Concours 1ère année 2014 : Epreuve obligatoire
Droit civil
Correcteurs:
Jean-Baptiste Lenhof, Maître de conférences, ENS Rennes
Florent Petit, Maitre de conférences, Université de Caen
Auteur :
Jean-Baptiste Lenhof
Sujet : Propriété et titre
Fait à Rennes, le 9 juillet 2014
Jean-Baptiste Lenhof.
1 ° Analyse du sujet
Le sujet de l’année 2014 « Propriété et titre » ne recelait pas de difficultés particulières, à la condition de bien
déterminer les éléments de droit qui pouvaient être rattachés à la notion de « titre ». Visiblement, l’essentiel
des erreurs commises par les candidats est né d’une absence de définition de ce terme du sujet, ou d’une
approche superficielle, voire incohérente.
Le sujet, à l’évidence, portait essentiellement, cette année, sur le droit des biens. Il apparaît, toutefois, qu’un
nombre important de postulants au concours de l’ENS Rennes semblait attendre un mouvement de balancier
vers le droit des obligations. Ainsi, beaucoup de copies étaient formellement parfaites, mais ne comportaient
que fort peu de droit substantiel, sans doute en raison de l’utilisation d’une stratégie de révision fondée sur
ce qu’il est convenu d’appeler des impasses. Nous avions signalé, cependant, dans nos rapports
précédents, que les sujets seraient imprévisibles, précisément pour éviter d’encourager de tels
comportements. Objectivement, il nous faut constater que le message n’a été qu’imparfaitement reçu.
De très nombreuses copies étaient, par ailleurs, hors sujet. Le hors-sujet le plus commun a été, sans
conteste, le traitement inopiné de l’abus de droit et des troubles anormaux du voisinage. Ces deux thèmes
faisaient souvent l’objet d’une partie entière de la dissertation. Ces hors-sujets, cependant, semblent
davantage dus à un défaut de connaissances qu’à une erreur de raisonnement.
Comme les années précédentes, enfin, nous soulignerons la difficulté qu’éprouvent les candidats à dégager
une problématique et à l’insérer dans la trame du raisonnement. Sur ce point, deux remarques méritent
d’être formulées :
- La première est formelle : il ne suffit pas de plaquer n’importe quelle question à la fin de l’introduction
pour générer une problématique. La problématique est la charnière entre l’introduction et l’annonce
de plan et, à ce titre, elle peut, si elle est bien conçue, découler simplement de la fin de la
délimitation du sujet. Mieux vaut, en effet, s’attacher à rédiger un paragraphe problématisant (mais
surtout pas en accumulant une avalanche de questions) qu’une problématique artificielle : ce n’est
pas parce qu’une phrase comporte un point d’interrogation que la problématique est construite.
- La seconde est méthodologique : cette déficience rejaillit directement sur le plan et sur le
raisonnement. Dans ce dernier, il convient, en effet, de rapporter systématiquement la rédaction à la
problématique afin de rester aligné sur la délimitation du sujet. Lorsque la problématique n’a aucun
sens, le raisonnement ne peut, à l’évidence, être conduit de façon cohérente.
2 ° Particularités de la session 2014
1
(Nota : nous invitons étudiants et préparateurs à consulter attentivement les rapports des années
précédentes qui complètent et précisent les attentes du jury.)
On ne saurait, toutefois, à l’issue de cette session 2014 que féliciter les préparateurs pour le travail rigoureux
qui a été fourni durant ce cycle car il a permis d’éliminer, chez les étudiants, des défauts qui semblaient,
pourtant, durablement ancrés. Tel est le cas, notamment, des dérives économiques qui pullulaient autrefois
et qui sont insignifiantes cette année, comme il en a été des digressions philosophiques, des détours
publicistes ou constitutionnels. En règle générale, les productions nous ont semblé plus rigoureuses et la
démarche des étudiants plus systématique que les années précédentes. Hélas, nombre d’entre les
candidats, visiblement, s’étaient consacrés à un travail assidu sur le droit…des obligations.
