif. Tom, J , /imfliJJ'^

(/') Mabihon, Frafat. tom. 9. AUcr, Colle-}. MARrtuî. p.ig. i«oj,


m- 4- ( f) Mabii.l. itiJ,
(e) Adfim. Epiji. ad Beretigar, Tout. 18. ({) Ll. iiid.
Pitliol. rat. p. 4^8. (h) Raidric. Tom. 4 Op. TtHchifn.pi
i,d) Maeui-, iWj iy>\ iH C'uron, Turon.fag. looy-
les
,

EVESQUE DE LANGRES. Ch.XVIIT. 281


le monde n'en penfoic pas ainfi & ceux qui rcxaminoient
;

<ie près (?"), rrouvoicnt que fa fcience étoit plus fupcrficicllc


que Iblide ;
qu'il abufoit des fophilmes de la dialedique ; qu'au
lieu de répandre du jour em-
iur les queftions oblcurcs , il

brouilloic les chofcs les plus claires de nouvel- ;


qu'il affectoit
les définitions de mots; une marche pompcufe , d'avoir une
Chaire plus élevée que les autres , de parler lentement & d'un
ton plaintif ; & qu'avec tous ces dehors il captivoit l'eftimc
des ignorans : aulli fa réputation ne fut -elle pas de longue
<lurée. La plupart de fes difciples l'abandonnèrent ; & ce qui
Xîe le piqua pas moins , c'eft qu'étant entré un jour en difpu-
teavccLanfranc (/) , qui enfeignoit publiquement dans l'Ab-
baye du Bec , il fut confondu. Par cette vittoire littéraire , l'E-
cole de Tours devint prefque défcrte , & celle du Bec très-
Jiombreufe^
Berenger efifaya de fe foutcnîr par des leçons fur l'E- Commence-
II..
^^
-criture-fainte (w) , quoique jufques-là il ne l'eût point étu- jj^^^g/
dice , appliqué entièrement aux arts libéraux. Mais en ne cher-
chant dans les Livres làints , qu'à fatisfairc fon orgueil , il n'y
rencontra point la vérité que Dieu fait connoître à ceux qui
Ja cherchent avec fimplicité. Il fe mit à combattre les maria-
ges légitimes , le Batcme des enfans , & fur-tout la foi de l'E-
glife touchant la préfence réelle dans l'Euchariftie. C'étoit
vers l'en 1047 («). Il répandit d'abord fes erreurs à Tours:
mais on ne fut pas long - tems fans en être informe dans les
pays étrangers ( ). Adalmanne fon condifciple , lui écrivit
que toute l'Allemagne en étoit fcandalifée de même que l'I-
talie (p) : & on y difoit hautement que Berenger s'étoit fé-
parc de la fainte Egliie Catholique, & de fa foi. Vous avez,
lui dit-il , des fentimens contraires à fa doftrine , croyant
comme vous faites , que l'Euchariftie n'eft pas le vrai corps
de Jcfus-Chrift , ni fon vrai fang , mais une fimilitude Se une
iigure.
III. Addmanne fe contenta d'exhorter Berenger à faire HugursEvé-
.cefler le fcandale & à renoncer aux erreurs dont il étoit ac- grès la com-

bat.

(») SiGEB. de Script. F.cclef. cap. 1^4. Ç5 (n)DucHESN. Tarn. 4. p. 87.


CniTM. Lib, I. de Veiitat, Ton;. 4. Biiliot. (0) Gauzeiin. in Mabillon. AnaleS. p.
fat. p. 441. 44U
(/)GuiTM. UiJ. (;) ToriK i8. B/i/Jst. P/if.f. 438.
(»") Li. ihi.-i. tj Mabulon. ul'ifuf. i
Tome KX. Nn
^

a82 HUGUES,
cufé. Mais Hugues Evéque de Langres , qui voyoit le mal
de plus près , & qui le connoinbit mieux (q) , parce qu'il l'a-
voic découvert dans un entretien avec Berenger , fe hâta d'y
apporter du remède. On le regarde comme le premier qui aie
combattu cette'nouvelle hércfie. Il ctoit fils de Gelduin Comte
de Breteuil , admis dans le Clergé de l'Egliie de Chartres (r),
le Roi Robert l'en tira en 103 1 , pour le mettre lur le Siège
Epiicopal de Langres , vacant par la mort de l'Evêque Ri-
chard. Hugues avoir destalens mais fe laiflant aller aux fail- ;

lies de fa jeuneffe ( ^ ) , il déshonora fa dignité. S'étant trou-


vé au Concile de Reims que le Pape Léon IX y tint en 1 045?,
enfuite de la Dédicace de l'Eglife de Saint Rémi , il forma
plufieurs plaintes contre Arnold Abbé de Pouthieres dans l'on
Diocèfe. L'Abbé n'ayant pas trouvé moyen de répondre aux
reproches , fut dépofé , dès la première Scffion. Hugues accu-
fé dans la féconde par le Promoteur du Concile , choiiicpour
Avocat Halinard Archevêque de Lyon & Hugues de Be- ,

lançon. Celui-ci avoir le don de la parole ; mais voulant en


faire ufage , il la perdit fur le champ : ce qu'on regarda com-
me un miracle. L'Evêque de Langres frappé de cet événe-
ment » refufa decomparoître à la troiliéme SelTion : c'eft pour-
quoi il fut excommunié. Le Concile fini (t) , il alla trouver le
Pape , confefla publiquement fes dèfordres , le fournit à la
pénitence , fuivit Léon IX jufqu'à Rome («) , marchant nuds
pieds , & fe préfenta devant un Concile , portant en main
un faifccau de verges , demandant pardon dans les mêmes
termes que l'enfant prodigue. Les Èvêques attendris , in-
tercédèrent pour lui : &
le Pape lui accorda l'abfolution de
fes fautes , en le rétabliffant dans les honneurs de l'Epifco-
pat (x). Il continua à fon retour en France , fes macérations
& les pouflTa fi loin , qu'il en tomba maladca Biccrne. Il avoic
pour compagnons de fon voyage quelques Moines de Cluni ,
à qui il demanda l'habit monalliquc (y ) , fous le nom du Mo~
najlere de Saint Vanne de Verdun , dont Valerann fon frère.

(7* Mabill. L;^. j-<J, Annal.aum, ^7. (f) I-/. Tom. 9. pah. 70. n. 6.

f. 5f2- («) Spicil.Tom. II p. 2 Si.


(r) Tom. 1. Spicil. p. 4^6, Cv) \bid.
(f) MabillOn , Uijhr. Dedicat. Eccltf. (y Mabuiok, lib. 58. Annal, num. 99*
Jl.emtnf. Tom, 8. Ailor,fag. 633. num, 14.
EVESQUE DE LANGRES. Ch. XVIII. 283
^oit Abbe & où le Comte Gelduin
, leur pcre , avoir fait
profelfion. mourut dans les larmes &
Il les travaux de la pé-
nitence en 1051.. Son nom fe trouve dans le Nccrploge de
l'Abbaye de Saint Vanne.
"^^^'''^
IV. Le leul Ecrit qui nous refle de lui , efl: Ion Traite con- ^°"
^'^"'
tre Berengcr. 11 etl: en forme de Lettre , & adrcHe à Bcren- „J^"^
gcr même , qu'il traite avec honneur, l'appellant très - rcvc-
reiid Prêtre à certains égards , parce rEglile n'avoir pas en-
core prononcé contre lui. Cétoit donc avanr le Concile que
le Pape Léon IX tint à Rome en lojo , quelque rems après
Pâques qui , cette année , tomboit au 1 5 d'Avril ; & même
avant le Concile renu à Reims le trois & quatre d'Odobre ,
où Hugues fut excommunié car depuis ce moment il fur oc-
:

cupé de toute autre chofe. Son Traité parut pour la première


fois à Paris en 1^48 , chez Jean Billaine , à la fuite des Œu-
vres de Lanfranc, par les foins de Dom Luc d'Achcri. Cet
Editeur étoit du moins perfuadé qu'on ne l'avoir pas encore
mis fous prciïe. Cependant on en cite une édition faite à Lou-
vain en 1 5 5 (z) , où on lui fait porter le titre de Lettre de
i

Hugues Evêque de Chartres ^ contre Adelmanne de Brefle.


Mais il y a dans ce titre une double faute ; on ne connoîc
point d'Evêquc à Chartres du nom de Hugues , en mcine-
tems qu'Adelmanne l'étoit de BrelTe ; 8c comment Hugues
,auroit'il écrit contre Adelmanne ,
qui penfoit comme lui fur
l'EuchariAie ? Des méprifcs de cette nature portent à croire
/qu'on en a fait de Louvain , & qu'elle
une autre fur l'édition
n'exifla jamais. Quoi
vrai ritre de l'Ouvrage
qu'il en foir , le
de Hugues de Lang.cs , cil félon les manufcrirs de la Biblio-
thèque du Roi & àc Corbie : Traite du Corps du Sang de &
}?fus-Chr'f(i contre Berengcr.
V. L'Évêc]ue de Langres le comamence par l'expofirion du AnzMe de
fcntimcnt de Bercnger , en ces termes : Vous dites que le""^'^"^*
Corps de Jefus-Chrifl: ell dans le Sacrement de l'Euchari-
ftie {a) , de telle forte que la nature du pain & du vin n'y eft
point changée, &
après avoir dit que le Corps de Jefus-Chrifl:
crucifié y eft , vous voulez qu'il ne loit qu'intcllcducl. Vous
icandalilez toute l'Eglife par cette erreur : car fi la nature &

(O Gesmer, BHliot.p. 365.P0SSEVIN, I (a) Tarn. 0-. lanfr.inc. png, 68. in -Ap^
in /parât, rom. i. ;-. 770. DrtAKjCE, in ffnil.
iffdiff Aftor. GIcJJjir. i

Nn ij
284 HUGUES,
l'effence du paîn &
du vin demeure encore après la confécra»
tion par une exiflence réelle dans le Sacrement , on ne peut
comprendre qu'il y ait rien de change dans la fubftance: & Ci
ce qui y furvient de nouveau , n'y ell que par la puiiïance de
remendement , on ne fauroit concevoir comment il le peut
faire que le corps intelleduel de Jelus-Chrill qui ne fubfifte
pas réellement , eft le même que fon corps véritable qui a été
crucifie. L'entendement n'eft que l'examinateur des lubftan-
ces , & non pas l'auteur : il n'en eft que le juge & non le créa-
teur ; & quoiqu'il nous montre & nous' repréfence les figures
& images des chofes créées , il n'eft pas néanmoins capa-
les
ble de produire aucun corps matériel. C'eft pourquoi il eft né-
ceflaire , ou que vous fartiez changer le pain de nature , ou*
que vousn'ayicz plus la hardiefle de dire que c'eft le corps de
Jefus Chrift. Or comme vous ne comprenez point comment
le Verbe a été fait homme (b), vous ne l'auriez aufii com-
prendre comment ce pain eft changé en chair & ce vin tranf-
formé en fang , fi la foi de la toute-puiftance de Dieu ne vous
l'apprend. Il fait voir que s'il n'y a rien dans l'Euchariftie que
ce qui fe fait par la feule puiifance de l'entendement, on pour-
ra en dire autant du Batême & de tous les autres Sacrcmens..
Bercnger n'avoit raifonné ainfi , qu'en voulant mefurer ce
Myftereincompréhenfible fur les principes & les lumières de
la Pbilofophie. C'eft pourquoi Hugues lui confeille de s'en
tenir aux lumières de la foi , & à ce qui eft écrit dans l'Ecri-
ture &
dans les Pères , nommément dans faint Ambroife &:
dans faint Auguftin. Le premier dit nettement (c) Le Corps :

que nous confacrons eft le même qui eft né de la Vierge. Le


fécond dit aux Juifs {d) Que vous reftc-t-il , finon de croi-
:

re , de recevoir le Batême Se de boire le Sang que vous avez


répandu ? Hugues ajoute , que comme Dieu s'cft formé un
corps de la fubftance de la Vierge , par la même puiflance
qu'il avoir formé du limon un corps à Adam ; de même il for-
me par la vertu fecrete de la divinité , fon Corps & fon Sang I
des fruits de la terre , offerts félon les rits de l'Eglife Catho-
lique. Entrant enfuite dans le motif de i'inftinution de l'Eu-

(i) Sicut enim non capis quomolo Ver- docucrit omnipotentirc Mes. Hvco Lwj^
,
|

bum caro faftuni fîf , /îc non potes capere


J
TmCi. in Btrmg.p. ««)•

quomodo panis ifte mutetur in carn«m & j


( <r
) Ambros. de initi.wii. cip. 9.
vinum in fanguinem transformetur , niû te •
(J) hvG.de qaitique bxrf/il/m.^-ip. t.
,

EVESQUE DE LANGRES. Ch. XVIII. 285


chariftic , il dit : Comme le Verbe de Dieu ctoit invifible dans
fa chair 8c dans Ton humanité , encore qu'il le fut fait homme y
ainfi cette même chair étant devenue en quelque forte invifi-
ble , parce
qu'elle repofe maintenant habite dans le Verbe &
a été de nouveau cachée par un conicil de miléricordc , fous
les quahtés du pain &
du vin , comme un moyen néccflcùre
pour pouvoir être mangée par les hommes ce qui ne cache :

pas toutefois la vérité de cette même chair de Jefus - Chriil


aux yeux fidèles &
fpiritucls. Mais ce n'étoit pas ainfi que Bc-
renger la voyoit. Je la vois , difoit-il , avec d'autres yeux
que le commun. Je ne le croirois pas , dit Hugues en finiflant,
l\ je ne vous l'avois ouï dire dans l'entretien que nous avons

eu enfemble. Ce Traité efl; chargé de raifonnemens d'ex- &


prefi^ions métaphyfiques , qui le rendent obfcur. L'ancienne
Gaule chrétienne attribue à Hugues les Ades de faint Viélor
en vers ( e ) mais on croit qu'ils font de Rainard furnommé
:

Hugues, l'un de fes fucccfTeurs.


VI. Lanfranc Moine & depuis Prieur de l'Abbaye du Bec Lettres ye B?-
^^"^^""^ ^'""
en Normandie, fe déclara aufii contre Berenger. Celui-ci
1 ayant appris une Lettre qui ne lui tut point ren-
, lui écrivit
due (/). dans cette Lettre S'il ed vrai , comme on
Il difoit :

me l'a rapporté , que vous teniez pour hérétiques les fcntimens


de Jean Scot fur le Sacrement de l'Autel , qui ne s'accordent
pas avec ceux de votre favori Pafchafe c'cll une preuve que :

vous n'ufez pas bien de l'cfprit que Dieu vous a donné , & que
vous n'avez pas encore afltz étudié l'Ecriture-fainte. Je vou-
drois voHS entendre fur ce fujec en préfencc de tels Juges que
vous voudriez mais en attendant que j'en aie la commodité (g),
:

je vous dis que fi vous tenez pour hérétique Jean , dont j'ap-
prouve les fentimens fur l'Euchariflie , vous devez regarder
aufii pour hérétiques faint Ambroife , faint Auguftin & plu-
fieurs autres.
VII. Cette Lettre étant tombée entre les mains de quel- Bercng^reft
cofdr.mné à
ques Clercs , foupçonnerent Lanfranc d'être aufiî dans Ter-
reur, L un d eux qui etoit du Dioccie de Keims {h) , ï ayant
portée à Rome , le Pape Léon IX , à qui cette nouvelle héré-

(e) Afii.i Lanfr.p. 6%.iii Appen}, [h] MaBULON. lib. Ji'. Annal, niim.
[

^/)LA^FR.A^C.^l^»/'. ii. G Hù.JeCor- 1


73.f'',î-511.©- LakVR. Lit. de drpcre *5
f or» f5 Sii»;. c.tp. 4./>. 254. Sanguin, Dtmini. cap,^. f,, 154,
I

(^)LA^^R., vit.in riotis.p. ii. '


2U HUGUES,
lie avoir été déférée , la fit lire dans le Concile qu'il tint en
cette Ville en 1050 , après Pâques. La doârine de cette Let-
tre ayant été trouvée contraire à celledcrEglifc , on en con-
damna l'Auteur , &
on le priva de la communion. Lanfranc
qui avoir iuivi le Pape à Rome, étoit préfent à ce Concile,
On lui ordonna de fe juRifier des mauvais foupçons que cette
Lettre avoit occalionnés contre lui ; ce qu'il fit non par des
raifonnemens , mais par rcxpofition de lés fentimens , auf-
quels pcrlonne ne trouva rien à redire. Enfuite le Pape indi-
qua un autre Concile à Verceil pour le mois de Septembre (ui-
vant, &
retint Lanfranc auprès de lui jufqu'à ce tems-là. Be-
rengcr y fut cité.
Il v.ipn Nor- vin. Ayant appris fa condamnation (i) ,'i\ paflTa en Nor-
n-anaie. où
j^iandic. Ansfoi Abbé de Préaux, ïe reçut avec politeffe ;
fp.t réfutées, mais ayant examiné avec loin fa dotîrine , il la trouva erro-

née en plufieurs points. De-là Bercnger alla chez Guillaume


le Bâtard , Duc de Normandie j dans le deffein de l'engager
dans fes erreurs. Le Duc, quoique jeune, ne fc laiffa pasfur-
prendre 5 mais il le retint jufqu'à ce qu'il allât à Brione où il j,

invita les plus babiles de toute la Normandie. Berenger avoic


avec lui un Clerc, fur lequel il failoit beaucoup de fond. La
Conférence fe tint. Berenger & fon Clerc furent réduits au
filence, &
à faire profeiïion de la foi catholique. De Brione
il vint à Chartres , où on lui propofa divcrfcs qucflions fur

l'Euchariftie. Il ne voulut point y répondre de vive voix ; &


croyant qu'il réufTuoit mieux par écrit , il écrivit aux Clercs
de cette Eglife , une Lettre , où entre autres abiurdités , il ac^
cufoit l'Eglife Romaine d'hcréfie , &
le Pape Léon qui la gou-
vernoir.
ïi.ftcondanv IX. Le Concile de Verceil fc tint au mois de Seprembrp
'-''^d^'v'r"'
'^^ ^'*"1050 (/), & non en 1053 , comme le dit Durand
«il en jojo. Abbé dcTroarn (?«). Berenger n'y vint point, quoique cité.
On lut par ordre du Pape qui préfidoit à cette Altcmbléc , le
Livre de Jean Scot fur l'Eucharillie, que l'on trouva (i perni-r
cicux j cju'il fut condamné & jette au feu. Enfuiie on examina

(«JMabill. Lit. ntm. 75.


f9. Anti.il. an. lofo.
f. f ij. Durand. liO. de Corport Domini. (m Di r.AND. Lib. dr Ccrpore Dtmi/tit
fart. 9. p. 106. part, i^.p.tg. \o6'^ loj,
il) HfKMAji.Cw/.'4i.7. in CLronic, a4
,

EVESQUE DE LANGRES. Ch. XVIII. 287


la dodrine de Berenger fur la même matière & elle fut con- :

damnée. Deux Clercs envoyés de fa part , fe mirent en devoir


de la défendre mais dès l'entrée de la diipute ils furent con-
:

fondus & arrêtés. Ainfi la foi de la faintc Eglile dont Lanfranc


prit la défenfe du conientement de tout le Concile , fut confir-
mée d'une voix unanime («).
X. Le Roi Henri informé desmouvemens que Berenger LettredeEe-
fe
donnoit pour établir fon héréfie , & de ce qui s'étoit pafTé à ceiin!R(fponib
Briône , indiqua de l'avis des Evêqiics & des Seigneurs , un d'Afceiin.
Concile à Paris pour le* i^ d'Oclobre de la même année 1050,
avec ordre à ce Novateur de s'y trouver. Son deiTcin en
y
allant , étoit de pafler par l'Abbaye du Bec. Il en donna avis
au Moine Afcelin par une Lettre où il lui dit ( ) , qu'il avoir
réfolu de ne traiter de l'Eucharifticavec perfonne, jufqu'à ce
3u'il eût répondu aux Evêques qu'il alloit trouver , c'eft-à-
ire, ceux qui dévoient s'allcmbler au Concile de Paris
(p) ;
& que c'étoit la raifon pourquoi il ne s'étoit prefque point
expliqué fur cette matière dans la Conférence de Briône , ni
même lur la propofition que Guillaume alors Moine du Bec
& depuis Abbé de Cormeilles , avoit avancée , fçavoir que
toute perfonne doit s'approcher à Pâques, de la fainre Table.
11 ajoute, que Guillaume l'accufoit fauffemcnt de n'avoir ofé
nier dans cette Conférence , que Jean Scot fût hérétique ; que
c'étoit démentir toutes les raifons de la nature , la do6trinc
de l'Evangile 8c de l'Apôtre , de croire ce que Pafchnib s'i-
maginoit icul , que dans le Sacrement du Corps du Seigneur,
la lubftance du pain fe retire abfolument. Il convient qu'il a-
voit dis que les paroles même de la confécration prouvcient
que la matière du pain ne fe retire pas du Sacrement ; & il
fouticnt que cette propofition eft fi claire , qu'un jeune écolier
peut la prouver. A l'égard de Jean Scot , il protertc qu'il ne
l'a jamais condamné , & prie Afcelin de ne fe pas rendre faux

témoin fur ce fujet. Afcelin en répondant à cette Lettre,


commença par juftifier Guillaume fur cette propofition Tout :

homme doit à Pckjues s'approcher de la Table du Seigneur.


Nous fommes témoins qu'il a dit feulement , qu'on devoit s'en

(n) Mabillon. 'LU. j'p. Aanal, num. '


^ ij.

(oj 1/iuotis ad vi'.. Luafir.nic.p.tr, i^\


,

288
^
HUGUES,
approcher , à moins que l'on n'eût commis quelque crime qui
obligeât à s'en éloigner ce qui ne fe devoit faire que par l'or»
:

dre du Confeffcur ; autrement ce fcroLt rendre inutiles les


clefs de l'Eglife. Il fe juftifie cnfuire lui- même , difant : Je
croirai toute ma vie comme certain & indubitable ,
que le
pain & le vin fur l'autel ,
par la vertu du Saint-Efprit & le
minillere du Pixtre , deviennent le vrai Corps & le vrai Sang
«de Jefus-Chrift. tourne Berenger en ridicule , au fujct des
Il

louanges qu'il donnoit au Livre de Scot , qu'il convenoit n'a-


yoirpas lu jufqu'à la fin j & de. lare qu'il croit avec Pafchafe
^ les autres Catholiques , que les fidèles reçoivent à l'autel le
vrai Corps &
le vrai Sang de Jefus-Chrift. Enfuite il foutienc
à Berenger qu'il avoir été oblige dans la Conférence de Briô-i
ne , d'abandonner Jean Scot fur un mauvais fens qu'il don-
noit à une Oraifon de faint Grégoire. Cela lui donne occa-
fion de juftifier aufll le Chantre Arnoul, fur ce qu'il avoir dit
â Berenger Laiffez-nous croire comme nous avons été inf-
:

truits. Il vouloit , dit-il , vous détourner de changer ce che-


min droit & battu que nous ont montré nos Maîtres Ci faints ,
/] fages &
fi Catholiques. Enfin il exhorte Berenger à aban-

donner le Livre de Scot , condamné au Concile de Verceil


qu'il appelle Plcnier , parce qu'il y vint des Evêques de divers
pays ; &à revenir à la doctrine de la Tradition Catholique &
Apofi:olique.
Lettra ^e XI. Cependant on apprit en Germanie que le Roi Henri
TiicoduinEvc-
^e
voulant convaincre publiquement d'erreur Berenger, Brur- &
e >^ge-
j^Qj^ Evêc]ue d'Angers

dodrinc
,
qui lui paroiflbit trop attaché à fa &
à Paris. Sur
I
; avoir à cet effet indique un Concile
cela Théoduin ou Déoduin Evcque de Liège (q) , écrivit à ce
Prince non-feulement pour le congratuler de fon zélé ; mais
AulTi pour lui faire obierver que Brunon étant Evcque , on ne
pourroit le juger dans ce Concile fans en avoir auparavant
reçu le pouvoir du Pape ; qu'au lieu d'interroger Brunon 8c
jBerenger fur leur doûrine , il valoir mieux fonger à les punir ;
qu'on ne doit écouter les hérétiques que quand les qucftions
n'ont pas encore été bien examinées ; que celles dont il s'a-
giflToit étant mifes dans un grand jour par les Conciles & par

les JEcrits des Prri^s, il ne relloit aucun doute à lever. Il rap-

(fl) Afud Habill. h A/tale3.f*g. 446.^ toin. ^, Ctnt.f. io6à,


porte
,

EVESQUF, DE LANGRES. Ch. XVIII. 28-


porte plulicLirs pjUagcs des Percs Grecs Latins lUr laprc- &
Icnce réelle dans TEucharirtie ; il en rapporte de laint Augu-
ftin fur le Barcme des enfans , un Canon d'un Concile &
de Tcicde contre ceux qui condamnent les mariages légiti-
mes; &
conclut que Brunon &
Bcrcnger étant déjà anachéma-
tifés , il ne s'agifiuit plus que de convenir avec les B^vêqucs de
France & d'Allemagne , avec l'Empereur & le Pape mériK , !e
la manière de les punir , fans les admettre à l'audience du L.on-
cilc de Paris.
^^'f^^'^çf'?
lieu de répondre à Adelmannc fon con-
XII Beren2;er au
diiciple, en des termes d amine & de reconnoillance , le prit nwàne.
d'un ton fort haut (r), fans aucun égard à fes remontrances
charitables, & le déclara ouvertement pour les erreurs que
cet ami |avoit eiïayé de lui faire abandonner. Paulin Primi-
cier de Mets, lui avoit auiTi écrit à la prière d'Adelmanne:
mais fa Lettre ne fit pas plus d'imprcITion , comme on le voit
par la réponfe de Bcrcngcr. Elle ne futpas rendue à Paulin,
mais intrrccptéc par Ifembcrt Evcque d'Orléans (j), qui la
porta ail Coi-cile de Paris.
Con-îieHePa,
XÏIl. Il fe tint au jour marqué, c'eft-à-dire le 16 d'Odo-
" °^°'
jbre 1050. Le Roi Henri y affilia avec un grand nombre d'E- ' '

vcqu.s , de Clercs & de grands Seigneurs ( r). Bcrengcr n'o-


ia y comparoître, quoiqu'il en eut reçu ordre. 11 demeura à
.Angers avec l'Evcque Brunon. Le Concile adernblé , Ilcm-
b;'rt produifit la Lettre de Berenger au Piimicier de Metz,
j& demanda qu'en en ik ledure. Quoiqu'on l'ccoutât avec
grande attention , les Evcqucs ne furent s'empêcher de l'in-
terrompre plulicurs fois , tant ils avoicnt d'horreur des hérélles
.que cette Lettre contenoit. Elle fut condamnée avec fon auteur
& fcs complices , & le Livre de Jean Scot qui étoit la fource
de ces erreurs. Le Concile déclara de plus , que fi Berenger
Se fcs feclatcurs ne fe rétratloient , toute l'armée de France
le Cle'g: à la tête en hjbit eccléilallique , iroit les chercher
où ils fudent, & les afilégcr, jufqu'à ce qu'ils fe foumiffcnt à
ia foi catholique , ou qu'on s'en fût laifi pour les punir de mort.
Ces mcna:es ne furent pas vaincs pluiieurs des fedatcurs de ;

(r] SiGEEERT. de Scriptor. Ecclcf. c.^p. Xpert. 9. p. 107.

i j-4
.
1
j';) Id. iiid. C? Chron. Eliioueiif. rem. 3.
(s) PllRA^D. /.(/', df Corpore Dcmiai.\A/iecdo:,j\^arteu.^. 1346.

TomçXX, Oo
,
,

a90 HUGUES,
cette nouvelle heréHe fe prcicnterent au Concile («) , jurè- &
rent fur les reliques des Saints , qu'ils croyoient ce que l'E-
glife croit : néanmoins quelque tems après ils retournèrent à
leurs erreurs.
L ures de Be- XIV. Bcrenger n'ayant fait aucune foumiffion , le Roi Hen-
chafd' & au" " ^" qualité d'Abbé de Saint Martin de Tours (x) , le priva
Trcforer de du revcHu qu'il tiroit comme Chanoine de cette Eglife. Be-
S. Martin.
renger s'en plaignit dans deux Lettres ; l'une à un Abbé nom-
mé Richard (jy) , l'autre au Tréforier de Saint Martin (z) ,
bien venu tous deux auprès du Roi ; les priant de lui obtenir
de ce Prince quelques libéralités indemnités du tort qu'on &
lui avoit fait fouffrir. II s'oftre de prouver au Roi , ou àtjuel-
qu'un député de fa part, que le Concile de Verceil avoir inju-
flemcnt condamné Jean Scoc approuvé Pafchafe ; les & &
charge de faire obferver à ce Prince , que Jean Scot écrivit
fon Livre par ordre du Roi Charles-lc-Chauve ; qu'en quali- &
té de fon iucceflTeur , il doit à ce more fa protedion contre les
calomnies des vivans.
Copcîles de XV. Le Pape Léon IX étant mort le p d'Avril 1054 , le
Tojrn 'de* ^^ps Viftor II tint un Concile à Florence l'année fuivante ,
R 3me contre où il Confirma tous les décrets de fon prédécefTeur («) , con-
JBerenger.
féquemment ce qu'il avoir fait contre l'héréfie de Bercnger.
Il y en eut un autre à Tours la même année 1055 (6) , aflem-
blé par les foins d'Hildcbrand Soûdiacre de l'Églife Romai-
ne , & de Gérard , l'un & l'autre Légats du Saint Siège (c).
Berenger y comparut, on lui donna liberté entière de défen-
dre fes fentimens (ci) : il n'en profita pas : il anathématifa fes
erreurs , confefTa publiquement h foi commune de l'Eglife
fur la réalité du Corps & du Sang de Jcfus-Chrifl dans l'Eu-
chariflie , & foufcrivit fon abjuration (e). Les Légats croyant
toutes ces démarches fincéres l'admirent à la communion. ,

Orderic Viial dit que Lanfranc aflifta à ce Concile , qu'il &


y confondit Berenger (/). Les autres Hiftoriens n'en difent

(«) Durand. Uid.fnge 107. cap.


44- Kî- i?4-
(*) Mabillon. Prafat. Tom. p. Adar. (0 Tom. 6, Cotic. llarduin. fag. 1041.'

f. 1 1. n. II. (i) MAain.. T..in. 9. Ador. tmm.i),


{y) Tom, %.SpiciUg, f.
loz.^ Tow. 7. P'^S- 'I.
Conc p. \o6z. (f) LAtFR, p. 1J4, Ationym. de multiple
(t.) JMabillon. u'i fn.ri. condcmn. 'îo v;^. p. T,(<l.lt, GoiTM.L/i, 3

{a) Tom. 6. Conc. UjiJiiin. p, 105p. Tom. 18. Bi liot. l'iXt.p. 46î.
(i) Lanfranc. Lit, Jt Corfort Domini, (f) Orderic. Lib. 4. iw;/. p. j tp.
EVESQUE DE LANGRES. Cn. XVIII. 2^1
rien. Ils ne parlent pas non plus d'un fécond Concile de
Tours contre cet Héréfiarque {^)y mentionne dans la Lettre
qu'Eufebe ou Brunon Evêque d'Angers , lui écrivit ; ni de ce-
lui qui fut tenu à Angers dans une certaine Chapelle , par
ordre du Comte d'Anjou. Apres la mort de Viâor fucccllcur
de Léon IX , & celle d'Etienne fuccefkur de Vidor , le Pape
Nicolas II , affembla à Rome cn 1055) , un Concile de cent
treize Evoques , dans lequel Berenger abjura encore ion hé-
réfie ; jerta au feu les Ecrits qu'il avoit compofés pour la dé-
fendre ; & foulcrivit à la profeiïion de foi dreilée par le Car-
dinal Humbert, & approuvé de tout le Concile. Le Pape en-
voya cette profeflion de foi dans tous les lieux où Berenger
avoit répandu fes erreurs ( A ) , pour réparer en quelque façon
le fcandale qu'il y avoit caulé. Mais il l'augmenta lui-même
après ion retour en France , par un Ecrit qu'il publia contre
le Concile de Rome où il venoit d'abjurer fon héréde. Ses dil-
ciples eurent grand foin de le répandre par-tout. C'étoit un
amas d'injures groflieres contre les Papes qui l'avoient con-
damné , & contre le Cardinal Humbert. Le Pape Alexandre
IL ne Isifla pas de lui écrire une Lettre pleine de charité ( >
pour l'exhorter à changer de conduite & de dodrine. Berenger
n'en fut point touché : il répondit à Alexandre qu'il ne change-
roit point de fentirnent.
XVI. Brunon Evêque d'Angers , avoit efface par une con- Lettre de Bru-
fefTion de foi , les foupçons qu'on avoit conçus fur fa doârine.
d'A'ngern''à
Apres y avoir rapporté les paroles de l'inilitution de TEucha- Berenger.
riftie ( /) , il reconnoiifoit que par la vertu & l'effet du même
Verbe qui a fait toutes chofes , le pain après la coniécracicn ,
étoit le vrai Corps de Jefus-Chrifl (m) , & le vin fon vrai
Sang. Mais, ajoutoit-il , fi quelqu'un demande comment cela

Cç)1VIabili.ok. in An.ilc^. p.^n, { dem moJo verum Sangu'nem efTe creHi-


(6) Lanfr./), 153. Anonym.àe multipl. [
mus & confitemur , qiiod R quis qualiter
f • Jf !• hrc furi poffic , inquirat , non ci fecundiim
\i) Amnym.ibid.f. jéj. tï Tom. l8. natiirr ordincm fcJ fecundùm Dei onini-
,

Bibliot, lut.p. Sjî. potentiam r^lpondemus & hoc & om- ; ,

(/) Mabulon , Prafat, Tom. p. A3or. nia qurcumque voluit, fecit Deus in cœlo
;. 13. &in terra & in mari, & m oiinibus a-
{m) Hiijus Verbi , per quod omnia faftn byffis.EcsFB. Rkuno. Ipifl. ad Bcnng.
fiint , virtute & eri'ecîu , pjnem port conle- pitd Mahiilon. Tom, 57. Aîîor. in l'rjfai,
cr.int.s in h.ïc v. rba SacerJofis facratio- p. 13.
nem, verum Corpus Chrilli , & vinumco-
Ooij
25>2 HUGUES,
fe fait , je n'ell point félon l'ordre de la nam-
réponds que ce
re mais par la toute-puiflance de Dieu , qui a fait dans le
,
Ciel , dans la mer 6z lur la terre tout ce qu'il a voulu. Brunon
ne voulut plus depuis , le mê'er de dilputer fur l'Euchariftie,
ni fe trouver daris des difputes publiques iur cette matière. Il
écrivit même à Rcrenger pour l'engager à prendre ce parci 8c
à foufcrire à la même profefTion de foi. Cette Lettre eft po-
fléricure à la Dédicace de l'Egliie de Saint Sauveur à An-
gers en 1062 (« ). Brunon en lit la cérémonie avec plufieurs
Evcques , du nombre defquels étoit Hugues Archevêque de
Befançon.
Concile de XVH. L'année fuivante 1063 , Maurille Archevêque de
ouen"[^or°^^
Rouen (0), tint unConci'e dans fa Cathédrale avec tous fes
Suffragans , en préfcnce de Guillaume de Normandie ; où l'on
publia une profefTion de foi contre Berenger. Quelques-uns
mettent cette Aifcmblée en 1055. Les Evêques y déclarent;:
qu'ils croient de cœur & qu'ils profeiTent de bouche , que le
pain mis fur l'autel , n'eft que du pain avant la confccra'ion. ;
mais que dans la confécration même , la nature & la fubftan-
ce du pain , par une puiflancc ineffable de la divinité , eft
changée en la nature & la fubftance de la chair , non d'une
autre , mais de celle-là même qui a été conçue du Saint-Ef-
prit , qui eft née de la Vierge Marie , qui a été flagellée pour
notre falut , mife dans le tombeau , refTufcitée le troifiéme jour
d'entre les morts, & qui eft afîife à la droite de Dieu le Père ;
. que pareillement , le vin que l'on prélente mêlé d'eau pour
être facrilié , efT; véritablement & elTentiellcment changé au
Sang qui eft forti du côté du Seigneur , ouvert par la lance
du Soldat. Ils ajoutent qu'ils anathématifent tous ceux qui s'é-
lèvent avec orgueil contre cette foi fainte & apoftolique. Cette
profefTionjde foi devint célèbre dans la fuite; & on obligea tous
les Evêques de la Métropole de Rouen (p) , à la ligner avant
leur Ordination-
Concil''s de XVIII. La du Pontificat de Grégoire VII
troifiéme année
f"-ceffcur d'Alexandre Gcrauld Cardinal , Evêque d'Oftie,
,
S°i\hTx ît en
1075. Légat en France, aflTembla un Concile à Poitiers (q) , où la

(n) l.AEB. nov. B(i/jof. «oro. i.p. 188. (p) IMabill. i^(V. p. 119.
(0) Mabill. //> ^«.i/ffl, /, 1x4. ^/J.»^. (^ '
Cire». Matltmciif. tom, l, Biblioti
QV, LaBB, p. Zllr
,

EVESQUE DE LANGRES. Ch. XVIII. 293


qucftion de rEuchariftie fut agitée avec tant de chaleur , cjuc
Berenger faillit à y être tué. On con[e6ture que ce fut en cette
occalion , qu'il accufa faint Hilairc d'avoir erré fur l'humani-
té de Jefus-Chrift ; ceux qui étoient prclens en écrivirent à
i^anfranc ,
qui leur répondit par fa cinquantième Lettre. 11 fe

tint la même c'ed-à-dire , en 1075 , un Concile dans


année ,

l'Abhaye- de Saint Maixent, auquel Gofcelin Ar*.hevcquc de


Bordeaux préiida. Berenger y rétrada fon héréiie contre la
préfence réelle (r) prcfclfa la foi de !' glife fur ce Myilere
,

ôc donna une confefiion de foi conforme.


Corci'ffd-
XIX. Le Pape Grégoire VII voulut bien lui donner au-
lence dans deux Conciles [j ) , 1 un en 1070 , lautre en
'

&107P.
1075?. fe tint le jour de la Fête de tous les Saints
Le premier
& non 22 de Npvehibre , comme le dit Bertold. Berenger
le

ne pouvanc nier que (a Scde ne fût d'un fentiment contraire


à la foi de l'Egide Catholique , abjura fous ferment fcs erreurs,
comme il avoir fait dans les Conciles précédens, & fît pro-
fclîîon de la foi Catholique. Le iccond fut tenu au Carême de
l'an 1079 , dans le mois de Février. Il s'y trouva cent cin-
quante Evêc|ues , avec grand nombre d'Abbés & de Clerc?.
On y difputa beaucoup fur l'Euchariftie , & les DoiSteurs Ca-
tholiques ayant démontré par l'autorité des faints Pères, tant
Grecs que Latins , que le pain Se le vin font par les paroles
de la confécration , changés fubftantiellement au Corps de
notre Seigneur, né de la Vierge & attaché à la croix ; & au
Sang qui a coulé de fon côté ceux qui foutenoient que ce:

Corps & ce Sang ne font qu'en figure dans l'Euchariftie , chan-


gèrent de fentiment ; Berenger demanda pardon & l'obtint,
après avoir donné fa profelîion de foi. Le Pape le renvoya
avec des Lettres de fauf- conduit adreffées à tous les fidè-
les (f), portant menace d'anathéme à quiconque lui feroic
tort en fa perionne ou dans les biens. Il lui donna même pour
l'accompagner, un Clerc de fa maifon nommé Foulques («) ,
qu'il chargea de Lettres pour Rodolphe ou Raoul Archevê-
que de Tours , & pour Eufcbe Brunon Evêque d'Angers ,
afin qu'ils fignifiaflent de fa part à Foulques Comte d'Anjou

(r) Id. ibid.iS G.iUitjdirijli.w. tiov. tom. p. 105. 104. I0<?.


Z. pag. S04. C r ) Tom. 2. SpUileg. p. ço8.
(î) Attoiijm. [JIM A BU. I» Aualeii.f,^\^. («) MabillON. Prafat, tom, f. Ador,
^ iliSd Guf. Tcw, 4. Arieciiot, Martene ,
p.ig. H.
25?4 HUGUES,
de ne plus inquiéter Berenger , mais de le défendre contre
fes ennemis. Toutes ces attentions de Grégoire VII donnè- .

rent lieu aux fchilmatiques de Taccufer dans le Conciliabule


de Brixen {x) , d'avoir douté de la préfence réelle dans TEu-
chariftie, ne faifant pas attention qu'il n'a voit agi de la forte,
qu'après s'être aiî'uré de la foi de Berenger. Il eft vrai qu'il fut
trompé comme fes prédéceffeurs l'avoient été. Berenger de
retour en France , publia un Ecrit contre la profeflion de foi
qu'il avoir récitée au Concile de Rome en 107p. Ce fut une
occafion de nouveaux troubles & 4e nouvelles difputes. Il fuc
attaqué , entre autres , par un Clerc de l'Eglife d'Angers ,
nommé Geoffroi. Berenger écrivit à Brunon Evêque de cette
Ville pour le prier de lui permettre de difputer avec Geoffroi
,

en préfence d'un Juge , fur le Livre de faint Ambroife , inti-


tulé , Des Sacremens. Eufebe répondit que cela n'étoit poinc
nécelTaire;
qu'il y auroit même du mal à traiter de nouveau
une queftion qui avoir été jugée trois fois dans des Conciles de
la Province de Tours , & une quatrième fois par le Synode du
Siège Apoftolique. Berenger ne fe rendant point à ces autori-i
tés, il falut affcmbler un nouveau Concile, où on Tobligeroit
de rendre raiion de fa foi.
Fo^°'^'^''^
^^ •^^* ^^ *^ ""^ ^ Bordeaux en 1080 (^ ) , en préfence d'A-
Aiort "ce Be- Hiat & de Hugues , Légats de Grégoire VU
, de Gofcelin Ar-^
renger. chevêquc de cette Ville, de Raoul de Tours , de Guillaume
d'Auch , & de plufieurs Evcques. Berenger y fut amené par
Raoul fon Archevêque , afin qu'il y confirmât la profcfTion
de foi qu'il avoir faite à Rome , & apparemment pour révo-
quer l'Ecrit qu'il avoir publié contre cette formule (z). C'eft
le dernier Concile que l'on afliembla contre Berenger. On ne
crut point devoir en convoquer un général {a) , comme l'on
n'en convoqua point contre Pelage ; parce que les décidons
du Saint Sicge & des Conciles particuliers ayant été reçues
unanimement dans toutes les Egliles , l'hérélie de Berçngcr
fe trouva tellement détruite , qu'elle ne trouva plus de re-
traite que chez les Manichéens. Il y renonça lui-même de

(«J Abb(H Ufpergc;:f, ad an, \oZo.fag. (i) MaBul. Prxf.u, in Tom, 9. Afior,
137.
{y) Clronic. Malhne. tom. a. Bitliof ('!' I?ossu£T , Uifl. du Variât, lit, ij,
mv. Labb./>, iii, Tom. ^.^^rïor, Mabil. nuin. i
iy p, 466,
EVESQUE DE L ANCRES. Ch. XMII. i^ç
bonne à en juger du moins fclon les apparences : car il
foi ,

pafla les huit dernières années de ia vie dans la retraite &


dans les exercices de la pénitence (ô). Il mourut k- cinquième
de Janvier de l'an 1088 , dans l'ille de Saint Cômc , âgé
d'environ po ans: fon corps fut rapporté à Tours, inhumé &
dans le Cloître de Saint Martin. Hildebert Evcquc du Mans,
& Baudri Abbé de Bourgucil (c) , lui firent des Epitaphcs , qui
prouvent qu'ils ne doutoient pas de la fmccrité de fa convcr-
fi )n. D'autres Ecrivains contemporains {d), alfurent qu'il mou-

rut dans l'unité de l'Eglife. C'cft en coniéqucnce que l'on a


mis fon nom dans le Nécrologe de l'Eglile d'Angers (e) ;
avec fa qualité d'Archidiacre. Bertold Prêtre de Confiance ,
en a jugé ditféremment (/) ; mais érant éloigné de Tours , il
pouvoit n être pas au fait de la conduite que Berenger avoir te-
nue dins les dernières années de fa vie.
XXI. On ne peut mieux connoîtrc fcs premiers fentimcns Doflrînede
fur l'Euchariftie , que par feS propres paroles, & par ce qu'en Je^lf%,\.
ont écrit ceux qui le connoifToient particulièrement , qui l'a- crits.
voient ouï s'expliquer dans les Conciles, & qui l'ont réfuté de
fon vivant. A
s'en tenir à fes propres paroles , il femblc qu'il
ait reconnu la préfcnce réelle dans l'Eucharillic , qu'il n'ait &
nié que la tranffubilantiation , ou changement iubftantiel du
pain & du vin au Corps &
au Sang de Jefus-C^hrifl. En effet,
dans la profeflfion de foi qu'il fit dans le Concile de Rome fous
le Pape Grégoire VII , profcfTion qu'il ne rétrada jamais , &
qu'il reconnut depuis être de fa façon , il dit nettement : Je
confeffc que le pain de l'autel {g) y après la confécration, eft
le vrai Corps de Jefus-Chrift, qui eft né de la Vierge , qui a
fouffert fur la Croix , & qui eft aiïis à la droite du Père ; Se
que le vin de l'autel , après qu'il eft confacré , eft le vrai Sang
<jui coula du côté de Jefus-Chrift. Il ne fit point mention de

la tranfubftantiation : aufti cette confeflîon parut infuftàfantc

(i) Cbronic. Turon. toni. •;. amplijf, Co!- j


tom. l. Spuiltg.f. 747. R ICHARD. Phl,tv.
ietl, Marten.'p. 1005. Ioo6. 1008. loi i. I in Cbron. Tom. ^. amplijf, CoUeti, Merlin.
(f) HiDEBKRT, Carm, M:fcetliin, f''S.\ftg- II 68.
1513. Baidric. Tow. 4. Ducheske,/-!»^. j
{e) Mabul, Profit. inTem. 9. A£l. p.

[d] Amtiym. Melliceiif. ca,>. 1 5 4. C? 8S. (/) Uid.


WiLiLM. iMalmesb. Ltl?. x.de Gcjiis Re (g ) J^d.t Concil. Rom.iK. tom. 4. A.'iccJ.

gitm Aiiglorum.p. 114. Cler. »'« Ciroftif. [ Marten. y). lOJ.


,

zç)6 ^ HUGUES,
aax Evèques de Pife & de Padoue ( li). Aacîmanne l'avoir
accufé d'enfeigner que ce que Ton immole tous les jours lur
l'autel , n'ell; pas le vrai Corps de JeluS-Chrifl; , mais une fi-
gure &
une reiîemblance. Voici la rcponl'e de Beren^^rer (?) :

Sachez que je n'ai jamais donné dans le rcntimcnt des i»lani-


chéens , qui n'admettent en Jefus- Chriil qu'un corps phanta-
ftique pour moi , je crois
: &
je croirai toujours que ion corps
eft véritable &
humain. Il dit dans la même Lettre , que i'Eu-
chariftie n'eft pas une limpîe figure du Corps de Jellis-Chrifl
mais figure 8f vérité tout enfcmble ; &: il y diilinguc la fiigu-
re de lachofe du Sacrement , c'eil-à-dire, du corps de Jelus-
Ciiriil:. Enfin dan^ la Lettre à AfccHn, il ne contell;e que fijr

la tranfubdanti.tion Vous demcnrcz , lui dit-il (/), les rai-


:

fons de la nature , la dotlrine de l'Evangile &: de l'Apôtre ,


fi vous croyez avec Paichafe , ce qu'il s'im.igine feul , que dans

le Sacrement du Corps du Seigneur , la iabftance du pain le


retire abfolumcnt. Mais fi l'on examine bien la fuite de cette
Lettre on verra que Bcrenger n'admettoit la préfence réel-
,

le ,
que de paroles & non de cœur & qu'il nioit véritablement
;

que le dans l'Ëuchariftie ,


Corps de Jeius-Chrill lût que le &
pain & le vin fulïcnt changes en ion Corps & en Ion Sang.
Tous les Novateurs ont eu pour maxime de répandre leurs er-
reurs fous des termes qui approchoient de ceux dont l'Eglife
fefert pour exprimer fa foi , de peur d'offcnfer d'abord les Ca-
tholiques par leurs nouveautés. Combien de difputes entre les
Catholiques &: les Ariens fur de fimplcs termes , ou fur le fens
de ces termes ?
DoârJne de XXII. C'cft ainfi que Bcrenger s'efl; conduit dans la publi-
Bcrengcr fe-
cation dc fes srrcurs. Il n'ofoit attaquer de fronc la préiei:ce
lai'n! ronxm- réelle :mais il s'expliquoit de façon qu'il la détruifoir. Hugues
porajns, Evcqucs de Langres , n'y fut pas trompé {m). Si la nature &
l'efifcnce du pain & du vin demeurent encore après la confécra-
tion, par une cxifience réelle dans le Sacrement, on ne peut,
dit. cet Evcquc, comprendre qu'il y ait rien de changé dan?

la fubrtancc ; & {\ ce qui y furvicnt de nouveau , n'y ell: que


par la puiuance dc l'cncendcmcnt , on ne fauroit concevoir

(i) Uid.fag. 104. (') AptidL\tiiK, p. Z4" <ï .Mabillon,


I
Bi:aENG. Epifl. ad Adelm.inti, tam. 4.
(»') 1 ilhl,
4ne.d. M.irteit. ^
Mabil. L'r,ij'.n. hm. 8. |
( ')" Huco Ungmtnf. .ip:id I-.viJr.i/i:. ia

/lîier, p. iç. ij, Af;ei.d.p.bi.


commcnc
EVESQUE DE LANGRES. Ch. XVIIT. 25)7
comment peut faire que ce corps intelleftuel de Jelus-
il le
Chrifl: qui ne lubiifte pas réellement , efl le même que fon
corps véritable qui a été crucifié. C'efl: pourquoi il eft nécef-
faire que vous fafTiez changer le pain de nature, ou que vous
n'ayez plus de dire que c'efl: le Corps de Jclus-
la hardiefle
Chrift. Berenger tomboit donc en conrradiûion avec lui-mê-
me , en admettant d'un côté la préience réelle , & en niant
de l'autre la tranfubftantiation ; puiique Jefus-Chrift: n'cft
préfent réellement dans l'Eucharirtie , que par le changement
réel du pain &
du vin en Ton Corps en fon Sang. C'efl: &
cette contradidion que Hugues
objede en cet endroit, fai-
lui
fant remarquer que ce Novateur abufoit des termes , en dilant
que Jcfus-Chrift n'étoit préfent dans le Sacrement que par la
puifl"ance de l'entendement. Aufli l'Anonyme qui affifla avec
lui au Concile de Rome en loycp («), foutient qu'il nioit
non-leulement le changement du pain & du vin au Corps &
au Sang de Jclus-Chrilt , mais encore la vérité de ce Corps
& de ce Sang dans l'Euchariflie , & qu'il n'y admettoit qu'un
changement en figure , contrairement à la foi Catholique.
Théoduin Evêque de Liège (0) , fe plaignoit à Henri Roi de
France , que Berenger foutenoit que le Corps du Seigneur
dans l'Euchariflie , n'étoit pas tant ion corps que l'ombre &:
la figure de fon corps & Lanfranc dit nettement (p) , qu'il
:

n'y avoit que Berenger & ceux de fa fc£te , qui enfcignaflent


que le pain de l'autel efl: feulement figure du Corps de Jcfus-
Chrifl:. Nous ajouterons aux témoignages de ces Ecrivains
contemporains, celui de la Chronique de Tours (q), où nous
lifons que Berenger afiTuroit que l'Eucharirtie que nous recevons
à l'autel , n'efl: pas le Corps ni le Sang de Jefus-Chrifl: , mais la
figure du Corps & du Sang de Jefus-Chrifl:.
XXIII. Les fc£lateurs de Berenger , à qui de fon vivant , Variatroncfans
y^" a'°"'
ne de
l'on donna le nom de Berengaii^ns , s'accordèrent à dire, Berenger.
comme lui , que Je pain & le vin ne font point changés fub-
flantiellcmcnt ; maïs fuivant l'ufage où les hérétiques ont été
de tous tems (r) , de varier dans leur dodrine , ils fe divifc-

( n ) Ancnym. de multiplie. Eereng. dam - f guine Doinini. p.il^.1^6,


(<;) Chron. Juron. Tim. $. ampliff". eolleH.
ntitiene. p. x6o. \
(0) Theoduin, in Akalcil. M.%l/ill. pag.'i Maritn.p, looy.
44<'« (r)T£&TVLL,Lil/, de Pr.tfcript.c.ip.'^l,
I
(;»1 Lanfranc. lit. de Cerpore <^ San-]
Tome XX, P p
apS HUGUES,
rent fur 'manière dont ils croyoient que Jefus-Chrifl étoît
la
dans rEuchariftie : les uns difoient qu'il n'y a rien abfolument
du Corps de Jefus-Chrid dans le Sacrement , que ce n'efl: &
qu'une ombre & une figure : les autres , que le Corps & le Sang
du Seigneur y font en effet , mais cachés par une efpcce d'im-
panation , afin que nous le puiflions prendre. Guitmond Eve-
que d'Averfe , mort vers l'an 1 080 , huit ans avant Beren-
ger, fait cette remarque (^). H appelle les premiers. Figura-
tifs ( f ) , parce qu'ils ne confidcroient le Sacrement d'Eucha-

riftie que comme la figure du Corps du Seigneur : les fé- &


conds , Impanateurs , parce qu'ils enfeignoient que la fubftan-
ce du pain &
du vin demeure avec le Corps de Jefus-Chrift. On
verra dans la fuite , de quelle façon il réfute cette double hé-
réfie.
Ecrits de Be- XXIV. î^ous avons de Berenger , une Lettre à des Her-
er.ger.
mites («) aufquels il donne des régies pour leur conduite ;
, &
une à un Clerc (a;) qui l'avoit confulté fur l'excommunication
prononcée contre un Diacre qui s'étoit marié. Berenger penfe
que cet Evcque a agi contre les Canons , à moins qu'il n'y
ait eu de la contumace de la part du Diacre. Il paroît par Si-
geberr , qu'il en écrivit plufieurs à Lanfranc (y). Celle qui
nousreflc ell très-courte. On la trouve dans les Notes fur la vie
de Lanfranc ( s ) , & dans le neuvième tome des Conciles»
La Lettre à Afcelin Moine du Bec , & la réponfe de ce Re-
ligieux fe lifcnt aufTi dans les Notes fur' la vie de Lanfranc ,
,

& dans les Collerions des Conciles par les Pères Labbe &
Hardouin (a). Berenger en écrivit une à l'Abbé Richard ,
imprimée dans le fécond Tome du Spicilége {ù) , & parmi les
Conciles. On n'a qu'une partie de fa Lettre au Trélorier de
l'Eglifc de Saint Martin ( c). Le but de Berenger dans ces
deux dernières Lettres , étoit , comme on l'adit plus haut,
d'obtenir quelques libéralités du Roi Henri , depuis qu'on l'a-
voit privé de fa Prébende de chanoine. Celle qu'il écrivit aux

(s) GdiTM. Je Corpore Domiiti, Lit. I. (c) Pag. 12.. ii Tom. 9. Cnnc.f. lOÎ'4v
Tom, j?,. Bibliot, Pat. p. 4^1. (a) Pai^e 14. CJ Tom. 5. Co«f. p. loj^.
(f) lii.i. l.ib. 3 , p. 461. C Harduin. Tom. 6. p. J019.
(«) Martfn. «o»n.i ,Anecd.p. \9ï. (AJ S Tom. s.Conc.p, \oèi.
i'tiçf ^ 10.

{x. \li:d. p^ar. ipiî. ^ Tuw. 6.Hardcin.^. 1014.


(y} Sic LBIA.T, de Scrifror, Eccle/iiifl, cap. (f) Mabill. l'raf.it. ;« Tom. 5. AHor.p,
J54. 1 1. unm.xi,.
KVESQUÈ DE LANGRES. Ch. XVIIT. 2^9
Ecclcfiaftiqucs de Chartres après la Conférence de Briône ,
n'cft pas venue juiqu'à nous. Durand de Troarn cn*fait
jncncion (d). La réponfe de Berenger à Adelmann n'eft pas
entière. Ce qui en reftea été imprimé dans le quatrième Tome
des Anecdotes de Dom Martcnne ( e ) , fous le titre de Let-
tre contre Adelmann. Elle eft écrite d''un flyle de hauteur &
de mépris , qui ne répondoit guéres aux marques de cha-
rité & d'amitié qu'Adelmann lui avoit données dans fa Let-
tre. Mais tel efl le cara6tcre de ceux qui s'offenfent de la vé-
rité.
XXV. Berenger, pour donner des preuves autentiqucs delà il^rctrafle f»

rétractation de fes erreurs (/) dans


, fit trois profeflîons de foi foi.

divers Conciles de Rome , la première en îo55> , la féconde


en 1078 , la troifiéme en 1075) : mais il ne fut pas long-tems
fans révoquer la première. Il compofa même un Ecrit pour la
réfuter , où faute de bonnes raiions il fe répandoit en injures
contre le Pape , contre les Evêques , fur-tout contre le Car-
dinal Humbcrc , qu'il regardoit comme l'auteur de cette pro-
fefnon de foi. Cet Ecrit de Berenger n'a pas encore été rendu
publique , à l'exception de ce que Lanfranc en a' iniéré dans
ion Traité du Corps & du Sang du Seigneur (g). Il y rapporte
les propres paroles de Berenger 8c les réfute de fuite , en re-
tranchant tout ce qui n'avoit point de rapporta la queflion.
Berenger ne révoqua point fa féconde profc/Tion de foi , par-
ce qu'il l'avoir faite lui-même. Il eft vrailemblable que le Pape
Grégoire VII (/z) , informé qu'il avoit attaqué fi violemment
la première , lui permit d'en drelTcr une lui-même. Les Evê-
ques du Concile de l'an ÎO78 , où il la prononça publique-
ment, la trouvèrent inlLiffifantc ; mais on voulut bien la lui
pafi"cr. On lui en fit foufcrirc une plus exprefie , dans le Con-
cile de l'année fuivante mais après que Berenger y eut fouf-
:

crit , il la rétraèla comme il avoit rétradé la première ; 8c


compofa fijr ce fujet un nouvel ,Ecrit. Dom Mabillon qui l'a-
voit lu , dit qu'il y employoit les mêmes raiions par lefquellcs
il combattoit la première profeirion qu'on lui avoit figner en
^
^
Ï059, fouslc Pape Nicolas IL
——^

( /{) De F.uch.ir:Jli.t ,
p.irt. 9, p. 107. in 1 pag. f 71.
^ppeiid. L,-t>ifr,x'ic. \ {^) Lanfranc. Lib. de Corpore Domini,
i') Page :09. I f.i/'. r.p'ig.i\i.
(/) Mabillon. in AiliUH. p. ^\^,^\ ( Zf
^ Masui. in Anulr,!. pa^. ^i^.
Fabaic. Tut», l.Bi'jli^t. Lat. Medi-e Lar.

Ppij
,

300 HUGUES,
Serment de XXVI. y a apparence quê cet Ecrit eft le même que
Il
'^"É •
D(5hiMarrenne & Dom Durand ont fait imprimer dans le qua-
trième tome de leurs Anecdotes («") , fous le titre de Serment
de Beranger Clerc de Tours , fait à Rome dans fEglife de La-
tran , fur Œucharipie , du Tems de Grégoire VU. Il y rapporte
en premier lieu , fa féconde profefTion de foi ; & ce qui fe paffa
à ion égard dans le Concile de Rome en 1078 puis il don- :

ne la troifiéme , qu'il figna l'année fuivante , &


dans laquelle
pour corriger le défaut de la féconde , le Pape fit inférer que
le pain &
le vin font c\\a.ngésfubflanîieltement en la vraie , pro-
pre &vivifiante chair &fang de Jefus - Chrifl notre Seigneur :
en forte qu après la confécration , l Eîuharifiie efi le vrai Corps
de Jefus - Chrifi , qui efl né de la Vierge i Ù" le vrai Sanz, de
Jefus-Chrijl qui ejî forti de fon côté. Il attaque cette formule en
des termes trcs-indécens , & par des railonnomens philofophi-
ques , tâchant d'appuyer fon fcntiment de l'autorité de faint
Âuguflin &
de faint Ambroife. Il ne laiffe pas d'y reconnoî-
tre que le pain 8c le vin confacrés fur l'autel ( / ) , font le vrai
Corps de Jefus-Chrifl. Il avoit dit la même chofe dans fa Let-
tre à Adelmann ( w ) mais ne reconnoiffant aucun change-
:

ment dans le pain & le vin ; ils n'étoient , félon lui , le Corps &
le Sang de Jefus-Chrift que d'une manière intelledluelle &par
la puiflance de l'entendement.
Prière de Be- XXVII. Les mêmcs Editeurs ont publié une Prière que Be-
renger.
renger compofa fur la fin de fes jours («). Elle cfl; en foixante
& douze petits vers , & commence par ces mots ]uflè Judex.
:

Elle lui eft attribuée par Clarius , Moine de Saint Pierre de


Sens (0)', quiécrivoit quelque tems après lamort de Berenger.
Cette Prière eft remplie de fcnt;mens de piété. L'Auteur s'y
explique nettement fur les Myfteres de la Trinité, de l'Incar-
nation , &
fur la vertu du ligne de la croix :mais il n'y dit
rien de l'Euchariflie. Elle eft; précédée dans l'édition de Dom
JMartenne(p) , des Rythmes d'Adelmann , qui fe trouvant
joints dans les manuicrits à la Lettre de Berenger contre lui
ont été regardes par quelques-uns comme l'Ouvrage de Be-
renger même , quoiqu'ils foicnt d'Adelmann , comme on le
dira ailleurs.

{Il ItiJ.p. 10^. ! \o)Tim. 1. Spicil. p. 7H7-


(m) Uid.p, iio. (/>) Tow. 4. yivccJf. 115.
I
,

EVESQUE DE LANGRES. Ch. XVIII. 501


XXVIII. Bcrenger adrefla deux Ecrits à Paulin Primicier
y^"^'i,lie
de TEglifc de Metz; l'un fur l'Euchariflie ; l'autre fur la do-àPauiin.'
Ôrinc de Jean Scot , dont il prcnoit la dcfcnle. Il compofa
celui-ci à la prière de Paulin & de l'Abbé de Gorze ( ^ ), On
croit que ce fut cet écrit que l'on lut dans le Concile de Paris, &
qui attira l'indignation de tous les afiîftans (r).Il avoit été inter-
cepté par Ifcmbert Evcquc d'Orléans , qui lui donne le titre de
Lettre.
XXIX. L'Anonyme du Père Ccllot fur TEuchariftie, por- Ecrits aitrî-
te dans quelques manufcrits , le nom de Bercnger (s). On a '"'" ^ ^"*"'
montré en fon tems , qu'il cfl: de Gcrbert , autrement du Pape
Sylveiîre II. II efl: dit dans la Chronique du Mont-Caflin (r)
que FAbbé Didier, depuis Pape ious le nom de Vidor III ,
lit faire un recueil de trois Commentaires lur le Cantique des

Cantiques , dont le premier étoit d'Origene, le fécond de S.


Grégoire , le troifiéme de Berenger. On cite même des ma-
nufcrits (a), où ce Commentaire porte Ion nom ; & Gcfner
& quelques autres (x) , en parlant des Ouvrages de Bercn-
ger, mettent un Commentaire lur ce Cantique. Il n'a pas en-
core vu le jour. Bcrenger parle honorablement de cet Al^bc
de Mont-CafHn, dans fon Ecrit contre fa troifiéme profefTion
de foi , & remarque que ce fut lui qui vint lui annoncer delà
part de Grégoire VII (y) , qu'il ne feroit point de ferment
publique , & ne louffriroit point fépreuve du fer chaud , com-
me les Evêques du Concile de Rome l'avoient demandé. Quoi-
que Gefner & quelques manufcrits (z) attribuent à Bcrenger
un Commentaire fur l'Apocalypfe de faint Jean , on ne peut
difconvenir qu'il ne foit de Bcrcngaud Moine de Ferrieres ,
fous le nom duquel il a été imprimé dans l'Appendice du fé-
cond tome des Œuvres de faint Ambroile. L'Auteur profef-
ibir la régie de Saint Benoît. Ce qui ne peut fe dire de Be-
xenger. Mais on peut lui attribuer le Traité de la Vie foli-
îairc («) , que l'on dit être manufcrit dans la Bibliothèque des

(7)Marten. Tom. \. Anecd.f.ig. i()6. ( A' ) Angl. Bibliot. Mff. fart. 3 . num.
(r)DoRAND. do Corpcre Domini, fag. 171.
,107. (^"IGesnfr. Bibiioth. iiniverf. p. 113,
(i) Jbid. LtLohO ,Bii'liol.facr. p. 6}<i.
(t) Angl. Biblict. MJJ'. p.trt. 4. y. ««>«. (t)Tom. 4. Au:cd. Mnrtcti.p. 10^.
(,i)'Gesnfr. ibid. ^ Angl. Bibliot, MJf.
(u) Cbroti, C.ijjî», Lib. 5. cap. 63, part. 2. 4'''. 181 ^ 19^6,
301 HUGUES,
Chanoines réguliers de Tongres (b). La feule difficulté cft que
dans l'inicription , Berenger cil: qualifié Evêque de Tours,
Mais les Copiiles ont fait ia même faute , en tranfcrivant la
Lettre de Berenger aux Ermites (c) , qui ne lui cfl: conteftée
par perfonne. Gefner & quelques autres {d) , mettent au nom-
bre de fcs Ouvrages, un l'raité de l'Incarnation & un Recueil
d'Homélies. Il n'en a rien paru dans le Public.
Jugement ie XXX. Le ftylc de Berenger eft dur , fcc , embarrafle , ob-
fcur , & ne répond point à la réputation qu'il s'étoit faite d'ha-
fe» Ecrit;,

bile Grammairien peut-être s'expliquoit-il plus coulament


: &
plus nettement de vive voix , dans fcs leçons. Dans fes Ecrits
il ne cherche qu'à furprendre par de mauvais fophiimes , & à

éluder les raifons de les adverfaires , fans y répondre. On die


que fon héréfie donna lieu cà l'élévation de l'hoflie & du cali-
ce ( e ) , auflî-tôt après la confécration , afin que les fidèles
rendiftcnt par l'adoration un témoignage de leur foi fur la
réalité du Corps & du Sang de Jefus-Chrifl dans l'Euchari-
flie. Il n'efl rien dit de cet ufagc dans le Traité des Ofliccs

jeccléiiailiqucs de Jean Evêque d'Avranche , fait avant l'an


1 068 ; ni dans la Lettre d'Yves de Chartres à Mathilde Reine

d'Angleterre (/"), quoiqu'il y ait eu occafion d'en parler. Dom


Mabillondit(g), que cette cérémonie ne commença en France
qu'après le milieu de l'onzième fiécle,& qu'elle ne s'établit à Ro-
me que quelques années après. Gui Paré Cardinal Evêque de
Paîcflrine, Légat du Papecn AIlcmagne,ordonnaen 1201 (/z),
qu'à l'élévation de l'Hodie tout le peuple fe profterncroit au
ion de la clochette , jufqu'après la confécration du calice. En
121 5 ( > il fut arrêté dans le Chapitre général de Cîteaux ,

qu'on éléveroir l'hoflie après la confécration. On faifoit fans


doute la même choie pour le calice , puifque celui dont fe fer-
voit faint Malachic étant à C.'airvaux , étoit garni de clochet-
tes pour avertir le peuple à l'élévation. On ne laifibit pas avant
cette inllitution , d'adorer le Corps & le Sang de Jefus-Chrid
aufTi- tôt après la confécration les Evêqucs, les Diacres & les :

Soûdiacres qui fcrvoicnt à la Mcffe Papale , dcmeuroient in-

(i) Sandfrs, Bibliot. Belgicx. p.irt. i. (/) Ivo. TEpifl. 14:.


/. i8p. ( .') M ABILL. Comintiit. i/t Ordiiu Rem,

(f) MartEHNE» Voyait htteraire , tom. Tom. 1. Mrifxi It.il. p, 49.


^.f. 1R8. (/')FLtUKi, Tom. lé. mit- Eulef.f^i.
(</)GisNKR, Eibtiot.univerf.pag. T13. VC.
• (.') Jouriifll (ia S^vain <« 173 j . />.
^
y u. ( .) 1\Iabili.oî). Jl/iJ,
VIPPON , HISTORIEN. Ch. XIX. yo%
clincs , de même
que tous les Prêtres dans le Prefbytcre , juf-
qu'à CCS paroles du Canon de h MeiTe; Nohis quoque pecca-
toribus : mais on n'élevoit l'hoftie & le calice qu'un moment
avant TOrailbn Dominicale, lorlquc le cclobrant diibit Per :

ipfum & in ip/o : c'ctoit l'Archidiacre qui taiioit cette fonction.


Le Cérémonial fait par ordre de Grégoire , dans le
treiziè- X
me porte qu'on fe profterncra à terre ù l'élévation , la
fiécle ,

têre baiflée pour adorer le Corps de Jelus-Chrift , qu'on &


demeurera en cette poflure jufqu'à per orr,7iia jitcuîa ^ qui pré-
cède rOraifon du Seigneur. Les Chartreux obfervent encore
aujourd'hui cet ulage.

CHAPITRE XIX.
Plppon , Hi/îorien } Halinard, Archevêque de Lyon -, Chro-
nique de Dijon f ] otirdain de Limoges & quelques autres
Ecrivains.

^^
I. /^ N de vraifcmhlance , que Vippon ^^l^^^'
croit avec afTez
\^ étoit né dans la Bourgogne Tranfjurane , puifqu'en
invitant le Roi Henri à venir viliter cette Province qui avoit
bcfoin de fa prélence , il l'appelle fa patrie (?). Il fut d'a-
bord au fervice de l'Empereur Conrade le Salique , en qua-
lité de fon Chape'ain ; puis il pafiTa à la Cour de l'Empereur
Hcnri-le-Noir fon lîls , où il fit les mêmes fondions. Son
attachement pour ces deux Princes l'engagea à les faire
connoître à la poftérité. Il écrivit Hifloire de Conrade ,
qu'il dédia à Henri fon fils ; & fit le Panégyrique de Hen-
ri en trois cens vers hexamètres. Comme il ne l'y nomme
que Roi , c'efi; une jrrcuve qu'il le compofa avant l'an 1046 y
auquel Henri fut reconnu Empereur. L'Hiftoire de Conrade
a été mile au jour la première fois en i 582 , dans le troiliéme
Tome des Ecrivains d'Allemagne (/) , de Piftoriusà P'ranc-
fort , «&: réimprimé dans le même recueil & en la même Ville

( i ) Vi PPCN , Var.t^yr. He/iric. in Le^e.


|
( l) PiSTOR, Ver, Germ. Siri^t, to»K 3*
304 V I P P O N ,

4?n 584 & j 6oy , in^fol. Vlppon ajouta un chant lugubre fur
1

la mort de ce Prince on l'a imprimé à la fuite de cette Hi-


:

ftoire. Le Panégyrique du Roi Hjsnri III , fe trouve parmi les


anciennes Leçons de Canifius («) , dans les éditions d'Ingolf-
tâd & d'Anvers. Le Prologue eft en profe; le corps de l'Ou-
vrage en vers , & divifé en quatre parties d'où vient que :

Vippon l'appelle le Tctralogue ,à caufe des quatre perfonnages


.qui y portent la parole le Pocte, les Mules , la Loi , les Grâ-
:

ces. Le Tétralogue.eft fuivi d'un Poème élégiaque furie My-


ftere de NaifTanée temporelle du Fils de Dieu. Vippon pré-
la
fcnta ce Poème au Roi Henri, le jour même de cette Fête,
dans le tems qu'il étoit à table.
Autres Ecrit! II. M. Fabricius a fait imprimer à la fin du premier
de Vippon.
'j'o^i^ Je fa Bibliothèque Latine du moyen du dernier &
âge ( ) , un Recueil de courres Sentences , adrcffé par
Vippon à Henri fils de l'Empereur Conraçle. Ces Sentences
font au nombre de cent cinquante , chacune contient un^ &
inftru6tion particulière pour ce jeune Prince ; elles font foli^
des. Le deilein de Vippon écoit d'en faire un bon Chrétien,
& de lui apprendre à régner chrérienncment. C'eft aufli ce
qu'il fe propoic dans fon Panégyrique. Il y infifte en particu-
lier fur la nécefiîté de faire cultiver les fciences dans l'Empire
d'Allenugne où elles étoient négligées, tandis qu'on les cul-
tivoit en Italie &
dans les autres Royaumes. Il prie le Roi
Henri de un Edit ( p ) , portant obligation aux
faire publier
riches de faire inftruire leurs enfans dans les Lettres. Nous
n'avons plus le Poème de Vippon fur le froid exceffif de l'an
J033 ( «^ ) , ni les Mémoires qu'il avoit recueillis pour l'Hi-
iloirc du régne de l'Empereur Henri le Noir. Celle de l'Em-
pereur Conrade efl; eftimée pour quantité de faits que l'on nç
trouve pas ailleurs. Vippon rapporte (r) que ce Prince ayant
découvert qu'Heribert Archevêque de Milan , &: les Evêqucs
de Vcrceil, de Crémone & de Plaifancc avoient conjuré de
le faire mourir pour mettre à fa place Otton Comte de la hau-
te Bourgogne , les envoya en prifon au-delà des Alpes, &
que quoique en cela il eût agi par le confeil des Seigneurs ,
Henri fon fils le défapprouva , parce que ces Evêqucs n'a-

(») Tom. 3 . EJit, B,ifn.ig. p. 1 6^. I (j ) Tom. j . Pijlor.p. 4 ? 8.


lo) Pag. Xl6^. (r) /*«/,;>rt_j. 411.413,
I
h)Tom. j.LtS,Canif.p.ï6j. l (i) Uid. pa^t ^^9.
voient
,

HALINARD, ARCHEV. DE LYON. Ch. XIX. 305


-voient point ccé juges canoniquemcnr. C'croic avec raifon ,
ajoute cet Hiftorien comme aprèi la fcntencc de dépofition
:

contre un Evêquc , on ne doit plus lui rendre aucun honneur


.ain(i avant le jugement on lui doit un grand rclpcft.
m. Ces deux Princes témoignèrent beaucoup d'amitié à Ha- Haiînarfl Ar-

linard qui ne tut pas moins aime de Robert & Henri Rois de
, Lyon7'^
^^ '

France. Il tiroit fon origine de Bourgogne d'une lamille j,

noble (f). Son perc ctoit de Langrcs , la mcre d'Autun. Cette


-dernière Ville fut apparemment le lieu de L^ naiffancc, puif-
quc Vautier qui en étoit Evêque , le leva des Fonts du Ba-
tême , & prit loin de fon éducation. Il fut mis enfuite fous la
difcipline de Brunon Evêquc de Langres, qui l'admit dans le
Clergé de fa Cathédrale. Halinard quitta la place de Cha-
noine , pourfe rendre Moine à Saint Bénigne de Dijon fous
l'Abbé Guillaume («). Il en fut fait Prieur & enfuite Abbé ,
à la mort de Guillaume arrivée en 103 1 Dix ans après , c'ell- .

à-dirc, en 1041 , l'Empereur Henri lui offrit l'Archevêché


•de Lyon ( .t ). Halinard s'cxcufa de l'accepter , & fuggéra à
ce Prince, Odalric Archidiacre de Langres , homme de ver-
"îu & de fçavoir étant mort en 1046 , le peuple & le Clergé
:

de Lyon demandèrent Halinard ; l'Empereur Henri l'accorda;


snais Halinard perfifla dans fon refus jufqu'à ce que le Pape
Grégoire VI lui commanda d'accepter (v).
IV. Cétoit l'ufage qu'un Evêquc élu fe préfcntât au Roi J' ^^^"^e cf«
pour recevoir l'invciliture. Halinard alla à la Cour du Roi rrEnitmur!
Henri. Ce Prince lui fit dire par Hugues Archevêque de Be-
sançon , de prêter le ferment de fidélité {z\ Halinard répon-
dit L'Evangile & la Régie de Saint Benoit me défendent de
:

jurer i\ je ne les obferve


: pas , comment le Roi pourra-t-il
c'aflurer que je garderai plus fidèlement ce ferment ? Il vaut
mieux que je ne fois jamais Evêque que de tranfgreffer le
précepte du Seigneur. Le Roi admira cette réponfe & vou
Jant éprouver fa fermeté, il réitéra fes ordres. Les Evêqucs
Allcmans & fur -tout Sigebaud de Spire où étoit la Cour,
vouloient qu'on l'obligeât à jurer comme eux. Mais Thierri
Evêque de Metz, Brunon deXoul , & Richard Abbé âcS.
Vanne , confeillerent au Roi de ne pas le preifer, Perfuadezr

(t) HAiiNAADi , Vhi Tam.^, A^oT.f. 1 (v) P«f. j ?.»««. 4.


55. »«'". -. 1 ( ' '
^'^- 5*^" ''"''"'• ^'
(«) P.î;. 54. K'tm. ^. \
(i"! i'.ij. 3^.. 11:1m, 6,

terne XX, Q cj
,

^6 H A LIN A R U;
lui du moins, leur die ce Prince, de fe préfenter,^fih qu'il^
paroifle avoir fait ferment , & que la coutume n'en fouffre rien.
Halinard répondit De feindre , c'efl: comme fi je le faifois t^
:

Dieu m'en garde. Le Roi fe contenta donc de fa promefle , &


fournit cà tout ce qui étoit néceffaire pour fon facre. L'Arche-
vêque de Bcfançon en fit la cérémonie l'an 1046.
?on voyage V. La même année il fuivit ce Prince , qui allôit à Rome
à-Rome*
pQyf recevoir la couronne de l'Empire. Le Pape Clément II
le couronna, & tint au mois de Janvier 1047 , un Concile
auquel Halinard afiifta (a). A la mort de ce Pape , les Romains
demandèrent Halinard pour fon fucceflcur. Il s'en ctoic fait ai-
mer par fon affabilité & fon éloquence (^) car il parloit auffi-:

bien qu'eux la langue du pays , & toutes les langues vulgaires


formées du latin. Mais ayant connu leurs defleins & la volonté
de l'Empereur , il cefla de fréquenter la Cour jufqu'à ce qu'on
eut choifi un autre Pape. •

VI. Léon élu en 104P , afilembla la même année un Con-


cile à Rome (c) , où il invita Halinard avec plufieurs Evêqucs
François. Halinard revint en France avec le Pape , & fe trou-
va avec lui à la Dédicace de l'Eglife de Saint Rémi de Reims
& au Concile qui fe tint enfuite. L'année fuivante il l'accom-
pagna en fon retour à Rome , où il aflifia au Concile contre
Berenger. Halinard fit un quatrième voyage à Rome en 1052,
Léon IX fe fervit de lui pour traiter de la paix avec les Nor-
mans. Etant à Rome au Monafiere de Saint Grégoire (^),
un faux ami lui fit fervir un poïiion empoifonné , dont il mourut
le vingt- neuvième de Juillet de la même année , après fept ans
d'Epitcopat. Outre fes ornemens & fon argenterie , il donna
à l'Abbaye de Saint Bénigne de Dijon un grand nombre de
livres. Quoiqu'il fur habile dans toutes fortes d'arts (ff ), il
s'appliquoit particulièrement à la Géométrie & à la Phyfique.
Ilaimoir tellement la ledure , qu'il s'en occupoit même dans
fes voyages, étant à cheval (/"}. Par cette alfiduité il devint
fi habile , qu'il furpjfra tous ceux de fon tcms , dans la connoif-
-

fancedcs Loix &de la Philofophic: car il lifoit audi les livres


des Philofophes & des Sages du monde; mais il avoir foin de
ne graver dans fajnémoire quece qu'ils ont enfeigné d'utile, -

(«) HÀtiNiRD, vitMyfdg. i7,aitm. 7» \


(J) JtiJ. nnm. 9,
(0 h<d.
I
(e) liid.
{ç)lbtd.n»m,U i {f)Jlfid.f. ij.mmté'
ARCHEVESQUE DE LYON. Ch. XIX. 307
rejcttant comme un poifon , tout ce qui peut dans leurs écrits ,
corrompre les mœurs.
VII. On ne voit pas néanmoins qu'il ait laiffc aucun monu- Ses Ltttrw.

ment de fon favoir. Nous n'avons de lui que quelques Lettres,
encore font-elles fort courtes mais elles fullifent pour don-
:

ner une idée de la douceur de fon caraderc &: de la politelTe


de fon flyle. La première efl adreflec au Pape Jean XIX (^),
qu'il qualifie Maître de tout l'univers & Pape univerfcl. Hali-
nard le fupplie de ne point fe rendre aux defirs des Chanoi-
nes de Dijon, qui vouloient employer fon autorité pour s'ap-
proprier l'ancien Cimetière de l'Abbaye de Saint Bénigne. Il
en écrivit une féconde fur le mcmefujet (k) ; au premier Séna-
teur & Duc des Romains ; à qui il dit Nous ne demandons rien
:

tl'injufle , mais d'être maintenus dans notre ancienne pofTef-


Cion. La troifiéme ell aux Moines de Saint Bénigne de Di-
^on (i). Ils lui avoient écrit que faint Odilon devoit venir les
voir. Ne pouvant s'y trouver , il les exhorte à ne rien négli-
ger pour la réception d'un Abbé fi rcfpedable , & à pro-
iiter de l'exemple de fes vertus , pour fe rendre plus fer
vens dans le fervice de Jefus-Chrift. La quatrième Lettre
fut écrite de Rome vers l'an 105 1 (/) : elle efl adrelTée aux
Chanoines de Lyon. Halinard fe trouvant en danger de
mort , les prie de lui pardonner les fautes qu'il avoir pu com-
mettre envers eux pendant fon Epifcopat ; & dans le choix
de fon fucccfTeur 5 de ne point chercher un fujet dans les pays
étrangers, comme on avoic fait jufques-là. il leur défigne le
Prévôt Humbert ,
croyoic d'autant plus propre à remplir
qu'il
cette place , quil s'en jugeoit moins digne. Enfuite il fait
quelque difpofition de fes biens , dont il fouhaitoit qu'une par-
tic fut donnée à fa-Cathédrale ; l'autre à l'Abbaye d'Ainai, à
qui il fedifoit redevable. Perard a publié les deux premières
Lettres ,dans fon Recueil de pièces pour l'Hiftoire de Bour-
gogne , à Paris en i66i fol. elles ont été réimprimées dans le
quatrième Tome des Annales de Dom Mabillon. Les deux au-
tres- fe trouvent dans le fécond Tome du Spicilége, le qua- &
^triéme de la.nouvelle Qaule chrétienne.

(i^Tam. i. Spi<il.p. 550.


(f) AfHil Uahill. Jim, jt» Anpnl, i/ii

ySpf end. pn^. "/!.%, 1 i /)


Tom. 4, GaUin Cbrijlian. nova.
,

3c8 JOURDAIN,
Chronique c'a VIII. C'efl par ll'hiftoirc de la vie d'Halinard que finît Ta
^* ^""^"^ ''^ Chronique de Saint Bénigne de Dijon. Il n'y cft pas dit un
mot de fon fucceflTeur ce qui donne lieu de juger que l'Au-
:

teur mourut à peu près dans le même tems que cet Archevê-
que. Il ne fe nomme point mais il nous apprend , qu'étant
;

encore jeune (m) , fon père l'offrit au Monaftere de Saint Bé-


nigne , auquel il fit, fuivant la coutume , donation d'une par-
tie de ion bien qu'il fut élevé dans la difcipline monaftiquc
;

par Halinard alors Prieur de Saint Bénigne («) 5 & depuis


Abbé ; & que c'eft en re,:onnoiflance de les douces & pater-
nelles inftruttions , qu'il en a fait vie dans cette Chronique.
1 1

Il la commence à l'an 1095 , c'eft-à-dire , à. la periécution


de Severe , met la Miffion de Saint Bénigne
fous laquelle il

dans les Gaules. A l'égard de fon martyre , il le place fjus le


régne & la perfécution de Marc-Aurele : ce qu'il dit fur ce
fujet , n'eft pas exa£i:. On ne peut pas même trop compter
fur lui dans ce qu'il rapporte des fiécles fuivans & quoiqu'il ;

eut fous les yeux l'hifloire de laint Grégoire de Tours 8c de


fes Continuateurs , il n'eft pas toujours fidèle à les copier. Ce
de mieux, regarde l'hifloire de fon tems , particu-
qu'il y a
lièrement celle de l'Abbé Guillaume & d'Halinard. Il lesavoit
vus l'un & l'autre, & avoir vécu dans le Monaftere de Saint
Bénigne , lorfqu'ils en avoient le gouvernement auffi racon- :

te-t-il plufieurs faits qui ont échappé à Glaber & à d'autres


Hiftoriens contemporains. Il entre dans un grand détail des
donations faites à fon Monaftcre, du vivant de ces deux Ab-
bés mais il ne fe borne pas là ; & fuivant fon plan général
:

il rapporte les principaux événemcns de l'Etat Se de l'Eglife.

Cette Chronique a été publiée par Dom Luc d'Acheri dans le


premier Tome de fon Spicilcge (0 ). Le Père Rouvierc en
avoir fait imprimer une partie dans l'Hiftoire de Moutier-
Saint Jean , à Paris en 16^7. C'efl: de-là auffi que Dom Mabil-
lon a tiré la féconde vie de l' AbSé Guillaume , imprimée au hui-
tième Tome des A£les d> l'Ordre (p).
Jourdain Eve- i^ Après la mort de Girard Evêquc de I^imogcsen 1024»
^ue e imo-
Jq^j-j^Jj^ Prevôt de l'Eglife de Saint Léonard (7) , fut élu

(m) Chrouic. Divitneiif, Tom, i. Sj>icil. (p) Tom S. ARot. f. 197-.


p. 47"' (7) Ademar. /« Chronic. p. ito. Cf
(n) IhiJ. pn^.^gj,. Mabjll. Lilr, jy. Àiinal. t.iim. ^ï. fa^
(JÙ f'^^' i5}' '}0U
, ,

EVESQUE DE LIMOGES,
Ch. XÏX. 309
pour lui fuccédcr. Les principaux de la Ville vouloicnc le
rendre maîtres de l'éledion & en tirer de l'argent. Guillaume
Duc d'Aquitaine & Guillaume Comte d'Angoulême, le pré-
vinrent ils convoquèrent une Aflemblce àTaint Junien , où
:

Jourdain fut élu unanimement , & conduit dès le lendemain


à FEglife de Saint Martial où il entendit la Mefle. Le jour
fuivant il reçut Tinvediture par le bâton Pafloral cnfuite il :

fut iacré Evéquc par l'Evêque de Saintes affilié de l'Arche-


vêque de Bordeaux & de fes Suffragans. Gauzclin Archevê-
que de Bourges , à qui l'ordination appartcnoit de droit
comme Métropolitain ( r ) , excommunia Jourdain dans un
Synode tenu le jour de la Pentecôte de la même année en pré-
fence du Roi Robert , & lui défendit les fonctions Epifcopa-
les. Jourdain fit le voyage de Bourges accompagné de cent
tant Clercs que Moines , tous nuds pieds , &: obtint de l'Ar-
chevêque la levée de rcxcommunication. En 1028 , Jourdaia
fit le pèlerinage de Jérufalem (s) ; & la même année, la Dé-

dicace de l'Eglife du Sauveur avec dix autres Evêques , qui


ibnt tous nommés dans la Chronique de Limoges. L'Archevê-
que de Bordeaux étoit de ce nombre (r ).
X. Le dix-huitiéme de Novembre de l'an 103 1 , où l'on ï' ."'^"' ""
^'"
célébroit la Fcre de cette Dédicace , il le tint un Concile à '^""'^''^ ^
Limoges. Jourdain en fit l'ouverture par un petit difcours: il 1031. Sa Let-
en fit un autre après la leQure de l'Evangile , contre les pil- ^I^ ^" ^^1"
lages & les violences où il expliqua ces paroles de faint Luc ;
,.

Le Fils de l'homme ejl venu four chercher Ô" four fauver ce qui
étoit perdu. Quoique le Pape Jean XIX eût approuvé dans fi
Lettre aux Evêques des Gaules , l'opinion qui fe déclaroic
pour r Apoflolat de faint Martial , & qu'elle eut été autorifée
dans le Concile de Bourges , l'Evêque de Limoges demanda
qu'elle fut décidée en fa préfencc par un troifiéme Jugement.
11 fut conforme aux deux précédens ; & Aimorv Archevêque
de Bourges , étoit prêt de prononcer l'excommunication con-
tre ceux qui contefleroient l'Apcftolat de faint Martial , (1
Jourdain n'avoit demandé un délai. Il fera parlé dans la fui-
te , des décrets de ce Concile. Nous obferverons ici que Jour-
dain , quelque tems après fon ordination , écrivit au Pape

(r) Ademar. Tdot. 2. Bibliot, nov. Litlb. . pa^. 3 ? f

t' '^o- (jl


Chou, lemi-.ictnf. ,iû nn, joîS,
tOM^BlixoN. lib, 56. Atuul.uHtn, 63, l
3 lo
^
<r O U RD A I N.,
Benoît une Lettre fur cette même queftion ; & où
Vni (f) ,

il foutenoit qu'on ne devoit point mettre faint Martial au

nombre des Apôtres. Sa raifon étoit que l'Eglife de Limoges


l'avoit toujours mis au rang des ConfefTeurs & que fi on Tho- ;

noroit du titre d'Apôtre pour avoir été l'un des 72 Difciples,


.on ne manqueroit pas de regarder aufîi comme Apôtres cha-
cun de ces 72 Difciples dans les Eglifcs où on leur rendoitun
Culte. Jourdain écrivit cette Lettre au nom du Roi Robert^
,de Guillaume Duc d'Aquitaine j des Archevêques de Bour-
,gcs, de Bordeaux, de Tours, & de plufieurs Evcques. Be-
noît VIII étant mortlorfqu'elle arriva à Rome, le Pape Jean
XIX, ou félon d'autres, le Pape Jean XVIIl y fit une rc-
ponfe (ff) , dans laquelle il traite d'infenfés ceux qui révo-
quoient en doute l'Apoflolat de faint Martial. Il fe fonde fur
ce que les Apôtres eux-mêmes ont donné cette qualité à Epa-
phrodite, à Silas, à Judas ; & que les Anglois la donnent
même à faint Auguflin , quoique dans l'Eglife Romaincon ne
le qualifie que Confeffeur. Cette Lettre fut lue dans le. Con-
cile de Limoges en .103 1 {x) , & dans celui de Bourges quin-
ze jours auparavant. Sur cette autorité , tous les fuffrages fe
réunirent en faveur de l'ApoUclai de faint Martial. .Jour-
dain s'étoit déjà déclaré pour cette opinion dans un autre
Concile de Limoges , que quelques - uns mettent en 1029 î
mais qui , ce femble , en 1028 , enfuite de la Dédicace
fe tint
.de l'Eglife du Sauveur , le dix-feptiéme de Novembre de cette
même année. Les ,A£les de ce Concile font partie de celui de
rl'an 10^ i (y).
n afTifteXI. L'année fuivantc , Jourdain afTifta au Concile de Poi-
à

'f£ w"t ^'^^5 ( 2 ) J en 1047 > à la Dédicace de l'Eglife de Sainte Ma-


,enio/i. rie , à Saintes ; & en 1048 , à la confécration de l'Eglife d'U-
ferche , où il figna comme témoin à la donation faite à ce
Monafterc par Aalberge cfc Bofon fon fils. 11 en fit une lui-mê-
me d'une partie de fon bien à l'Eglife Cathédrale de Limo-
ges. L'Aâc en efl: intérclTant (a) par ce qu'il y rappelle les
•noms de fon pere& de fa mère , & de quelques-uns de fes
_plus proches parens. 11 fit auiïi un accord avec Guillaume

ff) Tcm. i. Gnltùt, Çhrijliiui, nev, in (;) IM.pag. 8^3.


j/fippend. pa^. \6i, (x.) Oallia Cbriflim., wv. ttm, l. fag.
'

\k) Toi;». O. Cotic. p, Zf£,,


EVESQUË DE LIMOGES. Ch. XIX. 311
Gômtede Poitiers où en prcfencc de pluficurs Clercs
(1^) , &
de plufieurs laïques , on convint de la manière dont fe feroit
Téledion de fon fuccefleur. Le motif de Jourdain dans cette
convention', étoit d'empêcher que la fîmonie eût aucune part
à cette clettion. Cette précaution ne fut point inutile , com-
me on le voit par la Lettre que les Chanoines de Limoges
écrivirent à ce Comte (c) , après la mort de Jourdain arrivée'
en 10 ci. Ils le prient de faire attention qu'en vendant l'E-
vêché à quelqu'un , cet intrus ufurpera tous les biens de la
Communauté ; que rEpifcopat étant un don de Dieu, Tana-
thême efi: également contre celui qui reçoit de l'argent, com-
me contre celui qui en donne ; que d'ailleurs le Diocèle a été
ravagé par les ennemis ; que cette Egiife a befoin d'un dé-
fenfeur & non d'un voleur. Ils lui reprélentent encore , que'
rien ne lui manque; que toute l'Aquitaine cfl à lui ; qu'il doit
donc méprifer les richeiTes temporelles , pour n'afpirer qu'aux
femelles.
XII. On attribue à Egihvard la vie de faint Burchard Eve- EgilvarJ
que de "Wirzbourg , depuis l'an 752 jufqu'en ^80. Il étoit i^°^"^"^'^^'
!Moine du Monaftcre que cet Evêque avoir établi en cette
Ville. Son Abbé lui ordonna d'en écrire la vie. Mais avant
que de l'entreprendre , il écrivit les a6tes du martyre de faint
Kiliain & de fes compagnons. Surius les a donnés dans.le qua-
trième Tome de fon Recueil , mais imparfaits & après en
avoir changé le ftyle. Ils font plus entiers dans la Colletlion-
de Canilius ((i). On y. voit que Kiliain étoit Moine Ecoflois ;
qu'il pafla en Allemagne dans le deflein d'y annoncer l'E-
vangile aux peuples de Franconie ; & que pour exercer ce mi-
niftere , il en alla demander la permiflTion au Pape , ne pou-
vant le commencer fans être relevé des cenfures prononcées
pir TEfflife Romaine contre l'EcofTe , à caufe qu'elle étoit in-
feftéc ac l'héréfie Pélagienne. Muni des pouvoirs du Pape
Cononjqui occupa le Saint Siège depuis l'an ^8^ jufqu'en 687.
Il prêcha la foi à Wirlbourg, convertit un grand nombre de
perfonnes', entre autres le Duc Gozbert. Il avoir pour femme
Geilane , qui l'avoit été de fon frère. Kiliain voulut l'obliger
à la répjudier : Gozbert yconfentit j mais Geilane s'en vengea

(i) UUipug. 172.


'
{d-^ Tom.^fàpt. z.fa^r 6ii> fi tom. îj
I
lltjjf'd.f^t 17 J, J rdH, Bafos^. p. \f^,-
,

^l^ E G I L W A R D,
en mourir fecrctrement le Saint & fcs compagnons^
faifant
Elle les fit enterrer en un lieu indécent. Mais fous le règne du
Roi Pépin & le Pontificat, du Pape Zacharie , c'e(l-à-dire
'vers l'an 752 , on leur donna une fépuiture honorable. Ce
fut vers ce tcms-là que faint Boniface Archevêque de Mayen-
ce , érigea un Evêché à Wirzbourg (e) , dont faint Burchard
fut le premier Evêque. Quoique ces actes foient écrits d'un
ftyle grave &: féricux ils contiennent divcrfes circonflances
qu'EgiKvard ne favoit que fur une tradition populaire , & qu'il
auroit pu fuppi imer. Je ne fais où il avoit appris que l'ËcofTe
entière avoit été excommuniée à caufc du Pelagianiime (/),
îl femble dire auffi , que Kiliain fut le premier Evêque de
'Wirzbourg (g)' ce qui ne s'accorderoit pas avec la vérité de
l'hidoire.Canilius entend cet endroit de S. Burchard (h) , dont
Egilward promet de donner la vie. Si Kiliain fut ordonné
Evêque par le Pape Conon , comme Egilward l'avoir dit au-
paravant, ce ne peut être qu'en qualité d'Evêque régionaire.
Les Ades de faint Kiliain ont été réimprimes à Mayence en
ï^ir , parmi les Opufcules Théologiques de Serrarius , &:
dans le Recueil des Ecrivains de Wirzbourg de Pierre Lu-
dewig (/"). La vie de faint Burchard fc trouve dans Su rius
au quatorzième jour d'0£tobre : & dans le troifiéme Tome
des Leçons de Canifius de la dernière édition (^) mais ce :

font deux vies différentes (;«) ; celle de Surius eft de la fi-


çon d'Egil\f'ard ; l'autre cR d'un Ecrivain anonyme plus an-
cien.
Vie de faint XIÏL Canifius a inféré dans le même tome la vie de Gon-
Gonthier Er-
mite, par Vo.
fi^j,,. ou Gonthier , Moine d'Altaha ou d'Altach, 5c enfuite
jftriu. Ermite. Elle a depuis été donnée par Dom Mabillon dans le
Recueil des A£lcs de l'Ordre de Saint Benoît («), fous le
nom de NV.olfcrus Chanoine d'Hildesheim en Saxe, le même
qui a écrit la vie de faint Godehard Evêque de cette Ville (0).
Ces deux vies font en effet d'un même flylc d'un même gé- &
nie. L'Auteur de l'une &
de l'autre étoit Chanoine, contem-
porain de ces deux Saints, &
témoin oculaire de la plûparf

(i"i Cbronic. UiiJtiJjeim. toni. Script, (:) Va^c9(.6.


Bruiifii. />. 7 1 I . (') ^'î^ y.
(i;>) B.ASNAG. Ihid.p,
(!C) -^fiif Cani^.p. 17^. (/1) T-'tn.
8. p. 419.
(•j ItU.p.t^. 350.
dc5
,

MOÎNE DE \vlRZBOURG. Ch.XVII. 313


des faits qu'il rapporte. Ce qui donne encore de l'autenticité
à la narration, c'cft qu'elle elî conforme à ce qu'Arnolf, qui
de Comte croit devenu Moine de Saint Emmeramne de Ra-
tifbonne , raconte de Gonthicr fécond Livre de \a
, dans le
vie de faint Emmeramne (p). Gonthicr , l'un des grands
Seigneurs de Thuringc , touche de repentir des pêches de fa
jeuneffe , embraffa la vie monaftique dans le Monaftere d'Al-
tach , de l'avis de laint Godehard , à qui il avoir découvert
le fond de fa confcience. Ce Saint , qui étoit alors Abbé
d'Hersfcld , d'où dcpendoit le Monaftere d'Altach , permit
à Gonthicr de demeurer à celui de Guelingue , dont il avoit
été pourvu étant féculicr , & qui dcpendoit aufiTi du même
Abbé. Gonthicr peu accoutume à la pauvreté au travail &
trouva de grandes diiTicukés dans le gouvernement de ce
Monaftere. Comme il s'en cxpliquoit fouvcnc avec iaint Go-
dehard , cet Abbé lui dit d'un ton ferme & févere , ou de fe
foumettre à l'obéiflance & à la fiabilité qu'il avoir promife à
Dieu , ou de cjuitter l'habit monallique &
de retourner dans
le fiécle. Il en parla même à l'Empereur faint Henri , qui
ayant fait venir Gonthicr, lui repréfcnta qu'il nepouvoit fer-
vir deux Maîtres ; & qu'un Moine ne dcvoit non plus re-
tourner au fiécle , qu'un chien à fon vomiflemenr. Sur ces re-
montrances, Gonthicr quitta le Monaftere de Guelingue &
revint à Alrach pour y fuivre la vie commune. Il y vécut avec
ime grande édiHcacion. Saint Etienne Roi de Hongrie, fon
parent , ayant ouï parler de fes auftérités & de fes autres ver-
tus , l'invita à le venir voir. Gonthier ne fe rendit ni à la pre-
mière , ni à la féconde invitation ; mais à la troificme , il par-
tit avec la permiiFion de fon Abbé. Le Roi le fit mangera fa

table on lui fervit de la viande , on le prefîa d'en manger: ce


:

qu'il refufa conflammenr.


XIV. De retour à Altach, il obtint de fon Abbé, de fe reti-
rer avec quelques Moines d'Altach , dans une foret de Bohê-
me', où il bâtit un petit Monaflere , fous le nom de la Sainte
Croix , de la fainte Vierge & de faint Jean-Baptiite. C'étoit
en I 008 II y demeura trcnte-lept ans , vivant dans une extrê-
me pauvreté , d'une nourriture grofllere , & ne buvant que de
l'eau. Quoiqu'il n'eût appris que les Pleaumes , il avoit été Ci

(p) Canis. Tom. 3. p. 149. 55 Mabill. Tom. S. AUtr. pag. ^i$.


Tome KX. Rr
3 14 HERMANN CONTRACTE. Ch. XX.
attentif aux lectures de rEcriture-fainte & aux difcours dcs^
autres, que iouvent il expliquoit les lens les plus myfterieux
de la Loi & des Prophètes. 'Wolferus afiurc qu'il avoit ouï
de lui , un difcours fur faint Jean-Baptiile , qui tira les lar-
mes de tous les aiïiftans. Ratmond neveu de faint Godehard
& fon fuccelTeur dans le gouvernement du Monaftere d'Al-
tach , écoit du nombre avec pluIieurS' de fes Moines. Pour
"Wolferus, il n'entendit ce difcours que d'une fenêtre ( ^ ) »
ne lui étant pas permis d'entrer dans le Chapitre à cauie de
fon habit de Chanoine. Gonthier , quelque rems avant fa
mort , reçut par une rencontre inopinée , la vifite du Duc
Breduflas , à qui il fit connoîtreque ia mort étoit prochaine.
Ce Duc revint au jour marqué, avec Severe Evêque de Pra^
gue. Celui-ci célébra la Mefle dans l'Eglife du Monafterc ;
Gonthier reçut de fes mains le Viatique du Corps & du Sang
du Seigneur , & mourut à l'heure de Tierce , le neuvième
d'Odobre 1045. Son corps fut porté au Monafterede Breu-
non, éloigné de Prague d'environ 20 llades. Son Hiflorieni
témoigne qu'il, fe fit pluficurs miracles à fon tombeau.

CHAPITRE XX.

Hermann Contrarie, é' divers Auteurs de Chroniques».

Hcrmrnn I. T E furnom de Contrarie donné k Hermann , lui efl


Coiitia>.'le,.
I j venu de ce que dès fon enfance il avoit eu les mem-
bics lacourcis.Il étoit né en Souabe, de \(^olferade Comte

de Vcringcn , & d'Hiltrude Ion époufe* Trithcme le fait


Moine de Saint Gai en quoi on convient qu'il fe trompe.
:

Ce fut dans l'Abbaye de Richenou qu'Kcimann fit profcflion


de la vie monaflique , comme il le témoigne lui-même en di-

(q) Affedif jbificm vencr.ibilis Rnt- hofpiilbus , prarfcr rtr-s , quia in Cnno-
iBunilus Abb I , ciim plurimis fui Coc- nico iinbitii ii'uc irgret!i rfligio vctuit.
nobii fratcibus ,& aliis ^ iul'ujjKfr multis VitA Gcmber. Tçm, ^, AU. p. 425^
,

HERMANN CONTRACTE. Ch. XX. 315


vers endroits de fa Chronique ( r ). Il y fait mention de fon
père &: de fa merc , & de fes autres parens ( j ). WoHcradc
eut quinze enfans y compris Hermann. Il croit déjà Moine
de Richenou(f) , lorfque fon frère Vcrinharius , qui y avoir
fait aufïi profelîion , en fortit avec la permiffion de fon Abbé,
dans le dcflcin de faire le pèlerinage de Jcrufalem («) mais :

il mourut en chemin (x). Hermann fait 1 éloge de fon fçavoir

& de fa pièce. Il lit lui-même de grands progrès dans les


fciences iacrées & prophancs , qui le mirent en état d'enfei-
gncr les autres. Philofophe , Poëte , Rhéteur, Aftronomc ,
Muficien , Théologien (jy), il fe fit une grande réputation
parmi les Sçavans de Germanie. Il mourut en 1054, ^ ^"t
enterré dans une de fes Terres nommée Aleshufrn (z). Quoi-
qu'il ait laifie un grand nombre d'Ecrits, il y en a peu que
Ton ait rendu publiques. Tritheme , qui en fait le dénom-
brement , dit qu'il y en avoit en vers & en profe , & qu'outre
les Ouvrages qu'il compofa de fon fonds , il en traduilît quel-
ques-uns du grec & de l'arabe en latin : car il poffédoit bien
ces trois langues.
II. Le plus important de tous, eft fa Chronique, intitulée, -*>" Ecjts.

Des fix âges du monde y parce qu'il y rapporte ce ^'^^""'^"^


qui s'eft
pafTé depuis k création de l'univers jufqu'en 1054. Les édi-
tions qu'on en a faites ne font pas également remplies. Il
y
en a de plus amples les unes que les autres : ce qui peut venir
ou de ce qu'il y retoucha plufieurs fois , ou de ce qu'on y a
ajouté depuis comme il eft aflez ordinaire à ces fortes d'Ou-
:

vrages , où chacunala liberté d'ajouter les événemens omis par


l'Auteur. La première parut à Bâle en 15 2^ j 536, par les &
•foins de Jean Sichard ; avec les Chroniques d'Eufebe, de
faint Jérôme , de laint Profper , de Jornandés & de Bedc.
Elle fut faite fur un manufcrit de l'Abbaye de Saint Gai : &
c'eft peut-être ce manufcrit qui a donné lieu à Tritheme de
dire qu'Hcrmann étoit Moine de ce Monaftere. Piftorius la
fit réimprimer en 158Î& lôi^jà Francfort ; où elle fut re-

mife fous preffe dans le recueil des Ecrivains d'Allemagne

(r ) Hermann. in Cbrciiic, nd an. 104S («} /d an. lOf 5.


i$ loij. (i- Ad an. i85'4«
(j) Ad an. 1006. IC09, TOI©. 101».^ (j) TRiTHtM. in-Chrenic, UirfaHg, tom,
1031. l.p. 149.
(<J
Ad an. 1043. (ij Heri.iann. Continuât, ad au. 10J+.
Rrij
1 ,

3 6 HERiM ANN
CONTRACTE. Ch XX. .

de Chreftien Urflifius en 1584 & \6']o, Canidus lui donna


place dans fes anciennes Leçons , imprimces h. Ingolftat en
i<5oi. Il manque dans cette édition , ce qui s'efl pafle depuis
le commencement du monde ju-!qu'à Jefus- Chrifl:.M. Baf-
nage a réparé ce vuide fur les éditions de Piftorius & d'Ur-
ftifius , dans celle qu'il a faite des anciennes Leçons de Ca-
nifius, à Anvers en 1725. Il a encore fupplcécequi manquoic
dans Canifius , depuis 105 1 jufqu'en 1054, & donné la con-
tinuation de la Chronique d'Hermann par Berthold depuis ,

Tan 1054 jufqu'en 106^. Ce Continuateur qui étoit Prêtre


de l'Eglife de Confiance , avoit pouffé le récit des événe-
mcns jufqu'en iioo , comme on le voit dans les éditions
d'Urftillus. On cite des manufcrits de la Bibliotéquc Impé-
riale (/î) 5 où cette Chronique eil continuée jufqu'en 1347:'
clic fe trouve dans les Biblioréques de Cologne & de Lyon ,
mais fuivanr l'édition de Canifius.
Remarques JIÎ. Hermann fuit exaftemcnt les anciennes Chronique?
^-l•"Eufebe , de faint Jérôme & des autres que nous venons de
furcetteChro

citer mais il y m.êle fouvent , ou fes propres réflexions , ou


:

celles des Ecrivains de nom , comme d'Arnobc , de faint


Auguftin, de Jules Africain & quelquefois des paffages de
,

l'Ecriture. Il donne la fuite des Evêques des g-ands Sièges


'
des Empercurs , des Rois ; la notice des Conciles , & des
grandes affaires de l'Etat de rEgUfc. Il entre même dans le
détail de l'hifloire monallique , en quoi il s'applique particu-
liéremcnt à rapporter les divers événemcns des Provinces-
d'Occident ; il s'elt paîfé dans l'Em-
n'oublie point ce qui
pire d'Orient ,
ont une liaifon avec l'hiftoirc
quand les faits
des Princes d'Allemagne ou des Gaules. Son ftyle eft net &
précis , tel qu'il convient à ce genre d'écrire. Il fait une faute
à l'égard d'Heribcrt Archevêque de Milan , dont il met la
mort en 1044: le Tcftamcnt d'Heiibert eft date du mois de
DéccmbredcTannéofuivante 1045 ih). Hermann ne s'explique
ni fur l'héréfic de Bercnger , ni fur fa condamnation dans
les Conciles de Rome. 11 défapprouvc la bataille que Léon*
IX fit livrer aux Kormans (c) , difant cju'il convcnoit mieux

Fabric. Tarn. 8. EiùUoi. I.if. medix ] t02. />''!:<• 4?"-


(a)
yo7. toi», j.
itiihi. p. (<)I1ekman.
I (i(/<w. icyj.
(i^bilABniOh. Lib, j8. Atinal, mnm. L
.

HERMANN
CONTRACTE. Ch. XX. 3 17
au Pape de combattre par les armes fpirituelles , que par des
matérielles , pour les biens de ce monde. Hermann lit lui-
même TEpitaphe de fia mère , en trente - deux vers clégia-
ques , qu'il rapporte fur l'an 1052 , auquel elle mourut, le
neuvième de janvier , à l'âge de 61 ans , après quarante-
quatre ans de mariage, laiflant en vie fept de fcs enfans. Il
paroît qu'Hermann étoit un des premiers, puifqu'en 1054,
3ui fut l'année de fa mort, il avoit 41 ans, étant né au mois
i o 1
e Juillet de l'an (d).
3
IV. compofa un grand nombre d'autres Ouvrages fur Ecrtsii'Her-
Il
'°*""'
diverfes matières fçavoir , l'Hiftoire des Empereurs Conrad
;

& Henri Ion fils (e) ; un Poème fous le titre De confiifîu ovis :

& Uni 5 un autre , à la manière de Théodulc ; un troilléme ,


du mépris du monde ; un Livre des principales régies du
Comput pIuHeurs Vies de Saints (/); un Livre de la phy-
;

fîonomie un du monde & des élémens ; un du déclin du fo-


\

lein & de la lune plufieurs Livres de Géométrie ; un de la


;

quadrature du cercle ; un de l'horloge appelle cylindre ; un


d'une autre façon d'horloge ; un de la compolition de l'a-
fîrolabc , & deux de fon ulage & de fes utilités un des éclyp- ;

fes ; un de la mufique ; un du Mcnochorde; un du conflit


des fons. Hermann compofa auflî divers chants mélodieux ,
& diverfes hymnes & proies eu féquences (^ ) , entre autres
celles-ci Salve , Keghia ; Ahnri liedemptoris Mater ; Ave ,
:

praclara inf.ris Feni, ScnBe Spiritits ,


Stella j Jlorens Rojr. ;
& emiitc cœliîus. Salve , Regina^à. Ade-
D'autres attribuent le

mar Evéque du Puy. Tritheme met encore au nombre des


Ouvrages d'Kermann , les traduèlions de quelques Philofo-
phes Grecs &
Aftrologues Arabes , en latin ; des Commen-
taires fur l'Ecriture , îur Ariftote & Tullius. Egon & Metz-
Icr {h), le fontAuteur de plufieurs autres Ouvrages mais û :

y en a peu que Ton ait rendus publics.


V. Nous avons deux de fes Traités fur l'Aftrolabe , parmi Livres fur

les. Anecdotes de Dom Bernard Pez(i)


^'*'^*^^'''^^'
le premier a pour 5
^

(iV) Herman. ai an. ioij.Mabillon. (/)) ¥.cOîiS,ie viris illiijirib. Augiit. cap.
lib, 60. Annal, tium.bt.p. J49. 28. T^ir, i. Antcdot. PeX.. (. 689. £5 Met-:.,
(e) /.«onyni. Mellic. cat. 91 'de v.rii itlufl. iangallenf, ibid, tom. .pArt. 1

if) TrITH. Cbtofiic. Hirfatig, Tom: 1. 3.^53^.


t.- Ï4J>- ( ; ) Pci. Tom. 3. Aneed, part, 2. p, 04,
(•^)TritHBM ilrirJ.l^IIottor^ AHptfl'xl,
di Script, Ecclef, c,:p, i a. Hli, 4.
3 18 HERMANN CONTRACTE. Cm. XX.
titre : De la fccond , de fes utili-
mefure de l'Adrolabc; le
Le premier efl: en un fejl Livre
tcs. le fécond en deux, ;

Tîermana les a accompagnés de Tables Se de figures , pour


mettre le lecteur plus airémeiit au fait d'une matière difficile
à comprendre fans ce fecours. Il parle de lui-même dans le
Prologue , avec de grands fentimens d'humiJité ; paroît &
n'avoir entrepris cet Ouvrage que pour l'utilité publique (/) ,
principalement pour régler les heures des Offices de la nuit
& du jour. Les Ecrits d'Hermann fur l'Aftrolabe, l'en ont
fait regarder comme l'inventeur , par Guillaume Durand &
par quelques autres (m) : mais il eft confiant que l'ufage de
l'Allrolabe étoit connu avant le ficelé de Ptolomée. Dom Pez
en donne des preuves dans fes Prolégomènes («). On cite
d'Hcrmann un Traité fur les vertus ( o ) , dont Udalric de
Babenbergue rapporte quelques fragmens. L'Ouvrage étoit
en vers élégiaques. Il pafiTe auffi pour Auteur d'un Office
pour la Fête de l'Annonciation de la fainte Vierge (p) d'un -,

autre pour fainte Madeleine ; de la féquence liex om/iipo-


tens, pour le jour de l'Aicenfion ; d'une Hiftoire des Anges,
& d'un Répons qui commence par ces paroles Simon Bar- :

jona.
Chroiiiqre VI. La Chronique des Papes Saxons , efl moins une hifloi-
des Papes Sa-
xous. Pocs. rc fuivie ,
qu'une compilation de diverles Chronic^ues où il
efl parlé d'eux. Elle efl fur -tout inrérefiante pour ce qui
regarde la iaraille de Clément II , & les divers degrés
par lefquels il parvint au fouverain Pontificat. Les autres
Papes dont il y eft parlé , font Grégoire V , Saxon de naif-
fance & Léon IX, coufin de l'Empereur Conrad. L'arti-
•,

cle de Clément II & de Léon IX , e(t tiré des Annales ma-


nulcrites de Saxe , écrites dans le douzième fiécle. C'efl
à Monfieur Leibnits qu'on efl redevable de cette Anec-
dote {q). On la trouve dans le premier Tome des Ecrivains
de Brunfvic. On y trouve encore les Annales de Charlcma-
gne (r), plus correftes que dans l'édition de Reineccius.
L'Auteur qui eft anonyme , les écrivit fous le régne de l'Em-

(/) f rtf . 1 1 1 <ap, I. .


(p) pABaic. tom. ;. Bitliot. Latin, pug,
(m) Durand, iv. 12. 709.
(k) t'.iire 9. {(j) Tom. j. Script. Brunfv.p»iy9,
(0) EccAKD. Toi» (. Script, litiii ttvi. (r) Il/iJ. p. 1 10,
t. 6.
,

HERMANN CONTRACTE Ch.XX. 315^.


pereur Amoul (i) ; ainfi avant la fin du neuvième liccle. Elles
lonc en vers hexamètres, &
commencent à Tan 771 , indi-
£tion huitième , Tuivant la maiv.ere de compter de ce Poète,
C'étoit, i'elon d'autres , l'indiclion neuvième. Charlemagne
avoit régné avec l'on frère Carloman des Tan 7^8 mais il ne :

régna leul qu'en 77 1 . Ces Annales font divifées en cinq Li-


vres , dont le cinquième efl en vers élégiaques. C'cfl: un élo-
ge funèbre de Charlemame , où l'Auteur rappelle toutes les
vertus & toutes les grandes adions de ce Prince, avec beau-
coup d'ordre &
de méthode. Il les avoit déjà rapportées dans
les quatre premiers Livres , mais dans un plus grand détail.
Ge n'eft ici qu'une récapitulation. Ses vers font bons pour le
tcms où il écrivoir.
Chronique de
VIL Nous avons dans lé même Tome des Ecrivains de
Brunl\ ic (r) , une autre Chronique anonyme , où font rap-
portées les fondations des principales Eglifes d'Allemagne
depuis le régne de Charlcmagne jufqu'à celui de l'Empereur
Otton I ; c'efl-à-dire , depuis l'an 771 jufqu'en 938. Ce
morceau paroît intéreilant pour l'Hiltoire Eccléfiaftique du
Nord. Mais on ne voir point que ce qu'il dit de l'antiquité
de l'Eglife. de Bardewich, aujourd'hui Vcrdcn , foir appuyé
d'aucun monument autencique. Selon cette Chronique , l'E-
gliie de Barde wich fut fondée par un des 72 Difciples de Jc-
lus-Chrift , nommé Egiltius, qui y étoit venu de Trêves , &:
y fouffrit le martyre. Les Annales de Trêves difcntbicn que
iaint Pierre envoya de Rome (?/) , trois de fes di'ciples , Eu-
chaire , Valerc 8c Materne , pour prêcher la foi dans les pays
du Nord 8c de l'Occident; qu'Euchaire s'arrêta à Trêves , &
que Materne convertit les peuples de Cologne & de Ton-
gres. Elles ne difent rien d'Egiftius. On convient même que
les commenccmcns de FEgliie de, Trêves jufqu'à Agrcce-
qui vivoit en j 14, font fort obfcurs. Il parok donc que ce
que l'Anonyme dit de l'antiquité de la fondation de l'Eglife
de Bardewich , il ne lefçavoit que d'une tradition populaire
Se incertaine ; & c'efî fans doute fur une femblable autorité ,..
qu'il avance que cette Ville exifloit deux cens trcnte-fix ans
avant Rome ; & que B^rdewich & Verden font les plus an-

(») JiiJ. i>.


1^1. Cîî i<^6.
I
C") Atirml, Tuvinnf.Broveri. f.xg, lor.--
3 20 HERMANN CONTRACTiî. Ch. XX.
cicnnes Villes de toute l'Allemagne. Les autres articles de
cette Chronique regardent des évcnemens beaucoup plus ré-
cens ; puifque le plus ancien , qui eft la fondation de TE-
vèché d'Olnabrug , eft de l'an 772. L'Auteur pouvoit donc
en erre mieux informé. Il met l'éredtion de Bardewàch en
Evêchc en 782 j &
la tranflation du Siège Epifcopal à Ver-
den en 814.
VIIT. Le troificme volume des Anecdotes de Dom Mar-
Evru'^T"
Toui. tcne , n'cft prefque compofé que de Chroniques mais elles :

n'y font pas toujours placées félon l'ordre des tems ; il en &
eft de même de divers autres anciens monumens ecclédafti-
ques. L'Editeur a mieux aimé donner d'abord les hiftoires
générales ,
Après avoir rapporté les
puis les particulières (x).
Atles des Evcques de Toul , qui iinifl'ent à Pibon mort en
1 1C7 , il met de fuite deux Livres de la vie & des miracles

de faint Manfui (jv) j compotes par Adfon & dédiés à faint


Gérard , dont on met la mort en 95)4. Suivent la vie & les
miracles de faint Evrc (s) , par un Anonyme ; puis celle de
faint Gérard (a) , par Y/idric Moine & enfuite Abbé du
Monaftere qui porte le nom de ce Saint. Comme elle eft dé-
diée à Brunon Evêque de Toul , l'Auteur l'écrivit avant l'an
ÏO48 5 auquel Brunon fut élu Pape fous le nom de Léon IX,
Les vertus & les miracles de faint Gérard engagèrent Léon
IX à procéder à fa canonifation. Elle fe fit dans un Concile
afTcmblé à Rome en 1050. L'Abbé Vidric ajouta donc à la
vie de faint Gérard ( ^ ) , l'hiftoire de fes miracles & de fa
canonilaticn , avec les noms des Evcques & des Abbés qui
afT^flcrcnt à ce & ce qui fe paffa dans la cérémonie
Concile •,

de la exhumation des reliques de ce Saint par


tranflation ou
îe même Pape. Vidric écrivit tout cela avant l'an 106 1 qui
,
fut celui de fa mort (c). Dom Martenne donne enfuite les
A.des de la tranflation des reliques de faint Manfui par TE-
vcque Pibon (d); Sz deux Livres des Geftes des Abbés de
Moycnmoutier, attribués à Brunon Evêque de Toul. On en
parlera dans la fuite. Nous obfervcrons ici ( c ) ,
qu'il ctoit

(x)Tom. }. Atiecd.p. $<)i. (f )Mabillon. Lil/. 6j. Atittal, num,


(.>) P-^^. 10.5. py.pif^e 616.
(t) 1027.
l'.tg (rf) '
a^. 1088.
(<f) Pij^e 1047. (e) De Miraculis Sa/i3> Mafi/ueii. f»g.
{ù) l'ag. 1074. 1017..

d'ufage
,,

HERM ANN CONTRACTE. Ch XX- . 3a i

d'ufage lorfqu'un homme né libre , fc rcndoit


volonraircmcnt
efclave ou fcrf de quelque Eglife , de le mettre lui-même dans
l'Eglile , un lien lur la tête que la cclcbration des Fêtes le
;

commençoità l'heure de None delà veille (/), hnilToit à &


pareille heure du jour ; que faint Gérard , au lieu des icpt
heures canoniales du jour &
de la nuit , s'en ctoit prelcrit
treize ( ? ) , qu'il rccitoit accompagne de fcs Clercs , dilani
chaque jour le Pfeautier ; qu'il rebâtit l'Eglife Cathédrale , &
l'orna de diverfes peintures (A) ; &
qu'à l'entrée de la Ville
vers le Midi , il fonda une nouvelle Eglife en 1 honneur de
faint Gengoul , où il mit des Religicufes (i) mais que les '>

croyant trop expofées , il fupprima cet ctabliflcmcnt. Vidric


donne à faint Gérard quarante-un ans d'Epifcopat (/). C'eft
une faute ou de l'Auteur ou du Copifte. Ce Saint n^ fut fait
Evoque qu'en 5)^3 , &
mourut au mois d'Avril 5?5)4. On avoit
coutume (?«) , pour avertir le peuple de l'heure à laquelle on
devoir commencer la folemnité d'une Fête, s'abflcnir de &
tout ouvrage fcrvi'e , de fonner la cloche & il arrivoit quel-;

quefois que ceux qui continuoient à travailler, en étoicnt pu-


nis miraculeufemcnt.
IX. La Chronique de Novient ou d'Ebers Munftcr (n) , j'Ebers-Mua-
Abbaye fituée en Alface au Dioccfe de Straibourg fur la ri- fter.

viere d'Ifle , commence cà Jules -Céfar & finit à l'an 1255.


Mais il ce n'eft pas l'ouvrage d'une feule
efl viilble qi!c main ;
& que première partie de cette Chronique a été écrite par
la
un anonyme contemporain de l'Empereur Henri -le -Noir
& avant la mort de ce Prince , arrivée en 1056. Il y parle
comme témoin oculaire des vexations que Willon(o), qu'Henri
avoit fait Abbé d'Ebers - Munfter , contre la volonté des
Religieux , exerça contre eux. Il chaffa du Monaflere ceux
qui avoicnt de la naiffance &
du fçavoir , mit à leurs pla- &
ces des gens de la lie du peuple , qui en fortirent depuis
pour reprendre leur premier métier. L'Anonyme avoit char-
gé fa Chronique de quantité de fables. Dom Martenne a cru
devoir les fupprimcr j&pafler tout d'un coup de Jules-Céfar
au Roi Dagobert ; mais il a rapporté tout ce que cet Ecri-

(/) Pag. 10 59.


(jl VitaGeriirJi.p^ig. 10^3, (m)Pag. I07y.
(h) r,,^. zoss- («) Tcm, ^. Afiecd.p, Tiiy,
(o)P«_j. 141. I4J.

Tome XX, Sf
322 HERMANxN CONTRACTE. Ch. XX.
vain dit du Duc Altique, Fondateur d'Ebers- Munfter *, &
ce qui regarde THiftoire des Evêques de Strafbourg, & des
Monafteres de Saint Didier , de Moyenmoutier de Sainte &
Odile.
Chronique de
^
Siihieu ou de _^
j^ Chronique
- t
de Sithieu ou de faint Bertin à Saint
Omer (o) , elt comme la précédente , n1 ouvrage de pludcurs
, . / / -
i i i

S. Bénin.

Ecrivains , quoiqu'elle ne porte en titre que le nom de Jean


d'Ypre. Le plus ancien de ces Ecrivains, efl: Folcuin Moine
de Sithieu. Il vivoit dans le dixième liccle. C'efI: à lui qu'on
efl: redevable du Recueil des Diplômes des Rois des Em- &
pereurs en faveur de ce Monaftere. Après Folcuin , Simon
Abbé de Sithieu , en continua l'hiftoire jufqu'au commence-
ment de l'onzième fiécle. Un Anonyme la conduiut jufques
vers l'an 1229. J^^^ d'Ypre aufTi Abbé de Sithieu, profitant
des travaux de ces trois Ecrivains , mit la Chronique de Si-
thieu en l'état que nous l'avons , en y ajoutant ce qui s'étoit
pafle depuis l'an 1225? jufqu'à fon tems. Il mourut le fécond
de Janvier 1383. Son Ouvrage fouvent cité fouhaité par &
les Sçavans , n'a été mis au jour qu'en 17 17 , dans le troilié-
me Tome des Anecdotes de Dom Martenne. La plupart des
notes marginales font de Dom Luc d'Acheri , qui étoit prêt
à le mettre fous preflc lorfqu'il mourut. Cette Chronique cft
intéreflante , non-feulement pour l'Hifloire de Sithieu , mais
aufTi pour celle des Evêques Morins, des Comtes de Flandres,
des Papes , des Rois de France &
des Empereurs.
Chronique de XI. Il efl parlé auffi des Comtes de Flandres, dans la
a non.
Chronique de Hafnon (p ) , que Dom Martenne a jointe à
celle de Sithieu. Le Moine Tomelle en efl Auteur. Il étoit
Secrétaire du Comte Baudouin furnommé Montan. Tout ce
du Monaflere d'Hafnon, (kué fur la Scarpe dans le
qu'il dit
Diocèfe d'Arras , il l'avoit tiré des archives même de cette
Maifon. Il nous apprend qu'Hafnon fut dans fcs commence-
mens un Monaflcre double , l'un de tilles, l'autre d'hommes;
que Jean & Eulafie en furent les Fondateurs fur la fin dufep-
tiéme ficelé; depuis, Rodbnd en fut le premier Abbé; To-
melle lui dédia fon Ouvrage. Il fait dans le dix-feptiéme cha-
pitre, l'éloge funèbre de cet Abbé. Ainfi il aj.u a ce chapitre
& le luivant, à fa Chronique depuis la mort de Rodland. To-

melle le nomme premier Abbé d'Hafnon dcj uis le rctabliffc-

(0) Pag. 1141, ii^j. (j>) Tsw. 3. Anecd, M,nien.p.tg. 441,


HERMANN CONTRACTE. Ch. XX. 325
ment de ce Mon^flere, qui , comme beaucoup d'autres, avoit
paflc entre les mains des Chanoines. Baudouin le jeune le ren-
dit aux Bcncdidins , & Rodland en fut élu Abbé , vers l'an
106^ (q). Ce double Monafterc avoit été en règle depuis le
tems de la fondation , jufques vers la lin du régne de Charles-
le-Chauve, c'cfl-à-dire , pendant 15)4 ans ; & h dernière
AbbelTe pour les hlles, fut Ermentrude époufe de ce Prince.
L'Hiftoricn craignant que le ledeur ne fut lurpris de voir que
l'on eût fondé un double Monaftcre d'hommes & de filles ju- ,

flifie cet établilfement par de femblables , dont il étoit en état

de donner des exemples. Il marque les noms des Abbés & des
AbbeflTes, dont la dernière efl: Ermentrude.
XII. L'Auteur de la Chronique de Wa(le(r), la commence Chronique Je
a^'e ouWat-
à la fondation de ce Monaftcre , vers le milieu de l'onzième ^"^^

fiéclc. Son nom ell Ebrard il avoit été difciple du Fondateur


:

nommé Odfrid , & témoin de tout ce qu'il raconte. Odfrid étoic


Prêtre , très-inftruit dans les Lettres divines & humaines.
Dans le dciir de mener une vie retirée avec quelques perfonnes
de piété, il parcourut divers Monaftcres, & fe fixa enfin à
Vatte , où il aflcmbla plufieurs dilcipi'es pour y mener la vie des
Chanoines réguliers , établis depuis peu en France , mais dont
il n'y avoit point encore de Communauté en Flandres. Leur

vie étoit frugale, & ils ne mangeoient point de viande. Diver-


fes perfonnes firent des donations à. ce nouveau *Monaflere ,
qui furent confirmées dans des Alfemblées tenues à Sithieu &
à Terouane en préfence de l'Evèque Drogon l'an 1072. Od- ,

frid vécut fcpt ans , huit mois & lix jours depuis , & mourut à
Gand. Ebrard finitlà fa Chronique, & ne dit rien de fon fuc-
cefi!eur qui fut Bernold (r). Il paroît qu'on doit encore attri-
berà Ebrard la relation d'un miracle opéré en faveur de Ta-
mard Chanoine régulier de Vatte , par l'intercefiion de faine
Donatien , à Bruges en 1088. Cet Ecrit efl: de même ftyle que
la Chronique. Nous avons donné de fuite celles qui ont été
compofées vers le milieu & fur la fin de l'onzième fiécle, pour
ne point revenir pluiieurs fois à une même matière.

(î)r/'i,/./>. 778. 1 (s) Uid.p.j92.


(r) Mabiilon, Lib. Cl. Anrt.il. nnm.\ {t)lbid.fag. Si/.
70. f, e6i.

Ssij
,

3 M SUITE DES PAPES. Ch. XXT.

CHAPITRE XXL
Suite des Papes depuis Jean XF^ll ,
jufqua Léon IX;
IVibert Archidiacre de Tout , & Anfelme Moine de S.
Rémi de Reims,

Jean XVII. I.
en 1903
T
E Pape Sylveflre II , étant mort le 1 1 de Mai 1003: ,
JLv on élut pour lui fucccder , Siccon Romain de naiflan-
c^ {")) qui prit le nom de Jean XVII. Il ne tint le Sainr
Siège que juiqu'au fepriéme de Décembre de la même année , 1
e'eft-à-dire, environ cinq mois , à compter depuis le 13 de
Juin ordonné.
qu'il fut

Jean XVIII II. Jean XVIII , fon fucceffeur , monta fur la Chaire de
en 1Q04, faînt Pierre {b) ^\c 16 du. même mois de Décembre , Fête
de laint Etienne , qui étoit un Dimanche. Ce Pape étoit
comme fon prédéceffeur , Romain de naiflance , & iurnomm.é
Fafan. Henri Roi de Germanie , ayant érigé un Evêché à
Bamberg en 1007 , envoya la même année deux de fes Cha-
pelains à Rame , pour obtenir la confirmation de cette érec-
tion. Le Pape Jean XVIH , l'accorda dans un Concile. Sa
Lettre (c) , qui efl du mois de Juin de l'an 1007, porte que
l'Evêque de Bamberg fera fous la protection de l'Eglife Ro-
maine leule, & foumis néanmoins à l'Archevêque de May en-
ce fon Métropolitain. Elle fut lue dans le Concile de Franc-
fort , au mois de Novembre de la même année j & foufcrite
par tous les Evêques qui y affifterent. Ce fut du Pape Jean ,
que Brunon nommé
Boaiface {d) y obtint la pcrmiffion
auïïî
d'aller prêcher l'Evangilechez les Rulfcs. Sous fon Pontifi-
cat , l'Eglife de Conflantinople étoit en communion avec l'E-
glife Romaine ; en forte i-ue l'on y récitoit à la elle le nom M
du Pape Jean avec ceux des autres Patriarches. C'cft ce que
témoigne Pierre d'Antioche dans une Lettre à Michel Ce-

(«) Pagi, ail an, 1003. Tom. 2. Scripior. Mcdii a~jip.j6'


(h) Idem -Lid. {d) liid.p. 783. in vitajoiti.
(0 Tom.^.Conc. fa^.yS^. ^ EcCARB.
SUITE DES PAPES, Ch. XIX. 325
rularius (e) , & l'Epicaphe de ce Pape , rapportée dans les
Annales de Baronius & dans la Collc£Hon des Conciles. Ce
Pape mourut en 1009 on ne fçait ni en quel mois ni en quel
:

jour. Il paroît feulement par un Diplôme qu'on lit dans Ug-


hell (/) , qu il vivoit encore le dix-iepticmc de Juin de cette
année (g).
III. Après un interrègne d'un mois & treize jours (^ ) , on Seïgîus IV.

élut Pierre Evêque d'Albane , Romain de naiflance , qui par


refpetl pour faint Pierre , changea de nom , & prit celui de
Sergius IV. H fe nommoit auiïi Bouche de porc , félon Dit-
mar (?'),& ce lui fut encore un motif de changer de nom.
Au refte , il n'efl pas le premier des Papes qui en ait changé.
Jean XII s'appelloit Otîavien avant fon Pontificat ; Grégoi-
V; Brunon & Sylveflre III , Gerbert. Foulques Nerra Comte
;

d'Anjou ( » ayant bâti le Monaftere de Bcaulieu près de

Loches , invita Hugues Archevêque de Tours à en faire la ,

Dédicace. Hugues le refufa jufqu'à ce que Foulques eût refli-


tué à l'Eglife de Tours ce qu'il lui avoit enlevé. Le Comte fe
pourvut à Rome , & obtint de Jean XVIII , l'exemption pour
ce nouveau Monaftere. L'Archevêque alla lui-même à Rome,
& lit fur ce fujet des remontrances à Sergius iV. Elles ne
furent point écoutées & ce Pape prétendant que Foulques
:

avoit été en droit de foumettre au Saint Siège un Monaftere


qu'il avoit conftruit fur fon propre fonds , il envoya Pierre
Evêque de Viperne , pour faire la Dédicace du Monaftere
de Beaulieu. Le Pape Sergius IV vivoit encore le 17 de Juin
de l'an 1012 (m). Il n'en cfl plus parlé depuis dans l'hiftoi-
re. Les anciens Catalogues lui donnent trois ans de Ponti-
ficat , d'autres ne lui donnent que deux ans , neuf mois 8c
douze jours.
IV. Il eut pour fucceffeur Benoît VIII («) , qui tint le Benoît Vin.
Saint Siège onze ans, onze mois & 21 jours. Il étoit Evêque
de Porto quand il fut élu , & fils de Grégoire Comte d.e Tuf-

(») E^'/?. Pftri Antioch. Towj. z. Monnin. a') Tom. I, Scripier, Briiiifi:k. p.
29 y,
Coiel. fag. 14.8. ^ Baronius , ad av. Lib. 6.
1005. (/) Mabilion. Lib. yj. Annal, num.
{j )UcHELL. tom. 7. ItalU.p.fïg. \04.fag. IPÎ. CJ Lié. ;5. mim. 66, fag,
(fl) pAGi /jrf an. 1OZ9. num. !..
,

f/') Vit!! Strgii, lom. 9. Cooc.pag, Soi £^ (m) Pac.i , ad an. loti.n. j,

803. («; Paoi, aJ an. 10:4. «. i.


,

7^i6 SUITE DES PAPES Ch. XXL


culum. Son éle£lion ne tue point unanime. Un nommer Gré-
goire eut plufieurs fuffrages , &
loutenu de la puiffance de les
Eledeurs, il obligea Benoît VIII de fortir de Rome. Il fe
retira auprès du Roi Henri , qui étoit alors en Saxe. Ce Prince
voulant venger Tinjure faite au S. Siège, aflembla fon armée
& paffa en Italie. Au bruit de fon arrivée, l'Antipape Gré-
goire fe fauva , & Benoît VIII rentra dans fon Siège. Il cou-

ronna Empereur le Roi Henri , le z2 de Février de Tan


1014 ; deux ans après , c'eil-à-dire , en 1016 (0 ) , il re-
poufla les Sarralins qui s'étoient emparés de Lune en Tof-
cane. Le Roi de ces barbares irrité de la perte de fes troupes
&: de la mort de fa femme à qui l'on avoit coupé la tête , en-
voya au Pape un fac plein de châtaignes , & lui fit dire par
le porteur , que l'été fuivant illuiaméneroit autant de foldats.
Benoît VIII lui en envoya un plein de millet, en difant que
s'il ne fe contentoit pas du tort qu'il avoit caufé au patrimoi-

ne de faint Pierre , il pouvoir revenir , & qu'il trouveroit au-


tant ou plus de gens armés pour le défendre. La même année
il y eut à Rome un tremblement de terre (/>) , qui commença

le Vendredi -Saint après l'adoration de la Croix. Le Pape


averti qu'à la même heure les Juifs avoient traité avec déri-
(ion l'image du crucifix , s'informa exa£lement du fait ; &
l'ayant vérifié , il condamna à mort
coupables , auflî-
les &
tôt qu'ils eurent été décapités , la fureur des vents qui avoient
fecoué toute la Ville &
caufé la perte d'un grand nombre de
perfonnes , cefi"a. En 1020 , le Pape Benoît pafla en Allema-
gne pour demander du fecours cà l'Empereur contre les Grecs
qui mcnaçoient Rome(^). Ce Prince marcha contre eux
l'année fuivantc , & les défit. Benoît mourut en 1024, vers

le mois de Juin ou de Juillet ; d'autres devancent fa mort


& la mettent au mois de Février (j) , & quelques-uns le 2p
d'Avril.
Ses Lettres. V. h^ troificme année de fon Pontificat , la première du
Jugement en couronncmcnt de l'Empereur Henri ( j ) , ce Prince étant à
blye de Faffa."
-^^"^^ '^^^^ ^^ Bafiliquc de faint Pierre , pour y rendre jufti-

DiTMAR. Lih. J.pag. 41 i. (>; Ibid. Mabill. Lih. ^ J. Aimai. ttHtn.


(0)
(f) Glber. Lih. 3. cap. 8.,Apïmar.»» 41.
Chrofic.p. 177. ( s ) Tom. i. Annal.MJibilhn. in Afftnd.
(y) Viia Beifcdi^i. tom. y,
Co/tcil. ftig. {• 704.
810,
SUITE DES PAPES. Ch. XXT. 327
ce à tous ceux qui la demandoient, il ordonna à Creiccnt &
Jean Ion frerc , de reftirucr à Hugues Abbé de Farla , un
Château & quelques autres polTefTions qu'ils avoicnt uluipécs
fur Ion Monaflerc , & en de nouveau l'Abbé Hu-
invertit
gues. Mais l'Empereur ayant repaflc les Monts avant la rcfti-
lution, le Pape Benoît avertit Crefcent delà faire au plutôt.
Comme il rcfulbit d'obéir , les Pape lui donna vingt jours de
délai pour le prélenter, après lelquels il rendit une Sentence
portant une amende de cent livres d'or contre les infrafteurs.
Elle eft dattée du deuxième jour d'Août , & rapportée dans
l'Appendice du quatrième Tome des Annales de Dom Ma^
billon. Les Juges des Romains & des Lombards aflTiflerenc
à ce Jugement , & y foufcrivirent avec le Pape & plufieurs
Abbés.
VL 'Vers l'an 1016 (r) , faint Odilon Abbé de Cluni , lettrecomre
porta fcs plaintes au Pape Benoît, contre les ufurpateurs des j"s"blens'l'r
biens de ion Monaftere. Le Roi Robert étoit préfent à ces l'Abbaye de
^^^"''
plaintes. Le Pape y ayant égard , écrivit Une Lettre aux Eve-
ques de Bourgogne , d'Aquitaine & de Provence ( « ) , dans
laquelle il prononce excommunication contre tous les détcm-
teurs de ces biens , au cas qu'ils ne les reftitueroient pas. Il
les déligne tous par nom & par furnom. Cette Lettre eft du pre-
mier de Septembre ; & on voit par les Evêques qui y font dé-
nommés ^ qu'elle eft de l'an 101^ on l'a rapportée dans la
:

Colledion des Conciles.


VIL Le Pape Benoît en aftembîa un à Pavie , vers Tan Concile .le
^'-"'
1020 , le premier jour d'Août. 11 l'ouvrit par un long difcours ^^^'^^'^^^ :

contre la vie licentieufe des Clercs , & le mauvais uiage qu'ils


faifoient des biens d'Eglife , les employant à entretenir pu-
bliquement des femmes & ià enrichir leurs enfans. Il fit voir
par l'autorité du Concile de Nicée , que les Clercs font obli-'
gés à la continence ; qu'il ne leur eft pas permis d'avoir avec'
eux dans la même mailon aucune femme , fi ce n'cft leur merc
& leurs fœurs ; qu'y ayant eu des abus même à. cet égard , à
caufe des autres perfonnes du fcxe que cette cohabitation de-
proches parens occafionnoit , on la leur interdit dans la fui-
te ; que les Papes faint Sirice & faint Léon ayant défendu le
mariage même aux Soûdiacres , il l'étoit , à plus force raifon ,

(t) Id.Tom.'^.Ccncf, Sio. \ (« Mabillou. lit. }^. Ati/i4l,fit(m. iZ


I par. 1^7.
,

3iS SUITE DES PAPES. Ch. XXI.


défendu aux Diacres , aux Prêtres &
aux Evêques ; que les
enfans qui font nés d'eux depuis leur engagement dans les
Ordres , font illégitimes. Ces enfans pouvoient provenir d'une
conjondion illicite entre un Clerc né libre & une femme li-
bre ; ou un Clerc né ferf de l'Eglife , avec une femme née li-
bre. Le Pape renvoie l'examen de la première queflion à un
autre Concile ; & ne parle ici que d'un Clerc ferf de l'Eglife
& d'une femme libre ; &
foutient que la règle de droit , qui
porte que hors le mariage légitime l'enfant luit la condition
de la mère , n'a point lieu dans le cas préfent , ne doit &
s'entendre que des enfans des laïques. Il en donne pourrai-
fon , que ce font des laïcs qui ont fait cette Loi , qu'en &
,;; la faifant , ils n'ont pu avoir en vue les enfans des Clercs
puilque les Clercs ne dois'cnt point avoir d'enfans. Les Clercs
débauchés objedoient que faint Paul permet à chacun d'avoir
fa femme pour éviter la fornication. Le Pape répond que l'A-
pôtre ne parle que des laïcs ; que fi l'hérétique Jovinien l'a
expliqué des Clercs &
des laïcs , il s'efl éloigné en cela de
la doârine du Concile de Nicée &
des Pères. Benoît rap-
porte leurs paffages ; &
cite une Loi de Juftinien portant
qu'en certains cas les enfans des ferfs , quoique nés d'une
femme libre , doivent être cenfés ferfs. Il fe plaint des Ju-
ges qui , nonobftant cette exception , jugeoient fuivant la ma-
xime ordinaire , même à l'égard des enfans des Clercs ,
& des Evêques qui fe taifoient à la vue de tant de défor-
dres.
Canons de ce VIII. Le Concile de Pavie publia fept décrets (x), dont
les deux premiers défendent à tous Clercs lans excep-
les
tion ^ d'avoir ni femme ni concubine (y), fous peine de dé-
pofition , &
d'être privés de toute adminiflration dans le peu-
ple. Le troifiémc déclare que les enfans des Clercs feront ferfs
de la même Eglile que leurs pères (z) , quoiqu'ils foient nés
d'une mcre libre , &
que tous leurs biens appartiendront audi
à cette Eglifc. Le quatrième dit anathêmc contre tous les Ju-
ges qui les déclareroient libres (a). Il eft dit dans le cinquiè-
me (h) , qu'aucun ferf de l'Eglife , Clerc ou laïc , ne fera au-

(x) Tom, 9, Coiicf, 8lP, I ('»'! Can. 4.


(y) Cl». I. 1. I (*)C/i«. u
cune
SUITE DES PAPES. Ch.XXT. 32^
cune acquilltion fous le nom d'un homme libre, Tous peine de
fouet & de prifon , jufqu'ci ce que TEglife ait retiré tous les
titres de l'acquifition. Le fixicme porte (c) , que l'homme libre
qui aura prêté fon nom , donnera à l'Egîife les luretés , fous
peine d'être traite comme facrilege &: comme voleur. Par le
leptiéme (d) , on frappe d'anathême le Juge ou le Tabellion
qui aura reçu le contrat. On ajouta que l'Empereur Henri fc-
roit prie de confirmer tous ces décrets par un Edit , parce
qu'ils regardaient le temporel. Ils furent foufcrits de fept Pla-
ques. Benoît VIII prend dans fa foufcription , la qualité de
Pape de la Ville éternelle.
IX. L'Edit de l'Empereur efl compoféde foptarticles con- Eiiitdei'Enç-
formes aux fept décrets du Concile ( e ) , & on y ajoute des
^''^"^ ^'^""-

peincs temporelles aux fpirituelles. Le quatrième ordonne la


confifcation des biens , & l'exil contre les Juges qui auront
déclaré libres les enfans des Clercs ; 8c la peine du fouet 8c
de l'exil contre les mères , afin d'ôter toute occadon du mal.
Le feptiéme porte la peine de proicription contre les Tabel-
lions qui recevront les contrats d'acquifition au profit de ces
fortes d'enfans , fous le nom de quelque homme libre. L'Edic
ell foufcrit de l'Empereur Henri , de deux Marquis & d'un
Comte du Palais. Les autres foulcriptions qui étoient en grand
nombre , ne fe lifent plus dans les manuicrics.
Eccard rapporte dans fon fécond Tome des Ecrivains du Conàle de
moyen âge, pag. 73 (/), une Bulle de Benoît VIII , datée du Rome en loij.
mois de Juillet 1013 > ^^ faveur de l'Eglifc de Bamberg; &
une Lettre à l'Empereur Henri , au fujet des échanges qu'ils
avoient faits. On cite une Bulle du même Pape {g), confir-
mative de tous les droits Se privilèges du Monaflere de Bre-
met en Italie , datée de l'an 1014 (h). L'année fuivante , le
Pape tint un Concile à Rome , où il confirma la fondation
du Monaflere de Frutare. Gottefroi & Nithard frères de
l'Abbé Guillaume , l'avoient conftruit fur leur propre fond ,
en un lieu délert qui n'étoit fujet à aucune dixme ni autre re-

<0 Can. g. (i) haliafacra, tom. i./>. Ç)<)6. tf tom,


((/) Can, 7. >7. Co«c. 814. C? Mabillon. lib. 54.
/)i»^.

(f) i/./W. j./.,!^. 851. À'iiial. tium. jS {5 j"./». îîj.


(;) Italia fiera, lom. 1. p. 996. t5 Totn,
(1;) l:.%!iafacra , tcm, 4. p.iT. 1415, J^ 9. Conc.pag. 814. (^ Mabiilon. Lib. 54.
]\1abii.l. L/i. $^.Aiiful, nam, wo.fag. Aniul, tium. 36 ^
J7. />. if 5.

Tome XX. Tt
,

330 SUITE DES PAPES. Ch. XXT.


devance. C'efl pourquoi Benoît VI II le déclara exempt de
toute forte de Jurifdidion ; & l'Evcque de Langres , dans le
Diocèfc duquel Frurare étoit (Ituc, ratifia cette exemption en
1017. Elle avoit , comme on le voit , pour fondement , l'in-
dépendance même du lieu de la fondation ; & telle a été l'o-
rigine de l'exemption des Monaftcres [k). Au mois de Jan-
vier de la même année , le Pape donna une Bulle en faveur
du Monaftcre de Balneole ( / ) & une autre (m) , par laquelle
;

il accorde à celui de Ripouil de chanter V Alléluia 8z le Gloria

in excelfts , le jour de la Féteî de la Purification , lors même


qu'elle arrive après la Septuagéfime.
leitresdeBe- XI. Il relie quatre Lettres de Benoît VIII , toutes en fa-
noicWli,
^^^j. j^j Monaflere de Saint Bénigne de Dijon. Les deux
premières font du mois de Novembre de l'an 1012, & adref-
iécs à Brunon Evêque de Langres , à qui il recommande ce
Monaftere & l'Abbé Guillaume qui le gouvernoit alors. Il
marque qu'il avoit lu tous les privilèges que lui Brunon ou
l'Abbé Guillaume lui avoit envoyés, & les avoit confirmés ;
&quoiqu'il lait que cet Evêque aimoit les Moines de Saint
Bénigne, & qu'il favorifoit l'Ordre monaftique, il ne lailTe
pas de lui défendre & à tous fcs fucceffcurs , d'interrompre
î'OflBce divin dans ce Monaflere. Les deux autres Lettres font
à l'Abbé Guillaume, à qui il témoigne combien il prenoit de
part aux vexations qu'on lui fiifoit fouffrir ; mais en même-
tems il le loue de la patience avec laquelle il fupportoit les
mauvais traitemens de fes ennemis, il l'exhorte toutefois à
ne pas fouffrir la dilapidation des biens de fon Monaflere ,
& à lailfer agir l'Evêque Bénigne , cà qui il avoit ordonné
d'en prendre la défenfc. Cet Evêque avoit pris l'habit mo-
naflique à Saint Bénigne de Dijon. Le Pape lui permet de
faire des Ordinations dans ce Monaflere ; mais feulement
par les ordres de l'Abbé Guillaume. Ces quatre Lettres fe
trouvent dans le Recueil des pièces fervant à l'Hifloire de
Bourgogne («) , par Etienne Perard , à Paris en \66'] ,
in-fol.
Jean XIX, XII. Le fucccffcur de Benoît VIII, fut Jean fon frerc
P.!petnioi^.fQy5 ](, j^QjYj (je Jean XIX. Il ne commença à occuper le

a) Mabillon. \bid» I (m)W>â.


SUITE DES PAPES. Ch. XXI. 331
Saint Siège qu'après le (Ix du mois de Juin ( ) , mais avant
le mois d'Odobre. On dit qu'il n'croit que laïc lorfqu'il fut
élu (p) , Se que fon cle£lion le lit à force d'argent (q). Dans

les commcnccmcns de fon Pontificat , Euftathe Patriarche


de Conlîantinople , lui envoya des Députés avec de grands
préfcns (r), pour obtenir le titre d'Evcquc univerfcl dans
les Eglîfcs d'Orient , comme le Pape le prenoit dans celles
d'Occident. Cette demande fe fit de concert avec l'Empe-
reur Bafiic. Mais les Evoques de France & les Abbés firent
tous leurs efforts pour détourner Jean XIX de ce parti.
Quelques-uns, entre autres, Guillaume Abbé de Saint Bé-
nigne de Dijon & Richard de Saint Vanne de Verdun , in-
formés par un faux bruit , qu'on avoit accordé aux Grecs ce
qu'ils dcmandoicnt, en écrivirent au Tape. La tentative des
Grecs fut inutile ; ils s'en retourneront fans avoir rien obte-
nu. En 1027, le Pape XIX couronna à Rome , Empereur
le Roi Conrad (s ) , Se Impératrice , la Reine Gilele fon
époufe. La cérémonie fe fit le jour de Pâques, 26 de Mars,
en préfence de Rodolphe Roi de Bourgogne , & de Canut
Roi d'Angleterre & de Danemarc , qui étoit venu en cette
Ville accomplir un vœu. Ce Prince fe plaignit au Pape (f),
à l'Empereur & au Roi de Bourgogne , des vexations que
les Anglois & les Danois fouffroicnt lorfqu'ils alloient à Ro-
me , ou par piété , ou pour leur commerce. Conrad & Ro-
dolphe lui promirent exemption pour les fujets , des impo-
fitions , & liberté des chemins. Il fit d'autres plaintes au
Pape , fur les fommes immenfes que l'on exigeoit des Arche-
vêques d'Angleterre , quand ils alloient à Rome pour rece-
voir le Pnllium & il fut réfolu que cela ne fe feroit plus à
:

l'avenir. De fon côté , il recommanda aux Evoques , aux Sei-


gneurs 8c aux peuples fes fujets , de payer exadement à Rome
le denier de faint Pierre , les dixmes & les autres redevan-
ces aux Eglilcs. La Lettre qu'il leur écrivit en cette occa-
fion , eft de l'an 103 1 {u). Deux ans après , c'eft-cà-dire ,
en 1033 , le jour de la Fête de faint Pierre , il y eut à Rome

(0) P/cl, ad un, ioî4. rinm. i. fiov. Labb.f. 174.


(p) Herman. Contract. in Cbrin, ad (s) Vita Cutiradi, p. A)'i- ^ Pagi, ai
n. 1C24. an. 1017. tium, i.
{q) Glaber. I.ib, 4. c^tf, r. (ï) Tcm. 9, Cane, f. 86l.
(r) Hu60, FUvi/iiiiCenf.Totn, l,Bibliiit, («) Uid.]
Ttij
35i SUITE DES PAPES. Ch. XXI.
une confpiration contre le Pape Jean XIX (jv) , de la part
de quelques-uns des principaux d'entre les Romains. Ils at-
tentèrent à fa vie , &
n'ayant pu la lui ôtcr , ils le chafferent
de fon Siège. Plufieurs ont fait dire à Glaber , que l'Empe-
reur Conrad voulant venger l'injure faite à l'Eglife Romai-
ne , & mécontent d'ailleurs des Romains , vint à Rome avec
une armée, rétablit le Pape & foumit les rébelles mais le :

Père Pagi prouve clairement que ce que dit Glaber (_y ) ,


doit s'entendre de Benoît IX , fuccefleur de Jean XIX , &
non pas de Jean lui-même ; &
que ce ne fut qu'en 1038 ,
que l'Empereur Conrad vint à Rome , où il rétablit en effet
le Pape Benoît IX , cinq ans après l'apparition de l'éclypfc
qui jetta la frayeur dans les efprits , par les fuites que l'on en

appréhendoit ; dont une , félon Glaber , fut l'expulfion de


Benoît IX , qui arriva le même jour. Jean XIX mourut au
mois de Novembre de l'an 1033, après neuf ans & dix-neuf
jours de Pontificat (z) : quelques-uns y ajoutent huit mois ;
d'autres trois.
Ses Lettres, XIII. Il a été parlé plus haut , de la Lettre de ce Pape à
Jourdain Evêquc de Limoges , & aux autres Evêques des
Gaules, au fujet de l'Apoflolat de faint Martial. Jean XIX
l'appuya , 8e fon fentiment fut fuivi en divers Conciles alTem-
bléspour décider ce que l'on devoit croire là-deffus. Ce Pape
ne prétendoit point que faint Martial dût être compté dans
le nombre des Apôtres ; mais feulement qu'on pouvoit lui en
donner le nom , parce qu'il en avoit fait les fondions , &
qu'il avoit été envoyé exprès pour prêcher l'Evangile. Celui-
là , dit-il , peut être appelle Apôtre (a) , qui a été envoyé ;
Apôtre & Envoyé font des termes fynonimes. Nous avons
aufli parlé de fa Lettre à faint Odilon Abbé de Cluni , pour
l'engager à accepter l'Archevêché de Lyon, Il le prefle par
deux motifs ( ^ ) , l'^un de l'ebéiïïance qu'il devoit à l'Eglife
Rom:iine; Tautr? ,
qu'en rcfufant l'Epifcopat, il fe rendroic
coupable de la perte des amcs , à qui il auroit pu être utile
par fon exemple & par fa doârine. Hugues Evêque d'Au-
xerre (f ) , ayant confeffé fes péchés à Dieu & au Pape Jean ,

Cx) Glaber.Ii^. 4. M^. 9. I 0')Tom.9.Conc.p.S^7,


(;i) Paoi, <»</ jin. io38.««)W. I. 1 (i) liiJ. p.i^e S^tS,
{i.) ldtm,aJ an. lo^l, rtnin,^. (c) UiJ,
J
SUITE DES PAPES. Ch. XXI.
335
il en obtint des Lettres d'abfolution. On croit que ce qui
obligea cet Evcque de recourir au Pape (d), c'efl: quV-cant
en mème-tems Comte de Châlons-lur-Saone, & Evcque d'Au-
xerrc , il avoic depuis fon Epil'copat , fait la guerre , & s'ctoit
en cette occafion rendu coupable de quelque crime.
XIV. Thcophilaae neveu de Jean XIX I, lui fucccda. Il Benoît IX,
étoit fils d'Alberic Comte de Tufculum , & n'avoit alors
^'^^'^'^"*"'*'

qu'environ douze ans. Son père ne parvint à le faire élire que


par de grandes fommes d'argent. Cet abus régnoit dans rou-
te l'Italie ; la fimonie étoit la voie ordinaire pour entrer dans
les Bénéfices. On le voit par les plaintes qu'en faifoit dans
le tems même (e) , un Ecrivain connu depuis Ibus le nom de
ViÊtor. La vie de Benoît IX , depuis fon Pontificat , ne fut
pas plus édifiante que l'avoit été fon éledion. On ne laiiïa
pas de le reconnoître pour Pape dans toute l'Eglife. En
1036 (/) , il tint un Concile à Rome, où Bonifon Abbé
de Saint Pierre hors les murs de Perufe , fe plaignit qu'An-
dré Evêque de cette Ville , s'arrogeoit certains droits fur
fon Monaftere. L'Evêquc n'ayant produit aucun titre pour
les maintenir, fut débouté de fes prétentions. Les Collec-
teurs des Conciles ont mis celui-ci en 1037 (^ ) mais il fut :

tenu l'année précédente. En 1038, les Romains le chalTc-


rent de fon Siège (h). Il y fut rétabli la même année par
l'Empereur Conrad. Sur les remontrances que les Polonois
lui firent en 104 1 , du trifle état de leur pays & du befoin
qu'ils avoient du Prince Cafimir pour la confervation du
Royaume & de la Religion, il difpenfa Cafimir (?), Moine
Profès de Cluni & Diacre , de fes vœux , & lui permit de fe
marier. L'année fuivante 1042 , Benoît IX envoya un Légat
à Trêves , avec des Lettres pour la canonifation de faint Sy-
méon , oui le fit le dix-feptiémc de Novembre. La Bulle fe
trouve dans le recueil des Geftes des Evêques de Trêves
,
rapporté dans le quatrième Tome de la grande Colledion de
Dora Martenne (/). Il avoit déjà donné dans le premier
Tome de fes Anecdotes (w) , un privilège accordé parle

(/) Uiii, in notis, ( f _) Tom, $, C*Ht. in vit» StmJ, fa^i


(0 Victor, tib, ^.Dialog.
(f) Pagi , ad a». loj ;.»«»!. 7, (/) Pag. ^ 67.
ig) Tom. 9. Coric. p. 1250.
((A) Paoi , ad au, 1058, tinm, 1»
,

5?4 SUITE DES PAPES. Ch. XXL


même Pape en 1030 , à Gumbald Abbé de Sainte Croix à
Bourdeaux , & aux Moines de Sainte Marie de Solac por- ,

tant qu'ils feroicnt en droit de fe choifir un Abbé , & exemts


de la jurifdidion de l'Ordinaire.
Sylveiireil^ XV. Le peuple Romain ne pouvant plus fouffrir les mœurs
'^^'
dépravées de Benoît IX , le chaffa au mois de Décembre de
l'an 1044 (»). On lui lubftitua Jean Evêque de Sabine , qui
prit le nom de Sylveftre III. Son PontiHcat ne fut que de
trois mois , au bout defquels Benoît IX rentra dans fon Siè-
ge , foutenu du crédit ;de fcs parens , qui n'avoient cefTé de-
puis fon expuliion , d'infulter Rome par divers brigandages.
Il continua de vivre dans le dérèglement comme auparavant;
de forte que le voyant mépriié du Clergé & du peuple , il
céda le Pontificat à l'Archiprêtre Jean Gratien , pour une
fomme de quinze cens livres de deniers , fe retira dans fes &
Terres hors de la Ville , pour s'y livrer plus librement à fes
plaifirs.
GrfgoireVi, XVI. Jean tint le Saint Siège deux ans & huit
Gratien
l'-'P^'
mois ( ) , fous le nom
de Grégoire VI. Quoique la fimonie
eût eu part à fon intronifation , Glaber dit de lui (p) , qu'il
étoit un homme très- pieux & d'une faintetè connue ; & que
par fa bonne réputation il répara le fcandale que fon prédè-
ceffeur avoir caufè. Il trouva l'Eglife de Rome dénuée de
tout, les patrimoines occupés par des ufurpateurs ; la Ville
pleine de voleurs & d'aflafllns. On pilloit jufqu'aux offrandes
que les fidèles mettoient fur les autels & les tombeaux des
Apôtres. Il employa contre ces dèfordres , les exhortations
l'excommunication , la force des armes tous ces moyens fu- :

rent fans fucccs. Cependant Henri le Noir, Roi d'Allema-


gne , pafTa en Italie dans le deffein de fe faire couronner
Empereur à Rome, 8c de travaillera la réunion de l'Eglife,
Etant à Pavie, il y fit tenir un Concile {q). Il alla de-là à
Plaifancc , où Grégoire VI le vint trouver. Vers la Fête de
Noël de l'an 1046 (r) , il aflcmbla un Concile compofé d'E-
vêques , d'Abbés , de Clercs , de Moines , à Sutri près de
Rome , où le Pape Grégoire fut invité. Il y vint dans l'ef-

(n) Victor. I>i. j. Dialog. ^ Pagi , aJ Ci/) Herman. aJ an. 1046. ^ Tcni.f.
an, 1044. Cotic. p.jg. 943.
(0) Idem. iHd. (r) Victor, Lib. ^.Di.th^,
(/>J
GtABiR. Ul>t ! , caf, J,
SUITE DES PAPES. Ch. XXL -5
pérancc d'être reconnu fcul Pape légitime car Beno' c TX &
:

SylvcftrcIII , vivoicnt encore &


prcnoicnt l'un Se l'autre le
noni de Pape. Mais quand on eût examiné l'affaire , appa-
remment celle de fon intronifation (s) , voyant qu'il ne pou-
voit avec honneur , remplir une il grande dignité , il lortit
de Ion Siège fe dépouilla de fcs ornemens ^ & remit le bâ-
,

ton Pafloral en demandant pardon. Le Roi Henri étant en-


iuite entré dans Rome, avec les Evoques qui avoient aiïifté
au Concile de Sutri , Suidger Evêquc de Bamberg , fut élu
Pape d'un commun conrentcment du Clergé & du peuple ,
& nommé Clément IL Son Sacre fe Ht le jour de Noël & ce ,

jour-là même il couronna Empereur le Roi Henri , & la Rei-


ne Agnès Impératrice. Nous avons dans l'Appendice du
quatrième Tome des Annales de Dom Mabiilon (r) , une
Bulle de Grégoire VI , accordée à Henri Roi de France ,
en faveur du Monaflere de Saint Quentin , par laquelle ce
Pape , qui n'avoit pas encore renoncé à fa dignité , défend à
toute perfonne de s'emparer des biens de ce Monaflere dont
il fait le dénombrement. Il étoit alors gouverné par l'Abbé

"Walerann.
XVII. Aufli-tôt après fon ordination (//) , Clément CAémer.tU, U
écrivit une Lettre très - tendre à fon Eglile de Bamberg , un''concn'e"i
pour lui témoigner la douleur qu'il reffentoit d'être Icparé R^me en
d'une époufe qu'il avoir toujours chérie &
qu'il chérifToit en-
^°^'^'

core. Il y dit nettement , que les trois Papes qui vivoient en-
core , Benoît IX , Sylveftre III &
Grégoire VI , n'en avoient
obtenu le nom que par rapines ; &
fait mention des privilè-

ges que deux de fes prédécedeurs , Jean XV^III Benoît &


Vill , avoient accordés à l'Eglife de Bamberg , aux inftan-
ces de l'Empereur faint Henri. Cette Lettre ne fe trouve
point dans la Colle£lion des Conciles , quoiqu'elle eût été
imprimée jdans le Livre des Saints de Bamberg, par Gretzer
à.Ingolrtad en 1611. Les Pères Papcbroch Pagi en ont &
rapporté la plus grande partie ( x ). Eccard l'a donnée dans
fon fécond Tome des Ecrivains du moyen âge. II y a une
autre Lettre de Clément II (7) , datée du iS de Février

(0 ii>iJ. Papfbroch. in cmiatit Chonic.


(.ï) Hfjl,
{t)rage 754- ^47^. ^ Pagi , ad iiit, 1044. »»»i. ">
(r/j Eccard. Tom. i. Script. MedUavi, {y) Tom. 9.Conc.fiig. 544.
f. 81.
,

^36 SUrXE DES PAPES. Ch. XXI.


Tan 1047 , à Jean Archevêque de Salerne , par laquelle il
approuve fa tranflation de l'Évêché de Pcflane à celui-ci , à
caufe de la grande utilité qui en revenoit à l'Eglife de Sa-
lerne. Au commencement de Janvier de la même année , le
Pape tint un Concile à Rome , où l'on travailla à extirper la
Timonie qui régnoit depuis fi long - tems dans tout l'Occi-
dent (z) il y tut arrêté , entre autres chofes , que celui qui
:

auroit été ordonné par un fimoniaque { /7 ) , fçachant qu'il l'é-


toit , pourroit continuer les fondions de (on Ordre , après
quarante jours de pénitence. On y régla aufli la conteftation
pour la préféance entre l'Archevêque de Ravenne & celui de
Milan. Ils prétendoient l'un & l'autre (b) , être aiïis auprès
du Pape au côté droit. Le Patriarche d'Aquilée formoit une
femblable prétention. On produilàt un Catalogue des Arche-
vêques qui s'étoient trouvés au Concile du Pape Symmaque,
où l'Archevêque de Milan avoir la première place après le
Pape. Mais on oppofa un décret du Pape Jean fuccefleur de
Symmaque , portant que l'Archevêque de Ravenne avoit cé-
dé la préféance à celui de Milan, pour cette fois feulement.
Le Patriarche d'Aquilée montra un privilège de Jean XIX ,
qui lui accordoic la féance à fa droite. On alla aux opinions ;
& Icsfuffrages s'étant réunis pour l'Archevêque de Ravenne,
le Pape Clément II déclara que fuivant l'ancienne coutume,
cet Archevêque fcroit affis à fa droite , fi ce n'eft que l'Empe-
reur fût préfent ; auquel cas il ne feroit qu'à fa gauche. La
Lettre que le Pape écrivit fur ce fujet , eft adreffée à tous les
cnfans de la fainte Eglife.
Concile en XVIII. Léon d'Oftie (c) , die que l'Empereur Henri em-
A^iemngneen
^^^^ ^^^^ ]^jj j^ p^p^ Clément II en Allemagne-, & Baro-
nius croit qu'il fut préfent au Concile que ce Prince afierobla ,
& auquel il invita tous les Archevêques & Evêqucs de fon
Empire, Glaber parle de ce Concile (d) ; mais il ne dit point
que le Pape y ait aflîfié. L'Empereur harangua les Evêques
fur l'abus prefque univerfcl de la fimonie (e). Ils s'en reconnu-
rent coupables & demandèrent miféricordc. Alors ce Prince
publia un Edit pour tous fcs Etats , portant qu'aucun Clerc

(1) Petriis Damian. Opuf. 6. ctf, ij. \ad an. 1047.

U Glab. L»i. J. c.ï/). y. I


( c) Lio Opifiif. Lib.l.tap.ti,
{a)Tnm.9,Cot>c,p.9^6, i (</) GlabER , L;'^, y. («/>. J.
}j>) Tom. 9. Coiif.p. izji. Cî Herman ' (<) lùid.

n'achetteroic
SUITE DES PAP ES. Ch. XÎlï. 337:
n'acheteroit à prix d'argent le facrc Miniflcrc , que tous &
ceux qui en donneroient ou en recevroicnt , Icroicnt prives
de l'honneur de leurs grade* , &: frappés d'anathême. Clé-
ment avant de retourner en Italie, canonila laintc "Wi-
II ,

borade Vierge &


Martyre (/) , mi-le à mort parles Hongrois'
à Saine Gai en 925. Ayant enluirc repris le chemin de l'Ita-
lie , il mourut non à Rome , mais dans le territoire de cette

Ville (g) , après environ 5? mois de Pontificat. Son corps fut


rapporté à Bamberg , dont le fiége n'avoit point été rempli
depuis Ton életlion.
XIX. Après la mort de Clément II, Benoît IX rentra pour^^mafe II
^^^*
la troifiéme fois dans le Saint Siège , qu'il occupa huit mois
& dix jours (k) , depuis la Fête des Quatre Couronnés hui-
tième de Novembre, jufqu'à celle de faint Alexis dix-fep-
tième de Juillet 1048. Barthelemi , Abbé de la Grotte Fer-
rée ( ) , à qui il avoit découvert fes péchés
?"
demandé le &
remède , lui avoit conlcillé de renoncer à fa dignité de ne &
plus pcnfer qu'à le réconcilier avec Dieu. Ce fut là apparem-
ment le motif de fon abdication ; il paroît qu'elle fe fit de
concert avec l'Empereur Henri , puiïque le jour même que
Benoît IX fe retira ( /) Poppon Evêque de Brixen , que ce
_,

Prince avoit choifi &


envoyé à Rome (m) , fut placé fur le
Saint Siège , fous le nom de Damafe II. Cette circonftance
fe lit dans Onuphre («) j &
dans l'ancien manufcrit cité par
le Pcre Papcbroch mais Hermann Contradc Se Léon d'O-
:

ftie n'en parlent point. Damafe mourut à Prencfte , le huit

Août 1040, n'ayant gouverné l'Eglife Romaine que vingt-


trois jours ( ). Son corps fut inhumé à Saint Laurent hors de
la Ville de Rome (p).
XX. Incontinent après , Romains députèrent à TEm-
les Léonix^»,
^^^"
pcreur Henri (7 ) ,
pour l'informer de la mort du Pape Da-
malc , & le prier de lui donner un fucceffeur. Ce Prince tint

(/) Btirchard. i/f C.iftbtis Mon.tjlerU (/) Mff. apud Papeiroch. in conatii Chrti-
SiVi^atl. cap. 6. nologico,

(,ç) HcRMA N. »« Ciro«. «i/ .1». 1047. t5 (f«) Herman. in Chnnic, ai au. 1048.
Paci , iiii nn. 1047. tnim. 6. Léo OjUenf.lib. i. cap. 8i.
Mjf. npftd P.tpebroch. t?
(Ji) PagI , ad ('H)PAr.i, ad. an. 1048. num. i.
au. 104T. nutn. S. io) Léo Oflicnf. Lib. 1. cap. 81.
(«) Vita Bartl/.ttomai in Ths/auro Afcet. (/>) Herman in Cbromc. ad an, 1048,
Fojpviui , p, 419 Çj) Anselm. »'» hintrario.

Tome XX, Y v
33S SUITE DES PAPES. Ch. XXI.
quelques mois après , une Diérc à Vormes en préfence des
Députés , ou Brunon Evêque de Toul , qui étoit préfent , fut
élu Pape. Il s'oppofa de tout fon pouvoir à cette éledion , &
voyant qu'on le prcflbit de plus en plus d'accepter , il de-
manda trois jours pour décider.
Il les pafla dans le jeûne
fe

& dans la prière une confedîon publique de fes pé-


: puis il fit

chés , dans le deflTein de faire connoître fon indignité. Les


alTiftans ne purent retenir leurs larmes , mais ils perfévére-
rent dans leur première réfolucion. Brunon ne pouvant les
faire changer de fentiment , déclara devant les Légats , qu'il
n'acceptoit la Papauté que fous l'agrément du Clergé & du
peuple Rcrruin. Cette première életlion fe fit quelques jours
avant la Fête de Noël , que Brunon alla célébrer à Toul dans
fon Eglife. Il partit de cette Ville le 27 de Décembre 1048 ,
en habit de pèlerin (^ , )
&
non revêtu de pourpre , comme
le dit Otton de Frifingue, qui s'éloigne encore de la vérité
de l'hiftoire (r) , en difant qu'il paiïa par Cluni , emme- &
na avec lui Hildebrand Prieur de cetre Abbaye. Si Brunon
pafia à Cluni , ce ne pût être qu'après la Fêre de Noël , &
alors Hugues fuccefïeur de faint Odilon , étoic Prieur de ce
Monaflcrc, & non pas Hildebrand. Il prit fa route par les
montagnes de Vôgcs& paffa à Moyen-Moutier, d'où il em-
mena le Moine Humbcrt qui lui ctoit déjà connu ; Humberc
avoit été offert à ce Monafiere , & fait profeffion de la Règle
de Saint Benoît fous TAbbé Hardulphe vers l'an lOi y. Le
Pape fut reçu à Rome' aux acclamations du Clergé & du peu-
ple , & intronifé le douzième de Février 1049 (j) , qui
étoit le premier Dimanche de Carême , fous le nom de Léon
IX.
II avoit été
XXT. Il étoît né au mois de Juin de Tan 1002 (f) , d'une
^'"^'
des premières Noblefles d'Alfatc , p.irent de Conrad le Sa- &
lique. On confia d'abord fon éducation Bv rtold Evêque de i

Toul j qui le fit inftruire dans l'Ecole de fa Ca hédrale ( «).


Vibcrt ion Hifioricn , ne dit pas clairement qu'il ait cmbraf-
fé la vie monaflique mais il l'intlnui: en dilant, que loriqu'il
;

fut choifi Evêque de Toul , il fc rcjouilfoit d'être promu à un

(j) W1BEB.T. «« i-iM Lton. Iii. l.pog'l (O Tom. 9. jidor. p.

<5. I
{Il WiBfR.T. »fff;>/»I»o«. lit, i. tittm.
(r) Otto Frifinif. l'b. ^^. num, 11}. | i o. /i. 5 8.
AnS£i.M. in llineratiOf '
(j)
,

SUITE DES PAPES. Ch. XXL ^^


Evêché pauvre , fe fouvenanc de fa première prqfeffton ,.ou U
aimoic mieux fervir Jefus Chrift en fe contentant de ce qu'U -
y avoit de plus vil & de plus abjcd , que de parvenir , en
l'offcnfant , à ce qu'il y a de plus i'ublime. Paroles qui lom
tirées du fepticme chapitre de la Règle de laint Benoit , qu'ji
avoir donc profeflee d'abord. Mais ce qu'il dilbit quelquç
tems avant fa mort efl plus formel J'ai vu la Cellule que :

j'habitois étant Moine (.r) , changée en un vafle Palais §c il j

me faut dans le moment rentrer dans la demeure étroite dij


tombeau. Auiïi Trithcme le dit fans héliter (y) , Moine de
l'Ordre de faint Benoît.
XXII. Brunon en fut tiré pour remplir le Siège Epifcopal ii eft Tan'Evê-
de Toul , vacant par la mort d'Herimanne en 1026. Il l'oc- quedeToui.
cupa 22 ans , pendant lefquels il s'appliqua à rétablir la dif-
cipline régulière en divers Monafteres (z) , où elle étoit né-
gligée de la faute de ceux qui en avoient le gouvernement.
11 les dépofa & en mit d'autres à leurs places. Il avoit cou-
tume chaque année de faire le voyage de Rome , accompa-
gné d'un grand nombre de Clercs & de laïcs. Il furent atta-
qués en chemin d'une perte qui ravageoit l'Italie {a). Il les
guérit en leur faifant boire un peu de vin , où il avoit trempé
des reliques qu'il portoit avec lui en particulier celles de laint
,

Evre , à qui il avoit plus de dévotion.


XXIII. Quelque tems après fon intronifation , il aflembla SonPontlficat.
à Rome un Concile des Evêqucs d'Italie & des Gaules ( fc ) , Je hfimonie'
où déclara nulles les Ordinations fimoniaques. Ce Concile
il

cil daté du 26 de Mars de l'an 1 04^ , toutefois il eft die &


qu'il fe tint la féconde fcmaine d'après Pâques ce qui ne peut :

fc foutenirquand même Pâques auroit été en cette année le


,

21 Mars. Il faut donc dire que ce Concile commença le


z6 Mars , & qu'il ne finit que dans la féconde fcmaine d'a-
près Pâques , & dix - fcpr jours après cette Fcte , comme le
dit lePape dans une Bulle (c) , où il confirma les privilèges
de l'Eglife de Trêves. Etant à Pavie la feroaine de la Pente-
côte (f^) , il convoqua un fécond Concile contre les fimonia-

(.v) Cellam quam Monacliu;, incolui (x.) WiBERT. .«'« i/itii Léon. m. i. n, 1 1.
in fpatiolidlma Palatia jam duHùm vidi co i- ,60. -

verfam : modo ad hujus farcophagi angu- (il) ïdem ihid. lib. i. nitm, i.p. ^4.
flia« iterum eft remeandum. Maeill. Tem, [b] Tom. 9. CottC. p. 1017.

76. p. z77. ((•) Pagi ,.ii^ d"». 1049. niim. 10.


4. Anita'l. II.

0) ^d Mi. 1048. i'i Cbrtn. lUrfaug. (./) Tom, 9. CoHC. p. 1028.

Vvij
,

"540 $UITÉ J>ES PATES. Ch. XXI.


ques. On dans celui de Rome (e) , que le Dé-
lui repréfenta
cret de Clément II , permettoit à ceux qui avoient été ordon'-
nés par les fimoniaques , d'exercer leurs fondions après qua-
rante jours de pénitence. Léon IX ordonna que ce Décret
feroit fuivi. De Pavie il afla en Allemagne , & célébra à Co-
logne avec TEmpereur Henri , la Fête de Saint Pierre. Il a-
voit pris fa route par Cluni , où, à la prière de l'Abbé Hu-
gues' , il confirma par une Bulle datée de l'onzième Juin (/) ,
l'exemtion de ce Monaftcre. De Cologne le Pape vintàToul
& de là à Reims II y arriva la veille de Saint Rémi , trentième
de Septembre ; & pour fe préparer à la Fêre du lendemain ,
il fe baigna Se fe fit rafer (g). A
l'Office de Tierce , il alla

revêtu de fes habits pontificaux au tombeau du Saint, en tira
k' Châfle y qu'il porta lui-même fur fes épaules; puis elle fur
portée en procefTion à l'Egliie Métropolitaine , & le lende-
main autour de la Ville. Cependant Léon IX faifoit avec les
Evêques , la Dédicace de la nouvelle Eglife de Saint Rémi
bâtie par l'Abbé Hcrimar. Cette cérémonie fut fuivi-e de la
tenue d'un Concile au juel le Pape prélida , aflTifté de vingt-
cinq , tant Archevêques qu'Evêques , d'un grand nombre
d''Abbés & de Clercs, On y travai'la à la réforme de quan-
tité d'abus qui s'étoient introduits dans les Gaules, tant de la-
part des laïcs que des Eccléfiaftiques. Ceux-là s'emparoienc
des biens des Eglifes ceux-ci en achetoient ou en vcndoient
:

les dignités. Les mariages inceftueux avoicntlicu ;il régnoit de


nouvelles herélîes ; on prctoit à ufurc ; les Clercsportoient les
armes ; la lai de la continence étoit mal obfcrvée, même par
des Abbés,
le Pape fe- XXIV. Le Concile de Reims ayant fini fes féances le 6 d'O-
in'
1^1'^°'"^ aobre, le Pape Léon IX reprit le chemin de Rome par Ver-
dun , où il dédia TEglife de Sainte Madeleine , & accorda di-
vers priileges aux Abbayes de Saint Vanne & de Sunt
Maur ; pat Mets, où il confiera la Bifi ique de Saint Arnoul;
& par Maycncc , où il convoqua un Concile de quarante Evê-
ques (A). La fimonie y fut défendue , & le mari.ige des Prê-
tres. L'Evêque de Spire acculé d'adukcrc, voulut s'en jufti-

{e) Uiil.pa^.1017. 1 8. Ail^r.p. 67.9-


'^'J I c^ii. l'I: î. lium, 5. f. 70. tf
(f) HitlUr. (Jimiicenf. p. tr. j
[h

\l)
Ihpor. Detiiiat, Ecclif. Ktmenf, tsm. ( Tom. <). duc. p. 10+6.
,

SUITE DES
PAPES. Ch. XXI. 541
fier parSacrement du Corps du Seigneur ; mais on dit que
le

depuis , la mâchoire lui demeura tournée d'une paralyfic , juf-


qu'à la more ce qui fut regardé comme une punition de Ion
:

parjure. De Mayence il retou'na à Rome p.ir les montagnes


de Voges. Etant à Saint Dié (i) ii\ fit expédier un privilège
en faveur du Chapi:re , date du 1 5 de Novembre ; & un autre
deux jours après , pour l'Abbaye de Luxeu. De Saint Dié il
alla Hcfle proche de Sarbourg: c'éroit un Monaftere de fil-

les fondé par fcs parens. Le Pape confirma per une Bulle, tou-
tes lesdona'ions qu'ils avoient faites à ce Âlonafterc. A Ri-
chenou le Pape dédia une Eglife en l'honneur de la Sainte
,

Croix pendant qu'il difoit la MefiTe , on préfcnta un homme


:

pofledc du démon il fit fur cet homme , le figne de la Croix


:

& auffi - tôt il fut délivré. De retour à Rome au commence-


ment de Février de l'an 1050(7), Pâques il afl^embla après
un Concile dans l'Eglife de Latran Archevêques & qua-
: fept
rante -fept Evoques y aiïifterent avec pluficurs Abbés. Tous
foufcrivirent à la Bulle de canonifation de fiint Gérard Evo-
que de Toul. On lut dans le même Concile une Lettre de Be-
renger, contenant fes erreurs fur l'Euchariftie. Elles furent con-
damnées avec l'Auteur de la Lettre (?») , qui fur aulfi privé de
la communion de l'Eglife. Au contraire , Lanfranc accufé de

favorifer la dodline de Berenger , fe juftifia p'einement. A-


près le Synode, !e Pape alla à Mont-Caffin , où il arriva avant
la Fête de faint Pierre & faint Paul. Ce jour-là il y célébra la
Mefle («) & comme c'étoit un Samedi , où , félon la Règle
;

de faint Benoît , le lavement des pieds fe doit faire , il les lava


à douze Moines, qui les lui lavèrent auffi après quoi il dîna :

avec la Communauté au Réfectoire. Enfuite Léon IX paiïli en


Pouille pour y rétablir la paix encre les habitans & les Nor-
mans. Il tint à Siponto un Concile (0) , dans lequel il dépofa
deux Archevêques convaincus de fimonie. Il retourna à Rome
d'où il forti: vers le mois de Septembre, pour aller à Verceil.
Pluficurs Evêqucs s'yécoient rendus pour la tenue d'un Conci-
le. On y lut le Uvre de Jean Scot fur l'Euchariftie
(p) , & on le
condamna au feu. Berenger ne comparut pas ,"quoique cité ; fes

(i') Mabii.i.. Lii. yp. Annal, niem, (\. Ç5 LanFr. in Bereng. cap, 4.
fi. p. fO<;. f07. («_) Chrcn, CafTin, Lil/. z, cap, 84,
(1) HtRMAN. Chrtn, ad an, 1050.
in (0) Vit.i Léon, lrl>. 2. ti, 6, p. 71
(m)HER.MAl>JN.i»Cyr(i»if. ad .tn.iojo. (u) LANia, f.I/i. 4,
,

34» SUITE DES PAPES. Ch. XXT.


& profcrites d'un con-
erreurs furent examinées de nouveau,
fentement unanime.
un''feco^/''' . ^^y- Le Pape paflales Alpes & vint à Toul (/>). Le lu-
voy.ga en jet de Ce voyage étoic de transférer les Reliques de faine Ge-
Fraiice. j-^j-j q^'j] ayoit canonifé dans le Concile de Rome. La céré-

monie fe fit le 21 & 22 d'Odobre. Le même jour Léon IX j


confirma par une Bulle, toutes les donations faites à TAbbaye
de faint Manfui , & les exemta de toutes fortes de charges. La
Bulle cfl datée de la grande Eglife {q) y la féconde année de
fon Pontificat , la vingt-quatrième de ion Epifcopat d'où il :

paroît qu'il conferva le titre d'Evêque de Toul avec celui de


Pape , au moins pendant deux ans.
Concile de XXVI. Il tint à Rome, en 1051 , un Concile après Pà-
^"
losu ^"^5 C ^ ) > o^ '^ excommunia Grégoire Evêque de Verceil ,
coupable d'adultère avec une veuve fiancée à fon oncle. Cette
cenlure avoit été prononcée en l'abfence & à finfçu de l'Evê-
que. Aufli-tôt qu'il en fut informé il vint à Rome , promit fa-
tisfadion & fut rétabli dans fes fonctions. Le Pape fit dans le
même Concile , divers réglemens fur la continence des Clercs
dont un porte , que les femmes qui , dans l'enceinte des murs
de Rome , fe feront proflituées à des Prêtres , deviendront
efclaves du Palais de Latran. Les Evêques mirent ce Décret
en vigueur dans leurs Egliies. La mênt>e année , Léon IX fe
donna pour iucceffeur dans le Siège Epifcopal de Toul (i'),
Udon qui en croit Primicier , & à qui il avoit déjà donné la
charge de Bibliothécaire & de Chancelier de l'Eglifc Romai-
ne. Ce fut en cette qualité qu'Udon dreffa le privilège pour
l'Abbaye de Saint Manfui , dont nous venons de parler ; & la
Bulle pour un Monaflcre de filles fous la Règle de Saint Be-
noît , fitué à BIcurvilb dans le Saintois , de la dépendance de
BalTigny. Il ei\ dit dans cette Bulle (r) , que s'il fe trouve dans
ce Monaftere quelque Religicui'e parente de Rainard Comte
de Toul , Fondateur , qui ait le mérite d'être Abbcfle , on
relèvera à cette dignité i que s'il n'y en a point à Bleurville ,
& qu'il y en aitàRemiremont, on la prendra pour Abl>cflc j
iinon qu'il fera au pouvoir de l'Evêquc de Toul , de mettre

(p) Herman. >n C^ro». «j/ on. 1050. (j) Vila Lion. lib. %, riMm. 8. p. Jx.
(f) Mabillom. lib. f p. Annal, tium. 87. (I) AIabill. LiO, f9. Annal. Hum. 88./>.

n6.
(j-) Tom 9> Conc, f. 1067.
,

5UITE DES PAPES. Ch. XXI. ^4:;


en cette place uneRcligicufe, foit de Blcurville, foit de Rc-
miremont ou de quelque autre Monaftere de fon Diocèfe. On
obfervoit donc encore alors, la Rcgle de Saint Benoît à Re-
mirernont: autrement le Pape n auroit pas ordonné d'y pren-
dre une Abbcfie pour Bleurville , où il veut que la même Règle
foit oblervée à perpétuité. La Bulle efl; de l'an 1 050.
XXVII. En 1052 , le Pape Léon fit un voyage en Aile- ^^^if^Igae'
magne pour moycnncr la paix entre l'Empereur Henri (u) ,601052.
«Se André Roi de Hongrie. Il employa dans cette négocia-

tion , Hugues Abbé de Cluni , qui agit avec fuccès. Etant à


RatiiBonc , il leva du tombeau le corps de faint Wolfgang
Evêque de cette Ville ; 8c celui de laint Erhard. C'éroit une
façon de canonifer en ce tems - là. Il fit un échange avec
l'Empereur (x) , de l'Evêché de Benevcntavcc celui de Bam-
berg , & céda à ce Prince plulicurs Monafleres , pour d'au-
tres qui étoicntcn Italie. Aind l'Evcché de Bamberg& l'Ab-
baye de Fulde , qui julques-là , avoient été de la dépendan-
ce du Saint Siège , furent abandonnés à l'Empereur ; & le
Pape eut Bénevenc dans la Pouille. Ils célébrèrent enfemble
à Vormes la Fête de Noël. Le Pape officia pontificalemenc
à la McOTe mais le lendemain il Ht officier Linpold Archevê-
:

que de Mayencc. Il étoit d'ulage en cette Eglife , de chanter


plulîeurs Leçons à la Mefle ; après la première Oraiion , un
des Diacres de l'Archevêque en chanta une. Le Pape, à la
perl'ualîon de quelques Romains , lui envoya défendre de con-
tinuer. Le Diacre refufa d'obéir; fur quoi le Pape l'ayant fait
venir, le dégrada. Linpold redemanda fon Diacre ; le Pape
ne voulut pas le rendre. L'Archevêque prit patience pour
lors : mais après l'Evangile & l'Offertoire , il s'afTit dans fon
Siège , & protella que ni lui ni autre n'achéveroit l'Office , fi
on ne lui rendoit fon Diacre. Le Pape céda & renvoya le
Diacre revêtu de fes ornemens , & l'Archevêque commença
le Sacrifice , c'efl-à-dire , le Canon de la Mcffc. L'Abbé d'Uf-
perg(y) , qui rapporte cette contcflation , faitremarquerd'un
côté , la fermeté de l'Archevêque à foutcnir fa dignité &: de ;

Tautrc l'humilité du Pape , qui crut devoir céder au Métro-


politain dans fa Province.

(«1 Frf.j Léon, m, 2. ««m. 8. £? Viie(\aa, ioîî.^ Herman. «Ji/. a». lof^.
îhigeiiif. cap. i, \ 'f) Abb, Vfpergenf, in Cbron, ai an,
(x) LlO Oj}ienf. lib. 2, caf. 8 J.PAGI.ai { 105 5. p. 1 jo.
544 SUITE DES P A P E S. Ch. XXT.
Conciles en XXVII. Lc Pape, en retournant à Rome (z) , célébra I
"^'""'"^'-Auitourg, la Fête déjà Purification de l'an 1053 , & la
Quinquagéfime à Mantoue. Il y affembla un Concile ; mais
quelques Evcques qui craignoient qu'il ne leur fût point fa-
vorable (a) , excitèrent un ii grand tumulte , que le Pape for-
tit de cet Ville fans avoir rien fait. Il arriva à Rome pendant

le Carême , & y tint un Concile après Pâques , où il fut dé-


cidé que Grade ou la nouvelle Aquilée {é>) , feroit reconnue
Métropolitaine des deux Provinces de Vénetie & d'illrie , &
que la Jurifdidion de l'Evêque de Frioul feroit renfermée
dans la Lombardie. Après la tenue du Concile , le Pape mar-
cha avec fon armée contre les Normans ( f ) du côté de Bé-
nevent. La bataille fe donna le 18 de Juin. Les Normans
remportèrent la vidoire , prirent le Pape , le conduifirent en
cette Ville , d'où il ne fortit que le douzième de Mars de
l'année fuivante 10Ç4. Le Pape prit foin de la fépulture de
ceux qui avoient été tués dans le combat (d), les fit met- &
tre dans une Eglife ruinée du voifinage. Mais les Normans
eux - mêmes la rebâtirent , y fondèrent un Monaftere , & fe
foumirent à l'Eglife Romaine tant que Léon IX vécut. Wi-
bert fon Hidorien , en donne pour raifon les miracles qui
s'opérèrent fous leurs yeux en cette Ville , depuis qu'on y eût
enterré les foldats morts dans la bataille. Il fait le détail des
exercices de piété que le Pape pratiqua pendant fa détention
à Bcnevent ; & ajoute , qu'encore qu'il fût âgé de plus de cin-
quante ans , il apprit l'Ecriture-fainte en grec peut-être fut- :

il engagé à cette étude par la difpute qui s'éleva en cette


,
année 1053 (e) , entre les Grecs & les Latins , au fujet du
pain azime & du pain fermenté ; l'un en ufage pour le faint
Sacrifice chez les Grecs-, l'autre chez les Latins. Les Grecs,
pour foutenir l'ufage du pain fermenté , répandirent un li-
belle écrit en leur langue , plein de calomnies contre l'Eglife
Romaine. Le Pape & le Cardinal Humbert réfutèrent ce libelle.
Il en fera parlé dans la fuite.

Mort du Pape XXIX. Etant à Bénevent, Léon IX fut attaqué d'une ma-
Lcon IX en ladie dont il prévit qu'il ne reviendroit pas. Il le fit porter à
,

1C54.

(i.) Hfrman. in Cbronk. ad an. lOf J. (f)HFRVAN. inChron. ai a». loçj.


(a) Viia l.eon. lit, i.nnm, i.f.yi. {d) Vh.% Lcoii.lih, t.num. n. /'./f.
(i) Tom, «J. Couc, f, $ji. (f) li>id, num. 9tf»g- Ji'
Rome
,

SUITE DES PAPES. Ch. XXI. 345


Rome en litière Tous ceux avec qui il avoic été en difficul-
té , même les Normans le réconcilièrent avec lui. La veille
,

de mort on le porta par fes ordres à l'Eglifc (/) , où il


ia
pria pendant une heure a voix baffe , pour rÈgiiié , f^our l'E-
tat , pour la convcrlion des fimoniaques ; puis élevant la voix,
ildemanda a Dieu celle de Théophilatle , c'cft-à-dire , de
Beno't IX , de Grégoire & de Pierre, qui avoient établi la
limonic prefque dans tout le monde. A cette prière tous les
affiftans répondirent, Amen, il mourut le 19 d'Avril de l'an
1054 (ixiémc année de ion Pontificat, ayant occupé le
> '^
Saine Siège cinq ans , deux mois neuf jours , félon "Wi- &
bert (^) , à compter depuis le jour de fon intronifation , qui
fe fit le douzième de Février , non depuis la confécration &
qui s'éroit faite le deuxième du même mois. Le Père Pagi
croit qu'au lieu de neuf jours qu'on lit dans "Wibert {h) , il faut
lire iept jours , en quoi il s'autorile de quatre anciens Catalo-
gues des Papes. On rcmarquequece iaint Pape datoit fes Bulles
& fes Lettres des années de llncarnation ; qu'il fut imité &
en cela par Vittor II , Etienne IX , Nicolas II , Grégoire
VII , Alexandre II & Vittor III, les fucceffeurs que les Pa- -,

pes fuivans interrompirent cette manière de dater , jufqu'à


Eugène IV qui la remit en ulage. Léon IX fut enterré a faint
Pierre ( ?) , auprès de l'autel de iaint Grégoire devant la porte
de l'Egliie. Rome le pleura (/), défefpérant de trouver un
Pafteur femblablc à celui qu'elle venoit de perdre. C'eft ce
qu'exprime l'èpitaphe que l'on grava fur fon tombeau, (m). Ses
vertus &
fes miracles l'ont fait mettre au nombre des Saints,
XXX. Auffi-tôt que le libelle des Grecs contre les Latins ^'^'"*''^'-^°"
parut , Humbert Cardinal &
Evoque de Blanche-Selve («) , l'\f,hi['ce!
prit foin de le traduire en latin 8c de le porter au Pape Léon , rularius.
qui en fit la réfutation dans une Lettre adreffée à Michel Ce-
rulirius Patriarche de Conftantinople c'étoit l'Auteur du li- :

belle ; mais Léon Evêque d'Acride y avoir auffi travaillé.


"Wibert parle de cette Lettre dans la vie de Léon IX (o)i &

{f) Anonpn. apiid He/ijihcn, ad ditm IÇ . (I) Vit,y Ltoth ii.b. î^ n. 1 4. ,, ,^ .^ ^^


ApriUs. (w) Vi(Srix Roma dolet nono vîduata
( j ) Vita Leoiiis , num. 14 , liù. 1 , pag. Leone
Ex iiiultis talem-non habitura patreni.
Vac.i ,aJ an. ioî4. ««»«. 4 E^ 5.
(^h) Ibid.
Mabill. de Tt OiflomMic»^ (stf, 2J,
( i) f « ) Tof». 9. Conc. f. 949,
î5 Pagi xd an. 1054, », i
, ( » ) Vilit Lttr), lib, i. n. 9. /». 73.
Tome XX, Xx
546 SUTTE DES PAPES. Ch XXI.
il en efl: fait mention dans Sigebert (p ) qui lui donne le titre ,

delivre,àcaufe de fa longueur: car elle eft diviféeen4i arti-


cles. Ce Pape l'écrivit étanr encore détenu à Bénévent par
les Normans fur la fin de l'an 105 3 : ce qui fe voir par le cin-
âuiéme article, où il compte environ loao ans depuis la mort
u Sauveur. Le Patriarche & l'Evêque d'Acride avoient con-
damné l'Eglife Romaine , parce qu'elle employoit du pain
azime dans la célébration des divins Myfteres. Le Pape leur
demande pourquoi ils ont condamné cette Eglife fans l'avoir
entendue (q) ? Il ajoure qu'ils n'étoient point recevables à vou-
loir lui apprendre la manière dont elle devoit célébrer les
Myfteres , puisqu'on ne pouvoir douter qu'elle ne l'eût appris
Matth. 16. de celui à qui le Fils de Dieu dit : Fous êtes heureux fi/s de ,.

Jonas ,
parce que lefang & la chair ne vous ront point révélé _,*

mais mon Père qui eft dans le Ciel ; que cette Eglife fondée
parfaint Pierre , a réfuté & condamné toutes les hérélies,
même chez les Grecs , & en parti-
celles qui fe font élevées
culier dans l'Eglife de Conftantinople (r) ; qu'il n'appartient
à perfonnc de ]uger l'Eglife Romaine , comme il en fut con-
venu dans le Concile de Nicée {s) ; Qu'elle eft le Chef de tou-
tes les Eglifes , de l'aveu unanime des Evcques du premier
Concile de Conftantinople ; que quoique le pouvoir des clefs
ait été donné à toutes les Eglifes Catholiques , il appartient
fpécialement à celle qui a eu pour Pafteur le. Prince des Apô-
tres. Le Pape dit cnfuite , que l'Empereur Conftantin ne trou-
vant pas raifonable que celui à qui Dieu a donné l'empire du?
Ciel , fut fujet à l'empire de la terre (r) , accorda à faint Sil-
veftre &
à tous fes fucceft'eurs , non-feulement la puiiïance &
k dignité Impériale , mais les ornemens les Officiers con- &
venables à cette dignité. Il apporte en preuve (m) ,. une par-
tie de la donation de Conftantin , que l'on croyoic alors
véritable ; mais que l'on a rejcttée depuis , comme fuppoféc :
puis il relevé toutes les prérogatives accordées par Jcfus-Chrift:
à faine Pierre ( Jf
) ; fes
travaux pour l'étabLITement de l'Eglife y
fes miracles , fon autorité..

{f) SiGEXXHT. d* Striftar, Liclef. tuf. (s) An. 9 ïo.^


149. (») Jirt. II.
(yl Art. (, (m) Art, ijk
( T,) ^1, 7,. L (*) ^"- 1 1- i^.«7' ^
,

SUITE DES PAPES. XXI. Ch. 547


XXXI. On ne pouvoir douter que TEglife Romaine ne
fuivît la dodrine que cet Apôtre y avoic enfeigncc ( s ). La
preuve en croit claire Je rends grâces à Dieu pour vous , di-
:

îbit faint Paul aux Romains, de ce que votre foi e(l annoncée
dans tout le monde. D'où faint Auguftin & fainr Chryfoftomc
ont conclu que la foi des Romains ctoit la même que Ton
prcchoir dans rourcs les Eglifcs de l'univers. AufH cet Apô-
tre ne changea rien dans leur doctrine: il fe conrenra de les
cxhorrer à la pcrfcvérance. Il n'en ufa pas de même envers
les Grecs ; il les reprit fortemcnr d'avoir abandonné la foi
prefque autTi-tôt qu'il la leur avoit prêchce. Par une fuite de
leur inconftance dans la faine dodrine {a) , ils ont fupprimé
le culte des Images, &: donné le nom de Concile général au
Conciliabule de Conftantinople fous Conftantin Copronyme,
où Ton ordonna de les détruire. Mais le Pape Nicolas en prit
la défcnle il s'oppofa à la dépolirion d'Ignace
: à l'intru-&
fion de Phorius. Léon IX dit, qu'il ne veut pas ajouter foi au
bruit public , que l'Eglife de Conflanrinople avoit choifi des
eunuques pour Patriarches , au mépris des Canons de Nicée;
ce qui avoit donné occafion de dire , qe'une femme avoit été
placée fur le Siège de Conflanrinople. Ce crime , ajoure-r-il
i'eroir abominable, que nous ne pouvons le croire. Auroit-il
li

fait cette remarque , fi l'on eût eu inventé dcs-Iors l'hifloirefar


-buleufe de la PapefTe Jeanne ?
XXXII. II l'ait un parallèle entre l'Eglife de Rome celle &
de Conflantinople {b). Celle-là efl la mère : celle-ci eft la
iille. La première avoit déjà fouffert dix pcrfécurions , ren-
-vcrfé l'idolâtrie , oHtert à Dieu des armées de Martyrs , foulç
iiux pieds le Prince du monde &
fon Royaume , îorfque la
féconde cfi: née dans les délices. Comment donc ne rougit-
elle pas de s'arroger la primauté , & de manquer de refped
envers fa mcre , refpeélable par fes cheveux blancs ? Il fait
fouvenir le Patriarche Michel (t) , que c'eft à l'Eglife Ro-
maine qu'il eft redevable de l'honneur de fon Siège , puif-
qu'elle a ordonné en quelques Conciles , que l'Evcque de
Corrftantinople feroit honoré comme l'Evêqu€ de la Ville
Royale , fauve l'ancienne digniré des Sièges principaux &

(t J Art. 20. li. I (b) Art.z^. 14.

Xxij
348 SUITE DES PAPES. Ch. XXT.
Apoftoliques , c'eft- à-dire, d'Alexandrie d'Antioche. Il' &
reproche à ce Patriarche d'avoir fait fermer toutes les Eglifes
des Latins (d) , &
d'avoir ôté les Monaftcres aux Abbés &
aux Moines ,
jufqu'à ce qu'ils vécufTent félon les maximes des
Grecs. Combien l'Eglile Romaine eft-elle plus modérée ? puif-
qu'au dedans &
au dehors de Rome ,' il y a plufieurs Mona-
flercs &
plufieurs Eglifes des Grecs fans qu'on les empêche
de fuivre les traditions de leurs pères. Au contraire, on les
y exhorte ; parce que nous fçavons que la différence des cou-
tumes félon les lieux &
les tems ne nuit point au falut , pourvu

que l'on foit uni par la foi &


la charité (?) , qui nous rend tous
recommandables à Dieu.
XXXI V. Léon donne plufieurs exemples de la préfomp-
tion des Patriarches de Conflantinople {f)'t & iniîftant fur
l'indéfcctibilitéde la foi de l'Eglife Romaine , il répète que
c'eft à fesEvèques , comme fuccefleurs de faint Pierre, qu'ap-
partient le jugement de toute l'Eglife & que le Saint Siège ,

n'efl: jugé de perfonne d'où il infère que Michel & Léon


:

d'Acride , en voulant diminuer l'autorité de ce Siège par


Jeurs reproches , travaillent à renverfer l'édifice de tout le
Chriftianifme (g). Il les exhorte à l'unité, en leur remontrant
que l'honneur de l'Eglife Romaine les intéreflbit autant, que
1-e membre d'un corps cft intcreifé à la confcrvaticn du corps

même. Il marque qu'il leur envoie quelques paffages des Pè-


res {h) , pour réfuter leur écrit contre les azimes , en atten-
dant qu'il y réponde lui-même. Nous ne connoiifons point
cette rJponfe. Il paroît que le Pape en chargea fes Légats.:
car dans fa féconde Lettre à Michel Cerularius (?) , il le ren-
voie à un écrit plus ample, où l'erreur des Grecs touchant le
pain fermenté , étoit réfutée.

Lettre JeLeon XXXIV. La Lettre de Léon TX aux Evêques de Vénctic


IX aux Eve- g^ d'Iftrie, du Concile de Rome en 1053.
contient le réfultat
"^
p"y7i.
'
On y ordonna que ces deux Provinces dépendroient de la Mé-
tropole d'Aquilée , & que l'Evêque de Frioul n'étendroh

->
y) Art. ip. ad Micbael. Cerular. Tom, 9, Cou*. pJig.
(<•) Scit n,-mque quîa nil obfijnt falU-
ti credentium dWerfe pro loco & tcm-
porr ron'iii rtclineç quantfo un:i '^('cs ppr
. r?' Art. ^C;
dih'flionrm oprrans bona qur poteft uni (') Art. 40.
Deo ci-mjijemJat omnes. Léo IX , Efifti (j; Efift. 6. lam. p. Ccik. ^. j8».
SUITE DES PAPES. Ch. XXI. 349
point fes droits au-delà de la Lombardie.
XXXV. 11 rcftoit à peine cinq Lvêqucs en Afrique , fous Lettres aux
'^'^'
la domination des Mululmans Trois de ces Evêques le
f„^'„\""
(/J.
plaignirent au Pape de TEvcque de Gommi , qui s'arrogeoit y
ce iemble, les droits de Métropolitainyati préjudice de TE-

vêque de Carthagc; Ville que Ton ne regardoit plus comme


Capitale, parce que depuis long- tcms elle ctoit tombée en
ruine. Léon IX leur répondit par deux Lettres , dont l'une
cft adreffée à Thomas , que Ton conjedure avoir été Evcque
de Carthage. Il y témoigne fa douleur de voir l'Eglife d'A-
frique réduite à un fi petit nombre d'Evêques_, au lieu qu'on
en avoit vus jufqu'à deux cent cinq dans les anciens Conciles
de Carthage. Enfuite il déclare que la qualité de Métropoli-
tain de toute l'Afrique appartient à lEvcque de cette Ville;
que fans fon confentement l'Evcque de Gommi ne peut, ni
coniacrer , ni dépofcr d'Evêques , ni convoquer le Concile
Provincial ; & que tout fon pouvoir ne pafTe point les bornes
de fon Diocèfe. Le Pape ajoute , qu'à l'égard du Concile
général , on ne peut en tenir fans l'ordre du faint Siège ce :

que vous trouverez, dit-il, dans les faints Canons , (i vous


l'y cherchez. Cette Lettre e(l du dix-ieptiéme de Décembre

1055. La féconde , qui fut apparemment écrire en même-


tems , eft à Pierre & Jean , tous deux Evêques Africains (m).
Le Pape y déclare comme dans la précédente , que l'Eglife
de Carthage aura dans tous les tems , comme elle avoit eu
jufqu'a'ors , le privilège de Métropole , foit que cette Ville
Ibit défcrte , foit qu'elle recouvre fa première fplendeur. Il
rapporte enfuite , comme deux EvêquesJ'avoicnt fouhai-
ces
té , l'établifiTcment des Archevêques & des Métropolitains.
Mais tout ce qu'il en dit efl tiré des fauffes Décrétales des
Papes Clément, Anaclet, Anicct& autres. . ,

XXXVI. Pierre ayant été fait Patriarche d'Antioche, don- Lettre à Piet.-
na avis de fon ordination à Léon IX (n) lui envoya fapro- ff P"'''^',^'^^,.
^'
feiïion de foi , & lui demanda fa communion. Il chargea de "'""^

fa Lettre un Pèlerin de Jérulalem , qui devoit la mettre en


main à Argyre Duc d'Italie pour être rendue au Pape. II
,

en eil parlé dans le fécond Tome des monumens de l'E'^life

( /,) To«M. 9. Coiicp.rni. (ij) Uid, p. 97Ï.


