Charles Buet
Le chasseur d’ours
BeQ
Charles Buet
Le chasseur d’ours
La Bibliothèque électronique du Québec
Collection À tous les vents
Volume 262 : version 1.01
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Du même auteur, à la Bibliothèque :
Guy Main-Rouge
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Le chasseur d’ours
Édition de référence :
Limoges, Eugène Ardant et Cie, Éditeurs, 1895.
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I
Mon oncle Hilarion Bruno est un personnage
bien original, et je vous demande, ami lecteur, la
permission de vous le présenter.
Figurez-vous une manière de géant, que les
cuirasses du moyen âge habilleraient mieux que
nos pantalons collants et nos vestons étriqués ;
des bras musculeux capables de soulever les
fardeaux les plus lourds ; des jambes nerveuses,
infatigables ; une poitrine semblable à un soufflet
de forge.
Le visage de mon oncle présente le type
savoyard le plus pur : nez gros, rond au bout,
émaillé de rubis et semé de verrues multicolores ;
yeux gris, fendus en amande, ombragés de longs
cils et surmontés de sourcils énormes qui coupent
le front blanc, haut et large, de leur arc nettement
tracé.
Le visage respire la bonté, la franchise, la
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simplicité, j’oserai même dire la candeur.
Tel que je le trace pour vous, ô lecteur, ce
portrait n’est point flatté ; mon oncle n’est pas
beau, et, sous ce rapport, tous ses neveux lui
ressemblent.
Hilarion Bruno est rentier de son état, chasseur
de profession, maire de son endroit, hâbleur
superlatif, parce qu’il est chasseur, plein d’une
rogue dignité, parce qu’il est maire.
Il habite, à quelques kilomètres de Saint-Jean-
de-Maurienne, en Savoie, une charmante
maisonnette aux murs couleur de rose, aux
persiennes grises, que les paysans du village
appellent le château et les bourgeois de la ville,
Maison-Rose.
Cette maison possède une cave excellente,
fraîche en été, chaude en hiver, dans laquelle
vieillissent les bons vins du pays : le tonique
Princeps, le capiteux Saint-Julien, le Bonne-
Nouvelle et le vin de Rippes, dont le parfum se
rapproche de celui de la violette.
Le salon de Maison-Rose est un petit musée
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où sont réunis pêle-mêle des épées flamboyantes
et des meubles sculptés ; des tableaux de maître
et des fragments de vitraux. Les merveilles de la
céramique italienne s’y joignent aux filigranes de
Gênes, aux verreries de Venise, aux émaux
cloisonnés de la Chine, à ces mille objets, en un
mot, que l’argot parisien nomme bibelots, et que
leur propriétaire décore pompeusement du titre
d’objets d’art.
Si mes souvenirs ne me trahissent point, la
salle à manger et la bibliothèque n’étaient point
indignes du salon.
La salle à manger, vaste pièce lambrissée de
vieux chêne, était encombrée de trophées de
chasse, trophées qui s’étalaient même sur le
grand buffet de poirier sculpté, où mon oncle
renfermait sa massive argenterie et les belles
porcelaines qu’il avait rapportées du Japon. Il y
avait là des cornes de chamois, des bois de cerf,
des défenses de sangliers, auxquels
s’accrochaient dans un ordre admirable toutes
sortes de fusils, de poires à poudres, de flasques,
de bidons, de carniers. Les deux objets qui
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excitaient le plus vivement mon admiration alors
que j’avais douze ans, – il y a longtemps de cela !
– étaient : 1° une gourde faite d’une noix de coco
sculptée et 2° une paire d’ours empaillés placés
en sentinelle aux deux côtés du buffet.
Oh ! que ces deux ours me faisaient peur avec
leurs dents blanches et pointues ! leurs yeux de
feu, leurs poils bruns, longs et frisés !
Quant à la bibliothèque, elle se composait
uniquement de livres de voyage et de chasse.
C’était encore une des manies de mon oncle,
lequel, je vous l’ai déjà dit, était un fier original.
Il avait un certain nombre de manies.
D’abord, celle de la chasse ; puis, celle de
raconter ses chasses. Ensuite, celle de raconter
ses voyages, en montrant ses bibelots, ou bien en
sablant le contenu des vieilles bouteilles de sa
cave.
Il n’avait jamais voulu se marier et vivait
comme un ours, partageant son temps en quatre
parties égales qu’il passait dans son salon, sa
bibliothèque et sa salle à manger ; la salle à
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manger lui prenait deux parties sur quatre !
Chaque mois, il partait un beau matin, après
avoir endossé la veste de velours à côtes, les
culottes grises et les guêtres de peau, qui
composaient son costume de chasse, et ne
revenait qu’au bout de huit jours, amenant avec
lui le cadavre d’un ours et quelques joyeux
compagnons avec lesquels il mangeait son gibier.
