Mouvements et Enjeux Sociaux - Revue Internationale des Dynamiques Sociales 1
M.E.S., Numéro 125, Novembre - Décembre 2022
https://www.mesrids.org
Dépôt légal : MR 3.02103.57117
N°ISSN (en ligne) : 2790-3109
N°ISSN (impr.) : 2790-3095
Mise en ligne le 02 novembre 2022
Revue Internationale des Dynamiques Sociales
Mouvements et Enjeux Sociaux
Kinshasa, novembre - décembre 2022
MES-RIDS, nO125, Novembre - Décembre 2022 www.mesrids.org
Mouvements et Enjeux Sociaux - Revue Internationale des Dynamiques Sociales 295
L’IMPACT DE LA REFORME DE LA LOI N° 16/008 DU 15 JUILLET 2016
MODIFIANT ET COMPLETANT LA LOI N°87-010 DU 1er AOUT 1987
PORTANT CODE DE LA FAMILLE RELATIVEMENT A LA NOTION DU
MENAGE ET DE L’AUTORISATION MARITALE AU REGARD DES
CULTURES, TRADITIONS ET MENTALITE CONGOLAISES DU
MARIAGE ET DE LA FAMILLE
par
Richard MUKWALA MUZAMA
Professeur Associé,
Avocat près la Cour
Fils KINONO NZESA
Apprenant en DES
(Tous) Faculté de Droit, Université de Kinshasa
Résumé
Une réforme digne de ce nom n’a pour objectif que d’apporter des réponses adéquates aux
aspirations sociales de la population concernée en s’abstenant à des considérations simplistes, car
la vie de la famille et du mariage est largement régie par les règles coutumières, morales, sociales,
etc.
En effet, une réforme qui ne correspondrait pas aux réalités sociales ne serait qu’un décor
de théâtre d’une pièce qui se jouerait selon d’autres règles. Certes, le législateur de la loi n°16/008
du 15 juillet 2016 modifiant et complétant la loi n°87-010 du 1er août 1987 portant code de la
famille a théoriquement supprimé l’autorisation maritale exigée à la femme mariée pour tous les
actes juridiques à accomplir par cette dernière et imposé en lieu et place l’accord mutuel de deux
époux pour tous les actes juridiques dans lesquels ils s’obligent individuellement ou
collectivement ; il consacre aussi le principe de la cogestion du ménage par ces derniers. Dans la
pratique, ces éléments de réforme ont difficile à trouver échos favorables au regard des mœurs,
coutumes et réalités congolaises du mariage et de la famille. La meilleure réforme devrait se faire
précéder des enquêtes de terrain en vue de concilier la théorie à la réalité. Agir autrement
équivaudrait à mettre à la disposition de la communauté une œuvre constamment vouée à l’échec.
Mots-clés : impact, reforme, code de famille, autorisation maritale, mentalités congolaises
Abstract :
A reform worthy of the name aims only to provide adequate responses to the social
aspirations of the population concerned by refraining from simplistic considerations, because the
life of the family and of marriage is largely governed by customary rules. , moral, social, etc.
Indeed, a reform that does not correspond to social realities would only be a stage set for
a play that would be played according to other rules. Admittedly, the legislator of Law No. 16/008
of July 15, 2016 amending and supplementing Law No. 87-010 of August 1, 1987 on the Family
Code theoretically abolished the marital authorization required of married women for all legal acts
to be performed by the latter and imposed instead the mutual agreement of two spouses for all
legal acts in which they bind themselves individually or collectively; it also enshrines the principle
of co-management of the household by the latter. In practice, these elements of reform have difficult
to find favorable echoes with regard to the mores, customs and Congolese realities of marriage and
the family. The best reform should be preceded by field surveys in order to reconcile theory with
reality. To do otherwise would be to make available to the community a work that is constantly
doomed to failure.
Keywords : impact, reform, family code, marital authorization, Congolese mentalities
MES-RIDS, nO125, Novembre - Décembre 2022 www.mesrids.org
Mouvements et Enjeux Sociaux - Revue Internationale des Dynamiques Sociales 296
INTRODUCTION
Les changements dans les lois touchant au domaine du couple et de la famille
ouvrent de plus en plus la voie à de multiples conflits conduisant souvent au divorce et
dans la moindre mesure, à l’instabilité de l’association conjugale qu’est le mariage, ainsi
qu’aux liens familiaux.
En République Démocratique du Congo, la suppression de l’autorisation
maritale, la banalisation du pouvoir du mari en tant que chef du ménage, l’instauration
du principe de direction conjointe de la gestion du ménage par les époux et le recours
direct au juge dans les affaires du couple en cas de désaccord persistant des époux, sont
autant de questions qui ne favorisent pas un climat apaisé entre d’une part, les époux
eux-mêmes, et d’autre part, l’épouse et les membres de famille de son époux. C’est dans
ce contexte que les voix s’élèvent pour stigmatiser le rôle que doivent effectivement
jouer les époux au sein du ménage, faisant ainsi référence aux prescrits des dispositions
des articles 444, 445, 448, 449 et 450 de la loi n°16/008 du 15 juillet 2016 modifiant et
complétant la loi n° 87-010 du 1er août 1987 portant code de la Famille.
En effet, la lecture minutieuse des articles précités laisse transparaitre les germes
de conflictualité qui en résulteraient à l’issue de son application, pour la simple et bonne
raison que suivant la culture et tradition congolaises du mariage et de la famille, le mari
étant chef du mariage assure la protection et la direction de celui-ci, lequel, à en croire
la loi sous examen désigne les époux, leurs enfants non mariés à charge, ainsi que tous
ceux envers qui les époux sont tenus d’une obligation alimentaire, à condition que ces
derniers demeurent régulièrement dans la maison conjugale et soient inscrits dans le
livret de ménage.
Outre les personnes concernées par le terme ménage, le maintien constant de la
cohésion des membres du groupe qui caractérisent l’africain en général et le congolais
en particulier, la protection du ménage, la sauvegarde de l’unité et la stabilité du mariage
prônés par le législateur congolais à travers le code de la famille, les membres de famille
autres que ceux concernés par le ménage ne sauraient être indifférents face à
l’application au sein du ménage des théories juridiques considérées contraires aux
réalités sociologiques congolaises de la famille et du mariage.
