ENTRE SES GRIFFES

Aurore Doignies

Copyright © 2015

BONUS

Assis aux côtés de Cameron, face à la petite soixantaine de spectateurs qui les
observaient d’un air amusé, Kyren se demanda pour la millième fois ce qui
lui avait pris de céder à son époux, quant à leur participation à l’émission «
The Newlywed Game[1] ». Il faisait une chaleur étouffante, sur le plateau. Il
était mal à l’aise, n’avait pas aimé de se voir placer dans le camp des « filles
» avec les deux autres moitiés des couples – des couples évidemment hétéros
! – et envisageait fortement d’étrangler Mark, assis dans le public, pour son
sourire niais. Il devait être sacrément satisfait, ce crétin, vu qu’il était
l’investigateur de leur présence sur le plateau. Il les avait inscrits en traître et
Cameron avait été si plein d’espoir à l’idée de participer à l’émission qu’il
n’avait pas réussi à trouver une bonne excuse pour le décevoir.

L’arrivée du présentateur le distrayant de ses pensées d’homicide, il ravala

une grimace au ton enjoué du comique qui s’attirait les applaudissements et
les cris des spectateurs.

— Bonjour à toutes, bonjour à tous ! Bienvenue sur le plateau des…

Z’Amours !

Les spectateurs complétèrent avec lui sa stupide phrase d’introduction,

saturant ses tympans sensibles.

— Ave, Caesar, morituri te salutant, maugréa-t-il tout bas.

— Tu as un micro, lui souffla Cameron, un sourire plaqué sur ses lèvres. Sois
gentil.

« Ben voyons ! »
Il faillit se tourner vers lui, se rappela de la consigne de rester fixé sur les
caméras, et se contenta de lui shooter dans la cheville comme par mégarde.
Le petit grognement de douleur qui s’échappa des lèvres de Cameron l’emplit
d’une satisfaction mesquine.

Le présentateur leur jeta un bref coup d’œil avant de s’avancer vers le

premier couple, assis sur un fauteuil rouge, pour débuter les présentations des
candidats. Et le couple glamour de faire des signes de la main, un grand
sourire ravi sur le visage…

Les « jaunes » étaient un couple de retraités, tout aussi heureux d’être là. Et
puis, eux. Les « bleus ». Avec Cameron qui souriait d’un air enjoué et salua
la foule alors que lui-même se demandait si partir en courant serait mal pris.
Il supposait que oui.

Sous le regard insistant du présentateur, il fit un signe de la main peu motivé,

un sourire factice sur le visage.

Sur un signe du caméraman, le présentateur le laissa faire un gros plan des

spectateurs.

— On va devoir la refaire, si tu ne te comportes pas bien, lui glissa Cameron.

— Écoutez, les mecs, dit le présentateur en s’arrêtant devant eux quelques

secondes plus tard, la première séquence visiblement assez satisfaisante pour
être mise en boîte. Va falloir coopérer, sinon on va tourner dix fois toutes les
prises.

Kyren grimaça quand Cameron arqua un sourcil en le regardant, l’air de dire :

«

Qu’est-ce que je t’avais dit ? »

— Désolé…

On leur demanda de se séparer selon les groupes attribués à chacun.

Visiblement, les « filles » devaient quitter la salle pour les laisser enregistrer
les réponses aux questions des « garçons ».
— Souriez, ça ne va pas vous tuer, conseilla la retraitée alors qu’il s’éloignait
vers les coulisses d’un pas rageur.

— Peut-être ! Mais maintenant, je sais ce que ressent le chat quand on le

castre, rétorqua-t-il sans la regarder.

— Et quel effet cela fait ? s’amusa-t-elle.

Kyren lui jeta un regard peu amène avant de sourire malgré lui en croisant
son regard pétillant de malice.

— Ça donne envie de se venger du vétérinaire.

L’autre femme à leurs côtés pouffa.

Kyren secoua la tête et alla s’asseoir dans un fauteuil mis à leur disposition.

Envisageant des stratégies de vengeance à l’égard de Mark.

Debout derrière un morceau de plastique censé ressembler à un petit

comptoir, Cameron regarda brièvement ses deux adversaires.

— Cameron !

Il sursauta en entendant son nom prononcé d’une voix forte par l’animateur.

— Oui ?

— Originaire de Chicago ?