Un jour, comme j’étais allé rendre visite à
mon oncle, je le priai de me conter une de ces
histoires de chasse qu’il savait si bien conter.
Hilarion Bruno me jeta un regard sournois.
– Tiens ! tiens ! petit, me dit-il étonné, je ne te
savais pas curieux d’aventures.
Je poussai un soupir à fendre une roche en
deux.
– Ah ! mon oncle ! m’écriai-je d’un air
scandalisé, quand je ferai des livres il faudra bien
que votre nom y figure.
Il sourit paternellement et haussa les épaules.
– Il faut voyager pour faire des livres,
grommela-t-il ; il n’y a de beaux livres que les
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histoires de voyages !
C’était comme cela.
Hilarion Bruno ne concevait rien au-delà ! Il
faisait fi des romans, abhorrait la philosophie, se
souciait peu de l’histoire et dédaignait la
politique.
Pour en revenir à mon histoire, ou plutôt à
l’histoire de mon oncle, il alla déboucher un
flacon de vin blanc d’Hermillon, me versa rasade
et reprit :
– Tiens ! neveu, je vais te raconter comme je
suis devenu chasseur, et chasseur d’ours encore !
Alléché par ce préambule, je m’assis
commodément dans un grand fauteuil de cuir à
oreillettes, et je me préparai à écouter de mon
mieux.
– Il faut te dire, commença mon oncle, que je
n’ai pas toujours eu cinquante ans. En 1825,
j’étais un garçonnet de quinze ans, fort et robuste,
bourré de latin et de grec, mais orgueilleux
comme dix humanistes et sot comme vingt
collégiens pris collectivement. Cette année-là,
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j’étais allé passer mes vacances chez ma tante
Esthénie, laquelle habitait le village des Hulles,
au-dessus du bourg de la Rochette. Ma tante
Esthénie avait soixante-dix ans. Elle possédait
quatre fils et deux filles : Georges, qui avait
quarante ans ; André, qui en avait trente-cinq ;
Édouard, qui en avait trente-quatre, et Camille,
mon aîné de deux ans. Les deux filles étaient
mariées : l’une à M. Amenet, le notaire, l’autre à
l’avocat Platine, le bien nommé.
Comme bien tu le penses, mon camarade le
plus intime était Camille. Georges me faisait
peur. André m’intimidait, Édouard me semblait
un géant. Quant à Mme Amenet, elle me bourrait
de bonbons. Mme Platine habitait Chambéry et
portait des chapeaux à plumes ; elle ne venait
jamais aux Hulles, craignant de gâter son teint.
Il était impossible de voir famille plus unie et
gens mieux faits pour vivre ensemble sous un
même toit.
L’oncle Hilarion Bruno fit une pause et j’en
profitai pour lui dire que je ne voyais pas encore
poindre les oreilles de l’ours.
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– Esto hijo !1 grommela-t-il, patience ! neveu,
patience ! j’en ai déjà vu pas mal, des ours, à
quatre ou à deux pattes !... attends un peu !
Il but un grand verre de nectar hermillonnais
et continua son récit.
– En ce temps-là, reprit-il, on payait six francs
un permis de chasse...
Il faut vous dire que mon oncle me racontait
cette histoire en 1861, c’est-à-dire une année
après l’annexion de la Savoie à la France.
– On payait six livres un permis de chasse et
l’on chassait partout. Les gardes étaient de bons
enfants qui faisaient leur devoir, sans oublier les
préceptes de la civilité puérile et honnête. Au jour
d’aujourd’hui, il faut payer vingt-cinq francs,
payer l’impôt des chiens, payer le loyer des biens
communaux, payer encore et toujours !...
Si au moins l’on pouvait parler, après avoir
payé ! s’écria mon oncle, en appuyant cette
réflexion d’un grand coup de poing frappé sur la
table.
1
Cet enfant.
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Il murmura quelques paroles qu’il ne serait
point prudent de transcrire ici, et poursuivit :
– Tous les matins, Georges, André, Édouard et
quelques amis à eux partaient de grand matin
pour chasser le lièvre.
Camille, moi et un gamin de notre âge, qui
répondait au nom d’Aurèle, nous partions aussi
pour tirer les grives et les pigeons sauvages. Il y
avait un gros renard qui, chaque nuit, venait
tordre le cou à nos poules. Souvent nous le
rencontrions, mais nous n’osions le tuer, tant il
nous faisait peur.
– Mais l’ours, mon oncle ! interrompis-je.
– Attends, attends un peu, neveu !... Un matin,
excités par le récit des exploits de mes cousins,
nous leur déclarâmes que nous irions avec eux du
côté des tours de Montmayeur.
Les tours de Montmayeur sont deux belles
tours séparées l’une de l’autre par une distance de
cent mètres au moins. Elles sont restées debout à
la suite d’un crime commis dans ce château par le
dernier baron de Montmayeur, Jacques. Ce
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Jacques était fils du maréchal de Savoie. Or, en
14...