I
550 SUITE DES PAPES. Ch. XXL
Grecque. On voi^par la réponfe du Pape Léon , que Pierre
d'Antioche reconnoiflbit la primauté de l'Eglifc Romaine,
& que c'étoit ce qui l'engageoit à confultcr le laint Siège ,
fuivant en cela Ks décrets des Conciles 6c des Pères , qui
ont ordonné unanimement que les caufes majeures & diffi-
ciles feroient portées à fon Tribunal pour y cti e jugées défi-
nitivement. Le Pape loue Pierre d'Antioche de Ion amour
pour l'unité , & l'exhorte à maintenir lui-même les préroga-
tives de fon Eglife , la troifiéme après celle de Rome , luî
offirant fon fecours contre ceux qui s'efforçoicnt de diminuer
l'ancienne dignité de l' Eglife d'Antioche; c'eft-à-dire, con-
tre Michel Patriarche de Conftantinople , qui s'attribuant le
fécond rang , rejettoit c-onféquemment le Patriarche d'An-
tioche au quatrième. Pierre avoit prié le Pape de lui donner
des raifons de la divifion qui régnoit dans l'Eglife univer-
fellc. Le Pape répond, que par la grâce de Dieu , l'Eglife
Romaine conferve le lien de l'unité ; & que s'il y a quelque
femcnce de fchifme , c'efl: de la part de l'Eglife Grecque. En-
fuite il approuve la promotion de Pierre au Patriarchat d'An-
tioche , en fuppofant qu'elle s'étoit faite conformément aux
faints Canons ; & reconnoit pour Catholique fa profefllon
de foi. 11 met la fienne , félon qu'il étoit d'ufage; marquant
fur l'article du Saint - Efprit , qu'il procède du Père & du
Fils. 11 dit fur la prédcftination , que Dieu ne prédcfline que
les biens , mais qu'il prévoit les biens & les maux , que fa
grâce prévient & fuit l'homme , fans détruire fon libre-ar-
bitre ; que l'ame eft créée de rien , & coupable du péché ori- i
ginelle , tant qu'elle n'a point été purifiée par le Batême. Il
approuve les fept premiers Conciles généraux , & ne dit rien
du huitième, peut-être parce qu'on n'y décida aucun point
de dodrine.
i^ttreàMi- XXXVI. Au mois de Janvier de Pan 1054 (0) , le Pape
chel Ctrula-
p^voya à Conftantinople trois Légats, Humbert Cardinal 8c
chJ de conf- Evêquc dc Blanchc- Sclve ou Sainte Rufene , Pierre Arche-
tantinoplc. vêque d'Amalfi , & Frideric Diacre & Chancelier dc l'Egli-
fe R omaine , frère de Godefroi Duc de Lorraine , & parent
dc l'Empereur Henri. Il les chargea dc deux Lettres, l'une
pour l'Empereur Conftantin Monomaque , l'autre pour Mi-

(0) lUd.fitg. 97 1,
,

SUITE DES:PAPES. Ch. XXI. 3ÇI


chel Cerularius Patriarche de Conftantinople ; l'une l'au- &
tre en rcponfes de celles au'il avoit reçues d'eux. Le Patriar-
che avoit témoigné dans la Tienne un grand delir de la réu-
nion des Eglifes. Le Pape l'en congratule , & témoigne qu'il
ne la fouhaicoit pas moins mais il ne lui didimulc point les
:

bruits fâcheux que l'on répandoit fur fon compte. On dit que
vous êtes Néophyte i que vous n'êtes pas monté par dégrés
à l'Epifcopat; que vous voulez foumettre à votre domination
les Patriarches d'Alexandrie & d'Antioche , & les priver des
anciens privilèges de leurs dignités ; que par une uiurpation
facrilege , vous prenez le titre de Patriarche univerfel , que
faint Pierre ni aucun de les fuccefTeurs n'a voulu prendre
quoique le Concile de Calcédoine eût ordonné qu'on le don-
neroit à faint Léon 8c aux Papes fuivans. Mais qui ne s'é-
tonnera , ajoute le Pape, qu'après des Saints Si. des Pcrcs or-
thodoxes pendant raille vingt ans depuis la Palïion du Sau-
veur , vous vous foyez aviié de calomnier l'Eglife des La^
tins , anathématifant & perfécutanc publiquement tous ceux
qui participent aux Sacremens faits avec des azymes ? Nous
avons connu votre entreprife par le bruit commun , & par
la Lettre écrite en votre nom aux Evêques de Pouille , où
Fon prétend prouver que notre Seigneur inftitua avec du pain
levé le Sacrement de fon Corps qu'il donna à fes Aporres :
ce qui fe trouve réfuté par l'au'orité de l'Ecriture , qui dé-
fendoit aux Juifs , fous peine de mort , d'avoir dans leurs
maifons du pain levé pendant les huit jours de la Pâques.
Efl-il à prélumer que Jefus-Chriil ou fes Difciplcs aient pré-
variqué en ce point ? Léon IX ne répond point aux autres ca-
lomnîes répandues dans le libelle du Patriarche de Conflan-
tinople ; parce qu'il l'avoir fait dans un écrit particulier , dont
Il avoit chargé fes Légats , &où il réfutoit auffi plus au long
l'erreur des Grecs touchant le pain fermenté.
XXXVII. Dans la Lettre à l'Empereur Monomaque, le Lettre à l'Em-
Pape le loue de fon zélé pour le rétabliflement de la paix p"^.""" .S°"^'
n / tantin Mono-
entre les Grecs & les Latins [p). 11 rapporte en abrège cemaque.
1 /". IT •
\ Ti I / /

qu'il avoit fait lui-même , pour aélivrer les Eglifes de Dieu


de la perfécution des Normans; la confijrcnce qu'il avoit eue
avec le Due Argyre fur la manière de les réduire , non en les

{f) UiJ, pug. ;>8i.


,,

352 SUITE DES PAPES. Ch. XXI.


failant mourir , mais en les ramenant au devoir par la crain-
te des hommes , & la réfolucion ou il étoi: de chalTcr ces bar-
bares avec le fecours de l'Kmpereur Henri le (ien , c'eft- &
^
à-dire, de Conftantin. Ceft alors, lui dit-il, que combat-
tant iinguliérement pour la caufe de Dieu , vous ferez fur-
nommé devant lui Monomaque , comme vous Têtes déjà de-
vant les hommes. Il fc plaint des entreprifjss do Michel Ce-
rularius contre les Latins & contre les Patriatches d'Alexan-
drie & d'Antiochc ; prie Conftantin de rendreàTEglifc Ro-
maine fes patrimoines (Itués dans les lieux dcpcndans de fon
Empire , &
lui recommande fes Légats.
Lettres
^^^vequei aux
ta
XXXVIII. Le Pape ayant été informé que les Abbés &
j^^ Moines d'Italie (q) , follicitoient les Fidèles de leur faire
donation de leurs biens , foit de leur vivant , foit à la mort
apporta le remède à cet abus , en défendant à ceux qui en-
treroient dans les Monafteres par un motif de converlion ,
de donner à ce Monaftcre au-delà de la moitié de leurs biens
voulant qu'ils réfervaffent l'autre moitié à l'Eglife où ils a-
voient reçu le faint Batcme , la Pénitence , l'Euchariflic &
les inflruclions du falut. Il adrcfla ce décret à tous les Evc-
qucs d'Italie , pour le faire obferver chacun dans leur Dio-
ccle. Il rcgnoit un autre abus dans celui d'OiTimo. Apres la

mort de l'Evcque , le peuple entroic à main armée dans fa


rnaifon , pilioit tous fes biens , brûloit les maiions de campa-
gne , coupoit les vignes &
les arbres, fc conduifant en tout
cela avec une fureur qui furpaflbit celle des animaux. Le
Pape en écrivit au Clergé & au peuple de cette Ville à qui _,

il reprélente que fi l'Evêque dernier mort avoit otfenfé quel-

qu'un pendant fa vie , on ne devoit pas s'en venger fur Jefus-


Chrill, à qui l'EgUfe d'Offimo étoit demeurée en garde ; ni
fur le patrimoine de l'Eglife , d'où les pauvres tirent leur fub-
fiflance. Il défend à l'avenir de Icmblables excès fous peine
d'excommunication &
d'anathême. Il paroît que l'Evêque,
dont mort donna occalion à ce brigandage , étoit le même
la

,,qui vivoit dans le défordrc fous le Pontificat de Clément II,


àjqiii faint Pierre Damicnfc plaignoit qu'on laillàt fes crimes
'.
iffî'punis(/^). •

(5) Jkid.p»gi9Z'i ^ 9ii. I (7) Petr.Damiam. lit. t- Epift. Efifl.


^
I3. Il

XXXIX
SUITE DES PAPES. Ch. XXI. 353
XXXIX. Après que Lcon IX eut fait en 1049 (5) , la Litres aux
Dédicace de rEglilc de Saine Kemi , & fait la Tranflacion *•«

^'f^^^
de Ils Kcli ues , il ordonna par une Lettre ou Bulle adreiTée
à tous les FidcL'S du Royaume de France, de folemniier la
Fête de ce Saint le prcmi. r jour d'Gdobre ^ dilant qu'encore
qu'il ne fut pas Apotrc à l'égard des autres Nations, il i'ctoit
pour les François.
XL. On a de ce faint Pape une autre Bulle (f ) , où s'a- Bulle pour ,

'^* '
drcflant à laint Pierre , il lui donne, c'eft-à-dire à l'Eglife
fj^^^^
de Ion nom
, dixme des oblations que l'on y ofFroit iur
la
l'auc 1, pour être employée aux ré^'arations & à la décoration
de cette glile les orncmcns , les vafes & les vêtcmens des
F' ;

JVIiniftrcs; de même que toutes les offrandes de la veille & du


jour de la Fétc de cet Apctrc.
XLL En 05 1 , la troiiiéme année de fon Pontificat (u) ,
1 ^ J"" ^^

il continua par une Bulle, toutes les donations faites à l'E-

gliié de v^ale ne ,& à Jean qui en étoit Archevêque , le droit


de Métropolicain , en dénommant les Fglifes dépendantes de
{a Métropole.
XLII. dans une Eul'c adreffée au Roi de Fran-
Il eft dit Bulle tou-

cc & , fous le nnm de Léon IX , qu'étant à


à les iujc(S (x) '^^'"'i)."
'^]''

Kafifconne , les Moines de Saint Emmeran lui firent voir nis l'Ariopa-
d. s re i^ues qu'ils difoient être de laint Denis l'Aréopagite, g'te.

& premier Evêque de Paris , prétendant qu'elles leur avoient


été dcnnées par l'empereur Arnoul ; qu'ils prièrent le Pape
de vérifier leurs prétentions & qu'ayant examiné ioigneule- ;

menrces reliques , les châffes où elles étoi nr coniervées, les


titres que les Moines produiloient , les Diplômes des Empe-
reurs & des Papes , en prelence & à la prière des Ambafi"a-
deurs du Roi de France ; il déclara que ces reliques étoicnt
celles de laint Denis, & par cette décilion termina la que-
flion agitée" depuis fi Icng tems entre les François & les ha-
hitans de Rarifbonne , cjui te vantoicnt les uns & les autres
d'être en po- cffi-cn des reliques de faint Denis l'Aréopagite.
La Bulle cft du feptién c Octobre 1052 (v) rnais elle porte :

avec loi des caradcics évidens de fuppoficion. On n'y rcccn-

(i) Tom. 9. Couc. p,i^, ji8j. £5 p.t^ Cx) ]hiii.pag 0^9.


,ÏC44. {j) ;\1a SILLON, lib, 6o. Annal, ». 21. /i.

(t) P.T/f 9S;.


(«^ P.i.'.9«X.
Tome XX, Yy
554 SUITE DES PAPES. Ch. XXI.
noît ni de Léon IX , ni le ftylc ordinaire des BuTTes.
le ftyle
Ce qu'on y avance que depuis long-tems on difputoit fur le
lieu où étoient les reliques de faine Denis , fi c'étoit à Ratif-
bonne ou en France , n'efl: attelle par aucun Hiflorien. On
ne fait ce que c'eft que les Diplômes ou Lettres Impériales
ou Papales alléguées pour afl'urer à TAbbaye de Saint Em-
meran les reliques de ce Martyr. Perionne ne fe vante de les
avoir vues: les termes latins à'/ilewann. 8c à' AUmnnma \)0\Jit
défigner les Bavarois &
la Bavière , font d'un fiécle pofté-
rieur à celui de faint Léon IX. Enfin , ce qu'on fait dire à
ce Pape pour confoler Henri Roi de France , de n'avoir plus
dans fes Etats les reliques de faint Denis , n'eft pas même
fenfé. On convient toutefois que pendant le féjour de Léon
IX à Ratifbonne (z) , il fut queflion du corps de faint De-
nis , &
que les Moines de faint Emmeran lui en préfcnte-
rcnt un qu'ils prétendoient , par je ne fais quels titres , être
celui de l'Aréopagite. Les Annales de Saxe rapportent ce
fait & il efl confirmé par les mouvemens que le Roi Henri
:

fe donna quelque rems après, pour renverfer les prétentions


des Moines de ce Monaflere. Il affcmbla au mois de Janvier
1053 {a), dans l'Abbaye de Saint Denis , un Concile d'E-
vêques & d'Abbés on ouvrit en leur préfence la châffe où
:

étoienc les reliques de ce Martyr & de fes deux compagnons;


on les fit voir à tout le peuple, & on les expofa publiquement
pendant quinze jours.
LettreauDuc XLIII. Léon IX, dans fa Lettre au Duc de Bretagne,
retagne.
^^ Comte Anale & aux autres grands Seigneurs du pays (i),
leur notifie la fentence d'excommunication qu'il avoit pro-
noncée contre les Evcqucs Bretons , non-feulement à caufe
3u'ils pcrfilloienr à ne pas vouloir reconnoître l'Archevêque
e Tours pour , comme le Pape Nicolas
leur Métropolitain
I & fes fuccefléurs l'avoient ordonné , mais parce qu'étant
accufés de fimonie, ils n'avoient pas comparu au Concile de
Rome , fclon l'ordre qu1U en avoient reçu dans celui de
Reims en 1045;. Le Pape leur enjoint de ib trouver à celui
qu'il avoit indiqué à Verccil pour le premier de Septembre de
l'année fuivante , c'efl-à-dire , de l'an 105 1 : car cette Lctt c
eft de l'an 1050,

(^) Mabiilon. J*>i/..o. 5-54. iDi'CH. fom. 4.f>. IJ7,


(a) Uetn. tib, to, nutn. 34. p. (0 ^*"'- P- ^9}-
f j8. î5 \
SUITE DES PAPES. Ch. XXI. 355
XLIV. Edouard Roi d'Angleterre, avoit fait vœu d'aller LettreauRoi
Edouard.
à Rome (c) ne le crouvan pas en état de Taccomplir
: y , il

cn\oya des Députes demander au Pape la difpenlc de ce


VŒU. Léon IX , de l'avis du Concile qu'il tenoit lors de l'ar-
rivée des Députés , accorda la difpenfe , en ordonnant à ce
Prince pour pénitence , de diflribuer aux pauvres ce qu'il
avoit préparé pour la dépenfe de ce voyage , & de fonder ou
réparer un Monaftcre en Thonneur de faint Pierre. Nous
confirmons dès-à-préfent , ajoute le Pape , toutes les dona-
tions & privilèges que vous lui accorderez , & nous voulons
qu'il ne loit fournis à aucune puiiïance laïque qu'à la Royale.
Edouard , en exécution de la Lettre de Léon IX , rétablit
Tancicn Monalîere de Saint Pierre près de Londres , nommé
Oueftminfter ou Monaflere d'Occident.
XLV. Dans le Concile tenu à Rome , la féconde femalne Lettre à Jean

d'après Pâques l'an 1045) (d) ,on examina foigneufemenc


les raifons de la tranflation de Jean Evcque de Tofcanelle ,
au Siège de Porto ayant été trouvées bonnes , Léon IX ap-
;

prouva cette tranOation comme utile & même néccflaire ;


confirma à Jean & à fes fucceffeurs tous les biens de l'Egli-
fe de Porto , nommément Tlfle de Saint Barthelemi à Rome ,
que l'Evêque de Sainte Sabine lui difputoit , & le maintint
dans le droit de faire toutes les fondions Epifcopalcs au-delà
du Tibre. Ce qui prouve que le Diocèfe de Rome ne s'éten-
<ioit pas au-delà de la Ville. La Lettre que le Pape lui écrivit
fur ce fujet , ell: datée du vingt - deuxième d'Avril 1049,
& fignée de quinze Evêqucs , dont les deux premiers lont
Ëberhard Archevêque de Trêves , & Halinard Archevêque
de Lyon.
XLVI. On a mis à la fuite des Lettres de ce faint Pape , ?jf J^'^LeSe
dans la CoUedion des Conciles ( e) , plufieurs) Bulles en fa- à faint Pierre
veur de divers Monafteres , de Cluni , de Corbie , de Sainte d
Sophie à Benevent , & du Monaftere de Saint Pierre Da-
micn. Il avoit adreffé à Léon IX , un Traité contre les Clercs
impudiques , pour avoir fa décifion fur certains cas , qu'il
cxpole en détail. Le Pape loua fon zèle & fon Ouvrage ; mais
quoiqu'il convînt que les quatre degrés de péché marqués

Yyii
356 SUITE DES PAPES. Ch.XXL
dans cet Ecrit , méritaffcnt la dépofition fuivant la rigueur

des '^anons , il crut devoir ufer de clémence , & ne pronon-


ça cette fentence que contre les Clercs les plus coupables»
M. Balufe a fait imprimer la Bulle de Léon IX (/) , pour
la fondation de l'Abbaye de laChaife-Dieu. Il y en a deux
pour l'Eglife de Bamberg dans le recueil de M. Eccard (g) ;
quatre dans le premier Tome des Anecdotes de Dom Mar-
tenne (h) , la première pour le Chapitre de Saint Dié en Vô-
ges , par laquelle il permet aux Chanoines de s'adreffer à
quel Evcque ils voudront pour les Ordres la bénédiction &
des autels. Il leur accorde aufll la liberté de fe choilir un
Prévôt ; la féconde , pour l'Abbaye de Saint Fabien & de
Sainte Félicité en Alface , nommée Elion , où il avoit fait la
tranflation du corps de fainte Richarde , Fondatrice de ce
Monaftere ; la troifiéme , pour l'Abbaye de Saint Victor de
Marfeille ; la quatrième, pour celle de HefTe aux pieds des
montagnes de Vôges. Cet Editeur rapporte dans le même
Tome (2) une Lettre du Clergé du peuple de la Ville de &
Nantes au Pape Léon IX , vers l'an 1050. Il avoit dépolé ,
pour caufe de Simonie , dans le Concile de Reims , Pudicus
Evêque de Nantes , &
envoyé à fa place un homme indigne
de l'Epifcopat , mais qu'il ne connoiflbit que fur de faux
rapports. Il fe conduilit fi mal ,
qu'il mécontenta tout le Dio-
Le Clergé & le peuple
cèfe. prirent donc le parti de de-
mander un autre Evcque, en fuppliant le Pape d'en remet-
tre l'élection aux Evêques de la Province , à qui clic appar-
tenoit félon les Canons. On trouvera d'autres Bulles du mè-.
me Pape , dans les Recueils de Dom d'Achcri ^ de Dom
JVlabillon , dans l'Italie facrée d'CIghelli , dans les pièces ju-
ftificatives de l'Hiftoire de Lorraine de Dom Calmet , &
dans l'Appendice du quatrième Tome des Annales de l'Ordre
de Saint Benoit (/). Des (ix Bulles qui y font rapportées , il
n'y a que. celle pour Brunon Abbé de Monticr-cn-Der (;k) ,
qui foit datée des années de l'Incarnation. Ce qui fait voir
qu'il n'employoit pas toujours la date de l'ère vulgaire. Cela
fe voit encore par deux Bulles en faveur de l'Eglile de Ban>

(/)Baluz. iriAppend.ad Lupifervali


fip-p- ^14-
(^) lum. z. f. 90. {m) Pa^. 741.
SUITE DES PAPES. Ch. XXT. 357
berg. 11 n'y a que la fccondc qui foit datée des années de
l'Incarnation , quoiqu'elles foicnt Tune l'autre d'un même &
fccrctaire. On les trouve dans le fécond Tome des Ecrivains
du moyen âge par M. Kccard («),
XLVII. Sa Lettre a Guillaume; Comte de Ncvers (0), ^ft^ ^^^^^^^^^^
datée de la féconde année de fon Pontificat indiîtion troi- NkernoisJ
fiémc , c'eft-à-dire , de l'an 1050, le premier jour de Mai.
Le Pape le menace d'excommunication , fi dans un terme
préfix il ne l'Abbé & aux Moines de Moncicren-
rellirue à
Der les biens qu'il leur avoir enlevés. Il efl dit dans la même
Lettre ,
que Léon IX avoir béni le même jour dans la Cha-
pelle de Latran, cet Abbé, &, qu'il lui donné fon nom
avoir
en le béniffant. L'Abbé Brunon fe nommoit auparavant
"Wandelgere , comme on le voit par un Traité fait entre lui 6c
le Comte Rodulfe.
XLVIII. On voit dans îa généalogie des Comtes de Flan-
Partjculamés

dres, imprimée au troifiéme Tome des Anecdotes de Dom jeLéonixT


Martenne (p) , que le Comte Baudouin furnommé le Bon ,
ayant épouie la Comtefic Richilde, qui étoit ià parente , In-
gelbert Evêque de Cambrai , les excommunia pour avoir
contratlé un maringc inceftucux ; & que le Pape Léon , on-
cle de la Comtefle , leva cette ccnfure , à condition que lans
fe féparer , ils vivroienr dans le célibat. Il cfl dit dans la
même généalogie , que ce faint Pape étant au Concile de
Reims, un certain Evêque fut accufé de fimonie ; & que ne
pouvant prouver fon innocence, on lui ordonna de réciter
la doxologie toute entière mais qu'il ne pur dire que Gloria
;

Patri &Filio fans pouvoir ajouter ,


, Spiritui S ^nElo. L'A- &
nonyme qui a écrit l'Hifloire de l'Abbaye de Saint Hubert
en Àrdenne, vers l'an 1 107 , raconte comme témoin ocu-
laire , la déprédation des meubles précieux de ce Monaftere,
tant en vafes d'or & d'argent , qu'en ornemcns & en livres,
donnés à Saint Hubert pari' Kmpcreur Louis -le- Débonnaire,
& par l'Fvêquc Gualcand. Il y avoir entre ces livr s , un
pieautier écrit en lettres d'or avec l'image de ce Prince au
commencement. Ce Pfea'.'ticr Rt \endu dans la Ville de
Toul. La mère de Léon IX l'acheta , & le doi.na à i. u 'ù\s

(«) Pi».». 90. rf pi. [/-.y 17.


( 0) IVlABILLOii. fOWl. 4. J<(W"J<.,«;, «Oi .^. ,(^J . 1'
358 SUITE DES PAPES. Ch. XXI.
encore jeune pour y apprendre les Pfeaumes: mais il arriva
que It s lifant facilement dans un autre exemplaire moins pré-
cieux , il étoit fouvent arrêté dans celui-ci ; ce qui l'en dé-
goûta. Cependant le bruit fe répandit que ce Pleautier ap-
partenoit à l'Abbaye de Saint Hubert , & que l'on avoir pu-
blic des anathêmes en divers endroits contre les détenteurs.
AufTi-tôt cette pieufe Dame le rapporta elle-même au Mona-
flere , menant avec elle ion fils. Elle demanda rabfolution
de cette faute qu'elle n'avoit commife que par ignorance , &
offrit en fatisfatlion un livre des Sacremens qui fut depuis .',

donné à une Eglife de la dépendance de Saint Hubert. Hel-


vide , c'étoit le nom de la mère de Léon IX , craignant les
fuites de la guerre entre l'Empereur Henri & Thierri Evê-
que de Metz , fe retira vers l'an 1012 , dans l'Abbaye de
Moyenmoutier {q) , comme dans un afyle affuré. Elle mou-
rut laintement en 10^6 (r), la huitième année du régime
de l'Abbé Lambert. Circonftance remarquée par l'Hiftorien
de Moyenmoutier , qui donne quelque lieu de croire qu'elle
y finit fes jours. Il remarque encore ( ^ ) , que Brunon étant
Evêque de Toul , fut médiateur de la paix entre l'Empereur
Conrad & Robert Roi de France , en 1038 ; qu'en 1043 ,
il acheva le Monaftere de Pouffai commencé par fon pré-

déccffcur ; qu'il y mit des Religieufes , à qui il donna pour


Abbcffc Berhenna. C'eft aujourd'hui un Chapitre de Cha-
noineffes à une demie lieue de la Ville de Mircourt en Lor-
raine.
Difcoursde XLIX. Les Chanoincs de Saint Martin de Louvain(f),
Léon IX. imprimer en cette Ville quelques difcours
firent l'an 15^5 j

de Léon IX, avec fes Epîtres décrétales & familières. Surius


les remit fous prcffe à Cologne en i 568 , à la fuite des Ou-
vrages de faint Léon. On en fit une troiliémc édition à An-
vers en 1583. Dom Rivet en avoir vu une de l'an 1548 , à
Cologne («) , on trouve fous le nom du Pape faint Léon I ,
un Traité intitulé Combat des vices <ÙX des vertus. Nous a-
:

vons remarqué ailleurs (x) , que le Traité fe lifoit à la fin

(j) Hiflor. Médian. Monafl.f. 134. totn. 4. p. 75/.


(r) Ibii.fag. 236 t^ 245. («) Hifi. litttr. de France , nm, 7, f«g»
(j) Ibid. fag.i]-i. 116. 470.
(t) Fab&ic. Biblm. Latin, J^idii *yi.
SUITE DES PAPES. Ch. XXL 35^
des Œuvres de ce faine Dodeur , de l'édition de Paris en
1
5
1 1 , & quil ne pouvoit être de lui ,
puirqu'il y fait men-
tion de la Règle de Saint Benoît. On le lit encore dans les
éditions de Pierre Canilius à Cologne en 154<^ & 1547.
Mais ce Traité cfl-il de Léon IX? On n'en donne que de
foibks conjcdlures. A
l'égard de fes Difcours, nous ne con-
noiffons que ceux qu'il Ht en divers Conciles , qui font &
partie des ades de ces Aflembices ; nous ne favons fi ce &
font les mêmes qui ont été publiés par les Chanoines de Saint
Martin de Louvain,dont nous n'avons pas vu l'édition. 11
y en a un dans la Chronique d'Hirfaug dans les Annales &
de Baronius {y). Voici quelle en fut l'occafion. Léon IX
étant en Allemagne l'an 1049 > logea chez le Comte Adel-
bcrt fon neveu. Ils allèrent enfemble fur une montagne du
voilinage , d'où le Pape découvrit un endroit qui lui paroif-
foir propre pour un Monafterc. 11 s'en expliqua avec le Com-
te , de qui il apprit que fes ancêtres y en avoient fondé un
en l'honneur de faint Aurele ; &
que depuis , les Moines s'é-
tant relâchés , le Monaftere étoit tombé en ruine. Le Pape
\ lui demanda ce qu'on avoir fait des biens qui en dépen-
doient Seigneur ne put ou ne voulut lui donner là-
; 8c ce
deflus des éclairciflemens : mais Léon IX s'étant informé au-
près d'un Clerc fort âgé , & qui avoir vu les Moines de Saine
Aurele dans leur ferveur , apprit de lui que l'ayeul du Com-
te Adelbert avoir , par un motif d'avarice , détruit le Mo-
naftere &
ufurpé tous les biens ; &
que dans i'incurfion des
Normans , l'Abbé a voit caché fous terre le corps de faint
Aurele. A
force de chercher on le découvrit 5 il fortit du &
tombeau une odeur très-agréable les offcmens étoient enve-
:

loppés d'une étoffe de foie , avec une infcription en ces ter-


mes : Le corps defaint Aurele , Evêque du tems du Roi Arnoul,
a été mis icijous fyjhhé Harderade. Le Pape l'ayant lue , dit :
Malheur à ceux qui ont réduit en folitudece lieu fancliHé par
la préfence corporelle & les mérites d'un fi grand Prélat t
puis faifant fermer le tombeau , il s'adreflà au Comte fon
neveu &
à Wiltride fa femme , en préience de quelques Car-
dinaux , &
leur fit un difcours fur l'énormité du crime que

C^ ) Trithim. Chron. Hirfaug. tom, i.p. iSp. i;^ BarOn. ad an. 104s. i:ftm, zr
3^0 SUITE DES PAPES. Ch. XXL
fon aycul avoir commis en détruifanc ce Monaftere , en &
s'en appropriant les biens. Il lui ordonrui de le rétablir au
plutôt, d'y remettre la Communauté co nme elle étoit autre-
Ibis , &
de rellituer ce qu'on lui avoir enlevé. Le Comte A-
ëelbert touché de ce dilcours , fe jetta à genoux & les Jarrr.es
aux yeux , confeflfa fon pécaé , promettant de mettre toutes
chofe-i en état. A
cette condition le Pape lui accorda le pardon
de ia faute

RénblifTmèt L. Il n'étoit qu'Evêque de Toul , iorfqu'il rétablit l'Ab-


de l'Ab'riye biyc de Saint Evre à 1 oui ( z ). Les bâtimcns en tomboient
^"^ ^ ^^ vcrullé, & v'our avoir été incendiés une ou deux fois. La
Toul*
difcipline régulière en f'utirit beaucoup. L'Evêque Berthold
voulant la remettre en vigueur , fe iérvit du miniftere de
Guillaume Abbé de Saint Bénigne de Dijon. L'entre. >rife
trouva d'abord des concradicleurs ; mais ils changèrent en-
fdite de fencimens. Le bon ordie fut rétabli ; les Fidèles con-
tribuèrent de leur argent aux réparations du Monaftere; les
Bourgeois de la Ville y travaillèrent de leurs miins ; l'Em-
pertur Conrad fit préient de quinze livres d'argent & de
cinq onces d'or ; Thierri Evêque de Mets , les Abbés de
Saint Vanne , de Stavelo , de Metz , de Gorze , de Moyen-
mcuticr , firent aufli leurs largelTes ; en quoi ils furent im tés
de pluficurs perfonnes de la première condition. L'Kvêque
Brunon fuccelf'ur de Berthold, acheva fon ouvrage; & pour
laiifer à la poftérité un monument (^e la piété de;. Fi iélesd'a-
lors , il mit par écrit ce que chacun do na à l'Abbaye de S.
Evre foit en or , foit en argent , ioit en ornement , ioit en
,

denrées. L'a£te de ces donations qu'on rapporte à l'aji 1030 ,


fe trouve dans la Diplomatique de Dom Mabillon.
Ouvfagesde Ll. On rapporte auffi au tems que Brunon é oit Evêque
L'on IX en
de Toul ( ^) . Ics F épons qu'il compofa pour l'Ortice de plu-
ficurs Saints , entre autres, de iint C)riac^uc Maityr, de 1

faint Hydulphe Archevêque de Trêves , de iainte Odile


vierge & de fiint Grcgoire-le-Grand , Apotu- des Anglais.
Comme il étdit habile Mudcien , il les nota. L'Hilloire des
fuccefleurs de fain- Hydulphe dans l'Ab viye de MoyeniTnu-
tier (t) , attribue ce Répons au Moine Hum>->ert , depuis

(t) Mabiil. Diplo-n.it.j). f8i. C) lliflor. hUdi.w. A.'oni/Î. cap. fo. p.


I
(.1) LfON. Vita, Jeni. p, Aiior. iiitm, i j. j
144.
,61, lib, I. I
Cardinal
1

SUITE DES PAPES. Ch. XXI. 3^1».


Cardinal, Brùpon.pour k^-nd^^"
&: ajouta qu'il les donfna-â
ter;c'cft le fentiment deDom BGlhômmei(<5'). On chant^
encore ces Répons dans .cette 'Abbaye , le joui'- de la l^-êt« dei^
faint Hydulphe , en la manière qu'ils -ont-cté'notés par TE-'
ycque Brunon , le chant en efl: trcs-mélodieux-. On dit qu'il
Qota aufll rOflicc dé faint Nicolas ((^) , l'hymne GioHàiii'-
& quelques antiennes que depuis qu'il fut
e^xce/Jis.f ;
fait- PapÈ','-?.

il.compola & npta,, étant à Metz (e) des Répons pour rôf-'. ,

lïcq de faint Gorgon Martyr-, à l'Abbaye de Sigifroi -Abbe^


de Gorze. - -
'•• •
*•

LU. A l'égard de l'Hiftoire de faint Hydalphe& de fes^Ouvrag^e^qui


''^*
fucc.efleurs dans l'Abbaye, elle n'efl: point de Léon IX com-^'ibué.' ^
rae quelques-uns l'ont avancé (/) , mais de -Valcande'Moi^'î
ne de ce Monallere. Nous en avons rapporté les preuves {o)ijt
Léon IX^ écrivoic avec force avec politeffe 5 mais il n'é^* &
toit jamais éloquent , que dans fcs invectives contre lesvî- -
CCS & les défordres du Clergé. Ses difcours dans le Concile
de ReimSj.firenttrcDablerceuxmcmes.qui ne.fecroioicntpas>
coupables de llmonic ; en forte que plufieurs fongercnt à quit--
ter dès Béné/ices qu'ils a voient obteniaspar des cvoies illégi- ~ »

times (Ji). Il parut dans le monde comme une nouvelle lu- '''

miere qui éclaira toute la France (z) menant la vie des Apô- :

tres., il en, imita le zélé par fon application à inftruire les peu*
pjes, & à leur envoyer des Miniftrespour leur apprendre quel-:
lesfoptles voies qui conduilcnt à Dieu (/). . ..,.,.,
:
, v ie. de ce faint Pape fut écrite par 'Wibcrt' Ar- W"''"' Au-
LUI. La .*

c^iidiacre de l'Eglife de Toul. Il ne s'étoit d'abord pro-ilçL^g^iix^^


pofé que de rapporter ce qu'il avoir. fait, avant de monter-
fur la iChaire de Saint Pierre , lailfant aux RoJiiains. le foin,
d'écrire rhifloir<; de fon Pontificat : mais il, changea de fen-.
riment , 8c conduidt fa narration, jufqu à la mort de Léon IX, .

ce. qui, lui donna occaGon de diviier (on Oui^rage,en. deux .

livres. Il montre parrtout, beaucoup de bonnefciyne's'arrê-


tant ordinairement qu'atix faits dont il a voit été témoin , ou
Cpj'il croyoit favoir fûrement. Il efl exaél dans les dates j &
=-'u^vv !i )• / Vi , '.fn-jii 3iii-,i J:;'>iJ iK>Vb h iwi.;i,' :jJ -J . , i
X.

(£) I^ iJ. in nclis, C?) ^'ofex. t'arthle de Valcan-de,


(d) Pei. /ow, I. Anecdot. fart, i» f/tg-' '
(A) MâfiUiON. Oifttvttt. in vit. Léon,
)ï4m <-^-- ; .... V- •
.
..\-ï ( •

(f) fit.» Ifo». lib. z. n.^.p. 70. £ (J) Victor. Po^iUr. »i»V.
Cf) M.ARTFK. toiti. 3. Anecd.f. lofj. (/.) T»rw. ?. /W«j. Mabtl. p. 47.

Tome XX. Zz
,

3^2 SUITE DES PAPES. Ch. XXI.


s'il trouve quelques fautes à cet égard , elles peuvent venir
fe
de la part des copifles : du moins ne font-elles pas de con-
féquence. Il n'acheva fon Ouvrage qu'après la mort du Pape
Etienne IX , arrivée le 29 de Mars 1058. Le Père Sirmond
le fit imprimer à Paris chez Nivelle en i6i 5 , avec la vie de
faint Charles Comte de Flandres &
François Duchefne ,
*,

parmi les preuves de fon Hiftoire des Cardinaux François y


à- Paris en 1660. Les Bollandiftes l'ont rapporté dans leur

CoUedlion au 1 9 d'Avril ; Dora Mabillon , dans le neuvième


Tome des A£les de l'Ordre de Saint Benoîc ; M. Mura— &
tori , dans le troifiéme Tome des Ecrivains d'Italie. Il eft fui-
vi dans la plupart de ces éditions de l'Ecrit anonyme fur la
mort de Léon IX (m). L'Auteur qui étoit contempo-
laint
rain , en détaille exaûement les circonflances , auxquelles il
ajoute quelques miracles qui arrivèrent aulli-tôt après. Le
répandu , les Beneventins bâtirent une Egli-
bruit s'en étant
fe en fon honneur , & folemniferent fa Fête. Le jour même
des malades furent guéris miraculeufement dans la nouvelle
Eglife.
Anfeimefelt LIV. Il ne faut pas oublier entre les Hiftoriens de Léon
ritineraire du IX , Anfelme Moine de Saint Rémi de Reims. Son Ouvra-
PapeLeonix.
gç eft d'autant plus intéreflant , qu'on y trouve non -feule-
ment ce qui fe paffa à la Dédicace de l'Eglife de Saint Rémi
mais les Ââes du Concile que ce faint Pape tint en la même
Ville , dans l'Eglife qu'il venoit de dédier. Anfelme y ajou-
ta la relationde fon voyage de Rome à Reims d'où vient ;

que l'Ecrit d'Anfelme eft quelquefois intitulé Itinéraire du :

Pape Léon IX. C'efl ainfi qu'il eft nommé par Sigcbert ( w ).
Tritheme dit ou' Anfelme y a recueilli tout ce que ce Pape
fit en France (0) , foit dans les Conciles , foit en d'autres

Aiïemblées. Herimar étoit alors Abbé de Saint Rcmi de


Reims. Après qu'il en eut achevé l'Eglife , il envoya à Rome
des Députés prier le Pape d'en venir faire la Dédicace (/>).
Léon IX répondit , que quand d'autres affaires ne l'appel-
leroient point en France , il y viendront , par le feul motif
de l'amour qu'il avoit pour faint Rémi , & qu'il dédieroit la

{m' Arud MABiirotiiHd. f.i^i.


(n) Sicii:ERTj Jt Strift, Ealef. tap. ( ) Hifttr, DiiitM. Tm. 8. AStr. fs^,
6il.
(«j T&ITMSMB. J* Strifi. ttfU/, tap.
SUITE DES PAPES. ^6^Ch. XXI.
Bafilique conftruitc fous Ton nom. L'Abbé fâchant
apc le I

en chemin , invita Henri Roi de France , à honorer cette cé-


rémonie de fa préfence , & d'ordonner aux Evêques de fou
Royaume d'y aflifler. Le Roi le promit. Herimar envoya des
Lettres dans toutes les Provinces de France & les pays voi-
fins (q) , invitant les Fidèles de fe trouver à cette folemnité,
tant par le refpcd qu'ils dévoient à leur Patron , que pour
recevoir la bcnédi£lion Apoftolique. Le Pape de fon côté ,
envoya des Mandemens aux Evêques &: aux Abbés ( r ) ,
pour fe rendre à Reims le premier Odobre 104P , où il fe
propofoit de tenir un Concile après cette Dédicace. On en
commença la cérémonie ce jour -là même ; elle fut achevée
le lendemain. L'ouverture du Concile fe fit le troificme du
mois ; le quatrième on tint la féconde feflion , & la troidémc
le jour fuivant. On donnera dans l'article des Conciles , le pré-
cis de celui de Reims. Nous obferverons ici (s) , que le Pape
donna une Bulle portant , que perfonne ne célébreroit la Meflc
fur le maître-autel de l'Eglife de Saint Rémi , que l'Archevê-
que de Reims & l'Abbé de ce Monailere ; que deux fois l'an-
née fept Prêtres choifis de l'Eglife de Reims , pourroient aufïï
y offrir le faint Sacrifice ; fçavoir, la féconde Fête de Pâ-
ques & la veille de l'Afcenfion , félon la coutume de l'E-
glife de Rome. Anfelme rapporte cette Bulle , avec la Let-
tre du Pape Léon IX aux Evêques & aux Fidèles de toute la
France on y a ajouté depuis , celle que le Clergé de Fran-
:

ce, afiemblé à Paris en i6^y , le 22 de Mai , écrivit pour


la célébration de la Fête de faint Rémi au premier d'O-
âobre.
LV. l'Abbé Herimar chargea le Moine Anfelme de mettre i.Q^'^'j°"g
'^^

par écrit tout ce qui s'étoic pafle dans la cérémonie de la Dé- d'Anfelme.
dicace de fon Eglife (f ) ; les A£les du Concile qui fut célébré
enfuite , & les miracles opérés dans le même tcms par l'inter-
cefTion du Saint. Baronius (a) , Dom Marlot , Bollandus & le
Père Labbe ont donné une partie de l'Ouvrage d'Anfelme. 11
fe trouve tout entier dans le huitième Tome des A£tes de l'Or-

(«) Baron. /o»i, ii. in Affend. ptigi


(r) ItiJ. loy^. Marlot. tom. i.Hiftor. Remenf. p,
(î) UiJ. pag. (îji Cf fijr." 88. BoLLAMD. aJ iiem II April. p, (41.
(f) AnsELM.i'o L-Tolog. iiijior, Dtdic. f> Lasb. nm.f.Ccnc.p. ioz8.
('.^. 62.C'.

Zzij
3^4 MICHEL CERULARIUS,
are de Saint Benoît aVec les hôtes de Dom Mabillon. Il règne
dans l'Ouvrage d'Anfelmè une noble fimplicité, beaucoup d'or-
dre , & un détail qui fait plaifir.

C H A P IT R E X X1 1. i

'Jlâ^chel Cerularim , Patriarche de Çonflanùnople ; Lêon,^


~"
'
Eveque d Acrïde) Nicétas Pe&orati Pierre, Patriar-
che d' Antioche i Hum'bert , Cardinal ; Dominique ., Pa-
triarche de Grade i & Simêon le Jeune.

Lriu.p.uriar-.

tandnopie.Sa-ncat
.

L
,.J ^^^^ au fuiet du rain fermente , appartient au Ponti-
ae Leon IX 5 puiiqû il rut. le premier a prendre la aetcnl.e
lettre à Jean. de l'ufage où l'on étoit dans l'Egliie Romaine des letems des
""''
-Apôtres, de ne célébrer l'Euchariftie qu'avec des azymes. Nous
donnerons donc ici de fuite une notice des Ecrits que l'on
publia de part &d'autre dans le premier feu de ces difputes.
41 fut allumé par Michel Gcrularius , qui tint le Siège J^a-
i^riarchâl de Conftanùnople depuis Tan JO43 jufqu'en ip5p;
ëz p3r Léon Evcque d'Acride , Métro^politain de Bulgarif^
Ils écrivirent conjointement une Lettrejà Jean., Evêque de
Trani dans la Fouille , & par lui à tous les Evêque^ les &
-Prêtres desErancs, aux Moines ,-au peuple <&: au Pape mç.-
me. C'eft ce qu'ils déclarent au commencement de cpti,e Lcr-
.rre.- Entrant' -en matière', ils font aux Latins divers repro-

ches 1". deiconfacrer avec les azymes , contre ]'ufage ob»


;'

fervé par Jiefps-Glffîfl: , qui , après avoir faît l'ancie ^ic Pâquc
avec les azy-mcs , iniftitua la nouvelle avec du pain fermenté.
2°. D'obferver le Sabbat en Carême , parce qu'ils jeùnoient cfi
<:ic.jxi)ur.,x:ûntrc,ia.cOvfrLirrle dès Grecs, qui ne jcunoient 'ni le

SâiViedi ni'li^ DirnancHe.'^o» De manger du fang Â: des'ani*


maux fuffoqués. 40. De ne Doint chanter alkhàa en Çarcmp.
TTTcxîiorrei'Trvêquê'*de^ranï*'dè travailler à dcfabufcr les
Latin> fur tous ces points y&'promertcnt, s'il le fair , d'en-
voyer un' Ecrit.c.ontenant dçs vérités de plus grande impor-
tarice. Cette LcïVçexunL jpmbée .entre les mains de Hum-
PATRIARC. DE CONSTANT. Ch. XXII. 355
bert , Evcquc de Blanche-Selve b rraduiCit
en latin & la , il

porta au Pape Léon IX , qui y répondit par une beaucoup


plus longue. Nous en avons donné l'extrait dans l'ardcle pré-
cédent. Celle de Michel Cerularius a été imprimée dans Ca-
nilius &
Tonziéme Tome des Annales Eccléfiaftiques de Ba-
ronius(j).
l-"tre de M!-
II. L'Empereur Conftantîn Monomaque,AVoît intérêt d'ê-
tre en bonne intelligence avec le Pape (z ) , a cauic de Ion Léon IX.
crédit fur l'Empereur Henri; & il efpéroit qu'il pourroit par
fon moyen s'attirer le lecours des Allemands des Italiens &
contre lesf'rancs , c'eft-à-dire , contre les Normans. Il écrivit
donc à Léon , pour lui témoigner fon dellr de rétablir l'union
entre l'Eglife Grecque & la Latine. Il obligea mcme le Pa-
.t,riarche.Michel d'écriïe au Pape dans les mêmes termes. Ces
deux Lettres furent envoyées par un Officier de la garde-
robe de l'Empereur Conftantin , rendues à Argyre , Duc &
d'il allé , c]ui les fît tenir au Pape Léon fur la Hn de l'an
105 } Nous ne les avons plus ; mais on a encore les répbnfeS
.

du Pape (a).
. III. Elles furent portées à Conftantinople par les Légats Légation à

Humbert , Evêque de Blanche-Selve , Pierre , Archevêque pigenTon^."


d'Amald j & Frideric , Diacre & Chancelier de l'Eglife Ilo-
niaine GbdciVpi , Duc de Lorraine & de Tofcanc.
, frerc de
ils arrivèrent c.et(e Villeau commencement de l'an. 1063
en :

étant parti de Pvorne furli finde l'année précédente. i'Era-


jfereur les reçut avec honneur , & les logea dans fon Palais.
Humbert y travailla à une ample réponfe à la Lettre de Mi-
chel Cerularius & de Léon d'Acride. Il la divilc par articles
avec fa réponfe à chacun. C'eft une cfpece de Dialogue , où le
Conftantinop'ûlitain fait leâ objections ;'& le Romain en don-
ne la folution.
IV. Michel difoit dans fi lettre (&) .que la charité la ^"''^"^'^g^' &
ml, / v,iw
. -V
.
' , , rlumbert con-
on 1 avoient engage a'I écrire^ pour, retirer les Latins tre MicheiCe-
. t .

de leurs erreurs fur les azymes &• l'obfervation du* Sabbit. tuiarius.
Pourquoi donc, jùi dit Humbert , négligez-vous ceux. qui
font à votre charge , foufFranc chez vous des Jacobites & au-

(^ y) Ali an, iC5iL£_ioj. J^ Canis. f.


j rj<5.

(x) Tom, 1. Motmmtnt. Cotelerii. f3g.\ (t) Canis. Tcm. 5, />. 183.
,

^66 MICHEL CERULARIUS,


, converfant
très hérétiques &
mangeant avec eux ? L'Apô-
Tit. 3. 10.
tre ne pas ? Evitez celui qui efi hérétique , après l'avoir
dit-il

utii.^it!^ overti une& deux fois. Il vient cnfuite aux reproches touchant
Num. 18. les azymes &
robfcrvation du Sabbat ; &
après avoir rap-
Deutinn. 1$,
p^^j^ jçs paffages de l'Ecriture qui établirent l'ufage des azy-
mes , il dit que la Loi de Dieu , à cet égard , n'ayant eu lieu
que pour un tems , les Latins ne l'obfervoient plus ; qu'ils man-
geoient du pain levé pendant les fept jours de la Paque com-
me dans tout le refte de l'année ; & que s'ils fêtoient ces fepc
jours , les Grecs en ufoient de même ; que pour ce qui eft du
Samedi , les Latins le jeûnoient comme le Vendredi ; mais
qu'en cela on ne pouvoit les accufer de Judaïfme ; que ce re-
proche tomboit plutôt fur les Grecs , qui faifoient bonne chè-
re ce jour- là & le pafToient dans l'oiliveté comme les Juifs :
il ajoute que fi , comme le vouloient les Grecs , on ne doit

jeûner qu'un feul Samedi de l'année , en mémoire de la fépul-


t ire du Sauveur ; il ne faut donc aufli jeûner qu'un Vendredi ^
en mémoire de fa PafTion , & ne célébrer qu'un Dimanche
en mémoire de fa Réfurre£lion. Nous ne rejettons pas le jeû-
ne du Vendredi , & nous jeûnons même le Samedi pour imi-
ter la triftcffe des Apôtres en ces deux jours ; en nous con-
formant à ce qu'ils ont ordonné pour la célébration du Diman-
che , nous fêtons ce jour pendant toute l'année.
V. Humbert convient avec les Grecs {r) , que Jefus-Chrirt
cfl; la Pâque véritable , & qu'il l'a célébrée le quatorzième de

la Lune au foir. Mais parce qu'ils foutenoient que le pain que


Jcfus-Chrift prit à la Gêne , étoit du pain levé ; & qu'ils s'ap-
puyoient en cela de l'étymologie du mot artos , qui fignifie
pain élevé &
enflé par la fermentation ; il fait voir par divers
endroits de l'Ecriture , quartos marque indiflindemcnt le
pain levé ou le pain fans levain ; comme le terme lechem en
hébreu , fignifie toute forte de pain. En effet , l'Ecriture par-
lant du pain que l'Ange apporta à Elie , &
des pains de pro-
pofition qui dévoient être fans levain , fe fert du mot artos,
j. R»f.i9»». Il donne pour preuve que Jefus-Chrift inftitua l'Euchariflie

Wf. 1. avec du pain azyme , Tuiage établi chez les Juifs de n'en point
avoir d'autre , dès que les jours de la, Pâque étoicnt commen-
cés. La Loi ordonnoit de punir celui qui en auroit eu du fer-

{c)Tagei%6.
TATRIARC. DE CONSTANT. Ch. XXII. 367
mente dans fa maifon. Les Grecs ne témoignoient que du
mépris pour le pain azyme , le comparant à une pierre fans
ame , à de la boue féche. Humbert ne s'arrête à cette compa-
raifon que pour en faire fentir l'indécence ; & pour montrer
aux Grecs que leur pain levé n'ctoic pas plus pur que les azy-
mes des Latins , il rapporte les différens ingrédiens qui fcr-
voient à la fermentation du pain. Chez les Gaulois on em-
ployoit la lie de la bierre , ou du jus de poix ou d'orge ou du
lait de figue ; d'autres fe fervoient du lait aigri d'animaux ,
& de quelque nature que fût le ferment , il corrompoit tou-
jours la mafTe de farine dans laquelle on le jettoit , comme
le dit faint Paul. Les azymes chez les Latins n'avoient rien 1. Cor. f.

que de très-pur. Nous ne mettons point fur la Table du Sei-


gneur, dit Humbert, des alimens communs aux hommes &
aux bêtes ; mais feulement du pain tiré de la Sacriflie , dans
laquelle les Diacres avec les Soûdiacres ou même les Prêtres
revêtus d'habits facrés , l'ont paîtri & préparé dans un fer en
chantant des Pfeaumes (d) ; & ce pain eft compofé de grains
de froment & d'une eau limpide. Mais quel es font vos pré-
cautions à l'égard d'un fi grand myftere ( e ) ? Vous achetez
fouvent du pain fermenté Tans diftinftion de personnes , foie
qu'il ait été préparé par des hommes ou par des femmes ; vous
en achetez même quelquefois de ceux qui tiennent des ta-
vernes publiques. Quoique vous ne puifliez nier que ces fortes
de pains n'aient été maniés par des mains fales & non lavées ,
\ous les offrez fur la Table du Seigneur,
VI. Il demande aux Grecs , quelle raifon ils avoienc de
prendre avec une cuillicr le pain facré , mis en miettes dans le
calice? Jefus-Chrifl n'en ufa pas ainfi il bénit un pain entier ,
:

& l'ayant rompu le diftribua par morceaux à fes Difciples ,


comme l'Eglile Romaine l'obferve. L'Eglife de Jérufalcm
conferve à cet égard la difcipline qu'elle a reçue des Apôtres.
On n'y offre que des hoflies entières , que l'on met fur des
patcnes, fans employer, comme les Grecs, une lance de fer
pour couper l'hoftie en forme de croix elle eft mince & de
:

fleur de farine : on en communie le peuple fans la tremper


dans le calice. S'il refte quelque chofe de la fainte Euchari-

(0 Pag. 293.
,
,

558 MICHEL CERULARIUS,


llie on ne le brûle point , & on ne le jette pas dans une foiïc ;•
,

mais on le réferve dans une boëte bien nette , pour en com-


munier le peuple le lendemain : car on y communie tous les
jours, à caufe du grand concours des Chrdcicns qui y vien-
nent de toutes les Provinces viliter les iaints Lieux. Tel eft
l'ufage de l'Egliie de Jérufalem,& de toutes celles qui en dé-
pendent , grandes & petites. Tei efl: aufli l'ulage de TEglife
Romaine. On y met fur l'autel des hofties minces faites de
fleur de firine , faines & entières (g) ; Si les ayant rompues
après confécration, le Prêtre en communie avec le peuple:
la

enfuite prend le fang tout pur dans le calice. On y met de


il

même en réferve ce qui efl: relié de la fainte Eucharillie. Les


Grecs en quelques endroits n'en ufoient pas ainfi ( ^ ) ; ou ils
enterroicnt les relies , ou ils les mettoient dans une bouteille ,
ou ils les répandoient. C'cft , dit Humbert , une grande né-
gligence &
n'avoir point la crainte de Dieu. Sur ce qu'ils in-
Levit. 7.11. filtoient que les azymes étoient ordonnés par la Loi de Moy-
Î5 2}' 17. fe (i) j il répond qu'elle ordonnoit auflî des offrandes de pain
levé d'où il fuivoit qu'elle n'étoit pas plus favorable à la prati-
:

que des Grecs que des Latins.


VIL Aux reproches des Grecs fur l'obfervation du Sab-
bat (/) , Humbert répond que les Latins ne le fctoient pas
&
comme les Juifs ; qu'en ce jour ils travailloient faifoient des
voyages , au lieu que les Grecs ne s'y occupoient que du boire
& du manger , mcmc en Carême. Il fait voir qu'en reprochant
aux Latins de manger du fang &
des viandes fufioquées (m)
ils fe déclaroient pour Tobiervation de la Loi ancienne , qu'ils

méprifoient lorfqu'il s'agiffoit des azymes. Ce n'efl pas , a-


jpute-t-il , que nous voulions foutenir contre vous l'ufage du
fang &
des viandes fuffoquées nous les avons en horreur
:

fpivant la tradition de nos pères , &


nous mettons en péni-
tence quiconque en mange , fi ce ncil pour éviter le danger
de mourir de faim car nous tenons pour Loix Apoftoliques
:

toutes les anciennes coutumes qui ne font point contre la foi.


A l'égard de VAllcluia ( » ) , c'cfl à tort que vous nous accu-
fez de ne le chanter qu'à Pâques nous, le chantons tous les
:

(h) Pag. 2p4. (m) Vag, joi.


I
ii)l'aie 1^'), 1 (HjPrtff 504.
jours
.

PATRIARC. DE CONSTANT. Ch. XXII. ^6^.


jours de Tannée à l'exception des neuf fcmaines qui preee^"^
,

dent la Fête de Pâques. Nous nous conformons en cela à k^


tradition de nos Pères. Ceft un teir^s; de pénitence , auquel^
un chant de joie ne convient pas. Humbert , après avoir ju-
flifié les Latins , reproche aux Grecs divers abus ; de rebâti-

fer les Latins contre l'ufage général de l'Eglile Catholiquçi^j


qui n'a jamais permis de rebatiier au nom de la fainfc Tnj-j
nité ; d'enterrer les relies de rEuchariftic& de les fouler a^ijf,.
pieds ; de permettre aux Prêtres l'ulage du mariage , m.ème^
dans les jours qu'ils fervent à l'Autel ; de rcfufcr le Batême^
ou la Communion aux femmes en péril pendant leurs cou-^
ches ou leurs incommodités ordinaires ; de ne point batilçt,
les enfans avant le huitième jour après leur nailtance , fut-
fent-ils en danger de mort ; de repréfenter dans leurs Cruci-
fix la figure d'un homme mourant , en forte que l'on voyoit
fur la Croix de Jefus-Chrift une efpece d'antechrift quifcpré-
fentoit pour être adoré comme un Dieu ; de condamner les
Moines qui portent des callcçonsou qui mangcpt^q l^iyiandé^
crant malades. -
jb :•

• VIII Il e(l marquddans l'infcription de la rcponle de Hum-(.,|^j^^j" ^^


.

tert, qu'il l'écrivit en latin, & que par ordre dei'Empereur Humbcn mis
Conftantin Monomaque , on la traduidt en grec l'an 1054.^" /'"'^c par
Baronius l'a rapportée toute, entière dans fes A-nnales (0) ; elle pereur/ *

fe trouve dans le troir;éme Tome des anciennes ^Leçons deCa*


nifius de l'édition d'Anvers en ï 725 (/)).
rX. Baronius &
Caniûus ont (^onné de fuite l'Ec^t de NÎ- Ecm Je Ni-
çctasPeclorat contre les Latins (7). Il étoit. Moine de. Stude, contre ks La-
& en grande réputation parmi les Grecs. Le Pere.Combefis ""-'•
le fait difciplc de Siméon le Théologien, Abbé de Saint Ma-
rnas (r) , & lui attribue la, vie de fon Maître, dont il rap-i
porte l'abrégé dans les notes fur Nicctaf Caleças. Cett;e,vie
çii citée dans la Bibliothèque de Coillin (i).;Leo All-itius a
rapp:0.rté fous le nom de Nicétas (r) , un Poème en vers ïam-
bes lur le même Syméon , qu'on appelle .quelquefois le Jeune.
Il y a dans un ma^iufcrit de la Bibliothèque Impériale ( «)
,

JIM,^
'
,'
(0) BAP.ONUTS, tom.ïi'.'in /ppÀiiyp.l'" (s^^P'a^. i^xo.

'm, (;tlALliV.d.<!.S)fnepnS»frij>toXify i6%.^


(p) Page 18^. (h) LamBECU'S , liù. j. Bthliot. l'ifidot.
.iq) To»}. i.LcB.CanJf.p, ;o8. P'^g-SZ).l°7-.}.-A' Xi^.: ^
'" Catalogo f
(>) COMEEF. Tcv. a, Ât'.àti,ir'.i ntv'JJ'. p. 347. 563. C? lib. 8. Bibliot.p. 44g,
f.\r. I I i . Ç5 I I 9 .-(f^
, ad i:p.
Tome XX p - A sa
,

J70 -_MICHEL CERULARTUS,


trois Centuries de maximes afcétiques elles portent dans l'in- :

fcription le nom de Nicétas , Moine & Prêtre du Monaftcre


de Stude , furncmmé Peftorat. On y trouve encore plufieurs
autres Ouvrages fous fon nom , de même que dans les Biblio-
thèques d'Angleterre. Comme ils n'ont point été rendus pu«
bdics , nous ne parlerons ici que de celui qu'il compofa con-
tre les Latins. Il les exhorte à écouter dans un eiprit de paix
8t d'humilité , fes remontrances fur les azymes , le jeûne du
Samedi , &
le mariage des Prêtres. Sur les azymes , il die
que ceux qui s'en fervent font encore fous l'ombre de la Loi ;
3u'ils mangent à la table des Juifs , & non à la table vivante
e Dieu ; qu'ils ne mangent point ce pain fuperfubftantiel ou
confubftantiel à nous , parce que le pain azyme eft un pain
iranimé & fans vertu ; que ce n'eft pas même un pain parfait
n'étant pas compofé des trois chofes qui figurent le Corps de
Jefus-Chrift ; c'eft-à-dire , le levain , la farine & l'edu , figu-
res de l'efprit , de l'eau &
du fang de notre Seigneur , félon
que le dit l'Apôtre faint Jean. Pour montrer que Jefus-Chrift
s'eft fervi de pain fermenté dans l'inftitution de l'Euchariftie ,

il foutient qu'il l'a inftituée le treizième jour de la Lune de

Mars avant la Fête de Pâques , & non le quatorzième (x).


Il ajoute , que les Apôtres ont défendu l'ufage des azymes,

& que dans le fixiéme Concile , on fit une Loi là-deflus , à


Taquelle le Pape Agathon j qui étoit préfcnt , ne s'oppofa
point.
"
X. Nicétas paflant à l'article du Samedi (j») j il demande
aux Latins en quel endroit de l'Ecriture ils avoient appris
,

à jeûner ce jour là ? Il prouve que cette coutume ne peut


leur venir des Apôtres, puifqu'il n'en eft rien dit dans leurs
Canons ni dans leurs Conftitutions. On lit bien dans les E-
crits de faint Clément , qu'il a ordonné le jeûne du Mercredi
& du Vendredi : mais il défend le jeûne du Samedi. Nicétas
cite encore un Canon du fixiéme Concile , où il dit que le
Pape Agathon affifta, lequel Canon déclare que la coutume
de jeûner à Rome le Samedi , étoit contraire à l'ancienne dif-
cipline, & le défend abfolument. II demande encore aux La-
tins , en vertu de quoi ils célébroient la MeflTe entière les jours
de jeûne , & réfute cet ufage par un Canon des Apôtres 6c

0»)^"^ 3"' (;)^'»i'î '••>"•


l'ATRIARC. DE CONSTANT. Ch. XXII. 371
par d'autres , des Conciles de Gahgres , de Laodicée , de
Trullc, qu'il l'uppofe être le même que le fixiéme général. Ce
dernier Canon ne permet les Méfies entières en Carême, que
le Samedi &
le Dimanche , &
le jour de l'Annonciation:
aux autres jours de lafcmaineon dit la Méfie des Préfan£li-
fiés. Le Samedi &
le Dimanche on cdlébroit la Méfie à Tier-
ce , &
on y confacroit des hoflies pour tout le refic de la fe-
maine. En ces jours , c'eft-à-dire , le Lundi , le Mardi , le
Mercredi , le Jeudi &
le Vendredi , la Mefii ne fe difoit que

vers les trois heures après midi. Après avoir lu les prophéties
& récité les prières prefcritcs par faint Bafile , on difoit l'Oraî-
fon Dominicale ; puis le Prêtre ayant cleyé le pain prcfanflifié
en dilant, Satina S anfiis, on prenoitla communion du pain
& &
du calice ce qui étant fini l'adion de grâces achevée, on
:

renvoyoit le peuple.
XI. Le dernier article de l'Ecrit de Nicétas regarde îe ma-
riage des Prêtres (z). Il foutient qu'il efl: permis qu'on ne &
doit point les féparer de leurs femmes: alléguant pour le prou-
ver , le Canon du fixiéme Concile qui Icsautorife dans cet ufa-
ge. Il répète encore ici que le Pape Agathon préfida à ce Con-
cile. Il fe fonde aufilfur les Canons 8c les Conftitutions attri-
buées aux Apôtres.
XII. Il y avoit beaucoup de hauteur d'aigreur dans l'E- & Réponfe de
crit de Nicétas. Le Cardinal Humbert en prit occafion de ^^rdinai

l'humilier dans fa réponfe, en le chargeant de reproches & 1 Ecrit tfe Ni-


d'injures (a). Il trouve mauvais , fur-tout , de ce qu'au lieu céias.

de vacqucr aux exercices de la vie monafiique , conformé-


ment aux décrets du Concile de Calcédoine , il fc foit ingéré
dans des difputes ecclcfiafiiques ; &
que de fon propre mou-
vement , il ait ofé attaquer l'Eglife Romaine. Il rejette avec
mépris ce qu'il avoit dit de la confubfiantialité du pain levé
avec nous ; & l'application du pafl!age de faint Jean touchant
Tefprit , l'eau le fang , & &
fait voir que cet endroit n'a au-
cun rapport à l'Euchariftie , mais feulement au Batême , où
l'efprit ian£lifie, l'eau purifie , le fang rachetre l'homme bati-
fé. I] lui fait un crime d'avoir dit que l'élprit vivifiant éroit
demeuré dans Jefus-Chrifi: après fa mort parce qu'il fuivoit ;^

[x.) Page j 1 1. 3 1 3. Un Mfp'ehJ, UmniV^'nàr. pyjizl


.4«3 CANib. Xom. 3.^. JI4. C^ Ba&0)I. 1
'•''
AaaiJ
27'2 "
'MrCîTEL CERULARIUS,
de- là que Jefus-Chrift nefl point mort réellement , ni con—
féquemment refTufci c. Il s'arrête peu à fes objections contre
les azymes ,.difanr qu'il y avoir fuffifanimenc répondu dans
fon -Ecrit contre Michel Cerularius. Mais il remarque qu'on
ne pouvoir dire que le Sauveur eût fait la Pàque le treiziè-
me de la Lune ; pr.cniiérement , parce que , félon la Loi , on'
jie devoir la commencer que le quatorze au foir ; en fécond
lieu , parce qu'il l'auroit faite avec du pain fermenté :'ce qui
étoit égarement défendu pac la Loi. Il rejette comme apocry-
phes, Tes Cppïlitutior>s. qui portent le nom des Apôtres ,' 5c .

leurs prétendus Cafiohs'j.ne'reconnpifTant que l'autoritéi 4^5


cinquante premiers. Or» Nicécas avoir objecté le foixante-cli-
xiéme , encore Humbert foutient-il qu'il ne lait rien contre les
Latins , parce qu'en effet leurs jeûnes & leurs Fêtes n'avoienc
rien de commun avec lesjuifs. À'
Il- ï
'•

XIÏI, Erifuite il relevé cet Ecrivain ïur ce quil évoft^dii;


plus, d''uhe' fois (i5) , que le Pape Agathon prélida au fixicmë
Concile général. If n'y fut préfenc que par fes Légats. Ce
Concile s'afTembla pour la condamnation des Monothélites ,
& non pour introduire des nouveautés parmi les Romains.-
Lés' Cannons que l'on obje£le fous Ion nom , ont été ou fabri-
.
^ JL £[ués^QU-alt(çréspar les. Grecs. Le Saint Sicge ne les a jamais.
iTrilb-îO feçuSj'hl céu?c d'eTrulIe que les Grecs attribuent à ce fixié-
i j-iadmiiH jne'Cp'nçilc. Si le Fape Agathon avcit voulu toucher aux tra»-
:/. -i) Jir.j
-^jjIqj^s (je fes prédéccffeurs , les Romains ne l'auroient point
1


ecout*. Le Cardinal Humbert rapporte un fait' qu'on nc lit
point ailleurs ; fçavoir, qu'après le Concile , l'Empereur Con-
ïlanrin Monomaque étant dans fon Palais avec les Légats du
Saint Siège j leur demanda comment l'Eglife Romaine offroic
le fâint Sacrifice. Ils répondirent: Dans le calice d"a Seigneur
on ne doit'pas offrir dû vi-i^ PV^^ mais mêlé d'eau (c).: i\ l'oii
».

offre le vin pur fang de Jefus-Chrift eft fans nousj


, le (i &
l'on 'n'offre que de Teau ,,le peuple ciî fms Jcfus-Chrii^ mais :

conçu &:'éhtantcveius-Cnrift"lans aucune corruption. Il clt


d'ulige d^ns l'FgliO rjp np pninr n'-lél-irpr le Sacrifice fur de
— .-I- <\.w-.^.»r.'ivc!.'..''i',7v-;i) rrîTTT'T
,
,

PATRTARC. DE CONSTANT. Ch. XXII. Hj


la foie une écofe ceinte ; mais fur un linge blanc , com-
ou fur
me le corps du Seigneur fut enfevcli dans un linceul blanc.
Par cette raiion Thoflie doit être cxeititc de levain , ainfi
qu'il a été ordonné par faine Sylvcftre. Cette Tradition de
l'Eglife Romaine plût à ce Prince. On voit ici que Humberc
citoic lui-même des Ecrits apocryphes , tels que font les
Ceftes pontificaux du Pspe Sylveftre. Il en cite encore d'aïf-'
très.
XIV. En répondant à Fobjedion fur le jeûne du Samedi
il dit: Nous jeûnons exademcnt tous (<^) , les jours de Ca-
rême , &
quelquefois nous failbns jeûner avec nous des ehfans
qui n'ont pas atteint l'âge de dix ans. Nous n'en exceptons
pas le Samedi que Jefus-Chrift n'a point excepté dans fon'
jeûne de quarante jours ; &
nous ne romperions pas même'
le jeûne du Dimanche , cômnte ii ne l^a^ pas rompu , fi les
faints Pères Catholiques iVcuffent unanimement défendu le
jeûne en ce jour , à caufe de la joie de la réfurredion du Sei-
gneur pratique qui a été autorifée par les Evêques du Cori-
:

c.le de Gangres, Il appelle Nicétas , perfide flercoranifle


Comme s'il eut été dans le fentiment de ceux à qui l'on im-
putoit de croire que l'Euchariftie étoit fujette aux mêmes fui-'
tes que les autres aiimens ; ce qui ne paroît par aucun endroit
de fe^ Ecrits mais Humbert ne le nomme apparemment ainfi
:

qu'en conféque'nce de ce qu'il ditoic que l'Euchariflie rom-'


poit le jeûne. Ce que le Cardinal réfute , en dilant Celui :

qui mange la chair de Jefus-Chrift 8c boit fon fang , reçoit


la vie éternelle ; comment pouvez-vous croire que mangeant
fa vie incorruptible , nous corrompions l'intégrité de nos jeû-
ftes , comme [\ nous nou& repaiffions de viandes corruptibles 1

Jefus-Chrifl a t-il dit , qu'en mangeant fa chair & en buvant


fon fang, l'on romproic le jeûne (e)? Nous prenons l'Eucha-
riftie en trcs-petiVe quantité, pour n'en pas dégoûter les hom-
mes charnels mais auiïi nous ne doutons pas qu'on ne re-
:

çoive dans la moindre particule , la vie toute entière , c'ert-


à-dirc, Jefus-Chrift. Chaque jour , foit à Tierce , foit à'
None , ou à quelque autre heure , nous cék%rons la Méfie"
parfùre ; &
nous ne réiervons point une partie' de l'cblation^
pour célébrer cinq jours de fuite une Méfie imparfaite ; parce _

Wf..j. jip,. (OP..^. 5io,


574 MICHEL CERITLARTUS,
que nous ne lilbns point que les Apôtres aienc rien réfervé
de riioftie qu'ils reçurt-nt à la première Cène ; & il ne paroîc
point par leurs A£tcs , qu'ils aient dans !a fuite fait ou ordon-
né quelque chofe de femblable. Il cite la fauffe Décrétale du
Pape Alexandre , & ajoute Nous n'ignorons pas que vos
;

faints Percs ont établi l'ufage de célébrer la MefTe à l'heure


(de Tierce les Dimanches & les Fêtes folemnellcs, à caufe de
la defcente du Saint-Efprit en cette heure là , & qu'ils ont
ordonné qu'on la célébreroit de même à l'avenir mais il n'en :

eft pas des jours de jeûne comme du Dimanche & des Fêtes
folemnelles. On peut,
fans péché célébrer des MefTes par-
,

faites les jours de jeûne à l'heure de Nonc ou de Vêpres ,


puifque Jefus-Chrift a inftitué ce grand Sacrement le foir ; &
qu'il a confommé fon Sacrifice fur la Croix à l'heure de None.
Encore donc que les heures de Tierce 8c de None foient les
plus convenables , on peut , à caufe d'un voyage ou par quel-
que autre néceffité , célébrer la MefTe en d'autres heures , fans
préjudicier à l'intégrité du jeûne, comme on ne le rompt poinc
en la célébrant la nuit de Noël.
XV, Humbcrt reprend les Grecs (/) , de ce qu'en rompant
le pain facré , ils ne recueilloicnt point les miettes qui tom-
boient de côté & d'autre ; ce qui arrivoit encore quand ils
effuyoient les patènes avec des feuilles de palmiers ou des
brofles de foie de porc ; de ce que plufieurs d'entre eux fer-
roient le Corps de Jefus-Chrifl: avec l\ peu de refpeâ , qu'ils
en combloient les boctes & les prefToient avec la main , de
peur qu'il n'en tombât. Il y en avoit aulTi qui confumoient les
refies de l'Euchariftie comme du pain commun , jufqu'à en
prendre au-delà de leur appétit; & qui les cnterroient ou les
jettoient dans des puits , s'ils ne pouvoient manger le tout,
Plufieurs d'entre eux ne jcûnoient que peu ou point pendant
!c Carême ,
pafTant le jour entier à boire & manger d'autres
;

portoient de la nourriture à l'Eglifc , & la prenoicnt avant


d'en fortir quelques-uns ne jeûnoicnt qu'une femaine , qu'ils
;

appelloicnt Carême de faint Théodore. C'étoit encore une


le

coutume chez les Grecs , après l'unique repas du Carême , de


prendre des fruits ou des herbes par forme de collations. On
n'en ufoit pas de même chez les Latins on n'y mangeoitqu'u- ;

WP'f-iVf
• ,

PATRIARC. DE CONSTANT.Ch. XXIT. 375


ne fois ; & on ne permettoit à perfonnc de rompre le jeûne , li-
non d.ms le cas d'une griéve infirmité.
XVI. Nicétas avoit dit (^) , que dans TEglife Latine on
Commcnçoit par le faire ordonner , puis on fe marioit. Hum-
bcrr Taccufe de menfonge en ce point. Chez nous , dit-il
pcrfonne n'cft admis au Soûdiaconat qu'il ne promette de vi-
vre en continence , même avec fa propre femme ; & on ne
permet à aucun de ceux qui ont acquis quelque grade dans le
fjint Miniflere, de fe marier. Il fait voir enfuite , que fi , fui-
vant le principe de Nicétas , il étoit néceflfaire que ceux que l'on -

admet aux grades d'Evêque , de Piètre , de Diacre , deSoû-*


diacre , fufl'cnt mariés , Se qu'ils gardafl'ent leurs femmes après
leur Ordination ; faint Jean, faine Paul Se faint Barnabe au-
roient été en faute, eux qui n'étoient point mariés. Il expli-
que les Canons qui défendent aux Clercs de quitter leurs
femmes ; du foin qu'ils doivent prendre d'elles depuis leur
Ordination , en leur procurant les chofes néceflaires à la vie,
mais ians habiter avec elles comme auparavant. Puis il prou-
ve par pluficurs Epîtres décrétales des Papes Innocent , Sirice
& Léon , que tous les Minières facrés font obliges à la con-
tinence. Il n'en excepte que les Lcfteurs, les Portiers, les Exor-
ciftes, les Acolytes. Enfin, il prononce anathéme contre Ni-
cétas & contre tous ceux qui pcnfoient comme lui , s'ils ne chan-
gent de dodrine.
XVII. Nicétas fe retrada en effet (^) , le jour de la Saint Nicétas feré-
Jean 24 de Juin de l'an 1054, <^3ns le Monafiere de Srude , "^^^'
en préfence de trois Légats & de l'Empereur. Il anathématifa
Ion Ecrit intitulé De l'azyme , du Sabbat ,
: du mariage des &
Piètres S & tous ceux qui nieroient la primauté de l'Eglife
Romaine fur toutes les Eglifes, ou qui oferoient repre idre
en quelque point, fa foi toujours orthodoxe. Cela fiir, l'Em-
pereur , à la demande des Légats , fit brûler le Livre de Ni-
cétas. Le lendemain il alla de lui-même trouver les Légats
au Palais de Pige où ils Ingeoient , & ayant reçu d'eux la fo-
lufion de fes difficultés , il anathématifa une féconde fois de
fon plein gré , tout ce qu'il avoit dit ou fait , ou entrepris
contre le Saint Siège. Les Légats l'admirent en leur commu-

te)
P"^- 5 " wW/*/». Qî Tom, 9. CcH«,
f.$9\,
(/>) Camis. Ttm. },f, 315. a Baron.
I
1
•5f^ MICHEL CERULAR.IUS,
jiion , &
devint leur ami particulier. L'Ecrit du Légat Hum-r
il

bert contre Nicétas fut traduit en grec par ordre dcTEmpe-.


reur , & gardé à Conftantinople.
E.scommuni- XVIIl. Juïques-là ie Patriarche Michel n'avoir voulu , ni
cber"cer^à- "^^^^ ^^^ Légats , ni
Icur parler. Voyant qu'il dcmeuroit ob-
rius. ftiné dans les fentimcns ( ? ) , ils allèrent à Sainte Sophie le
Samedi fixicme de Juillet, à l'heure de Tierce , lorfqu'on ér
.toit prêt à célébrer la M elle : après s'c.re plaints de la con-
duite de Michel ils mirent lur le grand Autel en préfence
_,

xiu Clergé &


du peuple, un at>e d'excommun cation contre
Jui. Secouant enfuite )a poulTicre de leurs pieds, fuivantle prcv
Uatth. 10. cepte de l'Evangile, ils Ibitirent de i'Eglifc en criant ^ue :

"*• Dieu le voie &


qiiil ju^e. Ils réglèrent les Egliics des Latins

qui étoient à Conllantinople; prononcèrent an.ithéme contre


..tous ceux qui communicroient de la main du Patriarche ; pri-r

•rent congé de l'Empereur , reçurent les prclens , tant pour


faint Pierre que pour eux , & partirent le djx - huitième du
même mois. Arrivés à Selinbric , ils reçurent une Lettre de
l'Empereur , qui les invitoit à revenir de la part du Patriarrr
che. Ils revinrent au Palais de Pige. Michel leur offrit d'en-
trer avec eux en conférence le lendemain à Sainte Sophie ;
;Tiais fon deflein étoit de les faire alfommer par le peuple en
lui montrant l'cde d'excommunication. L'Empereur pré^-
voyant ce qui devoit arriver , voulut être prélent à la conr-
férence. Michel s'y oppofa fur quoi ce Prince fit partir Jcs
:

Légats. Le Patriarche irrité tourna la colère contre l'Empe-


fcur , & excita contre lui une grande lédition , l'acculant
d'intelligence avec les Légats. Condgntin ne put appailer le
tumulte qu'en livrant à Michel , Paul & fon fils Smaragdc ,
.qui avojcnt fcrvi d'interprctci aux Légats. Ils étaient déjà
chez les Rufles , loriqu'un Courier de l'Eçipcreur leur vint
demander un exemplaire fidèle de l'ade d'excorni'nunicaii.n.
Ils l envoyèrent. Conftantin convaincu que Michel l'avoit fal?
fifié , ô;a les Charges à les parens & à fes amis , & leschafla

4u Palais.
XIX. Les Légatsdifoicnt dans cet a£le (/) , qu'envoyés
de Rome
de la part du Saint Siège, pour connoitre la vérité
des rapports qu'on lui avoit faits , ils avoient trouvé à Con-

ftantinjDplie
. »

PATRÎARC DE CONSTANT. Ch. XXII. 577


fbfitinoplc que les colomnes dcrEiripirc , les pcrfonncs con-
jiituées en dignirc &:.Ies plus fagcs d'entre les citoyens ctoicr^c'
très-Chrétiens &
très-orthodoxes ; niais que Michel nomme
aburivcmcnt Patriarche , Se fcs fauteurs , femoient tous les
jours en cette Ville beaucoup d'erreurs ; qu'ils vendoient le;
jdon de Dieu , rcndoient eunuques leurs hôtes |, puis les c!e^'
voient à tous les degrés de la Clcricature , mcrrie à l'Epifeo-'
pat ; qu'ils rcbatilbient ceux qui avoicnt été batifés Au' nortt*
de la iaintc Trinité j enfeignoicnt qu'il n'y a point de Jalut:
hors de l'Eglifc Grecque , ni vraie Églife, ni facriHce ; pcr-^
jmettoicnt le mariage aux Minières des Autels ; qu'ilsavoîenr
retranché du Symbole ces paroles : Le Saint-rEfprit procédi^
du Fik; qu ils gardoient les purifications des Juifs , refufôiiçntr
le Batcmc aux cnfans avant le huitiérne jour de leur ndifTali-
cc, &
la Communion aux femmes en" couche , & n'admet-
toient point à leur communion ceux qui , fuivant l'afage de
l'Egife Romaine , fe rafoient la birbe 8z les cheveux. Les
Légats ajoutQient y que Michel n'avoit tenu aucun compte de{>
rcn^ontrances du Pape Léon IX , qu'il avoit de plus rcfufé
de les voir , de leur parler , & de leur donner des Eglifcs
pour célébrer la Mefle ; fermé celles des Latins , anathéma-
tifé le Saint Siège ; que pour toutes ces raifons , par l'autorité

de la. fainte Trinité, du Saint Siège Apoftoli:}uc , des fcpt


Conciles & de toute l'Eglifc Catholique , ils foufcrivoicnt à
l'anathcme prononcé par le Pape , difoicrir';eux-n>êmes' &
àna.thème à Michel, a Léon d'Acride',' à Côriftantin Sacèl-^
laire de Michel, &
à tous leurs fe(flatcurs, en cas d^obftina-'
fion de leur part. Les Légats prononcèrent de' vive voix en*
prélcncc de l'Empereur & des Grands de la Cour, une autre*
excommunication en ces termes Qui'cbnCfiie blâmera opinia-^ :

trément la foi du Saint Siège de Rome & ibri facrifice (w) ,


foie anathême, Se ne foit point tenu pour Catholique, rhais pour'-'
hérétique & défcnfeur du levain. On rCmar(i[ue que les héréiîcs'
imputées aux Grecs dans cet a£te (/z) , n'étoicnr la plapa-rr que
des conféqucnces tirées de leur doctrine 911 de leur conduite^
tn'ais .qu'ils ne les avoûoîent pas.
' / " .:'.'.: _>.!i ' ' •
-:

\ X'^. Le' Patriarche Micheî ipulDÎîi' lin, Décret


"

• ,
'cdHt^itfërrë'
.
1^1 ,
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^^ ^ ,
j.
-,•,;, Michel Ceru«
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larius.
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Il M. >!» (
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ji
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(ml UU. pag. ?î8. t^aj. 21. tom, IJ.


(...) F^î^fRi , lit. 60. de llifi. EccUf.
I
Tome XX. '
'
r: ' -i o, .
i uv*,-j .\.v..i .v,i g bb .»)
57? MICHEL CERULARIUS,
excommunication , qui a donné en grec & en latin par Léo
été
Allatius (o). Ce Décret au nom de Michel , de douze Mé-
eft
tropolitains & de deux Archevcques.il y eft dit ,quedes im-
pies fortis des ténèbres de l'Occident , font venus à Conftan-
tinople corrompre la faine doclrine par la variété de leurs
dogmes ; qu'ils ont mis fur l'Autel un écrit portant anathcme
contre le Patriarche &
tous ceux qui ne fe laifTent point en-
traîner à leurs erreurs. Michel met entre ces erreurs , le re-
Î)roche que les Légats avoient fait aux Grecs de ne point ra-
er leur barbe ; de communiquer avec des Prêtres mariés , &
4'âvoir retranché du Symbole ce qui regarde la proceffion du
Saint-Efprit. Il rapporte les autorités fur lefquellcs les Grecs
fè fondoicnt pour foutenir ces trois articles ; puis il ajoute ,
en parlant des Légats : Quoique venus d'eux-mêmes de con-
cert avec Argyre , ils ont fuppofé qu'ils étoient envoyés par
le Pape , &ont fabriqué de faufles Lettres fous fon nom y
comme il a été reconnu par la fauffeté des fceaux. l'égard A
de l'écrit qu'ils ont fait contre nous & mis fur l'aurel , les Soû-
diacres les ayant en vain voulu obliger à le reprendre , nous
Pavons pris pour empêcher que les blafphêmes qu'il contient
ne fulTent rendus publics , &
l'avons fait traduire de latin en
frec par le Protofpatairc Cofme , Romain le Roux, le &
[oine Jean Efpagnol. Michel le tranfcrit tout entier ; puis
il dit , que s'étant plaint à l'Empereur de l'infolence des Lé-

gats , ce Prince les rappella à Conftantinople, d'où ils étoient


partis ; qu'y étant de retour , ils ne voulurent ni le voir
ni entrer en conférence avec lui dans le grand Concile , ni
s'expliquer fur les impiétés contenues dans leur afte d'ex-
communication ; que l'Empereur n'ayant pas jugé à propos
de les y contraindre , parce qu'ils avoient la qualité de Lé-
gats , ce Prince lui avoir envoyé une Lettre , où il étoit dit :
Après avoir examiné ce qui s'eft paflc , j'ai trouvé que la four-
ce du mal vient des Interprètes &
d'Argyre. Je vous envoie
les coupables après les avoir fait fouetter , pour fervir d'e-
xemple aux autres. Pour ce qui eft de l'Ecrit , il fera brûlé
publiquement , quand on aura anathématifé tous ceux qui y
ont eu part. J'ai aufTi fait mettre en prilon le Veftarque gen-
dre d'Argyre &
fon fils, pour les punir de cette fuppofition.

(«) Lio A\.lLKt.dt Lit,E((ltf,Crti€or, f, i6i. 173. Parif.an, 1644, i»-^.


PATRIARC. DE CONSTANT. Ch. XXII. 375^
Michel ajoute qu'en confcquence de cet ordre de l'Empe-
,
reur , l'Fcrit avec ceux qui l'ont fait ou publié » ont ccé ana-
thématiies dans la grande Salle du Confeil en préfence des
Métropolitains &
des Archevêques qui fe trouvoient en cette
Ville i & qu'au lieu de brûler l'original de l'Ecrit impie , on
l'a dépofé au Cabinet du Cartophylace ,
pour la condamna-
tion perpétuelle de ceux qui ont proféré de femblables blaf-
phêmcs.
XXI. Cependant Dominique Patriarche de Grade & d' A- Lettre Je D»;
auilée(ô) , écrivit à Pierre Patriarche pour lui '^l^^^^ç ^ç'
d'Antioche ,
oemanaer fon amitié , qui lui étoit chère autant par fcs qua- Grade,
lités perfonnellcs , que parce qu'il étoit Evêque de la féconde
Eglife du monde , comme fondée par faint Pierre , de même
que celle de Rome. Il lui parloit auiïi du Patriarchat d'Aqui-
lée , & de fes prérogatives , dont une étoit d'être aflîs à la
droite du Pape dans les Conciles. Venant enfuite au vrai mo-
tif de fa Lettre , qui étoit d'engager ce Patriarche dans les
intérêts de l'Eglife Romaine je ne puis vous dillimuler , lui
:

dit-il , ce que j'ai appris des reproches que lui fait le Clergé
de Conftantinople. Ils blâment les faints azymes dont nous
nous fervons pour confacrer le Corps de Jefus-Chrift ; & pour
cela ils nous croient féparés de l'unité de l'Eglife au lieu que :

e'eft principalement en vue de cette unité que nous ufons des


azymes , ayant reçu cet ufage non -feulement des Apôtres,
mais de Jefus-Chrifi: même. Toutefois parce que les Eglifes
Orientales fe fondent aufli fur la Tradition des faints Percs
orthodoxes , dans la coutume où elles font d'ufer de pain
fermenté , nous ne la défapprouvons point y & nous donnons
à l'un & l'autre de ces pains des fignifications myftiques. Le
mélange du levain avec la farine , peut repréfenter l'Incarna-
tion de Jefus-Chrift : & le pain azyme la pureté de fa chair.
Dominique finit fa Lettre , en priant Pierre d'Antioche de
réprimer ceux qui condamnoient les ufages des Latins fon-
dés fur les Décrets Apoftoliques ; & de ne plus foutenir que
l'oblation faite avec des azymes , n'eft pas le Corps de Je-
ius-Chrift , & que tous les Latins font hors de la voie du
falur.

^ XXII. Le Patriarche Pierre

(p) Tow, i.Manum. Couler. p, loi»


lui répondit avec beaucoup
J'/'pa,rfa'rche
d'Antioche.

Bbbij
38o MICHEL CERULAKIUS,
de politeffe, mais uns approuver fes prétentions fur le Pa"
triarchac de Grade ou des Veneties. Je n'ai , lui dit-il , pas
encore ouï dire que TEvêque d'Aquilée eût le nom de Pa—
rriarche (q) , il n'y en a que cinq dans le monde par la dif-

polîtion divine ; Içavoir, ceux de Rome


de Conftanrino- ,

plé , d'Alexandrie d'Antioche & de Jéruialem encore ce-


, :

lui d'Antioche eft-il le ftul quLait proprement le titre de Pa-


triarche ceux de Rome & d'Alexandrie font nommés Papes :
:

'ceux de Conftantinople & de Jéruialem , Archevêques. On-


-<"''''^"''

"'.^ ".
I
connoît dans le monde des Provinces plus étendues que la
,i:;... -vôtre, qui ne font gouvernées que par des Mctrcjlolitains Se

des Archevêques , comme la Bulgarie , la Babylonie , Lt Co-


rofane & les autres de l'Orient, où nous envoyons des Arche-.
^êques & des Catholiques , qui ont ious eux des Métropoli-
tains. On nommoit en Orient (r), Catholiques ou Géné-
raux, certains Evêques plus diftingués. l'égard des azy- A
mes , Pierre d'Antioche excufe'le Patriarche de Cbnftanti-
nopk, en difant qu'il ne condamne pas abfolument les La--:
tins , & ne les retranche pas derEgliie; qu'il les reconnoît
pour orthodoxes, & dans la même croyance que lui lur la
Trinité & l'Incarnation ; mais qu'il ne voit qu'avec peine,
qu'ils s'écartent en ce point de l'ancienne Tradition de l'E-
glifc , n'offrant pas le Sacrifice comme les autres quatre Pa-.
t^iarches avec du pain levé» L'offrir avec des azymes y c'cft,
,

dit-il , participer aux facrifices de l'ancien Teftament , 8c non


pas du nouveau. Il ioutient que Jcfus-Chrift fe iervit de pain
levé dans l'inditution de l'Euchariftie , cp'il lit la Pâque &
joijw. 13. 1. 2. avant les Juifs ; piufque faint. Jean dit.: vivant la Fête de Fd-
ûiies j & après le /èw^er paroles, qui prouvent que le 6'auvcur
:

ne fit point la Pâque- le Jeudi: ce que l'Evangclifie manque-


encore lorfqu'il ajoure , enpaibnt des J;uifs qui menerentjc'-
Ù":
ijjj ^Q la maifon de Cafphe au Prétoire : f'croïf le matin ,
Jean. 18. 2».

Hs n' entrerez point au Prétoire , de peur qnf'tant devenus impurs


ils ne piifc-nt manger la. /'â(](ie.,.Vïcrrc dit beaucoup déchoies»
eontce les azymes ;,&.ajoate,' que li laiht Pierre laint Paull &
<tn ont étabUrufiige.chez ies Latins, ce n'a été eue par Ja.-
même condefcendance qui leur a fait tolérer dans les com-

( g ) T»OT. 1. H (tiumint, Cotder. par. 1 (r) Fi furi , Lib. (o. il Hift. Liclff. f
in. 1 1;.'»»'* ij-
,

PATRIARC. DE CONSTANT. Ch. XXII. ^81


mencemcns quelques obfervances judaïques, qu'ils ont réfor-
mées dans la fuite , à l'exemple de Moyle qui permit aux Juifs
certains facriliccs ,
pour leur inculquer davantage la crainte
de Dieu ; & défendit cnfuite, quand il les vit plus
qu'il leur
affermis dans ion culte. Il fait mention de la Lettre qu'il écri-
vit au Pape Léon IK , pour lui donner avis de fon Ordina-
tion ; &
dit qu'il n'en avoit pas encore reçu de réponfe , quoi-
qu'il l'eût écrite il y avoit déjà deux ans. Il en envoie une
copie à Dominique, le priant de la faire pafl'er à Sa Sainteté,
& de lui en procurer la réponfe. Si vous voulez aulfi , ajoute-
t-il, lui envoyer celle-ci aptes l'avoir lue , vous ferez une ac-
tion agréable à Dieu &
à nous : car il pourra arriver , par
l'intercellion des Princes des Apôtres , que le Pape fera con-
tent de ce qui y e(l écrit j 8c que fe conformant à nous , nou*
nous réunirons tous dans les mêmes Icntimens , nous offri- &
rons à Dieu le même Sacrifice. La Lettre finit par une falu-
tation en ces termes: Saluez en notre nom, vo:re divine ,
lacréc &
faintc Eglife. La notre ialue votre faincecé dans
le lainrbaiier , Se vous demande avec nous le Iccours de vos
prières.
XXIII.
Selerus, Duc d'Antioche, ayant eu communica- LettredeMi-
tion de Lettre de fon Patriarche , l'envoya à Michel Ce- "^."^"^ Cemia-
la
1 /
• \ ^ r»- n A • ,T- • 1 • nus a Pierre
/ • (-

ruianus ( j } , a qui Pierre a Antioche avoit aulli cent lur une dAntioche.
affaire particulière qui regardoit un Diacre. Michel , en le
remerciant de la place qu'il avoir accordée à ce Diacre , lui
fait part de la Lettre qu'il avoit adreffée au Pape Léon IX ,
autant dans le delTcin de procurer la réunion des deux Ègli-
fes , que d'obtenir par fon moyen du lecours contre les Nor-
mans. Il raconte comment ià. Lettre , ayant été remife au
Duc Argyre, il l'avoit retenue, & compofé une réponfe fous
le nom du Pape dont il avoit chargé des fcélérats, qu'il en-
,
,

voya à Conflanrinople en qualité de Légats du Saint Siège,


Il n'eut pas de peine, dit-il , à reconnoicre la fuppofition de
cette Lertre, par la fauffeté des Iceaux & par le ilvle d'Ar-
gyre qui lui étoit connu ; & il fur confirme dans fon fenri-
ment par l'Evêque de Trani , qui étant venu d'Italie à Con-
ftantinople , lui raconta toute l'intrigue d'Argyre. Il fe plaint
de la hauteur de ces Légats , qu'ils avoicnt poulfée jufqu"aa

{i)Tcm.i, Mo/i:t;u,C:iihr. pa^. l}$.


,,

3S2 MICHEL CERULARIUS,


point de ne vouloir ni le faluer ni lui parler. Mais il n'impute
rien de toute cette négociation au Pape , dont il parle en des
termes avantageux. If reproche toutefois au Patriarche, de
ce que, conjointement avec ceux d'Alexandiie de Jérufa- &
lem , ils avoient mis fon nom dans les facrés Diptyques , yû
que depuis le llxiéme Concile , on en avoit ôté le nom du
Pape , à caufe que Vigile qui occupoit alors le Siège Apofto-
lique , n'avoit pas voulu venir à ce Concile , ni condamner
les Ecrits de Théodoret, de Cyrille &
d'Ibas. Michel ajou-
te qu'on lui avoit dit que les Patriarches d'Alexandrie
, &
de Jérufalem recevoient ceux qui mangeoient des azymes , &
qu'eux-mêmes en ufoientdans le faint Sacrifice. 11 prie Pierre
de s'en informer , &
de le certifier du vrai. Ce Patriarche
n'avoit parlé , dans fa Lettre à Dominique de Grade , que des
azymes. Michel qui l'avoit lue , l'avertit que les Romains en-
feignoient beaucoup d'autres erreurs qui méritoient d'être re-
jettées. Il en fait le détail , &
n'oublie point qu'ils avoient
ajouté au Symbole permettent , dit-il
la particule fiUoque. Ils
aux deux frères d'époufer les deux fœurs
à la Mcfle , lors de
:

la Communion , un des Officiers embraffe les autres : leurs


Evêques portent des anneaux à leurs mains , fous le prétexte
que leurs Eglifes font leurs époufes ils vont à la guerre , As
•,

lont tués après avoir tué leurs âmes. On dit qu'us batilcnc
par une feule immerfion , & qu'ils empliflent de fel la bouche
du batifé. Au lieu de lire dans la première Epître aux Co-
rinthiens : Un peu de levain levé toute la pâte , ils lifent qu'il
la corrompt. Ils n'honorent ni les reliques ni les images ; ne
comptent point entre les faints faint Grégoire le Théolo-
,

gien , ni faint Bafile , ni faint Chryfoftome , &


font beaucoup
d'autres chofes qu'il feroit trop long de détailler. Ce que Mi-
chel trouve de plus étrange , c'eft que les Légats avoient dé-
claré , étant k Conflantinople , qu'ils venoient , non pour être
inftruits , mais pour inftruire les Grecs & les engager à cmbraf-
ier les dogmes des Latins.
Lettre dePier- XXIV, Le Patriarche d'Antioche témoigne dans fa report
re d'Antioche fg
^ être furpris qu'Argyre n'étant qu'un laïc , fe foit mêlé
^'
lulariuî!
d'affaires cccléfiaftiqucs ( f ). Il alTure le Patriarche Michel
que le nom du Pape n'eft point dans Içs Diptyques de l'Egli-

(»)Tom. t» Mçnumem, Qottltr, p, 14J»


PATRIARC DE CONSTANT. Cm. XXII. 385
Ce d'Antioche ; mais que quant à ce qu'il lui avoit écrit de
Vigile, cetoit une faute grofficrc qui venoic fans doute de
fon Secrétaire, le fixiéme Concile ne s'ctant tenu que cent
vingt-neuf ans depuis la mort de ce Pape j que le cinquième
s'ctoit aflTemblé fous le Pontificat de Vigile ; que dans le fi*
xiéme , on avoit reconnu le Pape Agathon , qui vivoit lors de
cette grande AfTemblée ; que quarante-cinq ans depuis, étant
à Coniîantinople , il avoit remarque le nom du Pape Scrgius
dans les Diptyques de cette Eglife avec ceux des autres Pa-
triarches & qu'il ne favoit pas la raifon qui l'en avoit fait
',

ôter. Venant aux erreurs que Michel attribuoit aux Latins,


ïierre d'Antioche dit qu'il y en a qu'on doit éviter , d'au-
tres auxquelles on peut remédier , & quelques-unes qu'il faut
diflimuler. Que nous importe que les Latins fe rafent la bar-
be ; qu'ils portent des anneaux à leurs doigts ? Ne faifons-
nous pas une couronne fur la tète , & ne portons -nous pas
des gants , des manipules &
des étoles ornés d'or ? Si les Moi-
Latins mangent de la chair
tiés &
du lard , les nôtres en
mangent aufïi. Les faints Pères ont permis de mettre de la
graifle de porc dans les légumes quand on manque de bonne
huile ; &
faim Pacome nourrifToit des porcs pour en faire
manger aux hôtes , &
en donner les pieds &
les entrailles aux
Moines infirmes. Pierre d'Antioche s'étend beaucoup fur l'ad-
dition du filiuque au Symbole («). C'étoit , félon lui , le plus
grand mal que les Latins avoient fait , & il juge cette addition
digne d'anathême(;r). Il eft plus indulgent envers une autre
que l'on attribuoit encore aux Latins : Un Saint , un Seigneur
Stfui-Chriji^ dans la gloire de Dieu le Père. Il paroît que c'é-
toit la fin du Gloria in excelfis {y). En général il veut que
l'on regarde la bonne intention ; &
que l'on incline plutôt à
la paix &
à la charité, quand la foi n'eft point en danger:
car les Latins , dit il , font nos frères ; & nous ne devons pas
chercher la même exaditude chez des nations barbares que
chez nous, qui femmes nourris dans la dodrine. C'eft beau-
coup qu'ils penfent fainement fur la Trinité &
fur l'Incarna-
tion.
XXV. Il défapprouve les Latins en ce qu'ils défendoient Suite Je la
Lettre lie Pier-

, ,
red'Antioche.

(u) Vageiu. (7) Po^.154.


I
5^ MICHEL CERULARIUS,
aux Prêtres qui avoient des femmes légitimes (z), de toucher
aux chofcs faintes ; & en ce qu'ils mangcoicnt encpçe de la
chair & du laitage la première femaine de Carême. Il ren-
voie pour la queftion des azymes , à ce qu il en avoit dit dans
ia Lettre à l'Évêque de Grade & die qu'il ne peut pas croire
:

que l'ulage des. viandes fuffoquées , & le mariage de deux


frères avec les deux fœurs , foient autorifés chez les Latins
du confentement du Pape & des Evêques. On commet de
Xemblablcs excès à notre infçu dans l'Empire. Il y a bien des
gens à Conflantinople & hors de la Ville , qui mangent du
lang de porc & l'on y voit du boudin expoli" iur les bputi-p
;

qucs. Ces uiages communs en Occident & en Orient , lui


donnent lieu de dire au Patriarche de Conflantinople Vous :

yoyez , mon très - honoré Seigneur , que nous négligeons


quantité d'abus qui ie commettent chez nous , tandis que
nous nous appliquons à relever ceux des autres. Il lui repro-
che poliment de n'avoir pas été plus loigneux que fes prédé-
cefleurs , à retrancher un abus du Monaftere de Stude , où
les Diacres fervoient à l'autel , gyanc leur aube ferrée par une
ceinture , au dévoient la laiiïer flotter. I! lui con-
lieu qu'ils
feille d'écrire au Pape, quand il y en aura un d'élu ; car ils
^^voient appris la mort de Léon IX , &
de n inHfler qu-" fur
deux points , l'addition au Symbole & le mariage des Prê-
tres n'étant pas croyable que les Romains n'honoroient , ni
:

les reliques , ni les images des Saints ; eux qui fp g'orifient


tant d'avoir les reUques de faint Pierre &
de faint Paul (^a) ;
& qui , lorfqu'ils viennent dans nos EgUfcs , rendent aux
images toute forte d'honneur. On fait d'ailleurs , que le Pape
Adrien a préfidé au feptiéme Concile , &
anaihématilc les
IconoclaRes. C'eft pourquoi il conjure le Patriarche Michel
d'ufcr de condefccndance ; de confidérer que les maux de
l'Empire d'Orient vencient de la divifion entre leurs Egliics
& le premier Siège Apoflolique s'ils fc corrigcoient , ajoute-
:

t-il , à l'égard de l'addition au Symbole (b) , je ne demande-


rois rien de plus , &
je regarderois même comme inditiéren-
te la queftion des azymes , quoique j'aie démontré dans ma
Lettre à TEvêcjuc des Vencties, que Jcfus-Cluift lit la Ccnc

{a) Pa^e 158. |

avant
,

PATRIARC. DE CONSTANT. Ch. XXIT. ^85


avant la Pâque. J ai fait paflcrnos Lettres aux Patriarches
d'Alexandrie & de Jcrufalcm ; &
je vous envoie la rcpon-
fe que j'ai reçue du Pape de bonne mémoire. Elle eft en la-
tin n'ayant pu
: trouver ici perfonne qui pût la bien rendre
en grec.
XXVI. Michel Ccrularius écrivit une féconde Lettre à Lettre de Mi-
Pierre d'Antioche (c), où il témoigne, comme dans la pre-
jmiere , ion mécontentement contre Argyre contre les Le- & 1/ ^'i^*
rius à
Ceruia-
Pierra
a'Amîoche.
gats. Il dit que s'il n'a pas fait brûler leur écrit impie , c'efl:
parce qu'il avoit été mis publiquement fur l'autel ; mais qu'il
l'avoir anathématifé dans la grande Salle du Confeil par or-
dre de l'Empereur ; qu'il s'étoit aufiî abflcnu de tirer ven-
geance de l'infultc que les Légats lui avoicnt faite par cet écrit
pour ne pas donner aux Romains une occafion de fcandalc ;
& en conlîdération d'un de ces Légats , qui fe difoit Chan-
celier de l'Eglife Romaine , & coulin du Roi 8c du Pape. Il
ajoute (^) 5 qu'ayant exhorté fortement ces Légats à venir dans
•cette Aflcmbléc rétracter leurs erreurs , ils avoient répondu
que fi on les preffoit davantage , ils fe tueroient eux-mêmes.
I^ous vous mandons tout ce qui s'eft pafTé , afin que s'il vous
Tient des Lettres de Rome , vous fâchiez comment répon-
dre. J'écris la même chofc aux Patriarches d'Alexandrie So
de Jérufilem , à qui je vous prie de faire tenir mes Lettres j
& de leur écrire vous-même , pour les encourager à la défen-
fe de la foi orthodoxe , & les inflruire de ce qu'ils auront à
répondre , fi on vient à les interroger fur ce qui s'cft palTé à
Rome.
XXVII. L'Empereur Conftantin Monomaque mourut de Mort de Mi-

la goutte en 1054 (e). Théodora fœur de l'Impératrice Zoé l^^sen Tosl'


morte avant fon mari , régna feule depuis le commencement
de Décembre 1054, jufqu'au 22 d'Août 1056 qu'elle mou-
rut , après avoir déclaré Empereur Michel Strationique ; mais

il ne régna qu'un an & dix jours. A peine étoit-il fur le Trô-


ne , que le Patriarche Michel chercha les moyens de l'en
faire defcendre. Il en vint à bout , & fit proclamer Empereur
ïlaac Comnene, fils de Manuel , Gouverneur de tout l'Orient
fous l'Empereur Bafile Bulgaiodone. Ifaac fut couronné fo-

(c)Tom. 1. Monum, Couler. ps^, i63.. [


<t)CtDKEti. p. «17, Ç? /<'/. Zona R. /»i,

Tonts XX. Ccc


,,

iS6 MICHEL CERULARTUS,


lemnellement dans la grande Eglife de Conftantinop^e ^ le
premier de Septembre 1058 , le lendemain de l'abdication
forcée de Michel Strationique. Le Patriarche Michel comp-
tant fur la reconnoiflance que ce Prince lui devoit, ne ceffjic
de lui demander , ufant de menaces quand il en étok refufé.
Il poufla la témérité jufqu'à porter la chauflure d'écarlate
marque de la puiflance Impériale , dif int qu'il n'y avoit que
peu ou point de différence entre l'Empire & le Sacerdoce,
iraac offenfé de la conduite & des difcours du Pat:iarche^
l'envoya en exil à Proconefe. Il fongea même à le faire dépo-
fer : mais Michel prévint cet alfront par fa mort , qui arriva
en i05(?.
Se« antrei XXVIIT. On une troifiéme Lettre de ce Patriarche à
cite
Eciiu.
Pierre d'Antioche (f) , mais qui n'a pas encore été rendue
publique; une Meffe (^),& un Ouvrage contre les Latins (/i).
Il n'eu point encore imprimé. LHomélie prononcée le pre-
mier Dimanche de Carême vers l'an 1044, à la Fête du ré-
tabiinement des images , ie lit en grec Se en latin dans le ca-
talogue des manufcrits grecs de la Bibliothèque Coifline ( ; )
imprimé à Paris par les foins de Dom Bernard de Montfau-
con. Il y eft fait mémoire de Michel le Métropolitain , de
Photius, & du Patriarche Sifmnius , qui mourut en 5)^9 & ;

on dit anathême à tout ce qui avoit été fait ou écrit contre


Photius. Cette Homélie efl intitulée Lettre du Concile de Ni' :

eée, à la fainte Eglife â*y^lexandrie. Le Patriarche Michel ren-


dit plufieurs Décrets , dont il refle quelques fragmens i fça-
voir ( /) 5 un qui portoit défcnfe de contratSler mariage dans
le feptiéme degré de parenté un contre les Abbé, rebel-
;

les (m); un troiliéme contre les Arméniens («) ; un touchant


l'horr.icide commis dans l'Eglife ( ) ; un touchant les jugc-
mens des Evêques (p) un du (ixiéme Synodique {q). On
;

trouve aufTi un fragment du Décret du même Patriarche ,


dans le quatrième Livre du Droit Grec-Romain , au fujet de
la femme d'un Prêtre fouillée d'un adultère mais ce Décret :

(^i) Lambec. Lib. 3. Biùliot. Viudottn. (»f) Nico. Cf)MNFN./i'*«ot. utyPagog't*

f. u:o. )40. Patav. 6. 96.I

(h) Idem. iltiJ. p. z4.


(/;) Idem 'biJ. lib, f . », 1
1 J. (d) Idem. ihil. p. ifT.
(» ) l'ajft 9f'. loz. (fi) l/tem. ihiJ. pJX- ^^S'
(/, l.ib. j. fit'H Grrco Homani , pag, (y) Uim, ibid.p. 1^.
Zo6. 110. (5 iib.
4.f. 2ÉO. 163. 264.
PATRIARC. DE CONSTANT. Ch. XXII. 387
a depuis écc donné tout entier par M. CotcUer, dans fcs no-
tes lur le Ilcond Livre d'Hcrmas , intitulé , Le Paflfur (r).
il porte
, que
le Prêtre qui , ayant découvert le crime de l'a
femme , s'eft féparé d'elle , peut continuer l'es fondions ; mais
qu'il en fera privé , s'il ne la charte point de fa mailon. Ce
Prêtre avoit eu un fils de cette adultère. Michel ordonne que
Jean , c'étoi: le nom du Prêtre , retiendra les deux tiers de
la dot de fa femme pour l'entretien de l'enfant ; & que l'autre
tiers Icra porté par cette femme au Monaftere où on la ren-
fermera. On attribue encore à Michel Cerularius ( J ) , des
Sermons fur les Evangiles des Dimanches , un fur la Transfi-
guration , &
plufieurs Panégyriques des Siints du moins :

portent- ils fon nom dans un manulcrit de la Bibliothèque


de l'Electeur de Bavière. Pour ce qui ell; de la Mefle des Pré-
fan£lifiés, il y a plus d'appare'^ce de l'attribuer à Michel An-
chiali , qui écrivoit après le milieu du douzième fiécle.
XX iX. Nicolas Comnene cite un Livre de Léon d'Acri- ^"'^''^^'^
de ( f ) , fur la procciïion du Saint-Efprit , dans lequel il pré- cH^ç"^
tendoit montrer qu'il ne procède que du Père ; un autre &
contre l'ufagc des azymes dans l'Euchariftic. Le manufcrit
du Duc de Bavière («) , contient deux Lettres de Léon fur
les azymes Se le Sabbat contre les Latins. Beveregius en cite
trois fur le même fujet , dont il rapporte quelque choie. La
première &
la troifiéme font auffi citées par Léo Allatius. Lam-
becius avoit vu dans la Bibliothèque Impériale (a), un autre
Ecrit fous le nom de Léon d' Acride , intitulé ; Des tentations
involontaires & de leur milité , divifé en 50 chapitres. Léon eut
part , comme on Ta dit plus haut , à la Lettre de Michel Ceru-
Jean , Evêque de Trani.
larius à _. ,

XXX.
Cet Evêque en reçut une auffi de Pierre , Patriarche r^'d-Xitiocbc!
d'Antiochc (y) , fur les difputes de la foi entre l'Eglife Occi^
dentale & Orientale. On ne l'a pas encore rendue publi-
que, ni celle que le même Patriarche adreffa vers l'an 104^ ,
à Michel Cerularius, élu Patriarche de Conftantinoplc: elle
a pour titre dans les manufcrits: Lèvre fur VEgtife Romaine,,

(r) Tom. I. p. 87. («) OuDiN. Tom. 1. ;• S04. Bfverec,


(.•) OuulN. Tom. 1. Je Script. Eccle/tafî. in Ced. canon, tom. 1, <3 Allât, dt Con-
f. ÉOJ. fenf. Htriiif. Ecclif. p. ilS^iié?.
(x.) NicOL. CoMNEK.prrfwcf. myjtagoz. (i)LAMBEC. Lib.^. Éibliith. p. Jf9t

^l8J. (f) OuBIN. To»;j. 1. P. (îoç._

Cccij
388 MICHEL CERULARIUS;
Abbé
Si'raéoB XXXI. Siméon , que
Ton nomme le Jeune , pour le diftini*
deS.Mamas.
gy^j. de Siméon Métiphrafle, appelle l'ancien , étoit Abbé
du Monaftere de Saint Marnas à Conftantinople , vers l'an
10^0. Il fuf le Maure de Nicéras Peftorat qui a écrit fa vie ,
comm"- on l'a dit plus haut. Sitttéona lailTé an grand nom-
bre d'Ecrits , dont quel]ucs-uns ont été imprimés ; fçavoir,
trente-trois Difcours fur la foi & les moeurs, tant des Chré-
tiens en général , que des Moines en particulier ; un Livre
intitulé Des divins amours , & deux cent vingt-huit chapi-
:

tres ou maximes de morale. Ils ont été traduits de grec ert


latin par Jacques Pontanus , & imprimés par fcs foins à In-
golftat, avec quelques autres Opufcules des Grecs , traduits--
aufli en latin en i ^03 , chez Adam Sertorius in-4", & à Lyoll
en 1677, ^^^^ Is vingt- deuxième volume de la Bibliothè-
que des Pères. Les notes ne font point de Pontanus, mais de
Gretzer. A ces Traités, Pierre PoufTines en a ajouté un qu'il
fît imprimer à Paris en 1^57 , à la fuite des Lettres de faine

Kil , difciple de faint Chryfoftome. Siméon y examine l'al-


rération & l'impreiïion que les élémens font Rir le corps &
fur l'ame des hommes. Ce Traité eft fuivi , dans la Bibliothè-
que des Pères , d'un autre qui a pour titre ; De Dieu, ou de
la manière dont Dieu eft dans tous les lieux , 8c comment fa
lumière eft répandue par- tout. Quoiqu'on ne life point le nom
de Siméon à la tête de ce dernier , mais feulement celui de
Scholajtique , on ne laifle pas de le lui attribuer , à caufe de la
conformité du ftyle & des principes. Ses Difcours & fes ïn-
flru£tions font en profe \ fon Livre des divins amours porte
dans quelques manufcrits, le titre d'Hymnes ce qui a donné
:

lieu de croire qu'il étoit en vers de différentes mefures. Pon-


tanus qui avoir d'abord donné dans cette opinion , la rejet-
tée , ayant examiné la chofc de plus près. Siméon avance plu-
Ceurs propoficioTïs , qui, prife à la rigueur , vont à établir le
Quiétifme ; & qui l'ont fait regarder comme la fource où les
Héfychaftes & Palamas ont puifé : mais en les rapprochant
des principes qu'il établit ailleurs , on peut leur donner un
bon fens. Il paroft qu'il fut acculé d'erreur de fon vivant,
puifque Nicétas Pcctorat fon difciple , entreprit de le défen-
dre dans un difcours apologétique, intitulé: Contre les accu-
fiieur^ des Saints.
Ccqu'ilya* XXXlî. Simécn enfèigne que depuis le péché d'Ailam y
iamks^Ewùs ^'^^^^^ hommes font pécheurs des leur naillance mais que
,
MTRIARC. DE CONSTANT. Ch. XXIT. 389
tégénérés par leSainc-Efpric dans les eaux faluraires du Ba- Je Sîm^onle
•'^""^*
tême , ils font rétablis dans les prérogatives de leur premier
état {fj). Telle eft la vertu du Batême , que ceux qu'il a lavés ,
font invincibles au péché ; ou du moins ils s'y laiiïent aller
difficilement , étant fortifiés fur - tout par la participation du
fang de Jefus-Chrift car cefl lefang cCun Dieu. Si après avoir
:

reçu ces Sacremens, ils commettent des péchés (è), il faut


qu'ils recourent aux Evêques & aux Prêtres du Seigneur pour
les expier par la pénitence. Quoiqu'il ne dife pas que le Saint-
Efprit procède du Père & du Fils (r) , il ne laifle pas de
croire qu'il eft l'Efpric du Fils j & que le Batême doit s'ad-
miniftrer au nom de la conlubftantielle Trinité. Comment
donner le nom de Chrétien à celui qui , par fcs œuvres , renon-
ce chaque heure à J. C Ces paroles font bien voir que Siméon
'(

ne croyoit pas que le Batême rendît impeccable , comme quel-


ques-uns l'en ont acculé. Il s'explique encore plus clairemenc
lorfqu'il dit, qu'il y en a qui le dépouillent pour ainfi dire, ,

du Batême , c'eft-à-dire , de la grâce qu'ils y ont reçue ( ^ ) ,


en vivant d'une manière qu'on diroit , à en juger par la per-
verfité de leurs mœurs , qu'ils n'y ont poi it renoncé aux pom-
pes du démon. Il ajoute , qu'il y a beaucoup de Chrétiens
qui vivent de cette forte , & il les met au nombre de ceux à
qui l'on doit refufer la Communion du Corps & du Sang de
Jefus-Chrift; parce que, comme dans un même vafe , le feu
ne peut demeurer avec l'eau , de même le Corps très pur de
Jefus-Chrill& le pé^hé déteftable, ne peuvent fublifter enfem-
ble dans un même Chrétien. Il en exclut auffi ceux qui font
poflTédés du démon.
XXXIII. Il propofe à ceux qui veulent s'avancer dans la
vie fpirituellc {e) , les exemples de faint Arfcnne , de faine
Eutymius , de faint Sabas , & de quelques autres ; pofe pour
principe que , comme l'orgueil eft la caufe de la perte de
Fhomme , il ne peut fe fauvcr fans la vertu d'humilité , qui eft
toujours jointe a la vraie pitté (/) ; dit que Dieu ne s'eft fait
homme , qu'afin qu'il put mourir pour nous dans fa nature
humaine (g ) ; «& que tout ce que nous faiions en cette vie ,

(«) Orat. i. p. 619. tom, 2X. Bibliot, t {d)r>riit. f.


tat. I (f) Orat. 7.
(.h) Or.u. î. l Cr.,t S.
If)
0) Oiat. }. I (g, OiM. ^,
390 MICHEL CERULARIUS,
nous devient inutile , Ci nous ne
pour notre falut."
le faifons
Il regarde les jeûnes , les veilles, \s chant des
, les aumônes
Pieaumes comme inutiles pour le pécheur (h) , s'il ne defire de
fe réconcilier avec Dieu. En expliquant ces paroles de l'E-
vangile Celui qui croira
: &
recevra le Baiê/ue ,fer.i Jauvè , il
ehfeigne que la foi dont il eft parlé en cet endroit , renferme
lobfervation des Commahdemens de Dieu (i). Il dit à ceux
;qui vivent dans des Monafteres, de conferver pour celui qui
1
en eft le père , le refped & l'amour qui lui font dûs , fût-il en-
gagé dans de mauvaifes habitudes ( /) ; à ceux qui ne vi- &
vent point en Communauté , de fe choilir un pcre fpirituel ,
pour fe mettre lous fà difcipline, lui obéiftantcommeà Jefus-
Chrift même. Il femble autorifer le dif<.iple à venger l'injure
faite cl fon maître , &
lui permettre de couper au calomnia-

teur , non-feulement l'oreille , mais la main la langue : mais &


ee n'eft qu'une façon de parler , pour marquer le zèle que la
ïeconnoiÀTance doit infpirerau difciplc envers le maître, pour
^n foutenir l'honneur. La règle qu'il prefcrit à ceux qui font
chargés de la conduite des autres (w), eft de rendre facile
par leurs exemples ce qu'ils ordonnent à leurs inférieurs. Il y
â un difcours entier pour l'inftruttion d'un Novice , avec le
détail de tous les exercices monaftiques ( « ) le chant des :

Pfeaumes , la prière , le travail des mains , la lefture , le filen»


ce. Il étoit permis de manger deux fois le jour : mais on
permettoit aufti de ne faire qu'un repas à ceux quienavoient
ia dévotion. Un Moine ne pouvoit entrer dans la cellule d'un
autre , fans l'ordre du Supérieur. Ils étoient obligés de décou-*"
vrir leurs penfées à leur pcre ipiritucl.
XXXIV. Siméon dit ,
qu'il s'étoit élevé de nouveaux hé-
tétiqucs (o) , qui enfcignoient qu'aucun homme dans le fié-
cle où il vivoit , n'avoir pu obferver les Commandcmens de
Dieu , ni imiter h vie des faints Pcrcs C'éroit , comme il le

remarque , rendre inutiles les fainces levures, foit de l'Evan-


gile, foit des écrits des faints Pères , & fermer le Ciel que
Jefus-Chrift nous a ouvert. Dans tous fes difcours il appuie

beaucoup fur l'efficacité des larmes , fuppofant qu'elles ont

(i)Oj-(if. 12. i^, 17. (m) Or/If. 14.


I
(i)Orat. îî. j
(n) Ortt. t^.
ll)Orat.zj. I
(o)Orat.yO.
,

PATRIARC. DE CONSTANT. Ch. XXII. 3^1


leur fourcc dans la douleur intérieure de l'amc. Il ne croit
pas routcfois qu'il foie abfolument néceflaire d'en répandre
& penfe qu'il fuffit de le délirer fincérement (p ). Dans le
dernier difcours , il traite de la pénitence du premier hom-
me ( «y ) , &
de celle que nous devons faire pour nos péchés,
non en nous faifant mourir nous - mêmes , mais en morti-
fiant notre chair , &
en nous excitant à la douleur au re- &
pentir.
>vXXV. LeLivre des divins amours clR; compofé de qua- livre ^es<K-
^'"' an>o»«S'
rante chapitres ( r ) , où après avoir invoqué le Saint-Elprit

par une fort longue prière , il en feigne de quelle manière


nous pouvons nous unir à Dieu par l'amour ; transformer nos
membres en ceux de Jefus-Chrift , être remplis du Saint- &
Efprir , qu'il dit clairement procéder du Père & du Fils (s).
Le Saint -Efpric , en nous rempliflant de fes lumières , nous
élevé au deflus de toutes les choies créées , au-deflus de &
nous- mêmes ; en forte qu'infenTibles à toutes nos paffions,
nous arrivons à une heureufe apathie. Siméon racon'e avec
étonncmcnt ( t une vilion qu'il avoit eue , femblablc à celle
)

que Dieu accorda à faint Paul & à faint Etienne Qu ). Cette


faveur ne diminua en rien les bas fcntimens qu'il avoit de lui-
même (;r) , de Prêtre & d'Ab-
faifant réflexion fur fa dignité
bé : Comment impur que je fuis , m'a-t-
, dit-i , miférabic &
on établi pour Supérieur de mis frcres , pour Sacrificateur
des divins Myfteres, & pour Miniftre de la fainte Trinité?
Car lorfque l'on met fur la 1 able lacrée (7 ) , le pain & Ig
vin pour former votre Corps & votre Sang, ô Verbe, vous
y êtes prélent, ô mon Dieu , & ces chofcs deviennent vérira-
blemont votre Corps & votie Sang par l'avènement du Sainc-
Elprit & par la force du Trcs-haiit. C'eft ce qui produit eji
moi des fcntimens de crainte , au lieu d'en produire de joie ;

' '

(u)Caf>. II.

(T)Tnm.ix BlHiot.Pat.p.6pfi (yj Quando enlm psnîï ponifnr Ht vî-


( .'
) Hïc eft enm vita c gnofcere te num hauritur adCorpus & Sanguioiem
folum Deum , non nntum , non cre tum , tuum , ô Verbum confiippdnm, ibi
, :

folum abfque principio & Filium ex te , tu ipt'e Deus meus S: h.Tc v rè Corpus
,

gen'tum & pr-.edtntem ex utroque Spi


, tiuim & S.nnrus fii:nt Aiprrvernu 5piritùs
riti m Sandittimum. Simeon ,i>i. Divin, l "Candi , virtuieque Altiflimi. Simïon. Dt
»mpr. cip, 3. p. 65>8. divin. am<ir,(itp. 14.^,704.
I
(f)C«/. 9. \
35)1 MICHEL CERULARIUS,
lâchant bien que moi ni aucun homme fur ia terre , n'cfl: di-
gne d'exercer ce Miniftere , qui demande une vie angélique
& plus qu'angclique , afin de pouvoir s'acquitter dignement
d'une fonction qui nous rend plus familiers avec Dieu que les
Anges , puifque nous manions avec les mains nous prenons &
par la bouche, ce que les Anges révèrent profondément, 8c
qu'ils environnent avec tremblement.
XXXVI Siméon avoit été envoyé en exil (z) , & on lui
avoit fait fouffrir de violentes perfécutions. Il en rend grâces
à Dieu , comme d'un moyen d'effacer les péchés de ia vie :
il enfeigne aux autres à fléchir la miiéricordc du fouverain
Juge ; &
à s'unir à lui par la contemplation , par les tra^ &
vaux de la pénitence (a). Ce qui le juflifie du Quictifme.
morale/"
^ XXXVII. Il en efl encore juflifie par divers points de mo-
rale {b) , qu'il établit dans fes deux cent vingt-huit Chapi-^
très. Il n'y connoît d'autre voie pour arriver à la vie éter-
nelle , que l'obfcrvation des préceptes év^ngéliques. Souffrir
la mort pour Jefus-Chrifl , aimer la pauvreté les mépris ; &
n'avoir aucune attache aux richeffes (c) ; endurer patiemment
les afflictions &
les calamités ; renoncer au monde (^d) , à fes
plaifirs à fes vanités ; aimer fes ennemis , prier pour eux (e).
,

Il conleille la ledure des divines Ecritures , les Traités &


pratiques des Pères (/) , pour en comparer les inftru£tions
javec celles que nous donnent nos Maîtres. Toutes ces ma-r-
ximes fervent à expliquer ce qu'il dit au Chapitre 65 Dieu :

ne demande rien autre chofe des hommes , finon qu'ils ne


pèchent point (g). On peut dire encore que cette propofition
efl vraie à la rigueur , parce qu'on ne pèche qu'en violant la
Loi", & on ne pèche point quand on Tobfcrve. Cependant il
diftingue lui-même ces deux choies dans le Chapitre 94 (h).
Autre chofe, dit -il , de ne pas pécher , & autre d'obferver
les Commandemens de Dieu. La première appartient à ceux
qui font parvenus à l'apathie ; la leconde , à ceux qui com-
battent encore , & qui vivent félon la règle de l'Evangile.
Les péchés que nous commettons après le Bateme , nous en

(i) Caf.
ia)Cap.
n^ Petit, Prétfat. ad Ltfftr. I {e) Cap. x9.
18.
I (/J Caf. ^9.
(*) ihid.p. 7JI, [i)Ci^. 6^,
j
(0 C-JJ>. 9. 10.
I (*) G^p.p^'

font
PATRIARC. DE CONSTANT. Ch. XXII. 395
font perdre la grâce nous pouvons la recouvrer par la pé-
;

nitence , la confeflion &


les larmes (i). La plupart des ma-
ximes contenues dans ce Livre , regardent les Moines. Il pa-
roît par la 204 , qu'il ne douroic point qu'en prenant l'habit,
c'efl-à-dire , en faifant profefîion de la vie monafliquc ( / ) ,

on n'obtînt la rcmiflion des péchés , comme on l'obtient par


la confcfTion. Il fuppofoit , fans doute , que le changement

d'habit étoit accompagné d'un changement de mœurs , &: de


toutes les autres conditions qui fe trouvent dans une véritable
converfion.
XXX Vin. jNous n'avons que des tradu£lions latines de tous
i/-\
lesOuvrages de parler
dont nous venons
jïvn
a 1 exception du
Traité de V altération que les élémem caufent fur le corps fur
;
!
&
Ouvrages de
Siiiiéon
imprimés.
non

l'ame , que le Père Pouffines a donné en grec & en latin. Si-


méon compofa beaucoup d'autres Ecrits qui n'ont pas encore
vu le jour. Léo Allatius en a fait le Catalogue dans fa Dif-
fertation fur les Siméons {m). On en trouve aufTi une notice
dans les deux Tomes des manufcrirs d'Angleterre , imprimes
à Oxford en i6g6 & 1(^5*8. La plupart ne font que des in-
ftrudions qu'il faifoit à fes Moines. 11 y en a toutefois quel-
ques-unes de purement théologiques. Celles, entre autres,
où il fait voir que le Père , le Fils & le Saint-Efprit font une
même fubftance & où il explique ces paroles de faint Paul :
',

Ceunqtie Dieu a connus dans fa prefeie?ice , il les aufji prédejîinés;


dont quelques Interprètes avoient perverti le fens. Il donne
dans d'autres , l'explication de divers paflages difficiles du
même Apôtre. On peut voir dans Fabricius &: dans Oudin ,
les titres de tous les Ecrits de Siméon le Jeune («) , qui n'ont
pas été rendus publics. On le fait auteur de l'erreur enfeignéc
depuis, par quelques Moines Grecs , que la lumière qui parût
fur le Mont Thabor , lors de la Transfiguration de Jefus-
Chrift , étoit la lumière incrééc& éternelle de la Divinité ; 8c
que la félicité des Juftes confifte à la contempler. Siméon
fait , il çd vrai ( ) , un parallèle entre la lumière qui fait le
fujet du bonheur des Saints , & celle que les Apôtres virent

ii)Cap. 171. 30. OoD:N. Tom. 2. Scriptor, Eeclef. pag,


( / ) Cap. 104.
10) SiMtoii, Jt Dto , pag. 750. T»m, ni
{/>) Fabric. Tom. 10. Bitlitt, Gr4t.f Biiliot. Pal,

Tome XX, Ddd


394 J E A N MA UR O P U S ;
^
fur le Thabor mais ; il ne dit pas que ce foit la même. Il avoît
dit plus haut, que les Anges &
les Saints voient la gloire de

l'Efprit de Dieu refplendiflantc , comme la lumière d'un é-


clair , &
dans cette lumière le Fils le Pcre. Il ajoute, que &
Dieu lumière ;
eft &
que ceux qui le voient , ne voient que la
lumière. Il confirme cette penfée parle témoignage des Apô-
tres , qui virent le vifage du Sauveur refplendiffant comme
un foleil , &
fcs vctemens blancs comme la neige. Siméon efl:
quelquefois iurnommé Xerocerce ; mais fon vrai lurnom eft
Xylocerce (p) , c'cft-à-dire , cerc le de bois ; du nom de la porte
du Monaflere de Saint Mamas , bâti fur pilotis.

CHAPITRE XXIII.
Jean Mauropus , Métropolitain d'Euchanie ; Jean de Gar~
lande i Alexandre &
Anjelme de Lié^e ; Jean Géo-
mètre,

Jenn Mauro j. T E
premier état de Jean Mauropus ou Melanopus, fut
versi'anVojo -L* dc Moinc. Il joignit fétude aux exercices mo-
celui
&1054' nafliques , &
fe chargea de Tinftruâtion des jeunes Reli-
gieux (7). Son deffein étoit de s'en occuper toute fa vie,
trouvant dans ce genre d'occupation, le moyen d'éviter les
foins &
les dangers qui font inféparîbles des grandes digni-
corriger les fautes qu'il trouvoit dans
tés. Il s'appliquoitauffi à
les en particulier dan»; les Menées des Grecs:
Livres (»") ,

mais on le rira malgré lui dc fon Monaflere, pour le faire


Evcque & Métropolitain d'Euchanie dans l'Alie mineure. Il
croit alors dans un âge avancé. Il oppola à fon Ordination
le défaut de forces {s) ^ p-iur remplir les devoirs de la di-
gnité à laquelle on vouloit l'élever. Il ne fut point écouté.
On voit p.T un en Iroit de fes Ecrits ( r) , qu'il vivoit encore
du tems de l'Empereur Conftantin Monomaque , de l'Impé-

(ù) U-J.p.9i6. I (0 ^''.(f. f.9.


(^) JoAN. Maurop. 0/»r. p. J9.
I
(i)P.(^. 43,
(r) Pag. 70. l
,

METROPÔLIT. D'EUCHANIE. Ch.XXIIT. 5^5


ratrice Zoé & de Thcodora la loeur e'cft-à-dirc en 1050, , ,

puifqu'il y à Jefus-Chiin; de leur prêter Ion fecours


demande
dans le gouvernement de TEmpirc , comme il l'accorda aux
trois jeunes hommes dans la fournaife de Babylone. On met
fa mort vers Tan 1054 ; mais il faut , ce femble, la retarder
jùfqu'en 1C5J2.
1(. Jean laifla un grand nombre d'Ouvrages , dont la plu- ^^s Ecrits;
'^'^'^'*
part font demeurés dans l'obfcuritc des Bibliothèques. Mat- ^

thieu Bufte imprimer en grec plufieurs de fcs Epigrammes


iit

& de à Etone en i^io, in-4°. le volume entier


fes Poèmes
ne contient que 75 pages l'Editeur a mis à la fin quelques
:

jiotes de fa façon, où il fait paroître de l'érudition. Il femble


que Mauropus ait lui-même rendu publiques fes Epigrammes,
avant que de répandre les Ouvrages qu'il avoir compofés en
profc & en vers , pour preffentir le goût du public. On trou-
ve dans les Livres eccléfiaftiques des Grecs plufieurs monu-
mens de fon efprit & de fa piété ; fçavoir des Canons ou des
Hymnes pour les Fêtes de faint Bafilc , de faint Grégoire de
Nazianze & de faint Chryfoftome. Le Père Raye les a fait im-
primer en grec & en latin dans fa Differtation préliminaire , à
la tête du fécond Tome des Saints du mois de Juin ( « ) j avec
une hymne en l'honneur de la Mère de Dieu (x). Allatius en
cite une fur Nicolas (y ).
III. Il rapporte auiïi quelques fragmens de la vie de fainte viesdesSaints
Eufebie par Jean Mauropus ( z ) » pour appuyer la dodrine & autres E-
de l'Eglifc fur le Purgatoire. Jean écrivit encore la vie de ""*•
Dorothée le Jeune , dont il avoir été difciplc. Elle fe lit dans
le premier Tome du mois de Juin , de la tradudion du Père
Conrad Janning. Ce font là les feuls Ecrits de cet Evêquc
que l'on a mis fous la preffe. On ne fait ce qu'efl devenue
fa Chronographie, Il témoigne qu'il ne l'avoit conduite que
jufqu'à fon tems exclufivement ( <^) , de peur qu'on ne fac-
cusât de flatterie ou de partialité dans le récit des événe-
mens.
IV. On croit que toutes les fois que l'on cite quelque chofe EcritsdeMa«.
fous le nom de Jean {b), dans la Chaîne des Pères Grecs par
p°E°"^'

(tt) Vag. fp. (a) MWKOP.pag. 69-


W 49.
P'î<r.

Allât,
(i) FaBRIC. Tpw. 7. Bihliot. Gr*f. pMgi

{y ) in Hotthig. p. i8 V 71Z.
(i) Idem, Lib, de l'tir^nt. p. 754.
Dddij
7p6 JEAN MAUROPUS,
le Pcre Cordier , il faut l'entendre du Métropolitain d'Eu-^
chanie , & non de faint Chryfoftome , qui y eft toujours cité
fous ce nom , & non fous celui de Jean. Il eft dit dans le
Catalogue des manufcrits de Conftantinople ( c ) , que Jean
d'Euchanie ajouta au Commentaire d'Origene fur les Pfeau-
mcs. Allatius lui attribue un grand nombre de Difcours (d) 5
fur faint Théodore Martyr ; fur le trépas ou fommeil de la
fainte Vierge , Mère de Dieu ; fur la fynaxe des faints An-
ges ; fur faint Théodore Teron ; fur fainte Eufébie ; fur les
faints Bafile , Grégoire & Chryfoftome ; & un en mémoire du
grand Triomphateur & du miracle fait par les Barbares. Il y
a de lui dans les manufcrits d'Angleterre (e) , un Commen-
taire fur les grandes tables des Fêtes , en vers ïambes ; & 1 02
Poèmes fur des fujets de Religion , avec fa vie au commen-
cement ; 8c dans celle de Vienne (/) , vingt-quatre Canti-
ques adrefles à Jefus-Chrift > qui ont chacun un acrofliche
particulier ; & deux fans acrofliche & fans nom d'Auteur ;
foixante-dix-fept Cantiques à la fainte Vierge ; onze à faint
Jean-Baptifle. Ce n'efl donc pas fans raifon , que les Grecs
lui donnent une des premières places parmi les Poètes Ecclé-
fiafliques. On met ordinairement fa mort vers l'an 1054:.
mais on ne peut douter qu'il n'ait furvécu à l'Empereur Con-
fîantin Monomaque , mort en cette année - là ; puifqu'il le-
pleure dans un de fes Poèmes (g ). II furvéquit même à l'Im-
pératiice Théodora; & pouffa fes jours julques fous le régne
d'Alexis Comnene; du moins trouve-t-on un Jean , Métro-
politain d'Euchanie ( h) , parmi les Métropolitains qui s'af-
femblerent avec Nicolas , Patriarche de Conftantinople , en
10^2. Le recueil de fes Poëmes en contient trois en l'hon-
neur de Conflantin Monomaque (i) , & un à la louange de
l'Impératrice Théodora. Il fît le premier à l'occafion de l'I-
mage que lés Euchaniens dédièrent à ce Prince , & dans la-
quelle ils enchâflerent une particule de la vraie Croix.
Jean de Gar- V. Jcan de Garlandc , Anglois de Nation , fe rendit céle-
lande.

(0 Uid. f.i66. 174.


(d) Allât. Diatrib. de Simton^Stript.. ( ? ) Maurop. p. f 4.

p. Sz.Ji 99. Io<!. I I :. I 5.1 ( /; ) Lib. 3. Juris GrtFco Romani , f»g.


(e) Ol'DlN. Tom. i. Script, Eccltf. p.

(/") LâMBECius, Lib. j. Biblitt. l'imi.


JEAN DE GARLANDE. Ch. XXITI. 3^7
bre vers le milieu de ronziéme ficelé , par divers Ouvrages de
Pocfle, de Grammaire , de Chymie, de Mathématique , de
Théologie. Il y en a peu d'imprimés , on ne les connoîc &
que par les Catalogues des manufcrits d'Angleterre , ou par
la notice qu'en ont donnée Bala^us , Pitfeus & VofTius ( /) :
en voici le détail. Un Poème des Myfleres de r E^li/e , adreffé
à Foulques, Evêque de Londres, avec un Commentaire fur
ce même Poëme ; Leyferus en a rapporté le Prologue & le
premier chapitre , dans fon Hifloire de la Poéfie du moyen
âge (fw). VEptîhalame de la faime Vierge j un Livre de la
Pénitence i un Comput Eccléfiaftique , à l'imitation de celui de
Bcde , avec une Table pafchale le Cornutus ou Difliques he-
-,

xamètres moraux , imprimé à Haguenau en 1489 j un Traité


de l'accent , fait apparemment pour enfeigncr la manière de
bien prononcer en lifant dans l'Eglife car il commence par :

ces paroles Vous qui cherchez à vous itjflruire de la règle de


:

VEgliJefacrèe. Ce fut dans le même deflein que Jean de Gar-


lande compofa un Traité de l'orthographe. Cela paroît par
les deux premiers vers («), que Leyferus en a rapportés les au- :

tres Ecrits de Jean n'intéreflent point notre fujet (0).


VL L'Eglife de Liège doit la connoifTance de fon Hifloi- ci^l,"^"'''^'^
re à deux Chanoines de fa Cathédrale , l'un nommé Aie- Li/g"?"*
xandre , l'autre Anfelmc. Le premier l'entreprit à la follici-
tation de la vénérable Ide , AbbefTe de Sainte Cécile de Co-
logne (p) , qui avoir quelque droit d'exiger de lui ce travail,
parce qu'elle l'avoit levé des Fonts du Batême. Le deffein de
cette Abbeffe étoit moins d'avoir la fuite de l'Hiftoire des E-
vêques de Liège commencée par l'Evêque Notger & par l'Ab-
bé Heriger , que celle de faint Ebcrgife , Evêque de Ton-
cres , dont on avoir les reliques à Cologne ; & celle de Vazon
Pun de fcî fucceffeurs , mort en 1048. Alexandre divifa fon
Ouvrage en deux partiras. Il donna dans la première , l'Hi-
ftoire abrégée des vingt-fept premiers Evêques de Liège ce :

qui le conduiloitjufqu'à faint Remaclc. La féconde commen-

(/) BALitOs. cent. îf f. 48.PiiSj£US.


. (0) VcfeX. Fabricius , tem. 5. ÉiHiot.
Voss. At hiflor. latin, cap. 44./». 3*9. Latin, lib. j.f, 56. Çj Oniirr. ,om, pag,
610.
(») Si quis in F.cc!e(îa Legisufquam ver- (;î)Martekke, ColkH: aKjpHf. tom.
bula diva ut vires vitia , fis doàusin ortho- 4. p. 845.
graphia. Leys.^. J40.
35?8 ALEXAND,;CHAN.D;E.LIÉGE,Ch. xxiir.
ce. ThéodaTd
par Taint &
va juicjuV Vazori , donc il'fairune
vie beaucoup plus déraillce que de fes prédéceffeurs , pour ie
conformer aux defn s de T Abbeffe Ide. L'Ouvrage fini , il la lui
dédia. Anfelme nous a confervé un fragment de TEpître dé-
dicatoire (q) ; 8z c'eft tout ce que nous favbns de l'Ouvrage
d'Alexandre.
Anfelme, VII. Soit qu'il n'eût point été goûte , foit pour quelque au-
Lic'ge?"^
^
trc raifonque nous ne l'avons pas , Anfelme auffi Chanoine
de Liège , travailla fur la même matière , par ordre de fes
Supérieurs , ou , comme il le dit , des premiers du lieu. Il étoic
de condition noble (r) , & joignoit à beaucoup d'efprit une
grande intégrité de mœurs. Toutes ces qualités lui mérite-»
rent l'eflime & la confiance de l'Evêque Vazon & de Théo-
duin fon fucceffeur celui-ci le mena à Rome en 1053. Afon
:

retour il fut fait Doyen de la Cathédrale de Liège (s). Il eut


parc en i o 5 5 , au choix que l'on fit d'un Abbé de Saint Hu-
bert. Les fuffrages tombèrent fur Thierry , & ce fut Anfelme
qui les détermina avec Godelcale homme de vertu & de pro-
bité connue. La réputation de Thierry n'étoit pas moins bien
établie. Anfelme l'ayant ramené de Rome à Liège , l'Em-
pereur Henri l'avoit demandé à l'Evêque Théoduin pour pré-
îider à l'Ecole de Fuldc ( f ). Anfelme vivoit encore en 1056,
puifque ce fut en cette année qu'il publia fon Hiftoire (u). On
ne fait combien il vécut depuis.
Son HifVoire VHI. Il la divifa en deux parties , comme avoit fait Ale-
de L^e-e!"" xandre
(x) ; mais au lieu que celui-ci n'avoit donné dans la
première , qu'un abrégé de celle d'Heriger , Anielme la co-
pia toute entière entière , en la divifant par chapitres , met-
tant à chacun fon titre , pour en faciliter la ledure &z la ren-
dre plus méthodique II compofa la féconde partie fur les mé-
moires qu'on lui fournit (t) , fur le rapport des perfonnes
dignes de foi , fur ce qu'il avoit vu lui-même , & fur ce qu'il
trouva dans l'Ouvrage d'Alexandre , commençant comme
lui cette féconde partie par faint Théodard , & la finilTant à
Vazon. Il dédia le tout cà Annon , qui avoit été ordonné Ar-

{sMbiJ.
(r) Mahil. Tom. ). ABor.pag. J6j. in ( «) ]bid. pag. 839.
vit a Tbeoil. iinm. iç. (v) Marten. /o;». ^. atiifliJJ'. Colltfl.

(O Marteîje. tom, 4. amiliff. dlhS. 839.


(;) Uiil.pageB44,
JEAN GEOMETRE. Ch. XXIII. 35)5,
chevêque de Cologne l'année précédente 1055. Dom Mar-r
tenne & Dom Urfin Durand , n'ont fait imprimer que cette
féconde partie , parce que Chapeaville avoir publié la pre-
mière en 16 iS. Son édition contient non-feulement THilloi-
re des Evêques de Liège par Hcriger , mais encore celle
du Chanoine Anfelme , & les additions de Gilles Moine
d'Orval , celle d' Anfelme n'y cil: point dans fon entier ;
ce n'efl; qu'un abrégé peu exad. Il croit donc important de
publier une nouvelle édition de cette Hiftoire ; & on doit
d'autant plus eflimer celle qu'en a donné Dom Martenne ,
qu'elle paroît avoir été faite fur l'original , le manufcrit d'où
il l'a tirée étant de plus lix cens ans (z). L'Hifloire des Evê-

ques de Liège comprend également celles des Evoques de Tcn-


gres & de Maflricht , qui n'ont occupé fuccefTivement qu'un
même Siège Epifcopal , placé d'abord à Tongres , puis à Maf-
tricht & fixé enfin à Liège («).
IX. Les Chaînes grecques fur S. Luc , font fouvent men- ^anGéome-
tion de Jean furnommé le Géomètre , & il en efl parlé aufli
dans la Chaîne d'or de faint Thomas d'Aquin ; mais on n'y
trouve rien qui puiflfe fixer le tems auquel il ècrivoit. Nous le
mettrons parmi les Ecrivains de l'onzième fiécle , comme a
fait le Père Combcfis. Jean s'appliqua particulièrement à com-
pofer des Hymnes & des Epigrammes , & toujours fur des
matières de piété. Ses quatre Hymnes en l'honneur de la Mère
de Dieu , font en vers èlègiaques , donr les hexamètres com-
mencent par le mot Jft'0«5y<s!/Me, ou c|uclque autre équivalent:
ces quatre Hymnes contiennent en tout trois cens vers , fans
compter le Corollaire qui cft en huit vers ïambes. Le Poète
y avettit qu'il a employé dans fes Hymnes les vers hexamè-
tres comme les plus parfaits , à relever dans Jefus- Chrift la
nature divine; ife les pentamètres , à célébrer ks louanges de
fon humanité. Frédéric Morel , Profeffcur Royal en langue
grecque, les publia en grec & en latin à Paris en 1591, in-
H". avec une Epître dédicatoire au Pape Grégoire XIV. En
155)5 ,il fit encore imprimer en grec & en latin un autre E-
crit de Jean le Géomètre , intitulé Le Paradis , compolc de
:

p6 Epigrammes, chacune de quatre vers èlègiaques , fur di-


vers fujets de morale. Il y rapporte aufli les paroles & les faits

(t) Util. ;. 858, («) IbiJ.fflg. 843.


4DD JEAN GEOMETRE. Ch. XXÎIT.
remarquables de plufieurs anciens Moines de réputation , faîntf
Achillas , faint Agathon , faint Antoine , faint Arfenne , faint
BeflarionSc plufieurs autres. Les quatre Hymnes furent réim-
primées à Genève en i6i^ y dans le recueil des Poètes Grecs
héroïques &
élégiaques. L'édition du Paradis faite à Vc-
nife en iç(Î5 > in- 40. n'efl: qu'en grecque {a). On lui a
donné place dans la Bibliothèque grecque & latine des Pères
à Paris en 1^24. La traduftion ou métaphrafe latine eft de
More! ( ^ ) ; de même que celle des quatre Hymnes en l'hon-
neur de la Vierge , qui ont aufli été réimprimées dans cette
Bibliothèque. On les trouve dans celle de Lyon , mais feule-
ment en latin. Il paroît par les fréquens éloges que Jean le
géomètre fait de la vie monaftique (c) , dans fon Paradis , qu'il
en faifoit profeflion.
Autres Ecrits X. Il compofa plufieurs autres Ouvrages , qui n'ont pas en*
Géomeue.^ corc été mis
fous la prefTe ; une métaphrafe ïambique des Can-
tiques de l'Ecriture (^) ; des Homélies fur la Paffion de Je-
fus-Chrifl: ( e ) , fur le trépas de la fainte Vierge , & une troi-
fiéme en forme d'aâions de grâces à cette iaintc Mère de
Dieu. Il convenoit , dans la féconde , qu'il avoit rapporté
non-feulement ce que les Prophètes &
lesÊvangéliftes avoient
dit de Marie , mais encore ce qu'il en avoit lu dans des Lî-»
vres apocriphes des Hymnes pour les grandes Fêtes de l'an-
*,

née (/) une fur la fainte Vierge , dont les lettres initiales
;

fuivoient Tordre de l'alphabeth ; une Confefïlon chrétienne


en vers élégiaques ; une Oraifon à la fainte Vierge , en vers
de même mcfure. Il y en avoit quelques-uns fur les Images»
Les autres Poëmes de Jean , font des dcfcriptions d'arbres
& de jardins. Quelques critiques ont fait paffer Jean pour un
très-mauvais Poète (g); mais peut-être mérita-t-il d'être efti-
mé en fon tems on ne peut du moins lui refufer une veine
:

poétique très-abondante &


très-pure. Allatius dit même (k)
,
qu'il a affez bien réufli dans fa métaphrafe ïambique des Can-
tiques de l'Ecriture.

(if )Le Moine, variit/acra, lom. i,pi


(c) Ttm. 8. 4^9.
p. n7."-f- Ji. ??• 54.
((/) Tom. 27. 471.
p.tg. ( i ) Bandwri in noiis nd aniijuit. Cou-
(c) Allât, de LUris Ectttf, Gratw, p. Haut. p. 877 C5 88t.
et. (0 AiiAT» dt Litris Ecclef. Çr/tccr. pt
Idem, il Simeott, fag, fi, 9J. 114,^ 61.
(f)
,

GONZON ABBÉ DE FLOR., Ch. XXIV. 401


XI. A des quatre Hymnes en Thonneur de la fain-
la fuite Hymne en
te Vierge (/) , il s'en trouve une cinquième fans nom d'Au- 1''^'^"";"'' '^'^

^ '^ ^'^^K*''
teur elle eft alphabétique , c cft-à-dirc , que les premières
:

de chaque verfet fuivent l'ordre de l'alphabeth. Ne fc-


lettres
la même Hymne qui , dans le manufcrit d'Etienne
roit-ce pas
Le Moine (m) , porte le nom de Jean le Géomètre î

CHAPITRE XXIV.
Conzon , Abbé de Florenne ; Odon , Moine des Fojps ;
Gozechin , Ecolatre de Liège y Ù" quelques autres Ecri-
vains.

I. ^^^ Onzon ou "Wcnfon frère de "Wafon , Evcque de Gon7on,Ab-


Vjr r^icgc , fit profcffion de la vie monaftique dans l'Ab- ^- ^^ Fioren.

baye uc Florenne (»), fituée dans ce Diocèfe. Il en fut le"^*


quatrièmeAbbé ( ) , & le reflaurateur de la dilcipline que
Richard , Abbé de Saint Vanne , y avoir d'abord établie.
Le zele de Gonzon pour Tobfervance ( /) ) , le fit aimer du
Pape Léon IX. Il afllda avec plufieurs Evêques & Abbés
au facre du Roi Philippe I , qui fc fit à Reims en 1055» {q).
On a de lui la relation des miracles opérés par l'interceffion
de S. Gengoul. Il afTure qu'il n'y a fait entrer que ceux dont
îl avoir été témoin , ou qu'il avoit appris de perlbnnes dignes

de foi. Les Bollandiftcs l'ont fait imprimer à l'onzième de


Mai ( r ) , avec la vie de ce Saint. Valerc André lui attri-
bue un Écrit fur la fondation d'un Monaftere de Saint Gen-
§oul (j) , defliné à des Clercs. Cet Ecrit n'efl point connu
ailleurs.

^/) Toni, 17. Biiliot. P,u.p. 475. tiorici , ti. td, p. y 6Ç.
(m) Le Moine, varia f.icrit , loin, i. (p) Uid. in riotii.

yinm. 55. (q) Mabill. Lib.ôi. Anttil. MHm, ^i;


(«) Marten. Tcm, 4. itmp'.ijf. CoUeS.p. (r) Pag. 64%.
(î) Vai.£B.. Akdr. Bibliot. Belgic.pagi
(0) MaIsili.. Tnm. 9. Ador, in vit» Thio- 197.
Tome XX, E ee
40Z ODON MOINE DES FOSSÉS. Ch. XXÎV.
,

Otion, Moine II. On


connoît mieux l'Hiftoire de la vie du vénérable
de !:Abiaye
des rolle; près
Bouchard , Comte de Melun
,, . \ _ _, v t» ^^
&
de Corbeil , reftaurateur de
.

1 Abbaye des rofles, près de Paris. On la trouve toute en-


, , i ^

de Paris.
tière dans le Supplément des Antiquités de cette Ville , par
&
Dom Jacques de Breul , dans le quatrième Tome du Re-
cueil d'André Duchcfne , &
en partie dans la Bibliothèque
de Cluni. Sebaflien Rouillard l'a mife en François, «& fait im-
primer à la fuite de l'Hiftoire de Melun, à Paris en 1628.
L'Auteur de cette vie efl: Odon , Moine de l'Abbaye desv
FoiTés. 11 dit lui-même qu'il l'acheva en 1058 ( r ) c'étoit :

quarante-fix ans après la mort de Bouchard. Il pouvoir donc


être bien inftruit des circonflances de fa vie , d'autant que
ce Comte avoit fini fcs jours dans cette Abbaye , où il avoir
pris l'habit monaftique. Il convient toutefois qu'il en a paflTi
plufieurs pour n'avoir pu les découvrir («). L'Abbaye des
FofTés ètoit tombée en décadence par le dérangement des
mœurs de l'Abbé Magenard. Né grand Seigneur , 8c livré
aux plaifirs du fiêcle , il les préféroic à l'obiervation de la
Règle de Saint Benoît : aimant fur-tout la chafTc. Lorfqu'il
fortoit du Monaftere il quitcoit l'habit monaftique , & en pre-
noit de magnifiques. Ses Moines" fuivoicnt fon exemple au-
tant qu'il ètoit en eux. Adicus , l'un d'entre eux , gémiflbit
feul fur ces dèfordres. Il alla à leur infçu , trouver le Comte
Bouchard dont il connoifiToit la piété &pouvoir ; lui ex-
le

pofa le vrai état de l'Abbaye , & l'engagea à y remédier. Le


Comte la demanda au Roi Hugues, qui la lui rcfufa , difant
que c'étoit un fifc Royal , & que l^Abbaye avoit toujours été
fous la puidance de fcs prédéceflTeurs. Le Comte inlifia , &
demanda permis d'y rétablir le bon ordre, parce
qu'il lui fût
qu'il avoit dclTein d'y faire une donation de plufieurs de fes
biens , &
de s'y faire enterrer. Le Roi reconnoifiant dans fa
demande la volonté de rDieu , lui accorda ce qu'il deman-
doit , & laifia à fa prudence la réforme de l'Abbaye des F'ofTés.
Bouchard communiqua fon deflTein àfaint Maïcul, Abbé de
Cluni, qui lui donna de fcs Religieux pour commencer cette
ccuvre fâlutaire. Le Comte y prit l'habit monaflique avec ,.

f ;) Antiquil. Tarifa in Supplem, ftg\ (") Uid.pag. 1484


ODON MOINE DES FOSSÉS. Ch. XXIV.
, 403
lequel il mourut en 1012. Il avoir un Hls nommé Rcginald ,
Evcque de Paris. Odon
propoia d'en écrire auiïi la vie :
le
mais on ne voit point qu'il ait exécute ce deflcin (a). On cire
une vie manufcrite de faint Maur (jy), en proie & en vers
par Odon. Eudes ou Odon , Abbé des Foflés dans le neu-
vième fiécle , en compofa une en profe. Celle qui efl en vers
pourroir être du Moine Odon dont nous parlons. Il efl fait
mention de lui dans un Poème en vers hexamètres , fait par
un nommé Tcudulfe (z) , à la louange de l'Ecole & des Etu-
dians de l'Abbiye des Foffés. Odon efl: auiïi Auteur des Ré-
pons que l'on y chantoit autrefois le jour de la Fête de S. Babo-
len qui en fut le premier Abbé (a).
III. Guillaume , Duc d'Aquitaine, fils du Comte Thicrri, V'^ie de fnint

eut beaucoup de part à la faveur de Charlemagne. Ce Prince ^"^"''dl w,


le fit entrer dans fon Gonfeil (b) ; 8c connoiJant fa valeur, taine.
il l'envoya contre les Sanafins , qui ayant pifle les Pyré-
nées , s'étoicnt répandus dans le Languedoc , & rendus maî-
tres de la Ville d'Orange. L'expédition fut heureufe pour
Guillaume il défit les ennemis , tua un de leurs Chefs & les
:

contraignit de repafler en Efpagne. L'Aquitaine dont Char-


lemagne lui avoit donné le Gouvernement fous le titre de
Duc, fe trouvant en paix par cette victoire, Guillaume s'ap-
pliqua à réparer les dommages que ces Barbares y avoienc
caufés. Il prit un foin particulier des Monafteres fondés ou
rétablis par ce Prince; & à fon exemple , il en fonda un lui-
même en un lieu dcfert nommé Gellone , & depuis Saint
Guillclme du défcrt , fur les confins du Dioccle de Lodevc ,
à une lieue de l'Abbaye d'Aniane. La charte de fondation
eu de l'an 804. Saint Benoît d'Aniane eut part à cet établif-
fement, & ce fut de fon Monaftere que l'on tira les premiers
Re igieux de Gellone. Le Duc avoit deux fœurs , Albane 6c
Bertane. Elles feconfacrerent l'une & l'autre à Dieu; & fe reti-
rèrent dans des cellules qu'on leur fit bâtir proche d'une Cha-
pelle de Saint Barthélemi , à quelque diftance du nouveau
Monaflere. Quelques années après, Guillaume y prit lui-même

(«) V-iJ.pa;^. 142. Ky. l6fi. (a) Mabillon. Tom. z. A&or.p. yyo.
(y) Wci.TFAUcON , Billict. Uikiitt.ptig. mim. 6,
1178. {b) Mabiiion, Tom. y. ÂSor. {ag.
{iS) I\I:i£iLLON. lib, 61. Annal, num. t-j, 2j BoLLAND. aà i8 M»»» > 54.I

Eee i
j
4o4 ODON, MOINE DES FOSSÉS. Ch. XXIV.
bit monaflique, & finit fes jours dans les exercices de la pé--
nitence, vers l'an 812. Ceft encore à fa piété que l'on e(l
redevable de la fondation du Prieuré de Cafeneuve dans le'
territoire d'Uzez. Il eft honoré dans TEglife comme Saint.
Nous avons fa vie dans les Bollandifles au 28 de Mai , &
dans le cinquième Tome des A£les de l'Ordre de Saint Bc- "
noît. L'Auteur eft anonyme ; mais fon ftyle grave & férieux ,.
donne du poids aux faits qu'il rapporte. Dom Mabillon le
croit du neuvième fiécle , ou au moins du dixième. En fup-
pofanr avec le Père Hcnfchenius (c) y que cet Auteur cft le
même qui a écrit auffi la relation des miracles de iaint Guil-
laume, il faut dire qu'il ne finit fon Ouvrage que dans les-
commencemens de l'onzième fiécle , puifqu'il y en rapporte
un opéré auprès du tombeau de ce Saint {(L) , par l'inter-
cefTion de faint Fulcran , Evêque de Lodsve, mort vers l'an
1006. Cela toutefois ne forme qu'une con}e£lure , parce que
cet Ecrivain reconnoîtque fainr Fulcran ètoit célèbre de foa,
vivant même , par fes miracles (<?);& que ce fut une raiforï
à une fille polfèdée du démon , qui ètoit venue au tombeau
de faint Guillaume , d'employer aurti la médiation du faine
Evêque de Lodeve, qui ètoit venu lui-même ce jour-là prier-
devant un morceau de la vraie Croix , que faint Guillaume
avoir donné à fon Monaftere de Gellone. Quoi qu'il en foit,
la vie de faint Guillaume ètoit déjà connue en Angleterre ,
dès l'an 1066 , comme on le voit par l'abrégé qu'en fit cette
année-là le Clerc Gerold (/). Stcngclius , Moine Bénédiftia
de Saint Udalric à Aufbourg, la fit imprimer en cette Ville
en 1611 , à la fuite de la vie du Bienheureux Guillaume,
Abbé d'Hirfauge; mais il n'y joignit point la relation des mi-
racles opérés à Gclionc. Dom Mabillon a donné l'une & l'au-
tre féparèment ; la^'iej, dans le cinquième Tome des Aftcs
de l'Ordre de Saint Benoît; la relation des miracles , dans
le (ixicmc. C'eft dc-là que les Bbllandiftes ont tiré ces deux
monurncns , pour leur donner place dans le fixiéme Tome
des Saints du mois de Mai , avec de nouvelles notes de Iclh:
-façon.

{c)Boll\vd,
AKD. ad dicm z8. Maii
z2. Ai/ijV ,
p.ig.
/i.if. h
1- (e)
(c) Uid.
Ibid.

j
{f)OMTMc..Viulis, Lib. é^Uifi»-
(«O tic, nd Jiem li. M'ait, {mg. lad
BOLL*t an. ioi-6.-
, ^,

GOZECHIN, ECOLAT. DE LIEGE. Ch. XXIV. 405


IV. Nous ne connoiffbns Gozcchin que par fa Lettre à Gozeclûn
f'?,°'''"f^ ^^
Velchcr qui a voit été fon difciple dans le tcms qu'il gou-
,

vcrnoit l'Ecole de la Cathédrale de Liège. Il quitta cetce


fiondion pour fe retirer à Maycnce , ne pouvant" plus le fouf-
frir àLiège à caufe des troubles que les nouvelles doQrines
particulièrement celle de Berengcr , y avoient caufés. Ne
trouvant pas à Mayence tous les Livres dont il avoit befoin ,.
il les dcmandoit à Velcher qui les lui copioit mais en les :
,

envoyant, il Maître de revenir à Liège. Goze-


preflbit Ion
chin ne fe laifla pas vaincre ; mais il rendit compte à ce dif-
ciple des motifs de fa retraite. Sa Lettre fut écrite peu de
tcms après la mort de Lintbaldc , Archevêque de Mayence ,.

e'efl-à-dire j en 1059 ou 10^0. Dom Mabillon Fa donnée


dans fes Analedes fur un manufcrit du Collège de Saint Jérô-
me à Dôle.
V. Le commencement de cette Lettre efl un éloge de „ ^^^^^''^

Valcher ; on y loue fon attachement à fon Maître (^ ) , fon


exactitude à lès devoirs , fes progrès dans les études, qui
étoient tels, qu'à l'abiénce de Gozechin , il expliquoit les le-
çons &: les diiîlcultés aux autres écoliers. Tous fes difciples
n'imitèrent pas Valcher: manquant de reconnoiiTînce pour
kur Maître, ils le traitèrent mal ; en forte qu'à l'exception
de Valcher , il n'en trouvoit aucun qui voulût lui fervir de
foutien dans la vieillciïe. Quoiqu'il fut honoré à Mayence ,.

& qu'on lui fournît en abondance les bcfoins de la vie , il lui


auroit toutefois préféré le léjour de Liège , dont il fait une
fo:t belle delcription, relevant fur-tout l'application qu'on
y
avoit aux fciences , ce qui la rendoit une autre Athènes; s'il
ne s'étoit trouvé dans cette Ville, des. perfonnes qui s'appli-
quoient en fecrct à noircir fa réputation. Il répond aux di-
vers reproches que Valcher lui avoit fiiits , & prote/îe que fa
retraite n'a point été l'effet d'une légèreté d'cfprit ni d'incon-
flance ; & qu'en paflant d'une Eg'ife à une autre , il n'a point
violé les Canons , qui ne défendent: ce changement que lorf-
qu'il n'y en a point de raifon. Il convient que plufieurs an-
ciens Evêques ont paffé leur vie en combattant pour la Re-
ligion; ma^is il cite d'autres grands Saints qui fe font occu-
pés de la vie contemplative. 11 déplore les maux de fon tems,:

(£)_Tom, At/aleil, Mabil, p. 447, f',//V. Pàrff^-iJ^i'^- ^ >y »», -(_i


4C^ GOZECHIN, ECOL. DE LIEGE. Ch. XXIV.
le renverfement de la dircip'inc Eccléilaftique , & les nou-
veautés que Berengcr , V Apôtre de Satan , introduifoic dans
TEglile , difant (//) que les Sacremcns ccleiies qui le conla-
crcnt fur l'Autel , ne lont ,que l'ombre non la vérité ce & :

que l'on ne peut ni dire ni entendre qu'avec horreur;, qu'ils &


vont au retrait comme les autres alimens. Il prie Dieu d'a-
néantir le levain de cette doi::l;rine mottelle, av'ant qu'elle aie
corrompu toute la maffe ; &
fe plaint que perfonne ne tra-
vail oit ou à détruire l'erreur, ou à rétablir la d.lcipline ,ou
qu'on lailToit fans récompenfe ceux qui y travailloient ce qui :

diminuoit le nombre des Ouvriers Evangéliques , en les obli-


geant de relier dans l'inadion , rebutés par les contrai iités
qu'ils rencoi.troient dans leur travail. Il met de ce nombre,
Herimar de Reims, D ogon de Paris, Emoremann de Spi-
re, Mainhard de Bamberg ; & dit , qu'à leur exemple , il
avoir abandonné les dilputes , pour ne s'appliquer qu'à la
Théologie dans le repos &
dans la retraite. Il oppofe à l'état de
trouble où étoit alors l'Eg ife dans ces cantons , l'état fiorif-
fant qui l'avoit précédé , & dont il avoit été témoin dans un
âge moins avancé; remontant julqu'à l'Epilcopat de Notger
de Liège , où la miléricordc & la vérité , la 'ullice & la paix
régnoient cnfemble. Apres avoir fait une trifte peinture des
défordres qui déshonoroient le Clergé le peuple , il die &
qu'il étoit à craindre que Dieu , pour les punir , n'en-
voyât les trois fléaux dont parle le Prophète , le glaive , la
famine & la pelle , qui commençoient déjà à le faire fentir.
Cette Lettre intéreffe le leflcur par la clarté , la douceur &
la politeflc du Hyle elle peut fcrvir de modèle dans les ré-
:

pliques aux reproches que fe font quelquefois lesami-i. Go-


zcchin ne s'y éloigne , ni des règles de la charité , ni des de-
voirs de l'amitié, ni de la tendreffe qu''un Maître doit con-
fervcr pour fes difcipies. La Lcttie de Valcher n'cfl: point
venue jufqu'à nous. Il l'avoit ornée de quelques vers d'Ho-
race , qui donnoient aux reproches qu'il iaifoit à fon Maître
un air de faryre : mais Gozechin ne s'en émut point.

;f '\\'- '\
.1

fi) Novas & percgrinas credunt à fiJe rrrii^it & aui^irus perliorrefc't , obroxîa
întelligentias , & ipfa 5.icrainenja ccrlc- concndunt vcntri & (ccelfu jiixta nature
flia , qiix in alc.iri confecrantur ,dicemcb ntccfiitaiera. /<«j;. 443.
umbram elle , non vcrù^tcm , quod lingua
ECBERT DE LIEGE. Ch. XXIV. 407
VI. Il y eut vers le même
tems , c'eft-à-dire , vers l'-in Ecbert de
1060, dans le Clergé de Liège , un Ecrivain nommé Ec- '^"'S^"
berc, dont les Ouvrages ne lont connus que par ce qu'en
difcnt Sigebert & Tritheme (i ). Il compola d'abord en vers
un Livre d'énigmes ruftiques. Ayant pris goût pour ce gen-
re d'écrire , il ht un iecond Livre beaucoup plus ample que
le premier. On lui attribue encore la vie de laint Amor,dont
les reliques repofent à Bclife près de Tongres )/).
VIL Widtic ou Guidric né dans le Dioccie de Toul , de WiHricAWié
parens nobles , embrafla la nrofeiïion monaftique dans l'Ab- ^;" ^- ^^'"^^ ^
baye de Saint Evre , fituée dans l'un des Fauxbourgs de cette
Ville. Il fut formé dans la difcipline régulière par laint Guil-
kiume , Abbé de Saint Bénigne à Dijon ; qui l'a voit rétablie
à Saint Evre & dans plufieurs autres Monafteres. Devenu
Prieur de cette Abbaye , l'Evêque Brunon (?«) , depuis Pape
fous le nom de Léon IX , jetta les yeux fur lui pour mettre
la réforme dans celles de Saint Manlui & de Moyenmoutier.
"Widric l'entreprit avec fuccès. Quelque tems après , faint
Guillaume voulant quitter le gouvernement de l'Abbaye de
Saint Evre, pria Brunon de le confier à Widric («). L'Evê-
que l'établie non-feulement Abbé de Saint Evre, il lui fou-
rnit encore les Abbayes de Saint Manfui & de Moyenmou-
tier , pour y entretenir le bon ordre qu'il y avoit rétabli.
L'année de fa mort n'efl: pas bien connue ; quelques-uns la
mettent en 1061 (0), d'autres en 1069 (/>): elle eft marquée
dans \q Nécrologe de Saint Evre dans Ion Epitaphe , au &
dixiém.c de Mars.
VIII. Il écùvit par ordre de l'Evêque Brunon (q) , la vie ses Ecnw,
de faint Gérard , l'un de fcs prédécefleurs , mort en 5^5)4 ; & La vie de S.
y joignit depuis , la relation de fcs miracles , & l'hiftoire de
^''"'''•

la tranflation ou de l'élévation de Ion corps ce qui forme :

un Ouvrage divifé en trois parties. Il dédia la première à


Brunon , qui n'étoit encore qu'Evêque de Toul : pour lui il

C!«) Sigebert de Script. Eccle/. cap. i^f. (0) Mabiilon. Lib. 61, Annal, tium.
^ Trithfmk. cap. 3 50. 97-
( / ) MiRiSOs , in NoNi ad Sigilien. cap, {p) CalMïT, Hi/L di Lorr. lom. i. p.
146. 1181.
(»>) VitxLeoHilX. Tarn. <),Ail»r,pa§. • (ij) MiiiEMt Tem, 3. Anecd.pag. 1047.
io. 61.
,,

4oS 'VJTI D R I C,^


ne prend que la qualité de fervitcur de Saint Evre , quoiqu'il
en tut Abbé. L'Epîcre dédicatoire efl fui vie d'un Poème en
quarante-quatre vers héroïques , qui contiennent le précis de
la vie de faint Gérard , qu'il donne enluite en proie , affu-
rant avoir appris les faits qu'il raconte , des perfonnes qui a-
voient vécu avec le iaint Evêque , &
qui vivoient encore
lorfqu'il en écrivoit i'Hiftoire. Saint Gérard étoit né dans
le territoire de Cologne, fous le règne d'Otton le Grand,
Empereur des Romains. Il reçue d'Ingrann fon père &
d'Em-
&
me fa mère, l'un l'autre d'une noble extraction , une édu»
cation conforme à fa naiflance. /idmis dans le Clergé de TE-
glife de l'Apôtre Saint Pierre à Cologne, il y fit fes études.
Il avoit déjà paffé par tous les dégrés du facrc Miniftere ,
lorfque Gozelin , Evêque de Toul , vint à mourir. Le Clergé
Se le peuple de cette Ville s'adreflerent à Brunon , Archevê-
que de Cologne , qui gouvernoit en Allemagne &
dans les
Provinces voi/ines , en l'abfence de l'Empereur Otton fon
frère , pour avoir un Paftcur. Il n'en trouva point de plus di-
gne que Gérard , &de l'avis des premiers de fon Clergé , il
le nomma Evêque de Toul. La modeftic dans fes habits , la
pureté de fes mœurs, fon afTiduité à la prière, fon applica»
lion à la lecture des divines Ecritures &
des vies des Saints
fon attention à inflruire fes peuples, &
par lui-même par&
les Minières qu'il formoit j les dépenfes pour la réparation
des Eglifes , ou pour en bâtir de nouvelles ; &
toutes fes auT
très vertus juflifiercnt le choix que l'on avoit fait de lui pour
remplir le Siège Epifcopal de Toul , qu'il occupa pendanc
trente-un ans, depuis l'an 5>63 jufqu'en 9^4. Le texte de \X^i-
dric porte quarante-un ans , trois femaines &
trois jours. C'efl
une faute des copiftes ; en lui donnant 4 1 ans d'Epifcopar, il ne
feroitmort qu'en 1 0^4 > ce qui ne peut s'accorder avec ce qu'oq
Jitdans la vie deS.Maïcul, Abbé de Cluni,mortcn 994, qu'il
put révélation de la mort de Iaint Gérard , & qu'il l'.innonça
à fes Religieux au moment qu'ils alloient prendre leur réfec-
tion. Saint Gérard obtint de l'Empereur Otton un Diplôme
portant ^ que le Clergé & le peuple de Toul auroient la liberté
de choifir ton Evêque (r). Il fit , par dévotion , le voyage de
Rome accompagné de douze perfonnes , partie Clercs , partie

(r) UiJ.p. leéS.


Moines
,

ABBÉDE s. EVRE. Ch. XXIV. 409


Moines , avec lefquels il pfalmodioic en chemin : la croix prc-
cédoic cette troupe de pèlerins.
IX. La féconde partie eft dédiée à Udon Primicier (s) ,
fef^de// &
à tous les Chanoines de la Cathédrale , qui avoient engagé
'Widric à l'ajouter à la première. C'efl: un recueil des mira-
cles de faint Gérard , opérés fous deux de fcs fuccefleurs ,
Bertold &
Hcrimann. "Widric y joignit la Bulle de canoni-
fation donnée par le Pape Léon IX , & les noms de tous les
Evoques & Abbés qui foufcrivircnt à cette Bulle , dans le Con-
cile tenu à Rome en 1050. Ce ne fut qu'après ce Concile que
iWidric travailla à cette féconde partie.
X. Il y promet la troifiéme, c'eft-à-dirc, l'Hiftoire de la Trapflatîoii
°
trandation ou de l'exhumation des reliques du Saint (f) , pour stcerard?
être expoiécsà la vénération des peuples. La cérémonie s'en
fit le11 Otlobre 10 5 1 , par le Pape Léon IX , qui étoit venu
exprès de Rome à Toul , accompagné des Archevêques de
Lyon , de Beiançon , de Colozza & de plufieurs Evêques.
On trouva le corps du Saint fans corruption , à l'exception
de quelques parties réduites en poudre , fon vifage vermeil ,
fes habits entiers. Le Pape confacra un Autel fur lequel les
reliques furent dépofées ; 6c ordonna à Widric de mettre par
écrit tout ce qui s'étoit pafTé en cette occafion. Les Bollandi-
ftes n'ont donné que la première partie de fon Ouvrage ( m ) ,
encore n'eft-clle point entière. Dom Martenne Dom Du- &
rand ont publié le tout dans le troifiéme Tome de leurs Anec-
dotes. L'Ouvrage fe trouve aulTî tout entier dans les preuves
de l'Hiftoire de Lorraine, par Dom Calmer. La vie de faint
Gérard compoféc en fiançois par le Père Benoît Picard , &
imprimée à Toul , chez Rolin en 1700, in-i2(A') , n'efl
proprement que la tradudion de l'Ecrit de "Widric , dont l'E-
diteur â éclairci le texte par de longues notes. Outre la vie
du Saint , il rapporte aufli fes miracles & l'hiftoire de fa tran-
flation ce qui prouve qu'il avoir fous fes yeux le même ma-
:

nufcrit que Dom Martenne a vu depuis. Le Père Benoît


tranfcrivit dans l'Hiftoire Eccléfiaftique & Politique de Toul
imprimée en cette Ville en 1707 , ce qu'il avoit dit de faint
Gérard , dans la vie particulière qu'il en avoit donnée fcpc

(j) IW. p. 1074, I (a)UiJ. fag.joti.


(») IhiA.p. 10S3. I (jr).T<i»l.4. p(»«. x.f. rji.

Tome KX. F ff
410 ADAM DE PARIS. Ch. XXTV.
ans auparavant. Le flyle de Widric eft affez châtié; mais c'efï
fur-tout la candeur & la piété qui donnent du mérite à fon
Ouvrage. Son Pocme montre du génie &
de l'élévation. Il efl:
.
fait mention dans les BoUandifles, d'un Office pour la Fête
de la tranilation de faint Gérard (y ) , dont ils ont rappor-
té l'Hymne & l'Antienne pour Mngfnficaî. il peut être de la
Ifaçon de \v'idric : mais on n'en a point de preuves.

ri-^-adJt des ^ï- ^" ^^"^ ^^^^ l'Hiftoire des Evêques de Salone de &
AdesdeMar-.Spalatro , par l' Archidiacre Thomas (s), qui écrivoit dans
*/"• le treizième fiécle , qu'un nommé Adam natif de Paris , très-
inftruit des arts libéraux , allant à Athènes pour y acquérir
*^::ln-,^)T les fciences des Grecs , paffa à Spalatro en Dalmatie ; qu'il y
5'^:' fut reçu avec honneur de l'Evêque Laurent , tranféré depuis
peu en ce Siège , du confentement du Pape Nicolas II ; &
que cet Evêque le pria de mettre en meilleur ftyle les Ades
du martyre des laints Domnius &
Anaftafe. Adam fe trou-
yoit donc à Spalatro vers l'an 1055) ou. 1060 , puifque le Pape
Nicolas II n'occupa le Saint Siège que depuis lemois de Jan-
vier 1059 , julqu'au mois de Juin ic6i. Il ne le contenta pas
de retoucher l'ancienne Légende de faint Dominius de &
faint Anailafe , il compofa des Hymnes en l'honneur des
Martyrs •, &mit en vers tout ce qui le chantoit en mufique
dans rOflîce de faint Domnius. Il ne relie de ces Aâes, que
ce qui s'en ell trouvé dans le Bréviaire de cette Egliie ; ce
qui fe réduit aux Leçons de Matines : mais je ne lais fi on
doit les regarder comme dignes de foi. 1". L'original lur le-
quel Adam travailla , étoit en un latin tout barbare il avoir :

donc été écrit plufieurs fiécles après le martyre de faint Dom-


nius. a°. On le fait diiciple de laint Pierre, &
établi Evêque
de Salone par cet Apôtre. Ce fait n'cft appuyé d'aucun Hi-
fiorien Ecclcfiaftique. 3°. Il eft dit dans ces Ades , .qu'il ba-
tiloit ceux qu'il convcrtiffoit, en puifant de l'eau dans un fleu-
ve : ce qui marque un Batcme par infufion , qui n'ètoit point
ordinaire dans les premiers fiècles , où l'on bariloit par la tri-
j)!e immcrfion. 4°i Ces A£tes parlent d'une Eglifc dédiée fous
le nom de ii iainte Vierge: on n'en connoilfoit point dans le
premier ni fqçond fjt'cles d» l'Egliie. Il faut donc l'entendre

(j') BoLLAND, ad diQm £pH, f, zo6. |


(') Boilam». ad diciit 11. Aj'ilis,v
THETBAUD, CHAN.de ROUEN. Ch. XXIV. 4'i'
.du huitième dans lequel on dit que le corps du Marr)T: lut
,

transféré de Salone aSpalatro, & mis dans une Eglilc deli


feinte Vierge , qu'on croyoit au dixième ( « ) , avoir été la
chambre dc'Dioclétien mais ce iera toujours une preuve que
;

cesAdesne font point originaux. On ne connoît plus ceux


^c S. Anaftalb retouchés par Adam.
i- XII. L'Auteur anonyme deTHiftoire des miracles defaiht ç,^'^^'''^.^""^^
Vulfram , Evêque de Sens , puis Moine de Saint Va ndrille , Rouen."*^
en rapporte un opéré fur un Chanoine de la Cathédrale d«
Rouen (b) , nommé Thetbaud , qui recouvra la vue par les
mérites du Saint. Ce Chanoine raconta lui-même cette gué-»
rifon miraculcuie à Robert , Abbé de Saint Vandrille , en
1053 ; & c'cftfurle témoignage de fon Abbé, que l'anony*
me Ta rapportée. Il en prend occafion de faire connoître les
Ecrits de Thetbaud ; & lui attribue en particulier une tradu-
ction en langue vulgaire , de pluficurs vies de Saints , écrites
originairement en latin de ce nombre étoit la vie de laint
:

Vandrille. Il ajoute, que ce tra'dufteur compofà du fond de


ces vies , des Cantiques rimes & cadencés , pour être chantés
par les Villes. **
„ '
'

XIII. Le dernier miracle qui! raconte , eft du troiftéme y^jj-^^^^ ^''''*


des Calendes d'Avril 1057 (c). II y ajouta depuis une cir-
conftancc qu'il crut digne d'être tranimife à la poilérité. En
jO')6 (d) , le Roi de Babylone envoya des ordres à Jérufa-
lem , pour faire fermer le faint Sépulcre , avec défenfe aux
Chrétiens d'y entrer à l'avenir. Il s'en trouvoit alors en cette
Ville plus de trois cens de l'avis du Patriarche , ils le reti-
:

rèrent en diligence 6c s'embarquèrent. Le commencement de


la. navigation fut heureux ; iurpris cnfuitc d'une tempête ^

chacun invoqua le Saint qui lui étoit plus connu ; les uns ^
faint Vulfram ; les autres , faint Nicolas tous échappèrent :

au danger. L'Anonyme étoit Moine de Saint Vandrille , dès


le tems de l'invention des reliques de faint Vulfram , c'ell-
à-dire , dès l'an 1027. Il avoir donc pu être témoin de la
plupart des faits qu'il raconte au rcfte , il ne s'applique pas
:

tellement à rapporter des miracles , qu'il ne fafle entrer dans

(n) Constant PoRPHyRor,. de admi- Ordin. S. Beiieditl.'p. ^60. ft. iS.


Kiflrari ie Imptr. ad Ro)ita/!,p, 8f . édit,Lf^J. (f) Ibid. 353.». I.
I>.

(./) Uid, niim, 1.


(i) ViiA S. Viilfr.tmn, T<im. 3. Athr,
F ff ij
412 VICTOR
II, PAPE.Ch.XXV.
fa narration des événemens intéreflans pour l'Hiftoire de la.
Normandie. Il parle des Comtes de cette Province ( e ) , des
Archevêques de Rouen , & de diverfes calamités publiques ,
entre autres, d'une famine qui dura fept ans. Dom Mabillon
a fait imprimer l'Hifloire de cet Anonyme ^ à la fuite de la
vie de faint Vulfram (/), écrite originairement par Jonas,
Moine de Fontenelle , & dédiée à Bainon , Evêque de Ter-
rouane. On en trouve aufïï une partie dans le troiliémeTome
du Spicilege (g) , par forme d'Appendice à la Chronique
de Fontenelle , qui finit à l'Abbé Anfegife , contemporain
de Louis-le-Débonnaire.

CHAPITRE XXII.
P^iâor II 'y Etienne IX i Nicolas II, Papes,

Vijiot n, j^ A Pj-^j j^ mon


de Léon IX , les Romains députerenc
jtjL Hildebrand A ) > Soûdiacre de l'Eglife Romaine , à
(
l'Empereur Henri ^ avec pouvoir d'élire en Allemagne , au
&
nom du Clergé du peuple de Rome , celui que ce Prince
jugeroit digne du Saint Siège. L'Empereur tint à cette occa^
fion une Aflemblée à Mayence , où Gebehard , Evêque d'Ei-
chftet fon parent, fut élu Pape par les Evêques (i). Hilde-
brand l'emmena à Rome. Gebehard y fut reçu avec grand
honneur , reconnu Pape d'un confentement unanime , & in-
troniCé le Jeudi-Saint 15 d'Avril 1055 , fous le nom de Vi-
âor II à l'imitation de fon prédécefleur , il retint l'Evêché
;.

d'Eichftet. Lambert de Schafnabourg (/) , Auteur grave 8t


contemporain , raconte qu'un Soûdiacre voulant faire mourir
Vidor ,. jetta du poifon dans le calice ; que le Pape n'ayant
pu le lever après la confécration , fe profterna avec |le peuple
pour prier Dieu de lui en découvrir la caufe ; qu'auffî - tôt

(h) Chronic. C.iiffn. lib. 2. c. <?p.

{f)UU. pag. 341. ( ; ) Continuât, litrniiju. Conirad. ad an,


Çg ) Tem, ^ Spiciltg, p. 148. Fo^/t aiiffî
. 10^4. 1055.
BoLLiND. nd Jiem lo M»rt, f, ijo< lio, ( / ) Lambert. Jt reins Germun. ad »n»-

10/ 4, apud Piflor.

i
VICTOR II, PAPE. Ch. XXV. 415
Tempoifonneur fut faifi du démon ; que le Soûdiacre ayant
avoue ion crime , le Pape fit enfermer le calice avec le Sang du
Seigneur, dans un autel pour le garder à perpétuité , comme
des reliques & fe profterna de nouveau en prière avec le peu-
*,

ple juiqu'à ce que le coupable fût délivré.


,

II. Vidor II tint la même année 1055 (m) , un Concile à


ç.J^ç.|',e"p,""
Florence, en piéfence de l'Empereur Henri , qui étoit venu rence, envoie
en Italie. On y fit divers Réglcmcns dé difcipline, un entre HiUiebrand
""'**
autres, portant défenfe d'aliéner lesbiens des Eglifes. Beren-^"
ger y fut aufll condamné , de même que dans les autres Con-
ciles qui furent tenus ailleurs, par les ordres de ce Pape. On
en mer un à Lyon & un à Tours ( « ) y auxquels Hildebrand
fon Légat en France , préfida. Le motif de fa légiation fut
de réprimer la fimonic qui ne faifoit pas moins de ravage en
Bourgogne qu'en Italie. Berenger abjura fon héréfie dans ce-
lui de Tours , mais il ne fe convertit point. Il fe tint un troi-
liéme Concile le 1 3 de Septembre i o 5 , par les Légats & l'or-
(5^

dre du Pape Vi£lor II , à Touloufe , où l'on fit plufieurs décrets


contre les fimoniaqueSr
La même année le Pape , invité par l'Empereur Henri , il va en Al-
III.

fît un voyage en Saxe. Ce Prince le reçut à Goflar f ). Ils '^™l^ç*J"


célébrèrent eniemble la rete de la Nativité : puis étant pâlies en 1057.

à Bothfeld l'Empereur fit confirmer par le Pape , par les


,

Evêques & les Seigneurs préfcns , l'éleftion de fon fils Hen-


ri , qui avoit été reconnu & couronné Roi à Aix - la - Cha-
pelle dès le 2 i de Juin de Tan 1054, L'Empereur mourut
,

le cinquième d'Odobre 1056 le Pape aiïlflaà fa mort. L'Im-


:

pcratrice Agnès prit les rênes du Gouvernement (p) , à


caufe de la minorité de fon fils , qui n'avoit pas encore cinq
ans. Elle étoit en différend avec le Roi Baudoin , Comte de
Flandres , &
Godefroi , Duc de Lorraine. Le Pape les récon-
cilia dans une grande Affcmbléc , qui fut tenue à Cologne
avant la Fête de Noël. Il célébra cette folemnité àRatifbonnej
puis il retourna en Italie , &
mourut en Tofcane le 28 de'
Juillet 1057.
IV. Au mois de Mai *précédent , il avoit accordé à Hum* Bulle <JeVJc-
tor en faveur
de rtglife de
Blandie-Sel-

(m) Tom. 9. Coiic.p, 1079.


(n) TbiJ.p.jg. 1080. 1081.

iC") Lamsi&t. Schaïkasurg. a4 m.


414 ETIENNE IX, PAPE. Ch. XXV.
bert , Cardinal &Evcquc de Blanche-Selve (q) , en rccon-
noillancc de fes travaux pour l'Eglifc , tant à lui qu'à fes iuc-
ceflcurs , les offrandes que l'on fcroit fur !e grand Autel ou
fur la ConfclTion de faint Pierre , depuis le commencement
des Matines du Jeudi-Saint julqu'à Complies; &le Samedi-
Saint, depuis Thcurc de Tierce jufqu'à la fin de la Mcfle du
lendemain, c'cfl:- à-dire , du jour de Pâques. La Chronique
de faint Bertin cite une Bulle du même Pape ( r ) , pour l'é-
lection libre des Abbés de ce Monafîere ; mais elle n'en rap--
porte que le commencement.
Etienne IX, V. Il eut pour fucceffeur Frideric , Lorrain de nation,'
Papcenio;/. fj-^fc cjg Godefroi
, Duc de Lorraine , l'un des trois Légats

envoyés à Conftantinople en 1054, P^"^ ^^ Pape Léon IX. Il


avoit été d'abord Archidiacre de Liège ( J ) ; Léon IX l'em-
mena en Italie , & le fit Chancelier de l'Eglife Romaine.
Avant trouvé à fon retour de Conftantinople , l'Empereur
Henri indifpofé contre lui , à caufe de Godefroi fon frère ,
qu'il regardoit comme fon ennemi ; il fe fit Moine au Mont
Caiïîn , fous l'Abbé Kicher. Cet Abbé étant mort en 1055;,
on choifit pour lui fuccéder Pierre , Doyen du Monaflere.
Victor II trouvant mauvais que cette élcdion eût été faite
fans fa participation , envoya le Cardinal Humbert à. Mont-
Caflîn. Pierre qui a voit été élu malgré lui , céda lans peine ,
& Frideric fut choifi d'un confentement unanime , le 23 de
Mai 1057. Il partit aufïï-tôt pour la Tofcane où étoit le Pape ,
pour recevoir de lui la bcnédiftion Abbatiale , fuivant l'an-
cienne coutume des Abbés de Mont-CafTin. Viftorll le fin
Prêcre du titre de faint Chryfogone , puis le bénit Abbé le
jour de faint Jcan-Baptifle. Frideric revint à. Rome prendre
poITclTion de ion titre de Cardinal. 11 n'avoir pas léjourné un
mois en cette Ville , lorfqu'on y apprit la mort du Pape. Plu-
fîcurs des Romains, tant du Clergé que du peuple, conlul-
tercnt Frideric fur le choix d'un lucceifeur. Il leur nomma
cinq fujcts, qu'il croyoit les plus dignes mais aucun ne leur
:

paroiflant convenable , ils l'élurent lui-même , le jour de U


Fête de faint Etienne Pap? , le fécond jour d'Aoùc, le &
nommèrent Etienne IX , à caufe du jour de fon élcilion.

(f) Tcm. 9,Concp. 1078. 1


(r) MACitL. Obfervat, in Viilor, lU,
(y) Martch. Toit, y A'iecd.f, ^77, \Tam.<^. Ailor.p.^îy
,

ETIENNE IX, PAPE. Ch. XXV. 415


fendant quatre mois qu'il demeura à Rome , il alTembU
les
plufieurs Conciles , où il s'appliqua lur-tout à empêcher les
mariages des Prêtres &
des Clercs , &
les mariages inceftueux

entre parens. Il chafla du Clergé tous ceux qui, depuis la dé-


fcnfe du Pape Léon IX , avoicnt vécu dans Tincontinencc j
& quoiqu'ils euflent quitté leurs femmes &
embraflc la péni-
tence , il leur défendit de célébrer à l'avenir. Enfuite il alla
à Mont-Caffin , oii il féjourna depuis la Saint André jufqu'à
la Fête de Sainte Scholaftique , 10 de Février. Le vice de
propriété s'étoit gliffé infcnliblemcnt dans ce Monadere le :

Pape vint à bout , par fes exhortations &


par fes menaces ,
de le déraciner prefque entièrement. Il défendit auflî l'ufage
du chant Ambrolîen , dans l'Eglife de cette Abbaye , & or-
donna que l'on y fuivit le Romain. Pendant fon féjour à Mont-
Cafîin , il tomba dangereuicment malade ; & fit élire pour fon
fucceiTcur le Moine Didier car Etienne IX avoit conlervé le
:

ïitred'Abbé , & il ne le quitta qu'à la mort. 71 r r •

VI. Le Pape qui connoilfoit le mérite de Pierre Daraien, dinar"rierrê


Abbé de Fonr-Avcllane , le tira de fa retraite pour le faire oamien en- ;

Evêque d Oflie ( f ) , & premier des Cardinaux ; mais il fallut ^°'nft^n.'|n".*


en venir aux menaces d'excommunication , pour lui faire ac- pie.
ccprcr ces dignités. Au commencement de l'an 1058 , Etien-
ne IX envoya Didier , Légat à Conftantinople vers l'Empe-
reur Ifaac Comnene , avec Etienne Cardinal, 8c Mainard,
depuis Evcque de Blanche-Selve. Didier avoit ordre de rc»
venir auffi-tôt qu'il auroit terminé les affaires qui faifoient le
Ibjct de Légation (a). Il étoit qualifié Abbé de Mont-
fa
Cailin , dans les Lettres qu'il avoit pour l'Empereur d'Orient,
Cependant le Pape fe difpoloit à aller en Tofcane conférer
avec le Duc GodeiVoi fon frère , à qui l'on difoit qu'il vouloic
faire tomber l'Empire. Son deffein étoit de revenir avec lui
thafTcr les Normans de l'Italie. Tous ces projets ne pouvoient
s'exécuter fans fecours. Il envoya donc un ordre au Prévôt
de Mont-CafTin ( a-) , de lui apporter au plutôt & fecrcte-
ment tout ce qu'il y avoit d'or & d'argent au tréfor de l'Ab-
baye, promettant d'en renvoyer bien - tôt une phjs grande
quantité. L'ordre fut exécuté dès le lendemain ; mais le Pape

(r) Vita D.imittt.cao, \4. p.9^ I (x) Cbron.C.iûtn.Lii. 1. cap. 95,


4ï5 ETIENNE IX, PAPE. Ch. XXV.
touché de l'affliction des Moines
, fe repentit de cette dé-
m^irche , &
renvoya le trcfor , fc contentant d'y prendre une
image grecque qu'il avoir apportée de Conftantinople , lorf-
qu'il y tut envoyé par Léon IX. Il ne laifla pas de fe mettre
en chemin pour la Tofcane mais y étant tombé malade , il
:

mourut à Florence , le 29 de Mars 1058 , après neuf mois &


28 jours de Pontificat. Le Légat Didier ayant appris à Bari,
où il attendoit le vent favorable pour pafter à Conftantino-
ple , la mort du Pape Ecienne , revint à Monc-CaflTin le joue
de Pâques grand matin ; & ce jour-là même , il fut mis en
poffenion de l'Abbaye par le Cardinal Humbert , qui s'y écoic
retiré pour éviter le tumulte que caufoit l'éleiSion de l'Anti-»
pape Benoît.
lettres J'E- VII. Il y a deux Lettres d'Etienne IX , l'une à Gervais ,
tienne JX.
Archevêque de Reims (y ) ; l'autre à Pandulfe , Evêque de
Marfi. Il loue Gervais de la fidélité qu'il avoit promife au
Saint Siège , & l'exhorte à ne pas s'en départir , malgré les
contrariétés des ennemis de l'Eglife Romaine. L'Archevêque
avoit fait part au Pape de fon delfein d'aflembler un Concile
à Reims ; mais il ne lui avoit pas mandé , qu'il eût obtenu là-
deflus le confentement du Roi. Le Pape témoigne être fur-
pris du filence à cet égard. Il ajoute , qu'il ne pouvoit rien rta-f
tuer fur fon différend avec l'Archevêque de Bourges en l'ab-
s fencc de Hildebrand , qui en étoit pleinement inflruit; que
s'il venoit à Rome avec ce Légat , ils régleroient enfemble

' cette affaire enfin , il lui ordonne de fe trouver avec fcs Suf-
:

fragans , au Concile qui devoit fe tenir à Rome , quinze jours


après Pâques. Cette Lettre efl fans date. Celle qu'Etienne
IX écrivit à Pandulphe (z) eft du Château de Caflin , le 5
,

des Ides de Décembre indidion 11 , c'cft-à-dirc, du neuviè-


me de ce mois , l'an 1058. Le Pape y déclare qu'il rétablit
l'Evcché de Marfi dans fon état primitif; & annulle la divi-
sion que Ton en avoit faite , pour en former deux Evcchés.
Cette réunion avoit été jugée néceflaire dans le Concile , que
le Pape Vi6lor II avoit affemblé à Rome dans la Bafilique de
Conftantin. Il faut ajouter à ces deux Lettres (/?) , le Décret
qu'Etienne IX fit dans une Aflcmblée d'Evêqùes , dy CIcrgç

{y) Tpm. 9. Conc.p. 1088. |


{a) Cir0ait. Cmffin. lit. t>cnf. 100.
jx.;)P»>^e 108?.
\
NICOLAS II, PAPE. Ch. XXV. 417
8c du peuple Romain , avant fon départ pour la Tofcanc ;
portant dcfenfe , en cas qu'il mourût dans le voyage , de
procéder à I eledion de fon luccefleur , avant le retour d'Hil-
debrand , enwoyé à l'Impératrice pour des affaires d'Etat.
VIII. Mais Grégoire fils d'Alberic , Comte de Tuiculum, Benoît, Aat»^
& Girard de Galère n'ayant aucun égard à ce Décret ( ^ ) , ^^'^^'
s'ailemblercnt aufifi-tôt qu'ils apprirent la mort du Pape,
avec quelques-uns des plus conddérables de Rome , & choi-
firent pour Pape Jean , Evéque de Vclctri , qu'ils nomme-
ront Benoît. En vain Pierre Damien & les autres Cardinaux
s'oppoferent à cette élection ils furent contraints de fe fau-
:

ver & de le cacher ; les partifans de Benoît foutenant leur


éledion par la force des armes. C'étoit â l'Evêque d'Oflie à
l'acrcr le Pape :ils prirent fon Archiprctre j &
le contraigni-
rent de facrcr Benoît cinquième d'Avril 1058 , qui étoit
le
le Dimanche de la PafTion. Hildcbrand ayant appris à fon
retour , ce qui s'étoit pafTé à Rome (c), écrivit de Florence
aux Romains les mieux intentionnés , &
lur le pouvoir illi-
mité qu'ils lui envoyèrent , il élut Pape , Gérard , Evoque de
Florence , né dans le Royaume de Bourgogne. Cette élec-
tion fe fit à Sienne, de concert avec Godcfroi , Duc de Lor-
raine &: de Tofcane. Cependant les principaux des Romains
députèrent au jeune Roi Henri (f^), pour l'aflurer qu'ils lui
garderoient la foi qu'ils avoient jurée à fon père; & que dans
ce dcflein ils avoient laiffé le Saint Siège vacant, jufqu'à ce
qu'il y eût pourvu. Ils ajoutoient , qu'une intrufion faite con-
tre les règles , ne préjudicioit point à fon droit , & ne pou-
voit empêcher une élection légitime. Le Roi en ayant délibéré
avec les Seigneurs de fa Cour , approuva l'éledion de Gérard,
qu'il favoit écre agréable aux Romains & aux Allemans , &
ordonna au Duc Godefroi de le mener à R omc.
IX. Gérard prit le nom de Nicolas II mais avant que de Nicolas ir,
:

partir pour Rome , il tint un Concile à Sutri Ville du patri- P^peemoji»,


moine , où il délibéra avec Hildcbrand , les Cardinaux , les
Evoques de Tofcane & de Lombardie , & avec le Duc Go-
defroi &: le Chancelier Guibert, fur ce qu'il y avoit à faire à
l'égard de l' Anti-pape Benoît. Celui-ci en ayant eu avis
,

{l)Çhrm!<:. ÇaJUn. ihiii. {.io\,


j
( <<
) LamSERT. ScHAFANAB. ad.

Tome XX, ^ SS
4i8 NICOLAS II, PAPE. Ch. XXV.
prie le parti d'abandonner le Saint Siège (e) , après l'avoir
occupé près de dix mois. Les Romains lui donnèrent , par
mépris , le furnom de Mincio ou Minchione , qui , en Ita-
lien , figniiie un ftupide. Nicolas II , informé de l'a retraite ,
entra dans Rome au mois de Janvier 105^ , accompagné des
Cardinaux & du Duc Godefroi. Il y fut reçu avec honneur
par le Clergé & le peuple , & intronifé fuivant la coutume.
Quelques jours après , l'Anti-pape Benoît vint fe jetter aux
pieds du Pape , proteflant qu'on lui avoic fait violence. Ni-
colas II leva l'excommunication prononcée contre lui , &
lui permit de demeurer à Sainte Marie-Majeure depofc de- ,-

l'Epifcopat & de la Prêtrife ainfi finit ce fchilme.


:

Concile de X. Le Pape voulant empêcher qu'il s'en élevât de fembla-


Rome en \y\ç j^^jg j^ f^itc (/) , tint à Rome , au mois d'Avril de la
^ ^'
même année lojp , un Concile de 113 Evêques, où il fuc
ordonné qu'à la mort d'un Pape , l'éledion de fon fuccefleur
appartiendroitauxEvêques-Cardinaux ; en forte que li quel-
qu'un venoit à être élu fans leur confentement unanime , <Sr
celui des autres Ordres du Clergé & du peuple , on ne le re-
garderoit point comme Pape, mais comme un apoftat. Telle
efl la teneur du premier Canon de ce Concile mais on en :

cite un Décret beaucoup plus étendu (g) , qui porte que le


Siège Apoflolique n'ayant point de Métropolitain , les Evê-
ques-Cardinaux en tiennent la place , & que c'eft à eux à in-
tronifer l'Evêque élu ; que le Pape doit être choifi dans le
fcin de l'Eglife même , s'il s'y trouve un fujet capable , finon
dans une autre fauf l'honneur dû au Roi Henri , & à ceux
5

de fes fuccefleurs à qui le Saint Siège aura perfonnellemenc


accordé le même droit ; que fi le pouvoir des méchans s'é-
tend jufqu'à empêcher dans Rome une éledion pure & gra-
tuite , les Cardinaux Evêques , avec le rcfte du Clergé & les
laïcs Catholiques , quoiqu'en petit nombre , auront droit d'é-
lire le Pape dans le lieu qui leur paroîtra le plus convenable;
que fi , il fur vient, quelque obfiacle à fon in —
après i'élctlion
rronifation ,ne laifiTera pas , comme vrai Pape , d'avoir le
il

pouvoir de gouverner l'Egliie Romaine , êc de difpofer de


lous fcs biens , comme le fit faint Grégoire avant fa confc-

(e) Gesta. Pttitif, Rom, ofttd Burott. \ ( f) Tom. 9. Conc.fag, IC93,


^ait.iç^p, l (jf; r^^. 1015..
,

NICOLAS II, PAPE. Ch. XXV. 41^


Cî'ation ; &
que fi quclqu+jn cfl: élu , ordonné , ou intronilé
contrairement à ce Décret , il fera anathématilc & dépofé.
On fit dans le même Concile , divers réglemens contre Tin-
continence des Clercs , contre la fimonie & contre les Moines
apoflats.
XL Nicolas II fit part de ces réglemens aux Evcqucs de '^|^"«j<'9jf^.-
France {h), nommément à ceux d'Aquitaine & de Gafco-Evcques&nux
gne ; ordonnant en conléqucnce que tous les Prêtres , Dia- Fidèles des
"*
cres & autres Clercs qui , depuis le Décret de Léon IX , au- ^"
roient époulé publiquement une concubine ou ne l'auroient ,

point renvoyée après l'avoir époufée , feroient privés des


fondions de leurs Ordres , 6c ne pourroient affifter aux Offi-
ces divins dans le Prefbyterc; que ceux qui fe feroient con- &
formes à ce Décret , mgneroient dans la fuite la vie commu-
ne , mangeant dans le même réfedoirc couchant dans le &
même dortoir. Il foumet à l'excommunication les Clercs qui
quittent leur ronfure , '& les Moines apoftats ; de même que
ceux qui pillent les Pèlerins , les Clercs , les Moines , les fem-
mes , les pauvres fans armes , ou qui violent la franchife des
Eglifes à foixanre pas à l'entour , des Chapelles à trente &
pas. Nous avons remarqué plus haut , que Berenger foufcrivic
dans ce Concile , à une formule de foi dreffée par le Cardinal
Humbert mais qu'étant retourné en France j il écrivit contre
,•

cette profeflion.
'
XII. L'Eglife de Milan ne pouvant plus fupportcr les dé- n envoie Pîef,
fordres occafionnésparla fimonie l'incontinence des Clercs, Légat T' Mi-&
députa vers Nicolas II, pour le fupplier de remédier à ces lan en 1050,
maux ( ? ). Le Pape y envoya le Cardinal Pierre Damien avec
Anielmc , Evêque dcLucqucs. Le lendemain de leur arrivée,

les coupables excitèrent une fédition parmi le peuple , difant


que TEglife de Milan ayant toujours été libre (/), il étoit
honteux de la foumettre aux loix de Rome. Le tumulte s'au-
gmenta quand on vit le Cardinal préfider à l'Afilcmblée du
Clergé , ayant Anfclme de Lucques à fa droite , à fa gauche & '

l'Archevêque de Milan. Pour l'a ppaifer, le Cardinal Pierre


fit un petit difcours j dans lequel il fit entendre aux afliftans.

( fc ) MU. p.i-te io<3(;. r^ Haco Tlaiiin. i ai an. lofp.


Tom. I. nov. Eihlict. Laeb./). i96. (/ ) DamIAN. Ofufc. ^.fag. Jî ^ fij,
• (»') GtSTA. Pow.'i/", Rom, ifpitd Baron, [

Gggij
420 NICOLAS"'!!, PAPE. Ch. XXV.
qu'il n'étoic point venu pour établir la gloire de l' Fglife Româî-
ne ;
qu'elle n'avoit pas beloin des louanges des hommes , étant
fondée de J. C. même; au lieu que ce iont des hommes qui
ont fixé les bornes des autres Egliies, foit Patriarchales, foit
Métropolitaines , ioit Epifcopales ; qu'on ne pouvoir , fans
erreur, difputer à l'Eglife Romaine fa prééminence fur tou-
tes les autres; mais auffi qu'il y auroit de l'injufticc de priver
de fes droits quelque autre Eglife que ce fut. Il ajouta , pour
montrer la fupériorité de l'Eglife de Rome fur celle de Mi-
lan , que faint Nazaire & faint Celfe martyrifés à Milan ,
avoient reçu le Batême à Rome des mains de laint Lin , par
ordre de faint Pierre ; & que faint Gervais & faint Protais
-étoient difciples de faint Paul \ d'où il fuivoit que l'Eglife de
Milan étoit fille de l'Egliie de Rome. Ce difcours fit ceiTer
le tumulte. Le peuple promit d'exécuter tout ce que le Cardi-
nal propoferoit : & dans la perplexité où il fe trouvoit , s'ii
interdiroit ou non , toutes les Eglifes de la Métropole de Mi-
lan , parce qu'il le trouvoit à peine un feul dans un Clergé S
nombreux, qui eût été ordonné gratuitement , il prit le parti
de les obliger tous à condam.ner hautement la fimonie , à s'o-
bliger par ferment , de ne rien donner ni recevoir pour les
Ordres, ni pour la provifion des Bénéfices , ni pour le iainc
Chrême , ni pour la confécration des Eglifes ; &
à fe féparer
des Clercs, ou mariés, ou concubinaires. Tous fe fournirent
à ce Décret & reçurent la pénitence. Celle qu'il impoiaà l'Ar-
chevêque Gui VavafTeur de Velate , fut de cent ans , qu'il
pouvoit racheter chaque année par une fomme d'argent limi"
téc. La pénitence des Clercs , qui n'avoient donné que la taxe
ordinaire pour les ordinations, fut de cinq années , pendant
. lefquelles ils dévoient jeûner deux fois la icmaine au pain &
à l'eau , & trois jours la lemaine pendant l'A vent &: le Carc>-
- me. Elle fut de fept ans pour ceux qui avoient donné au-delà
de la taxe accoutumée, avec obligation de jeûner en outre tous
les Vendredis le refle de leur vie. L'Archevêque promit de
-leur impofer à' tous un long pèlerinage , foie à Rome , foit à
tTours,& d'aller lui-même à faint Jacques en Efpagne. Pierre
ayant ainfi réconcilié le Clergé de Milan , rétablit dans leurs
'TontTio'ns vies ClïîTs-'qu'il connut être les plus lettrés & les plus
fages , v( ulant que les. autres fe contentaflcnt d'être réconci-
liés à-l'Eglife.
Concile Je après en avoir délibéré dans le
xilL Le Pape Nicolas II ,
,

NICOLAS 11, PAPE. Ch. XXV. 421


Concile de Rome (?») ,
partie pour la Pouille : les Normans Benevem, en
fc prclcntcrent au Concile qu'il tint à Mclfe & lui ayant re- ; "'J'-

mis la libre difpofition des terres de laint Pierre , dont ils


sY'toicnt empares, il leur donna l'ablolution de l'excommuni-
cation qu'ils avoient encourue , leur accorda les bonnes &
grâces du Saint Siège. Il leur céda même la Pouille la Ca- &
labrc , à l'exception de Benevent , lous l'obligation du fer-
ment de fidélité & d'une certaine redevance annuelle. Son
motif en cela , fut que les Normans étant les plus puiflans
dans cette partie de l'Italie, ils pouvoient lui donner du fc-
cours pour retirer des ufurpareurs les autres biens de l'Eglife
Romaine. Le Pape tint aulïi un Concile à Benevent ;& ay.)nc
réglé tout ce quiconcernoitle patrimoine de l'Eglife en cette
Ville , il revint à Rome. Les Normans , fuivant fcs ordres
ravagèrent toutes les terres des petits Seigneurs rebelles au
Saint Siège , ou qui en avoient ulurpé les biens , & rendirent
la tranquillité à cette Ville.
XIV. Le Roi Henri ayant fixe le Sacre de Philippe fon ^^«"''«duPa-
cr '\„ ' T .
J AT ' • pe Nicolas II

tilsaine,auvingt-troilicme de Mai, qui, en 10551, ctoit le jour iG<rvais,Ar-


' •
I

de la Peniccôte Pape envoya deux Légats pour afTiRer à dievcque


, le de

cette cérémonie. Elle fut faite par Gervais , Archevêque de^^'™^'

Reims , qui donna le premier ion fuffrage pour l'élcftion du


jeune Roi les Légats donnèrent enfuite le leur, puis les Ar-
:

chevêques , les Evêques , les Abbés & les Seigneurs, Il cft


marque" dans l'ade du couronnement de Philippe (« ) , qu'on
accorda par honneur aux Légats de donner leurs fuffrages j^
le confentement du Pape n'étant point néceffaire à cette éle-
fiion. Nous avons quatre de fes Lettres à l'Archevêque Ger-
vais ( ) ? dans la première , il lui témoigne qu'on l'avoir ac-
culé de favorifer l'Anti^pape Benoît; mais qu'il étoit informé
du contraire par une perfonne de conlidération & de poids.
C'eft pourquoi il l'exhorte à continuer dans fon attachement
au Saint Siège, 8c à empêcher le Roi d'écouter les mauvais
confeils de ceux qui cherchoient l'impunité de leurs crimes
dans la divifion de l'Eglife Romaine. Il affure Gervais , que
k crainte du Duc Godcfroi ne doit point mettre d'obftacle à.
fon voyage de Rome , puifque le Duc étoit au contraire très--

(ro) Gfsta. Rom. Ponrf. tt^ud Baron. 1 (") Tout. 9, Conc. p.iioS,
aJan io;jj, J {0) Uid, f, io>m.
422 NICOLAS II, PAPE. Ch. XXV.
r difpofc à lui rendre fervice. Le Pape lui ordonne , par Ht
féconde Lettre ( p ) ,
d'interdire l'Evêque de Beauvais & l'E-
vêque de Senlis , s'ils ctoient , comme on le difoit , l'un Ss

l'autre coupables de Simonie , jufqu'à ce qu'ils fc préfcntaflTenc


au Concile indique à Rome pour la troifiémc fcmaine d'après
Pâques. On difoit encore que l'ordination de l'Evèque de
Beauvais s'éioit fciite fans le confentcment du Métropolitain,.
Il lui ordonne , par la troifiéme (^), de réparer les torts que
lui ou fes gens avoient faits à l'Eglife de Verdun, attendu
qu'elle étoit fpécialcment fous la proteftion du Saint Siège,
Gervais fit paroîrre en tout fa foumifTion envers l'Eglife Ro'
maine. Le Pape lui en témoigna fa joie dans fa quatrième
Lettre ( r ) , & lui accorda ce qu'il avoir demandé pour l'E-
vêque de Senlis. Il marque qu'il ne favoit pas s'il iroit en
France ; & avertit l'Archevêque de faire fa paix avec le Duc,
avant de fe mettre en voyage pour Rome. Ces Lettres fem-
blent en fuppofer de la part de Gervais. Il n'en refte qu'une
de lui au Pape Nicolas II ( J ) ? par laquelle il le remercie du
bon accueil qu''il avoit fait à fes Députés j de les avoir vifité
dans leur maladie , & d'avoir accordé k un d'eux les honneurs
de la fépulture. Il lui donne avis de la mort du Roi Henri,
lui témoigne un grand defir de le voir en France & de le re»
cevoirà Reims.
AutresLet. XV. La cinquième Lettre du Pape Nicolas, eft un privî-
^'"'
\ll\i^ legc en faveur de Teiberge , AbbefTe du Monaflere de Sainte
Félicité proche de Florence. Ce monallere détruit par la né-
gligence des Evêques de cette Ville , venoit d'être rétabli &
remis en poflcfTion de fes biens. Le Pape l'cxemte de toute
Jurifdittion féculicre , le prend fous la protcdion du Saint
Siège ;& déclare qu'il n'exercera fur les Rcligieufes qu'un
domaine graticux. Ce privilège eft du mois de Janvier 1059 ,
& ligné du Pape , de quatre Evêques & de Pierre Moine. Il
fut écrit par le Cardinal Humbcrt. Le Pape Nicolas II en
accorda un à Edouard , Roi d'Analeterre ( r ) , pour le Mo-
naftere de Veflminfter, Ce Prince lui avoit envoyé Aldrede ,
Archevêque d'Yorc , &
deux Evêques élus , le priant de les

Cl>)F»g. IQ91, (s)UiJ.fag. -[097.


