Document 6 : CJUE 21 janv. 2016, aff.
C-359/14 et C-475/14, Ergo Insurance et Gjensidige Baltic
Les litiges au principal et les questions préjudicielles
L’affaire C-359/14
24 Le 1er septembre 2011, aux environs de Mannheim (Allemagne), un véhicule tracteur muni d’une
remorque s’est renversé sur la chaussée alors qu’il effectuait un demi-tour. Sur la base des constats effectués
par les agents de police intervenus sur les lieux de l’accident, le conducteur du véhicule tracteur a été déclaré
responsable de l’accident. En conséquence, l’assureur de ce véhicule, la succursale d’« ERGO Insurance»
SE, a versé aux victimes dudit accident une indemnité d’un montant de 7760,02 litas lituaniens (LTL)
(environ 2255 euros).
Cet assureur a ensuite saisi la juridiction de renvoi aux fins de faire condamner l’assureur de la remorque,
à savoir la succursale d’«If P&C Insurance» AS, à prendre en charge la moitié de l’indemnité d’assurance
qu’il a dû verser, au motif que celui-ci devait répondre solidairement du dommage causé.
25 Selon la juridiction de renvoi, il existe des incertitudes quant à la détermination de la loi applicable au
litige entre ces deux assureurs.
26 C’est dans ces circonstances que le Vilniaus miesto apylinkės teismas (tribunal de district de la ville de
Vilnius) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
«1) Convient-il d’interpréter l’article 4, paragraphe 4, du règlement Rome I, aux termes duquel, ‘[l]orsque
la loi applicable ne peut être déterminée sur la base du paragraphe 1 ou 2 [de cet article 4], le contrat est
régi par la loi du pays avec lequel il présente les liens les plus étroits’, en ce sens que c’est la loi allemande
qui est applicable dans des situations telles que celle en cause dans l’affaire au principal ?
2)Dans la négative, convient-il d’interpréter la règle énoncée à l’article 4 du règlement Rome II en ce sens
que, dans des situations telles que celle en cause dans l’affaire au principal, la loi applicable au litige entre
l’assureur du véhicule tracteur et l’assureur de la remorque doit être déterminée selon la loi du pays où
survient le dommage causé par l’accident de la circulation ? »
L’affaire C-475/14
27 Lors d’un accident de la circulation survenu en Allemagne le 21 janvier 2011, un véhicule
tracteur muni d’une remorque a endommagé des biens appartenant à d’autres personnes. Le
véhicule tracteur était alors assuré au titre de la responsabilité civile auprès de la succursale
lituanienne de Gjensidige Baltic. La remorque était assurée dans le cadre d’un contrat
d’assurance de responsabilité civile conclu avec PZU Lietuva.
28 À la suite de réclamations présentées en Allemagne par des victimes de cet accident,
Gjensidige Baltic a versé des indemnités d’assurance d’un montant de 4331,05 LTL (environ
1254 euros). Gjensidige Baltic estime que, dès lors que ces indemnités couvraient
l’intégralité du préjudice subi par ces victimes, elle pouvait intenter une action récursoire à
l’encontre de PZU Lietuva pour obtenir le remboursement de la moitié dudit montant, soit
2165,53 LTL (environ 629 euros).
29 Par jugement du 2 janvier 2013, le Vilniaus miesto apylinkės teismas (tribunal de district de la ville de
Vilnius) a fait droit à la demande de Gjensidige Baltic. Il a condamné PZU Lietuva à rembourser à cette
dernière les indemnités d’assurance versées à concurrence de 2165,53 LTL, montant majoré des intérêts au
taux annuel de 6 %. Cette juridiction a indiqué que, conformément à l’article 4, paragraphe 1, du règlement
Rome II, c’était le droit allemand qui s’appliquait à l’obligation non contractuelle résultant du fait
dommageable. Or, en vertu du droit allemand, il y aurait lieu d’opérer un partage de responsabilité en raison
des dommages résultant d’un accident de la circulation causé par un véhicule muni d’une remorque.
Lorsque le préjudice est indemnisé par l’un des assureurs, celui-ci serait en droit de réclamer la moitié du
montant à un autre assureur.
