Droit Pénal Des Affaires
Droit Pénal Des Affaires
AFFAIRES
Par Papa Ismaël DIALLO,
Magistrat,
Introduction Générale :
I – Le Droit Pénal:
Dans son célèbre ouvrage intitulé « Droit et Passion du Droit sous la Cinquième République »1, le
Doyen Jean CARBONNIER disait ceci : « Nous aurions pu songer à montrer, sur un exemple, comment
le droit change dans une société qui elle-même est en changement… ». C’est rappeler donc que les
sciences juridiques constituent une science sociale qui ne peut échapper aux mouvements universels
du progrès sur tous les plans.
De façon spontanée et pour les besoins de la pacification de la vie en société, les êtres humains se
sont d’abord accordés à appliquer, naturellement, des règles de bonne conduite : c’est le droit
naturel. Mais, étant donné que ces règles de droit naturel étaient appelées à se clarifier et à se
pérenniser, elles ont fini par être codifiées, d’où l’essor du droit positif, en particulier dans les
systèmes juridiques d’inspiration romano-germanique.
Les plus anciens textes connus ne sont bien souvent que des catalogues d’infractions et de peines et
au fil des siècles, le Droit Pénal, loin de céder la place à l’éclosion de nouvelles branches du droit, a
plutôt tendance à s’adapter à ces disciplines qu’il entreprend de compléter à travers ses fonctions. Le
droit pénal, aussi ancien soit-il, ne subit dès lors pas l’usure du temps mais a toujours tendance à se
perfectionner afin d’apporter sa contribution aux efforts de sécurité juridique et judiciaire.
Le Droit Pénal désigne au sens étroit l’ensemble des règles juridiques pourvues de peines. Dans un
sens plus large, le Droit Pénal est l’ensemble des lois qui régissent l’exercice de la répression par
l’Etat. Le droit pénal est le droit de l’infraction et de la réaction sociale qu’elle suscite, c'est-à-dire la
peine. D’un point de vue juridique, c’est l’étude du phénomène criminel, c’est-à-dire des
1
Ouvrage paru aux Editions Flammarion, Collection Forum en 1996.
1
comportements qui, sous des formes diverses, mais aussi à des degrés différents, vont être
considérés comme contraires à un ordre social et à la sécurité publique et pour cette raison, vont
être sanctionnés. Le Droit Pénal incrimine et sanctionne les comportements qui portent atteinte à
l’organisation de la vie sociale et aux valeurs essentielles de la société. La société édicte ces
infractions pour protéger l’ordre social, sanctionner ceux qui la troublent et dissuader ceux qui
seraient tentés de le faire.
Le Droit Pénal est une discipline évolutive car l’ordre social qu’il vise à préserver s’adapte aux
évolutions des normes, des techniques et subit l’influence des objectifs de politique criminelle mis en
œuvre par les pouvoirs publics.
L’infraction quant à elle, trame du droit pénal, constitue un terme tiré du terme latin « frangere » qui
signifie briser. Il s’agit plus exactement d’ « une action ou une omission définie et punie par la loi
pénale, imputable à son auteur et ne se justifiant pas par l’exercice d’un droit »2.
La peine quant à elle, raison d’être du Droit Pénal, est une sanction préalablement prévue par la loi
et qui sera appliquée en cas de commission d’une infraction.
- Le principe de légalité
Le principe de légalité est la clé de voute du droit criminel selon MERLE et VITU exprimée sous forme
d’adage : « Nullum crimen, nulla poena sine lege » qui signifie pas d’infraction ni de peine sans loi. Le
principe de la légalité des infractions et des peines a été consacré par la Déclaration des Droits de
l’Homme et du Citoyen de 1789. L’article 7 de cette convention dispose : « Nul homme ne peut être
arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la loi et dans les formes qu’elle a prescrites ».
L’article 8 de la même convention ajoute : « La loi ne peut établir que des peines strictement et
évidemment nécessaires et que nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée
antérieurement au délit et légalement appliqué ».
Au Sénégal, à la suite de la Constitution de 1963, celle du 22 janvier 2001 l’a repris avec force en son
article 9 et en ces termes : « Nul ne peut être condamné si ce n’est en vertu d’une loi entrée en
vigueur avant l’acte commis. La défense est un droit absolu dans tous les états et à tous les degrés
de la procédure ». Le Code Pénal Sénégalais quant à lui dispose en son article 4 : « Nul crime, nul
délit, nulle contravention ne peuvent être punis de peines qui n’étaient pas prévues par la loi ou le
règlement avant qu’ils fussent commis ».
2
G. LEVASSEUR, A. CHAVANNE, J. MONTREUIL, B. BOULOC, Droit Pénal Général et
Procédure Pénale, 13ème édition, Sirey, 1999.
2
C’est dire donc que pour qu’une infraction pénale existât, quelle que soit son importance, il faut
impérativement qu’elle ait été prévue par un texte tant du point de vue de sa définition que du
point de vue de sa répression.
Il y a lieu enfin de préciser qu’en vertu des dispositions de l’article 67 de la Constitution, la définition
des crimes, des délits ainsi que des peines et de la procédure qui leur sont applicables, relève du
domaine de loi. En ce qui concerne les contraventions, elles relèvent du règlement d’autant plus que
l’article 76 de la Constitution prévoit que toutes les matières qui ne relèvent pas du domaine
législatif ont un caractère règlementaire.
En vertu du principe de légalité, même si la loi pénale se doit d’être claire et précise, il n’en reste pas
moins que le juge répressif peut l’interpréter dans certaines circonstances. Deux (02) séries
méthodes d’interprétation peuvent être utilisées pour ce faire : il s’agit des méthodes doctrinales et
des méthodes consacrées par le droit positif. Les méthodes doctrinales sont de trois (03) ordres. Il
s’agit de la méthode littérale (MONTESQUIEU ET BECCARRIA) qui s’attache uniquement à la lettre de
la loi pénale, de la méthode téléologique qui s’intéresse plutôt à l’esprit de la loi et la méthode
analogique qui tend à s’inspirer d’un texte similaire pour deviner la volonté du législateur. Les
méthodes prévues par le droit positif quant à elles distinguent entre lois pénales de fond et lois
pénales de forme.
La jurisprudence a adopté pour ce type de lois la méthode de l’interprétation stricte qui interdit
toute interprétation extensive ou par analogie. Ainsi, quand la loi pénale est claire, le juge n’a pas à
interpréter le texte, il lui suffit tout juste de l’appliquer. Quand elle est obscure, il doit s’efforcer à
rechercher le sens véritable de la loi, sans faire montre d’imagination de façon à faire dire à la loi ce
qu’elle ne dit pas, sans également se substituer au législateur au risque de violer le principe de
légalité. Enfin, lorsque la loi a vieilli, ou est en retard par rapport à l’évolution technique, le juge
peut adapter le texte aux nouvelles réalités sans le dénaturer. Cela a été le cas en France pendant
que les rédacteurs du Code Pénal français de 1810 ne connaissaient pas le courant électrique, la
jurisprudence avait plus tard décidé que dès l’instant que ce produit est constitutif de chose
mobilière susceptible d’appropriation, le vol portant sur le courant électrique était parfaitement
concevable.
3
Pour ce type de lois, l’interprétation par analogie n’est pas interdite surtout quand il s’agit des règles
de procédure garantissant les droits de la défense.
Aux termes des dispositions de l’article 414 du Code de Procédure Pénale : « Hors les cas où la loi en
dispose autrement, les infractions peuvent être établies par tout mode de preuve… ».
Ce texte pose le principe de la liberté de preuve en matière pénale qui se comprend par le fait que
compte tenu de l’intérêt supérieur de la société, aucun obstacle d’ordre juridique tenant aux modes
de preuve ne doit pouvoir empêcher la manifestation de la vérité. L’administration de la preuve est
alors simplifiée en matière pénale. Le principe de la liberté de preuve en matière pénale postule que
dans cette discipline juridique, il n’y a pas de reine des preuves ; elles se valent toutes. Il n’y a
exception à ce principe que lorsque la loi en dispose autrement. C’est tout le sens qu’il faut donner à
l’article 414 du Code de Procédure Pénale lorsque ce texte précise : « Hors les cas où la loi en dispose
autrement… ». Par exemple, en présence d’un acte authentique qui vaut jusqu’à inscription de faux,
le juge pénal ne sera pas fondé à admettre une preuve contraire en arguant de la liberté de preuve.
Toutefois, il y a lieu de préciser que les seuls modes de preuve admissibles en matière pénale sont
ceux-là prévus en droit positif.
L’administration de la preuve en matière pénale, si libre soit elle, doit être faite dans le strict respect
de la légalité. Ainsi, aussi bien le principe de la présomption d’innocence que celui du respect des
droits de la défense doivent être respectés. Par exemple, une preuve obtenue en faisant usage de
torture ou en violation des règles relatives à la perquisition est illégale et doit par conséquent être
écartée, sans préjudice des éventuelles poursuites pénales qui pourront être initiées à l’encontre de
l’auteur de la violation de la loi.
Enfin, l’alinéa 2 de l’article 414 du Code de Procédure Pénale prévoit que : « Le juge ne peut fonder
sa décision que sur des preuves qui lui ont été apportées au cours des débats et discutées devant lui ».
Cela constitue une limite fondamentale au principe de la liberté de preuve dans la mesure où aucune
possibilité n’est accordée au juge pénal d’aller rechercher la preuve par lui-même ; la charge de celle-
ci incombant à la partie poursuivante. Le juge pénal ne peut en outre tenir compte que des preuves
qui lui ont été présentées et chacune des parties doit être mise en situation de les apprécier.
L’article 414 du Code de Procédure Pénale affirme ce principe en le liant étroitement à celui de la
liberté de preuve. Aux termes de ce texte : « …et le juge décide d’après son intime conviction ». Le
4
législateur avait par le passé donné un contenu au principe de l’intime conviction mais seulement en
matière criminelle. En effet, avant l’avènement de la Loi N° 2008 – 50 du 23 septembre 2008
modifiant le Code de Procédure Pénale, l’ancien article 330 de ce code, aujourd’hui abrogé, prévoyait
que le Président de la Cour d’Assises devait, avant que sa juridiction ne se retire pour délibérer,
donner lecture de l’instruction suivante qui, en outre, était affichée en gros caractères dans le lieu le
plus apparent de la salle des délibérations : « La loi ne demande pas compte aux juges des moyens
par lesquels ils se sont convaincus ; elle ne leur prescrit pas de règles desquelles ils doivent faire
particulièrement dépendre la plénitude et la suffisance d’une preuve ; elle leur prescrit de s’interroger
eux-mêmes, dans le silence et le recueillement, et de chercher dans la sincérité de leur conscience
quelle impression ont faites, sur leur raison, les preuves rapportées contre l’accusé et les moyens de
sa défense. La loi ne leur fait que cette seule question, qui renferme toute la mesure de leurs devoirs :
Avez-vous une intime conviction ? ». Il semble dès lors que les moyens par lesquels le juge a abouti à
se faire une intime conviction importaient peu ; il suffisait juste d’en avoir une en toute loyauté, ce
qui semble renvoyer à une primeur de l’éthique et de la déontologie du juge sur le respect par ce
dernier des prescriptions de la loi. Mais étant donné que le juge prête serment, non pas d’être juste,
mais plutôt d’appliquer la loi3, l’on peut valablement présumer qu’à côtés des obligations liées à la
loyauté, l’éthique et la déontologie, il se soumettra à des obligations de respect des prescriptions de
la loi.
De façon générale, le principe de l’intime conviction postule que le juge pénal apprécie
souverainement les modes de preuve qui lui sont soumis. Il en est de même de l’aveu qui est
indivisible en matière pénale ; le juge pouvant l’apprécier au même titre que les autres modes de
preuve4. En revanche, le juge pénal ne peut pas ex nihilo prononcer son intime conviction. Celle-ci est
limitée non seulement par le fait qu’elle doit être fondée sur une preuve, mais encore, qu’elle ne
peut prévaloir face à certains aspects du procès pénal qui appellent l’application d’autres types de
règles dont les modes de preuve sont réglementés.
Si tant est que le terme « affaires » est une locution très utilisée en sciences juridiques à telle
enseigne qu’il existe un droit des affaires qui comportent plusieurs subdivisions, il n’en demeure pas
moins que ce terme n’en est pas pour autant défini. En effet, ni la loi, encore moins la doctrine et la
jurisprudence n’ont donné une définition des affaires. Dès lors, pour donner un contenu à cette
3
KANDJI, (D.), in Discours d’usage du Premier Président de la Cour d’Appel de Dakar prononcé à
l’occasion de l’audience solennelle de prestation de serment de la promotion de juges suppléants de
l’année 2012.
4
Voir article 415 du Code de Procédure Pénale.
5
notion que nous autres juristes avons pour habitude d’évoquer à longueur de journées, il nous
faudra recourir au Petit Larousse Illustré qui renseigne que les affaires sont toutes les choses qui
concernent la fortune et les intérêts du public et des particuliers. Le dictionnaire renseigne
également qu’il s’agit d’une activité commerciale ou financière.
Quant au Droit des Affaires, l’on peut facilement concevoir qu’il s’agit tout simplement de l’ensemble
des règles qui régissent les affaires, c'est-à-dire les activités économiques, commerciales et
financières dans toutes leurs diversités. Cette définition aussi simpliste qu’elle puisse paraître, a le
mérite d’éviter de ne pas tomber dans l’outrecuidance car le Droit des Affaires, loin d’être une simple
discipline du droit, est plutôt une spécialité du droit englobant en son sein plusieurs autres disciplines
du droit. C’est certainement pourquoi le législateur OHADA a évité de tomber dans ce piège de la
prétention en ne définissant pas le Droit des Affaires, mais tout simplement son domaine. En effet,
en vertu de l’article 2 du traité portant création de l’OHADA, le droit des affaires institué par cette
organisation est un droit convergent, articulé autour de diverses matières dont « le droit des sociétés
commerciales, le statut juridique des commerçants, le recouvrement des créances, le droit comptable,
les sûretés, le droit de l’arbitrage, le droit de la vente et des transports, le droit des procédures
collectives, mais aussi le droit des sociétés coopératives et toute autre matière que le conseil des
ministres des Etats membres déciderait à l’unanimité d’y inclure ». Le droit des affaires OHADA est
donc appelé à accueillir de nouvelles matières. D’ailleurs, l’intégration du droit du travail, du droit
des contrats et de la preuve et du droit de la consommation dans les matières OHADA est projetée.
Ces précisions faites, il importe, préalablement à l’étude approfondie des infractions d’affaires, de
revenir sur la définition, la philosophie et l’historique du droit pénal des affaires.
Ce n’est pas une chose aisée que de donner une définition du droit pénal des affaires puisque celle
du droit des affaires dont elle est tributaire est elle-même problématique. Cependant, on peut
admettre qu’il s’agit de l’ensemble des règles juridiques incriminant et sanctionnant les faits
délictueux commis dans le cadre de l’exercice des activités économiques. Sous un autre angle, il
s’agit de l’ensemble des règles destinées à sanctionner les atteintes aux normes organisant les
rapports contractuels conclus dans le champ économique multiforme. Son objectif est d’assurer la
sécurité des transactions, dans l’intérêt éventuel des victimes et des hommes d’affaires et de
promouvoir la circulation des biens et richesses5.
5
Amadou FAYE, Cours de Droit pénal des affaires, UASZ, 2010-2011.
6
On a pu se poser la question de savoir si l’intervention du droit pénal dans le monde des affaires ne
serait pas un obstacle au développement économique ? Certains auteurs l’ont admis. Pour eux,
l’application du droit pénal aux affaires ne ferait que freiner l’expansion économique. Pour d’autres,
même si la pénalisation de la vie des affaires est un mal, ce n’est qu’un mal nécessaire. Ces derniers
avancent deux principaux arguments. Le premier est un argument de sécurité : le délinquant
d’affaire peut menacer les structures de l’Etat, de la vie économique. Il menace les institutions
étatiques et l’ordre public dans le domaine des affaires. La vie des affaires est de plus en plus
imprégnée de l’argent de la criminalité et on retrouve le même schéma que l’on voit dans
l’organisation des mafias et cela déstabilise les économies. Le second argument porte sur l’équité. Il
est fondé sur le principe d’égalité des citoyens devant la loi pénale. Il faut en effet traiter de façon
égale l’escroc d’affaire et l’escroc de droit commun.
Cette dernière thèse semble plus défendable si l’on sait que le droit pénal est un outil très
performant de moralisation, donc d’assainissement du monde des affaires qui constitue le domaine
de prédilection des grands malfaiteurs économiques, c’est-à-dire, les délinquants à col blanc. Ces
derniers utilisent essentiellement le monde des affaires pour réaliser leurs projets. Il apparait ainsi
clairement que l’intervention du droit pénal dans le domaine des affaires trouve toutes ses raisons.
