Le cadre juridique des contrats intelligents (smart contracts)
Introduction
Les avancées technologiques ont permis l'émergence de nouvelles formes de contrats,
notamment les smart contracts. Ces contrats, basés sur la technologie blockchain, permettent
d'exécuter automatiquement des clauses dès lors que certaines conditions prédéfinies sont
remplies. Dans un monde où l'efficacité, la rapidité et la transparence sont recherchées, ces
nouveaux outils semblent révolutionnaires. Cependant, leur utilisation soulève d'importantes
questions quant à leur compatibilité avec les systèmes juridiques traditionnels. Comment le
droit peut-il encadrer cette technologie en constante évolution ? Le smart contract peut-il
s'inscrire dans le cadre juridique des contrats traditionnels ou nécessite-t-il une nouvelle
approche réglementaire ?
Par ailleurs, l'émergence des smart contracts soulève une question éthique et juridique
fondamentale : peut-on faire confiance à des algorithmes pour prendre des décisions qui
affectent les relations humaines et économiques ? Alors que la technologie permet
d'automatiser de plus en plus les transactions, il reste à voir si le droit, conçu pour réguler les
interactions humaines, peut fournir un cadre efficace à cette innovation.
Au-delà des aspects purement juridiques, l’évolution vers une régulation des contrats
intelligents au Maroc soulève aussi des questions d’ordre économique et éthique : comment
ces nouvelles technologies influenceront-elles la transformation numérique et le
développement économique du pays ?
Problématique : Le contrat intelligent pose un certain nombre de défis au système juridique,
notamment en matière de responsabilité, d'exécution et de validité. Le droit actuel est-il
suffisant pour régir cette nouvelle forme de contrat, ou devons-nous adapter nos cadres
juridiques existants ?
PLAN :
Partie I : La nature et les caractéristiques juridiques des contrats intelligents
Chapitre 1 : Le fonctionnement des contrats intelligents et leurs bases technologiques
Définition et principes fondamentaux du contrat intelligent
Le concept de smart contract : un programme informatique auto-exécutable
Fonctionnement technique basé sur la blockchain
Les avantages pratiques : rapidité, transparence et sécurité
Les différences avec les contrats classiques
Absence de besoin d’intermédiation humaine dans l’exécution
Immutabilité du contrat : le caractère irréversible des opérations inscrites sur la blockchain
Programmabilité des clauses contractuelles : automatisation stricte des conditions
Chapitre 2 : Les défis juridiques posés par les contrats intelligents
La notion de consentement et de volonté dans le contrat intelligent
La question de la formation du contrat : consentement via programmation
Le problème de la compréhension des termes par les parties
La rigidité du contrat et l’impossibilité d’amendement
Difficulté de modifier les termes une fois le contrat codé
Les défis liés à la résolution des conflits : comment interpréter un contrat automatisé ?
Les limites en termes de responsabilité
Responsabilité en cas d’erreur dans le code ou dysfonctionnement technique
Qui est responsable : l’auteur du code, les parties contractantes, ou les développeurs de la
blockchain ?
Partie II : L’encadrement juridique et les défis des contrats intelligents
Chapitre 1 : Le cadre juridique des contrats intelligents
Section 1 : L’état du cadre juridique actuel dans les systèmes de droit civil et de common
law
Comparaison des cadres existants dans les systèmes de droit civil (ex. Maroc) et de common
law (ex. États-Unis, Royaume-Uni).
Reconnaissance des smart contracts : Analyse des législations spécifiques aux contrats
intelligents dans des pays avancés, notamment le Delaware (États-Unis) et le Royaume-Uni.
Les zones d’ombre législatives : Les défis dans les juridictions où la législation sur les smart
contracts reste floue.
Section 2 : Les bases et caractéristiques des contrats intelligents
Définition et fonctionnement : Analyse des principes techniques (blockchain, automatisation)
et leur application dans les smart contracts.
Comparaison avec les contrats traditionnels : Différences entre les contrats classiques (avec
intervention humaine) et les smart contracts (exécution automatique).
Les avantages et inconvénients des smart contracts : Sécurité, rapidité, transparence vs rigidité
et difficultés de recours en cas de litige.
