INTRODUCTION
Les marchés publics ont un lien étroit avec le rôle assigné à l'Etat et qui a
évolué avec le temps. Dans la majorité des Etats aujourd'hui, ce dernier est le
principal acteur du développement économique. Cet interventionnisme de
l’Etat se décline en différents programmes qui entrent dans le cadre des
politiques publiques. Dans les sciences sociales modernes, on utilise le terme «
Public management » très expressif de ce rôle managérial très fort de l’Etat.
Les marchés publics constituent en effet, l'instrument de matérialisation de
l'action de l'Etat et de l'administration.
Les marchés publics sont des contrats administratifs. Ils illustrent parfaitement
le recours par l'administration à des tiers notamment le secteur privé afin de
répondre à ses besoins. Ce recours se justifie par l’impossible concordance
entre les moyens dont dispose l’Etat et l’étendue de ses missions.
Au Maroc, le secteur privé reste incapable à lui seul à insuffler une
dynamisation de l'économie nationale. L’Etat se trouve dans l’obligation
d’intervenir aussi souvent que possible afin de stimuler la dynamique
économique.
Dès les premières années de l’indépendance, l’Etat marocain était dans
l’obligation d’élaborer un cadre juridique pérenne organisant les marchés qu’il
devrait conclure afin de répondre à ses besoins.
Décret de 1965
Ainsi, en 1965, est intervenu le premier décret qui va dans ce sens. Ce premier
texte avait pour objectif de tenir compte du manque de moyens financiers et
humains de l’Etat. Le critère principal retenu était le coût financier.
Décret de 1976
C’était dans ce cadre, qu’était intervenu une réforme par le biais du décret du
14 octobre 1976. D’autres critères ont ainsi été introduits. Le prix proposé est
devenu un élément secondaire. Le critère principal était désormais la qualité de
la prestation.
Décret de 1998
La troisième réforme était celle induite par le décret de 1998. Elle coïncidait
avec le gouvernement d'alternance présidé par Abderrahmane youssoufi.
L’objectif de cette réforme était d'accompagner le climat d'ouverture politique
et de moralisation de la vie publique.
Décret de 2007
La quatrième réforme est intervenue en 2007 durant la dernière année du
mandat du gouvernement Jettou.
Décret de 2013
Le décret actuellement en vigueur se distingue par certains principes en lien
notamment avec les exigences de la constitution de 2011. Dans le même
sillage, la nouveauté a résidé dans l’approche adoptée.
Décret de 2023
les élections de 2021 ont donné lieu à une nouvelle majorité. Ce mandat
gouvernemental est basé notamment sur la nécessité de mettre en oeuvre les
recommandations du nouveau modèle de développement.
Section 2 les acteurs des MP
Selon l'article 13 du décret relatif aux marchés publics, « les marchés de l'Etat
sont des contrats écrits ». Ainsi, un marché public est un contrat écrit qui
consacre l'accord de deux volontés entre deux personnes dotées de la
personnalité juridique : titulaire de droits subjectifs et jouissant de la capacité
d'exercer des droits et d'être assujetti à des obligations.
Néanmoins, ce contrat est à caractère administratif. La personne publique
signataire dispose d'un certain nombre de prérogatives entre autres le pouvoir
de modification unilatérale, le pouvoir de résiliation unilatérale. Il s'agit des
clauses exorbitantes qui caractérisent les contrats administratifs.
A rappeler que par personne publique concernée par ce décret on entend :
1 L’Etat : qui signifie les administrations centrales et les services extérieurs dans
le cadre des circonscriptions administratives déconcentrées
2 Les collectivités territoriales : c’est-à-dire les régions préfectures et provinces
et les communes dont les présidents sont considérés comme des
ordonnateurs.
3 Les établissements publics à caractère administratif dont la liste été fixée par
un arrêté de 2013. Il s'agit en l'occurrence des académies d'enseignement, des
chambres de commerce, des écoles d'enseignement supérieur…. Les
établissements publics à caractère industriel et commercial sont exclus de ce
décret sur les marchés publics.
La personne publique est représentée par le maître d'ouvrage, c'est à dire
l'autorité qui, au nom de l'un des organismes publics visés plus haut, passe le
marché avec l'entrepreneur le fournisseur le prestataire de service. Il
appartient de ce fait au maître d'ouvrage de formaliser le projet identifié et de
définir les besoins.
L’autorité compétente est l'ordonnateur ou la personne déléguée par lui pour
approuver le marché.
Pour les collectivités territoriales, l'autorité compétente est l'assemblée
délibérante qui peut se faire représenter par exemple par les sociétés de
développement local (SDL) comme Casa Transport…
Le marché public concerne les personnes privées suivantes :
• Concurrents : Toute personne physique ou morale qui propose une offre
en vue de la conclusion d'un marché
• Attributaire : il s'agit du concurrent dont l'offre a été retenue avant la
notification de l'approbation du marché
• Titulaire : l'attributaire auquel l'approbation du marché a été notifié
En outre, les partenaires sont des personnes impliquées dans l'exécution du
marché que ce soit au niveau de la réalisation (Cotraitant, sous-traitant) ou du
paiement (comptable)
La sous-traitance est un contrat privé qui autorise un entrepreneur à faire
exécuter une partie de son marché public par des tiers. Cette convention de
droit privé intervient entre l'entrepreneur et son sous-traitant et ne concerne
nullement le maître d'ouvrage
Le titulaire du marché peut recourir à d'autres prestataires notamment les PME
pour exécuter certaines prestations à condition de l'acceptation du maître
d'ouvrage.
Section 2 L’approbation du Marché public
La conclusion d'un marché public suit une procédure particulière prévue par la
réglementation en vigueur.
