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Les Infrastructures Régionales en Afrique de L'ouest: État Des Lieux, Enjeux Et Impact Sur La Zone de Libre-Échange

Le document décrit l'état des infrastructures de transport, énergétiques et de technologies de l'information et de la communication en Afrique de l'Ouest et leur impact sur la zone de libre-échange. Il présente les défis liés au développement des infrastructures et les initiatives entreprises pour renforcer l'intégration régionale.

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Les Infrastructures Régionales en Afrique de L'ouest: État Des Lieux, Enjeux Et Impact Sur La Zone de Libre-Échange

Le document décrit l'état des infrastructures de transport, énergétiques et de technologies de l'information et de la communication en Afrique de l'Ouest et leur impact sur la zone de libre-échange. Il présente les défis liés au développement des infrastructures et les initiatives entreprises pour renforcer l'intégration régionale.

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Les infrastructures régionales en Afrique

de l’Ouest : État des lieux, enjeux et impact


sur la zone de libre-échange
Les infrastructures régionales en Afrique
de l’Ouest : État des lieux, enjeux et
impact sur la zone de libre-échange
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B.P. 3001
Addis-Abeba, Éthiopie
Tél: +251-11- 544-9900
Télécopie: +251-11-551-4416
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Web: www.uneca.org

© 2017 Commission économique pour l’Afrique


Addis-Abeba, Éthiopie

Tous droits réservés


Premier tirage : Septembre 2017

Toute partie du présent ouvrage peut être citée ou reproduite librement. Il est cependant demandé d’en informer la Commission
économique pour l’Afrique et de lui faire parvenir un exemplaire de la publication.

Les appellations employées dans cette publication et la présentation des données qui y figurent n’impliquent de la part de la Commission
économique pour l’Afrique aucune prise de position quant au statut juridique des pays, territoires, villes ou zones, ou de leurs autorités,
ni quant au tracé de leurs frontières ou limites.

Conçu et imprimé à Addis-Abeba par le Groupe de la publication et de l’impression de la CEA, certifié ISO 14001:2004. Imprimé sur du
papier sans chlore.

Photos de couverture: Shutterstock.com


TABLE DES MATIÈRES

REMERCIEMENTS VII

PRÉFACE VIII

SIGLES ET ABRÉVIATIONS X

RÉSUMÉ ANALYTIQUE XII

INTRODUCTION 1
1. Intégration régionale et infrastructures : liens et avantages en Afrique de l’Ouest 1
2. Objectifs, méthodologie et structure du rapport 4

CHAPITRE PREMIER : INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT ET ZONE DE LIBRE-


ÉCHANGE EN AFRIQUE DE L’OUEST 6
1. Les infrastructures routières régionales en Afrique de l’Ouest 6
2. Le secteur ferroviaire et sa situation dans la zone CEDEAO 14
3. Secteur maritime et transport régional en Afrique de l’Ouest 18
4. Secteur aérien et transport régional dans la zone CEDEAO 22
5. Les projets de développement des infrastructures de transport en Afrique de l’Ouest 25
6. Impact des infrastructures de transport sur la zone de libre-échange 30
7. Les défis liés au développement des infrastructures de transport 33
CHAPITRE II. INFRASTRUCTURES ÉNERGÉTIQUES ET ZONE DE LIBRE-ÉCHANGE EN
AFRIQUE DE L’OUEST 35
1. Étroite relation entre énergie et croissance, compétitivité et intégration régionale 35
2. Situation de l’énergie électrique en Afrique de l’Ouest 35
3. Cadre politico-institutionnel et initiatives sous-régionales dans le domaine de l’énergie 40
4. Défis majeurs 46
5. Perspectives régionales et impact sur le commerce sous-régional 47
CHAPITRE III. INFRASTRUCTURES RELATIVES AUX TECHNOLOGIES DE
L’INFORMATION ET DE LA COMMUNICATION ET LA ZONE DE LIBRE-ÉCHANGE
OUEST-AFRICAINE 49
1. État des lieux des TIC en Afrique de l’Ouest 49
2. Téléphonie fixe : des taux de pénétration faibles dus aux difficultés technologiques 51
3. La pénétration rapide de la téléphonie mobile 53
4. Des connexions Internet faibles et des chaînes de valeur pauvres en maillons industriels 55
5. La régulation du secteur des TIC : acteurs et limites 56
6. Quelques contraintes et enjeux des TIC dans la sous-région 58
CHAPITRE IV. AGIR SUR LES CONTRAINTES ET OPPORTUNITÉS GLOBALES DANS LE
SECTEUR DES INFRASTRUCTURES RÉGIONALES POUR CONSOLIDER LA ZONE
DE LIBRE-ÉCHANGE 61
1. L’intégration économique sous-régionale : tremplin pour la construction des infrastructures en
Afrique de l’Ouest 61
2. Caractéristiques économiques communes des infrastructures 61

CONCLUSIONS ET RECOMMENDATIONS 70

RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 74

iii
Tableaux
Tableau 1 : État des tronçons nationaux du réseau routier régional 8

Tableau 2: État des lieux des routes le long des corridors de l’Afrique de l’Ouest 9

Tableau 3 : Principaux corridors de transport pour les échanges internationaux en Afrique subsaharienne 11

Tableau 4: Répartition du réseau ferroviaire en Afrique 15

Tableau 5: Compagnies ferroviaires mises en concession 17

Tableau 6: Comparaison de l’efficacité des ports d’Afrique 19

Tableau 7: État de la mise en concession en Afrique de l’Ouest 20

Tableau 8: Analyse comparée du transport aérien dans la zone CEDEAO et dans les autres zones africaines 23

Tableau 9: Libéralisation du secteur aérien en Afrique suivant les groupements régionaux 24

Tableau 10: Liste des projets du PIDA en Afrique de l’Ouest 26

Tableau 11: Impact des infrastructures de transport routier sur le commerce de la CEDEAO en millions de dollars 32

Tableau 12: Réserves et ressources énergétiques, fossiles et hydroélectriques 37

Tableau 13: Consommation électrique et intensité énergétique de la CEDEAO (2009) 38

Tableau 14: Besoins énergétiques de l’Afrique 2006-2015 39

Tableau 15: Projets en cours d’exécution de l’EEEOA 44

Tableau 16: Estimation des besoins et dépenses en infrastructures de quelques pays d’Afrique de l’Ouest 62

Figure
Figure 1: Répartition régionale du réseau des routes transafricaines 7

Figure 2: Densité comparative du trafic ferroviaire en Afrique 16

Figure 3: Lien entre les coûts des exportations-importations et la compétitivité des infrastructures 31

Figure 4 Total des besoins en dépenses dans l'énergie 2006-2015 (%) 40

Figure 5 : Besoins en dépenses d’exploitation et de maintenance dans l'énergie : 2006-2015 (%) 40

Figure 6: Câbles sous-marins desservant les pays de l’Afrique de l’Ouest 51

Figure 7 : Évolution des abonnements au téléphone fixe par pays 52

Figure 8 : Abonnements au téléphone fixe pour 100 habitants 52

Figure 9: Part des différents pays de la CEDEAO dans les abonnements au téléphone fixe en 2013 53

Figure 10: Parts des abonnements à la téléphonie mobile en Afrique de l'Ouest en 2013 54

Figure 11 : Évolution des abonnements à la téléphonie mobile pour 100 habitants en Afrique de l’Ouest 54

Figure 12: Taux de croissance (%) annuel de l’utilisation d’Internet dans certains pays ouest-africains, 2007-2011 55

iv
Figure 13 : Évolution du parc Internet mobile au Mali (2010-2012) 56

Figure 14 : Part en % des individus utilisant Internet dans les pays de la CEDEAO (2000-2013) 56

Encadré
Encadré 1 : Étude de cas du Niger sur l’application des quotas 12

Encadré 2: Renforcement de la sécurité maritime en Afrique de l’Ouest et du Centre 22

Encadré 3: Le quatrième Forum régional de la régulation de l’électricité en Afrique de l’Ouest : conclusions 42

Encadré 4 : Assemblée des régulateurs des télécommunications de l’Afrique de l’Ouest (ARTAO) : défis 57

v
PRÉFACE
La CEDEAO ambitionne d’accroître progressivement les échanges intra-communautaires pour
atteindre le seuil de 40 % en 2030. De tels approfondissements de l’intégration et l’intensification
des échanges dépendront largement de la capacité de la sous-région de se doter des infrastructures
nécessaires.

L’utilité d’un réseau régional efficient d’infrastructures dans la promotion de marchés régionaux
concurrentiels et efficaces ne fait plus débat en Afrique de l’Ouest. La « Vision 2020 » de la CEDEAO,
dont découle le Programme de développement communautaire, compte parmi ses priorités
stratégiques l’interconnexion des infrastructures de transport, de communication et d’énergie. La
CEDEAO et l’UEMOA disposent, chacune, d’une stratégie et d’un plan d’action visant à combler
les déficits existants en matière d’infrastructures. La Banque africaine de développement (BAD)
reconnaît pour sa part l’importance du renforcement des infrastructures régionales comme priorité
de développement de l’Afrique de l’Ouest.

Malgré des efforts appréciables de la CEDEAO, de l’UEMOA et d’autres acteurs clés visant à promouvoir
les investissements infrastructurels, l’état des lieux des secteurs d’infrastructures régionales et leur
contribution à la zone de libre-échange en Afrique de l’Ouest restent déplorables.

Les corridors ouest-africains demeurent perturbés par des retards liés à une double insuffisance
qualitative et quantitative des infrastructures, une faible harmonisation institutionnelle, des excès
de charges à l’essieu, ainsi que les prélèvements illicites menant à des tarifs de transport et coûts
de transaction élevés. Le réseau ferroviaire, pour l’essentiel datant de l’époque coloniale, est très
faible en densité et en volume transporté, et présente des signes de vieillissement et d’obsolescence
expliquant ses faibles compétitivité et productivité.

Alors que la sous-région dispose d’une bonne douzaine de ports maritimes, ceux-ci demeurent sujets
aux contraintes liées au manque de liaisons routières et ferroviaires intégrées et sont coûteux et
inefficients. Les secteurs aérien et portuaire souffrent d’une absence de hub sous-régional et sont
tous deux confrontés au problème de l’insécurité.

L’énorme potentiel en énergie hydroélectrique de la sous-région n’est que faiblement exploité et les
ressources en énergie éolienne et solaire demeurent largement sous-utilisées dans un contexte où
l’on estime à 175 millions de personnes (sur un total de plus de 300 millions) la population n’ayant
accès à aucun type d’approvisionnement électrique.

Dans le cadre de la révolution des nouvelles technologies de l’information et des communications


(NTIC), d’importants investissements privés ont été réalisés dans la construction de nouveaux
câbles sous-marins pour baisser les coûts de la connexion Internet, mais dans de nombreux pays,
le développement des services d’accès à Internet est encore entravé en matière de connectivité
terrestre entre les câbles sous-marins, les points d’échange Internet (IXP) et l’infrastructure d’accès
du « dernier kilomètre » (câblée ou sans fil). La sous-région présente des taux faibles de pénétration
de la téléphonie fixe, contrairement à la téléphonie mobile, qui connaît une croissance des plus
dynamiques comparativement aux autres régions du monde.

Alors que des progrès ont été réalisés dans la libéralisation et la privatisation du secteur des
télécommunications durant les deux décennies, l’essentiel des enjeux du secteur, que ceux du
transport et de l’énergie partagent d’ailleurs, tourne autour du renforcement de la régulation vers une
prise en compte des concepts de transparence, d’indépendance, de protection du consommateur et
de cybersécurité.

Il est clair que l`intégration régionale pourrait jouer le rôle de tremplin au développement des
infrastructures, étant donné la double contrainte des prix élevés des biens d’investissement et des
seuils de rentabilité difficilement atteignables pour des pays pris individuellement. L’intégration offre
une opportunité certaine pour la mise en œuvre du Programme de développement des infrastructures
en Afrique (PIDA), cadre stratégique de développement des infrastructures dont les ambitions de
combler le déficit infrastructurel en Afrique de l’Ouest sont pénalisées par de lourdes difficultés de
financement.

Pour surmonter ces difficultés de financement, il faut une forte mobilisation des ressources intérieures
et une participation active du secteur privé, aussi bien étranger que local, la promotion de diverses
formes de partenariats public-privé , la canalisation de l’épargne des migrants et la mobilisation
des investisseurs institutionnels en faveur des infrastructures. Les financements innovants devront
en outre s’appuyer sur une solide intermédiation financière nationale et sous-régionale pour être
opérationnels.

Il s’avère ainsi qu’une approche globale et intégrée est nécessaire pour le développement des
infrastructures régionales et l’optimisation de leur contribution à la zone de libre-échange. Une telle
vision exige d’aller bien au-delà de la disponibilité d’infrastructures matérielles (hard infrastructure)
supplémentaires, pour renforcer la dimension immatérielle (soft) de celles-ci en mettant l’accent sur la
qualité et la gestion des services y afférents, ainsi que la facilitation du commerce avec la promotion
des pratiques de mutualisation, d’interconnexion et de régulation des investissements.

Les politiques de développement des ressources humaines et la consolidation des systèmes


d’information en appui aux infrastructures devront impérativement faire partie de ces efforts intégrés
dont la sous-région a besoin au niveau national, sous-régional et régional.

J’espère que le présent rapport contribuera à promouvoir cette vision.

Dimitri Sanga, Directeur du Bureau sous-régional de la CEA en Afrique de l’Ouest

VII
SIGLES ET ABRÉVIATIONS
ACP D’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique
AFD Agence française de développement
AGAO Autorité du gazoduc de l’Afrique de l’Ouest

AGPAOC Association de gestion des ports de l’Afrique de l’Ouest et du Centre


Autorité de régulation régionale du secteur de l’électricité des pays de la
ARREC
CEDEAO
ARTAO Association des régulateurs des télécommunications d’Afrique de l’Ouest

BAD Banque africaine de développement

BEI Banque européenne d’investissement

BIDC Banque d’investissement et de développement de la CEDEAO

BSR-AO Bureau sous-régional en Afrique de l’Ouest

CAE Communauté d’Afrique de l’Est

CEA Commission économique pour l’Afrique

CEAC Conférence européenne de l’aviation civile

CEB Communauté électrique du Bénin

CEDEAO Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest

CEEAC Communauté économique des États de l’Afrique centrale

CEET Compagnie d’énergie électrique du Togo


Centre régional pour les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique
CEREEC
dans l’espace CEDEAO
CFA Communauté financière africaine

CILSS Comité permanent inter-États de lutte contre la sécheresse dans le Sahel

CNUCED Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement


Conférence des opérateurs et fournisseurs de services de
COFTEL
télécommunication des États membres de l’UEMOA
COMELEC Comité maghrébin de l’électricité

COMESA Marché commun de l’Afrique de l’Est et de l’Afrique australe

CRETEL Comité des régulateurs des télécommunications

ECG Compagnie d’électricité du Ghana

EEEOA Système d’échanges d’énergie électrique ouest-africain

EVP Équivalent vingt pieds

FMI Fonds monétaire international

IDA Association internationale de développement

VIII
IRED Initiative régionale sur l’énergie durable

NEPAD Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique

OACI Organisation de l’aviation civile internationale

OCDE Organisation de coopération et de développement économiques

OMAOC Organisation maritime de l’Afrique de l’Ouest et du Centre

OMI Organisation maritime internationale

ONUDI Organisation des Nations Unies pour le développement industriel

OPA Observatoire des pratiques anormales


Programme d’actions communautaires des infrastructures et du transport
PACITR
routiers
PAM Programme alimentaire mondial

PIB Produit intérieur brut

PIDA Programme de développement des infrastructures en Afrique

PNUD Programme des Nations Unies pour le développement

SADC Communauté de développement de l’Afrique australe

SFI Société financière internationale

TIC Technologies de l’information et des communications

TRIE Convention sur le transit routier inter-États des marchandises

UE Union européenne

UEMOA Union économique et monétaire ouest-africaine

UIT Union internationale des télécommunications

UMA Union du Maghreb arabe

UNESCO Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture

USAID Agence des États-Unis pour le développement international

ZMAO Zone monétaire de l’Afrique de l’Ouest

IX
RÉSUMÉ ANALYTIQUE
La CEDEAO fait de plus en plus preuve de sa volonté de tirer profit des possibilités offertes par
l’intégration régionale. Les économies de l’Afrique de l’Ouest sont résolument engagées dans une
régionalisation dont les gains escomptés en termes de libre circulation des biens et des personnes,
permettant une meilleure adaptation des investissements et une allocation de ressources plus
efficace, sont établis.

Il est reconnu à la zone de libre-échange ouest-africaine la capacité de propulser le développement


industriel et renforcer les flux commerciaux entre les pays, ce qui se traduira par l’augmentation des
revenus pour les populations, la consolidation de la croissance et la diversification économique.

Afin de mieux tirer parti de l’intégration régionale, la CEDEAO doit non seulement accélérer
l’élimination des barrières tarifaires et non tarifaires mais aussi accompagner le processus de mesures
visant à réduire les coûts de transaction et ainsi améliorer le climat des affaires. Parmi ces mesures,
les efforts visant à développer les infrastructures régionales demeurent cruciaux.

En effet, une partie importante de la population de la CEDEAO n’a pas accès aux infrastructures de
qualité et les besoins en investissements infrastructurels sont particulièrement criants dans la sous-
région et concernent non seulement le secteur des transports, mais aussi ceux de l’énergie et des
nouvelles technologies des communications.

L’Afrique de l’Ouest souffre d’un important retard infrastructurel. Ses réseaux nationaux
d’infrastructures manquent d’interconnexions régionales, les coûts des services demeurent élevés
et les défaillances dans la fourniture électrique constituent le plus gros défi à relever pour le
développement de la majorité des pays. L’important potentiel énergétique diversifié demeure, de
manière générale, inexploité, en dépit d’un certain nombre d’initiatives prises à ce jour. Le Système
d’échanges d’énergie électrique ouest-africain (EEEOA) présente des faibles quantités d’électricité
échangé entre pays comparativement à la tendance en Afrique australe, par exemple.

Les corridors de commerce sous-régional, qui doivent faciliter les échanges avec les pays enclavés et
permettre ainsi leur insertion dans le commerce international, restent sujets aux retards de livraison,
en raison des goulots d’étranglement de transport, d’une faible harmonisation des politiques ainsi
que d’une multitude de pratiques illicites et tracasseries incessantes.

Le réseau ferroviaire en Afrique de l’Ouest a connu un déclin et un relâchement des investissements.


Le sous-secteur souffre de la mauvaise gouvernance des entreprises, dont les productivités du travail
et du capital demeurent faibles. La majorité des réseaux ferroviaires sont indépendants les uns des
autres dans un contexte de faible harmonisation de la qualité des infrastructures.

Les pays de la CEDEAO comptent de nombreux ports mais aucun d’eux ne joue véritablement le
rôle de hub maritime. La sous-région manque de liaisons routières et ferroviaires intégrées et son
commerce conteneurisé promu par les ports, bien qu’en croissance, n’est souvent que superficiel.
Les infrastructures portuaires sont moins compétitives et demeurent confrontées à des questions de
sécurité des routes maritimes.

La problématique de la sécurité se pose également avec acuité dans le secteur du transport aérien
sous-régional, étant donné le pourcentage croissant de la flotte classée comme vieillissante. Les
compagnies aériennes nationales ont un marché trop étroit pour prétendre être de véritables hubs.

X
Elles concentrent des cas récurrents de problèmes managériaux, doublés d’une faible rentabilité, et
le trafic aérien est, par conséquent, dominé par quelques firmes étrangères.

L’Afrique de l’Ouest a récemment enregistré des investissements appréciables dans les réseaux de
fibres optiques pour répondre au grand nombre d’abonnés de la téléphonie mobile et un volume
croissant d’utilisateurs d’Internet à large bande, mais les résultats attendus en termes d’amélioration
de la qualité et de l’accès aux services à moindre prix tardent à se faire sentir.

Les infrastructures de télécommunications de l’Afrique de l’Ouest ont connu une croissance rapide
depuis la fin des années 1990. Portées essentiellement par des réseaux de téléphonie mobile en
très forte croissance et dominées par quelques acteurs étrangers, elles présentent néanmoins des
disparités géographiques énormes, les pays côtiers étant favorisés par l’atterrissement des câbles
sous-marins.

Dans le domaine des nouvelles technologies de l’information, il est nécessaire d’accélérer le passage
d’une réglementation verticale vers des cadres réglementaires axés sur l’utilisateur, visant à offrir un
accès au haut débit à faible coût et attachés à la protection du consommateur, au respect de la vie
privée et à la cybersécurité.

Le Programme de développement des infrastructures en Afrique (PIDA) fournit un cadre stratégique


de développement des infrastructures dans la région. Il offre une opportunité certaine pour combler
le déficit infrastructurel et renforcer l`interconnexion en Afrique de l’Ouest, et constitue un appui
précieux à la « Vision 2020 » de la CEDEAO, dont découle le Programme communautaire de
développement, qui compte parmi ses priorités stratégiques l’interconnexion des infrastructures de
transport, de communication et d’énergie.

La sous-région devra renforcer la mise en œuvre du PIDA en levant les contraintes financières pesant
sur ses projets et programmes. Une telle dynamique passe par l’identification et la mobilisation des
mécanismes innovants de financement, en donnant la priorité aux ressources intérieures, au niveau
national et sous-régional.

Un dispositif de financement adapté devra être fondé sur la promotion de la participation du secteur
privé, aussi bien étranger que local, les partenariats public-privé, ainsi que le développement des
autres formes innovantes de mobilisation des ressources, dont les émissions d’emprunts obligataires
sur le marché financier régional et international, la mobilisation des fonds d’investissement, la
canalisation de l’épargne des migrants et le recours aux banques de développement et investisseurs
institutionnels.

Une meilleure mobilisation des ressources intérieures pourra passer par une bonne performance
fiscale et l’amélioration de la qualité de la dépense publique tout en limitant la fuite illicite des
capitaux. Les efforts visant à tirer parti des sources extérieures de financement devront tenir compte
des exigences en matière de viabilité de la dette des pays et consolider les efforts de diversification
des sources de financement des infrastructures.

Cette ambition nécessite l’amélioration du cadre institutionnel de chaque État grâce à une législation
claire, respectant le droit des affaires et assurant la transparence des marchés publics, une meilleure
gestion macroéconomique ainsi que la maîtrise des troubles et conflits.

La poursuite des politiques de libéralisation et d’harmonisation des réglementations demeure


capitale pour accroître les investissements et améliorer la compétitivité du secteur. La coordination
et l’harmonisation des lois dans l’ensemble de la sous-région est essentielle si l’on veut que les

XI
politiques, la législation et les pratiques résultant de la libéralisation dans chaque pays ne freinent pas
le développement de marchés régionaux compétitifs. Le développement des infrastructures devra
aller au-delà de la problématique du déficit des infrastructures matérielles et inclure les questions
d’infrastructures immatérielles, liées à la qualité des services et de la gestion.

Il faudra renforcer les interconnexions dans la sous-région et redoubler les efforts de mutualisation
des infrastructures afin de réduire les coûts des services au consommateur et faire face aux disparités
géographiques entre pays côtiers et non côtiers et zones urbaines et rurales.

Une approche plus globale et intégrée du renforcement des infrastructures régionales et la


consolidation de leur contribution à la zone de libre-échange en Afrique de l’Ouest s’imposent.
Le développement des infrastructures régionales et l’optimisation de leur contribution au projet
intégrateur ouest-africain devront être soutenus par le développement d’un capital humain capable
d’assurer une gestion efficace des projets et programmes et par le renforcement de la qualité et de la
quantité des données sur le secteur pour éclairer l’élaboration, la mise en œuvre et le suivi-évaluation
des projets et programmes nationaux et régionaux.

XII
XIII
XIV
INTRODUCTION
1. Intégration régionale et infrastructures : liens et avantages en
Afrique de l’Ouest

1.1 L’intégration régionale et ses avantages pour l’Afrique de l’Ouest

L’Afrique connaît une redynamisation des organisations d’intégration depuis les années 1990. Le
continent, qui a, entre-temps, retrouvé ses perspectives de croissance, renforce ses communautés
économiques régionales, dans un contexte de ralentissement de l’activité économique dans les pays
développés, notamment en Europe.

Le continent fait preuve de plus en plus de volonté de tirer profit des possibilités offertes par
l’intégration régionale dans un contexte où la mondialisation a mis en évidence l’importance de la
dimension économique des pays pour leur développement, et alors que l’instabilité économique
mondiale a renforcé la vulnérabilité économique des petites économies, plus exposées que les autres
aux chocs externes.

Les économies africaines, en particulier celles de l’Afrique de l’Ouest1, sont de petite dimension. Elles
pourraient bien tirer profit d’une intégration régionale, porteuse des gains escomptés d’un marché
élargi au sein duquel une circulation libre et sans entrave des biens et services conduit à une meilleure
adaptation des investissements et une allocation des ressources plus efficace.

Alors que les petites économies, souvent peu peuplées, peinent à être compétitives au niveau mondial
et à développer des industries et des infrastructures qui permettraient d’améliorer la productivité
(PNUD, 2011), les avantages les plus importants de l’intégration régionale se trouvent essentiellement
dans les gains attendus d’un marché élargi.

La poursuite de l’intégration économique régionale pourrait pallier les désavantages de l’enclavement


et de la fragmentation qui limitent la taille des marchés et empêchent de nombreux pays de bénéficier
d’économies d’échelle.

Il est reconnu à la zone de libre-échange la capacité de développer les flux commerciaux entre les pays,
ce qui se traduira par des revenus plus élevés pour les populations. Elle présente le potentiel d’élargir
les possibilités pour les exportateurs en réduisant les obstacles au commerce et à l’investissement, et
de stimuler le commerce intra-régional par la création d’un marché plus vaste.

En plus de l’élargissement des marchés et de la réduction de la vulnérabilité associées à l’intégration


régionale, celle-ci est porteuse de gains substantiels de croissance et de compétitivité. Ces gains
potentiels sont, selon les estimations, compris entre 1,5 et 2 points de pourcentage de croissance
annuelle du produit par tête (Guillaumont et al., 2012).

L’intégration pourrait jouer un rôle capital dans le développement industriel de l’Afrique de l’Ouest et
changer sa structure actuelle, marquée par la spécialisation dans les produits de base.

1 Les pays de l’Afrique de l’Ouest sont regroupés au sein de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest et ont
constitué une zone de libre-échange), dont les membres sont le Bénin, le Burkina Faso, Cabo Verde, la Côte d’Ivoire, la Gambie, le Ghana,
la Guinée, la Guinée-Bissau, le Libéria, le Mali, le Niger, le Sénégal, la Sierra Leone et le Togo. Leur domaine d’intégration porte sur la libre
circulation des biens, services, investissements et personnes, avec comme objectif d’atteindre une union économique intégrale à long
terme.

1
Les accords régionaux d’intégration, du fait de l’envergure des marchés, de la taille accrue des réserves
de main-d’œuvre et de la diversification des bases de ressources et de production qu’ils induisent,
créent un environnement plus propice à la diversification économique et aux complémentarités
(PNUD, 2011). En éliminant les goulots d’étranglement et en accélérant son industrialisation, l’Afrique
de l’Ouest pourrait renforcer ses échanges et s’ancrer plus solidement dans les chaînes de valeur
mondiales (BAD, OCDE et PNUD, 2014).

Les autres gains de l’intégration régionale incluent notamment la capacité d’améliorer le niveau
du développement financier, de renforcer la mobilisation des recettes publiques, d’intensifier et
de diversifier le commerce intra et extra-régional, de développer les infrastructures, de stimuler
l’investissement privé et d’améliorer la gouvernance, tout en renforçant le développement humain de
manière générale.

L’intégration régionale est susceptible d’améliorer l’efficacité économique par suite des pressions
concurrentielles auxquelles elle expose les entreprises rivales au sein de la communauté et de
renforcer la compétitivité économique, contrairement aux petits espaces parsemés de marchés
comportant des monopoles et nœuds oligopolistiques.

L’intégration régionale représente enfin une plate-forme idéale pour le dialogue, le règlement des
conflits et la réalisation de la paix et de la sécurité.

1.2 Le renforcement des avantages de l’intégration régionale et le rôle des


infrastructures

Pour mieux tirer parti de l’intégration régionale, les États membres doivent non seulement accélérer
l’élimination des barrières tarifaires et non tarifaires, mais aussi accompagner le processus de mesures
visant à réduire les coûts de transaction et améliorer ainsi le climat des affaires. Parmi ces mesures,
les efforts régionaux visant à développer les infrastructures jouent un rôle clé pour une intégration
régionale réussie.