I

{r)îbi,l, p. lOPJt \
,

NICOLAS II, PAPE. Ch. XXV. 42^


©rdonncr. demandoit par les mêmes Députés , que le Pape
11

confirmât la fondation de ce Monaftcre , confirmant lui-même


de Ton côté , les revenus que le Saint Siège ponÀidoit en An-
gleterre. Le Pape , de Tavis du Concile où les Députés du
Koi furent ouïs , confirma premièrement l'abfolution que Léon
IX avoir accordée à Edouard au fujct du voeu qu'il avoir fait
dallera Rome ; & enfuite la fondation du Monalleredc Vefl:-
minfter , le déclarant exemt de toute Jurifditlion Epifcopalc:
mais il en donna la prote6lion au Roi , de même que de toutes
d'Angleterre.
les Eglifes
XVI. La Lettre à Anne, Reine de France («), ef! un Lettre à la
Reine Anne.
éloge de fcs vertus , de fa charité envers les pauvres , de fa
compaflîon pour les opprimés , de fon afllduité à la prière &
aux autres bonnes œuvres. Le Pape l'exhorte à la perfévé-
rance , & à infpircr au Roi fon époux les fentimens de piété
& d'équité dans le gouvernement de fes Etats. On trouve
cette Lettre parmi celles de Pierre Damicn (x) , parce que ce
fut lui qui l'écrivit au nom du Pape. La fuivantc efl: adreflee
au Comte de Roucrgue (y) y qui avoit deflcin de renoncer
au maniement des atiàires temporelles , pour le Royiumc du
Ciel. Le Pape lui donne par écrit les mêmes avis qu'il lui avoit
donnés de vive voix ; fçavoir , de faire fervir fon autorité &
fa puiflancc à la défenfe des Eglifes & des pauvres & de re- ;

flituer au plutôt à l'Eglife de Verdun , les biens qu'il lui avoit


enlevés» Il le menace d'excommunication en cas de refus de
fa part. Hugues de Flavigny qui rapporte cette Lettre ( 2 )
remarque que le Pape l'écrivit fur les remontrances de Wa-
leran , Abbé de Saint Vanne , parent du Comte. Waleran
fît exprès le voyage de Rome mais étant mort en retour-:

nant à Verdun , les Lettres du Pape ne furent point rendues à


ce Comte en ; forte qu'il continua dans fon ufurpation.
XVII. II y a encore du Pape Nicolas II (a) ^ une Lettre latte au
au Clergé & au peuple de Silteron , par laquelle il leur donne ^'''"'"^ '^^ ^^'

avis qu il avoit ordonne Evcque de cette ville, Gérard élu


par Hugues , Abbé de Cluni[, Légat du Saint ^iége en ces
quartiers-là , par l'Archevêque d'Arles , l'Evêque d'Avignon

(«) ll'iJ. pa^. lopf. t.thb.ft.195,


(.If) Damian. iik, 7. £///?• p. (a) Tom. I. Gallia Chripiati, tiov, t'a

f )' ) Tom. 9. CoHf. />. 1097.


(^) Huco Fiaviit, Tarn. i. ntv.Bibliat,
424 NICOLAS TI, PAPE. Ch. XXV.
& autres Prélats qui avoicnt rendu un bon témoignage à fe$
mœurs. Nous lui avons ordonné, ajoute le Pape, de ne promou-
voir perfonne aux Ordres lacrés , qui n^eùt les qualités requifes
par les Canons , & défendu d'y admettre des Africains , dont
quelques-uns dont infectés de Théréfie des Manichéens , &
d'autres qui ne font point difficulté de recevoir plufieurs fois
^c Batéme. Nous voulons aufli qu'il faile quatre portions des
revenus de l'Eglife ; une pour lui , la féconde pour les Clercs
qui font à ion fervice , la troifiéme pour les pauvres & les é^
trangers , la quatrième pour la Fabrique des Eglifes qu'il faiïe ;

les ordinations le Samedi des Quatre-Tems ; & qu'il n'admi-


niftre le Batêmc qu'à Pâques & cà la Pentecôte , hors le cas de
nécelTité.
Conciles de XVIU. Le Pape fît tenir en lo^o (i>) deux Conciles en ,

Toéo?
^ France par fon Légat Etienne , Prêtre Cardinal ; le premier
à Vienne, le 3 1 de Janvier ; le fécond à Tours , le premier
jour de Mars. Les Canons de ces deux Conciles font les mê-
mes , comme on le verra dans la fuite. Le Légat Etienne é-
crivit , par ordre du Pape , à l'Archevêque de Dol , de fe
trouver au Concile de Tours , ou à celui que l'on devoir te-
nir à Rome après Pâques , fuivant la coutume le menaçant, ;

en cas de délobéiffance , des cenfures ccclédafliques.


Décret tou- XIX. Il fut qucflion dans le Concile de Rome au mois ,

gS'approu- d'Avril de l'an 1055? , des Chanoines & des


ChanoinefTes qui
vées au Con- vivoient conformément aux règles approuvées dans le Con-

g[^/^j)^^-'''- cile d'Aix-la-Chapelle en §17. Ce fut Hildebrand , Archi-

diacre de l'Eglife Romaine , qui en propofa l'examen , en


étant prié par les obfervateurs de ces règles , afin qu'elles fufr
'
fcnt , ou confirmées ou réformées par le Saint Siège. Hilde-
brand s'expliqua peu avantageufement fur l'une & fur l'autre,
prétendant qu'on ne reconnoidoit point dans ces deux rè-
gles , la vie commune des Chrétiens de la primitive Eglife ;
& que les Chanoines & Chanoincffes , au lieu de tout aban-
donner à la Communauté , pofTédoicnt quelque chofc en pro-
pre, ce qui étoit contraire à l'ciprit des tems apoiloliques &
à leur première inflitution. Le Pape Nicolas appuya le dii-r
cours de l'Archidiacre ; fit apporter les deux règles ; on &
convint , pi^r la lecture qui en fut faite , qu'elles s'çloignoicnt

(i) Tom. 9. Conc.p. i loj. ti 1 1,

de
NICOLAS TT, PAPE. Ch. XXV. 425
de leur première pureté, lur-cout en ce qu'elles permettoienc
l'une 8c aune , aux Chanoines & aux Chanomefles, la pro-
1

priété , & qu'elles acccordoient à chacun quatre livres de


pain par juurs & Hx pitances de vin. On fit voir aurti , que
l'auteur de la première de ces règles , avoir détourné le fens
des pallages des Pères , qui refuient un pécule aux Clercs ; &
il fut prouvé que julqu'à la tenue du Concile d'Aix-la-Cha-

pelle , on n'avoit accordé à aucune Rc igieufe , pas mcme


aux veuves , de pofféder quelque chofe en pr- pre ; que tel
étoit encore l'uiage dans toute l'Aile , en Afrique & en Eu-
rope , à 1 exception d'une petite partie de rAllemagne. Le
réfultat de cet examen fut , que le Roi Louis-le-Débonnaire
n'avoit pu , fans l'autorité du Saint Siège, autorifer les Cha-
noines & Chanoincffes à vivre indifféremment de ce qui leur
étoit prrfcrit par les règles des faints Pères ; que les Moines
ou Abbés qui ainftoient à ce Concle, n'avoient pas eu plus
.de droit à cet égard , vu qu'ils avoient été formellement con-
tre la règle de Saint Benoit établie , rant dans les Monafte-
res d hommes que de lillcs, & approuvée par faint Grégoi-
rc-le-Grand Ccft ce qu'on lit dans un long fragment du
Concile de Rome rapporté par Dom Mabillou , dans le
quatrième Tome de les Annales (c) , fur un manulcrit du
•Cardinal Ottoboni. Il n'a point rapporté le Dé>.rct du Con-
cile , parce qu'il manquoit un feuillet à ce manufcrit ; mais
il efl: vifible qu'il portoit l'abrogation des deux règles, dont

le Concile de Rome avoir fait lexamen. On voit quelle étoit


la vie des Chanoines Réguliers, depuis le Concile d'Aix-la-
ChapcU:', par la formule de leur profefïïon (d). Ils y promet-
toient la fiabilité , la converfion de leurs mœurs , la chafleté,
robéiffance.
XX. On Tome des Mélanges de M.
a dans le feptiéme MortcîuPape
Balufe (f un recuàl de Canons ou d'Ordonnances, daté Nicolas II.
) ,

de l'an 10^0, le premier du rcgne du Roi Philippe. Il efl


dit dans le préambule qn'ils font du Pape Nicolas , & les
,

mêmes qu'on fuivoit dms l'Eglife Romaine mais on ne :

peut gueres douter que i'obfervution n'en ait été préfcrite en

(c) Ttim. 4. Annal. iil>. 6l. tmm. 3 J. /• 1


[it) ^biJ. p. 587 ÇJ 748.

Tome XX, Hhh


^z6 NICOLAS TT, PAPE. Ch. XXV.
France , tant par la darc que par le premier de ces régle-
mens , qui ordonne , fous peine d'anathcme , d'obferver la
Trêve de Dieu. Or , on fait que les Evéques de France fi-
rent les premières tentatives pour rétabliOement de cette
Trêve , dans les Conciles de Bourges & de Limoges en
103 1. Le troificme [enjoint aux Prêtres maries de quitter
leurs femmes ou leur Eglife. Le cinquième défend aux Evé-
ques & à tous les Clercs le port des armes , la chaffe & les
jeux de hafard. Le treizième ordonne la féparation de ceux
qui fe font maries au-deflbus du feptiéme degré de parenté.
Les autres rcglemens font contre la fimonie , à l'exception
du dixième , qui défend les Marches aux jours de Diman-
ches , fi ce n'eft pour les chofes néceflaires à la vie. Le neu-
vième paroît avoir été fait pofièrieuremeni à la mort du Pape
Nicolas. Elle arriva le vingt -deux de Juillet de l'an 1061 ,
à Florence (/) , où il fut enterré dans TEglife de Sainte Ré-
parate. Son Pontificat fut de deux ans , fix mois quel- &
ques jours. Baronius rapporte , dans les Annales , plulieurs
traits de la vie de ce Pape ; mais on la trouve entière dans
le troifiéme Tome des Ecrivains d'Italie , par M. Mura-
tori.

( f)'PAOï, ad.aii. loCi, num. i.

\
1
,

HUMBERT, CARDINAL. 427

CH APITRE XXVI.
Mumben , Cardinal , Evêque de Blanche - Selve,

I. ^ Es
^
parens l'offrirent de bonne heure à Dieu {a) , dans j^j^^^^^'^jg' '
Monaftere de Moyenmouticr , où il prit l'habit mo- Moyenmou-
le

naltique en 1015 , fous l'Abbé Hardulphe. On peut conclu- tier, puis Cae-
'^'"^ *
re de-là , que Humbcrt ctoit ne dans le voifinage de cette
Abbaye, ou du moins en Lorraine ; & que Berenger n'écoit
poinc tonde à le nommer Bourguignon. Humbert , après s'ê-
tre rendu habile dans les fciences {b) , les fit fleurir dans fon
Monaftere ; ce qui lui mérita la bienveillance de Brunon
Evêque de Toul. Il étoit encore à Moyenmouticr en 1049 ,
lori'quc ce Prélat
y pafïa allant à Rome. Brunon l'emmena
avec lui , & l'ordonna Archevêque de toute la Sicile ravagée
alors par les Arabes. Son deflcin étoit d'y rétablir la Religion
Chrétienne, que ces barbares avoient prelque détruite. Mais
Humbcrt n'ayant pu pénétrer dans cette Ifle (c) à caufe des .

Normans qui occupoicnt la Pouillc & la Calabrc ; Léon IX ,


c'eft le nom que Brunon prit depuis fon életlion au fouverain
Pontificat , le retint auprès de lui , & le créa Cardinal Evê-
que de Bknche-Selve à dix mille de Rome, en 1051.
II. Humbert vint la même année en Lorraine , avec le Haccompa-
Pape, qui avoit entrepris ce voyage pour l'exhumation des ^"^^^ ^jj^'^^
reliques de faint Gérard , Evêque de Toul , qu'il avoit cano- France,
nilé dons un Concile tenu à Rome l'année précédente. Le
Pape s'entrerenant un jour à Toul avec Halinard, Archevê-
que de Lyon , Hugues de Bcfançon & quelques autres Pré-
la'ts , iur l'invention des reliques de faint Eîienne premier

Martyr , l'Archevêque de Lyon eflaya de la rendre fufpetle.


Le Cardinal qui étoit préfenr , en fit voir l'autcnticité par un
Livre de faint Auguftin (^) , qu'il tira de la Bibliothèque de

f..1 U:i\r. Mcdidn. Mat.ijl. pag. 237. I (c) Uid. >. 14e. 1^ Ughel. tom. 1. fag.
H9- 104. i06. 120.
(J>)
Uid. pag, 144. I ^d)HiJ}or, M^-di.ui. ^Unap.p. i/^-j.

Hhhij
42? HUMBERT, CARDINAL;
Moyenmoutier : c'étoic apparemment le vingt - deuxième cfe*
la Cité de Dieu où il eft parlé des miracles opérés par la ver-
tu des reiiques de ce faint Martyr. Le C'ardinal Humbert ac-
compagna le Pape dans les divers voyages qu'il fit en France ,
en Allemagne & à fon retour à Rome. L'Hiftoire de Moyen-
moutier dit , que Humberty p-ifla la Fête de rEpiphanie en-
IOS2, &que ce jour là il y célébra li MefTe,
Il eft envoyé III. En 1053 , Ic Pape Léon fouhaitant de rétablir l'union:
grirrc TEiiUfe Latine & la Grecque , envoya trois Légats à
par le Pape a

pie en 10; j. Conttantinople , vers 1 Empereur Conltancin Monomaque^


qui ne la defiroit pas moins mais le Patriarche Michel Ceru-
:

larius traverfa cette négociation. Humbert , Chef de cette


Légation , compofa étant à Confîantinople , divers Ecrits
pour juftifier les Latins des reproches que les Grecs leur fai-
foicnt. Nicétas Pe£torat , qui s'étoit d'abord déclaré contre
TEglife Romaine, fe rendit aux raifons du Cardinal, & aban-
donna le fchifme. Ce fut le fuccès le plus éclatant de cette
Légation. La mort du Pape Léon IX rappella les Légats à
Rome. La tradition de l'Abbaye de Saint Evre à Toul , efi
que l'agathe précieufe , repréfenrant l'apothéofe de Germa-
nicus , Gcnfervée long - tems dans le tréfor de cette Ab-
baye , & qui eft pafTée depuis dans le Cabinet du Roi ( f ) j
avoit été rapportée de Confîantinople par le Cardinal Hum-
bert.
Son crédit IV. Le Pape Vidor II , fucceflcur de Léon IX , le fit
f>us les Papes
(21^3 Pcelier & Bibliothécaire de l'Eelife Romaine.
du Il fut

EiiennelX. voyage que ce Pape ht en Bavière au retour, Victor ayant :

appris que les Moines de Mont-Caffin s'étoient choili un


Abbé fans en avoir informé le Saint Siège
, députa le Cardi-

nal Humbert ,procéder à une nouvelle clcdion. Le


qui fit

choix tomba fur le Moine Fridcric , frère de Godefroi, Duc


de Lorraine &
de Tofcane. Ce fut fur lui aulTi que fc réuni—
\ rent les fuffrages , après la mort du Pape Victor. Frideric
F avoit auparavant propofé aux Romains de choifir le Cardi-
K nal Humbert (f). Etienne IX , c'eft le nom que l'on donna
\ à Fridcric, le continua dans fcs dignités de Bibliothécaire &
de Chancelier. Les troubles arrivés au lujet de l'élcélicn dti

f») Hift. de r.'Uad, dts Ififcrift. loin. I. 1 (,j)U.rm<. Ciftit '**• i* '> S7»
fart. l.f»g, 176. l
,

ÊVESQ. DE BLANCHE-SELVE. Ch. XXVI. 425)


fucceflTcur d'Etienne IX , obligèrent le Cardinal de fe reti-
rer à Benevent: de-Ià il vint à Mont-Canin , où il pafTa la
Fête de Pâques en 1058. Il étoit lié d'amitié depuis long-
tems avec Didier, Moine de cette Abbaye (^). Quoique le
P ipe eut réfolu de la garder toute fa vie , il ne laiffa pas de
faire élire Didier pour fon fucceflcur. On lui vit ce te dilpo-
iition après la mort d'Etienne ; & le Cardinal Humbert obli-
gea Didier , au nom de toute la Communauté , d'en prendre
le gouvernement.
V. Ce Cardinal fut en même crédit fous le Pontifica'- de MortJuCar
dinal Hum-
Nicolas II , qu'il avoit été fous fcs prédécefleurs. Il ainila au bé"t en
1061.
Concile de Rome en 1055» [h) , ce fut lui que l'on chargea &
de drefTcr la formule de foi que l'on fit foufcrire à Bercni^er.
Celui-ci en prit occafion dans la fuite d'inlultcr Humbert :
mais quelle force pouvoient avoir les reproches d'un homme ,
qui avoit ii fouvent fait naufrage dans la foi ? On ne voit pas
que le Cardinal s'en foit cmbarralfé : mais Lanfanc lui fer-
vit d'apologifte. Humbert mourut a Rome le cinquième de
Mai 1061 (/). Le Pape Nicolas le fit enterrer dans la Ba(i-
lique de Conilantin , auprès des corps des faintes Vierges
Rufine& Seconde: d'autres lifent. Materne &Sccondine\^/).
Lanfranc qui l'avoit connu particulièrement, rend témoigna-
ge à fa piété, à fon fçavoir , a la pureté de fa doîlrine. Il vé"
cur , dit-il , &
ilenfeigna de façon (/«) , que fa réputation ne
fut ternie par aucun foupçon d'erreur dans fa foi. J'en appelle
à témoin prefque toute l'Eglife Latine , qui ne l'auroit pu
ignorer , à cauie de la place qu'il occupoit auprès du Saine
Siège ; qui nefaifoit rien fans le confeil de ce Cardinal , qui &
ne renoit aucun Concile qu'il n'y fut préfent , ou qu'il n'y pré-
iidât par fes lumières.

{g) Uid. m. 5. c. 7. p. 10. gnitionem acceperunt .... Sanfta Roma-


{h) TotH. 9. C111C. p. lof.
I m F.cdeGs pr.ïfulpm '"bi Carci njlem con-
(-:.) ii'li. M diiiit. Honafl.p. 149. ftitu t. Qno in loco pcf^tus flirf-r vi.\it
( / ) Ur.Hf Inhi fnp. p, n. I taliter Hocuit. ut de fide vel rioftruia t jas,
(f«) Hun,l>'rt m
virum firfle re'igi"> nec filt-m (înif»r.T fifpicionii Cima ali-
fum, fandiniins operibus
fille i.hrifti.inâ>''i quando exora Cm Huius rei te is eft tota
perfever.intiflimc 'ecoratum , f i'-ntii d - ferè latinit.is, q ir pro rxcellentiâ Apo
vinarum ac I.E.ulariui!! litterarum opti ''olicv Sedis eu us Concliii Se con îiiis
me erulituni , c rtuntur o unes q i v fi ip T aderat & priprat, fun ignorsre
proprià xperiein â eiim noverunt ; ve non potuit. Lawfr, Comment, ad Btreyig,
ab aliis ^ui ipfuin expecci funt> ejus co
430 HUMBEP.T, CARDINAL,
Ecrits ('u VI. Nous ne répetercns point ce que nous avons die plus
Car-

t'en! Ttlhé
^^^^ ' ^^ ^^^ écrits contre !es Grecs. Il fit non- feulement tous
contre les fi- les cfforts pour détruire les vains prétextes du fchifme qui
moniaques. j^g féparoit dcs Latins il s'appliqua encore à combattre la
:

fimonie , que les Décrets réitérés des Conciles des Papes &
n'avoient pu encore bannir du Clergé , tant en Italie qu'en
France &
en Allemagne. L'Ouvrage qu'il compoia fur ce
fujct , efl divilé en trois Livres. Dom Martenne l'a fait im-
primer dans le cinquième Tome de les Anecdotes , fur un
manufcrit de la Bibliothèque du Grand Duc de Tofcane ,
qu'on croit être l'original ( « ) ; tant fur l'antiquité de ce ma-
nufcrit, que parce que le Cardinal Humbert écrivit ce Traité
étant à Florence (o).Il y fut engagé par l'Ecrit qu'un certain
Spinofule ou quelque vétilleur qu'il délîgne fous ce nom ,
publia en faveur des Ordinations fimoniaqucs , foutenant
qu'elles étoient & valides & licites. Humberc invedtive for-
tement contre Henri , Roi de France , de ce qu'il favorifoit
lesfimoniaqucs , fans aucun égard aux remontrances que lui
avoicnt faites là - deffus les Papes Léon IX & Victor II :
'
ce qui fait voir qu'il écrivit ce Traité avant l'an ic6o, au-
quel ce Prince mourut , & après le Pontificat de Léon &
de Viâor , c'eft-à-dire , vers fan 1057 , fous le Pape Ni-
colas IL
/n'iyfede VIL Le en forme de Dialogue entre
premier Livre eft
ce Traité. Jeux pcrfonnes (p) j de corrupteur & de cor-^
fous le nom
reâ:eur fous le nom de corrupteur , le Cardinal entend Spi-
:

nofule ; pour lui , il prend le titre de corrctteur. Il fait voir


que Spinofule avoir avancé faux , en difant que l'Ordination
de Formofe fût regardée comme valide dans le Concile de
Nicée (7) ; puilqu'il y avoir entre la tenue du Concile de
Nicée & le Pontificat de Formofe , plus de cinq cens ans
d'intervalle ; qu'encore que l'on ait reconnu pour légitime-
\mcnt ordonnes , ceux qui n'avoient été , ni choifis par le
Clergé , ni demandés par le peuple , ni conficrés par les
Métropolitains avec les Evêqucs compro\ inciaux , trois con-»
! <lii:ions requifes pour l'Ordination ordinaire d'un Evêque (r) ;

(«) Mabii-l. Iifr lui. p. kîS.Martek. r/')M\RTfN. tcm. f, Aneci. p.6]^,


toni. î.AnecA.p. 63 r. {I ) C.ip. I.
(0 J
Uijhr, Meili.in. Moiiitfl.f. 2jo. (0 C ./•.
u 6.
,

EVESQ. DE BLANCHE-SELVE. Ch. XXVI. 431


il n'étoic jamais arrive que l'on ait eu le
égard pour même
ceux qui avoicnt été élus & ordonnés par iiaionie ; quoique
les trois conditions dont nous venons de parler , le Ibicnt
trouvées dans leur Ordination. Il femble rejctter le Batêmc
conféré par les hérétiques (s) , même au nom de la Trinité ;
& il cite là- defllis les fauflcs Décrétales du Pape Clément :

mais il s'explique aufTi-tôt & dit, qu'à caufc que plufieurs s'en
fcandaliloient , il fut ordonné qu'on reconnoitroic pour va-

lide Batcme donné au nom de la fainte Trinité , avec


, tout
défcnfe de le réitérer. II rapporte à cette occaHon , un grand
nombre de partages des Pères & des Conciles il en cite d'au- :

tres pour montrer l'éloignement qu'on doit avoir des héré-


,

tiques ( f ) , & le peu de cas qu'il faut faire de leurs Ordina-


tions. Il eft clair , dit- il , qu'on doit rejetter ceux qu'ils ont
ordonnés , & cela pour deux raifons ( « ) ; la première efl
qu'en recevant l'Ordination d'un Evêque hérétique , on par-
ticipe à ion héréde ; la féconde , que par cette participation

on devient fujet à la pénitence publique. Il prouve la nullité


des Ordinations fimoniaques , par plufieurs textes de faiiit
Grégoire-le-Grand (x), de faint Ambroife , de faint Augu-
flin , &: des Conciles ; après quoi il le fait cette objection :
les Canons ordonnent de dépofer ceux qui ont été ordonnés
par argent ils avoient donc reçu la grâce fpirituclle ,
: le &
degré d'honneur dont on les prive ; puifque la dépofition eft
une privation de l'honneur reçu. Il répond qu'on appelle vé-
ritablement dépofition , la privation d'un degré d'honneur ,
qui n'enavoit que quelque apparence au dehors; pour prou- &
'ver que ceux qui font ainfi ordonnés , ne reçoivent pas réel-
lement la grâce du Saint-Efprit , il allègue le fécond Canon
du Concile de Calcédoine (y) , qui déclare que cette grâce
ne peut fe vendre , autrement ce ne feroit plus une grâce ; le
nom de grâce ne fe donnant qi'à ce qu'on reçoit gratuite-
ment 5 &
non à ce que l'on vend ou que l'on achette. Un paf-
fage de faint Ambroife réfout clairement, la difficulté. Ce qu'a
donné , dit ce Père , celui qui eft ordonné par fimonie , eft
de l'or: ce qu'il perd, c'eft Ion ame. Comment, en perdant
fon ame, peut-il acquérir la grâce du Sacerdoce ? Il s'objette

{s)Cap. p. 10. 1 (v; Ci/;. 13. 14. 1 6. 17. i!


(t]Cap. II. (;) C<V. 19.
(ji)Cap. II. I
432 HUMBERT, CARDINAL,
que du moins celui qui cil: bon ( z ) , c'cll-à-dire , excmt de
fimonie peut recevoir la grâce d'un Evêque limo iiaque. Il
,

répond , que l'on ne peut acquérir la juilice par l'injulHce.


Dans tout ce Livre Humbert confond la gra:e de l'Ordina-
tion avec TelTence de l'Ordination i en iorte que fon icnti-
ment ctoit que les Ordinations limoniaques dévoient pafler
pour nulles à tous égards. C'cft auffi ce que porte le neuvième
Décret dans le recueil du Pape Nicolas II Q^ue tous les Prêtres :

ordo/tnés fciemment pir des Evêques fnnomaqius («) , fachenf


qu'ils ne font point ordonnés.
Livre fécond, VIII. Le fecond Livre
efl: un iflu de pafljges de l'Ecri-
(• «84. j.yj.g ^ Pères , contre Is hérétiques en général
(jg5 contre &
les fimoniaques en particulier. Humbert fouticnt , que ceux
qui font ordonnés par un Evèque fimoniiquc , quand même
ils ne lui donneroient rien pour en être ordonnés {b) , fonc
coupables en ce qu'ils le regardent comme un Evêvjue légiti-r
me : en effet , ils ne s'adrclleroient peint à lui , b'iis n." Iç
croyoient Evêque. Il dit à cette occalion , que les péchés d'i^
gnorance n'excuient pas ; &
ne doute point que ces troupes
<le gens iîmples &
rultiques , qui fe laiffent iéduire par les
hérétiques , ne périlTent juilcment. Il avoue toutefois , qu'il
ne peut comprendre comment leur pcrre s'accorde avec la
juflire. Il rapporte les progrès de la fimonie (p) , à l'igno-
rance de 11 Loi de Dieu , à l'avarice 6c à l'avidité des di-c
gnités Eccléliaftiqucs ; &
la rcgirde comme la caufe de

la dcftruftion des Eglifes &


des Monaftercs , fur - tout en
Icalie.

Livre troîfié- IX. Il commence le troifiéme Livre ,


par la réponfe à Tob-
me,/». 787. jcdlion des limoniaques. Ils difcient: Nous n'achetons point
grâce invifible du Sa.nt-Efprit , ni la conlécration Ecclér
la
fiauique ou fOrdinat'cn
; mais feulement les revenus de I'Et

glife. Si ce'a efl, dit le Cardinal Humbert {d), que ne vous

Njcontcntcz - vous de ces revenus que vous avez achetés ; 81^


pourquoinc vous emparez-vous pas aufTi-rôt du Siège Epif-
i copal &
de fon autorité , fans attendre que vous ioytz or-w
donnes Ei'êques? Quel droit avez -vous d'exiger une con-

(a) âvh4 B4luJ.tom,v,MifctUan.v/it.\ (0 ^'V iU

fdcration y
a*

EVESQ. DE BLANCHE-SELVE. Ch. XXVI. 435


fccracion , i^ac vous (.unvcn^z navoir pas acquile ? Avouée
que ce ne lunt point de l'Eglife que vous avez
les poircfîions
achetées (e) mais le droit de les avoir, qui n'eft donné que
.

par la bénédidion Epilcopale. Le Concile de Calcédoine a


détruit cette objeâion des (îmoniaques (f) , en ordonnant
qu'un Econome des biens de l'Eglife , qui auroit acheté cet
emploi , feroit dépofé , de même que TEvêque , le Prêtre ou
ic Diacre ordonnés par llmonie. Toutefois l'œconome n'efl
établi par aucune confécration ; mais c'efl que le Sainc-Elprit
opère dans tous les dégrés du Miniflcre, même dans les plus
petits , comme cft celui d'œconome. Humbcrt fe plaint du
pouvoir que Princes laïcs s'attribuoient dans rélettion des
les
Evêques, au préjudice du Clergé (g) , prefquc toujours obli-
gé de fuivre le fcntiment des Seigneurs féculiers ; de ce &
que ceux-ci donnoient à l'élu l'inveftiture de fon Evcché ,
par la tradition de la crofle &
de l'anneau : c'eft, ajoute- 1-
51 , regarde toutes les
s'attribuer toute l'autorité Paftorale. Il
Ordinations faites de cette manière, comme illégitimes ; &
ne veut pas que l'on compte entre ks Evêques , ceux qui font
ainfi ordonnés : fa raifon eft, que l'invefliture efl une elpece
de vente , quoiqu'elle n'en porte pas le nom. La lîmonie fit de
grands ravages en Italie , dans les Gaules & en Allemagne
Icus le<. règnes des Ottnns; l'Empereur Henri fils de Conra-
de le Salique f // ) , s'appliqua à la détruire & il y réuffit en
;

partie dans l'Allemagne: au contraire , elle failoit des pro-


grès continuels en France, fous la protection du Roi Henri,
Humberc rend témoignage aux Grecs , qu'ils éroicnr excmts
de cette erreur ; & que ni l'Emt creur ni aucun laïc , ne s'ar-
rog oit le droit de difpofer des Eglifes, ou des Ordinations
KccleTriftiques, ou des Bénéfices. C'tfl. , dit-il (i), ce que
j'ai appris de la bouche même de Conflantin Monomae]ue ,

dans le tems que j'étois à Conftantinople. La difpofition de


toutes ces choies appartie-nt aux Métropoliains & autres per-
fonnes Eccléfiafiiques. Il n'y a paî eu là-defTus de variation
dans l'Eglife Grecque , depuis le Grand Conflantin , qui dé*
clara hautement dans le Oancile de Nicée , que les caulcs ec-

(e)C,p.t. I (i)Cip.7.

(s) Cap. 6. \

Tome XX' lii


454 HUMBERT, CARDINAL,
clcfiaftiques n'ctoient point de Ion reffort. On doit donc dire
qu'à cet égard , l'Eglile Grecque
plus libre que la Latine ,
eft

& moins loumife à la puiflance des laïcs , qui , chez les La-
tins , , aliènent ou vendent non-feulement les
s'approprient
EgUfes mais leurs biens , leurs droits & leurs offices , ibus
,

prétexte qu'ils en font les défcnfeurs. Leur tyrannie envers


l'Fglife (/) jfurpaffe celle des Lombards , quoique barbares &
^ricns. Agilulfe Içur Roi, n'empêcha pas le Pape de pourvoir
librement & fuivant l'ancien ufage , l'Eglife de Milan d'un
Métropolitain.
X. Humbert remarque que les Papes & les Métropolitains
confervcrent leur autorité julqu'au règne des Ottons (m) ;
qu'alors elle commença à décroître , par la négligence ou la
foiblelTe des Papes , tandis que les Princes laïcs augmentoienc
la leur fur les biens de l'Eglife &
fur fes dignités , employant
d'abord des prières pour les obtenir , puis des menaces en- :

fin , ils les donnèrent, foit par des brevets, foie par les in-
veflirures, fans confulter les Métropolitains. Cet ufage, dit-
il , quoique criminel, a tellement prévalu , qu'on le croit ca-

nonique («) ; & il n'y a pas jufqu'aux femmes , à qui iLn'eft


pas permis de parler dans l'Eglife , (]ui donnent des Evêchés
& des Abbayes par l'inveftiture , ou la tradition du bâton
Pafloral 8c de l'anneau , à des Clercs qui ont gagné leur fa-
veur ou qui leur ont rendu des fervices temporels. Il appli-
,,

que à cet abus , les reproches pleins de calomnies de l'impie


Porphyre contre l'Eglife , dont il diloit que le Sénat étoic
çompofé de femmes , &
que c'étoient elles qui donnoient aux
Miniflres les , ne leur étant pas
ornemens facerdotaux permis
de les recevoir d'autres mains. Enfuite il s'étend fur les fléaux
dont Dieu a puni les Princes ufurpateurs des biens Se des
droits de l'Eglife ( o) ; & traite de piété aveugle , celle qu'ils
ont fait paroître dans la conftrudion des Eglifes ou des Mo-
Drtilcres , qu'ils ne fondoient ou ne bâtilfoient qu'avec des
biens ufurpés fur l'Eglife. 11 met cette différence encre les mau-
vais Prêtres Catholiques & les iimoniaqucs (p) , que ceux-là
nç. laifTenç pas de conférer la grâce & le ialut , par l'admini-

(l) Cap. JO. |: (n}C.r^Ir.


(m) Cap. II.. j, (j,)Ctp. 32.3J>-
(«) Cap. I V I
,

feVESQ. DEBLANCHE-SELyE. Ch. XXVI. H?5


flratJon des Sacrcmçns; a,u Ugu que ceux-ci xi'ctanc point v(^-
jritjblemcnt ordonnés , ne -peuvent donner ce qu'ils n'ont pas
reçu. Il manque neuf clwpitres dans ce troiliéme Livre la i,

Table en marque 55, il n'y en a que 44 d'imprimcs. Hum-


i>crt fait voir dans tout l'Ouvrage , de .rcloquence & bcau^
coup d'érudition ; mais il n'eft ni alfcz concis , ni affcz mé-
.thodique : il eft même
en pluficurs endroits , obfcur em- &
l>arian"c 5 ce que l'on apperçoit fur-tout dans fcs réponies aux
xibjedions de Spinolule comme ce n'ctoient que de pures ful>-
:

.tilttés philofophiques, il n'étoit pasa^fcde îneta"e,le5 réponfe;s

^ans un grand jour.


XI. L'Hilloire de Moyenmoutier ne parle que ^e dçuK j^"'^^^^^^^^''j[' ,

Livres du Cardinal Humberc contre les limoniaques (q)- Humbert.


mais elle lui attribue des Hymnes & des Répons pour les
Offices de f ùnt Cyriaquc , AÏartyr ( r ) , de faint Hydulphe
F.vcque de Trêves , de iaint Dié , de faint Odylle , de faint
Grégoire , Pape , & de iaint Colomban ; ajoutant qu'il les
envoya à Brunon , alors Evcque de Toul , pour les noter.
"Wibert qui a écrit la vie de Brunon ou Léon IX {s) -, le fait
Auteur & des Hymnes & des notes , comme on l'a déjà rc-
maioué. Dom Bclhomme s'en tient à l'autorité -de la Chroni-
que de ion Abbaye I; & donne au Cardinal Humbert, les
Hymnes & ks Répons dont nous venons de parler , &; la
note a l'Evèque Brunon. On attribue encore à ce Cardinal,
un recueil d'hifloircs , défigné par ValTebourg , fous le titre
d'Hiflonûl de Htimb rt , Cardinal de Sicile i^t). Ce ne peut
être l'Hifloire des Abbés de Moyenmoutier , pulfqu'elle efl
du Moine Valcandc («) il faut donc que ce foit la relation
:

de fcs voyages , ou quelque au:re Hiftoire que nous ne


connoifTons pas. Ceux qui l'ont f lit Auteur d'un Commcn-
toire fur la Règle de Saint Auguftin , l'ont confondu avec
Humbert cinquième Général des Dominicains, de qui cd le
Commentaire. Cet Humbert mourut en 1277. On ne fait
point les railons qui ont obligé Oldoin à mettre au nombre
d(.s Ecrits du Cardinal (^x)., un Traité fur la virginité per-

CO WASîFEOraf,. TaHettei fntcftrs,


{r} IhiJ. p. i44. (h) lliji. MtJi.i'i. Honafl.p. 141.
(') WiBEKi. »/; iita Lem. tom, p,ASor. (*) O1.D01N. AlLen. RoiiMtt.p. 34?.

liiij
,

43<5 HUMBERT, CARDINAL^


pétuelle de la fainte Vierge. Il n'en eft rien dh dans le Ca-
talogue des Ouvrag'. s de Humbert mais perfonne ne lui con-
:

certe la traduction latine de la Lettre de Michel Ccrularius à


l'Evêque de Trani , ni la profefTion de foi que Berenger fouf-
crivit au Concile de Rome en 105p. On a parlé plus haut de

^ l'une& de l'autre,
d'une dipute XII. Le Cardinal Humbert ne fut pas le fcul des Latins,
contre les dans l'onziémc (iccle, qui écrivit contre les Grecs: nous a-
'*"•
vons à la fuite de fon Traité contre la llmonie , dans le cin-
quième Tome des Anecdotes de Dom Martenne , un frag-
ment d'une dilpute contre leurs erreurs , écrite vers le mi-
lieu ou fur la fin de ce ficelé. L'Editeur appuie cetre épo-
que , premièrement fur l'antiquité du manufcrit de l'Abbaye
de Fleuri , dont les caraÊleres marquent une écriture d'en-
viron fix cens ans ; fecondemcnt , parce que l'Auteur de cette
difpute fait un procès aux Grecs de ce que contrairement à
l'uiage de l'Eglile Latine, ils trempoient THoftie dans le
Sang de Jefus-Chrifl, avant de la donner à ceux qui com-
munioient. Les Latins ne changèrent cet ufage qu'au com~
mencement du douzième fiècle , comme on le voit par la-
Lettre d'Ernulfe ^ Evcque de Roftens. Jufques-là on don-
noit féparèment le Corps & le Sang aux communians ; & il'
avoir été défendu par le premier Canon du quatrième Con-
cile de Brague enôyy (y) , de tremper l'Hoflie doTEuchyri-
ftie dans le vin. On ne fait de qui efi: cette difpute parce que •,

le commencement & la fin manquent dans l'imprimé comme


dans le manufcrit.
Anaiyfede XIII. L'Anonyme, d'ans ce qui nous reflie de fon Ou—
«eue difpute. vrage (z) , établit la proccffion du Saint- Efprit , par un-
raifonnemcnt tout fimple. Le Saint - Efprir cfl l'Eiprit du
Père & du Fils il ne l'eft pas autrement du Fils que du
:

Père ; puis donc qu'entant qu'Rfprit du Perc , il procède


de lui j il procède auflTi du Fils entant qu'Efprit du Fils:-
qu'il ne fo-t pas autrement de l'Efpric du Pcre que du Fils
cck efl: certain ; parce qu'il eft l'Elprit du Père comme
Dieu , il efi envoyé comme Dieu , il procède comme Dieu».

fj^ Tom. t. Cffic.p. j<;j, r (jL ) M.iRTENNF. tom. y. Auccdot. f.ig.

U.{7.
ÊVESQ. DE BLANCHE-SELVE. Ch.XXVI. 437
Ceft en la même manière qu'il eft l'Efpric du Fils , &: qu'il
Îtrôcede de Le Fils die , que le Saint-Eipric recevra de
lui.

ui : que en recevoir , (inon ce qu'il eft , c'eft-à-di-e ,


peut-il
Dieu? L' Auteur reprend cnluite les Grecs , de ce qu'ils di-
foicnt anathême au Corps de Jefus-Chrift confacré avec du
pain azyme. Ou c'efl: dit-il , ion Corps , ou ce ne l'cft pas:
,

il c'eft l'on Corps , il doit être adoré de tout le monde fi :

ce ne l'eft pas , il faut le mépriler comme une idole. Mais


d'où prouvez -vous que fon Corps n'eft point confacré avec
du pain azyme ? Avez- vous là-dcflus des Décrets des Percs
ou des Conciles ? Il le plaint qu'ils récitoient dans les Dip-
tyques , les noms de Michel Cerularius , de Léon d'Acride
& de Nicétas Pcdorat. . Il paroît par cet endroit , ou que
.

l'Anonyme ne favoit pas que Nicétas avoit abandonné les


erreurs des Grecs , ou qu'il ccri. oit avant qu'il les eût aban-
données. Les Grecs foutenoient que Jefus-Cnrifl avoit fait
la Pâque avant le quatorze de la Lune , & qu'il l'avoir faite
avec du pain fermenté. Il a donc , répon l'Anonyme , été:!

tranfgrcfleur de la Loi , lui qui dit qu'il eft venu pour l'ac-
complir. Il reproche aux Grecs divers abus , comme de Irap-
per d'une lance le Corps de Jcfus-Chrift ; de l'enlevel r en
terre ; de le prendre avec de l'eau chaude ; d'enleigner que
fon fang fortit chaud de fon côté , quand on le perça ; &
d'attendre jufqu'au feptiéme jour pour batifer les enfans; ce
qui occadonnoit la perte de beaucoup d'ames.
,

A D E L M A N NE

CHAPITRE XXVII.
Adelmanne , Ecolâtre de Liège . (^ depuis Evêque d$
Br^'ffe 7 Afcelin , Moine du Bec.

Adelmanne. j^ ^T^ Et Ecrivain , à en juger par fon nom , qui en lan- ,

" Allemande, iignitie homm^ fioble ou g. nctlhomme ^


étu'dcr^^" >^^ S'^'^
dévoie ûre compté parmi les Sçavans d'Allemagne. Il y a
été mis, en etfet , par Urbain-Godefroi Siber , dans un Ou-
vrage imprimé à Leiplic en 1 7 i o , ions le titre s illulJres : D
yillemans ; mais par une rail'.n moins iolide t]ue celle qui Te
tire de l'étymologie de Ion nom Içavoir , qu'il s'appelloic
;

Allemanne & non Adelmanne (a) d'autres prétendent qu'il :

-n'ctoit point Allemand de nation parce qu'en parlant des


,

-Provinces Teutoniques ou de l'Allemagne , il les regarde


comme un p.iys étranger , quoiqu'il y demeurât depuis long-
tems (^). Il fut formé dans les fciences avec Berenger , à
l'Ecole de Fulbert, Evèque de Chartres (c): mais il fit plus
d'honneur que fon condilciple , aux inftruclions de ce véné-
rable Socrate, comme il l'appelle (d). Adelmanne conferva
précieufement la dodrine qu'il apprit dans cette Ecole ; Be-
renger s'en éloigna & la combattit. Le premier étoit Soudia-
cre del'Eglife de Liège , lorfqu'il vint étudier à Chartres. Re-
ginard qui fuccéda en 1024, à Durand , Evêque de Liège ,
écrivit à Fulbert pour lui redemander Ion Soûdiacre , qu'il
appclloit une brebis errante ( e ). Fulbert répondit avec poli-
tefleà Reginard , qu'il ne devoir point regarder Adelmanne
comme une brebis hors du troupeau ; qu'elle fe nourrifToit à
profit ; que toutefois il la renverroit incelTarnment à Liège ,
dans l'eTpérancc qu'elle reviendroit à Ch.irtres avec dimiffoire
en forme.

(j) SiCEEEaT. de Script. Ecclef. cap. (f) Idem. ibid.


{d, Jdcm. ibid.
(h) Tcutonicns aurcs intcr quas Jiu pere- (0 FULBEAT. Eplfti^Jt
grinor replevcrunt. Ap£j.M. ï^. adBcren.
EVESQUE DE BRESSE. Ch. XXVIT. 45^
n. Kcginard uCintclefon droit (/) ictinc chez lui Adel- eft Eco-
, Il fait

manne. Ce changement n'interrompit point le coars de f^s '^'^^''^'-'^S^'-


études: il les continua fur le plan qu'il les avoit commen-
cées , & fe rendit habile dans toutes fortes de iciences fa-
,

crces & profanes. Vazon gouvernoit alors l'Ecole de Liège ;

mais il en mèmc-tems Doyen de la Cathédrale. Son


étoit
zcle pour le maintien de la diicipline , lui ayant attiré des
ennemis , il fe recira à la Cour de TP^mpercur Conrade , où
il fcrvit en qualité de Chapelain. Sa place d'Ecolàtre fuc don-

née cl Adclmannc , qui 1 1 remplit avec honneur pendant plu-


ficurs années. Quelques raiions qu'il ne die point , Tobligerenc
de quitter le féjour de Liège. H leretira en Allemagne, (Sdpafla
de-là dans la Lombardie.
III. L'Eglife de Brcfle s'étant trouvée vacante, Adelmanne Oniecliciiît

fut élu pour la remplir. On place ordinairement l'époque de


'^^
d ^n'"^

Ion élévation a 1 Lpilcopat al an 1040 [g) quelques-uns la


:

mettent en 1050. Ses Ecrits ne fournilîent là-dclTus aucune lu-


mière. Il mourut, feloa Ughelli (h), vers l'an ic6i , & fuc
enterré dans TEglife des faints Fauftin & Jovitte , Martyrs.
IV. Rcrenger ayant attaqué , & de vive voix & par écrit, Befe„gery*^*
la prélence réelle de Jefus-Chrill dans le Sacrement de l'Eu-
chariflie , le bruit de cette nouvelle erreur fe répandit jui-
qu'en Allemagne, où Adelmanne demcuroit alors. Ilréloluc
d'en écrire à Bcrenger , pour apprendre de lui-même la vé-
rité de ces bruits mais ayant fait réflexion que Berenger
:

croit ami de Paulin , Primicier de l'Eglife de Metz, & que


eelui-ci étoit à portée , il lui écrivit, le priant de lui marquer
ce qui en étoit. Paulin le promit, mais il ne tint point pa-
role ; du moins fut-il près de deux ans fans faire de réponfe
à Adelmanne. Cette négligence lui fit prendre le parti d'é-
crire lui-même à Berenger, en ayant trouvé une occalion
favorable & telle qu'il la iouhaitoit , pour que fa Lettre fi"ic
rendue sûrement car il la remit à un François , qui étoit
:

venu le faluer de la part même de Berenger. Les termes de


frcrc, de cher condifciple dont il le iert en lui écrivant , font
voir que la Lettre efl antérieure aux Conciles de Rome c^c de
Verceil , où Berenger fut condamné en 1050. Auflî Adcl-

(/) SlGEBERT. r<>p. lyj.


j
(II) lit J,
(jIjUghel.Tow, 4.^.738. 739» !•
,

440 ADELMANNE,
manne nq de ces Conciles. Il faut ajouter, qu'il
dit-il rien
I en Allemagne , conféquemmenc avant Ton £^
écrivit étant
pifcopat c'eft-à- dire, avant l'an 1048 ou 1050. Il paroïc
-,

lui-même en fixer l'épo ,ue , lorfqu'il dit c.ue les erreurs lui
étoient connues depuis deux ans. On croit communément
que Berenger ne commença à les repeindre que vers l'an 1 044,
Dans cette fuppofition , Adelmanne auroit écrit la Lettre vers
l'an1C46 ou 1047 le bruit de cette nouvelle héréfie n'ayant
;

pu être portée en Allemagne.


li vi>c
Analyfe de V. Quoi de la date de cette Lettre (i) , c'efl
qu'il en foit
ceue Lettre, l'ouvrage d'un efprit très-cukivé , qui avoir le don de s'énon-
eer avec netteté, de penfer jufte , de raifonner folidement,
de donner à ion difcours un air fimple , naturel , inllnuant,
perfualif ; & dont le zèle pour la vérité , ne refpiroic que la
charité , fans aucun mélange d'amertume ou d'aigreur. Je
vous nomme , lui dit- il , mon frère de lait, à canf.- de la
douce fcciété dans laquelle nous avons vécu fi aj,réab'emcnt
à l'Acacémie de Chartres , vols plus jeune , moi un peu plus
grand , Socate ; c'écoit l'Evéque Ful-^
fous notre vénérable
bcrt. Adelmanne fon éloge , rappelle les doux entre-
fait

riens qu'ils avoicnt avec lui ; les inflruftions qu'il leur don-
noit , quelquefois les larmes aux yeux , fur-tout lorfqu'il les
conjuroit de marcher foigneufement f.r les traces des laints
Pères , fans jamais s'en écarter pour prendre des (entiers
détournés. Puis venant aux bruits qui fe répandoicnt de tous
côtés contre Berenger ;
qu'il s'étoit léparé de l'unité de l'E-
glife, en foutenant que ce que immole tous les lours lur
l'on
l'autel , par toute la terre , n'eft pas le vrai Corps & le vrai
Sang de Jefus-Chrill, mais une figure & une rcflcmb^ante;
il le conjure par la miféricorde de Dieu , & par la mémoi>e

fi chère de Fulbert leur Maître commun , de ne point trou-

bler la paix de l'Eglife Catholique , ni la République de la


Cité chrétienne , bâtie par nos anciens Pères ; pour laquelle
tant de milliers de Martyrs , &
tant de faints Dotleurs ont
combattu contre les idolâtres
, &
contre les hérétiques ; &
qu'ils ont fi bien défendue , qu'il n'en efl plus aucun qui ofe
s'élever contre fa doârine, qu'aufïi- tôt il ne foit accablé de
mille traits.

f^fj
Tim. 19. Bikl'ot, Pat. p. 438,
'
EVESQUE DE BRESSE. Ch. XXVH. 441
VI. Les Manichéens, les Ariens (/), & les autres pertes de
l'Eglife, lont tombes dans l'oubli: au contraire, on célèbre
la mémoire de laint Jérôme
, de faint , de faint Ambroife
Auguftin, qui ont réfuté efticaccment leurs erreurs. Il nous
€fl; bon , mon frère , nous qui lommcs petits , de nous cacher

fous les cnicignes de ces Généraux dont l'autorité eft ii gran-


de dans l'Ëglile. Quoiqu'cn général tout homme fait menteur , rj.,im. 1

ces grands hommes font véridiques, parce qu'ils fc font atta-


<:hcs à celui qui dit : Je fuis la voie , la vérité & la vie. C'eft /<"'". 14.

ont appris ce qu'ils nous ont enfeigné du Sacre-


•de lui qu'ils
ment dont nous parlons. Adclmanne rapporte la promefîe
que Jelus-Chrift ht à les Difciplcs , de leur donner un pain
<\u\ feroit la propre chair ; puis il fait voir l'exécution de cette
promelle , par les paroles de l'inllitution de l'Euchariftic , "&
ajoute: Qui eft-ce qui ne croit pas que la chofe foitaind,
iinon celui qui ne croit pas à Jcfus-Chrifl: , ou qu'il n'a pas
prononcé ces paroles : mais on ne peut douter qu'il ne les ait
dites , &
que ce ne foit le même qui a dit au commencement
du monde {m) ^ue la Iwmere je faffe , : la lumicre a ctè &
fane de rien. En dilant du pain : Ceci e(i mon Corps , n a-t-il
pas donc pu aufli faire que le pain fut fait fon Corps ? Et s'il
changea fans rien diie l'eau en vin, par une vertu fccrete;
refuicra-t-on a les paroles de changer le vin en fon Sang ?
Il montre que comme c'ell Jcfus-Chrifl qui batifc par fcs Mi-

nières , c'efl lui aulh qui confacre qui crée fon Corps & &
Ion Sang par la main la bouche des Prêtres («) ; &que fi &
l'on le plaint , que les chdngcmens du pain du vin en la &
Chair Se au Sang du Sauveur , ne fe font pas viliblement, il
en e(l de même du Batême , oj l'ame efl landlifiée par l'eau qui
touche le corps, fans qus.- cette fanitification paroilTe aux yeux
des fpcdareurs que dans l'un & l'autre Sacrement , les cho-
; >S<:

fes fe paflent ainfi , ahn de donner lieu à la foi , qui cefTeroit


d'être & de mériter, fi ce quife fait intérieurement étoit déve-
loppé aux yeux du corps.

(/) Ta;. 459. te voc^l'ter eâiiem viriute vinum ipfum in


(nii Qui enim dixit in prÏT^ipio : F/.i» Sanguinem fuumir. nÂate} Aott-u, Epifl,
lux , f5 fii'J.t ef. Itjx , non pot '
t dicenJo ad Bererij^.
de pane. Hoc e/i Corpus mttihi , ita fîeri j(») Chrii''us per manum & os Sacerdotîs
efficere ' & qui tici'â virtute aquam ver- baptil it; Chri'his per manum & os Sacer-
tit V nurn nonelficndù pot rat
in > (îquid '
dotis Corpus fuum & Sanguinem créât,
lame 1: cllîcacii's de Deo dici debït , fsnan- ] Jiid.

1 orne XX. Kkk


442 ADELMANNE,
VÎT. La Lettre d'Adelmanne n'eft pas venue entière jus-
qu'à nous (o ) , & il paroit que nous n'en avons qu'une pe-
tite portion ; mai-: elle futfit pour rendre un témoignage de
fa foi fur un de nos principaux dogmes. On y voit encore ,
que cet Ecrivain n'avoit point borne fcs études à la connoif-
fance de la Théologie ; qu'il a voit lu les Prophètes qu'il étoic
;

inftruit du fyftcme de quelques anciens Philofophes fur le


mouvement de la terre , & l'immobilité du foleil & des étoi-
les fixes , adopté dans le quatrième fiécle par Copernic qu'il ;

étoit encore en état de réfuter ce que ces mêmes Philofophes


ont avancé fur la création du monde & lur ce qu'il contient.
11 avoit fans doute puifé fes connoiiïances dans l'Ecole de
Fulbert , & les avoit communiquées lui-même à fes auditeurs-
dans celle de Liège. Nous l'obferverons , pour apporter un
corrcdif au préjugé commun , que les dixième & onzième
fiécles furent des tems de ténèbres & d'erreurs. Tritheme parle
de la Lettre d' Adelmanne (/> ) , comme très-longue. Il fcmble
dire par-là qu'il l'avoit vue route entière.
E.itionsde VIII. Le fragment qui nous en refte, a éré imprimé avec
cetieLettre.
]eg Traités dePafchafe Kadbcrt, de Lanfranc &
de quelques
autres , lur l'Euchariftie , à Louvain chez Rotaire & Phale-
fiusen 1551 , par les foins de JeanCoflcr , in- S'', en 1561.
Jean Ulimmier , fit réimprimer tous ces Opufcules en la mê-
me Ville & en la même forme , chez Jérôme Vellaus , & y en
ajouta d'autres fur la même matière. La Lettre d' Adelman-
ne , telle que nous l'avons , fe trouve auiTi pour la plus gran-
de partie , dans l'Ecrit de Jean Garet, fur la prélence réelle
dans l'Euchariftie , à Paris en i ^ ^2 , in - S''. & dans le pre-
mier volume de l'Hifloire de l'Univedîtè de Paris , par du
Boullay: depuis elle a été publiée dans les différentes éditions
de la Bibliothèque des Pères , à commencer par celle que
Margarin de la Bigne donna en 1574: on la trouve dans le
dix -huitième Tome de celle de Lyon en 16^/ , & dans le
Traité des illuftres Allemands par Siber , à Lcipfic en 17 10 :
elle fait la quatrième Se dernière pièce du recueil des Opuf-
cules des anciens Evêques de Brefle, imprimé en cette Ville
chez Jean-Marie Rizzardi en 1735? , in-fol. fous les aufpices

(0) PflX- 4;9. 1


\ (p) Trithem. Cbroaic. Uirfang, tom.
Ti ni.
,

EVESQUE DE BRESSE. C h. XX VII. 443


de M. Cardinal Qucrini. L'Editeur , M. Galeardi , don-
le

ne d'ahnrd le Livre dcfaint Pliilaftrc, Evoque de Breilc, fur


les hcréfies, avec une DilTerration , où il rend compte de ce
qui regarde ce Pcre & les Ecrits. Suivent les Ouvrages de
laintGaudence fuccciïcur de laint Philaftre dans le Siège Epif-
copal de Brefic, accompagnes d'une l'econde Diiïertation Tur
fes Ecrits & fur la perfonne ; puis un Dilcours de Rampcrt
quarantième Evcque de Breflc , fur la tranflation qu'il fit du
corps de laint Philaftrc en 838 , de l'Egliic de laint André
où il avoit été inhumé , à la grande Egliic dédiée à la fainte
Vierge.
IX. Bcrenger répondit à la Lettre d'Adelmanne, par un AutresLettres
'^''^'"""'^'
Ecrit plein d'injures, où il mêle de mauvais fophifmcs à une
'^

fade plaifanterie , l'appcllant Aulumannc au lieu d'Adelman-


ne. Sigcbert parle de cette réponie (q)- On en trouve des
fragmens dans le quatrième Tome des Anecdotes de Dom
JVIartenne (r) , cà la fuite des A£les du Concile de Rome en
1078 , fous Grégoire VIIl. Tritheme cite un recueil de
Lettres fous le nom d'Adcmanne ( ) ; mais il n'en fait point
j"

le détail. Nous ne connoiffons que celle qu'il écrivit à Paulin ,


Primicier de Metz encore n'en favons-nous que ce qu'il en
:

dit lui-même dans fa Lettre à Bercnger ; & celle qu'il adrelTa


à Guillaume, l'un de fes difciples (t), depuis Abbé de Saine
Arnoul à Metz, &
de Saint Rémi à Reims, pour l'engager
à relier dans le Clergé, où il pouvoit être plus utile à l'Egli-
fe , qu'en le retirant dans un Cloître. Dom Mabillon conje-
dure que îa réponfe à cette Lettre (ti) , s'adreiïc à Aleflan dif-
ciple de Fulbert , & non à Adelmanne: en ce cas, la Lettre
qu'on attribue à cet Ecrivain , ne feroit point de lui , mais d'A-
leftan cité par Adelmanne dans fa profe rimée, dont il faut
dire ici quelque chofe.
X. Elle ert compofée de vingt-trois (Irophes rangées félon Ry'';™" al-
(-tiques.
l'ordre alphabétique (x) , commençant à l'A & finiflant au^^^
Z. Chaque flrophe cft de trois vers ou verfets , qui finifTcnt
par la même rime les deux premiers font de quinze fylla-
:

bes ; le troifiéme quelquefois de quinze , iouvent de quatorze :

(7) SiCFBFRT. C.lp. 1^4. (t) Mabillon, Lil>. tf;. Aniial. n.


( r ) l'a^e 109. («IJMabill. in ÂnaleCÏ. pag. nfo.
(s ) TalTH. lie Scriptor. ci/'.jzo. (x) Mabm.l. i» An.ileFi. p. 3 S 2.

Kkkij
444 ADELM. EVESQ. DE BRESSE. Ch. XX VIL
les lylbbes font longues ou brèves indifferemmert , excepte
les deux dernières , qui terminent le verfet par un ïambe ; la
troifi 'me ftrophe cfl la ieule où cela ne fe rencontre pas. C'efl
dans celle-là qu'^Adelmanne fait l'cloge de Fulbert de Char-
tres fon Maître. Il le continue dans les quatre fuivantes ,

remarquant que ce grand Evêv:jue cultivoit les fcicnces di-


vines & humaines ; &
que par fes foins , les études flcurif-
foient dans les Gaules. Il fait connoître dans les autres ftro-
phes , les Sçavans avec qui il avoit eu quelque liaifon. La
plupart feroient demeurés dans l'obfcuricé , fi Ade'manne
ne nous avoit appris leurs noms , & quelques circonftances
de leur vie. Il fe nomme lui-même dans la dernière fljophe ,,

& s'appelle Adelmanne ainfi on ne peut douter que ce


:

n'ait été fon véritable nom. Cette pièce eft eflimable par la.
fingulariré de fon goût , & parce que l'Auteur y dit beaucoup
en peu de mots : mais elle n'a pas le mérite de la réponlc d'A-
delmanne.
K^^^tionsde XI. Dom Mabillon a fait imprimer ces Rythmes dans fes.
ccsRyiknies.
Analedes fur un manufcritfde l'Abbaye de Gcmblcurs en
Brabant , où on lifoit à la tête de ces Rythmes ; que l'Au-
teur les avoit compofés étant encore à Liège , & les avoit
jointes à la Lettre qu'il écrivit à Berenger ; & qu'à la fin on
voyoit cette réponfc impertinente de Berenger : Nafchur ri-
dkulus ?nus. Ils ont été publiés depuis par Dom Martenne &
Dom Durand , dans le quatrième Tome des Anecdotes , à.
Paris en 1 7 1 7 , avec les Atlcs du Concile de Rome en 1078 ,,
fous Grégoire VII, Se la réponfc de Berenger à la Lettre
d'Adelmanne. M. l'Abhé Galcardi leur a auffi donné place
dans fon recueil , avec les notes de Dom Mabillon , à la fuite
de la Lettre d'Adelmanne, à BrefTe en 1735?: rnais cen'eft
pas la feule fois qu'il les ait fait mettre fous la préfixe ; ils fe
trouvent dans fon édition des Difcours de faint Gauderce à
Padoue en 1710, in-40. Trithcme cite un Ecrit d'Adel-
manne (y) , où il donnoit de grandes lounnges à Lambert ,.
JVÎoine, &
depuis Abbé de"S. Laurent deLicge. Il efl parlé d'un
Lambert dans les Rythmes ; mais il fiiifoit la demeure à Paris:
8c non à Liège. Il faut donc regarder comme perdu TEcrit:
dont parle Tritheme.

(;() Tkithem. Chrofi. Uirfitiig. tom, l.f- lSc«


ASCELIN, MOTNE DU BEC. Ch.'XXVTI. 445
XII. Un des premiers advcrfaires de Berengcr , fur A fcc-Afceiin, Moi-
lin , Moine du Bec,& dilciplede Lanfmnc. il afTifta avec "^''"^^''•

deux de fcs confrères , à la Conférence indiquée à Briône ,


par Guillaumc-Ie-Bâcard , Duc de Normandie, pour y exa-
miner les erreurs que cet héréfiarque commençoic à répandre.
La Conférence tourna à l'avantage de la foi Catholique. Be-
renger réduit au filence par Alcelin , fut obligé de fe rétra-
cter. La confuiion qu'il en reçut ne l'empêcha pas de s'adref-
fer à Afcolin , pour fc plaindre de la manière dont on l'a voie
traite dans cette Conférence. Ses reproches tomboient fur Af-
celin comme fur Guillaume, autre Moine du Bec, quil'accu-
fûit d'avoir reconnu Jean Scot pour hérétique ;& il fc Hattoic
dans une féconde Conférence , de le juftifier fur toutes les ac-
culations formées contre lui.
XIIL Afcelin croyort(z), ert recevant la Lettre de Beren- Satetrreà
ger , qu'il trouveroït quelques mar ]ues de la fincérité de fa Berengcr.
cbnvcrfion mais il eut le ch.igrin de le voir endurci dans fes
:

erreurs. C'eft ce qu'il lui témoigne dans fa réponie , qu'il com-


mence par l'apologie de cette propolition de Guillaume , que
Berenger traitoit defacrilege iTout homme doit à Pâques s'ap-
procher de la Table du Seigneur. Nousfommes témoins, dit Af-
celin , que Guillaume a dit feulement, qu'on devoit s'en ap-
procher, à moins que l'on ne fût coupable de quelque crime
qui obligeât à s'en éloigner ; ce qu'il ne falloir faire que par
l'ordre du Confefleur ; parce qu'autrement ce fcroit rendre
inutiles les clefs de l'Eglife. Pour moi, continue Afcelin , j'ai
foutenu ce que )e croirai toute ma vie, comme certain & in-
dubitable, que le pain & le vin fur l'autel , par la vertu du
S^int-Efprit & le miniflere du Prêtre (/z) , deviennent le vrai
Corps & le vrai Sang de Jcfus-Chrifl:. Il ajoute, que le \àvxq
de Jean Scot a pour but d'écablir une dodrine conrraire ; &
qu'il ert furprenant que Berenger en falfe leloge , lui Ljui a-
vouoit ne l'avoir pas lu tout entier. Il adopte ce que Pafchafc
& les autres Catholiques enfeigncnt , que les Fidèles reçoi-
vent à l'autel le vrai Corps & le vrai Sang de Jefus Chrift ;.

(i ) A^ui 1 anfrinc. p. 24. |


fcilicet & viniim in alt?ri , Sniiii's Sanfti
f A Attuli enim n^ecum qiiO(1 qnandii'i
) ,
vir-fteper Sacer.-îotis rri.iiftpr'in i , v niin
vixero , r.i^iuvante vinâ virtute, certum,
.' Corpus, \eriimqueian uiren Clirifîi flî- .

indubitabile , n',ill''q',ie evpntibii! vi- la- 1


ci. Ascelin. •E,'/^ t>d Eereti^. a^iuI L*:.fr,

bile ,. in facrario ccrdis rttinebo ,


pantin '
p, i J.-
44^ ASCELT-N , MOINE DU BEC. Ch. XXVII.
& loudcnt qu'en cela (h) , il ne combat point le^ raifons de
lanature , n'entendant fous, ce nom , cjue la volonté de Dieu
qui eft toutc-puiflantc , &
qui fait tout ce qu'il veut. Or , il a
voulu que le pain &
le vin qui font confacré fur l'autel par la

vertu du Saint-Efprit &


par le miniftere du Prêtre ( c) , foicnt
crées potentiellement fa vraie Chair fon vrai Sang &
qu'en ; &
les créant ils foicnt immolés chaque jour : ce dont il nous
,

affure lui-même, en difant à fes Difciples: Prenez m.in- &


gez Ceci efl mon Corps, Il foutient encore à Berenger , qu'il
:

avoir en efiet abandonné Jean Scot dans la Conférence de


Briône ; Se lui re^ roche de penfer contrairement à l'Eglife uni-
vcrfclle fur l'Euchariftic, Se d'avoir changé le chemin droit &
battu que nous ont montré nos Maîtres (i fages fi Catholi- &
ques. Afcelin finit en l'exhortant amiablement à renoncer à
fes mauvais fentimens ; à ceflcr de répandre des opinions nou-
velles & inouïes ; à abandonner
Livre de Jean Scot , con-
le

damné au Concile de nomme un Concile plé-


Verceil ,
qu'il
nier; & à revenir à la Tradition Catholique & Apofiolique,
Ce Concile de Verceil fut tenu au mois de Septembre de l'an
1050, par le Pape Léon IX. 11 faut donc mettre la Lettre
d'Afcelin à Berenger, quelque tems après cette Affembléc,
qu'il nomme pléniere , parce qu'il y vint desEvçques de divers
pays. Sa Lettre, qui eft le feul monument que l'on connoifle
de fon fçavoir , a été imprimé parmi les Œuvres de Lanfranc,
à Paris en i ^48 , dans l'Hiftoire de l'Univerfité de Paris par ,

du Boullay ; & dans les Collçdions des Conciles , par les Pères
Labbe & Hardouin.

(b) Csterùm cùm Pafchano al iCque Ca- minifterium Sacerdotis conficitur , verè
tholkis non foliim fapiojfedetiam veneror fuam Carn^m & Sangiin^m pot ntialitec
& ample<Sor verum Corpus , verumque creari , cre.mdo verô quotliîic niyft ce im-
SangiijnemChrifti à fidelibujin altarifumi molari ; quod ipfe patenter infînuat in hu-
fubfpecie panis & vini. JbiJ, jus Sacramenti exordio Difcipuli* fuis di-

( c ) Voluit autem panem & vinum quod cens Acàjiite^ comeditt , hoc ej} Corfui
:

în al^iri Sanûi Spiritûs confecratione per ^ meum, ll/id.


,
,

HTST. DES EVESQ. DE VERD. Ch. XXVIII. 447

CHAPITRE XXIV.
mjloire des Kveqties de Verdun ; Botion, Abbê de Saint
Berlin ; IVitmond , Moine de Saint Evroul ; Arnalti ,

Moine de Saint Viâor i Louis , Moine de Saint Lau-


rent à Liège.

I. T 7"
Ers Tan 888 , le premier de l'Empire d'Arnoul (^), Hiftoîrecîeï
^
y le Prêtre Berthaire voyant rEgliie Cathédrale de
v«du".
Verdun réduite en cendres, avec la plus grande partie de fcs
livres & de fcs anciens monumens , crut qu'il étoit intéreflant
pour la poftérité , 4^ 'ui apprendre du moins ce qu'il favoic
des anciens Evcques de cette Eglife , foit pour en avoir lu
Thiftoire dans 'ces Livres avant qu'ils fuiïcnt confumés par les
flammes, foit pour l'avoir apprife par la tradition des Fidèles,
11 dédia fon Ouvrage à Dadon , élu Evcque de Verdun en

875 ( ). Ce n'eft qu'un très-petit abrégé des Evêques de ce


tf

Siège depuis Saint Saintin jui'qu'à Dadon , dont il rapporte


fiîême peu de chofes. Les deux Evcques dont il parle avec
plus d'étendue, font Atton & Berhard; parce qu'il étoit de
leur tcms. Un Moine anonyme de Saint Vanne , continua
l'Hifloire des Evêques de Verdun , en la commençant où
Ëerthaire avoir fini , c'efl-à-dire , à l'Epifcopat de Bernuin
neveu & fuccelTcur immédiat de Dadon , en 923 (/) , & la
conduifant jufqu'à Thierri , qu'il compte pour le quarantié-
ïrie Evêque de Verdun. Il remarque iur l'article de Bercn-

ger , trente - troifiéme Evêque de Verdun , que Humbert


Abbé de Saint Vanne , obtint de lui que l'on transféreroic
à Flavigni , Prieuré fitué en Lorraine , & de la dépendance
de Saint Vanne , le corps de faint Firmin , fcptiéme Evcque
de Verdun. Nous avons l'Hifloire de cette tranllation dans

(i) Tom.ii. Spicil.p. i'^l.zilm i/«of. libb. f,ig. Tzj.


I
{e) Hugo , F^aviniaf, tom, i. nov, Bi- | {/) IdiM. ibiJ.^a^. Jij-,
1 ,

44^ B o U O N ,

les Annales de Trêves par Browerus {g ) , qui la rapporte à


J'an ^59- On ne peut la mettre plus tard cjuVn 5^72, pujfque
t'Abbé Humbert , qui en lit la cérémonie , mourut en cette
année-là. Il avoit été le premier Abbé de Vai ne avant lui
:

c'étoit une Communauté de ( Icrcs. Leur vie ayant déplu à


l'Evêque Bercngcr , il les en fit lortir & mit des Moines en
leur place, fous la conduite de l'Abbé Humbert. JL,'Anony-
me ne fc borne point à rHifloirc des Evèques de Verdun j il
y mêle divers traits de THifloire de l'Empire. Son Ouvrage
ib trouve à la fuite de celui du Prêtre Berthaire, dans le dou-
zième Tome du Spicilege de Dom Luc d'Acheri. On y trou-
ve aulTi la continuation de l'Hifloire des Evoques de Verdun
par Laurent de Liège , Moine de Saint Vanne , vers le mi-
lieu du douzième liécle. Cette Ecrivain rapporte plulieurs
faits omis par Berthaire i puis reprenant la fuite des Evêques
de Verdun àThierri, le dernier dont l'Anonyme avoir par-
lé, il la conduit jufqu'à la quatorzième année de l'Epicopac
d'Adalberon , quarante-fixiéme Evcque de cette Ville.
Bbuon.'Abbé II. Nous lifcns dans la Chronique de faim Beitin (/z),
deS.Bertir, p^j- Jean d'Y pres
,
que Bouon fut élevé des fa jcunefTe dans
ce Monaflerc qu'il y apprit les belles-lettres a\ec la pié.é ;
;

que l'Abbé Roderic étant mort , il futchoili pour lui iuccéder,


&c qu'il gouverna cette Abbaye depuis l'dn 104^ jufqu'en
10(55. Ce fut à lui que Folcard dédia l'abrégé qu'il avoit lait
de la vie de faint Bcrtin. Dom Mab lion en a donné l'Fpure
dédicatoire dans le trojliémc Tome des A6les. Il remarque
que le Prologue n'cft pas le même dans tous les manufcrits ,
& que différens Auteurs ont publié la vie de faint f crtin;
que la première eft d'un anonyme la ieconde de Foiquin ,
;

Abbé de Lobes, qui recueillit aufTi les Adcs de faint Orner,


de l'Evêque Foiquin , de faint Vinox 8c de faint Silvin ; U
troifiéme & la
quatrième de Folcard ; celle-là plus courte,
celle-ci plusétendue ; la cinquième d'un anonyme; la lixiémç
de Siméon , Abbé de Saint Bertin , iur la tin du douzième lié-
cle. Ces deux dernières font en vers. Dom Mabillon n'a fait
imprimer que celle de Folcard. Il y a joint deux Livres dç
miracles , dont il croit que le premier eft du même Auteur ;

Ih) Marte{i, Ttm. }. Anecd' pig- 37 J-


le
.

ABBÉ DE SAINT BERTIN. Ch. XXVIII. 449


le' fécond, d'un Anonyme qui ccrivoit au commencemlnt du
dixième ilécle.
III. Suit dans le même Tome
de rinvcntion ^.Hifioire de
, l'Hiftoire
'''"^'^"'°" &
ou de la tranflation des reliques de iaint Bertin
( i ). Elle dl

precedee d une Lettre de Bouon a Gui, Ar( heveque de Reims, n du corps i

qui avoit fait la cérémonie , dans laquelle il lui donne avis*^'^^"^"""'


que fes Religieux le preffoient d'en mettre par écrit toutes les
circonflances ; mais qu'il nevouloit l'entreprendre fans avoir
là-deHus fon fentiment. L'Archevêque lui ordonna dans fa
réponfe , de faire l'Hifloire |de cette tranllacicn dans toute
Ion étendue; en forte qu'il nefoit pas nécefiiiire d'y ajouter;
mais auflî de n'y rien dire que de vrai. L'Abbé Bouon obéit
& dédia cet Ecrit cà Gui fon Métropolitain & à tout le Cler-
gé de FEglile de Reims témoin lui-même de ce qui le pa^Ta
:

dans cette cérémonie, il mérite toute forte de croyance. Elle


fe fit le 2 de Mai 1052 , far l'Archevêque Gui. Drogon ,
Evêque de Terrouane, lui avoit écrit qielque tem.s aupara-
vant pour lui apprendre qu'on avoit découvert le corps de
faint Bertin , & Içavoir de lui ce qu'il y avoit à faire. Gui ré-
pondit , qu'après en avoir conféré avec fon Clergé , on étoit
convenu d indiquer un jeûne de trois jours & des prières pour
demander à Dieu des lumières là-deflus. Bouon a fait entrer
ces deux Lettres dans fa narration.
IV. du dcflein qu'il avoit eu d'y détailler Autre Ecrit
Il
y parle aiffi '°'"°"*
avoicnt engagé faint Fokuin ( / ) , Evêque de
les raifons qui ^

Terrouane , au neuvième (îécle, de cacher le corps de faint


Bertin , &
en queile année il l'avoit caché ; mais craignant
de trop .ntcnomprele fil de fon Hiftoire, il remit à un au-
tre tems la publication de cet Ecrit. Avant de procéder à
rcxhi-.mation du corps de faint Bertin , il confulta le Pape

Léon IX ,
qui a prouva fon deffein. En 10^6 , Bouon ob-
tint de Baudouin , Comte de Flandres (m) , un privilège en
faveur de fon Abbaye. L'année luivante , il fit un voyage à
Rome , où le Pape Vi6tor II accorda aux Moines de Saint
Bertin, la liberté de fe choilir leur Abbé, fans la participa-
tion de r Evêque de Terrouane. A fon retour , il pafTa par
Saint Denis , d'où il rapporta des reliques de Saint Denis

£»") fi(V. pa^, 13^. (m) Marten. rom. i. Anecd.f.^yj»


I
( / ) lltiA p I4i. mirn. f I

Tome XX, LU
5

4Î0 . WI T M O N D, ^

l'Aréopagite, qu'il dans une même châfle avec


mie en 10^3 ,

celles de iaint Bertin. Il mourut le 10 de Décembre 10^5 ,


après avoir, gouverné vingt - quatre ans l'Abbaye de Saint
Bertin.
Vitmond , V. On rapporte au mois de Mai de la même année , la
Evïul
''' ^'
^^^^ d'OIbcrnc , Abbé de Saint Evroul («) , & de Witmond ,
Moine du même Monafterc. Ils avoient l'un & l'autre , em-
brafféla vie monaflique au Mont Sainte Catherine , près de
Rouen. Ofberne en ayant été tiré en 1061 , pour être fait
Abbé de Saint Evroul , emmena avec lui Witmond , qu'il
efUmoit pour fon Içavoir & fa piété. Il cxcclioit fur -tout
dans la mullque. Ord cric Vital dit, que l'onvoyoir encore de
fon tems à Saint Evroul (0), des Antiennes des Répons&
de la façon de Witmont, & plulieurs Hymnes qu'il avoir no-
tées fur des airs très-mélodieux. Cependant Ofberne ne pof-
fédoit pas paifiblement fon Abbaye. L'Abbé Robert qui la
gouvernoit avant lui, s'étoit pourvu à Rome contre les vio-
lences de Guillaume , Duc de Normandie. Le Pape Nicolas
ayant égard à fes remontrances , écrivit en la faveur , & lui
donna deux Clercs Cardinaux pour le faire rétablir. Le Duc
Guillaume menaça Robert de mort, s'il entrcprcnoit de ren-
trer dans l'Abbaye. Il fe retira donc à Saint Denis , d'où il
Ht lignifier à Ofberne de ccmparoitre à Chartres devant les
deux Cardinaux. Ofberne l'ayant refufé , Robert l'excom-
munia par autorité du Pape, comme ufurpatcur de l'Abbaye
de Saint Evroul. Cette excommunication inquiéta Ofberne
& jctta le trouble dans Ion Monallere : une partie des Moi-
nes allèrent joindre Robert à Saint Denis , &
firent ;.vec lui
le voyage de Rome ; d'autres fe retirèrent ailleurs, ne laif-
fant à Saint Evroul que les cnHins qu'on y élevait , & les in-
firmes. Dans de (i fâcheuils circoni^anccs , Ofberne prit le
parti de s'adrcfTcrau Saint Siège, pour faire lever lacenfure
portée par Robert. Le Pape Nicolas étoit mort, Alexandre&
II "ui avoir fuccédé. Ce fut donc à ce dernier qu'Ofbeine a-
drcflTa fa Lettre Elle étoit de la compoficion de \v'i mond , Se
écrite de la mnin d'un jeune Moine nommé Bernard, très-
habilc antiquaire. Guillaume , Prêtre de Saint André , la porta
à Rome.

(«) OnDESiic. Vital, lil/.y p.^i^, (o) Jl>id.


MOINE DE S. EVROUL, Ch. XXVIII. 451
VI. Ordcric Viral la donnée toute entière dans le troilic- Lettre de
^ ""'""'^'
inc Livre de l'on Hitloire Ecciciiaftique. Ellecontient en lub-
fiance (p), que l'Abbaye de Saint Evroul qu'Oftcrne polfcdoit
alors , avoit eu auparavant pour Abbé, Kobcrt fils de Guil-
laume , Chevalier Norman ; que Robert l'ayant abandonnée
pour de certaines railons , le Duc de la Province de concert
avec les Evêqucs, avoit impolé ce fardeau à Ofbcrne , qui ne
s'y étoit loumis que par obéiffance ; que toutefois Robert de-
venu Supérieur d'un Monaftere dans la Calabre, continuoic
dans la colère contre Ofberne , le menaçoit & le traitoit d'u-
furpatcur:ce qui avoit mis la divilion dans le Monaftcre.de
Saint Evroul. Ofbcrne finifloit en fuppliant le Pape de faire
comparoître les deux parties en prélcnce de rémoins irrépro-
chables, & de décider s'il devoir, ou demeurer en pofleHion
de Ion Abbaye , ou la quitter. Cette Lettie fut lue en plein
Confiftoire ( (7 ) ; on diltuta l'afTaire avec foin ; & le Fape ,
à la prière même de Robert qui étoit préient , leva l'excom-
munication. Il faut bien diftinguer Witmont (r). Auteur de
cette Lettre & Moine de Saint Evroul , de Guitmond , Moine
delà Croix-Saint-Leufroi, depuis Evcque d'Averle , dont
nous avons un Traité fur l'Euchariftie. Il en fera parlé dans la
fuite.
VII. Nous rapporterons ici la Lettre d'un Moine de Saint ^J"fs'.viàoî
Viûor de Marfeille à fon Abbéf, parce qu'elle peut ferùr à de Marfeiiie.
Lctire à
faire connoître le goût naiflantj pour l'étude de la Juriipru- ^
d/^Ce Moine
»*•*'/-
ence.
nom
r ^ •

ne le tait connoître que par la première


&
il en ufe de même à
Bernard. 1

lettre de fon ( j ) , qui cfl; un R.


l'égard de fon Abbé , qu'il ne défigne que par un B. qui fi-
gnifie apparemment Bernard , que l'en fait avoir été Abbé
de Saint Viftor, depuis l'an 1065 jufqu'en 1079 II y avoit
.ilors dans le même Monaftere , un Religieux nomme Ray-
mond Arnalli (r), comme on le voit par une autre Lettre
adreflee au même Bernard. C'eft lui vraifemblablement qui
cfl; dédgné par la lettre R. Envoyé à Rome pour des affaires

importantes de la Communauté , le cheval qu'il montoit lui


manqua en chemin ne pouvant avancer , moins encore finir
:

(p-, Ihid.fitg. 4g rt. (j) Marte^ne , tom. i.ampliff, ColkS,


(q] Ui,t.
(r) MabilloN. lij, 61. An».xl.uum. 22. i^t j Ibid. [itg. 480,
/. (54t.
Lllii
4$2 ARNALLT, MOINE DE s. VICT. Ch. XXVIIT.
fon affaire , il eut honte de s'en retourner. Mais pour ne pas
rendre fon voyage inutile , il conçut le deflein d'étudier en
Italie la Jurisprudence , à l'imitation d'un grand nombre d'c-
tudians qui y accouroient de toutes parts pour ce fujet , 8c
fur-tout de la Province d'où il étoit. Il écrivit à l'Abbé Ber- .

nard , pour lui en demander la permiffion , & le prier de


fubvenir aux frais , ou d'en charger le Prieur de Pife : car
c'étoit en cette Ville qu'il fe propofoit de demeurer. Il lui
promet qu'en cas de progrès dans l'étude du Droit , il n'en
abufera pas , pour faire le méiier d'Avocat dans les Tribu-
naux léculiers ; mais qu'il emploiera toutes fes connoiOances
à foutenir les intérêts de Ion Monaftere. Cette Lettre efl im-
primée dans le premier Tome de la grande Colledion de Dom
Martenne.
AutresLettres VIII. On y en trouve trois autres adreflees au même Abbé;
ç y^n"^'^'^
''^
la première , du Comte Bernard ( « ) , par laquelle il le prie
de fe charger du gouvernement du Monadere de Ripouille,
& d'y envoyer à cet effet des Moines de Saint Viclor de
Marfeille ; ne trouvant point de moyen plus efficace de ban-
nir de Ripouille la fimonie qui y régnoit depuis long- rems.
Cette Lettre efl de l'an 1070. La même année , le Comte
Bernard lit expédier un Diplôme portant , qu'à l'avenir le
JVÏonaftcre de Ripouille feroit ioumis à celui de Saint Vidor
de Marfeille. La fécond, cil: au nom de la Comnuinauté de
cette Abbaye ( ^ ) » dont il paroit que Bernard étoit abfent.
On lui donne avis de la mort d'un de les Religieux , nommé
Dom Jean de Touloufe , avec le détail des circonftances de
fa mort. Il s'y prépara par la confelFion de les péchés , & la
réception des Sacremens d'Extrême-Onclion &
d'Euchari-
ftie ; & pour marque de pauvreté, il rendit au Prieur & à un
autre frère à qui il s'étcit confclTé , tous les habits Se meubles
que la Règle permet à un Moine ; 8c mourut lur le cilice &
la cendre. [1 mourut encore d'autres Religieux dans le m^mc
Monaftere: c'efl pourquoi ceux q'ùétoicnt reliés prie- t l'Ab-
bé Bernard de faire revenir les ablens , nommément Ray-
mond Arnalli, afin que l'on pût continuer l'Office divi) &
les autres exercices de la régularité comme auparavjnt. Il eft
aulli fait mention du même Arn.illi dans la troiliémc Lettre ( ),
>

fu) 'i''/-p.>X--1-'3.47,-. j {y) UiJ.p.-l7P.


(.v)!/-;»/. /. 477. l
,

LOUIS , DTAC. DE S. LORENT. Ch.XXVTTT. 45$


comme d'un homme qui pouvoir ccre utile & môme néoeflaire
pour certaines affaires. Le Religieux qui l'écrivit le trouvoic
dans de grandes inquiétudes. Il en expofelc Tujet à fon Abbé
Bernard.
IX. En I05<^, le Prévôt de la grande Eglife à Liège , Louis, Dîacre
"^e?: Laurent
nommé Godefroi (%), fit à Rome le pèlerinage qu'il avoit
coucume d y faire chaque année. 11 prit Ion logement dans le
Monartere de l'Abbé Humbert ion parent , près de la Bafili-
que de faint Laurent , dont cet Abbé avoit la garde. On
comptoit alors à Rome julqu'à cinq Eglifes fous l'invocation
de l'aint Laurent. Celle dont nous parlons étoit très-fréquen-
tèe du peuple Romain , parce qu'on y confervoit dans une
phiole de criflal la liqueur qui étoit Ibrtie de fon corps ,
étant fur le gril. Godefroi dont on ne fe mèfîoit point , entra
à TEglife la nuit comme pour dire Matines , prit la phiole
en tira de la liqueur , ou plutôt de la graiffe, fortit de Rome
à grande hâte &
apporta la relique à Liège. L'Evcque Théo-
duin reçut ce tréfor avec grande joie , & il fe fit à cette occa-
iion, un changement fi fubic dans l'air , qu'on le regarda com-
me miraculeux. Les pluies étoicnt fi fréquentes fi abondan- &
tes , qu'on s'attendoit , pour ainfi dire , à un fécond déluge.
Aulli-tôt que les reliques eurent été pofèes fur la corne de l'au-
tel , le foleil qui avoit été obfcurci pendant un mois par les
nues , fit paroître les rayons , & le tems devint conftamment
beau. C'eft, dit l'Auteur de ce récit , ce que j'ai vu; je prends
Dieu à témoin du vrai , je le dirai & je il'écrirai. Il cfi: nomme
Louis l'Ancien, Moine de Liège , à la tête de cet Opulcule.
Reineius le met au nombre des Ecrivains du Monafiere de
Saint Laurent (a) ; & c'efi le feul Ecrit qu'il lui attribue. Louis
s'étoit apparemment rendu recommandable par quelque au-
tre endroit , puilque le même Ecrivain le qualifie vieillard de
bonne mémoire. Il gouverna long-tcms l'École de Liège. Fal-
calin & Herihaud les difcipKs en prirent foin fuccefiivement
après lui. Son Hifioiredu traniport des reliques deS. Laurent
à Liège , fe lit en prt>fe Se en vers dans le quatrième Tome des
Anecdotes de Dom Bernard Pez(Z)). Les vers font de la façon
dcRcincrus , Moine de S. Laurent de Liège dans le 12^ fiécle.

(«) V^z-iom, 1. Jinccîot. pan. l,{:'g- \


("^ II>iJ. p. zz.
4,54 G E R VA I S ,

CHAPITRE XXIX.
Cervais , Archevêque de Reims ; Aiaurille , Archevêque
de liouen.

Gervais. Sa I. ^^^ E Prélat dont k Chronique de Reims met la naif-


ra.ïïince. Ses
^^^ fance au fecond jour de Février de l'an 1007 (c) ,
iiis d'Aimon, Seigneur du Château-du-Loir , & d'Hil-
étoit
dcburge de Bellefme, iœur d'Avefgand, Evcque du Mans.
Il y avoit en cette Ville une Ecole afîez célèbre Gervais y :

fit des progrès. D'un efprit fin , folide & pénétrant , il étoit

propre à tout, & digne de l'Epifcopat (d). On ne lui repro-


choit qu'un peu trop de hauteur & de dureté mais il s'en cor- ;

rigea dans la fuite , fur les remontrances du bienheureux Thier-


ri , Abbé de Saint Hubert en Ardenn?.
lieftfaitEvc. II. Avefgand fon oncle étant mort le 27 d'0£tobrc 1036",
queduALiif. ;^
Cqj^ retour de la Terre-fainte (e) , Gervais fut ordonné
Evcque du Mans , le dix-huitiéme de Décembre de la même
année, qui étoit un Dimanche. Quoiqu'il ne cédât à pcrfonne
en fagefic & en probité (/) , il trouva des ennemis Hcr- ;

bers Bavon , Gouverneur du Maine, pendant la minorité de


Hugues, héritier légitime de ce Comté & Gcoffroi Martel,

;

Comte d'Anjou , furent les principaux celui - ci le mit en ':

prifon, où il le retint pendant fept ans. La liberté ne lui fuc


accordée que par la cefTion de fon Château du Loir à Gcof-
froi ; & en s'obligeant à ne pas rentrer dans fa Ville Epifco-
palc , tandis que ce Comte fcroit miîtrc du Maine. Gervais fe
retira en Normandie (g) auprès du Duc Guillaume , qui lui
,

un accueil gracieux.
fît

Archevêque lH- H y étoit encore en' 1055, lot fque l' Archevêché de
de Rti.n , Reims vint à vacquer parla mo i de Gui. Le Kci Henri quî

(c) To»i, I. Bihliot. nov, Laif>. p. 5(^0. /'.441.


(,/) iVlABitL. i/i A':aleil. fag. 460. S ( t) Hftn. in /tialfd.p. joy.
Toi,!. •) Atior. p. 571. ig) Orderic, l'it,flis , Lib. 3. /.T^,
(c) Mabill. Ut. j8. Ami.tl. num. aj. 474.
ARCHEVESQUE DE REIMS. Ch. XXIX. 455
vouloic s'atcicher Gervais, le nomma du confcn-
à ce Sicgc ,

temcnt du CL-rgc & du peuple , le onzième Octobre de la


même année. Avant de quitter l'Evêchc du Mans (^) j il y
fit beaucoup de bien fonda dans fon Château du Loir une
:

Collégial-- de Chanoines ; rétablir l'Abbaye de Saint Vin-


cent , y mit des Moines , leur donna pour Abbé Avcfgand
fon parent , & fit reftituer à ce Monaftcrc tout ce qu'en lui
avoit enlevé in:uftemcnt; mais il ne fit cxi^édier les Lettres
, cjue depuis qu'il eût été transféré à l'Ar-
nécefTaires à ce fujct
chevêché de Reims. En 1055) , le jour de la Pentecôte , il
facra le Roi Phi ippc I , fils du Roi Henri, qui vivoit encore.
Les Légats du Pape , grand nombre d'Evêques , d'Abbés &
de Seigneurs alTilterent à cette cérémonie tous donnèrent :

leurs fuffrages pour l'éledion du jeune Roi Henri Ion père ;

l'ayant ordonné ainfi. Cette éledion ne fe fit qu'après que


l'Archevêque eût expliqué à. Philippe , la foi Catholique ; que
ce Prince eut promis de l'obiervcr & prêté lerment de main-
,

tenir les droits de i'Egliie fuivant les Canons , & de rendre


juftice au peuple félon les Loix. Alors Gervais prenant en main
le bâton Paftoral de faint Rémi, fit un Difcours dans lequel
il foutint que la Primatie des Gaules lui appartcnoit avec le

droit de confacrer les Rois des François & la dignité de


,

Grand Chancelier. Il en fit les fondions du conlentement


du Roi , & foufcrivit en cette qualité aux Lettres que le jeu-
ne Prince donna pour la confirmation des droits de l'Eglife
de Reims.
IV. Gervais mérita par fa vertu & fon fçavoir , l'amitié llefthid'i-
& l'eftime des Papes Vittor II , Nicolas II & Alexandre IL p,,peviaorlï
Il auroit fort fouhaité que quelqu'un d'eux vînt à Reims tenir & ^es (uccef-
un Concile , comme avoit fait Léon IX au mois d'Octobre en"[ogJ',™°''
de l'an 104p. Il en écrivit à Etienne IX , fuccefl'eur de Vi-
der II (A) , avec qui il avoit déjà pris des mefures pour la
tenue de ce Concile mais fes projets à cet égard furent fans
:

fuccès. Il rebâtit l'Abbaye de Sain: Nicaife (z), & y réta-


blit la difcipline monaftique ; mit des Chanoines Réguliers
dans l'Abbaye de Saint Denis ( /) , fituée dans l'un des faux-

(^)Mabillon. Lil), jS. Annal, num,} {i) MabilL. Lib, $i, Afiri.tl.rium, iS,
ïj.f. +4'- {J)Ihid.n.if.
[hj Ton». 9, Conc.p, ioS8. \
45^ G E R V A I S, ^

bourgs de Reims ; engagea l'Abbé Herimar à réparer la Col-


légiale de Saint Timorhce en la même Ville (m) , & fit revi-
vre les études dans les Ecoles de la Cathédrale , en leur don-
nant pour Maître Bruno («) , qui inflicua depuis l'Ordre
des Chartreux. Il m.ourut le quatrième de Juillet de l'an
1067 , après avoir déclaré en prélcnce des Chanoines &
des autres Clercs de fon Eglife (0) , qu'il croyoii: que la fainte
Euchariflie contenoit réellement le Corps Se le Sang de Je-
fus-Chrift.
Son éloge; y^ L'Anonyme, qui nous a donné la vie du Bienheureux
Thierri, Abbé de Saint Hubert en Ardenne , dit que Ger-
vais joignoit à une naiflaiicc illuftre félon le monde, beau-
coup d'efprit & de fagacité (p); qu'il étoit capable des plus
grandes affaires; très-inllruit des arts libéraux, & digne de
l'Epilcopat; mais il ne diiïîmule point qu'il y avoit dans les
manières trop d'humeur & de férocité ; ajoutant toutefois ,
qu'averti par ce faint Abbé , dont il aimoit la converlation &
à qui il accordoit beaucoup de chofes , il avoit adouci les mœurs
& fes façons ce qui fait voir c]ue la dureté que cet Hiftorien
:

reproche à Gervais , étoit moins un défaut de cœur & d'efprit


que de tempérament.
Ecrits de Ger- Vl.Ilnous relie une Lettre du Pape Etienne IX à cetArchc-
vaif.Lettreau vcquc
,
quatre du Pape Nicolas II , & quinze du Pape Ale-
^£pe ICO us
.
jj,jj^jf£]^[ ÇQ qui ^j~^ fuppofe un grand nombre de fa part («7).
Nous n'en avons néanmoins que deux , Tune au Pape Nico-
las , l'autre à Alexandre , inférées dar;s les recueils de Du-
chelne , des Conciles & parmi les Lettres de Gerbe, t. La
première fut écrite depuis le quatrième d'Août de l'an 1060,
puifque Geivais y donne avis au Pape Nicolas II , de la mort
du Roi flenri arrivée en ce jour. Ce n'étoit pas le principal
jnotif de fa Lettre. On avoit formé à Rome diverles accufa-
tions contre lui. Il y envoya des députés pour fa juftification:
ils furent écoutés , & perfuadercnt au Pape Nicolas II , que

leur Archevêque n'avoit jamais été rebelle au Saint Siège. Il


l'alTure lui-même dans cette Lettre, de fa foumillion ik. de
fon refpeft , & protelle qu'il ne communiquera point avec

{m) BOLLAtiO. ail diem zj. Augiift.pag. I {p) Maeii.iox, Tcin. 9, Aâtr. pag,

S7f: 57I'
(h) Mabill. Lit. Cf.. Aiin»l, num. 63. ('/) Duchisn. Tom. 4./>. io<;.
J

^0) Idem, lil/. 6}, fit 6. •

quiconque
,

ARCHEVESQUE DE REIMS. Ch. XX.IX. 457


quiconque refufera de fe foumettre aux ordres du Siège Apo-
ftolique. Gervais avoic ibuhaitc , du vivant du Roi Henri ,
de voir le Pape Nicolas en France. Il prend Dieu à témoin
que ibndefir, à cet égard, n'eft point changé ; que fa joie
fera parfaite , s'il peut avoir l'honneur de le recevoir; & qu'il
le recevra comme il convient au Vicaire de fainr Pierre , à
fa pcrfonne & à fa dignité. Car nous vous croyons , dir-il
digne des mêmes honneurs que notre Seigneur Jefus-Chrift
a faits à faint Pierre , en l'élevant à la principauté de l'E-
glife. Il témoigne au Pape fa gratitude des fcryiccs qu'il a-
voit rendus à fes députés , & de la fépultùre honorable accor-
dée à l'un d'eux, après l'avoir vilité lui-même pendant fa ma-
ladie.
'
VII. La Lettre de Gervais au Pape Alexandre II , n'eft Lmre 5 Aie-
pas entière (r). Il y eft parlé des troubles que le fécond ma- ''andre il.

riage de la Reine Anne veuve du Roi Henri I , avec Raoul


Comte de Crelpi, caufoit dans le Royaume de France. Ces
troubles demandoicnt la préfence de l'Archevêque. C'eil la
raifon qu'il donne de ne pouvoir accomplir le defTein où il'
étoit de villter les tombeaux des faints Apôtres , & d'aller
rendre au Saint Siège dont
pouvoit être capa-
les fervices il

ble. Le Comte Raoul avoit répudié Ion époufe , qui en avoic


porté fes plaintes au Pape Alexandre II. Gervais lui expliquoic
toute cette affaire dans fa Lettre mais cette partie ne fe trou-
:

ve, ni dans les manufcrits, ni dans les imprimés.


VIII. Gervais écrivit une féconde Lettre au même Pape , Autre Lettre
pour le confulter au fujet d'un Clerc qui avoit reçu les dégrés Je Gervais au
de Diacre & de Prêtre , fans avoir paffé par celui de Soû-
"^'^"'^ ^^^'

diacre' (j). Ce Clerc fut lui-même porteur de cette Lettre,-


dont nous ne lavons le contenu que par la réponfe d'Alexan-'
dre II. Son avis efl: que ce Clerc doit s'abftenir des fohftioriS'*
du Diaconat &
de la Prêtrifc , jufqu'à ce qu'il fe préfente au
tcms marqué pour les Ordinations, où il recevra l'Ordre du
Soiidiaconat , fi toutefois fes mœurs font irréprochables ;
qu'en-'
fuite pourra continuer d'exercer le miniRere de Diacre St"
il

de Prêtre. Comme on ne trouyoit point de fo|ution_à.x4:t!tc.",


difficulté dans les Canons , le Pape appuie la Tienne fur ce
, ."..-••.V.'. .v/;'.'Vt".-.:r» .« r.o'' 'M
____»____ '—J. ! I i t -

'
1, ,'1 :r.\iJo3 ;..'

(r ) Virl. pa^. ro7. A Marlot, Tcw. l.f, llj.


• ."«HtO-a <',
(O Barom. ifiAiitial. Adan. lOf?. î5 \
•'.'' ' ''
'^

Tome XX. M mm
458 G E R V A I S ,
que Corneille ayant reçu don du Saint-Efprit , avant que
le
faint Pierre lui adminiftrât le Batême rien n'empêchoit que;

ce Clerc ne confervât les dégrés de la Prêtrife du Diaco- &


nat qu'il avoir reçus avant le Soûdiaconat. Alexandre cite dans
cette Lettre , la réponfe qu'il avoir faite à Rumold , Evêque

de Confiance , fur un cas femblable. C'eft la trente-deuxième
Lettre de ce Pape dans la Colle£tion des Conciles. On n'y
trouve point celle qui efl: à Gervais de Reims. Elle efl dans
Baronius ; &
dans î'flifloire de l'Eglife de Reims , par Dom
Marlot.
Pelaticn des IX. On fragmens des Lettres de l'Archevêque
cite divers
miracles de S. Gctvais (f ) mais on ne les a pas encore rendu publiques..
j
^'"^'
Il y a de fa façon une relation de quelques miracles opérés

par la vertu des reliques de faint Melaine («), Evcque de


Rennes. Gervais l'écrivit à l'occafion d'un préfent qu'il fit d'une
portion de ces reliques à Cuen , Abbé de Saint Melaine. Il
avoir été lui-même témoin de quelques-uns de ces miracles. On
peut les voir dans Bollandus au fixicme de Janvier , à la fuite
de la vie du Saint.
A^: dii^aae X. L'a£le du facre & deréleftion du Roi Philippe, doit être
de Philippe , regardé comme l'Ouvrage de Gervais (x). Il fcroit feulement
rance.
^ louhaiter qu'il y eût iniéré les deux difcours qu'il fit en pré-
fcnce de l'AfTemblée (y) ; l'un , pour inftruire ce jeune Prince
des principaux articles de la foi Catholique ; l'autre , pour
montrer que 1 eleâion &
la confécration du Roi lui apparte-
noit , depuis que faint Rémi avoir batifé Clovis mais il s'eft :

contenté de remarquer (qu'après avoir expliqué à Philippe la


foi de l'Eglife , 8c lui avoir demandé s'il la croyoit la vou- &
loir défendre; ce Prince ayant répondu qu'oui , il lui préfen-
ta la formule du ferment ; que Philippe la lut la foufcrivit; &
qu'elle portoit qu'il conferveroit aux Evêques à leurs Egli- &
les , leurs droits fuivant les Canons , & les déf endroit eux &
leurs Eglifes , comme il efl du devoir d'un Roi , qu'il ren- &
droit la juftice félon les Loix ; qu'enfuite ayant remis ce fer-
ment entre les mains de l'Archevêque de Reims ,' celui -ci

(/) WoNTFAt'cON , Bitlitt. Biùliot. fug.


I
{y) Dom Mariot , r. 2. Kiji. Remtnf,
18. A4. ( f- "8 <iit , 1" if f'cenà difccnrs fe iriuve
(«) 60LLAND, ad ditm 6, JariMaTii, f. dans l'Abbaye deSaiiit Ibiirry pris di'R.iitnSj
J

333. I ff il en rap£ortt uttfra^mHft, ^

(x) DucBEtN. Tçm, 4./>. Kl.


ARCHEVESQUE DE REIMS. Ch. XXIX. 459
prenant le bîcon Paftoral de faint Rémi , dit que par ce ba-
ron , le Pape Hormildas donna à faint Rémi le pouvoir de
lacrer les Rois , avec la primauté dans toute la Gaule & que ;

le Pape Vidor II lui avoit donne le même pouvoir à Ion &


Eglife. C'eft que ce Pape avoit envoyé le Pallium à Gcrvais.
On lit dans cet aûe , les noms de tous les Evêques , Abbés &
grands Seigneurs qui afliflerent au facre. Il y avoit en tout
vingt-quatre Prélats , tant de France que de Bourgogne &
d'Aquitaine , y compris Hugues , Archevêque de Befançon ,
& Ermenfroi , Evêque de Sion en Valais , Légats du Pape ;
vingt-neuf Abbés ; Guy, Duc d'Aquitaine, Hugues fils &
Député du Duc de Bourgogne , &
pluficurs autres Seigneurs.
Tous donnèrent leurs fuffrages pour l'éledHon du Roi , même
les Légats du Pape , quoique cela ne fut point néceflaire : &
le Pape cria trois fois : Nous l'approuvons, nous le voulons.
Enfuite le nouveau Roi confirma par un Diplôme les droits
de l'Eglife de Reims , &
Gervais foufcrivit comme grand
Chancelier. Tout ceci fe pafla avant la le£ture de l'Epître de
la Meflc alors l'Archevêque étant retourné à fon Siège , on
:

apporta le privilège que le Pape Vi£lor II lui avoit accorde ;


on en fit Icâure en préfcnce des Evêques. Duchefne cft le
premier qui ait publié l'ade du facre de l'éleftion du Roi &
Philippe. Le Père Chifflet le mit enfuite parmi les preuves
de i'Hifloire de l'Abbaye de Tournas (z) ; puis on lui a don-
né place dans les Collettions générales des Conciles ôc dans
l'Hiftoire de l'Eglife de Reims.
XI. L'Epitaphe de l'Archevêque Gervais lui attribue la vie Autres Eciiis

de faint Donatien , Evêque de Reims (a) , fur la fin du qua-


trième fiéclc: elle lui cft auflTi attribuée dans l'ancienne Gaule
I Chrétienne : mais on n'en a pointjd'autres preuves que le té-
moignage de Convenier , Ecrivain du feiziéme fiécle. On dit
que Gervais étant Archevêque de Reims , fit placer fur un
piedeftal un grand cerf de bronze à fe porte de fon Palais
Epifcopal ( è ) ; &
qu'il fit graver fous le ventre de ce cerf
jrois vers hexamètres pour fe rappeller le fouvenir du pays où
}\ étoit né , plus abondant en cerfs que la Champagne. Cette

(t.) Chifflet , Uiflor. de TtMrrms , in (a) Marlot , Uid.f. iij.


|

Vï MariPT. »tm. i. liijl.Remenf.f, 117, I

Mmm i
j
,

4<^o MA UR f L L É ;
circonftance de fa vie , fi elle efl véritable , lui feroit moins
d'honneur, que l'actennon qu'il eut étant Evêque du Mans
de fournir aux befoins des Minières de l'autel , en leur don-
nant fon propre patrimoine. L'atlc de fes donations fait partie
de l'Hiftoire des Evèques du Mans imprimée dans les Anale-
••'•'' "'-•'--
âes deDom Mabillon (<-). •
'-

MaurllKAr-
.,.xil. Maurilie né<lans lé territoire' d-eReîms (d),îuték-
Rouen. vë dans l'Eglifé de cette Ville , d'où il paffa à celle de Liè-
ge, dont l'Ecole étoit alors célèbre. Il y apprit les arts libé-
raux, qu'il enfeigna enfuite dans l'Ecole d'Halberftat en Sa-
xe. Le defir des biens céleftes lui ayant infpiré du dégoûc
pour les temporels , il fe confacra à Dieu d'ans l'Abbaye dé
Fécamp en Normandie. Ily vécutplufieurs années avec beau-
coup d'édification puis, avec l'agrément de fon Abbé , il fe
:

retira en Italie , où il mena la vie érémitique , vivant du tra-


vail de fes mains. L'Abbé de Sainte Marie à Florence , étant
venu à mourir, le Marquis Bonifa<:e tira Maurilie de fa fo-
litùde , pour lui donner le gouvernement de ce Monaftcre.
Le nouvel Abbé s'appli<jua à y faire refleurir l'obferYancc ré-
gulière fon exemple & fes exhorrations ne firent point d'im-
:

preiïion fur les Moines accoutumés à une vie plus ailée & plu^
libre que celle de la règle de Saint Benoît. Maurilie quitta
donc le féjour de Florence pour retourner à Fécamp. Mau-
ger , Archevêque de Rouen , ayant été dépofé pour fes mau-
vaifes -mœurs ( ?)^ aux follicitations de Guillaume, ÏXic dç
Normandie, Maurilie fut élu pour lui fuccéder, & ordoriné
fur la fin de l'an 1055. ^^ tint auffi-tôt un Concile à Rouen
en préfence du Duc Guillaume , dans le delTein de remédier
à divers abus (/) ,
particuliéremenr à l'incontinence des
Clercs. acheva de rebâtir fon EgKfe Cathédrale , com-
Il

mencée par r Archevêque Robert , & en fit la Dédicace en


10(^3. En ic6'7, il' fit celle de l'Eglifé de l'Abbaye de Ju-
miege (g ) , afTifté dés Evcques de Normandie, 8z en pré-
fence du Roi Guillaume & de toute la Cour. Ce fut une des
dernières années de fon Epifcopat , étant mort le neuvième
d'Août -de la même année. L'Auteur anonyme de fa vie re-

(d) Al}i'Fi,ifcrf.Rotbom.ig. i/i AnaUll. {f)ABaEpifccp.Rath.om.i;;.f,îi4.


Ma'ill.p 114. (7)ORDtRic. Vit,^l, lil/. 4' P- SCy.^,
(r) Orueric. Viul. lib. 7, llijl. EdltJ , VuitL.M, Gemmeik, lit/. 7- ''"/>• î S.
ÀRCHEVESQUE DE ROUEN. Ch. XXIX. 4^1
levé fon zèle pour robfervance de la Loi de Dieu ( A ) , &:
le rctabliiïcment de la difciplineeccléliaftique : à quoi il ajou-
te, que Maurille s'exerça julqu'à la fin de fcs jours dans les
œuvres de , les jeûnes , la prière & l'aumône. Cet Ano-
pieté
nyme ne rencontre pas en tout avec Orderic Vital: celui-
fc
ci fait naître Maurille à Mayence (i) ; mais il paroît qu'il
a pris le pays de Gerbert , compagnon des voyages de la &
pénitence de Maurille , pour celui de Maurille. Le lentiment
de l'Anonyme efl confirmé par l'Epitaphc de cet Archevê-
que , qui lui donne Reims pour patrie. Au reftc ils s'accor-
dent l'un & l'autre à nous donner une idée avantageufe de la
piété & du Içavoir de Maurille (/). Son nom fe lit dans les
Martyrologes Gallican & Bénédittin.
XIII, Nous ne connoifibns perlbnne qui ait écrit la vie de Se.- Ecrit?.

cet Archevêque ; mais Dom Mabillon en a recueilli tout ce


qu'il en a trouvé dans les Anciens. Il remarque que quelques-
uns lui attribuent les Epitaphes de Rollon & Guillaume Lon-
gue-Efée, Ducs de Normandie, dont il transféra les corps
dans la nouvelle Eglife qu'il avoit dédiée en 10(55. ^^^ ^P*"
taphcs font rapportées par Orderic Vital; celle de Rollon en
vingt vers élégiaques , celle de Guillaume en quatorze ; la
première contient les faits belli-jueux de Rollon («) on voit :

par la féconde , que Guillaume Longuc-Epée avoit un grand


defir de profeifer la Règle de Saint Benoît, & qu'il fe feroit
fait Moine dans le Monaftcre de Jumiegc , fi l'Abbé Martin
ne l'en avoit empêché , le croyant nécelfaire au bien de l'E-
tat. Outre le Concile que Maurille tint à Rouen en 10^3 ,
enfuit e de la Dédicace de fa Cathédrale , il en affcmbla un
autre à Jumiege , au mois de Juillet de l'an 1067 , auquel
Guillaume , déjà Roi d'Angleterre , alTilIa. Les Ecrivains du
tems n'ont pas eu foin de tranfmcttre à la poflérité les Ré-
glemens de ces Conciles & il ne nous refte que la prof^lTion
:

de foi qui y fut dreffée contre l'hérélie de Berenger. La


croyance de Maurille fur la prclence réelle du Corps & du
Sang de Jcfus-Chrill dans l'Euchariftie , y cft exprimée en
des termes ii clairs & fi précis , qu'ils ne fouffrent aucune ex-

(h) Ad.i F/f/io;-. R 'h mai.f. 225. I iîj.


(») Or,ueRic. Vin! <;'•. c y67. f. 1 («) Orderic, Vital, itb. J. f/>j. ^67.
(/) /'./n. lib. 4. p. T07. 5C-8.
j
(m) AIabiilon , le./;, p. Ail^r, p.^. \
, ,

4^2 MAU R I Iv L E
cçption. Il écoit befoin que les Evcques du Concile , que l'on
croit être celui de io6^ ou de 1065 , s'expliquafTent claire-
ment fur cette matière , à caufe des ravages que les erreurs
de Berenger avoient faits dans la Normandie. Cette profel^
fion de foi devint fi célèbre dans la fuite, qu'il ne fe tenoit point
de Concile dans cette Province , qu'on jne l'y récitât. C'eft ce
qui par l'Ecrit intitulé ; Ordre du Concile Provincial dans
fe voit
l'Eglife de Rouen , imprimé parmi les Analedles de Dom Ma»
billon (0) elle y efl: rapportée toute entière. Dom Guillaume
:

Beflin l'a auiïî inférée dans le recueil des Conciles de Rouen ,


,^^P''°^'^£°" & Dom Mabillon dans l'éloge de l'Archevêque Maurille (p) ;

ciiariftie, en VOICI la teneur,


XIV. Nous croyons de cœur nous confeflbns de bou- &
che {q) que
pain mis furlel'autel , n'eft que du pain avant
,

la confécration ; mais que dans la confécration , la nature 8c


la fubflance du pain efl changée par la puiflance ineffable de
la Divinité , en la nature & la fubftance de la chair , non
d'une autre chair , mais de celle qui a été conçue du Saint-^
Efprit iqui eft née de Marie ; qui a été frappée de verges pour
nous &
pour notre falut ; qui a été attachée à la croix , en-
fermée dans le fépulcre ; qui efl rcffufcitée d'entre les morts
le troifiéme jour , & qui cft afllfe à la droite de Dieu le Père,
Nous croyons de même > que le vin mêlé d'eau que l'on met
dans le calice pour être fandifîé , efl véritablement & eflen-
tiellement converti en ce Sang qui cft fortiheureufement pour
notre rédemption , de la plaie faite au côté de notre Seigneur
par la lance du foldat ; &
nous anathématifons tous ceux qui
par une rémérité impie, parlent avec orgueil, & attaquent cette
foi fainte & apoflolique.

(0) MaBIlioh, in AnaltS. fag, xi6. falutem flagellis carfa , 8c in ligno fufpenJ
117. fa , jacuit in fepulchro , tertià die refur-

{f)
Pag. ^9. part' I» Bî Mabil. Tom. 9. rexit à mortuis , & fedet ad dexteran»
A^^or.f. 136. Dei PatrJs. Similiter vinum quod aquae
{q)Corde credimns & ore profitemur, niixtum in calice fanftificandum pro-
paneni in menfâ Dominica propofîtum , ponitur & eflentialiter converti in eura
panem t.intummodô eiîe ante confecra- fanguinem , qui per lanceaiji militi? do
tionem ; fcd in ipfa confecratione, ineffa- vulnere Dominici lateris in redcmptionem
bili j)Otentl.î divinitaiis , converti natu- mundi féliciter cmanavit. Anathematifa-
lam & fubft:inti:im naturam &
p.init in mus autem omnes contra hanc fanftam tt
ful)ft.intiam carris ; non uUiiis
carnis vero apoftolicam fidem fuperbè atqiic hxroticè
altcrius , fed illiiis qux concepta efl Je & impiâ temeritatcgarrienteîi Tom, Cont^
Spiritu Saniflo , nata ex Maria Virginc , B.otbom.tg. p. 49.
qux itiam propter nos & propte; noU.am (r) ZW./).48,
ARCHEVESQUE DE ROUEN. Ch. XXIX. 4^3
XV. En 106 1 (r) , il fe tint à Caen une AfTcmblce , où Concile Je
fe trouvèrent les Eveques , les Abbés & les grands Seigneurs
Caenemoéi.

de Normandie. Quoique le principal motif fut d'y chercher


les moyens de réparer les pertes que les guerres avoient oc-
eaiionnées , & de rétablir la tranquillité publique , on ne laifla
pas d'y faire quelques réglemens ecclcfiaftiques ; dont un por-
te , que les Abbés 8c les autres Prélats qui ont leur demeure
à la campagne , fe retireront dans les Villes voftines de leurs
Monafteres , pour ne point être cxpofés aux infultes publi-
ques ; &l'autre , que l'on avertira tous les foirs le peuple par
le fon de la cloche , de faire à Dieu fa prière , & de ne plus
£brtir de la maifon. Il y a un troifiéme Décret de cette Af-
fcmblée , qui ordonne que l'on punifle fuivant la rigueur des
LoiXjCeux qui dans la fuite commettroient des vols ou quelques
autres crimes. Tout cela a beaucoup de rapport à la Trêve de
Dieu déjà établie en diverfes autres Provinces. Maurille préfi-
da fans doute à ce Concile ; & on ne peut douter qu'il n'aie
eu beaucoup de part aux Statuts que l'on fit dans le Concile
qui fuivit l'expédition & la conquête de l'Angleterre : car il
eu. dit (j) , qu'ils furent faits par les Evêques de Normandie,
& confirmés au nom du Saint Siège par Ermenfroi , Evêque
de Sion en Valais, Légat du Pape. Ces Statuts qui font au nom-
bre de treize , preicrivent les pénitences pour les péchés com-
mis par les foldats de l'armée du Roi Guillaume dans cette
expédition. C'eft pourquoi les Evêques les envoyèrent en An-
gleterre , afin qu'on les fit obferver , tant aux foldats qui y
étoient reftés pour la garde des Villes conquifes, qu'à ceux qui
étoient revenus en Normandie. Canons du'
XVI. Il V eft dit ( f ) , que celui qui aura tué dans le com- ^0"'=''^ 'jp
1 i r L r j> j 'Normandie,
' •

bat un ou pluiieurs hommes , tera autant a années de péni-


tence qu'il faura avoir tué de perfonnes ; tjue celui qui en
aura blefles («) , fans être alTuré qu'ils foicnt morts de leurs
Welfures , fera une pénitence de quarante jours , ou de fuite
ou par intervalles; que s'il ignore le nombre de ceux qu'il a
blefles ou tués (x) , fa pénitence fera à l'arbitre de l'Eveque ;
qu'un foldat qui n'aura frappé perfonne {y ) , mais qui en au-
ra eu la volonté , fera une pénitence de trois jours ; que l'on

{s)Ibid.f»g. fo.
I
(«)C««. I.
Il) liiJ.pMg. jQ, S5 Tem, 10. Cçne.fag, 1 (jt) C'jnJ^i,

i6u- l (/ ; Cari. ^.
, ,

4^4 MAU R I LL E
impofera une pénitence aux Clercs qui auront été au com-
bat (s) , ou qui auront pris les armes dans le deffein de com-
battre ; parce que cela leur eft défendu par les Canons. La
pénitence des Moines eft renvoyée à la diipofition de leur
Abbé & de la Règle {a). Le Concile diftingue entre les ho-
micides commis avant le facre du Roi Guillaume (6) , & les
homicides .commis depuis ; Se veut qu'on punifle ceux-ci ,
comme des homicides volontaires. Quant aux adultères (c) ,
aux rapts & aux fornications ^ il les foumet à la même péni-
tence , que fi on les avoit commis dans la patrie & en tems de
paix.
Miurifleper- XYIL Ce fut à la perfuafion de l'Archevêque Maurille ,
fuaJeaS.An-
qu'Anfelme embraffa la vie monaftique (d). Partagé entre le
bwiïei- l'état choix de trois états , c elt-a-dire , d être Moine , ou Lrmite
nionaftique &
qq Jg vivre de fon bien &. en fervir les pauvres , il confulta
j>Abba7e"d" Lanfranc , Prieur du Bec. Celui-ci ne voulant point décider
Bfc. fcul , le mena à l'Archevêque ,
qui opina en faveur de la vie
monaftique. Anfelme fit profeftion dans l'Abbaye du Bec ,
& en fui fait Prieur quelques années après fatigué de la mul-
:

titude des affaires , il fongea à quitter fa charge ; mais il ne


voulut point le faire fans, l'avis de Maurille. Ne cherchez
point , lui dit l'Archevêque , à vous décharger du foin des
autres : fen ai vu plufieurs qui ayant renoncé pour leur repos,
à la conduire des âmes, font tombés dans, la parefle , allant
de mal .en pis. Je vous ordonne donc par ]a Xainte obéiflan-
ce , de garder votre charge , & de ne la quitter que par or-
dre de votre Abbé. S'il arrive même que l'on vous élevé à
une plus haute dignité, ne vous y oppofez pas : car je fais
que vous ne demeurerez pas long-tems dans la place que vous
occupez ; &
que dans peu vous Icrez promu à un degré fupé-
Anfelme fe retira fort
rieur de Prélaturc. affligé ; mais il obéit
aux ordres de fon Archevêque.
L'Evcquf.rA. XVIII. Jean , Evêque d'Avranchcs , ayant .çompofé un
vranches Xraité dcs -OflSces Ecclcfiaftiques (e.) , ne voulut point le
dé-

g/àM^ïuie."^'^"'^'^^
public , que Maurille ne l'eût corrigé : il femble même:
qu'il ne l'avoir écrit qu'aux inftances de cet Archevêque; 8c
qu'ils étoient convenus de recueillir les fentcnccs des faints

(t.) Cm. 4. (c) r.>;;. ii.


I

Pcres
,

ARCHEVESQUE DE ROUEN. Ch. XXIX. 4^5


Teres , les mœurs &
ulages des diverfcs Eglii'es , les dif-
les
férens Ries des Offices divins ; d'accompagner ce recueil&
de réflexions &
d'explications propres à ranimer le zèle des
Pafleurs. L'Ouvrage a été imprimé à Rouen en 16^2 16^79 • &
TEpitre dédicatoire à Maurille , fc trouve dans le neuvième
Tome des Ades de l'Ordre de Saint Benoît.
XIX. On raconte de cet Archevêque , qu'au moment que ^ ^'.'1?" ^^

Ton fe dilpofoi: à porter fon corps à l'Eglife pour l'inhumer


il revint à lui , &
raconta aux ailillans ce qu'il avoit vu de-
puis ia mort ; les aflTurant que Dieu l'avoit reflfufcité , afin qu'il
leur fit part de cette vifion. On ne trouve rien de ce fait
dans les Ecrivains contemporains mais il efl rapporté par :

JVIalmefburi (/) ; &


Dom Hugues Menard l'a inféré dans les
notes fur le Martyrologe Bénédictin , fur l'autorité d'un ma-
nufcrit de l'Abbaye de Saint Victor. Tout ce que l'on peut
inférer de cette villon , c'efl: que ceux qui l'ont rapportée , ne
doutoient pas qu'il n'y eût en l'autre monde un moyen d'ex-
pier certaines fautes commifes en celui-ci. Ils racontent que
les elprics qui conduifoient Maurille , après lui avoir fait par-
courir l'Europe &
adorer les faines Lieux , le préfenterent aux
démons , que l'horreur de leur préfence le purifiât des pé-
afin
chés véniels qu'il n'a voit point expiés par la confcflîon.
XX. Il y a dans le premier Tome des Anecdotes de Dom Lettres de
Martenne (?) , une Lettre écrite au nom de Maurille & de JCa.", ÎÎ^^^AfL^j*
T Ail J T-'' HT— "
' H ^ Tl r->
ADDCdC
Jean , Abbe de b ecamp^ a Eveque d Evreux. lis remontrent Fécamp.
1

à cet Evêque , qu'il avoit excédé fon pouvoir en puniflant un


Moine , pour avoir enfreint la Trêve de Dieu ; un Moine ne
pouvant être puni que par fon Abbé , ou à fa prière , par un
autre. Ils polcnt pour principe (fi), que l'Evêcpe n'a aucun
droit fur les Monafleres. Dom Martenne rapporte au même
endroit ( ? ) , deux autres Lettres de l'Abbé de Fécamp ; l'une
à des Moines qui s'écartoient de l'obfervance prefcrite par la
Règle de Saint Benoit ; l'autre au Pape Léon IX , dont il
ctoit Légat. Jean , apiès un long éloge de ce Pape, fe plaint
de ce que l'on rompoit tous les jours la paix qu'il avoit établie
dans l'Eglife; des infultes que les Normans faifoient à tous

.(^ Idem, ihid.pag. 138. jus Epifcopus habere decernitur in ejus


(^) Marten. Tom, 1 Atiecd.p. î©é. Monifterio. Ibid. f. 207.
.(6) Ni!î enim ab AbbateEpifcopus in- (') Ibid.pag. 2CJ ^ Z07,
yitetur pro quiilicumque negotio , nuilum
Tome XX, Nnn
,

^,^6 ^
Ma ur ll è,. I
ceux qui alloient à Rome lui-même attaque, dé-
: ils l'avoient
pouillé , de la conduite du Comte
maltraité. 11 fe plaint encore
Thibaud & du Duc de Bourgogne;, & de ce qu'ils n'avoient
ni l'un ni l'autre , aucun égard pour les Décrets du Sainr Siège,
vivant dans la débauche , même avec leurs propres parentes %
ce qui les rendoitmcprifables aux peuples.
Bernard Moi-
^XI. Vers le même tems Bernard , Moine deCluni (h) ,
fie (le Cluni, _ ., ^ .
aii" n -l \

& Guiih unir, fit un recueil des anciens uiagcs de cette A bbaye , ahn de les
, ,

Woine de t. conlerver à la poftérité , & empêcher autant qu'il étoit en lui


Evroul,
les innovations, fourcc ordinaire de la décadence de la dif-
Cipline rcgliliere. Il en conçut le deffcinà l'occanon des diffi-
cultés qui naiflbient chaque jour entre les jeunes Religieux &
les anciens , au fujet de ces ufages ; & il l'exécuta par l'ordre
du faint Abbé Hugues , à qui il le dédia. On n'en trou-
ve que l'Kpître dédicatoire ( / ) , dans la Bibliothèque de
Cluni mais Dom Marquart Ergorte a donné TOuvrage en-
:

tier dans fon recueil intitulé Ancienne Discipline monapique ,


:

imprimé à Paris en l'J^6 ^ chez Olmont , \n-/^°. Tritheme


parle de Bernard avec éloge ( / ). On conferve dans l'Abbaye
de faint Evroul [tu) , un corps d'Homélies pour toutes les fê-
tes de l'année; & de particulières fur l'Apocalypie: elles font
d'un Moine de ce Monaftere, nommé Guillaume de Mtrula.
Orderic Vital , aufli Moine de Saint Evroul ( « ) , attribue au
même Guillaume , un recueil des miracles opérés par les reli-
ques de faint Joffe. Aucun de ces monumens n'a éiémis fous
la preffe. 11 en efl de même d'un corps d'Homélies qui fe trou-
ve parmi les manufcrits de l'Abbaye de Flores , Ordre de
Prémontré au Diocèfe de Namur. Dom Martennc & Dom
Durand qui l'ont examiné ( o ) , le croient de l'onzième
iiécle , & du tems que Bcrenger infedoit la France de fon
héréfie. Ils en jugent ainfi, par le détail que l'Anonyme fait
des erreurs que l'on répandoit en fon fiécle fur l'Eue hariffie.
Les uns , dit -il , prétendent que le pain & le vin n'y font
point changés ; qu'elle n'efl: qu'un (impie (îgne de forte qu'on :

îâ nomme le Corps de Jefus-Chrift , non qu'elle le foit véri-

yb") Anonyme de Floret.


'(. /) Bibliot. Ctuniacifif. in HpfetiJ. p. (») Orderic. Vital. Ub. j. lUjior. p,
xy.-
(7) UiJ. (o) Marte N, Voyage littéraire ,tum, x,.
(^'Ij^Hifioirt Liiicraire de Tranc* , nni. I/-. 113. iij.
ARCHEVESQUE DE RÇUEISI. Çh.^XIX. 4<Î7
tablement j mais feulcmefic en figùi'e , & qu'il en eft comme
de l'eau & du faint chrcmc dans le Batcmc , & de la robe
blanche qu'on donnoit au nouveau batifc , en lui difant Pre- :

nez cet habit blanc & le prefentez au Tribunal de Jefus-


Chrift. D'autres , continue cet Auteur , fouticnnent que le
pain conlcicré n'efl: pas purement une figure , mais que Jefus-
Chrift s'y ti cuve avec le pain, dont il le fait une elpece de
corps. Quelques-uns font d'opinion qu'il fe fait à la vérité
un changement en la chair de Jefus - Chrifl: ; mais que ce
changement ne perfévérant point à caufe de l'indignité de
ceux qui reçoivent l'Euchariftie , elle redevient un pur fignc
du pain. Enfin , quelque.? autfes prétendent que l'Êuchanflie
devient, par la manducation , fujette à la digefhon & a tou-
tes fes fuites. Après ce détail l'Anonyme expofe la foi de
l'Eglifc fur la réalité du Corps & du Sang de Jefus- Chrift
dans l'Euchariftie , en établifiiant auparavant la foi de l'In-
carnation. Il prouve que l'immolatich de Jefus - Chriil: fur
l'autel ne fuppofc point .qu'il foit mis à mort de nouveau ;
,

qu'elle réelle quoique repréfentative , & qu'elle a la même


cfl:

vertu iur l'autel que fur la croix ; que l'on mange le Gorps
de Jcius-Chrift en deux manière^ ; l'une réelle , Tautre fpi-
rituelle ; que les bons le reçoivent en ces deux manières ; mais
que les méchans ne le reçoivent qu'en une , c''efl;-à-dirc , réel-
lement ou corporellcment ; que la confécration du Corps de
Jeius-ChriH n'efl: pas moins réelle , lorfqu'elle fe fait par un
xnéchant comme par un bon Prêtre. On voit par ce détail
^
combien il feroit important de rendre publiques les Homélies
.de cet Anonyme.
XXII. Everhelme , neveu de faint Popon , Abbé de Sta- Everhelmei
AbbcdeHaut-
yelo , profeflion de la vie monaflique vers Tan lozo.
y fit
Ti n- n» r n TT rT • '
^°'^'
Il paila cnluitc au Monaitcre de Hautmon en Hainaut, donc
1 i

i\ fut fait Supérieur après la mort de Fokuin [p ) , qui


y
pvoit occupé cette plac-c fous les ordres du Bienheureux Ri-
ch.ird.Abbé de Saine Vanne. Quelques féjours dans ÎAbbaye
de .Blandinbcrg à Gand , lui donnèrent de l'attrait pour cette
Màifon; & à la mort de l'Abbé Guichard , il fe fit choifir
pour ion fucceffeur-^ au commencement de 4'an 1059. Des
défauts de conduite Je lifçnr déférer au Pap,e Alexandre II ,

'
(j>) MABjjLiûN. /îï. jf. Ànnul, pumy£9' lit» ^9' 'um. 47.
N nn i
j
4^8 LAMB. ABBÉ DE S. LAUR. DE
LIEG.Ch.XX5C.
_ , qui renvoya l'examen de l'affaire à Gervais , Archevêque de
Pvcims, comme Mcrropolitain de la Province. On ne fait quelle
en fut l'ifTue. Everhclme mourut en ic6^ {q)- Nous avons de
lui la vie de faint Popon fon oncle , dans le huitième Tome
des Aftes de l'Ordre de Saint Benoît: elle avoir été commen-
cée à fa folliciration , par Onuphre , Moine de Stavelo ; mais
celui-ci ayant témoigné trop de lenteur dans l'exécution de
l'ouvrage, Everhelme y travailla lui-même l'acheva , ea &
confervant la Préface qu'Onuphre avoit faite,

CHAPITRE XXX.
De quelques Ecrivains qui ont vécu vers h milieu de l'onzie-^
me fiécle,

lé^Z s.\zu- !• T Ambert né


à Liège , y fit fes études fous Adelmanne,*
TentdcLicge. I depuis Evêque de Breffe (r). Après avoir embraffé
j

la profefTion monaftique dans l'Abbaye de Saint Laurent dans


la même Ville , il pafTa à celle de Tuy dans le Dioccfe de
Cologne, où il compofa fous le règne de Henri-le-Noir (j) ,
& le Pontificat d'Herimanne , la vie de faint Heribert. Il
quitta le Monaflere de Tuy pour retourner à celui de Saint
Laurent de Liège , dont on l'avoit choid Abbé ( r ) , après là
mort d'Etienne en lo^i. Lambert le gouverna pendant en-
viron dix ans , étant mort le 6 de Septembre 1065? (")• Saine
Heribert , dont il écrivit la vie , avoit été Archevêque de
Cologne jufqu'cn loii. La mémoire de fes aâions étoit
donc récente y lorfque Lambert prit foin de les recueilhr :
car il finit fon Ouvrage avant l'an 1056 auffi aHure-t-il qu'il :

avoit été témoin de la plupart des faits qu'il rapporte (.v). Il


ne fit entrer dans l'Hiltoire du Saint , que les miracles qu'il

'
(y) Andr. Bibliot, Belgic.p. 213. (t) PÉz. Toin. 4. AiifcJ. part. 3./. zOi
(r) TrITH. Cbrcnic. lUrfitug. Tom, 1, cap. I.
(rt ) Galtia Cbrljlim. tttv. tom. j.p.çB^»
(5) BotiAND. ad dkm ï6, M.ir;. fa^. (x) BotLAND. ad ditm If, Miirt. p.
467. ««"H-ï» 467. ti, I.
,

DROGON, MOINE DE BERGS. VIN.Ch. XXX. 4(?5>


pendant fa vie, fans toucher à ceux qui s
a'voit faits
rés à fon tombeau (y). Lambert fe nomme pluficurs fois dans
cet Ecrit. Il en eft parlé dans le Catalogue des Ecrivains de
Saint Laurent de Liège, par Rciner , 8c dans la Chronique
d'Hiriauge , par Tritheme. L'un & l'autre attellent que ce
Lambert étoit Moine de Liège; & Reiner l'en fait le fécond
Abbé. Us reconnoilîent tous deux ( z ) , qu'outre la vie de
faint Heribert , il avoit compofé quelques pièces de muHque
c'eft-cà-dire , des Hymnes & des Epigrammes pour fervir
dans rOtfice du faint Archevêque. Cette vie a été donnée par
les Bollandiltes au feiziéme jour de Mars avec celle qu'en ,

fit dans la fuite Rupcrt , Abbé de Tuy mais ils n'ont pas cru ;

devoir rendre publiques les hymnes , les répons ni les ancien-


nes compofés par Lambert , fe contentant de remarquer qu'on
les trouvoit dans un ancien manufcrit de l'Abbaye de Tuy (a)y
à la fuite de la vie de faint Heribert.
IL L'identité de nom a fait attribuer quelquefois à divers f5''^go".l^Toî-
Auteurs, la relation des miracles de faint Vinok , Abbé de vliiol/"^^'
''^orimbolt à Drogon , Evoque de Terrouane, & à Dro-
;

gon Moine de Saint Vinok mais celui-ci ôte tout lieu à


, :

réquivoque (b), en citant cet Evêque dans le dix-huitiéme


chapitre de ce recueil. Il déclare ailleurs (c) ,
qu'il étoit Moi-
ne Flamand & de l'Abbaye de Saint Vinok ce fut fur cette :

déclaration qu'on lui accorda volontiers l'hofoitalité à Ham-


bourg où dans fon v -«yage de Dannemark. C'en efl:
il pafla
aflez pour le diftinguer de l'Evêque de Terrouane , & pour
le rcconnoître Auteur de cette relation , où il parle toujours
de lui-même en première perlonne. Il dit qu'il avoit été té-
moin de plufieurs miracles qu'il raconte ; qu'il en avoit appris
d'autres de perfonnes dignes de foi Son Ouvrage a été pu-
blié d'abord par Dom Mabillon , dans le troKiéme Tome des
Ades (d) y à la fuite de la vie de faint Vinok par un Ano-
nyme. Drogon compofa aulTi l'Hiftoire de la tranilation des
rel ques de fainte Levine, Vierge & Martyre, d'Angleterre
à Bcrgues en 1058 , & la dédia à Rumolde ion Abbé elle :

{>) UiJ.p. 47 T. 47 f. (/>) Ui erat Vroi^t , 'Ebifcop. Tarvernenf,


Cbron. }h}-f,iHg.p. i 80. tom.
(t^i 1. Pïz. Mabil. Tom. 5. Achr. cap. iS.p, jo^,
tom. 4. p. io. (c) liiri, c.-.p. ll.p, u.
3
(<»)

in noiis.
HoLLAMD. ad ditm \6 Mart.f. 47J, w 1\^. 305,
4r^o FROLLAND, EVESQ. DE SENLTS. Ch. XXX.
eft imprimée dans le nepviéme Tome des mêmes Acles (e),
La Vie ou légende de laint Oiwaîd , Koi d'Angleterre , e(l
moins TOuvrage de Drogon , qu'un extraie de ce que le vé-
nérable Bede ena écrit. Les Bollanciiftes ont réimprimé l'fii-
floire de la tranllation de iainte Lcvine , au 24 de Juillet ; 8c
la Légende de faine Ofw ald au cinquième d'Août. Ils font
mention de deux petits Diicours de Drogon en l'honneur de
ce faint Roi mais ils ne les ont pas jugé dignes de voir le
:

joui. Parmi le grand nombre de miracles de faint Vinok ,


Drogon en rapporte un opéré fur un aveugle né (/ ) qui re- j

couvra la vue , comme on portoit les reliques du Saint en


proceflion , le jour de l'Otlavç de la Pentecôte , au juel vers
l'an 10^8, on faiioit à Bergue TOffiçe de la très-fainte Tri-
nité. Il y avoir déjà plufieurs années qu'on célébroit cette
Fête en ce jour (g), comme on le voit par fade de la Dé-
dicace de i'Eglife de l'Abbaye de Vendôme , daté de la
veille de la Fête de la fainte Trinité , l'an 1040 , le 3 i de
Mai. On cite une charte de la même Abbaye de l'an 10^0, ,

où cette Fête eft marquée au douzième des calendes de Juin ,


c'eft-à-dire , au zi de Mai. Elle fe cékbroit alors deux fois
l'année ; l'une le jour de l'ottave de la Pentecôte, l'autre le der-
nier Dimanche d'après la Pentecôte.
FroilanJ , voyant condamné dans le Concile de Pa»
jjj^ Berenffer le
hvcque de . \ /• -n
7 ' J •'-II-
^ 1 • I

Seniis. ris en 1050 [h) , écrivit a Kichard qu il lavoit avoir la con-


,

fiance du Roi Henri , de faire entendre à ce Prince , que


l'on avoit condamné injullement Jean Scoc , approu. é aufli
injuHement l'opinion de Pafchafe dans le Concile de Ver^
ceil & que les Clercs de I'Eglife de Chartres avoicnt fait de
•,

\uï un faux rapport au Roi On ne connaît point d'ailleurs


ce Richard il paroît que c'cft le même qui eft qualifié Abbé
:

dans la réponfe que Frolland , Evêque de Scnlis , fait à Be-


renger. Cet Evêque, lans s'expliquer fur la dodrine de cet
héréfiarque , qu'apparemment il ne çonnoilfoit pas bien , té-
moigne un grand defir de le voir , & beaucoup de confiance
en les prières. Il l'affure de plus , qu'il avoit travaillé forte-
ment pour lui auprès du Roi Henri , pour le lui rendre favo-»

(e) Pa^. m. 1 (;.•) MaBILLON , W. «,8. Annal, n. zo,


(/) De Miracttlis^Tom, 9. AHer.f. 304. 1 T- 4(9.
fip, 4. (A) Tom. z. Spicilej. /•. ;o5). y jo.
I
,

"WIDRTC , ABBÉ DE S. GUILATN. Ch.XXX. 471


Table. Cette Lettre efl; le fcul monument qui nous rcfle de
Frolland. luccéda dans l'Evcché de'Senlis , à Guy vers
Il

l'an 1043 , &


occupa ce Siège julques vers l'an 107 1 Il affi- .

fta en 1045; (0 » au Concile que le Pape Léon IX tint à


Kcims ; à rÀflemblée de Saint-Denis en 105 3 , au cou- &
ronnement du Roi Philipi-e en 1059. Sa Lettre à Bcrenger
a été réimprimée dans le recueil des Monumens pour fcrvir
à THiftoire de i'Univerfité de Paris (/) , par M. du Boulei ;
& dans le lécond Tome des Ecrivains Eccléiiafliques (m) ,
par Calimir Oudin»
IV. Dom Mabillon nous en a donné une de Widric ou ^!^f|5-At'i>é
Guidric, Abbé de Saint Guilain en Hainaut (»)', vers le^g Lcure'à
milieu de l'onzième liécle. Elle efl adrelTée à l'Empereur Hen- l'Empireur
"enniii.
ri Iil , dit le Noir, & non à Henri IV , qui ne rc'gna qu'a-
près la mort de cet Abbé. Il s'y plaint des dommages que
B.uiouin, Comte de Hainaut, caufoit à ion Abbaye depuis
plus de trois ans-, en forte queles Religieux nevoyoient aucune
apparence de pouvoir lubiifter. L'ardeur du pillige étoit relie
dans Baudouin , que les miracles de iaint Guilain , qui ne lui
étoient p. s inconniis la préience de les reliques qu'on oppo-
-,

foit à fes brigandages , les Décrets des Empereurs , les re-


mon rances des hommes de bien , les rançons qu'on lui avoit
payées pour toutes les dépendances de l'Abbaye ne faiioient ,

fur lui aucune impreffion. Ses gens fécondant la fureur , char-


gèrent de coups ceux qui lui préfenterent !a châOe du Saint
tic elle fut fou'lléc du fang qui fortit de leurs plaies. Widric

exprime la défolation de Ion Abbaye en des termes capables


d'engager l'Empereur à la prendre fous fa protedion.-
V. On trouve entre les preuves de l'Hifloire de Lorraine, Anonymede
par Dom Calmer (0), un petit Ecrit touchmt l'origine de
'
'"°"

i'Egliie de Saint Jean l'Evangélifle , à quelque dillmce de


Metz : c'étoir l'Abbaye de Saint Arnoul elle ne fubilfte plus :

«u mêmp endroit : on l'a tranfportée dans l'enceinte de la


Ville.L'Anonyme fait venir d'Afie à Metz , faint Patient y
qu'ilfuppofe avoir été difciple de faint Jean l'Evangclille ,
éc envoyé par cet Apôtre , pour annoncer l'Evangile dans le

(i) Tom. 9. Cotte, faj. 1035, io6p.\ («) Mabillon. t/i. 63. Annal, nutih
ri 07. «8. pa^, 18.
I

( /) Tcm. I. p. 411V (0) Calmïi. H<yî. de Lan, icm, i.f-,


I
,

47X ANON. DES.FLOR. DESAUM.Ch. XXX.


pays Mefïïn. contre toute apparence de vérité , que
Il ajoute ,

laint Patient Metz une Eglife en l'honneur de ce


fit bâtir à
faint Apôtre, même de Ion vivant ; que c'eft-la que iainc
Arnoul fut enterré , &
qu'elle porta enfuite l'on nom. Il ra-
conte toutes les révolutions de cette Eglife ; donne en peu &
de mots l'fîiftoire du martyre de faint Livier. Ce qu'il dir
de mieux , regarde la réforme que l'Evcque Adalberon mit
en 5)41 , dans l'Abbaye de Saint Arnoul , dont il fit fortir
les Chanoines pour leur fubftituer des Moines Bénédidins.
Ce fait étant plus près de fon tems , on peut ajouter foi à ce
3u'il en rapporte. Il ne parle que des quatre premiers Aboés
epuis cette réforme, Arbert ou Heribert tiré de l'Abbaye
de Gorze; Anftée, Jean, qui en furent aufTi tirés , un au-&
tre Jean. Le dernier bienfaiteur de l'Abbaye de Saint Arnoul,
dont il mention , ell Adalberon III , Evêque de Metz
faffe
mort le de Novembre 1072 on peut juger de-Ià , que l'A-
1 1 :

nonyme écrivoit vers le même tems (p),


Anonymede VI. Nous mettons fous la même époque , l'Hidoire de la
, du renverfement & du rétabliffement du Mona-
faintFiorent fondation
aumur.
^^^^ ^^ Saint Florent de Saumur ; puifque l'Auteur la finie
par le récit de la mort de l'Abbé Sigon , arrivée Je 12 de
Juin de l'an 1070. Cette Hifloire a été rendue publique par
Dom Martcnne (q) , dans le troifiéme Tome de fes Anec-
dotes. Ce Monaftere fut bâti d'abord par les libéralités de
Charlcmagne. Le Duc Nomcnoi y mit le feu & le détruilic
fous le règne de Charles-le Chauve. Ce Prince le rétablit ;
mais il fut détruit une féconde fois par les Normans. Les
Moines fauverent les reliques de Saint Florent en Bourgogne
dans l'Abbaye de Tournus. Un Moine nommé Abfalon trou-
va le moyen de les rapporter à Saumur. Thencbald , Comte
d'Anjou , y bâtit un nouveau Monaftcre fous l'invocation du
même Saint. On en donna le gouvernement à Elie , qui eut
pour fucceflcur Amalbert, Moine de Fleuri-fur-Loire. P\.o-r
bcrt qui lui iuccéda , fut remplacé par Adhcbcrt ; celui-ci
par Girald , à c]ui l'on fit fuccéder Frédéric, Moine de l'Ab-
baye de Marmoutier car c'étoit l'ufage , quand il n'y avoir
:

point de fujct capable dans un Monaftere , de choifir les Ab-


bés en d'autres. Le fucceflcur de Frédéric fut Sigon , homme

(/>) Idcm.thiti.f. 1,151. (c) Marten,To>«. j.^«.c././'. 84;.

vénérable
,

THEODUIN, EVESQ. DE LIEGE. Ch. XXX. 475


vénérable par la douceur par fa vertu & par fon Içavoir. Il
,

s'étoic rendu habile dans tous les arts libéraux ; poffedoit les
langues grecque & hébraïque , & f'aifoit fon occupation or-
dinaire de la méditation des Livres faints de l'ancien Se du
nouveau Teflament, qu'il entendoit très-bien. La Bibliothè-
que de Saumur s'accrut par fes ioins; & afin qu'il n'y eut que
des exemplaires correds, il corrigcoit lui -même ceux où il
apperccvoit des fautes c'eft ce qu'il fit en particulier dans un
:

exemplaire du Livre des Adcs des Apôtres. S'il laifTa quel-


ques autres monumcns de Ion foavoir , ils ne font pas venus
jufqu'à nous. L'Hiltorien de Saumur ne les auroit pas oubliés ;
& Ion filence à cet égard , efl; une preuve que Sigon ne s'oc-
cupa point à compofer , quoiqu'il en eût les talcns.
VII. On ne connoît de Theoduin , fucceflleur de Vazon Theoduin.E-
dans l'Evêché de Liège en 1 048 (r) , que deux Lettres l'une ^'•'î ''ei^><^- ;
",'-'

à Henri , Roi de France ; l'autre à Imade , Evêque de Pader- fuRoiHenrT


born. La première a été quelque tcms attribuée à Durand ,
Evêque de Liège , fur ce que dans les manufcrits , le nom de
l'Auteur n'étoit dcfigné que par un D. qui pouvoir également
•défigncr cet Evêque , ou Theoduin l'un de fes fuccefleurs
nommé aufli Deoduin. Mais on a reconnu enfin , qu'elle étoit
de ce dernier ; & la matière qui y efl traitée , prouve claire-
ment cju'elle ne peut être de l' Evêque Durand , mortplulîeurs
années avant que Bercngcr publiât les erreurs qu'on attaque
dans cette Lettre. Elle eft imparfaite dans Chapcaville & dans
Baronius. Nous l'avons entière dans la Bibliothèque des
Pères, & dans les Analedes de Dom Mabillon. Theoduin
voyant que les erreurs de Berenger & de Brunon , Evêque
d'Angers, faiioicnt du bruit jufqu'aux extrémités de la Fran-
ce & dans toute l'Allemagne ; & qu'ils y renouvelloient d'an- -

cienncs héréfics , enfcignant que le Corps du Seigneur n'efl


pas lant Ion Corps que l'ombre & la figure aboliflant les ma- ;

liiges légitimes", & renvcrlant , autant qu'il étoit en eux , le


Batême d s enfans; écrivit au Roi Henri , qu'il favoit avoir
convoqué un Concile pour les convaincre publiquement , 8c
délivrer Ion Royaume de cet opprobre ; qu'il ne croyoit poinc
que ce Concile dut avoir fon etfet ; parce que Brunon étant
Evêque , il ne pouvoit être condamné que par le Pape. Nous

(r) Tom. 18. Bil'liot. P.u.p. jjt.i!^/» j4uii/fiî, Mabil. />. 445.
Tome XX, Ooo
474 THEODUIN, EVESQ. DE LIEGE,
craignons , ajoutoit-il , que lî ces malheureux font ouïs dan?
un Concile , où ils ne peuvent être punis , leur impunité ne'
produife un grand icand le parmi les Fidèles. En effet, con-
ildérant qu'on ne leur a fait fubir aucune peine , qu'on leS' &
a confervés dans leur degré d'honneur , ils penfcront , ou que
tout le Concile n'a pu les vaincre, ou qu'il les a déclarés in-

Matih
nocens alors le dernier état des chofes deviendra pire que le
:

*
4j.
'
premier. C'cfl: pourquoi nous fupplions Votre Majellé de ne
les point écouter, juf^u'à ce que vous ayez reçu du Saint Sié--
ge le pouvoir de les condamner. Il fcmble même qu'on ne
doit point écouter des hommes de ce caractère , ni ûlfcmbler
de Concile à leur occafion ; & qu'il ne fliut longer qu'à les
punir. On doit néceffaircmcnt entendre les hérétiques , Iqrf^
que les qucftions n'ont pas encore été bien examinées , en
iorte qu'elles peuvent fouffrir quelques doutes mais ce n'cfE :

point ici le cas , puifque celles qu'ils agitent ont été fi bien é-
claircies par les Conciles & par les Ecrits des Pères , qu'il ne
refte rien de douteux. Theoduin rapporte enfuite les pafla-
ges des Percs , commençant par ceux qui établiffent la pré-
lence réelle du Corps & du Sangdc Jeius-Chrift dans l'Eu-
chariftie. Ils font tirés de laine Léon , de faint Cyprien , de
faint Ambroife , de faint Bafile , d'Eufebe & de laint Hilaire.
Il en cite un de faint Auguflin touchant la validité du Batc-
me des cnlans , & un d'un Concile de Tolède , pour montrer
que le mariage fait félon la Loi du Seigneur, eft honorable ;
puis il ajoute Nous croyons que Brunon & Bcrenger font
:

déjà anathématifés ; qu'on doit donc rcfufcr de les entendre


dans un Concile ; &
que li vous le trouvez bon , il ne s'agit
plus que de délibérer avec vos Evcques les nôtres ,. avec&
l'Empereur votre ami & avec le Pape même , de la peine qu'il
faut leur irapofer , étant jufte de réunir les iuffrages de tous ,
• contre ceux qui combattent contre tous.
Lettre «ie VIII. La Icconde Lettre de Theoduin eft adrclTée à Ima-
Theoduin à ^^ (s) qui fuccéda en 1052 , à Rochon dans le Siège Epif-
,

luedei'ader- copal de Padcrborn , & l'occupa julqu'cn 1076. Cet Evêque


^^fi^- lui avoit envoyé en préfent des ours, du miel des abeilles.- iS.:

Theoduin l'en remercie & donne à ces préfcns une explica^

(s) Mariin, Tim. 2. Ampliff. Co//«7. />. 487. ïî lUpor. Lcodienf, lom. i. p. 5'1S.
j ,

BRUNON EVESQ. , D^ ANGERS. Ch. XXX. 475


tîon allcgorique : puis il tait parc à Imade de trois miracles
opérés dans la Cathédrale de Liège , par la vertu des reli-
ques de iaint Remacle, que les Moines deStavelo y avoient
apportées pour demander julîice contre ceux de Malmedi
qui vouloient rompre l'union établie entre ces deux Mona-
ftercs. On croit cette Lettre de l'an 107 1. Cinq ans aupara-
vant , c'cft-à-dire, en 1066 , Theoduin , après avoir fait la
Dédicace de TËgliiede Notre-Dame de Huy , lui fit une do-
nation de pluficurs biens , &
la choifit pour le lieu de fa fc-

pulture. L'atle fut (igné par plufieurs Archidiacres , foufcrit


& collationné par le Scholaftique Francon. Aubert le Mire
en a donne une partie ( r ). Il eu entier dans le premier Tome
de la grande Colledion de Dom Martenne. Trois jours aprc^^,
le même Evcque fit une autre donation à cette Egliic , donc
le Mire fait auffi mention (?<). Theoduinmourutle2 3 de Juin
de l'an 1075» Il avoiteu quelque tems avant fa mort, un diffé-
rend avec le bienheureux Thierri , Abbé de Saint Hubert en
,
Ardenne mais le Pape Grégoire VII le termina par une Let-
:

tre qu'il écrivit à Theoduin.


Bninon , Evâ.
IX. L'Evcque Brunon que Theoduin attaque comme com-
1. j Ti N n.
plicc des erreurs de Bercnger {x), elt plus connu lous le
r / 1 ri que d'Aniiersv
^ "

nom d'Eufebe. Il fuccéda dans l'Evcché d'Angers (>'), à


Hubert de Vendôme, mort au mois de Mars de l'année 1 057;
mais il ne fut ordonne que dans le mois de Décembre fui-
vant. II aiïirta en 1045» , au Concile de Reims, convoqué
par le Pape Léon IX en 1058 , à la Dédicace de l'Eglife
;

de Saint Jean Angeli ; en 1062 , à celle du Monaflere de


Saint Sauveur-, & au Concile de Poitiers (z) l'an 1078. ,

Hugues de Die , Légat du Pape Grégoire VII , y prélkloit.


Les Ch moines d'Anjou s'accordent a mettre la mort d'Eu-
febe &: de Brunon (a) , au mois d'Août de l'an 108 1 & lui ;

donnent pour fuccefleur Geofroi , qu'elles difent avoir été


placé fur la Chaire Epifcopalc , le huitième de Mai de la
même année: ce qui femble fuppofcr qu'Eufehe abdiqua l'E-
piicopat quelque tems avant fa mort. Il avoir effacé , des l'an

(('> MiR.ïUS , de Donai. Efljr.fag. 44. (») MaBILl. «« AnalfB.p, 447.


4?. Marten. Ton», l. ampliff. Colltcl, p. (/,) LabB. uov. Bibliot. p. 1Ï7. 18$.
4<î8.
(«) MiR.trc , C«./, Doii.u, p.^g. loc. (x)IhiJ. p. JOî.
ÎOi. (a) IbiJ.page zii.iZ'^.
Ooo i
,

47^ BRUNON EVESQ. D^ANGERS.


, Ch. XXX.
ic62 , çons que les liaifons avec Bercnger avoient
les fou,
fait naître dans refprit de plufieurs. S'étjnt trouvé vers cetcc
année là avec Hugues, Archevêque de Befançon , & pludeurs
perfonnes do6tcs , à l'AfTemblée qui fe tint dans la Chapelle
du Comte d'Anjou ; on y éteignit quelques étincelles de Thé-
réfie de Berenger , qui tâchoit de fe reproduire. C'efl lui-
même qui rapporte ce fait (b) , dans fa Lettre à cet héréliar-
que ; mais qu'il ne regardoit pas alors comme tel , puifqu'il
lé qualifie fon frère &
fon très -cher collègue dans le Sacer-
doce ; parce qu'apparemment il le croyoit (incérement con-
verti ; ou qu'il vouloit , par ces marques de charité & de po-
litefTe , rallentir l'ardeur qu'il témoignoit pour entrer en une
difpute réglée , où l'on examinât avec quelqu'un de fcs ad-
verfaires, un paflage tiré du Livre des Sacremens , attribué ,

à faim Ambroife. Eufebe qui avoir pris le parti de ne plus


difputer fur cette matière , confeille à Berenger d'en ufcr de
&
même a l'avenir , de s'en tenir à ce que la Vérité nous en-
feigne : puis ayant rapporté les propres paroles dont Jefus-
Chrifl fe fervit dans la confécration de l'Euchariflie , il dé-
clare que pour lui il croit &
confefTe (c) , qu'après que le
Prêtre les a prononcées , le pain eft le vrai Corps de Jefus~
Chrift , &
le vin fon vrai Sang , par la vertu l'opération &
du Verbe , par qui toutes chofes ont été faites. Que fi quel-
qu'un , ajoute-t-il , me demande comment cela fe peur faire ^
je lui reponds , que ce n'cfl point par les règles ordinaires
de la nature qu'il en faut juger ; mais félon la toute-puiffance'
de Dieu , qui a fait ceci & tout ce qu'il a voulu , foit dans Ie~
ciel , foit fur la terre , foit dans la mer & dans tous les abî-
mes. Il fait voir cnfuite , qu'il n'y a pas plus de difficulté à'
croire le Myflere de l'Euchariflie , que deux autres que nous
croyons fans hélîter , & toutefois par le fcul motif de la foi;
l'un , que le Verbe de Dieu s'eft fait chair dans le fein de la

( i") Ciijus Berengarii rediviva peftis nem verum Chrifti Corpus & vinutn'
, ,

aux nefcio quorum improbitate exagiwta eoïkm modo v-rum Sanguinem effe cre-
caput cxtulerat , Domini Eifonticenfis Ar- dimus 6. confiicmur. Quod fi <]uis,quali-
chiepifcopi & eruditorum qui interfue t(T lioc fit'ri poiïit , inquiiat ;nor ei (fcun-
runt, aiitoritate cjlcataeft incapellâprin- dùm natur.r or.lincm , (ed (ecundùm Dcî
oipis. De l\Kye ,p. p. omnipoteiitiam refpondtmuçu'^. hoc & om-
\c) Hijus vefbi per quod omnia faâa nia quacumquc voit it fccit Deus in crrio'
funt virtute Se iHtftu , panem port con-i & in ttrrâ in mari
, , & in omnibus abyflls,-
ûïcrjntls in harc verba Sacerdoùs factatio-1 il/iJ.p, 4p.
GUI, EVESQUE D'AMIENS. Ch. XXX. 477
fainte Vierge ; l'autre, que le Corps de Jelus-Chriil refTuf-
cité eft encré , les portes fermées , dans le lieu où écoienc les

Apôcres. Après s être expliqué en des termes Ci clairs fur l'Eu-


chariftie , il dit , que li l'on vouloit affembler des Conciles
pour y dilcurer de nouveau cette matière , il n'y confentira
point & refufera d'y afllfter ; regardant cette caufc comme
tinie. Il ne dilTimule pas les reprochas qu'elle lui avoit caufés
de la part de fes voilins , & fuipend l'on jugement fur le morif
que l'on avoit eu de faire naître cette difpute fur l'Euchari-
ftie ; fi c'étoit , ou pour affermir la vérité , ou dans la vue de

fe fairequelque réputation à quoi il ajoute, qu'elle avoit été


:

dans la Province de Tours , deux fois en


trois fois afibupie
ectte Ville, & une fois dans la Chapelle du Comte d'Anjou.
La Lettre d'Eufebe à Berenger, fe trouve dans les noces de
Claude Menard , fur le Livre de faint Augullin contre la fé-
conde réponfe de Julien le Pélagien ; dans le Traité de &
François de Roye , fur la vie de Berenger , imprimé à Angers
en 165^, in-4".
X. Gui Evêque d'Amiens (d) , fut du nombre des Pré-
, Guî.Evêque
'^'Amiens.
lacs qui afliflercncau facre du Roi Philippe en 1059. Il fg
trouva aulTi à la Dédicace de l'EgJife de Saint Martin-des-
Champs à Paris en 1067 (e) ; & a celle de l'Eglife de Saine
Quentin en 1074 (/). Il mourut en cette même année, félon
Hariulfe (g). Auteur de la Chronique de fdint Riquier. Gui
avoit fait les études dans cette Abbaye fous Enguerran , &
prit de Ion Maître le goût pour la poélie. Ce fut le feul gen-
re d'étude qu'il cultiva depuis: du moins ne connoît-on de
lui qu'un Poème, où il décrivoic la vitloire que Guillaume le
Conquérant remporta fur Harold , à la journée de Haftino-s
en Ï066, au mois d'Octobre. Cette pièce n'cft point venue
jufqu'a nous. Orderic Vital qui l'avoit lue ( A ) , dit que Gui

Y avoit imité Maron & Papinius qu'il y blàmoic 8c condam-


;

Boit Harold; & donnoit au contraire de grandes louanges à


Guillaume. Gui orna le tombeau d'Enguerran d'une Epira-
phe en quatre vers élégiaques ( ? ) • on le croit aulîi Auteur'

Çil) Tout 5. CoHf. f, II 07. ('i)ORDFRlC. Vital. LU. 3. Hifi.Ecclef.


(f) Mabill. Lib. 63. Annal, mtm, 7.
/ag 4. fi)Chronic. Cetitulcnf. tom. 4. S.^icH. p.
Galli.i Chrijli.wa vêtus <(?p Rolland, ad iiem j .Mart.p, iS]-
(
/")
, tem, î. f,
^
Mabili, Tom. 8. Âihr.
^,'^Tom, /L, Spicileg, cap, }É,p. 6i^
,

4/8 G U I , ^

de trente-deux vers en l'honneur du même Abbé , rapportés


par Hariulfe , & inférés dans les Colleétions des Bollandiftes
& de Dom Mabillon. Ces vers font hexamètres , & contien-
nent le détail de ce qu'Enguerran fit pour l'utilité de Ibn Ab-
baye , foit en faiiant rentrer les biens ufurpés, ibit en con-
fervant ceux qu elle poflcdoir , loit en décorant l'Eglifc de
divers ornemens précieux foit en fournilTant la Bibliothè-
.

que de bons livres. Toutes les bonnes oeuvres ne le mirent


pas à couvert de la calomnie & de la perfécucion des mé-
dians.
Lettres des XI. Il de deux Lettres afiez fin-
faut dire quelque choie
Ciercs de
o;ulicrcs ; l'une , de rEG-life de Cambrai
écrire par les Clercs
Cambrai. Ç> ti
i i^

^i tvi i ^ i i

a ceux de Reims; autre , des Clercs de JNoyon , a ceux de


l

Cambrai. On y verra que Ci tous les Minières des autels ne


fe contiennent pas également dans le devoir, il le trouve des
Pafleurs zélés qui prennent loin de les y ramener autant qu'il
eft en eux. Le Légat Hugues , Evcque de Die , en lacranc
Evcque de Cambrai , Gérard auparavant Prévôt de Saine
Vaft d'Arras (/), lui avojt ordonné d'obliger les Clercs à
quitter leurs femmes , & à fe contenter d'un fcul Bénéfice. Il
lui défendit aufli les Ordres lacrés à leurs enfans.
de conférer
Ces Clercs en furent allarmés & croyant qu'on violoit en
;

cela la liberté publique du Clergé, ilss'adrefferent aux Ecclé-


l^afliqucs de Reims (m) , pour implorer leur fecours contre
les Romains & contre Gérard leur Evêque , fe plaignant
qu'il vouloir remettre en vigueur un Décret que l'on nobier-
voit plus depuis long-tems. Us rejettent tout l'odieux de cette
nouveauté fur les Romains , qui étendoicnt leur pouvoir fur
rout ; afTolbliffant l'autorité Royale , excommuniant les Ar-?
chevêques , depoGint les Evéqucs, indiquant des Conciles à
leur gré , & faifant valoir leurs maximes dans les Jugcmens
qu'ils rendoicnt en des pays qui n'étoicnt point de leur rcf-
fort. Us fe plaignent de Hugues , Evcque de Langres , l'un
des Agens de la Cour de Rome, dont ils font entendre que
les mœurs n'étoient rien moins que régulières ; de TEvêque
de Die , Légat du Pape , qui, difent-ils , ne leur étoit conni|
que de nom^ & de Gérard Leur Evcque , qui agilTant de conr
cert avec le Légat, les traitoit avec dureté. Venant au fait.

(I) Mabillon. Lib, 64. Annal. num.\ {m) Ibid. in Afpaid, p. 654.
EVESQUE D'AMIENS.
Ch. 475) XXX.
îlsdifcnt qu'il cxigcoic d'eux qu'ils fe contentaflcnt d'une
feule prébende j fandis qu'ils pouvoientà peine fubfiftcravec
deux ou trois; qu'il ne vouloir point ordonner les cnfans des
Clercs mariés ; quoique fainr Auguftin cnfeigne , que l'ori-
gine des enfans , quelle elle loit , ne préjudicie point à leur
lalur, s'ils n'imitent point les défauts de leurs parens ; enfin ,
qu'il déiendort aux Clercs mariés , d'entrer dans le chœur &
de fcrvir cà l'autel. Ils s'élèvent avec force contre ce dernier
article , 6c prétendent que l'ufage du mariage n'eft point in-
terdit aux Prêtres: lur quoi ils citent les remontrances que
l'Evêque Paphnuce fit à ce fujet dans le Concile de Nicée («).
Dom Mabillon a rapporté cette Lettre dans l'Appendice du
cinquième Tome des Annales. Elle eft fans date ; mais il la
croit de l'an ïoj6.
XII. Il afart imprimer celle des Clercs de l'Eglife de Noyon, ^ente dus
dans le premier Tome de ion Muf^um halkum (0) , à la fuite giHedeNo'ion
de l'apologie de Manafle , Archevêque de Reims. Ils y font
mention de l'excommunication de ce Prélat, comme d'une
choie toute récente ainfi leur Lettre fut écrite trois ans après
:

la précédente, c'cft-à-diie, en 1075^. C'cft une réponfcà celle


qu'ils avoient reçue des Clercs de l'Eglife de Cambrai Ils in(i-
ftcnt comme eux, iiir la légitimité de l'Ordination des enfons
des Clercs:- en quoi ils s'appuient de la généalogie de Jefus-
Chrift , qui a voulu naître non-feulement des étrangers, mais
raêmc des adultères ; fur les fauiïos Décrétalcs des Papes Viftor
& Callifte ; &
fur un Canon du Concile d'Ancyre
( p ) , qui
n'eft nullement favorable au mariage des Prêtres. Pour fc main-
tenir dans l'uiage de polTcder plulieurs prébendes, ils dilenc
point contraire aux Canons ,
qu'il n'efl que chaque Eglifc a &
fes coutumes, qu'elle peut garder tandis qu'elles ne font con-
aux bonnes mœurs. A l'égard des enfans des
traires ni à la foi ni
Clercs ^ ils allèguent pour raiion de les ordonner, divers exem-
ples d'enfans nés de concubines , qui ont été élevés au Sacerdo-
ce , a l'Epiicopat , à la Royauté , même à la Papauté. &

f«) Uijlor, Trip,t)t. J ib, 14. op. z,


j
(g) Vcfetlom, 3./"'^. 718.
{,>). Tom. i , Miijai liai. p. i iS, i-
480 O T H L O N,

CHAPITRE XXXI.
Othlon y Prêtre & Avoine de Saint Emmeramne dt
F\aîijbone.

Ot!ilon,Moi- 1. T L paroît par divers endroits de fes Ecrits {q) qu'il vint ,

rfennfne^"dê A ^^ mondc vers l'an loi dans Dioccle de Frifin-


5 , le
Ratifbon-'.ses guc. D'un génie aile &: docile , il apprit facilement les icien-
premierc-s e-
^^^ dont on a coutume d'inftruire les enfans. Il rcuflTit fur-
tout à fc former la main , en forte qu'il écrivoit très - bien ;
cela lui donna du goût pour tranfcrire les livres. Il en copia
piuficurs dans l'Abbaye de Tcgerufe , où il avoir fait les pre-
mières études ; puis en France , c'eft-à-dire , dans la Fianco-
nie orientale.. Quoique ce travail lai eût affoibii la vue , il ne
laifla pas de le continuer &
d'y exhorter les autres. Il don-
noit de fes copies à (es parens , à fes amis aux Monaftc'- &
rcs. S'il n'en avoit lui-même fait le détail , il paroîtroit in-
croyable qu'il eût pu , à fon âge , tranfcrire un fi grand nom-
bre de livres. Il en relie encore de fa main dans les Bibliothè-
ques de Tegcrnié &
de S. Emmeramne.
Il apprend les H. De rctojr de Franconie , il s'appliqua avec fuccès à
o"' iljfp^,^^"^' l'étude des arts libéraux. Son ardeur pour les Iciences
alloit
re un BLi.cfice juf^u'à demander chaque jour à Dieu de le placer dans quel-
a la campa-
gneillcquit-
q^. JJp^ ^^ j} y ^^^ bcaucoup '^
de livres. Son père qui ne
* r . j a , . •
-n / >r -

te pourfe faire penloit pas dc mcmc ,


procura un riche Benence a Ja cam-
lui
i 1

Moine. pagne mais Othlon préférant la convcrfation des Clercs in-


:

ftruits & ftudicux , ne s'accommodoit point dc fa lîtuation.


Une difficulté qui lui furvint avec \\"crinharius , Archiprêtre
dans l'Evcché dc Friiingue , lui fit prendre la réfolution dc
fc retirer au Monaficre de Saint Emmeramne à Racifijonc.
L*Abbé Richard le reçut d'autant plus volontiers ,
que les
Moines fouhairoient d'avoir Othlon pour Maître, autant dans
Fart de bien former les lettres ,
que dans les autres fcienccs.

(^) Vtl.DijJiriut, Ifi^ogici in tom. 3. f. 10,


C'étoit
MOINE DE S. EMMERAMNE. Ch. XXXI. 481
C'étoit vers l'an 1032. Il trouva dans ce Monaftcre des Moi-
nes (ludicux , mais d'un goûc différent ; les uns applii-iucs à la
Ictitirc des Auteurs profanes, occupés de la médi-
les autres
tation des divines Ecritures. mais une occu-
Il imita ceux-ci :

pation li féricuie ne le mit point à couvert des tentations


dont il avoit été troublé étant dans le monde. On le char-
gea du loin de TEcole ; &
vers l'an 1055 , de Toffice de
Doyen.
m. L'Abbé Reginhard , qui gouvernoit alors le Mona- j.^'j^J^^""^^^*
ftere de Saint Emmeramnc, fuivoit moins ce qui ell prelcrit EmmeVamne'
par la Règle de Saint Benoît , que les avis de l'Evêque & les àcdiedeFul-
^^"^° ^'
conicils de quelques jeunes Religieux qu'il affettionnoit.Oth-
Ion le déiapprouva ce qui le rendit
: odieux à l'Evéque , à
l'Abbé & à ces Religieux. Le Monaftere iouffrit de cette di-
vifion. Othlon pour la faire ccflcr , demanda à Reginhard
permiflTion de paffer à Fulde, où il fut reçu en io6i. On ne
fait point combien il y demeura , ni quaiid il revint à Rati-
fbone. L'année de fa mort n'efl: pas plus connue. On conje-
fturc qu'elle arriva vers Tan 1072 ou 1073.
IV. Le premier de fcs Ecrits que l'on ait mis au jour, efl: Ses Ecrits;
xrelui qui eft intitulé Dejes tentations. Dom Mabillon lui a
:

donné place parmi les Analcûcs (?) , mais fans oier décider
de l'on Auteur. Il corjedure toutefois qu'il cft delà même
main que les Attes de faint Boniface , & conléquemment du
Mcine Othlon. Sa raiion efl; que ces deux Ecrits font d'un
même flyle , & que le dernier étant d'Othlon , on doit aulTi
lui attribuer celui qui porte le titre Des tentations. Il y a une
:

raiion encore plus forte c'efl: que l'Auteur de cet Ouvrage


:

en rappelle un de fa façon en vers , lous le titre de Do^rine


fpintiirlk {s). Or il s'y déligne lui-même par fon propre nom.
D'ailleurs ( f ) , ces Livres Des tentations , & de la DoEirins
fpiriuiclle , contiennent la même choie , & ne différent qu'en
ce que l'un efl en profe , & l'autre en vers. Aufli fe trou-
vent-ils joints enfemble dans un manufcrit de faint Emme-
ramnc («).
11 y reconnoît qu'avant de fe faire jNloine , comme depuis ,
Tra'té d&s

(>) MaBII-L. /H /^«il/ffZ./', iCT fine Prolog, de dod.fpiritu.ili.


{s] U:d.pa^i. .17. («) Pez- \T(im. 3. DiJJerut. Jf'tgogi(a\
(r) Ptz. Tom. 3, Anicd. pag, 4^5,

7 orne XX, Ppp


,

482 O T H L O N,
il eut à de fréquentes tentations (jv) , tantôt de défef-
fouflfrir

poir , tantôt de doute fur les principaux Myfteres de la Re-


ligion, tantôt d'impureté. Dans ces combats il avoit recours
à la prière , à la ledure des faintes Ecritures & aux exemples
des Saints , qui , agités comme lui de diverfes tentations
les avoient furmontées. L'étude lui parut aufli un moyen
de diflipcr les attaques de l'ennemi. Dans cette perfualion il
compola en vers Ion Traité de la Do£trine fpirituelle , où il
fit entrer les paflages de l'Ecriture dont il fc iervoit pour re-

poufTer les traits du Tentateur, ill le compte pour le premier


de fes Ouvrages ; mais Dom Bernard Pcz a fuivi un autre or-
dre dans l'édition qu'il en a faite. Nous nous y conformerons
pour la commodité des lecteurs.
Livre des tro's ^^' ^^^ Editeur met d'abord le Traité des trois queftions^
qucftionf. Othlon nous apprend lui-même en quel tems & à quelle oc-
cafion il lecompofa. Un Moine nommé Henri , de l'Abbayi
de Richenou, pafla à Saint Emmeramne en revenant de jé-
rufalem. Pendant le féjour qu'il lit en ce Monaftere , il eut
pluficurs conférences avec Othlon , fur le iens de quelques
paflages de l'Ecriture. Henri fatisfait des explications qu'Oth-
lan lui avoit données , le pria de mettre par écrit ce qui s'é-
t ;it paffé. Il fut quelque tems à le déterminer là-deffus en- :

fin , il écrivit leurs conférences en forme de Dialogue ; mais


fans mettre fcn nom , ni ceux des interlocuteurs. Henri vint
une féconde fois à Saint Emmeramne & voyant qu'Othlon •,

ne s'étoit point nommé à la tête de l'Ouvrage , ni les inter-


locuteurs, il le prefla de le faire, & d'ajouter un Prologue,
où il rendit compte de l'occafion qui avoit donné lieu à cet
Ecrit. Othlon le fatisfit. L'Ouvrage eft antérieur d'environ
quinze ans à celui qui eft intitulé : Des tentations (/ ) , & qui
fut compofé après l'an 10^2. Aind le Livre des trois quc-
flions n'efl au plutôt que de l'an 1 047 : la première traite
de la bonté de Dieu la féconde , de l'équité de fes juge-
•,

mcns; la troifiéme , des différens moyens qu'il nous donne de


'
faire le bien.
'Anaiyfedece VIL Othlon déclare dans le Prologue , qu'il ne
s'aflujétira
"^'^ "••
pas aux règles des Scholafliques (z) ,
qui, dans l'interprétation

ij)OiHLOu. Je tenta:,
f, 117, i/iMatil. \ i^z] l't.e.,Tan. 3./, 141»
,

MOINE DE S. EMMERAMNE. Ch. XXXI. 483


des faintcs Ecritures , des noms &
des verbes cpi y lont em-
ployés , aiment mieux s'en rapporter au lencimcnt de Boëcc ,
qu'aux explications des faints Perts. Je n'en uicrai pas ainfi ,
dit-il , je fuivrai plutôt ces faints Interprètes que Platon &
Aridotc , ou même Boëce qui s'cft trompé en quelques points ,
quoiqu'on ne puifl'e lui refurer la qualité d'excellent Orateur.
Après ce préambule (a) ^ il fait voir que les divines Ecritu-
res renferment toutes les vérités dont la connoiffance cfl; né-
ccflaire au falut
; qu'encore que
l'univers foit rempli des effets
de miféricordc de Dieu, il ne laiffc pas de permettre que
la
nous foyons afHigés en diverfes manières depuis le commen-
cement de notre vie jufqu'à la fin (b) : parce qu'il efl: jufle &
bon tout enfcmble. C'eit par la même raifon ( c) , qu'il laide
à l'homme la liberté du bien & du mal le libre arbitre étant ;

de fon eflencc , puifqu'il efi; fait à l'image de Dieu , qui jouit


lui-même du libre arbitre. Comme il a exercé fa juRice dans
la condamnation des Anges apoftats (d) , il a donné des preu-
ves de fa miféricorde dans la réparation du genre humain ,
en lavant dans le Batême , la tache contr.itlée par le pJché
originel (e). Othlon prouve par divers exemples tirés de l'E-
criture (/) , que Dieu a ufé envers les hommes , tantôt de
févcrité , ; mais que fa grâce a été
tantôt de douceur plus a-
bondanre dans nouveau que dans l'ancien Tcftament. Il
le
regarde comme impénétrable (g) , le myflere du péché origi-
nel , exprimé par ces paroles de faint Paul Pin le péché d'un :
R»"'- î- 1!

feul , TOUS les Jmnmes foni tombés dans la condamnation ; & s'ex-
cufe de l'approfondir. Paffant à la féconde queftion [h) ^ il
diftingue quatre efpeces de jugcmens de Dieu ; les uns jufles
les autres nécelTaires , d'autres ]uftes & néceffaires , enfin les
jugemens fccrcts & inconnus mais il ne fait cette diftindion
:

que pour fc conformer au langage ordinaire des hommes


auquel Dieu même veut bien s'accommoder dans fes divines
Ecritures. On reconnoît qu'un jugement eft jufte , quand il
eft coriforme aux Loix divines & humaines {i)\ qu'il cfl: né-
ccflaire , lorfqu'il fuit d'un principe établi de Dieu. Il a voul*

{'i)C»p.1. {f)Cap.6^fiq.
\
(t)Cap.i. I
{g) Cap. II.
(0 Cap. ^. (h) Cap. 17.
\
{'i)Crp.'^. (i)C»p.lZ.
I
'
{e) Cap. 5.

Pppij
,

484 O TH L O N ;
fauver l'homme: l'Incarnation du Verbe devient dès -lors
néceffaire ; comme il ne peut vivre fans le fecours de l'air &
des autres élémens ; qu'il eft jufte néceffaire , parce qu'il efl &
ordonné de Dieu , &
que de l'exécution de ce décret , dépend
de l'homme qu'il efl inconnu & fecrct quand il ne
le falut ;

peut être connu par ce qui précède ni ce qui fuit ce juge-


ment. Othlon donne des exemples de ces quatre efpeces de
jugemens (/). A l'égard de la troifiéme qiieftion, il la réfout
en difant , que l'homme étant doué du libre arbitre , il peut
de lui -même faire le mal ; & le bien avec le fecours de la
grâce. Il traite enfuite du myflere de la fainte Trinité (w) ,
& dit clairement, que le Saint -Efprit procède du Père &
du Fils, étant l'Efprit de l'un & de l'autre: puis il rapporte
divers exemples pour rendre croyable cet article de notre foi,
qui nous enfeigne que Dieu eft un en trois perfonnes («). La
chandelle allumée eft une (0) on y diftingue toutefois l'ctou- :

pe , la cire, la lumière.
VIII. Il pofe pour principe (p) , que toute confécration ,
pour être falutaire , doit fe faire par l'invocation du nom de
Dieu , & par la prononciation des paroles ordonnées de Dieu.
D'où il fuit (q) 3 que ii en plongeant le batifé dans l'eau , le
Miniffre ne dit pas au nom du Père , & du Fils, & du Saint-
Efprit , le myflere de la régénération ne s'opère point , & il

(1} Cip. 19. 20 tf /<-y. ait, ex hoc omnes ; hic efl tnimcalix Satigni-
(m) Cap, 51. ^feq. ms met , qui fro mmltis effundettir in remif-
(«) Cip. 36. fionimpeccatorum. )Hujufmodi , inquam ,
(0) C>/». 37. verba Domini , ni(î in confecrandis panis
(j>)Cap.4S. & vini facrificiis à Sacerdote dicantur :
(ç) Narn nid bcptifancîiiç juxta vcrba eadem panis & vini frcrificia in Corporis
divina in nomine Patris, 5^ Filii , & Spi- & Sanguinis Domini inyfteria vivifica
ritûs Sandi niergatur in fontem ; nullum tranifigurari minime credenda funt. Alia
ibi regenerationis agitar niyfterium , nu'ia enim verba, qii.T anteà vel pofteà Sacerdos
psrcipitur ibi rcmill^o p.'ccatorum qui- : celebrans dicit , benedidones , vel
IVliffiis

propter ut fi.u mvilerium regenerandi in laudes, fîve orationes vocantur,: fola au-
aquâ, agenda eft Sandi Trinicatis invc- tem priniilla Domini nollri diffa , quibus
catio pra-Hominata. Simi'i:er in célébra- Corpori: &: Sanguinis fui myrteria in pane
tione Miflarum , ubi Corporis & Sanoui- & vino deîîgnaia per ù commendavic ac
is Dominici myfteria in panis & vini fa- I in fui commemorationem fieri pra:cepit
crificio (une nraâanHa , ni (î il la Domini transfîgiirationem & vivificationem eorum-
nofiri Jefu Chrifti vcrba, qux cum Difci- dim myfk'rioriin in liolli'.m veram, pcr-
pulis in C. a râ recumbenî,pancmque &; ca- fectam , imnia^ulatam , per S.KCrdotis cu-
îicem eis porrigens Cpanem quiiiem, yic- jufliliet officium invifibiliter opcrirtur.
lipite , inquit , ^ ccmtdiie ex hoc , hcc e/i OiHLON , l'b. de trib. qit.efl.. cap. ^S, toin,
ttiimCor^ui miiiin : caliccm autcm> tii'iie, 3. Ânccd.Pex..p. 238. i;?.
,

MOTNE DE S. EMMERAMNE. Ch. XXXT. 485


n'y a point de rémifTion des j^échés. Afin donc que le myftcre
de la régénération s'accomplifTc dans l'eau , il fjut invoquer
les noms de la fainte Trinité. Il en efl: de même du facrifice
de la Meffe. Le pain & le vin n'y font point transfigurés au
Corps & au Sang de Jcfus-Chrift , fi le Prècre ne prononce
les mêmes paroles dont le Seigneur fe fcrvit en donnant le
pain & le calice à fes Difciplcs. Les prières qui précèdent ou
qui i'uivent la confécration , n'ont point cet effet. Les paroles
de JeiusChrifl: opèrent feules d'une manière invifiblc , cette
transfiguration & cette vivification des myfleres en une hoftie
véritable,
parfaite , & fans tache
par le miniflere de quelque
Prêtre que ce foit. Othlon ajoute, que ce facrifice efl utile ,
non-feulement aux fidèles vivans , mais aufTi aux défunts ;
que fuivant la tradition des Pères , on doit mêler l'eau avec
le vin dans le calice , à caufe que l'eau fortit avec le fang
du côté de Jefus-Chrifl. Le Traité des trois queftions efl: fuivi
de quelques obfervations fur le nombre de trois, & les myftc-
res qu'il renferme.
Lettre d'0:li-.
IX. remarque dans fon Livre des tentations (q) , qu'il lon à un ami.
Il

avoit écrit plufieurs Lettres & compofé plufieurs Difcours (r)


dans la vue de fe rendre utile. Nous n'avons de lui qu'une
feule Lettre à un ami qu'il ne nomme point. C'eft une réca-
pitulation du Traité des trois queftions. 11 écrivit cette Let-
tre dans un âge fort avancé , où il ne fe fenroit plus la même
facilité pour écrire, qu'il avoit eue étant moins âgé.
X. Senfible à la dépravation des mœurs de fon fiécle (s) , ^'^''^ ^^^
occalîonnée par la négligence des Paflcurs des Princes , &
tud." &
par leurs mauvais exemples , il s'en plaignoit de vive voix ;
mais perfonne ne l'écoutoit. Il prit donc le parti de mettre
fes plaintes par écrit ; &
d'oppofer aux abus dominans , les
plus faintcs maximes de l'Ecriture , afin d'édifier au moins
quelques-uns de ceux qui liroient fon Ouvrage. Ce qui l'en
faifoit bien efpérer, c'eft qu'il avoit ouï dire , que même de
Ion vivant , plufieurs perfonnes affligées de diverfes calami-
tés , en avoient été délivrées auffi-tôt qu'elles avoient con-
fefle leurs péchés, &
s'en étoient purifiées parla périccnce.
Il intitula cet Ecrit : Cours Jpiritusl , parce qu'il y cnfeignc à

{|J^
Jbid.p. 15-4. 1(0 Uid, p. 258,
(rj Apiid Mabil, in Anxhâ. p, i]?, \
,

t^S6 O T H L O N ,
courir dans la des Commandemens de Dieu. OtLlon le
vob
cite dans le Livre des remarions (f). C'efl; un tiffu de pafTa-
ges de l'Ecriture , particulièrement des Pieaumcs , dont il
tire d'oxellentes inflru£l:ions pour la pratique de la vertu 8c
la fuite des vices. Il fait voir enfuitc , que David
y prédit les
Myfteres de l'Incarnation , de la PaiTion , de la Rciurrcclion
& de l'Afcenfion de notre Seigneur ; qu'il en a marque &
pludeurs circonfiances. Il y rapporte auftl quantité de pafla-
ges des Prophètes , &
des Livres du nouveau Teftament ;
quant aux Livres de Salomon& de Jelu fils de Syrach, il (e
contente d'en confeiller la lecture , & de propofcr les exem-
ples de patience qu'on lit dans le Livre de Job. Il raconte
les diveries tentations dont il avoir été agité dans les com-
niencemens de fa converfion les conlolations qu'il avoir re-
;

çue5 de Dieu dans fes peines , & par quels moyens il avoit
réfifté au tentateur. On voit que de fon tems , l'épreuve de l'eau
chaude éroit encore en ufage pour fe purger d'un crime donc
on étoit accufc ; & que les Clercs fe raloient la barbe («),
Le manufcrit de Saint Emmeramne joint à ce Traité un frag-
ment de l'Hifloire de la tranflation du corps de faint Denis
de France en Allemagne, par l'Empereur Arnoul. Comme
ce fragment elT: d'une écriture du même âge , & que le ma-
nufcrit ne contient que des Ouvrages d'Othlon, c'efl une rai-
fon à l'Editeur de le croire Auteur de cette Hiftoire (x).
/v'rtinemert XI. Il compoia , étant à Fulde, ion Manuel ou AvertifTe-
au'^i*''"^'^'
"^ ment aux Clercs
& aux laïcs. C'efl ce qu'il attefle lui-même
dans le Livre de fes tentations (y). Le but en eft d'appor-
ter quelques remèdes aux maux de l'Eglife (s). On pilloic
les Monaftercs; on renverfoit les lieux faints; les devoirs de
la Religion étoicnt négligés 8c par une fuite de ces défor-
;

drcs , aont les Abbés & les Clercs étoient coupables comme
Jes laïcs , les Moines n'avoicnt plus les chofes nécefTaires à la
vie ; pauvres n'étoicnt point fecourus ,
les les étrangers &
n'avoient pcrfonne pour les recevoir. Les Pafleurs , défcn-
feurs nés des pauvres 8c des veuves , obligés de donner &
leur vie pour leurs brebis , étoient les premiers à les perfécu-^

(») /pitd Mal il. /•. H "


J I
(y) Aptid Mahil. in An.ilefl. /». U 8,
(k) Pj,'. 598. jpj». [i) VEZ.lcm.l.p«s. 40^,(5 f'I.
I
{x) l
as- ',0.. 1
MOINE DE S. EMMERAMNE.Ch. XXXI. 487
fer peu inquiets de leur troupeau , pourvu qu'ils yccuiïcnc
-,

dans les délices & dans l'abondance. Othlon donne à chacun


des avis trcs-falutaires , & les moyens de remplir dans cha-
que état les devoirs d'un parfait Chrétien. Il emploie , pour
les rappcller à eux-mêmes , les fléaux qui le faii'oient ientir
depuis quelques années , l'intempérie de l'air , les froids cxcef-
ilfs , les inondations , les fécherefles extraordinaires , la famine

annoncée par le dérangement des faifons.


XII. JNcus avons déjà remarqué qu Othlon étant encore ^^ZVçp£
dans le fiécle (ja) , y fut attaqué d'une violente maladie, & tudie.

que fe trouvant guéri, il prit le parti de la vie monaftiquc.


Sa fanté s'y fortiha de façon qu'il craignit pour les progrès
dans la vie fpiritucUe. Il demanda à Dieu de l'exercer par
quelque tentation , de peur que roifiveté ne le jettât dans la
tiédeur. L'effet fuivit de près la demande. Les tentations l'ac-
cablèrent au point qu'il le repentit d'en avoir louhaité il rc- :

garJoit fa prière comme indifcrctte & pernicicufe , lorfqu'il


Je ibuvint de ce que dit faint Paul Dieu e(i fidèle ,: il ue & ,.cor,ie. 1-;

l
ermeitra-pas que vousfo: ez tenté au-delà de vos forces ; mais en
permettant la tentation il vous enferafortir avec avantage ^ en
.^

forte que vous la pourrez fupporter. Il avifa aux moyens de


dompter fa chair & voyant que les exercices prefcrits par la
:

Kegle ne fufFiloient point , il y ajouta le travail inléparablc


d'une étude féricufe. Telle fut , comme il nous l'apprend lui-
même {b) , l'occafion du Livre à qui il donna pour titre De :

la DoSirtne jpirituelle. Il eft écrit en vers de diveries mefures:


j.jCnre d'écrire qu'il avoir cultivé étant féculicr ; faifant plus
ce cas de que de la profe. La foi aux myfleres de la
la poéfie
fainte Trinité & de l'Incarnation ; les attributs eflcntiels de
Dieu ; l'inutilité de la foi fans les bonnes œuvres ; la néceffité
de l'amour de Dieu & du prochain ; la manière de prier pour
cbtenir ; les dangers de la lefture des livres profanes , font
la matière des premiers chapitres de ce Livre enfuite il y :

déplore la négligence des Clercs , fur-tout des Pafteurs , isc


leur attachement aux richelTes. Il ne s'épargne pas lui-même
iur fes propres égarcmens ; puis il donne diveries inftrutlion-s
touchant la fobriété , la modeflie dans les habits , la fuite de
la vaine gloire , l'obéiffancc , l'hua.ilité , le mépris des hon-

(d) Pïz. To?7j. j.p. 45Î, (l>)ApudiI,ilil,inAnalt[},p, 117,


,
,

4^8 O T H L O N,
-neurs , & les autres vertus chrétiennes. Il invedive contre
lesavares &
les fuperbes j & finit par un Poëme fur l'endroit
de l'Evangile qui rapporte Naiiïance de Jcfus-Chrift, le
la
meurtre des l'aints Innocens, l'adoration des Mages; par un
< fécond Poëme fur la Nativité du Sauveur ; par une prière à la
fainte Trinité, &
un troifiéme Poème fur le jour du Juge--
ment.
Li'vre des XIII. Le Livre des Proverbes fur commencé dans le Mo-
Prover es,
naftcre de Fulde (c) ; mais il paroît qu'Othlon en a voit prc^
paré les matières avant que de s'y retirer (d). Il prit le def-
fein de cet Ouvrage fur celui de Séneque , qui lui paroiffoit
d'autant plus admirable , que l'Auteur n'ayant eu pour guide
que les lumières de la raifon, n'avoit pas laifTé de donner de
très-beaux préceptes pour la conduite de la vie. Si Séneque,
dit-il ,
qui n'avoit ni la foi ni l'efpérance d'une autre vie
s'cfl:appliqué à corriger les mœurs des autres ; ne dois-je pas
faire uiage des ralens qui m'ont été donnés , pour édifier quel-
ques-uns des fidèles ; moi qui crois que Dieu eft par -tout
& qu'il promet la vie éternelle à ceux qui l'aiment ? Othlon
tire fes proverbes ou courtes fentences , tant des Ecrivains
facrés que des profanes , &
les range félon l'ordre alphabé-
tique , comme a fait Séneque. 11 a eu principalement en vue
l'inftru£lion des jeunes étudians ; &
d'apporter quelque chan-
gement à la méthode ordinaire des Maîtres , qui avoient cou-
tume de lire à leurs écoliers les Fables d'Avienus ou les Sen-
tences de Caton ; ne fnlant point réflexion , qu'il étoit plus
utile de propofer d'abord , tant aux jeunes gens qu'aux plus
âgés , les maximes faintes de la Religion, afin qu'ils apprif-
icnt avec moins de danger les Lettres humaines. Le Livre
d'Ocnlon efl compofé de vingt chapitres , dont le premier
commence par la lettre A. le dernier par la lettre V. La plu-
part des Proverbes font des vcrfets des Pfcaumes ou des autres
Livres de l'Ecriture.
Dircourîfur XIV. Nous apprenons duDifcours fait en l'honneur des
''"
Ap6u"s.
Apôtres y avoit dans l'Eglife un jour dcfliné à la
(<?) , qu'il
mémoire , non-feulement des douze Apôtres , mais aufiï des
Evangéliftes faint Luc & faint Marc ; qu'en d'autres jours oïl

(c ) Pez. Tom. j.pff». 485.


I W Pu. Tom. 3. /-.i^. 558.

faifoit
,

MOINE DE S. EMMERAMNE. Ch. XXXI. 48^


faiibir pour eux des Fêtes particulières ; que celle de laint
Jacques & faint Philippe fe cclébroit le même jour. Par les
frères de Jelus-Chri!! , Othîon entend fes coufins germains
c'eft-à-dire , les cnfans de la l'œur de la fainte Vierge. Il dit
quelque chofc de chaque Apôtre , remarquant que faint Pierre
& laint Paul ont iouticrt le martyre le même jour & dans la
même Ville, c'efl-à- dire , à Rome. Ce qu'il dit de S. André,
paroît tire de l'hiftoire de fes Adcs, qui portent le nom des
Diacres d'Achaïe.
XV. 11 écrivit fon Livre des vifions , depuis celui qui eft ^'^''"^^« '»

intitulé; Delà Dialogue des


DoBrineJpirituelley 8c après le
trois qucflions , (/) , dans le dcflein d'appuyer par des exem-
ples , les vérités qu'il avoit établies dans ces deux Ouvrages,
par les paroles de l'Ecriture. Sous le titre de Vidons il com- ,

prend celles dont Dieu l'a voit favorite ( g- ) , & celles qui étoient
arrivées à d'autres perfonnes, dont quelques-unes vivoicnt en-
core. Incrédule comme beaucoup d'autres , il avoit été long-
tems fans ajouter foi à ce qu'il entcndoit dire de ces fortes
d'événemens. Il en fut convaincu par fa propre expérience &:
par les témoignages de gens dignes de foi. C'clî ce qui le
porta à mettre par écrit ce qu'il en favoit ; prenant Dieu à
témoin de la vérité de celles qu'il avoit eues lui-même. Deux
raifons l'engagèrent à, traiter cette matière ; l'exemple de laint
Grégoire , dans le quatrième Livre de fes Dialogues ; l'uti-
lité publique ; parce qu'il efl: intéreffant pour tous les hom-

mes 5 de Içavoir comment Dieu les vifire , ou en les cliâtiant


pour leurs péchés, ou en les confolant dans leurs afflidions.
Oa trouve dans ce Livre plufieurs points d'hifloire de l'on-
zième fiécle , qu'on chercheroic en vain ailleurs. Il manque
quelque choie dans le récit de la première & de la leconde
vilions ,
défaut du manuicrit d'où elles avoient été ti-
par le

rées. Il ert faitmention dans l'onzième de l'Empereur Henri


îll , comme vivant elle fut donc écrite avant fan 105^),
:

qui efl: celui de fa mort. La dix neuvième efl tirée d'une Lct-
tie de faint Boniface , Arcbcvêc^ue de Mayence ; les trois
fuivanres le liient dans l'HiiToire des Anglois , par le véné-
rable Bede. Othlon les rapporte toutes avec un air de fim-

( f) Ihid. p. 5-4^. t.i'.


f. I 17. apuJ. Mgùil. in Anal.
I

(g) l'iclo-^. in ta. li/îon, ^' lih, ds ttn- \

Toms XX, Qqq


490 ^
O T H L O N;
plicitc. C'en efl: aflcz pour le mettre à couvert de tout foup-^
çon d'impofture ; mais non pour leur donner l'autorité né-
ceflaire.

WolLâng!^^ XVI. Il demeuroit encore à Ratifbone dans le Monaftere-


de S. Emmeramne [h) , lorfque fcs confrères l'engagèrent à
mettre en un meilleur flyle la vie de faint "Wolfgang, Evèque
de cette Ville. Il paroît qu'elle avoir été écrite d'abord par
un étranger, qui, peu au fait du local, n'a voit pas rendu au
jufte les circonftances de la vie du Saint. Oihlon corrigea ce
défaut en recourant aux Mémoires du Moine Arnolfe , qui
avoient été faits fur les lieux , & à ce que l'on fçavoit de fainr
"Wolfgang par tradition. Dom Mabillon a fait imprimer cette
vie dans le recueil des A£les de l'Ordie de Saint Benoît;;
mais fans la Préface d'Orhlon. On la trouve parmi les Anec-
dotes de Dom Bernard Pez ( / ) , qui y a joint une autre vie
du même Evêque , écrite en profe rithmée , \)ar un Moine ano-
nyme j & diverfes autres pièces qui ont rapport à l'Office du:
Saint.
VJe^S.Ni . XVTI. Othlon corrigea auffi la vie de faint Nicolas, Evê--
colas. que de Myre ; & prit loin d'avertir dans un Prologue, des
Evêque
deMyre,&de
quelques au-
chanQ;emcns qu'il y avoit faits On trouve dans les Bibliothé-
^i, a n i r> m• i

très Saints, ques d Allemagne , deux vies de ce Saint , dont 1 une a pour
Auteur un Jean , Diacre , qui fe dit dans la Préface , fervi-
tcur de faint Janvier. Il a divifé cette vie en chapitres , avec
des fommaires en vers à la tète de chacun. La féconde vie
eft la même & commence par les mêmes mots : mais on n'y
lit point de fommaires. On ne fçait laquelle des deux a été-

corrigée par Othlon , ni fi ces fommaires font de lui. il a'ou-


te dans fon Livre des tentations , qu';l écrivit la vie de faint
Alton , avec quelques vers qui avoient rapport au même Saint;
qu'il fit tout cela avant d'aller à Fulde ; Se qu'énnr de retour
à Saint Emmeramne, il compofa la vie de fiint Magne, à la^
prière de Wuil'aum & d'Adalham; le premier, Moine de
Saint Emmeramne ; le fécond Abbé de Sainte Afre, q'jî
,

étoit venu prendre des leçons d'Othlon. Si la vie de faine


Alton publie par l-s Bollandiftcs au neuvième de Février,
&
par Dom M
billon dans les Atfles , efl la mêm^ dont il eft
pa-rlé ici ; il laut dire qu'Othlon n'en eft point l'Auteur , &

{b) Pe2. Tom, 3./flj. 614, (i) ltl<m,ibiik


MOINE DE S. EMMERAMNE. Ch. XXXI. 491
<]u'il en a feulement corrige le ftylc ; puill^u'clle eft viiil'.c-
ment d'un Moine d'Atcon-moncier , qui ecrivoic au com- I

mencement de l'onzième liccle , ielon la remarque de Dom


Mabillon ( /). Nous avons dans Goldafl: ( w; ) , deux Livres
de la vie de faint Magne , par un Théodore Ermite , cor-
rigée par Ermenric , Moine d'Elwangen. Celle qu'en fit
Othlon étoit-elle différente ? C'efl: iur quoi l'on ne peut rien
avancer , parce qu'on ne l'a point rendue publique.
XVIII. Il s'explique nettement fur la vie de faint Boni- ViedeS. Bo-
"'^'*'^'^^'"^'''
facc , Martyr («); dilant que les Moines de Fulde trouvant
celle qu'ils avoient , d'un llyle trop dur trop embarrafTé ,&
le prcfferent fi vivement de la mettre en un flyle plus doux
& plus coulant , qu'il ne put fe rcfuler à leurs inftances fou-
vent réitérées. Othlon la diviia en deux Livres ; & c'efl en
cette forme qu'elle a été publiée par Canilius, par Grozzer ,
par les BoUandiftes & par Dom Mabillon (0). La Préface eft
de la façon d'Othlon on l'y reconnoît aifément, en la compa-
:

rant avec celles qu'il a mifes à la tête des autres vies , auxquel-
les il a fait quelques changemens.
XIX. Browcrus lui a attribué la vie de faint Pyrmin , Cor- ^le defaînt
^'^™"'
évêque (p) ; mais Dom Mabillon a fait voir qu'elle avoir pour
Auteur "W^armann, Moine de Richcnou {q) , & depuis Evê-
que de Confiance. Aufli Othlon qui a fait dans le Livre de
les tentations , un détail exadt de fes Ecrits , n'y dit pas un
mot de la vie de faint Pyrmin. Il y fait mention d'un Dif-
cours qui avoit pour titre Comment on peut lire dam les cho~
:

fes viftbles (r). Voici quelle en fut l'occafion. En retournant


de Fulde à Saint Emmeramne , il s'arrêta à Amerbach :
l'Abbé qui l'y voyoit avec plaifir , s'entretenoit fouvent avec
lui fur des queflions de l'Ecriture ; fatisfait ordinairement de
fes réponfcs. La Fête de Pâques approchant , l'Abbé lui pro-
pofa d'édifier le peuple en cette folemnité par quelque Dif-
cours. Othlon s'en défendit d'abord fur fon peu d'ufage de
parler en public : mais réfléchiffant fur la propofition de l'Ab-

(/) Maeiiion. Tom. i, Ailor. p. (p) BroveruS. in SyJeriius illupriiim


' {m] GoLDAST. rernm Al-tmunnicarum, virortim,
tom. I. part, z, p. 190. (9)MaBILL. TflOT. Ailor.p,
(^n)Apnd Mabitlo» y in Analid. pag, (r) Afitd Miabilkn, m Analsil, fig,
nS. 118,
( 0^ JVÎABILLON ^ Tom. Ailor, pag.

Qqqij
,

4P2 O T H L O N
bé ,
qu'il regardoit comme un ordre de fa part , il compofa'
un Difcours^, prenant pour texte ces paroles du Pfeaume
treizième Le Seigneur regarde du Ciel fur les enfans des hoTti'
:

mes. Il les expliqua par diverfes fimilitudes , qu'il croyoit ca-


pables d'édifier les auditeurs. Ce Difcours n'a pas été mis fous
la preffe. Othlon fait mention dans le même Livre, de deux
Prières qu'il avoit compofécs pour l'édification de ceux à qui
ilpouvoit avoir été une occalion de chute par fes mauvais-
exemples (5). Dom Pez ne doute pas que ce ne ioit celle
qu'il a fait imprimer en langues Latine & Tudefque , dans
le premier Tome de fes Anecdotes ( r ) elle efl intitulée t :

Oraijon d'un certain pécheur. 11 eft vilible qu'elle efl: d'un Moi-
ne de Saint Emmeramne , & qu'il l'écrivit depuis l'incendie
de ce Monaflere, c'e(l-à-dire, après l'an 1062. Othlon y in-
voque les noms d'un grand nombre de Saints. Il y prie pour
le Pape , pour l'Empereur , pour fa Congrégation ,. & en gé-
néral pour les vivans & pour les morts.

rH*fbir"de^'îa
^^' ^^^ Ecrits d'Othlon , dont nous venons de parler ,
trânfi.uion de font rappcllés dans celui de les tentations: d'où il eft naturel

cJ-g conclure que c'efl le dernier de tous. Parmi les Ouvrages


Ski^e^iis.

qu'il tranfcrivit , on remarque ceux qui portent le nom de-


laine Denis l'Aréopagite. On conjcfturc qu'il ne les préféra
à d'autres ( « ) , que par une attention pour ce Saint , donc
on croyoit avoir les reliques à Saint Emmeramne. On tire
une pareille conféquence de ce que dans l'Oraifon que nous
venons de citer , il invoque en particulier faint Denis mais :

©n convient en même-tems , que les Moines de Saint Em-


meramne l'invoquoient entre leurs Patrons , dès avant la"

tranflation prétendue de fes reliques dans leur Monaftere. On


ne peut donc rien conclure de l'Oraifon d'Oihlon , ni de
fon attention à copier les Œuvres de ce célèbre Martyr (x) y
puifqu'il en a copié un grand nombre d'autres , qui n'avoienc
pas tant de réputation que celles de faint Denis. Tout ce
qu'on peut donc alléguer pour conflater la tranflation de fes-
reliques à Racifbone , fe réduit à ce qu'on en lit dans le frag-
ment cité plus haut , &
qu'on ne prouve appartenir à Otii-

(j) Mabrl. in Analt£{. p. i rp. i8. 19.


(t) ftz. Tum, i. A'ifcJ. part. 7. p. 417 (a) Âpad UMllon , in Jtialtih. fag^
II y.
'
i») Idem. DiJJeri. i/a^oj. in tom,
i-g^g^
MOINEDES.EMMERAMNE.Ch.XXXL 49^
Ion que parce qu'il fe trouve dans les recueils manuicrits de
,

fes Ouvrages: ce qui ne forme pas une preuve fans réplique.