L’étape préliminaire débute par la détermination des besoins de
l'administration par les services compétents. En effet, afin de réussir ses
commandes en termes de qualité et de prix, le maître d'ouvrage doit recenser
les besoins à satisfaire, les spécifications techniques et la consistance des
prestations et les définir par référence à des normes marocaines où
internationales sans mention de marque. Le maître d'ouvrage a l'obligation
également d'établir une estimation des coûts des prestations à réaliser.
La définition précise des besoins à satisfaire et l’estimation des prix est une
condition de la bonne gouvernance destinée à garantir la réalisation de l’intérêt
général de la meilleure des façons : meilleure prestation possible au moindre
coût possible.
Les études préalables contribuent à mieux définir et cerner les besoins de
l'administration.
L'approbation du marché public est une compétence exclusive de
l'administration. Aux termes de l'article 152 du décret, les marchés publics ne
sont valables et définitifs qu’après leur approbation par l'autorité compétente
L'approbation des marchés doit intervenir avant tout commencement
d'exécution de prestations. L’approbation doit être notifiée à l'attributaire dans
un délai maximum de 75 jours à compter de la date d'ouverture des plis ou de
la date de la signature du marché par l'attributaire lorsqu'il est négocié.
Si la notification de l'approbation n'est pas intervenue dans ce délai,
l'attributaire est libéré de son engagement vis-à-vis du maître d'ouvrage. Dans
ce cas même, on lui donne la mainlevée de son cautionnement provisoire.
Chapitre 5 le contrôle des marchés publics
Comme on l’a déjà vu à plusieurs reprises, les Marchés publics revêtent une
importance capitale dans la vie et le fonctionnement de l’Etat dans son sens
général (Etat central, collectivités locales, Etablissements publics). Il s’agit d’un
instrument principal de réalisation de l’intérêt général. Les Marchés publics
sont également un mode de gestion des deniers publics العامملعا ا.
C’est dans ce cadre qu’il existe un grand souci de protection de l’intégrité de
ces marchés publics. D’où le principe de l’intégrité des Marchés publics. Ce
principe signifie : une utilisation des fonds, des ressources, des actifs et des
pouvoirs conformément à leur destination finale en prenant en compte
l’intérêt général.
C’est dans cette optique que la loi marocaine, inspirée entre autres par
différents instruments internationaux1 a soumis le Marchés publics à
différentes formes de contrôle et d’audit.
Ce contrôle vise à veiller au respect des grands principes de gestion des
Marchés publics tels qu’on les a étudiés au début du cours à savoir : la
transparence, l’égalité, l’efficacité et le respect de l’environnement, et
également le principe de l’intégrité visant à prévenir les pratiques de
corruption et de népotisme.
Le contrôle des marchés publics se fait de plusieurs manières. Il existe en effet
plusieurs classifications de ce contrôle. Nous adopterons pour des raisons
pratiques le critère du type de contrôle. En effet, il existe un contrôle
institutionnel, un contrôle budgétaire, un contrôle financier, l’audit et un
contrôle juridictionnel
A rappeler que le contrôle pourrait être réparti selon le temps : il existe un
contrôle en amont, un contrôle en cours d’exécution et un contrôle à postériori
:
Le contrôle à priori ou en amont, intervient comme son nom
l’indique intervient avant la conclusion du marché. Il se fait à titre préventif.
C’est notamment du Contrôle des engagements et des dépenses (CED) qui est
un service du ministère des finances détaché au niveau de chaque personne
publique (ministère, EP….) dont le rôle principal est de contrôler la régularité
de la dépense avant son exécution.
Le contrôle en cours d’exécution : c’est un contrôle interne exercé
par l’administration
Le contrôle à postériori : il est conçu après l’exécution définitive de
l’acte de gestion,. Son objectif est d’identifier les irrégularités commises et
d’infliger des sanctions. Il est exercé notamment par les juridictions financières
(Cours des comptes)
Section I le contrôle institutionnel
Il prend différentes formes selon la nature de l’organisme de contrôle et le
contenu même de ce contrôle.
I Contrôle administratif
Il s’agit d’un contrôle exercé par l’administration elle-même. Il prend la forme
souvent d’une supervision hiérarchique. Ainsi, selon l’article 128 du décret de
1967 qui régit la comptabilité publique dispose : « les ministres exercent
soit directement soit par l’intermédiaire des corps du contrôle,
le contrôle des opérations faites par les sous-ordonnateurs qui
leur sont attachés ».
II le contrôle politique
Les Marchés publics ont une dimension politique qu’on pourrait présenter
autour des points suivants :
•
Le contrôle de l’exécution des politiques publiques qui émanent de la nation. Il
est nécessaire de veiller à ce que les marchés traduisent la volonté de la nation
et les grandes orientations stratégiques notamment en matière de
développement.
•
Le renforcement des règles de l’Etat de droit permettant de limiter les
prérogatives de l’Administration et de veiller à l’existence d’un contre-pouvoir
efficace.
Ce contrôle est essentiellement exercé par le pouvoir législatif à savoir les deux
chambres du parlement et plus particulièrement entre dans le cadre du
contrôle parlementaire sur les finances publiques.
La constitution a prévu plusieurs mécanismes permettant un meilleur exercice
de contrôle :
1
Les commissions parlementaires qui peuvent être:
Permanentes (notamment la commission des finances qui a la main dans
le contrôle du budget de l’Etat). La grande nouveauté ces derniers années est la
création d’une commission de contrôle des finances publiques au niveau de la
Chambre des Représentants2 dont le rôle est encore plus lié étroitement au
contrôle des Marchés publics.
Commissions d’enquête
Selon l’article 67 de la constitution : « peuvent être créées à l'initiative
du Roi ou à la demande du tiers des membres de la Chambre
des Représentants, ou du tiers des membres de la Chambre des
Conseillers, au sein de chacune des deux Chambres, des
commissions d'enquête formées pour recueillir les éléments
d'information sur des faits déterminés ou sur la gestion des
services, entreprises et établissements publics, et soumettre
leurs conclusions à la Chambre concernée"".
