Tableaux des ressources et des emplois
Le tableau entrées-sorties
Le tableau entrées-sorties est une présentation du système de
production mettant en évidence les relations entre les produits et les
branches de l'économie. Il repose sur une décomposition par produits
du compte de biens et services :
Compte de biens et services
Ressources Emplois
Production Consommation intermédiaire
Importations Consommation finale
Impôts sur les produits Formation brute de capital fixe
Moins subventions sur les produits Variation des stocks
Acquisitions moins cession d'objets
de valeur
Exportations
Il se présente sous la forme de trois grands blocs :
• une matrice des ressources ventilant par produits les ressources du
compte de biens et services ;
• une matrice des consommations intermédiaires ventilée par
produits et branches, elle est associée à une matrice ventilant par
branches la valeur ajoutée et la production ;
• une matrice des emplois finals ventilant par produits les emplois
finals du compte de biens et services.
Une branche est un regroupement d'unités élémentaires de
production.
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Dans le système des comptes, deux conceptions des branches sont
définies :
• la branche d'activité qui regroupe les unités d'activité économique
au niveau local exerçant la même activité économique principale ;
une branche d'activité peut avoir des activités secondaires
différentes ;
• la branche homogène qui constitue un regroupement d'unités de
production homogène, c'est-à-dire des unités produisant un seul
produit ; les unités de production homogène ne sont généralement
pas observées directement mais reconstituées à partir de données
statistiques.
Les comptes nationaux français utilisent les branches homogènes si
bien qu'ils ne décomposent pas la production par branches dans la
matrice des ressources. En effet, du fait de la correspondance
biunivoque entre branches homogènes et produits, la ventilation par
produits est suffisante.
Dans les pays qui utilisent les branches d'activité, la production sera
ventilée par branches d'activité et par produits car une même branche
d'activité peut avoir plusieurs produits.
Le choix des nomenclatures
Une difficulté pour l'analyse du système productif est la détermination
du niveau de finesse auquel il est pertinent de travailler. Un niveau trop
fin nécessite de travailler avec des tableaux énormes difficiles à utiliser
et, surtout, les données utilisées risquent d'être trop imprécises car, en
statistique, l'imprécision s'accroît avec le niveau de détail. Un niveau
trop agrégé risque, au contraire, de cacher certains phénomènes en
regroupant des activités trop différentes. Finalement, les comptables
nationaux vont travailler à un niveau qui représente un compromis et
qui dépend des particularités du pays étudié.
L'analyse des relations entre branches
Pour simplifier l'exposé, nous supposerons que les comptables
nationaux ont défini trois branches homogènes : l'agriculture, l'industrie
et les services. Au niveau national, il est intéressant de montrer les
relations entre ces trois branches. Chacune des branches utilise pour sa
consommation intermédiaire des produits provenant des autres
branches. Par exemple, l'agriculture utilise des engrais provenant de
l'industrie et des services comme des services de location ou des
services vétérinaires. L'agriculture utilise elle-même ses propres
produits comme consommation intermédiaire, par exemple les
semences.
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Ces relations peuvent être montrées dans un tableau de synthèse
faisant apparaître pour chaque branche la nature des consommations
intermédiaires. Ce tableau est la matrice des consommations
intermédiaires dont un exemple numérique simple est présenté ci-
dessous :
Dans ce tableau les colonnes correspondent aux branches et les lignes
aux produits. Ainsi, si nous considérons la colonne "Agriculture", 100
représente la consommation intermédiaire de la branche agriculture en
produits de l'agriculture, 200 la consommation intermédiaire de la
branche agriculture en produits de l'industrie, 100 la consommation
intermédiaire de la branche agriculture en produits des services, 400
est le total de la consommation intermédiaire de la branche agriculture.
Si nous considérons la ligne "Industrie", 200 est la consommation
intermédiaire en produits de l'industrie par la branche agriculture, 500
la consommation intermédiaire en produits de l'industrie par la branche
industrie, 300 la consommation intermédiaire en produits de l'industrie
par la branche des services, 1000 le total de la consommation
intermédiaire en produits de l'industrie de l'ensemble de l'économie.
Ce tableau peut être complété par deux autres pour faire apparaître
l'ensemble du compte de biens et services. Ainsi, à gauche nous
pouvons ajouter un tableau montrant les ressources du compte de biens
et services, c'est-à-dire la production, les importations, les impôts
moins les subventions sur les produits. Pour simplifier la présentation
de notre exemple numérique, nous supposerons qu'il n'y a ni impôts ni
subventions sur les produits.