Cependant, l’on constate dans certains pays comme la France un grand mouvement de
dépénalisation de la vie des affaires, surtout pour ce qui concerne le droit des sociétés et le droit
financier. L’on y propose d’examiner l’ensemble des infractions qui pèsent sur l’entreprise, puis en
supprimer les sanctions inutiles, les adapter ou les remplacer par des procédures civiles ou
commerciales ou par des sanctions administratives 6. Ceux qui militent pour cette dépénalisation
estiment qu’une pénalisation excessive constitue un risque pesant sur l’attractivité économique d’un
Etat.
En marge de ces éléments de précision, il convient de revenir sur l’historique du droit pénal des
affaires. D’abord, dans l’ancien droit, il y avait assez de pénalisation dans le droit des affaires. On ne
la retrouve pas dans le code Napoléonien où il n’y en avait pratiquement pas. A partir des années 45,
le droit pénal a commencé à faire une entrée notable dans la vie des affaires. On a parlé de furie
répressive du législateur en matière d’affaires. Ce phénomène a touché tous les volets de la vie des
affaires et en particulier, le droit des sociétés.
6
Rapport au garde des Sceaux, ministre de la Justice, sur La dépénalisation de la vie des affaires,
établi par le Groupe de travail présidé par Jean-Marie Coulon, Premier président honoraire de la cour
d’appel de Paris, 2008.
7
Dans le cadre de l’Afrique noire en général et du Sénégal en particulier, le droit pénal des affaires
s’est formé de manière progressive mais lentement en trois temps : d’abord pendant l’époque
coloniale, ce sont les textes de la métropole qui s’appliquaient ; puis juste après les indépendances,
on assistait à l’adoption d’un code pénal en 1965 ; enfin la période comprise entre 1990 à nos jours
est marquée par une sorte de furie répressive dans le mesure où bon nombre de textes spéciaux ont
été adoptés pour sanctionner sévèrement les infractions qui ont des conséquences néfastes sur
l’économie. Au chapitre de ces textes spéciaux, on a les Actes uniformes de l’OHADA, la loi de 2004
sur le blanchiment de capitaux, les lois uniformes de l’UEMOA sur la règlementation bancaire,
l’usure, les relations financières extérieures etc.
La présentation du domaine du droit pénal des affaires n’est pas facile à opérer puisque la question
de son autonomie fait toujours l’objet de débat. Cette difficulté résulte d’abord du fait qu’il n’y a pas
de code pénal des affaires qui répertorie l’ensemble des infractions relevant de ce domaine. La
question de la détermination du domaine du droit pénal des affaires a fait naitre une controverse
doctrinale. On a dû penser que le droit pénal des affaires n’est qu’une construction artificielle qui n’a
d’autre objet que de rassembler sous la même étiquette d’infractions ayant comme seul point
commun de se rattacher plus ou moins directement à la vie des affaires (c’est la thèse du mythe). On
s’est aussi demandé si au contraire, la spécificité des affaires impose que les infractions qui
sanctionnent les comportements répréhensibles qu’elles sécrètent présente des caractéristiques
particulières au regard du droit pénal, mais formant un ensemble homogène (c’est la thèse de la
réalité).
On s’aperçoit que la définition du domaine du droit pénal des affaires n’est pas chose aisée.
Cependant, il est admissible qu’il couvre l’ensemble des infractions commises dans le cadre de
l’exercice des activités économiques. Certaines de ces infractions relèvent du droit commun, d’autres
du droit des sociétés. On trouve aussi dans la criminalité d’affaires, les infractions relatives au droit
bancaire, au droit douanier, mais également au droit économique.
8
législatif, il appartient aux Etats-parties de déterminer les peines sanctionnant les principales
incriminations prévues par les Actes Uniformes par l’entremise des parlements nationaux, au regard
des dispositions de l’article 5 dudit traité qui dispose que « les actes uniformes peuvent inclure des
dispositions d’incrimination pénale. Les Etats parties s’engagent à déterminer les sanctions pénales
encourues ».
Le droit OHADA établit donc un concours de compétence normative qui fait fondamentalement fi du
sacro-saint principe de la légalité. Jusqu’à une certaine époque, sur les dix sept (17) Etats membres
de OHADA, seuls trois (3) seuls s’étaient conformés à cet engagement, les autres rendant
inapplicable ou difficilement applicable le droit pénal OHADA.
Au Sénégal, après la Loi N° 98 – 22 du 26 mars 1998 portant sur les sanctions pénales applicables aux
infractions contenues dans l’acte uniforme relatif au droit des sociétés commerciales et du
groupement d’intérêt économique, la loi N° 2018 – 13 du 27 avril 2018 relative à la répression des
infractions prévues par les Actes Uniformes adoptés en application du Traité relatif à l’Harmonisation
du Droit des Affaires en Afrique.
Le droit pénal des affaires OHADA est basé sur deux (02) sources principales, à savoir, la loi nationale
retenue par le souci de protéger la souveraineté des Etats et les actes uniformes ayant pour
substratum le Traité.
Ce cours vise à imprégner les étudiants au sujet de la place du droit pénal des affaires dans le droit
des affaires, le rôle qu’il joue dans ce domaine et les raisons de sa création. Il vise aussi à aider les
étudiants, en tant que futurs magistrats et conseillers juridiques d’entreprises, à comprendre le
phénomène de la criminalité économique et l’ampleur de son impact dans l’économie.
Spécifiquement, l’objectif de cet enseignement est d’amener les étudiants à pouvoir comprendre les
particularités du droit pénal des affaires, notamment par rapport au droit pénal spécial (quoiqu’il en
est partie intégrante). Il consistera aussi à amener les étudiants à saisir les éléments constitutifs des
différentes infractions, donc à leur permettre de savoir à partir de quel moment une infraction est
consommée. Nous reviendrons bien entendu sur les sanctions prévues à l’encontre des auteurs des
infractions d’affaires.
VII – Méthodologie :
9
Contrairement aux modalités de déroulement des cours en licence, ce cours de droit pénal des
affaires destiné aux étudiants en Master se fera suivant une méthode interactive. Il sera
principalement axé sur des échanges entre les différents acteurs, professeur et étudiants. Une forte
participation des étudiants est donc requise.
Les différentes infractions relevant du droit pénal des affaires ne peuvent pas toutes être étudiées
dans le cadre de ce cours tant et si bien qu’elles sont nombreuses et diversifiées. L’accent sera mis
sur les infractions les plus fréquemment commises dans le monde des affaires en tenant compte bien
entendu du cas particulier du Sénégal et de son actualité. Ainsi, ce cours sera divisé en deux (02)
grandes parties : il s’agit de quelques infractions de droit commun intéressant la vie des affaires
(Première partie), notamment l’abus de confiance, l’escroquerie, les soustractions, détournements et
escroqueries portant sur des deniers publics et de quelques infractions spécifiques à l’activité
économique (Deuxième Partie), notamment quelques infractions dans le cadre des sociétés
commerciales (l’abus de biens sociaux, les banqueroutes et infractions assimilées), les infractions
relatives à l’activité bancaire (l’exercice illégal de l’activité bancaire, les infractions en matière de
chèque et celles en matière de carte) et enfin, le blanchiment de capitaux.
Première Partie : Quelques infractions de droit commun intéressant la vie des affaires
Certaines infractions, bien que relevant du droit commun, peuvent être commises dans le cadre des
affaires. Elles sont nombreuses et variées, mais nous n’évoquerons en particulier que l’abus de
confiance (chapitre1), l’escroquerie (chapitre2), les détournements, soustractions et escroquerie
portant sur des deniers publics (Chapitre 3), assez fréquemment commises dans le monde des
affaires.
L’abus de confiance est un acte délictueux par lequel l’agent pénal conserve la chose qui lui a été
remise en vertu d’un certain type de contrats. Toutefois, les justiciables et parfois les professionnels
du Droit se méprennent en ce qui concerne cette infraction. Il suffit pour s’en convaincre de citer
quelques formules de plaintes pour abus de confiance adressées aux Parquets.
- « Je viens par la présente déposer plainte contre Monsieur X… qui a abusé de ma confiance
parce je lui ai prêté de l’argent qu’il refuse de me restituer » ;
- « Monsieur X… à qui j’ai loué ma maison refuse de me payer le loyer depuis plusieurs mois » ;
1
- « Monsieur X… a pris des bons de marchandises dans ma boutique et refuse de m’en payer le
prix » ;
- « En ma qualité de maçon Monsieur X… m’a chargé de lui construire un mur et refuse de me
payer depuis plusieurs mois» ;
L’abus de confiance est une infraction particulière car son existence suppose la réunion de plusieurs
éléments constitutifs qui peuvent être scindés en deux (02) catégories : il y a d’une part, les éléments
constitutifs qui peuvent être qualifiés de primaires (section 1) et d’autre part, les éléments
constitutifs réalisant la consommation du délit (section 2). Nous terminerons par examiner les
facteurs d’irresponsabilité (section 3) et la répression de cette infraction (section 4).
L’article 383 du Code Pénal prévoit quatre (04) conditions préalables : Un contrat violé, une remise,
une chose objet de la remise et enfin une mise en demeure infructueuse.
I – Un contrat violé
La loi exige un contrat, c'est-à-dire un accord de volontés en vertu duquel la chose a été remise à
titre précaire. Ce qui signifie que si la chose a été remise en pleine propriété, il ne peut plus y avoir
d’abus de confiance. Exemple : Un artisan reçoit la commande d’un objet qu’il va fabriquer, le client
lui verse le prix ou une partie du prix ; si l’artisan n’exécute pas la commande et s’il garde l’argent, il
ne commet pas pour autant un abus de confiance parce que cet argent lui a été remis à titre de
propriété. Seule sa responsabilité civile est engagée. Mais cet accord de volontés préalable ne peut
être quelconque, il faut qu’il s’agisse d’un contrat d’un certain type et précisément de l’un des
contrats prévus par l’article 383 du Code Pénal. Ces contrats sont au nombre de six (6). Il s’agit du :
- Le louage :
Aux termes de l’article 544 du Code des Obligations Civiles et Commerciales : « Le louage est le
contrat par lequel le bailleur s’engage à fournir au preneur pendant un certain temps la jouissance
d’une chose contre paiement d’un loyer ».Il s’agit ici du louage de chose mobilière et non du bail. Ce
contrat est donc défini comme le rapport juridique en vertu duquel l’une des parties s’oblige à faire
jouir l’autre d’une chose pendant un certain temps et moyennant un certain prix que celle-ci s’oblige
à lui payer. Exemple : il y a abus de confiance lorsqu’un individu détourne la voiture qu’il a louée.
- Le dépôt :
1
Aux termes des dispositions de l’article 497 du Code des Obligations Civiles et commerciales : «Le
dépôt est le contrat par lequel un déposant remet une chose mobilière à un dépositaire qui accepte
d’en assurer la garde ».
Le dépôt est l’acte par lequel l’on reçoit la chose d’autrui à charge de la garder et de la restituer en
nature. Pour qu’il y ait abus de confiance, il faut que le dépositaire soit tenu d’une obligation de
restituer en nature (choses non fongibles). Exemple : un individu remet un tableau d’art à un
dépositaire ; si celui-ci ne restitue pas ce tableau à l’échéance, on pourra le poursuivre pour abus de
confiance. Mais la jurisprudence retient également l’abus de confiance lorsque la chose remise est
une chose fongible. En pareil cas, si le dépositaire ne restitue pas en équivalent ou en valeur, on
pourra lui appliquer l’article 383 du CP.
- Le mandat :
Aux termes des dispositions de l’article 457 alinéa 1er du COCC : « Le mandat est un contrat par
lequel le mandant donne au mandataire le pouvoir de faire en ses lieu et place un ou plusieurs actes
juridiques ».Ce contrat est à la source du plus grand nombre d’abus de confiance. Il en est ainsi parce
que le mandat est le type même de convention basée sur la confiance. Le mandat est un contrat par
lequel une personne, le mandant, donne à une autre, le mandataire, le pouvoir d’accomplir un ou
plusieurs actes. Conformément à la loi, le mandataire agit au nom et pour le compte du mandant.
Pour la réalisation du délit, la forme du mandat est sans importance ; peu importe qu’il soit verbal ou
écrit. La nature du mandat est également indifférente ; la loi ne distingue pas selon que le mandat est
conventionnel ou légale.
Les règles de l’abus de confiance sont encore applicables même si le mandat est gratuit. Exemple :
trois individus achètent en commun un billet de loterie nationale ; l’un d’eux est détenteur du billet
et il a reçu mandat pour percevoir le montant du lot qu’ils ont gagné. Il y a un conflit lorsque le
mandataire indélicat détourne le montant du lot.
On remarquera que le contrat de société ne figure pas dans l’énumération de la loi. Sa violation ne
peut donc servir de fondement à une poursuite pour abus de confiance. Mais le principe ainsi dégagé
a été battu en brèche et avec juste raison car le contrat de société recouvre souvent un contrat de
mandat et à ce titre, il mérite d’être protégé pénalement par la loi. Ainsi les administrateurs et
gérants, en tant que mandataires, peuvent être poursuivis pour abus de confiance s’ils détournent
les fonds de la société. Mais, en pratique lorsqu’il s’agit des mandataires de SA et de SARL, le juge
aura tendance à retenir l’abus de biens sociaux. En droit des sociétés, seuls les détournements
effectués par les dirigeants des sociétés de personnes correspondent à un abus de confiance.
1
- Le prêt à usage
C’est le contrat par lequel l’une des parties livre une chose à l’autre pour s’en servir à charge pour
cette personne de la rendre après s’en être servi.
Pour qu’il y ait abus de confiance, il faut que l’emprunteur soit tenu de restituer en nature. Mais dans
l’hypothèse d’un prêt de consommation, l’article 383 CP ne pourra s’appliquer.
- Le nantissement ou gage
Le nantissement par ailleurs synonyme de gage, n’a pas en tant que tel fait l’objet de définition par
l’Acte Uniforme de l’OHADA portant Organisation des Sûretés. Le nantissement de biens meubles
incorporels est l'affectation d'un bien meuble incorporel ou d'un ensemble de biens meubles
incorporels, présents ou futurs, en garantie d'une ou plusieurs créances, présentes ou futures, à
condition que celles-ci soient déterminées ou déterminables (article 125 de l’AU sur les Sûretés.
En revanche, le gage qui quant à lui porte sur un bien meuble corporel, est le contrat par lequel le
constituant accorde à un créancier le droit de se faire payer par préférence sur un bien meuble
corporel ou un ensemble de biens meubles corporels, présents ou futurs (article 92 de l’Acte
Uniforme sur les Sûretés).
Il faut entendre par là, tout contrat par lequel l’une des parties s’engage à faire quelque chose pour
l’autre moyennant un prix convenu entre elles.
Exemple 1 : il y a abus de confiance lorsqu’un artisan détourne les matières premières qui lui sont
remises pour les façonner ou une chose confiée pour réparation.
Exemple 2 : il y a abus de confiance lorsque des ouvriers détournent une partie de la soit qu’ils ont
reçue pour être tissée.
Il revient au juge saisi d’une poursuite pour abus de confiance de qualifier le contrat pour savoir si
effectivement il rentre dans les prévisions de la loi. Dans ce travail de qualification, le juge du fond
est souverain, il n’est pas tenu de se ranger sur la thèse des parties en litige.
1
II – Une remise
L’abus de confiance suppose une remise volontaire et à titre précaire. Il faut entendre par remise à
titre précaire, une remise faite à charge de rendre ou de restituer ou de faire de la chose un usage ou
un emploi déterminé.
La remise peut être effectuée par le propriétaire de la chose ou par une autre personne agissant sur
les ordres du propriétaire. Exemple : on envoie un mandataire pour chercher de l’argent chez le
banquier et il le garde pour lui. Ce mandataire indélicat pourra être poursuivi pour abus de confiance.
Peu importe aussi que la chose ait été remise à l’auteur de l’abus de confiance ou à une personne qui
agit en son nom et à son compte. Exemple : un ami doit vous prêter sa mobylette, vous envoyez un
mandataire, ce dernier s’exécute mais vous détournez la mobylette. Votre comportement est un
abus de confiance.
Peu importe enfin que la chose ait été réellement remise ou laissée à la disposition de l’auteur du
détournement.
Jusqu’en 2016, la loi visait exclusivement des meubles. Mais avec l’avènement de la Loi N° 2016 – 29
du 08 novembre 2016 modifiant la Loi N° 65 – 60 du 21 juillet 1965 portant Code Pénal, il a été
ajouté à la liste des choses objets de la remise en matière d’abus de confiance l’expression « des
biens quelconques ». Ainsi, est-ce à dire que le délit est désormais possible en ce qui concerne les
biens immobiliers alors même que la remise pour ce délit suppose une remise précaire ? L’avenir
nous édifiera quant au contenu que les juges voudront bien donner à cette expression.
En ce qui concerne les biens meubles, ils peuvent être classés en deux (02) groupes :
A travers les termes effets et deniers, la loi vise l’argent, les bijoux, les meubles meublant, les
matières premières de toute nature remise pour être travaillés, transformées ou vendues.
