4
4
Document de travail
1
HEP Vaud
2
Université Montpellier
3
Université Paris-Est Créteil
4
Université Lyon 1
1
à la classe. En particulier, Weber et Dawkins (2018) soulignent que les recherches en
mathematics education doivent aujourd’hui s’interroger sur les méthodologies des
“Mathematical Practice informing Pedagogy (MPP) research”. C’est ce que nous proposons
de développer dans cet article, en adoptant un point de vue didactique : nous allons mettre
en évidence les apports didactiques d’une étude épistémologique de pratiques
contemporaines de mathématiciens.
Pour cela, nous reviendrons dans un premier temps sur la place de l’épistémologie dans le
domaine de recherche qu’est la didactique, et, ainsi sur l’utilisation du mot “épistémologie”
dans cet article. Nous pourrons alors préciser davantage ce que nous entendons par “Étude
Épistémologique de Pratiques Contemporaines de Chercheurs” (étude EPCC). Nous nous
appuierons sur quatre recherches distinctes ancrées en didactique des mathématiques ayant
mobilisées ce type de méthode (Gardes 2013, Modeste 2012, Ouvrier-Buffet 2013, Yvain-
Prébiski 2018) : ces recherches permettront de justifier et d’illustrer la nécessité d’un recours
à une étude épistémologique de pratiques contemporaines de chercheurs, de mettre en
évidence une méthode pour conduire une telle étude EPCC, et de montrer l’impact de tels
travaux pour la didactique. Les retombées de ces travaux seront alors discutées du point de
vue de la recherche en didactique des mathématiques.
1. Contexte de l’étude
1.1. Les apports de l’épistémologie aux didactiques des disciplines
scientifiques
La didactique des disciplines scientifiques s’est construite sur une volonté de prendre en
compte les savoirs dans la réflexion sur leur enseignement et leur apprentissage (Johsua &
Dupin, 1993). En effet, l’épistémologie joue un rôle central dans la constitution même des
didactiques des disciplines scientifiques, en permettant de rendre explicites les hypothèses
quant à la nature et la structure des savoirs, qui agissent de manières explicites et implicites
sur les choix d’enseignement. En fournissant des éléments relatifs à la genèse, à la nature,
au rôle et à la place des savoirs, l’épistémologie contribue ainsi scientifiquement au travail
didactique, permettant de justifier et d’éclairer des choix d’enseignement mais aussi de nourrir
les questionnements de recherche en didactique des mathématiques. Rappelons que les
principales théories développées en didactique des mathématiques relèvent d’une approche
épistémologique (Dorier 1997, 2016). Certaines interactions entre mathématiciens et
didacticiens permettent également de fonder des théories en didactique des mathématiques
: c’est le cas de la théorie des jeux comme background de la théorie des situations didactiques
(Brousseau 1977, 1998) ou encore les jeux de cadres et la dialectique outil/objet (e.g. Douady
1987, Douady A. & Douady R. 1994).
L’article fondateur de Artigue (1990a) présente la relation entre didactique et épistémologie
des mathématiques comme une “connaissance des processus par lesquels les concepts
mathématiques se forment et se développent” (Artigue, 1990a, p. 243). Elle ajoute :
Au-delà de l’analyse conceptuelle, l’épistémologie intervient à ce niveau sur un plan
plus général car ce que vise l’enseignement des mathématiques, ce n’est pas
simplement la transmission de connaissances mathématiques, c’est plus globalement
celle d’une culture. Il s’agit de faire entrer les élèves dans le jeu mathématique. Mais,
qu’est ce jeu mathématique ? Quels sont les processus généraux de pensée qui le
gouvernent ? C’est l’analyse épistémologique [...] qui est au premier chef concernée
par ces questions. (Artigue, 1990a, p. 246).
2
Ces propos correspondent aussi à des problématiques curriculaires d’aujourd’hui : on peut
citer, à titre d’exemples, les standards aux Etats-Unis et les curricula en France où la
“mathematical maturity and expertise” (NGA Center & CCSSO, 2020) et “l’activité
mathématique” (Villani & Torossian, 2018) doivent être développées de la maternelle (pre-
school) à l’université. Ici, l’approche épistémologique trouve sa place pour questionner les
choix curriculaires face aux évolutions et aux pratiques d’une discipline. De plus,
l’épistémologie permet d’identifier et de discuter les frontières et les articulations entre les
disciplines scolaires, l’introduction de nouveaux savoirs et de mutations d’une discipline dans
l’enseignement (Viennot, 2009).
Ainsi, les théories et travaux développés dans le cadre de la didactique des mathématiques
s’appuient sur l’épistémologie pour produire l’analyse de systèmes didactiques (c’est-à-dire
de transmission des savoirs) mais aussi, et surtout, pour construire et proposer des
approches, situations d’apprentissage, et organisations didactiques susceptibles de favoriser
les apprentissages mathématiques que la société attend. Dans cette perspective, l’ingénierie
didactique (Artigue, 1990b ; Margolinas et al., 2011) fournit une méthodologie de recherche
permettant de prendre en charge ce travail dans son intégralité.