Combien de Collections manufcrites des Ouvrages de faint
Auguftin , de faine Ambroiie , de faint Chryfoftome , mêlées
d'Kcrits qui leur font fuppofés ? Si Othlon avoit écrit l'Hi-
floire de la tranflation des reliques de faint Denis à Rati-
fbone, auroit-il négligé ou oublié d'en parler, en faifant le
dénombrement de les propres Ouvrages î Ce devoit être un
de les premiers Ecrits , lelon l'ordre des tems ; puifqu'on rap-
porte à l'an 1052 , la Bulle de Léon IX , qui adjuge ces reli-
ques à l'Abbaye de Saint Emmeramne ; & un des plus inté-
reflTans , puifqu'il aflliroit à ce monaftere un tréfor fi confidé-
rable néanmoins il n'en dit pas un mot. On peut donc re-
:

garder l'Hilloire de la tranflation de faint Denis , comme


' l'Ouvrage du même impofteur , qui a fabrique une Bulle fous
le nom de Léon IX, & dont on a prouvé ailleurs la fuppofi-
tion()/). Elle eil datée du mois d'Odobre de l'an 1052, & por-
te que ce faint Pape ayant examiné fur les lieux , & en pré-
lence des Ambalîadeurs du Roi des François , les raifons
que les Moines de Saint Emmeramne allcguoient pour mon-
trer que le corps de faint Denis avoit été transféré dans leur
Egliie par l'Empereur Arnoul, les avoit trouvées bonnes, &
ordonné en conféquence qu'ils feroient la Fête de cette tran-
flation. Les Annales de Saxe rapportent , que pendant lefé-
jour de Léon IX à Ratilbone , on découvrit un certain corps
dans l'Eglile de Saint Emmeramne, & que l'on produiiit au
Pape que ques titres pour lui perluadcr que c'étoit le corps de
laint Denis. Elles n'en difcnt pas davantage: mus c'en fut
aflcz pour engager le Roi Henri à aiTemblcr en l'Abbaye de
Saint Denis, les Evêques, les Abbés & les grands Seigneurs
de fes Etats en 1053. ^^ ouvrit la châfTe où ctoient ren-
fermét's les reliques du Martyr ( s ) : on les montra ,iu peu-
ple , & elles furent expofées pendant quinze jours fur l'au-
tel.
XXI. Othlon fut un de ces hommes utiles , toujours oc- J"ge"ie"t «les

cupés pour le bien public. Né avec d'heurcufes difpolîtionsiQn"" '''*^*^'

pour les Lettres , il les aima & apprit aux autres à les culci-

tiabil, Lib, 60 da J^tmaies , tiitm, zi, ^. 1 (x,) MaBil. Ibid.p. ;38,


494 OTHLON, MOINE DES. EMMER.Ch. XXXI.
ver , foie par fes par Ion exemple , loit en leur
Leçons , foit
fourniflant les bons livres en leur enfcignant à fe for-
, loit

mer eux-mêmes des Bibliothèques , en tranfcrivant les meiU


leurs livres. Il avoît pour maxime ( « ) , qu'on doit dans des
înftrudions publiques, ufer de termes clairs intelligibles à &
tout le monde : maxime fage , qu'il a fuivie dans fes Ecrits.
Le flyle en eft facile , fimple , net , fans être ni trop diffus
ni trop précis. Communément bon , foit en profe ou en vers,
Il eft à la portée des moins intelligcns. Il eft pur dans fa mo-

rale , folide dans fes inftrudions , qu'il égaie de tems en tems


par des comparaifons bien choifies , exact dans le dogme.
Accoutumé au langage des Pères , il rejette les explications
que la Théologie fcholaftique commençoit à introduire ; les

regardant comme plus capables d'obfcurcir les points capi-


taux de la Religion , que de les éclaircir. Zélé pour le bon
ordre , il en infpire l'amour avec douceur. Ses invedives con-
tre le vice , n'ont rien d'amer il emprunte ordinairement
:

les paroles de l'Ecriture , pour ramener les méchans au de-


voir. On peut à tout âge , lire avec fruit fes Proverbes c'eft :

un recueil très intéreffant pour la formation des mœurs. Nous


n'avons les Ecrits d'Othlon que dans les Anecdotes de Dom
Bernard Pez , imprimées à Auibourg en 1 7 1 1 , in-fol. On n'y
irt point le Livre des tentations , parce que Dom Mabillon l'a^

voit déjà fait imprimer parmi fes Analedes.

(-») QtPION, lib,dtÇ»r[» ffiritKêii , çaf.i^.f. 3}^^


ALEXANDRE II, PAPE. C«. XXXÎI. 495

j^'^i^i^®®®®®®®*^®!® ®®®®®®®©®®®®®

ÇHAPIT RE XXXIL
Alexandre II, Pape,

I. JL La more du Pape Nicolas II, arrivée au mois de Alexandre ir,


gfn^ 1061 , les Romains fe trouvèrent par- Papsww***
Juin de l'an
tagca lur le choix de fon fuccefTeur (b). Ils jetterent d'abord
les yeux fur Etienne , Prêtre Cardinal ; mais la Cour Impé-
riale ne lui ayant pas été favorable , ils élurent Anfelme , E-
vêque de Lucques , qui prit le nom d'Alexandre II. Il étoic
Milanois ion couronnement ne fe fit que le trentième de
:

Septembre de l.i même année ; en forte que le Saint Siège


vaqua environ trois mois. Comme cette életlion s'étoit faite
fansleconfencement duRoi Henri & de l'Impératrice Agnès
fa mère, Guibert de Parme, Chancelier du Royaume d'I-
talie, excita les Evêques de Lombardie à ne point recon-
noître Alexandre , & à fe choilir un Pape qui leur fût dé-
voué , c'eft-à-dire , qui eût de la condefccndance pour leurs
foiblelTes , étant la plupart (c), ou fimoniaques ou concubi-
naires. Ils fuivirenc ce confeil , & envoyèrent des Députés à

la Cour. L'Impératrice oflfenfée qu'on eût procédé à l'élec-


tion fans fon confentement , la regarda comme nulle ; & de
l'avis de fon Confeil , elle fit élire Cadalus ou Cadaloiis , E-
vêquc de Parme , qui fut furnommé Honorius II. Son élec-
tion fe fie le 28 d'0£lobre , par deux Evêques , l'un & l'autre
concubinaires publics , celui de Verceil & celui de Plaifance.
Cadaloûs étoit lui-même concubinaire , fimoniaque & excom-
munié (d).
IL Ayant amaffé beaucoup d'argent & de troupes (e) , il CaJaloiîî j

fe préfenta devant Rome, le 14 d'Avril 1062. Il eut de l'a- '^""P^P^*

vanrage au premier combat : mais Godefroi , Duc de Tof-

(b) HermAn. Centrai. Continuât. ttS \ (i) Pftr. Damian. lih. i. £/'//?. 10.
«n. ro I. I ^ n
Vil. Alexand, Tom. 6. Conc.p, 13.
G'-STA. Potttif, Riin, apud Baron'
( c ) I (f) Gesta. Pomif. afui Baron, ^viti
*â au. 1061. \Q6\t I
Alexand, tom, p, Conf,
,
,

4^<> ALEXANDRE II, PAPE. Ch.XXXIL


cane , étant accouru au fecours des Romuns , Cadalous fut
pris , & obtint avec beaucoup de peine , la penniflion de re-
tourner à Parme. Il ne renonça pas pour cela à fcs préten-
tions fur la Papauté. La divine Providence pourvût à fextin-
dion de ce fchifme , par le miniftere d'Annon , Archevêque
de Cologne. Chargé du gouvernement du jeune Roi Henri
& de Tadminillration de fes Etats , il fit un voyage en Ita-
lie, d'où , après avoir ôté à Guibert de Parme , la charge de
Chancelier , il revint en Allemagne , aflémbla un Concile 4
Oibor en Saxe , y fit dépofer Cadalous en préfence du Roi
&approuver Téle^ion d'Alexandre II.
Alexandre IH. £_,e Décret de ce Concile ne rebuta point Cadaloijs,
à"" ^^ trouva le moyen de mettre dans fes intérêts le Duc de
Condie"^
IWantoue en Tofcane , qui lui avoit d'abord été contraire. Pierre Damien
îo64oui».^7-en écrivit à. ce Prince
(/), le conjurant de revenir à l'obéif-
fance d'Alexandre. Il en écrivit aufli au Roi Henri , An- &
non de Cologne (^). L'Archevêque fe rendit aufTi-tôt à
Rome ; &
ayant conféré avec le Pape Alexandre , il l'enga-
gea à convoquer un Concile pour finir le fchifme. II fe tint à
Mantoue. Le Pape y alTifta avec les Cardinaux , l'Archevê-
que Annon , &
tous les Evêques de Lombardie. Cadalous
fut le feul qui rcfufa d'y venir , quoique Annon lui eût or-
donné de s'y trouver, Alexandre s'y purgea par ferment dii
crime de ilmonie dont il étoit' acculé ; & prouva fi bien la va-
lidité de fon élection , qu'elle fut unanimement confirmée. Ca-r
daloiis fut au contraire condamné tout d'une voix. Il ne fe
rendit pas à ce fécond Décret : &
ayant appris le départ de
l'Archevêque de Cologne , il rentra fecrétement dans Rome,
pu , à force d'argent &
de foldats , il s'empara de l'Egliié de
Saint Pierre : contraint d'en fortir , il fe retira au Château-
Saint- Ange , où il fe maintint pendant deux ans. Il mouruç
quelque tems après, ayant demandé obtenu le pardon d'A- &
lexandre (h), Sigebcrt , Auteur contemporain , rapporte ce
Concile à l'an 1067 5 ^^ 'l'^oi il ^^ ^"^i^i P'^^' ''^ ^^^^ ï'^'^g' j qui
s'appuie aulfi de l'autorité de Landujlphe dans l'Hilloirc de
Milan.
Autres Conci- XV. Lc Papc paifiblc poffeffcur de fon Siège , s'appliqua 9
,
les fous Ale-
xandre II. Sa __________ _^__^______ „___,__^__ __________ ^______ '

port en 1072. .
''

(f) l'trn. D/MJAN. m. 7. Efip. ]0. j


(n) hltm, lilf, j. Epift. 6.

terra' nçr
,

ALEXANDRE IT, PAPE. Ch. XXXII. '4^7


terminer divcrfes difputcs fur des macicrcs ecclcliafliqucs ;
celle entre autres qui concernoit les dégrés de parencé d-ns
lefquels le mariage croit prohibé , que Ton nommoit l'hé- &
réfie des inceflueux. Il tint à cet effet deux Conciles vers l'an

1065 (0* Avec le fecours de Godcfroi , Duc de Tolcane ,

il délivra l'Eglife Romaine de l'incurfion des Normans ( /) ,


qui avoicnt déjà pénétré jufqu a la Ville d'Aquin. Guillau-

me , Duc de Normandie , s'étant mis en devoir de maintenir


l'es , après la mort du Roi Edouard
droits fur l'Angleterre ,

le Pape envoya un étendart pour marque de la protection


lui

de faint Pierre. Ce Prince gagna la bataille contre Harold


fon compétiteur, & fut enfuite couronne Roi par ^Aldrcdc,
Archevêque d'Yorc. Alexandre accorda à Vratiflas , Duc de
Bohême , l'ufige de la mitre ce qui jufqucs-là n'avoir été -,

accordé à aucun Prince laïc. Il empêcha le Roi Henri de ré-


pudier la Reine Berchefon époufc. On verra dans l'Analyfe
de fes Lettres , 'es autres circonftances de fon Pontificat
qui fut d'onze ans , fix mois & \ingt-un jours , érant mort
à Rome le 21 d'Avril 1073. Ceux qui mettent fa mort au
premier de Mai , la confondent avec le jour de fa fépul-
ture.
V. Sa Lettre aux Milanois fes compatriotes, cfl une ex- Ses Lettres,:

horîation à la pratique des vertus chrétiennes (m). Il avoic


fur-tout à cœur la chafteté des Clercs, & fouhaitoit ardem-
ment de voir l'incontinence bannie du Clergé fous fon Pon-
tificat. nom du Pape Nicolas fe trou-
C'eù. par erreur que le
ve à 'a de cette Lettre (/z) , dans la CoUeâion des Con-
tête
ciles. Nicolas étoit ré dans le Rtyaume de Bourgogne , &
non à Milan. Hartold , Roi de Norvège , fe déclatoit hau-
tement contre les Chrétiens il en faifoit mourir plufieurs par
:

les fupplices , & Adalberr, Arche-


abattoir leurs Eglifcs.
vêque de Brème , lui en fit des reproches , & par Lettres &
par Députés. 11 le plaignoit encore, que ce Prince tournoie
au profit des laïcs , les oblations des Fidèles; qu'il faifoit ve-
nir des Evêqucs d'Angleterre & de France, pour les Ordi-
nations , qui lui apparrcnoient comme Légat du Saint Siège.
Hartold n'eut aucun égard à ces plaintes. L'Archevêque les

(j^Petr. Damian. O^k/i. I î. f. Z9. I


(i>i)Tom. 0. Cofic, p. J li'j.

(/) Tom. 9. Ci«f, /). Il 14. 1 («_) ffifl» I.

Tome XX. . R rr
4i;8 ALEXANDRE II, PAPE. Ch. XXXIT.
ayant portées à Alexandre II , ce Pape écrivit à Harrold en-
ces termes (o) : Parce que vous ères encore peu inllruit dans
la foi &
dans la difcipline eccléfiaftique , nous devrions , nous
à qui le gouvernement de toute TEglife eft commis , vous
donner de fréquens avertiflemens mais ne pouvant le faire :

par nous-mêmes , à caufe de la diftance des lieux , nous en


avons charge Adalbert Archevêque de Brème , notre Vi-
,

caire & notre Légat. Il s'eft plaint à nous, que les Evêqucs
de votre Province , ou ne font point facrés, ou qu'ils fe font
facrer pour de l'argent en Angleterre ou en France. C'eft
pourquoi , par l'autorité de faint Pierre & faint Paul nous ,

vous admoneflons vous & vos Evêqucs , de lui rendre la même


obéidance que vous devezau Siège Apoflolique.
VI. Le même Archevêque encourut l'indignation de Sué-
non, Roi de Dannemarc (/>) , pour l'avoir menacé d'excom-
munication , s'il ne fe féparoit de fa parente , qu'il avoit épou-
féc contre les règles de l'Eglife. Le Pape en écrivit lui-même
à ce Prince ; &
cette Lettre eut fon effet. Il ne nous en reflc
qu'un friî^ment , par lequel on voit que les Rois de Danne-
marc payoicnt un cens annuel au Saint Siège ; qu'ils dé-
voient l'envoyer eux-mêmes à Rome, & ne pas fc conten-
ter de le mettre fur l'autel , à la manière des oft'randes ordi-
naires.
VII. Alexandre II, en envoyant le Pallium à Pierre , Ar-
chevêque de Dalmatie & de Sclavonie {q) , lui fit un détail
de toutes les Eglifcs qu'il foumettoit à fa Jurifdidion , & le
chargea auffi du foin des Monaftercs, tant des Latins que des
Grecs, c'cft-à-dire, desSclaves. Il y joignit la lifle des Fê-
tes où il pourrort ufer du Pallium dans la célébration des My-
fleres, & les inflruftions ncccffaires pour s'acquitter digne-
ment des fondions de ion minillere. On remarque que le
fccau de cette Lettre portoit le nom d'Alexandre il, 8c au-
teur cette inlcription Dieu m'a èhvé par la force, de fon bras,-
:

Elle eft datée en quelques exemplaires , du quinzième des


calendes d'Avril, iidittion douzième , c'cft-a-dire , du 18
de Mars 1074 mais <1 cft certain que le Pape ètoit mort au
:

mois d'Avril, de Tannée précédente ainli il y a faute dans cette :

date.

(0) ïyi\). 1. •;-. I?.


J

Q) ^ P'fl- 'iP' 1 '*• C5 AvK-s/i.l'l'. 3. 1 {ijj rpif, 4./». I ny.


ALEXANDRE II, PAPE. Ch. XXXII. 4;^<?
VllI. En 1063, Alexandre II tint un Concile à Rome, lettre Syna-
aflîftc de plus de cent Evêques (r). Quelques Moines y ac- ^^ 'f ie« -i
' i^s

'''^""'
cuferent publiquement d'hJrciie Se de (imonie Pierre, Eve-
que de Florence ( j) , s'ofFrant de prouver Tune & l'autre par
l'épreuve du feu. Le Pape rejerta leur propoiition , & le con-
tenta de renouveller les Canons faits contre les fimoniaques
dans le Concile de Rome de l'an 1055) , fous le Pape Nico-
las 11. Il y en ajouta quelques autres fur divers fujets. Ils font
en tout au nombre de douze , adrefies en général à tous les
Evoques Catholiques , par une Lettre circulaire. Le premier
veut qu'un dépoie fans miicricorde , tous ceux qui ont été
ordonnés par fimonie. Le fécond permet par indulgence , à
ceux qui ont reçu les Ordres d'un Evéque fimoniaque , àe
continuer dans leurs fondions , pourvu qu'ils aient été or-
donnes gratuitement , & qu'ils ne ioicnt coupables d'aucun
des péchés qui excluent des Ordres félon les Canons mais :

cette indulgence ne devoit pas tirer à conféquence pour l'a-


venir Si on n'en ufoit alors , que parce qu'il n'étoit point
;

aifé de trouver des Evêques exemts de la tache de Hmonie.


Il efl défendu par le troiîléme , d'entendre la Méfie d'un Prê-
tre qu'on lait avoir une concubine ; & à tout Prêtre & Dia-
cre d'avoir des concubines , fous peine d'être interdits de
leurs fondions. Le quatrième porte , que les Prêtres les &
Diacres ordonnés pour certaines Eglifcs , auront leur demeu-
re dans le voilinage ; qu'ils mangeront & dormiront cnfem-
ble , comme il convient à des Clercs religieux , & auront en
commun tout ce qui leur viendra de l'Eglife. On croit voir
dans ce Canon , qui avoit déjà été fait dans le Concile de
l'an 1055? , l'origine des Chanoines Réguliers. 11 eu. dit dans
le cinquième , que les dixmes , les prémices 6c les oblations
des laïcs , feront à la diipofition de l'Evêque. Dans le lixié-
nie , que l'on ne fe fera point pourvoir d'une Eglife par un
laïc, ni gratuitement ni par argent. Dans le feptiémc, qu'un
Prêtre ne tiendra pas cnicmble deux Eglifcs. Dans le neu-
vième, que l'on ne contradera point de maiiage jufqu'aufep-
ticme degré de parenté. Dans le dixième , qu"un laïc qui aura
une concubine avec fa femme , fera privé de la communion
de l'Eglife. Il eft défendu par l'onzième , de prendre l'ha-

(0 ^i"'^- î' r- " i^- "7f. (il Viia lan. GnalLert. e.ip. 6x.
Rrrij
500 ALEXANDRE II, PAPE. Ch. XXXII;
bit monailique dans rcfpérance d'être Abbé par le dou-
: &
zième , d'élever un laïc à aucun degré du Miniîtere , qu'il
n'ait auparavant change d'habit , & vécu louablemcnt parmi
les Clercs.
Lettre auIX. Il refte un fragment d'une Conftitution d'Alexandre
(r), adreflee au Clergé & au peuple de Florence ; dans
KntT^^'^'°^^
laquelle il efl dit , que conformément au Décret du Concile
de Calcédoine & à la règle de Saint Benoît , les Moines de-
meureront dans leur Cloître fans fe répandre dans les Villa-
ges , ni dans les Villes ou Châteaux", & que Ci quelqu'un veut
prendre leur habit pour le falut de ion ame , il pourra les aller
confulter dans leurs Monafteres. On conjefture que les Moi-
nes qui vinrent accufer Pierre de Florence, donnèrent lieu à
cette Conftirution.
LettresàG.r- X, y a dans la CoUeftion des Conciles (u) , quatorze
Il
vais Archevc-
j du même Pape à Gervais , Archevêque de Reims,
|.(^

Prélat dune grande réputation. Alexandre, en 1 mtormant


de l'entrepriic téméraire de l'Antipape Cadalous , le congra-
tula de ion zèle à extirper la fimonie , &
lui commit à l'Ar- &
chevêque de Sens, le Jugement de l'Evcque d'Orlérins, ac-
cufé de ce crime. Il lui ordonna par la même Lettre, de chaf-
fer l'Abbé de Saint Médard de Soiffons , excommunié depuis
long-tems ; d'en mettre un autre à fa place qui en fût digne ;
& de faire à l'égard d'Amalric , ce qu'il lui avoir marqué.
L'Eglife deP.eims fouffroit beaucoup de la pait de deux de
fcs Chanoines , Manaiïc & Amalric (.r). Le Pape voulant
procéder contre eux félon les Canons , leur ordonna par écrit
de réparer les torts, ou de venir rendre compte de leur con-
duite au Concile qu'il devoit aflcmb'er à Rome , après la Fête
de Pâques. Il y invita auffi l'Archevêque: aucune des parties
ne comparut. Alexandre écrivit donc à Gervais de terminer
à l'amiable (7) jle différend qu'il avoir avec ces deux Chanoi-
nes , lous peine de perdre fon amitié. Sur les plaintes d'un
Abbé qu'on avoit dépouillé de la dignité , & des Moines de
Saint Picire de Gand , dont on avoit ulurpé les biens , &
qu'on avoir chaffés de leur Monaflcre, il chargea l'Archevê-
que de Reims (2) , de pcurfuivre les ufurpateurs par les voies

{«) rpift. 6. p. mît, I


(g Epifi. ij.
(x) Efifi. Il ^ 1}. I
ALEXANDRE ÎI, PAPE. Ch. XXXIÏ. 501
Canoniques , & enfin par les cenfures. Voyant que l'on con-
tinuoit à moleftcr l'Eglifede Reims , il promit de la défen-
dre , &
d'envoyer à cet effet un Légat {a). Il donna com-
miffion à Gervais d'examiner avec Elinard (^) , Evêque de
Laon , l'affaire del'Abbeffe de Saint Jean en cette Ville, que
l'on avoit dépoffcdée fans aucune formalité j avec ordre de la
rétablir dans le régime de fon Monaflere , avant d'entamer
l'infornaiion.
XL Par une autre Lettre (c ) , il défendit à cet Archevê-
que de conférer Joffelin , Evêque de Soiffons , parce qu'il
croit convaincu de fimonie. Le Pape avoit lui-même averti
TEvêque d'Amiens , de ne plus maltraiter l'Abbé de Corbie.
L'Evêque , au lieu de fe corriger , continua à vexer l'Abbé :
ce qui obligea Alexandre II à commettre Gervais pour en-
tendre les deux parties ; 8c en cas qu'il ne pût terminer leur
différend , d'en renvoyer le Jugement au Saint Siège. Les
privilèges accordés à l'Abbaye de Corbie , par Bertefride ,
Evêque d'Amiens, dans un Concile de Paris, '& confirmés
dans celui de Reims, par le Pape Léon IX , failbient le fujet
de la conteftation. Guy , alors Evêque d'Amiens , ne voulant
y avoir aucun égard , cira à fon Synode Foulques , Abbé de
Corbie , avec le Moine Baudouin. L'Abbé s'en cxcufa mode-
ftement {d). Guy l'excommunia. Foulques fe pourvue à Rome
par une Lettre au Pape Alexandre H , vers l'an 1062 , dans
laquelle il prouvoit que fon Abbaye avoit joui pendant près
de cinq cens ans des privilèges qu'on lui conreftoit ; & racon-
toir toute la iuite de cette conteftation. Le Pape en écrivit à
Guy d'Amiens , le reprit vivement d'avoir exigé de l'argent
de Foulques , pour lui conferver l'ufage de fes privilèges (e) ;
(fe lui déclara
, que
s'il continuoit à inquiéter cet Abbé& fon

Monaftcre, il lui permettroit de s'adrefTer à l'Archevêque de


Reims, ou à quel autre Evêque il trouveroit à propos, pour
le fainr Chrême &
les Ordinations. Il menaça même l'Evêquc
d'A.miens, d'interdit &
d'excommunication , s'il refufoit de
vivre en paix avec l'Abbé de Corbie. Le Pape écrivit en mê-
me-tems à Gervais , une Lettre fur le même fujet , rapportée

(a)'Epifl. {(.. \ AIabilion


(^)MASltLOli. m, 61. Ât;f!.il.»um, 110
{b)lfift. 17. J(d)
(0 ^t'fi' 18 (J 19;
502 ALEXANDRE ï I , P APE. Ch. XXXïf.
dans les Annales de Dom Mabilion , dans laquelle il le con-
flitue défenfeur de l'Abbaye de Corbie , que le Saint Siège
avoir prife fous fa protedion. Cette conteftation dura encore
quelque tems mais enfin l'Evêque
: &
l'Abbé s'accommodèrent
à condition que Guy jouiroit pendant fa vie des revenus d'une
méfairie du Monaftere.
XII. Il y eut un différend de même nature (/) , entre l'E-
vcquc de Paris & l'Abbé de Saint Denis les deux parties :

ayant produit leurs moyens de défenfe , à un Concile de


Rome, il fut décidé que l'Abbé de Saint Denis , félon l:s
privilèges accordés par les Evêques & les Rois à ce Mona-
flere , pourroit demander à l'Archevêque de Reims ou à quel-
qu'un de fes Suffragans le faint Chrême , l'huile & tout ce
qui dépend du miniflere Epifcopal. Gervais reçut à ce fujet
une Lettre du Pape. Il en reçut une autre , pour mettre à exé-
tution la fentence d'excommunication portée par le Légat
Pierre Damien , contre Reginald , qui avoit ufurpé l'Abbaye
de Saint Médard à Soiffons (g). Ce fut fans doute encore
en conféquence d'un ordre du Siège Apoflolique , qui! dc'-
pofa l'Eveque de Chartres , ordonné par fimonie. Le Pape
le remercia du zele qu'il avoit fait paroître en cette occa-
fion (.h)y & le pria d'en ufcr de même à l'égard de l'Evêque
d'Orléans , dont l'éle£tion s'ctoit faite par fimonie ; & de fé-
conder dans la dépofition de cet intrus , l'Archevêque de
Sens. Alexandre II les commit l'un & l'autre avec leurs Suf-
fragans {(?) , pour examiner la cauié du divorce entre le Com-
te Radulfe & fa femme ; & ordonner là-deffus ce qu'il ccn-
viendroir , fe refervant de confirmer leur fentence. La der-
nière Lettre à Gervais ( /) , cfl: à l'occafion des reliques de S,
Menne , que l'Evêque deChâlons-fur-Marne avoit enlevées
de l'Eglife dédiée fous l'invocation de ce Saint. Le Pape or-
donne de les y rapporter.
Conftitutîons XIII. A
Milan , la fimonie Se l'incontinence étoient les
pour i;Egiife yiccs dominans du Clergé (m). Le Diacre Arialde, touché
e Mvlan,
^^ ^^^ défordres, les combattoit avec ^ele, fécondé d'Her-
lembaud fon ami. Guy , ArchevcqujS de [cette Ville , le lie

(/) rpip. 10. I (,} Fpni. 24.


Cli) ïpil'. 11. -
(0 Epifl. is.
j
ALEXAND^RE II, PAPE. Ch. XXXIT. 503
arrêter -, & fa niccc craignant qu ne s'échappât le
il , fie mal-
facrer par deux Clercs coupables des mêmes crimes que l'Ar-
ehevêouc. Le martyre d'Arialde arriva le 27 de Juin \o66»
L'année fuivante , le Pape {Alexandre II voulant elTayer de
remédier aux maux de cette Eglifc , envoya à Milan deux
Légats , Mainard, Cardinal -Evêque de Sainte Rufinc , &
Jean, Prêtre-Cardinal. Ils y firent divers réglemens contre
les Clercs fimoniaques &
concubinaircs :la date cft du pre-
mier jour d'Août 1067 5 ^^ voici la fubflance. Dans tout le
Diocèfe aucun Abbé ne recevra un Moine pour un prix donc
il foit convenu : un Chanoine fera reçu gratuitement : on ne

conviendra d'aucune récompenfc pour les ordinations , les


conlécrations d'Eglife , la diftribution du faint chrême. Le
Prêtre, le Diacre , le Soûdiacre qui entretiendra publique-
ment une concubine, fera privé de toute fonction & de tout
bénéfice ecclcliaflique :mais celui qui , fans l'entretenir chez
lui , fera tombé par fragilité , iera , en étant convaincu , fuf-
pcndu feulement de fes fonctions jufqu'à ce qu'il ait fait péni-
tence de fa faute. Défenfc de condamner un Clerc fur un fim.^
pie foupçon ; il doit être convaincu , ou par fa confeflion ou
par témoins. Pour éviter tout foupçon, ils ne mangeront plus
avec les femmes qu'ils ont quittées , & ne leur parleront qu'en
préicnce de deux ou trois témoins irréprochables autant que
;

faire le pourra,les Clercs demeureront près des Eglifes en ca5:

de délit de leur part , ils feront jugés , non par des laïcs , mais
par des Eccléfiaftiqucs.
XIV. C'eft pourquoi les laïcs («) , qui , dans leur Seigneu-
rie , auront des Clercs coupables d'impureté , les déféreront
à l'Evêque &
aux Chanoines de l'Eglife donc ils dépendent :
t s'ils interdifent les fondions aux coupables , les laïcs feronc

exécuter ce Jugement. Si l'Archevêque &


les Chanoines né-
gligent l'avis du laïc , il empêchera que dans les lieux de fori
domaine , le Clerc coupable falTe fes fondions ou tienne au-
cun Bénéfice : mais le laïc ne pourra s'en approprier les re-
venus ; i s demeureront à la diipofition de l'Eglife. On dé-
fend aux laïcs de faire aucune violence à un Clerc même
coupable , foit dans fa perfonne , foit dans fes biens, fi ce
n'efl à l'égard de fon Bénéfice eccléfiafiique. Ils ne pourront

C^) ^"Z
,,

504 ALEXANDRE II, P AP E. Ch. XXXII.


non plus rien exiger d'un Clerc , pour le faire promouvoir à
quelque degré du laint Miniftere. L'Archevêque fera une ou
deux fois l'an la vifite des Paroiffes de fon Diocèfe tous : &
foit Clercs foit laïcs, luiobéiront en ce qui regarde la Reli-
gion. aura le
Il pouvoir de juger &
de punir , luivant les Ca-
nons , Clercs de fa dépendance , tant dans la Ville qu'au
les
dehors. Plufieurs , tant Clercs que laïcs , s'écoient emportes
contre les fimoniaques &
les concubinaires , juiqu'à les frap-

per &
piller leurs biens. Les Légats défendent ces violences
& veulent qu'on fe contente de les dénoncer à i'Archevêquii
& aux Chanoines , & qu'on les rappelle au devoir par l'e-
xemple d'une bonne vie. Ils défendent encore toute pour-
fuite pour les dommages caufés à cette occafion , ou pour les
injures reçues. Pour donner vigueur à leurs réglemens
or- , ils

donnèrent une amende pécuniaire contre les contrevenans;


cent livres de deniers , Ci c'eft l'Archevêque ; vingt livres pour
les Capitaines ; dix pour un vafTal ; cinq pour un Négociant :
le tout au profit de TEglife Métropolitaine.
Lettre aux
xV. On voit par le fragment d'une Lettre d'Alexandre
Rof^^ç'jjaj" Il , aux Evêqucs & au Roi de Dalmatie (o) , que le concubi-
matie. nage des Clercs n'avoit pas encore été réprimé dans cet Etat,
S'il arrive dans la fuite, dit ce Pape , qu'un Evcque , qu'un

Prêtre ou un Diacre prenne une femme , ou retienne celle


qu'il avoit déjà, il fera déchu de fon grade , jufqu'à ce qu'il
ait fatisfait , n'affiftera point au chœur , n'aura aucune &
portion dans les biens de î'Eglife. Par une féconde Lettre (p),
Alexandre II leur notifia les Confiitutions faites à Milan par
fes deux Légats.
Lettre aux XVI. En D^nnemarc , l'Evêquede Pari, nommé Edbert,
s'étoit rendu coupable d'un grand nombre de crimes (q)»
Darmem^*
Adalbert , Archevêque de Brème , Légat du Pape , le cira
à fon Concile. Edbert fut trois ans fans vouloir y comparoî-
tre. L'Archevêque s'en plaignit à Alexandre II , qui en écri-
vit à tous les Evêques de ce R oyaume , pour les engager à faire
rentrer Edbert dansTobéifiTancc qu'il devoitau Légat. Ce fut
apparemment en conféqucnce de cette Leitre, qu'Adalberc
convoqua en 1072 (r) , un Concile à SIcfvic en Dannemarc ,
avec le fecours du Roi.

(0) Vaf. I I
J I. (7) ^''.?' I !*• ^P'P- 7-
'
I
(p) Ihid, I
{r) Al>A}A. ht, 4. f. 4*.

XVII.
ALEXANDRE II, P APE. Ch. XXXII. ^05
XVII. Nous avons deux Lettres d'Alexandre II, à Guil- Lettres à

laume , Roi d'Angleterre (s). Dans l'une , le Pape le prie de r^] j-ATié-
continuer à faire payer au Saint Siège, denier laint Pierre ,le tene.
comme les Anglois l'avoienc paye tandis
qu'ils avoient été fi-

dèles à la véritable Religion. Une partie de cette taxe appar-


tenoit au Pape ; l'autre croit employée à l'entretien del'Kglifc
de Sainte Marie, qu'on appelloit l'Ecole des Anglois. L'au-
tre Lettre fut apportée de Rome par Lanfranc. Le Pape, au-
près avoir loué le zèle de ce Prince pour la Religion , l'exhor-
te à fuivre les conleils de Lanfranc , qu'il avoit établi fon Lé-
gat dans le Royaume d'Angleterre , avec pouvoir de juger
toutes les affaires.
XVIII. 11 accorda à Annon Archevêque de Cologne
, (f) ,
.^"''^^ ^•

un privilège pour l'Abbaye de Sigeberg qu'il avoit fondée. logi'e,


XIX. Un nommé Landulphe («) , s'étoit fait Moine après XettreàLan-
en avoir extorque le confentement de fa femme par des me- *luiphe.
naces; & avoit depuis quitté le Monaftere pour retourner au-
près d'elle. Inquiet s'il lui étoit permis de vivre avec elle
comme auparavant, il confulta Alexandre II, qui lui répon-
dit , que n'ayant pu s'engager dans un Monaftcre , fans le
libre confentement de fa femme , & fans qu'elle- même prît
le parti de s'enfermer audi dans un Cloître ; c'étoit à lui & à
elle à s'examiner fur ce point; que jufques-là il ne trouvoic
point qu'il y eût lieu de l'obliger à le féparer de fa femme.
XX. Le Pape ayant établi Pierre Damien , fon Légat en Lettre aux
France (x) , écrivit aux Archevêques de Reims , de Sens , de Eveor.es des
Tours , de Bourges & de Bordeaux , de le recevoir comme
lui-même , & de le loumettre à les Jugemens , fous peine d'en-
courir la dilgrace du Saint Siège; ajoutant que Ci Girclme en-
voyé auparavant en France avoit commencé quelque affaire
,

fans l'avoir achevée , elle feroit rcmiiè à la décifion du nouveau


Légat Pierre.
XXL Un Prêtre de l'Eglife de Verdun (y) , nommé Co- Lettre aux
fald , avoit fait voeu étant malade, de le faire Moine. Ri-fteves"& de
cher, Diacre de la même Eglife, en prit occafion de s'em- Verdun,
parer des Bénéfices de Cofald. Celui-ci étant revenu en fanté

(j) P.»?-. iiiî. it23.£;;yî. SCJ 10. (v) Prt^. ii}i. E/></?. il.
I
(0 P.i,?. 1115. Epifl. 9, I
(j) Vage 1 1
J4. Efiji. 16.
(u) l'.tg. I lit. E^iif, II. l

Tome XX. Sss


So6 ALEXANDRE II, PAPE. Ch. XXXII.
changea de fentimcnr, & fe , par une Re-
pourvut à Rome
quête en plainte contre Richer. Alexandre II fâchant que ce
Diacre avoit été convaincu de mauvaife foi dans un Synode
tenu à Trêves, écrivit à l'Archevêque de cette Ville Se à l'E-
vêque de Verdun , de faire rendre à Cofald fes Bénéfices, par
la raifon que ce Prêtre n'avoit point pris d'engagement dans
un Monalierc , où , félon la Règle de Saint Benoît & la Confti-
tution de S. Grégoire , il faut faire une année de probation ,
avant de pouvoir être Moine.
LetfreaiiCler- îv XXII. Il s'étoit élcvé une difpute en Italie (z , au fujec
)

foucha^t^^ieJ'
^^^ dégrés de parenré , dans lefquels il étoit défendu de con-
àégrés de pa- ttaêtcr mariage les uns loutenoient qu'après avoir compté
:

rente.
quatre dégrés d'un côté & trois de l'autre , on pouvoit fe ma-
rier légitimement. Ils fe fondoienc fur un palfage des Inflituts
de Juftinien , où il efl: dit, qu'on ne peut époufer la petite fille
de fon frère ou de fa fœur , quoiqu'elle ioit au quatrième de-
gré. Sur quoi ils formoient ce raiionncment: Si la petite-fil'e
de mon frère efl à mon égard au quatrième degré ; mon fils
efl donc par rapporta elle, ^au cinquième; mon petit-fils au

fixiéme mon arrière petit-fils au icptiéme. Les autres foute-


;

noient que l'on devoit défendre le mariage dans les mêmes


dégrés de parenté où les fucceflions ont li. u fuivant les Loix
civiles; d'où il fuivoit, qne ceux qui font parens au feptiéme
degré, étant admis aux fucceffions , le mariage leur dévoie
auffi être défendu au feptiéme degré. Ils donnoicnt pour preu-
ve de leur ientiment , l'arbre géné.dogique inléré dans les
Canons, où l'rnvoit fix dégrés de chaque coté ce qui ne :

fcroit pas néceffaire, fi, pour faire fept dégrés, il ne falloit


en compter que quatre d'un côté & trois d'un autre. Le Pape
Alexandre informé de cette difpute , la fit examiner dans le
Concile de Rome, de l'an 10(^5. On trouva que la différen-
ce des opinions fur ce fujet , ne venoit que de ce que les
uns comptoicnt les dégrés de parenté félon les Loix civiles ;
les autres fiiivant les Canons deux dégrés des Loix n'en font
, :

qu'un félon les Canons en forte que les frères qui , fuivant
;

les Loix , font au fécond degré , font au premier félon les


Canons. 11 fut décidé dans le Concile , que l'on compteroit
les dégrés de parenté fuivant l'ancien ufage de l'Eglifc , quand

(<.; P''S' lli^j^lpiP- 17. Cî r-PP' 38.^ïl+0.


,

ALEXANDRE II, P APE. Ch. XXXIT. 507


1 s'agiroic de mariage, qu'on ne pourroit en con-
c'cft-à-dirc ,

tracter entre parens , qu'après le feptiémc degré , parce que


les Canons ne comptent plus de parenté après la i'epùémc gé-
nération. La Lettre d'Alexandre II , au Clergé de Naples,
cft conforme à ce Décret. Il l'autorife par une Lettre de l'aine
Grégoire à faint Auguftin , Apôtre d'Angleterre. Le Papo
cite la même Lettre dans celle qu'il écrivit aux Clercs aux &
Juges d'Italie (a). Mais parce que quelques-uns précendoienc
que faint Grégoire y permet les mariages aux troifiéme qua- &
trième dégrés , Alexandre II en rapporte une autre du mê-
me Pape à Félix de Meffine ( ^ ) , où il efl dit , que Hiint
Grégoire en a voit ufé ainfi , par indulgence pour les An-
glois.
XXIII. Alexandre II déclare dans fa Lettre à Conflantin , ^l^"^^
-J,'"^-
Bvêquc d'Anezzo ( c ) , qu'une homme de fon Diocèlc , qui fljntln.

avoit époufé une parente delà concubine, promifc en maria-


ge à un autre qui n'avoit avec elle aucune altiduité , doit la lui
rendre.
Le"re.iA-
XXIV. Les Canons impofent vinet-huit ans de pénitence
a un rrccre qui en aura tue un autre (» ). Alexandre 11 la
réduifit à quatorze , pour un Prêtre du Dioccfc de Civitclla
en cette manière les trois premières années il n'entrera point
:

dans l'Eglife , & ne recevra point la Communion , fi ce n'eft


à l'article de la mort. Il jeûnera le Carême de la première an-
née au pain & à l'eau , trois jours de la fcmainc ; & deux jours
chaque femaine, depuis l'Ûclave de la Pentecôte julqu'à la
Fête de Saint Michel. Au bout de trois ans on lui rendra la
communion de l'Eglife & de la Table commune , & demeu-
rera fept années entières parmi les idiots. On le fera entrer
dans un Monafterc pour y accomplir cette pénitence \ & s'il
l'accomplit dignement , il fera au pouvoir de l'Evêquc ou de
l'Abbé , de la lui remettre après trois ans \ à la charge toute-
fois qu'il fera privé pendant toute fa vie des fondions de Ion
Ordre. Le Pape impofa dix ans de pénitence à un laïc qui
avoit tué un Prêtre , quoique ce Prêtre l'eût attaqué à main
$rmée {e) ; & fur ce que l'Evêque de Confiance avoit impofé

(ii)Pa^. 1142. I {dyVage ui^.Epifî. IÇ,


(A) f'o)fX.tom. ij-pifT, ^i6. 5x7, (f ) £/>»/?. 50.
J
(f)frfg. II3Î. Epip.i^. I

Sssij
5o8 ALEXANDRE II, PAPE. Ch. XXXir.
une pcnirence trop fcvcre à un Abbé , pour avoir donné ure
coupa un domefitique, dont on n'^étoit pas fur qu'il fût mort;
il réduit cette pénitence à un an
(/) avec ordre de rétablir,

l'Abbé dans fa dignité & dans le miniftere de l'Autel. Il con-


damna à feptans de pénitence (g) ^ un frère qui , fans le vou-
loir, avoit caufé la mort de fon frère & un nommé Thierry ,.;

qui avoit , contre fon intention Ils dévoient


, tué fon fils.

être privés de la Communion pendant


premières an- les trois
nées (k) , 8c jeûner au pain &• à l'eau le premier , trois jours:

chaque lemaine de Carême le fécond , deux jours feulement.


:

Il leur prefcrit auiïi quelques autres pénitences , donr il laiffe


le tems & la manière à la difpofition de leurs Evêques i au
cas qu'il furvienne aux coupables quelque infirmité corpo-
relle.
Lettre à l'E- XXV. Dans une féconde Lettre à l'Evêque de Conflan-
û!ince.'^
'^^'ce (i), Alexandre II ordonne que celui qui par négligence
plutôt ^que par orgueil , s'étoit fait promouvoir au Diaco-
nat & à la Prêtrife , fans avoir reçu le Soûdiaconat , s'ab-
fliendra de fcs fonctions jufqu'à ce qu'il eût reçu ce dernier
Ordre aux premiers Quatre-Tems qu'enfuite il pourra re- ;

prendre fes fondions ordinaires. Il écrivit aux Evêques d'Ef-


pagne (l) , qu'ils avoient fait prudemment d'empêcher ceux
cjui alloient combattre les Sarrafins, de tuer les Juifs parce ;

qu'au lieu de perfécuter les Chrétiens , comme faifoientles Sar-


rafins , ils étoient toujours prêts de les fervir. Auffi faint Gré-
goire fâchant qu'un Evêque vouloit détruire leur Synagogue ,
s'y oppofli.
Lettre au XXVI. Par un abus invétéré dans l'Eglifc de Lucques,
Liiciiw.
^ ^^ ^^ conféroit de Bénéfice à aucun Clerc [m) , de quelque
mérite qu'il fût , qui ne l'achetât par argent Le Pape, après
avoir montré combien cet ufage étoit contraire aux Canons,
nommément au C oncile de Calcédoine , défend fous peine
d'anathême , de rien donner ni recevoir , foir pour les Or-
dres , foit pour les Bénéfices, fût-ce même pour la Fabrique,,
pour l'Eglife , ou pour les pauvres. Il répondit à Gcbonard ,,
Archevêque de Vienne («) , qui l'avoit confulté fur un Prê-

(.?' l-ifl- ^5- (m) Epif} 5f.f. 1J3S.


I

(i)Epip.ii.p.iij7i l
,

ALEXANDRE IT, PAPE. Ch. XXXTT. 50^


tre qui tomboit d'cpilepde que fi les attaques en ctoient fré-
;

quentes , il devoit s'abftenir de célébrer la MeiTe; mais qu'on


pourroit le lui permettre , s'il revenoit en fanté ; attendu que
c'étoit une infirmité & non pas une faute.
Le-treàLa*
XXVII. Ayant appris que quelques Clercs féculicrs fou- f^^nc.
tenus de la puifiance laïque («) , vouloient chaiïcr les Moi-
nes de l'Egliic de Saint Sauveur à Cantorberi , pour y mettre
des Clercs , & faire le même changement dans toutes les Ca-
thédrales d'Angleterre , il en écrivit à Lanfranc, alors Ar-
chevêque de Cantorberi ; défendant fous peine d'anathême
défaire à cet égard aucun changement dans ces Eglifcs , puif-
que les Moines y avoicnt été établis par ordre de faint Gré-
goire , & que le Pape Boniface V avoit confirmé cetétablif-
icmcnr. Les Moines ont continué à deflcrvir les Cathédrales
dAnglctcrre , jufqu'au fchifmc d'Henri VIII. La Lettre à
Odric , Abbé de Vendôme ( ) , conti':nt un privilège pour
fon Abbaye , qui eft' déclarée foumife immédiatement au
Saint Siège , avec la claufe d'y recevoir les Légats Apoftoli-
qucs, & de leur fournir les bcfoins de la vie , fuivant la pofTi-
bilité du Monaftere , pendant le féjour qu'ils y feront. Le
Pape accorde auiïî aux Moines de Vendôme , la faculté de
fe choifir un Abbé entre eux ; & au cas qu'il ne s'en trouve
point qui foit digne de leur choix , d'en prendre un à Cluni
ou à Marmoutier. Il ajoute, que l'élu ira lui-mcme à Rome
pour fe faire bénir ; mais que li ce voyage lui devient à. char-
ge , il pourra recevoir la bénédidion abbatiale de tout Evé-
que Catholique ; ce qui n'empochera pas que les Moines n'en-
voient à Rome le décret d'élcdion , afin qu'on y puiflTc juger
fi elle a été faite félon Dieu & la Règle de Saint Benoît. Il

paroît par la fuite de ce privilège , qu'il avoit écé accordé du


confentement de l'Evéque de Chartres , dans le Diocèfe du-
quel l'Abbaye de Vendôme eft fituée. Alexandre II accorda
auiïi un privilège à l'Egliie que Pierre Damien avoit confacrée
en l'honneur de faint Luc (/>).
XXVIII. A la requête de Hugues, Abbé de Cluni (^) , ^'""r.^^î
i\ confirma toutes les donations faites a ce Monaiiere , e- Quni. J

xemta de toute Jurifdidion Epifcopale , avec pouvoir à l'Abbé

(ti) Efij}.fi. pagi 114^. I (p)£pift. 4f.


(0) Epip. ^t. ii in Append. Tom. 4.1 (y) £/>;)?. 41./. 1147.
,

5IO ALEXANDRE II, PAPE. Ch.XXXIT.


d'envoyer Moines à quel Evêque il lui plairoit pour l'Or-,
fes
dination enfin il leur accorde de ne pouvoir être excommu-
:

niés ni interdits , que par le Jugement du Saint Siège. Il per-


mit à Gebehard , Archevêque de Salfljourg (r) , d'ériger un
••
Evêché dans le lieu de fon Dioccfe qu'il trouveroit le plus
propre ; & à Altmann , Evêque de Paffau , de mettre une
Communauté de Chanoines Réguliers dans le fauxbourg de
fa Ville Epifcopale (s) , pour la deflerte de l'Eglife fondée
par l'Impératrice Agnès. Ces Lettres font fuivics dans la Col-
le£lion des Conciles (f) , de plufieurs fragmcns de divers au-
tres Décrets du Pape Alexandre II. Nous remarquerons qu'on
ne foulfroit point dans le Clergé., ceux qui , après avoir reçu
les Ordres de la Prêtrife , du Diaconat du Soûdiaconat &
cntretenoient publiquement des femmes chez eux ; qu'il n'é-
t;oit point permis aux fimoniaques ni aux concubinaires con-

nus , de dire la MefTe , ni aux Fidèles de l'entendre ; qu'il


fuffit à un Prêtre de célébrer une Mefle par jour ; qu'il y erj
avoit toutefois qui en difoicnt deux ; l'une du jour , l'autre
pour les défunts , quand cela étoit néceffaire ; que les gens de
bien recevoient les Décrets du Saint Siège , avec le même ref-
pccl: que les Canons ; que le mariage entre parens doit être
diflbus , fans qu'on puiffe obtenir , ni par des jeûnes , ni par
des prières , ni par des aumônes , de le faire fubfiller mais :

auflî qu'on ne doit point le diifoudre , que la parenté ne foie


bien conftatée ; que ceux qui ont fait violence à un Evêque,
doivent être excommuniés ; &
que ceux qui en feront aux
Prêtres &
aux autres Clercs de moindre rang , fubiront la péni-
tence canonique , &
feront dépofés ou même excommuniés en
cas de contumace.
LetfreàUdon XXIX. Outre la Lettre adreffceà Udon , Archevêque dp
Archevêque
Trcves («) , au fujct du Prêtre Coiald , le Pape Alexandre lui
en écrivit une, par laquelle il approuvoit fa conduite envers
un autre Prêtre coupable d'un péché d'impureté ; le fiilfant Iq
maître d'abréger ou non le tcms de la pénitence qu'il lui avoic
impofée. Udon confultant le Pape iur ce fujet, difoit dans ia.
Lettre , que l'Eglife de Trêves rcconnoîffoit pour fon premier
Apôtre , fiint Euchaire , Difciplc du Seigneur , envoyé dans &

(r) Eplft. 44. (h) Mart£NKe , tom, i.amplijf. ColU<l,


I
(i) Epip. 4f, 1/'. 480.
,

ALEXANDRE II, PAPE. Ch. XXXîI. 511


lesGaules par laint Pierre. La Lettre d'Alexandre fe trouve
dans le premier Tome de la grande Colledion de Dom Mar-
tenne.
XXX. Il y en a une autre du même Pape dans Ics^ Anale- ,
^^?^i ^^^'î^*^^

£tcs de Dom Mabillon {x ) adreflcc à Jean Evcque d' A vran- vranches.


, ,

ches. Il s'agiflbit de le transférer de fon Siégea celui de Rouen.

Guillaume , Roi d'Angleterre , fouhaitoit cette tranHation , &


l'avoit fait demander à Rome , par l'Evêque de Sion & par
l'Abbé Lanfranc. Alexandre U accorda la grâce en confidé-
ration de ceux qui la dcmandoicnt , & de l'avantage qui en
revcnoità l'Eglile de Rouen.
XXXI. La Bulle confirmative des donations faites à l'Ab- i-^Î^JJ^eT'
baye de Ripouille (y) , cft du 2 1 Mai io6y. elle efl: rapportée Ripoui'ile.
dans l'Appendice de THiftoire d'Elpagne, par M. deMarca.
XXXII. Quoique la Primatie de l'Eglife d'Angleterre fût Alexandre
depuis long-tcms attai-héeau Siège de Cantorberi, l'Arche- ^"^.'"touVât
vêque d'Yorc ne lailTa pas d'y prétendre , & de vouloir l'ôter la Primatie
à l'Archevêque de Cantorberi. Alexandre II renvoya la déci- «^'Angleterre,
fion de cette difficulté à Lanfranc , fon Légat en Angleterre,
L'ayant examiné en préfence des Evcques & des Abbés du
Royaume , il fut convenu qu'en ce qui regarde la Religion
l'Archevêque d'Y orc feroit foumis à celui de Canrorberi , com-
me Primat de toute l'Angleterre. "Wuillaume de Malmeiburi,
rapporte cet événement à l'an 1 072 (z). Le Pape Alexandre

II rétablit la vie commune parmi les Chanoines de Saint Jean


de Latran c'étoit un effet de fon zcle pour le bon ordre & le
:

maintien de la diltipline. De mœurs très-pures (a) , fa vie fut


exemtede tout lou|tçon. Il étoit favant & éloquent, d'un efpric
vif, mais toujours occupé des befoins de l'Eglife.

(,ï) Mabill. in Analeil. pa^. 114, \l6. 117.


(y ) Marca, Hijpanka in Apfeud. fag,
,
(a) Damian. Ipi^, 4é, lih, 4. nd Af
1121- chiepifc. Ravin,
(t) WuitLUM. U,ilmifiHr.lth, i.{i>g>

^
5 1 2 SAINT PIERRE DAMIEN ,

CHAPITRE XXXIII.
Saint Pierre Damien , Cardinal , Evêque dO/îie.

n^mie^sT ^* ^ ^'^'"^ '^"' ^"'^ ^'"" ^^^ principaux ornemens de Ton-


i^~^
BaifTancc. Ses V_J ziéme fiécle , naquit à Ravennc l'an 1007. Il nous
éiuJi*. apprend lui-même l'époque de fa naiflance , en difanc (b) ,
qu'elle arriva environ cinq ans après la mort d'Octon III.
Les reproches que l'on fit à fa mcre , de ce qu'elle mettoit au
monde un (i grand nombre d'enfans , dont Pierre étoit le
dernier , lui Ht naître le deflein de ne plus en prendre foin ;
mais rentrée en elle-même par les remontrances d'une femme
de fa connoiflance , elle le reprit & continua de l'allaiter.
Pierre étant encore en bas âge , perdit fon père & fa mère.
Un de fes frères fe chargea de lui ; mais au lieu de lui donner
quelque éducation , il l'employoit aux fervices les plus vils ;
ce qui engagea un autre de fes frères à le prendre chez lui 8c
à le faire inuruire. Il l'envoya d'abord à Faïence ( f ) , puis i
Parme. Ses progrès dans les Lettres humaines le mirent en
état de les enfeigner aux autres. 11 le fit avec réputation : on
. couroit à lui de tous côtés. Devenu riche & honoré dans un
âge peu avancé , il craignit de fuccomber aux tentations de
vanité & de plaifir. Dans cette penfée , il fe déroba à fes parens
& à fes amis , & fe retira au delert de Font-Avellane en Om-»
bric , dans le Diocèfe d'Eugubio.
11 emfcraiTe la jj^ L'Abbé le reçut, & fans l'avoir éprouvé , lui donna
vie monaft:- '
i,. i .ri- -n- r r •
i • • •

que; eft ^ habit monaltiquc. Pierre tut iurpris de cette précipitation ;


fait
Abbé. mais il fe foumità l'ordre de fon Supérieur [d). Quoique l'ob-
fcrvance générale fût extrêmement févere , il y ajoutoit en
fecret: ce qui lui caufa une infomnie dont il ne guérit qu'avec
peine. Ayant recouvré la fanté , il s'appliqua à l'étude des
faintcs Ecritures. Son Abbé le chargcoitde tems en tcms des

(b)Petr. Damian. Opufc. î7. c. c.


J
(J) l'it.j D.imi.i/r, Tom, p. JlUor. OrJiii,
(c)Ucm. lit. f • Epij}. 16. ÇJ Lilr, 6. Ep. 1 S, Baicil. «.14. />. 159.
fj.^Ofufc. }6.ci<.
cxhortAtion»
1

CARDIN. EVESQ. D'OSTIE. Ch.XXXIIL y^


exhorrations à Gui de Pompafie près de Fer-
fes confrcres.
rare , le demanda pour en faire à fes Moines (e) , qui étoicnt
au nombre de cent. Pierre en fit aufTi dans le Monaftcre de
Saint Vincent, proche de Pierre -Perrufe (/). De retour à
Font- Avellane , l'Abbé le choilit pour fon fucceffeur (g ) , de
l'avis de la Communauté. Pierre la gouverna après la mort de
cet Abbé en augmenta le nombre, Se fonda cinq autres Mo-
,

pafteres femblables.
III. Le Monafteres ne l'empêchoit pas de pren- H eft appelle
foin de fes
dre part aux de rEglife. Il écrivit vers l'an 1042 , fon l^Z'^^^"^*
affaires
huitième Opukuîe , au fujet d'une difpute qui s'étoit élevée
en Italie touchant les dégrés de parenté , dans lefquels il eft
défendu de contrafter mariage; & le dédia à Jean, Evêquc
de Celena. La réputation de ion fçavoir &
de fa vertu , le fit
appeller à Rome en 1042 (h) , par l'Empereur Henri, pour
aider Clément II de fes confcils. Pierre s'en défendit par une
Lettre qu'il écrivit au Pape même, &
dans laquelle il inléra
celle qu'il avoir reçue de l'Empereur. Il ajoutoit toutefois, en
parlant Clément II
cà Je vous prie de m'ordonncr (i je dois
:

me rendre auprès de vous car je ne veux pas perdre mon rems


:

à courir de côté & d'autre. On ne fait li le Pape l'obligea de


quitter fa lolicude.
IV. Mais il fallut , pour l'en tirer, qu'Etienne IX le me- ileflfaitEvô-

naçât d'excommunication (z). A


fon arrivée à Rome, le Pape «i"^
'^'*^'^-'^-

le jugeant digne de l'Epifcopat , &


néceflaire aux affaires de
l'Egliie le fit Evoque d'Oftic
5 &
premier des Cardinaux , lui
donnant lui-même l'anneau &
le baron Pafloral. Pierre fut
un de ceux qui s'oppoferent le plus vivement à l'ékdion de
Taïuipape Benoit. Il fe déclara hautement pour Nicolas II ,
Se ion ientiment prévalut (/). En 1055;, il affiftaau Concile
qui fe tint à Rome au Palais de Latran , dans la Bafilique de
Conftantin ; &: foufcrivit aux Décrets contre les limoniaqucs.
Le Clergé de Milan en étoit rempli ; Nicolas II envoya la
même année , Pierre Damien avec Anlelme , Evêque de Luc-
ques pour purger cette Eglife de tous ces prévaricateurs. Ils
,

prirent cnfemble tous les moyens qui leur parurent nécelfai^

(<) !/;./. titim. jiJ, (// Petr. Damfan. liù. x.Eplff, j,


I
{f) Itii*. 1 (t) Vita Pfiri , tirnn.zff.
tj) /*"/. 1 (0 PfTR. Epip. 4. !ib. 3.

Tome XX, T 1
,

514 SAINT PIERRE DAMIEN,


res pour mettre fin aux abus qui fe gliffoienc dans les Ordî-
, nations.
rEpIfco^"
^
V* ^^ (m) , auflTi-tôt après la mort d'E-
avoit eu deffein
en 10551. tienne IX
de renoncer à rÉpifcopat mais l'intérêt de l'E-
, :

glife Romaine , qui lui fembloit menacer ruine , l'en fit chan-
ger. Voyant depuis , que Nicolas II gouvernoit en paix la
barque de iaint Pierre , il le pria par écrit , de lui permettre
de fe retirer dans fa folitude ; & lui déclara , en renvoyant
fon anneau, qu'il renonçoit à l'Evêché d'Ofiie , fans cipé-
rance d'y revenir jamais. Ses prières & fes remontrances fu-
rent vaines. Le Pape continua à l'employer aux befoins de
l'Eglife. Alexandre II fon fuccelTeur , fe fervit utilement de
Pierre Damien , tant pour l'extintlion du fchifme de Cada-
loiis («), que pour réprimer divers abus qui régnoient en
France & en Italie. En 10153 , il l'envoya à Florence & en
France, en qualité de Légat. Il afTifta en la même qualité au
Concile de Mayence en io6g , où il réuffit à empêcher le di-
vorce du Roi Henri avec la Reine Berthe.
Sa mort en YJ. Alexandre II avoit excommunié Henri , Archevêque
ÏC7Z.
de Ravenne fon peuple , en communiquant avec lui, avoit
:

encouru l'excommunication. Pierre Damien repréfente au


Pape (0) , qu'il n'étoir pas jufle de punir la multitude pour la
faute d'un feul. Cependant l'Archevêque mourut le premier
de Janvier 1 070 , fans avoir été abfous. Quelque tems après
le Pape envoya Pierre Damien à Ravenne , avec pouvoir
d'abfoudre le peuple. Il ne furvéquit pas long-tems à cette
commifiion. En retournant à Rome, il fut faili de la fièvre à
Faïence, & y mourut le 21 Février 1072. Jean fon difci-
ple , qui a écrit fa vie , marque affez clairement (p) , qu'il
avoit obtenu du Pape , quelques années avant fa mort , de re-
noncer à l'Epilcopac. Dom Mabiilon croit que ce fut du Pape
Alexandre II (q) , & cite l'Ade de la Dédicace de l'Eglife
de Saint Martin-des-Champs à Paris , daté de l'an 10^7 ,
auquel Girald ou Girard , auparavant Prieur de Cluni , fouf-
crivit avec le titre d'Evêque d'Oflic ce qui fuppofe que :

Pierre Damien avoic dès- lors abdiqué. Il y en a même qui

(m) Petr, Damian. Opiifc. ip. îj itb. {0 ) Jiiem. lib. I. Tpifi. i4.
;. fp.yi. 8. f /7 ) Vit,i t'ctri,'titim.40.
(/;) Idtm. Opiifc. 4. ij Ton). •) , Ctiic, f. (y) M/IBT11.0N , Lit. 6y Annal, n. 7 ^
1 1 j£. i.^ Ub.ùi.n, 10»
. j ,

CARDIN. EVESQ. .D^OSTIE.Ch. XXXIir. 515.


mettent ion abdication en 1059 , d'autres en 106 1. Le Pape
Alexandre II ne laifFoit pas de le qjjaliner Evêque d'Oflie,
dans Lettres qu'il lui écrivit depuis. D'une vie très-pure
les
& très-auflere , Dieu le fit naître dans un fiécle très corrom-
pu , pour rappeller , par les exemples par les Ecrits , les &
Chrétiens à l'intégrité des mœurs, aux vraies maximes de &
la Religion. On compte parmi les dilciples , faint Dominique
iurnommé le CuiralTé , Rodolphe , Evêque d'Eugubio , &
Jean , -Auteur de fa vie. Il la dédia à Liprand , Prieur ( ) , /"

& aux anciens du defert de Font-Avellane , Chef de la Con-.


grégation inftituée par Pierre Damien , fous la Règle de Saint
JBenoît. L'Eglife de Faïence l'honore entre les Saints , par
une Fête annuelle ; & fon nom le trouve dans Ferrarius , Ja-
cobillus & autres Martyrologifles ,au 23 de Février. Le Pape
Alexandre II, en l'envoyant Légat en France (j)> difoit
aux Archevêques de ce Royaume Nous n'en connoiflbns :

point dont l'autorité foit plus grande , après la nôtre, dans


l'Eglile Romaine il efl notre œil , & le ferme appui du Siège
:

Apofloliquc.
VII. Les Ecrits de faint Pierre Damien furent recueillis à EcrîtsdeS.
Tordre du Pape Clément VIII , par Conftantin Cajétan ,
'
T> ^ --r^ ^ y y es
Pi^f^Damicn
divifcsenqua-
&
imprmies a Rome en trois Tomes , en 1606 , 1608 , 1615 , tre Tomes.
in fol. On les remit fous prefTe à Lyon , en 1623, in-fol. Ca-
jétan y ajouta un quatrième Tome imprimé à Rome en 1640
& dédié à Urbain VIII. C'cft fur ces éditions qu'ont été fai-
tes celles de Paris en 1642 & i<^6'3 elles font en quatre To- :

mes reliés ordinairement en un fcul volume. Nous fuivrons


celle de K542.
VIII. Le premier Tome contient les Lettres de faint Picr- ^^'^^^ '-Sw
re Damien , divilées en huit Livres , diftribuées félon la &
qualité des perfonnes à qui elles font adrelTées ; en forte que
ccUes du premier Livre font aux Papes ( r ) ; celles du fécond
aux Cardinaux ; celles du troifiéme aux Archevêques. Aulîi-
tôt que Grégoire VI fut monté fur le Saint Siège , Pierre
Damien lui en témoigna fa joie , dans l'cipèrance de voir
bannir de l'Eglife , fous fon Pontificat, les limoniaques , les
in. cllucux , les voleurs. Il nomme diverfes Eglifes gouver-

CO Mabili.. Tom. o. A^nr.p. 2ff | ;<»f. nu.


(.;J Aiev:a{>c. V.{'>?. 21. Jom j», Co«r, \ ( f ) I-ft^.

T 1 1 i
Si6 SAINT PIERRE DAMIEN,^
nées par des Evêques de ce carattere ; dit qu'on jugera âe &
Ion zèle contre l'Évêque de Pelaro , ce que l'on doit efpérer
de bon pour les autres Eglifes. Il écrivit au même Pape ( « ) ,
en faveur d'un Archiprctre , qu'il croyoit pouvoir être pro-
mu à l'Evêché de Foflcmbrune ; parce qu'il avoit les lutfra-
ges du Clergé &
du peuple ; qu'il étoit un peu meilleur que
d'autres, qui prétendoient à cette dignité; que l'on étoit &
dans une grande difette de fujets dignes de l'Epiicopat.
IX. Grégoire VI ayant renoncé au Pontificat , Clément II
fut ordonné a fa place, en Janvier i047(^). L'Empereur
Henri, qui l'avoit fait élire , manda à Pierre Damien d'aller
à Rome l'aider de défendit de ce voya-
fes confeils. Pierre fe
ge , jufqu'à ce qu'il en eût reçu un ordre exprès du Pape :
mais il écrivit au Pape , pour lui marquer la confufion qui ré-
gnoit dans les Ègîifes de fa Province , par la faute des Evê-
ques , la plupart chargés de crimes. Travaillez donc , lui dit-
il , ta relever la juftice , employez la vigueur de la diicipli-

ne , &
faites que les méchans foient humiliés , les bons en- &
couragés.
X. Pierre Damien , en invcflivant contre les défordres pu-
blics ()') , fe fit des ennemis ,
qui formèrent contre lui di-
verfes accufations auprès du Pape Léon IX. Elles furent é-
coutées. Pierre en étant informé , lui écrivit en des termes
très-modeftes , mais avec la fermeté que donne une bonne
confcience , pour le prier de ne le point condamner fans
l'avoir entendu ; protcftant quil ne iouhaitoit les bonnes
grâces, qu'autant qu'elles pouvoientlui être utiles pour fon
falut.
XI. Sa Lettre à Vi£lor II (s) , a pour but de l'engager
dans les intérêts d'un Seigneur nommé Henri , qui avoit re-
noncé à tout pour fuivre Jclus-ChrilT: , & que Ton vouioit op-
primer. Pierre Damien en écrivit quatre à Nicolas II , dont
la première eft le dix-feptiéme Opufculc (a^. Dans la fécon-

de , il le congratule fur la paix dont l'Egliic jouifioit fous fon


Pontificat & le prie de rendre la communion aux habitans
;

d'Ancone , dont ils étoicnc privés depuis quelque tems. It

(v) Fpifl. r. (
(;; E;;;/7. ^
,

CARDIN. EVESQ. D'OSTIE. Ch. XXXIir. 517


repréfente au Pape , que cette cenfure enveloppoit l'inno-
cent avec le coupable. Dans la troifiéme (b) , il fe plaint qu'on
lui avoit ôté les revenus de fon Evêché , ou , comme il dit
les orncmcns lacerdoraux ce qui lui faifoit cnviiagcr fa de-
:

ftitution comme prochaine.prévient, en déclarant qu'il


Il la

renonce pour toute Dans la quatrième,


fa vie à l'Epifcopat.
qui fait le dix -neuvième de fes Opulcules (c) , il témoigne
- tôt après la mort
au'il auroit renoncé à fon Evêché aufli
u Pape , Etienne IX , s'il avoit pu obtenir fon congé mais :

que ne l'ayant point obtenu alors à caule des troubles de l'E-


glife , il le demandoit à préfent qu'elle étoit en paix.
XII. y a plufieurs Lettres au Pape Alexandre II (dy II
Il

lui recommanda TEvéque d'Orléans, qui étoit dans le trou-


ble , tant à caufe des perfécutions qu'on lui faifoit fouffrir ,
que par rapport aux pillages de fon Eglife. Dans une autre
Lettre au même Pape (e) , il lui fait des remontrances fur
deux abus qui régnoient à la Cour de Rome l'un, que pref- :

que dans routes les Epîtrcs décrétales , on mcttoit à la fin la


peine d'anathcme contre les prévaricateurs des Décrets y con-
tenus ; l'autre , que l'on empêcboit les laïcs &
les Clercs d'accu-
ler les Kvcques pardevant l'Archevêque Se le Primat. Cet ana-
thcme mettoit en danger le falut des perfonnes contrequi il étoit
porté , &
qui louvent ne le favoient pas on le prononçoit pour
:

des fautes quelquefois peu conlidérables : d'où il arrivoit que


l'homme étoit puni plusrigoureufement pour avoir contrevenu
à une Loi hmnaine , que pour avoir viole les Commandemens
de Dieu. Pierre Damien prie donc le Pape de fupprimer à l'a-
venir cette ckufe dans fes Epîtres décrétales , vu qu'elle n'é-
toit point d'ufage du tems de faint Grégoire des autres &
Papes fes prédécefleurs. Il dit fur l'autre abus, qu'en le tolé-
rant , ce feroit donner lieu à un Evêque de vivre à fa liber-
té : ce qui auroit des coniéquences fâcheufes ; qu'on ne viole
en rien le refpetl dû à fa dignité , en le déférant à fes Supé-
rieurs Eccléliaftiques. QudndFidèles trouvèrent mauvais
les
que faint Pierre prêchât l'Evangileaux Gentils , il ne mé-
prifa pas leurs plaintes: au contraire, il leur rendit compte
de la conduite. Il fouffrit encore d'être repris par fainn Paul,-

(t) E/,;,?. ^. (</) Ff//7: to.O/K/<r. 10. £>(/?. u.


I
,

fi^ SAINT PÎERRE DAMIExN,


En vain , en objecLcroit ciuc le Pafteur ne doit pas être ac-
cufé par ceux qui lui font fournis FEvangile qui veut que
:

l'on défère les fautes de les frères à l'Eglife , n'en excepte pas
les Evêques.
XIII. Il furvint un autre abus en Italie, à l'égard de l'ac-
quiiition des Bénéfices (/). Deux Chapelains de Godefroi
Duc de Tolcane , avoient ioutenu en préfence de Pierre Da-
micn , qu'il n'y avoir point de llmonie à achetter du Roi ou
de quelque autre Prince , un Evéché ; puce que ce n'écoit
point le Sacerdoce qu'on achctoit , ni l'Egiile d'où dépendoic
le Bénéfice ; mais les revenu3 quiyétoicnt attachés. Pierre en
écrivit au Pape Alexandre , pour le conjurer de s'oppolcr de
toute fon autorité , à cette nouvelle erreur , & l'empêcher de
le répandre. Il la combat lui-même par des railons très-for-
tes montrant qu'un homme ne pouvant être diviie en deux
:

dont l'un jouiiTe des revenus , & l'autre fade les fondions fpi-
rituelles de l'Epifcopat ; c'eil une conléquence néceffaire,
que lorfqu'il achette des biens temporels , dont il ne peut
jouir fans être élevé à une dignité eccléliaftique , & lans en
remplir les devoirs , il achetto aulii cette dignité & le Sacre-
ment. En effet , le Roi en donnant l'invelliture d'un Evé-
ché, ne donne pas fimplement un bâton , mais le bâton Pa-
floral avec le tirre du Sacerdoce ; & quoiqu'on n'en reçoive
le Sacrement que par l'Ordination , il n'eft pas moins vrai
que ce n'eft qu'en conléquence de la nomination du Roi , que
l'on eff ordonné d'où il fuit que l'Ordination ne peut palfer
;

pour gratuite, puifqu'on n'y cft yarvenuque par argent. Audi


le Roi , en mettant le bâton Pafloral en main de celui à qui
il donne FEvêché , ne lui dit pas Recevez les terres & les
:

biens d'une telle Eglife; mais recevez cette Eglile. Enfin, il

y a une telle liaifon entre la jouifTancc des revenus eccléfia-


uiqucs, & la confécraticn ,
que celui qui reçoit le droit de
jouir de ces revenus , doit fe faire confacrer. Pierre Damicn
confirme fon fentiment par pluficurs palfagcs des Décréta-
les H étend ce qu'il avoit dit des Evêchés , à toutes fortes de
Bénéfices , grands Se petits ; & finir en priant le Pape de ne pas
fouffrir qu'on élevé au Sacerdoce , ceux qui l'ont acquis, 014
par argent , ou par des ferviccs rendus aux Princes.

(/; W- -J.
,

CARDÎN. ÉVESQ. D'OSTIE. Ch. XXXIII. 519


XIV. L'Eglifc d'Eugubio fe trouvant agitée (g-) , Pierre
Damicn , à qui l'on en avoit confie le foin , en écrivit au
Pape Alexandre II , qu'il croyoit avoir occafionné ce trou-
ble ; en lui repréfentant doucement ,
que les ferviccs qu'il lui
avoit rendus en prenant ion parti , dévoient le portera le trai-
ter plus favorablement. Il lui remontre aufTi , qu'il n'étoit pas
raifonnable de laiffer plus long-tems les habitans de Ravenne
enveloppés dans l'excommunication prononcée contre leur
Archevêque ; parce qu'on ne doit point punir la multitude
pour la faute d'un fcul.
XV. La Lettre iuivantc {h) , efl: une réponfe aux repro-
ches que le Pape lui avoit faits de ce qu'il ne recevoir plus de
Lettres de fa part. Pierre s'en excufe fur la quantité de vi(i-
tes & d'affaires qui l'occupoient dans la retraite ; & fur la dou-
leur que lui cauloicnt les dcréglemens du fiécle. Il en fait
une peinture alfez vive mais il trouve une elpece de confo-
:

lation dans la nouvelle qu'il venoit d'apprendre , qu'on lui


avoit ôté le Comté d'Ortie ; & demande en conféqucnce
qu'on le décharge aufTi de fon Evêché. Il exhorte Alexandre
de travailler à la réformarion des abus de l'EgUfe , dans le
Concile qu'on alloit tenir ; & lui fait un précis de fcs devoirs,
dans huit vers élégiaqucs qu'il joint à fa Lettre.
XVI. Le Pape & l'Archidiacre Hildebrand ( i ) , trouvè-
rent mauvais qu'il eût écrit à l'Archevêque de Cologne , fans
leur avoir communiqué fa Lettre. Pierre leur en envoya une
copie fidcUe , pour les convaincre qu'elle ne contenoit rien
qui dût les oiîcnfer. Ils l'avoient invité l'un & l'autre de ve-
nir à Rome , & de paffer de-ià à Mantoue , où l'on devoir
affembler un Concile. Il s'excufa du voyage de Rome , fur
fon grand âge & promit de fe rendre à Mantoue puilqu'il
; ,

s'agilfoit du bien de l'Eglife. Les autres Lettres au Pape


Alexandre II , fe lifcnt parmi les Opufcules de Pierre Da-
mien (/).
XVII. Nous avons deux Lettres de lui à l'Antipape Ca-
daloûs , Evêque de Parme (m). Il fait voir dans la première,
qu'ayant été condamné par trois Conciles , de Pavie , de

{g) Eptli. î4. (/) Epip. 17, 18. ip. Opitfc. 2,5. 24.
(h) Epijl. i;.. Vita S. Rodulfihi,
(,i) Epft.i6, (jllj Epip, 10,
p.o SAINT PIERRE DAMÎEN,
Mantoue & de Florence, comme coupable de pluficurs cri-
mes , il ne dévoie point ibuffrir d'être éluEvcque de Romej
que d'ailleurs il ne pouvoit en prendre le titre , puiique fon
éledion s'ctoit faite à l'infçu de l'Eglife Romaine , du Sé-
nat , du Clergé & du peuple , & dans le tems que le Saint
Siège étojt rempli par un Pafteur légitime. Il le menace des
jugemens de Dieu , & d'être frappé de mort dans l'année :
mais cette prédidlion qui fe trouve à la fin des vers joints à
cette Lettre , n'eut point fon accomplifîcmcnt. Il remarque
que les Cardinaux avoient la principale part dans l'éledion
du Pape ; qu'ils avoient encore d'autres prérogatives qui les
mettoient au-deffus des Evêques , des Patriarches &des Pri-
mats («) ; qu'ils croient comme les yeux du Saint Siège , &
au nombre de fcpt ; que la mitre & la chappe rouge étoienc
les ornemens propres au Pape (o). CadaloLis n'ayant tenu
aucun compte de cette Lettre, Pierre Damien lui en écrivit
une féconde , beaucoup plus forte que la première. Il le com-
pare à Judas, & aux tyrans qui ont ravagé &: periécuté l'E-
glile ; & le menace d'un traitement femblable à celui que

Ton fit fouffrir à l'Evcque de Plailance , qui s'étoit empa-


ré par les mêmes voies que lui , du Saint Siège , fous Gré-
goire IV.
î^ivre 2. XVIII. Il n'y avoit pas long-tcms que Pierre Damien
étoitEvêquc d'Ofde & Cardinal (p) , lorfqu'il écrivit aujf
Evêques -Cardinaux de l'Eglife de Latran. C'efl ainli qu'il
les qualifie dans l'infcription de fa Lettre. Il les appelle Evê-
ques de Latran , parce qu'ils avoient droit d'y officier au lieu
du Pape. En les appcllant fes frères , il fait voir qu'il étoic
de leur nombre ; & en effet, il fe compte entre les fcpc Evc-
oues-Cardinaux. Après avoir décrit les mœurs corrompue?
<^ fon fiécle, & les maux de l'Eglife dont la difcipline étoic
négligée prcfque par-tout , il les exhorte à fe conduire avec
tant de fîgeflc , que leur vie fervc de modèle aux autres :
f'eft pourquoi il fait voir que l'Epifcopat ne confiftc pas dans
la magnificence des ornçmens extérieurs , mais dans l'exer-
,cice de toutes les vertus. Il blâme ceux qui fuivoient les ar-
mées des Rois dans des pays éloignés, pour en obtenir qucl-

que
CARDIN. EVESQ.' D'OSTïE. Ch." XXXIIL 521
3ues dignités ccclcfiaCtiques. Sur quoi il di(linguctroi^ fortes
e limonic celle de la main
: en donnant de l'argent ; celle
-,

dés fervices ; celle de la langue , par les flatteries.^' & dit que
ceux qui fuivcnc les Princes dans leurs voyages , dans la vue
d'en obtenir des Bénéfices , font coupables de ces trois fortes
de fimonie. r-u'l .

XIX. Les deux Lettres fuivantes font les Opufcules 31 &


31 (q). La. quatrième -efl: au Cardinal Boniface , Evoque
d'Albane , Se au Prêtre Etienne , à qui il recommande L'Abbd
du Monaflere de Saint Apollinaire. Il explique dans la cin-
quième , les myftercs de la création de l'univers , & fur^-tout
au Sabbat , qu'il entend du renoncement à tous les plâiHrs
terreftrcs & corporels , pour ne fe repofer qu'en Dieu. Dans
la fixiéme (r) il fe plaint agréablement aux Cardinaux Hil-
,

debrand & Etienne , de ce que le Pape Alexandre II lui a--


voit emporté un Livre de fa compofition , fous prétexte de
le faire copier (5). Pierre qui metcoit fa complaifancc dans
cet Ouvrage, le redemanda inutilement. Le Pape n'en fit
que rire. Il paroît par la huitième ( r ) » que Pierre étoit fore
attaché au Cardinal Hildcbrand mais que celui-ci ne ré-
;

pondoit pas aux marques d'amitié qu'il en recevoir. La neu-


vième regarde une difficulté qu'ils avoient entre eux au fu-
jet d'un Monaftcre (a) Hildcbrand l'accufoit de l'avoir bâti.
fur un terrein qui ne lui appartcnoit pas, Pierre s'en dé-
fend , & montre qu'on lui avoir fait là-defTus un faux rap-
port.
XX. Des neuf Lettres à Didier , Abbé de Mont-Caiïin ,
& Cardinal (x) , il y en a iix parmi les Opufcules. Dans les
trois autres, il lui donne divers avis, tant pour fa conduite
particulière que de fon Monaflere; entre autres , de corriger
ceux qui font fous fa difcipline, de ne point dire de mal des
abfens , mais de reprendre en face les coupables. Dans la
dix-neyviéme , à Pierre Cardinal-Diacre Chancelier (^ ), &
il lui demande fon amitié, & d.e pouvoir, par fon miniflere,

reprulenter au Pape ce qu'il croira utile pour le bieii' del'E-


glifc JR.omainey d^it^i.dépcntli^ brin éta$.. des autres. Eglifes

.•
(7)Ef;/?, î. 3.4.;.
(r) Epifl, 6.
, _j;;i
r."
.

J ;(.•<) Ef'y?. 9. .

(x) Efijl. io. Opufc. 1 8.


,

Efifl,.lU iU,
,J -p^ ,j
I

TmeXX, Vvv
522 SAINT PIERRE DAMIEN ,

du monde. Les deux dernières Lettres du fécond Livre {z) ^


fe trouvent parmi les Opufcules.
Livre j.
-j^^j^ (^çji^g j^ rroifiéme Livre (a) , font adreflees à di-
vers Archevêques. Gebehard de Ravenne avoir écrit à Pierre
Damien de le venir trouver : il s'en excufa par deux raifons ;
l'une ( ^ ) , qu'il n'a voit pas le moyen de faire la dépenfe de ce
voyage ; l'autre , qu'il ne pouvoir abandonner le foin de fon
Monaftere. On voit par une autre Lettre ( c ) , qu'il étoit très-
attaché à Gebehard , & qu'il avoit en lui une grande confian-
ce; puifqu'il le prioit de chafler les Evoques de Pefaro & de
Fano , comme indignes de gouverner ces Eglifes , & d'en
confier le foin à d'autres. Il lui recommanda auflî l'Abbé de
ClafTe. Henri fuccefleur de Gebehard , confulta Pierre Da-
mien , fur les élections d'Al. xandre II & de Cadaloiis. Il ré-
pondit (d) , que celui-ci étoit un fimoniaque -,que fon élec-
tion avoit été faite contre les rfgles , fans le concours des fuf-
frages des Evêques - C.irdinaux qu'il avoit été intronifé de
*,

nutt, à main armée, à force d'argent*, & cela par un Prêtre


de l'Eglife d'Oflic , qui ne fait pas même lire ; que Cadaloiis
lui-même eft fi flupide , qu'il ne peut expliquer , ni un verfet
d'un Pfeaume , ni une ligne d'une Homélie ; qu'un feul de ces
articles fuffifoit pour le condamner ; qu'Alexandre , au con-
traire , eft luffiiamment lettré , d'un tfprit vif, de mœurs pures
au-dcffus de tout loupçon , & fort aumônier. La Lettre de
Pierre Damien tendoit vifiblement à autorifer l'éledion d'A-
lexandre ; & fâchant que l'Archevêque de Ravenne étoit dans
le deffcin de la tenir lecrctte , de peur de lui attirer des enne-
mis, il le prie de la rendre publique, afin qu'on connût dans
le monde le péril émin nt de l'Eglife.
XXII. Wibert ayant fuccédé ^ Henri dans l'Archevêché
de R avcnnc (e) , Pierre Damien lui rendit tous les honneurs
convembles , fans en recevoir aucune marque d'amitié. Il
s'en plaignit à lui - même , & le pr-a en même-tcms , de ne
point lurchargcr fon Monaftereen exigeant une fomme d'ar-
gent, qu'il n'étoit pas en état de fournir , depuis qu'on lui
avoit enlevé une partie de fes biens. Annon , Archevêque de

%a^E 'II.
i.Ofufc. j8, '
('0 Epifl 4.
I
CARDTN. EVESQ. D'OSTIK. Ch. XXXTIL 523
Cologne , le trouvoic en grand crédit à la Cour ,
parce que
outre l'éducation du jeune Roi Henri , il étoit encore ».hargc
du gouvernement de l'Erar. Pierre Damien faidt cette cir-
coniiancc (/) , pour l'engager à procurer au plutôt la tenue
d'un Concile général , pour réprimer l'infolcnce de Cada-
loijs , qui fe foutenoit toujours , &
finir le khifme. Sa Let-

tre à Guy Archevêque de Milan (g), eft un remerciement


,

des habits lacerdotaux dont il lui avoit fait prélcnt. Celle à


r Archevêque de Befançon & les deux fui vantes, font les Opuf-
cuies39, 25,34.
XXIII. Le quatrième Livre renferme les Lettres écrites Livre 4.

aux Evcqucs (k). Il paroît par les termes dont efi: conçue celle
qui efl: à l'Evcque Albert , qu'il avoit été difciple de Pierre
Damien. Quoiqu'il lui donne la qualité de très-cher frère , il
lui parle en maure , difant Je veux. Au relie , fon but dans
:

cette Lettre , eft d'engager Albert à mener une vie irrépro-


chable, & à difpofer des dixmes & des oblations des Fidè-
les , fuivant l'efprit des Canons ; en forte qu'il ne tourne pas
à fon profit , la portion due aux Clercs ; & que dans la diftri-
bution des aumônes , il préfère les pauvres de fon Diocèfe.
En remerciant un autre Evcquc de celles qu'il avoit faites à
fon Monaftere (i) , il l'avertit que l'aumône ne fuffit pas , fi
elle n'eft accompagnée des autres vertus qu'un de fes devoirs
;

eft de nourrir fon peuple du pain de la parole. Il le prie d'or-


donner Diacres , deux Clercs qui en avoient obtenu la per-
miflion de leur Evêque. Il repréfenteà celui d'Ofmo (/) , que
les morts fréquentes arrivées depuis peu , doivent l'engager à
fe convertir au plutôt. Il fait à un autre Evêque ( '« ) , une
defcription très-patétique du Jugement dernier, pour lui per-
fuader de s'y préparer par une vie pénitente. Dans le deflein
de faire connoiifance avec l'Evêque Jean (« ) , il lui envoya
quelques-uns de fes Opufcules , Se les accompagna d'une ex-
hortation au mépris des biens & des honneurs du fiécle ( ).
Il avertit un autre Evêque, de ne pas recevoir de préfens de

la part dcsméchans (/>) , de peur de participer à leur ini-

if) Epifl. 6. (m) Efifl 4.


iz) Epilh 7. (n) Epift. y.
1.^44.
</;)E/-.y?. («) Epifl.6.
0)Efil}.z. (p) £/'/'. 7.
(l)Efij}. ^.Opufc. 18.

VVV ij
524^ SAINT PIERRE DAMIEN,
quité. Il dit à cette occafion ,
qu'on n'en doit recevoir que
de ceux dont on ne doute pas que les préfens ne foient agréa-
bles à Dieu. Sa Lcnre à Mainard , Evêque d'Eugubio {(j), eft
pour l'exciter à retirer les terres & les biens enlevés de fon tems
à fon Eglife. Il l'exhorte aufli de corriger fcs mœurs , & d'en-
trer lérieufemcntdansle chemin qui conduit au lepos & à la
félicité éternelle.
XXIV. L'Evcque de Ferme (r) , en lui écrivant, s'étoic
fervi du terme: Votre Sainteté. La modeflie de Pierre Da-
mien en fut bleffce, confidérant que fes péchés !e rendoient
indigne de ce titre. Les malheurs & les défordres de fon fié-
cle , lui faifoient croire que la fin du monde n'étoit pas éloi-
gnée. Outre le fchifme de Cadaloiis qui déloloit l'Eglile Ro-
maine , on voyoit communément les Evêques & les autres Ec-
cléllaftiqucs défendre leurs biens les armes à la main. Pierre
fait voir qu'ils agiffent en cela contre l'efprit de l'Eglife , qui
défend la vengeance ; & contre l'efprit de Jefus-Chrift , qui
ne veut pas rnéme que nous répétions ce qui eft à nous. Il a-
joute , que la différence qu'il y a entre la Royauté & le Sa-
cerdoce , confifle en ce que le Roi fe fert des armes maté-
rielles ,au lieu que le Prêtre n'emploie que le glaive de Telprit
qui efl; la parole de Dieu ;
que fi l'on n'a jamais permis de
prendre armes pour la défenfe de la foi , qui donne la vie
les
à toute l'Eglife, on ne doit point mettre iur pied des armées

pour le recouvrement des biens ecclélîaftiques ; que fi les Saints


n'ont jamais fait mourir , ni les hérétique^ , ni les idolâtres,
quoiqu'ils leur fuflcnt fupérieurs en autorité; & s'ils ont plu-
tôt fouHcrt eux-mêmes la mort , un Fidèle ne doit tirer l'épée
contre celui qui lui a enlevé quelques podcfilons temporelles,
ne pouvant ignorer que l'ufurpa eur efl comme lui , racheté
du fang de Jefus-Chrift 11 s'objedequc Léon IX marcha lui-
même a\)ec ion armée contre les Normans. A cela il rép'.<nd
pfemiércmcm qu'on ne doir pas juger du bien ou du mal
,

parle mérite des perfonncs , mnis par ce que les chofes ou


les allions (ont en elles -m.cmes ; en fécond, lit-u , que faint
Grégoire fouifric les pillages &
les violences des L mbards,

nrnsU'uTTairc la guerre; enfin , qu'ion n'a point d'exemples


qu'aucun des laints Evcqces' ail,' pris les armes. Il conclut que

U)Ej>iJi.S. 0)îiifl-9,
CARDIN. EVESQ. D'OSTIE. Ch.XXXIIT '^zs
doivent être jugées , ou par ieUaics
les affaires ccclcfiafliques
fuivant les Loix du Barreau , ou par les Evoques. Il faut re-
marquer que Pierre Damicn ne s'élève ici que contre les Ec-
clclialliqucs qui vengeoicnt eux-mêmes &
de leurs propres
mains , les injures faites à eux ou à leurs biens ; & qu'il ne

contefte point aux Evêques &autres Eccléfiafliques qui font


en même-tems Seigneurs temporels &
fpirituels, la liberté de
défendre les Etats annexés à leur dignité, par des voies juftes
Se raifonnables.
XXV. L'Evêque d'Eugubio avoir interdit une Eglife dé-
pendante de Pierre Damien (s) , fous prétexte qu'elle avoit
été confacrée par l'Evêque de Foflbmbrone , à qui ce droit
n'appartenoit pas. Pierre en fit fes excufes à TEvcque d'Eu-
gubio. 11 reconnoît que c'étoit à lui à confacrer cetre Eglife;
& s'il a fouffcrt que l'Evêque de FoiTombronc en fît la céré-
monie , ce n'étoit que parce que le fâchant indifpofé contre
lui , il avoit eu peur de l'indilpofcr encore d'avantage , en
s'oppofant à fon entreprife. Il déclare donc que cette Eglife
eft de la Jurifdidion de l'Evêque d'Eugubio , le prie de lever
l'interdit , & le fupplie d'accorder fa protedion à fon Mona-
ficre. Il envoya au même Evoque (r) qui le nommoirRodul-
,

phe-, & à Théodoié, Evêque de Sinigaglia , quelques-uns de


les Ouvrages , pour les examiner & les corriger , avant de les
rendre publics.
XXVI. Ayant appris qu'un Evêque («) , qu'il ne nomme
point , alicnoit les biens de fon Eglife , il lui écrivit qu'en
cela il contrevenoit non-feulement aux Décrets du Pape Vi-
dor II , qui , dans un Concile tenu à Florence , en préfence
de l'Empereur Henri , avoit défendu , fous peine d'excom-
munication, ces fortes d'aliénations ; mais qu'il caufoit aufli
un préjudice aux veuves & aux orphelins , pour le foulage-
ment defquels ces biens étoienc deftinés. Il remonte à l'ori-
gine des biens de l'Eglife. Elle ne vécut d'abord que des o-
tlations des Fidèles , enfuice on lui donna des fonds ; & dans
toutes ces donations, les pauvres avoientleur pari:_, comme
les Clercs. Ceux donc , conclut - il , qui aliènent les biens
de l'Eglife , ôtent aux pauvres leur iubfiflance ; & comme les

U) Epjft. lo. I («) E[^fl. 12.


{<) Ej'ill. Il, i
52^ SAINT PIERRE DAMIEN,
pécheurs obtiennent la rémiflîon de leurs péchés , en donnant
leurs biens aux Eglifes ; ceux au contraire qui prennent ces
biens, fe rendent coupables. Qu'efl-ce d'abandonner Icsdix-
mes aux féculiers , finon leur faire boire un poifon qui leur don-
ne la mort ? Pierre Damien avoit procuré l'Evêché à cet Evê-
que c'eft ce qui rautorilbit à lui parler fortement de l'abus
:

qu'il faifoit des biens de Ion Eglife.


XXVII. La Lettre à l'Evêque de Sarfinc (jf) ,eft une exhor-
tation à la vigilance chrétienne. Pierre repréicnte à un autre
Evêque , qu'il doit l'exemple & la correction à fes Chanoi-
nes , parce que les Supérieurs font refponfables des fautes de
ceux qui vivent fous leur difcipline. Il enfeigne dans une au-
tre Lettre {y) , que l'on doit folemnifer l'Odave de la Fête
de Saint Jcan-Baptiftc , de même que le jour, parce que l'O-
flave n'a été établie que pour honorer le jour même de la
Fête. Il y ajoute , qu'il n'eft point furprenant que l'on fafle fous
la Loi nouvelle , les principales Fêtes â\ec oûave , puifque
l'on en ufoit de même dans la Loi ancienne , à l'égard des
huit Fêtes folemnelles des Juifs. Il met pour la première , le
facrifice que l'on offroit chaque jour le matin & le foir ; puis
le Sabbat ; la Fête de la Néomenieou nouvelle Lune; la Pâ-
que ; la Fête des nouveaux fruits i celle des Trompettes , 8s
celle des Tabernacles : & fait voir dans une explication allé-
gorique (z) rapport qu'elfes ont au Chriftianifme.
, le
Livre y. XXVIII. On a mis dans le cinquième Livre ( ^ ) , les Let-
tres adrcffées aux Archiprêtrcs, aux Archidiacres , aux Prê-
tres &
aux autres Clercs. Pierre Damien avoit avancé dans
un Difcours , que l'ame d'un chacun paroît au Jugement de
Dieu , telle qu'elle eft au fortir du corps. Quelques-uns fu-
rent Icandalifés de cette propofition , s'imaginant qu'il s'en-
fuivoit que les oblations , les facrifices , les prières que l'on
faifoit pour les défunts , ne leur fcrvoient de rien avant le
Jugement. Il en écrivit à deux Archiprêtres , à qui il fait voir
que faint Grégoire-le-Grand a dit la même chofe dans fes
Dialogues ; que c'efl la doftrinc des Livres faints. Il défa-
voue la conicquence que fes ennemis en tiroient , & recon-
noît l'utilité de la prière & du faint Sacrifice pour les morts ,

(r^l Eplff. IJ. l^.O^ufc, l6. Eyip. ly. I (i.) Eli/f- 17. Optifc. 4Q,
i})Utip,^, I Ça) EfiJl.Ufaitôl,
CARDIN. EVESQ. D'OSTIE Ch. XXXIIT. 527
difant que ceux qui penfent contrairement _,
font infe£lés de
d'Aërius. Son fentiment eft donc , que l'amc lortie
l'héréfie
du corps & préfentce au Jugement de Dieu, ne mérite plus
par elle-même ; mais qu'elle peut être aidée par les luffragcs
des vivans. Il s'accufe , dans une Lettre à TArchiprctre de
Ravenne (b) , d'un défaut qui lui étoit habituel , Içavoir d'ai-
mer à fe railler des autres: il avoit fouvent combattu ce mon-
flre , comme il l'appelle , fans avoir pu le détruire. Il décrit
dans la Lettre fuivante (c) , l'état déplorable où le pécheur
le trouve réduit à l'article de la mort ; paraphraie deux &
paflages de Jérémie , qui ont rapport à cette circonftance. Il
emploie les paroles du même Prophète, pour montrer que l'in-
tempérance eft plus condamnable dans les Clercs (d) , parce
qu'ils font par leur état , plus unis à Dieu que les laïcs.
XXIX. La Lettre à l'Archidiacre Almeric (e) , ne contient
rien de remarquable. Celle qui eft au Clergé 8c au peuple
d'Ofmo , ne fe lit parmi les Œuvres de Pierre Damien (f) ,
3ue parce qu'il l'écrivit au nom du Pape Léon IX ,
pour leur
éfendre de piller à l'avenir la maifon de l'Evcque aulTi-tot
après fa mort: c'étoitun abus qu'on n'avoit pu jufques-là dé-
raciner dans cette Ville La Lettre du Pape Alexandre II (g) ,
au Clergé &
au peuple de Milan , efl aufli du ftyle de Pierre
Damien. Le Pape, par l'amour qu'il leur portoit comme leur
concitoyen, les exhorte à méprifer les chofcs d'ici-bas, pour
n'afpirer qu'aux biens éternels.
XXX. Pierre Damien avoit écrit à un Moine (k] , ce qui
fc pratiquoit dans fon Monaftere , touchant les difciplines
ou flagellations. Sa Lettre fut , contre fon intention , rendue
publique. Les laïcs & les Clercs quoiqu'elle ne les regardât
,

point , commencèrent à blâmer cet ufage. Ilsdifoient: Si l'on


admet une fois ce nouveau genre de pénitence , c'en eft fait
des pénitences canoniques , & on anéantit la Tradition. Il
répondit à ces plaintes , par une Lettre adrelTée au Clergé de
Florence. En premier lieu , il prend à témoin les Frères qui
vivoient dans l'étroite obfervance de la fainte Règle , qu'il
n'a rapporté dans fa LettBe , que ce qu'ils pratiquoient cha-

(i) E^•/f. X.
[g) Eifl. 7.
(J) Efifl 4, (b)EtiJl.9,
,

5a8' SAINT PIERRE DAMIEN,


que jour, 8c ce quiétoit d'un commun
ufage parmi eux. En-
iuite il juflifie l'ufage des Hagcllations
par les exemples de ,

Jcfus-Chrift, qui fut flagelle à fa Paffion ; de laintPaul, qui


reçut cinq fois les trente- neuf coups de fouet; des Apôrres,
des Martyrs , qui ont louffert le fupplice des verges ; de faint
Jérôme , qu'on dit avoir été fouetté par ordre de Dieu. Il
prévient l'obiedion qu'on auroit pu lui faire , que ces Saints
avoient été fouettés par d'autres répond , que fi nous •,
&
devons attendre les mortifications de la part des autres
nous fommes exemts de porter notre croix , puisqu'il n'y
a p'us de perfécuteurs pour nous crucifier. On ne con-
damne pas , ajoute-t-il , celui qui jeûne fans l'ordre du Prê-^
tre ; pourquoi condamner celui qui fe donne la diicipline de
fes propres mains ? Il efi: utile de châtier la chair , pour re-^
parer le tort qu'on s'eft fait en recherchant les plaiflrs , de &
punir les voluptés par les mortifications. Pierre dit à ceux
qui rcprenoient cette pratique , parce qu'elle étoit nouvelle ;
qu'il falloit donc aufTi reprendre le vénérable Bede, qui or-
donne de mettre aux fers certains pénitens. Il rapporte divers
exemples d'auftérités fingulieres , que Pallade dit avoir été
pratiquées par les anciens Solitaires ; quoiqu'on n'y trouve &
point de flagellations , il ne laifTe pas de conclure qu'il efl:
permis de pratiquer des pénitences, autres que celles qui font
prefcrites par les anciens Canons. Il s'aurorife encore de l'u-
fage où étoient les Fvcques , d'obliger les pénitens à qui ils
avoient impolé de longues pénitences ou des jeûnes , de les
racheter par une fomme d'argent , quoiqu'on ne voie point
d'exemples de ce rachat dans les Canons. Pourquoi ne le-
roit-il pas permis à un Moine , à qui il ne relie point de bien
de racheter auffi la longueur de fa pénitence , par çlcs mortifi-
cations particulières?
XXXI. Pierre ne pouvant , à caufe de fes infirmités (;'),

aller à Faïence pour réle(5lion d'un' E\cque , pria le Clergé


& le peuple de la différer jufqu'à l'arrivée de l'Empereur,
dont la préfcnce rendroit la paix à leur Egîiié,, d'avertir le
Pape de ne point donner d'EvêqîieavaWt' ce tcms-là ;
leur
& de choifir un d'entre eux pour gouverner l'Egliie pendant
la vacance. Appelle à Ravcnnc par rArcTicvcciuc & les habi-

( i } Efijl. 9. Opufc. ij. E, If. 10. -, tans


CylRDIN. EVESQ. D'OSTIE. Ch. XXXIII. 519
tans {l)jM s'appcrçut qu'on ne l'y traitoit pas avec beau-
coup d'honneur; que fon fcjour en cette Ville étoi: peu utile
au iakit des âmes cela lui fit naître le defTein d'en lortir &
:

de retourner mais auparavant il voulut avoir


à fa folitudc
;

l'avis du Tréforier de cette Eglifc. C'efl: le iujet de la Lettre


qu'il lui écrivit. Dans celle qui cft adrelTce aux .Chapelains
du Duc Godcfroi (m) , il fait voir qu'ils l'accufoient mal-à-
propos d'avarice. Sa conduite prouvoit en effet fon dclinté-
rcflcment car la Ducheffe ayant prcfentc à l'offrande de la
:

Meffe que Pierre Damien célébroit , une pièce d'or, le Moi-


ne qui la reçut, la laiffa lur l'aucel, avec une autre pièce don-
née en offrande par une Marquife. L'un de ces Chapelains
prit une de ces pièces la Ducheffe lui ordonna de la rendre ;
:

mais Pierre refufa de la recevoir. Après s'être juffifié par la


fimple expofition du fait, il reprend ces Chapelains de deux
erreurs conlidérablcs ; l'une , en ce qu'ils foutcnoient que les
Minières de l'autel dévoient être mariés ; l'autre, que l'on
pouvoir, ians fimonie , donner de l'argent pour être nomme
à un Evêchè , pourvu que l'on n'en donnât point pour fim-
polition des mains. Au défaut du Code des Canons , que
Pierre n'avoir point fous les yeux , il réfuta ces deux erreurs
par divers paffages de l'Ecriture & des Pères que fa mémoire
lui fournit , ou qu'il avoit dans quelques feuilles volantes.
XXXII. Les deux Lettres à Kodulphe («) , Vital , & au-
tres Clercs de l'Eglifede Milan , font un éloge de leur amour
pour la vérité, & de leur conlfance à la défendre. Les deux
(uivantcs font partie des Opuicules (0). Il enfeigne dans la ré-
ponle aux queflions du Prêtre Ubert (p), qu'il faut éviter
route nouveauté dans la célébration des Myfferes ; qu'on ne
doit mettre ni huile ni vin dans l'eau deftinéeau Batême ; mais
feulement du fainr chrême; ni omettre l'ablution du calice à
la Meffe , li ce n'eff lorfqu'on eft obligé d'en célébrer une fé-
conde le même jour (/y).
XXXIII. Les Lettres du fixième Livre (r), font toutes Livre;;,

adreffées à des Abbés ou à des Moines. Ceux de Cluni lui

( l ) Efift. I I . Opufc. 4 1 . El-//?. I 2. (p) Epifl. I 8.


(m)Eril. 13. {()) Epiji. \ 9. opufc. i8.
<«) £/'»/' 14-
'f.
(0) Ejiji. 16. 17. Opufc. ^i ^ S.

Toms XX, XXX


,

5^0 SAINT PIERRE DAMIEN,


avoient promis en reconnoiflance de les iervices , de faire an-
nuellement pour lui un Icrvice le jour de la mort. Il écrivit
à l'Abbé Hugues , d'ordonner la même chofe dans tous les
Monafteres de fa Congrégation. Dans fa Lettre à Gebizon,
il le reprend vivement de ce qu'il avoit quitté l'Ermitage qu'il

lui avoit confié, pour fe faire Abbé d'un autre Monaliere ;.

& lui ordonne de retourner à cet Ermitage , ou de vivre en


(impie Moine dans ce Monaftere. Il tétrade dan2 une autre
Lettre ( J ) , l'erreur de fait où il étoit tombé , en difant que
faint Jean-Baptifle avoit été conçu dans le tcms de la Fête
des Tabernacles , c'efl-à-dire , au mois de Septembre ; au
lieu qu'on doit rapporter fa conception au huitième d'Oélo-
bre (f ). Un Abbé fe plaignit à lui , de ce qu'il avoit reçu un
de fes Moines ( « ) > contre la dcfenfe delà Règle de Saine
Benoit. Pierre Damien répondit , que la Règle devoit s'en-
tendre des Monafleres de Cénobites , & non pas des Ermi^
tes , qui mènent une vie plus parfaite. Il loue , dans fa Lettre
à l'Abbé de Sainte Marie à Conftantinople (.r) , les Moines
Latins qui y étoient , de ce qu'ils confervoient la pureté de
leur foi & de leurs mœurs ; mais informé qu'un de les Moi-
nes qu'il avoit excommunié (y) , s'étoit reciré au Monaftere
de ClafTe , il écrivit à l'Abbé de ne pas le retenir chez lui
promettant de recevoir ce fugitif avec douceur , s'il vouloir
revenir. Ecrivant aux Moines Rodulphe & Ariprand (z) , il
leur fait une dcfcription d'une longue maladie qui l'avoit ré-
duit à l'extrémité ; en forte qu'on lui avoit adminiftré l'Extrê*
mc-On£lion, & qu'on l'avoit couché fur la cendre & lecilicc ^
comme devant expirer dans le moment.
XXXIV. Quoiqu'il ne fut point d'avis que l'on fe char-
geât de faire des pénitences pour les autres ( <ï ) , il vouloir
qu'on s'en acquittât , quand on s'en étoit chargé. Le Moine
Ccrcbrofus (b) , avec qui il avoir eu quelque dilficulté , lui en
fit une lur l'ulagc des flagellations volontaires ; non qu'il les

délapprouvât abfolumcnt il n'en blàmoit que l'excès 8c la


:

longueur, Pierre Damien employa dans fa réponfe les mêmes


raiions qu'il avoit alléguées au Clergé de Florence. Venant

(0 hpift. 9.

(^.) f />///. 19.


(il) tpijl. 10.
,

CARDTN. EVESQ. D'OSTIE. Ch. XXXTII. 531


mi point de la contcflation , il dit que s'il cft permis de fe
donner cinquante coups de difciplinc , comme l'avouoin ce
IVloinc , on pouvoit s'en donner Ibixante ou cent , & même
•cent mille ce qui efl bon ne pouvant être pouflc trop loin.
:

Il raifonne de même par rapport au jeûne. Si le jeûne d'un


jour cil bon , celui de deux jours ou de trois efl: meilleur.
Il en cfi: de même , dit - il , des autres exercices de piété ,
comme de veiller , de pfalmodicr , de travailler des mains,
de méditer les divines Ecritures , en affligeant la chair , en
la déchirant, on le purifie des péchés que l'efprir a contrarié
par clK
XXXV. Un autre Moine lui avoir demandé (c) pourquoi .

faint Grégoire avoir dit , que le mauvais riche n'étoit damné


four avoir refulé la charité à La/are , que parce qu'il écoit
né Icus la L< i nouvelle , qui ordonne de loulager les pau-
vres? il ajoutoit, qu'il ne paroiflbit pas que le m.auvais riche
eût vécu lous la Loi nouvelle, qui n'a eu lieu qu'après l'Al-
cenllon de Jellis-Chrifl:. Pierre Damien rcpona , que, félon
rEsangiie, la Loi ancienne (fe les Prophètes ont duré julqu'à
faint Jcan-Baptifle. Or, ce faint Précurfcur ordonne à ceux
qui ont deux tuniques d'en donner une à celui qui n'en a point:
& de do' ner à manger à celui qui a faim; deux préceptes vio-
lés par le mauvais riche.
XXX VL Pierre recommande au Moine Etienne (d) , de
récirer chaque jour l'OfBce de la Vierge de lire afildue-
, &
ment la fainte Écriture. Il paroît par la Lettre circulaire aux
Ermites de fa Congrégation (e) ^ qu'il s'apperçut de l'abus
qu'il y avoit dans les longueurs des flagellations. Quelques-
uns, en effet, la prenoient chaque jour pendant tout le tems
qu'ils mettoicnt à réciter deux fois le Pieautier : ce qui rui-
noit abfolument leur fanté , &
jettoit la terreur dans ceux qui
fe préfentoient pour fe faire Moines. Il ordonna donc que
ces fortes de flagellations feroient volontaires
;
qu'on ne pour-
roit dans un jour , les étendre au-delà de quarante Pfeaumcs
il ce n'efl en Avent & e.'i Carême, où il fera permis de pren-

dre la difcipline pendant foixante Pfeaumes. Par l'établiATe-


ïiient de cette règle , nous ne fupprimons pas , dit-il , ce qui

( r ) Epift. 18. I (e) Epijl. 30.

Xxxij
5?2 SAINT PIERRE DAMTEN ,
eftbon, mais nous retranchons ce qui eft fuperflu. Il leur or-
donna encore de rendre après fa mort , aux autres Monafle-
res (/) , les biens qu'ils en avoient, Se qu'il leur avoit permis
de garder pendant la vie.
Livre 7.
XXX V. Le Icpticme Livre des Lettres (g) , contient cel-
les que Pierre Damicn écrivit aux Princes 6c aux PrincefTes»
Il y en a deux à l'Empereur Henri III dans l'une, il de-
:

mande à ce Prince le pardon & la liberté du Comte Giller ;.

dans l'autre (/?) , il le loue d'avoir ôté TArchevêché de Ra-


venne à Wiquier , qui s'en éroit emparé par de mauvaifes
voies , & qui Tavoit mal adminiflré. Ce Prince étant more
en 105 <5, laifia la Couronne à Henri fon fils , qui n'avoit pas
encore cinq ans. Ses Miniftres témoignèrent beaucoup d'in-
conftance dans le tems du fchifme tantôt ils le déclaroienc
:

pour Alexandre II, tantôt ils prenoienr le parti de l'Anti-


pape Cadaloiis. Pierre Damicn s'en plaignit au jeune Roi (?),
en le priant de favoriler l'éledion d'Alexandre , & de s'op-
pofer â l'entrcprife de Cadaloiis faifant dans fa Lettre , le
:

parallèle des deux Puiflances , la Royale & la Sacerdotale ,


il dit: Comme elles font unies en Jefus-Chrift , elles ont auITî

une alliance mutuelle dans le peuple Chrétien , chacune a be-


foin de l'autre le Sacerdoce eft protégé par la Royauté , &
:

la Royauté appuyée fur la fainteté du Sacerdoce. Le Roi


porte l'épée pour s'oppofer aux ennemis de l'Eglife ; le Pon-
tife veille & prie pour rendre Dieu propice au Roi & au peu-
ple : l'un doit terminer par la Juflice , les affaires terrcftrcs ;
l'autre doit nourrir les peuples affamés de la doctrine célelle t

l'un eil établi pour réprimer les méchans par des l'autorité
Loix ; l'autre a reçu les clefs pour ufer , ou de la févérité des
Canons , ou de l'indulgence de l'Eglife. Pierre rapporte en-
Tiom. 13.4. fuite ces paroles de faint Paul Le Prince e(i le Minière de
:

Dieu, pour vous favorifer dans le bien mais Ji vous faites mal y
:

vous aurez raifon de le craindre , parce que ce n'efl pas en vain


qîizl porte rêpée : car il ejî le Minifîre de Dieu , puur exécuter fa
vengeance en puni(fant celui qui fait mal. Puis il ajoute en par-
lant au Roi Si vous êtes donc le Miniftre de Dieu , pourquoi
:

ne défendez- vous pas l'Eglife de Dieu ? Il fait une peinturc


CAKDIN. EVESQ. D'OSTIE. Ch. XXXIII. 533
affreufede Cadaloiis ; & rcmoigne être prêt à tout fouffrir pour
la dcfenie de TEglile Romaine.
XXXVI. L'Impératrice Agnes avoir écrit à Rome (/) ,
pour obtenir le Pallhim au nouvel Archevêque de Maycnce.
Pierre Damien répondit au nom des Cardinaux , qu'il n'étoit
point d'ufage d'envoyer le Pallhim , Hnon à ceux qui avoient
été examinés ou par le Pape ou par fes Légats {m) ; qu'il étoit
donc nécefifaire que l'Archevêque de Mayencc vînt lui-même
à Rome pour le recevoir. Dans une autre Lettre à cette Prin-
cefTe («) , il l'exhorte à retourner au plutôt en cette Ville ,
pour y être un exemple de vertu , & afin qu'elle y eût fon
tombeau auprès de celui de fainte Petronille fille de l'Apôtre
iamt Pierre. On a parlé dans l'article du Pape Nicolas II,
des Lettres à Anne, époufe de Henri , Roi de France. Celle
qui eft adreflTée à Godcfroi , Duc & Marquis de Tolcane (0) ,
cft pour l'engager à revenir à l'obéiflance du Pape Alexan-
dre II , qu'il avoir quittée pour s'attacher au parti dj Cada-
loiis. Pierre Damien lui en écrivit une féconde (/>), pour

l'engager à fiournir à l'Abbé de Saint Jean-Baptifte , de quoi


payer la Bibliothèque qu'il avoit achetée (7). Ce Prince ik. la
Princeffe Béatrice Ion époufe , avoient rélolu d'un commun
conlentement , de vivre en continence, (r). Pierre en félicita
cette Dame {s) , en l'exhortant à pratiquer aufli les autres
vertus chrétiennes , & d'y prendre plus de pi lifir que dans la
nobleffe de la naiffance. Il tâcha d'infpirer les mêmes fen-
timens à un Prince qui commandoit les armées ( f ) ; en lui
rcpréfentant , que Dieu ne lui avoit foumis un fi grand nom-
bre d'hommes , & ne l'avoir comblé de tant de richefix^s ,
qu'afin qu'il fe fervît de tous ces avantages temporels pour s'en
procurer d'éternels , en obfervant les préceptes de fa Loi
divine. Il lui recommande les Monafteres qui étoient dans
le voifinage de fon armée , particulièrement celui de Saint
Vincent.
XXXVII. Pierre avoit ordonne au Marquis Rainier («) ,
le pèlerinage de Jérufalem, pour l'expiation de fes péchés ;

(0 £/>//?. 4. (<l) Epifl. II. II. Opilfc. ^Jr


(m) Ep'ji. 'i.Ofufc. ^6, (r)Epij}.ii.
{>.) bpij}. 8. (s)Epift. t+.
(0) Epi/}. 9,
Ce) £Ni- lo- (,»] Epifi.li, Optifc, 18,
534 SAINT PIERRE DAMÎEN,
voyant qu'il tardoit à parcir , & qu'il alléguoic divers pré-
textes pour fe difpcnfer de ce voyage; il lui écrivit (.v) , que
les difficultés & les périls qu'il appréhcndoit n'étoienc pas ,

une raifon fuffilante pour ne pas accomplir fa pénitence , 8c


que Dieu prenoit loin des gens de bien ce qu'il prouve par
;

plufieurs exemples. Un
des péchés de Ra'nicr , étoit d'avoir
ufurpc les biens des veuves &
des pupilles. Pierre D.imien fit
entendre à la ComteH^e fa femme ( y ) , qu'elle dcvoit rcflituer
tous ces biens à ceux à qui fon mari les avoit enlevés ; lui &
confeilla pour éviter à l'avenir ces fortes d'injuflices , de
,

prendre plus de foin de la cultuie de fcs terres ; il l'exhorta


auiïià faire l'aumône. Il fait voir dans cette Lettre (z) , qu'il

Y a des occafions où la femme n'ell; poiat obligée d'obéir à fon


Judith. 8. niari ; & d'autres où le mari doit écouter les avis de fa femme ;
i-Reg.zu fur quoi il rapporte ce qu'on lit dans l'Ecriture, de Judith,
ceuef.^u
d'Abigail&deSara,
Livre 8. XXXVIII. Le huitième Livre («), ed un mélange des
Lettres que Pierre Damien écrivit aux perfonncs conÛituées
en dignité , &
à celles qui mcnoient une vie privée. Cinthius
Préfet de Rome , s'acquittoit de fa charge avec honneur. Il
étoit le défenfeur des Loix , rendoit la JuRice avec inté-
grité & contenoic le peuple dans le devoir par fes difcours
,

& par l'exemple d'une vie régulière. Il en un dans l'tvglife


fit

lejour de l'Epiphanie. Pierre Damien en prend occalion


de montrer que deux chofcs font efTentiellcs à un Prédica-
teur ; la dodrinc & la vertu. Il exhorte Cinthius de conti-
nuer à remplir fes fondions comme il avoit fait julqucs-là ; à
être le protedeur des pauvres & des orphelins ; & à prendre
la défenfe des biens de l'Eglife. Pierre dit en général , que
chaque Chrétien efl: Prêtre par la grâce de Jefus - Chrifl: ;
mais il ne s'exprime ainfi , que relativement à ce que fainc
Jean dans l'Apocalypfc , 8c faint Pierre dans fa première
Epitre , dont il rapporte les paHages , difent du Sacerdoce
de tous les Chrétiens , qui conlidç à s'immoler eux-mêmes à
Dieu par la pratique de toutes fortes de bonnes œuvres. Il
ne laiffc pas d'avancer que Cinthius a^oit imité les fondions
des Prêtres , en publiant dans l'Eglife le jour de l'Epiphanie

(«) Eoi/Î. J7. J


(x) Epift. 19. Opufc.io,
i;)Efifî.i9. 1 (-1} Pag. 121. Epift. t.
,
,

CARDIN. EVESQ. D'OSTIE. Ch. XXXIII. 535


fur la Tribune une Ordonnance qui tcndoit au bien public,
,

& en exhortant le peuple à l'exécuter. Mais imiter les fonc-


tions du Sacerdoce & les faire d'office , n'eft pas la même
choie & Pierre Damicn , en ajoutant que peur lui, il étoic
:

oblige au miniftere de la parole en vertu de l'Ordre facerdo-


tal qu'il avoir reçu , il fait voir clairement qu'il participoit au
Sacerdoce d'une autre manière que le Préfet ; & que (i Cin-
thius avo't harangué le peuple dans l'Eglife , ce n'étoit point
qu'il en eut le droit ; au lieu que lui , comme Prêtre , y étoit
obligé. Le Préfet s'étanc rallcnti dans le zélé qu'il avoit à ren-
dre la Jullice, fous prétexte de s'appliquer à la prière, Pierre
Damicn lui écrivit une féconde Lettre (b) , où il montre que
rendre la Juftice au peuple , c'eft la même chofe que prier ,
& qu'il ne devoir pas préférer fon utilité particulière au bien
commun.
XXXIX. Il traite dans la Lettre à Albert (c), du refpe£l
& de l'obéiffance que les enfans doivent à leurs pères & mères
& rapporte pour l'avoir apprile du Pape Alexandre II la ,

punition miraculeufe d'un jeune homme qui avoir frappé fa


more fur le vifage. Il écrit au Sénateur Alberic à Ermi- &
line fa femme, qu'au lieu de s'affliger de la mort de leur fils,
ris dévoient s'en réjouir
,
puifqu'il étoit padé de cette vallée
de mifcre à. la félicité éternelle , fans avoir ni fouffert ni com-
battu , étant mort dans l'enfance. Pierre, Sénateur de Rome,
ayant commencé à bâtir une Egliic (d), l'abandonna fans
l'avoir achevée , fur ce que c]uclqucs-uns lui dirent que Dieu
ne lui en tiendroit aucun compte. Pierre Damien le défabufe
dans ia Lettre (c) , montrant par l'exemple de Salomon , &
par l'ordre que Dieu donna à Moyfe , pour la conflruttion
du Tabernacle ; que l'on doit mettre ces fortes d'ouvrages au
nombre des œuvres agréables à Dieu.
XL. Pierre donne pour confolation à un malade qui lui en
avoit demandé (_/) , quefouffrances dont Dieu permet
les
que nous ioyons affligés , marque de notre préde-
font une
fiination ;
qu'ainfi l'elpérancc de la félicité doit nous les faire,
fupporter avec patience. Regardant au contraire la profpé-

WEip. 1.
I
(e]Fpil}. f.
(<) t>',"'- 5-
f (/) tp<fl. 6,
,,

53f SAINT PIERRE DAMIEN,


rite comme
dangereufe au (aluc (g) il veut que l'on ufe for
-,

bremenc des biens temporels , & que Ton falle de férieufes



reflexions fur les fuites du Jugement dernier , fur la rigueur
du Juge, aux crimes (h). Il rapporte
fur les peines deftinces
ce qu'on lit de plus touchant fur ce fujet dans les Livres faints.
Il confeille deux choies à un homme accoutumé au parju-

re (?) ; la première, de ne point jurer du tout , & de fe con-


tenter du prcfcrit de l'Evangile oui & non ; la féconde (/)
:

de faire l'aumône cette bonne œuvre étant pour ceux qui la


:

font, une lource des grâces. Il combat le vice d'orgueil (in) ,


par un grand nombre de pafTages de l'Ecriture & fait voir ;

que ceux-là tombent bien vite , qui s'appuient fur un fonde-


tnent fi ruineux. La Lettre aux deux fœurs Rodelinde &
Sufficia («) , cfl remplie d'avis falutaires : elles avoient l'une
& l'autre perdu leur mari (o). Pierre Damicn leur confeille
de demeurer veuves , & de ne s'appliquer pas moins à la pu-
reré du cœur , qu'à celle du corps. Les moyens qu'il leur prcf-
crit (p) , font la patience dans les tribulations
, l'aiïîduité à

la prière fréquente
, la &
fincere confclTion de leurs péchés
le lupport des injures , le pardon des ennemis , les œuvres
de miféricorde , l'éloignement des affaires temporelles , le
mépris des richeffes. La dernière de les Lettres qui eft adrelTée
à un malade prêt à expirer (^) , efl une des prières que l'on fait
pour lesagonifans.
Tomei.Ser- XLI. Lc fccond Tome des Œuvres de faint Pierre Da-
^^'^^ > Comprend les Sermons &' les vies de quelques Saints
Pierre'^D'a-"'
mien. les unes & les autres difpolces félon l'ordre du Calendrier. Les
Sermons font au nombre de 75 ; mais il y en a plufieurs qui
font de Nicolas , Moine de Clairvaux , & Secrétaire de faint
Bernard. QuelquesCritiquesconjecturcntqu'ilyena de Pierre
Comeflor , Ecrivain du douzième iîécle. On trouve dans la
Bibliothèque du Roi (r), un recueil d'Homélies fur les Evan^-
giles de Tannée , dont la première efl fur ces paroles // y :

aura des fgnes , qui font le commencement de l'Evangile du


premier Dimanche d'Avent. Ces Homélies font intitulées ;

<g)El''li.7. Opnfc.^x. (u) Epifl. li.


(h) Epifl. 8. (f.) £•.•/?. i-^.Optifc. ;;ç.
(/) Epifl. $. Opnfc, ;8. {p^E;ifî.,4.
(.1) Epifl. 10. ('])Ep'fl. .y.
(m) F.piji. ii.OpHfc. 30, l,r)Cod, 4016 {J 4137.
Jjtj cours
CARDIN. EVESQ. D'OSTTE.Ch. XXXIIT. 537
Difcours du Maître Pierre , Evêque d'0[îie. Il y a fur cette in-
titulation , une note dans
le manufcrit , où l'on remarque que
Pierre Damien ne trouve en aucun endroit appelle Maître ,
fe
mais toujours , Pécheur &
Moine. Cczoient les titres qu'il pre-
noit ordinairement. On croit donc que parla qualité de Maî-
tre , donnée à Pierre , Evêque d'Oftie , il faut entendre le Se-
crétaire de Léon IX , &
non pas Pierre Damien. Venons au
détail des Difcours qui portent Ion nom.
XLII. Je ne vois pas qu'on lui contefte ceux qui font fur Remarque*
la Fête de l'Epiphanie, fur la tranflation des reliques de faint
^"'" "' ^""
mois.
Hilaire, Evêque de Poitiers ; fur le martyre de iaint Ana-
ftafe , Moine ; fur faint Severe &
faint Eleuchadie , Evcques
de Ravenne ; fur le Dimanche des Palmes ; fur la veille de
la Fête de faint Benoît fur la Ccne du Seigneur ; lur la Ré-
•,

furredion ; fur faint Georges ; fur faint Marc ; fur faint Vi-
tal , Martyr ; de la faintc Croix ; fur faint An-
fur l'invention
thime & Martyrs ; fur la defcente du Saint-
laint Boniface ,

Efprit ; fur les deux frères Laurentin & Pergentin , Martyrs.


Le premier Difcours fur faint Jcan-Baptifte , efl attribué à
Nicolas de Clairvaux , dans la Bibliothèque de Cîteaux &
dans quelques manufcrits. Néanmoins Dom Mabillonne l'en
croit point Auteur , parce qu'il efl dit dans ce Difcours , que
l'on ne célébroit d'autre naifTance que celle de Jefus-Chrift
& de fon Précurfeur ; au lieu que [du tems de faint Bernard ,
antérieur au Moine Nicolas {s), on célébroit encore dans
l'Eglife ia Nativité de la fainte Vierge , Mère de Dieu. Mais
il eu à remarquer, que s'il n'eft parlé que de deux Naiflances

dans ce Difcours , tel qu'il fe trouve dans l'édition de Dom


Mabillon , il eft fait mention de trois dans le même Difcours,
dans l'édition de Conftantin Cajétan. On peut donc s'en te-
•nir fur l'attribution de ce Difcours , tant à l'autenticité des
manufcrits qui le donnent au Moine Nicolas, qu'à celle de la
Bibliothèque Ciftercienne (f) , où il lui eft attribué avec dix-
huit autres Difcours ; fçavoir , fur la Fête des Apôtres faint
Pierre & faint Paul ; fur celle de faint Benoît ; de fainte Ma-
deleine ; de faint Picrreaux-Liens ; de l'Aflbmption de la
fainte Vierge, de fa Nativité; de l'Exaltation de la fainte

(j) Ma Bill, in natis ad iuftf Serm, tom. ! (j) Bihlitit. Cifterc, Ttm. j .
f , i^ 5
1|
l fOpn/c.S. Bern.p. 689. , i

Topie XX, Yyy


5 58 SAINT PIERRE DAMIEN ,
Croix ; des faims Anges ; de la Dédicace de l'Eglife; defaint
Viâor; de tous les Saints ; de faint Martin; de laine André;
de faint Nicolas ; fur TAvent ; fur la Veille & la Fête de
Noël ; & fur faint Etienne j premier Martyr. G'eft donc dix-
neuf Sermons qu'il faut ôter à Pierre Damien , pour les ren-
dre au Moine Nicolas. Cajétan lui-même s'efl: apperçu que le
Sermon de la Nativité de Jefus-Chrifl ne pouvoit êcre de Pierre
Damien , puifqu'on y fait l'éloge de faint Bernard (z) , beau-
coup plus récent que cet Evêque.
XL m. Ses autres Difcours font , deux fur faint Jean-Bap-
tifte ; le premier, fur la Fête de faint Pierre de faint Paul ; &
un fur faint Alexis trois fur faint Apollinaire , Evêque de
;

Ravenne; un de faint Chriflophe, Martyr deux des faints ;

Flore &: Lucille un de faint Rutîin


; Martyr un de faint
, ;

Etienne , Pape & Martyr un des faints Martyrs Donat Se


;

Hilarien un de faint Caffien , Martyr ; deux de faint Bar-


;

thélemi , Apôtre le fécond & le troificme fur la Nativité


;

de la fainte Vierge le fécond fur l'Exaltation de la fainîe


;

Croix ; trois fur faint Matthieu , Apôtre un fur faint Leu j


;

un fur S. Fidèle, Martyr le premier des deux fur faint An-


;

dré, Apôtre; le premier fur Noël ; deux fur faint Jean l'E-
vangélifte; un de faint Barbatien , Prêtre & Confefleur ; un
de fainte Colombe , Vierge & Martyre. L'Editeur met en-
fuite plufieurs Difcours qui n'ont point de jours fixes ; deux
pour la Fête des Vierges ; quatre pour la Dédicace d'une
Eglife , dont le premier eft de Nicolas de Clairvaux ; deux
de morale & le fragment d'un Difcours Synodal. Dom Luc
d'Acheri a fait imprimer dans le feptiéme Tome de fonSpi-
cilege (a) , cinq Difcours fur l'Oraifon Dominicale , fous le
nom de faint Pierre Damien (b) mais il y a apparerKe qu'ils
:

font de faint Pierre Chryfologue , Archevêque de Ravenne.


On leur a donné place dans toutes les éditions de fes Œu-
vres , & on les lui a reftitués dans le premier Tome de la
nouvelle édition du Spicilege. C'eft à ceux qui ont en main
les Sermons de Pierre Comcftor , à examiner s'il ne s'y en
trouve point du nombre de ceux que Cajétan nous a donnés
fous le nom de faint Pierre Damien. En attendant des éclair-

(t) Pfg. 146. I (i) Voyit Tew. IV t' M»


(») fagt J20, I
CAKDIN. KVESQ. D'OSTIE. Ch. XXXIII. ni>
cifTemens de leur part fur ce fujet , nous remarquerons qu'il
n'y en a aucun qui finiflc par la claule udrée dans les Ser-
mons de Pierre Comeftor ^ en ces termes ou en cquivalens :
Avec !a grâce de J efus-C hriji notre Seigneur , notre Roi, notre
Juge y qui viendra juger les vivans ô'^ it^^ rrorts , & le Jiécle par
le feu.

XLIV. Pierre Damicn écrivit , à la prière de Hugues ,


^Y^^^ <•«*

Abbc de Cluni (c) , la vie de faint Odilon. Ce n'eft qu'un


abrégé de ce qu'en avoi: dit Jotiaud , dans , diiciple du Saint
les trois Livres qu'il compofa,
d'Epitaphe de
tous le nom
l'Abbé Odilon , &
qu'il dédia à Etienne fon neveu. Pierre
écrivit auiïi la vie de laint Maur , Evèque de Cefena , fur ce
qu'il en avoir appris de quelques Moines dont l'autorité ne
lui paroiflbit pas mépriiabîe {d). Il y joignit quelques mira-
cles du Saint , qu'il avoit Içus par la même voie. Surius &
Bollandus ont rapporté cette vie au vingtième de Janvier. Ils
ont donné au 15) de Juin, celle de faint Romuald. Pierre
Damien eut quelque peine de le réioudre à l'écrire , penfanc
qu'il lui étoit plus utile de pleurer fes propres fautes, que de
tranlmettre à la poftérité les vertus des autres. Mais voyant
le grand concours de peuples qui venoient de tous côtés au
tombeau du Saint , le jour de fa Fête; & que témoins des mi-
racles qui s'y opéroient , ils fouhairoicnt de fçavoir les cir-
conftances de la vie de ce Saint , il la mit par écrit. Dom
Mabillon croit que Pierre Damien s'eft trompé (e) ,en don-
nant à faint Romuald cent vingt ans de vie ; qu'il vécut &
moins de tcms. Il ne trouve pas non plus (/) , que ce que
dit Pierre de la donation faite par l'Empereur à faint Ro-
muald , du Monaftere de Mont-Amiat, s'accorde avec ce
qu'Ughel rapporte des Abbés de ce lieu. Pierre étant à Flo-
rence en 1063 , apprit la mort de Rodolphe , Evêque d'Eu-
gubio, qui avoit autrefois été fon difciple. Aufli- tôt il en
écrivit à Alexandre II fc conformer à l'ordre qu'il
{g) , pour
avoit reçu de ce Pape, de ne lui écrire que des Lettres édi-
fiantes, &
qui méritaiïent d'être confervées. Il compofa le
corps de fa Lettre de la vie de ce iainr Prélat. Il y rapporte

(f) Tom. 1. f. 179. I (/) 'idtm. Lih. îj". nam. \6.in TJ^htlt.
(jyFa<(. \ S,-. It tl.f.iir. tant. I.f»g.'7\t3.
I

f. Î3S. l

Yyyij
,

540
^'^-^
SAINXrPIERRE DAMIEN",
âuffi diverfes circonftances de la vie de Pierre frère aîné de
Rodolphe. avoient embraffé enfemble la vie érémitique à
Ils

Fontavellane , fous la conduite de Pierre Damien. N'ayant


point trouvé d'occafion pour envoyer fa Lettre au Pape (A),
il joignit à la vie de l'Evêque Rodolphe, celle de Domini-

que lurnommé le CuirafTé , à cjufe d'une cuiraffe de fer qu'il


portoit continuellement par pénitence. Prévoyant que ce qu'il
raconte deifes grandes auftérités ,' paroîtroit incroyable à
quelques - uns , il protcfte de fon amour
inviolable pour la
vérité. On Jvoit du moins dans 'famanière de raconter les-
chofes , une grande candeur : mais il n'avoit pas vu lui-mê-
me tout ce qu'il rapporte. Il s'en efl; lié à la bonne foi des
autres.
lAftesdumar- XLV. C'eft auflTi ) , que les Aftes du mar-
fur le crédit (i
bre des Sain-
^yj^ ^ç fainte Flore &
defainte Lucille avoient de fon tems,
Lucille. qu'il les a donnés comme finceres. Mais Baronius les meil- &
leurs Critiques (l) 7 n'y trouvent rien qui ne leur paroifle ou
fabuleux ou apocryphe. Ils ne jugent pas ainfi des AîVes de
faint Jacques , Diacre , & de faint M
arien , Lecteur, Mar-
tyrs en Numidie , dont Pierre Damien a expliqué quelques
endroits , dans un Difcours qu'il fit étant Prieur du Mona-
ftere de Sainte-Croix à Avellane. Ces Ades ont tout le mérite
des originaux (w),
Tometroi/îé- XLVI. On a groflî le nombre des Opufcules de Pierre
me. Opufcu- Damien , en donnant ce titre à quantité de Lettres , à caufe
Dai^en,'"'^ de leur longueur. Dans le premier qui efl: adreffé à Ambroi-
fe ( «) , il enfeigne ce que l'on doit croire touchant les My-
fleres de la Trinité & de l'Incarnation , réfutant en paffant
leshéréfies d'Arius & de Sabellius , d'Apollinaire, de Mâ-
nes , de Neftorius , d'Eutychés ; & prouve contre les Grecs
par l'autorité de l'Ecriture & des Pères que le Saint-Efprit ,.

procède du Père & du Fils. Le fécond Opufcule à Hone-


ftus ( Aniilogue contre les ]utfs , parce qu'il y
) , cft intitulé :

fait voir contre eux par des paffagcs qu'ils ne pouvoient re-
,

jetter , étant tous tirés de l'ancien Teftament , que Jefus-Chrift


cft véritablement Fils de Dieu. Le troifiéme Opufcule cft fur

Jitm. ibid,p»g, ilo. (»«) Vcyettom. J.p. »JI«


QJj)
(O P..^.il6. {fi)Opufc, I.
( y) Faron. not.ad Martjrtlog.'Rom.ad
ititm Z9 JhIH , TiLLEM. tant, 4. p.- 14>]
,

CARDIN, EVESQ. D'OSTIE. Ch.XXXIII. 541


ïa même matière (p ) , mais en forme de Dialogue entre un
JuifiSi un Chrétien. Le Juif propofe desraifons contre la di-
vinité de Jcfus-Chrift. Le Chrétien les réfout. La principale
obje£tion roule fur rinobfcrvation des rits de la Loi ancienne
par les Chrétiens. On répond que fi Jcfus-Chrift les a abolis
après les avoir obfervés lui-même ; c'eft qu'ils n'étoient que des
figures de la Loi nouvelle.
XL VIL 11 y eut après la mort de Nicolas II, arrivée au mois
de Juinl'an 106 1 (^),une conteftation entre lesRomains& le
Roi Henri , au fujct de l'élcdion d'un fucceffeur. Les Romains
élurent Anfelmc, Evêquc de Luqucs , qui prit le nom d'A-^
lexandre II. Le Confeil du jeune Roi fit élire Cadaloiis , E-
vêque de Parme , fous le nom d'Honorius IL II fut convenu
que pour terminer le fchifme occafionné par cette double éle-
ction , on ticndroit un Concile. Ce fut à ce fujet que Pierre
Damicn compofa fon quatrième opufcule. C'eft un Dialogue
entre l'Avocat du Roi Henri , & le Dcfenfeur de l'Eglife Ro-
maine. L'Avocat foutient que l'on n'a pu procéder à Rome
à l'éledion d'un Pape ^ fans le confentement du Roi , comme
Chef du peuple Romain. Le Défenfeur répond , que non-
feulement les Empereurs Payons n'ont eu aucune part à l'é-
ledion des Papes , mais qu'elle s'eft faite même indépendam-
ment des Empereurs Chrétiens , jufqu'à faint Grégoire-le—
Grand; que fi l'Empereur Maurice donna fon confentement
pour l'éledion de ce faint Pape ; que fi quelques autres Prin-
ces en petit nombre , ont eu part à i'élcdlion des Papes , dans-
les fiécles fuivans, il en faut rcjetter la caufe fur les malheurs

des tems &: les troubles de l'Etat. Il fait valoir la donation


de Conftantin , dont l'autenticité n'étoit point conteflée alors;
& fur ce que l'Avocat alléguoit, que le Pape Nicolas II avoir
reconnu ce droit dans TEmpereur Henri III , &
confirmé par
un Décret le Défenfeur répond , que l'Eglife Romaine ne le
:

conteftoir pas non plus au Roi Henri fon fils ; mais qu'à caufe
de fon bas âge , elle avoit , comme fa Mère &
fa Tutrice
procédé fans fon confentement, à l'éleâion d'un Pape; parce
que l'animofité qui régnoit entre les Romains , auroit pu dé-
générer en une guerre civile fi l'on eût attendu plus long-
,•

tcms à faire cette éledion. Il s'écoit néanmoins paffé trois mois

Ir) Ofulf^l. y. (î; Ofi.fnil, 4.


,

54^ SAINT PIERRE DAMIEN,


qu environ depuis la more du Pape Nicolas il , jufqu'à Tclc-
dion d'Alexandre II , d'où l'Avocat concluoic qu'y ayant eu
aficz de tems pour envoyer à la Cour , & en recevoir répon-
fe , on ne pouvoir nier qu'on n'eût fait injure au Roi , en ne
lui demandant pas Ion confenremenr. Le Défenfeur répond
premièrement que les Seigneurs Allemans avec quelques E-
,

vêques de la même Nation , avoient caflT.- , dans un Concile ,


tout ce qui avoit été ordonné par le Pape Nicolas II , ré- &
voqué conléquemment le privilège accordé au Roi ; fcconde-
ment que les Romains avoient envoyé à la Cour , Etienne
,
Prêtre Cardinal ; qu'on lui rcfula audience pendant cinq
-

jou^s, & qu'on le renvoya fans que le Roi ni l'Impératrice


eullent voulu ouvrir les Lettres dont il étoit chargé ; enfin
qu'on avoit fait à la Cour l'élection d'un Pape , à l'inlçu de
Rome ; qu'elle etoit tombée fur un fujet indigne , & avoit
cté faite à la follicitation du Comte Gérard , excommunié par
plufieurs Papes. Il demande donc lequel des deux on doit
plutôt rcconnoître , ou Alexandre élu unanimement par les
Cardinaux , & demandé par le Clergé & le peuple Romain;
ou Cadaloiis élu par les intrigues des ennemis de l'Egliie Ro-
maine. Enfuiteil exhorte les Minières de la Cour & ceux du
Saint Siège à concourir à une même fin , pour le bien de l'E-
glife & de l'Etat.
XLVIII. Le cinquième Opufcule contient la relation de
ce que Pierre Damien & Anfelme, Evêque de Luques , dé-
putés à Milan contre les défordres du Clergé de cette Ville ,

firent peur y remédier (r). Cette relation eft adreffée à Hil-


debrand , Archidiacre de l'Eglife Romaine , qui l'avoit prié
de lui faire un précis de tout ce qu'il trouveroit d'intérefîant
touchant l'autorité du Saint Siège. On peut voir dans l'arti-
cle d'Alexandre II , ce que nous avons dit du fuccès de cette
Légation. Le (ixiéme Opuicule intitulé, Gratiffimus (s) , par-
ce qu'il devoir être très-agréable à ceux dont les Ordinations
ctoicnt révoquées en doute, elî adrcirè à Henri, Aichevê-
que de Ravenne. Pierre Damien examine Ci l'on doit réor-
aonner ceux qui ont été ordonnés par des Evcques limonia-
ques. Cette queflion avoit été agitée dans trois Conciles de
Kome ; mais elle étoit rcdée indècifc , jufqu'à de plus grands

(>-; o,v<, ;.•(.', f. (j; <','«','"."/. 6.


,

CARDIN. EVESQ. D'OSTIE. Ch. XXXIIÎ. 543


éclairciflemcns. Pierre foutient que ces fortes d'Ordinations
ne doivent point fe réitérer, parce que l'Evcque n'eftque le
Miniftre, &
quec'eft Jefus-Chrift , fource de toute grâce , qut
confacre i qu'il en eft de l'Ordination comme du Batême ,
qui ne fe réitère point , quoique conféré par un mauvais Mi-
niftre ; que pourvu que l'Ordination fe faffe dans l'Eglife Ca-
tholique, &
par un Miniftre qui profeiTe la vraie foi, l'Or-
dination eft valide, cet Evèque fùt-il limoniaque ; que Ba-
laam , quoique infe£té de cette tache , ne laida pas de pro-
phétifer ; que Saiil prophccifa aulli, quoique déjà réprouvé. Il
ajoute, qu'il y a trois Sacrcmens principaux dans l'Eglife, le
Batéme , l'Euchariftie Se l'Ordination des Clercs 5 que faint
Auguftin , dans fcs Commentaires
fur laint Jean, prouve le
Êatême ; & dans fon Livre du Corps du Seigneur
Palchafe ,

que ces deux Sacremens ne font pas meilleurs pour être ad-
miniftrés par de bons Miniftres ; ni plus mauvais , pour être
conlacrés par de médians Prêtres ; qu'encore que l'on n'aie
rien décidé jufques-Li , fur la validité de l'Ordination par rap-
port au miniftere , il faut en raifonncr de même que du Ba-
rème & de l'Euchariftie, &
fuivant les principes établis par
faint Auguftin i fçavoir , que comme c'eft Jefus-Chrift qui
batile ,
qui conlacre , c'eft lui qui ordonne les Prêtres & les
Evêques. Il rjpporte divers exemples d'Ordinations faites par
de mauvais Miniftres , même par des fimoniaques , & qu'on
n'avoit ni caflTées ni réitérées ; & le Décret de Léon IX , qui
fe contenta d'impofer une pénitence de quarante jours à ceux
qui avoient été ordonnés par des fimoniaques , mais gratui-
tement. Il loue l'Empereur Henri , de s'être oppofé aux Or-
dinations fimoniaques , contre lefquelles il déclame lui-même
avec force.
XLIX. Il ne témoigne pas moins de zèle contre les Clercs
impudiques, dans le ieptiénne Opufcu!e(f), qui a pour titre:
Gomorrhien. Apres avoir rapporté les divers crimes dont ils
fe fouilloient , il dit qu'ils s'appuyoient dans 'eurs défordres ,
de certaines règles fauftcs & apocryphes , qui fe trouvoient
mêlées avec les Canons. Il montre que ces règles ne peuvent
avoir lieu ; non - feulement , parce que les pénitences qui y
fontimpofées aux Clercs , font moins confidérables que celles

(0 OfufcHl. 7<
,,,

544 SAINT PIERRE DAMIEN,


qu'on impofe aux laïcs pour les mêmes péchés ; mais encore
parce qu'on ne connoît point les auteurs de ces règles , Hc
que tous les Canons doivent être publiés , ou par les Conciles
ou par ks Papes. Il rapporte ceux du Concile d'Ancyre , fur
les péchés dont il avoit parlé dans cet Opuicule , & prie le
Pape Léon IX de décider fi l'on doit exclure des Ordres, les
Clercs coupables de ces impuretés , ou dépoier ceux qui y font
déjà promus. Il le déclare pour l'affirmative mais le Pape,
:

dans fa réponfe , ne prononça la peine de dépofition que


contre les Clercs les plus criminels.
"
L. Pierre Damien combat , dans le huitième Opufcule(a),
ie ientiment des Juriiconrulces , qui reftreignant les dégrés
de parent-c dans Icf^jucls il cft défendu de fc marier, au qua-
trième , iourcnoient qu'il pouvoir y avoir mariage entre les
petits neveux & les petites nièces. Il fait voir que la manière
de compter les dégrés de parenté , félon les Loix civiles , efl:
différente de celle des Canons ; que celle-ci doit être fuivie
que l'on doit^obferver la parenté jufqu'à la feptiéme généra-
tion : &
que lorfque les perfonnes qui veulent contrarier ma-
riage (^) 5 font dans des dégrés inégaux , l'une au fixiéme ,
l'autre au feptiéme , il faut que le degré le plus proche em-
pêche le mariage: néanmoins il remet au faint Siégç la déci-
fion de cette difficulté. Il étoit d'uiage commun, quand on
comptoit les dégrés de parenté fur les générations , que le
nombre des perfonnes excédât d'un celui des générations
en forte qu'il n'y avoit que cinq générations, où il y avoit fix
perfonnes. Pierre Damien ayant appuyé cet ufage , dans l'O-
pufcule dont nous parlons , trouva des contradideurs ; ce
3ui l'obligea à examiner de nouveau la queftion, &àdeman.
er là-delfus à un Prêtre qu'il ne nomme point , ce qu'il en
pcnfoit. t
LI. voir dans le neuvième Opufcule {y) , les avan-
II fait

tages de l'aumône , tant pour les vivans qui la font, que pour
les morts pour qui on la fait. Il met aulfi au rang des bonnes
œuvres, de laveries pieds aux pauvres , & rapporte que le
Pape Nicolas II lavoit chaque jour les pieds à douze pau-
yjes j que s'il n'avoit pas eu le loilir de le faire de jour , il le

(*) Voyin l\inicUii'Al(.\AMtlri II, |

faifoit
CARDIN. EVESQ. D'OSTIE. Ch. XXXIII. 545
. faifoit la nuit. L'Office divin fait le fujccdu dixième Opuf-
culc. Pierre Damicn compte fcpt heures canoniales pour le
jour ; fçavoir , Matines ou Laudes , Prime , Tierce , Sextc ,
NoiiC, Vêpres & Complies; & pour la 'nuit , les Vigiles ou
Nodurnes. Il remarque cjue le peuple n'affiftoit plus à l'Office
de la nuit que l'Office des Moines ctoit différent de celui
;

des Clercs qu'il n'y avoit pas long-tcms que l'on rccitoit à
;

Prime le Symbole qui porte le nom de faint Athanafe ; qu'on


l'avoit fixe à cette heure-là , parce que la foi étant le fonde-
ment & l'origine des vertus , il ctoit convenable d'en réciter
le Symbole à la première heure du jour. Il exhorte le Sei-
gneur à qui il écrivoit , de fe rendre affidu aux Offices de l'E-
glife, & de les picférer à toutes fortes d'affaires temporelles,
de les'réciter même en marchant à cheval ou en travaillant à
la campagne ce qui fait voir que Pierre Damien croyoit
:

,
que l'on devoit réciter les prieres^canonialcs aux heures mar-
quas. Il ajoute , que ceux qui ne fçavcnt point lire , ni les
^
Pfeaumes par cœur , peuvent fc contenter de réciter l'Orai-
. fon Dominicale , en la répétant fans doute plufieurs fois. Il
'
confeillc de dire tous les jours les Heures de la fainte Vierge,
qui étoient dcs-lors réglées fur les Canoniales. .

LIT. Un faint Ermite nommé Léon (z), étoit en doute ,


^
fi , difant l'Office feul , il devoit demander la bénédidion pour

les Leçons , &


dire avant les Oraifons , Domimis volifcum ,
'
piiifqu'il ne fe rrouvoit perfonnc dans fa cellule à qui adreffer
ces paroles. Pierre Damien qu'il avoit confulté , lui répon-
dit, que celui qui récite l'Office en particulier , doit tout dire,
comme s'il le récitoit en commun ,
parce qu'il y parle au nom
de l'Eglifc & qu'il qu'autrement il faudroit re-
la reprcfente :

trancher tout ce qui fe dit au nombre pluriel , comme l'Invi-


tatoire Venue exultemus , &
ÏOrcmus. 11 ajoute , que fi les Do-
;
fleurs de l'Eglife , qui ont travaillé aux Offices , euffent jugé
néceffaire d'en faire un pour les particuliers , un autre pour &
le public, ils n'y auroient pas manque. Pour preuve qu'en
,
j;écitant l'Office en particulier , on repréfente l'Eglife , il ap-
porte l'exemple du Prêtre qui célèbre la MefTe quoiqu'il la :

_çiifc leul j il ne laiffe pas , après lé Mémento des vivans , d'ajou-

fei:' : Pour lefqucls nous vous offrons ce Sacrifice, ou qui vous

(;.) Opnfciil. I !.

Jome XX* Zzz


54<î SAINT PIERRE DAMIEN ,
l'offrent. Ilremarque qtie les Evêques , en faluant lé peuple ,
fe fervoient de cette formule , tant dans l'ancien que dans le
nouveau Teftament ; Fax vobis , que l'Eglife ne s'afTujetit pas
dans la célébration des Fêtes des Saints ou des Myfleres {a) ,
aux jours que ces Saints font morts , ou que ces Myfleres ont
été opérés cela n'étant pas poflîble à caufe de la mobilité de
;

la Fête de Pâques , qui entraîne nécelTairement un changement


dans toutes les autres. Il finit cet Opufcule par l'éloge de la vie
érémitique , & de Léon , qu'il regardoit comme ion Maître
dans la vie fpirituelle.
LUI. Dansle fuivant (i) , il fait une peinture très-vive du

dérèglement des Moines de fon tems , & de la décadence de


l'Ordre monaftique. La plupart gardoicnt de l'argent, difant
que ne recevant rien des biens du Monaflere, il leur falloir
une relTource pour vivre. Pierre répond , que le Monaltere
devoit fournir à leurs befoins en efpece & non pas en argent ;
& que s'ils recevoicnt de l'argent du dehors , ils devaient
l'employer à leurs befoins & non pas le garder. Les courfes
continuelles des Moines étoient un fujet de fcandale pour les
féculiers ces courfes attiroient en effet toutes fortes de relâ-
:

chemens ; la diflipation , l'intempérance , l'inapplication à la


prière, à la pfalmodie; le vice de propriété, la
ledure ;,
la
vue des objets dangereux pour la chaftcté , du moins de l'ef-
prit. Si le Moine veut être plus proprement pour paroître en
public , il fe rend méprifable aux féculiers ; s'il affede de por-
ter des habits mal-propres & difformes, il efl: taxé de vanité ;
tous les objets qu'il a vus &
tout ce qu'il a ouï fe préfente à
fon imagination ; en vain |il s'efforce de chaffer ces images
importunes , il en cft accablé. Pierre Damien reproche enco-
re aux Moines de fe mêler trop des affaires du monde. Il n'é-
pargne pas plus les Ermites , dont quelques-uns ne gardoient
leurs cellules qu'en Carême , paffant le refte de l'année à courir
le monde.
LI V. Apres avoir déploré les déréglemcns des Moines , il

les inflruit de leurs devoirs ( ^ ) , leur apprenant ce qu'ils


doivent faire & éviter pour arriver à Dieu. Il les invite à rai-
mer , non par la crainte des châtimens , mais pour lui-mê-

OC«/-î. I CO opuj.ui. 13.


(*) OfHflHl. IX.
.

CARDIN. EVESQ. D'OSTIE. Ch. XXXIII. 547


me ; &
à vivre dans l'étroite obfervance de leurs Règles ,
vivans dans la patience , l'humilité , l'obciffance , la mortifi-
cation pénitence , 8c dans la contemplation des vérités de
, la

la Religion. Il enlcigne qu'un Moine qui , étant dans le fié-


clc , a commis de grands péchés , n'y fatisfait pas par la com-
mune obfervance de h Règle ; qu'il doit y ajouter des péniten-
ces proportionnées à fes péchés ; en lorte que fi fes péchés
méritoient ioixante-dix ans de pénitence , fuivant les Ca-
nons , il devoit les accomplir dans le Monaftere , s'il en avoir
le loifir. Il raifonnoit ainfi , félon l'ufage où l'on étoit alors
de faireune fupputation de tant d'années de pénitence , pour
effacer un péché. Si celui qui avoit commis un homicide , de-
voit , félon les Canons , être dix ans en pénitence, on lui en
impofoit deux cens , pour vingt homicides mais ces fortes :

de pénitences fe rachetoicnt. On accompliffoit cent ans de


pénitence par vingt pfcautiers accompagnés de flagellations ;
cinquante Pfcaumcs valoient cinq ans de pénitence (d): on les
rachetoit encore par des libéralités aux Eglifes.
L V. Les quatorzième & quinzième Opufcules ( ? ) , con-
tiennent en détail les ufagcs & les pratiques des Ermites de
Font - Avellane. C'eft, pour ainfi dire, le corps entier de la
Règle , que faint Pierre'jDamien faifoit obferver dans les Mo-
nafteres de fa Congrégation. On y recevoir des laïcs ou Frè-
res convers , que l'on obligeoit à mener la même vie que les
Moines du chœur. Ils étoient vingt ou environ dans chaque
Monaftere , fans compter les Convers & les domeftiques. De-
puis rO£iave de Pâques jufqu'à la Pentecôte , ils jeûnoient
quatre jours la femaine: le Dimanche , le Mardi , le Jeudi ,
l ils faifoient deux repas. Ils augmentoient leur jeûne d'un jour

la femaine , depuis l'Oâavc de la Pentecôte jufqu'à la Fête


de faint Jean-Baptifte ; mais jufqu'au cinq de Septembre, ils
ne jeûnoient que quatre fois la femaine ; le refte de l'année &
jufqu'à Pâques, ils jeûnoient cinq jours de la femaine, à l'excep-
rion des malades & des infirmes. Ils obfervoient deux Carêmes
celui de Noël & celui de Pâques , pendant lefquels ils jeûnoient
tous les jours hors le Dimanche & les Fêtes de faint André, de
S. Benoît «Se de l'Annonciation s'il arrivoit dans ces tems d'au-
:

tres Fêtes de douze Leçons , il étoit permis au Prieur d'adou-

(i) Optift. ^i.tgpsu (0 OfMfe, 1 4. 1 î

Zzzi;
,,

548 SAINT PIERRE DAMIEN ,

cir la rigueur du jeûne , en faifant fervir aux Moines quelque


chofe de plus qu'à l'ordinaire. Ils appelloient jeûne parfait
de ne fe nourrir que de pain , d'eau &
de fel. Pendant toute
l'année leurs domeftiques jcûnoient trois jours la femaine , &
quatre jours dans les deux Carêmes : on en difpenfoit ceux
<jue l'on envoyoit dehors , quand le voyage étoit long. On fut
quelque tems à Font-Avellane, fans fervir de vin aux Moi-
nes ; il n'y en avoit que pour le faint Sacrifice &
pour les ma-
lades : on n'en fervoit pas même aux étrangers. Il fallut fe
relâcher fur ce point , à caufe du grand nombre à qui cette
abftinence occafionnoit des infirmités ; mais on continua à
ne boire que de l'eau dans les deux Carêmes , où l'on s'abfle-
noit aufli de poifTons : on ne en ces jours qu'un mets
fervoit
de légumes cuites ; fi ce n'étoit aux Fêtes de faint André
de faint Benoît , des Rameaux & du Jeudi-Saint , que l'on
donnoit du poiffon & du vin. La veille de Noël & de Pâ-
ques , les Moines ne mangeoient que du pain. Onrompoit le
jeûne tous les jours des Octaves de Noël , de Pâques & de la
Pentecôte mais on permettoit à ceux à qui deux repas de-
:

venoient à charge , de n'en faire qu'un. Les jours qu'on ne


jeûnoit pas , on fervoit deux mets cuits , & un feulement
les jours de jeûne. Lorfqu'un Moine alloiten voyage, & qu'il
devoit retourner le même jour au Monaftere , il ne lui étoit
pas permis de manger dehors. En tout tems , foit en été , foit
en hyver, ils étoient nuds pieds dans leurs cellules , excepté
le cas d'infirmité. Ils dévoient obéir fans délai , garder le fi-
lencc dans l'Oratoire , le Chapitre & le Réfedoire, ne don-
ner ni recevoir quoique ce fût , fans pcrmiflTion du Supérieur:
outre les Heures Canoniales , tant de la nuit que du jour ,
ils chantoient un Pfeautier, & quelquefois un fécond, ou une

partie pour les morts cela étoit fur-tout en ufage parmi les
:

Ermites qui vivoient deux enfemble dans une même cellule.


Ils prenoient fouvent la difcipline , faifoient de fréquentes gé-
nuflexions, & prioient les bras étendus chacun lelon fa fer-
veur leurs autres exercices étoient les mêmes qui lont pref-
:

crits dans la Règle de faint Benoît, & dans les Infiicuts de


Caffien. Pierre Damien recommande aux Supérieurs d'être
indu gens & charitables envers les infirmes, & d'imiter à cet
égard , faint Romuald , qui leur permettoit, dans les mala-
dies , l'ufagc de la viande. Les Moines ne fe recouchoient
point après les Nofturnes ou Office de la nuit ils le prolon-
:
CARDIN. EVESQ. D'OSTIE. Ch.XXXIII. 549
geoient, autant qu'il cfoit pofiGble"^ jufqu'au jour: c'efl: pour-
quoi entre le premier &
le lecondcoupcle cet Office- ,- ils rc-
citoient cnfemble tout le Plcautior, où autant Je Pfeaumes
qu'il en falioit , pour qu'à la pointe du jour ils fulîcnt encore
occupés des No£turnes. . i' >
''> , .- .i 1
j- > -

LVI. Gifler , EVcque d'Ofrnb (/) , avoir avancé qu'une


perlonne qui avoit pris, l'habit hionaitique , étant malacic à

l'extrémité, pouvoit:le quitter, s'il revenoit en fanté ^ & rL'n-»-


trer dans le monde ; fa raifon étoit que , félon la Règle de
Saint Benoît, il falloit une année de probat-on avant la prife
d'habit ou la profclTiôn ; car on ne les féparoit pas ordinai-
rement. PieirrcDamien en écrivit à cet Evêque,,i& lui foun
tint que l'année de probation n'étant qu'une précaution pour
s'affurer de la vocation, &
non une. condition néceffaire ,
le Supérieur pouvoir en difpenler , quand il étoit fuffifam-
ment convaincu de la converfion du poftulanc ; que la pro-
feflion eft irrévocable , en quelque manière qu'elle fe foit faite,
pourvu qu'il y ait eu une pleine liberté. Il rapporte làrdeffus
les Décrets de plulieurs Conciles ; l'exemple du Bacême , qui.
eft également valide quand on le donne d'abord , comma
après de longues épreuves ; &
celui des enfans offerts au Mo-i
naftere par leurs parens , fuivant la même Règle de Sainr
Benoît.
LVII. Dans une' autre Lettre , qui fait le dix-feptiémo
Opufcule (g)f il exhorte d'une manière très - touchante , le:
P-ape Nicolas II à réprimer l'incontinence des prêtres, donc
les défordres en ce genre croient fi publics , qu'on connoif-'
foit les lieux de leurs débauches , les noms de leurs conçu-'
bines &
leurs enfans : ce qui Icandalifoit les peuples- &i,avi-
liffoit le Sacerdoce. Le dix -'huitième Ppufcule eft compoféi

de trois Lettres ( A ). , l'une à Pierre , Cardinal , l'autre à T£>iî


vêque de Turin , la troifiéme à la Duchefie Adélaïde. Pierre i

les preffe vivement d'arrêter le cours, de ces débordémens.,^


& de meure en vigueur les Décrets du Pape Léon IX ^êc
du Concile de Rome contre les Clercs incontinens leurs &
concubines. -uijjj* 'j.L.'i>U.j "iut>l owj

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{f)OpHfc.ig. ih) OpufcKl. 19.


I
550 SAINT PIERRE DAMIEN,
LVIII. Nous avons vu , en parlant des Lettres de Pierre
Damien ( i ) , que dans une adreflee au Pape Nicolas II , il
fe plaignoit qu'on lui eût ôté les revenus de fon Evêché ; &
que croyant appercevoir dans cette fouflradion , une mar-
que que Ton devoit le dépouiller bien-tôt de fa dignité Epif-
copale , il y avoit renoncé lui-même. Il en écrivit une fé-
conde au même Pape , mais beaucoup plus longue , dans la-
quelle il le fupplie de le décharger du fardeau de l'Epifco-
at , &du foin de fes deux Monafleres. Il allègue pour rai-
lbn , fon indignité , la violence qu'on lui a faite pour accep-
ter cette dignité , les fautes qu'il avoit commifes dans les
fondions d& l'Epifcopat. Enfuite il rapporte divers exem-
ples , pour montrer qu'il eft quelquefois permis à un Evêque
d'abdiquer; &cite une annotation faite à la quarante-uniè-
me Lettre du neuvième Livre du Regiftre de faint Grégoire-
k-Grand , où on lifoit que le faint Pape ne faifoit aucune

de donner des fuccefleurs à ceux qui avoient re-


<iifficulté
noncé volontairement à l'Epifcopat. Le Pape n'ayant eu au-
cun égard à fes remontrances (/), Pierre Damien en fît de
nouvelles qui n'eurent pas plus d'effet. Il fe plaignit qu'au
,
lieu de décharger de î'Evêché d'Oflie , on lui avoit don-
le
né commiilion de faire la vifite d'un autre qui s'étendoit juf-
qu'aux montagnes des Alpes. 11 reproche à quelques Evê-
quts de fon tems j l'amour de la chafTe &
des jeux de ha-
zard ; & raconte qu'étant en voyage avec l'Evêque de Flo-
rence , & prêts à partir de l'hôtellerie où ils avoient cou-
ché , on vint lui dire qu'il jouoit aux échecs Pierre en fut
:

indigné , 8c prenant fon tems en chemin , il remontra à cet


Evêque , l'indécence de cet amufement, en un homme donc
la main offroit le Corps de notre Seigneur , &
dont la lan-
gue le rendoit médiateur entre Dieu &: les hommes. Il ajou-
ta ) que les Canons ordonnoient la peine de dépofîtion con-
tre les Evêques joueurs. Cela ne s'entend , répondit le Pré-
lat , que des jeux de hazard ; les Canons , en ne défendant
point les cchets , font cenfés les permettre. Pierre foutint
que leur dcfenfe s'étendoit à toutes fortes de jeux. L'Evêque
de Florence fe rendit & demanda pénitence. Pierre lui or-
donna de réciter trois fois le Pfeautier , de laver les pied? à

(«) Opufi.19. (l')OpnJc.io.


CARDIN. EVESQ. D'OSTIE Ch. XXXIII. 551
douze pauvres , &
de leur domier à chacun un denier , pour
expier le péché qu'il avoir commis par la langue &: par les
mains.
LIX. Le vingt & unième Opu feule eft adreffé à un Abbé
cjui avoir renoncé à fa dignité pour vivre en fimple Moine.
Pierre Damien Ten félicite (w) ; fur la difficulté qu'il y a de
réuiTir dans le gouvernement des âmes , & fur les dangers
de radminiftration des affaires temporelles mais il l'avertie :

de fc prccautionner contre les tentations qui furvienncnt


ordinairement à ceux qui ont quitté les dignités Eccléliafti-
ques , c'eft-à-dire , contre le aefir d'y rentrer. II montre
aans le fuivant ( «) , que ceux qui s'attachent au fervice des
Princes , dans la vue de parvenir à l'Epifcopat & à d'autres
Bénéfices , ne font pas moins coupables de (Imonie , que ceux
qui y parviennent par de l'argent parce qu'en effet , les pre-
;

miers font cenfés donner de l'argent pour acquérir les digni-


tés Eccléfiaftiques , par les dépenfes qu'ils font en voyages &
en habits précieux, & par le travail que leur occafionne leur
attachement à la Cour. Ils font encore coupables d'une au-
tre efpece de fimonie , qui eft celle de la langue , ne s'étu-
diant qu'à flatter le Prince dans toutes fes inclinations , & à
lui complaire en tout. N'eft-ce pas acheter chèrement les
dignités , que de les acquérir par une longue fervitude , &
faire le métier de parafite pour devenir Evêque?
LX. Alexandre II avoir propofé à Pierre Damien ( ) ,
pourquoi la vie des Papes étoit fi courte. Il répondit , que
n'y ayant qu'Un Pape pour toutes les Eglifes , Dieu permet-
toit que fa vie ne fut pas de longue durée , afin que la fragi-
lité humaine parût dans un porte fi élevé , & que la terreur
de la mort frappât plus fortement le relie des hommes , qui
ont les yeux attentifs fur le Pape ; comme on eft frappé des
ténèbres caufées par une éclypfe de foleil , parce qu'il eft le
feul principe de la lumière; que par une raifon contraire , la
mort des Rois n'efl: pas fi frappante , parce qu'il y en a quantité
dans le monde.
LXT. Il s'étoit gliffé un abus parmi les Clercs réguliers.
Quoique nourris en commun , des fruits & des revenus de

(m) Opufc. 1 X. \ (0) OpM/c, ij,


(n) 0/.«/f. 11. l
.

552 SAINT PIERRE DAMIEN,


l'Eglife qu'ils deffer voient ( p ) , ils gardoient par devers eux
de l'argent , &
poffédoienc d'autres biens en propre foute- :

nant que cela leur étoit permis par les Loix. Pierre Damien
compofa contre eux fon vingt-quatrième Opufcule , dans le-
quel il fait voir , que les Clercs ou Chanoines réguliers ne
dévoient rien avoir en propre ; que tel étoit l'efprit de faint
Auguftin , dans les Sermons de la vie commune , qui ont.
fervi de fondement à la Règle de ces Chanoines : que fi,
dans le Concile d'Aix-la-Chapelle , en 8 1 6 , on publia une
règle qui permet aux Chanoines d'avoir des biens en pro-
pre , foit de leur patrimoine , {bit des oblations ou autres re-
venus de l'Eglife: cette règle, à cet égard , eft abfurde, &
ne doit être approuvée qu'en ce qu'elle ordonne à ces Clercs
de fe contenter de la nourriture & du vêtement , qui leur
.font fournis par la Communauté ; parce qu'en effet il y a
çontradi£tion à donner du fuperfiu à ceux que l'on a réduits
- au néceffaire. Cet Opufcule eft adreffé au Pape Alexandre

II , que Pierre Damien exhorte à réprimer cet abus, il eft vi-
.fible que le quatrième Canon du Concile de Rome, en 1063 ,
fut fait en conféquence. Il porte que les Chanoines devait
vivre comme des Clercs Religieux , mangeront , dormiront
enfemble , & auront en commun ce qui leur viendra de l'E-
-^life. Le vingt-cinquième Opufcule (tj) , eft un éloge du Sa-
cerdoce ; on y voit auflî combien pure doit être la vie de ceux
qui font revêtus de cette dignité.
LXIL Pierre inve£live dans le vingt-fixiéme (r) , contre
l'ignorance des Prêtres , qui , la plupart ne favoient pas mc- ,

rne lire. Comment , dit-il , peuvent-ils prier pour le peuple >


& offrir à Dieu un fervice raiionnable , puifqu'ils n'enten-
dent pas ce qu'ils difent ? Les peuples, fans inftrudions, s'a-
bandonnent à toutes fortes de vices. Les Prêtres en font de mê-
me: nég.ligensjufques dans le fervice de l'Autel , ils n'ont que
des calices d'écain ou d'autre vil métal , craffeux & enrouillés ;
ijs enveloppent le Corps de notre Seigneur dans un linge

fale; les nappes font ufées & déchirées ; les ornemcns & les
^J^yrcs à proportion. Lcshpmmcs légers s'en mocquent; les

jfpgcs en gémiflciat. .Pie.rvc DaipiqfiTejette tous ces pupx.fur

(/>! epiifc. 24. .


I
(0 Oprifi. If. .
,
s

WOpufciS. • I


,

CARDIN. EVESQ. D'OSiTp. Çh.,XXXIII. 5^^


U.ncgligçnce des Evoques. Il ïeseX|hortc.à veiller fur la cbnî
duite de leurs Clercs , à n'élever au Sacerdoce , que ceux qui,
en font dignes ; à dcpofer ou à fufpendre ceux donc les
mœurs & la fçicnce ne répondent pas. à leur miniflere. Les.
fautes qu'il reproche aux Prêtres: dans radrnini(l;rat;9F) ^es
Sacremens de Batcme &
d'Euchariftic^. nous apprennent, dut;
moins les Rits de l'un &
de l'autre en, ce ;cms-là. jéj ne veux
pas , dit-il , rapporter les fautes qu'ils commettent , foit dans
i'oblatiqn des faints Myfleres , foit en adminiftrarit le Sa-
crement de la régénération ; fçavoir , dans les fcrutins , dans:
les Syn^boles , &
dans le Sacrement du bain baptifmal. II|
arrive fouvent que le pain qui doit être chapgc en des,ho-^
(lies falutaires , le trouve moifi avant d'être ian£li^é parl'o-j
blation ; & qu'au lieu de confumer le Myftere dans les ,huit
jours, ils le gardent, à l'injure de Dieu, jufqu'au troifiéme
mois, quelquefois même, ils ne mêlent point l'eau a^'ec le
vin dans l'Euchariftie j en forte que par l'erreur d'un fchiline,
occulte , le peuple efl féparé de Jefus-Chrift. .,.

LXIII. Les Chanoines de l'Eglife de Fane (i).VâvoienÇ


entre eux une contellation au fujet de leur manière de vie.
Les uns vouloient vivre féparément , les autres en commun.
Pierre Damien prit le parti des derniers , prétendant que les
Chanoines dévoient avoir tout en commun , à l'exemple des
Apôtres & des premiers Chrétiens ; qu'autrement ils feroïent
Chanoines de nom , fans l'être réellement puifque les ter-j •;

mes de Chanoine &


de Régulier font fynonimes. D'un au-
tre coté (/) , les Chanoines vouloient exclure les Moines de
l'adminiftration des Sacremens ; & l'un d'eux ,
qui ètoitpref-
que un idiot , & coupable de plufieurs crimes , eut la téméritq
d'excommunier cpux qui avdicnt reçu la communion d'un
Moine , & les obligea à communier une féconde fois. Pierrç
JPamicn prouve , par un grand nombre de témoignages
xjue les Moines ont toujours été admis à l'adminiftration'des
Sacremens. Il rapporte au long le Décret du Pape Boniface
JV , qui leur permet en particulier l'adminiftration du Sacrer
jnentdePenitence.il blâme , ^dans l'Abbé Majnarl:^ , U ,

:^mptMQlicé des habits («J ,&^fâ^ yotrj-jM'iL^i^-in^gcenpVif


li'ijp :: '
VI) o:- JTi I;.. •.{'"< V
',

r":':'?': {f.T/i • ';

(fjàpufc.ij. I {lî) Ùptifc. 19.'


ii)Op,.fc.^.S. I ,, „
Tome XX. Aààà^
554 SAINT PIERRE DAMIEN ,
tous les Eccléfiaftiques mais fur-tout aux Moines , d'affec-
,

ter de la beauté dans leurs vêremens puifque les Saints , tant


•,

de l'ancien que du nouveau Teftament , &


Jefus-Chrift mê-
me j n'ont pas rougi de porter des habits très-vils,
LXIV. Il y avoit un fchifme entre les Florentins Pierre &
fêur Evêque (x) , parce que le fufpe£tant de fimonie , ils ne
vouloient point recevoir les Sacremens de fa main. Pierre
Damien ^tant à Florence , eflaya inutilement de les récon-
cilier. Ils l'accuferent même de favorifer la fimonie. Il s'en
jiiftifîa dans une Lettre qu'il leur écrivit, proteftant qu'il re-
gardoiç la fimonie comme la première de toutes les héréfies.
Il dit enfuite , que plénitude de la grâce appartenant à
la
TEglife , on ne peut douter que les méchans qui font dans
fon fein , ne puiffent conférer les Sacremens. Il ajoute , qu'à
l'égard de leur différent avec leur Evêque, il ne lui apparte*
noip.pas de le charger d'un crime avant qu'il en fût convain-
cu ; que quiconque àvoit des plaintes à faire contre lui , il
pouvoit fe pourvoir au prochain Concile de Rome. S'adref»
lant enfuite à fes frères, les Moines , i] leur reproche d'avoir
excité cette querelle , en difant que de tels Evêques ne pou-
Voient , ni confacrer le faint Chrême , ni dédier des Eglifes ,
ni ordonner des Clercs , ni célébrer la MefTe ; de l'avoir &
foutenu avec tant d'impudence , qu'en trois ParoifTes ils a-
voient obligé à batifer Catéchumènes fans onélion du faint
les
Chrême. Cependant ne fçache pas , dit Pierre Damien ,
je
que jamais aucune héréfîe ait eu la hardiefle de féparer le
Chrême du Batême. Que fi on emprunte le Chrême d'une au-
tre Eglife , comme fait un Prêtre du parti oppofé à l'Evêque
de Florence , c'eft un facrilege & un adultère fpirituel. Il
reproche encore à fes Moines d'avoir été caufe que plus de
mille perfonnes trompées par leurs vains difcours , étoient
mortes fans recevoir le Corps «& le Sang du Seigneur ; qu'eux-
mêmes ne vouloient pas entrer dans plufieurs Eglifes ni mê-
me les faluer , fpupçonnant qu'elles avoient été conlacrées
par des Evêquçs indignes. Il les tourne en ridicule & dit,
qu'il ne conçoit pas comment ils oferoient rejetter le juge-
ment du Siège Apoftolique , ne pouvant ignorer que faint
Paul appella au Tribunal même de Néron. Il répète ce qu'il

W Ofmff. jo.

I
CARDIN. EVESQ. D^OSTIE. Ch.' XXXIII. 5^5
évoit déjà dit plus d'une fois ,
que les mauvlais Minières coid-
iàcrcnc comme les bons ; & les Conciles n ont jamais
que
permis que l'on réitérât le Batcme conféré par les plus dan-
gereux hérétiques , de peur de faire injure au nom du Seigneur
invoqué par eux fur les batilés. ;

-.
LXV. Le trente -unième Opufcule cft; adreflc aux Evé^
<}ues-Cardinaux du Saint Siège {.y.). Pierre Damien les co-
gardant comme Juges dans les Conciles ^' A: Confeillers du
Pape , les exhorte à s'oppofcr à l'avarice & à la cupidité des
r Eccléfiaftiques , qu'il fait cnvifager comme la ruine de toutes
les vertus , & la caufe des défordres &
des malheurs de l'E-
glifc. Qu'un avare , dit-il , bâtifTc des Eglifcs qu'il s'appli-
-,

que à la prédication ; qu'il accorde les différends ; qu'il affer-


mifle ceux qui font chancelans dans la foi ; qu'il offre des
facrifices tous les jours i tant que l'avarice le domine , elle
corrompt toutes fes vertus. Ce vice fe gliffoit jufques dans
les Conciles , où l'on donnoit quelquefois de l'argent pour fe
faire rendre juftice. Pierre ne condamne point ceux qui a-
voient recours à cette forte de voie. Il fait voir que le motif
d'amafTer de l'argent, dans les Eccléfiaftiques comme dans
les laïcs , n'ctoit pas de lubvenir aux befoins de la nature ;
mais pour fournir au luxe de leurs tables , de leurs ameuble-
mens, de leurs habits , de leur train. Il nomme deux Evê-
ques dépofés pour leurs mauvaifes mœurs ; &
dit qu'érant
ces Evêques de bois , il ne leur ferviroit de rien de fe montrer
avec des croffcs revêtues d'or &
ornées de. pierreries ; parce
que le mérite du Sacerdoce ne confiffe pas dans le brillant
des ornemens extérieurs , mais dans la fplendeur des vertus.
Il paroît par le même Opufcule , que deflors les Evêques-Car-
dinaux portoient la pourpre ; que les Papes portoient des chap-
pes couvertes d'or & de pierreries , & des anneaux chargés de
pierres énormes.
LXVI. Pierre Damien compofa le trente-deuxième Opuf-
cule (z) , à l'occafion d'un ferviteur de Dieu , qui, outre les
Carêmes inftitués par les Pères , c'ell-à-dire , ceux de Noël,
de Pâques & de la Saint Jean , s'en impofoit en fecret de
particuliers , où il s'abftenoit tantôt de poiflbns ^ tantôt de
légumes , & quelquefois du fruit des arbres. Il diDiine une

(;) 0;.«/c. 51. (i.) Ofkfc. II.


Aaaaij
S$^ SAINT PIERRE DAMIEN,
•explication morale'& myflique des quarante jours de jeûne , &
des quarante-deux dations des Ifraélites dans le déîen. Di-
dier , Abbé de Mont-Caflin , l'avoit menacé ( a ) ,que s'ilne
venoitle voir , il le priveroit de la participation des prières de
fon Monaftere. Pierre Damien s'excufa de ce voyage fur fon
•grand âge , 8c fur la crainte de mourir en chemin en rccon-
:

-noiifant toutefois que ce feroit un avantage pour lui de pou-


ivbir toucher le feuil de la porte de la Maiion de Saint Be-
noît. Il rapporte plufieurs miracles faits par l'interceffion de
Ja fainte Vierge , & dit qu'en quelques Eglifes il s'étoit éta-
bli une louable coutume de célébrer tous les Samedis une
Meffe particulière en fon honneur , s'il ne fe rencontroit une
F'êtè ou une Férié de Carême ; que dans les Ermitages &
Monaficrcs de fa Congrégation , il y avoit trois jours de la
femaine aOlgnés à des Saints , en l'honneur deîquels on y
célcbroic des Meffes; que félon la pieufe opinion de plufieurs
perlonnes illuftres , les âmes des défunts ne fouffroient point
le Dimanche, & retournoient le Lundi au lieu de leurs fup-
plices ; que pour cette raifon on difoit ce jour - là la Meffe
en l'honneur des Anges , pour attirer leur proteâion aux
morts & à ceux qui doivent mourir ; qu'on attribuoit auffi
avec raifon le Vendredi à la croix que ce jour-là les Moi-
;

nes de Font-Avellane fe donnoientl'un à l'autre la difcipline


en Chapitre avec les verges , & jeûnoient au pain & à l'eau ;
cp'en ce même jour ils difoient la Meffe de la Croix pour
obtenir fa protection que le Samedi , jour defliné au re-
',

pos , devoir être dédié à la fainte Vierge , où la Sagelfe s'é-


toit repoféepar le Myflere de l'Incarnation; & qu'il ne fal-
loit pas douter que ceux qui lui rendoient ces honneurs , ne
s'attirafTent fon fecours. 11 prouve enfuite par diverfes hiftoi-
res , que le faint Sacrifice , les prières , les aumônes faites
pour les morts , leur procurent du foulagcment. Il emploie
de femblables preuves dans l'Opufcule fuivant ( 6) , pour
montrer que Dieu , en ce monde & en l'autre , punit les mau-
vaifes a£lions & récompcnfe les bonnes ; & que les prières
des vivans dclivr'ent ^es âmes du Purgatoire. Nous rappor-
terons ici une dénccs. hiftoircs , parce qu'elle exprime clai-
i-emcnt la fdi de faint Pierre Damien, & de Didier, Abbé

^1 j, i, I.
CARDIN. EVESQ. D'OSTIE Ch. XXXIII. 557
de Mont-Cafîin , fur la préfence réelle & la tranl'ubftantia-
tioa. Une femmejaloufe de fon piari^ quelle foupçonnoit
d'adultère ayant prié une de les voifines de lui apprendre
,

quelque moyen pour empêcher qu'il n'aimât plus d'autre fem-


me qu'elle; cette voiline lui'confeilla de recevoir le Corp'?
de Notre Seigneur fans le manger , & de le garder l.\ - -i -
ment pour le faire manger à fon mari avec certains ithIcu-
ces. La femme jaloufe fuivit ce comfetl , èc garda le Corps de
Jefus-Chrifl dans un petit linge ^ jufqu'à ce qu'elle trouvât
l'occafion d'en faire l'ufage que fa paflion lui infpiroit. Mais
il arriva par miracle
, que
la moitié de cette parcelle du Corps
du Seigneur fe trouva changée en la forme de la chair , &
l'autre moitié conferva la forme de pain. Voilà , dit Pierre
Damien à l'Abbé Didier , ce que vous m'avez propofé ; Se
vous m'avez demandé eniuite ce que Dieu avoit voulu nous
marquer par ce miracle c'a été fans doute pour faire con-
:

noître la méchanceté & la perfidie de cette malheureufe fem-


me, en lui rendant vifible la vérité de k préfence du Corps
de Notre Seigneur ; afin que voyant que ce qu'elle croyoic
n'être que du pain , paroiiToit être véritablement de la chair,
elle condamnât elle-même par fon propre jugement, l'au-
dace facrilege du crime qu'elle avoit commencé d'exécuter.
Quant à cette partie de l'Hoftie , qui demeura telle qu'elle
étoit auparavant , cela fert à nous rendre encore plus vifible
k vérité de ce miracle ; afin que confidcranc que d'un côté
l'apparence du pain , & que de l'autre , l'apparence de la chair
fe rencontroient dans une feule & même fubftance , nous re-'
connoiflîons indifféremment dans toutes les deux l'exiftence
d'une véritable chair & d'un véritable pain ; parce que Jefus--
Chrift eft tout enfemble , &
ce pain qui eft defcendu du Ciel ,•
& cette chair qui a été formée du fang de la fainte Vierge.
Car l'Evcque de Melphe de fainte mémoire , & qui étoic
votre voifin , dit en ma préfence au Pape Etienne IX , & lui
confirma diverfes fois avec ferment , que comme il s'étoit un
jour approché de l'Autel pour offrir le faint Sacrifice ; fur ce
qu'il lui arriva de douter fi le Corps de notre Seigneur étoit
véritablement dans le Sacrement , il n'eût pas plutôt rompu
k fainte Hofiie, qu'il apperçût entre fcs mains une véritable
chair toute langlante , enforte que fcs doigts furent même en-
sanglantés ; i e qui le guérit entièrement de fon doute : &
cela
fait voir combien grand eff le p.éril de toucher avec des mains
,

558 SAINT PIERRE DAMIEN , ^' />

impures ce Sacrement terrible. Pierre Damien> fur là fin


"fi

de cet Opufcule , dit quelque chofe de la Loi de i'EgUfe, qui


défend à un homme d'époufer fa Commère.
LXVII. Le trente- cinquième eft intitulé : Des Images des
Princes des Apôtres (c). Saint Paul y étoit mis à la droite &
faint Pierre â la gauche. Pierre Damien en donne pour rai-
fon , que faint Paul étoit de la Tribu de Benjamin , qui en
latin fignifie le fils de la droite. Il ajoute qu'il méritoit aufli
cette prérogative , parce que par une reffemblance avec Je-^
fus - Chrill , il n'avoit point de Chaire particulière comme
faint Pierre , mais, préfidoit à toutes les Eglifes ; que fi l'E-
glife de Jérufalem n'eft pas la. première , quoique le Sauveur

y ait fouffert , c'eft; que dans Tordre des EgUfes , on a eu é-


gard au privilège accordé à faint Pierre au-deffus des autres
Apôtres.
LXVIII. Il traite dans le trente-fixiéme Opufcule (d),
de l'éternité , de l'immenfité & des autres attributs de Dieu ,
contre ceux qui mettoient des bornes à fa puiffance , en fou-
tenant que Dieu ne pouvoit faire que ce qu'il avoir fait n'eût
pas été fait. Il fe moque d'une propofition de cette nature
dont l'abfurdité eft fenfible: & toutefois il ne lailTe pas d'y cher-
cher un fens foutenable. Il répond , dans le t rente -fep tié-
me(f ) , à quelques queftions de l'Ecriture qui lui avoienc
été faites par le Cardinal Alberic , auparavant Moine de
Mont-Caiïin. Dans le trente-huitième (/) , il combat l'er-
reur des Grecs , fur la proceflion du Saint-Efprit ; & prouve
par plufieurs raifons & un grand nombre de paifages de l'E-
criture & des Pères Grecs 8c Latins , qu'il procède du Père
& du Fils. Paflant à |Befançon , il remarqua que les Clercs
de jla Cathédrale demeuroient afïis pour la plupart, même
pendant la Méfie (g). Il en fit fes plaintes à l'Archevêque ,
foutenant que non- feulement les Clercs , mais les laïcs & les
femmes mêmes , doivent afilfter de bout à l'Ofiice, & ne s'af-
feoir que pendant les Leçons des Nofturnes , fi ce n'efl: en
cas d'infirmité. Pierre Damien loue au furplus le bon ordre
& la bonne dilcipline que l'Archevêque faifoit oblervcr; fa

(0 Opufc. 5 y, le/") Op»fc. 5».


C^)0/;„/>. }/:. \ (&) Opufc. iç.
(r) Opufc. J7. I
^
CARDIN. EVESQ. D'OSTIE. Ch. XXXIII. 559
piété & la magnificence des Eglifes qu'il avoir fait bâtir. Ce
Suiplût fur-tout à Pierre , fut le foin que ce Prélat avoit pris
e lé faire dreffer un tombeau tout prêt à le recevoir , afin
d'avoir toujours devant fes yeux le jour de fa mort. En é-
crivant à un autre Evêque , fur fa convalefcence (h) , il
l'exhorte à modérer fa colère Se à pardonner fincércment à fes
ennemis.
LXIX. Quelques - uns prétcndoient que l'on pouvoir fc
marier en Avent , en Carême , &
pendant le. jeûne de trois
femaines qui prcccdoient la Saint Jean (i ) , pourvu que l'on
remît la confommation du mariage aux tems qu'il eft permis
de le contrader. Pierre Damien foutient que ces fortes de
mariages font nuls , &
qu'on doit féparer les mariés ; qu'au
refte l'union des corps n'efl pas efientielle au mariage , qu'il &
confifte principalement dans le confentement folemnel du
mari &
de la femme. Il dit que les Canons impofoicnt une
pénitence de quarante jours aux perfonnes mariées , qui n'a-
voient pas gardé la continence pendant le Carême , qui com-
raençoit deflors à la Septuagéfime ; &
femble croire que faine
Jean l'Evangélifte avoit été marié ; qu'il étoit toutefois de-
meuré vierge. Pierre Damien penfoit peut-être comme Bede
& l'Abbé Kupert , que faint Jean étoit l'époux des noces de
Cana, &
qu'étant appelle à l'Apoftolat par Jefus-Chrift , il
femme pour le fuivre,
quitta fa
liXX. Dans le voyage que Pierre Damien fit à Milan en
i059(/), comme Légat du Pape Nicolas II , il fut accom-
pagné d'un Clerc nommé Landulphe , qui fe voyant mena-
cé de mort dans une fédition arrivée en cette Ville , fit vœu
d'embralTer la profeflîon monaftique. Pierre qui étoit préfent
& dans le même danger , l'avertit de ne pas s'engager par la
crainte de la mort , s'il n'étoit difpofé à accomplir fon vœu.
Landulphe fe foumit au jugement de Dieu , fi jamais il man-
3uoit à cette promeiïe. La fédition s'appaifa ; Landulphe hors
e danger , ne fe prelfa point de faire ce qu'il avoit promis.
Pierre Damien l'en avertit , &
lui fit voir par des autorités
& des exemples , qu'on ne pouvoit fe difpenfer d'accomplir
un vœu , & que le fien ne l'obligeoit pas moins pour avoir

(b) Opufc. 40. (l)Opufc.^i.


I

(ni) Opufc. 41. I


^6o SAINT PIERRE DAMIEN ,

été occafionné par la crainte mort. Il écrivit fur le mê- de la


me lujet à un Avocat nommé Otton, qui avoit auffi fait vœu de
fe confacrer à Dieu dans l'état monaflique mais qui cherchoit •,

par de mauvaifes raifons à s'en difpenfer.


LXXI. Ce fut Pierre Daraien qui introduifit à Mont-
Caflin la flagellation ou difcipline ( m ) , avec le jeûne du
Vendredi , au pain &
à l'eau, pendant toutes les femaines de
l'année (n). Les Moines fc la donnoient l'un à l'autre en
plein Chapirre. Plufieurs s'élevèrent contre l'indécence de
cette pratique , fur-tout le Cardinal Etienne ,
qui avoit été
Moine du Mont-Caflin. Pierre Damien étant informé qu'on
y avoit ce(Té de fe difcipliner mutuellement les jours de Ven-
dredi , écrivit à la Communauté pour l'engager à continuer
cette pénitence , foutenant qu'il étoit honnête falutaire de &
fouffrir par un efprit de mortification , la confufion de la
,

nudité. Il leur propofe l'exemple de Jefus-Chrift dans fa Paf-


fion ; celui de iaint Paul d'un grand nombre de Martyrs&
flagellés nuds à la vue du peuple leur dit qu'en fe punif- •<,
&
fant eux-mêmes de verges , pour l'expiation de leurs fautes ,
ils ôtent à Dieu le defir de s'en venger. Le Cardinal Etienne

étant mort fubitement quelque tems après avoir défendu la


pratique de la difcipline à Mont-Caffin , Pierre Damien dit
que cette mort pouvoit bien être une punition de fa témé-
rité : néanmoins il donna à ce Cardinal les louanges qu'il
méritoit d'ailleurs par fes vertus. Au relie la pratique de dif-
cipline , dont on ne voit point d'exemple avant l'an 1 04^ &
1048 (0) , fut adoptée par toute la Congrégation de Mont-
Caflin avec la permiflion de l'Abbé ( p ) ; &: elle pafla dans
d'autres Monafteres.
LXXII. Pierre donne xians le quarante-quatrième Opuf-
cule (
une explication morale des dix plaies d'Egypte ,
7) ,

qu'il dit fignificr les vices capitaux que les hommes doivent
éviter , fur-tout ceux qui entreprennent de marcher dans la
voie étroite du falut. Il montre dans le fuivant (r), que le
delir de Içavoir eft l'origine de toutes fortes de maux ; que

(m) Vpufc. 45. num. i'^.


(n) Vila Viilor. III , Tom, 19. Aîlor. Ma- ( p") Idem, Tom, f, p, ^j^.
Bin. p. T9Î- i<!) Opufc. 44.
( ) Mabil. Vr*f%t. in Tom, 8 , Ailtr , (r)0/.«/V.4f.
CARDIN. EVESQ. D'OSTIE. Ch. XXXIII. 5^1
la fcicnce dans les Chrétiens mêmes , cft ou nuifible ou inu-
tile quand elle n'efl: point accompagnée des vertus chré-
,

tiennes ; que dans ce cas


la faintc iîmplicité lui efl: préféra-

ble parce qu'elle eft toujours utile au falut. Mais ce qu'il dit
;

contre les fciences , regarde principalement les fciences pro-


fanes. Dans le quarante - fixiéme ( f ) , il exhorte un jeune
homme qui étoit venu depuis peu dans le délcrt , à recevoir
patiemment les corrections, non-feulement des anciens , mais
des jeunes ; parce qu'elles iervcnt à purifier l'ame de fes ta-
ches, & à l'avancement dans la vertu. Il croit que lorfque faint
Paul réfifta en face à faint Pierre , parce qu'il contraignoit G*/. *, n:
les Gentils de judaïfer ; cette réprimande fe fit de concert
entre ces deux Apôtres , afin que faint Pierre qui ne man-
geoit auparavant qu'en fecret avec les Gentils , à caufe des
Juifs , n'eût plus de peine à communiquer publiquement avec
eux.
LXXIII. Le quarante - feptiéme efl: intitulé: Des moyens
d compofa pour Damien
conjerverla chnfleîé (f ). Pierre le
fon neveu. 11 de communier tous les jours, afin
lui conieille

que le démon ennemi de la pureté , voyant fes lèvres teintes


du Sang de Jefus- Chrifl , prenne la fuite car , ajoute- t-il, :

ce que vous recevez fous l'efpece vifible du pain & du vin ,


il fçait (k)
,
qu'il veuille ou ne veuille pas , que c'efl: en vé-
rité le Corps & le Sang du Seigneur. Pierre remarque en
cet Opufcule , que Ton réfervoit le Corps & le Sang de Je-
fus-Chrifl: pour les porter aux malades , afin de les commu-
nier fous les deux eipeces. Il dit ailleurs {x) , que le Corps
de Jefus-Chrift que la bicnhcureufe Vierge Mère de Dieu a
engendré , porté dans ion fein , enveloppé de langes , élevé
avec un foin maternel , e(} certaimmem le même corps que nous
recevons à l'autelJacré ; & dont nous recevons le Sang , com-
me étant le Sacrement véritable de notre rédemption que ;

c'cft-là la foi de l'Eglife Catholique ; que c'efl; par la force


de ce nouveau Sacrement du Corps du Seigneur ( )» ) , que

latibula pavefcendo dirt"ugiat,quod enim tu


<f) fypnft. 47. per vifibilem pnnis ac vini l^eciein fufci-
(k) Satage , frater , jamquotidi.' tcDo- pis : ille , velit , nolit , Dominici Corporis
nînici Corporis & Sunguinis perceptioxie ac Sanguinis intelligic veritatem.DAMiAK.
muiiire videat occultus lioftis labia tua 0/>«/c. 47- ^ 5 -•<•

Chrifli cruore ru'oentia , qua: territus per- (.1) S<t;«.4;.


horrefcat & mo\ in teDçbrarutn fuarum (t) Serm, lo.
Tome XX, Bbbb
,,

5<Î2 SAINT PIERRE DAMIEN,


nous chaffons de nous ce levain de la corruption de norre
vieil homme , afin de pafler de la lervicude à la liberté de
l'efprit.
LXXIV. Les deux Opufcules iuivans (z) , font des inftru-
£tions à des Moines , fur la tempérance , la modeftie dans les
habits , l'amour de la prière , la pratique de l'humilité & des
autres vertus. Le cinquantième Opufcule cft dans le même
goût. Pierre Damien y apprend à la ComtefTe Blanche , qui
avoit abandonné fes biens & fa famille pour fe faire Reli-
gieufe , comment elle devoit combattre contre les tentations,
& parvenir à la perfection par l'amour de Dieu , par la crain-
te de jugemens , par la méditation de la mort , par de
fes
faintes leâures. 11 blâme , dans le cinquante - unième ( « ) ,
un Moine nommé Teuzon , qui , mécontent de fon Abbé
ctoit forti du Monaftere pour fe retirer au milieu d'une gran-
de Ville c'étoit , comme le fait voir Pierre Damien , s'ex-
:

pofer à de grandes tentations de vanité, par les louanges que


devoit lui attirer , de la part des peuples , fon genre de vie
peu connu dans les Villes; ou à périr, n'ayant point d'autre
guide de fa conduite que lui-même. 11 lui raconte la fin mal-
heureufe de quelques Moines qui changeoient fouventdeMo-
nafteres mais il fait aufli l'hiftoire de plufieurs faints Solitaires.
:

Parlant de faint Dominique le Cuiraffé , il dit avoir appris de


lui, qu'on pouvoit accomplir cent ans de pénitence avec vingt
Pfeautiers accompagnés de difcipline.
LXXV. Apres avoir déploré , dans le cinquante-deuxiè-
me ( fc ) , les mœurs dépravées de fon fiécle , il congratule
ceux qui , pour éviter le naufrage , le retirent au port de la
Religion. 11 fait l'éloge des Moines de Mont-CafTin , dont il
compare le Monaflerc , où des hommes de différentes na-
tions opcroient leur falut , dans l'union indivifible de la cha-
rité , à l'Arche de Noé. Pourfuivant fa comparaifon , il don-
ne une explication morale de toutes les efpeces d'animaux
qui étoient dans l'Arche. Le cinquante-troifiéme (c) , adreffé
à Dominique le Cuiraffé , traite de la patience avec laquelle
on doit fouffrir les perfécutions des mèchans. Pierre y ra-
conte ,
qu'étant à Milan pour agir contre les fimoniaqucs

(î.) Optifc. 48. 49. yo, ,


(*) Opiifc. f 2,
(^) Opnfc. ^J. j. (,cyOfufc.,i..
CARDIN. EVESQ. D'OSTIE. Ch. XXXIII. 563
l*Abbé de Saint Simplicien lui donna un petit vafe d'argent ;
que la première penice fut de le refufer, &
d'examiner en-
luite fi cet Abbé n'avoit point quelque affaire , ou s'il n'étoit
point entré dans Ion Abbaye par llmonie ; qu'ayant trouvé
qu'il n'avoit d'autre vue dans ce prêtent, que de gagner fon
amitié , il l'avoit gardé après l'avoir toutefois prefTé de le re-
prendre , difant que fon amitié n'étoit pas vénale. Mais la
nuit fuivantc , en récitant les Pfeaumes , ce préfent l'inquié-
ta , & le matin il alla prier l'Abbé de le reprendre : fur le re-
fus qu'il en fit , ils convinrent que ce vafe d'argent feroit pour
un des deux Monafleres que Pierre Damien venoit de fonder.
De retour à fon défert, il fentit de nouveaux fcrupules fur ce
préfent & le renvoya à l'Abbé.
LXXVI. II exhorte , dans le cinquante-quatrième Opuf-
cule (d) , des Ermites de fa Congrégation, à jeûner le Sa-
medi en l'honneur de la fépulture du Seigneur, à l'imitation
de l'Eglife Romaine ; & à maintenir avec zèle l'obfervance
dans laquelle ils vivoienr. Pour les y engager, il leur repré-
fcnte qu'il ne reftoit plus que de foibles reftes de l'obfervance
rigoureufe des anciens •, & que comme ils ne rétablifloienc
pas ce que leurs prédcccffcurs avoient omis , leurs fuccefleurs
en feroient de même & alors , ajoute-t-il , nous ierons cou-
:

f)ablcs de leur négligence. Ils diront qu'il ne iont pas meil-


eurs que leurs pcrcs , & qu'ils s'en font tenus à ce qu'ils ont
trouvé établi. Dilivrons notre tems de ce reproche, 8c tranl-
mettons fidèlement à nos enfans l'exemple de vertu que nous
avons reçu de nos pères. Pierre exhorte encore fes Moines à
jeûner les veilles de Noël (e) , de l'Epiphanie , de faint Marc',
des Rogations , de la Pentecôte , de S. Jean - Baptille des&
Fêtes de tous les Apùtres. Il remarque que le jeûne du Sa-
piedi - Saint étoit plus rigoureux que des autres Samedis ;
mais qu'enquelqueslieuxonlcmodéroitàcaufedes malades &
de ceux qui venoient de loin recevoir le Batême ; qu'en ce
jour on ne devoit dire la Meflc que la nuit , afin que le Ba-
tcme général fût célébré entre la mort 6c U réfurredion de
JcHis-Chrift. :!•!•'
M^^ ' '- ^
LXXVII. L'Impératrice Agnès (j^'èpoiife'dé Vf mpéfètff

Bbbbij
,,

5<Î4 SAINT PIERRE DAMIEN ,

Henri ayant renonce au monde , vint à Rome, où elle


III ,

fe mie fous la conduite de Pierre Damien. Etant avec lui à


Saint Pierre , elle le fit affeoir devant l'autel lui fit une ccn- &
fefTion générale depuis lage de cinq ans , s'accufant exacte-
ment de tous les péchés dont elle pût fe fouvenir , accom- &
gnant fa confeffion de gcmifTemens de larmes {g ). Pierre &
qui raconte ce fait dans fon cinquante-fixiéme Opufcule , dit
qu'il ne lui impofa d'autre pénitence, que de continuer la vie
humble , auflere &
mortifiée qu'elle avoit embraffée. Il invite
ceux qui venoient par dévotion aux tombeaux des Apôtres
à imiter la ferveur de cette pieufe PrincefTe. Il rend témoi-
gnage à fes aumônes immenfes ; & on fçait d'ailleurs , que fes
jeûnes , fes veilles , fes prières étoient continuelles. Enfuite il
rapporte divers autres exemples de Princes , qui ayant mis
leur félicité dans la pofTefTion des richefTes des honneurs &
temporels ,malheureufement leur vie. Il en prend oc-
ont fini

eafion d'inve£liver contre les grands du fiéclc, en lesfaifan:


fouvenir qu'il n'ont pas lieu de fe glorifier de leur grandeur
puifque leur naiiTance &
leur mort ne font pas différentes du
commun des hommes.
LXXVIII. Il traire, dans lecinquante-feptiéme Opufcu-
^ ), de l'obligation où font les Princes de punir les mé-
le (
chans; &
avertit le Duc Godefroi , que fa douceur à cet é-
gard ne pouvoir qu'être préjudiciable à l'Etat; parce qu'en ne
punifTant point les crimes avec févérité , il leur donnoit lieu
de fe multiplier. Si celui-là, dit-il, cfl; le Miniftre de Dieu,
qui punit les malfaiteurs ; celui qui les traite trop doucement

efl: MiniRre du Diable. Il fait voir que la négligence


donc le
d'un Prince ou d'un Juge à rendre la juflice , ne peut être
excufée par fon affiduité à d'autres œuvres de piété. Il mon-

(g) Sedut hi qui a<5 Apoflrolorumlimina prietereà fubrepere potuit in fermone fu-
confluunt l'anftae devoiionis tua: falubriter perfluuiii , fidelibus eft relationibus evo-
imitentur cxemplum > fub arcaria guoque iutum. Ad quod mihi vifum eft ut nil a-
beati Pétri confefTiohe , ante facrum al ta- liud confitenii poenitentia; pondus injunge-
re me iedure f.cifti , ac pçr lugubres ge- rcni , nifi ut illud divinr legntionis elo-
nùtus & araara /ufpiria ab ipfa quinquen- gium iterarem , âge quod agis , operare
nis infantiK tetlera adhuc & nupef ablac- quod operaris . .. namDeo teftene unum
tata levitate cœpifti ; & tanquara illic ipfe quideni dicni jejunii , vel cujudibet afflic-

bcatus Apoftolus corporalitcr prrfideret, tionis indidi ; fcd ut in cocptis folummo-


quidquiil lubtilevel minutuin in humani- dô Tandis pcrfcverares operibus impeiavit»
tatis tua: potuit titillare vifceribus , quid- 1 Da mian. Opufc. ^6. p. 37Î
quid in cogitationibus vanura ,
quidquid |
(i) Ofufc, j 7.
CARDIN. EVESQ. D'OSTIE Ch. XXXIII. ^6^
tre dans le cinquante-huitième (i) , qu'on ne peut fc promet-
tre en ce monde une fclicitc parfaite; que les Saints accoutu-
més à l'étude de la véritable fagelTc , n'ont eu que du mépris
pour les fcicnces humaines d'où il conclut que ceux qui ne
:

veulent pas ablolument les négliger , ne doivent s'en lérvir que


comme des moyens pour parvenir à la fcience du lalut & à la
vraie félicité.
LXXIX. Le cinquante-neuvième a pour titre : De ce qui
arrivera dans les derniers jours , & de r^intechriji (/). Pierre
Damien convient qu'il efl: très-difficile de s'expliquer fur ce
qui précédera ou fuivra immédiatement le jour du Jugement;
mais qu'il eft utile de penfer à ce jour , dans l'affurance où
nous fommes qu'il fera fuivi pour nous , ou d'une félicité é-
ternelle , ou de fupplices qui n'auront point de fin. Il croit
que l'Ante-chrift régnera trois ans & demi ; & qu'après avoir
mis à mort Elie & Enoch , il fera lui-même tué fur le Mont
des Oliviers par l'Archange faint Michel ; que depuis la mort
de l'Ante-chrift il fe paflera quarante -cinq jours jufqu'à l'a-
vénement de Jefus-Chrift, pendant Icfquels la persécution
celTera, & les juftcs qui auront été ébranlés, feront péniten-
ce ;
qu'alors la terre & l'air feront couverts d'un feu qui pu-
rifiera les Elus. Il rapporte , d'après faint Jérôme , les fignes
qui précéderont le jour du Jugement dernier ; renvoie à &
ce qu'il avoit dit de ce jour , dans fa Lettre à la Comtefle
Blanche.
&
LXXX. Le foixantiéme dernier Opufcule {m) , contient
l'explication de quelques endroits de la Gcnefe: mais Pierre
Damien s'y livre entièrement au iens allégorique.
LXXXI. Suivent les Ades de fa légation en France (« ) , Légnion Ar
pour terminer différend qu'il y avoit entre Drogon , Eve- P'ecreD mien
le
quedeMâcon, &
Hugues, Abbé de Cluni. Pierre Damien '"çn^JI^^^Q^^
aflcmbla à cet etfet un Concile à Cbâalon - fur - Saône en ciie.
1063 on lut en préfence des Evoques , la charte de fonda-
:

tion de Cluni, par Guillaume , Duc d'Aquitaine, qui avoir

fouftrait ceMonaftcrc à la Jurifdidion de tout autre que du


Pape ; & les privilèges des Papes confirmatifs de l'exemption
de Cluni» Les Evêques conclurent unanimement à l'exécu-

(i) Optifc.^^. (m)Opuf(.6o.


I
^66 SAINT PIERRE DAMIEN ,

don de ces privilèges; mêmerEvêque de Mâcon , qui s'ex-


cufa d'y avoir contrevenu ,
parce qu'il n'en avoit pas eu une
entière connoiflance. Il demanda pardon de fa faute , & on

lui impofa une pénitence de fept jours de jeûne au pain & à


l'eau. Drogon demanda enfuite la confirmation des privilè-
ges accordés à fon Eglife , par le Pape Agathon mais les :

Evêques n'y trouvant rien outre le droit commun de toutes


les Eglifes , ne jugèrent pas à propos de lui accorder fa de-
mande. On lit à la têce de ces AQes, une Lettre d'Alexan-
dre II , aux Archevêques de Reims , de Sens , de Tours , de
Bourges & de Bordeaux, portant ordre de recevoir Pierre
Damien comme lui même, & d'obéir à fes ordres & à la fuite ;

des mêmes Aftes , une hymne fur la gloire du Paradis , tirée


des paroles de faint Auguftin.
Tomequatrii.'. LXXXII. Le quatrième tome des (Euvres de faint Pierre
'"^*
Damien , renferme plufieurs Oraifons , des Hymnes , des Le-
çons , des Mefles , des Répons &
2 1 5 Poèmes fur des fujets
de piété. Le 2 i 3 eft fon Epitaphe en vers élégiaques. Il n'a
d'autre part aux explications de l'ancien Tcftament , que
d'en avoir fourni la matière dans fes Ecrits. Un Moine ano-
nyme , qui avoit été fon difciple , mit par ordre ce qu'il avoit
trouvé de bon pour l'intelligence du texte facré ; dédia &
fa compilation à Damien neveu du Saint. On convient que
la Règle des Chanoines Réguliers, n'eft point de Pierre Da-
mien , mais d'un Clerc de l'Ëglife de Ravcnne, nommé or-
dinairement Pierre de koneftis. Elle efl: précédée d'une Lettre
ou Epître dédicatoire à Pafchal II , qui occupa le Saint Siè-
ge depuis l'an icpo jufqu'en 11 18. Pierre mourut l'année
fuivante 11 19. Quelques-uns ont regardé comme un Ouvra-
ge fuppofé à Pierre Damien , celui qui efl intitulé : De la cor-
rcBion des Evêques &
des Papes : d'autres ont cru qu'il avoit
été oublié dans la colledion de fes (Euvres. Rien de tout
cela. Il fait de la douzième Lettre du premier Livre,
partie
adrcffèe au Pape Alexandre II. On la trouve dans divers
Recueils d'anciens monumens , imprimés à Strafbourg en
1562 , & à Francfort en \6\i3^ Se 1611. Goldaft l'a aufli
rapporté dans fon fécond Tome de la Monarchie de l'Em-
pire.
.l!;t;c ment des LXXXIII. Lcs Ecrits de faint Pierre Damien méritent
pkrre ^a^' l'^ttcntion dcs Icdcurs , par la variété
des matières qui y font
mien. traitécs , par quantité de remarques importantes fur le dogme,
CARDIN. EVESQ. D'OSTIE. Ch. XXXIII. 5(^7
fur la morale, lur la dil'cipline ecclcfiafliquc & monadiquc ,
& de l'Eglilb , & par la facjOn pleine de noblcfle,
fur riiiftoire
de facilite & d'agrément dont il accompagne tout ce cju'il dit.
Son ftylc a le mérite de la préciiion &
de la clarté ; quoique &
femc de figures , il n'cfl point embarraflé. On voit dans fes
Lettres un génie fin , délicat , né pour les affaires. Il parle
aux Grands avec liberté; mais toujours avec politefTe & cir-
confpedion vif dans (es invc£tives contre les défordrcs , il
:

ménage les coupables pour les détourner plus aifémcnt du vice :

mais la pudeur a peine à fupporter les peintures qu'il fait de


ces défordres. Ilparoît trop crédule à l'égard d'un grand nom-
bre de vifions & d'hiftoires rapportées dans fes Ouvrages :
néanmoins y en a quelques-unes de fi bien conflatécs , qu'il
il

feroit déraifonnable de s'y rcfufer.ïl y a du tour &


de l'art dans
fes poéfies, de l'élégance dans fes difcours ; &
dans tous fes
Ecrits on remarque un efprit cultivé , 8c inftruit des fciences
divines & humaines.
LXXXIV. Ses Œuvres ont été recueillies par Conftantin Editions de

Cajétan & imprimées à Rome à Lyon & à


, , Paris , comme ^" ^"vrages.

on remarqué plus haut. Nous ajouterons ici qu'il s'cfl: fait


l'a

une édition particulière de fes Lettres à Paris en i6\o, in-4°.


par les foins du même Editeur. Il a mis à la tête de l'édition
générale des Ecrits de ce Père, fa vie par Jean fon difciple ,
dédiée à Liprand & autres anciens du défert de Font-Avel-
lane ; une autre vie , de la façon de Jean-Antoine Flaminius;
une troifiéme , par Auguftin Fortunius , Moine Camaldule ;
une quatrième , tirée du cinquième Livre de l'Hiftoire de Ra-
venne , par Jérôme Rubeus ; enfin divers témoignages que les
Ecrivains de l'onzième , douzième & autres fiéclcsfuivans,ont
rendus à la piété &• à la dottrine defaint Pierre Damien. Les
quatre tomes ont chacun un? Préface particuliere,avec de nou-
veaux témoignages des anciens en faveur du Saint. Il feroit à
fouhaiter qu'avec tant de précautions pour le bien faire con-
noître , Conflantin Cajétan eût rendu le texte de fon Auteur
plus correft mais on doit croire que la chofe ne lui a pas été
:

poflible , faute de bons manufcrits.


