SYSTEME POLITIQUE SENEGALAIS
SEQUENCE 1 : CONSIDERATIONS GENERALES
Section 1 : la réalité du système politique
Le Sénégal est une république à régime présidentiel multipartite où le
Président exerce la charge de chef de l'Etat et le Premier ministre, la
fonction de chef du gouvernement.
Les notions en présence
Le système politique
Définitions sémantiques
Le système politique a un sens général qui prend
en compte plusieurs facteurs à la fois politique,
institutionnel, économique, social, culturel, etc.
Définition de Guy Hermet
Le système peut être défini comme un ensemble
d’éléments interdépendants
Selon Philippe Braud
Formes et aspects
Platon distingue cinq systèmes politiques
correspondant à cinq formes d'âmes humaines
« S'il y a cinq formes de constitution, il doit y
avoir aussi chez les particuliers cinq formes
d'âme ».
Les cinq sont : monarchie (aristocratie),
timocratie (recherche des honneurs), oligarchie
(recherche des richesses), démocratie et tyrannie
(violence)
Le système politique influence le régime politique
dans les modèles démocratiques
En revanche, dans les modèles dictatoriales, le
chef fixe selon sa propre volonté le régime
politique qu’il impose au peuple (la dictature).
Le terme démocratie s'oppose historiquement aux
régimes monarchiques ou oligarchiques où le
pouvoir est détenu et transmis au sein d'un petit
groupe.
Abraham Lincoln : « le gouvernement du peuple,
par le peuple, pour le peuple »
Le régime politique
Composition du régime politique
Les règles constitutionnelles forment les bases du
régime politique. Il s’agit donc de règles relatives
à la dévolution, à l’organisation et au
fonctionnement du pouvoir.
Les règles qui régissent les pouvoirs publics
(exécutif, législatif et judiciaire) dites lois
organiques sont également prises en compte dans
la composition du régime politique.
Régime politique et constitution
La Constitution d’un pays dicte le régime
politique en place
le changement de Constitution peut ne pas
entraîner un changement de régime politique
le changement de régime politique conduit
incontestablement à une refonte ou
bouleversement de la Constitution existante
Les interactions possibles
Le système de partis
le parti unique
vote en 1956 de la Loi-cadre Gaston Defferre.
C'est aussi l'occasion de rappeler que des
discussions ont été organisées au siège de la
revue Présence Africaine sise au 46 rue
Descartes (Paris Ve) et sous l'initiative
d'Alioune Diop. Le conférencier était Madéra
Kéita ; à ces débats ont pris part le Marocain
Mehdi Ben Barka, le Guinéen Cheikh
Mbaye, le Sénégalais Cheikh Anta Diop, le
Sierra Léonais Johnson. Moustapha Diallo,
Habib Thiam et Amady Aly Dieng y
représentaient la Fédération des étudiants
d'Afrique noire en France (FEANF).
les originaires des quatre communes du
Sénégal (Saint-Louis, Gorée, Rufisque et
Dakar) étaient des citoyens qui élisaient des
députés devant siéger à l'Assemblée nationale
française.
Ceci explique la vieille tradition de
multipartisme au Sénégal.
La position de Léopold Sédar Senghor
o Léopold Sédar Senghor est un
homme politique et littéraire sénégalais
qui partage la position de Madéra Kéita
au sujet du système de partis en
Afrique
o Madéra Kéita est un vieux militant qui
a contribué à la fon section
Rassemblement Démocratique
Africain (RDA) de Guinée
o avant la guerre de 1939, existait ce que
les gens de sa génération
appelaient « le plein régime colonial»
institué par la République française
démocratique
o Avant 1945, c'était le régime de
l'indigénat
o En 1946, le mot d'ordre a été l'union de
toutes les couches sociales de la
population.
o C'est sur cette base que le congrès
constitutif du Rassemblement
Démocratique Africain (RDA) s'est
tenu à Bamako en octobre 1946
o Léopold Sédar Senghor qui appartient
à la même formation politique que
Madeira Kéita refuse l'existence de
classes en Afrique Noire.
