BACCALAUREAT EDITION 2022
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MONSIEUR NDOUR
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ETAT ET POUVOIR POLITIQUE
INTRODUCTION
L’Etat peut être défini comme un mode d’organisation sociale, doté d’un ensemble d’institutions et d’une autorité
souveraine s’exerçant sur l’ensemble d’un peuple dans un territoire déterminé. Il est aussi une société organisée ayant
un gouvernement autonome dépositaire de la puissance publique. En somme, c’est le pouvoir politique
institutionnalisé. Il est composé de trois éléments : un territoire, une population et un gouvernement. Le rôle de l’Etat
est diversement apprécié ; d’aucuns pensent qu’il est garant des libertés individuelles et d’autres estiment qu’il
menace les libertés. L’Etat serait-il plus à craindre que l’absence de l’Etat ? L’Etat est souvent perçu comme une
force contraignante envers les citoyens : il interdit ! Mais, ne peut-on pas voire aussi ce qu’il permet ? Avec le
phénomène de la mondialisation, les Etats sont-ils toujours souverains ? Voilà autant de questions auxquelles nous
apporterons des réponses à travers l’analyse des rapports que l’Etat entretient avec la liberté et la mondialisation. En
tout état de cause, l’Etat est nécessaire. Pour y voir plus clair, nous allons étudier la genèse, les fondements, les
formes, les fonctions et les différentes conceptions de l’Etat.
I-) LA GENESE DE L’ETAT
L’Etat n’a pas surgi de nulle part Les sociétés primitives n’ont pas connu l’Etat ; et pourtant elles étaient bien
organisées selon des règles qui garantissaient la stabilité et la cohésion du groupe. Il faut remonter loin dans le temps
pour avoir un aperçu sur ses conditions d’émergence. Au fil des siècles, ces sociétés ont donné naissance aux
premières formes d’Etat connues dans l’Egypte pharaonique, à Babylone, dans la Grèce et la Rome antiques. Mais au
plan historique, l’Etat moderne n’apparaîtra qu’à la fin du Moyen-âge sous la forme de la monarchie de droit divin. Il
a fallu des révolutions en Europe, couronnées par la révolution française de 1789, pour renverser la monarchie en
remplacement de la démocratie. Du point de vue utopique, l’Etat vient de ce que Rousseau et Hobbes appellent l’état
de nature. Tous deux sont partis d’un postulat (hypothèse) selon lequel il existait un état de nature avant l’existence
de la société. Pour eux, on est passé d’un état de nature à un état civil par le biais d’un contrat social, lequel contrat a
permis la mise en place d’un appareil chargé de garantir la liberté des hommes. Cet appareil se nomme Etat. Cet Etat
est situé au-dessus du corps social et sa vocation est de trancher les conflits sociaux. Mais il faut préciser qu’une
mission pareille ne peut être remplie par l’Etat qu’en recourant à la force.
Dans son Discours sur l’origine de l’inégalité parmi les hommes, Rousseau avance que l’état de nature est un état
de paix où les hommes vivaient solitaires, libres et heureux. La nature pourvoyait à tous leurs besoins mais à force de
la surexploiter et d’être menacés par les bêtes féroces et les catastrophes naturelles, les hommes ont fini par se rendre
compte que, séparés, ils disparaîtront progressivement, alors ils ont décidé de se regrouper pour vivre en société. Pour
cela, ils ont conclu un pacte que Rousseau appelle « contrat social » qui dispose chaque homme à vivre en groupe et
à respecter les lois instituées. Ainsi, est né l’Etat qui est, pour Rousseau, l’incarnation de la volonté générale. Puisque
ce sont tous les hommes qui ont élaboré les lois, obéir aux lois de l’Etat, c’est obéir à soi-même. C’est dans ce cadre
qu’il faut comprendre la pensée de Rousseau selon laquelle « l’obéissance à la loi qu’on s’est prescrite est liberté ».
Hobbes est également dans cette même dynamique. Mais sa conception de l’état de nature diffère de celle de
Rousseau parti de l’état de nature pour justifier l’origine de l’Etat. Selon Hobbes, l’état de nature est marqué par « la
guerre de tous contre tous », c’est un état où « l’homme est un loup pour l’homme ». Pour mettre fin à cette
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hostilité, les hommes ont décidé de vivre en société pour sauver l’espèce humaine. Ainsi ont-ils signé un contrat
social et accepté de se soumettre à un être transcendant, fort et cruel appelé le Léviathan, chargé de garantir l’ordre.
Mais, l’Etat est, de nos jours, l’unique source du droit à la violence. Dès lors, il convient de noter que la domination
demeure au cœur de la politique. Sa force est son moyen spécifique. Cependant d’autres moyens peuvent être utilisés,
mais s’ils échouent, la force est l’ultime recours de la politique. Elle permet de vaincre la résistance et de faire obéir.
