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Foundations in Microbiology Basic Principles 10th Edition
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Chapter 10
Cost Functions
113. In order to minimize the cost of a particular level of output, a firm should produce
where
v
b. the RTS (of L for K) = .
w
w
c. the RTS (of L for K) =
v
v
d. the MRS = .
w
215
216 Chapter 10: Cost Functions
b. cost-minimizing input choices for all possible output levels for when input
rental rates expand along with production.
c. cost-minimizing input choices for all possible output levels for a fixed set of
input prices.
a. is a straight line through the origin with a slope greater than one if w > v.
b. is a straight line through the origin with a slope less than one if w < v .
c. is a straight line through the origin though its slope cannot be determined by
w and v alone.
116. A firm whose production function displays increasing returns to scale will have a
total cost curve that is
117. A linear total cost curve which passes through the origin implies that
118. As long as marginal cost is below average cost, average cost will be
a. falling.
b. rising.
c. constant.
a. both average total costs and average variable costs will be falling.
b. average total costs will be falling but average costs may be rising or falling.
d. average total costs are falling but average fixed costs may be rising.
120. The average fixed cost curve always has a negative slope because
b. the underlying nature of the firm's production function when all inputs are
able to be varied.
218 Chapter 10: Cost Functions
d. the way in which the firm's expansion path reacts to changes in the rental
rate on capital.
a. marginal costs are constant but the average cost curve has a U-shape.
b. are usually greater than or equal to its short-run costs except in the case of
diminishing returns to scale.
d. are usually less than or equal to its short-run costs except in the case of
diminishing returns to scale.
124. An increase in the wage rate will have a greater effect on average costs
a. the larger the proportion labor costs are of total costs and the easier it is to
substitute capital for labor.
b. the larger the proportion labor costs are of total costs and the harder it is to
substitute capital for labor.
b. not affect the production function, but may shift cost curves.
c. shift a firm's production function and alter its marginal revenue curve.
d. shift a firm's production function and cause more capital (and less labor) to
be hired.
126. The Cobb-Douglas production function q = k .5 l .75 yields the cost function C =
(where B is a constant).
a. Bq v1 2 w3 4 .
5/4 12 34
b. Bq v w .
127. For the cost function C = q .8 v .4 w.6 consider the following statements:
a. None is true.
c. Only I is true.
129. The input demand functions that can be derived from cost functions are referred to
as “contingent” demand functions because the functions:
On y était tenu avec Saint Martin plus qu'avec aucun autre. Saint
Martin n'a point le rare privilège des grands esprits nets, des
hommes à découvertes dans l'ordre de la pensée et à résultats
positifs. Ceux-là, on les trouve sans les chercher dans ce qu'ils ont
fait et dans les influences qu'ils ont laissées après leur passage,
tandis que déjà, et à la distance d'une moitié de siècle, il nous faut
chercher Saint Martin pour l'apercevoir. De son vivant, il aimait à
s'appeler le philosophe inconnu, et il a bien manqué de sombrer
sous ce nom-là dans la mémoire des hommes, puni justement,
d'ailleurs, par l'obscurité de tous ces petits mystères de secte dans
lesquels il avait comme entortillé sa pensée. Sans le mot
enthousiaste de madame de Staël dans son Allemagne, un autre mot
plus grave et mieux pesé de J. de Maistre dans ses Soirées de Saint-
Pétersbourg, l'image de Joubert, qui en fait un aigle avec des ailes
de chauve-souris, et quelques lignes impertinentes de Chateaubriand
dans ses Mémoires d'outre-tombe, qui donc, dans le monde du XIXe
siècle, connaîtrait de vue Saint Martin, sinon les curieux qui lisent
tout et qui se font des bibliothèques de folies? Le temps a marché
sur les hommes qui croyaient au grand mystique des voies
intérieures et qui sympathisaient à ses idées. Il a péri presque tout
entier. Il n'a point laissé de trace et de ciment parmi eux, comme
Swedenborg, cet autre mystique, qui passa aussi sa vie dans la
contemplation et dans l'obscurité, mais dont le système, plus hardi
et plus exprimé, a jeté un éclat qui rappelle les aurores boréales de
son pays. Swedenborg a encore des milliers de disciples. Il est vrai
qu'ils sont en Amérique,—ce qui diminue le mérite d'en avoir,—dans
le pays qui pare sa jeunesse avec les oripeaux tombés de la tête
branlante de la vieille Europe. Saint Martin n'en a guères nulle part...
