Les technologies, la morale et nous
PROF JULIETTE FERRY-DANINI
Bonjour !
Wooclap sur webcampus ou avec le code :
COUQUE
?
Programme du cours
Introduction
à la philosophie
à la philosophie des sciences
à la philosophie de la technologie
à la philosophie de l’informatique
à l’éthique
à diverses questions philosophiques sur le numérique et ce qu’il change
dans nos vies
Objectifs du cours
Découvrir la démarche philosophique, des concepts, des arguments…
Développer son esprit critique, sa capacité à argumenter, à lire.
Réfléchir au lien entre science, technologie (informatique mais pas que) et
société.
Le mode d’évaluation
Un examen écrit :
fait de plusieurs questions de cours
et d’une courte question de réflexion.
Un travail maison qui reposera sur :
Le visionnage d’un film ou la lecture d’un livre
Et la visite du musée de l’informatique à Namur
Une séance de cours est supprimée pour vous donner du temps pour faire ce
travail : le 11 avril
(instructions pour le devoir maison seront postées sur webcampus)
Questions ?
Films Livres
2001: A Space Odyssey La Nouvelle Atlantide, 1627, Francis Bacon.
The Matrix Frankenstein, 1818, Mary Shelley.
Blade Runner Erewhon, 1872, Samuel Butler.
Gattaca Les robots, 1950, Isaac Asimov.
Minority Report Ada ou la beauté des nombres : La pionnière de
The imitation game l'informatique, 2019, Catherine Dufour.
Hidden figures
Agora
Oppenheimer
Fonctionnement du cours
Questions, objections, commentaires appréciés et recommandés
pendant le cours !
Participation appréciée : il y rarement de mauvaises réponses en
philosophie.
Travaux en groupes pendant le cours (?).
Pas de travail à faire chez soi d’une semaine à l’autre.
Pour les révisions : les slides du cours seront mis en ligne sur
webcampus ; d’autres ressources facultatives seront ajoutées.
Ressources philosophiques en ligne
Encyclopédie philosophique en ligne : https://encyclo-philo.fr/
À éviter : pages Wikipedia pas toujours de très bonne qualité en français
sur la philosophie, LLM pour la même raison.
Chaines YouTube intéressantes sur la philosophie :
Philoxime
MonsieurPhi
Trucsdephilo
Introduction à la philosophie
Qu’est-ce que la philosophie ?
Wooclap à ouvrir sur la page webcampus du cours ou via le code
« COUQUE »
1. Quelle est votre impression de la philosophie ? Qu’avez-vous déjà entendu
dire de la philosophie ? (positif ou négatif !)
2. C’est quoi la philosophie pour vous ?
Qu’est-ce que la philosophie ?
Dans le langage courant :
➢ « Ma philosophie », « à chacun sa philosophie », « la philosophie du
gouvernement c’est… »
Une vision du monde, une certaine compréhension ou interprétation des
choses. Une forme de savoir.
➢ « prendre les choses avec philosophie », « être philosophe »
Une certaine attitude: prendre du recul sur la situation, relativiser, réagir de
façon raisonnée.
Qu’est-ce que la philosophie ?
Etymologie
Du grec : philosophia
Philo / sophia
Philein Sophia
= aimer = sagesse
Etymologiquement, la philosophie désigne : l’amour ou le désir de la sagesse. Le
ou la philosophe est une personne qui aime ou désire la sagesse et qui donc la
recherche.
Qu’est-ce que la sagesse ?
Wooclap
La sagesse : savoir, connaître les choses, le monde qui nous entoure, mais
aussi une attitude, la bonne attitude.
Rechercher la sagesse pour le ou la philosophe, c’est chercher :
La bonne façon de se comporter, de vivre
Une juste compréhension du monde qui l’entoure
Qu’est-ce que la philosophie ?
➢ Quelle est la véritable nature des choses ? (savoir)
Ex: Comment fonctionne le monde ?
En ce sens, la philosophie est une science.
➢ Quelle est la véritable façon de vivre ?
Ex: comment être heureux ?
En ce sens la philosophie est une éthique (savoir bien vivre).
Dans les deux cas, la philosophie recherche la vérité.
La philosophie : la recherche de la vérité/connaissance.
Poser des questions et tenter d’y répondre de façon
rationnelle. Comme la science ?
Note : avant le 19e siècle, la philosophie c’est la science
(« philosophie de la nature », « philosophie zoologique »,
etc… c’est aussi de « philosophie » que le grade universitaire
« PhD » vient).
