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CM m1 Genetique - Ecue 3 Fondements Genetiques de La Biodiveriste 16 Janvier 2023

Ce document présente un cours magistral sur les fondements génétiques de la biodiversité dans le cadre d'un Master en biotechnologie. Il aborde la définition de la biodiversité, son histoire, ainsi que les mécanismes génétiques qui la déterminent, en soulignant l'importance de l'ADN et des mutations. Les objectifs du cours incluent la compréhension des liens entre la génétique et la diversité biologique, ainsi que les enjeux de conservation.

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CM m1 Genetique - Ecue 3 Fondements Genetiques de La Biodiveriste 16 Janvier 2023

Ce document présente un cours magistral sur les fondements génétiques de la biodiversité dans le cadre d'un Master en biotechnologie. Il aborde la définition de la biodiversité, son histoire, ainsi que les mécanismes génétiques qui la déterminent, en soulignant l'importance de l'ADN et des mutations. Les objectifs du cours incluent la compréhension des liens entre la génétique et la diversité biologique, ainsi que les enjeux de conservation.

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RÉPUBLIQUE DE CÔTE D'IVOIRE

-------------------------------
MINISTÈRE DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
ET DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE

22 BP : 582 Abidjan 22
01 BP V 34 Abidjan 01 Tél. /Fax : 27 22 44 58 03
Tél. /Fax : +225 27 22 44 35 31
www.univ-cocody.ci

UPR DE GENETIQUE

MASTER 1 – BIOTECHNOLOGIE-BIOSECURITE-BIORESSOURCES

COURS MAGISTRAL
UE MUTATIONS GENETIQUES

ECUE 3 : FONDEMENTS GENETIQUES DE LA


BIODIVERSITE

Dr. N’ZI Jean-Claude

1
SOMMAIRE

OBJECTIFS DU COURS 3

CHAPITRE 1 : GENESE DE LA BIODIVERSITE 4


1. DEFINITION DE LA BIODIVERSITE 5
2. HISTOIRE BREVE DE LA BIODIVERSITE 8

CHAPITRE 2 : DETERMINISMES GENETIQUES DE LA BIODIVERSITE 15

A. MECANISMES GENETIQUES QUI ENGENDRENT LA BIODIVERSITE 16


1. PROBLEMATIQUE DU LIEN ENTRE LA BIODIVERSITE ET LA GENETIQUE 16
2. COMPLEXIFICATION DE L’ADN ET DIVERSITE BIOLOGIQUE 18
3. MUTATIONS DE LA STRUCTURE ET DU NOMBRE DE MOLECULES D’ADN ET DIVERSITE BIOLOGIQUE 23
4. INFLUENCE DES PHENOMENES DE RECOMBINAISON GENETIQUE ET DE FECONDATION 46
5. ELEMENTS GENETIQUES MOBILES ET BIODIVERSITE 49

B. INTERET, EROSION ET CONSERVATION DE LA BIODIVERSITE 53


1. INTERET DE LA BIODIVERSITE 53
2. EROSION DE LA BIODIVERSITE 56
3. CONSERVATION DE LA BIO DIVERSITE 59

CONCLUSION 61

2
OBJECTIFS DU COURS

L’objectif général de ce cours est de faire connaître qu’une large part de la diversité que
nous constatons au sein et entre les espèces vivantes est génétiquement déterminée,
c’est-à-dire explicable par des facteurs génétiques.
Dans ses objectifs spécifiques, ce cours fera ainsi connaître :
• Le lien de cause à effet qui existe entre l’ADN (Acide Désoxyribonucléique) et la
vie.
• Le lien de cause à effet qui existe entre la ressemblance et la dissemblance des
êtres vivants et les propriétés de l’ADN.
• L’intérêt génétique et les risques d’érosion de la diversité biologique.

3
CHAPITRE 1 : GENESE DE LA
BIODIVERSITE

4
1. DEFINITION DE LA BIODIVERSITE
Les conditions environnementales qu’offre notre planète, la Terre, sont si propices à la
vie que celle-ci est présente partout. Dans les calottes glaciaires, les sources thermales
les plus chaudes, les abîmes les plus sombres des océans, dans le sol, l’air et sur terre
des êtres vivants pullulent. Mais qu’est-ce qu’un être vivant ? N’importe quel individu
humain sait faire la différence entre un bloc de pierre qui est un être inanimé non biotique
et un être vivant comme un poisson qui s’agite dans un aquarium. Et pourtant les
scientifiques n’arrivent pas à s’accorder sur la vie ou la non-vie de quelque chose.

Entre autres définitions de l’être vivant, celle que nous proposons dans le cadre de ce
cours est la suivante : « l’être vivant est cette entité qui se caractérise par sa composition
cellulaire, sa reproduction à partir du matériel héréditaire ou matériel génétique (l’ADN),
sa capacité de croître et de se développer, son aptitude à capter l’énergie dans son
environnement, à percevoir les signaux de cet environnement et à réagir en
conséquence, son haut niveau d’organisation et sa capacité d’évoluer, c’est-à-dire de
subir des changements dans sa structure et son comportement au cours des
générations ».

La biodiversité peut donc être définie comme étant la diversification de la vie à travers
l’infinie variabilité qu’exhibent les êtres vivants. Autrement dit, la biodiversité est la
variabilité que nous constatons au niveau des structures, des modes de vie et des
comportements des organismes vivants en relation avec des contextes
environnementaux physico-chimiques tout aussi diversifiés, le tout constituant des
complexes intégrés que nous appelons écosystèmes.

En effet, relativement à la structure, au mode de vie et au comportement des êtres


vivants, les situations sont très diversifiées si nous comparons entre elles des espèces
vivantes comme la bactérie, la levure, l’algue, la fougère, le cacaoyer, le riz, le pleurote,
la paramécie, le mille-pattes, la mouche, le rat, le requin, le crabe, le crocodile,
l’escargot, l’aigle, le gnou, l’homme, etc. Ces espèces peuvent être distinguées en

5
autotrophes et en hétérotrophes selon la manière dont elles accèdent à l’énergie pour
assurer leurs métabolismes. Si nous prenons en compte leur rythme circadien
(organisation séquentielle des diverses fonctions d’un organisme au cours d’une période
de 24 heures), les animaux se distinguent en diurnes et en nocturnes, et si nous
considérons la durée de l’éclairement nécessaire pour déclencher leur floraison, les
végétaux se distinguent en plantes de jours courts et en plantes de jours longs. Un
échantillon de cette biodiversité dans le règne animal nous est présenté dans la figure 1.

6
Figure 1 : Échantillon de la biodiversité dans le Règne animal

7
2. HISTOIRE BREVE DE LA BIODIVERSITE
Il y a un peu plus de 4,5 milliards d’années, se formaient tous les grands systèmes de
l’univers dont le système solaire auquel appartient la terre. Pendant le milliard d’années
qui a suivi la formation de la terre, a eu lieu une évolution dite chimique dans un contexte
environnemental terrestre caractérisé par une atmosphère primitive entièrement
réductrice, donc dépourvue d’oxygène à l’état libre. C’est l’étape d’un monde anoxique.
L’évolution chimique peut être définie comme étant l’ensemble des transformations
subies par la terre depuis sa formation et qui ont permis l’apparition de molécules
organiques pour la construction du vivant.

Cette phase d’évolution de la terre a culminé avec l’apparition des premières formes de
vie qu’on identifie à des bactéries découvertes dans des couches sédimentaires dont
l’âge est estimé à environ 3,5 milliards d’années. Ces bactéries étaient probablement
des descendants du dernier ancêtre de toutes les cellules actuelles baptisé du nom de
LUCA (Last Universal Cell Ancestor). De l’évolution de ces bactéries primitives sont nées
les Archéobactéries, les bactéries anaérobies photosynthétiques et finalement les
bactéries aérobies qui ont évolué à leur tour pour donner naissance aux cyanobactéries
(Algues bleues) qui sont des organismes unicellulaires eucaryotes. En effet, avec le
développement de l’activité photosynthétique, l’atmosphère terrestre primitive anoxique
s’est enrichie progressivement en oxygène libre dont on pense que la concentration
primitive atteignait 2 à 3 % de son niveau actuel. Cela a eu pour conséquence l’extinction
d’un grand nombre de procaryotes primitifs et le confinement de certains dans des
milieux sans oxygène.

L’augmentation de la concentration en oxygène de l’atmosphère primitive a été l’un des


évènements majeurs dans l’histoire de la vie sur terre, puisqu’elle a causé l’extinction de
nombreux organismes ancestraux, tout en donnant les bases de la naissance des
eucaryotes unicellulaires qui ont évolué pour générer les eucaryotes multicellulaires
complexes actuels.

8
Le passage des procaryotes aux premiers eucaryotes unicellulaires s’est fait par une
lente évolution biologique qui a durée 2 milliards d’années environ. L’évolution biologique
est l’ensemble des transformations subies par les êtres vivants dans leur structure, mode
de vie et comportement en liaison avec les contraintes imposées par le milieu depuis
l’apparition de la vie sur terre. Comme on le voit, jusque-là, le monde vivant n’était que
très peu diversifié, faute de moyen pour innover. La reproduction ne se faisait que par
simple mitose (division cellulaire homéotypique) génération après génération.

Cependant, avec le développement des eucaryotes multicellulaires et surtout l’apparition


décisive de la reproduction sexuée survenue il y a environ 1 milliard d’années, un
véritable élan diversificateur s’est emparé du monde vivant. Cet élan, que le cours de
l’évolution biologique subséquente n’a jamais pu freiner, est à l’origine de l’explosion
(augmentation spectaculaire) de la diversité biologique que nous constatons
actuellement. En effet, un mécanisme aussi complexe que la reproduction sexuée s’est
universellement imposé aussi bien dans le règne animal que végétal en raison des
avantages qu’il présente en termes de variabilité. Ainsi, alors que la reproduction
végétative ou reproduction asexuée (clonage naturel) reproduit un individu
génétiquement identique au géniteur, le mécanisme de la reproduction sexuée permet
de rebattre les cartes du patrimoine génétique si bien que chaque individu résulte d’une
combinaison nouvelle et le plus souvent unique de gènes. Ce mécanisme permet aussi
de maintenir des possibilités virtuelles, c’est-à-dire non réalisées, de combinaisons
génétiques. De ce fait, une population animale ou végétale peut conserver une variabilité
génétique très supérieure à celle qu’elle pourrait présenter en raison de l’effectif limité de
ses individus. Au cours des générations qui se succèdent et selon les nécessités
d’adaptation aux conditions du milieu, cette variabilité peut passer du « virtuel » au
« réalisé ». C’est là que réside le grand avantage de la reproduction sexuée.

Les grandes périodes de l’histoire de la vie sur terre et de sa spectaculaire diversification


à partir du Précambrien sont résumées dans la figure 2 et le tableau 1.

9
10
Tableau 1 :

11
3. NIVEAUX DE STRUCTURATION DE LA DIVERSITE BIOLOGIQUE

La variabilité est la principale caractéristique des êtres vivants. Elle s’observe à tous les
niveaux de leur organisation. En effet, lorsqu’on compare les individus d’une même
espèce entre eux ou ceux d’espèces différentes, on est frappé par les différences qu’ils
exhibent par rapport à plusieurs caractères ou critères de polymorphisme. Ces
différences sont plus significatives encore lorsqu’on compare des espèces de plus en
plus éloignées ou des grands groupes d’espèces.
Si on considère une espèce comme la drosophile ou mouche du vinaigre (Drosophila
melanogaster), on est frappé par la grande variabilité des individus par rapport à un
caractère comme la forme des ailes. Selon les individus, les ailes sont allongées le long
du corps, dressées, arrondies, découpées, réduites, atrophiées, pointues, ondulées, etc.
Si on considère une autre espèce, l’homme par exemple, un caractère comme la couleur
de la peau présente une grande diversité et permet même de distinguer les grands
groupes (races) d’êtres humains : les leucodermes à peau blanche, les xanthodermes à
peau jaune et les mélanodermes à peau noire. A l’intérieur de ces groupes, toutes les
variantes existent. La variabilité intraspécifique est commune à toutes les espèces
animales et végétales et on la constate à première vue chez le chien, le chat, le cheval,
le bœuf, le poulet, l’aubergine, le piment, le riz, la mangue, etc.

L’espèce, qui est un ensemble d’individus ayant des caractères communs, naturellement
interféconds et produisant des descendants viables et fertiles, constitue donc le premier
niveau d’organisation de la diversité biologique.

Rappelons que le nombre d’espèces découvertes actuellement et placées dans la


hiérarchie linnéenne s’élève à 1,5 millions environ, mais les estimations font état que ce
nombre est beaucoup plus grand et dépasserait les 30 millions. La découverte de
nouvelles espèces se poursuit à un rythme effréné et récemment des chercheurs
australiens ont découvert dans une grotte, à 4000 m de profondeur, des organismes

12
vivants minuscules auxquels ils ont donné le nom de « nanobe » ; leur taille se mesurant
en nanomètre.

Le deuxième niveau de structuration de la biodiversité est le Genre, entité regroupant


toutes les espèces les plus proches. Si on considère le genre Dioscorea (les ignames)
comme exemple, il contient toutes les variétés d’ignames précoces appartenant à
l’espèce D. cayenensis et toutes les variétés d’ignames tardives appartenant à l’espèce
D. alata, pour ne citer, entre autres, que ces deux espèces. Nous convenons tous que
même l’observateur le moins avisé n’aura aucune difficulté à distinguer ces deux
catégories d’ignames.

Il est donc évident que les différences sont beaucoup plus faciles à mettre en évidence
quand on compare des espèces appartenant à des genres différents ou des espèces de
familles différentes.

En définitive, les affinités et les différences que présentent les êtres vivants ont permis
leur regroupement en espèces, les espèces en genres, les genres en familles, les
familles en ordres, les ordres en classes, les classes en embranchements et les
embranchements en règnes. Six règnes d’êtres vivants sont actuellement définis :

- Le règne des Bactéries;


- Le règne des Archéobactéries;
- Le règne des Protistes (Protophytes et Protozoaires);
- Le règne des Plantes;
- Le règne des Champignons;
- Le règne des Animaux.

Si nous considérons l’homme comme exemple, sa systématique se présente comme


suit :

Règne : Animal
Embranchement : Vertébré
Classe : Mammifère
Ordre : Primate

13
Famille : Hominidé
Genre : Homo
Espèce : Homo sapiens

L’abondance des espèces dans les six grands groupes d’êtres vivants est matérialisée
par la figure 3.

