Partie II
Partie II
La faiblesse ou la fragilité de la protection des créanciers amène à se demander s'il est encore possible
de continuer à dire qu’il y a une protection (chapitre 1). En effet, la législation en vigueur en matière
de procédures collectives ne vise pas spécifiquement la protection des créanciers, mais plutôt la
sauvegarde de l'entreprise en raison de son objectif économique et social. La loi a cherché à atténuer
les sacrifices nécessaires au sauvetage ou au redressement de l'entreprise en difficulté, au détriment
des créanciers (chapitre 2), ce qui limite considérablement la protection dont ces derniers bénéficient
en raison des restrictions imposées par les procédures collectives.
La loi 15-95 se distingue par la diminution du rôle et des droits accordés aux créanciers, ce qui se
traduit par une protection limitée ne conférant pas aux créanciers un véritable droit de participation
dans la procédure (Section 1). En outre, ladite loi accorde aux créanciers un droit d'action restreint
(Section 2).
Le droit des procédures collectives exclut largement la participation des créanciers dans le processus
décisionnel. Les créanciers n'ont pas droit d'assister aux prises de décision du débiteur ou du syndic, et
ils ne sont pas impliqués dans l'élaboration et l'adoption du plan de continuation, qui est réservée
exclusivement à la décision du tribunal.
La loi autorise les créanciers à assigner en justice leur débiteur pour demander son placement en
redressement judiciaire s'il ne leur paie pas. Cependant, un créancier moins vigilant peut être informé
tardivement de l'ouverture d'une procédure collective.
A-L’assignation du créancier
Le créancier peut engager une procédure collective en saisissant le tribunal par le biais d'une
assignation, indépendamment de la nature de sa créance, à condition que cette créance soit certaine et
incontestable (ce qui n'est pas le cas pour une créance conditionnelle ou litigieuse), qu'elle soit
également liquide (c'est-à-dire chiffrée) et exigible.
Dans certains cas, l'assignation peut entraîner le paiement de la dette à la dernière minute par
l'entreprise assignée, lui permettant ainsi d'éviter la procédure collective. En conséquence, le dossier
de l'entreprise sera radié au tribunal suite au désistement du créancier poursuivant. Cependant, si le
créancier qui assigne n'a pas de sûreté, c'est-à-dire s'il est un créancier chirographaire, il ne sera pas
considéré comme privilégié dans la procédure, même s'il a engagé des frais de procédure. Cette
procédure d'assignation est généralement exercée par les créanciers institutionnels en raison de son
coût élevé, ainsi que par ceux qui ont des ressources importantes et une chance élevée d'être payés.
Pour que cette procédure d'assignation soit valable, il est essentiel de respecter les conditions tant sur
le fond que sur la forme.
En ce qui concerne le fond, le créancier doit d'abord fournir la preuve que l'entreprise en question se
trouve en état de cessation des paiements, car c'est une condition préalable indispensable pour
l'ouverture des procédures visant à résoudre les difficultés auxquelles elle fait face. Ainsi le Tribunal
de commerce de Tanger a considéré que : « Le créancier qui intente une action visant l'ouverture de la
procédure de redressement judiciaire contre son débiteur, est tenu de rapporter la preuve de l'état de
cessation de ses paiements, celle ci ne pouvant résulter uniquement de la production de jugements de
condamnation ou de formalités d'exécution ». De même le tribunal de commerce de rabat a considéré
que : « le relevé de compte déposé par le créancier ne constitue pas une preuve suffisante de la
cessation du paiement du débiteur vu qu’il ne reflète pas la position économique réelle de l’entreprise
et que la situation de celle-ci n’est pas irrémédiablement compromise de ce fait la demande est non
conforme aux dispositions des articles 560 et 568 du code de commerce ce qui justifie son rejet ».
Ensuite, il est nécessaire pour le créancier de démontrer que le débiteur est effectivement disposé à
prendre des mesures pour surmonter les difficultés de l'entreprise.
En ce qui concerne les exigences de forme de l'assignation, il est nécessaire de souligner que la
demande d'ouverture d'une procédure collective à l'encontre de son débiteur est une demande
exclusive, ne pouvant être combinée avec une autre demande, sous peine de nullité. Cela implique que
le créancier ne peut pas assigner son débiteur en demandant, en premier lieu, le paiement de sa dette,
et en second lieu, l'ouverture d'une procédure collective.
Il est essentiel que le créancier n'envisage l'ouverture d'une procédure collective contre un débiteur
qu'avec sérieux, en s'assurant que les conditions requises sont remplies, notamment la cessation de
paiements. Toute précipitation ou mauvaise foi de la part du créancier dans l'introduction de cette
procédure expose à un rejet de sa demande pour abus de droit, ainsi qu'à une condamnation à payer les
frais de justice et éventuellement des dommages-intérêts au débiteur.