Il existe, depuis longtemps, des travaux de recherche variés interrogeant les pratiques des
mathématiciens et/ou impliquant des mathématiciens, en lien avec la communauté éducative
et la recherche en didactique des mathématiques. Certains de ces travaux conçoivent et
exploitent des entretiens avec des mathématiciens professionnels. Dans ce cadre, notre
réflexion sur l’épistémologie nous conduit aux questions suivantes : Quels sont les objectifs
et spécificités méthodologiques de ces travaux sur les mathématiciens professionnels ? Quels
impacts didactiques ces travaux ont-ils pour la recherche en didactique des mathématiques,
d’une part, et pour l’enseignement, d’autre part ?
Les entretiens conduits avec des mathématiciens par des chercheurs en mathematics
education ont généralement pour but de caractériser certains processus, démarches,
heuristiques des chercheurs et d’utiliser de tels résultats pour l’enseignement et la formation
des enseignants. L’intérêt d’une telle démarche y est clairement affirmé (e.g. Burton 2001,
Rasmussen et al. 2005).
Les articles en mathematics education présentant des entretiens avec des mathématiciens
ont des caractéristiques communes. Les chercheurs souhaitent enrichir les connaissances en
mathematics education, mais aussi en philosophie des mathématiques (e.g. Weber 2008),
élaborer des propositions curriculaires (e.g. Weber 2011), étudier la pratique de
mathématiciens pour envisager des transpositions à l’enseignement (e.g. Gardes 2013,
Modeste 2012, Ouvrier-Buffet 2013, Yvain-Prébiski 2018), identifier des décalages, voire des
incohérences, entre ce qui est enseigné dans les classes et la pratique des mathématiciens,
ou encore proposer des leviers pour la classe qui ne sont pas encore présents dans les
pratiques enseignantes (e.g. Lockwood et al. 2016).
Ces études récentes sont généralement réalisées sur de petits échantillons de
mathématiciens. Il est alors difficile de parler de représentativité des mathématiciens
3
interviewés5, ce qui est de toute façon complexe, la communauté des mathématiciens elle-
même étant hétérogène. La nature des mathématiques étudiées dans de tels entretiens
nécessitent une compréhension des concepts et processus mathématiques en jeu dans la
discussion par les deux parties (mathématicien et didacticien), ce qui limite parfois l’étude
spécifique du domaine d’expertise du mathématicien. Quand des problèmes mathématiques
sont étudiés en dialogue avec les mathématiciens, les concepts et problèmes relevant du
discret semblent prédominants (e.g. Ouvrier-Buffet 2013). Dans de tels cas, les thèmes des
entretiens portent davantage sur les heuristiques de la démarche mathématique (choix de
problèmes, preuve, production d’exemples et contre-exemples, processus de définition).
Ainsi, les travaux en mathematics education sur et/ou avec des mathématiciens
contemporains apportent des éclairages sur la nature des mathématiques et des propositions
potentielles pour l’enseignement. Mais ces contributions restent locales : les méthodologies
de ces travaux semblent spécifiques à chaque étude, et la question de la généralisation des
méthodes et des résultats n’est pas abordée en tant que telle.
5
A notre connaissance, seule l’étude de Burton (2004) est à large échelle (70 mathématiciens).
4
Fehr, 1908), l’accès à la pratique ordinaire, actuelle des mathématiciens peut se poser6 tout
comme la prise en compte d’évolutions récentes de la discipline. C’est le cas, par exemple,
avec le développement de l’informatique et des preuves assistées par ordinateurs et
assistants de preuve (e.g. Hanna et al. 2019), tant du point de vue des pratiques que des
concepts, domaines, processus de preuve ou mode de validation7. Ainsi, en plus de
questionner les concepts et processus en jeu lors d’une activité mathématique, ces questions
didactiques demandent de s’interroger sur la nature, l’émergence, l’évolution et l’état actuel
des pratiques liées à cette activité mathématique. Cette réflexion s’étend donc au-delà des
analyses épistémologiques réalisées classiquement dans les travaux en didactique. C’est
donc bien cette étude que nous désignons par étude épistémologique de pratiques
contemporaines de chercheurs (EPCC). Précisons que cette étude et le questionnement
didactique associé se nourrissent mutuellement. En effet, comme nous l’avons déjà souligné,
l’étude EPCC est conduite avec une visée didactique, celle de mieux caractériser une activité
mathématique, par le biais de l’identification d’éléments invariants dans les pratiques
observées. Les résultats obtenus sur ces invariants permettent en retour d’outiller le
didacticien et d’enrichir ses analyses didactiques : analyse de la transposition à la classe8,
analyse de l’activité mathématique des élèves, anticipation et analyse de la gestion de
l’enseignant. A titre d’exemple, mettre en œuvre en classe des activités de preuve requiert,
de la part de l’enseignant, une gestion de classe spécifique (cf. synthèse de Balacheff, sous
presse) : au niveau international, les travaux convergent vers la nécessité d’approfondir les
travaux de recherche à ce sujet (e.g. Mariotti et al. 2018, Stylianides 2016), ce qui implique à
la fois d’identifier la nature de la preuve dans l’activité mathématique et d'approfondir les types
de situations favorables à un tel apprentissage. Une étude EPCC peut permettre
d’appréhender ces aspects, d’identifier des leviers pour l’enseignant (e.g. Ouvrier-Buffet
2013), et ce en prenant en compte l’évolution du rapport à la preuve dans la discipline (pointée
comme nécessaire par Hanna & Knipping 2020 par exemple).