Pour l’Union africaine, le commerce intra-africain est faible en partie parce que les aspects
fondamentaux de la logistique commerciale, tels que les infrastructures (transports, énergie, TIC,
etc.) sont compromis. Les contraintes telles que les infrastructures médiocres ou l’absence complète
d’infrastructures rendent les échanges commerciaux physiquement difficiles, voire impossibles,
indépendamment du régime commercial (Union africaine, 2012).

Les besoins en investissements dans les infrastructures sont particulièrement criants en Afrique.
Ils concernent non seulement le secteur des transports, mais aussi ceux de l’énergie et des
communications.

Le développement du secteur des infrastructures est l’un des principaux défis de l’Afrique de l’Ouest.
Une partie importante de la population de la CEDEAO n’a pas accès aux infrastructures de base, ce
qui a des incidences sur les conditions de vie et le commerce intra-régional.

Les infrastructures constituent un intrant à la production des biens et services et participent


activement à la consolidation de la compétitivité. Elles assurent l’accès aux ressources clés que sont
les savoirs et la technologie, réduisent les barrières à la libre circulation des personnes et des biens et
améliorent l’accès aux marchés des biens et services. Les infrastructures de transport accompagnent
le développement des échanges transfrontaliers et de l’investissement. Une « mise en réseau » des
économies par les infrastructures et les institutions tend à en faire un espace économique unifié.

2
Les infrastructures régionales réduisent sensiblement le coût de certains facteurs de production,
favorisent le développement des échanges intracommunautaires et donnent aux économies un
meilleur accès aux marchés sous-régionaux, régionaux et mondiaux.

Les investissements dans les infrastructures sont indispensables à l’amélioration de la compétitivité


dans la sous-région. Cela explique pourquoi l’Agenda 2063 de l’Union africaine souligne la nécessité
de disposer d’infrastructures de classe mondiale pour le développement du continent (Union africaine,
2014 ; PNUD, 2011).

1.3 Renforcer les échanges intra-CEDEAO : le rôle des infrastructures régionales

Il est admis que les échanges intra-CEDEAO sont des leviers à même de rendre les industries de la
sous-région plus compétitives, en permettant des économies d’échelle dans une zone caractérisée
par un grand nombre de très petits marchés. Les échanges intra-communautaires peuvent renforcer
les chaînes de valeur et faciliter le transfert de technologie et de connaissances grâce à des effets
d’entraînement (CEA, 2013).

La CEDEAO ambitionne d’accroître progressivement les échanges intra-communautaires en Afrique de


l’Ouest, pour qu’ils passent de moins de 12 % à 40 % en 2030 (CEDEAO, 2012). L’approfondissement
de l’intégration et l’intensification des échanges intra-régionaux dépendent largement de la capacité
de la sous-région de se doter des infrastructures nécessaires pour réduire le coût des affaires et
accroître la compétitivité.

La Banque mondiale et ses partenaires ont dressé un diagnostic des infrastructures nationales en
Afrique (AICD), en 2009, en se basant sur 24 pays africains dont 5 font partie de l’UEMOA, à savoir le
Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Niger et le Sénégal. Les conclusions montrent que la région
souffre d’un important retard infrastructurel. Les réseaux nationaux manquent d’interconnexions
régionales et le coût des services se révèle deux fois plus élevé qu’ailleurs du fait de l’absence
d’économies d’échelle, de l’insuffisance de concurrence, notamment dans le transport, où subsistent
des marges bénéficiaires excessives. Les défaillances dans la fourniture de l’électricité sont désignées
comme le plus gros défi à relever, les pays enclavés étant moins bien lotis que les pays côtiers
(Guillaumont et al., 2012).

Les prix payés par les consommateurs ouest-africains pour les services d’infrastructure sont
exceptionnellement élevés par rapport aux normes mondiales. Les tarifs pratiqués en Afrique et
en Afrique de l’Ouest pour l’énergie, l’eau, le transport routier, la téléphonie mobile ou les services
Internet sont plusieurs fois supérieurs à ceux en vigueur dans les autres parties du monde en
développement. Il y a deux explications à cela. Premièrement, le coût de fourniture des services
d’infrastructure est réellement plus élevé que partout ailleurs en raison de la petite échelle de la
production, du recours à des technologies sous-optimales, ou de la gestion inefficace des ressources.
Deuxièmement, les prix reflètent des marges bénéficiaires très élevées en raison du manque de
concurrence dans la prestation des services ainsi que d’une réglementation des prix inappropriée. Les
deux facteurs peuvent évidemment intervenir en même temps (Briceño-G., Smits et Foster, 2008).

L’Afrique de l’Ouest, dont les pays présentent des marchés de petite dimension et très fragmentés,
reconnaît le rôle stratégique d’un réseau régional d’infrastructures (transport, énergie et
télécommunications) dans la promotion de marchés régionaux concurrentiels et efficaces. La « Vision
2020 » de la CEDEAO, dont découle le Programme de développement communautaire, compte
parmi ses priorités stratégiques l’interconnexion des infrastructures de transport, de communication

3
et d’énergie. La Banque africaine de développement reconnaît aussi l’importance du renforcement
des infrastructures régionales comme priorité de développement pour l’Afrique de l’Ouest.

Un meilleur déploiement des infrastructures régionales pourra aussi améliorer la répartition des
bénéfices de l’intégration régionale et du commerce intra-régional entre les pays de la CEDEAO et
réduire la forte polarisation des échanges en Afrique de l’Ouest, où trois pays (Nigéria, Côte d’Ivoire
et Sénégal) représentent à eux seuls près de 90 % des exportations intra-régionales et près de 50 %
des importations intra-régionales (CNUCED, 2009).

C’est dans ce contexte que le BSR-AO de la CEA a envisagé d’organiser une réunion ad-hoc d’experts
sur le thème : « Les infrastructures d’intégration et leur impact sur la zone de libre-échange sous-
régionale en Afrique de l’Ouest ». Pour faciliter les discussions, le BSR-AO a préparé le présent
rapport qui servira de base aux discussions pendant la réunion.

2. Objectifs, méthodologie et structure du rapport

L’objectif principal du rapport est de présenter l’état des lieux des infrastructures d’intégration en
Afrique de l’Ouest et d’évaluer leur incidence sur l’approfondissement de l’intégration régionale, et
plus précisément sur le commerce intra-régional. En particulier, le rapport :

• Présente l’état des lieux des infrastructures d’intégration, en particulier dans les secteurs
du transport, de l’énergie, des technologies de l’information et des communications (TIC) en
identifiant les caractéristiques, défis et contraintes liés à leurs offres et demandes ;

• Évalue le déficit infrastructurel sous-régional et examine son effet sur le niveau du commerce
intra-régional et l’intégration régionale au moyen des concepts clés des coûts de transaction, de
la compétitivité et des barrières au commerce ;

• Examine les facteurs, enjeux et contraintes liés à l’optimisation de la contribution des infrastructures
régionales à l’intégration sous-régionale et au développement des pays de la CEDEAO dans le
contexte de la zone de libre-échange sous-régionale ;

• Présente le cadre politique, institutionnel et réglementaire de développement des infrastructures


d’intégration aux niveaux national et sous-régional, en se penchant en détail sur ses forces,
faiblesses et opportunités eu égard aux impératifs de l’intégration régionale ;

• Propose des recommandations pertinentes à l’endroit des décideurs et autres parties prenantes
pour la consolidation des infrastructures sous-régionales et l’optimisation de leur contribution au
processus d’intégration régionale en Afrique de l’Ouest.

Du point de vue méthodologique, l’étude se fonde sur une revue détaillée de la littérature sur les
infrastructures structurantes et la zone de libre-échange ouest-africaine et comporte une évaluation
quantitative et qualitative de l’état des lieux des infrastructures régionales, avec comme cas spécifiques
les secteurs du transport, de l’énergie et des TIC.

Elle porte sur une analyse des déficits infrastructurels, un audit du cadre réglementaire et stratégique
de chaque sous-secteur ainsi que l’identification des contraintes et enjeux spécifiques à chacun d’eux.
Les auteurs formulent des recommandations pour répondre aux enjeux et contraintes ainsi recensés.

4
Le présent rapport, dont l’ambition est de faire un état des lieux des infrastructures d’intégration en
Afrique de l’Ouest et d’évaluer leur incidence sur la zone de libre-échange sous-régionale, comporte
quatre chapitres établissant les liens clairs entre la consolidation des bénéfices de l’intégration
régionale et le développement des infrastructures.

Les trois premiers chapitres portent sur des analyses situationnelles des infrastructures dans les
secteurs particuliers des transports, de l’énergie et des TIC, en se focalisant sur les aspects qualitatifs
et quantitatifs, ainsi que sur les principaux défis propres à chaque secteur. Ces chapitres abordent
aussi la question de l’impact des infrastructures de chacun des secteurs sur la zone de libre-échange
en Afrique de l’Ouest après avoir passé en revue quelques initiatives clés des acteurs majeurs des
secteurs.

Le quatrième chapitre couvre, quant à lui, les contraintes et opportunités transversales aux différents
secteurs des infrastructures régionales et identifie les leviers de la consolidation et de l’optimisation
de leur contribution à la zone de libre-échange. Enfin, le rapport se termine par des conclusions
et recommandations orientées vers des actions susceptibles de renforcer le développement des
infrastructures régionales pour une intégration dynamique en Afrique de l’Ouest.

5
CHAPITRE PREMIER : INFRASTRUCTURES
DE TRANSPORT ET ZONE DE LIBRE-
ÉCHANGE EN AFRIQUE DE L’OUEST
Les infrastructures de transport jouent un rôle essentiel dans la compétitivité des produits et
l’élargissement des marchés à travers le coût de service de transport, l’accessibilité des marchés et les
délais de livraison des biens. Des infrastructures de transport bien intégrées et en bon état facilitent
les transactions commerciales au sein d’une zone donnée.

Le présent chapitre vise à déterminer comment les infrastructures de transport influent sur la zone
de libre-échange en Afrique de l’Ouest. Il commence par un état des lieux des infrastructures de
transport. Ensuite, les projets mis en place dans la sous-région pour développer les infrastructures
de transport sont passés en revue. Par la suite, le rapport évalue l’impact des infrastructures de
transport sur la zone de libre-échange et met en évidence les principaux obstacles qui entravent le
développement des infrastructures.

1. Les infrastructures routières régionales en Afrique de l’Ouest


1.1 État des lieux des infrastructures routières régionales dans la CEDEAO

En raison de leur impact sur l’économie, le commerce, les capacités de production et le développement
social, le développement et la réhabilitation des infrastructures de transport terrestre constituent
une des priorités régionales de la CEDEAO. L’UEMOA et la CEDEAO disposent, chacune, d’une
stratégie et d’un plan d’action pour les infrastructures routières et de transport. Les deux partagent
un programme interétatique2 ambitieux pour améliorer le réseau routier et réduire les coûts de
transport.

Le réseau routier de l’Afrique de l’Ouest date de l’époque coloniale et a considérablement évolué


depuis lors. Il est largement inférieur à celui de l’Afrique australe. En 2000, l’Afrique de l’Ouest
comptait un réseau de 409 377 km contre 801 751 km pour l’Afrique australe. En 2006, les chiffres
étaient de 434 910 km pour l’Afrique de l’Ouest contre 853 676 km pour l’Afrique australe. On note
toutefois une extension du réseau routier de 6,2 %. La densité des routes bitumées de la CEDEAO
est plus de deux fois inférieure à celle de la Communauté de développement de l’Afrique australe
(SADC) (38 pour la CEDEAO contre 92 pour la SADC). Cette densité s’élève à 284 km dans les pays
à revenu intermédiaire.

La route demeure néanmoins un outil intégrateur par excellence pour la sous-région. Dans l’ensemble
de l’espace UEMOA, 95 % du transport intérieur est assuré par la route. Par ailleurs, outre la voie
aérienne, la quasi-totalité des pays de cet espace ne sont liés que par la route, qui est vitale pour la
promotion du commerce régional et l’accès aux zones rurales.

Les années 1970 ont vu l’émergence de la notion de réseau des routes transafricaines. Celui-ci
se définit comme un réseau de routes de bonne qualité praticables en toutes saisons, destiné à
fournir des liaisons directes entre toutes les capitales africaines et les principales zones de production
économique en vue de promouvoir l’intégration des populations et des économies africaines. Leur

2 Il s’agit du Programme régional de facilitation du transport et du transit routiers de l’Afrique de l’Ouest.

6
mise en service, selon certaines estimations, pourrait permettre au commerce intra-africain de tripler
chaque année et de passer de 10 à 30 milliards de dollars (CEA et al., 2010).

L’Afrique compte à ce jour neuf réseaux transafricains : Route transafricaine 1 : Le Caire-Dakar ; Route
transafricaine 2 : Alger-Lagos (route trans-saharienne) ; Route transafricaine 3 : Tripoli-Windhoek-Le
Cap ; Route transafricaine 4 : Le Caire-Gaborone-Le Cap ; Route transafricaine 5 : Dakar-N’Djamena
(route trans-sahélienne) ; Route transafricaine 6 : N’Djamena-Djibouti ; Route transafricaine 7 : route
trans-côtière Dakar-Lagos ; Route transafricaine 8 : Lagos-Mombassa ; Route transafricaine 9 : Beira-
Lobito.

Le développement et l’entretien des routes transafricaines sont confiés aux différentes communautés
économiques régionales qui sont responsables des tronçons dans leurs régions respectives. En Afrique
de l’Ouest, la CEDEAO pilote le développement et l’entretien des routes transafricaines 5 et 7.

L’Afrique de l’Ouest possède un réseau routier relativement bien connecté grâce aux routes
transafricaines. Elle affiche le deuxième plus faible niveau de tronçons manquants (portions non
bitumées) après l’Afrique du Nord.

Figure 1: Répartition régionale du réseau des routes transafricaines

14 000
12 000
10 000
8 000
6 000
4 000
2 000
0
Afrique du Nord Afrique de l’Est Afrique australe Afrique centrale Afrique de l’Oues

Réseau total (Km) Tronçons bitumés(Km)

Source : BSR-AO à partir des données de CEA et al., 2010.

En Afrique de l’Ouest, 73 % du réseau routier régional est en bon état (bon et acceptable) et 92,5 %
des routes sont bitumées. Cette performance régionale s’explique en partie par les efforts consentis
par les États pour l’entretien des portions de routes à l’intérieur de leur territoire respectif. Une
analyse approfondie des portions nationales de la route régionale révèle que la plupart des pays
entretiennent leurs portions et les maintiennent dans un état allant de « bon » à « acceptable » à
l’exception des pays côtiers. En effet, pour la Côte d’Ivoire, le Sénégal, le Togo, la Guinée et le Bénin,
30 à 60 % environ des routes sont en mauvais état.

Pour Ranganathan et Foster (2011), cette mauvaise performance des pays côtiers pourrait s’expliquer
par un problème de financement ou par la faiblesse des projets régionaux dans leurs plans nationaux.
En analysant les portions de routes bitumées nationales, il ressort que les pays accusant un retard
considérable sont la Gambie et les pays sortant de conflits, à savoir la Guinée et la Sierra Leone, avec
chacun un pourcentage respectif de routes non bitumées de 34,4 %, 10,9 % et 66,4 %.

Tableau 1 : État des tronçons nationaux du réseau routier régional


7
Condition Type
État /
pays Bonne Acceptable Mauvaise Inconnue Bitumée Non bitumée Inconnu

Bénin 35,8 1,8 61,5 1,0 96,8 3,2 0,0


Burkina
58,2 33,6 8,2 0,0 100,0 0,0 0,0
Faso
Côte
16,1 47,1 35,4 1,0 90,3 9,7 0,0
d’Ivoire
Gambie 0,0 89,4 10,6 0,0 47,4 34,4 18,2
Ghana 70,3 23,6 6,1 0,0 100,0 0,0 0,0
Guinée 22,2 20,7 57,1 0,0 89,1 10,9 0,0
Guinée-
0,0 0,0 0,0 100,0 0,0 0,0 100,0
Bissau
Libéria 39,4 55,9 2,7 2,1 47,5 52,5 0,0
Mali 66,6 21,7 0,0 11,7 99,6 0,4 0,0
Niger 31,2 31,0 0,0 37,7 88,0 12,0 0,0
Nigéria 55,6 29,7 14,7 0,0 100,0 0,0 0,0
Sénégal 39,8 15,1 45,1 0,0 99,8 0,2 0,0
Sierra
19,5 58,4 22,1 0,0 33,6 66,4 0,0
Leone
Togo 49,7 0,0 50,3 0,0 100,0 0,0 0,0
CEDEAO 45,1 28,4 22,5 4,0 92,5 7,4 0,1

Source : Ranganathan et Foster (2011)

1.2 L’Afrique de l’Ouest et ses nombreux corridors : un avantage pour les pays
sahéliens

L’une des stratégies mises en œuvre sur le continent pour surmonter ses déficits d’intégration a été
de tenter de structurer les échanges commerciaux autour de corridors transfrontaliers multimodaux
intégrant la route, le rail, et même le transport fluvial et/ou maritime (Harelimana, 2014).

Les corridors constituent un réseau de routes ayant pour point de départ ou point de destination un
port maritime. Les corridors de commerce ont pour but de relier des pays, des zones économiques
et des ports, et d’encourager ainsi le commerce entre les différents pays d’Afrique ou au-delà du
continent par le recours à des services logistiques et de transport efficaces. La logique sous-jacente
des corridors est de faciliter les relations commerciales avec les pays enclavés et de permettre ainsi
une insertion assez facile dans le commerce international. Leur entretien permet d’améliorer non
seulement les routes, mais également la qualité du transport et d’autres services logistiques, la qualité
étant définie selon le temps du transit et le coût de l’acheminement des marchandises dans le corridor,
d’où la mesure de la fiabilité d’un corridor en fonction du temps de transit et de la souplesse qu’offre
la diversité des services sur les itinéraires faisant intervenir plusieurs modes de transport.

L’Afrique de l’Ouest compte trois pays enclavés : le Burkina Faso, le Mali et le Niger. Ces pays jouissent
d’une chance inouïe par rapport aux autres pays enclavés. Chacun de ces pays a au moins accès à
une voie maritime par le biais des ports des pays côtiers. Ouagadougou (Burkina Faso) a accès à Tema
(Ghana) et Abidjan (Côte d’Ivoire) ; Bamako (Mali) a accès à la fois à Dakar (Sénégal) et Tema (Ghana) ;
et Niamey (Niger) est relié à Cotonou (Bénin) et Lomé (Togo).

Tableau 2: État des lieux des routes le long des corridors de l’Afrique de l’Ouest

8
Pourcentage en condition Pourcentage en bande de trafic
Axes/Pourcentage en Pourcentage
condition bitumée 300-
Bonne Acceptable Mauvaise <300 >1000
1000
VOIES D’ACCÈS À LA MER
Tema-Ouagadougou-
67,1 30,7 2,2 100,0 3,8 25,7 25,4
Bamako
Burkina Faso 52,4 47,6 0,0 100,0 8,3 31,0 60,7
Ghana 62,8 32,5 4,8 100,0 0,0 0,0 0,0
Mali 100,0 0,0 0,0 100,0 4,7 72,0 23,2
Dakar-Bamako 48,0 19,8 32,1 100,0 24,9 55,6 19,5
Mali 75,6 24,4 0,0 100,0 46,7 47,2 6,1
Sénégal 16,6 14,6 68,8 100,0 0,0 65,2 34,8
Abidjan-Ouagadougou 33,1 23,0 43,9 100,0 3,5 23,3 73,1
Burkina Faso 68,6 27,3 4,1 100,0 4,1 27,6 68,3
Côte d’Ivoire 3,1 19,5 77,5 100,0 3,1 19,7 77,2
Lomé-Niamey 50,2 30,1 19,8 100,0 0,0 82,6 17,4
Burkina Faso 35,4 38,9 25,8 100,0 0,0 77,3 22,7
Niger 99,0 1,0 0,0 100,0 0,0 100,0 0,0
Togo 51,7 0,0 48,3 100,0 0,0 37,2 62,8
Cotonou-Niamey 49,5 7,9 42,6 98,5 1,5 26,4 70,0
Bénin 38,1 2,2 59,7 97,8 2,2 15,8 81,5
Niger 77,7 22,3 0,0 100,0 0,0 52,8 41,4

CORRIDORS INTRA-RÉGIONAUX

Abidjan-Lagos 50,7 28,0 20,6 98,8 0,0 0,4 43,6


Bénin 26,9 0,0 68,0 92,4 0,0 2,5 90,3
Côte d’Ivoire 0,0 100,0 0,0 100,0 0,0 0,0 100,0
Ghana 7,0 14,5 10,5 100,0 - - -
Nigéria 50,0 50,0 0,0 100,0 0,0 0,0 100,0
Togo 0,0 0,0 100,0 100,0 0,0 0,0 100,0
Nouakchott-N’Djamena 63,4 21,1 10,2 97,3 9,9 46,2 43,4
Burkina Faso 70,7 29,3 0,0 100,0 6,2 37,6 56,3
Cameroun 84,8 15,2 0,0 100,0 31,0 56,5 12,5
Mali 62,9 31,3 0,0 94,2 5,8 75,8 16,4
Mauritanie 50,6 23,8 25,6 100,0 0,0 21,5 78,5
Niger 66,4 4,4 29,1 99,1 3,8 46,8 48,5
Nigéria - - - 100,0 0,0 0,0 100,0
Sénégal 10,9 26,5 62,6 28,6 0,0 100,0 0,0

Source : Ranganathan et Foster (2011)

Les routes le long des corridors sont pour la plupart en bon état, mais on observe une négligence
dans la gestion des tronçons nationaux des pays côtiers. Les pays côtiers ont pour la plupart des
routes en moins bon état que les pays sahéliens. Pour preuve, sur le corridor Abidjan-Ouagadougou,
la Côte d’Ivoire enregistre 77,5 % de ses routes en piteux état contre seulement un taux de 4,1 %
pour le Burkina Faso.

Les corridors restent cependant sujets à un certain nombre de problèmes, notamment les retards liés
au transport assez importants, une insuffisance d’infrastructures et la faiblesse des harmonisations

9
institutionnelles entre les pays concernés. Les utilisateurs le long des corridors peuvent également
être soumis à l’extorsion aux multiples barrages routiers et points de contrôle.

Afin de faciliter le transport dans la région ouest-africaine, en particulier le long des corridors,
l’Observatoire des pratiques anormales (OPA) a vu le jour. L’OPA est une initiative de l’UEMOA suite
à une décision de la CEDEAO d’établir, entre autres, des observatoires des pratiques anormales
dans la région. L’OPA a été mis en place en 2005 avec l’appui technique et financier de l’Agence des
États-Unis pour le développement international (USAID), par le biais du projet West Africa Trade Hub.

L’OPA, dans son vingt-quatrième rapport couvrant le deuxième trimestre 2013, a collecté des
données concernant les corridors suivants : Tema-Ouagadougou, Ouagadougou-Bamako via
Koury, Ouagadougou-Bamako via Hérémakono, Lomé-Ouagadougou, Dakar-Bamako, Abidjan-
Ouagadougou, Abidjan-Bamako.

Il ressort de son rapport que les prélèvements illicites ont diminué de 18 %, et que les retards et les
contrôles ont également baissé, de 30 % et 17 % respectivement. Le Togo est le pays le moins touché
par les tracasseries, tandis que le Mali reste toujours le plus mauvais élève en matière de gouvernance
routière en Afrique de l’Ouest. La frontière de Hérémakono sur le corridor Ouagadougou-Bamako est
le poste frontalier le plus tracassier au Mali.

L’OPA signale également ne voir que peu d’évolution au Burkina Faso, puisque sur les quatre
dernières années, on constate plutôt un statu quo, en particulier concernant les pots-de-vin versés
aux douaniers.

1.3 Des déficits en infrastructures routières accompagnés de tarifs de transport élevés

L’Afrique de l’Ouest possède des routes dont certains tronçons sont relativement en bon état pour
le transport des marchandises, mais la sous-région présente de piètres performances régionales en
termes de coûts de transport. Les tarifs de fret de l’Afrique de l’Ouest sont les deuxièmes plus élevés
en Afrique après ceux de l’Afrique centrale. La vitesse implicite (vitesse comprenant le temps de
stationnement dans les ports, au passage des frontières et autres arrêts) est la plus faible de toutes
les régions de l’Afrique.

Ce constat paradoxal signifie qu’il ne suffit pas uniquement pour les États de combler le déficit
infrastructurel par la construction et la réhabilitation des routes régionales mais qu’il est aussi
nécessaire de s’intéresser aux services de transport. Les infrastructures sont à l’origine d’un manque
à gagner pour la croissance économique en Afrique de l’Ouest en raison non seulement des
insuffisances d’investissements, mais aussi et surtout des défaillances de gestion. Des difficultés
subsistent aussi bien en infrastructures matérielles qu’immatérielles, et imposent de trouver des
solutions pour les composantes matérielles et immatérielles qui correspondent, l’une et l’autre, à la
notion d’infrastructure économique et sociale.

En Afrique subsaharienne, ce n’est pas la qualité des routes qui détermine la performance dans les
corridors internationaux, mais plutôt les structures de la réglementation et du marché du transport
routier des marchandises.

Les efforts des gouvernements devraient aussi s’attacher aux mesures visant à éliminer les distorsions
structurelles du marché du transport, sous peine de voir annihilés tous les investissements visant à

10
réduire les coûts du transport routier, les cartels pouvant tirer profit des coûts réduits tout en gardant
les prix inchangés (Teravaninthorn et Raballand, 2009).

Tableau 3 : Principaux corridors de transport pour les échanges internationaux en Afrique


subsaharienne
Densité des
échanges Tarifs du
Longueur Routes en bon (millions de Vitesse implicite fret (dollars
Corridor
(kilomètres) état (%) dollars par (kilomètres/heure) par tonne/
kilomètre de kilomètre)
route)

Occidental 2 050 72 8,2 6,0 0,08

Central 3 280 49 4,2 6,1 0,13

Oriental 2 845 82 5,7 8,1 0,07

Austral 5 000 100 27,9 11,6 0,05

Source : Teravaninthorn et Raballand (2008)

West Africa Trade Hub (2010) a établi que les oligopoles du transit demeurent en place et réduisent
les avantages des investissements réalisés afin de diminuer le coût du transport le long des corridors
en Afrique de l’Ouest. Les oligopoles du secteur du transport constituent un frein évitable au taux de
croissance des exportations et des importations en provenance ou à destination des pays sahéliens,
et entravent l’intégration régionale de ces derniers.

L’existence de ces oligopoles trouve son fondement dans la Convention sur le transit routier inter-
États des marchandises (TRIE) de la CEDEAO, dont tous les pays membres sont signataires. Cette
convention permet à une paire d’États membres (un côtier et un enclavé) de conclure des traités
bilatéraux régissant le partage des droits de transport pour des marchandises importées en transit
du port jusqu’à destination du pays enclavé. Ces traités de « répartition du fret » semblent tous
avoir : a) réservé le transport de toutes les marchandises définies comme « stratégiques » par le pays
destinataire aux camions immatriculés dans le pays destinataire ; et b) alloué le tiers des marchandises
« non stratégiques » aux pays côtiers et deux tiers aux pays enclavés. L’objectif visé est celui de
garantir une « une part équitable » du trafic des transporteurs de chacun des partenaires nationaux
d’un marché de transit. Toutefois, cette limitation du marché par l’imposition de quotas est un frein
à la concurrence.

De plus, les camions sahéliens sont, dans la plupart des cas, en moins bon état que ceux des pays
côtiers (par exemple, voir encadré sur l’étude de cas au Niger). Aussi, l’autoréglementation pratiquée
sur chaque marché national pour gérer les droits de transport « non stratégique » à travers le
système de file d’attente « premier arrivé, premier servi » est un mécanisme inefficace qui entrave la
compétitivité.

Le monopole du partage du fret fournit une incitation pour les vieux camions mal entretenus à rester
en service parce qu’ils doivent seulement attendre au port comme leurs concurrents pour obtenir
une cargaison. Dans un environnement plus compétitif, des camions plus neufs, mieux entretenus les
supplanteraient, mais le système de file d’attente les met sur un pied d’égalité avec leurs rivaux. Dans
ce contexte, des camions modernes, bien entretenus ne peuvent exploiter tout leur potentiel. De
l’incitation pour les vieux camions mal entretenus à rester économiquement actifs résulte un surplus
de camions sur le marché. Sans ce soutien, les propriétaires les mettraient à la casse.