La protection des créanciers dépend de leur réaction en cas d'ouverture d'une procédure collective
contre leur débiteur, ce qui nécessite d'être informé de cette ouverture. Cependant, les moyens
d'information actuellement utilisés sont peu efficaces. En effet, pour déclarer leur créance, les
créanciers doivent être informés au préalable de l'ouverture de la procédure, soit par le syndic, soit par
eux-mêmes. Ce système, basé sur la présomption irréfragable de connaissance, entraîne la perte
inévitable des droits des créanciers en cas de défaut de déclaration. Même les créanciers disposant de
personnel chargé de surveiller le Bulletin Officiel ne sont parfois pas notifiés de l'ouverture d'une
procédure contre leur débiteur, en raison notamment de la publication en arabe des annonces du
Bulletin Officiel concernant les entreprises en difficultés, alors que de nombreuses entreprises
marocaines ont des noms en français et que les traductions en arabe peuvent être incorrectes ou
littérales. De plus, le numéro d'immatriculation n'apparaît parfois pas dans l'annonce, ce qui rend
difficile la reconnaissance du nom des débiteurs par les créanciers.
Cependant, les créanciers qui détiennent une sûreté ayant fait l'objet d'une publication (comme une
hypothèque inscrite sur le titre foncier ou un nantissement du fonds de commerce inscrit sur le registre
de commerce) ou d'un contrat de crédit-bail publié, doivent être personnellement informés à leur
domicile élu, afin de pouvoir déclarer leurs créances dans le délai légal. Dans ce cas, la forclusion ne
peut être opposée aux créanciers qui n'ont pas été personnellement avisés. De sur croit, un arrêt de la
Chambre Commerciale de la Cour de cassation de Rabat108 a décidé que : « Les créanciers titulaires
d'une sûreté ou d'un contrat de crédit bail dûment publiés, doivent être avisés du jugement ordonnant
l'ouverture de la procédure du redressement judiciaire mais la loi ne précise pas le contenu de la
lettre d’information ni les modalités de notification ».
En fin de compte, les créanciers ne peuvent pas accéder directement à l'information. Celle-ci est
canalisée et transmise par les contrôleurs, qui ne sont pas strictement tenus de transmettre diligemment
et en quantité suffisante les informations aux créanciers.
Paragraphe 2 - Les manifestations d’une faible participation
La participation limitée des créanciers se manifeste par leur représentativité insuffisante ainsi que par
leur droit de consultation limité.
L'article 645 du Code civil garantit que les créanciers sont représentés par les contrôleurs. Cependant,
plusieurs questions peuvent être soulevées concernant la nomination, le pouvoir et les lacunes légales
de cette institution.
Le législateur n'a pas établi de conditions claires pour choisir un contrôleur en cas de demandes
multiples, ni pour déterminer la proportionnalité de la créance. Aucune compétence professionnelle
n'est exigée pour leur nomination, mais leur révocation peut être ordonnée par le tribunal sur demande
du syndic ou du juge commissaire, qui reste libre dans son appréciation de la proposition. Cependant,
cela soulève la question de savoir pourquoi le législateur ne respecte pas le principe du parallélisme
des formes, puisque la nomination relève de la compétence du juge commissaire tandis que la
révocation relève de la compétence du tribunal. En France, la situation est similaire, sauf que les
contrôleurs peuvent également être révoqués par le tribunal sur proposition du représentant des
créanciers.
Une fois qu'ils sont nommés, les contrôleurs ont accès à tous les documents transmis au syndic par le
tribunal, le juge commissaire, le débiteur, les créanciers, ainsi que les organismes publics et privés.
Après avoir pris connaissance de ces informations, les contrôleurs rendent compte aux autres
créanciers à chaque étape de la procédure. Cependant, le législateur n'a pas spécifié la nature ni la
forme des avis et consultations que les contrôleurs sont autorisés à utiliser dans l'exercice de leurs
actions.
La désignation d'un contrôleur dans le cadre des procédures collectives devrait permettre aux
créanciers de surveiller le déroulement de la procédure. Cependant, le dispositif légal actuel semble
exclure en grande partie les créanciers du contrôle de la procédure. En effet, le législateur n'a pas
accordé aux contrôleurs, ni même aux créanciers, un droit d'action. Les contrôleurs n'ont ni pouvoir de
recours au nom des créanciers, ni pouvoir de décision, et leur avis n'est pas nécessairement suivi. Cette
situation soulève des questions sur l'utilité des contrôleurs qui sont privés des pouvoirs procéduraux
ordinaires. En revanche, la législation marocaine confère tous les pouvoirs au syndic, qui est le seul
autorisé à représenter les créanciers. Cela entraîne une fragmentation continue de l'intérêt général et
collectif, car un seul organe (le syndic) ne peut pas défendre des intérêts opposés. Il est donc pertinent
de se demander si renforcer le contrôle des créanciers sur la procédure en réhabilitant le rôle des
contrôleurs, en améliorant leur représentativité et en augmentant leurs pouvoirs, actuellement limités à
la simple information, serait souhaitable, compte tenu de la nécessité d'accélérer et d'améliorer la
fiabilité des procédures.
En accordant aux contrôleurs tous les moyens nécessaires pour devenir les véritables représentants des
créanciers, car la mission hybride du syndic ne garantit pas réellement l'intérêt des créanciers, la
législation française confère au contrôleur un pouvoir général de contrôle et de surveillance. Ainsi, le
contrôleur peut :
Examiner tous les documents transmis au liquidateur, y compris les offres en vue d'un
plan de cession;
Exprimer des observations et des avis ;
Avoir le droit d'être entendu avant chaque décision importante de la procédure ;
Solliciter l'assistance du liquidateur judiciaire dans la vérification du passif ;
Demander au juge-commissaire le remplacement ou l'ajout d'un organe de la procédure ;
Agir dans l'intérêt collectif des créanciers en cas d'inaction du liquidateur judiciaire, y
compris en ce qui concerne les sanctions à l'encontre des dirigeants.
