Propriétés Du Titane Et de Ses Alliages
Propriétés Du Titane Et de Ses Alliages
et de ses alliages
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e n’est qu’en 1790 que l’élément titane (Ti dans la classification périodique
C des éléments) a été découvert par le moine anglais Gregor. Cependant, sa
métallurgie extractive étant très difficile, il a fallu attendre les années 1940 pour
que des solutions exploitables industriellement soient établies. La généralisa-
tion du procédé d’extraction du Ti pur par la méthode Kroll a permis un démar-
rage de l’industrie du titane vers 1950.
On peut schématiquement séparer les propriétés du titane et de ses alliages en
deux classes :
— celle conditionnée par la nature de sa surface : la résistance à la corrosion
est en effet excellente et, associée à une bonne souplesse de mise en œuvre, elle
permet une utilisation croissante dans l’industrie chimique notamment ;
— celle des propriétés mécaniques qui sont élevées et d’un niveau compara-
ble aux aciers ; comme la densité est en revanche plus faible, les alliages de
titane sont des matériaux de choix dans l’aéronautique en particulier.
Ce sont ces deux classes qui vont induire les applications présentées au para-
graphe 5.
Nota : on se reportera utilement à l’article « Métallurgie et recyclage du titane et de ses alliages » [1].
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20 mm 20 mm
Tableau 1 – Quelques alliages de titane, leur composition pondérale et leur famille d’appartenance
Nom commercial Al V Mo Nb Fe Cr Sn Zr Si Famille
T40 (1) – – – – – – – – – α
TA5E 5 – – – – – 2,5 – – α
TA8DV 8 1 1 – – – – – – quasi α
IMI 685 6 – 0,5 – – – – 5 0,2 quasi α
TA3V 3 2,5 – – – – – – – α+β
TD5AC 4,5 – 5 – – 1,5 – – – α+β
IMI 550 4 – 4 – – – 2 – 0,5 α+β
TA6V 6 – 4 – – – – – – α+β
6242 6 – 2 – – – 2 4 – α+β
6246 6 – 6 – – – 2 4 – α+β
SP700 4,5 3 2 – 2 – – – – quasi β
Ti17 5 – 4 – – 4 2 2 – quasi β
β-CEZ 5 – 4 – 1 2 2 4 – quasi β
LCB 1,5 – 6,8 – 4,5 – – – – quasi β
10-2-3 3 10 – – 2 – – – – quasi β
TV15CA 3 15 – – – 3 3 – – quasi β
β21S 3 – 15 2,7 – – – – 0,2 quasi β
38644 3 8 4 – – 6 – 4 – quasi β
(1) T40 = titane non allié
On constate donc la quasi-infinité de structures que l’on peut 1.4 Propriétés physiques du titane
obtenir dans les alliages de titane par addition d’éléments et traite-
ments thermomécaniques en faisant varier à la fois : et de ses alliages
— le taux de phase α ; Le titane, comme ses alliages, présente des caractéristiques résu-
— la morphologie de la phase α ; mées dans le tableau 2 :
— la taille des particules de phase α. — sa masse volumique est environ 60 % de celle de l’acier
(ρ = 4,5 g · cm–3) ;
Il n’en demeure pas moins qu’il existe des propriétés génériques — sa tenue à la corrosion est exceptionnelle dans de nombreux
(§ 1.4). milieux tels que l’eau de mer ou l’organisme humain ;
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— ses caractéristiques mécaniques restent élevées jusqu’à une conditions ; un défaut de résistance à la corrosion est quasiment
température d’environ 600 oC ; toujours lié à un défaut du film d’oxyde protecteur.
— elles restent excellentes jusqu’aux températures cryogéniques ;
— sa transformation en demi-produits et en pièces de forme par
les techniques usuelles (forgeage, emboutissage, filage, coulée, Tableau 3 – Potentiels électrochimiques standards
soudage, usinage...) est raisonnablement aisée ; de quelques métaux
— il est disponible sous des formes et des types de produits très
variés : lingots, billettes, barres, fils, tubes, brames, tôles, feuillards ; Métal Potentiel (V/ENH)
— il est non magnétisable ;
— son coefficient de dilatation, légèrement inférieur à celui de Mg/Mg2+ – 2,37
l’acier, est moitié de celui de l’aluminium ; Al/Al3+ – 1,66
— son module d’Young (environ 100 GPa) est très proche de celui
des structures osseuses. Ti/Ti2+ – 1,63
Zn/Zn2+ – 0,76
Tableau 2 – Propriétés physiques du titane
Propriété Valeur Unité 2.2.1 Corrosion générale
Numéro atomique 22 – Des conditions très réductrices, ou des environnements très
Masse atomique 47,9 g oxydants, ou encore la présence d’ions fluor, diminuent le caractère
Masse volumique 4,507 g · cm–3 protecteur de cette couche d’oxyde (les réactifs d’attaque pour
révéler les micrographies sont le plus souvent des mélanges fluoro-
Température de transformation nitriques). La réactivité des solutions acides peut être néanmoins
allotropique 882 o
C réduite par l’adjonction d’agents oxydants et/ou d’ions lourds
Température de fusion 1 670 oC métalliques. L’acide chromique ou nitrique et les sels de fer, nickel,
oC cuivre ou chrome sont alors d’excellents agents inhibiteurs. Cela
Température d’ébullition 3 535 explique pourquoi le titane et ses alliages peuvent être utilisés dans
Capacité thermique massique 522,5 J · kg · K–1 des procédés industriels et des environnements où les matériaux
Conductivité thermique 16,7 W · m–1 · K–1 conventionnels se corroderaient.