o Léopold Sédar Senghor et Lamine
Gueye, après avoir signé le manifeste
du RDA en 1946 ont refusé d'aller au
congrès constitutif de ce mouvement
sous la pression de Marius Moutet,
alors ministre socialiste des Colonies
La position de Cheikh Anta Diop
o Cheikh Anta Diop quand à lui
aborda la question du parti unique
dans une perspective différente de
celle de Madéra Kéita
o Ces idées ont été clairement
exposées dans le premier numéro
de La voix de l'Afrique
noire (février 1952),
o qui était l'organe d'expression de
l'Association des Étudiants du
Rassemblement Démocratique
Africain (AERDA) créée en 1950.
o Pour lui, le parti unique est une
idée très bonne, lorsqu’il incarne
les aspirations nationales
Le multipartisme
Après une courte expérience du régime
parti unique de 1966 à 1974, le Sénégal
renoue avec le pluralisme politique mais
limité à trois partis représentants trois
courants politiques avec la loi n° 76-01
du 19 mars 1976 portant révision de la
Constitution
Le multipartisme devient intégral avec
la loi n° 81-17 du 6 mai 1981
après l’arrivée au pouvoir du président
Abdou Diouf qui révise l’article 3 de la
Constitution relative à la limitation du
nombre de partis politiques.
Avec l’avènement du multipartisme
intégral, chaque citoyen sénégalais a la
possibilité de créer son parti politique.
l’organisation et le fonctionnement d’un
parti politique au Sénégal sont régis par
la Constitution de 2001 et les textes
législatifs et réglementaires
Les partis politiques sont créés à partir
des dispositions du Code des obligations
civiles et commerciales, comme le
disposent les articles 812 et 814
Il est formellement interdit qu’un parti
politique s’identifie à une race, une
ethnie, un sexe, une religion, une secte,
une langue ou une région conformément
à l’article 4 de la Constitution du 22
janvier 2001 et à l’article 2 de la loi n°
81-17 du 6 mai 1981 au sujet du
multipartisme intégral
En 2018, treize (13) nouveaux partis ont
vu le jour au Sénégal en cinq mois
Cette nouvelle fournée porte le nombre
à 299 le nombre de formations
politiques dans ce pays de 15 millions
d’habitants et un fichier électoral de
seulement 6 millions de personnes
Le nombre de formations disposant d’un
récépissé est ainsi passé de 3 sous la
présidence de Léopold Sédar Senghor
(1960-1980) à 44 sous Abdou Diouf
(1980-1999) qui en a légalisé 41.
Arrivé au pouvoir en l’an 2000,
Abdoulaye Wade a légalisé 143 partis.
Arrivé au pouvoir en 2012, Macky Sall
en est déjà à 111 légalisations.
Selon la loi, il faut 1% de l’électorat, soit
65 000 signatures pour valider une
candidature. Il s’agit de la loi n° 2018-
22 du 4 juillet 2018 portant révision du
code électoral du Sénégal.
Les rapports de forces
Le politique désigne le champ pour la conquête du pouvoir.
La politique quant à elle est un programme destinée à atteindre un
objectif déterminée, par exemple la politique de santé qui vise à
éradiquer une pandémie.
Le pouvoir est juridiquement défini comme une prérogative ou un
commandement suprême et légitime dont dispose une personne
La cohabitation politique désigne la situation de coexistence d’un
chef de l’Etat et d’un chef de gouvernement (Premier ministre)
appartenant à une majorité parlementaire qui lui est politiquement
opposée
Le système politique sénégalais issu de la première
République, c’est-à-dire de la Constitution de 1960 est celui
qui offre l’exemple le plus connu de cohabitation entre un
Président de la République (Léopold Sédar Senghor) et un
Premier ministre (Mamadou Dia)
Les rapports entre le gouvernement et l’opposition constituent
également un autre aspect qu’il faut prendre en compte dans le
fonctionnement du système politique sénégalais.
l’opposition joue pratiquement deux rôles essentiels : la
critique du gouvernement et l’élaboration d’un programme
politique de rechange.
il arrive parfois que des conflits surgissent entre le
gouvernement et l’opposition notamment sur la gestion des
affaires publiques.
