Fiche de révisions : Économie Politique
1ère Partie : L’Économie Politique
I. Les prémices de la pensée économique
1. La pensée économique sous l’Antiquité Grecque
→ Xénophon : on lui doit le terme « l’économie ». Il exploite un grand domaine agricole et
rédige différentes œuvres comme l’Économique. À l’origine, l’économie est l’administration
de la maison. Il s’interroge sur l’art d’administrer les domaines ruraux et développe des
règles de bonne gestion avec l’idée que les individus s’enrichissent en cultivant + échanges.
→ Platon : Dans La République et Les Lois il fait des études sur une cité idéale et sur le
système économique le plus juste. Pour lui, il doit s’établir sur la forme d’une société
communautaire (catégories sociales qui reposent sur la sélection et non pas l’hérédité).
Formation d’une élite avec les gardiens au plus haut poste et les artisans en bas. Abolition
de la propriété privée et de la famille. Vision qualifiée de « communisme archaïque ». Il
développe 3 concepts économiques : la notion de besoins (qui conduit les individus à se
regrouper en cité), la notion de division du travail (aptitudes différentes des hommes qui
doivent se spécialiser) et notion de richesse (qui ne doit pas être une fin en soi).
→ Aristote : Auteur de La politique et l’Éthique à Nicomaque. Il n’envisage pas une
suppression de la propriété privée car les hommes s’intéressent peu à ce qui ne leur
appartient pas. Il effectue une analyse de l’enrichissement qu’il condamne. Il développe la
notion de chrématistique (= art de s’enrichir) en distinguant la naturelle (ou nécessaire) qui
est l’art d’acquérir les richesses nécessaires à la vie et la commerciale qui consiste à acquérir
un bien pour le plaisir d’accumuler. C’est dans ce cadre qu’il définit les 3 fonctions de la
monnaie : Unité de compte et Intermédiaire dans les échanges qui permet d’effectuer
toutes les transactions et Réserve de valeur. Il condamne l’activité économique lorsqu’elle
ne sert qu’à l’enrichissement et condamne aussi l’usure (prêt à intérêt).
2. La pensée économique au Moyen Âge
→ En Occident, la problématique s’inscrit dans le cadre de la religion chrétienne qui devient
omniprésente : on recherche les activités qui permettent de se rapprocher de Dieu. La
discipline la plus recherchée est la théologie (connaissance de Dieu, textes sacrés…).
→ Saint Thomas d’Aquin : est à l’origine de la scolastique thomiste = philosophie enseignée
au Moyen âge dans les universités, son objet est de montrer qu’on peut concilier les textes
Saints avec les textes Antiques (ceux d’Aristote ou des juristes romains). Il rédige la Somme
Théologique où il montre qu’on peut concilier foi et raison. Il condamne l’accumulation de
richesses et l’usure, la monnaie doit rester une monnaie d’échange. Enfin, il s’intéresse à la
notion du juste prix = juste s’il ne laisse personne au niveau individuel ou collectif.
3. Le mercantilisme
→ Contexte d’apparition : Fin du Moyen Âge = désagrégation de l’ordre féodal, constitution
progressive de l’État Nation, sentiment d’appartenance à la nation renforcé (surtout durant
la guerre de 100 ans), sacralisation de l’État via le Roi.
→ Théories de l’État souverain :
- Nicolas Machiavel écrit Le Prince en 1513, œuvre qualifiée d’immorale qui montre
comment devenir Prince et le rester, quel que soit les moyens.
- Jean Bodin, 6 livres de la République = bases théoriques de la monarchie absolue.
- Thomas Hobbes dans Léviathan en 1651 (« L’homme est un loup pour l’homme ») =
la liberté de chacun ne peut conduire qu’à la guerre. Donc les hommes doivent se
dessaisir de cette liberté au profit du pouvoir absolu du Prince.
→ Changements culturels : renaissance, développement des arts, apparition des humanistes
→ Changements religieux : réforme protestante avec Luther et Calvin
→ Avancées : grandes découvertes scientifiques telle que l’imprimerie en 1453, l’astronomie
de Copernic, progrès en chirurgie avec Ambroise Paré
→ Changements économiques au 15e siècle : découverture du Nouveau Monde, importants
empires coloniaux, les puissants ne sont plus les nobles mais également les grands
marchands et les banquiers.
→ Définition du mercantilisme : du latin « mercari » = faire du commerce. Terme
anachronique forcé à la fin du 18e siècle par les libéraux. Il s’agit d’une doctrine économique
(de 1450 à 1750) qui postule que la puissance et la richesse d’un État sont liés à son stock de
métaux précieux (or et argent). Nécessité d’intervention de l’État. 4 remarques :
- Ce n’est pas une véritable école de pensée.
- Richesse = monétaire associée à l’accumulation de métaux, c’est ce qu’on appelle le
chrysohédonisme (atteindre le bonheur par la possession d’or).
- Thomas Gresham définit la notion de commerce extérieur. Une nation doit avoir une
balance extérieure excédentaire (X>M). Commerce = jeu à somme nulle.
- L’État doit intervenir dans la vie économique pour favoriser les excédents
commerciaux et stimuler les exportations et instaurer un protectionnisme douanier.
→ Types de mercantilisme : il y a 4 variantes :
- Mercantilisme espagnol : l’Espagne de Charles Quint domine le monde et son
objectif est de conserver l’or qu’il a acquis donc adoption d’un protectionnisme
monétaire avec interdiction des sorties d’or et obligation pour les exportateurs de
dépenser leur argent à l’intérieur du pays + nécessité de réduire les importations.
- Mercantilisme anglais : l’Angleterre doit développer son commerce maritime pour
attirer le plus de métaux précieux + colonisation.
- Mercantilisme allemand : réduction des dépenses publiques et stimulation du
commerce et de l’industrie.
- Mercantilisme français : Colbert (ministre de Louis XIV) veut enrichir le pays et pose
les bases de l’interventionnisme de l’État. Il encourage l’agriculture et l’industrie, il
crée et subventionne des manufactures, il favorise le commerce extérieur (entretien
des routes) et enfin il développe les compagnies de commerce à monopole. Il va
également imposer des lourdes taxes sur les importations.
→ Critiques : aucun fondement théorique, bases contestables car l’accumulation de métaux
précieux entraine une inflation considérable (Jean Bodin établit une relation entre monnaie
et prix), idée qui sera fortement contestée par Monsieur de Malestroit. De plus, chercher
une balance excédentaire n’est pas forcément une bonne idée, les penseurs classiques
montreront que l’objectif est surtout d’augmenter le bien être des consommateurs.
4. L’école des physiocrates
→ Contexte : philosophie des lumières, triomphe de la raison sur la foi, remise en cause des
autorités politiques et religieuses. Montesquieu et Voltaire qui prônent la liberté
individuelle, de conscience, de la presse. Jean Jacques Rousseau demande l’égalité des
citoyens et la souveraineté du peuple (initie la pensée libérale).
→ Aspects généraux : « physis » = nature et « cratos » = gouverner, donc gouvernement de
la nature. On doit ce terme à Pierre Samuel du pont de Nemours qui l’utilise pour la
première fois en 1761. C’est la première véritable école de pensée. Elle fait reposer la
richesse sur la nature.
→ Différences avec le mercantilisme : véritable théorie économique, la richesse est un
réelle et repose sur des biens tangibles (et non sur la monnaie et l’or). De plus,
développement d’une pensée libérale = l’État doit faire respecter la propriété privée et la
liberté mais il ne doit pas intervenir en matière économique.
→ Tout repose sur l’ordre naturel qui est spontané et providentiel (voulu par Dieu). Il est
régi par des lois naturelles que les physiocrates cherchent à découvrir.
→ Principaux physiocrates :
- Pierre le Pesant de Boisguilbert : textes fondateurs de l’économie politique.
- Richard Cantillon : économiste et financier qui fait fortune avec le système John Law.
Premier à décrire l’économie comme un circuit. Essai sur la nature du commerce en
général de 1755 qui marque la physiocratie.
- Jean Claude Marie Vincent de Gournay : À l’origine de la maxime : « Laissez faire,
laissez passer » qui sera reprise par des auteurs libéraux.
- Anne Robert Jacques Turgot : économiste et ministre de Louis XVI, grandes réformes
sur la liberté du commerce et du travail puis renvoyé.
- François Quesnay : père de la physiocratie.
→ François Quesnay et le tableau économique d’ensemble : Il fonde l’école de la
physiocratie que l’on appelle la « secte des économistes » car elle rassemble les esprits les
plus brillants de l’époque.
→ Tableau économique, 1758 : pour la première fois il montre que l’on peut représenter
l’économie sous la forme d’un circuit. Analogie avec la médecine : les richesses de
l’économie circulent à l’intérieur du pays. Objectif = montrer comment la richesse se crée,
comment elle circule et comment elle est consommée. Pour lui, la richesse provient de la
terre (don gratuit). Il décompose la société en trois classes :
- Classe des propriétaires : propriétaires fonciers, aristocrates, souverain et clergé.
Leurs terres leurs procurent une rente qu’ils utilisent pour acheter des produits
agricoles et d’artisanat pour leur consommation.
- Classe productive : fermes, agriculteurs, laboureurs. Ils cultivent et exploitent les
terres des propriétaires à qui ils versent une rente. C’est la seule classe qui dégage un
produit net. Conséquences : il ne faut pas les imposer trop lourdement.
- Classe stérile : tout le reste qui produisent des biens artisanaux (artisans, industriels,
commerçants). Ils achètent des biens agricoles. Cette classe ne produit pas de
véritables richesses : activités de transformation et de revente.
Première fois que la notion d’interdépendance des classes apparait.
→ Portée de l’œuvre de Quesnay : primauté de la classe productive donc l’analyse est tout
de même vieillie. De plus, Quesnay n’a pas anticipé l’importance de l’industrie. De plus, pour
lui l’économie se reproduit identique à elle-même de période en période donc pas de notion
de croissance. Cependant, il a une vision macroéconomique qui annonce Marx et Keynes.
II. L’école classique
1. Aspects généraux
→ Contexte : première Révolution industrielle (fin 18e et 19e). Profondes transformations
liées au passage d’une économie agricole et artisanale et une économie commerciale et
industrielle (machine à vapeur, textile, métallurgie). Apparition d’un capitalisme industriel
soutenu par une diminution du rôle de l’État qui favorise l’initiative individuelle.
Accroissement des entreprises, investissements et main d’œuvre peu qualifiée.
→ Les principaux thématiques : on peut les regrouper en 5 questions
- Source de la valeur des biens ? : elle conduit à élaborer une théorie de la valeur
(rapports d’échange entre les différents biens et services). Globalement, ils pensent
sur le court terme que pour appréhender la valeur des biens il faut comprendre
comment se fixe les prix = par le jeu de l’offre et de la demande. Sur le long terme,
les prix tendant vers un niveau tendanciel, ce qu’Adam Smith appelle le « prix
naturel » et Stuart Mill le « prix nécessaire ». Mais ils sont confrontés au paradoxe
de l’eau et du diamant face auxquels ils estiment que l’utilité des biens n’a pas
d’implication sur la valeur (grave erreur). À ce titre ils distinguent la valeur d’usage
(utilité que procure un bien) et la valeur d’échange (qui permet à un objet d’être
échangé). Pour eux, le diamant est cher car il demande une grande quantité de
travail alors que l’eau n’en demande pas donc pas chère = théorie de la valeur dite
objective.
- Comment se répartissent les richesses ? : élaboration d’une théorie de la répartition
des richesses. Pour Adam Smith, les richesses se répartissent entre trois classes aux
intérêts antagonistes : les propriétaires terriens qui touchent une rente, les
travailleurs qui touchent un salaire et les entrepreneurs qui sont rémunérés par un
profit. Les classiques ne mettent pas l’agriculture sur un piédestal, ils sont intéressés
par la relation au sein de l’industrie entre les capitalistes et les travailleurs.
- Comment accroitre les richesses de l’économie ? : élaboration d’une théorie de la
croissance. Face à la croissance importante de l’Angleterre, les économistes se
demandent si celle-ci peut être durable. Conclusion : sur le long terme, toutes les
économies se dirigent vers un États stationnaire.
- Quel rôle joue la monnaie ? : pour les classiques la monnaie doit rester un moyen
d’échange. Ils développent l’idée que la monnaie est neutre (=pas d’influence sur la
sphère réelle, sur le niveau de production).
- Quel est le rôle de l’État ? : Ils prônent une intervention limitée de l’État donc le
libéralisme.
2. Adam Smith
→ Recherches sur la nature et les causes de la richesse des nations, 1776 : il reprend de
nombreuses idées de penseurs tels que Quesnay ou Hume. Il en fait une brillante synthèse
avec un raisonnement systématiquement scientifique. Deux grandes thématiques de son
œuvre : le travail et la liberté.
→ La théorie de la valeur travail : il montre que le travail est la mesure et le fondement de
la valeur. Il doit être utilisé comme un numéraire (étalon de valeurs). Pour Smith, des
quantités égales de travail auraient la même valeur en tout temps/lieu.
- D’abord, il fait une ébauche appelée la théorie du travail incorporé = il prend
l’exemple du castor et du daim : « Chez un peuple de chasseurs, s’il en coute
habituellement 2 fois plus de temps pour tuer un castor que pour tuer un daim, alors
le castor s’échangera contre 2 daims ». Raisonnement où il n’y a pas de capital.
- Il développe parallèlement une théorie du travail commandé = pouvoir d’achat
d’une heure de travail. Donc pour Smith la valeur d’un bien dépend de ce qu’il a
couté en travail et également de ce que ce bien permet d’acquérir en travail.
- Complétées par la théorie du travail productif = pour lui il existe le travail productif
qui ajoute de la valeur à un objet (ouvriers) et donc rapport un profit. Et aussi un
travail improductif qui consiste dans le travail de ceux qui réalisent des services
(fonctionnaires, souverain, magistrat), qui ne permettent pas d’accroitre les richesses
de la nation.
→ La théorie de la croissance : il analyse trois concepts clés.
- Le capital : pour accroitre la richesse d’une nation il faut favoriser le travail productif
= augmenter le nombre d’ouvriers ou augmenter la productivité de chaque
travailleur (machines). Il pense que l’accumulation de capital est le premier facteur
de la croissance. Mais il trouve des limites : l’économie ne peut pas accroitre
indéfiniment son capital donc sur le long terme : état stationnaire.
- La division du travail : exemple de la manufacture d’épingles = grâce à la division du
travail, 18 ouvriers produisent ensemble 48 000 épingles par jour alors que s’ils
travaillent isolément ils ne produiraient que 20 épingles chacun. Donc la division du
travail améliore l’habileté du travailleur (répétition des tâches), évite des pertes de
temps liées aux changements d’activité et enfin favorise le machinisme.
- Le marché : Grâce au marché, chacun peut se spécialiser dans une tâche sans avoir à
s’inquiéter de manquer de marchandises. La raison d’être de ces marchés sont le
penchant naturel des hommes dans l’échange.
→ Smith, père du Libéralisme :
- À l’intérieur du pays : il développe l’idée que les marchés doivent être livrés à eux-
mêmes. Il utilise l’expression de la main invisible : « En ne cherchant que son propre
gain, l’individu cherche à rendre aussi grand que possible le revenu annuel de la
société. Il est conduit par une main invisible ». Pour Smith il n’y a aucune
contradiction entre la dimension individuelle et la dimension collective. Cependant,
pour lui l’État doit conserveur deux rôles : théorie de l’État gendarme qui montre
que l’État doit maintenir la propriété et l’ordre par la police ou l’armée. De plus, il
doit prendre en charge le financement des biens publics (routes, ponts).
- Au niveau international : principe de libre concurrence = il élabore le premier
théorème de la spécialisation fondée sur la théorie des avantages absolus. Chaque
nation doit exporter les biens pour lesquels elle supporte un coût absolu inférieur
aux autres biens. Objectif du commerce = satisfaire les besoins des consommateurs.
3. David Ricardo
→ Relation monnaie et inflation : en 1797, alors que l’Angleterre est en guerre avec la
France, le gouvernement anglais demande à la Banque d’Angleterre de supprimer la
convertibilité or des billets afin d’émettre davantage de billets = forte inflation. Deux
courants s’opposent :
- École de la circulation (currency school) à laquelle appartient Ricardo = pour eux,
l’émission excessive de billets inconvertibles explique la hausse des prix.
- École de la banque (banking school) à laquelle appartient Thomas Tooke = la hausse
des prix a des origines réelles et proviendrait de la guerre avec la France et du blocus.
La conception de Ricardo sera à l’origine de l’Acte de Peel en 1844.
→ Liens valeurs-répartition-croissance :
→ Théorie de la valeur travail : il exprime son désaccord avec l’idée que le travail est la
mesure de la valeur. Il pense que le meilleur des numéraires est l’or. Il développe une
théorie du travail incorporé qui prend en compte le capital. Pour établir la valeur d’un objet,
il faut prendre en compte les heures de travail utilisées et les heures indirectement utilisées
pour fabriquer les capitaux nécessaires à la fabrication.
→ Théorie de la répartition : elle deviendra célèbre sous le nom de théorie de la rente
foncière. Il existe 3 classes, 3 lois et 3 processus de détermination :
- 3 classes : propriétaires fonciers + travailleurs + capitalistes.
- 3 principes : tout d’abord, loi des rendements décroissants (un pays commence par
exploité les terres les plus fertiles au coût de production faible, puis il doit cultiver les
terres moins fertiles aux coûts de production importants. Ainsi il faut utiliser + de
capital et + de travail). Ensuite, principe de population = la population croît plus vite
que les ressources. Enfin, principe d’investissement = les investissements des
capitalistes s’orientent vers les activités à forts rendements.
- 3 processus de détermination :
1° Détermination du salaire → fixé au niveau du minimum de subsistance (sous
l’effet de la concurrence) car il y a plus de main d’œuvre que nécessaire. Idée
formulée par Ferdinand Lassalle en 1863 sous le nom de loi d’airain des salaires.
Ainsi le salaire dépend du prix des denrées vitales.
2° Détermination de la rente foncière → 4 conditions = la terre est en quantité
limitée, propriété privée des terres, fertilités différentes de celles-ci et enfin le prix
du blé cultivé sur ces terres est unique. Ricardo raisonne ainsi : le prix du blé est
unique, déterminé à partir du coût de production de la terre la moins fertile, qui doit
au minimum équilibrer ces recettes et ces coûts pour ne pas faire de perte. Loi de
Malthus : face à l’augmentation de la population sont mises en culture des terres de
moins en moins fertiles aux coûts de production de plus en plus élevée, le prix du blé
s’élève, les propriétaires des terres les plus fertiles vont dégager des rentes de plus
en plus élevées (calculées à partir de l’écart entre le prix de vente et le coût de
production). Ces rentes sont appelées les rentes différentielles.
3° Détermination du profit → Pour Ricardo le profit ne constitue qu’un résidu = ce
qu’il reste à l’entrepreneur après avoir payé les travailleurs et versé les rentes
foncières. Relation inverse entre salaires et profits.
→ La théorie de la croissance : théorie de la croissance zéro = pour retarder l’État
stationnaire, Ricardo a deux solutions :
- Solution interne : obtenir des gains de productivité grâce au progrès technique.
- Solution externe : importations de blé. Ricardo prône le libre-échange et limite les
« corn laws » (lois sur le blé qui visaient à limiter les importations de blé). Il obtient
gain de cause en 1846 après sa mort.
→ Ricardo, père du libre-échange : pour lui, il peut retarder l’avènement de l’état
stationnaire. Il développe 2 théories soulignant l’importance du libre-échange :
- Théorie d’un équilibre automatique de la balance des paiements : pour Ricardo le
gouvernement doit se préoccuper de l’équilibre de cette balance via des droits de
douane ou un protectionnisme renforcé. L’équilibre se réalise automatiquement à
partir du moment où les monnaies sont convertibles entre elles. Pays avec
uniquement des flux de biens + en excédent commercial (X>M) : pour acheter ces
biens les étrangers doivent se procurer la monnaie du pays en convertissant leur
monnaie (donc la monnaie du pays devient plus chère suite à l’augmentation de la
demande), l’appréciation de la monnaie renchérit les exportations qui finissent par
baisser ; les importations augmentent = équilibre.