11
Troisièmement, le surplus et l’augmentation du délai d’attente au port signifient que les temps de
rotation entre le port et la destination sahélienne sont augmentés. Le temps d’attente supplémentaire
réduit la distance parcourue annuellement et donc l’efficacité du transport.

Quatrièmement, pour faire face à la faible distance parcourue annuellement, les entreprises ont
tendance à surcharger leurs camions. Les vieux camions mal entretenus et surchargés ont une plus
grande propension aux pannes, aux accidents, à la pollution et – surtout – à la dégradation des
routes. Le rendement lent et irrégulier de ces camions offre un service médiocre aux expéditeurs. Les
accidents, la pollution et la dégradation des routes sont des externalités négatives, quelquefois avec
un coût social très élevé.

Cinquièmement, le processus de file d’attente encourage les pots-de-vin afin de sauter la file ; la
surcharge et la violation des règlements de la sécurité routière exposent les chauffeurs aux extorsions
par la police. Le système est auto-entretenu par un ensemble de mesures d’incitation du secteur
informel. Les chauffeurs payent des pots-de-vin aux agents des organisations qui supervisent le
monopole, afin de permettre à leurs camions de sauter la file. L’importateur profite du tonnage
supplémentaire au-delà des limites légales mais non déclaré en douane à la frontière entre le pays
côtier et le pays enclavé. Il récompense le transitaire en conséquence. Le transitaire donne des
incitations additionnelles en espèces au chauffeur qui, en retour, verse des pots-de-vin à la police et
aux agents des douanes afin d’assurer que le camion en surcharge ainsi que la cargaison sous-déclarée
atteignent leur destination sans encombre et amendes officielles. Le personnel de l’entreprise de
transport ignore la surcharge si elle n’endommage pas d’une manière significative le camion.

Encadré 1 : Étude de cas du Niger sur l’application des quotas


Le transport routier au Niger semble emblématique du rôle négatif de la structure de l’industrie du
transport sur le niveau des tarifs et l’intégration régionale. Là où elles le peuvent, les associations
des transporteurs, en nœuds oligopolistiques, appliquent le système de quotas de 1/3-2/3 et la
règle de file d’attente du « premier arrivé, premier servi ». Ces pratiques sont courantes à la fois
à Cotonou et à Lomé, ports par lesquels passent la plupart des marchandises en transit pour
le Niger. Le Niger fait la promotion de cette politique de protection envers sa vieille flotte de
transport qui est trop petite pour tirer parti de ses droits sous le système de 1/3-2/3, et qui est
moins efficace que les flottes du Bénin ou du Togo. Les associations des transporteurs du Niger
perçoivent des honoraires pour chaque chargement au titre du quota 1/3-2/3 à Cotonou et à
Lomé, et vendent les droits pour le transport de tels chargements aux transporteurs avec des
camions immatriculés en dehors du Niger. À Cotonou, les transporteurs béninois estiment qu’ils
peuvent concurrencer leurs homologues nigériens mais ils ne peuvent pas gagner de parts de
marché en le faisant car ils sont limités par leur part maximale de 1/3 du marché. Cela signifie
que les transporteurs nigériens n’ont aucune incitation à améliorer l’efficacité de leur flotte ou
à réduire leurs tarifs, ce qu’ils auraient fait dans un marché concurrentiel. Ils n’ont pas besoin
d’innover ni d’améliorer la qualité de leur service pour conserver cette part de marché à des prix
plus élevés que la concurrence. En outre, au Niger, les associations des transporteurs imposent
des honoraires aux non-Nigériens qui veulent transporter des marchandises à l’intérieur ou à
partir du Niger. Le Niger est le meilleur exemple d’un pays dont les consommateurs de biens
importés et les fabricants utilisant des produits semi-finis importés font face à des prix plus
élevés, ce qui nuit à la compétitivité des produits. Le cartel des transporteurs joue un rôle non
négligeable dans cette hausse souvent injustifiée des prix.

Source : West Africa Trade Hub, 2010.

12
Dans un tel contexte, il n’est pas étonnant que le transport des marchandises soit soumis à toutes
sortes d’entraves récurrentes et de contrôles occasionnels, générateurs d’insécurité, de retards, de
corruption et donc de coûts tout au long des corridors.

En revanche, les prix élevés du transport routier dans la sous-région résultent plus des marges
bénéficiaires excessives que des coûts. Les marges bénéficiaires sont exceptionnellement élevées :
elles atteignent 60 à 160 %. La cause en est cette concurrence limitée existant dans le secteur,
combinée à un marché fortement réglementé et fonctionnant sur le principe du « tour de rôle », où le
fret est attribué aux transporteurs via un système centralisé de « file d’attente », au lieu de permettre
aux opérateurs de passer directement des contrats bilatéraux avec les clients (Briceño-G., Smits et
Foster, 2008).

1.4 Relation entre facilitation du transport et coûts de transport

Les coûts de transaction sont un élément clé pour le développement du commerce transfrontalier car
ils pèsent sur la compétitivité des pays. Les coûts de transaction liés aux retards du transport et autres
coûts indirects peuvent avoir des impacts aussi élevés que les obstacles matériels au commerce (tels
que les droits de douane ou les contingents).

Les coûts de transport, quant à eux, occupent une grande part dans la formation des coûts de
transaction. Ils sont la résultante de plusieurs facteurs tout le long de la chaîne d’approvisionnement.
Une gestion efficiente de la chaîne d’approvisionnement est étroitement liée à deux notions
importantes : les infrastructures matérielles (hard infrastructure) et les infrastructures immatérielles
(soft infrastructure).

Les infrastructures matérielles couvrent le développement des réseaux régionaux de transport


(installations portuaires, connexions aux chemins de fer, lignes de camionnage, etc.), d’énergie et
d’eau, et de télécommunications. Elles renvoient donc au sens strict de la notion des infrastructures.
Au sens large du terme, on pourra inclure les mécanismes institutionnels pour la gestion et l’entretien
de ces infrastructures. Quant aux infrastructures immatérielles, elles renvoient à la levée des barrières
intangibles, à la libre circulation des biens, des capitaux, des services et de la main-d’œuvre ainsi que
la mise en place des cadres institutionnels pour favoriser l’intégration des marchés nationaux. En en
mot, elles renvoient à la notion de facilitation du commerce, à savoir l’élimination des entraves et
des barrières au commerce intra-marché : i) l’élimination des entraves et des barrières au commerce
intra-marché ; ii) l’harmonisation des politiques pour la promotion du commerce intra-régional et
l’investissement ; iii) la création d’institutions chargées de gérer les marchés transfrontaliers ; et iv)
l’amélioration du climat des affaires à l’échelle régionale.

Il est assez difficile de dire laquelle des deux composantes des infrastructures a le plus d’incidences
dans la détermination du coût du transport tant elles sont complémentaires. Ainsi, des infrastructures
routières de bonne qualité avec des procédures administratives assez longues et contraignantes
auront sensiblement le même effet que des infrastructures routières en piteux état et des procédures
administratives assez fluides et moins contraignantes. En effet, les deux facteurs agissent sur le
temps de livraison des marchandises : plus ce temps s’allonge, plus les coûts s’accroissent.

La facilitation du commerce est généralement liée à des procédures administratives et n’engendre en


général pas des coûts financiers énormes comme c’est le cas de la mise à jour et la maintenance des
infrastructures matérielles. Elle est le fait des pouvoirs publics et permet entre autres une réduction
des coûts de transport et l’attraction des investissements dans la zone concernée. Par exemple, une
meilleure facilitation du commerce permettrait une segmentation de la production dans différentes

13
zones de la région, ce qui réduirait considérablement les coûts de transport du fait du facteur de
proximité.

Les infrastructures de transport, pour leur part, jouent un rôle primordial dans le développement
du commerce international. Tout d’abord, les ports constituent l’accès par excellence au commerce
international. Et des ports, la connexion aux différents marchés s’effectue en utilisant trois principaux
modes de transport : la route, les chemins de fer et les voies navigables intérieures. À ce stade, l’on
s’aperçoit que chaque mode de transport a un effet sur les coûts de transport et que plus l’on se
situe loin des zones portuaires (cas des pays enclavés), plus les coûts de transport auront tendance à
s’accroître. La facilitation du transport aura ici un rôle essentiel et consistera à jouer sur les différents
facteurs entravant l’efficacité de chaque mode de transport et à s’attaquer aux facteurs externes qui
entrent en œuvre dans le processus d’acheminement des marchandises, notamment les différentes
procédures administratives, les tracasseries routières et la gestion des postes de contrôle juxtaposés ;
cela aura pour effet final la réduction des coûts de transport.

1.5 La charge à l’essieu et la dégradation des infrastructures en Afrique de l’Ouest

Il n’est pas rare de voir des camions surchargés en Afrique de l’Ouest. Les camions lourds accélèrent
la destruction de la surface des routes, ce qui coûte aux gouvernements plus de 500 millions de
francs CFA par kilomètre pour les remplacer (West Africa Trade Hub, 2010). Les camions surchargés
entraînent entre autres des accidents et, avec le temps, la dégradation des routes qu’ils occasionnent
aggrave l’usure de tous les camions, qu’ils soient surchargés ou non.

L’Afrique de l’Ouest présentant déjà un déficit d’infrastructures routières, les camions surchargés
détériorent la qualité du faible réseau routier existant. En vue d’apporter une solution à ce problème,
en mars 2010, les huit États membres de l’Union économique et monétaire ouest-africaine et le
Ghana (un pays partageant des frontières uniquement avec des États membres de l’UEMOA) ont
approuvé une feuille de route pour la mise en œuvre des contrôles des charges à l’essieu pour les
camions.

2. Le secteur ferroviaire et sa situation dans la zone CEDEAO


2.1 Un réseau de faible densité, déconnecté et en proie à d’énormes difficultés

Le réseau ferroviaire en Afrique de l’Ouest est long de 9 715 kilomètres et présente une densité de
1,9 km/1000 km2. Cette densité est en deçà de la densité moyenne pour l’Afrique, qui, à 2,5 km/1000
km2, est l’une des plus faibles au monde. Cette petite taille du réseau ferroviaire constitue sans nul
doute l’une des raisons qui expliquent sa faible présence sur le marché du transport en Afrique de
l’Ouest.

Tableau 4: Répartition du réseau ferroviaire en Afrique


Région Réseau total (km) (de route) Densité (km/1000 km2)
Afrique du Nord 16 012 2,3
Afrique de l’Est 9 341 2,2
Afrique australe 33 291 5,6
Afrique centrale 6 414 1,2
Afrique de l’Ouest 9 715 1,9
Total Afrique 74 773 2,5

14
Pays à faible revenu couverts par les Diagnostics
- 2,3
des infrastructures nationales en Afrique (20)

Tous pays couverts par les Diagnostics des


- 3,4
infrastructures nationales en Afrique (24)

Asie du Sud - 18,8


Moyenne mondiale - 23,1
Pays à revenu élevé - 46,2

Source: CEA et al., 2010.

Le réseau ferroviaire en Afrique de l’Ouest, comme partout en Afrique subsaharienne, a connu un


déclin dû notamment à la forte concurrence du transport routier. La gestion des chemins de fer,
jusqu’au milieu des années 1990, était le fait des États et prenait la forme de monopoles d’État
caractérisés par une gestion lourde et bureaucratique.

Le relâchement des investissements de l’État dans les voies ferroviaires au profit d’énormes
investissements dans le transport routier et la mauvaise gouvernance des entreprises ferroviaires ont
eu pour conséquence l’absence d’amélioration du réseau ferroviaire.

L’essentiel du réseau existant date de l’époque coloniale et présentait déjà au début des années 1990
des signes de vieillissement, voire d’obsolescence (ballast insuffisant, usure des rails, détérioration des
terrassements). Dans la majorité des pays, le réseau ferroviaire n’est pas électrifié et compte une voie
unique. Les infrastructures de transport ferroviaire souffrent également du mauvais état de la plupart
de ses structures, d’une obsolescence des systèmes de signalisation et de télécommunication, du
manque de pièces de rechange, et de l’inadaptation des infrastructures aux conditions d’exploitation
des trains modernes.

La majorité des réseaux ferroviaires de la sous-région sont indépendants les uns des autres,
contrairement à ceux de l’Afrique australe et orientale, qui sont interconnectés. Il y a toutefois lieu de
noter l’existence de rares réseaux interconnectés, dont ceux du Burkina Faso et de la Côte d’Ivoire,
et du Sénégal et du Mali.

L’une des difficultés majeures que rencontre l’intégration du système des rails dans la région est la
présence d’une multitude d’écartements dans les différents pays. En effet, le Ghana et le Nigéria ont
un écartement de 1,067 m ; la plupart des pays francophones (Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire,
Mali, Sénégal, et Togo) ont un écartement de 1 m, tandis que seuls la Guinée et le Libéria possèdent
un écartement normal de 1,435 m.

2.2 Un trafic relatif faible et une moindre efficience du sous-secteur

Le trafic ferroviaire en Afrique est très faible et représentait seulement 2 % du trafic de fret et de
voyageurs dans le monde en 2010. En Afrique subsaharienne (hormis l’Afrique du Sud), les trains sont
plus utilisés pour le fret que pour les voyageurs. Le trafic de fret représente à lui seul 11,64 %, contre
1,7 % pour le trafic de voyageurs en Afrique subsaharienne. Ce trafic réduit pourrait s’expliquer par
la faible densité du réseau, qui engendre des coûts d’exploitation comparativement plus élevés pour
des services, dans bien des cas, non compétitifs.

La densité du trafic ferroviaire est un élément important dans sa compétitivité par rapport aux autres
modes de transport. C’est par les voyages et l’expédition de cargaisons effectués par le train que les
entreprises ferroviaires deviennent rentables. Olievschi (2013) signale qu’un train vide représente

15
une perte potentielle car les coûts fixes des entreprises de chemins de fer sont rarement inférieurs à
70 % des coûts totaux (y compris les dépenses d’équipement et d’entretien de la voie, des ouvrages
comme les ponts et les tunnels, des systèmes de signalisation et de communication, ainsi que
l’approvisionnement en énergie des sections électrifiées et les gares).

La densité moyenne du trafic en Afrique subsaharienne en 2010 était inférieure à un million d’unités
de trafic par kilomètre de voie ferrée et se situait très largement en dessous de la densité moyenne
de l’Afrique, qui était de 3,80 millions d’unités de trafic par kilomètre de voie ferrée.

Figure 2: Densité comparative du trafic ferroviaire en Afrique

007
006
006
005
005
004
004
003
002
001
001 000
000
000
Afrique Afrique de Afrique de sud Ass Sitaarail Transrail
nord

Source : BSR-AO à partir de Olievschi (2013)

D’autres éléments pour évaluer la compétitivité du transport ferroviaire sont la productivité du travail
et celle du wagon. La productivité moyenne du travail dans les entreprises subsahariennes représente
à peine 37 % de la moyenne africaine, alors que la South African Railways présente des chiffres sept
fois plus élevés (Olievschi, 2013).Cela signifie qu’en moyenne, pour des opérations exécutées par sept
employés d’entreprises subsahariennes, la South African Railways n’utilise qu’une seule personne, ce
qui a manifestement un impact sur les coûts et la compétitivité.

16
Les entreprises subsahariennes ont également une faible productivité des wagons. Une faible
productivité des wagons est un signe de méthodes d’exploitation moins efficaces ou d’une offre plus
limitée de wagons, compte tenu de leur mauvais état technique.

2.3 Les réformes du secteur ferroviaire en Afrique de l’Ouest

Afin d’améliorer la compétitivité du réseau ferroviaire, la plupart des États africains ont procédé à la
mise sous concession des chemins de fer, qui, pour la plupart, étaient soumis à un monopole d’État.

En Afrique de l’Ouest, deux entreprises ont obtenu une concession. Il s’agit de Sitarail et de Transrail,
respectivement en 1995 et 2003. Les entreprises privées sont désormais actionnaires majoritaires
de ces deux concessions. La part de l’État ne varie qu’entre 10 et 20 %.

Ces deux concessions ont été suivies de près par le Groupe de la Banque mondiale, qui a accompagné
la plupart des procédures de mise en concession par le biais de deux de ses institutions, l’Association
internationale de développement (IDA) et la Société financière internationale (SFI).

Tableau 5: Compagnies ferroviaires mises en concession


Montant total de l’aide
Année de la Longueur du (millions de dollars)
Entreprise Pays
concession réseau en km
IDA SFI

Côte d’Ivoire,
Sitarail 1995 1 254 21 0
Burkina Faso

Transrail Sénégal, Mali 2003 1 546 45 0

Source: Olievschi (2013)

L’IDA a fourni un montant de 66 millions de dollars pour accompagner la réussite de ces concessions.

De manière générale, ces concessions ont eu des effets positifs, notamment en matière de création
d’emplois, d’augmentation de la productivité de la main-d’œuvre et du volume du trafic. Toutefois,
l’étude de Pierre Pozzo di Borgo (2011) révèle que ces concessions souffrent d’une mauvaise
performance financière, qui pourrait freiner leur développement. Ces problèmes sont :

• La surestimation des marchés de fret ferroviaire accessibles : L’accroissement du volume de


fret a été beaucoup plus faible que prévu en raison de la forte concurrence du secteur routier,
les gouvernements hôtes n’ayant pas mis en œuvre une stratégie appropriée pour réglementer la
concurrence entre le rail et la route ;

• La sous-estimation des besoins d’investissement et une mauvaise évaluation des besoins dans le
secteur du fret. Les conditions d’octroi des concessions avaient sous-estimé l’état de délabrement
des infrastructures ferroviaires et du matériel, qui avaient nécessité d’énormes investissements
pour leur entretien et leur remise en état, et de nombreux concessionnaires n’avaient pas réalisé
les investissements nécessaires ou apporté les améliorations et les technologies attendues ;

• La sous-capitalisation des concessions. Les montants additionnels de fonds propres attendus


n’ont pas été apportés du fait du déficit de trésorerie étant donné la non-réalisation des prévisions
de trésorerie. Les sociétés concessionnaires ont ainsi été amenées à emprunter et à alourdir leur
dette à long terme.

17
3. Secteur maritime et transport régional en Afrique de l’Ouest
3.1 De nombreux ports mais pas de véritable hub maritime

L’Afrique de l’Ouest compte de nombreux ports parmi lesquels on peut citer ceux d’Abidjan, de
Cotonou, de Lomé et de Dakar. Le port d’Abidjan est le deuxième port à conteneurs d’Afrique après
celui de Durban, en Afrique du Sud. Toutefois, il n’existe pas de port jouant le rôle de hub maritime.

Le port d’Abidjan a connu un grand succès en tant que principal centre de transbordement de
conteneurs. Mais aujourd’hui, il ne joue plus ce rôle de hub régional du fait de l’instabilité dans le pays
et des problèmes spécifiques liés à la propriété des droits d’exploitation du terminal à conteneurs.

Ceci a eu pour conséquence le repli de Maersk Line (et sa société affiliée Safmarine) sur le port
espagnol d’Algésiras et le nouveau terminal à conteneurs de Tanger (Maroc) en tant que principales
plaques tournantes pour son commerce par conteneurs avec l’Afrique de l’Ouest, afin de relayer le
fret ouest-africain à destination ou en provenance de l’Europe et de l’Asie.

3.2 Un trafic de conteneurs en hausse mais déséquilibré

Le trafic de conteneurs et de cargos s’est largement accru dans la sous-région durant la décennie
1995-2005. Durant cette période, le trafic de conteneurs a connu la plus forte croissance enregistrée
dans toutes les régions de l’Afrique, avec un taux de croissance globale de 394 points de pourcentage,
soit une croissance annuelle de 14,7 %.

L’évolution du trafic de cargos général connaît également une hausse et enregistre la deuxième
meilleure performance en termes de croissance globale en Afrique. La croissance sur la période se
situait à 265 points de pourcentage, soit un taux annuel moyen de 10,2 %.

Malgré cette forte expansion, l’Afrique de l’Ouest représente moins de1 % du trafic total mondial de
conteneurs et un peu plus de 2 % de l’ensemble du trafic africain.

Par ailleurs, cette croissance du trafic de conteneurs est marquée par un grand déséquilibre. En effet,
les ports de la sous-région sont sujets à deux principales contraintes (Briceño-G., Smits et Foster
2008). La première contrainte est celle du déséquilibre marqué du trafic conteneurisé. Pour qu’un
trafic conteneurisé soit qualifié d’efficace, il faudrait l’équilibre, c’est-à-dire des conteneurs pleins à
l’arrivée comme au départ. Or, on observe qu’en Afrique subsaharienne, 80 % des conteneurs entrants
sont réexportés vides, contre généralement 60 à 70 % de conteneurs renvoyés vides au départ de
l’Asie. La raison en est que les exportations dominantes de la région sont des produits agricoles et
des matières premières, mieux adaptés au trafic de marchandises diverses qu’à la conteneurisation.

Deuxièmement, le manque de liaisons routières et ferroviaires intégrées signifie que les ports
d’Afrique subsaharienne sont mal équipés pour accueillir les conteneurs. Il en résulte que l’adoption
du commerce conteneurisé n’est souvent que superficielle. Les conteneurs sont chargés et déchargés
au voisinage immédiat des ports annulant par conséquent les avantages du transport multimodal
entièrement intégré qu’est censée procurer la conteneurisation.

3.3 Des infrastructures portuaires coûteuses, peu compétitives et inefficientes

Les infrastructures portuaires de l’Afrique de l’Ouest sont moins compétitives en termes de charges
et autres coûts de transaction. En effet, ils sont en deçà des meilleures pratiques mondiales quel que

18
soit l’indicateur choisi. Cela semble expliquer largement le fait que, malgré l’existence d’une douzaine
de grands ports maritimes, aucun ne fait partie des 70 plus grands ports du monde.

Les ports de la sous-région font partie des ports les plus coûteux et accusent le plus de retard dans
les délais de manutention. À titre d’exemple, la durée moyenne de séjour d’un conteneur au port varie
de 11 à 30 jours, soit approximativement une moyenne de deux semaines, alors que la norme exige
que cette durée soit de 7 jours ou moins. Ces retards engendrent des coûts supplémentaires élevés.

La Banque mondiale (2010) a évalué qu’en 2006, chaque jour supplémentaire passé au port coûtait
plus de 35 000 dollars pour un navire de 2 200 EVP (équivalent vingt pieds), et proportionnellement
plus pour les plus grands bateaux.

Pour répondre à cette situation, les lignes maritimes ont introduit le concept de « frais de congestion »,
qui allaient de 35 dollars par jour pour un conteneur de 20 pieds à Dakar à 425 dollars par jour à Tema
(Ghana), en 2006.

Ces retards pourraient s’expliquer par le temps de traitement et d’administration et la médiocre


manipulation dans les zones portuaires congestionnées, plutôt que par le manque de capacité de
base sur les quais (Banque mondiale, 2010).

L’analyse des performances individuelles des sept principaux ports de la sous-région fait ressortir que
le Nigéria et le Ghana sont les moins performants en termes d’efficience alors que, paradoxalement,
les plus efficients, notamment Abidjan, Cotonou, Dakar et Lomé, sont des ports où les charges de
manutention sont plus élevées.

Tableau 6: Comparaison de l’efficacité des ports d’Afrique


Afrique de Afrique Afrique de Reste du
Indicateur
l’Est australe l’Ouest monde
Performance
Temps de séjour d’un conteneur (jours) 5–28 4–8 11–30 <7
Durée de rotation des camions (heures) 4–24 2–12 6–24 1
Productivité des terminaux à quai (conteneurs
8–20 8–22 7–20 20–30
par heure)
Productivité des terminaux à quai (tonnes par
8–25 10–25 7–15 >30
heure)
Frais
Traitement de conteneurs (rendus sortie de
135–275 110–243 100–320 80–150
port), dollars par EVP
Fret général (sur quai par tonne métrique),
6–15 11–15 8–15 7–9
dollars par tonne

Source : Ranganathan et Foster (2011).

3.4 Les réformes portuaires : une solution de développement des ports

Pour faire face aux problèmes de capacités et de performance dont souffrent les ports ouest-
africains, les gouvernements ont entamé des réformes du secteur portuaire faisant appel à une
participation accrue du secteur privé. Le secteur privé est chargé de l’exploitation des conteneurs et

19
du développement des capacités portuaires. On distingue généralement trois modes de gestion des
ports:

• « Port-service » (service port) : l’autorité portuaire accomplit pratiquement toutes les fonctions, y
compris la manutention, qui est effectuée avec des équipements qui sont la propriété du port, et
par son propre personnel ;

• « Port-outil » (tool port) : l’autorité portuaire n’est pas responsable de la manutention, mais
possède généralement les équipements (avec parfois des engins de manutention, notamment sur
parc, propriété des entreprises de manutention qui opèrent dans le port) ;

• « Port-propriétaire » (landlord port), dans lequel l’autorité portuaire n’a plus qu’un rôle de
régulateur, et où les espaces ou terminaux portuaires sont concédés à des opérateurs spécialisés.

La mise en concession des conteneurs et la participation du secteur privé au développement et à


l’exploitation des ports en Afrique de l’Ouest sont assez récentes et ont accusé beaucoup de retard
par rapport aux autres régions. Le mode de gestion choisi lors de la mise en concession est le port-
propriétaire.

Dans ce type de concession, les terminaux sont concédés à des opérateurs qui devront s’engager
sur une amélioration de la productivité, des investissements dans les superstructures (manutention
de quai et sur parc), et aussi parfois dans des investissements en infrastructures pour développer
la capacité du port, tout en payant des redevances sur le trafic qu’ils traitent. Avant les réformes
portuaires, deux modes de gestion étaient développés dans la sous-région : le port-service, adopté
par les pays anglophones, et le port-outil, pratiqué par les pays francophones.

Le tableau 7 montre que l’ensemble des ports d’Afrique de l’Ouest est confié à deux grands groupes :
l’APM Terminals et le groupe Bolloré.

Tableau 7: État de la mise en concession en Afrique de l’Ouest


Investissement
Statut avant Date de la
Port Opérateur(s) (millions de Remarques Durée
réforme concession
dollars)
Freetown Port-service 2010 En cours 20 ans

Comprend également
la fourniture de
vedettes (pilotage)
Monrovia Port-service 2010 APM Terminals 120 25 ans
et de remorqueurs
pour les services
portuaires associés

2004, Bolloré et GPHA est également


Tema Port-service
effective APM 90 actionnaire du 20 ans
2007 Terminals terminal (30 %)

40 % APM Extension de
48 (fin 2007), 15 ans, avec
Abidjan Port-outil Terminals et la capacité à
2004 environ 100 au prolongation
60 % Bolloré 900 000 EVP
total possible
de 10 ans
Développement d’un
Port-
GETMA et nouveau terminal
Lomé propriétaire 2009 250 35 ans
MSC d’une capacité de 1,5
(partiellement)
million d’EVP

20
Investissement
Statut avant Date de la
Port Opérateur(s) (millions de Remarques Durée
réforme concession
dollars)
Complément MCA
pour 169 millions de
Cotonou Port-outil 2009 Bolloré 256 25 ans
dollars, extension
pour 1 million d’EVP
420 en deux Extension terminal
Dakar Port-outil 2008 DP World 25 ans
phases 1,5 million d’EVP

San Pedro Port-outil 2008 MSC 250 Extension terminal 15 ans

Conakry Port-outil 2008 GETMA 100 25 ans


Extension terminal
Lagos (Apapa) Port-service 1,6 million d’EVP,
2005 APM Terminals 179 (fin 2009) 25 ans
valeur 1,06 milliard
de dollars
Lagos (Tin
Port-service 2005 Bolloré / ZIM 83 millions de dollars 15 ans
Can)

Source : Hartmann (2010)

Cette stratégie d’implantations multiples d’APM Terminals et du groupe Bolloré ne laisse que peu de
place à d’éventuels concurrents et risque de contrecarrer l’émergence d’un hub régional qui servirait
de plate-forme de transbordement pour desservir la sous-région (Hartmann, 2010).

