Fiche de Lecture : CAHIERS DE DOUAI, Rimbaud (1895)
I-Parcours Associé : Emancipations Créatrices
● Le terme d’émancipation signifie une libération : l’enfant peut s'émanciper
de l’autorité familiale et devenir un homme, l’esclave peut s’émanciper de
l’autorité de son maître afin de s'affranchir.
● Sachant que le terme “émancipations” est au pluriel, on peut donc en
déduire que les auteurs s’émancipent de multiples choses : contraintes
familiales (opposition de la famille), sociales ( normes dominantes ) et
littéraires ( influence des artistes avant lui).
II-Les thèmes de l’oeuvre
A/La critique de l’ordre établi
1-Une satire féroce du régime de Napoléon III et de la Religion chrétienne
● Napoléon III est présenté comme un personnage ridicule . Par exemple, le
titre d’un des poèmes du deuxième cahier, “L'éclatante victoire de
Sarrebruck”, est assez ironique, présenté par les journaux impérieux comme
une victoire capitale et majeure, n’est en réalité qu’un petit accrochage.
Citation Importante : “ Au milieu de l’Empereur, dans une apothéose / Bleue et
jaune, s’en va, raide, sur son dada / Flamboyant”
● Il caricature l’empereur grotesquement. Dans “Rages de Césars” , Napoléon
III, désigné comme “L’Homme pâle”, est présenté comme un débile, l'œil
“terne”. Il caricature l’empereur dans le poème “le Forgeron”, à travers le
personnage de Louis XVI, on peut également reconnaître Napoléon III; il se
tient “debout sur son ventre”, tellement il est gras.
● Malgré le ridicule de l'empereur décrit par Rimbaud, Napoléon III est
représentée comme une personne dangereuse : il oppresse le peuple,
l’appauvrit et le contraint (“C’est bien : les pauvres à genoux !”) (“Le
Forgeron”). C’est lui qui est responsable de la guerre , c’est lui qui arrache
aux familles pauvres (paysans ; ouvriers) leurs enfants qui meurent pour lui
dans la plus grande indifférence.
● Avec le soutien de l’Eglise, le pouvoir est encore plus dangereux . Le jeune
Rimbaud s’en prend à l’Eglise, étant avide du moindre sou (“Sur les
chapelets clairs grenés de pièces d’or” -> “Le Forgeron” .
2-Haine de la bourgeoisie
● Rimbaud, qui a passé son enfance aux côtés des bourgeois de Charleville,
prend plaisir à les décrire grossièrement.Dans “A la musique”, il peint leur
embonpoint (signe de richesse), mais aussi signe de conservatisme, aussi
symbole de leurs grandes erreurs.
Citation Importante : “Tous les bourgeois poussifs qui étranglent les chaleurs /
Portent,les jeudis soir, leurs bêtises jalouses”
● Le jeune Rimbaud fait preuve d’empathie envers les pauvres, victimes de
l’oppression bourgeois et du pouvoir, comme les “cinq petits” dans “Les
Effarés” qui guettent le boulanger dans le froid, ou les “vieilles qui s’en vont
en pleurant sous leurs bonnets” dans “Le Forgeron”.
B/La Nature
1-Une nature sensuelle qui met les sens en éveil
● Dans les Recueils de Douai, la nature est une force séductrice des sens des
personnages et fait ainsi appel aux sens du lecteur:
-la vue : “Par les soirs bleus d’été” -> “Sensations”
-le toucher : “le vent baise ses seins” -> “Ophélie”
-le goût : “La sève est du champagne” ->”Roman”
-l’odorat : “Les parfums ne font pas frissonner sa narine” -> “Le Dormeur du Val”
-l’ouïe : “Mes étoiles au ciel avaient un doux frou-frou” -> “Ma Bohème”
● On peut donc en déduire que ce sont toujours des sensations agréables
pour l’auteur.
2-Une nature Maternelle
● Pour le jeune Rimbaud fugueur, la nature se montre très hospitalière et
protectrice : “Mon auberge était à la Grande Ourse” : “Ma Bohème”
● Elle protège aussi un des personnages que Rimbaud a convoqué de
littérature, Ophélie, en lui donnant une demeure.
● La nature est aussi nourricière, grâce au Soleil : “le foyer de tendresse et de
vie” -> “Soleil et Chair”
3-Une nature complice
● La nature accompagne le poète dans ses tentatives de séduction , en lui
donnant quelques fois un refuge : “On va sous les tilleuls verts de la
promenade” -> “ Roman” ; et elle rends les femmes plus attractives aux yeux
de Rimbaud “Un petit rayon buissonnier / Papillonner son sourire/ Et sur
son sein” -> “Première soirée”
● Elle l’aide également dans sa quête pour la liberté . Dans “A la musique”, les
“mesquines pelouses” de la bourgeoisie soppose aux “marronniers verts” du
jeune Rimbaud. Ce sont aussi les vents qui soufflent à Ophélie un désir de
liberté.