- Théorie des avantages comparatifs : chaque pays a intérêt à participer au commerce
international même si les coûts de production de tous les biens qu’il fabrique sont
supérieurs aux coûts de production des pays étrangers. Chaque pays se spécialise
alors avec succès dans les biens pour lesquels son désavantage comparatif est le
plus faible. Donc libre-échange et la spécialisation sont bénéfiques à l’ensemble des
pays.
4. Jean-Baptiste Say
→ La loi des débouchés ou loi de Say : « Le voile monétaire ne fait que masquer la réalité
des échanges et les produits s’échangent contre des produits puisqu’ils se servent
mutuellement de débouchés ». On se place dans une économie de troc (sans monnaie) : pour
se procurer un produit il faut en donner un en échange. Say montre que cette relation est
vraie dans une économie avec monnaie car pour lui la monnaie est un voile. 2 principes :
- L’offre fait se propre demande : pour acquérir un produit, il faut les fonds
nécessaires OR ces fonds proviennent en aval de la vente d’un autre bien. Alors
qu’on aurait pu penser que l’offre et la demande étaient déterminées
indépendamment l’une de l’autre, Say montre que l’offre crée une demande qui lui
est équivalente.
- La monnaie est un voile : monnaie ne sert qu’à réaliser des échanges/transactions.
Elle est neutre, elle n’a pas d’influence sur la sphère réelle. Augmentation de la
masse monétaire = niveau de production inchangé MAIS augmentation des prix.
→ Portée de la loi des débouchés : Malthus s’oppose à cette loi car elle ne prend pas en
compte la thésaurisation (argent épargné) qui réduit la demande. De plus, pour lui la
demande doit préexister à l’offre. Concept de demande effective (pouvoir d’achat +
décision d’achat).
5. Thomas Malthus
→ Contexte : débat sur les lois des pauvres (poor laws) = donner un minimum de
subsistance aux pauvres dont le financement est assuré par un impôt au niveau des
paroisses civiles.
→ Les théories démographiques : elles reposent sur le principe de population (loi naturelle)
= la population croît selon une progression géométrique. Au contraire, les moyens de
subsistance augmentent selon une progression arithmétique. Donc la population progresse
plus vite que les ressources.
→ Explication dans la loi des rendements décroissants (Ricardo) = les meilleures terres sont
mises en culture en premières. Avec l’augmentation de la population, les terres moins
fertiles sont utilisées donc production plus lente. Avant, Jean Bodin disait « il n’y a de
richesses que d’hommes » (population nombreuse = source de richesses).
→ Malthus décrit une nature avare. En termes de croissance = en raison du frein
démographique, le revenu d’une nation ne peut progresser sur le long terme. À l’inverse, la
famine ou la guerre qui réduisent le nombre d’habitants peuvent engendrer une période
d’expansion. De plus, concernant le rôle du capitalisme = la pauvreté a toujours existé, elle
n’est pas issue du capitalisme.
→ Les solutions proposées par Malthus : deux grands types.
- Supprimer l’aide aux pauvres : pour lui, elle ne fait qu’appauvrir les riches et n’aide
pas les pauvres à sortir de la misère (Banquet de la nature : « Celui qui est né dans un
monde déjà possédé, s’il ne lui est pas possible d’obtenir de ses parents les
subsistances qu’il peut justement leur demander, et si la société n’a nul besoin de son
travail, il n’a aucun droit de réclamer la moindre part de nourriture et en réalité il est
de trop. Au grand banquet de la nature, il n’y a point de couverts vacants pour lui
(…) »). La misère est donc une loi naturelle. Il faut laisser profiter les privilégiés qui
ont réussi à s’en soustraire et ne pas aider les pauvres.
- La limitation des naissances : importance de la contrainte morale. Il ne faut se
marier que si on a les moyens d’avoir des enfants. Il revient ainsi à l’État de favoriser
l’éducation du peuple afin de l’éclairer sur ses responsabilités. Sinon, l’ajustement
naturel se fera par la voie de la misère/famines/épidémies et guerres.
→ Portée des thèses : Bien accueillies par la classe aisée mais critiquées par les socialistes et
les marxistes qui y voient un dédouanement du capitalisme. Sa théorie de la démographie a
été supplantée par les théories de la transition démographique d’Adolphe Landry pour qui il
y a 4 phases :
- Régime traditionnel : natalité et mortalité élevées, s’équilibrent autour des 40 pour
1000. Croissance de la population faible, stagnation.
- Deuxième phase : baisse de la mortalité (progrès médecine), augmentation de la pop
- Troisième phase : baisse de la natalité = ralentissement de la croissance.
- Quatrième phase : stabilisation des taux (10 pour 1000) donc le taux de croissance
de la population devient de plus en plus faible et la population stagne.
→ Paul Leroy-Beaulieu dans sa parabole des trois Malthus : « Si le premier Malthus avait
vécu à l’époque des Cro-Magnon, la population maximale de la Terre serait inférieure à
500 000 personnes étant donné les résultats de la chasse et de la survie. A l’époque de
Malthus, il n’existait pas d’engrais minéraux et la terre ne pouvait nourrir qu’1 milliard
d’habitants. Si un autre Malthus vivait à notre époque il considérerait que la terre nourrirait
entre 5 et 20 milliards d’habitants en fonction des choix qui sont faits entre différents types
de culture. Toute estimation de la population maximale ou optimale dépend de l’État et des
progrès techniques de survie ».
6. John Stuart Mill
→ Les théories :
- Utilitarisme : Pour Jeremy Bentham, chacune de nos actions influencent
positivement ou négativement notre satisfaction à divers degrés d’intensité. Il
développe l’idée que le bonheur collectif est la somme des bonheur individuels.
Stuart Mill fait évoluer ce principe d’utilitarisme égoïste vers un utilitarisme
altruiste : il peut exister un écart entre bonheur individuel et collectif. L’intérêt
général doit devenir le premier critère d’action.
- Ses apports aux thèses de Smith et Ricardo : Mill pense que l’industrialisation a
apporté une forte croissance mais a engendré également d’importantes inégalités
sociales. Sur le LT, l’état stationnaire devrait engendrer une société plus épanouie. En
attendant, Mill pense que l’État doit préserver le bon fonctionnement des marchés
et garantir la propriété privée. 3 modes d’actions pour l’État :
1° imposer les plus riches et redistribuer aux pauvres
2° soutenir le mouvement coopératif
3° encourager la démocratisation de la société = instauration d’un suffrage universel
III. Le socialisme et le marxisme
1. Le socialisme
→ Grands traits : ensemble des doctrines qui visent à la transformation de la société afin de
mettre en place justice sociale et égalité. 2 grandes idées :
- Principe de moralité : lutte contre la misère, recherche du bonheur, égalité.
- Remise en cause du mode de production capitaliste qui repose sur la propriété
privée des moyens de production, l’exploitation des travailleurs, l’accumulation du
capital et qui prône l’économie de marché.
→ Contexte d’apparition :
- Contexte économique : le terme de socialisme se répand après 1830 avec Robert
Owen puis la révolution de 1848 et la deuxième république. Lors de la seconde
révolution industrielle : importantes innovations (électricité, pétrole) qui permettent
des gains de productivité + développement des transports + échanges
internationaux = début de la mondialisation. Pays émergents (Japon, Allemagne),
développement des modes de production (concentration des entreprises et division
du travail, taylorisme avec Frederick Taylor), détérioration des conditions de travail.
- Divisions de l’école classique : Apparition d’auteurs qui sappent les idées classiques
comme Friedrich List qui souligne que chaque nation doit poursuivre le
développement qui lui est propre même si elle doit passer par des phases de
protectionnisme. Jean de Sismondi remet en question la loi de Say, pour lui la
mécanisation réduit les salaires, crée du chômage et diminue le pouvoir d’achat. De
plus, il pense que le libéralisme accroit la misère des travailleurs.
→ Socialisme utopique : terme de Friedrich Engel qu’il oppose au socialisme scientifique. Il
rassemble l’ensemble des doctrines des premiers socialistes du 19e siècle. Volonté
commune : réformes progressives et pacifiques.
- Charles-Henri de Rouvroy (comte de Saint-Simon) : il est à l’origine du saint-
simonisme : il prône le développement d’une grande industrie, organisée
scientifiquement et planifiée + nouvel ordre social au fondement scientifique. L’État
doit soutenir le développement de la production et donner la primauté aux
industriels. Il œuvre pour un élitisme fondé sur l’utilité sociale. Seuls les scientifiques
doivent gouverner et non les ayants-droits.
- Robert Owen : Il est à l’origine de l’owenisme : il pense que l’État doit garantir une
protection des travailleurs. La transformation de la société doit se faire par les
travailleurs via la mise en place d’un mouvement coopératif. En 1825, il crée des
villages communautaires avec suppression de la propriété privée mais échec.
- Charles Fourier : il pense que l’industrialisation naissante ne peut qu’entrainer une
régression de la civilisation en raison de la détérioration de la condition ouvrière. Il
rejette les institutions sociales (famille notamment). Il pose les bases d’une société
communautaire qui débouche sur l’idée de Phalanstère en 1832 = sorte de
communauté agricole avec des bâtisses pour loger 400 familles, soit 1620 hommes et
femmes. L’homme pourra exercer librement ses passions et retrouver l’harmonie
naturelle. Suppression des notions de division du travail et de salariat.
- Pierre Joseph Proudhon : présente le socialisme libertaire et devient un précurseur
de l’anarchisme. Il joue un rôle important dans la première internationale (première
véritable organisation de l’internationalisme ouvrier fondé en 1864). Il écrit de
nombreux ouvrages où il écrit sa célèbre « La propriété c’est le vol ». Il critique l’État
et le pouvoir, la démocratie et le suffrage universel. Il jette les bases d’une société
sans propriété privée où tous les hommes seraient égaux.
2. Le marxisme
→ Objectif : mettre en place une révolution pour abolir les anciennes structures et poser les
bases d’une organisation sociale plus juste.
→ Analyse microéconomique : Il reprend la théorie de la valeur travail de Ricardo. Une
marchandise possède deux valeurs = valeur d’usage (utilité) et valeur d’échange (qui
dépend du cout de production, quantité de travail incorporée). Il s’intéresse à une
marchandise particulière : la force de travail, qui est vendu par les travailleurs et achetée
par les capitalistes. Sa valeur est fixée par la durée de son utilisation et la valeur d’échange
est représentée par la quantité de travail socialement nécessaire à sa reproduction (salaire).
L’écart entre la valeur d’usage et d’échange crée un profit que Marx qualifie de plus-value.
→ Analyse macroéconomique :
→ Facteurs de crises : Marx relève deux contradictions importantes
- Sous-consommation ouvrière : sous-payés, les ouvriers n’ont pas le pouvoir d’achat
nécessaire pour acheter les marchandises qu’ils produisent. La demande est
inférieure à l’offre = déséquilibres et crises de surproduction.
- Baisse tendancielle du profit : diminution tendancielle des capitalistes à extraire de
la plus-value. Sous l’effet de la concurrence, les entreprises procèdent à une course à
la plus-value. Les entreprises les moins rentables font faillite. Au fil du temps le
temps de travail socialement nécessaire pour produire une marchandise diminue.
Avec la loi du prix unique, une marchandise se vend au même prix : si le temps de
travail diminue, la valeur du bien diminue donc baisse de la plus-value. Pour la
converser, nécessité d’intégrer du progrès technique dans le système de production
(substituer du capital au travail) donc course à l’équipement. Cependant, plus les
entreprises s’équipent et plus le temps de travail diminue donc la plus-value aussi =
blocage de l’accumulation du capital. Donc crises majeures, faillites, chômage de
masse.
→ Effondrement du capitalisme : Pour Marx, à chaque fois que la société est divisée en
classes elles traduisent toujours les mêmes rapports opprimants/opprimés. Sous le
capitalisme, on retrouve les capitalistes (propriétaires de moyens de production), le
prolétariat (travailleurs qui ne possèdent que leur force de travail). Les travailleurs
inemployés constituent « l’armée industrielle de réserve » qui correspond au chômage. Pour
lui, c’est la lutte des classes qui permet au système d’évoluer : « L’histoire de toute société
jusqu’à nos jours est l’histoire de la lutte des classes ». Il dit que le capitalisme est dépassé,
les techniques de production se sont socialisées alors qu’il existe toujours une appropriation
individualiste des moyens de production. Le capitalisme doit donc laisser la place à un autre
système (abolition de la propriété privée des moyens de production). C’est au prolétariat de
permettre la révolution prolétarienne pour l’avènement d’un nouvel ordre : le
communisme (propriété collective, production = satisfaction des besoins).
→ Portée de l’œuvre : nombreux apports méthodologiques. Il a su développer et
approfondir l’analyse des auteurs classiques en incluant des aspects philosophiques et
sociologiques. Il donne des instruments de combat au socialisme utopique.
2ème partie : Les révolutions néoclassiques et keynésiennes
I. Les néoclassiques
1. Aspects généraux
→ Principaux courants : les fondateurs du courant néoclassique sont appelés les
marginalistes car ils sont à l’origine du nouveau concept de calcul à la marge. À partir de
1870, ils renouvellent entièrement la théorie classique avec l’utilité marginale. On parle de
révolution marginaliste car cette notion est découverte dans 3 pays. 3 principaux courants
issus du marginalisme :
- École de Lausanne fondée par Walras.
- École autrichienne fondée par Carl Menger.
- École de Cambridge fondée par Alfred Marshall.
→ Les principaux axes :
→ Objet de la science économique : Les économistes néoclassiques mettent en évident la
notion de rareté = ils cherchent à comprendre les choix des différents agents économistes
dans un univers où les ressources sont limitées. De plus, notion d’échange = les
économiques échangent sur des marchés qui sont des institutions centrales qui
fonctionnent sans l’intervention de l’État. Ils utilisent des outils sophistiqués (maths, stats).
Lionel Robbins donne une définition en 1932 : « L’économie est la science qui étudie le
comportement humain en tant que relation entre des fins et des moyens rares susceptibles
d’être utilisés différemment ».
→ Nouveaux outils et nouveaux apports : ils font évoluer deux grandes théories :
- Théorie de la valeur : face au paradoxe de l’eau et du diamant, contrairement aux
classiques, les néoclassiques soulignent l’importance de l’utilité marginale. Leur
théorie de la valeur est subjective.
- Théorie de la répartition : les néoclassiques ont recours à 2 nouveaux concepts :
1° L’individualisme méthodologique = les phénomènes collectifs peuvent être décrits
à partir des propriétés et des actions des individus. Il utilise une approche
ascendante = on part de l’action des individus et on en déduit une propriété pour
l’ensemble de la communauté.
2° La rationalité des comportements = les individus agissent en utilisant au mieux les
ressources dont ils disposent compte tenu des contraintes qu’ils subissent. Au centre
de l’analyse se trouve un homo oeconomicus = un être parfaitement rationnel et
égoïste dont l’ensemble des choix est éclairé. Son objectif est de maximiser sa
satisfaction personnelle.
2. Les marginalistes et l’utilité marginale
→ L’utilité marginale : Les marginalistes prennent comme point de départ le consommateur
et l’utilité que ce dernier retire de la consommation d’un bien. Ils sont influencés par
Jeremy Bentham et sa philosophie utilitariste. L’utilité doit être évaluée au regard de la
quantité consommée. Ce qui compte c’est l’utilité de la dernière unité de bien consommé
qu’on appelle utilité marginale (= différence entre les utilités totales). L’utilité totale est
croissante avec l’accroissement de consommation d’un bien alors que l’utilité marginale est
décroissante avec la quantité consommée. C’est le principe de la décroissance de l’utilité
marginale. Comme l’utilité marginale décroit avec la quantité consommée, le prix unitaire
du bien décroit avec la quantité qu’il est prêt à consommer.
→ La résolution du paradoxe de l’eau et du diamant : la notion d’utilité marginale permet
de résoudre ce paradoxe. L’eau est peu chère mais très utile, le diamant est très cher mais
peu utile. Pour une consommation importante, l’utilité marginale de l’eau est faible donc le
litre d’eau a une faible valeur et faible utilité.
→ Les lois de Gossen : avec le calcul à la marge, 2 principes :
- Le théorème de l’utilité maxima des marchandises : études dans lesquels les
individus ont plusieurs biens = ceux-ci se vendent à un prix. Les consommateurs ont
des besoins illimités mais des ressources limitées, ils doivent procéder à des
échanges entre les biens (vendre leurs biens pour en consommer d’autres).
- La satisfaction maximale d’un individu est atteinte lorsque les utilités marginales de
chaque bien pondérées par leurs prix sont égales : si un des biens a une utilité
marginale inférieure aux autres achats, et bien le consommateur ne doit pas
l’acheter.
→ Ces deux principes n’ont pas été entièrement inventés par les néoclassiques, on les
doit en réalité à Heinrich Gossen. Le principe de la décroissance de l’utilité marginale
s’appelle donc la Première loi de Gossen et le théorème de l’utilité maxima des
marchandises porte le nom de Deuxième loi de Gossen.
→ Portée de l’analyse : les marginalistes ont une théorie de la valeur subjective. Tous les
individus n’apprécient pas les biens de façon identique et n’en retirent pas la même
utilité. Ils sapent le travail de Marx. De plus ils ont développé un nouvel outil d’analyse :
le calcul à la marge.
3. Alfred Marshall et l’équilibre partiel
→ Dans son manuel, Principes d’économie politique, il énonce sa fameuse loi de l’offre et de
la demande (considéré comme le père de celle-ci même si Walras l’avait déjà énoncé).
→ La demande :
- La demande individuelle : Marshall reprend les études des marginalistes sur l’utilité.
Si un bien est utile et qu’il procure de la satisfaction, on va le demander. Il considère
qu’on peut établir une théorie de la demande de bien à partir de la théorie de
l’utilité. Plus un bien est consommé en quantité importante et plus le prix qu’un
individu est prêt à payer est faible. De plus, un individu a une contrainte budgétaire.
À revenu constant, Marshall met en évidence l’existence d’une relation décroissante
entre le prix unitaire de marché d’un bien et la quantité que le consommateur est
prêt à acheter = fonction de demande individuelle. Plusieurs facteurs déterminent la
demande des individus :
1° Revenu des individus : toute chose égale par ailleurs (ceteris paribus),
l’augmentation du revenu engendre une augmentation de la quantité demandée. La
fonction de demande se déplace vers la droite. Mais il faut également prendre en
compte le type de biens consommés : Ernst Engel en distingue 3, avec les biens
normaux (besoins vitaux), les biens de luxes ou supérieurs (biens culturels) et les
biens inférieurs (qui doivent être remplacés dès que possible par des biens de
meilleure qualité). Une augmentation de revenu engendre une augmentation moins
que proportionnelle de la consommation des biens normaux, plus que
proportionnelle des biens de luxe et réduit la consommation de biens inférieurs.
2° Variation des prix relatifs des biens les uns par rapport aux autres.
3° Modifications des goûts et des préférences.
- La demande de marché : Marshall pense qu’on peut séparer l’utilité procurée par un
bien de l’utilité procurée par un autre bien. Les biens procurent de l’utilité
indépendamment les uns des autres. Pour chaque bien, il est possible d’additionner
chaque prix, les demandes individuelles et d’en déduire une demande collective.
Donc la demande collective d’un bien (demande de marché) = quantité totale de
biens qui est demande à chaque niveau de prix.
→ L’offre : Marshall reprend l’analyse du calcul à la marge qui était utilisé pour le
consommateur et l’applique au producteur. Entreprise = processus qui transforme les
facteurs de production (inputs : terre, travail, capital) en un produit (output : biens de
production, de consommation ou services). Le bien est vendu sur un marché en concurrence
pure et parfaite = multitude d’offreurs et de vendeurs. 3 concepts :
- La recette totale : la vente d’un bien à un prix déterminé par le marché procure une
recette au producteur. Soit P = prix unitaire, Q = quantité vendue et R = recette
totale. R = P x Q. La recette moyenne est Rmoy = P x Q / Q et la recette marginale est
Rmarg = P (variation de la recette totale lié à la vente d’une unité supplémentaire de
biens).
- Le coût total : La production d’un bien occasionne des coûts pour l’entreprise.
1° Le cout total = somme du cout fixe + cout variable.
2° Le cout fixe = indépendants du volume de la production (frais de loyer par ex)
3° Le cout variable = dépendent du volume de la production (matière premières)
4° Cout moyen = cout total / quantité produite
5° Cout marginal = supplément de cout liée à la production d’une unité
supplémentaire de bien produit.