Aussi, le législateur de la loi no 87-010 du 1er août 1987 portant code de la famille
soumettait le recours au Tribunal par la femme mariée à une autorisation maritale
préalable pour tous les actes juridiques dans lesquels elle s’obligeait à une prestation
qu’elle devait effectuer en personne (1). De même, en cas de refus du mari à autoriser sa
femme, cette dernière avait le droit de recourir au tribunal de paix pour obtenir cette
autorisation, mais il lui était également exigé l’avis préalable du conseil de famille. Ce
double verrou à la fois du mari et du conseil de famille témoignait le souci du législateur
de 1987 de protéger l’institution mariage.
En revanche, la réforme de 2016 contraint les deux époux à s’accorder pour tous
les actes juridiques dans lesquels ils d’obligent à une prestation qu’ils doivent effectuer
et qu’en cas de désaccord persistant, le conjoint lésé saisit le Tribunal de paix1. Comme
on peut s’en rendre compte, contrairement au législateur de 1987, celui de 2016 a
supprimé l’autorisation maritale et l’avis préalable du conseil de famille.
Tout en reconnaissant à juste titre le rôle joué par la femme au sein du ménage et
cela, à la fois comme épouse et mère, il convient de relever que peu importe les
considérations religieuses, économiques et intellectuelles des époux, il s’observe fort
malheureusement que nonobstant les réformes initiées en la matière, la direction du
ménage est assurée par le mari au sein des couples et la femme mariée obtient toujours
1
Articles 448 et 449 du Code de la Famille
MES-RIDS, nO125, Novembre - Décembre 2022 www.mesrids.org
Mouvements et Enjeux Sociaux - Revue Internationale des Dynamiques Sociales 297
l’autorisation de ce dernier pour accomplir tous les actes juridiques dans la société
Congolaise.
Toute chose restant égale par ailleurs, comment peut-on d’un côté institué le mari
comme étant chef du ménage et de l’autre côté, confier la direction morale et la gestion
financière et matérielle de ce même ménage aux deux époux et ce, au mépris de la
mentalité congolaise et de l’objectif primordial du mariage qu’est la stabilité de l’union
conjugale.
Certes, le droit contribue au développement de la société, mais pour y parvenir,
il doit être conforme et adapté à la mentalité et cultures de ses membres au risque de
voir les règles édictées tomber constamment en désuétude.
Ainsi, un regard rétrospectif renseigne que partant de la société traditionnelle en
passant par la loi n°87-010 du 1er août 1987 jusqu’à sa modification par la loi n°16/008
du 15 Juillet 2016, le mari exerce pleinement son pouvoir de chef du ménage; il assure
sans entrave la direction de ce dernier et la protection de sa femme. Il bénéficie
également de l’obéissance de celle-ci qui continue sans désemparer à obtenir son
autorisation avant de poser non seulement tous les actes juridiques, mais aussi n’importe
quel autre acte dans sa vie quotidienne au sein du ménage et cela, dans le but de
sauvegarder la cohésion sociale ainsi que la stabilité de l’union conjugale.
Sur le plan théorique, les réformes initiées par le législateur admettent à travers
l’article 445 que les époux assurent conjointement la direction du ménage, principe qui
demeure à notre avis un vœu pieu quand on sait que dans la mentalité congolaise, seul
le mari qui, du reste, verse la dot dans la famille de l’épouse et est en même temps
institué chef du ménage et représentant de celui-ci vis-à-vis des tiers.
Sur cette lancée s’ajoutent les conceptions diamétralement opposées du mariage
dans la société traditionnelle d’avec celles prônées par la loi portant code de la famille
sus évoquée. Pour rappel, à travers les articles 444 et 445 de la loi n°87-010 du 1er août
1987, le législateur Congolais place le mari chef du ménage qui assure protection à sa
femme et cette dernière lui doit obéissance et que, sous la direction du mari, les époux
concourent dans l’intérêt du ménage, à assurer sa direction morale et matérielle.2
De l’interprétation de ces deux dispositions, il se dégage clairement que d’une
part, la direction du ménage et la protection de la femme sont dévolues à l’époux, et
d’autre part, bien que les deux époux concourent dans l’intérêt du ménage, à assurer sa
direction morale et matérielle, mais tout cela se fait bien compris sous la direction du
mari.
Par contre, à en croire le contenu des réformes de la loi n°16/008 du 15 juillet
2016, le pouvoir de chef de ménage conféré au mari à l’article 444, alinéa 1er n’est que
protocolaire, car la direction de ce dernier est désormais assurée de manière conjointe3.
C’est la thèse sus évoquée qui constitue sans nul doute le point d’achoppement.
En effet, sur le plan pratique, il est inconcevable d’affirmer que la direction du ménage
soit assurée conjointement par les deux époux. Il s’agit là à coup sûr, d’une meilleure
façon de favoriser l’émergence du ménage bicéphale ayant à sa tête deux chefs, mari et
femme, ce qui invite à imaginer la suite.
De ce qui précède, quelques questions méritent d’être posées dont celles de
savoir, six (6) ans après la promulgation de la loi n°16/008 du 15 juillet 2016 modifiant
et complétant la loi no 87-010 du 1er août 1987 portant code de la famille, peut-on
réellement admettre que les innovations apportées récoltent véritablement un franc
succès au sein des ménages congolais ?; Quel est le niveau d’application effective sur
2
Articles 444 et 445 de la loi n°87-010 du 1er aout 1987 portant code de la famille.
3
Articles 444 et 445 de la loi n°87-010 du 1er aout 1987 telle que modifiée et complétée par la loi n°16/008
du 15 juillet 2016.
MES-RIDS, nO125, Novembre - Décembre 2022 www.mesrids.org
Mouvements et Enjeux Sociaux - Revue Internationale des Dynamiques Sociales 298
terrain c’est-à-dire, le comportement des époux au sein des ménages sur les questions se
rapportant à l’autorisation maritale, au pouvoir du mari, à la direction et gestion du
ménage ?; Quelle est l’évolution historique des thématiques soulevées par la présente
recherche et enfin quelles sont les controverses qui émaillent ces innovations ? Ce sont
là les questions auxquelles nous essayerons d’apporter notre contribution dans le cadre
de la présente réflexion.
