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Les Annales de Droit

Le document examine la qualification du titre foncier au Cameroun en tant qu'acte administratif susceptible de recours pour excès de pouvoir. Il souligne que la jurisprudence de la Chambre administrative de la Cour suprême a établi une distinction entre les titres fonciers initiaux et dérivés, avec des implications sur leur justiciabilité. Cependant, les tribunaux administratifs actuels considèrent tous les titres fonciers comme des actes administratifs attaquables, remettant en question la politique jurisprudentielle antérieure.

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Les Annales de Droit

Le document examine la qualification du titre foncier au Cameroun en tant qu'acte administratif susceptible de recours pour excès de pouvoir. Il souligne que la jurisprudence de la Chambre administrative de la Cour suprême a établi une distinction entre les titres fonciers initiaux et dérivés, avec des implications sur leur justiciabilité. Cependant, les tribunaux administratifs actuels considèrent tous les titres fonciers comme des actes administratifs attaquables, remettant en question la politique jurisprudentielle antérieure.

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Les Annales de droit


15 | 2021
Varia

Retour sur une problématique


classique : la qualification du titre
foncier comme acte administratif
faisant grief dans la jurisprudence
de la Chambre administrative de la
Cour suprême du Cameroun
Return to a classic problematic: the qualification of the land certificate as an administrative act adversely affecting
in the case law of the Administrative Bench of the Supreme Court of Cameroon

Alassa Mongbat
p. 71-100
https://doi.org/10.4000/add.2106

Résumés
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Français English
Ce Le
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titre desconstitue
foncier cookiesauetCameroun l’unique document qui certifie la propriété sur les
terres.
vous En vertu
donne de l’article
le contrôle sur1er du décret n° 76-165 du 27 avril 1976 fixant les conditions de
son obtention, modifié et complété par le décret n° 2005/481 du 16 décembre 2005, le titre
ceux que vous souhaitez
foncier est inattaquable, intangible, définitif. Cette disposition consacre le principe de
l’absoluitéactiver
du titre foncier. La question s’est pendant longtemps posée de savoir si au
regard de ces règles, le titre foncier est un acte administratif susceptible de recours pour
excès de pouvoir. A cette question, la Chambre administrative de la Cour suprême d’avant
l’avènement des Tribunaux administratifs a mis en œuvre une politique jurisprudentielle.
✓ Tout accepter
Pour elle, le titre foncier n’étant pas unique, le principe de l’absoluité s’applique en
fonction du titre en cause. En feuilletant les décisions rendues par cette juridiction, l’on se
rend✗ compte que le titre foncier mère issu de la procédure contradictoire
Tout refuser
d’immatriculation est un acte couvert par l’injusticiabilité, tandis que les titres fonciers
dérivés ou titres obtenus à partir du titre mère sont des actes administratifs justiciables. Si
cettePersonnaliser
politique jurisprudentielle permet une certaine garantie du droit de propriété, force
est de constater que la Chambre administrative n’est pas aujourd’hui suivie par les
Tribunaux
Politique administratifs, désormais juges de premier ressort du contentieux
de confidentialité
administratif. Ces derniers considèrent tous les titres fonciers comme des actes
administratifs attaquables devant le juge administratif.
The land certificate constitutes in Cameroon the only document, which certifies ownership
of the land. Under Article 1 of Decree No. 76-165 of April 27, 1976 setting the conditions for
obtaining it, amended and supplemented by Decree No. 2005/481 of December 16, 2005,
the land title is unassailable, inviolable and final. This provision enshrines the principle of
the absoluteness of the land title. The question has long arisen as to whether, under these
rules, the land title is an administrative act subject to appeal for abuse of power. To this
question, the Administrative Bench of the Supreme Court before the advent of
Administrative Courts implemented a case law policy. For it, the land title is not unique;
the principle of absoluteness applies according to the title in question. By leafing through
the decisions rendered by this jurisdiction, we realize that the native certificate resulting
from the adversarial registration procedure is an act covered by injusticiability, while the
derived land certificates or titles obtained from the native certificate are justiciable
administrative acts. If this case law policy allows a certain guarantee of the right of
ownership, it is clear that the Administrative Chamber is not today followed by the
Administrative courts, now judges of first instance for administrative litigation. These
consider all land certificates as administrative acts that can be challenged before the
administrative judge.

Entrées d’index
Mots-clés : titre foncier, recours, excès de pouvoir, juge administratif
Keywords: land certificate, recourse, excess of power, administrative judge

Texte intégral
Le recours pour excès de pouvoir est […] plus précieux pour les administrés qu’il
leur permet, au cas d’irrégularité, de faire annuler les manifestations
unilatérales de volonté de tous les agents administratifs […] Qu’il s’agisse de
l’agent suprême, le président de la République, ou des ministres, le recours est,
en principe, possible dès qu’un intéressé peut signaler une illégalité1.

1 Au Cameroun, le régime foncier de l’immatriculation issu du décret colonial du


21 juillet 19322 a fait du titre foncier l’unique document qui atteste la propriété
sur les terres. Il s’agissait là de l’application du système de l’Act Torrens inventé
en Australie qui postulait le principe de la force probante absolue du titre
foncier3. Dans ce système, l’immatriculation constituait le mode définitif
d’acquisition de la propriété immobilière4. Cette mesure de sécurité du droit de
propriété foncière, instaurée à l’origine par le législateur colonial, avait pour but
de mettre fin à la propriété coutumière. À cette époque, le contentieux relatif au
titre foncier relevait exclusivement de la compétence des tribunaux de l’ordre
judiciaire pour au moins deux raisons : d’abord, parce que le titre foncier confère

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à son titulaire un droit de propriété privée immobilière, dont on sait qu’il
constitue le plus important des droits réels5 ; ensuite parce que le juge judiciaire
est traditionnellement présenté comme le gardien attitré de la propriété privée
Ce immobilière
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6. Toutes cesetraisons justifient sans doute l’intérêt des privatistes
vous
dans donne le contrôle
l’analyse sur
des problématiques foncières au Cameroun7.
2 ceux que vous souhaitez
Après l’indépendance du Cameroun, le décret de 1932 est abrogé par
activer
l’ordonnance no 74/1 fixant le régime foncier qui consacre le titre foncier. En son
article 7, l’on peut lire que « les conditions d’obtention du titre foncier ainsi que
les règles relatives à son annulation sont fixées par décret ». C’est sur la base de
cette disposition que le premier jugement de la Chambre administrative de la
Cour suprême sur le titre foncier a été rendu. Il s’agit du jugement Nkong
Emmanuel8 dans lequel le juge administratif a jugé que le titre foncier est un acte
administratif décisoire. Jusqu’à cette période, le titre foncier, bien que
formellement consacré, n’était pas défini par un texte. Le décret no 76/165 du
27 avril 1976 fixant les conditions d’obtention du titre foncier9 adopté deux ans
après l’ordonnance de 1974 est venu combler ce vide. Selon l’alinéa 1 de l’article
premier dudit décret, « le titre foncier est la certification officielle de la propriété
immobilière ». C’est le premier attribut du titre foncier10. De la sorte, ce
document se présente comme un excellent instrument de preuve de la propriété
foncière11. Selon le professeur André Tientcheu Njiako, « le titre foncier est la
page, le feuillet du livre foncier affecté d’un numéro d’ordre où se trouve
immatriculé un terrain avec indication du nom de son propriétaire, de sa
contenance, de ses tenants et aboutissants, des charges et droits réels qui le
grèvent12 ». L’alinéa 2 de l’article 1er du décret de 1976 ajoute que « sous réserve
des dispositions des articles 2 (alinéa 3) et 24 du présent décret, le titre foncier est
inattaquable, intangible, définitif. II en est de même des actes constatant les
autres droits réels attachés à la propriété. L’enregistrement d’un droit dans un
registre spécial appelé Livre foncier emporte immatriculation de ce droit et le
rend opposable aux tiers ». Cette disposition pose le principe de la force probante
du titre foncier et ses exceptions. Au rang des exceptions, on relève le pouvoir de
retrait du titre foncier reconnu au ministre des Domaines en cas de faute de
l’administration et de fraude du bénéficiaire au cours de la procédure
d’obtention du titre13 et la résolution de la vente d’un immeuble14.
3 En droit positif camerounais, le titre foncier n’est pas unique. Ainsi, l’on en
distingue deux catégories : le titre foncier de l’immatriculation, titre foncier
initial ou titre mère qui constitue la principale catégorie, et les titres fonciers
dérivés qui sont des titres accessoires. Dans le premier cas, le titre est délivré à la
suite de la procédure d’immatriculation. La doctrine, sous la plume du
professeur Dieudonné Alexandre Tjouen, définit l’immatriculation comme une
« opération juridique qui consiste à dégager de façon nettement définie les droits
individuels de l’emprise communautaire et à les placer sous l’emprise du livre
foncier dont l’aboutissement est, pour les droits immobiliers, la délivrance du
titre foncier15 ». Pour sa part, Joseph Comby voit en l’immatriculation une
« procédure administrative plus ou moins longue et complexe reconnaissant un
droit de propriété sur un terrain coutumier par l’attribution d’un titre foncier16 ».
En fait, l’immatriculation est un procédé qui permet à l’administration
d’attribuer la propriété d’un terrain à une personne. Pour être plus claire,
« l’immatriculation est le système par lequel l’appropriation individuelle des
terres est reconnue17 ». Ainsi, immatriculer un terrain permet à l’administration
de lui « attribuer un numéro de titre foncier, tiré d’un registre, après levé
topographique et accomplissement d’une procédure minutieuse et contradictoire
donnant à la propriété une base de départ sûre, exclusive de toute
contestation18 ». Au regard de ces définitions, on peut définir le titre foncier de
l’immatriculation comme le titre obtenu sur un terrain qui ne fait l’objet d’aucun
titre de propriété privée, ou encore sur un terrain acquis avant l’institution du

☝🍪
régime foncier de l’immatriculation. C’est ainsi que l’on distingue selon que le
titre foncier est établi à la suite de l’immatriculation directe ou de
l’immatriculation indirecte. Pour ce qui est de l’immatriculation indirecte, elle
consiste en la transformation de divers actes en titre foncier19. Ici, les occupants
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ou les exploitants disposent d’un titre de propriété sur le terrain qu’il convient
vous donne le contrôle sur
tout simplement de transformer en titre foncier. S’agissant de l’immatriculation
ceux que vous souhaitez
directe, activer
le titre foncier est délivré sur une dépendance du domaine national
exploitée ou occupée20.
4 Au sujet des titres fonciers dérivés, il s’agit des titres obtenus à la suite de
démembrement ou de fusion d’immeubles déjà immatriculés. C’est le cas du titre
foncier issu de la cession à titre gratuit ou onéreux qui emporte mutation du titre
initial au nom de l’acquéreur21 ; du titre de démembrement d’un immeuble à la
suite de ventes successives, de partage ou de cession à titre gratuit, qui emporte
morcellement du titre foncier initial au profit des acquéreurs, des copartageants
ou des cessionnaires22. En outre, selon le professeur André Tientcheu Njiako, les
titres fonciers dérivés comprennent également les titres spéciaux et le
duplicatum23. Les titres spéciaux sont « établis sur la demande des intéressés au
nom de l’usufruitier, de l’emphytéote, du superficiaire, de l’antichrèse, pour
garantir l’inscription des droits réels qu’ils exercent sur le terrain immatriculé.
Toutes références utiles sont mentionnées dans ce cas, sur le titre de l’immeuble
établi au nom du propriétaire24 ». Quant au duplicatum, il est délivré au
propriétaire25, et dans le cas d’indivision au propriétaire figurant en tête de
liste26.
5 En effet, l’on note une pluralité de titre foncier en droit positif camerounais.
Ces titres dont la procédure d’élaboration n’épouse pas celle des actes
administratifs classiques sont néanmoins établis par des autorités
administratives (notamment le conservateur foncier)27. C’est la raison pour
laquelle il est admis que ces titres sont des actes administratifs. Mais, en vertu du
principe de la force probante posé par le décret, tous les titres fonciers sont-ils
des actes administratifs justiciables devant le juge administratif sur le terrain du
recours pour excès de pouvoir ?
6 À cette question, la doctrine publiciste au regard des décisions rendues par le
juge administratif a pendant longtemps manifesté son intérêt dans l’analyse des
problématiques relatives au titre foncier28. On peut identifier deux grands
courants dans la doctrine publiciste sur la qualification du titre foncier. Le
premier courant qui représente la doctrine majoritaire pense que le titre foncier
est un acte administratif unilatéral. Obtenu à la suite d’une procédure
administrative, conférant à son titulaire un droit de propriété, le titre foncier fait
grief et peut par conséquent être déféré devant le juge administratif. Cette
conception générale n’est pas au fond celle retenue par le juge administratif.
Pour le second courant qui représente la doctrine minoritaire, le titre foncier
n’est pas un acte administratif unilatéral à cause de sa force probante29. Ces
courants sont nés du fait que dans certaines de ses décisions, le juge administratif
déclare le titre foncier comme un acte inattaquable bénéficiant d’une immunité
juridictionnelle et, dans d’autres, comme un acte attaquable susceptible de
recours pour excès de pouvoir. Le courant minoritaire y a de ce fait décelé une
ambiguïté30. Pourtant, la position du juge administratif nous semble d’une clarté
irréprochable. Les deux courants n’auraient pas tenu compte de la distinction
opérée par le juge administratif entre les titres fonciers dans le contentieux de
l’excès de pouvoir.
7 Par définition, « le recours pour excès de pouvoir est un recours contentieux
par lequel le requérant demande au juge administratif de contrôler la légalité
d’un acte administratif unilatéral et d’en prononcer l’annulation s’il estime que
cet acte est illégal31 ». Ce recours n’est ouvert qu’à l’encontre des actes
administratifs faisant grief, c’est-à-dire des actes qui entraînent des conséquences
juridiques ou qui modifient l’ordonnancement juridique32. Depuis la