Lorsque mon oncle se lançait dans l’histoire et
qu’il abordait une légende nationale, sa
digression durait ordinairement de trois à quatre
heures. Moi, je tenais à mon ours et je réclamais
énergiquement l’histoire de cet ours.
Hilarion Bruno eut aux lèvres un sourire de
pitié et haussa les épaules :
– Ah ! petiot, me répondit-il, tu ne sais pas
quel charme, quelle beauté, quel attrait
mystérieux ont nos légendes ! Si tu veux faire des
livres, il faudra bien apprendre tout cela !
Petiot ! ! !
Dans toute cette phrase de mon oncle, je
n’avais entendu que le mot petiot, et j’allais avoir
quinze ans au 23 octobre prochain !
Je dévorai ma rage, espérant que l’ours ne
tarderait point à venir.
– Un matin donc, reprit mon oncle, nous nous
dirigeâmes vers les tours de Montmayeur. Nous
étions six, en y comprenant ma petite chienne
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Blondette, qui était bien la bête la plus
intelligente que j’aie connue. Elle me suivait pas
à pas.
Comme je ne pouvais point marcher aussi
lestement que mes grands cousins, j’allai
tranquillement, suivant à dix pas mon cousin
Camille.
Voilà que tout à coup...
– Bon ! interrompis-je encore, nous y
sommes !
Mon oncle me jeta un regard sévère et reprit :
– ... Blondette se fourvoie dans un buisson et
lance un lièvre qui passe entre mes jambes. Je me
serais taxé de présomptueux si l’idée m’était
venue de tirer un lièvre à la course. Blondette
détala à la suite de l’animal aux longues oreilles,
et me voilà parti après ma chienne, brandissant
mon fusil au-dessus de ma tête.
Mes cousins s’étaient arrêtés et riaient de tout
leur cœur.
– Bravo, petit ! me criaient-ils, bravo !
Au lieu de venir à mon secours, ces badauds
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riaient et me contemplaient, bouche béante.
Le lièvre courait toujours, Blondette aboyait,
moi, je commençais à perdre haleine.
Enfin ce bon lièvre vint se jeter dans un champ
de pommes de terre. Mes cousins arrivèrent ;
mais je réclamai l’honneur de tirer le premier
coup, et profitant d’un moment où le lièvre
laissait passer ses oreilles derrière les feuilles,
j’envoyai ma charge tout entière... dans les
mollets de mon cousin André.
Ma foi ! je fis comme les cousins de mon
oncle, j’éclatai de rire, tant et si fort, que mon
accès d’hilarité dura cinq bonnes minutes.
Il faut si peu de chose pour faire rire les
enfants ! Quand j’eus ri tout à mon aise, Hilarion
Bruno recommença son récit.
– Tu dois penser quels cris d’épouvante furent
poussés de côté et d’autres. Les échos de la
montagne en retentissaient... Je crus avoir
commis un meurtre, et je me mis à fuir. Mes
cousins m’arrêtèrent en poussant un grand cri.
Je levai la tête...
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À dix pas de moi, un ours de la plus belle
taille s’amusait à fourrager dans un magnifique
champ d’avoine. À notre vue, il huma l’air,
grogna et s’enfuit dans la direction de la
montagne.
Je m’élançai à sa poursuite... Un coup de feu
retentit... une balle siffla à mon oreille et je vis
l’ours s’affaisser en poussant un gémissement
lamentable.
Mes cousins m’expliquèrent alors que le
champ était entouré d’une corde supportée par
des piquets plantés de distance en distance. Un
fusil y était adapté, disposé de manière à faire feu
pour peu que l’on touchât la corde traîtresse.
– Et le mollet du cousin ? demandai-je en
souriant.
– Bah ! répondit Hilarion Bruno, le mollet du
cousin était protégé par de fortes guêtres, et le
plomb n’avait touché que le cuir.
– Et c’est votre première chasse à l’ours ? mon
oncle.
– Oui, neveu. Mais depuis lors j’en ai vu bien
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d’autres !
– Vraiment ?
– Oui ! j’ai chassé le renard en Angleterre, le
loup en Russie, l’ours blanc dans les mers du
Nord, le lion en Afrique, la panthère à Java, le
tigre dans les Indes et l’homme dans les pampas
américaines !
– L’homme ! ! !
– Le Peau-Rouge, neveu. Il est certains cas où
il vaut mieux chasser qu’être chassé !
Je vous l’ai déjà dit, mon oncle Hilarion Bruno
avait un faible pour les sentences philosophiques.
– Si tu veux, Charles, me dit-il quand je le
quittai, nous irons demain faire une partie de
chasse.
– Oh ! merci, merci, je n’aime point les ours.
Il haussa les épaules :
– Comme on élève les jeunes gens
aujourd’hui ! murmura-t-il avec un sourire de
piété. Eh bien ! nous nous contenterons de tirer le
renard.