I. DU MENAGE ET DE L’AUTORISATION MARITALE SUIVANT LA LOI
N°16/008 DU 15 JUILLET 2016 MODIFIANT ET COMPLETANT LA LOI N°87-
010 DU 1ER AOUT 1987 PORTANT CODE DE LA FAMILLE.
Deux questions importantes occupent une place de choix dans ce point relatif à
la réforme du code de la famille, à savoir le rappel historique et l’analyse des éléments
fondamentaux de la réforme, ainsi que les forces et faiblesses de ladite réforme sur les
questions du ménage et de l’autorisation maritale.
1.1. Bref rappel historique
Dans son exposé de motifs, le législateur de 2016 soutient que c’est dans le souci
de concilier les éléments du droit moderne et ceux du droit traditionnel en vue de mieux
refléter les aspirations légitimes d’un peuple en pleine mutation, notamment dans le
domaine du droit de la famille, du droit des successions et du droit des libertés que
s’inscrit les présentes réformes.
Ainsi, poursuit-il, après une évaluation, il s’est avéré que plus de deux décennies
après l’application du code de la famille, soit du 1er août 1988 au 15 juillet 2016, plusieurs
faiblesses, spécifiquement sur le statut de la femme mariée et de l’enfant ont été décelées.
S’agissant particulièrement de la femme mariée, le législateur de 2016 a mis un
accent sur sa capacité juridique que le code de la famille dans son aspect original, a, entre
autres limité d’une manière excessive et discriminatoire soutenant que tout acte
juridique à poser par elle était subordonné à l’autorisation maritale4. C’est au regard des
faiblesses sus-énumérées qu’il a paru nécessaire d’adapter le code congolais de la famille
aux innovations apportées par la Constitution du 18 février 2006 et à l’évolution de la
législation nationale, en l’occurrence la loi n°09/001 du 1er janvier 2009 portant
protection de l’enfant et la loi n°15/013 du 1er août 2015 portant modalités d’application
des droits de la femme et de la parité.
Outre les lois nationales précitées ayant motivé la réforme du code de la famille,
les obligations souscrites par la République Démocratique du Congo se rapportant aux
deux pactes internationaux de 1966 relatifs aux droits de l’homme, à la charte africaine
des droits de l’homme et des peuples, à la convention sur l’élimination de toutes les
formes de discrimination à l’égard de la femme et celle relative aux droits de l’enfant ont
constitué le deuxième palier de ses motivations qui seront analysées dans les lignent qui
suivent.
1.2. Analyse objective des éléments fondamentaux ayant milité en faveur de la
réforme des questions relatives au ménage et à l’autorisation maritale par la loi
n°16/008 du 15 juillet 2016.
Pour mémoire, avant l’indépendance de la République Démocratique du Congo
et quelques années après celle-ci, le dualisme juridique avait caractérisé le droit
congolais de la famille jusqu’en 1967. C’est à la faveur de la Constitution de 1967 et la
réforme de 1968 que le législateur exprima l’impérieuse nécessité d’unifier le droit des
personnes et de la famille, à l’effet de se libérer de l’emprise de la législation coloniale.
Parmi les objectifs poursuivis par les législateurs de 1967 et 1968, c’est
notamment permettre au droit de la famille de contribuer comme instrument de
4
Exposé de motifs de la loi n°87-010 du 1er août 1987 portant code de la famille.
MES-RIDS, nO125, Novembre - Décembre 2022 www.mesrids.org
Mouvements et Enjeux Sociaux - Revue Internationale des Dynamiques Sociales 299
développement et d’unité nationale, mettre un terme au dualisme juridique considéré
comme un facteur de discrimination des citoyens contraire à l’égalité tous devant la loi
et élaborer un droit conforme à la mentalité et à l’impératif du développement.5
La volonté politique exprimée par le législateur pré rappelé a abouti par la mise
sur pied, en 1971, d’une commission de réforme et d’unification du droit congolais,
appelée à ce jour commission permanente de réforme du droit congolais, dont l’idée
maitresse lui dévolue est comme explicité ci-haut : « d’élaborer des règles de droit civil
qui s’inspirent des réalités congolaises et qui répondent à l’impératif social ; des lois qui
soient relatives au physique du pays, à son climat, au genre de vie de son peuple ».
En d’autres termes, le souci du constituant de 1967, était de voir constamment les
membres de la commission permanente de réforme du droit congolais s’inspirer, lors
desdites reformes, aux réalités sociales congolaises, répondant obligatoirement à son
mental, à sa psychologie, aux lois qui tiennent compte de la configuration géographique
de la République Démocratique du Congo et aux modes de vie des congolais.
Au regard des motivations soulevées par le législateur congolais, une seule
question heurte notre conscience, à savoir est-ce le législateur de 2016, a réellement pris
en compte tous les objectifs fixés à la commission précitée ?
II. POSITION DE LA CONSTITUTION DU 18 FEVRIER 2006 ET DE LA LOI
N°15/013 DU 1ER AOUT 2015 PORTANT MODALITES D’APPLICATION DES
DROITS DE LA FEMME ET DE LA PARITE.
2.1. Droits de la femme dans la constitution du 18 février 2006 telle que modifiée à ce
jour
Dans son préambule, la constitution de la République Démocratique du Congo
réaffirme le droit inaliénable et imprescriptible des congolais à s’organiser librement et
en vue de développer leur vie politique, économique, sociale et culturelle, selon leur
génie propre et cela, conscients de leurs responsabilités devant Dieu, la Nation, l’Afrique
et le monde.6
En effet, à travers cette déclaration considérée en quelque sorte comme étant un
serment, le peuple congolais manifeste sa ferme détermination à organiser la vie
nationale dans toutes ses dimensions en se fondant sur l’ingéniosité congolaise, mettant
à l’avant plan le développement intégral du peuple congolais. Fort malheureusement,
dans la pratique, le développement de la RDC peine à se concrétiser.