☝🍪
jurisprudence Dame Lamotte du Conseil d’État français du 17 février 195033, le
recours pour excès de pouvoir est un recours d’ordre public34 parce qu’« ouvert
même sans texte contre tout acte administratif, et qui a pour effet d’assurer,
conformément aux principes généraux du droit, le respect de la légalité ».
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S’inspirant de la jurisprudence du juge administratif français, le juge
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administratif camerounais a indiqué que « même dans l’hypothèse où une loi
ceux que vous souhaitez
dispose activer
qu’un acte ne peut faire l’objet d’aucun recours administratif ou
judiciaire, cette disposition ne saurait être interprétée comme excluant le recours
pour excès de pouvoir qui est ouvert même sans texte, contre tout acte
administratif faisant grief et qui a pour effet d’assurer, conformément aux
principes généraux du droit, le respect de la légalité35 ». Le juge a ainsi érigé le
recours pour excès de pouvoir en un principe général de droit. Mais comme tout
principe, il admet des exceptions. En plus des actes bénéficiant d’une immunité
juridictionnelle (acte de gouvernement et mesures d’ordre intérieur), le juge
considère le titre mère comme une exception au principe du recours pour excès
de pouvoir.
8 Pour le juge administratif, le titre foncier de l’immatriculation est un acte que
la loi déclare inattaquable par nature et par conséquent insusceptible de recours
pour excès de pouvoir tandis que les titres fonciers dérivés sont des actes
administratifs unilatéraux. L’intérêt scientifique de cette étude repose sur cette
clarification qui n’a toujours pas été perçue par la doctrine antérieure. Il s’agit de
mettre en exergue la politique jurisprudentielle construite par la Chambre
administrative de la Cour suprême36 dans le contentieux d’annulation des titres
fonciers. Cette politique jurisprudentielle s’entend du choix fait par le juge dans
le contentieux d’annulation du titre foncier : l’application du principe de la force
probante au titre mère de la manière absolue et la remise en cause du principe
s’agissant des titres fonciers dérivés. Cette politique jurisprudentielle permet au
juge administratif d’être au service de la loi37. Le juge a tout simplement
interprété la norme foncière pour opérer son choix, lequel lui a permis de
préserver le caractère absolu du droit de propriété conféré par le titre initial.
9 Au total, il ressort de la jurisprudence de la Chambre administrative de la Cour
suprême que le titre mère et les titres fonciers dérivés ne font pas double emploi.
Pour mieux étayer cette distinction, l’on opte principalement pour la méthode
casuistique qui permet de penser le droit par cas38, et accessoirement pour la
dogmatique. Le recours à ces méthodes permet de mieux cerner la politique
jurisprudentielle de la Chambre administrative de la Cour suprême dans le
contentieux des titres fonciers. Ainsi, tandis que le titre mère est un acte
administratif couvert par l’injusticiabilité (1), les titres fonciers dérivés sont des
actes administratifs justiciables (2).

1. L’injusticiabilité du titre mère dans la


jurisprudence de la Chambre
administrative de la Cour suprême
10 Selon les professeurs Pierre Serrand et Piotr Szwedo, « [l]’injusticiabilité
correspond à une situation : l’impossibilité pour un requérant d’obtenir justice,
c’est-à-dire d’obtenir une décision juridictionnelle réglant un litige, de telle
manière que le litige n’est pas jugé. […] En ce sens, la notion d’injusticiabilité
permet de saisir, en dépit de leur diversité, l’ensemble des hypothèses
correspondant aux angles morts du droit et de la justice39 ». L’étude de la
jurisprudence de la Chambre administrative de la Cour suprême du Cameroun
relative au contentieux d’annulation du titre foncier révèle que le titre mère est
en principe couvert par l’injusticiabilité. Cette injusticiabilité prend la forme non

☝🍪
d’une incompétence, mais de l’irrecevabilité et du rejet des recours dirigés contre
le titre mère. Le juge administratif fait de ce titre un acte inattaquable. Il s’ensuit
que le recours pour excès de pouvoir qui permet au juge administratif de
contrôler la légalité d’un acte administratif n’est pas exerçable à l’encontre du
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qui soulève le débat sur sa véritable nature (1.2).
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1.1. Le constat de l’injusticiabilité du titre mère
11 Il ressort de la jurisprudence du juge administratif que le titre foncier de
l’immatriculation est inattaquable, intangible et définitif40, et que ces principes
s’y appliquent de la manière la plus absolue41 parce que le titre mère est un titre
original42. Le juge administratif fonde sa décision sur les dispositions pertinentes
du décret de 1976 modifié et complété (1.1.1). La conséquence de cette
injusticiabilité s’avère l’exclusion du recours pour excès de pouvoir à l’encontre
du titre mère (1.1.2).
1.1.1. Le titre mère, un titre définitif
12 Selon le professeur Alexandre Dieudonné Tjouen, « le titre foncier est définitif,
il marque la fin de la procédure d’immatriculation. Son obtention est aux termes
de l’article 123 du décret du 21 juillet 1932, “le point de départ des droits réels et
charges foncières existants sur l’immeuble au moment de l’immatriculation”. On
n’attend plus rien d’autre pour être déclaré propriétaire de l’immeuble… On n’a
plus le droit de le mettre en cause43 »44. En réalité, le titre foncier de
l’immatriculation est établi suivant une procédure contradictoire permettant de
lever toute équivoque sur l’origine du droit de propriété privée immobilière. Le
caractère définitif du titre foncier de l’immatriculation est fondé sur le fait que sa
délivrance met fin à la procédure d’immatriculation et emporte de ce fait, d’une
part, la purge des oppositions à l’immatriculation et, d’autre part, la purge des
droits réels non-inscrits. C’est fort de ces règles que le juge a décidé de
l’applicabilité absolue du principe de la force probante au titre de
l’immatriculation. Dans l’espèce Basso Théodore et Makong Daniel45, le juge
décide que « les principes d’intangibilité et d’indiscutabilité énoncés par les
articles 1 et 2 du décret de 1976 s’appliquent d’une façon absolue dans le cas du
titre foncier établi après la procédure d’immatriculation emportant purges des
droits réels non révélés, et s’opposent à ce qu’il soit élevé un nouveau débat sur
la question de propriété de l’immeuble, ou réclamé un droit non inscrit à
l’encontre du bénéficiaire ».
13 S’agissant de la purge des oppositions, il est établi que toute personne qui
s’estime lésée par suite d’immatriculation directe d’un terrain au profit d’un tiers
peut faire opposition à la délivrance du titre foncier dans un délai de trente jours
à compter de la publication au journal officiel de l’avis de clôture de bornage. Ce
délai est d’ordre public. De la sorte, toute revendication faite en dehors de ce
délai est irrecevable. Il en est de même des oppositions formées après le constat
de la mise en valeur du terrain46. Ce droit à opposition prévu par le décret de
1976 modifié et complété ne porte que sur l’auteur et la mise en valeur47 de
l’immeuble.
14 En effet, le juge administratif rejette les recours dirigés contre les titres
fonciers de l’immatriculation motif pris de la purge des oppositions. Dans
l’affaire Fotso Joseph Simonet contre l’État du Cameroun48, par exemple, le
requérant avait intenté un recours tendant à l’annulation pour excès de pouvoir
du titre foncier no 3689 du département de la Mifi établi au profit de la dame
Foko Kamga Berthe. Le juge administratif déclare son recours irrecevable comme
dirigé contre un acte définitif au motif pris de sa demande d’opposition à

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immatriculation formée tardivement. Pour le juge administratif, le titre de
l’immatriculation de l’espèce est définitif et un nouveau débat ne peut plus y être
soulevé. La motivation du juge est la suivante :

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[le principe et probante] s’applique […] d’une façon absolue dans le
de la force
vous donne
cas duletitre
contrôle
fonciersur
établi après la procédure d’immatriculation qui emporte
purge
ceux que vousdessouhaitez
oppositions (à l’instar de celle qu’en l’espèce, le sieur Fotso avait,
tardivement
activer formée à la demande d’immatriculation de la dame Foko
Kamga Berthe, et qui fut purement et simplement écartée par la commission
compétente en application des dispositions de l’article 16 al. 1 du décret
no 76/165 du 27 avril 1976), et s’oppose à ce qu’il soit élevé un nouveau
débat sur la question de propriété de l’immeuble.

15 Cette jurisprudence n’est pas un cas isolé49.


16 Pour ce qui est de la purge des droits non révélés pendant l’immatriculation, il
est admis que l’immatriculation d’un immeuble emporte purges des droits réels
qui n’auraient pas été révélés pendant la procédure d’immatriculation. C’est la
conséquence du caractère définitif du titre foncier50. L’alinéa 1-b de l’article 39
du décret de 1976 modifié fixant les conditions d’obtention du titre foncier
stipule que toute personne peut intervenir par demande d’inscription de droit,
en cas de prétention élevée sur l’existence d’un droit réel ou d’une charge
susceptible de figurer au titre à établir. Cette voie est ouverte normalement
pendant la procédure d’immatriculation, à l’exception des cas de rectification du
titre foncier51.
17 Lorsque le délai de demande d’inscription – qui est de trente jours à compter
de la publication de l’avis du bulletin des avis domaniaux et fonciers52 – de l’avis
de clôture de bornage a expiré et les contestations réglées, le conservateur
foncier procède à l’immatriculation de l’immeuble sur le livre foncier. À ce stade,
aucune contestation portant sur l’immeuble n’est plus admise. C’est une garantie
du système de l’immatriculation53.
18 Le caractère définitif du titre foncier signifie donc qu’aucun droit non inscrit
ne peut être réclamé à l’encontre du bénéficiaire54. Le juge administratif
applique cette règle avec beaucoup de rigueur. Il a décidé du reste que si les
titulaires des droits sur l’immeuble n’ont pas fait opposition, se sont abstenus ou
oubliés de signaler leurs droits, ils les perdent automatiquement55. La doctrine
privatiste ne désavoue pas le juge administratif dans l’application de ce principe.
Ainsi, les droits non-inscrits pendant la procédure d’immatriculation sont exclus
même si le défaut d’inscription provient d’un oubli ou de toute autre cause parce
que l’immatriculation crée une présomption de propriété irréfragable56.
19 La purge des droits réels non inscrits entraîne en retour l’intangibilité du titre
foncier qui trouve son fondement à l’article 1er alinéa 3 du décret de 1976
modifié qui stipule que « l’enregistrement d’un droit dans un registre spécial
appelé Livre foncier emporte immatriculation de ce droit et le rend opposable
aux tiers ».
20 En fin de compte, le caractère définitif du titre foncier de l’immatriculation
emporte purge des oppositions non déclarées et purge des droits réels non
révélés pendant la procédure d’immatriculation. Le titre foncier établi suivant
cette procédure forme ainsi « le point de départ unique de tous les droits réels
existants sur l’immeuble au moment de l’immatriculation57 ». Le titulaire du titre
devient propriétaire de l’immeuble et titulaire d’un droit de propriété absolu qui
ne peut être remis en cause que par la procédure unilatérale de l’administration,
à savoir l’expropriation pour cause d’utilité publique58, laquelle est présentée
comme un mécanisme de fragilisation du droit de propriété59. Le titre foncier de
l’immatriculation étant assis sur des bases solides, il ne peut plus faire l’objet de
contestations devant le juge administratif.