A droite, nous pouvons ajouter un tableau montrant les différents
emplois finals, c'est-à-dire la consommation finale, la formation brute
de capital fixe, les variations de stocks, les acquisitions de biens de
valeur et les exportations. Pour simplifier la présentation nous
négligerons les variations de stocks et les acquisitions de biens de
valeur.
Nous obtenons ainsi un tableau appelé tableau entrées-sorties (TES)
par les comptables nationaux français. Ce tableau est directement tiré
des travaux de l'économiste W. Léontieff qui avait publié en 1939 un
tableau similaire présentant le système de production des Etats-Unis.
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Sous une forme très simplifiée, le tableau entrées-sorties se présente
sous la forme suivante :
Chaque ligne de ce tableau montre les ressources et les emplois de
chaque groupe de produits.
La production se retrouve à la fois dans la première colonne et dans
la dernière ligne, dans la colonne il s'agit de la production par produits
et dans la ligne il s'agit de la production par branches. Dans notre
exemple numérique nous retrouvons les mêmes valeurs parce que nous
avons supposé que les branches sont homogènes, c'est-à-dire que
chaque branche ne produit qu'un seul produit.
Les marges de commerce et de transport
Très souvent, les clients n'achètent pas les biens et les services
directement auprès des producteurs mais passent par l'intermédiaire de
commerçants. Ainsi, le prix payé par le client final diffère-t-il
généralement du prix payé au producteur d'une marge de commerce.
Ceci nous amène à préciser la définition et le calcul de la production des
services du commerce.
Par définition, un commerçant achète des biens pour les revendre
sans les transformer, il diffère en cela des autres producteurs qui
détruisent des biens ou des services (la consommation intermédiaire)
pour en produire d'autres. Le commerçant ne détruit pas les biens qu'il
achète, il se contente de les revendre dans le même état qu'il les a
achetés. Ainsi, les achats de biens par les commerçants ne peuvent pas
être considérés comme correspondant à une consommation
intermédiaire et, par voie de conséquence, la production de services de
commerce ne peut être assimilée au chiffre d'affaires.
La comptabilité nationale définit la production des services du
commerce par la marge réalisée sur les ventes, c'est-à-dire la valeur
des ventes moins leur coût d'acquisition. Le coût d'acquisition est ici le
coût de remplacement, c'est-à-dire le coût d'acquisition des biens
vendus si le commerçant devait les acquérir au moment de la vente.
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Lorsque nous cherchons à établir l'équilibre ressources-emplois d'un
produit particulier, c'est-à-dire le compte de biens et services pour ce
produit particulier, nous devons donc tenir compte de marges de
commerce. Par exemple, si nous considérons un produit comme
l'automobile, la valeur des achats des clients correspond non seulement
à la valeur de la production des constructeurs, mais également à la
valeur des marges de commerce. Un équilibre ressources-emplois se
présente alors sous la forme suivante :
Equilibre ressources-emplois
Ressources Emplois
Production Consommation intermédiaire
Importations Consommation finale
Impôts sur les produits Formation brute de capital fixe
Moins subventions sur les produits Variation des stocks
Marges de commerce Acquisitions moins cessions d'objets
de valeur
Exportations
L'équilibre ressources-emplois correspondant aux services de
commerce est assez particulier puisqu'il y a une production mais pas
d'emplois. La valeur des services de commerce est, en effet, incluse
dans la valeur d'acquisition des autres produits. Aussi, pour assurer
l'équilibre, la production est compensée par une marge négative. Le
tableau entrées-sorties se présentera alors de la manière suivante :
Il est également nécessaire de tenir compte des marges de transport.
Les coûts de transport entre le producteur et l'acquéreur sont un
élément du coût d'acquisition.
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La comptabilité nationale distingue trois cas :
• Les coûts de transport sont inclus dans le prix de base de la
production lorsqu'ils ne sont pas facturés séparément à l'acquéreur.
Ils constituent alors également une consommation intermédiaire du
producteur en services de transport.
• Les coûts de transport sont inclus dans la marge de commerce
lorsqu'ils ne sont pas facturés séparément à l'acquéreur par le
commerçant. Ils constituent alors également une consommation
intermédiaire du commerçant en services de transport.
