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2 L'Utilisation Du Théâtre Dans l'Enseignement-Apprentissage Du FLE

Ce mémoire professionnel explore l'utilisation du théâtre comme outil pédagogique dans l'enseignement du Français Langue Étrangère (FLE). Il met en avant les bénéfices du théâtre pour l'expression orale, la confiance en soi et la communication interculturelle, tout en s'appuyant sur des expériences vécues au sein d'un Centre d'Accueil pour Demandeurs d'Asile (CADA). L'objectif est de réfléchir sur la place du théâtre dans l'apprentissage des langues et son potentiel à enrichir les compétences linguistiques et extra-linguistiques des apprenants.

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2 L'Utilisation Du Théâtre Dans l'Enseignement-Apprentissage Du FLE

Ce mémoire professionnel explore l'utilisation du théâtre comme outil pédagogique dans l'enseignement du Français Langue Étrangère (FLE). Il met en avant les bénéfices du théâtre pour l'expression orale, la confiance en soi et la communication interculturelle, tout en s'appuyant sur des expériences vécues au sein d'un Centre d'Accueil pour Demandeurs d'Asile (CADA). L'objectif est de réfléchir sur la place du théâtre dans l'apprentissage des langues et son potentiel à enrichir les compétences linguistiques et extra-linguistiques des apprenants.

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UNIVERSITÉ FRANÇOIS RABELAIS

UFR LETTRES ET LANGUES


DÉPARTEMENT SOCIOLINGUISTIQUE ET DIDACTIQUE DES LANGUES
MASTER 2 FLE/S – APPROPRIATION, DIVERSITÉ, INSERTION

MÉMOIRE PROFESSIONNEL

L'UTILISATION DU THÉÂTRE DANS


L'ENSEIGNEMENT-APPRENTISSAGE DU

FRANÇAIS LANGUE ÉTRANGÈRE

Adèle GOUSSET
ANNÉE UNIVERSITAIRE 2012-2013

RÉFÉRENT DE MÉMOIRE : Elatiana RAZAFIMANDIMBIMANANA

RÉFÉRENT DE STAGE : Marie-Lou GUARDIA


Je souhaite, par ces quelques lignes, remercier :

Marie-Lou GUARDIA, pour ses enseignements et sa patience qui m'ont permis d'avancer
dans ma professionnalisation, ainsi que le CADA de Joué-lès-Tours, pour m'avoir accueilli au sein
de son équipe ;

Elatiana RAZAFIMANDIMBIMANANA, pour son aide dans la construction de ce mémoire


professionnel ;

Alain KOENIG, qui m'a mis le pied à l'étrier pour me lancer dans le théâtre FLE ;

L'association Langue en Scène, pour m'avoir permis d'observer des ateliers théâtres riches
d'enseignements ;

Le département de Français de l'université de Cân Thoʼ, pour m'avoir donner une


expérience de stage riche ;

et le département Sodilang de l'université de Tours, pour m'avoir donner les clefs


nécessaires à mon futur professionnel.
SOMMAIRE
INTRODUCTION......................................................................................1
A.CONTEXTUALISATION....................................................................4
1.Présentation du stage au CADA.............................................................................4
2.Le CADA et ses résidents........................................................................................7
3.La semaine théâtre enfants et adolescents au CADA...........................................9
4.Le projet d'atelier théâtre pour adultes...............................................................12
5.Présentation rapide des contextes d'interventions précédents..........................14
6.Un outil pédagogique théâtre FLE ?....................................................................15
B.THÉORIES ET ANALYSES..............................................................16
1.Formel versus informel.........................................................................................17
2.Un travail sur l'expression orale et le non-dit.....................................................26
3.Le geste et la gestuelle...........................................................................................33
4.Le théâtre : un outil pour se connaître et être reconnu ?...................................43
CONCLUSION.........................................................................................51
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES – SITOGRAPHIQUES.......54
ANNEXES.................................................................................................56
INTRODUCTION

« C'est à la présence de l'apprenant tel qu'il est


culturellement, psychologiquement ou mieux
poétiquement, que le théâtre s'adresse. »
(PIERRA, 1990 : 119)

Le théâtre est défini comme étant un « art dramatique, considéré comme un genre artistique
et littéraire » ou « l'ensemble des œuvres dramatiques d'un auteur ou d'une époque » (Le Larousse).
Quand je leur parle de théâtre, de nombreuses personnes pensent à Molière (c'est d'ailleurs
l'exemple donné par Le Larousse pour la deuxième définition que je viens d'évoquer). Ici, je
souhaite prendre le théâtre dans sa dimension artistique – je dirai même active – plus que dans sa
dimension littéraire, et dans sa forme contemporaine plus que dans sa forme classique. Je propose
une activité théâtrale basée sur l'action, plus que sur la récitation d'un texte.

Je souhaite notamment me baser sur l’improvisation, ou la semi-improvisation, où le texte


n'est qu'un accessoire au même titre qu'un costume ou un décor, où le plus important est l'acteur
(par sa personnalité propre) et ses interactions avec les autres acteurs et avec le public. C’est le
travail préliminaire à la représentation face au public qui me semble intéressant pour des apprenants
de Français Langue Étrangère (FLE). La représentation devant un public, même si elle peut effrayer
certains apprenants, serait une valorisation du travail effectué sur plusieurs séances. Ils pourront
présenter leur travail, sans pour autant être notés. Ce serait donc le travail collectif qui serait mis en
avant1.

Le théâtre est ici à prendre comme un espace de travail informel2, portant sur un ensemble
de techniques d'expressions, orales et corporelles, et comme un espace de semi-liberté. En effet,
pour des apprenants d’une langue étrangère, le théâtre me paraît être un lieu d’expression, où ils
peuvent échanger librement sans être constamment repris et/ou corrigés par l’enseignant : « pour
les élèves, l'atelier théâtre doit être le lieu où il ne faut pas avoir peur de se tromper, d'essayer et
recommencer. » (BALAZARD & GENTET-RAVASCO, 2003 : 27). Tous les participants, ainsi que

1 Je reviendrai sur ce point dans le développement de ce mémoire.


2 Définit dans la partie « Formel versus Informel ».

1
l'enseignant/animateur3, devraient garder à l'esprit le fait que c'est un espace de liberté. Mais je
pense cependant qu'il faut respecter des règles pour le bon déroulement des ateliers4.

Je conçois l'atelier théâtre comme un espace de libre échange, d'interaction et de co-


construction entre les apprenants. Les méthodes actionnelles s'appuient sur ce principe de co-
construction des savoirs. Ainsi les manuels FLE proposent souvent des activités de groupes qui
devraient normalement être réalisées sans intervention constante de l'enseignant (ce n'est pas
l'enseignant qui est expert mais l'apprenant).

Le théâtre est aussi un moyen – et je prends là mon expérience en tant que comédienne – de
vaincre sa timidité, de prendre confiance en soi, de gérer le stress dans les situations particulières de
la vie quotidienne (exemple : entretien d'embauche, exposé pour un cours à l'université 5) ; et de se
rendre compte que la vie est un théâtre6. Je me donne à voir à l'autre tel que je souhaite paraître – à
tout le moins j'essaie –7, tout comme au théâtre où je donne à voir un personnage tel qu'il devrait
être perçu par un public.

L'activité théâtrale me semble être un moyen de rendre des situations plus concrètes pour
l'apprenant. Dans un cours de langue étrangère, on n'enseigne généralement pas en faisant faire
directement les choses aux apprenants (contrairement aux auto-écoles par exemple) mais en leur
demandant de se projeter dans une situation subjective souvent éloignée de la réalité. Le théâtre
permet de rendre une situation plus concrète, même si cette situation fait partie d'un imaginaire
collectif, de « modéliser des situations auxquelles un individu n'est pas préparé » (RYNGAERT ,
1996 : 11). Sur ce point, l'animateur peut agir en recadrant ces représentations après discussion
entre et avec les participants de l'atelier. Le théâtre permet d'apprendre de soi et sur soi, d'apprendre
des codes qui régissent une société, et d'apprendre aussi à communiquer dans sa propre langue.
C'est un outil d'apprentissage sur la vie en société et les situations de la vie quotidienne (BRAHY &
VRANKEN ; BALAZARD & GENTET-RAVASCO).
3 « Enseignant/animateur » sera utilisé pour signifier « enseignant et/ou animateur ».
4 On peut ici faire une analogie avec le principe suivant : « la liberté des uns s'arrête là où la liberté des autres
commence ». Pour faire respecter ce principe, a été réfléchi et promulgué un ensemble de lois qui régit notre
société. Il en est de même en atelier théâtre, c'est pourquoi j'ai utilisé le terme de semi-liberté.
5 Le système d'exposés devant la classe est une source de stress pour les étudiants internationaux venant en France,
car il n'est pas toujours utilisé dans les universités de leur pays d'origine.
6 Je reviens en détail sur ce point dans la partie « B.4.d. Au delà de soi ».
7 Je développerai ce point au cours de ce mémoire car il me semble que la façon dont je me montre n'est pas toujours
consciente.

2
Le théâtre me semble être aussi un moyen de dépasser l'enseignement classique,
scientifique. L'art est un moyen d'expression visuel et artistique qui, je crois, est plus attractif qu'un
moyen d'apprentissage scientifique parce que plus ludique. Par « apprentissage scientifique » je
pense au cadre éducatif et didactique, régit par des lois qu'il est difficile de transgresser, où un
enseignant transmet son savoir à un apprenant qui doit l'acquérir.

De part mes expériences et observations, je suis convaincue que le théâtre apporte un


bénéfice dans l'apprentissage d'une langue étrangère8. Il permet un apprentissage inconscient et
informel9. C'est un complément dans l'apprentissage d'une langue.

En bref, le théâtre peut être un moyen de travailler sur l'acte de communiquer, en langue
étrangère mais aussi en langue(s) première(s). Le théâtre serait donc un moyen de travailler sur la
communication dans son ensemble. La communication comprend de nombreuses dimensions, qui
ne seront pas toutes exposées dans ce mémoire. Ici, je souhaite faire porter la communication sur
l'acte de parole, l'acte du corps, le non-dit et le non verbal, et l'affirmation d'un soi propre
nécessaire à toute communication puisque, je le pense, on ne peut communiquer qu'en apportant
une part de soi à l'interlocuteur.

Ce mémoire n’a pas pour but d’être un guide dans l’utilisation du théâtre en classe de langue
étrangère. Il se veut être un outil de réflexion sur l’apport du théâtre, en tant qu'outil
d'apprentissage, pour des apprenants de Français Langue Étrangère, et se place aussi bien du point
de vue de l'enseignant/animateur que du participant10.
C'est pourquoi, j'énonce cette problématique :
Le théâtre peut-il être l'objet à part entière d'un cours de Français Langue Étrangère ou
serait-il simplement un complément permettant le développement de compétences linguistiques et
extra-linguistiques ?

Tout d'abord, je commencerai par exposer les contextes d'interventions en rapport avec le

8 Je donnerai des exemples au cours du développement de ce mémoire.


9 Un développement de ce point est apporté dans la partie « B.1. Formel vs informel ».
10 Je souhaite préciser que je place mon propos dans le cadre du FLE mais qu'il peut être étendu à tout apprentissage
d'une langue étrangère.

3
théâtre.

Ensuite, je ferai part de mes réflexions autour de points qui me semblent essentiels dans
l'atelier théâtre. Dans un premier temps, je souhaite exposer mes réflexions autour des termes
« formel » et « informel ». Puis, je parlerai du travail qui peut être effectué en atelier théâtre sur les
compétences de communication : le travail sur l'expression orale, et sur l'expression corporelle.

Enfin, j'apporterai une réflexion au sujet du travail sur soi qui est, à mon sens, induit par
l'atelier théâtre.

A. CONTEXTUALISATION

1. Présentation du stage au CADA

Le CADA, Centre d'Accueil pour les Demandeurs d'Asile, est une structure sociale rattachée
à Adoma, une société qui offre des solutions de logements sociaux (foyers de travailleurs migrants,
résidences sociales, pensions de famille, centres d'hébergement, centres d'accueil de demandeurs
d'asile, aires d'accueil de Gens du voyage…). C'est une société d'économie mixte, c'est-à-dire, une
société dont « le capital est majoritairement détenu par une ou plusieurs personnes publiques (à
savoir l'État, une Collectivité territoriale, ou tout autre Établissement public) » (Wikipédia11).

Adoma est le premier gestionnaire de CADA en France. Ces centres sont financés par l’État,
et les résidents y sont placés par l'OFII (Office Français de l'Intégration et de l'Insertion), au
moment du dépôt de demande du statut de réfugié à la préfecture par ces derniers. Les demandeurs
d'asiles sont ainsi hébergés dans un CADA jusqu'à obtenir le statut de réfugiés ou être déboutés.

Le CADA de Joué-lès-tours accueille près de 130 résidents, généralement des familles, des
personnes isolées, des mères célibataires ou en fin de grossesse, et/ou des personnes qui ont une
santé fragile (en raison du service hospitalier de Tours, un des meilleur en France, notamment dans
la prise en charge des patients atteints de maladies mentales ou de problèmes psychologiques). C'est
un public migrant (adultes et enfants) particulier, en attente et dans l'angoisse de devoir repartir dans

11 http://fr.wikipedia.org/wiki/Soci%C3%A9t%C3%A9_d%27%C3%A9conomie_mixte

4
leur pays. Ces résidents sont aidées au quotidien par des acteurs sociaux référents (un référent par
personne) pour les courses, les démarches administratives. C'est donc dans un rapport d'assistanat et
la privation d'une certaine autonomie qu'ils s'installent.

La formation FLE est assurée chaque année par des stagiaires de l'Université de Tours, mais
sans continuité. Cette discontinuité ne permet pas aux résidents un suivi dans leur apprentissage du
français. En ce début d'année 2013, pour une période de 6 mois, étaient présentes deux stagiaires de
Master 1 FLE pour assurer les cours. La mission principale du stagiaire de Master 2 est d'assurer la
coordination des cours, l'emploi du temps et les sorties culturelles et contextualisées12.

L'enseignement du FLE (qui n'est pas une mission d'Adoma) en cours interne est une
initiative du CADA de Joué-lès-tours, en collaboration avec le département de Sociolinguistique et
Didactique des Langues (Sodilang) de l'université François Rabelais de Tours. De ce fait, aucun
budget n'est alloué par Adoma pour financer cette action que ce soit pour : engager un enseignant,
acheter des manuels d'apprentissage, avoir un espace FLE (comme une salle de cours fixe et dédiée
au FLE ou une bibliothèque), ou financer des stagiaires. Ce stage est donc sur la base du bénévolat,
pour aider la responsable FLE du CADA. Les missions, divisées en deux conventions de stage, ont
été proposées par le CADA, et complétées, après négociations, par la stagiaire.

Lors des deux conventions, j'ai eu en charge l'animation de deux heures hebdomadaires
d'aide aux devoirs à destination des enfants scolarisés. Cette mission m'a permis d'approcher ce
public, et de comprendre leurs besoins et leurs difficultés (utilisés pour la préparation des ateliers
théâtres).

Dans une première convention, j'ai eu pour mission de mettre en place et de coordonner les
cours de FLE/S, assurés par deux stagiaires de Master 1 de l'université de Tours. Cette mission
comprenait la diffusion de l'information – par biais d'affichages et de rencontres – auprès des
résidents et de l'équipe du CADA ; informer l'équipe du CADA des actions menées, avec un
compte-rendu en réunion, toutes les deux semaines, comprenant le nombre de personnes venues en
cours, les problèmes rapportés par les enseignantes... ; et la passation de tests de positionnements
pour les résidents du CADA afin de les rediriger vers des cours internes ou externes au CADA. Les
cours externes se font dans des structures de formation FLE/S, ce qui demande l'entretien et la
12 Les sorties contextualisées sont des sorties dans des instances administratives telles que le Pôle Emploi ou la
Préfecture. Ce terme a été choisi en raison d'une idée d'immersion « en contexte » pour les résidents, dans un souci
de les rendre plus autonomes dans leurs démarches fréquentes.

5
création de partenariats – une autre mission qui m'a été confiée.

Cette mission comprenait aussi une mise en lien entre l'équipe FLE et l'équipe CADA. Ce
lien n'est pas évident à établir. La stagiaire de Master 2 FLE de l'année précédente était chargée de
mettre en place ce lien qui doit être perpétué et entretenu chaque année. Cependant, les ruptures de
temps très importantes entre l'intervention des stagiaires de Master 2 fragilisent ce lien, et il doit
être réactivé constamment. L'équipe sociale n'est donc pas très impliquée dans les projets du pôle
FLE : les informations diverses ne sont pas transmises aux résidents, les intervenants sociaux ne
s'impliquent pas physiquement dans la mise en place d'un projet, et les organisations d’événements
FLE se trouvent souvent annulés en raison d'une autre action montée par une personne de l'équipe
sociale. Je dois cependant nuancer ce problème. En effet, les coupes budgétaires ont mené vers une
diminution du nombre d'intervenants sociaux. Ces derniers ont donc une charge de travail plus
importante et prennent moins de temps à informer sur les actions FLE.

Ma deuxième mission a consisté en l'organisation d'une sortie au Pôle Emploi à destination


des résidents demandeurs d'asile et réfugiés statutaires. Cette sortie avait pour but de faire connaître
le service informatique du Pôle Emploi, mis à disposition pour les démarches diverses. Pour les
résidents du CADA, il s'agissait d'imprimer un avis de situation pour les uns, et d'actualisation de
statut de demandeur d'emploi pour les autres. À la suite de cette sortie, j'ai créé un outil montrant les
étapes de ces deux démarches (par des captures d'écran). J'ai eu quelques difficultés dans la
construction de cet outil. En effet, une première version qui utilisait l'écrit n'était pas pertinente : de
nombreux résidents ne comprenant pas le français, j'ai du m'adapter et rendre les étapes visibles
sans devoir passer par la lecture (annexe 1).

J'ai aussi participé à une sortie culturelle à Loches, organisée par une intervenante sociale,
pour 5 femmes résidentes du CADA. Cette sortie a été l'occasion pour ces femmes de découvrir une
ville chargée d'Histoire, et de sortir du quotidien.

Pour ma deuxième convention, j'ai proposé d'organiser et d'animer une semaine théâtre FLE
à destination des enfants et des adolescents du CADA. Deux ateliers de 5 séances ont donc été mis
en place : des séances de 2 heures le matin pour les enfants, et des séances de 2 heures l'après-midi
pour les adolescents. Il me semblait plus pertinent de séparer ces deux publics, qui n'ont pas les
mêmes besoins : les enfants sont scolarisés en école primaire, et ont un niveau d'expression orale
plus élevé que les adolescents, souvent encore en classe d'insertion FLS (Français Langue Seconde).

6
En effet, les enfants étant installés dans le milieu scolaire très tôt à leur arrivée en France, ils suivent
le même cursus que les autres enfants et sont donc en perpétuelle communication orale avec leurs
camarades francophones (ce qui renforce leurs compétences orales). Ils ont cependant, pour la
plupart d'entre eux, de nombreuses difficultés à l'écrit (j'ai pu le remarquer lors des séances d'aide
aux devoirs). Les adolescents sont dans une autre problématique : à leur arrivée en France, ils
suivent un cursus de classe FLS (Français Langue Seconde) avant de pouvoir intégrer une classe.
Après une certaine avancée dans l'apprentissage FLS, les adolescents sont intégrés petit à petit dans
des classes de collège, tout en suivant les cours de FLS. Les adolescents ont donc besoin de
travailler les compétences orales et écrites. Le travail effectué n'a donc pas été le même.

