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Manon Lescaut La Rencontre Amoureuse Analyse

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Manon Lescaut

La rencontre amoureuse
Analyse linéaire

Ecclésiaste à la vie sulfureuse, L’Abbé Prévost a su fasciner son siècle par la


multiplicité de ses aventures, mais surtout par ses écrits souvent décriés par la critique. En
publiant le septième volume de son œuvre Aventures et Mémoires d’un homme de qualité
qui s’est retiré du monde, il retrace à travers le roman-mémoires intitulé Histoire de Manon
Lescaut et du Chevalier des Grieux le récit d’une passion dévastatrice reliant deux
protagonistes dotés de deux personnalités opposées. Sa publication en 1733 le condamne
donc à la censure pour immoralité. Ainsi, le présent passage, tiré de la première partie de
l’œuvre intervient au moment où le narrateur premier Renoncourt cède la parole au
narrateur second, Des Grieux. Ce dernier y relate sa première rencontre avec Manon. Il
serait alors intéressant de se demander comment la narration de ce coup de foudre serait
annonciatrice d’un destin tragique.
Nous diviserons notre analyse en trois parties :
Partie 1 : ll1- 5, « Elle me parut… la maîtresse de mon cœur » : Le coup de foudre, source de
changement
Partie 2 : ll5-13, « Quoiqu’elle fût encore moins âgée… tous ses malheurs et les miens » : Une
prise de contact
Partie 3 :ll13- 21, « Je combattis… le rendre heureux » : La déclaration d’amour.

Partie1 : Le coup de foudre, source de changement


L1- L3 : D’emblée, le narrateur met en scène au moyen du passé simple la première
impression qu’eut Manon sur lui. Le contact est alors foudroyant « elle me parut si
charmante ». En tant que COD, Des Grieux devient objet de sa passion puisqu’il en subit
l’impact.
Cette influence est renforcée par l’adverbe d’intensité « si » et recouvre une dimension
ensorcelante puisque « charmante » est définie dans son sens étymologique.
En l’occurrence, la consécutive « si…que… » met en œuvre l’issue de cette rencontre qui est
tout aussi fulgurante par l’utilisation du passé simple « je me trouvai enflammé ». Ce coup
de foudre amorce déjà la transformation du narrateur, une métamorphose qui va de
l’embrasement vers le changement ultime, un « transport » qui le porte vers une autre
personnalité.
En effet, l’image première du narrateur s’inscrit désormais dans le passé accompli « n’avais
jamais pensé à a différence des sexes ni regardé une fille » mais aussi dans un arrière-plan
que traduit l’emploi de l’imparfait « tout le monde admirait la sagesse ». Elle est encerclée
par la différence entre le moment de la rencontre « elle me parut si charmante » et sa
conséquence « je me trouvai enflammé ». Elle s’en trouve donc complètement anéantie. De
fait, Des Grieux dénie tout contact antérieur avec le sexe opposé, négation qui atteint aussi
bien l’imagination « pensé » que la vision concrète « regarder ».
Il se décrit ainsi comme objet d’une estime générale liée à des valeurs sociales qui
s’opposent d’ores et déjà à la passion. Il était donc doté de « sagesse » et de « retenue »,
des valeurs tant intellectuelles que morales.
L3- L5 : Des Grieux met encore en scène ce changement par une évolution de l’imparfait
« j’avais le défaut » vers le passé simple « je m’avançai ». Ses attributs liés à une absence
d’audace face à la société, ayant été « timide » et « facile à déconcerter » se muent en
qualités d’un homme entreprenant par l’usage d’un verbe de mouvement « je m’avançai ».
Manon est désormais définie par la périphrase « maîtresse de mon cœur », devenant alors la
source de sa soumission : elle contrôle son monde et l’allitération en [m] exprime tout le
plaisir qu’il en éprouve. D’ailleurs, le contact pourrait d’ores et déjà s’établir.