Le titane fait partie des métaux nobles au sens du potentiel gal-
Résistivité électrique à 20 oC 47,8 × 10–8 Ω·m
vanique. Dans le tableau 4, on donne le classement des métaux
Coefficient de dilatation linéaire à 25 oC 8,5 × 10–5 K–1 dans l’eau de mer. Dans cet environnement, le titane possède un
Susceptibilité magnétique 3,2 × 10–6 cm3 · g–1 potentiel de – 0,1 V par rapport à une électrode au calomel saturée
(V/ECS), ce qui le place du côté des métaux passifs (nobles). En
Mmodule d’élasticité 110 000 MPa conséquence, le couplage avec la majeure partie des autres métaux
Coefficient de Poisson 0,33 – crée un courant galvanique ; le titane devient alors la cathode et
l’autre métal se corrode (tableau 5). Dans ces conditions, le maté-
riau peut absorber de l’hydrogène ; il faut alors craindre la précipita-
tion d’hydrures fragilisants (§ 2.2.2).
2. Propriétés induites
par la nature de la surface Tableau 4 – Classement de quelques métaux dans l’eau
de mer selon leur caractère cathodique ou anodique
Il s’agit des propriétés de corrosion, d’érosion, de résistance au
feu, de biocompatibilité, d’usure et de grippage. Caractère Métal/alliage
Cathodique Platine
2.1 Nature de la surface du titane (passif ou noble) Or
et de ses alliages Argent
Le titane est un métal extrêmement oxydable ; le tableau 3 mon- Titane
tre que dans la série des potentiels électrochimiques standards, il se ...
place au voisinage de l’aluminium, entre le magnésium et le zinc.
L’une des causes de la résistance à la corrosion du titane et de ses Inox Cr-Ni
alliages est le développement d’une couche protectrice de quelques Nickel
fractions de micromètre, constituée d’oxyde majoritairement TiO2 ,
mais il est reconnu qu’elle peut contenir d’autres variétés. Cuivre
Cette couche est intègre et très adhérente. En cas de rayure de la Bronze
surface, l’oxyde se reformera spontanément en présence d’air ou Étain
d’eau. De plus, cette couche est très stable sur une large gamme
de pH, de potentiel et de température. Elle se forme sur tous les Plomb
alliages, indépendamment de la composition chimique ou de la Acier au C
morphologie de la microstructure sous-jacente.
Al classe 2xxx
Al classe 6xxx
2.2 Corrosion
(actif) Zinc
Bien que le titane soit chimiquement une espèce très réactive, il
résiste de façon générale à la corrosion, et ce dans la plupart des Anodique Magnésium
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Tableau 5 – Effet du couplage de l’alliage TA6V avec d’autres métaux dans l’eau de mer pendant un mois
Perte de masse Vitesse de corrosion
Matériau Aspect de la corrosion Aspect du TA6V
(mg) (mm/an)
Bronze Ni-Al 8,2 0,012 déalumisation
Laiton 60-40 17,4 0,025 dézingation
Inox 304 1,3 0,002 pas de corrosion visible
Inox 316 1,2 0,002 pas de corrosion visible
pas de corrosion visible
Al 1100 19,6 0,093 piqûre
Al 7075 19,3 0,092 piqûre
Al 6061 25,2 0,120 piqûre
Zn 180,5 0,323 générale
On peut bien entendu modifier les équilibres électrochimiques Un alliage comme le β21-S (Ti - 15 % Mo - 3 % Nb - 3 % Al -
par l’adjonction d’éléments d’addition qui réduisent l’activité anodi- 0,2 % Si) où le seul élément passivant utilisé est le molybdène,
que du titane ; cela conduit à améliorer la tenue à la corrosion. On possède une excellente résistance à la corrosion.
peut alors choisir des éléments : Enfin, on peut combiner les trois principes précédemment énon-
— qui déplacent le potentiel de corrosion et renforcent son cés ; c’est par exemple le cas de l’introduction de palladium dans
caractère de cathode, parmi le platine (Pt), le palladium (Pd) et le l’alliage 38644, qui renforce le caractère cathodique de la nuance et
rhodium (Rh). Cela explique le développement des nuances du type permet d’atteindre des niveaux de résistance tout à fait exception-
Ti-0,2 % Pd ; nels.