Ainsi, il n’existe pas de vraie concurrence. On assiste donc à une cartellisation du marché. Il n’est donc
pas rare de voir la concurrence à laquelle se livrent les deux groupes lors de chaque appel d’offres
pour la mise en concession de terminaux conteneurs faire place à des arrangements ad hoc pour
lesquels ils s’associent. C’est ainsi qu’ils exploitent conjointement les terminaux à conteneurs de Tema
(Ghana) et Abidjan (Côte d’Ivoire).

3.5 3La sécurité maritime, un problème pris au sérieux

Les ports de l’Afrique de l’Ouest sont confrontés à des questions de sécurité des routes maritimes,
notamment pour les tankers pétroliers du golfe de Guinée. Pour faire face aux problèmes de sécurité
maritime et portuaire, plusieurs actions ont été menées dans la zone.

En juillet 2008 au Sénégal, l’Organisation maritime internationale (OMI) et l’Organisation maritime


de l’Afrique de l’Ouest et du Centre (OMAOC) ont signé un mémorandum d’entente sur la mise en
place d’un réseau sous-régional intégré de garde-côtes en Afrique de l’Ouest et du Centre. Ce réseau
devrait permettre d’entreprendre des actions communes en vue de protéger les vies humaines, de
faire respecter les lois et de renforcer la sûreté, la sécurité et la protection du milieu marin, ces
fonctions étant également désignées par l’expression « service des garde-côtes ». En juin 2013, un
Code de conduite sur la prévention des actes de piraterie, des vols à main armée à l’encontre des
navires et des activités maritimes illicites en Afrique de l’Ouest et du Centre a été signé (voir encadré).

21
Encadré 2: Renforcement de la sécurité maritime en Afrique de l’Ouest et du Centre

Un Code de conduite sur la prévention des actes de piraterie, des vols à main armée à l’encontre
des navires et des activités maritimes illicites en Afrique de l’Ouest et du Centre a été signé en
juin 2013, au Cameroun, et vise à promouvoir la coopération dans le domaine de la sécurité
maritime sur le plan régional.

Le Code a été adopté par des hauts fonctionnaires des gouvernements des pays d’Afrique de
l’Ouest et du Centre. Il est fondé sur le modèle réussi du Code de conduite de Djibouti et a
été élaboré par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest, la Communauté
économique des États de l’Afrique Centrale et la Commission du golfe de Guinée en réponse
aux résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU 2018 (2011) et 2039 (2012), dans lesquelles
le Conseil de sécurité se déclarait vivement préoccupé par la menace que les actes de piraterie
et les vols à main armée commis en mer dans le golfe de Guinée faisaient peser sur la navigation
internationale, la sécurité et le développement économique des États de la région.

Les signataires de ce Code ont l’intention de coopérer en vue de prévenir et de réprimer les
actes de piraterie et les vols à main armée à l’encontre des navires, la criminalité transnationale
organisée dans les transports maritimes, le terrorisme maritime et la pêche illicite et autres
activités illicites en mer.

Le Code reconnaît les principes d’égalité souveraine et d’intégrité territoriale et son application
réussie stimulera le développement économique des États membres, assurera la viabilité des
pêcheries et développera le secteur maritime.

Source : OMI, 2014

4. Secteur aérien et transport régional dans la zone CEDEAO


4.1 Les tendances majeures du trafic aérien

L’analyse du tableau ci-dessous fait ressortir que le marché intérieur du transport aérien est assez
vaste tandis que le marché intra-africain est relativement restreint en Afrique de l’Ouest. Le marché
intérieur ouest-africain est le plus vaste de l’Afrique après celui de l’Afrique australe. Mais le marché
intra-africain est le plus étroit après celui de l’Afrique centrale. Le nombre de paires de villes desservies
dans la région est de 8 contre 20 villes internationales desservies.

22
Tableau 8: Analyse comparée du transport aérien dans la zone CEDEAO et dans les autres zones
africaines
Afrique Afrique Afrique Afrique
Sous-région
de l`Ouest centrale de l’Est australe

Sièges annuels, vols intérieurs (milliers) 2 034 235 1 345 3 076


Sièges annuels, vols internationaux en Afrique
362 187 1 196 964
subsaharienne (milliers)
Paires de villes desservies par des vols intérieurs
8 4 13 17
(nombre)
Paires de villes internationales desservies par des vols
20 15 29 26
internationaux (nombre)
Sièges-km dans les vieux avions (% du total) 43 30 33 29

Sièges-km dans les avions récents (% du total) 57 70 67 71

Indice de Herfindahl marché intérieur 0,84 0,83 0,64 0,73

Indice de Herfindahl marché international 0,19 0,24 0,25 0,34

Indice de Herfindahl (intérieur et international) 0,21 0,30 0,27 0,42

Source : Base de données des Diagnostics des infrastructures nationales en Afrique

Les années 2000 à 2007 ont vu le trafic aérien de la zone connaître des baisses considérables. Ces
baisses sont notamment dues à l’effondrement de plusieurs compagnies aériennes, dont Air Afrique
(acteur majeur du transport aérien qui avait une capacité de presque 5 millions de sièges) dans la
zone UEMOA composée du Bénin, du Burkina Faso, de la Côte d’Ivoire, de la Guinée-Bissau, du
Mali, du Niger, du Sénégal et du Togo, et des compagnies Ghana Airways et Nigeria Airways pour le
Groupe de l’Accord de Banjul comprenant Cabo Verde, la Gambie, le Ghana, la Guinée, le Libéria, le
Nigéria, la Sierra Leone et le Tchad. À partir de 2007, le trafic aérien a commencé à s’intensifier avec
l’émergence de Virgin Nigeria.

L’arrivée en scène d’Air Côte d’Ivoire en 2012 devrait renforcer le trafic aérien de la zone. Air Côte
d’Ivoire dessert 5 villes de la Côte d’Ivoire (Bouake, Korhogo, Man, Odienné, San Pedro) et 10 villes
de la sous-région (Bamako, Conakry, Cotonou, Dakar, Freetown, Lagos, Lomé, Monrovia, Niamey et
Ouagadougou). Asky fait aussi partie de cette nouvelle génération de compagnies qui redonne de
l’élan au secteur aérien ouest-africain en desservant la quasi-totalité des capitales de la sous-région.

En Afrique de l’Ouest, il n’existe pas de véritable hub aérien. En effet, les compagnies nationales ont un
marché trop étroit pour prétendre être de véritables hubs. Elles souffrent pour la plupart de problèmes
managériaux et leur profitabilité s’avère réduite en raison de coûts fixes élevés (sécurité, maintenance,
droits de trafic avec les pays voisins, etc.). Il n’est donc pas surprenant que des compagnies nationales
aient du mal à faire face à la concurrence internationale. C’est pourquoi le trafic aérien est dominé par
les compagnies étrangères (Air France/KLM, Lufthansa, British Airways, etc.).

L’un des défis auquel fait face le système aérien en Afrique de l’Ouest est la sécurité. La majorité de
la flotte est vieillissante. De 2000 à 2007, le pourcentage de la flotte classée vieillissante est passé
de 36 à 43.

Le programme de contrôle universel de la sécurité de l’Organisation de l’aviation civile internationale


signale que l’Afrique de l’Ouest est l’une des régions au monde où la mise en œuvre de la sécurité
est extrêmement déficiente. Pour preuve, l’Afrique de l’Ouest enregistre des résultats largement
inférieurs à la moyenne mondiale.

23
4.2 La Décision de Yamoussoukro : le cadre réglementaire du secteur aérien ouest-
africain

Les différentes politiques aériennes de la sous-région sont largement tributaires de la Déclaration de


Yamoussoukro sur une nouvelle politique des transports aériens en Afrique, qui s’est transformée par
la suite en un cadre de mise en œuvre de la Déclaration, dénommé la Décision de Yamoussoukro.
Cette décision vise à éliminer progressivement les barrières non physiques au transport aérien intra-
africain et les restrictions liées à l’octroi de droits de trafic, particulièrement le droit de cinquième
liberté. Elle accompagne le renforcement de la capacité en aéronefs des compagnies aériennes
africaines, la réglementation des tarifs et l’amélioration des instruments d’opération et l’exploitation
des vols cargo.

La Banque mondiale (2010) signale qu’en Afrique de l’Ouest, la CEDEAO n’a pas enregistré de progrès
remarquables en ce qui concerne l’adoption de mesures significatives dans le sens d’une libéralisation
des services aériens, mais des blocs de la région ont accompli des progrès considérables. L’UEMOA
est allée au-delà des principes de Yamoussoukro, avec un régime incluant les droits de cabotage. Le
Groupe de l’Accord de Banjul a signé, quant à lui, un accord de service aérien multilatéral, entièrement
compatible avec la Décision de Yamoussoukro. Le tableau ci-dessous montre l’état de la mise en
œuvre de la Décision de Yamoussoukro en Afrique.

Tableau 9: Libéralisation du secteur aérien en Afrique suivant les groupements régionaux

Situation générale Pourcentage de


Statut de la
de la mise en œuvre vols au titre des
Communauté Membres libéralisation des
de la Décision de cinquième et
services aériens
Yamoussoukro sixième libertés

Les cinq premières


Les principes de la
libertés ont été
Cabo Verde, Gambie, Décision ont été
Groupe de accordées, les tarifs
Ghana, Guinée, Libéria, acceptés dans un 43
l’Accord de Banjul sont libres, ainsi
Nigéria et Sierra Leone. accord multilatéral de
que la capacité et la
service aérien.
fréquence.

Les cinq premières


Les principes de libertés ont été
la Décision ont accordées, les tarifs
Communauté Cameroun, Congo,
été acceptés dans sont libres, ainsi
économique et Gabon, Guinée
un programme de que la capacité et 28
monétaire de équatoriale, République
transport aérien. De la fréquence. Au
l’Afrique centrale centrafricaine, Tchad.
légères restrictions maximum deux
subsistent. opérateurs peuvent
participer par pays.

Libéralisation en
attente. Lorsqu’elle
La plupart des États de sera appliquée, les
Libéralisation totale
l’Afrique orientale et opérateurs pourront
Marché commun acceptée, mais mise en
australe, à l’exception de desservir toutes les
de l’Afrique de œuvre en attente de la
l’Afrique du Sud, destinations (toutes
l’Est et de l’Afrique création d’une autorité
du Botswana, du Lesotho les libertés) et les
australe conjointe de la
et de la République-Unie tarifs, la capacité
concurrence.
de Tanzanie. et/ou la fréquence
ne seront plus
réglementés.

24
Le Conseil de la CAE
Tous les services
a émis une directive
ne sont pas
amendant les accords
Kenya, Ouganda, libéralisés, car les
Communauté bilatéraux entre les
République-Unie de amendements aux 16
d’Afrique de l’Est États membres de la
Tanzanie. accords bilatéraux
CAE pour les mettre
sont
en conformité avec la
toujours en attente.
Décision.

Aucune mesure n’a


été prise en vue de
la mise en œuvre de
la Décision, même
Communauté de La plupart des pays au Aucune libéralisation
si les politiques de
développement de sud de la République- n’a été entreprise au 6
l’aviation civile incluent
l’Afrique australe Unie de Tanzanie. sein de la SADC.
une libéralisation
progressive des
services aériens au
sein de la SADC.

Union Toutes les libertés, y


Bénin, Burkina Faso, Au sein de l’UEMOA,
économique compris le cabotage,
Côte d’Ivoire, Guinée- la Décision est
et monétaire ont été accordées. 44
Bissau, Mali, Niger, intégralement mise en
de l’Afrique de Les
Sénégal, Togo. œuvre.
l’Ouest tarifs sont libéralisés.

Note : CAE : Communauté d’Afrique de l’Est ; SADC : Communauté de développement de l’Afrique australe ; UEMOA : Union économique et moné-
taire de l’Afrique de l’Ouest.

Source: Banque mondiale (2010)

5. Les projets de développement des infrastructures de transport


en Afrique de l’Ouest
Cette section présente les différentes actions accomplies par la CEDEAO dans le cadre du
développement des infrastructures. Elle présente tout d’abord le Programme de développement des
infrastructures en Afrique (PIDA) dans la zone ouest-africaine, sur lequel les différentes communautés
économiques régionales doivent s’appuyer en vue de développer leurs programmes régionaux.
Par la suite, elle présente les projets et actions menés par la CEDEAO dans ladite zone pour le
développement des infrastructures de transport.

5.1 Le Programme de développement des infrastructures en Afrique (PIDA)

Le Programme de développement des infrastructures en Afrique (PIDA) fournit un cadre stratégique


de développement des infrastructures. Il vise à combler le déficit infrastructurel en Afrique et à faire
du continent africain une région interconnectée.

Le programme des transports formulé dans le cadre du PIDA vise à relier les grands centres de
production et de consommation, à réaliser des liaisons entre les grandes villes, à définir les meilleures
plateformes portuaires et liaisons ferroviaires et à offrir aux pays enclavés un meilleur accès au
commerce régional et international.

En matière de transport, le PIDA regroupe six principaux programmes concernant directement


l’Afrique de l’Ouest : i) Corridor côtier Abidjan-Lagos ; ii) Corridor multimodal Dakar-Niamey ; iii)

25
Corridor multimodal Praia-Dakar-Abidjan ; iv) Abidjan-Ouagadougou/Bamako ; v) Programme de
plateforme portuaire et ferroviaire d’Afrique de l’Ouest ; et vi) transport aérien en Afrique de l’Ouest.

Ces différents programmes abordent tous les volets du transport (aérien, routier, ferroviaire et
maritime) et se proposent de résoudre les questions suivantes : i) l’intégrité de l’interconnexion du
réseau (la question des tronçons inachevés) ; ii) la facilitation de l’accès au marché (les contraintes et
obstacles non physiques au flux du trafic) ; iii) l’harmonisation des normes et standards, notamment les
normes techniques, de sûreté et de sécurité ; iv) la déréglementation des marchés ; v) la concurrence
des autres modes de transport ; vi) les mécanismes de financement des options disponibles, à la
fois pour la construction et, surtout, pour la gestion des actifs et l’entretien ; vii) l’entretien du sous-
secteur routier, dont l’importance a été signalé par les Diagnostics des infrastructures nationales
en Afrique ; xviii) les possibilités de participation du secteur privé et les incitations pour stimuler sa
participation ; ix) l’impact sur l’environnement ; et x) les exigences de renforcement des capacités.

Leur mise en œuvre effective devrait combler le déficit infrastructurel régional. Mais à ce jour, la
réalisation de ces programmes est mise à mal par des contraintes de financement.

Le financement total du PIDA est estimé, jusqu’en 2020, à 68 milliards de dollars par la CEA et l’Union
Africaine. La part allouée aux projets de transport représente environ 36 % du total du financement
requis. L’Afrique de l’Ouest est chargée de mobiliser 6,2 milliards de dollars. La levée de ces fonds
nécessite une forte mobilisation des ressources internes de chaque État et une participation active
du secteur privé.

Tableau 10: Liste des projets du PIDA en Afrique de l’Ouest


Coût
No Programme Description (millions de Pays
dollars)

Ce programme modernisera le corridor ARTIN, le


plus fréquenté d’Afrique de l’Ouest (facilitation des Nigéria, Bénin,
Corridor côtier échanges, postes frontière intégrés, renforcement Togo,
12 290
Abidjan-Lagos des capacités et mise en œuvre de partenariats Ghana, Côte
public-privé) pour cinq pays : Côte d’Ivoire, Ghana, d’Ivoire
Togo, Bénin et Nigéria.

Ce programme est destiné à moderniser le corridor


ARTIN le plus fréquenté d’Afrique de l’Ouest
Sénégal, Mali,
Corridor multimodal (facilitation des échanges, postes frontière intégrés,
13 590 Burkina Faso,
Dakar-Niamey renforcement des capacités et mise en œuvre
Niger
de partenariats public-privé) pour quatre pays:
Sénégal, Mali, Burkina Faso, Niger.

Ce programme améliorera le transport maritime et


les liaisons entre les pays insulaires et continentaux
en créant un nouveau service maritime entre les
ports régionaux et en le facilitant par un système Cabo Verde,
informatique moderne reliant le service maritime Sénégal,
aux ports et au corridor routier du Corridor Dakar- Gambie,
Corridor multimodal
Abidjan. Ce programme modernisera également un Guinée-
14 Praia-Dakar- 150
des corridors ARTIN les plus fréquentés d’Afrique Bissau, Guinée,
Abidjan
de l’Ouest (facilitation des échanges, postes Sierra Leone,
frontières intégrés, renforcement des capacités, Libéria,
éventuellement par un partenariat public-privé) Côte d’Ivoire
pour huit pays: Cabo Verde, Sénégal, Gambie,
Guinée-Bissau, Guinée, Sierra Leone, Libéria, Côte
d’Ivoire.

26
Abidjan - Ce programme rénovera et modernisera le Côte d’Ivoire,
15 Ouagadougou / corridor multimodal endommagé pendant la 540 Burkina Faso,
Bamako guerre civile en Côte d’Ivoire. Mali

Ce programme vise à répondre aux futurs


Programme problèmes de capacité des ports ouest-
de plateforme
africains. Le programme comporte deux 15 pays,
16 portuaire et 2 140
ferroviaire d’Afrique éléments : a) un schéma directeur pour une AGPAOC
de l’Ouest plate-forme portuaire régionale et un lien
ferroviaire, et b) l’expansion du port.

Ce programme vise à accroître l’offre de services


Transport aérien en de transport aérien en Afrique de l’Ouest, qui
17
Afrique de l’Ouest est limitée actuellement faute d’une plate-forme 420 15 pays
aérienne régionale.

Source : Programme pour le développement des infrastructures en Afrique

Une telle exigence nécessite l’amélioration du cadre institutionnel de chaque État par une législation
claire, respectant le droit des affaires et assurant la transparence des marchés publics, une meilleure
gouvernance et une meilleure gestion macroéconomique, ainsi que la maîtrise des troubles
sociopolitiques et des conflits.

5.2 Les programmes mis en place par la CEDEAO

5.2.1 Secteur routier

Plusieurs initiatives ont été entreprises par la CEDEAO dans l’optique du développement des corridors
et de leur réhabilitation.

Le 28 février 2014 s’est tenue à Abuja une réunion des ministres des travaux publics et des
infrastructures routières de cinq États membres de la CEDEAO associés dans le projet du corridor
Abidjan-Lagos, à savoir le Bénin, la Côte d’Ivoire, le Ghana, le Nigéria et le Togo. Ce projet traduit
l’engagement de ces États à renforcer les échanges commerciaux, mais aussi la liberté de circulation
des biens et services et des personnes dans la région. Chaque État devrait apporter une contribution
de 50 millions de dollars comme « fonds de démarrage » pour montrer son engagement pour
l’exécution rapide du projet qui se situe dans la Phase I du Programme régional de développement
des infrastructures Dakar-Lagos.

Lors de la quarante-quatrième session ordinaire de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement


de la CEDEAO, en mars 2014, le Nigéria, le Bénin, le Togo, le Ghana et la Côte d’ivoire ont procédé à
la signature du traité sur le projet d’autoroute Lagos-Abidjan, lui conférant ainsi un statut international
d’envergure régionale. Ce sommet a lancé un appel aux partenaires de développement et aux
institutions financières pour soutenir la mise en œuvre dudit projet. Un projet de construction d’une
autoroute reliant Dakar et Abidjan est à l’étude. Une consultation de haut niveau initiale a eu lieu au
début de juin 2014.

Des actions sont prévues en vue de la réhabilitation et l’amélioration des maillons manquants des
routes transsahariennes. C’est ainsi que la Banque mondiale est chargée de la construction des
maillons manquants du corridor Abidjan-Lagos ; la BAD, quant à elle, est chargée de la construction
du pont Trans-Gambie et de la réhabilitation de la route Cotonou-Lomé.

27
Aussi, plusieurs actions ont été entreprises par la CEDEAO dans le cadre de la Route transnationale
Nigéria-Cameroun et le Programme de facilitation du transport, notamment des réunions de
coordination entre le Comité technique conjoint et les Comités de pilotage du projet.

5.2.2 Secteur ferroviaire

Le programme de développement des infrastructures ferroviaires en Afrique de l’Ouest est guidé par
le Plan directeur pour les rails. Ce programme a été mis en place par la CEDEAO en 2009 et vise
à construire de nouvelles lignes d’une longueur de 6 700 km et à réhabiliter d’anciennes lignes de
3 300 km de longueur.

Sur ce plan, il est prévu la réhabilitation des voies ferrées suivantes : Cotonou-Segbohoue (50 km),
Aného-Lomé-Blitta (334 km), et Dakar-Bamako de (1 150 km). Les nouvelles lignes à construire sont :
Ilaro-Pobé (23 km), Segbohoue-Aného (49 km), Lomé-Téma (147 km) et Prestea-Abidjan (222 km). Ce
plan prévoit également l’interconnexion des nouvelles lignes suivantes : Blitta-Pama-Fada-Ngourma-
Ouagadougou (783 km), Blitta-Sokodé-Fada-Gourma-Niamey (839 km), Bougouni-Mandiana-Kankan
(261 km), Tambacounda-Dabola (646 km), Man-Mandiana-Kankan (576 km), Dimbokro-Diléya-Man-
Sanniquellie (535 km), Ansongo-Dori-Kaya (363 km), Man-Diléya-San Pedro (399 km). Les nouvelles
étapes à suivre pour la réalisation de ces projets sont les études de faisabilité et la mobilisation des
fonds.

L’un des projets prioritaires qui a déjà fait l’objet d’études préalables est celui de l’interconnexion des
chemins de fer Cotonou-Niamey-Kaya-Ouagadougou-Abidjan. Ce projet prévoit la construction d’un
chemin de fer entre Parakou-Niamey-Dori-Kaya d’une longueur de 1 024 km et la réhabilitation des
rails entre Abidjan-Ouagadougou-Kaya. À l’heure actuelle :

• l’étude complémentaire technique pour la réhabilitation du chemin de fer Cotonou-Parakou est


achevée ;

• les études techniques détaillées de la liaison ferroviaire considérée comme prioritaire (à savoir la
liaison Kaya-Dory-Niamey), qui relie la ligne ferroviaire Abidjan-Ouagadougou à la République du
Niger, ont démarré en 2012 et doivent prendre fin en juin 2014.

5.2.3 Secteur maritime

Dans ce secteur, on ne note pas d’actions concrètes mises en œuvre par la CEDEAO. Toutefois, cette
dernière a entrepris une étude visant à mettre en place une stratégie maritime régionale en vue de
fournir une réponse aux problèmes récurrents liés aux faibles capacités portuaires. Il est aussi prévu,
dans le cadre du PIDA, le développement d’un service maritime reliant le port de Praia aux ports de
la zone ouest-africaine.

Un projet de création d’une compagnie maritime régionale en Afrique de l’Ouest et centrale est en
réflexion. Ce projet visera à interconnecter les deux régions via la voie maritime.

5.2.4 Secteur aérien

La CEDEAO a fait d’énormes progrès dans la mise en place d’un cadre réglementaire aérien favorable.
Ainsi, en 2012, les actions suivantes ont été réalisées :

• les efforts dans la mise en œuvre d’un cadre juridique harmonisé pour le transport aérien comme
préalable à la libéralisation du secteur du transport aérien en Afrique de l’Ouest se poursuivent.

28
Les actes additionnels relatifs au transport aérien ont été adoptés par la Conférence des chefs
d’État et de gouvernement de la CEDEAO lors de sa quarantième session ordinaire ;

• les efforts visant à améliorer la sécurité et la sûreté de l’aviation ainsi que la viabilité des compagnies
aériennes se consolident. La Commission de la CEDEAO a sollicité un appui financier auprès de
la BAD pour financer un certain nombre de projets dont l’objectif est de renforcer le contrôle de
la sécurité et de la sûreté de l’aviation (Projet BAGASOO et COSCAP) ;

• la coopération aéronautique se consolide avec la signature d’un mémorandum d’entente entre


la CEDEAO et la Conférence européenne de l’aviation civile (CEAC) et la signature d’un Accord
technique sur les services aériens humanitaires entre la CEDEAO et le Programme alimentaire
mondiale (PAM), le 17 octobre 2012, à Rome.

5.3 Programmes mis en œuvre au sein de l’UEMOA

5.3.1 Infrastructures routières

Par la décision n°07/2001/CM/UEMOA du 20 septembre 2001, l’Union s’est dotée d’un Programme
d’actions communautaires des infrastructures et du transport routiers (PACITR), qui est un des
principaux instruments de la politique d’intégration dans le domaine des infrastructures de transport
terrestre.

Ce programme s’articule autour des principales composantes suivantes : i) les infrastructures routières
inter-États ; ii) les routes secondaires et pistes rurales transfrontalières ; iii) les systèmes d’information
et indicateurs de performance ; iv) la facilitation des transports et transits routiers inter-États ; v) la
sécurité routière ; et vi) la gestion et le suivi-évaluation du Programme d’actions communautaires.

5.3.2 Infrastructures ferroviaires

L’UEMOA s’est dotée le 27 mars 2014 d’un Programme d’actions prioritaires de développement du
transport ferroviaire (pour la période 2014-2015), dont l’objectif général est le renforcement des
infrastructures ferroviaires pour les besoins de l’intégration régionale et du développement des zones
à potentiel minier, agricole et industriel.

Les composantes de ce programme sont : i) les infrastructures ferroviaires du réseau communautaire,


et ii) le renforcement des capacités et le développement de la coopération ferroviaire. La première
composante comprend les sous-composantes suivantes : a) l’harmonisation des normes et standards
de réhabilitation, de construction, de maintenance et de gestion des chemins de fer ; b) la réhabilitation
et la modernisation des réseaux ferroviaires existants ; et c) l’interconnexion et l’interopérabilité
des réseaux ferroviaires. La deuxième composante comprend, quant à elle, les sous-composantes
suivantes : a) le renforcement des capacités ; b) le développement de la coopération et de l’industrie
ferroviaire ; et c) la mise en place d’une banque de données ferroviaires.

5.3.3 Domaine du transport aérien

Le Programme commun du transport aérien, adopté par la décision n° 008/2002/CM/UEMOA du


27 juin 2002, marque l’amorce d’une restructuration du système du transport aérien dans l’espace
UEMOA.

29
L’objectif principal du programme est de désenclaver le territoire de l’Union par le développement
d’un système de transport aérien sûr, ordonné, efficace et répondant aux normes internationales
définies par l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI).

Les objectifs spécifiques sont, entre autres, de promouvoir l’efficacité des administrations de l’aviation
civile et la compétitivité des entreprises de transport aérien.

Le Programme commun s’articule autour de quatre axes d’amélioration ou chantiers phares relatifs
à : i) l’amélioration des infrastructures et équipements, ii) l’harmonisation et l’uniformisation des
réglementations de transport aérien, iii) l’amélioration des systèmes de transport aérien, et iv) la
libéralisation des prestations de service de transport aérien.

5.3.4 Transports terrestres, maritimes et facilitation des transports et du transit

a. Programme régional de facilitation des transports

Le Programme régional de facilitation des transports et transit routiers a pour objectif, d’une part, de
faciliter et développer les échanges intracommunautaires et, d’autre part, de permettre aux opérateurs
économiques de faire face à la concurrence et aux exigences des clients.

Il comporte trois principaux axes : i) harmonisation et simplification des procédures ; ii) postes de
contrôle juxtaposés ; et iii) Observatoire des pratiques anormales (OPA).

b. Programme communautaire de développement du sous-secteur maritime

Le programme adopté en 1998 prévoyait la mise en place d’un environnement favorable à la


participation des compagnies maritimes privées de l’Union au développement du sous-secteur. Le
programme établissait la nécessité d’une réglementation commune aux États membres en matière
d’organisation des transports maritimes, ainsi que l’adoption d’une réglementation commune des
États membres en matière de concurrence dans le sous-secteur.

6. Impact des infrastructures de transport sur la zone de libre-


échange
Cette partie a pour but d’évaluer le lien potentiel entre les infrastructures de transport et le
développement de la zone de libre-échange. Elle comprend deux parties. La première partie évalue
l’impact des infrastructures de transport, prises dans leur globalité, sur la zone de libre-échange. La
seconde partie, quant à elle, évalue l’impact de chaque sous-secteur du transport sur la zone de libre-
échange.

6.1 Impact des infrastructures de transport dans leur globalité

La zone de libre-échange consacre une libre circulation des biens et services au sein d’une zone donnée
et les échanges commerciaux qui s’effectuent entre les pays sont facilités par les infrastructures
de transport. Les infrastructures de transport interviennent à toutes les étapes du processus de
production des biens et services dans une telle zone.