1.1.2. Le titre mère, un titre exclu du contentieux de l’excès de

21
pouvoir
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Le titre foncier de l’immatriculation est insusceptible de recours pour excès de
pouvoir. Saisi en annulation d’un tel titre, le juge administratif déclare la
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demande irrecevable comme dirigée contre un acte inattaquable ou
vous donne le contrôle sur
insusceptible de recours juridictionnel. Le juge applique le principe de la force
ceux que vous souhaitez
probante avec beaucoup de rigueur en ce qui concerne le titre de
activer
l’immatriculation en se référant au décret qui, en prévoyant que le titre foncier
est inattaquable, précise que « toute personne dont les droits ont été lésés par
suite d’immatriculation n’a pas de recours sur l’immeuble […] ».
22 Dans l’affaire Fotso Joseph Simonet précitée, le recourant sollicitait
l’annulation du titre foncier issu de l’immatriculation. Le juge administratif avait
débouté le requérant en affirmant qu’« un recours en annulation dirigé contre le
titre de l’immatriculation comme celui de l’espèce se heurte nécessairement au
principe selon lequel le recours pour excès de pouvoir, recours juridictionnel de
droit commun pour l’annulation des actes administratifs illégaux, n’est pas
exerçable contre les actes que la loi déclare inattaquables par leur nature60 ». Le
titre foncier de l’immatriculation bénéficie ainsi de la protection des articles 1 et
2 alinéa 1 du décret de 1976 modifié. En effet, le droit de propriété immobilière
certifié par le titre foncier de l’immatriculation requiert ainsi un caractère absolu
et en fin de compte, incontestable61. En effet, la rigueur du juge administratif
dans l’exclusion du recours en annulation pour excès de pouvoir contre le titre
foncier de l’immatriculation vise sans doute à protéger ce titre contre toute
atteinte illégitime.
23 L’inattaquabilité du titre de l’immatriculation se justifie aussi par le fait que la
législation foncière prévoit un recours devant le juge civil en cas
d’immatriculation dolosive. Aux termes de l’alinéa 1 de l’article 2 du décret de
1976 modifié, toute personne dont les droits ont été lésés par suite d’une
immatriculation, ne dispose d’aucun recours sur l’immeuble, « mais seulement
en cas de dol, une action en dommages-intérêts contre l’auteur du dol ». En se
fondant sur cette disposition, le juge administratif s’inscrit contre l’attaquabilité
d’un tel titre devant lui pour la simple raison qu’une action en dommages et
intérêts est ouverte devant le juge civil en cas de dol62. Dans l’espèce Mbida
Mathernus63, la Chambre administrative a été saisie d’un recours en annulation
du titre foncier de l’immatriculation. Elle a estimé que le recours en annulation
n’est pas exerçable contre les actes inattaquables par leur nature, pas plus qu’il
ne peut être exercé lorsqu’un texte spécial organise un autre recours. En la
matière, le juge administratif s’est inspiré – nous semble-t-il – de la jurisprudence
du juge judiciaire. C’est en effet un arrêt rendu le 27 avril 1979, c’est-à-dire trois
ans après la signature du décret du 27 avril 1976 fixant les conditions d’obtention
du titre foncier, que la Cour Suprême a pour la première fois admis la force
probante absolue du titre foncier de l’immatriculation. Les termes de la solution
du juge judiciaire suprême sont très explicites :

Attendu qu’il résulte de la combinaison des articles 123 à 124 du décret du


21 juillet 1932 sur le régime foncier de l’immatriculation applicable en
l’espèce, que le titre foncier délivré après la procédure d’immatriculation est
définitif et inattaquable ; qu’il constitue le point de départ unique des droits
réels et charges foncières existants sur l’immeuble au moment de
l’immatriculation à l’exclusion de tous autres droits non inscrits ; que toute
action tendant à la revendication d’un droit non révélé en cours de
procédure est irrecevable. Toute personne dont les droits ont été lésés par
suite d’immatriculation n’a jamais de recours sur l’immeuble, mais
seulement, en cas de dol, d’une action personnelle en dommages-intérêts
contre l’auteur du dol64.

24 En cas de dol, la victime est appelée à saisir le juge civil du lieu de situation de
l’immeuble d’une action en dommages et intérêts. C’est ainsi que le juge

☝🍪
administratif qualifie de dol, et à ce titre justiciable devant le juge civil, le fait
pour un représentant d’une collectivité d’avoir obtenu en son nom, le titre
foncier sur un terrain collectif alors que tous les membres de ladite collectivité
avaient participé aux frais de la procédure d’immatriculation. Dans cette espèce,
Ce le
site utilise
juge des d’annuler
a refusé cookies etle titre foncier querellé65.
25 vous Le juge administratifsur
donne le contrôle rappelle à chaque fois qu’il en a l’occasion les dispositions
ceux que vous
précitées souhaitez
de l’article 2 alinéa 1 pour mieux asseoir l’inattaquabilité du titre
foncier de activer
l’immatriculation. C’est ainsi que dans le jugement Eyana Assouga
Guillaume66, il a rappelé cette disposition et déclaré le recours du demandeur
non fondé dans un attendu dont il est nécessaire de reproduire les termes pour la
compréhension de la démarche de la haute juridiction :

Attendu qu’aux termes de l’article 1er du décret no 76/165 du 27 avril 1976


fixant les conditions d’obtention du titre foncier, celui-ci étant la
certification officielle de la propriété immobilière, est intangible,
inattaquable et définitif, par conséquent toute personne dont les droits ont
été lésés par suite d’immatriculation, n’a pas de recours sur l’immeuble,
mais seulement en cas de dol, une action personnelle en dommages-intérêts
contre l’auteur du dol ; qu’il s’ensuit donc que le recours de Eyana Assouga
Guillaume sur l’immeuble litigieux n’est pas juridiquement fondé et qu’il y a
lieu par conséquent de le rejeter.

26 Le juge administratif a rappelé cette règle dans une espèce examinée en 2010,
Mme Veuve Onana née Mewoe Marie Thérèse67. La requérante avait saisi la
Chambre administrative d’un recours tendant à l’annulation du titre foncier
no 1978/MEFOU délivré le 23 janvier 1968 à feu Onambele Tobie au motif qu’elle
ne bénéficiait que d’une installation provisoire sur ledit terrain, laquelle avait
pris fin avec l’attribution à Onambele Tobie. Le juge administratif a estimé que
l’unique voie qui s’ouvrait à dame Onana était une action en dommages-intérêts
contre Onambele devant le juge civil du lieu de situation de l’immeuble pour
immatriculation dolosive68.
27 En tout état de cause, le titre mère est un titre que le juge administratif refuse
d’annuler dans le cadre du contentieux de l’excès de pouvoir. Les arguments
mobilisés par le juge ne sont pas, à notre avis, faux. Ils découlent des dispositions
du décret de 1976. Les exceptions au principe de la force probante du titre
foncier sont écartées ici. C’est ainsi que les décisions ministérielles portant retrait
des titres fonciers de l’immatriculation sont tout simplement annulées par le juge
administratif. La question qui taraude alors l’esprit est celle de savoir quelle est
alors la nature du titre de l’immatriculation au regard de la théorie des actes
administratifs.

1.2. La nature du titre mère


28 L’injusticiabilité du titre foncier de l’immatriculation soulève le débat sur sa
véritable nature. Comme il est admis en doctrine, l’immatriculation est une
procédure administrative et le titre foncier établi à la suite d’une
immatriculation est l’émanation de l’autorité administrative69. De la sorte, il
constitue un acte administratif. Mais de quel acte administratif s’agit-il ? Le titre
de l’immatriculation fait-il grief ? Selon le professeur Maurice Kamto, les actes
faisant grief sont « des actes de nature à produire des effets juridiques et contre
lesquels le recours pour excès de pouvoir est recevable70 ». Comme on sait, le
titre mère confère à son bénéficiaire le droit de propriété. Par conséquent, il fait
grief, mais le juge administratif l’exclut du champ des actes susceptibles du
recours en annulation pour excès de pouvoir. À tout prendre, le titre mère serait
un acte administratif d’un autre genre (1.2.1) assis sur une base juridique faible
(1.2.2).

29
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1.2.1. Un acte administratif inattaquable d’un autre genre
Dans la théorie générale du droit administratif, certains actes « administratifs »
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bénéficient d’une immunité juridictionnelle. C’est le cas des actes de
vous donne le contrôle sur
gouvernement, des mesures internes à l’administration et des actes
ceux que vous souhaitez
préparatoires. Le titre foncier mère entre-t-il dans ces catégories d’actes
activer
administratifs ?
30 En premier lieu sur les actes de gouvernement, la règle sans exception est celle
de l’injusticiabilité71. Ce sont des actes qui bénéficient d’une immunité
juridictionnelle72. Ni les juridictions de l’ordre administratif ni les juridictions de
l’ordre judiciaire ne sont compétentes pour connaître des actes de
gouvernement. L’injusticiabilité ici se fonde sur l’incompétence du juge. Comme
le souligne Pierre Serrand, « le juge ne peut pas juger73 » parce que ce sont « des
manifestations de volonté émanant des plus hauts organes exécutifs74 ». Dans la
jurisprudence de la Chambre administrative, il ressort que les actes de
gouvernement sont des actes relatifs aux rapports du gouvernement avec le
Parlement et les actes concernant les relations internationales75. Le titre foncier
de l’immatriculation se distingue ainsi de l’acte de gouvernement. Les domaines
ne sont pas les mêmes. Le titre de l’immatriculation a une nature administrative
et confère un droit de propriété foncière à son titulaire.
31 En deuxième lieu sur les mesures internes de l’administration, elles
comprennent les circulaires, les directives et les mesures d’ordre intérieur.
Comme le souligne le Commissaire du gouvernement Bernard Tricot, « la
circulaire est un pavillon qui peut recouvrir toute sorte de marchandises : ordres
du jour, conseils, recommandations, directives d’organisation et de
fonctionnement, règle de droit76 ». Il faut y ajouter les ordres, les consignes de
fond et de procédure, adressés par les chefs de service à leurs subordonnés77. Les
directives quant à elles traduisent un pouvoir d’orientation. N’ayant pas le
caractère réglementaire, elles ne peuvent faire l’objet d’un recours pour excès de
pouvoir78. Les mesures d’ordre intérieur quant à elles ne touchent que la vie
interne des services. Bien que pris par les autorités administratives, tous ces
actes ne font pas grief. Ils ne créent pas de droits et de devoirs à l’égard des
intéressés. C’est la raison pour laquelle ils sont insusceptibles de recours79. Le
titre foncier mère se rapproche de ces actes parce que sa nature administrative
ne souffre d’aucun doute. Cependant, son injusticiabilité ne se fonde pas sur
l’absence du grief.
32 Il n’en est pas non plus un acte préparatoire. Par définition, les actes
préparatoires sont des actes qui « interviennent au cours de la procédure
d’élaboration d’autres actes et ont pour seul objet de concourir à cette
élaboration80 ». Selon la jurisprudence, ces actes ne sont pas de nature à faire
grief81. Entrent dans cette catégorie les simples mesures d’instruction, les avis
consultatifs, les ordres d’enquête, les vœux, les déclarations, le procès-verbal.
Cependant, ces actes peuvent être attaqués s’ils modifient la situation des
intéressés82.
33 En effet, aucune critique, aucune objection ne peut être apportée à la nature
administrative du titre foncier de l’immatriculation. Contrairement aux actes
cités ci-dessus, le titre de l’immatriculation fait grief. Mais, au lieu d’admettre sa
justiciabilité, le juge administratif a plutôt admis son injusticiabilité. De ce fait, le
titre de l’immatriculation est un acte administratif inattaquable du « fait de la
loi » selon les termes du juge administratif. Il s’agit d’une qualification qui ne
résiste pas à la critique.