— qui accroissent sa stabilité thermodynamique et réduisent sa
propension à se dissoudre anodiquement ; ce sont le nickel (Ni), le
molybdène (Mo) et le tungstène (W) ; 2.2.2 Absorption d’hydrogène
— qui augmentent sa tendance à la passivation ; ce sont le zirco-
nium (Zr), le tantale (Ta), le chrome (Cr) et le molybdène, par exem- L’absorption d’hydrogène en milieu aqueux se passe de la façon
ple dans Ti - 0,3 % Mo - 0,8 % Ni. suivante : la réduction de l’eau à la surface du métal [cathode] pro-
duit de l’hydrogène, elle est suivie d’une phase d’adsorption, puis
Il en résulte une grande variété de résistances à la corrosion en de l’absorption proprement dite avec diffusion dans les diverses
fonction de la composition de l’alliage. La figure 2 illustre la vitesse phases en présence. Si la limite de solubilité de l’hydrogène est
de corrosion dans l’acide chlorhydrique pour diverses combinai- atteinte, il y a précipitation d’hydrures qui forment alors une couche
sons d’éléments d’alliage. On visualise bien l’effet positif du molyb- dont l’épaisseur croît continûment (en l’absence d’écaillage). Une
dène qui permet une meilleure tenue. En effet, les nuances les fois ce phénomène initié, l’absorption d’hydrogène est contrôlée
moins performantes en dehors du T40, TA6V et TV15CA (Ti - 15 % V par la diffusion dans le métal. Le coefficient de diffusion de l’hydro-
- 3 % Cr - 3 % Sn - 3 % Al), ont une phase β stabilisée au vanadium ; gène dans la phase α étant environ mille fois plus faible que dans la
cet effet bénéfique du molybdène semble prépondérant car il efface phase β, il en résulte que les alliages qui ont un caractère β plus mar-
un peu celui, a priori négatif, du vanadium comme dans l’exemple qué sont ceux qui absorbent le plus d’hydrogène, toutes choses
du 38644 (Ti - 3 % Al - 8 % V - 6 % Cr - 4 % Mo - 4 % Zr). égales par ailleurs. La figure 3 indique l’influence de la nature de
l’alliage et du pourcentage de phase β sur la prise d’hydrogène en
chargement cathodique dans l’acide sulfurique à 5 % ; la vitesse
d’absorption du T40 est plus faible que celle du TA6V, elle-même
inférieure à celle du TV15CA.
5
Dans ces conditions, le compromis en terme d’élément d’addition
Vitesse de corrosion (mm/an)
1-
3
64
qui vient d’être dit en remarquant que, d’une part, dans la plupart
b2
38
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Ti – 0,2% Pd
Ti
Duplex 2507
6Mo + N
Duplex 25 Cr
Duplex 2505
316
10 000
1 000
Figure 4 – Température critique d’apparition de corrosion
caverneuse du titane comparée à celle d’aciers inoxydables
dans l’eau de mer
100
0 20 40 60 80 100
Pourcentage de phase b (%)
2.3 Érosion
b influence du taux de phase b
La couche d’oxyde très adhérente et dure explique la longévité de
Figure 3 – Prise d’hydrogène en chargement cathodique dans l’acide
pièces en titane soumises aux chocs de particules en suspension
sulfurique à 5 % en volume
dans les fluides. Cet effet est amplifié par la capacité qu’a cette cou-
che à se régénérer. De façon classique, l’érosion dans l’eau de mer
est augmentée par un débit plus élevé ou une granulométrie plus
faible (tableaux 6 et 7).
dans un domaine proche d’une limite pratique de tenue à la corro-
sion générale. Il en est de même en ce qui concerne la corrosion liée
à des couplages galvaniques où le plus souvent le titane joue le rôle
de cathode. Tableau 6 – Influence de la nature du fluide sur l’érosion
Les risques de corrosion sous contrainte apparaissent dans les du titane T40 dans l’eau de mer
alliages de titane :
— à froid dans l’eau de mer (en présence d’entailles aiguës Débit Érosion
seulement) ; Particules en suspension
(m/s) (mm/an)
— dans certains milieux particuliers (tel que le méthanol
anhydre) ; 7,0 aucune 0,000
— à chaud, en présence de NaCl fondu. 36,0 aucune 0,008
Les critères de résistance sont globalement proches de ceux qui 2,0 40 g/L de sable granulométrie 60 0,003
améliorent la ténacité (voir § 3) :
— les structures α sont sensibles à la corrosion sous contrainte ; 2,0 40 g/L de sable granulométrie 10 0,013
— les structures β ont une bonne résistance ; 4,1 4 % de sable granulométrie 80 0,008
— les alliages α-β ont une sensibilité croissante avec la teneur en
7,2 40 % de sable granulométrie 80 1,500
aluminium contrecarrée par l’addition d’éléments β-gènes.
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3.3 Propriétés en traction Enfin, le tableau 9 compare la résistance spécifique (Rp 0,2 /ρ, où ρ
est la masse volumique) des trois compositions de référence avec
celle d’acier ou d’autres systèmes métalliques. Des valeurs extrême-
Comme pour tous les métaux, l’augmentation de résistance
ment élevées sont constatées (100 < Rp 0,2 /ρ < 350 MPa · cm3 · g–1),
mécanique (Rm , Rp 0,2 ) se traduit par une perte de ductilité (A ). À ce
qui justifient le choix du titane dans le domaine de l’aéronautique
titre, le tableau 8 présente, pour les trois compositions spécifiées,
(cf. § 5).
