NUMÉRO 8, FÉVRIER 2025
ACTUALITÉS DE LA SANTÉ,
SÉCURITÉ AU TRAVAIL
ANNE-SOPHIE BRIDON-BERGOUNHON
AJOUT DES CANCERS DU LARYNX ET
DE L’OVAIRE À LA LISTE DES
OUTIL D’ÉVALUATION EN ZONE
MALADIES PROFESSIONNELLES
RADON
SUSCEPTIBLES D’OUVRIR DROIT À
L’INRS a mis en ligne un outil d’évaluation, en zone
radon, de la dose prévisionnelle des travailleurs. L’ACAATA
L'outil permet d'informer sur les dispositions Un arrêté modifie la liste des maladies
réglementaires applicables en fonction de professionnelles provoquées par l’amiante
l’activité volumique de radon mesurée dans le permettant de bénéficier de l’ACAATA (Allocation de
cadre de l'évaluation du risque lié au radon. Il Cessation Anticipée d’Activité des Travailleurs de
précise les conditions dans lesquelles une zone l’Amiante) dès 50 ans.
radon doit être mise en place. Il permet d’évaluer
au préalable l'exposition individuelle des Y sont intégrées les affections figurant au tableau nº
travailleurs amenés à pénétrer dans une zone 30 ter des maladies professionnelles, à savoir les
radon. cancers du larynx et de l’ovaire provoqués par
l’inhalation de poussières d’amiante.
En savoir plus : https://www.inrs.fr/media.html?
En savoir plus : arrêté du 16 décembre 2024
refINRS=outil153
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT0
00050962816
PREUVE DU PRÉJUDICE D’ANXIÉTÉ CHOISIR LES
LIÉ À L’EXPOSITION À DES
VÊTEMENTS DE
SUBSTANCES NOCIVES OU TOXIQUES
PROTECTION :
Par un arrêt du 4 septembre 2024, la Cour de cassation est
venue préciser que l’attestation rédigée par le médecin du
NOUVELLE BROCHURE
travail énumérant les produits auxquels les salariés ont pu DE L’INRS
être exposés au cours de leur activité professionnelle ne
suffit pas à démontrer une exposition générant un risque
L’INRS a publié une nouvelle
élevé de développer une pathologie grave.
brochure intitulée « Les vêtements
de protection : choix et utilisation »,
En l’espèce, l’attestation médicale ne décrivait pas la
pour aider les entreprises à choisir
situation d’exposition personnelle, ni les postes
le bon vêtement de protection en
effectivement occupés au contact de la substance nocive ou
fonction de la situation de travail
toxique.
rencontrée.
Par ailleurs, la Cour estime que si l’employeur n’a pas remis
Cette brochure est destinée à tous
les fiches et attestation d’exposition aux salariés, ces derniers
les professionnels chargés de la
ne justifient d’aucun préjudice lié à ce manquement.
prévention des risques en
entreprise. Elle offre des conseils
La Cour de cassation confirme que « l'existence d'un préjudice
pratiques et opérationnels pour
et l'évaluation de celui-ci relèvent du pouvoir souverain
sélectionner les vêtements de
d'appréciation des juges du fond ».
protection les plus adaptés aux
Pour rappel, dans un arrêt du 13 octobre 2021, la Cour de situations de travail.
cassation avait déjà jugé que la seule attestation de
l’employeur justifiant l’exposition à une substance nocive ou
toxique ne suffisait pas à caractériser le préjudice d’anxiété En savoir plus :
d’un salarié, ce dernier devant apporter la preuve de son https://www.inrs.fr/actualites/bro
préjudice d’anxiété « personnellement subi ». chure-choisir-vetements-
protection.html
Dans son arrêt du 4 septembre 2024, la Cour de cassation
précise ce principe et restreint, cette fois, la portée de
l’attestation du médecin du travail qui ne permet pas non
plus, à elle seule, de démontrer le préjudice d’anxiété du
salarié.
En savoir plus : Cass. Soc. 4 septembre 2024, n° 22-20.917
PASSEPORT DE PRÉVENTION : NOUVEAU CALENDRIER DE MISE EN
ŒUVRE
Créé, à la suite de l’accord national interprofessionnel du 9 décembre 2020, par la loi du 2 août 2021 pour
renforcer la prévention en santé au travail, le passeport de prévention a pour objectif de répertorier les
formations et les certifications en matière de santé et sécurité au travail.
Ce dispositif concerne l’ensemble des travailleurs, en poste ou en recherche d’emploi, du secteur privé
comme du secteur public, ainsi que les employeurs et les organismes de formation.