2 les questions
Le contrôle se matérialise également par le mécanisme des questions orales et
écrites permettant d’interroger les ministres et chefs d’institutions et
établissements publics sur leur gestion et notamment sur l’affectation des
crédits alloués. Les Marchés publics en tant qu’instrument de dépenses entrent
bien entendu dans ce cadre.
3 La loi de règlement et le contrôle à postériori
Dans le cadre du principe du parallélisme des formes et des compétences, le
parlement s’occupe de l’évaluation de l’exécution des autorisations données
par le parlement. La loi de règlement constate les résultats financiers de
chaque année et approuve les écarts entre les prévisions et les résultats
concrets des lois de finances.
III le contrôle financier
Ce contrôle est assuré notamment par l’Inspection générale des finances
relevant du ministère de l’Economie et des finances.
Selon le Dahir du 14 avril 1960, l’IGF est chargée de :
•
Effectuer les vérifications des services de caisse et de comptabilité, deniers et
matière des comptables publics et de façon générale des agents de l’Etat et des
collectivités territoriales
•
Contrôler la gestion de ces comptables et s’assurer de la régularité des
opérations dans les comptes des ordonnateurs de recette et de dépenses
publiques.
Les opérations d’inspection se font soit sur demande (du ministère des finances
ou tout autre ministère) soit dans le cadre d’un programme annuel arrêté par
le ministère des finances.
Le contrôle peut être sur place (inspection sur le terrain) ou sur pièce (contrôle
des documents)
L’IGF a un rôle très important dans le contrôle des Marchés publics, à ses
différentes étapes : contrôle d’opportunité, de régularité budgétaire et
comptable.
Concernant les Marchés publics, plusieurs irrégularités peuvent être relevées
par l’IGF :
•
Non-respect des lois et règlements régissant la passation des Marchés publics
(principalement le décret de 2023 : (recours non fondés à la procédure
négociée, éviction injustifiée de certains soumissionnaires …)
•
Acquisition de matériels à des prix manifestement exagérés comparativement à
ceux pratiqués habituellement
•
Manquement au principe d’appel à la concurrence
•
Non-respect des clauses contractuelles
•
Absence de pièces justificatives à l’appui des dépenses engagées…
IV L’audit
Les marchés sont soumis, aux termes mêmes du décret de 2023, à des
contrôles et audits à l’initiative du ministre concerné.
Selo l’article 159, les marchés sont soumis à des contrôles et audits initiés par:
– le ministre concerné pour les marchés passés par les services relevant de son
autorité ou les établissements publics dont il assure la tutelle ;
– le ministre chargé de l’intérieur pour les marchés passés par les collectivités
territoriales ;
– le président de l’organe délibérant pour les marchés passés par les autres
personnes morales de droit public
Ces audits portent notamment sur :
•
La régularité des procédures de passation de préparation et d’exécution des
marchés
•
Appréciation de la réalité et de la matérialité des travaux exécutés, des
fournitures livrées ou des services réalisés.
•
Respect de l’obligation d’établissement des différents documents afférents au
marché
•
Respect de l’obligation de publication des différents documents
•
Appréciation des résultats obtenus au regard des moyens mis en oeuvre
•
Réalisation des objectifs assignés à la prestation,
•
Opportunité et utilité des projets et prestations réalisés
•
l’appréciation du prix du marché au regard des prix pratiqués et l’évaluation du
coût des prestations objet de ce marché
Les audits sont obligatoires pour les marchés dont le montant excède trois
millions de DH et pour les marchés négociés excédant un million de DH.
Les rapports d’audit effectués doivent être publiés par le ministre ou le chef de
l’EP qui en a fait la demande dans le portail des marchés publics.
A la différence des contrôles administratifs et institutionnel, l’audit se
concentre sur la réalisation des objectifs et l’efficacité des instruments utilisés.
Il est effectué non pas seulement par des institutions publiques, mais
également par des professionnels (cabinets d’audit, bureaux d’études …). Il
permet de déceler certaines pratiques qui pourraient échapper au contrôle
administratif en raison de leur caractère technique pointu.
C’est une activité qui applique en toute indépendance des procédures
cohérentes et des normes d’examen en vue d’évaluer l’adéquation des actions
menées à certaines normes établies.
V le contrôle juridictionnel
Ce contrôle est exercé notamment la Cour des Comptes dont la mission
principale est le maintien de l’ordre public financier.
La Cour des comptes a une double attribution :
•
Vérification des jugements des comptes à travers l’apurement des comptes
dans le cadre d’un contrôle juridictionnel. Il s’exerce notamment sur les
comptables publics
•
Discipline budgétaire et financière : incarnant la fonction exclusivement
juridictionnel et répressive de la Cour à l’encontre des agents qui auraient
commis des infractions à la réglementation financière et comptable
Au-delà de ces deux dimensions, la Cour des comptes a pour mission de
s’assurer de la régularité et la conformité des marchés publics par rapport à la
réglementation en vigueur. Elle veille également à l’efficacité de l’économie de
marché et sa performance.
A l’issue de ce contrôle, deux mécanismes de suivi sont prévus :
1.
Soit la formulation de de recommandations de nature à améliorer la gestion
2.
Soit la saisine en matière de discipline budgétaire lorsqu’il s’agit d’une
responsabilité de gestion, soit la possibilité d’engager des poursuites pénales
ou administratives
Dans ses rapports annuels, la Cour des comptes relève habituellement de
nombreuses observations concernant notamment l’imprécision dans la
détermination des besoins et dans la rédaction des Termes de Référence, le
recours abusif aux marchés négociés, la non-maîtrise des délais d’exécution, la
tolérance des malfaçons ….