,

568 HEPIDANN, MOINE DES. GAL. Ch. XXXIV.

CHAPITRE XXXIV.
Hepidann, Moine de Saint Gali Gualdon Moine de Cor-
bie j Jean d'Aquilée} Gmthier de Bamherg; Rainaud,

Sclîolaflique d'Angers ; à* quelques autres Ecrivains,

Hepidann , I.
C^ N nc fçait autre chofe de la vie d'Hepidann , fi ce
^°Tc
a F^
•^'
"'""-
^-^ '^'^^ ^"^''^ ^^ profeflion de la Règle de Saint Benoît
. j^ns l'Abbaye de Saint Gai en SuifTe {a) ; qu'il s'y appliqua
à l'étude des Lettres ; &
que dans le dcffein de tranfmettre à
la poftérité les chofes mémorables arrivées long-tems avant
fa naiflance , il lut les anciens Hifloriens, &pritSalufl.e pour
fon modèle. C'efl; ce que l'on remarque dans les Annales
qu'il a compofces , fur-tout dans ce qu'il dit fur l'année mil
cinquantième où elles finiffent. On y a ajouté depuis , ce qui
fe pafTa en io3o , fous le règne de l'Empereur Frédéric : mais
il efl vifible que cette addition efl: d'une autre main. Hepi-

dann efl bien plus diffus dans le récit des événemens paffés de
fou rems , que dans les flécles précédens. Il commence fa
narration à l'an 708 , auquel le Duc Godefroi mourut , fi- &
nit en 1050. Ses Annales font intercalées de vers. Il en rap-
porte fur l'an 829, de la façon de Notker- le -Bègue , qui
nous apprennent que le Monaflere de Saint Gai étoit alors fi
pauvre , que l'Abbé Gozbert ayant entrepris de bâtir l'Egli-
fe, les Moines porroient eux-mêmes les matériaux nécelTai-
res. Il marque en général tout ce qui pouvoit intéreffcr l'hi-
ftoire de l'Eglifc & de l'Etat. Goldaft efl le premier qui ait
mis au jour les Annales d'Hepidann (Z»), André Duchêne les
fit imprimer depuis ( c ) , dans le troifiéme Tome de fon Re-

cueil. Le premier Editeur dit, qu'il avoit en main un Con>


put Eccléfiafliquc compofc par Hepidann , avec autant de
précifion que les Annales. Le flylc &
le génie de ces deux

(d) GoLDàST. Tarn. I. rcTum AlamxA (*) ïiem. Ibid.


niiAT.fag. I. 1 (Ô '"''i- 471.
Ouvrages
, ,

GUALDON MOINE DE CORB. Ch. XXXIV.


, ^69
Ouvrages le font douter qu'Hepidann Ibit Auteur de la vie
de fainte Viborade. Il appuie ion doute d'une autre raiibn ;
fçavoir, que celui qui a écrit cette vie , dit dans fa Préface
à l'Abbé Udalric, qu'il l'a commencée en 1072. Si Hepidann
eût vécu jufqucs-là , c'cft le raifonnement de Goldafl: , eût-il
fini fes Annales en 1050. Il ne laifTe pas de rapporter cette
vie toute entière fous le nom d'Hepidann (d) : mais il pen-
fe qu'il y a eu dans le même fiéclc & prefque en mcme-
tems deux Ecrivains de ce nom ; comme on y vit deux
,

Ratperts , deux Hartmanns , deux Eldcehards , deux Not-


kers.
II. Lambecius nous a donné la vie de faint Anfchaire , Guaidon
Evêque de Hambourg , écrite en vers , & dédiée à Adal-^o'"edei'an.
bert , Archevêque de Brème. Le manufcrit fur lequel il l'a
publiée , ne portoit aucun nom d'Auteur mais a : il cru ap-
percevoir dans le texte même de cette vie , qu'elle étoit de
Gualdon , Moine de Corbie en France. Son opinion a été
fuivie d'Henfchenius, de Dom Mabillon & de plufieurs autres,
ainfi que nous l'avons remarqué dans le Volume précédent.
Mais Jean Hallervord prétend (e) , que Gualdon ne fît que
confeiller au Poète anonyme de mettre en vers la vie que S.
Rembert avoit compofée en profe & cela paroît affez claire-
:

ment par le vers 171 ; enforte qu'on doit rayer Gualdon du


Catalogue des Ecrivains Eccléfiaftiques (/).
III. L'Empereur Henri II ayant fait ériger en Evêché la
]^^^='J^''J[j'^^
^"' '^^*
Ville de Bamberg on y bâtit une Eglife Cathédrale , dont *
*^

la Dédicace fe Ht le jour de la naiflance de ce Prince (g) t


la trente-cinquième année de fon règne , de l'erc vulgaire
loi I . Ce fut Jean , Patriarche d'Aquilée , qui en fit la céré-
monie , aflifté de plus de trente Evêques. Il refte de ce Pa-
triarche une Lettre à Henri , Evêque de Wirtzbourg , dans
laquelle , après avoir loué la libéralité de l'Empereur Henri
qui avoit doté cette nouvelle Eglife de fes biens patrimo-
niaux ; il le loue lui-même d'avoir confenti au démembrement
d'une partie de fon Diocèfe , pour l'éreiSlion de l'Evcché de

(i/) 'GoiDAST. ibid.pag. 107. F«i« (^ p. 7f«.


BoLLAND. ad diem z Maii , tom. i , fag. (/) Contra naturam quem conipulit
15}. ES Mabjllov, ad fdcul, j AHor.Oi- efTe poè tam , Gualdo tibi fidus , fanàifli-
din. S. BeneJicli. me pr^eful amicus.
(<) Hallerv. Spicil. dt Hiftor. Latin [g) PACI,4i40. lOIt.^. lat.
Tome XX. Ce ce
,,

570 GONTfT. EVESQ. DE BAMB. Ch. XXXIV»


Bamberg. Cette Lettre fe trouve dans le fécond Tome des
Ecrivains du moyen âge {k) , par Eccard , avec tous les pri-
vilèges des Papes , les Diplômes des Empereurs & le confen-
tement de Henri , Evêque de Wirrzbourg , au dimembrcment
de fon Diccèfe en faveur de cetce Eglife.
Çônthier , IV. On trouve dans le même Tome ( ? ) , une Lettre fort
Evéque de longue fous le nom d'Udalric , Evêque d'Aufbourg , adrcilée
au Pape Nicolas II , fur la continence des Clercs mais n'y
:

ayant eu aucun Evêque de ce nom à Aufbourg ni dans tou-


,

te l'Allemagne, fous le nom d'Udalric, pendant le Ponti-


ficat de ce Pape , M. Eccard, fondé fur un manufcrit de la
Bibliothèque d'Hanovre (/) , penfe qu'au lieu d'Udalric, il
faut lire Gonthier , qui fut Chancellier de l'Empereur Henri
IV, & Evêque de Bamberg, fous le Pape Nicolas IL Sa
raifon efl: que ce manufcrit ne défigne l'Auteur de cette Let-
tre que par un G. qu'il n'y avoit alors que deux Evêques
dont le nom commença ainfi fçavoir Gundacar d'Eichftat
; ,

& Gontier de Bamberg ; que ce dernier ayant paffé pour


très-habile & très- éloquent , il étoit naturel delà lui attri-
buer plutôt qu'à Gundacar , qui n'efl: connu dans l'hiftoire
que par fa dignité d'Evêque. Le Décret du Concile de Rome
en 1055) , contre les mariages des Prêtres, donna occafion
à la Lettre dont nous parlons. Gonthier fe plaint de la fen-
tencc d'excommunication portée par le troifiéme Canon de
ce Concile , contre les Prêtres , les Diacres& les Soùdiacres
qui auront époufé publiquemeut une concubine , ou ne l'au-
ront point abandonné après l'avoir époufé. Il dit que le ma-
riage n'eft interdit aux Prêtres , ni dans l'ancienne , ni dans
la nouvelle Loi ; que l'Apôtre veut , fans aucune difl:in£lion
que chacun une femme pour éviter le danger de la forni-
ait
cation ; de ceux qui , par un vœu particulier ,
à l'exception
fe font engagés dans la continence ; que le Concile de Ni-
cée ayant voulu l'impofer aux Minières facrés , Paphnuce ,
l'un des Confefleurs dans la perfécution de Maximien , s'y
oppofa ; qu'en vain les défcnfeurs de la continence des Clercs
s'autorifcnt du fentiment de faint Grégoire fur ce point
puifque ce faint Pape fe répentoit du Décret qu'il avoit dori-
,

PAPIAS LE GRAMMAIRIEN. Ch.XXXHV, 571


ré là-deflus ; ce qu'il prouve par une hiftoire fabuleufe , in-
connue à tous ceux qui ont écrit au fepticme ou huitième {ié^
clés. Il prie le Pape Nicolas de révoquer fon Décret , de peur
d'expoler à de grands crimes les Clercs , en les privant d'une
femme qu'ils ont époufée légitimement.
V. On met ordinairement au nombre des Ecrivains Ec- Papias le
cléliaftiques, Papias le Grammairien. Il étoit Lombard de sJ^^J^'-J""'
nation. Tritheme lui attribue quelques Lettres (m) : elles
n'ont pas encore été rendues publiques. Mais fon Vocabu-
laire fut imprimé à Milan en 1476, in-fol. à Venife en &
1487 , i4pi &
14516. Cette dernière édition cfl: due à Bo-
vinus Monbitius elle efl: plus ample que les précédentes ,
:

par les additions de l'Editeur. Papias employa dix ans à la


compofition de fon Vocabulaire , &
l'acheva en 1055 , U
treizième année du règne de l'Empereur Henri fils de Con-
rade c'eft ce qui efl marqué dans la Chronique d'Alberic
:

de trois Fontaines («). Un nommé Rainald en fit une copie


en 1175. Il trouvoit ce Vocabulaire fi utile (0) ,
qu'il enrc-
commandoit la lecture à tout le monde ; & ne demandoit
pour les peines qu'il s'étoit données ^n le .copiant , que les
prières de ceux qui fcroient ulage de fa copie diiant qu'il ;

les efiimoit plus que l'or. Vers l'an 1 192 , Ugutius de Pile ,
Evcque de Ferrarc , augmenta le Vocabulaire de Papias,
dontil parle co-Dame d'un Ouvrage très-avantageux, tant pour
ceux qui enfcignent les Belles-Lettres & les Loix , que pour
les Théologiens & les Pafleurs de l'Eglife.
VI. Il y eut vers le même tems , un autre Grammairien RaîaaudScho-
dc réputation à Angers , nommé Rainaud , différent de Rai- ^^^'i^^ d' Ar-
naud de Tours. Ils avoient étudié tous deux fous Fulbert de
C-hartres celui-ci enfeigna â Tours ; celui-là à Angers. Son
:

fçavoir & procurèrent l'Archidiaconé d'Outre-


la vertu lui
"^aine(p), dépendant de l'Eglife Cathédrale d'Angers, Il
compofa divers Ouvrages qui exifient mais qu'on n'a pas :

encore fait imprimer. Le premier ell une Chronique [q) , où


il donne la fuite des événcmcns depuis Ptolomée Evcrgete ,

(m) Trithem. Je Script. Ecclef. c. (p) DucHESN.Tow. 4.^. 15 ).


.(«) Chronic. Alberic. ad au-, 105 J, fy) Le Long. Bil/iioth. Ir.inc p.
(o)tOliDIN. 4' Sirift^ tfçlef, Tom.i.f, MoNTF. Biblim.
61.1. 6il,

C ceci]
p2 LEGER, ARCHEV. DE VIENNE, Ch. XXXIIV
yufqu'à lan 1075 (r): c'efl: du moins à cette année que fon
Continuateur reprend la fuite de ITiiftoire (i). Le fécond
eft une relation des miracles faits au tombeau de faint Fie-
jent (f). Il compofa encore des R.cpons pour l'Ofi&ce de ce
Saint ; que Sigon , Doyen de l'Eglife de Chartres , mit en no-
tes. Rainaud mourut vraifemblablement vers l'an 1075 , au-
quel finit fa Chronique.
Leget, Arche,
VII. Léger fut premièrement Chanoine de l'Eglife du
chevsque de
Vieone. Puy en Vêlai ( «) , puis Archevêque de Vienne. Il occupoit
ce Siège dès-l'an 1025 , comme on le voit par une Ordoa-
nance qu'il fit en cette année pour le Monaftere de Saine
André. Les Moines que TAbbé Iterius envoyoit dans les obé-
diences, s'en approprioient les revenus. Il s'en plaignit à l'Ar-
chevêque , qui , de concert avec Iterius , ordonna que les
biens de ces obédiences feroient employés aux befoins de la
Communauté de faint André , fous peine aux tranfgrefleurs
d'être privés de la Communion. Léon IX s'étant arrêté à
Ravenne , à fon retour d'Allemagne en 1053 , reçut des Dé-
putes de l'Eglife du Puy , où l'on étoit en conteftation fur le
choix d'un Evêque. Le ]?ape ayant ouï leurs raifons , con-
firma réle£lion qu'ils avoient faite de Pierre , 8c fans aucun
égard au nommé par Roi Henri , il le fit ordonner par
le
Humbert , Cardinal & Evêque de Blanche - Selve. Léger
qui avoit dirigé les Chanoines du Puy dans toute cette affai-
re (^ ) , foufcrivit à l'ade d'éledion & de la confécration de
Picrre^prenant dans fa foufcription le titre de Primat de Vien-
ne («).En Ï050, Léger accompagna Léon IX à fon retour
de France à Rome. On a de lui une Charte datée du mois
de Février 1066. 11 avoit compofé l'hiftoire des Archevçp
ques de Vienne fes prédéceffeurs («). On ne l'a pas encore
imprimé.
Chroniques
d'Anjou.
VIII. Le Père Labbe Dom Martenne ont publié di- &
verfes Chroniques d'Anjou, dont une finie à Tan 1057, 8c

(^r) Ëilliot. fug. 10.


C5 Bibliot. Coiton. Spicil. f).
178.
fag. 6j. (7) Mabij-lon. lib, 60. Annal, rium,
(j j Labbe. tom. I. nov. Bibliot. fag. ih
z8z. (t) Idem, in AppenJ, Tom, 4. Annal, p,
(«) Martenne , amplijf. Colleil lom. j. 74S-
f. 1 121. («) DucHFSN. Tum. 3.^. tf+1. Murât.
(«) MaBILI. Lih. Co. Annal, nirm.
JJ. liai. Script. Tom. l.part. i, p. 761.
(x) Idem. tiii.
J5. „um. 76. ^
»o»«, 13.,
. ,,

JEAN , ABBÉ DE FECAM. Ch. XXXIV. 57^


une autre en io7p(^): celle-ci met fur l'an 1063 » l'écabliffe-
ment de l'Ordre de Grandmont dans le Diocèfe de Limo-
ges : mais il ne fut infli:ué qu'en 1073 , ^^"'' ^^'^^ paroît par
la Bulle de Grégoire VII (c), datée du premier de Mai de
cette année ; Se cet Ordre ne porta le nom de Grandmont
qu'après la mort d'Etienne de Thiers fon Fondateur, arri-
vée en 112(5 j à la quatre- vingtième année de fon âge. Il fc-
roit aifé de remarquer dans cette Chronique plufieurs autres
fautes (i^), de même que dans toutes celles d'Anjou , apparem-
ment par la négligence des copifles , qui fouvent ont tranf-
porté dans le corps des Chroniques , les additions qui y ont
été faites depuis.
IX. Jean nommé quelquefois Jeannelin , à caufe de la pc- jean,^bbc Je

titcfTe de fa taille, vint étant encore jeune, de Ravenne fa^écam.


patrie , à Dijon où il fit profefllon de la vie religieufe dans

l'Abbaye de Saint Bénigne , fous l'Abbé Guillaume (e) , qui


le fit depuis Prieur & enfuite Abbé de Fécam : car il avoir
gouverné lui-même ces deux Monafleres en même - tems.
Jean fut béni Abbé par Hugues, Evêque d'Avranches, vers
l'an 1028. En 1052, l'Empereur Henri III lui donna l'ad-
miniflration de l'Abbaye d'Erbreftein ce lui fut une occa-:

fion de fe faire connoître de l'Impératrice Agnès. Deux ans


après il fit le voyage d'Angleterre , pour prier le Roi Edouard
de prendre fous la protedion les biens que l'Abbaye de Fécam
avoit dans ce Royaume. Son voyage eut le luccès qu'il en at-
tendoit. Il ne fut pas fi heureux dans le pèlerinage de Jéru-
falcm. Les Mufulmans le tinrent affez long-tems en prifon :
mais ayant trouvé le moyen d'en fortir , il revint à fon Ab-
baye , où il mourut le 22 de Février 107 8
X. Nous avons de lui un Recueil de Prières & de Médi- p^Jj;"''''
'^'^

rations , qu'il compofa pour l'Impératrice Agnès , depuis fa


viduité & lorfqu'elle eût pris le parti de pafiTer le rcfle de fes
jours dans les œuvres de piété. Le Prologue ne porte en tête
que le nom de l'Abbé Jean mais on ne peut douter que ce
:

ne foit l'Abbé de Fécam , nommé quelquefois Jeannelin


comme on vient de le dire. Que l'Auteur ait été Abbé , c'efl'

( i) Labb. tom. I. nov. Bikiiot, fug. 84.


*7Ï- ^ f'1- £5 Marten. tom, f ANccd. p.
. ((/) La DE. Jhid, pag.6^4,
(e) MABj.Ll.Oli t'» AnaltS, f. ixy.
(f)MABlL. PrxftU. T«77,i». Ailor. iium.
574 ,
JEAN, ABBÉ DE FECAM.Ch. XXXIV.
ce qu'il marque clairement à la fin de ce Prologue, en difaftt
à l'Impératrice : Moi Jean, & les frères qui font avec moi ,
nous faluons votre Béatitude qu'il ait écé de petite taille
; ,
il le dit en termes exprès à la fin de l'aftion de grâces pour

les bienfaits de la miféricorde de Dieu. Si le nom de l'Impé-


ratrice n'eft pas marqué dans ce Prologue , il y a des indices
ïufiiùns pour dcfigncr la PrinceiTc Agnès , époufe de l'Em-
f)ereur Henri III dit le Noir. On y voit , en effet , que ce Pro-
ogue s'adreffe à la veuve d'un Empereur qui portoic le nom
d'Henri ; qu'elle étoit réfolue de paffer fes jours dans la vi-
duité ; qu'elle avoit parcouru prefque toute l'Italie pour vifi-
ter les reliques des Saints ; qu'elle faifoit à chacune des of-
frandes , & de grandes aumônes dans toutes les Villes &
Bourgades qui fe rencontroient fur fa route traits qui cara- :

dérifent parfaitement l'Impératrice Agnès. On demandera


peut-être où elle avoit connu l'Abbé de Fécam? Ce pouvoit
être , ou dans le tems qu'il prenoit foin de l'Abbaye d'Er-
breftein , par ordre de l'Empereur Henri fon époux , ou lorf-
que vers l'an 1 066 , elle fit un voyage en France. Il efl vrai
qu'elle fit auiïi un voyage au Monaftere de Frutare , qui
compte un Jean parmi fes Abbés ; mais ce Jean étoit more
dès l'an 104 1 ; & lorfque cette Princeffe fe propofa ce voya»-
gc , cette Al baye étoit gouvernée par Albert ainfi qu'il pa- ;

Toît par la Lettre qu'elle lui adrefi^a pour lui donner avis dû
dcflein où elle étoit de l'aller voir. Jean Gualbcrt étoit auflî
contemporain de l'Impératrice Agnès mais on ne voit nulle:

part que ce Saint fe foit mêlé d'écrire.


Ccquec'e][ XI. Le Rccueil de l'Abbé de Fécam , efl compofé de deux
'
Livres, & chaque Livre elt divile en trois parties , qui corn*-
•i. mencent par un ou plufieurs Pfeaumes relatifs aux matières
3ui font le fujet de l'Ouvrage aux Pfeaumes font jointes
:

iverfes prières tirées ordinairement de l'Ecriture - fainte.


Dom Mabillon ayant trouvé ce Recueil dans deux manuf-
crits , l'un de faint Arnoul de Mccz , l'autre de la Bibliothè-
que du Roi , en a donné le Prologue dans ies Analeflcs ;
quatre Prières entières , avec les titres dc^ chaque partie dcS
deux Livres. Il remarque que le fécond , intitulé De la di- ;

vine conti'tnplation , fut imprimé à Paris en 1539, chez Vaf-


cofan , fous le nom de Jean Cafîlcn {e) , avec ce titre Con- :

\t) Ai'C. m Âppiml. ttni, 6,f, lof.


*
. ,

JEAN, ABBÉ DE FECAM. Ch. XXXIV. 575


fejfion théologique divifèe en trois parties j que c'eft dans les Ou-
vrages de l'Abbé de que l'Auteur du Livre intitulé :
Fecam ,

Médnamns a puifé une bonne partie de


de faint Âugtijïin ,

fes réflexions ; que Jean de Fécam apuifé lui-même dans les


Ecrits de fjinc Auguflin &: d'Alcuin ; qu'il fuit de -là , que
l'Auteur des /Méditations attribuées à faint Augudin, efl; non-
fculemcnt plus récent que ce Père , mais encore que cet
Abbé.
XII. Il fait mention dans fon Prologue , de quelques autres j';''|f^'J^^f 'î'
Opulculcs qu'il avoir compotes pour l'édification de la même f^^cam.
Impératrice ; fçavoir , une inflrudion pour les veuves ; un
Traire de la vie & des mœurs des vierges , à l'ufagc des Re-
ligieufes du Monaftcrc où elle s'étoit retirée , c'cft-à-dire , de
Sainte Péironille; un de l'aumône & de la manière de la fai-
re ; & un de la contemplation & de la Jérufalem célefte. Au-
cun de ces Traités n'a été mis fous prefle.
XIII. Il a été parlé plus haut, de trois de fes Lettres im- Ses Lettres,
primées dans les AnaleiSles de Dom Mabillon (/) les deux :

premières font en faveur de la tranflation de Vital , Abbé de


Bernai j à l'Abbaye de Oucfminfter , comme le fouhaitoit le
Roi Guillaume. Dans la troifiéme, qui efl à Varin, Abbé de
Saint Arnoul à Metz, Jean lui réitère la demande qu'il lui
avoir déjà faite plufieurs fois , de lui renvoyer le Moine Be-
noît. Dom Martcnneen a donné cinq autres. Par la premie-
^'^
(s) i il établit un Abbé pour le Monaftere de Blangi , à
condition que Roger, Comte de Saint Paul , qui l'en avoir
prié , continucroic à prendre foin des bàtimens de cette Ab-
baye , comme il a voit commencé ; 8c que dans la fuite l'éle-
£l;on des Abbés dépendroit de la Communauté. Il reprend ,
dans la féconde ( /i) , quelques-uns de l'es Moines qui.a voient
fecoué le joug de l'obéiflancc. Il écrivit la troifiéme conjoin-
tement avec Maurille, Archevêque de Rouen ( «) à fEvêquc
d'Evreux , pour fe plaindre de qu'il avoir excommunié un
Moine , pour avoir contrevenu aux articles portés par la Tre-
ve de Dieu ; ce Moine étant, fuivant la Règle de Saint Be-
noît , exemt de la Jurifdidion de l'Evêque. 11 fe plaint dans

(/)MaBUI. j'n i4K(i/f3. f, 45T.


I
{ h ) V ag, i.01^

ig ) Mart£kne. tom, I. Anecdot, fag. 1 («} Pag, leÉ,


,

575 JEAN, ARCHEV. DE ROUEN. Ch. XXXIV.


la quatrième (/) , au Pape Léon IX, des mauvais traitemens
que les Normans & les habitans d'Aquapendence lui avoienc
faits dans fon voyage d'Italie. Il prie le même Pape d'appor-
ter remède aux l'candales que donnoient au public Raoul
Duc de Bourgogne , &
le Comte Thibaud , par leurs maria-
ges inceflueux , au mépris des Décrets du Saint Siège. La
cinquième eft pour engager Guillaume (w), Roi d'Angleter-
re , à empêcher les Seigneurs du pays de s'emparer des biens
de l'Abbaye de Fécam. Le même Editeur a fait imprimer la
Préface d'un Recueil de fentences des anciens (n) , pour l'in-
flruclion de la jeunefîe. Le titre de cette Colledion porte
qu'elle eft de Jean homme de Dieu. On donnoit communément
ce nom à Jean , Abbé de Frutare , au Diocèfe d'Yvée ; &
l'on ne voit pas qu'on l'ait donné à Jean de Fécam : d'ail-
leurs le manufcric de cette CoUeftion fe trouve dans l'Abbaye
de Taloire , qui n'efl: pas éloignée de celle de Frutare. Les E-
crits de l'Abbé de Fécam font d'un ftyle clair fimple & propre
à infpirer des fentimcns de piété.
Je^n, Arche- XIV. Jean fàls de Raoul , Comte de Baïeux (o) , futnom-
vc>]ue de mé à l'Evêché d'Avranches en ïo6i , par Guillaume , Duc
de Normandie , & transféré de ce Siège à celui de Rouen ,
après la mort de l'Archevêque Maurille en 10^7. Le Duc
Guillaume voulant faire confirmer cette tranflation , députa
Lanfranc à Rome , qui en rapporta des Lettres de confir-
mation, avec le Pallhim pour l'Archevêque. Il gouverna TE-
glifc de Rouen pendant environ onze ans & trois mois , qu'il
employa à rétablir les bonnes mœurs & l'ancienne difcipline
dans fon Diocèfe ; ayant tenu à cet effet divers Conciles
en 1075. Cécile fille aînée du Duc Guillaume , alors Roi
d'Angleterre , defirant de fe confacrer à Dieu , l'Archevêque
Jean en fit la cérémonie à Caen (p). Deux ans après, c'eft-a-
dire , en 1077 > ^^ aflifta avec plufieurs Archevêques {q) , le
Roi Guillaume 8c la Reine Methilde, a la Dédicace de l'E-
glife de Saint Etienne en la même Ville. Attaqué de paraly-
fie qui lui ôtoit le pouvoir de faire fcs fondions , il fe démit de

{r)?ag.ioj. rw. 4.^ro7.


(m) l'ag. 1J18.
1 [p) Ma BILL. Li5. 54. Annal, tsnm. $>7.
(n) Pag. '163. \ il ) ^^">>' tib. 6J. num, l j.
(e) Orderic. Vital, lit. 3>/«493. tf
'

fon
,

JEAN, ARCHEV. DE ROUEN Ch. XXXIV. 577


fon Archevêché deux mois avant fa mort , qui arriva le neu-
vième de Septembre l'an 1 07p.
SesEcrii*.
XV. On a de lui un Traité des Offices Eccléfiaftiques ,
imprimé à Rouen en 16^2 , chez Laurent Maccory ; Se en
1679 , chez Le Brun. Jean le Prévôt qui avoit travaillé à la
première édition avec Georges Ridel & Jacques Malet , fe
chargea feul de la féconde ; & voyant qu'on ne pouvoit re-
couvrer le texte entier de l'Auteur , il y fuppléa en ajoutant
dans cette édition un Traité anonyme , qui contient une ex-
plication fpirituelle , &
des Offices eccléfialliquesdes or-
nemens des Miniftres encore une expli-
facrcs. Il y joignit
cation de la Préface &
du Canon de la McfTe , qu'un incon-
nu avoit tirée d'Amalaire , &
un Cérémonial de l'Eglife de
Rouen , ancien alors de plus de deux cens ans. Jean compo-
fa fon Traité des Offices , étant Evcque d'Avranchcs , & le
dédia à Maurille , Archevêque de Rouen. L'éloge qu'il en
fait dans la Préface ou Epître dédicatoire, a engagé Dom
Mabillon à la faire imprimer toute entière dans le neuviè-
me Tome des A£les ( r ) , où il parle de Maurille. Dom
Pommeraye l'a rapportée auflî parmi les Ades des Conciles de
Rouen (5).
XVI. On voit par cette Préface, qu'il étoit d'ufage dans Ce qu'ils con-

les Eglifes Suffragantes, de fuivre les Rits & lesufages de la '^'aT/i'/^'


Métropolitaine en forte que l'Evêque Jean , en rapportant
;

ceux d'Avranches, étoit cenfé rapporter ce qui étoit en pra-


tique dans l'Eglife de Rouen. Les Chanoines ou les Frères
comme il les appelle , s'afTcmbloicnt au ion de la cloche pour
les heures des Offices , foit de nuit , foit de jour. Ils fe met-
toient modeflement à leurs places , & y demcuroient debout
en lllence jufqu'à ce que l'on commençât l'Office. On le fi-
niflbit à toutes les heures par un Répons , un verfct , l'Oraifon
Dominicale , les Prières , le Pfeaume Miferere & une Orai-
fon. Tout cela fe difoità genoux mais parce qu'il n'étoit
:

point permis de prier à genoux les Fêtes & Dimanches j ni


dans le tems pafchal", on fupprimoit en ces jours les Répons
& les autres parties de l'Office que nous venons de nommer.
Les Leçons du troifiéme Nodurne à Matines , fe prenoient
de trois Evangiles ceux qui les chantoient étoient revêtus
:

Tome XX. Dddd


578 JEAN , ARCHE V. DE ROUEN. Ch. XXXTV
de chapes , ayant devant eux des Minières qui portoient de
l'encens &: des cierges. Jean d'Avranches parlant des Fêtes
,
dit , qu'on ne doit pas trop les multiplier, de crainte que le
grand nombre ne cauie du dégoût. 11 ne compte , ni Fêtes
lemi-doubles , ni fimples, comme il y en a aujourd'hui aux :

joùr^ de Fériés , le Prêtre qui récitoit les Oraifons , fe tenoit


debout pendant que le chœur &
le peuple étoient à genoux.

Il en donne diverles raifons myftérieufes ; & c'efl la façon


ordinaire d'expliquer les cérémonies de TOffice divin. Le jour
de Noël , à la fin des Laudes , le Chantre entonnoit l'An-
tienne Ecce compleiafunt. Elle ctoit fuivie d'une Oraifon de
la Vierge. La première des trois Mefles que l'on avoir cou-
tume de célébrer en ce jour , fe difoit immédiatement après
les No6turnes &
avant les Laudes , par le Secrétaire de l'E-
glife; le Chantre célébroit la féconde, l'Evêque ou le Doyen
la troifiéme. On en chantoit deux le jour de la Fête de faint
Jean l'Evangélifte ; la première de grand matin , la féconde
après l'heure de Tierce. L'Office de la nuit s'y failoit comme
le jour de faint Etienne: on l'annonçoit par le fon des clo-
cles ; mais au lieu que quatre Diacres revêtus des ornemcns
de leur ordre , chantoient l'Invitaroire à la Fête de faint E-
tienne, c'étoit quatre Prêtres à celle de faint Jean. En cer-
taines Eglifes on ne chantoit point le Te Deum , ni le Gloria
in excelf?, ni V Alléluia le jour de la Fcte des faints Innocens *,

mais dansl'Eglife d'Avranches on les chantoit on n'y difoit :

^oint d'Invitatoire le jour de l'Epiphanie ni le jour de Noël;


mais après les Leçons du troifiéme Nodurne , on récitoit
VOffice de fEtoile. L'Auteur n'explique point ce que c'étoit.
Ailleurs on récitoit après Tierce , l'Office appelle Des trois
Rois : ce pouvoir être la même chofc. On peut voir dans Dom
Marronne un précis de l'Office des trois Rois (r).
XVn. Depuis le Dimanche de la Scptuagéfime jufqu'au
Dimanche de la Paflion , on lifoit à l'Office l'Eptateuque ,
c'eft-à-dire , les cinq Livres de Moyfe & les deux fuivans.
Le Samedi de devant le Dimanche des Rameaux , l'Evêque
ou le Doyen lavoit les pieds aux pauvres , en mémoire de
Marie qui en ce jour lava les pieds du Sauveur en les arro-
fant de fcs larmes. Au Jeudi -Saint, on confacroit plufieurs

(f ) MarteN. De Riiiius Ecdrf. Ivtn. J. p, IZl, EJil. AutHtrp. «u. I757'


,

JEAN ARCHEV. DE ROUEN.


, Ch. XXXIV. ^79
Hofties pour la Communion du Clergé &
du peuple , &:.on
réfervoit la moitié de ces Hoflics fans vin pour le lendemain :

ces Hoftics croient portées honorablement par le CcJébraiac


& fes Miniftrcs en proceflion , c'eft-à-dire , avec des cierges
& de Tcncens fur quelque autel , ou on les env^Ioppoit de
linceuls très-propres , & il y avoir toujours de la lumière de-
vant cet autel. Le même jour on chancoit en notes les Heu-
res canoniales ; &
depuis qu'à la fin du BenediBus on avoic
«teint le dernier cierge , il ne paroiflbit plus de lumière dans
l'Eglife , jufqu'après Ta bcnédidion du feu qui fe faifoit le Sar'
raedi-Saint on en portoit dans les maifons des Fidèles.
: A
la fin de la Mefle , le Clergé &
le peuple recevoient la Com-
munion après dîner on revenoit à TEglile dire Complies
:

oui , en ce jour , n'étoient que de trois Pleaumes ; on n'en


difoit non plus que trois à chaque Nodurne pendant tout le
tems Pafchal : c'étoit neuf pour les trois Nodurnes , & neuf
Leçons ; les fix premières fetiroient de TApocalypfe, les trois
autres de quelques Traités fur la Réibrrcdion. L'Office no-
cturne de la Pentecôte étoit difpofé de même que celui de
Pâques , avec cette différence , que dans celui-ci on ne difoit
point d'hymnes ; au lieu qu'il y en avoit deux pour l'Office
de la Pentecôte. En ce jour à l'heure de Tierce , on fonnoic
toutcsles cloches , on illuminoit toute l'Eglife ; & pendant
qu'on encenfoit l'autel & qu'on chantoit l'hymne , on.jettoit
du haut de l'Eglife des fleurs de divcrfcs couleurs :fur les a(Ti-
ftans, en figne des dons du Saint-Efprit. Il y a peu dé cho-
fesà remarquer dans Jean d'Avranches , fur le Canon de k
Méfie parce qu'il fuit à peu près l'ordre Romain. Des le com-
,

mencement du Canon, le Diacre & les autres Miniïîrcs.dc-


meuroient derrière le Célébrant , ayant tous la tête' baifféc;
ce qu'ils obfervoient pendant tout le Canon. Le Prêtre Géic-
brant, revêtu de fes habits facerdotaux , accompagné du ÉHa-
cre & du Soîidiacre, fortoit de la Sacriftie au GioriaFatr} de
l'Introïte delà MeflTe, le Diacre portantJ'EvangiJe. Ilsifair-
foient'Ia confeffion au bas de raute-l , puis s'cntredoEnoienicJe
baifer de paix. La Méfie fe célébroit fans aucune génuflexion;
on n'y Faifoit que des ihclinatioh's de tctc.'
XVin. En 1072 , Jean , alors Archevêque de Rouen , y Ccncî les (bus
tint un Concile, afllflé de les cinq Suffragans & deplurieursj',';"^'^^^^^^
Abbés ; il fit vingt-trois Canons , qui ont pour but , ou le ré-
tablifi^ement de la difciplinc , ou la reformation des mœurs.
D d d d ij
58o JEAN, ARCHEV. DE ROUEN. Ch. XXXIV.
La confécrarion du faint chrcme ( « ) , de Thuile du batême
. & de l'extrême-on£tion fe fera après None. L'Evêque à qui
cette confécration appartient, fe fera accompagner de douze
.
Prêtres revêtus de leurs orncmens facerdotaux. En certaines
Provinches , quelques Archidiacres recevoient d'un autre E-
- vêque quelque peu des faintes huiles , qu'ils mêloient avec
-de l'huile commune (;r). On défend cet abus , & on déclare
qu'elles doivent être entièrement confacrées par l'Evêque.
Les Doyens doivent en
faire la diftribution revêtus d'aubes,
& prendre garde
n'en périffe par la faute des vafes de-
qu'il
ûinés à les contenir ( v ). Aucun Prêtre ne dira la MefTe qu'il
-n'y communie (z) : il fera à jeun revêtu d'aube &
d'étole &
,lorfqu'il adminiftrera le Batême ,
ce n'eft dans le cas de né-
fi

jce/fité (a). Défenfe de garder le Viatique l'eau bénite &


plus de huit jours , &
de confacrer de nouveau une Hoftie
déjà confacréc (b), comme faifoient quelques-uns quand les
hofties non confacrées leur manquoient. Celui qui donne la
-Confirmation &
celui qui la reçoit doivent être à jeun ( c ) ;
&
on ne la conférera pas fans feu , apparemment pour figni-
fier le Saint-^Efprit qui defcendit fur les Apôtres fous le fi-
gne de langues de feu. Les Ordres fe donneront au com-
mencement de la nuit du Samedi au Dimanche ou le Diman-
che matin : ceux qui les conféreront & qui les recevront feront
à jeun.
- XIX. Il efl ordonné d'obferver les quatre-tems (d) , en la
.''

-manière &
dans les mois prefcrits par les faints Pères. Le
Concile déclare dignes de dcpofition , ceux qui fe font ordon-
ner par furprife , fans avoir été préientés auparavant à l'E-
-
vêque (e) ; & ceux qui , n'étant pas Diacres , reçoivent l'Or-
dre de la Prêtrife. G!efi pourquoi il veut que les Ordinans
-fc-préfentent à lui le Jeudi précédent (/). Ceux qui auionc
-reçu des couronnes bénites & les auront quittées , feront ex^
communies julqu'à une entière fatisfadion; c'eft-àdire, que
ceuxi qui avoient éîé: admis dans je Clergé vpar la couronne
-ou ionfure cléricalei»i ne dévouent point changer d'état fans

«>r
:..i|i-:.?:-:h

(«)Ct«. r. (/")Car. C,
(*) Can. 1. {c) Ci». 7.
(y) C.»«. 3. \d) Ciw. S.
(1) Can. 4. (f)Citn. 9.
(..) Car,, j. if) Cun, 10.
,

JEAN ARCHEV. DE ROUEN.


, Ch. XXXIV. ç8r
la participation de TEvêque qui l s avoit tonfurcs. Les Re-
ligieules & les Moines vagabonds ou chaflés de leurs Mo-
nafteres (g), feront contraints parles Evêques d'y retour-
ner. Si les Abbeflcs ou les Abbés ne veulent pas les rece-
voir , ils leur donneront en aumône de quoi vivre ; & de
plus , ces Religieufes ou ces Moines travai leront de leurs
mains , jufqu\à ce qu'on voie en leur vie de ramcndcmcnt.
XX. Dcfenfe , tant aux Clercs qu'aux laïcs (h) , de ven-
.dre ou d'acheter des Cures ou Eglilcs Paroidiales. Les ma-
riages ne fe feront , ni clandcftinemcnt ni après dîner ; mais
l'époux & l'époufc étant à jeun , recevront à l'Eglile la bé-
nédiction du Prêtre aufTi à jeun ( i ). Il aura foin , avant de
les bénir , de s'informer s'ils ne font point parens au-defTous
du fcptiéme degré : autrement il fera dépoté (/). Les Prê-
tres , les Diacres, les Soûdiacres qui ont des femmes , ne pour-
ront gouverner des Eglifes , ni par eux ni par d'autres
ni rien recevoir des Bénéfices. Les Archidiacres veilleront
fur la conduite des Clercs, & auront foin qu'ils vivent cha-
flement. On choifira pour Doyens , desperfonneî de bonnes
mœurs, qui fâchent reprendre & corriger ceux qui leur lonE
fournis. Il eft défendu à celui qui , du vivant de fa femme ,
a été accufé d'adulrerc , d'épou'er après i\\ mort , celle avec
qui on l'a voit accufé d'avoir commis Tadulrere (/«). Celui donc
la femme a pris le voile , ne pourra le marier tandis qu'elle
vivra («). S'il arrive qu'une femme dont le mari eft en voya-
ge dans les pays étrangers , fe loit mariée à un autre , avant
que d'être aflurée de la mort de fon premier mari ( o ) , on
l'excommuniera jufqu'à une entière fatisfa£lion pour cette
faute.
XXI. Les Clercs tombés dans un crime public ( /> ) , ne
fsiont pas rétablis trop promptement dan> les Ordres facrés;
mais feulement après une longue pénitence , (mon en cas
d'extrême néceirué. Si quelqu'un d'entre eux a fait une faute
qui mérite la dépofition (q) , il fera jugé par le nombre d'E-
vcques prefcrit pat les Canons j fix pour un Prêtre , trois

(^) Cjft. 1 1. (») Cjh. 16,


Can. la.
(';) (o) C.i«. 17.
{i)Ca„. I}. (p) C.i«. 18.
(/) C.»n. 14. (j) Cm. iS>»
(oj) Can,' ij.
,,

582 JEAN, ARCHEV. DE ROUEN. Ch. XXXIV.


pour un Diacre ; mais il fuffira que ceux qui ne pourront s'y
trouver , envoient leurs Vicaires. On ne dînera en Carême
qu'après None &
au commencement de l'heure de Vêpres ;
manger auparavant ( r ) , ce ne feroit pas jeûner. Le Samedi-
Saint on ne commencera pas l'Office avant None , parce qu'il
appartient à la nuit de la Réfurre£lion ; &
en ces deux jours
le Vendredi &: le Samedi (s) , on ne célébrera point le Sa-
crifice , à caufe qu'on y fait mémoire du deuil & de la tri-
flefle des Apôtres. L'Archevêque de Rouen cite fon Livre
ici

des Offices. Il remarque que dans celui de Pâques, on chan-


toit à la Mefle le Gloria in excelfts &
V Alléluia : lorfqu'il ar-
rivoit en ce jour la Fête d'un Saint ( f ) , on ne la prévenoic
point ; mais on la renvoyoit après l'Odave. Les Samedis de
Pâques & Pentecôte font deftincs au Batême général
de !a
à rcxclufion de de l'Epiphanie ; mais à l'égard des
la veille
enfans &
des infirmes , on peut le leur accorder en tout tem?.
L'édition du Père Labbe compte 24 Canons de ce Concile;
celle de Don Beffin n'en met que 23 , n'en faifant qu'un feul
du feptiéme &
du huitième. La plupart font obfcurs. Dom
Beffin les a rendus intelligibles par fes notes &
par celles de
Dom Ange Godin.
Autre Concih XXII. Les Evêques de la Province de Rouen fe rafTem-
de Rouen fousblercnt cncorc en 074 , à l'exception de Godefroi , Evêque
1

ji^an er3. ^e Coutancc. Guillaume , Roi d'Angleterre , affifta à ce


Concile , 8c foufcrivit aux Décrets que l'on y fit. Ils font au
'

nombre de 14 , dont voici les plus remarquables. On n'or-


donnera aucun Abbé («) , qu'il n'ait appris par un long exer-
cice , la difcipline monaftique. Dcfcnfe de conférer tous les
Ordres en un même jour (a*). Un Moine tombé publique-
ment dans un crime d'impureté , ne pourra plus être choiti
Abbé , ni remplir quelque office extérieur {y). 11 en fera de
même des Rciigieufcs. La Règle de Saint Benoît fera exa-
£temcnt obfcrvée dans les Monaflcrcs des deux fexes (s). Les
Clercs dépolés pour crimes , ne porteront point les armes
comme s'ils n'a voient plus rien de la cléricature {a). Celui
qui , pour fe faire dépofer des Ordres facrés , dira qu'il y eft

(r) Can. 20. (x) Car,. 4.


{y) Ctfi. 6.
(») C.tn. XI. (X.) C.«. 7.
(u) Can, if (a) Cati, j i.
JEAN , ARCBEV. DE ROUEN. Ch. XXXIV. 5 8^
parvenu fans avoir reçu tous les Ordres (b) fei'a obligé
.,

de le prouver juridiquement. On ne croira pas non plus


fur fa parole , celui qui , pour rompre fon mariage , s'accu-
fera d'avoir auparavant péché avec la parente de fa fem-
me (c).
XXIir. On trouve à la fin du Pcnitentiel de faint Théo- H^""*! ,^*
dore de Cantorberi (d) , un accord fait entre Jean , alors jean*^. "Ion lié-
Evêque d'Avranchcs , & Ramulfe , Abbé du Mont-Saint- mèié avec les
Michel , au fujet des immunités de ce Monafterc ; & dans les.^oùenî"*^^
Neuflria pia , fade par lequel il confirma , étant Archevêque
de Rouen, leredion du Prieuré de Saint Vidor en Abbaye,
Il ne nous rcfle aucune de fes Lettres mais on ne peut dou-
:

ter qu'il n'en ait écrit plufieurs à Lanfranc , Archevêque de


Cantorberi , de qui nous en avons cinq à l'Archevêaue de
Rouen. Celle que lui adreflfa le Pape Alexandre II , elt rap-
portée parmi les A6les des Archevêques de Rouen (e). Celui
qui les a recueillis , étoit Moine de Saint Oucn , fous le Pon-
tificat de Grégoire VII : après avoir relevé les grandes qua-
lités de l'Archevêque Jean , fa naiffancc , fon courage , fon

efprit , fon fçavoir, il fe trouve obligé d'avouer qu'il n'étoit


pas fans défaut ; que fon humeur akierc &
fes vivacités avoienc
pris en lui de l'accroifTemcnt à mefure qu'il s'étoit vu élevé en
dignités. Il rapporte pour preuve , un événement dont les fui-
tes furent facheules. Le 24 d'Août, jour de la Fête de l'Ab-
baye de Saint Ouen, l'Archevêque devoir y célébrer la Meffe
fuivant la coutume comme il tardoit de venir , on commença
:

la Meffe , & on avoir déjà chanté le Gloria in excelfs lorfqu'ii


arriva. Indigné contre les Moines , il les excommunia , fit
ceffer l'Office , chaffa l'Abbé de Séez qui avoir commencé la
Meffe , & la fit continuer par fon Clergé. Les Moines obéi-
rent , quittèrent leurs ornemens & fortirent de PEglife. Un
d'entre eux alla fonner la groflc cloche , puis étant allé dans
les rues, cria que l'Archevêque vouloir emporter le corps de
faint Ouen. Le peuple accourut armé; mais l'Archevêque fut
fecouru par le Vicomte de Rouen. Les Moines envoyèrent au
Mans, où étoit leur Abbé avec le Roi Guillaume. L'Arche-
vêque y envoya aufli; & Ion couricr étant arrivé le premier ,
il prévint le Roi de façon qu'on donna tout le tort aux Moi-

(*)0»«. II. {d) rage 6(..^,


j
(i) Cd». 10. j (,») Mabii-lou.j» yî«<i/<fl.^. 114,
,

584 JEAN ARCHEV. DE ROUEN.


, Ch. XXXIV.
nésquatre de ceux qu'on regardoit comme les auteurs du t^i-
:

multe , furent mis en prifon en divers Monafteres ; mais quel-


que tems après j l'Abbé de Saint Ouen appaifa l'Archevêque,
&
obtint le rappel de fes Moines.
Urfîon.Abbé XXIV. Urfion, Abbé de Hautmont vers l'an 1055 , n'efl
"^"'' connu dans la république des Lettres, que par les ades du
martyre de faint Marcel , & par l'hiftoire de la découverte des
reliques de cefaintPape vers l'an 1068. Tous ces monumens
ont été publiés par les Bollandiftes au ieiziéme de Janvier (/).
Dom Mabillon n'en a donné qu'une partie , qui regarde la
Topographie & l'origine de l'Abbaye de Hautmont (^) ; &
c'efl: ce qu'il y a de plus intérefTant car pour ce qui efl des
:

ades du martyre de faint Marcel \ Urfion s'cft contenté de


paraphrafer les anciens qui font fans autorité. Il raconte par
quelle voie les reliques de ce Saint furent apportées à l'Abbaye
d'Hautmont , & les miracles opérés enfuite de la découverte
de fes reUqucs. Il dédia (on Ouvrage à Lietbert, Evêque de
Cambrai , dont on met la mort en \0'j6{}i). Urfion ne lui fur-
véquit que peu de tems , puifqu'en 107^ (; ) , 'Wederic étoic
Abbé d'Hautmont.
Thîerri de XXV. Il eft parlé dans les Annales de Trêves (/) , d'un
Tholei.
Archevêque de cette Ville nommé Conon ou Conrad , que
,

le Comte Thierry fit mettre en prifon , tourmenter cruellement


& enfin précipiter du haut d'une montagne. Bertold, conti-
nuateur de la Chronique d'Hermann Contra£l , en dit aufli
quelque chofe fur l'an 1066 , qui fut celui de la mort de Con-
rad. Comme on lui rcndoit à Trêves les honneurs du martyre,
un Moine de Tholei dans le même Diocèfe , nommé Thierri
écrivit la vie de ce Saint , qu'il dédia à Thierry , Evêque de
Verdun. Eilea été donnée parles Bollandiftes au premier jour
de Juin (m).

(/) P"?' 9' '4. (0 ^*''^- />'',?• H^»


I

(^; Mabii-lon, Tom. î.yî5or. 64}. (0 ^"i- 54?.


/i.

{h) Gallia ChrijliMt. nov, tom. 5. p. x\. I (»>) Pag. 117..

CHAP.
MICHEL PSELLUS; 58J

CHAPITRE XXXV.
Michel Pfellus^ Précepteur de l'Empereur Ducas; Confiant
tin Licbudés , & Jean Xiphilin , Patriarches de Cou"
ftantinople.

I. T L nous apprend luî-mcme dans TEpiraphe de fa mère , ^


^'c^^'
^J^^-
J. qu'il croit né d'une famille Con- fanceenioï'o.
à Conftantinople (n) ,

fulaire &
Patricienne, mais favorifcc médiocrement des biens Son éducation
de la fortune ; que fa mère eut d'abord deux filles ; qu'ayant &
demandé à Dieu , avec beaucoup de larmes de gémifle- &
mens, un il fut le troificme de fes enfans; qu'elle l'allaita
fils,

elle-même que pendant fon enfance , on le vit toujours gai


;

& jamais pleurer ; & qu'à l'àgc de cinq ans , on l'appliqua à


l'étude des Lettres , pour îcfquellcs il paroiffoit né , ne trou-
vant aucun plaifir dans les amulemcns ordinaires de la jeu-
ncfle. Pfellus dit ailleurs , qu'en 1034 , qui fut l'année de la
mort de l'Empereur Romain Argyre , il n'avoir pas encore
achevé la feizicme année de fon âge. Il étoit donc né vers
l'an 1020. Conftantin Monomaque lui donna fa confiance,
quoiqu'il n'eût encore que 25 ans , lorfquc ce Prince parvint
à l'Empire. Jufques-là Pfellus s'étoit borné à l'étude de la Rhé-
torique & de la Philofophic il s'appliqua enfuite à la Phyfi-
;

que , cà la Théologie , à l' Agronomie , à la Géométrie , à la


Médecine & à l'art militaire.
II. Un efprit Ç\ en former d'autres,
cultivé étoit propre à il efi fait Pré-
'
Pfellus fut choifi pour Précepteur de Michel Ducas , fils aîné SouSf
de l'Empereur Conftantin Ducas , qui mourut en 10(^7 , a-
prcs un règne de fept ans & demi. Il n'oublia rien pour ren-
dre fon élevé digne du Trône & lorfqu'il y fut parvenu à
:

la défaite de Romain Diogene en X072 , Pfellus continua à


l'aider de fes confcils , & à l'inflruirc dans les fciences. Quel'

(») AriAT. Viatrib. de Pfell. FaPRIC. ]


Vcclef.Tam. J, pag. 647. Paci, ai a»,
tom. •i.Bihlint. ^rxc, Ol'UiN. if ScnpWr. j 1071.
Tome XX. Eeec
586 MICHEL PSELLUS,
ques Hiflorîens onc blâmé ce Prince d'avoir préféré l'appli-
cation à l'étude , à l'attention qu'il devoir au gouvernement
de l'Empire ce blâme retombe fur Pfellus , qui avoir un
:

grand pouvoir fur l'ciprit du jeune Empereur. Pfellus eft en-


core accufé d'avoir favorifé le fchifme des Grecs , rendu &
inutiles les mouvemens de Pierre , Evêquc d'Anagnia , en-
voyé vers Michel Ducas pour le rétablidement de la paix en-
tre les Eglifes d'Occident &
d'Orient. Il y a là-defTus deux
chofes qui ne lui font pas favorables. La première efl: , que
dans rexpolîtion de foi adrefTée à cet Empereur , il enfei-
gne que le Fils ne procède que du Père (o ) : la féconde , que
dans un difcours à la louange de Michel Cerularius , pro-
noncé dans le tems que Lichudés gouvernoit l'Eglile de Con-
ftantinople , il inveftive fortement contre les Latins (p)»
Pfellus n'avoit pas toujours penlé fi avantageufement de Ce-
rularius ; & dans un autre Difcours récité en plein Concile,
il l'accufa d'héréfie. Le Père Combefis étoit prêt de rendre

publics ces deux Difcours (7), avec plufieurs autres Opuf-


cules de cet Ecrivain , lorlque la mort l'enleva. On compte
entre ces Opufcules (r) , un Panégyrique du Patriarche Li-
chudés , qui avoit la principale part au gouvernement de l'Em-
pire , fous Conftantin Monomaque.
Ueftprîvéde IH. L'Empereur Michel Ducas ayant été dépofé en 1078,
^s emplois,
gpj-ès fix ans &
demi de règne , Nicéphore Botoniate mis &
à fa place , celui-ci dépouilla Pfellus de toutes fes dignités :
cela l'engagea à fc retirer dans un Monaftere d'y travail- &
ler de fes mains (s). Il y mourut dans un âge avancé ; mais
on ne fait en quelle année ; emportant avec lui la réputa-
tion du plus favant homme de fon fiéclc dans l'Empire d'O-
rient (f).
Ses Ecrits. IV. Ses grand nombre ; mais la plû-
Ecrits font en très -
Commentaire -^^j
n'ont r
point encorc été rendus publics. Voici ceux que
lurleCantique r
«les Cantiques,
ir
nous connoilTons. Une Paraphraie en vers lur le Cantique
rii^-
des Cantiques , adreflee à l'Empereur Nicéphore Botoniate :

(») Fabric. Tom. s, Bibliot, Grxcf. (r) IJ(m. ad an. 1066, nom, 10. fag,
10. ZX9-
('P)Pagi, ai an, loji, num. \h. p. (j) Fabric. pag, 10.
(») Paoi , ai au. loji.num. II» pag,
(y) Idem, ad titi, 10^4. num, U p^'S- 141.
197' i
PRÉCEPT. DE L'EMP.DUCAS.Cf^.XXXV 5S7
elle parut en latin de tradudion de Zinus de Vérone , avec
la
les Commentaires de Thcodorcr , de faint Maxime, de faint
Nil, à Rome en 1563 in-fol. & Séparément à Vcnifcen 1573
in-4". chez Jérôme Polus ; cà Anvers chez Gafpard Bellcrus
en 1^15 in-8". à Paris en 162^ , dans le fécond Tome du
Supplément de Fronton-le-Diic 6c dans les Bibliothèques
;

des Pères de Paris en 1654 > ^ ^^ Lyon en 1^77. Jean


Mcurllus en donna une édition grecque à Leyde en \6ij
in-4''. avec les Commenuires de Polychrone & d'Eufebe.
Pfellus compola un autre Commentaire fur le même Livre ,
où ;il fit entrer les explications de faint Grégoire de Nyffe,
de faint Nil & de faint Maxime. Il a été imprimé fouvent par-
mi les Œuvres deThéodoret, 8c dans le fécond Tome du Sup-
plément de Fronton-le-Duc à Paris en 1^24.
V. Ses queftions fur la Trinité & la pcrfonne de Jefus- SesGF.uvres

Chrift , ont été mifes fous prelTe en grec & en latin , à Aui- ''i=oiog'q"«-

bourg en 1608 in-40. avec les notes de Jean Wegelinus. Elles


font en plus grand nombre dans l'édition qu'en a donnée M.
Fabricius, dans le cinquième Tome de la Bibliothèque grec-
que (k). Le titre de l'Ouvrage qui efl: adrelféà l'Empereur
Michel Ducas , porte De la doflrine en tout genre , 6c com-
:

prend 193 queftions avec les rcponfcs. Il efl: parlé dans les
premières, de la trinité des pcrfonnes en Dieu , de l'unité &
de la confubftantialité de leur nature ; des termes ufités par-
mi les Chrétiens , pour fignifier la nature de Dieu , & les per-
lonnes de la Trinité ; de leur union , de leur difliinclion , de
la relation qu'elles ont entre elles ; de l'effencc de Dieu , de
ion immutabilité , de fon impafnbilité. Pfellus, en parlant dti
Saint-Ei'prit, dit, qu'il procède du Père & du Fils. Il parle
auiïi de la communication des idiomes , de la prcfciencc de
Dieu ; de l'Incarnation du Fils de Dieu ; des Anges, de l'a-
me de l'homme ; des vertus & des vices ; des élémens , de la
matière & de quantité d'autres chofes , qui prouvent qu'il étoit
Théologien & Philofophe Phyficien & Aftronome.
,

VI. Le Traité en vers iambiques fur les vertus & les vices , Traite fur le»

fut imprimé en grec & en latin à Bâle en i 544 in-8°. Le Pa- ^[^""Vfèmes
nég)'rique de Siméon Métaphrafte fe trouve en latin dans la de Pfellus.
Colleclion de Surius au 17 de Novembre. On dit que Pfcl-

Ecec i
j
$88 MICHEL PSELLUS,
lus fît en fon honneur , l'Oflice que l'on dévoie chanter
auflî
à l'Eglife le jour de fa Fête ; des tropaires pour les Laudes
& les Vêpres, & un canon ou Hymne pour les Matines en
vers acroftiches. Allatius a inféré ce Panégyrique avec ces
autres pièces , dans fa Diflcrtation fur les Siméons (x). lî
penfe qu'on peut les attribuer à Pfellus le jeune ; & c'efl: le
fentiment de Bollandus (y). La Synopfe des Loix a été tra-
duite en latin par François du Bofquet, & imprimée en grec
& en latin avec des notes de fa façon , à Paris chez Camufat
en 163a in-80. L'Ouvrage , dans quelques manufcrits , efii
dédié à l'Empereur Michel Ducas d'autres lifcnt Alexis.
:

Leunclavius en a rapporté divers endroits par manière de


Scholies , dans le fécond Tome du Droit Grec-Romain , dans
la Synopfe des Loix de Michel Attaliot (z). Du Bofquet a
joint à la Synopfe des Loix , le Traité des fept Conciles œcu-
méniques en vers. Il avoit déjà été imprimé en latin dans la
première partie du troifiéme Tome des Conciles , à Cologne
en 1606 , par La Bigne , & à Bâle avec les Poèmes de Théo-
dore Prodrome , & de Nicéphore Callifte , chez Jean Beba-
lius en 1536 in- 80. François du Bofquet ajouta encore quel-
ques vers grecs fur le Nomocanon mais divers manufcrits :

les attribuent à Conftantin Pfellus. Ce Nomocanon efl celui


de Photius. II faut entendre fur tous ces Ecrits , M. Lambe-
cius («). Il y a , dit-il , dans la Bibliothèque de Vienne cinq
Poèmes de Pfellus à l'Empereur Conftantin Monomaque , en
vers le premier cfl: fur l'infcription des Pfeaumes dé David ;
:

le fécond , fur la compolition , l'ulage de ces Pfeaumes & leur


traduction en langue grecque ; le troiiléme , des dogmes de
la foi chrétienne ; le quatrième , fur le Nomocanon de Pho-
tius , Patriarche de Conïlantinople , & les Conciles dont les
Canons iont rapporcés dans ce Traité ; le cinquième , des fepc
premiers Conciles généraux.
Traité des VII. Nous avons de Pfellus un Traité de l'opération des
^'^'"ons, OÙ il fuppofe qu'ayant des corps très-légers & très-
déinom"^''"
aètifs , ils prennent aifèment quelle figure ils veulent , tan-
tôt d'hommes, tantôt de femmes. Il dit là-deffus beaucoup de

(.ï) Léo Allât, ilc Spneott. Script, p. (s.)Titul. 16, 2f. i8. 31. 37.40. 41.
211. iTi6. fS. S3.
(y) BuLLANU. <i</ iliem J.i/inar, tom, I. (.1) Lameecius, Ton. j. Commeut.ir,
fag. 17. (5 Allât. ieSpneon.f. <>%» Bibliit. Vtiidiibim.f. 238.
,

PRECEPT. DE L'EMP. DUCAS. Ch. XXXV. 589


chofes qu'il dit avoir apprilcs d'un Moine de Mclopotamie,
qui avoic vu fouvcnt des i"pe£lrcs formes par les démons. Dans
lecommencement de ce Livre , il parle des hércriqucs nom-
mes Euchites , &
rapporte une partie des infamies qu'ils com-
mettoient dans la célébration de leurs myftcres. L'Ouvrage

cfl en forme de Dialogue il a été traduit en latin par Pierre


:

Morel , & imprimé en cette langue , avec la Préface de Fran-


çois Feu-ardent , à Paris chez Chaudière en 1577 in-S»^. Gau-
min le iit imprimer en grec en la même Ville en 1(^15 , avec
la traduction de Morel. On a fuivi la même verdon dans la
Bibliothèque des Pères (Z^) , & dans l'édition grecque & la-
tine^ à Kilon en 1688 in-i2j par les foins de Daniel Hafcn-
mullerus. Gaumin conjecture que Pfcllus écrivit deux Livre»
fur les opérations des démons. Il fe fonde fur ce qui efl dit à
la fin du Dialogue. L'Auteur y promet en effet de traiter une
féconde fois la même matière , cjue l'interlocuteur ne croyoit
pas aflcz développée: quelques-uns attribuent les deux Livres
des démons , à Michel d'Ephefe.
VIIL Nous ne nous arrêterons pas à rapporter les édi- Traités de
lions des Ouvrages de Pfellus, qui reo;ardentla Philofophie, T^"^''"" r°"
les arts , ou d autres matières profanes cela n eu point de :

notre deffcin. Nous remarquerons feulement qu'il compofa


un Traité fur la manière de faire de l'or ; qu'il Fadrcffa à
Michel Cérularius, & qu'il a été imprimé à Padoue en i 572
in-S''. avec divers Opufcules fur ce grand art. Il cil: encore
moins intéreflant pour notre fujct , de marquer les Ecrits de
Plellus que l'on connoît dans les diverfes Bibliothèques de
Rome , de Vienne, de Bavière, de France, d'Angleterre ,
de Venifc. La Bibliothèque d'Aufbourg en fournit un où le
nom de Plellus fe trouve à la tête d'un Traité qui a pour ti-
tre : De rame , félon les différentes opinions des Phihjophes. Il
paroît quec'cft même que Jean Tarin a publié en grec en
le &
latin mais fans nom d'Auteur , avec la Philocalic d'Origcne
,

à Paris chez Jean Cramoify en 1(^24 , in-4°. L'Abbé de Billy


a fait aufll imprimer des notes de Pfellus , fur plufieurs en-
droits des Ouvrages de faint Grégoire de Nazianze avec cel-
les d'Elie de Crète.
IX. Les plus intérefîans de ceux qui n'ont pas encore vuQuehfomies
plus remar-
. _ quàbkf.

{i) Tom, 18. /'.JJ-. ;S?.


çpo MICHEL PSELLUS,
le jour , font l'explication du Pfeautier
; fes Lettres ; un Trai-

té des Synodes ; l'Abrégé des Livres de Moyie; des Scho-


lies fur les Oracles Chaldaïques ; fes quatre Difcours fur l'a-

&
me le corps de rhomme ; un Traité fur les caufes de l'In-
carnation du Ver'oe ; un Difcours fur la Paffion la Sépul- &
ture de Jefus-Chrift; un autre adreflc à ceux qui difent qu'il
•,

cfl: entre dans le Paradis avec le bon Larron ; fur le Tré- &
pas &
l'AiToniption de h fainte Vierge; un fur la NaifTance
de Jefus-Chrift un lur la Transfiguration un à la louange
-,
;

de faint Jean-Baptifte , &


fur fa Décollation ; deux Poèmes
à un Moine orgueilleux j un Difcours fur la tranflation des
reliques de faint Etienne à Conftantinople ; une profeirion ou
définition de foi.
Son Hiftoire .
X. Empereurs de Conftantî-
Pfellus reprit l'Hifloire des
de Coniknti-
"°'""'
nople , Diacre Léon l'avoir finie ,
à l'endroit où le la con- &
tinua jufqu'à Tintronifation de Conftantin Ducas. Le Perc
Combcfii ayant trouvé cette fuite d'hiftoire en grec , la tra-
duifit en latin , dans le delTein de la rendre publique mais il :

n'en eut pas le loifir ; fa tradutlion eft paflee de fon 'cabinet


dans la Bibliothèque du Roi. Le Père Pagi a fait entrer une
partie de l'Ouvrage de Pfellus (c) , dans fes remarques criti-
ques fur les Annales de Baronius.
Conftantin XI. A la mort de Michel Cérularius, Pritriarche de Con-
LicimàtsjPa-f^gi-u-ji-iQplc ((^) , on élut pour lui fuccéder Conftantin Li-

co'iiRàmiiio- chudés, du confcntement des


Métropolitains , du Clergé &
pie. du peuple. II étoit Protovcftiairc ou Maître de la garde-robe
de l'Empereur , trcs-verfé d.ms les affaires de la Cour de- &
l'Etat , Içavant , éloquent , d'un génie aifé , & fi difcrt qu'il
fçavoit parfaitement proportionner fes difcours aux matiè-
res qu'il avoir à traiter. Noble , élevé , poli dans les pièces
d'éloquence , il étoit fimpic , clair , naturel , dans les convcr-
fations ordinaires. Quoiqu'il eût été élu dès l'an 1058 , l'Em-
pereur fit différer fon ordination ,
jufqu'à ce qu'il fe fut jufti-
tié dans un Concile , de certaines acculations formées contre
lui ; & il ne fut facré Patriarche , que dans le mois de Juin
de l'an 1059 (f). Il mourut en 106^ , après avoir occupé
k Siège de Conftantinople quatre ans & fix mois, Michel

{il) CuROPALAT. Uiji. p. éji. 1 l©3.


PRECEPT. DE L'EMP. DUCAS. Ch. XXXV. 55?!
Pfellus fon Ton Oraifon funèbre (/) , dans laquelle
ami , fit
il dit que Conftantin Monomaque ib repola enticremenc iur

Lichudcs du loin de l'Empire ; que lui en ayant cnfuit« &


oté le gouvernement , Haac Comnene le lui rendit. Ce Dii-
cours a été traduit en latin par le Père Combefis (^) ; mais
on ne l'a pas encore mis Tous la prefle. Il reflc de ce Patriar-
che quelques Conftitutions Synodales , rapportées dans le
Droit Grec - Romain (/z) > ''^vec celles de Michel Cérula-
lius fur les degrés dans lelcjuels il eft défendu de contrader
mariage.
XII. Le fuccelTeur de Conftantin Lichudcs fut Jean Xi- JeanX;ph;im,
philin. Il monta fur le Siège Patriarchal de Conftantinople ,
Conft^imTno-''
au mois de Janvier de l'an 10^4 , après avoir occupé une des p!e.
premières places du Sénat (z). La Ville de Trébifonte lui
avoit donné la naiflance ; & par fon application à l'étude , il
devint habile en toute forte de fciences. Son Epifcopat fuc
d'onze ans &
quelques mois, étant mort en 1075 (/). Dans
un Concile où aiFiflerent vingt - huit Evoques , il fit un rè-
glement touchant les fiançailles (m) , portant qu'encore qu'el-
les ne ioient point fuivies du mariage, elles produiroicnt unq
affinité qui empêcheroit d'époufer les parens de l'autre par-
tie; ou pour rendre un Clerc bigame, & confcquemment ir-
régulier. Ce Décret fut confirmé en 1080 {n) , par une Bulle
d'or de l'Empereur Nicéphore Botoniate , par un autre &
Concile que ce Patriarche tint depuis , afiifté de quatorze
Evêques. Il donna icul une autre Ordonnance datée du 16
Février l'an 10510 (0) , par laquelle il défendit aux Ecclélia-
ftiques & aux Moines de pofluler ou plaider pour un autre
dans aucun Tribunal , Ci ce neft que dans une caule eccléfia-
flique , un d'eux prenne par ordre de l'Empereur , la défen-
fe de l'une des parties. La raifon de cette défcnie eft, que
ceux qui plaidoient pour d'autres , en tiroient de l'argent.
XIII. Nous avons dans Gretzer (p ) , fous le nom de Jean Ses Evits*

(f^IJem, ad an. 1066. tiuni. 10. pag. (m) Jus Graco RomAH. Lih, 3. eagi
Zi9' m.
(g) Ibid. ( n) JbiJ. p. IZI,
(i) ]as Grttco Kunnn, Lit. 5. f, lod. (0) Pa^e ÎI4.
^ Lib.4.p. 16;. ip ) Gretzer. Tom, i. de Cruce, fag»
(«) ZONAR. in Confiant. Dnca, 144^.
II) Paci , ad an, 1078. n, 7,
,

5pî SAINT GEBOUIN,


Xiphilin une Homclic fur la Croix ou fur la troidcmc fc-
,

maine des jeûnes du Caièmc. Il compofa beaucoup d'autres


Difcours , puifqu'on trouve de lui des Homélies fur tous les
Evangiles des Dimanches de l'année , dans les manufcrits
du Duc de Bavière & du Vatican. Il y en a une fur faint
Matthieu (^) j dans la Bibliothèque de Leyde, donc Henri
Etienne rapporte quelques endroits dans fa Préface fur l'E-
pitome de Dion CaiTius, par Jean Xiphilin , neveu du Pa-
triarche. La rcflemblance des noms a fait attribuer cet abré-
gé de l'Hifloire Romaine à ce Patriarche ; mais l'Auteur dit
lui-même dans la Préface, qu'il en étoit neveu (r). On lui
reproche de n'avoir pas été aufTi exadl que Dion Caffius, à
dater les événemens par les Confuls,

CHAPITRE XXXVI.
Saint Gebouin , Archevêque de Lyon ; Oderic , Abbé de
Vendôme ;
Ù* quelques autres Ecrivains,

s. Gebouin. I.
^
^
Aint Gebouinde Hugues III, Comte de Dijon
fils

, avec une approbation générale


après avoir rempli
les tondions d'Archidiacre dans le Dioccle de Langres (5) ,
fut choifi au Concile qui fe tint à Autun en 1077 , pour rem-
plir la place d'Humbert, Archevêque de Lyon j dépofé pour
caufe de llmonic. Gebouin fut facré le premier de Septembre
de la même année, par le Légat Hugues , Evêque de Die ,
Préfident du Concile , qui demanda pour lui le Pal/ium au
Pape Grégoire VU. L'Archevêque de Lyon fit quelque tems
après, le voyage de Rome , où ce Pape lui confirma la Pri-
matie fur les quatre Provinces de Lyon , de Rouen , de
Tours & de Sens. Grégoire VII , pour lui donner despreu-

(1 ) OuDIN. Tom. t. Script, Ecdef. p. I (s) GitUia Chrifllwa nova, tcm, 4. p. S9.
iix. CJ HiifO , Fl.ivinitc, tom. l. Biblht, mv,
I
(f ) Fgo . . . Joannes Xiphilinus , Joan- I L,i*^ . p. i
j
ji.

nis Patriarchxfratrisfiliuî. ^

ves
,

ARCHE VESQUE DE LYON. Ch. XXXVI. 595


ves de fa confiance, l'aflbciaà Ion Légat Hugues dans le Ju-
gement du procès que le Doyen de Langrcs avoit avec les
Chanoines de la Cathédrale. On le fait A utcur de Técablif-
fement des Chanoines Réguliers de Saint Ruf (r) , dans la
Ville de Lyon. Il y mourut au mois d'Avril de l'an 108 z.
(«).
II. On a de lui quatre Lettres , dont la première fe trou- Ses Ecritf.

ve dans l'Appendice des Œuvres d'Hincmar de Reims , pu-


blié par M. des Cordes en 161 5 , en diverfcs éditions de la
Bibliothèque des Pères , & dans les (Ingularités hiftoriques
de Dom Liron (at). Elle eft adreflee à Raoul , Archevêque
de Tours, que Gebouin prie de demander à l'Abbé de Mar-
moutier un de fes Moines pour gouverner le Monaftere de
Savigny. Gebouin ne prend dans cette Lettre , que la qualité
d'indigne Prêtre de Lyon ; & il en ufe de même dans fes au-
tres Lettres ()'). Raoul, Archevêque de Tours , fe qualifie
de même dans Réponfe à la féconde Lettre de Gebouin.
fa
Ce Saint (z) craignant que la légation dont le Pape avoit
chargé Amé , Evêque d'Ôleron , pour la Province de Tours
ne portât préjudice à la Primatie de Lyon, tâcha , par cette
Lettre, d'engager Raoul de Tours & Eufcbc d'Angers, à
ne pas reconnoirre Amé pour Légat. Il fournit à Raoul un
moyen de ne pas aiïifter au Concile indiqué par Amé , en
lui ordonnant comme fon Primat (a) , de venir à Lyon dans
le tems même où le Légat devoit tenir fon Concile. Le pré-
texte de Gebouin, pour ne pas reconnoître ce Légat , étoic
que le Pape Grégoire VII, avec qui il s'étoit entretenu fur
beaucoup de choies à Rome , ne lui avoit rien dit de cette
Légation ; & qu'Ame lui-même ne la lui avoit pas fait con-
noître. Ces deux autres Lettres ont été publiées par M. Ba-
lufe {b) , dans l'Appendice aux Diflertations de M. de Mar-
ca, à Paris en 16 69 in-8°. dans l'une, Gebouin donne avis
à Raoul , qu'il avoit reçu le Pallium de la part de Grégoire
VII , & la confirmation de la Primatie de Lyon dansl'au- :

trc , il mande au même Archevêque , à fes Suffragans & à

(«) Colon. H</?, de Lyon. Tom. i. fag, (y ) M\Rck. Lib. f. de


ConccrJ. Sacerd,
sot. cap. 46. p. 748.
(«) Huco Tlavian. ubi ftipra pag. 217. (i.)Lhm.iiiJ.
(x) Tom. 4. p. 495, Tom. \6' Bibliot, (/») Marca. itid,
T»t.p. 7*8. HivcH, -Append, f, yio. (0 P-i- 545.
Tome XX. Ffff
,

594 O D E Ra C,
divers 'Abbés , que Ton avoir expulfé fans raifon FAbbé de
Saint Pierre de la Couture , dans la Ville du Mans ; leur &
ordonne d'anathématiier le Moine qui l'avoir accufé dé- &
porté ; &
de fufpendre de fes fondions l'Evêque du Mans
qui avoir donné à l'intrus la bénédiction abbatiale. Des deux
autres Lettres de Gebouin , que M. Balufc rapporte au même
endroit , il y en a une qui fe trouve dans le cinquième Livre
de la Concorde du Sacerdoce par M. de Mârca; la fécon- &
de même qui efl: dans l'Appendice des GEuvres de Hinc-
efl la
mar , par M. des Cordes. M. Balufe met à la tête de ces qua-
tre Lettres le Décret de Grégoire VII ,
pour la Primatie de
Lyon.
OcîTîc Abbé
lï^* ^^^^^ ^^s Lettres d'Alexandre II ( c ) , il s'en trouve
de Vendôme, une adreffée à Oderic , Abbé de Vendôme , par laquelle ce
Pape rend cette Abbaye immédiate au Saint Siège , & kiî
accorde l'Eglife de Sainte Prifque à Rome , avec le titre de
Cardinal , pour l'Abbé Oderic & fes SuccefTeurs, Cette Bulle
efl; datée de l'an 1063. Il accorda depuis à l'Abbaye de Ven-

dôme (d) , l'Eglife d'un Monaftere contigu à celle de Sainte


Prifque , à la charge d'y entretenir douze Moines pour le Ser-
vice divin. L'Abbé Oderic s'étoit rendu célèbre dans l'Or-
dre monaflique par fon exaditude à en remplir les devoirs.
11 fut choifi Abbé de Vendôme en 1044, ^ gouverna ce Mo-
naftere jufqu'en io8i ([e). On y conferve un Traité des vi-
ces & des vertus , qu'on croit être de lui , quoique fon nom
ne fe life point dans le manulcrit. Il y eut vers l'an 107a , un
différend entre [les Moines de Vendôme & ceux de Saint
Aubin d'Angers , au fujer de la Celle ou dépendance de
Craon. Pourle terminer , Oderic & Othrann , Abbé de Saint
Aubin, s'adreflerent fuccefllvement à Girard , Evêque d'O-
flie 5 Légat à Chartres , &; au Concile de Paris ; mais fans
fuccès. Enfin l'affaire fut finie au moyen de deux cens livres
de deniers, que les Moines de Vendôme donnèrent à ceux
de Saint Aubin. C'eft le fujct de la Lettre que l'Abbé Oderic
écrivit enfuite de cet accord au Légat Girard (/) elle efl :.

rapportée dans les Annales de Dom Mabillon.

{ cj) Tom. 9. Conc.p. 1144. fi88.


(J)Mabih. Lit. 6. Annal, tinm. C. (/) Mabillon. lit. 64. Annal, uum.
(e) Lasd. ttcv, Bitlitt, totn, 1, fag.
, ,

ABBÉ DE VENDOME. Ch. XXXVL "^9$


IV. Les Auteurs de lanciennc Gaule Chrétienne (g) nous
ont donne en partie la relation anonyme d^un différend d'une
autre efpccc. Raoul , Archevêque de Tours , nommé Légac
du Saint Siège en Aquitaine , avec Amé , Evêque d'Olcron ,
Se Hugues , Evêque de Die , voulut obliger les Chanoines
de Saint Martin de Tours , de les recevoir dans leur Eglife
avec les honneurs dûs à leur qualité de Légats. Ils s'en dé-
fendirent , difant qu'ils ne dévoient une femblable réception
qu'au Pape en perlonne, ou aux Rois. Raoul s'en plaignit à
Rome , & demanda que les Chanoines fuflent excommuniés.
Le Pape qui , ce femble, étoit Grégoire VII , ayant ouï les par-
ties , déclara que l'Abbaye de Saint Martin de Tours devoir,
comme celle de Saint Denis , être exemte de toute Jurifdic-
tion. Ainfi finit cette difficulté. Quoique l'Anonyme charge
d'injures l'Archevêque Raoul , il ne dit rien de l'excommu-
nication prononcée contre lui en 1081 ce qui forme une :

<:onje£lure , avant cette année- là.


qu'il écrivoit fa relation
V. C'eft à peu près le tems auquel un Soûdiacre de l'E- Fulcoîe, SoO-
glife de Meaux , nommé Fulcoié , cherchoit à fe faire une '^'^cre de l'E:
^
réputation par le grand nombre de les vers. Il étoit né à Beau-
f/ie^x.
vais vers l'an 1 020 (h) , d'une famille noble , mais plus pieu-
fe que riche. Préférant le féjour de la Ville de Meaux à ce-
lui de Beau vais , il y alla faire fa demeure , entra dans le
Clergé &
fut ordonné Soûdiacre. Quoiqu'il eût étudié les
langues & les Loix (i), il fe fit une occupation^fuivie de lapoé-
fic ; pour y vaquer plus à l'aife , il fe retira dans l'Abbaye de

Lacelle (l) , à. quatre lieuC?s de Meaux, qu'il dépeint com-


me un lieu agréable aux Mufcs. Ses poéfies le firent connoî-
trç non-fculcm'ent en France , mais aufll en Allemagne à &
Rome (m). Il en envoyoit par-, 'tout j & il n'étoit pas fâché
que ceilx a qui il les ad'reflbiç l'en. f écompcnfafreht. Qo ne
pe'iit rhettrc,,fa mort avant le 20'' d'OQobre de' i'^h '1082

p'uifqu'il fit TEpitaphe de Gautier Sâvéyr', 'Evcque dé Meaux,


qui mourut ce jour- là (»). Fulcoie s'appliqua particulière-

(^) G<i//:.J Cbrifi. vêtus tom„fl.f0g. •


( / ) DuPLESS. Bift. de MeaHK. Tom. IS.
pag. \i6. iS MAmi.. ubiftipi ,

(*) Mabul, I»7;, 6a. Atuial. fiutn, x?. ,


{jp) Mabillo?h Jl»/*» Ugl.i.ci fturn. i.
p. !8î. Le BiSfF. Dijjcrt. tom. z, fur, i. paz.wi.pitrt. 2.
f. Z^6. 2fO. (p) DcPLETS, toni, I. piig. 108. C? tom.
(«) Le Bœuf, ibid, p. z^6. z.p.Ml-
Ffffij
59^ FULCOIE, SOUD. DE MEAUX. Ch. XXXVI.
ment à célébrer dans fes vers , les Saints de la Brie , les hom-
mes illuftres , comme Alexandre II , Grégoire VII , Gervais
& Manafle, Archevêque de Reims , Richicr de Sens , Hu-
gues de Dié , & de pluiieurs autres Evêques de doâes pcr- ;

ionnages de l'on tems, comme deLanfranc, de S. Anfelme ,


d'Hermann Ion maître.
Ses Poéfies. VI. Ses poéfies dans les manufcrits des Bibliothèques du
Roi , de Sorbonne & de Beauvais, font diftribuées en trois
Tomes , en dix Livres. Le premier Tome eft intitulé :
divifés
Utrum fécond , Neuîrum ; le troifiéme , Utrumque : titres
; le
finguliers , dont le fens eft que dans le premier ( « ) , l'Au-
teur , à l'imitation d'un Laboureur , prépare la terre ; dans le
fécond , il jette la femence ; dans le troifiéme , il moiffonne.
Le premier contient les Epîtres , les Epitaphes , quantité &
d'autres petites pièces de poéfies , en l'honneur des grands
hommes que nous venons de nommer ; le fécond , les vies
de plufieurs Saints du Diocèfe de Meaux celle de faint Fa- :

ron avoit été écrite en profe par l'Evêque Hildegaire. Ful-


coie l'a mis en vers fans y rien changer. Le troifiéme Tome
comprend des Dialogues entre l'efprit & l'homme , fur la
réunion des deux Teftamens en Jefus-Chrift , & celle des
deux peuples , qui , par fa grâce , n'en font plus qo'un. Le
Poète y chante aufli l'union de l'Eglife avec ce divin Epoux.
On a imprimé divers fragmens de cet Ouvrage dans les An-
nales Bénédidines (o) , dans l'Hiftoire de l'Eglife de Meaux
(p), dans les Recueils de Leyfer de Fabricius (q) , 8c &
dans les Differtations de M. Le Bœuf (r ). Ce dernier re-
marque que Fulcoie y promettoit un Traité fur les arts libé-
raux. On ne fçait pas s'il a exécuté fa promefle. Il fe fit , par
festravaux littéraires , une fi grande réputation dans la Ville
de Meaux , qu'on l'y regardoit comme le plus habile Maître
que l'on y eût jamais vu ( 5 ). Ses vers ne font néanmoins ni
élégans , ni exads , ni harmonieux ; mais ils paffoient alors
pour admirables (r).

(») Le BauF. Dijfert. Tom. 1. part, t. tom.p.4fi.4^j. 4j4.


(ij) pABRrc. tom. 1. Biilitt. Utim. mtJ,
(o) Mabill. M«/>ti Itali<. Tom. i.p. latin, pag. 649.
ii8. Lib. fig.Annal, nuntt XJ. fagi l8/. (r) Le Bmi^?.ubiji4p.p, Z4). 144.
Tom. <;. A[l<sr. p. 61^. (s) Ihid, p. 46.
(p) DuPLESS. Hift. dtCEglife de Un*ttx. («) Uii.p, 14 r.
FR ANCON ECOL. DE LIEGE. Ch. XXXVI.
, 597
VII. Francon bien diflinguer de l'Abbé d'Affli-
,
qu'il faut Francon.i co-
'^tredeLiége.
ghem de même nom, vers Tan 11 10, étoit Ecolâtrc de la
Cathédrale de Liège dès l'an 1066 , comme on le voit par
fa ioufcription au bas de la donation faite à la Collégiale de
Huy («) par l'Evêquc Théoduin. Il joignoit à beaucoup d'é-
,

rudition une grande pureté de mœurs (x) ; quoiqu'il s'ap- &


pliquât quelquefois à l'étude des fciences profanes , fon oc-

cupation ordinaire étoit de fe pcrfedionner dans l'in-


la plus
telligence des divines Ecritures (y). En 1083 , Henri, E-
vêque de Liège , & Herimannc de Metz (z) , le prirent avec
eux pour terminer les difficultés qu'il y avoit dans l'Abbaye
de Saint Tron , au fujet de l'éleftion d'un Abbé. Depuis ce
tems-là il n'eft plus parlé de lui dans l'Hifloire. Il écrivit un
Traité fur la quadrature du cercle (a) , qu'il dédia à Heri-
manne , Archevêque de Cologne ; un fur la fphere ( è ) ,
qu'on dit avoir été commenté par faint Thomas par Ale- &
xandre de Halés ; un fur le comput ( c ) ; un fur les jeûnes
des quatre-tems (d) ; un fur la mufique & fur le plain-chant ;
un fur le bois de la vraie Croix ; quelques autres Traités &
que Sigebert ne cite qu'en général. Tritheme dit qu'il en
avoit lait fur l'Ecriture (e) ; mais il convient qu'il ne les avoit
pas vus. De tous les Ecrits de Francon, je ne vois pas qu'il
y en ait d'imprimés. Le Catalogue des manufcrirs d'Angle-
terre en cite un du Collège de la Sainte Trinité à Dublin
(/),
où l'on trouve un abrégé du Traité de Francon fur la Cioix,
Valere André en cite un autre du Monaftere de Sept-Fonts
à Bruxelles (g ) , qui contient un Difcours intitulé ; Des louan-
ges de la [aime Vierge: c'eft peut-être le même que Tritheme
marque dans le Catalogue des Sermons de Francon , Abbé
d'Afflighem {h).
VIII. Rainard furnommé Hugues, de la Maifon de Bar-Rainard.Evc-
fur-Seine (i) , après avoir fait fes études dans l'Ecole de la^"^ ^^ ^an-
gres.

(«) Mmacs , de Don*l, Belg. lih. 1.


fitp, 1 1 .
( c ) Sigebert. Hid.
(x) Sigebert /le Script. EccleJ. cap, 1 64. {d) Andr. Bitliot. Bflgic. pMg. 24J,
(^ in Cbron. ad an. 1047. ( e ) Trithem. cap. J67.
(ji) Trithim. de Script. Ecclef. cap. tf) Part, f. ttHtn, 784.
346. (?) Andr. Bibtiot, Belgic.p. 14.9.
(t) Chrottic. Triiil p. 353. 3 «4. jéj. (A) Tritheme. cap, 367.
(») Sigebert, fj»p. 164. |
(i) dtliiaCbrijUati^mv.tom, ^p. ^6a.
(A) Pez. Tom, 4. Auecd. in Prohg.f'C^. \ ^ ftq.
,

5pS RATNARD,EVESQ. DE LANG. Ch. XXXVL


Cathédrale de Langres , en fun fait Chanoine , puis Evèque
en io6ç. Il étoit fçavant , éloquent, affable , prudent, de
bon confeil , & gouverna fon Egb.fe avec fageflfe & édifica-
tion ennemi du défordre , il le joignit au Légat Hugues ,
:

contre les Clercs concubinaires. Les Abbayes de Moleime &


de Tonerre le reflentirent de fes bienfaits mais il eut des :

difficultés confidérables avec les Abbés de Saint Bénigne de


Dijon &de Pontieres , au fujet des droits des immunités &
de ces deux Monafteres. L'Abbé de Saint Bénigne fut main-
tenu dans fes privilèges , par le Concile tenu à Beze en io66y
& Grégoire VII arrêta les pourfuites de Rainard contre
l'Abbaye de Pontieres , en le menaçant d'excommunication.
Cet Evêque fit le pèlerinage de Jérufalem , obtint en paf- &
fant à Confîantinoplc , un bras de S. Mammés , Martyr. II
mourut le 3' ou 5 d'Avril de l'an 1085.
Ses Ecrifs. IX. Hugues de Flavigny ( /) rapporte en fubftance le dif-
Son Difcours. cours que Rainard fit au Concile d'Autun en 1077 , à l'oc-
cafion de Gebouin fon Archidiacre , qui y fut choifi Arche-
vêque de Lyon. L'Evêque de Langres fe plaignit qu'on lui
enlevoit un fi bon fujet , &
qu'on lui arrachoit Ion œil droit.
En effet , les l'œil & \\a main
Canons nomment l'Archidiacre
de TEvêque. Parlant enfuite de l'Abbaye de Saint Bénigne
de Dijon , il fit voir combien elle étoit déchue depuis la mort
de l'Abbé Guillaume ; les pertes qu'elle avoit faites dans fon
temporel , foit par la négligence des Abbés fes fuccefifeurs ,
foit par la violence de Robert, premier Duc de Bourgogne ;
.

ajoutant que la diminution des revenus avoit attiré le relâ-


chement de l'obfervance. Il repréfenta que ce Monafterc
qui avoit autrefois fourni des Evêques à plufieurs Eglifes j fe
trouvoit dépourvu de fujets capables de le gouverner ; & fur
ce que le Légat Hugues lui propofa de nommer pour Abbé ,
celui qu'il entrouveroit digne, Rainard demanda Javenron,
Prieur de la Chaife-Dicu ce qui fut accordé. Javenton ieul
:

s'y oppofa mais on l'obligea d'accepter , & il fut béni le 17


:

de Septembre par Rainard.


Ses Poé/îes. X. On lit dans l'Hiftoire du Monaftere de- Saint Hubert
Ouvrages qu'- en Ardcnnc (?n)
v , quelques
t
vers de la façon de cet Evcque.
on lui a fup- -- ^ i

pôles,

(l)Hor,,Flavian.toin. i. BihUot. nov . 1 (m) Wllv. AnJa^wenf. Moiiap.tom. 4.

tabi.p.too, \/.mpliJJ'. Colua.Mirun.f. p}}.^]^.


FOLCARD, ABBÉ DE TORNEY. Ch. XXXVI. 59^
Il y en a à Guillaume le Conquérant , à qui il étoit allé deman-
der quelques fecours pour fon voyage de Jérufalcm ; d'autres
à Hugues , Archevêque de Lyon , à qui il reproche d'avoir
réitéré l'ordre d'Exorcifle à un enfant , à qui Rainard l'avoic
conféré. Il y a encore de lui quelques autres vers rapportés
par Orderic Vital {h). C'cft tout ce que l'on fçait des Ecrits
de Rainard , fi ce n'eft qu'on le fait aufTi Auteur des An-
tiennes &
des Répons pour l'Office de faint Mammés ( i ).
A l'égard de la traduftion des ades de ce Martyr, que quel-
ques-uns lui attribuent , elle efl de Godefroi l'un de fes fuc-
ccfTcurs , dans le douzième (iécle. Rainard n'eft pas non plus
Auteur du Pocme en l'honneur du même Saint ; c'eft l'Ou-
vrage de Walafride Strabon , plus ancien que cet Evêque ,
de deux cens ans. Il n'y a pas plus de raifon de lui faire
honneur de l'hymne Gloria laus (/) , que l'Eglife chante le
Dimanche des Rameaux ; elle eft de la façon de Théodul-
phc, Evêque d'Orléans. On dit, mais fans preuve {rn)^ que
Rainard compofa quelques pièces pour l'Office du Saint Sa-
crement.
XL Quelques-uns ont diftingué Folcard («), Moine deFolcari./ibhé
Saint Bertin en Flandres , de Folcard , Moine de Cantor-'^'^^"'^^-
beri , &
en ont fait deux Ecrivains du quatorzième fiéclc ;
mais en y faifant bien attention , on verra que c'cft le même
qui , du Monaftere de Saint Bertin , pafTa à celui de la Tri-
nité de Cantorberi , depuis que Guillaume le Conquérant eût
fait la conquête de l'Angleterre. Folcard , avant que ce Prin-
ce Tappellât en cette Ifle s'étoit rendu habile dans les }fcien-
,

ces à S. Bertin (0). A


fon arrivée en Angleterre , Aldrede ,
Archevêque d'Yorc, le combla de bienfaits; ce qui l'enga-
gea , par reconnoiffance , à lui dédier la vie de faint Jean
de Beverley, qu'il avoit entreprife par fon ordre II demeu-
roit encore à Cantorberi lorfqu'il la compofa. Le Roi Guil-
laume l'en tira pour le faire Abbé de Torney en \o6?>. Fol-
card gouverna ce Monaftere pendant fcize ans , au bout dcf-
quels s'étant élevé un différent entre lui & l'Evêque de Lin-

(*) Orderic. Vital, lib.%. p.jx\. (m) ïi>;j.


(«") BoLLAND aJ iliem 17 AugKJl. fug. (u) Faericios , BUlict. latin, ton», i.p.
44Î-
il) Giillia Chrifli*», nvo, Tow, 4. fag. (») ORDiaiC. Vitalis , Lib. II. f»g„
83J.
6oo FO LC A R D,
coin , il quitta Torney &
fe retira , foit à Cantorberi, foit à
Saint Bertin : on lui donna pour fjccefTeur dans le gouverne-
ment de Torney, Gonthier né au Mans ,
qui établit dans fon
Monaftere (/)) , la
difcipline fuivant qu'on l'obiervoit à Mar-
mouticr-lès-Tours. L'année de la mort de Folcard ne nous efi;
pas connue.
Ses Ecrits. Vie XII. La vie de faint Bertin Abbé de Sithieu
, , fut le pre-
mier Ouvrage de Folcard : cela paroit clairement par TEpi-
tre dédicatoire adreflee à l'Abbé Bovon (^) , fous lequel il

avoir été élevé dans la difcipiine monaftique. Il donna d'a-


bord cette vie avec beaucoup de précifion ; enfuite il en fît
une plus longue & plus détaillée elle eft divifée en deux Li-
:

vres , dont le premier contient l'hifloire de la vie du Saint ;


le fécond , la relation de fes miracles. La Préface de cette
féconde vie eft la même que celle de la vie de faint Orner ;
ce qui peut venir de l'inadvertence des copiftes. Il y a quel-
ques miracles dans le fécond Livre , poflérieurs au tems de
Folcard. On fçait combien ces fortes de recueils font fujets à
être amplifiés. C'efl la féconde vie que Dom Mabillon a fait
imprimer dans le troifiéme Tome des A£les de l'Ordre de
Saint Benoît ( r ), Il a fait entrer la Préface de la première
dans fes Obfervations. On a dans Surius , au cinquième de
Septembre , un abrégé de la vie de faint Bertin ; mais on n'a
point de preuves que ce foit la première de Folcard.
Viedefiint XIII. Nous avons deux vies de faint Omer , Evcquc de
Orner.
Terouanne , au fcptiéme fiécle ; l'une dans le fécond Tome
des Aâes de l'Ordre {s ) , par Dom Mabillon ; l'autre dans
Surius , au neuvième de Septembre celle-ci pafTe pour être :

de Folcard. Si cela efl: , il y a mis peu de chofe du fienjpuif-


que ces deux vies ne différent prefqu'cn rien,
rcu..
1 en XIV. Le Poëme en l'honneur de faint Vigor , Evêque de
l'honneur de Baycux , cft rapporté fous le nom de Folcard , dans la Chro-
aintVagor.
j^j^^, ^^ Ccntulc OU de faint Riquier (r ), où repofcnt les
efl: en vingt - fept grands vers , qui
reliques de ce Saint. Il
n'ont rien d'eftimable que quelques circonftanccs de la vie
de cet Evcque.

(/>) Mabillon. L;t. 71, Annal, uum. t [r] IhU,


73./». 511.
I
(i) Masillon. Tom. t. AStr. f.
(y} Madil. Tom, i , AUtr.fti, fl, ' (t) Oirtnic. Ccntul, iU,^. e, 10.

XV
ABBÉ DE TORNEY. Ch. XXXVI. 6oi
XV. Depuis fon arrivée en Angleterre (k) , Folcard écri- Vledefaint
vit la vie de i.iint OiVa^d , Evêque de W'orcheftre, & en-^^^^'^'
fuite Archevêque de Cantorberi. Warthon croit cetie vie
perdue. Dom Mabillon ne veut pas décider fi ce n'cfl pas
celle qu'il a publiée dans le premier Tome des Ades (x). Le
ftylc net & coulant qui s'y remarque , comme dans les autres
Ecrits de Folcard (y ) , peut favorifer Topinion de ceux qui
l'en croient Auteur. Bollandus & Surius l'ont publiée au 2^
de Février; & avant eux tous , Capgrane , Provincial des Er-
mites de Saint Auguftin, dans fon Catalogue des Saints d'An-
gleterre , imprimé à Londres en 1 5 i<^ in-fol.
XVL Vers l'an 1066 , Folcard écrivit en deux Livres la ^''^ de S. Jean
"^e Bevcricy.
vie de faint Jean de Beverley, Archevêque d'Yorc , g^ j^
dédia à Aldrcdc l'un de fes fucceffeurs , tjui l'avoit engagé
à ce travail. Dom Mabillon ne donna d'abord qu'un abrégé
de cette vie (z). Les Bollandiftes l'ont publiée toute entière
au feptiéme jour de Mai (a). Folcard s'y nomme lui-même ,
& remarque que l'Evangile ne fut prêché en Angleterre,
qu'après qu'il l'eut été dans les Gaules. On lit à la tête de
cette vie ( ^ ) , dans le manufcrit de la Bibliothèque Cotto-
niene , que Folcard étoit Moine de la Sainte Trinité de Can-
torberi. Avant de l'écrire, Folcard avoir compofé des Ré-
pons pour l'Office de ce Saint (c) ; Se ce fut ce qui enga-
gea l'Archevêque Aldrede à le charger d'en compofer aufîî
la vie.
XVn. Le même manufcrit dont nous venons de parler, Vie de faint

contient , fous le nom


de Folcard (d) , une vie de faint Bo- ^o'"'^^*

tulfe , Abbé d'ikanoam en Angleterre, vers la fin du fep-


tiéme fiécle fon corps repoioit à Torncy , où il avoit été
:

transféré par faint Adelwolde , Fondateur de ce Monafte-


re (e). Folcard en étoit Abbé dès l'an io<>8 ; & cette vie
efl: adjr-effée à "Walkelin , Evêque de Wincheftre , en 1070 :

elle â été publiée fans nom d'Auteur , par Dom Mabillon &

OrBÏRIC. Vilil. lit. 11. p. Sjf.


(/() (l>) Smith, in Cat.i!o\^o p. 74. num,
,
1 6.
(x)Mabil. Tû)». 7. Atlor.p, (c) Rolland, ihid. uui». 4. p. 168,
(y) Orderic. Vit.il. tthi fitp. {li) Smith, in Catalogo , p. 17. «. j i i.

(t) Mabil. Tom. 5. p. 410.


(a) Paj. iiîf;. Toi». 1. ^î P-^S- '^3. ». (f) Orderic. Vital, lib. ii.pag. 854.

Tome XX, Gggg


6oz SULC. MOINE DE OUEST-MUST. Ch. XXXVI.
parles BoUandiftes (/). L'Ecrivain y témoigne qu'il n'étoit
point contemporain du Saint (^ ) ; que ce qu'il en rappor- &
roit , il l'avoit appris de ceux quiavoient eu le bonheur de le
voir «Se de vivre fous fa difcipline. Dans cette fuppofition , il

n'efl paspoiïiblc d'attribuer à Folcard la vie de S. Botulfe, pu-


bliée par ces Editeurs ;
puifqu'ctant mort fur la fin du fep-
tiéme fiécle , Folcard qui vivoit fur la fin de l'onzième , étoit
trop éloigné du tcms des difciples de ce Saint , pour avoir
appris de leur bouche quelques traits de fon hiftoire. Ainfi il
faut que la vie de faint Botulfe , rapportée dans le manufcrit
de la Bibliothèque Cottoniene , foit différente de celle qu'on
lit dans les Colledions de Dom Mabillon des BoUandiftes ; &
auffi l'ont-ils tirée d'un autre manufcrit.
Sulcard.Moi. XVIII. Il y eut en Angleterre un autre Ecrivain , dont
Munrter^"^^' ^°"^ "^ connoiffons les Ouvrages que par ce qu'en dit Pit-
feus (A). Il fe ncmmoit Sulcard , &
menoit la vie monafti-
que dans le Prlonaftere de Oucfl-Munftcr , fous l'Abbé Vi-
tal , qui gouverna cette Abbaye depuis l'an 1070 jufqu'en
1082 (î). Ce fut à lui qu'il dédia fa Chronique, dont on
trouve un aflez long fragment dans le Monafticon d'Angle-
terre /). C'efl: une defcription du lieu
( des arrangemens &
pris pour l'établifTement du Monaftere de Oueft-Munfter.
Le refte de la Chronique n'eft point imprimé , non plus que
leRecueil des Sermons de Sulcard , de fes Lettres , de quel- &
ques Opufcules.

R^r'^i^-""^'
XIX. Il a déjà été parlé de Guillaume , Bibliothécaire de
de il'Eglif"^ l'Eglife Romaine , dans l'article d'Anaftafe ,
qui l'avoit pré-
Romaine, cédé dans cette fon£lion. Onuphre faifant mention au com-
mencement de fa Chronique , des Ecrivains dont il s'étoit
fervi pour la compofer , dit que Guillaume continua les vies
des Papes commencées par Anaftafe , depuis Adrien II, juf-
3u'à Alexandre II , c'efî-à-dirc , jufqu'en 1073 ; que Pan- &
ulphc de Pife , foûdiacre de l'Eglife Romaine , reprenant
l'Ouvrage où Guillaume l'avoit fini , le conduifit depuis le
Pontificat de Grégoire VII > jufqu'à celui d'Honorius II ,
qui occupoit le Saint Siège en 1 1 30. On voit par -là , que

f/) Tow. 5. jlSor.f. I.BOLIAND. /!</ (/) Mabillon, LU. 6^. Annal. «. ^4.
àitm 17. ]unii. ^ lit.66. n. %6.
(g) Hnin. 10. (!) Monnj). Angl, Hm. X.f. 57.
(*) PiTSEUS. de Script. Angl. f. l88.

«
'THOMEL, MOINE D^HASNON.Ch.XXXVI. 603
rhiftoire des Papes par Guillaume le Bibliothécaire , failoic
une luite d'environ deux cens ans. Nous n'avons néanmoins
de lui que les vies d'Adrien II & d Etienne VI ; encore celle
de ce dernier Pape n'cft-ellc pas complecte elles ont l'une :

& l'autre été imprimées à Mayence en 1602 in-4''. parles


foins de Jean Bulée ibus le nom d'Anaftafe le Bibliothécaire,
à Paris en i6^g , & à Venile en 1729 , entre les Auteurs de
i'Hiftoire Byfantine, de l'édition de Charles Annibal Fabroc.
Antoine Dadin de Hauteferre , les fit imprimer féparément
avec des notes de fa façon, à Paris en i68o in-4°. à la fuite
des vies des autres Papes. Enfin on les trouve dans la nou-
velle édition de François Bianchini & de Jean Vignole à
Rome, en 171 8 , 1724, 1728 , 8c dans le troifiéme Tome
des Ecrivains d'Italie, par M. Muratori, à Milan en 1723.
Il manque donc de l'Ouvrage de Guillauoac , l'Hiftoire de

quarante-cinq Papes ce qui fait un vuide confidérable dans


;

celle de l'Eglile. Le ftyle de cet Ecrivain eil conforme au gen-


re hiftorique , grave & clair.
XX. Thomcl , Secrétaire de Baudoin VI , Comte de Flan- Tliomel, Moi
«^'Hafnon.
dres , quitta cet emploi pour embrafier la profefllon mona- "^
ftiquc dans l'Abbaye d'Hafnon , au Diocèfc d'Arras , vers
l'an 1070. Pendant le tems qu'il y vécut , qui fut d'environ
15 ans, il en écrivit l'Hiftoire par ordre de l'Abhé Rolland,
à qui il la dédia. Dom Martenne l'a fait entrer dans le troi-
fime Tome de fcs A nccdores ( / ) la reffemblance des noms
:

latins Haftionienfe & Elmnenfe , a occafionné l'erreur où plu-


fieurs Ecrivains font tombés (w) , attribuant à Thomel l'Hi-
ftoire de l'Abbaye de Saint Amand , au lieu de celle de l'Ab-
baye d'Hafnon ; & l'Hiftoire de Baudouin V , au lieu de celle
de Baudouin VI. On ne connoît point d'Abbé du nom de
Rolland , parmi ceux de Saint Amand & d'Einon. Thomel
ne fut pas Moine de cette' Abbaye , mais d'Hafnon ; & ce
qui eft dit dans fa Chronique , de Baudouin, Comte de Flan-
dres , ne peut s'appliquer qu'à Baudouin fixiéme du nom , qui
rétablit l'Abbaye d'Hafnon & en fit faire la Dédicace le 3 de
Juin de l'an 1070. -, ;

XXI. Thomel avoit été témoin oculaire de cette cérémo-SaChro.:iqi; ,

(/)T«»»«. j. Anfcd.f. 77J. 1 840. Pasci'IN. in Affeni. (om.J,^. Jl^.


(m) Valek. Andr. Bib. Bslgic. p, 840. [

Ggggij
6o4 G O D E F R O I,
nie , & da rétabliflement de fon Monaftere
(«) ; ce qu'il dit
des Fondateurs & des premiers Abbés d'Halnon , il l'avoir
puifé dans les archives de cette Maifon ( o ) fon Hiftoire :

peut donc paffer pour autentique. Il rapporte la fondation


d'Hafnon à l'an éjo ce Monaftere étoit double dans fes
:

commencemens , l'un d'hommes , l'autre de filles. Jean &


Eulalie fa fœur , qui les avoient fondés dotés de leurs &
biens, gouvernèrent ces deux Communautés pendant 17
ans ; Jean celle des hommes ; Eulalie celle des filles. Thomel
donne la fuite des autres Abbés &
Abbefles jufqu'à la nn du
règne de Charles-le-Chauve \ ce qui fait un eipace de 1^4
ans. Il remarque qu'on ne doit point être furpris de voir au
même endroit deux Monafteres de différent fexe; cet ufage
étant ancien. Enfuite il fait voir que la difcipline régulière
ayant été long-tcms en vigueur à Hafnon , elle s'affoiblit in-
fenfiblement ; que Baudouin VI , dont il donne l'hiftoire en
peu de mots , voulant y rétablir le bon ordre , en fit fortir les
Chanoines , qui ne l'étoicnt que de nom , leur fubftitua des &
Moines , à qui il procura les bâtimens néceffaires aux exerci-
ces réguliers.Il remarque que la Dédicace del'Eglife fut faite

par Evêques de Cambrai , de Noyon 8z d'Orléans , afli-


les
ftés de quinze Abbés ; que deux Abbefles y furent préfentes.
L'Abbé R olland étoic du nombre étant mort quelques an- :

nées après , Thomel crut devoir ajouter fon éloge à l'hiftoire


de la Maifon , qu'il avoit gouvernée fi fagement. Rolland eut
pour fucccffeur Lotbcrt , comme on le voit par un Ecrit ano-
nyme fur la fondation du même Monaftere (/> ).
GodefrovPre- XXII. Lcs dciix Monaftcres de Stavclo 8c de Matmcdr j
et deStaveic. puj-, cians le Diocèfe de Tongre^(^) l'autre dans celui de
,

Cologne , avoient ère fondés par faint Remaclc , à condition


qu'ils n'auroient qu'un même Abbé , dont la réfidence feroit
fixée à Stavelo. Cudbert , alors Archevêque de Cologne ,
avoit confenti à cet arrangement les Archevêques fes fuc-
:

ce/Teurs tentèrent plu (ieurs fois de changer cette difpofition ;


& de concert avec les Moines de Malmedi , ils entreprirent
de fixer la demeure de l'Abbé de ces deux Monafteres à Mal-

(o) Cap. I,
'\ff, p, 4j. ^ LfODIFNS. Iliflcr. tcm, i.p.
{p) Marten. ri»i. />.
7PJ,
7'"
II'
PREVOST DE STAVELO. Ch. XXXVI. 605
medi. L'Archevêque Annon fut celui de tous, qui poufla le
plus vivement cette affaire. Profitant de l'autorité que lui don-
noit radminiflration de l'Empire , pendant la minorité de
l'Empereur Henri IV , il envoya à Malmedi le Comte Con-
rade , pour y faire Féledlion d'un Abbé. Les fuffragcs tom-
bèrent fur Tegeno , Moine de Brunwillcrs , qui , pour fe
maintenir , employa le crédit de Godefroi , Duc de Tofca-
ne , & gagna le jeune Roi & les Courtilans par de grands
préiens. Les Moines de Stavelo n'eurent recours qu'aux priè-
res & aux larmes ; & voyant que ces moyens ne leur réuiïif-
foient point , ils s'avilerent de porter proceflionnellement à
Liège , pendant que la Cour y étoit , le corps de faint Rema-
cle ; ils le poferent fur la table même où le Roi mangeoit , le
priant au nom de Dieu , de leur faire reflituer , en confidé-
ration des mérites de leur faint Fondateur , ce qu'on venoit
de leur ôter. Le Roi effrayé ,
quitta la table & fe retira. Dans
le même tems rompit & brifa les jambes d'un des prin-
elle fc
cipaux Miniftrcs du Roi : mais il fut guéri quelques momens
après par la vertu des reliques du Saint ; & il fe fit de fuite
plulieurs autres miracles , qui engagèrent le Prince à ordon-
ner que le Monallere de Malmedi continueroit à être fou-
rnis à celui de Stavelo , comme il l'avoit été depuis le com-
mencement.
XXIII. Lambert de Schafnabourg rapporte cet événement SesEcrit?.
à l'an 107 1 , lix ans après le procès intenté aux Moines de
Stavelo par l'Archevêque de Cologne. Godefroi , Prevot de
cette Abbaye , témoin oculaire de tout ce qui s'étoit pafTé en
cette occafion , le mit par écrit. L'Ouvrage ell divifé en deux
livres , qui ont chacun leur Préface le premier contient la
:

relation du différend entre l'Archevêque Annon & les Moi-


nes de Stavelo. On trouve dans le fécond , les moyens qu'ils
employèrent pour la défenie de leur droit. Us le firent con-
firmer par une Bulle du Pape Léon IX , qui efl rappor-
tée à la fuite de l'Ouvrage de Godefroi dans le Recueil
de Chapeaville , imprimé à Liège en 1^18 in -4^. & dans
l'Appendice du quatrième Tome des Annales de Dom Ma-
billon. La vérité de cette hilloire ayant été attaquée par un
Ecrivain Allemand nommé Ignace Roderic , Dom Martenne
en prit le parti , dans un Ecrit qui parut à Cologne en 17 30,
in-fol. fous le titre : Défenfe des droits de l'Abbaye hnpériûle
de Stavelo. Il y fait voir que l'événement rapporté par Go-
6o6 HEBRETME MOINE DE CLUNI. Ch. XXXVI.
,

defroi (r) ne peut être révoqué en doute , puifqu'il eft con-


,

flaté par le témoignage de gens dignes de foi , & qui vi-


voient dans le tems même; Içavoir , de La-nbert de Schafna-
bourg, dans fa Chronique (i) ; de Théoduin , Evê^uc de
Liège, dans fa Lettre à Imade, Evèqu? de Paderborn; de
Frideric , fuccefleur de l'Archevêque Annon ; de l'Empe-
reur Henri IV dans un Diplôme de l'an 1089 ; & de divers
,

monumens de l'Abbaye de Stavelo. L'Ouvrage de Godefroi


eft intitulé : Triomphe de faint Remacle fur le Monnfîere de
Maimedi. Il fut , félon toutes les apparences , écrit vers l'an
1085. On y voit que les Cantadours ou Jongleurs (f) , com-
mençoient à fe répandre leur profcffion étoit de fiire des
:

chanfons fur les principaux événemens du tems. A leur exem-


ple, Godefroi en fit fur ce qui s'étoit paffé à Liège dans le tranf-
port des reliques de faint Remacle.
Hebreme, XXIV. En 1084, Sanche , Abbé de la Penna en Efpa-
Moine deCiu- gnc
, fit tranfportcr à fon Monaftere les reliques de faint In-

dalece, l'un des premiers Evêques de ce Royaume , & du


nombre de ceux qui y avoient annoncé l'Evangile. Il ordon-
na à Hebretme de mettre par écrit ce qui s'étoit paffé à certe
occafion («) ; ce qu'il exécuta la même année. Hebretme avoit
été tiré de Cluni avec quelques autres Moines , par Sanche-
Îe-Grand, Roi d'Arragon , pour établir dans le Monaftere
de la Pcnna , l'obfervance de Cluni. Les Bollandiftes ont
donné l'hiftoire de cette tranflation, dans le troifiémeTome
du mois d'Avril {x), avec celle de la tranflarion du corps
de faint I fi dore de Seville , faite en 1063 , qu'ils croient être
du même Hebretme. La différence qu'il y a entre ces deux
Hiftoires , eft que cet Ecrivain rapporte dans la première ,
ce qu'il avoit vu lui-même ou appris de témoins oculaires ;
& que dans la féconde , il ne raconte les chofes que fur la foi
d'autrui.
Barthelemi, XXV.
L'Abbaye de Marmouti-r nous préfente en un mê-
Abbcde Mar- rne tems deux Ecrivains ; Gauvillon qui y vivoit en qualité
de Moine , & Barthelemi qui en étoit Abbé. Il fera parlé du
mouticr.

premier dans l'article de faint Anfelmc ; nous mettrons ici

f»-)
Marten. Stahul.Jiir.f. If), \ii.\ («) Bolianb. Tom. j. /Ifriiis , p. jif.
{s) Ad an, 1071. 1
75''
(t) Lkodiens. Hifl.f. jii, I (0 Idem- Tcm, i. /.i^. 901.
BARTHEL. ABBÉ DE MARM. Ch. XXXVI. 607
ce que nous fçavons du fécond. Il fuccçda à Albert dans la
dignité d'Abbé, vers l'an ic63(j'); mais il n'en jouit pai-
fiblemcnt qu'après avoir furmonté les obftacles que Gcotfroi-
le-Barbu , Comte d'Anjou, lui oppofa. Quelque tems après
Ion clctlion , fon attention pendant fon gouvernement , fut
de maintenir une exa£le difcipline dans fon Mona'flcre , &
d'y faire fleurir les études. Il mourut au mois de Février
1084. "Wilgrin , Evcque du Mans , avoit , du confçntemcnt
de fes Chanoines , fournis à Marmoutier le Monaftere de
Vivoin. Arnauld fon fucceffeur voulut changer cette difpo-
fition : l'Abbé Barthélemi s'y oppofa , mais en prenant les
voies de la douceur &
de la politefTe. Il écrivit à l'Evêque
Arnaud ou Ernaud (z) , qu'il ne pouvoir qu'être furpris de
l'avoir pour adverfaire dans une affaire où il avoit tout lieu
de croire qu'il l'auroit pour défenfeur , fi tout autre fe fût
oppofé à l'union établie par fon prédécefTeur , entre l'Eglife
de Vivoin & Monaftere de Marmoutier c'eft enfuite de
le :

cette union , que s'eft faite une fociété de priè-


ajoute-t-il
,

res & d'autres bonnes œuvres entre vos Chanoines de Saint


Julien & nous , portant ce que nous devons faire à la mort
de chacun d'eux , & ce qu'ils font obligés de faire pour nous
en cas pareil. C'efI: vous-même qui avezdrelfé l'aÉle de cette
fociété il a été confirmé par l'Evêque Wilgrin & par les prin-
:

cipaux de votre Eglife. N'efl-il pas d'ufage dans les Eglifes


de France , d'Aquitaine & de toute la Gaule , qu'un a£te au-
torifé du confentement d'un Chapitre, demeure fiable? Sou-
friroit-on qu'une perfonne féculiere fe mît en devoir de le
rompre & l'annuller ? Il s'adrelTe enfuite aux Chanoines , les
priant de ne pas foufïrir que l'on donne atteinte à ce qui
avoit été fait mais il protefle qu'il ne portera l'affaire à au-
:

cun Tribunal. Barthélemi accompagna fa Lettre de préfens


pour l'Evêque {a) , afin de calmer fa colère envers les Moines
de Marmoutier. Arnaud changea en effet de fentiment, & laiffa
fubfifler funion.
XXVI. Nous remarquerons ici , d'après Dom Mabillon ,' ^
Monafte-es
,.,,„, en
,; j A /;\
1
beaucoup d autres dans le même tems {b) , non
loumis a celui
qu il s fit je Mannou-

(x") Uem.Tom. ï.p.çoi. » (i.) ïl-id.


f. iç,i.
(f) Mabiilon. Tom. s. ilflor, p. 388. 1 (•») Wabilion. pug. ?Si.

38/. l W""^-
6o8 B R U N O N , ^

que l'Abbé ni les Moines de Marmoutier s'emprcflaflent d'a-


voir dans leur dépendance un grand nombre de Monafte-
res mais parce qu'on leur demandoit des Moines de cous
;

côtés , pour y mettre en vigueur la difcipline qui s'obfervoic


à Marmoutier. Guillaume le Conquérant tira de ce Monafte-
re des Moines pour gouverner celui qu'il venoit de fonder,
au lieu même où il avoir défait l'armée d Harald ufurpateur
du Royaume d'Angleterre. Vers le même tems , c'eft-à-dire ,
en 1067 , Paganelle , noble Anglois, donna aux Moines de
Marmoutier l'Eglife de la fainte Trinité qui lui appartenoic
dans la Ville d'Yorc. Un Militaire de la Ville du Mans mie
auflî de l'avis de l'Evêque Arnaud , les Moines de Marmou-
tier en pofleffion de l'Eglife de Saint Guingaloc dans le
Château du Loir. Barthélemi étoit alors Abbé de Marmou-
tier , & ce fut lui qui accepta cette donation. La fainteté de
fa vie & la régularité de fes Moines , leur en attirèrent beau-
coup d'autres , qu'il feroit trop long de rapporter. Le nom
de Barthélemi fe lit dans quelques Martyrologes ; mais l'E-
glife ne lui a pas encore décerné de culte (c). On avoit autre-
fois à Marmoutier l'hifloire de fa vie & de fes miracles (d):
elle ne fe trouve plus. Raoul, Archevêque de Tours {e) , ne
pouvant déchifrer une Bulle que le Pape Grégoire VII lui
avoit adreffée , eut en vain recours â fes Chanoines. L'Abbé
Barthélemi la lut & la t-ranfcrivir. Cette Bulle ctoit de l'an
1075 , en caractères Romains. L'Ecrivain moderne qui rap-
porte cette anecdote , en conclut qu'il y avoit une parfai-
te intelligence entre l'Archevêque & les Religieux de Mar-
moutier.
Rr«non,Abbê XXVII. Milon , Abbé de Montier-en-Dcr , étant mort
deMontier-en- en 1041;» OU au Commencement de 1050, on lui donna pour
,

luccefleur Brunon. Il reçut la bénédiâion abbatiale à Rome ,


dans la Chapelle de Latran , où le Pape Léon IX , qui en
fliifoit la cérémonie , lui donna fon nom , c'efl-à-dire , celui

qu'il portoit étant Evêque de Toul (/). Brunon fe nommoit


auparavant "^'andelger. II efl parlé de ce changement dans
une Lcttte que ce Pape écrivit a Guillaume , Comte de Ne-

{c} Ihid. p. 594. j


481.
{d)ïb!i{. p. ;88. (/)MaBillon. LU. ;9. Aniijl.mum.
' (f) Singularités hipoiiqiies, tom. 4. p. I <)0' JI7»
f.

vers
ABBÉ DE MONTIER-EN-DER. Ch. XXXVI. 609
vers , pour l'obliger à reftituer certains héritages à l'Abbaye
de Montier-en-Der. Brunon nous apprend lui-même qu'il
avoit eu le nom de Wandelger , dans un Traité fait avec le

Comte Rodulphc ; comme on le voit dans deux chartes rap-


portées dans l'Appendice du quatrième Tome des Annales
de Dom Mabillon (g). L'Anonyme qui a continué la vie de
laint Berchaire , qu'Adlon n'avoit pas eu le loilir d'achever,
dit , que Brunon aflifla à plufieurs Conciles "( k) , où il avoit
été invité par les Evêques qui connoifibient Ion mérite; qu'il
fut confidéré des Papes Léon IX, Etienne , Nicolas, Viftor
& Alexandre ; de même que d'Athelenard , Archevêque de
Lyon , de Hugues de Belançon , & de Mainard de Sens ;
qu'outre le foin qu'il prit d'enrichir fon Monaftere de divers
privilèges , il recueillit les miracles opérés par faint Berchai-

re , &chargea de reprendre la fuite de l'Ouvrage d'Ad-


le
fon. Il étoit naturel que cet Anonyme fît entrer dans fon
Ecrit ce qu'il fçavoit d'Adfon. C'efl delà que nous avons tire
les principales circonftances de la vie de cet Auteur (?).
XXVIII. Un autre Anonyme du même tems , compofa Anonyme Je
l'Hifloire de l'Abbaye de Figeac au Diocèfe de Cahors. ll^'g^ac.
rapporte l'origine de ce Monaftere au règne de Pcpin-le-
Bref , & donne la fuite des Abbés , avec les principaux évé-
nemens jufqu'au Pontificat de Grégoire VII. Il remarque que
les Moines de Figeac rélolus de vivre conformément à la Rè-
gle de Saint Benoît , choilirent pour leur Abbé , Hugues qui
l'ctoit de Cluni. Cette Hiftoire fe trouve dans le fécond Tome
des Mélanges de M. Baluze (/).
XXIX. Le Pcrc Artur du Mouftiera inféré un Ouvrage Anonyme Je
du même goût ddns ion Recueil intitulé: Neuftrie pieufe (m),^^^"^'
imprimée a Rouen en 16^5 in-fol. c'eft l'Hidoire de l'Ab-
baye de Fécam , qu'il conduit depuis l'origine de ce Mona-
ftere , c'eft-à-dirc , depuis la fin du feptiéme fiécle jufqu'à
l'onzième où il fut réformé par Guillaume , Abbé de Saint
,

Bénigne à Dijon. Saint Waning en fut le Fondateur ; & c'efl:


aufTi fur la vie & les vertus de ce Saint , que l'Anonyme s'é-
tend davantage. Il dédia fon Ouvrage à Guillaume de Ros ,

f^ Tom. 4. Annal, in AppeiiJ.p, 741. 1 (i) Voyex,!' 19 Volume.


(h) Vit.x Bercbar. lit. z.p. Si;. Tom. i.
\
0) Pig. ip8.
Aâcr.Ordln. S.Bensdiil, \ ('") l'ag, 193.
Tome XX, Hhhh
,,

6io ANONYME DE CORBENI. Ch. XXXVI.


Abbé de Fécam, depuis l'an 1078 jufquen 1107. BoUand
& Dom Mabillon ont fait imprimer des fragmcns confidcra-
bles , de cette Hiftoire de Fécam ; Tun au neuvième de
tirés
Janvier («) l'autre dans le fécond Tome des Ades de l'Ordre,
;,

n'ayant pu recouvrer nulle parc la vie entière de faint "Wa-


ning (0).
CcrST''^ XXX. Ils ont auffi publié un Difcours fait en 108 5 (/> )
par un Moine de Corbcni , à l'honneur de faint Marcoul
dont les reliques repofent dans ce Monallere. Comme il s'y
faifoit beaucoup de miracles , l'Orateur raconte ceux dont il
avoit été témoin , ou qu'il fçavoit de gens dignes de foi. Ce
Saint croit dcs-lors invoqué comme il l'cft aujourd'hui , pour
la guérifon des écrouelles , qui dans ce Difcours font appel-
lées , maladies royales , apparemment parce que les Rois tou-
choient ceux qui en étoient attaqués. Ces deux éditeurs ont
joint à ces Difcours (q) , la relation du tranfport des reli-
ques du même Saint en diverfes Villes & Villages de Cham-
pagne , pour engager les fidèles à fubvenir aux befoins du
Monaftere de Corbeni. L'Auteur , qui ne diflîmule pas ce
motif, prétend le juflifier en difant , que l'année précédente
les Chanoines de Saint Quentin , & fix ans auparavant , ceux
de Saint Martin de Tours , avoient porté de même les reli-
ques de leurs Saints. II marque que le tranfport de celles de
faint Marcoul fe ht en 1 102 , qu'on le commença le jour de
la Pentecôte , & qu'on ne les rapporta à Corbeni que fur la fin
de Juin de la même année.

(«) BoLLAND. a.l Jiem 9. Jjnuar.p, (p) 60LLAND. T»m. 7, Hait , pa^. ;3 r.

Mabili. Tom. 8. Ador. p.


(») Mabiil. Toi», i, ASor, p. 533. (</)BOLI.AND./>. 533. MaBII./».
GREGOIRE VII , PAPE. Ch. XXXVII. 6n

CHAPITRE XXXVII.
Grégoire Fil , Pape.

I./'^ N n'eft point d'accord fur le lieu de fa naiflancc (r). Grégoi-eVil.


*"'' '*"^^*
^^^^ Bernried qui a écrit fa vie , & Pandulfe, le fontnaï-
tre en Tofcane ; Brunon de Signi & Hugues de Flavigni ,
Auteurs contemporains, difent qu'il naquit à Rome, de pa-
ïens Citoyens Romains. C'efl: l'opinion la plus probable. Il
eut pour Maître dans les iciences , Laurent , Archevêque
d'Amalphi , homme dode & d'une fainte vie , bien inftruit
des langues grecque & latine { s ). Grégoire VI , qui con-
lldéroitbeaucoup ce Prélat , le tcnoit auprès de lui. Il paroît
qu'Hildebrand , c'efl; le nom que Grégoire VII avoit eu au
Batême ( f ) , étoir dès-1 -rs engagé dans la profcfllon monafti-
que: car Orderic Vital dit, (]u'il cmbraffa cet état des l'en-
fance.
H. Quoique très- attaché à ce Pape , ce ne fut qu'avec UvaenAUe-
pcine qu'il le fuivit dans ion voyage d'Allemagne ( u ). Il fe ™*S"''-
trouva à Vormcs (x) dans le tems de la Diète ou Àflemblée
des Prélats &
des Seigneurs , que l'Empereur Henri tint en
cette Ville l'an 1048. Brunon qui y fut élu Pape fous le nom
de Léon IX , invita Hildebrand à retourner à Rome avec
lui. Il l'ordonna Soûdiacrc
(^ ) , &
le chargea du gouverne-
ment de l'Abbaye de Saint Paul , à la place d'Airard nom-
mé à l'Evêché de Nantes. Ce Monaflcre étoit tombé en dé-
'Cadence , les biens en étoient aliénés ; la diicipline réguliè-
re n'y étoit plus en vigueur. Hildebrand la rétablit, fit ren-
trer les biens , releva les bâtimens, y remit le bon ordre.
III. Après la mort de Léon IX , les Romains députèrent ri fait élire

PapelEvéque
- . . . mimn d'EicIiQet en
1055.
(r) Ma BILL. Lib, î8. Annal, num. 6i. («) Aprid Maiaion , itiJ.
/I.4ÇS. (v) WlBFRT. in vita Léon. PacI ,itJ an.
(s) IbiJ.pag.^;?. lo49.p. T78.
(t) Orderic. Vital. lib.i^.f .61^, ^10/, (;) Mabulom , lit. î9. Annal, n. 58.

Hhhhij
612 GREGOIRE
VIî,
Hildebrand à l'Empereur Henri (z) , avec charge d'élire
en Allemagne , au nom du Clergé 8c du peuple de Rome ,
celui qui lui paroîtroit digne de remplir le Saint Siège. L'é-
leâion fe fît à Maycnce , où le Député la détermina en faveur
deGebchard , Evêque d'Eichftec , proche parent de l'Empe-
reur. Ce Prince qui aimoit Gebehard , & fc fcrvoit de fes
confeils , demanda que l'on en choisît un autre mais Hil- :

debrand demeura inflexible à cet égard. Il emmena l'Elu


à Rome , où il fut reçu avec grand honneur , & nommé Vi-
ûor II. Son facre fe fit le Jeudi-Saint , qui , en 105 5 , étoit le
13 d'Avril.
Tieftenvoyé IV. La mcme année , Hildebrand fut envoyé Légat en
LégatenFran-pi-ance, pour réprimer la fimonie. Etant à Lyon («) , il y
ce en loj;.
gffçj^y^ ^^ Concile le premier jour on accufa un Évêque
:

d'être entré dans fon Siège par (imonie. La procédure n'ayant


pu être achevée avant la nuit , l'affaire fut remife au lende-
main : ce qui donna le loifir à l'accufé de gagner par argent
les accufateurs &
les témoins. Il fe préfcnta donc à la fécon-
de fefiion , demandant avec fierté , où étoient fes accufateurs:
aucuns ne comparurent. Tous les afliftans demeurant en fi-
lence , le Légat dit à l'Evêque accufé Croyez -vous que le :

Saint-Efprit loit de même lubftance que le Père le Fils? &


Je le crois , répondit l'Evêque. Hildebrand ajouta , dites :
Gloria Fatri , Filio & , & Spiritui Sanâîo, L'Evêque répéta :
Gloria Patri , Ù" Filio mais il ne put nommer le Saint-Ef-
,

prit , quoiqu'il l'eflayât par trois fois. Alors fe jettant aux


pieds du Légat , il avoua fon crime , & fut dépofé de l'Epif-
copat auffi-tôt il prononça d'une voix claire
: diftinde les &
trois Perfonnes divines dénommées dans cette doxologie.
Pierre Damien (l) dit avoir appris ce fait d'Hildebrand mê-
me. Il tint enfuire un Concile à Tours , avec Gérard aufli
Légat du Saint Siège. Berenger s'y rendit ( t ) : on lui donna
la liberté de défendre fon fentiment mais ne l'ofant faire > :,

il protefla avec icrmcnt , qu'il croiroit dans la fuite , avec

l'Eglife , la vérité du Corps & du Sang de Jefus-Chrift dans


l'Euchariftie.

( X ) Ll<vt)y?«Vn/. I.lh. 1. tap. 90. tf (c ) Anouym. Cbiffetian. èi multiplhi


VkCl ,aJ an. IoVV> "'<">• I. damnât. Bettngar, Piel , »d an» 1.055.
(a) Gregor. VU. vita , iium. x6. 17. Hum, f.
(i) Opnfc. 16. cnp. (,
1

PAPE. Ch. XXXVII. 6n


V. En 1057, Arialde, Diacre de l'Eglife de Milan , s'é- "ejfj^^y*
leva avec force contre les (îmonîa<ques, particulièrement con-^^^^^^'j^''"
tre TArchevcque Gui. Les Clercs coupables du même crime,
prirent le parti de leur Evcque les autres fe joignirent à A-
:

rialde , avec quelques-uns des principaux de la Ville; ce qui


forma un fchifme fâcheux en cette Viîle. Le Pape Etienne IX
voulant le diflipcr , y envoya deux Légats , Anfelme, Evêque
de Luqucs & le Soûdiacre Hildebrand mais ce fchiimene fut
, :

pas éteint li-tôt : il duroic encore en 1067 , fous le Pontificat


d'Alexandre IL
VI. Cependant le Pape Etienne envoya Hildebrand vers iieftdéputc-en
l'Impératrice Agnès , pour des affaires importantes & ^y^^^'f^k^hlut^l. ,

aflemblé les Evcques , le Clergé & le peuple Romain (<^) , ilpe lEvcque ,

Florence
leur défendit, au cas qu'il vînt à mourir pendant Tabience'^e
de ce Légat , de procéder a une élection juiqu a ion retour ,
afin de prendre là - defTus fes avis. Cette précaution de la
part du Pape , qui a été remarquée par Lambert de Scbaf-
nabourg , Ecrivain contemporain , & par Léon d'Oftie , fait
voir le crédit d'Hildebrand dans la Cour de Rome , & com-
bien fa fagefle & les lumières l'y faifoient coniidérer. Etien-
ne IX mourut quelque tems après, c'eft-à-dire, le 2p de
Mars 1058. Auffi-tot quelques Romains gagnés par argent
élurent Jean , Evêque de Veletri. à qui ils donnèrent le nom
de Benoit. Hildebrand apprenant à fon retour d'Allemagne,
que l'on avoit fait une éle£lion , contre la défenfe du Pape
Etienne , écrivit de Florence ( f ) , aux Romains qu'il fçavoit
être les mieux intentionnés ; & ayant reçu d'eux un pouvoir
illimité , il élut Pape , Gérard , Evêque de Florence , que
l'on nomma Nicolas II. Cette éle£lion fut contertée pendant
3uelque tems ; mais enfin elle eut lieu , 8c Jean de Veletri fut
épofé de l'Epifcopat.
VII. Jufques-là Hildebrand n'étoit que Soûdiacre. Nice- Il eft fait Ar-
ias II le fit Diacre , & l'éleva en 1059 , à la dignité d'Archi- ^]'J'^'^"fiefen
diacre (/). Deux ans après, Alexandre II lui donna le titre lo;?. loCi.
de Chancelier de l'Eglife Romaine. La dignité d'Archidia-
cre lui donnoic rang parmi les Cardinaux (g ). Il y eut en

(</ j PAgi «Jan. loy8.«. I. ir. 1 (g) AKi^VLP.Lib.^, (ap. i. ?aci , ad


(r) Ihid. tium. y, \an. 107Z. ». 10. 1 1 1..

if)?AGi, ad ad, lo<)9,n. II. ij. l


,,

61^ GREGOIRE VII,


1072, une conteftation à Milan , au fujet de l'éleiftlon d'un
Archevêque. Les uns choifirenc Atton ; les autres Godefroi.
Hildebrand fit confirmer celle d'Atton par le Pape, & re-
jetterGodefroi. Dans le Concile qui fe tint à Rome , au
mois d'Avril de l'an 105^ , fous le Pape Nicolas II , Hilde-
brand fit examiner la Règle des Chanoines Réguliers (h) , &
propofa beaucoup dechofes pour rendre leur genre de vie plus
parfait.
Il eft

en 1073.
élu Pape
VIII. Amort d'Alexandre II , arrivée au mois d'Avril
la
de l'an l'Archidiacre Hildebrand fut élu Pape du con-
1073 ,

fentement des Cardinaux , de tout le Clergé , des Abbés &


des Moines qui étoient préfens , & aux acclamations d'un
peuple nombreux des deux fexes. L'acte de fon éle£tion por-
te ( i) , qu'elle fe fit dansl'Eglife de Saint Pierre-aux- Liens
le deuxième des calendes de Mai , indièlion onzième , c'eft-
à-dire, le 22 Avril 1073. Il prit le nom de Grégoire VII,
& fut intronifé revêtu , félon la coutume ( / ) , d'une chappe
rouge , ayanr en tête la mitre papale mais il ne fut facré que -,

le vingt-ncuviéme de Juin ; parce qu'il voulut donner aupa-


ravant, avis de fon éledion au Roi Henri & c'eft le der- :

nier des Papes qui ait obfervé cet uiage (?n). Le Roi conlen-
tit à l'éleâion , & envoya aufTi-tôt Grégoire , Evêque de Ver-

cei! , pour la confirmer de fa part & alTilter à la confécration de


l'Elu.
Sa Lettre IX. Le lendemain de fon élection , Grégoire VII écrivit
l'Abbé de
, Abbé de Mont-Caffln , que de concert avec les
à Didier
Motu-Caflln
à Guibert 'de Cardinaux , il avoit indiqué un jeûne de trois jours, des pro-
Ravenne à cclTions , dcs pricrcs & des aumônes pour fe préparer à l'é-
;

le tcms même que l'on enterroit


deTofcàne!"^ leftion («) ; mais que dans
le Pape Alexandre dans l'EgUie du Sauveur, tous s'étoient
jctrés fur lui , comme des inlenfcs, pour le faire Pape. Il in-
vite l'Abbé à le venir trouver au plutôt , pour l'aider de fes
confeils. Il lalue , dans cette Lettre , l'Impératrice Agnes ,
qui étoit à Mont-CafTin depuis quelque tems, & qui y paffii
fix mois, (jrégoire écrivit aulfi fur fon élcdion , à Guibert
Archevêque de Ravcnne ,
procédant qu'on lui avoit fait vio-

(h) MaBILL. in Jipperid. Tom. 4, Annal. ( l )Cb'NTius, Camtr.tr, in lit. Ccnfaal.


p^ 748. C5 PaGI ad an. 1073, t:. J, 6,
,

( / ) Grbgor. vit. Vitti , num. 17. l'ijg. (;») IJem. ïbid.


41 5. Tom. p. Ailor, hiabitl. («) Efifl. i.lii. I.
PAPE. Ch. XXXVII. 615
lence pour le placer fur le Saint Siège ( ). Il témoigne , dans
fa réponfe à Godefroi , Duc de Tolcane ( p ) , qui l'a voit fé-
licité fur fon élévation , qu'elle eft pour lui un fujet de triltcfTe

& de crainte , par la confidération des difficultés iniéparables


du gouvernement de l'Eglife univcriellc , où un grand nom-
bre de Prélats travaillent plutôt à la troubler qu'à la défen-
dre ; entièrement occupés à fatisfaire leur avarice leur ambi- &
tion; &
toujours oppofés à ce qui regarde la Religion. Il a-
joute , , Roi d'Allemagne: Nous avons
à l'égard de Henri
réfoiu de lui envoyer des Nonces à la première commodité ,
de l'avertir paternellement de ce qui concerne l'utilité de l'E-
glife & l'honneur de la Couronne. S'il nous écoute, nous au-
rons autant de joie de fon falut que du nôtre : H , ce qu'à
Dieu ne plaife , il nous rend la haine pour l'amitié , nous ne
voulons pas nous attirer cette menace Maudit celui qui rîen-
:

^"""•'^^* '*•
fanglante pas fon épée : car il ne nous eft pas libre de préférer
à la Loi de Dieu , la faveur de qui que ce foit. Pour entendre
ce que dit ici le Pape (q) , il faut remarquer que le Roi Henri
IV vivoit , depuis quelques années , d'une manière déréglée,
qu'il avoit deux ou trois concubines à la fois ; qu'il faifoit mou-
rir les maris dont les femmes lui plaifoient ; & qu'ayant épou-
fé Berthe , fille d'Ochon , Marquis d'Italie , il fit tout ce qui
dépendoit de lui pour la répudier.
X. Des le commencement de fon Pontificat , Grégoire VII 9'^ë°'''l^'^j
penfa à introduire l'Office Romain en Efpagne , au lieu du Âce Romain
Gothique, ou de faint Ifidore, qui y étoit en ufage. Il en- enEfpagne.
voya à cet effet le Cardinal Hugues-le-Blanc , en qualité de
Légat , qu'il chargea d'une Lettre pour Girald (r) , Evêque
d'Oftie, & Raimbald, Soudiacre de l'Eglife Romaine, Lé-
gat en France , par laquelle le Pape les prioit de réconcilier
Hugues avec l'Abbé de Cluni , & de demander à celui-ci
quelques-uns de fes Moines , pour l'accompagner dans fa Lé-
gation d'Efpagne. Le Cardinal étant arrivé en Arragon , oii
le Roi Sanche-Ramire régnoit , affcmbla les Evoques à Saint
Jean de Penna , & leur fie tellement goûter le projet du Pape,
que l'Office R.omain fut reçu en Efpagne la même année, ou

(0) Epi/t, j.
I
Hfrman. Chtoti.p. (o^.
(p)Epift.s. {r)Lil;.i.Epj!.6.
(y) Hift. belii Saxou. p lea. CJCoRN- j
6\e GREGOIRE VII,
au commencement de Sanche-le-Grand
la fuivance 1074 (x).
l'avoir déjà introduiten quelques endroits de les Etats ( t ) :
on s'en fervoit déjà à Saint Jean de Penna; & ce fut appa-
remment ce qui engagea le Légat à tenir fon Concile en ce
lieu.
SaLertreau XI. Ebles , Comtc de Rouci en Champagne, fe difpofoit
à paffer en Ei'pagne , enfuite d'une convention faite avec A-
^°f 'Jn^^°"'
lexandre II , à laquelle Hildebrand a voit accédé ,
portant
qu'il jouiroit de fes conquêtes fur les Infidèles , moyennant
certaines conditions exprimées dans le traité , relatives aux
• droits que l'Eglife Romaine prétendoit fur l'Efpagne. Pour
favorifcr l'expédition du Comte , Grégoire VII lui donna
une Lettre pour les Seigneurs qui voudroicnt fe joindre à
lui («) , dans laquelle il les exhorte à faire payer équitable»

ment dans ce Royaume , les droits de faint Pierre & les ren- ,

voie au Cardinal le Blanc , qui vous expliquera , dit-il , nos


intentions. Le Pape fuppofe dans cette Lettre , comme un
fait certain , que le Royaume d'Efpagne appartenoit autre-
fois en propre à l'Eglife Romaine ; mais que depuis l'inva-
fion & la tyrannie des SarrafinSj fon droit, à cec égard ^étoic
tombé prefque dans l'oubli par le non ufage.
iiexcommu- XÏI. A s'en tenir à l'infcription de la Lettre de Grégoire
nie^Godefroi,
yj^ ( .T ) , à tous les fidclcs de Lomoardic , il fiiudroit dire
l'Eglife de Mi- qu'il aflembla un Concile nombreux deux jours après fon fa-
Jan, ^j-g ^ pour procéder contre Godefroi , ufurpateur de l'Eglife

de Milan mais il efl: vifible que ce Concile cft le cinquième


:

de Rome (y ) , fous Alexandre II , où en effet Godefroi fut


excommunié , & l'éledion d'Arhon déclarée canonique. Aufli
le Pape Grégoire ne dit point qu'il ait excommunié cet ufur-
pateur , mais feulement qu'il avoit été excommunié par TE»
glife, c'efl-à-dire , par Alexandre II. Ce ne fut que l'année
fiiivante 1074, que Grégoire aflembla fon premier Concile,
& qu'il y excommunia Godefroi. Avant d'en venir aux cen-
fures , il avoit écrit contre lui, comme coupable de fimonie,
à Béatrix , Comtefic de Toicane (:;),& à Marhilde fa fille;

(*) E/i(/?. 15. lib. I.


(t) Pagi, ail an. IO73. r.um. 8. fag. (> ) Paci , <!(/ an. 1073. «. 1 1. Il,
250. (t) £/>»/?, II. 12. 1;. ly. lû. 17. 18*
( m) T.r'i^. 7. iih. I. c; lih. 4. E/;«yî. lib.\.
28.
PAPE. Ch. XXXVÎI. 1^17
Z Guilliume, Evêquc de Payie; à Herlambaud Cotta, Chef
du parti Catholique contre les fimoniaques ; & à plufieurs au-
tres , pour les détourner de fecouru- Godcfroi, & de Icfavori-
ier en quoique ce fût.
XIII. L'Evêchc de Luqucs cnTofcane, fe trouvant va- Sacondui:«

•cant par la mort d'Alexandre II , qui lavoit gardé jufqu'à la Jnvefti'tures?


fin de fa vie, on élut Anfelme pour remplir ce Siège. Gré-
goire VII qui connoilToit fon mérite, le fit connoître à Béa-
xrix , Corateflc de Tofcane (a) mais il écrivit à Anlclme de
:

f\e point recevoir l'invcHiture de fon Evcché (b) , jufqu'à ce


x^ue ce Prince fut réconcilié avec le Saint Siège. Anfelme fe
yrc'fenta pour être ordonné par le Pape , fur la fin de l'an
107 3 .11 vint dans le tems même des Députés du Roi Henxi (c),
<]ui prièrent Grégoire VII de ne facrer ni Anfelme ni Hu-
gues , Eycque de Die , parce qu'ils n'avoient reçu ni l'un ni
l'autre Tinvelliture. Le Pape s'étant relâché en faveur d'An-
felme il fut ordonné après avoir reçu l'inveftiture par l'an-
,,

•neau & le Uîton paftoral (d) ; mais il en eut tant de fcrupule,


<ju'abandQnnant fon Evêché , il alla fe faire Moine à Cluni.
X-e pape l'obligea de retourner à fon Eglife , & le rétablit
dans fes fon«flions , après qu'il eût remis entre fes mains l'an-
neau & le bâton palloral qu'il avoit reçu du Roi. L'ordina-
tion de Hugues fut renvoyée à la première femaine de Ca-
xême de l'an 1074 (£) , cà caufe de l'oppolition du Roi. Le
Pape l'ordonna Prêtre le Samedi , & le lendemain Dimanche
:i} le facra Evêque ; puis il le renvoya à fon Evcché , avec une

Lettre à Guillaume,Comte de Die(/) , par laquelle il lui ordon-


Jioit de réparer les torts qu'il avoit faits à cette Eglife pendant
l'ahfejnce de J'Evêque.
XIV. Les excès que commettoit Philippe, Roi de Fran- ^" ^^"'"^/'."
ce ^ en fait de fimonie (_g-), excitoient le zcle de Grégoire VII Hppe, Roi : de
jnais il crut devoir le modérer , fur ce qu'un nommé Alberic, France.

Chambellan de ce Prince , étant venu à Rome en 1073 ,


l'aflura de la part de fon Maître , qu'il fe corrigeroit, L'E-
glife de Mâcon étoit alors vacante. Onchoiiit Landri pour

(a) LU. i.Epifl, n. (;) HcGO Tlavian. ad an. io74./>. ijjtf.

(*) Efifl. 21. )m. I. Bibliot. ttov.Labb,


(/)HiiGO Ti.tvian, ad an, 1074.^, t^6. (f)Epift. eçf.lib.i.
(i) Anselm. Vit* , Tdin. 5. Act, M.ibil

Tome XX, liii


6i8 GREGOIRE VII,
la remplir :Roi ne voulut pas lui accorder graaiite-
mais le
mcnt rifivcftiture. Le Pape employa la médiation de Roclen,
Evéque de Challon-fur-Saonc, ami du Koi, pour l'engager
à laiflcr pourvoir ielon les Canons , à l'Eglile de Mâcon &
ôc aux autres qui vicndroient à vaquer. Il difoit dans fa Let-
tre à Roclen ( ) Ou le Roi renoncera à la fimonie , ou les
/? :

François , frappes d'un anathême général , refuferont de lui


obéir , s'ils n'aiment mieux renoncer au Chriftianifme. En
même-tems il ordonna à Humbert , Archevêque de Lyon ,
de facrer Landri (?) , fans égard à l'oppcfition du Roi, ni
même au refus de Landri ; ajoutant qu'il pouvoit venir à Ro-
me, & qu'il l'ordonneroit lui-même. Landri prit le dernier
parti. Les deux Lettres du Pape font du 4 Décembre 1073,
On rapporte à la même année (/) , la fondation de l'Ordre
de Grammont , par Etienne iils du Vicomte de Tiers en Au-
vergne. La Bulle d'éredion efl du premier de Mai.
Lettres à l'E- XV. Au mois d'0£lobre fuivant , le Pape écrivit deux
véquedeCar-Lçf(.j.£5 ^^ Afrique; l'une aux habitans de Carthage; l'autre
thaee. ^ „ . .'/-ai ^
" J^ r
a Cyriac, qui en ctoit Archevêque. Quoique des le leptieme
• i • /

fiécle, les Sarrallns euflent renverfé les murs de cette Ville,


elle continua à être peuplée , & plufieurs de fes habitans
profeflbient la Religion Chrétienne. Ils accufcrent leur Evé-
que devant les Sarrafins , qui le dépouillèrent & le frappèrent
de verges comme un voleur. Grégoire VII en ayant été infor-
mé ( ?« ) , écrivit aux acculateurs , les menaçant d'excommu-
nication s'ils ne faifoient pénitence de leur faute. Il écrivit
aulTi à l'Evêque Cyriac , pour le conlolcr &• louer fa con-
fiance. Carthage obéiflbit alors à Tamimus , Roi de l'A-
frique Mineure, qui s'ctendoit depuis Tabarea jufqu'à Tri-
poli (»).
Concile de XVL Lc Papc fongeoit toujours aux moyens de faire re-
Romeemo74. ^^^jj. j^,
j^qJ }lcnx\ de fes défordrcs & le tenir bien uni à TE-
glife Romaine. Ce fut dans ce dcflein qu'il écrivit à Rodol-
fe , Duc de Suabc (0) , à Rainald , Evêque îde Come , à &
Brunon , Evêque de Vérone, quiavoient de l'accès à la Cour.
Il s'employa même à appaifer la Saxe révoltée contre ce Prin-

(m] Epifl, îi. ij. m, r,


(i) Foj/?.
i6.lib.i. (n) Pagi , aii an.107J. n. 1 J.
(/) l'iia Stephan. apud BellartJ. »i ditm (0) Epift, l^. zo, 14. ai, I.
9, lelmjr.fag. acj.
PAPE. Ch. XXXVII. ûic,
ce , &
promit d'envoyer des Nonces en Allemagne , pour
connoîtrc des caufes de cette divifion y remédier. En at- &
tendant ( />) , il écrivit à Vezel , Archevêque de Magdc-
bourg , au Marquis Dcdi , &
autres Seigneurs de Saxe , pour
les exhorter à une fufpcnnon d'armes , comme il y avoit ex-
horté le Roi , au nom des Apôtres laint Pierre & faint Paul.
Son defTein , avant d'envoyer fes Nonces , ctoit de tenir un
Concile à Rome , la première femaine de Carême en 1074,
II y appella les Evêques &
les Abbés de Lombardic , par
deux Lettres ( <;/) , dont l'une efl: adrcflee à Sicard , Arche-
vêque d'Aquilée ; l'autre aux Suffragans de l'Eglife de Mi-
lan ne pouvant écrire à l'Archevêque Godefroi , parce qu'il
',

étoit excommunié. Il donne pour motif de ce Concile (r),


l'ufage où l'on étoit depuis long- tems dans l'Eglife Romai-
ne, d'y en affcmbier un chaque année, (jrégoire \'II a don-
né lui-même le précis de celui-ci dans fa Lettre à Otton , E-
vêque de Conftance ( ^ ) j en ces termes Il ell ordonné 1°. :

que les Clercs qui feront parvenus à quelqu'un des Ordres


facrés par fimonie , feront privés à l'avenir de toute fondion
dans l'Eglife. a". Que ceux qui ont donné de l'argent pour
obtenir des Eglifcs , ne pourront les retenir , qu il ne fera &
permis à perfonne de vendre ni d'acheter les droits de l'E-
glife. 3°. Que tous ceux qui fe font rendus répréhenfibles par
leur incontinence , feront interdits de toute fondion cléricale.
4°. Que le peuple n'alTiftera point aux Offices des Clercs qu'il
faura méprifer les Conflitutions Apoftoliques.
XVII. Apres que ces Décrets eurent été publiés par toute
"^^
l'Italie (f) , le Pape manda à plufieurs Evêques des Gaules , ç.^n|.i5e.''^
de les faire obfcrver dans leurs Eglifes , d'obliger, fous &
peine d'anathême , les Clercs coiicubinaires à fe Icparer de
leurs femmes mais la fadion de ces incontinens s'éleva avec
:

de grands murmures contre Grégoire VII , l'appellant héré-


tique , &
proteflant qu'ils quitteroient plutôt le Sacerdoce que
leurs femmes. Sigebert de Gemblours (k) , Ecrivain très-
attaché au parti du Roi Henri IV , cria comme les autres
contre le Décret du Concile , prétendit qu'en défendant&

(p) Ibià. Epifl. 39. çj? Lambert. nJ a?i. 1 (5^ Tim. 10. Conc. p. 313.

(^) Etifi. ^z. I («) Lambert. Schaïkab. ad an.


(r) £/>«;?. 4J. •
1074- f- 378. 37i'-

liii ij
,

6io G RE GO IR E VIT,
aux Clercs la célébration des Offices divins
{jx) , aux peuples &
d'y aiïîfter , i! avoir contrevenu inconfidérémcnt aux Décrets
des faints Pères , qui ont cnfeigné que les Sacremens de Ba-
tême de Confirmation & d'Euchariflie , adminiflrés dans
,

l'Eglife par de mauvais Miniftres , font auffi valides que s'ils


étoient adminiflrés par de faints Prêtres , parce que c'efl: le
Saint-Efprit qui opère intérieurement l'effet des Sacremens t
mais ce Chronoîogifle a mal pris le fens des paroles du Con-
cile & du Pape. Ils ne difent point que les Sacremens admi-
niftrés par des Prêtres maries ou concubinaires font nuls ;
ils fc contentent de défendre aux peuples d'afiiRer à leurs

McfTes, afin que ce mépris du peuple les engageât à vivre


dans la continence. C'cfl: la raifon que Grégoire VII en
donne lui-même dans fa Lettre à l'Evêque Otton (y). Un
Ecrivain anonyme , mais conremporain , a fait l'apologie du
Pape &
de fon Décret. Son Ouvrage fe trouve dans le dixiè-
me Tome des Conciles {%).
Lettres pcn- XVIII. Pendant la tenue de celui de Rome , Grégoire
d-ifît le Conci-
le Ù2 Rome. VII écrivit à Arnauld, Abbé de Saint Severe («) , pour lui
faire des reproches de ce qu'il ne s'y étoit pas rendu & lui ,

annoncer qu'on avoir confirmé la Sentence portée contre lui


pour n'avoir pas encore reftitué ce qu'il avoir enlevé au Mo-
naftere de Sainte Croix. Il écrivit auffi à Manaffé (&), Arche-
vêque de Reims , fur le choix qu'il avoit fait d'un Abbé pour
l'Aobaye de Saint Rémi. C'étoit Arnoul , quigouvernoit dé-
jà une Abbaye cà Metz mais ne pouvant en gouverner deux
:

à la fois , il pria le Pape de pourvoir à celle de Saint Rémi :

c'efl: le fujet de la Lettre à Heriman , Evêque de Metz ( c ),

Celle qui eft adreflTée aux Chanoines de Saint Hilaire ( d) ,


efl: pour leur faire connoitrc qu'il avoit été décidé dans le

Concile , qu'ils continucroient à recevoir dans leur Eglifc les


Chanoines de la Cathédrale de Poitiers, lorfqu'ils y vicn-
droient en Proceffion le jour de la Fête de faint Hilaire &
de tous les Saints ; 8z qu'il feroit permis à l'Evêque , s'il étoit
préfent, finon au Doyen ou à quelqu'un des anciens, d'y cé-
lébrer la Meffe. Ces Chanoines avoient envoyé des Députés

(.v) Sk'.ebert. ifl Chron. aJ an, 1074. n')Ep!ll. 51.


[y] \om. ic. Conc.p. 3 kJ. (c'jEFijl.Si.
P A P E. Ch. XXXVI î. 521
.ltl Concile ,
pour la dcfcnfc de leur caufc. Le Pape en adrefla
une aux Suffragans de TEglifc d'Aufch , pour les obliger
d'obéir à leur Archevêque (/) , lelon cme le Légat Girald le
leur avoir ordonné. Philippe Roi de France (g ) , avoir de-
,

mandé au Pape l'abfolution de l'Evcque de Challon Gré- :

goire VII y confentit à condition que l'Evcque vicndroit à


Rome finir fon différend avec fon Eglife. Il ordonna auiïi à
Guillaume, Evc^ue de Pavie (h) , de venir à Rome avec le
Marquis Azon, qu'on avoir accufé dans le Concile, d'avoir
commis un inccfle avec la iœur de cet Evêquc. L'accuiation
formée contre Azon n'cmpcchoit pas le Pape de l'honorer de
fa confiance, puifqu'il écrivit à Geifa (i ) , Duc des Hon-
grois , de lui faire connoître fes volontés par ce Seigneur.

On lut dans le Concile (/) , les Lettres de Guillaume, Evc-


que de Bcauvais,par lefquellcs il prioit le Pape de lever l'ex-
communication encourue par le Clergé 8c le peuple de cette
Ville , pour l'avoir maltraité ; fa demande lui fut accordée :

mais on y confirma l'excommunication portée par les Lé-


gats Girald , Evêque d'Oftie (m) , Se Rcmbald , contre Mu-
nion fimoniaque qui avoit ulurpé TEvcché d'Occa fur Si-
_,

méon légitime poifelfeur.


XIX. Il fe trouva en ce Concile , des Evcques d'Efpagne, Antrestet-
qui, conformément à ce qu'on avoit décidé («) j promirent "^^ dum^œe

par écrit de quitter l'Office en ufage dans leur Eglife , pour


prendre le Romain. Ce fut une raiion au Pape d'exhorter
Alphonfe, Roi de Caftille, & Sanche, Roi d'Arragon , de
le faire recevoir aulTi dans leurs Etats. Il y en ajoute une au-
tre ; fçavoir , que les Eglifes d'Efpagne a voient reçu la foi
premièrement de faint Paul , enfuite de Icpr Evcques envoyés
de Rome par faint Pierre & faint Paul , &. qu'elles s'étoient
conformées au Rit Romain dans la célébration de l'Office
divin, jufqu'au tems que les Prifcillianiftes , les Ariens & les
Goths les infe£terent de leurs erreurs. On excommunia dans le
même Concile ( o ) , Robert Guilchard , Duc de Pouille , de
Calabre & de Sicile, avec tous fes adhérans , pour être cn-

{g)Epil1.r6' lu.
(Ij) Eptji. 17. («) h'pifî. 6^.
I
(«) f;>;/?. 58. I (c) Tcw. 10, Cow. pflf . y 4i.
6^^ GRÉGOIRE VI I,
très dans k Campanie , &
avoir quelques terres de TEglife.
Les Chanoines de Luques y furent cités (p ) , pour rendre
raifon des mauvais traitemens qu'ils avoient faits à Anfelme
leur Evêque. Ceux qui fe trouvèrent coupables furent punis
félon les Canons. Enfin on y lut les Lettres de Geifa (e), Duc
des Hongrois , par lefquellesce Prince témoignoit Ion attache-
ment & fon relpett envers le Saint Siège. Le Pape de Ion côté
lui promit fon amitié & fa protedlion.
RctabiiiTe XX. L'Evcchc d'Olmuts en Moravie (^) , uni depuis
°^^"j,Qj|j^^'^^*long-tems à celui de Prague, en fut diflrait du confentement
de l'Evcque Severc , à la prière de "Wratiflas ; on y mit un
Evêque nommé Jean. Severe mourut , "Wratiflas devint &
Duc de Bohême. Il avoit trois frères , Conrad , Otton & Ja-
romir. Les deux premiers ayant appris la mort de Severe ,
demandèrent l'Evêché de Prague pour Jaromir. \<'ratiflas
qui en connoiffoit l'incapacité , le refufa , & nomma pour
remplir le Siège vacant , le Prévôt de Litomerie , fon ancien
Chapelain. Les Seigneurs de Bohême s'y oppoferent , à la
folUcitation de Conrad & d'Otton ; & Wratiflas fut contraint
de confentir à l'éleftion de Jaromir , qui , avec l'agrément
du Roi Henri , fe fit facrer à Mayence par l'Archevêque fon
Métropolitain. Jaromir nommé Gérard â fon Ordination (y),
fe voyant en poflefllon de l'Evêché de Prague , entreprit de
faire calTer la défunion de l'Evêché d'Olmuts. Wratiflas le
foutint. Ils envoyèrent l'un & l'autre des Députes au Pape
Alexandre II quoique l'affaire eût été finie fous fon Ponti-
:

ficat , comme le difcnt les Hifl:oriens de Bohême ; foit qu'elle


eût recommencé fous celui de Grégoire VII , il efl certain
qu'il envoya en 1073 , deux Légats en Bohême pour le mê-
me fujct ; Bernard & Grégoire. L'Annalifle Saxon n'en met
qu'un (f), qu'il nomme Rodolphe , le même que les autres
Hiftoriens difent avoir été envoyé par Alexandre II mais il :

ell: plus sûr de s'en rapporter aux Lettres de Grégoire VII ,

qui mettent les deux que nous venons de nommer (^') Gérard
refufa de fe foumcttre aux Légats ils prononcèrent contre
:

lui une fufpcnfe , & s'en retournèrent fans avoir pu terminer

4SS.
(y) ibii. (0 un. P. ri?.
CO Dl'BRAt', lib.
J./». JJ.
( j) :'.mtti. Saxi y ad an, 1068. f<i^i
P A
P É. Ch. XXXVII. 6ii
Leur fentence fut confirmée par le Pape en 1073 :
l'affaire.
mais l'année iuivante , il rétablit l'Evêque de Prague dans
les fondions , mais non dans fcs revenus (x). Il lui défendit
aufTi de toucher aux biens de l'Evêché d'Olmuts , & lui or-
donna de venir à Rome avec l'Evêque Jean , pour le Diman-
che des Rameaux. Cependant Sigefroi , Archevêque de
Maycnce , prit connoiffance du différend entre ces deux E«
vêqucs en cjualité de leur Métropolitain. Le Pape le trouva
,

mauvais (y) ,8c lui défendit de fe mêler d'une affaire portée


déjà plus d'une fois au Saint Siège. Gérard fe rendit à Rome,
où s'étant juftiiié des reproches formés contre lui , il fut ré-
tabli dans tous fes droits (z), à l'exception des revenus de l'E-
vêché d'Olmuts , dont il donna la provifion à l'Evêque Jean
quoique abfent remettant le Jugement définitif de cette diffi-
,

culté au prochain Concile. Il le plaignit dans la fuite , que Gé-


rard ne lui avoir pas tenu parole , & qu'il ne vivoit pas en paix
avec le Duc Wratiilas (û).
XXI. Les Légats que Grégoire VII s'étoit propofé d'en- Concîle d'Er-
voyer en Allemagne pour en pacifier les troubles, y arrive- ^'*''*^" '°''4-
rent vers le mois de Mai de l'année 1074 , avec l'Impéra-
trice Agnès. Ils demanderenc la tenue d'un Concile; les E-
vêques s'y oppoferent , déclarant qu'ils n'accorderoient à per-
fonne qu'au Pape , la prérogative de préfider à leur Affem-
blée. Le Roi au contraire fouhaitoit que l'on en tînt un fon :

fentiment prévalut. On l'affembla à Erford au mois d'Odlo-


bre de l'an 1074. L'Archevêque de Mayence , nommé Si-
gefroi (è), y preffa plus vivement qu'il n'avoit fait jufques-Ià
,
l'exécution du Décret contre les Prêtres mariés ou concubi-
naires , & voulut les obliger , ou à renoncer fur le champ à
leurs femmes , ou à quitter le fervice de l'autel. Ils alléguè-
rent plufieurs raifons pour éluder fes infiances annuller le &
Décret mais voyant qu'ils ne gagnoient rien ,
: que Sige- &
du Saint Siège , ils for-
froi leur oppofoit toujours l'autorité
cirent du Concile de n'y plus rentrer. Quelques-uns
, rék lus
changeant de fentiment , opinèrent à y rentrer à 'mettre à &
mort l'Archevêque avant qu'il prononçât contre eux^ afin que

(y) Epiji. sç- éo- 6i.


I
(i) Lambert. ScHAFwAE. «Il/ 1ÎW.I074.
,

^24 GREGOIREVH,
cet exemple jcctâc la terreur dans tous ceux qui voud^-oleni
à l'avenir contraindre les Clercs à garder la continence. A-
vcrti de leur delTein , il les fit rappeller , & prenant la voie
de doucetir , il leur promit de faire Ion poflTible auprès dy
Pape , pour lui faire modérer la rigueur de ion Décret. Le
lendemain (c) FArchcvêque ayant admis à fon audience in-
diflin£tenient les laïcs &
les Clercs , fe plaignit que contrai-
rement au Gerfting quelque tems auparavant,
traité fait à
les Thuringiens ncgligeoient de payer les décimes. Le Pré-
lat ne faifoit pas réflexion que la répétition des décimes avoic
occaiionné de grands maux à la république. Les Thuringiens
fiers des viôtoires qu'ils venoient de remporter fur le Roi , ne
s'étoicnt point imaginés qu'on oferoit jamais les inquiéter fyjr
ce fujet. lis furent indignes des plaintes de Sigefroi , &
voyant qu'il n'avoit aucun égard aux paifibles rcniontrances
jqu ils lui firent d'abord fur le traité de Gerlling , ils forti*
.1 rent en furie , &
s'érant fait accompagner de gens a/més
ils rentrèrent dans le Concile dans le deffein d'afTommer TAr-

chevêque fes vaffaux le fecoururent. D'Erford il paffa à


:

Hclengflat , où pendant le refte de l'année , il fit publier tous


ks jours de Fête à la Meffe , un ban pour exciter à pénitence
ceux qui avoient troublé le Concile (d).
LeKresduPa- XXII. 'Lcs tcntativcs d'Altman, Evêque de Paflau , pour
pefurrincon-f^jj-g valoir le Décret du Concile de Rome
, n'eurent pas uï\

•Clercs. P^us hcurcux lucccs il n'étoit guercs poflible que ni lui ni


:;

l'Archevêque de Mayence, réuiTilfent dans cette commiJFion,


puiiqu'ils témoignoicnt l'un &
l'autre , qu'ils ne s'en acquit-
coient qu'avec peine &: uniquement pour obéir aux ordres du
Pape. Grégoire Vil s'en plaignit à rArcheyêque de Mayen-
ce (e) , &lui ordonna de le trouver au Concile de Rornc la.
première fcmaine de Carême de Fan 1075., avec tous ,(cs
Suffragans^ ou d'y envoyer du moins des Députes. Il y ap-
pella auITi Liemar, Arxihevcque de Brème (/) ; & parce qu'il
n'étoit point venu à Rome au jour qu'il avoir été cité , c'efl:-
à-dire , à la Saint André, le Pape le lulpcnJit de toute fon-
âion Epilcopalc. Il avoit fourni à Grégoire une autre railon
de mécontentement , en empêchant Albert de Prœnefte Se

(c) Uem.il/iil. |
(e) Fpifl. li). lit, t.
{i) UU. p^^. lio, \ (f)Epip.tS.
Giraid
,

P AP
E. Ch. XXXVIT. 62'i
Girald d'Oftîe de tenir un Concile. Le Pape n'étoit pas
,

plus fatisfait de la condu te d'Otton de Confiance. Ilavoit


envoyé à cet Evcque (g) les Ades du premier Concile de
Rome , avec le Décret contre les concubinaires. Otton ne le
mit point en peine de le faire exécuter. Il laiiTa vivre les
Clercs de Ton Dioccfe dans leurs anciens dcfordrcs ; permit
à ceux qui n'avoient point de femmes d'en prendre. Ce mé->'
pris formel des Décrets Apoftoliques lui attira de vifs repro-
ches de la part de Grégoire VII ( ^ ) , un ordre de fe &
trouver au Concile indiqué pour la première fcmaine de Ca-
rême. En mcme-tcms le Pape écrivit au Clergé & au peu-
ple de Confiance (/) , de ne rendre aucune obéiffance à leur
Evêque , tant qu'il pcrfévéreroit dans fon endurciffement.
Otton refufa de venir au Concile ; fa défobéiffance fut punie
d'excommunication ( /). Il mourut à Bafle fans avoir étéab-
fous. Rodolphe , Duc de Suabc , Se Berthold , Duc de Ca-
rinthie , étoient zélés pour le bon ordre. Grcgcire VII leur
écrivit l'onzième de Janvier iC'75 , d'empêcher autant qu'il
leur feroit pofTible , les Clercs limoniaqucs ou incontinens de
fcrvir aux faints Myftcres , & d'employer même , s'il étoit be-
foin , la force du bras féculicr.
XXIII. Quelques jours auparavant , c'eft-à-dire , au mois Lettres ;

^' "^""'
de Décembre de l'année précédente , il écrivit deux Lettres
au Roi Henri dans Tune (m) , il le remercie du bon accueil
:

qu'il avoir fait à les I ,égats ; l'aflure qu'il faifoit mémoire de


lui à la Mefle , 'fur les corps des faints Apôtres ; & le prie
d'obliger les Evêques de la Province de Mayence de venir
au Concile. Il lui donne avis dans l'autre (n) , des pcrfécu-
tions que les Chrétiens d'outre-mer fouflfroient de la part des
Payens ; & des dilpofitions où étoient les Italiens & les UI-
tramontains de les aller fccourir , rélolus de marcher à mains
armées contre les ennemis de Dieu , & d'aller jufqu'au Sé-
pulcre de Notre Seigneur. Ils veulent , dit-il , m'avoir pour
Chef de cette expédition ; ce qui m'y excite puifiamment
c'eft que l'Eglife de Conflantinople divifée d'avec nous au
fujet de la proceflion du Saint -Efprit , demande à fe réunir

ig)VftnG>e^,,ium. ^6,p.i^^o,um. 9.i (/) ?aç,i , nd a». 1074. n. 1 j-, MaMic.


Afior.Mabilhn. j Ton). 9. Âilor. p. i^ia.
(*) ïl'iJ- I (»») Lib. î. Epift, •,3.

( «) Ibid. p. 41Z. 1 («) Epij}. 5 1.

Tome XX, Kkkk


626 GREGOIRE VIT,
au Saint Siège. Prefque tous les Arméniens font écartés de Li
foi Catholiique, &
prefque tous les Orientaux attendent que
la foi de faint Pierre décide entre leurs diverfes opinions.
Nos pères ont fouvent paffé en ces pays-là pour confirmer la
foi : nous fommes auiïi obligés d'y aller li Dieu nous^en ouvre
le chemin. Un fi grand deftein ne peut s'exécuter fans votre
confeil & votre fecours vous demande l'un Se l'autre Ci je
; je :

fais ce voyage ,
je , après Dieu , TEglifc Romaine
vous îaiffe

pour la défendre comme votre Mère. Voilà le projet de la


Croifade qui ne s'exécuta que vingt ans après (o).
lettreàTEm- XXIV. On croit que la Lettre que le Pape reçut au com^
pereurMichel. menccment de fon Pontificat, de la part de l'hlmpereur Mi-

chel , avoir rapport à cette guerre. Ce n'étoit qu'une Lettre


de créance , fur ce que les porteurs dévoient dire de vive
voix. Grégoire VII envoya fa réponfe par Dominique , Pa-
triarche de Venife (p) j à qui il confia ce qu'il devoit dire
aulTi de vive voix à ce Prince. Les revenus du Patriarche de
Venife croient fi modiques, qu'ils auroient à peine fuffi à un
fimple Evêchc. Le Pape voyant que la dignité de Patriarche
en étoit avilie (q) , exhorta les Vénitiens à la relever , en
augmentant les biens temporels de celui qui la polTédoit. Sa
Lettre à Guillaume ^ Comte de Bourgogne , a aulfi du rapport
au projet de la Croifade , de même que celles qu il écrivit en
général à tous ceux qui voudroient défendre la foi Chrétien'-
ne (r) , & à tous les fidèles de faint Pierre (s).
icttresauxE- XXV. Le Roi Philippe occafionnoit en France toutes for-
vcquesdeFran-
g j défordres par la foiblclTe de fon pouvernemcnt , &
du Roi Phi- par la dépravation de les mœurs. Le Pape s en prit aux Eva-
î^ppe»
ques du Royaume ( f ) , les accufant de fomenter les Crimes
de ce Prince , dès-là qu'ils n'y réfiftoient pas avec la vigueur
Epifcopale. Il leur ordonne de s'aflemblcr ; & par une délir-
bération commune, de prendre les moyens d'engager ce Prin-
ce à rétablir la jufticc dans les Etats , & les bonnes mœurs ,
en réformant les fiennes. Il veut , qu'en cas d'incorrigibili-
rc , ils le menacent des cenfures Apoftoliques ; qu'ils fe fé-
parent de fa communion ; qu'ils interdifent par toute la Fran*

( ) Flei:ri , Hijî. EuUf.Lii. 6i. f. I (r) Ub. I . Epifi. 49.

(p) Lib. I. Epift. 1 8. I (1} Lit, z. E^'lU f. jr.

(uj Lib,
i.Epijl. 3ji^ »
PAPE. Ch. XXXVII. <Î27
£€'Ia céldbration publique de l'Office divin ; les menace &
,eux-mcmcs de privation des foniSlions Epifcopalcs , s'ils agif-
fenc foiblcmcnc en cette occafion. Le Pape écrivit encore à
Guillaume , Comte de Poitiers («) , de fe joindre aux autres
Seigneurs de France , pour obliger le Roi à fe corriger , &
empêcher les violences qui fe commettoicnc dans fon Royau-
me contre les Commerçans étrangers. quoi il ajoute , que A
s'il continue dans fes dércglemens , il le féparera de la com-

munion de l'Eglile , dans le prochain Concile de Rome j &


lous ceux qui lui rendront honneur ^béiffance. Toutes ces&
Lettres furent fans effet.
XXVI. Il y en a deux de Grégoire VII à Suénon , Ro» 5;Dan^"i^"
^""«™^c
de Dannemarc ; l'une du 2Ç Janvier 1075 ; l'autre du 17
xl'Avril. Le Pape ignoroit fans doute la mort de ce Prince ,
arrivée l'année précédente. Il lui faifoit (x) , dans toutes les
deux , des offres pour rétablilfcment d'une Métropole , que
Suénon avoir demande à Alexandre II mais dans la prc- :

Tniere , il le prioit de lui marquer quelle quantité de troupes


l'Eglife Romaine pourroit efpérer de lui , au cas qu'elle en
eiit bcfoin contre les ennemis de la Religion ; ajoutant que

s'il Iç^ cnvoyoit avec un de fes fils , comme on le difoit , il

fouhaiteroit que ce jeune Prince s'établit dans une Provin-


ce voifine de l'Italie , très-riche , mais occupée par de lâches
hérétiques, pourenctrele maître , &
en même-tems le défen-
deur delà foi.
XXV II. Le Concile indiqué pour la première femaine de„ Concile de

Carême en 1075 , eut heu. Le Pape y avoit appelle des Eve-


ques d'Italie (y) , de France de Bretagne , d'Allemagne.
,

Les féances durèrent depuis le 14 de Février, jufqu'au der-


nier du même mois on eut foin d'écrire jour par joiur ce qui
:

s'y paflbit mais les a£les entiers du Concile ne font pas ve-
;

nus juiqu'à nous. Il n'en refte qu'un précis dans les Annales
de Baronius, encore n'eft-il point exaêt (s). On n'y fait au-
cune mention des inveflitures ; & toutefois il eft certain par
les témoignages de Hugues de Flavigny (a) , d'Anfelme de

(«) £/>;/?. 18. ( z) Pagi, aJ ao. lo/f^ num. i. ^


(.v) Lib. 2. £f<j?. ?I.7f. ffq.
'(^y) Lib. z. Ep'fl. I. r. ij. Ï4. z^ ( il
) Hi'GO , llaziiniac.ad an, 107^.
îi». 5J.34-4--+3- 1

Kkkkij
,

(Î28 GREGOIRE VII,


Luqucs ( & ) , & de l'Hiftoricn Arnou) (c) , qu'il y fut défen-
du , fous peine d'anathême & de dépofition , de recevoir des
mains d'une perfonne laïque , un Evêrhé ou une Abbaye ;
& aux Empereurs , Ducs , Marquis , Comtes , & tous autres
conftitués en dignité , de donner , fous la même peine d'a-
nathême , rinveftiture d'un Evêchc ou de quelque autre di-
gnité eccléfiallique. On y confirma le Décret contre les Si-
moniaques (<i) , & contre les Clercs concubinaires ; &
parce que plufieurs d'entre ces derniers , déclarèrent qu'ils
aimoient mieux garder l'interdit jette fur eux par le Siège
Apoftolique , que de renvoyer leurs femmes ; il fut défendu,
]
dans le Concile ( e ) , à tout Chrétien d'entendre la Meffe d'un
Prêtre marié. Il fe trouva au Concile , cinquante tant Arche-
vêcjues qu'Evêques (/), grand nombre d'Abbés , de Clercs &
de laïcs cinq domeftiques du Roi Henri y furent excommu-
:

niés (g) , pour avoir confeillé à ce Prince de vendre des E-


glifes mais on ménagea fa perfonne , parce qu'il donnoit
;

des marques de foumiffîon aux Décrets faits contre les fimo-


niaques & les Clercs incontinens. Philippe , Roi de France
fut menacé d'excommunication , s'il ne fc corrigeoit. A l'é-
gard des Evoques , il y en eut de fufpendus , d'autres dépo-
fés. On confirma l'excommunication prononcée contre Guif-
card , Duc de Pouille , dans le Concile précédent ; & quoique
Gérard de Prague & Jean d'Olmuts fulTent préfens (h) , leur
difficulté ne put être terminée on le contenta d'ordonner qu'ils
:

partageroient les revenus par moitié ,


jufqu'ù ce que leurs droits
fuffent plus éclaircis.
Dépofition XXV m. Herman de Bamberg étoit du nombre des Evê-
*1"^^ fufpendus au Concile; mais ce n'eft pas la feule cenfure
Evêque^dê
Bamberg. qu'il cut à efifuyer. 11 en cette Ville ( i ) , une
avoir fait bâtir
Eglife à l'honneur de faint Jacques , & mis vingt-cinq Cha-
noines pour la dclTervir. Quelque tcms après il les en chafla
Se leur fubditiM des Moines par un motif de prédilection.
Les Chanoines de Saint Jacques , conjointement avec ceux

(^' Ansei.m. /i/'. 1. centr,\ Wtebert, fupra.


(c) AuNtii». lib. 4. i«^. \. Tom. 10. Cotte, p. 344»
(jf)
('i)GK(c,.Lib. z.Epill. i<7.
(f ) Maria», Scot; in Cbrtnic. ad an. (») Lambert. Schafnab. aJan. 1075'.
IC7Î. ffl^r. 380.
(;') Huco Tl/t-jin. î5 Akselm. tili
,

P A P E. Ch. XXXVIT. 629


de la Cathédrale , lui repréienterenc que {"on Dioccfe avoir
plus befoin de Clercs que de Moines , qui, par leur inftitur
dévoient vivre dans la retraite. L'Evêque n'ayant aucun c-
gard à leur remontrance , ils fc pourvurent à Rome , où ils
accuferent Herman de divers crimes , en particulier , de li-
monie. Le Pape qui lui avoit interdit le miniftere de l'Autel
depuis long-tems , ayant ouï de nouvelles plaintes contre
lui , l'excommunia , fur ce qu'étant accufé &
appelle plufieurs
fois à Rome pendant deux ans, il avoit refufé de s'y rendre :

en même-tems il lui ordonna de rétablir les Chanoines dans


l'Eglife de Saint Jacques, &
écrivit au Clergé de Bamberg,
de le féparer de la communion d'Herman , proteftant qu'il
ne le rétabliroit Jamais.Sa fentence lui ayant été fignitiée
par des Légats que le Pape avoit envoyés exprès , il eut re-
cours à l'Archevêque de Mayence, dont il étoit ami. L'Ar-
chevêque alla à Rome : mais au lieu de fléchir le Pape , il
faillit à être dépofé lui-même, pour avoir ordonné Herman

par fimonie. Il reçut ordre du publier l'excommunication


prononcée contre cet Evêque , & d'en mettre un autre à fa
place. Herman voyant fa caufe défefperée , alla lui - même
implorer la clémence du Pape. Tout le fuccès de fon voyage
fut d'être abfous de l'excommunication , à la charge de finir
fes jours dans un Monallere. Ce parti n'étoit pas de fon
goût. Il revint à Bamberg , où pendant environ un mois , il
fit toutes les fonctions Epifcopales , à l'exception de la célé-

bration des Myfteres. Mais pendant tout ce tems on ne fit


aucun Office public dans la ville , & ni le Roi ni aucun E-
vêque ne communiquèrent avec lui. Grégoire VII informé
que l'on n'avoir point exécuté les ordres , écrivit à l'Arche-
vêque de Mayence & au Roi Henri, de remplir au plutôt le
Siège de Bamberg. Ce Prince y vint le jour de faint André,
& fit ordonner Evêque de cette Ville , Rupert , Prévôt de
Gollar, fon confident. Alors Herman fe retira dans le Mo-
naftere de Souarcz , &: y prit l'habit monaflique. L'Abbé
Egbert le mena à Rome , où ayant fait au Pape les foumif-
fions , il fut abfous <ies cenfurcs & rétabli dans les fontlions
de Prêtre & non d'F^iyêque. Il y a fur cette atlaire quatre
Lettres du Pape (/) , dont la première cfl du premier de

(/) Lié. z. Epiji. 76. £? Lib. i. Eiijl .1. 1. 3.


1

^30 G Pv E G O I R E V1 ,
Mai; les autres du vingtième Juillet 1075. Il en avoit écrit
une dès le mois de Juin 1074 à Herman, où il lui ordon-
noit d'obéir à ce qui icroit régie à fon égard par l'Evêque dç
. . , Metz. C'efl: la 84 du premier Livre.
RoraT contre XXIX. Guibert , Archevêque de Ravenne , cherchoi.t eij
Gfi^^oi.'eVil.fecret les moyens d'uiurper le faint Siège. Il felia pour cet

effetavec plufieurs personnes puiffantes , mal dilpofées contre


•Grégoire VII , nommément avec Centius , Préfet de Rome,
•excommunié par le Pape pour les vexations qu'il avoit exerr
cées dans les terres de TEglile Romaine. Centius s'aflbci^
Guifcard , Duc de Pouille , &
plufieurs autres excommuniés.
ïls convinrent de le faifir du Pape à l'Office de la nuir , à la
Fête de Noël ^075. Ils le prirent avant qu'il eût achevé la
Mefle , ie frappèrent d'un coup d'épée au front, voulant lui
couper la tête ; le dépouillèrent de tous fes ornemens, & le
menèrent prifonnier dans la Tour de Centius. Le peuple
Romain courut en fode pour délivrer le Pape. On affiégea
la Tour. Centius le rendit demanda pardon au Pape , Scût
.

pénitence de fa faute, Grégoire lui ordonna le v.oyage de Jc-


rufalem. Le tumulte appaifé , on ramena le Pape à Sainte
Marie-Majeure ,011 il acheva la Mefle , & donna au peuple
ia bénédi£lion foiemnelle. UA
rchevêque Guibert voyant que
cette tentative ne lui avoit pas réufli , eut recours au Cardi-^
nal Hugues-le- Blanc, dcpofé pour fes mauvaifes moeurs j&
comme fauteur des fimoniaques ; le croyant propre pour ex-
citer contre Je Pape , le Duc Guifcard & le Roi Henri. Ce
Prince avoit écrit i Grégoire (;«) des Lettres pleines d'amir
tié & de foumiffion ; & il en avoit re^u une réponfe (») , où
le Pape , en lui permettant de fe faire abfoudre par quelque
pieux Evcque , de l'excommunication encourue pour avoir
communiqué avec des excommuniés ; car jufques-là il n'a-
voit pas été excommunié nommément il ne laiflbit pas de
:

lui fairedes reproches fur la conduite. D'un autre côté , il


témoignoit être fatisfait de ce que ce Prince avoit fait pour
l'exécution du Décret contre les Clercs concubinaires;& il le
félicitoit fur fa vidoire contre les Saxons. La I^etcre du Pape
cfl: du 8 Janvier ioy6.
Le Papeeft
dépofc à Vor-
XXX. Mais cette vlûoirc même fut une occafion au Roi
çicscn 1075

(r;) Liù. 5, rpijl. 10. {,;] Uid,


P A
P E. Ch. XXXVII. ^31
Henri de fe déclarer ouvertement contre Grégoire VII. Il
,

aflembla une Diète ou plutôt un Conciliabule à Vormcs , le


vingt-troiiiéme du mcme mois (0) , où il le trouva à la :c:e de
tous les Prélats mécontens du Pape. Le Cardinal Hugues-le-
Blanc s'y rendit aufli , charge de pluficurs Lettres écrites au
nom des Cardinaux , du Sénat & du peuple Romain , con-
tre le Pape, dont ils demandoient au Roi la dépofition. Il
joignit à ces Lettres une hidoirc fabulcufc , de la vie &: de
l'éducation de Grégoire. Tout fut lu dans l'AfTcmblée. On
y
dépola le Pape , & tous ioufcrivirent à l'afte de dépofition.
Il n'y eut qu'Adalberon , Evcque de Wirtzbourg , âc Hcr-

man de Mcrz , qui réfiftcrent quelque tcms. Aufli-tôt le Roi


écrivit aux Evéques de Lombardie (p), pour les obliger à
foufcrirc à la condamnation du Pape. Ils s'afl"emblercnt.&
jurèrent fur les Evangiles qu'ils ne le reconnoîtroient plus.
Ses Lettres au Clergé & au peuple de Rome n'eurent pas le
même effet. Il en écrivit deux au Pape même, à qui il ne dif-
limuloit pas que c'étoit par Ion ordre qu'on s'étoit ademblé
à Vormes, pour procéder à fa dépofition. Il s'agiflbit de fi"
gnifier au Pape la Icntence. Un Clerc de Parme, nommé Ro-
land , s'en chargea , & la prélcnra lui- même au Pape avec les
Lettres du Roi , en lui difant Le Roi mon Maître , & tous:

les Evcques Ultramontains Se Italiens vous ordonnent de


quitter préfentemcnt le Saint Siège que vous avez ufurpé :
puis fe tournant vers le Clergé de R.omc , il ajouta Vous :

êtes avertis , mes frères , de vous trouver à la Pentecôte en


la préfenc€ du Roi , pour recevoir un Pape de fa main , puif-
que celui-ci n'cfl pas un Pape , mais un loup raviffant. Le
Préfet de Rome avec la Milice , fe jetterenc fur ce Clerc , &
ils l'auroienc mis à mort , s'il n'eût trouvé fon falut entre les

pieds du Pape. L'Annalifte Saxon , qui rapporte cet événe-


ment fort au long , avec les Lettres du Roi Henri , dit (q) ,
que ce Prince obligea tous les Evêques de l'AfTemblée de
Vormes , à déclarer chacun en particulier , qu'ils ne recon-
noiffoient & ne reconnoîtroient jamais Hildebrand pour Papej
mais que peu d'entre eux firent cette dcclaraiion librement ;

(0) Vita Gregor. Tom. 9. Aàar. UaiiU. Lambert. Schafkab. ad an, loji.pagf
^ Bruno , de bello Saxon. p. 197. 404.
[p] VitaS.Atifcim.Luccuf. n.\\, i^Aari ( </ ) hiem, ihidr
Saxo, tom, t. Eccakd. p. ^16 ÏS^ ffj. (5
,

6^2 GREGOIREVII,
que les autres , & c'étoic le plus grand nombre , y furent con-
traints par la crainte mort ; d'où vint qu'à la première
de la
occafion ils écrivirent au Pape , pour demander pardon d'une
faute qu'ils n'avoient commife , dii'oient - ils , que par vio-
lence.
Concile deXXXI. Le Clcrc Roland avoit fignifié la fentencc du Con-
Roinevnioyf.ciliabule de Vormes , dans le tems même que le Pape tenoic
fon Concile à Rome. Il ne fut point ému d'une nouvelle fi
étrange ; & afin que toute l'Affemblée connût quelles étoienc
les diîpontions du Roi Henri ( r ) , il fit lire à haute voix les
Lettres de ce Prince. Le fentimcnt du Concile fut , que
Henri fcroit privé de la dignité royale , & anathématifé avec
tous fes complices. En conféquence le Pape défendit à ce
Prince de gouverner à l'avenir le Royaume Teutonique &
l'Italie (s). Il délivra tous les Chrétiens du ferment qu'ils lui
avoient fait , & fit défenfe à toute perfonne de le fervir com-
me Roi. Le Pape excommunia en même-tems Sigefroi, Ar-
chevêque de Maycnce , comme auteur du fchifme entre le
Royaume Teutonique & l'Eglife Romaine; Guillaume, Evc-
que d'Utrecht , qui avoit preflTé Adalbcron de Virtzbourg , &
Herman de Ivletz , de foufcrirc à la dépofition.du Pape ; &
Robert de Bamberg. Il fe contenta de fufpcndre des fonc-
tions Epifcopales, ceux qui avoient confenti à fa condamna-
tion ; & donna à ceux qui n'y avoient foulcrit que malgré
eux , terme jufqu'a la faint Pierre, pour fe juftificr à Rome
ou en perfonne, ou par députés. Les Evêques de Lombardie
furent fufpendus & excommuniés pour avoir conjuré par fer-
ment contre le Saint Siège. Otton , Evêque de Ratilbonne ,
Otton de Confiance ( f ) , Bouchard de Laufane , le Comte
Eberard, Ulric & quelques autres , dont le Roi fuivoit prin-
cipalement les conieils , avoient été excommuniés depuis
long-tems mais on excommunia dans ce Concile , Berenger ,
:

Evêque d' Agde j Herman de Vienne , Etienne de Pui , Ponce


de Grenoble , &
quelques autres d'un rang inférieur , dont les
noms font rapportés aux Actes du Concile ( « ). Il confirma
ce que l'Evêque de Die, Légat du Saint Siège , avoit réglé

fr) Lambert. Schafnab. «d an. 1076. f ( ' ) Lamtert- Schaknab.p. 4'-4'

fAg. 404. i («) Tom. 10. Conc. p. iji.


{s) Tarn, lo. Cenc.fag. jyy. Jjfi. |

dans
PAPE. Ch. XXXVII. 6}j
dans fa légation , roucliant les décimes , les prémices & les
^glifes.
XXXII. Aufïï-côt après la tenue du Concile de Rome, CePapepu-;
Grégoire VII publia le Décret contre le Roi Henri (x) , par
^^'^J^ j^^^'^j
une Lettre adreHée à tous les fidèles. Il y joignit le Décret Henri.
même,& les motifs de l'anathême prononcé contre ce Prin-
ce. Cela ne l'empêcha pas de célél-ircr à Urrecht la Fête de
Pâques , ni Guillaume, Evêcue de cette Ville , de lui con-
tinuer ion attachement. 11 prechoit fouvent , tous les Dif- &
cours étoient lemés de traits envenimés contre le Pape. Un
Hiflorien du tems rapporte (>") > que quelques jours après
que le Roi fût forti d'Utrecht, Guillaume fuc faili tout d'un
coup d'une dangercufe maladie ; que dans les douleurs ai-
guës qu'elle lui caufoit , il difoit en gémiflant devant tous les
afliltans, que par un julle jugement de Dieu , ii avoic perdu
la vie prélente &
la vie éternelle , pour avoir iccondé les
mauvaifes intentions du Roi ; que dans l'intention de gagner
fes bonnes grâces , il avoir , contre fa confcicncc , charge
d'opprobres le Pape , quoiqu'il fût un iaint homme & d'une
vertu apoftolique. On dit que cet Evêque (z) , en prononçant
ces dernières paroles , mourut fans avoir fait pénitence ni re-
çu la communion,
XXXIII. Guibert , Archevêque de Ravenne, & les autres Conciliabule
*^*'""
Evêques fchifmatiqucs , ayant appris ce qui s'étoit paffé au **
'^^p ^
'^
Concile de Rome , s'^aifemblerent à Pavie, où ils excommu-
nièrent une féconde fois le Pape (a). Quelques Seigneurs du
Royaume , dévoient détérer à cette fentence,
incertains s'ils

confulterent des gens habiles, qui


leur répondirent , que le
Pape ne pouvant être jugé de perlonne , il ne pouvoit con-
féquemment être excommunié. D'autres doutoient que l'on
encourût l'excommunication en communiquant avec le Roi,
ou qu'il pût être excommunié. Le Pape traite ces deux que-
flions , dans une de les Lettres à Herman, Evêque dé Metz,
qui avoir quitté le parti du Roi , pour fc réunir au Saint
Siège. .
'

XXXIV. 11 décide i''. que tous ceux qui communiquent LettreduPape


fur l'excoin-
munication
des Rois.

(x) Lib. 3. Epiii. 6.


j
(x) nu.
(y) Lambfrt.Schatnab. »7'j./,fi.40î. I (() Toh;. io. Cewf.f. jfS.

Tomt XX. LUI


i ,

,'634 GREGOIRE
avec ce Prince (^),font excommuniés, comme ill'avôit été-
Vil,
lui - même avant le Décret du Concile , en communiquant
avec les amis excommuniés pour caule de limonie ; 2". qu'il
y a de la folie & de l'impertinence , à foutenir qu'un Roi ne
peut être excommunié. Le Pape Zacharie dépofa Childeric
Roi de France (c) , & déchargea tous les François du fer-
ment qu'ils lui avoient prêté. Saint Grégoire déclai-a excom-
muniés & même déchus de leur dignité ,.les Rois & les Prin-
ces qui donnoient atteinte aux privilèges accordés à des E-
gli^fes par le Saint Siège. Saint Ambroife excommunia l'Em-

pereur Théodofe , & lui défendit de demeurer à la place des


Prêtres dans l'Eglife. Jcius-Chrill en donnant à iaint Pierre
le pouvoir de lier & de délier , n'a cxcepr.é pcrfonne ; il n'a
fouflrait qui que ce foie de la puifïance de cet Apôtre. Ce-
lui qui nie pouvoir être lié par l'Eglife , doit nier encore
qu'elle puiffe l'abfoudrc. Enfin , (i le Saint Siège A poftolique
a reçu de Dieu le pouvoir de juger les choies fpirituelles ,.
pourquoi ne jugera-t-il pas aulTi les temporelles? Si les hom-
mes Ipirituels. font jugés quand il le faut, pourquoi les- fécu-
liers leroient-ils exemts de rendre compte de leurs mauvaifes
aétions. S'ils s'imaginent que la dignité royale efl: au-defllis.
de l'épilcopale, qu'ils fe détrompent en remarquant que l'une
a été inventée par l'orgueil huma-in , & que l'autre a été in-
{lituée par la bonté de Pieu ; que celle-là ne recherche que
U; vaine gloire, au lieu que celle-ci afpire continuellement
à la vie célefte. C'efl pour cela que faint Ambroife dit, que
l'Epifi^qp^t. e.fl autant au-deffus de la royauté , que l'or au-
delius du plomb ; & que l'Empereur Conftantin prit la der-
nière place entre les Evêques. Le Pape appuie toutes ces
preuves & tou^ ces exemples dç, l'autorité de la Lettre de-
Iaint Clément à faint Jacques , qu'on regardoit alors comme
véritable , mais qui paffe aujourd'hui au nombre des apocry-
phes.^ Enfuite il donne avis cà Herman, que fur les Lettres
qu'il avoir reçues de plulieurs Evêques Ducs .excommu- &
niés , il leur avoir permis de le faire abfoudre; mais qu'à l'ér
'ioiici'iujrr.i-f)'.-)

f/Ot»?."'?. I>«yï. 1. |n.ît la Royauté à Pépin, qui avottjnfquof-


'
(i) Les François voulant dcporr Chil- 1 ).i les fondions de Roi
f:iit mais il ne dt-
;

d'jric , non pour f s nauvuifes m^yrs, pofupasde (a propre çutoiité, Cbilcienc.;


jii;.is pair (on ineajiaciti; , coniulteicnt li: icfurent kiFramçois, . • >
. - > i
, ;

Page Zacharie. Il iîit d'avi; qu'on don- . jt.^.i-KK'j \»At.t. \i


P A P E. Ch. XXX vit. 63J
gard du Roi Henri ne vouloic que perlonnc lui donnât
, il

l'abiolution qu'après des témoignages bien certains de Ion re-


pentir & de la pénitence. Il charge l'Evèque de Metz d'avoir
-une entrevue avec l'A rchevêque de Trêves , de cafler enfem-
-hle ce que l'Evcque de Toul avoit flatué contre l'Abbefle de
jRemiremont , & dcJ'avertir de ne rien entreprendre à l'ave-
nir fur ce Monaftere.
XXXV. Quelques jours après , Grégoire VII écrivit aux LettreauxE-
Evcques (c) , aux Seigneurs Se aux fidèles du Royaume Teu-^^^?""^^^^^^;!
-tonique ou d'Allemagne , pour juftifier l'excommunication Royaume
prononcée contre le Roi Henri , & la dépodtion. Accoutu- '^'^"^°"'^"-'
mé de jeunclTe à des actions honteules , les iniquités s'accru-
rent avec l'âge. En vain le Pape l'invita à fe corriger & à
faire pénitence, il continua dans fes déiordres, jufqu'à ven-
dre des Evêchés & des Abbayes cà des perfonnes indignes.
Averti d'éloigner de ion Palais des perfonnes excommuniées,
il le refula , & continua à les admettre à fon conieil. Il crai-

gnit, en voyant les Saxons fc fortilier, il demanda la péni-


tence , la reçut des Légats mais auiîi - tôt après fa viftoirc
:

iiir ces peuples , il oublia toutes fes promefles , fe rejoignit


aux excommuniés , ranit les Eglifcs dans la première con-
fufion ; &
obligea tous les Evêques d'Italie d'Allemagne, &
put féduire ou intimider , à renoncer à l'obéifTance du
<ju'il

Saint Siège, Tel efl: en peu de mots l'cxpofé des raifons qui
-portèrent le Concile de Rome à excommunier & à dépofet
-le Roi Henri. Dans une autre Lettre (f/) le Pape exhorte les
,

-Evcques &
Seigneurs Allemans,, de recevoir ce Prince;
les
-avec bonté , s'il efl véritablement pénitent , en éloignant de
lui les mauvais Confeillers , en lui en donnant de bons ; &
.mais il défend à qui que ce foit de l'abloudre fans le con-
sentement du Saint Siège; &ieur confeille , au cas qu'il ne
fe corrige pas, d'élire un autre Roi , pourvu que ce foit du
conientement de l'Impératrice Agnès , & que l'éledion fe
-fafle par l'autorité du Saint Siège. Plufieurs perfonnes no-

bles (<?) , d'autres de moindre condition , abandonnèrent le


parti du Roi; la plupart de ceux qui avoient loufcrit à la dé-
-polition du Pape , lui en demandèrent pardon par des Dé-

(0 f';:.î Grf^^cr.
" p. 43S. To,k. 9. .iihr. \ U.) T.ik 4. Efifl. 3.
M^-i!l. 1 (,-) !')"/J G.'f^rr.
f»^.
440. Tow. j. A7«r.
Llllij
^^6 GREGOIRE VII,
pûtes ;
quelques-unes même voyage de Rome nuds
firent le
pieds, pour demander grâce. Le Pape ne la refufa à aucun;
& il écrivit aux abfens des Lettres de conlolation. Uton , Ar-
. chcvêque de Trêves (/) , fut du nombre de ceux qui allè-
rent à Rome fe faire abfoudre. De retour , il ne voulut com-
muniquer , ni avec Sigefroi de Mayence, ni avec Hidulphe
de Cologne ; il n'avoit obtenu du Pape , que de pouvoir par-
ler au Roi feul, à la charge de ne communiquer point avec
lui en aucune autre manière. A l'exemple d'U ton , plufieurs fe
retirèrent de la Cour; &le Roi voyant que les Seigneurs l'a-
bandonnoient fous prétexte de Religion , employoit toutes for-
tes de voies pour les rappeller.
AtTembléede XXXVI. L'Affemblée de Tribur acheva de ruiner fon
kR^Henr?. P^"^- ^^^^ ^^^^"^ *^^^ indiquée par Rodolphe (g) , Duc de
Suabe , Guelfe , Duc de Bavière , Berthold , Duc de Carin-
thie , Adalbert , Evoque de Vormes , & par quelques autres
Seigneurs, dans une entrevue à Ulme; & ils Tavoient dénon-
cée aux Seigneurs de Suabe , de Bavière , de Saxe, de Lor-
raine & de Franconie , en les conjurant au nom de Dieu de
s'y rendre au jour nommé , c'eft-à-dire, le feiziéme d'Ofto-
bre îoy6. Le Pape y envoya deux Légats , Sigehard, Pa-
triarche d' Aquiléc , &
Altman , Evcque de Paflau , qui ayant
été chafTé de fon Siège par le Roi Henri , s'étoit retiré à Ro-
me. Ils étoient chargés de déclarer publiquement les raifons
que l'on avoir eues d'excommunier ce Prince , de promet- &
tre l'agrément du Pape pour l'éleètion d'un autre Roi. L'Af-
femblée dura fept jours , pendant lefquels on s'occupa dérou-
tes les adions de ce Prince , qui le rendoient indigne de la
royauté ; des moyens de prévenir la ruine de l'Etat , des &
remèdes qu'on devoit apporter aux maux dont la paix de
l'Eglife étoit troublée. Le Roi qui s'étoit rendu à Oppen-
heim , cnvoyoit fouvent des Députés à Tribur
pour traiter ,

d'un accommodement. Il olTroit d'abandonner le gouverne-


ment de l'Etat j pourvu qu'on lui laiiïât le nom & les orne-
mens de la royauté. Les Seigneurs affemblés ne fe fiant ni à
fes promefTes ni à fcs fermens , étoient prêts de l'aller atta-
quer avec leurs troupes ; mais avant d'en venir à cette extré-

P' ('/")'L/M«CRT. SCHAFNAB. fa^. -JO/.


' |
(x) Idem. fHd. f. ^11.
408..
PAPE. Ch. XXXVII. 637
mité, ils propoferenc de s'en rapporter à la dccifion du
lui
Pape , difant qu'ils rengageroicnc à venir à Aufbourg , à la
Purification de la Vierge de l'année i'uivante 1077 ; que l'on y
tiendroit une AfTemblce de tous les Seigneurs du Royaume ;
que le Pape ayant ouï les deux parties, condamneroit Henri
ou le renverroit abfous & que fi , par la faute , il n'obtenoic
;

fon ablolution avant l'an & jour , il feroit pour toujours dé-
chu du Royaume. Le Roi accepta l'offre , & congédia fur le
champ tous les excommuniés de fa Cour. Voyant que Ion
lalut dépendoir de fon ablolution avant le bout de l'an de Ion
excommunication {h) , il partit de Spire quelques jours avant
Noël , & le rendit en Italie par la Savoie accompagne de ,

la Reine fon époufe & de fon fils encore enfant. Le Pape s'é-
toit déjà mis en chemin pour fc rendre à Aufbourg ; mais
apprenant l'arrivée du Roi Henri en Italie , & ne Içachant à
quel deiïein , il fe retira , par lavis de la ComtefTe Mathilde,
dans le Château de Canofle , qu'elle avoir dans la Lombardie
près de Rege.
XXXVII. Il vint de l'Allemagne grand nombre d'Eve- Abroh:ro_nr!u
^''^''"'
ques & de laïcs ( / ) , demander d'être abfous de l'excommu- ^°'
nication. Le Pape les reçut leur impofa
, des pénitences, les

renvoya abfous. Le Roi Henri, après avoir employé le cré-


dit de la ComtefTe Mathilde, de la ComtelTe de Savoie, de
plufieurs Seigneurs d'Italie & de Hugues, Abbé de Cluni ,
,

obtint de voir le Pape à CanolTe. Il entra feul dans la For-


terefle, fans aucune marque de fa dignité , nuds pieds, vêtu
de laine fur la chair. On le laifla trois jours en cet état dans
la féconde cour, & à jeun depuis le matin julqu'au foir; le
quatrième , le Pape l'admit à fon audience, & après s'être
expliqués enfemble fur le fujct de fon voyage , il convint de
l'abfoudre fous plufieurs conditions ,
qui portoicnr en fub-
ftance ,
qu'il le rapportcroit au jugement du Pape, touchant
les plaintes formées contre lui par les Seigneurs d'Allema-
gne ; qu'il lui donneroit fureté entière pour aller au-delà des
Monts, ou ailleurs & qu'au cas qu'il manquât à quelqu'une
•,

des conditions portées dans l'Ade qui en fut drefi!e, les Sei-
gneurs auroicnt la liberté de choifir un autre Roi. Henri &
les Médiateurs promirent par ferment l'exécution de tout ce

^h)lbii p. 417- {i] UU.p.4'9.


638
que
GREGOIRE
Pape exigea
VII,
le ( / ) ; il n'y eut que l'Abbé Hugues qui re-
lufa de jurer, difant que de Moine ne leluiper-
fa profeffion
^Tiecroit pas : mais iî donna fa parole en la prélence de Dieu.
Le Pape ayant abfous le Roi , de l'excommunication , célé--
bra la Meffe & après la confccration , il le fit approcher de
;

J'autel avec tous les aiTiftans; puis prenant en main le Corps


de Notre Seigneur, il dit: J'ai reçu depuis îong-tems des
Lettres de vous , où vous m'accufiez d'avoir ufurpé le Saint
Siège par fimonie , & d'avoir commis , tant avant mon E-
pifcopar que depuis . des crimes qui , félon les Canons , nje
fermoicnt l'entrée aux Ordres facrés. Il me feroit facile de
.me jurdficr (?n) parie térpoignage de ceux qui içavent cpm-
rne:;t j'ai vécu depuis mon enfance , & de ceux qui ont été
les auteurs de ma promotion à l'Epifcopat mais pour éviter :

^oute ombre deXcandale , je veux que le Corps de Notre Sei^


^ncur que je vais prendre , foit aujourdhui une preuve de
mon innocence , & qup Dieu me faffe mourir fubitement , Q.
je fuis coupable. Ayant ainfi parlé, il prit une partie de l'ho-
(lie & la confomma :enfuite s'adreffant au Roi , il dit : Fai-
.rcs , s'il vous plaît , mon fils , ce que vous m'avez vu faire.

Les Seigneurs Allenjands vous chargent de quantité dp cri-


mes, pour Icfquclsils prétendent que vous devez être inrer-
xiit , non - feulemcat de toute fon£ticn publique , & de la
communion eccléfuinque, mais de tout commerce de la vie
.civile. Ils demandant inflamment que vous loycz jugé , &
,vous Içavcz rinccrcicudc des jugemens humains. Faites donc
ce que je vous conleille ; & fi vous vous fentez innocent ,
.délivrez l'Eglife de ce fcandale , & vous-même de cet em-
barras: ptenez ceite autre partie de l'hoftie, afin que cette
preuve de votre ianoceace ferme la bouche à tous vos ennc-
.mis , Se m'engage à être votre défenfeur le plus ardent, pour
vous réconcilier avec les Seigneurs , & terminer la guerre
civile. Le Pi.oi eiîrayé de la propofition , pria Je Pape dercn-
.voyer l'atlaire à un Concile général. Le Pape y confentit
,
donna la communion au Roi, acheva la Méfie ;& l'ayant in-
vité à dîner, il le traita avec beaucoup d'honneur après quoj :

il l'inllruifit de ce qu'il devoit oblcrver , & le renvoya à ie3


gens qui l'attendoicnt :hors du Château.

{/) IHd. p. 41:. (.-?;) 7^<,a. i7;V.


,

PAPE. Ch. XXXVII. ^5p


XXXVIII. Le Pape donna aufTi-tôt avis aux Seigneurs LettreduPnpe
Al!cmans(«) , de ce qui venoit d'arriver. 11 ajoute au rt^'cit
^"^^^J;^^"^""
qu'en a fait Lambert de Schafnabourg, que le Roi fut trois iiir l'abfoiu-
jours à la porte , demandant miiéricordeavec beaucoup de lar- ''^" ''" ^^°'-'
mes; en forte que tous les affiflans ne pouvoient retenir les
leurs , &
prioient inftamment pour lui , l'accuiant non de
fcvcrité mais de cruauté. Le Pape promet à ces Seigneurs
,

de paffer en Allemagne le plutôt qu'il lui fera poiïible , pour


procurer plus aifémcnt la paix de fEgliie de l'Etat. Ce- &
pendant l'abfoîution que le Roi venoit de recevoir, excita
contre lui les Lombards ils chargèrent d'injures l'Evêque de
:

Ccitz (o) , envoyé du Pape pour les abfoudre eux-mêmes


ft: refulcrent de le donner pour Roi le fils de Henri , quoi-

que enfant , & d'élire un autre Pape qui le ccuronneroic


E-mpcrcur , &
annuUeroit tout ce que Hildebrand avoit fait.
Le Roi trouva le moyen d'arrêter cette confpifacion ; mais
s'écant rallumée il crut qu'il ne pourroic regagner l'aflcction
,.

des Lombards , qu'en rompant le traité ciu'il avoit faiit avec le


Pape i & il le rompit en effet au bout d'environ qoinze jours ;
il rappella tous les excommuniés, & le livra touD entier à fcs
paffions comme
auparavant.
Aircmb!<îeJe
XXXIX. Les Seigneurs Allcmans voyant auc le Pape ,
trompé par les artifices du Roi Henri , ne s ctoit point ren-
du à Aufbourg le jour de la Purification , lui écrivirent de fe
trouver du moins à l'Afl'cmblée qu'ils avoicnr indiquée à For-
cheim en Franconie , pour le treizième de Mars. Sur cela ,
Grégoire VII envoya le Cardinal Grégoire avec d'autres Lé-
gofs, au Roi Henri , pour lui dire de le rendre à Forclieim
au. jour marqué, afin que fa caule y fut jugée définitive-
ment. Le Roi s'en excula fous divers prétextes (p): il fupplia^
même le Pape de lui permettre de recevoir la Couronne »
Alonza par les mains de l'Evêque de Pavie& de l'Archevê-
que de Milan. Mais le Pape s'appercevant de la rufe, le re-
fufa , prétendant qu'en lui rendant la communion de l'Egli-
fe , il avoit pas rendu la royauté y Se qu'il ne le pouvoir.»
ne lui
faire fans leconfentement des Seigneurs. Ce Prince avoit ferme
fi exactement tous les paflages,qu il n'étoit pas poiTible au Pape

f») Lit. 4. Fpifl.ii. (;•) Vita Grever, p. 4^5,.Tc»»,- j^'jfJtr.