• Les coûts de transport constituent des marges de transport lorsqu'ils
sont facturés séparément à l'acquéreur.
Les marges de transport doivent, comme les marges de commerce,
être ajoutées à la production dans l'équilibre ressources-emplois d'un
produit. Elles doivent également être traitées de la même manière que
les marges de commerce, c'est-à-dire apparaître négativement dans
l'équilibre ressources-emplois des services de transport. Le tableau
entrées-sorties se présentera alors de la manière suivante :
La correction territoriale
Les notions d'importation et d'exportation correspondent en
comptabilité nationale à des échanges entre résidents et non résidents
et ne font pas référence au passage de la frontière douanière. Ainsi, la
consommation finale des ménages résidents hors du territoire national
correspond à une importation de biens et services, de même, la
consommation finale des ménages non résidents sur le territoire
économique est une exportation. Dans ces deux cas, ce sont non les
produits mais les ménages qui se déplacent.
Cela pose un problème au niveau du tableau entrées-sorties car les
seules statistiques détaillées par produits portant sur le commerce
extérieur sont les statistiques douanières. Or, ces statistiques
n'enregistrent les importations et les exportations qu'à l'occasion du
franchissement de la frontière douanière. Il n'est donc pas possible, du
point de vue statistique, de ventiler par produits la consommation finale
des résidents hors du territoire économique national et celle des non-
résidents sur le territoire économique national.
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Dans ces conditions, les équilibre ressources-emplois par produits du
tableau entrées-sorties n'enregistrent dans les importations et les
exportations que les biens et services ayant franchi les frontières
douanières et la consommation finale qu'ils présentent est celle de
l'ensemble des ménages sur le territoire économique national, que ces
ménages soient ou non résidents.
Une écriture corrective est alors nécessaire pour retrouver la
consommation finale des ménages résidents telle qu'elle apparaît au
niveau du compte des ménages et du tableau économique d'ensemble.
Ceci est fait en introduisant dans le tableau entrées-sorties une ligne
supplémentaire intitulée "correction territoriale".
Les équilibres ressources-emplois par produits du TES correspondent
en fait à l'équilibre suivant :
Importations douanières + production = consommation intermédiaire
+ consommation finale sur le territoire économique + investissement +
exportations douanières
Cette équation signifie simplement que les produits disponibles sur le
territoire économique ont été soit produits sur ce territoire, soit
proviennent d'autres territoires, c'est-à-dire correspondent à des
importations douanières. Ces produits ont été soit utilisés sur le
territoire économique, soit sortis du territoires, c'est-à-dire exportés au
sens des douanes.
La consommation finale sur le territoire économique national est égale
à la somme de la consommation finale des ménages résidents et non-
résidents sur le territoire économique.
Importations sur le Consommation finale
territoire économique Consommation finale des résidents sur le
sur le territoire territoire économique
économique Consommation finale
des non-résidents
Consommation
intermédiaire
Production
Formation brute de
capital fixe
Variation des stocks
Exportations du
territoire économique
Pour retrouver les définitions du tableau économique d'ensemble, il
convient d'ajouter aux importations la consommation finale hors du
territoire économique des ménages résidents et d'ajouter aux
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exportations la consommation finale des ménages non-résidents sur le
territoire économique.
Au niveau de la consommation finale, pour retrouver la consommation
finale des ménages résidents, il faut ajouter à la consommation finale
sur le territoire économique la consommation finale hors du territoire
économique des ménages résidents et déduire la consommation finale
des non-résidents sur le territoire économique.
Ainsi, dans le tableau entrées-sorties, aux différentes lignes
correspondant aux équilibres ressources-emplois par produit, on va
ajouter une ligne qui permettra de retrouver les totaux de la
consommation finale, des exportations et des importations, tels qu'on
peut les trouver dans le tableau économique d'ensemble. Cette ligne
prend le nom de "correction territoriale".
La consommation finale des ménages résidents en dehors du territoire
économique est portée dans la ligne "correction territoriale" en
importations. La consommation sur le territoire économique des non-
résidents est portée dans la ligne "correction territoriale" en
exportations.