Figure 3 :

14
CHAPITRE 2 : DETERMINISMES
GENETIQUES DE LA BIODIVERSITE

15
A. MECANISMES GENETIQUES QUI ENGENDRENT LA
BIODIVERSITE

Il ne faut pas perdre de vue que les conditions du milieu dans lequel se développent les
êtres vivants exercent une pression permanente sur l’expression de l’ADN. Ainsi, la
typologie phénotypique globale que présente un être vivant à tout instant est la
résultante de l’interaction entre le génotype (l’ADN) et le milieu. Par exemple, si des
grains d’une même variété lignée pure de maïs (donc de génotype identique) sont
semés, les uns sur un sol pauvre en matières organiques et minérales et les autres sur
un sol riche, les plantes qui en seront issues présenteront des phénotypes très différents
comme si elles provenaient de génotypes distincts. Cependant, dans les
développements qui suivent, nous ne nous intéressons qu’à la seule contribution du
génotype à la diversification du monde vivant.

1. PROBLEMATIQUE DU LIEN ENTRE LA BIODIVERSITE ET LA GENETIQUE


Au cours de la longue période d’évolution chimique du monde, de nombreuses
molécules avaient été formées mais aucune d’elles ne réunissait toutes les propriétés
pour l’exercice de la vie :

- Contenir toutes les informations nécessaires pour l’exercice et le contrôle des


fonctions vitales.
- Être capable d’assurer la synthèse des protéines et de la réguler.
- Être capable de subir des modifications structurales d’emblée héréditaires.
Les acquis actuels des biosciences et de la chimie permettent de dire que, pour le
moment, l’ADN est la seule molécule chimique qui réunit toutes les propriétés pour
l’exercice de la vie. Or, nous savons que l’ADN et l’hérédité sont consubstantielles ou
indissociables car c’est cette substance qui assure la production d’une descendance

16
conforme à l’original et qui est donc responsable de la stabilité sans laquelle les
populations de cellules et d’organismes ne pourraient exister.

Le schéma du dogme central de la biologie moléculaire que voici nous permet de


comprendre comment les individus d’une même espèce sont identiques (en ce sens
qu’ils présentent tous les caractères propres à leur espèce) mais en même temps
différents les uns des autres.
Transcription Traduction Expression

Chaîne
ADN ARN Caractère
polypeptidique
(phénotype)
(Génotype) (protéine)

Réplication
Dogme central de la Biologie Moléculaire

En effet, l’ADN (génotype) se reproduit à l’identique au cours du phénomène de la


réplication de sorte que la descendance qui en résulte est identique à l’original
(réplication conforme). Cependant, des erreurs (ou mutations) peuvent survenir au cours
de la réplication de l’ADN de sorte que la descendance qui en résulte est différente de
l’orignal : c’est la variation phénotypique induite par la mutation de l’ADN. Si nous
considérons l’exemple des bactéries, c’est par ce mécanisme qu’une souche bactérienne
sensible à un antibiotique pendant plusieurs générations peut devenir brusquement
résistante. Le lien entre la diversification biologique et la génétique ou hérédité apparait
ainsi dans toute sa réalité : la variabilité génétique se traduit par une diversité
phénotypique.

La vie étant apparue une seule fois sur terre, l’ADN de la cellule qui est l’ancêtre de
toutes les cellules actuelles est la mémoire de la parenté de tous les êtres vivants, c’est-
à-dire de leur origine commune. L’universalité du code génétique en est un indice

17
tangible comme le montre bien la transgénèse qui est le transfert de gènes (portions de
molécules d’ADN) d’un organisme dans un autre organisme appartenant à une espèce
différente. Un gène humain peut donc s’exprimer parfaitement dans un organisme
bactérien et vice-versa.

Comme nous venons de l’évoquer, l’ADN est la mémoire de l’origine commune de tous
les êtres vivants. Nous avons signalé aussi le lien direct entre la variabilité génétique et
la diversité des phénotypes. Mais en quoi consistent les modifications qui ont affecté la
structure de l’ADN et qui ont permis, au cours de l’évolution biologique, la naissance
d’espèces nombreuses et variées ?

2. COMPLEXIFICATION DE L’ADN ET DIVERSITE BIOLOGIQUE


Comme nous le savons, depuis la découverte faite par James Watson et Francis Crick et
rendue publique dans un article historique publié en 1953, l’ADN est une double hélice
composée de deux longs filaments de nucléotides complémentaires et antiparallèles. Les
molécules d’ADN diffèrent les unes des autres à la fois par le nombre de paires de bases
qui les composent et par la séquence (ordre de succession) de ces paires de bases. Ce
sont justement les différences dans la séquence des bases qui constituent le fondement
des variations héréditaires.

Le premier niveau de complexification de l’ADN est l’association de la double hélice avec


des molécules de certaines protéines (histones et non histones) pour constituer un
complexe de nucléosomes appelé chromatine. La condensation de la chromatine donne
des structures particulières appelées chromosomes. A chaque chromosome correspond
donc une seule molécule d’ADN.

Chez les Procaryotes (Bactéries et Archées) le matériel héréditaire fondamental est un


chromosome unique ; en dehors de ce chromosome, les Bactéries possèdent aussi de
l’ADN enroulé en de petites molécules circulaires appelées plasmides. Il peut arriver

18
parfois que des portions d’ADN provenant des plasmides soient incorporées dans le
chromosome bactérien.

Quand la cellule n’est pas en division (interphase), la forme la plus condensée de


chromatine qui puisse être observée au microscope optique est appelée
hétérochromatine ; la forme la plus décondensée (la plus difficile à observer) est appelée
euchromatine. Les gènes qui sont des séquences d’ADN contenant l’information
nécessaire à la synthèse des protéines ou des molécules d’ARN sont situés dans
l’euchromatine.

Chez les Eucaryotes, le matériel héréditaire est composé de plusieurs molécules d’ADN,
donc de plusieurs chromosomes formant ce que l’on appelle le génome nucléaire. En
dehors de l’ADN nucléaire, les eucaryotes possèdent aussi de l’ADN dans les
mitochondries (ADNmt) et les chloroplastes (ADNct). On parle de génomes mitochondrial
et chloroplastique ou plastidial.

Chaque espèce eucaryote est caractérisée par un nombre de chromosomes qui est
normalement constant dans chacune de ses cellules. Si par hasard deux espèces
possèdent le même nombre de chromosomes, la séquence des bases dans les
molécules d’ADN ainsi que la morphologie et la taille des chromosomes varient entre les
deux espèces. D’ailleurs, l’espèce dont nous avons déjà entamé une définition est un
groupe d’organismes possédant des ensembles de gènes essentiels en commun,
naturellement interféconds, produisant des descendants viables et fertiles et qui sont
incapables de se reproduire naturellement avec les individus d’une autre espèce. C’est la
différenciation génétique qui rend les chromosomes de deux espèces incompatibles et
entraine leur isolement reproductif.

Les nombres chromosomiques caractéristiques de quelques espèces animales et


végétales sont donnés en exemple comme suit :

19
- Espèces à cycle haplobiontique :

Ce sont des espèces qui vivent à l’état haploïde sur la plus grande partie de leur cycle de
développement. Exemple :

Neurospora (Ascomycète) : n = 7 / Sordaria (Ascomycète) : n = 7 / Pleurotus


(Basidiomycète) : n = 11 / Volvariella (Basidiomycète) : n = 15.

- Espèces à cycle haplodiplobiontique :

Ce sont des espèces qui vivent à l’état haploïde sur une moitié de leur cycle de
développement et à l’état diploïde sur l’autre moitié : Saccharomyces (levure) : n = 8 ; 2n
= 16.

- Espèces animales à cycle diplobiontique :

Ce sont des espèces animales qui vivent à l’état diploïde sur la plus grande partie de leur
cycle de développement. Ce sont entre autres :

Drosophile (mouche du vinaigre) : 2n = 8 / Mouche domestique : 2n = 12 / Carpe : 2n =


104 / Truite : 2n = 80 / Alligator : 2n = 32 / Cobra : 2n = 38 / Grenouille : 2n = 26 /
Poisson rouge : 2n = 94 / Etoile de mer : 2n 36 / Dauphin : 2n = 44 / Escargot : 2n = 24 /
Rat : 2n = 42 / Souris : 2n = 40 / Cobaye : 2n = 64 / Lapin : 2n = 44 / Chat : 2n = 38 /
Chien : 2n = 78 / Cheval : 2n = 64 / Poulet : 2n = 78 / Chimpanzé : 2n = 48 / Homme : 2n
= 46.
- Espèces végétales à cycle diplobiontique :

Ce sont des espèces végétales qui vivent à l’état diploïde sur la plus grande partie de
leur cycle de développement. Ce sont entre autres : Haricot : 2n = 22 / Soja : 2n = 40 /
Petit pois : 2n = 14 / Chou : 2n = 18 / Oignon : 2n = 16 / Tomate : 2n = 36 / Mil : 2n = 14 /
Sorgho : 2n = 20 / Maïs : 2n = 20 / Coton (Sauvage) : 2n = 26 / Coton (Cultivé) : 2n = 52 /
Tabac (Sauvage) : 2n = 24 / Tabac (Cultivé) : 2n = 48 / Café (Robusta) : 2n = 22 / Café

20
(Arabica) : 2n = 44 / Cacao : 2n = 20 / Taro (Colocasia) : 2n = 28 / Taro (Xanthosoma) :
2n = 26 / Canne à sucre : 2n = 80.

Le deuxième niveau de complexification de l’ADN est l’accroissement du nombre de


paires de bases lorsqu’on passe des Procaryotes aux Eucaryotes. On parle
d’augmentation de la taille du génome. Par exemple, chez les plus petites bactéries (les
mycoplasmes), la taille du génome est de 650 Kb (Kb = Kilobase ; 1 Kb = 1 000 paires
de bases). Ce génome contient environ 400 gènes. Chez les cyanobactéries, la taille du
génome est de 1 000 Kb. Chez la bactérie E. coli, la taille du génome est de 4,6 Mb (Mb
= Mégabase ; 1 Mb = 1 million de paires de bases) et contient environ 4 000 gènes.
Chez la levure de boulangerie (Saccharomyces cerevisiae), la taille du génome est de 12
Mb et contient environ 6 000 gènes. Le nématode Caenorhabditis elegans a une taille de
génome atteignant 97 Mb et contenant environ 19 000 gènes. Chez la mouche du
vinaigre (Drosophila melanogaster), le génome a une taille de 180 Mb et contient environ
13 000 gènes. Chez l’homme (Homo sapiens), la taille du génome atteint 3 000 Mb et
contient environ 20 000 gènes. Chez une espèce végétale comme le maïs (Zea mays),
la taille du génome est bien plus grande encore et atteint 15 000 Mb.

Le troisième niveau de complexification de l’ADN porte sur la taille et la complexité des


gènes. En effet, corrélativement à l’accroissement de la taille des génomes, la taille et la
complexité structurale des gènes augmentent aussi. Par exemple, la taille moyenne d’un
gène bactérien est de 1 000 Pb (Pb = paire de bases) et le gène bactérien est dépourvu
d’intron. A l’opposé, un gène de mammifère peut être aussi grand que 600 000 Pb et
contient des introns (portions d’ADN non codantes) et des exons (portions d’ADN
codantes). C’est pourquoi, contrairement aux procaryotes, chez les eucaryotes les gènes
sont transcrits dans le noyau d’abord sous la forme d’un ARN pré-messager (ARN
immature non traductible en protéine) avant de subir, toujours dans le noyau, une
maturation post-transcriptionnelle. Cette maturation se traduit par l’élimination des

21
introns et le raccordement des exons pour donner l’ARNm traductible en protéine qui
passe dans le cytoplasme pour la traduction. C’est le phénomène de l’excision-épissage
lié à la structure en mosaïque des gènes eucaryotes. En d’autres termes, nous pouvons
dire que la complexité d’un organisme n’est pas seulement fonction de l’accroissement
de la taille de son génome mais aussi de la complexification des mécanismes de
fonctionnement de ses gènes. En effet, des organismes plus complexes peuvent avoir
des mécanismes permettant la production de plus d’une protéine par gène simple. Un
exemple de ce type de mécanisme est l’épissage alternatif qui donne différentes
protéines; la différence entre les protéines provient de la façon dont les introns sont
épissés de l’ARN transcrit pour la constitution de l’ARNm mature. On estime
qu’approximativement les 20 000 gènes humains sont responsables de la production
d’au moins 100 000 protéines.

Un dernier niveau de complexification de l’ADN est la duplication de séquences qui rend


les gènes de plus en plus redondants lorsqu’on passe des Procaryotes aux Eucaryotes.
Par exemple, on estime que la bactérie E. coli contient 1 345 gènes dupliqués, alors
qu’un eucaryote comme la drosophile en contient au moins 5 000. Ce phénomène se
traduit aussi par la répétition de certaines séquences de nucléotides dans les molécules
d’ADN. C’est le cas des séquences télomériques (aux extrémités des chromosomes),
exoniques et introniques. En dehors des gènes de structure qui sont en séquences
uniques, les autres séquences sont moyennement ou fortement répétées. Contrairement
aux eucaryotes, les procaryotes possèdent très peu de séquences répétées. On pense
que les séquences d’ADN répétées forment la partie non codante du génome qu’on
appelle « ADN poubelle » ou « ADN égoïste ». Chez l’homme, elle constitue au moins 95
% du génome. Le rôle de l’ADN poubelle n’est pas encore bien élucidé mais on pense
qu’il peut intervenir dans la production de la diversité génomique nécessaire à l’évolution
des génomes et à la génération de la diversité phénotypique des individus.

22
3. MUTATIONS DE LA STRUCTURE ET DU NOMBRE DE MOLECULES D’ADN ET
DIVERSITE BIOLOGIQUE
Des modifications aléatoires peuvent affecter la séquence des nucléotides dans les
molécules d’ADN au cours des divisions cellulaires (Mitose et Méiose) et porter sur une
ou plusieurs paires de bases. Mais ces modifications peuvent porter aussi sur le nombre
de molécules d’ADN de la cellule en augmentant ou en diminuant le nombre de
chromosomes caractéristique de l’espèce. Toutes ces modifications qualitatives et/ou
quantitatives de l’ADN cellulaire sont réunies sous le vocable "mutation".
Lorsque la mutation porte sur une seule paire de bases, on dit qu’elle est ponctuelle ;
lorsqu’elle porte sur plusieurs paires de bases au point d’affecter la morphologie du
chromosome, on dit qu’elle est chromosomique structurale. Enfin, lorsque la mutation
porte sur le stock de chromosomes de la cellule en faisant varier le nombre de l’un ou de
tous les types de chromosomes, on dit qu’elle est chromosomique numérique.

3.1. Mutations ponctuelles et biodiversité

Les mutations ponctuelles dont nous parlerons sont celles qui portent sur les portions
d’ADN codant des protéines (les gènes) et qui peuvent avoir des répercussions sur le
phénotype.