Le mysticisme, qui est de tout temps comme l'orgueil de l'homme,
sa personnalité et sa soif d'infini, a changé de peau comme un
serpent. Il n'en est plus où il en était au XVIIIe siècle, et Caro, nous
développant la doctrine de Saint Martin, cette mystérieuse et
nuageuse doctrine qui partit de Boehm pour aboutir misérablement
à une madame de Krudner, nous produit bien moins l'effet d'un
philosophe que d'un antiquaire, qui nous désenveloppe une momie
et nous fait compter ses bandelettes.
En Allemagne, où l'on n'a pas plus peur des mots que des idées, il
s'était hautement et fièrement organisé. Berlin avait vu naître une
secte qui s'appela plus tard la secte d'Avignon et qui fut suivie de la
grande société des «Éclaireurs» (Aufklærer), laquelle se répandit
dans l'Allemagne entière et jusque sur les pics de la Suisse. Caro—et
nous prenons acte de ceci venant d'un philosophe—nous les donne
pour les précurseurs de Hegel. Le chef influent de cette secte était le
fameux Nicolaï, le libraire prussien, assez oublié à présent, qui tenait
l'opinion, la critique et la littérature sous la triple fourche de la
Gazette littéraire d'Iéna, du Journal de Berlin et du Muséum
allemand. L'ascendant de Nicolaï à Berlin, Weishaupt l'obtenait en
Bavière. C'était un Proudhon en action qui devançait la théorie,
comme les poètes devancent les poétiques, et qui voulait détruire
tous les gouvernements. En Suisse, Lavater couvrait de je ne sais
quelles vertus, plus dangereuses que des vices, car elles font
illusion, un mysticisme qui touchait à l'illuminisme allemand par une
extrémité et par l'autre à la théurgie. Gasner, Cagliostro, Mesmer, ces
puissants jongleurs, se jouaient de l'imagination et des passions de
l'Europe incrédule... folle d'un besoin de croire qu'elle avait voulu
supprimer. En Angleterre, il n'y avait pas, il est vrai, d'associations
comme en Allemagne, mais une vogue immense entourait William
Law, qui commentait ce vieux Boehm, si cher aux imaginations des
races germaniques. En Suède, Swedenborg éclatait et jouissait d'une
autorité illimitée. En France enfin, le pays des railleurs, où «les
torrents» de madame Guyon ne s'étaient pas écoulés sans laisser les
fanges molles et chaudes du quiétisme au fond de bien des âmes,
les dispositions à une mysticité sans guide et sans appui étaient si
grandes que l'odieux jansénisme même, cette froide chose, arrivait
aussi au mysticisme, non par la tendresse, mais par l'orgueil. Tel
était en réalité le XVIIIe siècle quand y apparut Saint Martin.
Il ne fit aucun fracas tout d'abord, pas plus que depuis. C'était une
intelligence recueillie, une espèce de sensitive de la pensée qui
fleurissait pudiquement dans la solitude, la méditation et le mystère,
et qui se rétractait avec trouble, et presque honteusement, sous le
doigt si souvent familier, maladroit ou brutal, de la publicité. S'il eut
des lueurs,—comme dit madame de Staël,—il eut plus de parfums
encore, et c'est qu'il est des fleurs dont le calice, à certains
moments, semble verser de la lumière. Fleur rêveuse de mysticité, il
ressemblait à une de ces fraxinelles, à une de ces capucines
timidement phosphorescentes, comme on en trouve parfois le soir
sur les murs disjoints des vieilles chapelles. Pénétré, dès sa
jeunesse, des influences fatalement mystiques d'une société qui,
comme le dit excellemment Caro, ne pouvait secouer le joug de ses
croyances que pour tomber sous le joug de ses illusions, il ne monta
point sur l'horizon intellectuel de son temps comme un astre plein de
puissance, mais il s'y coula furtivement, comme un rayon qui
s'égare. Son nom même, il ne le donna point à la secte qu'il allait
créer. Il le trouva et il le prit. Les martinistes, chose singulière!