Le pouvoir politique revendique toujours sa domination sur les limites de son territoire. Et si la force est l’ultime
recours du pouvoir, il faut reconnaitre qu’aucune forme de pouvoir ne peut se contenter de l’obéissance à une
adhésion à sa légitimité. L’exercice du pouvoir suppose donc la légitimité et la force. Le pouvoir légitime est accepté
et reconnu. Max Weber fait référence ici à un pouvoir de contrainte qui suppose l’usage de la force. Ce pouvoir ne
peut donc se maintenir que si ceux qui le subissent en reconnaissent la légitimité. Cette violence fera dire à certains
penseurs que l’Etat est liberticide alors que d’autres y voient un moyen de garantir les libertés individuelles.
Réfléchissant sur le pouvoir et la domination, MAX WEBER distingue 3 formes de domination :
1-) La domination traditionnelle
Elle a comme fondement la tradition, les mœurs et les coutumes. Ainsi le pouvoir est détenu par un homme qui gère
en fonction des coutumes.
2-) La domination charismatique
Elle s’explique par la valeur exceptionnelle d’un homme doué de force et de capacité surnaturelle. Cette domination
est dépourvue de toute direction. Le chef charismatique peut être un héros, un dictateur ou un militaire.
3-) La domination légitime
Elle a pour fondement les règles de droit. Le chef légal agit conformément à la loi qu’il doit appliquer. Les gouvernés
qui sont des citoyens ne se soumettent que lorsque la loi le prévoit.
II-) LES FORMES DE L’ETAT
Il existe plusieurs formes d’Etat qui correspondent à des formes différentes de régimes politiques dont les uns ont
disparu et les autres toujours en vigueur. La démocratie est considérée aujourd’hui comme le meilleur régime, car on
suppose que le pouvoir est détenu par le peuple. D’ailleurs, on a l’habitude de dire que c’est le pouvoir du peuple, par
le peuple et pour le peuple. Mais il existe deux types de démocratie : la démocratie directe qui veut que le peuple
exerce directement sa souveraineté et la démocratie représentative où le peuple élit ses représentants. L’oligarchie est
un régime politique dans lequel la souveraineté appartient à un petit groupe de personnes ou à une classe restreinte et
privilégiée. La monarchie est un régime dans lequel l’autorité réside entre les mains d’un seul homme et est exercée
par lui ou par ses délégués. La théocratie est un mode de gouvernement dans lequel l’autorité, censée émaner
directement de la divinité, est exercée par une caste religieuse ou un souverain considéré comme le représentant de
Dieu sur la terre ; parfois il est même considéré comme un dieu incarné. Le totalitarisme ou fascisme est un régime
qui n’admet qu’un parti unique, donc aucune opposition. Exemple l’Allemagne nazie, l’ex-Urss et l’Italie sous
Mussolini. L’aristocratie est le gouvernement des meilleurs ou des nobles. Devant cette pluralité de régimes
politiques, il y a des penseurs qui sont pour la démocratie comme Rousseau, Montesquieu, John Locke, tandis que
Platon est favorable pour l’aristocratie. On se rappelle son souhait de voir les rois philosophes ou les philosophes rois.
Contrairement aux penseurs qui sont pour un tel régime politique, il y en a d’autres qui ne sont favorables ni pour
l’un ni pour l’autre, ils sont pour la disparition pure et simple de l’Etat qui n’existe, pensent-ils, que pour étouffer les
individus et remettre en cause leur liberté.
III-) FONCTIONS ET FINALITES DE L’ETAT
L’Etat a plusieurs fonctions et finalités. Sur le plan intérieur, l’Etat a pour fonction d’assurer la sécurité des biens et
des personnes en garantissant les libertés individuelles. Pour cela, il dispose de moyens coercitifs, contraignants que
Louis Althusser appelle appareils répressifs d’Etat comme la police, la gendarmerie et l’armée. Ils sont dits
répressifs parce qu’ils répriment, punissent et rappellent à l’ordre ceux qui violent la loi. Parallèlement. En même
temps, il dispose d’appareils idéologiques d’Etat comme l’école, les syndicats la mosquée, l’église, la synagogue et
tout autre lieu de culte ou d’endoctrinement. Sur le plan extérieur ou international, l’Etat assure l’intégrité territoriale
au moyen de l’armée. Etant donné que l’Etat a la possibilité de sévir par le biais de ses institutions compétentes, il est
légitime de dire qu’il est une source de contrainte sur les individus. Néanmoins, il leur accorde des droits et veille sur
leurs libertés et sécurité, d’où la question des rapports entre l’Etat et la liberté. En fait, il existe, entre les doctrines
politiques et philosophiques, de profondes divergences sur la conception de l’Etat. Il y a des penseurs étatistes qui
souhaitent le renforcement de l’Etat et d’autres qui sont des anti-étatistes, qui souhaitent la disparition de l’Etat
pensant qu’il menace les libertés.
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1-) L’Etat, garant des libertés
Spinoza, Hegel, Rousseau, Hobbes et John Locke, ont une vision positive de l’Etat : ils pensent que l’Etat garantit
les libertés. Rousseau, dans son Contrat social, soutient que l’Etat ne menace pas les libertés. A son avis, « il n’y a
point de liberté sans lois ». En d’autres termes, aussi contraignantes qu’elles puissent être, les lois garantissent
néanmoins la liberté des hommes.