Nous allons maintenant nous concentrer sur l’étude EPCC (Figure 1).
6
On peut aussi se demander à quel point la pratique décrite dans le discours coïncide avec la pratique
réelle (cf. textes de Claude Bernard sur la démarche scientifique).
7
Le théorème des 4 couleurs en est un exemple (Gonthier 2019).
8
La question de la transposition « de quoi » serait à développer spécifiquement et mériterait un autre
article. "Travailler comme les mathématiciens° c’est rencontrer leurs objets et entrer dans les
problématiques que ceux-ci imposent : les mathématiciens° font ce qu’ils font parce que leurs objets
sont ce qu’ils sont." (Balacheff, sous presse).
5
L’étude épistémologique de pratiques contemporaines soulève plusieurs questions
méthodologiques. En effet, il s’agit d’avoir accès à des pratiques vivantes et contemporaines
de chercheurs sur une activité mathématique spécifique. Il semble dès lors difficile de recueillir
ces informations uniquement dans des documents écrits, dans la mesure où le passage à
l’écrit peut induire une reconstruction a posteriori des pratiques9. Le recours à d’autres moyens
semble nécessaire, tels que des entretiens avec les chercheurs ou des observations de
chercheurs dans leur activité de recherche in situ. Les critères permettant la conception de
tels entretiens ou observations et les analyses de ceux-ci sont fondés sur les résultats
d’études épistémologiques classiques. Cette épistémologie classique est accessible dans des
travaux antérieurs en didactique sur l’activité mathématique étudiée et, parfois, dans des
articles écrits par des chercheurs et publiés dans des revues de recherche de la discipline
concernée (tel l’American Math Monthly dans le domaine des mathématiques), où les
chercheurs décrivent leurs propres pratiques (e.g. Thurston 1994, Edwards & Ward 2004). Il
est également possible de trouver des résultats d’épistémologie classique dans le domaine
de la philosophie des sciences lorsque des écrits de mathématiciens sont étudiés sous un
prisme théorique : c’est le cas, par exemple, des travaux de Werndl (2009) qui a mis en
évidence des démarches de mathématiciens à partir de leurs publications de recherche, en
prenant le modèle de Lakatos (1961, 1976) comme cadre théorique.
Où se situent alors les spécificités et les apports de l’étude épistémologique contemporaine
de chercheurs ? Nous allons donner deux exemples.
9
Notons que nous devrions discuter de la transposition elle-même avec une perspective
épistémologique, sociologique, anthropologique et professionnelle plus large, pour permettre un retour
sur le praticien et une « clarification des rapports entre savoirs et pratiques » et ainsi rendre des savoirs
professionnels et compétences visibles (e.g. Perrenoud 1998, Rogalski & Samurçay 1994).
6
chercheurs, élèves et étudiants sur un même problème mathématique (i.e. la conjecture
d’Erdös-Straus).
10
Une articulation des cadres théoriques de Douady (1987), Balacheff (1995), Balacheff & Margolinas
(2005) a été mobilisée pour mettre en évidence ces conceptions.
7
caractérisation de l’activité
mathématique chez des chercheurs
didactique
Dans la suite de l’article, nous montrons en quoi les résultats d'une étude EPCC permettent
de développer et d’enrichir le questionnement didactique portant sur une activité
mathématique spécifique.
8
l’élaboration de situations pour l’enseignement permettant de faire vivre aux élèves l’activité
mathématique étudiée, d’une part, et l’élaboration d’outils pour anticiper, décrire et analyser
les pratiques des élèves liées à cette activité mathématique, d’autre part. Nous les détaillons
et les illustrons ci-après sur les activités mathématiques de modélisation et de recherche d’un
problème.
9
des entretiens semi-dirigés auprès de huit mathématiciens contemporains. La modélisation
des conceptions sur la définition en mathématiques (issues de l’épistémologie classique d’une
part et des entretiens d’autre part) a été réalisée avec le cadre théorique de Balacheff (1995).
Dans l’étude EPCC, la spécificité des recherches d’Ouvrier-Buffet (2013, 2015) est de
caractériser les types de problèmes permettant d’engager une telle activité, de décrire les
processus de définition en jeu et d’utiliser cette modélisation pour construire et mettre en
œuvre des situations de définitions à l’université. Il est question ici de chercher à construire
des outils fidèles à l’activité mathématique qui se pratique et à la connaissance mathématique
qui se construit pour des études didactiques et une transposition en classe (cela concerne la
formation scientifique d’élèves, d’étudiants, d’enseignants). On est là en appui et dans la
lignée de l’épistémologie contemporaine de Lakatos et l’idée d’une mathématique faillible et
on cherche à construire un modèle de réflexion épistémologique de la science mathématique
qui se pratique et dont les lignes bougent. Ce qui revient à revoir, réviser, compléter ce que
l’épistémologie et la philosophie proposent comme vision des mathématiques.