« Principes mathématiques de la philosophie naturelle », 1687,
Newton
Aparté : Leibniz (1646-1716) (un philosophe) est
considéré comme précurseur de l’informatique
➢ Crédité pour ses travaux sur le
La machine à
calcul binaire (inspiré en cela
calculer de Leibniz,
par des travaux chinois.
capable de
➢ L’invention du calcul
calculer les quatre
infinitésimal (en même temps
calculs de base de
que Newton).
l’arithmétique
➢ A imaginé un logiciel et/ou une
machine à répondre à des
questions (« calculus
ratiocinator »)
➢ Parfois considéré comme le
premier « computer
Gottfried Wilhelm scientist »/informaticien.
Leibniz (1646-1716)
L’attitude de la philosophie :
l’étonnement
La recherche de la vérité, commune à la philosophie et à la
science, est une attitude particulière qui s’oppose à
l’attitude spontanée et quotidienne :
L’attitude spontanée c’est ne pas se poser de questions,
on ne remet pas en question non plus.
Par exemple, pendant une large part de l’histoire, on
n’apprenait pas aux femmes à lire et elles n’avaient pas de
droit.
Cette attitude se rapproche aussi du dogmatisme : où
on accepte une vérité (divine ou autre) sans jamais la
remettre en question.
Par opposition, la philosophie pose des questions qui
mettent en cause « ce qui semble normal ».
A votre avis, à quoi font références
ces dates ?
27 mars 1948
1976
Qu’est-ce qui semble normal aujourd’hui mais qui
sera peut être remis en cause dans le futur ?
Wooclap
Illustrations du géocentrisme et du système de Ptolémée
Exemple : les paradoxes de Zénon
Zénon d’Élée, philosophe et
mathématicien grec de l’Antiquité (-
490/-430).
Etonnement face au mouvement : est-
ce qu’il existe vraiment ?
Paradoxe de la flèche :
Comment la flèche peut-elle se déplacer
d’un point A à un point B ?
si la distance entre l’archer et la cible peut
être divisée de façon infinie, alors la flèche
n’arrive jamais.
si cette distance ne peut pas être divisée
de façon infinie, la flèche reste figée.
Exercice
Qu’est-ce qui est évident dans l’amphithéâtre
actuellement pour vous (vous n’en doutez pas) ?
Essayez de mettre en question chaque chose qui vous
semble la plus évidente. Essayez de douter de tout ce
que vous pouvez.
Wooclap: de quoi pouvez-vous douter ?
René Descartes – le « doute
cartésien » (1596-1650)
« Ainsi, à cause que nos sens nous trompent quelquefois, je voulus supposer qu'il n'y
avait aucune chose qui fût telle qu'ils nous la font imaginer; Et parce qu'il y a des
hommes qui se méprennent en raisonnant, même touchant les plus simples matières
de Géométrie, et y font des Paralogismes, jugeant que j'étais sujet à faillir autant
qu'aucun autre, je rejetai comme fausses toutes les raisons que j'avais prises
auparavant pour Démonstrations; Et enfin, considérant que toutes les mêmes
pensées que nous avons étant éveillés nous peuvent aussi venir quand nous
dormons, sans qu'il y en ait aucune raison pour lors qui soit vraie, je me résolus de
feindre que toutes les choses qui m'étaient jamais entrées en l'esprit n'étaient non
plus vraies que les illusions de mes songes. Mais aussitôt après je pris garde que,
pendant que je voulais ainsi penser que tout était faux, il fallait nécessairement que
moi qui le pensais fusse quelque chose; Et remarquant que cette vérité, je
pense, donc je suis, était si ferme et si assurée, que toutes les plus extravagantes
suppositions des Sceptiques n'étaient pas capables de l'ébranler, je jugeai que je
pouvais la recevoir sans scrupule pour le premier principe de la Philosophie que je
cherchais. » Discours de la méthode, 1637
L’un des premiers philosophes, Socrate
Socrate a vécu à Athènes au 5e siècle avant JC.
Arpentait les rues pour poser des questions et montrer à tous
qu’ils croient savoir nombre de choses alors qu’en réalité ils
sont ignorants.
Proposait un enseignement gratuit à l’inverse des sophistes qui
enseignaient l’art oratoire (la rhétorique) contre rémunération.
Sa devise : « je ne sais qu’une chose, c’est que je ne sais rien ».
Condamné à mort par la cité d’Athènes en 399 av JC:
Impiété (non-respect de la religion)
Corruption de la jeunesse (inviter les jeunes à l’esprit critique, perçu
comme un danger)
Aspasie s’entretenant avec les hommes illustres,
Monsiau, 1801
L’allégorie de la caverne
Décrite par Platon dans La république, texte où
il met en scène des dialogues entre Socrate et
des personnages variés de la cité. Dialogue
entre Socrate et Glaucon (frère de Platon).
Note: une allégorie exprime une idée sous
forme imagée.