Il vise à permettre aux entreprises de faciliter la mise en œuvre de leurs obligations en matière de
formations en santé, sécurité au travail, notamment en anticipant les mises à jour des formations ou en
évitant les formations redondantes grâce au partage des données par le travailleur quant aux formations
dont il a pu bénéficier.
Valable tout au long de leur vie active, le passeport de prévention permettra aux travailleurs de retrouver
dans un espace personnel dédié toutes les données liées à leurs formations en SST.
La mise en place du passeport de prévention, initialement programmée au 1er octobre 2022, a été plusieurs
fois reportée.
Dans une note d’actualité diffusée le 17 février 2025, le Ministère du travail a indiqué que l'ouverture
des services du passeport de prévention se fera de manière progressive en 2025 et 2026 avec plusieurs
étapes clés pour les différents publics cibles :
28 avril 2025 : ouverture du service pour les organismes de formation ;
Premier trimestre 2026 : ouverture du service pour les employeurs ;
Quatrième trimestre 2026 : ouverture du service pour les travailleurs ;
Des fonctionnalités complémentaires seront également disponibles en 2027, comme la possibilité
ANNE-SOPHIE BRIDON-BERGOUNHON
d’importer des fichiers pour faciliter les déclarations de données en masse ou la mise à disposition d'un
tableau de bord pour accompagner l’employeur dans la gestion de ses formations.
Cette approche progressive permettra de préparer au mieux chaque acteur – organisme de formation,
employeur puis travailleur – à la mise en œuvre du service.
Par ailleurs, en 2025 et 2026, des actions ciblées seront menées pour accompagner les organismes de
formation dans la déclaration de leurs formations en SST et adapter leurs processus et organisations. Les
employeurs seront également accompagnés dans la prise en main de l’outil, afin de les aider à l’utiliser
efficacement pour gérer et améliorer la prévention des risques.
En parallèle, des actions de sensibilisation et de communication autour de l’intérêt du passeport de
prévention seront lancées auprès des travailleurs.
En savoir plus : lien vers le portail d’information du passeport de prévention
https://passeport-prevention.travail-emploi.gouv.fr/
PROTECTION DES TRAVAILLEURS
CONTRE LES RISQUES DUS AUX PUBLICATION DU
RAYONNEMENTS IONISANTS RAPPORT ANNUEL 2023
Un décret du 31 décembre 2024 tire les conséquences de la loi du SUR L’ACTIVITÉ DES
21 mai 2024 « relative à l'organisation de la gouvernance de la
SERVICES DE
sûreté nucléaire et de la radioprotection pour répondre au défi de
la relance de la filière nucléaire » qui a créé l'Autorité de sûreté PRÉVENTION ET DE
nucléaire et de radioprotection (ASNR) au 1er janvier 2025.
SANTÉ AU TRAVAIL
Cette loi nécessite de modifier tous les articles du Code du travail
qui mentionnent l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire Dans le cadre de la loi du 2 août
(IRSN) pour le remplacer par l'ASNR, à l'exception des activités de 2021 pour renforcer la prévention
dosimétrie à lecture différée reprises par le Commissariat à en santé au travail, une enquête
l'énergie atomique (CEA). annuelle dématérialisée, pilotée
par la Direction générale du travail
Outre la substitution des noms d'IRSN et ASN par celui de l'ASNR, la (DGT) permet de remonter à
loi impose de faire évoluer certains dispositifs pour tenir compte du l’administration les données
statut d'autorité administrative indépendante de la nouvelle entité relatives à l’activité et à la gestion
et de la réunion au sein d'une même entité d'activités de contrôle, financière des services de
d'expertise et de fourniture de prestations faisant l'objet d'une prévention et de santé au travail
rémunération pour services rendus à des tiers. (SPST).
Par ailleurs, plus concrètement, ce décret crée la « zone de C’est sur la base de cette enquête
sécurité radiologique » pour des situations particulières et clarifie que la DGT a publié le bilan des
la démarche de prévention du risque d'exposition activités des SPST sur l’année
professionnelle au radon provenant du sol. 2023.
Enfin, ce décret opère la transformation des certificats de Ce rapport se penche sur le
conseillers en radioprotection (CRP) et des certificats d'aptitude fonctionnement des SPST et leurs
à la manipulation d'appareils de radiologie industrielle activités.