Les propositions de règlement des dettes, incluant les délais et les remises, sont généralement
présentées par le syndic au contrôleur sous la surveillance du juge commissaire. Avant cela, le syndic
doit consulter individuellement ou collectivement les créanciers ayant déclaré leurs créances, et
obtenir leur accord sur les délais de paiement ou les remises demandées pour assurer le bon
déroulement du plan de continuation. Cette consultation est requise par l'article 585 et fait référence à
l'existence d'un intérêt collectif des créanciers afin de leur permettre de confronter leurs intentions et
de parvenir à une position commune dans le cadre du plan de continuation. En effet, les délais et
remises n'ont de valeur que dans le contexte d'un tel plan.
Le syndic adresse aux créanciers, par lettre recommandée, un état de la situation active et passive avec
ventilation du passif privilégié et du passif chirographaire, les propositions du syndic et du débiteur
ainsi que l'indication des garanties offertes, accompagnés de l'avis des contrôleurs s'ils en ont été
nommés. Les créanciers sont consultés individuellement et disposent d'un délai de 30 jours pour
répondre, faute de quoi leur silence sera considéré comme une acceptation des propositions du syndic.
Ainsi la Cour de cassation a considéré que : « Le créancier qui a déclaré sa créance dans les délais et
n’a pas répondu à la lettre du syndic comportant une proposition d’abattement de la créance, est
présumé en avoir accepté les termes ». Dans le cadre d'une consultation collective, les créanciers se
rassemblent sous la direction du syndic, à l'endroit, à la date et à l'heure indiqués dans la lettre de
convocation. Le créancier peut se présenter en personne ou se faire représenter par un mandataire
muni d'une procuration.
Étant donné que le législateur n'accorde pas aux créanciers un véritable droit de participation à la
procédure, ces derniers chercheront à entreprendre des actions pour protéger leurs droits.
Le droit à l'action se heurte au principe de l'arrêt des poursuites, limitant ainsi sa portée. Cependant,
malgré cet arrêt des poursuites, les créanciers peuvent encore exercer certaines actions. De plus, le
syndic peut engager d'autres actions au nom et dans l'intérêt des créanciers.
L'ouverture de la procédure a pour conséquence de suspendre les actions des créanciers antérieurs.
Toutefois, cette règle n'est pas absolue, car il existe des actions en condamnation qui échappent à
l'arrêt des poursuites, notamment celles concernant les poursuites contre le débiteur lui-même, ainsi
que celles contre les tiers.
Les instances en cours sont temporairement interrompues jusqu'à ce que le créancier poursuivant ait
présenté sa déclaration de créance. Une fois que cela est fait, les instances sont automatiquement
reprises avec la participation du syndic dûment convoqué, mais elles ont pour seul objectif de
constater les créances et de fixer leur montant.
Les sûretés personnelles offrent une meilleure protection aux créanciers en les protégeant contre deux
risques : la diminution de la créance et la perte ou l'inefficacité de la sûreté. La diminution de la
créance est évitée car les remises de dettes consenties au débiteur en difficulté ne sont pas bénéfiques
au garant qui doit toujours payer l'intégralité de la somme due par le débiteur, même à l'échéance
initiale. Le risque de perte ou d'inefficacité de la sûreté est évité car le garant peut être poursuivi même
après l'ouverture de la procédure. De plus, l'extinction de la créance du débiteur ne conduit pas
automatiquement à l'extinction de l'engagement d'un autre coéditeur. Ces mesures garantissent le
paiement du créancier et renforcent l'efficacité des sûretés personnelles dans les procédures
collectives.
Il est courant que la créance soit garantie par plusieurs codébiteurs qui sont soumis à une procédure de
redressement ou de liquidation judiciaire. Dans ce cas, le créancier a le droit de faire une déclaration
cumulative. Il peut y avoir deux scénarios possibles : soit les codébiteurs sont solidaires et sont en
redressement judiciaire, soit les codébiteurs ont versé une partie de la créance au créancier mais une
procédure a été ouverte contre eux ensuite. Dans les deux cas, le créancier peut faire une déclaration
cumulative, mais en déduisant le montant déjà reçu des codébiteurs.
En raison de l'absence de lien accessoire, l'extinction de la créance sur le débiteur n'affecte pas
l'engagement d'un autre coéditeur. De même, le transfert de la charge de la sûreté lors d'un plan de
cession, où le repreneur assume une partie des dettes du débiteur, n'a pas d'impact sur l'obligation du
coéditeur de payer l'intégralité de la dette. La cession judiciaire du contrat ne libère pas non plus le
coéditeur de son obligation de payer la dette découlant du contrat. Enfin, la clôture de la procédure
pour insuffisance d'actif, qui empêche les poursuites contre le débiteur, n'interdit pas la poursuite d'un
coéditeur.