existaient avant Saint Martin. Un juif portugais, savant dans la
cabale, nommé Martinez Pasqualis, avait fondé, en 1768, la secte
des martinistes, «vouée aux œuvres violentes de la théurgie», et
c'est de cette école que Saint Martin fut le fils; mais bientôt le fils
dissident. Martinez mort, il la modifia. Doué d'une âme qui fut son
génie, on aurait pu dire de lui le mot charmant du vieux Mirabeau,
qu'«il était fait de la rognure des anges». Mais, puisque des anges
sont tombés, une telle rognure ne garantit pas les hommes, et Saint
Martin, si chrétiennement né, se perdit. Certes! si l'Église a des
mélancolies comme celles des mères, ce doit être en voyant se
détacher d'elle des âmes comme celle de Saint Martin. Déjà tout
plein de Swedenborg, qu'il n'acceptait pas dans toute son audace,
en relation avec le commentateur William Law, il lut Boehm, et tout
fut dit. Sa vocation et sa chute furent décidées. Voilà le plus grand
événement de sa vie, dit-il, et il a raison. C'était en 1781: «L'aurore
naissante» de Boehm, qui se leva dans l'éther de son âme,
l'empêcha de voir cette autre et terrible aurore qui allait s'étendre
sur le monde des réalités et dans le ciel sanglant de l'histoire.
Biographe avec scrupule, Caro nous montre Saint Martin abrité
contre la révolution française dans le désert intérieur de sa
spiritualité, et, quand la tempête est passée, plus tard, en 1795, il
suit avec un intérêt mêlé d'éloge le solitaire, devenu homme public,
répondant sur la question de l'enseignement, agitée alors
officiellement par le pouvoir, aux attaques cauteleuses de Garat, le
rhétoricien de la sensation. Caro insiste beaucoup sur cette
discussion, dans laquelle Saint Martin déploya une aptitude
philosophique véritablement supérieure. Mais nous, qui ne sommes
ni professeur ni philosophe, Dieu merci! nous à qui la suite des
temps a trop appris que le spiritualisme du XIXe siècle a fait autant
de mal que le matérialisme du XVIIIe, nous nous intéressons fort
peu à ce débat entre Garat et Saint Martin. A notre sens, le
philosophe inconnu n'existe réellement que dans sa pensée
religieuse, et c'est exclusivement là qu'il faut le surprendre et le
chercher.
Et, nous le répétons, Caro l'y a saisi avec habileté. Il nous a donné,
en quelques pages pressées et pleines, toute la substance médullaire
des doctrines de Saint Martin. En les lisant, on est surtout frappé de
cette idée que le XVIIIe siècle, dans sa haine contre le catholicisme,
n'a pas seulement trouvé, pour la servir, des raisonneurs et des
impies, comme l'affreuse société qui soupait contre Dieu chez
d'Holbach, mais aussi des âmes d'élite, des cœurs tendres, aux
intentions pures, de nobles esprits qui croyaient au ciel. Saint Martin
fut un de ces ennemis du catholicisme qui le frappèrent d'une main
chrétienne. Il avait au plus haut degré ce qui est le signe de l'hérésie
depuis que l'hérésie est dans le monde, c'est-à-dire la haine du
sacerdoce et la fureur de sa propre interprétation.
Qu'avaient de plus Luther et Calvin? Caro, qu'il faut lire si l'on veut
connaître cet hérésiarque au petit pied et qui se croyait et se disait
«né avec dispense», et qui peut-être, hélas! aurait été un saint s'il
avait eu l'obéissance; Caro tourne contre Saint Martin tous ces
grands arguments de l'Église contre le protestantisme qui, depuis
Bossuet, sont notre musée d'artillerie. C'est qu'effectivement Saint
Martin n'est qu'un protestant modifié.
Car l'abbé Mitraud—quel que soit son talent, qui est réel, et sa
charité, qui doit être ardente,—n'a pas converti ces messieurs. Il leur
a plu. Il a ému leurs sympathies, mais il ne les a pas changés. Des
philosophes ne se convertissent pas par la vertu des brochures.