1.2.2. Une qualification critiquable

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34 Comme ont pris soin de le souligner le premier président de la Cour de
cassation Guy Canivet et le professeur Nicolas Molfessis, « puisque toute politique
jurisprudentielle est un parti pris, le choix effectué – qui en est la marque – sera
nécessairement sujet à appréciation et donc à critiques, controverses,
Ce polémiques,
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accords ou et
désaccords. Le propre d’une politique jurisprudentielle
vous donne le contrôle
est d’imposer une voie surqui pourra être suivie ou désavouée : autres juges, du
ceux
fondque
ou devous souhaitez
cassation, législateur, doctrine, justiciables […] vont dès lors devenir
activer
les interlocuteurs [du juge], destinataires de la politique jurisprudentielle certes,
mais aussi relais des choix qu’elle recèle83 ». Alors qu’une partie de la doctrine
n’avait pas perçu ce choix du juge administratif, de vives critiques avaient
néanmoins été adressées à la solution du juge. Aloys Mpessa relève à cet effet que
« les attributs du titre foncier ne sont pas des caractéristiques intrinsèques de
celui-ci, mais un simple élément de son régime juridique, posé par un décret, lui-
même susceptible de recours devant le juge administratif84 ». Il s’ensuit que le
titre foncier dont les règles applicables sont établies par un décret, acte
administratif, est assis sur une base juridique faible. Cet auteur sera suivi par les
professeurs Magloire Ondoa85 et Célestin Sietchoua Djuitchoko86.
35 Il faut donc souligner l’inconfort de cette politique jurisprudentielle. Le juge
administratif, en proclamant l’immunité juridictionnelle du titre foncier de
l’immatriculation (document établi par l’administration foncière) et qui fait grief,
aurait perdu de vue le fait que le principe d’inattaquabilité du titre foncier tire sa
source dans un décret (acte réglementaire). Le juge administratif a confondu le
décret de 1976 avec une loi puisqu’il affirme, dans ses décisions, que le caractère
inattaquable du titre mère résulte de la loi. Et pourtant, cette critique n’aurait pas
eu lieu si le juge avait fondé sa décision sur les dispositions constitutionnelles87
ou du Code civil88 qui consacrent le caractère absolu du droit de propriété.
36 L’on note également que la voie du juge administratif de la Chambre
administrative n’est pas aujourd’hui suivie par les tribunaux administratifs. Ces
jeunes juridictions considèrent le titre foncier sans aucune distinction comme un
acte administratif décisoire89. Le tribunal administratif de l’Ouest a même eu à
déclarer recevable un recours tendant à l’annulation d’un titre foncier établi à la
suite de la procédure d’immatriculation90. Il faudrait que la nouvelle Chambre
administrative en appel ou en cassation intervienne pour fixer définitivement la
voie à suivre. Peut-être faudrait-il également que le législateur intervienne afin
d’asseoir l’inattaquabilité du titre foncier de l’immatriculation par une loi comme
c’est le cas par exemple au Tchad, au Bénin ou au Congo. Ainsi, ne seront
susceptibles de recours pour excès de pouvoir que les titres fonciers dérivés.
37 S’agissant de ces titres, le principe de la force probante ne s’applique ici que de
manière relative. La Chambre administrative a toujours admis leur justiciabilité.
Il s’agit là encore d’une politique jurisprudentielle.

2. La justiciabilité des titres fonciers


dérivés dans la jurisprudence de la
Chambre administrative de la Cour
suprême
38 Contrairement au titre mère, les titres fonciers dérivés sont des actes
administratifs justiciables. Le principe de la force probante ne bénéficie pas de la
même application rigoureuse en ce qui concerne les titres fonciers dérivés. Les
règles d’inattaquabilité et d’intangibilité fléchissent parce que ces titres ne sont
pas autonomes. Aussi, l’établissement de ces titres est particulier. Il n’obéit pas à
la procédure prévue en ce qui concerne le titre de l’immatriculation. Les

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exceptions à la force probante du titre foncier bénéficient ici d’une application
très stricte. Par conséquent, le recours pour excès de pouvoir reste ouvert à
l’encontre de ces titres (2.1). C’est pourquoi en cas de fraude ou de faute de
Ce l’administration,
site utilise des cookies etsont tout simplement annulés par le juge administratif
ces titres
vous donne le contrôle sur
(2.2).
ceux que vous souhaitez
activer
2.1. L’ouverture du recours en annulation pour excès
de pouvoir à l’encontre des titres fonciers dérivés
39 En principe, les titres fonciers dérivés ne sont pas intangibles, définitifs et
inattaquables (2.1.1). De la sorte, ils sont des actes administratifs faisant grief
(2.1.2).

2.1.1. La force probante relative des titres fonciers dérivés


40 Les titres fonciers dérivés ne bénéficient pas forcément de la protection des
articles 1 et 2 du décret de 1976 modifié. De la sorte, toute personne dont les
droits ont été lésés par suite de l’établissement d’un titre foncier à la suite d’une
vente, de partage ou de cession dispose d’un recours contre ce titre foncier. En
cas de dol, le recours sera exercé devant le tribunal civil du lieu de situation de
l’immeuble. En cas d’irrégularités de l’administration dans l’établissement du
titre ou de fraudes du bénéficiaire, le titre foncier sera attaqué devant le juge
administratif en annulation pour excès de pouvoir.
41 Dans l’affaire Fotso Joseph Simonet91, la Chambre administrative, en
interprétant les articles 1er et 2 du décret de 1976 modifié, avait remis en cause le
principe de la force probante du titre foncier s’agissant des titres fonciers
dérivés. Le titre foncier dérivé en cause était un titre de morcellement. Dans cette
espèce, la motivation du juge fut la suivante : « Attendu qu’il résulte des
dispositions réglementaires ci-dessus rappelées que si, s’agissant du titre foncier
issu du morcellement d’un immeuble déjà immatriculé, les principes
d’intangibilité et d’indiscutabilité énoncés par les articles 1er et 2 du décret du
27 avril 1976 suscité, fléchissent puisqu’il est admis que la validité du titre de
morcellement reste subordonnée à celle de l’acte de cession qui lui a donné
naissance, lequel peut, à tout moment, être remis en cause […] ».
42 Il ressort de cet attendu que le titre foncier de morcellement n’est pas
intangible. Il n’est pas définitif et par conséquent attaquable. Le juge
administratif a réitéré sa position dans le jugement Basso Théodore et Makong
Daniel contre l’État du Cameroun92.
43 Comme il a été signalé plus haut, les titres fonciers dérivés traduisent
l’hypothèse selon laquelle il existe déjà un titre foncier issu directement de la
procédure d’immatriculation sur un immeuble et dont il faut établir un autre
titre foncier au nom du nouvel acquéreur. On se pose la question de savoir quel
est le sort du titre de l’immatriculation en cas de démembrement ou de mutation.
Le titre foncier de l’immatriculation reste intact. Une fois les titres fonciers
dérivés annulés, le titre de l’immatriculation acquiert une fois de plus toute sa
force parce qu’il demeure intangible, inattaquable et définitif. Toutefois, en cas
de fusion d’immeubles voisins, le nouvel acquéreur bénéficie de l’établissement
d’un nouveau titre foncier sur lequel sont mentionnées toutes les inscriptions
grevant les anciens titres fonciers. En effet, ces derniers sont purement et
simplement annulés93.
44 En matière de vente, l’article 24 du décret de 1976 modifié dispose que « [l]a
résolution de la vente d’un immeuble entraîne la mutation du titre délivré à
l’acquéreur au nom du propriétaire initial ». Il ressort de cette disposition qu’en

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cas de résiliation de la vente, le titre foncier est muté à l’acquéreur initial, c’est-à-
dire le propriétaire originaire du terrain, car comme on le sait, « celui qui, pour
la première fois, acquiert sur un immeuble un titre foncier s’appelle le
propriétaire originaire, tous ceux à qui cette propriété est ultérieurement
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transmise soit par l’effet des conventions, legs, donation ou testament, sont des
vous donne le contrôle sur
propriétaires successifs ou dérivés94 ».
ceux que vous souhaitez
45 La remise en cause du principe de l’absoluité des titres fonciers dérivés a
activer
permis au juge administratif de les qualifier comme des actes administratifs
unilatéraux.

2.1.2. Les titres fonciers dérivés comme des actes


administratifs unilatéraux
46 Les titres fonciers dérivés sont des actes administratifs faisant grief. La
production jurisprudentielle en la matière remonte à l’affaire Nkong Emmanuel.
Dans cette affaire, le titre foncier querellé n’était pas le titre foncier originaire. Le
titre foncier originaire avait été immatriculé sous le no 1.200 du livre foncier du
Nyong et Sanaga. Le terrain avait été vendu à Nkong Emmanuel vers 1970. Cette
vente n’avait pas été effectuée devant le notaire, ce qui constituait déjà une
illégalité. Sur ce même terrain, Etoundi Gabriel, sur la base de son titre foncier
no 2649, le vendait aux prix de 200 000 francs à monsieur Mbede Ahang Jean
Michel suivant acte notarié dressé le 16 juin 1972 par maître Ahanda. Le
2 janvier 1973, le titre foncier no 3905 fut établi au nom de Mbede Ahang Jean
Michel par Kamwa, malgré les oppositions formées par Nkong à la suite d’une
vente devant notaire le 4 août 1972. Kamwa fait muter le titre en son nom le
même jour. Devenu propriétaire du terrain, Kamwa assigne Nkong en expulsion
sur la base du titre foncier no 3905. Nkong demande l’annulation de ce titre. À la
question de savoir si le titre foncier querellé était un acte administratif, la
Chambre administrative par une belle construction, répond par l’affirmative :

Considérant que les actes administratifs couvrent toutes les décisions ou


mesure affectant le public en général ou un individu en particulier sans
regarder l’autorité exécutive dont émane ces mesures ou décisions ; que
l’action peut être intentée par n’importe quelle personne ayant un intérêt
pour l’annulation des actes, décisions ou mesure » ; « Considérant dans le
cas d’espèce, que le document contesté étant un extrait du registre foncier
appelé titre foncier délivré et émis par le conservateur de la province du
Centre-Sud, document officiel qui confère un titre de terrain à son titulaire
sur la portion de terrain considéré ; que la procédure selon laquelle ces
titres (extraits du registre foncier) sont émis et réglementés pour assurer
l’impartialité et la paix sociale en évitant les abus » ; « Considérant qu’en
droit, la décision exécutoire ou acte administratif est tout acte juridique
unilatéral d’une administration qualifiée et agissant en tant que telle
susceptible de produire par lui-même des effets de droit » ; « Considérant
que le législateur en prévoyant dans l’ordonnance no 74/1 du 6 janvier 1974
fixant le régime foncier, des règles postérieures à fixer par décret
réglementaire relatives à l’annulation d’un titre foncier reconnaît qu’un
titre foncier est un acte susceptible d’être entaché d’excès de pouvoir ; qu’il
s’en suit qu’en l’absence de règles exceptionnelles d’annulation du titre
foncier, celui-ci est un acte administratif susceptible d’être déféré devant le
juge administratif.

47 Le juge administratif de l’espèce avait été très prudent. Sa solution était fondée
sur l’ordonnance de 1974 dans l’attente du décret qui devait fixer par la suite les
modalités d’obtention du titre foncier. Si l’on considère même que cette décision
était d’ordre général, c’est-à-dire applicable à tous les titres fonciers, la
production jurisprudentielle, après l’adoption du décret de 1976, l’isole tout
simplement. La doctrine, en s’appuyant sur l’espèce Nkong Emmanuel pour
conclure de l’administrativité du titre foncier, n’aurait pas tenu compte de la

☝🍪
jurisprudence postérieure95. À l’analyse, le titre foncier issu d’une vente comme
celui de l’espèce Nkong Emmanuel est un acte administratif attaquable. Il en est
également de ceux des mutations et partages.
48 À l’observation, dans les décisions de la Chambre administrative où elle
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déclare le titre foncier comme un acte administratif, il ne s’est jamais agi du titre
vous donne le contrôle sur
foncier de l’immatriculation, mais des titres fonciers établis à partir du titre
ceux que vous souhaitez
mère96. Le juge administratif contrôle la régularité de ces titres et les annule en
activer
cas d’irrégularités.