ainsi que pour l’IMI 685 et 550, quelques valeurs typiques. On cons-
tate l’effet durcissant des éléments d’addition (comparaison T40 vs,
IMI 685) ; on notera que les alliages α + β possèdent un compromis
Tableau 9 – Résistances spécifiques d’alliages de titane
résistance-ductilité peu étendu, à l’inverse des alliages quasi β dont
la plage est extrêmement large ; dans ce tableau, on se rend compte et d’autres métaux
que pour un alliage comme le β-CEZ, la résistance peut être multi-
Rp 0,2 r Rp 0,2/r
pliée par 2 ; on notera enfin que c’est pour les alliages quasi β ou β Alliage
qu’on peut obtenir des valeurs basses de module élastique (MPa) (g á cm–3) (MPa á cm3 á g–1)
(70 GPa), ce qui en fait des alliages compatibles mécaniquement
avec les structures osseuses (E = 50 GPa). T40 275 (1) 4,51 61
TA6V 830 (1) 4,42 188
b-CEZ 1 650 4,67 353
Tableau 8 – Caractéristiques de traction Inox 316 230 7,94 29
pour différents alliages
Inox 2205 duplex 300 7,80 58
Rm Rp 0,2 A E Monel 400 175 8,83 20
Nuance
(MPa) (MPa) (%) (GPa) Inconel 625 415 8,44 49
T40 483 352 (1) 28 110 Hastalloy C267 355 8,89 40
IMI 685 1 020 914 8 110 70/30 Cu-Ni 120 8,90 13
TA6V 1 000 910 (1) 18 110 (1) Valeurs utilisées dans l’aéronautique.
IMI 550 1 138 1 035 12 110
β-CEZ 1 250 1 150 11 115
3.4 Résistance à la propagation
β-CEZmax 1 700 1 650 7 115 des fissures
β-CEZ100 %β 927 723 9 70
Nous abordons ici la résistance à la propagation des fissures :
(1) Valeurs supérieures.
— soit en chargement monotone croissant (ténacité) ;
— soit en chargement cyclique (da /dN : incrément de propaga-
tion de fissure da sur variation du nombre de cycle dN ).
La figure 5 illustre l’influence de la température sur la résistance
mécanique des trois nuances présentées comme référence. En des- On constate, dans le tableau 10, que les microstructures de type
sous de – 50 oC, dans le domaine des températures cryogéniques, lamellaire s’opposent à la propagation des fissures de manière plus
l’augmentation de résistance est spectaculaire, néanmoins elle efficace que les morphologies équiaxes, ce qui est cohérent avec les
s’accompagne d’une ductilité très basse. C’est au-delà de 350- considérations exprimées dans le paragraphe 3.2. Les alliages
400 oC que la résistance mécanique des alliages de titane quasi β, surtout pour les morphologies équiaxes, sont légèrement
commence à diminuer. moins performants que les alliages α ou α + β ; cela tient surtout
à la finesse de leur microstructure. Par contre, leurs morphologies
lamellaires ont des propriétés aussi bonnes voire meilleures,
notamment au travers des microstructures en collier obtenues par
transus sous corroyage [3] ; ces microstructures sont obtenues en
utilisant la lenteur des cinétiques de précipitation de la phase α des
2 400 alliages quasi β.
Rm et Rp 0,2 (MPa)
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nues par transus sous corroyage, qui, tout en étant de type lamel-
laire, ont une performance égale aux morphologies équiaxes. Tableau 11 – Fatigue vibratoire sur éprouvette lisse
de différents alliages
80 b-CEZtsc(TE + Ru)
III
TA5E(Rt)
70 II 662b(TD + Ru)
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Contrainte (MPa)
700 Déformation plastique totale 0,2 %
600 b-CEZ spécifiques sont recherchées (typiquement l’aéronautique et le
domaine spatial).
500 IMI 685
400
A (%) 15 4 –
Figure 7 – Comparaison des propriétés de fluage
E (GPa) 115 130 220
β-CEZéquiaxe 13 à 15 Dans cette partie, nous n’aborderons pas les détails de la mise en
forme à l’état solide qui fait l’objet des articles M 685 [3] pour les
β-CEZlamellaire 44 à 68 traitements thermomécaniques et M 1 335 [2] pour les traitements
β-CEZlamellaire-tsc 88 à 131 thermiques. L’apprentissage et la maîtrise de ces techniques sont
longs et nous conseillons dans un premier temps de les sous-traiter.
Nous ne survolerons que les traitements thermiques, mais nous
présenterons le décapage, l’usinage, et le contrôle final des pièces
De nombreuses techniques de fabrication de composites peuvent plus en profondeur.
être utilisées, mais les deux principales sont la métallurgie des pou-
dres pour les renforts particulaires (typiquement TiB) et le pressage
à chaud de couches de fibres (typiquement du SiC)/feuillard titane.
Dans ce dernier cas, les feuillards ont une épaisseur de l’ordre de
grandeur du diamètre des fibres (100-150 µm) et ils se soudent entre 4.1 Quelques principes régissant
eux par diffusion (cf. § 4.4.2). Enfin, il faut noter que la principale dif- les traitements thermiques
ficulté d’élaboration réside dans la réactivité du titane et son action
à l’interface du renfort, notamment aux hautes températures de
fabrication ; la zone d’interaction fibre/matrice est inférieure au Les quelques principes présentés ci-après permettront d’éviter les
micromètre, mais elle peut croître si on augmente la température ou erreurs commises lorsqu’on traite pour la première fois des pièces
la durée d’exposition des pièces (tableau 13). en alliage de titane. Les précautions à prendre sont de quatre
ordres :
— homogénéisation des pièces ;
— déformation des pièces ;
Tableau 13 – Épaisseur de la zone de réaction fibre/matrice — contamination par l’atmosphère ;
dans un composite b-21S/SiC — fragilisation spécifique au titane.