Les mutations géniques ponctuelles sont de natures diverses et peuvent consister en :

- une substitution d’une paire de bases par une autre, substitution qui peut être : soit
une transition quand une purine (A et G) remplace une purine ou quand une
pyrimidine (T et C) remplace une pyrimidine, soit une transversion lorsqu’une
purine remplace une pyrimidine et vice versa,
- une perte d’une paire de bases ou micro délétion,
- une insertion ou addition d’une paire de bases.

Certaines des protéines synthétisées conformément aux messages transmis par les
gènes sous forme d’ARNm sont des enzymes, c’est-à-dire des substances qui catalysent

23
toutes les réactions chimiques qui ont lieu dans les organismes vivants. Ce sont ces
réactions biochimiques qui assurent le développement des êtres vivants, donc la
manifestation de leurs caractères ou phénotypes. Toute modification de la composition
en acides aminés des enzymes provoquée par des mutations géniques aura des
conséquences sur l’activité enzymatique et, corrélativement, une incidence sur
l’expression phénotypique.

Pour mieux comprendre le lien plus ou moins direct qui existe entre les variations
structurales de l’ADN et la biodiversité, il est nécessaire de dire quelques mots sur le
développement d’un organisme ou ontogénèse. L’ontogénèse est l’embryologie d’un
être vivant, c’est-à-dire la séquence des transformations qui ont lieu depuis sa
constitution sous forme d’une cellule-œuf ou zygote jusqu’à son état adulte reproducteur.
Les différences fondamentales entre espèces trouvent leur explication dans les
différences qui existent lorsqu’on compare leurs séquences ontogéniques. On entend
par séquence ontogénique d’une espèce l’enchainement dans le temps des évènements
qui sont caractéristiques du développement d’un individu de cette espèce et commun à
tous ses individus. On appelle hétérochronie toute différence (ou transformation) dans la
séquence ontogénique d’une espèce par comparaison avec celle d’une autre espèce.
Les principales étapes de l’ontogénèse dans le règne animal sont :

- La formation du zygote,

- La multiplication cellulaire (division mitotique des cellules issues du zygote),

- La différenciation précoce (gastrulation, neurulation, mise en place des feuillets


embryonnaires, des tissus et des organes),

- La croissance fœtale et post-natale qui permet aux organes déjà différenciés


d’acquérir progressivement leur taille, forme et proportions définitives.

L’ontogénèse apparait ainsi comme une cascade d’évènements successifs


rigoureusement programmés et causalement coordonnés dans l’espace et dans le

24
temps. C’est l’information génétique codée dans les molécules d’ADN qui régule
l’ontogénèse et qui rend donc harmonieux le développement d’un être vivant. Les gènes
qui, dans les molécules d’ADN, sont spécialisés pour coordonner les séquences
ontogéniques sont appelés gènes du développement ou gènes homéotiques.

Chez la drosophile par exemple, ces gènes homéotiques sont classés en trois groupes :

- Les gènes maternels qui commandent l’acquisition des polarités avant/arrière (c’est-
à-dire antéropostérieure) et haut/bas (c’est-à-dire dorso-ventral) de l’embryon.

- Les gènes de segmentation qui commandent l’organisation segmentée du corps de


l’animal ; ce sont ces gènes qui positionnent la tête, le thorax et l’abdomen et qui
commandent donc la différentiation de l’avant et de l’arrière des segments.

- Les gènes sélecteurs homéotiques qui organisent les appendices (pattes, ailes,
antennes, etc.) caractéristiques de chaque segment. Les mutations de ces gènes
produisent d’étranges animaux : pattes à la place d’antennes chez les mutants
antennapedia ; pattes à la place de trompes chez les mutants proboscipedia ;
doubles paires d’ailes chez les mutants bi-thorax.

Nous pouvons donc dire, après cette brève évocation de l’ontogénèse, que l’édification
complète et harmonieuse d’un être vivant dépend à la fois de l’inaltération de son ADN
contenu dans le zygote et de la coordination parfaite (régulation) de l’expression des
gènes. Faute de quoi, certains individus présenteront un écart par rapport au modèle
phénotypique de leur espèce.

Donnons quelques exemples de l’incidence des mutations géniques sur l’expression


phénotypique.

25
Le premier exemple est celui de l’albinisme chez l’homme.

La mélanine est le pigment qui assure la coloration de la peau, des cheveux, des yeux,
etc. Cette substance provient du métabolisme d’un acide aminé, la phénylalanine (Phe)
comme le montre la chaîne simplifiée des réactions biochimiques que voici :

Phe Tyrosine 2,4 Di hydroxy-phénylalanine

E1 E2 E3 G3

G1 G2 Mélanine

Chaque étape de la transformation de la phénylalanine en mélanine est catalysée par


une enzyme, et les enzymes intervenant dans la chaîne sont désignées E1, E2 et E3. Ces
enzymes sont codées respectivement par les gènes G1, G2 et G3. Toute mutation
ponctuelle portant sur l’un de ces gènes et dont la conséquence est la synthèse d’une
enzyme inefficace ou l’absence de synthèse de celle-ci provoquera l’arrêt de la
biosynthèse de la mélanine. C’est l’absence de ce pigment qui explique l’apparition du
phénotype albinos dans les populations humaines.

Le deuxième exemple est celui du crustacé isopode marin (Sphaeroma serratum).


En 1950, Bocquet et Teissier ont mis en évidence chez cette espèce cinq (5) types
morphologiques en relation avec la couleur du corps (Figure 4). Ils sont désignés par les
lettres A, D, L, O, S.

A = type Albicans O = type Ornatum

D = type Discretum S = type Signatum

L = type Lunulatum

26
27
De nombreux croisements entre ces races ont permis de montrer que le
polychromatisme chez Sphaeroma est gouverné par quatre (4) couples d’allèles
indépendants notés D/d, L/l, O/o, S/s. Les interactions épistatiques entre ces gènes (les
allèles en majuscule sont dominants) se présentent comme suit :

- La présence de S à l’état homozygote ou hétérozygote dans le génotype détermine


l’expression du phénotype Signatum, quels que soient les allèles présents aux
autres loci.

- En l’absence de S, la présence de O à l’état homozygote ou hétérozygote


détermine l’expression du phénotype Ornatum, quels que soient les allèles
présents aux autres loci.

- En l’absence de S et O, la présence de L à l’état homozygote ou hétérozygote


détermine l’expression du phénotype Lunulatum, quels que soient les allèles
présents aux autres loci.

- En l’absence de S, L et O, la présence de D à l’état homozygote ou hétérozygote


détermine l’expression du phénotype Discretum.

- Enfin, le génotype quadruple homozygote récessif détermine l’expression du


phénotype Albicans.

Quelques correspondances entre génotypes et phénotypes chez Sphaeroma se


présentent comme suit :

28
DDLLOOSS
ou
DDLLOOSs
Type Signatum
ou
ddllooSS
ou
ddllooSs

DDLLOOss
ou
DDLLOoss
ou Type Ornatum
ddllOOss
ou
ddllOoss

DDLLooss
ou
DDLlooss
ou Type Lunalatum
ddLLooss
ou
ddLlooss

DDllooss
ou Type Discretum
Ddllooss

ddllooss Type Albicans

29
Un troisième exemple tout aussi révélateur est celui de la drosophile (Drosophila
melanogaster).
Lorsqu’on étudie des populations naturelles de drosophile où la souche sauvage ou
souche de référence a pu être identifiée, on constate l’existence de plusieurs souches
(races) qui se distinguent de la souche sauvage par un ou plusieurs caractères relatifs à
toutes les parties du corps de l’animal. Ces souches dites mutantes proviennent pour la
plupart de mutations ponctuelles portant sur des gènes qui gouvernent ces caractères.
Dans le tableau 2 nous rapportons quelques-uns des caractères distinctifs, quand on
compare les races mutantes à la sauvage. L’interprétation du tableau 2 fait apparaître
que les mutations géniques ponctuelles sont une source inépuisable de diversité
génétique. En effet, les quelques exemples de mutations rapportés dans ce tableau
permettent de montrer l’existence de 16 races simple mutantes. Nous verrons plus tard
comment la recombinaison génétique et la fécondation permettent d’obtenir davantage
de races encore.
Le même phénomène s’observe chez les végétaux car le polychromatisme des fleurs,
des fruits, des feuilles, des tiges, ainsi que les variations de la forme des feuilles, des
fruits, etc. sont déterminés par des mutations géniques ponctuelles.
Chez la courge (plante diploïde) par exemple, la forme du fruit est sous le contrôle
génétique de deux couples d’allèles indépendants A/a et R/r (les allèles en majuscule
sont dominants) en interaction épistasique (l'interaction existant entre deux ou plusieurs
gènes). Il y a épistasie lorsqu'un ou plusieurs gènes (dominants ou récessifs) masquent
ou empêchent l'expression de facteurs situés à d'autres lieux génétiques (locus) telle
que :
- La présence simultanée de A et R à l’état homozygote ou hétérozygote dans le
génotype détermine le phénotype ‘’fruit en disque’’.
- La présence de A ou R à l’état homozygote ou hétérozygote dans le génotype
détermine le phénotype ‘’fruit rond’’.
- Le génotype double homozygote récessif détermine le phénotype ‘’fruit allongé’’.
Les correspondances entre génotypes et phénotypes sont les suivantes :
AARR AArr
ou ou
AaRR Aarr
ou Fruit en disque ou Fruit rond aarr Fruit allongé
AARr aaRR
ou ou
AaRr aaRr

30
Tableau 2 : Diversité phénotypique chez la drosophile induite par les mutations géniques
ponctuelles. Les couples d’allèles gouvernant les caractères sont indiqués entre
parenthèses

SOUCHES CARACTERES ET PHENOTYPES


(RACES)
Couleur du corps Forme, taille, aspect des ailes Couleur des yeux

SAUVAGE v Gris v Allongé le long du corps v Rouge brique

v Arrondi

MUTANTES Ø Jaune (j+/j) Ø Découpé (d+/d) Ø Blanc (b+/b)

Ø Argenté (ar+/ar) Ø Atrophié (at+/at) Ø Rubis (ru+/ru)

Ø Sable (s+/s) Ø Réduit (rt+/rt) Ø Rouge vif (ro+/ro)

Ø Noir (n+/n) Ø Recourbé (re+/re) Ø Marron (ma+/ma)

Ø Miniature (mi+/mi) Ø Orange (or+/or)

Ø Ondulé (on+/on) Ø Rose (ro+/ro)

31
3.2. Mutations chromosomiques structurales et biodiversité

Bien que les chromosomes soient des éléments relativement stables, ils peuvent subir
des changements structuraux accidentels, appelés aussi aberrations chromosomiques,
qui contribuent dans une large mesure à la diversification biologique.

Le changement structural le plus simple est la fragmentation par rupture d’un


chromosome. Quand cette rupture se produit en dehors de la région centromérique, elle
donne naissance à deux fragments. Le fragment « centrique » pourvu du centromère
persiste alors que le fragment « acentrique » dépourvu de centromère est éliminé. Il en
résulte un chromosome qui diffère de son homologue par l’absence d’un segment
terminal plus ou moins long. C’est ce que l’on appelle une « déficience ».

Une aberration chromosomique qui ressemble à la précédente est la perte d’un segment
interstitiel de chromosome ; c’est ce que l’on appelle une « délétion ». Mais il arrive
parfois que l’on utilise le même terme « délétion » ou « déficience » pour désigner ces
deux types d’aberrations chromosomiques.

La modification chromosomique structurale opposée à la délétion est la « duplication »


dans laquelle un segment intercalaire de chromosome s’ajoute au chromosome original
et provoque une redondance de certaines régions du chromosome. Une telle
modification peut survenir au cours d’un crossing-over inégal entre chromosomes
homologues ou par simple transposition d’un segment de chromosome dans une autre
région du même chromosome ou d’un autre chromosome comme le montre l’exemple
suivant :

ABCDEF JKLM NO
A B
ABCDEF JKLM NO
2 paires de chromosomes originaux

ABCDECDF JKLM CDNO


A B
ABCDEF JKLM NO
Le segment CD est dupliqué sur l’un des chromosomes A et sur l’un des
chromosomes B .

32
Une autre modification structurale de chromosome est "l’inversion" qui se produit
lorsqu’un segment de chromosome occupe une position inversée par rapport à sa
situation d’origine (Figure 5A). On peut supposer que la formation de cette aberration
débute avec l’établissement d’une boucle suivie d’une double cassure. Les segments
isolés se soudent de telle manière que le segment provenant de la boucle soit inversé.

Figure 5 :

33
Le dernier type de modification chromosomique structurale est la « translocation ». Elle
résulte d’échanges de segments entre chromosomes non homologues. Il existe trois
types de translocations :

- La translocation simple qui consiste en un transfert d’un segment terminal d’un


chromosome sur l’une des extrémités d’un chromosome non homologue. Ce
phénomène ne requiert qu’une seule cassure.

- Le Shift qui est le transfert d’un segment intercalaire d’un chromosome dans une
partie d’un autre chromosome non homologue. Cette opération requiert trois
cassures.

- La translocation réciproque qui consiste en un échange de segments terminaux


entre deux chromosomes non homologues, ce qui nécessite deux cassures
(Figure 5B). Au niveau de chaque paire de chromosomes ayant subi une
translocation réciproque, on parle d’hétérozygotie (Figure 5C).

Dans la nature, les aberrations structurales comme les déficiences et les délétions ne
semblent jouer qu’un rôle très minime sur la diversification biologique. En effet, ces deux
types d’accidents chromosomiques en particulier ont généralement un caractère létal,
c’est-à-dire qu’ils sont incompatibles avec la vie.

Les translocations et les inversions, cependant, semblent avoir joué un rôle très
important dans la diversification biologique. Nous allons le montrer à travers quelques
exemples relatifs aux translocations.

Chez les onagres (plante diploïde à 2n = 14 chromosomes appartenant au sous-genre


Œnothera), l’espèce de référence appelée Œnothera hookeri présente à la méiose 7
bivalents. De cette espèce originale, sont dérivées 6 autres espèces par des
translocations réciproques ayant impliqué (Figures 6A et 6B) :

• 2 paires de chromosomes Œnothera franciscana


• 3 paires de chromosomes Œnothera rubrinervis
• 4 paires de chromosomes Œnothera rubricalyx
• 5 paires de chromosomes Œnothera strigosa
• 6 paires de chromosomes Œnothera lamarckiana
• 7 paires de chromosomes Œnothera muricata
34
Figure 6A

Figure 6B

35
Dans la superfamille des Acridoïdae (insectes orthoptères), Robertson a montré par une
étude des caryotypes que chez la plupart des espèces le caryotype est constitué par 23
chromosomes acrocentriques, soit 11 paires d’autosomes et 1 chromosome X. Chez une
minorité d’espèces, on a 2n = 21, 2n = 19, 2n = 17, mais chez celles-ci il y a toujours
présence d’un certain nombre de chromosomes métacentriques, le nombre de bras étant
toujours égal à 23. Cette situation s’explique comme suit :

• 2 translocations par fusion centromérique ayant impliqué 2 paires d’autosomes


permettent d’expliquer l’existence de l’espèce à 2n = 21 (9 paires d’autosomes +
2 métacentriques + 1 X).

