Histoire de la pensée
économique
Éléments de cours
Dr. Kenza BOUARARA
2024/2025
Introduction
+ La particularité que présente la science économique par rapport à d’autres
disciplines, est le fait qu’elle a intégré sa propre histoire dans le champ de sa
réflexion.
+ L’étudiant en économie est censé connaître les grands systèmes de la
pensée qui ont marqué l’évolution de son domaine.
+ Quelle est donc l’utilité de l’histoire de la pensée économique ? Schumpter a
répondu en apportant trois utilités : « un avantage pédagogique, de nouvelles
idées et des perspectives sur les voies de l’esprit humain »
+ Il est donc important de récolter des leçons utiles pour le présent à partir des
différents explorations tentées par les auteurs du passé.
Remarque
+ Il existe deux règles fondamentales en économie:
1- Pour tout économiste, il existe un autre économiste d’avis contraire
2- Tous les deux ont tort.
+ Pourquoi, dans ce cas, considérer la présence de controverses majeures au sein
d’une pratique intellectuelle et universitaire comme étant davantage
caractéristique des sciences de la société ?
+ L’une des causes majeures des controverses au sein de la pensée
économique soit le choix des critères principaux pour évaluer la trajectoire
historique des sociétés humaines et des individus. C’est précisément parce
que les économistes n’ont pas réussi a se mettre d’accord sur le choix des
critères de base que nous pouvons souligner que l’économie fait partie des
sciences de la société.
+ Si les écoles ou les courants de pensée se sont opposés ou continuent de
s’opposer, c’est parce qu’ils tachent de défendre l’intérêt d’étudier les
phénomènes sociaux et de poursuivre des objectifs du point de vue de
critères différents. Les désaccords sur le choix des critères pertinents
permettent, en même temps, de répondre a la question par laquelle
D’une manière générale,
+ On peut faire l’histoire de la discipline du point de vue de son
aboutissement, retenant l’idée d’un progrès constant des connaissances
(Schumpeter , History of Economic Analysis, 1956).
+ Il s’agira d’expliquer, de la pensée Grecque a la pensée économique
contemporaine, en passant par les Classiques, les Marginalistes, la révolution
keynésienne et la synthèse néoclassique, non seulement ces critères et leur
cohérence, mais également le lien entre ces critères et leur contexte social.
Contexte
Schématiquement, l’histoire de ces débats est ponctuée par trois « révolutions » (dont la datation découle de la
parution des grandes œuvres qui les marquent) :
+ La « révolution classique » (1776-1817) représente pour la première fois l’économie comme un système dans
lequel s’articulent les échanges marchands et l’organisation de la production, et elle élabore les principes de
la doctrine libérale.
+ La « révolution marginaliste » (1874-1890), en généralisant la loi de l’offre et de la demande à l’ensemble
des activités économiques, absorbe l’analyse de la production dans celle du marché et donne un fondement
scientifique à la doctrine libérale.
+ La « révolution keynésienne » (1936) établit l’incapacité d’une économie de marché à atteindre le niveau de
production globale permis par la main-d'œuvre disponible et justifie ainsi l’abandon d’un laisser-faire général
au profit d’une intervention de l’État.
Ces trois « révolutions » dans la pensée économique ont façonné les termes dans lesquels se présentent
aujourd’hui les controverses entre économistes, en particulier sur la place qu’il convient d’attribuer au marché
dans l’ensemble des relations sociales, thème central du renouveau néolibéral.
Objectifs
Comprendre les principaux courants de la pensée économique:
1. Les précurseurs;
1.La pensée grecque et la pensée médiévale
2.Mercantilistes ;
3.Physiocrates ;
2. Classiques ;
3. Marginalistes et néoclassiques ;
4. Keynésianisme ;
5. Monétaristes.
+ Identifier dans quelle mesure la théorie économique explique les crises
économiques;
+ Analyser la situation économique d’aujourd’hui à l’aide des théories
Chapitre 1: Les précurseurs
I- La pensée antique et médiévale
Si une pensée économique a incontestablement existé depuis l’Antiquité, cette
pensée se caractérise, jusqu’à la constitution de la science économique classique à la
fin du XVIIIe siècle par le fait qu’elle n’est pas autonome, mais articulée à d’autres
types de savoirs dans le cadre de l’héritage de l’architectonique aristotélicienne.