2.2. L’annulation des titres fonciers dérivés par le juge


administratif
49 Avant l’intervention du juge administratif (2.2.1), le retrait des titres fonciers
relève de la compétence du ministre en charge des domaines et des affaires
foncières (2.2.2).
2.2.1. L’intervention en amont du ministre des Domaines et des
Affaires foncières
50 Au Cameroun, l’administration est curieusement le gardien de la propriété
privée immobilière. Comme le note le magistrat Robinson Tchapmegni, l’une des
particularités du contentieux relatif à la propriété foncière découle du fait que
l’administration y cumule les rôles de juge et de partie97. S’agissant de son rôle de
juge, l’on note à l’observation que le ministre des Domaines et des Affaires
foncières dispose d’importants pouvoirs dans la résolution des contestations
relatives au titre foncier98. Ainsi, aux termes de l’alinéa 3 de l’article 2 du décret
de 1976, « le ministre chargé des affaires foncières peut en cas de faute de
l’administration, résultant notamment d’une irrégularité commise au cours de la
procédure du titre foncier et au vu des actes authentiques produits, procéder au
retrait du titre foncier irrégulièrement délivré ».
51 Le retrait du titre foncier par le ministre est subordonné par la faute de
l’administration99 et la production des actes authentiques par le demandeur.
Ainsi, si la faute de l’administration n’est pas prouvée, le retrait du titre ne peut
être opéré. Aussi, le ministre dispose en ce sens d’un pouvoir discrétionnaire. Il
n’est pas tenu de retirer le titre foncier même établi irrégulièrement. C’est
pourquoi, avant la modification intervenue en 2005, l’alinéa 4 du décret de 1976
posait que la décision du ministre est susceptible de recours devant le juge
administratif afin de limiter les abus du ministre. Cette disposition a été ôtée à la
faveur de la réforme de 2005. Mais, étant un acte administratif, la décision de
retrait sera toujours contrôlée par le juge administratif au travers du recours en
annulation pour excès de pouvoir.
52 Aussi, le retrait du titre est encadré. C’est ce qui ressort de l’article 2 alinéa 3 du
décret de 1976 modifié qui dispose en effet que : « le retrait du titre foncier prévu
à l’alinéa 3 du présent article ne peut, sauf cas de fraude du bénéficiaire,
intervenir que dans le délai du recours contentieux ». Il en ressort que lorsque le
retrait du titre foncier résulte de la faute de l’administration, la décision du
ministre est enfermée dans le délai de soixante jours100. Il s’agit d’un délai
d’ordre public dont la violation constitue une cause d’annulation de la décision
ministérielle par le juge administratif101. En cas de fraude du bénéficiaire, aucun
délai n’est prescrit au ministre des Affaires foncières. On peut subodorer que le
délai reste ouvert en cas de fraude du bénéficiaire. C’est ce qui ressort même de
l’affaire Ebene Ombolo Didier et autres contre l’État du Cameroun102.
53 En réalité, le ministre des Domaines est un acteur important du règlement des
litiges fonciers. Le retrait des titres fonciers dérivés ne peut intervenir que dans

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deux cas précis : la faute de l’administration d’une part, et la fraude du
bénéficiaire, d’autre part. Mais, dans la pratique, l’on observe de nombreux abus
de la part de cette autorité qui remettent en cause le caractère fondamental du
de propriété103. C’est pour limiter ces cas d’abus que le juge administratif
Ce droit
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vous donneà leannuler
contrôlelessur titres fonciers dérivés irrégulièrement établis par
l’administration.
ceux que vous souhaitez
activer

2.2.2. L’intervention en aval du juge administratif


54 L’intervention du juge administratif en aval permet de garantir le respect de la
légalité. Lorsqu’il est régulièrement saisi dans les formes et délais prescrits par la
loi, le juge administratif sanctionne les irrégularités commises au cours de
l’établissement des titres fonciers dérivés en les annulant tout simplement.
L’annulation se fonde soit sur les irrégularités émanant de l’administration
(2.2.2.1), soit sur les fraudes des bénéficiaires (2.2.2.2).
2.2.2.1. L’annulation fondée sur les irrégularités émanant de
l’administration foncière
55 De nombreux cas d’irrégularités surviennent dans l’établissement des titres
fonciers dérivés. Un examen des décisions du juge administratif atteste de la
volonté de l’administration à défier la norme foncière.
56 L’espèce Bollo Etogo contre État du Cameroun104 atteste de cette volonté de
l’administration à défier la légalité. Dans cette espèce, le requérant avait saisi la
juridiction administrative d’un recours tendant à l’annulation des titres fonciers
no 12390, 13641 et 13796 établis sur son terrain au profit des tiers. Par acte
notarié devant maître Mongo Mbock Philippe, il avait été procédé au partage du
terrain collectif revenant à Balla Bollo Paul décédé le 8 mai 1980. Bollo Etogo,
héritier de Balla Bollo Paul, reconnu par le jugement no 1290 du 13 juin 1983 du
tribunal de premier degré de Yaoundé, avait voulu se faire établir un titre foncier
sur le terrain du de cujus. Ce terrain, objet du titre foncier mère no 875, avait fait
l’objet des morcellements. L’État du Cameroun, pour faire échec à la prétention
du requérant, affirmait que le titre foncier « est la certification officielle de la
propriété immobilière », et que la qualité d’héritier ne lui conférait pas la qualité
de propriétaire. Le juge administratif va prononcer l’annulation de ces titres de
morcellement en affirmant :

[…] aux termes du paragraphe 2 de l’article 1er du décret no 76/165 du


27 avril 1976 fixant les conditions d’obtention du titre foncier, celui-ci est
inattaquable, intangible et définitif. Toute personne dont les droits ont été
lésés par suite d’une immatriculation n’a de recours sur l’immeuble, mais
seulement en cas de dol ; une action personnelle en dommages- intérêts
contre l’auteur du dol […]

Attendu que le décret no 76/161 du 27 avril 1976 précité énonçait en son


article 25 que « le démembrement d’un immeuble à la suite de vente
successive, de partage ou de cession à titre gratuit, emporte morcellement
du titre foncier initial au profit des acquéreurs, copartageants, ou des
cessionnaires » ;

Attendu que dans le cas d’espèce il y a au départ un titre foncier no 875 sur
l’immeuble collectif et indivis. Attendu qu’après le partage, chaque
copartageant devait avoir un morcellement conformément à l’acte notarié
du 5 février 1968 qui attribuait déjà 10 000 m2 à Mballa Bollo Paul.

Attendu par ailleurs que l’article 31 du décret no 76/165 du 27 avril 1976 sus
évoqué dispose que « avant de procéder à toute transformation en titre
foncier, le chef de service provincial de domaine doit vérifier sous sa
responsabilité, des pièces déposées et s’assurer en outre ; 1- de l’identité et
de la capacité des parties, 2- de la disponibilité de l’immeuble »

Attendu que le sieur Bollo Etogo est l’héritier du sieur Balla Bollo Paul

☝🍪
suivant jugement d’hérédité no 1290 du 13 avril 1985 ;

Qu’en délivrant les titres fonciers à Nganoma Marie-Thérèse, Mengue Joseph


et Onambele Hilaire sur la parcelle du terrain appartenant à Balla Bollo Paul
au détriment
Ce site utilise de Bollo
des cookies etEtogo son héritier, l’administration domaniale a
vous donne le contrôle sur mérite d’être sanctionnée par l’annulation des titres
commis une faute qui
fonciers litigieux.
ceux que vous souhaitez
57 activer
Plusieurs irrégularités de l’administration découlent dans cette espèce.
D’abord, l’établissement des titres fonciers querellés sans tenir compte de la
qualité d’héritier reconnu à Bollo Etogo ; ensuite la délivrance des titres fonciers
à des personnes n’entrant pas dans la succession ; enfin la violation de l’article 31
du décret du 27 avril 1976105.
58 La faute de l’administration peut aussi consister en la délivrance du titre
foncier à l’administrateur d’un bien successoral. L’article 10 du décret de 1976
fixant les conditions d’obtention du titre foncier modifié dispose à cet effet que
« les administrateurs des biens d’une succession ne peuvent obtenir en leur nom,
des titres fonciers sur ces biens ». L’administration avait violé cette disposition
dans l’espèce Les Ayants droit de feu Pehuie Kuo Pierre106. Dans cette affaire, le
sieur Pehuie Kuo décède sans descendance directe en laissant un immeuble
urbain à Mbouda d’une superficie de 1 000 mètres carrés et immatriculé au livre
foncier du département des Bamboutos sous le no 3453, vol. 18, fol. 59 du 1er août
1979. Ses collatéraux ont été désignés héritiers de sa succession. Sieur Noutong
Kuo est désigné par jugement d’hérédité, héritier principal et administrateur des
biens de la succession. Ce dernier par sa mauvaise foi fait immatriculer
l’immeuble successoral en son nom sous le numéro 1994 le 23 juillet 2001. Ce qui
fait une double immatriculation sur un même terrain. Après l’immatriculation, il
vend l’immeuble à un certain Fokou Ngnintedem et fait muter le titre foncier au
nom de l’acheteur. De même, ce même administrateur fait muter irrégulièrement
le titre foncier originaire no 3453 en son propre nom. Les ayants droit de feu
Pehuie Kuo estiment avoir été privés de leur droit sur l’immeuble puisqu’ils sont
sommés par l’acheteur de libérer les lieux. Les recourants demandent au juge
administratif l’annulation de la seconde immatriculation et de la mutation
opérée sur le titre originaire et obtiennent gain de cause au motif que
« l’administrateur de la succession n’est pas autorisé à immatriculer un bien de la
succession à son nom ».
59 L’irrégularité de l’administration provient aussi de la violation de l’article 8
alinéa 1 de l’ordonnance no 74/1 du 6 juillet 1974 fixant le régime foncier qui
dispose : « les actes constitutifs, translatifs ou extinctifs de droits réels
immobiliers doivent à peine de nullité être établis en la forme notariée ». C’est
dire que l’acte notarié constitue une condition sine qua non de la validité d’une
vente, cession ou mutation. C’est ainsi que le juge administratif annule le titre de
démembrement obtenu sans acte notarié107. Il faut aussi dire que la faute peut
aussi provenir du notaire lorsqu’il procède à la substitution du nom du véritable
acquéreur contre celui d’un tiers dans l’établissement de l’acte de vente108.
60 Comme on peut le remarquer, l’annulation des titres fonciers résulte d’un
manquement ou d’une abstention de la part de l’administration. C’est pourquoi le
décret de 1976 modifié définit l’irrégularité dans ce sens comme une faute. Ce qui
n’est pas le cas du côté du bénéficiaire du titre où l’annulation est fondée sur des
cas de fraudes.
2.2.2.2. L’annulation fondée sur la fraude du bénéficiaire
61 Les irrégularités du fait du bénéficiaire du titre foncier sont qualifiées de
fraudes. Par définition, la fraude est une tromperie pour laquelle l’auteur utilise
des moyens illicites pour nuire à autrui. Selon l’adage fraus omnia corrumpit, tout
acte juridique entaché de fraude peut être l’objet d’une action en nullité.
62 Le titre foncier obtenu par fraude du bénéficiaire peut être retiré ou annulé
par le ministre des Affaires foncières109. Le retrait du titre foncier entraîne

☝🍪
mutation sans frais dudit titre au nom du propriétaire initial s’il s’agit d’un
immeuble immatriculé. On peut retenir de cette disposition de l’alinéa 4 de
l’article 2 du décret de 1976 modifié que le titre qui doit être retiré ici est le titre
de démembrement puisque le titre immatriculé restera intact entre les mains du
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propriétaire originaire.
vous donne le contrôle sur
63
ceuxÉtant
queentendu que les titres de démembrement sont issus du titre foncier mère,
vous souhaitez
titre originaire
activer ou titre de l’immatriculation, de nombreux cas de fraudes
peuvent y subvenir. C’est le cas par exemple de la substitution de nom du
véritable propriétaire.
64 Dans l’espèce Succession Ndeffo Mbewou contre État du Cameroun110, la
fraude résultait en la substitution de nom des véritables propriétaires. Sieur
Mbouobouo était bénéficiaire d’un séjour dans la concession de Ndeffo grâce à
l’hospitalité de ce dernier. Le 22 juin 1975, il décède pendant que sieur
Mbouobouo se trouvait encore dans la concession. Ce dernier profite de ce décès
et orchestre à l’insu des véritables enfants du feu Ndeffo le bornage du terrain en
son nom. Par la suite, le terrain était immatriculé en son nom et concrétisé par le
titre foncier no 6611. Les enfants de Ndeffo Mbewou vont saisir la Chambre
administrative aux fins d’annulation de ce titre foncier au motif qu’ils avaient été
privés de leur immeuble par les manœuvres frauduleuses de sieur Mbouobouo.
Le juge administratif leur donne gain de cause en affirmant :

[…] les 13 enfants de feu Ndeffo Mbewou ont été privés de leur immeuble
par des manœuvres frauduleuses de sieur Mbouobouo qui lui ont permis de
tromper la vigilance de l’administration des domaines et le faire établir un
titre foncier en son nom sur près de 4 hectares de terrain appartenant à la
Succession Ndeffo Mbewou ;

Attendu qu’en faisant établir ledit titre foncier, le sieur Mbouobouo a, à


l’insu des héritiers de feu Mbewou, fait figurer les noms et signatures de ces
derniers sur le procès-verbal de bornage comme étant les riverains alors
qu’il s’agit du terrain de leur feu père.

65 L’espèce Succession Ndeffo Mbewou a été réitérée par le jugement Ekessi


Fidèle contre l’État du Cameroun ou le juge administratif a qualifié de fraude le
fait pour une personne d’obtenir un titre foncier au détriment des propriétaires
légitimes111.
66 Il est à noter que parfois le juge administratif assimile la faute à la fraude.
Alors que les textes sont clairs, pour qualifier de faute les agissements de
l’administration, le juge a qualifié de fraude le fait pour un agent de
l’administration des domaines et des affaires foncières de substituer son nom
dans l’acte de vente à celui du véritable acheteur aboutissant à la délivrance d’un
titre foncier112.