En cas d'impossibilité de recouvrer la créance, le créancier peut se tourner vers la caution pour obtenir
le paiement. La caution est soumise à une obligation similaire à celle du débiteur principal. Cependant,
il peut y avoir des questions sur le moment où la caution peut être poursuivie et le montant maximum
de la poursuite. Si le débiteur bénéficie encore de son terme, le créancier ne peut pas agir contre la
caution, sauf si des clauses de renonciation au maintien du terme sont incluses dans le contrat de
cautionnement à l’article571 du CC. Cela expose la caution au risque d'être poursuivie en paiement
même si la créance principale n'est pas encore exigible.
En ce qui concerne le plafond de la poursuite, il faut noter que le cautionnement est considéré comme
étant accessoire à la créance principale. Ainsi, lorsque la créance principale est éteinte, le
cautionnement l'est également. Cependant, en cas de procédure collective, si la créance n'est pas
déclarée dans les délais prévus, elle n'est pas éteinte mais reste opposable. Cela peut entraîner la non-
extinction du cautionnement.. Ainsi, le caractère de l’accessoire peut être remis en cause par deux
règles prévues par l’article 662 du CC qui dispose que : « Les cautions, solidaires ou non, ne peuvent
pas se prévaloir : - des dispositions du plan de continuation ; - de l'arrêt du cours des intérêts prévu à
l'article 659 ».
En tant que représentant des créanciers, le syndic est habilité à agir en leur nom pour protéger et
récupérer les actifs de l'entreprise. À cet égard, il peut engager des actions en annulation des actes
suspects et saisir le tribunal pour exercer l'action en comblement de passif et demander l'extension de
la procédure aux dirigeants.
La reconstitution ou la libération des garanties qui pèsent sur les actifs de l'entreprise sont des
opportunités pour sa survie, contribuant ainsi à renforcer les moyens nécessaires pour augmenter les
chances de succès du plan de sauvegarde, protégeant ainsi les créanciers. Cependant, ces actions ne
peuvent être légitimement poursuivies que pour les actes passés par le débiteur pendant la période
suspecte. Seul le syndic est habilité à engager une action en annulation des actes suspects. Un
créancier n'a pas le droit de demander l'annulation des actes suspects même en cas de carence du
syndic. De même, la nullité ne peut être soulevée d'office par le tribunal.
En cas d'annulation d'un contrat de vente en période suspecte, la jurisprudence française stipule que
l'acheteur doit déclarer au passif le montant du prix de vente qui doit lui être remboursé selon la
procédure prévue à l'article L.622-24, alinéa 1 du Code de commerce français. Bien que le fondement
de cette position soit encore imprécis, il peut être justifié par la volonté des juges de sanctionner les
cocontractants ou de sauver l'entreprise en facilitant les rentrées d'actif dans le patrimoine du débiteur.
Ainsi, le produit de l'action de reconstitution de l'actif du débiteur intègre son patrimoine et opère une
nullité à l'égard du cocontractant, mais si cette nullité cause un préjudice au cocontractant, le syndic
récupère la totalité des biens et le cocontractant lésé n'a qu'à déclarer sa créance.
Il est important de noter que toutes les inopposabilités liées à la période suspecte sont soumises à deux
conditions strictes. Tout d'abord, il doit y avoir un préjudice causé aux créanciers, et ensuite, il doit y
avoir eu connaissance de la cessation des paiements au moment où l'acte a été conclu. Ainsi, la
Chambre Commerciale de la Cour de cassation de Rabat a considéré que « S'agissant des actes à titre
onéreux faits par le débiteur pendant cette période ou à titre gratuit durant les six mois précédant la
cessation des paiements, la nullité est soumise à l'appréciation souveraine du juge. Doit être cassé
pour défaut de motifs, l'arrêt qui infirme le jugement de première instance ayant ordonné la restitution
des fonds à l'entreprise sans motiver sa décision et préciser si l'accord a été conclu à titre onéreux ou
gratuit et si cet accord a préjudicié aux droits des autres créanciers ».
L'action en comblement de passif est un outil inspiré du droit français, mis en place par le législateur
pour atténuer les effets de la séparation des patrimoines et de la limitation de responsabilité découlant
de la personnalité morale. Elle permet aux créanciers de tenir directement responsables les dirigeants
sur une base extracontractuelle lorsqu'ils ont commis une faute de gestion ayant contribué à
l'insuffisance de l'actif de la société. Cette action revêt une importance capitale dans les sociétés
anonymes (SA) et les sociétés à responsabilité limitée (SARL), où la responsabilité des actionnaires et
des associés est limitée au patrimoine social.
L'action en comblement du passif, comme son nom l'indique, semble avoir été créée dans l'intérêt des
créanciers. À cet égard, la législation marocaine prévoit cette action en tant que sanction patrimoniale
applicable aux dirigeants d'entreprises en difficulté, confiant ainsi au syndic la mission de la
déclencher. En effet, le syndic est le seul, en dehors de la saisine d'office du tribunal, habilité à agir en
ce sens. Ni les créanciers, ni le débiteur, ni le ministère public ne sont autorisés à demander
l'application de cette sanction patrimoniale.