- Le profit de l’entreprise : différence entre la recette et le cout. Profit = RT – CT.
→ Règle fondamentale : le profit est maximal lorsqu’on est en CPP si l’entreprise produit un
nombre de bien tel que sa recette marginale est égale à son cout marginal (profit maximal si
Rmarg = Cmarg). Ainsi, l’entreprise produit jusqu’à que l’unité supplémentaire produite lui
rapporte autant qu’elle ne coute. Pour cela, il faut que le cout marginal soit faible pour de
petites quantités mais qu’il augmente quand la production s’accroit.
→ La loi des rendements décroissants pour le producteur est le pendant au principe
d’utilité marginale décroissante du consommateur.
→ On en déduit une offre du producteur = à chaque niveau de prix, il est possible d’associer
un niveau de production pour le producteur. Si le prix de marché unitaire du bien est élevé,
l’offre est élevée et inversement. Donc l’offre individuelle sur un marché est une fonction
croissance du prix du marché unitaire.
→ N.B : l’offre peut être affectée par le progrès technique et la variation des coûts de
production.
→ L’équilibre partiel : Marshall fait la synthèse des différents courants de pensée sur la
valeur des biens. Il regarde ce qu’il se passe sur un marché d’un seul bien (équilibre partiel).
Il confronte l’offre collective de bien et la demande collective de bien. Elles se croisent en
un point particulier où les quantités demandées sont égales aux quantités offertes pour un
prix particulier qui est le prix d’équilibre du marché. Citation de Marshall : « Le prix et la
quantité échangé d’un bien sont déterminé simultanément par deux forces qui jouent
symétriquement comme les deux lames d’une paire de ciseaux coupant ensemble une feuille
de papier ». Pour lui, c’est la parfaite flexibilité des prix à la hausse comme à la baisse qui
garantit l’atteinte de cet équilibre. La fixation d’un prix plafond ou plancher entraverait le
processus d’équilibre.
→ Rôle du temps : il distingue trois périodes :
- Période de marché = extrêmement brève, la production n’a pas le temps d’être
modifié. Dans ce cadre, la fonction d’offre collective devient verticale car elle est
rigide face au prix. La demande collective est toujours décroissante avec le prix.
L’élément déterminant du prix est ici la demande.
- Courte période = la production peut être adaptée. La courbe d’offre collective est
croissante car les rendements sont décroissants. La demande collective est
décroissante.
- Longue période = à tout moment de nouveaux entrepreneurs arrivent sur le marché,
disparition des entreprises les moins rentables. Conséquence = augmentation de
l’offre, baisse généralisée des coûts de production, baisse des prix d’équilibre. Ainsi la
fonction d’offre peut devenir décroissante ou horizontale. Influence déterminante
du coût de production.
→ Conclusion : plus la période est courte plus le prix d’un bien est déterminé par la
demande et l’utilité ; plus la période est longue et plus le rôle de l’offre et du coût de
production prédominent.
→ Portée : Analyse de Marshall = très novatrice et très complexe, elle fait la synthèse entre
les auteurs classiques et les marginalistes sur la valeur des biens. Sa théorie est dite
unificatrice. Son analyse introduit l’aspect temporel, en considérant que le temps est un
facteur important pour expliquer le comportement des entreprises. Faiblesses de son
analyse : représentation très simplifiée de la réalité.
4. Walras et l’équilibre général
→ Interdépendance des marchés : Cœur de la théorie = interdépendance entre les marchés
(qu’il emprunte à François Quesnay). Pour lui, on ne peut pas étudier ce qui se passe sur un
marché sans étudier les autres marchés.
→ La loi de Walras : Il étudie une petite économie composée de 2 marchés : du bien A et du
bien B. Les individus possèdent soit du A soit du B. Ils peuvent faire des échanges. Il
considère que si le marché du bien A est à l’équilibre alors le marché du bien B aussi. A
contrario, si un marché a un déséquilibre, l’autre marché connait un déséquilibre inverse.
Cette loi s’appellera la Loi de Walras = pure relation comptable qui est vrai quel que soit les
prix pratiqués sur les marchés.
→ Si on appelle demande nette la différence sur un marché entre la demande et l’offre
établie à un prix, la loi de Walras s’exprime ainsi : la somme des valeurs des demandes
nettes sur l’ensemble des n marchés de l’économie est nulle. Soit une économie avec n
marché, si n-1 marché sont à l’équilibre, alors le nième l’est aussi.
→ L’équilibre général : Il redécouvre les lois de Gossen : l’utilité marginale est décroissante
avec la quantité consommée + la satisfaction d’un consommateur est maximale si les utilités
marginales pondérées par les prix sont égales. De là, Walras démontre qu’il est possible de
déduire de l’utilité la demande de biens des individus. Il construit une véritable théorie du
consommateur.
→ Il la complète par une théorie du producteur. Par une série d’équations complexes
empruntées à la physique de Laplace et au mathématicien Augustin Cournot, il analyse
comment les offres et les demandes s’équilibrent sur l’ensemble des marchés. Il parvient à
un système comportant autant d’équations que d’inconnus, les inconnus ce sont les prix qui
équilibrent les marchés. Il admet qu’il doit exister au moins un système de prix d’équilibre
non négatif qui permet d’équilibrer l’ensemble des marchés de l’économie. L’analyse en
équilibre général décrit ainsi le processus par lequel, grâce à des mouvements de prix sur
l’ensemble des marchés en CPP, ceux-ci s’équilibrent de sorte à ce que sur chaque marché :
offre = demande.
→ Portée : Walras montre qu’en recherchant leur intérêt personnel, les agents procèdent à
des échanges sur des marchés interdépendants en CPP qui se réalisent une fois le prix de
chaque bien déterminé à partir de la confrontation de l’offre et de la demande. Il démontre
qu’une économie décentralisée en CPP tend naturellement vers un équilibre. Deux
critiques : le peu de rôle de la monnaie + la complexité de la modélisation. De plus, il n’a pas
démontré l’existence d’un équilibre, il s’est contenté de l’admettre. C’est Kenneth Arrow et
Gérard Debreu qui reprendront son analyse.
5. Optimum de Pareto
→ Optimum de Pareto : Constitue un prolongement de la théorie de Walras. Il a montré
qu’il est possible de trouver un système de prix qui équilibre tous les marchés. Grâce à ces
prix, les individus procèdent à des échanges. Pareto se demande si ces échanges sont
bénéfiques pour tous. Il définit un critère d’optimalité qui permet de classer les situations
les unes par rapport aux autres. 2 situations : A et B = B est strictement préférée à A. Si
certains individus améliorent leur utilité dans la situation B par rapport à la situation A, les
autres n’y perdent rien.
→ À partir de ce critère, il définit l’optimum de Pareto. Une situation est un optimum de
Pareto s’il n’existe pas de meilleure situation qui permet d’augmenter l’utilité de certains
individus sans que les autres y perdent. Une propriété fondamentale est qu’il est possible de
démontrer que tout équilibre général Walrassien est un optimum de Pareto. C’est ce qu’on
appelle le premier théorème du bien-être.
→ Problèmes : il n’est pas toujours possible de classer entre elles toutes les situations de
l’économie. Ainsi, le passage d’un état A à un état B peut entrainer une augmentation de
l’utilité d’un agent au détriment d’une baisse de l’utilité d’un autre agent. Or, pour Pareto,
il est illégitime de comparer les gains et les pertes d’utilité des agents entre eux. Ex : société
composée d’une personne vivant dans l’opulence, grande proportion des richesses et à côté
une multitude de délaissés qui se partagent le reste. C’est un optimum de Pareto = tout
prélèvement consistant dans une redistribution, d’une partie de la richesse vers les pauvres,
engendrerait une diminution de l’utilité du riche même si l’utilité de tous les autres
augmente. Ainsi le critère de Pareto ne prend pas en compte la justice sociale.
→ Portée : Walras a montré que les marchés en CPP livrés à eux-mêmes tendent vers un
équilibre. Pareto montre que cet équilibre est un optimum et qu’il n’est pas possible de
trouver meilleure situation.
6. Fischer et la théorie quantitative de la monnaie
→ Équation des échanges et théorie quantitative de la monnaie : la théorie quantitative de
la monnaie explique qu’une émission trop importante de monnaie par rapport à la
production engendre un accroissement des prix. Il précise ce lien monnaie-prix (après
d’autres auteurs tel que Jean Bodin) en mettant en évidence une relation fondamentale que
l’on appelle l’équation des échanges : MV = PT (M = quantité de monnaie en circulation sur
une période donnée ; V = vitesse de circulation de la monnaie (nombre de fois que la
monnaie est utilisée pour réaliser les transactions) P = niveau général des prix et T = volume
des transactions réalisées sur une période donnée).
→ À la base, MV = PT est une simple réalité comptable. À droite de l’équation = montant des
transactions en volume multipliés par leur prix (c’est le revenu nominal de l’économie). À
gauche de l’équation = masse monétaire qui a été utilisée un certain nombre de fois pour
réaliser les transactions sur une période donnée (dépense totale de l’économie). Ainsi, on a
l’identité comptable suivante : dépense totale = revenu nominal.
→ Cette équation devient la théorie quantitative de la monnaie dès lors qu’on fait deux
hypothèses et que l’on y intègre un lien de causalité. 2 hypothèses :
- V = paramètre constant et exogène, elle dépend des habitudes des individus et des
institutions.
- T = déterminé de façon indépendante sur les marchés des biens et services, il est fixe
et exogène.
- Lien de causalité = toute augmentation de la masse monétaire M induit uniquement
un accroissement de P (niveau général des prix). Or, T et V sont constants. Donc
toute augmentation de M induit uniquement une augmentation de P.
→ Pour réaliser les échanges, les prix s’adaptent à la quantité de monnaie en circulation de
sorte que P = M x V / T. Fischer dira : « Les prix sont directement proportionnels à la
quantité de monnaie en circulation ».
→ Portée : Une deuxième version de la théorie quantitative est élaborée par Alfred
Marshall et Arthur Cécile Pigoud qu’on appelle l’équation de Cambridge. L’objectif n’est
plus de déterminer P (niveau général des prix) mais les besoins de monnaie pour motif de
transactions. On repart de MV = PT mais on met en évidence : M = P x T / V qui représente
la demande de monnaie pour motif de transaction.
→ La première version de Fischer a trois conséquences importantes :
- Reprise de l’idée des classiques que la monnaie sert uniquement à réaliser des
transactions. Elle n’est jamais demandée pour elle-même.
- Idée de la neutralité de la monnaie (elle n’influence pas le niveau des transactions).
Les phénomènes monétaires (masse monétaire, niveau général des prix et taux de
change) n’ont pas d’incidence sur les phénomènes réels (consommation et
production).
- La théorie concerne l’inflation : toute augmentation disproportionnée de la masse
monétaire se traduit par de l’inflation. Il faut donc faire attention à ne pas créer trop
de monnaie par rapport à la production.
7. La concurrence pure et parfaite
→ Description : Un marché en CPP vérifie les 5 conditions suivantes :
- Atomicité : nombreux acheteurs et vendeurs. Aucun individu ne peut influencer seul
les prix. Les agents sont « preneurs de prix ».
- Homogénéité : biens et services identiques ou homogènes sur les marchés.
- Fluidité du marché : les entreprises peuvent entrer librement sur le marché et ainsi
concurrencer les autres. Aucune barrière l’entrée.
- La transparence : les agents sont parfaitement et gratuitement informés de tout ce
qu’il se passe.
- Libre circulation des facteurs de production : le capital et le travail doivent être
parfaitement mobiles = ouverture des frontières.
→ Limites de la CPP : en fonction de chaque critère :
→ Atomicité : de nombreuses filières sont concentrées et dominées par quelques acteurs.
Tableau élaboré par Stackelberg qui donne une typologie des différents types de
concurrence selon le nombre d’acheteurs et de vendeurs :
Pour un seul offreur :
- 1 acheteur = monopole bilatéral.
- 1 petit nombre d’acheteurs = monopole contrarié.
- 1 grand nombre d’acheteurs = monopole.
Pour un petit nombre d’offreurs :
- 1 acheteur = monopole contrarié.
- 1 petit nombre d’acheteurs = oligopole bilatéral.
- 1 grand nombre d’acheteurs = oligopole.
Pour un grand nombre d’offreurs :
- 1 seul acheteur = monopsone.
- 1 petit nombre d’acheteurs = oligopsone.
- 1 grand nombre d’acheteurs = concurrence pure et parfaite.
→ Homogénéité du produit : dans la réalité les produits vendus sont de moins en moins
homogènes. Stratégies des entreprises pour différencier leur produits (qualité notamment).
→ Libre entrée : de nombreuses entraves empêchent les entreprises d’accéder au marché
(protectionnisme, coût de recherche ou de transports).
→ Transparence de l’information : l’information est difficilement gratuite, elle est souvent
imparfaite car elle privilégie quelques acteurs au détriment des autres.
→ Libre circulation des facteurs de production : la mobilité des travailleurs est loin d’être
parfaite, la libéralisation du marché du capital s’est faite progressivement.
8. Les défaillances du marché
→ Les biens collectifs : consommable par tous. Ils vérifient deux propriétés :
- Non rivalité : la consommation de ce bien par un individu n’exclue pas la
consommation du même bien par un autre individu.
- Non exclusion : on ne peut pas empêcher un individu de consommer ce bien.
Ils ne sollicitent aucune demande personnelle. Personne ne souhaite les financer à titre
individuel. C’est l’État via les impôts qui doit financer ces biens collectifs.
→ Les externalités : situation particulière où l’activité d’un agent a des répercussions sur
l’utilité ou le profit d’un autre agent, sans contrepartie monétaire, sans transaction sur un
marché.
- Externalités positives : qui augmentent la satisfaction des tiers (ex : recherche et
développement). Certaines entreprises peuvent bénéficier de la R&D d’autres
entreprises, sans subir les coûts de recherche.
- Externalités négatives : qui peuvent nuire aux tiers (ex : la pollution).
L’État a un rôle important : il peut taxer (imposer une entreprise qui pollue) ou à l’inverse
réglementer ou instaurer des aides monétaires pour les externalités positives. Il peut
renforcer les droits de propriété et subventionner l’activité économique (renforcer la
législation en matière de brevets/secrets commerciaux).
→ Les rendements d’échelle croissants : une technologie à rendements d’échelles
croissants = si pour augmenter le volume de production il faut augmenter dans des
proportions moindres le volume de facteurs de production (si en multipliant par 2 le travail
et le capital on arrive à multiplier par 3 la quantité produite).
→ Ils s’expliquent par des situations où les coûts fixes sont très importants. Si on prend
l’exemple de la Poste, une fois que le réseau est mis en place (coût important) on peut
facilement augmenter la production sans accroitre le coût en capital et en travail.
→ Problème : favoriser les monopoles = plus une entreprise produit, plus elle est efficace et
elle peut évincer les autres entreprises jusqu’à l’apparition d’un monopole naturel. L’État
doit intervenir en imposant des contraintes de prix et d’efficacité. Il peut également mettre
en place des politiques de concurrence qui lutterait contre les monopoles et des politiques
qui interdisent les pratiques de dumping (vente à perte). Il peut également interdire les
ententes, sanctionner les abus de position dominante (lourdes amendes). Enfin, l’État peut
déréglementer les marchés (déréglementation des marchés financiers dans les années 80)
pour ouvrier les monopoles publics à la concurrence via la privatisation.
9. Le modèle macroéconomique néoclassique
→ Hypothèses : Ce modèle reprend trois piliers de l’analyse classique à s’avoir
l’autorégulation des marchés sans intervention de l’État, la neutralité de la monnaie et
l’idée que l’offre fait la demande. Il reprend également les fondements de l’analyse
néoclassique : le comportement d’optimisation des agents microéconomiques sur des
marchés en CPP et la parfaite flexibilité des prix et des services. L’analyse se fait sur le court
terme = les entreprises peuvent ajuster leur capacité de production en jouant seulement sur
le travail sans jouer sur le stock de capital.
→ La structure du modèle : l’économie est résumée à 4 marchés principaux :
→ Le marché du travail : O = travailleurs et D = entreprises, la variable clé est le taux de
salaire réel (= salaire nominal corrigé par l’inflation ; salaire nominal = effectivement versé
aux travailleurs). Soit W le salaire nominal, P le niveau des prix : salaire réel = W/P. À partir
de ce salaire réel, on peut définir le taux de salaire réel qui est W/P en taux horaires.
Comment ce taux de salaire réel influence-t-il l’offre et la demande ?
- Offre de travail : plus la rémunération est grande, plus l’heure de travail
supplémentaire procure satisfaction et utilité (elle devient plus attractive qu’une
heure de loisirs). Donc l’offre de travail est une fonction croissante du taux de
salaire réel.
- Demande de travail : les entreprises paient leur salarié en fonction de leur
contribution à la production. Elles cherchent la rentabilité donc elle embauche tant
que le salarié supplémentaire lui rapporte plus qu’il ne lui coute. On dit que le salaire
est égal à la productivité marginale du travail. Au fur et à mesure que l’entreprise
embauche, le supplément de production diminue. Les néoclassiques font l’hypothèse
d’une production à rendements décroissants. Plus le taux de salaire réel est
important, plus il peut devenir supérieur à la productivité marginale des travailleurs.
Donc la demande des entreprises est une fonction décroissante avec le taux de
salaire réel.
Si le marché du travail est en CPP, les néoclassiques démontrent que la parfaite flexibilité du
taux de salaire réel permet l’équilibre en l’offre et la demande. Il est possible de déterminer
le niveau d’emploi et le taux de salaire réel d’équilibre. Cet équilibre est de plein emploi.
→ Le marché des biens et services : À partir du nombre de travailleurs il est possible de
déterminer le volume de production. À court terme, le capital est fixe. Loi de Say = l’offre
fait la demande sans possibilité de crise de surproduction.
→ Le marché du capital de prêt : rencontre des épargnants et des emprunteurs (agents aux
capacités de financement) avec les agents au besoin de financement (entreprises). Offre de
titres (fonds prêtables) et demande de titres. La demande et l’offre dépendent du taux
d’intérêt réel (=rémunération du capital prêté exprimé en % du montant prêté). Le taux
d’intérêt nominal est le taux auquel un prêt est conclu ; le taux d’intérêt réel est la charge
réelle qui pèse sur l’emprunteur en raison de l’inflation.
- Demande de titres : elle provient des comportements individuels. Arbitrage entre ce
qu’ils vont consommer aujourd’hui et demain (= épargner). Donc le taux d’intérêt
réel apparait comme le prix de la renonciation à une consommation immédiate. Plus
le taux d’intérêt réel est élevé et plus les individus acceptent de prêter les fonds et
d’épargner. La fonction d’épargne est croissante avec le taux d’intérêt réel.
- Offre de titres des entreprises : l’investissement décroit avec le taux d’intérêt réel.
Plus le coût de l’emprunt est élevé, moins il est intéressant d’épargner.
→ Le marché de la monnaie : sur ce marché l’offre de monnaie provient des autorités
monétaires et la demande émane des agents. Ce marché est toujours à l’équilibre (loi de
Walras : le 4e marché va aussi être à l’équilibre).
→ Portée : le modèle macroéconomique souligne l’existence d’équilibre sur l’ensemble des
marchés. Concernant l’État, toute politique économique devient inutile. L’État ne doit pas
mettre en place de politique monétaire expansive qui constituerait en un accroissement de
la masse monétaire = inflation. Idem pour les politiques budgétaires et fiscales qui seraient
inefficaces. Rôle de contrôle de la monnaie et du bon fonctionnement des marchés.
II. La révolution keynésienne
1. Introduction à l’analyse keynésienne
→ Contexte : années 20/30 = dommages suite à la 1ere GM, croissance importante dans les
pays occidentaux, essor industrielle lié aux années folles, EU = puissance économique. Le
krach boursier de 1929 sonne le glas de cette ère de prospérité = crise éco. L’ensemble des
pays développés sont plongés dans la Grande Dépression (chute de la production, déflation
et chômage massif). Face à l’inaptitude de l’analyse néoclassique, John Meynard Keynes
n’hésite pas à bouleverser les grands principes en publiant La Théorie générale de l’emploi
de l’intérêt et de la monnaie en 1936.
