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Principe de Fermat
Ne doit pas être confondu avec Théorème de Fermat.
Le principe de Fermat est un principe physique, attribué à Pierre de
Fermat, qui sert de fondement à l’optique géométrique. Il décrit la forme
du chemin optique d’un rayon lumineux et s’énonce ainsi :
La lumière se propage d’un point à un autre sur des trajectoires telles que
la durée du parcours soit localement extrémale (localement signifiant :
pour une trajectoire « petite »).
Une conséquence première du principe de Fermat est la propagation
rectiligne des rayons lumineux dans les milieux homogènes. En effet, dans
un milieu homogène, le temps de parcours est proportionnel à la longueur
du trajet, et le chemin le plus court dans un espace euclidien pour aller
d’un point à un autre est la ligne droite.
Il permet de retrouver la plupart des résultats de l’optique géométrique,
en particulier les lois de la réflexion sur les miroirs, les lois de la réfraction,
la loi de Snell-Descartes, etc.
Historique
Ce principe doit son nom à Pierre de Fermat, qui l’a énoncé en 1657 mais
qui n’a soumis son mémoire, Synthèse pour les réfractions qu’en 1662.
Tandis que René Descartes, dans La Dioptrique, expliquait les lois de
l’optique en faisant « l’analogie entre les rayons lumineux et les
trajectoires d’une balle envoyée par un joueur de paume », Fermat se
base sur ce principe finaliste qu’il estime être le plus « probable » :
« que la nature agit toujours par les moyens les plus aisés, c’est-à-dire ou
par les lignes les plus courtes, lorsqu’elles n’emportent pas plus de temps,
ou en tout cas par le temps le plus court, afin d’acourcir son travail et de
venir plus tôt à bout de son opération. »
En 1746, Maupertuis utilise un principe finaliste équivalent pour introduire
le principe de moindre action, qu’ensuite Euler et Lagrange développeront.
En 1924, Louis de Broglie identifie le principe de Fermat et celui de
moindre action en proposant qu’à chaque particule massive soit associée
une onde : cela ouvrit la voie de la dualité onde-particule menant à
l’équation de Schrödinger, fondamentale en mécanique quantique.
Durées de parcours stationnaires ou minimales
Chemins optiques stationnaires lors de la réflexion dans un miroir concave
Le principe de Fermat a été énoncé ci-dessus sous sa forme commune
mais on doit l’énoncer sous la forme plus rigoureuse :
La lumière se propage d’un point à un autre sur des trajectoires telles que
la durée du parcours soit stationnaire.
En effet si, dans la plupart des cas, on rencontre des chemins dont la
durée de parcours est minimale, il ne faut pas oublier pour autant que
d’autres situations peuvent exister. Par exemple, pour aller d’un point A à
un point B situés à l’intérieur du miroir concave représenté ci-contre, en se
réfléchissant une seule fois sur la surface, la lumière peut emprunter deux
parcours de durée minimale (en rouge) et un parcours de durée maximale
(en vert) parmi les parcours constitués de deux segments AM et BM.
L’étude de la longueur du chemin ferait apparaître trois extrema locaux,
deux minima et un maximum, pour ce type de trajets.
Le terme stationnaire peut être compris à partir de cet exemple. Si le point
quelconque M effectue un déplacement infiniment petit du premier ordre à
la surface du miroir, la variation du chemin optique est également du
premier ordre. En revanche, si l’on considère les trois zones qui
correspondent aux extrema, alors un déplacement du premier ordre du
point entraîne une variation du chemin optique du second ordre ou plus
faible encore. En d’autres termes, lorsque le point M se déplace sur le
miroir, la variation du chemin optique est rapide presque partout mais très
lente au voisinage des trois points particuliers où elle devient quasi nulle,
d’où l’emploi du mot « stationnaire ».
Toutefois, si deux points sont reliés par un chemin suffisamment court, ce
chemin minimise la durée par rapport aux autres chemins possibles les
plus proches. Pour reprendre l’exemple du miroir concave, si les deux
points sont sur le trajet vert et sont assez proches de son point de «
rebond » sur le miroir concave, alors pour la longueur du chemin il n'y a
plus trois extrema, mais un seul qui est un minimum. De manière
générale, une trajectoire pour la lumière entre deux points est un point col
ou un minimum pour l’ensemble des trajectoires géométriquement
possibles les reliant.
Le même problème se retrouve dans l’énoncé du principe de moindre
action, qui est à la mécanique ce qu’est le principe de Fermat à l’optique,
dans la définition des surfaces minimales (qui ne sont pas forcément…
minimales) ou dans celle des géodésiques.
Formulation du principe de Fermat à l’aide du chemin optique
Cas d’un milieu homogène
Le chemin optique de la lumière pour aller d’un point vers un point dans
un milieu homogène, noté , est défini comme étant un nombre
proportionnel au temps mis par le rayon pour aller de à , le coefficient de
proportionnalité étant tel que est égal à la distance pour un parcours dans
le vide. Appelant la célérité de la lumière dans le milieu, et celle dans le
vide, on a donc et , d’où ; le coefficient de proportionnalité est appelé
l’indice de réfraction du milieu. Le chemin optique est donc défini par :
La lumière se propage « plus difficilement » dans les milieux autres que le
vide. Exemple : Un rayon lumineux traverse une couche d’eau de 5 cm
d’épaisseur. Parallèlement, un autre rayon lumineux traverse 5 cm d’air.
L’eau a pour indice de réfraction et l’air un indice sensiblement égal à
celui du vide . Dans l’eau, le rayon lumineux aura parcouru une distance .