En amont, dans un pays donné, les infrastructures de transport permettent de connecter les différents
acteurs de la chaîne de production. Des coûts de transport élevés détermineront donc la structure

30
des prix des biens finaux échangés. En aval, une fois les biens et services prêts, il faut les acheminer
via des canaux de distribution vers les consommateurs.

Des moyens de transport défaillants entravent la connectivité des pays et engendrent des coûts
supplémentaires. Outre l’effet sur la connectivité, un service de transport inefficace et la mauvaise
qualité des infrastructures engendrent également des coûts supplémentaires et donc une augmentation
des prix à la consommation pour les biens importés et une faible compétitivité des exportations sur
les marchés extérieurs. Ainsi, des infrastructures et des services de transport intérieurs inefficaces
entravent gravement la connectivité d’un pays et son accès aux marchés régionaux et induit un effet
préjudiciable sur ses résultats commerciaux et sa compétitivité.

Des infrastructures de transport et des services y relatifs de bonne qualité facilitent l’entrepreneuriat
et réduisent considérablement les coûts de transaction auxquels les entrepreneurs font face (frais de
congestion, retard de livraison…).

Les graphiques ci-dessous montrent les liens entre le commerce transfrontalier (coûts à l’exportation
et à l’importation fournis par la Banque mondiale dans son rapport Doing Business 2014) et l’Indice
de compétitivité global des infrastructures de transport élaboré par le Forum économique mondial
(2013-2014) en Afrique subsaharienne. Ils établissent clairement que de bonnes infrastructures de
transport améliorent la compétitivité et le climat des affaires au sein d’une économie.
Figure 3: Lien entre les coûts des exportations-importations et la compétitivité des
infrastructures
20000
15000
10000
5000
0

2 2.5 3 3.5 4 4.5


()*

Couts a I exportation (USD per conteneur) Fitted values

Source: BSR-AO, 2015

Les coûts de transport sont particulièrement élevés en Afrique et figurent parmi les facteurs qui
entravent le commerce intra-africain. Plusieurs études empiriques ont cherché à évaluer l’impact des
coûts de transport sur le niveau actuel du commerce intra-africain et le commerce international.

Ackah et Morrissey (2005) établissent que les coûts de transport constituent environ 15 % en général,
et 20 % pour les pays sans littoral, de la valeur unitaire des exportations en Afrique, alors que ce taux
tourne autour de 8 % pour l’Asie et 5 % pour l’Europe occidentale. Limoa et Venables (2001) évaluent
l’effet des coûts de transport sur les échanges commerciaux sur la base d’un échantillon constitué de
pays d’Afrique et du reste du monde. Ils aboutissent à la conclusion qu’une augmentation de 10 % du
coût de transport entraîne une réduction du volume des échanges d’environ 20 %. Ils confirment que

31
les coûts de transports d’un pays enclavé sont plus élevés que ceux des pays côtiers et que les coûts
de transport pour le commerce intra-africain sont plus du double de ce qu’ils seraient dans d’autres
pays en développement.

6.2 Impact de chaque sous-secteur du transport sur la zone de libre-échange

6.2.1 Transport routier

Le transport routier domine, représentant entre 80 et 90 % de tous les mouvements de fret et de


passagers entre les zones de production économique et les marchés intérieurs et internationaux
(CEA et al., 2010). Le transport routier constitue en Afrique de l’Ouest l’un des réseaux de transport
les plus développés.

Les avantages commerciaux potentiels de l’investissement dans la mise à niveau et l’entretien


d’un réseau autoroutier transafricain sont tels que les échanges intra-CEDEAO pourraient
passer de 3 à 7,3 milliards de dollars après la mise en service de la route transafricaine,
avec un investissement initial et un coût d’entretien annuel relativement modérés (Buys,
Deichmann et Wheeler, 2006).

Cette amélioration du réseau routier dynamiserait les échanges commerciaux entre la CEDEAO et
l’Afrique centrale, qui passeraient de 647 millions de dollars à 1,6 milliards de dollars. Les autres
variations inter-régionales africaines sont présentées dans le tableau ci-dessous :

Tableau 11: Impact des infrastructures de transport routier sur le commerce de la CEDEAO en
millions de dollars
Avec le réseau Avec le réseau
Région partenaire Variation (%)
commercial actuel commercial amélioré
Afrique de l’Ouest 2838,1 7300,7 157,24
Afrique centrale 647,3 1593,1 146,11
Afrique de l’Est 23,1 437,6 1 794,37
Afrique australe 4,2 50,6 1 104,76
Afrique du Sud 870,4 2301,4 164,41

Source : Buys, Deichmann et Wheeler (2006)

6.2.2 Transport ferroviaire : avantages et développement en Afrique de l’Ouest

L’apport du fret ferroviaire est faible dans les échanges intra-CEDEAO du fait que le transport
ferroviaire est mis au second rang et ne fait que jouer le rôle de connecteur entre l’intérieur du pays
et les ports maritimes pour les besoins du commerce extérieur. Ceci est en partie dû au fait que les
réseaux ferroviaires nationaux sont pour la plupart déconnectés les uns des autres.

Le transport ferroviaire offre plusieurs avantages comparatifs par rapport à la route dont une plus forte
capacité de transport par unité monétaire investie. Le coût au kilomètre de voie ferrée réhabilitée est
inférieur de 50 % à celui d’une route à deux voies. Le transport ferroviaire présente aussi une plus
grande durabilité. Alors que les routes doivent être entièrement refaites tous les 7 à 10 ans, les voies
ferrées doivent l’être tous les 15 à 20 ans. Le transport ferroviaire se caractérise aussi par une plus
faible consommation d’énergie et une empreinte carbone inférieure par tonne transportée – dans
une proportion atteignant 75 % et 85 %, respectivement – ce qui fait du transport par voie ferrée
un élément contribuant au développement durable en parfaite conformité avec la Position commune
africaine.

32
Étant donné la faible empreinte carbone calculée sur la base d’une tonne-kilomètre et les perspectives
de croissance de la demande de fret ferroviaire, les politiques nationales et régionales des transports
se sont concentrées sur les investissements dans les infrastructures et les services connexes afin de
favoriser un remplacement progressif des transports routiers par les transports ferroviaires.

La Commission européenne a adopté, en mars 2011, le livre blanc sur les transports qui remet le
transport ferroviaire à l’honneur. Il est reconnu plusieurs avantages au transport ferroviaire pour
le développement de l’Afrique (CNUCED, 2011). Le transport ferroviaire est mieux indiqué pour
l’Afrique étant donné la structure des échanges du continent, qui portent essentiellement sur des
marchandises volumineuses et de faible valeur, ainsi que la situation économique et géographique
d’une région au fort potentiel de développement du commerce interrégional et dont un grand nombre
de pays sont dépourvus de littoral.

Le coût généralement prohibitif des transports intérieurs pousse à la hausse l’ensemble des coûts
commerciaux en Afrique. À titre d’exemple, le transport par mer d’un conteneur de Doubaï à
Mombasa (Kenya) coûte entre 1 400 et 1 700 dollars pour un conteneur de 40 pieds, alors que son
acheminement terrestre de Mombasa à Kampala coûte 3 800 dollars.

Le transport ferroviaire est en accord avec les besoins de la conteneurisation et l’évolution


correspondante des exigences de promotion efficace du transport multimodal en Afrique afin de
soutenir la diversification des échanges du continent. Une amélioration du réseau ferroviaire et de son
interconnexion dans la sous-région permettrait de doper le volume des échanges, de désengorger les
routes et réduire les tracasseries routières, et de relever la concurrence entre le transport ferroviaire
et le routier.

6.2.3 Infrastructures de transport maritime et aérien

Si les ports soient essentiellement utilisés pour les importations et exportations de l’Afrique, la
navigation côtière dans le continent reste insignifiante. En conséquence, les ports maritimes ont un
impact indirect sur les échanges intra-africains.

Par contre, le transport aérien est d’une importance primordiale pour les produits dont le facteur
temps est une contrainte. Il joue un rôle majeur dans le développement de chaînes de valeur
régionales dans le cadre du développement de l’agro-industrie, où les principaux produits sont des
produits agricoles ou produits intermédiaires périssables. Ainsi, le développement du transport aérien
permet d’asseoir une certaine compétitivité sur l’échiquier mondial et en Afrique. En effet, les coûts
de transport aérien en Afrique sont plus élevés que dans les autres régions. Les coûts de transport
aérien représentent parfois jusqu’à 50 % de la valeur des exportations africaines vers les États-Unis
(Amjadi et Yeats, 1995).

7. Les défis liés au développement des infrastructures de


transport
Cette section présente une analyse des principaux défis auxquels est confrontée l’exécution des
projets régionaux.

• Stimuler la participation du secteur privé

Le secteur privé est un partenaire important pour la fourniture des infrastructures de transport. Il
a joué un rôle important dans le relèvement du transport ferroviaire et tout récemment dans les

33
réformes portuaires. Il faudrait instituer un mécanisme régional d’incitation de la participation du
secteur privé dans les différents projets mis en place. La mise en œuvre du PIDA en Afrique de
l’Ouest requiert un financement important de la part de chaque État, une nouvelle attention doit
donc être accordée au secteur privé dans l’élaboration des projets régionaux.

• Favoriser la mise en place de cadres réglementaires régionaux

Bien au-delà de la production des infrastructures, l’établissement d’un cadre réglementaire régional
dans tous les sous-secteurs du transport favoriserait la participation du secteur privé, limiterait les
goulots d’étranglement administratifs qui varient d’un pays à l’autre et rendrait plus efficace les
infrastructures physiques. Par exemple, la Déclaration de Yamoussoukro sur le libre accès aux cieux
africains a amélioré la connectivité intra-régionale et internationale.

• Maintenir la paix et un climat propice aux investissements

Le maintien de la paix est l’un des défis majeurs auxquels devront faire face les pays de la CEDEAO.
Le développement des infrastructures exige un environnement politique et sécuritaire assez stable.
L’Afrique de l’Ouest a été frappée par d’importants conflits armés. Les conflits armés engendrent
une atmosphère de terreur, de peur, et ne sont pas propices aux activités économiques car ils sont
un facteur de risque supplémentaire. Les conflits armés ont pour conséquence la destruction des
infrastructures de transport et le détournement des fonds au profit de l’achat des armes. La CEDEAO
devra donc jouer un rôle important pour le maintien de la paix.

• Intégrer les plans de développement des infrastructures régionales dans les stratégies de
développement global des pays

Les projets sont généralement bien conçus au plan régional, mais leur application sur les territoires
nationaux est soumise à d’énormes contraintes. La réalisation des infrastructures de bonne qualité
fait l’objet d’études préalables établissant la faisabilité, les matériaux à utiliser et l’évaluation de la date
de clôture des travaux. Il y a lieu de renforcer les synergies entre les plans de développement des
infrastructures aux niveaux régional et national.

34
CHAPITRE II. INFRASTRUCTURES ÉNERGÉTIQUES
ET ZONE DE LIBRE-ÉCHANGE EN AFRIQUE DE
L’OUEST

1. Étroite relation entre énergie et croissance, compétitivité et


intégration régionale
L’étroite relation entre énergie et croissance économique explique la part croissante de la demande
d’énergie à certaines étapes de développement d’un pays ou d’une région. Le déficit d’infrastructures
énergétiques constitue par ailleurs un handicap au commerce et à l’intégration régionale étant donné
ses conséquences considérables sur la compétitivité économique des entreprises locales et son coût
substantiel en termes de perspectives de croissance à long terme et de compétitivité.

Il est établi que le manque d’infrastructures de production d’énergie ampute la croissance de l’Afrique
subsaharienne de 2 % par an en moyenne. Le coût moyen de la facture électrique, évalué à plus
de deux fois celui de l’Asie - sans compter les délestages- cause bien des pertes de production aux
entreprises africaines (Harelimana, 2014).

Les défaillances du système électrique sont à l’origine de distorsions dans l’allocation des ressources
productives. Ces distorsions pèsent sur l’intégration régionale et sur les possibilités de diversification
vers des activités manufacturières, où les exigences de compétitivité sont fortes. Les problèmes
électriques agissent comme une barrière supplémentaire à l’entrée qui s’ajoute aux autres handicaps
liés à la géographie, à l’accès au financement, le cas échéant aux errements de la politique économique.
Les surcoûts de la production d’énergie pour compte propre sont particulièrement dommageables
aux entreprises exposées à la concurrence régionale. Ils le sont moins pour celles d’entre elles
qui sont éventuellement protégées sur le marché intérieur et peuvent répercuter les surcoûts aux
consommateurs locaux (Guillaumont et al., 2012).

Ce chapitre examine les caractéristiques du secteur de l’énergie en Afrique de l’Ouest avant de


passer en revue les contraintes et difficultés majeures du secteur. Il présente les initiatives en cours
visant à promouvoir les infrastructures régionales d’énergie avant d’avancer des recommandations
sur les approches pouvant permettre de renforcer l’apport des infrastructures énergétiques dans la
consolidation de la zone de libre-échange ouest-africaine.

2. Situation de l’énergie électrique en Afrique de l’Ouest


2.1 Un accès limité dans un contexte de besoins élevés

En Afrique de l’Ouest, on estime que 175 millions de personnes (sur un total de 300) ne peuvent
accéder à aucun type d’approvisionnement électrique ; 25 % d’entre elles vivent dans les zones
urbaines et 75 % dans les zones rurales. Tous les pays de la CEDEAO ont un degré élevé de
dépendance à l’égard des importations de gaz et de pétrole. En outre, la demande énergétique est
caractérisée par une forte dépendance à la biomasse traditionnelle. Environ 90 % de la population
utilise le bois et le charbon pour la cuisson domestique, avec des effets notables sur l’environnement
et la santé. Par ailleurs, un certain nombre de pays se détachent par leur ratio d’accès à l’électricité,
le premier d’entre eux étant Cabo Verde (qui affiche près de 100 % de couverture), suivi par le Ghana

35
(66,7 %), le Nigéria (50 %), la Côte d’Ivoire (47,3 %), le Sénégal (42 %) et le Mali (27 %) (Groupe
d’études africaines de l’Université autonome de Madrid, 2014).

L’Afrique de l’Ouest est suffisamment dotée en sources d’énergie (hydroélectricité, charbon, gaz,
pétrole, uranium, énergies nouvelles et renouvelables) pour répondre à ses besoins. En effet, la région
compte quelques-uns des plus grands fleuves du monde, à savoir le Niger, le Sénégal et la Volta.
Par ailleurs, la coopération et l’intégration régionales pourraient permettre de mettre en valeur ces
immenses ressources pour produire une énergie peu coûteuse en vue du développement de la sous-
région dans son ensemble.

Toutefois, cet important potentiel énergétique demeure, de manière générale, inexploité, en dépit
d’un certain nombre d’initiatives et d’investissements entrepris à ce jour. Il s’agit donc de changer
cette situation en exploitant ces ressources de manière économique pour fournir à la population et
aux différents secteurs économiques des services énergétiques à un prix abordable.

S’il est évident que la disponibilité de l’énergie améliore la qualité de la vie et renforce les
activités économiques et le développement industriel, à l’inverse, la pénurie d’énergie entrave le
développement, sachant que l’absence d’électricité influe sur la qualité de l’éclairage, l’efficacité des
dispositifs d’économie de main-d’œuvre, des communications et de l’entreprise.

2.2 Potentiel énergétique de l’Afrique de l’Ouest

La situation de l’Afrique de l’Ouest en ce qui concerne l’accès à l’énergie et l’efficacité énergétique


est paradoxale : d’une part, la majeure partie de la population est dépourvue d’accès aux services
énergétiques modernes, d’autre part, une partie significative des ressources énergétiques existantes
est sous-exploitée.

2.2.1 Ressources énergétiques fossiles et hydroélectriques

Les principales sources d’énergie électrique de la sous-région sont le gaz naturel (Nigéria et Côte
d’Ivoire), l’hydroélectricité (Nigéria, Ghana, Côte d’Ivoire, Guinée avec un potentiel plus limité au
Sénégal, au Mali et au Niger – fleuves Sénégal et Niger). Les autres pays, et en particulier le Sénégal,
le Mali, le Burkina Faso, le Niger, le Togo et le Bénin, reposent sur du mazout, voire du gazole, dont le
prix est prohibitif. Il faudrait donc envisager de nouvelles orientations pour une meilleure production
électrique.

L’essentiel de la production de pétrole est assuré par le Nigéria, où les réserves sont conséquentes.
Mais la production est limitée par la situation dans le delta du Niger. La Côte d’Ivoire est un producteur
non négligeable mais sa production est mal connue. Le pétrole produit dans le golfe de Guinée est
de très bonne qualité, avec une très faible teneur en soufre et en général une densité faible (pétrole
léger donnant beaucoup d’essence et de gazole).

La demande de produits reste limitée, mais les raffineries, bien que nombreuses (Dakar, Accra/Tema,
Abidjan, Nigéria : Kaduna, Warri, Port Harcourt), sont soit non économiques (petites raffineries
simples), soit hors d’état de fonctionnement, comme les raffineries du Nigéria, qui fonctionnent peu,
autant pour des raisons politico-économiques (corruption : l’exportation de brut et l’importation
de produits permettent des commissions en devises) que techniques (l’oléoduc qui alimente la
raffinerie de Kaduna a été vandalisé ; la raffinerie de Warri est au centre de la région, très troublée,
de production). L’approvisionnement des zones intérieures est problématique compte tenu des
infrastructures de transport.

36
Tableau 12: Réserves et ressources énergétiques, fossiles et hydroélectriques

Réserves de Réserves de Forêts (1000


Réserves de gaz Ressources
pétrole brut charbon brut ha) Source :
Pays naturel (millions de hydroélectriques
(millions de (millions de FAOSTAT,
mètres cubes) (MW)
tonnes) tonnes) 2014

Bénin 21 2 800 0 300 4 511


Burkina Faso 0 0 0 900 5 589
Cabo Verde 0 0 0 0 85
Côte d’Ivoire 13 20 000 0 1 650 10 403
Gambie 0 0 0 0 482
Ghana 1 24 000 0 2 000 4 825
Guinée 0 0 0 6 000 6 508
Guinée-Bissau 0 0 0 60 2 012
Libéria 0 0 0 2 000 4 299
Mali nd 0 nd 2 000 12 411
Niger 0 0 70 400 1 192
Nigéria 3300 3 400 000 495 10 000 8 631
Sénégal 10 500 15 300 8 433
Sierra Leone 0 0 0 1 000 2 706
Togo 0 0 nd 250 267
CEDEAO 3 345 3 447 300 580 26 860 72 354

Source : CEDEAO et UEMOA, 2006.

Le Nigéria à lui seul concentre plus de 98 % des réserves prouvées de pétrole brut, de gaz naturel
et de charbon, soit 30 % des réserves prouvées africaines en pétrole brut (3 300 millions de tonnes)
et 31 % des réserves prouvées africaines de gaz naturel (3 400 milliards de m3) (Kouo, 2005). Le gaz
naturel et le charbon ne sont majoritairement consommés que dans l’industrie. La consommation de
gaz naturel en CEDEAO est principalement observée au Nigéria et en Côte d’Ivoire tandis que celle
du charbon est observée au Sénégal et au Nigéria.

Le potentiel en énergie hydroélectrique, estimé à 26 860 MW, n’est exploité qu’à hauteur de 16 %
(Kouo, 2005). Malgré son avantage sur le plan du coût de production du kWh, ce potentiel demeure
largement sous-exploité dans la sous-région. La mutualisation des ressources hydroélectriques sous-
régionales permettrait d’accélérer la maîtrise du secteur énergétique, tout en offrant l’avantage de
disposer d’une énergie à faible coût de fonctionnement et fortement rentable à long terme.

2.2.2 Potentiel en énergie éolienne et solaire

L’énergie éolienne, avec des vitesses de vent honorables le long des côtes ou dans les zones
désertiques, peut constituer une solution attractive du fait des coûts d’investissement qui ont
significativement diminué au cours des dernières années pour atteindre des niveaux quasiment
équivalents à ceux des grandes unités thermiques (de l’ordre de 1 000 dollars par kW, en fonction
des conditions locales).

Quant à l’énergie solaire, il est à noter que l’ensoleillement moyen en Afrique de l’Ouest représente
un potentiel d’environ 5 à 6 kWh/m²/jour, contre seulement 3 kWh/m²/jour en zone tempérée
européenne. L’importance de l’ensoleillement et la perspective réelle mais lente de réduction des
coûts de la technologie photovoltaïque ont conduit à prévoir une contribution très significative de

37
l’énergie solaire dans l’accès des populations rurales à un service électrique de base mais qui s’est
avérée surestimée.

2.2.3 Ressources énergétiques en biomasse

La biomasse constitue l’une des principales ressources énergétiques des États membres. Elle est
principalement concentrée dans la partie tropicale humide au sud de la région, et les quantités
disponibles varient d’un pays à l’autre en fonction de la climatologie. La superficie des forêts de
l’espace CEDEAO a été estimée à environ 72 354 000 ha (FAOSTAT, 2014). Ce potentiel forestier
serait encore suffisant dans beaucoup de pays pour couvrir la demande globale en combustible (bien
que des disparités internes existent entre des zones). Au Sénégal et au Mali, la stratégie de diffusion
des foyers améliorés a été développée avec succès grâce à la participation d’organisations non
gouvernementales et d’un opérateur privé dans la production et la vulgarisation de foyers améliorés
(cas du Mali).

2.3 Prédominance de l’hydroélectricité et disparités nationales

En Afrique de l’Ouest, l’offre d’électricité reste insuffisante. De plus, avec l’accroissement de la


population, le volume total d’électricité consommé dans la région est passé de 47 073 GWh en 2010
à 48 959 GWh en 2011, soit une croissance de 4 % (CEDEAO, 2012). Il est à noter qu’au cours
de cette période, l’hydroélectricité est demeurée la première source d’électricité avec 65 % de la
production, les 35 % restants provenant essentiellement de la production d’énergie thermique. Les
plus grands producteurs sont le Nigéria, le Ghana et la Côte d’Ivoire.

En ce qui concerne l’approvisionnement en électricité de leurs citoyens, certains pays sont plus
avancés que d’autres. C’est le cas de Cabo Verde, du Ghana, du Nigéria, de la Côte d’Ivoire, du Sénégal
et du Mali, où la population a en théorie accès à l’électricité. Pour les autres pays, la possibilité d’accès
à l’électricité est plus limitée, en moyenne de 16 %.. Le tableau ci-après montre la situation de la
consommation électrique en 2009 dans les pays de la CEDEAO ainsi que les données sur l’intensité
énergétique au cours de la même période.

Tableau 13: Consommation électrique et intensité énergétique de la CEDEAO (2009)

Consommation Électricité Approvisionnement PIB en 2009 Intensité


Population
Pays électrique (MWh) par habitant énergie primaire total (millions de énergétique
2009
2009 (kWh) (EPT, ktep) dollars) (EPT/PIB)

Bénin 8 520 876 800 605 94 3 470 6 585 0,53


Burkina
15 224 780 699 789 46 3 260 8 348 0,39
Faso
Cabo
506 000 294 934 583 121 1 600 0,08
Verde
Côte
21 080 000 3 672 819 174 9 978 23 041 0,43
d’Ivoire
Gambie 1 766 100 204 600 116 506 983 0,51
Ghana 23 840 000 6 060 000 254 9 240 25 978 0,36
Guinée 10 498 597 855 600 81 4 275 4 164 1,03
Guinée-
1 449 000 65 100 45 219 834 0,26
Bissau
Libéria 4 128 600 311 600 75 227 879 0,26
Mali 14 528 662 979 767 67 3 500 8 964 0,39
Niger 14 693 112 580 977 40 4 000 5 254 0,76
Nigéria 154 880 872 18 140 000 117 108 250 168 567 0,64

38
Consommation Électricité Approvisionnement PIB en 2009 Intensité
Population
Pays électrique (MWh) par habitant énergie primaire total (millions de énergétique
2009
2009 (kWh) (EPT, ktep) dollars) (EPT/PIB)

Sénégal 12 767 600 2 328 372 182 2 940 12 769 0,23


Sierra
5 997 500 53 940 9 317 1 856 0,17
Leone
Togo 6 191 000 671 900 109 2 630 3 156 0,83
CEDEAO 296 072 699 35 720 003 121 152 933 272 978 0,56

Source : CEREEC, 2012.

L’Afrique de l’Ouest présente des besoins énergétiques énormes. Sa demande d’énergie est quasi
directement proportionnelle à la croissance économique. D’après une étude menée par Rosnes et
Vennemo (2008), près de 21,5 millions de nouveaux ménages auraient besoin d’être connectés au
réseau électrique pendant la période allant de 2006 à 2015 (voir tableau 14). Comparativement
à l’Afrique centrale, l’Afrique de l’Ouest présente un besoin considérable et pressant en termes
d’investissements dans les infrastructures au cours de la décennie.

Tableau 14: Besoins énergétiques de l’Afrique 2006-2015


Nouveaux
Nouvelle capacité de Nouvelles interconnexions ménages
Pool
production (MW) transfrontalières (MW) connectés
(millions)

Pool énergétique de l’Afrique centrale 4 395 831 2,5

Pool énergétique de l’Afrique de l’Est 17 108 3 878 20


Pool énergétique de l’Afrique australe 33 319 11 786 12,2
Pool énergétique de l’Afrique de l’Ouest 18 003 5 625 21,5
États insulaires 368 n.a. 1,2
Total 73 193 22 120 57,4

Source : Rosnes et Vennemo, 2008.

Les besoins en dépenses dans l’énergie en Afrique sont estimés à 4,6 milliards de dollars pendant la
période 2006-2015. Le pool énergétique de l’Afrique de l’Ouest concentre 12,3 milliards de dollars,
soit 30 % du total africain. Il est second après le pool de l’Afrique australe, qui affiche des besoins en
dépenses énergétiques de18, 4 milliards, soit 45,3 % du total du continent. Le total des besoins en
maintenance des infrastructures énergétiques en Afrique, estimé à 14 milliards de dollars de 2006 à
2015, relève des pools de l’Afrique australe et de l’Ouest pour presque 90 %, avec, respectivement,
60 % et 28,57 %, confirmant ainsi le poids des contraintes énergétiques dans le développement de
ces sous-régions.

39
Figure 4 Total des besoins en dépenses dans Figure 5 : Besoins en dépenses d’exploitation
l'énergie 2006-2015 (%) et de maintenance dans l'énergie : 2006-2015
(%)

2%
2%3%
20%
" 1%
" 8%
30%
29%

45% 60%
"

Source : Rosnes et Vennemo, 2008.

3. Cadre politico-institutionnel et initiatives sous-régionales dans


le domaine de l’énergie
3.1 Le cadre institutionnel régional

Le cadre institutionnel régional de l’énergie dans la CEDEAO est constitué de quatre institutions :

• le Centre de la CEDEAO pour les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique (CEREEC)


favorise la mise en place d’un marché régional de l’énergie renouvelable et l’efficacité énergétique ;

• le Système d’échanges d’énergie électrique ouest-africain (EEEOA) a entrepris le développement


d’un marché intégré de l’énergie électrique de réseau pour les 14 pays de la CEDEAO (Cabo
Verde n’est pas relié au continent) ;

• l’Autorité de régulation régionale du secteur de l’électricité des pays de la CEDEAO (ARREC),


qui est l’autorité de régulation des interconnexions électriques transfrontalières en Afrique de
l’Ouest ;

40
• WAPCo, une société à responsabilité limitée qui possède et exploite le gazoduc ouest-africain,
reliant les ressources gazières du Nigéria au Bénin, au Togo et au Ghana.

3.2 Les politiques et initiatives régionales dans le domaine de l’énergie

Pour faire face aux problèmes énergétiques dont souffrent les pays de la CEDEAO, plusieurs politiques
et initiatives régionales ont été mises en place, à savoir :

• Le Livre blanc de la CEDEAO

Il a été élaboré en 2006 pour la mise en place d’une politique régionale visant à accroître l’accès aux
services énergétiques dans les zones périurbaines et rurales d’ici 2015. Les récentes analyses sur
l’état d’avancement (CEDEAO, 2013a) du processus de mise en œuvre du Livre blanc indiquent que
la plupart des objectifs ne seront pas atteints d’ici 2015. Un nouvel engagement politique et une
action en faveur de solutions énergétiques durables sont donc nécessaires.