→ Nouveau cadre d’analyse, nouvelle problématique : La théorie keynésienne repose sur
une approche macroéconomique soulignant l’importance d’agrégats comme la production,
l’emploi ou l’investissement. Keynes remet en avant l’idée de circuit. Les agrégats se
déduisent les uns des autres selon des liens de causalité (=équilibre global). Il pense que les
entreprises produisent uniquement dans l’optique de la vente et doivent anticiper la
demande pour y répondre : la demande fait l’offre. De plus, il pense que la monnaie n’est
pas neutre. Les prix seraient rigides, les ajustements se feraient par les quantités. Cela
aurait pour conséquence l’existence de chômage involontaire. Il introduit également la
notion d’incertitude. La situation économique est influencée par la façon dont les individus
aperçoivent leur environnement et perçoivent le futur. Contrairement à la plupart des
analyses classiques, il s’inscrit dans le cadre du court terme car comme il le dit : « À long
terme, nous serons tous morts ». En cas de récession, il revient à l’État de mettre en place
des politiques conjoncturelles de relance. Donc 8 caractéristiques de son analyse :
macroéconomique, de court terme, économie en situation d’incertitude, prix et salaires
rigides, économie de la demande, de sous-emploi (chômage involontaire), économie
monétaire et enfin intervention de l’État nécessaire surtout en cas de crise.
2. La théorie keynésienne
→ Une théorie de l’emploi : objectif est de montrer que livrées à elles-mêmes, les
économies capitalistes peuvent engendrer des situations de sous-emploi des facteurs de
production. Pour Keynes, les entrepreneurs eux seuls déterminent le niveau de production
et d’emploi en fonction de leurs anticipations de débouchés. S’ils pensent qu’ils n’arriveront
pas à vendre leur production, ils ne produisent pas = chômage involontaire. Enfin pour lui la
demande fait l’offre.
→ La demande : la consommation et l’investissement constituent des éléments majeurs.
- Consommation : acquérir des biens destinés à être détruits immédiatement ou
progressivement et qui permettent la satisfaction directe des besoins humains.
Keynes développe l’idée d’une loi psychologique fondamentale = les hommes
tendent à accroitre leur consommation à mesure que leur revenu croit mais dans
une quantité moins grande que l’accroissement du revenu. On peut représenter la loi
graphiquement avec C pour la consommation nationale et Y le revenu nationale. On
a la relation C = aY + b où a = pente de la droite (constante, entre 0 et 1) elle
s’interprète comme la propension marginale à consommer (=variation de
consommation induite par une augmentation du revenu) et b = consommation
incompressible (= si le revenu est nul, les individus consomment quand même). On
appelle par ailleurs propension moyenne à consommer (PMC) la part du revenu qui
est consacré à la consommation. On peut l’écrire PMC = C/Y. On s’aperçoit que plus
le revenu est important et plus la PMC diminue. Il déduit de la consommation
l’épargne qu’il distingue entre financière (avoir liquides + placements financiers) et
non financière (logements, biens d’équipements). Pour Keynes, l’épargne est un
résidu par rapport à la consommation. Enfin, on a S = Y-C (épargne nationale =
revenu national – consommation nationale).
- Investissement : bien de production durable qui, étant acheté par une entreprise,
modifie le stock de capital existant. Il y en a des matériels (biens physiques) et des
immatériels (pub, frais de R&D). Il peut être envisagé sous deux aspects : soit un
facteur de production (plus une entreprise investit et plus elle peut produire) soit un
emploi de la production (investissement = objet d’une demande par les entreprises).
Pour Keynes, l’investissement dépend du taux d’intérêt (fonction décroissante du
taux d’intérêt). Il explique cette relation à partir de la nation d’efficacité marginale
du capital. C’est le taux de rendement d’un investissement. Pour effectuer le
meilleur choix il faut comparer le taux de rendement de son investissement avec le
taux d’intérêt du marché des capitaux. Plus le taux d’intérêt est élevé par rapport au
taux de rendement et moins l’entreprise réalisera d’investissement. De même, une
entreprise qui manque de fonds va devoir emprunter : plus le taux de l’emprunt est
élevé et moins elle investira. Enfin l’investissement dépend des anticipations des
individus : plus les entrepreneurs anticipent des revenus élevés sur leur
investissement plus cela augmente le taux de rendement espéré. Les ménages
investissent également (investissement logement), ainsi que l’État (politiques
interventionnistes publiques).
Au final, la demande globale est l’ensemble des biens et services destinés à la
consommation des ménages, à l’investissement privé des entreprises et des ménages ou
l’investissement public.
→ Demande effective : Pour Keynes ce qui est central c’est les anticipations des
entrepreneurs concernant leur vente à la période suivante. Les décisions de production et
d’embauche dépendent de ce qu’ils pensent vendre demain. Donc notion extrêmement
nouvelle : demande effective. Il s’agit du niveau de demande auquel les entrepreneurs
décident de répondre compte tenu de leur prévision de vente et des coûts et profits qu’ils
peuvent attendre. La prévision se fondent sur la demande globale mais aussi sur l’état
d’esprit de l’entrepreneur (pessimisme/capacité à prendre des risques). Keynes désigne par
« esprit animaux » l’ensemble des émotions qui guident leurs comportements en dehors de
tout calcul rationnel.
→ La théorie de l’intérêt et de la monnaie :
→ La monnaie : Keynes propose une analyse où la monnaie joue un rôle majeur. Il distingue
trois motifs de détention de la monnaie :
- Motif de transaction : la détention de monnaie est nécessaire pour tenir compte du
décalage pour les ménages entre la détention de leur revenu et le paiement de leurs
transactions. Plus les transactions vont être élevées, plus les individus ont besoin de
monnaie. La demande de monnaie pour motif de transaction s’accroit avec le revenu
national.
- Motif de précaution : individus confrontés à des incertitudes sur leurs recettes et
dépenses futures. Ils souhaitent maintenir une réserve liquide pour faire face à des
charges imprévues. Cette demande augmente également avec le revenu national.
- Motif de spéculation : c’est une réserve de valeur. La monnaie peut être préférée
aux titres (obligations par ex) dont la valeur fluctue. La variable clé est le taux
d’intérêt. Lorsque ce taux est élevé, les individus préfèrent détenir des titres. Quand
il est faible, ils demandent de la monnaie. Situation extrême : trappe à liquidités =
taux d’intérêt très faible, les individus ne veulent plus aucun titre et demandent
indéfiniment de la monnaie.
→ Le taux d’intérêt : prix de la renonciation à la consommation. Il constitue une
rémunération pour les épargnants qui ne consomment pas l’ensemble de leurs revenus
aujourd’hui. Pour Keynes l’arbitrage consommation/épargne se fait en fonction du revenu
et la loi psychologique fondamentale. Le taux d’intérêt n’intervient pas mais pour lui il
permet l’arbitrage entre détention de monnaie et détention de titres. Le taux d’intérêt
devient donc le prix de la renonciation à la liquidité. Comment se forme le taux d’intérêt ?
Déterminé par confrontation entre l’offre et la demande de monnaie. La demande de
monnaie est décroissante avec le taux d’intérêt. L’offre de monnaie est la quantité de
monnaie disponible résultant des décisions des autorités monétaires (banque centrale par
ex). Le taux d’intérêt fait le lien entre la sphère réelle et la sphère monétaire. Il est
déterminé dans la sphère monétaire mais c’est lui qui influence la sphère réelle. Il influence
le niveau de production et de l’emploi (ex : un taux d’intérêt trop élevé peut décourager
l’investissement, réduire la demande et la production).
3. Le circuit keynésien
→ Qu’est-ce qu’un circuit ? : un circuit économique peut se définir comme une
représentation simplifiée de l’activité économique mettant en évidence des flux monétaires
et réels entre les principaux agrégats de l’économie (production, conso, investissement).
→ Le circuit keynésien : Il faut reprendre les concepts étudiés.
- Sphère monétaire : les individus ont une demande de monnaie pour motifs de
transaction, précaution, spéculation, croissante avec le revenu, décroissante avec le
taux d’intérêt. L’offre de monnaie est fixée par les autorités monétaires. La
confrontation entre l’O et la D de monnaie permet de déterminer le taux d’intérêt
d’équilibre. Donc taux d’intérêt = liaison entre sphère monétaire et réelle.
- Sphère réelle : on s’intéresse à la demande globale de biens et services. Demande
issue de la consommation (qui provient du revenu national) et de l’investissement
(déterminé par le taux d’intérêt). L’analyse de Keynes est réalisée dans une
économie fermée. La demande globale permet aux entrepreneurs de prévoir la
demande de demain. En fonction de leurs anticipations de recettes et de coûts, ils
décident de répondre à une partie de la demande qu’il anticipe = demande effective.
Celle-ci permet aux entrepreneurs de décider du niveau de leur production en vertu
de l’application du principe : la demande fait l’offre.
→ Pour Keynes le marché du travail ne fonctionne pas comme un marché :
- Demande de travail : les entrepreneurs embauchent en fonction de la demande
effective.
- Offre de travail : les travailleurs sont victimes de l’illusion monétaire, ils ne
connaissent pas le niveau général des prix (leur réel pouvoir d’achat, l’inflation) donc
ils regardent le salaire nominal, or ce salaire est rigide à la baisse, donc un
ajustement par les salaires n’est pas possible. L’ajustement se fait donc par les
quantités, ce qui crée un possible équilibre de sous-emploi.
En somme, dès lors que la demande effective est insuffisante, les travailleurs ne sont pas
employés, c’est pourquoi il y a du chômage involontaire. Circuit : le revenu national
influence les décisions de consommation des individus ainsi que la demande de monnaie
(pour motif de transaction et de précaution) dans la sphère monétaire.
→ Conséquences de l’analyse : Une économie de marché ne garantit en aucun cas le plein
emploi dans l’économie keynésienne. Lorsque la conjoncture économique devient mauvaise,
la récession peut s’installer : les entreprises n’embauchent plus, elles licencient. Dans ce
scénario, il n’y a pas d’ajustements automatiques. Ainsi, Keynes souligne l’importance de
l’intervention de l’État. Lui seul est en mesures, par une politique de régulation, de sortir
l’économie de la spirale récessionniste.
LE CIRCUIT KEYNESIEN
SPHERE
MONETAIRE
Demande de
monnaie
-motif de Offre de
transaction monnaie
-motif de
précaution
-motif de
spéculation
Taux d’intérêt
SPHERE
REELLE
Consommation Investissement Dépenses publiques
Demande globale
Demande globale
anticipée
Demande effective
Travailleurs employés
Revenu
Production
National Offre globale
Chômeurs
4. Les politiques de régulation keynésiennes
→ La politique budgétaire et fiscale : objectif = réguler l’activité économique. L’État (via son
budget) détermine le niveau de dépenses publiques ainsi que les recettes fiscales. Une
politique fiscale agit au niveau des prélèvements obligatoires, une politique budgétaire agit
au niveau des dépenses de l’État. Elle est dite expansive lorsqu’elle accroit les dépenses
publiques et restrictive lorsqu’elle les diminue. Pour relancer l’économie, il faut mettre en
place une politique fiscale qui allège l’impôt sur le revenu et la consommation mais qui
impose lourdement les successions et une politique budgétaire expansive.
→ Effets de la politique budgétaire expansive : on trouve deux types d’effets :
→ Directs : toute augmentation des dépenses publiques augmente la demande globale
donc augmentation du revenu national.
→ Indirects (effet multiplicateur) : L’État finance ses dépenses en créant un déficit
budgétaire qui est financé par endettement. Comment une faible augmentation des
dépenses publiques peut avoir un impact important ? C’est grâce à l’effet multiplicateur =
processus selon lequel toute augmentation des dépenses publiques engendre une
augmentation beaucoup plus importante du revenu national en raison de nombreux effets
secondaires générés.
→ L’augmentation des dépenses publiques de l’État a deux effets :
- Effet direct : la dépense publique génère des revenus au sein des entreprises car
elles embauchent davantage de personnel, les rémunérations augmentent.
- Effet indirect : l’économie toute entière va profiter de ces effets bénéfiques. La
consommation des salariés augmente donc les autres entreprises voient leurs ventes
s’accroitre et ainsi de suite. Donc grâce à une petite augmentation des dépenses
publiques, le revenu national a beaucoup progressé grâce à l’effet multiplicateur.
→ Cependant, on peut noter certaines limites de l’effet multiplicateur : son fonctionnement
nécessite certaines conditions.
- Les individus doivent être prêts à consommer leur supplément de revenu. Donc la
propension marginale à consommer le revenu joue un rôle déterminant. Au
contraire, si les individus choisissent d’épargner, l’effet multiplicateur est réduit voire
inexistant (fuite au circuit économique).
- De plus, les individus doivent consommer à l’intérieur du pays sinon les bénéfices de
la relance profiteront au pays extérieur. C’est une raison pour laquelle Keynes pense
qu’il faut limiter la libre circulation des marchandises.
- L’économie doit se trouver en situation de sous-utilisation des capacités de
production. Elle doit pouvoir répondre rapidement à une augmentation de la
demande par une production supplémentaire donc une embauche. L’offre doit
pouvoir s’adapter rapidement à la demande, sinon risque d’inflation.
- Les taux d’intérêt doivent être peu élevés afin d’éviter un effet d’éviction (= une
politique budgétaire expansive accroit la consommation et le revenu national mais
elle se traduit également par une augmentation du taux d’intérêt de l’économie).
Deux raisons : l’accroissement de l’activité engendre une augmentation de la
demande de monnaie = augmentation du taux d’intérêt. De plus, l’État doit lui-
même emprunter sur les marchés financiers donc augmentation du taux. Cette
augmentation risque de réduire l’investissement privé et la demande globale. On
parle d’une éviction de l’investissement privé par l’investissement public. Deux
solutions : effectuer une politique budgétaire seulement si les taux d’intérêt sont bas
ou mettre en place une politique monétaire d’accompagnement de la politique
budgétaire (policy mix).
→ La politique monétaire : moduler la masse monétaire en circulation dans les différentes
économies afin de juguler l’inflation ou réguler l’activité économique. Pour relancer
l’économie il faut mettre en place une politique monétaire expansive qui accroit la masse
monétaire. Cela est rendu possible par les autorités monétaires et la banque centrale. C’est
la BC qui décide des taux d’intérêt directeurs sur le marché monétaire. Ce sont les taux
auxquels les banques empruntent à la banque centrale, puis elles répercutent ce taux auprès
du public. En résumé, une politique monétaire expansive consiste à mettre en circulation
une quantité importante de monnaie. Cela est possible en maintenant un taux d’intérêt
faible qui favorise les crédits et l’investissement.
III. Les prolongements de l’analyse keynésienne
1. Introduction
→ Contexte économique des années 50/60 : Renouvellement du cadre institutionnel suite à
la 2nde GM, reconstruction qui passe par l’aide américaine (Plan Marshall), la réorganisation
du système monétaire internationale (SMI) qui consacre l’hégémonie du dollar lors de la
conférence de Bretton Woods en 1944 + décloisonnement progressif de l’économie
mondiale : nouveaux organismes (GATT, Commission du marché commun du charbon et de
l’acier). Puis période des 30 glorieuses (terme de Jean Fourastié), croissance sans
précédent, accroissement du pouvoir d’achat. Importante réserve de main d’œuvre due à
un secteur primaire en déclin.
→ Les courants issus de l’analyse keynésienne :
- École de la synthèse classico-keynésienne (d’inspiration keynésienne) : Paul
Samuelson, John Hicks. Objectif : replacer le modèle keynésien dans le modèle
néoclassique. Ils représentent le circuit keynésien mais l’équilibre résulte
d’interactions entre différents marchés.
- École hétérodoxe (postkeynésiens) : conservent les éléments de la pensée
keynésienne (intervention de l’État et approche macroéconomique), puis ils situent
des problèmes de production, croissance, circulation. On a les keynésiens de longue
période avec Roy Forbes Harrod, la macroéconomie de Michal Kalecki (synthèses
économie keynésienne et marxiste), on a les post cambridgien (Joan Robinson ou
Nicholas Kaldor) et enfin l’économie keynésienne du circuit avec Frédéric Poulon.
2. Les représentations issues de l’analyse keynésienne
→ Le modèle dépense-revenu : Modélisation que l’on retrouve chez Roy George Douglas
Allen ou Ralph Hawtrey qui montre qu’il est possible de résumer l’économie autour de trois
pôles : la production (offre), le revenu et la dépense (demande). La richesse induite par la
production des entreprises permet de distribuer des revenus à ceux qui ont été employés
par les entreprises. Ces revenus sont eux-mêmes dépensés pour acheter la production. Il y a
des applications très concrètes comme l’INSEE qui calcule le PIB sous chacune des trois
optiques (dépense, revenu ou production).
→ Le circuit très simplifié : économie très simplifiée = les agents sont réduits aux ménages
et entreprises. Ils échangent sur le marché du travail et celui des biens et services.
- Flux réels : ménages offrent leur force de travail aux entreprises. Les ménages
achètent des biens de consommation aux entreprises.
- Flux monétaires : en échange de leur travail les entreprises donnent une
rémunération aux ménages, qui la dépensent en achetant des biens aux entreprises
(dépense nationale). L’économie est à l’équilibre si ces flux sont identiques (revenu
national = dépense nationale = production nationale).
→ Le circuit avec épargne et investissement : Introduction du marché du capital. L’épargne
= revenu – consommation. Les ménages placent une partie non consommée de leur revenu,
qui permet l’investissement des entreprises. L’épargne apparait comme une fuite dans le
système économique. L’investissement est considéré comme une injection. Donc pour être
à l’équilibre il faut que l’épargne = investissement.
Production (Q) satisfait la conso (C) et l’investissement (I) donc Q = C + I.
Revenus (Y) sont consommés (C) ou épargnés (S) donc Y = C + S.
À l’équilibre, Q = Y donc C + I = C + S donc I = S.
→ Le circuit avec administration publique : Les administrations publiques prélèvent des
impôts (uniquement sur les ménages) = notion de revenu disponible (une fois les impôts
prélevés). Si Y = revenu et T = impôts, Yd = revenu dispo ; Yd = Y – T. Ces impôts permettent
aux administrations d’acheter des biens et services (G = dépenses publiques) et de faire des
paiements de transfert aux ménages (F = transfert).
Production = conso + investi + biens publics : Q = C + I + G.
Le revenu Y augmente les transferts sociaux F qui vont être consommés C, épargnés S ou
utilisé pour payer les impôts T donc Y + F = C + S + T. On peut écrire : Y = C + S + T – F.
→ Le circuit en économie ouverte : Les importations s’ajoutent à la production nationale
mais ne créent pas de revenus dans l’économie (M). Les exportations sont produites sur le
territoire et envoyés à l’extérieur, création de revenus (X). On a donc Q + M = C + I + G + X où
Q+M = offre globale et C+I+G+X = demande globale. Comme à l’équilibre, on a Y = Q, on
peut écrire que Y = C + I + G + X – M.
3. Le modèle IS-LM
→ Le modèle IS-LM en économie fermée : en insérant le modèle keynésien dans un cadre
néoclassique avec équilibre général et interdépendance des marchés, John Hicks donne des
bases macroéconomiques plus solides.
- IS = Investments and Savings (investissement et épargne). La courbe IS représente
l’ensemble des points d’équilibre sur le marché des biens et services, c’est une
courbe décroissante.
- LM = Liquidity preference and Money supply. La courbe LM se trace dans le même
repère (Y en abscisse et r (taux d’intérêt) en ordonnée). Elle représente l’ensemble
des points d’équilibre sur le marché de la monnaie. Courbe croissante.
- À l’intersection des droites IS et LM, on trouve le taux d’intérêt et le niveau de
production qui équilibrent l’économie. Le niveau de production peut être insuffisant
pour employer toute la main d’œuvre (chômage) = analyse keynésienne.
→ L’effet des politiques budgétaires et monétaires :
- L’État peut intervenir sur le marché des biens et services via une politique
budgétaire fiscale expansive = réduction des impôts ou augmentation des dépenses
publiques. Cette politique engendre un déplacement vers la droite de la droite IS
(revenu et taux d’intérêt plus élevés).
- L’État peut également mettre en œuvre une politique monétaire expansive =
déplacement vers la droite de la courbe LM (baisse des taux d’intérêt et
augmentation de la masse monétaire en circulation).
- Possibilité d’une policy mix (politique budgétaire + monétaire) = déplacement des
courbes IS et LM vers la droite, taux d’intérêt revient au niveau initial et le revenu
national augmente.