C«) LamBERT.ScHAF, f. 411.413.


]

[Mnim. ': -^ . '


^40 GREGOIRE
de paflcr en Allemagne , ni de retourner à Rome. Les Sei-
VII,
gneurs Allemans informés de fa fituacion par les Légats , 8c
des mécontentemens que le Roi luiavoit donnés, leur repré-
fenterent qu'il n'y avoit pas d'autres moyens de tranquillifer
le Royaume que d'élire un Roi à la place d'Henri Les Lé-
,
gats témoignèrent qu'il fcfoit bon de différer 1 cleûion juf-
qu'à l'arrivée du Pape mais les Seigneurs incertains du teras
:

de l'a venue , & afTùrés du danger qu'il y avoit à ditférer, s'af-


femblerent chez l'Archevêque de Mayence , & élurent Ro-
dolphe , Duc de Suabe (^). Il fut élu à Forcheim,le ij de
Mars 1077 , & facré à Mayence, le 27 du même mois , par
les Archevêques de Mayence & de Magdebourg , en pré-
fence des Légats. C'étoit Bernard , Abbé de Saint Vic-
tor de Marfeille , & un Cardinal-Diacre , nommé aufll Ber-
nard.
HiecTonde XL. Rodolphe donna au(Ti-tôt avis de fon éleiSlion au
Rodolphe, papç Çy.^ .
^ pQuj, montrer fa foumiffion à fes ordres , voyant
que le Soùdiacre qui dévoie chanter l'Epître à la Melfe le
jour de fon Sacre , étoit un fimoniaque , il demanda qu'on

en mit un autre. Ce changement excita le jour même une


fédition. Le
peuple en furie voulut fe jetter fur le Roi, com-
me il alloit à Vêpres; les Chevaliers qui l'accompagnoient,
quoique fans épées , parce qu'on n'en portoit point en Ca-
rême {s) y repouflerent les féditieux , dont plufieurs furent
rués ou noyés. Le Pape ne voulut point fe déclarer fur la ca-
nonicité de l'éledion de Rodolphe ( r ) ; dans fes Lettres &
aux Légats Bernards (k) , on voyoit le nom de Henri avant
celui de Rodolphe. Les Allemans du parti de celui-ci , S'rti
plaignirent (x) , difant qu'ils s'étoient conduits par les lumiè-
res du Pape ; & que tout ce qu'ils avoient fait , étoit pour
venger les injures faites au Saint Siège. Le Pape ne leur fit
point de réponfe pour lors.
Lettresài'E-
XLL L'Archevêque de Cambrai , nommé Gérard , n'ayant
Lc'gaV'en'^' point eu connoilfance du Décret contre les invefticurcs , ni
France. dc l'cxcommunication du Roi Henri , avoit reçu de ce Prince

ff ) Uim. nu. p. 445. (m) Lit. 4. Epi/t. t j.


(r) Uid.p. 44g. {
X ) Bruno , de Btlto Saxon. Tom. i

(l) Ibld. Frecb.p, iii.zï9. zio. \

fon
PAPE. Ch. XXX vil ^4«
Xon Evêchc avec' les cérémonies ordinaires. Il fit le voya-
ge de Rome , avoua fa faute au Pape , qui, informé de la ca-
nonicicé de fon éledion , & de Ja probité de fes mœurs , le
laifl'a en paiiible podelfion. Il en écrivit à Hugues , Evcquc

de Die , ion Légat en France (jf ) & afin que cet exemple;

ne tirât point a coniéquence , il lui ordonna d'aflembler un


Concile , pour y terminer plufieurs affaires , & en premier
Jicu celle de l'Archevêque de Cambrai , que le Pape avoit
obligé de déclarer par ferment , devant les Evcques de la
Province , qu'il n'avoit point eu de connoiffance du Décret
contre les inveftitures , ni de l'excommunication du Roi
Henri. Le Légat avoit ordre de publier ce Décret dans le
Concile, & de le faire confirmer par les Evcques. Le Concile
Jfe tint à Autun , du confentemcnr de Hugues I , Duc de Bour-

gogne , en 1077^
XLIL En cette année , le Pape ne tint point de Concile ConclledeRo.
à Rome , Iclon fa coutume, en ayant été empêché par fon"^*^" '°''»-
Xéjour dans la Lombardie. Il demeura trois mois chez la
ComtelTe Mathilde , de peur d'être arrêté en chemin par le
Koi Henri qui avoit formé le deffcin de le prendre avec cet-
,

te Princclle; & quoiqu'il l'eût quittée des le mois de Mai, il


n'arriva à Rome qu'au mois de Septembre. Mais au mois de
.Janvier de l'année fuivante 1078, il en indiqua un, que l'on
compte poui- le quatrième de fon Pontificat. Il fc tint la prc«
mierc fcmaine de Carême: cent Evêques ou environ y affi-
flerent (z), fans les Abbés & les Clercs. Guibert, Archevê-
que de Ravennc (/?) , quoique invité, n'y vint pas ; fon e-
xcmple fut luivi de plufieurs Evêques de la Romagne & de
la Lombardie. Le Concile renouvella l'anathême déjà pro-
jîoncé contre lui & contre Tetald , Archevêque de Milan,
Arnoul de Crémone convaincu de fimonie , fut dépofé , de
même que Roland de Trevife ; & on confirma la dépofition
du Cardinal Hugues-le-BIanc , &: de Guifroi , Archevêque
de Narbonne. Il y eut aufli une excommunication générale
contre les Normans qui pilloicnt les terres de faint Pierre ; &
diverfescenfures prononcées contre les Evêques qui n'étoient
pas venus au Concile , & contre ccrix qui s'cmparoient des

(7) m. 4. £.>;;?. il. 1 (,.) lit. î. Epijl. ij.


(î.1 Toi». 10. Ciiic, p. 359, I

Tome XX, Mm mm
^42 G R E G O I R E yir,
débris des naufrages. Mais Pape prévoyant les fncheufcs"
le
fuites que pouvoient avoir les excommunications , en s'éten—
<iant à ceux qui communiquoient avec les excommuniés {b) ,
déclara qu'il en exceptoit les femmes & les cnfans des ex-
communiés , leurs ferviteurs & leurs ferfs ceux qui commu- ;

niquent par ignorance avec les excommuniés , ou qui ne com-


muniquent qu'avec ceux qui ont communiqué avec les excom-
muniés; les pèlerins & les voyageurs qui, pafîant dans un pays
d'excortimuniés ,ne peuvent s'empêcher de recevoir d'eux les
chofes néceffaires à la vie ; & ceux mêmes qui les donnent aux

excommuniés, pourvu que ce ne foit point au mépris de l'ex-


communication.
Lettre aux
XLIIÏ. On réfolut dans le même Concile (c) , d'envoyer
Seieneurs Al-
• v / * n a rr •
i i
' '

lemans. dcs Legats en Allemagne , pour y tenir une Allemblce gé-


nérale du Royaume , afin d'y récablir la paix avec connoif-
lance de caufe , c'cfi-à-dire , après avoir examiné à qui de*
deux Rois le Royaume appartenoit. En conféquence de ce
Décret, le Pape , qui jufques-là n'avoit fait aucune réponfe
aux trois Lettres des Seigneurs Allemans ( ^ ) , leur écrivit
pour les exhorter à tenir une Affemblée (e) , où l'on pût , en
préfencc de fes Légats , pacifier les troubles de l'Allemagne.
li écrivit en particulier à Udon, Archevêque de Trêves (/) ,.
de travailler à la paix , & de faire rendre la jufticc cà qui elle
appartenoit. Grégoire VII ne rcgardoit donc pas le Roi
Henri, comme privé irrévocablement de la royauté; mais il
étoit dans le doute , lequel des deux on devoit reconnoître
pour Roi dans les circonftances préfentes , de Henri ou de
Rodolphe. Le Pape écrivit aufTi aux François (^g) , pour leur
faire part des délibérations du Concile , en leur faifant remar-
quer que l'on n'y avoit pas fuivi les Canons à la rigueur en-
vers les Evêques de France & de Bourgogne , que le Légat
Hugues avoit fufpendus ou condamnés. Les Archevêques de
Reims, dcBefançon, de Sens , de Bourges, de Tours, &
i'Evêque de Chartres , furent rétablis dans leurs fondions , à
de certaines conditions qu'il étoit aile de remplir.

{e)Lii. f.Epip, 15.


(e) Tom. j.Cotic.p. J70.
(d) Bruno Jt Btll« Saxt». f»g, xio. (s) Epift. 17.
P APE. Ch. XXXVII. 645
XLIV. Le Pape avoit une confiance particulière en Hii- !-«'"« à Hu-
gues , Abbé de Cluni. Il l'avoir invité dès la première année lëcîuni'''"^^
de ion Ponrificat (h) , à le venir voir à Rome. En cette an-
née 1078 {i) jil lui renvoya &
au Légat Hugues, Evêque
de Die, le jugement d'une difficulté entre Manaffés , Arche-
vêque de Reims , & Garmond , Archevêque de Vienne. En
d'autres occalions il lui ouvroit fon cœur (/) Tur les peines
& les chagrins que lui caufoit le gouvernement de TEglife.
Ce fut aulîi à lui qu'il s'adreflTa ( '» ) » pour avoir quelques
Moines habiles pour le fervice de rÉglife. Hugues lui donna
entre autres , Odon ,Pape donna l'Evêché d'Oftie.
à qui le Il
voulut enfuite l'avoir continuellement auprès de lui, & en fit

Ion confident (n).


XLV. Johonée , Evêque de Dol en Bretagne , étoit entré ^'^^'V/^ ^^

par iimonic dans ce Siège; &


setoit marie depuis publique- gne.
ment. Les filles qu'il eut de fon mariage , étant venues en
âge , il leur donna en dot les terres de TEgliie ( ). Cité à
Rome par le Pape Nicolas II , que l'on avoir informé de ce
fcandale , il refuia de comparoîtrc. Grégoire VII kdépofa,
& ordonna à fa place Evêque de Dol , Èven ( p) , Abbé de
Saint Mclainc, à qui il donna le Pailium {q)t avec ordre
aux Evêques de la Province , de lui rendre obéiflance , fans
préjudice toutefois aux droits de l'Archevêque de Tours. Ce-
lui ci qui feprétcndoit Métropolitain de la Bretagne , fe plai-
gnit au Pape de la prérogative accordée à l'Evêque de Dol.
Le Pape répondit (r) , qu'il ne lui avoit accordé le PaUitnn^
que parce que les Seigneurs avoient déclaré qu'ils renon-
•çoient à l'ancien abus de donner l'inveftiture , & de prendre
de l'argent pour les Ordinations ; qu'au refte il avoit pris les
précautions néceflfaires pour conierver la dignité de l'Eglife
de Tours. Johonée fit tous fes efforts pour rentrer dans fon
Siège, jufqu'à intérefler en fa faveur le Roi d'Angleterre.
Grégoire VII fit réponfe à ce Prince , qu'il enverroit fur les
lieux des Légats pour examiner l'affaire (5) , qui auroient &

(h) Lih. I. Efifi. 6».


(i)Lih.6. Epift.z. 5. (l>)
Lik 6. Eplfi. 4.
(/) Lit. 1. Epill. 4y. lii. y. tp'P. IT. iil)Ub.^.Epift. f.
(^m) Orderic. Vit,il. iib. a.. ,1/1. 1075. (r)£p.-/î. ,5.
(n) Berthoid. ad an. 1077. {sj E0. 17.
iy) Marten. Tjrf». 3. Anud, p.ig. 871.

Mm m m i
j
,

^44 GREGOIRE VIT,


foin de le lui faire connoître. y a une autre Lettre du Pape fur
11

le même fujet (r) , adreflee aux Seigneurs Bretons.

S eïîo??*'
XL VI. Au mois de Novembre d^ cette même année 1078
Grégoire VII tint un fécond Concile à Rome , qui efl: comp-
té pour le cinquième depuis fon éledion. Quelque tems au-
paravant, les Rois Henri &
Rodolphe s'étoienc livré deux
fois bataille ( m ) i à la première , l'armée de Rodolphe fut
raife en fuite ; la féconde lui fut favorable , Henri obligé &
de prendre la fuite. Ils envoyèrent l'un & l'autre des Dépu-
tés au Concile , qui jurèrent l'un &
l'autre au nom de leur
Maître , de n'empêcher en aucune manière la tenue de l'Af-
fcmblée projettée pour terminer leur différend. Berenger affi-
fla à ce Concile de Rome , y préfenta une courte profeluon
de foi; & afin qu'il abjurât fes erreurs avec connoiffance de
eaufe , on lui donna un délai jufqu'au Concile de l'année fui-
vante. En Orient (.r) , Michel Ducas ayant été dépolé , Ni-
céphore Botoniates s'empara de l'Empire , fe fit couron- &
ner par Cofme , Patriarche de Conftantinople. Les Evêques
du Concile regardant Nicéphore comme un ufurpateur , l'ex-
communièrent, (y). Ils firent entre eux quelques réglemens^
contre les détenteurs des biens de l'Eglife ; contre les inve-
ftitures , contre les fimoniaques , &
contre l'incontinence des.
Clercs. Ils déclarèrent fauflcs pénitences ( z ) , celles qui ne
fe font pas conformément aux Décrets des Pères ;, comme:
îorfque le pénitent ne renonce pas à une profeflion qu'il ne
peut exercer fans péché, ou qu'il ne reflitue pas le bien d'au-
irui ,.ou qu'il garde de la haine dans fon cœur. Le Concile,
défendit aux laïcs &
aux Abbés-(«) ,.de pofléder des dix—
mes fans le confentcment du Pape ou de l'Evcque diocéfain y
parce que , félon les Canons, elles appartiennent à l'Evê-
que. Défenfe de manger de la viande le Samedi (è) , fi ce
n'eft qu'en ce jour il le rencontre une grande Fêrc , ou en.
cas de maladie. Tout Chrétien doit faire fon offrande à h'
Méfie (c) , fuivant l'ancien ulage de l'Eglife. Tous les Evê-
ques feront enfeigner les Lettres dans leurs EgUfes ; ils au-»- &

(0 Ub. ,. Epift. 25. 10. Coiic.p. J71.


(« ) Pagi, ad au, 1078. num. i> fg. (1) Gi«. j.»

léZ. z6<). ». 3. 4. (a) Ca». 6. S.


(*) il/iJ, num. 6, 7. (*) Cl». 7.
^7) Beuîholu. ud an, 107Ï. Cî Tenu (c) Cm. li..
PAPE. Ch. XXXVIT. ^45
ront foin d'empêcher qu'on n'en enlève les ornemcns fans
une grande nécedîté. Il paroîc , par une Lettre du Pape au
peuple de Ravenne ( d ) , que Guibert, qui en étoit Arche-
vêque, &
dcshonoroit depuis long-tems cette Eglife par fes
mœurs , y &it dcpofé. On excommunia dans le même Con-
cile Ce) ceux qui pilloient le Mont-Canin; cela regardoit
,

particulièrement Jourdain , Prince de Capouc,.qui avoit en-


voyé des foldats tirer du trcfor de l'Eglife de ce Monaftere ,-
une grande forame d'argent qu'un Evcque y avoit mife en dé-
pôt (/). Le Pape fit de grands reproches à l'Abbc & aux Moi-'
nés , d'avoir fouffert ce facrilege.
XLVIL Celui deCluni, que l'on croit être Hugues, avoit^J "''^^^ ''^^-
reçu dans fon Abbaye , Hugues , Duc de Bourgogne , qui s'y
étoit retiré pour vaquer à fon falut , fur la fin de l'an 1078,
après avoir gouverné le Duché de Bourgogne environ trois
ans. Le Pape confidérant que par cette retraite , les peuples
perdoicntun prote£leur , s'en plaignit à cet Abbé,. comme
s'û eût mal fait de recevoir ce Prince dans le Cloître, On trou-
ve, lui dic-il ,. alTez de Moines Se de particuliers craignans-
Dieu i mais à peine trouvc-t-on uabon Prince. Cette Lettre eft
du 2 Janvier 107^.
XL Vin. Au mois de Février fuivant, le Pape tint fon Ci- Concile de-
xiémc Concile à- Rome , dans l'Eglife du Sauveur i cent cin- '^omeemo?,*.
quantc Evêques y afiTiftcrent (g) i Berenger s'y trouva , &
on y traita en fa préfence la matière de l'Euchariftie. La plus
grande partie des Evêques foutinrcnt , que par les paroles de
la prière facrée , la conîccration du Prêtre & la vertu du Saint-'
Efprit , le pain &
le vin font changés fubftantiellement au-
Corps de Notre Seigneur, qui efl né de la Vierge, & qui a-
été attaché à la Croix ; & au Sang qui a coulé de fon côté :•
ils le prouvèrent par des pafTages des Pcrcs , tant Grecs que

Latins. Quelques-uns aveuglés par de faux préjugés , difoienc


que ce n'étoit qu'en figure , & que le Corps fubflantiel eft-
aiïls à la droite du Père. Mais avant même le troificme jour
du Concile , ils furent fi clairement convaincus , qu'ils cefle-
rent de combattre la vérité ; & que Berenger , le maître & le'

(</) Lit. f. Epjl. 10. I (s) Tom. 10. Cc»c. pag. 378. Hugo
('»)Cii«. I. IPlaviniat. BiUict, ««v. Lati, p.,ig,.
tonr. i,
\j\),€bri)ni(,CoJ}sn lit, i.caf..6* 1114.
, ,

C^6 G Pv E G O I R E VIT ,

défcnleur de cette erreur qu'il fi long-


enfeignoit depuis
,

tems, confcfla en pleine Aiïemblée, qu'il s'étoit trompé, de-


manda pardon & l'obtint , en confeffant que le pain & le vin
qu'on mec fur l'Autel , font changés fubftantiellement par le
myftere de Toraifon facrée & les paroles de notre Rédemp-
teur, en la chair propre &: vivifiante , & au Sang de notre
Seigneur Jefus-Chrid ; qu'après la coniécration , c'eft Ion vé-
ritable Corps , qui cd: né de la Vierge , qui a été offert fur la
Croix , qui efl: affis à la droite du Père ; & le vrai Sang de
Jefus-Chrift qui a coulé de fon côté. Le Pape lui défendit
au nom de Dieu tout-puififant & des Apôtres faint Pierre &
faint Paul , de plusdifputer à l'avenir fur cette matière , finon
pour ramener à la vérité ceux qu'il avoit engages dins l'er-
reur. Il Im donna une Lettre de recommandation adrefiee à
tous les fidèles ih) , portant ordre de le reccnnoître pour en-
fant de l'Eglife Romaine , avec délenfe de le taxer d'héré-
tique , & de rinquiéter ni dans fes biens ni dans fa perfonnc.
L'A nonyme donné par le Pcre Chifflet ( ? ) , étoit préfenc
lorfque Berenger anathématifa fon héréfic en plein Concile.
Les AmbaiTadeurs du Roi Rodolphe (/) , s'y plaignirent des
tores que le Roi Henri fiifoit en Allemagne , à la Religion ,
aux Eglifes, & aux pcrlonncs c^nfacrécs à Dieu. La plupart
des Evoques étoicnt d'avis qu'on employât les cenfures con-
tre lui. Le Pape crur qu'il falloit différer fur quoi les Am- :

baiïadeurs de ce Prince promirent de fa part , qu'il obéiroit


à tout ce qui feroir ordonné par la Conférence qui le tien-
droit en Allemagne. Ceux de Rodolphe firent la même pro-
mciTe pour leur Maître. L'Archevêque d'Aquilée fit dsns le
même Concile , ferment de fidé:ité au Pape l'Evcquc de ;

Riez promit fous ferment , de garder l'interdit prononcé


contre lui & on renouvella les excommunicacions contre les
;

Evêques de Lombardie, & contre les Clercs & les laïcs qui
leur étoienr arrachés.
Letfrefurla XLIX. La même année le Pape Grégoire VII s'employa,
Pnmatie de
^^^.^ inutilement (m) , à réconcilier les cnfans de Raimond
Berenger , Comte de Barcelone. Gcbouin , Archevêque de

h Tarn. 2. Sj/iciU^. P*oi l Vit.\ Cregtr. p. 4^1. Trm. 9. Ado.


) f. Jo8. Ç?
{ )
(

«dan. I079' M^l-iil. K TcHi. 10. Conc.pa^, 57?»


(i) Idem. Uid. (m) Lil>^.F.piJi.l6.
,

PAPE. Ck. XXXV I r. (<47


jLyon ,exprès !c- voyage de Rome , pour deniander le
fit

l'uiîiutn , &
la confirmation de la Primarie, qu'il dilbit ap-

partenir à l'on Egaie fur les Provinces de Lyon , de Rouen


_,

de Tours & de Sens. Le Pape ilippolant que TArchevêque


ne dcmandoit que la confirmation d'un droit dont fcs prcdc-
ecilcurs avoicnt joui , lui accorda (a demande (?^) , par une
Lettre qu'il luiadrefla. Il en écrivit une autre aux Métropoli-
tains des trois Provinces dont nous venons de parler (<?),.
Tours , Sens &
Rouen ; par laquelle il leur enjoint de recon-
noître pour Primar, l'Archevêque de Lyon. Il en prend oc-
eafion de parler de l'ancienne divifion des Provinces , Sz des
divers degrés de la hiérarchie eccléfiaftique , conformémenc
à ce qu'il en avoir lu dans la faufTc Décrétale qui porte le nom:
d^Anaclct ^& dans une Lettre luppolee à iaint Clément.
Ces deux Lettres font du 20 Avril 1079. Le même jour il en-
écrivit une troifiéme aux Chanoines de Lyon (p) , qui il à.

fait fçavoir que l'un d'eux, c'étoit leur Doyen , avoit remis
entre fes mains les Bénéfices dont il s'étoit emparé , fans le
Gonlentemenc des frcrcs. Il leur ordonne, parla même Lettre,.-
de remettre eux-mêmes entre les mains de leur Archevêque,
les Bénéfices qu'ils avoient obtenus par fimcnic , eu au mépris
de l'excommunication prononcée dans leur Chapitre, par Lan-
dri , Evêquede Mâcon.
L. Dans le recueil des Lettres de Grégoire VU, il y cna Lettres duPa-
deux à Guillaume , Roi d'Angleterre ; dans l'une (q) , il loue ^f. ^''"^ ^'°'*
ce Prince de fon amour pour la juRice ; dans l'autre (r) , qui deNorv.ge&
regardoic l'affaire de la dépofition de Johonce , Evêque de de Suéde.
Dol en Bretagne , il marque qu'il avoit chargé ion Légat
Hubert , de prefler ce Prince de prêter au Saint Siège le fer-
ment de fidélité , & d'y envoyer l'argent que les Rois fes
prédéceflcurs avoient coutume d'envoyer. Le Roi Guillaume
refufa de prêter ce ferment ( j ) , dilant qu'il n'ctoit point
d'ufage: mais il promit de faire pafler à Rome tout l'argent
ue la collede avoit produit. Ce refus mécontenta le Pape :
1
il s'en plaignit a fon Légat (f) , &
plus encore de ce que ce
Prince empêchoit les Evêques d'Angleterre d'aller à Rome;-

( » ) Er>ft. 34. (0 Uh.


J^'''- 4- F;,/.
4. F/"/- 17.

(0) Efijh 5î. 1(0


I

(P) Efifl. 36. {t)Lib.7.E(i(i,i,


(3) Lik. I. £/;/?. 70.
,

6^ GK E GO I R E VIT,
Ordonnez , aux Anglois & aux Normans, d'en-
ajoutoic-il,
voyer de chaque Archevêché , au moins deux Evcques au
Concile que nous tiendrons le Carême prochain. En 1078,
le Pape écrivit à Olaf j Roi de Norvège ( ?< ) , que n'étant
pas aifé , à caufe de l'éloignemcnt des lieux , foit à caufe
foit
<de la différencedes langues , de lui envoyer de Rome , des
perfonnes pour inftruire fes peuples , &
les fortifier dans la
Religion Chrétienne , il le prioit , comme il en avoit déj«
prié le jRoi de Dannemarc , d'envoyer à la Cour Apoftoli-
•que , de jeunes gens de la Noblcffe du pays , pour y êtrein-
ftruits de la Loi de Dieu , & la cultiver enluite
eux - mêmes ,
à leur retour en Norvège. ne demanda point de jeunes gens
Il

au Roi de Suéde ; mais quelques Evcques (x) , ou autre per-


fonne confidérable du Qergé , qui put informer le Saint Siè-
ge des qualiccs du pays, & des mœurs de la Nation , & re-
porter enfuite en Suéde les ordjres du Pape. Cette Lettre eft
du 4 Odojbre 1080.
Ar^^ens"^ LL Le fixiéme de Juin de la même année , Grégoire VIÏ
en écrivit une à TArchevcque de Synnade en Phrygie , à
cette occafion.. Un Prêtre nommé Jean , étoit venu à Rome
fe plaindre , de la part de cet Archevêque , qu'un certain
Machar chaffé d'Arménie pour les erreurs, les avoit enfei-
gnées en cette Ville , comme étant la doûrine des Armé-
niens. Le Prêtre Jean afTura le Pape qu'ils ne penfoient point
ainfi ; & lui donna une profedion de foi orthodoxe. Le Papç
informé que Machar s'étoit retiré dans le Dioccfe de Béné^
vent (y) , écrivit à l'Archevêque de juger l'affaire d£ ccc
hérétique , avec quelques Evêques & l'Abbé de Mont-Caffin
.& enfuite de le bannir de ion Dioccfe , après l'avoir fait mar-
quer d'un fer chatid. Mais voulant s'aflurer de ce que l'on
penfoit en Arménie lur les matières de la foi , il manda à
,

l'Archevêque de Synnade , de lui écrire ce .qu'il encroyoit;


& en particulier , s'il étoit vxai qu'au faint Sacrifice , il ne
mclàt point d'eau dans le vin ; qu'il fit le faint Ciircme, nog»
avec du bauiTie mais avec du beurre ;s'il honoroit & approu-
.,

voit l'héréfiarque Diofcore , quoique condamné & dépolr


dans Je Concile de Calcédoine j s'il recevoit les cinq premiers

ConciL's
PAPE. Ch. XXXVII. /54P
Conciles généraux. Il l'exhorte à ne plus ajouter au Trifa-
gion , ces paroles: ^id avez été crucifié poumons , puifque les
Eglifes d'Orient &
celle de Rome, ne les ajoutoient pas ; &
de continuer à célébrer le faint Sacrifice avec du pain azy-
me , fans s'inquiéter des reproches que les Grecs pouvoient
lui faire à ce fujet , comme ils en faifoient à l'Eglife Romai-

ne. Nous avons , dit le Pape , des railbns invincibles pour


foutenir l'ulagc du pain fans levain dans le Sacrifice ; mais
nous ne condamnons ni ne réprouvons le pain fermente des
Grecs; ayant appris de l'Apôtre , que tout eji pur pour ceux qui Tit. i, ly.

font pur s,
LU. Le Roi Henri cherchant tous les moyens de mettre Concile de
le Roi Rodolphe hors d'état de lui conrefter le Trône ( z ) , RomeemoSo.

lui livra bataille le 27 de Janvier , l'an 1030.


une troitiéme
La pour Rodolphe , qui auiïi-tôt en don-
vi£loire fe déclara
na avis au Pape. Il tcnoit à Rome fon feptiémc Concile,
lorfque les Ambafladcurs de ce Prince y arrivèrent. Ils re-
nouvellerent les plaintes déjà faites contre le Roi Henri , di-
fant qu'il mectoit tout à feu & à fang ; qu'il chaflbit les Ar-
chevêques &
les Evêques de leurs Sièges {a), pour les don-

ner à les partifans ; qu'il bruloit les Eglifes , tourmentoit


ceux qui refufoient de lui obéir, en conféquence du Décret
du Saint Siège ; que fi la Conférence ordonnée par le der-
nier Concile, pour la pacification de l'Allemagne , ne s'étoit
point tenue , il ne falloit s'en prendre qu'à ce Prince. Il fe
trouva à ce Concile grand nombre d'Archevêques , d'Evê-
ques , d'Abbés , de Clercs & de laïques. On y confirma ce
qui avoir été ordonné dans les précédens (^) , contre les in-
veflitures &contre les faufit>s pénitences; la fentence de dé-
polition &d'excommunication portée contre Tedald à Mi-
lan ( c ) , Guibert de Ravenne , Rolland quelques autres &
Evêques (^ ) , & contre les ufurpateurs des biens de TEgUfe,
nommément contre ceux qui avoient enlevé une fomme d'ar-
gent mife en dépôt à Mont-CaflTm. Il fut ordonné qu'à la
mort d'un Evêque ( e ) , le Vifiteur député par le Pape ou
par le Métropolitain , aura foin que l'élection d'un fuccef-

(i) Bruno, àe belU Saxon, fag il4 (*) Can. t. j.


|
BerthoiD. »d an. i«8o. (,') Can. j.
J
(a) VitaGregor. p. 45- i, Tom. f,A3»r.\ (d) Can. }.
MaHlton. i
(0 Cau. 4.
Tome XX, Nnnn
6$D GREGOIRE VIT,
feur fc fafle librement par le Clergé & le peuple (/), conformé-
. . ment aux Canons.
eftdépoféV& Lnr. Le Pape ayant enfuite rapporté les fujets de plaintes
Rodolphe que le Roi Henri avoit donnés à TEglife 8c à l'Etat l'ex- ,

confirmeRoi.
çQj^^uj^j^ & fes fauteurs, & lui otaRoyaume d'Alle-
le
magne & d'Italie ;
puis donna à Rodolphe le Royaume Teu-
tonique accordant à tous ceux qui lui feroient fidèles , le
,

pardon de leurs péchés , au nom des Apôtres faint Pierre &


faint Paul. L'Ade de la dépofition du Roi Henri eft du fep-
tiéme de Mars 1080. En mémoire de cet événement (g), le
Pape mit cette infcription fur la couronne qu'il envoya au
Roi Rodolphe Petra dédit Petro , Petrus diadema Rodulpko,
:

On agita dans le même Concile ( ^ , la difficulté mue depuis )

long-tems entre l'Archevêque de Tours & l'Evêque de Do!


en Bretagne , au fujet du droit de Métropole mais les par- :

ties ne s'étant pas trouvées en preuves fuffilantes, elle ne pue


être décidée. La fentence rendue contre ManalTés , Arche-
vêque de Reims, par le Légat Hugues , Evêque de Die , fut
confirmée. Le Pape lui donna néanmoins du délai (i) » pour
fe purger devant quelques Evêques qu'il lui nomma. N'en
ayant rien voulu faire , le Pape le déclara excommunié &
dépofc , fans efpérance d'être rétabli. Il ordonna au Clergé
& au peuple de Reims ( /) , & aux Evêques delà Province ,
de procéder à l'élcdion d'un autre Archevêque , du confente-
ment du Légat Hugues. Il recommanda cette éle£lion au Roi
Philippe &
à Ebles , Comte de Rouen (m). Elle eut lieu , &
Manafles fut chalTé de fon Eglife.
Guibert de LIV. Le Roi Henri ayant appris la nouvelle de fon ex-
Ravenne , communication , en fut pénétré de douleur. Ne fcachant quel
Antipape.
parti prendre («) , il relolut , après bien des perplexités , de
choifir un autre Pape. L'Aflemblée où cette éledion fe de-
voif faire , fut indiquée à Brixen dans le Tirol trente Evê- :

ques & grand nombre de Seigneurs s'y rendirent ; & quoi-


qu'il n'y eût perfonne pour reprélenter l'Egiife Romaine ,
que le Cardinal Hugues- le- Blanc , dcpofé anathématifé &

(f) Cm». 6. (m) Epifî. 18. zo.


(y) 7om. 10. Cent.pag, 38 J« (fi ) CtNTii'S Camrrar. lit. Ctnfual.
(b) lih.y.tfiji. 1;. i^ Chrcnic. XJfferg. ad au, 1080. QJ T«W.
{i)rpiii. 10. lO.Conc.pag. 38?.
,

PAPE. Ch. XXXVI t. 651


dans les Conciles de Rome, ils élurent Pape, Guiberc , Ar-
chevêque de Ravenne, qui, dès l'an 1075 , avoic tâché d'u-
furper le Saint Siège. 11 prit le nom de Clément III. Le Dé-
cret de fon élection n efl: que du 2 5 de Juin , quoique les E-
vcques fe fufifent aflemblés dès le 3 i de Mai , qui étoit le
jour de la Pentecôte mais l'Abbé d'Uiperge remarque qu'ils
:

s'afTemblerent deux fois ; la première à Mayence , le 31 de


Mai ; la féconde à Btixcn , le 25 de Juin. Guibert entra
en Italie avec les ornemens de la dignité papale , accom-
pagné de ceux qui avcient eu le plus de part à ion élec-
tion.
LV. Avant , le Pape Grégoire avoit écrit plu- Le PapeGré-
qu'elle fe fît
(leurs Lettres à Guillaume, Roi d'Angleterre {0) , à la Reine Éfe™'.
Mathilde fon époufe , & au Prince Robert leur fils , pour leur
demander du fecours contre les ennemis de l'Eglife. Il avoit
auiTi reçu en Grèce, Robert Guifchard , Duc de Pouillc , Jour-
dain , Prince de Capoue , & les principaux Seigneurs des Nor-
mans, excommuniés plufieurs fois. Nous avons encore les Actes
pafTés avec le Duc Robert en cette occadon (p); où Ton voit qu'il
promit fidélité à l'Eglifc Romaine , & au Pape Grégoire, de le
défendre contre tous. Mais quand il apprit l'éledtion de l'An-
tipape Guibert , il envoya des Légats en Pouille & en Cala-
bre , avec une Lettre aux Evêques de ces Provinces ( ^ )
pour ics engager à fecourir l'Eglile, & par leurs prières &
en toute autre manière qu'ils pourroient. Il leur renouvelle
le fouvenir de l'ancienne conspiration de Guibert , & des
crimes pour lefquels il avoit été noté par tout le monde Chré-
tien. La féconde Lettre qu'il leur écrivit (r), étoit pour les
exhorter cà encourager les troupes que Robert Guifchard de-
voir faire pafTcr en Grèce pour fecourir l'Empereur Michel
dépofé injuftemcnt deux ans auparavant. Il en adrefla une à
tous les fidèles de faint Pierre {s) , dans laquelle il leur dit,
qu'avec le fecours que plufieurs Seigneurs lui avoient promis
il iroit à mains armées délivrer l'Eglile de Ravenne de la main

des impies. On ne voit pas que le Pape ait exécuté ce projet;


mais après avoir exhorté le Clergé & le peuple de Ravenne
& les Evêques voifins (r) , à choilir un autre Evêque j il leur

(») Lib. 7. Epifl. 1 5 . z ,-. 1 é. 17. I ^f) Epifl. 6.


(f)Tom.io.Conc.f.i'^o. 1 (s) Epij}. 7.

(j) Epifi. f. lit, 8. 1(0 ^P'P- !»• I J'U.


Nnnnij
,
.

6yi GRÉGOIRE VT T ,

envoya Richard , Clerc deî'Eglife Romaine , pour le mettre


à la place de Guibert.

p^od"'i" ^f
LVl. Le I ç d'Octobre 1080 , il y eat une Tanglante ba-
Roi°Hcnri ^taille fur la rivière d'Elder (m). L'armée du Roi Henri fut
pafleeniialie. mifc en dcroute par les Saxons mais la mort du Roi Rodol-
:

phe leur ôta le fruit de leur viftoire. Dans le môme tems le


fils du Roi Henri livra bataille à l'armée de la Comteffe Ma-

thilde , & remporta la vi£toire {x). Alors ion père ne trou-


vant plus d'obftacles , entra en Italie au mois de Mars 108 1
Il ne permit à perfonne de prendre le chemin de Rome ,
qu'après ferment prêté de ne point aller trouver le Pape Gré-
goire , c'cft-à-dire , de ne le pas reconnoitre pour Pape s'a- •,

vança vers Pvome avec fon armée (y ) fit le dégât par-tour, ;

& renverfa tout ce qui s'oppofa à fa marche. 11 menoit avec


lui l'Antipape Guibert (z). Dans ces circondances , le Pape
Grégoire écrivit à Altman , Evcque de PaiTau (a) , & à Guil-
laume, Abbé d'Hirfauge , que depuis la mort de Rodolphe,
tous fcs amis lui confeilloient de fc réconcilier avec le Roi
Henri , à qui prefque tous les Italiens obéifiToient qu'il lui ;

paroiflbit que la Comteffe Mathildc n'avoit point d'autre


parti à prendre , que de faire fa paix avec ce Prince ; qu'au
furplus ils dévoient exhorter Guelfe , Duc de Bavière , à de-
meurer fidèle à l'Eglife Romaine, &
empêcher qu'on n'élût
point de Fvoi à la place de Rodolphe, qui n'eût les qualités
néceflaires à cette dignité. Altman 8c Guillaume étoient Lé-
gats du Saint Siège en Allemagne. Le Pape écrivit encore
à Didier , Abbé de Mont-Caflin (b) , de fçavoir de Robert
Duc de Calabre , s'il viendroit au iecours de l'Eglife Ro-
maine. Le Roi Henri en demanda auffi à ce Duc; qui n'en
accorda ni à l'un ni à l'autre. Il paroit iculement qu'il don-
na ordre à fon fils Roger , Gouverneur de la Pouille , de
lecourir le Saint Siège contre le Roi Henri , quand il en fe-
roit prié.
Concile de LVII. Quelque fachcufe que fût la firuation du Pape , il
RomeenioSr, ne biffa pas de tenir un Concile à Rome (r) , qui eft comp-

(m) EarNO Je Eello Saxon, page zi6. (ï)Bkr.thold. ai an. loSu


217-
(*) L/)iy?. 4. C5 Paci, lia an, 1081. num.
(y ) Amtiym. in vita Ilrtiru. Pacx,<»«/
fff.1080. tium. <), (t) Berihold. ni an, loSi.
. ,

PAPE. Ch. XXXVTI. (?55


te pour le huitième de fon Pontificac. Tout ce que l'on en
l'dj-ait , c'cfl; qu'il y excommun-a une rcconde fois Henri 8c
ceux de Ion parti ; qu'il confirma la fcntence de dépofirion
prononcée Tannée précédente, au Concile d'Avignon, con-
tre les Archcvê.^ues d'Arles &
de Narbonne, par le Légat
Hugues , Evêque de Die.
LVIII. Le Koi Henri arriva devant Rome avec fon Anti- t.e Roi Henri

pape (d) , le 2 3 de Mai loS i mais les Romains l'empcche-


:
'^<^^^"'''^''"^'^'

rent d'y encrer; en lorte qu'après avoir ravagé le pays il ,

fut contraint de retourner en Lombardie. Son deiïein ctoit


d'attaquer la Comteflc Marhilde (f) , la feule qui eût une
armée fur pied, pour la défenle de Grégoire VII. Elle n'é-
pargna pour f défenfc , ni fes vaflTaux , ni fcs richcflcs ; &
i

voyant qu'elles ne pouvoiont futiîre aux frais de la guerre , ni


à l'entretien des Evê^ucs, des Clercs & des Moines , qui
chafTés de leurs Villes par le Roi Henri , fe réfugioient chez
elle ; de l'avis de faint Anfelme de Luques , elle prit tour ce
qu'elle & fes prédéceiTeurs avoient donné à l'Eglife de Ca-
nofle , avec promeflc de reftitution après la paix. Au mois
de Mars de l'an 1082 (/) ,1e Roi Henri fe ptéfcnta une fé-
conde fois devant Rome il en occupa les dehors jufqu'aux
:

Fêtes de Pâques. L'approche des chaleurs de i'ctc l'obligea à


lever le fiége;& laiflant le commandement de fon armée à l'An-
tipape , il retourna en Lombardie avec peu de monde. Ce-
pendant les Saxons & les Allcmans, du parti de Rodolphe,
élurent pour fon fuccefTeur , Laurent Herman , Seigneur de
Luxembourg. Il célébra à Gollar la P'ète de Noël en 1082
& fut couronné le lendemain par Sigefroi , Archevêque de
Mayence (g) , du confentemcnt des Seigneurs. Il fe mit en
chemin pour aller au fecours du Pape Grégoire: il s'étoit déjà
avancé jufqu'en Suabe mais fes propres affaires l'obligèrent
-,

de revenir en S^-kc. Le Roi Henri marcha vers Rome pour


la troifiéme fois en loS ^ & voyant qu'il n'avoit pu jufqucs-
;

là s'en emparer par la force des armes , il eut recours à la


rufe. Il feignit de vouloir fe juftificr auprès de Hugues , Abbé
de Cluni & de plufieurs autres faints pcrfonnages , qui le re-

{d) Ek)LLAND. Ail.t Gregor. cip. ?. pa^. (f) Acl.i Gregor. apiti Boll.if/J. tom.
j,
6x9. Tom. ^. Mait. Maii.p.if. 91').
(*) Lt'Pt's Frotufp. in Chron. ad an. (?) Bai'NO , i!e Betio Saxon, p. z^i,\^
loSl. Qî Paoi ad an, loSi. », 4. Mai^Iam. Scot.ad an. 1082
,

554 GREGOIREVir,
gardoient ; & recevoir la Couronne im-
comme excommunié
périale main du Pape Grégoire. Les Romains le croyant
de la
dans cette difpoficion , fe jetteront aux pieds du Pape (A),
le priant avec larmes d'avoir pitié de leur patrie , qui fe trou-
voit à la veilie de fa ruine. Le Pape prêta donner la vie pour
la défenfe de la jaflice & de la liberté eccléfiaftique , leur re-
prélenta qu'il avoit éprouvé plus d'une fois les artifices de ce
Prince; que néanmoins il vouloir bien rabfoudre& lui donner
la Couronne impériale, fi de fon côté il étoit difpofé defatis-
faire à Dieu &r à l'Eglife.
Concile de LIX. Le Roi refufa de faire cette fàtisfa£lion ( z ) ; mais il
ome.n.o
i'^^Qj^^int de tenir un Concile au mois de Novembre , où la
queflion de la royauté feroit décidée que lui & les Romains;

en obferveroient les Décrets , & qu'il donneroit fureté à tous


ceux qui voudroient venir à cette AfTemblée. Elle fe tint au
rems marqué ; mais elle ne fut point fi nombreufe qu'on l'avoit
efpéré , parce que le Roi Henri fit arrêter en chemin la plupart
de ceux qui dévoient s'y rendre. Le Pape y parla de la foi , de
la morale chrétienne , & de la conliance nécefiTaire dans la
perfécution , en des termes fi touchans , qu'il tira les larmes de

tous lesafiiftans(/). Il nerenouvella point l'excommunication


contre le Roi Henri ; mais il excommunia en général , quicon-
que avoit empêché de venir au Concile , ceux que le Pape y
avoit invirés.
Le Roi Henri LX. Ce Princc palTa l'hyvcr aux environs de Rome (;«)
^""^'^^"!,^''"
en attendant que Guibert de Ravennc arrivât. Pendant ce
me en 1084. -i v 1 i't^ ai •
i

rems il employa 1 argent que 1 Empereur Alexis lui avoit en-


voyé , pour faire la guerre à Robert Guifchard en Italie , à
gagner le peuple Romain ; & ce fut avec fon fecours qu'il
entra dans le Palais de Latran avec l'Antipape , le Jeudi
d'avant le Dimanche des Rameaux , c'eft-à-dire , le 2 i de
Mars 087. Mais la plupart des nobles Romains de-
l'an i

meurèrent attachés au Pape Grégoire , qui fe retira au Châ-


teau Saint-Ange , confervant en ion pouvoir les ponts du
Tibre , & les plus fortes places des Romains. Le jour de
Pâques, 31 de Mars, le Roi reçut la Couronne impériale
des mains de Guibert , appelle Clément III ; 6c dans le cou-

(h) AflaGregcr. apud BolUnd. tem, ;. (0 Tom. 10. Co«f. /i.if. 401. 401.
(
^izii.p. (.\^.n.\^. I (m) AhbisUfperf^ciif. ad an. 1084. (Jt
(;) Ibid. ttttin- 16. I
BeRTHOLD, »d n». 10U4.
. ,

^
PAPE. Ch. XXXVII. tf5j
rant de la mcme Icmaine , il afficgca la fortcrefle où le Pape
s'étoic retiré. Robert Guifchard («) , qui , des Tan 1082 , écoit
revenu d'illyric en Fouille , &; fc difpofoir à retourner en
Illyrie , alla en diligence au fecours de Grégoire. Le Roi
Henri n'attendit pas la venue d'un ennemi dont il connoif-
foit la valeur. Il quitta Rome , & reprit le chemin de la Lom-
bardie. Robert remit le Pape au Palais de Latran (0) , & fie
rentrer fous fon obéiflTance plufieurs Villes Châteaux , que &
Henri avoit contraint de s'en féparer. Ce Prince , en fortant
de Rome, fe faifit du fceau du Pape Grégoire, emmena &
avec lui l'Evêque de Porto , qu'il içavoit avoir été dans fa
confiance. La Comtefle Mathilde continuoit à prendre les in-
térêts de l'Eglifc ; & craignant que le Roi Henri n'abusât de
ce fceau pour tromper les Allemans (p) , elle leur écrivit ce qui
étoit arrivé ; le vol du fceau du Pape , & la fuite de Henri &
de fon Antipape.
LXL Grégoire VIT en liberté dans Rome , y tint fon di- Concile cîe
xiéme Concile , où il excommunia de nouveau Guibcrt , ieRo'neenio84.
Roi Henri &
leurs fauteurs. Il fit publier cette fentence en
Allemagne , par Otton , Evêque d'Ortie , fon Légat (^) ; &
en France , par Pierre , Evcque d'Albane. Sa dernière adion
de marque à Rome , fut la fuppreiïion de foixante Manfio-
naires , qui occupoient tous les oratoires de l'Eglife de Saint
Pierre , excepté le grand Autel , &
faifoient leur profit de
toutes les offrandes des pèlerins. C'étoient des gens mariés
qui n'étoient diflingués des autres féculiers , qu'en ce qu'ils
fe faifoient rafer la barbe comme les Clercs : leur vie étoic
d'ailleurs licentieufe. Le Pape mit à leur place des Clercs
bien réglés (r) , à qui il donna la garde de cette Eglife. Quel-

que tems après , il partit pour le Mont-CaiTin (s), 8c pafTa


de-là à Falerne où il demeura jufqu'à fa mort, fous la pro-
,

tedtion du Duc Robert ; défrayé avec les Cardinaux les &


Evoques de fa fuite , par Didier , Abbé de Mont-CafTin, Etant
tombé dangereufemcnt malade , les Evèques les Cardi- &

( n) PaGI , ad an, 1084. «• f (q) Tom. 10. Coric.p. 401. î5 Pagi, ad


(0) Centius Camerar. lib, Cenfu»Ii
, > an. 1084. n. 1 1.
tap. 3. (r ) Aila Gregor. aftid Bolland. tom, J.
(^)HrGO TIavin. tom. i. Eibliot. nov. Al.i»i, p, ifj. cap. ;.

Lëbb.fag,^ i Ad ad an. loi'^'n. Il, i (s) Cbroti, Caffintnf, lib. j. e. if


,

6^6 G R E GO IR E VI I,
naux le prièrent de fe nommer un
, qui pût pren-
lucceffcur
dre la défcnfe de l'Eglife contre l'Antipape Guibert. Il leur
en nomma trois, Otton, Evêque d'Oflic, Lcgar en France ;
Hugues, Archevêque de Lyon ; & Didier , Abbé de Mont-
Callin i mais réloignement des deux premiers fit qu'illeur pré-
féra Didier, qui en effet lui iuccéda.
Mort de Gré- LXIl. Etant prêt de mourir , on lui demanda s'il vouloic
^" ^^'^^ d'indulgence envers ceux qu'il avoir leparés de la com-
foir
munion de TEglile , il répondit: l'exception du prétendu A
Roi Henri , de l'Antipape Guibert & de leurs principaux
paitilans , j'abfous & je bénis tous ceux qui m'en croient le
pouvoir. Ses dernières paroles furent J'ai aimé la juftice 8c :

haï l'iniquité ( t ) ' ^'^^ pourquoi re meurs en exil. Sa more


arriva le 2% de Mai 1085 on Tinhuma à Salerne dans l'E-
:

glife de faint Matthieu , dont les reliques y avoient été trou-


vées quelques années aup.iravant (n) , par l'Archevêque Al-
fane. Orderic Vital, Hiflorien d'ailleurs exa<5l,s'e(I trompé,
en difant que Grégoire VII mourut à Bénévent (.v) , & qu'il
y fut enterré près du tombeau de faint Barthéicmi. Paul de
Bcrneried , Auteur contemporain , les AQ.es Pontificaux,
Sigebert de Gcmblours , & plufieurs autres ( v) , s'accordent
à mettre ia mort & fa fépulture à Salerne. Ce qui met la cho-
ie hors de doute , c'eft qu'en 1577 , Marc-Antoine Colon-
ne , Archevêque de Salerne ( s ) , trouva fon corps prefque
entier , revêtu des ornemens pontificaux , dans l'Eglife Mé-
tropoliraine de cette Ville. Le Pape Grégoire XIII fit infé-
rer fon nom au Martyrologe Romain , en 1584: & Paul V,
par un Bref de l'an 1605) (<ai) , permit à l'Archevêque , au
Cha^)itre & au Clergé de Salerne , de l'honorer comme Saint,
& d'en faire chaque année l'Office fous le rit double, le jour
de fi fête & de la tranflation de fes reliques.
Vie lie Gré- LXIIl. Sa vie fut écrite quarante-cinq ans après fa mort,
fauMe' Ber P^"" P^"W Chanoine régulier de Berneried en Bavi.re. Il
rcried & par avoit été auparavant Chanoine de l'Eglife de Ratifbonne;
Doranifon. p^^j^, j^ j^^, ficm-i jy voyant qu'il prenoit parti contre lui

l'en chjfia. Apiès avoir demeuré quelques années à Berne»

(f ) Vit,i Grtgor. p. 45e. Tom. p. .ARor. /«p. BoilAND. Tom. î. Maii , fagt 6x4,
SifFBFRT, (irfun. io9î.
(«) Epift. 8 lib. 8. (x.) fioLLAtiD. aJ Hiein 1; Maii.p. Î70,
(.v) Orduiic Viial. lib. 8. nitm, 7.

(7J '"•' Gjf^of. afiid MaUllon , ubi (t)ïbii,fagef7i.


ried y
P APE. Ch. XXXVII. <Î57
ried , il alla à Rome ,
où il gagna les bonnes grâces de Gré-
goire VII. Son iéjour en cette Ville lui donna lieu de re-
cueillir les principales circonftances de fa vie de Ion Pon- &
tificat : il recueillit même plufieurs de fes Lettres & de les
actions miraculeulcs. Ces mémoires lui fervirent depuis , pour
compofer la vie de ce laint Pape ; que Gretzer , Bollandus
& Dom Mabillon, ont fait imprimer dans leurs Colledions.
Paul ajouta à la fin de la vie de Grégoire VII , ce qu'en
avoir dit faint Anfelme , Evcque de Luques , dans fes Com-
mentaires fur les Pfcaumes. Outre cette vie , Paul compofa
celle de la bicnheurcufe vierge Herluce(â:), rapportée par
Gretzer, avec celle de Grégoire, & l'Apologie de Baronius
contre Goldafl;; &
par Bollandus, au dix-huiticme d'Avril,
Nous avons une autre vie de Grégoire VII , par Domnifon,
Prêtre «fe Moine de Canode. Dom Mabillon l'a jointe dans
le neuvième Tome des Ades de l'Ordre , à celle que Paul
de Berneried a compolce mais ce ne font que des morceaux
:

détachés de la vie de la Princeffe Mathilde , que le même


Domnifon a écrite en vers , partie hexamètres , partie léo-
nins. Elle efl divifée en deux livres (b) , & imprimée dans le
premier Tome des Ecrivains de Brunfwic , de la CoIle£lion
de Godefroi Leibnitz , à Hanovre en 1707. On l'a voit mife
fous preflfe dès l'an 1612 , à Ingolftat , avec divers autres mo-
numens pour la défenfe de Grégoire VII , contre les fchif-
matiques ; & en l'a réimprimée depuis , plus correcte plus &
ample , dans le cinquième Tome des Ecrivains d'Italie (c) ,
avec les notes de M. Leibnitz &
de M. Muratori. Domni-
fon l'écrivit du vivant même de la Comtefle Mathilde, avec
qui il demeura long-tems à Canoflc, en qualité de fon Cha-
pelain , & la lui dédia mais elle mourut avant que l'Ouvra-
:

ge fut achevé. Domnifon


donc la dernière main qu'a-
n'y mit
près l'an iiip, qui mort de Mathilde. Sa vie
fut celui de la
fut encore écrite en profe, par un Anonyme (^). Sandius
fait Domnifon Auteur de cette féconde vie; & cite l'endroic
où il eft parlé de l'amour que Théobald , Evêque d'Arczzo,
avoit pour la challeté. Je ne fçais pourquoi M. Fabricius

(.1) MABil.Tcni. p, Ailor.pag, 406. l^ \ (c) Pag. î^f.


^57. I {d)Script» Brunfv.ttm. l.p, ô'i?.

i6) Pag. 619. [


Tome XX. Ooop
6^S GREGOIREVII,
dit que cette vie compofée en profe ( e) , citée par San-
,
dius , n'a point encore vu le jour , puifqu'elle fe trouve à la
fuite de celle qui efl en vers , dans le premier Tome des
Ecrivains de Brunfvic , & qu'on y lit le trait marqué par
Sandius. Le voici : L'Evêque Thcobald attaqué d'une ma-
ladie (/) , où les Médecins ne voyoient point de remède que
l'adultère , fes amis lui confeillerent de le commettre pour
fauver ia vie , & firent venir une femme. Etant arrivée , l'E-
vêque ordonna 'd'allumer du feu devant fon lit il s'en ap- :

proche & fentant l'ardeur des flammes , il s'écrie en pleu-


;

rant Malheur à moi


: fi je ne puis fupporrer un degré fi lé-
!

ger de chaleur , comment pourrois-je endurer les flammes


de l'enfer auxquelles je ferai condamné en commettant le
crime qu'on me conieille ? A Dieu ne plaife , que pour me
procurer une fantc temporelle , je me prive du ialut éternel.
Cet exemple fervit de leçon à Ion peuple ; & Dieu renvoya la
fanté à l'Evéque.
Ecrits de LXIV. On
peut mettre encore au nombre des Hifloriens
G VII, laint Anfelme de Luques , Lambert de
'^^ ^''^'S^'^'^
SesTeitrl^^'
Schafnabourg , Hugues de Flavigny , Bertold , Marianus
Scotus , & quelques autres dont nous parlerons dans la luire.
Venons à fes Ecrits. Nous avons de lui, dans les Colledions
des Conciles _, un grand nombre de Lettres, que l'on a di-
ftribuées en onze Livres, félon les années de fon Pontificat.
Le premier en contient 85 , le fécond jj j le troifiéme a 1 y
le quatrième 28 , le cinquième 23 , le iixiéme 40, le feptié-
me 28 , le huitième 23 , le neuvième 34 , le dixième manque.
Il n'y en a que deux pour l'onzième. Suivent deux Appen-

dices , l'un de trois , l'autre de fix Lettres ; en tout 370 , aux-


quelles il en faut ajouter fept publiées par M. Baluze, dans
le fcptième Tome de fes Mélanges (g). Il s'en trouve en-
core dans le Code épiflolaire d'Udalric de Bambcrg, publié
par M. Eccard (h) ; dans le troilième Tome des Conciles
d'Efpagne (/) , par le Cardinal d'Aguirre ; dans la vie de
Grégoire VII (/) , par Paul de Bcrncricd ; dans la Chro-

COFabricuis, Bibliot.Lttin. tom. i.p. l (h) Tom. z. Script. Medii xvi ,


p. Hl»
l(S. (•;) Pfljr. 146.
J
(/) Script. Bmufv. tom. t.p, 6$i. 1 ( / ) Mabulon. Tom. Ç). ASor. p. 410.
f;p,i^. 115. lez/ry'
PAPE. Ch. XXXVII. 6^9
nique de Hugues de Flavigny (m) , dans les Collections de
Dom Mdrtenne & ailleurs ; mais la plupart font partie des
onze Livres ou du Regiftre imprime parmi les Conciles. Le
Père Hardouin ne les a pas routes inlérces dans fa Collec-
tion. Il s'eft borne à celles qui lui ont paru les plus intcref-
fantcs. Il auroit du en ce cas («), fupprimer les 27 articles
ou maximes qui le lifent cnfuite de la cinquante -cinquième
Lettre du fécond Livre , fous le titre de DiElattis Pap^ , ou
dccifions du Pape ,
puifcju ils font communément rejettes com-
me apocryphes.
LXV. Ces articles n'ont en effet aucune liaifon avec la J„^^ ç«"''7'««»
<»/'^ n eft pas
r r
.

Lettre Cinquante-Cinquième ,
. . /

m.

avec la cinquante -lixicme,(]e Grégoire


I . '

entre lefquelles ils font places. Il eft vrai que Baronius les a VII,
rapportés comme des dccifions du feptiéme Concile de Rome
en 1077 (0 ) mais il n'en donne aucune preuve. Bellarmin
:

& le Père Labbe n'en font point mention dans leurs Catalo-
gues des Ecrivains Eccléfiaftiques , à l'article du Pape Gré-
goire VII. Ils ne parlent que de fes Lettres ; le dernier , en &
les rapportant dans la Colledion des Conciles , ne dit pas
qu'ils foient ou de ce Pape, ou de quelque Concile tenu fous
fon Pontificat. Il y a d'ailleurs dans ce Diâiatus , des propo-
Jltions fi & fi contraires à l'ancienne difcipline de
fingulieres
l'Eglife que les ennemis de Grégoire VII , entre autres,
,

le Cardinal Bennon , qui ne cherchoit qu'à le calomnier ,


n'auroient pas manqué de les relever , s'ils en eufllent eu con-
noiflance. Il faut donc les attribuer plutôt à quelque ennemi
du Saint Siège (/?) , qu'à un Pape aufTi fçavant & aufli éclai-
ré que l'étoit Grégoire VII. On en jugera par la letlure de
ce Di^atus , où l'impofture , entre plufieurs fauffes fuppofi-
tions, ne laifle pas d'en avancer de véritables , pour donner
plus de cours à fa pièce. Voici quels en font les articles. L'E-
glife Romaine a été fondée par le Seigneur feu! (q). Le Pon-
tife Romain efl le feul qui ait droit d'être appelle univer-
Xel (r). Il eft le feul qui puiffe dépofer les Evêques les ré- &

fra) Labb. Tom, I. nov. Biùl. pag. 198. (p) Pagi , ad an. 1077. " 8. Ç5 Nat.1l.
.'Itxander t in part. i. fgctlli il. ^ It.
{ri) Ha&DOIN. Ton.. 4. Cant, fag. Diff,rt. 5. art. ij,
504. (•l)
Art. I.

(0) B&ROti* ad »n, 107^^ (r) Art.i.

Ooooij
. ,

66o GREGOIRE VII,


tablir (5). Son Légat
quoique d'un rang inférieur, préfide
,
à tous les Evcques dans les Conciles , & peut prononcer con-
tre eux une fentence de dépofition (r)* ^^ ^^ ^^ pouvoir du
Pape de dépofer un abfent («). On ne doit point demeurer
en une même maifon avec ceux qu'il a excommuniés ( j? ).
II n'appartient qu'à lui de faire de nouvelles Loix , ielon le

befoin des tems , d'établir de nouvelles Eglii'es , de faire une


Abbaye d'une Chanoinie , de diviler un Evcche riche (y),
& d'en unir qui font pauvres ( z ). Il a feul le droit de porter
les ornemens Impériaux ; & le feul à qui les Princes doivent
baifer les pieds ( « )• H n'y a que lui dont on récite le nom
dans les Eglifes (&) ; & fon nom eR unique dans le monde
c'eft-à-dire , apparemment qu'il efl le feul qui ait droit d être
nommé Pape permis de dépofer les Empe-
( c ). 11 lui efl

reurs ij) ; de transférer les Evêques d'un Siège à un autre ,


quand il y a néceflTué (e) : d'ordonner des Clercs pour quel-
que Eglife que ce foit (/) ; en forte qu'un C'Crc ordonné
par lui , peut préfider à une autre Eglife , mais non pas y fer-
vir. Il ne peut non plus être promu à un dég é fupérieur par
un autre Evêque (g). On ne doit convoquer aucun Concile
général fans l'ordre du Pape , ni reconnoître , fans fon au-
torité , aucun Livre pour canonique ( h ). Son jugement ne
peut être réformé de perfonne , & il peut réformer ceux des
autres (?'). Perfonne n'a droit de le juger (/; , ni de condam-
ner celui qui a appelle au Saint Siège (?« ). Les caules ma-
jeures de toutes les Eglifes lui doivent être portées (»). L"E-
glife Romaine n'a jamais erré , & n'errera jamais , félon le
témoignage de l'Ecriture {0). Le Pape élu canoniquement ,
devient ,
par les mérites de faint Pierre
indubitablement ,

faint , fuivant le témoignage d'Ennodius , Evêque de


Pavie, approuvé par les faints Pères (p) , comme on le lie

0) Art. j. (e) Art. rj.


(»1 Art. 4. (/) Art. .4.
(«) Art. f in) Art. ij.
{*) Art. 6. (*) Art. 16.
(y) Art. 7. ( « ) An. 17.
(O Art. 8. \l)Ari. 18.
(<i) Art. 9» (to) Art. 19.
(b) Art. 10. («) Hrp. 20. il.
(c) Art, 1 1. (0) Art. 22.
i^d) Art. 11. {})_Art. 2J.

-OOOO
,

P A P E. Ch. XXXVII. é6i


dans le Décret du Pape Symmaque. Par Tordre du Pape
ou avec fa pcr.i iîfion , il ell permis à un inférieur d'accufer
fcs Supérieurs (q). Il peut , lans alfcmblcr un Synode , dépo-
fcr ou rétablir les Evoques ( r). Celui qui n'eft pas d'accord
avec l'Eglife Romaine, n'eft pas Catholique (s). Le Pape a
le pouvoir d'abfoudre les fujets du ferment de fidélité fait
aux Princes injuftes (r). Le neuvième article eft tiré de la
fauflTe donation de Conftantin. Le vingt- troifiéme ne rend

point la penfée d'Ennodius. Cet Evêque ne parle que de la


fainteté du miniflere Pontifical («); & ne dit point que ceux-
là font faints perfonnellement, qui en font les fondions , ou
qui font élus pour les remplir. Ce qu'on lit dans l'article û"
xicme, qu'il ne faut pas demeurer dans la même maifon avec
celui que le Pape a excommunié, eft abfolument contraire à
ce que Grégoire VU
déclara dans fon quatrième Concile;
fçavoir , que les femmes , les enfans , les domelliques , pou-
voienr demeurer dans une même maifon avec l'excommunié,
fans encourir Texcommunicarion. Il n'eft pas même vraifem-
blable qu'il ait réfervé au Pape , à l'exclufion de tout autre
Evêque , le droit de faire de nouvelles Loix dans les befoins
preffans d'une Eglife. Pouvoit-il ignorer les Statuts de tant
de Conciles provinciaux , nationaux & généraux ? Il dit lui-
même, dans une de fes Lettres à Annon , Archevêque de
Cologne (vv) , qu'il s'appliquoit plus à renouvcller les Décrets
des anciens Pères, &
à exécuter les Canons , qu'à en faire de
nouveaux ; &
quoiqu'il ajoute dans la même Lettre, que l'E-
glife Romaine a toujours été en droit de faire des Loix nou-
velles contre les nouveaux excès , il a foin de marquer que
ce droit appartient à l'Eglite Romaine, non au Pape feul,' &
comme le dit la propofition du DiHatus. L'article dixième /
qui porte que l'on ne récitoit point d'autre nom dans les Egli-
fes , que celui du Pape , eft villblement contraire à Fufage gé-
néral des Eglifes d'Orient &
d'Occident, où , dans la célébra-
tion des Myfteres , on fait mémoire de l'Evêque ou du Patriar-
che , de l'Empereur ou du Roi.
LX VI. Le vingt-feptiéme article , où il eft dit que le Pape Remarques
fur les Lettres

^ "~~ ___«.«_^_______^___^^_____ VIl.lurKpou


Grégoire <^e

voiriiesPapet.
(y) Art. 24. (f) Art. tr.
I
(r) Art. ij. I . («) Voyetlom if./?. 644,
(^s) Art. 16. \~ {x)Lih.i.Eti?,-6y.
1

66z GREGO I RE V1 ,
peut abfoudre du ferment de fidélité , les fujets des méchans
Princes , a plus de liailon avec les principes établis dans les
Lettres de Grégoire VII. Il prétendoit que c'étoit à lui à
donner l'Empire d'Occident {y ) avec la Couronne Impé-
dale \ qu'il étoit en droit d'exiger le ferment de fidélité du
Roi d'Allemagne , comme de fon vaflTal ( z ) ; que la Saxe
avoit été donnée à faint Pierre , par Charlemagnc ( <? ) ; que
chaque maifon des François étoit tributaire au Saint S é-
gc (è) ; qu'il en étoit de même de l'Angleterre (c) , du Dan-
nemarc (^) , de l'Efpagne (e). Il diloit de ce Royaume,
qu'avant l'invafion des Sarrafins , il apparccnoit a faint Pierre,
èc qu'il aimoit mieux que ces infidèles y demeuraflfent , que
de le voir occupé par des Chrétiens qui n'en rendroient pas
hommage au Saint Siège. Il offrit à Suénon , Roi de Dan-
ncmarc (/) , la propriété d'une Province polTédée par des
hérétiques , ne doutant point qu'il ne fut en droit de difpo-
fer de leurs biens. On voit par plufieurs de fes Lettres (^) ,
3u'il fe croyoit le maître de donner laSardaigne à qui il vou-
ruit , & qu'il regardoit le Royaume de Hongrie iji) , comme
appartenant à l'Eglife Romaine , de même que la Dalma-
tie (?) , &
la Rufïie (/). Toutes ces prétentions n'étoienc
point pcrfonnelles à Grégoire VII. Il en avoit trouvé les fon-
demens dans les Archives de l'Egliie Romaine: il ne faifoit
qu'ufcr d'un droit qu'il trouvoit établi avant lui. En deman-
qam aux François le denier que chaque maifon devoir cha-
que année au Saint Siège , il leur faifoit dire par Ion Légat :
L'Empereur Charlemagne (m) , comme on lit dans fon Livre
qui cfl: aux Archives de l'Eglife de Saint Pierre , recueilloit
tous les ans en trois endroits douze cens livres pour le fer-
vice du Saint Siège ; fçavoir , à Aix-la-Chapelle , au Pui en
Vêlai , &• à Saint Gilles outre ce que chacun offcoit par fa
:

dévotion particulière. Etant donc perfuadc que toutes les


puifTanccs temporelles dépendoient de la ficnne , en qualité

(,; ) Ma BULL. Lilr. 1. Diplom. c.ip. i^. (,) Lilr. J.Epift. 6.7. ,

(l)GitEr,. Lib. ().Epifl. 5. Ç^ Tom. ic. (/) /./i. i. £/'.-/?. SI.


Conr. p. 179. {g) LU. I. Epi/}. 19. 41. i'i. 8. Efif*
{a) ll>id.pa.g. vj^.Lih:^. ij. o. "' •
Epifl-,

(*) Il>i4. (h) tih. î. Epifl. I î. 53. 70,


( £) Lil>. 4 Ei,ift. 17. Ç5 "i""^ Lanfrant. {i)Lil,.7-Epift.4.
Epifî. 7. (l) Lib. 1. Epifl. 74.
{m) Lib. 8. Epifl, zj.
PAPE. Ch. XXXVIT. €fi
^e Pape, ne croyoit point excéder fon pouvoir en détrô-
il

nant les Rois rebelles aux ordres de Dieu , & en déchargeant


leurs fujccs du ferment de fidélité. Ce neft pas à nous a pro-
noncer lur l'étendue ni fur les bornes des Puiflances fupé- ^
neurcs ; & nous nous en tenons a ce que dit 1 Apôtre; (^ue
toute perfonne doit leur être foumife , parce qu'il n'y a point
de puiffance qui ne vienne de Dieu , la temporelle comme la
Ipirituelle.
Lettres contre
LXVII. Mais nous remarquerons ici , que Grégoire VII

le rrouvoit dans des tems difficiles, ou, comme u le dit lui- i^ i„veftitL-
même , dans une Lettre à Lanfranc , il y avoir autant de res»
danger de ne pas réfiftcr aux méchans , que d'entreprendre
de les corriger. L'incontinence des Eccléiiaftiqucs , & la fî-
monie caufoicnt un Icandale, que les foins du Pape Léon IX
& de les fucccffcurs n'avoient pu faire cefTer. Il y avoir un
autre abus c'étoit de prendre l'inveftiture d'un Evêché ou
:

d'une autre Eglife , de la main d'un Prince ou d'un autre


laïc. Grégoire VII entreprit de détruire tous ces défordres ;
& s'il n'en vint pas à bout , il diminua confidérablcment le

nombre des coupables , en employant contre eux les cenfu-


res de l'Eglife. D'où viennent les fréquens anathêmes portés
dans les Lettres , ou dans les Conciles tenus à Rome fous
fon Pontificat, contre les Clercs incontinens ou fimoniaqucs,
& contre les inveflitures. Les Evcque^ dont la conduite étoic
rcprochable, fouleveient contre lui Henri IV, Roi d'Alle-
magne ; & s'ctant affemblcs avec ce Prince à ,Vormes , en
1076 , ils dépoferent le Pape. Hugues de Flavigny remar-
que (n) , que jufques-là le Pape n'avoit prononcé aucune cen-
lure contre les Evêques qui le trouvèrent à cette Aiïemblée ,
ni contre le Roi Henri d'où il fuit , que le motif de leur pro-
:

cédure contre le Pape , fut de le maintenir dans leur vie li-


centieufe , & qu'ils ne le dépoferent , que parce qu'ils étoient
irrités du Décret donné dans le Concile de Rome, en 1075 ,
contre les Clercs concubinaires. Non conrens d'avoir fouf-
crità la condamnation du Pape , ils y firent foufcrire les
Evêques de la Lombardie & de la Mafchc d'Ancone. A cet
effet leRoi Henri y envoya des Lettres; il en écrivit au peu-
ple de Rome , & une troifiéffie âtr'Pape. Ccroient autant de

(«) Huco TUvin. tom, I. Biiiiotb, Laii.f, il'^t


,

'^«^4 GRE GO I R E VIT,


libelles diffamatoires.Le Concile de Rome, en 107^, pour
venger l'injure faire à l'Eglife , excommunia les Evèques du
Conciliabule de Vormes , & dit anathême au Roi Henri
avec dcfenlc de mêler à l'avenir , du gouvernement du
fe
Royaume d'Allemagne. Les Seigneurs s'aflemblerent contre
lui. Il demanda pardon au Pape, &
reçut l'abiblution mais :

auflî-tôt, manquant à les promefles , il le réunit avec les ex-


communies, déclare la guerre au Pape, l'afliége dans Rome,
& le tient enfermé dans le Château Saint- Ange. Tous les
crimes rcgnoient en France ( ) , parce qu'ils y étoient im-
. . punis, fous le règne de Philippe. Ce Prince déshonoroit le
fceptre par fes mauvaifes mœurs. Il vendoit publiquement les
Eglifes. Herman , Archevêque de Vienne, Manafles , Ar-
chevêque de Reims , Etienne , Evêque du Pui , plufieurs &
autres , étoient connus pour fimoniaques le nombre en étoic :

grand en Italie. Le Pape prit d'abord les voies de douceur


pour faire rentrer ces Princes (p) , &
les Evêques de leurs
Royaumes dans le devoir; &
il n'en vint aux menaces aux &
cenlurcs que quand il ne trouva plus d'autres remèdes aux
maux de l'Eglife.
Calomnie
contre le P.^ ne r^l
LXVIII. Les partifans du Roi Henri , fur- tout les
•'
&
l- •
x» i

"^'^^^ concubinaires que le Pape avoit ou excommunies ou


Grégoire VII. ,
dcpofés , ne manquèrent pas de l'accufcr lui-même d'un ex-
cès de familiarité avec la Comteffe Mathilde : mais leurs ca-
lomnies furent mal reçues des gens fenlés ; la vie toute &
Apoflolique ( ^ ) , le mit à couvert de tout mauvais foupçon
à cet égard. Aulfi le Cardinal Bennon , qui s'cft appliqué à
noircir la réputation de Grégoire VII , ne dit-il rien contre
la pureté de les mœurs , ni de la Comteife Mathilde. On ne
peut lire fans horreur , la Lettre que. dix -neuf Evêques du
parti du Roi Henri (r)., écrivirent à Mayence , le jour de
la Pentecôte de l'an 1080; ni celle des trente Evêques afTcm-

blés à Brixen , au mois de Juin de la même année. Il n'y a


point de crimes dont iis ne chargent le Pape Grégoire; à les
entendre , il étoit entré dans le Saint Siège par (imonie , par
des parjures ; il avoit mis le trouble dans l'Eglife dans l'E- &

(e) Lib. 1, Epijl. ^. I ("7) Lambert. ScHAFNAB. «//""•'O?*'*


(p)Lib. i. Epip. i^. ^6.Lib. l.Ep:fl.\p.'HS.
S. ^ lit'. I. Ep-j}. 15. jo. 14. 3P. ; I. l'O. I {r) Chronic. Aiigelh. Tom, l. Script,

j. Ep'fl. l- S-7' lo. Briittfv.p, to8^. lejjo.


,,

PAPE. Ch. XXX Vif. 66s


tat, femc par- tout la caulcdes divorces dans les-
dilcordc ,

mariages , attente à la vie du Roi Henri , & fait métier dC'


I^écromantic. Mais ce ne font que des déclamations de gens
qui étoicnt , ou dans le défcfpoir d'obtenir le pardon de leurs
crimes , ou dans la voloncc de les continuer. 11 n'y a pas plus
d'apparence , dans les reproches qu'ils lui faifoicnt ( 5 ) , d'a-
voir été difciplc de Bcrengcr, 8c favorifc fes erreurs. Igno-
roicnt-ils que Grégoire VII , n'étant encore que Cardinal
avoit préfidé en 1055 , au Concile de Tours , où cet héréfiar-
cjue avoit confefTé la foi commune de l'Eglifc , & juré qu'il
s'y conformeroit à l'avenir ? Si les Légats le reçurent à leur
communion, ce ne fut qu'après qu'il eut foufcrit de fa main
fon abjuration. Ne fçavoicnt-ils pas que dans le Concile de
Kome, en 1079 (r), Bctcnger ayant de nouveau confefTé
la foi de l'Egliic fur la réalité du Corps & du Sang de Jefus-
Chrift dansl'Ëuchariftie, & demandé pardon de fes erreurs
le Pape Grégoire lui défendit au nom de Dieu , de plus dif-
putcr fur cette matière , (Inon pour ramener à la vérité ceux
qu'il en avoit éloignés ? S'il cft vrai , comme le difent ces.
Evêques , que le Pape le voyant retomber fi fouvent dans fon
hérélie , offrit l'épreuve du fer chaud pour conllater fa doc-
trine ; il ne fuit nullement dc-là , que le Pape ait douté de la
vérité ; & tout ce qu'on en peut conclure («) , c'ell qu'il vou-
loit s'afTurer , par cette épreuve , de la fincéritc du ferment
que Berenger avoit fait de profefTer à l'avenir la foi de l'E-
glife Catholique fur la préfcnce réelle. Mais au lieu de l'obli' '

^er à cette épreuve , il le contenta d'indiquer des prières & un


jeûne de trois jours , pour le fucccs du Concile la convcrfion &
de Berenger ; & non , comme l'avance témérairement le Car-
dinal Bcnnon , pour demander à Dieu de faire çonnoître ce,
qu'on doit croire fur l'EuclTariftie. -
mj . .

LXIX. Ce Cardinal faifoit beaucoup d'autres, reproches à Ecrits du Caf'


Grégoire VII (.t), comme d'avoir été élu le jour même Je '^'"^'^^""°*^^
la mort d'Alexandre II , contrairement aux Canons qui dé-
,

fendent d'élire un Pape avant le troiliéme jour de la fépul-


turc du défunt ; d'avoir excommunié le, ^oi Henri contre le

(j) Tom. 10. Cmc.p,-ig. 389, 76.


j
( / ) //.»(/. p. 378. {x]Inf.ffcictilo reriim cxpeieiidarum
j ,f,
(fi) Mabil. Prxfat, ia Tom. 5. Alîor, n, } 35. erf/c Colonienf. an. 153).
Tome XK^ ^PPP
,

666 ÔREGOTREVir,
fentimcnt des Cardinaux , & fans obferver l'ordre judiciaire;:
de porter ordinalreinenc avec lui un livre de Nécromantie. It
mêle à ces reproches des hiftoircs fabuleules, remarquant en-
tre autres , que lorl'que le Pape fc leva de la chaire pour pro-
noncer la ientcnce d'excommunication contre ce Prince , cette
chaire, quoique neuve, fc fendit tout d'un coup en plufieurs-
morceaux par Tordre de Dieu ^ pour annoncer le ichifme qui
devoir être k fuite de cette excommunication. Il dit, à Toc-
cafion du Livre de Nécromantie , que le Pape le l'étant fait
apporter par fes domeftiqucs , ils l'ouvrirent: & en lurent quel-
ques pages ; qu'aufli-tôt les Démons leur apparurent , de-
mandant pourquoi ils les avoient appelles ? Quelle foi ajouter
à un accufateur de ce caraclere ? On n'a pas laiflc de mettre-
fouvcnt au jour jfes deux Lettres contre le Pape Grégoire ^
adreffées à TEgUfe Romaine. Orthurnus Gratius les fie im-
primer à Cologne, en 1535; > dans le Recueil intitulé: Taf*
eicu/us rerum expetendarutn &fugiendarum ; & féparément ert
1542. Elles parurent avec le Traité d'Enée Sylvius y fur le
Concile de Bade , à Bafle même , en 15^5 6 , Reinerus Rein-
cerius les fit imprimer à Francfort , en 1 581 ; Jean "W0I-- &
fius à Devenceren 1^00 , au premier Tome de fcs Leçons-
mémorables. On les trouve auffi dans le Recueil des Opuf-
cules contre Grégoire VII , imprimé à Hanovre en 1611 >
in-4°. par les ifoins de Melchior Goldaft ; dans un plus &
ample Recueil d'Edouard Brown, à Londres en i6^o.
Remarques LXX. Après un au(H grand détail de la vie du Pape Gré»
/derÈghfe' goire , il eft inutile d'en faire un du contenu de fes Lettres ,
puifque c'eft de-là que nous avons tiré ce qui regarde fors
Hiftoire. Les Lettres que nous n*y avons point fait entrer
concernent des affaires particulières ; nous nous contente-
rons d^y remarquer quelques traits qui ont rapport à la dif—
cipline de l'Eglife. Lorlqu'un Evcque fe troavoit , par fcs in-
firmités (jv) , hors d'état de remplir les fonctions de fon mi-
niftcre , on ne pouvoir , fans fon confentement y lui en fub-
ftituer un autre , fi ce n'cft dans le cas d'imbécillité. Alors on
procédoit à l'élcdion d'un Evêque pour remplir ce Siège y
qui étoit cenfé vacant. On obiigeoit un Evêque (z) ,qui avoit
dilapidé les biens & les ôrnemens de fon Eglifc,à reftitucr

(y; L/i'. î. £|i,(?» 15» {k) ft;//. lix.


PAPE. Ch. XXXVir. 6t^7
Je tout , fous peine d anathême. Les Seigneurs féculiers (a),
4ifurpatcurs des biens de quelque Egliie , écoient , fous la
«Tïême peine, obligés à refticution. S'il arrivoic que dans des
<onreftations , Ton produisît quelques privilèges fufpeds de

faux (^), on renvoyoît à quelque Evêque l'examen de ces


jjrivileges. On commcttoic auflii quelquefois fur les lieux (c) ,
<ies Evêques pour juger définitivement des procès entre diffé-
rentes Eglifes : niais lorfqu'un Evêque étoit accufé perfon-
lîellement, il ctoit oblige de fe juftifier devant une AfTem-
blée d'Evêques [d). Il étoit d'ufage que les Archevêques ou
Evêques qui demandoient le Fallium {e) , Tallaffent recevoir
à Rome. Un Prêtre coupable d'homicide ( f) , étoit priv(>
pour toujours du miniftere de l'Autel mais s'il témoignoir :

un regret fincere de fon crime , on lui fourniflbit là fubfillan-


ce fur les rétributions eccléfiaftiques. L'élcftiori d'un Eve-
«que (g) , devoit fe faire par le Clergé
pour être légitime , &
le peuple , avec liberté , Se d'un confenrement unanime. Si
une veuve époufoit en fécondes noces quelqu'un de fes parens
dans les dégrés prohibés {h) , elle ne pouvoir , ni prendre fa -

dot fur les biens de fon mari , ni en tirer aucun avantage,


«ttendu la nullité de ce mariage. Il feroit contre les Canons^
d'élever à l'Epifcopat (î) , celui qui n'eft pas né d'un légi-
time mariage. Le Pape Grégoire exhortoit la Comtefie Ma-
thilde ( /) , à communier fouvent , &
à la dévotion envers la
lainte Vierge. 11 regardoit la communion comme une des
plus fortes armes contre l'ennemi de notre falut ; il appuie &
ce qu'il dit ftir ce fujet à cette FrinccfTc , de l'autorité de
faint Ambroife , delaint Grégoire -le -Grand , de faint &
Chryfoflome. A l'égard de la fainte Vierge
que plus , il dit
elle e£l élevée au-dcfltisde toutes les autres mères , & plus fain*
te^ plus grande aufli icft fa clcWicnce & fa bonté envers les pé-
cheurs convertis , &
plus prompte à les fecourir*
LXXL On a quelquefois attribua à Grégoire VII , le Ou"ag«fup- '^"
Commcntaire fur les iept Pfeaumes de la Pénitence. Mais g°ifeyii.
nous avons lait v-oir ailleurs , qu''il ne peut être de lui , puif-

(rt) Lib. 6. Epi)}. 8.9.

{() Lib.^.Ef;fi.i.<;.6.
(f) Lib, z, Epifl. 19. {h)lib.\.Efill. 5.
<
(</) ub.6.Efifi.'ir (. ) Lib. z. Epifi. jo.
(<) Lit, 1. Efiji, i4. il) lib, l.Epifl. 47. •

Ppppij
.

^68 G R E G O I R E VIT,
qu'il eft cité par Paterius (m) , difciple de faint Grégoire-îc-
Grand ; par le Pape Nicolas I ; par le Concile de Douzi, ca
871 , plus de deux fiéclcs avant le Pontificat, de Grégoire
VII. Le MiniRre Alix le £ùt Auteur d'un Commentaire fur
faint Matthieu , & il en rapporte un fragment («) ^ peur mon-
trer que ce Pape doutoit de la traniubuantiation du pain &
du vin dans rÉucharifîie. La raifon de l'attribuer à Grégoire-
VII, efi , félon ce Miniftre, que le nom d'Hildebrand le lit-
à la fin du Commentaire, dans le manufcrit de la Bibliothè-
que de Lambeth. Mais Henri W'^arthon (0) , qui s'eft fervî
de ce Commentaire , que l'on n'a point encore rendu pu-
blic , dit qu'il eft d'un Ecrivain poftérieur à Grégoire VII ,
qui porroit comme lui le nom d'Hildebrand qui vivoit vers ',.

le milieu du douzième fiécle, &-peut-être encore plus tard ,,


puifqu'il cite les Livres de faint Bernard , Abbé de Clair-
vaux ,. intitules : Pe la conjidéraiion , qui ne furent achevés
qu'en i 1 5 2
Jugement des LXXII. Il efl furprenantque l'on ne nous ait confervé au-
g^'j^Vll/^'cun des Difcours de Grégoire VU. Il s'étoit appliqué de
bonne heure à la prédication : &
l'Empereur Henri III di-
foit (p),. qu'il n'a voit jamais ouï perfonne prêcher la parole

B^ Dieu avec tant d'alTurance. has Evêques les plus expéri-


mentes ne l'entendoient qu'avec admiration ; ils étoient dan3
l'étonnement des paroles de grâce qui lortoient de fa bou-
che. On doit donc regretter la perte de fcs Difcours mais^ :

fes Lettres nouS fourniflenc des preuves qu'il Içavoit ^parler!,


aux Grands le langage de la foi , &
leur annoncer avec fer-
meté les vérités de la Religion. Zélé pour la réforme des-
mœurs , ennemi déclaré du vice & du libertinage , il s'op-
pofa, comm,e un mui d'airain , à tout ce qui bleflbit la pu-
reté des, maximes de l'Evangile .& des faints Canons', fan»
craindre ni le^ perfécutions ni la mort {q). Il ne fut pas moin»
..^l'• intrépide dans la, défcrtfe des droits & des libertés de l'E-
glife mais il ne diUiiigua pas la puilîancc temporelle de la
:

^irituelle. Il étoi.t dans des principes qui ne quadroient pas-

Ci») Toi», n.f. JtJ. ., , ,-^


^matic.Ujprii .p. ^f,
(«) Fabivic. To»H., }. Efl/Jiot, Lat.'p.
SSp. {5 Atw. VTÎtfat.adhàn.iSafi/ituf.
(î) L,t.z. Ef>fl. ^.

"

t'^-7' .
;

(0) W A&.TH. iti.Auwnr, ai }iijioT. /o^.

Iqri'i
P A P E. Ch. XXXVri. 6(^p
avec cette diflinttion. Voilà ce qui paroît par fcs Lettres. Elles
ont le mérite de la clarté & & de la bricvccé ; de la no-
blelTe dans les fentimens ; de l'élégance de ron£tion dans &
le ftyle ; de la force dans les exprcflians Se montrent par- -,

tout un efprit v'f, pénétrant , cultivé, bien initruit , capa-


Me des plus grandes affaires. On a remarqué plus haut , que
le Pape Paul V permit , par un Bref de l'an i6o^ , au
Clergé de Salerne , d'honorer Grégoire comme Saint, VU
6c d'en faire rOfficc fous le Rit double. En 1728 , l'abré-
gé de fa vie fut inféré dans le Bréviaire Romain par forme
de Leçons , pour le jour de fa Fête j. avec ordre du Pape
Benoît XIII , de les réciter dans toute l'Eglife mais il y :

eut oppodcion de la part de la France ( r ) , de l'Allema-


gne & de la Flandre ; parce qu'il étoit dit dans fcs Le-
çons , que Grégoire VII avoit privé l'Empereur Henri ÎV
de fon Royaume , &
de la communion des fidèles ; & dé-
chargé fcs peuples du ferment de fidélité. On craignit que
cet exemple ne contribuât à ébranler les principes inviola-
bles de l'attachement des fujets à leur Souverain.

^r)]QHtna} de Verdun^ Sept, 171^, pag. iij. Bibliub. Franc, Tom, 13, faj. j^8.

9^îé '"
---ti'- -' -
^ .^ jl ?nnh ii'

jj. xual.
e-jo SAINT ANSELME,

CHAPITRE XXXVIIL
Saint Anfelmç , Eveqne d^ Luqites ; Gehehard , Evêquc
de SalzbouYg j Lambert de Schafnaboiirg y Berthold de
Con/îance ; Marianm Scotus j Brumn ; IValtram ; Si-
gefrûi de Mayeme.

s.Anfeime, X.
EvcquedcLu-
^
^
A'int Anfclmc , Evêque de Luques
attaches au Pape Grégoire VII ; &
, fut
il
un des plus
n'y avoit per-
dues, besditt:- •~-'
, 1 j 1 'P 1 r 1 •

cultes avecies fonne plus en état de le détendre contre les calomniateurs;


Chanoines de
|qJ|. .^ caufc de la réputation qu'il s'étoit acquile par fon Ica-

voir &
par la vertu ; loit parce qu il etoit plus au lait que
tout autre , de la conduite du Pape. Anfclmc ctoit de Man-
rouc. Il s'appliqua dans fa jeunefle , à 1 ecude de la Gram-
maire & de la Dialedique (s). Etant entré dans le Clergé ,
le Pape Alexandre II , qui avoir gardé l'Evêché de Luques
avec la Thiarc, l'envoya au Roi Henri pour recevoir Tinvô-
ilicure de cet Evcché. Anfeirae qui ne croyoit pas quq les
Puiflances féculieres euflent droit de conférer les dignités
eccléfiaftiques , revint d'Allemagne fans avoir reçu Tinvç-
lliture. Grégoire VII ayant fuccédé à Alexandre II, défen-
dit d'abord à Anfelme de recevoir l'invcftiture de fon Evê-
ché , de la main du Roi ; mais il le lui permit cnfuite , & le
facra Evcque. Anfelme en eut du fcrupulc , & feignant un
pèlerinage , il alla fe rendre Moine à Cluni. Le Pape l'en fie
lortir , & le rétablit dans fon Evèché , en lui permettant de
garder l'habit monaftique. Il fit de grands fruits dans fon
Dioccfc , par fes prédications. Mais ayant voulu obliger les
Chanoines de fa Cathédrale , à la vie commune , en vertu
d'un Décret du Pape Léon IX , ils fe révoltèrent contre lui.
Grégoire VII leur écrivit deux Lettres (r ) , pour leur re-

(i) Vil» Atifelm. To»J. 9. ASlor. Mxbill. I p. S 5.

f. 471. tf in Colleâ, antijuv, mafiimfm,\ {*) Lil>, J. Epift. \,lib, 6. Efi/l.t,


,

EVESQUE DE LUQUES. Ch. VIII. 67$ XXX


prochcr leur indocilité , leur défendit l'entrée de TEglile ;
& les ayant appelles à Rome , ils y furent convaincus d'a-
voir confpiré contre leur Evcque. En conféquence le Concile
les livra à la Cour féculiere , fuivant les Canons , c'eft-à-dirc,
qu'ils furent fournisaux charges publiques (u) y ce qui étoit une
efpece de fervitude.La Comteflc Mathilde ioutcnoit Anfcl-
me ; elle fit exécuter ce jugement , les Chanoines fe révoltè-
rent contre elle-même.
II. On afTembla un fécond Concile à Saint Gcncs (^x) y L'Antîpape
près de la Ville de Luques. Pierre Ignée , Evêque d'Albane , „';' ",°^
^f
y prciida au nom du Pape : les Chanoines rébelles y furent Evêque deLu-
excommuniés ; &
le Pape défendit au Clergé au peuple , ^""» &
de les lailTer jouir de leurs prébendes (^) , & de leur prêter
aucun fecours. De délefpoir , ils fouleverent toute la Ville
contre leur Evêque; 8c à l'aide du Roi Henri, ils le chafle-
rent de Luques. Tout ceci fe paffoit en 1079. Ce Prince
étant venu deux ans après en Tofcane , avec l'Antipape Gui-
bert , ils donnèrent TEvêché de Luques à Pierre , le Chef
des Chanoines rebelles , homme débauché & fanguinaire.
Anfelme , à qui il ne reftoit plus rien des terres de Ion Egli-
fe , qu'un feul Château , fe retira chez la ComtciTe Mathil-
de , dont le Pape Tavoit fait Diredeur (z). Il l'aida de fes
confeils dans le maniement des affaires féculieres ; mais tou-
jours en lui failant obferver les loix de l'équité , que prefcri-
vent TEvangib & les
Canons. L'Antipape Guibert qui ne le
voyoit qu'avec peine , auprès de cette Princefie , lui ordon-
na de la quitter ( /ï ) , l'accufant de la féduire & de la trom-
per. Anfelme ne lui répondit que par l'éloge de cette ver-
tueufe PrincefTe. : & en lui difant qu'elle étoit difpofée à coût
facrifier , même
propre vie , pour la défenfe
fa la gloire de &
la fainte Eglife , jufqu'à ce que le Seigneur eût livré fon ennemi
entre les mains d'une femme.
III. Il y avoit alors peu d'Evêques dans la Lombardie (b), Anfelme eH
Le Pape Grégoire donna à Anfelme le foin de toutes les [^'tLégat dans
Eglifcs qui manquoient de Pafleurs , &
le fît à cet effet fon ia °-muçn'
1086.

(« ) Fiîi'Ri , m. 6$. Hift. Ecclif. i»g. 10S2. num. f

461, »om. 15. ( «) Anselm. m. I, contra Guibert»


\^x) Vit.i Greg. p. 474 ^ ftf, Tom, }. Leîl. Canif, p. 5^7,
(y) Epijl. 1. iib. 7. [h] Vila Gregor.. p,
47J,
(x.)Vit» Gregr'r^p. 47;. tf PaGI, adaii.
,,

C-j^ SAINT ANSELME,


Lcgat dans cetre Province. Tous accouroicnt à lui , les Ca-
tholiques pour recevoir fa bénédittion , les excommuniés pour
erre abfpus , d'autres pour être promus aux Ordres facrés.
S'il arrivoit à quelques fchirmaciques de conteftcr avec lui

il les mettoit dcs-lors hors de réplique


,
par fa doctrine & fon
éloquence : car il avoit appris par cœur prefque toute l'Ecri-
ture fainte, ék fçavoit comment Pères en avoient
les faints
explique les endroits difficiles : en quelque lieu qu'il trouvât
un Livre , il le lifoit exa61:ement (c) , &
méditoic la nuit fur ce
qu'il avoit lu le jour. Il ne permettoit point qu'on lût à l'E-
glife d'autres Livres que des Pères orthodoxes , fe confor-
mant entièrement à ce qu'ils ont ordonné pour le chant &
les Leçons des Offices divins; mais à {a table , ou dans des
Conférences particulières , il foufiproit qu'on lût quelquefois
des Livres qui n'avoient pas la même autorité. Il difoit la
Méfie tous les jours ; &
s'il arrivoit qu'il en fût empêché par

quelque affaire , il en étoit chagrin tout le jour. Se voyant


près de fa fin ( «/ ) , il recommanda à ceux qui étoient pré-
fcns , de perfcvércr dans la foi &
dans la dodrine du Pape
Grégoire VII. mourut à Mantoue, le i8 de Mars 1086 ,
Il
qui étoit la treizième année de fon Epifcopat. Quoiqu'il eût
demandé d'être enterré dans le Chapitre du Monauere de
Saint Benoît , nommé Polirone , de la dépendance de Cluni
& que l'on fût déjà en chemin pour y tranfporter fon corps,
l'Evêque Bonifon obtint, par fes remontrances , qu'on Ten-
terreroit dans l'Eglife Cathédrale. Il fe fit plufieurs miracles
à fon tombeau , & il en fit même de fon vivant. L'Auteur
de fa vie , qui avoit été fon Pénitencier , & ne l'avoir point
cjuitté depuis long-tems , a eu foin de les rapporter. Il en met
un dont il fait honneur à Grégoire VII (e). Ce Pape en mou-
rant avoit envoyé fa mitre à Anlelme. Il arriva quelque tems
après , qu'Ubalde , Evcque de Mantoue , fut affligé d'une
maladie de rate , qui lui caufa des ulcères par tout le corps.
Les Médecins ayant inutilement épuifé tous leurs remèdes, on
appliqua la mitre de Grégoire VII , à l'endroit où l'Evêque
fcntoit plus de douleur, & auffi tôt il recouvra une fancépar-

(c) U:,l.p.47/;. {e)UiJ.paj.ift.


I
{d) Ibid. p. 48J. 1

faite.
,

EVESQUE DE LUQUES. Ch. XXXVIII. 67?


faite. La mémoire de faint Anfelme efl honorée dans l'Eglifc
le 3 de Mars.
IV. Bardus , c'eft le nom de l'Auteur de fa vie (/), lui attri- Se» écrits.
bue plufieurs Ouvrages , à la tête defquels il met l'Apologie Q^f °f'^yfj
pour le Pape Grégoire VIL II paroît néanmoins par cette
Apologie même (g) t que faint Anfelme avoit déjà écrit à
Guibert , pour l'exhorter à revenir de fon erreur , & à effa-
cer fes crimes par la pénitence. Mais cette Lettre n'eft pas
venue jufqu'à nous. Guibert y répondit avec beaucoup de hau-
teur ; n'alléguant pour fa défenfc que des faits fuppofés , ou
la calomnie. Saint Anfelme lui répliqua par l'Apologie dont
nous parlons. Comme il y fait mention de la mort de Ro-
dolphe 8c de la défaite des Saxons , c'efl une preuve qu'il ne
la compofa qu'en 1082 elle efl divifée en deux Livres. Il
:

prouve dans le premier , que Guibert ne pouvoit s'attribuer


le foin de l'Eglife univerfellc , puisqu'elle avoit un autre Pape
que lui ; qu'il n'étoit qu'un ufurpatcur ; & que le Roi , dont
il prenoit la défenfe , renverfoit toutes les Loix de l'Eglife

en vendant les Evêchés , ou en ne les accordant que fous la


condition des inveftitures. Il allègue grand nombre de pafTa-
ges contre les fchifmatiques , 6c rejette fur eux la facheufc
néccfTité où l'on s'étoit trouvé de prendre les armes pour la
défenfe de l'Eglife. Il exhorte Guibert à quitter le fchifme,
& à fe réunir à l'Eglife fa Mère , en l'affurant que dans la joie
de fon retour , elle imitera tout ce que fît le père de famille
pour l'enfant prodigue.
V. Dans le fécond Livre ( ^ ) , il fait voir que ce n'eft point
aux Princes de la terre à donner des Palpeurs à l'Eglife , &
qu'ils n'ont point droit de difpofer de fes biens que par un :

ufage établi dans toutes les Eglifcs depuis les Apôtres , c'cft
au Clergé & au peuple de pourvoir de Pafleurs les Eglifes
vacantes , par une délibération commune ; que les Empereurs
Zenon 8c Ânaflafe , l'un & l'autre de la fc£le des Eutychiens,
font les premiers qui aient fubflitué des Evcqucs de leur
communion à des Evêques Catholiques ; que fi quelques Em-
pereurs (d'Occident ont ordonné que le Décret de î'éledion
du Pape leur feroit envoyé , d'autres ont révoqué cette or-

(f)Lib. J. Tom. V Canif, f. 571. l ^. Canif.


1. contr. Guittrl.f. 371. Tom.l (i) Tom, }, Canif, lib. i\.f. J7*
(^) lib.
Tome XX, Qqqq
,

674 SAINT 'ANSELME,


donnance que du moins aucun d'eux
: n'a jamais touché à l'é-
Icûion faite à Rome. Il rapporte les autorités des Papes &
des Conciles fur les élevions des Evêques ; & montre que
dans les premiers ficelés , les Princes icculiers n'y avoient
d'autre part , que celle que l'Eglife vouloit bien leur accor-
der , c'efl-à-dire , de les approuver. Puis il s'objefte , que
dans un Concile de Rome , où le Pape Nicolas II préfidoit
il fut ordonné que le Pape ne fcroit facré qu'après que fon

é!e£lion auroir été notifiée au Roi. A quoi il répond , que les


Rois d'Allemagne fe font rendus indignes de la faveur à eux
accordée par ce Concile , en dépofant des Papes , quoiqu'ils
ne puifTent être dépofés ni jugés de perfonne ; & en en choi-
fiffant d'autres, fans la participation du Clergé & du peuple
Romain , à qui l'éleftion appartient de droit, fuivant le Dé-
cret de ce Concile. Il ajoute , comme une réponfe fans ré-
plique , tjuc le Pape Nicolas II n'étant qu'un des Patriar-
ches , n'a pas été en pouvoir avec fon Concile , de révoquer
ks Décrets des Conciles généraux , en particulier du huitiè-
me , autorifé par cinq Patriarches & par plus de 250 Evê-
ques , en préfence des Empereurs. Or ces Décrets , non feu-
lement n'accordent aucune part aux Princes , dans l'éleftion
ou promotion des Pontifes ; mais ils leur défendent encore,
fous peine d'anathcmc , de s'en mêler. Il donne pour der-
nière raifon , que le Pape Nicolas II étoit homme; qu i! a pu
faillir par furprife; que le Pape Boniface II fit de même un

Décret , qui fut annullé après fa mort , comme contraire aux


faints Canons.
VI. Il vient enfuite au pouvoir que les Princes avoient
ufurpé fur l'Eglife (i) , en s'attribuant le droit d'inveftiture;
& dit que cette damnable coutume ne peut s'autorifer par le
nombre des années , puifqu'elle efl contraire aux Statuts des
faints Pontifes Romains , & à l'ufage établi dans toutes les
Eglifes dès le tems des Apôtres. Il entre dans le détail des
inconvéniens qui réfultent de ce pouvoir que les Princes s'ar-
rogent fur l'Eg'ife ; c'efl: une fource de fimonic , parce qu'on
acheté les faveurs du Prince , ou par argent , ou par des
ferviccs , ou par des flatteries : c'efl la caufe des défordres
de l'Eglife , parce que les Princes donnent fouvcnt les £vê-

(.•)P^^. JSJ.
EVESQUE DE LUQUES. Crt.XXXVIir. 675
chés à des fujers indignes , faute d'être en crac de les con-
noître , ou pirce qu'ils aiment de voir en place des Paftcurs
lâches, qui n'oient reprendre les péchés des Grands. Il dé-
crit les fcandales que donnent à l'Egliie des Pafleurs de ce
caraftcre. ne penfent à leurs troupeaux que pour en tirer
Ils
la graiiïe: du
refte ils s'occupent des vanités du fiécle, de la
chalTe, des plaifirs de la Cour: à peine fe trouvent-ils trois ou
quatre fois l'année à leur Eglife , pendant que les Canons dé-
fendent à un Evêque de s'abfenter trois Dimanches de fuite de
fa Cathédrale.
VII. On dira qu'il faut des Clercs aux Princes pour le Ser-
vice divin (/): mais n'efl-il pas plus raifonnable que l'Evê-
que dans le Diocèfe duquel le Prince fait fa demeure , lui en-
voie des Clercs vertueux pour cet ufage ? C'eft ,' ajoute An-
felme, à caufc de tous ces défordres que Grégoire VII a dé-
fendu les invcftituics dans un Concile de Rome, où ily avoic
cinquante Evoques. Il prouve par les Capitulaires de Char-
lemagnc & de Louis-le-Dcbonnaire, que ces Princes, confor-
mément aux Décrets des Conciles généraux , des Papes &
des faints Pcrcs, ont déclaré que l'életlion des Evcques ap-
partenoit au Clergé & au peuple ; que l'on devoir remplir le
Siège vacant par un fujet du Diocèfe ; & qu'il ne falloit avoir
égard dans l'élcdion, ni à la faveur, ni aux préiens , mais
au feul mérite de la pcrfonne. A prendre à la rigueur ce qu'il
dit des fimonijques , il femblcroit qu'il ne reconnoiflbit en
eux ni vrai Sacerdoce , ni vrai Sacrifice : mais il ne veut dire
autre choie (?k) , finon qu'ils ne peuvent exercer licitement
leurs fondions. Il pcnfe des fimoniaques , comme le Concile
d'Antiochc penfoit des fchifmatiqucs ; c'cft-à-dire , qu'on
devoir les réprimer par la Puiflcxnce féculicre , comme étant
également coupables. Mais d'une proportion particulière il
en fait une générale car le Concile d'Antiochc ne parle que
:

d'un Prêtre ou d'un Diacre («) , qui , au mépris de fon Evê-


que , fe fépare de l'Eglifc , tient une affemblée à part , éri-
ge un aurcl , & excite une fédition dans la Ville. Anfelme
finit fon fécond Livre, & annonce un Traité con re ceux qui
prétendent que les biens de l'Eglife font fous la puifTance des

C/)P<»^.j84. I {n) Voyn Tom. 4- p-6fJ.


(m) Pag. i%6. I

Qqqqij
<?75 SAINT ANSELME,
Princes , enforte qu'ils en peuvent difpofer.
Traité des VIII. Canifius qui nous a donné l'Apologie de Grégoire
^'^"
sHfe.
^^
VII , dit qu'elle eft fuivie dans le même manufcrit (o) , d'un
Traité ou Recueil de paffages , où Anfelme s'applique à faire
voir que les facultés &
revenus de l'Eglife ne font point à la
difpofition du Roi. Il doute fi ce Recueil n'eft point une fui-
te de l'Apologie contre Guibert , ou le troifiéme Livre de
cette même Apologie. Les paffages font tirés de l'Ecriture,
des Conciles , des Décrétales des Papes , foit fauffes , foit
véritables ; parce qu'on ne les diftinguoit point alors. On les
trouve dans Canifius à la fuite de l'Apologie ; dans le dixiè-
me Tome de la Bibliothèque des Pères à Cologne , dans le &
dix-huitiéme de celle de Lyon.
AutresEcrJts IX. Mais on n'a pas encore mis fous la prefic deux autres
de s. Anfelme. Ecrits de faint Anfelme, dont il eft parlé dans la vie
(p ) i
fçavoir , une explication des Lamentations de Jérémie , &
une du Pfeautier. Il entreprit celle-ci à la prière de la Com-
teffe Mathilde ; fa mort ne lui laiflTa pas le loifir de l'ache-
ver. Il la finit au dernier verfet du Pfeaume 1 25? ; Nous vous
avons béni au mm
du Seigneur, On lui attribue encore une Col-
ledion de Canons divifée en treize Livres. Elle fe trouve dans
la Bibliothèque du Vatican (7) , fous le nom du Bienheu-
reux Anfelme , Evêque de Luques. Dom Mabillon , qui en
avoit une copie tirée du manufcrit du Vatican, rapporte le
titre de chaque Livre , fans examiner fi l'Ouvrage eft de
l'Auteur dont il porte le nom; ne doutant pas apparemment
qu'il ne fût de cet Evoque. Quelques-uns néanmoins en ont
douté ; fondés fur ce que l'Auteur de fa vie , en parlant de
fes Ouvrages , n'y dit rien de la CoUeQion des Canons ; fur
le filence de Sigebert de Tritheme ; & fur ce que cette &
Colledion renferme plufieurs Décrets d'Urbain II de fes &
fucccffcurs. A
cela on peut répondre ( J') » que l'on ne trou-
ve aucuns Décrets de ces Papes , dans les anciens manuf-
crits de cette Colleûion , notamment dans celui du Vatican ,
que l'on croit du tcms même de faint Anfelme ; ce qui prou-

(0) Tant, 3. Lell, Canif, p. jS?. ( r) Pagt , aJ an. ioi6. num. 4. C?

(y) Vita Atiftlm. p. 480. Tom. 9. Aào Baluz. Je emetidat. CrAiian, Prafat. ad
Mabill. yî SictB. de Script, Ecclef, ta^ I.eiler. num. 19, ^ in notis , page 641.

161. Cl Trithfm. cap. 344. Fabkic. tem, f. Bitliot. Gmc.f, j/.


(j) Mabiiioh. ibid, pa^ 471.
,

GEBEHARD,ARCH. DE SALZB.Ch. XXXVIII. 577


ve ont cté ajoutés dans les copies faites long-tcms de-
qu'ils
puis fur l'original , ou fur les plus anciens exemplaires ; que fi
Sigebert &
les autres Bibliographes n'ont rien dit de cette
Colledion , dans l'article de cet Evêque, leur filence ne fait
point une preuve décifive. On fçait qu'ils ont omis bien des
chofes ; &
dans le cas prcfent , l'autorité des anciens manuf-
crits où le nom d'Anfelme le lit avec la qualité d'Evêquc de
Luques , doit l'emporter fur toutes les preuves négatives.
Wa ding a fait imprimer , fous le nom de faint Anfelme ,
quatre Opufcules en forme de méditations ; le premier , fur
rOraifon Dominicale ; le fécond , fur VAve Maria ; le troi-
fiéme , fur le Salve Regina y le quatrième , fur les adions de
Jefus - Chrift. Le troifiéme de ces Opufcules avoir déjà été
imprimé parmi les Œuvres de faint Bernard , dans les édi-
tions faites depuis l'an 155^^ , jufqu'en 1640. On les a mis
tous quatre dans le vingt-feptiéme Tome de la Bibliothèque
des Pères à Lyon , avec la Préface de Wading ; où il dit
d'après Arnold Wion & Poffevin , qu'ils font attribués à
faint Anfelme , dans un manufcrit du Monaftere de Saint
Benoît à Mantouc , & que c'efl de-là que le Cardinal Bar-
berin en a tiré une copie pour la lui envoyer. Le quatrième
Opufcule efl en profc rimcc , & fuivi d'une autre Médita-
tion fur le même fujet, & dans la même forme. Mais on ne
reconnoît dans aucun de ces Ecrits , le génie ni le ftyle de
faint Anfelme. C'eft un tiffu d'exclamations froides & dé-
placées , d'expreffions baffes & quelquefois indécentes. Les
îcntimens n'y répondent pas à la nobleflede la matière. L'Au-
teur paroît un de ces dévots , qui veut qu'on le croie tout con-
fumé d'amour , pendant qu'à en juger par fon difcours , il eft
tout de glace.
X. L'Archevêque de Salzbourg, nommé Gebehard , prit Gebehard,
défenfe de Grégoire VII , dans une Lettre affez Ion-
auffi la Archevêque
^^'^^°"'g-
eue à Herman , Evêque de Metz. Le Pape lui en a voit écrit ''^

deux ( J ) , pour le mettre en état de répondre aux partifans


du Roi Henri , & de l'Antipape Guibert. Hermann voulut
encore apprendre de Gebehard , dont il connoiflpit le mérite
& la vertu , ce que l'on devoit croire dans ce tems de divi-

(i) Lib. 4. £/»/?. ï. Lib, %. Epifl. XI.


,

6yS GE B E HARD ,
fion &
de fchifme. II lui écrivit à cet effet deux Lettres (r ) ,
que nous ne connoiffons que par la rcponfe de l'Archevêque
de Salzbourg. L'origine de la divifion entre les deux partis,
venoit de ce que les partifans de Guibert & du Roi Henri,
communiquoient fans aucun (crupule avec les excommuniés
8c prétendoienr qu'on le devoit faire au lieu que les Catho- ;

liques , foutenoient que cela n'étoit pas permis , fur- tout à


l'égard de ceux qui avoient été excommuniés par le premier
Siège. Gebehard appuie ce fentiment , & fait voir que tandis
que l'excommunication n'a point été calTée par un examen
canonique , ou levée , on ne doit point communiquer avec
celui qui l'a encourue. Enluite il montre que l'on n'avoit gar-
dé dans la dépofition de Grégoire VII («) , aucune des for-
malités requifes par faint Grégoire , pour la dépofition même
d'un fimple Evêque ; qu'il n'avoit été ni convaincu , ni en-
tendu , ni appelle , ni averti ( x ). Voilà ^ ajoute-t-il , pour-
quoi nous ne communiquons point comme eux avec les ex-
communiés ; & que nous ne voulons point renoncer au Pape
Grégoire , ni en reconnoître un autre pendant qu'il vit en-
core , & demeure uni à l'Eglife Romaine. Il répond aux
inventives des fchifmatiques contre Grégoire {y ) Sça- VU :

chez que fi nous lui obéifibns , ce n'eil pas en confidéra-


tion de fa vie & de fa conduite ; mais à raifon du miniftcre
de fa dignité. Ils reprochoient aux Catholiques & même au
Pape', d'avoir violé le ferment qu'ils avoient fait au Roi
Henri ; & foutenoient par divers paflfages de l'Ecriture, qu'il
n'efl: aucun cas où l'homme puiffe être délié du ferment de fi-

délité. Gebehard répond ( s ) , que les Evcques font en leur


ordination , ferment de fidélité &:d6foumi{fion au Pape; que
ce ferment ,
qui fe fait devant l'Autel & les faintes reliques ,
8c par l'invocation du nom de Jefus-Chrifl: , cft préférable au

ferment que l'on prête dans une chambre & en tumulte , à


l'Empereur ; qu'il efl: des cas où le ferment n'oblige point ;
comme lorfqu'il tend au mal {a) , &
que c'en étoit un de fe
féparer du Pape pour obéir au Roi qu'au refic les Ichifma-
:

tiques étoient la première caufe de tous les maux , puifqu'ils

'
( f) TichAg. in veitr. Monim. p.ig. 7.
EoLLAND. tom. «, Junii-ifag, lj'7.
(») Pa^t 160. (4) Page 164. I6î.
(x) Page \6l.
ARCHEV. DE SALZBOURG. Ch. XXXVIIT. 679
fe font aflemblés à Vormes contre Grégoire VII , & qu'ils
l'ont dépolé avant prononcé aucune fentence d'ex-
qu'il eût
communication &
d'anathême contre eux ni contre le Roi.
Cette Lettre fe lit parmi les anciens monumens recueillis par
SébaflienTegnageUe, &
imprimes à Ingolftat en 16 12 in- 4°.
& dans les Bollandiftosaufeiziémede Juin,àla fuite de la vie
de Gebehard.
XLCet Archevêque fe trouva en 1 08 1 , à l'Aflemblée que Difcours Je
les principaux des Saxons tinrent avec ceux du parti du Roi l'Aiiembiéede
Henri , en un lieu nommé Capoue , parce qu'on le difoit de Capoue en ,

la dépendance de la Ville de ce nom. Les Evêques Sci- '°^'* &


gneurs Saxons connoiflant la prudence & la capacité de Ge-
behard , le prièrent de parler pour eux. 11 ouvrit la féancc
par un Difcours , où il montra que le Roi Henri , au lieu de
rcconnoître leur attachement pour fa perfonne pour fon &
fervice, avoir ravagé la Saxe , dépouillé les Evêques les &
Prêtres de leurs Eglifes &
de leurs biens ; donné le patri-&
moine des pauvres aux complices de fes crimes. Il pria les
Evêques &
les Seigneurs attachés au parti de ce Prince , de

finir leurs hoflilités. Nous fommes , leur difoit-il , vos frères


en Jefus-Chrift , vos parens félon la chair ; nous vous pardon-
nons volontiers les maux que vous nous avez faits jufqu'ici,
& nous les regarderons comme la peine due à nos péchés , (i
à l'avenir vous nous laiflez en repos. A
l'égard du Seigneur
Henri , nous fommes en état de prouver , que ni les Clercs
ni les laïcs ne peuvent le reconnoitre pour Roi , fans riique
de leur falut de deux chofcs Tune ; ou prouvez - nous qu'il
:

doit être reconnu pour Roi , ou laiflez - nous la liberté de


vous montrer qu'il ne peut être véritablement Roi. Les par-
tifans de ce Prince répondirent, qu'ils n'étoient point venus
pour agiter cette queflion ; qu'ils ne s'y étoient pas préparés ;
& qu'il en falloir renvoyer la difcuflîon vers le milieu du mois
de Juin , c'eft-à-dire, à quatre mois car l'Aflemblée de Ca-
:

poue fe tint commencement de Février 1081. Nous necon-


au
noiflbns ce trait d'hiftoire que par Brunon (b) , & c'efl d'après
lui que les BoUandifles l'ont rapporté.
XH. Les deux *partis s'aflTemblerent encore au mois de Jaa- Son Difcours
dans l'AlIem-

" '
'
chac en io8>.

(b) Bruno, Je Btllo Saxon. Tom. lIBollako. ad diem i6. /««''« />•'> lîf-
Scrift, Germmic, fer Frecb. pag. z.l3. ^\l'j6.
68o GE B E H A RD;
vier de l'an 1085 , à Derchach en Turinge (c). Gebehard fut
chargé de parler au nom des Saxons Vccilon de Mayence,
:

pour le Roi Henri. Le premier dit , que depuis que le Pape


avoir dénoncé aux Saxons le Roi Henri , comme excommu-
nié au Concile de Rome , ils ne pouvoient fe difpenfer de
l'éviter. Le fécond répondit , que le Jugement rendu en ce
Concile , n'étoit point équitable ; parce que le Roi Henri
étant dès-lors fpolié par l'éleûion du Roi Rodolphe , il n'a-
voit pu être appelle en jugement , ni condamné. Gebehard
répliqua , que ce n'étoit point à eux à examiner le Jugement
du Saint Siège ; que leur feul parti étoit d'y obéir ; qu'au fur-
plus un particulier dépouillé de fon bien ', n'étant pas pour
cela difpenfé des Lpix divines ; il y avoit beaucoup moins de
raifon d'en croire le Prince difpenfé , lui qui ne peut re-
garder l'Etat comme fon patrimoine , puilqu'il appartient à
Dieu , qui le donne à qui il lui plaît. Chaque parti applau-
dit aux réponfes de fon Orateur, & on fe lépara fans avoir
rien fait.
Concile de XIH. Otton , Evêquc d'Oftie , Légat en Allemagne, cé-
Quediim-
Roi Henri , la Fête de Pâques de la même
bourg en
1 j8j.
]ébra avec le
,
année 108 ç ,
v^ni ^ . r
a Quedlimbourg ; & y tint la même icmaine un
, ,. •

Concile (d) , auquel ce Prince fut préfent avec les Seigneurs


de fa Cour. Divers Evêques y aflifterent ^ avec Gebehard de
Salzbourg & Harvic de Magdebourg. Il y eut auflî plufieurs
Abbés & Députés de la part des Evoques de Wirzbourg, de
Vormes , d'Aufbourg & de Confiance. Comme on avoit
voulu , dans rAflemblée de Derchach , obliger les Saxons à
difcuter le Jugement rendu par le Saint Siège contre le Roi
Henri , on commença dans ce Concile , par établir la pri-
mauté de ce Siège , & par montrer que fcs Jugemens ne font
point fujets à rcvifion. Un Clerc de Bambcrg , nommé Cu-
nibert , s'avança au milieu de l'Aflemblée , & Ibutint que ce
droit avoit été ufurpé par les Papes ; mais tous les afllftans
s'élevèrent contre lui ; & un laïc lui ferma la bouche par ces
paroles de l'Evangile : Le dtfciple n'efî pas ûu-de/fus du Maître ;
& par cette maxime reçue généralement Le Supérieur n'eft:

point jugé par l'inférieur. Enfuite le Concile déclara nulles

(c) AbbéXsVfptrg.ad an, lo8;.f. ij?.! ('0 To/«. 10. CoHf. />. 404. ^ l8jl.
^ Berihuld. i^i.i». leS^. l

toutes
,

ARCHEV. DE SALZBOURG. Ch. XXXVIII. 68i


toutes les Ordinations faites par les excommuniés nommé-
,

ment par Vecilon de Mayence , Sigcfroi d'Auibourg , &


Norbert de Coïre. Vecilon fut même condamné comme hé-
rétique (e) , pour avoir ioutenu j comme dans l'AlTcmblée de
Berchach , que les particuliers dépouillés de leurs biens , ne
iont point fournis au Jugement Eccléfiaftique', ni fujets aux
ccnfures , & que les excommuniés peuvent être reçus fans
abfolution. Le Concile fit un Décret portant , qu'un excom-
munié , même injuflement , par un Evêque non dépofé ni
excommunié , ne pourroit être admis à la communion , fans
l'abfolurion eccléfiafliquc. Il en fit quelques autres lur divers
points de difcipiinc , & contre l'incontinence des Clercs :

mais il ne voulut rien décider fur la queftion de la parenté en-


tre le Roi Herman & la Reine fon époufe ; parce qu'il n'y a-
Vûit point d'accufateurs légitimes.. On finit le Concile en pro-
nonçant anathême avec les chandelles ardentes , contre l'An-
tipape Guibert & fes fauteurs.
XIV. Ceux-ci s'aifemblerent trois femaines après à Mayen- Concile de

^ (/) » par ordre du Roi Henri. Ce Prince s'y rendit avec fX?"'
"*

les Légats de Guibert , qui fut reconnu pour Pape légitime.


Les Evêques du Concile furent contraints de donner leur
déclaration par écrit. En confcqucnce on confirma la dé-
pofition de Grégoire VII , &
on prononça excommunica-
tion contre lui &
fes adhérans. Quelques Evêques de fon
parti furent dépofés , entre autres , Herman de Metz ; mais
le peuple refufa de recevoir celui qu'on lui avoit fubftitué.
XV. L'hiftoire ne nous apprend plus rien de Gcbehard , MondeCe-
depuis le Concile de Quedlimbourg , où il aiïifia. Il mourut ^^gg''' ^^
le 15 de Juin l'an ic88, regretté de tous les Catholiques
pour fon zelc à défendre la caufe du Saint Siège contre les
Ichifmatiqucs , qu'il combattit publiquement en toute occa-
lion , &de vive voix & par écrit. C'eft ce que dit Berthold
de Confiance , Ecrivain contemporain (g). Gebchard fut
d'abord Archichapellain de l'Empereur Henri III , dit le
Noir, puis de Henri IV, fon fils. L'Archevêciié de Salz-
bourg étant venu à vaquer en io6q, on élut Gcbehard pour
le remplir. En 1072 , il fonda l'Evêché de Gurca dans h

.(e) Alias Ufftrgrnf. ii an. loSf, é\ (/) Tom. io.CoHC.fag.no9- iSjK


aj9. 1 (^)litKiYlOl.D,adan.y\o'6Z.

Tome XX, Rrrr


,

éSz LAMBERT
Carinthie. On du Pape Alexandre II
voit encore les Lettres
& du Roi H.endi(A) , de cette érc£lion. Deux
coriiîrmativcs
ans après , c'eft-à-dire , en 1074 ( ? ) , il fit bâtir un Mona-
flere en rhonneur de la. faintc Vierge & de faint Blaife , où
il mit douze Moines Prêtres
,
pour faire le Service divin ; &
leur fournit abondamment de quoifubfifter, recevoir les étran-
gers & nourrir les pauvres. Ce Monaftere efl fitué dans la Ba-
vière au milieu des;mo[ritagnes,.fur liRiviere d'Aafe ,& con-
nu fous le nom d'Ajdmont.
Lambert de X VL Nous donncTons de fuite quelques autres Ecrivains >
Schafnabourg.
qyj Çq f^j^f appliqués , OU à décrire les plus célèbres événe-
mens du Pontificat de Grégoire VII , ou qui ont pris fa dé-
fenfe contre les ennemis du Saint Siège. Lambert de Schaf-
nabourg: en Franconie, dans le, Diocèfe de May^nce (0 > eft
un de ceux qui a le mieux rcufli à tranfmettre à la pofterité ,-
ce qui s'eft pafTé dam ces tems de troubles. On eft furpris de
trouver en Allemagne , dans un tems où elle fe reflTentoit en-
core de la barbarie^ un Ecrivain auiïi poli, audi éloquent
au(îî exad , & d'un langage auIIi pur , que Lambert. Ce n'eft
pas qu'il foit fans défaut. 11 a même charge fa Chronique de
pluficurs faits qui intérclToienr peu le public mais en général :

on n'a rien de meilleur pour l'Hiftoire de l'onzième fiécle.


Il fut fait Prêtre en 1058 (tn) par Ludolphc , Archevêque
,.

de Mayence , & aufli-tôt il fc mit en chemin pour le pèleri-


nage de Jérulalem. Je l'entrepris , dit-il , pour la gloire de:
Dieu ; que mon zèle à cet égard foit félon la fciencc Il mit' !

un an entier à ce. voyage ,.& trouva à ion retour l'Abbé Me-


ginhere en vie ; grâce qu'il avoir demandée inftamment à
Dieu. Mcginhere gouvernoit le Monaftere d'Hirsfeld. Lam«
bert lui demanda l'habit monaftique , & le reçut de fes mains.
Il s'appliqua dans fa retraite à compofcr divers Ouvrages.
Trirheme n'en nomme que deux (n) , difant qu'il n'avoit pas
lu les autres. Le premier cft une petite Chronique du Mona-
ftere d'Hirsfeld , que l'on n'a pas encore rendue publique :
le fécond cft l'Hiftoire des Rois , des Princes & des Empe-
reurs, depuis Charlemagnc jufqu'à Henri IV,. Roi d'AUe-

(h) Bolland', Tarn. 6. Junii., gage p. louSSfcq. E-fit. V.xt[(î>on. an. 1751.
»; (ni)I.AMBFaT. ii(/.T.-;, rojS./». 314.
(1 j Ib'd.'p, \^Z, (7;)Tritheme, Chron. f/;>/.>«i'. ad an»
(l)Iom. 1. teram Germanie, Pistor. K.58,
DE SCHAFNABOURG. Ch.XXXVIII. 6S^
tnagne. Lambert l'a faire fous la forme d'une Chi;onique ,
qu'il commence mais il. ne touche
à la création du mO;nde :

que Icgcrcmcnt , même les plus gr-ands dvénc(nens de l'ancien


Teflamcnt. Il ule d'une femblablt préçifion dans ce qui-rcr
^arde le nouveau', jul'qu'en lo^p. Mais depuis cette année
jufqu'en 1077 , qui fut celle de fa mort , il entre dans un
très-grand détail des affaires de TEglile de l'Etat i ce qui &
eiiimportant pour rhiftoire ; parce qui! écrivpit.cc qui 'fe
paffoit , ou fous les yeux , ou dans des pays qui n'étoient pas
à une extrême diftance. Sa Chronique fut imprimée deux fois
fans nom d'Auteur , à Tubinge- en l'çaj i 550 , in -8°-. &
>chez Hulderich Morhard de Suerius. Louis
, par les foins
5chradin ayant reconnu, par là Chroniqije d'Hirfauge,quc
Lambert de Scliafnabourg a voit eoinpafé celle» dont npiis
parlons , la fit paroître fous fon nom en la même Ville &
chez le même Imprimeur en 1533. Elle a été imprimée de-
puis , avec diverfes autres Chroniques; feavoir, à Francfort
en 156^), avec Turpin :& avccRe:ginon SigcbertàBjfle, &
chez Henri Pierre en 15^9 , in-fol. Piftoriusl'inléra dans fon
ilecucil des Ecrivains Allemands .,' imprimé à Francfort en
1583 & K^i? > Se à Ratiflîonnc en 172^ & 1731. Il s'en fie
•une édition a Strafbourg er} 160^ , ayec la Chronique de
Reginon,chez Lazare Zetner. Maderus & Leibnitz (0),
'ont rapporté dans le premier 1-ome desjEcrivainsde Brunf-
vic, un abrégé de l'Hiftoirc des Empereurs , depuis Henri
rOifeleur jufquà Henri V. Cetidbrégé eft d'un Moine de
Hamerllebe ; mais on conjeduTe que cet Anonyme l'a tiré
de la Chronique du^Mopaftcçcsi-Hirsf^ldXp.) j^par Laftibcrc
de Schafnabourg. u -;",V7 , .c::i ::-' Ij}: j^.inn\,l[j .:;..
.,;

• XVII- Il eut pour iConttmporalnrMarfenus ScGt ,oli rHir MarîndufScot


Sa Chronique.
•bernais., ajnfi nommé,, parce .qu'iliétoit^ié en, Hibernic, Ifan
1028. Dans le dcfir de m.ei"ier iifine vie plu$ parfaite ,'il quitta
en 1056 ((j) , Lt. fàxv'icSc fes biens, vint à .Cologne , où &
il vécut quelque tcms en reclus, vacant continuellement à |a

•levure &. à la prière. .Sigefroi., Abb.é.tde Fuldç, reùpmçOa


dans fon Monaftere. Scot y continua la vie qu'il avoit menée

M I
'.
I i I
i f^iMiw I
'
^'^
^tmi^mmmm

(•) Madfrî's, l'i Aittùjn'it, Br«;//iy«c,


I
701.
Tôt», i, Scriiitor, Sr.inf-j. p. ^07. i (q) Prafat,}» Marian. tcni, i.XJ/iJPî/î.
'.p) Fabric. Tom. 4/ Bibliot. Lntin'. f. |^4.5r 44i>-44i». .',,,!! -'.'. ,',

'
É^rî-rij '
.

684 •
MARTANUS SCOT. Ch. XXXVIII.
à Cologne &
s'enferma pendant dix ans dans la cellule d'un
;

faint EcofTois nommé Annuchard , qui y étoic mort en 1043


Les miracles qui s'opéroient à fon tombeau le faifoient refpe-
ôer. Scor y chantoit tous les jours la Mefle (r) : car il avoir
été ordonné Prêtre à Wirzbourg, en 1051^. Sigefroi ayant
été élu Archevêque de Mayence , engagea Scot à le fuivre ,
& lui donna une cellule d^ns le vdifinage de l'Eglifede Saint
Martin. Scot y paffa le refte de fa vie, qui finit en 1-086. Il
compofa une Chronique depuis le commencement du monde
jufqu'en 1083 dans laquelle il fuit Cafïïodore, qui avoir lui-
*,

même fuivi Eufebe. Il fuit auflîfaint Jérôme, faint Métho-


dius , faint Profper &
le vénérable Bede. C'cft pourquoi on
peut tirer avantage delà Chronique de Marianus, pour la
corredion dû texre de ces Auteurs. Il étoit plus près de leur
t'ems que nous , &
il pouvoir avoir des manufcrits de leurs

Ouvrages , plus Gorre£Îs que les nôtres. Quelques-uns ont ac-


cufé Scot de s'être trop déclaré en faveur du Roi Henri c an-
tre le Pape Grégoire VU. On ne peut mieux en juger, qu'en
lifant ce qu'il raconte de leur différend , depws Tan 1074
jufqu'en 1083. il y appelle les partifans de ce Prince , fchif-
inatiques& hérétiqucis, &-ne parle qu'en termes refpc£lueux
du Pape Grégoire & de ceux qui lui étoient attachés. Catho-
liques & juftes, font les épithetes ordinaires qu'il leur donne.
Sa Chronique en trois Ltvres,
cft divifée chaque Livre en &
plufieurs âges. Il manque quelque chofe au commencement.
Jean Hcrold la fit imprimer à Bafle , en 1 5 Ç5>. On lui- donna
place dans la ColIe£lion de Piftorius , à Francfort en i6iy y
in-fol. & à Rarifbone en 172-6 & 1751, avec la continuation di
cette Chronique jufqu'en 1 200, par Dodechin , Prêtre Alle-
itnZ'.'jnnn,-: TT>ànd'\ & Abbé de Saint Dyfibode. Nicolas de Syghen
, Doc-
.jjpiaoï.;,c
^^^^ d'Erfôrt y fut 'le Continuateur de celle de Lambert de
Schafi^ahourg, &
la conduifit jufqu'en 1352.
AutrfsEcrîts XVIII. Sigcbert (5) j en parlant de la Chronique deMa-
Seot.^'""^*
rianus , dit qu'elle ne commençoit qu'à la naiflancc de Jcfus-
- Ghrift.Tilthcmc ki fait commencer à la création , 8c elle y
en fftet dlins tous nos imprimés. C'eft le feul des
'-éôfi1tti€*K:'e

Ouvrages de Marianus , qui ait été mis fous la prefl'e les au- :

'(*) Marian. Scot. <J./ /i». 104^. | Ealff.caf, jj?.


BRUNON , MOINE. Ch. XXXVIII. 68 j
très fontcncare cnfevclis dans les ténèbres des Bibliorhc-
ques. On met de ce nombre (r) , une Concorde des quatre
Evangcliflcs ; des Lettres pleines de pieté d'Jiudicion , &
dont Trirheme jugeoit la lecture très-utile aux Moines ; &
des Scholies marginales &
inccrlinéaires fur les Epîtres de
faint Paul (h). Le manulcrit qui les contient, fe voit dans la
Bibliothèque Impériale, écrit de la main même de Marianus.
En écrivant f^ Chronique , il corrigea avec beaucoup de fulv
tilitc , Terreur des Chronologiftcs précédens , touchant la

naiflance du Sauveur ; qu'ils comptoient de façon , qu'en fui-


vant leur époque, l'année de fa Paiïion ne fe renconrreroit
plus avec le tems auquel elle eft fixée dans l'Ecriture. cet A
effet il ajouta vingt -trois ans à Tannée où ces Chronogra-
phes raettoient la naiflance de Jefus-Chrift , les vérifia par &
les dates des Confuls. Marianus joignoit à beaucoup d'éru-
dition , une grande pureté de mœurs. Il ne s'eft point con-
tenté de rapporter les faits , comme Hiftoricn ; il a auffi elTayé
quelquefois de concilier les endroits de l'Ecriture , qui paroif-
foient fouffrir difficulté. On peut voir au fécond âge du pre-
mier Livre {x) , comment il fe tire de l'embarras que caufent
les générations de Caïnan &
d'Arphaxad , dans la GcTiéalogic
de Jefus-Chriil par faint Luc.
; diftingucr Brunon , qui a écrit THiiloire de la ^f""°"'
XIX. Pour •'^î^^'-

o J
/ J r- J " J ne. Son Hl-

guerre de Saxe {y j , des autres Ecrivains du même nom dans Mre de la


\ •

Tonziéme fiécle , on le qualifie ordinairement Moine; mais g"f"edeSaKe.


on ne nous apprend point de quel Monaftere il éroit. Ses liai-
fons avec "Werinher , Evêque de Merfbourg , donnent lieu
de croire qu'il demeuroit dans ce Diocèfe , qui fait partie de
la Saxe. Ce fut à cet Evèque qu'il dédia THiftoire de la guer-
re entre le Roi Henri &: les Saxons. La matière lui parut
aflez intéreflante pour la poftérité. Il fit ce qu'il put pour la
Tendre fidèle , & il l'écrivit fur le rapport de ceux qui avoient
été préfens ( z ) , ou fervi dans cette guerre. Quoiqu'il ne dife
rien dans fa Préface , de Grégoire VII , ni de fes démêlés
avec le Roi Henri , il ne pouvoit gueres fe difpenfer d'en

(t) TrIth. CbroHic. Hirfatlg, Tom.j. (y) Tom, I. Script, Germa», Treberi ,
ni an. TO(îi.
(k) Lambec- ta Bitliet, Cafar, Tom, z. ( t) Bruno , in Efi^i, dedicat. tom, I.
t. 749. 741. Freb.p, 173,
( x) Caj), i4./>. 4(58'.
686 WALT RAM. Ch. XXXVIIT.
parler dans le corps de l'Ouvrage; puirqu'il s'étoit propofc de
faire connoître ce Prince tel qu'il avoic ccc dans les premiè-
res années &
dans Ion adolercence («) , afin que le ledeur
ne fût pas furpris de le voir dans Page viril , entreprendre
une guerre fi ruineufe. Brunon dépeint en effet le Roi Henri ,
comme fouillé par toutes fortes de crimes , fur-tout par des
homicides &
des adultères; &
comme un Prince qui ne pre-
noit de conleil , que de ceux qui flattoient les paflîons 1 au- &
torifoient dans l'es défordres. Il joint à l'Hiftoire de la guerre
de Saxe , celle du fchifme que le Roi Henri occafionna en
dépofant Grégoire VII , &
en lui fubftituant l'Antipape Gui-
bcrt. Il fait mention des Conciles de Pvome tenus de fon
tcms delà fentence d'excommunication 8c de dépofition pro-
-,

noncée contre le Roi Henri de l'élection du Roi Rodolphe


;

5i de Hcrman fon fucceffeur; dcsdiverfcs Affemblces tenues


dans l'Empire , par les deux partis de Grégoire & de Gui'
berr d'Henri 8c de Rodolphe ou d'Herman ; & pour mieux
;

conflater les faits qu'il rapporte , il donne en entier les Let-


tres qui y ont trait ; foit celles du Pape Grégoire , ou des
Evoques qui lui étoient attachés ; foit celles du Roi Henri,
11 y en a deux de Werinhcr (^ ) , Archevêque de Magde-

bourg, aunom de tous les Evêques Ducs& Comtes de Saxe, ,

à Sigefroi , Archevêque de Mayencc , pour le fupplier de


porter ce Prince à la paix 8c à la clémence ; & une troilléme
à l'Abbé Frideric, qui lui avoir écrit de travailler lui-même
à faire la paix avec le Roi Henri. La Lettre du Clergé & du
peuple de Magdebourg à Udon , ell: fur le même fujet (c). La
Chronique de Brunon commence à l'an 1075 , & finit à 1083,
Elle le trouve dans le premier Tome des Ecrivains d'Allema-
gne , recueillis par Freherus.
Wahram.Son XX. n'dcoif point de la communion Ror
Cct Editeur
, qui

tt'tîe rF^nfe'
"^^'"^(^), trouvant le Moine Brunon trop.porté.pour Grcr
'
goire VII, & peu favorable au Roi Henri , fit imprimera
la fuite de l'Hiftoire de la guerre de Saxe , un Traite in-
titulé: Dff la manière de coujerver l'unité de fEglife,^- comme
pour fervir d'antidote contre les traits envenimés que le Moi-
ne Brunon a portés au Roi Henri IV. Quelques-uns l'ont at-

{a)IiiJ.pagt JJ4. (c) Pa<^. te;,;.


j
(*)i'«^. 188.1 Jl.ipîi I {J) Ui.l. p, 1^4,
. ,

BERTHOLD PRESTRE. , Ch. XXXVIII. 6^7


tribuc à Vénerie de Vcrccil mieux fon-
: mais l'opinion la
dée , cfc ceiie qui en fait Auteur Waltram , Evêque de Num-
bourg {e ), Il ne 1 écrivit qu'environ huit ans après la mort
de Grégoire VU , comme il le marque en plus d'un endroit
& du vivant du Roi Henri. Ce Traité eft: divifc en deux Li-
vres l'un 8c l'autre font employés à l'apologie de la condui-
;

te du Roi Henri, & à réfuter la Lettre du Pape Grégoire


VII à Herman , Evcque de Metz. Waltram entre dans le
détail de tout ce qui le paflfa entre les deux partis , du Pape
& du Roi Henri. Il accule le premier d'avoir caufé un fchif-
me dans l'Eglifc & dans l'Etat ; dans l'Eglife , en excom-
muniant les Evéqucs attachés à ce Prince , &r en l'excom-
muniant lui-même dans l'Etat , en dépofant Henri , & en
;

lui fubflituant Rodolphe. Il fait voir qu'en cela il a' ufurpc


fur Dieu même , à qui il appartient de donner les Royau-
mes & les Couronnes. Waltram fe répand en injures grodîe-
res contre Grégoire VII. Il l'avoit traité de même quelque
tems auparavant , dans untc Lettre à Louis , Landgrave de
Thuringe ; qu'il vouloir engager dans les intérêts du Roi
Henri & l'obliger à quitter le Pape Grégoire. Cette Lettre
,

fe trouve dans l'Appendice de Dodechin


(/) , à la Chroni-
que de Marianus Scot , & dans la Préface de Burcard Got-
thelf Struve , fur les Livres de Waltram. La tentative de
*
cet Evêque fut inutile. Le Landgrave Louis demeura fidèle
au Pape ; & chargea Heward , Evêque d'Halverftat , de la
réponfe à la Lettre de Waltram. Heward fait voir que cet
Evêque étoit hérétique & (imoniaque; que le Roi Henri étant
auiïî hérétique Se excommunié , il ne devoir plus porter le
nom de Roi ; qu'il avoir vendu les Bénéfices de l'Eglife, tan-
tôt pour de l'argent , tantôt pour des homicides , tantôt pour
des adultères & d'autres impuretés encore plus condamna-
bles. Tritheme fait mention de la Lettre d'He ward
{g) Dode- .

chin l'a mife cnfuite de celle de Waltram , dans fa Chronique.


XXI. C'eft le tems auquel Berthold , Prêtre de l'Eglife de Bertho!d,Pré-
Conftance , compofoit la fienne. Il la commence à l'an i o54"e
'^sJchro"!
où finit celle d'Hermann Contradc , & la conduit jufqu'en nique.

( f ) T»i7j. I . Colleil, Friier, pag. 2;4 i'flt/ lib. de Unitat, Tom. i . Treb, ^. 1 1 y

îSPi' I
(g) Trithfm. Je Script, fcclef. CJp.
Q) DoDECH. tid au. 1090. ^ in Praf. \
jtîo. ^ in Chronic, HirfuHg. ad >ui, 1093.
,

688 B ER T H O r. D ,
I loo. Elle fut imprimée à Balle en 1584, Sz à Francfort en
1 670 , dans le premier Tome de la Colleclion de Ghreilien

Urflitius. Ce qu'on en trouve dans Canifius dans Pifto- &


rius, à la fuite de la Chronique d'Hermann , ne va que juf-»
qu'à l'an 1066. Berthold s'efl applique particulièrement à
rapporter ce qui fe paffa de confidérable dans la diipute de
Grégoire VII avec Henri IV; & il le fait de façon , qu'on
voit aifément qu'il tenoit le parti du Pape. Sa Chronique
quoique eftimable , n'efl: pas exemte de fautes. Il en fait une
en difant (h) , que le Clergé de Metz ayant refufé pour Evê-
que , celui que le Roi Henri avoir fubftitué à Hermann , en
choiilt un qui fut facré à la Mi-Carême , par Gebehard , E-
vêque de Conftancc , en qualité de Légat du Saint Siège.
Hugues de Flavigny , Moine de Verdun , 8c témoin oculaire,
raconte (z), que l'Elu par le Clergé de Mcrz , fut ordonné
non à la Mi-Carême , ni par Gebehard ; mais par l'Arche-
vêque de Lyon , afllfté des Evèqucs de Mâcon & de Lan-
gres, la première fcmaine de Carême. Il remarque que cette
Ordination auroit dû fe faire par l'Archevêque de Trêves ,
Métropolitain ; mais qu'on ne s'adrefla point à lui , parce
qu'il s'ctoit déclaré pour l'Antipape Guibert , contre le Pape
Grégoire VII. On croit que Berthold cft le même que Bernald,
qualifié Prêtre de Confiance, donr il y a un Traité parmi les
anciens Monumens de Sébaftien Tcgnagcle à Ingolftat en ,

16^1 2 , fous ce titre : De robligation defeféparer de la cO)nmuniou


àcs excommuniés y de la re'conciliation de ceux qui font tombés ;
Ù" de rautorité des Décrets des Conciles ^&
des Épîtres décré-
tâtes des Popes.
4i^p""if u'"
XXII. Jacques Hottinger cite de Bernald , des réponfes
apologétiques aux objeÊtions des fchilmatiques ; diverfes &
Lettres , où il trairoit de la Loi de l'excommunication ; de la
folution du ferment de fidélité ; du falut des enfans qui ont
reçu le Batême par des excommuniés ; de l'acquiniion des
Eglifes par argent ; 8c des devoirs des Prêtres; il en mar- &
3UC le fujet dans fes additions au Tome quatrième de l'Hi-
cire Eccléfiaflique Helvétique (/) , imprimée en Allemand,

(h) r.FRTHoiD. ad an, io>}. ("'f"'f.p.4j, pABaiC. Biiliat.ljtitj.um. i.


(«) Hur.o ad an. 109t. If* 654>
( /;Ottikc. Tom. 4. lUp, Ecdef. HeJ-\
On
PRESTRE. Ch. XXXVIII. 6S^
On croit encore que Berthold eft le même que le Prêtre Ber-
nard, dont l'Anonyme de Molk dit qu'il compofa avec fon
Collègue le Prêtre Alboin (m) , un Ecrit utile fur l'inconti-
nence des'CIcrcs ; l'Apologétique des Décrets publiés par le
Pape Grégoire VU, dans un Concile de Rome , contre les

Clercs fimoniaques & incontinens ; un Livre de la puiflance


des Prêtres; un de la concorde des Offices; un de la Confeffion,
& une Chronique. Berthold compofa un Apologétique pour
le Pape Grégoire , ou Traité des Sacremens des excommu-
niés , félon le fentiroent des Pères. Il a été inféré dans le cin-
quième Tome de la grande Bibliothèque Pontificale de Ro-
caberti à Rome, en 16^8 in-fol. &
il efl: le premier de ceux

<]ue Gretzer a fait imprimer fous le nom de Berthold , dans


le fixiéme Tome de fes Ouvrages. Il met enfuite l'Apologé-
tique de l'excommunication prononcée par le Pape Grégoire
VIT ; les A£les du Concile qu'il tint à Rome en 1 074 ; la
première Lettre de Berthold à Alboin , touchant le célibat
des Prêtres ; deux de fes rcponfes ; une féconde Lettre à
Alboin ; une troifiéme réponfe de Berthold ; la Lettre de
réconciliation d'Alboin avec Berthold ; l'Apologétique des
Décrets faits dans le Concile de Rome , par le Pape Gré-
goire VII ; la Lettre d'Adalbert & de Bernald à Bernard ,
Maître des Ecoles de Confiance , touchant les Sacremens des
excommuniés ; la réponfe de Bernard à cette Lettre ; une
autre Lettre d'Adalbert & de Bernald à Bernard. Tous ces
Opufcules portent , tantôt le nom de Berthold , tantôt ce-
lui de Bernaldi , &
quelquefois de Bernard. C'eft vraifem-
blablcment la même perfonne. On en juge par la qualité de
Prêtre , donnée à Bernald & à Bernard , comme à Berthold.
On les dit , ou Prêtre , ou Maître des Ecoles de Confiance ;
le Bernard à qui l'Anonyme de Molk attribue un Apologéti-
que des Décrets de Grégoire VII , eft le même , félon lui , qui
a fait une Chronique. Les réponfes apologétiques aux fchifma-
Ques j qui , dans Hottinger , portent le nom de Bernald , ont
dans Gretzer celui de Berthold.
XXIII. Aux Ecrits de cet Auteur en faveur de Grégoire Ecrits en fa-

VII , Gretzer en ajouta divers autres («) ; fçavoir , de Paul Henri."

(m)Amnfm. Mtllicenf. de S(rift,Ietlef,\ (n) Gretz. Ttm, 6. EJiU hgoifi. ai_


tap. TOI. I «». 1605. »V4.
Tme XX Ssss
6^0 BERTHOLD, PRESTRE.
de Bernried de Gerhoh de Reicherfperg ; d'Onuphre Pan-
;

vinius. Goldaft lui oppofa un grand nombre d'autres Ecri-


vains , dans l'Apologie qu'il fit de Henri IV contre Grégoi-
re VII, imprimée à Hanovre en i6i i in-4°. Il mit à la tête
le Cardinal Bennon , dont il y a deux Livres ou plutôt deux
Lettres fur la vie & les geftes d'Hildebrand ; enfuire Otton
de Frifinguc ; l'Anonyme qui a décrit en trois Livres la guer-
re de ce Prince contre les Saxons ; les deux Lettres fur le cé-
libat des Prêtres , écrites par le Prêtre Alboin , condamné
par Hildebrand ; l'Apologétique des Evêques & des Clercs
Impériaux pour l'Empereur , contre l'excommunication du
Pape; le Difcours de Conrad , Evêque d'Utrecht, contre le
Pape , prononcé dans l'Aflemblée des Etats ; la Lettre de
"Waltram , Evcque de Numbourg, à Louis, Landgrave dé
Thuringe ; & trois Livres d'Apologies , compolés par le mê-
me Evêque , en faveur du Roi Henri ; avec un Traité de l'in-
veftiture des Evêques & des Abbés , par le même "Waltram ;
une Lettre d'Yves de Chartres , fur les inveftitures ; une Let-
tre en forme d'Oraifon funèbre , pour l'Empereur Henri , par
Otbert 5 Evêque de Liège ; & quelques autres Ouvrages fa-
vorables à ce Prince ; mais qui ne furent écrits qu'après fa
mort. Goldaft penfe que la vie anonyme du Roi Henri , eft
de cet Evêque de Liège. Elle a été réimprimée à Francfort
en iyi6 , parmi les Œuvres de Reuberus (o), L'Auteur en
fait un Saint à canonifer, & dit de lui , qu'il fut la gloire de
Rome , l'ornement de l'Empire , la lumière du monde. On a
mis a la fuite de cette vie (/>) , neuf Lettres de ce Prince ,
dont les trois premières regardent Grégoire VH
, les deux

luivantes font au Pape Pafchal , qu'il ne traite pas mieux, que


fon prédécefTeur. Dans la dixième , il fe plaint au Roi de
France , des perfccutions de la Cour de Rome , & l'accufe
d'avoir armé contre lui fon propre fils. 11 s'en plaignit à
Henri lui-même, par fa fepticme Lettre. La huitième & la
neuvième font adreflces aux Archevêques , Evêques , Ducs
& Comtes du Royaume d'Allemagne , dont il demande le
fecours pour rentrer dans les Etats que fon fils lui avoit en-
levés. Suivent les trois Livres (^) de l'Hiftoire de la guerre

(^Ji'.i^< 174. 1
STGEFROI, ARC. DE MAY. Ch. XXXVIII. (îpi
de Henri IV contre les Saxons. Goldafl , qui les avoir d'a-
bord attribues à Rupert , Prévôt de Goflar , & depuis Evê-
ue de Bamberg , changea de fcntiment , & crut qu'ils ccoient
1'un nommé Ruland. Ce que l'on en peut dire, c'eft que l'Au-
teur avoir été préfent aux faits qu'il rapporte. Il commence fon
Hiftoireen 1075 , &
la finit en 1075. Elle efl écrite en vers hé-
roïques, d'un uyle très-médiocre.
XXIV. L'éducation du Roi Henri , &
le gouvernement Sigefroi.Af.
de l'Etat, avoient été confiés à Sigefroi , Archevêque de.^j^^^^'î^^ ''•'

Mayence ( ^ ) j &
à quelques autres Prélats de diftindion,
^^^"'^'

Adalbert de Brème , qui étoit de ce nombre , s'empara tel-


lement de l'efprit du Roi , que Sigefiroi , ni Annon de Co-
logne , n'eurent prefque plus rien à faire à la Cour. Sigefroi
fe trouvant donc en liberté (y ) , partit en 10^4, pour Jéru-
falem , avec Gunther , Evêque de Bamberg , Otton de Ra-
tiibonne, Guillaume d'Utrecht,& plufieurs autres perfonnes
confidérables , à la tête d'une grande troupe de pèlerins. Ils
furent reçus à Jérufalem ( r ) , par le Patriarche Sophrone ;
& après qu'ils eurent vifité les faints Lieux , ils revinrent
chacun chez eux en 106^. L'année fuivante le Roi époufa
Berthe fille d'Otton , Marquis d'Italie. Ce mariage n'étant
pas de fon choix , il tint en 1069 une Diète à Vormes , dans
le deffein de quitter fon époufe. Il en parla fpcrétement à
Sigefroi ( k ) , à qui il promit d'obliger les Thuringiens à lui
payer les dixmes , s'il vouloir lui aider à faire diffoudre fon
mariage. L'Archevêque le promit : la diflblution fut propofée
à la Diète. Sigefroi appuya la demande du Roi ; d'un &
commun confentemcnt , on renvoya l'affaire au Concile qui
devoir fe tenir à Mayence , fur la fin de Septembre.
XXV. En attendant , Sigefroi écrivit au Pape Alexandre Sa Lettre au
ce qui s'étoit paffé dans la Diète de Vormes ( a- ) , & la ré-
^ape Alexan-

folution que le Roi avoit prife de répudier la Reine fon é-


poufe. Nous lui avons , dit -il , réfifté en face , de l'avis de
tous les Seigneurs , & déclaré que nous le retrancherions de la
communion de l'Eglife , s'il ne nous expofoit la caufe de fon

(r) Lambert. Schatkab, aJ ati.t C«) Lambert Schafn. «</ n.v. 106?.
Ï06 J, (x) Ton). S' Conc, p. i ZOD. ÇJ? CoJ. Uial,
I
( j) lient, ni un, lo(î4, 1 Tom, î. Script. McJsi azti. Eccard. pag,
(i)Ingdi.ï. p. p04. '115.
Ssssij
6^1 S I G EFRO I ,

divorce. Il a allégué l'impuifTance de la Reine, & elle en- eft


convenue. doivent Tun
Ils &
l'autre fe trouver au Concile
indiqué à Mayence , pour y fubir le Jugement, Mais nous ne
voulons rien faire fans votre autorité vos avis : envoyez-&
nous des perfonnes capables, avec vos Lettres , pour être pré-
fens à l'examen &
à la dccifion. Ce n'eft pas ainfi que Lam-
bert de Schafnabourg raconte la chofe {y ). Il dit que l'Ar-
chevêque prit le parti de ce Prince , autant qu'il le put faire
honnêtement. Quoi qu'il en foit , le Concile s'aflembla à
Mayence au jour marqué : mais le Roi ayant appris en che-
min , que Pierre Damien y écoit arrivé , comme Légat du
Pape , avec ordre de s'oppofer au divorce ; & de menacer
Sigefroi , de la part du Pape
,
pour avoir promis^ d'autori-
fer cette fépa ration Francfort , pu il manda le Con~
; il alla à
eile. Pierre Damien expofa les ordres du Pape , parla &
fortement contre l'entreprife du Roi. Les Seigneurs lui tin-
rent un même langage en ', forte qu'il fut obligé de fe défifter
du divorce.
Il vaRome: XXVI. En 1070 ( z) , Sigefroi fit levoyage de Rome ,'

ciie Vivi^en-
^^'^^ Annon de Cologne & Herman de Bamberg accufés :

ce. tous les trois de vendre les vafes facrés, le Pape Alexandre
les réprimanda févérement mais lur le ferment qu'ils lui fi-
:

rent de fe corriger, il les renvoya en- paix. Sigefroi étoir en-


core à Rome , lorfque le Clergé de Confiance porta fes plain»
tes contre Charles , Chanoine de Magdebourg. Le Roi Hen-
ri l'avoit nommé Evêqje de Confiance à \à mort de Ru- ,

mold, arrivée fur la fin de l'an \o6^. Mais on prétendoit que


Charles avoit obtenu l'Evêché par fimonic , Se détourné fur-
tivement une bonne partie des tréfors de l'Eglife. Le Pape
Alexandre défendit de vive voix à Sigefroi , de facrer Char-
les , jufqu'à ce qu'il fe fût jufiifié ; &
lui réitéra cette défenfé

par écrit (/?) , avec ordre d'afl^cmWer un Concile pour exa-


miner cette affaire. L'Archevêque de Mayence obéit f &
voyant que le Roi Henri prenoit les moyens d'empêcher la
tenue du Concile , & de faire facrer Charles à Rom^ il écri- ,

vit au Pape de n'en rien faire {b) ; mais de lui renvoyer l'or-

f/) Lambert. Schafnab» ad »n.\ (a)Tom.<).C<>nc.pa^.MO<;.\i06.


jo«9. I (b) Coil Vii'lric,i,iii,Tam. i.Satft»
(t) IJtm, aJ at, 1070» [McJU «vi. E^ctud.
ARCHEV. DE MAYENCE. Ch. XXXVIIT. ^ 6^j
dination , au cas que le nomme par le Roi le trouvât in-
nocent. Le Concile fe tint à Maycnce (c) , le 15 d'Août
1071. Gebcbard de Sa!zbcurg , & Udon, Archevêque de
Trêve-, y afTiflercnt avec neuf autres Evêques; après qu'on
eût terminé diverfes affaires particulières , on examina celle
de Charles. Les Députés du Clergé de Confiance , prélen-
tercnt un libelle contenant les cauies de leur oppofirion à fon
iàcre ; les noms & les qualités des témoins , par lefquels ils

offroient de prouver que Charles étoit coupable de ftmonie,


& qu'il avoit pillé les biens de i'Eglife. Le Roi fit en cette
occafion , tout ce qu il put pour la défenfe de Charles ; mais
celui-ci, après de férieules réflexions fur fa propre condui-
re, remit à ce Piince l'anneau & le bâton pailoral , difanc
Qu'il ne vouloit pas être Evêque de ceux qui ne vouloient pas
dclui.
XX Vn. Sigefroi rendit compte au Pape Alexandre , de ^* ^^"'* *°
tout ce qui s'ctoit paflfé dans ce Concile, êc lui en envoya les ^fc,
A£tcs. La Lettre qu'il lui écrivit fur ce fujet, eft fuivie dans-
k Code Bamberg {d)y de pluileurs autres du
d'Udalric de
même Archevêque. La première eit une Lettre de recom-
mandation au Pape Alexandre , en faveur du porteur. Il a-
voit commis un homicide, & fait la pénitence prcfcrite par
les Canons. La leçon e eft au Cardinal Hildebrand (e) elle ;

a pour but d'engager le Pape à envoyer quelqu'un de fa parc


âu Concile de Mayence , pour foutenir les intérêts de Sige-
froi contre les Thuringicns , qui lui rcfuloient le paiement
des dixmes. Dans la troilîémc (/) , il communique au' Pape
Alexandre le defTeinoù il é oit de faire le péleiinagc de Jé-
rufalem , pour là rémifTion de fcs péchés : en même -rems il
lui fait des plaintes derEvcqued'Halbcr.'laT ,. qui affedoitde
porter dms la célébration des Myfteres d'autres ornemens
,,

que ceux qui croient en ufage dans fon Eglile fous fes pré-
dccefleurs. il !c prie , dans la quatrième ^g) , d'aider de fes
confeilsie Roi Henri encore jeune ; de l'aider luirmêcne à ré-
duire les Thuringiens rebelles , &
de faire punir les auteurs

(f) Ihiit. îS Tom. •). Coac.f. 1106. (f)nùi.p.%jeitt:yx-i.


(^) Cod. U.ltl. low. 2. fftjri, paf (•) \bii, O J-fuai, luvùtnf, Tarn, l.

IX». .

(») UU,
^^4 S I G E F R O I»
du meurtre commis en la peribnne de Conrad, élu Evêqué
de Trêves. La cinquième fut écrire au Pape Grégoire VU ,
dans les commencemens de Ion Pontificat (h): elle regarde
le différend de Jaromir ou Gérard , Evêquc de Prague, dont
il a éré parlé plus haut. Sigefroi y demande aufli le fecours

du Pape contre les Thuringiens. Au mois d'Odobre de l'an


1 074 , il affembla un Concile à Erford , où il prefla les Clercs

concubinaires de renoncer fur le champ au mariage ou au


miniftere de l'Autel , fuivant le Décret de Grégoire VU.
Ses inftances furent inutiles , de même que celles qu'il réitéra
pour la dixme des Thuringiens. Le Pape mécontent de la
non éxecution de fon Décret , écrivit à Sigefroi de fc trou-
ver à Rome la première fcmaine de Carême j pour y aflifter
au Concile. L'Archevêque ne l'ayant pu pour caufe de ma-
ladie , il en fit fes excufes au Pape par la fixiéme Lettre ( i )û
Il s'excufe dans la feptiémc , de n'avoir pu à caufe des trou-

bles occafionnés par la guerre entre le Roi Henri , & les Sa-
xons & Thuringiens , afiTemblcr le Concile pour l'extirpa-
tion de la fimonie. La Lettre de TEglife de Mayence à Si-
gefroi, paroît avoir été écrite vers l'an 1070. Cet Archevê-
cjue étant à Rome , voulut renoncer à fa dignité : le bruit s'en
répandit en Allemagne: fon Clergé lui écrivit pour le dé-
tourner de fon deflfein (/). Sigefroi fut un des plus zélés contre
le Pape , au Concile de Vormcs en 107^ ; & le Pape le re-*
gardant comme auteur du fchifme entre le Royaume Teu-.
tonique &
l'Eglife Romaine, l'excommunia nommément danS'
le Concile tenu à Rome la même année. Ce fut une raifon
à Sigefroi de s'attacher de plus près au Roi Henri. Il s'en
détacha dans la fuite , fc réconcilia avec Grégoire VII 9
eut part à l'éledion de Rodolphe , &
le facra dans fon E-
glife Cathédrale , avec PArchevêque de Magdebourg. Ce
^t lui auffi qui fit l'ondion Royale fur Herman (m) , élu
Roi d'Allemagne , à la mort de Rodolphe. Il mourut en
1084 , & eut pour fucceffcur dans l'Evêché de Mayence ^>
Vecilon. . >

Lettre; a'Her- XXVIII. Lc Codc d'Udalric , d'où nous avons tiré une
mann Je Bani-
berg.deThier-
ri de Verdun.

[i)ll>id.f. 1^0. \ (m) L«MBEKT. Conn'ArMf. <ii<iffl.io8xi


ARCHEV. DE MAYENCE Ch. XXXVIIT. 6^^
partie des Lettres de Sigefroi («) , en contient quelques-unes
d'Herman de Bambcrg , qui Taccompagna dans ibn voya-
gé de Rome ; &
des Chanoines de fon Eglife. Elles ont
rapport à leurs démêlés touchant les Chanoines de Saint Jac-
ques , dont nous avons déjà parlé. Celles de Thierry , Evc-
que de Verdun ; d'Egibcrr , Archevêque de Trêves ; Henri &
Èvêque de Spire ; font autant de libelles diffamatoires contre
le Pape Grégoire VII.
XXIX. Suivent, dans le même Code (o) , plufieurs Let- Lettres de
très de l'Antipape Guibert , où il prend le nom de Clément. Clément à
La première efl une Lettre ^circulaire
il 1 / ... .,
aux Evêques
,., r 'r
aux ^^""pap^
(juibert.
&
I

Abbcs , pour les inviter au Concile qu u le propoloit de te-


nir dans l'Eglife de Saint Pierre. Les autres regardent des
affaires particulières.On y a ajouté une efpece de Diiïçrta-
tion (p) où l'Auteur prouve que Guibert avoir été élu ca-
,

noniquement ; & la relation de quelque^ miracles (q) , qu'on


difoit avoir été opérés à fon tombeau. Ces deux Ecrits font
anonymes.

"- I
, 1 . j - - . - t l' iJÀT Mu i .
!

X'')Tom. i. Script. Medii'avi, p.- l}4-i' Xp)^''''^- f- '81.


t$ fil/. 170. Ij) léiJ.p. iç,4.
I

«5»

: •.: :,..:]-c .i^ - .

lobn'i ono no ivsl litt-rtoi


,

YpiJ [SAINT ANAST'ÀSE,

CHAPITRE XXXIX.
Saint Anaftafe , Ermite i Guillaume Moine de Jumiège ;

Dudon de Saint -Qtiemiti i Guillaume de Poitiers ;


'
J: Guillawne i Roi d^ Angleterre } Thierri, Evêque de Ver-
dun,

s. Anîflafc,
J.^ AiNT Anastase né à Venifedans les comraencemens
Fni ite.
^ ^ ^^ l'onzicme , y
dans la piété & dans
ficcIe (r)

les icicnces , fous Jes yeux de les père & mère , jufqua ce
fut élevé

que faifanr de férieufes réflexions fur les dangers infépara-


blcs de la pofTeirion des biens & des autres avantages tem-
porels , il les abandonna pour fe retirer dans un Cloître ,
& y mener une vie pauvre &
mortifiée. Il choifit le Mona-
ftere du Mont Saint Michel , appelle, in periculo maris. Il y
ctoit encore en 1058- Mais l'Abbé dont on ne fçait point
le nom , ayant été reconnu pour fimoniaque , Anaftale en lor-
tit , & fe retira en une Ifle fur les côtes de la mer , où il vé-

cut en Ermite. L'éclat de fes vertus fit naître à faint Anfel*


me, alors Abbé du Bec , le defir de le connoître. Il employa
à cet effet (f) , la médiation de Robert de Tombelaine,
Moine de Saint Michel, ami d"'Anaftaie. Sa réputation par-
vint auffi julqu'à faint Hugues , Abbé de Cluni , qui l'enga-
gea à venir s'établir en fon Monaftcre. Anaflafc y pafla en-
viron fept ans , au bout defquelsll fut envoyé , par ordre du
Pape Grégoire VII , pour prêcher l'Evangile à quelques re-
ftcs de Mufulmans qui étoient encore en Efpagne. Voyant
que fes dilcours faifoient peu d'imprefTion fur eux , il s'offrit
pour les convaincre , de paffer , après avoir célébré la Méfie
au travers d'un bûcher ardent. Les Mululmans craignant que
s'il en fon oit fans en être endommagé , ils ne fuiîent con-

(r) Vit.i Afi.-.ft.,f. Tom.9. Mtr. MaiillA (') Anseim. LU. i. Bfip. j.

f. 488.48J1 C5/fj. I

traînts
,

ERMITE. Ch. XXXIX. '%


traints de recevoir le Batî-mc , ne voulurent point accepter
l'offre. Il revint donc à Cluni. L'Abbé Hugues s'en fervoit
dans le cours de (es vidtcs , pour donner des indrudions aux
Moines. Mais Anaflale qui le fentoit toujours de l'attrait
pour la vie érémitique , obtint de lui permilTion de le retirer
dans les Monts Pyrénées. Il y pafia trois ans , prêchant la
parole du falut à ceux qui le venoient voir. Son Abbé le rap-
pclla à Cluni , pour donner à fes Moines un exemple de
"vertu. Cefl le motif qu'il allègue de fon retour, dans la Let-
tre pleine de tendreffe qu'il lui écrivit (f). Anaftafe obéit fans
délai mais il mourut en chemin , en un lieu connu aujourd'hui
:

fous le nom de Doydes au Diocèfe deRieux.


II. L'Auteur de fa vie , nommé Gaurhier, ne marque point Sa mort en
l'année de fa mort ; mais en fuppofant qu'il fortit de l'Ab- loSj.SaLet-
"'
baye de Saint Michel vers l'an 1058 , il fuit de-là qu'il mou- c'ifarifti^e,^
rut vers l'an 1085 : ce qui peut fe vérifier par la fupputation
des années qu'il pafla dans la folitude («) , en Efpagne à &
Cluni. Sa vie fut écrite peu de tems après fa mort. Il y eil:
faitmention de divers miracles opérés par fon interccflion.
Nous avons de lui un petit Traité en forme de Lettre , fur
i'Euchariflie. On Ta attribué quelque rems à un Moine de
Saint Serge à Angers fur deux raifons la première , que le
; :

oianufcrit fur lequel Dom Luc d'Acheri l'a donné au public


ipparticnt à cette Abbaye ; la féconde, parce que ce Traité
cil adrcffé à Gérard , Abbé de Saint Aubin en la même
Ville. Mais il efl à remarquer que le nom de Gérard ne fe lit
point entier dans le manulcrit, & que l'on n'y trouve que la
lettre initiale G que dans un autre manufcrit , au lieu de G ,
',

on lit un double W
ce qui a plus de rapport au nom de
;

Guillaume ou \C' uillaume qu'à celui de Gérard. Ce qui fait


croire à Dom Mabillon (x) , que le Traité d'Anaftafe efl
dédié à Guillaume , Abbé de Cormeilles, auparavant Moine
du Bec , qu'il avoit pu connoître lorfqu'il demeuroit à Saint
Michel. Guillaume l'avoit prié de lui dire ce qu'il croyoit du
Corps &
du Sang du Seigneur (y). Je crois , lui répondit
Anaflafe ^ quele facré-faint Corps du Seigneur , qui efl cha-

( t ) Tom. 9. AHer. p.491. 1 (x) MaBiil. Lit. $$. Annal, tinm. So.
(k) AIabilign , Ttm. 9, AAor, j»\p. nj-
Viferv.nia-ziiis. J (^) /IfUil Laufranc. in notis, f/ig. l\.
"

Tome XX. Tttt


^p8 SAINT ANASTASE, ERMITE.
que jour conlacré fur l'Autel par le miniftere du Prêtre (z),
eft fans aucun doute fa vraie chair qui a fouffert fur la croix ,
& fon vrai Sang qui efl forti de fon côté ; ainli que la Vé-
rité même nous en afllire en difant Ma Chair efl vraiement, :

"' ^' ^^'


viande , (?> mon Sang ejl véritablement breuvage. Je crois que
la chair que nous mangeons pour la rcmifTion de nos péchés,
n'efl autre que celle qui eft née de la Vierge Marie , & qui
eft reflufcitée du tombeau & que le Sang que nous buvons ,;

n' eft autre que celui qui eft forti de fon coté. Il condamne
l'erreur de ceux qui jugeant de l'Euchariftie , plutôt par les
yeux corporels, que par ceux de la foi, difent que le Corps
de Jefus-Chriil n'cft qu'en figure dans l'Euchariftie, même
après la ccnfécraticn j 8c que le pain y eft matériellement ou
réellement ce qu'il appelle une folie conire la foi. Mais il
:

ne fait point difficulté de reconnoître qu'il eft permis , en


parlant de l'Euchariftie , de fe fervir des termes de pain &
de chair , de facrement & de figure , pourvu qu'on en croie
ce qu';l en croyoit lui-même*, c'eft-à-dire, que c'eft la vraie
Chair & le vrai Sang du Sauveur. Pour éviter la prolixité, il ne
cite les témoignages que de trois anciens Pères , faint Cy-
prien , fair.t Auguftin & faine Ambroife ; & il fe ccntente de
nommer un grand nombre d'autres faints Dodeurs , qui ont
pcnlé de même fur ce Myftere. Ce qui fait voir qu'il s'étoic
appliqué lérieufemcnt à la Icdure des faints Pères. Son Trai-
té fetrouve parmi les Ecrits de Lanfranc , dans le premier &
Tome de l'Hiftoire de l'Univerfité de Paris (u) , par du Bou-
lai. Je ne fçais pourquoi cet Editeur M. Dupin ont mis &
Anaftafe entre les difciplcs de Berenger , qui abandonnèrent
leur Maître &
fon hérélie. On ne voit dans cette Lettre aucu-

(t) De Corpore & Sanguine Doraini [


mo'^i verbis Dominicis fidera pribenj;
jufTifti , vt-ner -.nJe Pater, ut quid parvitas i
ficut nullum al.ud corpus pro noftr.i falute
miafentif, imo quod crédit , ve
faiiftitati traditum pra: er fuuin fcio , i;a ut piîcfa-
flra: [jati-faciat : haec brevi er pro modulo tus fum, nullam eijs aliam carnem quàtn
ineo faivâ fidci puritats accipiat. CreJo q:x nata eft de Maria Virgitie , & refur»
lâcro-fanAum Corpus Dominicum quod iii rexitde ftpulchiO, manducnri in remiflîo-
altari quotidie ex Sacerdoiis oflicio con- '

nem ptcc; toruin cn'do: neque a.ium fan-


fecratur , omni execratâ dub.'tatione , ve- gfincm b bi ,
quàm qui profluxit de latere
ram cjus carnem efle qujc pailt ift in
,
ej.s, non c'ubito. Qui vero eftimantilluj
cruce ; fit verum e;us fanguinem qui ma- j
p'ft «.onfecrationeni panem elFe materiali-
navit ex latere, ut Veritas ipfa te'latur: j
ter , & Corpus Dom ni figur.iliter lantùia
C.iro mca , in^uiens , vfrè eft cibus i t^ Sun- i tk no-, verac.'ter . . tout, a tidem dcHpimit.
guis mtus verè efi fotHS. His & Iiujufte- |
(a) P>ig. ^(.i.Jiin. l.
,

GUILLAUME DE JUMIEGE. , Ch. XXXIX. 699


lie marque de rétra£lation , ni que l'Auteur ait jamais varié
dans la dodrine de
la prcfencc réelle.
rapporter au même tcms , l'hiftoire des Nor-
III. Il faut Giiiia-ime c!e

"'"'^^^*
mans , par Guillaume furnommé ordinairement de Jumiege ,
parce qu'il en croit Moine , &
quelquefois Cnlatlus (b) , ap-
paremment à caufe qu'il ctoit travaillé de la pierre. en ju- A
ger par le huitième Livre de cette Hifloire , l'Auteur auroic
vécu jufques vers le milieu du huitième fiécle , n'auroit fini &
fon Ouvrage qu'après l'an 1 1 37 , puifqu'il y cfl: parlé de la
mort de Boion , Abbé du Bec , arrivée en cette année-là :
mais ce huitième Livre n'eft pas de la même main que les
fept autres. On n'y reconnoît, ni le même deflein, ni le mê-
me flyle d'ailleurs quelle apparence qu'un Ouvrage dédié
:

au Roi d'Angleterre, dès avant l'an 1087 , n'ait été achevé


que près de cinquante ans depuis ? C'cft donc à l'Epître dé-
dicatoire de cette Hiftoire , qu'il faut recourir pour en fixer
l'époque elle cfl: adreflce à Guillaume le Conquérant , déjà
:

Roi d'Angleterre. Il le fut pendant près de vingt ans , de-


puis le mois d'Oâ;ol;)re 1066 , jufqu'au mois de Septembre
1087 qu'il mourut. Il cfl: vifible qu'on ne peut placer l'Ou-
vrage du Moine de Jumiege , ni avant 1066 y ni après 1087;
& qu'il l'écrivit dans l'intervalle de ces deux époques. Mais
en quelle année? C'efl ce qui ne peut fe décider. On voit feu-
lement que dans le tcms qu'il compofoit fon feptiéme Livre
le Roi Guillaume avoit appaifé les troubles élevés en Angle-
terre au commencement de fon règne (c). D'où l'on peut con-
jcâurerque l'Auteur achevoit ce Livre vers l'an 1070: car ces
troubles durèrent quatre ou cinq ans.
IV. Le deffein de Guillaume de Jumiege {d) , dans cette SonHlftoîré
''" N°'"""^'
Hifloire , eft de faire connoître les mœurs les avions rc- &
raarquables des premiers Ducs de Normandie. C'eft à quoi il
emploie Les quatre premiers Livres, qui ne font qu'un abrégé
de rOuvrage de Dudon, Doyen de Saint Quentin , fur le
même fujet. Guillaume eftiraoit cet Ecrivain {e) ; & il le cire
avec éloge. Mais aujourd'hui on regarde Dudon comme un
Hiftorien fabuleux , & un faifcur de Romans. Guillaume , en

(b) Orderic. Vital, lih, 5./». 478 \5 \ (<l) Duchesne, H//?. Norm.p. ÎI5.
AS^- i {e} GviLLï.LM.in Priffat. p.zïj.

Ttttij
, — —
700^ GUILLAUME,
1 abrégeant, ne s'arrêta qu'aux faits qui lui parurent de quel-
que importance. Il fupprima la plus grande partie des vers
que Dudon avoit inférés dans fon Hiftoire (/) , en l'honneur
de ces premiers Ducs. Les cinquième , fixiéme , & fepciéme
Livres vont depuis la mort de Richard I , c'eft-à-dire , de-
puis Van pp6 j jufquà la conquête d'Angleterre par le Roi
Guillaume en 1066 ce qui comprend l'Hiftoirc de quatre
:

Ducs , dont le dernier eft Guillaume furnommé le Conqué-


rant, & depuis Roi d'Angleterre. Orderic Vital dit entermes
exprès (g) , que le Moine Guillaume ne pouflTa pas plus loin
fon Ouvrage. Cefl donc au quarante- deuxième chapitre du
feptiéme Livre , qu'il faut le finir , regarder les deux &
chapitres fuivans , où il eft parlé de la mort de Robert Guif-
card , Duc de Pouille , & de la fépulture de Guillaume, Roi
d'Angleterre, comme ayant été ajoutés après coup. Ce qu'on
lit dans le vingt-cinquième chapitre , de la mort de Lanfranc

en 1066 f 8c de celle du Roi Guillaume en 1087 , ne peut


non plus être attribué au Moine de Jumiege , lui qui , au
quarante-deuxième , parle de ce Prince , comme régnant en-
core glorieufemcnt en Angleterre. Il.feroit ailé de montrer
par divers autres endroits , que ce feptiéme Livre a été re-
touché' par une main étrangère &
peu correde. Ces additions
pouvoicnt n'être d'abord que des notes marginales , que des
Copiftcs peu intelligens ont cnfuite fait paffer dans le texte.
Guillaume de Jumiege narre brièvement , coulamment &
clairement. Son Hiftoire parut pour la première fois à Franc-
fort en 16^03 dans la Collection des Hifloriens Anglois &
Normans de Guillaume Camden; puis à Paris en 16 ip , chez
Sébaftien Cramoifi , Robert Fouet Nicolas Buon. On doit &
cette dernière édition aux foins d'André Duchefne , qui fît
entrer dans un même Recueil , tous ceux qui avoient écrie
l'Hiftoire des Normans, depuis l'an 838, jufqu'en 1220:
le Traité des Offices (h) , que quelques - uns ont attribué à
Guillaume de Jumiege , efl de Guillaume de Ros , Abbé de
Fccam.
Hifloriens de V. Le premier Hiftorien , dans la Colledion d'André
Normandie.
Guill.'.ume
Arrhidiacre
de Li2.ieux.
'
—— ——
(h) GfSHER. Biklioi. univ. pag-io},
(f) Orderic. Vital, in Prafat. Iil>. ^.i
^.458. IrosskMti.iitAffaratttom. ^'f-joy
*
(^) Idem, iliiil,
,

ARCHID. DE LIZIEUX. Ch. XXXIX. 701


Duchefne , eft anonyme. Il commence par rapporter lesin-
curfions des Normans dans la Frife , la Hollande , la Belgi-
que , la France & la Germanie ; & finit par l'écablifTement

de RoUon dans la Ncuftrie , ce oui fait une Hifloire d'envi-


ron 6p ans , à compter depuis l'an 838 julqu'en Sp6. On
trouve enfuite ce que Reginon a dit des Normans , dans fa
Chronique; ce qu'on en lit dans les Annales de Mayence ,
dans Abbon de Fleuri fur le ficge de Paris , dans les Anna-
les de Fulde, & dans diverfes Chroniques particulières. Sui-
vent les trois Livres de Dudon , Doyen de Saint Quentin ,
intitulés
: Des mœurs Ù' des gefîes des Normans. Le premier
commence à Haftmg , Duc des Danois; le troifiéme finit à la
mort de Richard I , Duc de Normandie. L'Ouvrage efl a-
dreffé à Adalberon , Evcque de Laon. Enfuite de Dudon
on a mis l'éloge d'Emme , Reine d'Angleterre, fille de Ri-
chard II. L'Auteur écoit contemporain & Moine de Saint
Bertin. 11 compofa cet éloge du vivant même de cette Prin-
cefle , & le lui dédia. Il eft divifé en deux Livres. Vient
après cela l'Hifloire de Guillaume le Conquérant , qui , de
Duc de Normandie , devint Roi d'Angleterre. Elle a pour
Auteur Guillaume de Poitiers (0 > ainfi nommé à caufe du
long féjour qu'il fit en cette Ville. Perfonne n'étoit plus en
état que lui , d'écrire les gelles de ce Prince , puifqu il iervit
fous lui dans les armées, & qu'il fut enfuite Ion Chapelain.
Il avoit d'ailleurs du talent pour écrire. On le lit avec plai-
fir , parce qu'il efl clair & concis ; & qu'il entremêle fa nar-

ration de maximes de politique & de traits de piété, qui font


des preuves de la bonté de fon cœur & de la folidité de fon
efprit. Ce ne fut qu'après la mort de Guillaume , qu'il en-
treprit d'écrire fon Hiftoire mais il n'y mit pas la dernière
:

main ; du moins ce qui nous refle ne va que jufqu'à la mort


d'Eduin, Conful des Merciens , arrivée en 1070. Guillau-
me de Poitiers mourut à Lizieux , où l'Evêque Hugues lui
avoit donné un Archidiaconné ( /). Il le conferva fous Gil-
bert fuccefleur de Hugues. On ne connoit point d'aucre édi-
tion de fon Hiftoire , que celle d'André Duchefne &• quoi- -,

qu'il Fait faite fur un manufcrit qui paffe pour être l'origi-

(«)Ordfric. Vital, lib. 4. f. <^zl. !/#i, 4, p. Jil«


(/) OiVPEmC, Vital, lit, ^. p. fjl,^ [
,,

702 GUILLAUME,
nal , elle efl imparfaite dès le commencement , Ton n'y &
trouve rien de ia naiflance de Guillaume le Conquérant , ni de
fon éducation.
Guillaume, VI, Cc Prince qui efl: le principal héros des Hifforiens
I^J^^
'^ ^"S'e- dont nous venons de parler , étoit fils de Robert I , Duc de
Normandie , & d'Herlette fa concubine (m) ; d'où vient
qu'on lui donna le furnom de Bâtard. Il naquit à Falaife
fur la finde Tan 1027. Quoique enfant , fon pcre prêt à par-
tir pour le pèlerinage de Jérufalem , le fit reconnoître pour
fon fucceffcur ; & il lui fuccéda en effet au mois de Juillet
1035 (w). Sa minorité fut agitée de guerres civiles, qui le
mirent fouvent en danger de périr. On ne laifTa pas , pen-
dant ces tems de troubles , de lui donner une éducation con-
venable à fon rang. Il eut pour Précepteur Turold , homme
de mérite : mais il fe forma encore dans la fcience & dans la
vertu (0) , en converfant familièrement avec desperfonnes
fages & inftruites , dont il fe faifoit ordinairement accom-
pagner. Devenu paifible poflcfTeur de fes Etats , avec le fe-
cours de Henri , Roi de France (p) , il y fit régner l'équité
&la juflice. Son mariage avec Mathilde fille de Baudouin
Comte de Flandre, lui caufa du chagrin , parce qu'ils étoient
parens dans les dégrés prohibés. Le Pape Nicolas II , pour
l'obliger à le rompre (g) , mit la Normandie en interdit ;
mais fur les remontrances que Guillaume lui fit faire par Lan-
franc , il accorda la difpenie , à la charge que les époux fon-
c'croient un Monaftere. C'efl; l'origine de l'Abbaye de Saint
Etienne de Caen , & de celle de la Sainte Trinité en la mê-
me Ville. Edouard , Roi d'Angleterre , fe voyant fans po-
flérité , adopta Guillaume pour Ion fils & fon héritier. îfa-
rold , à la mort de ce Prince, s'empara du Royaume. Guil-
laume arma contre l'ufurpateur , & le vainquit au mois d'O-
£tobrc de l'an 1066. Il fut facré Roi d'Angleterre , le jour
de Noël fuivant , à "Wcflminfter , & gouverna fes Etats
avec autant de piété & de fageffe , que de prudence: ce qui
le faifoit appeller par Grégoire VIT, la perle des Princes. Il
mourut à Rouen le neuvième de Septembre l'an 1087 ( ') >

(m) IiUm, lilr. 7. p. 660. ( rj ) Idem. cap. 16. Ç^ Lanfranc, vit» ,


(h) \</vii.Ltl..Gemct.Lib.6tCMp. II. cap. 3.
(0 J Idem. lib. 7. cap, I, i, ir)Lil>.7.EpiJi. zj.
(f) Idem. tap. 17.
,
,

ROI D'ANGLETERRE. Ch. XXXIX. 703


non dans foixante-quairiéme , comme on lit dans Vital j
la
mais dans la foixanticme année de fon âge , la vingtième &
de fon règne en Angleterre (5) ; laiflant le Duché de Nor-
mandie à Robert fon fils aîné , &
le Royaume d'Angleterre
à Guillaume le Roux fon fécond fils.
VU. Orderic Vital nous a confervc un long difcours (r) , ^°" DiCcours

que Guillaume fit à ceux qui lafTiftoicnt à la mort entre- -,

coupant fes & de fes larmes. Il le com-


paroles de fes pleurs
mença par grands péchés , qui lui failoient appré-
l'aveu des
hender le redoutable Jugement de Dieu. Il témoigna fur-
tout beaucoup de douleur du fang répandu dans les diffé-
rentes guerres qu'il avoit foutenues. Parlant des Normans
il die que le feul moyen de mettre natu-
à profit leur valeur
relle, étoit decontenir dans une féverc
les exade difci- &
pline- Il raconta les maux que fes proches lui avoient cau-
lés ; comment il avoit été tiré de l'oppreflîon par le Roi
Henri ; &
comment Dieu l'avoir mis en poiTeiïion du Royau-
me d'Angleterre , par la vitloire qu'il lui avoit accordée fur
fes ennemis. S'adrefTant cnfuite aux Evêques aux Prêtres &
il les conjura de lui obtenir par leurs prières , le pardon de

fes péchés; &


ajouta : Je n'ai jamais rien fait contre l'Eglife
notre Mère; je l'ai toujours honorée par-tout , comme il ell
de raifon. Il ne m'efl: point arrivé de vendre les dignités ec-
cléfiaftiques ; &
j'ai toujours détefté la fimonie , n'ayant égard

dans le choix des Prélats , qu'à leur mérite , autant que je


pouvois le connoître. On peut, continua-t-il, s'en convain-
cre en jettant les yeux fur Lanfranc , Archevêque de Can-
Torberi ; Anfelme , Abbé du Bec Gerbert de Fontenclle, ;

Durand de Troarn & fur plufieurs autres perlonnes doètes


,

de mon Royaume, dont je crois que la réputation s'étend


jufqu'aux entrémités du monde. C'efl avec ces grands per-
fonnages que j'ai aimé de m'entretenir c'cfl dans leur com- :

pagnie que j'ai trouvé la vérité & la fageffe , & je me fuis


faitun plaifir de profiter de leurs confeils. Il y a en Nor-
mandie neuf Abbayes de Moines & une de Religieufcs fon-
dées par mes ancêtres ; avec le fccours de Dieu , je les ai aug-
mentées ; & fous mon règne on en a bâti dix-fcpt de Moi-

(s) Ordïhic, Vii,tlis , lit, 7. f.ig.\ {() Idem.UU.


<5*.
704 GUILLAUME ROI D'ANGLETERRE. ,

nés & de Religieufes , où l'on fait un grand fervice


fix &
beaucoup d'aumônes pour l'amour du fouvcrain Roi ce font :

les vérirables fortereftcs de la Normandie , & l'on y apprend


à combattre les démons & lesdellrs de la chair. Le Roi Guil-
laume ajouta, qu'il avoir aufli confirmé toutes les donations
faites à l'Eglife par fes Barons , tant en Normandie qu'en
Angleterre ; & il exhorta fes enfans à fuivre fon exemple ,
& à fe conduire par les avis des hommes dottes & pieux.
Il accorda la liberté à tous fes prifonnicrs ; mais on eut bien
de la peine à l'obtenir pour Eudes , Evcque de Bayeux ,
fon frère utérin , qu'il avoir fait enfermer au Château de
Rouen , pour avoir débauché les troupes , vexé les peuples ,
dépouillé les Eglifes d'Angleterre , où Guillaume l'a voit établi
Vice-Roi.
Ses Lettres.
VIII. Après qu'il eut fini de parler, il écrivit une Lettre
à l'Archevêque Lanfranc ( k ) , & la donna fcellée de fon
fceau à Guillaume le Roux fon fils , pour aller au plus vite
prendre pofi!"e(Iion du Royaume d'Angleterre ; afin de pré-
venir les troubles qui étoient à craindre dans un fi vafte
Royaume , en l'abfence du Souverain. Nous n'avons plus
cette Lettre. Ce Prince en écrivit plufieurs au même Arche-
vêque , & aux Papes Alexandre II & Grégoire VII. Il n'en
reftc qu'une qui fe trouve parmi celles de Lanfranc (a") , &
dans le feptiémc volume des Mélanges de M. Baluze (y).
On a parlé dans l'article de Jcannelin , Abbé do Fécam , de
la Lettre que ce Prince lui adreiïa pour la tranflation de Vi-
tal , Abbc de Bernai, de l'Abbaye cic Bernai à l'Abbaye de
Oueft-minfter. Le Moine Eadmer en a rapporté deux dans
fon Hifloire ( z ) , l'une à tous les Clercs Se les laïcs d'An-
gleterre , pour lie maintien des privilèges de l'Abbaye de
Saint Martin de la Bataille ; l'autre aux Diocéfains de Lin-
coln , par laquelle il leur fait fçavoir qu'il avoir rcdifié , de
concert avec les Evêques , les Abbés & les Seigneurs de fon
Royaume, les anciennes Loix des Anglois , avec [ordre de
s'y conformer. Il efl: dit dans la Préface qui le lit à la tête
des Loix de faint Edouard {a) , que le Roi Guillaume fon

(«) Ttiem. Lib. 7. p. 6^9. 1 ( t) Eadmfi\. a,l taUcm. Op. Anfehn,


(at) Lankr. E/j;/?. 7,
'
ifiA^. r 1 :. 11;.
I Tom, Cttic.paj. joio.
\j ) P.i^. izy, (<i) 9.

fucccfieur
.

THIERRT, EV. DE VERDUN. Ch.XXXIX. 705


fuccefTeur , le les ayint fait rcprclcnter , les examina avec
douze pcrlonnes de les Etats , & Its confirma. Elles
choilics
font en 22 articles que Ton rcduidt depuis à cinq (b) , en
,

les mettant en langue Normande. On aura dans la luite oc-


cadon de parler de ces Loix , & des Réglemens de l'AlTem-
blée de Lilkbone en 1080 , auxquels le Roi Guillaume eut
part. On ne içait ce que c'elt que le Traité fur le Juge-
ment ernier , que Gelner attribue à ce Prince (c). Èn-
.

tendroii-il par-la , le Dilcours qu'il fit avant de mourir ,& ,

qui en effet commence par une réflexion fur ce jour formi-


daole ?
IX. Nous finirons ce Chapitre par Thierri , Evcque de Tlii-rri, Evc-
Vcrdun , dont il a été dit quelque choie dans le précédent. quedeVetdun,
hé en Allemagne , vers l'an 1008 , d'une famille diflinj,uée
dans la Nobleli'e ( H) , il fut quelque tcms Chanoine de la
Cathédrale de Balle. L'Empereur Henri III l'en tira en
1046 (e) , pour le mettre fur le Siège Epiicopal de Ver-
dun, vacant par la mort de l'Evêque Richard. Dès le com-
mencement de fon Epilcopar , il eut le chagrin de voir Ion
Eglifc Cathédrale piilée &
incendiée par les troupes enne-
mies. Il la rétablit & la ht confacrer par le Pape Léon IX,
avec qui il avoir afTiflé au Concile de Reims en 1049 (/)•
Les divifions entre Grégoire Vil & Henri IV , Roi d'Alle-
magne , lui furent fatales , comme à beaucoup d'autres Evo-
ques Ce Prince voyant qu'il ne pouvoit vaincre par les pro-
pres forces , le Roi Rodolphe (g) , envoya en 1079 , Thierri.
de Verdun avec Bernard d'Olnabruc au Pape, pour le prier
de fa part , de lui faire juflicc. C'étoit du côté du Roi Henri,
une marque de confiance en l'Evêque Thierri. Grégoire VII
lui en avoir témoigné long-tems auparavant, en lui écrivant,
à Udon de Trêves & à Hermann de Metz , de demeurer
attachés à la Ch.iirc de faint Pierre , de s'oppofcr aux fchif-
niatiqucs , d'avertir Pibon ou Pippon, Evcque de Toul , d'e-
xécuter ce qui lui avoit été ordonné de la part du Saint Siè-
ge & en cas de refus , de le déc arer excommunié (h). Mais
;

Ihicrri ne Içut pas long-tems fe contenir dans le devoir en-

( h) Hid. p.tg. 1014. Labb./). ipo.


( c)Gf>;mfr, Bibiint.Htti'a.f. 308. ( / ) Tant. 9.Conc.p. I0j6.
((i!) Tom. II. Sp:cil. p.-^. zry. 178. i^g) M.i.BiLLON. Toin.9. Aclur. p. 4f4,
( f ^
HtGO fl.tvin. tom, t. iHiliotb. nzv. (A) Lib, 3. tpifi. 11.

Tome XX. Vvvv


7o6 T H I E R R I,
vers ces deux Puiflances. Il fe déclara hautement pour le Roî
Henri contre le Pape Grégoire , dans l'Affembléc fchifma-
tique de Vormes en 1076. Craignant le> fuites de cette faulTe
démarché , qui lui avoit attiré l'excommunication ( i ) , il
tâcha de rentrer daiis les bonnes grâces du Pape, en avouant
fà faute. Il lui écrivit , & lui renvoya Ion ctole & fon anneau
par Rodulphe , Abbé de Saint Vanne. Grégoire VII lui ren-
dit fon amitié , & permit à Hermann de Metz de l'abfou-
dre.(/). Le Pape le chargea en 1080 , d'affembler un Con-
cile pour obliger Arnoul , Comte de Chini , de reftituer à
Henri, Evcque de Liège, ce qu'il lui avoit enlevé , fous pei-
ne , éh cas de- refus , d'être frappé d'anaihcme.
Sa Lettre au X. Nous n'avons plus la Lettre que Thierri envoya au
PapeGrégoiie Pgpe par l'Abbé de Saine Vanne, avec fon étole & fon an-

neau ; mais on nous a confervé celle qu'il lui écrivit à l'occa-


fion d'Egilbert (m) , nommé par le Koi Henri à l'Archevê-
ctié de Trêves, après la mort d'Udon. Hermann de Metz,
Pibon de Toul , & la plus grande partie du Clergé de Trê-
ves , s'oppofoient fous main à l'Ordination d'Egilbert ; &
quoiqu'il eût reçu l'anneau & la croffe de la part du Roi,
dès le mois de Janvier 1075?, fon facre fut différé de trois
ans ou environ. Ce Prince pria Thierri de venir en faire la
cérémonie , & le lui ordonna de la part de l'Antipape : mais
l'Evêque voulut auparavant en écrire au Pape Grégoire. Il
lui repréfenta avec beaucoup de refpeft & de foumiflfion , au
nom de l'Eglife de Trêves , le préjudice que lui cauloit une
fi longue vacance ; l'affurant qu'il n'étoit intervenu aucun
pade fimoniaque dans la nomination d'Egilbert. Voyant fes
remontrances inutiles , il alla à Mayence, & affifté des Evê-
ques qui fe trouvoient ci la Cour, il facra Egilbcrt («). De-
puis ce tcms , il fe déclara pour l'Antipape Guibert, chafla
de fon Diocèfe les Clercs & les Moines attachés au Pape
. Grégoire , & jetta le trouble dans l'Eglife de Verdun. L'Ab-
bé Rodulphe voyant que toute la colère du Prélat fe tour-
noit contre lui , crut devoir céder au tcms ( ) ; & fe retira

dans un Prieuré de la dépendance de ion Abbaye de Saint

(i) Hugo, TIavitnac.p. ity. îitf. i in Amial. Trevirtnf. p. ^(i. tom. t.


(t) Ibid.f.iij. („) Tom. II. 5;nVi/. ;>. îi8. es ijo.

[m) luitt. 11. SpUilig.f. 230. (5 Br.OV. I (0) Huoo ll.rviu.p. IJ4'
— — — . ,,

EVESQUE DE VERDVN-. Ch. XXXIX. 707


Vanne , nommé Flavigny , au Dioccic de Toul. Threrd étant
tombé malade quelque tcms après , cqnfefla publiquement la
faute qu'il avoir faite en s'attachant à l'Antipape Guibcrt
& en traitant mal ceux qui tenoicnt pour Grégoire VU (p).
Il envoya un Moine de Saint Vanne , nommé Gérard , à
l'Abbé Rodulphe , qu'il fçavoit avoir reçu du Pape le pou-
voir d'abioudre les excommuniés ; le priant de lui prêter fcy
cours. Rodulphe renvoya Gérard & un autre Moine nommé
Gcrbert («y) , avec pouvoir d'abfoudre rEvêque. Ils le trou-
vèrent au lit , privé de l'ulagc de la parole , mais en pleine
connoiflancc ; 8c après qu'il eût témoigné par des (Ignes non
équivoques fon repentir fur toutes les fautes qu'ils lui rap-
pelèrent, ils lui donnèrent l'abfolution : un moment après
il expira. Ces deux Moines firent rapport à Rodulphe de

iCc qui était arrivé (»•). L'Abbé en rendit compte au Sy-

node d'Autun en 105)4, auquel .prélidoit le Légat Hugues ,


alors Archevêque de Lyon; &: 11* Concile approuva ce qui
avoit été fait. On met la mort dcThierri au vingt-huit d'A-
vril 1088.
XL Sa Lettre adrcffée à tous les Archevêques, les Evêr Sa Lettre

ques , les Princes , Ducs , Marquis , Comtes de l'Empire Ro- gohe vil.
jnain , au Clergé &
aux peuples fidèles dç la fainte Eglifc
pa:oît avoir été écrite dans Iç tems que les fchifmatiques pen-
foicnt à fe donner un Chef. Elle a donc plus de rapport^
rAfTemblée de Brixcn , où ils dépolcrent Grégoire VII , &
élurent Pape, Guibert de Ravcnne , en 1080, qu'à celle de
Vormes en 1076 , où il ne fut qucftion que de la dépofition
jdu Pape. Thierri attaque Grégoire VII dans fes mœurs 8c
-

dans fa dodrine ; &


en des termes dittés par la paf-
il le fait

fion la plus outrée. Goldaft a rapporté cette Lettre (s). On


la trouve encore dans le Code d'Udalric de B^mberg ; au
fécond Tome des Ecrivains du Moyen Age , par Eccard (r ),;
avec celles d'Egilbert, Archevêque de Trêves , & de Henri
de Spire , contre le Pape Grégoire. Elles font toutes écrites
dans le même goût.
XII. 11 y a plus de modération & de retenue dans IcTrairé j-TT^^'^f^^
intitulé : De la divifon de l'Empire & du Sacerdoce» L'Ai}^ l'Empire&Ju
Sacerdoce, par
î — ^
rr—.— . _. . _ . . ... - - - I >• '
r Guenenc.
(g) Jbid />. 159. i Tl.tziini/ic. fag. 140.
''{q)Tom. \-L.Spici!. p. x?.ç. [
(j) GoLDAST. CcH^Î/f. Tom. I. ^. ij^.
{r) Ton), i:. Sficil. pa^. zZ9, HuGol (») Png. 170. 171. i/l.
V V vv ij
7o8 T H I E R R I ,
teur ne s'y répand point en injures contre le Pape Grégoire :
au contraire , il lui parle Père & à (on Supérieur ;
comme à fon
& s'il rapporte les faux bruits que l'on répandoit contre Tes,
mœurs & contre fcn gouvernement , ce n'cft qu'en lui en té-
moignjnt fa douleur, & en le priant de lui fournir les moyens
de fermer la bouche aux calomniateurs. On ne Içait pourquoi
il fit paroître fon Ouvrage fous le nom de Thierri de Verdun :

peut-être que cet Evêque ne s'étoit pas encore fi fort déclaré


contre Grégoire VIT. Quoi qu'il en foit, ce Traité cfi de Gue-
neric ou W'eneric , Ecolâtre de Eglife de Trêves, qui fut
1

depuis Evoque de Verceil. Il en eft parlé dans Tritheme &


dans Sigcbert de Gemblou(«). Dom Martennel'.jyant trouvé
marufcrit dans l'Abbaye de ce nom , l'a fait imprimer parmi
fes Anecdotes (x). Il remarque que le Copifte a eu foin d'a-
vertir que ce Traité étoit de Gueneric( y ) , Ecolâtre de Trê-
ves ; que c'eft lui q. i y parle fous le nom de Thierri de Ver-
dun. Sigebcrr & Tricheme ont dit la même choie. Gueneric
réduit à fix chefs les reproches qu'on faifoit au Pape i fçavoir,
que fes mœurs n'étoicnt pas pures; que fon Décret contre les
Clercs concnbinaires éroit trop iévere ; qu'il avoir palfé fon
pouvoir en dépotant le Rci Henri; qu'il prodiguoitles cenfu-
res & excommunioit pour des fu;ets trop légers ; qu'il préten-
doi', lans raiion, pouvoir délier icsiujets du Roi du lermenc
de fidélité ; Sz fupprimer les inveftitures en ufage depuis long-
tems. Il appuie rous ces reproches , de toutes les preuves que
les fc ifmati jUes avoient coutume d'alléguer faifant fur-touc
;

valoir leurs raif ns contie la dépoiîtion du R"i Henri , l'éle-

ûion de Rodolphe, Se a f^pprcifion de^ in.eflirures eccléfia-


fliques- Mais il dit du Pape ce qu'on ne t point ailleurs (z) , 1

qu'il s'étoitfauve quelquefois pour éviter les dignités ecclélîa-


fliques ; qu'il n'avoit accepté le P.;nrifi.at qu'avec beaucoup
de peine ; qu'il s'y et it comporté avec équité, aver figefle
& avec zc!e veillanr affiduement fur fon troupeau ,
, faifant &
tout ce qui dépendoit de lui pour ramener au devoir ceux qui
s'en étoient éloignés. Ce n'efl qu'après cet éloge de Grégoire
VIT, qu'il entre dans le détail des accufationsqucfes ennemis
formoient contre lui.

(w) Trithem. Ciron. Hirf.ttig. tom, i (a) Martïnnf. tom. i.Anecd. p.iï^,
J
f. 2^3. y? '/f Script, Efclcf, cap, 341. l5 1 (jl) Pai- 119. in net.
,,

EVESQUE DE VERDUN. Ch. XXXIX. 709


XIII. Son Décret contre les Prêtres concubinaires , por- Lettre tou-
toit défcnlc aux laïcs d'aiïifler à leurs MefTes ', & de recevoir i^l^J^^^'*^'
I
très uiaii^-s.
d^ eux les Sacremei s. Un Ecrivain anonyme, que Dom Mar-
tcnne juge par le ft)le (a) , être l'Ecolâcie Thierri dont nous
venons de parlei , attaqua ce Décret comme trcp rigoureux.
Les laïcs en prirent occalion d'infuker les Prêtres mariés.
L'Auteur fait voir par des autorités de l'Ecriture & des Pè-
res, que la validité des Sacremensnc dépend point delà pro-
bité des Minières & que s'il n'éroit plus permis de les recevoir
;

de ceux qui ont ou des femmes ou des concubines , il y auroic


un nombre infini Je perlonnes de tout âge , de tout fcxe & de
toute condition qui mourroient , ou fans batcme , ou fans pé-
,

nitence Çb) , parce qu'il y avoit très-peu de Minillrcs des au-


tels qui vécufilnt dansla continence.

XIV. Egilbert, auffi-tôt après ion facre , vint à Trêves ; Ecrit contre le
mais le Clergé ne voulut point le reconnoître (c) , ni recevoir
fç Yn?'^^°'
de lui les Ordi es facrés , parce qu'il n'a voit pas reçu le Pallnim
de la part du Pape Grégoire , &
ne vouloit pas lui obéir com-
me au leul Pape légitime. Il envoya donc un Moine nommé
Thierri , homme fçavant , m.ùs Ichifmatique comme lui , &
faiiant profeflîon Nécromantie, à l'Antipape Clément
de la
pour avoir le Pallium. Celui-ci le lui envoya avec plaifir, avec
une Lettre où il lui marquoit en quel tems il devoit s'en fer-
vir. Egilbert donna au Moine 1 hierri , l'Abbaye de Saine
Martin à Trêves , tant pour le récompcnfer de ce fervice
que pour les deux Livres pleins de mcnfonges & de calom-
nies , qu'il avoit compofés contre le Pape Grégcire , en faveur
du Roi Henri & de Guibert.

(a) Tom. I. Ariecd. p. 1^0, if» titt, 1 (r) T(ffi, iz, Sfidl. t^l, 131, 23 J,

{t) Page 1.^0, 1

Vf
7IO I> I I> I E R ;

C HAP I T R E X L.
'


Didier , Aùl^é de Mont - Cajftn , (Z^ Fape fous le nom
de Vi^or 111.

Didier, Abbé j,
lyj É des Princes de Benevent (d) , fon père , qui n'a-
rfe Mont-Caf- IXI j' r r • - J u •

XH
• i
, longea a le marier de bonne
i
iînen loj/. que lui d entant
^oic
heure, pour perpctiier fon nom. Didier penfoic au contraire
à quitter le monde &
à vivre dans la retraite ; mais il ne
crouvoit pas le moyen d'exécuter fon deffein. Il arriva que
fon père fut tué par les Normans. Alors il fe retira dans le
dcfert , &
y vécut quelque rems dans la cellule d'un Ermite,
nomme Santar , qui le revêtit de l'habit monafl:ique. Sa mère,
Ten fit fortir de force , &
le fit garder avec foin pendant un
an. Mais quelque inftance qu'on lui fît fur le mariage , on
ne put l'engager à vivre dans cet état. Il fe fauva une fé-
conde & ; on le contraignit chaque fois de re-»
troilicme fois
venir.: enfin permis de prendre l'habit monafliquc
il lui fat
a Mont-CafTih, L'Abbé Frideric , frère de Godcfroi , Duc
ae Lorraine , ayant été élu Pape , fous le nom d'Etienne IX ,
iît élire pour fon fuccefiTeur à Mont-CafTin , le Moine Di-

dier , en io6j : au commencement de l'année fui vante , il


renvoya fon Légat à Conflantinople , près de l'Empereur
Ilaac Comnene. Didier attendoit à Bari le vent fivorable _,

pour paflcr au lieu de fa légation , lorfque des Moines du.


Mont-Caffin vinrent lui apprendre la mort du Pape Etienne i
8c le prier, au nom de la Communauté , de revenir prendre
le gouvernement du Monaflere. Il partit des le lendemain , &
arriva à Mont-CafTin le jour de Pâques. 11 prit le même jour
podcfiion de l'Abbaye , dont Etienne IX avoit confervé le
titre jufqu'à fa mort.
II répare les II. L'Abbé Didier commença par rétablir les Officines du

PAbbave M-
Monaflere &
autres bâtimens "qui tomboient en ruine cn- :

tit «ne nou-


velle Eglife. II.. —
(i) Chrofiic, Cijjitt. lib. j. ^ M\BIl. Te»;, .j , Ailor.p.ig. sZ^. ^f"]-
,

ABBÉ DE MONT-CASSIN. Ch. XL. 711


fuite une nouvelle Eglife , qui fut conlacrée en 107 1
il bâtit
par le Pape Alexandre II (e). Elle avoir cent cinq coudées
«le long , quarante -trois de large & vingt-huit de haut: au-
devant ctoit un parvis de 77 coudées de long & de 57 de
'large, environné de colomncs. Il y avoit auŒ dix colomnes
•de chaque côté dans Tintcrieur de TEglife. Il avoit fait ve-
nir des marbriers & des ouvriers de moiaïque de Conftan-
tinoplc , tant pour travaillera ces colomnes, qu'au pavé de
toute rÊglife , qui ctoit compofé de pierres de diverfes cou-
leurs. Ces fortes d'arts n'étoient plus en ufagc dans l'Italie.
Pour les y rétablir , l'Abbé les fit apprendre à plufieurs des
ferfs du Monaftere. C'efI la remarque de l'Auteur de la
Chronique de Mont-CafTin, qui y fait une defcription
très-curieufe & très-bien détaillée de toutes les parties de
cette Eglife, de tous fes ornemens , & de la folemnité de fa
Dédicace.
III. Il y avoit alors en cette Abbaye un Moine recom- li fait écrire

mandable par fa naiflance, par fa fageffe & fon éloquence, 'i'^'^^p'^»'"'


Secondin par
nomme /- T ' /-, J J • '
uuairer. Un avoit découvert depuis quelque tems

1

Guaifer.
'

le corps de faint Secondin , à Troies dans la Fouille , en bâ-


tiflant l'Eglife de Saint Marc. L''Evcque Etienne pria l'Ab-
bé Didier d'engager Guaifer à mettre par écrit les circon-
flances de cette invention , & d'y ajouter la vie du Saint.
L'Ecrit de Guaifer fe lit dans le fcpciéme Tome de l'Italie
facrée , par Ughelli (/) , & dans le fécond Tome de Février
de Bollandus. L'Auteur appelle l'Evêque Etienne , fon frè-
re & fon Go-Evêque ce qui donne lieu de croire qu'il étoit
:

lui-même revêtu de l'Epifcopat. Néanmoins Pierre , Diacre,


ne le qualifie que Moine , foit dans fa Chronique, foit dans
fon Catalogue des hommes illuflres. Guaifer remarque dans
cette Hiftoire , que quelques-uns doutant que les reliques trou-
vées fufient d'un Saint , on en fit la preuve en les faifanc
paffer par le feu.
IV. En 1082 , avant que le Roi Henri afîîégcât Rome , Sa conférence
^'^^
il écrivit , étant dans l'Abbaye de Farfa , à l'Abbé Didier o^*^
-^^

'""*
de le venir voir [g). L'Abbé n'ayant point fait de réponfe

(f ) WjV./'.i^. yp7. ^99. f (f) Chron. C.iiTt/;. lib. i. cap. 30. Ci


(y") Pag. i3(;j, tiJ BoLLAND. «», z,\Mabill. Liù. 66. Atmal.iiiim. li,
Teiruar. fag. jjl
711 D I D r E R ,

à ccrrc Lettre ce Prince lui eh envoya une féconde pleint


,

de menaces, avec les mêmes ordres. L'AbDé s'en cxcula lur


la crainte des Normans mais a la troiliéme Lettre du Koi,
:

ii partit , craignant pour fon Monafterc. 1! eut foin en ce

voyage de ne communiquer avec aucun des excommuniés ,


pas même avec le Chancelier du Roi , & ne leur donna point
le baifer de paix, ne pria &
ne mangea avec eux. Le Roi le
prefla de lui jurer fidélité ,&
de recevoir de lui l'nvertiture.
L'Abbé &. l'autre. Henri irrité, ordonna a Jour-
refula !'un
dain , Prince de Capoue , de livrer à fes Nonces le Mona-
flere de Mont-CaflTinj mais ce Prince parla Ci avantageufe-
inent de l'Abbé au Roi , qu'il le pria de s'entremettre auprès
du Pape pour fon couronnement. Pendant fon fcjour à la
Cour, l'Abbé Didier diiputa fouvent avec les Evéques qui
y étoient , fur les droits du Saint Siège. Ils alléguoient , en
faeur du Roi, le Décret de Nicolas II , portant qu'on ne
fcroit point de Pape fans l'agrément de l'Empereur. L'Abbé
Kur répondoit que, ni Pape , ni Evcquc , ni aucun homme
vivant, ne pouvoit faire validement un Décret de cette na-
ture ; parce que le Saint Siège cfl au-delTus de tout , & ne
peut être jamais loumis à pcifonne; que fi le Pape Nicolas
avoit fait ce Décret , c'étoit imprudemment & que la faute ",

d'un horrime ne dcvoit point faire perdre à Eglife fa digni- 1

té. Avant de retourner à Mont-Calfin , le Koi Henri lui


donna une Buile d'Or en faveur de ce Monafiere. L'Abbé
Didier en reçut une autre de Michel, Empereur de Conftan-
rinoplc(A), portant qu'en l'honneur de faint Benoît, &
pour le falut de fon ame , il donnoit par chacun an au Mo-
naficre de Cafiîn , vingt -quatre livres d'or à prendre fur
le Palais Impérial ; Michel , en envoyant ce Diplôme fcellé
d'une Fulle d'Or , l'accompagna de grands prélens pour
l'Abbé Didier , demandant le fecours de fes prières & de fa
Communauté.
IlenéiuPape. V. Grégoire VII étant dangcrcufemcnt malade à Saler-
nc , en 1085 (;) , les Evécjues & les Cardinaux le prièrent
de fe défigner un fuccefieur. Il en nomma trois ; Otton , E-
véque d'QlIie ; Hugues , Archevêque de Lyon ; & l'Abbé

(b) Tom. 9. AfI. p. 607, y Tom. 9. A3or. p. 609.