Il était convenu que je prépare et organise un atelier théâtre FLE pour les adultes, qui devait
débuter au mois de septembre 2013. Les échéances et des changements de dernières minutes
(notamment, les ateliers qui ont finalement débutés en juin 2013) ne m'ont pas permis d'effectuer
cette mission, que je souhaitais pourtant réaliser. Je n'ai donc pu que préparer la présentation et les
objectifs de ces ateliers, de façon incomplète. En effet, l'atelier théâtre devait s'appuyer sur une
analyse de besoins complète, avec des entretiens auprès des résidents et de l'équipe sociale du
CADA, ainsi qu'avec des comédiens professionnels spécialisés dans ce type d'actions.

Ma troisième mission pour cette convention était la création d'une trame afin de créer un
partenariat durable entre le CADA et le département Sodilang de l'université François Rabelais de
Tours. Mes faibles compétences juridiques ne m'ont pas permis de réaliser totalement cette mission.
De plus, ne connaissant pas suffisamment les modalités de création d'une convention, je n'ai pu que
préparer une trame très incomplète, à partir d'un modèle.

2. Le CADA et ses résidents

Le CADA est un foyer pour des familles et des personnes isolées en demande d'asile. Ils sont
un public vulnérable, plein de désillusions lorsqu'ils arrivent sur le territoire français. Les
demandeurs d'asile se trouvent dans une grande précarité, en attente d'un placement dans un
logement, dans lequel ils doivent cohabiter avec des personnes de cultures différentes. Même s'ils
sont aidés et suivis par des assistants sociaux, ils ressentent souvent cette aide comme un
déclassement social : ils perdent leur indépendance et doivent être accompagnés au quotidien.

7
Les demandeurs d'asile n'ayant pas la possibilité d'exercer une activité salariale, et ayant
souvent peur de quitter le foyer du CADA, se retrouvent dans un état d'attente constant. De même,
ils restent dans l'angoisse de la réponse pour leur statut de réfugié qui ne sera pas forcément
positive. De plus, cette attente de réponse ne permet généralement pas de se projeter vers « l'après
réponse ».

« Si le travail impacte positivement la santé, l'absence d'activité salariale, ou à minima


bénévole, attaque les assises narcissiques en contraignant la personne à l'assistanat. » (annexe 2 :
20) Les demandeurs d'asile, particulièrement les chefs de famille, souffrent de cette absence de
travail qui leur donne l'impression de perdre leur statut au sein de leur famille. Il n'est pas rare que
la décision d'un voyage jusqu'en France pour se sortir d'une situation très complexe vienne du chef
de famille. Il se sent alors coupable du déracinement de sa famille. A cela s'ajoute cette perte de
revenu et cet état de dépendance, ce qui engendre un « sentiment de passivité, d'inutilité » (annexe
2 : 20).

Après l'attente et l'inactivité (généralement longue), vient la période de la réponse. Là


encore, il est difficile pour les demandeurs d'asile de gérer leur stress, que la réponse de statut soit
positive ou négative. Dans le cas d'une réponse négative, les demandeurs d'asile savent qu'ils
doivent retourner dans leur pays (qu'ils ont cherchés à fuir) ou dans la clandestinité. Dans le cas
d'une réponse positive, ils doivent « trouver rapidement un logement, un travail et une place dans la
société. » (annexe 2 : 20), ce qui est ressentit comme une angoisse. Pour les chefs de famille, il
s'agit de retrouver leur place et de ne pas décevoir les attentes du reste de la famille.

L'autonomisation des demandeurs d'asile est un des enjeux du CADA. Les assistants sociaux
doivent amener le résident à se prendre en charge pour les démarches quotidiennes. Ils cherchent
donc, par un projet personnalisé, à rendre l'attente plus active. Ce projet personnalisé dépend des
envies et des loisirs du demandeur d'asile. Ce peut être du bénévolat, une activité sportive ou
artistique, ou encore l'apprentissage du français. C'est aussi une raison pour la mise en place des
cours de FLE interne au CADA13.

Les résidents du CADA sont placés dans des unités de vie qu'ils doivent partager avec
13 Entre aussi en compte la baisse du budget alloué aux interprètes : les assistants sociaux du CADA ne peuvent plus
faire appel à des interprètes sauf en cas de nécessité, notamment pour le recueil des récits de vie des demandeurs
d'asile.

8
d'autres personnes, isolées ou en famille. Ceci donne souvent lieu à un choc culturel important, et
peut créer des tensions. Par exemple, une famille arménienne et une famille mongole ne vivent pas
de la même façon. Ils ne partagent pas non plus de langue commune. Il est donc souvent difficile de
mettre en place des règles de vie commune qui conviennent à tous. De même, lorsque la façon de
vivre d'une personne ne convient pas à l'autre, la barrière de la langue amène souvent l'un et l'autre à
s'isoler et à devoir subir la façon de vivre de l'autre.

Le théâtre est-il un moyen efficace d'agir contre ces difficultés ? Une expérience similaire a
été mise en place une année par la référente FLE du CADA. Les résidents ont été invités à
participer à la création d'un spectacle de marionnettes pour le noël du CADA. Les participants
étaient tous d'origines et de cultures différentes, et tous avaient des difficultés pour se faire
comprendre par leurs interlocuteurs.
Cette activité a débuté par des exercices d'expressions orales et corporelles. Des exercices
d'improvisations ont aussi été proposés. À partir de ces exercices, l'animatrice a écrit une pièce de
théâtre de marionnettes qu'elle a proposée et modifiée en fonction des volontés des participants. Les
familles des participants ont aussi été mises à contribution dans la création des décors et des
marionnettes.
Il s'est avéré qu'à la fin de l'expérience, les résidents qui ont participé à ce projet étaient
parvenus à sortir de leur isolement pour certains, de leur mutisme pour d'autres, et ont tous amélioré
leurs expressions orales et corporelles.
Un des participants, un père de famille, a réussi à retrouver sa place de chef de famille et a
retrouvé une envie de s'en sortir qu'il avait perdue. De plus, sa capacité à communiquer avec les
acteurs sociaux du CADA s'est grandement améliorée.
Qu'est-ce qui, dans l'activité, à provoqué ces changements ?14

3. La semaine théâtre enfants et adolescents au CADA

Suite aux éclaircissements sur le type de public, je souhaite maintenant présenter la semaine
théâtre FLE proposée aux enfants et adolescents du CADA.

14 Une réflexion sur cette question sera apportée dans la partie « 4. Le théâtre : un outil pour se reconnaître et être
reconnu ? »

9
Dans le but d'aider les enfants du CADA à prendre confiance en eux et de leur donner un
espace où ils puissent s'exprimer librement, une semaine d'atelier théâtre/improvisation a été
organisée, du 15 ou 19 avril 2013, pour les enfants âgés de 6 à 11 ans et les adolescents à partir de
12 ans. Ces ateliers ont eu lieu tous les jours, de 10h à 12h pour les uns, et de 14h à 16h pour les
autres.

Ces ateliers avaient plusieurs objectifs :


- Culturels
- sortir du cadre scolaire,
- s'évader pendant les vacances scolaires,
- découvrir une part culturelle par le biais du monde théâtral et de l'improvisation,
- Linguistiques
- travailler l'expression orale et corporelle,
- découvrir ses propres capacités à s'exprimer,
- Personnels
- laisser libre cours à son imagination,
- apprendre à travailler en groupe,
- s'adapter à différentes situations.

Les séances étaient originellement organisées en 4 temps :


- des exercices de respiration, de prononciation, de prise de confiance en soi et en autrui, de
mise en lien entre les enfants ;
- des exercices d'improvisations (lors de la première séance les situations ont été données par
les animatrices de l'atelier, pour les séances suivantes, se sont les enfants qui devaient en proposer) ;
- un temps d'échange : les enfants peuvent s'exprimer sur les choix faits par les autres, sur
comment ils auraient fait etc...
- un exercice de relaxation.

Cependant, les ateliers ne se sont pas déroulés de cette manière. En effet, la prévision et la
réalité des contraintes, données par les besoins des participants au moment des ateliers, se sont
avérées complètement différentes. Ce fait m'a fait comprendre qu'un parcours d'enseignement-
apprentissage doit être constamment modifié (la préparation initiale et les modifications des ateliers
se trouvent en annexe 3, pour les enfants, et 4, pour les adolescents).

10
Les enfants avaient besoin, au début des ateliers, d'être canalisés par des exercices de
relaxations. En fait, les exercices de respirations utilisés étaient aussi des exercices relaxants qui
mettaient les enfants dans de bonnes conditions pour réaliser des exercices plus théâtraux – à tout le
moins je le croyais –. Afin d'impliquer les enfants dans cet exercice de début de séance, j'ai décidé
de diffuser en fond sonore, une berceuse. Cette berceuse correspondait chaque jour à une berceuse
dans la langue première d'un des enfants présents. Cette première berceuse a été une berceuse en
langue arabe. Ce fond sonore n'a pas toujours eu l'effet voulu. Lors de cette première séance,
certains enfants étaient perturbés par cette musique en langue inconnue d'eux et n'ont pas réalisé
l'exercice dans le calme escompté. Ce n'est qu'à la troisième séance que l'exercice a pu être réalisé
dans le calme et le sérieux demandé.

Il a été proposé15 aux enfants de créer une petite pièce de théâtre, simple, à présenter aux
parents le vendredi soir, à la fin de la semaine .

Suite à plusieurs échecs dans l'organisation d'une sortie au théâtre (annulation du spectacle
prévu, ou organisation en parallèle d'une activité pour les enfants au sein du CADA), une réunion
d'information s'est tenue le 10 Avril 2013 à 14h. Cette réunion a été l'occasion, pour les animatrices,
de présenter deux petites pièces de théâtre afin de montrer une partie du travail qui est effectué dans
les ateliers, et de donner l'envie aux enfants d'y participer. À cette présentation, les adultes étaient
aussi invités mais ne sont pas venus : les adultes ont identifié cette réunion comme étant à
destination des enfants.

Comme je l'ai évoqué dans la présentation de mes missions de stage (cf. supra), les enfants
éprouvent de nombreuses difficultés à l'écrit. Je me suis donc posée la question sur le travail des
compétences écrites en atelier théâtre. Par manque de temps (à mon sens, cinq ateliers théâtre ne
suffisent pas), je n'ai pas eu l'occasion de me pencher sur cette question. Je pense que la semaine
théâtre doit être une finalité : il serait plus pertinent de faire des séances de 2 heures toutes les
semaines, afin que la semaine théâtre soit consacrée à la répétition du spectacle. Des séances
espacées (6 au minimum) permettraient d'aborder plus de sujets et de travailler sur un plus grand
panel de compétences (orales et écrites). De plus, cela permettrait aux participants une meilleure
assimilation des compétences, communicatives et théâtrales, et une meilleure préparation pour un
spectacle.

15 Je reviens sur cette notion dans la partie « B.1.d. Proposer ou imposer »

11
Cette expérience m'a aussi fait comprendre qu'un groupe d'enfants d'âges différents peut
poser problème. Chacun n'a pas les mêmes sensibilités : un enfant de 6 ans n'aura pas les mêmes
centres d'intérêts qu'un enfant de 10 ans. La présence dans le groupe d'un enfant d'école maternelle
a été compliquée à gérer. En effet, cet enfant étant plus jeune, il n'avait pas les mêmes besoins et
envies que les autres. Je prends pour exemple un exercice d'improvisation effectué lors de la
quatrième séance (annexe 3) :
J'ai laissé 5 minutes à chacun pour réfléchir et préparer son intervention.
Cet enfant, le plus jeune du groupe, avait des difficultés à comprendre la situation et à
s'exprimer oralement. J'ai dû trouver une idée qui lui permette de ne pas parler (comme il éprouvait
de grandes difficultés à l'oral, du fait de son âge, le travail du langage corporel lui était plus utile 16) :
une chaîne de télévision culinaire pour sourd-muets, dans laquelle il devait mimer les actions de
cuisine.

Ainsi, je pense qu'il faudrait que tous les enfants du groupe soient dans un même cycle
scolaire : tous en école maternelle, tous en école primaire ou tous au collège.

4. Le projet d'atelier théâtre pour adultes

Au regard de la présentation du public du CADA, voici la présentation du projet théâtre pour


adultes. Les objectifs ont été élaborés à la suite d'une analyse des besoins des résidents. Cette
analyse a été effectuée à partir de la présentation du public qui m'a été faite par la référente FLE du
CADA et de lectures d'ouvrages présentant ce type de public.

Dans le but de faire découvrir le monde du théâtre et de donner un espace de liberté, le


CADA propose des ateliers théâtre à ses résidents. Ces ateliers seront l'occasion de créer un
spectacle qui sera présenté lors du Noël du CADA en Décembre 2013.

Ces ateliers ont plusieurs objectifs :


- Culturels
- faire découvrir le théâtre et inciter les résidents du CADA à aller voir des pièces de
théâtre (des places sont disponibles avec Culture du cœur) ;
16 Ce travail sur l'expression corporel peut être un préalable au travail sur l'expression orale.

12
- connaître les codes gestuels et oraux utilisés quotidiennement en France ;
- aider à l'insertion des demandeurs d'asile par le biais d'une activité culturelle ;
- avoir un espace de libre échange culturel ;

- Linguistiques
- apprendre le français par des moyens détournés ;
- mettre en pratique le français ;
- travailler l'expression orale (prononciation, intonation, prosodie) et corporelle ;
- avoir confiance dans sa capacité à parler en français ;
- savoir s'adapter à différentes situations (par le biais de l'improvisation) ;

- Personnels :
- s'autonomiser
- s'exprimer librement et s'évader du quotidien ;
- sortir pour un moment de l'état d'attente et/ou d'angoisse ;
- apprendre à gérer le stress ;
- prendre confiance en soi ;
- savoir travailler en groupe ;
- se socialiser : créer un lien social, porter un autre regard sur les autres, déconstruire
les barrières ;
- être acteur et sujet dans une dynamique de groupe ;
- découvrir l'autre et se redécouvrir soi-même ;
- retrouver une place sociale perdue (par exemple, retrouver le statut de chef de
famille)

Tous les demandeurs d'asile du CADA sont invités à participer à ces ateliers, sur inscription.
Pour avoir une certaine stabilité dans le nombre de participants, les résidents statutaires et les
résidents déboutés ne seront pas prioritaires. Les places sont limités à 10 personnes. Ce nombre
permet une meilleure gestion de groupe et un travail plus poussé avec chacun des participants.

Une réunion d'information était prévue pour présenter le travail qui peut être effectué
pendant les ateliers. Elle avait aussi pour but de montrer aux résidents que la parole n'est pas
forcément nécessaire dans l'expression théâtrale (cf. supra). Une sortie de sensibilisation du théâtre
consacrée aux adultes sera organisée par la référente FLE du CADA, qui sera l'animatrice de ces

13
ateliers.

5. Présentation rapide des contextes d'interventions précédents

a. Le CUEFEE

Durant l'année 2010-2011, j'ai participé à l'animation d'un atelier théâtre au Centre
Universitaire d'Enseignement du Français pour les Étudiants Étrangers (CUEFEE) de Tours.

C'est un centre de langue rattaché à l'université François-Rabelais de Tours qui permet à des
étudiants étrangers d'apprendre le français pour ensuite intégrer un cursus de Licence ou de Master
proposé par l'université. Généralement, ces apprenants souhaitent intégrer les filières Économie,
Droit, Informatique, et Science du Langage ou Français Langue Étrangère. Ce centre propose aussi
des cours de français pour les étudiants venus dans le cadre d'un échange ERASMUS ou d'une
convention inter-universités, dits « internationaux ».

L'atelier théâtre était prévu pour accueillir les apprenants de niveau B1 (internationaux et
Erasmus) qui le souhaitaient, et était considéré comme une Unité d'Enseignement Libre (UEL).
Chaque semaine, je devais préparer le cours suivant, que l'enseignant responsable de ce cours
validait après quelques retouches. Les séances suivaient une progression d'apprentissage du français
et de l'art théâtral. L'évaluation17 était une représentation théâtrale: quatre groupes, dans lesquels
nous avions mélangés les étudiants de différentes nationalités, devaient présenter une scénette.

b. L'université de Cân Thoʼ

Pendant l'année 2011-2012, j'ai effectué un stage au Département de Français de la Faculté


de Pédagogie de l'Université de Cân Thoʼ au Vietnam.

J'ai animé un atelier théâtre, de 20 personnes au premier semestre et de 7 personnes au


second, réunissant des étudiants des 4 années universitaires : un défi, car tous les apprenants avaient

17 Une note était donnée à chaque participant et entrait en compte dans la moyenne du semestre.

14
des niveaux de français différents. Au deuxième semestre, cet atelier était destiné à préparer les
apprenants au Concours Dynamique, organisé tous les ans par l'AUF 18, mettant en compétition le
Vietnam, le Cambodge et le Laos après une phase de sélection dans chacun des pays.

c. L'association Langues en Scène19

Langue en Scène est une association créée par Pascale de Clauzade en 2009. Après des
essais à Saint Jean de Luz, l'association s'est étendue pour proposer l'organisation d'ateliers théâtres
en langue étrangère dans les académies de Paris – Versailles et Bordeaux.

L'association est en charge de mettre en relation les enseignants demandeurs avec des
comédiens professionnels bilingues français-langue apprise par les apprenants ; et de trouver des
financements. En règle générale, les ateliers se font sur 12 semaines (18h), réparties en 1 année
scolaire ou un semestre, et donnent lieu à une représentation finale devant les autres élèves de
l'établissement et les parents.

Au cours du semestre, j'ai pu observer 2 groupes différents : une classe de CM2, apprenant
l'espagnol, et un groupe réunissant 2 classes de 6°, apprenant l'anglais. Le théâtre est ici un support
à l'enseignement, un support pour travailler l'expression orale et corporelle, et est assuré par un
comédien professionnel bilingue. Il ne donne pas lieu à la notation des participants.

6. Un outil pédagogique théâtre FLE ?

Au début de ma réflexion pour ce mémoire, j'avais pour projet de créer un parcours


d'enseignement-apprentissage du FLE qui aurait pour base le théâtre, utilisable par une personne
non experte de l'enseignement du FLE ni du théâtre. C'était un projet que je devais monter pour le
CADA de Joué-lès-Tours. Cependant, après de nombreuses lectures et une réflexion sur mes
expériences de théâtre, je me suis rendue compte qu'il est impossible de prévoir, à l'avance, un
18 Association Universitaire de la Francophonie. L'AUF est un des 5 acteurs principaux de l'Organisation
Internationale de la Francophonie, avec l'APF (Association Parlementaire de la Francophonie), TV5 Monde,
l'Université Senghor d'Alexandrie, et l'Association Internationale des maires francophones.
19 http://www.langues-en-scene.com/

15
parcours d'apprentissage complet.

En effet, un atelier-théâtre (tout comme l'apprentissage du FLE) doit s'établir sur la base des
besoins des apprenants. Or, en atelier théâtre, les besoins ne peuvent qu'être supposés à priori. Les
ateliers doivent donc être remaniés et ré-adaptés en fonction des apprenants, de l'avancée des
ateliers etc. J'ai moi même pu expérimenter cela lors de la semaine théâtre pour les enfants que j'ai
organisée et animée au cours de mon stage au CADA (annexes 3 et 4).

