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Retrouvailles Pathetique Entre Des Grieux Et Manon 3

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On vint m’avertir, un moment après mon retour, qu’une dame demandait à me voir.

J’allai au parloir
sur-le-champ. Dieux ! quelle apparition surprenante ! j’y trouvai Manon. C’était elle, mais plus aimable
et plus brillante que je ne l’avais jamais vue. Elle était dans sa dix-huitième année. Ses charmes
surpassaient tout ce qu’on peut décrire : c’était un air si fin, si doux, si engageant ! l’air de l’amour
même. Toute sa figure me parut un enchantement.
Je demeurai interdit à sa vue ; et, ne pouvant conjecturer quel était le dessein de cette visite,
j’attendais, les yeux baissés et avec tremblement, qu’elle s’expliquât. Son embarras fut pendant
quelque temps égal au mien ; mais, voyant que mon silence continuait, elle mit la main devant ses
yeux pour cacher quelques larmes. Elle me dit d’un ton timide qu’elle confessait que son infidélité
méritait ma haine ; mais que, s’il était vrai que j’eusse jamais eu quelque tendresse pour elle, il y avait
aussi bien de la dureté à laisser passer deux ans sans prendre soin de m’informer de son sort, et qu’il
y en avait beaucoup encore à la voir dans l’état où elle était en ma présence, sans lui dire une parole.
Le désordre de mon âme en l’écoutant ne saurait être exprimé.
Elle s’assit. Je demeurai debout, le corps à demi tourné, n’osant l’envisager directement. Je
commençai plusieurs fois une réponse que je n’eus pas la force d’achever. Enfin je fis un effort pour
m’écrier douloureusement : « Perfide Manon ! Ah ! perfide ! perfide ! » Elle me répéta, en pleurant à
chaudes larmes, qu’elle ne prétendait point justifier sa perfidie. « Que prétendez-vous donc ?
m’écriai-je encore. — Je prétends mourir, répondit-elle, si vous ne me rendez votre cœur, sans lequel
il est impossible que je vive. — Demande donc ma vie, infidèle, repris-je en versant moi-même des
pleurs que je m’efforçai en vain de retenir ; demande ma vie, qui est l’unique chose qui me reste à te
sacrifier ; car mon cœur n’a jamais cessé d’être à toi. »
À peine eus-je achevé ces derniers mots, qu’elle se leva avec transport pour venir m’embrasser. Elle
m’accabla de mille caresses passionnées. Elle m’appela par tous les noms que l’amour invente pour
exprimer ses plus vives tendresses. Je n’y répondais encore qu’avec langueur. Quel passage, en
effet, de la situation tranquille où j’avais été, aux mouvements tumultueux que je sentais renaître !
J’en étais épouvanté. Je frémissais, comme il arrive lorsqu’on se trouve la nuit dans une campagne
écartée : on se croit transporté dans un nouvel ordre de choses ; on y est saisi d’une horreur secrète
dont on ne se remet qu’après avoir considéré longtemps tous les environs.»
Histoire du chevalier des Grieux et de Manon Lescaut , première partie (1731) ,de l’Abbé Prévost.

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