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ø 110
mm
4.2.2 Décapage
Le décapage en bain de sel se fait à chaud, entre 350 et 500 oC.
1 000 Les solutions aqueuses caustiques à 40-50 % de soude s’utilisent
600 700 800 900 1 000 1 100 vers la température d’ébullition (125 oC) du mélange ; il faudra
Température visée (°C) prendre garde aux émanations nocives. On peut adjoindre au mé-
lange d’autres éléments comme par exemple dans le cas suivant :
Longueur des barres > 3 x diamètre
NaOH 50 % + pentahydrate de sulfate de cuivre CuSO4(H2O)5 10 %
et eau à 40 % à 105 oC. Ces solutions aqueuses caustiques peuvent
Figure 8 – Temps d’homogénéisation en fonction de la section aussi retirer les couches d’oxydes de faible épaisseur (présentes
de barre et de la température visée pour l’alliage TA6V après un traitement à basse température) qui ternissent l’aspect de
surface.
Les bains d’acides sont en général des mélanges fluonitriques à
froid ; on fera attention de réduire le temps d’immersion au mini-
On risque aussi une contamination des pièces par oxydation mum pour éviter l’absorption massive d’hydrogène. Des exemples
à l’air (couche à éliminer par usinage mécanique ou chimique, typiques sont donnés dans le tableau 15.
cf. § 4.2) et par absorption d’hydrogène pouvant donner lieu à la
précipitation d’hydrures fragilisants. On peut utiliser, pour éliminer
l’hydrogène, un dégazage à chaud sous vide (coûteux), mais nous
conseillons d’avoir recours à des fours électriques ou de régler les
flammes de fours au fuel ou à gaz en mode oxydant. Tableau 15 – Quelques conditions de décapage
pour l’alliage TA6V
Un affaiblissement du métal par précipitation de phases fragili-
santes peut apparaître ; cela se règle en ajustant les compositions Température
chimiques (Al < 8 % par exemple pour éviter la formation de la Immersion en Rinçage en Rinçage final
de formation bain de sel bain à 30 % en bain à 30 %
phase α2) ou le traitement thermique (trempe pour éviter la phase de la couche
ω athermique ou revenu à haute température pour éviter la phase d’oxyde à 205 oC H2SO4 HNO3 + 3 % HF
ω isotherme) [2].
(oC) (min) (min) (s)
Une fois les produits traités, on a recours à des traitements de
finition (meulage et décapage). 650 2 2 30
820 5 5 30
4.2 Traitements de finition 950 5 5 60
4.2.1 Meulage
Il vise en général à retirer sur demi-produit ou pièce finie la cou-
4.3 Usinage
che superficielle contaminée. Les couches d’oxydes doivent subir
une action mécanique (meulage, brossage, sablage) avant attaque Cela inclut les opérations de tournage, perçage, fraisage, cou-
chimique (dans un acide). Le meulage est effectué sur de grosses page... Pour un usinage optimal, il faut connaître le compromis
pièces. Il peut se faire à sec avec des vitesses linéaires inférieures à entre la nature de l’outil, sa durée de vie et les lubrifiants.
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0,13
échauffement pouvant amener des modifications microstructurales 30
locales (passer de 4 à 46 m/min conduit à une élévation de 425 à
mm
925 oC) ; 25
/t
0,3
— maintenir des avances élevées ; cela n’a que peu d’influence 20
0,23
8m
sur l’autoéchauffement (passer de 0,05 à 0,51 mm/t n’accroît que de
150 oC la température) ;
m
15
mm
/t
— utiliser des lubrifiants (cf. figure 10) ;
/t
— ne jamais s’arrêter lorsque la pièce et l’outil sont en contact ; 10
— remplacer l’outil dès que des risques d’usure apparaissent. 5
0
25 35 45 55 65 75 85 95
4.4 Soudage Vitesse de coupe (m/min)
Émulsion chimiqu
H u il e c
Huile lourde s
— soudage à l’état solide : soudage par diffusion (diffusion bon- 250
ding DB) ;
200
hlo
— brasage.
rée
150
olu b
4.4.1 Soudage à l’état liquide 100
e 1/ 1
le
Les techniques les plus employées sont TIG, MIG et PAW. EBW est 50 /1
1
5
5
aussi utilisé en aéronautique pour les disques de moteur d’avion. La
0
soudabilité des alliages de titane diminue quand on passe des allia-
15 20 25 3 35
ges α aux alliages β. Les quasi α sont soudés dans un état recuit. Les
α + β sont soudés soit dans un état recuit, soit dans un état brut de Vitesse de coupe (m/min)
mise en solution ; un traitement thermique à basse température per-
met alors un détensionnement de la soudure et un vieillissement de Figure 10 – Perçage de l’alliage TA6V traité 375 HB, foret \ 6,4 mm
la matrice. Les quasi β et β sont aussi soudés dans leur état recuit M-7 HSS
ou brut de mise en solution ; la soudure est alors ductile mais
peu résistante ; le vieillissement par revenu la rend en général très
fragile.