30Par un arrêt du 8 novembre 2013, le Vilniaus apygardos teismas (cour d’appel de Vilnius) a annulé le
jugement du Vilniaus miesto apylinkės teismas (tribunal de district de la ville de Vilnius) et a rejeté l’action
récursoire intentée par Gjensidige Baltic. La juridiction d’appel a constaté que, en l’occurrence, les
questions liées à la responsabilité civile résultant de la circulation du véhicule devaient être résolues sur la
base du contrat d’assurance obligatoire de responsabilité civile résultant de la circulation du véhicule et que
les dispositions du règlement Rome II n’étaient pas applicables. En effet, dès lors qu’un contrat d’assurance
obligatoire avait été conclu dans l’affaire au principal, la situation en cause ne pourrait pas relever de la
responsabilité civile délictuelle. Considérant que l’obligation de PZU Lietuva découlait du contrat
d’assurance obligatoire, cette juridiction a conclu à l’applicabilité du droit lituanien.
31 Le pourvoi en cassation formé par Gjensidige Baltic devant la juridiction de renvoi vise à obtenir
l’annulation de cet arrêt et la confirmation du jugement du 2 janvier 2013 du Vilniaus miesto apylinkės
teismas (tribunal de district de la ville de Vilnius).
32 La juridiction de renvoi relève que le litige porte essentiellement sur la qualification de la relation
juridique existant entre les assureurs respectifs du véhicule tracteur et de la remorque et sur la détermination
de la loi applicable à cette relation. Cette qualification serait déterminante pour ce litige, dès lors que les
ordres juridiques lituaniens et allemands établiraient des principes différents de partage de responsabilité
entre l’assureur du véhicule tracteur et l’assureur de la remorque lorsque le dommage est causé par un
véhicule couplé.
33 Par ailleurs, il serait nécessaire de déterminer si, ainsi que le soutient Gjensidige Baltic, l’article 14, sous
b), de la directive 2009/103 établit une règle de conflit de lois aux termes de laquelle la loi du lieu de
l’accident serait applicable à un litige entre assureurs tel que celui au principal.
34 Dans ces circonstances, le Lietuvos Aukščiausiasis Teismas (Cour suprême de Lituanie) a décidé de
surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:«1)L’article 14, sous b), de la
directive 2009/103 énonce-t-il une règle de conflit de lois, qui s’applique, ratione personae, non seulement
à l’égard des victimes d’accidents de la circulation, mais également pour déterminer la loi applicable à la
relation entre les assureurs des véhicules ayant causé le dommage et cette règle de conflit constitue-t-elle
une règle spéciale à l’égard des règles de conflit édictées dans les règlements Rome I et Rome II?
2) En cas de réponse négative à la première question, il convient de clarifier si la relation existant dans la
présente affaire entre assureurs peut être qualifiée d’‘obligation contractuelle’, au sens de l’article 1er,
paragraphe 1, du règlement Rome I. Si la relation entre assureurs relève de la notion d’‘obligation
contractuelle’, il importe de savoir si cette relation juridique est considérée relever des contrats d’assurance
et si la loi applicable doit être déterminée en application des règles établies à l’article 7 du règlement Rome
I.
3)En cas de réponse négative aux deux premières questions, il y a lieu de clarifier si, en cas d’action
récursoire, la relation entre les assureurs d’un ensemble de véhicules couplés relève de la notion
d’‘obligations non contractuelles’, au sens du règlement Rome II, et si cette relation est à considérer comme
une relation juridique dérivée, résultant de l’accident de la circulation (fait dommageable) aux fins de la
détermination de la loi applicable conformément à l’article 4, paragraphe 1, du règlement Rome II. Dans
un cas tel que celui en cause dans la présente affaire, les assureurs de l’ensemble de véhicules couplés
doivent- ils être considérés comme des débiteurs responsables au titre de la même obligation au sens de
l’article 20 du règlement Rome II et la loi applicable à la relation existante entre eux doit-elle être
déterminée selon cette règle ?»
35 Par décision du président de la Cour du 19 novembre 2014, les affaires C-359/14 et C-475/14 ont été
jointes aux fins de la procédure orale ainsi que de l’arrêt.
Sur les questions préjudicielles
36 Par leurs questions, qu’il convient d’examiner ensemble, les juridictions de renvoi cherchent, en
substance, à savoir comment il convient d’interpréter les règlements Rome I et Rome II ainsi que la directive
2009/103 aux fins de déterminer la ou les lois applicables dans le cadre d’une action récursoire de l’assureur
d’un véhicule tracteur, qui a indemnisé la victime d’un accident causé par le conducteur dudit véhicule, à
l’égard de l’assureur de la remorque tractée lors de cet accident.