Pour Hobbes, le pouvoir de l’Etat doit être absolu ; faute de quoi les hommes tomberaient de nouveau dans la
violence. Et c’est cette absoluité qui garantit, selon lui, les libertés individuelles.
John Locke affirme, pour sa part, que même si l’Etat est un instrument qui assure la liberté ainsi que la sécurité des
biens et des personnes, son pouvoir doit être quand même limité, il ne doit pas empiéter sur la propriété privée des
hommes. John Locke est un des penseurs de la libéralisation. Il voudrait que l’Etat intervienne le moins dans les
affaires des hommes. C’est ce qu’on pourrait résumer en cette expression « Moins d’Etat et le mieux d’Etat ».
Si tous ces penseurs ont une vision positive de l’Etat, d’autres ont, au contraire, adressé à l’Etat de vives critiques : ce
sont les anti-étatistes.
2-) L’Etat, une menace pour la liberté
L’Etat a été institué, en principe, pour jouer le rôle d’arbitre. Mais en réalité, l’Etat n’est jamais neutre. Il est toujours
au service de la classe dominante. Par exemple, dans les sociétés capitalistes, l’Etat est au service de la bourgeoisie ;
les bourgeois en ont fait un instrument de domination pour préserver leurs intérêts et pour exploiter la classe ouvrière.
C’est pour cette raison que Marx et Engels ont prôné la disparition de l’Etat en remplacement de la société
communiste qui est une société sans classes. Dans l’Idéologie allemande, Marx affirme que l’Etat est un instrument
d’oppression et d’exploitation de l’homme par l’homme. A ses yeux, l’Etat et l’esclavage sont inséparables. C’est
pourquoi il estime que seul le « dépérissement » de l’Etat pourra mettre fin à la misère de la classe prolétarienne.
Le point de vue de Marx est partagé par les anarchistes Proudhon et Bakounine qui considèrent que « l’Etat, c’est
l’ennemi ». Dans les Confessions d’un révolutionnaire, Proudhon dit que
« le gouvernement de l’homme par l’homme, c’est de la servitude ». Même le gouvernement démocratique, pris
pour la meilleure forme des régimes politiques, n’est pas épargné. Les anarchistes aspirent à la disparition de l’Etat,
donc à toute forme de contrainte pour l’émergence d’une liberté totale de l’individu.
Nietzsche s’est également prononcé sur l’Etat en le critiquant sévèrement. Dans son ouvrage Ainsi parlait
Zarathoustra, il compare l’Etat à un monstre froid et un menteur qui prétend représenter le peuple. Il dit à ce
propos : « Etat, qu’est-ce cela donc ? (…) Je vais vous parler de la mort des peuples. L’Etat, c’est le plus froid des
monstres froids. Il est froid même quand il ment ; et voici le mensonge qui s’échappe de sa bouche : ‘ « moi l’Etat,
je suis le peuple ». Mensonge. Dans le même ordre d’idée, Nietzsche ajoute que quoi que l’Etat puisse avoir il l’a
volé et quoi qu’il dise il ment, et il ment dans toutes les langues.
L’Etat a fait l’objet de diverses interprétations opposant ceux qui sont pour et ceux qui sont contre. Mais une position
intermédiaire semble s’installer avec Paul Valery qui dit que «Si l’Etat est fort, il nous écrase ; s’il est faible, nous
périssons». Que choisir face à ce dilemme ? La toute-puissance de l’Etat ou sa faiblesse ? Paul Valery invite à un
fonctionnement équilibré de l’Etat, de telle sorte que les libertés soient garanties sans qu’elles nuisent au pouvoir de
l’Etat.
CONCLUSION
Au terme de notre réflexion, il convient de noter que l’Etat marque le passage de l’état de nature caractérisé par une
guerre permanente à l’état civil dans lequel chacun est libre. Même si l’Etat est considéré comme un appareil de
violence et d’oppression qu’il convient de supprimer selon les anti-étatistes, il n’en demeure pas moins qu’il garantit
les libertés. Il fournit à la population un cadre juridique qui lui permet de vivre et d’agir dans l’ordre et la sécurité.
Rappelons qu’il existe plusieurs types d’Etat, mais le plus souhaitable est l’Etat démocratique dans lequel les
pouvoirs sont séparés. Il s’agit du pouvoir législatif (dévolu au Parlement et qui vote les lois), du pouvoir
exécutif (qui applique la loi et qui est dévolu au gouvernement) et du pouvoir judiciaire (qui tranche les litiges
et qui échoit aux tribunaux). Ces trois pouvoirs sont séparés en démocratie et confondus en dictature. Et c’est
Montesquieu qui a prôné la séparation de ces pouvoirs dans son ouvrage, De l’esprit des lois. Donc pour Rousseau
« L'impulsion au seul désir est esclavage ; l'obéissance à la loi qu'on s'est prescrite est liberté. »
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