LA PROBLÉMATIQUE DES RETARDS DE PAIEMENTET DES DÉLAIS DE PAIEMENT
TRÈS PÉNALISANTEPOUR LES ENTREPRISES.
Le Maroc a adopté un nouveau décret sur les marchés publics, entré en
vigueur le 1er septembre 2023. Ce décret vise à moderniser le système de la
commande publique, en introduisant plus de transparence, d’équité et de
préférence nationale.
Le retard de paiement dans les marchés publics au
Maroc constitue une problématique récurrente qui
impacte la performance des entreprises, notamment les
PME, souvent dépendantes des marchés publics. Ce
phénomène, lié à des dysfonctionnements administratifs
et financiers, engendre des tensions de trésorerie et
freine l’exécution des projets. L’enjeu est donc
d’instaurer des mécanismes efficaces pour garantir la
fluidité des paiements et renforcer la confiance des
opérateurs économiques.
La question du cadrage des délais de paiement ne date
pas d’aujourd’hui. La réglementation des délais de
paiement etdes intérêts moratoires dans les marchés
publics au Maroc a évolué depuis le Dahir de 1949.
Après son abrogation en2003, puis en 2016 avec le
décret n°2-16-344, un cadre plus strict est entré en
vigueur le 1er janvier 2017. Ce texte fixe les délais,
conditions, et sanctions en cas de retard de paiement
pour les commandes publiques, à l'exclusion de celles
liées à la Défense nationale.
Selon L’article 1 du Décret n° 2-03-703 du 18 ramadan 1424 relatif aux délais
de paiement et aux intérêts moratoires en matière de marchés de l'Etat:
Toute dépense résultant de l'exécution d'un marché passé pour le compte de
l'Etat dans les conditions et les formes prévues par la réglementation
applicable aux marchés de l'Etat, doit être ordonnancée et payée dans un
délai n'excédant pas quatre vingt dix (90) jours.
L'ordonnancement de cette dépense a lieu dans un délai maximum de
soixante quinze (75) jours, à compter de la date de constatation du service
fait dans les conditions fixées par le règlement général de comptabilité
publique et les cahiers de charges des marchés publics et après présentation à
l'ordonnateur de toutes les pièces justificatives dont la production est mise à
la charge du titulaire du marché.
Le visa et le règlement de ladite dépense par le comptable
doivent intervenir dans un délai de quinze (15) jours,
Ordonnancement des dépenses
L’ordonnancement est une étape de la procédure de
dépense publique où l’autorité compétente
(ordonnateur) donne l’ordre au comptable public de
payer la somme due à l’entreprise après vérification que
les travaux ou services ont été réalisés conformément
aux clauses du contrat. Cela implique : La réception des
factures
La vérification de la conformité de la prestation
exécutée L’émission de l’ordre de paiement
Non certification du « service fait
» par les services liquidateurs :Selon le décret n° 2-16-
344, du 22 juillet 2016fixant les délais de paiement et
les intérêts moratoires: l’opération de constatation du
service fait d’une commande publique doit se faire dans
un délai de 30 jours, à compter de la date du dépôt par
le titulaire de ladite commande publique, des
attachements, de la facture ou de la note d’honoraires.
Étalement du délai de séjour des dossiers de paiement chez les services
d’ordonnancement :le délai d’ordonnancement est au maximum de 45jours, à
compter de la constatation du service fait. La circulaire du Premier ministre du
sur la déconcentration des crédits et programmation des engagements et des
émissions des ordonnateurs du 26 juin 2000. présentation des pièces
justificatives par le titulaire de la commande publique. Ensuite, le visa et le
règlement desdites dépenses par le comptable public, ne doivent pas
dépasser un délai de 15jours, à compter de la date de réception de
l’ordonnance ou du mandat
Non certification du « service fait
» par les services liquidateurs :Le retard dans le
paiement peut être imputé à des divergence de points
de vue entre l’ordonnateur et le comptable assignataire
quant à la validité de la dépense, objet d’ordre de
paiement émis.
Indisponibilité de crédits et/ou de fonds Parmi les problèmes qui peuvent
causer un retard dans l’émission des ordres de paiement est indisponibilité de
crédits et/ou de fonds pour l’ordonnateur, bien que le service fait est bien
certifié et toute la procédure d’exécution du MP est respectée (engagement,
approbation, etc.).
- Les sanctions des retards de paiement pour les entreprises au Maroc
Retard dans le règlement des sommes dues Le retard dans le règlement des
sommes dues ouvre droit travaux et a la résiliation du marche dans les
conditions ci-après.
A- Droit aux intérêts moratoires
En cas de retard dans le règlement des sommes dues à
l'entrepreneur, des intérêts moratoires lui sont payes confortement
à la règlementation en vigueur
B - Droit a l'ajournement des travaux
Lorsque le retard dans le réglèrent des sommes dues au titre du
marche dépasse quatre (4) mois a compter de la date de signature
des attachements par l'agent charge du suivi de l'exécution du
marche et/ou par le maitre d'œuvre le cas échéant , l'entrepreneur
a droit, en plus des intérêts moratoires, a l'ajournement s'il le
demande. Dans ce cas, le maitre d'ouvrage précède a la
notification a l'entrepreneur de l'ordre de service prescrivant
l'ajournement de l'execution des travaux sollicite, Le paiement de
l'acompte en retard donne lieu a l'établissement d'un ordre de
service de reprise de l'exécution des travaux.
C - Droit a la resiliation du marche
Lorsque le retard dans le réglèrent des sommes dues au titre 'du
marche dépasse huit (08) mois, l'entrepreneur peut, en plus du
droit aux intérêts moratoires, demander au maitre d'ouvrage de
procéder a la résiliation du marche. Dans ce cas, l'autorité
compétente précède immédiatement a la résiliation du marche.
sans accorder a l'entrepreneur aucune autre indemnité.