37 Il convient de rappeler que, ainsi qu’il ressort de leurs articles 1 er, les règlements Rome I et Rome II
ont harmonisé les règles de conflit de lois applicables, en matière civile et commerciale, respectivement
aux obligations contractuelles et aux obligations non contractuelles. La loi applicable à ces deux catégories
d’obligations doit être déterminée au moyen des dispositions établies par l’un des deux règlements, sans
préjudice, toutefois, des règles visées aux articles 23 et 25 du règlement Rome I ainsi que 27 et 28 du
règlement Rome II.
38 À ce dernier égard, il convient de relever, d’une part, en réponse à l’interrogation formulée par le
Lietuvos Aukščiausiasis Teismas (Cour suprême de Lituanie) dans l’affaire C-475/14, que l’article 14, sous
b), de la directive 2009/103 n’énonce pas de règle de conflit de lois spéciale par rapport aux règles de conflit
édictées dans les règlements Rome I et Rome II en ce qui concerne les actions récursoires entre assureurs
et ne remplit, partant, pas les conditions posées, respectivement, aux articles 23 du règlement Rome I et 27
du règlement Rome II.
39 La directive 2009/103 impose aux États membres l’obligation d’adopter des mesures garantissant que la
victime d’un accident de la circulation et le détenteur du véhicule en cause dans cet accident soient protégés.
Selon son considérant 12, cette directive a pour objectif général d’assurer la protection des victimes
d’accidents en garantissant que ceux-ci bénéficient d’une couverture d’assurance minimale.
40 Il ne ressort ni des termes ni des objectifs de la directive 2009/103 que celle-ci vise à établir des règles
de conflits de lois.
41 Plus particulièrement, l’article 14 de ladite directive, lu conjointement avec le considérant 26 de celle-
ci, se cantonne à imposer aux États membres de prendre les mesures nécessaires pour que les polices
d’assurance automobile couvrent, sur la base d’une prime unique, la totalité du territoire de l’Union
européenne pendant la durée du contrat et à ce qu’elles garantissent, sur la base de cette prime, dans chacun
des États membres, la couverture requise par sa législation, ou la couverture exigée par la législation de
l’État membre où le véhicule a son stationnement habituel lorsque cette dernière est supérieure.
42 Cette disposition porte donc exclusivement sur l’étendue territoriale et le niveau de couverture que
l’assureur est tenu de fournir, afin d’assurer une protection adéquate aux victimes d’accidents de la
circulation. Il ne saurait en être déduit une règle selon laquelle la législation de l’État membre ainsi
déterminée régirait le partage de responsabilité entre assureurs.
43 S’agissant, d’autre part, des champs d’application respectifs des règlements Rome I et Rome II, les
notions d’« obligation contractuelle» et d’«obligation non contractuelle» y figurant doivent être interprétées
de façon autonome, en se référant principalement au système et aux objectifs de ces règlements (voir, par
analogie, arrêt ÖFAB, C-147/12, EU:C:2013:490, point 27). Il convient également de tenir compte, ainsi
que cela ressort du considérant 7 de chacun des deux règlements, de l’objectif de cohérence dans
l’application réciproque de ces règlements, mais également du règlement Bruxelles I, qui, notamment, opère
une distinction, à son article 5, entre les matières contractuelle et délictuelle ou quasi délictuelle.
44 Il ressort de la jurisprudence de la Cour relative à ce dernier règlement que seule une obligation juridique
librement consentie par une personne à l’égard d’une autre et sur laquelle se fonde l’action du demandeur
relève de la « matière contractuelle », au sens de l’article 5, point 1, dudit règlement (voir arrêt Kolassa, C-
375/13, EU:C:2015:37, point 39). Par analogie, et conformément à l’objectif de cohérence indiqué au point
43 du présent arrêt, il convient de considérer que la notion d’« obligation contractuelle», au sens de l’article
1er du règlement Rome I, désigne une obligation juridique librement consentie par une personne à l’égard
d’une autre.
45 S’agissant de la notion d’«obligation non contractuelle», au sens de l’article 1er du règlement Rome II,
il y a lieu de rappeler que la notion de «matière délictuelle ou quasi délictuelle», au sens de l’article 5, point
3, du règlement Bruxelles I, comprend toute demande qui vise à mettre en cause la responsabilité d’un
défendeur et qui ne se rattache pas à ladite «matière contractuelle», au sens du point 1 de cet article 5 (arrêt
ÖFAB, C-147/12, EU:C:2013:490, point 32 et jurisprudence citée). Par ailleurs, il convient d’observer, ainsi
qu’il découle de l’article 2 du règlement Rome II, que celui-ci s’applique aux obligations issues d’un
dommage, à savoir de toute atteinte résultant d’un fait dommageable, d’un enrichissement sans cause, d’une
gestion d’affaires ou d’une «culpa in contrahendo».