Pour cela, la méthodologie de type EPCC est la suivante :
- construire un premier modèle philosophico-épistémologique à partir de lectures autour
de trois pôles identifiés avec une étude épistémologique classique (logique & langage ;
preuves et réfutations ; construction axiomatique), et conduire une critique de ces lectures
(e.g. Ouvrier-Buffet 2013) ;
- choix d’un cadre théorique permettant de décrire ce modèle et ainsi les conceptions au
niveau épistémologique et ayant une opérationnalité en didactique (ici le cadre théorique cK¢
de Balacheff 1995) ;
- étudier l'opérationnalité du modèle initial ainsi structuré pour concevoir des situations
de construction de définition pour la classe et pour analyser les processus des étudiants ;
- conduire des entretiens avec des mathématiciens pour (in)valider/updater ce modèle
de l’activité mathématique, ce modèle, pérenne, pouvant être révisé au fil du temps.
11
Encore une fois, la question de la transposition didactique se pose difficilement, mais serait à poser,
car il faudrait parvenir à identifier “suffisamment” le savoir savant, ce qui est complexe étant donné la
variété des pratiques des mathématiciens (suivant leurs champs de recherche, la place de la dimension
expérimentale, les types de raisonnements et de preuves et l’émergence de nouveaux problèmes dans
la recherche).
12
“Dans cette direction, celle de la vigilance épistémologique, de la prise de distance par rapport à
l’objet d’étude, l’analyse épistémologique permet également au didacticien de prendre la mesure des
disparités existant entre savoir “savant’’ […] et savoir enseigné. En effet, alors que l’école vit sur la
fiction consistant à voir dans les objets d’enseignement des copies simplifiées mais fidèles des objets
de la science, l’analyse épistémologique, en nous permettant de comprendre ce qui gouverne
10
seulement de s’assurer de la conformité du savoir enseigné au savoir savant (ou d’une
simplification fidèle de celui-ci), mais bien de comprendre les phénomènes qui amènent à une
transformation du savoir pour permettre son enseignement, et la façon dont un concept ou
des pratiques vont pouvoir cohabiter dans un système d'enseignement donné, à une époque
donnée.
L’EPCC permet justement de questionner la transposition didactique du point de vue de la
pratique des mathématiques (transposition d’une activité spécifique à la pratique des
mathématiques comme la preuve ou l’activité de définition par exemple). Elle permet aussi de
prendre en compte des évolutions récentes de la discipline, de ces concepts et de ses liens
aux autres disciplines13. En ce sens, à titre d’exemple, le développement de l’informatique,
comme outil pour les mathématiques et consommatrice de mathématiques, questionne les
mathématiques contemporaines en tant que discipline (surviennent par exemple des
questionnements épistémologiques sur ce qu’est une preuve), mais aussi leur enseignement.
Le modèle épistémologique construit par Modeste (2012, 2020) dans une démarche d’EPCC,
a permis de réaliser une analyse détaillée de la transposition didactique du concept
d’algorithme dans les curricula du lycée français de mathématiques et d’informatique mis en
place pendant la période 2010-2012. Cela a permis de mettre en lumière une transposition
didactique du concept d’algorithme dans le curriculum de mathématiques principalement
centrée sur son usage comme outil, avec une centration sur les aspects langagiers du concept
et un écrasement sur le concept de programme informatique.
Comme nous l’avons souligné dans des notes de bas de pages précédentes, la question de
la transposition d’activités mathématiques, quant à elle, nécessiterait un article spécifique.
Yvain-Prébiski (2018, 2017) a mené une étude EPCC dans ses travaux de recherche portant
sur la transposition des pratiques de chercheurs utilisant la modélisation mathématique dans
les sciences de la vie. L’analyse des entretiens menés auprès de tels chercheurs a permis
d’identifier des invariants dans leurs pratiques relatives à la mathématisation d’un problème
posé dans ce contexte des sciences de la vie : mettre des hypothèses simplificatrices pour
traiter le problème donné en sélectionnant un fragment de réalité, identifier des variables
pertinentes qui influent sur la situation réelle, choisir des relations pertinentes entre les
variables sélectionnées, choisir un modèle de départ qui est un modèle mathématique connu
permettant d’envisager un travail mathématique quitte à affiner ou rejeter le modèle choisi en
reconsidérant les choix retenus, associer certaines propriétés identifiées à des quantités. En
appui sur ces invariants, Yvain (2018) a caractérisé des situations pour la classe favorisant le
l’évolution de la connaissance scientifique, nous aide à prendre conscience de la distance qui sépare
l’économie des deux systèmes.” (Artigue, 1990, p. 244-245).
13
Bien que les curricula de mathématiques paraissent plus figés et moins liés aux évolutions de la
discipline, que ceux d’autres disciplines comme les sciences du vivant, l’analyse des curricula de
mathématiques au cours du temps montre bien des évolutions liées au développement de la science
mathématique elle-même.
11
travail de mathématisation en jeu lors du passage d’une situation extra-mathématique à une
situation accessible à un traitement mathématique. Elle a élaboré une situation pour la classe,
conçue à partir d’une adaptation d’une problématique professionnelle de modélisation sur la
croissance des végétaux. Les choix didactiques ont été réalisés pour favoriser et attester du
développement chez les élèves les invariants identifiés : par exemple la prise de conscience
de la nécessité de faire des choix et l’identification de variables pertinentes pour traiter
mathématiquement la situation.