Concernant les droits de la femme, le constituant de 2006 n’a pas de manière
spécifique abordé les questions relatives au ménage et à l’autorisation maritale, mais en
son article 40, il précise que : « tout individu a le droit se marier avec la personne de son
choix, de sexe opposé, et de fonder une famille ; la famille, cellule de base de la
communauté humaine, est organisée de manière à assurer son unité, sa stabilité et sa
protection. Elle est placée sous la protection des pouvoirs publics ; les soins et l’éducation
à donner aux enfants constituent pour les parents, un droit naturel et un devoir qu’ils
exercent sous la surveillance et avec l’aide des pouvoirs publics. Les enfants ont le devoir
d’assister leurs parents et la loi fixe les règles sur le mariage et l’organisation de la
famille».7
Autrement dit, tout en reconnaissant la portée réelle de la famille en tant que
cellule sociale da base de toute société humaine, le législateur a imprimé à ladite
5
BOMPAKA NKEYI, Cours de l’évolution du droit de famille, troisième graduat, Faculté de Droit, 2002,
P.18
6
Préambule de la Constitution du 18 février 2006 telle que modifiée par la loi n°11/002 du 20 janvier 2011
portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo.
7
Art. 40 de la Constitution du 18 février 2006 telle que modifiée par la loi n°11/002 du 20 janvier 2011
portant révision de certains articles de la Constitution de la République Démocratique du Congo.
MES-RIDS, nO125, Novembre - Décembre 2022 www.mesrids.org
Mouvements et Enjeux Sociaux - Revue Internationale des Dynamiques Sociales 300
structure sociale un traitement décent et protecteur, visant ainsi son unité, sa stabilité et
sa protection. C’est dans cette optique qu’il reconnait par la même occasion, à la loi le
pouvoir de fixer les règles sur le mariage et l’organisation de la famille, en l’espèce, la loi
n°87-010 du 1er août 1987 portant code de la famille telle que modifiée à ce jour.
De l’analyse de l’article 40 de la constitution en présence, il se révèle que hormis
l’impérieuse nécessité d’assurer l’unité, la stabilité et la protection de la famille, du reste,
placée sous la protection des pouvoirs publics, nulle part allusion est faite à une
quelconque discrimination aux droits de la femme mariée.
En définitive, seul l’alinéa 5 de l’article 40 sous examen justifie la nécessite de la
réforme de 2016. Il s’agit là d’une opportunité de forme et non pas de fond laissée à
l’avantage du législateur de 2016.
2.2. Droits de la femme mariée au regard de la loi n°15/013 du 1er août 2015 portant
modalités d’application des droits de la femme et de la parité.
La loi sous examen fixe les modalités d’application des droits de la femme et de
la parité (homme-femme) dans les domaines politique, administratif, économique et
social, culturel, judiciaire et sécuritaire.
En réalité, elle consacre des droits en rapport avec l’élimination de toutes formes
de discrimination à l’égard de la femme ainsi que la protection et la promotion de ses
droits. Le total épanouissement et la pleine participation de la femme au développement
de la Nation. Cette loi protège la femme contre les violences dont elle est souvent victime
dans la vie publique et privée ; elle soutient le principe de représentation équitable de la
femme au sein des institutions nationales, provinciales et locales.
Pour ce qui est de la participation de la femme dans le domaine économique, la
vie politique et les programmes de développement, le principe égalitaire, parité homme-
femme à l’accès aux ressources et avantages mérite d’être appliqué. C’est dans ce cadre
que le secteur privé est appelé à promouvoir en son sein, la participation de la femme
aux instances de prise de décision.8
L’article 2 de la loi sous examen a bel et bien énuméré son champ d’application
regroupant le domaine de la vie nationale, en l’occurrence les domaines politique,
administratif, économique, social, culturel, judiciaire et sécuritaire.
En effet, après analyse, il s’avère que la loi n°15/013 du 1er août 2015 portant
modalités d’application des droits de la femme et de la parité plaide plutôt pour la
représentation de la femme dans les domaines pré rappelés qui seront examinés ci-
dessous. La vie du ménage, les relations inter personnelles des époux n’ont pas été
épinglées de manière spécifique.
- De la représentation de la femme dans les domaines politique et administratif.
A ce niveau, la loi pose le principe égalitaire dans l’exercice de l’activité politique
et administrative dont jouissent l’homme et la femme, car il est stipulé clairement que
« l’homme et la femme jouissent de tous les droits politiques. La femme est représentée
d’une manière équitable dans toutes les fonctions nominatives et électives au sein des
institutions nationales, provinciales et locales, en cela y compris les institutions d’appui
à la démocratie, le conseil économique et social, ainsi que les établissements publics et
para étatiques à tous les niveaux9.
A l’en croire, en utilisant le verbe jouir à travers l’alinéa 1er de l’article 4 de la loi
du 1er août 2015, le législateur insinue que les deux êtres humains (homme-femme)
8
Art. 1er de la loi n°15/013 du 1er août 2015 portant modalités d’application des droits de la femme et de la
parité.
9
Art. 4 de la loi n°15/013 du 1er août 2015 portant modalités d’application des droits de la femme et de la
parité.
MES-RIDS, nO125, Novembre - Décembre 2022 www.mesrids.org
Mouvements et Enjeux Sociaux - Revue Internationale des Dynamiques Sociales 301
bénéficient de manière égalitaire des droits politiques, tandis qu’à l’alinéa 2, le verbe
représenter est à notre avis utilisé pour signifier que la présence de la femme à toutes les
fonctions, notamment politique, administrative, judiciaire, etc. constitue une garantie de
la représentation de cette dernière, laquelle agit en ce moment au nom de toutes les
autres.
Ces deux possibilités de jouissance des droits politiques égalitaires, c’est-à-dire
la pleine possibilité leur offerte ainsi que le principe de représentation équitable ou juste
sont à considérer comme étant des opportunités légales que doivent mettre à profit ces
deux semblables afin de jouir desdits droits.
En revanche, si la femme, mieux, les femmes n’éprouvent aucun intérêt pour
exercer les activités politiques ou encore intégrer les institutions nationales, provinciales,
locales et autres, ces vœux exprimés par le législateur à travers les articles 4, 5 et 6
n’auront pas de sens.
- De la participation de la femme dans le domaine économique
La participation de la femme dans le domaine économique est effective, car les
activités économiques dans leurs diversités sont exercées tant par l’homme que par la
femme. En République Démocratique du Congo, la participation de la femme dans ce
domaine n’est plus à démontrer, car en milieu rural, les activités champêtres sont
souvent l’œuvre des femmes, tandis qu’en milieu urbain, les femmes participent dans la
vie économique, notamment dans le commerce, les institutions bancaires et elles ont
toujours eu accès à l’épargne, aux crédits, aux diverses opportunités et aux nouvelles
technologies.