Il m'est avis que tout enseignement devrait se faire à partir des besoins et des envies des
apprenants. Chaque groupe d'apprenants est singulier. De même, chaque apprenant d'un groupe est
singulier. L'ajustement du parcours se fait en fonction des apprenants et est plus aisé pour un
animateur expert20 du théâtre et/ou du FLE. Je ne prétends pas être experte de l'une ou l'autre
discipline (cependant mes connaissances et compétences (balbutiantes??) dans ces domaines me
permettent peut-être d'établir plus facilement cet ajustement).

De plus, comme le remarque Gisèle PIERRA :

« La pédagogie du théâtre ne doit pas prendre le risque de devenir


mécanisée ou technicienne en imposant une manière précise d'aborder le
théâtre et créer ainsi des modèles à copier. Les techniques de base de l'acteur
doivent être intégrées de manière personnalisée au fil des phases. »
(PIERRA, 1990 : 94)

Enfin, un parcours d'enseignement-apprentissage mène indéniablement à une évaluation et


une notation dans nos sociétés actuelles. Évaluer une activité théâtrale ne va-t-il pas à l'encontre du
principe même du théâtre ? En effet, l'atelier théâtre se veut être une façon de renverser les codes
classiques en mettant l'apprenant en position d'expert et de maître de son parcours. Or, en utilisant le
théâtre comme base d'un apprentissage, ne remet-on pas alors l'enseignant en situation d'expert et de
détenteur du savoir ?

B. THÉORIES ET ANALYSES

20 Cette question de l'expertise pourrait faire l'objet d'une recherche qui n'est pas prise en compte dans ce mémoire.

16
1. Formel versus informel

L'enseignement-apprentissage par le théâtre peut être vu comme une façon détournée et


informelle d'apprendre une langue ou une discipline, au même titre que le jeu. On parle d'ailleurs de
jeu d'acteur et de jeu théâtral. Je cherche dans cette partie à montrer ce qui fait du théâtre quelque
chose d'informel, en partant de définitions et de mes propres représentations, et en m'appuyant sur
des témoignages d'enseignants qui ont l'expérience du théâtre comme appui à leur enseignement
d'une langue étrangère. Je souhaite aussi réfléchir sur la question de l'informel comme facteur
d'apprentissage.

a. Définitions

On peut caractériser de « formel » tout apprentissage se faisant à partir d'une didactique


centrée sur ce qui est à apprendre, et validé par une quelconque forme d'évaluation : « Un savoir
formel est transmis lorsque le discours didactique se centre sur des contenus spécifiques en
référence à des programmes. » (CAILLER, FROSSARD & GIROD). Je pense qu'il est aussi
possible de parler de « formel » à partir du moment où un protocole est mis en place. Le protocole
serait dans ce cas la didactisation.

Ce qui serait « informel » serait tout apprentissage par soi-même ou en dehors d'un cadre
didactique. Le caractère informel d'un apprentissage peut se manifester de nombreuses manières,
mais surtout par le jeu, le ludique, les conversations...(BROUGERE, 2007).

Une étude américaine21 a par ailleurs montré que 90 % des apprentissages se font de façon
informelle. Le meilleur moyen d'apprendre est l'action, la résolution de problèmes, l'intérêt porté à
un sujet... En me penchant sur ma propre expérience, je me rend compte qu'effectivement, j'ai
acquis la majeure partie de mes connaissances en dehors d'un cadre « didactique », ou tout au
moins, non ressenti comme tel.

Je peux citer comme exemple deux cours de français, vécus au lycée en seconde. Les

21 Morgan McCall, Robert W. Eichinger et Michael M. Lombardo du Center for Creative Leadership de l'Université
de Princeton

17
enseignantes nous ont fait sortir du cadre habituel, « vous êtes assis devant votre bureau, vous
prenez des notes, je vous transmet mon savoir », en nous menant vers une œuvre littéraire par
l'action théâtrale. Les enseignantes nous ont mis en action, nous ont fait jouer la pièce davantage
que la lire. J'ai plus appris de ces œuvres que sur les autres étudiées de façon classique en classe :
c'est une mise en jeu et en je (je suis impliquée dans l’œuvre physiquement). Je pense que cet
exemple montre que l'informel peut être un moyen efficace d'apprendre. Cet apprentissage était-il
conscient ?22

D'après Gilles BROUGERE (2007), l'informel et le formel sont deux mondes qui
s'entrecroisent en permanence. Il n'est donc pas pertinent de les penser séparément, il y a « une
interaction continuelle du formel et de l'informel en éducation. » (BROUGERE, 2007 : 5) Il me
semble que le cadre formel, ici la didactique, ne peut pas tout enseigner d'une même matière. Par
exemple, en mathématiques, l'enseignant enseigne des formules à apprendre par cœur, dans une
situation donnée. C'est ensuite à chacun d'apprendre à les utiliser dans d'autres situations. Chaque
enseignement ne peut pas regrouper toutes les situations possibles, car elles semblent infinies.

Cependant, les formations diverses ne prennent pas ou peu en compte cette dimension
d'informel dans l'apprentissage, ne la considérant pas comme valide puisque non contrôlable
(BROUGERE, 2007).

Ce qui, pour moi, définit un cadre formel, est la didactique, donc le protocole,
habituellement mis en place en salle de classe. Rien que l'espace défini salle de classe paraît induire
un enseignement-apprentissage formel. Une didactique, même si les enseignants en font des
interprétations personnelles, reste calculée. Mais il en est de même dans l'atelier théâtre.
L'enseignant/animateur cherche à atteindre un objectif bien défini : enseigner une langue étrangère
et/ou amener les apprenants vers des objectifs théâtraux. L'enseignement paraît donc formel.
L'activité théâtrale est

« une pratique consciente du point de vue de l'éducateur des effets


d'apprentissage, mais qui se limite à des interventions qui ne prennent pas la
forme éducative, qui se limitent à des conversations, des débats, des
activités ludiques. » (BROUGERE, 2007 : 7)

Cependant, en se plaçant du point de vue de l'apprenant, le cadre salle de classe implique un

22 Je reviens sur ce point dans la partie suivante.

18
apprentissage formel, guidé vers un objectif explicité par l'enseignant. Dans le cas d'un atelier
théâtre, l'apprenant va apprendre sans toujours connaître les objectifs – ou tout au moins sans les
connaître consciemment –. Dans l'activité théâtrale, utilisée comme appui à un apprentissage du
FLE, les apprenants vont avoir conscience d'apprendre des techniques théâtrales, mais pas
nécessairement d'apprendre le français. Il y a là cette « interaction continuelle du formel et de
l'informel » (BROUGERE, 2007 : 5). Ainsi, l'enseignement serait de l'ordre du formel, et
l'apprentissage de l'ordre de cette interaction.

Je parle ici du cadre salle de classe qui implique un apprentissage formel du point de vue de
l'apprenant. Mais, en réfléchissant sur mon expérience au lycée (cf.supra), je me rends compte que
ce cadre n'est pas forcément formel : cette expérience du théâtre en jeu et en je se passait dans la
salle de classe. Ainsi, ne serait-ce pas l'enseignant qui détermine un cadre formel ou informel ?

Au cours de mon raisonnement, sont apparues les notions « conscient » et « inconscient ».


Ainsi, peut-on considérer un parallélisme avec les notions « formel » et « informel ?

b. Un apprentissage inconscient ?

Le terme « conscient » est défini comme étant un acte « fait en connaissance de cause,
sciemment » (Le Larousse). L' « inconscient » est utilisé pour désigner « un acte qui se produit sans
que celui qui le fait en ait conscience » (Le Larousse).

L'enseignant, en rendant son enseignement formel, a conscience des enjeux et des objectifs
qu'il veut atteindre : il prépare un parcours d'enseignement-apprentissage « en connaissance de
cause » (Le Larousse). L'apprenant, lui, reçoit des consignes, des propositions, sans avoir
conscience de tous les enjeux. Ainsi, dans mon expérience de lycée (cf. supra), je pense que le
conscient et l'inconscient se sont mêlés, de même que le formel et l'informel.

La pratique du théâtre, dans le cadre de l'apprentissage d'une langue, amènerait des


apprentissages non ressentis comme tels par l'apprenant, donc inconscients. Par exemple, le théâtre
procure à l'apprenant un enrichissement de son vocabulaire en langue étrangère, non négligeable,
malgré lui. Ceci m'a été confirmé par une enseignante lors de l'observation d'un atelier théâtre en
anglais : elle a constaté que ses apprenants avaient de meilleures capacités à l'oral, tant sur le plan

19
de la prononciation, de la prosodie que sur les questions grammaticales et lexicales.

L'inconscient est-il un facteur d'apprentissage ? Faudrait-il forcément rendre un


apprentissage conscient ? Faudrait-il présenter un atelier-théâtre comme un lieu d'apprentissage ou
comme un loisir aux futurs participants ?

Un atelier théâtre en langue étrangère me semble être un lieu d'apprentissage de la langue


non conscientisé par les apprenants. Ils ne savent pas toujours qu'ils vont enrichir leur vocabulaire,
qu'ils vont apprendre de nouvelles façons de parler, de nouvelles expressions....mais ils en prennent
conscience au fur et à mesure des ateliers. Je pense donc qu'il n'est pas nécessaire de préciser aux
apprenants qu'ils sont en situation d'apprentissage, et qu'il est préférable pour l'enseignant/animateur
de présenter les ateliers théâtre comme une activité ludique (donc informel).

Le processus d'apprentissage est conditionné par

« l'apprenant et la situation, celle-ci comprenant l'enseignant, la


classe, et la communauté environnante.

C'est cette dernière définition qui semble le mieux correspondre à


la réalité de la pratique théâtrale.

En effet, la situation représente des sources d'apprentissage


multiples : apprenants entre eux, apprenants-enseignant, apprenants et
rapport à l’œuvre, apprenants et rapport à la société. » (PIERRA, 1990 : 70)

Mais je tiens à préciser, même si c'est hors du propos de cet écrit, que le monde extérieur à
la classe semble aussi être un lieu où le processus d'apprentissage est actif.

Christine PAGE considère qu'il « n'est pas question de prendre le jeu dramatique comme un
outil d'apprentissage, ni comme un moyen mais comme le choix libre d'un mode d'expression. »
(PAGE, 2009 : 115) Or, ne sommes-nous pas en apprentissage constant de ce qui nous entoure ? Ne
pouvons-nous pas considérer que tout est apprentissage conscient et/ou inconscient ? N'apprenons-
nous pas de stimuli extérieurs ? Je pense, comme Jean-Pierre RYNGAERT, que le théâtre est un
outil d'apprentissage, un « lieu d'élaboration « d'un discours personnel » » (citation in PAGE, 2009 :
115). De plus, le théâtre permet à l'apprenant de se mettre dans des situations proches de la réalité,
et lui permet d'essayer, sans avoir peur des conséquences et sans risques (RYNGAERT, 1996). Faire

20
du théâtre un outil d'apprentissage ne me semble donc pas incompatible avec la liberté donnée par
le jeu théâtral.

Le théâtre en tant qu'outil d'apprentissage ne serait-il pas considéré comme tel uniquement
par l'enseignant/animateur ? Les apprenants vont-ils le ressentir de la même façon que
l'enseignant/animateur ? Je pense que cela va dépendre de l'enseignant et de son approche de
l'atelier théâtre.

c. Un changement de rapport enseignant-apprenant et apprenant-atelier

Dans un cours de FLE, l'enseignant est un modèle et le détenteur du savoir : il est le


spécialiste de la langue qu'il faut suivre et croire sur parole.

L'atelier théâtre me semble être un espace dans lequel l'apprenant peut devenir le
spécialiste : il est l'acteur principal de son apprentissage, le chercheur, et le développeur de ses
capacités. Ici, l'enseignant ne serait pas le détenteur du savoir : il ne fait que participer à l'atelier, au
même titre que les apprenants, même s'il en est l'animateur. De même, si l'enseignant peut contrôler
et diriger les paroles d'un apprenant dans un cours de FLE, il me semble qu'il ne peut le faire que
très partiellement avec le corps de ce dernier. En effet, l'enseignant pose un modèle, de phrase par
exemple, et corrige l'apprenant jusqu'à ce que ce dernier reproduise fidèlement le modèle. Mais il
me paraît plus difficile de le faire avec le corps de l'apprenant : l'enseignant peut montrer un
modèle, mais il ne peut pas manipuler l'apprenant comme une marionnette pour qu'il reproduise le
modèle fidèlement. L'enseignant devrait donc se placer et être vu comme accompagnateur dans le
cadre d'un atelier théâtre.

L'enseignant sera vu par les apprenants comme un égal, à condition que l'enseignant accepte
de se mettre au même niveau que ses apprenants, et de jouer avec eux. Puisqu'il participe lui aussi à
l'atelier, qu'il soit animateur ou non, il devrait accepter et préciser à ses apprenants qu'il peut lui
aussi « trébucher » dans son texte ou dans sa gestuelle, son expressivité, etc23. Cela participerait
aussi au changement de rapport entre l'enseignant et les apprenants.

23 Il m'est avis qu'il doit aussi le faire dans le cadre d'un cours de FLE : il en sait davantage sur la langue que les
apprenants, mais il peut lui aussi ne pas savoir répondre instantanément et devoir rechercher la réponse.

21
De même, l'attitude de l'enseignant envers l'atelier théâtre déterminera le rapport de
l'apprenant envers ce dernier. Au cours d'un atelier théâtre, l'implication de l'enseignant doit être
totale. Même s'il s'agit d'ateliers organisés conjointement entre l'enseignant et un comédien
professionnel (comme c'est le cas pour l'association Langues en Scène) : le comédien est
l'animateur, l'enseignant doit s'impliquer physiquement, ne pas être un figurant mais aussi un acteur.
Voici 2 exemples pour illustrer mon propos, vécus dans le cadre de Langues en Scène.

• Un atelier théâtre en espagnol, classe de CM2 (25 élèves), une séance d'1h30 toutes
les deux semaines.
Les élèves ne paraissaient pas très impliqués dans le projet, des rivalités et des tensions sont
apparues, et l'ambiance générale n'était pas à l'écoute mais au chahut. Après discussion avec la
directrice de Langue en Scène, il s'avère qu'une telle situation est récurrente lorsque l'enseignant
refuse de s'impliquer dans le jeu et de se mettre au même niveau que ses élèves. Ici, l'enseignante
était présente uniquement pour imposer une discipline, elle ne participait pas à l'atelier. Elle ne
s'impliquait pas non plus en dehors du temps des ateliers théâtres : il n'y a eu aucun travail sur le
texte de la pièce en dehors des ateliers, malgré les demandes de la comédienne qui animait cet
atelier. Les enfants n'étaient donc pas prêts pour les séances de théâtre. Il en résultait un travail
supplémentaire pour la comédienne et une fatigue improductive pour les élèves.

• Un atelier théâtre en anglais, deux classes de 6° (36 collégiens), une séance de 2h


toutes les semaines.
Les collégiens étaient très attentifs aux demandes du comédien et des enseignantes. Malgré
quelques chahuts intempestifs, les collégiens se calmaient très rapidement après un recadrage de la
part du comédien ou des enseignantes. La plupart des collégiens connaissaient déjà leur texte, après
seulement 3 séances. Les enseignantes participaient activement aux côtés de leurs apprenants, en
jouant les scènes avec eux, en les aidant à répéter leur texte, les intonations, etc. Les collégiens
étaient très actifs dans ces ateliers, faisaient des propositions, et étaient très impliqués dans le projet.
De même, un travail régulier sur la pièce était effectué pendant les temps de classe.

Ces deux exemples montrent bien que l'attitude de l'enseignante modifie le comportement
des apprenants envers l'animateur et l'atelier théâtre. De plus, l'investissement de l'enseignant et son
changement de statut vont entraîner une implication plus grande des apprenants.

Le renversement du rapport enseignant-apprenant permet aux apprenants d'éprouver du

22
plaisir à la tâche, source d'apprentissage et de dépassement des difficultés lesquels sont alors plus
effectifs qu'un apprentissage passif tel que pratiqué dans l'enseignement traditionnel (PIERRA,
1990). Il permet à l'apprenant de « se rendre compte qu'il travaille pour lui et non pour le
professeur. » (PIERRA, 1990 : 66)

Ce plaisir à la tâche serait-il aussi provoqué par un renversement de la tradition de la


consigne au profit de la proposition ?

d. Proposer ou imposer ?

Tout d'abord, les ateliers théâtres devraient-ils être imposés à tout un groupe-classe ou bien
proposés, sur une base de volontariat ? Dans le cas d'un contexte semblable au CADA, il me semble
logique que les ateliers théâtres soient proposés afin que chacun soit libre de participer ou non à
l'atelier, en fonction de ses envies et sensibilités. Mais dans le cas d'un groupe-classe de FLE, ou
d'une classe d'enfants, serait-il pertinent de les imposer à tous ou bien de rester sur la base d'une
proposition ? Cette question est aussi une des raisons pour lesquelles j'ai abandonné mon projet d'un
parcours d'enseignement-apprentissage FLE sur la base du théâtre (l'outil que je souhaitais créer
avec ce mémoire) : je ne suis pas sûre qu'il soit opportun d'imposer le théâtre à des apprenants, ils
n'y trouveraient pas tous leur compte et n'éprouveraient pas tous un plaisir, ce qui est, je pense, la
source d'un apprentissage plus effectif.

Proposer ou imposer est une question qui se situe aussi au sein même des ateliers théâtre.

Les cours traditionnels s'appuient sur des consignes. L'enseignant demande à l'apprenant de
réaliser une tâche imposée, pour l'amener à travailler sur telle ou telle connaissance ou compétence.
Je pense qu'il ne cherche pas, la plupart du temps, à faire réfléchir l'apprenant par lui-même, il lui
demande d'exécuter une tâche selon un modèle pré-défini.

À l'inverse, la proposition « interpelle l'enfant, l'élève, la personne en formation en tant que


sujet de son acte et ne pose pas d'obligation autre que celle qu'il se donne à lui-même. » (PAGE,
2009 : 100). La proposition laisse donc la place au participant de l'interpréter et de proposer en
retour.

23
Cependant, comment conduire les participants vers un travail des compétences voulues par
l'animateur ? Car il s'agit, dans l'apprentissage d'une langue étrangère, de travailler sur des
compétences d'expressions concrètes. Les consignes ne restent-elles pas nécessaires pour les
exercices ?

Lors de ma mission de semaine théâtre pour les enfants du CADA, j'ai commencé par
proposer aux enfants de faire ce qu'ils voulaient pour le spectacle du vendredi, je leur ai demandé de
réfléchir, à partir de sujets que nous avons trouvés ensemble, à un spectacle. La proposition n'a pas
donnée lieu au résultat attendu : les enfants n'ont pas réfléchis aux personnages et à ce qui pourrait
être joué. Il m'a donc fallut imposer un spectacle qui utilise l'improvisation semi-dirigée (ou semi
improvisation) et des personnages (qui sont-ils, quel est leur caractère...). La pièce était inspirée de
l'émission La France a un incroyable talent. Les situations et les possibilités données par ce type
d'émissions sont multiples. Avec la co-animatrice, nous avons réfléchi sur les personnages à
proposer, avec un choix suffisamment large pour que les enfants puissent choisir. Le fait d'imposer
subrepticement le personnage à chacun a finalement été judicieux. Même si les personnages et les
situations étaient définies à l'avance, les enfants avaient une certaine liberté dans le dialogue, et la
latitude d'ajouter ou de retirer des éléments pré-définis, en accord avec les autres participants. Je
jouais le rôle du jury et présentateur de l'émission, la co-animatrice était le vigile chargé de faire
entrer et sortir les personnages. La maîtrise de la pièce s'est faite en coordination entre les
animatrices et les enfants, chacun répondant à l'autre en fonction des actions.