Dans ce titre on s’intéresse aux « vingt siècles » au cours desquels, de l’antiquité
grecque à la philosophie médiévale, la pensée économique demeure inféodée aux
considérations éthiques et morales et les pratiques économiques, à ce titre,
condamnées et contingentées.
1- La pensée grecque
+ Xénophon : l’économique comme art de la gestion domestique : (vers 426-
354 av. J.-C.), élève de Socrate, que l’on doit donc le terme « d’économie ».
Dérivé de oikos (la maison) et nomos (l’administration), se réduit aux règles de
bonne gestion domestique. Xénophon ne s’intéresse qu’à l’administration des
domaines ruraux, se contentant précisément de mettre en évidence l’importance
de l’agriculture dans la production des richesses.
+ Platon : de la cité « réelle » à la Cité « idéale »: (428-348 av. J.-C.) s’écartent
de cette vision étroite et ont une portée plus philosophique. Il s’agit de
s’interroger, comme dans La République, sur l’ordonnancement de ce que
pourrait être une Cité idéale (ordonnée, harmonieuse). Dans l’esprit de Platon, et
concernant les questions économiques, cela passe par un strict contrôle « collectif
» des pratiques et des relations économiques. Lorsqu’il s’interroge dans Les Lois
sur les cités possibles qui seraient à même de se rapprocher de cet idéal, Platon y
confirme que prospérité et richesse ne doivent pas être une fin en soi et que les
1- La pensée grecque
+ Aristote et la condamnation morale de l’enrichissement:
(384-322 avant notre ère), Aristote fait la distinction entre deux types de
richesses, la « véritable richesse » qui concerne « les biens indispensables à
la vie » et la « fausse richesse » qui concerne les biens superflus. L’art de
l’économique, qu’il associe comme Xénophon à l’administration familiale,
consiste, pour le maître, en sa capacité d’acquérir et de se servir de la « véritable
» richesse : la finalité de l’existence n’est pas l’enrichissement, mais « la vie
heureuse ».
+ L’activité économique est donc condamnée dès lors qu’elle s’écarte de la seule
juste satisfaction des besoins familiaux ; l’enrichissement (monétaire) est banni
et la pratique de l’usure (bien souvent confondue avec celle de l’intérêt) est
également condamnée : faire payer un intérêt, c’est faire du profit avec la
monnaie elle-même, c’est encore une fois faire de la monnaie la finalité et non le
moyen de la transaction, alors qu’elle n’a pas été instaurée pour cet usage.
2- La pensée médiévale
+ La scolastique de Saint Thomas d’Aquin (1225-1274)
Saint Thomas d’Aquin (1225-1274), soutient le courant de pensée dit « réaliste » et qui s’étend du Xe au XIIIe
siècle et en réalise la somme (Somme théologique) reprenant dans sa conception la démarche philosophique des
savants musulmans Avicenne (Ibn Sina, 980-1037, médecin et philosophe persan, auteur d’un Livre de la
politique inspiré des travaux d’Aristote) et Averroès (Ibn Rushd, 1126-1198, philosophe arabe, cadi de Séville
puis de Cordoue), mais dans le cadre de la théologie chrétienne, cherche à concilier les « vérités » contenues à la
fois dans les textes saints, les textes antiques (et spécifiquement ceux d’Aristote) et les textes des juristes
romains.
Il mène aussi des interrogations sur la notion de « juste » prix. Là où Platon insistait sur la justice distributive
(où l’on se soucie de la justice dans la répartition des richesses au sein du corps social), Aristote sur la justice
commutative (la justice étant de s’assurer de la satisfaction commune des deux seules parties de la transaction),
Saint Thomas insiste pour que le « juste » prix résulte d’une estimation « commune », d’un consensus général,
qui ne saurait résulter de la seule satisfaction des participants à une transaction ponctuelle. Pour qu’un prix soit
juste, il faut s’assurer que la transaction ne lèse personne, à l’échelle individuelle et collective. Seul un jugement
moral, en amont de la transaction proprement dite, est alors à même de déterminer la justice d’un échange.
2- La pensée médiévale
+ Le « nominalisme » d’Oresme et Buridan
En réaction à la pensée thomiste apparut au XIVe siècle le courant dit « nominaliste ».