Par marchandises, il faut entendre toutes les choses qui sont susceptibles de faire l’objet d’un
commerce. Exemple : on a jugé que les fiches de commerce contenant les noms et adresses des
clients sont des marchandises au sens de la loi et qu’il y a abus de confiance lorsqu’un représentant
commercial chargé de visiter cette clientèle éventuelle, détourne ces fiches au profit d’une
entreprise concurrente.
1
- Et d’un autre, les écrits
La loi vise les écrits contenant obligation de charge. Dans ce cadre, il faut ranger les effets de
commerce, une reconnaissance de dette, une quittance. De même, on a jugé qu’une promesse
synallagmatique de vente est un écrit contenant des obligations à la charge des parties. Dans cette
affaire, l’acte rédigé en un seul exemplaire est remis à un tiers à charge de le conserver dans l’intérêt
commun des parties. Ce tiers qui avait servi d’intermédiaire entre les parties remet l’acte au vendeur
avec mandat de le faire signer par sa femme, mais le vendeur procède à la destruction de l’acte
contenant les promesses synallagmatiques de vente.
Pour la chambre criminelle de la Cour de Cassation française, l’acte du vendeur est un abus de
confiance au sens de la loi. Il résulte de cette analyse que l’article 383 CP ne vise que les écrits ayant
une incidence sur le patrimoine. Sont donc exclus les détournements frauduleux d’écrits ne
contenant pas d’obligations ou de charges et qui sont sans valeur commerciale ; c’est le cas des
lettres missives qui ne sont pas appréciables en argent. Exemple : le fondé de pouvoir qui détourne
les lettres personnelles du directeur d’une entreprise ne commet pas un abus de confiance. On
pourra le poursuivre pour délit de suppression de correspondance de l’article 167 alinéa 2 CP.
- l’intention coupable.
En droit français, le code pénal de 1810 emploie les termes de « détournement » et « dissipation »
pour mettre en relief les caractères du détournement et de la dissipation, ce texte utilise les
expressions suivantes « ne pas avoir rendu la chose, ne pas l’avoir représenté, ne pas en avoir fait
l’usage ou l’emploi qui avait été déterminé ».
Le nouveau Code Pénal français, ne vise que le détournement. Mais, comme par le passé, on admet
qu’il existe deux formes d’abus de confiance. Le détournement et la dissipation.
Le droit sénégalais préfère l’expression non-exécution des engagements. Mais, il faut souligner que
les caractères de cet engagement sont les mêmes que les caractères du détournement ou de la
dissipation. Comme en droit français, l’expression « ne pas exécuter ses engagements » recouvre
deux hypothèses :
1
1- Le cas où l’affectation d’un bien n’a pas été respectée
Dans cette hypothèse, la chose reçoit une destination différente de celle qui été primitivement
prévue. Exemple : il y a abus de confiance lorsque les dirigeants sociaux utilisent pendant la période
pré-constitutive de la société, les fonds qui ont été reçus du souscripteur et qui avaient été remis
avec une affectation déterminée ; commet le délit d’abus de confiance, le directeur d’une SA qui
détourne les sommes destinées au paiement de commissions dues aux agents de la société.
La dissipation est un acte d’aliénation. Exemple : vente de la chose, destruction de la chose. L’acte de
dissipation réalise tout le contraire d’une appropriation puisqu’il fait perdre à l’agent pénal la
disposition de la chose. Tel est le cas du mandataire qui utilise pour ses dépenses personnelles les
fonds remis par le mandant.
Il est admis que la dissipation ne constitue pas toujours un abus de confiance car elle n’exclut pas, en
toute hypothèse, la possibilité de restituer.
Pour savoir si le délit est caractérisé, il est nécessaire de s’attacher à la nature de la chose objet de la
remise. Quand il s’agit d’une chose non-fongible, la dissipation va consommer l’abus de confiance car
elle rend impossible la restitution en nature. Peu importe que le sujet invoque qu’il est en mesure de
restituer en valeur.
En ce qui concerne les choses fongibles, la dissipation prend un caractère délictueux lorsque le sujet,
étant ou en devenant insolvable, est dans l’impossibilité de restituer en équivalent ou en valeur.
La mise en demeure constitue une sommation de rendre, de restituer ou de faire l’usage ou l’emploi
convenu. En somme, la chose remise doit être réclamée et tat qu’elle ne l’est pas et que cela n’est
pas suivi d’effets, le délit ne peut être considéré comme étant consommé. Si elle est fructueuse, le
délit n’est pas non plus consommé, car l’équilibre brisé du fait du non-respect du contrat sera
restauré.
Enfin, par l’expression simple mise en demeure, le législateur consacre le principe de la liberté de sa
forme. Elle peut être écrite ou verbale mai dans ce dernier cas, il se posera un problème de preuve
en cas de contestation de son existence par l’agent pénal. Toutefois en jurisprudence, la plainte
établit la simple mise en demeure.
II – L’intention coupable
1
Elle est nécessaire. Le délit existe lorsque l’agent pénal a eu conscience de la précarité de sa
détention. L’intention, c’est donc la conscience de la part de l’auteur du délit qu’il détient à titre
précaire et qu’il n’a pas le droit de disposer de la chose qui lui a été remise.
En principe, la preuve de l’intention ne pose aucune difficulté. Les juges du fond pourront déduire
l’intention des circonstances qui permettent de constater l’abus (c’est l’élément matériel qui éclaire
l’intention). Cette solution s’applique aisément lorsque la remise porte sur une chose corporelle
individualisée. Dans cette hypothèse, la nature même de l’acte de disposition doit permettre
d’affirmer avec certitude qu’en détournant la chose qui lui a été confiée, l’agent pénal n’a pas ignorer
le caractère illicite de son acte.
L’hésitation est cependant permise lorsque la remise porte sur une somme d’argent. Le prévenu dans
cette hypothèse va prétendre généralement qu’il n’avait nullement l’intention de s’approprier cette
somme et ce n’est que par suite de circonstances indépendantes de sa volonté qu’il s’est trouvé plus
tard dans l’impossibilité de rembourser.
Dans cette hypothèse, les juges ont tendance à considérer que le prévenu a pris un risque dont il a
mal mesuré l’ampleur. Et même s’il avait la ferme volonté de rembourser les fonds qu’il utilisait à des
fins personnelles, il ne peut échapper à la sanction pénale car l’élément moral est établi dès l’instant
qu’il est dans l’impossibilité de restituer par équivalent ou en valeur les sommes qui lui ont été
remises.
Dans certaines circonstances, la responsabilité pénale ne peut être engagée. Il en est ainsi lorsque
l’infraction est justifiée par certains faits (para1) ou lorsqu’il y a immunité familiale.
Les faits justificatifs consistent en des circonstances matérielles ou juridiques dont la réalisation
neutralise la responsabilité pénale ; ils découlent de la volonté du législateur. L’article 383 CP en
prévoit trois (3) :
- La force majeure,
1
Pour épargner l’auteur de la responsabilité pénale, ces faits doivent empêcher l’exécution de
l’engagement. Il revient au prévenu d’établir le fait justificatif qu’il invoque par tout moyen.
Sur cette question, le CP sénégalais fait preuve d’originalité par rapport au CP français. La loi
française ne connaît pas ces faits justificatifs. Mais la jurisprudence française a admis l’exclusion du
délit lorsque le prévenu est en mesure de rapporter que ce sont les événements de force majeure,
absolument imprévisibles, qui le mettent dans l’impossibilité de rembourser. Par exemple, un vol, un
incendie ou une perte.
Les juges font preuve de fermeté dans l’appréciation de la force majeure. Ils se prononcent dans le
sens de la répression lorsque l’agent pénal est dans l’impossibilité de s’exécuter parce qu’il a fait des
erreurs de prévision. Exemple : un comptable retire de l’argent de sa caisse pour jouer au Pari
Mutuel Urbain (PMU). Il gagne et replace l’argent ; il renouvelle son action mais cette fois ci, il perd. Il
ne peut se retrancher derrière le pronostic des jeux pour invoquer l’impossibilité de restituer. Ce
pronostic n’est pas infaillible. Ce comptable indélicat a fait des erreurs de prévision, son
comportement est un abus de confiance au sens de la loi.
L’article 383 CP ne s’applique pas lorsque le remettant a donné au prévenu l’autorisation de disposer
de la chose. Exemple : un banquier reçoit de l’argent en vue de l’achat d’actions pour son client. Si le
banquier dispose des sommes d’argent sur l’autorisation de son client, il ne pourra pas être poursuivi
pour abus de confiance.
Enfin, il n’y a pas d’abus de confiance lorsque la faute de l’agent pénal est une simple négligence.
Exemple : le représentant commercial ou le mandataire d’une compagnie pétrolière qui tarde à
reverser le produit de la vente ne peut être poursuivi pour abus de confiance même s’il restitue les
fonds au-delà du délai imparti.
Mais, s’il est établi que le retard est frauduleux, la répression sera de rigueur ; exemple, c’est le cas
d’un organisateur d’une exposition qui, malgré une mise en demeure, ne restitue pas les tableaux
invendus confiés par un peintre.
II – L’immunité familiale
L’immunité familiale est une exception prévue par la loi interdisant la condamnation d'une personne
en raison des rapports de parenté ou d’alliance entre l’auteur de l’infraction et la victime. Elle a été
seulement prévue pour le vol, mais la jurisprudence l’avait étendu à l’abus de confiance. Il faut
préciser qu’en France, l’immunité ne joue pas si les époux, mariés à l’époque des poursuites ne
l’étaient pas au moment des faits. En sens inverse, l’immunité joue si les époux sont divorcés à
1
l’époque des poursuites alors qu’ils étaient mariés à l’époque des faits. Mais au Sénégal, l’immunité
légale entre époux en matière d’abus de confiance n’est désormais plus de mise.
L’abus de confiance est un délit puni d’une peine d’emprisonnement de six (06) mois à quatre (04)
ans et d’une amende de vingt mille (20 000) F CFA à trois millions (3 000 000) F CFA (article 383
alinéa 1er Code Pénal).
Les juges pourront ordonner l’interdiction de séjour pour une durée de dix (10) ans. En outre, ils
pourront prononcer à l’encontre du délinquant, l’interdiction des droits visés à l’article 34 du Code
Pénal. Il s’agit de l’interdiction de certains droits civils, civiques et de famille.
Même aggravée, l’abus de confiance reste toujours un délit et il est porté devant le tribunal
correctionnel. La peine d’emprisonnement est égale à 10 ans, l’amende est égale à douze millions
(12 000 000) F CFA (article 383 alinéa 3 du Code Pénal).
Les peines de l’abus de confiance sont aggravées lorsque le délinquant a fait appel au public afin
d’obtenir soit pour son compte, soit comme directeur ou administrateur ou agent d’une société ou
d’une entreprise commerciale ou industrielle des remises de fonds ou valeurs à titre de dépôts, de
mandat ou de nantissement.
Comme en droit commun, la complicité ne peut être retenue que si l’intervention du complice est
positive et si elle a été faite en connaissance de cause.
Au passage, il faut relever que la tentative n’est pas punissable pour les raisons suivantes :
- L’existence d’un contrat préalable opère ici une remise volontaire des objets entre les mains du
coupable,
- En général, dans l’abus de confiance, l’agent pénal poursuit normalement son dessein criminel,
enfin
Chapitre2 : L’escroquerie
1
L’escroquerie constitue le parfait exemple de ce que l’on appelle la délinquance d’astuce. Elle diffère
du vol et de l’abus de confiance. Dans le vol, l’auteur soustrait frauduleusement la chose d’autrui.
Dans l’abus de confiance, la remise de la chose s’effectue régulièrement. L’infraction n’apparaît que
lorsque l’agent pénal succombe à la tentation en refusant de restituer la chose qui lui a été confiée
en vertu de l’un des contrats prévus par l’article 383 du Code Pénal. Dans l’escroquerie, la remise de
la chose se fait irrégulièrement. La victime remet la chose parce qu’elle a été trompée par l’auteur de
l’infraction. L’escroquerie est une infraction complexe car elle suppose au départ l’emploi de certains
moyens frauduleux qui doivent avoir un but : tromper la victime et un résultat : obtenir de la victime,
la remise des biens convoités. Cette remise doit être préjudiciable à la victime.
En droit pénal des affaires, certains actes malhonnêtes sont réprimés par des textes spéciaux, mais
l’escroquerie est prévue par le texte de base, le code pénal.
Ceci précisé, il convient maintenant de savoir quels sont les éléments constitutifs de l’escroquerie. Ce
travail une fois fait, il convient de s’intéresser au régime juridique et à la sanction de cette infraction.
- La remise de la chose,
- Un préjudice et
- Une intention.
Les moyens frauduleux peuvent consister dans l’usage de faux noms, l’abus de qualité vraie, l’emploi
de manœuvres frauduleuses. Ils peuvent être autonomes. Ils peuvent s’enchevêtrer, ils présentent
un point commun : tous les moyens supposent un mensonge. L’escroc est un menteur. Au regard de
certains moyens frauduleux, le mensonge seul suffit.
En revanche dans d’autre cas, pour les manœuvres frauduleuses, le mensonge à lui tout seul ne suffit
pas.
2
Quand elle se commet par usage de faux nom, le moyen frauduleux se réduit à un mensonge qui
porte sur le nom ou sur la qualité.
Le faux nom consiste à prendre un autre nom que le sien. Ce peut être un nom patronymique, un
faux pseudonyme, un simple prénom qui peut être source de confusion.
Pour la fausse qualité, elle est largement entendue. Elle peut porter sur l’état des personnes,
célibataire à la place de mariée, une fausse qualité mobilière, de chômeur, portant sur une qualité
professionnelle.
L’usage de fausse qualité peut être une qualité juridique. En effet, selon une jurisprudence
constante, la fausse qualité de mandataire, est une fausse qualité au sens de notre droit de
l’escroquerie.
Le fait que le texte emploie le terme de faux nom ou fausses qualités signifie qu’ il faut un acte positif
d’usage. Cela a pour conséquence que lorsqu’une personne remet une chose en se trompant sur
l’identité de la personne en lui remettant cette chose, si cette personne ne la détrompe pas sur
l’erreur sur l’identité, il ne peut pas y avoir d’escroquerie, car celui à qui on remet la chose n’a pas
fait un acte positif.
Lorsqu’une loi pénale emploie des termes d’où il résulte qu’il faut un acte positif, l’omission qui
aboutit au même résultat que de l’acte d’usage ne peut pas parce qu’elle est omission, être
constitutive du délit.
Cette règle joue pour tous les délits d’action mais il faut dire qu’elle subit très souvent des
atténuations lorsque des omissions pures et simples s’inscrivent dans une action qui va déboucher
sur le résultat que veut prohiber la loi pénale.
2
Le fait de ne pas déclarer une activité professionnelle constitue un acte positif de prise de fausse
qualité de chômeur.
La manœuvre vaut si le mensonge est écrit. Le terme manœuvre postule plus qu’un simple
mensonge. Celui-ci doit être renforcé par l’intervention d’un tiers, la production d’un écrit, une
machination, une mise en scène.
-Le mensonge renforcé par l’intervention d’un tiers : L’escroquerie étant un délit d’action,
l’intervention du tiers doit avoir été provoqué par l’escroc en conséquence, une intervention
spontanée d’un tiers qui renforcerait le mensonge de l’escroc ne peut pas être constitutif du délit,
dès lors que l’escroc ne peut pas faire intervenir un tiers.
Il faut que le tiers soit distinct de l’escroc. Pourquoi ? Car dans des opérations litigieuses peuvent
intervenir des mandataires. Dans la théorie civile, le mandataire se confond avec son mandant.
En pratique cela signifie qu’un mandataire ne sera pas considéré forcément comme un tiers.
Le tiers qui va intervenir aux cotés de l’escroc peut être un tiers de mauvaise foi dans ce cas là, le
tiers sera complice de l’escroc. Il peut être un tiers de bonne foi, dans ce cas, il ne pourra pas être
complice ; la complicité étant un acte intentionnel.
Exemple : Pour les caisses de retraites, lorsqu’un héritier ne dit pas que le père est mort à la caisse de
retraite. Selon la chambre criminelle, c’est une escroquerie par mensonge renforcé.
2
Dans ce cas, on a un simple mensonge écrit. La présentation du seul faux bilan au banquier est un
mensonge écrit.
Si c’est un bilan certifié par un commissaire aux comptes, on se trouve en présence d’un mensonge
renforcé par un tiers. C’est le commissaire aux comptes.
L’écrit a pour conséquence qu’il ne peut pas y avoir escroquerie si l’exploitant d’une salle de cinéma
qui doit rémunérer les producteurs en fonction du nombre d’entrée ment sur le nombre d’entrée.
S’agissant des manœuvres par mensonge renforcé par un écrit, on a une application positive pour
l’escroquerie à la demande d’un crédit si on produit des faux bulletins de salaires pour faire croire
que l’on est plus solvable.
Il y a escroquerie si on a un visa d’un architecte qui précise que les travaux facturés en plus ont été
fait alors qu’ils n’ont pas été faits.
Dans certain arrêts, la chambre criminelle qualifie d’escroquerie des agissements qui sont au fond
que des mensonges.