Le fait d'imposer une pièce a permis aux enfants d'être moins perdus, et semblaient ravis que
je leur donne ces consignes. La plupart ont accepté les rôles proposés, quant aux autres, je leur ai
laissé plusieurs choix. Ceci a induit chez eux un sentiment de responsabilité vis-à-vis de leur
personnage.

De même, pour cette même semaine avec les adolescents, les propositions semblaient les
perdre. Ils m'ont demandé à plusieurs reprises des consignes directives. Pour le spectacle, ils m'ont
d'ailleurs demandé de leur donner un texte à apprendre. Lors de la première séance, je leur ai
proposé des improvisations, dans lesquelles ils étaient libres de choisir la situation et les
personnages à partir d'un thème. Malgré mes incitations pour leur laisser une certaine liberté, il
m'ont demandé de leur donner des directives dans l'improvisation. Est-ce dû à un manque de
confiance en eux ou tout simplement à mes explications peu claires quant à la méthode de
préparation d'une improvisation ?

24
Cette expérience m'a fait comprendre qu'il faut garder une part de consigne dans la
proposition. La proposition peut se faire sur la situation à jouer, la pièce à présenter, les
personnages, de façon semi-directive. Je pense qu'il faudrait du temps pour que la proposition soit
acceptée et prise comme telle par les apprenants, dans l'accomplissement d'une tâche. En effet, la
tradition éducative semble faire de la consigne un pilier de l'enseignement. Il est donc difficile pour
les apprenants (et même les adultes qui sont sortis du cadre éducatif) de sortir de cette tradition.

Cependant, la consigne peut mener vers un refus de jouer24. Toujours lors de la semaine
théâtre avec les enfants du CADA, pendant la représentation, une des enfants a refusé de jouer son
rôle prédéfini, et a renversé la situation. Elle devait jouer le rôle d'une personne qui ne voulait pas
être là, qui semblait malheureuse. Elle est rentrée l'air joyeux, a joué de façon à être « sélectionnée »
pour la suite de l'aventure. Avant la représentation devant les parents, elle m'avait fait comprendre
que son rôle ne lui convenait pas. Après discussion et ré-explication de la situation (le comique dû à
l'incompétence de quasiment toutes les personnes participant au concours) elle semblait prête à
suivre la règle de son personnage. Ce changement de jeu est-il à considérer en raison de son manque
d'intérêt pour le personnage ou bien à cause de son envie de se montrer sous son meilleur jour
devant ses parents ? Elle ne voulait peut-être pas se montrer en situation d'échec face à ses parents.
À l'issue du spectacle, n'ayant pas eu le temps de discuter avec les enfants de la semaine et de la
représentation, je n'ai pas pu le lui demander.

Le refus de jouer et/ou de respecter les règles préalablement définies doit faire l'objet d'une
discussion avec le participant qui a transgressé les règles pour en comprendre la raison (PAGE,
2009). Par manque de temps après la représentation devant le public, je n'ai pas pu mettre en place
cette discussion.

Mais le refus de jouer ne fait-il pas partie de la liberté du participant ? Il peut poser
problème pour l'animateur, et les autres participants, il est souvent mal perçu. Si j'autorise le refus,
je ne sais pas si je peux compter sur tous les participants dans le cas d'activités proposées qui
demande un nombre défini de participants par groupe. Mais je pense que ne pas autoriser le refus
fait perdre sa valeur à l'atelier théâtre qui se veut un espace de liberté : « on est libre ici, alors
pourquoi on ne peut pas refuser de jouer ce qu'on ne veut pas jouer ? On n'est pas censé être jugé
ou noté » peuvent être des remarques venant des participants. À cela, l'enseignant/animateur peut

24 Le théâtre serait un espace de liberté donc pourquoi imposer ?

25
répondre qu'ils ont accepté de participer à cet atelier, qu'ils sont libres dans un champ défini qu'ils se
sont engagés à respecter de façon tacite. Mais n'est-ce pas là encore une façon de limiter une liberté
que devrait être instaurée dans un atelier théâtre ? Quoiqu'il en soit, une discussion entre les
participants est, je pense, nécessaire pour délimiter cet espace de liberté, et pour comprendre le
pourquoi du refus d'un joueur à se mettre dans certaines situations.

2. Un travail sur l'expression orale et le non-dit

« Le processus d'acquisition est réalisé par


l'expression elle-même, délivrée de la peur des
fautes grâce à la liberté des échanges »
(PIERRA, 1990 : 15)

C'est un fait, dans les dernières approches didactiques d'enseignement du FLE, l'oral est
considéré comme un facteur important de l'apprentissage (Cadre Européen Commun de Référence
pour les Langues – noté CECRL par la suite). Ainsi ont été développées les approches
communicative et actionnelle. Dans la première approche, l'accent est mis sur la communication
dite « contextualisée », c'est-à-dire que les situations de communication sont inspirées de situations
réelles que peuvent rencontrer les apprenants. L'approche actionnelle s'appuie sur un apprentissage
par l'action : il faut agir pour apprendre ; cette démarche s'appuie sur des projets à réaliser.

Le théâtre peut être inclus dans cette démarche par l'action. En effet, le théâtre mènerait vers
une production réelle de la parole/communication en incluant toutes ses dimensions verbales et non-
verbales : sémantique, phonétique, prosodie, gestuelle... Les apprenants sont amenés à
communiquer entre eux dans la langue d'apprentissage (pour décider de la mise en scène, en
écrivant un texte à jouer ou en improvisant par exemple).

La communication en théâtre se fait sur plusieurs plans : acteur-acteur, acteur-metteur en


scène, acteur-spectateur (PIERRA, 1990). Ce dernier plan est souvent critiqué, car la
communication implique une interaction entre un locuteur, un message et un récepteur qui

26
deviendra à son tour locuteur transformant le locuteur initial en récepteur. Le spectateur est
généralement vu comme un récepteur du message, sans qu'il devienne locuteur. Cependant, le
spectateur est aussi, en quelque sorte, locuteur puisqu'il renvoie des émotions, des impressions
perceptibles par l'acteur/locuteur (PIERRA, 1990). L'utilisation même d'une langue ou d'un langage
peut être considérée comme une forme de communication :

« Pour certains chercheurs le théâtre constitue même l'art et le


prototype de la communication humaine : « ce qui est exclusivement
spécifique du théâtre, c'est qu'il représente son objet, la communication
humaine par la communication humaine : au théâtre la communication
humaine (la communication des personnages) est alors représentée par la
communication humaine elle-même, par la communication des acteurs »
(Patrice PAVIS, Dictionnaire du théâtre, Messidor, Paris, éditions Sociales,
1987, p.88).

Si l'on considère le sens de représentation tel que supposé supra, on


peut dire que la représentation de la communication est aussi
communication puisqu'elle transmet le retour en présence des émotions
communiquées par la langue en situation. » (PIERRA, 1990 : 54) (souligné
par l'auteure)

a. Une liberté d'expression

Dans un enseignement classique de langue étrangère, l'apprenant semble souvent forcé à


parler ce qui peut parfois provoquer des blocages chez certains apprenants. Lorsque les apprenants
restent muets, je leurs en demande la raison, à la fin des cours. Le blocage est souvent dû à
l'angoisse, la peur de faire des « erreurs »25, qui seront reprises par l'enseignant et notées26 par
certains apprenants du même groupe-classe.

De plus, en cours de langue classique, « l'impossibilité de mettre en place, par des situations
données, l'emploi effectif de la langue à travers un vécu, entraîne la fixation au stade abstrait de
l'usage : on sait beaucoup de choses mais on en peut rien exprimer » (PIERRA, 1990 : 26).

25 Bien que couramment utilisé, je mets ce terme entre guillemets car il ne me convient pas totalement, de même que
le terme de « faute ». En effet, je considère que « faute » et « erreur » sont des termes très fort, trop négatifs.
L'apprenant est encore en cours d'apprentissage, il est donc normal qu'il tâtonne ou trébuche dans ses productions
verbales.
26 Par « notées » j'entends « gardées en mémoire » ou « remarquées ».

27
Je pense qu'il est alors possible de parler d'une parole bridée, aussi bien sur un plan
personnel que sur un plan situationnel27. C'est sur ce point que l'activité théâtrale peut agir pour
libérer la parole de l'apprenant et lui permettre de travailler plus efficacement sur ses compétences
orales.

Lors de l'atelier théâtre, la parole est libre de toute contrainte : il entraîne une « situation de
jeu où l'étudiant peut parler sans crainte de sanctions, au cours d'improvisations ou d'exercices
divers » (PIERRA, 1990 : 91) et « doit être le lieu où il ne faut pas avoir peur de se tromper,
d'essayer et recommencer. » (BALAZARD & GENTET-RAVASCO, 2003 : 27). Ainsi, si
l'apprenant ne veut pas parler, il n'y est pas obligé. L'animateur peut encourager les participants à
s'exprimer, en indiquant clairement que les « erreurs » ne sont pas interdites, qu'ils ont le droit
d'hésiter dans leurs productions orales. Il devrait donc être annoncé clairement au début des ateliers
par l'enseignant/animateur, que les productions orales des apprenants ne feront pas l'objet d'une
notation quelconque, et qu'elles ne seront pas reprises ou corrigées par l'enseignant/animateur –
mais elles peuvent l'être par les autres apprenants de façon spontanée –. Les « erreurs » pourraient
faire l'objet d'une correction ultérieure pendant un cours de FLE.

Ainsi, il me semble qu'un atelier théâtre devrait être mis en place en complément d'un cours
FLE, et ne pas être considéré comme un cours. C'est là encore une des raisons pour lesquelles j'ai
abandonné le projet d'un parcours d'enseignement-apprentissage du FLE avec pour base le théâtre28.

Il m'est avis que, les apprenants, libérés des contraintes d'expression qu'ils rencontrent en
cours de FLE, osent parler, osent faire des « erreurs ». De plus, le travail collectif et la prise en main
par les apprenants d'un projet, sans que l'enseignant soit le détenteur du savoir et le directeur de la
pensée, permet de dépasser plus facilement les difficultés.

Dans le cas de groupes d'apprenants venant de cultures différentes, les échanges devraient
obligatoirement se faire dans la langue cible, pour permettre de réaliser le projet, pour les échanges
d'idées, les improvisations, l'écriture d'une pièce à jouer devant un public... Pour se faire
comprendre et partager leurs idées, les apprenants utilisent alors l'expression orale et corporelle.
L'enseignant viendrait en appui dans le cas où ils rencontrent ce type de difficultés. Ainsi, étant
maîtres de leurs paroles, les apprenants oseraient s'exprimer :

27 Toutes les situations de communication ne peuvent être abordées en cours de FLE.


28 Cf. la partie « A. 6. Un outil pédagogique théâtre FLE ? »

28
« La désinhibition comportementale et langagière est obtenue
rapidement dans une atmosphère où concentration et jeu cohabitent et où la
parole est encouragée en dépit de ses hésitations et de ses imperfections. »
(PIERRA, 1990 : 50)

L'appel à la créativité des apprenants est aussi une source de libération de la parole :

« Ce sont (…) les situations qui doivent entraîner la libération de


parole de l'élève pour que le sens de l'échange langagier soit réel et
l'implique au niveau de son désir et de la révélation de lui-même.

Dans l'espace du théâtre, le jeu, qui n'a pas la langue pour finalité
mais la réalisation d'une œuvre collective, permet cette désinhibition,
acceptation de soi et des autres, dans le contexte d'improvisations et
d'exercices multiples où les étudiants sont en contact sans qu'il y ait de
finalité linguistique propre à réduire l'activité créative à un formalisme quel
qu'il soit. » (PIERRA, 1990 : 89)

L'utilisation de l'improvisation permet une certaine liberté d'expression. L'expression ne


passe pas uniquement par la parole, elle peut se faire par différents moyens, laissés au choix et à
l'imagination de chacun. L'improvisation « est le lieu de la découverte, de la liberté, elle nous
permet de mettre en action nos questionnements sur nous-mêmes et sur le monde. Il s'agit de laisser
éclore notre imaginaire » (MEIRIEU, 2002 : 15) (en gras dans le texte).

De plus, même si l'improvisation part d'une situation ou de personnages donnés, les


participants sont libres de définir les dialogues et de mener vers une situation finale.
L'improvisation permettrait un travail avec les autres29, de travailler vers une interaction spontanée
et un échange culturel, qu'il est, ce me semble, difficile d'avoir dans un apprentissage FLE
classique.

D'après Gisèle PIERRA (2001), le texte permet à l'apprenant de FLE de dépasser des
blocages qui apparaissent lors d'une parole libre sans support. Ainsi, le texte permettrait à
l'apprenant de passer à « un niveau expressif supérieur et plus affirmé aux yeux de tous, et surtout à
ses propres yeux » (PIERRA, 2001 : 113). Le texte joue alors, lui aussi, un rôle de masque derrière
lequel l'apprenant s'affirme. Donc, le texte rassure un apprenant de FLE. D'autant plus que le texte,
29 Je reviens plus en détail sur ce point dans la partie 4. « Le théâtre : un outil pour se reconnaître et être reconnu ? »

29
de part la tradition pédagogique et scolaire, semble être un outil représentant la quintessence, un
niveau bien supérieur et plus sérieux que la parole et le soi. Je pense que le texte est plus un facteur
d'inhibition de la personne, même si, je dois accepter ce fait, il la rassure et peut engager l'apprenant
vers un travail sans le texte dans lequel il entrera avec plus de confiance et lui permettra de
s'exprimer sans support.

Une expérience menée par Gisèle PIERRA (1990) montre que le travail à partir d'un texte
serait bénéfique dans l'apprentissage d'une langue étrangère. Avec d'autres enseignants, elle a
effectué un travail du FLE avec des groupes d'apprenants de nationalités diverses, par des ateliers
théâtres :

« On constate en fin de parcours que l'expression de la parole


individuelle est plus précise et plus pertinente et que la prononciation a été
améliorée grâce au travail de répétition intensive du texte. Les étudiants
passent de l'incompréhensibilité du départ à une qualité globale de la diction
acceptable pour un public francophone au bout des douze semaines de
travail. » (PIERRA, 1990 : 50)

Ainsi, le théâtre permettait aussi à l'apprenant d'améliorer sa prononciation.

b. Le travail sur la prononciation

Les apprenants se trouvent souvent en difficulté lorsqu'il s'agit de produire les sons dans la
langue cible. D'autant plus lorsqu'il s'agit d'apprenants qui découvrent un nouveau système
phonétique, éloigné de celui de leur(s) langue(s) première(s) 30. Je prends en exemple ma propre
expérience d'apprentissage du vietnamien. Il m'est très difficile de pouvoir communiquer dans cette
langue car une association de phonèmes identiques ou très proches, prononcée de différentes
manières n'a pas la même signification. De plus, de nombreux phonèmes vietnamiens n'existent pas
en français. Pendant mes cours de vietnamien, l'enseignant me faisait répéter les sons jusqu'à ce que
je parvienne au « bon résultat », mais une fois le cours fini, je ne parvenais plus à reproduire ces
sons. Je me suis donc posée la question quant aux difficultés de mes apprenants vietnamiens à
produire les sons français. J'ai organisé et animé un atelier théâtre avec quelques étudiants
vietnamiens qui avaient des difficultés dans l'apprentissage du français. Au fur et à mesure de

30 L'utilisation des termes « langue maternelle », « langue première », « langue seconde » a souvent été débattue, et je
ne souhaite pas, dans ce mémoire, m'étendre sur ce sujet.

30
l'avancée des ateliers, je me suis rendue compte que ces étudiants éprouvaient de moins en moins de
difficultés dans la prononciation, même en dehors des heures de cours et de théâtre. Le résultat n'est
pas immédiat et demande un certain temps avant d'en voir les effets.

Un travail sur l'articulation des sons me semble être la première étape : si ma bouche reste à
moitié close, mon interlocuteur aura du mal à distinguer les mots que je produis. Les vire-langues et
les trompe-oreilles31 (annexe 5) sont des phrases très utilisées dans les cours de prononciation en
FLE. Mais sont-ils efficaces si on ne les couple pas avec d'autres outils ? En effet, répéter des vire-
langues seuls ne suffirait pas. Malgré leur attrait ludique, ils sont parfois perçus par les apprenants
comme une tâche ardue à accomplir. C'est pourquoi, l'ajout d'un niveau supplémentaire dans ces
exercices serait intéressante. Ce niveau peut être un ajout de difficulté dans la prononciation (dire la
phrase en tirant la langue, avec un stylo en travers de la bouche...), ou une règle pour trouver un
partenaire de jeu. Il existe de multiples façons d'utiliser les vire-langues et trompe-oreilles de façon
amusante et moins rébarbative.

Après l'articulation, vient la portée de la voix : si je murmure, j'articule moins, donc ma


prononciation est moins assurée. Plus la voix est forte et assurée, plus la prononciation viendra
facilement. Pour faire porter la voix, il semble nécessaire de savoir gérer sa respiration. Pour
travailler sur ces aspects, l'enseignent-animateur peut utiliser des exercices pratiqués en chant tels
que des exercices de respiration, de relaxation des muscles concourants à la production du son
(diaphragme, mâchoire, nez...), des exercices dans lesquels les participants doivent se faire entendre
par un interlocuteur pendant qu'un autre groupe fait du bruit... Dans la semaine théâtre à destination
des enfants du CADA, j'ai utilisé ces exercices de respiration comme première activité à chaque
séance. En plus du travail sur les muscles utilisés pour la production d'un son, ces exercices ont
permis de canaliser l'énergie des enfants.

Les échanges entre apprenants permettraient aussi de travailler la prononciation. Si la règle


selon laquelle les apprenants doivent communiquer uniquement dans la langue cible est posée dès le
départ, ils devront parvenir à se faire comprendre et pratiquer la langue cible dans leurs échanges.

Une fois ce travail sur la prononciation effectuée, l'enseignent/animateur peut amener les
participants vers un travail sur la prosodie, qui me semble être d'une grande importance dans

31 Les vire-langues et les trompe-oreilles sont des phrases comprenant des allitérations et des assonances qui les
rendent difficiles à prononcer et/ou à comprendre.

31
l'expression orale.

c. La prosodie en langue étrangère

Il est souvent difficile d'exprimer une émotion dans une langue étrangère. De nombreux
témoignages montrent que des personnes qui ont pour langue(s) première(s) une (des) langue(s)
différente(s) de celle qu'elles doivent utiliser dans leur vie quotidienne s'expriment dans leur(s)
langue(s) quand elles se mettent en colère, par exemple.