Conclusion
67 Le contentieux de l’excès de pouvoir du titre foncier est assis sur la distinction
entre titre foncier mère et titres fonciers dérivés. Dans sa politique
jurisprudentielle, le juge administratif de la Chambre administrative de la Cour
suprême a pendant longtemps jugé que le principe de la force probante du titre
foncier s’applique de « la manière la plus absolue » en ce qui concerne le titre de
l’immatriculation (titre mère). Par contre, s’agissant des titres fonciers dérivés, le
principe fléchit. De la sorte, le recours pour excès de pouvoir est écarté en ce qui
concerne le titre de l’immatriculation et reste toutefois ouvert s’agissant des
titres fonciers dérivés. L’on ne saurait donc conclure à une politique
jurisprudentielle « paradoxale » ou « incohérente113 ». Le choix du juge nous
semble d’une clarté irréprochable. Il s’agit d’une politique jurisprudentielle qui
titre sa source de l’interprétation de la norme foncière qui, quoique

☝🍪
discriminatoire, est assise sur une base juridique faible (le décret).
68 Si l’exclusion du recours en annulation contre le titre mère permet de
renforcer le caractère fondamental du droit de propriété parce que la procédure
d’immatriculation permet de lever tout doute sur l’origine de la propriété, il n’en
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demeure pas moins vrai que ce titre fait grief. C’est sans doute la raison pour
vous donne le contrôle sur
laquelle le juge de la Chambre administrative n’est pas suivi aujourd’hui par les
ceux que vous souhaitez
tribunaux administratifs qui généralise le recours en annulation sur tous les
activer
titres fonciers sans aucune distinction. C’est encore un choix pour ces tribunaux
dont l’objectif est de limiter l’arbitraire administratif. Mais, le choix du juge
administratif de la Chambre administrative de la Cour suprême nous semble le
meilleur. Il ne faudrait pas que l’on « banalise » le droit de propriété immobilière
avec le recours pour excès de pouvoir notamment en ce qui concerne le titre de
l’immatriculation obtenu après une procédure longue et essentiellement
contradictoire au contraire des titres fonciers dérivés. Qui plus est, en cas
d’immatriculation dolosive, le décret de 1976 permet la saisine du juge civil pour
obtenir les dommages et intérêts. Il semble que l’intervention du législateur
serait nécessaire en ce sens afin de confirmer cette politique jurisprudentielle. Le
Cameroun ayant opté pour le régime de l’immatriculation, le législateur devrait
doter le titre foncier de l’immatriculation d’une force probante absolue et
consacrer définitivement son injusticiabilité devant le juge administratif. Ainsi, le
recours pour excès de pouvoir ne s’exercerait que contre les titres fonciers
dérivés dont l’établissement n’épouse pas celui du titre mère.

Notes
1 . Gaston Jèze, Les principes généraux du droit administratif, Paris, Bergert-Levrault, 1904,
p. 50.
2 . Décret instituant au Cameroun le régime foncier de l’immatriculation, JOC, 1934, p. 230.
3 . La loi australienne de 1858 dit « Act Torrens » consacre l’immatriculation foncière
comme l’unique mécanisme d’appropriation privée des terres. Elle permet au
conservateur d’immatriculer chaque immeuble sous un nom et un numéro avec
inscription sur chaque titre foncier des droits réels et charges foncières qui grèvent
l’immeuble. Pour plus d’amples éclairages sur ce système, lire René Viollette, L’Act
Torrens : son application en Australie et en Tunisie, thèse de doctorat, faculté de droit de
Paris, 1900, 241 p.
4 . Civ. 1re, 18 février 1957, RJPUF, 1958, p. 380 ; Civ., 8 mars 1962, Penant, 1963, p. 424.
5 . Jean Carbonnier, Droit civil, t. III : Les biens, 15e éd., Paris, PUF, « Thémis », 1992, p. 123.
6 . Sur la question, voir Simon Gilbert, Le juge judiciaire, gardien de la propriété privée
immobilière. Étude de droit administratif, Paris, Mare et Martin, 2011, 946 p.
7 . Voir Stanislas Melone, La parenté et la terre dans la stratégie du développement.
L’expérience camerounaise : étude critique, Paris, Klincksieck, 1972, 201 p. ; Paul-Gérard
Pougoue, La famille et la terre : essai de contribution à la systématisation du droit privé au
Cameroun, thèse de doctorat d’État, université de Bordeaux I, juin 1977 ; Alexandre
Dieudonné Tjouen, Droits domaniaux et techniques foncières en droit camerounais : étude
d’une réforme législative, Paris, Economica, 1982, 209 p. ; Jean-Marie Nyama, Régime
foncier et domanialité publique au Cameroun, Yaoundé, PUCAC, 2001, 488 p. ; André
Tientcheu Njiako, Droits réels et domaine national au Cameroun, Yaoundé, PUA, 2005, 484
p. ; du même auteur Droits fonciers urbains au Cameroun, Yaoundé, PUA, 2003, 545 p. ;
Robinson Tchapmegni, Le contentieux de la propriété foncière au Cameroun, thèse de
doctorat, université de Nantes, 2008, 531 p.
8 . CS/CA, jugement no 1/75,19 déc. 1975, Nkong Emmanuel c/ État du Cameroun.
9 . Ce décret est modifié et complété par le no 2005/481 du 16 déc. 2005.
10 . Aloys Mpessa, « Le titre foncier devant le juge administratif camerounais : les
difficultés d’adaptation du système Torrens au Cameroun », Revue générale de droit,
vol. 34, no 4, 2004, p. 624.
11 . Yannick Serge Nkoulou, « Le titre foncier comme instrument de preuve », Droit et
politique de l’immobilier en Afrique. Exemple du Cameroun. Mélanges en l’honneur du
professeur André Tientcheu Njiako, Yaoundé, PUA, 2015, p. 482-510.
12 . Voir André Tientcheu Njiako, Le titre foncier au Cameroun, Yaoundé, ARIKA, 2009, p. 9.

☝🍪
13 . D. no 76/165, 27 avril 1976, [fixant les conditions d’obtention du titre foncier], modifié
par le D. no 2005/481, 16 déc. 2005, art. 2, al. 3.
14 . D. no 76/165, op. cit., art. 24.
Ce 15
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. Alexandre cookiesTjouen,
Dieudonné et op. cit., p. 133.
vous donne le contrôle sur
16 . Joseph Comby, Dictionnaire foncier [en ligne], p. 20, http://www.comby-
ceux que vous souhaitez
foncier.com/dictionnaire_foncier.pdf. La première version de ce texte est publiée en
supplément au n o 136 de la revue Études foncières.
activer
17 . André Tientcheu Njiako, Le titre foncier au Cameroun, op. cit., p. 37.
18 . Mamoudou Traore, « Les outils de la sécurisation foncière au Mali », Séminaire de
sensibilisation à la sécurisation foncière a l’attention des parlementaires d’Afrique
francophone, Bamako, 14 et 15 avril 2011, p. 4.
19 . Il s’agit des actes d’acquisition de terrains inscrits au Grundbuch, des actes
d’acquisition de terrains selon les règles de la transcription, des arrêtés d’attribution
définitive d’une concession domaniale, des livrets fonciers, ou des certificates of
occupancy, des jugements définitifs, constitutifs ou translatifs de droits réels, des
conventions entre Africains passées sous le régime du décret du 29 septembre 1920,
abrogé par la loi du 27 juin 1961 relatives aux actes notariés, des actes d’acquisition des
freeholds lands (D. de 1976 modifié, art. 3).
20 . D. no 76/165, op. cit., art. 9 à 21.
21 . Ibid., art. 22 à 24.
22 . Ibid., art. 25 à 29.
23 . André Tientcheu Njiako, Le titre foncier au Cameroun, op. cit., p. 21.
24 . D. no 76/165, op. cit., art. 38, al. 1.
25 . Art. 38, al. 2 : « Le propriétaire, à l’exclusion de toute autre personne, a droit à un
duplicatum du titre foncier et du plan y annexé ce duplicatum unique, est nominatif, et le
chef service provincial des domaines en certifie l’authenticité en y apposant sa signature
et le timbre du service. Tout usufruitier, emphytéote, antichrèse ou superficiaire a
également droit à un duplicatum authentique exact et complet du titre spécial dont il a pu
requérir l’établissement ; les autres titulaires de droits réels n’ont droit qu’à la délivrance
des certificats d’inscription nominatifs portant copie littérale des mentions relatives aux
droits réels ou charges inscrits ».
26 . Art. 38, al. 3 : « Lorsque deux ou plusieurs personnes sont propriétaires indivis d’un
immeuble, le titre, son duplicatum et le plan y annexé portent les noms des indivisaires.
Le duplicatum est délivré au propriétaire figurant en tête de liste. Les autres propriétaires
n’ont droit, sur leur demande, qu’à des copies certifiées conformes de livres fonciers ».
27 . Sur les spécificités d’élaboration des titres fonciers, lire : Urbain Noël Ebang Mve, Le
titre foncier au Cameroun. Recherche sur la spécificité d’un acte administratif unilatéral,
Paris, L’Harmattan, 2011, 268 p.
28 . Voir notamment Jean Calvin Aba’A Oyono, La compétence de la juridiction
administrative en droit camerounais, thèse de doctorat en droit, Nantes, 20 juin 1994, 510
p., Aloys Mpessa, op. cit. ; Urbain Noël Ebang Mve, op. cit. ; Simon Pierre Billong, « Le
contentieux de l’annulation du titre foncier devant le juge administratif », Actes de la
conférence sur la problématique de la propriété foncière au Cameroun, Hôtel de ville de
Mbalmayo, 18 novembre 2005, p. 28-35 ; Fernand Honoré Tagouemekong, « Le contentieux
d’annulation du titre foncier », ibid., p. 104-121 ; Bernard Raymond Guimdo Dongmo, « Le
contentieux de la délivrance du titre foncier », Document pédagogique du séminaire de
formation en contentieux administratif sur « le contentieux foncier et domanial ».
Programme d’appui au secteur de la justice au Cameroun, Kribi, 27 février-1er mars 2012,
Pool Cour Suprême, p. 1-15 ; du même auteur : « Le contentieux du retrait du titre
foncier », ibid., p. 1-14.
29 . Voir, en ce sens, Evelyn Mandessi Bell, « Radioscopie d’un système foncier africain :
l’exemple du Cameroun 50 ans après », Penant, mai-juin 1987, p. 286 ; Jean Calvin Aba’A
Oyono, op. cit., p. 458-459.
30 . Pour le professeur Jean Calvin Aba’A Oyono, « en application de l’article 1er
paragraphe 2 du décret no 76/165 du 27 avril 1976 fixant les conditions d’obtention du titre
foncier, qui y tient un triple caractère “inattaquable, intangible ; définitif”, et qu’en
conséquence, “toute personne dont le droits ont été lésés n’a pas de recours sur
l’immeuble…”, le juge administratif a forcément proclamé l’immunité juridictionnelle de
ce document d’immatriculation, lui déniant le caractère d’acte administratif décisoire.
Paradoxalement et au risque de désorienter le potentiel justiciable, ce même juge fait état
d’une production jurisprudentielle qui assimile le titre foncier à un acte administratif
soumis à la procédure de l’annulation contentieuse » (« Chronique du grain de sable dans
la fluidité jurisprudentielle à la Chambre administrative du Cameroun », Juridis
Périodique, no 78, avril-mai-juin 2009, p. 63 ; du même auteur, La compétence de la