Le bilan est un écrit du commerce, il a valeur probante, donc on peut admettre que le bilan est digne
de foi au sens du droit du faux, au regard de la personne a qui on le présente, de sorte qu’on
comprend que les mensonges soit assimilé à une manœuvre frauduleuse.
Ils sont aussi variés que l’imagination des escrocs. La mise en scène peut être vue comme une mise
en scène théâtrale (escroquerie à la carambouille). On commence par monter une entreprise, dans
laquelle on a des fonds, on va louer des locaux luxueux, on va commencer à faire des opérations
d’affaires. Un beau jour, on vient dire qu’on a besoin d’un crédit important, lorsqu’on a obtenu le
crédit, on retire tout l’argent, les locaux luxueux ont été vidé, tout le matériel a disparu, et les mêmes
personnes recommencent dans un autre pays.
Quelques fois la mise en scène théâtrale doit avoir une certaine ampleur. Souvent on a de la
publicité.
2
La mise en scène qui va renforcer le mensonge, l’escroc peut être en mise en scène juridique.
Par exemple il a été jugé que le fait d’inclure des fausses factures d’achat dans la comptabilité est une
mise en scène.
De même on a escroquerie par mise en scène, dans les escroqueries aux assurances.
Les notions de machination vont très loin et illustre bien les escroqueries.
Ils ont d’abord une finalité psychologique : tromper la victime. Mais la tromperie débouchera sur la
remise de biens par la victime, elle est donc patrimoniale.
L’emploi des moyens frauduleux est destiné à persuader de l’existence d’une fausse entreprise, ou
de crédit imaginaire ; celui qui tire des traites sur des tiers imaginaires ou des tiers de complaisance.
En définitive, l’escroc vise principalement la remise d’une chose. Cette finalité est requise par le
texte. Il faut la déterminer à lui remettre une chose visée. La finalité patrimoniale demande à être
précisée quant à sa cause, ses modalités et son rôle dans la qualification de l’infraction, dans un
premier temps et dans un second temps, quant à son objet.
La cause de la remise, c’est l’emploi des moyens frauduleux. Il faut donc un lien de causalité
entre l’emploi des moyens frauduleux et de la remise de la chose. De plus il faut que l’emploi
des moyens frauduleux soit antérieur à la remise. Si c’est après, c’est postérieur à la remise,
on ne peut donc pas être escroc.
Les modalités de la remise. La remise peut être le fait de la victime propriétaire du bien mais
aussi par un tiers ou un mandataire. Ce peut être une remise par tradition matérielle, on
remet les sommes d’argent ou les bijoux, mais aussi une remise juridique par ordre de
virement, ou une remise se passant par jeu de compensation.
Le rôle de la remise dans la qualification de l’infraction, le rôle de principe c’est que c’est la
remise consentie par la victime consomme le délit.
La tentative d’escroquerie est incriminée. Cela est fréquent en matière d’escroquerie à l’assurance.
Ces escroqueries sont tellement fréquentes que toutes les compagnies d’assurance emploient des
policiers ou gendarmes à la retraite pour vérifier qu’il n’y a pas de fausse déclaration de sinistre.
Comme en droit commun, la tentative suppose un commencement d’exécution qui n’aura pas eu le
résultat escompté au regard de l’infraction.
2
Le commencement d’exécution doit être un acte tendant directement et immédiatement à la
commission de l’infraction.
L’escroquerie est une infraction complexe. On a l’étage des moyens frauduleux et ensuite l’étage de
la remise qui va consommer l’infraction.
Il faut aussi un lien de causalité entre l’emploi des moyens frauduleux et la remise de la victime.
On se demande si la tentative était constituée dès lors que les moyens frauduleux ont été constitués.
Dans un premier temps, on répond non, le seul fait d’avoir mis le feu à un immeuble pour avoir
l’assurance, est un acte simplement préparatoire.
Ce caractère déterminant dans le cas des escroqueries, ne pourra être constitué que s’il y a eu
déclaration et demande de paiement de l’indemnité.
Par la suite, il y a eu une évolution. En effet à l’heure actuel, il est admis que si la simulation a été
suivit d’une déclaration de sinistre à l’assurance, on a donc a ce moment la tentative d’escroquerie.
L’objet de la remise.
Les biens font l’objet d’une énumération légale mais, à l’instar du délit d’abus de confiance, la
réforme de 2016 a introduit la notion d’objet quelconque dans la liste des choses susceptibles d’être
remises dans le cadre de l’escroquerie.
-Les fonds, ce sont les numéraires, les valeurs peuvent être mobilières, le bien quelconque a pour
conséquence que les biens susceptibles d’escroquerie peuvent être corporels ou incorporels.
Les termes biens quelconques laissent penser que l’escroquerie peut porter sur immeuble, mais dans
l’ancien droit pénal, on a exclu les biens immeubles de l’escroquerie.
En droit français, il y a une légère atténuation en 2003. En effet, selon l’article 133-6, il existe un délit
particulier, qui est la mise à disposition frauduleuse à autrui contre rémunération ou avantage
quelconque d’un bien immobilier appartenant à autrui et sans l’accord du propriétaire.
2
Le nouveau code pénal français vise aussi les services. Ce visa a pour conséquence que l’escroquerie
peut porter sur un transport.
L’escroquerie peut aussi avoir pour objet des actes opérant obligation ou décharge. Les actes opérant
obligation sont des actes créateurs de droit pour le bénéficiaire de ces obligations, les actes opérant
des charges, sont des actes qui dissolvent un lien de droit, c’est l’obtention d’une remise de dette.
Une observation particulière, l’escroquerie sera consommée dès l’obtention de l’acte.
Si on prend le texte d’incrimination, il faut que la remise porte préjudice à la personne qui remet où à
des tiers.
III – Le préjudice
Il peut être causé à la victime directement, ou à un tiers Il est très rare que le préjudice dans des
infractions pénales, soit constitutif d’une infraction.
De ces termes, on devait déduire que le préjudice devait être un préjudice patrimonial.
L’escroquerie est une atteinte aux biens, qui passe par une atteinte préalable au consentement.
Sous l’empire de l’ancien code pénal, une jurisprudence constante précise que le délit pouvait être
constitué même sans préjudicie patrimonial dès lors que la remise n’a pas été librement consentie.
Dans un arrêt de 1994, la Chambre criminelle a exclu la qualification d’escroquerie dans une affaire
ou des moyens frauduleux ont été faits auprès d’une préfecture pour avoir un titre de séjour. La
personne a été relaxée, car il n’y avait pas eu atteinte à la fortune d’autrui.
De cet arrêt certain auteur ont déduit que le préjudice doit nécessairement être patrimonial.
Donc on ne maintient plus que le préjudice peut résulter d’une simple atteinte au consentement.
2
Or pour qu’il y ait escroquerie, il faut une certaine valeur, mais un titre de séjour de se vend pas.
La jurisprudence selon laquelle une simple atteinte au consentement peut continuer à s’appliquer.
Il y a des divergences.
Le délit ne pourra pas être constitué si l’agent, ou la personne que l’on poursuit peut revendiquer un
droit sur ce qu’on lui reproche d’avoir obtenue par manœuvre. Cette précision doit être donnée
d’après un arrêt.
Un automobiliste assuré brise glasses, fait remplacer son par brise par un garagiste, mais demande
qu’un par brise d’occasion soit mis, et demande pour le complément de faire des réparations de
carrosserie. Il est poursuivi par son assureur. Il a été relaxé car l’assurance n’avait pas payé plus que
la valeur du par brise. Donc elle n’a pas subi un préjudice.
Cependant on est propriétaire du montant de l’indemnité, on n’est pas obligé de faire la réparation.
L’élément intentionnel résulte de la tromperie qui est la finalité des actes posés. Le dol spécial est
requis, mais il a un rôle réduit dès lors que les moyens frauduleux et leur finalité sont établis.
I – Le régime juridique
L’escroquerie est une infraction instantanée qui se consomme par la remise de la chose. La
prescription court du jour de la remise. Cette solution de principe souffre d’atténuations dans
l’hypothèse des remises indivisibles.
Ex : Grâce à des moyens frauduleux, un individu se fait remettre un titre d’invalidité, lui permettant
de toucher une rente. Le délit est totalement consommé lors de la remise du titre d’invalidité. Dans
ce genre d’hypothèse on suppose que la perception des rentes est indivisible du titre obtenu, de
sorte que selon la jurisprudence, la prescription ne commence à courir que du jour de la dernière
perception de la rente d’invalidité.
2
En vertu de l’article 379 du Code Pénal, l’escroc sera puni d'un emprisonnement d'un (01) an au
moins et de cinq (05) ans au plus, et d'une amende de cent mille (100 000) à un million (1 000 000) F
CFA.
Si le délit a été commis par une personne ayant fait appel au public en vue de l'émission d'actions,
obligations, bons, parts ou titres quelconques, soit d'une société, soit d'une entreprise commerciale
ou industrielle, les peines ci-dessus pourront être portées au double.
Dans tous les cas, les coupables pourront être, en outre, frappés pour dix ans au plus de l'interdiction
des droits mentionnés en l'article 34 du présent code ; ils pourront aussi être frappés de l'interdiction
de séjour pendant le même nombre d'années.
Chapitre 3 : Les détournements, soustractions et escroqueries portant sur des deniers publics
Ces infractions sont prévues par les articles 152 à 155 du Code Pénal. Il s’agit d’incriminations
instituées afin de lutter contre tout agissement illicite sur les deniers publics ; ces biens méritant une
protection spécifique et rigoureuse dans la mesure où ils appartiennent à toute la communauté
humaine établie sur un territoire déterminé. L’institution de ces infractions s’inscrit dans la
dynamique d’assurer une bonne gouvernance dans la gestion des affaires publiques.
Ces délits se différencient principalement par leurs éléments constitutifs (I) mais elles ont pour
dénominateur commun la qualité de la victime mais aussi de l’auteur (II).
La commission de ces délits suppose la réunion d’éléments matériels (A) et intentionnel (B).
A - L’acte matériel
En ce qui concerne le détournement ou la soustraction de deniers publics, c’est l’article 152 qui en
prévoie les éléments constitutifs. En vertu de cette disposition, le délit se réalise sur le plan matériel
par le détournement ou la soustraction ou la tentative de détournement ou de soustraction « des
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deniers ou effets en tenant lieu, des pièces, titres de paiement, valeurs mobilières, actes contenant ou
opérant obligation ou décharge, effets mobiliers, denrées, œuvres d'art ou objets quelconques ».
Quant à l’escroquerie sur les deniers publics, il consiste dans le fait d’obtenir ou de tenter d'obtenir
«(…) frauduleusement de l'Etat, d'une collectivité publique, d'une société nationale ou d'une société
d'économie mixte soumise de plein droit au contrôle de l'Etat, au moyen de pièces fausses ou de
manœuvres quelconques, des sommes d'argent ou des avantages matériels indus, sera punie des
mêmes peines suivant les mêmes distinctions qu'à l'article précédent ». Comme dans l’escroquerie de
droit commun, dans l’escroquerie de deniers publics, l’agent pénal emploi certains moyens pour
duper, et enfin obtenir la remise de sommes d’argent ou des avantages matériels indus.
A. L’élément intentionnel
Les délits de détournement, de soustraction ou d’escroquerie de deniers publics constituent des
infractions intentionnelles. L’agent pénal doit agir de mauvaise foi. Cela résulte d’ailleurs des termes
« détournement », « soustraction » et « frauduleusement » employés par le législateur qui expriment
l’idée de mauvaise foi.
Si la victime est une personne différente de celles visées par la loi, l’infraction consommée sera l’abus
de confiance et non détournement de deniers publics.
B – La qualité de l’auteur
Au regard des dispositions des articles 152 et 153 du Code Pénal, les détournements, soustractions
ou escroqueries portant sur des deniers publics, peuvent être le fait d’un simple particulier, d’un
agent civil ou militaire de l’Etat ou d’une collectivité publique, qu’il soit ou non comptable public,
d’une personne revêtue d’un mandat public, d’un dépositaire public ou d’un officier public ou
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ministériel, d’un dirigeant ou d’un agent de toute nature des établissements publics, des sociétés
nationales, des sociétés d’économie mixte soumises de plein droit au contrôle de l’Etat, des
personnes morales de droit privé bénéficiant du concours financier de la puissance publique, des
ordres professionnels, des organismes privés chargés de l’exécution d’un service public, des
associations ou fondations reconnues d’utilité publique.
Par ailleurs commettent également un détournement de deniers publics, tout agent civil ou militaire
de l’Etat ou d’une collectivité publique, qu’il soit ou non comptable public, toute personne revêtue
d’un mandat public, tout dépositaire public et tout officier public ou ministériel qui aura détourné ou
soustrait des deniers ou des pièces au préjudice de personnes privées, à l’occasion de l’exercice de
ses fonctions (article 152 in fine du Code Pénal).
Section 2 : Le régime juridique des infractions portant sur des deniers publics
Les infractions contre les deniers publics relèvent d’un régime juridique différent, sinon, dérogatoire
à bien des égards du droit commun. Ces règles dérogatoires se manifestent aussi bien dans les
poursuites et la prescription de l’action publique (I) qu’en ce qui concerne la détention provisoire (II).
Il y aura lieu en outre de faire la distinction entre les infractions contre les deniers publics et
certaines infractions voisines, notamment, l’enrichissement illicite, la corruption et la concussion (III)
avant d’étudier les sanctions pénales applicables (IV).
1 – L’action publique
Si tant est que les infractions en matière de deniers publics revêtent une certaine particularité, il n’en
reste pas moins que l’exercice des poursuites en la matière et en particulier, la mise en mouvement
de l’action publique est faite selon les règles du droit commun avec l’intervention du Ministère
Public. En effet, aux termes des dispositions de l’article 1 er du Code de Procédure Pénale : « L’action
publique pour l’application des peines est mise en mouvement par les magistrats ou les
fonctionnaires ou les fonctionnaires auxquelles elle est confiée par la loi.
3
Cette action peut aussi être mise en mouvement par la partie lésée, dans les conditions déterminées
par le présent code ». Cela signifie qu’en principe, c’est au Ministère Public qu’il appartient d’initier
les poursuites à l’encontre des auteurs d’infractions contre les deniers publics. Toutefois, il n’est pas
non plus interdit à la partie civile, c’est-à-dire celle qui prétend avoir souffert d’un préjudice du fait
de l’infraction, de mettre en mouvement l’action publique, soit en se constituant partie civile devant
le juge d’instruction (article 76 du Code de Procédure Pénale), soit en faisant une citation directe
(articles 538 et suivants du Code de Procédure Pénale). Dans l’un comme dans l’autre cas, le
Ministère Public garde le monopole de l’exercice de l’action publique (articles 31 et suivants, 445 du
Code de Procédure Pénale).
En outre, aux termes des dispositions de l’article 32 du Code de Procédure Pénale : « Le Procureur de
la République reçoit les plaintes et dénonciations et apprécie la suite à leur donner ». C’est donc dire
que cette autorité judiciaire reste seule maître de la légalité et de l’opportunité des poursuites.
2 – L’action civile
Aux termes des dispositions de l’article 2 alinéa 1 er du Code de Procédure Pénale : « L’action civile en
réparation du dommage causé par toute infraction appartient à tous ceux qui ont personnellement
souffert du dommage directement causé par l’infraction ». Toutefois, lorsqu’une infraction contre les
deniers publics est commise, ce sont les intérêts pécuniaires de la puissance publique prise en tant
que sujet de droit qui sont en cause.
Toute action portée devant les tribunaux et tendant à faire déclarer l’Etat créancier ou débiteur pour
des causes étrangères à l’impôt et au domaine doit, sauf exception prévue par un texte spécial, être
intentée à peine de nullité par ou contre l’Agent Judiciaire de l’Etat.
Plus particulièrement, celui-ci est chargé d’exercer les poursuites pour le recouvrement des créances
de l’Etat étrangères à l’impôt et au domaine et, dans ce cas, peut émettre des titres de perception
ayant force exécutoire.
Il a également pour mission de sauvegarder les droits de l’Etat dans tous les domaines où les textes
en vigueur n’ont pas conféré ces prérogatives à d’autres services ».
3
Ainsi, il résulte de ce texte à portée générale que quelle que soit la matière, à chaque fois qu’il est
question de faire déclarer l’Etat créancier ou débiteur, l’Agence Judiciaire de l’Etat est fondée à le
représenter. Pour ce qui est de la matière pénale, l’Agent Judiciaire de l’Etat exerce l’action civile à la
suite de l’action publique exercée par le Ministère Public.
Les infractions contre les deniers publics sont des délits et en tant que tels, ils se prescrivent dans un
délai de trois (03) ans révolus (article 8 alinéa 1er du Code Procédure Pénale). Cependant, l’alinéa 2 de
ce même texte dispose : « Toutefois, pour les infractions prévues aux articles 152 et 153 du Code
Pénal et à la Loi N° 2004 – 09 du 06 février 2004 relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux,
la prescription est de sept (07) années révolues à compter du jour où le fait délictueux a été commis ».
Ainsi, par dérogation aux règles de droit commun en matière de prescription de l’action publique, les
infractions contre les deniers publics se prescrivent dans le délai sus visé.