(i.) Chrcn. CaJJineiif. lib. }. e.6f.6(
Didier
,,

ABBÉ DE MONT-CASSIN. Ch. XL. 713


Didier. De ces trois que l'Abbi qui fût préfjnc
il n'y avoir
lorlqu'on procéda à l'clcdion , après la mort du 1 ape. Les
Evêques & les Cardinaux le prelTerenc de le rendie à 'eur
choix. H le refula , offrant d'ailleurs à l'Eglife Romaine tous
les fervices dont il Jourdain, Prince de Ca-
leroit capable.
>poue, & RainuJfe , Comte d'Averfe , fe joignirent aux Evê-
ques & aux Cardinaux , pour faire de nouvelles inftances à
l'Abbé ils le trouvèrent inliexible. Une troilicme tentative
:

n'a ant pas eu plus de iucccs , ils s'offrirent d'élire celui qu'il
leur indi^ueroit. Il nomma Otton d'Ortie: mais comme on
ctoit prêt de procéder à cette élection , un des Cardinaux
s'y oppofa , difant qu'elle étoir contre les Canons. Alors tous
ceux qui étoient préiens fe lailîrent de l'Abbé Didier , & le
menèrent de force dans l'Eglife de Sainte Luce , où ils l'élu-
rent Pape d'un confentement unanime, & le nommèrent Vi-
£lor ni. Cette éledion fe fit le jour de la Pentecôte 24 de
Mai de l'an 1086 , le Saint Siège ayant vaqué un an entier,
Viâor fortit de Rome au bout de quatre jours , & retourna
à Mont-Caffin. En partant à Terracine , il y quitta la croix
la chappe & les autres marques du Pontificat , réfolu de ne fe

-charger jamais de cette dignité. Il ne lairta pas de f? trouver


avec les Cardinaux , au Concile que l'on tint a Capoue , à la
Mi-Carême de l'an 1087 : & ce fut là qu'il confentit enfin à
fon élcdion , en reprenant la croix & la pourpre. Il fut fa-
cré folemnellemcnt à Rome dans l'Eglife de Saint Pierre, le
Dimanche d'après l' Afcenlion , neuvième de Mai de la même
année.
VI. Au mois d'Août fuivant, étant au Concile de Bene»- Sa mortea
vent , il tomba grièvement malade , & lé fit reporter à Mont- '°^7.

Callin, où il mourut le feizième de Septembre , quatre mois


& fcpt jours après fon facre. Il avoir été Abbé de Mont-
Cartin pendant vingt-neuf ans , & fait Cardinal au mois de
Mars de l'an 1059, P^'' ^^ P'ipe Nicolas II , fous le titre de
Sainte Cécile. On doit faire peu d'attention à la Lettre que
Hugues, Archevêque de Lyon (/) , écrivit Contre lui à la
ComtelTe Mathilde. C'eft un tiifu de reproches qui n'avoienc
aucun fondement dans la conduite de Viclor lll ; & que
i' Archevêque de Lyon ne fit éclater , que lorfqu'il perdit

(/ ) Tom. 10. Conc.p. 414.


Tome XX, Xx xx
,

74 ,
,:
DI D 1ER,
l'erpérance d'ctre lui-même
élu Pape à la place de TAfebé
;
Didier. Un
des reproches que lui fait l'Archevcque Hugues,
. eft d'avoir promis au Roi Henri , de s'employer auprès de

;
Grégoire VII ,
pour couronner Empereur. MaisTHi-
le faire
ftorien qui rapporte ce fait dit que ce Prince eut bien de la
,

peine d'obtenir rinterceflion de l'Abbc à cet égard ; & il ne


.rifquoit rien de la lui promettre , puifqu'il fçavoit que Gré-
goire VII n'accord^roit jamais la Couronne de l'Empire au
;Koi Henri , qu'il ne fît pénitence & fatisfadion à l'Eglife.
rHugues de FJavigny eil tombé dans une faute grolFiere (w) ^
.en difant que le Pape Viclor célébrant la Mefïe dans l'E-
,.

glife de Saint Pierre à Rome , fut frappé du Jugement de


• Dieu ; & qu'ayant reconnu fa faute , il le dépofa lui-même ,,
envoya chercher les Moines qu'il avoit amenés en cette
.
Ville , leur ordonna de porter loa corps à, Mont-CalTin , &
-4e rinhumer dans le Chapitre non comme Pape , mais cora-
,

«ne Abbé. Ce fait efl démenti par Pierre , Diacre , Conti-


-nuateur de la Chronique de ce Monaftere («) , où. nous li-
fons que Viclor de retour de Benevent à Monr-Cailvn, y
établit pour Abbé , Oderife , Di.îcre de l'Eglife Romaine
& Prévôt de cette Abbaye; qu'ayant enfuite appelle les Evo-
ques 8c les Cardinaux , il leur recommanda d'élire pour
Pape , Otton , Evêque d'Oflie , fuivant l'intention de Gré-
goire VII ; & que s'étant fait conflruire un tombeau dans le
Chapitre , il mourut trois jours après. On voit encore au-
jourd'hui fon Epitaphe dans la Chapelle de Saint Berthai-
re ( ) , où ion corps fut transféré il y a près de deux cents
ans. Elle efl: en feize vers élégiaques , qui renferment les
principales circonftances de fa vie; entre autres , qu'il laifTa
ion époufe vierge , en la quittant pour fe faire Moine.
Ses^Ecrits.
yii Etant Abbé de Mont-Calfin , il mit par écrit les
les miracles de tti' racles de faint Benoît (p) , de quelques Moines de ce &
fejntBenoît. Monaftere, qui s'étoi.nt rendus rccommandables p.îr la fain-
teté de leur vie. Le Recueil qu'il en fit, étoit divilé en qua-
tre Livres. 11 y en a trois d'imprimés dans le fixiéme Tome
des Ades de l'Ordre de Saint Benoît ; & dans les Bollan-

{m) Hugo Tlaviniac, in Clronit. ad an. (0) r^S'6is.


1,087. (j) Tom. C. /.ilcr. 4H- C? 4<^S'
i^n) Mabjll, Tom. 9. AHor. f. ^14.
ABBÉ DE MONT-CASSIN. Ch. XL. 71 j
•diftes yau vingt-unième de Mars. La fin du troiiicmc Se le
<juatriéme entier , fc trouvent parmi les manufcrits du Vati-
can , nombre 1203. Ces Livres font en forme de Dialogue.
L'Abbé Didier avoit été lui-même témoin de la plupart des
miracles qu'il rapporte , ou il les avoit appris de perionnes
dignes de foi. II joignit aux miracles opérés à Mont-Cai-
lin , ceux qui s'étoient faits depuis peu dans les lieux voi-

sins.
Vin. On attribue à l'Abbé Didier (q), des chants ou Ses Letut».
'des hymnes en l'honneur de faint Maur , quelques Let- &
tres. De m
Mabillon en a donné une dans l'Appendice du
cinquième Tome des Annales Beneditlines , adrcflée à une
Impératrice, qui n'efl; dédgnée que par la première lettre de
fon nom A : mais il penfe qu'il y a faute dans l'infcription ,,
& que la lettre A
défigne l'Empereur Alexis Comnene. Il
s'agit en effet , dans cette Lettre, d'engager ce Prince à fup-
primer le tribut qu'il avoii impofé fur tous les pèlerins qui
alloientvifiterlcs faints Lieux. Or, on fçait que l'Empereur
Alexis tendit des pièges ( r ) , non feulement aux armées des
Chrétiens qui alloient à la conquête de la Terre-faince , mais
encore aux pèlerins ; &
l'on a des preuves de fon avarice ,
dans un de fcs Diplômes en lettres d'or , où il avoue que
rcxtrémitéà laquelle il letrouvoit réduit , l'avoit obligea dé-
pouiller les Eglifes de ce qu'elles avoient de plus précieux. Il
efl vrai qu'il défend en même tcms de rien faire de femblable
à l'avenir ; mais on voit par les Hiftoriens du tems , qu'il con-
tinua de \cxer les pèlerins.
IX. L'Abbé Didier eut foin de pourvoir l'Eglife qu'il a- ii falttranfctl'
voit fait bâtir ( j ) , de tous les livres néceffaires pour la ce- re des livre*.
lébra'ion des iaints Myftercs Se des Offices divins ; faifanc
couvrir ces livres de matières préçieufes , d'or , d'argent ^
de pierreries &
d'y voire. II fit reV'Ctir de même la Règle de
Saint Benoît , & fit tranfcrire avec beaucoup d'exadtitude
l'Hiftoire de la vie de ce Saint ; celles de laint Maur de &
fainte Scholallique. Il n'eut pas moins de foin d'enrichir la

(/}) PosSEViN. lom. I. Apparat, p. 4ji3.


(^Ludovic. Jacob. Bibliot. Poniif, pag. ( j J Cbronic. CiJJiii. l.i, j. cap, lo. Çj
X19. Tom. 5». AU, p. $94.
(r) Mabillon. MDU f . Annal, lit. 6'^.

XXXX ij
7i<5 DIDIER , ABBÉ DE MGNT-CASSIN.
Bibliothèque de Caffin. On compte parmi les Ouvrages qu'il
fit tranfcrire , ceux de faint Auguftin , de faint Ambroile,

de fjint Bafile ( î ) > ^^ ^^^^^ Jérôme , d'Eugefippe , de


Severien de Cabales ; THiftoire des Lombards, par Jour-
dain ; l'Hiftoire de la guerre des Juifs , par Jofeph ; Cor-
nei le , Tacite , H-omere ; Erchempert , Bede fur Tobie ;
les Sermons de faint Léon &
de faint Grégoire de Nazian-
ze ; un Livre intitulé La doctrine des Pères y deux Sacra-
:

mcntaires avec un Martyrologe ; l'Ordre Epifcopal ; les


Vies & les Inftitjts des Pcres ; les A£tcs des Apôtres , leurs
Epîtres , l'Apccalypfc &
ks Paralif omenes ; quelques Opuf-
cules d'Origene , de Berenger , de faint Chryfollome , de
faint Hilaire , de Sedulius , de Juvencus , de Crefconius;
les Poèmes d'Arichcs, de Paul, de Charles, de faint Pau-
lin ; Cicéron , De la nature des Dieux ; les Inftituts de Ju-
ftinien , fes Novelles ; Terence , Horace , Ovide , Seneque,
Virgile , Donat &
les Etlogues de Théodore. Le choix de^
tous ces Ouvrages, pour les mettre entre les mains des Moi-
nes de CafTin , marquoit autant de goût &
de difcernement;
dans leur Abbé, que de defir de leur donner les moyens de
s'inflruire dai)S les Lettres divines & humaines.

(») un. i»g. 60$,

êiâ
URBAIN II , iPAPE. Ch. XLI. 717

CHAPITRE XLL
Urbain II 3 Pape,

I.

A A Près la mort de Vi^or III , le Saint Siège vaqua fix Urb.'in


mois , pendant Icfqucls l'Eglile fut agitée de grands
trouuiLS («). Les Evêques ne fçachant comment y remé-
Fape.
II,

dier , fe dilpcrferent de toutes parcs mais enfin , aux folli- :

citations , tant des Romains que de la Comtefle Mathilde ,


ils fe raflcmblerent à Terracine, la première femaine de Ca-

rême, 8 Mars de 1088. Les Clercs & les laïcs de Rome


l'an
invités de s'y rendre y envoyèrent des Députés ; Jean , E-
,
vêque de Porto , de la part des Cardinaux du Clergé ; & & i

le Préfet Benoît, de la part de tous les laïcs. L'Alïemblée


étoit compoféecntoutde quarante , tant Evêques qu'Abbés.
Le lendemain Jeudi , les Députés préfenterent leur pouvoir ;
& l'Evêque de Tufculum ayant fait rapport de ce que Gré-
goire VU &
Vidor 111 avoient réglé pour le bon gouverne-
ment de l'Eglife , on indiqua un jeûne de trois jours , ac-
compagné de prières & d'aumônes, pour demander à Dieu
<ie faire connoître celui qu'il avoit choifi. Le Dimanche 12.
de Mars , jour de la Fête de faint Grégoire , tous s affem-
blercnt dans l'Eglife de Saint Pierre & de Saint Céfaire; &
après avoir délibéré quelque tera'>, ils clirent d'une voix una-
nime Otton , qui fut nommé Urbain II. On.
Evcque d'Ollie ,

le revêtit fur le chappe de pourpre , & on le


champ de la
mit dans le Siège de l'Evêque de Terracine. Son introni-
fation fut fuivie de la. Melïe folemnelle , qu'il célébra lui-
même. , ,

II. Otton ou Odon , & quelquefois Eudes, étoit né à Cha- SanaJfTance.


P'^ê'^^*
tillon- fur- Marne, vers l'an d'autres le font naître à
1042 :

Lageri dans le voifinage de Chatillon ; quelques - uns à &


Reims. 11 y fit fes études fous faint Bruno , alors Chance-

(gi) CbrtnU. CaJRn. lib, 4. fi^. 1. ^ Vit» Vrb»H. Il, tom. 5. Oftifc. Uabii.
,

71-8 URB A I N II„ .

lier de cette Eglife , &


depuis Indicuteur de POrdre des
Cl>artreux (*•)» Ses progrès dans la vertu Se dans les fciences
lui ftiéfitcrent xiùe place dan* la Cathédrale , &
enfuire celtç
d'Archidiacre. Quoiqu'on y vécût dans une grande régula-
rité , la réputation de celle que l'Abbé Fïuguos faifoit obfer-
ver à Cluni , l'y attira. II en fut fait Prieur Tan iO'/6. Gré-
goire VII l'ayant appelle à Rotne deux ans après , lui donna
TEvêché d'Ollic , avec le titre de Cardinal ; il en fit fon con-
fident , & l'employa à des négociations difficiles , connoif-
fant fa prudence 8c fa dextérité dans le maniement des affai-
res. Otton étoit préfent à la conférence que l'Abbé Didier
eut en 1082 à Farfa , avec le Roi Henri ; &
y foutint contre
l'Abbé, qu'on ne pouvoit point faire de Pape fans le con-
fentement de l'Bmpereur. Pendant fa légation d'Allemagne,
il affifta à une autre Conférence qui fe tint à Bcrchach en
Turinge, le 21 de Janvier 1085 , entre les partifans du Roi
Henri & les Saxons. Il fut un des trois que Grégoire Vil défi-
gna en mourant pour lui fuccéder ; &
Vider III fe trouvant
au lit de la mort, le prélenta nux Evêques &:aux Cardinaux,
leur recommandant de l'élire pour Pape ; ce qui fut exécuté le
12 de Mars 1088.
Sa lettre à
^^^' ^^^ ^^ lendemain de fon éle£lion , il en donna avis à
tous les Ca- tous Ics CathoHqucs par une Lettre circulaire {y) j où il leur

(Jcclafoit qu'il fuivroit en tout les vertiges de Grégoire VII


thoiiques.

fon prédéccffeur. Il en écrivit une particulière à la ComtefTe


Mathildc, pour l'exhorter de continuer dans la dcfenfe de
la caufe du Saint Siège contre les fchifmatiqucs. En même-
'.

tems il envoya des Légats aux Princes Chrétiens d'Orient


& d'Occident , afin de les confirmer dans la foi Sz dans l'u-
nité de l'Eglife. Il chargea ceux qu'il députa à l'Empereur
Alexis Comnene (z) , de lever Texcommuniration portée
contre lui , pour avoir oliligc les L:itins qui réfidoient dans
fes Etats, à fe fervir de pain fermenté au Sacri fice cfe la McfTe.
Ce Prince , quelque tems auparavant , avoit invité le Pape
à venir lui-même tenir un Concile général à CorrlHntinoplc
pour la réunion des deux Eglifes. Ce projet n'eut pas lieu i
& il paroît qu'il fut feulemi^t arrêté entre les Légats &

(jr) Mabîhon. Tom, 9. AQor. p.tjT.l Maiil. p, 19.


,

PAPE. Cm. XZT. 719


l'Empereur (a), qu'il fcroit libre aux Grecs 6c aux Latins
;de confervcr chacun leurs uiages au fujct de l'Euchariftie ,
jufqua ce qu'il en fut autrement décidé dans un Concile œcu-
ménique.
IV. On compte parmi les Lettres qu'Urbain II écrivit A'urei Lettres
adreflee à
^'^''^'*'" "•
auffi-tôt après fon intronifation (/»), celle qui crt:

l'Archcvcquc de Salzbourg , &


aux autres Evêques Catho-
liques d'Ailcm.Tgnc ,
par laquelle il les exhorte en peu de
mots , mais très-énergiques , à la perlévérance dans la fou-
miffionàrEgUtc; uncaux Evêques delà Province de Vienne,
qu'il preffe de remédier aux troubles dont leur Métropole é-
toit agitée, par la longue vacance de Ion Siège ; celle à Hu'-
gues , Abbé de Cluni, pour l'inviter à venir au plutôt à Ro-
me , partager avec lui le fardeau dont on l'avoir charge; &:
quelques autres qui ne font pas venues juf ^u'à nous , entre le(-
quelles on en met une à Kainaud , Archevêque de Reiras , par
laquelle il l'invitoic de le venir voir.
V. Quelque tems après fa confécration , Urbain II alla à Urbain ii va
"
Mont-Caflin , où il fut guéri d'un violent mal de côté qui g^ '"^^'g^"'^
l'affligeoit fouvent (c). Pierre , Diacre, attribue ce miracle
aux mérites de laint Benoît , & il en infère que le corps de
ce Saint étoic dans l'Eglife de ce Monaflere. Cela paroît en
«ffet par une Bulle de ce Pape, rapportée au premier Tome
du Bullaire de Cadin , qu'on dit avoir été donnée en cette
occafion (^y). Mais elle efl rejeitée comme apocryphe par le
Cardinal Baronius , & par un grand nombre de Critiques,
Le Pape tira de Calfin le Moine Jean Gaétan , Se le fit Car-
dinal de l'Eglife Romaine. Urbain étoit encore dans cette
Abbaye , lorfque le Duc Roger , Bemond fon frère , Se Ur-
fion , Abbé de Bantin , vinrent l'inviter à confacrer l'Eglife
de ce Monaftere (e). 11 y alla , & lui accorda de grands pri-
vilèges mentionnés dans une Bulle en forme de Lettre à tous
ks Fidèles. Quelques Seigneurs de Pouille profitant de l'ab-
fence du Duc Roger & de Bemond , pillèrent le Monaftere
de Bantin. Le Pape en étant informé , écrivit au Duc & à
fon frère , de réprimer l'iniolence de ces téméraires (/"). Il

(a) Par^ 60. I (rf)ToTO, i./>. it.


(h) P.j?f 30, l (t) Tom. to.Cortc. Epifl. I.p/ij.^ij
,

720 ^
U R B A r N I r
pafla de-là en Sicile j & n'y
ayant pas trouve le Comte Ro-
ger , oncle du Duc de Pouille , il le iit prier de le venir voir
a Traîne , pour conférer enfemble lur des matières d'impor-
tance. Le Comte étoic occupé au fiége de Dutere il le quitta :

&
vint à Traîne.
LettreàAn- VI. Anfelme , Archevêque de Milan , avoir encouru la
feime de Mi- (jjfgface de Grégoire VII
(/), pour avoir reçu Tin /eilitare
du Roi Henri Le Pape Urbain i .formé qu'il s'étoit repenti
de cette démarche , le rétablit dans fon Siège , lui envoya le
Pallium , &
lui écrivit une Lettre dont il ne refte qu'un frag-
ment , rapporté par Yves de Chartres , dans le dixième &
Tome des Conciles. Il regarde la manière de réconcilier les
fénitens. La même année 1088 , le Pape dota la Collégiale
de Sainte Agathe à Crémone {g ) ; Bernard , Arche-
rétablit
Pnmatie de
Tolede , dans
y^qjjg de les droits de Primatie fur tous les
Royaumes des Efpagnes , dont fes prédécefTeurs avoient joui

avant l'invafion des Sarrafins ; & le fit fon Légat dans ces
Royaumes , à la place de Richard qui s'étoit mal conduit
dans la légation. Il y a plufieurs Lettres d'Urbain au lujet da
rétablifTcment de la Primatie de Tolede (h). On doit rap-
porter au même tems le Concile de Fuffelle, non au Pon- &
tificat de Pafchal II , comme a fait le Cardinal d'Aguire ;
puifque l'Abbé Pierre, qui gouvernoic TEglife d'Iria lors de
la tenue de ce Concile (j) , en fut déjetté deux ans après par
Rainier , Légat du Saint Siège , dans le Concile de Léon ,
qui, de l'aveu de tous les Sça vans, fe tint en 105^1. Le Pape,
dans la Lettre qu'il écrivit au Roi Alfonic, pour lui faire parc
du rétabliffement delà Primatie de Tolede , lui ordonne de
rétabUr Diégue , Evêque d'Iria , qu'il avoit fait arrêter dc- &
pofer de la dignité Epifcopale , contrairement aux Canons, &
de l'envoyer enfuite à Rome avec des Députés , pour y être
jugé canoniquement.
Démêlé entre VII. Artauld ayant été élu Evêque d'Elne en Rouffillon,
iVrchevêque
^ io88 ( /), fe prèfcnta à Dalmace, Archevêque de Nar-
& l'Evcque bonne , Ion Métropolitain , pour être ordonne. Celui-ci ne
d'Elne en youlut point le facrer , le regardant comme itmoniaque , à

(/) P.i^. 59. Tom. 10. Co«f. E/iyî. 4. I (6) E/f^. 1. 3. 18. ip. 50. )l. 31,
piiT. 4î4. ( i ) VitA Urbiin. p. 41.
(1;) l'itaUrb.m.p. 40.iSTont.lC.Ciinc.\ ("/; IW./Jf. 43,44. 4J.

caule
,

PAPE. Ch. XLT. 711


«caufe du ferment qu'il avoit fait aux Chanoines , après ion
fon éledion , de confeivcr les biens de l'Eglife. Artauld i"c
pourvut à Rome , où , aprcs avoir prête ferment qu'il n'avoic
fait aucune convention avant d'être élu , le Pape le facra
Evêque. L'Archevêque de Narbonne réclama contre cette
Ordination , mais il ne fut point écouté. Artauld gouverna
pailiblement fon Eglifc , &
afllfta à divers Conciles. Graticn ,
dans fon Décret, l'appelle Evêque d'Arles. C'cft une faute.
11 l'étoit d'Elne.
VIII. Le premier de Novembre , Urbain II accorda à ^^'^V'^S^^j^*
l'Abbé Hugues & à fon Monaftere, un ample privilège, où ni en loss/"
entre autres chofes remarquables (?w) , il dit qu'il étoit rede-
vable à cet Abbé 8c à ion Abbaye , d'y avoir été régénéré par
une féconde grâce du Saint - Efprit , regardant la profeiïîon
monaftique comme un fécond Batême. Au mois de Décem-
bre il confirma à Godfroi , Evêque de Maguelonc , un Comte
qui avoit été donné à Grégoire VU
, 8c que ce Pape avoit

cédé fous le titre de fief («) , à Pierre , prédécelTeur de God-


froi , à la charge du ferment de fidélité & d'un cens annuel ,
d'une once d'or du meilleur alol. La Lettre d'Urbain II eft;
datée du 14 Décembre 10S8. Il en écrivit une vers le même
tems ( ) , au Clergé & au peuple de Vienne , en faveur de
Gui qu'ils avoient élu pour leur Archevêque , & qui enluite
de fon éledion étoit allé à Rome., où il avoit fait quelque fé-
jour.
IX. Vers le commencement de l'an 1085? (p) j Pibon j Lettres à
Evêque de Toul , coniulta le Pape Urbain fur plufieurs diffi- Pibon,Evcque
ne Toul,
k/'y^T->" r / \ •

es. Cet Evêque avoit rait (7) , quelques années aupa-


1
'

ravant , le pèlerinage de Jérufalem , avec Conrad de Lu-


celbourg; & promit que s'il en revcnoit, il fe feroit Moine,
II accomplit fon vœu en faifant profcfTiondans le Monaftcre
de Saint Bénigne de Dijon , fous l'Abbé Jarenton. Mais les
peuples de fon Diocèie l'ayant redemandé , le Pape Vidor
III l'obligea à y retourner. On cite une Lettre qu'Alexandre
II lui écrivit (r ) , pour l'empêcher de s'oppoier à l'exécution

(m) //(</. ;>. 4T. 455-


(«) UiJ.p. 4i<. (rj) Ma BILL. LU. 66. Aiitial. i.mm. ?J,
<») f*'''- P-^S^ 47- (r) Idem, lib. 64. num. i 1

4f) Ibid, p. %o, i5 Tcm, lo. Co«r, fig-.

Tome XX. Yyyy


722 URBAIN IT^
d'un privilège accordé à l'Abbaye de Montier-en-Der, pat
Léon IX. Celle du Pape Urbain eft le réfultat d'une Affem-
bk'e fynodale , où l'on répondit aux difficultés propofées par
Pibon. On décide i°. que toutes les dignités à la nomina-
tion de l'Evêque doivent être conférées gratuitement , &
que l'on dépofera ceux qui y auront été promus pour de l'ar-
gent. 2°. Que ceux qui , après avoir reçu le Soûdiaconat ,
n'auront pas gardé la continence , feront privés de leur Offi-
ce &de leur Bénéfice ; &
que l'Evêque qui aura toléré cet
abus y fera interdit de fes fon£lions. ^°. Que l'on interdira
aux enfans des Prêtres le minifiere de l'Autel, à moins qu'ils
n'aient été éprouvés dans des Monafleres, ou parmi des Cha-
noines Réguliers. 4°. Qu^à l'égard de ceux qui ont reçu les
Ordres des Evêques Catholiques , mais excommuniés , s'il
n'eft point intervenu de fimonie dans leur ordination , on
leur permettra de demeurer dans leur grade, après leur avoir
impofé une pénitence, ç". Que tous les Clercs fimoniaques
feront interdits du facré minifiere , privés de
leurs Bénéfi-»
ces ; que l'on confacrera de nouveau les Autels & les Egli-
&
fes qu'ils auront confacrées. 6". Qu'à raifon de la néceffîté ac-
tuelle de l'Eglife, l'Evêque pourra , s'il le juge à propos^
permettre l'exercice de leur Ordre à ceux qui ont été ordon-
nés fans titre ; pourvu qu'il n'y ait d'ailleurs aucun défaut
dans leur ordination. 7°. Que l'on privera de leurs fondions
ceux qui ont époufé une veuve , ou qui ont été mariés deux
fois.
Approbation X. On rapporte au même tems le privilège que le Pape
" Urbain accorda aux Chanoines Réguliers de Saint Jean des
Chanome^
Réguliers en Vignes à SoifTons (j), établis depuis peu en cette Ville. Le
1.08^.
Pape , pour les engager à l'exade obfervance , les prit fous
la protedion du Saint S ége, & apcrouva leurs Règles com-
prifes en quarante - deux leçons ou chapitres. Il en accorda
aufli un à l'Abbaye de Saint Vidor de Marfeille. Mais il
s'appliqua fur- tout à éteindre les reftes du fchifme en Alle-
magne, ou il fit fon Légat Gebchard , Evêquc de Confian-
ce , par une Letre datée du 18 Avril. Cette Lettre cft en
même- tems la réponfe à plufieurs queflions que Gebehard
avoir faites au Pape touchant les excommuniés. Urbain II ea

{s) Vita Vrlan, p. ;o. 5 i. (J tom. IQ. Conc.f. 444»


P A PE. Ch. XLI. 715
faît divcrfcs clafles.met dans la première , l'Antipape
Il

Guibert ; dans la féconde , le Roi Henri , & tous ceux qui


aident les excommunies, d'argent j de confeil, ou qui re-
çoivent d'eux ou de leurs fauteurs , des dignités eccléfiafli-
qucs ; &
dans la troificme , ceux qui communiquent avec les
excommunies. Il veut qu'on impofe une pénitence plus févere
à ceux qui font tombés volontairement ou par négligence ,
qu'à ceux qui ont agi par ignorance , par crainte ou par né-
cefTité. A
l'égard des Clercs ordonnés par des Evêques ex-
communiés , il leur permet les fondions de leurs Ordres ,
pourvu qu'ils les aient reçus fans llmonie , qu'ils foienc &
dotles &de bonnes mœurs , en leur impofant toutefois une
pénitence: mais il défend de les promouvoir à des dégrés
lupérieurs , [s'il n'y a une grande utilité pour l'Eglife. Il fe
relâche aufii envers les Clercs tombés dans le crime per- *,

mettant, à caufe de la rareté des Minières Catholiques , de


les rétablir dans leurs fondions , fans prétendre déroger à
l'ancienne difcipline, qui ne réhàbilitoit jamais les Clercs cou-
pables de grands crimes, quelque pénitence qu'ils en euffcnr
faite. Par la même Lettre , le Pape donne à Gebehard la ju-
rifdidion fur l'Ifle de Richenou, fauf l'exemption des Moi-

nes. 11 lui ordonne de leur donner un Abbé Catholique,


c'eft-à-dire , non fchifmarique à ceux de Saint Gai , & aux
;

autres Monaftercs qui en manquoient ; de pourvoir auffi aux


Evcchés d'Aoufte , de Coïre , & aux autres qui n'avoicnc
point d'Evêques ; de gouverner conjointement avec l'Evcque
de Palfau , la Saxe, l'Allemagne & les pays voilins ; de ré-
prouver les mauvaiiés ordinations , de conferver les bonnes ,
& de régler toutes les affaires eccléfiafliques en prenant con-
feil de gens fages. Le Décret touchant les excommuniés avoit

été arrccé dans un Concile, après une longue & miàre délibé-
ration.
XI. Mais quel eft Concile qui rendit ce Décret ? Quel-
le Concile àt
Ron^eemoSi».
ques-uns croient que Concile général affembléà Rome
c'eft le

en io8i;> ( r ) , où il fc trouva cent quinze Evêques. Mais le


Pape Urbain ne s'explique pas clairement là- delTus. Il dit
feulement qu'il écrivit la Lettre à Gebehard , après en avoir
conféré avec fes frères ; &
plus bas il femble dire , que ce

(«) Tom. 10. Conc. p. 474. Ç5 Urb^xn. t/iM , p/j'3. 54.

Yyyyij
724 URBAIN II,
qu'il avôît réglé touchant les excommuniés , méritoit d'être
traité définitivement dam un Concile général , parce que le
mal éroit général. Quoi qu'il en foit , le Pape confirma dans
le Concile de Rome , les Loix établies par les prédécefleurs.
Les Romains chalTercnt l'Antipape Guibcrt , & l'obligèrent
de promettre par ferment qu'il ne s'empareroit plus du Saint
Siège. Le feu de la guerre entre les Catholiques commença à-
s'éteindre , ils cherchèrent à faire la paix ; les Ducs les Com- &
tes Catholiques s'afTemblerent avec le Roi Henri ; ils lui pro-
mirent du lecours pour rentrer dans fes Etats , s'il vouloit
renvoyer l'Antipape &
reconnoitre Urbain ; & ce Prince con-
fentit à tout, pourvu que les Evcques de fon parti y donnaf-
fent leur conlcntemcnt. Mais craignant d'être dépofés avec
Guibcrt, ils difluadcrenr le Roi de fe réconcilier avec le Saint
Siège.
tettreàGuil- XII. Guillaume , Archevêque de Rouen («) , a-voit jette
laume , Ar- un interdit fur toute la Normandie , pour obliger le Comxe
Ro^ueT^
^ Robert à lui rendre la VillôiQe Gifors ; & excommunié les
Moines de Fccam parce qu'étant fournis immédiatement au
,

Saint Siège , ils n'avoiènt pas obéi à l'interdit , ni cefTé la cé-


lébration de l'Office divin. L'affaire ayant été portée au Pape-
Urbain , il défendit à l'Archevêque l'ufage du Pàllium y qu'u-
ne lui rendit depuis qu'à la- prière du Comte ; & afin qu'iP
n'entreprît plus rien à l'avenir fur l'Eglife de Fécam , le Pape
confirma l'exemption de ce Monaftere par im nouveau Di-
plôme. Il écrivit vers le même tcms à T Archevêque, en fa-
veur des Moines du Bec , qui s'étoient établis dans l'Eglife de-
Saint Pierre de Pontoifc , &
que les habitans de cette Ville,,
fécondés des Chanoines de Saint Mellon, vouloient empêcher
d'annoncei l'Office divin par le fon des cloches. Quelque tems
auparavant, Urbain II avoir accordé le privilège d'exemp-
tion de la jurifdidion de l'Evêque , à Frotard , Abbé de Saint-
Pons de Toraieres.
teMre aux
XIII. La date de ce privilège eft du premier de Juillet-
Seigneurs de loSc? ( .T ). Le même ijour le Pape écrivit aux grands Set--
Catalogne,
gncurs de Catîlognc , pour les exhorter à réparer la Ville
de Tarragone Se en faire une forterclfe contre les Sarrafins.

(«) ViiA Uib.itt. p/tg. 17. Lib, <j. f, 408. î^ t« Apftiid.ti, joj,
I

Q») U>id.[.%g. 57. © MâRjCA. llifoMliC. I


, '

P A P É. Ch. XLI. 7^25


Son deflein étoit d'y faire rétablir le Siège Epifcopal avec ,

la qualité de Métropole , qui avoir été accordée à l'Arche-


vêque de Narbonne. Bcrcngcr , Evcuuc d'Aufone , Tecon-
doit les intentions du Pape , dans rcfpérancc qu'ayant été juf-
ques-là chargé du loin de rEglifc de Tarragone , il y feroit
transféré, & devicndrôir par-là Métropolitain de la Proviri-"
ce. Cette Lettre fut écrite par Jean , Diacre de l'Eglifc Ro-
maine , qui , avec la qualité de Cardinal , prend aufli celle de
Chancelier.
XIV. Le dixième de Septembre fuivant , Urbain II rint conciie de
un Concile à Mclfe dans-Ia Pouillc (y), où aiïiferenr foi- Meife.
xante & dix Evêques du pays , douze Abbés , le Duc Ro-'
ger , & les Seigneurs. On, a quelquefois varié lur la date de
ce Concile mais Jean , Diacre , qui y étoit préfcnt , dit net-
:

tement dans fa Lettre à l'Abbé de Molefnie (z) , qu'il fut tenu


en 1085) , la féconde année du Pontificat d'Urbain. Lé Duc
Roger y fit hommage lige àp Pape , avec promeffe de fidé-
lité à lui & à tous fes fuccéfTeurscanoniquementcIus. Enfuitc.
de quoi il reçut l'invefliture de cette Terre par l'étcndart
avec le titre de Duc. Le Concile publia feize Canons, qui"; -

défendent I3 vénalité des dignités eccléfiafliques (a) ; l'ufage^


du mariage , même aux Soùdiacrcs (b) d'en ordonne;- qui -y

rie foient vierges, oir rftarî's d'une feule tetprhe (c) ; d'ordonnbr'

uft Soûdiacré avant quatorze ans Çd] juri Diacre avant ypgc-S
quatre ans (e) ; aux laïcs^de'difpoféf de leurs dixmes ou dé'
leurs Eglifes en faveur-dés Moines oti des'Chanoines , fans
le confentement de l'Evêque ou du Pape
(/) ; aux Abbés &
aux Prévôts de recevoir écs dignités-, fans- en ai'oir obtenu
la permiffion de TEvêque. II éft' aUfïFd'eférlda^aûix AbbçS'dê^
recevoir de l'argent dcceu)^ qui vieiihenta^j Moriaftcré ppiiF
le convertir {g). On confirme lés aribiensfGahotT(S tpntre'les ^'^ ^^''•'"\ '

.,

ihveftitures des dignités ecclénaftiqu'es(i^);;^ «Srrbri'cbhdam-S^ "" "

(^ ) Tom. lo.Conc.titj. 476. Cf XJrban, (i/j C»«. 4.


*)M,/>. 6'). •' '
-, '",'
"-
(t) ToOT. 10. Conf.^. 47;?j. •
(f) Ct«. 6.
Ci». .-,.x.-v.;0 «iu"l ( 1
(.1^ l.'^=> -l^ j

,
ih)Can. 8». .P . : - ..)

(f) Cm. -"ô


3.
. ,

7?5. U RB A, I N II ;
dans leur Dioccfe fans l'agrément de l'Abbc («). Défenfe de
mettre dans le Clergé , des hommes de, condition fervile ( /) j
& aux Clercs de s'habiller à la manière des féculiers (w). Les
enfans des Prêtres ne feront point admis au facré minifte-
re {n), qu'ils n'aient été éprouvés dans des Monafteres ou
dans aes Communautés de Chanoines (o). Celui qui aura été
excommunié par fon Evêque , ne pourra être reçu par d'au-
tres (p). Le dernier Canon traite des faufles pénitences ;

& fous ce nom il entend {q)


ne faire pénitence que d'un
,

péché , quoiqu'on foit coupable de plulieurs ; demeurer dans


des emplois que l'on ne peut exercer fans péché ; avoir delà
haine contre quelqu'un, ou rcfufer defatisfaire ceux que l'on-
a offènfés.
Urbain II XV.Après le Concile , Urbain II alla à Bari (r) , & en
transfère les
p^ff^nt àVenofa , il donna une Bulle pour la confirmation
Nicohs.
^ '
des droits & des biens de l'Abbaye de Cave. Le motif de
fpn voyage à Bari fut de facrer .Archevêque de cette Ville
Papes ordonnaffer^t des
Élie. 11 n'étoit point d'ufage que les,
Evêqucs ailleurs qu'à Rome
il ne put refufcr cette: mais
grâce au Duc Roger & à fon frère Bocmond , Seigneurs de
Bari, qui la lui demandèrent conjointement avec Elie. Ce
nouvel Archevêque étoit Abbé de Saint Benoît, aupara- &
vant Moine de Cave près de Salernç. On lui avoir confié la
garde des reliques de faint T^Jicolas. Le Pape les transféra
dans l'Églife qu'on venoit de bâtir] à Bari , fous l'invocation
de ce Saint -, &
confirrrisa^à l'Archevêque fes droits fur les dix-

huit Evêchés de fa Province,, dénommés dans la Bulle de


confirmation, datée de Bari le neuvième d'Odohre 1089, 8c
faiiurifdi6tionfur tous.ks:;!fi/Ionaftçres)i'horames de filleç,! &
tant de Grecs que de Latins. ; ., . ;.-

Concfle de Baronius , Binjus & quelques autres Ecrivains, (i)>!


XVL
TroiCt mettent fur la fin de la même année , un Concile de Troics
en Pouille 5 ce qui les oblige d'en admettre deux en la même
yille , le fécond en .ijç^j- Ils fe fondent fur le témoignage
de Pierre, Diacre, qui, dans la Chronique de CaïTin , dit'

( « ) Can. 9, (p) Can. Tf.


(/ ) Cm. 10. (^) Cati. \6. •. -j .',x.-<'? .

(m) Cfl«. Ili • ;


J^y, (r) Viia U riait, p. Cf. 66.
[n)C.tn. n. (j) Tom. lo. Conc./i,+7f , {J Vit» Vrlan,
(o)C'dn. 14. 66,
,

Ch. PAPE. I. XL727


ique lePape Urbain (f)l , dans fon deuxième voyage en cette
Abbaye , y ordonna Diacre , Jean Cajétan ; & tint vers le
mcme tems un Concile à Troie d'où il fuit que Jean Cajé-
:

tan ayant été ordonné Diacre la première année du Ponti-


iicat d'Urbain , il y eut en cette même année un Concile à
Troie; & qu'y en ayant eu un autre en cette Ville en iO(>3 ,
ou ne peut fc dilpenier d'en reconnoître deux. Mais ceux
c|uiont publié la dernière édition de la Chronique de Caffin,
ont remarqué dans Pierre , Diacre , c^uanrité d'anachronif-
mes ; & ne doutent pas que Jean Cajétan n'ait été ordonné
Diacre dès le premier voyage du Pape à Mont-CafTin. On
peut dire encore que Pierre , Diacre , ne parle pas de la pre-
mière ordination de Cajétan ; mais de la féconde, c'eft à-
dire , de fa promotion au Diaconat de l'Eglife Patriarchale
de Latran ; &
cette explication efl fondée fur le texte même
de Pierre , Diacre. Cette promotion ne s'érant donc faire
qu'en 10^ 3 , rien n'empêche qu'on ne la mette en mêmc-tems
que le Concile de Troie. Aufli Berthold , Ecrivain contem-
porain , ne parle que d'un Concile en cette Ville , fous le
Pontificat d'Urbain II. Il rapporte les deux Canons que l'on
y publia ; l'un , qui ordonne de diflbudre les mariages con-
tra£tés entre parens ; l'autre , pour l'obfervation de la Trêve
de Dieu. De Bari le Pape vint à Brindes , où il dédia l'E-
glife Cathédrale , &
y rétablit le Siège Epifcopal transféré
à Oria , à caufe de l'incurlion des Sarrafins. Il étoit de re-
tour à Rome aux Fêtes de Noël ( « ) , ainfi qu'il paroîr par
une Bulle datée de ce jour , accordée à Rainaud , Archevêque
de Reims.
XVII. Dalmace , Archevêque de Narbonne , étoit venu à concîie <k
Rome fur la fin de l'an io8p ({x) , pour foutenir fes droits Nf bonne.
'''
fur l'Eglife de Tarragone , que le Pape vouloir rétablir dans Rallier?
la dignité de Métropole. On lui demanda s'il avoir quelque
privilège du Saint Siège , qui établit fa Primatie fur la Pro-
vince de Tarragone. Il répondit que fon Eglife en avoit , &
qu'il efpéroit les trouver. Dalmace fortit donc de Rome fans^
avoir réuifi dans fon projet , ni fini la conceflation qu'il avoiC'
avec l'Abbé de Grafle , &
avec Frotard , Abbé de Tomieresi*'

ii_t) Cbronic. C^ffin.Ub. ^.caf.y, 1 {x)IiiJ.p,7^


(«] Vit.i Urtan. p, 7 1
|
,

fi8 UR B Aï N 5ir ,

Son voyage ne fut pas néanmoins inutile. Le Pape écrivit ati


Clergé , au peuple, au Comte &
au Vicomcc de Narbonne
pour leur recommander leur Evèque, & leur ordonner de lui
obéir comme à leur pcre 8c au Vicaire de Jefus-Chrift , me-
naçant d'anathême les ufurpateurs des biens de cette Eglife,
s'ils ne les reftituoient . Outre cette Lettre il en écrivit deux

à ion Légat Rainier , par leiquclles il le charge de s'informer


des injures que Dalmace difoit avoir reçues de TAbbé Fro-
tard. Il y en a une troifiéme à cet Abbé , à qui le Pape or-
donne de fe foumectre au Décret du Légat , & de fatisfairc,
au cas qu'il fût trouvé coupable , tant à l'Archevêque d-e Nar-
bonne qu'à l'Evcque de Barcelone , qui s'étoient plaints l'un &
l'autre de fa conduite. Quant au droit de Primatie que Dal-
mace prétendoit fur l'Eglife de Tarragone, le Pape dità fon
Légat de s'informer des privilèges que l'Eglife de Narbonne
alléguoit pour prouver fon droit de Primatie , de les lui en- &
voyer pour en juger comme d'une affaire d'importance. Ces
quatre Lettres fe trouvent dans le dixième Tome des Con-
ciles. Il y en a une cinquième dans l'Appendice du rnême
Tome (y) , Dalmace & Frotard. Elle
fur la difficulté entre
eft Légat Rainier. Mais il y a faute dans l'inf-
adreiïée au
cripùon , où on lit un L. pour un R. & dans le corps de la
Lettre , Comorienfem Abbatem , au lieu de Tomerienfem. L'af^,
faire que Dalmace avoir portée à Rome contre Robert, Abbé
de Graffe (z ) , fut accommodée , parties préfentes , dans le
Concile de Narbonne , Mars de l'an 1090.,
tenu au mois de
L'Archevêque, de du Concile, reconnut les droits de
l'avis
l'Abbé de Graffe , fur les Abbayes de Saint Laurent <&: de
sL s'^onc'^
Saint Polycarpe ; & l'Abbé Robert s'avoua coupable de n'a-
.'.-' voir pas obfcrvé l'interdit porté par l'Archevêque , & d'avoir
reçu , farïs fon confcntemcnt , l'Abbaye de Saint Laurent.
Les Ades de ce Concile font divifés en deux parties , & rap-
portés dans l'Appendice du dixième Tome des Conciles {a),
A l'égard du droit de Métropole , le Pape l'accorda à l'E-
glife de Tarragone , par une Bulle datée de Capoue , le pre-
mier Juillet 105?!. L'année précédente il avoit accordé à
AyiTicric , Abbé de Saint Jean-Baptiftc de Pinna , la conlir-

(^) P4^.4fî.4j6. 1840. 1 (O-P-»!. i8i8. i8ii. .

...
(O Pa^. 1818. Il
.

.j

mation
,

P A P E. Ch. X LI. ^ 72^


matîon de tous les privilèges de ce Monaftcre , à la prière de
Sanche , Roi d'Amgon (b). Ce Prince confulta le même
Pape pour lavoir (i Ton pouvoit obliger la propre niéceà con-
tracler mariage avec un homme à qui il Tavoic promiie par né-
ceflité. Urbain répondit que cela ne le pouvoit, parce qu'il fal-
loit de la liberté dans lescontra6tans.
X VIH. Au commenccmcnc de l'an 10510 (c) , il écrivit Lettre à'l«
*'
à la Comteflc Mathilde de contraindre l'Evcque de Mancoue ^1^°!^^^^
"^

à rendre l'Eglile de Saint Florien qu'il avoit ufurpée iur le


Monaftere de Polirone. Il accorda vers le même tems le
Pallium , à Thiemon , Archevêque de Salzbourg , & divers
privilèges à des Monafteres, encre autres à ceux de la Con-
grégation de '^ijif^allombreufe , portant que tous les Abbés qui
^n dépendoient auroicnt droit de luffrage dans l'éledion de
l'Abbé de Wallombreule , &c que fi le choix tomboit Tur quel-
qu'un d'eux , il quitteroit fon Abbaye pour palier à celle-là,
quiétoit regardée comme la première & la mère de toutes les
autres. Il eîl fur prenant qu'il ne loit fait aucune mention dans
cette Bulle de l'Abbé aducl dcWalIombreule.C'étoitRufliquc,
le même qui avoit confulté avec Pierre , Evêque de Piftoria
le Pape Urbain , fur l'Ordre de Diaconat que Daïmbert avoit
reçu de Vecilon , Archevêque de Mayence , fchifmatiquc &
fimoniaque. Le Pape l'avoit enluite ordonne Evêque de Pife:
ce qui caufa du fcandalc à Piftoria {d). Urbain II écrivit fur
cela deux Lettres dans leiquelles il dit, qu'il n'ignoroit pas
(\uc Daïmbert avoit été ordonne par Vecilon fchifmatiquc
•mais qu'il Içavoit aufll qu'il n'étoit intervenu aucun patte de
fimonie dans fon ordination , & qu'il avoit quitté de corps &
d'cfprit les hérétiques ; qu'ayant donc égard à fon zèle , à fes
travaux pour l'Eglife , & à la néceffité , il l'avoit confacré E-
vêque.
XIX. Sa Bulle pour l'Abbaye de Marmoutier efl: datée du Lettre à l'Ab-
^^^^'""''•
mois d'Avril de la même année 10^0 (e). Il y prend ce
Monaflere fous la protedion fpécialc du Saint Siège , à la
charge que l'Abbé élu le fera bénir par l'Archevêque de
Tours , mais fans que ce Prélat puilTe exiger de l'Abbé au-

(i) V!ta Uiian. p. 74, 7J. (e) Vitn Urban. f. 79. 80. C? MaBILL.
j
(c]ïhid.p, 76.77. yt. I Tom. ^, Annal, lit, 67. n. lot.
((H Tom. lo-Conc. p. i^^z

Tûine XX, Zzzz


730 URB A I N II, ^
cune profefTion. Le Pape mit cette claufe , à l'occafion de la
profelïîon que les Evêques de ce tems-là avoient coutume de
demander aux Abbés qu'ils bcniiïbient ; & que les Abbés re-
fuioicnt ordinairement de donncr,foit parce qu'ils craignoicnt
qu'elle ne donnât atteinte à leurs droits d'exemption de la
jurifdidion des Evêques , foit à cauie qu'il y entroit quelque
chofe de llmoniaque. La Bulle eftadreflee à l'Abbé Bernard ,
à qui le Pape écrivit une Lettre vers le même tems pour ,1e
détourner du deffein de quitter le régime de fon monafterc.
Il craignoit qu'il n'y eût eu quelque défaut dans fon cle£lion.
Le Pape la ratifie , & ordonne à tous les Frères de lui rendre
jrefpetl & obéiffance.
Concile Je XX. Le Pape fit tenir par fes Légats un Concile à Tou-
Touioufe en Joufe vcrs la Fête de la Pentecôte de l'an 1090 (/) , où
,

aflifterent les Evêques de diverfcs Provinces. C'efl pourquoi


Berthold , Auteur contemporain , l'appelle un Concile géné-

ral. Gny corrigea plufieurs abus en matières eccléfiaftiques ;


êc l'Evêque de cette Ville s'y purgea canoniquement de quel-
ques crimes dont il étoit accufé. Berchold dit que l'on envoya^
à la prière d'Alphonfe , Roi de Caftille , une légation à To-
lède pour rétablir la Religion Chrétienne ; ce qui paroît in-
intelligible , à moins qu'on ne l'entende de la réception du
Rit Romain dans l'Office divin , au lieu du Gothique dans
les Eglifcs d'Efpagnc. En effet , le Légat Rainier qui aiïïfta
à ce Concile , fit faire là-dcfTus un Règlement dans celui qu'il
tint à Léon l'année fuivante , comme on le dira ci -après,
Rainier en fortant de Touloufe prit fa route par la Catalo^
gne, où Raimond , Comte de Barcelone , ayant alTemblé les
Seigneurs de la Province, fit une donation folemnelle de la
Ville de Tarragone au Saint Siège , à charge d'un cens de
vingt-cinq livres d'argent trcs-pur tous les cinq ans, recon-
noiffant que lui & fes fuccefleurs ne la ticndroient à l'avenir
que comme vafTaux du Pape.
Concîle de XXL Cependant le Roi Henri entra en Italie avec fon
Benevem en
10^ I.
armée (g) , fit le fiége de Mantoue , n'oublia rien pour &
augmenter le parti des fchifmatiques. Ces nouveaux troubles
engagèrent Urbain II à fe retirer dans les Provinces foumifes

(f) Tarn. 5.C0/K-./.47S. © Vit» Urban. j (g] Viti V.ban. p. 87. G» /'^.
foj(. 80. 81. 1
PAPE. Ch. XLI. 731
au Duc Roger & à Bocmond ,
pour s'y occuper avec plus
de tranquillité des affairesde l'Eglife. Il écoit en Campanie
vers le milieu du mois d'Août de l'an 105^0 , comme on le
voit par une Bulle pour le Monaftere de Saint Bafle , datée
de Sinuefle le 15 de ce mois, adreffée à l'Abbé Burchard.
Le premier jour du même mois il avoit écrit de Capoue à
faint Anfelme , alors Abbé du Bec en Normandie , pour lui
recommander Foulques , Evoque de Beauvais , qui avoit été
fon difciple- Il inliitua la même année la Congrégation des
Chanoines Réguliers , nommée Aroafia , du nom de fon prin»-
cipal Monafiere dans le Diocèfe d'Arras ; changea l'Eglifç
Collégiale de Sainte Marie à Taunai, en un Monaftere, où
il établit des Moines de Saint Jean d'Angely , & accorda un

privilège à l'Eglife de Catane. Il efl daté d'Anagnie le 9 de


Mars de l'an 1091. Le Roi Henri fe rendit maître de Man-t
toue l'onzième d'Avril , après un an de fiége , & trouva le
moyen de s'emparer enfuite du Château Saint -Ange, par
ceux de fon parti qu'il avoit à Rome : ce qui donna lieu 4
l'Anfipape Guibert de rentrer en cette Ville. L'Empereur
de Conftantinople {h), Philippe, Roi de France , & tous
les autres Princes étoient dans l'obéiffance d'Urbain II. Le
Koi d'Allemagne feul , avec ceux de fes fujets qu'il avoit ga»
gnés par argent , lui étoit contraire. Il étoit au Pape facile ,
s'il eût voulu , d'entrer à Rome avec une puifTante armée 8c

foumettre les rebelles. Il aima mieux foutenir fes droits avec


douceur , & céder pour un tems à l'iniquité , que de défcn-»
dre fa caufe par la force des armes. Le vingt - huitième de
Mars il affcmb'a un Concile à Benevcnt , où, après avoir
réitéré l'anathême contre Guibert & fes fauteurs , il fit , dq
concert avec les Evêques du Concile , quatre Canons , qui
portent qu'à l'avenir on n'élira point d'Evêque qui n'ait exer-
cé religieufement les fondions des Ordres facrés ( i ) , c'efl:-
à- dire , de la Prêtrife ou du Diaconat; car ce font les feuls
Ordres fur lefqucls l'Apôtre nous donne des règles ; (1 nous
confentons que l'on élife des Soûdiacres (/) , ce n'eft que
dans le befoi n , rarement , & par permiflion du Pape ou du
Métropolitain; que l'on interdira les Prêtres qui fervent dans

(i )T»»<. 10. Co«,-.;>. ^g*. 1

Zzzz i
j
732 "U R B A I N I I,
les Eglifesau-delà du nombre prefcrit (m) , fans permiffion
de l'Evêque , &
qui ont obtenu des dixmcs des laïcs; qu'il
ne fera permis à aucun Evêque d'ordonner un Clerc d'un au-
tre Diocèfe , fans Lettres formées ou DémifToire («) ; que
depuis le jour des Cendres , tous les laïcs s'abfliendront de
viandes (o) ; &
que ce jour-là , tant les Clercs que les laïcs
des deux fexes , recevront des cendres fur leurs têtes ; qu'on
ne pourra contrader mariage depuis la Septuagéfime juiqu à
Pâques , ni depuis l'Avent jufqu'à l'Odave de l'Epiphanie.
On dit qu'il fe trouva à ce Concile un très - grand nombre
d'Evêques &
d'Abbés , entre autres l'Abbé de Cave , aupa-
ravant Moine de Cluni ; &
que le Pape Urbain le voyant aflTis
tête nue, lui envoya une mitre; que Pierre, c'étoit fonnom,
la reçut avec rcfpe£l &
ne voulut point s'en couvrir , quoi-
que le Pape l'en priât. Le Concile termina la difficulté mue
depuis quelque tems entre Romuald , Evêque de Monopo-
lis dans la Province de Bari , &
l'Archevêque de Brindes ,
au fujet de la jurifditbion. Il fut décidé que l'Eglife de Mo-
nopolis ne dépendroit en aucune façon de celle de Brindes.
Concile de XXII. Les funérailles de Garfias , Roi de Galice, frère
éonenio^i.
^j'y^jpj^Qnfe , occafionnerent un Concile à Léon en lopi (p).
Le Cardinal Rainier , Légat du Pape, y fut préfcnt avec Ber-
nard , Archevêque de 1 olede , &
plulicurs Evêqucs. Les
Ecrivains Espagnols difcnt que l'on y régla beaucoup de cho-
fes touchant les Offices divins ; ce que quelques-uns enten-
dent du changement du Rit MoDrabique au Romain , qui
avoir déjà été ordonné en différens Conciles ; ils s'appuienc
fur ce qu'il fut arrêté dans cette Affemblée , que l'on célé-
brcroit les Offices divins fuivant la Règle de Saint Ifidore :
mais le Cardinal d'Aguire foutient que par cette Règle de
, on n'entend autre chofe que fa Lettre à Land-
faint Ifidore
froi Evêque de Cordoue, où il détaille les devoirs de cha-
,

que Ordre , & les Rits de chaque Office. Ils avoient été né-
gligés long-tems en Efpagne, à caufede l'invafion des Mau-
res. Les Evêques du Concile de Léon en rétablirent la pra-
tique conformément au prefcrit de cette Lettre. Il y fut en-
core ordonné que dans la luite on le lerviroit de l'écriture

(m) C<n. 1. (/>) T^""- 'C<.Co/iC,p. 4S1. 2? VitaVr-


I
(n) V.iin. j. l-,tii.f.i^. 100,
I

(0; Ca„. 4. I
PAPE. Ch. XLT/ 73Y
gauloife dans tous les a£tes ccclcfiaftiqucs au lieu de la gothi-
que inventée par l'Evéquc Ulfilas. Le Cardinal Rainier fit dé-
pofer Pierre ordonné Evoque de Çompoftcl par le Légat'
,

Richard en \o88 , & mettre à fa place un Abbé^ dé l'Ordre de'


Cluni , nommé Dalmace. ^- ^' ;
- • ' -

XXIIL En Allemagne pluficurs laïcs de rdri éè^'êè l'autre' Urbafnlinp-

fexe iq) ) embrafferent la vie commune , renonçant au mon- no°ye[infti_


de & donnant eux & leurs biens au iervice des Commu-tut.
le
nautés Réguliers de Clercs & de Moines pour vivre fous leur-
conduite. Grand nombre de filles de la campagne reno'nee-'
i^ent au mariage & au monde, pour vivre Tous la <;onduite'
de quelque Prêtre. Quelques-uns blâmèrent ce nouvel Infti-
tut :mais le Pape Urbain II qui en avoir connu la lainteté
dans le tcms de lalégatic n en Allemagne , le prit fous fa pro- -'il^:;^n''0
tedion , & le confirma par une Lettre adreflee aux 'Supé^ "' «=^y"*

rieurs des Monafteres chargés de la conduite' de ces vertueuîb


laïcs.
XXIV. Geoffroi , Evêque de Chartres (>*), après avoir Lettres tou-

été dépofé deux fois par le Légat Hugues , & rétabli deux ciiantGéoHroi
fois par le Pape Grégoire VII , fut accufé de nouveau de'chamcs.
divers crimes devant le Pape Urbain II ; qui ayant examiné^
avec foin la vérité , l'obligea de fe démettre de l'Epiicopat.
En conféquence le Pape ordonna au Clergé & au peuple de
Chartres de procéder à l'éledion d'un autre Evoque ; & pria
Richer , Archevêque de Sens , de favorifer cette élcâion , &
d'ordonner celui qui feroit élu. Il recommanda Yves, Prê-
tre & Prévôt de Saint Quentin. Sa recommandation eut Ion
effet aijprès du Clergé & du peuple de Chartres; mais l'Ar-
chevêque de Sens refufa de facrer Yves , foutenant que la
dépofition de Geoffroi n'étoit pas canonique , parce qu'on
auroit dû fe pourvoir devant lui comme Métropolitain , pour
procédera cette dépofition. Yves quî n'avoir confenti qu'a-i
vec peine à fon éleftion , ne laifla pas d'aller à Rome avccî
les Députés de l'Eglife de Chartres, pour fe plaindre de la
réfiflancc de l'Archevêque. Le Pape facra Yves fur la fin de
Novembre lopi , &
le renvoya avec deux Lettres , l'une
pour le Clergé &
le peuple de Chartres , l'autre pour Richer, .

[ij] Viia Urhan. p, loi. I ^ VitAVrbaii.f. 104.


(r) £^:y?. 8 $5 p.lom. lo. Co/zf./'. 4ip. ." 1
1
7î^ U R B A IN II,
défend dans l'une
Il &
dans l'autre à Geoffroî , fous peine
d'excommunication , de fe donner aucun mouvement pour
rentrer dans le Siège de Chartres , & menace de la même
cenfure tous ceux qui l'aideroicnt dans cette tentative. Dans
fa Lcttie à l'Archevêque, il marque qu'en facrant Yves , il
n'avoit point prétendu le fouftraire à l'obéiflance qu'il devoit
à fon Métropolitain. Ces deux Lettres font fuivies dans la
CoUetlion des Conciles , d'un Difcours du Pape à Yves. Ce
n'eft qu'une partie de la formule d'inftrutlion que le con-
fiécratcurfait au nouvel Evêque , telle que nous la lifons dans
le Pontifical Romain. Vers le même tems le Pape accorda à
Rainaud , Abbé de Saint Cyprien de Poitiers , une Bulle con-
firmative de fcs droits fur l'Eglife de Sainte Croix d'Angle.
Concîied'E- XXV. La même année , Robert , Comte de Flandres (s) ^
tnmpes en rcnouvclla un ancicn abus , qui ôtant aux Clercs la faculté
"'^^*
de difpofer de leurs biens par teftament , les adjugeait au.
Le Clergé en porta fcs plaintes au Pape , qui écrivit à ce
fifc.

Comte de fe défifter d'une femblable vexation. Sa Lettre eft


du fécond Décembre 105)1. L'année fuivante Richer , Ar-
chevêque de Sens , irrité contre Yves de Chartres , le citât
au Concile d'Etampes , où affifterent les Evêques de Paris »
de M
eaux & de Troyes. Yves étoit préf.nt. L'Archevê-
que l'accufa de s'être fait facrer à Rome , prétendit qu'en
cela il avoir porté préjudice à l'autorité royale , & opina
pour fa dépoiition & le rétabliffcment de Geoffroi : mais
Yves en appclla à Rome , & fufpcndit ainfi la procédure du,
Concile..
Lettres o'u
- XXVI. Quelque tems après, il tomba dans la difgrace du-
Pape ;iu fujet
Roi Philippe (t) , pour n'avoir pas voulu approuver le def-,
RoiThiiippe'!" fcin où étoit ce Prince de répudier la Reine Bcrthe, fille de
Floris , Duc de Frife , dont il avoir deux cnfans. Nonobftant
les remontrances de cet Evêque , le Roi quitta la Reine,
l'envoya au Château de Montreuil-fur-mer , Se époufa Ber-
trade fille de Simon, Comte de Montfort. Enfuite il fit pil-,

1er les terres de l'Eglife de Chartres , & mettre fon Evêque


en prifon. Le Pape en étant informé, écrivit à Rainaud,
Archevêque de Reims & à fes Suffragans, d'aller au plutôt
trouver le Roi , l'avertir de quitter Bcrtrade , & de mettre

( j ) Vita Vrhan.fag, 108. ( ') To»». »o- Cme.fag. 4<3- ^S"h


,

PAPE. en. XL T. 73r5


TEvêque Yves en liberté , fous peine d'encourir les cenfurcs
de l'Eglifc. La Lettre efl du 27 Odobre lopz. Urbain II en
adrefla de fcmblables à tous les Archevêques & Evcques du
Royaume de France mais Yves empêcha qu'elles ne fuflent
;

rendues publiques de crainte que les fujets du Roi ne fc ré-


,

voltaflent contre lui. La même année le Pape fit la Dédicace


de l'Eglifc du Monaftcre de Cave («) ; termina un procès
entre les Moines de Vendôme Se de Sdint Aubin d'Angers,
au fujet de 1 Eglife de Saint Clément de Craon ; rétablit l'E-
•vêché d'Arras ; érigea en Archevêché l'Eglile de Pife , &
maintint Foulques dans le Siège Epi fcopal de Bcauvais , d'où
fes ennemis avoicnt voulu le charfer , en Taccufant de plu-
fieurs crimes, La Lettre qiWî le Pape écrivit en cette occa-
fion , au Clergé & au peuple de Beauvais , eft du mois de
Février l'an 105» 3. Les Evêques des Gaules ne laifTerent pas
de procéder contte lui ; mais le Pape les reprit vivement
d'avoir ofé difcuter une affaire terminée par le Saint Siège.
C'eft le fujet de fa Lettre à Renaud , Archevêque de Reims Se
à fes Suffragans {x) , écrite au mois de Mai 10^4.
XXVII. On a déjà parlé ci-delTus du Concile aflemblé à _ Concile de
Troie en Pouille , l'onzième de Mars 105)3 (^) foix.intc& jo°|! •

quinze Evêc]ucs y adlftcrent avec douze Àbbés. Ce Concile Lettres du


^^^^*
fut fur-tout occupé à réformer l'abus des mariages entre pa-^
rens ; & l'on décida que les Evêc|ues diocéfains feroicnt citet
les parties jufqu'à trois fois ; que fi trois hommes affirmoicrft
la parenté , ou il les parties en convenoient , le mariage feroit
diffous ; que faute de preuve , ils prendroient les parties à fer-
ment i & que fuivant leur déclaration , ils laiflcroient fubfifter
le mariage ou en ordonncroicnt la diiïblution , en leur permet-
tant de contratter un autre mariage , s'ils font dans un âge peu
avancé.
XXVIII. La même année, le vingtième de Mars (z) , il Concile de
fe tint un Concile à Reims , de la iéparation de
à l'occaiion ^^'"" ^"
'*^^'
l'Evêché d'Arras d'avec celui de Cambrai , ordonnée par une
Bulle d'Urbain II , du 2 Décembre 105)2. Six Evêques de la
Province y aiïifterent , avec les Députés de Cambrai & d'Ar-

(b) VitaXJrban.p. 119. 117. j


C«M<r.f. 4K}.
(x) Uid pas- ti8. (x) Ibid.pag.l^z.t^i.^fej.
1

j/ ) lb:d.(Jg. 118. $5 feq. i5 Tom. 10 J


r^v6
^
.TU R R'A I N II,
-ras^ Goux-ci' prouvèrent qu'Arras ctoit une Ville Ëpîfcopale
'dès le.'tenas defaint Rémi & de iainc Vaft ; & que i'elon les
Canons, on dévoie rétablir des Evoques dans les Villes où il
y en avoit eu. Ceux de Cambrai n'ayant produit a'jcun titre
pour prouver leur droit fur TEglife d Aras , l'Archevêque
Renaud fit lire la Bulle d'Urbain II , & le fixiémc Canon de
.Sardique touchant rére£lion des Evêchcs; puis l'Archidiacre
de Cambrai ayant demandé d'aller foutenir le droit de fon
Eglife devant le Pape , & les Députés d'Arras y ayant con-
fenti , il déclara de la part du Concile , que fi dans huit jours
les Députés d'Arras ne fe mettoient pas en chemin pour Ror
me , il ne les écouteroit plus ; & que fi ceux de Cambrai re-
fufoient d'y aller dans le même terme , il ordonneroit fans
autre délai un Evcque d'Arras , fuivant le commandement du
Pape. L'Eglifc d'Arras obéit ; celle de Cambrai fit défaut.
Le Pape donna donc un fécond ordre à l'Archevêque de
faire élire un Evêque d'Arras. L'élcdion fe fit le dixième de
Juillet 10$) 3. On élut Lambert de Guifnes , Chanoine 8c
Chantre de Lille. L'Archevêque ne voulut point le facrer
fans le confentcment des Evêqucs de la Province ; & ren-
voya le facre au Concile qu'il devoit tenir à Reims le quinze
d'Août. Les Députés d'Arras comparurent. L'Archevêque
leur demanda un délai jufqu'à la Toufl^îinr. Ennuyée de tous
ces .délais, PEglife d'Arras renvoya à Rome. Le Pape écri-
•vit à l'Archevêque de facrer Lambert dans un mois , ou de

l'envoyer à Rome ; fa Lettre à Lambert contenoit à peu près


Jci même çhofe. Renaud remit l'Ordination à l'Odave de
Saint André. Lambert fe rendit à Reims & fe préfenta à
l'Archevêque , qui le renvoya à Rome. Lambert y arriva le
,17 de Février 10^4. Le Pape ayant afi^cmblé fon Conr
feil , fit lire toute la procédure faite pour l'élection de Lam-

bert. Les Romains demandèrent qu'il fût ordonné Evêque


d'Oftie mais le Pape voulant affermir le nouvel Evêché d'Ar-
:

ras , facra Lambert le ip de Mars , & le renvoya à fon Egli-


fe, avec des Bulles adrcfix'cs à l'Archevêque de Reims, au
Clergé d'Arras , aux Abbés & Abbefi"es du Dioccfe , au Comte
&
de Flandres à Lambert lui-mêm.e , pour lui fcrvir de titre.
Affaire deDol
XXIX. Il affifla , étant à Rome (a) , au Jugement qui
en Bretagne.

(») Ihii. f. 137.

fut
,,

PAPE. Ch. XLT. y-i.'j

fut rendu contre Rolland , Evcquc de Dol en Bretagne , vers


la Mi-Carcme de l'an 105)4. Cet Evêque croit venu à Rome
demander le rallium , comme Archevêque de Bretagne ,
s'appuyant fur des Lettres de Grégoire VII , qui avoir ac-
cordé le Pallmtn à Ivcn fon prédéceffeur , fans préjudice du
droit de TArchevêque de Tours. Le Pape Urbain accorda la
même chofe à Rolland , avec la même reftridion. Mais l'Ar-
chevêque de Tours ayant fait voir au Pape , que cette caufc
avoit été jugée fur les lieux en fa faveur , par les Légats
de Grégoire VII, il fut ordonné que les deux contendans
comparoîcroient à la Mi-Carême pour difcuter leur droit
fous peine au défaillant de perdre fa caufe. L'Archevêque
de Tours comparut ; Rolland fe contenta d'envoyer une ex-
cufe , qui me fut pas trouvée valable. On examina aufli les
Lettres de Grégoire VII & des autres. Papes; & de l'avis de
Lambert, de quelques autres Evcques & des Juges Romains,
il fut décide que l'Evêque de Dol & tous ceux de la Breta-

gne reconnoîtroient l'Eglife de Tours pour leur Métropole.


La Bulle que le Pape Urbain fit expédier fur ce point , efl:
du cinquième Avril iop4. Radulpheou Raoul, Archevêque
de Tours , profita de cette occafion pour obtenir du Pape le
Pallium , qu'il demandoir depuis long-tems : mais le Pape ne le
lui accorda cju'après qu'il eût fait ferment en préfence de quel-
<]ues Moines de Marmoutier {b) , qui étoient préfens , de ne
plus inquiéter leur Monaflcre.
XXX. Le Pape étoit alors à Benevent, Dans le deffein Le Pape Ur.
de rentrer dans Rome fans effu{ion de fang (c) , il écrivit j^'" Jf""®
pour lever descollc6les fur les Eglifes. Nous avons deux de en 1094.
fes Lettres fur ce fujet , dont l'une qui efl datée du fécond Concile de
^"*
Novembre 1093 » ^^ adrefTée aux Evêques & Abbés d'Aqui- °^
taine , de Galcogne & de la Bourgogne inférieure ; & l'au-
tre à Rainaud , Abbé de Saint Cyprien proche de Poitiers.
On croit que ce fut à cette occafion que l'on tint un Concile
à Bordeaux ( ^ ) , dont il efl: fait mention dans la Chroni-
que de Maillezai , fur l'an 105» 5. Perfonne ne fervit plus le
Pape queGeoffroi, Abbé de la Trinité de Vendôme (^ ). Il
fit le voyage de Rome , porta au Pape treize mille fous d'or

it)TMge 138. I (//)IW. />. 139.


^c) Uid. f,%z- 15 s, 1 («) Ibid.f. 149. Ifo.
Tome XX, A a. 3.3.3.
,

73^ URBAIN II,


ians autre motif que de le foulager dans fes befoins ; voyant &
que cette femme qui valoit au-delà de cent marcs d'argent
ne fuffifoit pas pour gagner la garde du Palais de Latran ,
il vendit fes mules &
ics chevaux. Le Pape rentra dans ce
Palais, &
Geoffroi fut le premier qui lui baifa les pieds dans
la Chaire Pontificale. Le Pape l'ordonna Prêtre , confirma
par une Bulle les biens & les droits de l'Abbaye de Vendô-
me ; écrivit à Guillaume , Comte de Poitiers , de lui refti-

tueries terres qu'il avoit ufurpces; remit Geoffroi & fes Moi-
nes enpolfeffion de l'Eglife de Sainte Prifque, dont les par-
tifans de l'antipape Guibert s'étoient emparés , &
conferva
à Geoffroi 8c à fes fucceffeurs la dignité de Cardinal qu'O-
deric fon prédéceffeur avoit reçue d'Alexandre II , avec l'E-
glife de Sainte Prifque. Les Abbés de Vendôme portoienc
encore le titre de Cardinal dans le tems du Concile deCon--
ftance (/).
Concile de XXXI. Les affaires d'Urbain II ayant repris le deflus ,,
Confiance, en tanten Italie qu'en Allemagne (g) , la tranquillité publique
'^^'^^
qui en fut une fuite, permit à Gcbehard , Evêque de cette
Ville , d'y affembler un Concile nombreux d'Abbés , de
Clercs & de Seigneurs du pays. Il étoit Légat du Pape eri
Allemagne ; ce qui donnoit plus d'étendue à fon autorité*.
Ce Concile fe tint pendant la Semaine-Sainte de l'an 10P4.
On y réprima l'incontinence des Clercs & la violence des (i--
moniaques , en défendant au peuple d'entendre l'Office cé-
lébré par eux. Le jeûne des Quatre-Tems du mois de Mars
fut fixé à la première femaine de Carême; & celui de Juin,,
à la Pentecôte. Jufques-Ià il avoit été d'ufage dans le Dio-
ccfe de Confiance , de fêter la femaine de Pâques & celle de
la Pentecôte toute entière il fut ordonné qu'à l'avenir , on
:

ne fêteroit que trois jours de chacune. La Reine Praxede


qui avoit quitté le Roi Henri fon mari , dont elle ne pouvoic
plus foutenir les mauvais traitemens ni l'incontinence , vinc
à ce Concile, y raconta tout ce qu'elle avoit fouffcrt de la.
part du Roi; & toucha tellement les affiflans , que tousex-
Guferent fa fuite & lui portèrent compaffion. C'efl: ce que dit
Berthold dans fa Chronique. Domnilon.ne parle point decec
événement.

(J) liiJ.f. l')i.. (£) Uid.f. i^^.Ttm. 10. Ctrit. p. 4S7,


,

PAPE. Ch. XLT. ^ 739


XXXII. Le dix-huiticme de Septembre de la même an- Concile Je
''"^ ^"
ïiée 1 004 (k), le Roi Philippe fit tenir un Concile à Reims '1054.
X 1 r ~ ' r \ L " 1J
, J^'

OU il fe trouva en perlonne , avec les Archevêques de cette


Ville , de Sens &
de Tours , &
huit Evêques. Yves de Char-
tres y fut invité ; m.iis fçachant qu'on vouloic y rcnouveller
les accufations formées contre lui dans un Concile précé-
dent , il s'excufa d'y aller , parce qu'il ne devoit point être
jugé hors de fa Province. Le deffein du Roi , dans la con-
vocation de cette Affemblée , étoit de faire approuver fon
mariage avec Bertrade: ce qui lui paroifToic d'autant plus fa-
cile , que Berthe fa première femme étoit morte depuis quel-
que tems. Il ne refle rien des A£tes de ce Concile : mais il pa-
roît pir une Lettre d Yves de Chartres ( » ) , que les Evêques
plièrent aux defirs du Roi , ou du moins qu'ils manquèrent de
fermeté à fon égard.
XXXIII. Au mois d'O^obre fuivant, Hugues, Arche- Conciled'A».
""^'' "^*"
vêque de Lyon (/) , rétabli Légat en France par le Pape
Urbain , tint un Concile à Autun , affilié de trente -deux
Evêques &
de pluficurs Abbés. Lambert , Evêque d'Arras ,
fut de ce nombre. On y renouveila l'excommunication con-
tre le Roi Henri , contre T Antipape Gu:bert fes compli- &
ces ', &
Ton excommunia pour la première fois , Philippe
Roi de France , pour avoir époufé Bertrade du vivant de la
Reine Berthe. La fimonie & l'incontinence des Prêtres y fu-
rent condamnées fous peine d'excommunication. Il fut dé-
fendu aux Moines de faire les fondions curiales dans les
Eglifes paroifTialcs. On y déchargea l'Abbé de Marmoutier
du ferment que l'Archevêque de Tours exigcoit de lui. Le
différend entre l'Archevêque de Vienne l'Evêque de Gre- &
noble , au fujct de la Terre de Salmoriac , dont le premier
s'étoit emparé de force , y fut propofé , mais non terminé.
L'excommunication du Roi Philippe caufa quelques mouve-
mens dans les Gaules [m) ; &
on croit que ce fut à cette oc-
caûon que l'on indiqua un Concile à Troycs , que l'on trans-
féra depuis à Reims j l'Archevêque de cette Ville n'ayant

*
(5) To«. lo.Cowc./'.i^, 497, tf Vrban. ( / ) Ttm. !«. Ctnc. f, 479, ÇJ Vit» Uri.
pa^. 161.
(i; Y vo, £/<)». jr» {m) Vita Ut ban. fag. 1 6^.

AaaAaij
740 UR B A I N I T ,
pu pour caufe de maladie , fe rendre à Troyes. Mais on
,

n'a rien de bien certain fur ce qui regarde ces deux Con-
ciles.
Conduite XXXÏV. Le Roi Philippe , atiflî-tôt après fon excommu-
versVhnippei nication (m) députa au Pape pour l'alTurer qu'il n'avoit plus
,

Roidefrance. de commerce criminel avec Bertra ^e. Les Dépurés étoient


chargés de faire entendre à Urbain II , que s'il ne levoit l'ex-
communication & ne permettoic que ce Prince reçût à l'or-
dinaire les jours de Fêtes , h couronne de la main d'un Evo-
que , il fe redreroit de fon obéiffance. C'cll: qu'aux jours fo-
Icmnels , le Roi paroifToit dans l'Eglife en habi' royal , avec
la couronne en tête. Yves de Chartres avertit le Pape , que
cette députation n'étoit quemenfonge, & que le Roi n'étoic
point converti. Le Pape, nonobftant cet avis, crut devoir trai-
ter ce Prince avec douceur , leva la cenfure , 8c lui permit
d'ufer de la couronne a l'ordinaire , renvoyant le jugement de
cette affaire à la Touffaint de Tan 105)5 • peut-être avoit-il
deiïein de la faire examiner auparavant dans le Concile de
Plaifance.
Concile de XXXV. 11 fut aflcmblé le premier jour de Mars 1095 (0).
Phifance en
q^ ^ ^j^. pj^^ ^^ ^^^^ cents Evêques , que le Pape avoir ap-
pelles d'Italie , de Bourgogne , de France d'Allemagne, ,.

de Bavière & d'autres Provinces; plus de quatre mille Clercs


& plus de trente mille laïcs ; enforte que n'y ayant point à
Plaifance d'Eglife affcz Ipatieufe pour les contenir, on fut
contraint de tenir les Allcmblées en pleine campagne. Le
Concile dura fept jours. La Reine Praxede ou Adélaïde vint
accompagnée de la Comteffe Mathilde , s'y plaindre du Roi
Henri fon époux, qu'elle avoît quitté à caufe des outrages &
des infamies qu'il luiavoit fait fouffrir. Le Pape qui fçavoit
ce qui en étoit, &
qu'elle n'avoit quitté fon époux que mal-
gré elle , la difpenfa de la pénitence que l'on avoir coutume
d'impofer aux gens mariés , qui fe féparoient de leur propre
autorité. Mais la Reine ne laiffa pas dé fe retirer dans ua
Monaftere , où elle finit fcs jours dans les exercices de piété»
Le Roi Philippe envoya une ambaflade au Concile , s'excu-
fant de n'y être pas venu en perfonne , pour des raifons lé-

(«) Ton. 10. Conc.f. 464, Vita Url'a/iA («) Tom. lO. Coiu. f. 501. C? VitttVrb*.
PAPE. Gh. XLI. 741
citimes. Le Pape , à la prière du Concile, lui accorda un
délai jufqu'à la Pentecôte , n'en ayant pas demandé un plus

long par Ambafladeurs. Hugues, Archevêque de Lyon ,


les
qui avoit prononcé la fentence d'excommunication contre ce
Prince au Concile d'Autun , fut appelle à celui de Plailance.
N'y étant pas venu & n'ayant point envoyé d'cxcufe Icgici-
ine , on le iUfpendit de fes fonctions. Il y vint des AmbafTa-
deurs de l'Empereur Alexis Comnene, demander du fecours
contre les infidèles qui ravageoicnt les Eglifes d'Orient. Le
Pape exhorta les fidèles à donner ce fecours. Plufieurs s'enga-
gèrent par ferment à y aller en perfonne , & à aider l'Empereur
oe Conftantinople de tout leur pouvoir» ;

XXX VL C'eft ce que nous apprenons de Berthold, Ecri- Canons dece


vain du tems (/?) , qui ajoute qu'on fit dans le Concile de^^""''^*
Plaifance plufieurs rég'emens , entre autres , qu'on n'admet-
troit point à la pénitence , ceux qui ne voudroient pas quit-
ter leurs concubines , ni pardonner à leurs ennemis , ni quit-
ter l'habitude de quelque péché mortel ; que les Prêtres ne
recevroient perfonne à la pénitence , fans une commiiïîon de
l'Evêque diocéfain i que l'on ne refuferoit point les Sacre- .

mens de Pénitence &


d'Eucharifîie , à ceux qui ne commu-
niciuent que de corps &
non d'cfprit avec les excommuniés ,
c'eu-à-dire , qui demeurent avec eux fans participer à leurs
Sacremens. Le Concile déclara nulles toutes les ordinations
faites par fimonie ; mais il ufa d'indulgence envers ceux qui
,
fans le fçavoir, avoient été ordonnés par des Evêques fimo-
niaques ou fchifmatiques. Il défendit de rien exiger pour le
faint Chrême , le Batême & la fépulture : interdit de leurs
fondions les Prêtres & autres CL-rcs majeurs , qui préten-
doient n'être pas obligés à la continence ; avec dcfcnfc au
peuple d'diïifter à leurs Offices renouvella Tanathême con-
:

tre l'Antipape Guibert & les complices : & condamna l'hé-


réfie de Bercnger , déclarant que le pain & le vin , quand on
le confacre fur TAutel , font changés, non-feulement en fi-
gure , mais véritablement & eflTentiellement au Corps & au
Sang de Notre Seigneur. On fixa le jeûne des Quarre-Tems
aux mêmes jours où nous l'obfervons encore. Pendant la te-
nue du Concile , le Pape facra Arnoul , Archevêque de

{f)
Iii</.£.î04»
, ,

741 UR B A I N r T
Milan , & bénît
"Waldric , Abbé de Richenou. Ce que Ber-
ihold rapporte des Décrets faits dans le Concile de Plaifan-
ce , efl: conforme à ce qu' Anfelme de Luques en dit dans fon
Recueil, où il compte quatorze Canons. Il s'en trouve un
quinzième dans la Bibliothèque Barberine , qui porte qu'une
ordination faite fans titre eft nulle ; que le Clerc demeu-
rera toujours dans l'Eglife pour laquelle il a été ordonné ;
qu'il ne pourra avoir deux titres ou deux prébendes en deux
différentes Eglifcs ; & que s'il y a des Chapelles dont les re-
venus ne foicnt pas fuffii'ans pour l'entretien d'un Chapelain ,
ils feront à la difpofition du Prévôt , cïui les emploiera à la

deflerte de la Chapelle. On lit ailleurs ( r ) , que le Pape Ur-


bain inflitua en ce Concile , la dixième Préface pour la Meffe,
qui eft celle de la Vierge , & la même que nous chantons au-
jourd'hui ; & qu'il y défendit de recevoir des mains d'un
laïc les inveilitures pour quelque Bénéfice que ce foit. D'au-
tres rapportent l'inftitution de cette Préface ( s) , au Concile
que le Pape tint vers le même tems à Guaftalle , ou fur la fin
de l'année précédente. Paffant à Crémone , il écrivit à tous
les fidèlesde Gochie, en faveur des Moines de Saint Gilles
dans le Diocèfe de Nîmes , à qui le Comte Raimond avoic
depuis peu rcftitué les biens enlevés par lui-même ou par les
Comtes fes prédéceffcurs. Cette Lettre fur lue au Concile de
Plaifance , &
on y confirma à ce Monaftere les biens qu'on
venoit de lui rcflitucr. Le Pape accorda , vers le même tems
divers privilèges à un grand nombre d'Eg^Ufcs , qu'il feroic
trop long de rapporter.
Lettres
Pape Uibain.
c'u XXXVIL II y a de lui quatre Lettres datées du mois de
j^j^^-gjf-,^^ ^{^ L3 première, aux fidèles de Noyon , pour

les engager à recevoir en qualité de leur Evêque , Radbod ;


la féconde, à Gaucher', élu Evêque de Cambrai; la troifié-
me , à Robert, Comte de Flandres , en faveur de l'Eglife
d'Arras la quatrième, à Gui, Archevêque de Vienne, au
;

Fujct de la Terre de Salmoriac , qu'il avoit ufurpée fur l'Evêque


de Grenoble. En conféqucncc delà reflitution qui en fxjt or-
donnée , le Pape écrivit , étant à Milan , aux habitans de Sal-
moriac , d'obéir à l'Evêque de Grenoble , jufqu'à ce qu'il en

(r) Uiti.p. JOÎ. I Urban. , p. 1C9. 170. 176.

(j)Sjcon. Ub. 9. it f^tgn» Ital. a vit* \ (() Vita Urban. p. 177. I?!.
PAPE. Ch. X L I. 743
fût ordonné autrement par le Saint Sicge (a),
XXXVIII. Apres qu'Urbain II eût réglé les affaires de LcTapsUr-
Lombardie (x) , il pafla en France par mer , félon Berthold , eil' Francrén
ou par terre, félon d'autres. Il étoit au Pui-en-Vclai le 15109;.
d'Août 1095 , où il célébra la Fête de Ti^ffomption de I4
fainte Vierge, & indiqua un Concile àClermont, pour l'Oda-
ve de la faint Martin. Pendant cet intervalle , il confacra un
grand nombre d'Egliles& d'Autels en diverfcs Provinces de
France. Comme il avoir été Moine & Prieur de Cluni, il fe
fit un plaifir d'y aller. C'cft ce qu'il témoigna dans un Dif-

cours qu'il fit au peuple en prcfence des Evêques & des Car-
dinaux, le 25 d'Odobre, en confacrant le grand Autel de
k nouvelle Eglife. Il avoir déjà accordé, étant à Plaifance ,
une. confirmation de tous les privilèges de cette Abbaye ; il

lui accorda , étant iur les lieux, une Bulle d'immunité donc
ilmarqua les bornes , avec défenfe, fous peine d'excommu-
nication , à qui que ce foit de la violer par aucune violence ,
incendie , pillage , capture , homicide ou mutilation de mem»
bres.
XXXIX. Si l'on en croit M. Duchefne ( )'
) , le Pape tint Concile de
dans le d'Oftobrej, un Concile à Reims , où ijCiermont
même mois en

confirma la fentence d'excommunication portée contre le Roi*'


Philippe ; réfolut la croifade contre les infidèles j ordonna &
le jeûne de la veille de l'AfTomption. Mais outre qu'il n'cft
rien dit de ce Concile dans les Ecrivains du tems , il ne peur
s'accorder avec k
route que le Pape fuivit pour fe rendre à
Clermont , ni avec l'Hiftoire
de l'Eglife de Reims de celle &
d'Arras. 11 arriva à Clermont le 1 5 de Novembre. Durand
qui en étoit Evêque , fe donna tant de mouvemens pour le
bien recevoir , qu'il en tomba malade , &
mourut la nuit fui-
vante de l'arrivée du, Pape, après avoir reçu de lui l'abiblu-
tion. Il fe rrcuva à ce Concile treize Archevêques, deux cent
cinq^PréJats portant croffe , tant Evêques qu'Abbés j un &
nombre infini de perfonnes diftinguées dans tous les Ordres,
Hugues de Flavigny dit qu'il y vint des Evêques de toutes les
Provinces du monde Chrétien , excepté de Lorraine , d'Al-
lemagne &
de Hongrie. Mais quelques Hiftoriens poftérieurs

(tt)IHii.p'g.i8i. (y) Tcm. 10. Cortc.fag.^oô- ViiaUrt,


I
Q, lhid.(age i8p. 0/<f. l£. ^?9. 101.
744 URB A IN II,
diient(z) , que Popon de Metz & Pibon de Touî y afTiflc-
rent; &: que Richer de Verdun , qui avoit abandonné le parti
du Roi Henri , y envoya des Députés. On ne voit point qu'il
y foie venu d'Evêques d'Angleterre mais il y en avoit d'Ef-
:

pagne 6c d'Italie , ce qu'il faut entendre des Cardinaux des&


Evêques qui accompagnoient le Pape.
Canons de XL. On traita dans ce Concile (a) , des affaires delà der-
ce oncile.
j^jgj.^ importance ; mais il n'efl: point aifé d'en donner le dé-

tail , parce que la plû^ art des monumens de ce tems , ou font


perdus , ou n'ont point encore été rendus publics. Il y a
même une grande variété dans les Canons que nous en avons ;
ce qui vient de ce que ceux qui les ont rapportes , ne l'ont
fait que fommairement , fans s'aftreindre à en donner le tex-
te entier, ni à fuivre l'ordre dans lequel ils furent publiés. On
s'en eft tenu dans la Colle£lion des Conciles , â l'exemplaire
de Lambert , Evêque d'Arras , comme au plus corre£l , ayant
été préfent lui-même au Concile de Clermont. Cet exem-
plaire contient trente-deux Canons. Le Pcre Labbe y en a
ajouté dix d'un manufcrit de Pierre Pithou ( ^ ) ; neuf de
celui de Cencius le Camerier ; treize d'un manufcrit de l'Ab-
baye de Saint Denis, publiés par Bellcfcrefl:, dans le qua-
trième Livre des Annales de France. Ordcric Vital en rap-
porte vingt- cinq au commencement du neuvième Livre de
fon Hifloire Eccléilaftique. On en trouve à peu près autant
dans "Wuillaume de Malmefburi , & dans les autres Ecrivains
Anglois (c). Berthold s'eft contenté de donner les trois plus
intéreflans , dont l'un confirme les Décrets du Concile de
Plaifance ; l'autre porte excommunication contre le Roi Phi-
lippe', pour avoir quitté la Reine Berthe , &
époufé Ber-
trade femme de Rechin , Comte d'Anjou , encore vivant;
& le troifiéme indique un Concile à Tours , pour la troi-
fiéme femaine de Carême en lo^x?. On ne les trouve point
parmi les 32 Canons de Lambert d'Arras : voici ce qu'ils
contiennent.
Ceqtiecctn- XLT. En tout tcms les Moines, les Clercs , les femmes
^ennent ces
g^ cé\cs qui demeurent avec elles ( c? ) , obfetveront la Trêve

H») Ihid. {i)Tem. 10. Conc.f.%07,


I
(b] VitaUrian.p. m, /
de
,

PAPE. Ch. X LI. 745


de Dieu. Toutes autres perfonnes n'y Icront tenues que qua-
tre jours de la femainc , les Jeudi , Vendredi , Samedi &
Dimanche (e). Ceux qui iront à Jcrufalcm dans le deflein
de délivrer l'Egliie de cette Ville, feront déch:irgés par ce
voyage de toute autre pénitence (/). Les dignités de Doyens
ne feront données qu'à des Prêtres celles d'Archidiacres
;

qu'à des Diacres (g). Défenfes aux Clercs de porter les ar-
mes. On ne pourra élire un Evcque , qui ne foit au moins
Soûdiacre (h). Perfonne n'achètera de prébendes ni d'au-
tres Bénélices ; autrement il fera obligé de les remettre entre
les mains de l'Evêque (;). Les Autels donnés à des Con-
Îfrégations de Chanoines ou de Moines , retourneront après
a mort des donateurs , à la difpofition de l'Evêque ( / ) ; à
moins que l'Evêque lui-même n'ait confirmé cette donation
par écrit. Par Autels , on entendoit les oblations & le cafucl ;
êc par Eglifes , les dixmes & les autres revenus fixes (m). Il
efl défendu de rien exiger pour droit de fépulture (n) ; aux
Clercs d'avoir des concubines , ou de demeurer avec d'au-
tres femmes que celles que les Canons permettent ; de pof-
féder deux prébendes en deux Villes différentes (o) , parce
qu'un même Clerc ne peut avoir deux titres. C'cfl pourquoi
le Concile veut que chacun foit ordonné pour le titre pour
lequel il a été ordonné d'abord (p) ; c'eft-à-dire , que celui
qui a été ordonné Soûdiacre d'une certaine Eglife , en fera
ordonné enfuite Diacre & Prêtre (q). Il ne permet pas non
plus à un Clerc d'avoir deux dignités dans une même Egli-
fe ; ni de recevoir d'un laïc aucune dignité eccléfiaftique (r) ;
ni de lui en faire hommage-lige , quand même ce laïc feroic
Roi (j). Il défend au Roi 8c aux Princes de donner l'inve-
fliture des Bénéfices (f) ; à tous laïcs d'avoir des Chape-
lains quine leur foient donnés par l'Evêque ou par l'Archi-
diacre, pour la conduite de leurs âmes ( « ) ; de retenir ou
de percevoir les dixmes ( x ) ; de retenir des Autels ou des

(») Can, I. (o)C»H. II.


C/) Can, z. (/>) C.j«. I ;.
0) Can. ; C5 4. (tj) Cati, 14,
(*) Can. y. ( r ) Can. i J.
( » ) Can. 6. (s) Can. 17.
(l)Can.7. (0 O". 16.
(m) Can. 8. («; Ci». iS.
{n)Can. p. lO. li. (x) Can, 19.
Tome XX, Bbbbb
74<^ UR B A I N I I ,
Eglifes , c'efl-à-dire, les oblations & les dixmcs ()'). On or-
donne de refufer l'abfolution à ceux qui ne veulent pas re-
ftituer le bien d'aurrui (z), ou qui font dans l'habitude de
péché mortel. Le Prêtre doit néanmoins leur confeiller de
faire des aumônes , & jeûner pour fe faciliter le retour dans
le chemin du falut (a). Les Chrétiens doivent s'abftenir de
chair depuis le commencement du Carême jufqu'à Pâques.
Les Ordinations fe feront le Samedi Ides Quatre-Tems , &
le Samedi de la troifiéme femaine de Carême ( è ) ; & s'il eft
poflible on continuera le jeûne jufqu'au matin du Diman-
che, afin de faire l'Ordination en ce jour. Les enfans des
Prêtres , des Diacres, des Soûdiacres, ne pourront être pro-
mus aux Ordres , s'ils ne font ou Moines ou Chanoines Ré-
guliers ( c ) Le jeûne du Samedi-Saint fera pouiTé jufques vers
.

la nuit (d). On obfervera toujours le jeûne des Quatre-Tems


du printcms, la première femaine de Carême ; & celui de l'été,
dans la femaine de la Pentecôte (e). Perfonne ne commu-
niera, fans prendre féparément le Corps & le Sang, à moins
que quelque néceflité ou quelque précaution n'oblige de faire
autrement ce qui arrivoit dans la Communion d'un malade
:

ou d'un enfant (f). On communioit donc pour l'ordinaire


fous les deux efpeces. Celui qui étant pourfuivi par fes enne-
mis , fe fauve auprès d'une croix , y fera auffi en fureté que
s'il étoit dans une Eglifc
(g ) mais on pourra l'en tirer pour
:

le mettre entre les mains de la Juflicc ( A) , après qu'on l'au-


ra aflliré de n'attenter ni à fa vie ni à fes membres. Défen-
fe , fous peine d'anathême , de piller les biens des Evêques
ou des Clercs , foit pendant leur vie , foit après leur mort (i) ;
& fi quelqu'un arrête ou met en prifon un Evêque , il fera
noté d'une infamie perpétuelle , & ne pourra plus porter les
armes (/).
Autres^ Afies XLIL Le Concilc de Clermont confirma , non-feulement
de ce Concile.
les A£tes du Concile de Plaifance , comme ditBerthold (w),'
mais aufii ceux de Melphe , de Bencvent & de Troie ; on dit

(y) Gin, ao. (f) Can, 18.


(l) Can. ZJ:. li," (g) Can. 29.
(a) Can, 2j. (h) Can. jo.

(J>)
Can. 24. {i)Cari, 31.
(c) Can. ij-, (/) Can. 31.
C</; Can. i6. (»>) VitaUrban, p, iio.
(t) Cil«. 17.
,

PAPE. Ch. XLI. 74^


même qu'on Canons de quelques anciens Conciles
y lut les
& qu'ils y furent confirmés. On dit encore que Foulques Re-
chin , Comte d'Anjou , s'y plaignit que Philippe lui avoit
enlevé Bertrade fa femme ; & qu'a cauie de ce rapt , Philippe
fut excommunié. Il eft du moins certain que le Pape , pour
punir ce Prince du fcandale qu'il donnoit à l'Eglifc par fon
mariage adultérin avec Bertrade, le priva de la communion,
& lui défendit de fe fcrvir de fa couronne aux jours folem-
nels mais cette défenfe ne porta aucun préjudice à fon au-
:

torité royale , &


fcs fujers lui obéirent comme auparavant.
On des plaintes au Concile contre quelques Evêques , qui
fit

obligeoient les Moines de racheter les Autels donnés à leurs


Monaftcres , en lui payant un droit lorfqu'il inftituoit de nou-
veau une perfonne pour les deflervir ; à l'imitation du rachat
des fiefs aux changcmens des Seigneurs. («). Le Concile
condamna ce rachat d'autels , c'eft-à-dire , d'oblations & du
cafuef accordé à celui qui deiïervoit l'Eglife regardant , le

comme une efpece de (imonie. Il conferva aux Monaftcres


les autels dont ils étoient en poffefllon depuis trente ans (o)
fauf le cens annuel aux Evêques ; c'efl:-à-dire , l'ancienne re-
devance nommée fynodiqueou cathédratique parce qu'il : &
y avoit des Moines qui s'attribuoient toute l'autorité fur les
Eglifes de leur dépendance , le Concile ordonna que dans
les Eglifes paroiiïiales dont ils étoient en poflefrion , l'Evêque
mettroit un Curé du confentement de l'Abbé ; que le Curé
rendroit compte à l'Evêque du gouvernement de la ParoifiTe ,
mais qu'il fcroit fournis à l'Abbé pour le temporel .Ces deux Ca-
nons ne fe lifent pas dans la Colledion de Lambert d' Arras ;
mais ils font le troifiéme & le quatrième de celle de Cencius.
XLIII. Le Pape Grégoire avoit confirmé à l'Archevêque Autres D^
Gebuin , la Primatie de Lyon (p). Mais la Bulle donnée à *^[j^'* ^^ Con-
ce fujet , avoit été mal exécutée, fîugues fon fucceffeur , fit
de nouveau confirmer fon droit par le Concile de Clcrmonti
& le Pape l'autorifa par une Bulle adrcflce à Hugues lui-mê-
me. Sa primatie s'étendoit fur les Provinces de Lyon , de
Rouen , de Tours &
de Sens. L'Archevêque de Tours s'é-
toit foumis dès avant le Concile ; celui de Sens , qui écoit

( » ) JbiJ. psg. 1 1 1. e? Tom. 10. C)«f. I j. f. <! lO.


I
p.^%9. {^f)VitaUrian.p, iï6.
I
(o) FlïORi , lih. 6d. Htfl. Ecclef.tom, |
Bbbbbij
1 ,

748 B IUR 1 , A N
préfent , n'ayant pas voulu reconnoître ce droit
lui in- , on
terdit l'ufage du FalUum ; & on menaça de
peine , la même
l'Archevêque de Rouen , abfent , s'il ne fe foumettoit dans
trois mois. L'Archevêque de Tours renouvella auiïi fes pré-
tentions fur l'Evêque de Dol en Bretagne. Le Pape examina
attentivement fes jaifons &
celles de cet Evêque , prcfens
l'un & l'aurre ; & jugea en faveur de l'Archevêque : décla-
rant que Rolland , Evêque de Dol , lui feroit fournis comme
à fon Métropolitain, & qu'il feroit fatisfa£tion à Roduîphe,
alors Archevêque de Tours ,
pour fa défobéiflance paffée.
On encore dans le Concile , la Bulle du rétabliffement
lut
de l'Evêché d'Arras : elle fut confirmée ; Gaucher , qui &
fe difoit Evêque de Cambrai , dépofé privé de toute fon- &
£lion d'Evêque &
de Prêtre , comme convaincu de fimonie :
mais il trouva le moyen de fe foutenir plufieurs années de-
puis.

Décrets ton. XLIV. Nous paflons fur plufieurs autres affaires de moin-
chamiaCroi- dre importance (^), réglées par le Concile de Clermont, pour
fade.
venir à celle de la Croifade, qui y fut réfolue d'un commun
confentement , & publiée avec l'applaudiffement de tous les
Ordres. Le Pape s'en étoit ouvert auparavant à un Ermite
nommé Pierre , homme de vertu , qui avoit faic le pèlerinage
de la Terre fainte, & reconnu par lui-même la mifere que les
Chrétiens y fouffroient. Il l'avoit encore apprifc de Siméon
Patriarche de Jérufalem ; & ce Patriarche, à la prière de
Pierre , en écrivit au Pape Urbain , pour lui demander du
fecours. Pierre rendit exactement la Lettre ; raconta au Pape
ce qu'il avoit vu , &
ce que le Patriarche lui avoit dit. Il fit
plus: il alla trouver tous les Princes d'Occident l'un après
l'autre , les exhorta à la délivrance des Lieux faints ; & fit les
mêmes inftances aux peuples qui fe trouvoient fur fa route.
Tels furent les préliminaires de la Croifade publiée en ce
Concile ( r ). Le Pape fit fur ce fujet , un Difcours aux Evê-
ques & aux peuples , où il dit en fubrtance , qu'encore que
le Sauveur ait livré aux infidèles la Terre promife aux an-
ciens Pcres , & qu'il avoit honorée par fa préfence , il ne l'a
pas pour cela abandonnée ; que les Sarraiins la tiennent depuis
iong-tcms fous une dure tyrannie , fouillant de leurs impure-

I3) Itiil. ^. 114, (r) Tarn, iQ.Conc.p. ;ij. 114.


,

PAPE. Ch. XLI. 74P


tés l'Eglifc du faine Sépulcre , & les autres lieux faînts ; met-
tant à mort tous les Chrétiens qui ne veulent point apofta-
fier , & ufant d'une femblable violence envers les Prêtres &
les Diacres , qu'ils tuent jufques dans le Sanduaire. Il ex-
horte les fidèles à tourner contre les ennemis du nom Chré-
tien , les armes qu'ils a voient employées injuftement les uns
contre ; à racheter leurs péchés en lecourant leurs
les autres
frères , &
en réprimant l'iniolence de ces barbares , qui le
propofoient d'éteindre le Chriflianifmc. Se confiant en la
miléricorde de Dieu & en l'autorité de laint Pierre , il remet
les péchés à ceux qui prendront les armes contre eux ; &
promet pour récompenic , la vie éterncll,c aux Chrétiens qui
mourront en vrais pénitens dans cette expédition : menaçant
d'excommunication de l'Evêque du lieu , ceux qui ofcroient
les inquietter dans le chemin. Tous les afllftans attendris par
ce difcours s'écrièrent : Dieu le veut. Alors le Pape voyant
:

cette unanimité de voix, déclara que ces paroles feroient le


cri de guerre. Enfuite il difpenfa du voyage ceux qui n'é-
toient point en état de porter les armes , Se ordonna que qui-
conque l'entreprendroit , porteroit fur lui la figure de la .

Croix. On donna aux croifés deux Chefs , l'un ecclcfiaflique


l'autre féculicr j fçavoir , Adhcmar , Evêque du Pui , & Rai-
mond , Comte de Touloufc. Le Pape ordonna , fous peine
d'excommunication , à tous ceux qui fe croiferoient , d'accom-
plir leur vœu ; aux Evêques , de prêcher la Croifade dans
leurs Diocèfes ; aux Clercs & aux laïcs , de dire pendant
cette expédition le petit Office de la Vierge, afin d'obtenir
fa proteélion fur les croifés. Les Difcours que le Pape pro-
nonça en cette occalion (s) , ne font pas rapportés de même
par les Ecrivains du tems : mais cette variété ne doit point
les rendre fuipeds ; parce que les uns fe font contentés d'en
prendre le fens ; les autres fe font appliqués à rendre les pro-
pres termes. D'ailleurs le Pape ayant parlé plus d'une fois fur
le même fujet , il n'efl: pas furprenant de trouver de la diffé-
rence dans les Difcours que nous avons ious fon nom en diffé-
rens Recueils.
XLV. Quoique le Concile de Clermont fût fini le 28 de Urbainii va
Novembre, le Pape demeura encore quelques jours en cette * "^"""^^r, ,

^^^^^^^^^^ Limoges.

(j) Viu Uil/.m. p. iif, izg.


7ÇO UR B A IN II ,
Ville (r) occupé à faire expédier des privilèges pour les
,

Abbayes de Cluni & de Moleime ; à régler des difficultés entre


l'Evêquc de Maguelone & l'Abbé d'Aniane ; à faire dreffer
la Bulle pour la Primatie de Lyon ; à écrire des Lettres à
i'Evêque de Grenoble & au Clergé de Cambrai ; & à régler
divcrfes autres affaires particulières. De Clermont il alla à
Saint-Flour , enfuite à Aurillac , à Limoges , où il dépofa
Humbaud qui en étoit Evcque , accufé & convaincu d'avoir
falfifié les Lettres Apofloliques. On procéda contre lui dans

un Concile tenu en cette Ville , & on mit à fa place Guillau-


me, Prieur de Saint Martial de Limoges. De -là il paiïaà
Poitiers , à Angers , & arriva à Tours au commencement du
mois de Mars de l'an 105)6. Pendant ce voyage , il confacra
plufieurs Eglifes , & prêcha par -tout la Croifade. Etant à
Angers , il voulut voir Robert d'Arbriflel , s'entretint avec
lui , le fit prêcher en fa préfence ; &
lui trouvant du talent
pour la prédication , lui ordonna d'aller prêcher de tous cô-
tés. Il écrivit de la même Ville , à Philippe , Evêquc de Châ-
lons- fur- Marne ( m) , pour l'engager à prendre fous fa pro-
tedion les Moines de Saint Vanne de Verdun , inquiettés par
les payfans dans le Prieuré de Saint Nicolas , Diocèfe de
Châlon.
Con iie de
XLVI. Guillaume , Archevêque de Rouen (x) , qui n'avoîÉ
Rouen en pas affifté au Concile de Clermont , en affcmbla un au mois
ïo»6. de Février de l'an 1086 , où l'on examina les Décrets de celui
de Clermont qu'Odon de Bayeux , Giflcbert d'Evreux , &
Serlon de Sécz en avoicnt apportés. On confirma les Or-
donnances du Pape mais on ne dit rien de ce qu'il avoit réglé
:

fur la Primatie de Lyon. Il y a huit Canons du Concile de


Rouen par lefquels on ordonne l'obfervation de la Trêve
,

de Dieu , depuis le Dimanche qui précède le commencement


du Carême , jufqu'au Lundi de la Pentecôte (^) ; & depuis
le Mercredi qui précède l'A vent, jufqu'à l'Oflavc de l'Epi-
phanie ; pendant le rcflc de l'année , depuis le Mercredi au
foir jufqu'au Lundi matin; dans toutes les veilles & Fêtes de
la Sainte Vierge &
des Apôtres. La Trêve efl déclarée pcr-

(t) JhiJ, pag. 230. C!$ tcm, 10 Cont.p^î (x) Tom, \o.C*nf.f. ^99,
S09- I
(/)C4». I.
(m) ItiJ. p. 1^1, I
,,

P A P É. Ch. XLI. 751


pétuclle à regard des Eglifcs (z) de leurs parvis, des Moi-
,

nes , des Clercs , des Rcligieufes , des femmes , des Pèle-


rins, des Marchands & de leurs ferviteurs ; des hommes &
des bêtes fervanc au labourage des terres de l'Eglife des &
biens des Clercs. Le Concile prefcrit la forme du ferment
qu'on ctoic oblige de prêrer au-dciïus de l'âge de douze ans
& condamne à l'anathêmeceux qui ne l'obferveroient pas (a).
Il maintient les Eglifes dans la pofleflion de leurs biens {b) ,
de leurs ufages & de leurs immunités , défendant aux laïcs
d'entrer en partage des dixmes &
des autres revenus ecclé-
liaftiques. Il défend aux laïcs de donner un Prêtre à une E-
glife ou de l'en ôter , fans la permiflion de l'Evêque (c) ; ni
de recevoir de l'argent de ce Prêtre , pour le nommer à la
defferte de cette Eglifc. 11 défend encore à tous les hommes
en général de nourrir leurs cheveux , & veut qu'ils les cou-
pent , comme il convenoit à des Chrétiens. Cette défenfe efl
îbus peine d'être chaffé de l'Eglife , & de privation Jde fé-
pulrure. Saint Anfelme ordonna dans le même tems aux jeu-
nes hommes de couper leurs longs cheveux, à caufe des dé-
bauches infâmes de la Cour d'Angleterre. Le Concile de
Rouen défendit aufïï aux laïcs de fe mêler de la Juflice ec-
cléfiaflique & du foin des âmes ; &
aux Prêtres de faire hom-
mage aux laïcs , en prêtant ferment entre leurs mains ; étant
indigne que des mains confacrées , foient mifes dans celles qui
font fouillées de crimes.
XLVII. Le Pape étant arrivé à Tours, alla loger dans Concile de
l'Abbaye de Marmoutier (d). Le lendemain , neuvième débours.
Mars , qui étoit un Dimanche , il prêcha fur le bord de la
Loire en préfence de Foulques , Comte d'Anjou , de plu-
fieurs Seigneurs & d'une grande affcmblée de peuples , de
tout âge &
de toute condition. Le dixième jour du même
mois , il dédia la grande Eglifc du Monafterc , affifté des
Evêques & des Cardinaux Se étant entré dans le Chapitre
•,

il s'y aflTit avec les Moines , leur fît une exhortation & leur

donna l'abfolution. Les Chanoines de Saint Martin avoient


un privilège qui les autorifoit à avoir un Evêque propre. Ur-

(X.) Cm. 2. (0 Can. 6.


J
(.1) Can. j. 4.
I
( "^ ) ^'t" Urbati- fg' 147. î^ow. 10.
{b) Can. 5. |Co;;f./?, 60 1.
-752 U-R-BA I N lîf-
bain II ordonna qu'à l'avenir ils feroient fournis immédiate-
ment au Saint Siège, &
que leurs caufes d'importance y fe-
roient jugées. La femaine fuivante, il tint un Concile dans
le Monaftere de Saint Martin , avec les Evêques de divcr-
fes Provinces , où il confirma les Décrets du Concile de Cler-
mont ; mais, il ne paroît pas qu'il en ait fait de nouveaux dans
celui-ci. On y traita néanmoins plufieurs affaires particuliè-
res concernant quelques Monafîeres ; & l'Archevêque de
Lyon s'y plaignit de roppofuion de Richer de Sens à fa Pri-
matie. Radbod y fut facré Evcque de Rennes par le Pape.
Quelques Evoques de France tentèrent de faire lever l'ex-
communication du Roi Philippe. Le Pape ne voulut point y
confentir , comme on le voit par la Lettre qu'il écrivit peu
de tems après aux Evêques de ce Royaume. On ne marque
jjo^nt quel jour le Concile finit ; & ce n'efl: que par conje(^u-
re que l'on croit que ce fut le quatrième Dimanche de Carê-
me ( e ) , à caufe de la proceffion folemnelle qui fe fit de l'E-
^life de Saint Maurice à celle de Saint Martin. Le Pape y
aflîfla couronné d'une couronne de palmes , portant en main
la rofe d'or , fuivant l'ufage de Rome. Il la donna à Foulques,
Comte d'Anjou , qui , en mémoire du Pape , la porta depuis à
la proceflion -des Palmes, &
ordonna à fes fuccefleurs d'en
ufer de même.
Concile de XLVIH. Avant de fortir de Tours , le Pape fit expédier
Nîmes en plufieurs privilèges en faveur de certains Monafîeres (/). Il in-
2056.
diqua, dans fa Lettre aux Evêques de France , un Concile à
Arles pour la fin de Juin mais il fut tenu à Nîmes au com-
:

mencement de Juillet. On y fit feize Canons , dont la plu-


part font les mêmes que ceux de Clermont. II faut en excep-
ter le fécond & le treizième. Celui-ci défend de marier les
filles avant l'âge de douze ans (g): celui-là déclaxe que les

Moines peuvent adminiflrer les Sacrcmcns & avoir foin des


âmes (k). Il le prouve 1°. par l'exemple de faint Martin , de
faint Grégoire , & dclfon difciple faint Auguftin , Apôtre
d'Angleterre, qui étant Moines , ont été élevés à l'Epifco-
copat ; 2°. parce que la Règle de Saint Benoît ne défend
point aux Moines l'adminiftration des Sacrcmcns , ni le foin

{e) Viia Urtitn. p. iji. I f,?) Can. 15.


f/) Tow. 10. Conc.p, Coj» • (i) Cdn. x<
des
PAPE. Ch. XLTr. 7?r
des âmes parce que des hommes qui ont qaittc le mon-
;
3'.
ade (i)j font plus dignes que d'autres , de prêcher , de
batiier , d'impoier la pénitence de donner la Commu- &
nion.
XLIX, De Nîmes le Pape retourna en
Italie, prenant fa Le Pape re^
route par Saint Gilles (/) confirma par un Diplôme , |^^"'-nccn iti-
, où il

laccord fait au Concile de Nîmes , <între les Moines de Fi-


geac &
de Conques. Etant à Vienne en Dauphinc , il or-
donna que les reliques de faint Antoine , que Joffelin , Sei-
gneur de la Mote-Saint-Didier , y avoit apportées de Con-
liantinople , fcroient placées en un lieu faint. Jofrelin bâtit
une Eglife , qu'il confia d'abord à des Clercs féculiers : "puis,
il y mit des Moines du Monaflcre de Mont-Majour. Ber-

îhold dit que le Pape , avant de fortir de France , leva l'ex-


communication du Roi Philippe (?«) ; que ce Prince renvoya
Bertrade & fit pénitence de fon crime : mais il paroîtparla
Lettre d'Urbain à Manaflcs de Reims , & aux autres Evê-
ques de France , que cette réconciliation ne fe fit pleine-
nient qu'au commencement de l'année iuivante 1097, ^^ P^pe
célébra à Mortare près de Pavie, la Fête de l'Exaltation de -

la Sainte Craix. Le 14 d'Oêtobre , étant à Crémone , il ac-


corda un privilège à l'Abbaye de Saint Bafle dans le Diocèfç
de Reims. A Luques il fut rencontré par les Croifés , qui
avoient pour Chefs Robert, Duc de Normandie, & Etienne,
Comte de Blois. Il donna audience à ces deux Seigneurs Se
à tous ceux qui la demanderont puis il leur donna fa béné- :

diftion. La ComtefTe Mathilde vint au-devant de lui & le


conduifit jufqu'à Rome , où il célébra la Fête de Noël. Les
troupes de cette Princefle en chaflcrent les Guibertins &
l'Antipape du Châtcau-Saint-Angc. Elles chaffercnt auflî de
là Lombardie les troupes duiloi Henri, q^ui fut, obligé: de
le retirer en Allemagne.
. L. Le Pape conlacra les premiers momens de fon retour à Concîie •
de
Kome , à la tenue d'un Concise dans l'Eglife de Latran («). Latran en
Les Attes en font perdus & peut être n'y fit-on autre chofe "*^'*
;

3ae de confirmer les Décrets du Concile de Clermont , &r


es autres Conciles qu'il avoit célébrés pendant fon féjour

-C») C";. i. .1 («) rW./. 1(38. a73.. .

(/) l'it.iUihaii, p. i6^,^ ftq. ;l (^n) îbid.fag. 176. ly?.


Tome XX, C cccc
754 Ù R B A I N II,
en France. On rapporte à ce tems , la Lettre qu'il écrivit à
Hugues , Archevêque de Lyon époque eft fondée fur
; cette
ce qu'il e(l dit dans cette Lettre , que Daïmbert venoit d'ê-
tre élu Archevêque de Sens à la place de Richer , mort fur
la fin de Décembre io<^6. L'Archevêque de Lyon s'oppofa
au facre de Daïmbert, parce qu'il ne vouloir pas^lui promet-
tre obéiiTance à caufede fa Primatie. Yves deChartres qu'on'
avoit choifi pour l'ordination , en écrivit au Pape , refufant de
la faire fans fon conlentement.

SaimM?*
^^ ^^' ^^ Concile de
Saintes qui , dans la Colîe£lion géné^
raie , rapporté au mois de Mars de Pan iop6 , ne fut tenu
eft
que l'année fui vante (o). Cela fe prouve premièrement, parle
Diplôme accordé parle Concile à l'Abbé de Seauve-Majour,
qui eft daté de l'an 1097. En fécond lieu , Raimond , Ar-
chevêque d'Auch, l'un des Prélats du Concile de Saintes,
n'étoit pas promu à cette dignité au mois de Mars 105)5). Hil-
dcbcrt qui y aflSfta aufTi en qualité d'Evêque du Mans , ne
fuccéda à Johelle qu'au mois de Juillet de la même année II
eft vrai que la Charte de Vendôme paroît autorifer l'époque
que le Père Labbe a donnée à ce Concile mais il faut remar-^ :

quer qu'il eft fait mention dans la même Charte de plufieurs


ëvénemens qui n'arrivèrent que fur la fin de iop6 : quaran*^
te- trois Prélats, tant Evê^ues qu'Abbés, foufcrivirentà cette

Charte ilsétoicnt donc autant au Concile de Saintes. Amé,


:

Archevêque de Bordeaux & Légat du Pape, y préfida. Il y


fut ordonné que l'on jeûneroit toutes les veilles d'Apôtres.
On y agita la difficulté entre les Moines de Nanteuil & les
Chanoines dé Saint Emilien. Ceux-ci vouloiert s'emparer dt
ce Monafterc. Ils employèrent toutes fortes de moyens (p ) >
la violence , la calomnie; enfin ils en écrivirent au Pape Ur-
bain: on ne fçait «;'il leur fit réponfe. Le Concile de Sain-
tes confirma la reftitution faite de l'Eglife de Saint George
d'Oléron à l'Abbaye de Vendôme Elle avoir été ordon-
^, ,, née par lePapeà Saintes, où ilpafla la Fête de Pâques en
!

105)^. .
:

^eTrî"n?e-
LI^- Vers le printems de l'an 105^7 , le Pape alla à Cif
feur Aicivis pouc , apparemment pour conférer avec le Duc Roger , pout
en ]0J7'

(0) Ibii.p, 280. ^ Tcm. 10, Coitc.p.i (p) Mabili. lib. 6y. Ainml, mm. 6j,
,

P A PE. Ch. XLT. 75Ç


prêcher la Croifade («7). II pada de-là à Thicte , où il la
prêcha aufli. Il y eiic iur ce iujec une Conférence avec les
Evcqucs & les Seigneurs. Sa Lettre à l'Empereur Alexis
Comnene eft du même tcms. 11 dit à ce Prince , qu'en con-
féquence de la réfolution prile au Concile de Clermont pour
la Croifade , il s'étoic formé une armée de Croifés , qui
montoit à trois cens mille hommes. Le Pape en nomme les
Chefs , & ajoute que le Duc Bocmond s'étoic joint à eux , a
la tête de fcpt raille hommes d'élite. Il prie l'Empereur de
donner fes ordres pour la fubfiflancc de les troupes , & de
favorifer , autant qu'il feroit en lui , une guerre li jufte fi &
glorieufe. Alexis qui craignoic que fous le prérexte d'atta-
'

ocer les Sarrafins, on n'en voulût à fa Couronne, drefla


des embûches fecrettes aux Croifés , &
leur coupa les vivres en
partie , ce qui en fit périr un grand nombre. Ayant connu de-
puis leur véritable dclTein, il traita avec eux, leur fit des pré-
lens 8c leur fournit des vaifTeaux pour pénétrer dans les terres
des Infidèles.
LUI. Le Pape de retour à Rome (r ), fit expédier divers Corcîle de
privilèges , termina plufieurs différends entre les Monallcres, ^"^"^
«"

leva lexcommunication du Roi Philippe, en donna avis aux


Evêques de France , par une Lettre adreflee à Manafles
Archevêque de Reims; & transféra Bertrand de l'Evêché de
Nîmes à l'Archevêché de Narbonne, à la demande des Evê-
ques de la Province , qui jugcoient cette tranflation nécef-
faire. Bernard, Archevêque de Tolède , & Vicaire du Pape
dans les Efpagnes , tint un Concile à Girone , fur la fin de
cette année 1097 (^) > ^^^^ ^^^ Evêques de Tarragonc , de
Bot , de Barcelone , &
quelques autres , pour travailler au
fctabliflement de la difcipline &
au maintien des libertés de
l'Eglife. Le Pape Urbain lui avoit écrit là-defi"us , & recom-
mandé de remettre dans fon Siège l'Evêque de Compoftelle ,
délivré de prifon (r),
LIV. L'arrivée de faint Anfelme , Archevêque de Can- concile tîes
torberi , caufa beaucoup de joie au Pape Urbain («). Il lui fchifmatiques
donna un logement dans ie Palais de Latran , fit fon éloge '" '''^^'

(<}) Tarn. 10. Cons. p.tj. 4)8. tf Vil-l |


(j) UfW. p. 189.
Vrhiiii.p. xHi.
I
( r ) TcTO. 10. Concf. l8;p.
(r) VitaVrù.in.p. iSy.CJ/t^. [ (») l'itaVrtar. p. iç^.i^ ffj.
C cccc ij
7 5^ ^
U R B A T N I I,
en préfence de Nobleflè Romajne , qui s'éroit aflembléc
la
pour le voir ^ & lui permit en attendant que l'on pût termi-
ner fes affaires , de fe retirer au Monaftere de Saint Sauveur
dans la Terre de Labour. Roger , Duc de Pouille , faifoic
alors le fiége de Capoue. Il invita faint Anfelme de l'y ve-
nir trouver. Le Pape s'y rendit en mcme-tems, dans l'efpé-
rance de faire la paix , mais inutilement. Après que la Ville
fe fut rendue , faint fuivit le Pape à Averfe , & le
Anfelme
pria de le décharger de l'Epifcopat. Le Pape n'eut aucun
égard à fes remontrances, & lui ordonna en ie quittant, de
fe trouver à Ba/i , pour aflifter au Concile qu'il y avoit con-
voqué pour le premier jour d'Oftobre 105)8. Quoique l'An-
tipape Guibeit ne fût plus à Rome, fes principaux partifans
s'y aflemblerent le cinquième , fixiéme & ieptiéme jours
d'Août en différentes Eglifes. Le dernier jour ib écrivirent
une Lett^re Synodale , adreflëe à tons ceux qui craignent Dieu y
& qui aiment le falut de la République Romaine difant qu'ils :

s'ctoicnt affcmblés pour détruire les hérélies rcnouvellées par.


Hildebrand ou Grégoire VII , & pour exterminer l'impiété
de ceux qui déchiroient la foi Catholique. Ils offroient à ceux
qui communiquoientavec les fauteurs de ces erreurs, de leur
pardonner , s'ils vouloient fe réunir menaçant de les con-
;

damner, s'ils ne revcnoient à l'unité de l'Eglife pour la Fête


de la Touffainc. Cette Lettre portoit en tcte les noms de
huit Cardinaux , quatre Evcques & quatre Prêtres. Elle fut
fans effet.
Concile de LV. Le Concilc indiqué à Bari , pour le premier d'Otto-
arieniop^.
j^j.^ jQ^^g ^^ f^^ commencé que le troiiia-nc {x). Le Pape
^

l'avoit convoqué pour tâcher de réunir les Grecs & les La-
tins , fur les articles de dotlrine qui les divifoient ; craignant
que ne penlant pas de même fur la foi , la différence de leurs
fentimens ne fût un obftacle aux progrès de la Croilade. IL
fe trouva au Concile cent quatre vingt- cinq Evcques, lelon.
Lupus Protofpata {y ) , d'autres en mettent 183 ; mais aucun
Hifîorien ne nous les a fait connoitre. Guillaume de Mal—
mefburi dit , qu'ils s'affemblercnt devant le corps de faint,
.. Nicolas ; que tous les Evêques étoient revêtus de chappes ,,

(a) Tom. IQ Cmc, fag. 6II. Î5 Vita\ {y) Luf US , i» Chronic.aHan.f. lojp,
Vjl/au.p. yox.^ fiq. "'
\
PAPE. Ch. XLT. 7^7
à rexception du Pape , qui portoit une chafuble le Fallhim &
par-dcflus. Il s'y trouva aufli un grand nombre de Clercs &
de laïcs nobles. Saint Anfclme y occupa une des premières
places , à railon de la dignité de fon Siège. Le Pape le fit
placer vis-à-vis T Archidiacre de l'Eglifc Romaine , quictoit
aifis , félon la coutume
devant le l'rone du P^ipc. Après
,

qu'Urbain II eût parlé long-tcms fur la foi Catholique , les


Èvcques Grecs propofercnt la qucftion de la procellion du
Saint-Efprit , & s'efforcèrent de montrer par l'Evangile , qu'il
Jie procède que du Père. Le Pape leur répondit par des rai-
fons tirées la plupart de la Lettre c]ue faine .Anfelmeluiavoit
écrite autrefois iur l'incarnation du Verbe. Comme la dif-
putG continuoit, le Pape tic faire filcncc , & ordonna à faine
Anfelme de parler, l'ayant auparavant fait connoîtreà toute
l'Affemblée. Il ctoic prêt de répondre aux ob'eftions des
Grecs ; mais on renvoya la chofe au lendemain. L'Archevê-
que traita la matière de la proceflion , avec tant de force &
de netteté , que tous ceux qui l'entendirent furent fatisfaits
de fes railons. Le Pape lui donna de grandes louanges ; les
Evêques en firent de même ; & on dit anathême contre ceux
qui nieroient que le Saint-Efprit procède du Pcre du Fils. &
Saint Anlelme mit depuis par écrit, à la prière de les amis,
principalement d'Hildebert , Evêque du Mans , les raifons
par lefquellcs ii avoir établi ce Myftere. Nous les rapporte-
rons en parlant de fes Ecrit?. Il y eut de grandes plaintes
au Concile contre Guillaume , Roi d'Angleterre. On l'ac-
cufoit de fimonie , d'opprimer les Eglifes, de maltraiter les
Evêques. Le Pape l'avoit fouvent averti en vain de fe cor-
riger les Evêques du Concile opinèrent à le frapper d'ana-
:

thème le Pape fut aufli de cet avis; mais faint Anfclme ob-
:

tint, à force de prières, que la lentence ne feroit point pro-


noncée.
LVI. II accompagna le Pape à fon retour à Rome (z) , où Epoque du
quelques jours après arriva un Envoyé du Roi d'Angleterre, Concile de
^'*"*
apportant la réponfe à la Lectre que le Pape lui avoit écrite.
L,ePape fit diverfes queflions à ^Envoyé ; & voyant que ce
Prince n'avoit dépouillé faine Anielme de tous fes biens , que
parce qu'il étoit venua Rome fansfapefmilTîon , il ordonna

(t) Vita Urian, p. joj. 307. 3 10,


,

^58 ^
U R B A I N IT,^
a cet Envoyé de retourner dire à fon Maître, de rétablirai!
plutôt l'Archevêque dans tous jfes biens , s'il ne vouloit être
excommunié. L'Envoyé demanda au Pape une audience fe-»
crette , & ayant gagné plusieurs perfonnes par les préfens ,
I
il obtint un délai pour Ion Maître jufqu'à la Saint Michel de

l'année fuivante 10^9. Ceci fe paffoit aux Fêtes de Noël de


l'an iop8 , quelque tems après le Concile de Bari. Il faut
donc le mettre en cette année , & non en lop/ , comme
ont fait Baronius & le Père Labbe. S'il fe fût tenu en 10^7 ,
& que le délai eût été accordé au Roi , à Noël de la mê-
me année , le Pape & le Roi en auroient vu la fin , puif-
qu'ils ont vécu l'un & l'autre jufqu'en lopp i le Pape n'étant
mort qu'à la fin de Juillet de cette année ; & le Roi Guil-
laume l'année fuivante , le deuxième jour d'Août. Lupus
Protofpata met le Concile de Bari en i o^^ ( « ) mais c'efl: :

que dans la Pouille , d'où il étoit , dans la Calabre , dans la


Sicile , l'année chrétienne commençoit au premier de Sep-
bre comme chez les Grecs. Ainfi le Concile de Bari [b) , qui
félon notre manière de compter , s'étoit tenu au mois d'Odo-
bre I o(>8 , avoit été célèbre , félon Lupus & l'Anonyme de
Bari , au même mois de l'an lopp ce qui revient au même pour
:

le icms de la tenue de cette Alfcmblée.


Concile de LVII. L'époque du Concile de Bari, fert à fixer celle du
Rome en Concile de Rome (c). Baronius 8c le Père Labbe le mettent
''^^'
en 1098 mais il ne fe tint que la troidémc femaine d'après
:

Pâques de l'an 1 05)9 ; & c'eft à ce tems que le Pape l'avoic


indiqué dès les Fêtes de Noël qui fuivircnt le Concile de
Bari. Il vint à Rome des Evêques de diverfes Provinces, au
nombre de 150, plufieurs Abbés , des Clercs fans fin. Le
Concile s'affembla dans la Bafilique de Saint Pierre , le Di-
manche de la troifiéme femaine d'après Pâques , vingt-qua-
trième d'Avril. Les Evêques furent placés à leur rang , fui-
vant la coutume ; mais parce qu'on ne fçavoit quelle place
donner à l'Archevêque de Cantorberi , le Pape lui fit mettre
un (lége vis-à-vis le fien , dans le cercle qui formoit la féan-
cc : ce qui , félon Eadmer , étoit une marque de diftindion.

(a) LvTVS rmefptita , in Cbrtn. ad an. |


(f) Vitii Vrhan. f. 305. fij Pagi, adan^
iop9. I 1098. p. 33a. (5 337.
•( i) PA6It«''l». I«P7./. 330, J
P A
P E. C H. L I. X 75^
Dans le Concile de Reims , en 1049 , la féance fut aulTi dif-
pofée en forme de cercle ou de couronne ; le Pape Léon &
IX avoit fon fiége à l'oppofite de ceux qu'occupoient les Ar-
chevêques de Reims & de Trêves. Lambert die que le Con-
cile de Rome fut convoqué contre les erreurs des Grecs. Il
n'en efl: toutefois point parlé dans les dix-huit Canons de ce
Concile. Cette omiffion peut venir de ce que ceux qui les
ont recueillis, ne fe font appliqués qu'à nous tranfmettre les
Décrets qui intéreflbient l'Eglife d'Occident ; comme iis ont
négligé de rapporter ce qui regardoit faint Anfelme & le
Roi d'Angleterre; laiflant aux Ecrivains de ces cantons de
mettre par écrit , ce qui avoit été réglé à leur égard dans
cette Affemblée. Les onze premiers Canons font abfolumenc
les mêmes que les douze premiers du Concile de Plaifance.
On renouvelle dans les fuivans , ce qui avoit été ordonné
dans les Conciles précédens , touchant l'adminiftration gra-
tuite des Sacremens , le célibat des Clercs , la fimonie & les
inveftitures & la défenfe de recevoir de la main des laïcs ,
•,

les dixmes ou autres droits ecclédafliques , fans le conlente-


ment de TEvêque. Le dix-huitiéme défend aux Evêques d'e-
xiger à l'Ordination , des chappes , des tapis ou d'autres
petits préfens ; &
il étend cette défenfe à la bénédidion des

Abbés.
LVIII.. La Chronique de Mallczai ajoute (d), qu'il fut Canonsdece
ordonné dans le même Concile , que tous les fidèles jeûne- ^°""^^*
roicnt chaque Vendredi de l'année pour leurs péchc^ , fur-
tout pour ceux dont ils auroient oublié de fe confefler. On y
prononça auJTi excommunication contre tous les laïcs qui
donneroicnt les invcflirurcs des Eglilcs & contre les Ecclé- ;

fiaftiques qui les recevroicnt , ou qui confacrercient ceux


qui les avoient reçues. Le Concile comprit fous le même
anathcmc , les Clercs qui feroicnt hommage aux laïcs, pour
des dignités eccléflafliques ; n'étant pas polfible de voir fans
horreur , que des mains qui ont l'honneur de créer le Créa-
teur , &
de l'otTrir pour le falut de tout le monde , foicnt
foumifcs à des mains fouillées de crimes. Biiance , Arche-
vêque de Trani , fe préfenta au Concile avec des Députés de
fon Eglifc , demandant qu'il lui fût permis de pouriuivre la

(^) Tom, to. Cône, p.tg. 617. ^ Vita Uri.p, ji6. 317.
,

760 ^ URBAIN ir,


canonifation de 'faint Nicolas Pcrcgrin mort depuis cinq
,

ans. Il fit en peu de mots l'Hinoire de du Saint, de


la vie
fa mort & de fes miracles, & la donna enfuite par écrit. Le
Pape la lut , & de l'avis une Bulle ,
du Concile , il fit drcficr
par laquelle il commit de Trani, afin
TafFaire à l'Archevêque
qu'après l'avoir examiné plus mûrement , il fit ce que Dieu
lui infpireroit. Bifance fit bâtir une Eglife en l'honneur du
Saint , où fon corps fut enfuite transféré. Les Moines de
l'Abbaye de Molefme vinrent au même Concile , fe plaindre
que Robert leur Abbé , les avoit quittés pour fe retirer dans
le défert de Cîteaux , où il avoit bâti un nouveau Monaftere.
Ils difoient que par la retraite de Robert, la difcipline étoic
renvcrfée à Molefme ; qu'ils étoient eux - mêmes devenus
odieux aux Seigneurs &
aux peuples voifins. Le Pape , pour
, écrivit à Hugues , Archevêque de
faire ceffcr leurs plaintes
Lyon , Légat dans les Gaules , de perfuader s'il étoit
8c fon
pofTible à Robert, de retourner à Molefme , & d'engager les
Frères de ces deux Monafteres, à demeurer en repos dans la
pratique de leur Règle.
Mort du Pape LIX. Le Pape Urbain mourut le 25) de Juillet lopp (e) ,
laiflant l'Eglife dans une paix dont elle n'avoit point joui
depuis long-tcms , & que l'opiniâtreté des fchifmatiques ne
laiflbitpoint efpérer. Son Pontificat fut d'onze ans , quatre
mois &dix-huit jours. Toute la Ville de Rome le pleura.
On enterra fon corps à l'Eglife de Saint Pierre , auprès de
celui de faint Léon ; &
Pierre de Léon fon ami , chez qui il
étoit mort , lui fit des obfeques magnifiques , avec une Epi-
taphe en vers élégiaques , qui repréfcntent au vrai les vertus
& les actions de ce grand Pape. Léon iemble dire qu'Ur-
bain II mourut dans un âge peu avancé ; du moins les voya-
ges qu'il fit dans les dernières années de fa vie , les fonc- &
tions pénibles dont il les accompagna , font des preuves qu'il
de vicilleflc. Il étoit de grande taille
n'étoit point alors cafTé
modefte , recommandable par fa piété , fa fageffe , fon élo-
quence , & par fon zèle pour la difcipline de l'Egliic. Les
Écrivains du tems , l'appellent un homme vraiment apofto-
liquc. Ils difcnt même qu'il fe fit plulîeurs miracles à fon
tombeau. On ne doit donc pas être furpris que fon nom fc

(f) Vita Ufi»«./'«^.jz;. 3x6. 317. 330. 531.331.


trouve
,

PAPE. Ch. XLT. 7^1


LTOUVC en divers Martyrologes. Ceux qui lui font un reproche
d'avoir engagé les Chrétiens à des combats contre les Infidè-
les , fur lefqucls il n'avoit point de droit (/) , n'ont pas ré-
fléchi , Pcre commun des fidèles , il pouvoir avec
cju'étant le
juftice les armer pour rcpouOer par la force les ennemis de h
République chrétienne , qui en avoient déjà ravagé des Pro-
vinces considérables , en Elpagne , en Italie , en Sicile & dans
tout l'Orient, & qui auroient ians doute pouffé leurs conquê-
tes plus loin , s'ils n'eudent trouvé de la réfiflance. Si la Croi-
sade fut fouillée par de grands défordres , c'eft une fuite or-
dinaire des guerres, même les plus juftes ; & on ne doit point
les imputer à ceux qui confeillcnt ces guerres ou qui les entre-
prennent.
&
LX. Platina , "Wîon quelques autres attribuent au Pape Ecrits du
Urbain divers Opufcules. Charles de Saint Jacques met de [j"?^ Uibain.
•ce nombre un Traité contre les hérétiques (g)-, & un Livre
contre les mauvais traitemens qu'il avoir reçus du Roi Henri
dans fa légation d'Allemagne. Ces Opufcules ne font point
connus d'ailleurs ; & l'on ne connoîc pas mieux la Paraphrafe
•fur le Pfeaume Mifcrere, citée fous fon nom par Dom Ma- -

billon (/z). Mais il rcfle un grand nombre de Lettres de ce


Pape , pluficurs fragmens de fcs Difcours , & quantité de
Bulles. A l'égard de fes Lettres , on en trouve foixante-trois
-dans le dixième Tome de la Colledion des Conciles ( ? ) ,
dont quelques-unes avoient déjà été publiées par Baronius &
par Dom Luc d' Acheri , dans le cinquième volume du Spici-
lege ( / )• ï^ ^'^^ trouve aufli dans les deuxième , cinquième
(ixiéme & feptiéme Tomes des Mélanges de M. Balufe (m) ;
mais la plupart font les mêmes qui fe lifent dans la Colledioïi
<les Conciles. Dom Martennc en a publié neuf (n) , tant dans
îc troifiéme Tome de fes Anecdotes, que dans le premier &
quatrième de fa grande Colledion. La trente-deuxième Let-
tre dans le fécond Livre de celles de faint Anfelme, efl du
Pape Urbain II de même que les deux premières , dans la
;

Collc6tion de celles d'Yves de Chartres. Dom Thierri Rui-

(/) Uid.p. 1:8. (m) Tom. i.p, 16^, 167. 177. i8t tom'
(g) B:biioth, Pciitif. lib. \.f, tîî. j.p. ijj. 137.174- 189. ÎP2. 3 1;. tom. (-,

{h) AIabill. Prjcfin. in Oper. S. Bern. f. 371. 38f . ;8S.4or.ioiw. 7. p. up. 1 5 1.


mum. ij. («) Tom. j. Anecd. p. 878. 882. tom. I.
Ampliff. Colleil. /). j 10. 5151. î f 5. eî 'ow.
4 />. loiî.
Tome XX^ Ddddd
762 UR B AIN II, P APE. Ch. XLT.
nart en cite jlus de vingt- cinq dans la vie de ce Pape , qui
n'ont pas encore été rendues publiques •,
&
il en rapporte p!u-

. fleurs dans l'Appendice à cette vie , pour lervir de pièces ju-


fliticatives. 11 y en a auffi dans la DiiTertation de M. deMarca
fur la Primatie de Lyon ^ rapportée au dixième Tome des
Conciles dans l'Hiftoire des Comtes de Poitiers , par Befly ;
;

dans le neuvième Tome de l'Italie facrce , par Ughelli ; dans


le fécond Tome de l'Hifloire des Cardinaux François , par
Duchefne ; dans le cinquième Tome des Anecdotes de Dom.
. Bernard Pez , & ailleurs. Nous ne faifons que les indiquer ici ,
parce que nous avons donné le précis des plus intèreffantes en
faifant l'Hiftoire de ce Pape. Il a été aulfi parlé de quelques-
unes de fes Bulles , n'étant pas polîible de les détailler routes ,
foit à caufe de leur grand nombre, loit parce que le détail
en leroit aufïï ennuyeux qu'inutile pour les letleurs , qu'elles
intèreffent peu. Elles ont été recueillies dans les Bullaircs Ro-
main , de CalTin , de Cluni ; dans le cinquième Tome des
Annales Bénédictines ; dans l'Italie facrée d'Ughclli , dans le
Alarca Hijpanica ; dans l'Appendice à la vie de ce Pape , im-
primée au troifiéme Tome des Ouvrages pofthumes de Dom
Mabillon ; & dans les Collerions générales des Conciles»
DiTcoiirscîu LXI.On ne nous a confervé que quelques fragmcns des Dil-
Pape Urbain, cours d'Urbain IL 11 en fit un à la conlecration du grand Au-
tel de Cluni ; un à l'ouverture du Concile de Clermont ; plu-
sieurs à l'occafion de la Croifide. On y voit , comme dans fes
Lettres , qu'il parloit facilement , avec grâces & avec élégan-
ce. Ses paroles font pleines du fuc de la piété & de la charité.
Sa Lettre à Lucius , Prévôt de Saint Jouvence , eft une preu-
ve de fon érudition ; 8c qu'il n'étoit pas moins verfc dans la
connoilfance des Ecrits des Pères , que des Livres l'aints. Il eiî
donne encore des preuves en diverfes autres Lettres»

'¥nr
DES CONCILES, Ch. XLTI. 7/^5

CHAPITRE XLII.

De^ Conciles de Vorms de Tolède de Nefirefield , de


, ,

Home , de Nid, d'Aine , d^ Angleterre , de ConJlantinQ-_


phf de Rome.

I. T 7 Ers
Tan 700 , il fe tint un Concile à Vorms (a) , Concile Je
y^^^""'^''
vers
Y où Ton Ht douze Canons pour le maintien de la dif- l'an/oo!
cipline ecclcfiaflique , principalement en ce qui regarde la
manière de procéder contre les Clercs accufés de crimes. Ce
n'eiT: qu'une rcpérition des anciens Décrets des Conciles fur

cette matière. Nous remarquerons cependant , que le pre-


mier défend de donner la Communion, même à la mort , à
celui qui ayant accufé un Evoque , un Prêtre , ou un Dia-
cre , n'aura pu prouver ce qu'il avoit avancé j que l'onzième
& le douzième déclarent nulles les fentences rendues par des

Evêques , contre des Clercs qui ne font point de leur Dio-


cèfe.
II. En 701 , ou
'^*
félon d'autres , en 704 {h) , Vitiza , Roi ^'î'","''''^
,

â'Efpagne , aflembla un Concile dans l'Eglifc de Saint Pierre


près de Tolède , pour le règlement de fon Royaume. C'cft
pourquoi il y appella non-feulement les Evêques , mais aufll
ies Seigneurs de fa Cour. Ce Concile efl: regardé comme le
dix-huiriéme de Tolède , & le dernier; parce qu'on fut très-
long-tems depuis fans en tenir en cette Ville. Les Aftes &
les Canons ne font pas venus juiqu'à nous. Pour remplir ce
vuide le Cardinal d'Aguirre a mis au commencement de
_,

fon troifiémeTome des Conciles , divers monumcns anciens;


fçavoir un Catalogue des Canons & des Conciles , qui rc-
gloient la difcipline des Egliles d'Efpagne , pendant les fixié-
me & feptième (iécles ; un autre Catalogue qui contient la fuc-
cciTiondcs Evêques de Rome, depuis l'irruption des Sarra-
zins ; une fuite des Rois d'Efpagne , fous Iciquels fe font te-

(rt) Martiens , tom. -, Coilcâ. p-, 49. {b ) Tom, z. Conc. vaz. "<;.
Dddddij
7^4 D E S C N CI LES,
nus Coaciles ;
les &
le Catalogue des Evêques de Tolède.
Concile de
e re e en
m. En Angleterre. Fan 703 (c) , le Roi Alfride alTcm-
^ j^j.^ ^ ^ j^ perfuafion des ennemis de faint "Wilfride , un Con-

cile à Neftrefield ou. Eflrefeld >. à. deux, lieues de Riponv


Prefque tous les Evêques de Bretagne y aiïiilerent , ayant à.
leur tête Berthuald ou Brithuvaîd , Archevêque de Cantor-
beri. Ils invitèrent faint Wilfride , qui s'y rendit dans l'ef-
pérance de quelque accommodement. Les Evêques les Ab- &
bés, foutenus de l'autorité du Roi , avoient ufurpc les biens
de fon Monaftere. Ils avancèrent plulieurs fauffetés pou&fe
maintenir dans leurs ufurpations , voulurent obliger le &
Saint à fe foumettre aux Décrets de Théodore , Archevêque-
de Canrorberi. Sans s'expliquer il répondit , qu'il obéiroic
aux Canons. Mais les Evêques le preflTerent de fe démettre-
de fon Evêché, &
de fe retirer dans l'Abbaye de Ripe. Saint-
"Wilfride le refula , difant que de fe démettre dans cette con*-
jondure , ce feroit fe déclarer coupable. Ila.ppeilade leur pro-
cédé au Saint Siège.
Goncilede IV. Malgré fon grand âge , il alla à Rome chercher la-
%inpen.704. juflicc qu'on lui refufoit en Angleterre {d). Le Pape Jean--
VI , qui occupoit alors le Saint Siège , fit examiner fon af--
faire par un Concile , en préfence des Députés de fcs parties..
Le premier chef d'accufation fut , qu'il avoit méprifé en plcirv
Concile les Décrets de l'Archevêque de Cantarberi , établi
par le Saint Siège fur toutes les Eglifes Britanniques. SainD
Wilfride s'étant pleinement juftifié fur ce point , le Concile,
déclara qu'il s'étoic défendu canoniquemcnt ; & renvoya fes
parties, difant, que n'ayant point prouvé le premier chef
d'accufation , elles ne pouvoient , fuivant les Canons, être^
admifcs à prouver les autres. Les Evêques continuèrent néan--^
moins à s'affembler ; & pendant quatre mois ils tinrent foi--
xantc & dix congrégations , où ils examinèrent à loifir tous
les articles. C'étoit en 704. Saint Wilfride fut renvoyé ab—
îbus , & les Aâes de fa juftification de même que ceux du.
Concile , furent lus à haute voix devant tout le peuple , félon
îlufagedcs Romains. En même-tems le Pape Jean VI écri-
vit à Ethelrede , Roi des Mcrciens, «&: à Alfride , Roi de-

'

(c) Vita s. inihUi. Tom. y, AU. Ordin. |


{d) UiJ. p.tg. 6i. i^ /ry. cap. 47. 4&
StBfMtd.p, 661. ca(. 44. \^' jo,
,

DES CONCILES. Ch. XLII. 7(5"^

JWorthumbre (e) , d'avertir Bcrrhuald , Archevêque de Can-


torberi 5. d'aflemblcr un Concile en Angleterre avec l'Evcque
"Wilfridc ; d'y faire venir Boza & Jean , & de tacher de les
accommoder •, ou que fi cela ne le pouvoir , de les obliger de
venir les uns &
les autres à Rome, où leur ditiërend feroic
terminé par le Saint Siège. La Lettre à ces deux Rois, eft
attribuée dans la Colledion des Conciles (/) , à Jean VII :
mais c'cfl par erreur. Elle fut écrite en 704 Se Jean VII ne :

monta fur la Chaire de faint Pierre , que vers le mois de


Mars de Tan 705. Ce fut lui qui reçut la Lettre de l'Empe-
xeur Juftinien , dans laquelle ce Prince le conjuroit d'afîem-
bler un Concile &
d'y confirmer les Décrets du Concile de
Trulle. Le Pape fit en effet affembler les Evoques à Rome .'

mais par la crainte de déplaire à l'Empereur ( g ) , il n'ap-


prouva, ni ne rejetta les Décrets; de Trulle , lui renvoyâtes &
volumes de ce Concile fans y avoir rien corrige.
V. Saint Wilfridc de retour de Rome en Angleterre , fe Concile de
^"^^" ^oj,.
réconcilia, d'abord avec Bertualde y Archevêque de Cantor-
beri (/ï); puis par le confeil d'Echelrede ,. qui ^ après trente &
un an de règne fur les Mcrcicns , s'étoit fait Moine en 704 ,,-
dans le Monaftere de Bardeneg , il envoya un Prêtre un &
Abbé à Alfride , Roi de Northumbrc ,.pour le prier d'agréer
qu'il lui préfentât les Lettres du Pape. Alfride protefta qu'il
lîc changeroic rien à ce qui avoit été ordonné par les Evê-
ques de Bretagne ; mais étant tombé malade , il recomman-
da à fon fucccifeur de faire la paix avec faint "Wilfride. Ca-
dulphe , au lieu de lui rendre juftice , lui ordonna de fortir
dans fix jours de fon Royaume : il en fut chafie lui-même
au bout de deux; &
Olred, fils d'Alfrid , régna à fa place.
La première année de fon règne, c'eft-à-dire, fur la fin de
l'an 705 (?) , Bertuald de Cantorberi , tint avec les Evo-
ques , les Abbés &
les premiers du Royaume , un Concile.
près la rivière de Nid. Le jeune Roi y alfifta , &: faint "Wil-
fdd avec Elflede , Abbefle de Strencshal , qui étoit en répu-
tation de prudence & de fagcffe. On lut les Lettres du Pape
Jean VII; & comme elles étoicnt en latin , on en donna.

(«) Uid. ^ Tom. 6. Conc.p. 1 390. 1387. 1388.


Çf) Mabii lon , Tom. f . Ailor. Ordin. (h) Tom. 6. Conc.p, ijSp. ^Tom. fi
&,Sene,i.p, 66S. Aitt>r.Ordin, S. Beiied. p. 6yi,
(^) Akasi, in Jo,w, Tom, j, Ctiic.
f ( j) Maisii. intiotis.
,

7^^ ^ DES C ONC I L E S.


1 aux Seigneurs Anglois. Elles portoient ea"
intcrprcration
fubftance , que les Evêqucs fe réconcilieroient avec faint
Wilfrid ; qu'ils lui rcndroient fes Eglifes , ou qu'ils iroicnc
tous enfemble à Rome pour y erre ju-;és. L'Abbefle Elflede
rendit témoignage que la dernière volonté du Roi Alfride
Ctoit,
que l'on rétablit le faint Evêque. Sur cela Bertefrid
dit au nom du Roi Olrcd , qu'il falloit obéir aux ordres du
,

Saint Siège du Roi Alfrid, & &


qu'on ne pouvoit s'en dé-
fendre , après le vœu qu'on avoit fait d'exécuter cet ordre
du Pape , il Dieu donnoit à Oired le Royaume de fon père,
A ces paroles tous les efprits fe réunirent ^ il fut conclu &
unanimement que l'on feroit la paix de bonne foi avec faint
Wilfrid , &
qu'on lui rendroit les deux Monaftcres de Ri-
pon &
d'Hagulftad , avec tous leurs revenus. Avant de fe
îeparer , tous les Evêques s'embraiTerent & communièrent en-
femble.
Concile d'Al- VI. Vers l'an yoc) , l'Archevêque Berthualde affembla un
ue en 70?.
Concile à Aine (/) , où il confirma les donations faites par
Ofward , frère du Roi Ethelrcd , & par quelques autres Sei-
gneurs 5 au Monaflere d'Evesham , bâti par laint Eguvin ,
Evêque de "Worccllre. Il eft dit dans la vie de ce Saint,
qu'étant un jour en oraifon dans une folitude où il y avoic-
une petite Chapelle , la fainte Vierge lui apparut , tenant en-
une de fes mains une croix d'or , & en l'autre un livre , &
qu'elle lui ordonna de fonder ce Monafiiere. Quelques -r uns
ont pris occallon de cette vifion, de mettre vers l'an 710 ou'
7 1 2 , un Concile en Angleterre , où il fut ordonné que l'on'
mettroit des images dans les Temples. Mais tout ce qu'on
dit là-defTus, paroît fort incertain (m). On en met encore-
un fous le règne d'Ina , Roi des Saxons occidentaux ( « )
dans lequel ce Prince, après la mort de Heddi , Evêque de ce»
peuples , divifa fon Evcché en deux Diocèles , dont l'un fur
confié à Daniel , l'autre à Adclme. Cette diviiion étoit faite
dès le tcms du vénérable Bede , qui en parle dans Ion Hi-
floire Eccléfiaftique d'Angleterre. Le Roi Ina fit , vers l'an

(l ) Tmn. 5. Al OrJ. S. BeneJ.p. 324, M.ilmejli.lib. z. de Pontife. 'in'tUr. Bfda,


Ç5 Tom, 6. Cottc.p. 1401, Lih.^.cap. i?. Mkbill. ith f'tj>. p. 121,
'(m) Si'KLM. Tom. I. Cane. p. io8. Ç5 tom. 6. Coiic.p. I
JJ'J.
(/;)Tu«. 6, Cottc.p, 1411.55 ViLLFM.
DES CONCILES. Ch. XLTT. 7^7
5po , Loix pour
divcrfcs peuples , dans une AfTcmbléc
les

de Seigneurs de les Etats , où fc trouvèrent quelques Evo-

ques. On les a rapportées dans le fixicme Tome des Conci-


les (0). La féconde de ces Loix , ordonne de batifer les cn-
fans dans le mois de leur naiflance i la quatrième , de payer
à l'Eglifc les prémices des fruits au jour de Saint Martin.
Les peines contre les prévaricateurs , font des amendes pé-
cuniaires. Ce qu'on lit du m.iriage d'îna avec Guala, ed re-
gardé 'comme une fable. Il faut donc rejetter le Concile
qu'on dit avoir été alTcmb'é à cette OLcafion , pour régler
les mariages entre les Anglo - Saxons , les Bretons les &
Ecoflbis.
VIL Bardane ou Philippique étant parvenu à l'Empire , Concile Jj
après mort de Juftinien, en 712 (p), fit tenir la même ^-'5'"^'""'""^'
la
année un Concile à Conftantinople , où le flxiémc Concile
-général fut condamné. Ce Prince éroit Monothélite. Ayant
donc fait chafier de l'Eglifc le Patriarche Cyrus, il mit à fa
•place Jean, Monothélite comme lui; 8c perfécuta vivement
ceux qui refulerent de foufcrire à fon Concile. Philippique
fut dépofé la troifiéme année de fon règne & Anailafe re- ;

connu pour Empereur. Il écoit Catholique & rcccvoit le fixié-


me Concile.
VIII. Le Pape Grégoire II en affembla un à Rome ( a) , ^
Con.-ne .le

Je 5 d Avril 721 , ou aililterent vmgt-dcux Evcques , donc


trois étoicnt étrangers ; Sinderad d'Efpagne, qui , en 715 ,
avoir quitte le Siège Epifcopal de Tolède par la craint*
des Arabes; Sedulius de la Grande-Bretagne, Fergufte &
d'Ecoffe. Les mariages illicites avec des femmes confacrées à
Dieu, a voient donné occafion à cette Affemblée. Tous les
Evêques convinrent que tous ceux qui fc trouveroient cou-
pables de tels crim.es , Romains, Lombards ou autres , dé-
voient être ^nathématifés. Sur quoi le Pape prononça devant
•le corps de faine Pierre , la fentence de condamnation en

onze articles ( r ) , où il dit anathcme à quiconque épouferoic


une Prêtreflc , c'e(l-à-dire , celle dont le mari auroit été or-
donné Prêtre , lui étant défendu de fe remarier, même après
la mort de fon mari ; une Diaconcfle , une Religieufe , fa

(0) Tom. g. Cane. p. 1314, | (^) Ihid. f.jge


^i^^,

(/) lbid.{.ig. 1401. l


(r) Can. l, ^ 1 1.
7^8 D E S C O N C r L E 5.
commère , la femme de fon frère , fa nièce , la femme de
fon père ou de fon fils, fa coufine , fa parente ou fon alliée,
& à celui qui auroic enlevé une veuve ou une 611e. A chaque
article les Evêques répondirent par qui! fon ann-
trois fois ;

thême. Ils firent la même chofe fur chacun des fix articles
fuivans qui portent anathême contre ceux qui corifultent
,

des devins ou des forciers , ou qui fe fervent de ligamens ;


contre ceux qui , au préjudice des Lettres Apoftoliques . s'em-
parent des jardins ou des places appartenantes à l'Eglile {s)\
contre un nommé Adrien & une Diaconefi"e nommée Epipha-
nie ( ?) , qui s'ct oient mariés nonobftant le ferment qu'ils a-
voicnt fait l'un &
l'autre ; contre ceux qui avoient eu part à
ce mariage {u) ; &
contre les Clercs qui laiiTent croître leurs
cheveux.
Concile de jx. Voici quelle fut l'occafion du Concile tenu à Rome ,
Rome en 7H«
fous le Pontificat du même Pnpe, en 724 (.r). Un Moine de
grande réputation , nommé Corbinien, voulant fe dérober aux
vilitcs que plufieurs perfonnes de la première condition lui
rendoient fréquemment pour recevoir fes inftrudtions , quitta
fa cellule , &
alla à Rome, où il découvrit au Pape fes pei-
nes intérieures au fujet de ces vifites &
des offrandes qu'on
lui failoit. Il craignoit qu'elles ne dcvinffent la caufe de fa
perte. Le Pape n'en jugea pas de même : de l'avis de Ton &
Confcil , W ordonna Corbinien Evêque , après l'avoir fait
paffer par tous les dégrés. Il lui donna même le Palliiim, avec
pouvoir de prêcher par-tout. Corbinien exerça fon miniftere
dans toute la Gaule avec beaucoup de fuccès: mais ne pou-
vant fouffrir les refpeds qu'on lui rendoit de toutes parts ,
il retourna à fon ancienne cellule, près de l'Eglife de Saint

Germain de Châtres , dans le voifinage de Paris. Sa retraite


ne fit qu'augmenter fa réputation. II réfolut donc de retour-

ner à Rome , &


de demander au Pape de le décharger de
TEpifcopat. Grégoire II le reçut avec honneur, le fit affeoir
auprès de lui ; & le faint Evêque lui ayant expliqué toutes fes
peines, le conjura avec larmes de le décharger de la dignité
Epifcopale , & de lui permettre de s'enfermer dans quelque
Mona(iere,ou de lui donner dans un bois écarté quelque piéc^

( J) Ca», lî, ,1 (*) lom. 6. Cotte, p. l+îp. C» TotH, J^


(rlC««. 15. \ AS. Or/ii». S. EeneJ.f. 171.
(u) Cati. 14. If. l'r* I
de
^
DES CONCILES. Ch: XLIT. 7^9
de terre à cultiver. Le Pape
aflembla un Concile , où il fuC
arrêté tout d'une voix, que Corbinien dcvoit s'en retourner.
'Ne pouvant donc rclifler , ni aux raifons des Evoques , ni à
l'autorité du Pape , il fortit de Rome & paffa en Bavière , où il

établit fon Siège à Frifingue.


X. Le Pape Grégoire III voyant que l'Empereur Léon Ifau- Concile de

rien avoir méprifé la Lettre qu'il luiavoir écrite dès le corn- sc'jTô?^ ^^*
menccment de ion Pontiticar en 73 i(y); qu'il avoit maltraité
George fon Légat & qu'il continuoit
le Prêtre ; à faire abolir
entièrement le culte des laintes images
affembla un Concile à ,

Rome, vers l'an 732 , dans l'Eglife de Saint Pierre. Quatre-


vingt-treize Evêques y affiftcrent , avec les Prêtres , les Dia-
cres , tout le Clergé de Rome , les Nobles , les Conlùls , le &
refte du peuple. On y ordonna que quiconque méprifcroitlu-
fage de l'Eglife, touchant la vénération des faintes images,
foit en les ôtant , en les détruifant , en les profanant , foit en
parlant avec mépris, feroicnt privés du Corps du San<T de &
Jefus-Chrifl Se féparé delà communion de l'Eglife. Tous ceux
quifurenc préfens au Concile, foufcrivirent à ce Décret ; auquel
on joignit les autorités des Papes précédens. Les a6les de ce
Concile font perdus , &
nous n'en fçavons que ce qu'Anaftafe
en a rapporté dans vie de Grégoire III. Une dit point que
la

Grégoire fon prédéccfTeur , ait aflemblé de Concile pour


II ,

la défenfe du cuire des images. Néanmoins on en met un à


Rome en 726 , fous fon Pontificat: le Pape Adrien , dans &
ia Lettre à Charlcmagne , dit en termes exprès , que Grégoire
II affembla un Concile à R ome au fujct des images. Il rapporte
même, les raifons & dont le Pape Grégoire II le
les autorités
fervit pour montrer que le culte en étoit ancien dans l'Eglife,
& légitime. Adrien parle au même endroit d'un Concile que
le Pape Etienne , l'un defes prédécefTeurs , aflembla aufTi pour
la défenfe des images,

(/) Tom. i.Con(.p. l^(-i. ï5 1460.

Tome XK, Eccee


'^'jo DES CONCILES,

CHAPITRE XLIII.

T)es Conciles d'Allemagne , de Liptines , de Soiffons , de


Rome j & de Cleveshoiu

Conciiecj'Ai- 1. TT E
vingt-uniémc d'Avril de l'an 742 (z) , CarToman ,.
lemagne en
| j & Prince des François, afTembla un Concile en
, Que
Allemagne. Il s'y trouva fept Evêques de fes Etats ; fçavoir,
faint Boniface de Mayence , Burchard de Virfbourg , Re-
genfrid de Cologne , Wintan de Burabourg, Vilebard d'Ei-
chflat , Dadan d'Utrecht & Eddan de Siraitourg. Son def-
fein , dans la convocation de cette Aflemblée, étoit de con-
certer les moyens de rétablir la Loi de Dieu & la difcipline
eccléfiaflique , mal obfervée fous les règnes précédcns , 8c
d'empêcher les fidèles d'être trompés par de faux Prêtres ,
comme ils l'avoient été auparavant. A
cet effet le Concile fie
feize Canons , que d'autres éduilent à fept : i il n'y en a. &
pas davantage dans la CoUeftion du Père Labbe , ni dans
les Capitulaires donnés par M. Baluze. Ils font précédés
d'une Lettre de Carloman , dans laquelle ce Prince , qui éroit
préfent à l'Aflemblée , témoigne qu'il Tavoit convoqué par
le confcil des fcrvitcurs de Dieu & des Seigneurs de fa Cour*^
Le premier Canon confirme les Evêques établis par l'Arche-
vêque Boniface (a) , qui eft qualifié Légat de Saint Pierre.
Enluitc il ordonne que l'on tiendra tous les ans un Concile
pour la réformation des mœurs de la difcipline ,& pour &
le rétabliflfemcnt des droits de l'Eglifc ; que ce Concile fe
tiendra en préfence du Prince ; que l'on rendra aux Eglifcs
les biens qui leur ont été ôtés ; que les mauvais Prêtres , les
Diacres & les autres Clercs débauchés , ne percevront rien
des revenus eccléfiafliques ; qu'au contraire ils Icron' d .'-ri-
dés 8c mis en pénitence. Par le fécond Canon , i! eft défem-

(Z.) Tom. 6.Cùnc. p. 1533. ^ Tom. l. 1 (ii) Cn».. l»


Q.tpUul. fdg. 145. l
,

DES CONCILES. Ch. XLIT. yji


du aux Clercs de porter les armes ( fc
) , de combattre &
d'aller à la guerre contre l'ennemi , fice n'eft qu'ils aient ctc
choiiis pour y célébrer la Méfie, & porter les reliques des
Saints ; c'eft-à-dire , un ou deux Evoques avec leurs Cha-
pellains & leurs Prêtres. Toutefois chaque Commandant pour-
ra mener un Prêtre pour juger ceux qui confefleront leurs
péchés, &
leur donner des pénitences. Le même Canon défend
aux Clercs de chafi!er ou de courir les bois avec des chiens , ou
d'avoir des éperviers ou des faucons. Dans le troifiéme (f ) ,
on ordonne aux Curés d'être fournis à leur Evêque , de lui &
rendre tous les ans en Carême , compte de leur foi èc de
toutes les fondions de leur miniftere ; d'être toujours prêts à
le recevoir avec le peuple afl!emblé , quand , fuivant les Ca-
nons , il fera la vifite de fon Diocèfe pour donner la Confir-
mation ; & que le Jeudi-Saint ils recevront de lui le nouveau
Chrême. Il eft défendu par le quatrième (^) , d'admettre
au miniftcre les Evêques & les Prêtres inconnus , de quelque
part qu'ils viennent, avant l'approbation de l'Evêque diocé-
iain en fon Synode. Le cinquième ordonne aux Evêques ( e )
avec le fecours du Comte , défenfeur de leur Eg'ile , de pur-,
^er le peuple de Dieu de toutes les fupcrfîitions pa\ennes.
Il cft dit dans le fixiéme (/) , que les pcrfonnes de l'un &
de l'autre fcxe confacrées à Dieu , qui , du jour de la date
du Concile , tomberont dans la fornication , feront mis en
prifon pour faire pénitence au pain & à l'eau ; que (i c'efl un
Prêtre, il y demeurera deux ans , après avoir été fouetté juf-
qu'au fang , & que l'Evêque pourra augmenter la peine ; que
fi c'efl un Clerc ou un Moine , après avoir été fouetté trois

fois , il demeurera un an en prilbn \ que l'on fera fubir la


même pénitence aux Rcligieufes voilées , & qu'on leur rafera
la tête. On voit par-là que ce n'étoit pas encore l'ufage de
rafer les Rcligieufes en leur donnant l'habit. Le feptiéme dé-
fend aux Prêtres & aux Diacres (g ) , de porter des man-
teaux ou faies lemblables à ceux des laïcs , & veut qu'ils por-
tent des chaiubles , qui étoit l'habit ordinaire des EccléHa-
fliques. Il ordonne aux Moines & aux Religieufes de faire

(A) Clin. i.
I
(0 Ca„. y.
(0 Cl», j. j (/) c..«. 6.

E ceee i
j
.

772 DESCONCILES,
obferver dans leurs Monafteres la Règle de Saint Benoît.'
Concile de
jj^ gj^ exécution du premier Canon du Concile dont nou?
.iptines.
ygnQns de parler , le même Carloman en aiïembla un le
premier de Mars 743 {h) , à Liptines Maifon Royale, au-
jourd'hui Leftine en Cambrefis , auquel faint Boniface de
Mayence , avec un Evêque nommé George & Jean
préfida
Sacellaire Dépurés du Pape. Hincmar , Archevêque de
,

Reims , fait mention de ce Concile, dans fa Lettre trente-


fepiiéme à Rodulphc de Bourges. On y lit quatre Canons ,
dont le premier n'efl qu'une confirmation du Concile précé-
dent ( ? ) , avec promefle de la part de tous les Evêques &
du Clergé , de vivre conformément aux anciens Décrets ec-
cléfiaftiqucs. Les Abbcs & les Moines s'engagèrent auffi , de
même que les Religieufes à obferver la Règle de Saint Be-
,

noît. Il fut dit dans le fécond (/) , que le Prince, à caufe


des guerres préfentes , pi endroit pour un tems une partie des
biens de l'Eglife , à titre de précaire & de cens , pour aider
à' Tcntrctien de fes troupes , à la charge de payer tous les ans

à l'Eglife ou aux Monaftcres , un fol valant douze deniers pour


chaque famille & que lorfquc celui à qui la terre de l'Eglife
:

aura été donnée , viendra à mourir , elle retournera à l'Egli^-


fe j que toutefois elle pourra être donnée de nouveau au mê-
me titre de précaire, (i cela efl nécelfaire pour le bien de l'E-
rat , & que le Prince l'ordonne. Mais le Canon fuppofe que
ks Eglifes & les Monaileres dont le Prince prendra les biens
. à titre de précaire, ne fouffriront point de la permifFion que
le Concile lui accorde ; & il veut que fi l'Eglife eft p.iuvre,
on lui rende fon revenu tout entier. Ce précaire éroit donc
une efpcce de fief accordé à un homme de guerre pour faire
le fervice ( w) & feulement à vie , comme ils étoicnt tous
alors. Le troifiéme Canon ordonne aux Evêques d'empê-
cher &
de punir les adultères ( « ) , les inceftes les maria- &
ges illicites. Il défend encore de vendre aux payens des ef-
claves Chrétiens. On renouvelle dans le quatrième (0) , la
défenfe des fuperfticions payennes , lous peine de quinze fols
d'amende. Le fol étoit d'argent valoir vingt-cinq fols de &

(*) Tom.6. Conc. p. 1337.


( I
) Cari. 1 («) C(tn. j,
(/) Ca/i. ». (0) C*«. 4.
(ni) Fleuri , Hif. EccliJ, tom. 9, lib.
DES CONCILES. Ch. XLII, 773
notre monnoie. On lit à la fuite de ces Canons , une formule
d'abjuration en langue Tudefque , & un Mémoire des fu-
perflitions les plus uiitces alors , avec une inftru6lion fur les
mariages illicites , & fur la dcfenfe de célébrer le Sabbat. La
plus remarquable de ces fuperftitions eft , qae les peuples fc
faifoicnc des Saints de tous les morts (p) d'où vient ap- :

paremment l'origine de la facilité que l'on avoit eu en ces


tcms-là à honorer d'un culte public plufieurs Saints dou-
teux.
IIL Pépin , Prince & Duc des François , aflcmbla le 3 Condie de
de Mars de l'an 744 (7) , un Concile à Soiiïbns , pour la Soiffons en
^'^"^*
partie de la France qui lui étoit foumifc. Il s'y trouva vingt-
trois Evoques , avec des Prêtres Se d'autres Clercs. Pépin y
afTifta avec les principaux Seigneurs , qui foufcrivirenr aux
Décrets. On croit que faint Boniface de Mayence préfida à
ce Concile mais fon nom ne fe trouve point dans les fouf-
:

criptions: auffi ne lont-elles point entières. Les Réglemens


de cette Aflemblée font à peu près les mêmes que des pré-
cédentes. Il fut ordonné que l'on publieroit par -tout la foi
établie par le Concile de Nicée (r) , & les Jugemens cano-
niques des autres Conciles , pour rétablir plus facilement la
dilci|.line eccléliaflique & parce qu'un nommé Adalbert ,
:

Gaulois de nation , répandoit diverfes erreurs , confacroit


des Eglifes fous fon nom , faifoiç de petites croix & de pe-
tits oratoires dans les campagnes , près des fontaines & ail-
leurs, & qu'il y faifoit faire des prières publiques; ce qui en-
gagcoit le peuple à s'y affembler , au mépris des Evêques. Le
Con;.ile le condamna (j) , & ordonna de brûler les croix
qu'il avoit plantées. Il établit & ordonna dans toutes les E-
glifes vacantes ou qui étoient pofledées par des ufurpateurs,
des Evêques légitimes , &
au -deflfus d'eux deux Archevê-
ques , Abel pour l'Eglife de Reims , &
Ardobert pour celle
de Sens. Le dernier Canon , qui eft le dixième ( f ) , ordon-
ne que les contrevenans aux Décrets faits par le Concile ,
feront jugés par le Prince même , avec les Evêques Se les
Seigneurs , &
condamnés à l'amende fuivant |a Loi. Ces af-

(p) Flfi'ri , Uid.p. 308. I (r) Cl». I.

(q) Tom. 6. Conc. f, 1/52. Çî? tom, I. j


{s) Cuti. 1 Cf 7.
Capitul.p. jj. j {t) Cat>, xo.
,

774 ,
' 'I>BS CONCILES,
lemblées étant compofées d'Evêques & de Seigneurs (») , on
.joignoit les peines temporelles aux Ipirituelles»
RomTen m. ^^' ^^ ^^^^ ^""^^ 744 > «" > d'aurres , en 743 (ar)
^f^^^^
le Pape Zacharie, qui avoit fuccédé à Grégoire III en 741
tint un Concile à Rome , dans l'Eglife de Saint Pierre, avec
i^uarante Evoques , vingt-deux Prêtres , fix Diacres , & tout
le relie du Clergé de Rome. Il expliqua lui-même les raifons
^u'il avoit eues de convoquer cette Aflemblée ; fçavoir ^ le
tnaintien de la foi orthodoxe & de la difcipline eccléfiafli-
que. Il fit à cet effet quinze Canons , qui furent agréés una-
nimement. Les Evêques ne demeureront point avec des fem-
mes (y ) , pour ne pas donner lieu de rendre leur miniftere
tnéprilable. Il en fera de même des Prêtres 8c des Diacres ;
-feulement ils pourront avoir avec eux leur mère ou leurs plus
.proches parentes (z). Ils ne porteront, ni des habits fécu-
iiers, nide longs cheveux. Les Evêques qui auront été or-
donnés par le Pape ( « ) , fe rendront à Rome chaque année
le quinze de Mai , pourvu qu'ils ne foient pas Jtrop éloignés
de la Ville autrement il leur fuffira d'écrire pour marquer
:

leur foumiflion (/>>). Celui qui aura époufé la femme d'un Prê-
tre une DiaconefTe , une Religieuie , ou fa commère fpiri-
,

ruelle (c), fera livré à l'anathême , & privé du Corps & du


Sang de Jcfus-Chrift aucun Prêtre ne pourra communiquer
:

avec lui (^ )j, fous peine d'être privé de l'honneur du Sacer-


doce. La même peine efl ordonnée contre celui qui époufera
ia riiéce(f), fa coufine-germaine , fa belle-mere , fa belle-
fœur. Anathcme contre ceux qui enlèvent des vierges & des
veuves ; aux Clercs &
aux Moines qui laiffent grandir leurs
<:hcvcux (/) ; contre ceux qui font des fêtes au premier jour
4e l'an à la manière des payens (g) , qui marient leurs filles
avec des Juifs (^) , ou qui leur vendent des efclaves Chré-
tiens. Les Ordinations font fixées aux "Quatre -Tcms (i ) ;
avec défenfe aux Evêques d'ordonner un Clerc étranger fans

.. iM i' V

X w,.n'JW
"'(«) l^Lniki , liij. pag. 30p. (d) Cm. 6.
(* )Tc»i. e.Conc.p. 1546. ( e ) Cnn. 7.
-
ryl-Can. r. ('/) Crtfl. ?.

(JL) Cfl«. 1.
(.1) Ciw. ]. (h) Caii. I o.
(/')Ciw. 4. ' '
'
(i)Can. II.
Ci». J. ••
(f)
DES CONCILES. Ch. XLIT. 775
Lettres dimifforiales de Ion Evoque dioccfain. Si les Ecclé-
fiaftiques ont entre eux des diffcrcns , Us leronc jugés , non
par des fcculiers , mais par des Evêques (/) , ceux des &
Evcques par le Pape. Le Clerc qui faura fon Evêque indil-
pofé contre lui ,
pourvoir devanc l'Evêque le plus
pourra fe

voi(in , fuivant les ;Canons &


il l'on ne veut pas s'en rap-
poner à fon jugement , l'affaire fera portée au Saint Siège.
Il faut entendre ce Canon des Evêques d'Italie. Défenle à
TEvêque , au Prêtre , au Diacre {m) , lorfau'ils viennent pour
célébrer les faims Myfleres, de fe lervir de bâtons , ou d'a-
voir la tête couverte étant à l'Autel. L'Evêqvie ou le Prêtre
ayant dit l'Oraifon du commencement de la Mefle , ne doit
plus quitter l'Autel (») , ni faire achever la Mefle par un au-
tre; mais continuer jufqu'à la fin , fous peine d'être fufpens
de la Communion du Corps &
du Sang de Notre-Seigneur,
Le Pape Grégoire II , qui eft ici appelle le Jeune , a voit dé-
fendu dans un Concile tenu à Rome en 721 , les mariages
entre parens dans les dégrés prohibés , avec des perlon- &
nes confacrées à Dieu, Cet abus régnoit fur -tout parmi les
Lombards. Comme il duroit toujours , on renouvelle la dé-
fenfe faite dans ce Concile à cet égard. Le Pape Zacharie
ajoute , qu'il avoit appris que le Pape faint Grégoire avoin
permis aux peuples de Germanie , dans le commencement
de leur converdon , de concrader des mariages au quatrième
degré de parenté ; mais qu'il n'avoit rien trouvé là-deffus dans
les archives de l'Eglife Romaine.
V. L'année fuivante 745 (0) , Carloman , de l'avis de CoridledeS.
faint Boniface, Apôtre des Allemans, fit tenir un Concile, S""''^^'"^^''^
OU on examina plulieurs Clercs hérétiques qui avoienr ete
1

féduits par Adalbert , condamné au Concile de Soiflbns.


On y examina aufli la conduire de Gevilieb , Evêque de'
Mayence, qui ayant été convaincu d'avoir tué de fa propre
main un Saxon , pour venger la mort de fon père , & de fe
divertir ordinairement avec des oileaux & des chiens , ce
qui étoit défendu à un Evêque , fut condamné & dépolé de
VEpifcopat. On croit qiie ce fut de ce: Concile , que fainto

(/)C.i». 12. (o) ToOT. (f . Cone.f: i;5j. ij-jg. Vit»


I
\m)Can. I). \^<>riifacfi,ptTOthtn:lib,i,cit(. <-j.
77<^ ,
.
pES CONCILES. -
Boniface écrivit à Erelbard , Roi des Merciens, puifqu'il y
parle en fon nom & de l'ept autres Evoques , du nombre des-
quels font Abel , Archevêque de Reims ; faint Burchard ,
Evcque de Virfbourg; & faint Villebard , Evêque d'Eich-
flat. Gevilicb voulut d'abord fe pourvoir à Rome ; mais
voyant la fentence rendue contre lui , foutenue de l'autorité
du Prince Carloman , il fe fournit. Saint Boniface craignant
que rhcrécique Adalbert , & un autre qu'il avoit aufïï con-
damné dans le même Concile; fçavoir , Clément qui ctoit
Ecoffois , ne continuaflent à répandre leurs erreurs , écrivit
deux Lettres au Pape Zacharie , où , après avoir dépeint leurs
mauvaifes mœurs & leurs erreurs, il le prioit d'écrire au Duc
Carloman, pour faire mettre ces deux hérétiques en prifon ,
& d'empêcher que perfonne ne leur parlât ou ne communi-
quât avec eux. Il chargea de fes Lettres le Prêtre Denéard ,
avec les pièces néceiïaires pour la conviction de ces deux im-
pofteurs. Outre les aflemblées illicites &
fupeftitieufes , par
1< fquelles Adalbert féduifoit les peuples , il donnoit fes on-
gles & fes cheveux pour les honorer & les porter avec les
reliques de faint Pierre & lorfque quelques-uns venoient le
:

confeiïer à lui , il leur difoit qu'il n'étoit pas befoin d'accu-


fer leurs péchés, parce qu'il connoiffoit leurs plus fecrettes
penfées , & pouvoient s'en retourner en leur raaifon ,
qu'ils
aflurés d'avoir reçu l'abfolution. A l'égard de Clément , il
rejettoit les Canons, les Conciles & les Ecrits des Percs -, &
quoiqu'il eût eu deux enfans par un adulrere , il foutenoic
qu'il pouvoit être Evêque. 11 foutenoit qu'il étoit permis à
un Chrâien d'époufer la veuve de fon frerc ; que Jefus-
Chrift dcfcendant aux enfers , en avoir délivré tous les dam-
nés , même les idolâtres ; & avançoit plufieurs autres erreurs
fur la prédeflination. Le Pape Zacharie ayant lu les Let-
tres de faint Boniface , aflembla un Concile à Rome , où fe
trouvèrent fept Evêques , dix - fept Prêtres , les Diacres &
tout le Clergé. On fit entrer le Prêtre Denéard dans la Ba-
frJique de Théodore , où fe tcnoit le Concile : & après qu'il
eût fait rapport de la Sentence rendue contre Adalbert &
Clément , dans le Concile afl'cmblé par faint Boniface , on
lut la Lettre de cet Evêque au Pape Zacharie. Les Evêques
&:lcs Prêtres ayant ouï ce qu'elle portoit, s'écrièrent , qu'A.-
dalbert Si Clément étoient.des Miniftres de Satan & des pré»
curfeurs de l'Antcchrift. C'cft ce qui fe palfi dans la pre-
mière
.

DES CONCILES. CM.XLir. ^'jj


inîere aflion du Concile de Rome. On commença la fé-
conde par la lefture de la vie d'Adalbert , & des autres Ecrits
•que le Prêtre Dencard avoit apportés. Il y avoit entre au-
tres une Lettre dont cet impollcur fe fer voit pour féduire
les peuples , & qu'il difoit être de Jefus-Chrift , & defcen-
due du Ciel , tombée à Jérufalem & trouvée par l'Archan-
.gc falnt Michel à la porte d'Ephrem. Cette Lettre fut lue
toute entière après quoi on en mit l'examen à une autre ac-
:

tion. Le Prêtre Denéard y préfenta une Oraifon compoféc


par Adalbert , dans laquelle cet hérétique invoquoit des An-
^es dont les noms font inconnus , & la plupart des noms
de Démons. Le Pape demanda l'avis du Concile; & tous
ayant opiné qu'il failoit brûler tous ces Ecrits & en anathé-
matifer les Auteurs , Zacharie répondit, que les Ecrits d'A-
dalbert méritoient en effet d'être condamnés au feu mais :

qu'il étoit à propos , pour la confuiion éternelle de cet im-


pofleur , de .les conferver dans les archives de l'Eglife Ro-
maine. Le Concile fc contenta donc de dépofer Adalberc
& Clément du Sacerdoce ; & de prononcer l'anathême con-
tre eux & leurs fedatcurs , s'ils perfévéroient dans leurs er-
reurs. Cette fentence fut foufcrite par le Pape , avec tous
les Evêques & les Prêtres. Quoiqu'il y aie eu trois féances dans
le Concile , elles ont néanmoins la même date , comme ayant
été tenues en un même jour. Le Pape Zacharie en envoya les
A£les à faint Boniface , avec une Lettre datée du dernier Oc-
-tobre de la même année 745
VI. Vers le commencement de Septembre de l'an 747 , Concile le
Cuthbert , Archevêque de Cantorberi (0 ) , tint un Concile ^'°^"''*" ^"
''^'^'
à Cloveshou , où affilièrent l'Evcque ae Rochefter , trois
Evêques du pays des Merciens , deux d'Oueffcx , un d'E-
ilangle , un de Suflèx , deux de deux autres Provinces. C'é-
•toic en tout douze Evêques de la Nation Angloife ; en forte
qu'on peut regarder ce Concile comme national. Ethelbalde ,
Roi des Merciens , y aiïifta en pcrfonne , avec les Seigneurs du
-Royaume. La Lettre de faint Boniface à l'Archevêque Cuth-
bert , fe trouve à la tête des Ades de ce Concile ce qui fup- :

•pofe qu'elle y fut lue : on y lut aufli deux Lettres du Pape

{f ) Te«. 6. Conc. p. ï.\6^,


'

Tcmc XX. Fffff


778 DES C ON CI LE S.
Zacharie; & parce qu'elles étoicnt en latin , on les expliqua
en langue vulgaire ( ^). Elles contenoient des avis falutaircs
à tous les habitans de la Grande-Bretagne , pour les enga-
ger à réformer leurs mœurs , avec mcruces d'anathême con-
tre ceux qui s'obftineroienc dans leurs déi-cglemens. Après
la leQure de toutes ces pièces , les Evêques ayant conféré
enfcmble fur la néceflïté de s'acquirter eux-mêmes des de-
voirs de leur miniftere , pour lervir d'exemple au^ autres , 6t
examiné les Homélies de faint Grégoire & les Décrets des
faints Pères , compoferent trente Canons , dont voici la fub-
ftance. Les Evêques feront aflldus à remplir leurs fonctions ,
& plus occupes du fervice de Dieu que d'affaires féculieres ;
ils s'appliqueront à former par leurs inftruftions & par leurs

exemples ( r ) , les mœurs des peuples confiés à leurs foins.


Quoique féparés les uns des autres par les limites de leurs
Dioccfes ( y ) , ils feront unis par les liens de la paix & de la
charité. Chaque année ils feront la vifite de leur Diocèfe ,
êc travailleront à détruire les reftes des fuperfîitions payen-
nes ( r ). Ils avertiront les Abbés & les Abbefles de vivre
conformément à leur Règle , & de donner bon exemple aux
JVloines & aux Religieufes qui font fous leur conduite (« ),
Les Monafleres dont les féculiers fe font emparés par une
violence tyrannique & par avarice , ne feront point négligés
par les Evêques {x) : ils en fciont la vifite , s'il eft nécefi^ai-
re, & auront foin qu'il y ait un Prêre afin que ceux qui y ;

demeurent ne manquent pas des choies dont il eft befoin


pour n'ordonneront Prêtres , ni Clercs ni Moi-
le falut. Ils
nes (y ) ,
ne fe foient afiiirés auparavant de la probité
qu'ils
de leur vie , de leur capacité & de leur doèlrine. On aura foin
dans les Monafteres, tant d'hommes que de filles (2) , de faire
des lectures , &: d'y tenir des Ecoles pour l'inftrudion de la
jeuneflTe ; afin que l'Eglife puiffe dans fes befoins , en tirer de
l'utilité.

VIL Les Prêtres quitteront les affaires féculieres pour s'oc-


cuper entièrement du fervice de l'Eglife (a), de l'office de

(y) Tom. 6. CofK. p. I


J73.
(r) C<i». I. (y ) Ca>i. 6.
(5) Ca„. X. ( t ) Can. 7.
(t) C-.n. 5. (4) C*n, 8.
(«^ Can, 4.
,

DES CONCILES. Ch. XLIT. 779


TAurel &
du cuire dîvin. Ils prendront foin de la mailbn
d'oratoire Se de fes orncmcns ; s'emploieront à la !c6lure, à
la prière, à la célébration des Méfies, au chant des Pleau-
«mes ; rendront fervice aux Abbés Sz aux AbbefTes ; corrige-
ront & avertiront ceux qui font fous leur conduite , & les
porteront à la vertu autant par leurs exemples que par leurs
difcours. Ils prêcheront la parole de Dieu , & atiminiftrcronc
les Sacremens dans tous les lieux de leur dépendance ( ^ )
prenant garde de fcanddlifcr les féculicrs ou les Moines, par
des excès dans le vin , par trop d'attachement au lucre, ou
par quelque difcours peu décent. Non-feulement ils appren-^
dront le Symbole (c) , l'Oraifon Dominicale , les prières dé
la Meflc , celles du Batême & les cérémonies qui s'obfervent
dans Tadminiflration des Sacremens ; mais ils lès explique-
ront encore en langue vulgaire à ceux dont ils font chargés.
Les fondions facerdotales fe feront par-tout de la même ma-
nière (d) , &'on confervera aufli Tuniformitc dans l'admi-
niftration du Batême. Ceux qui fe préfenteront pour le re-
cevoir , feront infîruits de ce qu'il faUt croire ; & on appren-
dra à ceux qui fervent de parrains aux enfans , ce que c'eil
que de renoncer au diable & à fes pompes , & quelle cfl la
foi dont ils doivent faire profc/fion. Les Prêtres (e) , en s'ac-
quittant de l'Office divin , ne déclameront point à la ma-
nière du Théâtre mais ils chintcront modeuement 8c llm-f
:

plemenr , fuivant fulage de l'Eglife. Ceux qui ne peuvent


chanter fe contenteront de prononcer en lifant(/). On ob-
fervera les Fêtes de toute l'année le même jour qu'elles font
marquées dans le Martyrologe Komain. Le "Dimanche fera
célébré par-tout de façon qu'il foit employé uniquement ati
Service divin {g). Tous les Abbc-s &
les Prêtres demeure-
ront Ce jour-là dans leur Eglife pour y célébrer les faints My-
fteres , à rfioins qu'ils ne loient obligés d'en fortir pour des
railons indifpenfablcs. Il en fera de même des autres Fêtes
majeures, où le peuple s'affemble dans l'Eglife pour enten-,
dre la parole de Dieu (Z^). On chantera les fcpt Heures ca-t
noniales du joui:- &
-de la nuit , en oblfervant par -tout iinc

(-/' Ct».9. ( C/) C.»«. 13.


(îr)C.»«. 10. (g) C..;;. 14.
I
(^d)Cau. II. C^J Cï». ly.
j
(<) Citi, I z, «*

Fffffij
780 DE s C O N CI LE
s.
manière uniforme dans la pfalmodie ou le chant des Pfeau-
mes & on ne mêlera dans la récitatioa des Offices , aucune-
:

prière que celles qui font tirées de l'Ecriture , ou à Tufage de


l'Eglife Romaine. Aux prières que les Eccléfiafliques & les
Moines ou ReligieuCes feront pour eux-mêmes , ils en ajoute-
ront pour les Rois & pour tout le peuple Chrétien.
VIII. Les Rogations ou Litanies feront faites par k Qer-
gé & par le peuple avec beaucoup de révérence le vingt-cinq;
Avril (i) , c'efl-à-dire , le jour de Saint Marc & trois jours
avant TA fcenfion. En 'ces jours-là on jeûnera jufqu'à None>
on célébrera la Mcffe , & on portera en procelTion la croix
& les reliques des Saints , fans pouvoir mêler à ces cérémo-

nies des chants profanes. La Fête de Saint Grégoire fera cé-


lébrée en fon jour ( /) , & celle de faint Auguftin , fon dif*
ciple, le vingt -(ixiéme de Mai. En ces deux jours on s'ab-
fliendra d'œuvres ferviies & dans les Litanies on récitera
:

après le nom de faint Grégoire > celui de faint Auguftin ,


Pcre & Dodeur des Ang!ois (m). Les jeûnes des Quatre-Tems
s'obferveront au même jour & en la même manière qu'on les.
cbferve dans l'Eglife Romaine : & on aura foin d'en avertir
le peuple. Il eft ordonné aux Moines d'être foumis- à leurs.
Supérieurs , de vivre félon leur Inftitur & de s'habiller mo-
deftement , fans rechercher dans leurs habits de vains orne--
mens à la façon des féculiers («). LesEvêques veilleront fur
les Monafteres fitués dans leur Diocèfe , prendront garde
qu'on y vive en paix ; que les Moines s'y appliquent au tra-
vail & à des Icftures fpirituelles ; que les féculiers n'y entrent
pas facilement;; & que ces maifons ne foient point des de-
meures ou des. retraites de Poëtes , de Muficiens & de bouf-
fons. L'entrée dans les Maifons de filles eft principalement
défendue aux laïcs ( ) : & il eft ordonne qu'elles s'applique-
ront plutôt à lire de bons livres & à chanter des Pfeaumes ^
qu'à broder des étoffes de diverfes couleurs , pour fervir à la
vani'é des gens du monde.. Les repas des Religieux & des.
Religieufes , de même que des Eccléfiafliques {p ) , feront fo-
feires is'il eft polliblc, ils ne les commenceront qu'après l'heure:

(») Can. lé^ I (n) Cun. 19.


(t)Can.j7. (o)C.i«. îo,
'
j
i^m) CarJ, j8. 1 (f) Can. il.
>
1 ,

DES CONCILES. Ch. XLîI. 781


de Tierce achevée , c'efl-à-dire
ce n'eft en cas , à midi {q) , fi

d'infirmité. On avertira les Moines, les Rcligieufes les &


Clercs (r), de fe préparer fans cefle à recevoir le Corps &
le Sang de Jefus-Chrift: on reprendra ceux qui, pour ne pas
s'en approcher, vivent mal
négligent de confeiïer leurs pé-
,

chés & de s'en corriger. On


exhortera à la fréquente Com-
munion ( i ) , non-feulement les enfans qui n'ont pas encore
perdu leur innocence , mais au(Tî les perfonnes plus âgées
foit qu'ils vivent dans le célibat ou dans le mariige , & qui
celTent de pécher: de peur que faute de cette nourriture fa-
lutaire , ils ne tombent en défaillance , félon ces paroles de

Jefus-Chrifl : Si vous ne mangez la chair du Fils de l'homme


,
C$- ne buvez fon fang , vous n'aurez pas la vie en vous. Les
féculiers qui fe préfentent pour recevoir l'habit monaflique
y
leront éprouvés avec d'autant plus de foin par les Supérieurs
des Monafleres ( f ) , qu'il ne leur fera plus permis de les ren-
voyer après qu'ils auront été reçus , fi ce n'eft pour des cau-
fes graves , au Jugement d'un Synode. Les Evcqucs , au re-
tour d'un Concile ( m ) , en feront publier les Décrets dans
une AfT^mblée particulière des Prêtres , des Abbés & des
Prévôts & s'il arrive qu'ils ne puiffcnt remédier à certains
:

abus de leur Dioccfe, ils en feront leur rapport dans le Con-


cile en préfence de l'Archevêque de tous les autres , afin &
qu'on y apporte remède. Quelques-uns prétendoient pouvoir
par des aumônes , diminuer ou [commuer les peines canoni-
ques impofées par le Prêtre pour la fatisfadion des péchés.
Le Concile , en condamnant cet abus qui commençoit à s'in-
troduire , établit plufieurs maximes fur l'auïnône , puifées
dans les Ecrits des Pères, dont on avoit fait la le£lure. Pre-
mièrement , il défend de la donner dans le delTein de pécher
plus librement, ne îùt-ce que dans des chofes de peu decon-
féquence. En fécond lieu , il ne veut pas qu'on h fafle d'un
bien mal acquis. TroLfiémement , que cène foit pas non plus

(q) Cm. 11. Tadmonendi fint, quatenus frequentiùs corn-


er) C%n. 1 munirent, ne falutaris cibi potûfque ino-
( I ) Adjundum e(l quod laici puerî hor- pia deficiant , dicente Doniino Nr/fm.!»-
:

fint , qui necdum videlicet lafcivien-


landj duciveritis carnem Filii hominis ^ biberi'
tis SEtatis corruptela fint vitiaa , ut fepiùs lis fangriiHem ejus , non hjbebiiis vitam in
communicent : necn in proveiflioris quo- vabis mmeti'tm. ConC. ClovesJl. Can. Xi.
^
çue a:tatis, feu ciHbes feu etiam conju- (f)C^». 14.
gati ,
^ui peccare deiînuat , ad hoc ipfuia
782 D E s C O N C T L E s.
pour diminuer la fatisfadion de la pénitence canonique , ou
pour s'exempter du jeûne &'des autres œuvres expiatoires
impofées pour des crimes par ie Prêtre du Seigneur. Il veut
donc que Faumône foit un moyen au pénitent d'accélérer la
corredion de fes moeurs (;>;),& de fléchir plutôt la colcre
divine qu'il avoit provoquée par fes mauvaifes adions; parce
qu'il doit fçavoir que plus il s'efl: permis d'a£lions défendues,
plus il doit s'abftenir de celles mêmes qui font permifes ; &
que plus les maux qu'il a faits font grands , plus aulfi les fruits
de fes bonnes œuvres doivent être abondans. Il c(l bon de
chanter fouvent des Pfeaumes , de fléchir fouvcnt les genoux
avec une intention droite & fincere, & de faire tous Ks jours
l'aumône mais il ne faut pas, càcaufe de ces bonnes œuvres,
:

fc difpenfcr du jeûne impofc iuivant les règles de l'Eglife :


& il efl befoin que la chair qui , pour avoir eu trop fes aifes,

nous a engagé dans le péché, foit affligée & mortifiée par le


jeûne , afin qu'elle nous fafle obtenir au plutôt le pardon de
nos fautes. Le Concile condamne aufli ceux qui s'imaginoienc
s'acquitter de leur pénitence par d'autres perfonncs qui chan-
toient des Pfeaumes ou qui jeûnoicnt pour eux (y). Que cha-
cun fçache, dit- il , que la même chair qui a porté au ^éché,
doit être punie félon la mcfure du péché , fi l'on ne veut
qu'elle foit punie dans le fiécle futur par le Juge éternel. S'il
étoit permis de fatisfaire pour fes péchés par autrui, les ri-
dics le fauveroicnt plus aifémcnt que les pauvres, contre la
Mail. ip.î4. parole expreffe de la Vérité :Il ejî plus difficile qu'un ricTie e?t-

tre dans le R oyc^tne du Ciel , que non pns quart chameau finjje
par le trou d'une èguille. H efl dit dans le Canon , que quoique
l'on n'entende pas en chantant , le latin des Pfeaumes , on
peut diriger fon intention aux demandes générales que l'on
doit faire à Dieu. Ce qui prouve que l'Ofiice public fe fai-
foit alors en latin dans les Eglifes d'Angleterre mais comme
:

les Pfeaumes y étoient auffi traduits en langue faxonne ; quel-


ques-uns , dans leurs prières particulières , récitoient les Pfeau-
mes en cette langue.
DC. 11 cfl: défendu à qui que ce foit d'établir des Commu-
nautés plus nombreufcs ( z ) , que les revenus ne peuvent en

COO». i6. I (î,)C.». *!.


(;) C.W.17, 1
DES CONCILES. Ch. XLI IL 785
entretenir pour la nourriture , ibit pour le vêtement ;
, loic
Se. aux Moines Se aux Rcligicufes , de porter des habits fc-GU-

Uers & profanes, ou d'affetter dans les leurs des modes Se


des ornemens contre l'ufage de leur état. Cette dcfenfe s'é-
tend également lur les Clercs. On ordonne aux Religieux &
aux Rcligieufes (a) , qui depuis certain tems demcuroienc
dans les mailons des laïcs, de retourner dans les Monafte-
res où ils ont fait profefilon , loit qu'ils en loient lortis de
leur plein gré , ioit par violence , lans qu'on puifle rcfufer
de les y recevoir. Le dernier Canon veut qu'à toutes les Heu-
res canoniques l'on faffe des prières (ù) j.non-leulement pour
les personnes confacrécs à Dieu , mais aufTi pour les Rois, pour
les Princes, pour tout
peuple , le &
que l'on offre des lacrifices
pour le repos des âmes des défunts.

CHAPITRE XLIII.
Des Conciles de Verberîe , de Carîfiac , de Conflantim-
ple j de Vemeuil f de Metz , de Comptegne , de Geii"
tilli , de Rome.

I. TT? N 753 Verberîe , Maifon Royale , au


, il fe tint à Condie de
Vj Dioccfe de Soiffons (c) , une AfTemblce de la ISation
^"''"''*

FiaïKjOile , où le Roi Pépin , les Seigneurs , les Evêques &


les Abbés affifterent. Ce fut ce Prince qui la convoqua la fé-
conde année de fon règne, c'eft-à-diie , en 753. On y fie
vingt Se un Canons , dont la 'plûpaçt regardent les mariages
inceftueux. Voici les plus remarquables. Ceux qui fe feront
mariés au troiliéme degré de parenté fe fépareront (d) mais :

après avoir fait pénitence , ils auront la liberté de fe marier


à d'autres. On ne fépare point ceux qui ont contradé ma-
riage au quatrième degré ; feulement on leur impoie péni-
tence. Si une femme a confpiré avec d'autres hommes contre

fa) Can. Z9m (c) Tom. 6. Coric. p. lC-^7»


|
784 DE S C O N C I L E S.
la vie de fon mari ( e ) , & qu'il en ait tué un en fedéfen-
dant , il peut la quitter & le remarier ce qu'il faut
: entendre
après la mort de fa femme (/) : &
il ne le pourroit pas même

alors s'il étoit jugé coupable d'homicide mais la femme cri- :

minelle ne pourra jamais fe remarier; parce qu'une partie de


la pénitence des grands crimes étoit d'exclure du mariage
pour toujours. Celui qui a époufé une femme ferve la croyant
libre, peut en époufer une autre (g). On accorde la même
liberté à la femme libre, qui aépoulé un ferf dont elle ignoroic
la condition (A). Mais celui qui prend volontairement pour
femme fa fervante , doit la garder. Les Ordinations faites
par des Evêaues vagabonds , font nulles fi toutefois ceux :

qui ont été ordonnés Prêtres par eux , font de bonnes mœurs ,
on pourra les ordonner. Le mari qui aura permis à fa femme
de prendre le voile , ne pourra fe remarier à une autre ( i ). A
la fuite de ces Canons rapportés parmi les Capitulaires ( / ) ,
on en trouve neuf autres j qui ne font que des explications des
différentes efpeces d'inccfte , avec les peines qu'on doit impo-
fer aux coupables.
Concîle de II. Nous avons parlé dans l'article du Pape Etienne II (/») ,
Carifiac ou ^q l'Aflemblée qui fut tenue â Carifiac ou Quiercy-fur-Oife , le
Quiercyen
j 4 j' Avril de l'an 754.

CoHciie de IIL La même année , qui éroit la treizième de PEmpereur


Conftantino-
Conftantin , ce Prince qui s'ctoit déjà déclaré en plufieurs oc-
cafions contre les images ( » ) , aflembla un Concile dans le
Palais d'Hierie fur la côte d'Aile, vis-à-vis Conftantinople.
Ildura depuis le dixiane de Février jufqu'au huitième d'Août,
où Evêques paflerent dans l'Eglife de Blacquernes. Ils
les
étoient au nombre de 338, ayant à leur tête Grégoire de
Néocéfarée , Théodofe d'Ephefe & Sifinnius de Perge en
Pamphilie. On n'y vit aucun Patriarche ni aucun Député des
Eglifes de Rome , d'Alexandrie , d'Antioche & de Jérufa-
lem & il ne pouvoit y avoir d'Evcque de Conftantinople ,
:

le Siège étant vacant par la mort d'Anaftafe. Il ne refte plus


de cette Affemblée qu'une définition de foi^ qui cft intitulée :

(e) Can. f. (i) Can, II.


Hj) Fleuri, Uift, Eedef. lib. iPfg. (/)Baloz. Tcm. I. C'piiul. f. i6f.
(m) lam. 6. Coitc. p. 1650.
(^1 Can. 9. [») Tom, 6, Conc.f, i66i-

Définition
,

DES CONCILES. Ch. XLIII. 785


Définition du faint &
grand Concile œcuménique. Mais on l'a
toujours regardé dans l'Eglil'c Catholique , comme l'ouvrage
4'un Conciliabule , puilqu'cn effet elle eft dircdement oppo-
fée à la dodirine de TEg'ife fur le culte des images. Cette
définition de foi fe trouve parmi les A£les de la lixicme ac-
tion du fécond Concile de Niccc (0). Il en fera parlé en
cet endroit , & on apportera les raifons de rcjctter le Concile
^es Iconoclafles. ,
,

IV. Prefque tous les Evêques des Gaules furent appelles à Concile d«
l'Aflemblée que Pépin tint à Vcrneuil-fur-Oife {p) , Ton- ^""^"*^'
ziéme de Juillet de l'an 755 , le quatrième de fon règne mais :

on ne fçait point combien il y en aflîfta , parce que nous n'a-


yons les foufcriptions d'aucun. Le but de ce Concile fut le
rétabliffement de l'ancienne difcipline , & la réformatioti
d'un grand nombre d'abus. Les Evêques ne fe flattèrent
pas néanmoins de remédier à tous les maux de l'Eglife.
11 falloit un rems plus favorable. Ils firent vingt-cinq Ca-
nons , où il eft dit que chaque Evêque aura dans fon Dio-
cèfe la Jurifdidion , tant fur le Clergé que fur les Réguliers
avec pouvoir de les corriger fuivant les Canons ( ^ ) , & de
faire en forte qu'ils vivent de façon à fe rendre agréables à
Dieu ; que l'on tiendra deux Conciles ; l'un au premier jour
de Mars ( r ) , au lieu défigné par le Roi en fa préfence ;&
l'autre au premier d'OQobre , à Soiffons ou en tel autre en-
droit dont les Evêques feront convenus au mois de Mars ;
que les Métropolitains appelleront à ce fécond Concile les
Evêques , les Abbés & les Prêtres , qu'ils trouveront à pro-
pos i que les Monafteres , foir d'hommes , foit de filles ( ^ ) ,
où l'on ne vivra pas félon la Règle , feront réformés par l'E-
vèque diocéfain ; que s^il ne le peut , par le Métropolitain ou
par le Concile , en cas que le Métropolitain ne foit point
obéi ; & que fi les Abbés & les Abbefles n'obéiflent point au
Concile , on les excommuniera , & d'autres feront établis à
leur place dans le Concile même avec l'autorité du Roi ;
qu'une Abbefle n'aura pas deux Monafteres , ni la liberté de
(ortir du fien (t ) , fi ce n'eft en cas d'hoftilité , ou qu'elle foit

( • ) Tom, 7. Cette, f, 596. (r) Can. 4.