Introduction
Le législateur marocain a prévu une série de règle et de procédure qui accorde au contractant
une protection dans le domaine des contrats de marchés publics afin de garantir la
transparence notamment l'obligation de respecter les règles du libre commerce et de la
concurrence. Un ensemble d’outils est mis à la disposition des soumissionnaires et des
titulaires de marchés publics par la réglementation pour gérer « à l’amiable » les litiges et
éviter par ce moyen des contentieux lourds, longs et coûteux. Clauses contractuelles pour
gérer les litiges à l’arbitrage, commission des marchés ou transaction par le biais de la
médiation, les outils ne manquent pas.
La loi 95-17 relative à l'arbitrage et la médiation conventionnelle a été publiée au BO 7099 du
13 juin 2022 et est entrée en vigueur le 14 juin 2022. Cette loi s'inscrit dans le cadre d'une
politique d'ouverture du Maroc dans ses relations économiques, au regard notamment des
conventions de libre-échange mises en place, et de la promotion du Maroc comme place
internationale de l'arbitrage et de la médiation.
L'importance de cette réforme réside du fait notamment des avantages multiples des MARD
(MODES ALTERNATIFS DE RESOLUTION DES DIFFÉRENDS). Aujourd'hui ces
derniers répondent mieux que la justice étatique aux contraintes actuelles du monde des
affaires.
L'arbitrage et la médiation sont rapides, flexibles, confidentiels et à moindre coût. Ce sont des
méthodes de résolution des conflits mises en place de manière consensuelle par les parties qui
décident de recourir à la médiation ou à l'arbitrage, et aux principaux organes de ces
méthodes, tels que le médiateur ou l'arbitre désigné.
Le choix de l'arbitre ou du médiateur n'est pas anodin car il est très apprécié dans les
différends de nature technique, notamment en matière de nouvelles technologies,
d'environnement ou tout différend nécessitant une connaissance ou une expertise approfondie.
Partie 1 : Procédures du règlement amiable
Chapitre 1 : L’arbitrage
L’arbitrage est un mode consensuel de règlement des différends nés ou susceptibles de naître
concernant un rapport de droit déterminé à caractère commercial qui consiste à remettre d’un
commun accord le règlement de ce différend à une autorité non juridictionnelle ou à une
instance non investie par l’État, sans recourir à des juridictions compétentes, afin de trouver
une solution acceptable par les deux parties.
La notion de volonté et de liberté des parties est au cœur du dispositif contractuel et arbitral :
la liberté de préférer à la juridiction étatique une forme privée de règlement des conflits, de
choisir leur arbitre juge, de fixer la procédure qui leur paraît la plus appropriée et son
déroulement et de déterminer les normes applicables au litige. C’est l’équilibre entre les
domaines privés, qui lui confère sa souplesse, et le domaine public, qui lui garantit son
efficacité.
L’arbitrage peut être interne ou international. L’arbitrage international s’oppose donc à
l’arbitrage interne, à caractère strictement national, qui est gouverné par l’ordonnancement
juridique du pays.
On distingue aussi l’arbitrage organisé sur la base du mandat ad hoc, qui se déroule en dehors
de toute institution permanente d’arbitrage et qui est entièrement organisé par les parties en
litige, de l’arbitrage institutionnel, dans lequel les parties font appel à une institution
d’arbitrage. En tout état de cause, l’arbitre est amené à prendre une décision et non à exprimer
une opinion.
Historiquement, le Maroc a connu l’arbitrage depuis 1693, date de la signature du traité de
Saint-Germain entre l’État marocain et l’État français pour recourir à l’arbitrage afin de régler
les différends qui étaient susceptibles de naître.
Actuellement, le droit marocain de l’arbitrage est régi par la loi n°08-05 du 30 septembre
2007 abrogeant et remplaçant le chapitre VII du titre V du code de procédure civile,
notamment les articles 306 à 327-36. En ce qui concerne l’arbitrage international, la loi 05-08
relative à la création des tribunaux du commerce a déjà consacré un cadre juridique pour ce
genre d’arbitrage.
Par ailleurs, le code de procédure civile fixe les règles procédurales propres à l’arbitrage, que
ce soit l’arbitrage interne ou international.
Section 1 : les types d’arbitrage
§1- L’arbitrage interne
Les articles 306 à 327-38 du code de la procédure civile (C.P.C.) ont fixé les règles relatives
à l’organisation des règlements des litiges par le recours à l’arbitrage interne.
La lecture de l’article 310 § 3 du C.P.C. permet de constater que le recours à l’arbitrage dans
les affaires qui portent sur les litiges concernant les actes ou les biens soumis à un régime de
droit public rentre dans le champ d’application des dispositions relatives à l’arbitrage : « Les
litiges relatifs aux contrats conclus par l’État, les collectivités locales ou les établissements
publics » peuvent faire l’objet d’une convention d’arbitrage.
Cela signifie que le maître d’ouvrage peut conclure un compromis ou insérer une clause
d’arbitrage dans un marché public et que le contrat peut faire l’objet d’un compromis formel.
§2- L’arbitrage international
Depuis deux décennies, se pose le problème pour l’entrepreneur étranger qui soumissionne
dans d’autres pays : il doit rechercher la sécurité de son investissement, une crainte qui
découle du caractère étatique de son contractant, et par ailleurs rechercher des formules
juridiques permettant ainsi de minimiser les risques.
C’est pourquoi on trouve dans les contrats de marchés publics dont le financement est assuré
par des bailleurs de fonds étrangers ou par des entreprises dont les sièges sont à l’étranger, des
clauses qui ont pour but de neutraliser le pouvoir normatif de l’État contractant à travers le
recours à l’arbitrage international ou à la médiation.