II – La détention provisoire
La détention provisoire est en principe obligatoire lorsqu’il s’agit d’infractions contre les deniers
publics. De même, les conditions de la mise en liberté provisoire sont exceptionnelles.
En matière correctionnelle, l’article 63 du Code de Procédure Pénale prévoit que lorsqu’une peine
d’emprisonnement est encourue, le Procureur de la République peut décerner mandat de dépôt
contre la personne poursuive selon la procédure de flagrant délit. Mais, même si le Procureur de la
République est souvent, et à tort, considéré comme étant responsable de la détention provisoire
avec tous ses impairs, le mandat de dépôt décerné par celui-ci est précaire en ce sens que la
procédure de flagrant délit est une procédure d’urgence et d’évidence qui fait l’économie d’une
information judiciaire avec ses vicissitudes.
L’article 127 bis du Code de Procédure Pénale prévoit pour ce qui est de l’information judiciaire que
la détention provisoire en matière correctionnelle ne peut excéder six (06) mois, à l’exception des
infractions prévues aux articles 56 à 100 du Code Pénal. Toutefois, il y a lieu de préciser que lorsque
le délai de six (06) mois arrive à expiration entre le renvoi prononcé par le juge d’instruction et
l’enrôlement de l’affaire, le prévenu arrêté demeure en en état de détention (article 173 in fine du
Code de Procédure Pénale).
L’article 140 du Code de Procédure Pénale prévoit quant à lui qu’à l’encontre des personnes
poursuivies par application des articles 152 à 155 du Code Pénal, le juge d’instruction délivre
obligatoirement mandat d’arrêt si l’inculpé est en fuite et mandat de dépôt lorsque le montant initial
3
du manquant est égal ou supérieur à un million (1 000 000) F CFA et ne fait pas l’objet d’un
remboursement ou d’un cautionnement de son intégralité ou d’une contestation sérieuse. A
contrario, il ne sera donné main levée du mandat de dépôt (mise en liberté provisoire) que si au
cours de l’information surviennent des contestations sérieuses, le remboursement ou le
cautionnement de l’intégralité du manquant.
Les contestations sérieuses ne doivent pas être confondues avec le fait que l’inculpé ou le prévenu
conteste les faits qui lui sont reprochés dans le cadre de sa défense, ce qui du reste, est un droit en
vertu du principe du contradictoire. Il y a contestations sérieuses lorsqu’il survient en cours de
procédure un élément nouveau de nature à remettre en cause les fondements des poursuites
engagées (Par exemple un rapport d’expertise complémentaire ou définitif).
Il n’y a exception aux règles sus visées que si, selon le rapport d’un médecin commis en qualité
d’expert, l’état de santé du détenu est incompatible avec son maintien en détention, même dans un
centre hospitalier (articles 140 in fine et 149 du Code de Procédure Pénale).
Le cautionnement doit quant à lui s’entendre en vertu des dispositions de l’article 133 du Code de
Procédure Pénale d’une consignation de nature à garantir la représentation de l’inculpé, du prévenu
ou de l’accusé à tous les actes de la procédure et pour l’exécution du jugement ou de l’arrêt, le
paiement des frais avancés par la partie civile, de ceux avancés par la partie publique, des amendes,
des restitutions et des dommages et intérêts. Dans tous les cas, il appartient au juge d’instruction de
déterminer la somme affectée à chacune des parties du cautionnement.
Enfin, l’article 134 du Code de Procédure Pénale ajoute que lorsque la mise en liberté provisoire aura
été subordonnée au cautionnement, il sera fourni en espèces soit par un tiers, soit par l’inculpé, le
prévenu ou l’accusé le montant arrêté par le juge d’instruction, le tribunal ou la cour.
III – Les infractions contre les deniers publics et certaines infractions voisines
A bien des égards, les infractions contre les deniers publics présentent des ressemblances avec des
infractions voisines mais elles s’en différencient, en particulier, en ce qui concerne leurs éléments
constitutifs. C’est le cas de l’enrichissement illicite (A), de la corruption et de la concussion (B).
A – L’enrichissement illicite
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Ce délit a pour siège l’article 163 bis du Code Pénal ainsi libellé : « L’enrichissement illicite de tout
titulaire d’un mandat public électif ou d’une fonction gouvernementale, de tout magistrat, agent civil
ou militaire de l’Etat, ou d’une collectivité publique, d’une personne revêtue d’un mandat public, d’un
dépositaire public, ou d’un officier public ou ministériel, d’un dirigeant ou d’un agent de toute nature
des établissements publics, de sociétés nationales, des sociétés d’économie mixte soumises de plein
droit au contrôle de l’Etat, des personnes morales de droit privé bénéficiant du concours financier de
la puissance publique, des ordres professionnels, des organismes privés chargés de l’exécution d’un
service public, des associations ou fondations reconnues d’utilité publique, est puni d’un
emprisonnement de cinq ans à dix ans et d’une amende au moins égale au montant de
l’enrichissement et pouvant être portée au double de ce montant.
Le délit d’enrichissement illicite est constitué lorsque, sur simple mise en demeure, une des personnes
désignées ci-dessus, se trouve dans l’impossibilité de justifier l’origine licite des ressources qui lui
permettent d’être en possession d’un patrimoine ou de mener un train de vie sans rapport avec des
revenus légaux.
L’origine licite des éléments du patrimoine peut être prouvée par tout moyen.
Toutefois, la seule preuve d’une libéralité ne suffit pas à justifier cette origine licite.
Dans le cas où l’enrichissement illicite est réalisé par l’intermédiaire d’un tiers ou d’une personne
physique dirigeant la personne morale, ces derniers seront poursuivis comme complices de l’auteur
principal ».
Contrairement aux infractions contre les deniers publics, l’enrichissement illicite suppose un acte
matériel très fort qui consiste dans le fait de trouver l’auteur de l’infraction avec des biens qui ne
sont pas en adéquation avec son niveau de revenu. Dans le cadre des infractions contre les deniers
publics, la destination des choses soustraites, détournées ou escroquées importe peu, sauf à
commettre une autre infraction (blanchiment ou recel). Il importe également peu que l’auteur de
l’infraction se soit enrichi, il suffit simplement que le détournement ait été commis dans les
conditions décrites par la loi.
B – La concussion et la corruption
3
Au regard des dispositions de l’article 156 du Code Pénal, la concussion s’entend par le fait pour un
fonctionnaire, un officier public, un percepteur des droits et contributions ou deniers publics, ses
commis ou préposés de recevoir, exigé ou ordonné de percevoir pour droits, taxes, contributions ou
deniers, ou pour salaires ou traitements, ce qu’ils savaient n’être pas dû ou excéder ce qui est dû. La
peine est deux (02) ans à dix (10) ans d’emprisonnement s’il s’agit du fonctionnaire et d’un (01) an à
cinq (05) ans d’emprisonnement s’il s’agit du commis ou du préposé. Il sera en outre toujours
prononcé une amende de deux cent cinquante mille (250 000) F CFA à cinq cent mille (500 000) F
CFA.
La corruption passive quant à elle, suppose en vertu des dispositions de l’article 159 du Code Pénal,
le fait pour un fonctionnaire de façon générale, de solliciter ou d’agréer des offres ou promesses, de
solliciter ou de recevoir des dons ou présents pour faire ou s’abstenir de faire un acte de ses
fonctions ou de son emploi, juste ou non, mais non sujet à salaire, de rendre une décision ou une
opinion favorable ou défavorable à une partie. Il en est de même des médecins qui dans les mêmes
circonstances, auront faussement dissimulé l’existence de maladies ou d’infirmités ou un état de
grossesse et des préposés ou commis qui, à l’insu de leur hiérarchie, auront agréé ou sollicité ou reçu
des dons ou promesses aux mêmes fins.
La corruption active suppose au sens de l’article 160 du Code Pénal le fait pour toute personne de
solliciter ou d’agréer des offres ou promesses, de solliciter ou de recevoir des dons ou présents pour
faire ou tenter de faire obtenir l’accomplissement ou l’abstention d’un acte.
La concussion et la concussion se distinguent des infractions contre les deniers publics du fait qu’elles
ne supposent pas au préalable l’existence de deniers appartenant à la puissance publique.
En vertu des articles 152 et 153, la personne coupable de ces délits sera punie :
« - s'il s'agit d'un simple particulier, d'un emprisonnement d'un à cinq ans ;
- s'il s'agit d'un agent civil ou militaire de l'Etat ou d'une collectivité publique, qu'il soit ou non
comptable public, d'une personne revêtue d'un mandat public, d'un dépositaire public ou d'un officier
public ou ministériel, d'un dirigeant ou d'un agent de toute nature des établissements publics, des
sociétés nationales, des sociétés d'économie mixte soumises de plein droit au contrôle de l'Etat, des
personnes morales de droit privé bénéficiant du concours financier de la puissance publique, des
ordres professionnels, des organismes privés chargés de l'exécution d'un service public, des
associations ou fondations reconnues d'utilité publique, d'un emprisonnement de cinq à dix ans. »
3
De plus, il sera toujours prononcé contre le condamné une amende de 20.000 à 5.000.000 de francs.
La confiscation de tous les biens du condamné sera obligatoirement prononcée dans les conditions
prévues aux articles 30 à 32 lorsque les sommes ou objets détournés ou soustraits n'auront pas été
remboursés ou restitués en totalité au moment du jugement.
A l'égard des prévenus reconnus coupables des faits punis par les articles 152 à 154, l'application des
circonstances atténuantes sera subordonnée à la restitution ou au remboursement, avant jugement,
du tiers au moins de la valeur détournée ou soustraite.
Le bénéfice du sursis ne pourra être accordé qu'en cas de restitution ou de remboursement avant
jugement des trois quarts au moins de ladite valeur.
Les derniers, effets et objets quelconques qui ne sont pas restitués spontanément par l'auteur du
délit ou sur ses indications précises, n'entrent pas dans le calcul des fractions de remboursement
permettant I’application des circonstances atténuantes ou du sursis
Ces infractions sont tout aussi nombreuses et diversifiées car comme préalablement précisé,
nombreux sont les textes spéciaux qui règlement l’activité économique et qui comportent des
dispositions pénales.
Toutefois, nous nous intéresserons dans cette partie du cours à quelques infractions prévues dans le
cadre des sociétés commerciales (chapitre 1), quelques infractions relatives à l’activité bancaire
(chapitre 2). Nous terminerons par le cas particulier du blanchiment de capitaux (chapitre 4).
Les incriminations prévues dans le droit OHADA sont principalement contenues dans les actes
uniformes portant sur :
Bien qu’il soit communément dénommé abus des biens sociaux, le délit peut aussi se commettre par
usage abusif du crédit social. Ces deux (02) infractions constituent des abus de gestion. Dans l’un
comme dans l’autre, l’élément matériel dans un usage contraire à l’intérêt social soit des biens ou
crédit. Ces délits ont une finalité commune car ils tendent à sanctionner les dirigeants qui traitent le
patrimoine social comme leur patrimoine propre, en méconnaissance du principe de séparation des
patrimoines, ou qui gèrent la société dans leur intérêt personnel, quand bien même leur mandat est
un mandat de gestion dans l’intérêt de la société. L’objectif du délit est en fait de sanctionner les
confusions entre le patrimoine social et patrimoine personnel.
L’abus de biens sociaux a été créé par les décrets-lois des 8 août et 30 octobre 1935, et a été repris
par le législateur OHADA à l’article 891 de l’AU/SC&GIE qui dispose : « encourent une sanction
pénale, le gérant de la société à responsabilité limitée, les administrateurs, le président directeur
général, le directeur général, l’administrateur général ou l’administrateur général adjoint qui, de
mauvaise foi, font du bien ou du crédit de la société, un usage qu’ils savaient contraire à l’intérêt de
celle-ci, à des fins personnelles, matérielles ou morales, ou pour favoriser une autre personne morale
dans laquelle ils étaient intéressés, directement ou indirectement ».
Nous verrons la question de la constitution de l’infraction d’un côté, et d’un autre la répression.
I – La constitution de l’infraction
L’article 891 AU/SC&GIE incrimine les abus ou les atteintes ayant trait aux valeurs patrimoniales que
sont les biens sociaux ou le crédit de la société. La constitution de l’infraction d’abus de biens sociaux
suppose la réunion de certains éléments. Cependant, il faut qu’un élément préalable existe pour
l’infraction puisse être qualifiée d’abus de biens sociaux.
A – L’élément préalable
Il faut un contrat de société. Mais il doit s’agir d’une société commerciale, et même d’une SARL ou
d’une société par actions (plus d’autres sociétés comme les mutuelles d’assurance ou les
coopératives). Pour les autres sociétés (sociétés de personnes notamment), la qualification restera
l’abus de confiance. C’est logiquement la ou les personnes qui représentent l’entreprise, ont pouvoir
3
de l’engager : il s’agit de protéger le patrimoine de la société contre le mauvais usage qui pourrait en
être fait par les dirigeants.
Les biens sociaux couvrent tous les biens mobiliers appartenant à la société (fonds sociaux, matériels
et marchandises). Il peut s’agir également de ses biens immobiliers et même des biens incorporels
(droit de créance, droit d’exploitation d’un brevet d’invention, droit de clientèle). En définitive, les
biens sociaux représentent l’ensemble de l’actif mobilier et immobilier d’une société destiné à
l’intérêt de celle-ci.
Les biens sociaux doivent appartenir à la société et celle-ci doit être in bonis c’est-à-dire que la
société doit être maître de ses biens.
Le crédit social correspond de façon générale à la confiance financière qui est attachée à la société à
raison de son capital, de la nature de ses affaires et de la bonne marche de celles-ci.
On note à cet effet la dépense sociale qui sert l’intérêt personnel des dirigeants et qui n’a pas de
contrepartie pour la société :
- Il s’agit du détournement de biens ou de fonds sociaux dans un intérêt personnel direct (les
dirigeants qui font livrer à leur domicile personnel du matériel réglé par la société ou virent sur un
compte personnel des sommes d’argent dues à l’entreprise ou encore payent leur loyer personnel ou
leurs frais de vacances avec des fonds sociaux).
- Il s’agit du détournement de biens ou de fonds sociaux dans un intérêt personnel indirect (les
dirigeants qui affectent à une société dans laquelle eux-mêmes ou leurs proches ont des intérêts, le
matériel acheté par la société qu’ils dirigent ; la société verse des salaires à des personnes qui ne
fournissent aucune prestation de travail et qui appartiennent à la famille des dirigeants ou à leurs
amis ou aux amis de leurs amis).
3
- Il s’agit de la perception de commissions personnelles sur des opérations sociales (les dirigeants qui
exigent et obtiennent une commission personnelle parfois très élevée quand ils mènent une
opération d’acquisition pour le compte de la société, or, cette commission va souvent de pair avec
une surfacturation de l’acquisition à laquelle procède la société, cette surfacturation permettant le
versement de la commission personnelle. A hauteur de la surfacturation, il y a un paiement sans
contrepartie ou sans cause pour la société qui sert les intérêts des dirigeants puisqu’elle permet le
paiement de la commission).
- Il s’agit de frais relationnels ou de réception pris en charge par la société (frais servant à traiter la
famille des dirigeants. En cas de frais relationnels équivoques : frais de mariage d’un enfant ;
demande de remboursement direct de frais de restaurant ou de distraction sans justification de leur
bénéficiaire).
- Il s’agit de la perception par les dirigeants de rémunérations indues qui sont, stricto sensu, les
rémunérations perçues sans autorisation préalable du conseil d’administration ou de l’assemblée
générale.
- Il s’agit de la perception des rémunérations excessives qui sont des rémunérations pouvant être
considérées comme disproportionnées, soit par rapport aux capacités financières de l’entreprise, soit
par rapport au travail fourni par les dirigeants.
La mauvaise foi de l’auteur de l’abus est requise, ainsi que la poursuite des fins personnelles, le but
d’intérêt personnel et égoïste qui constitue le dol spécial.
2. L’élément intentionnel
On distingue le dol général du dol spécial. Le dol général tient à ce que l’acte contraire à l’intérêt
social doit avoir été commis de mauvaise foi. Quant au dol spécial, il tient à ce que l’acte est commis
à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société dans laquelle les dirigeants sont
intéressés directement ou indirectement. Les dirigeants sociaux peuvent chercher à faire
directement des faveurs ou à satisfaire un intérêt personnel indirect consistant dans l’abus commis
pour favoriser une autre société, personne morale dans laquelle ils sont intéressés directement ou
indirectement.
II – La répression
L’AU vise des personnes bien déterminées. Nous reviendrons sur ces aspects avant de voir les
sanctions.
B. Les sanctions
La détermination des sanctions relève des législateurs nationaux. Au Sénégal, l’article 35 de la Loi N°
2013 – 13 du 27 avril 2018 prévoit un emprisonnement d’un (01) an à cinq (05) ans et une amende
de cinq cent mille (500 000) F CFA à un million (1 000 000) F CFA.