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Cette fois, je ne pus que m’incliner.
– Sais-tu au moins tenir un fusil ?
La modestie n’est pas mon fort :
– Ah ! mon oncle, répondis-je, mieux qu’une
plume, à coup sûr !
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II
Le lendemain, nous partîmes à l’aube pour
aller chasser le renard du côté d’Aiguebelle.
Aiguebelle est un gros village, un petit bourg
dont l’unique prétention a toujours été de se
donner comme une ville. C’est la patrie par
excellence du commérage et des plaisirs
champêtres. On y décore toutes choses d’un nom
pompeux : la mairie devient Hôtel-de-Ville, et la
justice de paix est un palais de justice. Les
habitants n’appelleront jamais leur pasteur :
« Monsieur le curé, » mais bien : « Monsieur
l’archiprêtre. » Soyez avocat, médecin, notaire,
professeur ; ce titre suivra chaque fois le mot
monsieur quand on s’adressera à votre personne.
Aiguebelle est formé d’une seule rue qui n’est
autre chose que la grand’route sur les deux côtés
de laquelle s’alignent des maisons à peintures
prétentieuses, à balcons ambitieux.
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L’Hôtel-de-Ville étale avec orgueil son pignon
pointu et son badigeon couleur beurre frais entre
deux maisons d’un gris sombre, que l’on m’a dit
appartenir à deux notabilités du pays.
La rue est pourvue de trottoirs boueux et de
candélabres en simili-bronze dans lesquels brûle
un simili-gaz obtenu à l’aide du pétrole.
L’église menace ruine : elle était jadis assez
belle, mais l’on y voit maintenant les traces du
temps.
Hâtons-nous de le dire, ce bourg, si humble et
si petit en apparence, a son histoire que lui
envieraient certaines grandes villes où règnent le
charbon et la houille, où l’on n’entend que le
bruit des roues et des machines.
Le château de Charbonnières, qui domine
Aiguebelle, fut le berceau de la maison de
Savoie, de cette illustre famille dont le roi
philosophe, Louis XVIII, faisait un jour l’éloge
en disant qu’un prince de la maison de Bourbon
ne pouvait épouser sans mésalliance qu’une
princesse de Savoie.
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Or, les premiers comtes de Savoie entourèrent
Aiguebelle de murs et de fossés. Sous le règne
d’Adélaïde de Suze, veuve du comte Oddon, on y
battait une monnaie que les numismates
désignent sous le nom de salidi maurianenses.
En 1536, François Ier réduisit en cendres les
deux tiers d’Aiguebelle dont le connétable de
Lesdignières s’empara de nouveau en 1597. Trois
ans plus tard, le maréchal de Créqui s’en rendit
maître, et les Espagnols le prirent d’assaut en
1742.
La petite ville dont nous parlons subit donc
quatre sièges en règle, et l’on doit avouer que
l’appellation de ville dont se servent ses habitants
paraît moins ridicule quand on connaît cette
histoire.
Hilarion Bruno me racontait cela, pendant que
nous volions sur les ailes rapides de la vapeur.
Veuille le lecteur me pardonner cette image
surannée, que je m’empresse d’attribuer à mon
oncle, lequel affectait de parler le beau langage
du siècle.
J’avais revêtu, pour cette circonstance
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solennelle – ma première chasse, – un costume en
peau de diable qui me donnait, avec mon bonnet
d’higlander, la tournure d’un boy anglais en
quête d’un remède contre le spleen. Mon oncle
riait en regardant cet excentrique accoutrement et
me décochait de temps à autre les plus mordantes
épigrammes.
Il fumait sa pipe, tout en causant avec moi et
buvait de temps à autre une gorgée de vin blanc,
son apéritif ordinaire.
Vers huit heures nous arrivâmes à Aiguebelle,
et la vue de cette ville produisit sur moi
l’impression que j’exprime en termes un peu
amers au commencement de ce récit.
Notre première visite fut pour un ami, qui
nous offrit un déjeuner des plus substantiels. Une
heure après, nous étions en chasse dans les
vignobles de Durnières. Mon oncle avait été
élevé dans ce pays et le connaissait parfaitement.
Un Aiguebellain nous avait accompagné et nous
avait mis sur la piste d’une famille de renards qui
causait chaque jour de grands dommages aux
fermes des environs.
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La chasse présenta plusieurs incidents qu’il
serait trop long et peut-être oiseux de rapporter
ici. Vers quatre heures du soir, nous avions forcé
la retraite du renard que mon oncle emportait
dans son carnier avec une visible satisfaction.
Pour moi, j’étais...
Honteux comme un renard qu’une poule
aurait pris !
c’est, ou jamais, le cas de le dire.
J’avais chargé cinq ou six fois mon fusil, mais
je revenais les mains vides et je contemplais avec
envie la carnassière gonflée de mon oncle
Hilarion.