→ Ce modèle réduit l’analyse keynésienne à un cas particulier de l’analyse néoclassique (prix
et salaires rigides, équilibre général accompagné de sous-emploi). L’analyse ne prend pas en
compte le climat d’incertitude dans lequel les agents prennent des décisions. Elle donne lieu
à des politiques de stabilisation conjoncturelles qui accompagnent le mouvement de
croissance des 30 glorieuses.
→ Le modèle IS-LM en économie ouverte : Robert Alexander Mundell et John Marcus
Fleming ont publié des articles sur les effets à court terme des politiques monétaires et
budgétaires dans une économie ouverte.
→ Hypothèses : la prise en compte de l’international se traduit par deux paramètres :
- Le régime de change : règles de détermination des taux de change d’un pays ou d’un
ensemble de pays. Il peut être fixe = déterminé par un étalon, on parle de cours
pivot (cours fixe) ou flottant = le taux de change de la monnaie évolue librement en
fonction de l’offre et de la demande, la monnaie n’a pas de parité officielle avec les
autres monnaies.
- Le degré de mobilité du capital : circulation du capital. Plus le degré de mobilité est
important, plus il est aisé d’implanter une usine étrangère, d’acheter un bien
immobilier à l’étranger ou des titres (actions, obligations). Si le degré de mobilité
était parfaitement mobile, les capitaux se déplaceraient instantanément d’un pays à
l’autre pour s’établir là où la rémunération serait la plus intéressante. Dans ce cas, un
pays ne pourrait plus maintenir durablement un écart de taux d’intérêt avec les taux
d’intérêt internationaux.
→ Le modèle de Mundell-Fleming :
Politique monétaire
Faible efficacité = plus le capital est mobile,
Change fixe moins la politique est efficace.
Efficacité = plus le capital est mobile, plus la
Change flexible politique est efficace.
Politique budgétaire
Efficacité = plus le capital est mobile, plus la
Change fixe politique est efficace.
Faible efficacité = plus le capital est mobile,
Change flexible moins la politique est efficace.
- Politique monétaire expansive : en économie ouverte = augmentation des
importations, fuite des capitaux étrangers. Possibilité d’un déficit du compte des
transactions courantes et du compte financier de la banque des paiements. En
change fixe, les autorités monétaires doivent maintenir la parité, la BC vend des
devises pour soutenir le cours de sa monnaie mais cela contracte la masse
monétaire et rend caduque les effets positifs de la politique monétaire. En change
flexible, dépréciation du change sur le marché des changes ce qui rend plus
attractifs les produits nationaux (donc augmentation des exportations et du revenu
national).
- Politique budgétaire expansive : en économie ouverte = en change fixe,
l’augmentation du revenu accroit les importations mais la hausse du taux d’intérêt
attire les investissements étrangers. Plus le capital est mobile, plus ce dernier est
important et domine le premier entrainant une appréciation du taux de change.
Pour l’éviter, les autorités monétaires achètent des divises = la masse monétaire
augmente jusqu’à ce que le taux d’intérêt retrouve son niveau initial. En change
flexible, les autorités monétaires n’interviennent pas face à l’appréciation de la
monnaie. Le taux de change s’apprécie librement, la compétitivité se détériore =
baisse des exportations et augmentation des importations.
→ Pour résumer, en change fixe dès lors qu’il existe un peu de mobilité du capital une
politique budgétaire expansive permet d’augmenter le revenu national et d’atteindre le
plein emploi. La politique monétaire ne fonctionne pas car les autorités monétaires doivent
intervenir sur le marché des changes, ce qui annihile tous ces effets bénéfiques. En change
flexible, les variations du taux de change rétablissent automatiquement l’équilibre sur le
marché des changes : la politique monétaire expansive est d’autant plus efficace que le
capital est mobile. En revanche, la politique budgétaire est inefficace.
→ Le triangle des incompatibilités : Dans une économie ouverte, il est impossible que
l’économie atteigne trois objectifs : avoir un régime de change fixe, disposer d’une politique
monétaire autonome (qui permet aux autorités de fixer le taux d’intérêt en fonction des
besoins) et avoir une parfaite mobilité du capital (qui permet de placer son argent au taux le
plus intéressant). Si on enlève un paramètre, les deux autres deviennent réalisables.
→ Pourquoi ? Pour soutenir la croissance, les autorités baissent le taux d’intérêt, le capital
étant mobile, il se dirige vers les places à la rémunération la plus rentable = fuite des
capitaux vers l’étranger = dépréciation du change. Pour éviter une dévaluation, les autorités
doivent élever le taux d’intérêt. La conciliation de ces trois objectifs entraînent
inévitablement une crise monétaire et financière.
4. La fonction de consommation keynésienne
→ Les vérifications empiriques : deux méthodes sont utilisées pour vérifier la forme de la
consommation keynésienne.
- Analyse en séries chronologiques ou temporelles : permet de tester l’évolution
simultanée dans le temps de la consommation et du revenu. On utilise des données
annuelles ou trimestrielles.
- Analyse en coupes instantanées ou transversale : tester l’évolution de la
consommation en fonction des différentes tranches de revenus de la population en
se situant sur une année précise.
→ Résultats contradictoires : les études menées sur le court terme (2/3 ans) ont trouvé une
fonction de type affine qui validerait les hypothèses keynésiennes. En revanche, sur le long
terme on obtient des droites linéaires passant par l’origine (étude de Kuznets) = invalide la
fonction de consommation keynésienne.
- Droite affine (C = aY + b) : lorsque le revenu baisse, la part de la consommation a
tendance à augmenter. En coupe instantanée, plus un individu est aisé et plus il
épargne. Une personne pauvre consomme une partie beaucoup plus grande de son
revenu. Politique de redistribution = augmentation de la consommation.
- Droite linéaire (C = aY) : la part de la consommation en fonction du revenu est stable.
Quel que soit le niveau de revenu, on consomme donc la même proportion.
→ Analyse de Duesenberry : James Stemble Duesenberry met en évidence l’importance de
la position sociale à travers deux théories :
- Théorie du revenu relatif : le niveau de consommation des individus proviendrait
d’un effet d’imitation. Les individus ont tendance à s’aligner sur les habitudes de
consommation des autres qui appartiennent à la même catégorie sociale. La
consommation dépend donc de leur revenu relatif au sein d’un groupe.
- Théorie des habitudes acquises : la consommation dépend du revenu le plus élevé
atteint dans le passé. Les consommateurs gardent le même style de vie malgré une
crise ou une récession. Il apparait un effet de rémanence ou effet de cliqué. La
consommation tend à être rigide à la baisse donc les individus réduisent leur
épargne. En revanche, toute augmentation du revenu engendre une hausse de la
consommation.
→ Analyse de Friedman : Pour Milton Friedman, le revenu courant se divise en deux types :
- Revenu transitoire : revenu exceptionnels qu’un individu peut gagner (gain au loto
par ex). Il représente aussi toutes les pertes dont il peut faire l’objet (chômage). Sur
le long terme, il faut espérer que ces gains et ces pertes s’équilibrent.
- Revenu permanent : revenu qu’un individu prévoit de percevoir régulièrement tout
au long de son existence. Revenu anticipé = forme d’approche de sa richesse.
De la même manière, la consommation est divisée en deux types :
- Consommation transitoire : dépenses imprévisibles et exceptionnelles.
- Consommation permanente : dépenses que fait quotidiennement un individu.
Parmi ces variables, il pense que la seule relation existante est celle qui relie consommation
permanente et revenu permanent. Il pense que Cp = k Yp. Cette théorie remet en cause
l’analyse keynésienne = toute augmentation exceptionnelle du revenu augmente la
composante transitoire du revenu mais elle reste sans aucun effet sur la consommation
courante. Une politique budgétaire de relance ne peut avoir d’impact ici.
→ Analyse de Modigliani : Franco Modigliani élabore la théorie du cycle de vie.
- Phase 1 : Jeunesse = consommation > revenu, l’individu doit emprunter.
- Phase 2 : Vie active = revenu > consommation, il épargne.
- Phase 3 : Retraite, il consomme tout ce qu’il a épargné et ne laisse aucun héritage.
L’épargne permet donc de s’acquitter des emprunts effectués pendant la jeunesse et de
financer la consommation pendant la retraite. À chaque instant, trois générations
d’individus cohabitent au sein d’une même économie. Modigliani montre l’importance de la
démographie sur la propension à consommer. Si la consommation est déterminée dans une
optique inter temporelle, influencée par la richesse de l’individu et son âge, alors les
politiques économiques de relance keynésiennes ne peuvent plus fonctionner.
5. La courbe de Phillips et la loi d’Okun
→ La courbe de Phillips : À partir de l’économie de la Grande Bretagne, Phillips effectue une
étude et met en évidence une relation forte et négative entre le taux de variation des
salaires nominaux et le taux de chômage. Quand le chômage est élevé, la hausse des
salaires est faible. Les salariés sont prêts à accepter des emplois moins bien rémunérés et les
syndicats sont moins exigeants. Au contraire, lorsque le taux de chômage est faible, les
difficultés de recrutement peuvent inciter les entreprises à accroitre la rémunération des
salariés.
→ La réinterprétation de ses travaux : la courbe a donné lieu à de nombreuses
interprétations. Lipsey, Samuelson et Solow transforment la relation de Phillips en une
relation inverse entre inflation et chômage. L’augmentation des salaires est un déterminant
fondamental des coûts de production d’une entreprise, donc des prix de vente. Face à une
augmentation des salaires, les entreprises augmentent leurs prix. Leur étude montre que
tant que la croissance des salaires est inférieure à 2,5%, les prix n’augmentent pas et le
chômage demeure entre 5 et 6%. Pour un taux de chômage de 3%, l’inflation serait
d’environ 4 à 5%. Donc relation décroissante entre taux de chômage et inflation. Plus le taux
d’inflation est élevé, moins le taux de chômage est fort. Cette relation de Samuelson et
Solow prend le nom de courbe de Phillips.
→ Conséquence : la politique de lutte contre le chômage se paie par plus d’inflation. Les
keynésiens font de cette analyse l’équation manquante = elle permet de dépasser le modèle
IS-LM standard à prix fixe et de pouvoir prendre en compte l’inflation. Cela donne des
fondements théoriques aux politiques conjoncturelles de régulation (politique de stop and
go). Lorsque le chômage est trop élevé, l’État met en place une politique budgétaire
expansive qui réduit le chômage mais provoque de l’inflation. Quand l’inflation devient trop
grande, les gouvernements cherchent à la bloquer via une politique d’austérité qui réduit
l’inflation mais augmente le chômage.
→ La pire situation survient lorsque l’arbitrage n’est plus possible entre le chômage et
l’inflation, ce qui finit par engendrer la stagflation = faible croissance économique et forte
inflation.
→ La loi d’Okun : établie à partir d’une étude sur données américaines, elle précise les liens
entre le marché du travail et celui des biens et services. Relation entre le taux de croissance
du PIB et la variation du taux de chômage. Taux de chômage en abscisse et taux d’évolution
du PIB en ordonnée = droite décroissante. Aux EU dans l’étude d’Okun il faut une croissance
d’environ 3% par an pour maintenir un taux de chômage constant.
→ La loi d’Okun fait l’impasse sur des facteurs importants comme l’évolution de la
population active et la productivité du travail. Toute augmentation de la population active
rend nécessaire une augmentation de la production + augmentation de la productivité du
travail (liée au PT ou à la formation des salariés) rend nécessaire une augmentation de la
croissance pour stabiliser le chômage. Au final, pour le chômage baisse, il faut une
croissance économique solide qui dépasse l’augmentation de la PA et de la productivité.
6. Les théories de la croissance
→ Croissance = augmentation soutenue pendant une ou plusieurs périodes longues d’un
indicateur de dimension permettant d’appréhender l’augmentation de la production sur le
long terme.
→ Développement = augmentation de la production accompagnée d’une importante
modification économique et sociale.
→ Le modèle de croissance de Harrod et Domar : ces deux post keynésiens développent un
des premiers modèle de croissance de référence. Pour eux, il existe trois taux :
- Taux de croissance garanti : qui assure une progression parallèle et équilibrée de la
demande et de l’offre en termes de biens.
- Taux de croissance naturel : qui assure le plein emploi.
- Taux de croissance effectif : qui résulte de la véritable croissance constatée.
→ Ces taux sont déterminés indépendamment les uns des autres, ils ont peu de chance
d’être identiques. Harrod et Domar se montrent très pessimistes sur la possibilité d’une
croissance équilibrée : ils concluent une instabilité intrinsèque de la croissance qui peut
engendrer le chômage de masse. La croissance ne peut évoluer, selon Harrod, que sur le
« fil du rasoir ». Importance des politiques gouvernementales pour rétablir l’équilibre entre
ces trois taux.
→ Le modèle de Solow : La modélisation de Solow schématise de façon très simplifiée
l’économie, elle le représente à partir d’une fonction de production à deux facteurs de
production substituables : Y = f (K,L). Donc la production d’un pays (Y) résulte de la
combinaison d’une certaine quantité de capital (K) et de travail (L). Optique de long terme,
pas de prise en compte des problèmes de chômage ou de sous-utilisation du capital. Plus le
capital ou le travail augmente, plus le PIB s’élève mais dans une production moindre. Solow
fait ici l’hypothèse que les facteurs de production ont des rendements décroissants.
Augmentation du capital = augmentation de la production mais de plus en plus faible avec
l’accroissement du capital.
→ Implications : la modélisation induit 4 principales implications :
- Importance dans la croissance d’un pays du travail et du capital. Ces facteurs
permettent à l’économie de converger vers un équilibre de long terme (état
stationnaire) où le PIB par habitant est constant. Cela s’explique par des rendements
décroissants. Seul le progrès technique qui est considérée comme une sorte de
« manne tombée du ciel » peut permettre l’augmentation du PIB par tête.
- On peut obtenir une croissance soutenue et régulière sans aucune intervention de
l’État : l’État ne doit pas s’injecter dans la vie économique.
- Les individus doivent choisir entre consommer ou épargner. Il doit exister un taux
qui maximise la consommation de chaque individu et permettent une consommation
soutenue pour l’ensemble des générations futures. Pour atteindre ce taux, le taux
d’intérêt réel de l’économie doit être égal au taux de croissance de la population.
C’est la règle d’or de l’accumulation (décrite par Maurice Allais).
- Existence d’un effet de rattrapage : un pays est souvent pauvre en raison d’un déficit
de capital mais il peut accroitre son niveau de vie en épargnant et augmentant son
stock de capital. Durant la phase d’accumulation du capital, le taux de croissance du
PIB est supérieur à sa valeur d’équilibre.
→ Limites : les fortes simplifications et les hypothèses engendrent des critiques :
- La croissance ne dépend que de facteurs exogènes (sur lesquels on ne peut pas
jouer, telle que la croissance de la population). Cela est contestable car plus les
investissements en R&D augmentent plus il y a de chance d’avoir du progrès
technique (brevet technique = endogène).
- On peut s’interroger sur la possibilité pour les pays pauvres d’accumuler du capital :
beaucoup de pays en voie de développement peuvent difficilement accéder au
niveau d’épargne et d’investissement suffisant pour permettre le décollage
économique. Existence d’un seuil minimal de capital pour accéder à la croissance.
Au-dessous, les pays semblent être prisonniers d’une sorte de trappe de sous-
développement dont ils ne peuvent sortir sans aide extérieure.
- Absence de chômage dans le modèle de Solow. Modélisation éloignée de la réalité.
3ème partie : l’économie politique aujourd’hui
I. Renouveau de la théorie libérale
1. Introduction
→ La crise des années 1970 : Hausse de l’inflation, apparition de chômage et dérèglement
du SMI qui conduit en 1971 à la suspension de la convertibilité or du dollar. En 1973,
multiplication par 3 des prix du pétrole par l’OPEP = premier choc pétrolier. Recul de la
production et du commerce international, forte inflation + chômage (stagflation). 2nd choc
pétrolier suite au doublement du prix du pétrole en 79 (révolution iranienne), récession
mondiale, progression de l’inflation et du chômage. 3e révolution industrielle fondée sur le
développement de la technologie et de l’information.
→ Solutions à la crise : de nombreux gouvernements veulent utiliser les politiques de
régulation keynésienne (1975 en France = politiques de relance de Chirac). Mais les déficits
budgétaires engendrés par ces relances deviennent de plus en plus lourds à supporter. Donc
augmentation de l’endettement national, accroissement de la charge fiscale sur les
contribuables… Ces politiques sont inefficaces en raison de l’ouverture des économies. De
plus, l’augmentation du chômage et de l’inflation remet en question la courbe de Phillips.
2. Monétarisme
→ Met l’accent sur les questions monétaires = il faut réguler la masse monétaire et limiter
l’inflation avant tout. Chef de file : Milton Friedman.
→ Remise en question de la politique budgétaire keynésienne : Friedman ne croit pas en
l’efficacité d’une politique conjoncturelle keynésienne. Il remet en question la stabilité de la
fonction de consommation keynésienne. Toute politique de relance crée un supplément de
revenu exceptionnel qui va forcément être épargné = aucun effet bénéfique sur l’économie
du pays, elle peut juste créer de l’inflation et engendrer des déséquilibres. Les monétaristes
affirment la supériorité de l’approche par la quantité de monnaie.
→ Inflation et politique monétaire : L’inflation se définit comme la perte du pouvoir
d’achat de la monnaie = augmentation générale et durable des prix. Friedman : « L’inflation
est toujours et partout un phénomène monétaire » (et non pas réel). La cause principale
est : « une augmentation de la quantité de monnaie plus rapide que celle de la
production ». Le responsable de cette inflation est donc l’État et les autorités monétaires. Il
compare l’inflation à l’alcoolisme : « L’inflation est comme l’alcoolisme, lorsqu’un homme
se livre à une beuverie, le soir même cela fait du bien. Ce n’est que le lendemain qu’il se
sent mal ». Ainsi, l’inflation peut avoir des effets favorables mais seulement à court terme.
- À court terme : l’augmentation de la masse monétaire engendre une augmentation
des prix. Si les prix P augmentent, sur le marché du travail cela va réduire le salaire
réel (rapport W/P où W = salaire nominal). La baisse du salaire réel conduit les
entreprises à embaucher = réduction du chômage. Les agents font l’objet d’une
illusion monétaire, rendue possible par leurs anticipations adaptatives (=les
individus effectuent des anticipations à partir des évènements passés. À court terme,
ils ne se rendent pas compte de la baisse de leur pouvoir d’achat).
- À long terme : les travailleurs finissent par s’apercevoir de la baisse de leur pouvoir
d’achat, ils demandent des augmentations de rémunération. La hausse de leur salaire
accroit leur taux de salaire réel = création de chômage. Chômage à son niveau initial
mais l’inflation a explosé. Il n’y a pas d’arbitrage possible entre inflation et chômage
car ils appartiennent à deux sphères disjointes.
→ La courbe de Phillips dans la vision monétariste : Pour réduire le chômage, les autorités
peuvent mettre en place une politique monétaire expansive qui augmente l’inflation (à
court terme). Mais à long terme les individus demandent une augmentation de salaire donc
le chômage augmente à nouveau.
→ La politique monétaire préconisée : en période de faible croissance, il faut renoncer à
une politique monétaire de relance. En période de forte croissance, la monnaie peut se
révéler insuffisante pour réaliser les transactions. Friedman développe l’idée qu’il faut
mettre en place une politique monétaire codifiée (bien précise) : « Toute augmentation de
la masse monétaire doit se faire de façon proportionnelle au taux de croissance du PIB. Au
contraire, il faut abandonner toute politique discrétionnaire (qui se ferait à la discrétion du
gouvernement, selon son bon vouloir), gouvernement qui pourrait chercher à vouloir tromper
les individus pour relancer l’économie ».
→ Le chômage : Pour Friedman il existe un taux de chômage naturel compatible avec un
taux d’inflation stable. On appelle ce taux le NAIRU (non accelerating inflation rate of
unemployment). Ce taux dépend des structures du marché du travail, il provient des rigidités
qui perturbent l’ajustement concurrentiel des salaires (rigidités : salaire minimum, action
des syndicats, niveau des allocations chômages…). Solution contre le chômage pour les
monétaristes : politiques microéconomiques structurelles sur le marché du travail visant à
le flexibiliser + stabilité des prix.