La société constitue un cadre d’exercice d’activité économique aux enjeux importants. A ce titre, le
législateur incrimine certains agissements qui peuvent porter atteinte aux intérêts des créanciers,
des associés ou de la société. Ces agissements constituent très souvent ce que l’on appelle la
banqueroute (Par. 1) qui est une infraction d’affaires. Toutefois, d’autres infractions lui sont
assimilées (Par. 2) et il conviendra de les évoquer.
I - Les banqueroutes
La dénomination de banqueroute vient de l’italien « banca rotta » ou « banco rotto ». Elle tient à ce
qu’au Moyen-âge, dans les villes italiennes, les commerçants en faillite (le terme faillite vient du latin
fallere : tomber) étaient considérés comme des criminels dont le banc était rompu à l’assemblée des
marchands d’où ils étaient honteusement exclus. Par exemple, le comptoir d’un banquier était brisé.
En France, la conception délictuelle de la faillite se traduisait également par des peines infamantes
applicables aux débiteurs défaillants : port du bonnet vert, mise au pilori, condamnation aux galères
et même à la peine capitale. La tendance était donc à l’élimination professionnelle du failli et à cette
élimination pouvaient s’ajouter les plus hautes sanctions pénales.
La banqueroute s’applique aux commerçants personnes physiques et aux associés des sociétés
commerciales qui ont la qualité de commerçants. Elle concerne également les personnes physiques
dirigeantes de personnes morales assujetties aux procédures collectives et les personnes physiques
représentantes permanentes de personnes morales dirigeantes de personnes morales.
Le délit de banqueroute suppose un état de cessation de paiements, sans que cet état soit
nécessairement constaté par un tribunal commercial ou civil. La cessation de paiements est l’état du
4
débiteur qui ne peut faire face à son passif exigible avec son actif disponible. La jurisprudence ajoute
une condition supplémentaire en exigeant que la situation de la société soit irrémédiablement
compromise. Le rôle de la cessation des paiements dans la qualification de l’infraction est capital.
En revanche, l’intervention du droit pénal devient justifiée quand le débiteur, en état de cessation
des paiements ou dont la situation est gravement compromise, se livre à des agissements constitutifs
de faits de banqueroute car de tels faits portent atteinte, non seulement au droit de gage général des
créanciers, mais encore à l’ordre public, économique et commercial.
En tout cas, si les faits de banqueroute peuvent être postérieurs à la cessation de paiements qu’ils ne
font alors qu’aggraver, ils peuvent également être antérieurs à la cessation des paiements qu’ils ont
alors pour effet de provoquer ou de maquiller.
Ceci dit, il n’est donc pas nécessaire que la personne morale soit elle-même commerçante, le seul
exercice d’une activité économique est suffisant. En outre, il peut ne pas s’agir seulement d’une
société, le texte s’appliquant également aux groupements d’intérêt économique.
Il peut s’agir enfin des dirigeants de droit ou de fait ou plus généralement de toute personne ayant
directement ou par personne interposée, administré, géré ou liquidé la personne morale sous le
couvert ou aux lieux et places de ses représentants légaux.
Le droit OHADA consacre les articles 226, 227, 228 et 229 de l’AU/PCAP à la banqueroute simple et à
la banqueroute frauduleuse.
En effet, l’article 227 de l’Acte uniforme portant organisation des procédures collectives d’apurement
du passif prévoit que « les dispositions de la présente section s’appliquent :
4
- aux associés des sociétés commerciales qui ont la qualité de commerçants ».
Par commerçants personnes physiques il faut entendre les entrepreneurs individuels ayant la qualité
de commerçants et les associés ou membres de personnes morales tenus indéfiniment et
solidairement des dettes sociales, qui sont classiquement considérés comme étant des commerçants.
- si elle a contracté sans recevoir des valeurs en échange, des engagements jugés trop importants eu
égard à sa situation lorsqu’elle les a contractés ;
- Si, dans l’intention de retarder la constatation de la cessation de ses paiements, elle a fait des
achats en vue d’une revente au-dessous du cours ou si, dans la même intention, elle a employé des
moyens ruineux pour se procurer des fonds ;
- si, sans excuse légitime, elle ne fait pas au greffe de la juridiction compétente, la déclaration de son
état de cessation de paiements dans le délai de trente jours ;
- si sa comptabilité est incomplète ou irrégulièrement tenue ou si elle n’a tenu aucune comptabilité
conforme aux règles comptables et aux usages reconnus de la profession eu égard à l’importance de
l’entreprise ;
- si, ayant été déclaré deux fois en état de cessation de paiements, en cinq ans, ses procédures ont été
clôturées pour insuffisance d’actifs.
L’achat en vue de revendre au dessous du cours ou l’emploi de moyens ruineux pour se procurer des
fonds sont deux modes de commission du délit qui doivent avoir été commis en vue d’éviter ou de
retarder l’ouverture de la procédure collective et donc avant la constatation de la cessation des
paiements.
Sous le rapport de leur esprit, dans les deux cas, l’agent se procure des fonds dont l’obtention ne fait
qu’aggraver le passif préexistant.
Le recours à des moyens ruineux pour se procurer des fonds consiste à se procurer des fonds par des
concours financiers, ce qui permet le maintien artificiel et temporaire de l’activité de l’entreprise,
alors que la situation financière est déjà irrémédiablement compromise.
L’agent doit nécessairement avoir agi en vue d’éviter ou de retarder l’ouverture de la procédure
collective. Les juges doivent établir le caractère ruineux du moyen employé.
L’emploi de moyens ruineux laisse apparaître la mauvaise foi de l’auteur de l’infraction, car la loi vise
l’intention de retarder la constatation de la cessation de paiements, traduisant l’exigence d’un dol
spécial, ou, tout au moins, de la mauvaise foi.
Parmi les moyens ruineux, on peut citer les crédits obtenus à un taux usuraire, les concours financiers
obtenus à un taux jugé excessif, le découvert trop important entraînant des intérêts et agios hors de
proportion avec le chiffre d’affaires.
La complicité peut être retenue à l’encontre des personnes qui ont fourni le concours financier
ruineux. Ce risque pénal concerne particulièrement les banquiers qui auront connu la situation de
cessation des paiements de leur client, la volonté de celui-ci de retarder l’ouverture de la procédure
collective et le caractère ruineux du crédit accordé.
La tenue d’une comptabilité régulière est l’une des garanties des droits des créanciers vis-à-vis de
leur débiteur. Le débiteur qui néglige cette obligation ne peut connaître son passif et son actif et
compromet du coup les droits de ses créanciers.
- a soustrait sa comptabilité ;
4
- a détourné ou dissipé tout ou partie de son actif ;
- soit dans ses écritures, soit par des actes publics ou des engagements sous seing privé, soit dans son
bilan, s’est frauduleusement reconnue débitrice de sommes d’argent qu’elle ne devait pas ;
- a exercé la profession commerciale contrairement à une interdiction prévue par les Actes uniformes
ou par la loi de chaque Etat-partie ;
- a stipulé avec un créancier des avantages particuliers à raison de son vote dans les délibérations de
la masse ou qui a fait avec un créancier un traité particulier duquel il résulterait pour ce dernier un
avantage à la charge de l’actif du débiteur à partir du jour de la décision d’ouverture ;
- a, de mauvaise foi, présenté ou fait présenter un compte de résultats ou un bilan ou un état des
créances et des dettes ou un état actif et passif des privilèges et sûretés, inexact ou incomplet, à
l’occasion d’une procédure de règlement judiciaire ;
- a, sans autorisation du Président de la juridiction compétente, accompli des actes interdits par la
loi. »
Se reconnaître débiteur de sommes d’argent qu’on ne doit pas en réalité relève d’une malhonnêteté
très préjudiciable aux créanciers. C’est la manifestation la plus prononcée d’une fraude évidente et
naturellement punissable à souhait.
Le paiement frauduleux d’un créancier au préjudice de la masse après la cessation des paiements
annihile l’égalité entre les créanciers qui est du reste un principe cardinal du droit des procédures
collectives.
4
La mauvaise foi n’est apparemment requise que pour la plupart des cas de banqueroute frauduleuse.
C’est ce qui justifie l’emploi du terme « frauduleux ».
Il s’agit ici des infractions assimilées aux banqueroutes et d’autres infractions qui sont le fait des tiers
ou des parents du débiteur. Ces délits sont punis des mêmes peines que la banqueroute frauduleuse.
Sont donc concernés, les dirigeants qui, au regard des dispositions de l’art.231 de l’Acte uniforme sur
les procédures collectives ont :
- Après cessation des paiements de la personne morale, payé ou fait payer un créancier au préjudice
de la masse ;
- Fait contracter par la personne morale, pour le compte d’autrui, sans qu’elle reçoive de valeurs en
échange, des engagements jugés trop importants eu égard à sa situation lorsque ceux-ci ont été
contractés;
- en vue de soustraire tout ou partie de leur patrimoine aux poursuites de la personne morale en état
de cessation de paiement, ou à celle des associés ou des créanciers de la personne morale, détourné
4
ou dissimulé, tenté de détourner ou de dissimuler une partie de leurs biens ou qui se sont
frauduleusement reconnus débiteurs de sommes d’argent qu’ils ne devaient pas».
Toutes les fautes énumérées ci-dessus sont commises au détriment de la personne morale.
1°) « sont punis des peines de la banqueroute frauduleuse, les dirigeants visés à l’art.230 qui ont
frauduleusement:
- reconnu la personne morale débitrice de sommes qu’elle ne devait pas, soit dans les écritures, soit
par des actes publics ou des engagements sous signature privée, soit dans le bilan ;
- exercé la profession de dirigeant contrairement à une interdiction prévue par les Actes uniformes ou
par la loi de chaque Etat-partie ;
- stipulé avec un créancier, au nom de la personne morale, des avantages particuliers à raison de son
vote dans les délibérations de la masse ou qui ont fait avec un créancier un traité particulier duquel il
résulterait pour ce dernier un avantage à la charge de l’actif de la personne morale, à partir du jour
de la décision déclarant la cessation des paiements. »
2°)- « sont également punis des peines de la banqueroute frauduleuse, les dirigeants visés à l’art.230
qui, à l’occasion d’une procédure de règlement préventif ont :
a) – de mauvaise foi, présenté ou fait présenter un compte de résultats ou un bilan ou un état des
créances et des dettes ou un état actif et passif des privilèges et sûretés, inexact ou incomplet ;
b) – sans autorisation du président de la juridiction compétente, accompli un des actes interdits par
l’art.11 AU/PCAP (qui interdit au débiteur, sous peine d’inopposabilité de droit:
- de payer en tout ou en partie, les créances nées antérieurement à la décision de suspension des
poursuites individuelles ;
- de désintéresser les cautions qui ont acquitté des créances nées antérieurement à la décision».
4
En l’espèce, la soustraction concerne les biens de la personne morale. Le détournement concerne
l’actif. L’interdiction est celle du dirigeant lui-même.
La juridiction de jugement peut être saisie à la fois par le ministère public, ou sur constitution de
partie civile, ou sur la base d’une citation directe initiée par le syndic ou tout autre créancier agissant
en son nom propre ou au nom de la masse.
Le syndic agit au nom de la masse après avoir obtenu l’autorisation du juge commissaire.
L’application des sanctions pénales, avec celle des déchéances et interdictions, renforcent l’efficacité
des procédures collectives.
Une condamnation pour banqueroute simple ou frauduleuse ou pour délit assimilé à la banqueroute
simple ou frauduleuse est possible même dans l’hypothèse où la cessation des paiements n’a pas été
constatée dans les, conditions prévues dans l’Acte uniforme.
L’article 4 de la Loi N° 2018 – 13 du 27 avril 2018 prévoit que les infractions prévues par les articles
228, 229, 231, 232, 233, 240 et 241 de l’Acte Uniforme sur les Procédures Collectives sont punies des
peines prévues par le Code Pénal.
L’article 376 alinéa 2 du Code Pénal punit les banqueroutiers simples d’un emprisonnement d’un (01)
mois à deux (02) ans.
L’alinéa 3 punit quant à lui les banqueroutiers frauduleux d’un emprisonnement de cinq (05) ans à
dix (10) ans.
Le domaine bancaire est un secteur en proie à des malfaiteurs en raison des enjeux économiques et
financiers qu’il comporte. Dans le souci de protéger les professionnels de cette activité ainsi que les
épargnants, il est apparu indispensable d’incriminer certains agissements. Il en est ainsi, entre autres,
de l’exercice illégal de l’activité bancaire (Section 1).
Aussi le législateur a- t – il songé à apporter une certaine protection sur le plan pénal aux instruments
paiement, en particulier le chèque (section 2) et la carte bancaire et les autres procédés
électroniques de paiement (Section 3).
4
Section 1 : L’exercice illégal de l’activité bancaire
L’activité bancaire est une activité spécifique. Elle comporte des enjeux économiques et financiers
très importants. A ce titre, il a été envisagé de mettre en œuvre une règlementation pouvant assurer
un contrôle effectif de l’ensemble des acteurs intervenant dans ce domaine ainsi qu’une protection
des banques et de leurs partenaires. C’est pourquoi, dans le cadre de l’UEMOA, en adoptant la loi
2008-26 du 28 juillet 2008 pour règlementer l’activité bancaire, qui est une activité au cœur de
l’économie, des dispositions spécifiques ont été prévues pour lutter contre l’exercice illégal de ladite
activité. Il y’a exercice illégal de l’activité bancaire lorsqu’on s’active dans ce domaine sans respecter
les exigences légales, plus précisément sans avoir obtenu un agrément ou une autorisation.
L’interdiction d’exercer la profession bancaire se conçoit en général comme une mesure de sûreté
plutôt qu’une peine. C’est une mesure qui vise à empêcher certaines personnes à faire partie de la
direction, de l’administration, de la gérance ou même de l’équipe de contrôle d’une société ayant
pour objet l’exercice de l’activité bancaire, ou même d’une succursale ou d’une simple agence, on
même à signer pour une banque en vertu d’un mandat permanent. Le non respect par les interdits
de cette mesure constitue un délit différent de celui de l’exercice illégal de l’activité bancaire. Si le
second se caractérise matériellement par le fait de mener des activités bancaires sans agrément ou
autorisation préalables, le premier suppose le fait de faire fi d’une interdiction ; l’auteur de ce délit
pouvant même avoir été préalablement agréé.
En marge de ces précisions, l’étude de cette infraction passera par une revue des actes constitutifs
(Par. 1) de ladite infraction avant de terminer par une analyse des sanctions qui lui sont applicables
(Par. 2).
En vertu de l’article 13, le délit d’exercice de l’activité bancaire suppose, soit l’exercice de l’activité
bancaire sans agrément préalable (A), soit la prévalence ou la création de l’apparence de la qualité
de banque, de banquier, ou d’établissement financier à caractère bancaire (B).
En raison de sa spécificité, l’activité bancaire ne peut être exercée que si certaines exigences
spécifiques ont été satisfaites, notamment l’obtention d’un agrément. Toute personne souhaitant
4
effectuer des opérations de banque à titre de profession, devra ainsi solliciter une autorisation
auprès du Ministère chargé des Finances de l’Etat où l’activité devra être menée. Celui-ci le prononce
après avis conforme de la commission bancaire. L’exercice de l’activité bancaire renvoie à la
réalisation d’opérations de banque lesquelles correspondent à la réception de fonds du public, aux
opérations de crédit et à la mise à disposition de la clientèle et la gestion de moyens de paiement
(article 2 alinéa 2).
L’agrément est constaté par l’inscription sur la liste des banques ou sur celle des établissements
financiers à caractère bancaire.
Ces listes sont établies et tenues à jour par la Commission bancaire qui affecte un numéro
d’inscription à chaque banque ou établissement financier à caractère bancaire.
La liste des banques et celle des établissements financiers à caractère bancaire, ainsi que les
modifications dont elles font l’objet, y compris les radiations, sont publiées au Journal officiel de la
République du Sénégal, à la diligence de la Commission bancaire. Une inscription sur la liste des
banques ou des établissements financiers à caractère bancaire est requise pour pouvoir exercer
légalement l’activité bancaire.
Il est tenu au niveau de chaque Etat une liste répertoriant toutes les banques ou tous les
établissements financiers à caractère bancaire. L’entreprise qui souhaite exercer l’activité bancaire
devra donc, après avoir obtenu l’agrément, solliciter son inscription sur cette liste.
Depuis 1997, c’est le principe de l’agrément unique qui prévaut dans l’espace UEMOA. Ainsi les
établissements de crédits exerçant dans cet espace n’ont pas besoin de solliciter un agrément auprès
de chaque Etat pour pouvoir exercer son activité. Tout de même, ils devront s’ils veulent étendre
leurs activités dans les autres pays de l’union obtenir une autorisation préalable du ministre des
finances de l’Etat où ils souhaitent implanter une succursale, sous peine de poursuites pénales pour
exercice illégal de l’activité bancaire.