– Eh bien ! mon garçon, me dit-il, te voilà tout
penaud !
Je poussais un soupir.
– Eh ! eh ! continua-t-il en ricanant, tu
voudrais peut-être bien être à ma place, hein ?
Nouveau soupir du neveu, nouveau
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ricanement de l’oncle.
– Eh ! eh ! eh ! tout le monde ne peut pas être
heureux. C’est ce que me disait un fakir, à
Lahore, en 1835. Il ajoutait que l’espérance, elle-
même, était un leurre et ne servait qu’à rendre la
vie plus amère !
– Théorie dangereuse, affirma l’Aiguebellain.
Par esprit de contradiction, mon oncle soutint
le contraire, et la discussion s’engagea vivement
entre ces deux messieurs.
L’Aiguebellain n’était pas de force, Hilarion
Bruno le roula proprement.
Quand nous fûmes arrivés au pont de
Randens, qui sépare d’Aiguebelle le hameau de
ce nom, mon oncle se retourna vers moi et me
dit :
– Garçon ! tiens, voici le renard. Marche en
avant, je te permets de te dénoncer comme
meurtrier de cet animal dont les Hindous ont le
caractère, et les Chinois la couleur, mais à une
condition...
Mon cœur se prit à palpiter, et je hasardai
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timidement cette question :
– À quelle condition, mon oncle ?
Un sourire effleura ses lèvres et il me
répondit :
– Tu porteras jusqu’à la maison tout ce qu’on
te remettra.
– Bien, mon oncle !
Et je partis d’un pas allègre, la casquette sur
l’oreille, le poing sur la hanche, et sifflotant, de
l’air le plus dégagé du monde, une chanson à
boire.
J’avais passé le renard en bandoulière autour
de mon corps, et je portais mon fusil sur l’épaule.
Allez ! j’étais bien le plus fier et le plus joyeux
enfant de la terre.
Pour ne rien perdre de l’honneur que j’allais
tirer de ma chasse (ô ironie !) je résolus de
traverser Aiguebelle dans toute sa longueur, et je
fis un détour qui me conduisit au Paradis des
Chèvres. Là, je pris la grand’route, je passai sous
l’arc-de-triomphe élevé au roi Charles-Félix, et je
me trouvai à l’entrée de la ville.
26
Dès que l’on m’aperçut, ce fut un véritable
remue-ménage. Les commères s’assemblèrent sur
le pas de leurs portes, les épiciers et les cafetiers,
tout le commerce d’Aiguebelle sortirent de leurs
boutiques, et tout ce monde se mit à m’admirer,
bouche béante, tandis que les gamins me
couraient après avec des cris de joie si perçants
que j’en fus abasourdi.
Bientôt je vis diverses femmes rentrer
précipitamment dans leurs maisons. Orgueilleux !
j’attribuais cette brusque retraite à l’effroi inspiré
par le cadavre de « mon » renard, dont le museau
sanglant pendait à quelques centimètres de ma
ceinture.
Je ne tardai pas à être détrompé.
Les ménagères sortirent l’une après l’autre.
L’une m’apporta douze œufs dont j’emplis ma
casquette ; l’autre vint me donner une paire de
poulets que je pendis à mon bras ; la troisième me
chargea d’une botte de carotte, la quatrième d’un
lapin vivant...
Je n’étais pas arrivé au milieu de la rue, que je
succombai sous le fardeau.
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Un jeune homme se chargea de la moitié de
ces présents, et je pus continuer ma route.
Il eût fallu me voir, ainsi transformé en garde-
manger ambulant avec mes poules, mes œufs,
mes carottes et surtout mon renard, que je n’avais
point voulu donner à mon complaisant
compagnon.
Je croyais d’abord que l’on voulait me
mystifier, mais les sourires gracieux, les
compliments à brûle-pourpoint et les caressantes
flatteries que tout le monde m’adressait me
tournèrent la tête.
Lorsque mon oncle rentra, cinq minutes après
moi, il riait à gorge déployée.
– Eh bien, petit, me dit-il, trouves-tu que ce
soit agréable de porter un renard ?
– Certes, mon oncle !
Je lui montrai mon butin.
– Qu’allons-nous faire de tout cela ?
demandai-je.
– La belle question ! ce sont des cadeaux
qu’on te fait, petiot ; une prime semblable est
28
donnée à tous ceux qui tuent le renard. C’est un
usage établi depuis des siècles et dont on trouve
le premier exemple dans la Chronique du
chanoine Agrald, en 1221. Cette chronique, écrite
sur parchemin...
Je me hâtai de fuir, craignant une nouvelle
averse d’érudition.
29
III
« Le moi est haïssable », a dit Pascal.
Aussi je dois cesser de parler autant de ma
chétive personne. J’ai, du reste, entrepris un
portrait, il faut que je l’achève. Je laisse là mon
oncle, son neveu et le renard susdit, pour faire
poser mon modèle et commencer mon esquisse.