L'équilibre de la ligne est assuré en ajoutant le solde, c'est à dire la
différence entre la consommation finale des ménages résidents en
dehors du territoire économique et celle des non-résidents sur le
territoire économique, dans la colonne consommation finale. Ainsi, le
total de la colonne "consommation finale" correspond bien à la
consommation finale des résidents telle qu'elle apparaît dans leurs
comptes. En effet ce total est égal à :
Consommation finale sur le territoire économique
− consommation finale des non résidents sur le territoire économique
+ consommation finale des résidents hors du territoire économique
Puisque la consommation finale sur le territoire économique national
est égale à la somme de la consommation finale des ménages résidents
et non-résidents sur le territoire économique, on constate que la somme
de la colonne est égal à :
Consommation finale des ménages résidents sur le territoire
économique national
+ consommation finale des ménages résidents hors du territoire
économique national
= consommation finale totale des ménages résidents.
Par exemple, si la consommation finale des ménages résidents hors
du territoire économique national est de 20 et la consommation des non
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résidents sur le territoire économique national est de 30, les écritures
dans le tableau entrées-sorties sont les suivantes :
La correction CAF/FAB
La ventilation par produits des importations n'est connue que par les
statistiques douanières, or celles-ci évaluent les importations non à leur
prix à la frontière du pays exportateur (prix FAB) comme le
recommande le système, mais par leur valeur à la frontière nationale,
c'est-à-dire au prix CAF. La différence avec le prix FAB correspond au
coût d'acheminement des biens de la frontière du pays exportateur à la
frontière nationale, c'est-à-dire essentiellement des coûts de transport
et, accessoirement, des frais d'assurance. Dans le TES, les importations
par produits sont donc mesurées CAF.
Une correction, égale aux frais de transport et d'assurance du point
FAB au point CAF, au TES est nécessaire pour que le total des
importations de biens soit bien égal au prix FAB. Une ligne et une
colonne correspondant à cette correction CAF/FAB sont ainsi introduites
dans le TES :
• sur la ligne supplémentaire, la correction CAF/FAB est introduite
négativement dans la colonne des importations pour que le total des
importations de biens soit mesuré au prix FAB ;
• dans la colonne supplémentaire, la correction est également
introduite négativement, dans les lignes correspondant au transport
et à l'assurance. En effet, ces services sont déjà inclus dans la
valeur CAF des biens importés ;
• la correction est inscrite sur la ligne d'ajustement CAF/FAB, à
l'intersection de la colonne CAF/FAB, afin d'annuler le total de la
colonne et celui de la ligne.
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Le modèle de Léontieff
Le tableau entrées-sorties provient essentiellement des tableaux de
l'économiste W. Léontieff. Celui-ci avait analysé l'économie américaine
en la décomposant en branches d'activités comme le fait le tableau
entrées-sorties. Pour simplifier la présentation, nous utiliserons un petit
TES simplifié d'une économie fermée, sans importations ni
exportations.
La notion de "coefficients techniques de production" joue un rôle
fondamental dans le modèle de Léontieff. Ces coefficients sont obtenus
en divisant chaque poste du compte de production détaillé par la valeur
de la production. Ils représentent la part de chaque poste de coûts dans
le total de la production. Par exemple, pour la branche "Agriculture" les
coefficients techniques sont obtenus en divisant les différents postes de
la première colonne par 1000.
Le tableau des coefficients techniques est donc le suivant :
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Le modèle de Léontieff repose sur une hypothèse de constance des
coefficients techniques, c'est-à-dire par exemple, que pour produire 1€
de produits de l'agriculture, il faut toujours consommer 0,1€ de produits
de l'agriculture, 0,2€ de produits de l'industrie et 0,1€ de services. Ceci
s'entend, bien entendu, à prix constants car, l'idée de départ est que
pour produire une unité d'un bien donné il faut toujours les mêmes
quantités de biens intermédiaires. Par exemple, pour produire un pain
il faut toujours la même quantité de farine, de sel, de levure, etc.
Ce qui est vrai pour un bien donné reste approximativement vrai pour
l'ensemble des biens et services produits par une branche donnée, du
moins tant que la structure des productions à l'intérieur de la branche
ne varie pas trop. Dans le cas contraire, la stabilité des coefficients
techniques n'est plus assurée.
Par exemple, si nous considérons comme branche les industries
alimentaires, il est bien évident qu'un arrêt de la production de pain qui
serait compensée, en valeur, par une augmentation de la production de
bière, verrait la consommation intermédiaire de farine chuter
considérablement alors que la production globale de la branche resterait
inchangée. Le coefficient technique associé à la farine baisserait donc
suite à la modification de la structure de production de la branche.