Dans ses travaux, Gardes (2013) s’est appuyée sur les résultats de l’étude EPCC menée sur
le processus de recherche des mathématiciens pour construire une situation d’enseignement
permettant de faire vivre cette activité de recherche de problème aux élèves. Plus
précisément, elle s’est appuyée sur les invariants généraux identifiés dans les pratiques de
recherche des chercheurs (processus de création en quatre étapes, rôle du temps, importance
des modalités variées des échanges entre pairs, importance de la documentation) pour
élaborer une organisation didactique, dont voici les spécificités : proposer une recherche du
problème sur un temps long, avec plusieurs séances de recherche, afin de prendre en compte
le facteur “temps ouvert” ; construire des scénarios composés de différentes phases de
recherche (individuelle, collective par petits groupes, collective pour des mises en commun et
débat, synthèse) afin de prendre en compte la dimension sociale de l’activité de recherche
sous toutes ses formes d’une part et d’approcher les différentes phases du processus de
création mathématique d’autre part ; permettre l’accès à tout type de documentation (sauf
Internet) afin d’approcher l’importance du recours à la documentation dans une recherche
mathématique. L’ensemble de l’étude EPCC a également permis d’analyser finement les
processus de recherche des élèves.
12
chercheurs, l’auteure a mis à l’étude la question des contraintes, les marges de manœuvre et
les leviers potentiels associés à l’enseignement de la modélisation mathématique à partir
d’une situation extra-mathématique. En particulier, elle a étudié dans quelle mesure, les
enseignants identifient comme un enjeu d'apprentissage et d’enseignement le travail de
mathématisation nécessaire lors du passage d’une situation posée dans un contexte a priori
non mathématique à un problème mathématique (Yvain-Prébiski & Chesnais, 2019).
Dans les travaux de Gardes (2013, 2017), les résultats de l’étude EPCC ont permis d’élaborer
un outil pour décrire et analyser l’activité de recherche mathématique. A partir des invariants
spécifiques identifiés dans les pratiques des chercheurs (e.g les gestes de la recherche),
l’auteure a construit une grille d’analyse des processus de recherche s’appuyant sur ces
gestes. Cette analyse a permis de montrer comment un sujet agit sur le problème afin
d’avancer dans sa résolution. Par exemple, dans la recherche de la conjecture d’Erdös-
Straus14, la majorité des élèves effectuent le geste Construire et questionner des exemples,
d’une part pour s’engager dans l’étude du problème (en essayant pour n=2, n=3, n=4, etc.) et
d’autre part pour avancer dans leurs recherches en construisant une méthode de
décomposition ou d’élimination des cas (par exemple pour n pair, pour n congru à 1 modulo
3, etc.). Cette analyse met en évidence que le processus de recherche des élèves s’effectue
par des allers et retours permanents entre la recherche de décompositions pour certaines
valeurs de n et la volonté de déterminer des identités générales. Plus généralement, les
gestes identifiés dans l’activité de recherche des élèves mettent en évidence le recours aux
connaissances mathématiques disponibles et mobilisables, le rôle des objets mathématiques
en jeu, les heuristiques développées, la complexité des raisonnements mis en œuvre et les
origines et la nature des avancées de la recherche. Notons que cet outil est ainsi pertinent
pour étudier la question de la transposition du travail du chercheur. En effet, certains gestes
identifiés dans les recherches des mathématiciens sont également relevés dans les
recherches des élèves, quand ces derniers disposent des connaissances mathématiques
favorisant leur émergence.
4. Conclusions et perspectives
L’origine de cet article est une discussion entre les auteurs en réaction à la contribution de
Weber et Dawkins (2018) intitulée “Toward an evolving theory of Math Practice informing
Pedagogy: what standards for this research should we adopt? Leur chapitre d’ouvrage se veut
être une conceptualisation d’un schéma de recherche (pattern of research) nommé
“Mathematics Practice informing Pedagogy” (MPP) basée sur quatre chapitres de la même
monographie traitant de l’épistémologie de la preuve (Hanna 2018, Durand-Guerrier &
Tanguay 2018, Harel 2018, Boero et al. 2018). Weber et Dawkins (2018) en appelle à des
critères partagés, qu’ils pointent comme non présents dans les recherches de type MPP, pour
évaluer les recherches MPP et leur pertinence pour la recherche en mathematics education15.
Ils formulent plusieurs critiques et identifient des difficultés certaines :
14
Pour tout entier n>1, 4/n=1/x+1/y+1/z.
15
“(...) we observe that MPP research has developed in a piecemeal manner without much consistency
in how authors support their arguments (...) how do we verify that any stated pedagogical goals are true
13
1) Comment fonder des recommandations pédagogiques sur des pratiques de
mathématiciens qui pourraient s’avérer isolées ? Comment définir des critères
méthodologiques pour « transposer »16 les apports en histoire et épistémologie des
mathématiques à la littérature en mathematics education ?
2) Comment évaluer des compétences chez les élèves/étudiants relevant de “meta-
conceptions of mathematical practice”.
3) Si les études méta aident les chercheurs et peut-être les enseignants, faut-il cependant
prioriser l’acquisition de compétences liées à l’activité mathématique chez les
étudiants ?
to mathematical practice, available for assessment, and essential for instruction?” (Weber & Dawkins,
2018, p.75).