Il est inutile, je pense, de donner ici quelques
détails sur le quadrupède auquel nous avons
affaire.
L’ours des Alpes est le même que celui des
Pyrénées et des Asturies, selon le dire de la
plupart des naturalistes. Cependant Cuvier
prétend le contraire. Cet animal se tient dans les
montagnes boisées ou dans les amas de rochers
situés vers les cimes de certains escarpements des
Alpes ; il vit de racines, de fruits acides, comme
l’épine-vinette, la ronce et la buxerole. C’est un
grand dévastateur de ruches et de fourmilières : il
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mange le miel des unes et les habitantes des
autres. Sa vie est solitaire.
Il n’attaque point l’homme, si ce n’est quand il
est provoqué.
Voilà, mes chers lecteurs, tout ce que mes
faibles connaissances en histoire naturelle me
permettent de vous dire sur le sauvage souverain
de nos montagnes.
Ce n’est point chose facile que de chasser
l’ours.
On ne le tue point avec une balle, comme le
premier lièvre venu. Nos chasseurs chargent leurs
fusils avec des chevrotines, dont la forme est
celle des dents d’un rateau.
Ces sortes de balles sont de forme conique,
pointues à une extrémité, arrondies à l’autre ;
elles ne sont point de plomb, mais de fer. Les
bourres sont des rondelles découpées dans le
feutre d’un vieux chapeau.
Ce fut à La Chambre que je vis pour la
première fois un chasseur d’ours de profession.
Puisque je dois vous instruire, tout en vous
31
amusant, je puis bien vous dire en passant ce que
c’est que le bourg de La Chambre.
Il est situé dans une vallée riante et fertile, à
quelques kilomètres de Saint-Jean-de-Maurienne,
et faisait autrefois partie du domaine temporel
des évêques de ce diocèse. Jadis cette vallée
inculte fut entièrement défrichée par les
Bénédictins. La Chambre fut érigée en comté en
1456, en marquisat en 1553, en faveur de la
maison de Seyssel, qui fournit un nombre infini
d’illustrations : cardinaux, évêques, maréchaux
de Savoie, lieutenants-généraux du duché,
chevaliers de l’Annonciade, etc.
Ruiné en partie sous le duc Charles I er, le
château de La Chambre fut entièrement détruit
par le roi François Ier de France, en 1536.
Donc ce fut à La Chambre, un jour de marché,
que je vis pour la première fois François
Guigonnet, plus familièrement appelé Guignon,
chasseur d’ours de son état. Il y a de cela deux
ans. Si vous saviez ce que c’est qu’un jour de
marché à La Chambre !
Il y avait des Villarmches en robes noires
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rayées de galons bleus ; chaque galon représente
un sac de mille francs, faisant partie de la dot de
la fille ; il y avait de grosses rougeaudes, aux bras
nus, aux cheveux crépus, habitantes des Cuines ;
il y avait des filles des Beauges, dont la beauté
orientale, la démarche lente et grave dénoncent
l’origine sarrazine. Que sais-je ? toutes les races
de la Maurienne se confondaient pêle-mêle sur le
pré que côtoie le torrent de Bugeon.
François Guigonnet allait et venait d’un
groupe à l’autre, lançant à l’un une grosse
plaisanterie, serrant la main d’un autre de façon à
la broyer, décochant un compliment à celle-ci,
saluant avec respect les vieillards, et veillant avec
attention sur ses paroles : Chacun sait qu’une
langue de jeune homme est souvent beaucoup
trop prompte.
Il portait un pantalon et une veste de drap
bleu, un gilet gris, une cravate noire ; ses pieds
étaient chaussés d’énormes souliers, autour
desquels la semelle faisait comme un petit
trottoir. Une ceinture de laine rouge s’enroulait
autour de son corps. Un feutre à larges bords
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complétait ce costume et couvrait ses longs
cheveux bruns.
– Connais-tu cet homme-là, me dit mon oncle
Hilarion en me montrant Guigonnet.
– Pas le moins du monde ! répondis-je avec
indifférence.
– Eh bien ! neveu, c’est le chasseur d’ours.
Nous allons faire connaissance avec lui, et il te
contera ses histoires.
La présentation fut bientôt faite. François
Guigonnet était obligé de rester quelques jours à
La Chambre où le retenaient des affaires de
famille. Il voulut bien passer avec moi tous les
instants de loisir qu’il eut, et je fus bientôt au
courant de tous les détails de sa vie.
C’était un bien beau caractère que celui de
François Guigonnet : un caractère grand, ouvert,
généreux. Il possédait le vrai courage, la
résolution indomptable unie au sang-froid. Il y
avait en lui une teinte de poésie qui le distinguait
des autres hommes de la montagne, et l’entourait,
à mes yeux, d’une véritable auréole.