→ Conclusion : 3 principaux points de controverses avec les keynésiens :
- Divergence du cadre d’analyse : court terme (Keynes) contre long terme (Friedman).
- Divergence sur l’efficacité des politiques conjoncturelles à court terme : elles
peuvent relancer l’économie (Keynes) ou être totalement inefficace, voire aggraver
les déficits (Friedman). La politique monétaire n’est efficace qu’à court terme.
- Divergence de priorités : chômage (Keynes) et inflation (Friedman).
3. La nouvelle économie classique
→ Radicalisation des thèses monétaristes. On trouve Thomas Sargent, Robert Lucas, Finn
Kydland, Edward Prescott ou Robert Joseph Barro. Elle vise à réhabiliter les concepts
fondamentaux classiques (loi de Say, parfaite neutralité de la monnaie) en y introduisant le
concept d’anticipations rationnelles.
→ Les anticipations rationnelles : concept défini en 1961 par John Muss. Si les agents sont
rationnels, leurs anticipations également (elles ne sont plus adaptatives comme le disait
Friedman). Les agents raisonnent de la manière la plus rationnelle possible et font des
prévisions sur les évènements futurs. En raison de cette hypothèse, toute politique
monétaire devient inefficace.
→ Inefficacité de la politique monétaire : pas d’effet, même à court terme. Elle engendre
une augmentation des prix qui réduit le salaire réel qui entraine une embauche accrue.
Avec la nouvelle économie classique et les anticipations rationnelles, les individus
s’aperçoivent immédiatement de la baisse de leur pouvoir d’achat et donc demandent une
hausse de salaire. Une politique monétaire expansive n’a alors plus aucun effet bénéfique
sur le chômage à court terme, elle crée simplement de l’inflation.
→ En 1977, Kydland et Prescott enrichissent l’analyse en introduisant le principe
d’incohérence temporelle. Il y a incohérence temporelle si un gouvernement adopte des
politiques différentes à deux instants différents pour traiter du même problème. Le
mécanisme peut fonctionner la première fois car les individus sont pris au dépourvu mais ils
s’aperçoivent rapidement qu’ils ont été trompés. Ils soulignent qu’il vaut mieux mettre en
place des politiques codifiées plutôt que des politiques discrétionnaires.
→ Un certain nombre d’études enrichissent également l’analyse avec le concept de
prophéties auto réalisatrices. Le sociologue Robert King Merton précise ce concept dès
1948. Prophétie auto réalisatrice = définition d’abord fausse d’une situation, mais cette
définition erronée suscite un nouveau comportement qui la rend vraie. Exemple des tâches
solaires : dès que les hommes constatent l’apparition de tâches sur le soleil, ils pensent que
les prix vont augmenter. A priori, il n’y a pas de lien. Cependant cette seule croyance peut
devenir réalité = en anticipant une hausse des prix, les individus achètent des biens
massivement donc la hausse de demande engendre une augmentation des prix. On parle ici
d’inflation auto générée.
→ Que faut-il faire pour éviter l’inflation ? Les individus doivent avoir confiance dans les
autorités et les politiques antis inflationnistes afin qu’il n’ait pas d’anticipations d’inflations.
À partir de 1980, mouvement d’indépendance des banques centrales = indépendante par
rapport au gouvernement et au pouvoir public si elle peut décider librement de la politique
monétaire à mettre en place. Une telle indépendance doit permettre une meilleure
crédibilité des politiques monétaires visant à lutter contre l’inflation.
→ Inefficacité de la politique budgétaire conjoncturelle : mise en évidence en 1974 par
Robert Barro qui reprend l’ancien argument de David Ricardo (on parle d’effet Ricardo
Barro ou d’équivalence Ricardienne). L’idée est : lorsque le gouvernement entreprend une
politique de relance budgétaire financée par un déficit budgétaire, les consommateurs
anticipent une augmentation de leurs impôts donc ils accroissent leur épargne. Tout
supplément de revenu est donc épargné. L’effet multiplicateur prôné par les keynésiens a
peu de chance de se produire.
4. La diversité de l’école libérale
→ L’œuvre de Friedrich Hayek : vise à défendre et reconstruire le libéralisme. La supériorité
de l’économie de marché sur tout autre forme d’organisation est un thème majeur qu’il
développe en 1944 dans La route pour la servitude. Il s’oppose aux politiques
interventionnistes keynésiennes et au rôle croissant de l’État. Il s’élève également contre le
socialisme en place dans les pays de l’Est. Par exemple, la fixation d’un salaire minimum par
l’État provoquerait du chômage (cela exclu du marché ceux qui ont une productivité
inférieure). Hayek est opposé à l’institution de tout établissement centralisé (État, BC). Des
banques de missions privées devraient se substituer aux banques centrales, ce qui
conduirait à une dénationalisation de la monnaie.
→ L’école des choix publics : développée dans les années 60 par James Buchanan et
Gordon Tullock à partir des travaux de Nicolas Condorcet et son paradoxe de Condorcet qui
montrait la difficulté de trouver un système de vote idéal (un scrutin uninominal ne conduit
pas à l’élection du candidat préféré s’il y a dispersion des voix). Ils reprennent cette
problématique du vote et des élections qu’ils élargissent au fonctionnement de l’État.
L’école des choix publics montre que l’État ne doit jamais intervenir en matière économique
(études sur les services publics américains démontrent que les entreprises privées ont obtenu
de meilleurs résultats). Tullock et Buchanan préconisent de remettre au domaine marchand
tout ce qui peut l’être.
→ L’école de l’offre : apparait dans les années 70 avec Arthur Laffer et Georges Gilder,
s’inscrit dans la lignée des économistes classiques. Elle renouvelle l’idée que le moteur de
l’économie est l’offre. Pour favoriser la croissance, il faut encourager les investissements
des entreprises plutôt que favoriser la demande. Il faut soutenir l’initiative privée en faisant
disparaitre tous les freins à son développement (lever les entraves fiscales et
règlementaires).
→ Arthur Laffer met au point une courbe de Laffer qui montre que de trop forts taux
d’imposition peuvent réduire les recettes de l’État. Elle est d’abord croissance, atteint un
maximum en T* puis devient décroissante. Plus le taux d’imposition est élevé, plus les
recettes fiscales sont grandes. Mais la deuxième partie de la courbe traduit plusieurs effets :
taux d’imposition trop grand = évasion et fraude fiscale. Cette courbe illustre donc l’idée
qu’il ne faut pas dépasser un certain taux d’imposition (autour des 30%). En réduisant les
impôts, on peut améliorer les recettes fiscales et favoriser l’activité économique.
Cependant, la courbe de Laffer ne prend pas en compte les effets redistributifs des impôts.
→ Les théories de la croissance endogène : d’inspiration néoclassique. Pour soutenir la
croissance il faut pratiquer des politiques structurelles d’investissement. 4 facteurs :
- Phénomène d’apprentissage par la pratique : concept de Paul Romer = c’est en
produisant qu’on acquerra les techniques pour produire davantage et réaliser des
découvertes à l’origine de progrès technique.
- Recherche et développement : favorise le PT qui va être source de croissance.
- Capital humain : concept de Robert Lucas = ensemble des compétences des
individus issues de leurs aptitudes innées, de leur formation/expérience qui
déterminent leur capacité à produire.
- Infrastructures publiques : mises en évidence par Robert Barro = en facilitant la
circulation des biens/personnes/information, elles sont un facteur clé.
→ Ces 4 facteurs ont une caractéristique commune : ils engendrent des externalités
positives. Cela explique que le libre jeu du marché conduise à une situation sous optimale.
Les agents d’eux-mêmes n’investissent pas suffisamment en R&D. Compte tenu des
défaillances du marché l’État joue un rôle important en incitant les agents à investir
davantage. Donc l’État doit mettre en place une politique structurelle de croissance visant à
soutenir un investissement suffisant en formation/recherche/infrastructures publiques.
→ Cette théorie de la croissance endogène explique également le sous-développement de
certains pays qui peuvent être coincés dans des trappes à pauvreté car ils manquent de
capital et de formation initialement.
II. Nouvelle microéconomique, répliques keynésiennes et autres tendances
1. La nouvelle microéconomie
→ La microéconomie classique de Marshall et Walras s’appuyait sur des hypothèses d’un
monde en CPP. Un certain nombre d’économistes essaient de lever certaines hypothèses
concernant les marchés en CPP : Augustin Cournot (théorie du monopole, duopole et
oligopole. Il montre comment une entreprise en monopole maximise son profit et établit le
prix de vente de ses produits et la quantité à vendre) et Robinson (elle publie la Théorie de la
concurrence imparfaite en 1933).
→ Le comportement stratégique des individus : Le marché n’est pas totalement
atomistique. Les individus et les entreprises ont des relations d’interdépendance et exerce
un certain pouvoir sur le marché. Ces comportements sont étudiés par la théorie des jeux
qu’on peut divisée en deux grandes catégories :
- Jeux contre la nature : considèrent un ou plusieurs participants avec la réalisation
d’un évènement purement aléatoire. Ils ont donné lieu au développement des
probabilités et au concept d’espérance d’utilité. Ce type de jeu s’appelle la théorie
de la décision en incertitude.
- Jeux de société : considèrent les interactions entre différents joueurs. Chacun en
demeurant parfaitement rationnel essaie de deviner ce que l’autre va faire avant de
jouer.
→ Développements majeurs en théorie des jeux par John von Neumann et Oskar
Morgenstern qui en 1944 proposent le premier manuel de théories des jeux. Dans les
années 50, John Forbes Nash soutient sa thèse sur les jeux non coopératifs et crée un
concept : l’équilibre de Nash.
→ Dilemme du prisonnier (énoncé pour la 1ère fois par Albert Tucker) = jeu non coopératif
où les individus prennent leurs décisions en cherchant à maximiser leurs intérêts propres.
Deux prisonniers sont arrêtés, le commissaire demande qui est le fautif. Si l’un accuse
l’autre, l’accusateur est libre et l’accusé prend 10 ans de prison. Si les deux s’accusent
mutuellement, les deux feront 5 ans de prison chacun, et si aucun n’accuse l’autre alors ils
ne feront que 1 an de prison. Chaque joueur a le choix entre deux stratégies. Les deux
prisonniers s’accusent l’un l’autre et obtiennent 5 ans, un tel équilibre est un équilibre de
Nash (=situation de non-regret). Ce choix n’est pas un optimum de Pareto.
→ Hypothèse d’asymétrie d’informations : L’information n’est pas parfaite :
- Anti-sélection ou sélection adverse : entre différentes parties qui doivent procéder à
une transaction, l’une possède des informations privées auxquelles les autres n’ont
pas accès. Article de Georges Akerlof sur le marché des voitures d’occasion = seul le
vendeur connait l’État de sa voiture (pas l’acheteur). L’acheteur hésite à acheter les
voitures en bon état parce que 1) il ne sait pas si elles sont en bon état et 2) elles sont
plus chères. Au final, les voitures en bon état se retirent du marché et seules les
voitures en mauvais état sont proposées. Il existe également une application pour les
assurances développée par Rothschild et Stiglitz avec le principe d’équité actuariel =
dans une compagnie d’assurance il est normal de faire payer chacun selon son
risque. La firme devient faiseuse de prix. L’asymétrie d’informations peut être
surmontée en mettant en place des contrats visant à révéler l’information privée sur
la santé des individus (contrats auto-révélateurs), contrats à prime faible mais
franchise élevée (choisis par les bons risques).
- Le risque ou hasard moral : exemple donné par Stiglitz avec la théorie du salaire
d’efficience = un employeur pour réduire la paresse de ces salariés peut mettre en
place un contrôle des travailleurs ou augmenter les salaires qui inciteront les
salariés. Cependant, si toutes les entreprises le font, le salaire devient supérieur au
salaire d’équilibre = chômage. Cette théorie explique donc le chômage par la
recherche d’efficacité des entreprises qui rémunèrent leurs travailleurs au-dessus du
salaire d’équilibre.
2. La réplique keynésienne
→ Les néokeynésiens : années 70, ils remettent en cause les résultats de l’école de la
synthèse classico-keynésienne : ils privilégient une analyse en termes de déséquilibres. On
parle de théories des déséquilibres. Pour Robert Clower, la loi de Walras ne permet pas de
rendre compte d’une économie avec chômage involontaire. Hypothèse de base des
néokeynésiens = fixité des prix = rationnement sur les marchés.
→ Les principales idées : les prix mettent du temps à s’adapter sur le court terme, ils sont
fixes. L’offre peut devenir supérieure à la demande et inversement, donc rationnement des
marchés. Quand il y a un excès d’offre sur le marché du travail et le marché des B&S, on est
dans le cadre d’un chômage keynésien. S’il y a un excès d’offre sur le marché du travail mais
excès de demande sur le marché des B&S, le chômage est classique. Enfin, quand il y a un
excès de demande sur les deux marchés, on a une inflation contenue.
- Chômage classique : excès d’offre du travail, donc chômage involontaire. Sur le
marché des B&S, les entreprises ne produisent pas assez pour satisfaire la demande,
donc elles n’embauchent pas car cela coute trop cher. Remède = politique de
réduction des coûts des entreprises (stagnation du SMIC ou abaissement des
cotisations sociales).
- Chômage keynésien : excès d’offre sur le marché du travail, chômage involontaire
mais pour une autre raison. Les entreprises font face à une insuffisance de
débouchés (elles n’écoulent pas leur stocks) donc elles réduisent leurs embauches.
Remède = relance de la demande par des politiques budgétaires ou monétaires
pour favoriser la consommation et réduire le chômage.
→ Les néokeynésiens expliquent le chômage par la rigidité des prix et des salaires.
→ La nouvelle macroéconomie keynésienne : années 80 avec Stiglitz, Akerlof, Mankiev.
Objectif = maintenir le programme de recherche keynésien en donnant des fondements
microéconomiques à la macroéconomie. Ils rejettent l’idée d’une concurrence parfaite, ils
essaient de découvrir l’origine de la fixité des prix (par l’imperfection de l’information).
- Les prix : ils sont visqueux car des changements de prix trop fréquents
engendreraient pour l’entreprise de nombreux couts. Argument de Mankiev dans un
article avec ce qu’il appelle les « coûts de menu » qui représentent des coûts de
catalogues (changement d’étiquettes, renégociation des contrats, réimpression des
catalogues). Si les prix ne sont plus flexibles, la monnaie n’est plus neutre donc toute
augmentation de la masse monétaire n’engendre plus directement une
augmentation des prix. Donc les individus disposent de plus de monnaie et peuvent
accroitre leur demande de biens.
- Les salaires : en présence d’asymétrie d’informations, la recherche d’efficacité
conduit l’entreprise à payer les travailleurs au-delà du salaire d’équilibre = chômage
involontaire d’équilibre. Ce chômage n’est pas keynésien, donc politique de relance
inefficace. Solution = flexibilisation des salaires réels.
- Politiques économiques : effet positif de la politique budgétaire de relance sur le
court terme (risque : déficit public). Efficacité de la politique monétaire en présence
de viscosité des prix. En prenant en compte les problèmes d’incohérence
temporelle, ils préconisent l’emploi de règles et le suivi par la BC de règles précises
comme la règle de Taylor (élaborée en 1993 par John Taylor) = taux d’intérêt
pratiqué par la BC dépend de sa cible d’inflation et du niveau d’activité économique
qu’elle souhaite atteindre.
→ En somme, les économistes de la nouvelle macroéconomie montrent que les
déséquilibres peuvent être endogènes au fonctionnement des marchés. Ils utilisent le cadre
de la modélisation microéconomique en concurrence imparfaite qui explique pourquoi les
prix sont fixes. Le chômage provient d’une asymétrie d’informations sur le marché du
travail. Véritable solution = améliorer le fonctionnement de l’économie et des marchés.
3. Autres courants et orientations de l’économie politique
→ Joseph Schumpeter : difficilement rattachable à une école de pensée économique. On
peut résumer son apport autour de 3 idées centrales :
- L’innovation, l’entrepreneur et le banquier : l’entrepreneur sait utiliser l’innovation,
la faire fructifier et prendre les risques nécessaires. Il est motivé par la perspective de
profit. Pour Schumpeter l’entreprise est à l’origine de monopoles temporaires qui
sont indispensables au développement du capitalisme. Le banquier accorde des
crédits à l’entrepreneur, il supporte une partie du risque. L’innovation est facteur de
crise et source de croissance. Quand une innovation apparait, elle en déclenche
d’autres = grappes d’innovations. Après un temps d’adaptation à l’innovation, des
restructurations s’opèrent générant de la croissance et de l’emploi = notion de
destructions créatrices.
- Les cycles de l’économie : Un cycle se définit comme l’alternance de phases
d’expansion et de récessions. Schumpeter donne une explication cohérente des
cycles longs de Kondratieff = environ 1 demi-siècle, conséquence d’innovations
radicales liées aux révolutions industrielles. Au sein de ces cycles longs se
superposent des cycles d’une durée inférieure : cycles de Juglar (6 et 8 ans, liés aux
variations d’investissement) et cycles de Keetchin (3 ans, variations de stocks).
- Le déclin du capitalisme : Schumpeter pense comme Marx que le système capitalise
est transitoire. Le succès du capitalisme repose sur le développement de grandes
entreprises innovatrices, mais au fil du temps cet esprit d’entreprise peut se scléroser
(sentiments d’hostilité des employés). Face à ce déclin, les gouvernements
démocratiques doivent prendre des mesures populaires visant à accroitre la
consommation des plus démunis. Mais, selon Schumpeter, leur seul objectif est de se
faire réélire. Il élabore une théorie de la démocratie.
→ L’institutionnalisme : intégration du contexte historique, juridique ou social dans lequel
l’individu évolue. Ce contexte se traduit dans des institutions qui peuvent se définir comme
l’ensemble des lois/règles/coutumes/organisations.
→ Les premières analyses : l’approche institutionnaliste = idée que beaucoup d’institutions
qui expliquent l’histoire des sociétés n’ont pas été intentionnellement mis en place par les
hommes. Approche de Weblen = emblématique. En étudiant les habitudes de
consommation de la classe aisée, il met en évidence l’effet d’ostentation dans sa théorie de
la classe de loisirs. Contrairement aux consommateurs rationnels, les consommateurs aisés
préfèrent la consommation de biens inutiles aux prix élevés pour montrer sa richesse et sa
position sociale. Consommation = appartenance à une classe sociale. On parle de paradoxe
de Weblen qui définit les institutions comme des habitudes mentales prédominantes. Elles
sont issues d’un processus non-intentionnel, origine = sélection naturelle.
→ La nouvelle économie institutionnelle : Galbret analyse le capitalisme américain et sa
société de consommation contrairement aux consommateurs qui sont mis sur le devant de
la scène des néoclassiques = il montre l’importance des grandes entreprises qui peuvent
contrôler les habitudes de consommation (publicité). Objectif = analyser le rôle des
institutions dans l’économie et s’interroger sur leur efficacité. Ronald Cose (un des pères
fondateurs) met en évidence l’importance des coûts de transactions des entreprises.
→ Quelques autres courants dérivés :
- L’école de la régulation : Robert Boyer, André Orléans ou Michel Aglietta =
s’intéressent aux facteurs sociaux et institutionnels à l’origine des crises + aux
configurations qui permettent d’en sortir pour déterminer le mode de régulation du
capitalisme. Termes centraux : inégalité, crises économiques et financières. Les
applications à la finance contribuent à expliquer les comportements moutonniers et
mimétiques des individus qui vendent et achètent en suivant ce que les autres font.
Formation de bulles spéculatives qui conduisent à des krachs boursiers.
- L’école des conventions : Jean Pierre Dupuis, Olivier Favrau ou François Duvernet =
comprendre comment les individus mettent en place des conventions (routines,
coutumes, habitudes) qui déterminent leurs comportements dans un univers
incertain, avec une rationalité limitée.
- L’économie expérimentale : Smith, Daniel Capman = à la frontière entre
l’économie/sociologie/psychologie, essaie de mieux cerner le comportement des
individus à travers des expérimentations. Objectif : tester la validité des théories
économiques existantes et trouver de nouvelles pistes de réflexion.