Autre sujet de satisfaction, la baisse du nombre de copies blanches, même si leur proportion demeure
affligeante, comme celle de copies de pure forme, qui ne comportent que quelques lignes. Nous félicitons,
enfin, avec sincérité, les étudiants qui ont su produire des copies d’un très haut niveau, gageant que cette
distinction rejaillira indirectement sur leurs préparateurs.
Une mention particulière, cependant, sera accordée pour la copie (hors sujet) intitulée « Propreté et vitres »
qui, pourtant, était fort rigoureuse dans son raisonnement ainsi qu’en atteste la transition suivante (sic) :
« L’avènement d’un tel principe est le fruit de l’évolution d’une présomption de propreté des vitres dont on a
la garde (a) à une obligation de propreté de ces dernières (b) ». D’autres ont eu moins de bonheur dans la
production d’un style plus proche de la téléréalité que de celui du Doyen Carbonnier : « Le seigneur et les
cerfs se partagent la propriété » ; notamment dans les phrases d’accroche : « Dans un régime communiste
le droit de propriété est très peu développé » ; on mesure, également, que de saines lectures ne suffisent
pas à former un juriste subtil : « Pour Cornu, les biens, c’est bon. » ; on soulignera, au surplus, que le souci
d’un propos didactique peut conduire à une vulgarisation démesurée : « chaque personne a un patrimoine, ni
zéro, ni deux ».
Cette année, nous avons (i.e. J-B Lenhof) décidé de proposer, exceptionnellement, une introduction
développée avec une proposition de corrigé. Nous n’exigions pas, bien entendu, la production de l’ensemble
des éléments du droit positif recensés dans ce rapport car ils sont nombreux et parfois très précis. Une
excellente copie (18 ou 19/20) pouvait, de la sorte, ne comprendre qu’environ 70 % des connaissances
mobilisables. Un barème, par ailleurs, vous a été indiqué, sans qu’on puisse augurer qu’il fasse
ultérieurement jurisprudence car tout dépendra du sujet de l’année prochaine. Ce dernier, une fois encore,
sera surprenant et cet avertissement évitera aux étudiants de gaspiller leur énergie à recherche des pistes
d’impasse.
Nous indiquerons, enfin, et ce point nous paraît fondamental pour rassurer les candidats, que toutes les
copies ont fait l’objet d’une double correction, une trentaine d’entre elles ayant été corrigées trois fois.
3 ° Rappel succinct des exigences du jury
Quant à la problématique : dans pratiquement toutes les copies, les problématiques sont absentes,
ridicules ou superficielles, alors que, paradoxalement, le niveau intellectuel produit est plutôt satisfaisant. Ce
ne sont, ainsi, pas tant les compétences des étudiants qui font défaut que leur manque de conviction dans
l’efficacité d’un déroulement ordonné du raisonnement, que l’introduction de la dissertation est censée
canaliser.
Quant au contenu des dissertations nous insisterons sur deux points.
- Le premier vise l’utilisation abusive de positions doctrinales étrangères au sujet. Ces dernières, fruit du
travail des chercheurs, visent à approfondir la compréhension de mécanismes juridiques complexes et/ou à
en repousser les limites. C’est, ainsi, un travail de prospective qui vise à donner un nouvel éclairage du droit
pour inciter à la réflexion. Si la légitimité de ces travaux est incontestable, on voit mal, toutefois, comment les
articuler avec les problématiques qui peuvent ressortir des sujets du concours. Les candidats, ainsi, en
mettant en avant des raisonnements doctrinaux spécifiques, s’écartent du sujet proposé ou en faussent le
traitement.
- Le second porte sur l’inefficacité du débat d’idées. Les copies efficaces sont toujours celles qui privilégient
les approches classiques, les confrontent avec l’évolution du droit positif et s’appuient sur des références au
droit substantiel. Rien ne dessert plus un raisonnement, ainsi, que d’être placé dans une perspective
exclusivement abstraite, détachée, en conséquence, de la rigueur textuelle qui s’impose au juriste et, au
surplus, socialement déconnectée de la réalité.
2
Quant à l’acquisition de connaissances.