46 Au regard de ces éléments, il convient d’entendre par «obligation non contractuelle», au sens du
règlement Rome II, une obligation trouvant sa source dans l’un des évènements énumérés à l’article 2 de
ce règlement et rappelés au point précédent.
47 En l’occurrence, il ressort des décisions de renvoi que des obligations contractuelles, au sens du
règlement Rome I, existent entre les assureurs et, respectivement, les détenteurs ou les conducteurs du
véhicule tracteur et les détenteurs de la remorque. Il n’existe, en revanche, aucun engagement contractuel
entre les deux assureurs.
48 En outre, l’existence et l’étendue de l’obligation d’indemnisation des victimes en cause au principal
dépendent, avant tout, d’appréciations relatives aux accidents de la circulation qui sont à l’origine des
dommages en cause. Ces appréciations, de nature délictuelle, sont étrangères à la relation contractuelle
unissant les assureurs à leurs assurés respectifs.
49 S’agissant de la possibilité pour l’assureur d’un véhicule tracteur, qui a indemnisé une victime de
l’intégralité du préjudice qu’elle a subi en raison d’un accident impliquant tant ce véhicule tracteur que la
remorque qui y était attachée, d’exercer une action récursoire à l’encontre de l’assureur de la remorque, il
convient de relever ce qui suit.
50Premièrement, l’existence même d’un droit de recours de l’assureur d’un véhicule tracteur, dont le
conducteur a causé un accident, à l’encontre de l’assureur de la remorque tractée une fois la victime
indemnisée ne saurait être déduite du contrat d’assurance, mais présuppose l’engagement concomitant de
la responsabilité délictuelle du détenteur de ladite remorque à l’égard de cette même victime.
51Il y a donc lieu de relever qu’une telle obligation de réparation pesant sur le détenteur de la remorque
doit être considérée comme une «obligation non contractuelle», au sens de l’article 1er du règlement Rome
II. Partant, c’est au regard des dispositions de ce règlementqu’il convient de déterminer la loi applicable à
ladite obligation.
52 Conformément à l’article 4 dudit règlement, sauf dispositions contraires de celui-ci, la loi applicable à
une telle obligation non contractuelle est celle du pays où le dommage est survenu, à savoir, dans les affaires
au principal, celui où le dommage résultant directement de l’accident est subi (voir, en ce sens, arrêt Lazar,
C-350/14, EU:C:2015:802, point 24).
Selon l’article 15, sous a) et b), du règlement Rome II, cette loi déterminera les conditions et l’étendue de
la responsabilité ainsi que les causes de partage de cette responsabilité.
53 Partant, c’est au regard de la loi du lieu du dommage direct, en l’occurrence le droit allemand, qu’il
conviendra de déterminer les débiteurs de l’obligation d’indemnisation de la victime ainsi que, le cas
échéant, les contributions respectives du détenteur de la remorque et du détenteur ou du conducteur du
véhicule tracteur dans le dommage causé à la victime.
54 Deuxièmement, il convient de rappeler que l’obligation pour un assureur d’indemniser le dommage
causé à une victime résulte non pas du dommage causé à cette dernière, mais du contrat le liant à l’assuré
responsable. Une telle indemnisation trouve donc sa source dans une obligation contractuelle, la loi
applicable à une telle obligation devant être déterminée conformément aux dispositions du règlement Rome
I.
55 Il convient donc de rechercher, au regard de la loi applicable, respectivement, au contrat d’assurance des
véhicules tracteurs, tels que ceux en cause au principal, et à celui des remorques qui y étaient attachées, si
les assureurs de ces deux types de véhicules étaient effectivement tenus, conformément auxdits contrats,
d’indemniser les victimes d’un accident causés par ces derniers.
56 Troisièmement, et s’agissant du point de savoir si l’assureur d’un véhicule tracteur ayant indemnisé une
victime dispose, le cas échéant, d’un recours subrogatoire à l’encontre de l’assureur de la remorque, il
importe de relever que l’article 19 du règlement Rome II opère une distinction entre les questions soumises
au régime délictuel et celles soumises au régime contractuel. Cette disposition s’applique notamment à la
situation dans laquelle un tiers, à savoir l’assureur, a indemnisé la victime d’un accident, créancier d’une
obligation délictuelle de dommages-intérêts envers le conducteur ou le détenteur d’un véhicule automobile,
et cela en exécution d’une obligation de la désintéresser.