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Chez un Savoyard, le courage est chose
ordinaire : il voit trop souvent la mort de près,
pour qu’il en ait peur... Chez le montagnard, le
courage se transforme en une sorte d’exaltation.
Il aime le danger parce que c’est le danger ; parce
que le danger est son élément. Il peut, à chaque
instant, rouler d’abîme en abîme jusqu’au fond de
ces précipices, dont aucun œil humain n’a jamais
sondé la profondeur ; il peut être enseveli sous
une avalanche, tomber dans une fente de glacier,
mourir écrasé par la chute d’une roche, devenir la
proie des loups ou des vautours ! Qui sait ? Il
peut avoir à souffrir les tourments épouvantables
de la faim et de la soif !...
Rien n’y fait.
Il part d’un pied leste, le front haut, l’œil fixe,
le fusil sur l’épaule, et chantant à pleine voix
l’antique chanson des montagnards :
Amis, que la montagne est belle !
Fuyons les bruits de la cité.
Courons gaîment fêter loin d’elle
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Notre pays, en liberté !
Le sac au dos, en main la pique,
Pressons le pas.
Faisons un effort énergique,
Pressons le pas.
Que les dangers ne nous arrêtent pas,
Car les dangers pour nous n’existent pas !
Ce courage, cette exaltation leur donnent une
adresse à nulle autre pareille. Ils luttent contre la
montagne. Ils franchissent d’un pas ferme les
passages les plus difficiles : ils mesurent, sans
vertige, la profondeur des gouffres : ils marchent
sans crainte sur les bords des crevasses des
glaciers, ils défient l’orage et supportent avec
indifférence les rafales du vent. Oh ! ce sont des
hommes forts !
Et puis, sous leurs yeux se déroule un paysage
immense autant que varié. Ils ne voient jamais
deux fois la nature sous le même aspect. En
hiver, c’est un vaste manteau de neige sur lequel
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tombe un maigre rayon de soleil qui donne à cette
blancheur un chatoiement de perle ; alors, le ciel
est gris, terne, pommelé de nuages ; alors, tout
dort ! Mais au printemps, le monde s’éveille ; la
neige a fondu et remplit maintenant les larges
combes dans lesquelles mugissent les torrents
noirs ; le mont revêt sa robe de verdure ; ce sont
des prairies semées de fleurs, des arbustes qui
grimpent sur des roches, couvrant leur nudité
d’une guipure de feuillages ; des amandiers
couverts de fleurs blanches, des sapins aux
feuilles sombres qui couronnent les sommets
altiers. Vient l’été, avec ses moissons jaunies, ses
arbres chargés de fruits que le soleil mûrit
lentement. Enfin l’automne, la plus belle des
saisons, quoiqu’en disent les poètes ! Le
Savoyard comprend et admire toutes ces
splendeurs. Il saisit toutes les beautés du
paysage ; il voit chaque jour avec un nouveau
plaisir le soleil se lever du côté d’Italie et se
coucher, là-bas, du côté de la France.
Quand l’astre disparaît, le ciel s’empourpre
comme par l’effet d’un gigantesque incendie :
tantôt il se diapre de nuages dorés, tantôt il
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s’efface en laissant derrière lui une traînée
lumineuse.
Et le Savoyard contemple chaque jour un
spectacle nouveau.
Cette nature, si magnifiquement belle, il la
peuple d’une création fantastique ; son
imagination lui montre partout un monde
surnaturel qui l’entoure et l’enchante et qui,
suivant l’expression d’un de nos romanciers de
haut parage, Octave Feuillet, lui fait sentir la vie
avec une intensité que nous ignorons.
Enfin, il est libre, absolument libre. Il ne
relève de personne que de lui-même. Il est
souverain seigneur et maître de la montagne ; il
va où il veut, fait ce qu’il veut et ne reconnaît de
volonté supérieure à la sienne que celle de Dieu.
Que lui importent les vaines rumeurs du
monde ? Que lui fait cette fourmilière sur laquelle
il jette un regard dédaigneux, fort de sa grandeur
et de son indépendance ?
Voilà, cher lecteur, ce que me disait François
Guigonnet ; sa voix était émue ; son regard
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brillait d’une éloquence naïve ; son langage
vulgaire se transformait en un parler plein d’une
sauvage poésie.
Moi, je l’écoutais sans oser l’interrompre.
Quand il m’eut dépeint la montagne, il me
raconta sa vie.
39
IV
François Guigonnet est né en 1810, il avait
donc aujourd’hui cinquante-huit ans. C’était un
homme d’une taille élevée, d’une maigreur
extrême ; son visage n’offrait aucun trait saillant
et n’exprimait qu’une sorte de placidité mêlée à
une certaine finesse. Ses cheveux étaient longs,
très noirs, et le bas de son visage s’encadrait dans
une barbe assez bien soignée.