Quand cela leur arrive, il leur faut, comme à La Harpe, le coup de
tonnerre dans le sang de la place Louis XV et le chemin de Damas
de la guillotine! Mais, quant à des livres, ils en font trop pour que le
Prends et lis du figuier d'Augustin se renouvelle. C'est donc du haut
de leurs idées et de leur orgueil que les ennemis de l'Église ont fait
tomber l'éloge sur le front épanoui de l'abbé Mitraud et qu'ils ont
tendu leur main de Grecs (Timeo Danaos et dona ferentes!) à son
catholicisme romain. Certainement, la montagne n'est pas venue à
lui. Faut-il donc conclure qu'il soit allé à la montagne?... Nous
aurions bien voulu le nier. Malheureusement, c'est impossible. Nous
avons lu, avec l'attention qu'il mérite, le livre de l'abbé Mitraud sur la
Nature des Sociétés humaines, comme il dit, et ce livre, dont tout,
pour nous, jusqu'au titre, manque de rigueur et de vérité, nous a
jeté dans des perplexités étranges. A ce titre seul nous avions
reconnu le problème du temps présent, la chimère du siècle, comme
disait saint Bernard,—car les littératures font beaucoup de théories
sociales lorsque les peuples ont relâché ou brisé tous les liens
sociaux, absolument comme on écrit des poétiques lorsque le temps
des poèmes épiques est passé,—et il était curieux de savoir
comment le prêtre avait remué à son tour le problème vainement
agité si longtemps par les philosophes. Tant de mains que l'on
croyait puissantes s'étaient blessées, comme des mains d'enfant, à
pousser ce cerceau dans le vide, que nous nous demandions s'il
fallait accuser la faiblesse maladroite des hommes ou la difficulté
radicale du problème. Eh bien, après y avoir regardé, nous nous le
demandons encore! Le prêtre, aujourd'hui, n'a pas plus avancé la
question que les philosophes. Seulement ce n'est pas l'infortune du
résultat qui les a rendus si doux pour lui, car nul d'entre eux ne
doute de la virtualité de ses idées. Ils ne sont pas si bêtes que d'être
sceptiques sur leur propre compte! La philosophie a remplacé la foi
religieuse, qui pour tant de gens est une duperie, par l'infatuation de
la vanité, qui pour tout le monde est un profit.
Telles sont les idées qui circulent, à l'état plus ou moins confus, dans
le livre de Mitraud, et qui créent une parenté d'erreur profonde entre
son ouvrage et tant d'autres écrits fades et dangereux. Le danger
des livres est relatif. Il tient autant à ceux qui les lisent qu'à ceux qui
les composent. Les peuples vigoureux et purs ont des livres sévères
comme de fermes législations. Mais, quand ils s'énervent, l'utopie de
leurs penseurs s'énerve aussi et tombe au niveau de la moralité
générale. C'est ce qui est arrivé à l'abbé Mitraud. La théologie, qu'il a
étudiée et qui aurait dû donner de la trempe à son esprit, n'a pu
l'empêcher d'être et de rester un métaphysicien d'un ordre inférieur,
qu'attire un problème qui échappe à sa portée. Il est évident, en
effet, qu'au-dessous de toute cette battologie philosophique l'auteur
de la Nature des Sociétés humaines ne sait pas ce qu'on doit
entendre par ce mot de société dont il se sert, et qu'il en confond la
notion métaphysique avec la notion historique des différents peuples
qui se sont agités sur la terre et se sont efforcés de réaliser cet idéal
de société qui, pour l'incrédule, n'est qu'une ironie, et pour le
chrétien, qu'une aspiration. Il a vu, à la vérité, passer à travers
l'histoire des masses d'hommes, sous la lance de leurs conducteurs.
Mais cet état des multitudes dans l'univers donne-t-il le droit
d'affirmer, à un penseur rigoureux, que l'idéal social existe
réellement sur la terre en dehors de cette société—qu'on nous passe
le mot!—crépusculaire créée par le christianisme, entre les ténèbres
de l'ancien monde et la lumière du Jour Divin?
Et qu'il ne s'y trompe pas! l'éloge que font ces derniers de son livre
n'a été combiné que pour cela. Pousser un esprit de bonne foi et de
bonne volonté, mais sans connaissance de la profondeur des partis
et de leurs desseins, sur la voie dangereuse où il s'est
imprudemment avancé, lui retourner un jour ses idées contre ses
intentions, compromettre un prêtre, compromettre Dieu, dans cette
question du socialisme contre laquelle un gouvernement d'énergie
ferait plus que tous les écrivains réunis, voilà ce que l'abbé Mitraud,
dans les illusions de sa charité, ne voit pas au fond des éloges
donnés à son livre par tous ceux-là qui devraient le plus le repousser.