• L’Initiative « Énergie Durable pour tous (SE4ALL) » des Nations Unies

Cette initiative a été lancée par le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies en septembre
2012. D’ici 2030, l’objectif est de fournir un accès à l’énergie à tous, de doubler l’efficacité énergétique
ainsi que la part des énergies renouvelables dans le bouquet énergétique mondial. C’est dans ce
cadre que le CEREEC doit représenter la région CEDEAO pour toutes les questions d’énergies
renouvelables et d’efficacité énergétique.

• Le schéma directeur révisé de l’EEEOA

Approuvé en septembre 2011, il prévoit 30 projets de production d’électricité sélectionnés


et définis comme projets régionaux de l’EEEOA (Système d’échanges d’énergie électrique
ouest-africain), avec une puissance totale de 10,3 GW et un coût égal à 18 milliards de
dollars. La majeure partie de cette nouvelle puissance devrait être disponible entre 2017 et
2019.

41
Encadré 3: Le quatrième Forum régional de la régulation de l’électricité en Afrique de l’Ouest :
conclusions
Le quatrième Forum régional de la régulation de l’électricité a réuni durant deux jours (les
20 et 21 novembre 2013) à Banjul, en Gambie, 168 participants (ministères en charge de
l’énergie, opérateurs publics et privés des services d’électricité, groupes de consommateurs,
organisations de la société civile, banques et institutions financières, institutions régionales et
internationales, associations de régulateurs) venus des structures en charge de la régulation
du secteur de l’électricité des États membres de la CEDEAO sur le thème suivant : « Accélérer
le développement du marché régional de l’électricité de la CEDEAO : les enjeux de la
régulation ». Organisé par l’Autorité de régulation régionale du secteur de l’électricité de la
CEDEAO (ARREC), ce forum a voulu mettre en relief l’importance de la régulation pour le
fonctionnement optimal du marché de l’électricité au plan national et sous-régional.

Il est ressorti des échanges la nécessité de renforcer la solidarité énergétique régionale par le
développement des interconnexions et des échanges transfrontaliers, de mieux comprendre
et appliquer les conditions d’accès au financement tout en relevant l’importance pour les pays
et les opérateurs de remplir les conditions minimales garantissant la réussite des projets, de
développer le renforcement des capacités dans le domaine des arrangements contractuels,
des montages et bouclages financiers des projets au niveau des organes de régulation, et de
renforcer la maîtrise des aspects nécessaires au développement des échanges.

Source : CEDEAO, 2013b

• L’Initiative régionale sur l’énergie durable

L’objectif principal de cette initiative est de permettre aux citoyens de l’UEMOA d’accéder à une
énergie à bas prix, au sein d’un vaste marché d’échanges d’énergie électrique intégré et harmonisé
à l’échelon de l’Afrique de l’Ouest, produisant une énergie propre et s’appuyant sur un partenariat
public-privé dynamique.

• L’Initiative du CILSS sur la biomasse traditionnelle

Le Programme régional de promotion des énergies domestiques et alternatives au Sahel) est une
initiative du Comité permanent inter-États de lutte contre la sécheresse dans le Sahel (CILSS) mise
en œuvre entre 2001 et 2009, qui couvre sept pays de la CEDEAO (Burkina Faso, Cabo Verde,
Gambie, Guinée-Bissau, Mali, Niger et Sénégal). Le programme était axé sur la biomasse forestière,
la gestion durable des forêts et l’usage du bois de feu. Grâce à cette initiative, les pays du CILSS
déploient des efforts importants pour susciter l’engagement autour d’une politique nationale relative
aux combustibles domestiques à savoir : la gestion durable des forêts et l’utilisation efficace des
ressources (foyers améliorés et production de charbon de bois).

• La création du CEREEC

Le CEREEC est une agence spécialisée de la CEDEAO créée en 2010, dont le rôle est de promouvoir
les marchés régionaux des énergies renouvelables et l’efficacité énergétique en limitant le nombre
d’obstacles à l’expansion des technologies et services liés à l’énergie verte.

42
3.3 Activités de la CEDEAO dans le cadre de la mise œuvre des projets énergétiques

Faute d’énergie, l’Afrique de l’Ouest ne peut pas assurer les échanges suffisants entre ses pays
membres, ni mettre en place des industries durables, ou, de manière générale, améliorer les moyens
de subsistance de sa population, en particulier dans les zones rurales.

Pour faire face à cette situation, la Politique énergétique de la CEDEAO a été adoptée en décembre
1982. Le Protocole de l’énergie a été adopté en 2003 et le Plan général pour la génération et la
transmission de l’énergie en 2006. Le Système d’échanges d’énergie électrique ouest-africain, visant
à intégrer les capacités et les systèmes de production d’électricité nationaux dans un marché régional
unifié, afin de promouvoir le développement économique, a aussi été lancé en 2006.

Au niveau de la CEDEAO, ces activités se sont principalement focalisées sur les questions suivantes :

Participation à des initiatives majeures :

• l’initiative « Énergie durable pour tous » de l’ONU, en organisant un atelier sur l’accès aux services
énergétiques en Afrique de l’Ouest ;

• le premier forum sur le marché régional du gaz, qui s’est tenu à Accra en mars 2012 et organisé
par la Banque mondiale, en association avec la Société du gazoduc de l’Afrique de l’Ouest et
l’Autorité du gazoduc de l’Afrique de l’Ouest (AGAO).

Harmonisation des politiques énergétiques dans la région

• bilan de la mise en œuvre du Livre blanc UEMOA-CEDEAO pour l’accroissement de l’accès aux
services énergétiques des populations rurales et péri-urbaines en vue d’un alignement des délais
et des objectifs ; démarrage du projet Énergies de cuisson économique pour l’Afrique de l’Ouest
(PROCEAO), initié par la Commission de la CEDEAO et l’Agence allemande de coopération
internationale (GIZ), avec le financement de l’Union européenne, le 19 mars 2012 ;

• promotion du développement de l’électrification rurale à travers une réunion d’experts organisée


à Niamey du 27 au 29 mars 2012, au cours de laquelle il a été recommandé la mise en place d’un
vaste programme régional d’électrification rurale pour contribuer à l’atteinte des objectifs du Livre
blanc UEMOA-CEDEAO pour l’accès aux services énergétiques ;

• Une mission d’évaluation du projet d’alimentation en énergie électrique de la ville de Banjul en


Gambie a été effectuée du 11 au 15 août 2012.

Activités de soutien à l’accroissement de la fourniture d’énergie

• l’Autorité de régulation régionale du secteur de l’électricité de la CEDEAO (ARREC) a poursuivi le


processus de sa mise en place avec les deux catégories d’actions regroupant, d’une part, les tâches
de lancement de l’Autorité sur la période 2009-2013 et, d’autre part, les actions d’organisation et
de surveillance du fonctionnement du marché régional de l’électricité ;

• dans le cadre du projet d’interconnexion Ghana-Burkina Faso, l’ARREC a apporté son assistance
aux sociétés d’électricité VRA, GRIDCO et SONABEL pour l’élaboration du cadre commercial et des
documents contractuels de la ligne d’interconnexion 225 kV Bolgatanga (Ghana) - Ouagadougou
(Burkina Faso).

43
• la Commission, par l’intermédiaire du Centre et en collaboration avec le Forum mondial pour
l’énergie durable et l’Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI),
a organisé un forum de haut niveau sur le thème   « Baliser le chemin pour une énergie durable
pour tous en Afrique de l’Ouest ». La rencontre s’est tenue à Accra, du 29 au 31 octobre 2012.

3.4 Projets énergétiques en cours d’exécution

Avec le Système d’échanges d’énergie électrique ouest-africain (EEEOA), la Commission de la CEDEAO


et d’autres partenaires financiers et techniques tels que l’Agence française de développement (AFD),
la Banque européenne d’investissement (BEI), l’Union européenne (UE), la Banque mondiale, la
Banque africaine de développement (BAD), la Compagnie d’énergie électrique du Togo (CEET), la
Communauté électrique du Bénin (CEB), la Compagnie d’électricité du Ghana (ECG) et la Banque
d’investissement et de développement de la CEDEAO (BIDC), ont entrepris plusieurs projets. Le
tableau ci-dessous présente la liste des projets en cours d’exécution ainsi que les dates probables de
leur inauguration.

Tableau 15: Projets en cours d’exécution de l’EEEOA


Coût du projet
Bailleurs de Date probable
Projet (millions de Actions menées
fonds d’inauguration
dollars)

Les travaux sont en cours sur le


Projet
segment ghanéen. La procédure de
d’interconnexion BAD, KfW
présélection des soumissionnaires
330 kV Volta (Ghana) 149 et Banque 2014
est achevée pour le segment Togo-
– Lomé ‘C’ (Togo) – mondiale
Bénin et les propositions ont été
Sakété (Bénin)
lancées.

Financement obtenu pour le


Projet de ligne de
segment 330 kV Kumasi –
transmission de 330
Bolgatanga.
kV Aboadze (Ghana) AFD
174,8 Le traitement du financement est en 2016
– Prestea (Ghana)
cours et le cahier des charges pour
– Kumasi (Ghana) -
la ligne de transmission 330 kV et
Bolgatanga (Ghana)
pour les sous-stations est achevé.

Les études d’évaluation de l’impact


environnemental et social sont
Projet de ligne de
achevées et l’Agence ghanéenne
transmission 161 kV
19,1 Non déclaré de protection de l’environnement a 2014
Tumu (Ghana) – Han
octroyé le permis environnemental.
(Ghana) - Wa (Ghana)
Les travaux de construction ont
démarré.

Le contrat de service de
Projet
transmission signé entre SONABEL
d’interconnexion
Banque et GRIDCo a été exécuté et
225 kV Bolgatanga
111 mondiale, AFD le contrat d’achat et de vente Non déclaré
(Ghana) -
et BEI d’électricité entre VRA et SONABEL
Ouagadougou
devrait être prêt pour exécution d’ici
(Burkina Faso)
à décembre 2012.

Le Gouvernement guinéen a
Centrale
émis le permis environnemental
hydroélectrique Banque
236 pour le projet, le processus est 2013
60 MW Felou (OMVS- mondiale et BEI
pratiquement terminé dans les
SOGEM)
autres pays concernés.

44
Le traitement du financement est en
Projet cours.
d’interconnexion 8,6 (pour Le Gouvernement guinéen a
Banque
225 kV Côte d’Ivoire – études de pré- émis le permis environnemental -
mondiale et BEI
Libéria - Sierra Leone investissement) pour le projet, le processus est
– Guinée pratiquement terminé dans les
autres pays concernés.

Le Gouvernement béninois a
Centrale régionale acheté des terres d’une superficie
de production totale de 46 hectares déclarées en
d’électricité à Maria 564 Non déclaré zone franche. Sithe Global Power 2017
Gleta (Bénin) d’une Ventures LLC a été retenu comme
capacité de 450MW partenaire privé pour aider l’EEEOA
à exécuter ce projet.

50 hectares ont été identifiés à


Centrale régionale Domunli au Ghana et le processus
de production d’obtention d’un titre de propriété
d’électricité à auprès du Gouvernement est bien
564 Non déclaré 2018
Aboadze/Domunli avancé. Sithe Global Power Ventures
(Ghana) d’une capacité LLC a été retenu comme partenaire
de 450 MW privé pour aider l’EEEOA à exécuter
ce projet.

UE, la Société
nationale
d’électricité du
Libéria (LEC)
Les travaux sont achevés en Côte
Projet transfrontalier et l’ancienne
d’Ivoire. Au Libéria, tous les isolants
HTA Côte d’Ivoire Société
12.6 et les traverses HTA ont été installés 2013
– Libéria (1er projet d’opération
dans les comtés de Grand Geddeh
énergétique ACP-UE) ivoirienne
et de Nimba.
d’électricité
(SOPIE)
(rebaptisée CI-
Energies)

Projet transfrontalier Les études de pré-investissement


HTA Ghana – Sud UE, ECG, CEB du projet ont été adoptées et le
3 2014
Togo (2ème projet et CEET processus de recrutement des
énergétique ACP-UE) entreprises a été lancé.

Projet transfrontalier
HTA Bénin – Nord UE, ECG, CEB
2,76 2014
(2ème projet et CEET
énergétique ACP-UE)

Source : CEDEAO, Rapport annuel, 2012

L’EEEOA s’inscrit dans cette optique de développement des pools énergétiques régionaux, qui
subdivise l’Afrique en cinq grands réseaux électriques régionaux. Le processus octroie un statut
d’agence spécialisée auprès de leur communauté économique régionale respective aux différents
réseaux : l’Eastern Africa Power Pool pour le Marché commun de l’Afrique de l’Est et de l’Afrique
australe (COMESA), le Central Africa Power Pool pour la Commission économique des États de
l’Afrique centrale (CEEAC), le Southern Africa Power Pool pour la Communauté de développement de
l’Afrique australe (SADC), le Système d’échanges d’énergie électrice ouest-africain pour la CEDEAO
et le Comité maghrébin de l’électricité (COMELEC) pour l’Union du Maghreb arabe (UMA).

Alors que ces quatre pools d’énergie sont déjà fonctionnels en Afrique subsaharienne, les quantités
d’électricité échangées entre les pays demeurent encore très faibles. La majorité des échanges actuels
se produisent dans le cadre du Southern Africa Power Pool.

45
Le renforcement de l’EEEOA devra passer par la modernisation de la législation et le développement
de mécanismes innovants et transparents de contractualisation et de partenariat public-privé dans
le but de renforcer l’investissement. La bonne gouvernance au sein des institutions publiques est
une condition préalable au succès des producteurs indépendants, tandis que le renforcement et
la sécurisation du cadre juridique et réglementaire doteront la sous-région d’un levier d’attractivité
considérable pour les investisseurs (Harelimana, 2014).

L’intégration efficace des marchés de l’énergie nécessitera des investissements en infrastructures


physiques (lignes électriques, gazoducs et oléoducs) et un meilleur fonctionnement du marché de
l’énergie. Une meilleure intégration des marchés de l’énergie nécessitera des actions communes.

4. Défis majeurs
L’état actuel du système énergétique de l’Afrique de l’Ouest entrave le développement social,
économique et industriel de toute la région. Les pays font face simultanément aux défis liés à l’accès
à l’énergie, à la sécurité énergétique et aux changements climatiques.

• Faire face à la précarité énergétique

La pénurie d’électricité en zone urbaine et l’accès plus que limité à des services énergétiques
modernes, abordables et fiables dans les zones rurales sont intimement liés à un ensemble de
problèmes économiques, sociaux, environnementaux et politiques. Dans la région, alors que les
zones urbaines ont tendance à utiliser des solutions énergétiques diversifiées (électricité, charbon de
bois, pétrole, etc.), les zones rurales dépendent toujours de la biomasse traditionnelle pour satisfaire
leurs besoins énergétiques pour la cuisine et l’éclairage. Au regard de ce constat, il faudrait améliorer
la disponibilité et l’accès à l’électricité en encourageant le secteur privé à investir dans l’électrification
des zones rurales.

• Assurer la sécurité énergétique

Les systèmes énergétiques de la région sont confrontés à des problèmes liés à l’écart croissant entre la
demande prévue et les capacités d’approvisionnement existantes, ainsi qu’aux ressources financières
limitées. En plus de la pénurie d’électricité, s’ajoute le problème de délestage lié aux pertes électriques
lors de la production, de la transmission et de la distribution. Il est donc nécessaire de diversifier les
ressources car les pays de la région sont de plus en plus dépendants des importations de combustibles
fossiles et demeurent vulnérables aux fluctuations de leurs prix. De plus, la dépendance croissante
envers le pétrole/gazole ou le fioul lourd, coûteux pour la production électrique, n’arrange pas les
choses. Cela entraîne une élévation des tarifs de consommation et restreint par conséquent l’accès
au marché pour le financement des projets de développement.

• Prendre en compte les changements climatiques

Le nouveau défi est celui des changements climatiques. Cette préoccupation supplémentaire s’est
ajoutée aux contraintes énergétiques de la région CEDEAO. Il est urgent de tenir compte des
nouveaux risques induits par les changements climatiques dans les programmes énergétiques de
la sous-région. Cela est particulièrement important en ce qui concerne l’énergie hydraulique, pour
laquelle il faut tenir compte de la sensibilité au déficit pluviométrique en raison des changements de
régime et de débit des cours d’eau.

46
5. Perspectives régionales et impact sur le commerce sous-
régional
Plusieurs pays de la région ont adopté ou sont en train d’élaborer une politique en matière d’énergie
en proposant des structures institutionnelles favorables. La Commission de la CEDEAO, dans cet
élan, a mis en place une politique en matière d’énergies renouvelables et d’efficacité énergétique
en septembre 2012. Un grand nombre de barrières pour mettre en œuvre efficacement les mesures
sur l’efficacité énergétique ont été identifiées par les missions d’état des lieux. Ainsi, pour les lever et
renforcer les bénéfices de l’efficacité énergétique dans la sous-région, il y a un besoin urgent d’action
des États, tant au niveau national que régional ; des actions ciblées dans des secteurs énergétiques
clés ainsi que des actions transversales sont nécessaires.

• Politiques et outils législatifs et réglementaires pour l’efficacité énergétique

La mise en place de cadres législatifs et de régulation, ainsi que le développement et la mise en


œuvre de stratégies et de plans nationaux d’efficacité énergétique, sont indispensables pour que la
CEDEAO mobilise son potentiel énergétique hétérogène pour le développement de la zone de libre-
échange. Les mesures d’efficacité énergétique doivent concerner les différents usages de l’énergie
et la mobilisation de ses diverses sources, et associer les nombreux acteurs et parties prenantes. Les
autorités publiques doivent coordonner leurs différentes actions, prises en charge par de nombreux
organismes. La Commission de la CEDEAO devra renforcer son rôle essentiel d’aide aux États en
coordonnant leurs efforts respectifs, pour une meilleure synergie et efficacité dans la production
d’énergies et la gestion des infrastructures régionales y relatives.

• Capacités pour améliorer l’efficacité énergétique

Les États membres et la CEDEAO dans son ensemble se doivent d’élaborer les activités nécessaires
pour concevoir efficacement, mettre en place et gérer les mesures d’efficacité énergétique. Le
développement des capacités est un processus sur le long terme, nécessitant une approche systémique,
et qui doit reposer sur des organisations bien structurées et un personnel qualifié. Renforcer ces
capacités pour améliorer l’efficacité énergétique demande des actions dans de nombreux secteurs :
formation et qualification ; recherche et développement ; projets de démonstration ; production,
distribution et usage de technologies énergétiquement efficaces ; création et renforcement des
institutions nationales pour concevoir et mettre en place des politiques et programmes d’efficacité
énergétique ; amélioration de la coordination entre différents acteurs et institutions aux échelles
nationale et régionale.

Renforcer la sensibilisation et la visibilité de l’efficacité énergétique est nécessaire pour modifier les
comportements de consommation d’énergie et les orienter vers des pratiques plus efficaces.

• Financement des énergies durables et promotion des investissements

Des mécanismes financiers opérationnels sont nécessaires pour mettre en œuvre une politique sur
l’efficacité énergétique dans la région de la CEDEAO. L’accès au financement est une des clefs pour
mettre en œuvre et développer des technologies énergétiquement efficaces, et ainsi concrétiser
les économies d’énergie et les économies monétaires en découlant. Les fonds peuvent venir de
différentes sources et par différentes voies. Une gamme de modes de financement est disponible,
depuis les modèles coordonnés par les gouvernements jusqu’aux partenariats public-privé, en passant

47
par les compagnies de services énergétiques, qui font intervenir des acteurs privés. L’objectif à long
terme est de mettre en place des mécanismes de financement innovants devant accompagner la
création d’un environnement favorable à l’efficacité énergétique pour qu’elle devienne durable et
économiquement profitable dans la consolidation de la zone de libre-échange ouest-africaine.

48
CHAPITRE III. INFRASTRUCTURES RELATIVES
AUX TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION ET
DE LA COMMUNICATION ET LA ZONE DE
LIBRE-ÉCHANGE OUEST-AFRICAINE
Les technologies de l’information et de la communication (TIC) permettent d’accélérer le processus
de l’intégration de la sous-région et de renforcer la prospérité et la capacité de transformation
sociale. Les TIC ont connu cette dernière décennie une forte expansion dans la sous-région grâce à la
révolution de la téléphonie mobile et à la croissance non négligeable de l’accès à Internet.

Conscientes du rôle des TIC dans le développement socio-économique de la sous-région, la CEDEAO


et l’UEMOA ont mis en place des programmes communs pour harmoniser les politiques et cadres
réglementaires relatifs aux TIC.

Le présent chapitre propose un état des lieux des infrastructures des TIC en Afrique de l’Ouest en
deux sections : la première présente une analyse descriptive du niveau de pénétration de la téléphonie
fixe et mobile et de la connexion Internet ; la deuxième met en évidence quelques obstacles et défis
liés aux infrastructures des TIC dans la sous-région.

1. État des lieux des TIC en Afrique de l’Ouest


Pour atteindre ses objectifs en matière d’intégration des économies de l’Afrique de l’Ouest, la CEDEAO
appuie le développement d’un marché régional ouest-africain viable des télécommunications. Ses
principaux objectifs consistent tout d’abord à harmoniser les politiques et à mettre en place un cadre
juridique et des dispositions réglementaires en vue de la promotion d’un marché unique et libéralisé
des télécommunications au sein de la Communauté.

La Communauté est également engagée dans le développement d’infrastructures régionales viables et


modernes des télécommunications à travers l’exécution du programme INTELCOM II, et la promotion
d’infrastructures alternatives de large bande et de câbles sous-marins. Le programme INTELCOM
II concerne 32 liaisons de télécommunication inter-États formant l’ossature d’une infrastructure
régionale de large bande, qui sera connectée au réseau international mondial par le biais de câbles
sous-marins. Parmi ces 32 liaisons, 55 % étaient installées fin décembre 2009 et 45 % d’entre elles
étaient opérationnelles.

La CEDEAO, en collaboration avec l’Assemblée des régulateurs des télécommunications en Afrique de


l’Ouest, a mis en place un cadre de contrôle permettant d’assurer la réglementation de l’exploitation
des câbles sous-marins prévus pour assurer la connexion de la sous-région au reste du monde à un
coût compétitif.

L’UEMOA a aussi mis en place un marché unique en adoptant un ensemble de directives régissant
l’octroi des licences, l’interconnexion, le service universel, la gestion du spectre radioélectrique et le
plan de numérotage. La CEDEAO a également défini un cadre unique, largement inspiré des directives
de l’UEMOA, mais moins contraignant (Performances Management Consulting, 2007).

49
En 2012, les connexions terrestres inter-États en fibre optique suivantes ont été achevées: Burkina
Faso–Niger, Burkina Faso–Ghana et Ghana–Togo. Par ailleurs, tous les États membres côtiers à
l’exception de la Guinée-Bissau ont été connectés aux câbles sous-marins avec au moins un point
d’atterrissage. Grâce à ces nouvelles connexions terrestres et aux points d’atterrissage, les trois pays
enclavés (Burkina Faso, Mali et Niger) disposent désormais de deux voies d’accès aux câbles sous-
marins.

Plus récemment, les réseaux de fibres optiques ont été développés pour gérer les niveaux de trafic
accrus générés par le grand nombre d’abonnés à la téléphonie et un nombre croissant d’utilisateurs
d’Internet à large bande. Cette infrastructure terrestre est également complétée par les câbles sous-
marins à fibres optiques qui, de plus en plus, connectent la sous-région au reste du monde.

D’importants investissements ont été réalisés par le secteur privé dans la construction de nouveaux
câbles sous-marins pour baisser les coûts de la connexion Internet internationale. Le système de
câble pour l’Afrique occidentale (West African Cable System) bénéficie du soutien des plus gros
opérateurs sud-africains – MTN, Neotel, Telkom et Vodacom – qui gèrent le trafic le long de la côte
ouest.

Le secteur des télécommunications a connu des mutations importantes depuis les années 1990 grâce
aux réformes structurelles entreprises par les États et aux innovations technologiques, notamment
l’essor de la téléphonie mobile et de l’Internet. Les pays ont progressivement libéralisé le secteur,
privatisé partiellement les opérateurs publics de téléphone fixe et adapté les cadres juridiques et
réglementaires. En retour, les pays ont connu une progression remarquable des capacités et de la
demande des services de télécommunication.

Ces améliorations significatives de la connectivité Internet réalisées depuis cinq ans, permises par un
investissement considérable dans les infrastructures de télécommunications, en particulier en termes
de connectivité intercontinentale et de réseaux terrestres à fibre optique, ne se sont pas toujours
traduites par une amélioration de la qualité et de l’accès aux services, et encore moins par une baisse
des prix.

En effet, dans de nombreux pays, le développement des services d’accès à Internet est encore
entravé en ce qui concerne la connectivité terrestre entre les câbles sous-marins, les points d’échange
Internet (IXP), l’infrastructure d’accès du « dernier kilomètre » (câblée ou sans fil) et les fournisseurs
d’accès Internet, qui fournissent l’accès aux utilisateurs finaux. Des mesures sont nécessaires pour
supprimer les barrières à l’entrée et à l’expansion dans le marché, donner des règles claires, et assurer
un leadership fort pour atteindre les objectifs en matière de TIC (Schumann et Kende, 2013).

Pour positionner l’Afrique de l’Ouest dans le faisceau mondial des inforoutes, il sera nécessaire
de développer les infrastructures de télécommunication, non seulement à l’échelle des pays, mais
aussi à l’échelle de la sous-région par le biais des interconnexions intra-sous régionales, intégrant le
développement des points d’échange Internet, pour réduire les coûts d’accès à Internet. La poursuite
des politiques de libéralisation et d’harmonisation des réglementations demeure capitale pour plus
d’investissement et de compétitivité du secteur (Performances Management Consulting, 2007).

50
Figure 6: Câbles sous-marins desservant les pays de l’Afrique de l’Ouest

Source : African Undersea Cables (2013).

2. Téléphonie fixe : des taux de pénétration faibles dus aux


difficultés technologiques
La sous-région présente un faible taux de pénétration des services de téléphonie fixe. À l’exception
de Cabo Verde, qui a atteint un taux de 15 % en 2012, le taux de pénétration n’a pas dépassé le seuil
de 4 % pour les autres pays de la sous-région, ce qui explique les difficultés actuelles des opérateurs
de téléphonie fixe.

La faible pénétration des services se reflète de prime abord dans le développement limité des
infrastructures, qui restent encore peu fiables et sont obsolètes dans certains pays. La lourdeur des
investissements sur le fixe constitue une barrière qui n’incite guère les investisseurs à se lancer sur ce
marché (Performances Management Consulting, 2007).

51
Figure 7 : Évolution des abonnements au téléphone fixe par pays

Togo
Sierra Leone 2013
Senegal
2012
Nigeria
Niger 2011
Mail 2010
Liberia 2009
Guinea- Bissau 2008
Guinea
Ghana 2007
Gambia 2006
Cote d’voire 2005
Cape Verde
Burkina Faso
Benin
0 500,000 1,000,000 1,500,000 2,000,000

Figure 8 : Abonnements au téléphone fixe pour 100 habitants


Togo
16.00
14.00
12.00
2005 2006 2007
10.00
8.00
6.00 2008 2009 2010

4.00
2.00 2011 2012 2013
0.00
au

a
o

so
ire

e
a
ria

na
e

ria

ne
g

l
ga

n
rd
bi
on

ai

ss
To

Fa
ge

ni
vo
be

ha

am

Ve
ge

ui
ne
Le

Be
Bi
Ni

d’
Li

a
Ni
Se

pe

in
a-
ra

te

rk
ne
er

Co

Ca

Bu
Si

ui
G

Source : ITU World Telecommunication/ICT Indicators Database.

Le nombre d’utilisateurs de téléphonie fixe n’a beaucoup évolué durant cette dernière décennie.
Alors qu’ailleurs dans le monde, les opérateurs de téléphonie fixe disposaient d’une assise solide
quand la téléphonie mobile a fait son apparition, la faiblesse du taux de pénétration et la rareté des
lignes fixes de l’Afrique de l’Ouest ont permis aux nouveaux opérateurs de téléphonie mobile d’avoir
un impact important dans la sous-région. La situation varie beaucoup selon les pays, le Nigéria, le
Sénégal, la Côte d`Ivoire et le Ghana concentrant 63 % des abonnements de la sous-région en 2013.

52
Figure 9: Part des différents pays de la CEDEAO dans les abonnements au téléphone fixe en 2013
Togo
3% Benin
8%
Sierra Leone
1% Burkina Faso
7%

Senegal Cape Verde


17% 3%

Côte d'Ivoire
14%

Nigeria
18%
Gambia
3%

Mali
Niger 7% Liberia Ghana
5% 0% 14%

Guinea-Bissau
0%
Guinea
0%

Source : ITU World Telecommunication/ICT Indicators Database.