En ce qui concerne les établissements financiers à caractère bancaire, classés dans une catégorie, ils
ne peuvent exercer les activités d’une autre catégorie sans autorisation préalable accordée par
l’autorité compétente comme en matière d’agrément. Cela signifie qu’ils ne doivent pas se
transformer de fait en banques, ils doivent se limiter aux seules opérations pour lesquelles ils ont été
agréés. Lorsqu’ils veulent effectuer d’autres opérations de banque, ils devront solliciter une
autorisation préalable, sous peine de poursuites pénales pour exercice illégal de l’activité bancaire.
4
Cependant, en application de l’article 14 il est permis à une entreprise, quelle que soit sa nature :
- de consentir à ses contractants des délais ou avances de paiement dans l’exercice de son activité
professionnelle ;
- de procéder à des opérations de trésorerie avec des sociétés ayant avec elle, directement ou
indirectement, des liens de capital conférant à l’une des entreprises liées, un pouvoir de contrôle
effectif sur les autres ;
- d’émettre des valeurs mobilières, ainsi que des titres de créances négociables, conformément aux
dispositions législatives et réglementaires en vigueur ;
- d’émettre des bons et cartes délivrés pour l’achat, auprès d’elle, d’un bien ou d’un service
déterminé.
L’incrimination ne vise pas seulement l’exercice de l’activité bancaire en tant que tel, mais aussi la
prévalence de la qualité de banque, banquier ou d’établissement financier à caractère bancaire ou la
création de l’apparence de cette qualité. En incriminant de tels actes, le législateur communautaire
vise à protéger les banques contre des usurpations de leur appellation.
La prévalence de cette qualité peut résulter du fait pour une entreprise de vouloir bénéficier
d’avantages accordés aux établissements de crédit.
Ainsi, serait sous le coup de la loi toute personne qui, agissant pour son compte ou pour le compte
d’une personne morale :
-utilise indûment une dénomination commerciale, une raison sociale, une publicité et de manière
générale, toute expression faisant croire qu’elle est agréée en tant qu’établissement de crédit ou
entretient sciemment dans l’esprit du public une confusion sur la régularité de l’exercice de son
activité ;
5
-utilise tous procédés ayant pour objet de créer un doute dans l’esprit du public quant à la catégorie
d’établissement de crédit au titre de laquelle elle a été agréée, cette infraction peut être commise
aussi bien par une personne agissant pour son propre compte, ou intervenant simplement pour le
compte d’une société ne remplissant pas les conditions requises pour exercer le commerce de
banque.
Il est prévu à l’encontre de celui qui exerce illégalement l’activité bancaire un emprisonnement d’un
(1) mois à deux (2) ans et d’une amende de dix millions (10.000.000) à cent millions (100.000.000) de
francs CFA, ou de l’une de ces deux peines seulement, quiconque, agissant pour son compte ou celui
d’un tiers, aura contrevenu aux dispositions des articles 13 et 17, alinéa premier.
La loi ne vise que l’auteur des faits. Cela se justifie par le principe sacro sain de la personnalité des
peines qui occupe une place de choix en la matière, lequel s’oppose à ce que quelqu’un puisse être
tenu responsable pénalement pour les actes posés par autrui. Mais, la logique voudrait que l’on
subisse les conséquences fâcheuses d’une activité illicite, quand on profite de ses produits en toute
connaissance de cause. Tout de même, à défaut d’une possible poursuite sur cette base, des
poursuites paraissent envisageables sur le fondement du recel.
En cas de récidive, le maximum de la peine sera porté à cinq (5) ans d’emprisonnement et à trois cent
millions (300.000.000) de francs CFA d’amende.
Les instruments de paiement constituent des titres qui constatent l’existence au profit du porteur
d’une créance exigible et sert à son paiement. Les instruments de crédit quant à eux, outre le fait
qu’ils servent au paiement à l’échéance, constatent l’existence d’une créance à moyen terme ou plus
ou moins long terme. Le chèque fait partie de la catégorie des instruments de paiement puisqu’il
constitue un titre par lequel une personne, le tireur, donne l’ordre au tiré de payer immédiatement
au bénéficiaire une somme d’argent.
5
Ce délit avait pour siège les dispositions de l’article 83 - 1 de la Loi Uniforme N° 96 – 13 du 28 août
1996 relative aux Instruments de Paiement ainsi libellé : « Est puni d’un emprisonnement d’un an à
trois ans et d’une amende de 100 000 F à 2 500 000 F ou de l’une de ces deux peines seulement … le
titulaire du compte ou le mandataire qui, de mauvaise foi, aura émis un chèque sans provision… ».
Cette infraction était donc constituée par le fait d’émettre un chèque alors que dans le compte il n’y
avait pas du tout de provision (absence de provision) ou que la provision qui s’y trouvait était
inférieure au montant du chèque (insuffisance de provision). Dans l’un comme dans l’autre cas, il
s’agissait d’une infraction intentionnelle car l’agent pénal devait avoir conscience de l’absence de
provision ou de son insuffisance au moment de l’émission du chèque.
Bien qu’étant une réalité sur le plan légal, la dépénalisation du délit d’émission chèque sans provision
fait débat. En effet, à peine cette dépénalisation est-elle intervenue, des voix se sont élevées pour
s’interroger sur les motivations. Pourquoi dépénaliser alors que les émissions de chèques sans
provision n’ont jamais baissé ? Si le droit pénal a pour ambition de protéger les valeurs sociales, il ne
peut être insensible aux sollicitations des victimes de ce délit qui relève d’une certaine malice surtout
à une ère où la victimologie occupe une place de plus en plus importante. Donc étudier les
motivations de cette dépénalisation ne relève que d’un prétexte pour apprécier la pertinence de
cette option de politique criminelle législative7.
Il est heureux que faisant montre d’imagination et de perspicacité, les parquets parviennent sous
certaines conditions à poursuivre les cas d’émission de chèque sans provision sous la qualification
d’escroquerie. En effet, le postulat est que le chèque est un instrument paiement et non de crédit et
il est payable à vue. Donc sa remise convainc le bénéficiaire de l’existence de la provision. Lorsque
maintenant, la religion du bénéficiaire aura été surprise par la présentation d’un chèque qui
7
Voir NDIAYE Jean Aloïse, Feu le délit d’émission de chèque sans provision : essai de réflexion sur une
dépénalisation passée presque inaperçue.
5
s’avèrera être sans provision, l’on peut valablement conclure à des manœuvres frauduleuses qui, si
elles ont déterminé la remise de choses, caractérisent le délit prévu à l’article 379 du Code Pénal. Il
est d’ailleurs arrivé à plusieurs reprises que les juridictions pénales prononcent des condamnations
pour escroquerie en pareille situation.
En même qu’elle a dépénalisé l’émission de chèque sans provision, la Loi Uniforme N° 2008 – 48 du
03 septembre 2008 relative à la répression des infractions en matière de chèque, de carte bancaire
et d’autres instruments et procédés électroniques de paiement a prévu plusieurs autres infractions
liées à l’utilisation du chèque. Il s’agit (article 2) :
Ces infractions sont punies d’un emprisonnement trois (03) ans et d’une amende de deux millions
(2 000 000) F CFA qui peut être portée à cinq millions (5 000 000) F CFA lorsque le tireur est
commerçant ou récidiviste. La tentative de ces infractions est punie comme le délit consommé.
5
L’article 4 de la loi réprime d’un emprisonnement de sept (07) ans et d’une amende de dix millions
(10 000 000) F CFA celui qui en connaissance de cause fabrique, acquiert, détient, cède, offre ou met
à disposition des matières, machines, appareils, équipements, instruments, programmes
informatiques ou toutes données conçues ou spécialement adaptées pour commettre une
contrefaçon ou une falsification de chèque.
Dans les cas prévus aux articles 2 et 3, la juridiction pénale peut interdire au condamné d’émettre
des chèques autres que ceux qui permettent exclusivement le retrait de fonds par le tireur lui-même
ou des chèques certifiés pour une durée d’un un an à cinq (05) ans. La violation de cette interdiction
par le tireur ou le mandataire est punie d’un emprisonnement de cinq (05) ans et d’une amende de
deux millions (2 000 000) F CFA (article 7).
Enfin, la responsabilité pénale du tiré c’est-à-dire la banque peut être engagée dans certains cas. Il
s’agit :
- Du refus du paiement du chèque au motif que le tireur y a fait opposition hors les cas prévus
à l’article 84 alinéa 3 du règlement ;
- L’indication d’une provision inférieure à la provision existante et disponible ;
- Le rejet du chèque pour insuffisance ou indisponibilité de la provision sans indiquer si tel est
le cas que le chèque a été émis en violation d’une injonction adressée en application de
l’article 115 du règlement ;
- Le défaut d’indication des incidents de paiement entre autres.
Dans ces cas, la peine encourue est une amende de trois (3 000 000) F CFA.
Ces infractions sont également nombreuses et variées mais pour l’essentiel, il s’agit des délits ci-
après :
8
Article 139 Les organismes visés à l'article 42 du présent Règlement doivent, préalablement à la délivrance d'une carte de paiement,
s'assurer que le demandeur n'a pas fait l'objet d'une décision de retrait de carte, d'une mesure d'interdiction bancaire ou judiciaire d'émettre
des chèques ou d'une condamnation pour les infractions visées aux articles 143 et suivants du présent Règlement. Cependant cette
disposition ne vise pas le porte-monnaie électronique. En tout état de cause, les organismes visés à l'article 42 ne sont pas tenus de délivrer
une carte de paiement.
Article 42 Les dispositions du présent Règlement s'appliquent aux organismes suivants : les banques au sens de l'article 3 de la Loi portant
Réglementation Bancaire ; les services des Chèques Postaux sous réserve des spécificités liées à leur statut ; le Trésor Public et tout autre
organisme dûment habilité par la loi. Au sens du présent Règlement, le terme banquier désigne les organismes visés à l'alinéa précédent sans
5
- De l’abstinence par un émetteur d’informer dans les délais requis la Banque Centrale de
l’existence d’un abus constaté dans l’utilisation d’une carte de paiement en violation de
l’article 140 du règlement 9;
Ces infractions mises à la charge des émetteurs de carte sont punies d’une amende deux millions
(2 000 000) F CFA (article 15).
Il s’agit en outre de :
En dehors du porte-monnaie électronique, il ne peut être délivré à un demandeur interdit bancaire ou judiciaire d'émettre des chèques qu'une
carte de retrait utilisable exclusivement dans les guichets de l'établissement émetteur, tant que la mesure d'interdiction n'aura pas été levée.
9
Article 140 En cas d'utilisation abusive, dans les quatre (4) jours ouvrables qui suivent la constatation de cette utilisation, l'établissement
émetteur doit enjoindre au titulaire de restituer sa carte et informer de cette décision la Banque Centrale qui tient un fichier recensant les
décisions de retrait de cartes
5
- De la détention sans y être autorisé et en connaissance de cause d’un élément ou partie
d’une carte bancaire ou tout autre instrument de paiement électronique.
Ces infractions prévues par les articles 16 et 18 de la loi sont punies de cinq (05) ans
d’emprisonnement et d’une amende de dix millions (10 000 000) F CFA.
L’article 17 de la loi punit d’un emprisonnement de sept (07) ans et d’une amende de dix millions
(10 000 000) F CFA celui qui en connaissance de cause, fabrique, acquiert, détient, cède, offre ou met
à disposition des équipements, instruments, programmes informatiques ou toutes données conçues
ou spécialement adaptées pour commettre les infractions prévues à l’article 16 a (contrefaçon ou
falsification de carte bancaire).
Des abus dans l’utilisation des cartes bancaires ou autres procédés électroniques de paiement sont
réprimés par la loi. Il s’agit de l’utilisation de la carte bancaire après expiration de sa durée de validité
dans une intention frauduleuse ou après opposition ou perte, vol, utilisation frauduleuse ou
ouverture d’une procédure collective contre le bénéficiaire. Elles sont réprimées par l’article 19 par
une peine d’emprisonnement de cinq (05) ans et d’une amende de dix millions (10 000 000) F CFA.
Les articles 20 et 21 prévoient quant à eux des infractions relatives à des abus dans certains procédés
électroniques de paiement. Il s’agit du transfert d’argent ou de valeur monétaire dans le but de se
procurer un avantage économique illégal ou de le procurer à une autre personne en introduisant,
altérant, effaçant ou supprimant des données informatiques ou en perturbant un logiciel ou un
système informatique. Il s’agit également de fabrication, de la réception, de l’obtention, de la vente,
de la cession ou de la détention illégale d’équipements, instruments, articles, logiciels ou tout autre
moyen spécialement adapté pour commettre les infractions prévues à l’article 20. La peine est de
cinq (05) d’emprisonnement outre une amende de dix (10 000 000) F CFA.
Le blanchiment de capitaux est une infraction qui consiste dans le fait de faciliter, par tout moyen, la
justification mensongère de l’origine des biens ou des revenus de l’auteur d’un crime ou d’un délit
ayant procuré à celui-ci un profit direct ou indirect, ou d’apporter un concours à une opération de
placement, de dissimulation ou de conversion du produit de l’une de ces infractions.
5
résulte d’une prise de conscience des menaces graves qu’il engendre notamment au plan moral10, au
plan politique11, au plan économique12 et au plan financier13.
Le blanchiment de capitaux porte atteinte non seulement à la sécurité mondiale 14, mais aussi
compromet la stabilité, la transparence et l’efficacité des systèmes financiers.
Pour toutes ces raisons, les autorités communautaires UEMOA ont mis en place un dispositif
juridique et institutionnel pour combattre le fléau, tout en misant sur une coopération
internationale15.
Le dispositif anti-blanchiment de l'UEMOA avait pour fondement la loi uniforme relative à la lutte
contre le blanchiment de capitaux, approuvée par le Conseil des Ministres de l’Union Monétaire
Ouest Africaine (UMOA) le 20 mars 2003 à Ouagadougou. Cette loi est une transposition de la
Directive N° 07/2002/CM/UEMOA relative à la lutte contre le blanchiment de capitaux dans les Etats
10
L’influence des organisations criminelles affaiblit le tissu social et mine les valeurs individuelles et
collectives.
11
L’opération de blanchiment permet aux détenteurs de capitaux d’origine illicite d’infiltrer les
systèmes démocratiques grâce à la corruption afin d’obtenir une protection pour leurs activités
délictueuses. Il constitue donc une menace pour l’ordre public et les valeurs républicaines.
12
Grâce aux importantes ressources financières dont ils disposent, les blanchisseurs d’argent sont en
mesure d’acquérir des pans entiers des économies. Ils faussent, de ce fait, le fonctionnement normal
des marchés en instaurant notamment une concurrence déloyale.
13
L’utilisation des établissements de crédit à des fins de blanchiment peut entamer la réputation et la
crédibilité des banques et établissements financiers et provoquer, en conséquence, leur déstabilisation
et des crises systémiques.
14
Selon le FMI, le blanchiment d’argent représenterait 10% du PIB mondial.
15
Dans la perspective de cette coopération internationale en vue d’une prévention et répression
efficaces du phénomène de blanchiment de capitaux, un ensemble d’instruments internationaux sur
lesquels les Etats s’appuient pour y parvenir ont été mis sur pied :
- la Convention des Nations Unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances
psychotropes, adoptée à Vienne le 19 décembre 1988 ;
- la Convention du Conseil de l’Europe du 08 novembre 1990 relative au blanchiment, au
dépistage, à la saisie et à la confiscation des produits du crime ;
- la Convention des Nations Unies sur le crime organisé, adoptée le 15 décembre 2000 à
Palerme (Italie) ;
- la Directive du Conseil de l’Union Européenne du 4 décembre 2001 modifiant la Directive du
10 juin 1991 invitant les Etats membres de l’Union Européenne à modifier leur droit national
afin de prévenir l’utilisation du système financier du blanchiment des capitaux ;
- la Directive de Bâle de 1988 formulée par le Comité des règles et pratiques de contrôle des
opérations bancaires de la Banque des Règlements Internationaux (BRI) ;
- les quarante (40) recommandations du Groupe d’Action Financière sur le Blanchiment de
Capitaux (GAFI).
5
membres de l’UEMOA, adoptée par le Conseil des Ministres de l’UEMOA, lors de sa session du 19
septembre 2002 à Cotonou.
L’étude du blanchiment de capitaux passera par une analyse de ses éléments constitutifs (Section1),
puis par les mécanismes de prévention et de détection (Section2), pour finir par les sanctions pénales
encourues par les personnes coupables de cette infraction (Section3).
I – L’infraction préalable
Le blanchiment de capitaux suppose que l’argent à blanchir ait une source illicite. La loi (article 7) vise
expressément les crimes et les délits ; les contraventions étant donc exclues.
Cet argent est en général le produit d’actes illicites tels que la vente illégale d’armes, la contrebande
et les activités de la criminalité organisée, notamment le trafic de stupéfiants et les réseaux de
prostitution qui peuvent générer des sommes importantes. Il peut aussi résulter de l’escroquerie, des
délits d’initiés, de la corruption ou de la fraude informatique qui permettent aussi de dégager des
bénéfices importants.