16
Notons qu’ici Weber et Dawkins ne considèrent pas la question de la transposition (didactique) à la
classe.
14
Nous avons également au fil du texte apporté différentes illustrations de nos travaux
permettant d’appréhender soit le concept d’algorithme, soit les activités mathématiques de
recherche, de modélisation, de définition. Celles-ci ont permis de souligner l’interaction entre
didactique et étude EPCC, en particulier pour produire des « modèles » épistémologiques à
visée didactique, par exemple, en prenant appui sur des cadres théoriques de la didactique
des mathématiques (cf. travaux de Modeste 2012, Ouvrier-Buffet 2013).
Les apports didactiques se situent à différents niveaux : une formalisation de compétences ou
savoirs mathématiques prenant en compte l’activité mathématique (si possible in situ), un
outillage didactique renforcé pour concevoir des situations de classe et de formation et pour
analyser les productions des apprenants (Gardes 2013, Modeste 2012, Ouvrier-Buffet 2013,
Yvain-Prébiski 2018).
17
Mais aussi du mathématicien, comme on peut le voir dans les travaux de Grenier-Boley (2019).
15
Références
Artigue, M. (1990a). Épistémologie et Didactique. Recherches en Didactique des Mathématiques, 10(2.3),
241–285.
Artigue, M. (1990b). Ingénierie didactique. Recherches en Didactique des Mathématiques, 9(3), 281 – 308.
Artigue, M., & Blomhøj, M. (2013). Conceptualizing inquiry-based education in mathematics. ZDM, 45(6), 797-
810. https://doi.org/10.1007/s11858-013-0506-6
Balacheff, N. (sous presse). Situations pour l'apprentissage de la preuve en mathématiques. In Ouvrier-Buffet,
C., Vandebrouck, F. & Vivier, L. (Eds), Synthèses et perspectives en didactique des mathématiques –
Preuve, Modélisation, et technologies numériques. https://hal.science/hal-04028314v1
Balacheff, N. (1995). Conception, connaissance et concept. In D. Grenier (Ed.) Séminaire Didactique et
Technologies cognitives en mathématiques (pp. 219-244). Grenoble : IMAG.
Balacheff, N. & Margolinas, C. (2005). cK¢ Modèle de connaissances pour le calcul de situations didactiques.
In A. Mercier & C. Margolinas (Eds), Balises pour la didactique des mathématiques (p. 1-32). La Pensée
Sauvage.
Boero, P., Fenaroli, G. & Guala, E. (2018). Mathematical argumentation in elementary teacher education: the
key role of the cultural analysis of the content. In A. J. Stylianides, G. Harel (Eds), Advances in
mathematics education research on proof and proving – An international perspective (pp. 49-68).
Springer
Brousseau, G. (1977). La division à l’école élémentaire. APMEP, 19, 89-100.
Brousseau, G. (1998). La théorie des situations didactiques. La Pensée Sauvage.
Burton, L. (2001). Research mathematicians as learners – and what mathematics education can learn from
them. British Educational Research Journal, 27(5), 589-599.
Burton, L. (2004). Mathematicians as enquirers: Learning about learning mathematics. Springer.
Dorier, J.-L. (1997). Recherches en histoire et en didactique des mathématiques sur l’algèbre linéaire -
Perspective théorique sur leurs interactions (Note de synthèse pour l’Habilitation à Diriger des
Recherches, Université Joseph-Fourier - Grenoble 1). https://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00338400
Dorier, J.-L. (2016). La didactique des mathématiques, une épistémologie expérimentale. In M. Bächtold, V.
Durand- Guerrier, & V. Munier (Eds.), Épistémologie et Didactique. Actes de la troisième journée
épistémologie de l’Université Montpellier 2. Presses Universitaires de Franche-Comté.
Douady, R. (1987). Jeux de cadres et Dialectique Outil-Objet. Recherches en Didactique des Mathématiques,
7(2), 5-31.
Douady, A. & Douady, R. (1994). Changements de cadres à partir des surfaces minimales. Cahiers DIDIREM,
23. IREM de Paris VII.
Durand-Guerrier, V. & Tanguay, D. (2018). Working on proofs as contributing to conceptualization – The case
of IR completeness. In A. J. Stylianides, G. Harel (Eds), Advances in mathematics education research
on proof and proving – An international perspective (pp. 19-34). Springer. https://doi.org/10.1007/978-
3-319-70996-3_2
Edwards, B. S. & Ward, M.B. (2004). Surprises from mathematics education research: student (mis)use of
mathematical definitions. The American Mathematical Monthly, 111(5), 411-424.
Ernest, P. (1994). The Philosophy of Mathematics and the Didactics of Mathematics. In R. Biehler, R. W.
Scholtz, R. Straesser, & B. Winkelman (Eds.), The Didactics of Mathematics as a Scientific Discipline
(pp. 335-349). Kluwer.
Fehr, H. (1908). Enquête de l’Enseignement Mathématique sur la méthode de travail des mathématiciens.
Gauthier-Villars.
Gardes, M.-L., & Mizony, M. (2011). La conjecture d'Erdös-Straus : expérimentation en classe et travail du
chercheur. Repères IREM, 87, 79-90.