— Oui…

— Et qu’est-ce que vous faites dans la vie ?

— Je travaille pour une agence fédérale.

— Ah ! Laquelle ?
Cameron se racla la gorge.

— Le F.B.I.

— Vous avez vos menottes ?

Cameron cilla puis secoua la tête alors que le présentateur faisait une grimace
supposée être comique.

— Et… euh… Terry ?

— Employé dans une entreprise publicitaire, répondit le grand blond avec un

sourire éclatant.

— Et vous, Isaac ?

— Comptable à la retraite, répondit le plus âgé.

Le présentateur hocha la tête, puis prit ses fiches.

— Quand elle fait ça, votre femme – ou votre compagnon, hein, Cameron, on
est bien d’accord ? – vous agace particulièrement… De quoi s’agit-il ?

Cameron roula des yeux.

— Il est maniaque.

— C’est-à-dire ? demanda le présentateur.

— Il a une façon bien à lui de ranger le linge, soupira-t-il. Tout doit être placé
correctement en tas dans l’armoire, repassé sans l’ombre d’un pli…

— D’accord… Maniaque avec le linge. Terry ?

— Elle chante, le matin.

— Ce n’est pas agréable ?

— Elle chante faux, précisa le blond. Dès le matin, c’est dur.

Cameron ravala difficilement un sourire. Le présentateur, lui, gloussa.

— Isaac ?

— Oh, depuis le temps que je la pratique…

— Il n’y a plus grand-chose qui vous agace ?

— Tout m’agace, répondit le retraité en riant.

— Il va falloir choisir quelque chose quand même, sourit le présentateur.

— Sa façon de conduire.

— D’accord. Deuxième question… À l’époque où vous l’avez rencontrée…

C’était il y a combien de temps ?

— Trois ans, répondit Cameron.

— Cinq ans.

— Trente-quatre ans.

— Trente-quatre ans de vie commune ? rebondit le présentateur.

— Trente-trois ans de mariage, précisa Isaac. Trente-quatre qu’on se connaît.

Des applaudissements retentirent dans la salle. Le présentateur hocha la tête.

— Qu’est-ce qui vous a le plus surpris, dans ses petites habitudes ? Isaac ?

— Elle portait toujours ses bracelets par trois.

— Mmm. Terry ?

— Elle a un sac qui correspond à chacune de ses paires de chaussures.

Cameron fit la moue quand le présentateur se tourna vers lui.

— Il aime ses bains à peine tièdes, soupira-t-il.

— Ça a dû vous refroidir, plaisanta l’animateur.

Le regard compatissant du blond près de lui le fit presque rougir et il baissa

les yeux alors que le retraité à ses côtés rigolait.

— Entre vous, ça a été : le coup de foudre, un accident lors d’une soirée trop
arrosée, un travail de longue haleine ?

— Un travail de longue haleine.

— Vous l’avez travaillé au corps à corps ? se moqua l’animateur. Ah,

j’imagine bien les interrogatoires que vous pratiquez avec lui…

Cameron, les joues écarlates, ne répondit pas et fut soulagé de le voir passer à
ses adversaires.

De retour sur les fauteuils flashy, aux côtés de Cameron, Kyren réprima un
soupir lorsque les caméras recentrèrent leurs objectifs sur eux.

— Allez les filles ! fit l’animateur avant de se tourner vers lui. Et Kyren, bien
sûr.

« Il se croit drôle, en plus. »

— Tout d’abord dites-moi, dans quel domaine travaillez-vous ?

— Je suis professeur à l’université de Northwestern.

— Dans quelle branche ?

— Éthologie.

— Ah, les oiseaux, tout ça ?

— Ça, c’est l’ornithologie, répondit-il en se retenant de lever les yeux au ciel.

— Quelle différence ?
— J’étudie les comportements humains et animaliers, pas les oiseaux.

— Un peu comme le Dr. Dolittle, donc. Je vois…

Kyren en resta bouche bée. À ses côtés, Cameron réprima difficilement un

éclat de rire alors que le présentateur s’intéressait aux compagnes des
candidats. Puis, l’animateur revint vers eux.

— Quand vous faites ça, cela l’agace particulièrement. De quoi s’agit-il ?

Kyren fronça les sourcils.

— Je suppose qu’il y a certaines choses qui l’agacent…

— Celle qui l’agace le plus, suggéra l’animateur. À votre avis.