Le père de François était un honnête
cultivateur qui fut pris dans la dernière levée que
fit Napoléon avant la première Restauration et
qui mourut à la guerre, laissant une femme jeune
encore, mère de huit enfants. Deux ou trois ans
après, la veuve se remaria.
Quand François eut quinze ans, il partit pour la
France, muni d’une boîte de colporteur. En cinq
ans, il amassa l’énorme somme de mille francs,
revint au pays, acheta un bout de terrain et se
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maria. Quand sa mère mourut, il se trouvait à la
tête d’une fortune de trois mille francs,
représentée par une chaumière, un jardinet et le
lopin de terre, fruit de ses économies.
Sa femme et ses deux enfants moururent ;
François, alors âgé de quarante ans, fut pris par le
désespoir et voulut quitter le pays. Il vendit son
bien et partit. Au bout de six mois, il revenait
malade de nostalgie. Alors il se fit chasseur
d’ours et les âpres jouissances de la chasse lui
firent oublier ses malheurs.
Aujourd’hui, il a racheté sa chaumière et vit
complètement isolé.
Quand il lui prend fantaisie de chasser ou bien
quand on lui signale un ours dans la montagne, il
part de grand matin, muni de sa carabine et
cherche la piste de la bête.
Sa chasse dure quelquefois trois ou quatre
jours.
Quand il a trouvé le repaire de l’ours, il va se
poster avant l’aube à quelque distance de ce
repaire et attend. À peine le soleil se lève-t-il
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derrière les monts de Beaune qu’un sourd
grognement l’avertit du réveil de sa future
victime.
Il se place derrière un tronc d’arbre ou un
rocher et lorsque l’ours apparaît à l’entrée de sa
tanière, il vise l’oreille ou le front, entre les deux
yeux, afin de ne point gâter la peau de son gibier.
Quelquefois, il manque son coup. La bête
alors se rue en avant : arrivée à deux pas du
chasseur, elle s’élance furieuse vers son agresseur
pour l’étouffer dans ses bras.
Si le chasseur manque de sang-froid, il est
perdu. Guigonnet, lui, ne s’effraie pas pour si
peu. Il attend tranquillement, sans bouger de sa
place ; puis, quand l’ours est bien en face de lui,
qu’il ouvre sa gueule formidable ornée de dents
aiguës, il ajuste et fait feu à bout portant, dans
cette gueule rouge, fumante... L’ours tombe et
tout est dit.
Un jour, il lui advint une singulière aventure.
Il chassait le renard en compagnie de quelques
amis. Or, pendant que ses compagnons
l’attendaient de l’autre côté de la forêt, François
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Guigonnet avait grimpé sur la montagne et
guettait le renard au passage.
Il se trouvait tout auprès d’une coulée, sorte de
boyau taillé à pic dans le roc et par lequel on fait
glisser du haut de la montagne en bas les fagots
que l’on coupe dans les forêts et les broussailles.
La coulée était bordée d’arbres touffus qui,
réunissant leurs hautes branches, formaient au-
dessous d’elles une voûte de verdure à travers
laquelle le soleil ne pourrait pénétrer.
Quelques instants après, le renard passa au
galop, suivi de plusieurs chiens qui aboyaient à
tue-tête. L’animal sauta d’un bond dans la coulée,
se faufila à travers la broussaille et disparut.
N’obéissant qu’à son instinct de chasseur,
Guigonnet bondit... Le pied lui glissa... il tomba.
L’instinct qui porte tout homme qui tombe à
chercher un point d’appui, lui fit jeter les mains
en avant. Une de ses mains rencontra un objet
velu qu’il prit pour une branche moussue. Il
tomba, entraînant avec lui ce à quoi il se retenait
et, en quelques secondes, il fut arrivé au bas de la
coulée.
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Un épouvantable grognement retentit aussitôt,
et notre ami François se trouva face à face avec...
un ours de la plus belle taille.
Or, son fusil n’était chargé qu’à balle et la
balle glisse sur la peau de l’ours, comme une
pierre sur la glace ! Il se trouvait en pleine forêt,
seul avec cet animal féroce...
Ma foi ! je crois qu’il eut peur.
Heureusement l’ours eut plus peur que lui. Il
fit un bond de côté et s’enfonça sous le bois, en
courant aussi vite que lui permettaient les
obstacles semés sur sa route.
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V
Guigonnet me raconta bien d’autres histoires,
un jour que je lui avais offert une bouteille de bon
Saint-Julien, au café G... Mais s’il fallait tout
dire, je serais bien embarrassé, et peut-être mes
jeunes lecteurs me traiteraient-ils de...
blagueur ! ! !
Cet âge est sans pitié...
Je préfère m’en tenir à l’esquisse ci-dessus.
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Cet ouvrage est le 262e publié
dans la collection À tous les vents
par la Bibliothèque électronique du Québec.
La Bibliothèque électronique du Québec
est la propriété exclusive de
Jean-Yves Dupuis.
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