L'hypothèse de constance des coefficients techniques suppose
également une stabilité des techniques de production dans le temps, ce
qui n'est jamais totalement vérifié, mais peut raisonnablement être
accepté dans des études de court et moyen termes.
Exprimée d'une autre manière, l'hypothèse de stabilité des
coefficients techniques signifie tout simplement que si la production
double ou triple, alors les consommations intermédiaires et la valeur
ajoutée doubleront ou tripleront également.
Les modèles de Léontieff peuvent être utilisés dans deux types
d'applications :
• l'étude de l'impact d'une variation de la demande finale d'un produit
sur l'ensemble du système de production ;
• l'étude des effets d'une hausse du prix des produits importés ou de
celui d'un élément de la valeur ajoutée sur l'ensemble des prix.
Pour étudier l'impact d'une augmentation de la demande finale sur le
système de production, supposons, par exemple, que la demande de
produits industriels augmente de 400. Pour la satisfaire l'industrie devra
augmenter sa production de 400, c'est-à-dire de 10%. Sous l'hypothèse
de constance des coefficients techniques cela implique que l'industrie
devra également augmenter ses consommations intermédiaires et sa
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valeur ajoutée de 10%. Le compte de production de l'industrie devient
donc :
Branche Industrie
CI agriculture 330
CI industrie 550
CI services 220
CI produits
importés : 110
Valeur ajoutée 3300
Production 4400
Ainsi, un accroissement de la production se traduit par une
augmentation des consommations intermédiaires des différents
produits, c'est-à-dire par une demande supplémentaire qui doit être,
elle aussi, satisfaite par un accroissement de la production des
branches. Par exemple, la consommation intermédiaire de produits de
l'agriculture passe de 300 à 330 ce qui implique que l'agriculture
augmente de 30 sa production. Celle-ci étant à l'origine de 1000, il doit
y avoir une augmentation de la production de l'agriculture de 3% . Cette
augmentation nécessite une augmentation de 3% des consommations
intermédiaires de cette branche dont le compte de production devient :
Branche agriculture
CI agriculture 103
CI industrie 206
CI services 103
CI produits
importés : 110
Valeur ajoutée 618
Production 1030
Nous voyons que commence un processus où chaque augmentation
de la production induit une augmentation des consommations
intermédiaires, donc de la demande de produits et par suite un nouvel
accroissement de la production. Ainsi, un accroissement de la demande
finale, initialement localisé à une seule branche, va se propager à
l'ensemble des branches. Ce processus est convergent, c'est-à-dire que
les augmentations deviennent de plus en plus petites et que le système
finit par se stabiliser à un certain niveau.
Ce problème peut se résoudre mathématiquement. Supposons que,
finalement, la production de l'agriculture soit multipliée par un
coefficient p1, celle de l'industrie par p2 et celle des services par p3.
Puisque nous avons supposé les coefficients techniques constants,
l'ensemble du compte de production de chacune des branches sera
multipliée respectivement par p1, p2 et p3. La demande finale de
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produits de l'industrie ayant augmenté de 400, elle passe à 4400. Le
TES devient alors :
Le total des trois lignes est égal à la production. Nous obtenons ainsi
les trois équations suivantes :
100.p1 + 300.p2 + 0.p3 + 600 = 1000.p1
200.p1 + 500.p2 + 50.p3 + 3650 = 4000.p2
100.p1 + 200.p2 + 100.p3 + 1600 = 200.p3
Ce qui donne un système linéaire de trois équations à trois inconnues
que l'on peut résoudre facilement, soit en utilisant le calcul matriciel,
soit directement en combinant entre elles les différentes équations ou
bien encore en faisant appel à des méthodes itératives adaptées à
l'usage d'un tableur sur un micro-ordinateur.
Dans notre exemple on trouve les résultats suivants :
p1 = 1,039
p2 = 1,117
p3 =1,014
Ainsi, une augmentation de 10% de la demande de produits
industriels a provoqué une croissance de 3,9% dans l'agriculture, de
11,7% dans l'industrie et de 1,4% dans les services. La croissance de
l'industrie a finalement été supérieure à 10% car il a fallu satisfaire non
seulement directement la demande finale mais également la demande
des autres branches qui ont fourni les consommations intermédiaires
de l'industrie.
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Le T.E.S. final s'écrit :
Dans ce modèle nous avons fait l'hypothèse implicite que la
production s'alignait instantanément sur la demande, ce qui suppose,
en particulier que les capacités de production ne soient pas saturées et
que l'excédent de demande ne soit pas satisfait par un déstockage.