• 4 translocations par fusion centromérique de 4 paires d’autosomes permettent


d’expliquer l’existence de l’espèce à 2n = 19 (7 paires d’autosomes + 4
métacentriques + 1 X).

• 6 translocations par fusion centromérique ayant impliqué 6 paires d’autosomes


permettent une explication de l’espèce à 2n = 17 (5 paires d’autosomes + 6
métacentriques + 1 X).

Remarque : Une translocation réciproque impliquant 2 chromosomes acrocentriques par


fusion centromérique est appelée translocation équilibrée ou translocation
robertsonienne.

Chez l’homme, on sait que l’une des causes de l’apparition du mongolisme (trisomie 21)
ou syndrome de Down est la survenue d’une translocation équilibrée entre l’un des
chromosomes 21 et l’un des chromosomes de l’une des paires de chromosomes du
groupe D (13, 14, 15). Cette translocation qui implique le bras long (q) du chromosome
21 et le bras long du chromosome 13, 14 ou 15 est symbolisée par tDq21q (t13q21q,
t14q21q, t15q21q). Un individu mâle ou femelle porteur d’une translocation tDq21q a un
phénotype tout à fait normal, mais garde la possibilité de donner naissance à un enfant
mongolien suivant le mécanisme schématisé ci-après :

36
21
21
21 14
14 t14q21q
14

Six types de gamètes


Méiose

21 21 21

21
14 21 14 14 14 21
14 14
I II III IV V VI

A l’issue de la méiose, un individu t14q21q, pris comme exemple, produit 6 types de


gamètes identifiés par les chiffres romains I, II, III, IV, V et VI.

A la fécondation, si un gamète de type IV fusionne avec un gamète normal qui a la


garniture chromosomique du gamète de type VI, l’enfant qui naîtrait serait mongolien
(trisomique 21) par translocation. Dans ce cas particulier on parle de mongolisme
héréditaire, et il est possible de prévoir son risque de récurrence dans une descendance.
Nous verrons qu’il existe aussi un mongolisme non héréditaire lorsque nous aborderons
les mutations chromosomiques numériques.

Chez la musaraigne commune d’Europe (Sorex araneus) (mammifère), on a observé


une variabilité chromosomique très importante induite par le phénomène des
translocations. Sur l’immense aire de distribution de cette espèce qui va de l’Europe de
l’Ouest jusqu’au lac Baïkal, le nombre d’autosomes varie de 18 à 30 en raison d’un
polymorphisme robertsonien. Plus impressionnant encore, cette espèce renferme plus
de 50 races chromosomiques différentes : d’une race à une autre, certains
chromosomes métacentriques ne sont homologues que par un seul bras, car ils ont été
produits par des translocations robertsoniennes différentes (Figure 7). En cas

37
d’hybridation entre deux races, cette homologie monobrachiale sera un obstacle à la
formation de gamètes normaux lors de la méiose. La fertilité même des hybrides est
mise en cause par ce processus qui établit ainsi une barrière d’isolement reproductif,
empêchant du même coup un flux de gènes entre les races. L’apparition de ces barrières
reproductives constitue les prémices de la spéciation, c’est-à-dire de la diversification
des espèces.

Figure 7 :

38
3.3. Mutations chromosomiques numériques et biodiversité

La variation numérique des chromosomes est une exception à la règle de constance du


nombre de chromosomes de chaque espèce. On distingue deux types de variations
chromosomiques numériques :

- Les variations numériques aneuploïdes qui n’affectent qu’une partie du stock ou lot
de chromosomes de la cellule ou de l’individu.

- Les variations numériques euploïdes qui affectent la totalité du lot de chromosomes


de la cellule ou de l’individu.

3.3.1. Mutations chromosomiques numériques aneuploïdes

Elles peuvent revêtir plusieurs formes dont nous ne citerons que quelques-unes :

• La nullisomie quand un organisme perd 2 chromosomes d’un complément donné


(2n – 2) ; elle est létale chez les organismes diploïdes.
• La monosomie quand un organisme diploïde perd un chromosome d’une paire
d’homologues (2n – 1).
• La trisomie quand un organisme diploïde possède un chromosome supplémentaire
(2n + 1).
• La double trisomie quand un organisme diploïde possède 3 exemplaires pour
deux des types de chromosomes (2n + 2).
• La tétrasomie quand un organisme diploïde possède une paire de chromosomes
homologues en 2 exemplaires (2n + 2). A la méiose, au moment où les
chromosomes homologues sont appariés, un organisme diploïde comme le mil
(2n = 14), s’il est tétrasomique (2n + 2 = 16), présentera 6 bivalents et 1
tétravalent.

Les variations chromosomiques numériques aneuploïdes ont une influence sur la


diversité biologique comme le montre les exemples suivants :

Exemple 1 : Chez la drosophile, les mouches monosomiques pour le chromosome IV (on


les appelle aussi haplo-IV) diffèrent phénotypiquement du type sauvage : elles sont plus
petites, moins vigoureuses, se développent plus lentement, ont des yeux plus rugueux,
et des soies plus courtes et fines.

39
Toujours chez la drosophile, les mouches monosomiques X sont mâles comme les XY.

Exemple 2 : Chez l’homme, les femmes monosomiques pour le chromosome X


présentent le syndrome de Turner ou syndrome de Bonnevie-Ulrich qui se caractérise
par une petite taille, une absence de la pilosité pubienne, des seins et de développement
des organes sexuels. Ces femmes sont donc impubertes et stériles. Elles exhibent un
habitus masculin.

Exemple 3 : Chez l’homme, les hommes disomiques pour le chromosome X présentent


le syndrome de Klinefelter qui se caractérise par une gynécomastie, une atrophie des
testicules et une stérilité. Ces hommes présentent un habitus féminin.

Exemple 4 : Chez l’homme, la trisomie du chromosome 21, liée à la non-séparation des


2 chromosomes 21 à la méiose et la formation de gamètes non réduits appelés gamètes
diplo-21, est responsable du mongolisme non héréditaire ou trisomie 21 libre. Sa
fréquence augmente dans les populations humaines avec l’âge de la mère (0,43/1000
naissances chez des femmes âgées de moins de 20 ans; 0,6/1000 chez des femmes
âgées de 20 à 25 ans; 1,2/1000 chez des femmes âgées de 30 à 35 ans; 21,7/1000 chez
des femmes âgées de 40 ans et plus, sur la base des données de Collman et al. (1962).

Exemple 5 : La trisomie 13 chez l’homme cause le syndrome de Patau se traduisant par


des perturbations tellement graves que les sujets trisomiques 13 ont une durée moyenne
de vie de 5 mois.

Exemple 6 : La trisomie 18 chez l’homme est responsable du syndrome d’Edward. La


durée moyenne de vie des mutants n’est aussi que de quelques semaines ou mois
comme dans le cas de la trisomie 13.

3.3.2. Mutations chromosomiques numériques euploïdes

Pour aborder les mutations chromosomiques numériques euploïdes qu’on appelle aussi
la polyploïdisation, faisons une distinction entre le nombre de chromosomes du gamète
qui est désigné par la lettre n et le nombre de chromosomes constitutif du génome de
base qui est désigné par la lettre x. chez les diploïdes, 2n = 2x ; chez les polyploïdes,
cette relation n’est plus vérifiée comme nous le verrons à travers de nombreux
exemples.

40
Considérons une espèce végétale comme Festuca ovina qui contient des formes ou
sous-espèces ayant 14, 28, 42, 49, 56 et 70 chromosomes (Bidault, 1968). Pour
l’ensemble de ces nombres, le plus petit commun multiple (7) représente le nombre de
base de l’espèce ou génome de base; on peut donc dire que dans cet exemple x = 7. Le
nombre le plus faible de cette série (14) représente 2 fois le nombre de base et on dit
qu’il est le nombre diploïde de l’espèce; on a 2n = 2x = 14 (n = x = 7). Les autres formes
dont les nombres chromosomiques sont des multiples de 7 sont qualifiées de
polyploïdes. Dans cette série nous avons donc :

2n = 4x = 28 = tétraploïde

2n = 6x = 42 = hexaploïde

2n = 7x = 49 = heptaploïde

2n = 8x = 56 = octoploïde

2n = 10x = 70 = décaploïde.

Selon leur origine et leur constitution génomique, on distingue habituellement quatre


grandes catégories de polyploïdes : les autopolyploïdes, les allopolyploïdes
segmentaires, les allopolyploïdes vrais et les autoallopolyploïdes.

• Les autopolyploïdes : ils se forment par multiplication du génome originel. Si l’on


représente ce dernier par AA ou BB ou CC, …, l’autotétraploïde, pris comme exemple,
aura la constitution AAAA ou BBBB ou CCCC, etc. La caractéristique générale des
autopolyploïdes est leur stérilité car ils produisent à la méiose des gamètes
déséquilibrés. Ils sont donc très rares dans la nature et l’un des rares exemples connus
d’autotétraploïdes est la variété vivace Œnothera lamarckiana (une espèce végétale
appelée onagre). Un autre exemple connu est celui des peupliers du groupe des
trembles (Populus tremula) qui sont des autotriploïdes (2n = 3x = 57). Ces arbres se
multiplient végétativement et forment des clones vigoureux et à croissance très rapide.

● Les allopolyploïdes segmentaires : ils contiennent deux paires de génomes ayant en


commun un grand nombre de segments homologues de chromosomes ou même des
chromosomes entiers, mais qui diffèrent l’un de l’autre par un certain nombre de
segments de chromosomes ou de gènes. La réunion de tels génomes au niveau diploïde
se traduit par une forte stérilité. C’est ce qu’on observe lorsqu’on croise deux espèces
animales proches comme le cheval et l’âne : les hybrides obtenus, qui sont le mulet (âne

41
x jument) et le bardot (ânesse x cheval), sont stériles. La formation des allopolyploïdes
segmentaires est donc subséquente à une hybridation entre deux types ayant des
génomes voisins. Si les formules génomiques de ces types sont AA, BB, CC, etc. et A’A’,
B’B’, C’C’, etc. l’hybride aura la constitution AA’, BB’, CC’, etc. S’il survient un
doublement du stock chromosomique de cet hybride, on obtient un allopolyploïde
segmentaire ayant la constitution AAA’A’, BBB’B’, CCC’C’, etc.

L’exemple classique d’allopolyploïdie segmentaire est celui que l’on connaît chez
Primula kewensis. Cette espèce végétale est issue du croisement spontané entre
Primula verticillata et Primula floribunda, deux espèces diploïdes (2n = 2x =18). A
l’origine, l’hybride F1 diploïde fut entièrement stérile mais au bout de quelques années,
cet hybride vivace donna naissance à un pied fertile tétraploïde (2n = 4x = 36) par la
fusion de gamètes non réduits.

● Les allopolyploïdes vrais : ils se forment comme les allopolyploïdes segmentaires


mais renferment des génomes nettement distincts. Leur méiose est donc caractérisée
par la formation exclusive de bivalents homogénétiques. C’est pourquoi ils sont
parfaitement fertiles et sont aussi appelés amphidiploïdes.

Un exemple bien connu d’allopolyploïdes vrais est celui de l’espèce végétale Galeopsis
tetrahit qui est un allotétraploïde avec 2n = 4x = 32 chromosomes. Muntzing (1930) a pu
exécuter expérimentalement une synthèse de cette espèce à partir de deux espèces
supposées parentes : Galeopsis pubescens (2n = 2x = 16) et Galeopsis speciosa (2n =
2x = 16). L’hybride obtenu, moyennement fertile, a donné une descendance variée parmi
laquelle une forme triploïde (2n = 3x = 24) qui a été croisée en retour avec Galeopsis
pubescens pour obtenir le Galeopsis tetrahit artificiel. La fécondation d’un gamète non
réduit (2n = 24) provenant de l’hybride triploïde par un gamète normal (n = 8) venant de
Galeopsis pubescens permet d’expliquer ce résultat. Le galeopsis artificiel créé par
Muntzing se croise parfaitement avec le galeopsis naturel.

Dans le complexe d’espèces de chou (Brassica), on connait aussi de nombreuses


espèces allotétraploïdes vraies formées par des hybridations entre espèces diploïdes.
Comme exemple, nous avons :

Brassica campestris (2n = 2x = 20) x Brassica nigra (2n = 2x = 16)

Brassica juncea (2n = 4x = 36)


42
Brassica campestris (2n = 2x = 20) x Brassica oleracea (2n = 2x = 18)

Brassica napus (2n = 4x = 38)

Brassica oleracea x Brassica nigra

Brassica carinata (2n = 4x = 34)

Dans le complexe d’espèces de blé, il existe des diploïdes, des allotétraploïdes et des
allohexaploïdes tels que :

Triticum monococcum (2n = 2x = 14, génome AA)

Triticum timopheevii (2n = 4x = 28, génome AAGG)

Triticum turgidum (2n = 4x = 28, génome AABB)

Triticum durum (2n = 4x = 28, génome AABB)

Triticum aestivum (2n = 6x = 42, génome AABBDD)

Chez les chrysanthèmes, il existe une série polyploïde à côté de l’espèce diploïde :

Chrysanthemum argenteum (2n = 2x = 18)

Chrysanthemum praealtum (2n = 4x = 36)

Chrysanthemum sibiricum (2n = 6x = 54)

Chrysanthemum arcticum (2n = 8x = 72)

Chrysanthemum pacificum (2n = 10x =90).

43
● Les autoallopolyploïdes : comme leur nom l’indique, ils sont une combinaison
d’autopolyploïdie et d’allopolyploïdie. Ils ne peuvent donc exister qu’à partir du niveau de
l’hexaploïdie. Nous nous contenterons de mentionner ici le cas de Phleum pratense qui
est hexaploïde et dont la formule génomique serait AAAABB, dans laquelle A est le
génome de Phleum nodosum et B celui de Phleum alpinum (Nordenskjold, 1941, 1945).

La polyploïdie, quasi inexistante dans le règne animal, a joué un rôle majeur dans
l’évolution des végétaux en assurant la diversification des familles et des genres
(paléopolyploïdie), ainsi que celle des espèces et des variétés (néopolyploïdie)
(Wagner et Wagner, 1979). En effet, elle est observée dans tous les grands groupes
végétaux (Algues, Bryophytes, Ptéridophytes, Gymnospermes et Angiospermes). Dans
le cas des Angiospermes, de nombreux auteurs ont estimé que la fréquence de la
polyploïdie est égale à 50 % (Darlington, 1937), 47 % (Grant, 1963), 30-35 % (Stebbins,
1971).

Dans la nature, les autopolypoïdes proviennent de la fusion de gamètes non réduits


issus d’individus d’une même espèce alors que les allopolyploïdes sont le résultat
d’hybridations interspécifiques suivies de doublement chromosomique par fusion de
gamètes non réduits.