— Je le bats à la course.

— Vous le battez souvent à la course ?

Cameron grimaça.

— Sauf quand je le laisse gagner, répondit Kyren avec un petit sourire en

coin.

— Non, dit le présentateur alors que Cameron se penchait pour prendre un

carton et le montrer au public. Vous l’agacez quand vous rangez le linge.

— Ah… Eh bien, je t’en prie, range-le, toi, railla Kyren en toisant son époux.

— Je n’ai pas dit que c’était mal fait, objecta Cameron.

— Juste que ça t’agaçait, ironisa-t-il. Mais si je ne le faisais pas, ce serait le

foutoir, chez nous.

Les spectateurs s’esclaffèrent. Cameron, une moue aux lèvres, reposa le

carton.

Après avoir posé la même question aux deux autres candidates, qui
répondirent avec aussi peu de succès que lui, le présentateur posa la seconde
question.

— À l’époque où il vous a rencontré, qu’est-ce qui l’a le plus surpris, dans

vos petites habitudes ?

— J’aime avoir mon espace.

— Il ne nous a pas parlé de ça, non. Il nous a dit que vous aimiez les bains
tièdes.

C’est vrai ?

— Il m’a appris à faire des compromis quant à la température de l’eau…

— Oh, oui, pour ne pas le refroidir ! s’amusa l’animateur.

— Oh je vous rassure, il oublie vite la température de l’eau avec moi,

répondit Kyren.

L’animateur en avala presque sa salive de travers et Cameron se sentit rougir.

Attrapant le carton, il en frappa légèrement Kyren sur la tête.

— Qu’est-ce que vous en dites, Monica ? demanda le présentateur en se

tournant vers la jeune trentenaire aux cheveux sombres.

— Mes sacs assortis à mes chaussures, répondit-elle sans hésiter.

— C’est ça, confirma-t-il. Et vous, Ruth ?

— Mes bracelets.

— C’est-à-dire ?

— J’en mets toujours trois à la fois.

— On y est, conclut-il alors qu’Isaac sortait le carton et que retentissait la

sonnerie validant la réponse. Troisième question, mesdames, Kyren, entre
vous, ça a été : le coup de foudre, un accident lors d’une soirée trop arrosée,
un travail de longue haleine ?

— Le coup de foudre, dit Ruth, qui se vit valider sa réponse.

— Un travail, sourit Monica.

— Tout à fait, confirma l’animateur. Kyren ?

— Un travail de longue haleine, dit-il avec une pointe de nostalgie.

Cameron sortit le carton pour le montrer et se pencha pour embrasser Kyren.

— Vous marquez vos premiers points ! les félicita l’animateur. On fait un

petit point sur les scores… C’est dix, dix et cinq pour le F.B.I !

Il fit rapidement le lancement des publicités et ils purent se lever de leurs

fauteuils, pour se séparer à nouveau. Kyren passa une main sur sa nuque,
tendu, et suivit les deux femmes d’un pas réticent.

— Mesdames, Kyren… Comment vous voyez-vous dans dix ans ? En couple

sans engagement, mariés sans enfant ou mariés avec un ou plusieurs enfants ?

— Oh bah c’est facile pour moi, s’amusa Ruth. Mariés avec plusieurs
enfants.

— Monica ?

— Mariés avec des enfants.

— Sans enfant, répondit Kyren.

L’animateur opina.

— Si votre compagnon était le héros d’un film, qui serait-il ? « The Mask » –
Jim Carrey – séducteur, drôle et exubérant ; Rocky Balboa – Sylvester
Stallone – dans les
« Rocky », gros bras viril, protecteur et au cœur tendre ; Edward Lewis –
Richard Gere – dans « Pretty Woman », prince charmant moderne ?

Kyren haussa les sourcils.

— The Mask, répondit Monica.

— Edward Lewis, soupira Ruth.

— Aucun n’est pas une réponse acceptable ? grimaça Kyren quand

l’animateur le regarda.

— Non.

Kyren haussa les épaules.

— Edward Lewis, marmonna-t-il en évitant de regarder vers Mark, qu’il

sentait extrêmement amusé dans le public.

L’animateur se mit à rire.

— Le prince charmant moderne ? OK… Quel sujet de disputes revient le plus

souvent

? La jalousie, les soirées avec les copains ou la belle-famille ?