L’épreuve impose aux candidats de s’appuyer sur le droit positif, sous tous ses aspects, et de renvoyer aux
réflexions de la doctrine sur les points évoqués. Nous avions déjà souligné les ravages causés par la
technique du « fichage » superficiel. Le plus souvent, ce fichage, qui n’est pas fondamentalement à
proscrire, est extrêmement mal réalisé. Il conduit, en premier lieu, à extraire des données de leur contexte et
à donner naissance, de la sorte, à des contre-sens flagrants. Il mène, en second lieu, à une approche du
droit par le détail qui empêche de percevoir la façon dont les matières se combinent, de comprendre leur
articulation et de saisir l’importance des antécédents historiques d’une donnée juridique. A notre sens, il
n’est possible de travailler correctement que sur des fiches que l’on a soi-même établies.
Quant à l’absence de malléabilité du droit
Les notions juridiques ne sont, en aucun cas, susceptibles d’appropriation par le candidat, fussent-
elles l’objet d’une épreuve de dissertation de droit. Pour reprendre un exemple issu du sujet 2012, le dol, par
exemple, est défini avec une grande précision mais la majorité des candidats a préféré ignorer cette
définition pour lui en substituer une autre, plus conforme à l’idée qu’ils se faisaient de la réponse attendue.
Quant aux approches trop intellectualisées
Nous rappellerons que l’empilement de citations crée un effet d’accumulation qui altère le raisonnement :
d’une part, parce que les citations apprises par cœur ne recoupent pas nécessairement la problématique
visée et, d’autre part, parce qu’elles conduisent souvent à des hors-sujet. Nous reprendrons une formule qui
figure dans nos précédents rapports : « Une copie brillante n’est pas une copie clinquante ». Au risque d’une
seconde autocitation : « Certains développements n’impressionnent les correcteurs que par l’entêtement de
certains candidats à préférer le calibrage mental à une réflexion sur le sujet proposé ».
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Propriété et titre
Introduction : 5 points + style et rédaction de la copie 1 point, chaque partie 7 points.
« Le droit de propriété en soi est (…) une institution directe de la nature, et la manière dont il s'exerce est
(…) une conséquence du droit lui-même ». Ainsi, Portalis, dans son discours préliminaire au premier projet
de Code civil, semblait placer le droit de propriété sous la seule égide du droit naturel. Ledit Code, toutefois,
viendra ultérieurement contredire cette assertion en donnant une telle fonction au titre que ce dernier
débordera, rapidement, de sa seule vocation probatoire. (0,5)
Au plan historique, la complexité du rapport entre propriété et titre peut trouver ses racines dans Pothier qui,
enseignant la possession triennale des meubles, soulignait, déjà, la difficulté d’interprétation de l’article 118
de la Coutume d’Orléans. Il faudra, de la sorte, attendre que les juges du Chatelet établissent, au
XVIIIe siècle, une jurisprudence qui tiendra compte des difficultés probatoires en matière de propriété
mobilière pour établir ce principe, encore applicable de nos jours : « celui qui est en possession de meubles,
bijoux et argent comptant en est réputé propriétaire s’il n’y a de titre contraire ». Les pères du Code civil
reprendront l’esprit de cette formulation à l’article 2279 du Code civil (aujourd’hui 2276), tout en conservant
une distinction de régime entre le sort fait aux meubles et celui qui doit être réservé aux immeubles. Res
mobilis res vilis, l’encadrement du droit de propriété visait, en effet, essentiellement, la protection de la
richesse foncière dans le nouvel ordre juridique issu de la révolution. (0,5)
La propriété, dont le centre de gravité pivotera, désormais, autour du régime immobilier, sera ainsi définie à
l’article 544 du Code civil comme étant : « le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus
absolue (...) ». Elle prendra ainsi trois caractéristiques : outre l’absolutisme, celle d’être perpétuelle et
exclusive, se décomposant, par ailleurs, en trois droits réels ; le fructus : le droit de recueillir les fruits du
bien ; l'usus : le droit de l'utiliser et l'abusus, c’est à dire le droit d'en disposer et - principalement - de le