La technique TIG est la plus fréquemment utilisée, sauf quand on l’autre par fluage. Dans un deuxième temps, il y a diffusion de
a affaire à des produits de section importante ; le soudage doit matière, et sous l’action de la pression appliquée, les porosités exis-
s’effectuer si possible à plat. La technique MIG convient pour des tantes dues aux aspérités de surface se ferment ; il y a ensuite recris-
produits de plus de 3 mm d’épaisseur ; bien entendu, le métal tallisation et migration des joints de grains. Avant mise en forme, en
d’apport est le même que la matrice, sinon on s’expose, à plus ou mettant sur les surfaces une barrière de diffusion (stop-off ), on peut
moins longue échéance, à une fragilisation de la soudure au niveau créer des structures en « nid d’abeille ».
de la ZAT (précipitation d’hydrures, provenant d’une diffusion de
l’hydrogène induite par l’action du gradient de composition chimi-
que matrice-soudure). Les métaux d’apport sont eux aussi normali-
sés et les recommandations de l’American Welding Society (AWS) 4.5 Contrôles non destructifs (CND)
A5.16 peuvent être suivies. Les gaz protecteurs sont l’argon (Ar) et
l’hélium (He) à haute pureté (minimum 99,985 %). Les parties à sou- Courants de Foucault, ressuage et contrôles aux ultrasons (US)
der doivent être proprement nettoyées (1 à 20 min dans le mélange sont les techniques les plus classiques applicables aux alliages de
acide nitrique HNO3 20-47 % + acide fluorhydrique HF 2-4 %). Le titane. C’est certainement le CND US qui est le plus fréquemment
soudage plasma est utilisé pour les sections importantes. Les condi- utilisé. L’European Titanium producers Technical Committee (ETTC)
tions typiques de soudage sont indiquées dans le tableau 17. a fixé les règles CND US dans sa publication ETTC no 7. On y définit
les classes de produits concernés, la qualification du personnel, les
méthodes de contrôle, les blocs étalons, les équipements de
4.4.2 Soudage à l’état solide contrôle, l’état de surface et la forme du produit à contrôler, le
déroulement du contrôle, les critères d’acceptation, le marquage, le
Le besoin de réduire la masse et le coût des structures métalli- rapport et le certificat de contrôle.
ques de l’aéronautique a conduit à l’accroissement de l’intérêt pour
le soudage par diffusion et spécialement lorsque celui-ci peut être Le danger qui guette les pièces de titane est la présence de micro-
combiné avec la mise en forme superplastique (d’où un gain de fissures, dont on suppose qu’elles ont la forme d’un disque plat
temps). Dans un premier temps, les deux surfaces étant mises en (penny shaped flaw en anglais). Le CND US permet un contrôle et
contact après décapage soigné, elles se déforment l’une contre une détection des défauts par rapport à un étalon trou à fond plat.
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16 310 38 – 1
MIG manuelle
50 310 38 – 1
16 360 45 400 1,4
automatique
50 325 33 650 chambre Ar
Débit gaz
Épaisseur Vitesse Courant Tension Débit torche
Soudure Nature gaz protecteur
(mm) (mm/min) (A) (V) (m3/h) (m3/h)
5. Principaux domaines lière offshore, montre que les coûts d’installation et d’exploitation
des tubes de forage en titane sont 16 % voire 200 % plus bas
d’emploi qu’avec la référence acier :
— la résistance à la corrosion évite les opérations de revêtement
des tubes et permet des durées de vie trois à cinq fois supérieures à
Autrefois réputés chers à cause de leur valeur d’achat, le titane et celle de la référence acier ;
ses alliages sont de plus en plus considérés comme économiques — les valeurs élevées des résistances spécifiques (cf. tableau 9)
dans les coûts d’exploitation. La clé du succès pour leur rentabilité permettent de réaliser des tubes fins et extralégers ; ceux-ci peuvent
est d’utiliser au maximum leurs propriétés et caractéristiques uni- être facilement manutentionnés par un homme seul, là où il fallait
ques dès la conception, plutôt que de les substituer ex abrupto à un auparavant deux ou trois personnes aidées d’engins de levage ; le
autre métal. L’exemple du tableau 18, tiré de l’exploitation pétro- gain en main-d’œuvre et en facilité d’exploitation est ainsi avéré.
Tableau 18 – Comparaison de l’alliage TA6V avec la référence acier pour des tubes de forage
Résistance Épaisseur Rayon courbure mini Masse Coût
Alliage
(MPa) (mm) (m) (kg/m) (% Ti/m)
TA6V 827 5 15 14,5 100
Super Duplex 550 12 42 62,2 116
Flexipipe – 45 2 148,5 300
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Cet exemple montre bien que le titane, initialement employé dans biomédical. Son emploi s’est développé rapidement en raison de
le domaine aéronautique (démarrage des turboréacteurs dans les son caractère biocompatible bien sûr (§ 2.4), mais aussi mécano-
années 1950), touche de plus en plus de secteurs. Il faut cependant compatible (§ 3.3).
noter qu’au cours des diverses crises récurrentes qui ont secoué On trouve aussi toute une succession d’implants tels que des pro-
l’aéronautique, et dont la dernière a duré trois ans au début des thèses de hanche, des agrafes osseuses, des vis, des plaques...