Gardes, M.-L. (2017). Une étude d’épistémologie contemporaine sur l’activité de recherche mathématique de
chercheurs : intérêt pour l’étude didactique. In M. Bächold, V. Durand-Guerrier et V. Munier (Eds.),
Epistémologie & Didactique, Synthèses et études de cas en mathématiques et en sciences
expérimentales (pp. 177-192). Presses universitaires de Franche-Comté.
16
Gardes, M.-L. (2013). Étude de processus de recherche de chercheurs, élèves et étudiants, engagés dans la
recherche d'un problème non résolu en théorie des nombres. Thèse, Université Claude Bernard - Lyon
I. https://theses.hal.science/tel-00948332v1/file/these_GARDES.pdf
Goldin, G.A. (2004). Problem Solving Heuristics, Affect, and Discrete Mathematics. Zentralblatt für Didaktik
der Mathematik, 36 (2), 56-60.
Gonthier, G. (2019). A computer-checked proof of the four colour theorem. http://research. microsoft.com/en-
US/people/gonthier/4colproof.pdf
Grenier, D. & Payan, C. (1998). Spécificités de la preuve et de la modélisation en mathématiques discrètes.
Recherches en Didactique des Mathématiques, 18(1), 59-100.
Grenier-Boley, N. (2019). La recherche en mathématiques : une ressource pour les didacticiens ? Note de
synthèse pour l’Habilitation à Diriger des Recherches. Université Paris Diderot.
https://inria.hal.science/tel-02418563/
Hadamard, J. (1993). Essai sur la psychologie de l’invention dans le domaine Mathématique. Les Grands
Classiques Gauthiers-Villars. Editions Jacques Gabay.
Hanna, G. (2018). Reflections on proof as explanation. In A. J. Stylianides, G. Harel (Eds), Advances in
mathematics education research on proof and proving – An international perspective (pp. 3-18).
Springer.
Hanna, G. & Knipping, C. (2020). Proof in mathematics education, 1980-2020: an overview. Journal of
Educational Research in Mathematics, Special Issue, 1-13.
Hanna, G., Reid, D.A., de Villiers, M. (2019). Proof technology in mathematics research and teaching.
Springer.
Johsua, S. & J.-J., Dupin (1993). Introduction à la didactique des sciences et des mathématiques. PUF.
Harel, G. (2018). Types of epistemological justifications, with particular reference to complex numbers. In A.
J. Stylianides, G. Harel (Eds), Advances in mathematics education research on proof and proving – An
international perspective (pp. 35-48). Springer
Lakatos, I. (1961). Essays in the Logic of Mathematical Discovery. Cambridge University Press.
Lakatos, I. (1976). Proofs and Refutations. Cambridge University Press.
Lockwood, E., Ellis, A.B., Lynch, A.G. (2016). Mathematicians’ example-related activity when exploring and
proving conjectures. Int. J. Res. Undergrad. Math. Ed., 2, 165-196.
Margolinas, C., et al. (Eds.). (2011). En amont et en aval des ingénieries didactiques. La Pensée Sauvage.
https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00770768
Mariotti, M.A., Durand-Guerrier, V. & Stylianides, G.J. (2018). Argumentation and proof. In T. Dreyfus, M.
Artigue, D. Potari, S. Prediger, K. Ruthven (Eds), Developing research in mathematics education –
Twenty years of communication, cooperation and collaboration in Europe (p.75-89). Taylor & Francis.
Modeste, S. (2020). Prendre en compte l’épistémologie de l’algorithme. Quels apports d’un modèle de
conceptions ? Quelle transposition didactique ? Recherches en Didactique des Mathematiques, 40 (3),
363-404.
Modeste, S. (2012). Enseigner l’algorithme pourquoi ? Quelles nouvelles questions pour les mathématiques
? Quels apports pour l’apprentissage de la preuve ? Thèse, Université de Grenoble 1. https://
tel.archives-ouvertes.fr/tel-00783294/
Modeste, S., & Ouvrier-Buffet, C. (2011). The appearance of algorithms in curricula, a new opportunity to deal
with proof ? In Pytlak, M., Rowland, T., & Swoboda, E. (Eds.), Proceedings of the Seventh Congress of
the European Society for Research in Mathematics Education (CERME 7, February 9- 13, 2011).
Rzeszów, Poland: University of Rzeszów and ERME. (pp. 202-2012). http://www.mathematik.uni-
dortmund.de/~prediger/ERME/CERME7-Proceedings-2011.pdf
Mousoulides, N., & Sriraman, B. (2020). Heuristics in mathematics education. Encyclopedia of Mathematics
Education, 331–333.
Nardi, E. (2008). Amongst mathematicians. Springer.
NGA Center & CCSSO (2020). Standards for Mathematical Practice. Common Core State Standards Initiative.
http://www.corestandards.org/Math/Practice/
Nimier, J. (1989). Entretiens avec des mathématiciens : l’heuristique mathématique. IREM de Lyon.
17
Gravier, S. & Ouvrier-Buffet, C. (2022). The mathematical background of proving processes in discrete
optimization – exemplification with Research-Situations for the Classroom. ZDM – Mathematics
Education, 54, 925-940.
Ouvrier-Buffet, C. (2015). A Model of mathematicians' approach to the defining processes. In K. Krainer & N.