Artificiellement, les polyploïdes sont produits par divers procédés : action du froid et de
certaines substances chimiques comme la colchicine, l’acénaphtalène, les dérivés
halogénés du naphtalène, etc.

Remarque : Dans certains cas, la variation de la longueur totale et de la morphologie


des chromosomes s’ajoute à la variation numérique des chromosomes pour engendrer
une diversité biologique. C’est ce qu’on constate lorsqu’on étudie l’évolution des
caryotypes dans le genre Crépis, comme le montre la figure 8. Cette évolution se
caractérise par une réduction du nombre (n = 6, 5, 4 et 3), de la longueur totale et de la
morphologie des chromosomes. Les caryogrammes de la figure 8 ont été établis en
utilisant comme longueur de référence, la longueur totale des chromosomes de Crepis
kashmirica à laquelle on a attribué le chiffre 100 (E. Babcock, 1947).

44
45
4. INFLUENCE DES PHENOMENES DE RECOMBINAISON GENETIQUE ET DE
FECONDATION
Les modifications qui affectent la structure de l’ADN sous les formes de mutations
géniques ponctuelles, chromosomiques structurales et chromosomiques numériques
sont les seules sources d’innovations génétiques sans lesquelles la diversification
biologique (ou évolution biologique) est impossible. Cependant, les gènes nouveaux
apparus suite aux mutations sont figés dans l’environnement des autres gènes avec
lesquels ils partagent le même chromosome. Par ailleurs, dans un contexte diploïde ou
polyploïde, l’expression phénotypique d’un gène mutant n’est immédiatement perceptible
que si celui-ci est dominant. Or, la plupart des gènes mutants sont récessifs et leur
incidence sur le phénotype n’est donc pas immédiate. C’est ici qu’intervient le rôle
déterminant des phénomènes de recombinaison génétique et de fécondation chez les
organismes à reproduction sexuée. Il existe deux types de recombinaisons génétiques :
la recombinaison interchromosomique et la recombinaison intrachromosomique.

• La recombinaison interchromosomique assure un mélange entre chromosomes


homologues (d’origine paternelle et maternelle) à la métaphase de la première
division méiotique.

• La recombinaison intrachromosomique assure une redistribution des gènes au


niveau de chaque paire de chromosomes à travers le phénomène du crossing-
over.

Le fondement des recombinaisons génétiques réside dans la différenciation des


chromosomes induite par les mutations et qui rend les chromosomes homologues
fonctionnellement différents. Si nous ne considérons que la recombinaison
interchromosomique, le nombre de types de gamètes qu’un individu diploïde est capable
de produire à la méiose est égal à 2n (n étant le nombre haploïde de chromosomes).

Donnons-en quelques exemples :

Drosophile : 2n = 24 = 16 types de gamètes


Mil : 2n = 27 = 128 types de gamètes
Cacao : 2n = 210 = 1 024 types de gamètes
Escargot : 2n = 212 = 4 096 types de gamètes
Souris : 2n = 220 = 1 048 576 types de gamètes
46
Homme : 2n = 223 = 8 388 608 types de gamètes
Canne à sucre : 2n = 240 > 109 types de gamètes.

A la fécondation, nous savons que les gamètes paternels et maternels se rencontrent au


hasard pour former les génotypes individuels. En prenant l’homme comme exemple, le
nombre minimal de génotypes individuels qu’un couple hétérosexuel peut produire à
chaque accouplement suivi de fécondation est égal à 2n x 2n = (2n) 2 = (223)2 ; on obtient
un chiffre qui avoisine les 65 000 milliards (65 trillions) de génotypes ou descendants
différents. On imagine aisément que ce chiffre puisse être infini si nous faisons intervenir
simultanément les deux types de recombinaison génétique. De cette manière, chaque
fécondation donne naissance à un individu véritablement différent, équipé d’un ensemble
unique de gènes. Ainsi, vient d’être mis en évidence le caractère déterminant des
phénomènes de recombinaison génétique liés à la reproduction sexuée dont nous avons
déjà noté l’importance dans le paragraphe 2 du chapitre 1. En permettant de rebattre
les cartes du patrimoine héréditaire, la recombinaison génétique assure des possibilités
infinies d’association de gènes dans les gamètes, donc une augmentation de la diversité
génétique. Par la combinaison au hasard des gamètes à la fécondation, cette diversité
génétique est davantage amplifiée dans les génotypes qui en résultent.

Par ailleurs, chaque gamète étant pur (première loi de Mendel), c’est-à-dire haploïde, la
rencontre de deux gamètes portant chacun un gène récessif pour le même locus permet
la formation d’un génotype homozygote et, subséquemment, l’expression phénotypique
des gènes récessifs masqués par l’hétérozygotie. C’est là que réside l’autre aspect très
important de la reproduction sexuée qui est de permettre une explosion de diversité
phénotypique corrélativement à la diversité génotypique.

Pour concrétiser l’augmentation phénoménale de la diversité génotypique et


phénotypique sous les phénomènes de recombinaison génétique et de fécondation,
reconsidérons l’exemple de la drosophile rapporté dans le tableau 2. Les 16 phénotypes
simple mutants correspondent chacun à un génotype homozygote récessif résultant du
croisement entre mouches sauvages simple hétérozygotes. Pour le caractère « couleur
du corps », si nous considérons l’exemple du phénotype mutant « corps jaune », il
apparaît dans la descendance d’un croisement : j+j x j+j. Pour le caractère « forme des
ailes », le phénotype mutant « ailes découpées » apparait dans la descendance d’un
croisement de génotype : d+d x d+d, etc.

47
Les croisements entre simple mutants de souche pure dans lesquels ces deux
caractères sont impliqués donneront des descendants F1 double hétérozygotes de
phénotype sauvage. Ensuite, les croisements de ces mouches F1 entre elles donneront
des descendants parmi lesquels certaines mouches sont sauvages de génotype d+d+j+j+,
d+d+j+j, d+dj+j+ et d+dj+j, d’autres simple mutantes pour l’un ou l’autre des deux caractères
et de génotypes ddj+j+, ddj+j, d+d+jj, d+djj et d’autres encore, double mutantes de
génotype ddjj. Si les mouches double mutantes ainsi obtenues sont croisées avec des
mouches simple mutantes de race pure aux yeux marrons, par exemple, et de génotype
d+d+j+j+mama, on obtient en F1 des mouches triple hétérozygotes de phénotype sauvage
dont les croisements entre elles donneront des descendants présentant des génotypes
et phénotypes variés dont des triple mutants : d+d+j+j+ma+ma+, ddj+j+ma+ma+, d+d+jjma+ma+ ,
d+d+j+j+mama, ddj+j+mama, d+d+jjmama, , , ddjjmama, etc. Les génotypes sont écrits en ligne
pour ne pas tenir compte de l’indépendance ou de la liaison des gènes.

C’est de cette manière que nous pouvons obtenir à partir des 16 races simples mutantes
du tableau 2, 84 races double mutantes et 144 races triple mutantes. Donnons quelques
exemples de races double mutantes et triple mutantes :

Races double mutantes

• Corps jaune, ailes découpées


• Corps noir, yeux orange
• Corps argenté, ailes réduites
• Corps noir, yeux roses
• Corps jaune, ailes miniatures
• Corps sable, ailes ondulées
• Ailes découpées, yeux blancs
• Ailes atrophiées, yeux marrons.

Races triple mutantes

•Corps jaune, ailes découpées, yeux blancs


•Corps jaune, ailes découpées, yeux marrons
•Corps noir, ailes atrophiées, yeux rubis
•Corps argenté, ailes ondulées, yeux rouge vif
•Corps sable, ailes réduites, yeux orange
•Corps noir, ailes redressées, yeux rubis
48
•Corps argenté, ailées découpées, yeux roses
•Corps sable, ailes atrophiées, yeux marrons.

On imagine aisément l’extraordinaire variabilité phénotypique que peut contenir une


population naturelle d’une espèce comme la drosophile, conséquence de l’immense
diversité génétique qu’elle recèle en liaison avec les mutations géniques, la
recombinaison génétique et la fécondation. Cette observation est générale à toutes les
espèces à reproduction sexuée.

5. ELEMENTS GENETIQUES MOBILES ET BIODIVERSITE


La recombinaison intrachromosomique par crossing-over dont nous avons déjà parlé est
une recombinaison homologue puisqu’elle requiert une ressemblance globale entre les
deux fragments d’ADN échangés. Autrement dit, il faut donc que ces fragments aient une
parenté structurale et un lien ancestral. Ainsi, chez les Procaryotes comme chez les
Eucaryotes, la variabilité génétique repose sur un mécanisme limité aux échanges entre
différents allèles de mêmes gènes ou entre gènes différents qui présentent des
similitudes quant à la séquence nucléotidique. Cette limitation réduit beaucoup la vitesse
de l’évolution (c’est-à-dire de la diversification biologique) par recombinaison
homologue ; en d’autres termes, on observe une persistance des espèces qui,
génération après génération, conservent leur identité fondamentale.
Cependant, nous avons déjà montré qu’en dehors de la recombinaison homologue, les
variations structurales et numériques des chromosomes sont des mutations génétiques
susceptibles d’entrainer un changement brusque de l’identité fondamentale des espèces.
Vers le milieu du 20e siècle, on a découvert l’existence de divers processus de
recombinaison « illégitime » capables de réunir des fragments d’ADN ayant peu ou pas
d’homologie de séquence nucléotidique. Une telle recombinaison est souvent effectuée
par des éléments génétiques mobiles appelés éléments transposables ; ces éléments
sont des segments d’ADN, discontinus structuralement et génétiquement, capables de
se déplacer d’une molécule d’ADN à l’autre. Le terme de « gènes sauteurs » est souvent
utilisé pour désigner aussi les éléments transposables. L’unité d’élément génétique
transposable est appelé transposon. Chaque transposon est caractérisé par des
extrémités constituées de séquences nucléotidiques en répétitions inversées (Figure
9A). Le mouvement assurant le transfert du transposon est appelé transposition. Les
éléments transposables ont d’abord été découverts chez les céréales (plus précisément
chez le maïs par une généticienne américaine, Barbara McClintock, à la fin des années

49
1940, ce qui lui a valu le prix Nobel en 1983), puis chez les phages, bactéries,
champignons, insectes, virus, et animaux plus complexes.
Les éléments transposables peuvent être de deux types. Le premier est une séquence
relativement courte d’ADN qui a la capacité de « sauter » d’un point à un autre du
génome. Ces éléments contiennent généralement un ou quelques gènes, parmi lesquels
le gène d’une enzyme nécessaire à la transposition appelée transposase. Ces éléments
se retrouvent chez les Procaryotes et les Eucaryotes. Le second type d’éléments
transposables doit passer par un ARN intermédiaire (un ARNm) qui est converti en ADN
avant que ce dernier ne soit inséré en un nouveau site du génome. Ces éléments sont
dénommés rétrotransposons et montrent des analogies avec les rétrovirus. Ils se
rencontrent principalement chez les organismes eucaryotes. Par ailleurs, les éléments
transposables peuvent êtres fonctionnels, c’est-à-dire capables d’assurer eux-mêmes
leur transposition, ou non fonctionnels dans le cas où ils ne pourraient induire à eux
seuls leur déplacement.
Il est apparu que le processus de la transposition joue un rôle non négligeable dans
l’organisation de l’information génétique et dans la régulation de son expression. Ainsi, la
transposition peut provoquer des mutations ; elle est donc une source potentielle de
modifications génomiques, et subséquemment, de diversité biologique.
En effet, les éléments transposables peuvent emmener dans leur déplacement des
séquences d’ADN adjacentes, engendrant ainsi des mutations ou peut-être des sites de
recombinaison au sein du génome. Lorsqu’un transposon se trouve inséré dans la région
codante d’un gène, il interrompt cette dernière et inactive l’expression du gène concerné.
De plus, les éléments transposables peuvent contenir des signaux de fin de transcription
et/ou de traduction qui bloquent l’expression d’autres gènes situés en aval du site
d’insertion, ce qui est le cas dans les opérons. Cet effet mutationnel unidirectionnel (ou
polarité) est décrit sous le terme de « mutation polaire ». La transposition peut aussi
aboutir à l’induction d’activités oncogéniques ou déclencheuses de cancer.
En provoquant des modifications génomiques brutales auxquelles sont associées des
variations phénotypiques inattendues, les éléments transposables se révèlent être une
source d’accélération de l’évolution à l’instar des variations structurales et numériques
des chromosomes. Quelques exemples de modifications phénotypiques provoquées par
les éléments transposables sont donnés par les figures 9B et 10.

50
Figure 9 :

51
Figure 10 :

52
B. INTERET, EROSION ET CONSERVATION DE LA BIODIVERSITE
1. INTERET DE LA BIODIVERSITE
Le terme biodiversité peut être remplacé aussi par le terme « ressources génétiques »
puisque ces deux concepts désignent l’ensemble des êtres vivants qui peuplent la terre.
Or, nous avons déjà vu que la taxonomie classique regroupe les êtres vivants en de
grands ensembles qui vont du règne à l’espèce. C’est dans cette logique que les
ressources génétiques sont divisées en deux grandes entités : les ressources
phytogénétiques (ensemble des êtres vivants constituant le règne végétal) et les
ressources zoogénétiques (ensemble des êtres vivants constituant le règne animal).

Dans ce cours, nous n’avons pas abordé le fonctionnement des écosystèmes dans
lesquels sont intégrées les ressources génétiques en fonction de leurs exigences vitales.
Dans les systèmes écologiques qui constituent la biosphère, les espèces vivantes sont
interdépendantes si bien que l’intégrité de chaque composante est indispensable pour
l’équilibre de l’ensemble. Autrement dit, l’existence de chaque espèce dépend de celle
des autres espèces. Comme nous le savons, la biosphère représente la partie de
l’écorce terrestre et de l’atmosphère contenant une vie organique. Le maintien de la
biosphère est assuré par l’existence-même de la biodiversité dont l’importance vitale
apparait ainsi. En effet, la diversité intraspécifique est indispensable pour assurer à
l’espèce une plus grande souplesse d’adaptation quand les conditions du milieu
changent radicalement. Cette assertion s’applique aussi aux genres, familles, ordres,
etc. C’est par ce principe qu’on peut expliquer la survie de nombreuses espèces
animales et végétales après la disparition en masse d’autres espèces tout au long de
l’histoire évolutive de la vie sur terre. Par exemple, dans le règne végétal les
gymnospermes étaient prédominantes au carbonifère mais aujourd’hui ce sont les
angiospermes qui prédominent.

Dans les paragraphes qui vont suivre, nous allons seulement montrer comment l’homme
a su tirer profit de la biodiversité ou ressources génétiques en sélectionnant des espèces
animales et végétales adaptées à ses besoins par le phénomène de la domestication.