3. La pénétration rapide de la téléphonie mobile


Les infrastructures de télécommunications en Afrique de l’Ouest ont connu une croissance rapide
depuis la fin des années 1990. La plupart de cette croissance a été enregistrée dans les réseaux
mobiles, utilisant principalement les technologies sans fil.

L’Afrique de l’Ouest est l’une des régions du monde où le développement du secteur de la téléphonie
mobile a été le plus rapide en nombre d’abonnés. Pour l’année 2013, le taux de pénétration du marché
a atteint un niveau supérieur à 100 % pour certains pays, avec cependant des disparités à noter entre
les différents pays. Cette augmentation du nombre d’abonnés a dopé le taux de pénétration du
mobile, qui est passé de 0,6 % à 32 %.

En Afrique de l’Ouest, les opérateurs ont concentré leurs investissements sur les réseaux de deuxième
génération (2G), même si certains pays comme le Sénégal, le Ghana, Cabo Verde et le Nigéria utilisent
les réseaux à haut débit de troisième, et même de quatrième génération (3G et 4G). Néanmoins, le
taux d’abonnés à des services AMRC (accès multiple par répartition en code) à large bande et AMRC
HSPA (High Speed Packet Access – haut débit mobile intégré) reste très faible. Début 2009, on
dénombrait seulement 5 millions d’abonnés – soit 2,3 % du total des abonnés en Afrique de l’Ouest,
dont 50 % sont localisés au Nigéria seulement.

53
Figure 10: Parts des abonnements à la Figure 11 : Évolution des abonnements
téléphonie mobile en Afrique de l'Ouest en à la téléphonie mobile pour 100
2013 habitants en Afrique de l’Ouest
140.00

120.00
2000
Sierra Leone
2% Cape Verde 2001
Burkina 0% 100.00
Senegal Togo Benin Faso 2002
5% 2% 4% 4%
Côte d'Ivoire 2003
7%
Gambia 80.00 2004
1%
Ghana 2005
11%
2006
Guinea 60.00
3%
Nigeria 2007
Mali
49% 8% Guinea -Bissau
0% 2008
40.00
Liberia 2009
1%
2010
Niger
3% 20.00 2011

2012

2013
0.00
o de ia a nea sau eria
nin as er oire b

go
e
ali

l
n i is

ga
Se ia

on
b

ge
Be na F pe V d’iv Gam ha Gu - B Li

To
r
ne
ge

Le
Ni
ki Ca te G a

Ni
r ne

ra
Bu Co i

er
u
G

Si
Source : ITU World Telecommunication/ICT Indicators Database

Le marché de la sous-région reste dominé par le Nigéria, qui représente 43 % du nombre total
d’abonnés mobiles en Afrique de l’Ouest et plus de 60 % de ses abonnés à Internet à large bande. Le
rôle du Nigéria dans la croissance du marché du mobile a été particulièrement prononcé au milieu des
années 2000 alors que depuis 2006, les marchés dans d’autres pays ont pris leur envol et contribuent
plus substantiellement à la croissance du marché régional. Globalement, le taux annuel de croissance
de l’accès à la téléphonie mobile a ralenti entre 2000 et 2003, mais a repris en 2004. Il a ensuite
ralenti encore une fois, et en 2007 et 2008, il était d’environ 40 %.

Le marché de la téléphonie mobile est nettement plus concurrentiel que celui de la téléphonie fixe,
et il est surtout dominé par quelques acteurs étrangers sur un marché concentré. Le top 7 contrôlait
65 % du marché du mobile en Afrique en 2005, soit environ 89 millions d’abonnés (Performances
Management Consulting, 2007).

4. Des connexions Internet faibles et des chaînes de valeur


pauvres en maillons industriels
L’Internet constitue le moteur de la révolution numérique du XXIe siècle. L’Afrique subsaharienne
en général demeure une région où la connexion Internet internationale est peu développée et son
accès se fait essentiellement par lignes commutées à bas débit. Le taux de pénétration de l’Internet
en Afrique de l’Ouest reste encore très faible, comme en témoigne le nombre d’utilisateurs pour cent
habitants pour l’ensemble des pays de la sous-région.

54
Figure 12: Taux de croissance (%) annuel de l’utilisation d’Internet dans certains pays ouest-
africains, 2007-2011

Mali

Cote d'Ivoire

Burkina Faso

Gambie Taux de croissance (%)

Ghana

Senegal

Nigeria

0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50

Source : ITU World Telecommunication/ICT Indicators Database.

En 2013, le nombre d’utilisateurs Internet est estimé en moyenne à 10,27 % de la population en


Afrique de l’Ouest. Ce taux relativement faible masque des disparités importantes entre les pays. En
effet, ce taux est principalement porté par trois pays : Cabo Verde (37,5 %), le Nigéria (38 %) et le
Sénégal (20,90 %), qui affichent des taux de croissance du nombre d’utilisateurs supérieurs à 20%,
sur la période 2007-2011.

Ce taux d’accès faible cache un dynamisme important en termes de taux de croissance du nombre
d’utilisateurs du réseau. La sous-région affiche une évolution assez satisfaisante du taux de croissance
du nombre d’utilisateurs d’Internet. Ce taux est estimé en moyenne à 20,35 % entre 2006 et 2013.
Le graphique ci-après montre l’évolution du nombre d’utilisateurs d’Internet pour cent personnes
ainsi que la dynamique du parc Internet au Mali.

Comme l’Afrique entière, la zone CEDEAO se caractérise par une chaîne de valeur télécom réduite
à la distribution des produits et services, avec des maillons industriels quasiment inexistants et dont
les coûts élevés demeurent un handicap majeur au développement (Performances Management
Consulting, 2007). Les coûts d’accès élevés témoignent d’une faiblesse des infrastructures et de la
basse connectivité intracontinentale.

55
Figure 13 : Évolution du parc Internet mobile au Mali (2010-2012)

1400000
1205886
1200000

1000000

800000 725464

600000

400000
200666
200000

0
2010 2011 2012

Source : ITU World Telecommunication/ICT Indicators Database et Rapport de l’Autorité malienne de régulation des télécommunications/TIC et des
Postes

Figure 14 : Part en % des individus utilisant Internet dans les pays de la CEDEAO (2000-2013)

40.00

35.00 Benin

30.00 Burkina Faso

25.00 Cape Verde

20.00 Cote d’ivoire


15.00
Gambia
10.00
Ghana
5.00

0.00 Guinea
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2012

Source : ITU World Telecommunication/ICT Indicators Database et Rapport de l’Autorité malienne de régulation des télécommunications/TIC et des
Postes

Pour l’essentiel, la connectivité de la sous-région demeure assurée par des stations terrestres de
télécommunication par satellite et des antennes satellitaires VSAT (very small aperture terminal).
Intelsat, le leader mondial des services commerciaux par satellite, couvre la totalité de l’Afrique
subsaharienne. Des initiatives sont engagées dans la sous-région, mais pour l’instant, elle doit se
contenter des satellites et n’a accès qu’à 0,07 % de la capacité de la bande passante internationale. Le
Ghana, le Nigéria et le Sénégal concentrent la plus forte demande potentielle de connexion
internationale.

5. La régulation du secteur des TIC : acteurs et limites


L’évaluation des progrès réalisés dans les trois piliers essentiels de la réforme du secteur des
télécommunications en Afrique de l’Ouest, à savoir la libéralisation, la privatisation et la régulation,
montre que les deux premières composantes ont beaucoup évolué durant les deux décennies, mais

56
de nos jours, l’essentiel des enjeux porte sur la régulation du secteur, qui demande à être renforcée
avec notamment la problématique de l’indépendance du régulateur vis-à-vis de l’État et de l’opérateur
historique, ainsi que la question de la transparence des procédures d’attribution des licences (Institut
Panos Afrique de l’Ouest, 2011).

En Afrique de l’Ouest, les acteurs clés de la régulation des TIC sont entre autres l’Assemblée des
régulateurs des télécommunications d’Afrique de l’Ouest (ARTAO), le Comité des régulateurs des
télécommunications (CRETEL) et la Conférence des opérateurs et fournisseurs de services de
télécommunication des États membres de l’UEMOA (COFTEL), pour lesquels il s’impose de renforcer
les capacités et consolider les synergies.

Encadré 4 : Assemblée des régulateurs des télécommunications de l’Afrique de l’Ouest


(ARTAO) : défis

Créée à Bamako en mai 2002, l’ARTAO est née de la volonté des régulateurs des pays membres
de la CEDEAO de se doter d’une assemblée régionale, répondant ainsi à l’impérieuse nécessité
de créer un cadre harmonisé capable de stimuler le développement des réseaux et services de
télécommunication dans la sous-région.

Les objectifs de l'ARTAO sont définis à l'article 3 de ses Statuts et sont notamment les suivants:

• Œuvrer en faveur de l'élaboration et de l'harmonisation des réglementations en matière de


fourniture et de tarification des services de télécommunication dans les pays de la sous-région;

• Contribuer à l'élaboration de politiques visant à faciliter l'accès universel et la pénétration des


télécommunications dans les zones rurales et mal desservies de la sous-région ;

• Œuvrer en faveur de la réalisation de normes de service harmonisées dans la sous-région et


de l'adoption de normes techniques et qualitatives harmonisées en matière d'applications et
d'équipements de télécommunication dans la sous-région.

Les mécanismes de mise en œuvre de ces objectifs sont entre autres :

• Délibérer sur des questions liées à la réglementation des télécommunications et faire les
recommandations qui s'imposent aux gouvernements des pays membres ou à d'autres autorités
compétentes, ou prendre toute autre mesure jugée appropriée ;

• Collaborer avec, ou participer comme membre consultatif ou associé ou dans une autre
capacité, aux activités de n'importe quelle organisation, institution ou corps constitué dont
les objectifs incluent la réglementation des télécommunications, en particulier, l'association de
réglementation des télécommunications des autres groupements économiques sous-régionaux
d'Afrique ainsi que les autres organisations internationales et les programmes publics ou privés
participant ou s'intéressant à la création et à la modernisation des structures des services de
télécommunication en Afrique ;

• Coordonner l'utilisation des ressources rares dans les domaines de la réglementation des
télécommunications et intensifier la coopération entre les membres au moyen de l'utilisation
commune des installations spécialisées ;

57
• Prendre toute autre initiative et adopter toute autre mesure jugée nécessaire ou souhaitable
pour la réalisation de ses objectifs.

L’ARTAO demeure un outil essentiel de la CEDEAO dans ses efforts visant l’harmonisation
des politiques sur les NTIC et la régulation du secteur. L’ARTAO est la dernière association de
régulateurs à avoir adopté des lignes directrices sur l’octroi de licences, l’accès universel, la
gestion des fréquences, la numérotation, l’interconnexion, la gestion des données, la migration
numérique et la cybersécurité.

Source : UIT, 2009a

À ce jour, au sein de la CEDEAO et de l’UEMOA, peu d’États membres ont appliqué le cadre juridique
relatif aux télécommunications et très peu d’avancées ont été enregistrées sur la question de la
cybercriminalité. En plus du risque de double emploi et d’incompatibilité entre les règles de l’UEMOA
et la CEDEAO, les organisations régionales éprouvent des difficultés à assurer le suivi de la mise en
œuvre de règles régionales au niveau national, même lorsque ces règles ont force obligatoire, compte
tenu notamment de leur pouvoir d’intervention restreint.

Le recours croissant aux réseaux large bande a rendu l’environnement réglementaire beaucoup plus
complexe et exigeant. La transition d’une régulation verticale vers des cadres réglementaires axés sur
l’utilisateur, visant à offrir un accès financièrement abordable au haut débit et attachés à la protection
du consommateur, au respect de la vie privée et à la cybersécurité, s’accompagne de toute une série
de problématiques nouvelles (BAD, 2013).

Malgré les initiatives en matière de régulation et d’harmonisation des politiques, la sous-région peine
à installer un accès large bande à un coût abordable, et à développer les applications électroniques
et les compétences nécessaires à une économie de l’information. Les différentes langues et cultures
ainsi que la diversité de l’environnement des TIC dans la région s’ajoutent aux principaux freins que
sont le prix élevé de la large bande, les difficultés d’application des politiques régionales au niveau
national et le manque de compétences techniques.

Si l’UEMOA ne prévoit aucune disposition en ce qui concerne la protection des droits des utilisateurs,
la CEDEAO consacre un nombre important de ses initiatives à l’élaboration de dispositions sur la
cybersécurité, confirmant ainsi les besoins en matière d’harmonisation des politiques relatives aux
TIC dans la sous-région.

6. Quelques contraintes et enjeux des TIC dans la sous-région


Malgré un réel potentiel de développement et des opportunités certaines, le secteur des TIC en Afrique
de l’Ouest souffre d’un environnement global peu favorable et de la faiblesse des infrastructures de
base.

Les services de télécommunication défectueux ont tendance à isoler les États ouest-africains
les uns des autres. Des services de communication difficilement accessibles, surtout pour les
télécommunications internationales, une dépendance extrême à l’égard des technologies satellitaires
coûteuses et l’absence d’autres solutions concurrentielles grâce à des câbles sous-marins sont autant
de contraintes qui limitent sérieusement les perspectives de croissance et de développement des
pays, ainsi que la capacité du sous-secteur à promouvoir le commerce intra-régional.

58
Il faut noter la faible tendance à la mutualisation des infrastructures, avec des propensions limitées
à l’interconnexion, ce qui induit des coûts élevés des services vendus au consommateur final , tandis
que la course aux zones urbaines rentables influe sur la couverture nationale en défaveur des zones
rurales peu peuplées.

Les disparités géographiques sont telles que les pays côtiers sont favorisés par l’atterrissement des
câbles sous-marins au fond de l’Atlantique. Les pays de l’arrière-pays restent à leur merci, tandis que
les programmes régionaux ouest-africains (CEDEAO, UEMOA et NEPAD) tardent à se concrétiser
faute de financement endogène. Il en résulte une disparité criante entre la connexion en Côte d’Ivoire
et au Sénégal d’une part, et le Mali, le Niger et le Burkina Faso de l’autre (Diallo Iam, 2013).

Parmi les autres obstacles qui freinent le développement des infrastructures des TIC dans la sous-
région, on peut citer :

• L’absence de cadres politiques et de régulation sur les TIC au niveau de la sous-région : la


coordination et l’harmonisation des lois dans l’ensemble de la sous-région est essentielle si l’on
veut que les politiques, la législation et les pratiques résultant de la libéralisation dans chaque
pays ne freinent pas le développement de marchés régionaux compétitifs.

• La mauvaise qualité du service et le coût élevé du matériel : le faible taux de pénétration


d’Internet et le coût très élevé de sa connexion tiennent essentiellement à l’absence de réseaux
internationaux de haute capacité. Les tarifs de l’accès à Internet en Afrique subsaharienne sont
les plus coûteux au monde. L’Union internationale des télécommunications et la Banque mondiale
estiment qu’en moyenne, le coût d’une connexion haut débit y est d’environ 100 dollars pour
110 kilobits par seconde. En Europe et en Asie centrale, le même type de connexion revient à
20 dollars alors qu’en Amérique latine et aux Caraïbes, il s’établit à 7 dollars. Les pays du Moyen-
Orient et d’Afrique du Nord paient quant à eux moins de 30 dollars. En l’absence d’une véritable
concurrence, les opérateurs peuvent donc imposer un prix supérieur au coût marginal de leur
service.

• L’absence de données durables sur le secteur des TIC aux niveaux national et sous-
régional : l’absence d’une base de données centralisée sur les TIC constitue un obstacle à
l’élaboration, la mise en œuvre et le suivi-évaluation rapides de projets régionaux portant
sur les TIC. Des efforts ont été engagés par plusieurs partenaires du développement pour
constituer leurs propres bases de données mais la fiabilité des systèmes d’information et
des données demeure un défi majeur (Institut Panos Afrique de l’Ouest, 2011).

• La pénurie de ressources humaines qualifiées dans le secteur des TIC : cela est principalement
dû à la faible rémunération de la main-d’œuvre dans le secteur, à l’absence d’un environnement
de travail propice, mais aussi à des faibles capacités de formation technique.

• Les écueils liés à la privatisation des opérateurs historiques : le processus de privatisation des
opérateurs historiques dans certains pays a connu ou connaît des difficultés dues à l’état des
infrastructures ou à l’environnement international actuel. Il se pose un problème d’arbitrage entre
le choix d’accélérer la privatisation des opérateurs historiques et celui de moderniser d’abord
les infrastructures existantes. Il y a peut-être lieu d’imaginer une nouvelle forme de gestion
participative des infrastructures de base à large bande des réseaux nationaux comme une solution
alternative.

59
• L’absence de plans directeurs de développement des infrastructures : La restructuration et
la libéralisation du secteur des télécommunications ont été engagées dans la plupart des pays
sans stratégie sectorielle bien élaborée et partagée par l’ensemble des acteurs. Cela explique
le ralentissement du développement du secteur, surtout des infrastructures de transmission de
l’opérateur historique qui était supposé fournir des ressources aux nouveaux entrants.

Les difficultés liées à des facteurs exogènes telles que la cherté des terminaux et le problème crucial
de l’énergie peuvent constituer des freins à l’utilisation des TIC dans la sous-région.

60
CHAPITRE IV. AGIR SUR LES CONTRAINTES
ET OPPORTUNITÉS GLOBALES DANS
LE SECTEUR DES INFRASTRUCTURES
RÉGIONALES POUR CONSOLIDER LA ZONE
DE LIBRE-ÉCHANGE
1. L’intégration économique sous-régionale : tremplin pour la
construction des infrastructures en Afrique de l’Ouest
Il est unanimement admis que le développement social et économique des nations nécessite la
disponibilité d’infrastructures de qualité. Comme la plupart des pays africains, ceux de l’Afrique
de l’Ouest présentent une insuffisance des infrastructures en niveau et en qualité. Il est donc
indispensable pour ces pays d’imaginer et d’appliquer des stratégies efficaces pour la mise en place
des infrastructures. Bien qu’à des degrés divers, cette insuffisance est constatée dans l’ensemble des
pays de la région. Il semble que les raisons qui expliquent cette insuffisance sont presque similaires
pour tous les pays. Dès lors, il s’avère nécessaire de rechercher des solutions communes applicables
dans l’ensemble des pays. L’intégration économique de ces pays est le début de la stratégie optimale
de construction de ces infrastructures.

Les chapitres précédents ont permis de constater l’état des infrastructures dans les pays de l’Afrique
de l’Ouest. La présente partie du rapport vise à montrer que l’insuffisance des infrastructures
constatée dans l’ensemble des pays découle de causes structurelles liées à la fois à la situation socio-
économique des pays et à la caractéristique économique des infrastructures. Cette partie insiste sur
la nature économique des infrastructures, qui rend difficile leur mise en place par la plupart des pays
africains, en particulier ceux de l’Afrique de l’Ouest, étant donné leur situation socio-économique, et
examine les voies et moyens pour y parvenir, de manière transversale.

2. Caractéristiques économiques communes des infrastructures


Pour leur développement, les pays de l’Afrique de l’Ouest font face à de nombreux défis qui
nécessitent des ressources financières, matérielles et humaines conséquentes. Les infrastructures
constituent un des leviers importants pour enclencher une croissance économique d’envergure.
Dans le but de proposer des stratégies pouvant permettre aux pays africains, et à ceux de l’Afrique
de l’Ouest en particulier, de répondre efficacement à leurs besoins en infrastructures, une analyse
des caractéristiques économiques des infrastructures pourrait s’avérer utile.

2.1 Des prix des biens d’investissement en infrastructures élevés

Eu égard aux coûts de réalisation et de fonctionnement, les dépenses d’investissement nécessaires


à la mise en place des infrastructures des pays de l’Afrique de l’Ouest à un niveau satisfaisant sont
difficiles à réaliser par chacun des pays de la zone. En effet, il ressort des différents rapport-pays
réalisés de 2009 à 2011 dans le cadre du projet de Diagnostics des infrastructures nationales en

61
Afrique 3 que les besoins annuels de financement en infrastructures de la plupart des pays africains
représentent une part importante de leur PIB.

Le tableau ci-dessous présente l’évaluation des besoins en infrastructures et les dépenses


d’investissement en infrastructures de quelques pays de l’Afrique de l’Ouest en pourcentage du
PIB. Deux messages importants en ressortent. Premièrement, les dépenses d’investissement en
infrastructures sont insuffisantes pour la mise en place d’infrastructures d’envergure. Elles s’établissent
en moyenne à moins de 10 % du PIB la plupart des pays.

En comparaison, les investissements infrastructurels effectués par la Chine, qui avait adopté une
stratégie résolue de leur accroissement en tant que moyen d’accélérer la croissance économique,
représentaient 14 % du PIB en 2006. Deuxièmement, nécessitant une mise à disposition de plus
15 % du PIB sur plusieurs années pour la plupart des pays de l’Afrique de l’Ouest, les besoins
d’investissements en infrastructures représentent une part relativement importante du PIB, d’autant
plus qu’ils sont globalement supérieurs aux dépenses réellement effectuées en infrastructures.

L’un des principaux défis pour le développement des infrastructures en Afrique de l’Ouest demeurant
le financement de projets d’investissement, dont le coût initial est élevé, et qui requiert une vision
et un pari à long terme, il est impérieux d’identifier des mécanismes innovants de financement des
infrastructures donnant la priorité aux ressources intérieures au niveau national et sous-régional.

Tableau 16: Estimation des besoins et dépenses en infrastructures de quelques pays d’Afrique de
l’Ouest

Besoins de dépenses en infrastructures Dépenses réelles en


Pays Année de base
(% PIB) infrastructures (% PIB)

Bénin 16,5 10,5 2005


Burkina Faso 11 7,5 2009
Cabo Verde 5,2 15 2006
Côte d’Ivoire 10 5 2008
Ghana 21 11 2006
Niger 22,4 6,7 2009
Nigéria 12 7 2006
Sénégal 20 11 2006
Sierra Leone 26 10 2009

Source : Rapports-pays du projet Diagnostics des infrastructures nationales en Afrique.

2.2 Des seuils de rentabilité difficilement atteignables

Le seuil de rentabilité d’une entreprise ou d’une structure désigne le niveau d’activités à partir duquel
le fonctionnement de la structure devient rentable. Il s’agit d’un critère qui reflète la viabilité financière
d’une installation. Concernant les infrastructures (transport, énergie, TIC, etc.), le coût élevé de leur
réalisation pour chacun des pays de l’Afrique de l’Ouest a été évoqué précédemment. De plus, leur
rentabilité financière n’est pas réalisable, en raison de la taille réduite des économies de ces pays.
Or, l’absence de rentabilité rend difficile la mobilisation de ressources de financement, notamment
privées.

3 Cette étude fait partie des Diagnostics des Infrastructures nationales en Afrique, un projet dont l’ambition est de développer la
connaissance de l’infrastructure physique africaine dans le monde. Développés de manière standardisée dans les pays africains, sur la base
d’un ensemble commun d’objectifs et de méthodologies d’établissement des coûts, ils permettent de comparer l’accessibilité économique
de ces objectifs entre les pays, et, si nécessaire, de les modifier ou de les retarder pour maintenir l’équilibre financier.

62
En effet, face à des coûts de réalisation élevés, la viabilité financière nécessite un volume d’utilisations
important que pourraient garantir à la fois une population nombreuse et un bon pouvoir d’achat
des ménages. À l’exception du Nigéria, la plupart des pays de l’Afrique de l’Ouest présentent des
handicaps. Comme pour l’Afrique subsaharienne dans son ensemble, la fragmentation géographique
de l’Afrique de l’Ouest réduit la portée des économies d’échelle. L’Afrique de l’Ouest est divisée
en 15 petites économies. La densité de la population est relativement faible, et bien que les taux
d’urbanisation soient à la hausse, une grande part de la population réside dans les zones rurales.

2.3 Intégration économique et caractéristiques économiques des infrastructures

L’intégration économique sous-régionale se présente comme un tremplin pour la réalisation des


infrastructures régionales en Afrique de l’Ouest car elle permet aux pays de surmonter efficacement
les difficultés découlant des caractéristiques économiques des infrastructures.

2.3.1 Organisation économique idoine des secteurs des infrastructures

L’analyse économique des infrastructures révèle qu’elles sont déterminées par deux éléments
principaux : les économies d’échelle et les économies d’envergure. Les économies d’échelle sont liées au
fait que le coût unitaire d’utilisation d’une infrastructure diminue avec le nombre d’utilisateurs. Quant
aux économies d’envergure, elles sont réalisées à partir du moment où des coûts variables communs
à plusieurs services empruntant l’infrastructure sont partagés, entraînant des économies de variété
de l’offre. Ces propriétés proviennent du fait que la plupart des biens d’infrastructure possèdent une
structure physique en réseau, qu’il s’agisse des infrastructures de transport, énergétiques, des TIC ou
monétaires et financières.

En tenant compte des caractéristiques physiques des infrastructures et des propriétés économiques
inhérentes, il s’avère4 que la stratégie optimale pour la mise en place et la gestion des biens
d’infrastructure consiste à fédérer les structures et les ressources. En effet, dans ces secteurs, la
fonction des coûts de production est sous-additive, autrement dit, pour une quantité donnée à
produire, il est plus coûteux pour deux ou plusieurs structures de la produire que pour une seule.

Ainsi, l’intégration économique apparaît comme la meilleure démarche qui s’offre aux pays de
l’Afrique de l’Ouest, afin de fédérer leurs ressources et répondre convenablement à leurs besoins en
infrastructures. Par la mise en commun des ressources humaines et matérielles, cette démarche leur
permet naturellement de pallier leurs faiblesses démographiques et économiques pour bénéficier des
économies d’échelle et d’envergure des infrastructures.

Pour chacun des pays de l’Afrique de l’Ouest, les bénéfices d’une réelle intégration économique sont
multiples. Cependant, les effets en termes de réduction des coûts en général, et en particulier de
ceux des produits d’importation, et de l’amélioration de la compétitivité des économies de ces pays,
sont les plus directement observables.

2.3.2 Réduction des coûts des biens et amélioration de la compétitivité des économies

Selon plusieurs études, les coûts de transport élevés représentent l’un des plus grands désavantages
des pays africains en général, et de ceux de l’Afrique de l’Ouest en particulier. Ce niveau élevé des
coûts de transport est principalement lié à la mauvaise qualité des infrastructures. Les populations

4 Selon la nouvelle théorie industrielle.

63
de deux espaces géographiques souffrent particulièrement du niveau élevé des prix des biens, dû
à la mauvaise qualité des infrastructures de transport. Concernant l’Afrique de l’Ouest, il s’agit des
populations à l’intérieur des pays pour les pays côtiers et de la population dans son ensemble pour
les pays enclavés.

À cet égard, l’étude réalisée par Vignal (2004) pour les pays africains montre qu’aussi bien les
infrastructures routières dans les pays que les routes de transit pour les pays sans littoral sont un
déterminant significatif et quantitativement important des coûts de transport et des flux commerciaux
bilatéraux. De manière empirique, les estimations montrent qu’une amélioration des infrastructures
de destination par un écart-type réduit les coûts de transport d’un montant équivalent à une réduction
de 1 000 à 6 500 km pour un voyage terrestre partant de la mer.

Deuxièmement, l’étude montre également que le fait pour un pays d’être enclavé accroît ses coûts
de transport d’environ 50 %. Troisièmement, en combinant les estimations de données sur les coûts
de transport avec celles du commerce, il apparaît que l’élasticité des échanges par rapport aux coûts
de transport s’élève à environ -2,5. Cela signifie qu’une réduction des coûts de transport de 10 %
entraînerait une augmentation du volume des échanges d’environ 25 %.

Ces résultats corroborent les faits relevés dans la région de l’Afrique de l’Ouest dans laquelle trois pays
(le Burkina, le Mali et le Niger) sont enclavés. Pour ces trois pays, les coûts de transport sont 50 %
plus élevés que dans les économies côtières, et les volumes des échanges sont de 60 % inférieurs.
Ainsi, la mise en place d’infrastructures de transport transfrontalières dans les pays d’Afrique de
l’Ouest permettrait de réduire considérablement les coûts de transport, en particulier pour les pays
enclavés.