L'article 704 du CC prévoit que si un dirigeant commet une faute de gestion contribuant à
l'insuffisance de l'actif d'une entreprise, le tribunal peut décider que cette responsabilité soit supportée,
en tout ou en partie, avec ou sans solidarité, par tous les dirigeants ou certains d'entre eux. Ainsi, la
faute du dirigeant n'a pas besoin de causer directement l'insuffisance de l'actif, mais seulement de
contribuer à cette situation. Cela peut entraîner une condamnation du dirigeant à payer l'ensemble du
passif de l'entreprise.
Le jugement d'ouverture d'une procédure collective a des effets stricts sur les droits des créanciers de
l'entreprise débitrice, limitant leurs prérogatives habituelles en suspendant leurs droits de créance et en
imposant des restrictions substantielles sur leurs droits.
En général, les créanciers antérieurs sont empêchés de recevoir des paiements, d'entamer des
poursuites en justice ou de saisir les biens du débiteur. Néanmoins, il existe plusieurs exceptions à
cette interdiction, qui sont diverses et variées.
En vertu du jugement d'ouverture, toute action en justice entreprise par des créanciers dont la créance
est antérieure au jugement d'ouverture, visant à obtenir la condamnation du débiteur au paiement d'une
somme d'argent ou à la résolution d'un contrat pour défaut de paiement du prix, est suspendue ou
interdite. De plus, les instances en cours sont également suspendues jusqu'à ce que le créancier
poursuivant ait effectué la déclaration de sa créance. Ainsi la Chambre Commerciale de la Cour de
cassation de Rabat a considéré dans un arrêt que : « Le créancier peut seulement déclarer sa créance
entre les mains du syndic et lorsque l'action est en cours, faire constater la créance et la fixation de
son montant par application des dispositions de l'article 654 du code de commerce ».
Le principe d'interdiction des poursuites individuelles s'applique de manière générale. Cette mesure de
suspension des poursuites individuelles s'applique à tous les créanciers antérieurs au jugement
d'ouverture de redressement judiciaire, sans distinction de leur statut chirographaire ou privilégié, y
compris les créanciers bénéficiant d'un privilège spécial comme le trésor public et les organismes de
sécurité sociale. Seuls les salariés bénéficieront d'un traitement plus favorable et ne seront pas soumis
à cette suspension.
En outre, le jugement d'ouverture interdit ou suspend également : les délais qui, en cas de non-respect,
entraîneraient la déchéance ou la résolution des droits, ainsi que les mesures d'exécution visant les
fonds du débiteur détenus par un tiers.
L'arrêt des voies d'exécution est une conséquence logique de l'interdiction des actions visant au
paiement d'une somme d'argent. Ainsi, toute forme de voie d'exécution, qu'elle concerne les biens
meubles ou immeubles, est interdite de la part des créanciers. . La cour d’appel de Fès a décidé que: «
le commandement immobilier, voies d’exécution, est suspendu par le jugement d’ouverture». Par
contre une ordonnance du Tribunal de commerce Marrakech a considéré que : « Le jugement
d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire n'annule pas les mesures conservatoires
pratiquées, celles-ci revêtant un caractère conservatoire garantissant la créance et ne peuvent être
assimilées à des mesures d'exécution ».
En outre, le principe de l'arrêt des poursuites comporte des exceptions, telles que les actions dirigées
contre les tiers à la procédure, les actions en nullité d'un contrat, les actions en rescision pour cause de
lésion, les actions en résolution basées sur des motifs autres que le non-paiement d'une somme
d'argent, ainsi que les demandes d'expertise, etc."
La déclaration du jugement d'ouverture apporte des changements substantiels aux droits des créanciers
antérieurs : les intérêts légaux et conventionnels sont gelés, les créanciers ne sont pas autorisés à
inscrire de nouvelles sûretés sur des biens déjà consentis, et ce jugement n'entraîne pas la déchéance
du terme des obligations contractées.
L’article 666 du CC dispose que : « les hypothèques, nantissements, privilèges ainsi que les actes et
décision judiciaires translatifs ou constitutifs de droits réels ne peuvent plus être inscrits
postérieurement au jugement d’ouverture de redressement judiciaire ». Suite au prononcé du jugement
d'ouverture de redressement judiciaire, le patrimoine du débiteur est gelé afin de garantir la continuité
de l'activité et de préserver l'équité entre les créanciers. Toute inscription qui contreviendrait à cette
règle serait considérée comme invalide, et toute partie concernée pourrait demander sa suppression.
En interdisant aux créanciers d'enregistrer leurs garanties après le prononcé du jugement d'ouverture,
même s'ils sont encore dans les délais pour le faire, la loi permet de définir clairement le patrimoine du
débiteur et de faciliter son redressement. Ces créanciers qui n'ont pas pu enregistré leurs garanties
avant le jugement d'ouverture ne peuvent être admis qu'en tant que créanciers ordinaires. Ils ne
peuvent donc plus invoquer leurs garanties contre des tiers, et les biens du débiteur sont disponibles
pour de nouvelles affectations en garantie de dettes contractées après le jugement d'ouverture.