années 1990, l’industrie du titane s’est consolidée et propose main-
tenant des prix extrêmement attractifs (–15 à 25 % par rapport Exemple : l’utilisation la plus frappante est schématiquement pré-
à 1990). Ceci favorise sa percée. sentée par la prothèse de hanche en figure 11. L’os humain travaille
en compression avec un module d’élasticité de 50 à 60 GPa. Si on
implante une prothèse en acier, lors de la transmission d’un effort
5.1 Aéronautique et aérospatial (pendant la marche par exemple), c’est la prothèse qui va subir les
déformations. À la base de la prothèse, le fémur n’est plus sollicité et
Les domaines de l’aéronautique et de l’aérospatial constituent la ses tissus n’ont plus besoin de se renouveler ; on constate alors une
première des applications historiques du titane et ses alliages ; 80 % diminution de la section de l’os préjudiciable en cas de sollicitation laté-
des compositions ont été conçues pour ces applications. Dans ce rale. Dans le cas du titane, notamment pour les nuances quasi β ou β
secteur, on utilise totalement ses excellentes propriétés spécifiques. (l’alliage β-21S sans Al est en cours d’évaluation par le département de
la Santé américain), le module peut descendre jusqu’à 60 à 70 GPa ; la
De nos jours, le titane constitue 6 à 9 % de la masse des avions. compatibilité mécanique est alors plus élevée, et on ne constate qu’un
On en trouve tout d’abord sous forme de pièces forgées, dont la amincissement très limité.
plus impressionnante est sans nul doute le train d’atterrissage du
B777 en 10-2-3, mais aussi sous forme de boulons. Il ne faut pas Le titane a fait aussi une percée importante dans le domaine de
oublier les éléments de moteur, à savoir les étages basse et l’odontologie. Toujours pour ses compatibilités biologique et méca-
moyenne température : aubes fan, aubes courtes, disques de tur- nique, il sert d’implant dans la gencive pour les supports de cou-
bine, carter... ; la température maximale d’utilisation étant limitée à ronne ou de prothèse. Pour sa résistance aux fluides corporels,
600 oC. notamment la salive, on l’emploie au Japon comme palais dans les
Dans le domaine de l’espace, il est utilisé pour les éléments du appareils dentaires. Enfin, on le met en œuvre sous forme de fil
moteur Vulcain d’Ariane 5 pour le mélange H2-O2 et sa combustion ; superélastique (de composition 50 % Ti - 50 % Ni) pour tendre les
les rouets centrifuges sont ainsi soumis à des températures cryogé- prothèses dentaires.
niques d’un côté (température de l’H2 liquide) et à celles de la Il faut enfin signaler l’apparition d’outillages en titane (TA6V) pour
combustion de l’autre. Il sert aussi de réservoir aux gaz de propul- la chirurgie, comme les forets creux refroidis à l’eau. À l’inverse de
sion pour les satellites grâce à ses bonnes propriétés cryogéniques la référence acier, tout débris d’outil titane pouvant rester dans le
et à sa résistance à la corrosion des gaz propulseurs. Enfin, comme corps n’occasionnera pas d’infection postopératoire du fait de la
c’est aussi un métal faiblement magnétique, il est embarqué sur les biocompatibilité.
navettes ou stations spatiales sous forme d’outil ; en effet, il peut
évoluer en apesanteur près des appareillages électriques sans
risque de créer un arc.
5.5 Génie alimentaire et pharmaceutique
5.2 Génie chimique On l’a déjà vu dans le domaine du génie chimique pour le traite-
ment des eaux usées, le titane est aussi utilisé dans les usines de
Le secteur de la chimie, au sens large, correspond à la seconde dessalement (14 000 km de tubes en service) pour sa résistance à la
utilisation historique du titane et de ses alliages. corrosion et à l’abrasion par l’eau de mer (cf. tableau 7) ; dans ce
secteur, l’augmentation spectaculaire de la durée de vie des ensem-
On trouve des tubes en titane dans nombre de condenseurs, où sa bles de dessalement vient contrebalancer le coût élevé du matériau
résistance à la corrosion et à l’abrasion permettent des durées de de base.
vie élevées. Il est souvent utilisé, notamment aux États-Unis, dans
les circuits secondaires des réacteurs nucléaires, et il permet de Il sert aussi dans l’alimentation et la pharmacie comme réacteur
minimiser le nombre d’arrêts de tranche (extrêmement coûteux) et ou injecteur. Dans ce cas, on tire partie de sa résistance à la corro-
d’éradiquer les risques de fuite. Il sert aussi sous forme de réacteurs sion, à l’abrasion et de sa non-toxicité (exemple de la cuisson-extru-
dans les raffineries (résistance à H2S et CO2) et pour le blanchiment sion du ketchup ou de la cuisson du jambon entre 80-120 oC dans
de la pâte à papier (résistance au Cl). Il est enfin utilisé dans les une vapeur à 13 % de sel aux États-Unis).
usines de traitement des eaux, notamment au Japon, pour ses pro-
priétés de résistance à la corrosion et pour sa résistance aux agents
biologiques et à la flore microbienne.