Par ailleurs, la zone CEDEAO est composée d’une zone de huit pays (UEMOA) ayant une monnaie
commune (CFA) et d’une zone de sept autres pays (zone monétaire de l’Afrique de l’Ouest, ZMAO) dont
chacun dispose de sa propre monnaie. D’un point de vue heuristique, plusieurs éléments expliquent
la réduction des coûts de transaction qui pourrait résulter d’une intégration des infrastructures
financières et monétaires de l’ensemble de la sous-région. Ce résultat est également étayé de façon
empirique en termes d’accroissement des échanges intra-zone.

Une intégration des infrastructures financières et monétaires entraîne l’élimination des coûts de
change, la réduction du coût du capital et l’amélioration de la comparabilité des prix et pourrait
constituer un axe important de mobilisation des ressources régionales pour le financement des
infrastructures.

Élimination des coûts de change. Une zone monétaire intégrée signifierait que les transactions ne
nécessiteraient plus d’opérations de change entre les différentes monnaies des pays de la CEDEAO.
Par conséquent, il résulterait une économie des ressources liées notamment aux marges des courtiers
en devises5.

Réduction du coût du capital. La suppression du change entraîne naturellement une disparition du


risque de change et une fusion des marchés des capitaux. La diminution du risque moyen engendrée
par cet élargissement du marché des capitaux entraîne la réduction du coût du capital, favorable
notamment aux investissements directs étrangers.

5 Par exemple, dans une étude effectuée par la Commission européenne, il apparaît que l’existence de l’euro permet d’économiser
globalement 0,04 % du PIB, en moyenne, à travers le commerce entre les membres de l’Union, par l’élimination des coûts de change.

64
Transparence de comparaison de prix. En effet, les prix d’un même bien libellé dans différentes devises
sont plus difficiles à analyser en raison de l’effet du change. La comparabilité des prix est donc
améliorée par la disparition de la conversion des valeurs nominales. Ce gain en transparence des prix
est un facteur propice à la concurrence et donc à la réduction des coûts.

La réduction des coûts des transactions issue d’une intégration des infrastructures financières et
monétaires est corroborée par des résultats empiriques, notamment l’étude de Diandy (2007) qui
analyse le commerce bilatéral entre les pays membres de la CEDEAO sur la période allant de 1997
à 2004. Il ressort de cette étude que l’appartenance à une union monétaire exerce une influence
déterminante sur les échanges bilatéraux. En l’occurrence, le fait d’appartenir à l’UEMOA multiplie
par un facteur d’environ 3 la valeur moyenne des transactions bilatérales. Diandy fait observer que
ce résultat obtenu dans le contexte de la CEDEAO est conforme à la conclusion de l’étude de Frankel
et Rose (2000), établie à l’échelle mondiale, selon laquelle les unions monétaires triplent en moyenne
le commerce intra-zone.

La réduction des coûts des transactions, conjuguée à une stabilité financière et monétaire, est un
facteur déterminant de la compétitivité des économies. Selon une étude réalisée par la BAD, les
facteurs liés à l’offre, notamment les infrastructures et les compétences, constituent les principaux
obstacles à la compétitivité en Afrique de l’Ouest. Selon l’Indice mondial de compétitivité 2010, les
pays de la CEDEAO dans leur ensemble obtiennent une note moyenne de 3,50, qui les classe 120e
sur 139 pays, dans le quintile inférieur. Le pays le mieux classé est la Gambie (90e) mais tous les
autres se situent dans le quartile inférieur. Tous les pays de la CEDEAO, à l’exception de Cabo Verde,
sont encore au stade de développement économique où les « exigences de base6 » déterminent la
compétitivité.

2.4 Problèmes de financement des infrastructures régionales et appel aux innovations

Des programmes et des initiatives essentiels tels que le Programme pour le développement des
infrastructures en Afrique (PIDA), le plan d’action pour le renforcement du commerce africain, et
l’établissement de la zone de libre-échange continentale attendent encore d’être solidement financés
(CEA, 2013).

Le développement des infrastructures sous-régionales en Afrique de l’Ouest devra être porté par un
dispositif adapté en termes de financement mettant en œuvre une ingénierie financière et un cadre
réglementaire adéquats, une politique active de la part des pouvoirs publics, et surtout des moyens
humains, techniques et institutionnels nécessaires (Esso, 2015).

Les nouvelles tendances de financement des infrastructures régionales vont de l’incitation à


l’investissement direct par le secteur privé, aussi bien étranger que local, à la promotion des diverses
formes de partenariats public-privé, en passant par le développement de formes innovantes de
mobilisation des ressources incluant les émissions d’emprunts obligataires sur le marché financier
régional et international, la mobilisation des fonds d’investissement et le recours aux banques de
développement. La tendance récente a aussi été caractérisée par des efforts de diversification des
sources de financement, qui a mis en évidence le rôle de plus en plus visible des nouveaux partenaires,
dont la Chine et les États arabes, dans le financement des infrastructures en Afrique de l’Ouest.

On distingue un schéma de spécialisation clair parmi les différentes sources de financement extérieures
des infrastructures en Afrique et en Afrique de l’Ouest. Au niveau des secteurs, la participation
privée est fortement concentrée sur les technologies de l’information et de la communication dont

6 Institutions, infrastructures, environnement macroéconomique, santé et éducation primaire.

65
la rentabilité financière est avérée. L’aide publique au développement tend à se focaliser sur les biens
publics à forte dimension sociale, notamment les routes et l’eau. Beaucoup de fonds provenant des
pays non membres de l’OCDE sont allés à l’énergie et, dans une moindre mesure, aux chemins de
fer, deux secteurs fortement liés à l’industrie et au secteur minier. La participation du secteur privé
a plutôt eu tendance à aller vers les pays à revenu intermédiaire et les pays riches en ressources,
alors que les fonds en provenance des pays non membres de l’OCDE ont marqué leur préférence
pour les pays riches en ressources, avec un lien fort entre les investissements dans l’infrastructure
et l’extraction des ressources naturelles. L’aide publique au développement est allée de préférence
aux États non fragiles à faible revenu qui ont des ressources nationales limitées mais des capacités
institutionnelles adéquates. Les États fragiles ne semblent pas avoir obtenu une part équitable des
ressources extérieures (Briceño-G., Smits et Foster, 2008).

Le financement innovant des infrastructures régionales devra principalement s’appuyer sur la


mobilisation de davantage de ressources intérieures par une meilleure performance fiscale et
l’amélioration de la qualité et l’efficacité de la dépense publique, la mise en place des outils financiers
novateurs canalisant les épargnes des migrants, à l’exemple des obligations de la diaspora, en plus de
la mobilisation des fonds verts et de la loterie internationale.

Une meilleure mobilisation des ressources intérieures bénéficiera de la poursuite des réformes
fiscales visant à élargir l’assiette et améliorer la gouvernance fiscale tout en limitant la fuite illicite
des capitaux. Les efforts visant à tirer parti des sources extérieures de financement devront tenir
compte des exigences en matière de viabilité de la dette des pays (Esso, 2015). Les contraintes liées
aux difficultés des contributions supplémentaires des budgets des États pourront amener à envisager
des délais plus longs pour la réalisation des objectifs et promouvoir l’utilisation de technologies moins
coûteuses. Les États devront impérativement s’attaquer aux trois facteurs principaux d’inefficacité de
la dépense publique en infrastructures que sont le manque d’attention accordée à la maintenance,
l’impossibilité de dépenser les fonds inscrits au budget, et les coûts cachés (Briceño-G., Smits
et Foster, 2008). Les marchés locaux des capitaux devront jouer un rôle plus important dans le
financement des infrastructures à travers des prêts consentis par des banques commerciales,
certaines émissions d’obligations de sociétés et d’actions, ainsi que l’intervention d’investisseurs
institutionnels, notamment les fonds de pension et les compagnies d’assurance.

La faisabilité de la mise en œuvre de mécanismes de financement innovants dépendra de la qualité de


l’intermédiation financière au niveau sous-régional et exigera la définition des cadres institutionnels
et réglementaires devant encadrer la mise en œuvre et la gestion de tels mécanismes.

Les nouvelles approches de développement et de financement des infrastructures devront associer


autant que possible le secteur privé, soutenir les nouveaux instruments financiers et renforcer
l’environnement réglementaire, y compris le climat des affaires. Les politiques de financement devront
s’accompagner d’efforts visant à réduire autant que possible les risques budgétaires et préserver la
viabilité globale de la dette, tout en se dotant des capacités nécessaires pour choisir et exécuter
les projets complexes. Les États et groupements sous-régionaux devront s’investir davantage
dans l’amélioration des cadres juridique et institutionnel et la modernisation des organismes de
réglementation (FMI, 2014).

Pour mobiliser de façon efficiente des ressources pour les infrastructures régionales, l’Afrique de
l’Ouest devra renforcer ses marchés financiers locaux qui demeurent peu développés, superficiels
et de petite taille, et où le financement à long terme avec des échéances adaptées aux projets
d’infrastructure est rare. La faible capacité des systèmes bancaires locaux reste un des obstacles
structurels au financement des infrastructures qu’il faudra lever au niveau sous-régional.

66
2.5 Le développement des ressources humaines en appui aux infrastructures
régionales

En réalité, le problème d’insuffisance des infrastructures en Afrique de l’Ouest n’est pas uniquement
d’ordre financier, il est aussi lié au déficit de ressources humaines capables d’assurer une gestion
efficace de ces infrastructures d’un point de vue technique et financier.

En effet, l’Afrique de l’Ouest, à l’image de l’Afrique subsaharienne dans son ensemble, souffre d’un
déficit grave d’ingénieurs et dépend fortement d’expertise importée. Cette situation s’explique par
trois raisons : une production insuffisante des institutions de formation, une qualité médiocre de
l’enseignement et un manque d’expérience pratique parmi les diplômés. Pourtant l’Afrique présente
des besoins de développement pressants qui exigent des ingénieurs. Il faudrait assurer, par exemple,
que la construction d’infrastructures aille de pair avec la trajectoire de croissance économique de la
région. Cette réalité concerne notamment les routes, les ponts, les bâtiments, les aéroports et les
ports.

Selon plusieurs études, dont un rapport sur la qualité de l’enseignement en Afrique7, il faudrait environ
2,5 millions de nouveaux ingénieurs et techniciens rien que pour réaliser un seul des objectifs du
Millénaire pour le développement, à savoir l’amélioration de l’accès à l’eau salubre et à l’assainissement.

À défaut de disposer de données quantitatives relatives à la situation des ressources humaines en


Afrique de l’Ouest à même de porter les projets d’infrastructure, une description de l’état des lieux
de la situation d’une catégorie professionnelle particulièrement importante dans la réalisation des
infrastructures, les ingénieurs, sera effectuée sur la base d’informations issues de rapports d’études.

2.5.1 État des lieux de la formation des ingénieurs en Afrique

Trois rapports importants proposent un état des lieux de la formation des ingénieurs en Afrique.
En 2012, la Royal Academy of Engineering a publié un rapport détaillé intitulé Engineers for Africa:
Identifying Engineering Capacity Needs in Sub-Saharan Africa. Ce rapport se base sur un examen
de la documentation existante, une enquête électronique auprès d’ingénieurs professionnels et de
décideurs issus de 18 pays africains, ainsi que sur des entretiens avec des parties prenantes en
ingénierie ayant l’expérience dans la conduite de projets dans différents pays africains (surtout des
pays anglophones). En 2010, l’UNESCO a publié le rapport intitulé Ingénierie : Enjeux et défis pour le
développement. Une autre étude, entreprise pour le compte du Réseau africain d’études de politique
en matière de technologie, publiée en 2005, a évalué la capacité de l’enseignement en ingénierie au
Nigéria, au Ghana et au Zimbabwe de façon à préparer les diplômés des écoles d’ingénieurs à leur
rôle dans le développement industriel.

Sur la base de ces trois rapports, la situation de la formation d’ingénieurs en Afrique pourrait être
résumée de la façon suivante :

• Il y a une pénurie d’ingénieurs, bien que des diplômés en ingénierie soient au chômage. Par
exemple, le Nigéria produit 3 500 ingénieurs par an, un nombre modeste lorsqu’on le compare à
celui de sa population, et beaucoup d’entre eux sont au chômage.

7 Rapport intitulé : « Améliorer la qualité de l’enseignement et de la formation des ingénieurs en Afrique », Sciences, Technologie et
Compétences pour le Développement de l’Afrique, mars 2014.

67
• On observe un manque de financement pour l’achat d’équipement de laboratoire et pour l’appui
d’autres installations, et les programmes de cours et les méthodes d’enseignement sont démodés.

• Il existe un déficit de professeurs disposant d’une expérience industrielle ; le recrutement et la


rétention du personnel académique sont rendus difficiles par la médiocrité des salaires et des
conditions de travail.

• Les partenariats entre les universités et les industries sont faibles, et il manque d’opportunités en
matière d’expérience industrielle pour les étudiants ingénieurs.

• Les diplômés tendent à avoir de faibles compétences en matière de gestion, de compétences


entrepreneuriales et de communication.

• Les femmes sont sous-représentées dans les institutions d’ingénierie ; elles représentaient en
2005 moins de 10 % de la population estudiantine au Ghana, au Nigéria et au Zimbabwe.

• Les statistiques et indicateurs en matière d’ingénierie au niveau national ne sont pas suffisamment
disponibles.

• Il faut développer la prise de conscience du public quant au rôle de l’ingénieur en tant que moteur
de développement et d’innovation sociaux et économiques.

Par extrapolation, ce sont ces mêmes raisons qui expliquent l’inadéquation des ingénieurs en quantité
et en qualité en Afrique, qui fondent également l’insuffisance de ressources humaines capables de
porter les projets d’infrastructures en Afrique de l’Ouest.

Face à cette situation, des recommandations peuvent être formulées dans le but de combler le déficit
de main-d’œuvre qui vient aggraver le problème de disponibilité de ressources pour la réalisation des
infrastructures en Afrique de l’Ouest.

2.5.2 Actions visant à développer les ressources humaines en appui aux infrastructures

Ces recommandations portent sur l’analyse de la situation des ressources humaines, le système de
formation et les politiques d’accompagnement.

Évaluation et planification

Plusieurs pays africains comme l’Éthiopie, le Mozambique, le Rwanda et le Sénégal ont évalué leurs
besoins en matière de compétences. Certains ont également élaboré des plans spécifiques en matière
de ressources humaines. La mise en œuvre réussie de tels plans demande une amélioration de la
qualité et de la régularité des données nationales en matière d’emploi et de production institutionnelle.
Elle demande également des mécanismes institutionnels au sein de plusieurs ministères de façon à
évaluer la demande de l’industrie.

Qualité et pertinence de la formation

Le paradoxe est que, malgré une pénurie d’ingénieurs en Afrique, de nombreux diplômés en
ingénierie restent sans emploi ou sous-employés. La mauvaise qualité des formations d’ingénieurs
est la principale raison de cette situation. En outre, les institutions existantes doivent mettre à
niveau leurs infrastructures et leurs laboratoires. En effet, les institutions africaines d’enseignement

68
supérieur financées sur des fonds publics ont, pendant plusieurs décennies, souffert d’un manque
d’investissement et leurs infrastructures se sont détériorées. Par ailleurs, les programmes de cours en
ingénierie doivent également être revus et les chargés de cours doivent être mieux formés.

2.5.3 Politiques gouvernementales favorables et formations au niveau régional

Des politiques industrielles axées sur la création d’emplois, le développement des entreprises et
l’amélioration de l’acquisition des compétences sont nécessaires.

En outre, les initiatives régionales récentes qui visent à relever certains des défis de l’ingénierie
en Afrique doivent être appuyées, maintenues et étendues. L’harmonisation des approches et la
collaboration entre les institutions africaines ont des dimensions communes importantes. En plus des
contraintes budgétaires, le développement du secteur des infrastructures au niveau sous-régional
souffre de la faiblesse des systèmes d`information y relatifs. Sans informations fiables, il demeure
difficile d’évaluer le succès des interventions antérieures, de déterminer les priorités dans l’allocation
des ressources actuelles et d’élaborer un cadre de référence pour la mesure des progrès futurs. La
qualité et la quantité des données sont extrêmement faibles, ce qui limite la capacité de la sous-
région, comme l’Afrique entière d’ailleurs, à faire le suivi et l’évaluation de sa performance.

2.6 Une approche plus globale et intégrée dans le renforcement des liens entre
infrastructures régionales et zone de libre-échange en Afrique de l’Ouest

L’existence d’une zone de libre-échange ne peut être renforcée que si sont mises en place des
mesures de facilitation du commerce propres à réduire les obstacles aux échanges commerciaux,
ainsi qu’un environnement commercial stable et prévisible, si les restrictions à la libre circulation des
personnes et de biens sont éliminées. Une politique industrielle ambitieuse permettant de rentabiliser
les infrastructures et renforcer les capacités de production régionales est cruciale, tandis que les
politiques d’approfondissement de l’intermédiation financière et de renforcement des ressources
humaines doivent être au cœur du développement des infrastructures en appui à l’intégration
régionale en Afrique de l’Ouest.

Une vision globale, intégrée et holistique s’impose donc dans la consolidation des liens entre ces deux
aspects de l’intégration régionale, les infrastructures et la zone de libre-échange, qui se renforcent
mutuellement dans une sorte de causalité bidirectionnelle.

69
CONCLUSIONS ET RECOMMENDATIONS
La CEDEAO, à travers le Programme communautaire de développement, reconnaît le rôle de
l’intégration régionale pour répondre à l’enclavement et à la fragmentation qui empêchent de
nombreux pays de bénéficier d’économies d’échelle. La zone de libre-échange ouest-africaine porte
en elle des espoirs en termes de consolidation de la compétitivité, de promotion de la croissance, de
diversification économique et de renforcement des flux commerciaux intra-régionaux, qui devraient
se traduire par une amélioration des conditions de vie des populations. L’intégration pourrait jouer
un rôle capital en tant que levier du développement industriel et consolider la paix et la sécurité dans
la sous-région.

Le développement des infrastructures constitue l’un des principaux défis dans la promotion du
commerce intra-régional en Afrique de l’Ouest. Les infrastructures médiocres ou l’absence complète de
celles-ci compliquent la logistique commerciale et rendent les échanges commerciaux physiquement
difficiles, voire impossibles, indépendamment du régime commercial adopté.

Au niveau continental, l’Agenda 2063 de l’Union africaine confirme la nécessité d’infrastructures


de classe mondiale pour le développement africain. La réalisation des ambitions de la CEDEAO
d’accroître progressivement les échanges intra-communautaires, pour les porter de moins de 12 % à
40 % en 2030, dépendra largement de la capacité de la sous-région de se doter des infrastructures
nécessaires pour réduire le coût des affaires et accroître la compétitivité.

Le diagnostic des infrastructures régionales, en matière de transport, d’énergie et de TIC en Afrique


de l’Ouest est sans équivoque : la sous-région souffre d’un important retard infrastructurel, ses
réseaux nationaux manquent d’interconnexions régionales et les coûts de fourniture de services sont
élevés pour une qualité faible.

Bien que la route concentre l’essentiel du transport intérieur dans la sous-région, le réseau routier et
sa densité demeurent largement inférieurs à ceux de l’Afrique australe, par exemple. La sous-région
est résolument inscrite dans la promotion des corridors de transport, mais ces derniers restent sujets
à un certain nombre de goulots d’étranglement, notamment : les retards criants dans la fourniture des
services de transport, des insuffisances liées à la qualité des infrastructures, une faible harmonisation
des politiques et pratiques entre pays, une forte informalité des activités, d’innombrables cas de
pratiques collusoires de l’industrie, des surcharges à l’essieu, des prélèvements illicites et corruptions
justifiant des tarifs de transport élevés.

Le réseau ferroviaire sous-régional, essentiellement hérité de la période coloniale, est long de


9 715 km et présente une densité de 1,9 km/1000 km2, inférieure à la moyenne africaine – qui
s’élève à 2,5 km/1000 km2 – et figure parmi les densités les plus faibles au monde.

Le secteur a longtemps souffert du relâchement des investissements publics et de la mauvaise


gouvernance. Ses infrastructures présentent des signes de vieillissement, voire d’obsolescence, et
souffrent de l’inadaptation aux conditions d’exploitation des trains modernes, ainsi que d’une faible
harmonisation de la qualité entre pays.

Afin d’améliorer la compétitivité du réseau ferroviaire, la plupart des États africains ont procédé à la
mise sous concession des chemins de fer jadis soumis au monopole d’État. Ces concessions ont eu
des effets positifs, notamment en matière de création d’emplois et d’augmentation de la productivité
et du volume du trafic, en dépit de la mauvaise performance financière des entreprises concernées.

70
L’Afrique de l’Ouest compte de nombreux ports mais aucun d’eux ne joue véritablement le rôle de
hub maritime. Malgré une bonne dynamique de croissance durant la décennie passée, le réseau
portuaire sous-régional affiche un trafic de conteneurs déséquilibré, ne bénéficiant que faiblement des
avantages d’un transport multimodal intégré. Avec des infrastructures moins compétitives, ces ports
sont des plus coûteux et demeurent confrontés à des questions de sécurité des routes maritimes.

Pour faire face aux problèmes de faible performance portuaire, les gouvernements ont entamé des
réformes du secteur faisant appel à une participation accrue du secteur privé.

Le marché intérieur du transport aérien de la zone CEDEAO est le plus vaste de l’Afrique après celui
de l’Afrique australe tandis que son marché intra-africain est relativement faible.

L’un des défis auquel fait face le système aérien en Afrique de l’Ouest demeure la sécurité, dans un
contexte où la majorité de la flotte est vieillissante. La CEDEAO n’a pas non plus enregistré de progrès
remarquables dans l’adoption des mesures significatives allant dans le sens d’une libéralisation des
services aériens, mais certains blocs de la région ont accompli des progrès considérables.

En Afrique de l’Ouest, on estime à plus de 175 millions le nombre de personnes ne pouvant accéder
à aucun type d’approvisionnement électrique. L’important potentiel énergétique de la sous-région
demeure inexploité, en dépit d’un certain nombre d’initiatives. Le potentiel hydroélectrique, estimé
à 26 860 MW, n’est exploité qu’à hauteur de 16 % malgré la prédominance, à plus de 65%, de
l’hydroélectricité dans le bouquet énergétique de la sous-région.

Les besoins énergétiques demeurent énormes et la demande d’énergie de la CEDEAO est quasi
directement proportionnelle à la croissance économique. Les besoins en dépenses dans l’énergie en
Afrique sont estimés à 40,6 milliards de dollars pendant la période 2006-2015, le pool Afrique de
l’Ouest concentrant à lui seul 12,3 milliards de dollars, soit 30 % du total africain.

Les services de télécommunication défectueux ont tendance à cloisonner les États ouest-africains
les uns par rapport aux autres. Des services de communication difficilement accessibles, surtout
pour les télécommunications internationales, et une dépendance extrême à l’égard des technologies
satellitaires coûteuses sont autant de contraintes qui limitent la capacité du sous-secteur à promouvoir
le commerce intra-régional.

Les récents investissements privés dans les réseaux de fibres optiques connectant de plus en plus
la sous-région au reste du monde ne se sont pas traduits par une amélioration tant attendue de la
qualité, de la compétitivité et de l’accès aux services.

La sous-région présente un faible taux de pénétration des services de téléphonie fixe avec des
inégalités géographiques criantes, doublées d’infrastructures peu fiables et obsolètes dans certains
pays. Le secteur de la téléphonie mobile, quant à lui, demeure des plus dynamiques avec un marché
nettement plus concurrentiel et dominé par quelques acteurs étrangers. Les connexions Internet
demeurent faibles et leurs chaînes de valeur pauvres en maillons industriels, et présentent des coûts
d’accès élevés.

Plusieurs actions ont été entreprises par la CEDEAO et l’UEMOA dans l’optique du développement
des infrastructures régionales et de l’optimisation de leur contribution au renforcement de la zone
de libre-échange. Le PIDA fournit un cadre stratégique visant à combler le déficit infrastructurel en
Afrique mais à ce jour, la réalisation de ses ambitions en Afrique de l’Ouest est mise à mal par des
contraintes de financement.

71
La sous-région et les pays doivent renforcer la mise en œuvre du PIDA en levant les contraintes
financières entravant l’exécution des projets et programmes. Une telle exigence nécessite l’amélioration
du cadre institutionnel de chaque État grâce à une législation claire, qui respecte le droit des affaires
et assure la transparence des marchés publics, une meilleure gestion macroéconomique ainsi que la
stabilité sociopolitique.

La CEDEAO et l’UEMOA devront poursuivre les efforts de promotion d’un dispositif adapté en termes
de financement mettant en œuvre une ingénierie financière et un cadre réglementaire adéquats
pour promouvoir les mécanismes innovants de financement des infrastructures régionales. Une telle
approche devra promouvoir une participation accrue du secteur privé, étranger et local, les partenariats
public-privé, ainsi que le développement des autres formes de mobilisation des ressources, dont les
émissions d’emprunts obligataires sur le marché financier régional et international, la mobilisation
des fonds d’investissement et le recours aux banques de développement et aux investisseurs
institutionnels.

La mise en œuvre du PIDA devra s’appuyer sur la mobilisation de davantage de ressources intérieures
à travers une meilleure performance fiscale, l’amélioration de la qualité de la dépense publique et la
mise en place des outils financiers novateurs canalisant l’épargne des migrants et d’autres modes de
financement émergents, tout en limitant la fuite illicites des capitaux.

Les efforts visant à tirer parti des sources extérieures de financement devront renforcer la dynamique
actuelle de diversification des ressources, tout en tenant compte des exigences en matière de viabilité
de la dette des pays.

La CEDEAO et les États membres devront renforcer l’EEEOA par une législation modernisée et un
développement des mécanismes innovants et transparents de contractualisation et de partenariat
public-privé, consolider les efforts pour la bonne gouvernance au sein des institutions publiques
et améliorer le cadre juridique et réglementaire afin d’attirer plus d’investisseurs et encourager un
meilleur fonctionnement du marché de l’énergie.

Pour un développement global et intégré des infrastructures régionales, la CEDEAO et les États
membres devront aller au-delà de la provision des infrastructures matérielles (hard infrastructure)
par la promotion de la construction et la réhabilitation des infrastructures régionales et améliorer la
dimension immatérielle (soft) des infrastructures régionales en mettant l’accent sur la qualité et la
gestion des infrastructures et des services y afférents et sur la facilitation du commerce intra-régional.

La CEDEAO devra poursuivre l’intégration des infrastructures au moyen d’investissements physiques


supplémentaires et consolider le développement d’un marché sous-régional viable des services y
relatifs à travers une harmonisation des politiques et la mise en place d’un cadre juridique et des
dispositions réglementaires en vue de la promotion d’un marché unique et libéralisé. La sous-région
devra impérativement améliorer sa capacité institutionnelle en vue d’une meilleure régulation des
infrastructures régionales et renforcer la prise en compte des initiatives sous-régionales et régionales
dans le processus de développement infrastructurel au niveau national.

La CEDEAO devra encourager les pratiques de mutualisation et d’interconnexion des infrastructures


pour réduire les coûts et faire face aux disparités géographiques dans la répartition des infrastructures,
entre les zones rurales et urbaines, au niveau national, et entre les pays côtiers et non–côtiers, au
niveau sous-régional.

La CEDEAO, l’UEMOA, la CEA, les États membres et autres acteurs pertinents devront renforcer
le développement des ressources humaines, notamment par la promotion de la formation des

72
ingénieurs en appui aux infrastructures régionales pour résoudre la question épineuse du déficit
des capacités nécessaires à une gestion efficace et efficiente des projets et programmes. Ils devront
en outre renforcer les systèmes d’information sur les infrastructures et l’intégration régionale aux
niveaux sous-régional et national en tant qu’outil d’appui à l’élaboration, à la mise en œuvre et au
suivi-évaluation de projets et programmes régionaux d’infrastructures et de développement.

Le développement des infrastructures régionales et la consolidation de leur contribution à la zone


de libre-échange devront se concevoir dans une approche plus globale et intégrée comprenant les
mesures de facilitation du commerce, un environnement commercial stable et prévisible et l’élimination
des restrictions à la libre circulation des personnes et des biens, une politique industrielle ambitieuse
et un approfondissement de l’intermédiation financière sous-régionale, en plus de la fourniture
traditionnelle des infrastructures physiques.

73
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Imprimé à Addis-Abeba par le Groupe de la publication et de l’impression de la CEA, certifié ISO 14001:2004.
Imprimé sur du papier sans chlore.

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