Chapitre 2 : Les défis juridiques et les réformes nécessaires pour le droit marocain
Section 1 : Validité juridique et responsabilité dans les smart contracts
Validité et consentement : Comment le consentement est exprimé dans les smart contracts et
les adaptations nécessaires en droit marocain.
Responsabilité en cas de dysfonctionnement : Qui est responsable en cas d’erreur de
programmation ? Étude comparative entre le droit marocain et les régulations avancées (ex.
États-Unis, Union Européenne).
Section 2 : Réformes et adaptations pour le cadre marocain
Lacunes dans le droit marocain : Absence de législation spécifique pour les smart contracts et
les risques liés à cette absence.
Propositions de réformes : Intégration des leçons tirées des régulations avancées (États-Unis,
Europe) pour moderniser le droit marocain et assurer une reconnaissance légale des smart
contracts.
La nécessité de créer une législation propre aux smart contracts au Maroc, prenant en compte
les spécificités locales (infrastructure technologique, formation des juges, etc.)
Importance d’une harmonisation régionale avec les autres pays d’Afrique du Nord et d’autres
pays arabes
Introduction : ²
Le développement rapide des technologies numériques et de la blockchain a profondément
transformé les secteurs économique et juridique, bouleversant les conceptions traditionnelles
du contrat. Dans ce contexte général d'innovation technologique, les smart contracts sont
apparus comme une nouvelle forme d'accord juridique exécuté automatiquement par des
algorithmes informatiques. Cette automatisation réduit considérablement le besoin
d'intervention humaine, tout en offrant des garanties de transparence, de rapidité et de
sécurité. Ce phénomène s'inscrit dans un contexte particulier de numérisation croissante des
échanges, dans lequel la technologie blockchain joue un rôle central en rendant ces
transactions immuables et traçables.
Les smart contracts peuvent être définis comme des programmes informatiques auto-
exécutables dont les clauses sont écrites dans le code et sont automatiquement exécutées
lorsque des conditions prédéfinies sont remplies. Ils diffèrent des contrats traditionnels, qui
reposent sur des processus d'exécution manuels et sur l'intervention humaine. La blockchain,
quant à elle, est une technologie de registre distribué, décentralisé et sécurisé qui garantit
l'intégrité et l'immutabilité des transactions. La combinaison de ces deux concepts ouvre la
voie à une nouvelle façon de conclure et d'exécuter des contrats dans différents domaines,
allant des transactions financières à l'échange de biens et de services.
Historiquement, la notion de contrat a toujours reposé sur la rencontre des volontés des parties
et sur l'existence d'un cadre juridique garantissant l'équité et la sécurité. Cependant, l'idée
d'automatiser l'exécution des clauses contractuelles n'est pas nouvelle : des concepts tels que
les dispositifs d'exécution automatique existent depuis les premières expériences
informatiques des années 1990. Ce n'est qu'avec l'avènement de la blockchain en 2008 et
l'invention du bitcoin par Satoshi Nakamoto que les smart contracts sont devenus une pratique
courante, notamment dans les systèmes financiers et de crypto-monnaies.
Cette étude vise à définir le sujet en abordant les aspects juridiques spécifiques des smart
contracts, en examinant leur nature, leur fonctionnement et les défis juridiques qu'ils posent
dans un cadre juridique souvent inadéquat. En ce sens, cette thèse examinera les
caractéristiques des smart contracts par rapport aux contrats traditionnels, ainsi que les limites
et les risques associés à leur utilisation dans des juridictions telles que le Maroc.
L'intérêt théorique de cette étude réside dans l'analyse de cette transformation des concepts
classiques du droit des obligations face à l'irruption des technologies numériques. . Sur le plan
pratique, les contrats intelligents offrent des solutions inédites pour automatiser et sécuriser
les transactions, mais ils soulèvent également des questions de responsabilité, de
consentement des parties et de résolution des litiges en l'absence de médiation humaine.
La question centrale de cette thèse sera donc de déterminer dans quelle mesure le droit actuel
peut s'adapter à l'utilisation des contrats intelligents, et quelles réformes sont nécessaires pour
encadrer leur utilisation tout en assurant la sécurité juridique des parties.
Nous examinerons également la question de la responsabilité en cas de dysfonctionnement du
code et les implications pour les tribunaux, notamment au Maroc, où la législation est encore
balbutiante.