Je ne cherche pas, dans le théâtre, à les empêcher d'agir ainsi mais bien plutôt de faire
comprendre aux apprenants que l'expression des émotions est une part culturelle importante dans la
langue cible. En effet, je pense que je montre constamment mon état d'esprit par mes émotions
transcrites en mots et en gestes32. Il m'est souvent utile de faire comprendre à mon interlocuteur ce
que je ressens quand je parle de quelque chose. Par exemple, la phrase « tu as un beau chapeau »
prononcée de manières différentes (chaleureuse d'une part, ironique d'autre part) ne sera pas
comprise de la même façon par l'interlocuteur : il se sentira soit heureux, soit frustré. La prosodie
peut donc éviter de nombreux quiproquos et incompréhensions.

Dans l'atelier théâtre, l'apprenant est d'abord invité à utiliser la prosodie dans sa/ses
langue(s) première(s). Une discussion avec les autres apprenants (surtout s'ils sont de nationalités
différentes) permettrait de visualiser les différences entre les cultures, les différentes façons de
s'exprimer. L'enseignant/animateur peut s'appuyer sur cette discussion pour mener les apprenants
vers l'expression des sentiments en langue cible.

Là encore, de nombreux exercices sont possibles. Il semble cependant important pour les
apprenants d'avoir un modèle. Pour éviter les imitations, il est possible de montrer des dessins
représentant un visage qui produit chaque émotion que l'animateur souhaite faire travailler (annexe
6). Les apprenants auront chacun une interprétation différente de ce visage dessiné et produiront
eux-mêmes ce qu'ils auront compris. Ils n'imiteront pas l'enseignant/animateur. Cette technique
laisse la liberté aux apprenants de faire ce qu'ils ont envie de faire (contrairement aux cours de
langues lors desquels il est demandé aux apprenants de reproduire ce que l'enseignant fait). C'est
ainsi un encouragement fait envers les apprenants, afin qu'ils laissent libre cours à leur imagination.
32 Je reviendrai en détail sur l'expression en gestes dans la partie suivante.

32
Le travail sur cet aspect de l'expression orale pourrait aussi se faire à partir d'un écrit. En
fonction du niveau des apprenants, les participants (incluant l'enseignant/animateur) peuvent jouer33
avec un texte, en modifiant l'intention portée par ce dernier, en le changeant, le découpant, lui
mettant une ponctuation différente... Ils peuvent aussi jouer avec la signification des mots, les
détourner de leur signification première en modifiant la prosodie. Ceci semble difficile à réaliser
pour des apprenants en dessous du niveau B1, ou en utilisant le vocabulaire limité qu'ils
connaissent.

De même, les onomatopées sont différentes d'une langue à l'autre. Ces mots formés par
harmonie imitative (comme « crac »34, « boum » par exemple) changent en fonction des langues.
Dans la plupart des langues, les onomatopées n'ont pas de grande valeur lexicale, et ne sont que
rarement utilisées (sauf dans les bandes dessinées). Cependant, dans d'autres langues, ces
onomatopées font parties du champ lexical courant, et sont usitées quotidiennement. Par exemple,
en japonais, ces dernières sont utilisées couramment, que ce soit dans une conversation informelle
ou formelle. Dans ce cas, il est important pour les apprenants de japonais de les apprendre, les
connaître et savoir les utiliser. L'atelier théâtre ne serait-il pas alors un bon outil pour aider ces
apprenants ?

Dans une langue, l'expression orale est-elle suffisante pour communiquer ? La dimension du
corps n'est-elle pas aussi à prendre en compte ? Je souhaite maintenant réfléchir sur ce point.

3. Le geste et la gestuelle

« Le jeu scénique repose sur cette vocation


qu'a le théâtre de destiner son langage de
gestes et de paroles mêlés au public dont la
réceptivité conditionne le sens profond de

33 Jouer doit être ici prit dans un sens d'amusement plutôt que de récitation théâtrale.
34 L'onomatopée « crac » est à l'origine du verbe « craquer » (Le Larousse)

33
l'interprétation réalisée. » (PIERRA, 1990 :
124)

Je souhaite dans cette partie travailler sur deux problématiques différentes concernant le
geste et la gestuelle : quelle est l'importance35 de la gestuelle dans l'utilisation de la langue, dans la
communication ; et, quelle est l'importance du geste dans l'apprentissage de la langue. Ces deux
problématiques seront traitées simultanément car il me semble que l'une appelle l'autre.

a. Définitions

Tout d'abord, je souhaite revenir sur les définitions données par Le Petit Larousse36. Le geste
est défini comme étant le « mouvement du corps, principalement de la main, des bras, de la tête,
porteur ou non de signification. » Cette définition me paraît incomplète, dans le sens où les gestes
peuvent aussi être effectués par le bassin, les jambes, le cou... Elle omet que le corps forme un tout,
et que, dans une communication, tout le corps est mis à contribution, tout le corps produit des
gestes, perceptibles ou non (PAVELIN, 2002). Je souhaite donc retirer de cette définition la
distinction donnée pour les parties du corps et garder : « mouvement du corps porteur ou non de
signification. »

La gestuelle est définie comme étant ce « qui concerne les gestes ; qui se fait avec les
gestes » ou encore la « façon de se mouvoir, de s'exprimer corporellement caractéristique d'un
acteur ou d'un style de jeu » (Le Larousse) (je mets en évidence). Ici, les notions d'acteur et
d'expression corporelle me paraissent importantes à souligner puisqu'il s'agit de mon propos. Cette
définition permet d'inclure dans la gestuelle la posture du corps, les mimiques et les gestes. Ainsi,
« gestuelle » et « corporel » me semblent être des synonymes, à cela près que la gestuelle paraîtrait
plus spécifique à une partie du corps que le corporel.

b. « non dit » versus « non verbal »

35 Par « importance » j'entends « le degré d'importance », pouvant aller d' « inutile » à « très utile ».
36 Le Petit Larousse Illustré, 2001

34
Je souhaite ici, dans un premier temps, faire une distinction entre le « non-dit » et le « non
verbal ». Lorsque j'entends le terme « non dit », il me renvoie à des sentiments transcrits par la voix,
mais pas forcément par la parole37. Quant au terme « non verbal », il me renvoie à la gestuelle, à
l'expression corporelle, à tout ce qui ne fait pas appel à l'appareil phonatoire.

Je fais, dans cet écrit, une distinction entre les différents outils qui composent les modes de
communication, mais il va sans dire que tous ces outils sont reliés et qu'ils s'appellent les uns les
autres : il faut « considérer l'acte de langage comme le résultat du fonctionnement complémentaire
et synergique de différentes modalités langagières. » (PAVELIN, 2002 : 11).

Il est nécessaire aussi de penser que ces outils peuvent être conscients ou inconscients : je ne
transcris pas forcément consciemment mon état d'esprit, et, de même, l'interlocuteur ne va pas
toujours décrypter consciemment les signes que je lui envoie. Par exemple, si un homme me plaît,
je vais essayer de le lui faire comprendre d'abord par mon expression corporelle (consciemment ou
inconsciemment ??). Mais ce dernier sera-t-il toujours réceptif à ces signes ? Le terme « signe » est
ici à prendre dans sa définition première, c'est-à-dire comme un « geste ou mimique permettant de
faire connaître une pensée ou de manifester un désir, un ordre » (Le Larousse). Mais il me permet
de m'interroger sur la signification linguistique que pourrait avoir la gestuelle, et ainsi connaître son
degré d'importance dans l'apprentissage du FLE.

c. Le geste comme signe linguistique ?

Ferdinand de SAUSSURE a défini le signe linguistique comme étant constitué d'un signifié
(« le concept » (SAUSSURE, 2005), ou ce qui est désigné) et d'un signifiant (« l'image acoustique »
(SAUSSURE,2005), ou le mot désignant) : « Le signe linguistique unit non une chose et un nom,
mais un concept et une image acoustique. » (SAUSSURE, 2005 : 98) Ces derniers « s'appellent l'un
l'autre » (SAUSSURE, 2005 : 99) et ne peuvent donc être séparés. Cependant, le « signe
linguistique » de SAUSSURE a un caractère arbitraire : le signifié n'est pas forcément quelque
chose de concret, il peut être une idée telle que « liberté ». De même, toutes les langues n'utilisent
pas le même signifiant pour le même signifié. Le signifiant est donc défini de façon arbitraire. Je

37 Je fais une différenciation entre les termes « parole » et « voix ». D'après moi, la parole est productrice de sens :
nous parlons, nous formons des phrases, nous prononçons des mots. La voix concerne l'appareil phonatoire qui
produit des sons, des intonations, sans forcément produire un sens lexical.

35
pense que le signe linguistique est culturellement38 marqué.

Les gestes peuvent être catégorisés en fonction de leur utilisation et/ou de leur signification
dans les interactions. Dans son ouvrage, Bogdanka PAVELIN définie une « échelle de codage » à
partir de recherches d'Umberto ECO, et distingue les gestes « très codés » des gestes « peu
codés ». :

« Les gestes « très codés » (en l'occurrence les gestes quasi-


linguistiques) sont des « types expressifs » en grande partie préformés,
tandis que la forme de l'expression des gestes « peu codés » est souvent
créée au moment où le contenu est déterminé en fonction d'une pragmatique
langagière : le codage des gestes « peu codés » se construit au cours d'une
communication. Le sujet interprétant doit faire quelques « paris », quelques
« conjectures », quelques « abductions » (selon les termes d'Eco 1993,
26839), pour reconnaître et recréer les règles de codage improvisées hic et
nunc par l'énonciateur. » (PAVELIN, 2002 : 31) (la note de bas de page est
celle de l'auteure)

Voici la reproduction du schéma présent dans son ouvrage (PAVELIN, 2002 : 31) :

Ce schéma permet de comprendre que les gestes sont porteurs de sens. Dans ce cas, ne sont-
ils pas aussi, de même que les mots, des signes linguistiques ?

Les gestes quasi-linguistiques sont des gestes qui peuvent remplacer les mots mais qui
n'auront pas le même effet. Si un geste quasi-linguistique est utilisé, c'est pour renforcer le propos,
et provoquer un impact plus grand auprès de l'interlocuteur. Ils sont appelés « gestes-signes »
(PAVELIN, 2002 : 105). Par exemple, le fait de lever le pouce vers un interlocuteur permet à ce
dernier de comprendre que « c'est bon, ça marche ». Ce même geste, dans un contexte différent,
permet de demander à une voiture de s'arrêter.

38 Une définition du terme « culture » sera apportée par la suite.


39 ECO, U. (1993), Sémiotique et philosophie du langage, Paris : PUF

36
Les gestes syllinguistiques sont des gestes qui appuient un propos, sans pour autant pouvoir
le remplacer totalement ou être utilisés indépendamment de la parole. On y distingue deux
catégories : les phonogènes (mouvement des lèvres) et les coverbaux (qui vont de pair avec le
discours verbal)40. Parmi ces gestes, il y a, par exemple, ceux du regard et de la main accompagnant
la phrase « Asseyez-vous là, s'il-vous-plaît » pour indiquer à l'interlocuteur l'endroit où s’asseoir.

Les gestes synchronisateurs sont des gestes d'adaptation à l'interlocuteur. Ils « assurent le
contact entre les sujets interactants. » (PAVELIN, 2002 : 115) ainsi que « le bon fonctionnement de
l'interaction » (PAVELIN, 2002 : 116). Ils sont « le regard, le mouvement du corps, la posture et
parfois le toucher que l'on instaure » (PAVELIN, 2002 : 115). Par exemple, dans une interaction
entre plusieurs plusieurs personnes, celle qui a la parole souhaite la garder et le fait comprendre par
des regards insistants vers les personnes qui cherchent à prendre à leur tour la parole. De même,
cette volonté de prendre la parole sera marquée par un regard vers le locuteur.

Les gestes de confort, autocentrés et ludiques (aussi appelés gestes « extra-langagiers » par
Bogdanka PAVELIN), sont, quant à eux, des gestes qui « ne [relèvent] pas forcément d'un effort
langagier » (PAVELIN, 2002 : 90). Parmi les gestes de confort, on trouve, par exemple, le
changement de posture (dans le cas où le locuteur est mal installé). Pour les gestes autocentrés, il
s'agit « d'automanipulations » (PAVELIN 2002 : 90) tel que le fait de se gratter. Les gestes ludiques
sont, quant à eux, toute manipulation d'objets qui n'entre pas en compte dans la conversation (une
cigarette, un stylo, etc).

Une langue se compose donc non seulement d'un système de mise en lien de mots pour
produire une phrase et du sens, mais aussi de gestes, conscients ou inconscients. Les gestes
conscients du locuteur correspondent à une envie de faire comprendre à l'interlocuteur ce qu'il dit,
en accompagnant les mots par des gestes (PAVELIN, 2002). Les gestes inconscients sont les gestes
qui, entre autres, traduisent un sentiment lorsqu'un locuteur parle. Par exemple, quand une personne
explique ou contredit l'interlocuteur, ses paroles seront appuyées par l'intonation, mais aussi par des
gestes qu'il ne contrôle pas forcément. Il arrive souvent que d'autres personnes remarquent nos
gestes et nous en fasse prendre conscience :

« C'est d'une solidarité du gestuel et du verbal qu'il est question

40 Pour plus de détails, voir PAVELIN, 2002 : 105-112

37
dans le langage, lorsque celui-ci est compris comme l'articulation du verbal
et du non-verbal, la parole unissant le signe au symbole pour rencontrer le
réel. » (PIERRA, 1990 : 112)41

Le geste traduirait l'émotion du locuteur, mais aussi celle de l'interlocuteur, qui, par ces
gestes, envoie un message sur ses sentiments et son ressenti au locuteur qui va, ou non, adapter son
discours. Par exemple, un interlocuteur fera comprendre à la personne qui parle que ses mots sont
blessant par l'expression de son visage.

Ainsi, au théâtre, les spectateurs reçoivent des messages par les gestes des acteurs. La
gestuelle complète le propos, et permet au spectateur de comprendre la situation sans toujours
entendre les acteurs.

Dans le cas d'une conversation par gestes42, les signifiants sont des gestes (habituellement ce
sont des mots). Mais ne sont-ils pas aussi, dans ce cas, les signifiés ? Les signifiés ne peuvent pas
réellement changer dans l'esprit d'un locuteur43. Plusieurs gestes signifiants peuvent désigner un seul
et même signifié. Parfois, le signifié peut être un geste qui a déjà effectué par un locuteur ou qu'il
reprend d'un interlocuteur : « tu sais, le geste qu'il a fait la dernière fois ! »

Cependant, les gestes ne peuvent-ils pas parfois renforcer le signifié, sans totalement le
remplacer, en étant plus marquant que ce dernier ? Je prends pour exemple, une situation déjà vue
ou vécue par de nombreuses personnes : deux personnes discutent. Au cours de la conversation,
l'une d'elles fait un geste pour faire comprendre un mot à l'autre, et ce geste les amuse. Plus tard,
dans une conversation avec des personnes supplémentaires, l'un des deux protagonistes ne se
souvient plus du mot (qui a été mimé lors de la conversation précédente) et l'autre reproduit le
geste. Le premier des protagonistes se souvient alors du mot. Ici, le geste est-il signifié ou est-il
simplement une aide pour retrouver le signifiant ?

Ainsi, en atelier théâtre et dans le cadre de l'apprentissage d'une langue, les gestes effectués
sont-ils des aides pour les apprenants (mémoriser un mot, une émotion, un discours grâce au jeu et

41 Dans cette définition, le terme de « langage » me pose problème. Un langage n'est pas forcément verbalisé, il peut
être uniquement gestuel. Je souhaiterai donc remplacer ce terme par « langue », terme plus approprié à mon sens.
42 Je ne parle pas ici de la langue des signes mais bien d'une conversation muette dans laquelle seuls les gestes sont
utilisés, comme, par exemple, deux élèves d'une même classe ou deux personnes dans une réunion qui se parlent
chacun d'un endroit différent de la salle.
43 C'est du moins ce que je retire de conversations que j'ai eu avec des personnes qui connaissent ce champs de la
linguistique.

38
au rire) et pour l'enseignant ?

d. Les gestes dans l'enseignement-apprentissage du FLE

La plupart des comptines pour enfants s'accompagne de gestes. Ainsi, un enseignant en école
maternelle ou en premier cycle d'école primaire, associe les gestes à la chanson pour la rendre plus
compréhensible par les enfants. Ces gestes désignent les mots principaux de la chanson, ils ne
traduisent pas, par exemple, les déterminants : ils traduisent les noms communs (« le soleil ») et les
verbes (« disparaît »). De plus, la succession des gestes aiderait à la mémorisation de la chanson par
les enfants. En est-il de même pour les enfants plus âgés, les adolescents et les adultes qui
apprennent une langue étrangère ? « D'après Hélène TROCME-FABRE, la mémorisation est
facilitée par les sens tactile et kinesthésique dont l'action facilite la résolution des difficultés de
certains apprenants. » (PIERRA, 1990 : 110).

Cet apprentissage accompagné de gestes permet aussi un certain contrôle de soi et de ce que
le locuteur souhaite transmettre :

« Entre corps spontané et corps contrôlé se situe le lieu du travail


du comédien qui, par le contrôle de sa gestualité, sa parole, son image et son
contact – en un mot ses capacités de communication – parvient à la
spontanéité, à la vie de l’œuvre incarnée dans la représentation. » (PIERRA,
1990 : 122)

C'est, je pense, en agissant, en apprenant à communiquer par les gestes, que l'on peut
parvenir à une certaine spontanéité. En effet, il me semble important, pour pouvoir s'intégrer dans
une société où la langue m'est étrangère à priori, d'avoir une parole fluide et spontanée 44. Cependant,
cette intégration n'est pas un objectif pour tous les apprenants. Il me semble donc important de
cerner les objectifs et les besoins des apprenants, et d'adapter l'enseignement-apprentissage en
conséquence. Les apprenants souhaitent-ils seulement communiquer en langue étrangère ou vivre
dans une société qui a pour langue dominante cette même langue étrangère ; ou souhaitent-ils
pousser leur apprentissage jusqu'à pouvoir s'intégrer dans cette société même s'ils n'utiliseront pas
cette langue étrangère quotidiennement ?

44 C'est d'intégration culturelle donc je parle ici. Je reviens sur cette association langue-culture-geste par la suite.

39
L'utilisation des gestes pour l'apprentissage et pour communiquer semble être un point
important en FLE, à des degrés différents car chaque apprenant n'a à priori pas les mêmes besoins.
L'enseignant devrait donc utiliser et enseigner les gestes, en conséquence. Le théâtre, puisqu'il
utilise le corps, la voix, la parole, c'est-à-dire la communication corporelle et verbale, peut être un
moyen efficace pour aider les apprenants dans leur apprentissage du FLE.

« La pratique théâtrale permet de constater un apprentissage


accéléré de la parole au cours des douze semaines de travail correspondant à
un stage intensif où tous les sens sont sollicités. » (PIERRA, 1990 : 109)

Mais quelle est mon utilisation des gestes lorsque je suis enseignant ou apprenant ?

i. Du point de vue de l'enseignant

Un enseignant de FLE se trouve souvent confronté à des groupes d'apprenants qui sont de
nationalités différentes (dans le cas d'un enseignant en centre de langue en France) et/ou dont il ne
connaît pas la langue. Je me suis retrouvée dans ces deux cas, au CUEFEE d'une part, et d'autre part
au Vietnam.

Dans ce que je souhaite montrer, l'expérience du Vietnam, dans laquelle j'ai eu en charge des
apprenants débutants, est la plus probante. Ne connaissant que très peu de mots en vietnamien, il
m'a fallut surtout utiliser les gestes, le mime et le dessin afin d'être comprise par les apprenants.
C'est alors un grand jeu d'acteur et de patience qui s'est mis en place. Ainsi, la gestuelle semble très
importante dans une interaction avec un interlocuteur dont on ne partage pas la même langue.