I
(/>) Tom, 6.Conc.p. U64, M^BILL. 1 (s) Can. y.
Atin4l. lib. II. num.lt, l ((j C««. é*

'
Tome XX, Ggggg
yU DESGONCILE S,
mandée par le Roi , une fois Tan & du confcnrement de l'E-

vêque diocèfain que les Religieufes ne fornronc point non


;

plus de leur Monaftere , & que s'il arrive qu'elles aient be-
foin de faire connoîtrc quelque chofe au Roi ou au Concile,,
elcs le feront par quelques députés ; que s'il y a des Mona-
fteres qui ne puilTcnt, à caufe de leur pauvreté , vivre dans
l'obfervancc régulière , TEvêque s'informera du vrai , & en
fera fon rapport au Roi , afin qu'il puifle par fes charités re-
médier à ce mal que s'il fe trouve des Religieufes dans un
;

Monaftere qui ne veuillent pas vivre régulièrement, & qui ,


par défaut de mœurs , ne foient pas dignes de demeurer avec
les autres , l'Evêque ou l'Abbefle les mettra en un lieu féparé y
où elles travailleront de leurs mains fuivanr Tordre de l'Ab-
beffe , jufqu'àce qu'elles méi'itent de retourner dans leur Mo-
naftere par une vie plus régulière. Le Concile ordonne en-
fuite («) , qu'il n'y aura de Batiftere public dans aucune
ParoilTe , fi ce n'eft où l'Evêque diocèfain en aura ordonné ;
que les Prêtres pourront toutefois batifer par-tout en cas de
nécefiité ( j: ) ; que hors ce cas , aucun Prêtre ne fe donnera
la liberté de batifer dans le Diocèfe où il fe trouve , ni d'y
célébrer la Mefle , fans la permifiion de l'Evêque. Si un Prê-
tre dégradé par fon Evêque entreprend par mépris de faire
quelque fontlion de fon office {y)^ il fera excommunié par
fon Evêque ; & quiconque communiquera fciemment avec
lui , encourra l'excommunication. Cette cenfure s'étend auflî
fur les Clercs & les laïcs qui communiquent avec un excom-
munié connu. Celui qui étoit excommunié ne devoit point
entrer dans l'Eglife, ni boire ni manger avec aucun Chré-
tien. Il n'étoit permis à perfonne de recevoir de lui des pré-
fens , de lui donner le baifer , ni de le recevoir de lui , de
prier avec lui , ni de le faluer avant qu'il eût été réconcilié
par fon Evêque. S'il fe prétendoit excommunié injuftement^
il pouvoit en appeller au Métropolitain & plaider fa caufe

devant lui , mais en gardant toujours les règles de l'excom-


munication. Défcnfe aux Moines qui vivent en régularité ,
d'aller ci Rome ou ailleurs ( z ) , lans la permifiion de leur
Abbé. Si toutefois l'Abbé négligcoit d'entretenir le bon or-

iv«'> «««ù
DES CONCILES. Ch. XLIII. 787
dre dans fon Monaftcre , ou que ce Monaftcre vînt au pou^
Voir des laïcs , les Moines; qui ne croiroicnt pas pouvoir y
demeurer fans danger pour leur ialut, pourront, du conicn-
temcnt de l'Evêque, pafler en d'autres Monafteres. Ceux qui
difent qu'ils fe iont fait tonfurer pour l'amour de Dieu (/» ) ,
& vivent de leur propre bien fans ctre lous la difciplinc de
l'Evêque, ni dans un Monaflere , feront contraints , ou de
vivre comme Moines dans un Monafterc , ou comme Clercs
fous la main de l'Evêque {b). Les Clercs feront obliges de
demeurer dans l'Eglifc où ils ont commence de fervir ; fi ce
n'ell qu'ils foient obligés de pafler à un autre pour avoir été
chafles de leur patrie. Quant aux Evêques qui n'ont point de
Diocèfe & dont l'Ordination n'efl; pas connue (t ) , ils ne
pourront faire aucune fonélion fans la permiflïon de l'Evê-
que dioccfain. Il s'ctoit glifle un abus fuperftitieux parmi les
peuples touchant l'obfervation du Dimanche (d) , qui ap- &
prochoit du judaïfme , ne voulant pas même en ce jour pré-
parer ce qui ccoit néceffalre pour la nourriture. Le Concile
ordonne que l'on fera le jour du Dimanche ce qui croit per-
mis dans les liécles précédens , &
que l'on s'abfliendra feule-
ment des œuvres ferviles , aHn que l'on puiflTe plus facile-
ment aller à l'Eglife pour y vaquer à la ordonne
priere»?41
que tous les mariages {e) , ioit des Nobles , foit de ceux qui
ne le font pas , feront célébrés publiquement. ;

V. Les Canons feize & dix-fcpt font les mçmcs que les
trois & vingt-cinq de Calcédoine. Le dix -huit cfl tiré du
troifiéme Concile de Carthage. Le dix neuf confervc aux
Eglifes leurs immunités (/). On diltingue dans le vingtième, :3
les Monaftcrcs Royaux (g ) , c'cft-à-dire , Ceux que les Rois i

avoient fondés , d'avec les Monafkrcs Epifcopaux qui avoient


été fondés par les Evêques. Les premiers n'étoient foumis
qu'à l'infpedion de l'Archichapelain les autres à celle do
:

l'Evêque , & l'Abbé ou l'Abbcfle étoient obligés de lui ren-


dre compte de leurs biens. Le vingt-deuxième porte que tous
les pèlerins feront exemts de péa.9^'{k}. Le vingt-quatriémo
défend de donner de l'argent pour parvenir à quelque degré

<*)Crt«. 12. j
{f)Can,iç.
{()C.w. i \.
I
((j) C««. 10.
(li) Clin. 14. I, {h) dn. il.
,

788 Ti D E S C O N CI LES.
que ce foit du dans le
miniftere eccléfiaftique {i). Il eft dit
vingt-cinquième, que ni les Evêques ni les Abbés, ni même
les laïcs , ne prendront aucun falaire pour rendre la juftiee.
A ces Canons il y en a cinq d'ajoutés dans les Capitulaires (/) :
mais ils font abiolument les. mêmes que les cinq derniers du
Concile de Metz en 75^..
Concile de VI.. Il eft dit dans le titre , qu'il fut afifemblé après celui
9Iguen7j'6.
jg Verncuil , ious le règne de Pépin (m): l'année n'en eft
pas marquée. M. Baluze croit que ce fut la cinquième de 'ce
Prince, qui revient à l'an 756 de l'ère commune, le Père
Labbe met ce Concile trois ans plutôt c'eft-à-dire, en 755,
•,

li y a aufli de la variété dans le nombre des Canons. 11 y en

•a dix dans l'édition des Capitulaires , & feulement huit dans

la Colledion des Conciles. Les deux premiers puniflent d'a-


mendes ou de peines corporelles («) , les incefles, s'ils ont
été commis par des laïcs ; H c'eft par des Eccléfiaftiques , ils
iéronc , ou privés de l'honneur de leur grade , ou punis de
verges, ou mis en prifon, fi ce font de moindres Clercs, Le
troiliéme charge l'Archidiacre de l'Evêque (0 ) , d'appeller
les Prêtres & les Clercs au Synode. Le quatrième & le cin-
quième ordonnent à ceux qui tiennent du Roi.desEglifes ou
autres Bèn<KSces (p) , de payer les dixmes , cens & autres
redevances à qui elles appartiennent , fous peine d'en être
privés , ou du moins d'une amende pécuniaire parmi ces re- :

devances il y en a une qui regarde la fourniture de la cire à la


Mere-Eglife.
Concile de VII. L'Affemblée de Compiégne , en 757 (^) , efl comp-
Compiégneen [ée entre les Conciles, de même que celles qui le tinrent fous
7j'-7«
Pépin & Charlemagne; parce que les Evêques y a/fiftoient
aulli bien que les Seigneurs. Les Légats du Pape Etienne II;
fçavoir , l'Evêque George, 8c le Sacellaire Jean , furent pré-
fcns à ce Concile , &
en approuvèrent les Canons. lis font,
au nombre de dix- huit dans les Recueils des Conciles, &
de vingt & un darts l'édition des Capitulaires mais les txois. :

dcrniersappaiitienncnt villbleraent au Concile de Metz , où

(i) Can. 14. f (f>) Caii. j.


(/) Tom. i.Capitul. Ba[tH. f^, 176, j (p^) Can. 4. y.
(w) Tom. C.Coiic. f, léjp. i^ tom, I. I (1/) Tom. 6. Coiic. p, lépf. ^Tom. i.

Ctpiiul.p. 177. Ctpitut. p, iSl.


(/O O/J, 1.2. .1. j
,

DES CONC ILE S. Cn. XLIir. y&p


ilsfont les trois premiers. Les autres ne font que rcpccer ce
qu'on avoit déjà décidé dans les Conciles précédens princi-
,
palement dans celui de Verberie. Nous ne donnerons ici que
le neuvième & le feiziéme» Celui-là. porte ( r , que le Batc-
)
me adminiftré par un Prêtre qui n'eft pas batilé lui-même
,
ne pas d'être valide , pourvu qu'il l'ait conféré au nom
laiffe
jde la fainte Trinité. Il efl die dans celui-ci
, que fi de deux
conjoints , l'un efl attaqué de la lèpre &
l'autre eft fain , ce-
lui qui peut le remarier avec la permilTion de l'autre.
eft fain
Ce fut pendant l'Affemblée de Compiégnc , que Pépin reçut
les Ambaffadcurs de l'Empereur Conflantin, qui, entre au-
tres préfens , lui envoya des Orgues , jufques-là inconnues en
France.
Vin. Saint Othmar , Abbé de Saint Gai (s), s'étant plaint Conciliabule
au Roi Pépin , que deux Comtes , Garin &
Roadard j qui J'AUemagae
gouvernoient la Province du Haut Rhin, s'cmparoienr des ter- ^" ^^^*
res dépendantes de ion Monaftere, &
des biens de plufieurs
autres Eglifes , ce Prince les menaça de fa difgrace , s'ils ne
refticuoient. Réfolus de fc venger fur l'Abbé, ils le firent ac-
cufer d'incontinence par un de les Moines , nommé Lambert,
On affembla un Concile fan 755? , auquel préfida Sidonius
Evêque de Confiance , &
Abbé de Richenou. Saint Othmar
obligé de comparoître , protefta devant eux de fon innocen-
ce ; &ne dit autre chofe pour fa défenfe , fâchant qu'il le fc-
roic inutilement. On le condamna à être renfermé dans le
Château de Potame , où il pafla le refle de fes jours appliqué
au jeûne &
à la prière.
IX. A Rome , le Pape Paul I ayant fait un Monaficre de Concile de
la maifon paternelle (r) , le dora de grands revenus, ac- Rome en 761. &
corda un privilège à Léonce qui en étoit Abbé, portant que
les biens donnés a ce Monafiere, ou qui lui feroient donnés
dans la fuite , ne pourroicnt lui être jamais ôtés. Ce privilège
fut accordé dans un Concile que le Pape Paul tint à Rome ,
le deuxième de Juin de l'an 761 , & foufcrit par vingt-trois
Evêques , dix-huit Prêtres titulaires des Eglifes de cette Ville
& l'Archidiacre.
X. En 765 , la quatorzième année du règne de Pépin («) , Conciie'd'Ai.;
tignienyéj.
' -' " '-^i I*

(r)Ctn.ç. t (t) UiJ. p. idZçf.^ ijoo,


Qi}Tom,6.Conc.p. 1700t. l (m) iiirf.f, 1701.
790 DES CONCILES. ''

il y eut une Aflemblée générale de la Nation Françoife â


Attigni-fur-Aifne dans le Diocèfe de Reims: vingt-fept
,

Evoques y avec dix-fept Abbés. Ils firent entre eux


affiflerent
promeffe réciproque, que lorfque quelqu'un d'eux viendroit
à mourir , chacun feroit dire cent Pfeautiers célébrer cent &
Méfies par fes Prêtres , &
que l'Evêque lui-même diroit trente
Méfies. C'eft tout ce qui nous refte des Actes de ce Concile ,
auquel faint Chrodegang de MetzafTifta.
Concile de XI. Lcs Légats du Pape Paul I fe trouvèrent à celui que
Gemiiii en
j^ ^^^^^ Vtince tint à Gentilli près de Paris , en 767 ( a; ). Il
femble qu'il fut affemblé pour entendre les Ambaffadeurs de
l'Empereur Conflmtin, qui avoient quelque chofe à propo-
fer de la part de leur Maître, fur la Trinité: car on y agita
la queftion qui regarde la proceffion du Saint-Efprit ; fçavoir,
s'il procède du Fils comme du Père. On y examina encore

s'il étoit à propos de peindre dans les Eglifes les imîges des

Saints. Adon de Vienne &


l'Abbé Reginon, qui rapportent
ces deux faits ne nous apprennent pas quelle fut la décifion
,

du Concile (y ) Reginon ajoute, que les Ambaffadeurs étoienc


.

auffi chargés de répéter les Provinces d'Italie que le Roi Pépin


avoir données à l'Eglife Romaine.
Concile de XII. 11 a été parlé ailleurs du Concile que le Pape Etienne
Ronieen76>îii afTcmbla à Rome (z) , pour la condamna ion du faux Pape
Conflantin, & de tout ce qu'il avoit fait pendant fon intru-
fion fur le Saint Siège. Nous ajouterons ici ,
qu'on y traira
aufTi de la vénération des images ; & que les Evêques ayant
examiné ce qui en étoit dit dans les Ecrits des Pères , or-
donnèrent que les reliques & les images des Saints ieroient
honorées luivant l'ancienne coutume ; & anarhématiferent le
Concile tenu depuis peu à Conflantinople contre les images.
Conciles de XIII. Nous n'avons aucune connoifTancc de ce qui fe pafTa
Vornis, deVa- (jans les Concilcs de Vormsen77o
(<2), de Valencienncs en

Di'nt'oivin.
^
77^ i ^^ Vorms en 772. On rapporte de ce dernier, un Dé-
gue,'dc Gènes, cret touchant la manière dont un Prêtre acculé doit fe jufli—
de Pjiderbor-
^^^^ jyjgjj Rjculfe y eft cité comme Archevêque de Mayen-
ne, de Duria „ .i n iw ^ ,^ '

&de Life, cc, & u elt certain qu il ne etoit pas en jyz. En 772 , la
i-i . ,

\ingt-dcuxiéme année du règne de TafTilon, Duc de Bavic-

(x)rcm. i.CnHc.f, (O "«''


fS- mi.Hjf'?.
170J, I
(; )
J'*»<'.
1 00 ^*"/. ir^' i7»<*. i79i.
DES CONCILES. Ch. XLIII. 791
re ce Prince fir tenir un Concile de fix Evoques
, &
de treize
Abbés à Dingolvingue (b) , où Ton fit treize Canons qui re-
gardent autant le civil que la Religion. Le premier prelcnt U
lanftification du Dimanche fuivant la Loi de Dieu les Ca- &
nons ; quatrième interdit le mariage aux Religieufes ; le
le

treizième renouvelle la promefle que lesEvêques &


les Abbés
de Bavière s'étoient faite mutuellement , qu'à la mort de l'un
d'entre eux , chacun feroir célébrer dans fa maifon Epifco-
pale ou dans fon Monafterc , cent Meffes pour le défunt &: 1

chanter autant de Pfeaumes ; &


que l'Evcque ou l'Abbé diroic
lui-même trente MelTcs , ou les feroit dire par un de fes
Moines ou de fes Prêtres , avec autant de Pfeautiers. Ces Ca-
nons font fuivis de feize Loix ou Décrets pour la police pu»
blique , à l'exception du dernier qui défend à ceux qui font
toniurés de nourrir leurs cheveux à la manière des féculiers ;
& à celles qui ont reçu le voile , de le quitter pour reprendre
l'habit du monde. L'année fuivante,Charlcmagne s'écant mis
en chemin pour aller au fecours du Pape Adrien , tint un Con-
cile à (jenes (c) , où il fut réfolu qu'il diviferoit fon armée en
deuxcolomnes; qu'il en commandcroit une, & Bernard fon
oncle l'autre , pour entrer en Italie par deux endroits différens.
On met deux Conciles à Padcrborne (i^),run en 777jrautre en
786 , où Ton fit plufieursKéglemcns touchant les Saxons nou-
vellement convertis. Les Conciles de Duria en 775? , de &
Lipe en 780 (e) , furent encore affemblés, tant pour régler le
gouvernement cccléfiafiique dans la Saxe , que pour y établir
es Evcchés. Il nous refte vingt-quatre Canons du Concile de
Duria. Il eft dit dans le premier , que les Suffragans feront
foumis à leur Métropolitain ; dans le fécond , que l'on or-
donnera des Evêques au plutôt pour les Sièges vacans ; dans
letroifième, que les Monafteres qui ont autrefois été régu-
liers , feront remis en règle ; qu'une Abbeffc n'aura point deux
Mon:.fteies , & réfidera toujours dans le fien ; dans le (eptic-
me, que chacun paiera la dixme de fes fruits^ &que la diftri-
bution en icra faite par l'ordre de l'Evêque.
XIV. Eginard dit que Charlemagnc affembla un Concile Conciles de
à Cologne, en 782 (/) , & que ce Prince y affifta en per-^°'
ne en
& de
Calchute ou
Calcu;.
(^b) ihhi.p. 1794. (f) ib,d. 1S24. 18:7.
I
(c) Ibid.p. 1799. [f)Tom. 6, Ccnc. f, 1817.
I
(</) Ibià. 1823. £^ iS6c. 1
7P2 DE s C NC I LE s.
fonne: mais il ne rapporte rien de ce qui s'y paffa , finon qu'il
y reçut des Ambaffadeurs ou Députés de diverfes Nations,
Il y eût la même année un Concile à Calchute ( c dans le
) ,
Royaume des Merciens: Grégoire d'Ortie &
Théophila6le ,
Evêque de Todi , Légats du Pape Adrien , y afllflerent avec
fix Evêques , un Député pour un Evêque abfent , des Abbés
& des Comtes. On y fit vingt Canons , qui portent en fub-
ftance , que l'on fera profeflTion de la foi de Nicée , &: de la
do£trine reçue &
établie dans les fix Conciles généraux ; que
le Batême fera adminiftré fuivant la forme dans les tems&
marqués par les Canons (d); que tous les fidèles fçauront le
Symbole & l'Oraifon Dominicale ( ^ ) ; que l'on avertira les
parrains de l'obligation qu'ils contratàent envers Dieu , pour
i'inflrudion de leurs filleuls (/). Que l'Evêquc tiendra deux
fois l'an fon Synode (^) , &
fera chaque année la vifite de fon
Dioccfe ; que les Clercs obferveront dans leur manière de vi-
vre &
de s'habiller , les ufages de l'Eglife Romaine ; les &
Moines, celle des Moines orientaux , afin qu'il y ait entre
eux &
les Chanoines une diflindion. Que les Heures cano-
niques feront récitées en leur tems &
avec révérence dans tou-
tes les Eglifes (k). Que les fidèles offriront du pain & non
pas une crout<; ( i ) ; que les Minières de l'Autel n'y ferviront
pas les jambes nues, & n'offriront pas le faint Sacrifice dans
des calices &
des patènes de corne de bœuf; que tous les fi-
dèles paieront la dixme , purfqu'ellc efl ordonnée de Dieu
même (/) que s'il arrive que quelqu'un meure fans péniten-
.;

ce ou fans confeflion , on ne priera point pour lui (m) ; que


les Rois feront choifis légitimement par les Prêtres & les an-
ciens du peuple («) ; &
que l'on aura foin de les choifir par-
mi ceux qui feront nés , non d'adultère ou d'inccfte , mais
de véritable mariage. Les Evêques adrefi"erent ces Canons au
Pape Adrien , par une Lettre qu'ils y joignirent , où ils &
marquent que les ayant propofés aux Evêques , aux Abbés ,
aux Sénateurs , aux Ducs , &
à tout le peuple du Royaume ,
tous avoient promis de les obferver.

(c) IhU.pag. i85l, {b)Cm. 7.


fi</) Can. I, {i)Cat,. 10.
(f) Cati. r.
(/) Caii. 17.
(f) Cnn. j. (m) Cati. !«,
{g) Cun. 4. (n)C-iU. 12.

xv.
,,

DES CONCILES. Ch. XLIIÎ. ypj


^ V. A ce Concile qui dernier du (ixicmc
,
eft le Tome Corcii? de

de Collcaion du Louvre en 167 1 (0 ) , le Père Labbe en


la ^g";^'^'" ""

a ajouté quelques autres dans un Appendice , fans donner


les Aéles d'aucun : ce qui les rend peu intcrenans. On peut
feulement remarquer fur celui de Cantorberi en 685 , qu'en-
core que faint Cuthbert y eût été élu tout d'une voix , Evêque
de Lindisfarne, il refufa de forrir de fon Monaftere; & qu'il
fallut que le Roi Elfrid allât lui-même l'en tirer , pour le con-
traindre à accepter l'Epifcopat.

CHAPITRE XLIV. |

Jptt fécond Candie de Nicée , pour les Images / feptiéme


généraL

î, T 'Ufage des Images efl très -ancien dans l'Eglife on.g,^^;^j^J^^« :

j en voyoit dès les premiers fiécles ; mais l'ufage en a le culte des


.1

varié luivant les rems. Nous parlons des Imaecs en peinture f^ages. 11 eft
&
r, l'cii .-. 1-
non pas en relief; celles-ci n ont eu Iku que plus tard ; h
ancien, ij/-
ce n'efl: dans les portiques des Eglifes , où l'on en voyoit dès
le feptiéme fiécle , fur-tout en France. Théodore , Le6leur
rapporte (p), qu'Eudocie envoya de Jérufalcm à l'Impéra-
trice Pulcherie, l'Image de la Mère du Seigneur , qu'on di-
foit avoir été peinte par l'Evangéliûe S. Luc. Eufebe de Cé-
farée (q) , parlant de la ftatuc de Jefus-Chrift , drelTée par la
Syro-phenilTe, ainfi [qu'on le difoit , remarque qu'il n'éroit
point furprenant fi les payens , qui avoient reçu du Sauveur
tant de bienfaits, lui euiTenr, en reconnoilTance , fait drcder
une ftacue ; puifque nous voyons encore , ajoute-t-il , les Ima-
ges de faint Pierre , de faint Paul ,& même de Jei'us-Chriil:
faites en peinture. Il feroit inutile de rapporter ce que les
anciens Ecrivains ont dit des Images. On a pu le voir dans
les volumes précédens , mais il n'eft pas aifé de montrer que

(<.)Tooi. i.CoHc.p, \i74.^feif, » (j) Lib% 7. H«jf. caf. l8.


(/>) Theodor. lih. 1. Hifitr*
\
Tome XX, Hhhhh
7P4 .
I>U SECOND CONCI LE
l'Eglife en ait exigé
dans tous les tems : feulement il
le culte
efl certain qu'elle ne jamais défapprouvé ,
l'a la raifon feule &
montre que les Images des Saints iont refpedables par elles-
mêmes. Peut-être l'Eglife s'eft-elle difpenfée de leur établir
un culte dès le commencement , de peur que les Gentils qui,
en fe convertilîcint à la foi , quittoient leurs Idoles, n'y re-
tomb.Tffent en honorant les Inwgcs. C'efl; pour cette raifon
que quelques Evcques ont jugé à propos de ne pas admettre
dans leur Egl fe l'ufage des Images , afin de n'être point une
cccafion de fcandale aux Gentils. Le Concile d'Elvire dé-
fendit d'en peindre fur les murailles (r) : mais il paroît qu'il
fît cette défenfe par un autre motif; fçavoir qu'il y avoir lieu
,

de craindre qu'elles ne fufTcnr profanées par les infidèles dans


tems de perfécution.
les
Il n*e/î p.s Les plus habiles Théologiens conviennent que leslma-
II.

Son utilité,
g^s iont. une de ces choies qu on appelle ind)ncrentes {s) y
c'eft-à-dire , qui ne font point abfolument nécefiaires au fa-
lut , ni de la lubftancc même de la Religion ; & qu'il eft au
pouvoir de l'Eglife d'en faire ufage ou non , félon les cir-
' '

confiances des rems & des lieux. Mais d'abord qu'elle en eut
permis l'uiage , les fidèles , par un amour refpcdueux pour
Jeius-Chrift , pour fa très- fainre Merc , & pour les autres
Saints , témoignèrent beaucoup d'ardeur pour leurs Images»
&
d'horreur pour ceux qui les méprifoient. Cela fe remarqua,
non-feulement dans le peuple fidèle moins inllruit, mais en-
core dans les Evêques & les autres Pafteurs , qui trouvèrent
bon que l'on mît des Images dans les Eglifes , principalement-
parce qu'elles fervoient de livre à ceux qui ne fçavoient pas
lire ; qu'elles apprenoienr à ceux qui les regardoient , les ac-
tions admirables de Jefus-Chrift & de fes Saints; & qu'elles
étoient utiles à ceux qui les fçavoient déjà pour leur en ra-
,
fraîchir la mémoire. On ne pouiTa guère plus loin le culte des
Images dans les premiers fiécles. Depuis on y ajouta des mar-
ques plus fenfibles de refped & de vénération comme de les ,

bailcr , de les laluer , de s'agenouiller & de brûler devant elles


de l'encens & des cierges. Quelques-uns s'élevèrent contre cet
ufage comme s'il eut été fupcrlliticux ; d'autres le tolé-
,

(r) Coticil. Eliherit. c/ifi. ;^. IMabill. Prafat. in tcm. Aihr,f. j.


s
(i) Petay. tib. ij.Dogm. tbeolog. f. 13. 1
DE NICÉE. Ch. XLIV. ^pç
roienr, comme, rendu par fimpliciré ; 6c d'autres l'approu-
verenc, pourvu que ce culte fut relatif, &
que l'honneur que
l'on rcndoit aux Images , fc rapportât à la perlonne qu'elle
repréfentoit,
III. Les Juifs qui ne pouvoient fouffrir que l'on rendît on Comm?nce-
cultc public à l'Image de celui qu'ils avoient attaché à une JJJ,^;."^fjç5"^^*
croix , perluadercnt au Calife Yczid , qu'en faifanc effacer
toutes les peintures qui étoient dans les Eglifes des Chrétiens,
foit fur des planches de bois , foit en mofaïque fur les mu-
railles, foit fur les vafes facrés & les orneme is de l'Autel,
fon règne feroit de longue durée. Le Calife ajoutant f^i à
cette promefle ( r ) , envoya une Lettre circulaire par tout
Ton Empire , portant ordre de fupprimer les peintures qui fe
trouvoient, non-feulement d.ms les Eglifes, mais aufTi dans
les places publiques, pour l'ornement des Villes. C'étoit vers
l'an 724. Trois ans après, l'Empereur Léon Ifaurien frappe
de certains événemens extraordinaires arrivés dans la mer *,

êc les prenant pour des marques de la colère de Dieu , irrité


à ce qu'il penfoi: , de l'honneur que l'on rcndoit aux Images
de Jelus-Chrifl & des Saints (car il regardoit ce culte com--
:

me une idolcâtrie ; & il avoir appris des Mufulmans à penfer


ainfi (î/ fît affcmbler le peuple 8c dit hautement , que faire
) )
des images étoit un a£le d'idolâtrie, qu'à plus forte raifon on
ne devoit pas les adorer. Il n'en dit pas davantage alors :

mais au mois de Janvier de l'an 7^0 (x ) , il Ht un Décret


contre les Images; &
voulant en commencer l'exécution par
l'Image de Jeius Chrift qui étoit placée dans le veftibulc du
grand Palais , il la fit ôter , jetter au feu , & mit à la place une
iimple croix , avec une infcription qui marquoit qu on en
avoit ôté l'Image. Saint Germain , Patriarche de Conflanti-
nople , s'éleva en vain contre cet Edit ; le Pape Grégoire II
ne fut pas plus heureux dans les avertiflemcns & les menaces
qu'il fit à ce Prince. Son fils Conftantin dit Copronime , qui
lui iuccéda en 741 , ne fe déclara pas moins ouvertement que
fon père contre les Images. Il pouffa l'impiété jufqu'à mé-
prifcr, non- feulement les Saints, mais Jeius - Chrill: même.
En 754, ce Prince fit affcmbler un Concile à Conflantino-

(»)TnopH4N. «i rtn. 4.p. 1:^7. I


(x) Idem.ibid.f.ljo.
(u) Idem. nu. I

Hhhhhij
79<5 DU SECOND CONCILE
pie , ou plutôt dans un Palais vis-à-vis de cette Ville , fur la
côte d'Aile : trois cens trente-huit Evêques s'y rendirent ; &s
t cous , foit par flatterie , foie parce qu'ils penibient en efFet
comme
l'Empereur , dirent anachême à quiconque adoroic
Images. Ils ne pouvoient toutefois ignorer que k terme
les

, d'adoration fe prend en deux manières dans l'Ecriture ; l'une,,


.

- . qui convient à Dieu feul ; l'autre, qui n'eft qu'un honticur


*** que nous rendons


aux amis de Dieu , à caufe de lui-même ;.

ou que les hommes fe rendent mutuellement ^ comme lorfque


Jacob adora fon frère. Entre autres raifons que les Evêques
Iconoclaftes rendirent de la condamnation des Images , ils
alléguèrent dans leur définition de foi , que c'étoit faire in-
jure aux Saints qui vivent avec Dieu , de les tepréfentcr avec
une matière morte , par l'art des payeus (y) ; comme s'il n'y
eût point de Chrétiens qui fçuffent l'art de peindre. Conftan-
tin Copronime étant mort en 'j'^'^ , après un règne de trente-
quatre ans & près de trois mois , fon fils Léon lui fuccéda».
Pendant fon règne, qui ne fut que de cinq ans , il fe condui-
fit différemment à l'égard des Images : d'abord il témoigna

de la piété &: du refped }.^our la fainte Vierge ; mais fur la.


fin il le décbra contre les Images ( z ,
) fit fouffrir divers &
tourmens à ceux qui les honoroient. Il eue pour fucceffeur
fon fils Conflantin mais ce jeune Prince, eu 780, qui fut
:

l'année de la mort de fon père , n'étant point en état de gou-


verner l'Empire , Irène fa mère en prit les rênes. Zé ée pour
la Religion Catholique , on commença fous fon règne à par-
ler librement pour le culte des Images. Taraife qu'elle fie
élire Patriarche dé Conftantinople en 784, refufa d'accep-
i.ter le gouvernement de cette Eglife , jufqu'à ce que l'Impé-
.

ratiice lui eût promis d'aflembler un Concile œcuménique,


pour réunir le> Eglifes d'Orient qui étoient divifées au fujec
des Images. On le lui promit & quclqui,- tems après fon ac- :

ceptation, Irenc fie expédier les Lettres pour la convocation


du Concile , au nom de Conllantin fon fils & du fien.
Convocation IV. Ccs Lettres ayjnt été envoyées à tous les Evêques de
Condir"de ^'^"^P^""^ ('*)i ils fe rendirent à Confiant inople, en même-
Kicceen78û-

(y) Tnm.T.Conc.p 4(5i. ! (a)Tç>n.7. C-nc.pa;^. 3ï.tJTHiOr*


( t ) Theophan. ad /in, i. Leoti.g. jo» aJ an^C^Cj''j-jnt. p. ^o^.
DE NI CEE. Ch. XLIV. 797
tems que les Légats du Pape Adrien , à qui Tlmpératrice Irè-
ne avoir communiqué dès l'an 78 5 , la rélolution qu'elle avoîc
prifc avec le Patriarche Taraiie , d'aflembler un Concile uni-
vcriel. L'Empereur & l'Impératrice étoient alors en Thrace.
Les Evcques Iconoclaftes profitant de leur abfence , s'oppo-
fercnt à la lenue du Concile, dilant qu'il falloit s'en tenir à
ce qui avoir été décidé en la même Ville en. 754 , contre les
Images, Le Patiiarche 1 ar.ilc informé que ces Eveques tc-
noienc des alTemblécs particulières , leur fit dire qu'ils ne pou-
voient en tenir à Conflantinople , fans fon agrément , fous
peine d'être dépofés fuivant les C anoris. Sur cet avis les Evê-
qucs ccllcrenc de s'a(femb!er ( b ). Ircne & Conftantin de
retour ea cette Ville , l'ouverture du Concile fut fixée au
premier jour d'Août de l'an j^S ; & le lieu , dans l'Egiife
des iaints Apôtrts. La veille , des foldats furieux entrèrent
le foir dans le Batiftere de l'Egiife , criant en tumulte , qu'il
n'éroit point permis d'afltmbler un Concile. Le Patriarche
en fit fon rapport à l'Impératrice , qui ne crut pas que l'on
dût pour cela différer de l'alfembler. Il s'aflcmbla en effet le
lendemain : mais comme on avoir commencé à lire quelques
Lettres fynodiques , les foldats pouffes par les Evoques du
parti des Iconoclaftcs , entrèrent dans l'Egiife l'épéc à la main,
menaçant de tuer le Patriarche , les Eveques orthodoxes &
les Abbés. L'Empereur & l'Impératrice qui étoient dans les
galeries hautes (c ), d'où ils pouvoient voir le Concile , en-
voyèrent les foldats de leur garde pour arrêter le tumulte.
Les Iconoclaflcs étant forris , le Patriarche Taraife célébra
les Myfteres avec les Eveques Catholiques: mais l'Impéra-
trice lui envoya dire & aux autres Eveques de fe retirer , afin
d'éviter l'emportement du peuple. Il étoit environ midi , 8c
chacun le retira ehcz loi pour prendre fa réiedion : car ils
étoient tous à jeun. Au mois de Septembre fuivant (1^;, l'Im-
pératrice fie lortir de Conflantinople toutes l.s troupes qui
avoient fervi lous l'Empereur Conflantin ion beau-pere , 8c
qui étoient infedées de l'eireur des Iconoclaftes ; puis les
aya' t fait paiTer en Natolie , elle les obligea de pofer les ar-
mes, les caffd toutes, &: elle en leva de nouvelles dont elle

(i) Trm. T.Coitc.fitg.J»^ t (V) Th£OPH. «1/ «», 7. p. JO?. JIO,


fù\ Idem. P. 47. L
798 DU SECOND CONCILE
«afTiarà. Au
mois de Mai de Tannée fui vante , elle envoya
convoquer de nouveau tous les Evêques , pour tenir le Con-
cile àNicce en Bithinie.
Krcon'': ]^ s'affembla dans l'Eglife de Sainte Sophie, le vingt-
^'
cite. quatrième de Septembre 787 (e). Les deux LcgKS du Pape,
Pierre, Archiprêtre de l'Eglife Romaine , & Pierre, Prêtre
8c Abbé du Monafterc de Saint Sabas de Rome, font nom-
més les premiers dans les Aftes du Concile , comme repré-
fentant le Pape Adrien. Taraife , Patriarche de Conftanti-
nople , ell nommé enfuite , 8c après lui les Députés des autres
-Patriarches d'Orient : trois cens foixante &dix-fept Evê-
ques affifterenc à ce Concile , avec deux Commiffaires de
l'Empereur , plufieurs Archimandrites , Abbés &
Moines;
les faints Evangiles étant placés au milieu de TAffemblée. Les
Evêques de Sicile parlèrent les premiers , & demandèrent
que le Patriarche de Conftantinople fit l'ouverture du Con-
cile : tous s'y accordèrent , 8c Taraife prenant la paroie ren-
dit grâces à Dieu de la liberté accordée à l'Eglife
(/) , ex-
horta les Evêques à rejctter toute nouveauté , foit dans les
paroles , foit dans la dodtrine , & à s'en tenir aux traditions
de l'Eglife , qui ne peut errer , & dans laquelle on ne connoîc
pas le oui & le non. Il permit enfuite à ceux qui , l'année
précédente , réfilloient à la vérité , d'entrer 8c de dire leurs
raifons (g ). Alors les Commilfaires de l'Empereur firent lire
la Lettre adreffée au Concile en fon nom & en celui de l'Im-
pératrice Irène , par laquelle ils déclaroient qu'ils Tavoienc
aflemblé du confentement des Patriarches ; &
qu'ils laiflbient
une entière liberté aux Evêques d'y dire leurs fentimens : en
les exhortant toutefois à procurer, par leur Jugement, la
paix à l'Eglife. Cette Lettre contenoit encore le récit de ce
qui s'étoit paffé à la mort du Patriarche Paul , &à l'ékdion
de Taraife. L'Empereur ajoutoit à la fin , qu'il avoit reçu des
Lettres du Pape Adrien , 8c d'autres par les Légats d'Orient,
dont il demandoit que l'on fit la le£lure , afin que l'on con-
nut quel étoit le fentiment de l'Eglife Catholique. Apres la
Icdure de toutes ces Lettres (k) , on fit avancer Batile , Evc-
cjue d'Ancyre, Théodore de Myre, 8c Thcodofe d'Armo-

C») P*,?- 309. (.7)^'«?'ro.


I
if) l'agi 47, 1 (i)fajf 54.
,

DE NICÉE. Ch.ICLIV. 7^^ ^ ,


,

rion , qui étoienc du nombre de ceux qui. Tannée précéden-


te , avoient pris le pareil des Iconoclaftcs. Ils déclarèrent

qu'ayant examiné la queftion , ils honoroicnt les Images , fi-


chés d'avoir eu d'autres ientimcns, Bafile d'Ancyre donna
même l'a profciïion de loi par écrit , où , après avoir déclaré
^e qu'il croyoit avec toute 'l'Eglifc , touchant la Trinité &
l'Incarnation ( i ) , il ajouta : Je reçois avec toute forte d'hon-
neur , les reliques des Saints ; je les adore avec vénération
dans la confiance que j'ai de participer par-là à leurfainteté.
Je reçois aulfi les vénérables Images de Jefus-Chrift, entant
3u'il s'elT: fait homme pour notre falut; de fa fainteMcre^
es Anges , des Apôtres , des Prophètes , des Martyrs & de
tous les Saints je les cmbrafle , & leur rends l'adoration
:

d'honneur. Je rejette 8z anathématife de toute mon ame le


faux Concile , nommé fcptiéme , comme contraire à toute la
Tradition de l'Eglife, & affemblé par un principe de folie
& de démence. Après cette déclaration, il dit anathême aux
Iconoclaftcs (/) ; à ceux qui ofent dire que l'Eglife ait jamais
reçu des Idoles , ou que les Images viennent d'une inven-
tion diabolique , & non pas de la tradition des laints Peres.-
Théodore de Myre lut auffi fa profefllon de foi Théodole :

d'Armorion en iit autant ; &


le Concile jugeant qu'ils étoicnt

véritablement pénitens , leur ordonna de reprendre leur fié-


ge & leur rang. La comparaifon que Théodofe d'Armo-
rion employa dans fa profeflTion de foi , mérite d'être rap-
portée. Si les Images des Empereurs écant envoyées dans les
Provinces & dans les Villes, le peuple vient au-devant avec
des cierges & des parfums (w) ; non pour honorer le tableau ,
mais l'Empereur avec combien plus de raifon doit-on pein-
:

dre dans les Eglilcs l'Image de Jefus-Chrift notre Sauveur &


notre Dieu , celle de fa fainte Mère , & de tous les faints &
bienheureux Pères î
VI. Après que le Concile eût reçu ces Evêques , il s'en Suite de la

préfenta fept autres , qui tous témoignèrent un grand repen- fjonT'^'^

honorantes ; quanto magis oportet in Ec- .

(/)P„,Î. ss. cIcfTis Clirinî Domini noftri Iconam de-


(>i)Sienim Rp£;um laurata & iconas pingi Salvatoris Dei noftri & intemerata:
mifTas ad civicates vel régions s obvii ad- M:itris ejus , omniumque fandorum ôt
eunt populi eu mcercis & incenfis non , beacorum Patrum. Tom, 7. Conf. p. ^9,
cerâ perfufam ubulam , fed Imperatorem
8r)0
^^
pu SECOND CONCILE
tir de aux Iconoclailes cela donna Heu d'exà*
s'être joints :

miner comment on devoit recevoir les hérétiques convertis»


On 'apporta donc les Livres des Percs & les Recueils des
Conciles qui fe trouvoicnt dans la Bibliothèque du Palais pa-
triarchal. Le premier Canon que l'on lut («) , fut le cin-
quante-troificme des Apôtres ; enfuite le huitième de Nicée ,
pour la réception des Novatiens ; le troifiéme d'Ephefe , tou-
chant les Macédoniens ; le premier de l'Epître de laint Bafile
à Amphiloque , où il eft parlé du Batéme des Encratites ;
quelques paflages de fa Lettre aux Evaiféniens ( o ) ; &
de
celle au Comte Terence , dans laquelle il parle de la récep-
tion de ceux qui quittoient l'héréfie pour fe réunir à l'Èglife ;
les deux Lettres de faint Cyrille d'Alexandrie, au fujet de fa
réunion avec Jean d'Antioche; la Lettre de faint Athanafe à
Rufinien , fur la récoriciliation de ceux qui avoient foufcrit au
Concile de Rimini; le Jugement du Concile de Calcédoine,
dans la réception des Evêques d'Orient & d'Illyrie , qui a-
voient afliflé au faux Concile d'Ephefe fous Diofcore ( p ) ;
des extraits de l'Hifloire Eccléfiaftique de Rufin , touchant
le Concile d'Alexandrie , où Ton reçut ceux qui avoienc
communiqué avec les Ariens ; un paffage de l'Hiftoire Ec-
cléfiaftique de Socrate ; un de cdh de Théodore , Leileur ;
& plufieurs autres anciens monumens qui pouvoient fervir
d'éclairciflcment à la difficulté propofée. Apres quoi le Con-
cile ordonna aux fept Evêques de lire leurs libelles de réu-
nion à l'Eglife Catholique : ils le lurent, C'étoit le même que
Bafile d'Ancyre avoit fait. Le Patriarche Taraife déclara que
leur foi étant fuffifamment connue par la ledure de ces libel-
les (q) , ils feroient reçus dans une autre feffion , s'il ne furvc-
noit quelque autre empêchement.
Seconde ffcf- VIL Dans la féconde, qui fut tenue le vingt- fixiéme de
^o"- Septembre, Grégoire, Evêque de Néocéfaréc, le même qui
fe trouva à la tête du faux Concile de Conftantinople , en

754 (r), fe préfenta, s'avoua coupable & demanda pardon.


Taraife , après lui avoir fait quelques reproches fur la con-
duite qu'il avoit tenue dans cette Affemblée , le remit à la

fcfTîon
,,

DE NICÉE. Ch. XLIV. Soi


feiïîon fuivante, pour apporter fon libelle d'abjuration. On
lut enfuite la Lettre du Pape Adrien à Conftantin & à Irène
dans laquelle il établifibit le culte des Images , prétendant
que TEglile Romaine Tavoit reçu par tradition de iaint Pier-
re : mais parce qu'il y avoit dans cette Lettre quelque re-
proche contre Taraife , fur-tout en ce qui regardoic l'irré-
gularité de fon Ordination , & le tirre d'Eveque univerfcl
qu'il s'atiribuoit( J ) , de même que plufieurs de fes prcdécef-
fcurs, on paiïa fous lîlencc ces endroits, pour ne pas don-
ner lieu aux hérétiques de réfîfler à ce Patriarche, ni de con-
tefter l'autorité du Conci'e. On lut aufli la Lettre du même
Pape à Taraife ( r ) & les Légats lui ayant demandé s'il l'ap-
:

prouvoit, il répondit que dans l'une & l'autre Lettre ( «) , le


Pape expliquoit clairement la Tradition de l'Eglife , fur le
culte des Images ; qu'il avoit lui-même examiné ce que les
Ecritures enfeignoient fur cet article ; qu'il étoit pleine- &
ment perfuadé que l'on doit adorer les Images d'une affec-
tion relative , en réfervant à Dieu feul le culte de latrie.

Tout le Concile approuva cette déclaration & les Lettres du


Pape.
VIII. La troifiéme feffion fe tint deux jours après , c'efl:- '
Troifléme
^'^'^'O"-
à-dire , le vingt -huit de Septembre 787 ( .r ). Grégoire de
. Néocéfarée y lut fa confeflion de foi ,
qui étoit fcmblable
aux autres (y). Mais parce qu'il couroit un bruit qu'il étoit
du nombre des Evêques qui, pendant la perfécution , avoicnt
maltraité les fidèles , il fut interrogé fur ce fu/ct ; & ayant
affuré qu'il n'avoit frappé ni maltraité perfonnc, le Concile
confentitqu'il reprît la place. On fit la même grâce aux fis ^

Evêques qui s'ctoicnt préfentés à la première ieflion. Après


quoi on fit la ledure de la Lettre de Taraife aux Orientaux
dans laquelle ( s ) , outre fa confeATion de foi fur la Trinité
& l'Incarnation, il fe déclaroit nettement pour le culte des
Images; & de la réponfc que les Evêques d'Orient avoienc
faite à cette Lettre. Ils y déclaroient au nom des trois Sièges
apoftoliques d'Orient (a) ,
qu'ils recevoient les fix Conciles

(s)rag.ij^. C>) P.t^. 158.


I
(f) îii.
p.»?. rt) Pag.z';9.
I
('»)P''5. 174.
v«) r^ç. 117. I
(v) Pag. . f 4. I

Tome XX,
So^ DU SECOND CONCIL E
œcuméniques , & rejettoient que l'on nommdit le fep-
celui
tiéme , c'eft-à-dire , le faux Concile de Confiantinople en ,

754. Ils ajoutoient que l'ablence des trois Patriarches d'O-


rient , & des Evêques de leur dépendance , ne dévoie pas
leur faire de peine , ni empêcher i'affemblée d'un Concile,
puifqu'il n'étoit pas à leur pouvoir de s'y rendre , à caule de
de la tyrannie des Arabes à q-ui ils cbéiiToicnc ;
qu'ils n'a-
voient pas aflTifté pour la même raifon au Concile œcuméni-
que ,
qui toutefois n'avoit loulTert aucun préjudice , & n'a-
voit pas empêché qu'il n'établît clairement les vrais dogmes
delà piété vu principalement que letrès-faint Pape de Rome
;

y confcntoit & s'y trouvoit par Tes Légats. Ces paroles font
remarquables en la bouche des Orientaux (b), qui n'avoienc
point d'intérêt de flatter l'Eglife Romaine. A cette Lettre
les Evêques d'Orient ajoutèrent la copie de la Lettre fynodi-
que de Théodore , Patriarche de Jérufalem , adrelTée félon
la coutume aux Patriarches d'Alexandrie & d'Antioche. On
en fit aufli la le6ture, & on vit qu'il y admettoit les (ix Con-
ciles œcuméniques fans en reconnoître d'autres ( c ) ; & qu'il
recevoit les traditions de l'Eglife touchant la vénération des
Saints , de leurs reliques &
de leurs images. Les Légats du
Pape déclarèrent qu'ils approuvoient ces deux Lettres comme
conformes à celles de Taraife & d'Adrien, 8c rendirent grâ-
ces à Dieu de ce que les Orientaux s'accordoient à la foi or-
thodoxe touchant les Images.
Quatrième ^^- Dans la quatrième fefTion , qui fut tenue le premier
rcffion. jour d'Oclobre ySj {d) , le Patriarche Taraife ayant ùk ap-
porter les Livres des Percs , pour montrer la Tradition de
l'Eglife fur les Images , on commença par les pafTages de
!•.«//, 1^ 17. l'Ecriture touchant les Chérubins, qui couvroient l'Arche
^um.y.sç. d'alliance & qui ornoient l'intérieur du Temple-, puis on lut

Hetr.f.i '
^^ pafTage de faint Chryfoiîomc, où il efl parlé des Images
de iaint Mélece, que les fidèles portoient avec eux , fai- &
foient peindre dans les chambres pu i's couchoienc (e)i &
un autre où ce Pcre dit , qu'il avoit regardé avec plaifir une

(i) Sed nullum ex hoc fan<fhr adlisfît Romanu? concordiivcrit, & in eâ inventus
Synodo fpxtx prx'udiciiim: neque vires ha- lit ptrapocriliarios Iuos,p. 17J.
hiiit proliibitio aliqua ft.ifueiidi & munife-
ft.i fic-cndi rcd.i pittatis do^mati , prx-
cipuc cùm faiiftifljmus & apôftohcus Papa (f ) Pag. 201,
DE NI CEE. Ch. XLIV. So^
Image fur laquelle on reprefentoic on Ange
métrant en fuite
des troupes de barbares ; un de laint Grégoire de Nyflc , c ù
il dit qu il avoit vu fouvcnc , 8c toujours en vcrfant dc> lar-

mes , la peinture du facriiicc d'Abraham ; un de faint Afterc


d'Amafée , où il faifoit la delcription d'un tableau qui rcpré-
fentoit le martyre de lainte Euphcmie (/") ; un de iaint Cy-
rille ; un de iaint Grégoire de Nazianze ; un de la vie de

faint Anaflale, Perian, &: un autre de fes miracles. Sur cela


les Légats du Pape dirent (g) , que l'Image de laint Ana-
ftafe le voyoit encore à Rome dans un Monaflere , avec fon
précieux Chef. Le paflage tiré du Recueil des miracles de
faint Anaftafe montroit que Dieu opéroir des guérifons mi-
raculeuies par les Images & pour en donner de nouvelles
:

preuves , on lut un Diicours attribué à faint Athanafe ( /« ) >


où l'on fait le récit d'un miracle arrivé à Beryte , fur une Ima-
ge de Jefus-Chrifl: percée par les Juifs , dont il fortit du fang
qui guérit plufieurs malades. On convient aujourd'hui que ce
Difcours n'efl: point de faint Athanafe , &
qu'il eft plutôt
d'un Evoque de même nom en Syrie. Le Concile allégua en-
core d'autres pièces attribuées à des Ecrivains de qui elles
n'étoient pas mais cela ne fait rien contre l'autorité de cette
:

décifion , puifqu'elles font fuffifamment appuyées de pièces


véritables & autentiques &
que foit qu'il le foit trompé dans
-,

l'attribution de certains Ecrits , il ne laiffe pas d'être vrai


oue ceux qui en font les Auteurs , n'avoienc point d'autre
aodrine fur le culte des Images , que celle de l'Eglife. Tout
ce que l'on peut donc reprocher aux Evêques de Nicée , eft
de n'avoir pas été alTcz verfcs dans la critique. Le Concile
fît lire encore beaucoup d'autres Difcours & Lettres des an-

ciens (i) , entre autres, de faint Nil &


de faint Maxime. Il
étoit dit dans les Aftes de ce dernier , que lui & les Evê^
ques Monothéiites qui l'étoient venu trouver , fe mirent à
genoux devant les Esangiles , la Croix les Im;iges de &
Jefus-Chrifl 8c de la fainte Vierge, les faluerent les tou- &
chèrent de la main ( / ) j pour confirmer ce dont ils é-
toient convenus cnfcmbîe. Sur quoi Conftantin , Evêque

(/) Pas loj. (


.
) Pag. laj. Si7.
I
U)Pag.ziU (O^*^. IJI.
(*) yo}ex.tafn. ^.f. 185. |
liiiiij
,

8o4 DU SECOND CONCILE


de Chypre , dit , que ce falut étoit une adoration , puifqu'il
s'adrcflbit aux Evangiles , à la Croix & aux Images tout en-
femble. Mais le Patriarche Taraife reprit , qu'il falloit mettre
les vénérables Images au rang des vafes facrés : le Concile &
ajouta Cela eft évident. Le Concile de Trulle avoit ordon-
:

né , par fon quatre-vingt- deuxième Canon , de peindre Jefus-


Chrift en fa forme humaine ( w). Ce Canon fut lu dans ua
papier qui étoit l'original même ; enfuite dans un Livre >&
où il avoit été tranfcrit avec les autres. Taraife prenant la
parole , dit : Que l'on conteftoit fans raifon ces Canons au
fixiéme Concile , puifqu'ils avoient été faits par les mêmes
Evêques , quoiqu'en diffcrens tems ; c'eft-à-dire , à quatre ou
cinq ans de diftancc. C'étoit une erreur de fait. Le fixiéme
Concile avoit fini au mois de Septembre 68 1 , celui de &
Trulle ne fe tint qu'onze ans après , en 6(^2. Les Evêques de
cesdeux Conciles ne furent pas non plus les mêmes , comme
on peut s'en convaincre par les foufcriptions. Mais comme il
y en avoit beaucoup qui avoient afTifté à l'un à l'autre , la &
réflexion de Taraife pouvoit avoir lieu. Le paflage de Léon-
ce , Evêque de Naples en Chypre (» qui fut lu enfuite à la ) ,
requête des Légats , établie clairement le culte extérieur des
Images , & rejette tous les mauvais fens que l'on pourroit y
donner, montrant que ce culte eft abfolument différent de
celui que nous rendons à Dieu qu'il ne fe rapporte pas pré-
;

cifément à l'Image , mais à la chofe qu'elle repréfente; com-


me l'honneur que nous rendons à l'Image de l'Empereur n'efl:
point relatif à l'Image même , mais à l'Empereur qui y eft re-
préfcnté. Le Patriarche Jacob baifa la tunique de Jofeph
non par amour ou par honneur pour ce vêtement ; mais pour
Jofeph , qu'il croyoit tenir entre fes mains en bailant fa tu-
nique. De même tous les Chrétiens , en faluant l'Image de
Jclus-Chrifl: , ou des Apôtres , ou des Martyrs ( ) , rappor-
tent ce falut à Jcfus-Chrifl: même , aux Apôtres , aux Mar-
tyrs , comme s'ils les avoient préfens : c'eft l'intention que l'on
doit regarder d.ms le falut &
dans l'a^loration. Si vous m'ac-
cufez d'idolâtrie , parce que j'adore la croix du Sauveur ;
pourquoi n'en accufcz-vous pas Jacob , qui adora le haut du

(»;p«^. 13;. I
DE N I C É E. Ch. XLIV. 805
bâton de Jofeph? Dans le même pafTage , Léonce confirmoic
le culte des Images , par divers miracles opérés , ou par les
Reliques des Martyr^ , ou par les Images (p). On cita plu-
fieurs Ouvrages de cet Auteur , qui rendoienc témoignage à
fon orthodoxie (q) puis on lut quelques endroits des Ecrits
:

d'Anaftafe, Evoque d'Antioche , où il diftingue clairement


l'adoration que nous rendons aux hommes & aux faints An-
ges , d'avec celle que nous rendons à Dieu. L'adoration que
l'on rend aux Saints , n'efl qu'une marque d'honneur ; celle
qu'on rend à Dieu, eft un culte de latrie ou de fervice (r),
qui n'eft dû qu'à lui leul ; félon que le dit Moyfe Fous ado- : DcHin. 6.

rerez le Seigneur votre Dieu , & vous lefervtrez feu/. Les au-
tres palTages que l'on allégua , étoicnt tirés des Ecrits de faint
Sophrone de Jérufajem , ou plutôt de Jean Mofch (s) , de
faint Chryfoflome , de faint Athanafe , de faint Badlc , de
Théodoretj dans la vie de faint Syméon Stylite, de celle de
faint Jean le Jeûneur, de faintc Marie d'Egypte , des Ades
du Martyr faint Procope, & de faint Théodore Sicéote. On
y joignit la Lettre de Grégoire II à faint Germain de Con-
ftantinople ( f ) , & trois de ce Patriarche, dont nous avons
parlé plus haut. Sur quoi le Concile s'écria La do£lrine des
:

Pères nous a corrigés nous y avons puifc la vérité ; en les fui-


:

vant , nous avons pourfuivi le menfonge ; inftruits par eux ,


nous faluons les Images («) anathême à qui ne les honore
:

pas. Enfuite Euthymius , Evcque de Sardes , lut au nom du


Concile une confelFion de foi , à laquelle tous les Evêques
foufc r i virent , les Légats du Pape les premiers. L'article qui
regarde les Images efl conçu en ces termes Nous recevons :

la figure de la Croix précieufe Se vivifiante , les Reliques des


Saints & leurs Images: nous les embralTons & les faluons,
fuivant l'ancienne 1 radition de la fainte Eglife de Dieu (x) ,
c'eft-à-dire , de nos faints Pères qui les ont reçues , & ordonné
qu'elles feroient mifcs dans toutes les Eglifes & dans tous les
lieux où Dieu eft fervi. Nous les honorons & adorons ; fça-
voir , celles de Jefus-Chrift , de fa fainte Mère & des Anges,

(p) ras-i]9. (1) Pa^. zSi.


(«)P..jr.
(y) P^g. l^é. 3,8.
(r) P'g- 147- {x]Pai. 3îi.
(0 P<»f. 1/0. {^ftg.
,

8c<f DU'SÈCOND CONCILE


qui, quoique incorporels , ont néanmoins- apparu Gtwnnié'
homntes auxr Joftcs; celles des Apôtres , des Prophètes , des
Martyrs & des autres Saints , parce que leurs Images nous rap-
pellent leurfouvenir , & nous rendent participans en quelque-
manière de leur fainteré.
Cinquième X. La Cinquième l'eflion , qui efî du quatrième d'Oftobrei
fefGon,
y^j {^^-i ^^^ emplo7ceà montrer par la leélure de plufieurs
pièces ,
que les Iconoclaftes n'avoicnt foit qu'imiter les Juifs
les Sarraiins , les Manichéens & quelques autres
les Payens ,

hérétiques. Saint Cyrillede Jérufalem compte encre les cri-


mes de Nabuchodonofor d'avoir enlevé les Chérubins de
,

TArche {y). Il efl dit dans une Lettre de faint Syméon Sty-
lite le Jeune , que les Sarrafins profanèrent les Images de
Jefus-Chrift & de fa très-fainte Mere(z). Jean , Evêque de
ThefTalonique , cnfeignc dans l'un de que l'on les Difcours ,

peignoir dans les Eglifes les Images des Saints


que ce , &
n'ctoit point les Images que les Chrétiens adoroicnr , mais ce
qu'elles repréfcntent ; qu'ils ne les adoroicnt pas comme des
Dieux , mais comme les ferviteurs les amis de Dieu ; & &
que s'ils peignoient les Anges en figure humaine , c'éroit par-
ce qu'ils ont fouvent apparu fous cette forme à ceux à qui
Dieu les avoit envoyés. L'Auteur de la difpute entre un Juif
& un Chrétien {n) , dit , qu'en adorant les Images qui re-
préfcntent les combats &Ies victoires des Saints, nous invo-
quons & louons le Dieu de ces Saints , qui leur a donné la
patience & les a rendus dignes de fon Royaume ; en lui de-
mandant en mcme-tems de nous faire participans de leur
gloire , & de nous fauver par leurs prières. On lut quelque
chofe d'un Livre apocriphe, intitulé Les voyages des Apôtres'.
:

& quoiqu'il fût favorable au culte des Images ( ^ ) , le Con-


cile défendit de le tranfcrire , & le condamna au feu. Ce que
Ton cita d'Eufebe de Céfarée, forvir plus à flétrir fa mémoi-
re, qu'à établir le culte des Images (c). Le paflTage cité de
THiftoire d'un nommé Jean , appelle le Séparé , marquoic
que Xcnaïas l'iconoclaftc {d) rraitoic d'idole & d'invention

(«)P.i?. 34«5. I (b) P/i.î. 358.


(r) P''f- 347. (c) P.ïf. 1,66.
I
(t) l'a'i. 5ro. (d) Pag. 370.
I
DE NIC ÉE. C H. X LTV. 807
t.pii^rile , la colombe que l'on pcigncit poor repréfcnter le
•-ûaint-Elpric;
parce qu'en cffec il s'éroit fuit voir lous la forme

d'une colombe , ainfi qu'il cft dit dans l'Evangile. A ces paf- ^'^l''''
''

fages on en ajouta de la vie de iaint Sab^is , des Ecrits de Lhc. 5.

,Jean Gabale&: de Conftantin , Treforicr de la grande Êglilc


;de Conflantinople ce dernier foutient qu'on : doit point m
-faire d'Imcîgcs de la divinité, mais qu'on peut icn faire de
•l'humanité de Jelus-Chrirt. Il fut cnluire prouvé 'que les hé-
rétiques Iconoclallcs avoicnt brûlé plulicuts livres de la Bi-
bliothèque de l'Eglife de Conliantinople (e) , où il y étoit
parlé des Imagx?s qu'en d'autres ils avoicnt coupé les feuillets
j

qui traitoient la même matière: &


le Mcine Etienne montra
un livre cù avoicnt effacé de rHiiloircEcclcfiatHqued'Eva-
ils

grc (/), l'endroit où il parle de l'Image de Jefus-Chrirt envoyée


a Abgare d'Edclle. Grégoire , Prêtre 8c Abbé , dit qu'il en
avoit un exemplaire , &
offrit d'en faire la letlurc ce qui fut :

accordé. Le Moine Kticnne , garde des Livres , olïrit aufli


de lire pluhcurs palTagcs ; mais on le contenta de trois: le &
Concile jugeant que l'on avoit démontre^ furtilamment la Tra-
dition de i'Eglile fur le cuhe des Images , demanda que
Jean , Légat d'Orient , lût un Mémoire qui conrcnoit l'hi-
ftoire du Juif (g), qui pcriuada au Calife Yezide de faire
ôter les Images , comme on l'a dit plus haut. L'Evêque de
Mcffine dit qu'il éioit enfant en Syrie, lorlque
le Calife fit
détruire les Images (â). La concludon de cette feffion fut,
que les faintes Images (croient remifes à leur place ; qu'on les
porteroit en procclîion ; que l'on en placeroit une au milieu de

î'Aflcmblée; qu'elle y ieroit laluée, &


que tous les Ecrits des

Iconoclaft es fcroient condamnés au feu.
XI. Le llxitme d'Otlobrc ( i ) , auquel fe tint fîxicme fef- h Sixième fef-
''°"'
flon , le Concile s'occupa à lire la réfutation de la définition
de foi faite par les Iconoclafîcs , en 754. Cette réfutation
étoit divilée Tomes. Jean , Diacre de l'Eglife de Con-
en Cix
flantinoplechargé d'en commencer la lecture ,
, fut le Dia- &
cre Epiphane de la continuer. Grégoire , Evêque de Néo*-
-céfarée , l'un des Chefs de l' AlTemblce des Iconociaftes , lut

(f) P-i^. 371. ^ 374. I {b) ?ag. 387.

a) ^n- 578. (O^oj- J*»'


,

8o^- DU SECOND CONCILE


la définition de foi qui avoit écc dreffée. La première chofe
que l'on attaqua dans cette définition, fut le titre de Concile
feptiéme œcuménique ,
que les Iconoclafies donnoient à leur
Affemblée (/). Comment, dit la réfutation , peut-on ap-
peller un Concile œcuménique , qui n'a été reçu ni approuvé
mais au contraire anathématifé par les Evêques des autres
Eglifes ; auquel le Pape , qui gouvernoit alors l'Egliie Ro-
maine , n'a point concouru , ni par lui-même , ni par les Evê-
ques qui font près de lui , ni par fes Légats , ni par une Let-
tre circulaire , fuivant la Loi ordinaire des Conciles ; auquel
,les Patriarches d'Alexandrie, d'Antioche de Jérufalem , &
n'ont point donné de confentcment , ni par eux-mêmes, ni
par leurs Députés , ni par les grands Evêques de leur Pro-

•_vince î La définition diloit (m) , que Jeius-Chrifi nous a dé-


livré de l'erreur & du culte des idoles, en nous enfeignant
l'adoration en efprit & en vérité. La réfutation répond Com- :

ment donc ceux qui croient en lui font - ils retombés dans
ridolâtrie ? Dieu incarné nous a rachetés , & nous fommes
réduits une féconde fois à la captivité («) ? Il n'en ed pas de

Jefus-Chrifl: comme des Rois de la terre , qui font tantôt vi-

ûorieux & tantôt vaincus ; fa vi£toire eH: éternelle : d'où il

fuit que l'on ne peut accufer d'idolâtrie l'Eglife entière , fans
faire injure à.Jefus-Chrift. Il étoit dit dans la définition , que
les fix Conciles œcuméniques avoicnt confcrvé la beauté de
rEo-life fans aucune diminution. On répond dans la rcfutâ-
; tion qu'il n'y a eu que foixante &
dix ans depuis le fixiéme
Concile jufqu'au Conciliabule des Iconoclafl:es ; que l'ufage &
des Images étant beaucoup plus ancien que le fixiéme Con-
cile , il cfl: vifible qu'il ne s'eft pas introduit dans cet inter-
-laljfniuri'a valle. Nous pafferons fous filcnce plufieurs articles de la dc-
'
finition & de la réfutation , parce qu'ils n'ont point de rap-

port au culte des Images ; &


nous nous contenterons de re-
marquer en paffant , que Tune & l'autre , en parlant du Pape
Honorius ( o ) , fuppofent toujours qu'il avoit été condamné
-djans le fixiéme Concile. Les Iconodafies accufoicnt ceux qui
adofentles Images, (p ) , d'é^tablir tout cnfemblc les deux hé-

(l)P/tg.j<)^. (o) P«!r. 41Î. 413'


I
(m) /'.>ir- 401. . j
(P) ^'''.?-433.

rcfics
,

DE NICÉE. Ch. XLI V. 809


réfies de Ncftorius &
d'Eutichès ce qui ccoic toutefois im-:

pcfTible , puifqu'ellcs font diamétralement oppofécs. cela A


on répond , que l'Image de Jefus-Chrift ne le rcpréfcnte que
félon la nature par laquelle il a été vifible (q) , que l'Image
n'a que Ion nom &
non pas fa fubftance ; qu'ainfi les Catho-
liques, en faifant peindre Jcfus-ChriH;(r) , ne divifent pas
pour cela les deux natures , puifquc l'Image de l'humanité
rappelle en nous l'idée de Jefus-Chrift entier, c'ell- à-dire ,
du Verbe incarné (s) l'Image d'un homme ordi-
: comme
naire rappelle l'idée de fon celle de fon corps. En
amc avec
effet , tout homme de bon fens , en voyant l'Image d'un hom-
me , ne s'efl jamais imaginé que le Peintre ait féparé l'homme
de fon ame. L'objc£lion la plus intéreflante ( r ) , eft celle que
les Iconoclaftes tirent de l'Euchariftie , en difant qu'elle efl:

la feule Image de Jcfus-Chrifl qui foit permife. L'Auteur de


la réfutation répond , qu'aucun des Apôtres ni des Pères
n'a dit que le Sacrifice non fanglant fût l'Image du Corps
de Jcfus-Chrifl. Ce n'cfl: point , dit-il , ce qu'ils avoient ap-
pris de lui. 11 ne leur a pas dit Prenez, mangez l'Image de
:

mon Corps ; mais Prenez 6"^ mangez Ceci ejt mon Corps. II
: :

efl donc démontré que , ni le Seigneur, ni les Apôtres , ni


las Pcres ( « ) , n'ont jamais dit que le Sacrifice non fanglant
qui cfl: offert par les Prêtres , foit une Image de Jefus-Chriff :
mais ils ont dit au contraire , que c'efl; fon propre Corps &
fon propre Sang. 11 ell vrai que quelques Pères , par un fen-

quod in proverblîs legrtur .ComeJite panem


(»•) ^'i- 43P« meiim Î5 bibite vintim quoi mifcui voiii !
(j) Pag. 417. h.cc dicit : per panem & vinum , typoa
( '
f •>,?• 4+7-
)
corporalium Chrifti prxdicnt membrorum,
(«) Ergo liquide tîemonfîrafumefl quod Alter vero ex eodem fonte hauriens in o-
mirquam Dominus vel Apodoli aut Patres ratione divinx oblationis ita dicit Con- :

Jraaginem dixenint Sacrificium fine fan- fidentes appropinquamus fanfto Altari &
guine, quod per Sacerdotem otiertur, fcd proponentes typos fancli Corporis San- &
iplum Corpus S; ipfum Saiiguineni . & . . guinis Chrifti tui , te doprecamur S: te lo-
ame fanftificationi^ quidem confummatio- gamus , & quod deinccps infcrtur , cer-
rem: typos quibufdam landorun' Patrum fiorem patris huju; perfccit intelledum,
liac pic viluni eft nominare quorum eft
: qualiter antequàm fanditicata fuerint , vo-
Euftathius propugnator ortliodox.r fidei & , cata (înt typi : poil ninctificationem -au-
Arian.T deftruiftor velanir, & Bafilius ejuf- tem , Corpus propnè ac Sanguis Chrifti
dem infelicis fupcrftiiionis depolîtor ,
qui dicuntur, (tint & creduntur. Iplï veto viri
onine quod fub fok' eft planam re^torum forces voientes venerabilium imaginuni
dogmauim bafîm edocuit ex uno enim
: demoliri vifionem , aliam imaginem in-
codemque fpiritu dilputantes unus quidem troduxerunt, qu.->î non eft imago, fed Cor-
eorum interpretansSalomoniscura djctum pus & Sanguis, Tow. lo, Ccnc.p. 450,
Kkkkk
,

8io DU SECOND CONCILE


timent de piété , ont cru pouvoir nommer les chofes offertes ^
avant qu'elles fufTent confacrées , antitypes , c'eft-à-dire , des
figures &
des images qui repréfentent ces chofes : de ce nom-
bre a été faint Euftache, le puiflant adverfaire des Ariens,
& faint Bafile. L'un d'eux , (avoir faint Euftathe , expliquant
ces paroles des Proverbes de Salomon : Alangez mon pain j &
buvez le vin que fat mêlé d'eau pour vous ; dit qu'elles mar-
quent , par le pain & le vin , les antitypes des membres du
Corps de Jefus-Chrift ; & l'autre , c'efl-à-dire , faint Bafile
puifant dans la même fource, parle ainfi del'oblation du Sei-
gneur :. O
Dieu , nous approchons avec confiance de l'Au-
tel facré , &
en vous préfentant les antitypes du faint Corps
& du S.^ng de votre Chrifl , nous vous prions & vous invo-
quons. Ce qui fuit ( dans la Liturgie qui porte le nom de ce
Père ) fait voir encore plus clairement fi penfce , & de quelle
manière ces cliofes ont été appcllées antitypes avant h con--
fécration : car après la confécracion ils font nommés le pro-
pre Corps & le propre Sang de Jefus-Chrift ; parce qu'ils le
font en effet , & qu'on les croit tels. Mais les Iconoclafles
voulant détourner nos yeux des facrées Images, en ont in-
troduit une autre , qui n'eft; pas une Image , mais le Corps &
le Sang de notre Sauveur. Ce que dit la réfutation , qu'au-
cun des Pères n'a jamais donné à l'Euchariftie le nom d'I-
mage , n'cfl pas exa£l il y en a qui l'ont appelle Image ;
:

d'autres , Symbole ; & quelques-uns , Signe & Sacrement (x);


mais peut-être l'entendoient-ils d'une image ordinaire, & qui
ne repréfcnte que l'original fans le contenir. Quant à ce que
lies Iconoclafles obje£toient, que l'on n'avoit point dans TE-

glife de prières particulières, ni aucunes cérémonies pour la


confécration des Images , il répond (>' ) , qu'il y a beaucoup
d'autres chofes parmi les Chrétiens , qui font faintes par leur
nom feul , fans confécration ni prières telle eft la figure de :

la croix que nous adorons , &


dont nous marquons le figne
fur notre front , ou en l'air avec le doigt , pour chaffer les
démons. Il en efl de même des Images nous les honorons à :

caufc du nom qu'elles portent &


de ce qu'elles repréfentent^

(*) EcsFB. Demonfîr.it. Eva/i(f. lit. 8. |


i j. Eux/.
f'H.ocov. Commeiiiar. in Genef. Kvc. l.ib.l Çy)i'''g- 4JI.4j'4:..
tMtr. AJimtwt, Munieb. Isidor, in tflp,.'
DE NICÉE. Ch. XLIV. Sri
Nous faluons au(\\ &
nous cmbraflbns les vafcs facrcs , quoi-
qu'ils n'aienc reçu aucune bénédi£lion , dans l'eipérance de
recevoir quelque fantlitication en les baifanc. Les Grecs en-
core aujourd'hui ne béniflent , ni les croix , ni les images , ni
les vafes facrcs. Les Iconoclalles alléguoient pluficurs autori-
tés , tant de l'Ecriture que des Pères , contre le culte des
Images. Parmi les pallages des Pères , il y en avoir de faine
Epiphane, de faint Grégoire de Nazianze , de faint Bafile,
de faint Athanafe , de faint Amphiloque & de Théodore
d'Ancyre. L'Auteur de l.i réfutation répond à tout (z) , en
montrant , ou que ces paflages ne font que contre le culte des
Idoles , ou qu'ils font tirés d'Ouvrages fuppofés à Severe.
Enluite il fait voir qu'il y a contradidion dans le Décret du
Concile des Iconoclafles , en ce qu'après avoir condamné
généralement les Images que l'on mettoit dans les Eglifes,
ils les laiffoient lur des va les & des ornemens , avec défenfe

d'y toucher pour les convertir à des ufages profanes. Comme


ils avoient dit anathême à faint Germain , Patriarche de Con-

ftantinople (a) ; à faint George , Evoque de Chypre ; & à


faint Jean Damafcene , & qu'ils les avoient dépofés ; les Pères
de Nicéc font l'éloge de ces trois faints perfonnages , en les
faifant paflfer pour les lumières de l'Eglife (b): ils s'étendent
davantage fur faint Jean Damafcene , parce que les Iconocla-
fles l'avoicnt appelle par dérilion , Manfure.
XIL On lut dans la fcptiéme fcflîon , qui e([ du treizième Septième
'^''^'°"*
d'06tobre 7^7(0), la confeffion de foi du Concile , & les
deux Décrets touchant les Images. La confeiïîon ne(ï autre
chofe que le Symbole de Nicée mais il cft fuivi d'anathêmcs
:

contre les hérétiques qui le font depuis élevés dans l'Eglife,


en particulier contre Ncftorius , Eutichès, Diofcorc, Sévè-
re, Pierre & leurs iectateurs. On anathématifa encore les fa-
bles d'Origene, d'Evagre&: de Dydime ; Sergius, Honorius,
Cyrus , &: les autres qui n'ont point reconnu deux volontés
& deux opérations en Jefus-Chrill:. Vient enluite le Décret
touchant les Images, qui eft conçu en ces termes Ayant em-
:

ployé tout le foin & l'exaétitude poflîble (d), nous décidons

(t) Prtf. 5'?o, 554. I (c)Pag.uT-

{b) Pau. s 15' l

Kkkkkij
8i2 DU SECOND CONCILE
que Images , foit de couleur , foit de pièces de
les fainres
rapport , ou de quelque autre matière convenable , feront
propofés, comme la figure de la croix de notre Seigneur Je-
fus-Chrift , tant dans les Eglifes , fur les vafes les habirs &
facrés , fur les murailles les planches, que dans les maifons &
& dans les chemins c'eft à fçavoir, l'Image de Jefus-Chrift,
:

de fa fainte Mère, des Anges de tous les Saints car plus & :

on les voit fouvent dans leurs Images ( e ) , plus ceux qui les
regardent font excités au fouvenir à l'affedion des origi- &
naux. On doit rendre à ces Images le falut Tadoratioa &
d'honneur: non la véritable latrie que demande notre foi,.
& qui ne convient qu'à la nature divine. Mais on approchera
de ces Images l'encens le luminaire , comme on en ufe a &
l'égard de la Croix , des Evangiles des autres chofes fa- &
crécs ; le tout fuivant la picufe coutume des anciens car :

l'honneur de l'Image pafie à l'original ; celui qui adore &


l'Image , adore le fujet qu'elle rcpréfenre. Telle eft la dodri"
l.adUtff. ne des faints Pères &
la Tradition de l'Eglife Catholique ré^
If- 14. pandue par -tour. Nous fuivons ainfi le précepte de faine
Paul , en retenant les traditions que nous avons reçues. Ceux
donc qui ofent penfer ou enfeigner autrement , qui abolifll'nE

(c) Dcfinimtis în omni certitudine ac oblatio adharum Iionorem effi iendum ex-
diligentiâ , fîcut figuram pretiofï ac vivi- hibeatur , quemadmodum & .intiquis pix
fic.T crucis , ita vencra/'iles ac fsn(fhs Ima- confuetudinis erat. Imaginis enim honot
gines proponendas , tàm qux» de colori- ad primitivum tranfît : & qui adorât Ima-
bus &: tefîelis , quàm qu.r ex aliâ materiâ ginem , adorât in eâ depifti fubfîlientiam.
congriienter in Sindi* Dei Eccleflis , & Sic enim robur obtinet Innftoriim Patrura
fiicris vafî; & veftibus & in parietibus ac noftrorum do'flrina, id eft , tr.iditio fandjc
fabulis ; domibus & viis tàm videlicet : CathoJicE Eccle/îs quxàrnibus ufque ad
Imagincm-Domini Dei ff Salvatoris no- fines terrï fufcepit Fvangelium. Sic Fau-i
firi Jefu Clirifti, quim intemfrata; Dorai- lum . . . exequimar ,
[tenentes tr.iditioncs
nx noflraf fTiift.r Dei genitricis , honora» quas accepimus . . . eos ergo qui audent a-
biliunique Angelorum & omnium Sanifto- liter fapere aut docere , aut (erundùm Tcf-
rum alinorum vironim. Quanto
fimul S: leftos hxreticos Ecclefiaflicas traditioncî
fnim imaginalcm forma-
freqiientiùs per fpernere,& novititcm quamiibct cxcogi'-
floncm viJ ntiir, tanto qui lias contem- tare , vel projicere aliquid ex his qux funt
planfjr, ahcriùs erioiintur nd primitivo- Ecclefi;c deputata (îve Evangelium , five
nim eanim mrmorinm ti defidcrium U ad figuram crucis , five imaginalem-pitlurarr!»
ofcnlum ad hononriam his ailûrarioncm
t's: five fandasrcliquias Mr.rtyris. , . veietiaiîi
trihuf nd-m. Non ;amcn ad veram latriani, quafi communibus ufi facris vafis, au: vp-
gti.T fcci;ndùm fidem cft. qua-qee folam di- nerabilibus Monafteriis : (îq\ii:!em Epif»
vinam nnti:ram dccct, impartiendam : ita copi aut Clerici , dcponi pr.rcipimus ; Âlo-
ut iflis, ficuti fiij'iri.- preriof-C *\ vivifier n-iclios autem vel laicos à commun ione'fe-
crucis & ÇM\i\\% Fvnrgeliis iv reliquis fa- grcgnri. Conc, Nic»n, z, Ail>-7.f. 5f f.
cris monumcntis iixenforum & luminum jam 7, Conc,
DE NICÉE. Ch.XLIV. S13
comme les traditions de l'Eglifé ; qui intro-
hérétiques , les
duifcnt des nouveautés (/) ; qui ôtenc quelque chofe de ce
qu'on conferve dans l'Eglifé , l'Evangile , la Croix, les Ima-
ges ou les Reliques des faints Martyrs ;
qui profanent les va-
tes'facrés ou les vénérables Monafleres : nous ordonnons
qu'ils foicnt dépofés, s'ils font Evèqucs ou Clercs ; & excora-
muniés , s'ils font Moines ou laïcs. Les Légats & tous les
Evêques du Concile y au nombre de 205 , y compris quel-
ques Prêtres & quelques Diacres pour les Evêques abfens (^ ),
foufcrivircnt à ce Décret. Apres qu'on en eût fait la leîlure,
on dit anathême au Concile de Conftnnrinoplc contre les Ima-
ges {h). Se à. quelques Evêques eh particulier , qui étoient
regardés comme les principaux fauteurs des Iconoclailes au :

contraire , le des acclamations pour la mémoire


Concile fit

éternelle de fainr Germain de Conftantinople , de faint Da-


mafcene &
de faint George de Chypre.
XIII. Il y a plufieurs obfcrvations à faire fur le Décret de Remarques
ee Concile ( r ) la première , qu'il n'y eft pas fait mention to^ j^jn^'^^J'
:

de flatues , mus feulement de peintures plates. Il eft certain images.


néanmoins, que les Grecs avoient, dès le neuvième fiécle j
des ftatucs dans leurs Eglifcs. Ce'a fe voit par la Lettre des
Empereurs Michel &
Théophile à Louis Augulle , où ils fe
plaignent que quelques-uns mcttoient le Corps du Seigneur
entre les mains des Images , pour recevoir d'elles la Com-
munion : cela ne peut s'entendre des Images peintes , mais
feulement en relief. Il y en avoir donc alors de ce genre.
Saint Damafcene , qui écrivoit avant ce Concile , parle des
ftatues en 1 honneur des Saints: mais, ou il n'y en avoir pas
encore du tems de ce Concile dans les Eglifes , ou elles étoienr
fi rares
, qu'on
ne crut pas devoir en parler. Au frxiéme iié-
cle, l'Empereur Juftinien ayant bâti l'Eglifé de Sainte So-
phie , n'y mit que des Images , ou en peinture , ou fculptées
îur des tables d'argent: ce qui ne faift)it pas une grande dif-
férence d'avec les Im.iges peintes ou- faites à la mofaïque. La
féconde obfervation eu , que le Concile ne décida rien fur
l'es Images de la fainte Trinité , ou du Père ou du Saint-Ef-

(/) P'^S- ryS. [ ( O Mabu-lov , Prtefat.Tom, ;. Ador,


ii) ^"i- 57 W I
Ordiii, S, Btntd.f, (,,
[h) Pag. 578.. |,
Si4 DU SECOND CONCJLE
prit parce qu'on n'a voit pas alors la coutume de les peindre.
;

La troifiéme , que le culte des Images de Jcfus-Chrift des &


Saints, érabli par ce Concile, nVfl point un culte abfolu ,
mais relatif; c'e(l-à dire , qui]le rapporte , non à l'Image mê-
me , mais au fujct qu'elle repréfente. La quatrième , que l'a-
doration] extérieure que l'on rend à la Croix , n'eft pas un
vrai culte de latrie , qui n'eil; dû qu'à Dieu feul ; mais fimple-
ment une adoration d'honneur que nous lui rendons , en la
baifant &
en nous profternant devant elle , en nous fouve-
nant que c'eft par elle que Jcfus-Chrifl nous a rachetés. Les
Evcques de France s'accordoicnt en ce point avec ce Conci-r
le ( > lorfqu'ils
difoicnt que , fuivant la tradition desfaints
Pères , on honore , on adore la croix , mais non pas d'un culte
& d'une adoration qui appartient à la divinité feule.
Lettres de XIV. Après la fignature du Décret touchant les Images,
T.imiie & du
^j^ écrivit dcux Lettres au nom deTaraife de tout le Gon^ &
r^" !* cile (m) j l'une à l'Empereur &: à l'Impératrice , l'autre au
Clergé, tant de la grande Eglife de Conftantinople , que des
autres Eglifes delà même Ville , pour les inftruire de ce qui
s'étoit palfé. La Lettre à l'Empereur contient un précis de
ce que les Iconoclaflcs avoient fait pour la deftrudion des
Images , &
les anathêmcs prononcés contre eux contre les &
autres hérétiques. Enfuite elle explique le mot d'adoration ;
& fait voir qu'adorer &
falucr , font deux termes linonimes ;
c'cft ce îque la Lettre prouve par divers pafTages de l'Ecri-
ture. Il eft dit dans le premier Livre des Rois («) , que Da-
J. v.cf. 10.41.
y^j c^ profternant fur le vifage , adora trois fois Jonathas , &
liebr. II îi le baifa : &
dans l'Epître aux Hébreux , que Jacob adora le
haut du bâton de Jofeph. On trouve dans faint Grégoire le
*

Théologien , de femblables exprelTions ( ) Honorez , dit- :

il , Bethléem & adorez la crèche. Quand donc nous faluons

la croix , ajoutent les Pères du Concile, & que nous chan-


tons ; nous adorons la croix , Seigneur , & nous adorons la lan-

ce quia percé votre coté : ce n'eft qu'un falut , comme il pa-


roît en ce que nous les touchons de nos lèvres. Enfuite ils
diflinguent les divers fens du mot d'adoration. Il y a une

(/ ) Gallicana Ecclelîa ex fandoriim Pa- il/:,iem.

trum traditione crvcem Chrifti veneraba- (m) P.T.,'. f78.

tur , ador. bat , rolebat , non cukii & ado- («) P.i?. ç!?î.
^tione qux folius diviniiatb efl. Mabill. (.ojl'iS-S^i-
DE NICÉE. Ch. XLIV. 8i^
adoration mêlée d'honneur, d'amour & de crainte : telle eft Genef. p. j.
l'adoration que l'on rend à l'Empereur. Il y en a une de crain- Ccnef. 13.7,

te feule : comme lorfque Jacob adora Efali. 11 y en a une troi-


ficme qui eft d'a6tions de grâces ; comme quand Abraham
adora les cnfans de Heth , qui lui avoicnt accordé une place
pour la fcpulture de Sara, il ,'y en a une quatrième que l'on
rend aux Puidcinces de qui on cfpere quelques bienfaits : &
ce fut en pareille occafion que Jacob adora Pharaon. Mais
l'Ecriture voulant nous inftruire, dit: Tu adoreras le Seigneur Dtutn.é.ii.
ton Dieu , Ç^ neferviras que fui fetil. Elle met l'adoration in-
définiment, comme un terme équivoque, qui peut convenir
à d'autres & avoir plulîcurs fignifications mais elle rcflreint
:

à lui feul le fcrvice que nous ne rendons qu'à lui feul , & que
nous appelions latrie. Il efl dit fur la fin de cette Lettre, que
les Evêques y avoient joint quelques palfages des Pères , pour
convaincre l'Empereur que le Concile n'avoit rien décide
3'ue conformément à leur doctrine. La Lettre au" Clergé
e Conftantinople dit en fubftance la même chofc que la
'

précédente.
XV. L'Empereur 8c l'Impératrice ayant reçu îa Lettre du ^^i^'t'^'ne "*
"^
Concile (p ) , ne crurent pas devoir le laifler icfparcr fans y '

avoir afliilé eux-mêmes en perfonnc. Ils écrivirent donc au


Patriarche Taraife d'amener tous les Evêques 'à Conrtànti-
nople ( ^ ) , & marquèrent pour le jour de rAficmblée , le
vingt- troificme d'Oélobre de la même année J^ij. Elle fe tint
dans le Palais de Magnaure. Les faints Évangiles étant pla-
cés au milieu de la Salle , Irène s'affit à la première place
avec fon fils , & ils invitèrent le Patriarche à parler. Ils par-
lèrent eux-mcmc5 au Concile r\çc beaucoup de doucecr &
d'éloquence & après que les Evêques leur eurent répondu
:

par de grandes acclamations , l'Empereur & l'Impératrice'


firent lire la définition de foi à haute voix , afin qu'elle fût
entendue même du peuple qui étoit préfcnt. Le Diacre Côme
en ayant faic la ledure , les Princes demandèrent fi elle avoir
été publiée du confentcment unanime de tous les Evêques. Ils
le témoignèrent en divc^fcs manières, dilant qu'elle conte-
noit la foi des Apôtres j des Pères & de tous les orthodoxes.
A quoi ils ajoutèrent des anathêmes contre les principaux

(/) ^"J- 550» (?) P'S-^SU


Si6 DU SECOxND CONCILE
Iconoclaftes. Taraife préfenta à l'Empereur & à l'Impératrî-
ce, le Tome où de foi étoic écrite , les priant
la définition
d'y foufcrire. Irène foufcrivit la première & enfuite Conftan-
tin fon fils (r). Apres quoi ils demandèrent la ledure de^
paflages des Pères qu'on avoir lus à Nicée , inférés dans là
Quatrième feffion ; fçavoir, du panégyrique de faintMelecéj
e celui de fainte Euphcmie , du Traité de Jean de ThefTa-
lonique contre les payens , de la Lettre de faint Siméon Scy-
îitc à l'Empereur Juftin , de celle de faint Nil à Olympiodo-
re , & le quatre-vingt-deuxième Canon du fixiéme Concile
oecuménique , c'eft-à- dire , de Trulle. Tous les afTiftans en
ayant ouï la ledture , parurent touchés & perfuadés de la vé-
rité. Les Evêques firent plufieurs acclamations qui furent fui-
vies de celles du peuple car la falle en étoit remplie , de même
:

que de gens de guerre. Ainfi finit le fécond Concile de Nicée ,


& le feptiéme œcuménique.
Canons du XVI. On y fit vingt-deux Canons (s). Le premier re-
^^1^^'*"'^ j^ǰ"" commande l'obfervation de ceux qui ont été faits par les
'
faints Pères ( r ) , dans les fix premiers Conciles généraux ,
,
de même <que ceux que les Conciles particuliers ont compo-
fés pour les expliquer. Il veut aufli queTon anathématife , que
l'on dépofc & que l'ois fcpare ceux dont ils ont ordonné l'a-
nathême , la dépofrtion & la pénitence. Il efl dit dans le fé-
cond («) , que l'on examinera fi celui que l'on veut élever à
l'Epifcopat , fçait le Pfeauticr , s'il efl: réfalu de s'appliquer à
la ieflure des Canons & de l'Ecriture- fainte, d'y conformer fa
vie & les inftrudtions qu'il doit donner aujc peuples. Ce Ca-
non cite une maxime tirée dès |Eci:its attribués à faint Denis
l'Aréopagite , touchant la néceflîté où font les Evêques d'ê-
tre inftruits des divines Ecritures. Le troifiéme déclare nulles
toutes les élections d'Evêques {x) , &: qu'ih feront choifis & or-
donnés par les Evêques de la Province, du moins partrois d'en-
tre eux , fi la longueur du chemin n'en permet pas davan-
tage. Le quatrième défend aux Evêques d'exiger de l'or (y) ,
de l'argent ou quclqu'autrcs chofcs que ce foit , des Evêques,
ou des Clercs ou des Moines fournis à leur Jurifdiflion j d'in-

terdîre
DE NICÉE. Ch. XLIV. 817
terdire quelqu'un de Tes fondions ou de le fcparer par palTîon,
ou de fermer une Eglife , pour empêcher que l'Office divin
ne s'y fafle, (ous peine d'être traité comme il a traite les au-
tres. Le cinquième veut qu'on mette au dernier rang (z) , les
EccIéHaftiques qui tiroient vanité des préfens qu'ils avoienc
caule de leur Ordination ,
faits à l'Eglife à prenoient de- &
là occafion de méprifer ceux qui n'avoient rien donné. Il
veut qu'en cas de récidive, on leur faffe fubir une plus gran-
de peine. Le même Canon renouvelle les peines décernées Ci

fouvent contre les fimoniaques. Il eft ordonné par le fixié-

me (a;) , que chaque année des Conciles provin-


l'on tiendra
ciaux, fous peine d'excommuiùcation ,
pour les Princes qui
voudront les empêcher ; & de peines canoniques , pour les
Métropolitains qui négligeront ces Aflemblées. Le feptiéme
porte {b) , que l'on mettra des reliques dans les nouvelles
Eglifes , en difant les prières accoutumées , défend aux &
Evêques , fous peine de dépofition , d'en confacrer aucune
fans reliques des Martyrs. 11 y avoir des Juifs qui faifoicnr
femblant de fe convertir &
de profefler la Religion Chré-
tienne ; mais qui en fecret judaïfoicnt , obfcrvant le Sabba-t:
& les autres cérémonies juives. Le huitième Canon défend
de les recevoir à la Communion (c) , ni à la prière , de les
laifîcr entrer dans l'Eglife , de batifer leurs enfans , de &
leur permettre d'acheter des efclaves Chrétiens. Si toutefois
quelqu'un fe convertit fincérement , on pourra les batifer &
leurs enfans.
XVII, On ordonne par le neuvième (d) , de porter au
Palais Epifcopal de Conftantinople , tous les livres des Tco-
noclaftes , pour y être gardés avec les autres livres des héré-
tiques ; & de ks cacher , fous
on défend à qui que ce foit
peine de dépofition , fi ce font des Evêques , des Prêtres oa
des Diacres, ou d'excommunication, Ci c'eft un Moine ou un
laïc. Il cft défendu par le dixième (e), de recevoir des Clercs
étrangers pour dire la Mefl!e dans les Oratoires particuliers ,
fans la permifiTion de leur propre Evêque ou du Patriarche
de Conflantinople & à l'égard de ceux qui ont permiffion
:

(a)C,ir>.6.
I
(J)Can.9.
ii)Can. 7. I {e)Catf. 10,
Tome XX. Lllll
8(8 DV SECOND CONCILE.
de demeurer auprès des Grands de cette Ville , il ajoute qu'ils
ne doivent s'y charger d'aucune affaire temporelle , mais uni-
quement de l'inftrudion des enfans ou des domefliques , &
de leur lire l'Ecriture-fainte. L'onzième ordonne que chaque
Eglife aura Ton Econome (/) ; & que C\ quelqu'un en man-
que , le Métropoli-ain fera chargé d'en donner aux Evêques,
& le Patriarche aux Métropolitains. Le douzième défend ,
fous peine de nullité (g) , aux Evêques & aux Abbés, de
vendre ou de donner aux Princes ou à d'autres perfonnes ,
les biens de leur Eglife ou de leur Monaftere. Il étoit arri.é
pendant les troubles caufés par les Iconoclaftes , que l'on
avoit converti en hôtelleries & à des ufages profanes , les Ma;ii-
fons Epifcopales & les Monafteres. Le treizième Canon or-
donne qu'on les rétablira en leur premier état ( /f ) > fous pei-
ne de dépofition ou d'excommunication contre les déren-
teurs. 11 efl; dit dans le quatorzième ( ? ) , qu'aucun tonfuré
ne lira dans l'Eglife fur l'ambon ou le jubé, fans avoir reçu
l'ordre du Lecteur ; qu'il en fera de même pour les Moines ',

que l'Abbé pourra toutefois ordonner un Le(5teur dans fon


JVIonaftere, par l'impofitiondes mains, pourvu qu'il foit Prê-
tre lui-même , & qu'il ait reçu de l'Evêque rimpofition des
mains comme Abbé. Les Corévêques pourront aufli ordon-^
ner les Le£leurs , fuivant l'ancienne coutume , par permiflion
de l'Evêque. Le quinzième ne veut pas qu'un Clerc foit inf-
crit dans deux Eglifes différentes (/) , fi ce n'eft dans la cam-
pagne , où l'on pourra lui permettre de fervir deux Eglifes
pour la rareté des hommes. Il ajoute que celui qui defferc
une Eglife de la Ville , & n'a pas fuffifamment pour vivre ,
doit choifir une profeffion qui lui aide à fubilfter , félon qu'il
dit de faint Paul Vous fçavez que ces mains ont fourni a ce
M. io.}4 eft :

qui m étoit nécejfaire ^ &


à ceux qui étaient avec moi. Le fei-
ziéme défend à tous les Clercs (w) , fans aucune diftinftion ,
les habits magnifiques , les étoffes de foie bigarrées , & l'ufa-

{f)Can. TI. catur ab Fpifc^po fecundùm morem per.


(g)Can. II. ficitndorum Abbatum , dum conAec iljum
(i)C««. M. elTe Preil^yterum,' Cont, N*V<e». Can. 14.
(»') Leftoris autem manus impofitîo- p. 607.
nem licentia cft unicuique Abbati in pro- (0 Can. 15.
prio Monafterio folummodo facierdi , fi {m) Can. 16»
duntaxat Abbati manus impofitiofaâa nol^
\

DE N CE I E. Ch. XLIV. 819


ge des huiles parfumées ; & parce qu'il y en avoir qui fe moc-
quoient de ceux qui s'habilloienc modeilcment , le Canon veut
qu'on les punifle. Il remarque qu'autrefois toutes les perfonr-
nes confacrces à Dieu , s'habilloient fimplement modcfte- &
mcnt tout habit que l'on ne prend pas pour la ncccirité , mais
:

pour la beauté, jette un foupçon d'orgueil &


de vanité , félon
que le dit faint Balile.
XVIII. Il eft défendu par le dix-fcptiémc (n), d'entre-
prendre de bâtir des Oratoires ou des Chapelles , fans avoir
des fonds fuffifans pour les achever. Le dix-huitiéme défend
aux femmes d'habiter dans les Maifons Epilcopales (0 ), ou
dans Monafteres , foit que ces femmes foicnt libres ou
les
ferves. porté dans le dix-neuviéme ( p ) > que l'on ne
Il efl

prendra rien pour les Ordres , ni pour la réception dans les


JVIonafteres, fous peine de dépofition pour les Evcv]ues& les
Abbés qui font Prêtres & à l'égard des Abbés qui ne font
:

pas Prêtres , &


des AbbefTes , fous peine d'être chaffés de
leur Monaftere , & mis dans un autre. Mais il permet de re-
cevoir ce que les parens donnent pour dot , ou ce que le Re-
ligieux apporte de fes propres biens , à la charge que ce qui
fera donné demeurera au Monaftere , foit que celui qui y en-
tri- demeure ou qu'il en forte , fi ce n'eft que le Supérieur

foit caufe de fa fortie. Le vingtième défend à l'avenir (q) ,


les Monaftcres doubles d'hommes & de femmes ; mais il con-
fcnt de laiffer fubfifter ceux qui font déjà fondés fuivant la
Règle de faint Bafile. Il défend encore à un Moine de cou-
cher^dans un Monaftcrc de femmes, &
de manger feul avec
une Rcligieufe. Le vingt-unième porte ( r ), que les Moi-
nes ne quitteront point leur Monaftere pour paiTer en d'au-
tres ; qu'ils n'y feront point reçus fans l'agrément de leur
Abbé. Il prefcrit la même chofe pour les Religieufes. Il eft dit
dans le vingt-deuxième (s) , que les Moines ne mangeront pas
feuls avec des femmes , fi ce n'efl: que cela foit néceflaire pour
le bien fpi rituel de ces femmes , ou qu'elles foient leurs paren-
tes , ou qu'ils foient en voyage. .

XIX. Pendant la tenue du Concile (^ t) , Epiphane , Dia- '


Difcoursdu
Diacre Lpi-

(n) Can, 17. (r)Can. 1 i .


(0) Can. 18. Can. zi.
(i)
Cp) Can. 19. (0 Pag. 617.
(y) Can, 10,
Lllllij
820 DU SECOND CONC I L E
cre de TEglife de Catanes en Sicile ,
prononça un Difcours y
où il fit voir qu'il n'y avoir aucune apparence quel'Eglife,

après avoir renverfé de tous côtés les Temples des faux Dieux
& leurs Idoles tombée elle-même dans l'idolâtrie par le
, fût
culte des Images. Il l'éloge du Concile , en particulier de
fit

Taraife , de l'Impératrice , qu'il com^iara à fainte Hélène, de


l'Empereur & de la Ville de Nicée , déjà célèbre par le Con-
cile qui s'y étoit tenu contre Arius, par trois cens dix-huic
Evêques. .
'

triarcife Ta^" ^^* ^c Patriarche Taraife rendit compte au Pape Adrien


raifeau Pape de cc qui au Concile convoqué, dit-il («) , par
s'étoit pafTé
Adrien.
j^ volonté & le zele des très-fideles &
pieux Empereurs, en
premier lieu à Conftantinople , puis à Nicéc. Il marque qu'on
lut d'abord les Lettres de ce Pape, enfuite celles des Evêques
d'Orient , dont la dodrine fe trouve conforme ; que tou- &
tes ces pièces jointes aux témoignages dei faints Pères , donc
on fit aufli la le6lure , formèrent une preuve folide de la vé-
rité de la dodrine de l'Eglife fur le culte des Images. Il a-
joute que Conftantin &
Irène les ont rétablies par-tout, dans
les Eglifes & dans leurs Palais. Les Légats du Pape , qui fu-
rent apparemment chargés de cette Lettre , emportèrent de
Conftantinople à Rome, un original grec des Attes du Con-
cile. Adrien le fit traduire en latin , & placer dans fa Bi-
bliothèque ( jf ) ; mais le Tradudeur s'étant appliqué à ren-
dre fon texte mot à mot , rendit fa verfion prcfque inintel-
ligible : ce qui engagea Anafliafe le Bibliothéquaire , d'en
faire une nouvelle environ cent ans après. Il la dédia au
Pape Jean Vllt ; &
c'eft celle qu'on a fuivie dans les Collec-
tions des Conciles.
Difficuit^ifor- XXI. Le Pape Adrien approuva confirma tout ce qui &
ce^^contre"k s'étoit fait à Nicéc (^) ; &
afin que les A£les en fuflfent con-
Conciie de nus dans les Gaules &
dans les autres parties de l'Occident,
Nicée.
jj çj^ envoya des exemplaires à Charlcmagne autres Prin- &
ces de l'Eglife Laiine, Les Evêques des Gaules furent offen-
fés du terme d'adoration, dont le Concile fe fervoit en par-
lant du culte des Images &
fur les plaintes qu'ils en por-
:

tèrent au Roi Charles , la commillion fut donnée à quel-

(.v) Anast, Tq/h, 7. Conc.p. X9 tf 30, |


DE NICÉE. Ch. XLIV. ' 821
qucs-uns d'enrre eux de faire un Recueil de ce que les faints
j,

Pères ont dit fur ce fujet. Cette compilation parut trois ans
après le Concile , c'eft-à-dire , en 75)0 , divilée en quatre
Livres ; c'efl: ce qu'on appelle Livres Carolins. Deux ans
après , Charles l'envoya en tout ou en partie , au Pape A-
drien , par Angilbert , Abbé de Ccntulle , en le priant de
répondre aux diflicultés que les Evcques des Gaules oppo-
foient au Décret du Concile. Le Pape y répondit article par
article, & fît voir que les Pères de Nicée ne s'étoient point
écartés de l'ancienne Tradition de TEglife Romaine. Ses ré-
ponfes ne firent point changer de fentimenc à l'Egliic de
France & dans un Concile tenu à Francfort , en 7514 , au
:

fujet des erreurs de Félix , Evêque d'Urgel , les Evêques de


ce Royaume donnèrent un Décret tout coniraire à celui de
Nicée , fur le culte des Images. Syméon , Moine de Du-
nelme, & Matthieu, Moine de "Weftmunfter, affurent que
les Evèques d'Angleterre avoient , quelque tems auparavant,
fait un Décret femblable à celui de Francfort. Louis Augu-
fle afTcmbla, vers l'an 825 (z) , un Concile à Paris , où il
fut décidé que l'on retiendroit les Images , mais qu'on ne
les adoreroit point , & qu'on ne leur rendroit aucun culte
fuperftitieux. On voit par-là ^que ce qui rendoit odieux aux
Evêques François , le Décret de Nicée , étoit le terme d'a-
doracion ils foutenoicnt qu'elle n'cfl; due qu'à Dieu feul (a) ;
:

mais ils convenoient d'ailleurs , qu'on dcvoit à la Croix un


culte , non de latrie , mais d'honneur & de refpe£l ( è ) , en
la faluanc , en la baifant , en fe profternant devant elle par-
-,

ce que Jefus-Chrift y avoir été attaché. Les Pères de Nicée


n'en demandoient pas davantage. Ainfi, fur cet article, la
difpute ne confifloit que dans la différente manière d'expli-
quer le terme d'adoration. A l'égard des Images (c) , on ne
leur rendoit en France aucun culte , foit ablolu , foit relatif,
êc on ne les confidéroit que comme des monumens propres
à conferver ou à rappeller le fou venir de quelques hiftoires.
C'efl ce que difent clairement Agobard & Jonas. Ce fcnti-
ment n'étoit pas toutefois général , & il y en avoit qui n'é-
toient point éloignés de rendre aux Images le culte qui eft

(X.)ldem.ibid.fiig.i^ I (*) IW.p. lo.'

{»)Uid.p, 11. \ (c) Itid.p, 11,


822 DU SECOND CONCILE DE NICÉE.
prefcrit par le Décret du fécond Concile de Nicée ; entre
autres , Valafrid Scrabon , Abbé de Richenou , & le Reclus
Dongal. Hincmar , Archevêque de Reims (d) ^ fut aufli de
ce nombre. Mais enfin , dans les dernières années du neu-
vième fiécle ou au commencement du dixième ( f ) » l'Eglife
Gallicane fe réunit avec les Grecs & l'Eglife Romaine , fur
la manière d'honorer les Images , comme on le verra dans
la fuite.

{d) ibid.f. li.e? 13. {e)IbiJ.p. 8.


, , , , ,

823
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TABLE
DES MATIERES
Contenues dans ce vingcicme Volume.

ABbon (faint;
naiflance, fes études.
Abbé de Fleuri. Sa
enfjigne les
Il
cufe d'enfeigner que le Corps de Jcfus-Chrîft
dans l'Euchariftie n'eft qu'une figure , iptf.
belles-letties, p.i^f 31. Eft envoyé en Réponfe de Berenger à cette accufation , 'bid.
Angleterre. Eft fait Abbé de Fleuri , />. 33. Sx. 300. Rythmes d'Adalmanne , ibid. Son ori-
Sa mort en 1004,^.34. S;s écrits, fa colleâion gine, 438. Ses études, ibid. l\ cft fait Evê-
des Canons. A nalyfe de cet ouvrage , 54. G* /. que de BrefTe, 419. Ses autres écrits, 443-
Apologie d'Abbon , 37. Recueil de fes Let- Jugement de fa lettre à Eérenger, 440.
tres, 40. Ses autres Ecrits, i .Chronologie des Adam de Paris. Ses ouvrages 4 1 o.
Papes , 48. La vie de faint Edmond Roi d'An- il^fViiVf/f, Impératrice, fonde pluficurs Mona-
gleterre . ibid. Ses Poèfies , 49. Son Cycle , fteres, 160. Sa mort, îJ3, 158 ï(5i. Mira- &
49. Son Commentaire fur le Cycle de Viélo- cles opérés par fon interceflion ibid. ,

rius, yo, Sonintroduâionà l'intelligence des Adetbode, Evêque d'Utrecht, liï. Ses Ecrits,
Canons fur la concorde des Evangiles 2^6. ,
ibid. cr f'I.
Jugement de tous fes Ouvrages ji. ,
Ademitr , Moine de S. Cibard. Sa famille , fes
Abraham , Evêque de Frifingue , ell accufé d'un études, 170. Sa chronique , 171. Sa notice
mauvais commerce avec la Princefle Judith. des Abbés de S. Martial de Limoges, 172.
S'en jullifie, 103. Sa lettre fur l'Apoftolat de S. Martial , 173.
Abfo utieti déprécatoire , i ly. Analyfe de cette lettre , 174. Difcours d'A-
AccufaiîKns d'Intérieurs envers leurs Supérieurs. demai 8c autres écrits qui lui font attribués ,
Règle» d'Abbon de Fleuri à ce fujet , 41 8c 1758c 177.
43- Adoration , divers fcns de ce mot 8 1 j.
Aialarà , Abbé de Blandigny , écrit la vie de S. Âdjon , écrit la vie 8c les miracles de S. Manlui,
Dunflan , Archevêque de Cantorberi, 94.
^(/4/ifro» , Evêque de Metz. Abrégé de fa vje, Aganon , Chanoine de Châtillon-fur-Seine. Ses
120. Ecrits, 125 âc 127.
Adalbertn ,'E\è<\\ie de Laon. S. Fulbert lui Agntau. Bénédiâion d'un Agneau le jour de
écrit,! 38. Il fe donne un SuccefTeur ; Gérard Pâques 92.
de Cambrai l'en reprend , 277. Agnès , Epoufe de Henri III , renonce au mon-
Aiialbert, S. Evéque de Prague Martyr. Sa & de , 564. Ses vertus, 574.
Tie, léi. Il quitte fon peuple incorrigible > Aimoin , Moine de Fleuri. Lieu de fa naiflance.
ibid. Se retire à Rome, eft rappelle à Prague Il embrafle la vie monaftique , 52. Sa mort
par le Duc Boleflas , \6i. Travaille à la con- fes Ecrits , fonHilloire des François , ibid.
verfion des Hongrois , pafTe en PrufTe , ibid. Cet ouvrage a trouvé des cenfeurs 8c des
Son Martyre ibid. critiques ,63. Editions de cette hiftoire , ihid,
Adatbert , Archevêque de Brème , fait des repro- Aimoin écrit l'Hiiloire de la Tranflation des
ches à Harrold , Roi de Norvège , 497. Con- Reliques de S. Benoît , 54. Ses autres écrits,
voque un Concile en ro7i , page ^04. 6; 8c 55.
Adalbert , répand des erreurs dans les Gaules , Albert , Abbé de Mici. Sa lettre au Pape Jean

77^ & 775:. Sa condamnation , 770 8c 777. XVII. pag.4^.


Malmanne, Condilciple de Berenger , l'exhor- Aldebuld Moine de Cluni. Ses
, Ecrits ,2jo.
te à quitter fes erreurs , page 18 1 &4 3 9. l'ac- Alexandre II. Sonéleûion 495 , 8c 541, Elle cil
, , , , , , , , ,

824, TABLE DES MATIERES.


confirmée, 45^. Ses lettres , 497. Il tient Arnonl , Chantre de l'Eglife de Brionne. Son
un Concile a Komc , 459. Décrets de ce attachement à la tradition, 28S«
Concile tbid. Arnatil ( faint ) Abbaye de ce nom. Son origi-
Alexandre , Chanoine de Liège , jp/. écrit l'hi. "^' 47r-
lloire des Evêques de cette Ville , j , .
ibid, Artour du Moutier , Auteur du Recueil intitulé
Alfric (Çi'im) Archevêque de Cantorberi , Sj". Neujlrie pieitfe , tfOp.
Ses Ecrits, 86 i^ fuiv. Afcelhi. Sa réponfe à Bérenger , 287 8c 44^.
Aljric , Moine de Malmefbuti
puis Archevê- , Sa foi fur l'Euchariflie , 288. Ses fentimens
que d'Yurck. Sa mort, 86. de Jean Scot,
fur l'écrit ibid.
Aljrtd, Evêque de Munller, U4. Ecrit la vie Affompiion de la Vierge , étoic la créance com-
de S. Lutger , if y. mune du temps de S. Odilon , 2^4.
Alleluia.Be.no\t VIII. permet aux Moines de Ri- Avent. Ses offices commençoient dans l'Eglife
pouil de le chanter après la Purification , J30. Gallicane à la fête de S. Martin , 7. Va-
AUemans, vaincus par Valentinien , 107. Leurs riété des ufages dans l'obfervation de l'A-
premiers Chefs , 108. vent 1 24,
Alpert, ou Albert, Moine de S. Symphorien Aumône. Son utilité, 781 ^/f 7.
de Metz. Ses Ecrits , 120. Avouet des Eglifes. Leur origine & leurs abus
Ahvalo/i. Sa Lettre à un Evéque , dont le nom iS-
n'efl défigné que par une L. 1 17. Aurele ( faint ) Evéque. Invention de fon corps.
.^»a/?.»/e(faint) SesAdles, 410.
Jbirify Reine de France. Ses vertus , 413. Autels donnés en bénéfice à des Laïques , 13p.
Aiinon Archevêque de Cologne , fait dépofer
, Atyle. Abbon de Fleuri défend le droit des azyr
Cadaloiis , 496. les 3Î-
Anfelme ( faint ) embrafle la vie monaflique,4d4. Atyme. Difpute des Grecs au fujet du pain
Anfelme (faint ) Evéque de Luques , ôyot^lï eil azyme , 344. J. C. s'en ell
fervi dans l'inlli-
fait Légat dans la Lombardie, 671. Sa mort tution de l'Euchariftie, jyi. Humbett réfiite
6yi, Ses Ecrits, 673 ^ feq, les Grecs fur ce fujet 3 66.
Anfelme (fz'mt) Ermite» 6ç6. Prêche l'Evan- B.
gile aux Mufulmans , ibid. Sa lettre fur l'Eu- BAîLLER. Coutume des Fidèles de faire fur

chariftie , 697. leur


] bouche le figne de la croix , lorfqu'ils
Anfelme Chino'me de Liège, 397. Ecrit i'hi-
, bâilloient 90.
ftoirc des Evêques de cette Ville , itid. Bamberg. Ereéliondel'Evêché deBamberg,524.
Anfelme , fait l'Itinéraire de Léon IX. 362. Henri Duc de Bavière donne à l'Eglife Ro-
Ansfroi, Abbé de Préaux , reçoit Bérenger, & maine la ville &
l'Evêché de Bamberg , 108.
examine fa doélrine , 285. En fait dédier l'Eglife Cathédrale , ibid.

Anttchrifl. Sa venue &


fon règne , s6f. Baptême , ne fc conféroit autrefois qu'à Pâques
Attthohgium des Grecs , 227. _
& à la Pentecôte, 424. Sa néce(Tîté , 273. Il
Apparitions de Morts.rapportées parDicmar>i02 a fon effet ,
quoique conféré par un mauvais
Apparitions d'Efprits , i^i^, Minillre , 151 &
275. Sentiment de S. Ful«
Arcbambald , Archevêque de Tours, attaque les bert fur ce Sacrement, ijo.
privilèges des Chanoines de S. Martin , 41, B.ircepba ( Auteur Syrien , e(l fait Evê-
Moïfe )

Les Chanoines s'adreffent à Abbon deFleuri, que mort, yy- Ses écrits, ibid. îsfeq. Au«
: fa

4î. teurs cité? par Barcepha , yg. Il étoit de la


Aritni' Maladie des Ardcns , 24*. _
fedle des Monophyfites , 80-
Jrialdi, Diacre de Milan, martyrifé , 5-02. Bardus écrit la vie de faint Anfelme de Luques ,
Aribon , Archevêque de Mayence.Sa naiflance, «7- a-f'l'
2 15. Sa mort > 217. Ses écrits, ibid. Barthelemi, Abbé de la Grotte-Ferrée, confcUle
Aribon Syrinus £5 yîfrjio» le Muficien, ibid. à Benoît IX. de renoncer à fa dignité , 337.
Arméniens. Leurs erreurs 74 75". & Barihelemi , Abbé de Marmouticr. Sa lettre.
Arnalii , Moine de S. Viâor de Marfcille , Arnauld , Evéque du Mans 607.
Ba/tle d'Ancyre donne fa profcfTion de foi au
4J2.
Arnold, Evéque de Halberfladt. Sa lettre à II. Concile de Nicée,5c anathématife les Ico-.
Henri de Wirtzbourg , 157. noclaflcs, 799.
Arnold ou ArHflf, Prévôt dcS. Emmcram , 157. Beaiilteu.ou Loche, Monâflere. Sa fondation,
Ses écrits , 15:7, 158 515. & ?2J- Sa Dédicace, 241.
Arncut (faint) Archevêque de Tours, ii^6. Belhomme ( Dom Humbert ) , Abbé de Moycn-
Arnoul , Moine de S. André , à Avignon. Ses Montier, 4?^*
écrits, izi. Bénédiilinsy occupoicnt & defTervoient les Egb-
ies
, , , ,

fes Cathédrales,
TABLE DES MATIERES.Rome joy. affilie au Concile de fit les abjuie
825
,

Sénéjiie. On ne doit en polTéder qu'un , de nouveau» 291. Son ferment, fa formule


478 i^lfrq. 49? j 74^ > 5^ 745'' de foi , 300. la combat , ibid. Il inveâive
Btnigni ( faint ) Sa miflion dans les Gaules fon , contre le Pape &
le Caidinal Humbert , ipi
Martyre, 308. & x<)ç. Rétraéle fon héréfie au Concile de
Bénigne {^{i\ni) Abbaye, joy & 3C7. Lettres S. Maixent , 233. Grégoire VIL lui donne
de Benoit VllI. en fa faveur j}o. audience dans deux Concile; , où il abjure
Bénigne , Evéque de Dijon , prend l'habit m(j- encore fes encurs, 293. Le Pape le renvoie
naftique, jîo. avec un lautconduit , itid. ba réttaâation
Beniiot) , Cardinal ; fts écrits > ôJy. par<;it infuflilante, apy 11 l'ciit contre fa pro-
Benoît ( (nMi) Hilloire de fa Ttanflation par feflîon de foi, 294. Renonce à fes erreurs,
Aimoin 64. Abbon envoie cette hiiloirc à
, 294 & 2p(î. Paffe le telle de fa vie dans la
Grégoire V. /'«?. 41. Difcours d'Aimoinen pénitence , i. Sa mott, 295. Sa doélrine tirée
l'honneur de S. Benoît , 64. Adalbert & Ade- de fes écrits , il>id. La même , félon les Au-
lere donnent des miracles opérés à
l'iiilloite teurs contemporains, iptf Variations de fes
Fleuri , iM. Vuy. Thierri , Moine de Fleuri. feâateuts , 297. Ses écrits ,501. Ses lettres ,
Be'jott V. Pape, exile à Hambourg, fa mort , 29S. S. Fulbert de Chartres é:ant au lit de
10}. Son corps efl rapporté à Kome , 104. la mort , le fait chafTet de fa chambre, 129.
Be'ioit VIII. eft obligé de fortir de Rome , 5*5. BtrLuide ( fainte ) Vierge de Mcrbeck en Bra-
Couronne l'Empereur Henri , Z40. Fait la bant. Sa vie écrite par Heriger , Abbé de Lo-
guerre aux Sarrafms, ^26. Demande du fe- bes , ) 8.

cours à Henri contre les Grecs > iHd. Affera- Btrnald. Voy. Berthold.
ble un Concile à Pavic , 317. &
à Rome > BernirJ, Abbé de Beaulieu. Abbon de Fleuri lui
)îp. Prend la qualité de Pape de la ville éter- écrit , 4<ï-
nelle> ji9. Ses Bulles, il>id. Ses lettres Bern<ird, Moine de Cluni , fait un recueil des
?i7ÔC5jo. anciens ufages de cette Abbaye , 4615.
Benoit IX. Pape,élu à l'âge de 12 ans: cil Bernitr y Abbé de Marmoucier, accufé de plu-
de fon Siège , 246. Rétabli,
cbafl'é ^ ' 1J î n • fîeurs crimes > - 41.
J54 &
5J7. Difpen'e Cafimir , Diacre de Bernotd , Bibliothécaire du Dôme de l'Eglile
Cluni, de fon vœu de chaileté î5'4 & 538. , Métropolitaine de Milan. Son recueil des Rits
Renonce à fa dignité, 235 6c 337. de la Liturgie Ambrofienne , ;.
BenoitX. Antipape ,417. Demande pardon,4t8. Bertion , Abbé de Richenow , 206. accompa-
Benoît , Prieur de Clufe, combat l'ÂpofloIat de gne Henri à Rome, aiTille à &
fon couron-
S. Martial, 17415/?.;. nemeac , 107. Ses écrits , ibid, Î5 feq. Ses let-
Btreng.iud , Moine de Ferriercs. Son Commen- tres , 2ii. Ju2;ement de fes écrits, i\6.
taire fur l'Apocalypfe 3or. Beriion, Abbé de Cluni , rétablit Pobfervance
Btrenger , Héréfiarque. Sa nailTance , fes études de la règle de S. Benoît. i6i.
fes dignités , 180. Sa fcience efl plus fuperfi- Bermujrd (him) Evéque d'Hildesheim. Savie
cielle que folidc, a8i. Laniranc le confond écrite par Tangmar, 109. Son diftérend avec
dans une difpute , HiJ. Commencemens de Villegife , Archevêque de Mayence , nor
fon he'réfie , lùiii. Expofuion de fa do(Srinc, Son voyage à Rome , il/id. Il con'acre Ar-
18} &287. Sa lettre i Lanfranc. 11 s'appuie chembaud, Archevêque de Mayence , iiid.
de rau;Gn;é de Jean Scot, de faint Ambioifc, Sa mon , 11 1.
&c. 28J. Le Pape le cite au Concile de Bertbe , fon mariaffe avec Robert Roi de France
Vetceil en loyo , pag. 186. 11 patTc en Nor- déclaré nul par Grégoire V. p'g. 40,
mandie , eil confondu dans une conférence à Berthaire , Prêtre , écrit l'hilloire des Evêques
Brionnc , liid. 11 va à Chartres, rcfufe de ré- de Verdun , 447.
pondre de vive voix aux queilions qu'on lui Berttald , Pierre de Confiance, Continuateur
feLt,)/'<V. écrit aux Clercs de l'Eçllfe de Char- de la Chronologie de Hermann- Contrat ,

tres, Md. envoie deux ClciCf au Concile ;i5. Sa chronique, 687. Ses autres écrits ,.
de Verceil pour fa défenfe, 187. Ses Lettres 688. Il doute de la iincérité du retour de Be-
k Afcelin , itiJ. & ifjtf, à Adelmanne, 289 &
rcnger 4 la foi de i'Eglife , zçk-
443. Sa lettre à Paulin tft interceptée lue &
Tthi (faint) Invcrttion Tranflation de fcs &
au Concile de Paris , 289. condamnée avec le Reliques , 449.
livre de Jean Scot , iiiJ. Ôc 34t. Réfolucion Biers &
revenus l'Eglifie. Régies fur l'adir.ini-
du Concile de Paris, 341. Le Roi le prive rt'ration uu'on en doit faire, i4ii
de fes revenus , ipo. Autres lettres de Bércn- Bottiface ffaint Archevêque de Mayence, pré- ^

ger,iA«W. Il anathcmatife fes erreurs, ii>U. fideà plufieut' Conciles, 770 tS/'f»
M mm m m
, ,, .,

826 TABLE DES MATIERES.


Bo'iific^ va prêcher la Foi aux Rufijs , j 14. Vanne en fait un qui contient les chattes &
Bo"i:hard , Arche/êque de Lion ; fa more , 1/4. lesdiplômes de fon Monallere , 100. L'ori-
Bo»chard , Comte de Melun , prend l'habit Mc- ginal s'en conferve à Dijon, ibid.
nailique > réforme l'Abbaye des Foflez ,401. Ca/im:r, Fils de Miceflavv, fe retire à Cluni,
Bo^'chart Evêqus de Vorm.s. Sa nailTince les
, , 254. Eli élevé iu Diaconat, ibid. Retourne
études , I5i. Il ell fait Evêque, aflîile au en Poiogn;: .difpenfé de (es]\œu%,ibid. &
Concile de Selingllad. Sa mort , if?. Ses 333. Conditions de ccre difpenfe , 154*
écrits , fon décret , ibid. Sommaire de cet ou- Cat'-rC!'.-:ier,'s renvoyés avant le Canon dejla
vrage , 15-4. Sa lettre à Alpert , Moine de Meiie quand cet ufage a ceffé dans l'Eglife
:

S. SymphoriendeMetz, if 56c 157. latine, 13»


B9M011, Abbé de S. Bertin 448. Ses écrits',' 44p. ,
C(itT:'.i^;j, Moine de Redon, i62. Etablit un
Br">>o C.iinz) Fondateur des Chartreux, enfei- MonaïkreàBeile-lfle, «iW. Ses lettres à Hil-
gne Reims ,
les belles-lettres à 4ji5. : degarde 8c Léburge , ^6ç.
BritnoH , Evêque de Wirtzbourg; fa naiflancc> Célib.u o'doiné aux Clercs , 328, 419 , 478 ,
fes écrits > 19}. 504,jip,â9&(îij. Lettre en faveur des
Brttnoit , Evêque de Langres ; fa nalflance , fes • Clercs maris.;:, 57o&tfi9. Voy. Clercs.
écrits, i\6
117. Sa mort; i<. ibid, Çelfi, ( fainr ) Evêque de Trêves. Invention de
BrHnori , Evêque d'Angers , attaché à la doilri- fts Relique.^ , en 980. fg. 170.
ne de Bérenger , jSj ôt 47;. Sa lettre à Bé- Cendres , Mercredi des Cendres obfervé dans le
rûnger 25 1 Se 475. onzième fiecle, ^79'
Brtmon prêche la foi aux Rufles , 3x4. CeruUrius , voy. Michel.
Bmmn Evêque de Toul. Sa naiffance, ^38 II
, Chrême. Quand les Evêques alloient en voyage,
a été Moine, 3 ;p. Son zèle pour le tétablif- ilsfaifoient porter un vafe rempli du faint
lèment de la difcipline Mon.illique > ibid. Il Chrême , pour donner la Confirmation , 90.
eft tait Pape fous le nom de Léon IX. 539. CI-'..»oines. Leur profcflîon ne prêche que l'hu-
Aflemble des Conciles contre les Simoniaques, miliré , »??•
ibid. [5 fej. Ses voyages, 340 S?? bulles C hitnoiiies Réguliers. Leur profelTion ,415. Doi-
341 Se 3 J5. Fait la guer;e aux Normans,544. vent vivre en commun , JîJ-
Éll fait captif, ibid. Sa mort i 345. Ses écrits, Chanoines Réguliers d'Aroafia , leur inftitution,
»i«rf. Réfute Cerulanus touchant le pain azy- 731.
me, 34<î. Ses lettres 348 dfeq. Ses difcours > , Cbarlem^tgne, Son éloge funèbre dans la chroni-
358. Son éloge, 36 1. Ses miracles > que des Papes Saxons, î'9*
3<9, 341 & 3(îi. Ciw/'jwf (fainte; Sœur de Poppon,Archevêque
Brunon , Abbé de Montier-en-Der , recueille les de Trêves , rec.ufe, 104.
miracles de S. Berchaire . 60g. Chrijlodiile, Patriarche d'Alexandrie, 73.
Brunon , Moine. Son Huloire de la guerre ûc Chrcuiijiies. De Snxe ou Quedlimbourg , 107.
« Saxe, 62;. De Tours , xç7. Elle rapporte l'erreur de Bé-
Btinhard Cfaint) Evêque de Wirzbourg , 511. renger fur préfence réelle içy. •— De
Bitrchard , Abbé > i I j HermannCunrraft
la
. 3iy — De ,

S. Benene
508 —Des Pa; Saxons , <i8 ,
CAdalous ,
C.
Antipape , 49; ,
jio ,
$ti &
de Dijon
— De Saxe ,319
,

De Toul 3x0.
bers-Munller ,311 .-^De
— D'E-
ou de S.
e.'.


Cacn , Abbaye , fon origine ,
Cambrai. Lettre des Ciercs de Cambrai à ceux
^41.
702. Bertin , 511.
IteouWatte, 313.
De — —
Hafnon ,
Siihieu
ibid, De Wa-
D'Anjou,
— 5:72.
de Reims 478. Cinthius Préfet de
, Rome
, fait undifcouis dans

Cane» de la Meffc. Addition faite au Canon par l'Eglife, S3S-


S. Grég ire Pape, 2 31 & Clément Il.Pape. Son éIeaion,33î. Ses Lettres,
Canons. Collection des Canons Abbon par S. ibid. Tient un Concile à Rome, 3 35, Sa mort.
de Fleuri 34.
Cantiris , Cantianus &
Cantianellus , Martyrs. Clément III. Antipape , tfji.

A(fte de leur Marryre , 30. Clément , Ecoifoi': fouticnt des erreurs , yyô.
,

Canut, Rdi de Dannemarck d'Angleterre, & E!l con '.-mné dans deux Conci!es,»i»i/ '3 y»?.
351. S. Fulbert lui écrit » 141. Clercs. 11 Icu -Il défendu d'avoir aucune fem-
Cirdinaux. Origine de leur droit d'élirele Pape, me avec eux , 317. 1 enis cnfansfinr illégiti-
418. Leurs prérogatives, çio. mes, 3:8478.^/'/. Décrets du Concile de
Carême , quand il commcnçoit en Angleterre , Rome conne l'incontin. ncc dt s Cieics 41p.
60. Autres décrets. j'03.7s8& 7\9- Jugement
Ç»TnUairfS. Leui uciliti. Richard Abbé dg S. des Clercs léfeivé aux Juges Ëccléfiailiques »
, y

TABLE DES MATIERES. 817


leurefl défendu de porcer les armes •—De Coblentz, pour la condamnation de
|©j. Il

5 =
,

4- Thicrri Evéque de Metz, p. io3.


—De
De Co-
Compiegne en

Cliini regardé dans le XI. fiecle pour le Mona- logne en 781 , /». 7pi-
—De Conllancc en
flere le plus régulier
Colmann ( faint ) Hilloirc de fon Martyre ,130.
Communion. Les avantages d'une bonne Com-
, 140.
758. —
757 > f- 788. 1

DcConfttntinople en 712. On y
094 , p.tg.

condamne le V'I. Concile général, /><>?. 7(5'7.


munion , x6. Les dangers d'une mauvaife. E- —ihid. en 7î4 contre les images , p'^g. 784.
xemplc à ce fijjec , itid. y /ej. Co qu'il t'aut —De S. D.-'(U5 , /). 38 — —
De Dingolvingue
faire avant de s'approcher delà Communion ,
17. Fréquente Comrnunion , 18. A qui il faut
en 772, p-7^0
— —De Duiie en 779 , p.791-
D'Etford en 1074, p. (îiy.— D'Ètampes
j8p. On ne doit point la différer —Je Florence en 10; î ,
la rcfufi.r ,

aux Moines qui font profefîion d'une v;e péni-


tente , comme aux Laies qui font fous le )oug
en 109Z ,^.754.
p. 2po. — —
D j Gènes en 77 p-7^\'
Geunlli en 767 , p. 790. —
Dj Gironne en
;
De , —
du fiecle, 57. Communion générale le Ven- —De Jutniege en 10^7, /"t^.
dredi-Saint , le Samedi
&
le jour de Pâques ,
Communion
&
deux efpeces,
1097 p. 7Jf-
,

481. -^De Léon en lopi ,p. 732.


.Limoges en lOji. Déccts Jece Concile , p.
De —
yi

Concile général
287.

, ne fe
fous les

peut tenir fans l'ordre


746.
du
jop. — De Lipe en 780 p. 791.
nes en 743. Canons de ce Concile, p.jyi..^—
, Li- —De
S. Siège , HP- De S. Maixent en 1075. Bérenger y rétraéle
de Nicée , en 785. pour le culte
Concile général fon héréfie , p. 293.
—De Mantoue en 1 067
4p5. ——De Mayence en 104P Décrets de
.^
des images, 7çi. Cî/fj. Première fefnon,798.
Bafile d'Ancyre, Théodprede Myre «Scïhéo-
.
p.
ce Concile, p. 540. —Uid. en 1071 ,p. (îpj.
_^ dofe d'Armorion fe rétraâent , & anathémati- De Melt'e y p.
*.. ^fen;
les Iconoclalles 79p. Seconde fcflîoD. ,
41t. —
Ibid. en 108 s, p. 63 1.
-DeMelfeen io3p, p. 725'. —De
Metz en 755. Canons de ce Concile p. 788.
Grégoire de Néocéfarce demande pardon ,
800. Le culte des images efl confitmé, 801. — De Narbonne en 1 090 p, 71 8. De
,
,


Troifiemc feffion. On rejette le faux Concile Nellrefield en 703 , p. 764. De Nid en
de Conflantinople , 801. Quatrième fellion.
On prouve l'antiquité du culte des images
par l'Ecriture 5c la tradition 805. Conielfion ,
703- ,p. 7<5y.—De Nîmes
D'Orléans en 1022 ,/>. 205-
en ioç)6

De Piderborne en 777 8c en 785 , />. 79


,
p-7';i.
21 1. &
» .
——
de foi touchant le culte des Images, Soj. Cin- De Paris en 1050. Bérenger y eil cité , 287.
quième fe/îîon , p. 806. On condamne au feu
les écrits des Iconoclaftes 807. Sixième fcf-
fion. On réfute la définition de foi des Icono-
,
(i<(/.—
Il n'y vient point , p. 289. Sa condamnation ,
De Pavie vers l'an 1020. Défend
aux Clercs d'avoir avec eux aucune femme ,
clafles,808 Et l'on établit la préfcnce réelle,
80p. Septième feffion. On anathématife Ho-
norius , f. 81 1. Décrets touchant les images ,
p. 317. Autres décrets de ce Concile p. 3 28.
-— De Pavie en 1049 p. 339,
1
,

fance en 093' p. 740. Canons de ce Concile,


De Plai- — .

8 II. Remarques fur ces décrets, 81 j. Huitiè- p. 74.1. De Poitiers en 1075. La vie de
me feflîon. L'Empereur & l'impératrice Irène Bérenger y efl en péril , p. ;pi. —De
Qucd-
foufcrivent aux décrets, 8 i<î. Canons du Con- limbouig en 1085 p. 62o.
,
—De
Reims en
cile,
Conf«7fi— J'AUemagncen 742. Canons de ce

BiC.îSfeq.
73 f-

1049, p. 340 5c 282.
^^'<^- en 1C94 ,
Uid. en 1:95 pag.
p. 739,
,

d'Allemagne, Conciles de Rome en 72 Canons de ce Conci-


Concile, 770. Conciliabule
en 7j^. . 78p- Concile d'Aine en 7op , i>,jg.
75<f. -^ D'Arras contrôles nouveaux Mani-
1 .

le , p. 7C7. -^En 714 , p. 76Z. En 725


5c 75 !• au fujet du culte des Images, p. 75p.

chéens:ailes de ce Concile, 272. ^f'<j- D'At- —En 744. Canons de ce Concile, p. 774,
. .

tigny en 76^ p. 790. ,D'Autun en 077 ,


pa^.641. D'Au in en ]0p4,;'. 759- De
— —
1 -—En 74J. contre Adalbcrr ôc Clément Hé-
réfîrrques , p. 777. En 7^1 p. 789. —
Bari en iop8,p. 75<î. ^— De Benevent en
—De
En 7(Î9,/'. 790- —En
En 1047,
loij ,/!. 329. En
,


—En
105 p. ;>. 421. «i«.V. en lopi , p. 750. 103^ />. 1};.
, p. 35<î.
Bordeaux en loSo.contr'^ Bcrenger f 194. 1C49, contrôles Simoniaqu°s 335 8c 53p.
itid. en iop;,/)-j^. 7^7. —DeCaèn en io5i,
Dj
,


.

—En loj'o, fous Léon IX ,p. 28f .


— — En iof9. Décrets de ce
, p.
— En
p. 46}. Canons de ce Concile, ibid. ioy3 , p. 344.
Calchute en 781. Canons dece Concile , p,i(. En lofij. Lettr^
792. De Cintorbeti en 58 f p. 795. . —

Concile, p. 418 ôc 414.

Synod.le de ce Concile , p. 499.
— —
.En ]074>p. 619 —
En io<;y,
De Châal. ns-fur-S ône en lOiJj. 1. 565. En 1075 »•-
De Clermont en iop5. p-74^. De Clo-
veshou en 747. Canons de ce Concile, f. 778.
— p. ;o5.
p. 617.
C41 &
— —
<Î44.
—En
Efl ic7^, p. 53 2.

En io7 9,f«^. 64),
*78 p.'
Eti
I

Mmm mm i
j
, , —
,
, , , , ., ,

828 TABLE DES MATIERES.


—En 1081 tfyi. «—En D.
1080, p. <S4p.
1085 ,/. (Îf4.
io8p,;>.7i5.
— ,p/tg.

En 1084 ,p»s- ^^5- "-"En DAmien ffaint; Sa naiflance, fes études,'


—En 1097 f, 7f}. 1 En iz. Embraffe vie monaftique. ibid. Ell
f la

\o99. Canons de ce Concile, />«^. 7J8. — fait d'OlVie, Jij. Renonce à l'Epif-
Evêque
De Rouen en lotfj.Ony anathématifelesBé- copat, ^14. Il ell fait Cardinal, 41 j &rij.
rengariens, p. ipz &
En 1072. Ca- Enfuite Légat en France , joj. Sa mort, f 14.
41Î1.
nons de ce Concile, p. 57p.
crets de ce Concile,/?. 582.
En 1074. Dé-
En içS,p.
—— Ses écrits , j, n m
Se 420. Ses lettres , y i y.
Ses Sermons, s 5<î. Sa règle, j47.Sa créance fur
7fo. —De Saintes en 1097 , P- 754- —De la prefeiice réelle , , 57. Ses otaifons, hymnes,

Siponto. Léon IX. y dépofe deux Archevê-


ques fimoniaques, p. 341, -DeSlefvic en — leçons , poëmes, j66. Jugement de fes écrits ,
ibid. Editions de fes ouvrages $57.
1072, p. J04, —De
Soiffonsen744»/». 77J. Daphfiopates ( Théodore ) Patrice de Conftanti-
—— De Sutri en 1046, p. }J4. De To- nople. Ses écrits, 80 (!?/<?•
lède en jçS &
en 535 , pag. i; ic 16.— Démons. Leurs opérations jB8.
Il>iJ. en 701 , page j6i. —— De Tou- Denis ( faint ) l' Aréopagice. Vérification de fes
loufe en logoi pag. 730. De Tours en Reliques, 3ÎÎ>3V4&49Î.
105J. Bércngcr y anathémacife fes erreurs, Diiititut Papa, Ce que c'efl ^yp C /fj. ,

efl admis à la Communion , p^g- 293 tl''<l- en Didier, Abbé de Mont-Caflîn,3oi,4if, 5j53c
1060, p. 414, Uid. en 10^6. p. 7$ I. —De 71 o. Il ell fait Pape fous le nom de Viâot III .
Troieen lopj ,/j. 7KÎ & 7JÎ De Ver- ^— p. 713. Sa mort, »*;</. Ses écrits, 7i4,'ÇS/<f.
berie en 753. Canons de ce Concile ,p. 78 ; • Didier S. ) o'j S. Diet, Chapitre occupé d'abord
{

—De Verceil en lojo p. i8(S. On y con- ,


par des Moines , 118, } 11. Léon IX expédie
damne la doûtine de Jean Scot de Béfen- & un Privilège en fa faveur, }4t jjtf. &
—De
get. Verncuil en 7îî. Canons de ce Dimanche. En quoi confiftefon obfervation,787.
Concile p. 78 -—De Vienne
1 . en 1060 p. ,
Di/^f«^. d'accomplir le vœu de pèlerinage, jyy,
,

—De
414. Vormes en 700 , p. 76 5 . Ibid, en Ditmar , Evêque de Meiftiourg. Sa naiflànce ,
770, &en 772, p. 790. fon éducation , roi, L'Empereur Henri lui
CcnJ'eJJeurs , méritent un culte particulier, 17 f. donne l'Evéché de Merfbou.g avec le bâtott
Confeffioti. Elle fe faifoit dans l'Eg ife , .u dans paftoral , f*i(/. Sa mort, 102. Ses écrits, fs
un lieu fecret,p. 84. Corfeflîoiide péchés chronique, 10 1.
faite à un Laïc en cas de néceflîté , pag. 1 16. Divorce. Hezeiin après huit ans de mariage fe
Co^^iji/ couronné Empereur par Jean XIX > p. fcpare de fa femme , 278.
j5 1 .Rétablit Benoît IX. dans fon Siège, 311. Dixmet. Saint Abbon s'oppofe aux Evêques du
Conftantin Lichudés, Patriarche de Conlhnti- Concile de S. Denis qui vouloient ôtet aux
,

noplc, 5po- Laies &


aux Moines les Dixmes qu'ils pofTé-
Couflaiitin Coptonymè , fe déclare contre ,es doKnt, 38.
images ^py. Dowjrnjyuf , Patriarche de Grade. Sa lettrç à
Confiantitt k\>hé de S. Symphoricn de Metz-
y
Pierre d'Antioche
_
375,
Ses écrits > 1 15?. Sj mort ibid. Domnijon , Moine de CanolTe 1 écrit la vie de

Conflantirieple en communion avec l'Eglife de Grégoire VII, f'^S7-


Rome fous le Pape Jean XVIII , p. 3 H- Domnius ( faint ) Ses actes 410.
Cotiftihfiautiatton p- 4<Î7- Donatien ( faint) Miracle opéré par fon inter-
,
Cotithience prcfcrite en Carême
violée par le , ceflîon 125.
Roi Henri, ce qui fut regardé comme un crime, Drogon , Evêque de Beauvais. Sa lettre fur l'ex-
102. communicition , 20/. _

Coriinicn ( faint; Moine , puis Evêque de Fri- Drtgon Evêque de Terrouane , injuflemcnc
,

fingue, 768. chaffé de fon Siège , 278.


Croifiiie publiée au Concile de Clermont en Dro^f on, Moine de Berg-faint-Vinock , écrit la
lopî , p. 748. Alexis Comnene dreffe des vie de faint Vinock, 4<îp.
embûches aux Crojfés , 7!f. Dudon , Doyen
de S. Quentin. Ses écrits, 701.
Croix , deux fêtes infti'uéesà (on honneur, 2^4. Dunflan ffaint) Sa vie écrite par Olberne , Moi-
ne de Cantorberi Il ell fait Abbé de
Le culte de la Croix ell relatif, 27* Signe de , py.

la Croix paroît fur les habits des honimes, 103 Gladcmburi , ibH. Reflifc l'Evêché de Vin-
Cunegondt couronnée Reine par Benoît VlII ciert>"r, ibid. S'oppofe aux défordres du Roi
/. io<J. Edui,9(î. Il ell facré Evêque de Worchc-
fier, Se chargé du foin de l'Eglife de Lon-
'

Çutbbnt ffaint J Evêque de Lindisfarnei 7j>5


dres, 8c enfuite de celle de Cantorberi , p*.
Fait le voyage de Rome. Ses écrits» bid. & p7.
, , , , , , , ,

TABLE DES MATIERES. 829


Auvergne, Inllitutcur de l'Ordre de Grana-
E. mont, tfiS.
Etienne, Clerc de l'Eglife d'Orléans , Mani-
EBehard, Abbé d'Attach. Ses lettres, KÎ4. chéen. Ses erreurs 241.
Evêqucde Tongies , jp?-
Eiergife (dinr.) Eludes négligées en Angleterre» rétablies pat
Eberfmiinfier Abbaye fituéeen Alface ,
, jii. S. Duiillan, pfi.
£Ar,ir</,Chronologirtc de Wafte ou Watte.jij. Evangile. Livte des Evangiles des Grecs pojr
Ecbert de Liège ; les ouvrages 1 407. toute l'année , 214,
Eclypfe terrible, 144. Eucharifie. Préfence récWc, pag. 144 , 174, ^77,
Edmond ffaint) Roi d'Angleterre. Sa vie écrite jpi ,441 , 461, 474, 476, Sy?' Miracle à
parAbbon, 54. ce fujet , il'id. fûi , <Î4î , <Î97, 741 , 809,
Eglift. Origine des biens de l'Rglife, jiy. Les Protelfions de ioi furla prélence réelle , 190,
Evêques ne peuvent pas les aliéner , ibid. 291 , Ci/f?. Doélrine des Eglifes des G;>ules
EgHvin (faint ) Evéque de Worcelkr, bâtit le fur la préfence réelle &
la tranfubllanriation ,

MonaJlcred'Evesham j66. 9 & 10. Sentiment de Gezon , Abbé de Tot-


Eledion des Pafleurs de l'Eglife, à qui elle ap- tonne, 1 J , 27 18. & —De
faint Fulbert de
partient (Î75. Chartres, 131 &
135. Sentinnent d'Aifnc,
^If'g"', Evéque de Wincliedcr, puis Archevê- Archevêque de Cantorberi fur la tranlubllan-

que de Cancorberi. Son martyre , fa vie écriic tiation, f 0^.87 &


88. Réponfes aux obje-
par Olbeme , P9 ôc 1 00. étions contre fon fentiment , il'id. Etteur fur
Emmerumne (fainte) Arnolphe, Moine en écrit l'Eucharillie en Angleterre , 97. Détruite
la vie ji^. par un m. racle , pS. On fe fert d.; l'Euchari-
Emi«fr<jM ( faint Sa vie écrire par Arnold, ij8.
) ilie pour découvrit le cr me ou l'innocence
Enguerran , Abbé de S Ri |Uici. S- in éducation, d'une perfonne , 244. Elévation de l'Hoilie
fes études, 187- L.-Roi Robert le .netenpof- 8c du Calice , d'où elle tire fon origine , 302.
feflîon de l'Abbaye en lui fjifant toucher les Adoration de l'Euchariftie , ibid. On le réfer-
cordes des cloches, 188. Sa m.Tt , ibid, Sjs v-e pour les malades, 7 12. &
D.-puis le
écrits, 189. Vendredi-Saint lufqu'au Dim,anchedj Pâques
Epiphane , Prêtre de Jerufa'em , 8i &. 8j. on conletvoit l'EuchatilLe en un autre en-
Epreuvt du fer chaud pour découvrit un crime , droit que de coutume, 9Z.
j>o. Autre épreuve du fer chaud pour prouver Eacbologe des Grecs , ce que c'ell 227.
la Religion chrétienne, loj. Evéque , pat la grace de Dieu. Formule ufitée
Erchinfroid, Abbé de Molk , écrit rhidoirc du dans le dixième Ç\ect,fig. i\6. Evêques
Martyre de S Colmann , ajo. guerriers 143. Edit du Roi Charles qui dé-
,

Erbard {(iint) Sa canonifation , 34î« fend aux Evêques 8c aux Prêtres de porter les
Ermeutrude , AbbefTe dcHâfnon , 315. armes, »i»i. Si un Laïc peut être ordonné
Ermmtrttdt , Noble Matrone. Sonteftamenr.jo. Evéque: fentiment de S.Fulbert fur cefu-
Elle fait à l'Eglife de S. Svmphorien. dans le
Diocèle de Meaux , donation du pain du & Everhelme, Abbé de Hautmon écrit la vie de ,

vin ntïcefTaires pour les oblations , ibid. Popon Abbé de Stavelo,


, 467.
Efprit-S'iiiit. Sa divinité &
'on égalité avec le Evilgard Moine de ^X'irtzbourg écrit la vie
, ,

Père Se le Fils , 265 , & 154. Sa proceffîon de S. Burchardi Evéque de cette ville, &
du Père Se du Fils , }8i , 58} , 5pi > 455 les aéles du martyre de faint Kiliain & de Tes
< 58 & 757. Oppofition des Grecs à l'addition Compagnons, Jii.
Eilioque 58481^40. E'^re ( iaint ) Evéque de Toul 57.0. Monaftere ,

Efarj. Trois érats dans l'Eglife, 38.


diflFérens de ce nom , ibid. Son rétabliflement , p. }6o.
L'état des Moines eft préférable à celui des Eiifebe , Evéque d'Angers. Voy. Brunon.
Clercs, jp. Eaflache , Patriarche de Conllantinople , de-
Eihelwerd, Patrice &
Conful.NobiefTe de fon mande au Pape Jean XIX. la permilKon de
e«tra(ftian , 66. Sa chronique , p. 6j Sx. 6Z. Sa prendre dans lEglife d'Orient le titre d'Evê-
mort. Jugement de fa chronique , 69. queunivcrfel 24381 33 r.
Ethilvod (faint ) Sa vie écrite par Volflan , po. Eutycbius, Pattiarche d'Alexandrie, 70. Sa naif-
Etienne (faint) Roi de Hongrie , embraiïe la fance > fes écrits, fes annales, yr. Elles font
Religion chrétienne, 141. luvite faint Gon- pleines de fautes Se même de fables, ibid. y
thier à venir le voir, jtj. feq. Témoignage d'Eutychius fur l'éleôion
Etienne IX. Pape. SoB éleélion , 414. Ses pro- du Patriarche d'Alexandrie, 72. Ses autre»
jets, 415. Ses lettres , 415. écriis» _
71 •

Eiitnui (faint) Fils du Vicomte de Thiers ea Exfommfwication. En quoi elle confifte , 78<y.
, , , , , , , , , , ,

Sfo TABLE DES MATIERES.


Elle plus de force , fi on la rend dans un
a trine 172.
Concile Provincial , i j 3. Excommunication G.injbert , Abbé de proche Tours ,
faint Julien
lancée contre des Laïcs qui avoient frappé un 42.
Clerc, zoj. Lettre de faint Nicon, intitulée Gnnjlin ou Gauteli» , Archevêque de Bourges.
De l'Excommunication inJHJÎe , 7j'. Hifîoire de fa vie , 1 50. 1 i &
Sa mort , fes 5; .

Excommuniés, On doit leur rcfufer la fépulture éciits , iHd. & 152. Lettre du Roi Robert a
Ecdéfiaftique , 177. En quel cas on peut Gauflin, 141. Il excommunie Jourdain, pour
communiquer avecles Excommuniés, 641. avoir reçu l'ordination épifcopale d'un autre
Extreme-Onàion. Avant d'adminiflrer aux mori- que de fon Métropolirain , 309.
bonds le corps &
le fang du Seigneur , on les Gehehard, Pape, fous Je nom de Viftor IL />. 41 2.
oignoi: de l'huile fainte 50 ôc pi. Gebehard , Archevêque de Sakzbourg , prend la
détënfedeGrégoire Vil, p. 677. Sa lettre,
678. Ses difcours , 679. Sa mort 681.
Gebehard , Prêtre d'Aufbourg , écrit ia vie de S.
FAMINE générale en 103 j. On mange de Udahic 9ir.
la chair humaine , 243» Gebouin ( S. ) Archevêque de Lyon. Ses écrits ,
FwwpMÏ/f s. Leur effet jpi. 59;.
Ti^uratijs. Sectateurs de Berenger, leur fenti- Gshoutn, Evêque de Chàalons-fur- Marne > con-
roent 297 Se 298, fond un faux Apôtre , 241.
Tirmin ( faint ) Evêquc de Verdun
447. Tranf- , Geti'ioul faint ) Ses miracles
( 401 •
lation de fcs Reliques à Flavigni 448. Geoffro: , Clerc de l'Eglife d'Angers , attaque
Tlagellations ,527. Saint Pierre Damien en jufti- Berenger 244*
fie l'ufage, 518. Leur utilité, jj 1. Leurabus, Çeriir(/( faint) Evêque de Toul. Widric, Moi-
,'
ibid. L'ufage s'en introduit dans la Congré- ne de faint Evre, en écrit la vie , 320.
gation du Mont-Caflîn , 5(îo. Girard, Evéquc de Cambrai, fonde des Mona-
Tlnvigni , Prieuré dépandrnt de faint Vanne de lleres » rétablit la difcipline monail:ique , 271.
Verdun, 707, Afliile à divers Conciles , 272. S'oppofe à
Tohard , Abbé de Torney. Ses écrits, S99'^f^1- l'obfervation de la tteve de Dieu , examine
Tohuiu ( faint ) Evêque de Terrouane , 449. ladoélrine des nouveaux Manichéens , ibid.
EoUttiii Moine de Sithicu, Chronologie, 522.
, Réfute leurs erreurs. Prouve la néceflîté Ôc
Toniques , Ncrra , Comte d'Anjou , bâtit le Mo- la validité du Baptême quoique conféré par
naflere de Beaulieu , 325. des Minières impies , 273. La préfence réel-
Traucoii , Ecolâtrc de Liège. Ses écrits , 597. le, 274. La fainteté des Eglifes, ibid. L'uti-
Trolland , Evêque de Senlis, Sa lettre à Beren- lité du facrifice de la Mt/Ib même pour les ,

ger , 470. morts, 27 J. L'exiilence du Purgatoire, ibid.


Fnuare, Monaflerc dans le Diocèfede Langres. Que Dieu ell auteur du mariage, ibid. Que
Sa fondation ^zp. Son exemption,
, 330. le culte des images efl relatif, 276. Il con-
Julbert ( faint J Evêque de Chartres. Son éduca- damne les erreurs oppofées , ibid. 277. En- &
tion , fes études , ii8. I! ell fait Evêque en voie les ailes de fon Synode à un Evêque
1007, ihid. Sa mort en 1018, /"tf. izp. Ses voifin pour le préciutionner, ibid. Lettres de
130 CJ f^'l- Autres écrits
écrits, fes lettres, Gérard. Son zèle pour la difcipline, ibid. Se
de Fulbert. Ses difcours fur la Religion , fur plaint de la conduite des Archidiacres de Liè-
h Nativité de la Vierge , 144. Analyfe de ge , qui approuvoient un divorce , 278. S'in-
fon traité contte les Juifs 145. Difcours fur , téreffe pour faire rentrer dans le (iége de Ter-
ks Myileics &
fur la Pénitence, 147. Ses rouane, Drogon injullement chafle par Bau-
ouvrages poétiques, &
fur le chapitre li des douin , ibid. Son fentiment fur la iréve de
Afles des Apôtres, 148. Jugement de fes Dieu , 279. Il s'opp jfc à ce que le jeûne des
étrits, 149. Lettre de faint Odilon à Ful- Quatre- Temps foit obfcrvé avec celui du
bert, 16^. Difcours qui lui font attribués, 147. Meraedi des Cendres, ibid. Sa mort, 272.
TuUoic , Soudiacrc de Meaux. Sa naiflancc , fcs Jugement de fes écrits , 279.
potfies 595;. Gérard, Légat du S. Siège, aflemble un Concile
Tnlde , Abbaye 543. à Tours contre Berenger, page iç/o.
Gérard , Moine de Fleuri , ôc difciple d'Abbon.
G. Ses écrits, Jî-
Geraud , Cardinnl , afîemblc un Concile à Poi-
GAB TAN, Moine du Mont-Caflîn
Cardinal ,
,.

7I9'
puis tiers contte Berenger,
Geriert Ou Syheftre II. Autcur d'un Traité ano-
292.

Coadulphif Hciéfiarque. Ses difcipics & fa doc- nyme fut l'Eucharillie » 30 1-


, , ,, , , , , ,
,

TABLE DES MA TIERES. 831


Germain ( h'int ) Evêque de Paris. Meflb Galli- Guald on , Moine de l'ancienne Corbie, 5/Î9. Oa
cane qui lui ell attribuée 1 1. lui attribue la vie de faint Anlchaitc, ibid.
Germain (Tainc ) Patriarche de Conftantinorile , Giie tieric. Voy. Wcneric.
s'élève contre l'édic de Léon l'Ifaurien , 79 j. Gui , Evêque d'Amiens. Ses
pocfies , 47-'.
Ceron , Archevêque de Colofîne 104. . Gui (d'Arrezzo) célèbre Mu(icicn,2i7. Invente
Gemn , Archevêque de Magdebourg , tiz, la gamme , 218. Ses écrits, fa lettreà Michel >
Gervais , Archevêque de Reims. S.i naiflànccfcs Moine de Pompofic, «*;'(/. MicrologuedeGui,
études, 4Î4. 11 facre le Roi Philippe I. 45 y. 219. Traité du Monochorde,220. Traité con-
Gerî/aj/f , Evêque du Mans 254. tre Bérenger fuppofé à Gui ibid.
G<ton,Abb'. de Tortone, 14. Son Traité de l'Éu- Gui ou IP'idon , Coadjutcur d'Adalberon de Laon
charillie, 25. Analyfc de ce Traité, i6Qfeq, contre la reg'e de l'Eglife 277.
Glai/tr. Voy. Rodulphe. G«;/;f« , Archevêque de Ravenne, cherche les
Godtfroi, Prévôt de l'Eglife de Liège, dérobe moyens d'ufarper le faint Siège ,<î30. Ileft élu
des reliques de i>. Laurent à Rome , 455. fous le ncm de Clément III. 6'}i.
CodeJ'roi , Prévôt de Stavelo. Ses écries , 6oy. Guillaume Abbé de faint Bénigne de
,
Dijon. Sa
Godebard Cfainc) Abbé d'Attach , puis Evêque nairtance , fes études, 177. Il réforme divers
de Hildesheim , f. i6i. Sa mort , fcs écrits , Monalleres, eft fait Abbé de Dijon. Sa mort,
165 164. & 178. Sa vie écrite par Rodulphe, ibid. 247. &
Eonther ou Gontbier ffaint ) Sa vie, 315. Sa Ses écrits, fes lettres. La charte de fondation
mort, 314. de l'Abbaye de Frutareell de lui, 178 179. &
Gontbier , Evêque de Bamberg, «fyo. On lui at- 5es autres écrits, iSo.Lettres de Benoît VlII.
tribue ur.e lettre à Nicolas IL en faveur des à Guillaume, jP-
Clercs mariés , ibid. Guiltatirrte (faint) Duc d'Aauitaino. Ses exploits
Gofiuii Abjé deFlorenne. Ses écrits,
., 401. 40 5 . Prend l'habit monaltique , 404. Ses mi-
Gofcci:.! , Archevêque de Bordeaux , préfidc au racles ,
'l>'d.

Concile de S. Maixenc contre Bétenger, 295. Guillaume de Merulit , Moine dc faint Evroul
Getd-Ai» , Ecoiâcre de Liège , 4oy. Sa lettre à compofe un corps d'homélies, ^6,
Valcher ibid, Guillaume , Bibliothécaire de Rome. Ses écrit?
Gotpen, Abbé de Tegernenfe. Ses lettres , ^j»^» 602.
Guillaume , Evêque d'Utrccht , excommunie
Grâce de J. G. Il n'y a ni jullice 1 ni mérite lans Grégoire Vn. /"'^•65 3.
elle , iy6. Elle eif gratuite , ibid. Elle ne dé- Guillaume de Jumiege. Son hifloire des Nor-
tru t point le libre arbitre , 5 jo. mans, p99-
Grandmottt. Inllitution de cet Ordre, 575 & Guillaunie de Poitiers, écrit l'hiftoire de Guillau-
618. me Conquérant
le 701»
Grégoire VI. fubftitué à Benoît IX. encore y\- Guillaume le Conquérant, 702. Son difcours,
vanc,/>.)f. 255 , 246 ôc 554. Quitte le Ponti- 703. Ses lettres , 704. _ _
_

ficat, 33J- Guitmond , Moine de faint Oucin, puis Evêque


d'A verfe , écrit contre Bérenger , 220 & 298,
.

Créjitire VIL
Sa naiffance ,611. Son intronifa-
rion,<îi4. Ses lettres, ibid. Sa conduite tou- Guy, Evêque de Senlis,confulteS. Fulbert, 157.
chant les in vellitures, 617. Menace Philippe
Roi de France de ioullraire les fujets à fon H.
obéiflance, 618. AfTemble plufieurs Conciles
à Rome, 619. Bérengcry abjure fes erreurs , HAlinard, Archevêque de Lyon, 282.
293. Ecrit fur l'incontinence desClercs, 614. Se fait Moine, 30,. Relufedeux fois l'Ar-
On conjure contre lui, 650. 11 eil dépofé à chevêché , ibid. Refu'c de prêter le ferment
Vormes, ibid. Publie le décret de dépofition dc au Roi ibid. Son voyage à Rome 1
fidélité ,

contre le Roi Henri , 633. Grégoire ell dé- ^06. Les Romains le demandent poutSuccef^
pofé de nouveau, 651. Il eftafîiége dans Ro- four à Clément II. li alTille à deux Concilesde
me Cîyy. Sa mort, 6$6. Il efl honoré comme
, Rome, Ofid. Il ell empoifonné, Ses let-
«*»</.

Saint, «*«</. Remarques fur fcs lettres , 6(52. 11 tres, 307. Son habileté dans la connoiffancc
eft accufé de divers crimes , 664. Jugement de des loix 5c de la Philofophie ^06. ,

fes écrits, 66i. Hartold,P,.Oi deNorvege,petfécute lesChrétiens,


Grégoire IX. fait livrer bataille aux Normans ,
Hafnon , Monaflere au Diocèfe d'Arras. S^fen-
Grégoire , Antipape 3 2(5. dation 323.
Guaifer , Moine de Mont-Caflîn , écrit la vie & Uebtrt ( le Comte ) s'empare des maifo.-:s & des
rinvencion de faim Secondin, 711. biens de l'Evèché du Mans, 133.
, , , , , ,,, , , , , ,.

832
htbretma , Moinc de Cluni , écri: la tranflation
TABLE DES MATIERES.
Hcn/é jTreforier de S. Martin de Tours, 41.
des Reliques de S. Indalece 606. Uej/mard , Succeffeur de S. Odon à Cluni , dé-
Heimer.irJ ou Haimo» fPrêtie) Hiftoirede fa vie, clare S. Mayeul A bbé , z6i.
1 14. Hiérarchie Eccléliaflique , d'inftitution Apollo-
Htli^auJ, Moine de Fleuri , 248. Ses écrirs,'*»V. lique, 276.
On lui attribue fauflement la vie de S. Abbon, J/i///f *rfl»</Soudiacre 8c Légat, aflemble un
,

250. Concile à Tours contre Bérenger, 290 6i(S. &


JUlvide , Mère de Léon IX. Sa mort , 558, H ell fait Cardinal. Sa. conteltation avec faine
Henti I. ( faint ) couronné à Rome par Benoît Pierre Damien , 511. 11 ell fait Pape fous le
VIII , p. 240. Envoie à Cluni 'a pomme d'or nom de Grégoire VII p. 614.
,
3ue le Pape lui avoit donnée, iiid. Tâche de Hildegaire, Difciple de S. Fulbert. Ses lettres à
éracinerla fimonie Affemble un Con-
, 1415. fon maître, r42. Lettres de Fulbert àHilde-
cile contre les Simoniaques, ^^6. Sa mort. Sa gaire, 14J.
yie écrite par Adelbode , Evêque d'Utrccht JiUdegarda ComtefTe d'Anjou. Ses vertus, 1(58;
,
112. Autre vie de faim Henri, 125. Hirmingare Abbefle de Zurich
, 214.
Hf«W le Noir ,
Roi d'Allemagne, 213. Reçoit Eirtuotoge des Grccs. Ce que c'elt,. 128.
Pierre Roi d'Hongrie , & l'aide à rentrer dans Hijioire. Règles que doivent fuivre ceux qui écri-
Ion Royaume , 214. Eli couronné à Rome , vent lliilloire m.
Homicide. S. Fulbert refufed'abfoudte les homi-
Hturi IV. Roi d'Allemagne , fait dépofet Gré- cides de Senlis , i ^. Pénitence remarquable
goire VII.;,. 6^1. Le Pape le prive de la di- itnpofée à un homme qui avoit tué fon père
gnité royale dji. Lettre du Pape au fujet de
,
89.
la dépofition de Henri , (Sjy Son abfolution , . Honorius IL Antipape ^çiy. Fait laguerrepour .

tf 37. Sa rechute,
«39. Les Seigneurs éiilent entrer dans le Siège de Rome , it'd.
Rodolphe à fa place 640. Henri ell dépofc de , Horloge des Grecs. Ce que c'eft 227«
nouveau, 8c Rodolphe confirmé, 6jo. Henri Heftie. Ufage établi en plufieutsEplifes de don-
palTeen Italie, (5; i. Entre dans Rome, <î;4. ner un Piêtre,après fon
à ordination, une Ho-
Reçoit la Couronne Impériale de la main de flie confacrée qu'il devoir confumer pendant
,
l'Antipape Guibert 654. 40. jours, /,. 132. Sentiment de S. Fulbert fur
Henri, Moine de Richenou. Ses conférences cet ufage, iji&i3}.
avec Othon , Moine de Sainte Enuneramne Hubert ( kint ) Monallete de ce nom dans les Âr-
482. dennes 557.
Uepi,i.inn , Moine de S. Gai. Ses écrits , ytfS. Hugnesde Befançon , voulant défendre Hugues
Ueribert ( faint Archevêque de Cologne, 282.
) 4<ï8. de Langres, perd la parole ,
Un Citoyen de Spire lui écrit touchant le Sa- Hugue$ , Archevêque de Tours , 140. Refufe de
crement de Pénitence, 125. Lettre d'Albuin confacrerTEglifede Beaulieu,p. 241 &}iy.
Ermite à Héribert, 126. Hugues y Evêque de Langres. Son origine, 282.
Ueribert Arcl.evèque de Milan, conjure la mort
, Il prend l'habit monaftiquc.Sa mort, 283. Son
de Conrade Empereur 304. Traité contre Bérenger. On lui attribue les
yieriger , Abbé dc Lobes. Sa mort, fes écrits.fon AaesdeS. Viaor, ibiJ..
hilloirc des Evêqucs de Liège
J4 jy. Il , & Hugnis , Abbé de Cluni , conflifué arbitre d'un
met en vers la vie de faint Urfm.nr , iniJ. Sa difTcrend entre deux Archevêques 64^. >
Hugues $6. Son Traité Je l'Avcnt
lettre à , Hugues , A bbé de Farfa , 17. 3
58. Son Traité du Corps & du Sang du Hugues de Flavigny , 247.
Seigneur & autres écrits ,
, 58 âc jp. Huile-fainte , rend la fantéaux malades, 244. On
IlerlembauJ, combat la fimonie & l'incontinence s'en fert à divers ufagcs , ibid
des Clercs de Milan, yoi. Uumbert le Cardinal , dreifeune prcfefSon de foi
Hirman Seigneur de Luxembourg
, , élu Roi à que Bérenger foufcrit , 2pi. Réfute le libelle
la place de Henri Cki. de Michel Ceiularius au fujct de razyme,344
Wtrman , Evéque de Bambcrg , dépofé 8c ex- & 565. Sa réponfe à l'écrit de Nicétas , 37r.
communié, 629. Ses lettres, «îpç. Il ell faitArchevêque de la Sicile, 427. Ses
BtimannConlratl 271. Ses écrits, 315. Sa
, voyages, 5 50 & 427. Son crédiry^^iS.Sa mort,
chronique, »fri(i. coTnpofe plufiturs autres
11 415». Son éloge, ibid. Ses écrits contre les Si-
ouvrages en vers en profc ,517. Ses livres
ôc moniaques 430. Son fcntimcnt touchant la
,

ftyJ'aiholabc.jiS. Ildéfapprouve la conduite validité de leurs ordinations ,451 & 454* ^^*
Ac Gréj^oire IX. d'avoir fait livrer bataille aux autres écrits 4}5'
Normans jij_, Humbet t {Dom) Be'homme , AbbédeMoyen-
tUiQld, Roi des Danois. 5a conveilîon > lo^. mûutier, écrit l'hilloire de fon Abbaye, 118.
Hwnhert ,
, ,, , , ,

TABLE DES MATIERES. ;27


'Humbers, Général des Dominicains 45^. images Leur cuite eft relatif, 27^,
, .
79J' , 5c 804.
Hfdiilpbe faint ) Archevêque de Trêves ,
[
jéo. On ne les adore pas, 276. Benoît VIII. fait
Thébain. Sa ciiionique 6<j.
Ihf'poliie le ,
Autre mettre à mort des Juifs , pour avoir déshonoré
ouvrage qui lui eft attribué , 70. une Image du Crucifix, ?i5. Remarques fut
le culte des Images. Il eil ancien,
795. N'eft
I. pas nécelTaire , 794. Son utilité , ibid.
Immunité des Egliics foutcnucs par faint Odon,

ICONOCLASTES. Leur commencement , 795*. Archevêque de Cantorberi 99.


Tiennent un Concile , 756. Voy. Concile de hnpanateurs, Difciples dc Bérenger. Leur fen-
Nicée. timent 298.
Ide ( fainte )femme d'Ecbert, Duc des Saxons Impiiiffance, Motif fuffifant pour diflbuJre le ma-
108. riage , 140.
Jdty AbbefTe de fainte Cécile à Cologne, 3 57. Incendie. On emploie pour l'éteindre le cierge
Jean VI. Pape, écrit en faveur de S. Wilftide , béni du Samedi-Saint, 114.
764. Innccetis ( les Saints ) Difcours anonyme fut leur
JeattXVIII. Pape , confirme l'ére£Hon de l'Evé- martyre, 50,
ché deBamberg, 314. De fon temps, l'Eglife hivejlitures, jiS. Leur condamnation, ^28,574,
de Conrtantinople ell en communion avec cel- 7*; 7 yS9'
le de R'Jtne ib'ii. hi'vocittion des Saints . 1 1^,
Jf,ui XIX. Sonéleélion, 531. Il eft chafféde Johoixe , Evêque de Dol , Simoniaque , fe marie
fon Sicgc ,531. Ses lettres, iiid, 8c i^j. Sa publiquement, 643.
more , 233. Jouai Moine de Fontenelle ,
, écrit la vie de fam:
Je.w , Abbé de Fécam. Ses écrits , fcs lettres , Wuifram, 4I».
ï«p, 270, 45; , 574, Se y7y. Jofapbjt. La fainte Vierge a été enterrée daris la
Jeun, Miiine Diacre. Son Pénuentiel 8?. .
valiée de Jofaphat , 144.
Jtttri d'Ypres, Chronologille , ^12 448. & Jûif.md Moine de Cluni, écrit la vie de fainc
,

Jean MâLTPpus , Métropolitain d'Euchanie, 554. Odilon 2f<î. Son jugement des écrits de fainc
,

Ses écrits , }v y. Ses poélies , ;p<ï. Sa mort > OJilon, 261. Poème de Jotfaud fur la more
ihid. de ce Saint , 267,
Jean de Garlande > Anglois > jptf. Ses ouvrages Jourdain, Evèque de Limoges, 3o8.Gâuzelin>
197- Archevêque de Bouiges, l'excommunie, l'/'/i/.
Jfitn ( le Géomètre ) 399- Ses écrits, 4C0. 11 t ent un Concile , ioid. Sa lec.re à Benoît
/f.i« , Evéquc d'Avranches, compo/e un rraité VllI. furl'Aportolatdc S. Martial, 310. Il
des Offices Eccléliailiques, 464. alliile à d'autres Conciles , ibid. Sa précuuiion
Jean , Ducre , écri' la vie de iaint Nicolas 4po. , pour l'éleclion de fon fucceffeur 311,
Jeati , Dilciple de faine Pierie Damicn , en écrit hfne. Impératrice, convoque lo 11. Concile Je
la vie, 414. Nicée, j^6. Adille au Concile transféré à
Je.tn , Pauiarche d'Aquilée. Sa lettre à Henri , Conllaninople , 8ij".
Evêque de Wirtzbourg J1S9., Irrégularité d'un Laïc qui avoir tué un Eve ,uc ,
Jta» Archevêque do Rouen $j6. Ses écrits ,
, , ^66.
Ç77. 11 afll'mble eux Conciles à Rouen, «AjV. Juifs, mis à mort pour avoir traité avec déiifii n
Se.-, lettres , fon caraâero , 5^1 • un Crucifix, jitf,
Jfrtft Xiphil n, y>>i Scséciits, ypz.
Je.iw, Fc>ndatcut du Monallcie d'Hafnon, 604. K.
jeHtie filemnel duroit en Angleterre jutqu'a trois
heures ay rès mid 90. J.. une au ain , j l'eau
,

& au (el, aux ^cilic i^e fainr Jean Baptille,


;

Kl L 1 A I N , Moine EcofTois , prêche


en Allemagne. Souffre k martyre,
la foi
}i i.
de fain-. Pu ire , faint Paul , de 'aint Laurent &
de rrui; 'es Saines , loy. J û.ie de la veille de
l'AlTIiinpn.'ti , des Apoires , de.- Quarre- &
Temp comme on Carême , ihid,
LAïf. Cinthius, Préfet de Rome, pronon-
Jllj H'i!{ Marthia? FiacruFj fait imprimer une ce un difctiurs dans. l'Egli'e, 3}4'
Meffelati-e, ic. Cn y irouve tous les dcg- ljw*»ri. Abbé de fjint Laurent dc Liège. Ses
m^ s de l'Fgliie bien étal li?. L'invocaton des é.rits, 468.
Saints &
de la f.inri V.erge;la préfence réel- Lambert de îkchaffnab urg , auteur d'une ci^^m-
le de J. C. dan- l'Euchaiiflie &f ibid. Les , . çue , 681. Sts écri'; , ibi.j. Jk 606.
Lutherie s li'pprimcnt le? exemplaires qu' Is Laiiioald ) Fié
( 'aint re : 'à vie & \'\ \i\- rede
peuvent ciouvei de cette Liturgie , ibid. l'a liaiiflaticn écrrr [- Hc gci , iSôtjp.
Nnnnn
, , , , , ,

834 TABLE DES MATIERES.


J,unjranc confond Bérenger dans une difpuce ,
23 1. Lettre de Bérenger à Lanfranc , 18/. Il M.
eitfoupçonné des erreurs de Bérenger, ihid.
S'en jultifie i8(î. Prend ladcfenfe de la Foi
, MAgdebourg érigé en Métropole, lej.
au CoHcile de Verceil , 287. Ecrit contre Bé- Diplôm; d'Otton IL en faveur du Chapi-
renger, 297. Eilfait Légat en Angleterre , tre de la Cathédrale ,
'hid.
Ma^enxrd\n{.i\is dans l'Abbaye de faint Pierre de
Litntfrid , Moine de l'Abbaye de Wmcheiter. Chartres, 154.
Ses écrits, 89. Majeflé , titre d'honneur donné à un Archevê-
Laurent de Liège écrit l'hiftoite des Evêques de que, 125.
Verdun, 448. Mateul ( faint) Abbé de Cluni ,150. Sa mort
Leâionnaire de? Grecs. Ce que c'efl , 224 ÎS Jej. 2J1. S. Odilon écrit fa vie fes .niracles , &
Léger, Aichevêqucde Vienne. Ses éctiis, 572. 2(5 r & 252.
Leofi IX. Voy. Bunin , Evéque de Toui. Mutichéeits découverts à Orle'ans ,
20J. Leurs
Leou, Légat en France, & Abbé de fainr Boni- erreurs , 241. Glaber les réfute , ibid. On en
face , 47. punit quelques-uns, i4NSc2oy.
Léon, Evéque d'Acride, écrit avec Cerularius Manichéetti ? Arras. Leurs erreurs . 27i. Gérard
contre le pain azyme ,34^. Ses écrits , 387. Evéque d'Arras les réfute , 275. Leur condam-
Letn , Ifaurien , s'élève contre le culte des ima- nation ,
27tf.
ges, 79 y. M,%ii/<onii.urei. Leur fuppreffion , ^ÎS-
Léon , Ermite , propofe une difficulté à Pierre Da- Mjtifni ( faint; Evêqu'i de T.ouj. Adfjn en;écrit
mien 5'4|- la vie les miracles, 320. &
eon IX. confirme
LeutarJ, Fanatique , s'érige en Prophète. Eli les donations faites à i'Abbaye de S. Manfui,
convaincu d'erreur : le jette dans un puits , 341.
241. JWifforf/ (faint) Ses miracles, Cia.
Leiiteric ou Lenteric , Archevêque de Sens. Let- Mariage. Dieu en ell auteur, 275;. On ne doit
tres de Fulbert à ce Prélat , 5 ? Se 155. Let-
1
pas le permettre indillinftement , ih d. Il elè
tre du Roi Robert à cet Archevêque. Erreur défendu jufqu'au feptiéme degré, Joô j'Si. &
de Leuteric fur l'Euchaiiftie ,. 1 8 j Sci 84. Comment il faut compter les degrés de paren-
Letcelin y Abbé de Crefpy en Valois. Ses écrits, té, ibid. & J44. Décrets du Cortcile de Ver-
i8(î. berie au fujet des degrés de parenté ,785. Ma-
Liehert (h'int) SuccclTeur de Gérard dans l'E- riage clandeflin cfl défendu , 8 1 & 587. Dé- >

vêrhé de Cambrai */*• cifions de deux quellions fur le mariage, 1 38.


Limpo d , Archevêque de Mayence. Sacontelh- Diirolubilitc du mariage en cas de Icpre avec
tiv.n avec Léon IX. />• 34?' la permiflîin du Lépreux, 789.
Liji.nd , Archidiacre de Paris. Accufations 8c Man.irins { Scot ) (583. Ses écrits , 684.
reproches contre lui ^l^- M,irte , Mi^re du Prince de Babylonc , rebâtie
Lffoye Clerc de l'Eglife d'Orléans , Montani- l'Eglife du faint Sépulchre, pag, i+z,
,

i\t , 242. Ses erreurs , Hid. Ses Seâateurs M.irmonfi.r. Régularité de cette Abbaye , 607.
font co.ndamnésau fupplice, 143. Martial (faint ) difpute fur fon Apoilolat, ji 1

Liturgie, Romaine , pag' i Ambrofienne, p.tg. 2.


• & 309. J.'urdain fe déclare contre, 310. Ré-
Rits de la Liturgie Ambioficnne 3 'ô Pq. , ponse du Pape qui confiime l'apoUolat de S.
Ufagesparriculiersà l'Egli-e de Milan p. y. Maitial,
,
'*»</.& 8}2.
Lettres fur le Rit Ambr.ifi>-n 28. Liturgie M.trtial faint J Abbaye de Limoges. Notice de
, (

Gallicane, fun antiqu'ré. Elle ell diHtrente fes Abbés , 171.


de la Romaine 5. l.wre? de la Litutgi Gal- M.iriin ( faint &uve la vie à des Prifcillianilles ,
,
1

llranc, 6. Lcâ'onnniroGalican , 7. MilFels


Gallicans, 8. Liturgie d'Kfpafjne, 1 ,^j fetj. 5;
Manrc ( faint ) Evêquc de Cefena , J59. Pierre
Lirurgicde M-itthias Finccus lllyriciis , 20. Damion en écrit la vie ibid.

Elle n'eft pas anci nn". Preuves de fi nou- Mauri eSon corps transféré de Ratifbon-
faint)

veauté , il-'i- Se 2<. E le piut dvoir é'c à l'u- nc à Magdebourg , 103.


fagc de l'Eglife do Sa't/-boii'(r,p-î 14- Litur- Mannlie , Archevêque do Rouen ,4^0. Ses ver-
gie, ou livre liturgique des GreCs. Gc qu'il tus , fes écrits, 461. Sd pri.feii'in sic :oi (ut

tenièrme « **?• ' la ptélence réelle , 461 «. 2.2. Sa vifion,4(îy.


Ses I.''ttrrs ibid.
£»>«! fort cher» au X. fiécle, fng- 92.
io/irt , D
acre de L cge. Ses écrits > 45?' M<ginjroid, Prévôt de Magdebourg. Ses écrits,
258. i6o.
i«/cW de Bambcrg ,
Mcj^inhmd, Evêqucdc \/irzbourg.Sampit> 19J.
, , , , . , .

TABLE DES MATIERES. 8î5


MgpuraJ Ermite Martyr
( faint ) il J. & jv';Vo/,if Ffr<'^r/H f faint) Sa canonifation, y6c.
Mn,/g,uii{ , Archevè.iue de Trêves, loi. .
i . .2sj«co/.iin. Pape. Son éleâion, 417. Tient un
Memverc flaintj Evêquc de Pacierborn, 112. Concile où l'élei^on du Pape efl accordée
tonde des MonaltercsSc des Eglifes, H}. aux Cardinaux, 418. Ses lettres , 421. Son
Melpbe , Evéqiie de lainto Mcm:me , doute de la décret touchant les régies approuvées au Con-
préfcncerécUe, Jjy. Eftconfùmé par un mi- cilç d'Aix-la-Chapelle , 424. Il envoie la pro-
,

racle . iiid, feflîo'i[i,de foi de Bérenger dans les lieux où il


. .

Jtf «;fVj des Grecs,, ce que c'eft> 211. ,


avoir répandu fes erreurs, îpi. Celui-ci pu-
Mf'wo/ojTf. Ce que c'cll m, blie un écrit contre le Concile de Nicolas IL
Elle eft utile aux Morts , 245 , 175,485 ,
MejJ^e. qui lui écrit une lettre pleine de charité, ibid.
516, 550, 55<S,79o, 791. On ne doit point Niiolas, Moine deClaitvaux. Ses fermons,
557,
célébrer la Mefle dans une Eglife quia été vio- Njcoa (faint) Solitaire d'Arménie, 75. Sa viç
lée par un meurtre, I40. Un Diacre qui, tei- :crite en orec
écrite Grec , 74. ocs
Ses écrits , 74 , 75 oc 76.
" yô. &
gnant d'être Prêtre , a célcbrc la Mode , doit tjçfr, Evêque de Liège.
Nof^fr, ' Son extraélion , fes
être dépolé du Diaconat, 157. Quelle peine ignités, î^i.Ilefl
dignités, î^i.Il fait Evêque, Son gouver-
mérite un Prêtre qui a célébré la McITe fans nemént
emént dans l'Epifcopat 60. Il établit une ,'

communier, 140. Difpoficion des Ofïices ôc e'colc. Ses difciples, fa mort,»i»</. Ses écrits,6 1
de la MclTc de l'aint Ambioife,;. 2. A Milan
on ne dit point de Meflè les Vendre !is de Ca- O.
rême , y. MelTe Gallicane par faiit Germain ,
Evêque de Paris, 12. McfR' Mi zarabique ,
19. Méfie des Préfanétiliés; MelTe feche , 22 5
OD A L R c , Archidiacre de Langres, efl
I

nommé à l'Archevêché de Lyon x^C. ,

S. Udalric , Evêque d'Aulbomg.difoit quel- Od.ric, Abbé de Vendôme, fait un Traité des
quefois deux Se même troisMelTespar jour,9i. vices & des vertus , 594.
Le Dimanche des Rameaux il cliantoit la Odjrid , Prêtre , tondateur du Monalîere de Wa-
Mefîe de la fainte Trinité ,
ibid. tle, 32}.
Mùhtl Cenilariiis , Patriarche dc Conftantino- Odilott ( faint ) Abbé de Cluni , 245. Sa naiflàn-
ple.Son libelle touchant le pain azyme, 34(5. cc, 251. 11 elî fait Abbé, 252. Refufe de
Autres reproches qu'il fait aux Lanns 3(î4. ,
renvoyer Cafimir en Pologne fans la permif-
Son excommuniuation , 576. Son décret con- fion du Pape, 254. Etablit la commémoration
tre cette excommunication, jyS. Ses lettres, des Morts, 255. Fa"orife les études, i/o.
j8i & 585. Sa morr,»/'.Sesau[rfs écrits, }8(î. Son difcnurs la veille de fa mort , 257. Ses
Miibel yjeliiis. Son éducation , jSj; ; fes écrits , écrits ibid. &
i6i. Ses difcoursfurdivers fu-
jets, i6z. Ses lettres, fes poèfics, 166. Re-
71»W C Abbaye de ) Lettre d'Abbon de Fjeuti cueil des diplômes accordés à Cluni , ibid.
aux Moines de Mici,44. Lettre d'Albert , Odon ( faint ) Archevêque de Cantorberi. Sa vie
Abbé de Mici au Pape Jtan XYlL/jj^f 45'.
, écrite par Ofberne, 97. Sa mort , fes écrits
,

Micijlas , Duc de Pologne. Sa convcrfion 104. , 98 gç. &


Micrologitt fuçpod à Bernon , Abbc de Riche- 0(/«« (faint' Abbé de Cluni, foutient l'obfer-
nou 109. vanccde la règle de faint Benoît , & l'établit
Mijfeh Gallicans , 8 & 9. MilTcIs Mozarabes, 1 9. en plufîeurs Monalleres , 261.
Mitr'. Alexandre 11 en permet l'ulage à Vra- Odon OU O«o«, Evêque de Tufculum. Voy. Ur-
tiflas > Duc de Bohême , 497. bain II.
Moines. Soumidîon 3c ûbéifTance qu'ils doivent Odon , Moine de l'Abbaye des Fofl^és , 402. Ses
aux Evêqu's félon Fulbert de Charries, 140. écrits, ihid. Ç5 feq.
Morts. Méfies , pricics 8c aumônes pour les Odcra/iiie , M
line de faint Pi rre-leVit! S. m ha-
Morts, 105 ÔC 198. bileté dan? l'orfèvrerie. Fait la châlTo de fiint
hloulfti Ch'oniquf^ de cette Abbaye , iby. Savinicn, Martyr, ipo, Ses écrits, ipr 193. &
Mojtnmoutitr, 312 &
558. Livres desgeilesdcs Sun Apol.gieoùil fejuilifie de l'erreur dor.c
ADi;c;>de Mo/cnnumtier 320. on l'acculoit jçi,
Ojfice de coramenço't lutrefois ^ Noncs,
l'E?life
N. & finifi"oit à heure ,31'. Oflice divin
pareilli;
cbanté en langue érnngere , 782. Olfice de la
NAlgOD écrit la vie cIp faint MaVcul , iji. fainte Vieigc. Son inllitu-ion S U lalric !c
Nicftits I'e3 rat, M inc de Flude , écrit récitoit tous es jours , pi. Il difoi: aufiî celui
contre les L'tins toucliant le pain .izyrne , de la Cro x , & un troTiétre en Thonneur de
369. S.- rc r&c, 5^5 V 429. TOUS les Saints , & tout le Pfeautier , ibul.
JUicelas ( faint ) Tianflation de fes ReLque.syiô. Lettre fuppo ce à faint Auguftin, où il cil

N nn nn i
j
, , .. , , , , , , .

TABLE DES MATIERES^


padé des Ofîîces divins , ^9^ i3«.
0/*frr, AbbédeGûmbloux, 2ji. Efl chargé du Paris. Lettre de S. Fulbert àTEglifede Paris,
foin de deux Monafteres , 156. Prévoit une
famine. Sa charité , 257. Ses écrits, fes hym- Parrain. Si un homme qui a été Parrain de iDti
nes , fes répons , &c. ièid. Il aide Bouchart de fils à la Confirmation, doit fe féparer de fa fc ri-

dey ormeS| à cbmpofer fon décret j 1 54 1 3 8 & me. Sentiment de faint Fidoert-, ijtf.
Sa mort r,
'
131 137. & Parricide. Pénitence remarquable impofée à un
Ol'bd , ABb'é de Rîpouil, puis Evêque de Vie > homme qui avoir tué Ion Père, 89. Pcnirence
204. AfTciiiblc un Concile à Ripouil : alfifte à publique impofée à un jeune homme qui avoir
plufieurs autres , ibid. PofTcde pluficurs béné- tué fon frère, 1 if

fices. Sa mort , >l>:d. Ses lettres > zoy. Pafchafe , 185. Sa dcatinefur l'Euchariflie,287
Olmmhs. Rctablifîementdecet Evêchc j 621. Ôt r.p(î.

Orderic Vital , 290. 46 1


Panl , faint Paul l'Apôtre, n'efl pas inférieur à
Ordination. C'étoitrurafc dc, n'ordônnér per- faint Pierre , z<S4.
~
forme fahs,titré;'pàé même qpMèriic,57J. Ordi- Paiti de Berneried écrit la vie de Grégo:re VII.
"\ na''tion/)e»-/i/(K»i', 458.' Un Clerc reçoit les
^''- - - p. 6^6.
dr'drës'de Diaconat &de Prètrifc, fans avoir Paulin, PrimicierdeMetz. Sa lettre à Bérenger
reçu le Soudiaconat. Solution de la difficulté n'a pas de fuccès, 28p. Ecrits de Bérenger à
que ce cas fait naître>(J. Se 508. L'Ordination Paulin , 301,
ne doit point fe réitérer Pfcié Originel ^'i^.
543. ,

Or/f«( (faintj Evêque d'Aufch. Ses écrite, ^op. Pénitence. Elle n'eft utile qu'autant qu'on ft cor-
Editions qui en ont été faites,' ,
' 201. rige de fes fautes , 144. Abus dans l'admini-
'pr/f'iws. Cette Ville eftbiLilée'&r'tirofanéc par flration du Sacrement dePénitencejcondamnés,

divers facrileges, 141.


'
I ïj &
iz6. Pénitence impofée à ceux qui ont
Opertie , Moi no de Cantorberi écrit les vies dé tué ou bleffe dans le combat 463.
faint Dunihn > /<. 9î ; de faint Ocion , Arche- Péfiitentiet Gallican, 483.
iquc de Cantorberi , 97 ; de faint Elfegus , pp. Peiifées. Les mauvaifes ne nous nuifent point, (i

Autres écrits d'Ofberne, 100. nous n'y prenons pas de plaifir, 141.
Ofxvald (faim) Evêque de Vorcheflcr. Ses écrits, Pentecoflarioii des Grecs î2(î,

pj. Sa vie > Philippe I. Roi de France , répudie la Reine Ber-


P3.
O'thelbold,khhi de faint Bavon de Gand. Sa let- the, 754. Eli excommunié, 759 &747. Le
tre àOtgivcf :mir,c de Baudouin le Barbu, 1 84. Pape le réconcilie , 75?&7f).
Oihlon, Moine de fiinte Emmeramne. Ses écrits, PiboH , Evêque de Toul , fe fait Moine à Dijon,
481.1' cnirigerbiftoiredeS. Nicolas & de S. 721. Confulte Urbain 11. furplufieurs points,
Wolfgang, 490. Jugement de fes écrits, 493. *Hd-
Otbmar ( faint ) Abbé de faint Gai calonïnié ', & Pierre , Patriarche d'Antioche, 549. Sa réponl'e

mis en prifori , 7^9' à Dominique d'Aquilée , 3S0. A Michel Ce-


rularius, 381. Ses autres écrits,
Otton m. Empereur , tire du tombeau de Char- 387.
lemagne h croix qui pendoit à fon col , 104.
Pierre (de hotieflis) Auteur de la Rrgle des Cha-
noines Réguliers ^66,
Sa mort. Son coriis ell porté à Cologne, »i«V.
Son diplôme pour l'établi (Temcnt du Mona-
Pierre Evêque de Ravennc , convainc d'encur
.,

(here de Pton en Bavière , 166. le Grammairien Vilgard , 241.


Piitre , Chancelier de l'Eglifc de Chartres. Ses
écrits, 187.
Pluie de fang. Nature de celle qui tomba en Fran-
PAdeRBORN. Son école. Onyenfcignoitles ce du temps du Roi Robert , 141. Comment
fept arts libéraux , 1 12. expliquée par Gauflin ôc par S. Fulbert , 141.
P,i«/yn//;*f de Pife. Ses écrits, _ 601. Pontife. Le titre de fouvcrain Pontife donné à
Vatiéj^yriquei. Livrc des Panégyriques dcs Grecs. d'autres qu'au Pape 117.
Ce que c'crt 217. Popon ( Prêtre ) Prouve la Religion chrétienne
Pape;. Succeiîîon dcs Papes , r4- Le Pape levé par un miracle, 103. Efl élevé à l'Epifcopar,»*.

unecenfurc infligée par un Evêque, 357. Re- Po^pciiy Archevêque de Trêves, 201. Fait écri-
marques fur le pouvoir des Papes , 66i, Le re la vie & les miracles de S. Simeon, & le
Pape peut faillir , (Î74. Ne doit rien entre- canoiiifer
fait 20J,
prendre fur lc2 droits dr-s Evéqucs , 241. , Abbaye
Porc/p»! de Religicufes. Son origine,
Papiaf le Grammairien. Ses écrits , 571. jyg.Ell aujourd'hui occupée pat dcsChanoi-
Paraclétiii"e des Grcrs , cc que c'efl ,' ii6. ncifes iiid.

Paradis. Traité de Moyic Barcephafur cc fujct. Prf/,.«a»yp'i.'f (Meffedes) tih


, ,, , , , ,

TABLE DES MATIERES.


Vanne 194. Rétablit la dlfcipline mo
'
«37
Prêtres étoient mariés dans l'Eglife Grecque, faint ,

nallique dans vingt -un Mcnaflcres , 195'.


571. L'Eglife Latine ne le toléroic pas> 41^
& Prêtres L'Empereur Henri le députe vers le Roi Ro-
J70. Ignorance ôcdéréglemensdcs l'Evêché de Verdun itid. Sa
bert. 11 refufe
du temps de Pierre Damicn >
,
5/2 > 155'
mort, 195, Sa vie écrite par Hugues Abbé
Prjwcfj. Leurs devoirs , ^f* _
deFlavigny,& par un anonyme, </'<V._ Ses
Pfalmodie de l'Eglife , d'où elle tire fon origine,
17)-. écrits, T97. Lettre de l'Auteur de la vie de
l'Abbé Richard , IPP-
Pfe.mmes. En quelques Eglifes il étoit d'ufage ,
Riihf.i , Merc deCafîmIr. Les Polonoisfecouenc
les jours de jeune, d'ajouter un certain nom-
fon joug , ôc rappellent Cafimir zy4'
bre de Pfcaumcs à ceux qui étoient prefcrits
pour chaque heure canoniale , 140. Senti-
Ri^mer (faint) Sa vie écrite par Enguerran> 189.
Robeyt, Roi de France. Ses études, 181. Sa pié-
ment de faint Fulbert fut cet ufage , »*»('.

P/f.vttier des Grecs : comment les Pfeaumes y té , fes fondations , i8i Se 148. Traits remar-

font difpofés _2iv quables de la vie , 249. Sa mort , 181. Ses


écrits , 185. Ses Lettres > 184.
P«ijf^i«cf, Royale & Sacerdotale , les devoirs de
Î3*- Robert, Evêque de Senlis , demande le Sous-
chacune >

Purgatoire. Son exiftence


_

i7î 8c jpy. Doyenné de Chartres pour Gui fon frère. S.

Piijirie ( faintc; Hiftoirc de fa Tranflation à Fulbert le donne à un de fes Prêtres , 137.


lop Robert Abbé dc Molefme , fe retire à Cîteaux ,
Hervord
760.
Q- Robert d'Arbriflll, 7S=>-
KoJland premierAbbé d'Hafnon , 522.
,

QUENTIN ( faint ) Monatlere de faint Rodolphe, Evéque d'Eugubio ; Pierre Damien


Quentin. Bulle de Grégoire V'L en fa en écrit la vie > tt d /a?' •

faveur, Rodolphe, fubllitué àla place de Henri Roi d Al-


5 5y.
lemagne , «40 8c «y o.
R. Rodttlphe Glaber , Mnine de Cluni , 138- Réfute
les Manichéens, 241. Ses écrits, 259 \*4^-
RAdulphe. Hilloire de faint Licberr, 17*. Rodiilphe ( le Comte ) ufurpe les biens de l*Eg.ifc
Rainard Evêquc de ;Langrcs Ï97. Ses de Chartres. Eft excommunié par faint Ful-
y '
,

écrits, 598. l^e", „ 'îJ-


^ .

Rainanii, Scholaftiquc d'Angers. Scsécrit?,J7I. Rog.uions , en ufage au VUL


fiecle , p. 7«o. éta-
les reçut
Jùji«.)«,/ de Tours, DifcipledeS. Fulbert, 571. blies dans les Gaules avant qu'on
Raiitea-tx. Bénédidlion des palmes, & proccdion en Efpagne ou ailleurs, a j
^'
des Rameaux pi. KoAou , Evêque d'An^oiilême , charge Adamar
'Raoul Archevêque de Tours , amené Bérenger
, dc lui faire tranfcrirc les vies des Papes 176. ,

au Concile de Bordeaux , 294. Eli excommu- Rome. L'Eglife Romaine fes prérogatives, i^S ,

nié ,
^
jp;. & 410. Son indéfeftibilité , }48. Sjn autorité
'Ravetwi. Son Archevêque a la préféance fur ce- s'étend fur toute rE;^life, i6.
lui de Milan, î}5. Rouyn (faint) Abbé de Beauheu. Sa vie écrite
RéfeRoirt commun des Chanoines de la Cathé- par Richard , Abbé de faint Vanne , 197.
drale de Liège 251.
Règles des Chanoines ChanoinelTes approu- &
vées Aix-la-Chapelle, 424, Décret de Ni-
à
colas IL touchant ces règles , 4:5". SAcRAMENTAiRE de l'Eglife Gallicane,
'ReiiK'. Origine du droit de l'Archevêque de fa- 10. Ce qu'il contient ,
n-
crer les Rois de France, Sacrifice de la pour les morts, 14;,
Méfie ofl'ert
459.
Reimriis, Moine de Liège, écrit la tranflarion -7Î ,78} 790 ts. 791- Divers
,
ulagesdans .e
des Reliques de faint Laurent, 45'}. Sacrifice dc la Méfie , 3<î8 43(î. H ne faut &
point l'ofiFrir pour les homicides ni pour les
Reliques éprouvées par le feu 1 1 ? 1 70. & ,

*"•
Kf'ndc/f (faint) Sa vie écrite par Notgcr, jj. voleurs,
Ses miracles 60^. Les Normans & les Danois
Sacrifices profanes.

Rémi (faint Léon IX. célèbre la folemnité de


)
imraoloientà leurs ùux Dieux p^ h.mmes.au-
tant de chevaux, de chiens 5c uc coqs. Le
fi fête, J40& jlj?'
E«n<>r>Ho«f.MonafîercdeBénédii£lines,545,iî;j'. Roi Henri leur défend de femblabks Sacri-
,>o»-
Réfiirreflion prouvée par des apparitions de morts, fices ,
^, ,
coutumes félon les lieux
& par l'Ecrirure , 102. Salut. La différence des
pourvu
IRichard ( le Bienheureux ) efl fait Abbé de & les temps , ne nuit point au falut ,
, , , , ,,

838 TABLE DES MATIERES.


qu:> l'on foit uni par la fol &
la charité,! 2. & mois de Pontificat
, 354»
S.meii-S.iint. Bénédiâion du Cierge Pafchal
,
Symbole. En Afrique on ne le récitoit point à la
& B préme folemnel , 92. Méfie du temps de faint AuEiilHn i j. On ne ,

5.iï;j«if« ( faint ) Hilloire de


Tranflation de
la le difoirpasàRomedanslcXlII.fiécieipour-
fe- Reliques, ipi. quoi, 207.
Siot ( Jean ) Son livre fur l'Eucharillie condam- Synaxaire des Grecs , 217.
né &jette au feu , 186, 289 8c <4i. Synode. Prêtres interdits pour n'avoir pas payé
Sépulchre (Uint) Grand concours au faint Sépul- le droit du Synode, 138.
chre , 244. Syriii , Moine de Cluni » écrit la vie de faint

On doit la refufer aux


Sépulture éccléfiaflique. MaïeBl %So.
excommuniés, & à ceux qui meurent fans
donner des marques de repentir, 277.
Serfs de l'Eglife, 32r. TACTIQUE. Livre taétique 2iJ»
Sergiii'IV. Pape, appelle auparavant , Bouche Tagmoti, Difciple de faint Wolfgang , élu
de Pore , loy. EvêquedeRanfbûnne,io5. Henri Duc de Ba-
Serment. Difpute au fujet du Serment de fidéli- vière le fait Archevêque de Magdebourg. »i«V.
té que les Evéques exigcoient des Abbés, 37. Tangmitr , Prêtre d'Hildesheim , écrit la vie de
Lettre d'Abbon de Fleuri fur le Serment , S. Bernouard , Evêque de cette Ville , 109.
45
&44. Taraife, Patriarche de Conllantir.ople. Son éle-
Sigebert de Gemblous , Chronologifte , écrit élion , 7p(î. Le Pape lui tait des reproches,
contre Grégoire Vil p. 620. 80 1 Lettres écrites en fon nom & du Conci-
.

^'^'^/"'i Archevêque de Mayence. Ses lettres lede NJcée, 8oi.


ai Pape Airxanire II, f.691. Theohjtd ,Evèqueà'Ariezzo. Son amour pour
Sigoti , Abbé de S. Florent de Saumur. Son mé- la chafîeté , 6^ 8.
rite, 473. TieW.iWf, Evêque d'Arrezzo, 219.110,
Sinieon f faint ) Moine de Sinrï , 202. Va à Je- Théodore , Ermite , écrit la vie de S- Magne, 491.
rufal.mavecPc^ppon, Archevêqucde Trêves. Tbeodofe, Diacre de Conilantinople. Ses écuts»
A fon retout il s'enferme dans unetour près 'a 85.
Ville. Ses miracles , »*/</. Sa canonifacion, 203 Theoduiu, Evêque de Liège. Ses lertres,i88, 297,
153. & 47 j. Demande la punition de BérengerCt de
5/mfi)», Abbé de faint Mamas, 388. Ses écrits, ce Brunon, 29"^. Prouve la préfcnceréelle, 2X9.
qu'il y a de remarquable, 389. S m livre des Théoduthe , Evêque d'Orléans, Auteur de
divins amours , 391. Chapi:res de Morale , 1 Hymne : G/»m',ï , Lins, fçç.
392. Ses ouvrages non imprimés, 395. Erreurs THern ou Théodoric , Evêque d'Orléans. S- Ful-
qu'(in lui reproche, 388 3c 393. bert refufed'aflifler à fon facrc pour plufieurs
5»mo«, Abbé de Sithieu , Chronolog.ile , 512. raifns, 159.
Simoniaquei. Anathême &
décrets contre eux, TA». rW, Evêque de Verdun,70f. Ses écritr,70(j.
ï?5' Î'J ' ?^^' 3 J7, 4i9>4iO, 499, 50} , TWfrr», Moine de Fleuri. Ses écrits, i^(î, 'iS/fy.
508, 3:29 (S19 Ils ne doivent pas etie réor-
, Thierri de Tholei , écrit la vie de S. Conrad, Ar-
donnés , mais réhabilités. For.-nule de cette chevéque de Trêves, 584.
réhabilitation, ijf, TAiVrr» Moine de S. Matthias de Trêves. Sa
,

Simonie fréquente parmi les Evcques fous Jean converiion , fes écrits, 1^9 Si I70.
XIX. 219. Guillaume, Abbé de S. Ben'gne , Ti«>rr' , Moine de Trêves, écrit contre Gré-
exhorie le P.-pe à 1. répr mer, 179. Ellee.4 goite VII. _ p-7op.
condamnée par Abb n de Fleuri , 41?, Lettre Thomel ou Tomelle, Moine d'Hafnon. Ses écrits,
des Chanoines deLimiges à GuilInimeCi'm- 312 ôc (Soj.
te de Poitiers , pour l'exhorter k éviter la 5i- Tout. Aéles des Evoques de Toul jio.
m-nie, 3,1. Tr.infubftittiiiaiioii , ou chuigi-ment du pain ôc
Sithomede trois fottCS, JH 5c f çi du vin au corps de J. C. 25 , 97 & 462.
Succ'JIinus. En Anglercre comme en beaucoup Trec.inum,x.c\mz de Lirurg.c. Ccque c'écoit, ip
d'autres ei.droirs, les Moines n'écoient pas ^'- 20.
ex lu dos fucccnîiins , 05:. Tremblement de terre &
tcmpêtc, où il tomba
Suidée: , EveQuc de B mb» rg, élu Pipe à la pla- de ix pierres de feu , 108.
ce de G-éeoirc VI. />«<. 235 ;5c 5 3;. Tient True de Dieu. Ce que c'eft , 145. Ceux qui l'a-
Concile à Rome. Sa 'eitre à l'Eglifc de Bam- volen- ji ri'e , fc parjurent 279.
bere ^ ihid. Tr»'/«/f. Egilité des trois petfonncs , 2(^3. E rit
Sut ,i"l,'M infl'Ou'd Munftcr. Sesécrits.(î(i2. fur c. Myllere, i)0.
Syiv.fire 111. éla Pape ôt^hMlTe au bout de trois Trhdioti des Grecs "<»•
, , , ,, , , , , ,•

TABLE DES MATIERES. 839


Trc/./T>>« & Canons des Grecs izy. diflcrens Conciles , 71 ;. tï/f?. E(l obligé de
Tyçique ou Type. Ce que c'eft, 222. fortir deRorac,750. Y rentre, 737- Sa con-
duite envers le Roi Philippe , 740. Son dif-

V. cours pour la croifadc , 749. Sa mort > fon élo-


ge, 71Î0. Ses écrits, 7^1'
VAlcakdh , Moine de Moyenmoutier en Ur/V( faint) Martyr , 2M'
Lorraine. Ses écries, 117. 11 écrivoic au Ur/isn , Abbé de Hautmont , écrit les aâes du
commencement du XI fiecle 118. martyre de S. Marcel 584.
Varnier , à fa folUcitacion, i-'y rus écrie la vie de C7>/m.ir f faint ) Patron de l'Abbaye dc Lobe.
S- Maïeul ifo. Sa vie parHcriger, 5Î.
V.tfei f/icrés. On peut dansde preffansbcfoinsde Vulfram (faint ) Evêque de Sens , 411. Sa vie
l'Eglife les matcre en pièces ; mais jamais les Ses miracles '*'''•

employer à des ufages profanes, 141. Ref-


peft qui leur eft dû , 14?.
V.tion ou Vaton , Evêque de Liepje ,f prédit fa
mort ,131. Ses écrits , fes lettres , ibid. WAlburge ( fainte
1:3-
) Sa vie écrite pat
Uiialricb ( faint ) Evêque d'Aufbourg. Sa vie Wolshatd&psrAldcbolde,
écrite par un anonyme, par Gebehard 3c par /ir.i//r,im. Son livre de l'umté dc l'Eglife, 685

Bernon, 91. Guérifunmiraculcufeà fon tom-


beau , 91. Warin Abbé de S. Arnoul de Metz, 259. Jean
,

Udalrich Doyen de Richenow ,


, 207. Abbé de Fécam lui demande un de les Reli-
,

UJon, Primicier &puis EvêquedeToul, 34;. , gieux. Réponfe de W^rin , »*»''•

Verdun. Hilloire des Evêquesde cetre ville.447, JP^armanne, Evêque de Confiance, zo7.
Verinbarius , frère d'Hermann-Contraift , 515. /FfwmV, Ec;ilhre dc Trêves. Son traité dc la
Verori f faint ) ConfefTeur 1 -,7. divifion de l'Empire du Sacerdoce , 708. &
Ugutiu.' de Pife Evêque dc Ferrare, auçni:nre
, Wibert, Hiiloiien de Léon lX./>fl^. 3}8.& 161.
le vocabulaire de P'ipiaslc Grammairien, f7i. W'dric, Moine de S Epvre , 520. Met la réfor-
Viandes. Le Clfrgc s'abilenoit de viande le Lun- me i S. Manfui îc à Moycnmoutier,407. Ecrie
di de la Quinquafiféfime , pi. la vie de S. Gérard, EvêquedeToul, 520 &
Vierge (la fainte) Lieu de fa naiffance qui fut 407. Jugement de ff s écrits , 410.
annoncée par un Anpe à Joachim & à Anne , «^/(/Wf, AbbédeS.Guilain. Sa lettre à Henri
144. La fainte Vierge fut enterrée dans la III. page ^61.
Vallée dcJofapliat, ibid. Livr^'s apocryphes li^'ilfride ( faint ) calomnié , fe juftifie devant le

de la naiffance de la fainte Vietee & dc l'en- Pape, 754 lui rend les Monafteres, 7^6
On
fance de J. C. rejettes par S. Fulbert , ihid. IF't Ihe! me, A':ibéd'Hirfauge , il7»
Vidor 11. Pape. Son éleilicn, 41 z. If-'illan , Abbé d'Ebcrs-MunlIer, vexe fes Reli-
Vithr III. Voy. Didier. gieux , 3ii'
Vilrard, Grammairien. Ses erreurs, il e.1 con- U'ijtugfis , Moine de Verdun , écrit la vie de
damné, 241. fainte Ide, 108 5c 109.
Vinntk.([iint) Abbé de Vorimbold. Ses mira- IP^itikindui, Moine de Corbie en Saxe. Ses
cles , 470. écrits 84.
Vippon, Hillorien. Sa naiffance, fes emplois, 50J. Wol férus écrit la vie de S. Gonthler de S. Go- &
Il s'intéreffe à faire fleurir les fciences en Al- dehard, />. IJI&312.
lemagne J04. *;es écrits
, 503 S: 304. ir^olfgmg ( S. ) Evêque de Racilbonne. Sa cano-
Vital , Difciple d'ASbon de Fleuri 53. n fation , Î4J*
Vitmond , MoinedcS. Evroul. Sa lettre au Pape, IVoljianl , Moine de W'incheller. Ses écrits. 90,
4fo. Wttlf'de , Abbé de Fleuri , puis Evêque de
Voleurs. Loi duRoiEdgard contre les voleurs. 90. Chartres, î».
Volpert de Gladbac , 1 j, 1 Y.
EsiD, Calife, fait effacer les Images pein-
Vcrle f faint ) Parron do laCoIlégia'e de Châtil-
lon-fur-Seine. Difcours en fon honneur, 1 16
& 117,
Y tes dans les E^lifes, 79^.
ïzes de Chartres. Son éleclion 8c faconfécration
Urbain II. Pape ,717. Ses lettres ,718. Tient 75J. 11 eftmisen prifon, 754.

Ftn de la Table des Matières.

Addition à l'Errata du FUI. Tome.


***/• 1 51 »
'»'?'" 1;. On ne voir pas qu'il l'ait iamais été avec Magnus, /'/. On ne voit pas qu'il ait
été avec Magnus 'urnommé Niger » fous ce Pontificat. Ils le fuient enfemble fous Telcfphorc ,
Prédéccfleut d'Hygin.
Pag.e
ERRATA.
2î<y, au titre, Monologe, /«/fs: Ménologe.
238 ,%. 9, à ces Evéques, />/. àcet Evêque.
241 , vers le milieu, peu de temps , ///. peu de temps après»
24s ,
au milieu , Eultache , />/. Euilathe.
l-g- I
3.(^9 .
î , il répéta auffî Warin , lif. à Warin.
270 > vers la fin , ni ne Fécam , /;/. ni de Fécam.
288 vers le milieu , trop attaché & à fa doûrine , effacex. &.
,

29 1. lig. II. approuvé > lif. approuvée.


^S>9 > '»?"« dernière , qu'on lui avoir figner , lif. qu'on lui avoit fait fîgner.
304 ,
tig. 10 , la naiflânée , iif. naiflance.
3 17. vers le milieu , du folein , tif. du foleil.

323 , vers]afin> attriber, lif. attribuer.


0^7' %• 7- les Papes , lif. le Pape.
iùid. au milieu, les détemrcurs , les détenteurs,

3 31 , au milieu , le Pape XIX. /// le Pape Jean XIX.


42? ,
vers le milieu, indifféremment, lif. différemmcn*.
4?(î , à la fin , qu'ii ne foit pas autrement de l'efprit , /'/. qu'il ne fuit pas autrement l'efprir.
4^ 2 ,
au milieu , la fécond . /<y. la féconde.
4^p, & le P. pe cr a trois fois, .j;'o«/ft par fes Légats.
4^9, /g I. à ceux quif. /;/. qaifef)nt opéiéî.
47). en bas, les Chanmnes , /-/. les chroniques.
499 . 'I. vtu' qu'un dépofe,/j/. veut qu'on dépofe,
l'i'

îyP, l'i- I , f> iété lif. piété. ,

5^4 J,ins lit note , imptravit , /;/. imperavi.


57 < au bas de qu'il , lij. de ce qu'il.
, ,

i8o, lig. s en certaines provinchrs, lif. provinces.


j8( à la mirge avec les Religieufes /«/. Religieux.
, , ,

J95, /y. 4, & de plufeurs autres Evéques comme de Lanfranc, de S. Anfclme, d'Heimann, ,

l'/.Sc ^.luiicuis autres E -éques, comme Lantranc, S. Anfelme, Herraann.


tSjoJig. 1 , Boll.inJ. /:/. Bol'andus.
tfii , lig. I. Se avoir quelque"; terres, /'/. & avoir ravagé.
tfpf , à 1 1 marge Lettres d. Clément à
, , &c. lif. de Clément où.
699 , lig. 8 , vers le milieu du 8 fiecle , lif. du 1.
1

747 ' 'n n.ilieu, quelques Evéques en lui payant, /'/fi en leur payant un droit, lorfqu'ib
indiiuo enr.
7iO, ver? le milieu , de l'an io8<î, /'/. loptf,
75 2 i la marge, en 1096 lif. 1096. ,

754 > 3U mi'icu, 1099, nf. 1096.


75'8 au miben , avon été célèbre , l'f. célébré.
,

769 au m'Iiou , foit en parlanr , Hfet foit en en parlant.


,

8 ? vers la fin , qu'on ne curt pas , /«/fi qu'on ne crut pas.


.

i'.6y vers la fin le troifit me déclare nulles routes les ordinations d'Evêques , /»;'o«ff!t dcPié-
,

aescu de Diacres faites pai les Piiinccs : Su oidonne , à l'cgatd des Evéques,
-5'

Às-^Ij^
ï

r%s^^-^^'

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