→ Exemple d’expérimentation : le jeu de l’ultimatum = expérience avec 100 personnes à qui
on demande de se mettre en binôme (A et B). On propose 100€ à la personne A, elle doit
déterminer la partie de la somme qu’elle garde pour elle et quelle partie elle donne à B. La
personne B peut accepter ou refuser la somme, si elle accepte elle repart avec la somme
attribuée, par contre si elle refuse personne n’a rien. Les études montrent qu’en général A
garde 60€ et donne 40€ à B. Un individu purement rationnel devra garder 99€ pour lui et si B
est rationnel il préfère toujours gagner 1€ que rien. La rationalité des agents intègre des
paramètres avec une dimension sociale et psychologique.
→ Conclu : Les fondements de l’économie politique repose sur les apports des libéraux,
classiques et néoclassiques, keynésiens, marxistes et institutionnalistes. Le devant de la
scène est occupé par la controverse entre libéraux et keynésiens. L’analyse libérale a été
remise en question par la crise de 2008. La multiplicité des courants rend difficile la
construction d’une théorie unificatrice.
III. L’économie politique et la crise économique de 2008
1. Les marchés des capitaux
→ Marché des changes : également appelé le forex (foreign exchange). Les devises
convertibles s’y échangent les unes contre les autres selon le taux de change. Les
opérateurs passent leurs achats et ventes depuis les salles de marché connectées par des
ordinateurs. Les transactions s’effectuent 24h/24 en raison de la propagation des changes
flottants. Marché dominé par les grandes banques internationales, multinationales,
centrales et institutions internationales (banque mondiale, FMI et OCDE) ainsi que les fonds
d’investissement. Les devises servent à importer ou exporter des biens et services, au
tourisme, à investir des capitaux ou à spéculer.
→ Marché monétaire : institutions financières et grandes entreprises placent leurs avoirs
ou empruntent à CT ou MT, moyennant une rémunération (taux d’intérêt). Ce taux
représente le prix de la renonciation à la consommation présente et à la liquidité.
→ Marché interbancaire : réservé aux banques centrales, banques et quelques
établissements (Trésor, Caisse des dépôts et consignations).
- La Banque Centrale balise le marché interbancaire = taux pilotes par lesquels
passent sa politique monétaire. C’est sur ce marché que se détermine le taux auquel
les institutions financières empruntent auprès de la BC. Le taux de refinancement
d’une banque auprès de la BC impacte directement le taux des ménages et
entreprises.
- Opérations d’open market = la BC accorde des prêts aux banques sur des délais très
courts via des appels d’offre à des taux directeurs (taux refit=la BC demande aux
banques ce qu’elles veulent emprunter et elle indique ensuite son taux) qu’elle
détermine.
- À côté de ça, la BC fixe les deux taux qui encadrent le marché interbancaire qui
constituent les facilités permanentes (permettent aux banques d’obtenir des
liquidités = facilité de prêt marginal pour les banques qui sont déficitaires, pour les
banques excédentaires elles leur permettent de déposer leur excédent (facilité de
dépôts)). Facilité de prêt marginal = financement le plus couteux pour une banque,
c’est le taux plafond du marché interbancaire. Les facilités de dépôts rémunèrent les
banques qui ont des excédents à placer (= plus bas qu’une banque peut obtenir) =
taux plancher. On a l’inégalité suivante : taux de facilités de dépôts < taux refit <
taux des facilités de prêts.
- Les banques peuvent intervenir entre elles sur le marché interbancaire. Celles en
excédent de trésorerie prêtent à celles en déficit. Indice EONIA en Zone Euro =
moyenne des taux pratiqués par les banques dans la journée. Pour les prêts le plus
longs on a l’EURIBOR 1 mois jusqu’à l’EURIBOR 12 mois.
→ Marché des titres de créances négociables : crée en 1986, ouvert à tous les agents. Les
prêts et les emprunts doivent porter sur un montant minimum de 150 000 euros. Les titres
de créances négociables sont des titres émis au gré de l’émetteur, négociables sur un
marché réglementé, qui représentent chacun un droit de créance pour une durée
déterminée.
- Bons du Trésor négociables émis par le Trésor Public.
- Certificats de dépôts négociables émis par les établissements de crédits.
- Billets de Trésorerie émis par des agents non financiers (entreprises qui ont au moins
2 ans d’existence, notées par des agences de notation).
- Bons à moyen terme négociables émis par les banques.
→ Marché financier :
→ Principaux produits échangés : nous en étudierons 2 principaux =
- Action : titre négociable représentatif d’un droit de propriété sur une fraction de
capital social de l’entreprise émettrice. Rendement incertain qui dépend des
résultats de l’entreprise. Calculé à partir du dividende (bénéfices que le conseil
d’administration distribue aux actionnaires). Si le cours monte, plus-value liée à la
revente de l’action. Si le cours chute, il peut y avoir une perte si on la revend.
Actionnaires = droit de vote lors des assemblées générales.
- Obligation : titre de créance négociable, représentatif d’une créance du souscripteur
(investisseur) sur l’émetteur (emprunteur). Emprunt remboursé à échéances de
l’obligation. Principaux émetteurs : institutions financières, État et grandes
entreprises (à savoir que les PME obtiennent davantage des fonds en empruntant
directement à une banque plutôt qu’en émettant des obligations. Le rendement
d’une obligation est déterminé lors de son acquisition. Il peut donner lieu au
paiement d’un coupon par l’emprunteur.
→ Trois agences de notations notent les émetteurs : Standard & Poor’s, Moody’s et Fitch
qui représentent 90% des marchés. Plus la note est faible et plus la rémunération du titre est
élevée pour compenser le risque de non remboursement de l’emprunteur.
→ Marché financier et financement de l’économie : deux compartiments = marché
primaire (vente des titres nouvellement émis, lorsqu’une entreprise entre en bourse) et
marché secondaire. Le marché primaire contribue au financement de l’économie. Le marché
secondaire (Bourse) est le marché de l’occasion où on peut négocier des titres déjà émis.
→ Principales bourses :
- New York, NYSE depuis 1792, implantée à Wall Street, 25 000 milliards de dollars.
- NASDAQ de NY, 1979, 7 000 milliards de dollar grâce à Google, Amazon, Apple.
- London Stock Exchange à Londres, 1776, 6 000 milliards de dollars.
- Japan Exchange Groupe à Tokyo, 1878, 4 500 milliards de dollars.
- Bourse de Shangai, plus importante que celle de Hong Kong.
- EURONEXT = fusion des bourses de Paris, Bruxelles, Amsterdam et Lisbonne.
→ Marchés dérivés : les produits dérivés sont des actifs financiers dont la valeur dérive d’un
actif appelé le sous-jacent. Le sous-jacent peut prendre diverses formes : taux d’intérêts,
matières premières, emprunts d’États, devises. 2 types de produits dérivés :
- Contrats à terme : engagement ferme et définitif d’acheter ou de vendre une
quantité déterminée à une échéance déterminée un actif (sous-jacent) à un prix fixé
à l’avance. Ex : Une entreprise d’aviation veut s’assurer contre le risque
d’augmentation du carburant. Elle peut souscrire un contrat à terme en négociant
aujourd’hui le prix du carburant et le nombre de barils de carburant qu’elle achètera
dans 6 mois. La transaction peut s’effectuer sur un marché organisé avec des
contrats standardisés et la présence d’une chambre de compensation qui sécurise le
bon déroulement = ces contrats s’appellent des futurs. La négociation peut
également s’effectuer sur des marchés de gré à gré (OTC) = pas réglementés, les
contrats sont des forwards. Le risque de défaillance d’une partie est grand.
- Options : c’est un droit d’acheter ou de vendre une quantité déterminée d’un actif
(sous-jacent) à un prix fixé à l’avance qui est le prix d’exercice pour une échéance
déterminée (qui s’appelle la date d’exercice). La prime est le prix de l’option = prix
payé par l’acheteur de l’option aux termes de la négociation. À l’échéance, si le cours
comptant est plus avantageux que le prix d’exercice, on n’exerce pas l’option mais si
le prix de l’option est plus avantageux alors on l’exerce et on gagne la différence.
→ C’est un instrument de couverture mais ils sont devenus des produits extrêmement
risqués. Les 4/5 des opérations s’effectuent sur des marchés de gré à gré où la bonne fin des
opérations n’est pas garantie. Par ailleurs, ils deviennent des instruments de spéculation
pure = ils offrent la possibilité d’effectuer un effet de levier important. On peut acheter des
actifs avec un minimum de fonds en s’endettant. Ils peuvent donc devenir des spéculations
à la baisse sur l’actif sous-jacent.
2. Les acteurs de la finance mondiale
→ Les émetteurs de titres : agents économiques privés ou publics qui recherchent des
financements pour réaliser des investissements. Deux catégories :
→ Les entreprises : deux principaux modes de financement
- Capitaux propres : ressources d’une entreprise, propriété des actionnaires. Ils
proviennent de la part de bénéfice de l’entreprise qui sont réinvestis ou de l’apport
de nouveaux fonds (=qui proviennent de l’émission d’actions nouvelles pour
l’entreprise). C’est dans ce cadre qu’une entreprise fait son entrée en bourse ou
accroit son capital = émission de nouvelles actions sur le marché des capitaux.
Toutes les actions ne sont pas forcément cotées en Bourse = les entreprises non
cotées en bourse sont trop petites ou trop jeunes, elles ne veulent pas subir toutes
les contraintes. Elles peuvent trouver des fonds par le biais de ce qu’on appelle le
private equity ou capital investissement. Des investisseurs procurent des fonds à
l’entreprise, rentrent dans le capital de l’entreprise et deviennent propriétaires
d’actions sans que ces actions soient cotées.
- Emprunts : auprès d’une institution financière (banque ou institution spécialisée) ou
emprunts sur le marché des capitaux avec l’aide des banques. Une entreprise qui
souhaite emprunter à CT ou MT peut émettre des titres sur le marché des titres de
créances négociables. Les entreprises non financières y émettent des billets de
Trésorerie et les sociétés financières émettent des certificats de dépôts. Sur le LT,
l’entreprise émet des obligations.
→ Les administrations publiques : elles ne disposent pas de capital et ne peuvent donc pas
émettre d’actions. Principale source de financement : prélèvements obligatoires (impôts,
cotisations sociales et taxes fiscales) + partie importante des ressources dans les emprunts
qu’elles émettent. On trouve les collectivités locales et l’État. Collectivités locales =
emprunts bancaires ou émission de titres obligatoires. État = agence France Trésor qui gère
et organise la gestion de la dette, emprunt pour financer la dette et le déficit budgétaire.
Formes d’emprunts :
- Sur le CT et MT : Bons du Trésor émis sur le marché des titres de créances
négociables = BTAN (bons du Trésor à intérêt annuelle) émis entre 2 et 5 ans et les
BTF (bons du Trésor à taux fixes) avec une durée inférieure à 1 an.
- Sur le LT : OAT (obligations assimilables au Trésor) durée de 7 à 50 ans.
Les emprunts de l’État français sont recherchés parce qu’ils présentent peu de risque.
Depuis 1973, l’État ne peut plus faire financer son déficit par la BC mais sa dette a progressé
drastiquement avec l’émission de ces emprunts. Faibles taux d’intérêt = favorisent le recours
à cet endettement mais risque d’une dépendance accrue vis-à-vis des marchés des capitaux.
→ Les investisseurs : Les marchés des capitaux sont dominés par les investisseurs
institutionnels (les zinzins) = grands investisseurs. Ce sont des organismes collecteurs de
l’épargne qui placent massivement leurs fonds sur les marchés.
→ Les OPCVM (Organisme de placement collectif en valeur mobilière) : crée dans les
années 80 à l’intention des particuliers pour favoriser leur accès aux marchés de valeurs
mobilières. Ils collectent l’épargnent qu’ils placent en action et obligation. 2 types :
- SICAV (sociétés d’investissement à capital variable)
- FCP (fonds communs de placement)
Les OCPVM monétaires regroupent des titres du marché monétaire, les actions regroupent
des actions, les obligations sont des ensembles d’obligations, les diversifiées regroupent des
titres de différentes origines et enfin les garanties permettent d’éviter des pertes. Deux
avantages : gestion du portefeuille par des spécialistes (par rapport à des actifs financiers
classiques) qui améliore le couple rendements-risques + diversification du portefeuille =
panier de titres = réduction du risque au cas où l’émetteur fait faillite.
→ Les fonds souverains : créés dans les années 50, fonds d’investissement publics qui
répondent à 3 critères (selon le FMI) = contrôlés par un État + gérés dans une optique de
long terme + leur stratégie répond à des objectifs macroéconomiques précis (garantie des
pensions retraités, diversification des actifs, soutien du budget public). Ils permettent aux
gouvernements d’investir leur excédent venant de leurs importantes réserves de change ou
de leurs revenus pétroliers. Rôle stratégique sur l’économie mondiale : avec la crise des sub
primes, ils ont largement aidé les banques et les États (risque : accroitre d’autant leur
puissance). Objectifs actuels = prise de contrôle d’entreprises stratégiques.
→ Les fonds de pension : organismes de placements collectifs. Deux rôles : gestion de
l’épargne salariale et gestion en capitalisation des retraites.
- Épargne salariale : système d’épargne mis en place par certaines entreprises qui
permet au salarié de recevoir une prime liée à sa performance ou à ses bénéfices.
Sommes perçues directement ou mises sur un plan d’épargne salariale.
- Retraites : système par capitalisation qui permet aux personnes qui ont cotisé de
percevoir une retraite. Ce sont principalement les fonds de pension qui gèrent cette
épargne + système de retraite par répartition où les cotisations prélevées
permettent de financer les retraites des personnes ayant cotisé.
Aux EU, les fonds de pension gèrent une retraite par capitalisation = expansion considérable.
Leurs poids financiers les conduit à s’impliquer dans la gestion des entreprises et renforce le
poids des actionnaires = gouvernement d’entreprises qui peut conduire les entreprises à
privilégier la recherche de gains sur le CT = conséquences en termes de licenciements. Par
ailleurs, ces fonds font dépendre les retraites des cours des actions sur les marchés
financiers. Crise des sub primes = ruine de nombreux retraités américains.
→ Les fonds de couverture (Hedge Fund) : 1949, peu ou pas réglementés, peu transparents
et souvent implantés dans les paradis fiscaux. Objectif = recherche de performance,
rendement le plus élevé par d’importants risques. Utilisation de règles de gestion
alternatives visant à spéculer fortement à la hausse comme à la baisse + utilisation de
différentes techniques risquées (produits dérivés, effet levier, vente à découvert d’actifs
(=on vend des titres que l’on ne détient pas encore en espérant les racheter moins chers) +
détenir des actifs particuliers (=matières premières ou dérivés climatiques)). Problèmes :
manque de transparence, intenses spéculations qui peuvent aggraver les crises financières,
instabilité des marchés financiers.
3. Les banques
→ Présentation générale :
→ Métier de banquier distingué en 3 grands types :
- Prestation de services pour le compte de tiers : gestion et mise à disposition de
moyens de paiements, activités pour lesquelles les banques ont le monopole. Elles
tiennent les comptes dépôts et mettent à disposition des supports de paiements
(chèques, cartes bleues). De plus, opérations de change = gérer des actifs pour le
compte de tiers (gestion collective via les OCPVM ou gestion individuelle (de
patrimoine)).
- Intermédiation financière : intermédiaire entre les agents en capacité de
financement et ceux en besoin de financement. Elles collectent des fonds sur le CT,
MT et LT pour prêter à d’autres.
- Intermédiation de marché : aller sur différents compartiments des marchés de
capitaux pour son propre compte ou sa clientèle. De plus, elles diversifient leurs
activités (non bancaires : assurance, téléphonie).
→ Types de banques :
- Banques pour particuliers : banques de détails qui s’adressent à une clientèle de
ménages ou PME. Elles gèrent leurs comptes et proposent des produits d’épargne
adaptés. Elles cherchent à fidéliser une clientèle importante en proposant une
gamme de service étendue. À côté, banques coopératives dont la mission est très
proche : gérées par leur propres sociétaires et l’ensemble de leurs décisions sont
prises par leurs membres en assemblée générale. Enfin, apparition des banques en
ligne = services identiques.
- Banque d’investissement et banques d’affaires : clientèle = grandes entreprises.
Elles ne peuvent pas prendre de dépôts ou proposer des crédits, spécialisées en
conseil stratégique et financier des entreprises. Cela va de la fusion-acquisition à
l’introduction en bourse. Spécialisées dans l’achat et la revente de titres sur les
marchés de capitaux.
→ Rôle des banques dans le financement de l’économie :
→ Différents types de financement : financement interne ou autofinancement = l’épargne
brute finance l’investissement des entreprises. Financement externe = recours aux
institutions financières ou marché, rendu possible par la coexistence d’agents en capacité de
financement (ménages) et ceux en besoin de financement (administrations publiques et
entreprises). Objectif du système monétaire et financier = mettre en correspondance les
capacités de financement et les besoins de financement = via la finance directe (=marchés
des capitaux) ou finance indirecte (=institutions financières en octroyant des crédits).
→ Évolutions historiques :
- Jusque dans les années 80, le financement de l’économie se fait par le financement
indirect à travers le crédit bancaire = économie d’endettement. Il reposait sur
l’activité de transformation des banques (=utiliser des ressources courtes comme la
collecte d’épargne sur CT ou MT pour financer des emplois longs comme les prêts à
MT ou LT). La différence de taux d’intérêt entre les prêts et les placements qu’elles
proposent s’appelle la marge d’intermédiation. La transformation traduit deux
inadéquations = des échéances (les ménages préfèrent prêter sur le CT mais
beaucoup de projet d’investissement nécessitent des fonds sur le LT) et des risques
(les ménages préfèrent des placements peu risqués contrairement aux entreprises).
- À partir des années 80, essor du financement direct via les marchés de capitaux suite
au processus des trois D : déréglementation, décloisonnement et désintermédiation
qui touche l’ensemble des pays industrialisés. Mutation du système monétaire et
financier qui devient une économie de marchés de capitaux. En France, 3 facteurs :
modernisation du cadre réglementaire (nouveaux marchés accessibles aux
entreprises) + multiplication des innovations financières + établissement de
nouvelles lois (crédits entrent en concurrence les uns avec les autres).
→ Conséquence : les banques distribuent moins de crédits que dans le passé mais
développent leurs interventions sur le marché des capitaux = acteur majeur du financement.
→ Les banques et la création monétaire :
→ Masse monétaire = ensemble des moyens de paiement mis à la disposition des agents
non financiers pour effectuer des transactions dans un espace donné. Ensemble des actifs
liquides susceptibles d’être convertis facilement en monnaie sans risque de perte de capital.
Agrégats monétaires =
- M1 : encaisses immédiatement disponibles (monnaie au sens strict, billets pièces et
dépôts, 85% des moyens de paiement)
- M2 : agrégat intermédiaire (M1 + (M2 – M1)). Ce sous agrégat rassemble les actifs
dont la valeur est stable qui ne peuvent servir directement à effectuer des
paiements. Dépôts inférieurs à 2 ans = remboursables avec des préavis inférieurs à 3
mois (livret A, livret jeune…).
- M3 : masse monétaire au sens large, sert de base politique monétaire (M3 = M2 +
(M3 – M2)). Ce sous agrégat regroupe les actifs financiers liquides émis par les
institutions monétaires (titres de CT et MT).
Les actions, obligations à LT et l’épargne contractuelle n’appartiennent pas à la MM.
→ Comment les banques créent-elles de la monnaie ? : Quand les banques accordent un
crédit, elles créent de la monnaie tant qu’elles ne prêtent pas à partir de ses ressources.
L’opération consiste en une double inscription à l’actif (=détient une créance de son client)
et au passif (=crédite le compte de son client de la somme demandée) de son bilan. Elle peut
créer de la monnaie lorsqu’elle autorise un compte débiteur ou quand elle achète un actif
réel ou financier.
→ Contraintes : lorsque la banque A créé de la monnaie au profit de monsieur X, monsieur X
ne va pas laisser son argent sur son compte mais a de fortes chances de le donner à
monsieur Y pour l’achat d’une maison. Or, monsieur Y est dans la banque B donc la banque
A va devoir de l’argent à la banque B. Tous les jours les banques font le bilan de l’ensemble
des opérations effectuées entre elles et ce qu’elles se doivent = opération de
compensation. Cela permet d’éviter de multiples transferts de monnaies entre les banques
et de ramener à un solde unique leurs obligations mutuelles. Une banque peut se retrouver
en cas de besoin, on dit qu’elles doivent se refinancer auprès de la banque centrale ou
d’autres banques. Cette monnaie s’appelle la monnaie banque centrale (elle n’appartient
pas à la masse monétaire).