Nous l'avons dit déjà, mais il faut le crier: le livre de Mitraud pose la
nécessité d'une théocratie, et les ennemis jurés de toute théocratie
l'acclament. Et ce n'est pas tout! Le même livre s'inscrit en faux
contre la souveraineté politique de l'homme et contre la souveraineté
philosophique de la raison, et tous ceux qui veulent et posent dans
leurs théories que les gouvernements personnels et hiérarchiques
doivent être remplacés par des mécaniques sociales dont ils ont le
devis tout fait dans leur poche, et les rationalistes de toute nuance,
protestants, hegeliens, sceptiques, l'acceptent comme la dernière et
la plus heureuse interprétation de l'Évangile des temps futurs.
Évidemment il y a une raison à cette anomalie, dont l'abbé Mitraud
É
ne se doute pas. Évidemment il y a pour les philosophes, dans cette
théocratie que l'abbé Mitraud appelle et qu'il justifie, je ne sais quoi
qui n'est pas la théocratie du moyen âge et du cardinal Bellarmin,
mais quelque chose qu'ils flairent avec plaisir et qui odore, comme la
théocratie de Gioberti, par exemple, de Gioberti, cet autre abbé cher
à cette ogresse d'abbés: la révolution! Il y a, enfin, dans toute cette
dilatation des entrailles catholiques de Mitraud, qu'il ne faudrait pas
cependant dilater au point de le perdre, ce christianisme de l'utopie
que la philosophie aime à embusquer partout dans l'intérêt de son
service, et qui, sur les débris des institutions monarchiques, ferait
volontiers descendre—et toujours sous la forme d'une colombe!—un
Saint-Esprit par trop désarmé.
Les Études religieuses[23] d'Ernest Renan ont déjà paru, feuille par
feuille, ici ou là, dans des revues et dans des journaux. A
proprement parler, ce n'est pas un livre. C'est une suite d'articles de
critique sur des sujets consanguins, réunis, pour tout procédé de
composition, par le fil du brocheur, et sous le couvert d'une préface;
car faire un livre n'est pas maintenant plus difficile que cela. Vous
enfilez les uns au bout des autres les œufs que vous avez pondus, et
c'est un collier... pour le public! et vous vous croyez un grand lama
qui fait des bijoux avec les déjections... de sa pensée. Éparpillé dans
les journaux en vue desquels il a été écrit, le livre d'Ernest Renan
était là à sa vraie place pour faire illusion. Quelques esprits pleins de
fraîcheur, mais ignorant parfaitement, dans leur virginité française,
tout ce qui se brasse de paradoxes outre-Rhin, avaient poussé leur
petit cri d'admiration en humant le matin, avec leur café, des idées
qui leur semblaient nouvelles. Étonnés et flattés de la sensation, ils
se disaient avec mystère: «Quel est donc ce Renan?... Voilà un
critique redoutable!» Il semblait que dans les jungles du journalisme
on entendît miauler—doucement encore, il est vrai,—un tigre de la
plus belle espèce et dont la voix devait arriver aux plus terribles
diapasons. Si Renan était resté dans la publicité des journaux, cette
publicité d'éclairs suivis d'ombre, nous n'aurions pas eu la mesure de
ses idées dans leurs strictes proportions. Nous aurions pu le croire
formidable. Mais avec un livre nous pouvons le juger. Aujourd'hui
que le tigre est sorti de ses jungles, nous nous apercevons qu'il a fait
ses humanités en Allemagne et qu'il n'est qu'un chat assez
moucheté, car il a du style par places, mais cachant sous sa robe
fourrée et ses airs patelins la très grande peur et la petite traîtrise de
tous les chats,—ces tigres manqués!
Oui! peur et traîtrise, voilà les deux seules originalités des Études
religieuses de Renan. Ordinairement, en France, on est plus brave.