De même, en sortant du cadre éducatif, j'ai souvent pu observer des touristes (que ce soit en
France ou à l'étranger) qui communiquaient avec les autochtones par des gestes, et des mises en
scène pour parvenir à se faire comprendre.

ii. Du point de vue de l'apprenant

Pour l'apprenant, les gestes lui permettent aussi de se faire comprendre par un enseignant qui
ne parle pas la même langue.

40
De même, la visualisation des gestes de l'enseignant peut lui permettre de comprendre un
mot, une situation, une idée. Je l'ai vécu en tant qu'apprenante de japonais : j'ai eu des enseignants
qui, ne parlant pas français, utilisaient des gestes pour expliquer un mot de vocabulaire.

Cependant, que ce soit dans ma situation d'apprenante ou d'enseignante, j'ai souvent dû faire
face à l'incompréhension de mes interlocuteurs. Mes gestes me paraissaient être tout à fait illustrer
mes propos ou mes mots. Ainsi, j'en viens à me demander si les gestes ne sont pas investis d'une
dimension culturelle ?

e. Le geste culturel

J'entends par « culturel » une marque identitaire, qu'elle soit nationale, régionale ou sociale,
dans laquelle tout individu se (re)trouve. La culture d'une personne serait définie par son histoire,
ces légendes, le comportement de son corps (la façon qu'elle a de se déplacer ou de s'embellir), sa
nourriture et sa façon de se nourrir (par exemple, manger avec des baguettes, des couverts ou avec
les mains), son éducation (l'âge adulte, la scolarité)...en bref, l'environnement dans lequel une
personne vit45.

Je pense que la culture d'un individu est d'abord sa/ses langues : « la langue n’est pas
seulement une donnée essentielle de la culture, c’est aussi un moyen d’accès aux manifestations de
la culture » (CECRL, 2001 : 12). Aussi, l'apprentissage d'une langue nouvelle donnerait l'accès à
une culture nouvelle. Ainsi, la communication (dans toutes ses composantes orales et corporelles)
est marquée par la culture. De plus, il me semble que dans une culture, tout conditionne une certaine
forme de communication, de langue ou de langage.

Les gestes – donc la communication gestuelle – dépendent du locuteur, de sa langue, de son


origine culturelle, sociale etc. Par exemple, le hochement de tête pour répondre « oui » n'est pas
commun à toutes les cultures : dans certaines, ce même hochement de tête peut signifier « non » ou
« je ne sais pas ». Pour répondre « non », au Vietnam, le fait de secouer la tête ne signifie rien : les
Vietnamiens utilisent un geste de la main, semblable à un geste transcrivant « à peu près » en
France. De même, « pour téléphoner, le Français, en un même geste, mime la tenue de l'appareil
45 Ces éléments culturels ont été recueillis auprès de personnes néophytes.

41
(…), sa configuration (…) et son utilisation (…) alors qu'un Napolitain fait le numéro (…) pour être
entendu (…). » (citation de CALBRIS & PORCHER, 1989 : 131 in PAVELIN, 2002 : 25).

De même, un groupe d'amis, que j'appellerai un groupe social, inventera, consciemment ou


non, des codes gestuels qui ne seront pas compris par – ou les mêmes qu' – un autre groupe social.

Je souhaite ici faire une approche comparative entre l'humain et l'animal, pour ainsi
comprendre si la communication gestuelle serait marquée culturellement. Les chiens, qu'ils soient
en France, en Égypte, au Brésil, ou en Asie, auront toujours la même façon d'exprimer leur joie :
remuer la queue. Une femme française l'exprimera par un sourire franc et visible de tous, alors
qu'une femme japonaise ne fera qu'un léger sourire sauf si elle le dissimule derrière sa main.

Ces exemples montrent l'ancrage culturel du geste. L'analogie n'est pas toujours possible
entre le geste et l'objet ou l'action et peut mener vers des incompréhensions ou des quiproquos
(PAVELIN, 2002). Parfois, le même geste peut être significatif dans la plupart des langues. Par
exemple, chaque fois que j'ai du signifier dormir (les mains jointes, sur une joue avec la tête
penchée), ou manger (les doigts d'un main joints avec un mouvement répéter vers la bouche), mes
interlocuteurs comprenaient.

Ainsi, lorsque, dans le groupe, les apprenants viennent de cultures différentes, il peut
s'opérer un enrichissement de chacun dans ses gestes : chaque participant apporte et découvre une
nouvelle dimension et un nouveau code. Mais ceci n'est pas systématique, je n'adopterai pas pour
miens tous les gestes différents des miens. Il s'établirait une sorte de micro-société et, ainsi, une
culture éphémère propre à ce groupe d'apprenants. Une fois hors de ce groupe la micro-société
disparaîtrait et avec elle ses codes gestuels.

Une discussion sur les habitudes de chacun permettrait une approche interculturelle, dans
laquelle la compréhension, l'acceptation et le respects des autres serait l'objectif. Cela induirait de
plus une liberté de mouvements ressentie par tous car ils n'auraient plus de crainte d'être incompris.

« L'essentiel pour le travail pédagogique est que la dimension pluri-


culturelle devienne facteur d'enrichissement et d'écoute réciproque afin que
les apprenants se sentent suffisamment à l'aise pour accomplir les gestes qui
leur conviennent en toute liberté et respect de leurs valeurs. » (PIERRA,
1990 : 116)

42
Cette liberté est d'ailleurs essentielle dans un groupe de théâtre et en est aussi un objectif.
Elle permet une désinhibition, une affirmation de soi et de sa culture, et une confiance en soi, et le
geste peut être considéré comme un « accès non langagier à l'expression de soi. » (BRAHY &
VRANKEN, 2012 : 20) 46.

L'échange autour de la gestuelle peut aussi permettre une imagination commune : créer de
nouveaux gestes ou encore perturber les associations gestes-paroles. Mais, dans un premier temps,
je pense que l'apprenant a besoin de s'appuyer sur la gestuelle qu'il connaît, dont il a l'expérience,
avant de pouvoir s'extraire de cette dimension et en adopter une nouvelle.

J'en viens à me demander (et je laisserai cette question ouverte), si le fait de parler n'est pas
aussi un geste ? Lorsque je parle, un ensemble de muscles est activé, de mes poumons, jusqu'à ma
bouche et mon visage en passant par mes cordes vocales. Les gestes sont aussi dus à l'activation de
muscles. De plus, ces derniers accompagnent et produisent la parole :

« Les différences en action que sont parole et gestualité, sont


inventées par le corps non divisible, devenu passage, qui transmet un
message et des émotions reçus de façon globale pas le public. » (PIERRA,
1990 : 123) (je souligne).

Ainsi, le message et les émotions que je transmets ne me seraient-ils pas propres ? Si je dois
transmettre mes émotions par mon jeu d'acteur, faut-il que je le fasse par rapport à ma sensibilité ou
bien par rapport au personnage ? N'est-ce pas là un travail sur ce que je souhaite transmettre et ainsi
sur moi-même ?

4. Le théâtre : un outil pour se connaître et être reconnu ?

« L'atelier théâtre nous rappelle que l'individu


n'est pas donné, il nécessite un « travail » pour
se construire lui-même, exprimer sa
singularité (…) et la rendre publique. »
46 Pour plus de détail, voir la partie 4. « Le théâtre : un outil pour se reconnaître et être reconnu ? » .

43
(BRAHY & VRANKEN, 2012 : 41)

a. Pour l'animateur, un travail de mise en confiance

Tout atelier théâtre, qu'il soit destiné à un public d'apprenants adultes, étudiants, enfants, ou
un public en difficulté sociale ou psychologique, devrait s'appuyer sur une relation de confiance
entre le participant et l'animateur, et entre les participants eux-même. Une mise en confiance
réciproque est, je pense, un facteur primordial, et ce dès le premier atelier.

Dans le cas des demandeurs d'asile, le récit de leur vie est indispensable pour leur demande
d'asile. Cependant, ce récit de vie est « susceptible de réactiver des souffrances profondes qui ne
seront pas toujours entendues ou reconnues. » (annexe 2 : 18). Ce récit est vécu comme un
traumatisme par la plupart des demandeurs d'asile, d'autant que leur parole n'est pas toujours
suffisante, ils doivent souvent apporter des preuves sur ce qu'ils ont vécu. Malgré tout, avec toutes
les preuves, ils ne sont pas toujours crus. C'est une méthode d'extraction d'informations plutôt que
de suivi. L'atelier théâtre pourrait permettre, à ce type de public, de s'exprimer sans ressentir cette
forme d'intrusion dans sa vie personnelle et son parcours de vie.

Une fois la confiance installée, les participants peuvent entamer, avec moins de peur et d'à
priori, leur travail de découverte intérieure.

b. Un travail sur soi

L'atelier théâtre devrait s'appuyer, avant tout, sur le participant. En effet, c'est en intégrant sa
personnalité, sa volonté et ses capacités, dont il n'est pas toujours conscient, que le jeu se crée. Le
participant est « mobilisé comme un individu producteur de sens et d'histoire. » (BRAHY &
VRANKEN, 2012 : 7) Il va donc être invité à se découvrir, à faire ressortir des expériences jusque
là rarement conscientes :

« Afin de pouvoir servir le projet collectif, les joueurs sont amenés


à puiser dans leurs ressources profondes, leur passé particulier
(psychologique, social, culturel). Cette meilleure connaissance d'eux, qu'ils
acquièrent dans et par le jeu, leur permet progressivement d'utiliser et
d'exploiter ce qui en eux peut servir les personnages différents et de ne pas

44
rester cantonnés à des personnages figés toujours dans le même rôle.
Explorer les aspects de leur personnalité leur donne dans le jeu des
moyens multiples. » (PAGE, 1998 : 24) (je mets en évidence)

Le travail sur lui-même du participant est accompagné par l'animateur mais c'est uniquement
le participant qui peut faire ce travail intérieur : « [L'action de l'animateur] va s'apparenter au travail
d'un « accoucheur »(...) le comédien-animateur ouvre la possibilité d'un accès (…) à un monologue
intérieur » (BRAHY & VRANKEN, 2012 : 9).

Un atelier théâtre devrait aussi s'appuyer sur les compétences et les capacités des apprenants.
C'est d'autant plus le cas pour des publics en difficultés qui ne se pensent pas capables de
nombreuses actions. Ils doutent notamment de leur capacité à retrouver une certaine indépendance,
laquelle est perdue en raison de l'organisation de la société qui semble chercher cette situation de
dépendance.

« [Une tendance] des politiques sociales contemporaines serait de


replier l'usager sur lui-même en exigeant de lui une livraison complète du
soi, renvoyant ainsi l'intervention à une « tutelle de l'intime », à un rapport
« tyrannique » et intrusif. » (BRAHY & VRANKEN, 2012 : 45)

Pour exemple, le cas des demandeurs d'asile qui dépendent des assistants sociaux pour
toutes leur démarches administratives et même quotidiennes. Ils doivent se dévoiler intimement à
des personnes qui leurs sont étrangères quand ils font leur récit de vie, dans une relation de
domination de la part des assistants sociaux ou ressentie comme telle. Ils ne sont pas non plus libres
de dire et de faire tout ce qu'ils souhaitent (avoir une activité salariée par exemple). Le théâtre
devrait donc leur permettre de retrouver ces capacités parfois perdues (BRAHY & VRANKEN,
2012). Il n'est pas ici question de dire au participant tout ce qu'il doit faire, mais de mettre en place
des activités qui permettent au participant de se retrouver et de s'exprimer.

L'animateur aide le participant à se fouiller pour « découvrir des capacités nouvelles, jusque-
là laissées en friche » (BRAHY & VRANKEN, 2012 : 15) par les activités mises en place. « Le
rapport à soi est intensifié et contribue à l'augmentation d'un degrés de conscience et de
connaissance de soi. » (BRAHY & VRANKEN, 2012 : 15). Les apports de l'atelier théâtre sur les
plans intimes seraient plus visibles et plus bénéfiques aux participants que lorsque les activités sont
imposées et ne correspondent en rien aux participants.

45
Le terme « capacité » semble au cœur de la problématique d'un atelier théâtre. Faire ressentir
au participants qu'il est « capable de » serait une manière de lui donner les clefs pour un travail et
un retour sur lui-même, un travail dans lequel personne ne peut intervenir pour l'arrêter et l'obliger à
s'extérioriser. Le théâtre permet aussi

« un travail d'introspection sur soi-même. Ce ne sont pas les


autres qui me font une leçon de morale, c'est moi qui « en jouant » dans tous
les sens du mot, prend conscience de mes possibles, positifs ou négatifs. »
(MEIRIEU, 2002 : 99) (en gras dans le texte)

Ainsi, l'activité théâtrale permettrait au participant de prendre conscience ou de retrouver ces


capacités, de se rendre compte qu'il est « capable de ».

C'est, je pense, le fait de se sentir « capable » qui a permis, pendant l'activité autour du
spectacle de marionnettes47, aux résidents du CADA qui y ont participé (notamment le père de
famille) de retrouver une place au sein de leurs familles respectives et de trouver une place au sein
de la société.

La représentation théâtrale devant un public doit s'appuyer sur des sujets vécus par tous les
participants, et qui ont émergés lors des ateliers préparatoires (BRAHY & VRANKEN, 2012). Ces
sujets doivent être choisis d'un commun accord entre le participants. Ils se sentent alors mis au cœur
de l'action et plus confiants. Ils créent une « parole collective » (BRAHY & VRANCKEN, 2012 ; 2)
qui leur semble avoir plus de poids que la parole d'une seule personne. Les participants prennent
conscience qu'ils ne sont pas seuls à vivre les mêmes situations. Cette approche, particulièrement
mise en place par le « théâtre-action »48, est celle qui est adoptée au sein du CADA par la référente
FLE. Les participants auront donc la possibilité de s'exprimer et se sentiront libres au travers d'un
groupe et d'un personnage qui leur servent de masque.

c. L'effet de masque

De part son caractère d'espace de liberté, l'atelier théâtre permettrait une parole libre, la
liberté de donner son opinion et de s'exprimer. Mais le jeu dramatique peut faire peur : « la peur de
47 Cf. page 9
48 Le théâtre-action est une forme de théâtre social destiné à un public en difficulté. Pour plus de détails, voir BRAHY
& VRANKEN, 2012

46
ce qui pourrait surgir et qui n'est pas prévu (…) la crainte d'une parole subversive. » (PAGE, 2009 :
14). C'est sur ce point que le personnage a son rôle à jouer. Il a l'effet d'un masque, derrière lequel le
participant (ou l'acteur) peut s'exprimer à l'insu du spectateur ou des autres participants :

« Anne Ubersfeld écrit : « Au théâtre, Je est un autre, ce n'est pas


moi.49 » Le personnage ainsi compris à la fonction d'un masque. Dissimulant
l'individu, il lui permet de se mettre à découvert, de se risquer puisque c'est
au nom du personnage qu'il agit. « Faisant ce que je fais, par jeu, je vous dis
ce que je ne suis pas... » « Attention nous dit Freud, car c'est précisément ce
que je suis.50 » En jeu dramatique, le jeu s'enracine dans l'espace ménagé par
cette double et contradictoire affirmation. » (PAGE, 1998 : 19) (les notes de
bas de page sont les notes de l'auteure)

Ainsi, l'acteur se dissimule aux regards des autres, et le personnage permet de se montrer en
sécurité, sans avoir peur de donner son avis et de montrer ses sentiments.

Le personnage est dual. En effet, il est vivant grâce à l'acteur et aide l'acteur à être vivant. Le
personnage permet une distanciation à soi et rend l'expression de soi inconsciente : « Le joueur qui
découvre la fonction du masque du personnage va d'abord l'essayer, puis s'en servir à l'insu (croit-il)
des autres (et souvent de lui-même). » (PAGE, 1998 : 20). En effet, mes pensées, mes sentiments
peuvent être transcrits dans mes actes sans que je m'en rende compte. Par exemple, je juge souvent
les personnes sur ce que je perçois d'elles. De même que je suis jugée par les autres sans forcément
connaître ce jugement : sommes-nous51 conscients du fait que nous renvoyons tous une image aux
autres ? Et sommes-nous conscients de cette image ? Nous pouvons contrôler pour partie ce que les
autres perçoivent de nous mais les autres peuvent percevoir ce que nous ne voulons pas montrer.

Le théâtre donne à penser aux participants et aux spectateurs que tout est fiction (les
dialogues et les personnages sont perçus comme fictifs, même si parfois la fiction s'appuie sur des
situations concrètes). Sur scène, ce ne sont pas des personnes qui sont données à voir, mais des
personnages. Ainsi, même des paroles qui exprimeront réellement la pensée de l'acteur, des
situations qu'il a réellement vécues, des expériences joyeuses ou douloureuses, seront perçues
comme étant de la fiction. L'acteur pourra toujours se défendre en disant « c'est le personnage qui l'a
dit, pas moi »52 : « le personnage peut. Il peut dire tout ce qu'il veut puisque c'est un personnage. »
(BRAHY & VRANKEN, 2012 : 31). Le personnage est donc un masque, voire un mur, derrière

49 Anne Ubersfeld, L’École du spectateur, Éditions Sociales, 1981


50 Voir le commentaire de J. Hyppolite sur la « Verneinung », in Les Écrits de Lacan, p. 879 à 887
51 Nous, êtres sociaux en constante interaction
52 Paroles rapportées de l'atelier théâtre avec les adolescents du CADA, exprimées lors d'un échange après une
improvisation.

47
lequel l'acteur se cache. Cependant, le participant peut très bien refuser cette idée que le personnage
transpire sa propre personnalité et ne pas entamer de travail sur lui-même et sur ce qu'il dit. Mais ce
refus n'est-il pas aussi, en quelque sorte, une affirmation de soi-même ?

Il est alors difficile pour l'animateur, dans le cadre d'un atelier théâtre à destination d'un
public en difficulté, de faire la part entre le réel et la fiction. Mais est-il important et opportun de
toujours analyser les paroles des participants ? Les publics en difficultés, sociale ou psychologique,
à qui sont proposés les ateliers théâtres, sont généralement suivis par des assistants sociaux, des
psychologues et autres personnes susceptibles de les aider : « l'entrée dans l'atelier théâtre s'effectue
souvent en concordance avec une expérience sociale spécifique » (BRAHY & VRANKEN, 2012 :
7). Si le participant n'a pas déjà exprimé tout ce qu'il souhaitait lors de séances avec ces aidants,
l'animateur peut-il le forcer à en parler en rapportant ses propos à la personne qui l'aide ? Ne
devrait-il pas plutôt garder ce qui se dit lors des ateliers théâtre dans l'intimité de l'atelier ? C'est sur
ce point aussi, je pense, qu'une certaine confiance peut s'instaurer : « ce qui se passe, se passera
pendant ces ateliers restera dans l'atelier et n'en sortira pas ». Le participant sera donc plus
confiant, pourra garder sa liberté et pourra jouer avec le masque comme il l'entend. Il me semble
que l'animateur devrait alors être une personne extérieure à ces institutions d'aide aux personnes en
difficultés pour « recueillir un matériau subjectif susceptible de composer une œuvre théâtrale. »
(BRAHY & VRANKEN, 2012 : 9) et non un récit à rapporter en tant que tel.