C’est pourquoi le gouvernement est tenu d’informer sur tout
ce qui concerne l’exécution des politiques publiques
Section 2 : Le processus de décolonisation
La défaite des français à Dian Ben Phu en 1954 ;
Le début de la guerre d’Algérie en 1955 ;
La Conférence de Bandoeng de 1955 lors de laquelle les colonies africaines
et asiatiques ont ouvertement réclamé l’indépendance des colonies ;
L’indépendance du Maroc et de la Tunisie en 1956 et du Ghana en 1957.
Ces évènements créeront une atmosphère anticolonialiste obligeant la France
à initier des changements importants qui vont sonner la fin de la colonisation.
La loi cadre du 23 juin 1956 fut le premier jalon posé.
L’autonomie interne
En vertu de la Constitution française de 1946, le Sénégal devient un
territoire d’outre-mer (TOM) au sein de l’Union française.
Gaston Deferre était ministre des affaires d’outre-mer
Les changements issus de la loi-cadre
La loi française du 23 juin 1956 modifie sensiblement le
statut des TOM.
Elle autorise le « Gouvernement à mettre en œuvre et à
prendre les mesures propres à assurer l’évolution des
territoires relevant du ministère de la France d’outre-mer. »
la loi-cadre prévoit :
En effet, le Gouvernement pouvait changer le statut
des colonies par décret.
Ainsi, dans chaque colonie est érigée une assemblée
territoriale (parlement local) élue au suffrage
universel et dotée de véritables pouvoirs.
Ensuite, un collège unique est institué pour les
élections.
Enfin, des conseils de gouvernement sont créés dans
chaque colonie.
La mesure de la loi-cadre
Pour Léopold Sédar Senghor, la loi-cadre ouvrait la porte
à la balkanisation (morcellement) de l’Afrique.
La vie en communauté
La Communauté franco-africaine
La Comité consultatif constitutionnel mis en place pour rédiger
la Constitution avait reçu mission de créer les conditions de mise
en œuvre de cinq principes fondamentaux :
Le suffrage universel comme source du pouvoir ;
La responsabilité du gouvernement devant le parlement ;
L’indépendance de l’autorité judiciaire ;
La définition des droits de l’homme ;
L’aménagement des rapports entre la France et les peuples
qui lui sont associés.
la Communauté franco-africaine a été créée et organisée par
le titre XII de la Constitution du 4 octobre 1958 (articles 77
à 87)
General De Gaulle fut demandé à la population un vote
massif en sa faveur.
Ce qui fut fait lors du référendum du 28 septembre 1958.
Le 15 novembre 1958 l’Assemblée territoriale adopta une
résolution établissant la république du Sénégal devenant
ainsi un Etat membre de la Communauté
Description de la Communauté franco-africaine
Michel Debré soutiendra que la Communauté n’est ni une
fédération, ni une confédération d’Etats.
En effet ; elle semble être une institution hybride à mi-chemin
entre l’Etat fédéral et la confédération d’Etats.
Ensuite, au sein de la Communauté, il n’y avait pas de partage
de compétence entre l’Etat fédéral et les Etats fédérés
L’Etat français gérait les affaires communes qui étaient les plus
importantes :
o il s’agissait de la politique étrangère,
o de la défense,
o de la monnaie,
o de la politique économique et financière commune,
o de la politique des matières premières stratégiques,
o de la justice,
o de l’enseignement supérieur,
o des transports extérieurs et communs,
o des télécommunications.
les membres de la Communauté se rendirent compte que le
statut d’Etat qu’ils avaient acquis suite à la Constitution de
1958 ne leur permettait pas d’exercer la plénitude des
compétences d’un Etat souverain.
dans son organisation, plusieurs organes ont été mis en place
pour permettre à la Communauté de remplir ses différentes
fonctions.
Organisation de la Communauté franco-africaine
composée de quatre (4) principaux organes
La Présidence
o Le président de la république française était
constitutionnellement le président de la
Communauté
Le Conseil exécutif
o Il était composé des chefs de gouvernements des
Etats membres de la Communauté et des ministres
chargés des « affaires communes » (qui furent tous
des ministres français).
o art. 82 de la Constitution française de 1958
Le Sénat
o Le Sénat est un organe consultatif composé de
délégués français consultatifs au deux tiers et de
délégués africains.
o Le Sénat est consulté dans certains domaines de
compétence de la Communauté comme par exemple
les affaires communes, l’engagement de la
Communauté à travers des traités et accords.
o Le Sénat ne peut être consulté par le président de la
Communauté.