En référence aux prescrits des dispositions des articles 7, 8 et 9 de la loi précitée,
les politiques et programmes économiques de développement de la RDC sont élaborés
et mis en œuvre en tenant compte de la parité homme-femme, lesquels politiques et
programmes de développement doivent assurer à tous, c’est-à-dire à l’homme et à la
femme l’égal accès aux ressources et avantages consécutifs. Le secteur privé doit
promouvoir la participation de la femme aux instances de prise de décision, autrement
dit, ces dispositions prônent la participation et l’apport de la femme dans les prises de
décisions, son point de vue étant requis.
L’Etat est donc invité à garantir le droit de la femme à l’initiative privée, favoriser
l’accès à cette dernière à l’épargne, aux crédits, aux diverses opportunités et aux
nouvelles technologies, à prendre des mesures pour éliminer toute pratique néfaste aux
droits de la femme en matière d’accès à la propriété, à la gestion, à l’administration, à la
jouissance et à la disposition des biens10.
Il convient de relever que le sens des dispositions sus-vantées renseigne que le
législateur plaide ou exhorte l’Etat congolais à prendre de mesures, sinon, à rendre
effective la participation de la femme et cela, de façon égalitaire dans les activités de la
vie économique du pays. Pour ce faire, force est de rappeler que cette participation de la
femme dans la vie économique consacrée le 1er août 2015 a toujours existé, mais de
manière et à de degrés différents. En sus, outre le vœu formulé par le législateur, la
participation de la femme est tributaire à son propre engagement dans ledit domaine.
- De la protection et de la promotion de la femme dans les domaines
socioculturels et de la santé.
Dans ce chapitre, il est fait état du principe d’égalitaire, de chance et d’accès entre
l’homme et la femme en vue de bénéficier des mêmes chances à l’éducation et à la santé,
à l’institutionnalisation du partenariat égalitaire de l’homme et de la femme dans la santé
de reproduction, du choix commun à opérer concernant la méthode de planification
10
Arts. 4, 5 et 6 de la loi n°15/013 du 1er août 2015
MES-RIDS, nO125, Novembre - Décembre 2022 www.mesrids.org
Mouvements et Enjeux Sociaux - Revue Internationale des Dynamiques Sociales 302
familiale qui devra tenir compte de la situation sanitaire de chacun des partenaires.
Aussi, en son article 17, le législateur fait bénéficier à l’homme et à la femme des mêmes
droits et obligations dans leurs rapports familiaux. En d’autres termes, il s’agit de la
consécration de la cogestion du ménage, cadre approprié de l’exercice des rapports
familiaux ; mais dans la formulation de la disposition évoquée, le législateur de la loi
n°15/013 du 1er août 2015 renvoi à la loi n°87-010 du 1er août 1987 portant code de la
famille, en l’occurrence, les questions relatives aux effets du ménage.
Dans le même sens, les articles 18 et 19 de la loi sous examen soutiennent d’une
part que, le droit de la femme au mariage et son plein épanouissement dans le foyer ne
peuvent souffrir d’aucune entrave liée à la dot et d’autre part, en cas de décès, il est
interdit, sous peine de poursuites judiciaires, d’infliger au conjoint survivant des
traitements inhumains, humiliants et dégradants.
L’interprétation de l’article 18 nous fait croire que le législateur du 1er août 2015
ne fait pas allusion au mariage, car en son alinéa 2, l’article 361 de la loi n°16/008 du 15
juillet 2016 modifiant et complétant la loi n°87-010 du 1er août 1987 portant code de la
famille précise que « le mariage ne peut être célébré que si la dot a été effectivement
versée, au moins en partie ». Comment peut-on parler du mariage en République
Démocratique du Congo lorsqu’une des conditions de fond de celui-ci, en l’espèce la dot,
n’est pas versée. Il s’agit là d’une union de fait et non pas du mariage.
En effet, les traditions et cultures congolaises du mariage sont sur ces points
précis contraires à l’idée de parler ou de célébrer mariage sans versement de la dot,
même en partie. En définitive, l’article 18 de la loi du 1er août 2015 a été pris en violation
de l’article 361, alinéa 2 du code de la famille.
En substance, il est interdit de recourir aux rites coutumiers après le décès de l’un
des conjoints sous peine de poursuites judiciaires, c’est-à-dire au risque de subir des
sanctions pénales. A vrai dire, il s’agit là de l’introduction du juge pénal dans les affaires
familiales, du reste la mort qui relève du domaine émotionnel est affectif.
Mais la question qui mérite d’être posée à ce niveau est celle de savoir est-ce que
le juge pénal, sinon le ministère public qui fait application de la procédure inquisitoriale
dans la recherche des infractions, peut-il prendre le risque d’interpeller et condamner
les membres de la famille du conjoint prédécédé ayant procédé à l’application des rites
au conjoint survivant ? Dans la pratique, il est assez rare de voir cette hypothèse se
réaliser.
En sus, quel est le sens donné aux concepts : traitements humiliants, inhumains
et dégradants en cas de prédécès en se situant bien entendu dans le contexte des cultures
et traditions congolaises du prédécès de l’un des conjoints ?
Une fois de plus, il s’agit là d’un vœu pieux qui a difficile à se réaliser pour la
simple et bonne raison que la quasi-totalité des pratiques coutumières observées à
l’occasion de décès ne sont pas contraires à l’ordre public et aux bonnes mœurs tant des
communautés concernées que de l’ensemble des communautés congolaises.
En conclusion, sans entrer au chapitre relatif à la protection et promotion de la
femme dans le domaine judiciaire et sécuritaire, il se dégage que la loi n°15/013 du 1er
août 2015 portant modalités d’application des droits de la femme et de la parité ayant
entre autres motivé la réforme de la loi n°87-010 du 1er août 1987 portant code de la
famille, intervenue le 15 juillet 2016 met plus l’accent sur l’homme et la femme, mais non
pas sur l’époux et l’épouse, moins encore mari et femme mariée et cela peut se vérifier
dans la lecture des articles 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 13, 14 et 17 de ladite loi.