Se donner à voir à travers un personnage, ce qui l'aide à travailler sur lui-même, conduirait
le participant vers ce et ceux qui l'entourent, permettant l'appropriation d'un lui social.

d. Au delà du soi

Il existe un « lien étroit entre théâtralité et vie sociale » (BRAHY & VRANKEN, 2012 : 38).
En effet, au quotidien, c'est un soi social qui est prêté à voir, dans un souci de se montrer tel que je
veux être vu par les autres. Ainsi, je ne serais pas la même personne devant un employeur, devant
un ami, ou devant un passant dans la rue... Toute interaction est donc régie par une norme sociale à
respecter53. Pour un demandeur d'asile, la théâtralité se fait lors des commissions de demande de
statut de réfugié : devant des personnes présentes pour juger de la véracité des propos du

53 C'est ici au champ sociologique que je me réfère, d'après des débats et des interventions télévisés ou
radiophoniques.

48
demandeur, ce dernier doit donner à voir un lui convaincant. Pour un étudiant de Master, la
théâtralité se fait pendant les exposés, ou encore la soutenance de mémoire de fin d'études. Comme
le disait Sénèque : « La vie est une pièce de théâtre : ce qui compte ce n’est pas qu’elle soit longue,
mais qu’elle soit bien jouée » ; et William Shakespeare : « Le monde entier est un théâtre, et tous,
hommes et femmes, n’en sont que les acteurs. Et notre vie durant nous jouons plusieurs rôles. »

De plus, le participant à l'atelier théâtre peut se sentir libre de ne pas être ce que la société
veut qu'il soit. C'est notamment le cas pour un public tel que celui du CADA : la société dans
laquelle il vit le veut être d'une certaine façon : dépendant, enchaîné à sa situation, et heureux de se
livrer entièrement à des personnes qui ne lui sont pas intimes. Le théâtre lui permettrai, à priori, de
ne pas être cet être dénué de sentiments et devenir autre, ou redevenir lui-même.

Ainsi, en atelier théâtre, pour parvenir à un travail sur l'aspect social, la vie quotidienne et
les situations concrètement vécues par les participants sont le point de départ (BRAHY &
VRANKEN, 2012). Le participant prête ses expériences, les met en lien avec celles des autres
participants, pour mener vers la représentation d'une réalité « qui englobe leurs histoires singulières
et contre laquelle il s'agit de réagir. » (BRAHY & VRANKEN, 2012 : 44). En Touraine existe une
compagnie de théâtre-action Les 3 casquettes qui intervient souvent auprès de demandeurs
d'emplois. Au cours d'une formation de 2 semaines, les participants sont invités à faire part de leurs
expériences, angoisses, amusements....pour créer une pièce de théâtre qui tourne ces situations en
comédie, afin de les dédramatiser et de les donner à voir à un public :

« Pour le participant à l'atelier-théâtre, il ne s'agit plus d'explorer


son intimité mais de la prêter (ou l'apprêter) à voir ou à entendre, de
maîtriser cette image et cette parole, dans un rapport quasi-instrumental à
lui-même. » (BRAHY & VRANKEN, 2012 : 31)

Un travail théâtral qui s'éloignerait de situations réelles permettrait aux participants de


pousser plus loin leur imagination et donc un travail d'introspection et/ou d'évasion plus important.
Cependant, il serait moins constructif et amènerait les apprenants à s'isoler dans leur subconscient
(PIERRA, 1990).

Ce caractère collectif permet, à priori, de renforcer le masque et de protéger le soi qui


s'exprime au travers d'un groupe. Il permet aussi aux participants de se trouver moins seuls à vivre

49
une situation et permet de la rendre plus supportable. Ce sont le travail individuel, la discussion et
l'échange entre participants, qui permettent ce travail sur et avec les personnes.

e. Se découvrir dans l'activité de groupe

Je souhaite débuter cette partie par une citation de Christine PAGE qui se suffit à elle-même
et que je ne souhaite pas commenter :

« L'élaboration collective du projet dramatique, sa mise en œuvre et


son questionnement dans le temps d'échange engagent les participants à
prendre conscience de leur rôle et leur responsabilité personnelle face au
groupe, dans le groupe et pour le groupe. Ce travail contribue à développer
la notion de projet individuel articulé avec le projet de groupe. Il met en
place une dialectique permanente, entre l'individu et le groupe, entre
l'individu, le groupe et les règles sociales, entre le jeu et la réalité, entre le
projet et le produit. » (PAGE, 2009 : 117)

L'atelier-théâtre tend à rendre indispensable la communication entre les participants. Un


travail de groupe se met en place, et conduit les participants vers une responsabilité face aux autres
et face à soi-même (PAGE,2009) : il y alors un « phénomène d'activation des personnes pour les
impliquer et les responsabiliser davantage » (BRAHY & VRANKEN, 2012 : 3).

De même, chaque membre du groupe, par sa présence, ses idées, sa personnalité, fait
avancer le projet, sans laisser de place à la compétition (PAGE, 2009). L'individu s'insère dans un
ensemble. Par des discussions, des apports d'idées, des débats, chacun peut apporter sa pierre à
l'édifice. De plus, chacun a un rôle à jouer dans la discussion et doit l'assurer. C'est donc une forme
de responsabilisation de l'individu envers lui-même et les autres. De même, ces discussions
permettent l'émergence d'un groupe solidaire dans lequel chacun a sa place et peut prendre
confiance (PAGE, 2009).

Ce travail de groupe permet aussi à l'individu d'apparaître, et de faire émerger un soi.


Chacun a la possibilité de s'affirmer, d' « essayer des comportements nouveaux, [de] se risquer à
être perméables aux autres, [de] s'aventurer à d'autres places, et [de] construire ainsi avec les autres
des références communes » (PAGE, 2009 : 118), ce qui est là aussi un facteur d'émergence de soi.

50
« Liées également à l'apprentissage de la langue, une confiance en
soi se développe, une jouissance du travail du texte et le plaisir de créer dans
un groupe solidaire où chacun peut s'exprimer avec son intelligence, sa
sensibilité et son humour tout en effectuant un travail intensif. » (PIERRA,
1990 : 50)

De plus, le travail en groupe permet de se sortir d'une certaine solitude et/ou d'un isolement,
éprouvé(s) par de nombreuses personnes dans le cas d'un public comme celui du CADA. La
discussion avec d'autres personnes leur permet de se rendre compte qu'ils ne sont pas seuls à se
retrouver dans une situation similaire et à avoir rencontrés des problèmes dans leurs parcours
personnels. C'est là une remarque faite par la référente FLE du CADA suite au spectacle de
marionnettes qu'elle a proposé.

Un autre aspect du groupe est l'émergence de la différence dans la ressemblance, de


l'acceptation de l'autre tel qu'il est, de la complémentarité. Cette « acceptation de la différence aide à
l'enrichissement du groupe et permet l'affirmation de soi » (PAGE, 2009 : 118). C'est à partir de ce
constat que l'enseignant/animateur d'un atelier théâtre FLE peut travailler sur l'interculturel, les
échanges entre les apprenants, et la découverte pour chacun d'une autre culture.

CONCLUSION

Pour pouvoir profiter des apports de l'atelier théâtre, il me semble que l'apprenant doit
l'investir de sa personne afin de créer un espace de travail propre à lui dans lequel il agit pour lui-
même, par lui-même et sur lui-même.

Si l'activité est proposée à tout un groupe-classe, les temps de cours peuvent venir en soutien
de celle ci ; c'est-à-dire qu'ils peuvent permettre de revenir sur des « erreurs » souvent produites par
les apprenants. Les cours peuvent aussi être un temps de découverte de pièces de théâtre classique
qui nourrira la culture générale des apprenants. Cependant, comme j'ai tenté de le démontrer lors de
mon mémoire, il semble plus judicieux de proposer plutôt que d'imposer l'activité théâtrale. Ainsi,
devrait-on réfléchir à un moyen de rassembler en un même groupe-classe les participants de
l'atelier ?

51
L'activité théâtrale devrait plutôt être l'objet d'une activité hors du cadre des cours, de façon
à ce que les apprenants la prenne comme telle : une activité de support – ludique et informelle –
dans leur apprentissage, et une activité dans laquelle ils sont libres de faire leurs propres choix, de
s'exprimer sans correction systématique (PIERRA, 1990 ; BALAZARD & GENTET-RAVASCO,
2003), et de s'entraîner à vivre des situations, ce qu'ils ne peuvent pas faire dans le cadre des cours.
Ses situations se font par la communication avec des pairs qui amène les participants vers des
conversations qu'ils ne pourraient, à priori, pas avoir en classe de langue (PIERRA, 1990).

Le théâtre semble être un moyen pour des apprenants d'améliorer leurs compétences de
communication, orale et corporelle. Un travail s'effectue sur la prononciation (diction, prosodie),
l'expression des sentiments (le « non-dit »), et l'expression par le corps (la gestuelle).

Un travail de groupe, prenant en compte l'interculturel et l'échange, permettrait aussi de


libérer une parole bridée par la société, et de se (re)découvrir des compétences et des capacités
qu'ils ne soupçonnaient pas (BRAHY & VRANKEN, 2012 ; PAGE, 1998 ; MEIRIEU, 2002).

Les effets (négatifs ou positifs) provoqués par l'activité théâtrale ne sont pas immédiats.
L'enseignant/animateur ne doit pas s'attendre à voir les participants devenir d'excellents locuteurs en
langue étrangère dès le premier atelier, voire même à la fin de l'atelier. Il peut s'écouler un temps
plus ou moins long pour que les participants assimilent les techniques enseignées dans l'atelier
théâtre, et les utilisent par la suite dans leur vie quotidienne.

Ainsi, la pratique théâtre en groupe permet de développer de nombreuses compétences. La


liste des compétences qui suit, énoncée par Gisèle PIERRA, me permet ainsi de résumer mes
propos :

« - aptitudes à la communication lors d'échanges d'idées,


propositions, critiques, par la libération et l'écoute de la parole en
interlocution permanente dans le groupe.

- aptitude à l'invention dans la langue cible lors d'improvisations


nécessaire à la mise en action des capacités créatives des apprenants qui, en
même temps réactivent leur acquis verbal.

- aptitude à la lecture, dans la première phase du travail du texte,


soit compréhension et prononciation.

52
- aptitude à la diction dans la phase d'interprétation du texte avec
correction phonétique plus systématique et apprentissage des techniques de
l'acteur pour ce qui est du phrasé, prosodie etc...

- aptitude à la création par le jeu d'acteur et le travail de mise en


scène, dans la phase de l'invention des situations, de la gestuelle et des
comportements impulsés par l'interprétation du texte. » (PIERRA, 1990 :
48-49)

L'enseignant/animateur devrait, quant à lui, s'attendre à renverser sa place de détenteur du


savoir et de modèle linguistique et culturel : laisser les participants servir de modèles, se tromper,
s'essayer à des actions qui ne sont pas forcément acceptées en classe (PIERRA, 1990 ;
BALAZARD & GENTET-RAVASCO, 2003). De plus, il devrait préparer ses séances en sachant
qu'elles seront modifiées au fur et à mesure, et cela en fonction des besoins ressentis par les
participants et lui-même. Il serait un guide plus qu'un dirigeant, pour accompagner les apprenants
dans leur travail.

Ainsi, j'ai tenté de montrer dans ce mémoire que le théâtre ne peut pas être l'objet principal
d'un enseignement-apprentissage du FLE, mais qu'il peut en être une aide, pour l'apprenant, dans le
développement de compétences linguistiques et extra-linguistiques.

De plus, si le théâtre est la base d'un enseignement-apprentissage, quid de l'évaluation ?


L'enseignant peut-il se permettre de juger54 de la qualité de l'imagination d'un apprenant ? Peut-il se
permettre d'évaluer une activité qui se veut informelle, basée sur un principe de liberté ? L'atelier
théâtre proposé par le CUEFEE (cf. « A-3. Présentation rapide des Contextes d'interventions
précédents ») étant une UEL, il faisait l'objet d'une évaluation continue55. Les critères d'évaluation
portaient sur la coordination de groupe, la mise en scène, l'appropriation du texte, les costumes et la
prononciation. Je laisse au lecteur la liberté de s'interroger sur la pertinence d'une évaluation d'un
apprentissage qui se veut informel.

54 Je choisi ce terme car l'évaluation est une forme de jugement par l'enseignant du travail de l'apprenant.
55 Il y a eu deux évaluations sur des scénettes à jouer en groupe.

53
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES – SITOGRAPHIQUES

BALAZARD, S. & GENTET-RAVASCO, E. (2003), Le théâtre à l'école, techniques théâtrales et


expression orale, Paris : Hachette Éducation, coll. Pédagogie pratique à l'école, 223 p.

BROUGERE, G. (2001), « Les jeux du formel et de l’informel », Revue française de pédagogie,


n°160 juillet-septembre 2007, mis en ligne le 01 septembre 2011, URL : [http://rfp.revues.org/582]
(consulté le 13/01/2013)

Conseil de l'Europe (2001), Un Cadre Commun de Référence pour les Langues : apprendre,
enseigner, évaluer, Paris : Les Éditions Didier, 196 p.

CAILLER, F., FROSSARD D. & GIROD V. (2003), Savoirs formels vs informels, publié sur
internet [http://tecfa.unige.ch:8888/riat140/20] (consulté le 13/01/2013)

DOMONT, F. (2011), « Apprentissage formel ou informel », article paru sur le site internet Le
Monde le 20 mai 2011, URL : [http://www.planete-plus-
intelligente.lemonde.fr/organisations/apprentissage-formel-ou-informel-les-deux-mon-capitaine-_a-
12-714.html] (consulté le 13/01/2013)

HINGLAIS, S. & LIBERMAN, M. (2002), Pièces et dialogues pour jouer la langue


française, Paris : édition RETZ, 206 p.

MEIRIEU, M. (2002), Se (re)connaître par le théâtre, Lyon : Chronique Sociale, coll.


Pédagogie/Formation, 104 p.

PAGE, C. (coord.) (1998), Pratiques du théâtre, Paris : Hachette Education, coll. Ressources
Formation, 144 p.

PAGE, C. (2009), Pratiques théâtrales dans l'éducation en France au XX° siècle : aliénation ou
émancipation ?, Arras : Artois Presses Université, Chap III : pp. 99-132

PAVELIN, B. (2002), Le geste a la parole, Toulouse : PUM, 212 pp., Chap : Introduction, II, III

PAYET, A. (2010), Activités théâtrales en classe de langue, Paris : CLE Internationale, 206 p.

PIERRA, G. (1990), Le théâtre dans l'enseignement du français langue étrangère, l'anti-méthode,


thèse de doctorat dirigé par DUMONT, P., 407 p.

54
PIERRA, G. (2001), Une esthétique théâtrale en langue étrangère, Paris : L'Harmattan, 238 p.,
Deuxième partie Chap III & IV, Troisième partie

PIERRÉ, M. & TREFFANDIER, F. (2012), Jeux de théâtre, Grenoble : PUG, 112 p.

RYNGAERT, J.-P. (1996), Le jeu dramatique en milieu scolaire, Paris & Bruxelles : De Boeck &
Larcier s.a., coll Pratiques Pédagogiques, 3° édition, 190 p.

SAUSSURE, F. de (2005), Cours de linguistique générale, Paris : PAYOT, 520 p.

Association Instant Présents, « Apprendre à animer un atelier théâtre dans un cadre éducatif et
social », Présentation de la formation théâtre, URL : [http://theatreinstantpresent.org/creer-et-
animer-un-atelier-theatre-a-caractere-educatif.pdf] (consulté le 24/01/2013)

55
ANNEXES

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ANNEXE 1 : Première page de l'outil créé pour la sortie au Pôle Emploi

Pour voir et imprimer votre « Avis de situation »

Allez sur le site internet du Pôle Emploi et cliquez sur Accéder à mon espace et gérer mon dossier.

57
ANNEXE 2 : « Les difficultés des demandeurs d'asile » - Texte consulté sur le lieu de stage, dont la
source est inconnue

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ANNEXE 3 : Préparation des séances pour les enfants, modifiée au fur et à mesure de l'avancée des
ateliers.

Légende : tous les exercices surlignée et en rouge n'ont pas été réalisés.

Séance 1

Nombre de participants : 9
Durée : 2h

Objectifs :
_ dynamiser le groupe
_ découvrir l'improvisation
_ faire appel à l'imagination

Déroulement de la séance

Introduction : mise en condition pour aborder l'atelier (5 minutes)


musique : berceuse arabe
Asseyez-vous chacun sur une chaise. Nous allons commencer par un exercice qui sert à se
détendre avant de pouvoir faire du théâtre : c'est très important !
Maintenant, fermez les yeux et posez vos mains sur vos cuisses. Attention ! N'ouvrez pas les
yeux avant que je vous le dise.
Jeu 1 dans « Jeux de théâtre »

Nous commencerons tout les jours par un exercice de ce type.

Exercices : dynamique et confiance de groupe (30-35 minutes)


Jeu 6 dans « Jeux de théâtre » (10 minutes)
Fiche 11 dans « Activités théâtrales » (10 minutes)
Jeu 14 dans « Jeux de théâtre » (10-15 minutes)

66
Improvisation (10-15 minutes de préparation, 5 minutes de présentation par groupe, soit 40
minutes au total)
Mettez-vous par groupe de 2 (il devrait y avoir un groupe de 3).
Vous allez tirer au sort un sujet. Je vous laisse 10 minutes pour préparer une petite scène de
5 minutes que vous présenterez devant les autres.

Temps d'échange sur les improvisations (15-20 minutes)


Ce temps doit permettre à chacun de s'exprimer sur ce qu'il a préparé, vu, aimé, pas aimé, fait
autrement......

Proposition pour un spectacle le vendredi soir et info sur la représentation devant l'équipe Cada →
les enfants ont décidé de créer une pièce eux-mêmes. Les improvisations prévues initialement
dans les autres séances seront remplacées par une réflexion sur la pièce qu'ils vont créer.

Détente et relaxation (pas besoin de le faire, les enfants se défoulent de toutes façons après
l'atelier)
Fermez les yeux. Sentez votre respiration, votre ventre se gonfler et se dégonfler.

Pour le lendemain, les enfants doivent réfléchir à des sujets d'improvisation, qui seront mutualisés
et donner à un autre groupe le lendemain (→ pas fait). Ils doivent aussi apprendre leur
« virelangue » pour le lendemain.

Séance 2

Nombre de participants : 9
Durée : 2h

Objectifs :
_ dynamiser le groupe
_ travail sur la concentration
_ gestion de la respiration
_ faire porter sa voix sans crier

67
_ articuler

Déroulement de la séance

Introduction : mise en condition pour commencer la séance et contrôle de la respiration (5


minutes)
musique : berceuse Buuvein Duu
Mettez vous en cercle. Vous pouvez arrêter l'exercice si jamais vous sentez que votre tête se
met à tourner.

Mettez vos mains sur votre ventre. Inspirez par le nez et gonfler votre ventre comme un
ballon. Ensuite, expirez par la bouche, en vidant votre « ballon ». Gardez les épaules décontractées.
(faire un tour dans le cercle pour vérifier que l'exercice est bien effectué : inspiration par le nez,
ventre qui se gonfle, épaules qui ne bougent pas ou très peu.....)