La philosophie comme acte de résistance
et esprit critique
La philosophie selon Socrate :
poser des questions afin de contester les préjugés et les idées reçues
que la population adopte par tradition. Par exemple, les croyances
coutumières pour lesquelles on n’a aucune preuve ou justification.
Susciter la réflexion et se mettre en quête de la vérité.
→ Ces deux premiers traits expliquent pourquoi la philosophie est
« dangereuse » : la philosophie est critique.
Mais à quoi ça sert la philosophie ?
Ce que l’on appelle aujourd’hui les sciences ne
posent-elles pas aussi des questions ? Quelle différence
entre la science et la philosophie ?
En plus, il n'y a presque jamais de consensus en
philosophie, alors à quoi bon ?
Bertrand Russell, « La valeur de la
philosophie », 1912
Lecture du texte.
La philosophie permet-elle de répondre à des
questions comme le fait la science ?
Si ce n’est pas le cas, cela signifie-t-il que la
philosophie n’a pas de valeur ?
La philosophie traite donc de questions qui échappent
aux sciences. Quelles questions ?
La valeur de la philosophie
« L'homme qui n'a nulle teinture de philosophie passe sa vie prisonnier des préjugés du
sens commun, des croyances courantes de son époque ou de son pays, et des
convictions qui se sont développées dans son esprit sans le concours ou l'approbation
de sa réflexion. Pour un tel individu, le monde semble explicite, fini, transparent ; les
objets ordinaires n'éveillent nul questionnement, et les hypothèses inhabituelles sont
dédaigneusement repoussées. Au contraire, dès que nous commençons à philosopher
nous découvrons, comme nous l'avons vu dans les premiers chapitres, que même les
choses les plus ordinaires conduisent à des questions sans réponses réellement
satisfaisantes. Bien que ne pouvant nous répondre avec certitude aux doutes qu'elle
suscite, la philosophie peut suggérer de multiples possibilités qui élargissent nos
réflexions et les libèrent de la tyrannie de l'habitude. Ainsi, en ébranlant notre
conviction de savoir ce que sont les choses, elle accroît considérablement notre
connaissance de ce qu'elles pourraient être ; elle fait disparaître le dogmatisme
quelque peu arrogant de ceux qui n'ont jamais parcouru le chemin du doute
libérateur, et garde vivace notre perception du merveilleux en nous présentant les
choses familières sous un jour insolite. » (Bertrand Russells, 1912, Problèmes de
philosophie)
Qu’est-ce qu’un argument valide ?
Le syllogisme :
Tous les hommes sont mortels Si je pense, c’est que j’existe.
Socrate est un homme Je pense
- -
Donc Socrate est mortel Donc j’existe
Ces raisonnements sont-ils valides ?
Exemple 1 Exemple 2
Si je pense, c’est que j’existe S'il a plu alors le sol est mouillé
Je ne pense pas Il n'a pas plu
- -
Je n’existe pas Donc le sol n'est pas mouillé
Des erreurs de raisonnement communes :
Négation de l’antécédent : Affirmation du conséquent :
1. S'il a plu (P alors le sol est mouillé (Q) 1. S'il a plu (P), alors le sol est mouillé (Q).
2. Il n'a pas plu (il est faux que P) 2. Le sol est mouillé (Q).
3. Donc le sol n'est pas mouillé (il est faux 3. Donc il a plu (P).
que Q)
Le sol peut être mouillé car on a jeté un saut d’eau.
Vivons-nous dans une simulation ?
L’argument proposé par Nick Bostrom (2003)
Prémisses de l’argument
1. Si on répliquait les processus d’un cerveau à l’identique, on simulerait une
véritable conscience.
2. Il n’y a pas de limite physique qui nous empêcherait dans le futur de
simuler une conscience.
Vivons-nous dans une simulation ?
L’argument frappant proposé par Nick Bostrom (2003)
« L'idée de ce papier peut être exprimée
grossièrement comme suit : s'il existe une chance
substantielle que notre civilisation atteigne le stade
post-humain et effectue de nombreuses simulations
de leurs ancêtres, comment se fait-il que nous ne
vivions pas dans une telle simulation ? » (Bostrom,
2003, 248)
Trois possibilités
Vidéo YT de MonsieurPhi résumant
l’argument
1. Les civilisations s’autodétruisent avant d’avoir atteint le stade
« posthumain » où il est possible de simuler en masse des
consciences.
2. Les civilisations atteignent ce stade, mais ne simulent pas en
masse des consciences (pour diverses raisons).
3. Nous sommes des consciences simulées / nous sommes dans
une simulation.
Bostrom 2003, « Are we living in a computer simulation? »
Et bon weekend!