Le législateur n’a pas clairement précisé le concept "femme mariée" de façon
récurrente. Toutefois, à travers l’article 18, il énonce le droit de la femme au mariage tout
en méconnaissant l’exigence de la dot considérée comme l’une des conditions de fond
MES-RIDS, nO125, Novembre - Décembre 2022 www.mesrids.org
Mouvements et Enjeux Sociaux - Revue Internationale des Dynamiques Sociales 303
de ce dernier. D’où, de façon indirecte, il protège la femme vivant dans une union de
fait.
Seul l’article 19 soutient clairement le concept conjoint survivant, mais évoque
par ailleurs des théories qui contredisent les cultures et traditions congolaises sur les
rites traditionnels après le décès de l’un des conjoints.
2.3. Analyse des articles 444, 445, 448 et 450 de la loi n°87-010 du 1er août 1987 telle que
modifiée et complétée par la loi n°16/008 du 15 juillet 2016 portant code de la
famille.
Vingt-huit ans après sa mise en vigueur et soucieux de concilier les éléments du
droit moderne et ceux du droit traditionnel pour mieux refléter les aspirations légitimes
d’un peuple en pleine mutation, notamment dans les domaines du droit de la famille,
du droit des successions et du droit des libéralités, il a plu au législateur d’initier la
réforme de la loi n°87-010 du 1er août 1987 portant code de la famille, en supprimant
l’autorisation maritale exigée à la femme mariée pour l’accomplissement de tous les
actes juridiques dans lesquels elle s’obligeait à une prestation qu’elle devait effectuer en
personne, en imposant aux deux époux de s’accorder pour tous les actes juridiques dans
lesquels ils s’obligent, individuellement ou collectivement(i), en consacrant le principe
de la participation et de la gestion concertée du ménage par les deux époux en ce qui
concerne sa gestion financière et matérielle, ainsi que sa direction morale(ii) ;
Ladite reforme a pour fondement l’article 40 de la Constitution du 18 février 2006, la loi
n°15/013 du 1er août 2015 portant modalités d’application des droits de la femme et de
la parité, la nécessité de conformer le code de la famille de 1987 aux obligations souscrites
par la Réplique Démocratique du Congo dans les deux pactes internationaux de 1966
relatifs aux droits de l’homme, dans la charte africaine des droits de l’homme et des
peuples et dans la convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à
l’égard de la femme.
Sept ans après la réforme intervenue, les questions qui méritent d’être posées
sont celles de savoir si les innovations apportées en 2016, trouvent-elles un écho
favorable vis-à-vis de la population ? Autrement dit, sont-elles d’application effective ?
Sont-elles conformes à la mentalité, cultures et traditions congolaises du mariage et de
la famille ? Ce sont là les quelques interrogations qui attendent de réponses appropriées.
2.3.1. De l’organisation du ménage : pouvoir du mari et gestion du ménage
Point n’est encore besoin de définir le concept ménage, car ayant déjà été
décortiqué dans nos précédents développements. Toutefois, il est important de noter que
dans son organisation, le mari est institué chef du ménage et les époux se doivent
protection mutuelle dans leurs rapports11.
Contrairement au code de la famille de 1987 qui, non seulement place le mari
chef du ménage, en même temps, il lui confie la mission de protéger sa femme et intime
à cette dernière l’ordre d’obéir à son mari, à travers l’article 444 du code de la famille
reformé au 15 juillet 2016 comme suit : « il est reconnu au mari la qualité de chef du
ménage, mais la protection dans leurs rapports est rendu réciproque ».
De façon générale, cette innovation apportée par le législateur de 2016 n’a pas
profondément énervé les cultures et traditions congolaises du mariage et de la famille,
car ayant maintenu la place qu’occupe le mari au sein du ménage. Par ailleurs, la
protection mutuelle que se doivent les époux dans leurs rapports au sein du ménage est
de nature à heurter la culture, mentalité et traditions congolaises du mariage et de la
famille, en ce sens qu’elle prête à confusion parce que n’ayant pas la même interprétation
tant dans sa lettre que dans son esprit.
11
Art. 444 du code de la famille
MES-RIDS, nO125, Novembre - Décembre 2022 www.mesrids.org
Mouvements et Enjeux Sociaux - Revue Internationale des Dynamiques Sociales 304
En effet, comment comprendre que le mari soit placé chef du ménage sans
pouvoir de donner des ordres à sa femme ?; D’où tire-t-il cette qualité ? ; Qui de l’épouse
et de l’époux contribue régulièrement aux charges du ménage dans la mentalité africaine
en général et congolaise en particulier ?; qui épouse qui ?.
A toute cette batterie de questions, il importe de noter que matériellement, et
psychologiquement le mari est considéré chef du ménage du fait que d’une part, c’est
lui qui verse la dot ; en la versant, toutes les coutumes congolaises instituent le mari
responsable de leur fille à qui l’on rappelle souvent ce qui suit : « maintenant que nous
te libérons notre fille, il te revient de prendre soins d’elle, assure sa protection, c’est-à-
dire ses soins alimentaire, sanitaire, physique, etc.».
Aussi, après la célébration du mariage, la femme nouvellement mariée est
obligée de vivre dans le domicile de son mari, milieu qui lui est étranger. Logiquement,
c’est la personne qui est reçue qui doit bénéficier de la protection de celle qui est disposée
à recevoir, en l’espèce le mari. A ce propos, l’article 165 du code de la famille soutient
que la femme mariée à son domicile chez son mari, à moins que la loi n’en dispose
autrement12.
Pour ce qui est de la contribution aux charges du ménage, il est vrai que les
époux, par souci d’offrir au ménage les conditions nécessaires pour son existence
contribuent, chacun selon son état et ses capacités, mais suivant la mentalité, la culture
et les traditions congolaises du mariage et de la famille, la femme mariée, mieux,
l’épouse au sein du ménage admet difficilement que les charges de ce dernier soient
assurées de manière équitable. La femme congolaise, mariée ou non mariée s’accorde
que le mari doit assurer pleinement ses responsabilités. C’est dans ce cadre qu’une
anecdote Kinoise soutient que « mbongo ya mobali ezalaka elengi », ce qui signifie que
l’argent provenant du mari est mieux à utiliser.