Maintenant, inspirez, bloquez votre respiration pendant 2 secondes puis expirez.

On va ajouter une petite règle : vous devez expirer sur 4 temps, bloquer votre souffle
pendant 2 temps, et expirer sur 8 temps. (montrer l'exemple)

Vous êtes maintenant prêt à jouer !

Exercices : dynamique de groupe, faire porter sa voix, articuler (35-40 minutes)


1- « Le voyage en bus » (fiche 12 dans « Activités théâtrales ») (5-10 minutes)
Installer les chaises 2 par deux comme dans un bus avec une chaise seule à l'avant.

Un chauffeur s'il-vous-plaît ? Tu t'installe sur la chaise devant. Les autres, asseyez-


vous derrière.

Vous roulez sur une route de montagne, avec beaucoup de virage. Quand le virage va
à droite, tout le monde doit se pencher à droite, pareil si le virage tourne à gauche. C'est le chauffeur
qui indique la direction du virage.

Il peut, à tout moment, dire « STOP », et tout le monde doit se pencher en avant, la

68
tête baissée. Après le stop, il doit redémarrer le bus et doit donc dire « ON REPART » et tout le
monde bascule en arrière.

2- « Décontraction faciale » (fiche 83 dans « Activités théâtrales ») (5 minutes)


On remet les chaises en cercle s'il-vous-plaît.

Asseyez-vous, les mains sur les genoux. Faites des grimaces, sans toucher votre
visage avec vos mains. Vous avez le droit de faire des bruits, mais pas trop fort !

Ensuite, bâillez, la bouche grande ouverte.

Je vous laisse discuter pendant 1 minute.

3- « Variation vocale » (5 minutes)

Mettez-vous debout, en cercle.

Avec l'aide de la respiration, comme on l'a travaillé au début, vous devez produire un
son, en le faisant varier d'intensité et de puissance. Par exemple, le son « u », avec un niveau sonore
faible puis fort (montrer l'exemple).

Maintenant, je veux qu'une personne envoie ce son à une autre personne du cercle en
la regardant. Cette personne qui reçoit le son doit le renvoyer à quelqu'un d'autre.

Petite difficulté supplémentaire : la personne qui envoie le son doit le faire varier, et
la personne qui reçoit le son doit le reprendre avec la variation donnée, et le refaire varier avant de
l'envoyer.

4- Virelangues (15 minutes)


Vous avez bien appris vos phrases ?

69
Vous devez dire votre phrase, sans produire de son, tout en cherchant votre partenaire
en lisant sur les lèvres.

Vous avez trouvé votre partenaire ? Vérifions !

Maintenant, je vais vous demander de dire votre phrase, chacun votre tour, d'une
manière différente : le doigt en travers de la bouche (comme un os), en tirant la langue, en souriant,
la bouche en cœur, avec un gros chewing gum qu'on mâche....

Préparation de la pièce – temps d'échange (40 minutes)


Apporter des feuilles et de quoi écrire. A voir : écriture sur ordinateur

Exercice éventuel si le timing le permet :


« La bouteille ivre » (fiche 65 dans « Activités théâtrales ») (5-10 minutes)
Je voudrais un volontaire. Les autres, vous vous mettez en cercle autour de lui/elle,
très serré, presque épaule contre épaule.
La personne au milieu doit fermer ses yeux, les pieds joints, les bras le long du
corps : tu fais comme si tu étais une bouteille. Tu te balance doucement pis tu te laisse tomber,
quand tu veux.
Les autre, vous devez le rattraper et l'envoyer DOUCEMENT vers un autre point du
cercle.
Attention ! Vous devez rester concentré et solidaire !

Détente et relaxation (5 minutes)


Asseyez vous, fermez les yeux. Sentez votre respiration, votre ventre se gonfler et se
dégonfler. Vous cherchez maintenant à développer des supers pouvoirs auditifs ! Écoutez tout les
sons qui vous entoure.

Qu'avez vous entendu ?

Séance 3

Nombre de participants : 9

70
Durée : 2h

Objectifs :
_ faire passer un message par les gestes et les émotions
_ se positionner sur scène
_ camper un personnage

Déroulement de la séance

Introduction : mise en condition pour commencer la séance et contrôle de la respiration (5


minutes)
musique : berceuse Baiushkibaiu
Mettez vous en cercle. Vous pouvez arrêter l'exercice si jamais vous sentez que votre tête se
met à tourner.

Mettez vos mains sur votre ventre. Inspirez par le nez et gonfler votre ventre comme un
ballon. Ensuite, expirez par la bouche, en vidant votre « ballon ». Gardez les épaules décontractées.
(faire un tour dans le cercle pour vérifier que l'exercice est bien effectué : inspiration par le nez,
ventre qui se gonfle, épaules qui ne bougent pas ou très peu.....)

Maintenant, inspirez, bloquez votre respiration pendant 2 secondes puis expirez.

On va ajouter une petite règle : vous devez expirer sur 4 temps, bloquer votre souffle
pendant 2 temps, et expirer sur 8 temps. (montrer l'exemple)

Vous êtes maintenant prêt à jouer !

Exercices :
1- camper un personnage : les démarches, les mimiques.... utiliser les personnages de la
pièce

2- travail sur les émotions à partir de « petites cartes émotions » avec un dessin représentant
une émotion. Les enfants doivent faire deviner cette émotion aux autres.

71
Travail sur la pièce – temps d'échange

Détente et relaxation

Séance 4

Nombre de participants : 9
Durée : 2h

Objectifs :
_ mise en scène
_ se déplacer sur scène
_ improviser si besoin

Déroulement de la séance

Exercices : faire porter sa voix, se (dé)placer sur scène, improviser

1- Comprendre le placement sur scène (5 minutes)

Je vais demander à chacun de vous, l'un après l'autre, de vous placer sur scène, dos
au public et de dire quelque chose.

Faites la même chose, face au public. Qu'est ce qui est le mieux ?

2- Le zapping (5 minutes de préparation - 15 minutes)

J'aime beaucoup zapper d'une chaîne de télévision à une autre. Vous êtes ces
chaînes ! Vous allez chacun choisir un thème (chaîne musicale, chaîne météo, chaîne d'information,
chaîne de comédie, chaîne de cuisine, chaîne sport), et préparer 5 minutes de programme télé.

Maintenant, je vous donne à chacun un numéro. Ce numéro, c'est celui de votre


chaîne. Quand j'annonce votre numéro, vous vous levez et vous parlez. Quand je décide de changer
de chaîne je dis un autre numéro : celui qui était debout doit s’asseoir et ne plus parler alors que

72
l'autre se lève et commence à parler.

Si j'annonce des dizaines, cela veut dire que je regarde 2 chaînes en même temps ! Il
doit donc y avoir 2 personnes qui se lèvent et parlent. (donner un exemple)

Travail sur la pièce – temps d'échange


Les enfants vont choisir leur personnage et commencer les répétitions. Après chaque
passage d'un enfant, les autres pourront donner leur avis sur les prestations, ce qui est bien, moins
bien, à changer...

Répétition générale devant l'équipe du CADA

Séance 5

Répétition générale et intégration des personnes qui étaient absentes.

Représentation devant les parents

73
Annexe 4 : Préparation des séances pour les adolescents, modifiée au fur et à mesure de l'avancée
des ateliers.

Légande : tout les exercices surlignés et en rouge n'ont pas été effectué, les modifications sont
uniquement surlignées en jaune.

Séance 1

Nombre de participants : 4 ou 5 → en réalité 2


Durée : 2h → 1h30

Objectifs :
_ dynamiser le groupe
_ découvrir l'improvisation
_ faire appel à l'imagination
_ prendre conscience de son corps

Déroulement de la séance

Introduction : mise en condition pour aborder l'atelier (5 minutes)


Avant de commencer, il faut être détendu. Asseyez-vous sur une chaise, le dos contre
le dossier, et les pieds bien à plat sur le sol.

Jeu 1, sans musique

« Je suis détendu et plein d'énergie »

Proposition pour un spectacle le vendredi soir et info sur la représentation devant l'équipe Cada.
Si ok, demander ce qu'ils préfèrent entre créer eux même une pièce ou avoir un dialogue pré-défini
à apprendre.

Exercices : confiance et dynamique de groupe (35 minutes)

1- « Regarder autrement » (fiche 61, p.149 dans « Activités théâtrales ») (15 minutes)

74
Musique : Finntroll

Déplacez vous dans la salle, comme si vous n'étiez jamais venu. Regardez la,
observez la, sous tout les angles. Ne vous occupez pas des autres.

Maintenant, vous découvrez votre propre corps, sa composition, ses membres : soyez
curieux de vous même !

Vous commencez à voir les autres qui vous entoure. Cherchez des angles de vues
inhabituels pour les découvrir, dites leur bonjour (sans parler), examinez les....

2- « Les statues personnages » (fiche 25, p.69 dans « Activités théâtrales ») (5 à 10 minutes)

Continuez à vous déplacer dans la salle. Dans cet exercice, vous allez devoir vous
figer comme des statues pour représenter le mot que je vais vous dire. Ensuite, je vous direz quand
vous pourrez de nouveau vous déplacer. (« maison », « chat », « oiseau »)

Maintenant, vous pouvez vous mettre ensemble pour représenter le mot !


(« éléphant », « soleil », « étoile »)

3- « La pâte à modeler » (fiche 69, p.158 dans « Activités théâtrales ») (10 minutes)

Mettez-vous avec quelqu'un. L'un sera sculpteur et l'autre un gros pain de pâte à
modeler. Le sculpteur doit modeler la pâte, déplacer les parties du corps de la pâte à modeler qui
doit garder les positions données par le sculpteur.

Je demande au sculpteur de ne pas trop déséquilibrer son œuvre, elle risque de


tomber !

Le sculpteur peut-il me décrire son œuvre ?

On inverse les rôles !

Improvisation (10-15 minutes de préparation, 5 minutes de présentation par groupe, soit 20-25

75
minutes au total)

Mettez-vous par groupe de 2 (il devrait y avoir un groupe de 3).


Vous allez tirer au sort un sujet. Je vous laisse 10 minutes pour préparer une petite scène de
5 minutes que vous présenterez devant les autres.

Temps d'échange
Ce temps doit permettre à chacun de s'exprimer sur ce qu'il a préparé, vu, aimé, pas aimé, fait
autrement......

Pour le lendemain, les ados doivent réfléchir à des sujets d'improvisation, qui seront mutualisés
et donner à un autre groupe le lendemain.

Séance 2

Du fait de la présence d'une seule personne, la séance a été annulée : seul le choix du texte
pour la représentation a été décidé. Les éléments de travail de la séance 2 seront traité
pendant la séance 4

Nombre de participants : 2 ou 3
Durée : 2h

Objectifs :
_ dynamiser le groupe
_ trouver sa place au sein du groupe
_ faire passer un message par le geste
_ camper un personnage

Déroulement de la séance

Introduction : mise en condition pour aborder l'atelier (2 minutes)

76
« A la poubelle ! » (fiche 28, p,72 dans « Activités théâtrales »)
matériel : une poubelle
En cercle
Cet exercice sert de rappel de la séance précédente en ce qui concerne la dynamique
de groupe.

Mettez votre main droite devant vous, la paume tournée vers le haut. Imaginez
qu'une boule se forme dans la paume de votre main, avec toutes les énergies et pensées négatives
que vous avez, telles que la peur, le stress, la fatigue, les mauvaises notes.....

Nous allons tout jeter à la poubelle ! Nous allons compter jusqu'à 5, ensemble, et à
chaque chiffre, on jette ce qu'on a dans la main droite.

On fait pareil avec la main gauche. Le pied droit. Le pied gauche.

On recommence avec la main droite en comptant jusqu'à 4. La main gauche. Le pied


droit. Le pied gauche.

Jusqu'à 3. Jusqu'à 2. Jusqu'à 1.

Maintenant, je vais vider la poubelle par la fenêtre !

Exercices : la gestuelle pour se faire comprendre

1- Présentation gestuelle (5 minutes)

On reste en cercle. Vous allez devoir dire quelque chose aux autres sans parler !
Uniquement par des gestes. Votre âge, vos activités favorites, ce que vous aimez, ce que vous
n'aimez pas.

2- Dans le parc (10 minutes)


matériel : un journal

Une personne vient s’asseoir sur la chaise.

77
Tu es dans un parc, tu aimerai lire tranquillement mais quelque chose autour de toi te
perturbe. Tu dois nous faire deviner, par tes actions, ce qui t'embête.

Le public doit attendre au moins 1 minutes avant de dire ce qu'ils pensent.

Recommencer l'exercice avec tout les participants

3- Jeu de miroir (5 minutes)


Par groupe de 2 ou groupe au complet

Mettez vous face à face. L'un de vous se regarde dans un miroir (représenté par
l'autre/les autres). Le miroir doit suivre fidèlement les actions de la personne qui se regarde.
Le mieux, pour réaliser cet exercice, est de commencer avec des gestes très lents
pour que le miroir.
Attention, il est interdit de parler !

Improvisation (10-15 minutes de préparation, 5 minutes de présentation par groupe, soit 20-25
minutes au total)

Comme hier sauf que je vous impose des personnages que vous allez tirer au sort !

Réflexion sur la pièce à jouer

Séance 3

Nombre de participants : 2 ou 3 → 1 personne présente


Durée : 2h → en réalité 30 minutes

Objectifs : travailler sur la diction et la façon de dire un texte

78
Déroulement de la séance

Introduction

Exercice :

L'Avare de Molière

« Au voleur, au voleur, à l'assassin, au meurtrier. Justice, juste Ciel.


Je suis perdu, je suis assassiné, on m'a coupé la gorge, on m'a dérobé mon
argent. » (L'Avare, acte IV, scène 7)

Prononcer la réplique avec des intonations et des styles différents.

Improvisation

Temps d'échange

Détente et relaxation

Séance 4

Nombre de participants : 2 → 1 personne présente


Durée : 2h

Objectifs : _savoir se faire comprendre sans parler


_prendre confiance en son partenaire de jeu
_répétition générale

Déroulement de la séance

79
Exercices : la gestuelle pour se faire comprendre

1- Présentation gestuelle (5 minutes)

On reste en cercle. Vous allez devoir dire quelque chose aux autres sans parler !
Uniquement par des gestes. Votre âge, vos activités favorites, ce que vous aimez, ce que vous
n'aimez pas.

2- Dans le parc (10 minutes)


matériel : un journal

Une personne vient s’asseoir sur la chaise.


Tu es dans un parc, tu aimerai lire tranquillement mais quelque chose autour de toi te
perturbe. Tu dois nous faire deviner, par tes actions, ce qui t'embête.

Le public doit attendre au moins 1 minutes avant de dire ce qu'ils pensent.

Recommencer l'exercice avec tout les participants

3- Jeu de miroir (5 minutes)


Par groupe de 2 ou groupe au complet

Mettez vous face à face. L'un de vous se regarde dans un miroir (représenté par
l'autre/les autres). Le miroir doit suivre fidèlement les actions de la personne qui se regarde.
Le mieux, pour réaliser cet exercice, est de commencer avec des gestes très lents
pour que le miroir.
Attention, il est interdit de parler !

Improvisation

Temps d'échange

Détente et relaxation

80
Répétition générale devant l'équipe du CADA

Séance 5

Nombre de participants : 2
Durée : 2h

Répétition de la pièce pour la représentation du soir

Exercice : Jouez la pièce sans parler ! Uniquement par les gestes.

Représentation devant les parents

81
ANNEXE 5 : Exemples de virelangues et trompe-oreilles

Virelangues :

_ As-tu vu le ver vert allant vers le verre en verre vert ?

_ Je veux et j’exige d’exquises excuses.

_ Le fisc fixe exprès chaque taxe fixes et excessives exclusivement au luxe et à l’exquis.

_ Natacha n’attacha pas son chat Pacha qui s’échappa. Cela fâcha Sacha qui chassa Natacha.

_ Si ton tonton tond ton tonton, ton tonton sera tondu.

_ Mais qui scie un saucisson avec une scie ?

Trompe-oreilles :
_ Tas de riz, tas de rats.
Tas de riz tentant, tas de rats tentés,
Tas de riz tentant tenta tas de rats tentés,
Tas de rats tentés tâta tas de riz tentant.

_ L'eusses-tu cru mon ami quand ton père fut là peint il était trop homme de terre pour aimer l'état
marin ?

_ À l'étranger, j'ai mangé des mets locaux (l'interlocuteur comprend "des mélocos" et demande ce
dont il s'agit)

_ Ôte ta gaine Berthe, que je tâte. (prononcé rapidement, cette phrase ressemble à de l'allemand)

_ La cavale au Valach avala l’eau du lac, et l’eau du lac qu’avala la cavale à Valach, lava la cavale
au Valach.

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ANNEXE 6 : Planche de dessins utilisée dans le travail sur les émotions pendant la semaine théâtre du
CADA

PIERRÉ, M. & TREFFANDIER, F. (2012), Jeux de théâtre, Grenoble : PUG, p.77

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TABLE DES MATIÈRES
Introduction..........................................................................................................................................1
A.Contextualisation.............................................................................................................................4
1.Présentation du stage au CADA..................................................................................................4
2.Le CADA et ses résidents............................................................................................................7
3.La semaine théâtre enfants et adolescents au CADA..................................................................9
4.Le projet d'atelier théâtre pour adultes.......................................................................................12
5.Présentation rapide des contextes d'interventions précédents....................................................14
a. Le CUEFEE..........................................................................................................................14
b.L'université de Cân Thoʼ......................................................................................................14
c.L'association Langues en Scène............................................................................................15
6.Un outil pédagogique théâtre FLE ?..........................................................................................15
B.Théories et analyses.......................................................................................................................16
1.Formel versus informel..............................................................................................................17
a.Définitions.............................................................................................................................17
b.Un apprentissage inconscient ?.............................................................................................19
c.Un changement de rapport enseignant-apprenant et apprenant-atelier.................................21
d.Proposer ou imposer ?...........................................................................................................23
2.Un travail sur l'expression orale et le non-dit............................................................................26
a.Une liberté d'expression........................................................................................................27
b.Le travail sur la prononciation..............................................................................................30
c.La prosodie en langue étrangère............................................................................................32
3.Le geste et la gestuelle...............................................................................................................33
a.Définitions.............................................................................................................................34
b.« non dit » versus « non verbal »..........................................................................................34
c.Le geste comme signe linguistique ?.....................................................................................35
d.Les gestes dans l'enseignement-apprentissage du FLE.........................................................39
e.Le geste culturel....................................................................................................................41
4.Le théâtre : un outil pour se connaître et être reconnu ?............................................................43
a.Pour l'animateur, un travail de mise en confiance.................................................................44
b.Un travail sur soi...................................................................................................................44
c.L'effet de masque...................................................................................................................46
d.Au delà du soi.......................................................................................................................48
e.Se découvrir dans l'activité de groupe...................................................................................50
Conclusion..........................................................................................................................................51
Références bibliographiques – sitographiques...................................................................................54
Annexes..............................................................................................................................................56
1.Première page de l'outil créé pour la sortie au Pôle Emploi.......................................................57
2.« Les difficultés des demandeurs d'asile »..................................................................................58
3.Préparation des séances pour les enfants....................................................................................66
4. Préparation des séances pour les adolescents............................................................................74
5.Exemples de Vire-langues et Trompe-oreilles............................................................................82
6.Planche de dessins pour le travail sur les émotions....................................................................83

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