En effet, ayant constaté que sa survie dépendait des animaux et des plantes (arbres
fruitiers, tubercules, graminées, etc.), l’homme a commencé à organiser d’abord la
cueillette et la chasse, et ensuite l’agriculture et l’élevage. Les premiers champs
constitués par l’homme étaient basés sur des populations végétales naturelles. En
remarquant par exemple que certaines graminées sont plus abondantes dans certaines
53
zones écologiques que dans d’autres, l’homme s’est contenté dans un premier temps à
sauvegarder ces zones. Mais la gestion de ces réservoirs d’aliments n’était pas toujours
facile car, mis à part la distance qui séparait son habitat de la zone de cueillette, il n’était
pas le seul qui avait accès à ces ressources.

Certains historiens pensent que les premières guerres qui ont eu lieu entre les peuples
primitifs étaient justifiées par la farouche volonté de contrôler les zones comportant ces
ressources. L’homme a fini par décider de rapprocher ces ressources de son habitat, et
c’est ainsi que sont nés les premiers champs autour des zones d’habitation. Ces champs
contenaient évidemment des plantes alimentaires très variées que l’homme s’évertuait à
reproduire. De cet effort est née l’agriculture. L’homme s’est rendu compte que la
diversité était très avantageuse pour lui, car ce qui lui permettait de survivre dans les
périodes difficiles c’était de pouvoir disposer de ressources alimentaires dont
l’exploitation pouvait s’étaler sur toute l’année. De toute évidence, aucune espèce
végétale ne pouvait à elle seule satisfaire cette condition.

De plus, l’homme a remarqué que même pour une espèce végétale donnée, il existe des
formes plus vigoureuses que d’autres, des formes qui supportent mieux les conditions
climatiques que d’autres. Et comme il ne pouvait pas prédire la situation future dans
laquelle il se trouverait, il a judicieusement conservé la diversité naturelle. Dans ce
processus de domestication, l’homme s’est aussi rendu compte que la proximité qu’il a
artificiellement créée en regroupant différents individus de la même espèce qui ont des
caractéristiques différentes entrainait la combinaison entre ces caractères dans les
descendances.

Petit à petit, l’homme est arrivé à regrouper dans un nombre limité de génotypes ou
d’individus beaucoup de caractères intéressants pour lui. C’est ainsi que la
domestication a permis d’aboutir à l’amélioration variétale. Ce processus d’amélioration
qui a évolué à travers les âges est à la base de l’agriculture moderne. Il est donc évident
que l’homme est capable de changer le cours de l’évolution. Par la domestication, il a su
contrôler durant des milliers d’années la reproduction des espèces sauvages pour
adapter leur évolution à ses besoins propres. Du blé, du riz, du maïs, des vaches, des
poulets et des chiens sont tous dérivés d’espèces sauvages.

Dans le cas des espèces végétales, la domestication a d’abord permis la création


d’espèces cultivées traditionnelles. Sous la pression de sélection continue exercée par
l’homme, on est passé des variétés traditionnelles à des variétés lignées pures ou des
variétés hybrides issues de croisements entre lignées pures. Les exemples du blé et du
54
maïs illustrent deux manières différentes selon lesquelles cette évolution s’est faite. Le
blé a évolué grâce à deux évènements polyploïdes de spéciation, le premier à conduit à
la production du blé dur (Triticum turgidum), le second à la formation du froment ou blé
tendre utilisé dans la panification (Triticum aestivum). Le maïs, d’autre part, a évolué
directement à partir d’une espèce sauvage appelée téosinte. Alors que le téosinte
possède de longues branches latérales, chacune pleine de structures reproductrices
mâles, le maïs a des branches latérales courtes, chacune inclinée avec des structures
femelles. Ainsi, le maïs produit plus de graines et donc plus de nourriture. Les études
génétiques récentes indiquent que les nombreuses différences en termes de forme entre
le maïs et le téosinte sont contrôlées par des variations dans la régulation d’un seul
gène. Les premiers fermiers d’Amérique Centrale (où a débuté la domestication du maïs)
ont probablement repéré un plant de téosinte présentant certaines mutations qui ont
changé l’expression de ce gène et, en multipliant sélectivement ce mutant, ont continué
à guider l’évolution du maïs à partir de téosinte.

Dans le cas des espèces animales, il semble maintenant évident que le bétail bovin a été
domestiqué trois fois depuis le bœuf sauvage maintenant éteint (Bos primigenius) appelé
Auroch. Le résultat est l’obtention de deux espèces domestiquées : Bos taurus (le
taureau domestique) et Bos indicus (le zébu à bosse). Quant aux poulets actuels, ils ont
été domestiqués à partir d’une volaille de la jungle asiatique méridionale. Pour ce qui
concerne les chiens, ils ont été domestiqués à partir des loups gris en plusieurs étapes.
Ainsi, la remarquable diversité des chiens représente les effets d’une sélection artificielle
sur un nombre restreint de loups domestiqués (Figure 11).

Tout comme chez les végétaux, le perfectionnement de la domestication a abouti à la


création d’animaux de race, c’est-à-dire de souche pure. Il existe aujourd’hui des
chevaux, des chiens, des moutons, des porcs, des bœufs, des poulets etc., de race
pure.

55
Figure 11 : Diversification des chiens sous la pression de la domestication

56
2. EROSION DE LA BIODIVERSITE
L’histoire de la biologie évolutive montre qu’il existe de nombreuses pressions érosives
de la diversité biologique. Ces pressions sont d’origines naturelle et anthropique. En
effet, de nombreux facteurs naturels comme les incendies de forêt provoqués par des
foudres et des coulées de laves volcaniques chaudes, les émissions de gaz volcaniques
toxiques, les cataclysmes provoqués par les chutes de grosses météorites, les
glaciations etc., ont entrainé des extinctions à grande échelle d’espèces animales et
végétales, réduisant de manière impressionnante la biodiversité. Nous en avons pour
preuves, la crise de la fin du Dévonien (-365 millions d’années) qui a vu la disparition
d’environ 70 % des espèces, la crise de la transition Permien/Trias (-245 millions
d’années) qui a entrainé la disparition d’environ 95 % des espèces, celle de la fin du
Trias (-205 millions d’années) à laquelle on attribue la disparition de 60 % des espèces
et la dernière grande crise de la transition Crétacé/Tertiaire (-65 millions d’années) qui a
provoqué la disparition d’environ 70 % des espèces dont tous les gros reptiles comme
les Dinosaures. On pense qu’aucune espèce strictement terrestre de plus de 25 kg n’a
survécu à cette crise.

A cela, s’ajoutent les effets dévastateurs de l’environnement induits par les activités
relatives au développement humain : industrialisation polluante, urbanisation accélérée
(du fait de l’explosion démographique), déforestation à grande échelle pour la réalisation
de grands projets agro-industriels et de cultures de subsistance, incendies de forêts
allumés par l’homme, chasse incontrôlée des animaux, catastrophes maritimes
provoquées par l’exploitation et le transport de pétrole etc. Ces pressions anthropiques
érosives de la biodiversité sont si agissantes que de nombreuses espèces animales et
végétales actuelles ont disparu ou sont en voie de l’être (espèces endémiques).
Cependant dans ce paragraphe, nous parlerons brièvement de l’érosion de la
biodiversité sous la seule pression de facteurs d’ordre génétique tels que la sélection
naturelle, la sélection artificielle, la dérive génétique aléatoire et la consanguinité. En
d’autres termes, nous ne donnerons rien qu’un bref aperçu des effets des forces
d’érosion de la variabilité génétique, c’est-à-dire de l’appauvrissement en gènes des
espèces.

● Dérive génétique : C’est le phénomène qui conduit à la fixation des allèles dans les
lignées d’effectif génétique limité. Elle se produit à chaque génération du fait du faible
effectif des fluctuations aléatoires des fréquences alléliques qui vont jusqu'à entraîner la
perte de certains autres. Le processus de dérive conduit donc à une érosion complète de
la variabilité génétique s’il n’est pas compensé par un certain degré de migration, venant
57
éventuellement d’autres lignées en dérive, mais qui n’auront pas fixé les mêmes allèles
puisque c’est un processus aléatoire.

● Consanguinité : Elle consiste en des croisements (ou accouplements) d’individus


apparentés. Elle conduit aussi à la fixation aléatoire et complète d’un allèle de chaque
gène. Elle ne diffère pas de la dérive génétique lorsqu’elle a lieu dans une population de
faible effectif. Toutefois, l’application de systèmes de croisements consanguins de
manière systématique permet de parvenir plus vite à la fixation des allèles. Dans le cas
de croisements frères par sœurs, 10 générations suffiraient à obtenir l’homogénéité
d’une lignée.

Que ce soit la dérive ou la consanguinité, c’est la variabilité intra-lignée qui s’amenuise et


non la variabilité entre lignées.

● Sélection naturelle : C’est le phénomène qui agit sur les différences d’adaptation des
individus. En effet, dans un milieu de vie caractérisé par des conditions stables (froid,
chaleur, sécheresse, pluviosité, humidité, lumière, compétition, parasitisme, prédation
etc.), les individus dont les phénotypes sont les moins adaptés sont éliminés en masse.
Seuls les mieux adaptés survivent et transmettent à leurs descendants leurs caractères
adaptatifs. En éliminant directement les phénotypes les moins adaptés, la sélection
naturelle élimine indirectement les génotypes qui les gouvernent. De cette manière, des
espèces entières peuvent être éliminées au profit d’autres espèces qui prennent le
dessus. En agissant ainsi, la sélection naturelle occasionne une grande perte de
variabilité génétique.

● Sélection artificielle : Elle opère comme la sélection naturelle ; à la seule différence


qu’ici la pression de sélection est imposée par l’homme en fonction des besoins qu’il veut
satisfaire. Nous avons déjà montré que le perfectionnement de la domestication,
exigence de l’agriculture et de l’élevage modernes, a conduit à la création de variétés
lignées pures chez les végétaux et d’animaux de race pure. Malheureusement, ce
succès retentissant de l’agriculture et de l’élevage a eu pour conséquence l’abandon
progressif de nombreuses souches ou variétés traditionnelles de plantes et d’animaux au
profit de variétés ou races améliorées plus productives. Aujourd’hui, nous pouvons
affirmer de manière péremptoire que de nombreuses variétés ont totalement disparu.
L’agriculture et l’élevage modernes ont conduit progressivement au remplacement de la
variabilité par l’uniformité.

58
Cette érosion génétique, consubstantielle à la sélection artificielle, est source de danger.
Un exemple concret nous vient du maïs dont la variété CMS-T (Cytoplasmique Male
Stérile-Texas) était utilisée pour la constitution des champs (80%) dans les années 60-70
aux USA. Malheureusement, l’apparition d’une souche mutante d’un champignon appelé
Helminthosporium maydis, à laquelle la variété CMS-T était seule sensible, a entrainé
une catastrophe agricole en 1970 par la perte de 80% de la production de maïs. Cet
évènement majeur a suscité une prise de conscience mobilisatrice de la nécessité
absolue de conserver la variabilité génétique. Ainsi, sont nés les grands programmes de
conservation des ressources génétiques.

3. CONSERVATION DE LA BIO DIVERSITE


La conservation de la diversité biologique peut se faire sous des formes variées.

3.1. Conservation in-situ

La conservation in-situ d’un matériel biologique consiste en son maintien dans son
écosystème naturel en prenant toutes les dispositions pour sauvegarder l’équilibre de cet
écosystème. Sous cette forme, on peut citer : les aires protégées, les parcs nationaux,
les forêts classées, les réserves naturelles et les forêts sacrées.

3.2. Conservation ex-situ

Elle consiste en des collections qui peuvent revêtir plusieurs formes :

• Les collections vivantes : Elles sont constituées de matériels biologiques prélevés


dans différents écosystèmes pour constituer des parcs à bois (jardins botaniques,
collections spécialisées de plantes pérennes comme les caféiers et les cacaoyers par
exemple, les bois sacrés).

• Les collections en champ : Elles sont faites pour les cultures vivrières, les cultures
annuelles, les plantes médicinales, etc.

• Les collections en chambre froide : Elles sont faites pour les semences comme les
graines.

59
• Les collections in vitro : Elles consistent en la conservation de plantes sous forme de
micro-boutures repiquées en milieux de culture artificiels totalement aseptisés.

• La cryoconservation : Elle est faite pour les embryons ou autres structures cellulaires
embryogéniques, à des températures inhibant toutes les fonctions biologiques, sans
pour autant tuer les tissus.

60
CONCLUSION

61
Nous savons que les pressions venant des facteurs du milieu agissent directement sur
les phénotypes individuels. Les réponses différentielles produites par les individus sous
ces pressions déterminent leur adaptation ou leur élimination : c’est le phénomène de la
sélection naturelle. Les divergences intraspécifiques qui en résultent, si elles sont
accompagnées par des phénomènes d’isolement (l’isolement écologique par exemple),
peuvent conduire à la naissance d’écotypes. Un écotype se définit comme étant une
population dont les caractéristiques héréditaires sont le produit de la réaction entre les
génotypes et le milieu. C’est le résultat de l’action sélective des facteurs prédominants
du milieu qui éliminent les biotypes défavorables et produit des populations
génétiquement adaptées. Si cette différenciation intraspécifique se maintient et s’il s’y
ajoute des phénomènes d’isolement reproductif (isolement prézygotique, isolement
zygotique, isolement postzygotique), elle conduira à la différenciation spécifique, donc à
la spéciation (c’est-à-dire la naissance de nouvelles espèces). La spéciation est le
moyen par lequel la diversité de la vie s’est produite.

Les différences génétiques entre individus au sein des populations d’une espèce
constituent donc le point de départ de l’explosion de diversité que nous constatons entre
les espèces et les grands groupes d’espèces.

C’est la biodiversité qui assure l’équilibre de la biosphère car toutes les espèces vivantes
sont interdépendantes. Malheureusement, les civilisations humaines sont en train de
compromettre cet équilibre. Grâce à la diversité génétique qui prédispose les espèces
vivantes à toutes les formes d’adaptation, les chances de survie aux changements
imprévisibles des conditions du milieu sont garanties à tous les groupes d’êtres vivants.
C’est pourquoi, nous pensons que le plus grand défi que toutes les civilisations
humaines actuelles se doivent de relever absolument est celui de la préservation de la
biodiversité. Du succès de cet enjeu dépendent notre survie et celle de toutes les autres
espèces.

62
TRAVAUX DIRIGES

EXERCICE 1

1. A partir du modèle hypothétique d’un gène que voici, expliquez les notions
de :
-Gènes allèles
-Réplication de l’ADN
-Transcription de l’ADN
-Traduction de l’ADN
3’TACCTACAAGGTAAGATGTTTCCAGTAATT 5’
5’ATGGATGTTCCATTCTACAAAGGTCATTAA 3’
2. On admet que la protéine enzymatique codée par ce gène catalyse la
dernière étape de la biosynthèse de la mélanine. En faisant intervenir une
mutation faux-sens ou une mutation non-sens par substitution portant sur le 7è
triplet de bases, expliquez la variation phénotypique qui peut affecter le
mutant.