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Nous avons déjà vu que le titane et ses alliages peuvent servir Toujours en raison de sa biocompatibilité et de ses facultés à se
dans l’exploitation pétrolière grâce à leur résistance à la corrosion colorer par anodisation, on trouve du titane non seulement dans la
(notamment dans les milieux saumâtres en profondeur), à l’érosion bijouterie de fantaisie (bracelets, boucles d’oreilles, boîtiers et bra-
et au feu d’hydrocarbures. Il faut aussi noter leur utilisation dans la celets de montre...), mais aussi dans la lunetterie, pour des montu-
géothermie sous forme de canalisations et de carters et dans les res extrafines et légères où la résistance spécifique du titane est
échangeurs de chaleur (tubes droits ou en U), toujours pour les totalement exploitée. Il faut aussi noter pour cette dernière applica-
mêmes propriétés. Enfin, grâce à leurs résistances spécifiques éle- tion l’utilisation d’alliages superélastiques permettant d’avoir des
vées, on en trouve dans les turbines génératrices de vapeur sous montures « indéformables ».
forme d’aubes (parfois bimétal : TA6V revêtu d’une couche d’alliage Dans le domaine du sport, pour sa résistance à la corrosion, sa
quasi β très dure) ; dans ce cas, on réduit fortement les arrêts de coloration par anodisation et surtout pour ses excellentes propriétés
centrale dus aux ruptures d’aubes. spécifiques, le titane, et ses alliages, est employé pour :
— les bicyclettes (vélo de tourisme, VTT ou compétition) ;
— les clubs de golf ;
5.7 Nouveaux secteurs d’application
— les raquettes de tennis ;
— les fixations de ski ;
5.7.1 Automobile — les crampons, pitons et mousquetons...
L’automobile représente un marché d’envergure pour le titane, si Notons enfin que, du fait de son prix élevé, l’industrie du titane a
l’on ne considère que le renouvellement du parc français annuel. Ce développé très tôt des procédés de recyclage [1], ce qui fait que sa
marché, par l’effet volume, permettrait de baisser encore plus les mise en œuvre ne pose pas de problèmes environnementaux (hor-
coûts de fabrication des demi-produits. mis ceux induits par sa chimie extractive basée sur l’utilisation du
chlore). Il peut même être la solution idéale pour servir de conteneur
C’est surtout au Japon et maintenant aux États-Unis qu’on trouve
de matières radioactives, si l’enfouissement des déchets est l’alter-
des alliages de titane dans les voitures de tourisme. Ce qui est
native retenue (résistance à la corrosion et propriétés mécaniques
recherché est l’allégement des structures visant à réduire à la fois
élevées).
les émanations du moteur et le bruit (pièces en mouvement) ; cela
est obtenu par la résistance spécifique élevée. On trouve ainsi des
valves, des ressorts et des bielles.
Le cas des ressorts est typique d’une bonne utilisation des carac-
téristiques uniques du titane : comme son module d’élasticité est
deux fois plus faible que celui de l’acier, il faut deux fois moins de 6. Conclusion
spires ; comme le titane est deux fois moins dense que l’acier, le res-
sort est donc quatre fois plus léger, et il faut deux fois moins de
place pour le loger dans la suspension ; si on ajoute à cela qu’il a Les propriétés du titane et des alliages de titane sont extrême-
une durée de vie quasi illimitée, notamment sur les routes salées, ment variées. Cela est dû au nombre élevé de compositions chimi-
on comprend son rapide développement aux États-Unis. ques et de morphologies de microstructure. Il faut non seulement
En France, l’industrie automobile est extrêmement attentive à ces retenir la résistance à la corrosion, souvent associée à la résistance
applications, mais on ne trouve d’alliages de titane qu’en Formule 1. à l’érosion et au feu, et la biocompatibilité, mais aussi les excellen-
tes propriétés mécaniques (résistance, ductilité, ténacité, fatigue,
fluage...) qui permettent de concevoir des pièces plus fines et légè-
5.7.2 Génie civil res. Les alliages de titane se mettent en œuvre par les procédés clas-
siques de mise en forme et de traitement thermiques. Ils nécessitent
C’est pour ses propriétés de résistance à la corrosion, mais sur- quelques précautions pendant la finition (décapage, usinage, sou-
tout pour sa faculté, par anodisation chimique, à se couvrir d’une dage...). Cet éventail attractif de propriétés explique le développe-
couche d’oxyde extrêmement résistante, pouvant prendre toutes les ment des applications dans les domaines aéronautique, aérospatial
couleurs de l’arc-en-ciel (variation de l’épaisseur de la couche) que et chimique. Cependant, de plus en plus, on en trouve pour des
le titane non allié est utilisé dans le génie civil, en architecture applications courantes, car l’ingénieur devient plus familier avec
notamment. cette classe de matériaux.
Exemple : au Japon, il sert d’élément de toiture (garantie 100 ans) En guise de point final, on pourrait citer le sénateur américain
ou d’ornementation, mais aussi d’enveloppe pour protéger les piles de John Glenn (un des premiers cosmonautes de la NASA et passager
pont prenant appui sur les fonds marins. Il faut noter que le musée de la navette spatiale américaine en octobre 1998) :
Guggenheim, à Bilbao en Espagne, est totalement recouvert de tôles « Peu de matériaux ont autant de potentiel à une dynamique de
en titane. croissance dans les années 1990, et au-delà, que le titane. »
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© Techniques de l’Ingénieur, traité Matériaux métalliques M 557 − 15
P
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Propriétés du titane R
et de ses alliages
E
N
par Yves COMBRES
Ingénieur civil des Mines
Docteur en science et génie des matériaux
S
Ingénieur de recherche à CEZUS
A
Bibliographie
V
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DONACHE (M.J. Jr Ed.) et ASM international. –
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L
U
S