Vondrová (Eds.), Proceedings of the ninth congress of the European Society For Research In
Mathematics Education (CERME9) (pp.2214-2220). Prague, Czech Republic: Charles University In
Prague, Faculty of Education and ERME.
Ouvrier-Buffet, C. (2013). Modélisation de l’activité de définition en mathématiques et de sa dialectique avec
la preuve – Étude épistémologique et enjeux didactiques. (Note de synthèse pour l’Habilitation à Diriger
des Recherches, Université Paris Diderot). http://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00964093
Ouvrier-Buffet, C. (2011). A mathematical experience involving defining processes: in-action definitions and
zero-definitions. Educational Studies in Mathematics, 76, 165–182.
Ouvrier-Buffet, C. (2006). Exploring Mathematical Definition Construction Processes. Educational Studies in
Mathematics, 63(3), 259-282.
Ouvrier-Buffet, C. (2003). Construction de définitions / construction de concept : vers une situation
fondamentale pour la construction de définitions en mathématiques. Thèse, Université Joseph Fourier,
Grenoble 1. http://tel.archives-ouvertes.fr/tel-00005515/en/
Perrenoud, P. (1998). La transposition didactique à partir de pratiques : des savoirs aux compétences. Revue
des sciences de l’éducation, 24(3), 487-514.
Poincaré, H. (1908). L’invention Mathématique. Bulletin de l’Institut Général Psychologique, 3, 175-187.
Pólya, G. (1945). How to solve it. Princeton University Press.
Pólya, G. (1989). Comment poser et résoudre un problème. Editions Jacques Gabay.
Rasmussen, C., Zandieh, M., King, K., Teppo, A. (2005). Advancing Mathematical Activity: A Practice-
Oriented View of Advanced Mathematical Thinking. Mathematical Thinking and Learning, 7(1), 51-73.
Rogalski, J. & Samurçay, R. (1994). Modélisation d'un « savoir de référence » et transposition didactique dans
la formation de professionnels de haut niveau. In G. Arsac, Y. Chevallard, J.-L. Martinand et A.
Tiberghien (Eds.), La transposition didactique à l'épreuve (pp. 35-71). La Pensée Sauvage.
Larsen, S. & Zandieh, M. (2008). Proofs and Refutations in the Undergraduate Mathematics Classroom.
Educational Studies in Mathematics, 67, 205-216.
Stylianides A.J. (2016). Proving in the Elementary Mathematics Classroom. Oxford University Press.
Thurston, W.P. (1994). On proof and progress in mathematics. Bulletin of the American Mathematical Society,
30(2), 161–177.
Viennot, L. (Ed.). (2009). Didactique, épistémologie et histoire des sciences : Penser l’enseignement. PUF.
Villani, C. (2012). Théorème vivant. Grasset.
Villani, C., & Torossian, C. (2018). 21 mesures pour l’enseignement des mathématiques. Ministère de
l'Éducation Nationale. https://www.vie-publique.fr/sites/default/files/rapport/pdf/184000086.pdf
Weber, K. (2008). How mathematicians determine if an argument is a valid proof. Journal for Research in
Mathematics Education, 39(4), 431-459.
Weber, K. (2011). Why and how mathematicians read proofs: an exploratory study. Educational Studies in
Mathematics, 76, 329-344.
Weber, K. & Dawkins, P.C. (2018). Toward an evolving theory of mathematical practice informing pedagogy:
what standards for this research paradigm should we adopt? In A. J. Stylianides, G. Harel (Eds),
Advances in mathematics education research on proof and proving – An international perspective (pp.
69-82). Springer. https://doi.org/10.1007/978-3-319-70996-3
Werndl, C. (2009). Justifying Definitions in Mathematics - Going Beyond Lakatos. Philosophia Mathematica,
1–28.
Yvain-Prébiski (2018). Étude de la transposition à la classe de pratiques de chercheurs en modélisation
mathématique dans les sciences du vivant. Analyse des conditions de la dévolution de la
mathématisation horizontale aux élèves. Thèse, Université Montpellier.
Yvain-Prébiski, S. & Chesnais, A. (2019). Horizontal mathematization: a potential lever to overcome obstacles
to the teaching of modelling. In Jankvist, U. T., Van den Heuvel-Panhuizen, M., & Veldhuis, M. (Eds.),
Proceedings of the Eleventh Congress of the European Society for Research in Mathematics Education
18
(CERME11, February 6 – 10, 2019). Utrecht, the Netherlands: Freudenthal Group & Freudenthal
Institute, Utrecht University and ERME. hal-02409063
Yvain-Prébiski, S. & Modeste, S. (2020). Collaborations between teachers and with academics in an irem
group on a collaborative problem-solving device. In H. Borko & D. Potari (Eds.), ICMI Study 25 –
Conference proceedings, Lisbon, Portugal. hal-02572440f
Yvain-Prébiski, S. & Modeste, S. (2020). Design of situations fostering horizontal mathematization: benefits
from epistemological analysis of experts’ practices. CIEAEM 71, Jul 2019, Braga, Portugal. pp.139-150.
⟨hal-03121679⟩
Zandieh, M. & Rasmussen, C. (2010). Defining as a mathematical activity: A framework for characterizing
progress from informal to more formal ways of reasoning. Journal of Mathematical Behavior, 29, 57–
75.
19