S’agissant de la question en rapport avec la direction du ménage, contrairement
à l’article 445 de la loi n°87-010 du 1er août 1987 portant code de la famille qui place le
ménage sous la direction du mari, la loi n°16/008 du 15 juillet 2016 modifiant et
complétant cette dernière soutient quant à elle que les époux concourent dans l’intérêt
du ménage, à assurer sa direction morale et sa gestion financière et matérielle, foulant
ainsi au sied le pouvoir de coordination exercé par le mari dans la conduite de la
direction morale et la gestion financière et matérielle du ménage.
Tableau 1 : Opinion des enquêtés sur la(les) personne(s) qui assure la direction morale
et la gestion financière et matérielle du ménage.
La direction morale et la gestion
financière et matérielle du ménage Effectifs %
sont assurées
Père et mère 38 38
Père 60 60
Mère 2 2
Total 100 100
Sur les 100 personnes interrogées dans les communes de Kintambo et de
Bandalungwa en raison de 50 personnes par communes, il se révèle que, 60% s’accordent
que la direction morale et la gestion financière et matérielle du ménage soient assurées
par le père, 38% affirment que ce sont les père et mère qui les assurent et 2%
reconnaissent ce pouvoir à la mère en raison du caractère monoparental du ménage.
Le choix de ces deux communes a été adopté compte tenu du nombre croissant
des ménages des intellectuels supposés détenir des connaissances sur le droit.
12
Article 165 du code de la famille
MES-RIDS, nO125, Novembre - Décembre 2022 www.mesrids.org
Mouvements et Enjeux Sociaux - Revue Internationale des Dynamiques Sociales 305
De ce qui précède, il convient de noter que contrairement à l’article 445 de la loi
n°16/008 du juillet 2016 modifiant et complétant la loi n°87-010 du 1er août 1987 portant
code de la famille, dans la quasi-majorité des ménages, la direction est assurée par le
mari.
Tableau 2 : Opinion des enquêtés sur l’accord mutuel des époux pour tous les actes
juridiques dans lesquels ils s’obligent à une prestation qu’ils doivent
effectuer en personne.
L’accord de deux époux est toujours requis pour
Effectifs %
accomplir les actes pratiques
Oui 85 85
Ester en justice contre les tiers
Non 15 15
Oui 93 93
Conclure un contrat de travail
Non 7 7
Oui 90 90
Ouvrir un compte bancaire
Non 10 10
Oui 96 96
Faire de libéralité
Non 4 4
Les données recueillies du tableau ci-dessus renseignent que de manière
générale, l’accord mutuel de deux époux est requis pour l’accomplissement de tous les
actes juridiques. Toutefois, étant donné que dans la formulation de l’article 448 du code
de la famille reformé, l’autorisation maritale a été extirpée en ce qui concerne
l’accomplissement des actes juridiques par la femme mariée, une autre question de
précision mérite d’être posée, à savoir si dans la pratique, l’accord mutuel des époux
suffit à lui seul pour que la femme mariée accomplisse tous les actes juridiques ?
Tableau 3 : Opinion des enquêtés sur l’absence totale de l’autorisation maritale en
faveur de la femme mariée pour poser les actes juridiques ci-après :
L’absence totale de l’autorisation maritale en Total
faveur de la femme mariée congolaise pour Effectifs %
accomplir les actes juridiques ci-après :
Oui 28 28 100
Ester en justice contre un tiers
Non 72 72
Oui 20 20 100
Conclure un contrat de travail
Non 80 80
Oui 91 91 100
S’engager dans la vie politique
Non 9 9
Oui 39 39 100
Ouvrir un compte bancaire
Non 61 61
Les différentes opinions des enquêtés interviewés ont avoué que la femme
mariée obtient toujours l’autorisation de son mari pour les actes juridiques dans lesquels
elle s’oblige à une prestation qu’elle doit effectuer en personne et ce, conformément nos
us et coutumes.
2.3.2. De l’obligation faite aux époux de s’accorder pour tous les actes juridiques dans
lesquels ils s’obligent, individuellement ou collectivement en lieu et place de
l’autorisation maritale pour la femme mariée.
En référence à l’article 448 de la loi n°16/008 du 15 juillet 2016 modifiant et
complétant la loi n°87-010 du 1er août 1987 portant code de la famille, l’obligation est
faite aux époux de s’accorder pour tous les actes juridiques dans lesquels ils s’obligent,
individuellement ou collectivement. En d’autres termes, seul l’accord de deux époux
suffit pour l’accomplissement des actes juridiques dans lesquels ces derniers s’obligent,
MES-RIDS, nO125, Novembre - Décembre 2022 www.mesrids.org
Mouvements et Enjeux Sociaux - Revue Internationale des Dynamiques Sociales 306
individuellement ou collectivement. Point n’est donc besoin pour la femme mariée
d’obtenir l’accord préalable de son mari pour tous les actes juridiques dans lesquels elle
s’oblige à une prestation qu’elle doit effectuer en personne comme stipulé dans l’ancien
article 448 du code de 1987.
En effet, si dans l’ancienne formulation de l’article 448 du code de la famille de
1987, le législateur a parlé de l’autorisation maritale que devait obtenir la femme mariée
pour accomplir tous les actes juridiques, à travers le nouvel article 448, le législateur s’est
tout simplement contenté de mentionner que les époux doivent s’accorder pour tous les
actes juridiques dans lesquels ils s’obligent à une personne qu’ils doivent effectuer…
sans expliciter clairement la suppression autorisation maritale des actes juridiques à
accomplir individuellement par la femme mariée.
A cet égard, force est malheureusement de constater que c’est dans l’exposé des
motifs de la loi n°16/008 du 15 juillet 2016 modifiant et complétant la loi n°87-010 du 1er
août 1987 portant code de la famille que le législateur s’est contenté d’énoncer que parmi
les principales innovations introduites par la présente loi, il y a notamment la
suppression de l’autorisation maritale pour la femme mariée substituée par l’obligation
faite aux époux de s’accorder pour tous les actes juridiques dans lesquels ils s’obligent,
individuellement ou collectivement.