L’arbitrage international n’est rattaché à aucun droit étatique. Cela signifie qu’il n’existe pas
de for pour un arbitre international. A partir de ce constat, les praticiens peuvent affirmer que
l’arbitrage international est autonome par rapport à l’ordonnancement juridique du pays.
Le Maroc est signataire des conventions de New York du 10 juin 1958 et de Genève du 21
avril 1961 relatives à la reconnaissance des sentences arbitrales internationales ; il est aussi
membre de la Chambre de Commerce franco-arabe. Il reconnaît donc officiellement les
sentences arbitrales rendues à l’étranger.
Les réformes amorcées par la loi 05-08 promulguée par le dahir du 30/11/2007 s’inscrivent
dans cette logique qui vise à sécuriser les investisseurs étrangers.
§2- L’arbitrage ad hoc
Parallèlement à l’arbitrage institutionnel, l’article 319 du C.P.C. prévoit le recours à
l’arbitrage ad hoc, un mode de règlement moins structuré et moins hiérarchisé, dans la mesure
où le tribunal arbitral se charge seulement de fixer la procédure à suivre.
Ad hoc est une locution latine qui signifie qui va vers ce vers quoi il doit aller, c’est-à-dire
formé dans un but précis ou qui a été institué spécialement pour répondre à un besoin précis.
Il s’agit en fait d’un mandat.
Le mandat ad hoc permet aux parties de négocier sous l’égide d’un mandataire ad hoc,
désigné par les parties ou à défaut par le tribunal arbitral afin de permettre une négociation
confidentielle et à l’amiable.
La durée diffère selon la procédure envisagée par le tribunal arbitral mais elle ne peut pas
dépasser le délai prévu pour la médiation.
Cependant, l’article 319 C.P.C. prévoit que la procédure de l’arbitrage ad hoc peut être aussi
utilisée pour caractériser une procédure d’arbitrage dont les parties n’ont pas confié
l’organisation à une institution spécialisée, le Tribunal arbitral en l’occurrence, mais qui l’ont
organisée elles-mêmes, en suivant les conseils de leurs avocats et conseillers.
Section2 Les conséquences du recours à l’arbitrage
A l’occasion d’un différend, le législateur a donné la priorité aux tentatives nécessaires de
conciliation amiables. Avant de saisir la juridiction compétente pour statuer sur la question
objet du conflit, le recours à un tribunal arbitral est exigé, même en cas de résiliation du
marché. La sentence arbitrale règle le litige d’une manière définitive et acquiert l’autorité de
la chose jugée.
Cette procédure s’appuie sur trois éléments : la primauté de l’arbitrage, l’autonomie de la
clause d’arbitrage et enfin l’exequatur.
La primauté de l’arbitrage : les articles 314 et 327 imposent aux parties, mais aussi aux
tribunaux de prononcer l’irrecevabilité du litige et de soumettre les parties à l’arbitrage,
jusqu’à épuisement de cette procédure.
Cela signifie qu’il y a une primauté de l’obligation de déférer au tribunal arbitral les litiges
visés par la convention arbitrale. L’article 327 § 1 dispose que « Lorsqu’un litige soumis à un
tribunal arbitral en vertu d’une convention d’arbitrage est porté devant une juridiction, celle-ci
doit prononcer l’irrecevabilité jusqu’à épuisement de la procédure d’arbitrage ou annulation
de la convention d’arbitrage. »
La compétence du tribunal arbitral pour régler les différends visés par la convention
d’arbitrage résulte du principe de « la compétence de la compétence. » A partir de là, il est
impossible pour une juridiction de statuer dans un premier temps sur un litige, ou de soulever
d’office l’incompétence du tribunal arbitral en la présence d’une convention d’arbitrage.
Cependant le législateur marocain a prévu une exception qui permet aux parties de saisir
d’urgence le juge administratif, qui ne juge pas du principal (ex : ne prononce pas l’annulation
d’une décision), mais permet d’obtenir des mesures provisoires et rapides destinées à
sauvegarder les droits et libertés des cocontractants, et ce, soit avant d’engager la procédure
d’arbitrage, soit au cours de celle-ci. C’est ce qui ressort des termes de l’article 327-1 du
C.P.C. : « La convention d’arbitrage ne fait pas obstacle aux parties, soit avant d’engager la
procédure d’arbitrage, soit au cours de celle-ci, d’avoir recours au juge des référés en vue de
prendre toute mesure provisoire ou conservatoire conformément aux dispositions prévues par
la présente loi. Les parties peuvent se rétracter au sujet desdites mesures de la même manière.
»
L’autonomie de la clause d’arbitrage Ce principe doit être apprécié d’une manière
indépendante du contrat du marché auquel il se rapporte, mais aussi par rapport à la
législation nationale régissant le contrat, car la clause sera acceptée quelle que soit la solution
donnée en droit interne.
L’exequatur : En principe, une sentence arbitrale définitive n’est passible d’aucun recours
dans la mesure où le législateur lui a reconnu l’autorité de la chose jugée, et ce en vertu de
l’article 327-26 qui dispose que « Dès qu’elle est rendue, la sentence arbitrale a la force de la
chose jugée.» L’article 327-34 confirme l’aspect exécutoire de la sentence : « La sentence
arbitrale n’est susceptible d’aucun recours. »
Cependant, quand il s’agit d’un différend auquel est partie une personne morale de droit
public, la force de la chose jugée ne lui est reconnue que lorsqu’elle homologuée ou reconnue
exécutoire par un acte qui émane d’une autorité publique.
En effet, aux termes de l’article 327-26§2, « La sentence arbitrale n’acquiert la force de la
chose jugée qu’en vertu d’une ordonnance d’exequatur. »
Dans le cas d’un refus, l’article 327-33 exige la motivation de l’ordonnance, ce qui ouvre la
voie à l’appel dans les formes ordinaires prévues à cet effet.