céder. Il en ressort que lorsqu’une personne est désignée, dans le langage commun, comme étant un
propriétaire, c’est qu’elle est, juridiquement, titulaire du droit de propriété, c’est à dire titulaire d’un droit
qu’elle peut exercer sur une chose, et ce, a priori, en vertu d’un titre. (0,5)
La notion de titre, revêt, semblablement, une signification différente selon qu’elle est prise dans le sens
commun ou dans son sens juridique : dans le langage courant, le titre renvoie, le plus souvent, soit à un rang
nobiliaire, soit à un statut social ou à une fonction dans une institution. En droit, en revanche, il désigne un
document, un acte ou un jugement, qui constitue la preuve d’un contenu juridique, d’une substance
normative, d’une injonction juridique comminatoire ou de la constitution de droits subjectifs. Toutefois, le droit
ne peut être qu’exceptionnellement contenu dans le titre et il ne saurait être confondu avec sa preuve
matérielle : negocium versus instrumentum, les deux actes coexistent, il s’interpénètrent parfois mais ne se
mélangent pas. En effet, un contrat non matérialisé peut exister sans avoir de titre pour support et, comme le
Code civil nous le rappelle, la possession d’un meuble peut valoir titre. Dès lors, le titre n’est pas
indispensable à l’existence de la propriété. (0,5)
Analyser le sujet impose, en exergue, de circonscrire le champ d’investigation très vaste qu’ouvre la
polysémie du terme « titre ». Il convient, en effet, d’écarter du champ de l’étude, par exemple, le titre de
capital qui matérialise - imparfaitement, mais dans son essence - un droit de créance sur une société. Il en
va de même du titre à ordre qui se rattache également à un droit de créance (cf., par exemple : article 110
du Code de commerce).
Il convient ainsi de ne retenir que l’acception du terme qui se rattache à la source, l’exercice, ou la
preuve du droit de propriété. S’agissant des sources, le titre peut, dans une acception élargie, constituer
un acte juridique qui permet de transférer la propriété (un contrat de vente). Ce peut, également, être un fait
qui va permettre, en vertu d’une disposition légale, de donner accès à la propriété (la possession ou
l’accession, en sont de bons exemples). Le titre, cependant, n’est pas seulement la source mais, également,
la preuve du droit ou un élément qui permet d’attribuer le droit à celui que la loi désigne alors que s’affrontent
deux prétentions concurrentes sur une même chose (ou le bénéfice d’un régime susceptible d’y mener).
Ainsi, par exemple, l’acte authentique ou la primauté donné en matière immobilière au premier titre publié,
aussi bien que l’interversion de titre, sont autant d’illustration des effets matériels et/ou probatoires auxquels
la production du titre peut conduire. (1)
Ces derniers exemples renvoient à une interrogation : savoir quelle est la fonction du titre dans la source,
l’attribution, l’aménagement ou l’exercice du droit de propriété. (1)
4
La réponse à cette question se décompose en deux temps. Il apparaît, en effet, que le titre a pour fonction,
d’abord, de consolider le droit de propriété (I) en dehors de tout conflit car là où Portalis ne voyait qu’une
« institution de la nature », l’encadrement juridique demande davantage de substance. Il permet, ensuite,
dans l’hypothèse d’un conflit entre titulaires de droits (II) sur une chose de déterminer celui qui pourra être
déclaré le véritable « propriétaire ». (1)
I / Consolidation du droit de propriété et titre
Le titre joue une fonction différente selon que le bien est meuble ou immeuble. La définition du meuble, qui
suppose la possibilité de le déplacer, comme la facilité à en opérer la cession, complique, en effet,
l’administration de la preuve de la propriété (A). A l’inverse, le statisme des immeubles, conforté par la
rigueur probatoire du transfert de propriété permet de mettre en œuvre un équilibre plus subtil dans les
rapports entre propriété et titre (B).
A / Consolidation du droit de propriété des meubles et titre
1° le régime de possession des meubles
- Rôle de la possession sur la présomption de titularité. Article 2256 du Code civil : On est toujours
présumé posséder pour soi, et à titre de propriétaire, s'il n'est prouvé qu'on a commencé à posséder pour un
autre.