On y retrouve principalement des considérations sur la monnaie et la valeur.
1. Nicolas Oresme (1320-1382) réaffirme l’idée que la monnaie est d’abord et avant tout un
instrument d’échange suppléant aux insuffisances du troc. Nicolas Oresme soutient que la
valeur de la monnaie a pour origine le seul consentement des marchands à l’utiliser et
qu’en conséquence le Prince, seule source légitime de création monétaire, doit s’abstenir de
la manipuler. En l’espèce, le « politique » doit donc se soumettre aux exigences de «
l’économique » (le bon fonctionnement des échanges marchands par le maintien et la
garantie du poids et de la valeur des monnaies).
2. Jean Buridan(1300-1358), quant à lui, approfondit surtout la question de la valeur
(Questions sur la Politique d’Aristote ; Questions sur l’Éthique à Nicomaque d’Aristote).
Sa réflexion conduit à émettre l’idée que la valeur des biens puise à deux sources : leur
rareté, mais aussi leur utilité. Cette réflexion, aussi, réapparaîtra, sous une certaine forme, à
l’époque moderne.
II- La pensée mercantiliste
1- Origine du mercantilisme
+ Le mercantilisme est bien un système de pensée qui émerge aux XVIe et XVIIe
siècles, comme un symbole de la nouvelle attitude qui se répand vis-à-vis des
pratiques économiques et de leur place dans l’ordre social : l’ordre social est un
ordre politique.
+ Les mercantilistes ne sont pas des « penseurs » et ils ne forment pas une école
constituée portant un regard commun sur les réalités économiques. Ce sont bien
plutôt des « hommes de l’art », marchands et financiers le plus souvent, «
fonctionnaires » parfois, qui, dans le cadre de leurs activités, sont aux prises avec
les questions économiques.
+ Ils plaident le plus souvent, lorsqu’ils sont marchands ou banquiers, en faveur de
ce qu’ils nomment « la liberté économique », c’est-à-dire en fait l’octroi
d’avantages, de monopoles, d’interventions publiques pour développer ou
Ce courant présente un certain nombre de caractéristiques:
+ un courant empirique, car son objectif n’est pas d’élaborer des théories
économiques mais surtout de se préoccuper des de la pratique (politique
commerciale, industrielle, monétaire).
+ un courant colonialiste, étant donné qu’il encourage la conquête des colonies pour
augmenter le stock des métaux précieux.
+ un courant nationaliste, qui se base sur l’idée de l’Etat providence, c’est-à-dire un
Etat interventionniste, transformateur et régulateur de l’économie nationale.
+ un courant populationniste, ceci s’explique par le fait que la croissance
démographique assure à l’économie une main d’œuvre de bon marché car la
diminution des salaires garantie la compétitivité des produits nationaux par
rapport à la concurrence ce qui contribue au développement de la richesse
nationale.
II- La pensée mercantiliste
2- La richesse dans le mercantilisme
+ Les auteurs mercantilistes des XVIe et XVIIe siècles considèrent
donc l’accumulation de richesse monétaire (or et argent monnayés)
comme une finalité en soit, aboutissant au bullionisme (l’intérêt
presque des mercantilistes pour les métaux précieux). Pour un
individu (en fait pour un marchand), comme pour un État, le but doit
donc être d’accumuler les monnaies d’or et d’argent.
3- Le commerce dans le mercantilisme
+ Le commerce international est vu comme « un jeu à somme nulle ». Ce
que gagnent les uns est égal à ce que perdent les autres, lieu de compétition
entre les nations. Selon eux, comme la richesse repose sur l’or que détient
un pays, il faut exporter beaucoup et être payé en or ou convertir les gains
II- La pensée mercantiliste
2- Le mercantilisme selon les nations
Suivant les pays, cette doctrine commune va pouvoir se décliner différemment, suivant
essentiellement la place de chacun dans les circuits monétaires européens.
A- Le bullionisme ibère
+ Les Espagnols et les Portugais sont ceux qui introduisent les monnaies d’or et d’argent en Europe.
Leur souci principal est donc de les conserver (contrôler la « fuite des capitaux »). Cet impératif
apparaît plus nettement lorsque dans la seconde moitié du XVIe siècle, Espagne et Portugal
amorcent un déclin qui ne se démentira plus.