(CAMARI) en certifications professionnelles en cohérence avec le
droit commun de la formation professionnelle. Il parachève
également la reconnaissance du système d'experts et En savoir plus :
d'opérationnels de la radioprotection exigée par la directive https://travail-
2013/59/Euratom du 5 décembre 2013. emploi.gouv.fr/lactivite-des-
services-de-prevention-et-de-
Ce décret est entré en vigueur le 1er janvier 2025, à l'exception sante-au-travail-en-2023
des modalités concernant le certificat d'aptitude à manipuler des
appareils de radiologie industrielle qui entreront en vigueur au 1er
janvier 2026 et celles concernant le certificat de conseiller en
radioprotection et la fonction d'opérationnel en radioprotection
qui entreront en vigueur au 1er janvier 2027.
En savoir plus : décret n° 2024-1238 du 30 décembre 2024 relatif
à la protection des travailleurs contre les risques dus aux
rayonnements ionisants.
https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000050871487
CHAMP D’APPLICATION DE L’OBLIGATION D’ÉTABLIR UN PLAN
PARTICULIER DE SÉCURITÉ ET DE PROTECTION DE LA SANTÉ
Selon un arrêt de la Cour de cassation du 14 janvier 2025, toutes les entreprises qui concourent à la
réalisation d’un chantier soumis au régime juridique de la co-activité du décret de 94 seraient amenées
à établir un Plan Particulier de Sécurité et de Protection de la Santé (PPSPS), et non plus seulement
celles participant directement à la construction.
Rappel des faits
Sur un chantier soumis à coordination SPS, une entreprise de BTP loue une grue à tour et fait réaliser une
vérification trimestrielle par un technicien de maintenance, salarié du loueur de grue.
Lors de la visite, le technicien de maintenance est victime d’un accident et décède. Le grutier, employé par
l’entreprise de BTP, avait remis la grue en fonction, croyant, par erreur, que le mainteneur était
redescendu au sol.
L’entreprise de BTP et le loueur de grue ont été poursuivis pour homicide involontaire et violation
d’une obligation particulière de sécurité et de prudence.
En appel, les responsabilités des deux entreprises ont été retenues :
l’entreprise de BTP avait bien établi un PPSPS dans lequel figurait le recours à la grue mais n’y
figuraient pas les risques associés à la maintenance de la grue ;
de son côté, le loueur de grue n’était pas couvert par un PPSPS.
Par ailleurs, aucun mode opératoire spécifique n’avait été établi pour les interventions de maintenance et
aucun moyen de communication spécifique entre le grutier et le technicien de maintenance n’avait été mis
en place.
La Cour d’appel a considéré que ces manquements avaient empêché le CSPS de procéder à une analyse des
risques et de définir les mesures de prévention nécessaires.
Les entreprises ont contesté leur condamnation, arguant que l’obligation de PPSPS s'appliquait
uniquement aux entreprises de construction, et non pas aux prestataires de services comme les
techniciens de maintenance.
Dans son arrêt du 14 janvier 2025, la Cour de cassation a toutefois confirmé les condamnations.
Motivation de la Cour de cassation :
« Aux termes de l'article L. 4532-9 du code du travail, sur les chantiers soumis à l'obligation d'établir un plan général
de coordination, chaque entreprise, y compris les entreprises sous-traitantes, appelée à intervenir à un moment
quelconque des travaux, établit, avant le début des travaux, un plan particulier de sécurité et de protection de la
santé. Ce plan est communiqué au coordonnateur ».
« […] L'obligation d'établir un plan particulier de sécurité et de protection de la santé concerne l'ensemble des
entreprises dont les travaux concourent à la réalisation de l'opération de construction et n'est pas limitée à
celles participant directement à la construction […] ».
« Les dispositions de l'article L. 4532-9 du code du travail sont générales et visent chaque entreprise appelée à
intervenir à un moment quelconque des travaux ».
« Il n'existe aucune exonération concernant une prestation de services, en l'espèce une opération de maintenance
préventive, laquelle par son caractère obligatoire chaque trimestre concourt à l'opération de bâtiment ou de génie civil
envisagée ».
En savoir plus : Cass. Crim. 14 janvier 2025, n° 23-84.130
MANQUEMENT AUX RÈGLES DE LES ROBOTS
COACTIVITÉ - RECONNAISSANCE DE COLLABORATIFS, POINTS DE
VIGILANCE EN MATIÈRE DE
LA FAUTE INEXCUSABLE DE
PRÉVENTION POUR UNE
L’EMPLOYEUR - CONTOURS DE INTÉGRATION RÉUSSIE
L’OBLIGATION DE SÉCURITÉ DE L’INRS a publié une revue, à destination des
L’EMPLOYEUR intégrateurs et des entreprises souhaitant se
doter d'une application robotique
Une salariée est victime d'un accident pris en charge par la caisse collaborative.
primaire d'assurance maladie au titre de la législation Cette revue décrit la démarche d'intégration à
professionnelle. mettre en œuvre à l'aide de repères
méthodologiques.