Lorsqu’une activité criminelle génère des bénéfices importants, l’individu ou le groupe impliqué
tente de trouver tous moyens nécessaires pour contrôler les fonds sans attirer l’attention sur son
activité criminelle ou sur les personnes impliquées. Les criminels s’emploient donc à masquer les
5
sources, en agissant sur la forme que revêtent les fonds ou en les déplaçant vers des lieux où ils
risquent le moins d’attirer l’attention.
Sauf si l’infraction d’origine a fait l’objet d’une loi d’amnistie, il y a blanchiment de capitaux même :
- si l’auteur des crimes ou délits n’a été ni poursuivi ni condamné ;
- s’il manque une condition pour agir en justice à la suite desdits crimes ou délits.
II - L’élément matériel
Au sens de l’article 7 de la loi N° 2018 – 03 du 23 février 2018, le blanchiment de capitaux est défini
comme l’infraction constituée par un ou plusieurs des agissements énumérées ci-après, à savoir :
a-La conversion, le transfert ou la manipulation, par toute personne qui sait ou aurait dû savoir que
ces biens proviennent d’un crime ou d’un délit ou d’une participation à un crime ou délit dans le but
de dissimuler ou de déguiser l’origine illicite desdits biens ou d’aider toute personne impliquée dans
la commission de ce crime ou délit à échapper aux conséquences juridiques de ses actes ;
b-La dissimulation ou le déguisement de la nature, de l’origine, de l’emplacement, de la disposition,
du mouvement ou de la propriété réelle de biens ou de droits y relatifs dont l’auteur sait ou aurait dû
savoir que ces biens proviennent d’un crime ou d’un délit ou d’une participation à ce crime ou à ce
délit ;
c-L’acquisition, la détention ou l’utilisation de biens dont l’auteur sait, au moment de la réception
desdits biens, qu’ils proviennent d’un crime ou d’un délit ou d’une participation à ce crime ou délit.
Il y a blanchiment de capitaux, même si les faits qui sont à l’origine de l’acquisition, de la détention et
du transfert des biens à blanchir, sont commis sur le territoire d’un autre Etat membre ou sur celui
d’un Etat tiers.
d-L’acquisition, la détention ou l’utilisation de biens dont celui qui s’y livre sait ou aurait dû savoir au
moment où il les réceptionne que ces biens proviennent d’un crime ou d’un délit ou de la
participation à un crime ou à un délit ;
Il y a également blanchiment capitaux, même si les activités qui sont à l’origine des biens à blanchir
sont exercées sur le territoire d’un autre Etat membre ou celui d’un Etat tiers.
Techniquement, le recyclage de capitaux d’origine illicite passe par différentes étapes : on procède
d’abord à son placement dans le circuit économique, puis à son empilement, et enfin à son
intégration.
5
Dans la phase initiale du blanchiment, ou phase de placement, l’agent pénal introduit ses bénéfices
illégaux dans le système financier. Cela peut se faire en fractionnant de grosses quantités d’espèces
pour obtenir des sommes plus petites et moins suspectes qui sont alors déposées directement sur un
compte bancaire ou en faisant l'acquisition de divers instruments monétaires (chèques, ordres de
virement, etc.) qui sont ensuite collectés et déposés sur des comptes en d’autres lieux.
Une fois que les fonds sont entrés dans le système financier, intervient alors, la deuxième phase, dite
de l’empilement. C’est alors que le blanchisseur procède à une série de conversions ou de
déplacements des fonds pour les éloigner de leur source. Les fonds peuvent ainsi être transférés à
travers l’achat ou la vente d’instruments de placement ou encore le blanchisseur peut se contenter
de les virer sur une série de comptes ouverts auprès de diverses banques sur tout le globe. Cette
large dispersion de comptes à des fins de blanchiment est particulièrement fréquente dans les pays
qui n’apportent pas leur coopération aux enquêtes d'anti-blanchiment. Dans certains cas, le
blanchisseur peut masquer les transferts sous forme de paiements de biens ou de services, ce qui lui
permet de donner aux fonds une apparence légitime.
Ayant réussi à retraiter ses bénéfices d’origine criminelle à travers ces deux phases du blanchiment
de capitaux, le blanchisseur les fait alors passer par une troisième phase – l’intégration au cours de
laquelle les fonds sont réintroduits dans des activités économiques légitimes. Le blanchisseur peut
alors décider de les investir dans l’immobilier, les produits de luxe ou la création d’entreprises.
Le blanchiment d’argent est une infraction intentionnelle. Il suppose que l’auteur soit de mauvaise
foi. L’exigence de cet élément résulte de la loi elle-même. C’est tout le sens du législateur : « … dont
l’auteur sait ».
Toutefois, la négligence peut également réprimée car le législateur a ajouté l’expression « … aurait
dû savoir « .
Afin de combattre le blanchiment d’argent, les autorités étatiques s’emploient dans la prévention
(Para1) et la détection précoce des opérations de blanchiment (para2).
I – La prévention
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La loi uniforme institue un cadre juridique permettant de prévenir l’utilisation des circuits
économiques et financiers à des fins de recyclage de capitaux d’origine illicite. Son champ
d’application couvre toute personne physique ou morale, qui dans le cadre de sa profession, réalise,
contrôle ou conseille des opérations entraînant des dépôts, des échanges, des placements, des
conversions ou tous mouvements de capitaux. Il s’agit aussi bien des organismes intervenant dans le
secteur financier que non financier, notamment les membres des professions juridiques pour
certaines de leurs activités, les transporteurs de fonds, les marchands d’articles de grande valeur et
les établissements de jeux.
Au titre de la prévention du blanchiment, la loi uniforme définit les modalités d’identification des
clients par les organismes financiers, de l’ayant droit économique par les organismes financiers, des
modalités de surveillance particulière de certaines opérations, la conservation des pièces et
documents par les organismes financiers. En outre, elle prévoit des dispositions régissant la mise en
place par les organismes financiers, de programmes internes de prévention, pour mieux détecter les
opérations de blanchiment.
La CENTIF est une structure permanente composée de six (6) membres. Les membres de la CENTIF
exercent leurs fonctions, à titre permanent, pour une période de trois ans renouvelable une fois. La
CENTIF, dans le cadre de l’exercice de ses attributions, s’appuie sur un réseau de correspondants
désignés ès qualité au sein des différents services de l’Etat impliqués dans la lutte contre le
blanchiment de capitaux (Police, Gendarmerie, Douanes, Services judiciaires de l’Etat) par arrêté de
leur Ministre de tutelle. Sa composition, son organisation et son fonctionnement sont précisés par
décret.
6
La CENTIF est un Service Administratif, doté de l’autonomie financière et d’un pouvoir de décision
autonome sur les matières relevant de sa compétence. Sa mission est de recueillir et de traiter le
renseignement financier sur les circuits de blanchiment de capitaux.
A ce titre, elle :
La CENTIF élabore des rapports périodiques (au moins une fois par trimestre) et un rapport annuel,
qui analysent l’évolution des activités de lutte contre le blanchiment de capitaux au plan national et
international, et procède à l’évaluation des déclarations recueillies. Ces rapports sont soumis au
Ministre chargé des Finances.
Dans l’exercice de ses attributions, la CENTIF peut recourir à des correspondants au sein des Services
de la Police, de la Gendarmerie, des Douanes, ainsi que des Services Judiciaires de l’Etat et de tout
autre Service dont le concours est jugé nécessaire dans le cadre de la lutte contre le blanchiment de
capitaux.
Les correspondants identifiés sont désignés ès qualité par arrêté de leur Ministre de tutelle. Ils
collaborent avec la CENTIF dans le cadre de l’exercice de ses attributions.
Au plan des statistiques, il convient de noter une évolution croissante des déclarations de soupçon,
marquée par une certaine diversification des sources (banques, Administrations financières,
Notaires, etc.).
6
Section 3 : Les sanctions pénales
La loi fait la distinction entre les sanctions encourues par les personnes physiques et celles encourues
par les personnes morales.
L’article de la loi prévoit un emprisonnement de trois (03) à sept (07) ans et une amende égale au
tripe de la valeur des fonds ou biens sur lesquels ont porté les opérations.
La tentative de blanchiment est également punissable des mêmes peines et il en est de même de
l’association de malfaiteurs en vue du blanchiment de capitaux.
En cas de blanchiment aggravé, c’est à dire commis de façon habituelle, en récidive ou en bande
organisées, les peines de l’article 113 sont doublées (article 115).
Si le maximum de la peine de l’infraction sous – jacente est supérieure à celle prévue à l’article 113,
le blanchiment sera puni des peines prévues pour l’infraction d’origine.
L’interdiction de séjour, celle de l’exercice de certains droits civils, civiques et de famille, d’exercer la
profession à l’occasion de laquelle le blanchiment a été commis ou d’émettre des chèques peuvent
être prononcées à titre complémentaire.
L’article 124 prévoit que les personnes morales autres que l’Etat et les organismes publics pour le
compte ou au bénéfice desquelles une infraction de blanchiment de capitaux a été commise pat l’un
des organes ou représentants, sont punies d’une amende d’un taux égale au quintuple de celles
encourues par les personnes physiques, sans préjudice de la condamnation de ces dernières comme
auteurs ou complices des mêmes faits.
- l’exclusion des marchés publics à titre définitif ou pour une durée de cinq (05) ans au plus ;
- la confiscation du bien qui a servi ou était destiné à commettre l’infraction ou du bien qui en
est le produit ;
- le placement sous surveillance judiciaire pour une durée de cinq (05) ans au plus ;
- l’interdiction à titre définitif ou pour une durée de cinq (05) ans d’exercer directement ou
indirectement une ou plusieurs activités professionnelles ou sociales à l’occasion de laquelle
l’infraction a été commise ;
- la fermeture définitive ou pour une durée de cinq (05) ans des établissements ou de l’un des
établissements de l’entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés ;
6
- la dissolution lorsqu’elles ont été créées pour commettre les faits incriminés ;
- l’affichage de la décision prononcée ou la diffusion de celle-ci par la presse écrite ou par tout
moyen de communication audiovisuelle aux frais de la personne morale condamnée.
Concernant, les personnes physiques coupables d’une infraction de blanchiment de capitaux, elles
sont punies d’un emprisonnement de trois (3) à sept (7) ans et d’une amende égale au triple de la
valeur des biens ou des fonds sur lesquels ont porté les opérations de blanchiment.
De plus l’entente ou la participation à une association en vue de la commission d’un fait constitutif de
blanchiment de capitaux, l’association pour commettre ledit fait, l’aide, l’incitation ou le conseil à une
personne physique ou morale, en vue de l’exécuter ou d’en faciliter l’exécution sont punies des
mêmes peines prévues à l’article 37.
En outre, sont punis d’un emprisonnement de six (6) mois à deux (2) ans et d’une amende de cent
mille (100.000) à un million cinq cent mille (1.500.000) francs CFA ou de l’une de ces deux (2) peines
6
seulement, les personnes et dirigeants ou préposés des personnes physiques ou morales visées à
l’article 5, lorsque ces derniers auront intentionnellement :
- fait au propriétaire des sommes ou à l’auteur des opérations visées à l’article 5, des
révélations sur la déclaration qu’ils sont tenus de faire ou sur les suites qui lui ont été
réservées ;
- détruit ou soustrait des pièces ou documents relatifs aux obligations d’identification visées
aux articles 7, 8, 9, 10 et 15 dont la conservation est prévue par l’article 10 de la présente loi ;
- réalisé ou tenté de réaliser sous une fausse identité l’une des opérations visées aux articles 5
à 10, 14 et 15 de la présente loi ;
- informé par tous moyens la ou (les) personnes visée(s) par l’enquête menée pour les faits de
blanchiment de capitaux dont ils auront eu connaissance, en raison de leur profession ou de
leurs fonctions ;
- communiqué aux autorités judiciaires ou aux fonctionnaires compétents pour constater les
infractions d’origine et subséquentes des actes et documents visés à l’article 33 de la
présente loi, qu’ils savent falsifiés ou erronés ;
- communiqué des renseignements ou documents à des personnes autres que celles visées à
l’article 11 de la présente loi ;
- omis de procéder à la déclaration de soupçon, prévue à l’article 17, alors que les
circonstances amenaient à déduire que les sommes d’argent pouvaient provenir d’une
infraction de blanchiment de capitaux telle que définie aux articles 2 et 3.
Sont punis d’une amende de cinquante mille (50.000) à sept cent cinquante mille (750.000) francs
CFA, les personnes et dirigeants ou préposés des personnes physiques ou morales visées à l’article 5,
lorsque ces derniers auront non intentionnellement :
1. l’interdiction définitive du territoire national ou pour une durée de un (1) à cinq (5) ans à tout
étranger condamné ;
2. l’interdiction de séjour pour une durée de un (1) à cinq (5) ans dans une ou des circonscriptions
administratives ;
6
3. l’interdiction de quitter le territoire national et le retrait du passeport pour une durée de six (6)
mois à trois (3) ans ;
4. l’interdiction des droits civiques, civils et de famille pour une durée de six (6) mois à trois (3) ans ;
5. l’interdiction de conduire des engins à moteurs terrestres, marins et aériens et le retrait des
permis ou licences pour une durée de trois (3) à six (6) ans ;
6. l’interdiction définitive ou pour une durée de trois (3) à six (6) ans d’exercer la profession ou
l’activité à l’occasion de laquelle l’infraction a été commise et interdiction d’exercer une fonction
publique ;
7. l’interdiction d’émettre des chèques autres que ceux qui permettent le retrait de fonds par le
tireur auprès du tiré ou ceux qui sont certifiés et d’utiliser des cartes de paiement pendant trois (3) à
six (6) ans ;
8. l’interdiction de détenir ou de porter une arme soumise à autorisation pendant trois (3) à six (6)
ans ;
10. la confiscation du bien ou de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction ou de
la chose qui en est le produit, à l’exception des objets susceptibles de restitution.
Les personnes morales autres que l’Etat, pour le compte ou au bénéfice desquelles une infraction de
blanchiment de capitaux ou l’une des infractions prévues par la présente loi a été commise par l’un
des organes ou représentants, sont punies d’une amende d’un taux égal au quintuple de celles
encourues par les personnes physiques, sans préjudice de la condamnation de ces dernières comme
auteurs ou complices des mêmes faits.
Les personnes morales, autres que l’Etat, peuvent, en outre, être condamnées à l’une ou plusieurs
des peines suivantes :
1. l’exclusion des marchés publics, à titre définitif ou pour une durée de cinq (05) ans au plus ;
2. la confiscation du bien qui a servi ou était destiné à commettre l’infraction ou du bien qui en est le
produit ;
3. le placement sous surveillance judiciaire pour une durée de cinq (5) ans au plus ;
6
4. l’interdiction, à titre définitif, ou pour une durée de cinq (05) ans, d’exercer directement ou
indirectement une ou plusieurs activités professionnelles ou sociales à l’occasion de laquelle
l’infraction a été commise ;
5. la fermeture définitive ou pour une durée de cinq (05) ans, des établissements ou de l’un des
établissements de l’entreprise ayant servi à commettre les faits incriminés ;
6. la dissolution, lorsqu’elles ont été créées pour commettre les faits incriminés ;
7. l’affichage de la décision prononcée ou la diffusion de celle-ci par la presse écrite ou par tout
moyen de communication audiovisuelle, aux frais de la personne morale condamnée.
Les sanctions prévues aux points 3, 4, 5, 6, et 7 du second alinéa du présent article, ne sont pas
applicables aux organismes financiers relevant d’une autorité de contrôle disposant d’un pouvoir
disciplinaire.
Toute personne coupable, d’une part, de participation à une association ou à une entente, en vue de
commettre l’une des infractions prévues aux articles 37, 38, 39, 40 et 41 d’autre part d’aide,
d’incitation ou de conseil à une personne physique ou morale en vue de les exécuter ou d’en faciliter
l’exécution, est exemptée de sanctions pénales si, ayant révélé l’existence de cette entente,
association, aide ou conseil à l’autorité judiciaire, elle permet ainsi, d’une part, d’identifier les autres
personnes en cause et d’autre part, d’éviter la réalisation de l’infraction.
Les peines encourues par toute personne, auteur ou complice de l’une des infractions énumérées
aux articles 37, 38, 39, 40 et 41 qui, avant toute poursuite, permet ou facilite l’identification des
autres coupables ou après l’engagement des poursuites, permet ou facilite l’arrestation de ceux-ci,
sont réduites de moitié. En outre, ladite personne est exemptée de l’amende et, le cas échéant, des
mesures accessoires et peines complémentaires facultatives.
Dans tous les cas de condamnation pour infraction de blanchiment de capitaux ou de tentative, les
tribunaux ordonnent la confiscation au profit du Trésor Public, des produits tirés de l’infraction, des
biens mobiliers ou immobiliers dans lesquels ces produits sont transformés ou convertis et, à
concurrence de leur valeur, des biens acquis légitimement auxquels lesdits produits sont mêlés, ainsi
que des revenus et autres avantages tirés de ces produits, des biens en lesquels ils sont transformés
6
ou investis ou des biens auxquels ils sont mêlés à quelque personne que ces produits et ces biens
appartiennent à moins que leur propriétaire n’établisse qu’il ignore leur origine frauduleuse.