+ Les mercantilistes espagnols sont donc ceux qui portent au plus haut degré le bullionisme et le
chryshédonisme et ils exposent des « Requêtes pour que l’or et l’argent ne sortent pas du
royaume » (Ortiz , 1558).
II- La pensée mercantiliste
2- Le mercantilisme selon les nations
B- Le commercialisme britannique
+ La particularité du Royaume-Uni est évidemment d’être une île. Il en résulte qu’en sus des thèmes
généraux qu’ils développent au même titre que les autres mercantilistes européens, les
mercantilistes britanniques (les plus célèbres sont , Thomas Mun Discours sur le commerce
anglais aux Indes orientales, 1621 ; Josiah Child, Brèves Observations concernant le commerce et
l’intérêt de l’argent, 1688 ; John Locke, Considérations sur l’intérêt et la valeur de la monnaie,
1691) vont insister sur l’importance du commerce maritime.
+ Les auteurs britanniques de cette époque, apparaissent comme les plus « libéraux » (au sens actuel
du terme) des mercantilistes : puisque leur objet est de s’enrichir en accroissant le volume du
commerce transitant par leurs ports, ils militent en faveur de la liberté la plus grande du
commerce. En développant de tels thèmes « libéraux », ces auteurs posent ainsi les bases du
mouvement libre-échangiste de la fin du XVIIIe siècle qu’animeront en premier lieu les classiques
britanniques.
II- La pensée mercantiliste
2- Le mercantilisme selon les nations
C- Le colbertisme français
+ Le mercantilisme français est surtout caractérisé, à partir de la fin du XVIe siècle, et au travers
des écrits de Barthélémy de Laffémas (1545-1611, contrôleur général du commerce sous Henri
IV, il publie en 1597 un Règlement pour dresser les manufactures du royaume) et d’ Antoine de
Montchrestien (1575-1621, il publie en 1615 le premier Traité d’économie politique), par l’accent
mis sur la nécessité du développement de l’artisanat et de l’industrie à l’intérieur du royaume.
Il faudra attendre le ministère de Jean-Baptiste Colbert (1619-1683, il fut de 1661 à sa mort un
des principaux ministres de Louis XIV) pour que ces mesures soient systématiquement mises en
application. Il met en place une politique douanière, réglementaire et manufacturière et pose ainsi
les bases de la tradition interventionniste de l’État français.
+ Les auteurs français développent l’idée que le meilleur atout du royaume de France pour
attirer les métaux précieux est sa nombreuse population (Jean Bodin , Les Six Livres de la
République, 1576) et son grand territoire, devant lui donner des atouts agricoles (Maximilien
de Béthune).
II- La pensée mercantiliste
+ Il y a eu plusieurs formes de mercantilisme. Il y a des différences entre ces
théories mais toutes convergent vers une même vision du fonctionnement de
l’économie avec un objectif l’accumulation de richesse grâce à un moyen : le
commerce.
+ Les commerçants sont donc la classe productive.
+ Trois reproches majeurs lui sont adressés :
1. D’abord, elle assimilerait à tort la richesse à la monnaie faite de métaux
précieux
2. Ensuite, la recherche de l’excédent commercial ne serait pas nécessaire dans
l’hypothèse où la production interne permet la création d’une demande
suffisante pour l’absorber ; il conviendrait alors de mieux étudier l’articulation
interne entre l’industrie et l’agriculture ;
III- Les physiocrates
+ École de pensée typiquement française, qui a été importante dans l’histoire de la
pensée, qui a eu une durée assez courte : 1756-1780 (fin du 18ème, époque de
Louis 15).
+ Terme qui vient du grec : Physis (Nature) et Kratos (pouvoir). Terme inventé par
Dupont De Nemours et les personnages importants sont : François Quesnay
(1694-1774) et Mirabeau.
+ Les physiocrates considèrent que les mercantilistes sont à l’origine des crises qui
touchent le pays. Il y a d’abord une crise des finances publique : l’Etat est en
faillite. On a aussi une crise d’ordre politique, guerre de 7ans, qui se solde par la
perte des colonies américaines, et a contribué à alourdir davantage les finances. Et
pour finir il y a une crise agricole, l’agriculture française ne produit pas
suffisamment pour nourrir le pays (famines).