Citation Importante : “Et j’irai loin, bien loin, comme un bohémien ; Par la
Nature – heureux comme avec une femme” -> “Sensation”
C/Les Femmes
1-Les différents visage des femmes
Les Cahiers de Douai présentent des femmes différentes les unes des
autres.La femme, parfois idéalisé , comme dans “Ophélie”, personnage de la
littérature anglaise de Shakespeare, le personnage est caractérisé comme
un enfant, avec la peau de couleur blache, synonyme de purté. Rimbaud
célèbre aussi la déesse de l’amour dans “Soleil et chaire”.
● Cependant, la femme peut aussi apparaitre comme horrible et repoussante,
comme dans “Vénus Anadyomène”, avec la chute se terminant par “un
ulcère à l’anus”.
● Ceci n’empeche pas la femme à etre sensuelle et séductrice . Elle n’hésite
pas à attirer et séduire Rimbaud et accepte les tentatives amoureuses du
poète.
2-L’amour du jeune Homme
● Le poète fait preuve d'ironie à son égard lorsqu’il s’agit d’amour. Dans
“Roman”, il prend conscience, par le regard de la jeune fille , de sa naïveté
“immensément naïf”.
Citation Importante : “Oh ! la la ! que d’amours splendides j’ai rêvées !”
● C’est donc cette jeunesse qui le rend maladroite et l'empêche de concrétiser
et de solidifier ses amours. Il rêve ainsi plus qu’il n’entreprend, il imagine
plus qu’il voit et qu’il expérience . (“Je reconstruis les corps, brûla de belles
fièvres” ->”A la musique”).Les fantasmes du poète s'expriment dans des
points pleins de désirs, sans prendre en compte la réalité.
D/La Liberté
1-Les fugues du jeune Rimbaud
● Arthur Rimbaud fugue plusieurs fois lors de la rédaction des Cahiers de
Douai.Il s’émancipe de l’autorité maternelle et le milieu dans lequel il
évolue.Il rejette ainsi la bourgeoisie de Charleville, tout comme le régime de
Napoléon III.
● Certains poèmes s'apparentent à des pages de journaux, en ce qu'il semble
raconter un événement précis de ses fugues.
● Le désir de liberté devient de plus en plus prégnant lorsqu’il évoque la
marche : le verbe aller est repris multiples fois à travers le recueil, dans
“Sensation” (j’irai loin comme un bohémien) le verbe aller est conjugué au
futur ce qui indique sa volonté de continuer ses fugues, ou à l’imparfait, “je
m’en allais, les poings dans mes poches crevées”. L’espace où se déroule
cette marche libre semble ne jamais s'arrêter…
2-Liberté Créatrices
Citation Importante : “J’allais sous le ciel Muse ! et j’étais ton féal” -> “Ma
Bohème”
● La liberté physique et morale revendiquée par le jeune poète devient une
revendication esthétique pour Rimbaud.
● Il se libère des formes poétiques traditionnelles . Par exemple, il conclut le
poème “Rages de Césars” par des rimes suivies qui aurait dû commencer
dans les 2 premiers tercets. Il a recourt aussi à de nombreux enjambement,
rejets et contre rejets qui modifient les rythmes et la métrique des
alexandrins.
● Il n’hésite pas à employer des onomatopées “frou frou” -> “Ma Bohème” et
des mots familiers / vulgaires “cul”-> “Les Effarés” / “merde” -> le
Forgeron.Il met aussi en valeur une rime à un mot vulgaire : “Vénus”/
“anus” dans “Vénus Anadyomène”. On a aussi cette cohabitation entre
langage courant et langage poétique se lit également dans les répétitions
dans “Le Buffet” -> “conter tes contes” .
● On observe aussi dans le recueil Cahier de Douai des mélanges satiriques :
-registre épique dans “Le Forgeron”
-registre satirique dans “A la musique”, “Rages de Césars”
-registre pathétique/empathique dans “Les Effarés” : “A genoux, cinq petits,
–misère !” ; des images grotesques “Leurs culs en rond”
Citation Importante : “Et tout ce corps ce remue et tend sa large croupe /
Belle hideusement d’un ulcère à l’anus” -> “Vénus Anadyomène”