L'arrêt du cours des intérêts, tel que stipulé dans l'arrêt, vise à garantir une certaine équité entre les
créanciers en ce qui concerne la durée de la procédure. Si les intérêts continuaient à courir, il faudrait
les recalculer quotidiennement. Selon l'article 659 du code de commerce, « le jugement d’ouverture
arrête le cours des intérêts légaux et conventionnel ainsi que tous les intérêts de retard et
majorations».Cette disposition peut s'expliquer par la volonté du législateur de favoriser la
restructuration de l'entreprise en évitant d'alourdir le passif du débiteur. Cependant, ces intérêts
reprennent leur cours à la date du jugement qui arrête le plan de continuation.
De plus, les créances non échues à la date du jugement d'ouverture ne sont pas rendues exigibles.
Toute clause contraire est considérée comme non valide. Par conséquent, il n'est plus possible
d'inclure dans un contrat une clause de déchéance du terme basée sur le prononcé du jugement
d'ouverture. Ainsi, le passif exigible du débiteur n'est pas augmenté par les dettes qui ne seraient
payables que dans plusieurs années.
Outre les contraintes imposées aux droits des créanciers, il est essentiel que ces derniers consentent à
des sacrifices en ce qui concerne le paiement afin de permettre la survie de l'entreprise.
Afin de garantir le remboursement des créanciers, il est nécessaire en premier lieu d'établir une
hiérarchie de priorités entre les créanciers et de déterminer le mode de paiement. Cette hiérarchie de
priorités des créanciers est cruciale pour déterminer les créances qui bénéficient du principe de
paiement à l'échéance pendant la période d'observation et du privilège de paiement dans le cas
contraire, ainsi que pour définir le montant et la nature des dettes à régler dans le cadre du plan de
redressement.
Les modalités de paiement des créanciers diffèrent entre les procédures d'exécution individuelles et les
procédures collectives telles que le redressement et la liquidation judiciaires. Dans les procédures
d'exécution individuelles, les créanciers ne sont soumis à aucune procédure spécifique et le paiement
dépend de la diligence du créancier pour recouvrer sa créance. En revanche, dans les procédures
collectives, le paiement peut être soit un objectif subsidiaire (dans le cas du redressement), soit un
objectif principal (dans le cas de la liquidation). Toutefois, dans cette situation, les créanciers
encourent le risque de voir leur droit de recouvrement contre le débiteur compromis en cas de clôture
de la procédure.
Lorsqu'une entreprise fait l'objet d'une procédure collective, le processus de règlement de ses dettes est
perturbé, avec des différences selon qu'il s'agit d'un plan de continuation ou de cession, ce qui modifie
le schéma habituel.
Il faut rappeler que la participation des créanciers est décisive dans le choix de la continuation au lieu
de la liquidation et dans la réussite du nouveau rôle judiciaire du traitement des difficultés de
l’entreprise. Ainsi le tribunal de commerce de Casa Blanca a décidé que : « attendu que la réussite du
plan de continuation et la réalisation des résultats positives sur le plan économique est liée à la
sincérité des garanties données aux créanciers, Attendu que le dit plan contient des échelonnements
pour les créances ordinaires jusqu’à huit ans et pour les créances garanties jusqu’à dix ans à
l’exception des créances du trésor public pour lesquelles l’échelonnement s’étale jusqu’à six ans,
Attendu que les prépositions de redressement judiciaires déposées par le chef d’entreprises au syndic
et qu’il a présentées aux créanciers ont recueilli l’accord de l’entreprise IBN TABET BERIAL
ALCHARIBA- KARJIL … SRILKS SORIKO ALWAFIK IDRESSE, Attendu que les créanciers qui n’ont
pas répondu aux propositions dans les délais prévus par l’article 585 du CC sont réputés avoir
acceptés les propositions du syndic, et le pourcentage de l’accord a atteint 82 % ».
Il existe trois types de créances distinctes pour une entreprise en redressement judiciaire :
-Les créances nées antérieurement au jugement d'ouverture : Il s'agit des créances qui existent avant
que la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire ne soit ouverte. Pour apurer le passif de
l'entreprise, cette dernière peut bénéficier d'une remise de dette envers ces créanciers. Le tribunal peut
ordonner le respect des délais et remises acceptés par ces créanciers.
-Les créances nées entre le jugement d'ouverture et le jugement du plan de continuation ou de cession :
Il s'agit des créances qui sont apparues pendant la période entre l'ouverture de la procédure et le
jugement du plan de continuation ou de cession. Ces créances sont soumises au droit commun et
peuvent être poursuivies normalement par les créanciers.
-Les créances nées après le jugement qui fixe le plan de continuation ou de cession : Il s'agit des
créances qui sont apparues après que le plan de continuation ou de cession ait été fixé par le tribunal.
Ces créances sont payées à leur échéance et bénéficient du droit de priorité en vertu de l'article 575 du
CC.
-Les créanciers qui n'ont pas accepté de renoncer à leurs créances verront imposer des délais de
paiement uniformes dans le cadre du plan, sauf indication contraire des parties avant le début de la
procédure, pour les créances à terme. Il est possible que ces délais dépassent la durée prévue du plan.
Dans le cas où le tribunal approuve le projet de plan et que certains créanciers ont refusé les
propositions ou n'ont pas répondu, il revient au tribunal de déterminer les modalités de remboursement
de ces créanciers. Cependant, bien que le tribunal puisse accorder des délais de paiement et un
échelonnement jusqu'à dix ans, il n'a pas le pouvoir d'imposer à un créancier un remboursement
inférieur à 100% de la créance. Ainsi, dans le souci de respecter le principe d'égalité entre les
créanciers, le tribunal fixera des délais uniformes pour tous les créanciers. De même, les reports
d'échéances devront être les mêmes pour tous les créanciers concernés.