- Conditions de la possession : corpus / animus et exempte de vice. Article 2258 : La prescription
acquisitive est un moyen d'acquérir un bien ou un droit par l'effet de la possession sans que celui qui
l'allègue soit obligé d'en rapporter un titre ou qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi.
Article 2261 : Pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique,
non équivoque, et à titre de propriétaire.
N.B. les correcteurs ont valorisé, ici, la production d’explications claires sur la possession ainsi que sur les
vices.
- Effets de la possession et article 2276 du Code civil : En fait de meubles, la possession vaut titre.
Néanmoins, celui qui a perdu ou auquel il a été volé une chose peut la revendiquer pendant trois ans à
compter du jour de la perte ou du vol, contre celui dans les mains duquel il la trouve ; sauf à celui-ci son
recours contre celui duquel il la tient.
2° La convention entraînant transfert de propriété des meubles
- Rôle de la convention en matière de meuble : c’est l’acte juridique créateur d’obligation qui constitue la
plupart du temps le titre. (Renvoyer ici à 1134 où des développements sont bienvenus).
Application : Article 1316-2, lorsque la loi n'a pas fixé d'autres principes, et à défaut de convention valable
entre les parties, le juge règle les conflits de preuve littérale en déterminant par tous moyens le titre le plus
vraisemblable, quel qu'en soit le support. (Ce point renvoie à la partie II A/ à laquelle il pouvait aisément être
agrégé).
B / Consolidation du droit menant à la propriété des immeubles et titre
1° Rôle du juste titre dans le délai d’usucapion et bonne foi.
Article 550 : Le possesseur est de bonne foi quand il possède comme propriétaire, en vertu d'un titre
translatif de propriété dont il ignore les vices. Il cesse d'être de bonne foi du moment où ces vices lui sont
connus.
Article 2272 : Le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans.
Toutefois, celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans.
Article 2273 : Le titre nul par défaut de forme ne peut servir de base à la prescription de dix ans.
- Mécanisme de l’interversion de titre et calcul du délai. Article 2257 : quand on a commencé à
posséder pour autrui, on est toujours présumé posséder au même titre, s'il n'y a preuve du contraire.
Article 2268-Néanmoins, les personnes énoncées dans les articles 2266 et 2267 peuvent prescrire, si le titre
de leur possession se trouve interverti, soit par une cause venant d'un tiers, soit par la contradiction qu'elles
ont opposée au droit du propriétaire.
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Article 2269 : Ceux à qui les locataires, dépositaires, usufruitiers et autres détenteurs précaires ont transmis
le bien ou le droit par un titre translatif de propriété peuvent la prescrire.
Article 2270 : On ne peut pas prescrire contre son titre, en ce sens que l'on ne peut point se changer à soi-
même la cause et le principe de sa possession.
2 ° Rôle du titre dans l’aménagement du droit de propriété :
Servitudes : Article 686 : Il est permis aux propriétaires d'établir sur leurs propriétés, ou en faveur de leurs
propriétés, telles servitudes que bon leur semble, (…). L'usage et l'étendue des servitudes ainsi établies se
règlent par le titre qui les constitue ; à défaut de titre, par les règles ci-après (…).
Article 690 : Les servitudes continues et apparentes s'acquièrent par titre, ou par la possession de trente
ans.
Article 691 : Les servitudes continues non apparentes, et les servitudes discontinues apparentes ou non
apparentes, ne peuvent s'établir que par titres.
Usufruit, Article 600 : L'usufruitier prend les choses dans l'état où elles sont, mais il ne peut entrer en
jouissance qu'après avoir fait dresser, (…) un inventaire des meubles et un état des immeubles sujets à
l'usufruit.
Nota : Fort curieusement le « titre » n’est pratiquement pas évoqué en matière de démembrement de la
propriété et, encore moins, pour déterminer le régime de la nue-propriété et on en trouve exclusivement une
manifestation pour l’usufruit.