Dans l’évidence, il y a lieu de s’accorder que même si dans le corps de la
disposition juridique sus-évoquée (art.448), le législateur dans son esprit et dans sa lettre
a retenu la suppression de l’autorisation maritale en faveur de la femme mariée pour
accomplir les actes juridiques, dans la pratique, en République démocratique du Congo,
les choses ne se passent pas de cette manière. Les cultures, mentalités et traditions
congolaises du mariage et de la famille défendent l’impératif de protéger le ménage et
la sauvegarde de son unité ainsi que de sa stabilité conformément à l’article 331 du code
de la famille. Telles sont les questions qui ne manqueront pas d’intérêt dans nos
prochaines analyses à la culture, mentalité et tradition congolaise du mariage et la
famille
La non autorisation maritale dans l’accomplissement des actes juridiques de la
part de la femme mariée est de nature à occasionner les conflits au sein du mariage pour
ainsi conduire au divorce. Il en est de même de la présence de juge en cas désaccord
persistant entre époux dans l’accomplissement de tous actes juridiques qui serait aussi
une façon d’exposer le mariage au divorce, car dit-on un mauvais arrangement vaut
mieux qu’un bon et long procès.
CONCLUSION.
Après avoir passé en revue les questions relatives à l’organisation du ménage et
l’autorisation maritale dans la société traditionnelle, suivant la loi n°87-010 du 1er août
1987 portant code de la famille, jusqu’à la réforme par loi n°16/008 du 15 juillet 2016 en
jetant un regard sur le décret du 4 mai 1895 sur les personnes, l’essentiel à retenir est
que, partant de la société traditionnelle en passant par le décret du 4 mai 1895 jusqu’à la
loi n° 87-010 du 1er août 1987 portant code de la famille, le mari est, non seulement
considéré comme étant chef du ménage qui doit protection à sa femme, mais aussi son
autorisation a été requise en faveur de son épouse pour tous les actes juridiques qu’elle
s’obligeait d’effectuer en personne.
A notre avis, c’est dans le souci de préserver la quiétude et l’harmonie au sein du
ménage, gages nécessaires de l’unité et la stabilité du mariage que l’autorisation maritale
devrait être maintenue. En effet, nonobstant l’avènement de la mondialisation culturelle
qui sévit l’environnement familial congolais, le pouvoir moral du mari dans la conduite
des intérêts du ménage demeure perceptible et ce, conformément à la culture, mentalité
et traditions congolaises du mariage et de la famille.
MES-RIDS, nO125, Novembre - Décembre 2022 www.mesrids.org
Mouvements et Enjeux Sociaux - Revue Internationale des Dynamiques Sociales 307
Par contre, dans la loi n°16/008 du 15 juillet 2016, le législateur a certes maintenu
la qualité du mari, chef du ménage au sein duquel les époux se doivent protection
mutuellement, concourir dans l’intérêt du ménage, à assurer la direction morale et la
gestion financière et matérielle de celui-ci, mettant ainsi fin au pouvoir de coordination,
mieux, de direction du ménage dévolue au mari, à la suppression de l’autorisation
maritale pour la femme mariée avant l’accomplissement de tous les actes juridiques,
instituant de ce fait, le principe de l’accord conjoint des époux pour tous les actes
juridiques dans lesquels ils s’obligent à une prestation qu’ils doivent effectuer.
Pareilles constructions juridiques bien que conformes à la loi n°15/013 du 1er août
2015 portant modalités d’application des droits de la femme et de la parité, aux deux
pactes internationaux de 1966 relatifs aux droits de l’homme, à la charte africaine des
droits de l’homme et des peuples, à la convention sur l’élimination de toutes les formes
de discriminations à l’égard de la femme comme explicités par le législateur en terme
des motivations ayant fondé sa réforme, sont presque contraires aux cultures, mentalité
et traditions congolaises du mariage.
Pour mémoire, dans la loi n°15/013 du 1er août 2015, les droits de la femme et de
la parité visés ont trait dans leur majorité aux droits publics, c’est-à-dire l’engagement
de la femme dans la vie publique, privée et économique, lesquels droits s’exercent bien
entendu en considération de nos cultures et traditions. Cependant, l’insistance des
prescrits de dispositions de la loi sus-évoquée sont de nature à introduire les germes de
conflits entre partenaires et exposer ainsi le mariage au divorce. De même, dans
l’ensemble des dispositions de ladite loi, le législateur de 2015 emploi le concept femme
en lieu et place de la femme mariée dont il est question en droit de la famille. Parler de
la femme de manière péjorative laisse entrevoir la possibilité d’admettre que la femme
mariée n’est pas particulièrement concernée.
Dans cette optique, tout en admettant la nécessité pour la République
démocratique du Congo de souscrire aux obligations internationales proclamées dans
les pactes internationaux, charte et convention précités, mais tout en prenant en compte
les réalités sociologiques congolaises, c’est-à-dire nos cultures, mentalités et traditions
du mariage et de la famille. Il serait indiqué de faire précéder toutes reformes à des
enquêtes de terrain sous peine de produire régulièrement et continuellement des lois
non applicables sur le plan pratique, ce qui serait des vœux pieux.
BIBLIOGRAPHIE
- BOMPAKA NKEYI, Cours de l’évolution du droit de famille, troisième graduat,
Faculté de Droit, 2002.
- Charte africaine des droits de l’homme et des peuples.
- Code de la famille
- Constitution du 18 février 2006 telle que modifiée par la loi n°11/002 du 20
janvier 2011 portant révision de certains articles de la Constitution de la
République Démocratique du Congo.
- Convention sur l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des
femmes (CEFDF)
- MUKENDI F., Les baluba - Kasaï, leurs coutumes et témoignage de la tradition orale
sur l’origine ancestrale luba, éd. Lubilangi, Juillet 2003.
- MUKWALA MUZAMA, Cours de droit coutumier Congolais, Faculté de droit,
Unikin, 2021.
- MULUMBA KATCHY, Canevas de l’introduction au droit coutumier Congolais, 2007.
- Pacte international sur les droits civils et politiques (PIDCP)
- SOHIER A., Traité élémentaire de droit coutumier du Congo Belge, 2e éd,
Bruxelles, 1954.
MES-RIDS, nO125, Novembre - Décembre 2022 www.mesrids.org