III- Les physiocrates
1- L’origine de la physiocratie
+ L’étatisme mercantiliste a abouti à un système économique où le poids des
réglementations et des impôts est tel qu’il n’y a pratiquement aucun espace pour
le secteur privé. De plus, l’accent mis sur l’industrie et le commerce a entraîné un
détournement de l’investissement du secteur agricole et un abandon des terres
agricoles et à l’exode rural.
+ Pour résoudre ce problème un nouveau courant a vu le jour, c’était au XVIIème
siècle caractérisé par le siècle des lumières ; elle préconisait le laissez faire,
laissez aller.
III- Les physiocrates
2- Les principes de la physiocratie
« Dieu seul est producteur »
A- PREMIER PRINCIPE: Ordre naturel des sociétés
Les Physiocrates énoncent que la société est régie par un ordre providentiel et essentiel, voulu par Dieu pour le
bonheur des hommes, un ordre qui doit s'imposer à la sagesse des gouvernements. Cet « ordre naturel » contient
les lois fondamentales et immuables de toute société.
Aux yeux des physiocrates, les institutions essentielles qui découlent ainsi de la nature sont :
1. La société elle-même.
2. La propriété « Que la propriété des biens-fonds et des richesses mobilières, disait Quesnay, soit assurée à
ceux qui en sont les possesseurs légitimes : car la sûreté de la propriété est le fondement essentiel de l’ordre
économique de la société. »
+ La liberté économique. Les physiocrates, à cet égard, réclamaient deux libertés qui manquaient plus ou moins
à leur temps, c’est-à-dire la liberté des cultures et la liberté des échanges.
III- Les physiocrates
A- PREMIER PRINCIPE: Ordre naturel des sociétés
Les physiocrates posent les bases du libéralisme en considérant que la
propriété privée est primordiale, que la rencontre d’acheteur et de
producteur crée « le bon prix », sans pour autant parler de marché et
encore moins en étant effleuré par l’idée d’autorégulation. Ils
préconisent déjà le « laissez faire, laissez passer », la baisse des impôts
et la suppression de la multitude d’impôts en un seul unique et bas qui
servirait aux besoins de la Défense Nationale, ainsi que la mise en place
d’une justice apte à juger les atteintes aux intérêts des particuliers.
III- Les physiocrates
B- DEUXIÈME PRINCIPE: Productivité de l’agriculture seule
+ Selon Cantillon « la terre est la source ou la matière d’où l’on tire la richesse »:
mais, avec cela il regardait aussi le travail de l’homme comme la « forme qui
produit la richesse ».
+ L’agriculture est la seule industrie qui produit : le travail subséquent transforme
sans produire ; aussi les manufacturiers, commerçants, ouvriers quelconques des
industries non agricoles composent-ils une classe stérile.
+ L’agriculture doit recevoir nécessairement des avances pour conserver et accroître
sa productivité; et l’État doit encourager ces « dépenses productives », aux
dépens des « fortunes pécuniaires ».
III- Les physiocrates
3- Les apports de la physiocratie
Un grand nombre d’historiens de la pensée voient dans Quesnay et la
physiocratie la première école d’économistes modernes. Quesnay lui-même avait
choisi de se qualifier et de qualifier ses disciples « d’économistes ». Pour la
première fois, en effet, un auteur revendique l’idée que l’harmonie sociale repose,
non pas sur un ordre moral (qu’il soit religieux ou pas), non pas sur un ordre
politique (qu’il soit libéral ou absolu), mais sur un ordre économique qui est
considéré comme l’ordre naturel des sociétés. L’étude de l’économie est donc
considérée comme une discipline à part entière, pouvant apporter une réponse à la
question de l’ordre social.
III- Les physiocrates
3- Les apports de la physiocratie
A- Le tableau économique
+ Les premières contributions à la question du circuit économique venaient de
Pierre de Boisguilbert, puis de Richard Cantillon. Elles vont trouver des
prolongements avec le « Tableau économique » des Physiocrates.
+ François Quesnay (1758) a publié le tableau économique dans lequel il décrit les
mécanismes de production, de circulation et d’utilisation de la richesse créée au
sein de l’économie. L’idée centrale est l’idée de circulation des richesses dans
l’économie inspirée de la circulation du sang dans un corps.