Le champ d'application des délais ou remises est étendu, car presque tous les créanciers sont concernés
par cette règle. Ainsi, le tribunal peut imposer des délais non seulement aux créanciers
chirographaires, mais aussi aux créanciers hypothécaires, nantis ou privilégiés. Toutefois, en l'absence
de dispositions légales, on peut se demander si les sacrifices demandés aux créanciers en ce qui
concerne les remises et délais s'appliquent également aux créanciers à privilège général tels que les
salariés, les impôts, la CNSS, etc. Dans une affaire, le tribunal de commerce de Casablanca a ordonné
le paiement intégral des créances fiscales, tandis qu'il a imposé un délai pour la CNSS.
La question de l'inclusion des créances salariales dans un plan de redressement établi par le tribunal
n'a pas été abordée par le législateur marocain. Il est donc légitime de se demander si les créances
salariales doivent être traitées de la même manière que les autres créances dans le cadre d'un plan de
continuation, étant donné que la durée de rééchelonnement des dettes peut aller jusqu'à 10 ans. Le
législateur n'a pas pris position sur cette question, ce qui suggère qu'il n'y a pas de volonté d'accorder
une priorité de paiement aux créances salariales par rapport aux autres créances dans cette procédure.
Il semble que le législateur reste attaché au principe d'égalité des créanciers.
La cession est moins avantageuse pour les créanciers chirographaires par rapport à la continuation, car
elle entraîne des retards de paiement si le prix n'est pas payé en totalité et des paiements partiels
lorsque le prix est inférieur au montant du passif, ce qui est généralement le cas. En revanche, en cas
de continuation, le tribunal peut accorder des délais de paiement aux créanciers, mais il ne peut pas
imposer de remises. La seule façon d'éviter cette conséquence aurait été de permettre les cessions
uniquement si le prix permettait de régler l'intégralité du passif.
La plupart des créanciers antérieurs qui détiennent des garanties voient leurs paiements retardés, tandis
que d'autres subissent simplement une réduction de leur priorité de paiement.
En effet, le paiement des créanciers détenant des garanties (telles que le privilège spécial, le
nantissement ou l'hypothèque) sera effectué en prélevant une portion du prix de cession, qui sera
attribuée à chaque garantie en vue de la répartition du prix et de l'exercice du droit de préférence.
Cependant, le législateur n'indique pas les techniques à utiliser pour évaluer cette portion. Le tribunal a
donc le pouvoir discrétionnaire de fixer le montant de la portion qui sera attribuée, ce qui comporte
toujours un risque d'arbitraire. Si les montants ainsi attribués ne suffisent pas à rembourser
intégralement les créances, le créancier sera considéré comme chirographaire pour le surplus. Cette
solution semble peu avantageuse pour les créanciers disposant de garanties réelles.
L'article 616 du CC prévoit le droit de préférence, mais son efficacité est limitée. En effet, ce droit est
déjà reconnu aux créanciers en vertu du droit commun et ne s'applique donc qu'en comparaison avec
les créanciers ordinaires dont les créances ont été contractées avant l'ouverture de la procédure de
redressement judiciaire. Lors de la distribution du prix de vente, ces créanciers devront rivaliser avec
les créanciers bénéficiant de privilèges généraux, même si leurs créances ne sont pas prises en compte
dans le calcul de la quote-part.
En outre, une fois que le cessionnaire a entièrement payé le prix de cession, les créanciers ne
conservent plus un véritable droit de suite, car il ne peut plus être exercé pour le reste du prix. En effet,
le paiement intégral du prix entraîne la suppression des garanties et des inscriptions. Cependant, cela
n'empêche pas les créanciers qui n'ont pas été payés en totalité ou en partie de recouvrer leur droit de
poursuite individuelle contre le débiteur après la clôture de la procédure, en tant que créanciers
ordinaires. En revanche, les créanciers peuvent exercer leur droit de suite si le cessionnaire a cédé le
bien avant d'avoir entièrement payé le prix de cession. C'est pourquoi, avant de procéder à toute
cession d'un bien grevé, le cessionnaire doit informer préalablement le syndic de toute aliénation du
bien cédé. Le syndic doit alors prévenir les créanciers bénéficiant du droit de suite.
En outre, la question des créanciers bénéficiant de privilèges généraux, tels que les impôts ou la
CNSS, n'a pas été spécifiquement résolue par la loi, et les dispositions relatives à ces créanciers ne
sont pas claires à cet égard. Ainsi, en ce qui concerne les dettes antérieures à la cession, ces créanciers
sont traités de la même manière que les autres créanciers lors de la répartition du prix de cession. En
revanche, pour les dettes postérieures à la cession et les reliquats, le cessionnaire sera responsable de
leur paiement en raison de la solidarité qui s'applique généralement dans ce domaine, étant donné que
la dette est liée à l'exploitation.