La Cour arbitrale
o Elle était composée de sept (7) juges nommés par le
président de la Communauté pour un mandat de six
(6) ans renouvelables.
La Fédération du Mali
La mise en place de la Fédération
C’est en janvier 1959 que les délégués du Sénégal, du
Soudan du Dahomey et de la Haute Volta réunis à
Dakar, prirent la décision de concrétiser l’idée d’une
fédération primaire intra-communautaire.
Le projet de constitution adopté à cette occasion fût
immédiatement ratifié par le Sénégal le 22 janvier 1959,
la Haute Volta et le Dahomey ne deviendront jamais
membres de la Fédération du Mali
La Présidence de la fédération
o Il est élu pour 5 ans renouvelables par un collège
électoral comprenant les membres de l’Assemblée
Fédérale réunis en Congrès avec ceux des
assemblées législatives des Etats
o Il veille au respect de la Constitution et assure par
son arbitrage la continuité de la Fédération et le
fonctionnement régulier des institutions
o Enfin, il joue un rôle d’arbitre entre les Etats fédérés
d’une part et entre ceux-ci et la Fédération d’autre
part
Le Gouvernement fédéral
o Il est composé d’un Président, d’un Vice-président,
et de 6 ministres nommés sur la base d’un système
paritaire (3 ministres par Etats).
o A l’origine, le Président du Gouvernement Fédéral
était désigné par le bureau de l’Assemblée
législative fédérale.
o Suite à la révision constitutionnelle du 20 juin
1960, il est nommé par le Président de la Fédération
et investi par l’Assemblée Fédérale.
o Le Président du Gouvernement Fédéral nomme le
Vice-président de la Fédération et les autres
membres du Gouvernement en respectant une
représentation paritaire.
o Le Président du Gouvernement Fédéral peut mettre
en jeu la responsabilité du Gouvernement par le
biais de la question de confiance devant l’As-
semblée fédérale.
o Cependant, celle-ci ne pouvait être dissoute.
L’Assemblée fédérale
o Elle était composée de 40 membres élus pour 5
ans de manière paritaire par les assemblées
législatives des Etats fédérés.
o Elle votait la loi et le budget fédéral
o Elle investissait le Président du Gouvernement
Fédéral et ratifiait la composition de l’exécutif
fédéral.
o Elle exerçait un contrôle sur l’exécutif et pouvait
engager la responsabilité du Gouvernement par le
biais de la motion de censure.
o Le monocamérisme en vigueur dans la Fédération
du Mali était assez original.
La Cour fédérale
o Elle était subdivisée en 3 sections :
une section constitutionnelle compétente
en matière de contrôle de
constitutionnalité,
une section administrative compétente
en matière administrative et
une section chargée des comptes
compétente en matière de contrôle des
comptes des comptables publics.
La fédération vit seulement neuf (9) mois.
L’éclatement de la Fédération
septembre 1959, les dirigeants de la Fédération
firent connaître leur décision d’accéder à
l’indépendance en application de l’article 78 de la
Constitution française du 4 octobre 1958.
Le 13 septembre 1959, à Saint Louis du Sénégal,
le Général De Gaulles marque son accord pour
l’accession des Etats membres de la Fédération à
la souveraineté internationale.
Le 4 avril 1960, fut signé un accord de transfert de
compétences entre le gouvernement de la
république française et les gouvernements du
Sénégal et du Soudan.
Le 20 juin 1960, la Fédération demanda et obtint
son indépendance mais les nouvelles institutions
n’étaient pas encore mises en place que le 20 août
1960, la Fédération éclatait.
En fait, c’est le Sénégal qui s’est retiré
unilatéralement de la Fédération pour proclamer
son indépendance.
L’Assemblée législative du Sénégal vota alors une
loi proclamant l’indépendance du Sénégal ; une
nouvelle Constitution fut promulguée le 26 août
1960 inaugurant la première république du
Sénégal indépendant : une république
parlementaire.