+ Le Tableau économique décrit donc comment les « dépenses du revenu »
circulent sans fin dans la société pour alimenter d’une part les « dépenses stériles
relatives à « l’industrie » et d’une autre les « dépenses productives relatives à
l’agriculture ».
III- Les physiocrates
3- Les apports de la physiocratie
A- Le tableau économique
La nation est réduite à trois classes de citoyens :
+ La classe productive est celle qui fait les avances des
dépenses des travaux de l'agriculture, et qui paye
annuellement les revenus des propriétaires des terres.
+ La classe des propriétaires comprend le souverain, les
possesseurs des terres et les décimateurs. Cette classe
subsiste par le revenu ou produit net de la culture, qui lui est
payé annuellement par la classe productive.
3- Les apports de la physiocratie
A- Le tableau économique
La classe stérile a une avance de 1 milliard qui lui provient par les achats de biens manufacturés par
les agriculteurs. Elle dépense son avance en achat à la classe productive, et reconstitue son avance,
la classe stérile ce qu’elle a gagné sous forme de réinvestissement et achat de bien de consommation
→ produit net nul.
La classe des propriétaires a un revenu de 2 milliard qu’il dépense de la façon suivante : 1
milliard pour la classe productive et 1 milliard pour la classe stérile. La totalité de leur revenu est
dépensée .
La classe productive produit pour 5 milliards, il en dépense 2 sous forme d’avances annuelles et 1
sous forme d’avances primitives, et par conséquent il leur en reste 2, qui sont versés aux
propriétaires fonciers.
III- Les physiocrates
3- Les apports de la physiocratie
B- La théorie du produit net
Quesnay part d’observations empiriques pour établir une comptabilité de ces exploitations. Les deux
concepts que Quesnay élabore à partir de ses observations sont les concepts de produit brut et produit
net.
Produit Brut = somme des intérêts reçus sur les avances primitive + avances annuelles + produit net
Produit Net = rente (de la terre) + impôts
Seule l’agriculture est à même de fournir un « produit net », c’est-à-dire d’accroître le montant de
richesses par rapport aux richesses « avancées ». Au contraire, l’industrie, les « arts et manufactures »
sont réputés être « stériles », ne faisant que transformer les richesses (transformer les « valeurs
d’usage »), mais ne créant pas de surplus.
4- Les limites de la physiocratie
La physiocratie repose sur 2 idées :
+ d’une part l’agriculture est la source de la richesse et le commerce est secondaire.
+ pour commercialiser et répartir la richesse créée par l’agriculture il faut supprimer toutes les
barrières à l’échange à l’intérieur du pays mais aussi avec les autres pays.
Cependant
+ Sur le plan analytique, son insistance sur la productivité exclusive de l’agriculture mettait la
physiocratie en décalage avec son temps, qui connaissait déjà, notamment outre-Manche, les
prémisses de ce qui allait devenir la première révolution industrielle.
+ Sur le plan conceptuel, le tableau laissait largement ouverte les questions de la valeur, des
revenus, de la détermination économique des classes sociales et de leurs rapports… autant de
questions qui seront abordées et résolues par l’école classique anglaise.
Chapitre 2: La pensée classique
I- Présentation générale
La pensée classique en économie peut se caractériser, de manière « anachronique »,
comme articulant une « microéconomie » classique (théorie des prix : valeur travail,
prix de production, gravitation ; théorie de la répartition : relation inverse entre
salaires et profits) et une « macroéconomie » classique (loi de Say et neutralité de la
monnaie), fondant une vision du capitalisme (un ordre économique naturel, qui
articule une activité de production et une activité d’échange, où l’individu appartient
par conséquent de deux manières à la société : comme marchand et comme titulaire
de revenu) et une doctrine (libéralisme et libre-échangisme).
Chapitre 2: La pensée classique
I- Présentation générale
La pensée classique en économie peut se représenter comme articulant une «
microéconomie » classique (théorie des prix : valeur travail, prix de production,
gravitation ; théorie de la répartition : relation inverse entre salaires et profits)
et une « macroéconomie » classique (loi de Say et neutralité de la monnaie),
fondant une vision du capitalisme (un ordre économique naturel, qui articule une
activité de production et une activité d’échange, où l’individu appartient par
conséquent de deux manières à la société : comme marchand et comme titulaire de
revenu) et une doctrine (libéralisme et libre-échangisme).