Mouvement 2 : La prise de contact


L5-L6 : Elle se fonde d’abord sur une concessive : « quoiqu’elle fût encore moins âgée que
moi… ». Des Grieux met en avant la jeunesse de Manon qui ne dénie en rien son expérience
sociale. La possibilité d’une gêne quelconque est le lieu d’une négation « sans paraître
embarrassée ».
L6-L8 : Le contact visuel se mue alors en communication verbale qu’introduisent les verbes
de parole : « demandai », « répondit ». Cette communication révèle la curiosité de des
Grieux, sa volonté de cerner Manon au moyen d’interrogatives indirectes . Audacieuse, sa
réponse émerge « ingénument », adverbe qui marque tout autant sa liberté de penser.
L8-L10 :En tout état de cause, l’amour est pleinement sujet : il est le catalyseur de la
transformation de Des Grieux qui se trouve investi d’un nouveau caractère introduit comme
un attribut de l’objet : « l’amour me rendait déjà si éclairé ». Dans une conception quasiment
platonicienne, Des Grieux, quoiqu’étudiant en philosophie, est investi d’une nouvelle
sensibilité liée à un monde plus émotionnel qu’impose le champ lexical de la passion :
« l’amour, cœur, désir ». Au premier regard échangé avec Manon fera écho la consécutive
rattachée à un regard intérieur, une perception personnelle « je regardai ce dessein comme
un coup mortel ». Le monde religieux, la morale sociale qui le définissaient sont désormais
fatals à son monde amoureux, d’où la comparaison établie.
L10- L11 : Au discours indirect se substitue un discours narrativisé : « Je lui parlai d’une
manière qui lui fit comprendre mes sentiments ». La manière est donc tue, indéfinie. Ne
s’agit-il pas en fait de passer sous silence l’ingénuité du personnage dans ce domaine ? Cette
prise de conscience s’affirme au moyen de la comparaison avec Manon dite « bien plus
expérimentée que [lui] ». Elle lui est supérieure dans le domaine de la passion.
L11-L13 : L’implication de Des Grieux est dès lors totale assurant un discours indirect libre à
travers lequel les deux voix s’enchevêtrent. Manon est dirigée vers le couvent. Or, son
opinion est emphatisée définissant le caractère même de la jeune femme « c’était malgré
elle qu’on l’envoyait au couvent ». Le but de cette action s’inscrit dans une perspective
morale, « pour son penchant au plaisir ». Manon est présentée comme un modèle de la
femme fatale par sa propension au libertinage. L’utilisation du terme « penchant » tend à en
faire une seconde nature qui ne saurait être traité que par le couvent et ce, selon la
conception sociale. Ce penchant est donc doublement déterminé aussi bien au passé car
« déjà déclaré » mais aussi dans le futur « dans la suite ». Pourtant, décidé à défendre son
amour, Des Grieux commence par l’avouer.

Mouvement 3 : La déclaration d’amour


L13-L14 : Par le biais du complément circonstanciel de moyen, Des Grieux expose les armes
utilisées afin de défendre son amour : « par toutes les raisons que mon amour naissant et
mon éloquence scolastique… ». Or, elles semblent être dérisoires par la position même du
personnage en tant qu’individu qui leur est soumis : le pronom « me » occupe en effet la
fonction de COD « me suggérer ». En outre, un rapport quasiment antithétique s’impose
entre les « raisons », censées être argumentées et leurs fondements, à savoir la passion
« mon amour naissant » et « l’éloquence scolastique » qui reste purement formelle.
L14-L15 : La réaction de Manon est immédiate par l’emploi du passé simple, car « elle
n’affecta ni rigueur ni dédain ». Elle adopte d’emblée une négation des attitudes
conventionnelles ou sociales réfutant ainsi l’apparence à la quelle doivent se conformer les
jeunes filles face aux déclarations d’amour.
L15-L17 : Toutefois, elle s’érige en héroïne tragique, menant Des Grieux sur la voie de la
pitié. Elle s’institue en Sibylle annonçant sa propre destinée qu’elle subordonne au verbe
« prévoir » avec toutes les composantes du tragique : « malheureux, la volonté du ciel, nul
moyen de l’éviter ». Elle semble être consciente de sa fin funeste.
L17-L19 : Des Grieux reprend la perception actuelle qu’il a des événements passés. Ainsi,
l’adverbe « plutôt » met en parallèle les attributs féminins, séducteurs de Manon « la
douceur de ses regards », un « air charmant » et sa destinée personnelle. En l’occurrence, ce
coup de foudre est un catalyseur de son destin tout aussi tragique et est donc annonciateur
d’une fin malheureuse. Il ne fait alors que subir le pouvoir de sa passion par sa position de
complément : « ma destinée qui m’entrainait », « ils ne me permirent pas de balancer ». Ce
pouvoir est si grand que son effet fulgurant trouve sa concrétisation dans l’usage du passé
simple.
L19-L21 : La longueur de la réplique vise à lui conférer une certaine solennité. L’attitude de
Des Grieux est conditionnée par la volonté de Manon, d’où l’usage de la circonstancielle de
condition « si elle voulait faire … ». Il s’impose donc en chevalier courtois, asservi à cette
dame. L’hyperbole est de mise par « la tendresse infinie », « j’emploierais ma vie », « la
tyrannie de ses parents ». Elle définit un engagement total de Des Grieux avec une seule
finalité qu’introduit le complément circonstanciel de but : « pour la rendre heureuse ».

En somme, en relatant son coup de foudre, Des Grieux fait de sa narration une
annonce d’un destin tragique. En effet, cette première rencontre a un effet rapide sur le
jeune héros puisqu’elle l’amène sur la voie du changement. Il n’en demeure pas moins que
sa communication avec la femme aimée montre d’emblée l’expérience de cette dernière en
termes de relations sociales et amoureuses. Elle reflète déjà le grand ascendant qu’elle aura
sur le narrateur et la jonction qui s’opérera entre leurs deux destinées. Confronté à la
volonté de ses parents, Des Grieux lui voue sa vie. N’est-il pas en train d’écrire les premières
lignes d’une tragédie dont l’issue ne peut être que dévastatrice ?

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