— Les soirées avec les copains, dit Ruth en secouant la tête d’un air
désabusé.

— Ah oui ? Il a tendance à faire la fête, Isaac ?

— Il aime bien passer une soirée de poker avec ses amis.

— Alcool et cigares ? supposa le présentateur.

— C’est ça.

— Bien sûr. Monica ?

— La belle-famille, grimaça-t-elle.

— Kyren ?

— La jalousie, grogna-t-il.

— Avec ou sans raison ? l’interrogea l’animateur avec un petit air entendu.

— Sans.

— De votre point de vue, c’est ça ?

Kyren se passa de répondre et la lueur dans son regard poussa le présentateur

à changer de sujet.

— Ces derniers temps, alors que vous suggérez un câlin, votre compagnon se
met à bâiller, dit-il en reprenant ses fiches.

Ruth se mit à rire.

— Pas ce soir, chérie, je suis fatigué, ajouta l’animateur en prenant une voix
de fausset. Quelle est votre réaction ? Sarcastique : « Ça fait plaisir, de se
sentir désirée

». Compréhensive : « Tu devrais te reposer, mon chéri, tu travailles trop ».

Ou bien entreprenante : « Laisse-moi faire, bébé ».

— Compréhensive, dit Ruth.

— Ah oui, ça travaille dur, un ancien comptable, s’amusa l’animateur. Kyren

?

— Entreprenant.

Le public siffla et l’encouragea. Malgré lui, il se sentit rougir.

— Monica : sarcastique, compréhensive ou entreprenante ? demanda le

présentateur.
— Sarcastique.

— D’accord. Vous vous moquez un peu… Question bonus ! Si vous deviez

donner un nom d’animal à votre compagnon, ça serait plutôt : un lapin,
toujours chaud ; un chien, loyal ou un renard, parfois trop rusé pour son
propre bien.

— Un renard, répondit Kyren lorsque les yeux de l’animateur se posèrent sur

lui.

— Ah oui, vu son métier… Monica ?

— Un lapin.

— Mmm mmm… Ruth ?

— Un lapin, approuva cette dernière.

— Encore maintenant ?

— Il a de bonnes réserves.

— C’est les piles Duracell, plaisanta l’animateur.

— Je rappelle à nos couples que les scores sont dix, dix et cinq ! Le F.B.I. est
à la traîne…

— On va se rattraper, assura Cameron.

L’animateur sourit avant de reprendre ses fiches.

— Messieurs, selon votre compagne ou compagnon, comment vous voit-elle,

ou voit-il, dans dix ans ? En couple mais sans engagement, mariés sans enfant
ou mariés avec enfants ? Isaac ?

— Mariés avec plusieurs enfants.

— En effet, confirma l’animateur alors que Ruth sortait son carton. Terry ?

— Mariés avec des enfants ?

— Vous êtes mariés, déjà ?

— Il n’a pas encore fait sa demande, répondit Monica.

— Eh bien voilà, vous savez ce qu’il vous reste à faire, Terry, se moqua-t-il.

Cameron ?

— Mariés… avec enfants ?

Kyren sursauta et le regarda d’un air incrédule. Cameron lui sourit d’un air
hésitant.

Secouant la tête, Kyren tira son carton et le gong de mauvaise réponse

retentit.

— Ça sent la discussion de couple après l’émission, s’amusa l’animateur

avant de lire une seconde fiche pour éviter qu’ils ne la commencent sur le
plateau même. Si vous étiez le héros d’un film, qui seriez-vous selon votre
partenaire ? « The Mask », séducteur, drôle et exubérant ; Rocky Balboa,
gros bras viril, protecteur et au cœur tendre ; Edward Lewis, prince charmant
moderne ?

— The Mask, répondit Terry sans hésitation.

— Le prince charmant, affirma Isaac.

— Cameron ? demanda l’animateur en se tournant vers lui.

— Rocky ? tenta Cameron, peu convaincu.

— Non, il avait choisi Edward Lewis.

Cameron ne put s’empêcher de sourire.

— Le prince charmant moderne ?

— La ferme, marmonna Kyren après lui avoir envoyé un coup de carton sur
la tête.

Son compagnon rit tout bas sans en prendre ombrage.

— Quel sujet de disputes revient le plus souvent ? La jalousie, les soirées

avec les copains ou la belle-famille ?