Section 3 Le régime d'arbitrage dans les marchés publics.
L'importance de l'arbitrage dans le domaine des marchés publics est évidente dans la mesure
où il constitue d'une part un moyen de résolution des litiges qui peuvent survenir lors de la
passation et de la conclusion des contrats publics, qu'il s'agisse des litiges causés par
l'administration ou la partie contractante de manière amiable et d'autre part un mécanisme de
règlement des déséquilibres administratifs de manière efficace et rapide, en évitant les
lourdeurs et les délais des procédures judiciaires..
En plus de ce rôle, l'arbitrage dans les marchés publics joue un rôle crucial permettant aux
contractants de solliciter l'avis des arbitres sur certaines questions qu'elles peuvent rencontrer
lors de la conclusion du contrat.
D'une manière générale, le législateur marocain a accordé cette tâche à la Commission des
Marchés.
Toutefois, le recours a la commission nationale des marchés publics n'a lieu qu'après avoir
épuise toutes les formalités légales limitées. Le concurrent doit adresser au préalable sa
réclamation au maître d'ouvrage dans un délai fixé par le décret entre la date de publication de
l'avis d'appel d'offres et sept jours après la publication du résultat de l'appel d'offres. Le maître
d'ouvrage doit en informer le concurrent concerné de la réponse qu'il a apportée à la
réclamation dans un délai de sept jours à compter de la date de réception de ladite
réclamation. Dans le cas où le concurrent n'est pas convaincu par la réponse du porteur de
projet, il peut s'adresser au ministre concerné. Dans ce cas, le Ministre peut :
• Soit ordonner la correction du vice constaté ;
• Soit il décide d'abolir le processus. Toutefois, avant de prendre cette décision, il peut
suspendre le processus d'appel d'offres pour une durée de 20 jours au maximum, à condition
que la réclamation soit fondée et comporte des arguments valables démontrant que le
concurrent subira un préjudice si le processus n'est pas arrêté, et que la suspension n'entraîne
pas de préjudice disproportionné au maître d'ouvrage (propriétaire du projet) ou à d'autres
concurrents.
Après avoir épuisé ces procédures, on peut alors recourir à la Commission des Marchés. Ce
qui est remarquable à cet égard est la longueur et la complexité de la procédure liée aux
solutions amiables, ce qui contredit le principe de célérité d'exécution sur lequel repose la
clause compromissoire de l'accord.
Chapitre 2 : La médiation
La résolution amiable des conflits dans les marchés publics est une approche privilégiée tant
au Maroc qu'en France, car elle permet de régler les différends sans recourir aux tribunaux, ce
qui est souvent coûteux et chronophage. Cette section explore les méthodes de résolution
amiable utilisées dans les deux pays, en mettant en lumière les similitudes et les différences
dans leurs approches.
Section 1 Cadre réglementaire de la médiation
Tout d’abord, il convient de définir le terme médiation, la médiation est un processus par
lequel un tiers neutre, appelé médiateur, aide les parties à trouver une solution mutuellement
acceptable à leur différend.
La médiation est prévue par l’article 327-55 du C.P.C. : « Afin de prévenir ou de régler un
différend, les parties peuvent convenir de la désignation d’un médiateur chargé de faciliter la
conclusion d’une transaction mettant fin au différend. »
Le médiateur suit l’évolution du différend et propose lui-même aux parties un projet de
solution du litige qui constitue une plateforme de discussion. il n'a pas le pouvoir de décider
pour les parties, mais facilite la communication et les négociations 1 Gaultier, J. (2019). La
médiation : principes et pratique. Paris : Éditions Larcier
Actuellement la médiation est devenue un mécanisme essentiel dans la gestion des conflits
relatifs aux marchés publics, particulièrement avec l'adoption de la loi n° 86-12 relative aux
partenariats public-privé (PPP).
Cette loi vise à moderniser le cadre juridique des marchés publics au Maroc, en intégrant des
méthodes alternatives de résolution des litiges comme la médiation pour améliorer l'efficacité
et la rapidité des règlements de conflits. Dans le même ordre d'idées, la loi 95-17, publiée au
Bulletin officiel n° 7099 du 13 juin 2022, vise à répondre aux besoins des investisseurs
fatigués des procédures administratives et judiciaires complexes, tout en s'adaptant aux
nouvelles tendances du commerce international.
Cette loi crée un code des modes alternatifs de règlement des conflits et s'inscrit dans la
politique d'ouverture du Maroc dans ses relations économiques, notamment à travers les
conventions de libre-échange et la promotion du Maroc comme centre international
d'arbitrage et de médiation.
La loi n° 86-12, adoptée en 2014, a introduit des dispositions spécifiques pour la médiation
dans les marchés publics. Elle permet aux parties contractantes de recourir à la médiation
comme méthode de résolution des différends, avant d'engager des procédures judiciaires.
Cette approche s'inscrit dans une logique de promotion de la résolution amiable des conflits,
conformément aux meilleures pratiques internationales.
Selon l’article 6 du décret n° 2-12-349 du 20 mars 2013, les marchés publics peuvent inclure
des clauses spécifiques de médiation, encourageant les parties à utiliser cette méthode avant
toute procédure contentieuse. La médiation est vue comme un moyen de réduire les délais et
les coûts associés à la résolution des litiges, tout en préservant les relations commerciales.
Les C.C.A.G. des marchés publics financés par l’Union européenne prévoient une tentative
préalable d’un règlement amiable des différends relatifs aux marchés financés par l’Union
européenne, et ce dans un délai de quatre (04) mois, notamment à travers les articles 54 du
C.C.A.G.-Services, 61 C.C.A.G.-Travaux et 65 C.C.A.G.-Fournitures, qui disposent dans des
termes identiques que « Tout différend survenant entre le maître d’ouvrage et l’attributaire ne
peut faire l’objet d’un recours contentieux s’il n’a pas été soumis préalablement à une
tentative de règlement amiable. »
La médiation peut être soit un compromis de médiation, lorsqu’elle est conclue après
l’éclatement du litige, soit une clause de médiation lorsqu’elle figure dans le contrat de base.