Le développement technologique rapide des dernières décennies a conduit à l'émergence de
nouvelles formes de contrats connus sous le nom de « smart contracts ». Ces contrats auto-
exécutoires, basés sur la technologie blockchain, bouleversent les règles traditionnelles du
droit des obligations en éliminant l'intermédiation humaine dans leur exécution. Cependant,
malgré leurs nombreux avantages, ces contrats posent des défis juridiques complexes, tant au
niveau de leur validité que de leur mise en œuvre dans les systèmes juridiques existants. Cette
thèse examine la nature et les caractéristiques juridiques des contrats intelligents (Partie I) et
leur cadre juridique et réglementaire (Partie II).
Partie I : La nature et les caractéristiques juridiques des contrats intelligents
Chapitre 1 : Le fonctionnement des contrats intelligents et leurs bases technologiques
Les contrats intelligents se distinguent par leur nature technologique et leur fonctionnement
automatisé. Ce sont des programmes informatiques auto-exécutables, reposant sur la
technologie blockchain, une base de données distribuée et sécurisée qui garantit l’intégrité et
l’immutabilité des transactions.
1.1. Définition et principes fondamentaux du contrat intelligent
Un contrat intelligent, ou smart contract, est un programme informatique qui s'exécute
automatiquement lorsque les conditions prédéfinies sont remplies. Contrairement aux contrats
traditionnels, qui nécessitent une exécution manuelle par les parties ou par des intermédiaires
(tels que des notaires ou des avocats), les contrats intelligents suppriment cette intermédiation
grâce à leur automatisation stricte. Cette exécution automatique est rendue possible par
l’intégration des clauses contractuelles sous forme de code informatique.
1.2. Fonctionnement technique basé sur la blockchain
La blockchain constitue la base technologique des contrats intelligents. Il s'agit d'une
technologie de registre distribué, où les transactions sont enregistrées de manière transparente
et sécurisée. Une fois un contrat codé et déployé sur la blockchain, il devient immuable, c’est-
à-dire que les clauses inscrites ne peuvent être modifiées, et chaque transaction liée à ce
contrat est vérifiée par un réseau décentralisé.
1.3. Les avantages pratiques : rapidité, transparence et sécurité
Les contrats intelligents offrent plusieurs avantages par rapport aux contrats traditionnels.
Leur exécution est rapide, car elle est automatisée et ne nécessite pas de vérification humaine.
De plus, la transparence est garantie par la blockchain, où toutes les transactions sont visibles
et vérifiables. Enfin, la sécurité est renforcée par l’utilisation de cryptographie, qui protège les
données et empêche toute altération des clauses contractuelles.
1.4. Les différences avec les contrats classiques
Les contrats intelligents se distinguent fondamentalement des contrats classiques. Ils
n’exigent aucune intermédiation humaine lors de leur exécution. Une fois programmés, ils
s’exécutent automatiquement, ce qui les rend irréversibles. Cette immutabilité, bien que
sécurisante, soulève également des problèmes, notamment en cas de nécessité de
modification. Par ailleurs, leur programmabilité permet une automatisation stricte des
conditions, mais limite la flexibilité des parties en cours de contrat.
Chapitre 2 : Les défis juridiques posés par les contrats intelligents
Bien que les contrats intelligents présentent des avantages pratiques indéniables, ils posent de
nombreux défis juridiques, notamment en matière de consentement, d’interprétation et de
responsabilité.
2.1. La notion de consentement et de volonté dans le contrat intelligent
L’un des défis majeurs concerne la formation du contrat et l’expression du consentement.
Dans un contrat classique, les parties manifestent leur volonté à travers la signature d’un
document. Dans le cas des smart contracts, le consentement se manifeste par la
programmation et l’exécution automatique du code. Cela soulève des questions quant à la
compréhension réelle des termes par les parties, en particulier lorsque ces dernières ne
maîtrisent pas les aspects techniques du contrat.
2.2. La rigidité du contrat et l’impossibilité d’amendement
L’un des inconvénients majeurs des contrats intelligents réside dans leur rigidité. Une fois le
contrat codé et inscrit sur la blockchain, il devient difficile, voire impossible, de le modifier,
même en cas de changement des circonstances ou de désaccord entre les parties. Cette
immutabilité pose des problèmes en matière de flexibilité et de négociation contractuelle.