Dans l’air, le rayon aura parcouru une distance . Le rayon aura parcouru
un chemin optique plus long dans l’eau que dans l’air.
Cas d’un milieu continu quelconque
On considère deux points infiniment voisins et distants d’une distance . Le
chemin optique séparant ces deux points est défini par ; est la
différentielle de chemin optique ou encore, l’élément unitaire infinitésimal
de chemin optique. Pour trouver le chemin optique séparant deux points et
sur cette courbe, il suffit de faire la somme intégrale de tous les éléments
sur la coordonnée curviligne délimitée par les points et :
Le principe de Fermat s’énonce alors :
Entre deux points et , atteints par la lumière, le chemin optique suivi le
long du trajet est stationnaire.
Conséquences
Principe du retour inverse de la lumière
Le trajet suivi par la lumière pour aller d’un point à un autre ne dépend
pas du sens de propagation de la lumière.
La stationnarité du chemin optique permet de procéder à quelques
considérations. Entre deux points A et B, tous deux sur la trajectoire
curviligne d’un rayon lumineux se propageant dans un milieu inhomogène,
on peut exprimer l’intégrale de chemin optique comme il suit :
En considérant que est l’élément de coordonnée curviligne de B vers A, on
peut alors écrire . Dans le cas de l’étude d’un système optique, cela
signifie que l’on pourra étudier la propagation de la lumière et le trajet des
rayons lumineux sans se soucier du sens de propagation.
Attention : en pratique, l’utilisation irréfléchie de ce principe aboutit à des
absurdités. On sait par exemple qu’un objectif ne donne jamais une image
ponctuelle d’un point lumineux, mais une tache toujours plus ou moins
floue. Il serait enfantin de penser que les rayons formant cette tache,
renvoyés dans l’objectif par un miroir plan, pourraient reformer de l’autre
côté un point-image net… Ce n’est pas le principe qui est en cause ici,
mais le fait de vouloir l’appliquer de façon fautive.
Lois de Snell-Descartes
Un plan de vecteur normal sépare deux milieux d’indices de réfractions
et . Un rayon lumineux part d’un point situé dans le premier milieu,
traverse en et atteint un point . Le problème est de trouver la position de à
partir du principe de Fermat.
Le chemin optique de à est donc :
La condition de stationnarité de , , se traduit donc par le fait que est
orthogonal au plan , soit colinéaire à ; le rayon lumineux est donc inclus
dans le plan passant par et et orthogonal à (première loi de Descartes) et
donne : (deuxième loi de Descartes).
Cette démonstration est due essentiellement à Maupertuis en 1744, près
d’un siècle après l’énoncé par Fermat de son principe.
Une illustration en est donnée par le problème dit « du maître-nageur ».
Celui-ci, situé sur la plage en doit aller secourir un noyé situé en . Comme
il court plus vite qu’il ne nage, son trajet optimal (en temps) est celui qui
suit les lois de la réfraction, que nous venons de déterminer.
On démontre que si la surface de séparation des deux milieux est une
surface quelconque, les deux lois de Descartes sont conservées (mais il
peut y avoir plusieurs chemins possibles).
Généralisation des lois de Descartes au cas d’un milieu continu
quelconque
Cas d’un trajet plan
Si la lumière se déplace dans un plan , on peut paramétrer sa trajectoire
par son abscisse x (à l’exception de la droite x = constante). La trajectoire
devient une fonction y(x) et le chemin optique s’écrit
.
L’équation d’Euler-Lagrange exprimant la stationnarité de la trajectoire
pour cette intégrale donne
Nous allons résoudre le cas particulier où n ne dépend que de x : on
obtient alors ; or si l’on désigne par l’angle que fait la tangente à la courbe
avec , cette condition s’écrit :
Ceci constitue en quelque sorte une version infinitésimale de la seconde
loi de Descartes, laquelle est en fait une traduction locale du principe de
Fermat.
L’équation différentielle de la trajectoire est donc : .
Traversée d’un rayon lumineux dans une bande où l’indice de réfraction
est inversement proportionnel à la distance au centre de la bande : la
trajectoire est un arc de cercle, comme démontré ci-contre.
On retrouve évidemment que pour constant, les trajectoires sont des
droites ; mais si on prend , la courbe se paramétrise simplement en
C’est une courbe de Ribaucour.
Par exemple pour (l’indice de réfraction est inversement proportionnel à
l’abscisse) on obtient
Autrement dit les trajectoires sont des cercles.
Pour (l’indice de réfraction est inversement proportionnel à la racine
carrée de l’abscisse) on obtient
:
La courbe est une cycloïde. Ce cas est historiquement intéressant : c’est
par cette méthode que Jean Bernoulli a prouvé que la courbe
brachistochrone (minimisant le temps de parcours d’un point matériel) est
la cycloïde, en montrant que le problème de mécanique et celui d’optique
sont en fait équivalents.
Cas général
On considère maintenant un milieu hétérogène continu à 3 dimensions. On
montre que les lois de Descartes généralisées, issues du principe de
Fermat, s’énoncent sous la forme suivante :
Le plan osculateur à la trajectoire en un point contient la normale à la
surface d’indice de réfraction constant passant par .
Si on désigne par l’angle que fait la tangente à la courbe avec cette
normale, on a la relation :
Où est le rayon de courbure de la courbe.
Bibliographie
José-Philippe Pérez & Eric Anterrieu, Optique : fondements et applications,
Dunod, 2004.
Ouvrage de mécanique générale des Séries Schaum
Born & Wolf, Principles of optics
Georges Bruhat, Optique
Jean Bass, Exercices de mathématiques, Masson, 1965, p. 381-385
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