N’ayant pu accéder de l'intérieur à la terrasse de l'appartement sur Pour chaque étape, elle présente plus
laquelle elle devait effectuer des travaux d'étanchéité, la victime a spécifiquement les principaux points de
vigilance en matière de prévention.
décidé de sa propre initiative de passer par l'extérieur de
l'immeuble, d'utiliser l'échelle de la co-propriété dont les La démarche décrite permet ainsi de réussir
caractéristiques étaient impropres à un tel usage et a chuté. l'intégration d'une application robotique
collaborative répondant aux besoins de
l'entreprise.
Pour faire droit à la demande de reconnaissance de la faute
inexcusable de l’employeur introduite par la salariée, la Cour de
En savoir plus :
cassation retient « que le plan particulier de sécurité et de https://www.inrs.fr/media.html?
protection de la santé des travailleurs établi pour le bâtiment refINRS=ED%206540
ne prévoyait pas les modalités d'accès aux terrasses et les
mesures de sécurité propres à garantir la sécurité de ces
derniers contre les risques découlant d'une circulation en
hauteur, infraction pour laquelle l'employeur avait été
condamné pénalement, ce dont il résultait qu'il n'avait pas pris
les mesures nécessaires pour préserver la victime du danger de
chute de grande hauteur dont il ne pouvait pas ne pas avoir
conscience ».
Deux principaux enseignements peuvent notamment être tirés de
cet arrêt :
- Un manquement aux règles de coactivité peut avoir des
conséquences sur la reconnaissance de la faute inexcusable de
l’employeur ;
- L’employeur peut être condamné pour ne pas avoir anticipé un
comportement pourtant intrinsèquement dangereux de son
salarié. L’employeur doit protéger le salarié face à l’ensemble des
dangers auxquels il est exposé.
En savoir plus : Cass. Civ.2., 9 janvier 2025, n° 22-24.167
https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000051012372
NOUVELLES MESURES POUR LUTTER CONTRE LES ACCIDENTS DU
TRAVAIL GRAVES ET MORTELS
Le 3 février 2025, Astrid Panosyan-Bouvet, la ministre chargée du Travail et de l'Emploi, a présidé une
réunion du Conseil National d’Orientation des Conditions de Travail (CNOCT), consacrée à la
prévention des accidents du travail graves et mortels.
Lors de cette réunion, Astrid Panosyan-Bouvet a notamment rappelé les importants travaux lancés dans le
cadre du quatrième plan santé au travail. Cette réunion a également été l’occasion d’entendre la
présentation du bilan social de Paris 2024 par les deux co-présidents du Comité de suivi de la Charte
sociale de Paris 2024. Astrid Panosyan-Bouvet a rappelé le succès de cette charte qui a permis de
diviser par 4 la sinistralité au travail observée pendant la préparation des Jeux Olympiques et
Paralympiques de Paris 2024.
La ministre a insisté sur sa volonté de poursuivre et amplifier avec volontarisme la lutte contre les
accidents du travail graves et mortels.
Pour ce faire, elle a, d’une part, annoncé l’installation d’un « groupe de contact » parrainé par les
coprésidents de la Charte sociale et adossé au Comité national de prévention et de santé au travail. Celui-
ci aura pour mission de mobiliser pleinement le dialogue social des branches à fort enjeu de
sinistralité en faveur de l’amélioration de la prévention des accidents du travail graves et mortels.
D’autre part, elle a annoncé la création et la mise en route immédiate d’un volet « mobilisation »,
complémentaire au « Plan accidents du travail graves et mortels » (ATGM), via plusieurs mesures :
Élaboration d’une instruction à destination des donneurs d’ordre public pour les responsabiliser
davantage dans leur politique d’achat. Cette politique devra ainsi valoriser davantage les démarches
de prévention ambitieuses de leurs prestataires.
Élaboration d’une instruction pour renforcer la coopération entre les services judiciaires et
l’inspection du travail en matière de sanctions à la suite d’accidents du travail graves et mortels.
Création d’une « équipe analyse accidents du travail », composée de préventeurs et d’agents de
contrôle et placée auprès de la direction générale du travail.
Amélioration de l’accompagnement des employeurs par les services de prévention et de santé au
travail dans l’établissement du document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP).
Mobilisation accrue du levier de la formation pour renforcer la culture de prévention en entreprise.
En savoir plus : communiqué de presse du 3 février 2025 du Ministère du travail
https://travail-emploi.gouv.fr/conseil-national-dorientation-des-conditions-de-travail-cnoct-du-3-fevrier-2025