57 Plus précisément, l’article 19 du règlement Rome II prévoit que, dans cette hypothèse, la question d’une
éventuelle subrogation dans les droits de la victime est régie par la loi applicable à l’obligation du tiers, à
savoir l’assureur de la responsabilité civile, d’indemniser cette victime.
58 Ainsi, l’obligation de l’assureur de couvrir la responsabilité civile de l’assuré à l’égard de la victime
résultant du contrat d’assurance conclu avec l’assuré, les conditions dans lesquelles l’assureur peut exercer
les droits détenus par la victime de l’accident contre les personnes responsables de l’accident dépendent du
droit national régissant ledit contrat d’assurance, déterminé en application de l’article 7 du règlement Rome
I.
59En revanche, la loi applicable à la détermination des personnes susceptibles d’être déclarées responsables
ainsi qu’à un éventuel partage de responsabilité entre celles-ci et leurs assureurs respectifs demeurent
soumises, conformément audit article 19, aux articles 4 et suivants du règlement Rome II.
60 Il y a notamment lieu de considérer que, dans l’hypothèse où, selon la loi applicable en vertu de ces
dernières dispositions du règlement Rome II, la victime d’un accident de la circulation causé par un véhicule
tracteur muni d’une remorque dispose de droits tant à l’égard du détenteur de la remorque qu’à l’égard de
l’assureur de cette dernière, l’assureur du véhicule tracteur, après avoir indemnisé la victime, bénéficie d’un
droit de recours à l’encontre de l’assureur de la remorque dans la mesure où la loi applicable, selon l’article
7 du règlement Rome I, au contrat d’assurance prévoit une subrogation de l’assureur dans les droits de la
victime.
61 Dès lors, il appartient aux juridictions de renvoi d’établir, dans un premier temps, comment les
dommages-intérêts à payer aux victimes doivent être répartis entre, d’une part, le conducteur et le détenteur
du véhicule tracteur et, d’autre part, le détenteur de la remorque, conformément aux règles de droit national
applicables en vertu du règlement Rome II.
62 Dans un second temps, il y a lieu de déterminer, conformément à l’article 7 du règlement Rome I, la loi
applicable aux contrats d’assurance conclus entre les assureurs requérants au principal et leur assuré
respectif, pour savoir si et dans quelle mesure lesdits assureurs peuvent, par la voie subrogatoire, exercer
les droits de la victime contre l’assureur de la remorque.
63 Au regard de tout ce qui précède, il y a lieu de répondre aux questions posées que l’article 14, sous b),
de la directive 2003/109 doit être interprété en ce sens que cette disposition ne contient pas de règle de
conflit spéciale ayant vocation à déterminer la loi applicable à l’action récursoire entre assureurs dans des
circonstances telles que celles en cause au principal.
64 Les règlements Rome I et Rome II doivent être interprétés en ce sens que la loi applicable à une action
récursoire de l’assureur d’un véhicule tracteur, qui a indemnisé les victimes d’un
accident causé par le conducteur dudit véhicule, à l’égard de l’assureur de la remorque tractée lors de cet
accident est déterminée en application de l’article 7 du règlement Rome I si les règles de la responsabilité
délictuelle applicables à cet accident en vertu des articles 4 et suivants du règlement Rome II prévoient une
répartition de l’obligation de réparation du dommage.
Sur les dépens
65 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la
juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des
observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit: L’article 14, sous b), de la directive 2009/103/CE
du Parlement européen et du Conseil, du 16 septembre 2009, concernant l’assurance de la responsabilité
civile résultant de la circulation de véhicules automoteurs et le contrôle de l’obligation d’assurer cette
responsabilité, doit être interprété en ce sens que cette disposition ne contient pas de règle de conflit spéciale
ayant vocation à déterminer la loi applicable à l’action récursoire entre assureurs dans des circonstances
telles que celles en cause au principal.
Les règlements (CE) no 593/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 17 juin 2008, sur la loi
applicable aux obligations contractuelles (Rome I), et (CE) no 864/2007 du Parlement européen et du
Conseil, du 11 juillet 2007, sur la loi applicable aux obligations non contractuelles (Rome II), doivent être
interprétés en ce sens que la loi applicable à une action récursoire de l’assureur d’un véhicule tracteur, qui
a indemnisé les victimes d’un accident causé par le conducteur dudit véhicule, à l’égard de l’assureur de la
remorque tractée lors de cet accident est déterminée en application de l’article 7 du règlement no 593/2008
si les règles de la responsabilité délictuelle applicables à cet accident en vertu des articles 4 et suivants du
règlement no 864/2007 prévoient une répartition de l’obligation de réparation du dommage.