Qu’elle soit un compromis ou une clause, la convention de médiation est, en règle générale,
constatée par écrit. Selon les termes de l’article 327-57 C.P.C., l’écrit peut prendre les mêmes
formes que celui prévu dans l’arbitrage
Section 2 - Mécanismes de médiation
- Clauses de Médiation dans les Contrats : La loi encourage l'inclusion de clauses de
médiation dans les contrats de marchés publics. Ces clauses stipulent que, en cas de différend,
les parties doivent d'abord tenter de résoudre le litige par la médiation avant d'envisager un
recours judiciaire.
- Commissions de Règlement Amiable : La création de commissions de règlement amiable
des différends au sein des administrations publiques est encouragée. Ces commissions jouent
un rôle clé en facilitant la médiation entre les parties contractantes, contribuant à résoudre les
litiges rapidement et efficacement.
- Centres de Médiation : Le Centre Marocain de Médiation et d’Arbitrage (CMM) propose
des services de médiation pour les litiges liés aux marchés publics. Le CMM offre un cadre
structuré et des médiateurs qualifiés pour assurer une résolution équitable des conflits. Le
recours à ces centres est souvent recommandé pour garantir l'impartialité et la compétence
dans la gestion des différends.
Section 3 - Processus de Médiation :
Le processus de médiation selon la nouvelle loi comprend les étapes suivantes :
- Initiation de la Médiation : La médiation peut être initiée par l'une des parties en cas de
différend. La demande de médiation est adressée à la commission de règlement amiable ou à
un centre de médiation agréé.
- Sélection du Médiateur : Les parties choisissent un médiateur d'un commun accord. Ce
médiateur doit être impartial et posséder les compétences nécessaires pour traiter le litige
spécifique.
- Sessions de Médiation : Le médiateur organise des sessions où les parties peuvent
exprimer leurs points de vue et chercher à trouver une solution mutuellement acceptable. Le
médiateur facilite la communication et aide les parties à explorer différentes options de
règlement.
- Accord de Médiation : Si un accord est trouvé, il est formalisé par écrit et signé par les
parties. Cet accord a une valeur contraignante et peut être homologué par un juge si
nécessaire.
Il est à rappelé que le médiateur ne peut abandonner sa mission qu'avec l'accord des parties,
ou si le délai fixé pour la médiation est écoulé.
L'objectif de l'accord de médiation est que les parties parviennent à une solution à leur
différend avec l'aide du médiateur. L'importance de cette solution apparaît tant en termes de
valeur juridique qu'en termes de de la possibilité de sa mise en œuvre. Le législateur a entouré
cette solution d'un ensemble de garanties, qui se manifestent comme suit :
- Dans le cas où la réconciliation n'a pas lieu pour quelque raison que ce soit, le médiateur
remet aux parties un document attestant la réconciliation n'aura pas lieu, signé par lui.
Toutefois, si le médiateur met fin à ses efforts pour parvenir à une réconciliation entre les
deux parties, il rédige la réconciliation dans un document dans lequel il garantit la solution
trouvée par les parties.
Le médiateur doit signer le document de règlement conclu avec les parties.
La réconciliation entre les parties a force de la chose jugée. En conséquence, les exigences de
réconciliation peuvent être mises en œuvre automatiquement par les deux parties.
Recommandations
Il ne fait aucun doute que le système judiciaire marocain en général et le système judiciaire
administratif en particulier ont contribué à un ensemble de règles procédurales qui assurent la
protection des entrepreneurs dans le domaine des marchés publics, les travaux dans ce
domaine étant basés sur la réforme du système de passation des marchés, qui s'inscrit dans la
dynamique globale de modernisation et de transformation de l'administration par
l'introduction de deux mécanismes : les conventions d'arbitrage et de médiation dans le
domaine des transactions publiques.
De ce qui précède, il ressort clairement que le législateur marocain a eu tendance à adopter à
la fois l'arbitrage et la médiation conventionnelle pour résoudre les litiges qui surviennent
dans les contrats administratifs notamment dans les contrats liés aux transactions conclus par
l'État, de manière amiable sans recourir au système judiciaire en raison de la complexité des
procédures et du temps nécessaire.
A cet égard, un certain nombre de recommandations peuvent être retenus telles que la
nécessité d'apporter une série d'amendements juridiques visant à garantir généralement les
intérêts des parties contentieuses dans le domaine des marchés publics, et particulièrement
l'entrepreneur étant donné qu'il est la partie faible dans cette relation.
De surcroît, les ressources humaines des tribunaux administratifs, notamment les juges
administratifs doivent faire l'objet d'une formation continue dans le domaine financier en
général et dans le domaine des transactions publiques en particulier, afin qu'ils connaissent
pleinement tous les aspects juridiques, procéduraux qui entourent toutes les transactions qui
font l'objet du litige.
En général, la question de l'arbitrage dans les contrats administratifs reste l'un des sujets qui
nécessitent une théorisation, une diligence plus approfondie, afin de trouver une formulation
consensuelle entre l'État et tous les acteurs économiques, tant locaux qu'étrangers, c'est à dire
la mise en œuvre d'une loi spécifique régissant l'arbitrage dans les litiges relatifs aux contrats
administratifs.
Si un pays comme l'Égypte a pu proposer dès 1997 une loi sur l'arbitrage dans les contrats
administratifs, pourquoi le Maroc est-il à la traîne dans ce domaine, d'autant qu'il est
considéré comme un partenaire stratégique pour les pays du nord du bassin méditerranéen ?