S'il y a des poltrons d'idées, ce ne sont pas du moins ceux qui les
ont. Voyons! Renan, au fond, est un philosophe. C'est un
rationaliste; c'est un hegelien plus ou moins; c'est l'ennemi du
surnaturel; c'est le critique qui montre comment cela pousse dans
l'humanité mais n'est jamais la vérité en soi, indéfectible, absolue,
comme nous y croyons, nous! Il pense, lui aussi, comme Diderot[24],
qu'il faut élargir Dieu pour faire tomber les murs des Églises. Mais,
quand Diderot attaquait l'Église, il frappait bravement, par devant, à
grands coups, avec l'abominable héroïsme de son sacrilège. Quand
Voltaire blasphémait Jésus-Christ, il ne bégayait pas. Il criait sur les
toits: «Écrasons l'infâme!» Quand l'Allemagne elle-même, si
longtemps nommée la douce et religieuse Allemagne, mais qui a
dernièrement recommencé le XVIIIe siècle en mettant de grands
mots et des obscurités d'école où le XVIIIe avait émis de petites
phrases claires comme de l'eau (car il ne faut pas profaner ce mot
de lumière); quand l'Allemagne elle-même attaque Dieu, elle n'y va
pas de main morte. Elle ne lui demande pas respectueusement la
permission de le jeter par la fenêtre; elle l'y jette, voilà tout, et elle
ferme la porte pour l'empêcher de remonter par l'escalier. Mais cette
manière d'agir, au moins nette, au moins vaillante, et qui semble au
moins convaincue, n'est pas celle que Renan emploie aujourd'hui. Au
contraire! il la trouve imprudente; il ne craint pas de la blâmer. Il
reproche à Feuerbach et à la jeune école hegelienne leur violence
contre Dieu. Il les accuse d'avoir le pédantisme de leur hardiesse et
de ne pas mettre dans la négation de la vérité chrétienne assez de
placidité et d'amour. O Athéniens d'Allemagne, vous n'êtes que des
enfants! «Beaucoup d'esprits droits et honnêtes—dit-il—s'attribuent
sans les mériter les honneurs de l'athéisme.» Mais ne les a pas qui
veut et qui s'en vante! Feu Machiavel nous a légué son âme. Il faut
les mériter et ne s'en vanter pas. «Feuerbach—nous dit encore
Renan avec un sourire placide et superbe—a écrit en tête de la 2e
édition de son Essence du Christianisme: «Par ce livre, je me suis
brouillé avec Dieu et le monde.» Nous croyons que c'est un peu de
sa faute, et que, s'il l'avait voulu, Dieu et le monde lui auraient
pardonné.» Voilà la sagesse pour Ernest Renan. Faire pardonner à
Dieu les insolences qu'on lui débite:
II
Mais, nous l'avons dit, il n'a rien inventé pour cela. L'exécution est
restée au-dessous de la prétention. Les idées sur lesquelles il
s'appuie sont communes en Allemagne, où les idées cessent de
dominer dès qu'elles sont populaires, et en France déjà elles se sont
produites obscurément et sans succès. Renan, qui parle, dans ses
Études d'histoire religieuse, de tous ceux qui s'avisèrent les premiers
de lever, comme une catapulte, le misérable fétu de leur critique
contre les religions et leurs symboles, et qui nomme des médiocrités
comme Boulanger, Dupuis, Émeric-David, Petit-Radel, Renan a oublié
de citer l'homme qui, dans un livre intelligible et français, a posé
l'idée générale qui domine la critique de détail dont on est si fier
aujourd'hui et dont on attend tant de ruines. Et voici pourquoi: il
l'imitait trop pour le nommer! Benjamin Constant a écrit un livre sur
les religions, et l'idée de ce livre, très simple et très dangereuse dans
un pays qui croit que la vérité ne peut jamais être compliquée, l'idée
de ce livre est que les formes religieuses passent, mais que le
sentiment religieux est éternel. Eh bien, c'est toute la théorie de
Renan! L'auteur des Études, et dans sa préface et dans vingt-cinq
endroits de son livre, reprend l'idée de Benjamin Constant, la
retourne, la commente, l'explique et l'applique. Rien de plus. «La
religion,—dit-il,—en même temps qu'elle atteint par son sommet le
ciel pur de l'idéal,»—par exemple Benjamin Constant, qui filtrait son
eau du Rhin avant de la boire, était trop spirituel et trop Français,
lui, pour nous parler de l'idéal ailleurs que dans un roman!—«la
religion pose par sa base sur le sol mouvant des choses humaines et
participe à ce qu'elles ont d'instable et de défectueux». Et plus bas:
«Éternellement sacrées dans leur esprit, les religions ne peuvent
l'être également dans leurs formes...» Selon Renan, l'humanité a le
sentiment religieux, ou le sentiment du surnaturel, plus fort ici que
là, dans certaines races que dans certaines autres, mais elle l'a
incontestablement. C'est un fait presque physiologique, tant il est
visible et impossible à rejeter! Seulement, les formes à travers
lesquelles ce fait s'exprime sont plus ou moins menteuses, vieillies et
tombées, et elles tomberont toutes de plus en plus jusqu'au jour où
l'humanité arrivera à la culture de l'idéal pour l'idéal... Si elle y
arrive! car l'humanité aura toujours besoin de symbolisme. La
religion de Renan n'est guères bonne que pour des mandarins et des
savants, et il en convient de bonne grâce: «Dites aux simples—dit-il
de son ton protecteur—de vivre d'aspiration à la vérité, à la beauté,
à la bonté morale, ces mots n'auront pour eux aucun sens. Dites-
leur d'aimer Dieu, de ne pas offenser Dieu, ils vous comprendront à
merveille. Dieu, Providence, immortalité, autant de bons vieux mots
un peu lourds que la philosophie interprétera dans des sens de plus
en plus raffinés, mais qu'elle ne remplacera pas avec avantage.»