Chapitre 2: La pensée classique
I- Présentation générale
+ Le contexte économique : la Révolution industrielle
Le contexte économique de la science classique est celui de la première révolution industrielle, que connut
l’Angleterre au cours du XVIIIe siècle et qui culmina au milieu du siècle suivant. Il s’agit d’une mutation
essentielle de l’histoire : une élévation considérable du volume de la production industrielle (dans la métallurgie
et le textile notamment) et du rythme de sa croissance, fondée sur un mouvement de concentration et de
mécanisation du processus de travail et sur la généralisation de l’usage d’une source d’énergie, la vapeur (et
l’utilisation du charbon).
La Révolution industrielle conduit à passer définitivement d’un capitalisme commercial et marchand d’essence et
de logique mercantiliste à un capitalisme industriel libéré des entraves réglementaires et plaçant en son cœur
le rapport salarial entre une bourgeoisie devenue industrielle et une main-d’oeuvre salariée rendue disponible par
la révolution agricole (enclosures) et que les progrès agricoles autorisent à nourrir.
Chapitre 2: La pensée classique
I- Présentation générale
+ Le contexte économique : la Révolution industrielle
Ce processus, favorisé par les innovations techniques, touche tous les secteurs de l'activité, notamment la
croissance démographique entre 1750 et 1800 la population britannique a doublé, l’agriculture a connu une
remarquable amélioration de la productivité, l’industrie s’est développé aussi à travers les découvertes capitales
(machine à vapeur et apparition du moteur mécanique), ensuite le transport devenu de plus en plus accessibles
grâce à la construction des réseaux ferrés.
Donc c’est en Angleterre, première grande puissance à l’époque, avec Adam Smith (1723-1790), Thomas
Malthus (1766 - 1834), David Ricardo (1772 - 1823) ; puis en France avec Jean Baptiste Say (1767 - 1832) que
naît la pensée libérale classique.
Chapitre 2: La pensée classique
I- Présentation générale
+ Les postulats de l’école classique
Chapitre 2: La pensée classique
I- Présentation générale
+ Les postulats de l’école classique
A- Le modèle de l’Homo oeconomicus
• L’individualisme des agents économiques : L’individu est un être rationnel, il est le seul capable de
juger et de décider ce qui est bon pour lui. L’interventionnisme de l’Etat, même à but louable, est donc
pervers dans ses conséquences. Chaque individu poursuit son intérêt particulier (utilitarisme) par la
maximisation des satisfactions et la minimisation de l’effort (hédonisme).
• L’affirmation de la liberté économique: Dérivé de l’ordre naturel , la propriété privée des moyens de
production est une garantie de la liberté. Le marché constitue le régulateur le plus efficace de l’activité
économique (on parle également de socialisation par le marché). La recherche de l’intérêt individuel
permet de réaliser l’intérêt général car il existe une main invisible (le marché) qui guide les passions
individuelles vers le bien. L’État doit intervenir le moins possible, juste dans les fonctions régaliennes :
défense, justice, ordre public, travaux publics (infrastructures routières) c’est ce que l’on nomme l’État
gendarme.
Chapitre 2: La pensée classique
I- Présentation générale
+ Les postulats de l’école classique
A- Le modèle de l’Homo oeconomicus
• La permanence de l’équilibre économique: Un système économique conduit par
le principe de la liberté économique tend naturellement vers l’équilibre. Lorsque
celui-ci n’est pas réalisé, les prix s’ajustent à la hausse ou à la baisse. La Loi des
débouchés de J. B. Say stipule que « toute offre crée ses débouchés », Selon cette
loi, un accroissement de la population crée des richesses, ce qui augmente les
revenus distribués et entraîne une hausse de la demande, constituant des
débouchés pour l’offre. Aucune crise de surpopulation n’est possible.
Chapitre 2: La pensée classique
I- Présentation générale
+ Les postulats de l’école classique
B- L’analyse de la production
L’analyse de la production chez les classiques repose essentiellement sur les 4 piliers suivants : la
division du travail ; la théorie de la valeur ; la loi des débouchés de J-B Say ; la théorie quantitative de
la monnaie.