Terry et Isaac répondirent correctement et Cameron jeta un bref coup d’œil à

son compagnon avant de regarder l’animateur d’un air désabusé.

— La jalousie ? supposa-t-il.

— C’est ça, confirma le présentateur alors que Kyren sortait le carton pour
montrer sa réponse. Vous êtes jaloux ?

— Un peu.

Kyren roula des yeux.

— Mais j’ai confiance en lui, ajouta Cameron en lui souriant tendrement.

— Mmm. Ces derniers temps, alors que votre partenaire suggère un câlin,
vous vous mettez à bâiller. Quelle est sa réaction ? Premièrement, sarcastique
: « C’est agréable, de se sentir désirée ». Deuxièmement, compréhensive : «
Tu travailles trop, mon chéri ». Ou bien plutôt entreprenante : « Laisse-moi
faire, bébé, je vais te requinquer ».

— Entreprenante, dit Isaac.

— C’était compréhensive, s’amusa l’animateur. Terry ?

— Sarcastique.

L’animateur confirma alors que Monica tirait le carton et embrassait son

partenaire.
— Cameron ?

— Entreprenant ? suggéra-t-il en se sentant rougir.

Kyren sourit malgré lui et montra le carton alors que le public applaudissait et
que Mark sifflait plus fort que les autres.

— Question bonus ! Si votre compagne, ou compagnon, devait vous donner

un nom d’animal, ça serait plutôt : le lapin, toujours chaud ; le chien, loyal ou
le renard, rusé.

— Un chien, répondit Terry.

— C’était un lapin, s’amusa l’animateur.

Le jeune homme rougit.

— Isaac ?

— Un lapin.

Le public éclata de rire alors que la réponse était validée.

— Cameron ?

— J’hésite… J’espère qu’il a dit un lapin.

— C’était le renard, répondit le présentateur alors que Kyren grommelait et

sortait le carton. Alors, les scores, c’est trente-cinq pour Ruth et Isaac, trente
pour Monica et Terry et quinze points pour Kyren et Cameron ! Les gagnants
sont donc Ruth et Isaac, nos retraités ! Bien joué !

L’enregistrement de la séquence s’arrêta là. Kyren, soulagé, se leva du

fauteuil avec son amant et félicita les retraités avant de s’éloigner vers les
coulisses où ils étaient supposés attendre avant de revenir pour le générique.
Cameron le rattrapa et le prit par la main, lui offrant un sourire complice.

— Ce n’était pas si terrible, si ?

— Non, grommela Kyren en l’attirant dans un recoin pour avoir un peu plus
d’intimité. Mais Mark me le paiera quand même.

Cameron opina et l’enlaça, penchant légèrement la tête pour lui voler un bref
baiser.

— Tu n’as pas fait exprès de perdre, pas vrai ? murmura-t-il.

— Non. Et toi ?

— Non plus… Alors comme ça, tu trouves que je suis le prince charmant ?
Moi ?

Kyren se contenta de rire. Cameron nicha son visage dans son cou en souriant
et caressa sa gorge de son nez. Un ronronnement ténu échappa à Kyren qui
soupira doucement.

— Cameron ?

— Mmm ?

— Tu veux vraiment des enfants ?

Cameron releva la tête pour le regarder avec une pointe d’inquiétude.

— Je sais qu’on n’en a jamais vraiment parlé… En fait, je n’y avais jamais
réfléchi avant cette question…

— Cam…

— Et ce n’est pas comme si je voulais absolument être père, le coupa-t-il.

— Mais tu aimerais.

— Construire une famille avec toi ? Bien sûr que j’aimerais ! Mais
uniquement si tu le veux, toi aussi.

Kyren le contempla longuement en silence, puis un sourire frôla ses lèvres.

— Pas tout de suite, d’accord ? dit-il doucement. Mais on peut se
renseigner…

— Oui ? souffla Cameron, le cœur battant, les yeux un peu brillants.

— Oui, répondit-il tendrement.

L’étreinte de Cameron se raffermit autour de lui et il l’embrassa à pleine

bouche, fougueusement, avant de blottir son nez contre son oreille, les yeux
clos.

— Je t’aime, Kyren, chuchota-t-il.

— Moi aussi je t’aime, répondit-il en lui caressant tendrement le dos. Je

t’aime tellement…

[1] L’équivalent de l’émission « Les Z’amours » aux États-Unis.