EXERCICE 2

Pour l’exemple de variation phénotypique chez Sphaeroma serratum donné


dans les pages 26 à 29 du cours magistral, donnez :
1. Une méthode simple pour faire l’inventaire de tous les génotypes possibles
avec les quatre couples d’allèles considérés.
2. Les génotypes non mentionnés des types Signatum, Ornatum et Lunulatum.

EXERCICE 3

Avec l’exemple de quatre caractères, sous la dépendance d’un couple d’allèles


chacun (pages 46-49 du cours magistral), expliquez les mécanismes des
recombinaisons génétiques méiotiques :
1. La recombinaison interchromosomique en admettant que les quatre couples
d’allèles sont portés par des chromosomes différents.
63
2. La recombinaison intrachromosomique en admettant que les quatre couples
d’allèles sont portés par le même chromosome.
3. Quel est l’intérêt de la reproduction sexuée ?

EXERCICE 4

En ne considérant que les paires de chromosomes 14 et 21, donnez les


combinaisons chromosomiques possibles dans les zygotes issus du croisement
d’un homme portant une translocation de type (t14q21q) avec une femme
normale et donnez aussi le risque de récurrence du mongolisme dans leur
descendance.
Cet exercice offre l’opportunité de décrire brièvement la morphologie des
chromosomes et le caryotype humain avant sa résolution.

EXERCICE 5

Expliquez par quels mécanismes certains individus, dans les populations


humaines, sont atteints :
1. Du syndrome de Down lié à la trisomie 21 libre (mongolisme non
héréditaire).
2. Du syndrome de Turner ou syndrome de Bonnevie-Ulrich lié à la monosomie
X chez les femelles.
3. Du syndrome de Klinefelter lié à la disomie X chez les mâles.

EXERCICE 6

Pour l’exemple du complexe d’espèces du genre Chrysanthemum à la page 43


du cours magistral, montrez comment l’hybridation interspécifique suivie du
dédoublement chromosomique peut permettre d’expliquer l’existence de ce
complexe.

EXERCICE 7

Expliquez les mécanismes de la différenciation spécifique dans la superfamille


des Acridoidea et dans le genre Oenothera (exemples cités aux pages 34-36 du
cours magistral).

64
EXERCICE 8

Le cotonnier cultivé (Gossypium hirsutum) est un allotétraploïde à 2n = 4x = 52


chromosomes issu du croisement entre G. herbaceum (2n = 2x = 26, génome
AA) et G. raimondii (2n = 2x = 26, génome DD).
Pour montrer l’expression phénotypique associée à chaque type de
chromosome, on a créé expérimentalement une série de lignées d’addition
monosomiques de cotonnier cultivé selon la méthode qui suit :
G. hirsutum (2n = 4x = 52, AADD) a été croisé avec G. anomalum (2n = 2x = 26,
B1B1) pour produire, après dédoublement chromosomique, un hybride fertile
hexaploïde (2n = 6x = 78, AADDB1B1). Cet hybride a été croisé en retour avec
l’espèce parente G. hirsutum (backcross) pour créer un hybride pentaploïde
fertile (2n = 5x = 65, AADDB1) qui, croisé toujours en retour avec G. hirsutum, a
permis l’obtention de la série de lignées d’addition monosomiques contenant
chacun l’un ou l’autre des 13 chromosomes du génome B1.
Expliquez, en détaillant, la méthode de création de ces lignées d’addition
monosomiques.

EXERCICE 9

Une étude cytogénétique du complexe d’espèces de chou (Brassica) et de leurs


hybrides a donné les résultats consignés dans le tableau suivant :
Nombre de Nombre de Nombre de
Espèces ou hybrides
chromosomes bivalents monovalents
B. juncea 36 18 0
B. carinata 34 17 0
B. napus 38 19 0
B. juncea x B. nigra 26 08 10
B. napus x B. campestris 29 10 09
B. carinata x B. oleracea 26 09 08
B. oleracea x B. juncea 27 0 27
B. carinata x B. campestris 27 0 27
B. napus x B. nigra 27 0 27
A partir de ces résultats :
1. Déterminez les nombres chromosomiques de B. nigra, B. campestris et B.
oleracea,
2. Et établissez les relations évolutives dans ce complexe d’espèces.

65
LE CODE GENETIQUE

66
CORRIGES TRAVAUX DIRIGES

EXERCICE 1

1. Explication des quatre notions


1.1. Notion de gènes allèles

Deux gènes sont dits allèles quand l’un dérive de l’autre par mutation. Un allèle
est donc une version alternative d’un gène.
Considérons l’exemple du système de groupes sanguins ABO chez l’homme et
admettons que le modèle de gène donné dans l’exercice correspond à la version
A du gène qui gouverne ce système.

Figure 2 :

A = 5’ ATGGATGTTCCATTCTACAAAGGTCATTAA 3’
G T
Si, par mutation, la 15è paire de base C est remplacée par A nous aurons la
version B du même gène telle que :

1 5 10 15 20 25 30
3’ TACCTACAAGGTAATATGTTTCCAGTAATT 5’
B = 5’ ATGGATGTTCCATTATACAAAGGTCATTAA 3’
T C
Si, par une autre mutation, la 20è paire de base est remplacé par G
nous
A
aurons la version O du même gène telle que :

1 5 10 15 20 25 30
O = 3’ TACCTACAAGGTAAGATGTCTCCAGTAATT 5’
5’ ATGGATGTTCCATTCTACAGAGGTCATTAA 3’
A, B et O sont donc trois allèles ou versions alternatives d’un même gène.

67
1.2. Notion de réplication de l’ADN

La réplication de l’ADN est la duplication d’une molécule d’ADN en deux


molécules filles ayant la même séquence de bases que la molécule mère. Elle
commence par la séparation des deux filaments ou brins complémentaires et
chaque monofilament est utilisé comme matrice pour la synthèse d’un nouveau
brin de sorte que la nouvelle molécule d’ADN est constituée d’un brin ancien et
d’un brin néoformé (modèle de réplication semi-conservative de Watson et
Crick).
Avec le modèle d’ADN donné dans l’exercice, nous aurons :

3’ TACCTACAAGGTAAGATGTTTCCAGTAATT 5’
5’ ATGGATGTTCCATTCTACAAAGGTCATTAA 3’

5’ ATGGATGTTCCATTCTACAAAGGTCATTAA 3’
3’ TACCTACAAGGTAAGATGTTTCCAGTAATT 5’

1.3. Notion de transcription de l’ADN

C’est la synthèse d’une molécule d’ARN à partir d’une matrice d’ADN. La


transcription produit les molécules d’ARNm, ARNt et ARNr. Dans l’ARN dont
la structure est généralement monocaténaire (simple brin) la Thymine est
remplacée par l’Uracile (T remplacée par U). A partir du modèle d’ADN qui
nous est donné dans l’exercice nous aurons :
a) Si le brin transcrit est 3’ 5’, la molécule d’ARN formée aura la
structure : 5’ AUGGAUGUUCCAUUCUACAAAGGUCAUUAA 3’
b) Si le brin transcrit est 5’ 3’, la molécule d’ARN synthétisée aura la
structure : 3’ UACCUACAAGGUAAGAUGUUUCCAGUAAUU 5’

68
1.4. Notion de traduction de l’ADN

La traduction est la conversion de l’ARNm transcrit à partir de l’ADN en


séquence d’acides aminés dans une chaîne polypeptidique ou protéine. La
traduction débute toujours à partir de l’extrémité 5’ de l’ARNm par un codon
(triplet de bases de l’ARNm qui permet la sélection d’un acide aminé) initiateur
qui est AUG pour progresser vers l’extrémité 3’ de l’ARNm. Au cours de cette
progression, si l’un des trois codons suivants : UAA, UAG, UGA est rencontré,
la traduction s’arrête. Ces codons sont donc appelés codons d’arrêt ou codons de
terminaison ou codons non-sens.
C’est donc un triplet de bases de l’ARNm qui est nécessaire pour spécifier, soit
un acide aminé, soit un signal d’initiation, soit un signal de terminaison pour la
formation d’une protéine. C’est ce qu’on appelle le code génétique qui permet à
la cellule d’utiliser l’information du gène pour fabriquer la protéine pour
laquelle il code.
NB : Alors que dans l’ARNm les triplets de bases du code génétique sont
appelés codons, on les appelle anticodons dans l’ARNt et genons dans l’ADN.
Triplet d’initiation Triplets de terminaison

Codon Codons
ARNm
AUG UAA ou UAG ou UGA

Genon Genons
ADN
TAC ATT ou ATC ou ACT

En plus d’être initié et ponctué, le code génétique est dégénéré, non chevauchant
et non ambigu.

2. Variation phénotypique pouvant affecter le mutant :


- Une mutation faux-sens est une mutation qui change la structure d’un
codon et qui change aussi la spécificité en acide aminé différent,
entrainant un changement de la séquence primaire de la chaîne de
polypeptide codée; corrélativement, la fonction de la protéine est aussi
modifiée et celle-ci devient inactive.

69
- Une mutation non-sens est une mutation qui change un codon à spécificité
d’acide aminé en un codon de terminaison (codon d’arrêt);
corrélativement, elle entraîne l’arrêt prématuré de la formation de la
chaîne d’acides aminés pendant la traduction. La protéine n’est donc pas
synthétisée.
Le modèle de gène qui nous est proposé contient 10 triplets de bases au niveau
de l’ADN, donc 10 genons.
Admettons que le brin 3’ 5’ est le brin codant de ce gène puisqu’il
commence par un genon d’initiation (TAC) et se termine par un genon d’arrêt
(ATT). Le 7è triplet de bases ou 7è genon de ce gène est TTT.
Déterminons la séquence des acides aminés de la protéine codée par le gène et
qui catalyse la dernière étape de la biosynthèse de la mélanine :
ADN : 3’ TACCTACAAGGTAAGATGTTTCCAGTAATT 5’

Transcription

ARNm : 5’ AUGGAUGUUCCAUUCUACAAAGGUCAUUAA 3’

Traduction

Protéine: Met – Asp – Val – Pro – Phe – Tyr – Lys – Gly – His

- Une mutation faux-sens se traduisant par le changement du 7è genon TTT


en CTT par exemple, aurait pour conséquence le remplacement du 7è
acide aminé (Lys) par un autre acide aminé (Glu) codé par le codon GAA.
Si cette substitution d’acide aminé entraîne la perte de la fonction de la
protéine, la mélanine ne sera pas synthétisée et le mutant sera albinos.
- Une mutation non-sens qui se traduirait par le changement du 7è genon
TTT en un genon d’arrêt ATT par exemple, aurait pour conséquence
l’arrêt prématurée de la traduction et donc la non formation de la protéine.
Dans ce cas aussi, la mélanine ne sera pas produite par le mutant qui sera
alors albinos.

70
EXERCICE N°2

1. Méthode d’identification des génotypes possibles :

Les quatre couples d’allèles en jeu sont : D/d, L/l, O/o et S/s. Ils sont
indépendants. Chez les organismes diploïdes nous avons trois génotypes pour un
couple d’allèles.

D D d O O o
D/d , et O/o , et
D d d O o o

L L l S S s
L/l , et S/s , et
L l l S s s

Compte tenu de l’indépendance physique des 4 couples d’allèles, les 3


génotypes de chaque couple d’allèles peuvent être combinés au hasard à ceux
des autres couples d’allèles, ce qui permet de construire l’arbre des
combinaisons génotypiques pour déterminer tous les génotypes possibles.

O S D L O S

O S D L O S
L O S L O S
D
L o s L O s
D
L o
D s D L O s

D l o
s D L O s
. .
l
. .
. l .
. .
. .
C’est ainsi qu’on arrive à identifier les 81 génotypes possibles.
71
2. Les génotypes non mentionnés des types Signatum, Ornatum et Lunulatum :
Les génotypes de ces types se déduisent aisément de la première question en
tenant compte des interactions entre les gènes indiqués dans le cours. Les
génotypes non mentionnés sont au nombre de 50 pour Signatum, 14 pour
Ornatum et 2 pour Lunulatum.

EXERCICE N°3

1. La recombinaison interchromosomique est le processus de brassage


indépendant des chromosomes d’origine maternelle et d’origine paternelle.
Corrélativement on a aussi de nouvelles combinaisons entre les allèles portés par
ces chromosomes. La recombinaison interchromosomique intervient à la
première division de la méiose, plus précisément à la métaphase quand les
chromosomes homologues se disposent de chaque côté du plan équatorial.
Considérons le modèle de l’espèce végétale diploïde rapporté dans les pages 46
à 49 du cours magistral et admettons que cette espèce possède 2n = 8
chromosomes (n = 4). Représentons les quatre paires de chromosomes par
quatre paires de figures géométriques différentes et marquons les chromosomes
d’origine maternelle par les allèles dominants et ceux d’origine paternelle par les
allèles récessifs.

72
73
Pour notre modèle à 2n = 8 (n = 4), le nombre de types de gamètes produits par
recombinaison interchromosomique est égal à 16, soit 24 = 2n.
2. La recombinaison intrachromosomique est le processus de brassage par
crossing-over des allèles portés par le même chromosome et qui ne concerne
donc que la même paire de chromosomes homologues. La recombinaison
intrachromosomique se produit à la première division de la méiose, plus
précisément à la prophase quand les chromosomes homologues sont appariés.
Considérons le même modèle précédent avec cette fois-ci les quatre couples
d’allèles portés par l’une des paires de chromosomes, avec les allèles dominants
sur l’un des homologues et les allèles récessifs sur l’autre homologue.

74
C P C P
R S RS
+
c p r s
c p
r s

Aucun crossing-over ne survient à la méiose :

C P C P
R S RS
+ Gamètes recombinés
c p
c p r s r s

1 crossing-over survient entre C/c – P/p :

c P R c P
S RS
+ Gamètes recombinés
C p r s C p
r s

1 crossing-over survient entre P/p – R/r :

C P C P
r s r s
+ Gamètes recombinés
c p R S c p
RS
75
76
Par recombinaison intrachromosomique, on obtient aussi 16 types de gamètes.

L’importance de la reproduction sexuée est de créer, à travers les


recombinaisons génétiques méiotiques, une grande variabilité de gamètes et
subséquemment une diversité bien plus grande encore de génotypes par la
fécondation. Il en résulte une diversité des phénotypes.
3. Il s’agit ici de calculer le nombre génotypes possibles en considérant les 4
couples d’allèles (ou en construisant l’arbre des combinaisons génotypiques).
Soit 3x3x3x3 = 34 = 81 génotypes possibles.
De même, le nombre de phénotypes possibles en faisant le calcul (ou en
construisant l’arbre des combinaisons phénotypiques) est : 2x2x2x2 = 24 = 16.