Le deuxième type d'utilisation concerne la mesure de l'impact d'une
augmentation du prix des produits importés ou de celui d'un élément
de la valeur ajoutée sur l'ensemble des prix. Nous traiterons ici le cas
d'une augmentation des salaires, celui d'une augmentation du prix des
produits importés se traitant de manière très similaire.
Reprenons donc notre exemple initial en supposant que la valeur
ajoutée se décompose uniquement en salaires et excédent brut
d'exploitation, les comptes de production et d'exploitation des
différentes branches se présentant ainsi :
Agri. Indus. Services
Agriculture 100 300 0
Industrie 200 500 50
Services 100 200 100
Total 400 1000 150
Salaires 200 1500 1000
EBE 400 1500 850
VA 600 3000 1850
Production 1000 4000 2000
Supposons que les salaires augmentent de 10% et que les entreprises
puissent répercuter intégralement dans leurs prix, c'est-à-dire que leur
excédent brut d'exploitation reste inchangé. Nous supposerons
également que la production de chaque branche ne varie pas en
quantité. Prenons le cas de l'industrie, ses salaires s'élevaient à 1500,
après l'augmentation ceux-ci croissent de 150. L'industrie compensera
son surcoût de 150 en augmentant de 150 la valeur de sa production
qui passera de 4000 à 4150, soit une augmentation de 3,8%.
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L'augmentation des salaires induit donc une première augmentation
des prix de production dans chaque branche, mais cette première
augmentation va se répercuter sur les prix de production de chacune
des autres branches par l'intermédiaire des consommations
intermédiaires qui verront leur prix croître.
Ainsi, l'augmentation de 3,8% du prix des produits de l'industrie se
répercute sur les consommations intermédiaires de chaque branche et
provoque une nouvelle augmentation des prix de production des
branches concernées. Comme dans le modèle précédent, on assiste à
un processus où toute augmentation dans une branche se répercute sur
les autres branches. Là encore ce processus est convergent, c'est à-dire
qu'il finit par se stabiliser après un certain temps, les augmentations de
prix devenant de plus en plus faibles à chaque étape.
Pour résoudre mathématiquement ce modèle nous désignerons par
p1,p2 et p3 les coefficients par lesquels sont multipliés, après
l'augmentation des salaires, les prix de production d'origine de
l'agriculture, de l'industrie et des services. Les salaires ont augmenté
de 10% et passent respectivement à 220, 16500 et 1100. Ils ne
varieront plus dans la suite du processus sous l'hypothèse que
l'augmentation des prix n'a pas de répercussion sur le niveau des
salaires. Les comptes de production et d'exploitation finaux s'écrivent :
Agri. Indus. Services
Agriculture 100.p1 300.p1 0.p1
Industrie 200.p2 500.p2 50.p2
Services 100.p3 200.p3 100.p3
Total 400 1000 150
Salaires 220 1650 1100
EBE 400 1500 850
VA 620 3150 1950
Production 1000.p1 4000.p2 2000.p3
Nous obtenons les trois équations suivantes en écrivant que la
production est égale à la somme des consommations intermédiaires,
des salaires et de l'excédent brut d'exploitation :
100.p1 + 200.p2 + 100.p3 + 220 + 400 = 1000.p1
300.p1 + 500.p2 + 200.p3 + 1650 + 1500 = 4000.p2
0.p1 + 50.p2 + 100.p3 + 1100 + 850 = 2000.p3
Ce système de trois équations à trois inconnues peut se résoudre
simplement.
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Les solutions sont les suivantes :
p1 = 1,039
p2 = 1,0491
p3 = 1,054
Ainsi, une augmentation de 10% des salaires se traduit par une
augmentation de 3,9% du prix des produits agricoles, de 4,9 % des
produits de l'industrie et de 5,4% des services.
Ce modèle est bien entendu très simplifié mais il peut être sophistiqué
en modifiant certaines hypothèses de base. Il peut être très utile pour
mesurer, par exemple, l'impact mécanique d'une augmentation des prix
du pétrole sur les prix intérieurs. Il montre également comment les
hausses des prix se répercutent de branche en branche, mettant en
évidence, là encore, l'interdépendance de toutes les branches de
l'économie nationale.
Auteur : Francis Malherbe
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