☝🍪
juridiction administrative en droit camerounais, op. cit., p. 63.)
31 . Francis-Paul Benoit, Le droit administratif français, Paris, Dalloz, 1968, p. 574, cité par
Emmanuel Messan Acouetey, Le contrôle juridictionnel de l’administration en Afrique noire
francophone, thèse de doctorat en droit public, université de Nancy II, 1974, p. 200-201.
Ce 32
site utilise desAuby
. Jean-Marie cookies et Drago, Traité de contentieux administratif, 2e éd., Paris,
et Roland
vous donne
LGDJ, t. II, p.le contrôle sur
169.
ceux que vousLong,
33 . Marceau souhaitez
Prosper Weil, Guy Braibant, Pierre Delvolvé et Bruno Genevois, Les
activer
grands arrêts de la jurisprudence administrative, 18e éd., Paris, Dalloz, 2011, p. 394-397.
34 . Patrick Edgard Abane Engolo, Traité de contentieux administratif du Cameroun, Paris,
L’Harmattan, 2019, p. 227.
35 . CS/CA, jugement no 40, 29 mai 1980, aff. Monkam Tientcheu David contre État du
Cameroun.
36 . Il s’agit de la Chambre administrative de Cour suprême avant la mise en place
effective des tribunaux administratifs au niveau des régions.
37 . Pour de plus amples éclairages sur la politique jurisprudentielle, voir Guy Canivet et
Nicolas Molfessis, « La politique jurisprudentielle » [en ligne],
https://www.courdecassation.fr/IMG/File/pdf_2007/publications_2007/la_politique_jurisprudentielle.pdf,
consulté le 9-04-2020.
38 . Jérémie Van Meerbeeck, « Penser par cas… Et par principes », Revue interdisciplinaire
d’études juridiques, no 2, vol. 73, 2014, p. 77-97 ; François Ost, « Penser par cas : la
littérature comme laboratoire expérimental de la démarche juridique », ibid., p. 99-131 ;
Jeremy Perelman, « Penser la pratique, théoriser le droit en action : des cliniques
juridiques et des nouvelles frontières épistémologiques du droit », ibid., p. 133-153.
39 . Pierre Serrand et Piotr Szwedo, « Introduction », dans Pierre Serrand et Piotr Szwedo
(dir), L’injusticiabilité : émergence d’une notion ? Études publiées en hommage au professeur
Jacques Leroy, université Jagellonne, Cracovie, 2018, p. 9.
40 . De l’avis de Pierre Lampue, « [c]es formules énoncent le principe essentiel et le plus
caractéristique du régime de l’immatriculation foncière, principe que l’on retrouve dans
les textes instituant un pareil régime dans différents pays africains. Il a été jugé nécessaire
de le consacrer, pour atteindre le but visé par le législateur, c’est-à-dire, la clarté et la
sécurité des droits sur le sol. Il faut en effet que le titre foncier établi à la suite d’une
procédure destinée à assurer un examen complet de la situation matérielle et juridique
d’un immeuble, soit doté d’une force probante irréfragable et ne puisse pas être remis en
question », Pierre Lampue, Penant, 1975, p. 394, cité par Aloys Mpessa, op. cit., p. 626.
41 . CS/CA, jugement no 39, 21 mai 1987, Fotso Joseph Simonet c/État du Cameroun
(MINUH) ; no 1, 29 oct. 1987, Basso Théodore et Makong Daniel c/État du Cameroun.
42 . CS/CA, jugement no 29/2011/CS/CA, 12 janv. 2011, aff. Mmes Veuves Tounde née Akoa
Suzanne et Chimi née Himeni Rachelle c/ État du Cameroun.
43 . Alexandre Dieudonné Tjouen, op. cit., p. 173.
44 . Jean Marie Nyama est du même avis lorsqu’il écrit que « le titre foncier est en principe
inattaquable et définitif dans la mesure où ce document est établi à l’issue d’une
procédure minutieuse, entourée de publicité destinée à sauvegarder les droits des tiers. Le
requérant est mis en demeure, en cas d’opposition ou de demande d’inscription soit d’en
rapporter main levée formelle soit d’y acquiescer, soit de le rejeter. Aussi, après
l’expiration des délais légaux, il est tout à fait normal que l’immatriculation étant
ordonnée, on ne peut plus permettre la contestation des mentions portées au titre
foncier » (Jean Marie Nyama, op. cit., p. 166). À titre de droit comparé, voir Alima Chene-
Sanogo, Enjeux fonciers et développement « durable » au Mali, thèse de doctorat en droit,
université de Bourgogne, 2012, p. 404.
45 . CS/CA, jugement no 1, 29 oct. 1987, Basso Théodore et Makong Daniel c/État du
Cameroun.
46 . CS/CA, jugement no 39, 30 avril 1992, Kitio David c/ État du Cameroun. Ici, le juge
administratif a déclaré nul le droit allégué par l’opposant au motif que « l’opposition
formée le 30 juin 1980 après le constat de la commission consultative en date du 20 juin
1980 est irrégulière, donc irrecevable pour avoir été adressée au sous-préfet et non au
chef de service provincial de domaine ». Le juge avait ainsi déclaré le titre foncier établi
au sieur Yankoua Martin, obtenu après la procédure d’immatriculation, inattaquable,
intangible et définitif.
47 . D. no 76/165, op. cit., art. 16, al. 1a.
48 . CS/CA, jugement no 39/86-87, 21 mai 1987, recours no 54/86-87, 1er septembre 1981.
49 . CS/CA, jugement no 18/91-92, 30 janv. 1992, Eyana Assouga Guillaume, recours
no 52/91-92, 8 mai 1984.

☝🍪
50 . André Tientcheu Njiako, Le titre foncier au Cameroun, op. cit., p. 103.
51 . D. no 76/165, op. cit., art. 39.
52 . Sous l’empire du décret de 1976, la publication ne devrait se faire qu’au Journal
Ce officiel de la République.
site utilise des cookies Leetdécret de 2005 qui modifie celui de 1976 est venu remplacer le
Journal officiel par le bulletin des avis domaniaux et fonciers. C’est qui est normal puisque
vous donneofficiel
le Journal le contrôle
n’existesur
au Cameroun que sur papier.
ceux que vous souhaitez
53 . Charles Ambiallet note à ce sujet que : « porta [l]’immatriculation est la liquidation
activer
complète du passé juridique de l’immeuble et l’avènement de celui-ci, à une vie nouvelle,
dont l’histoire sera écrite sous la partie relative à l’inscription. […] Tous les titres
antérieurs à l’immatriculation sont annulés pour faire place au titre foncier qui porte en
lui la preuve du droit du propriétaire. Il ne s’agit plus, après l’immatriculation, de
rechercher, ni même de savoir, comment celui-ci a pu, antérieurement, acquérir son droit.
Est-ce par voie de succession, de donation, de vente ? Peu importe. Il tient désormais, son
droit de l’immatriculation. […] L’immatriculation purge les droits antérieurs qui ne
seraient pas mentionnés au titre foncier. Les droits réels, les charges foncières grevant
l’immeuble doivent se manifester pendant la période de la procédure d’immatriculation.
Si leur titulaire a négligé de les sauvegarder, à ce moment opportun, en demandant leur
inscription sur le titre foncier à venir, l’immeuble en est affranchi » (Les effets de la force
probante de l’inscription sur le livre foncier marocain, Paris, Domat-Montchrestien, 1934,
p. 42-43, cité par Aloys Mpessa, op. cit., p. 628).
54 . CS/CA, jugement Fotso Joseph Simonet, 21 mai 1987, précité.
55 . CS/CA, jugement no 16/2002-2003, 28 nov. 2002, aff. Collectivité Fonkouakem c/État du
Cameroun (MINUH).
56 . Jean-Marie Nyama, op. cit., p. 173-174, n. 193. André Tientcheu Njiako souligne à ce
sujet qu’« au cours de la procédure d’immatriculation, les personnes titulaires de droits
sur l’immeuble ont eu tout loisir de faire inscrire ces droits afin qu’ils soient portés sur le
titre foncier devant être délivré. Dès lors qu’elles ont laissé les délais d’opposition expirer,
qu’elles aient été absentes, qu’il s’agisse d’un oubli ou d’une erreur et quel que soit de
manière générale la raison du défaut d’inscription, elles ne peuvent plus être admises à
faire inscrire ces droits » (Le titre foncier au Cameroun, op. cit., p. 117).
57 . Civ. 1re, 18 février 1957, RJPUF, 1958 : 380 ; Civ., 8 mars 1962, Penant, 1963 : 424, cités
par Ahonagnon Noël Gbaguidi, « La revendication du monopole foncier de l’État,
l’intangibilité du titre foncier et l’accès à la terre au Benin », Journal of Legal Pluralism,
no 39, 1997, p. 59.
58 . Sur la question, lire Alassa Mongbat, « Le droit de propriété privée immobilière en
droit positif camerounais : quelle génération des droits de l’homme ? Contribution à
l’étude de la classification d’un droit fondamental de l’homme en perpétuelle évolution »,
Revue panafricaine des sciences juridiques comparées – Mosaïque, no 11, 2015, p. 94-146.
59 . Sur la question, voir Isabelle Forestier, La fragilisation de la propriété privée
immobilière, thèse de doctorat en droit, université du Sud-Toulon-Var, 2009, p. 258-281.
60 . Cette motivation du juge est reprise dans bon nombre d’autres décisions : CS/CA,
jugement no 18, 26 mars 1987, Mbida Mathernus ; CS/CA, jugement no 54, 25 juin 1987,
Mpondo Dibongue Gabriel et la collectivité Bonatonè ; CS/CA, jugement no 55, 15 mars 1988,
Tato Jean ; CS/CA, jugement no 60, 31 mars 1988, Akoa Ndongo Luc ; CS/CA, jugement no 62,
26 mai 1988, Waguia Véronique ; CS/CA, jugement no 65, 26 mai 1988, Epie Martin, CS/CA,
jugement no 69, 30 juin 1988, Elomo Mineli Bernard.
61 . Aloys Mpessa, op. cit., p. 626.
62 . Paul-Gérard Pougoue, La famille et la terre. Essai de contribution à la systématisation
du droit privé au Cameroun, thèse de doctorat en droit, université de Bordeaux, juin 1977,
p. 66-67, cité par Robinson Tchapmegni, op. cit., p. 278-279.
63 . CS/CA, jugement no 18, 26 mars 1987, Mbida Mathernus.
64 . CS, arrêt no 33, 27 avril 1979, Fonkou Victor dit Mba Deffo c/ Touwonping Koagne,
Tamba David Podop, Poka Benjamin et Tagne Joseph, BACS, no 39, 1978, p. 5857. Dans le
même sens, voir CS, arrêt no 18, 7 déc. 1978, aff. Bonjawo Joseph c/Église Presbytérienne du
Cameroun, BACS, no 40, p. 6144 et suiv. commenté par Isidore Léopold Miendjiem, Les
grandes décisions de la jurisprudence civile camerounaise, François Anoukaha (dir),
Bamenda, LERDA, 2008, p. 144-154.
65 . CS/CA, jugement n° 19-2000, 30 déc. 1999, aff. collectivité Mvog-Ndongo Evouna c/ État
du Cameroun (MINUH) & Evouna Pierre René (intervenant volontaire), recours no 722/99-
2000, 30 janv. 1998.
66 . CS/CA, aff. Eyana Assouga Guillaume c/ État du Cameroun, précitée.
67 . CS/CA, jugement no 343/2010/CS/CA, 27 oct. 2010, Mme Veuve Onana Mewoe Marie
Thérèse c/ État du Cameroun (MINDAF), recours no 255/2008, 3 oct. 2008.
68 . Jurisprudence constante : CS/CA, jugement Fotso Joseph Simonet précité ; CS/CA,