EXERCICE N°4

1. Morphologie des chromosomes

Les chromosomes se distinguent les uns des autres par leur longueur totale et par
la position du centromère. Chaque chromosome est séparé en deux bras par le
centromère. Le bras long est appelé « bras q » et le bras court est appelé « bras
p»:
• Le chromosome est dit métacentrique quand q = p : q p
• Le chromosome est dit submétacentrique quand q est légèrement
supérieur à p : q p
• Le chromosome est dit acrocentrique quand le bras p est très petit :
77
q p
• Le chromosome est dit télocentrique quand le centromère est à l’extrémité
du chromosome : q

2. Le caryotype humain

La représentation par microphotographie ou par dessin du nombre et de la forme


caractéristiques des chromosomes d’une espèce constitue le caryotype de cette
espèce.
Chez l’homme, la classification morphologique fondamentale des chromosomes
a été précisée au cours des congrès scientifiques de Denver (1960), Londres
(1963) et Chicago (1966). Elle repose sur deux critères qui sont :
- La longueur relative du chromosome (rapport de la longueur totale du
chromosome sur la somme des longueurs totales de tous les
chromosomes).
- L’indice centromérique (rapport de la longueur du bras court du
chromosome sur la longueur totale du chromosome).
C’est ainsi que les 22 paires de chromosomes autosomes humains sont
numérotés de 1 à 22 dans l’ordre de grandeur décroissant des chromosomes et
classées en 7 groupes notés A, B, C, D, E, F, et G.
A (1-2-3) ; B (4-5) ; C (6-7-8-9-10-11-12+X) ; D (13-14-15) ; E (16-17-18) ;
F (19-20) ; et G (21-22+Y).

3. Combinaisons chromosomiques dans les zygotes

Tous les types de gamètes produits par l’homme portant la translocation de type
(t14q21q) sont représentés dans les pages 36 et 37 du cours et numérotés I à VI.
La femme conjointe étant normale, elle ne produit que des gamètes normaux
correspondant au N°VI. Les combinaisons chromosomiques dans les zygotes
sont donc les suivantes :

I + VI 21 Zygote trisomique 14
(Létal) 78

14 14 14 21
II + VI Zygote monosomique 14
(Létal)
21 21 14

Zygote monosomique 21
III + VI (Létal)
14 14 21

IV + VI 21 Zygote trisomique 21 par


translocation (Mongolisme par
14 14 21 21
hérédité)

21
Zygote normal mais portant une
V + VI translocation équilibrée t14q21q
21 14 14

Zygote normal
VI + VI
21 21 14 14

4. Risque de récurrence du mongolisme

Parmi les six combinaisons chromosomiques possibles dans les zygotes, 3


conduisent à la létalité (zygotes non viables). Parmi les 3 autres combinaisons
viables, une seule donne une trisomie 21 ou mongolisme. Le risque de
79
récurrence du mongolisme dans la descendance d’un sujet portant une
translocation équilibrée t14q21q est égal à 1/3.

EXERCICE N°5

1. La trisomie 21 libre provient d’une anomalie cytogénétique ayant entrainé la


non disjonction de la paire de chromosomes 21 au cours de la méiose. La
formation de gamètes diplo 21 et nulli 21 qui en a résulté permet, à la
fécondation d’un diplo 21 par un gamète normal, d’obtenir un sujet trisomique
21 libre.
2. Si l’anomalie de non disjonction à la méiose porte sur la paire de
chromosomes X chez la femme, elle conduit à la formation de gamètes diplo X
et nulli X. La fécondation d’un gamète femelle nulli X par un gamète mâle
normal portant X aboutit à la naissance d’un sujet féminin monosomique X qui
développe le syndrome de Turner.
Si l’anomalie de méiose affecte un sujet masculin et se traduit par la non
disjonction de la paire de chromosomes XY, on obtient la formation de gamètes
anormaux XY et nulli XY. Lorsqu’un gamète mâle nulli XY féconde un gamète
femelle normal, on obtient aussi la naissance d’un sujet féminin monosomique
X.
3. Lorsqu’un gamète mâle anormal XY féconde un gamète femelle normal ou
lorsqu’un gamète femelle anormal diplo X est fécondé par un gamète mâle
normal portant Y, on obtient un sujet masculin XXY (disomique X) qui
développe le syndrome de Klinefelter.

EXERCICE N°6

Pour expliquer l’existence du complexe d’espèces du genre Chrysanthemum, on


peut tout d’abord faire intervenir la fusion de gamètes non réduits produits par
l’espèce diploïde à 2n = 2x = 18 qui serait à l’origine de l’espèce tétraploïde C.
praealtum (2n = 4x = 36).
Une hybridation entre l’espèce diploïde à 18 chromosomes et l’espèce
tétraploïde à 36 chromosomes suivie d’un dédoublement chromosomique permet
d’expliquer l’existence de l’espèce hexaploïde C. sibiricum (2n = 6x = 54).

80
Une hybridation entre l’espèce diploïde à 18 chromosomes et l’espèce
hexaploïde à 54 chromosomes suivie d’un dédoublement chromosomique
permet d’expliquer l’existence de l’espèce octaploïde C. arcticum (2n = 8x =
72).
Les croisements C. praealtum (2n = 4x = 36) x C. sibiricum (2n = 6x = 54) ou
C. argenteum (2n = 2x = 18) x C. arcticum (2n = 8x = 72) suivis de
dédoublements chromosomiques des hybrides permettent d’expliquer l’existence
de l’espèce décaploïde C. pacificum (2n = 10x = 90).

81
EXERCICE N°7

La différenciation des espèces dans la superfamille des Acridoidea et dans le


genre Oenothera cités en exemples aux pages 34, 35 et 36 du cours s’est faite
suivant le même mécanisme: la translocation réciproque entre chromosomes non
homologues.
Chez Acridoidea, l’espèce diploïde de référence possède 11 paires d’autosomes
et 1 chromosome X pour les mâles ou 2 chromosomes X pour les femelles, soit
un total de 2n = 23 ou 2n = 24, selon le sexe. Pour l’espèce à 2n = 21 (♂) et 2n =
22 ( ), il y a eu deux translocations réciproques équilibrées par fusion
centromérique ayant impliqué deux paires d’autosomes pour produire deux
chromosomes métacentriques. Ainsi, cette espèce ne possède plus que 9 paires
d’autosomes plus 2 métacentriques plus 1X ou 2X selon le sexe.
Pour l’espèce à 2n = 19, ce sont quatre translocations réciproques ayant
impliqué 4 paires d’autosomes qui ont eu lieu pour produire 4 métacentriques de
sorte que cette espèce ne possède plus que 7 paires d’autosomes plus 4
métacentriques plus 1X ou 2X selon le sexe, etc.
Chez le genre Oenothera, le mécanisme est le même mais à la différence qu’ici
il n’y a pas de production de métacentrique par fusion centimétrique car les
chromosomes ne sont pas acrocentriques. Considérons l’exemple de Oenothera
hookeri

1 1 3 3 5 5 7 7 9 9 11 11 13 13

2 2 4 4 6 6 8 8 10 10 12 12 14 14

(2n = 14) 7 bivalents à la


prophase I de la méiose.

1 1 3 3

Translocation réciproque impliquant 2


Chromosomes des 2 paires considérées

2 2 4 4
82
1 1
1 1 3 3

2
Méiose 4

+ 5 bivalents
(Prophase1) 2 4

3 3
2 4 2 4

1 anneau de 4 chromosomes ou croix de translocation


+ 5 bivalents qu’on observe chez Oenothera franciscana
Pour l’espèce Oenothera rubrinervis, nous aurons :

1 1 3 3 5 5

Deux translocations réciproques


impliquant 4 chromosomes des 3
paires considérés

2 2 4 4 6 6

1 1 3 3 5 5 4
1
1 4

2 5
+ 4 bivalents
2 5

3 6
3 6
2 4 2 6 4 6
1 anneau de 6 chromosomes

83
EXERCICE N°8

Méthode de création de ces lignées d’addition monosomiques :

G. hirsutum x G. anomalum

(2n = 4x = 52, AADD) (2n = 2x = 26, B1B1)

Hybride (2n = 3x = 39, ADB1) sterile

Dédoublement chromosomique

Hybride fertile x G. Hirsutum

(2n = 6x = 78, AADDB1B1) (2n = 4x = 52, AADD)

Hybride fertile x G. Hirsutum

(2n = 5x = 65, AADDB1) (2n = 4x = 52, AADD)

Lignées d’addition monosomiques B1

L1 = AADD+B1 N°1
L2 = AADD+B1 N°2
L3 = AADD+ B1 N°3
L4 = AADD+B1 N°4
L5 = AADD+B1 N°5
L6 =AADD+B1 N°6
L7 = AADD+B1 N°7
84
L8 = AADD+B1 N°8
L9 = AADD+B1 N°9
L10 = AADD+B1 N°10
L11 = AADD+B1 N°11
L12 = AADD+B1 N°12
L13 = AADD+B1 N°13
L’addition de chaque type de chromosome B1 au génome de G. hirsutum
provoque des modifications phénotypiques spécifiques du chromosome
additionnel.
Par exemple l’addition de B1 N°3 provoque un épaississement caractéristique
des feuilles, un grossissement des capsules qui deviennent globuleux et de
couleur vert sombre, un rougissement précoce des feuilles.

EXERCICE N°9

Pour déterminer les nombres chromosomiques des trois espèces données et les
relations évolutives du complexe Brassica, il faut faire les observations
suivantes:
- Lorsqu’un individu d’une espèce ou d’un hybride fait la méiose et qu’on
observe en métaphase à la fois des bivalents et des monovalents, c’est
que dans le stock de chromosomes d’un tel individu, on a la
contribution de deux génomes de base différents.
- Lorsqu’un individu d’une espèce ou d’un hybride fait la méiose et qu’on
observe en métaphase que des bivalents, c’est qu’il y a une homologie
parfaite entre les paires de chromosomes en présence. Ce qui n’est
possible que chez un diploïde ou chez un amphidiploïde.
- Lorsqu’un individu fait la méiose et qu’on observe en métaphase que des
monovalents, c’est qu’il n’existe aucune homologie entre les
chromosomes de cet individu. Cet individu peut être soit un hybride au
premier degré entre deux parents génétiquement distincts soit un
haploïde.
- Si l’individu dont on étudie la méiose est un hybride interspécifique et
qu’on observe à la métaphase des bivalents et des monovalents, le
nombre de bivalents correspond au nombre haploïde de chromosome de
l’une des espèces parentes de l’hybride; par ailleurs, l’autre espèce

85
parente contient dans son génome, le génome de base de l’espèce
partenaire.
Ainsi, si nous considérons l’hybride interspécifique B. juncea par B. nigra, on
observe à la méiose 08 bivalents et 10 monovalents. Connaissant le stock de
chromosome de B. juncea qui est égal à 36, cet hybride interspécifique ayant 26
chromosomes possède 18 chromosomes de B. juncea et 08 chromosomes de B.
nigra. On en déduit le nombre haploïde de chromosomes de B. nigra qui est égal
aussi au nombre de bivalents si bien que le nombre diploïde de chromosomes de
B. nigra est 2n = 2 x 8 =16.
Le même raisonnement au niveau de l’hybride B. napus X B. campestris nous
permet de dire que le nombre diploïde de chromosomes de B. campestris est
égal à 2n = 2 x 10 = 20.
De la même manière on arrive à la conclusion que le nombre diploïde de B.
oleracea est égal à 2n =2 x 9 =18.
Brassica campestris x Brassica nigra
(2n = 20) (2n = 16)

2n = 18

Dédoublement

2n = 4x = 36 ce qui correspond à Brassica juncea.


On établit les relations évolutives suivantes entre les différentes espèces
suivantes :

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1. Déterminons les nombres chromosomiques de B. nigra, B. campestris et B.
oleracea :
Lorsque deux chromosomes homologues sont appariés à la méiose, ils
constituent ce que l’on appelle un bivalent. Les chromosomes qui n’ont pas
d’homologues avec lesquels ils peuvent s’apparier constituent des monovalents.
Pour déterminer les nombres de chromosomes des espèces indiquées et établir
les relations évolutives dans le complexe d’espèces de chou, il nous faut faire les
remarques suivantes :
- Quand l’étude de la méiose d’un individu ne montre que des bivalents c’est que
cet individu est un diploïde ou un amphidiploïde (allotétraploïde).
- Quand l’étude de la méiose d’un individu ne montre que des monovalents c’est
qu’il n’existe aucune homologie entre ses chromosomes.
- Quand l’étude de la méiose d’un individu montre à la fois des bivalents et des
monovalents, c’est que son stock de chromosomes provient de deux génomes de
base différents. Si l’individu étudié est un hybride interspécifique, le nombre de
bivalents observés correspond au nombre haploïde de chromosomes (n) de l’une
des espèces parentes. Par ailleurs, l’autre espèce parente contient dans son stock
de chromosomes le génome de base de l’espèce partenaire.

1.1. Nombre de chromosomes de B. nigra:

L’hybride B. juncea x B. nigra contient 26 chromosomes provenant d’un gamète


de B. juncea à n = 18 (puisque B. juncea possède 36 chromosomes) et d’un
gamète de B. nigra à n = 8. Le nombre diploïde de chromosomes de B. nigra est
donc égal à 2n = 2x8 = 16

1.2. Nombre de chromosomes de B. campestris:

Le même raisonnement à partir de l’hybride B. napus x B. campestris permet de


déduire le nombre diploïde de chromosomes de B. compestris 2n = 2x10 =20.

1.3. Nombre de chromosomes de B. oleracea:

De la même manière, un raisonnement à partir de l’hybride B. carinata x B.


oleracea permet de déduire le nombre diploïde de chromosomes de B. oleracea :
2n= 2x9 = 18.

2. Établissons les relations évolutives dans ce complexe d’espèces.

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B. nigra, B. campestris et B. oleracea étant diploïdes, les trois autres espèces du
complexe proviennent des hybridations entre les diploïdes.
Des remarques précédentes nous pouvons déduire que B. juncea ne contient pas
le génome de B. oleracea mais celui de B. nigra.
De même, B. carinata ne contient pas le génome de B. campestris mais plutôt
celui de B. oleracea.
Enfin, B. napus ne contient pas le génome de B. nigra mais plutôt celui de B.
campestris. Les relations évolutives dans le complexe d’espèces Brassica se
présente donc comme suit : B. juncea
(2n = 2x = 36)

B. nigra
(2n = 2x = 16)
B. campestris
(2n = 2x = 20)

B. carinata
B. napus (2n = 4x = 34
(2n = 4x = 38)

B. oleracea
(2n = 2x = 18)

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