II / Titre et conflits entre propriétaires et/ ou possesseurs
Entre revendicants et propriétaires, la question se pose de la force du titre, force qui ne tourne pas
nécessairement en faveur du propriétaire. Encore faut-il tempérer cette affirmation, car elle dépend en
grande partie de la nature des titres (A) et du poids respectif de ces titres lorsque naît un conflit sur la
propriété (B).
A / Nature des titres servant à la solution des conflits
1 ° Acte authentique,
Article 1317 : L'acte authentique est celui qui a été reçu par officiers publics ayant le droit d'instrumenter
dans le lieu où l'acte a été rédigé, et avec les solennités requises. Il peut être dressé sur support
électronique s'il est établi et conservé dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat.
Article 1317-1 : L'acte reçu en la forme authentique par un notaire est, sauf disposition dérogeant
expressément au présent article, dispensé de toute mention manuscrite exigée par la loi.
Article 1319 : L'acte authentique fait pleine foi de la convention qu'il renferme entre les parties contractantes
et leurs héritiers ou ayants cause.
2 ° Acte sous seing privé,
Article 711 : La propriété des biens s'acquiert et se transmet par succession, par donation entre vifs ou
testamentaire, et par l'effet des obligations.
S’agissant des obligations, Article 1341 « Il doit être passé acte devant notaires ou sous signatures privées
de toutes choses excédant une somme ou une valeur fixée par décret, même pour dépôts volontaires, et il
n'est reçu aucune preuve par témoins contre et outre le contenu aux actes, ni sur ce qui serait allégué avoir
été dit avant, lors ou depuis les actes, encore qu'il s'agisse d'une somme ou valeur moindre ».
Destination du père de famille, Article 692, La destination du père de famille vaut titre à l'égard des
servitudes continues et apparentes.
B / Force du titre en cas de conflit
1° La possession inscrite dans le titre
Usucapion et proba diabolica dans la propriété des immeubles (nul ne peut transférer plus de droit qu’il
n’en a lui-même) : on a vu que la possession l’emportait sur le titre si la durée de prescription était atteinte.
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Ce régime va jouer, également, lors de l’établissement du titre, lorsque le notaire va vérifier l’origine de la
propriété et que le délai de prescription est dépassé. Ainsi, la possession va accroitre la force du titre et, en
cas de conflit de titre, celui qui sera préféré sera celui qui permettra d’établir, à travers l’origine de la
possession, que le délai d’usucapion est bien écoulé.
Nota, selon l’orientation du texte ce paragraphe pouvait figurer dans la partie « consolidation » qui figure
dans le I /B)
2° La primauté du titre
Primauté des titres en matière de meubles : la primauté du titre ne s’apprécie pas ratione temporis.
Article 1141 : si la chose qu'on s'est obligé de donner ou de livrer à deux personnes successivement est
purement mobilière, celle des deux qui en a été mise en possession réelle est préférée et en demeure
propriétaire, encore que son titre soit postérieur en date, pourvu toutefois que la possession soit de bonne
foi.
Alluvions : conflit entre la personne publique et le titulaire du titre, Article 560 : Les îles, îlots,
atterrissements, qui se forment dans le lit des cours d'eau domaniaux, appartiennent à la personne publique
propriétaire du domaine concerné, en l'absence de titre ou de prescription contraire.
Renforcement de la mitoyenneté par le titre :
Mur, Article 653. Dans les villes et les campagnes, tout mur servant de séparation entre bâtiments jusqu'à
l'héberge, ou entre cours et jardins, et même entre enclos dans les champs, est présumé mitoyen s'il n'y a
titre ou marque du contraire.
Clôtures, Article 666. Toute clôture qui sépare des héritages est réputée mitoyenne, à moins qu'il n'y ait
qu'un seul des héritages en état de clôture, ou s'il n'y a titre, prescription ou marque contraire.
Conflit de titres dans les servitudes, Article 695. Le titre constitutif de la servitude, à l'égard de celles qui
ne peuvent s'acquérir par la prescription, ne peut être remplacé que par un titre récognitif de la servitude, et
émané du propriétaire du fonds asservi.