☝🍪
jugement no 11/91-92, 6 déc. 1991, Bolo Etogo c/État du Cameroun ; CS/CA, jugement
no 55/99-2000, 29 juin 2000, Feupissie Jean-Marie c/ État du Cameroun (MINUH) et Keuko
Alexandre (intervenant volontaire) ; CS/CA, jugement no 37/99-2000, 24 févr. 2000, Bamby
Boniface c/État du Cameroun (MINUH) et Associations des chrétiens des Témoins de Jéhovah
et Betho Robert et Betho Dieudonné (intervenants volontaires) ; CS/CA, jugement no 97/03-
Ce 04,
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juin 2004, et
aff. Tchokouadi Jean c/ État du Cameroun (MINUH) ; CS/CA, jugement
vous donne le25contrôle
no 17/CS/CA, sur
janv. 2012, aff. Succession Youdom c/ État du Cameroun (MINDAF).
ceux que Mpessa,
69 . Aloys vous souhaitez
op. cit., p. 639.
activer
70 . Maurice Kamto, Droit administratif processuel du Cameroun, Yaoundé, PUC, 1990,
p. 230.
71 . Pierre Serrand, « Les explications doctrinales de l’injusticiabilité de l’acte de
gouvernement : contribution à une typologie des injusticiabilités », dans Pierre Serrand et
Piotr Szwedo (dir), op. cit., p. 63-76.
72 . Selon l’article 4 de la loi no 2006/022 du 29 décembre 2006 fixant l’organisation et le
fonctionnement des tribunaux administratifs, « aucune juridiction ne peut connaître des
actes de gouvernement ».
73 . Pierre Serrand, op. cit., p. 71.
74 . Ibid., p. 63.
75 . CS/CA, jugements Kouang Guillaume Charles du 31 mai 1979 et Essomba Marc Antoine
du 29 mars 1980.
76 . Concl. Bernard Tricot sur CE, 29 janvier 1954, Institution Notre-Dame du Kreisker,
R. 64, RFDA, 1954.50.
77 . André Maurin, Droit administratif, 11e éd., Paris, Sirey/Dalloz, 2018, p. 68.
78 . Georges Dupuis, Marie-José Guédon, Patrice Chrétien, Droit administratif, Paris,
Sirey/Dalloz, 10e éd., 2007, 695 p., p. 623.
79 . Robert-Édouard Charlier, « Circulaires, instructions de service et autres prétendues
mesures d’ordre intérieur administratives », JCP 1954, I, 1169. Selon Édouard Laferrière,
« toute manifestation des intentions d’un administrateur n’est pas, par elle-même, un acte
sur lequel un débat contentieux puisse s’engager. Pour que le recours soit recevable, il
faut qu’il existe une décision susceptible d’être exécutée ; si l’administrateur s’est borné à
manifester ses intentions qui ne pourraient se réaliser que par des actes ultérieurs, la
partie doit attendre que ces actes l’atteignent… Pour former valablement le recours pour
excès de pouvoir, il ne suffit pas qu’on se croie menacé par une décision éventuelle, il faut
qu’on soit réellement touché par une décision actuelle ». Édouard Laferrière, Traité de la
juridiction administrative et des recours contentieux, 2e éd., Paris, Bergert-Levrault, 1896,
t. II, p. 427.
80 . Jacques-Henri Stahl et Didier Chauvaux, « Chronique générale de jurisprudence
administrative française », AJDA 1996, no 5, p. 366, cité par Célestin Keutcha Tchapnga,
« L’irrecevabilité du recours pour excès de pouvoir contre les actes préparatoires au
Cameroun : À propos de quelques décisions jurisprudentielles », Revue marocaine
d’administration locale et développement, no 26, janvier-mars 1999, p. 66.
81 . CS/CA, jugement no 50, 15 janv. 1990, Essama Joachim Michel c/ État du Cameroun.
82 . CS/CA, jugement no 77/02-03, 24 avril 2003, aff. Effa Victor c/ État du Cameroun
(MINUH), recours no 572/94-95, 22 févr. 1995 ; CS/CA, jugement no 38/04-05, 29 déc. 2004,
aff. Association Le Tabernacle des Aigles c/ État du Cameroun (MINATD) ; TA [Littoral],
jugement no 085/FD/16, 19 mai 2016, aff. Monsieur Bayemi Manasse c/ État du Cameroun
(MINDCAF).
83 . Guy Canivet et Nicolas Molfessis, op. cit., p. 1.
84 . Aloys Mpessa, op. cit., p. 635.
85 . Magloire Ondoa, « Préface », dans Urbain-Noël Eban Mve, op. cit., p. 15-17.
86 . Célestin Sietchoua Djuitchoko, « Les limites au principe de l’absoluité du titre
foncier », dans Droit et politique de l’immobilier en Afrique, op. cit., p. 587-597.
87 . Selon le préambule de la Constitution de 1972 repris par celle de 1996, « La propriété
est le droit d’user, de jouir et de disposer des biens garantis à chacun par la loi. Nul ne
saurait en être privé si ce n’est pour cause d’utilité publique et sous la condition d’une
indemnisation dont les modalités sont fixées par la loi ; le droit de propriété ne saurait
être exercé contrairement à l’utilité publique, sociale ou de manière à porter préjudice à
la sûreté, à la liberté, à l’existence ou à la propriété d’autrui ».
88 . Selon l’art. 544, « la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière
la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les
règlements ».
89 . TA [Centre], jugement no 178/ADD/2015/TA-YDE, 10 nov. 2015, aff. Ntsama Gabriel et
consorts c/ État du Cameroun (MINDCAF) : « Considérant que contrairement à ce que

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soutient l’État du Cameroun, un titre foncier délivré sur les mises en valeur d’autrui est un
acte administratif fondé sur des faits matériellement inexacts ; que cette erreur de fait est
un cas d’ouverture du recours pour excès de pouvoir ; que la compétence du Juge
administratif à connaître du présent recours est donc justifiée » ; TA [Sud], jugement
no 13/ADD/2016, 24 août 2016, aff. Akono Mbongo’O Moline c/ État du Cameroun
Ce (MINDCAF)
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« “Qu’en et le titre foncier litigieux est un acte administratif dont le
effet,
vous donne ledecontrôle
contentieux l’excès desurpouvoir relève du Tribunal administratif”. Ces alinéas que
l’immatriculation
ceux d’un immeuble ne fait pas obstacle à l’exercice d’un recours contre le
que vous souhaitez
titre foncier établi en fraude à la loi ; que par conséquent, le moyen soulevé par Me Tassa
activer
André Marie encourt rejet ».
90 . TA [Ouest, Bafoussam], jugement no 02/ADD/TA/BFM/2015, 27 avril 2015, aff. Nembot c/
État du Cameroun (MINDCAF) & Tchendjou Joseph Fopah Jean Aimé : TA [Ouest,
Bafoussam], jugement no 02/ADD/TA/BFM/2015, 27 avril 2015, aff. Nembot c/ État du
Cameroun (MINDCAF) & Tchendjou Joseph Fopah Jean Aimé : « Attendu que sur le moyen
soulevé par maître Tassa André Marie, relatif à l’impossibilité d’un recours sur un
immeuble en cas d’immatriculation, le défendeur soutient qu’au regard de l’article 2 du
décret no 2005/481 du 16 décembre 2005 fixant les conditions d’obtention du titre foncier,
l’immatriculation d’un immeuble a un caractère irréversible sauf à engager une action
personnelle en dommages-intérêts devant le juge civil du lieu de situation de l’immeuble,
et ce, seulement en cas de dol ; Mais attendu que les alinéas 3 et 6 de l’article 2 précité,
constituent des exceptions à cette règle ; que l’alinéa 3 dispose “Toutefois, le ministre
chargé des Affaires foncières peut, en cas de faute de l’Administration résultant
notamment d’une irrégularité commise au cours de la procédure d’obtention du titre
foncier, et au vu des actes authentiques produits, procéder au retrait du titre foncier
irrégulièrement délivré” ; que l’alinéa 6 énumère les cas pour lesquels un titre foncier est
nul d’ordre public ; qu’il s’agit notamment lorsque “le titre foncier est délivré
arbitrairement sans suivi d’une quelconque procédure, ou obtenu par une procédure
autre que celle prévue à cet effet” ; attendu qu’il résulte de ces alinéas que
l’immatriculation d’un immeuble ne fait pas obstacle à l’exercice d’un recours contre le
titre foncier établi en fraude à la loi ; que par conséquent, le moyen soulevé par Me Tassa
André Marie encourt rejet ».
91 . Aff. Fotso Joseph Simonet c/ État du Cameroun, précitée.
92 . Aff. Basso Théodore et Makong Daniel c/ État du Cameroun, précitée.
93 . D. no 76/165, op. cit., art. 29.
94 . Fernand Honoré Tagouemekong, op. cit., p. 106.
95 . Voir, en ce sens, Aloys Mpessa, op. cit., p. 638.
96 . CS/CA, jugement no 92/ADD, 30 juin 2004, aff. Bomba Essomba Alphonse. Dans cette
affaire, le représentant de l’État affirmait que le titre foncier issu d’un acte notarié n’est
pas assimilable à un acte administratif pouvant être attaqué devant le juge administratif.
En réitérant sa jurisprudence claire en ce sens, le juge administratif assimile le titre
foncier de l’espèce comme un acte administratif : « Attendu qu’il ressort de l’article 9 de
l’ordonnance no 72/6 du 26 août 1972 fixant l’organisation de la Cour suprême que le juge
administratif est compétent pour juger les recours en annulation des actes administratifs
pour excès de pouvoir… ; attendu par ailleurs, qu’aux termes de l’article 1er du décret
no 76/165 du 27 avril 1976 fixant les conditions d’obtention du titre foncier, ce document
est la certification officielle de la propriété foncière; qu’en l’espèce, le recours de Bomba
Essomba Alphonse Léandre et autres tend à la rectification du titre foncier querellé par
l’adjonction de leurs noms sur celui-ci en tant que cohéritiers indivisaires de leur feu père
Essomba Fouda Jean ; attendu, quelle que soit l’origine des droits leur ayant donné
naissance, le titre foncier est un acte de l’administration ; que de ce fait, il est susceptible
d’être attaqué devant le juge administratif ; attendu qu’il s’ensuit que le juge administratif
est régulièrement saisi s’agissant du présent litige et doit se déclarer compétent ». Cf. dans
le même sens : CS/CA, jugements : no 13/2003-2004, 5 nov. 2003, aff. Esso Laurent Marie c/
État du Cameroun (MINUH) ; no 117/2003-2004, 25 août 2004, aff. Belibi François c/ État
Cameroun (MINUH) ; no 124/04-05, 27 juill. 2005, aff. Dame Endalle Moudio Hélène et autres
c/ État du Cameroun (MINUH) ; no 095/2003-2004, 30 juin 2004, aff. Mbida Barthélemy c/
État du Cameroun (MINUH) ; no 25/2003-2004, 28 janv. 2004, aff. Kuenda Jean c/ État du
Cameroun (MINUH) ; no 148/04-05, 31 août 2005, aff. Nkom Etoa Williams c/ État du
Cameroun.
97 . Robinson Tchapmegni, op. cit., p. 21.
98 . Ibid., p. 133.
99 . Ibid., p. 134.
100 . André Tientcheu Njiako, Le titre foncier au Cameroun, op. cit., p. 156.
101 . CS/CA, jugement no 25/99-2000, 30 déc. 1999, aff. Njoh Philibert et Ekoka Koum Samuel
c/ État du Cameroun (MINUH) et Ngankam Sielenou Jean.
102 . CS/CA, jugement no 189/2011, 7 sept. 2011. Dans le même sens, voir CS/CA, jugement
no 123/2009/CA/CS, 22 juill. 2009, aff. Chedjou Omar Noe c/ État du Cameroun (MINDAF) &

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Defo David (intervenant volontaire) ; CS/CA, jugement no 160/04-05, 31 août 2005, aff. Betsen
A Tiati Jean R. c/ État du Cameroun (MINUH).
103 . Robinson Tchapmegni, op. cit., p. 133. Pour une étude comparée sur les atteintes au
droit de propriété, voir Jean-François Lachaume et Hélène Pauliat, « Le droit de propriété
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fondamental », Droit et politique à la croisée des chemins. Études en
vous donne
l’honneur dele contrôle
Philippe sur Paris, LGDJ, 1999, p. 373.
Ardant,
ceux
104 . que vous
CS/CA, souhaitez
jugement no 10, 26 déc. 1991, aff. Bollo Etogo c/ État du Cameroun.
activer
105 . Cet article dispose que : « Avant de procéder à toute transformation des actes en
titres fonciers, le chef de service provincial des domaines doit vérifier sous sa
responsabilité les pièces déposées et s’assurer en outre : De l’identité et de la capacité des
parties ; de la disponibilité de l’immeuble ». La réforme de 2005 a remplacé le chef de
service provincial des domaines par « le conservateur foncier ».
106 . CS/CA ; jugement no 64/2009/CA/CS, 11 mars 2009, aff. Ayant droit de feu Pehuie Kouo
Pierre c/ État du Cameroun. En ce sens, voir Bernard-Raymond Guimdo Dongmo, op. cit.,
p. 12.
107 . CS/CA, jugement no 255/2010, 22 septembre 2010, aff. Les Ayants droit de feu Ndzinga
Joseph c/ État du Cameroun (MINDAF).
108 . Aff. Kong Emmanuel, précitée.
109 . Voir art. 2, al. 4 du décret no 76/165 du 27 avril 1976 fixant les conditions d’obtention
du titre foncier, modifié par le décret no 2005/481 du 16 déc. 2005.
110 . CS/CA, jugement no 74/99-2000, 28 sept. 2000, aff. Succession Ndeffo Mbewou c/ État du
Cameroun (MINUH).
111 . CS/CA, jugement no 73, 28 sept. 2000, Ekessi Fidèle c/ État du Cameroun.
112 . CS/CAY, aff. Kong Emmanuel c/ État du Cameroun précitée ; CS/CA, jugement no 41,
28 juin 1989, aff. Ateba Barthélemy c/ État du Cameroun.
113 . En ce sens, voir Jean-Calvin Aba’A Oyono, La compétence de la juridiction
administrative en droit camerounais, op. cit., p. 63 et 458.

Pour citer cet article


Référence papier
Alassa Mongbat, « Retour sur une problématique classique : la qualification du titre foncier
comme acte administratif faisant grief dans la jurisprudence de la Chambre administrative de la
Cour suprême du Cameroun », Les Annales de droit, 15 | 2021, 71-100.

Référence électronique
Alassa Mongbat, « Retour sur une problématique classique : la qualification du titre foncier
comme acte administratif faisant grief dans la jurisprudence de la Chambre administrative de la
Cour suprême du Cameroun », Les Annales de droit [En ligne], 15 | 2021, mis en ligne le 09 janvier
2023, consulté le 25 mars 2025. URL : http://journals.openedition.org/add/2106 ; DOI :
https://doi.org/10.4000/add.2106

Auteur
Alassa Mongbat
Docteur/Ph.D en Droit public

Enseignant-chercheur

Assistant à la Faculté des sciences juridiques et politiques

Université de Dschang (Cameroun)

Droits d’auteur

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-SA 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers
annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

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