L'aveu est toujours bon à enregistrer. Mais qu'importent les simples!
Renan est l'aristocrate de la science. C'est lui qui a osé écrire: «Il ne
faut pas sacrifier à Dieu nos instincts scientifiques.» Après cela, vous
comprenez très bien le charmant détour que l'auteur des Études a
pris, ou l'immense illusion dont il est la dupe. Quand on a déporté
Dieu dans les culs de basse-fosse de l'intelligence, on se lave les
mains et on affirme que l'on n'a rien fait contre lui.
III
Mais le scepticisme dans l'histoire des religions, c'est déjà un résultat
pour la philosophie, et d'ailleurs Renan a moins écrit son livre pour
résoudre des difficultés qu'au fond il regarde lui-même comme
insolubles que pour proclamer les droits de la Critique indépendante
et désintéressée, de la Critique en dehors de tout dogmatisme et de
toute polémique, comme il dit. Cette définition de la Critique, qui
correspond à la définition que Taine, dont nous parlerons plus loin, a
donnée de la science, et qui permettrait à toutes les deux de faire
leur travail de destruction dans la plus complète sécurité et sans
s'inquiéter de savoir s'il y a une morale, une société, des
gouvernements, un foyer domestique, tout un ensemble de choses
organisées autour de soi à respecter, cette définition, qu'il est si
important de faire admettre à tout le monde, est la grande affaire et
le coup d'État actue des philosophes. Si la pleine liberté de la
Critique était consentie, si la science avait le droit d'agir en vue
seulement des résultats scientifiques, on n'aurait plus besoin de rien,
on aurait tout, et les vêpres siciliennes de la philosophie sonneraient,
à pleines volées, sur nos têtes! Voilà pourquoi le monde hésite à
admettre cette notion de la Critique en dehors du monde et se
soucie médiocrement qu'on le mette à feu, sous prétexte de science,
dans l'intérêt de la plus vaine et de la plus inepte curiosité. N'y
aurait-il à cela que l'énervation des forces sociales, en avons-nous
tant déjà que nous puissions impunément les diminuer?... Le doux
Renan, cet officier de paix de la Critique, qui blâme Bauer de ses
colères comme il a blâmé Feuerbach, revient à toutes les pages de
son livre sur cette idée fixe de l'indépendance absolue de la Critique,
de la séparation complète des hommes et des choses. «Quand
l'historien de Jésus-Christ—dit-il—sera aussi libre dans ses
appréciations que l'historien de Mahomet et de Bouddha, il ne
songera pas à injurier ceux qui ne pensent pas comme lui.» Raison
pitoyable! N'insulte-t-on pas tout ce qui contrarie et résiste, quand
on est violent et orgueilleux, et les savants ont-ils l'habitude de
manquer de violence ou d'orgueil? Seulement, il faut bien essayer de
justifier n'importe comment ce qu'on voudrait faire accepter à
l'opinion. Les moyens employés à cette fin par Renan seraient d'un
tacticien supérieur s'ils ne finissaient pas par trop éveiller la gaieté.
Que diable! il faut s'arrêter dans les nuances dont on parle tant! «La
critique des origines d'une religion—dit Ernest Renan—n'est pas
l'œuvre du libre penseur, mais des sectateurs les plus zélés de cette
religion.» C'est pour cela sans doute qu'il est sorti de Saint-Sulpice.
Manière de se retrouver prêtre quand on a jeté sa soutane aux
buissons du chemin! Ailleurs, il ajoute, avec une componction d'âme
pénétrée: «La critique renferme l'acte du culte le plus pur.» C'est le
mysticisme de la chose! Mais n'est-ce pas trop gai qu'un tel langage,
et le rire qui prend n'avertit-il pas?