Dans la plénitude de la célébration de la fête du St Sacrement il y a Trois moments pour exprimer trois
attitudes de notre foi. D’abord, nous sommes rassemblés autour de l'autel du Seigneur, pour être ensemble
en sa présence ; en second lieu, lorsque la fête est célébrée dans tout son déploiement il y a la procession,
c'est-à-dire le cheminement avec le Seigneur; et enfin l'agenouillement devant le Seigneur, l'adoration, qui
culmine dans le moment final de la bénédiction avec le saint Sacrement, quand nous nous prosternerons
devant Celui qui s'est abaissé jusqu'à nous et a donné sa vie pour nous. Nous ne célébrons pas cette année la
fête dans sa plénitude, puisque nous ne ferons pas la procession, mais nous exposerons brièvement le Saint
Sacrement à la fin de la célébration pour marquer de façon spéciale l’adoration.
La première action, donc, est celle du rassemblement en présence du Seigneur. Saint Paul disait dans
la première lecture : « puisqu’il n’y a qu’un seul pain, vous êtes un seul corps » ; et il dit ailleurs : "Il n'y a
ni Juif ni Grec, il n'y a ni esclave ni homme libre, il n'y a ni homme ni femme; car tous vous ne faites qu'un
dans le Christ Jésus" (Ga 3, 28). "Tous vous ne faites qu'un"! Dans ces paroles on sent la vérité et la force de
la révolution chrétienne, la révolution plus profonde de l'histoire humaine, qu'on expérimente justement
autour de l'Eucharistie : ici se rassemblent en présence du Seigneur des personnes différentes par leur âge,
leur sexe, leur condition sociale, leurs idées politiques. L'Eucharistie ne peut jamais être un fait privé,
réservé à des personnes qui se sont choisies par affinité ou amitié. L'Eucharistie est un culte public, destiné à
tous. Aujourd'hui, nous n'avons pas choisi nous-mêmes qui nous rencontrerons, nous sommes venus et nous
nous trouvons les uns aux côtés des autres, réunis par la foi et appelés à devenir un corps unique en
partageant le seul pain qui est le Christ. Nous sommes unis au delà de toutes nos différences de profession,
de classe sociale, d'idées politiques: nous nous ouvrons les uns aux autres pour devenir un à partir du Christ.
Et cela, depuis les origines, a été une caractéristique du christianisme réalisée de manière visible autour de
l'Eucharistie, et il faut toujours être attentif pour débusquer les tentations récurrentes de particularisme. La
fête du Corps du Christ nous rappelle donc avant tout ceci: qu'être chrétien veut dire se réunir de partout
pour être en présence de l'unique Seigneur et devenir un avec Lui et en Lui.
Le deuxième aspect est le cheminement avec le Seigneur. C'est la réalité manifestée par la procession.
Par le don de Lui-même dans l'Eucharistie, le Seigneur Jésus nous libère de nos "paralysies", nous fait nous
relever et nous fait "procéder" c’est-à-dire « avancer », nous fait faire un pas en avant, et puis un autre pas,
et ainsi nous nous mettons en chemin, avec la force de ce Pain de la vie. La procession de la fête de Dieu,
exprime que l'Eucharistie veut nous libérer de tout abattement ou paresse, Jésus dans ce sacrement veut nous
relever, pour que nous puissions reprendre le chemin avec la force que Dieu nous donne à travers Lui. C'est
l'expérience du peuple d'Israël dans l'exode hors d'Egypte, la longue pérégrination à travers le désert, dont a
parlé la première lecture. Une expérience qui est constitutive pour Israël, mais demeure exemplaire pour
toute l'humanité. L'Eucharistie est le Sacrement du Dieu qui ne nous laisse pas seul sur le chemin, mais se
place à nos côtés et nous indique la direction. En effet, il ne suffit pas de marcher devant soi, il faut voir où
l'on va! Le "progrès" ne suffit pas, s'il n'y a pas de critères de ce qu’est un véritable progrès. Jésus est le
chemin du progrés par excellence.
Enfin au début du "décalogue", il est écrit: "Je suis Yahvé, ton Dieu, qui t'ai fait sortir du pays
d'Egypte, de la maison de servitude. Tu n'auras pas d'autres dieux devant moi" (Ex 20, 2-3). Nous trouvons
ici le sens du troisième élément de cette fête : s'agenouiller en adoration devant le Seigneur. Adorer le Fils
de dieu, qui s'est fait pain rompu par amour, est le remède les idolâtries d'hier et d'aujourd'hui. S'agenouiller
devant l'Eucharistie est une profession de liberté : celui qui s'incline devant Jésus ne peut et ne doit se
prosterner devant aucun pouvoir ou aucun prestige terrestre, aussi fort soit-il. Nous les chrétiens nous ne
nous agenouillons que devant Dieu, devant le Très Saint Sacrement, parce qu'en lui nous savons et nous
croyons qu'est présent le seul Dieu véritable, qui a créé le monde et l'a tant aimé au point de lui donner son
Fils unique (cf. Jn 3, 16). Adorer le Corps du Christ, et nous y sommes invités aussi au long de l’année, veut
dire croire que là, dans ce morceau de pain, se trouve réellement le Christ, qui donne son vrai sens à la vie, à
toute l'histoire humaine comme à l'existence la plus courte. L'adoration est une prière qui prolonge la
célébration et la communion eucharistique et dans laquelle l'âme continue à se nourrir : elle se nourrit
d'amour, de vérité, de paix.
Voilà pourquoi cette fête nous remplit de joie. Faisons nôtre l'attitude d'adoration de Marie, prions
pour nous et pour tous afin que soit connu le Père, et Celui qu’il a envoyé, Jésus Christ. Pour avoir la vie en
abondance. Amen.