La liquidation judiciaire suppose que l'entreprise est en état de cessation des paiements et que son
rétablissement est manifestement impossible. Elle met fin à l'activité du débiteur, dont les biens sont
vendus pour permettre le paiement des différents créanciers. Mais cet objectif n’est pas toujours atteint
à cause des insuffisances législatives au niveau de l’ordre de paiement entre les créanciers ainsi qu’au
niveau de la clôture de la procédure.
Le principal objectif de la liquidation judiciaire est d'effectuer le paiement des créanciers. Cependant,
cette opération est moins avantageuse pour l'ensemble des créanciers en raison de la dépréciation de la
valeur des actifs de l'entreprise en liquidation, ce qui expose ces derniers au risque de ne recevoir
qu'une fraction souvent insignifiante de leur dû. Le règlement s'effectue en plusieurs fois, ce qui
entraîne une inégalité entre les créanciers à ce stade de la procédure.
Lorsqu'une liquidation judiciaire est prononcée, le syndic a pour responsabilité de liquider les actifs du
débiteur, de répartir les recettes de vente et de régler les créanciers selon un certain ordre. L'objectif de
cette procédure est de régler les divers créanciers, en respectant les principes des sûretés réelles, car les
actifs de l'entreprise sont réalisés, que ce soit de manière individuelle ou par unité de production. Les
créanciers qui détiennent des garanties devraient pouvoir exercer librement leurs droits et recevoir un
paiement en fonction de leur rang de préférence.
Après la vente des immeubles et le règlement définitif de l’ordre entre les créanciers hypothécaires et
privilégiés, ceux d’entre eux qui viennent en rang utile sur le prix des immeubles pour la totalité de
leur créance ne perçoivent le montant de leur collocation hypothécaire que sous déduction des sommes
par eux reçues. Les sommes ainsi déduites profitent aux créanciers chirographaires. Toutefois, les
créanciers privilégiés ou hypothécaires, non remplis sur le prix des immeubles, concourent avec les
créanciers chirographaires pour ce qui leur reste dû.
En outre, les articles 630 à 632 du CC tentent de fournir des solutions au problème de concurrence
entre les créanciers bénéficiant de droits hypothécaires ou privilégiés et les créanciers ordinaires. Ces
dispositions s'appliquent automatiquement aux créanciers détenant des sûretés spécifiques. Cependant,
les difficultés découlent principalement de l'absence de règles claires dans le CC régissant à la fois
l'ordre de paiement entre les créanciers postérieurs à l'ouverture de la procédure et celui devant être
établi entre les créanciers, qu'ils soient antérieurs ou postérieurs.
Le tribunal peut prononcer la clôture de la liquidation judiciaire dans deux cas : premièrement, lorsque
la poursuite des opérations de liquidation est devenue impossible en raison de l'insuffisance d'actifs ou
lorsque le syndic dispose de suffisamment de fonds pour rembourser les créanciers, ce qui est très rare.
Dans ce cas, il y a clôture pour extinction du passif, ce qui signifie que les opérations de liquidation
sont terminées, y compris la réalisation des actifs et les actions entreprises. Les créances restantes
seront ensuite payées selon les échéances prévues, sauf si des poursuites sont engagées en cas de
défaut de paiement. Deuxièmement, la clôture de la liquidation judiciaire peut être prononcée lorsque
la poursuite des opérations de liquidation est impossible en raison de l'insuffisance d'actifs. Dans la
plupart des cas, cette clôture est définitive, mais si des actifs n'ont pas été réalisés ou si des actions
dans l'intérêt des créanciers n'ont pas été entreprises, la procédure peut être reprise à la demande d'un
créancier intéressé ou du ministère public. Dans les deux cas, le tribunal de commerce rend un
jugement de clôture de la liquidation judiciaire.
La clôture de la procédure produit trois effets : la cessation de la mission des organes de la procédure
et la fin du dessaisissement du débiteur. Toutefois, le troisième effet est plus complexe, car la clôture
pour insuffisance d'actif pourrait permettre aux créanciers de reprendre des poursuites contre le
débiteur. La législation française, en particulier l'article L622-32, prévoit que le principe de non-
reprise des poursuites individuelles connaît des exceptions générales lorsque le débiteur ne mérite pas
de bénéficier de cet avantage. Malgré les exceptions, la doctrine française a critiqué ce principe pour
diverses raisons, notamment le fait qu'il peut affecter l'éthique commerciale et inciter les commerçants
à ne pas respecter leurs engagements.
Cependant, selon l'ancien Code de Commerce de 1913, en particulier l'article 279, les créanciers ont le
droit d'exercer des actions contre le débiteur pour se protéger contre la négligence du syndic et de
demander la contrainte par corps du débiteur. Cependant, la législation en vigueur, notamment l'article
635 du CC actuel, qui considère l'insuffisance de l'actif comme l'une des causes de clôture de la
procédure de liquidation judiciaire, ne prévoit pas explicitement cette possibilité. Face à ce vide
juridique, la doctrine et la jurisprudence ont la responsabilité de trouver des solutions. Dans ce
contexte, la doctrine marocaine, en particulier le professeur SBAII Choukri, plaide en faveur du
maintien de la position de la législation ancienne, c'est-à-dire la possibilité de poursuivre le débiteur en
cas de clôture de la procédure de liquidation en raison de l'insuffisance de l'actif.