→ En somme les banques ne peuvent créer de la monnaie que si elles sont sûres de pouvoir
se procurer de la monnaie centrale. On appelle liquidités bancaires la somme des avoirs
d’une banque en monnaie centrale. Plus la liquidité est faible moins elle crée de la monnaie.
→ Principaux risques bancaires : 3 grands types de risques.
- Risque de contrepartie ou de signature : risque de défaillance de l’emprunteur qui
ne peut pas rembourser. Pour le limiter, les banques doivent diversifier les prêts,
examiner la qualité des dossiers et ne pas prêter trop par rapport à leurs fonds
propres (capitaux dont elle dispose).
- Risque de transformation ou d’illiquidité : comportement des banques qui
immobilisent des ressources courtes pour des emplois longs. En cas de retrait massif
des déposants elles peuvent ne pas pouvoir faire face à leurs engagements. Pour
empêcher cela, il faut une assurance sur les dépôts (garantie au déposant un certain
plafond de remboursement) + la BC joue son rôle de prêteur en dernier ressort.
- Risques de marché : relatifs aux opérations effectuées par les établissements de
crédits sur les marchés des capitaux. Ils sont imputables à l’instabilité des paramètres
de marché = lorsque les taux varient on parle de risques de taux, lorsque les cours
varient on parle de risques de prix et lorsque le cours des devises varie on parle de
risques de changes. Pour réduire ces risques on contraint les établissements de
crédits à constituer des fonds propres de plus en plus importants.
4. La Banque Centrale Européenne (BCE)
→ Présentation : système européen des banques centrales composée de la BCE et des
banques centrales nationales. La BCE décide de la politique monétaire que les banques
centrales nationales devront appliquer. Le capital de la BCE est détenu par les banques
centrales nationales et des banques centrales hors zone euro. 3 organes de décision :
- Conseil des Gouverneurs de la BCE : oriente et prend les décisions de la politique
monétaire.
- Directoire de la BCE : met en œuvre la politique monétaire, il donne les instructions
aux banques centrales nationales.
- Conseil général de la BCE : associer les États européens ne participant pas à l’union
économique et monétaire aux prises de décisions de la zone euro.
→ Fonctions traditionnelles de la BCE :
- Fonctions liées à la politique monétaire : objectif = stabilité des prix. La BCE n’a pas
de politique de change, une banque centrale peut donc orienter le taux de change
de la monnaie en allant sur le marché des changes en utilisant ses réserves
monétaires ou par la fixation des taux d’intérêt directeurs. L’Euro est en change
flottant et aucune politique de change n’est défini à l’échelon européen.
- Fonctions liées à la monnaie et aux systèmes de paiement : émission et gestion de
la monnaie fiduciaire (banques nationales sous l’égide de la BCE qui émettent les
pièces et les billets à disposition des banques) + banque des banques (chaque
banque a un compte auprès de sa banque centrale nationale par lequel passe les
règlements entre les banques et les opérations avec la banque centrale elle-même) +
comptes du Trésor Public (lui permet d’effectuer des opérations avec d’autres
banques) + bon fonctionnement des systèmes de paiement (système target 2).
- Stabilité du système bancaire et financier : surveiller les établissements de crédits
(contrôle l’accès à la profession bancaire + l’activité des banques via une
réglementation stricte mise en place et des ratio de plus en plus contraignants que
les banques doivent respecter) + préserver la stabilité et la sécurité du système
financier (prêteur en dernier ressort = en cas de crise la BC fournit la liquidité
nécessaire pour éviter la faillite. Par le biais de l’effet domino, la faillite peut
entrainer d’autres faillites donc l’objectif est d’éviter une crise systémique).
→ La BCE et la politique monétaire : De 1945 à 1993, c’est l’État qui décide de la politique
monétaire (objectifs : atteindre le plein emploi, la croissance, résorber l’inflation et
maintenir l’équilibre extérieur). Utilisation de politiques budgétaires et de politiques
monétaires (accompagnement de la politique budgétaire). Depuis 1993, la politique
monétaire contraint la politique budgétaire = la BCE fixe la politique monétaire qui doit
stabiliser l’inflation et les gouvernements doivent adapter leurs politiques budgétaires avec
3 objectifs : emploi, croissance, échanges extérieurs.
→ Les mandats des membres de la BCE sont révocables par les gouvernements donc
l’indépendance de la BCE a été restaurée suite aux idées de la nouvelle économie classique
(=éliminer les risques d’incohérences temporelles + réduire risques d’inflation).
Hiérarchisation des objectifs : stabilité des prix (lorsque l’inflation est environ de 2%) puis
soutient de l’activité éco.
→ Modes d’actions :
- Chaque banque est obligée de maintenir sur son compte à la BC une somme non
rémunérée, ce sont les réserves obligatoires (calculées en % de leurs cours de
dépôts selon un taux de réserves obligatoires fixé par la BCE). En imposant cela aux
banques, elles ont de moins de liquidité donc elles réduisent les crédits.
- Fixation du taux directeur et encadrement du marché par les facilités permanentes.
Ce sont des taux de CT. Si on prend une politique monétaire expansive = la BCE
réduit son taux d’intérêt directeur = sur le marché monétaire, le refinancement des
banques devient moins couteux, elles peuvent proposer des crédits à des taux plus
faibles donc hausse des crédits, la demande augmente, relance par la demande. Sur
le marché financier = baisse des taux de LT, augmentation du prix de certains actifs
(relation inverse entre l’évolution du taux d’intérêt et le cours des obligations) donc
la baisse des taux peut rendre la consommation plus attractive que l’épargne.
L’économie toute entière bénéficie de la baisse des taux. Si le taux d’intérêt est faible, les
capitaux attirés par un rendement important préfèrent d’autres places. En change flexible,
cela peut conduire à une baisse du taux de change = facilite les exportations et réduit les
importations. Risque : inflation.
5. Les causes de la crise économique de 2008
→ Facteurs microéconomiques : le système bancaire est le premier responsable de cette
crise = prêts sans limite, sans regarder la solvabilité des emprunteurs. 3 techniques
bancaires ont eu un rôle fondamental dans la crise :
- Développement des crédits sub primes : permettent à des emprunteurs peu
solvables et mal notés d’emprunter afin d’effectuer un achat immobilier. Ces clients
peu aisés doivent payer des taux d’intérêt plus élevés. Deux conditions : taux
d’intérêt bas et stables + appréciation régulière de l’immobilier. Face à un contexte
morose (11 septembre 2001, guerre en Irak), le gouvernement américain essaie de
faciliter l’accession à la propriété des classes les moins aisées. La FED fixe des taux
directeurs à des niveaux bas. À partir de 2004, la FED remonte son taux d’intérêt.
Allan Greenspan a la confiance de tous : il a géré au mieux le krach d’octobre 1987 et
stabilisé l’inflation. Sa décision d’augmenter le taux d’intérêt contribue au
retournement de situation à l’origine de la crise de 2008.
- La titrisation : les établissements de crédits transforment par l’entremise d’un tiers
des blocs de créances en instruments négociables sur les marchés de capitaux. Un
établissement regroupe des créances homogènes sous forme de blocs + il les vend à
un fonds commun de titrisation (véhicule de titrisation) qui rachète les blocs de
créance + le fonds commun divise ces blocs en parts qu’il revend sur les marchés
financiers. Avantages : une banque peut continuer à prêter en respectant ses ratios
prudentiels + permet de sortir de son bilan un certain nombre de ses créances et de
les revendre + transfert du risque de la banque vers les investisseurs sur les marchés.
Cependant, création de produits complexes (absence de visibilité sur le risque réel).
Ne supportant plus le risque les banques sont conduites à prêter encore plus en
faisant moins attention à la solvabilité des emprunteurs.
- Les notations : les produits vendus font l’objet de notation par des agences
(standards & poor’s, moody’s, fitch). Elles doivent évaluer la capacité des émetteurs
de titres à honorer leurs engagements. Leurs notes fixent les taux d’intérêt que les
entreprises notées ou les États devront verser pour obtenir des prêts. En pratique,
ces agences sont des entreprises privées qui sont rémunérées par les entreprises
qu’elles notent donc indulgentes.
→ Facteurs macroéconomiques :
- La globalisation financière : mise en place au niveau mondial d’un marché unifié du
capital. Elle s’est réalisée sous l’impulsion des trois D : la déréglementation
(=assouplissement des règles sur les transactions financières = diminution du
contrôle des changes), le décloisonnement (=multiplication de banques universelles
qui prennent une dimension internationale) et la désintermédiation
(=développement de l’accès direct aux marchés de capitaux = passage d’une
économie d’endettement à une économie de marché de capitaux). Avantages de la
globalisation financière : réduction du coût de l’intermédiation financière avec la
concurrence accrue + élargissement des possibilités de placements et de prêts +
réduction du risque via la diversification des placements. Cependant elle a également
permis un développement de la sphère financière dans des proportions
disproportionnées = on parle d’hypertrophie des marchés de capitaux =
déconnectés de la sphère réelle, ils spéculent. Apparition de bulles sur les actifs.
- Sphère réelle : le capitalisme financier est devenu le système économique qui
prévaut. Nouveaux principes de la gestion de l’entreprise = gouvernance
d’entreprises (partage de la VA au profit des actionnaires). Les entreprises
privilégient les investissements sur le CT, affectant leur productivité et leur
croissance. Peu d’augmentation des rémunérations voire licenciements.
Conséquence : augmentation des inégalités. Les pays développés se sont alors
tournés vers un modèle de croissance reposant sur l’endettement = la globalisation
financière a favorisé des transferts d’épargne.
6. Le déroulement de la crise de 2008
→ Phases de la crise :
- Prémices : Été 2007 = faillite de plusieurs fonds d’investissement = crise de défiance
sans précédent entre les établissements de crédits. Les banques préfèrent garder
leur liquidité (par peur de ne pas être remboursées) = crise de liquidités des
banques. Le marché interbancaire est totalement bloqué. De nombreuses banques
doivent leur survie aux BC (FED ou BCE). Différents établissements se font malgré
tout racheter (ou faillite), organisations de plans de sauvetage par le gouvernement
(pour des organismes comme Freddy Mac = organisme privé de l’État spécialisé dans
les sub primes ou des leaders mondiaux de l’assurance).
- Déclenchement de la crise : Faillite de la banque d’investissement Lehman Brother
le 15 septembre 2008. La banque n’est pas sauvée (les autorités américaines font
d’elle un exemple), comme les particuliers ne sont pas touchés elles pensent que
l’impact sera faible. Henri Paulson, secrétaire d’État au Trésor américain contribue à
cette prise de décision, or il a été PDF de Goldman Sacks (principal concurrent de
Lehman Brother). Conséquences : la globalisation financière entraine une rapide
transmission de la crise sur les différents marchés de capitaux, induisant des effets
de reports des investisseurs et des faillites en chaine. Tous les marchés impactés.
- Transmission de la crise : Transmise sur le secteur réel des pays développés = les
banques réduisent leurs crédits, donc le cout du crédit augmente, les entreprises ont
des anticipations défavorables et diminuent leurs investissements, les ménages ont
vu la valeur de leurs actifs se réduire, ils obtiennent difficilement des prêts donc
consomment moins et augmentent leur épargne. La crise atteint les économies des
pays émergents de 4 façons : chute de la demande mondiale = recul brutal du
commerce international + pays exportateurs subissent l’évolution de la valeur de
leurs produits = crises alimentaires + les flux de capitaux vers ces pays se réduisent +
les banques réduisent leur exposition et diminuent leurs prêts.
- Crise des dettes souveraines européennes : L’Europe se remet difficilement de la
crise. La crise des sub prime partie des EU se transforme en une crise des dettes
souveraines européennes en Europe (paroxysme entre 2010 et 2013). Elle touche les
pays du Sud fortement (Grèce, Portugal, Italie, Espagne) = leurs dettes publiques
progressent rapidement au risque de devenir insoutenable = défiance des marchés
financiers donc augmentation des taux d’emprunts des pays endettés.
→ La réponse à la crise :
→ Action des banques centrales :
- Politiques de refinancement : les BC se sont substituées au marché interbancaire en
vertu de leurs rôles traditionnels de prêteurs en dernier ressort = elles offrent aux
banques toute la liquidité dont elles ont besoin. Offrir de la liquidité illimitée à taux
fixe + allonge la durée des refinancements.
- Baisse des taux d’intérêts : 0 (FED) ou proche de 0 (BCE). Elles réduisent le
refinancement des banques qui devient moins couteux. Cependant, politique
insuffisante pour relancer l’économie en situation de trappes à pauvreté.
- Politiques monétaires non conventionnelles : telle que l’assouplissement quantitatif
= achat massif de titres inhabituels par les BC. Elle pourrait acheter directement les
titres de dettes publiques mais cela peut se faire également de manière indirecte. La
BCE n’a pas le droit d’acheter des titres de dettes publiques = elle a dû utiliser des
politiques comparables à travers des achats indirects = détente des taux d’intérêt sur
le long terme, reprise du crédit. Problème : forte création monétaire. La FED a mis en
place en 2017 une politique de resserrement quantitatif = remontée des taux
d’intérêt, dégonflement du bilan de la BC, contraction monétaire.
→ Action de l’État :
- Soutien des banques : Les États ont contribué au sauvetage du secteur bancaire en
nationalisant, recapitalisant ou en mettant en place des garanties publiques
(assurances prêts). Question centrale : arbitrage entre la préservation des intérêts
des actionnaires, des créanciers et du contribuable.
- Soutien de l’activité économique : mises en place de politiques budgétaires de
relance (on a parlé du retour de Keynes), elles deviennent efficaces combinées à la
politique monétaire du taux 0 (cela évite l’effet d’éviction). Toutefois, projets
d’infrastructures mettent du temps à se mettre en place + certaines mesures trop
ciblées risquent de déplacer la demande d’un secteur vers un autre + ces mesures
ont aggravé les déficits publics (=dettes souveraines européennes).
- Réduction des déficits : politiques de dévaluation internes mises en place en zone
euro = série de mesures concernant le marché du travail, la production ou la fiscalité
pour accroitre la compétitivité des pays dans un régime de change fixe. Plan
d’austérité en Grèce = baisse des salaires, hausse des prélèvements obligatoires,
recul de l’âge de la retraite, diminution des pensions…
→ Action des organismes internationaux :
- Le G20 : crée en 1999, réunit les 20 économies mondiales (90% du PIB mondial). Les
États ont essayé de se concerter pour trouver les réformes du système financier et
bancaire pour éviter de nouvelles crises. Pôles de réflexion = renforcement de la
surveillance, régulation des marchés de capitaux, recherche de nouvelles règles des
banques et lutte accrue contre les paradis fiscaux.
- Le Fonds Monétaire International (FMI) : crée en 1944 lors de Bretton Woods. Il a
renforcé sa présence en Europe lors des dettes souveraines + intervention auprès des
pays émergents fragilisés par la crise de 2008. Mise en place d’une troïka associant la
commission européenne, la BCE et le FMI.
- Les banques des Règlements Internationaux (BRI) : crée en 1930 en Suisse.
Actionnaires = BC. Ses actions ont pour objet une meilleure coopération entre les BC
pour assurer la stabilité financière internationale.
- Comité du Bal : crée par les pays du G10 en 1974, mis en place par la BRI, impose aux
établissements de crédits des règles = mis en place du ratio cook qui impose aux
banques 8% de fonds propres. Accords de bal 2 et bal 3 = renforcer la solidité
financière avec de nouveaux ratios = renforcer les exigences en termes de fonds
propres des banques.
7. Les conséquences de la crise en zone euro
→ Une crise encore présente en zone euro : crise de 2008 = ralentissement de l’activité éco,
aggravation du chômage, augmentation de la dette publique. Dans la zone euro, la crise
laisse de nombreux stigmates = croissance en berne malgré une légère reprise de 2016 à
2017 (1,6% de croissance en 2018 + 7,9% de chômage, dette publique de 86% du PIB).
Pourquoi ? La crise des sub primes a servi de catalyseur à la crise européenne = ce sont les
défauts de la construction de l’union monétaire qui ont permis son installation et
développement. Il est difficile d’appliquer une politique monétaire commune à des
économiques aux politiques budgétaires spécifiques et peu coordonnées. Au lieu de faire
converger les économies, l’euro les a fait diverger. Le taux de change de l’euro a favorisé
certains pays comme l’Allemagne mais il a aussi pénalisé d’autres pays comme la Grèce.
Absence de budget commun = aucun mécanisme rééquilibrant ne permet de résorber les
déséquilibres.
→ Les réformes :
→ Réformes financières :
- Le mécanisme Européen de stabilité (MES) : depuis 2012, il remplace les mécaniques
mises en place dans l’urgence (fonds européen de stabilité financière + mécanisme
européen de stabilité financière). Capital global de 700 milliards d’euros, il permet à
un État au bord de la faillite de disposer de fonds afin d’éviter la propagation de la
crise. Il peut accorder des prêts à taux réduits, acheter des obligations et
recapitaliser les banques. En contrepartie, l’État doit mettre en œuvre des réformes
structurelles (imposée par la BCE, le FMI et la Commission Européenne). Enfin,
prêteur en dernier ressort depuis 2018 pour les banques défaillantes.
- L’union bancaire : assurer la stabilité du système bancaire. 3 piliers :
1° Mécanisme de supervision unique (MSU) = depuis 2014 la BCE supervise les 130
plus grandes banques à la place des superviseurs nationaux. Objectif = prévenir la
faillite de banques dites « too big to fail ».
2° Mécanisme unique de résolution = résoudre les crises bancaires. À partir de 2025,
ce ne seront plus les États et les contribuables mais les créanciers et actionnaires qui
seront sollicités pour soutenir les banques en cas de crise.
3° Mécanisme Européen de garantie unique des dépôts = permettre aux épargnants
de récupérer leur épargne en cas de faillite à hauteur de 100 000€. Objectif = éviter
les mouvements de panique bancaire.
- Les autorités de régulation des marchés : Au niveau de la France, l’Autorité des
Marchés Financiers (AMF) veille depuis 2003 à la protection de l’épargne. Fin 2010,
mis en place du Système Européen de supervision Financière (SESF) qui comprend le
Comité Européen de risque systémique (CERS) = chargé de la surveillance macro
prudentielle (surveiller la finance). Il dispose de trois autorités européennes de
supervision (Londres, Paris et Francfort) chargées de la surveillance micro
prudentielle. Mise en place parallèlement d’une réforme budgétaire avec divers
mécanismes comme le six-pack ou le two-pack visant à renforcer les sanctions et
permettre un meilleur encadrement des budgets. En 2013, Pacte budgétaire
Européen (Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance) = les pays sont
dans l’obligation d’arriver à l’équilibre budgétaire, leur déficit structurel ne doit pas
dépasser 0,5% du PIB.
→ Les risques potentiels : Les réformes demeurent insuffisantes sur le plan budgétaire, il n’y
a pas de véritable budget commun qui permettrait la stabilisation macroéconomique des
pays. De nombreux risques demeurent dans la sphère financière et bancaire. Le « shadow
banking » continue son essor = « secteur bancaire parallèle », ensemble des activités et des
acteurs permettant un financement non bancaire de l’économie (on y trouve les hedge fund
et les véhicules de titrisation). Ils sont difficilement contrôlables.
→ Actuellement, il y aurait 28 groupes bancaires systémiques qui sont en situation
d’oligopole et qui domine le marché. Ces groupes sont des « too big to fail », ils auront le
soutien des pouvoirs publics pour ne pas faire faillite. Donc ils prennent de nouveaux
risques.
→ Facteurs d’instabilité : ralentissement économique en Chine, fin de la prospérité en
Allemagne, fort endettement des pays émergents et des EU, politique protectionniste aux
EU, Brexit, accélération des changements climatiques…
→ Conclu : La crise de 2008 a permis de souligner les limites d’un libéralisme poussé à
l’extrême à travers des marchés financiers dérégulés et des banques insuffisamment
contrôlées. Remise en avant de la pensée keynésienne, importance de réforme visant à une
meilleure supervision de la sphère financière et bancaire. Enfin, la crise a mis en avant les
faiblesses de la zone euro. Pour Jacques Attali : « Ce qu’on nomme la crise n’est que la
longue et difficile réécriture qui sépare deux formes provisoires du Monde ».