- Le processus de production est la combinaison de facteurs de production (terre, travail, capital).
Plus la spécialisation des tâches, ou encore la division du travail est poussée, plus le produit
obtenu (la combinaison des facteurs de production) sera élevé (efficace).
- Selon ce courant la division du travail présente trois avantages, le premier est l’accroissement de
l’habileté de l’ouvrier qui augmente la quantité de produits qu’il peut réaliser. Le second est relatif
au gain temps qui se perd dans le passage d’un ouvrier à un autre, le troisième est que cette
division serait à l’origine de l’invention de machines propres à abréger et à faciliter le travail.
Dans son ouvrage, « Recherches sur la nature et les causes de la richesse des
nations », Adam Smith (1776 : 72) introduira la division du travail en s’appuyant
sur le célèbre exemple de la manufacture d’épingles : « Un ouvrier tire le fil à la
bobine, un autre le dresse, un troisième coupe la dressée, un quatrième empointe,
un cinquième est employé à émoudre le bout qui doit recevoir la tête. Cette tête
est elle-même l’objet de deux ou trois opérations séparées : la frapper est une
besogne particulière ; blanchir les épingles en est une autre ; c’est même un
métier distinct et séparé que de piquer les papiers et d’y bouter les épingles ;
enfin, l’important travail de faire une épingle est divisé en dix-huit opérations
distinctes ou environ, lesquelles, dans certaines fabriques, sont remplies par
autant de mains différentes, quoique dans d’autres le même ouvrier en remplisse
deux ou trois ».
Chapitre 2: La pensée classique
I- Présentation générale
+ Les postulats de l’école classique
C- La théorie de la valeur
+ Selon les mercantilistes la richesse est tributaire du stock de métaux précieux, par contre les
physiocrates qualifient la richesse comme dérivant de l’activité agricole, mais pour les
classiques la richesse repose principalement sur le travail. Pour les classiques La valeur d'un
bien est déterminée par la quantité de travail commandé, la quantité de travail qu'il permet
d'acquérir.
+ Pour Smith valeur doit être rattachée au travail, et distingue entre deux : La valeur d’usage se
réfère à l’utilité procuré par la possession de la marchandise (théorie subjective de la valeur). Et la
valeur d’échange, mesurée par la faculté qu’à ce même bien d’acheter d’autres biens. L’exemple le
plus courant à cet égard est celui de l’or et l’eau, selon A. Smith (1976) : « Rien n’est plus utile
que l’eau mais ne permet d’acheter presque rien(…) Un diamant au contraire, n’a presque de
valeur d’usage ; mais on peut fréquemment l’échanger contre une grande quantité d’autres
Chapitre 2: La pensée classique
I- Présentation générale
Les postulats de l’école classique
C- La théorie de la valeur
Pour déterminer la valeur stable, naturelle ou réelle des marchandises. Adam Smith
a fait la distinction entre le prix du marché et le prix nominal exprimé en unités
monétaires et le travail. Pour Smith, à l’état primitif, il n’existe qu’un seul facteur
de production, le travail. Le rapport de valeur de deux biens sera alors directement
en proportion de la quantité de travail nécessaire pour les obtenir. Dans un état plus
avancé, il faut tenir compte du profit du capital et de la rente foncière incorporés
dans chaque produit. Ce n’est plus une théorie de la valeur travail, mais une
expression du coût de production.
Chapitre 2: La pensée classique
I- Présentation générale
+ Les postulats de l’école classique
D- La loi des débouchés de J. B Say
J-B Say souligne que « c’est la production qui ouvre des débouchés aux produits ». Par la suite, cette loi a
donné lieu à quelques polémiques. Certains l’ont assimilé au précepte « toute offre crée sa demande » et
reproché à l’approche classique son incapacité à saisir la portée de la demande.
Or, Jean-Baptiste Say, en insistant sur les débouchés, il souhaitait simplement rappeler que les produits
s’échangeaient contre d’autres produits et que la monnaie ne remplissait « qu’un office passager dans ce
double échange » (1803, [1972, p. 140]).
Dès lors, l’achat d’un produit ne pouvait être fait qu’avec la valeur d’un autre produit. Dans ces conditions,
« plus les producteurs sont nombreux et les productions variées, et plus les débouchés sont faciles, variés et
vastes».