2.3. Les défis liés à la résolution des conflits
La nature automatisée des contrats intelligents complique également la résolution des conflits.
Les contrats classiques sont interprétés par les juges en cas de litige. Dans le cas des smart
contracts, l’interprétation des clauses codées peut s’avérer complexe, car les termes sont
traduits en langage informatique, rendant l’intervention judiciaire difficile.
2.4. Les limites en termes de responsabilité
Enfin, la question de la responsabilité en cas d’erreur dans le code ou de dysfonctionnement
technique demeure floue. Qui est responsable en cas de problème ? L’auteur du code, les
parties contractantes, ou les développeurs de la blockchain ? Ces questions demeurent sans
réponse claire dans de nombreuses juridictions.
Partie II : L’encadrement juridique et les défis des contrats intelligents
Chapitre 1 : Le cadre juridique des contrats intelligents
Le cadre juridique entourant les contrats intelligents varie considérablement entre les
systèmes de droit civil et de common law.
1.1. L’état du cadre juridique actuel dans les systèmes de droit civil et de common law
Dans les systèmes de droit civil, comme au Maroc, la législation sur les smart contracts est
encore balbutiante, tandis que dans les juridictions de common law, comme aux États-Unis et
au Royaume-Uni, des avancées législatives ont été réalisées, notamment au Delaware.
Cependant, même dans ces pays, des zones d’ombre persistent, notamment sur la
reconnaissance juridique pleine et entière des contrats intelligents.
1.2. Les bases et caractéristiques des contrats intelligents
Les contrats intelligents reposent sur des principes techniques spécifiques, tels que la
blockchain et l’automatisation. Par rapport aux contrats traditionnels, ils présentent des
avantages certains (sécurité, rapidité, transparence) mais également des inconvénients liés à
leur rigidité et à la difficulté de recours en cas de litige.
Chapitre 2 : Les défis juridiques et les réformes nécessaires pour le droit marocain
2.1. Validité juridique et responsabilité dans les smart contracts
Au Maroc, l’adaptation du droit aux contrats intelligents est nécessaire. La notion de
consentement, exprimée par la programmation, pose problème, tout comme la question de la
responsabilité en cas de dysfonctionnement. Des réformes juridiques doivent être entreprises
pour clarifier ces aspects, en s’inspirant des régulations avancées aux États-Unis ou dans
l’Union européenne.
2.2. Réformes et adaptations pour le cadre marocain
Le droit marocain ne dispose pas encore d’une législation spécifique pour les smart contracts.
Cette absence de cadre juridique clair expose les parties à des risques importants. Il est donc
crucial que le Maroc intègre dans son droit interne les leçons tirées des régulations étrangères,
tout en prenant en compte les spécificités locales, notamment en matière de formation des
juges et de développement de l’infrastructure technologique.
Conclusion
Les contrats intelligents représentent une avancée technologique majeure dans le domaine
juridique, offrant des avantages considérables en termes de rapidité, sécurité et transparence.
Toutefois, leur nature technologique pose des défis juridiques significatifs, notamment en
matière de consentement, de flexibilité, et de responsabilité. Si certains pays ont déjà
commencé à intégrer les smart contracts dans leur législation, il demeure urgent d’adapter les
cadres juridiques pour garantir une protection adéquate des parties et définir clairement les
responsabilités en cas de dysfonctionnement ou de litige.
Pour des juridictions comme le Maroc, où le cadre législatif spécifique aux contrats
intelligents reste encore embryonnaire, l’adaptation du droit est indispensable pour tirer
pleinement parti de ces nouvelles formes contractuelles. Une étude comparative avec des
systèmes juridiques avancés démontre qu’il est possible de concilier innovation technologique
et sécurité juridique. Cependant, cela nécessite des réformes juridiques adaptées aux réalités
locales, ainsi qu’une harmonisation avec les normes internationales. L'avenir des contrats
intelligents dépendra donc à la fois de l'évolution technologique et de la capacité du droit à
encadrer efficacement ces nouvelles pratiques, tout en assurant la sécurité juridique des
parties.